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Deuxième séance du jeudi 18 novembre 2004

62e séance de la session ordinaire 2004-2005


PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

LOI DE FINANCES POUR 2005

DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005 (nos 1800, 1863).

ANCIENS COMBATTANTS

M. le président. Nous abordons les crédits du ministère des anciens combattants.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, pour un rappel au règlement.

M. Alain Néri. Monsieur le président, mon intervention est relative à l'organisation de nos travaux. Je demande que l'Assemblée suspende ses travaux pendant un quart d'heure environ. Nous pourrons ainsi retourner en commission, de façon à étudier au fond le projet de budget des anciens combattants sur le point essentiel de la revalorisation de la retraite du combattant.

Lors de la discussion en commission, j'avais présenté deux amendements sur la revalorisation de la retraite du combattant.

Le premier prévoyait que cette retraite soit revalorisée dès ce budget et passe de 33 à 48 points d'indice. Le second amendement, de repli, aurait permis dès cette année d'engager un processus de revalorisation conséquente. Il prévoyait de passer de 33 à 38 points.

Or M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, a soumis à discussion un amendement de nos collègues de la majorité prévoyant une revalorisation d'un point. C'est contraire à la procédure normale d'examen des amendements, puisqu'il faut toujours commencer par l'amendement le plus favorable, pour passer ensuite à des amendements de repli. La procédure n'a donc pas été respectée.

M. le président. Monsieur Néri, je vous demande de bien vouloir conclure votre rappel au règlement.

M. Alain Néri. Dans ces conditions, je considère qu'il convient que nous reprenions normalement la discussion des amendements, de façon à obtenir la revalorisation la plus significative et la plus intéressante possible pour le monde combattant.

M. le président. Je ne suis pas tout à fait sûr, monsieur Néri, que votre rappel au règlement ait trait à l'organisation de nos travaux. Mais cela vous aura au moins permis d'exprimer un sentiment personnel.

Par ailleurs, les commissions sont maîtresses de leur ordre du jour. M. le rapporteur pour avis a entendu votre argumentation et je suis convaincu qu'il y répondra.

Je vais maintenant donner la parole à M. le rapporteur spécial.

M. Alain Néri. Puis-je répondre d'un mot, monsieur le président ?

M. le président. Monsieur Néri, n'abusez pas ! M. le rapporteur spécial est monté à la tribune, je vous prie donc de bien vouloir le laisser s'exprimer. C'est conforme à la courtoisie républicaine.

Ouverture de la discussion

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué aux anciens combattants, mes chers collègues, il y a une semaine, dans l'ensemble de nos villes et villages, nous avons, dans la dignité et le recueillement, commémoré l'armistice du 11 novembre 1918.

Ces cérémonies, auxquelles chacun d'entre nous est attaché, ont permis de rendre hommage, notamment, aux quinze derniers poilus qui demeurent encore à nos côtés.

Le témoignage de leur vie personnelle a ému les Français. Ils justifient à eux seuls l'attention que la nation doit manifester en faveur de celles et ceux qui ont combattu sur différents champs de bataille, à différentes époques, pour défendre la France, les Français et les valeurs qui font le socle de notre République.

Je tiens, monsieur le ministre, à saluer ici votre action ministérielle. En effet, depuis plus de deux ans, vous avez tenu le langage de la vérité. Vous avez agi avec efficacité et justesse pour préserver et enrichir le devoir de mémoire et l'hommage permanent que la nation doit aux anciens combattants.

Votre projet de budget pour 2005 est la traduction de cet effort. Il est, pour la première fois depuis dix ans, en hausse de plus 0,14 %.

M. Alain Néri. On verra ça plus tard !

M. François Rochebloine. Tu parles ! Belle progression !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. L'effort moyen par ressortissant augmente même de près de 4 %, contre une progression, pourtant notable, de 1,58 % en 2004. Les crédits du ministère chargé des anciens combattants s'élèveront donc en 2005 à près de 3,40 milliards d'euros, et cela pour 1,4 million de ressortissants au titre de la carte du combattant, et pour 420 000 ressortissants au titre des pensions d'invalidité, dont 130 000 veuves.

Avant de détailler les points les plus significatifs de ce projet de budget pour 2005, je tiens à rappeler que c'est le dernier à présenter les crédits au sein d'une section budgétaire. En effet, l'an prochain, nous examinerons les crédits de la mission « Mémoire et lien avec la nation ». Celle-ci sera composée de deux programmes, dont l'un est intitulé « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Il retracera les crédits consacrés au monde combattant.

À cet égard, je n'exprimerai qu'un regret sur cette maquette budgétaire. Les crédits concourant à la politique de mémoire seront répartis sur deux programmes. Cela ne conduira pas forcément à clarifier leur présentation.

Pour l'heure, le projet de budget pour 2005 que vous nous présentez, monsieur le ministre, mérite toute notre attention.

En premier lieu, la dette viagère, composée, comme chacun sait, des pensions d'invalidité et de la retraite du combattant, est marquée par une double évolution.

M. François Rochebloine. Ah !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Première évolution : les crédits des pensions d'invalidité connaissent une baisse limitée de 1,8 %, soit 41,2 millions d'euros...

M. François Rochebloine. Il y a à cela des raisons faciles à expliquer !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. ...contre une baisse de 127,96 millions d'euros en 2004 ; mais je note avec satisfaction une provision de 2,2 millions d'euros pour l'application du rapport constant en 2005 et une mesure nouvelle de 11, 84 millions d'euros, pour financer le relèvement des pensions des veuves de grands invalides, prévu par l'article 121 de la loi de finances pour 2004. Enfin, il convient de souligner la provision totale de 32 millions d'euros pour financer la décristallisation dans le cas des sorties en capital, dont 2 millions d'euros au titre de la retraite du combattant.

Deuxième évolution : les crédits affectés à la retraite du combattant connaissent une augmentation de 6,2 % due à l'entrée massive dans le dispositif des anciens combattants d'Afrique du Nord. Ceci se traduit notamment par une augmentation de 29,4 millions d'euros, pour tenir compte de la progression du nombre des bénéficiaires, d'une provision de 600 000 euros pour l'application du rapport constant en 2005, d'une mesure nouvelle de 3 millions d'euros afin de financer l'augmentation du nombre de retraites qui sont délivrées, depuis le 1er juillet 2004, aux personnes ayant servi au moins quatre mois en Afrique du Nord.

M. François Rochebloine. Seulement depuis le 1er juillet !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. À ce niveau de mon propos, je voudrais maintenant insister sur quelques points qui méritent réflexion. Tout en étant conscient de la nécessité de maîtriser les dépenses publiques, j'estimerais souhaitable que le Gouvernement étudie les possibilités de relever le montant annuel de la retraite du combattant,...

M. François Rochebloine. Il ne faut pas attendre qu'il n'y en ait plus !

M. Alain Néri. Il n'y a rien dans le budget, hélas !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. ...qui est actuellement, comme chacun sait, de 425,37 euros.

M. Alain Néri. Ce n'est pas beaucoup !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Cette mesure est désormais prioritaire, même si nous devons avoir conscience des enjeux financiers, à savoir qu'une augmentation d'un seul point...

M. Alain Néri. Une misère !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. ...équivaut à une dépense supplémentaire d'environ 17 millions d'euros par an.

M. François Rochebloine. Et le droit à réparation, qu'en faites-vous ?

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. De même, le plafond de la rente mutualiste du combattant pourrait, de manière échelonnée, être porté de 122,5 à 130 points d'indice.

M. Alain Néri. C'est en panne !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Après ces remarques personnelles, j'ajoute qu'une observation de la commission des finances a été adoptée de manière consensuelle. Elle souhaite que le Gouvernement amplifie son effort d'information pour que tous les bénéficiaires de prestations cristallisées profitent des mesures de revalorisation.

Je connais, monsieur le ministre, les efforts que votre ministère a accomplis en la matière. Je sais que nombreux sont les anciens combattants qui ont d'ores et déjà obtenu des améliorations. Il convient cependant de s'assurer que tous ont été pleinement informés.

Par ailleurs, cette même observation propose que le Gouvernement étudie la possibilité de verser à tous les anciens combattants des pays de l'ex-Union Française la retraite du combattant au taux français.

M. François Rochebloine. Ce n'est pas demain la veille !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Cette proposition s'inscrit dans la lignée de l'hommage qui a été rendu aux combattants de l'Union française lors de la commémoration du soixantième anniversaire du débarquement de Provence.

J'ai parfaitement conscience, monsieur le ministre, de la difficulté juridique que poserait une décristallisation totale des seules retraites du combattant. Pour autant, la commission des finances a souhaité montrer l'attention toute particulière qu'elle porte à ces hommes qui ont combattu pour la France au péril de leur vie.

J'en viens aux moyens des établissements publics que sont l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, l'ONAC, et à l'Institution nationale des invalides, l'INI.

À périmètre constant, les moyens de fonctionnement de l'INI augmenteront de 50 000 euros. Les moyens de fonctionnement de l'ONAC, progresseront en 2005 de 564 166 euros, hors action sociale, sans compter une mesure de 294 217 euros destinée à revaloriser les indemnités des agents. Au total, les moyens de l'ONAC auront progressé de 2 millions d'euros depuis 2003.

M. Jérôme Lambert. Et l'inflation ?

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Compte tenu des nombreuses mesures de transformations d'emplois, les effectifs de l'ONAC se réduiront de vingt- quatre postes, tandis que ceux de l'INI augmenteront de quatre emplois. Je rappelle que les suppressions de postes de l'ONAC sont prévues par le contrat d'objectifs et de moyens proposés voici quelques années par la précédente majorité.

Mes chers collègues, nous sommes tous d'accord quant à l'utilité de l'ONAC. Sa pérennité n'est absolument pas remise en cause. Bien au contraire, son action est consolidée.

M. Alain Néri. Il faut adopter mon amendement ! C'est clair !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Enfin, j'ajoute que l'effort de mise en sécurité et de confort des maisons de retraite se poursuit.

En effet, la subvention d'investissement aux deux établissements publics, imputée sur le budget du ministère de la défense, s'établira à 1,29 million d'euros en autorisations de programme et 1,70 million d'euros en crédits de paiement. Je souhaite également souligner que les dotations en faveur de l'action sociale de l'ONAC progressent, pour la seconde année consécutive, puisqu'une mesure nouvelle de 465 000 euros portera sa dotation à 12,6 millions d'euros, soit une progression de plus de 3,8 %.

J'en arrive aux crédits de la mémoire. Je rappellerai que l'année 2004 a été riche en célébrations et que 2005 ne le sera pas moins.

Globalement, le projet de loi de finances consolide l'effort de mémoire, en favorisant notamment la restauration et la préservation du patrimoine. Les crédits consacrés à la mémoire et à l'information historique se fixeront en 2005 à 8,3 millions d'euros, sans compter les subventions versées aux musées. L'effort en faveur de la mémoire sera donc consolidé. Parce que notre mémoire collective nationale joue un rôle essentiel dans la vie quotidienne, elle doit être sauvegardée et ses enjeux clairement explicités, auprès des jeunes notamment.

L'information historique participe de cet effort en favorisant, par son action de sensibilisation, le rassemblement, l'intégration, la construction européenne et la vigilance face aux manifestations d'intolérance.

Depuis quelques années, de nombreux dossiers ont été réglés, d'autres sont encore à régler, nous le savons tous. Ils le seront grâce à une démarche responsable et partenariale.

En effet, compte tenu de leur ampleur, les dossiers font l'objet de consultations permettant d'engager, tout au long de la législature, des actions nouvelles en faveur du monde combattant.

C'est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à adopter, comme l'a fait la commission des finances, les crédits des anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. François Rochebloine. Nous espérons qu'il sera meilleur !

M. Jean-Louis Dumont. N'oubliez pas de parler du devoir de mémoire, monsieur Lett !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget des anciens combattants est en augmentation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Alain Néri. C'est faux !

M. François Rochebloine. Allez expliquer ça aux anciens combattants !

M. Jacques Desallangre. Vous en avez vraiment d'excellentes, monsieur Lett !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. La nouvelle, première du genre depuis dix ans, a été à juste titre soulignée par M. le ministre au moment de la présentation du budget, et par le rapporteur spécial à l'instant. Je souhaite dire à mon tour ma satisfaction. L'augmentation des crédits des anciens combattants de 0,14 %,...

M. Maxime Gremetz. Les anciens combattants apprécieront !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. ...dans un contexte budgétaire particulièrement resserré, doit être appréciée à sa juste mesure.

C'est d'autant plus vrai que le budget comprend des dispositions fort avantageuses pour l'ensemble du monde combattant,...

M. Maxime Gremetz. Oh !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. ...en dépit des limites existantes, dispositions sur lesquelles je reviendrai, avant de développer, dans un deuxième temps, le thème de la politique de mémoire.

Deux mesures nouvelles se détachent au sein du budget.

La première est l'accroissement des crédits sociaux de l'Office national des anciens combattants - l'ONAC - à hauteur de 3,83 % ; elle donne au budget une coloration sociale et de solidarité que je souhaite souligner.

La seconde mesure répond à une attente du monde combattant : le décret du 27 juillet 2004 permet en effet désormais l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie pendant la Seconde Guerre mondiale.

M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Cette indemnisation est accordée dans les mêmes conditions, sous forme de capital ou de rente mensuelle, que celle résultant du décret du 13 juillet 2000, et pour des montants identiques. Il est vrai que, comme cela avait été le cas en 2000, les crédits - 20 millions d'euros - figurent au budget du Premier ministre et non, au sens strict, à celui des anciens combattants. Mais l'essentiel réside dans le bénéfice ainsi accordé aux intéressés et le fait que le budget de la nation dans son ensemble consacre ainsi un effort réel à ces orphelins.

M. Georges Colombier. Tout à fait !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Par ailleurs, le présent budget poursuit une dynamique impulsée dès les années précédentes. Je citerai brièvement, tout d'abord, les 20 000 cartes, et donc les 20 000 retraites du combattant supplémentaires, accordées...

M. François Rochebloine. À 65 ans !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. ...à ceux qui justifient de quatre mois de présence sur un plusieurs des trois territoires d'Afrique du Nord.

M. Jacques Desallangre. Cette mesure a été prise l'année dernière !

M. le président. Mes chers collègues, laissez parler M. le rapporteur !

M. Jacques Desallangre. Mais il se trompe d'année !

M. Maxime Gremetz. Le ministère des anciens combattants est le ministère du mensonge !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Je rappellerai aussi la majoration uniforme de quinze points d'indice pour les veuves dont la pension est calculée en application des articles L. 49 à L. 52 du code des pensions civiles et militaires. Même si cette mesure prend effet « en année pleine », je tenais à la souligner.

Outre ces réalisations effectives, la réflexion est engagée sur un certain nombre d'autres questions. Une première réflexion a été ouverte par le rapport sur les anciens combattants et leurs veuves de plus de 60 ans ayant des ressources inférieures au SMIC.

M. Alain Néri. Et que faites-vous concrètement ?

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Il y a un rapport (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) qui en décidera.

M. Louis Guédon. Et vous-mêmes, qu'avez-vous fait pendant vingt ans, messieurs de la gauche ?

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Par ailleurs, un médiateur a été nommé pour étudier la question de la prise en compte de la campagne double pour les anciens d'Afrique du Nord.

Avantageux, le budget présenté par le Gouvernement peut certes encore être enrichi, et je sais que M. le ministre en est lui-même convaincu.

Avant tout, force est de constater que la revalorisation de la retraite du combattant par l'augmentation du point d'indice ne se fait pas. C'est mon regret. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et il est dommage que, sur cette question, je sois obligé de reprendre, presque mot pour mot, les analyses et les souhaits de mes prédécesseurs (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), qui demandaient que soit revalorisé le montant indiciaire de la retraite.

M. Jacques Desallangre. Cela fait déjà trois ans que vous êtes aux commandes !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Cet indice n'a pas varié...

M. François Rochebloine. Eh oui ! Encore et toujours le même !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. ...depuis qu'il a été fixé par l'article 85 de la loi de finances pour 1978, et ce, je tiens à le rappeler, quelle que soit la couleur politique des gouvernements successifs...

M. François Rochebloine et M. Alain Néri. C'est vrai !

M. François Rochebloine. Mais ce n'est pas une raison pour ne rien faire !

M. Alain Néri. C'est vous qui êtes aux manettes aujourd'hui !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Certes, il existe un problème de coût, mais on pourrait procéder de manière progressive.

L'année dernière avait été suggérée la mise en œuvre d'un plan quinquennal permettant d'augmenter chaque année l'indice de trois points.

M. Alain Néri. Eh oui !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. J'ai proposé cette année, dans un amendement, une augmentation d'un point. Je sais que celui-ci ne pouvait être retenu. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) J'espérais le voir repris par le Gouvernement. Pour l'instant, cela n'a pas été le cas. Mais cette proposition devra bien un jour prendre forme.

Il faut aussi citer la question de la rente mutualiste du combattant, dont le plafond devrait être revalorisé,...

M. François Rochebloine. Eh oui ! Sur tous ces sujets, il n'y a que des paroles !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. ...même s'il est vrai que cette mesure touche moins de ressortissants que la retraite du combattant précédemment évoquée.

M. Alain Néri. C'est juste !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. D'autres questions plus sectorielles sont en suspens, que je ne peux malheureusement que citer, faute de temps.

Premièrement, même si certains efforts ont déjà été engagés dans ce sens, il convient d'améliorer le remboursement des soins aux pensionnés et mutilés de guerre et de prévoir la prise en charge de l'intégralité des soins et appareillages au titre du droit à réparation.

Deuxièmement, le droit à réparation au titre de la Seconde Guerre mondiale doit être encore amélioré, qu'il s'agisse des incorporés de force dans l'armée allemande, des prisonniers de l'armée soviétique détenus au camp de Tambov ou dans ses annexes, ou encore des incorporés de force dans les formations paramilitaires RAD et KHD. Le député lorrain et de surcroît mosellan que je suis connaît bien cette situation et il est de mon devoir de contribuer à trouver une solution.

M. Alain Néri. Et vous avez notre appui !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. J'en arrive à la seconde partie de mon avis budgétaire, que j'ai choisi de consacrer à la question de la politique de mémoire.

M. Maxime Gremetz. J'ai l'impression que, moins il y a de sous, plus on parle !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Je me bornerai à citer les acteurs de la mémoire, qui sont bien connus et dont le rôle est primordial : pour l'impulsion, le Haut Conseil de la mémoire combattante ; pour l'orchestration, la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la défense et le ministère délégué aux anciens combattants ; sans oublier les multiples interventions plus ciblées ou plus ponctuelles d'autres ministères, des collectivités locales ou des associations.

Pour ce qui est des moyens de la politique de mémoire, je rappellerai, sans entrer dans une analyse détaillée de l'ensemble des crédits, que, pour l'année 2005, près de 23 millions d'euros sont consacrés à la poursuite ou au lancement d'opérations de mémoire entendues au sens large.

Le dynamisme de la politique de mémoire se reflète dans la diversification de ses missions. La plus évidente est celle de conservation de la mémoire.

S'agissant de la gestion et du développement des musées et des archives, tout d'abord, il convient de s'arrêter, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2005, sur deux types d'initiatives particulières.

La première est la construction du centre européen du résistant déporté dans le système concentrationnaire nazi à proximité immédiate de l'ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof en Alsace. Le budget de l'ensemble de l'opération s'élève à 12 millions d'euros. L'inauguration du centre est prévue pour l'automne 2005. Il faut noter que non loin de là, dans la vallée de la Bruche, à Schirmeck, les travaux du mémorial de l'Alsace-Moselle, dont la construction a débuté fin 2002, s'achèvent.

Les « fêtes de la mémoire » constituent le deuxième volet de l'action de conservation de la mémoire. Est-il besoin de redire ici le succès indéniable des commémorations de l'année 2004 ? Chacun espère que celles de 2005 connaîtront le même succès et je partage bien évidemment ce souhait.

L'idée de visiter les lieux de mémoire constitue le deuxième axe des actions de mémoire. Elle n'est pas nouvelle : la mission traditionnelle d'entretien des nécropoles et des mémoriaux l'atteste. Un élément plus novateur consiste dans le développement du tourisme de mémoire, qui repose d'une part sur la notion de points d'appui, et d'autre part celle de chemins de mémoire reliant entre eux des points d'appui, et permettant de consacrer des itinéraires entre sites particulièrement pertinents. Une convention a été signée à Lille le 9 février 2004 par M. Léon Bertrand, secrétaire d'État au tourisme, et M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants, pour favoriser le caractère national de la démarche.

Troisième axe des actions de mémoire : le partage. Le partage de la mémoire géographique - ou le concept de mémoire partagée - repose sur la signature de conventions passées entre l'État français et un État étranger.

Il faut aussi citer le partage intergénérationnel de la mémoire : les journées nationales d'hommage sont un premier moyen de sensibiliser toutes les générations et, en particulier les plus jeunes, à certains événements du passé. Il existe aujourd'hui huit journées commémoratives légales et, en tant que maire, j'ai l'habitude d'associer systématiquement à mes dépôts de gerbes les jeunes de ma commune.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Alain Néri. C'est indispensable !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Dans le même temps, sans que cela soit paradoxal, une « journée de la mémoire combattante » pourrait être instituée, par exemple le 11 novembre, pour faciliter, à cette occasion, la transmission des valeurs défendues lors des différents combats.

M. Alain Néri. Qu'est-ce que ça cache ? Vous voulez faire disparaître le jour anniversaire du 8 mai 1945 ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Par ailleurs, il faut rappeler que la collecte des témoignages est effective dans six services départementaux de l'ONAC.

De manière plus générale, je soutiens entièrement l'idée d'instituer un « grand centre de la mémoire combattante », lieu de centralisation des archives de cette mémoire.

Je conclurai cette présentation par quelques propositions d'ordre très général.

Premièrement, la politique de mémoire manque de lisibilité budgétaire.

M. François Rochebloine. Il y a beaucoup d'insuffisances et de manques !

M. Céleste Lett, rapporteur pour avis. Il faudrait veiller, autant que possible, à ce que la réforme budgétaire en cours permette de lui donner une unité véritable.

Deuxièmement, l'actualité, à l'heure où certains réécrivent l'histoire, nous rappelle trop souvent la nécessité du devoir de mémoire : il me semble essentiel d'orienter tout particulièrement les efforts en direction de la jeunesse.

Troisièmement, il importe de mettre en œuvre une politique de mémoire « recontextualisée », prenant en compte autant les événements en tant que tels que leur environnement, c'est-à-dire l'histoire sociale, économique et politique de toute une époque.

Quatrièmement, ne devrions-nous pas parler de politique pour la mémoire plutôt que de politique de la mémoire, pour montrer l'importance de l'objectif à atteindre et éviter toute tentative d'instrumentalisation de cette politique ?

Peut-être les propos de Paul Ricœur, qui font écho à ceux de Tzvetan Todorov, peuvent-ils résumer ce qui, me semble-t-il, constitue avant tout un état d'esprit : « Je reste troublé » - écrit-il - « par l'inquiétant spectacle que donnent le trop de mémoire ici, le trop d'oubli ailleurs, pour ne rien dire de l'influence des commémorations et des abus de mémoire - et d'oubli. L'idée d'une politique de la juste mémoire est à cet égard un de mes thèmes civiques avoués. »

Pour conclure, j'indique que le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles que je suis émet un avis favorable sur ce budget des anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Néri. Vous n'êtes pas difficile !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, premier orateur inscrit dans la discussion.

M. Maxime Gremetz. Je vous plains, messieurs les rapporteurs. Et je vois bien pourquoi on vous a choisis parmi les nouveaux parlementaires. (Sourires.)

M. François Rochebloine. Ils auraient pu quand même consulter les débats précédents !

M. Maxime Gremetz. Il vous est demandé de présenter un budget de l'impossible, injustifiable, et condamné par toutes les associations.

Vous vous êtes sans doute réjouis de défendre la noble cause des anciens combattants, sans bien voir ce qui vous attendait...

Jamais, au grand jamais, de mémoire de parlementaire élu depuis 1978, je n'ai eu à examiner un budget des anciens combattants aussi indigent. Et je pèse mes mots ! Nos anciens collègues pourront le confirmer sur tous les bancs de cette assemblée. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Charles Cova. Vous devriez avoir plus de mémoire !

M. Maxime Gremetz. Aucune mesure nouvelle n'est proposée dans ce budget. Je dis bien : aucune ! Ce n'était jamais arrivé, quels qu'aient été les gouvernements, depuis 1978, autrement dit depuis que je siège ici. Jamais je n'avais vu cela ! C'est une grande première !

M. François Rochebloine. C'est vrai !

M. Maxime Gremetz. Vous confirmez, mon cher collègue !

M. Charles Cova. Cela ne veut pas dire qu'il va dans votre sens !

M. le président. Monsieur Rochebloine, n'interrompez pas M. Gremetz.

M. Jean-Louis Dumont. M. Rochebloine a raison !

M. Maxime Gremetz. Et pourtant, il n'est pas à gauche. M. Colombier pourrait faire de même : que l'on soit à droite, à gauche ou au centre, tout le monde peut le confirmer.

M. François Rochebloine. Ce n'est pas un problème de gauche ni de droite !

M. Jean-Louis Idiart. C'est l'opposition centriste !

M. Maxime Gremetz. Ce n'est pas à vous que je m'en prendrai, monsieur le ministre - nous avons su régler ensemble d'autres problèmes, et de bonne manière -, mais à ceux qui ont décidé, qui ont arbitré, comme d'habitude... On n'hésite pas à prendre des mesures particulières pour telle ou telle catégorie, victime, par exemple, de la hausse des prix des carburants, sans se préoccuper des autres usagers ; de la même manière, on n'hésite pas à multiplier les exonérations de cotisations patronales...

M. Charles Cova. Hors sujet !

M. Gérard Charasse. Mais non, ce n'est pas hors sujet !

M. Maxime Gremetz. On ne peut pas tout faire, me direz-vous, c'est un choix. Et ce choix, votre gouvernement l'a fait. C'est cela qu'il a décidé, plutôt que de respecter les engagements pris, le droit à réparation reconnu à toutes les générations d'anciens combattants !

Et pourtant, des engagements avaient été pris. Même ceux-là, pour minimes qu'ils soient, ne sont pas tenus ! Vous vous abritez derrière les chiffres. Mais la manipulation des chiffres ne saurait créer l'illusion et cacher la réalité cruelle : le fait est que vous essayez de faire passer pour deux nouvelles mesures des dispositions déjà adoptées en 2003 ! Non seulement vous ne tenez pas vos promesses, mais vous y ajoutez la duplicité, moralement condamnable !

Des engagements, disais-je, ont été pris et des mesures attendues devaient être mises en œuvre. Ainsi en est-il de la revalorisation par étapes de la retraite des anciens combattants, qui reste lettre morte en dépit des promesses faites depuis deux ans ; de même du relèvement à 130 points du plafond majorable des rentes mutualistes des anciens combattants, lui aussi promis à maintes reprises aux associations ; le plafond de référence des pensions militaires d'invalidité reste figé à 122,5 points depuis la dernière hausse, et depuis, vous en êtes restés là. Ce n'est pas acceptable. Qui fait du sur-place recule !

Que dire également de l'attribution uniforme de quinze points aux veuves d'anciens combattants pensionnées, qui aurait dû être effective depuis le 1er juillet 2004 ? Ce retard, déjà condamnable, devient aujourd'hui vraiment indécent.

Qui plus est, vous contournez les décisions de justice rendues en faveur des anciens combattants ressortissants de pays aujourd'hui décolonisés : c'est le problème dit de la cristallisation des pensions, sur lequel reviendra mon ami Jacques Desallangre.

À toutes ces attentes légitimes des associations vient s'ajouter un dernier point qui illustre le désengagement total du Gouvernement : les anciens combattants se voient aujourd'hui refuser l'accès gratuit aux soins lié à leur statut, pour une cynique histoire de crédits « manquants » ! C'est là encore inadmissible. Ils ont des droits mais ne peuvent pas en faire usage !

Les associations comme l'UFAC, la FNACA ou l'ARAC sont unanimes à juger que ce budget n'est pas à la hauteur que la reconnaissance que leurs membres sont en droit d'attendre de la nation. Promesses non tenues, blocage des mesures déjà adoptées, multiplication des fins de non-recevoir à leurs attentes légitimes, tout cela témoigne, monsieur le ministre, d'une attitude à mon sens indigne. Je vous le dis sans agressivité et solennellement. Car je le pense profondément.

Pourtant, des avancées sont possibles. Je veux rappeler à ce propos la formidable bataille menée conjointement par les associations d'anciens combattants et les parlementaires pour l'extension aux orphelins des résistants fusillés ou massacrés de l'indemnisation officielle déjà attribuée aux orphelins victimes du nazisme. Il aura fallu quatre ans durant lesquels nous nous serons battus ensemble, avec vous, monsieur le ministre, avec toutes les associations, pour obtenir cette mesure, depuis le vote à l'unanimité de l'amendement que j'avais moi-même proposé. C'était une avancée notable, mais qui mérite d'être perfectionnée pour devenir totalement applicable, y compris sur le plan de la rétroactivité. Durant ces quatre années, nous avons réclamé avec les associations l'application à toutes ces familles au passé meurtri de cette décision qui honore la représentation nationale.

M. Jacques Desallangre. Mais qui reste lettre morte !

M. Maxime Gremetz. Quatre années pendant lesquelles les anciens combattants, leurs associations, les élus ont multiplié avec détermination et conviction les efforts pour voir cette reconnaissance se concrétiser. Nous sommes décidés à rester mobilisés jusqu'au bout, comme nous avons déjà su le faire, si votre gouvernement reste sourd à ces revendications légitimes.

Vous le savez, monsieur le ministre : lorsque nous entrevoyons des mesures positives, nous nous concertons immédiatement avec les associations pour déterminer notre vote. Mais cette fois-ci, je n'ai aucune hésitation, je n'ai pas besoin de les consulter : aucune mesure nouvelle égale un vote contre de notre part. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.

M. Georges Colombier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'année 2004 aura été une année riche en commémorations pour le monde combattant. Nous avons encore tous en mémoire l'immense émotion suscitée par les célébrations organisées à l'occasion du soixantième anniversaire des débarquements et de la libération de la France.

L'année 2005 sera elle aussi riche en anniversaires. Elle sera l'année des moyens d'une politique de mémoire ambitieuse afin non seulement de transmettre aux nouvelles générations le souvenir des grandes pages de notre histoire et les valeurs alors défendues, mais aussi de rendre hommage aux combattants. Le monde ancien combattant est solidaire des combattants d'aujourd'hui : aussi pouvons-nous avoir une pensée toute particulière pour nos soldats tués ou blessés en Côte-d'Ivoire et pour leurs familles. (Applaudissements.)

L'exercice 2005 sera également marqué - on me pardonnera de le dire, mais c'est bien ainsi qu'il apparaît - par un budget en hausse. D'un montant de 3 394,9 millions d'euros, le projet de budget des anciens combattants pour 2005 poursuit l'action que vous avez engagée voilà maintenant plus de deux ans, monsieur le ministre, en faveur du monde combattant. Alors que le budget des anciens combattants était en diminution depuis dix ans, le projet de budget 2005 inverse enfin cette tendance que j'avais régulièrement dénoncée, en proposant une hausse des crédits de 0,14 %.

M. Jacques Desallangre. Nous vous avons connu plus clairvoyant !

M. Georges Colombier. Chers amis, je n'ai pas beaucoup de qualités, mais j'ai au moins celles de l'honnêteté et de la franchise.

M. Patrick Beaudouin. Excellent rappel !

M. Jacques Desallangre. Mais pas celle de la clairvoyance !

M. Georges Colombier. Naturellement, cette augmentation prend en compte le financement des mesures mises en œuvre courant 2004. Mais je tenais à saluer cet infléchissement attendu depuis longtemps.

Avant d'aborder plus précisément les mesures contenues dans le projet de loi de finances pour 2005, je souhaiterais évoquer brièvement les avancées que vous avez apportées, monsieur le ministre, à propos de questions importantes qui avaient mobilisé le monde combattant.

Tel est le cas de l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie. Le décret du 27 juillet 2004 est venu concrétiser, conformément aux engagements pris, la décision du gouvernement d'indemniser les orphelins des victimes d'actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale au même titre que les orphelins des déportés de la Shoah. Cette mesure marque l'aboutissement d'une démarche que vous aviez engagée dès le mois de mai 2002.

M. Jacques Desallangre. Avec notre très fort soutien !

M. Charles Cova. Oui, mais c'est nous qui payons !

M. Georges Colombier. J'évoquerai aussi le processus de décristallisation des pensions. Dans un souci de juste reconnaissance des sacrifices consentis, vous avez répondu à cette vive attente des anciens combattants. Le projet de budget que nous étudions aujourd'hui intègre les crédits nécessaires à la décristallisation des pensions, devenue effective.

Concernant la carte d'ancien combattant d'AFN, je salue la mesure d'équité que vous avez prise. Désormais, la carte du combattant d'AFN est attribuée à partir de quatre mois de séjour sur ces territoires et les dates butoirs pour les trois conflits sont alignées sur le 2 juillet 1962.

M. François Rochebloine. Excellente mesure !

M. Georges Colombier. Trois millions d'euros sont prévus pour l'extension en année pleine pour la mise en œuvre de cette mesure attendue. Je m'en réjouis.

M. Alain Néri. C'était déjà prévu l'an dernier !

M. Jacques Desallangre. C'est la loi !

M. le président. Allons, monsieur Néri !

M. Jacques Desallangre. Mais il nous parle de 2003 !

M. Georges Colombier. Faites attention, mes chers collègues : je ne vous parle pas du passé. Vous devriez ouvrir grand les oreilles !

Je citerai également des sujets pour lesquels nous nous sommes mobilisés, comme la prise en charge des cures thermales à hauteur de cinq fois le taux de la sécurité sociale ou bien la pérennisation des missions de l'Institution nationale des invalides. Comme l'ONAC, l'INI poursuit sa voie de modernisation avec la signature prévue avant la fin de l'année 2004 d'un contrat d'objectifs et de moyens associé à un projet d'établissement et un projet médical.

Mais le projet de budget des anciens combattants pour 2005 ne se contente pas d'honorer les engagements pris dans le cadre de la loi de finances de 2004. D'autres mesures sont évidemment prévues.

Ainsi en est-il de l'augmentation des crédits sociaux. La contribution de l'Etat aux dépenses sociales de l'ONAC s'élevait à 12,135 millions d'euros dans le cadre de la loi de finances 2004. Le projet de budget pour 2005 la porte à 12,6 millions d'euros, ce qui permet à l'ONAC de consolider et de pérenniser son action de solidarité à laquelle nous sommes très attachés. À cet égard, il convient de souligner l'augmentation des interventions en faveur des veuves, parfois confrontées à de graves difficultés financières.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Georges Colombier. L'effort de modernisation des établissements publics est également poursuivi. L'existence même de l'ONAC, on le sait, était menacée.

M. René Rouquet. Il l'est toujours !

M. Georges Colombier. Grâce à votre action et à votre détermination, monsieur le ministre, l'avenir de cet office est désormais assuré. L'ONAC poursuit sa modernisation et entre en 2005 dans la troisième année d'exécution du contrat d'objectifs et de moyens. Avec une contribution de 36,5 millions d'euros au budget de fonctionnement de l'ONAC, le Gouvernement garantit ainsi les moyens d'une politique digne de cette institution. Représentant l'Assemblée nationale au sein du Conseil d'administration de l'Office, je tiens cependant à relayer les inquiétudes des associations relatives à la pérennité de cet établissement public au-delà de l'actuel contrat d'objectifs et de moyens arrivant à terme en 2007. Je ne doute pas que vous saurez nous rassurer à ce sujet.

La situation des veuves fait l'objet d'une attention toute particulière de votre part. Nous vous savons très attaché à la dimension humaine de votre action. C'est dans cet esprit que vous avez entrepris de relever uniformément de quinze points les pensions des veuves. L'augmentation des crédits sociaux de l'ONAC permet de prendre en compte le mieux possible les demandes d'aide. Je soutiens néanmoins le souhait exprimé par les associations d'anciens combattants de voir les veuves d'anciens combattants les plus démunies bénéficier d'une allocation de solidarité.

L'opération de collecte des témoignages des anciens combattants en Afrique du Nord a été lancée. Vous avez récemment rappelé lors d'un congrès national tout l'attachement que vous portez à cette action. C'est pourquoi vous avez demandé à la direction de la mémoire de conduire, avec le concours de l'ONAC et en lien étroit avec les associations concernées, une campagne rigoureuse de recueil de ces témoignages. Je ne peux que vous encourager dans cette voie.

Si je me réjouis de ces mesures positives attendues, je persiste à penser que le budget que nous examinons aujourd'hui doit être amélioré et enrichi sur des sujets d'importance.

Je citerai notamment la revalorisation de la retraite du combattant. Vous le savez, monsieur le ministre, la retraite du combattant est un témoignage de reconnaissance particulièrement apprécié par les anciens combattants. Son montant a été fixé à 33 points d'indice par la loi de finances pour 1978.

J'ai bien conscience de l'importance des sommes déjà consacrées par votre ministère à la retraite du combattant - cela dans un contexte économique difficile - et du coût d'une revalorisation des indices de pensions : un point d'indice représente 18 millions d'euros. Toutefois, je souhaite insister sur l'absence de revalorisation de la retraite du combattant depuis vingt-six ans. J'apporte mon entier soutien à la revendication du monde combattant qui plaide depuis de nombreuses années pour la revalorisation des indices des pensions. Aussi, je réitère ma proposition en faveur d'une revalorisation progressive afin d'amorcer cette réforme tant attendue. C'est pourquoi, avec mes collègues Céleste Lett, notre rapporteur, et Patrick Beaudoin, nous comptons sur vous pour reprendre l'amendement que nous avons déposé, et qui a reçu un avis favorable de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en vue de majorer, dans le budget 2005, le montant de la retraite d'un point en le faisant passer de l'indice 33 à l'indice 34.

M. Alain Néri. C'est de la mendicité !

M. Georges Colombier. Ce geste manifesterait la reconnaissance de la nation, à l'occasion du soixantième anniversaire de la fin de la Deuxième guerre mondiale, à l'ensemble des anciens combattants.

M. Alain Néri. C'est une aumône !

M. Georges Colombier. Mon cher collègue,...

M. le président. Ne répondez pas aux interruptions de M. Néri. Il aura l'occasion de s'exprimer ultérieurement !

M. Georges Colombier. Attentif aux observations des agents publics anciens combattants et soucieux de clarifier cette situation, vous avez, s'agissant de la campagne double pour l'Afrique du Nord, confié une étude à un inspecteur général des affaires sociales, M. Christian Gal, qui m'a précisé, lorsque je l'ai rencontré début octobre, qu'il vous remettrait son rapport au cours du premier semestre 2005. Vous envisagez ensuite de réunir une commission tripartite afin de respecter le principe de l'égalité des droits et de traitement entre tous les anciens combattants.

M. Alain Néri. L'Assemblée nationale n'est pas respectée !

M. François Rochebloine. Qu'est-ce que c'est que ce cinéma ?

M. Georges Colombier. D'autres attentes, restées en suspens, ont été exprimées par le monde combattant. Sans être exhaustif, je rappellerai notamment le relèvement du plafond de la retraite mutualiste du combattant. En 2003, le plafond de la retraite mutualiste a été augmenté, grâce à vous, de 7 points et demi. Je souhaiterais que l'objectif de 130 points soit réalisé en 2005, tout en ayant bien conscience que le montant des cotisations peut s'avérer trop élevé pour les anciens combattants les plus modestes.

S'agissant de la simplification du rapport constant, les associations d'anciens combattants attendent depuis très longtemps sa simplification tout en veillant, à terme, au maintien des intérêts des anciens combattants. J'ai appris que vous aviez réuni tout récemment le groupe des douze à ce sujet. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous faire part des conclusions de cette rencontre et nous dire quelles suites nous pouvons en attendre ?

Les anciens combattants de la guerre du Golfe devraient bénéficier de la campagne double. Pour les anciens des missions extérieures, il serait souhaitable d'attribuer la carte du combattant pour 120 jours de séjour sur un ou plusieurs territoires en mission extérieure, comme en ont bénéficié les anciens combattants d'Afrique du Nord.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Jacques Desallangre. Nous sommes d'accord.

M. Georges Colombier. S'agissant des incorporés de force alsaciens et mosellans et de l'indemnisation des incorporés de force dans les formations paramilitaires RAD et KHD, notre rapporteur a insisté à juste titre sur ces sujets sensibles, et je m'associe à sa démarche.

Pour ce qui est de l'abaissement de l'âge d'accès à la demi-part fiscale pour les anciens combattants, les associations demandent que les anciens combattants titulaires de la carte puissent bénéficier, dès l'âge de soixante-dix ans au lieu de soixante-quinze ans actuellement, d'une demi-part supplémentaire à l'impôt sur le revenu.

Les associations d'anciens combattants réitèrent leur demande d'attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires du service du travail obligatoire - le STO - afin de rendre hommage à ceux qui ont refusé de participer à l'effort de guerre nazi. À cet effet, j'ai, le 12 février 2003, déposé une proposition de loi. Monsieur le ministre, je vous remercie de nous préciser les mesures que vous comptez prendre sur ce sujet difficile.

Quant aux conditions d'attribution de la carte du combattant volontaire de la Résistance, les associations d'anciens combattants renouvellent leur demande d'attribution de la carte du Combattant volontaire de la Résistance aux titulaires de la médaille de la Résistance ou de la croix de guerre au titre de la Résistance. Qu'envisagez-vous pour répondre à cette attente ?

Telles sont les principales remarques que je souhaitais formuler concernant le projet de budget des anciens combattants. Au regard du travail accompli par votre ministère depuis plus de deux années et demie et des mesures prévues dans ce projet, et confiant dans votre détermination à faire progresser tout au long de cette législature la cause des anciens combattants, le groupe UMP votera pour ce budget 2005.

M. Alain Néri. Quelle annonce !

M. Georges Colombier. À titre personnel, je souhaite évoquer la date du 19 mars.

M. Alain Néri. Ah !

M. Georges Colombier. Pour avoir eu de longs échanges avec vous, monsieur le ministre, je connais votre position, comme vous connaissez la mienne.

M. François Rochebloine. Elles sont différentes.

M. Georges Colombier. Je me suis toujours efforcé d'aborder ce sujet avec dignité et dans le respect de l'opinion de chacun. Je souhaite que le droit au souvenir et au recueillement soit également respecté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, qui va enfin pouvoir s'exprimer !

M. Alain Néri. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'an dernier, j'ai dénoncé un budget en trompe l'œil. Cette année, lorsque je l'ai vu augmenter, ô merveille, de 0,14 %, je me suis dit que j'allais enfin pouvoir adresser des félicitations à M. Mékachéra !

M. Patrick Beaudouin. Vous auriez eu raison !

M. Alain Néri. Mais en allant plus avant dans la lecture du budget, j'ai déchanté ! Votre budget, c'est Ramona : comme dans la chanson, « j'ai fait un rêve merveilleux, mais ce n'était qu'un rêve » ! (Rires.) Le réveil fut brutal et s'est transformé en cauchemar.

Votre budget, monsieur le ministre, n'est rien d'autre qu'une tromperie, un tour de passe-passe ! Vous annoncez une hausse de 0,14 %. Or vous n'arrivez à ce pourcentage que parce que vous prenez en compte des mesures votées dans le budget 2004 mais dont les effets ne se feront sentir qu'au 1er janvier 2005 : carte du combattant à quatre mois, trois millions d'euros d'économies ! Même chose pour la pension des veuves, qui a pris effet elle aussi au 1er juillet 2004 et dont l'effet se fait sentir au 1er janvier 2005, soit douze millions d'économies !

Ce sont ainsi quinze millions d'euros qui s'envolent, et qui correspondent en fait non à une augmentation, mais à une baisse de 1,5 %, et même de 3,5 % si l'ont tient compte de l'inflation. Telle est la triste vérité !

Pour la première fois depuis des années, votre budget ne comprend aucune mesure nouvelle ! Il est désespérément vide. Certes, vous n'en portez pas seul la responsabilité. Les arbitrages vous ont été imposés. Mais vous comprendrez que nous soyons obligés de dénoncer cette situation.

Vous avez lamentablement échoué à l'écrit de l'examen. Il vous reste cependant une chance inespérée de vous rattraper, grâce au concours des nombreux parlementaires qui s'intéressent à la réalité du monde combattant. Pour ma part, j'ai déposé pas moins de onze amendements en vue d'améliorer votre budget. Certes, la commission des affaires sociales n'a pas cru bon d'en adopter un seul. Mais vous, monsieur le ministre, vous pouvez réussir votre oral de rattrapage cet après-midi en les reprenant à votre compte ! (Sourires.)

M. Jean-Louis Dumont. Très bien !

M. Alain Néri. Vous vous étiez engagé à revaloriser, au cours de la législature la retraite du combattant de 33 à 48 points, mais, depuis deux ans, nous sommes comme sœur Anne : nous ne voyons rien venir ! Or le temps presse, car il ne vous reste plus que trois budgets, en comptant celui-ci. Vous êtes donc obligé d'accorder 5 points - 16 millions - chaque année. Le président de la commission des affaires sociales nous a opposé l'article 40. Mais, moi, monsieur le ministre, je vais trouver un financement !

Rappelez-vous, j'avais déposé un amendement, adopté en son temps et qui s'était traduit dans le budget par la création d'une allocation pour les anciens combattants chômeurs âgés de moins de soixante ans ayant cotisé quarante annuités. Il leur fut accordé 5 600 francs nets d'allocations. Aujourd'hui, ils ont allégrement dépassé les soixante ans. Par conséquent, cette allocation n'a plus de raison d'être. Vous pouvez donc basculer les quatre-vingts millions correspondants sur la revalorisation de la retraite du combattant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Je suis sûr, monsieur le ministre, que vous reprendrez mon amendement et que nous aurons ainsi le plaisir de revaloriser la retraite du combattant d'une manière conséquente : 33 points représentent 425,35 euros par an, 2 790,11 francs ! Si vous faisiez l'effort d'augmenter la retraite de 5 points cette année, 5, l'année prochaine et encore 5 l'année suivante, d'ici à la fin de la législature, vous vous prépareriez un départ en fanfare ! Vous ne feriez pourtant que porter la retraite du combattant à 4 058,54 francs par an, soit 618,72 euros, ce qui, vous en conviendrez, ne correspond guère qu'à un treizième mois de retraite pour les plus modestes des anciens combattants, et ils sont nombreux : artisans, paysans, ouvriers qui ont cotisé au SMIC. Ne méritent-ils pas un treizième mois de retraite, eux qui ont sacrifié leur jeunesse à l'appel de la nation ?

M. Jean-Louis Dumont. Très bien !

M. Alain Néri. S'agissant des pensions des veuves, vous consentez 15 points mais vous ne garantissez pas leur pérennité. Vous devez, monsieur le ministre, les intégrer dans votre budget et les consolider. Pour cela, il faut faire passer les pensions des veuves de l'indice 500 à l'indice 550.

Vous aviez fait un effort important pour la retraite mutualiste : 7,5 points d'un coup mais, depuis, vous êtes en panne.

Sans doute, n'est-ce pas une priorité, étant entendu que la plupart des anciens combattants ne peuvent pas cotiser au plafond. Mais vous aviez là une occasion intéressante en direction du monde combattant, et qui ne coûtait pas cher, car les crédits n'auraient pas été consommés en totalité.

Comme vous n'hésitez pas à geler les crédits du monde combattant, vous aviez là une occasion rêvée, et nous vous aurions presque applaudi.

Comme certains de mes collègues, je souhaite que la quatrième génération du feu, les OPEX, soit reconnue dans ses droits et qu'on lui permette de bénéficier du fonds de solidarité et de la carte du combattant.

Pour l'allocation différentielle pour les veuves d'anciens combattants et pour les anciens combattants qui ont des ressources inférieures au SMIC, vous avez à juste titre demandé la création d'une commission, et celle-ci a fourni son rapport. Maintenant, il faut passer aux actes. Je ne doute pas que vous allez reprendre mon amendement. Vous avez prévu 16 millions d'euros pour abonder les crédits destinés aux prestations remboursées par l'État au titre du régime général de la sécurité sociale des invalides de guerre. Vous savez comme moi que vous ne les dépenserez pas, les lois inexorables de la vie étant ce qu'elles sont.

M. Patrick Beaudouin. Ne spéculez pas ainsi sur la vie des gens !

M. Alain Néri. Il ne s'agit que d'un effet d'affichage. Aussi, je vous demande de bien vouloir reporter ces crédits sur l'allocation différentielle : seize millions d'euros, ce n'est tout de même pas rien !

Il serait utile aussi d'abaisser de soixante-quinze à soixante-dix ans l'âge du bénéfice de la demi-part fiscale réservée aux titulaires de la carte du combattant. J'ai déposé un amendement en ce sens. Il est à votre disposition. Si vous l'acceptiez, le monde combattant, qui nous fait l'honneur d'être présent dans les tribunes, ne pourrait qu'être satisfait d'une telle décision.

S'agissant de la décristallisation, vous poursuivez l'action engagée par Jacques Floch et Jean-Pierre Masseret : il convient de s'en féliciter, certes, mais il faut aussi rouvrir les droits à révision de pension des anciens combattants de l'armée française.

Pour ce qui est de l'ONAC, nous sommes face à une véritable mystification. Vous dites, monsieur le ministre, que vous avez pérennisé les crédits sociaux de l'office. Je vous en donne acte, vous les avez en effet consolidés. Désormais, ils seront inscrits dans le budget alors qu'auparavant ils dépendaient de l'adoption d'un amendement de réserve parlementaire et étaient, de ce fait, chaque année remis en cause. Cependant ils ne sont pas augmentés. Notre inquiétude n'est pas dissipée. D'une part, nous n'avons aucune assurance que l'ONAC continue à être adossé au ministère de la défense, revendication essentielle du monde combattant. D'autre part, nous craignons que l'office ne soit pas pérennisé au-delà du terme du contrat d'objectifs, en 2007. J'ai déposé un amendement à ce sujet, comme l'année dernière. Faites-en sorte qu'il soit adopté, monsieur le ministre.

Je vois qu'il me faut aller plus vite.

M. le président. Juste remarque !

M. Alain Néri. S'agissant des orphelins, nous nous félicitons bien sûr qu'ils bénéficient tous d'une égalité de traitement. Mais je veux vous soumettre deux propositions. D'une part, nous souhaiterions que les mesures prises soient étendues aux orphelins dont les parents ont été fusillés ou massacrés sur le sol de France. D'autre part, il conviendrait d'envisager d'inclure les orphelins dont les parents déportés sont morts dans l'année qui a suivi leur retour des camps, en s'appuyant sur la jurisprudence selon laquelle la mention « mort pour la France » peut être attribuée à une personne décédée des suites de ses blessures dans l'année où elle les a reçues. Ce serait une mesure d'égalité et de justice, qui honorerait la République.

Pour finir, monsieur le président, et vous être agréable, ...

M. le président. Merci, monsieur Néri.

M. Alain Néri. ...je voudrais parler de la politique de mémoire. Il faut faire un effort, monsieur le ministre, particulièrement pour l'année 2005 où nous célébrerons le soixantième anniversaire du 8 mai 1945. Ne nous refaites pas le coup du Memorial Day, qui permettrait de passer à la trappe le 8 mai 1945 ou ...

M. Jérôme Lambert. Le 19 mars 1962 !

M. Alain Néri. ...le 19 mars 1962. Il n'en est pas question.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Néri.

M. Alain Néri. Je termine, monsieur le président. Simplement, je voudrais que l'on profite de l'occasion donnée par ce soixantième anniversaire pour faire du 27 mai, jour de la création du Conseil national de la Résistance en 1943, une journée de la Résistance.

M. Jérôme Lambert. C'est un jour particulièrement important.

M. Alain Néri. Le programme du CNR est à l'origine des plus grandes avancées sociales que l'on connaisse.

M. Jacques Desallangre. Nous avons déposé une proposition de loi en ce sens, votez-la !

M. le président. Voilà une belle manière de conclure, monsieur Néri.

M. Alain Néri. Vous comprenez bien qu'il me faut parler plus longuement du 19 mars, monsieur le président.

Monsieur le ministre, vous avez essayé de tromper le monde combattant ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Charles Cova. C'est une attaque personnelle !

M. Louis Guédon. Des excuses, une suspension de séance ! Nous ne pouvons tolérer de tels propos ! (MM. Cova et Guédon se lèvent et quittent l'hémicycle.)

M. Alain Néri. Vous n'avez pas eu le courage de venir devant la représentation nationale pour proposer une date de recueillement, de souvenir et de mémoire pour toutes les victimes de la guerre d'Algérie et du combat Tunisie-Maroc. Vous le savez, le 19 mars est un jour historique. La troisième génération du feu a trop longtemps souffert que la guerre d'Algérie ne soit pas reconnue officiellement. Cette guerre, qui est restée trop longtemps sans nom, ne doit pas être une guerre sans date. La seule qui s'impose est celle du 19 mars, hautement symbolique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Veuillez conclure !

M. Alain Néri. Ce budget ne contient, je le répète, aucune mesure nouvelle.

M. Jean-Pierre Gorges. Et vous, qu'avez-vous fait ?

M. Alain Néri. Les anciens combattants, ce n'est pas de charité ni de compassion qu'ils ont besoin. Ils revendiquent simplement le respect de leur dignité.

M. Jean-Pierre Gorges. Démago !

M. Alain Néri. Ceux qui ont sacrifié leur jeunesse et parfois leur vie pour que vive la France et vive la République ont droit au respect de la nation parce que, comme le disait Clemenceau, « ils ont des droits sur nous ». (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pierre-Louis Fagniez. Et nous, nous avons droit à votre respect, monsieur Néri !

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine qui saura, comme à son habitude, aborder les choses avec calme afin de remettre un peu d'ordre dans un débat qui le mérite.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en découvrant cette année le budget des anciens combattants, pour la dix-septième fois, j'ai été comme nombre d'observateurs surpris de prime abord de voir apparaître une évolution positive de 0,14 % des crédits prévus pour 2005. Sachant que, pour la première fois, ce budget ne comporte aucune mesure nouvelle marquante, seule une lecture attentive permet en effet d'expliquer la légère augmentation qui le caractérise et qui contraste avec la baisse systématique observée depuis au moins une décennie.

L'effet d'annonce passé, chacun s'accorde à reconnaître que ces 0,14 % ne sont que la conséquence directe de mesures prises en 2002 et 2003. Cet effet retard est-il pour autant significatif d'une inversion de tendance ? Manifestement non.

La diminution constante de la dette viagère, liée à la baisse démographique structurelle des parties prenantes, continue de produire ses effets, de manière mécanique, même si quelques mesures viennent cette année atténuer ce phénomène. Je pense à la décristallisation des pensions des anciens combattants des pays de l'ex-Union française devenus indépendants, mesure obtenue non sans difficulté, dois-je le rappeler, le décret d'application ayant mis une bonne année à paraître. Je pense encore à l'entrée dans le dispositif de la retraite du combattant des classes d'âge de la troisième génération du feu, rappelés compris.

Il n'y a donc certainement pas de quoi crier victoire ! À vrai dire, avec 0,14 % de hausse en euros courants, on est loin du compte alors que l'inflation se situe à environ 2 %. Si l'on considère les reports sur 2005 de dépenses qui auraient dû être financées en 2004, il devient évident, en toute objectivité, que ce budget n'est pas à la hauteur des enjeux.

Je vous l'accorde, monsieur le ministre, l'analyse budgétaire ne saurait se limiter à la lecture d'un taux directeur. Aussi convient-il d'aller plus loin dans la réflexion en descendant dans les différentes lignes du budget. Alors, on s'aperçoit que l'absence de mesures nouvelles destinées à répondre aux attentes légitimes du monde combattant met en lumière de graves insuffisances.

C'est donc aujourd'hui avec ce constat, une certitude : ce budget ne tranche pas avec ceux des exercices précédents. Il ne traduit pas de changement de cap, ce qui a au moins l'avantage de rassurer le rapporteur spécial de la commission des finances, Jean-Claude Mathis, qui souligne que « la stabilité générale du dispositif juridique, administratif et financier de réparation et de solidarité dû au monde combattant est assurée. »

Il n'est donc pas abusif de dire qu'en fait nous sommes en présence d'un budget en trompe-l'œil, loin de permettre de garantir le respect de l'imprescriptible droit à réparation lié aux services rendus à la nation.

Rassurez-vous : la représentation nationale ne se fait guère d'illusions quant à l'importance des marges de manœuvre dont peut disposer le ministre délégué aux anciens combattants, dans ce gouvernement comme dans les précédents. D'ailleurs, la situation budgétaire de l'État étant ce qu'elle est, il faut bien reconnaître que nous n'attendions pas de miracles cette année, malheureusement.

Je dois d'abord évoquer la question de la simplification du mode de calcul du rapport constant.

La représentation nationale attend de votre part des précisions et un engagement ferme sur ce point, car le monde combattant ne peut plus se contenter de vagues promesses, comme cela a été trop souvent le cas dans le passé. Durant des années, Bercy s'est arc-bouté sur une formule illisible pour le commun des mortels mais aussi pour les parlementaires ou les ministres eux-mêmes ! Seuls des technocrates pouvaient l'expliquer.

Il me faut dire ici un mot de l'épisode totalement surréaliste que nous avons vécu lors de la dernière réunion de la commission d'évaluation de la valeur du point de pension où, avec mes collègues parlementaires, en présence des représentants du monde combattant, nous avons assisté à une bien mauvaise représentation, que dis-je, à une véritable mascarade ! Plus de trente personnes rassemblées pour constater que, cette année, il n'y aurait pas de réajustement de la valeur du point. Les parlementaires et les représentants des associations du monde combattant ont refusé fort logiquement de prendre part au vote ou se sont abstenus. Seuls les représentants des administrations ont approuvé cette orientation. Ainsi, le rapport des fonctionnaires a été adopté par les fonctionnaires : drôle de conception de la démocratie !

Mais je crois que vous avez pris la mesure d'une telle situation et je vous saurais gré de nous éclairer sur ce point. Selon les informations dont je dispose, vous envisageriez un dispositif simplifié et beaucoup plus lisible. Le groupe UDF ne peut que s'en réjouir et sera particulièrement vigilant quant à sa mise en œuvre.

Trois mesures attendues auraient dû figurer dans ce budget, mais nous n'en trouvons pas trace.

La première est la revalorisation de la retraite du combattant. Il est un fait que le nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant, du fait des modifications successives des critères d'attribution de la carte du combattant, a régulièrement augmenté au cours de la dernière décennie. À l'inverse, son montant est resté inchangé à 33 points, contrairement aux promesses qui avaient été faites concernant un rattrapage de 3 points par an de la perte de pouvoir d'achat enregistrée.

Cette année encore, le Gouvernement n'a pas souhaité donner suite à cette demande prioritaire du monde combattant. Nous aurions pu le comprendre si cette retraite était par ailleurs d'un bon niveau, ce qui est loin d'être le cas. L'an dernier, en novembre 2003, j'avais ironisé sur le montant de cette retraite du combattant, en illustrant mon propos d'une comparaison rapide : elle correspond pour un fumeur, à l'équivalent de cinq cigarettes par jour !

Alors oui, si la notion de droit à réparation garde un sens, la revalorisation du montant indiciaire de cette retraite s'impose à brève échéance, sans attendre qu'il n'y ait plus d'anciens combattants !

Le problème du coût de la mesure ne nous a pas échappé et c'est pourquoi, il nous paraissait utile de prévoir une revalorisation progressive. Sur ce point, je crois que l'ensemble des groupes parlementaires pourraient s'accorder, ne serait-ce que sur la méthode. D'ailleurs, je souscris pleinement aux souhaits réitérés des rapporteurs successifs de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, notamment de mon collègue et ami Georges Colombier, de voir satisfaite une revendication ancienne et unanime du monde combattant visant à porter la retraite du combattant de 33 à 48 points d'indice. Le rapporteur, notre collègue Céleste Lett, a raison d'insister lorsqu'il écrit : « l'essentiel est d'enfin inverser une tendance qui malheureusement perdure ». Aussi ne puis-je personnellement que regretter que le Gouvernement n'ait pas jugé bon de reprendre l'amendement de nos collègues de l'UMP visant à augmenter d'un point l'indice, dont je rappelle que le coût ne représente qu'un peu plus de 15 millions d'euros. Ce refus témoigne d'une sorte de mépris du monde combattant. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La deuxième mesure concerne le plafond majorable de la retraite mutualiste, qui reste bloqué à l'indice 122,5 du point de pension militaire d'invalidité depuis deux ans. Là encore, le rattrapage annoncé par le Gouvernement dès 2004, avec l'objectif de porter le plafond majorable à 130 points, se fait attendre. Le Gouvernement a-t-il renoncé à cette mesure ? Si tel était le cas, il s'exposerait inévitablement à de vives critiques. Mais au moins dites-le : les choses seront ainsi clarifiées.

Enfin, troisième mesure : l'amélioration des droits des conjoints survivants. Je connais l'engagement des organisations du monde combattant sur ce point, je le partage et, je l'espère, vous aussi, monsieur le ministre. Il est du devoir de la nation de prendre en considération les différentes situations qui ont pu être signalées, sachant que nous ne sommes pas dans le registre de l'assistanat mais bien au contraire dans une logique de réparation.

Le rapport publié, avec quelque peu de retard, à la fin de l'été, sur la situation des veuves de plus de 60 ans dont les ressources sont inférieures au SMIC, conformément à l'article 122 de la loi de finances pour 2004, ouvre sans aucun doute de réelles perspectives qui doivent toutefois déboucher sur des mesures concrètes, devenir en quelque sorte « un nouveau chantier » selon les termes employés par le rapporteur pour avis. Même si je reconnais que l'effort consenti cette année en faveur de l'ONAC constitue une avancée intéressante, je souhaite que vous nous apportiez des précisions quant à son avenir.

À cet instant du débat relatif à la réaffirmation du droit à réparation, d'autres volets revendicatifs spécifiques en suspens doivent être abordés.

D'abord, la campagne double, avec la demande de création d'une commission tripartite qui aurait le mérite d'autoriser une confrontation saine et constructive entre les experts des ministères, les représentants du monde combattant et les parlementaires. Cette commission ou ce groupe de travail pourrait débattre objectivement de la question et déterminer une méthode en vue de fixer le coût exact d'une telle mesure. Nous prenons acte de votre décision du mois de juillet, qui consiste à confier une mission de médiation à M. Christian Gal, et nous espérons qu'elle donnera lieu à une concertation élargie, ne serait-ce qu'avec les représentants des organisations combattantes concernées. C'est un minimum, me semble-t-il.

Ensuite, le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 a institué une aide financière pour les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Le financement prévu pour 2005 sera-t-il suffisant ? Pourquoi avoir exclu du bénéfice de la mesure les orphelins de guerre ?

M. Jean-Claude Viollet. Bonne question !

M. François Rochebloine. Mon collègue et ami Pierre-Christophe Baguet reviendra plus longuement sur ce point tout à l'heure.

M. le président. Monsieur Rochebloine, veuillez conclure !

M. François Rochebloine. Je termine, monsieur le président.

Enfin, nous souhaitons l'amélioration du remboursement des soins aux pensionnés et mutilés de guerre, ainsi que la prise en charge des appareillages, autre sujet de préoccupation absent de ce budget alors que nous sommes en présence d'un problème d'une acuité réelle et qui concerne plus de personnes que nous ne l'imaginons parfois. Quand pouvons-nous espérer que l'État honorera pleinement ses obligations ?

Certains de mes collègues reviendront sans doute sur les différentes questions relatives au droit à réparation au titre de la Seconde Guerre mondiale. Je pense ici au statut des Alsaciens-Mosellans. Plusieurs catégories n'ont toujours pas été prises en considération. Est-ce bien raisonnable ? Là aussi, n'attendons pas qu'il n'en reste plus qu'une poignée pour régler cette question.

Certes, tout ne saurait être réglé en un jour ou en une année, le ministre n'étant pas le seul responsable. N'oublions pas en effet le rôle éminent joué dans les arbitrages budgétaires par cette citadelle qu'est Bercy.

Un mot encore sur l'Observatoire de la santé des vétérans, l'OSV. Si le recours au terme de « vétéran » a de quoi surprendre, il faut surtout regretter que rien n'ait été fait pour rendre transparent le travail de cette instance, composée a priori d'experts et de médecins militaires. Pensez-vous, monsieur le ministre, que cette démarche puisse être comprise sur le plan de la méthode ?

Enfin, j'évoquerai la question de la politique de la mémoire, qui a beaucoup inspiré le rapporteur pour avis.

M. le président. Monsieur Rochebloine !

M. François Rochebloine. Je souhaite notamment revenir sur la commémoration du 5 décembre comme journée nationale d'hommage aux morts pour la France pendant la guerre d'Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie.

Je ne reviendrai pas sur le choix du Gouvernement, que je juge personnellement on ne peut plus contestable, comme mes collègues du groupe UDF. Mais je souhaiterais que soit clarifié un point qui vous a été reproché récemment, monsieur le ministre.

Nous avions compris que le décret du 28 septembre 2003 instituait une cérémonie le 5 décembre dans chaque chef-lieu de département, aucune directive n'étant adressée aux maires des communes. Or j'ai appris récemment que certains préfets avaient pris l'initiative d'inviter les maires à organiser une cérémonie et à faire pavoiser les bâtiments publics.

M. Jacques Desallangre. Dans l'Aisne, notamment !

M. François Rochebloine. Monsieur le ministre, cette consigne émane-t-elle de votre ministère ou de la simple volonté de certains préfets, ce qui serait pour le moins regrettable ?

M. Gérard Charasse. De ceux qui font du zèle !

M. François Rochebloine. Toujours au titre de la politique de la mémoire, la collecte des témoignages des anciens combattants d'AFN s'impose. Dans quel délai comptez-vous lancer cette action ?

Plus largement, la pérennisation de la politique de la mémoire suppose une implication associative importante. Je ne suis pas convaincu que l'on y parviendra en ne s'appuyant que sur les moyens publics. La réussite des actions pédagogiques en témoigne souvent, et il n'y a qu'à observer le déroulement des cérémonies patriotiques et commémoratives. En effet, là où la jeunesse est associée et rendue actrice, il y a du monde autour des monuments aux morts et dans les espaces dédiés au souvenir. À ce titre, je regrette que l'on agisse parfois un peu vite par décret, en cédant aux sirènes idéologiques sans toujours tenir compte des aspirations de nos concitoyens.

En conclusion, je dois déplorer une nouvelle fois le sentiment d'incompréhension qui semble persister entre, d'une part, les pouvoirs publics et, d'autre part, le monde combattant, malgré l'énergie déployée par les associations et leurs représentants, et l'engagement des parlementaires pour rappeler sans cesse le bien-fondé d'un droit à réparation que l'usure du temps menace de banaliser ou de faire disparaître au profit de mesures de solidarité et d'assistance.

Or n'oublions jamais que le sacrifice consenti par les différentes générations du feu a donné lieu à un pacte social fort, un véritable ciment pour notre unité nationale. C'est cela aussi notre devoir de mémoire. Je le dis avec d'autant plus de force que j'ai la chance, de par mon âge, d'appartenir à une génération qui n'a pas connu directement la guerre et qui a pu vivre jusqu'à ce jour libre et en paix.

Mes chers collègues, vous l'aurez compris, cette année encore, en l'absence de mesures nouvelles, et dans un souci de cohérence avec ses positions antérieures, le groupe UDF sera dans l'obligation de voter contre ce budget.

Monsieur le ministre, nous vous demandons instamment de répondre aux différentes questions qui vous ont déjà été posées et qui le seront sans doute encore, ce qui n'avait pas été le cas l'année dernière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Idiart. Heureusement que l'UDF fait partie de la majorité !

M. Jean Dionis du Séjour. Elle est libre !

M. le président. La parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse. Monsieur le ministre, à vous écouter, nous examinerions aujourd'hui l'un des rares budgets qui augmente. Ce serait effectivement notable si cette augmentation de 0,14 % par rapport à l'année dernière ne tenait pas en totalité à la mise en œuvre de mesures déjà décidées en 2003 et en 2004. Ces décisions pesant finalement plus lourd financièrement que la hausse des crédits, vous avez dû serrer ce budget, ce qui a quelques conséquences tout à fait néfastes.

J'aborderai pour ma part deux sujets.

D'abord, il me semble indispensable de revaloriser le montant de la retraite du combattant ainsi que le plafond de la rente mutualiste. Je constate au passage que ce public, pourtant plus fragile, ne sera pas épargné par le forfait d'un euro exigé pour tout acte de soins, mesure décidée par votre majorité. J'ai bien noté, monsieur le ministre, que le chapitre 46-21 connaissait à nouveau une augmentation, mais elle trouve son origine pour l'essentiel dans l'entrée massive des anciens combattants d'Afrique du nord dans le dispositif. Les crédits augmentent ainsi de 23 millions d'euros, dont 600 000 euros permettront de financer la revalorisation du point.

Je tiens à préciser que la France a une dette d'honneur à l'égard des anciens combattants de l'ancienne Union française, qui se sont vaillamment battus pour sa liberté.

M. Jean-Christophe Lagarde. C'est vrai !

M. Gérard Charasse. Cette dette d'honneur doit être honorée et la blessure de la cristallisation refermée. Je comprends la contrainte budgétaire, mais un signal fort me semblerait bienvenu.

Deuxième point, je veux évoquer la mémoire. Vous savez d'où je suis l'élu. Vous savez ce que coûte à Vichy un travail de mémoire mal fait. Vous comprendrez donc mon attachement viscéral à dire la vérité sur ces cinq années de notre histoire pendant lesquelles la France a basculé dans la dictature et les pires compromissions.

Je voudrais, monsieur le ministre, que vous vous engagiez à dire ce que fera le Gouvernement de notre demande de clarté, qui peut s'installer autour de nombreux supports, un centre de recherche par exemple.

Naturellement, quand je constate sur le terrain les conséquences de la politique de réduction des moyens, quand je vois que vingt-quatre postes sont supprimés à l'ONAC, je n'adhère pas à la vision du devoir, à la culture de la mémoire que véhicule votre budget.

Enfin, je poserai trois questions qui appellent des réponses simples.

Premièrement, est-il envisagé d'accorder une allocation différentielle aux veuves d'anciens combattants dont les ressources sont inférieures au SMIC ?

Deuxièmement, comptez-vous finalement prendre en compte la spécificité des réfractaires au service du travail obligatoire, le STO ?

Troisièmement, quelles suites le Gouvernement donnera-t-il à l'observation faite par la commission concernant l'accélération du processus de décristallisation ?

Monsieur le ministre, l'ensemble de vos réponses aux questions mais aussi aux amendements qui ont été déposés conditionnera le vote des députés radicaux de gauche.

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après la baisse de 6 % en 2003, à périmètre constant, et de 3 % en 2004, on claironne la hausse de ce budget pour 2005. Hosannah !

Mais cette hausse ne tient pas compte des millions d'euros d'annulations de crédits. Et si vous n'aviez pas par ailleurs effectué des tours de passe-passe et des manipulations, votre budget afficherait en fait une nette baisse. Je n'ai pas le temps de démonter tous les mécanismes que vous avez utilisés, cela a déjà été fait et le sera peut-être encore.

M. Jérôme Lambert. Les anciens combattants le savent !

M. Jacques Desallangre. J'avais déjà dénoncé, l'année dernière, la méthode qui permet de gagner du temps sur le dos des anciens combattants. C'est ce que vous faites pour les orphelins de la barbarie nazie car, après plus de deux ans, vous n'avez toujours pas accepté de donner toute sa portée à l'amendement sur l'indemnisation que nous avons fait voter avec mon collègue Maxime Gremetz. En refusant la rétroactivité jusqu'en 2000, vous rompez le principe d'égalité et vous faites supporter aux orphelins les conséquences de votre indécision.

De même, nous avons voté en 2003 la revalorisation de 15 points de l'ensemble des pensions de veuves. Je réprouvais alors la manœuvre dilatoire qui, en ne rendant cette mesure applicable qu'en milieu d'année, vous permettait de ponctionner 11 millions d'euros dans les poches des veuves. Mais cela n'a pas semblé suffisant à vos yeux ou à ceux qui décident pour vous, monsieur le ministre, puisque la mesure, votée en 2003, n'est toujours pas mise en œuvre. Le prochain remaniement ministériel sera-t-il, après l'informatique, votre nouvel alibi pour ne pas verser ce qui leur est dû ? Pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur votre refus de mettre en œuvre cette loi de la République ? Faut-il que les veuves aient recours, comme d'autres, au juge pour que l'on accepte de se soumettre ?

Si cette revalorisation devait néanmoins être appliquée en année pleine en 2005, cela gonflerait artificiellement votre budget et ferait croire qu'il augmente alors qu'il s'agit là encore d'une mesure ancienne.

Ce sont les gels et annulations budgétaires en cours d'année qui vous conduisent à des opérations de cavalerie, mais surtout à refuser aux anciens combattants l'un de leurs droits à réparation, à savoir la gratuité des soins qui leur est pourtant garantie par l'article L. 115 du code des pensions.

Les anciens combattants, invalides, mutilés ou malades, se voient, depuis de longs mois, refuser par les médecins, pharmaciens, directeurs d'établissements thermaux, le bénéfice du carnet de soins gratuits. On leur demande de ranger cette carte et de présenter la carte Vitale. Ce refus de prise en charge est imputable au Gouvernement qui, depuis de longs mois, ne règle pas les honoraires. Monsieur le ministre, nous vous demandons de mettre fin dans les plus brefs délais à cette situation qui n'honore ni le Gouvernement ni notre pays. Que le Gouvernement respecte à nouveau la loi et le droit à réparation !

Vous utilisez d'autres types d'artifices avec la décristallisation des pensions que vous refusez d'accepter de manière scandaleuse avant d'y être contraint par la justice française. Je reviendrai tout à l'heure dans le cadre des questions sur ce point.

Vous refusez cette année toute mesure nouvelle en faveur des anciens combattants et vous avez tenté de bluffer en saluant le premier budget de la droite au pouvoir par une revalorisation de 7,5 points du plafond majorable de la rente mutualiste. Mais depuis, c'est le silence radio.

Donc, contrairement aux habitudes qui prévalaient depuis 1998, la revalorisation en trois ans aura été de 7,5 points, au lieu des 15 points que les anciens combattants auraient pu espérer en se fiant aux promesses qui leur avaient été faites. Sur les deux dernières années, la revalorisation aura été de vingt euros ! Vous êtes bien loin de respecter les engagements du Gouvernement d'atteindre sans délai les 130 points d'indice PMI.

Le Gouvernement avait également promis la revalorisation de la retraite du combattant de 33 à 48 points, afin qu'elle soit équivalente à une pension militaire d'invalidité de 10 %, conformément à l'intention initiale. L'an dernier, Maxime Gremetz et moi avions proposé plusieurs amendements, du plus optimiste au plus raisonnable à nos yeux. Rien n'y a fait ! Vous avez dit que vous y réfléchiriez. Apparemment, la réflexion dure encore et votre engagement n'a pas été tenu. De même, il serait légitime de verser cette retraite à soixante ans pour toutes les générations du feu.

Votre présentation fallacieuse, pardonnez-moi de le dire, s'applique aussi aux crédits de l'ONAC. Nous nous félicitons tous des quelque 465 000 euros en faveur de l'action sociale pour ses ressortissants, mais vous ne vous attardez pas sur les suppressions d'emplois et les 750 000 euros que vous récupérez sur le dos de l'ONAC et des anciens combattants.

J'aurais pu poursuivre la litanie, mais le temps me manque. J'aurais dû vous parler de la journée nationale de la Résistance car nous avons, avec Maxime Gremetz et les membres de notre groupe, déposé une proposition de loi. Mais nous attendons toujours une réponse.

Votre budget, monsieur le ministre, ne comporte aucune mesure nouvelle, aucune réponse aux légitimes revendications des anciens combattants. Vous faites tout au plus du « recyclage », en essayant de faire passer pour de nouvelles mesures des dispositions déjà adoptées en 2003. Je ne partage pas le bel optimisme de mon collègue Néri : je sais que les contraintes vous empêchent d'agir et que vous ne ferez rien. Vous êtes condamné à recourir aux subterfuges et à nous présenter un miroir aux alouettes. Votre budget est insincère et nous le condamnons, comme le font les associations d'anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Alain Néri. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Patrick Beaudouin.

M. Patrick Beaudouin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos deux rapporteurs ont exposé et analysé en profondeur les crédits en hausse du budget des anciens combattants. Ils ont en particulier expliqué que la dotation par ressortissant s'accroît de 3,9 %.

M. Jean-Louis Dumont. C'est faux !

M. Alain Néri. Ils n'ont convaincu personne !

M. Patrick Beaudouin. Par-delà les chiffres, je souhaiterais évoquer la politique que vous conduisez dans trois domaines : la solution de problèmes importants, le développement de la solidarité et la structuration de la mémoire combattante. Comme je suis un jeune parlementaire, j'essaierai d'être positif.

M. Jacques Desallangre. Bel optimisme !

M. Patrick Beaudouin. Premièrement, vous apportez des solutions à des problèmes importants.

Quatre problèmes majeurs se posaient depuis plusieurs années : la décristallisation des pensions des combattants de l'ancienne Union française, l'augmentation des pensions des veuves, l'indemnisation des orphelins de parents victimes du nazisme, l'extension de la qualité de combattant. Ils trouvent au moins en partie leur solution dans le présent budget et ce sont les crédits correspondants qui expliquent en grande partie l'augmentation constatée. Félicitons-nous sans réserve de voir les anciens combattants de l'Union française rejoindre définitivement leurs frères d'armes, l'ensemble des orphelins des victimes du nazisme indemnisés, la qualité de combattant adaptée au combat spécifique que fut la lutte en Afrique du Nord, et les veuves mieux aidées. Vous aviez promis ces mesures, vous avez tenu parole.

Tout n'est pas réglé pour autant. Il subsiste une question importante et d'autres qui sont plus spécifiques.

Il s'agit, pour la première, de la retraite du combattant, dont la valeur en points d'indice n'a pas augmenté depuis 1978, comme Georges Colombier l'a rappelé. Les associations d'anciens combattants demandent une revalorisation de 15 points. Personnellement, j'avais proposé, l'année dernière, dans mon rapport, une première tranche de trois points.

M. François Rochebloine. Cela aurait déjà été très bien !

M. Patrick Beaudouin. Je partage la démarche de Georges Colombier et de notre rapporteur Céleste Lett, qui proposent cette année une augmentation d'un point.

M. Jacques Desallangre. Bien sûr ! Et l'année prochaine, vous proposerez 0,5 point !

M. Patrick Beaudouin. Il est vrai que, pour une retraite qui demeure symbolique, le coût de la mesure est important, surtout dans un contexte économique et budgétaire difficile.

Je regrette, monsieur Néri, qu'entre 1981 et 1995, où le Président de la République était lui-même un ancien combattant...

M. Jean-Louis Dumont. Et ancien ministre des anciens combattants !

M. Patrick Beaudouin. ...vous n'ayez pas fait entendre votre voix pour obtenir à l'époque ne serait-ce qu'un point par an. Comme j'ai fréquenté, comme vous, l'école élémentaire, 1995 moins 1981, cela fait quinze ans, donc quinze points !

M. Jean-Louis Dumont. D'autres mesures ont été prises, et financées !

M. Patrick Beaudouin. Les associations nationales d'anciens combattants, que nous avons rencontrées à l'occasion des auditions organisées par notre rapporteur, ont parfaitement compris les raisons du Gouvernement. Il faut rendre ici hommage à leur sens des responsabilités et de la mesure, qu'ils ont d'ailleurs acquis au front. La question est reportée, mais soyez certain, monsieur le ministre, qu'ils attendent de votre part une réponse positive et nous serons leur pressant relais auprès de vous l'année prochaine.

Nous fêterons bientôt le soixantième anniversaire de la victoire de 1945 et, pourtant, nous recevons toujours dans nos permanences des hommes, pour la plupart octogénaires, qui demandent à faire valoir leur qualité de combattant ou de combattant volontaire de la Résistance. Les règles d'attribution des cartes ont évolué avec les conflits et beaucoup se sentent aujourd'hui lésés par rapport à leurs camarades plus jeunes. S'ajoutent également à cela les problèmes des statuts particuliers : nos compatriotes incorporés de force, les RAD-KHD, ceux d'Alsace-Lorraine, les prisonniers du camp soviétique de Tambov, voire les STO. Ne serait-il pas possible de revoir, une fois pour toutes, toutes les demandes liées à la Seconde Guerre mondiale et de les examiner avec bienveillance ? Un examen définitif de leur situation serait le bienvenu, sans toucher cependant à la qualité des titres attribués. Je vous le demande instamment car la plupart des demandeurs auront bientôt disparu. Profitons de l'année anniversaire de 2005 pour solder les comptes.

Deuxièmement, vous vous attachez à développer la solidarité.

Nous nous félicitons que la restructuration de l'ONAC et de l'Institution nationale des invalides s'accompagne d'un effort financier certain. Ainsi, les crédits d'action de solidarité de l'ONAC sont maintenant inscrits au budget général, et ils ne dépendent plus de la réserve parlementaire qui présentait un caractère aléatoire. L'ONAC peut dès lors intervenir plus largement en faveur des plus défavorisés, en particulier des veuves d'anciens combattants qui deviennent bénéficiaires à part entière.

L'Office poursuit sa modernisation en fonction des deux objectifs contenus dans sa devise : « mémoire et solidarité ». Dès aujourd'hui, il nous faut mettre en chantier le nouveau contrat qui commencera en 2007. Nous témoignerons ainsi de notre volonté de faire perdurer l'ONAC.

L'INI voit aussi sa modernisation bien engagée. Il travaille en priorité à l'aide au grand handicap et à l'amélioration de l'accompagnement médical et social des personnes handicapées.

À la suite de l'adoption, sur ma proposition, de l'article 122 de la loi de finances pour 2004, vous nous avez fourni un rapport très complet et très intéressant sur la situation des anciens combattants, ou de leurs veuves, dont les ressources seraient inférieures au SMIC. Il est le résultat d'une initiative prise par de jeunes parlementaires.

M. Jean-Louis Dumont. Jeunesse se passe ! Et même rapidement pour certains.

M. Patrick Beaudouin. Votre conclusion est cependant trop réservée pour m'avoir convaincu. Vous estimez que les anciens combattants peuvent être assimilés aux autres retraités et qu'ils ne sont finalement justiciables que de l'action ponctuelle de l'ONAC.

Je ne partage pas totalement votre point de vue. Mon rôle de maire me fait rencontrer chaque jour des personnes âgées qui, malgré toutes les aides, ont des retraites inférieures au SMIC, et mes collègues élus locaux vous le confirmeront. Certes, elles ne sont sans doute pas légion. Mais ne faudrait-il pas que, parmi elles, les anciens combattants voient le service qu'ils ont rendu à la nation, fortement spécifique, reconnu par une aide permanente marquant la gratitude et la solidarité nationale ?

Je vous propose donc, monsieur le ministre, de réaliser en 2005 deux tests dans deux départements. Il suffirait que les services départementaux de l'ONAC, avec l'aide des associations, reçoivent ceux qui estiment que leurs ressources sont inférieures au SMIC. Cela permettrait de se faire une idée du nombre d'anciens combattants et de veuves concernés. S'il n'y en a pas, tant mieux. Dans le cas contraire, nous pourrions agir.

Il est un autre domaine où les anciens combattants attendent un geste : le système de soins gratuits est perturbé. Les délais de paiement des médecins et des pharmaciens sont particulièrement longs, jusqu'à une année. Des crédits ont été débloqués dernièrement, mais bien tardivement. Ne serait-il pas possible d'accélérer les procédures ? Les retards de paiement accumulés peuvent mettre en danger ce service primordial, ne serait-ce qu'en décourageant le personnel soignant !

Troisièmement, le Gouvernement contribue au devoir de mémoire.

L'effort entrepris dans ce domaine par votre ministère, en liaison étroite avec celui de la défense, est dynamique et important. Il répond à toutes les questions que se posent les jeunes générations, celles pour lesquelles les sacrifices des anciens combattants appartiennent de plus en plus à l'histoire et qui ne les apprennent plus de la bouche même de ceux qui les ont consentis. Ainsi, vous contribuez à l'entretien et même à la création de monuments de la mémoire : nécropoles, lieux de combat ou de déportation comme le mémorial du Struthof ou celui d'Auschwitz. Votre action rappelle aussi le sacrifice de nos alliés, qui nous ont tant donné. Elle y associe, tant que ce sera possible, le témoignage de survivants qui viennent dans les lycées et collèges raconter ce qu'ils ont vécu.

M. Georges Colombier. C'est une très bonne chose !

M. Patrick Beaudouin. Ces moments sont graves, surtout lorsque sont évoqués les camps de déportés. Il est très important que nos jeunes puissent mettre des voix et des visages sur ce qu'ils lisent dans leurs manuels.

Dans le même ordre d'idée, je salue la démarche entreprise par Mme la ministre de la défense qui, en liaison avec vous, a décidé de faire inscrire sur les emblèmes des 256 régiments concernés la mention « AFN 1952-1962 ».

M. Georges Colombier. Très bien !

M. Patrick Beaudouin. Elle m'a fait savoir que quinze de ces emblèmes seraient présents, le 5 décembre prochain, à la commémoration nationale des combats d'Afrique du Nord.

La mémoire doit être vivante et j'approuve totalement le tourisme de mémoire que vous mettez en place.

Comme beaucoup de Français, j'ai pu apprécier les remarquables efforts réalisés pour commémorer le soixantième anniversaire de l'année 1944. Les cérémonies ont été l'occasion pour beaucoup d'entre nous de prendre conscience que l'histoire est la somme de nos histoires, avec leurs souffrances et leurs joies. Grâce à ce déclic, la mémoire familiale a refait surface, et il faudra continuer à l'encourager car elle favorise la connaissance de notre histoire collective. Au fil des témoignages qu'ils entendent, les jeunes s'aperçoivent que tous ceux qui les entourent y ont participé à leur manière. Cette action doit être poursuivie, en particulier au moment des grandes manifestations de 2005, que préparent depuis longtemps votre ministère et la direction du patrimoine et de la mémoire.

La mémoire, enfin, doit être conservée. C'est la tâche que vous avez confiée à l'ONAC auquel vous avez donné les moyens de l'accomplir en créant, et en budgétisant, de nombreux postes d'attaché de la mémoire dans les services départementaux de l'Office.

Je rappelle la nécessité de la création d'un grand centre de la mémoire. La réforme en cours des services historiques des armées, que nous suivons de près, peut être un premier pas dans cette direction. Cet effort, je le souhaite, doit permettre aux historiens de demain de disposer des matériaux qui leur permettront de mener leurs études. Il s'agit d'une démarche essentielle car nous devons faire en sorte que l'histoire soit bien le récit critique des événements, non une construction idéologique justifiant une vision politique, voire partisane...

M. Maxime Gremetz. Après qui en avez-vous, au juste ?

M. Patrick Beaudouin. ...et même mensongère.

M. Jean-Louis Dumont. Vous êtes pour une mémoire tronquée ?

M. Maxime Gremetz. C'est une provocation !

M. Patrick Beaudouin. Vous vous sentez visé, monsieur Gremetz ?

M. le président. Monsieur Beaudoin, poursuivez.

M. Jean-Louis Dumont. S'agissant du 5 décembre, il y aurait beaucoup à dire sur la politique de mémoire !

M. Patrick Beaudouin. Je souhaite, comme je l'ai déjà dit, que s'instaure progressivement dans notre pays une journée du soldat, célébrant les sacrifices d'hier et associant au souvenir les soldats d'aujourd'hui, qui poursuivent la mission de leurs aînés, en particulier nos soldats de la paix qui, récemment, ont été durement touchés dans leur chair.

Cette journée de la mémoire combattante, du « soldat-citoyen » pourrait être le 11 novembre. Les associations d'anciens combattants qui ont été consultées récemment ont massivement donné leur feu vert. Elle ne supprimerait nullement les commémorations de tous les conflits, qui seraient maintenues. Il s'agirait seulement de réunir dans un même hommage les « soldats-citoyens » et nos valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité, qu'ils défendaient sur tous les théâtres d'opérations, comme continuent à le faire aujourd'hui nos soldats engagés dans les missions de paix.

Sans être novateur, votre budget est bon (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) car il est la traduction de votre détermination à apporter aux anciens combattants la reconnaissance de la nation et le témoignage de solidarité qui en est la conséquence.

M. Maxime Gremetz. L'an prochain, s'il contient une seule mesure nouvelle, il sera extraordinaire !

M. Patrick Beaudouin. Il faudrait simplement que, chaque fois que c'est possible, cette reconnaissance et cette solidarité se manifestent avec générosité : les anciens combattants ont des droits sur nous, dont le premier est la considération.

Ce budget est la solide charpente de votre action pour les anciens combattants. C'est pourquoi, avec le groupe UMP, je le voterai. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Maxime Gremetz. Quelle surprise !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, François Rochebloine est intervenu sur l'ensemble de ce budget. Je me limiterai, compte tenu du temps qui m'est imparti, à la douloureuse question de l'indemnisation de l'ensemble des orphelins des victimes de la barbarie nazie.

À la suite de longues démarches, le décret du 27 juillet 2004 a étendu l'indemnisation prévue par le décret 2000-657 du 13 juillet 2000 à tous les orphelins de déportés, fusillés, morts sous la torture en France ou dans les territoires occupés par les nazis pour faits de résistance, opposition politique ou en qualité d'otage. Je tiens à saluer ici la persévérance dont a fait preuve notre collègue Charles de Courson, qui a travaillé sur ce dossier durant plus de deux ans.

M. François Rochebloine. Parfaitement !

M. Pierre-Christophe Baguet. Nous saluons la décision du Gouvernement, qui accorde enfin satisfaction aux orphelins des déportés assassinés par les nazis dans les camps de déportation, ainsi qu'aux orphelins des personnes exécutées par l'ennemi dans certaines conditions.

M. Maxime Gremetz. Nous avons travaillé sur ce sujet avec vous en bonne intelligence !

M. Jacques Desallangre. Personne ne peut le nier !

M. Pierre-Christophe Baguet. C'est exact, mes chers collègues.

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Toutefois, monsieur le ministre, ce décret ne met pas fin à toutes les inquiétudes.

Je pense en premier lieu à la ligne budgétaire de 20 millions d'euros qui apparaît dans les crédits des services généraux du Premier ministre. Cette somme est insuffisante : un simple calcul l'établira !

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Pierre-Christophe Baguet. Selon une estimation basse, quelque 12 000 bénéficiaires sont susceptibles de percevoir une rente mensuelle de 457 euros : le montant annuel global de l'indemnisation s'élèvera donc à 66 millions d'euros. Les 20 millions d'euros de la ligne budgétaire pour 2005 sont loin de faire le compte !

De plus, le décret exclut de l'indemnisation les orphelins de tous les résistants fusillés et massacrés et ceux des otages assassinés dans les villes martyres puisqu'il rattache les orphelins des personnes exécutées par l'ennemi dans certaines conditions aux critères concernant les internés et résistants politiques. Le décret fait en effet référence aux articles L. 274 et L. 290 du code des pensions militaires, qui exigent que les personnes exécutées aient été au préalable arrêtées ou emprisonnées par l'ennemi. Cette définition exclut les orphelins des résistants tombés les armes à la main, ou achevés sur place, lors des combats du Vercors, des Glières, du Mont-Mouchet, ou lors des combats pour la libération de la France. Elle exclut également les otages massacrés à Tulle et à Oradour-sur-Glane.

Par ailleurs, la discrimination issue du décret du 13 juillet 2000 n'est pas totalement effacée. Les orphelins juifs - c'est une excellente mesure - perçoivent un capital ou une rente viagère depuis le 1er août 2000.

M. Maxime Gremetz. Vous êtes mal informé.

M. Pierre-Christophe Baguet. Le respect du principe d'égalité impose donc de tenir compte de la différence de quatre ans entre les dates d'application des deux décrets. Nous demandons que le montant de la rente mensuelle et le montant du capital soient relevés, afin de tenir compte de l'inflation sur la période allant du 1er août 2000 au 31 juillet 2004. Une telle actualisation est indispensable pour interdire toute rupture d'égalité entre nos concitoyens.

En conclusion, il convient d'augmenter dès 2005 les crédits, d'étendre l'indemnisation aux orphelins de tous les résistants fusillés et massacrés et à ceux des otages assassinés dans les villes martyres et de revaloriser le montant de la rente mensuelle ou le montant du capital afin d'effacer la différence due aux quatre années qui séparent la publication des deux décrets.

Seule la prise en compte de ces trois mesures légitimes sera susceptible de rétablir l'équité entre les orphelins de toutes les victimes.

Les attentes en ce sens sont fortes, monsieur le ministre. Elles émanent non seulement de tous les groupes de l'Assemblée nationale et du Sénat, mais encore des associations du monde combattant et des associations des victimes des persécutions nazies

M. François Rochebloine. C'est vrai !

M. Pierre-Christophe Baguet. Il s'agit ici, purement et simplement, de rétablir l'équité entre tous les Français, en l'honneur de ces femmes et de ces hommes qui ont donné leur vie pour la France. Leur rendre enfin justice serait aujourd'hui la meilleure façon de leur rendre hommage et de leur témoigner notre reconnaissance tout en respectant à leur égard notre devoir de mémoire. Il y va de notre responsabilité collective. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Robert Lecou.

M. Robert Lecou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ce début de xxie siècle, il est à la fois intéressant et rassurant de constater à quel point la place du monde combattant s'affirme encore de façon vivace dans notre société.

Je saluerai tout d'abord la qualité de l'organisation des manifestations commémoratives de l'année 2004. Les anniversaires de la bataille de la Marne, des débarquements de Normandie et de Provence, ou l'anniversaire de la bataille de Dien Bien Phû ont, à l'évidence, contribué à conforter auprès de toutes les générations, notamment les plus jeunes, le souvenir des anciens combattants dans notre société, alors même que l'Europe est en paix depuis plus de cinquante ans. Prenons ensemble, si vous le voulez bien, la mesure de la paix qui s'étend aujourd'hui avec bienfaisance sur des peuples qui, depuis des siècles, se faisaient la guerre et s'entre-déchiraient.

Le ministère des anciens combattants a ainsi pour fonction d'incarner auprès des jeunes générations l'espoir de paix qu'elles attendent de nous et que les anciens combattants ont eu à cœur de leur transmettre.

Le maire de Lodève que je suis constate avec satisfaction la participation croissante depuis deux ou trois ans aux cérémonies patriotiques des élèves des écoles et des collèges. Comment ne pas être heureux de voir tous ces enfants et ces adolescents, aux côtés de leurs enseignants et de leurs aînés, associés à des moments de mémoire et de recueillement ? Il convient de poursuivre les efforts entrepris, déjà couronnés de succès, en vue de renforcer le lien entre les générations. Dans cet esprit, monsieur le ministre, des mesures pourraient-elles être prises visant à établir avec les enseignants, par le biais de manifestations ou de concours, de nouvelles occasions de rencontres et de mémoire ?

L'attention portée aux anciens combattants est justifiée par les mots eux-mêmes. En tant qu'anciens, ils méritent le respect tout en ne cessant pas de jouer un rôle dans la société. En tant que combattants, ils ont fait abstraction, des mois, voire des années durant, de leur vie personnelle, familiale et professionnelle, dans le seul but de défendre les intérêts de leur pays. La patrie n'est pas une notion abstraite : elle a les couleurs de nos villes et de nos villages, le sourire de nos enfants et de nos parents. Elle a pour elle la force de son histoire et porte l'ambition de toute une nation.

C'est pourquoi il est important de maintenir vivace le souvenir des combattants. Chacune et chacun d'entre nous a un devoir de mémoire et la France, dans son ensemble, un devoir de reconnaissance, qui tient à l'essence même d'une nation. Ce devoir peut revêtir différents aspects, qui vont de l'entretien des monuments aux morts des villes et des villages de France aux cérémonies patriotiques, des musées aux publications d'ouvrages. Mais, plus concrètement, il doit nous conduire à porter une attention toute particulière à la situation personnelle de chaque ancien combattant.

Votre projet de budget, monsieur le ministre, après une décennie de baisse, augmente de 0,14 %.

M. François Rochebloine. Expliquez-nous comment !

M. Robert Lecou. Il poursuit l'action engagée par le Gouvernement depuis 2002. Il comporte des mesures qui témoignent d'une réelle reconnaissance de la France envers ses anciens combattants. Chacun a pu apprécier depuis deux ou trois ans votre volonté d'apaisement des esprits, notamment au sujet des rapatriés et des harkis, pour lesquels une véritable politique de mémoire civique est nécessaire.

Mais nous devons également prendre en compte les aspirations de nos concitoyens. Telle est la raison précise pour laquelle j'ai souhaité intervenir sur le budget des anciens combattants. Je vous demande d'étudier le dossier relatif à la revitalisation progressive de la retraite du combattant.

M. Alain Néri. C'est le moment où jamais ! Il conviendrait de se dépêcher !

M. Robert Lecou. Nous entendons dans nos permanences, dans les réunions publiques ou lors des congrès et des assemblées générales d'associations d'anciens combattants une revendication récurrente : celle du passage de la retraite du combattant à l'indice 48. Cette revendication est juste, il convient de la satisfaire, de même qu'il convient de prendre en compte la situation des veuves d'anciens combattants, qui doivent obtenir la juste reconnaissance de leur sacrifice.

M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !

M. Robert Lecou. Enfin, le devoir de solidarité de la nation exigerait de revaloriser le plafond majorable de la retraite mutualiste du combattant.

M. François Rochebloine. Eh oui !

M. Robert Lecou. Certes, monsieur le ministre, de telles revendications ont des incidences financières et le retard pris ne vous est pas imputable.

M. Jean-Christophe Lagarde. Désormais, si !

M. Robert Lecou. Je n'ignore pas que, dans les critiques excessives qu'ils vous ont adressées sur un ton parfois un peu vif, certains de mes collègues ont fait l'impasse sur l'absence de politique des gouvernements qu'ils soutenaient !

M. Alain Néri. Comment osez-vous prétendre cela ?

M. Robert Lecou. Mais il convient de témoigner de la juste reconnaissance du pays tout entier envers les anciens combattants par la juste satisfaction de leurs revendications. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Rochebloine. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de budget, qui traduit des décisions prises antérieurement, ne comporte malheureusement rien de neuf. On y trouve naturellement des mesures que nous pouvons approuver ou que nous avons déjà défendues : l'harmonisation des conditions d'attribution de la carte du combattant pour les conflits d'Afrique du Nord, la seconde partie du financement de la revalorisation de quinze points d'indice de la pension des veuves, à compter du 1er juillet 2004, pour un montant global de 11,8 millions d'euros, l'augmentation de près de 4 % des aides allouées par l'ONAC - mesure sur laquelle, l'an dernier, des députés issus de l'ensemble de la représentation nationale étaient intervenus à la tribune - ou la création de soixante postes de délégués à la mémoire combattante dans les services départementaux de l'ONAC.

M. François Rochebloine. Voilà une bonne année !

M. Jean-Christophe Lagarde. Cela dit, je ne suis pas convaincu que ces deux dernières mesures suffisent, tant les besoins, dans nos départements sont importants.

Plus globalement, on ne peut que regretter que les crédits figurant dans ce projet de budget ne soient en réalité que des crédits en trompe l'œil. En effet, si la masse budgétaire n'augmente que de 0,14 % en euros courants, c'est qu'elle ne tient pas compte de l'inflation de 2 % : la hausse minime de votre budget est donc uniquement due au report en 2005 de dépenses qui auraient dû être engagées en 2004, comme le début de décristallisation des pensions des anciens combattants des pays de l'ex-Union française devenus indépendants, mesure obtenue non sans difficulté, le décret d'application ayant mis une bonne année à paraître - faut-il le rappeler ? - après de nombreuses relances écrites des parlementaires, y compris lors du dernier débat budgétaire.

Une fois ces sommes retranchées, on peut objectivement soutenir que votre budget, loin d'être en hausse, connaît cette année encore en euros constants une véritable diminution.

Naturellement, vous me répondrez que le nombre d'anciens combattants diminue lui aussi, mais de nombreux problèmes ne sont toujours pas réglés et votre budget ne comporte aucune mesure nouvelle alors que trois mesures sont très attendues par le monde combattant.

La première concerne la retraite du combattant : cette année encore, et alors même que nous en exprimons le souhait depuis longtemps, elle ne bénéficie d'aucune revalorisation et demeure inchangée, toujours figée à trente-trois points. Vous nous aviez pourtant promis, à votre arrivée au Gouvernement, un rattrapage de trois points par an de la perte de pouvoir d'achat enregistrée dans le passé.

M. François Rochebloine. Une perte de mémoire, certainement !

M. Jean-Christophe Lagarde. Or, compte tenu de son niveau actuel, il est grand temps, voire extrêmement urgent d'envisager une revalorisation rapide et importante de la retraite du combattant. D'ailleurs, plus vous tarderez, moins elle sera progressive, et plus elle sera douloureuse sur le plan budgétaire.

La deuxième revendication des associations, qui ne trouve aucun début de concrétisation dans votre projet de budget, a trait à la retraite mutualiste. Le plafond majorable de la retraite mutualiste du combattant subit un gel récurrent. La dernière revalorisation remonte à 2003, portant l'indice de référence des pensions militaires d'invalidité à 122,5 points. Or les organismes de mutualité combattante, les associations nationales d'anciens combattants et de victimes de guerre et les pouvoirs publics s'étaient mis d'accord sur une revalorisation à 130 points d'indice : 7,5 points restent donc en suspens. Alors que l'année 2004 s'est traduite par une pause préjudiciable aux intérêts des cotisants et des retraités, il est n'est pas acceptable de constater qu'aucune mesure budgétaire de revalorisation du plafond n'est envisagée pour 2005. Pourquoi le Gouvernement ne tient-il pas les promesses faites à ceux qui ont servi la France ?

Troisième et dernière revendication : l'amélioration des droits des conjoints survivants. Il est du devoir de la nation de prendre en compte les situations délicates que vivent parfois les conjoints survivants. Tous, dans nos circonscriptions, nous connaissons des cas douloureux. Le principe du droit à réparation doit être réaffirmé.

Je voudrais enfin, monsieur le ministre, à la lumière de ce qui s'est passé dans mon département l'an dernier, appeler une nouvelle fois votre attention sur le choix très contestable du Gouvernement de faire du 5 décembre la « Journée nationale d'hommage aux morts pour la France des combattants d'Afrique du Nord ».

M. Alain Néri. Cette date ne représente rien !

M. Jean-Christophe Lagarde. Outre qu'il constitue une véritable provocation pour la grande majorité des anciens combattants d'Algérie, ce choix se trouve de surcroît en totale contradiction avec les promesses du candidat Jacques Chirac, qui s'était clairement engagé le 24 mars 2002 à ne prendre aucune décision qui ne ferait pas l'unanimité.

Alors que l'Assemblée nationale avait, lors de la précédente législature, adopté en première lecture une proposition de loi reconnaissant le 19 mars pour date officielle, votre gouvernement a pris sa décision sans aucun débat parlementaire et dans le mépris le plus total des représentants de la nation que nous sommes.

M. Jean-Louis Idiart. Vieille pratique !

M. Jean-Christophe Lagarde. La date du 5 décembre n'a aucun lien avec la réalité historique : elle est donc privée de toute signification, notamment pour les jeunes générations, comme nous avons pu le constater l'an dernier.

Qui connaît la signification de la date du 5 décembre ?

M. Alain Néri. Personne !

M. Jean-Christophe Lagarde. Par cette décision, vous n'avez fait, monsieur le ministre - et je suis désolé de vous le dire -, qu'entretenir la confusion et entraver la politique de la mémoire que vous cherchez par ailleurs à promouvoir pour d'autres conflits. Or notre nation a le devoir, envers les dizaines de milliers de morts tombés pour la France en Afrique du Nord avant et après le 19 mars, et envers l'ensemble des anciens combattants, d'entretenir cette mémoire.

Je pense donc que le Gouvernement s'honorerait en inscrivant à l'ordre du jour du Sénat la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale en faveur du choix du 19 mars comme journée nationale du souvenir. Il faut revenir sur une décision tombée d'en haut et prise sans aucune concertation : c'est à la représentation nationale de trancher cette question de mémoire et de souvenir national. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-sept heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre délégué aux anciens combattants.

M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, la présentation du projet de budget des anciens combattants et victimes de guerre est un événement qui compte dans la vie du monde combattant. Votre présence nombreuse et la densité de l'assistance dans les tribunes du public témoignent de l'attention qui est portée à nos interventions.

Permettez-moi tout d'abord d'exprimer ma sincère gratitude à vos rapporteurs, MM. Mathis et Lett,...

M. Alain Néri. Ils ont bien du mérite, en effet !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. ...qui sont intervenus avec beaucoup de cœur et de justesse. Je les remercie du soutien de leurs commissions respectives.

Je veux également remercier l'ensemble des orateurs. Au-delà de la diversité des opinions exprimées, ce qui domine, à l'évidence, c'est le respect de la représentation nationale à l'égard du monde combattant : respect pour ceux qui sont tombés au champ d'honneur, respect pour ceux qui ont combattu, respect pour les blessés, les infirmes, les mutilés, respect enfin pour les veuves et les orphelins, pour l'ensemble des victimes civiles de la guerre.

À l'heure où, comme l'a rappelé M. Mathis, seuls quinze Poilus de la « Grande guerre » sont encore parmi nous, beaucoup pourraient penser que l'attention que notre société porte au monde combattant a fléchi. Les commémorations qui ont jalonné l'année 2004 pour la célébration du soixantième anniversaire des débarquements et de la Libération, montrent qu'il n'en est rien. L'écho exceptionnel de ces cérémonies, en France et dans le monde, les images durables qu'elles nous laissent, l'éveil qu'elles ont suscité au sein des jeunes générations sont autant de signes de la place qu'occupe aujourd'hui le monde combattant dans notre société.

L'hommage unanime rendu à nos soldats tombés tragiquement en Côte d'Ivoire atteste, mesdames et messieurs les députés, de la pérennité de la reconnaissance de la nation à l'égard de ceux qui font le sacrifice de leur vie pour la défendre. C'est donc avec une certaine gravité que j'aborde la présentation de ce budget.

Je veux, tout d'abord, saisir cette occasion pour souligner combien le soutien apporté au monde combattant par la ministre de la défense, Mme Michèle Alliot-Marie, nous est d'un grand secours. Retenue à Londres par le sommet franco-britannique, elle regrette de ne pas pouvoir assister à nos débats.

Je crois que ce projet de budget pour 2005 est bien le reflet de l'effort de la nation en faveur de ses anciens combattants et des victimes de la guerre.

M. Jérôme Lambert. Pâle reflet !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. A l'évidence, la progression des crédits par rapport aux dix années antérieures mérite d'être soulignée. Les chiffres, dit-on, sont têtus. Cette hausse éclaire la réalité de l'effort consenti, depuis maintenant vingt-neuf mois, par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est un fait. Mais on peut évidemment le falsifier...

M. Jean-Christophe Lagarde. C'est un trompe-l'œil !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je remercie MM. Beaudouin et Colombier, ainsi que les membres du groupe UMP du soutien qu'ils apportent à cette démarche de progrès.

Je comprends et je respecte sincèrement l'opposition. Mais force est de reconnaître que le rôle de MM. Néri et Gremetz est plus difficile cette année ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Maxime Gremetz. Heureusement qu'on a le soutien de l'UDF !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Néri, monsieur Charasse, vous le savez bien, cette hausse est incontestable. Encore une fois, les chiffres sont têtus. Les anciens combattants jugeront d'ailleurs sur pièces.

M. Jérôme Lambert et M. François Rochebloine. Ils le font déjà !

M. Alain Néri. Et leur déception est totale !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Ils verront bien que les crédits augmentent réellement, à périmètre constant. Ils verront que, contrairement à ce que j'ai entendu dire, ce budget contient bel et bien des mesures nouvelles et importantes.

M. Maxime Gremetz. Lesquelles ? Il faut les dévoiler !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Réduire l'explication de la hausse du budget à sa seule origine démographique, comme vous l'avez fait, est injuste. Certes, nous observons l'arrivée à soixante-cinq ans, âge où l'on perçoit la retraite du combattant, de nombreux anciens d'AFN. Mais la vraie raison de cette augmentation du budget réside dans les politiques de justice, d'équité et de solidarité que nous mettons en œuvre depuis vingt-neuf mois, en concertation permanente avec les associations d'anciens combattants.

M. Maxime Gremetz. Elles ne comprennent donc rien ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Plusieurs de ces mesures produiront leur plein effet en 2005. Quoi de plus normal ?

Monsieur Rochebloine, si notre budget augmente, c'est que nous avons accru le nombre des bénéficiaires de la retraite du combattant en accordant la carte du combattant aux militaires ayant séjourné au moins quatre mois en AFN. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. François Rochebloine. Ce n'est pas une mesure nouvelle !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. C'est une revendication commune à toutes les associations depuis des années.

M. Jacques Desallangre. Non, c'est une obligation !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Gremetz, monsieur Desallangre, si notre budget augmente, c'est que nous avons accordé 15 points supplémentaires de pension aux veuves de guerre, aux veuves d'invalides et aux veuves de grands invalides. C'est le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin qui l'a accordé, on ne peut pas l'ignorer.

M. Jean-Christophe Lagarde. C'était une décision de 2004 !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Lagarde, si notre budget progresse,...

M. Alain Néri. Il diminue !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. ...c'est que nous vous proposons d'augmenter encore, en 2005, les crédits sociaux de l'ONAC pour venir en aide aux anciens combattants et aux veuves d'anciens combattants en grande difficulté financière.

Monsieur Néri, monsieur Charasse, si notre budget augmente, c'est qu'il porte les conséquences de la décristallisation...

M. Jean-Christophe Lagarde. Décidée pour 2004, appliquée avec un an de retard !

M. Alain Néri. Vous avez repris le même papier que l'an dernier ? ...

M. le ministre délégué aux anciens combattants. ...des pensions des anciens combattants originaires des pays autrefois placés sous souveraineté française. Les anciens combattants le savent, cette revendication, désormais satisfaite, est restée plus de quarante-deux ans en jachère !

M. Jean-Louis Dumont. Eh oui !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Exactement !

M. Jean-Christophe Lagarde. C'est la seule chose de vraie !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Qui peut me contredire sur ce point-là ?

Enfin, cette hausse de 0,14 % en volume se traduit par une augmentation de près de 4 % par ressortissant, en forte progression par rapport aux deux exercices précédents.

Au-delà de la dimension quantitative de l'effort consenti par la nation en faveur du monde combattant, d'autres éléments soulignent le souci du Gouvernement de répondre à ses attentes. Je traiterai tout d'abord des questions touchant au droit à réparation, pierre angulaire de l'expression de notre gratitude.

Vous avez tous salué, et je vous en remercie, la publication du décret du 27 juillet 2004 qui institue une indemnisation pour les orphelins des victimes d'actes de barbarie pendant la Deuxième guerre mondiale.

M. François Rochebloine. C'est vrai !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je veux répondre aux questions qui m'ont été posées sur ce qui est une mesure nouvelle. Je rappelle que sont concernés les orphelins des personnes mortes en déportation, fusillées, comme au Mont Valérien ou à Chateaubriant, ou massacrées, comme à Oradour-sur-Glane, Tulle ou Maillé. En d'autres termes, il s'agit bien des victimes d'actes de barbarie, dont les circonstances et l'horreur dépassent le cadre habituel d'un conflit entre États.

Bien que les crédits correspondants ne figurent pas au budget des anciens combattants, j'indique à M. Baguet que les montants inscrits constituent une simple provision, car il s'agit de crédits évaluatifs. Vous qui êtes des parlementaires avertis, vous pouvez donc être pleinement rassurés. Si les 20 millions qui ont été mis en réserve ne suffisaient pas, nous les abonderions pour pouvoir appliquer cette mesure.

M. Pierre-Christophe Baguet. Dès 2005, monsieur le ministre ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. M. Desallangre et M. Gremetz estiment que le décret du 27 juillet 2004 aurait dû avoir une portée rétroactive. Mais une telle décision conduirait à accorder à ses bénéficiaires les avantages cumulés de la rente et du capital. Ce serait une injustice au détriment des orphelins des victimes de la Shoah. Il ne s'agit pas, pour corriger une iniquité, d'en créer une autre. Nous avons voulu respecter une stricte égalité. Cela vaut aussi pour les sommes versées.

MM. Beaudouin, Desallangre et Gremetz se sont inquiétés des risques que les mesures de régulation budgétaire faisaient peser sur la mise en œuvre effective du droit à réparation.

M. Jacques Desallangre. Nous parlons d'expérience !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je tiens à les rassurer : les crédits provisoirement gelés sont à nouveau disponibles.

M. Maxime Gremetz. Ah bon !

M. Jacques Desallangre. Alleluia !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Les paiements des sommes dues au titre des soins médicaux gratuits sont honorés. Vous pouvez le vérifier.

J'aurai l'occasion de revenir à la décristallisation des pensions des anciens combattants originaires de pays autrefois placés sous souveraineté française. J'ai bien entendu les propos de M. Mathis et l'observation de la commission des finances. J'indique d'ores et déjà que la décristallisation a produit tous ses effets. Elle bénéficie désormais à 80 000 ressortissants répartis dans vingt-trois pays. Les quatre années de rappel ont été versées. Les droits ont été rouverts : les titulaires d'une PMI peuvent faire constater, si besoin est, l'aggravation de leur état de santé ; les veuves peuvent obtenir une pension de réversion, jusque là gelée.

M. Patrick Beaudouin. Beau travail !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. J'en viens maintenant à la reconnaissance. Vous avez tous abordé la question de l'absence de revalorisation de l'indice de référence de la retraite du combattant. Je vous ai bien entendus. Je salue l'attitude constructive de MM. Beaudouin, Mathis, Lett et Colombier qui se sont faits les interprètes efficaces des attentes du monde combattant.

M. François Rochebloine. Et les autres ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Les autres ? J'attends qu'ils me fassent connaître les résultats de leurs démarches et leurs propositions. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Alain Néri. J'ai deux amendements, monsieur le ministre. Profitez-en !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Quoi qu'il en soit, je m'adresse à l'ensemble de la représentation nationale. Son action conjuguée à la mienne ne manquera pas de porter ses fruits. Et je puis vous assurer qu'elle a été entendue par le Premier ministre.

Enfin, comment ne pas rappeler à MM. Néri, Gremetz, Lagarde et Rochebloine, que l'indice 33 est inchangé depuis 1978 ?

M. François Rochebloine. Et alors ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Depuis cette date se sont succédé, me semble-t-il, plusieurs gouvernements !

M. François Rochebloine. De gauche comme de droite !

M. Jean-Louis Dumont. C'est une responsabilité collective !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. MM. Rochebloine et Colombier ont évoqué l'attribution éventuelle de la campagne double aux agents publics ayant servi en AFN. A ma demande, une étude approfondie est conduite sur la base d'une large consultation. Nous examinerons ensemble les suites qu'il conviendra de donner au rapport que me remettra M. Gal.

Je n'aurai garde d'oublier la « quatrième génération du feu », celle issue des opérations extérieures. Pour elle, nous devons définir de nouveaux critères représentatifs de la réalité actuelle de l'engagement de nos armées. Un travail est en cours, qui aboutira dans les prochaines semaines à des propositions concrètes.

La retraite mutualiste du combattant a été évoquée par plusieurs d'entre vous. Je sais gré à M. Gremetz et à M. Lagarde d'avoir rappelé qu'un geste exceptionnel avait été consenti au titre du budget 2003, avec le relèvement du plafond de 7,5 points au lieu des 5 points prévus par l'accord.

M. Jacques Desallangre. C'était 5 points par an !

M. Jean-Christophe Lagarde. Pour arriver à 130 points !

M. Alain Néri. Vous n'y connaissez rien !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Les anciens combattants, je les connais un peu !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. C'est vrai !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Dans le budget 2005, le concours de l'État au financement de la retraite mutualiste s'élèvera à 205 millions d'euros, en progression de plus de 3 % par rapport à 2004. L'effort est donc réel. Naturellement, nous n'avons pas renoncé à porter le plafond à 130 points.

M. Jacques Desallangre. Il va falloir se dépêcher !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je mesure et partage l'attention que vous portez aux anciens combattants et aux veuves d'anciens combattants en situation de grande difficulté matérielle. Le rapport remis récemment au Parlement, en application d'un amendement voté à l'initiative de M. Beaudouin, témoigne des obstacles qui s'opposent à une saisie statistique précise de cette population. Pour autant, nous n'avons pas renoncé à trouver une méthode appropriée.

Le Gouvernement s'efforce de venir en aide à ces personnes, comme en témoigne l'augmentation des crédits sociaux de l'ONAC, que vous avez reconnue. Une mesure nouvelle d'un demi-million d'euros supplémentaire est inscrite au projet de budget. L'ONAC dispose désormais d'une capacité d'intervention de 12,6 millions d'euros. De façon pragmatique, l'Office pourra ainsi prolonger en 2005 les interventions consenties cette année en faveur de plus de 40 000 ressortissants, bien souvent des veuves d'anciens combattants. C'est ainsi que nous entendons procéder, monsieur Charasse. Ce projet de budget confère à l'ONAC la capacité de poursuivre dans les meilleures conditions son adaptation aux attentes prioritaires du monde combattant, notamment dans le domaine de la mémoire et de la solidarité.

M. Jean-Christophe Lagarde. Et la retraite ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Il y a deux ans, les plus grandes inquiétudes pesaient sur l'avenir de l'ONAC. Il est désormais garanti.

M. Alain Néri. Pas au-delà de 2007 ! Alors acceptez mon amendement !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Bien au-delà de 2007. Vous devriez vous réjouir de la réponse concrète que j'apporte à votre préoccupation.

M. Alain Néri. Ce serait plus clair si vous repreniez mon amendement !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. La qualité de son personnel, le dynamisme et la compétence de son directeur général sont autant d'atouts pour la réussite du contrat d'objectifs et de moyens qui assure la transformation et la pérennité de l'ONAC.

Autre pilier emblématique du monde combattant, l'Institution nationale des Invalides poursuivra en 2005 la démarche d'adaptation qui est le gage de sa pérennité.

M. Colombier et M. Rochebloine m'ont interrogé sur nos projets concernant le rapport constant. Qui ne connaît le rapport constant ? Voilà près de quinze ans qu'il occupe toutes les discussions.

M. François Rochebloine. Si ce n'est plus !

M. Maxime Gremetz. C'est un sujet constant !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Là encore, vous devriez être satisfaits : ce projet de budget va mettre un terme au débat autour de ce « serpent de mer ».

M. Georges Colombier. Très bien !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Mais la modestie m'oblige à reconnaître que nous ne sommes pas les seuls à avoir dénoncé ce qui n'allait pas.

Avec l'amendement du Gouvernement qui vous sera soumis, l'indice du point de pension militaire d'invalidité sera directement relié à l'indice d'ensemble des traitements de la fonction publique calculé par l'INSEE. Il évoluera donc à chaque changement de l'indice, automatiquement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. François Rochebloine. Ça, c'est bien !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Ce nouveau mécanisme garantit absolument l'évolution des droits des anciens combattants. Il est simple et lisible par tous. Il permettra des ajustements immédiats.

J'en viens maintenant au devoir de mémoire. Je remercie M. Lett d'en avoir fait l'axe de son rapport, car c'est une priorité. Les cérémonies que nous organiserons en 2005 commémoreront avec force le soixantième anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale en Europe, le 8 mai 1945, et dans le Pacifique. Nous célébrerons également avec une grande émotion le soixantième anniversaire de la libération des camps de concentration et du retour des déportés. D'autres cérémonies seront spécialement consacrées au retour des prisonniers de guerre et des requis du STO.

De cette année, essentiellement dominée par le souvenir de l'immense tragédie que fut la déportation, nous voulons laisser des réalisations pérennes. C'est pourquoi deux grands projets muséographiques ont été conçus. Ils seront achevés dans les prochains mois. Le premier concerne la nouvelle exposition du pavillon français du musée d'Auschwitz. Conçue avec le concours de grands témoins de la Shoah, d'historiens et de scénographes, elle sera inaugurée le 27 janvier prochain par le Président de la République. Plus tard dans l'année, sans doute en octobre, il inaugurera au Struthof, dans le Bas-Rhin, le Centre européen du résistant-déporté. M. Lett a très justement souligné l'importance de ce projet : il s'agit du seul camp de concentration installé en France par les nazis. Sur ce lieu, nous rappellerons la réalité tragique de la barbarie nazie et l'héroïsme des résistants et des « politiques » qui furent confrontés à la pire des épreuves. Sera également inauguré le mémorial de Schirmeck, qui évoque la mémoire si douloureuse de l'Alsace et de la Moselle.

J'ai bien pris note des demandes de M. Mathis et de M. Lett tendant à rendre les crédits plus lisibles dans le cadre de la LOLF.

Chacun connaît le combat de M. Charasse au sujet de l'appellation « régime de Vichy ».

Je partage l'avis de M. Lecou sur l'intérêt manifesté par les jeunes pour la mémoire. C'est un encouragement très fort.

Je ne veux pas oublier les élus locaux, les porte-drapeaux, les associations, les enseignants qui se mobilisent pour faire vivre le devoir de mémoire sur tout notre territoire. Je pense aussi au Comité de la flamme qui, chaque soir, 365 jours par an, ravive la flamme sous l'Arc de triomphe.

Monsieur Lecou, s'agissant des actions de mémoire pour les harkis - question qui me touche particulièrement, vous pouvez le comprendre -, je rappelle l'instauration de la Journée du 25 septembre, le futur Mémorial de Marseille et le projet de loi en faveur des rapatriés, qui est en cours de discussion et sera examiné par la Haute assemblée le 16 décembre prochain.

Je ne reviendrai pas sur la Journée d'hommage aux morts pour la France de la guerre d'Algérie. Le débat a eu lieu. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Alain Néri. Pas au Parlement !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. J'ai écouté tout ce qui a été dit.

M. Jean-Louis Idiart. Dans les couloirs, pas ici !

M. Alain Néri. Vous avez méprisé la représentation nationale !

M. Maxime Gremetz. Vous l'avez ignorée !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Les opinions des uns et des autres sont bien connues.

M. Julien Dray. Qui, ici, a fêté le 5 décembre ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Beaudouin, je vous confirme que les premiers emblèmes portant la mention « AFN 1952-1962 » défileront devant le Premier ministre le 5 décembre prochain.

M. Jean-Christophe Lagarde. Et Chirac, vous l'avez oublié ?

M. Alain Néri. Vous serez tout seul !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Il est dommage que vous ne m'écoutiez pas, monsieur Néri,...

M. Alain Néri. On connaît par cœur !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. ...car cela répond également à l'un de vos vœux.

M. Alain Néri. Vous, écoutez plutôt les anciens combattants !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Si vous faites vous-même les réponses aux questions que vous posez, vous ne pourrez qu'être satisfait, c'est sûr. !

M. Julien Dray. En l'occurrence, c'est une affirmation : vous avez trompé les anciens combattants !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je ne vous vise pas personnellement ; tâchez d'avoir la même attitude à mon endroit.

M. Julien Dray. Vous êtes le représentant d'un gouvernement qui a pris une mauvaise décision ! Assumez-la !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je remercie M. Lett d'avoir souligné l'importance du « tourisme de mémoire » et les premières applications concrètes de notre politique innovante, de « mémoire partagée ».

Mesdames, messieurs les députés, j'espère vous avoir convaincus (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste) que le projet de budget des anciens combattants pour 2005 répond à notre ambition de mieux servir le monde combattant,...

M. Alain Néri. Votre ambition est bien limitée !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. ...qui a tant donné pour la France.

M. Alain Néri et M. Maxime Gremetz. Et qui méritait mieux !

M. Jean-Pierre Gorges. Qu'avez-vous fait, vous ? Absolument rien !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Dans notre société en quête de repères, le monde combattant reste un exemple pour tous nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en arrivons aux questions, en commençant par le groupe des député-e-s communistes et républicains.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. À la suite de l'arrêt Diop du Conseil d'État, j'ai été le premier dans cet hémicycle à interroger le Gouvernement sur les moyens mis en œuvre pour assurer la complète décristallisation des pensions des anciens combattants étrangers. Je ne pensais pas alors que les gouvernements feraient preuve d'une telle mauvaise foi, pour ne pas dire duplicité, et qu'ils épuiseraient toutes les manœuvres dilatoires.

Il y a bien longtemps que les associations et les parlementaires réclament la décristallisation. Plus de cinq ans après, de la décision de justice de juillet 1999 à la publication des décrets en juillet 2004, vous appliquez de la façon la plus restrictive cette jurisprudence, qui aurait dû permettre de rétablir ces anciens combattants dans leurs droits. Elle vous y oblige pourtant ! Mais cela semble vous être insupportable, car vous cherchez par tous les moyens à réduire ces droits, à en minimiser le coût, quitte à dénaturer la décision de justice.

Si la reconnaissance de l'égalité des hommes face à la mort avait guidé votre action, vous auriez reconnu à ces anciens combattants les mêmes droits qu'aux Français. Mais vous avez préféré vous perdre dans de fallacieuses considérations tenant au pouvoir d'achat, au lieu de résidence, à l'âge du bénéficiaire et à bien d'autres critères encore pour justifier l'injustifiable, c'est-à-dire la rupture d'égalité entre anciens combattants.

Au critère de nationalité, sanctionné par le Conseil d'État, vous substituez le critère de territorialité pour continuer de les spolier, alors qu'un travailleur ayant effectué toute sa carrière en France bénéficiera de la même retraite qu'un Français quels que soient son pays de résidence et le pouvoir d'achat relatif de cet État. Pourquoi ce qui est applicable dans le cadre du travail ne peut-il l'être dans le cadre du sacrifice de ces hommes pour défendre notre terre et nos libertés ?

M. Gérard Charasse. Tout à fait !

M. Jacques Desallangre. Par ailleurs, si le critère discriminant devient la territorialité, qu'adviendrait-il d'un ancien combattant français désirant passer sa retraite dans un pays étranger ? Verrait-il sa pension de retraite divisée par cinq ou par dix ?

Vous voyez bien, monsieur le ministre, que toutes vos tentatives de justification ne résistent pas à l'examen critique et restent juridiquement bancales.

Faudra-t-il encore une décision de justice pour que les bénéficiaires puissent tous faire valoir leurs droits ? Notre rapporteur est même obligé d'avouer que votre dispositif n'entraîne pas une réelle décristallisation et qu'il est très en deçà de ce que la justice a accordé à ceux qui ont intenté un recours.

En cette matière hautement symbolique, monsieur le ministre, ces mesures n'honorent pas la France. Allez-vous abandonner tous ces expédients, au bénéfice de la justice ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je vous rappelle, monsieur le député, que, depuis quarante ans, le dossier de décristallisation a été ouvert par tous les gouvernements successifs, et refermé aussitôt sans aucune solution.

M. Jacques Desallangre. On est bien d'accord !

M. Jean-Louis Dumont. Encore faudrait-il se rappeler qui a cristallisé les pensions !

M. Alain Néri. Et qui a mis en place la commission de décristallisation !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin peut donc légitimement être fier d'avoir réalisé cette décristallisation.

Le système de revalorisation des pensions qui a été mis en place est, en toute objectivité, équitable. Les comparaisons avec les régimes privés de retraite ne sont pas pertinentes. Ce ne sont pas les mêmes calculs, ce ne sont pas les mêmes sommes, ce n'est pas la même démarche dans le public et dans le privé, vous le savez très bien.

Il s'agit, dans ce cas précis, des régimes pour lesquels la notion de nationalité n'est pas prise en compte. L'observation du Conseil d'État concernait uniquement le critère de nationalité. Nous avons retenu le principe de la parité des pouvoirs d'achat pour calculer des valeurs annuelles de point, pays par pays. Est ainsi garantie l'égalité de traitement pour tous les ressortissants, quel que soit leur pays de résidence. Prenez deux anciens combattants avec le même taux d'invalidité, l'un habitant Dakar et l'autre Paris. L'équité veut qu'on leur donne des moyens leur permettant d'obtenir des biens matériels équivalents. Si celui qui est à Paris peut acheter 200 kilos de sucre et que celui qui est à Dakar peut, avec la même somme, obtenir 1 000 kilos de sucre, nous créerons un déséquilibre au détriment des anciens combattants français, ce qui serait inéquitable. La grille de la parité des pouvoirs d'achat est établie par l'ONU et est applicable au vu de tout le monde, avec une augmentation annuelle.

Toute autre orientation aurait créé une injustice, je viens de vous le démontrer. Il n'est donc pas souhaitable ni envisageable de modifier le dispositif mis en place en 2002, qui est aujourd'hui entré dans les faits : 80 000 ressortissants en bénéficient, originaires de vingt-trois pays, et 132 000 prestations sont servies.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Ma question, monsieur le ministre, concerne les enjeux de la mémoire, et notamment la disparition, latente, des notions d'ancien combattant et de victime de guerre.

Ainsi, la création d'un observatoire de la santé dit « des vétérans » n'est-elle pas le prolongement de la démarche ayant déjà fait disparaître de l'intitulé du ministère la mention de victimes de guerre ? En privilégiant une nouvelle appellation, celle de vétéran, votre objectif n'est-il pas de faire disparaître la notion d'ancien combattant ? De fait, ce changement de vocable s'inscrit dans la politique gouvernementale selon laquelle le droit à réparation doit s'éteindre et le ministère des anciens combattants être adossé au ministère de la défense.

Il ne s'agit pas ici d'une simple querelle de mots. Cette évolution sémantique traduit plutôt la volonté du Gouvernement d'effacer de notre mémoire nationale les luttes du peuple français et de ses soldats-citoyens.

Cette remise en cause est la même que celle qui conduit à la banalisation de la guerre d'Algérie et qui se traduit par l'absence de reconnaissance officielle du 19 mars, date du cessez-le-feu.

En s'employant à rayer cette notion de soldat-citoyen née de la Révolution française, en renforçant la professionnalisation de l'armée, qui se traduit par l'utilisation de ce terme de vétéran, c'est tout le droit à réparation qui est ainsi attaqué, c'est l'abandon du lien symbolique entre les anciens combattants et la nation qui est consacré, c'est la négation de la reconnaissance de la dette de la nation à l'égard de ses anciens combattants.

En faisant disparaître les notions d'ancien combattant et de victime de guerre, vous ouvrez la porte à une politique sociale d'assistanat remplaçant le droit à réparation, et vous préparez l'intégration à terme de votre ministère dans le ministère de la défense.

Oui, monsieur le ministre, cette évolution est de plus en plus sensible dans la politique de votre gouvernement à l'égard des anciens combattants. C'est tout l'héritage de Valmy que vous enterrez.

Aussi ma question est-elle simple : comment justifiez-vous cette politique qui, petit à petit, cherche à faire disparaître les notions d'ancien combattant et de victime de guerre, et donc l'idée même de leur droit à réparation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Rassurez-vous, monsieur Chassaigne, je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour que la notion d'ancien combattant conserve la force et la clarté qu'elle a acquises au cours des conflits de notre histoire : je suis entièrement d'accord avec vous.

Je suis réconforté par l'enthousiasme soulevé dans tous les pays par les cérémonies marquant le soixantième anniversaire des débarquements et de la Libération. Ce sentiment montre que les Français conservent un très fort attachement à l'égard des anciens combattants.

Certes, le terme de vétéran est apparu dans le langage administratif avec la création de l'observatoire de santé des vétérans, mais il correspond à une réalité sensiblement différente puisqu'il ne vise pas seulement les anciens combattants. Nous sommes donc loin, vous en conviendrez, de la réalité historique, sociale et même juridique du concept d'ancien combattant auquel nous sommes tous attachés et auquel je suis personnellement très attaché.

M. le président. Nous passons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Pierre Lasbordes.

M. Pierre Lasbordes. Cette année, monsieur le ministre, le Gouvernement a inscrit près de 30 millions d'euros supplémentaires à la ligne « Retraite du combattant », pour un total de 600 millions d'euros, ce qui est une somme importante.

Cependant, comme vous l'avez indiqué tout à l'heure, le montant indiciaire de la retraite du combattant n'a pas varié depuis qu'il a été fixé, par l'article 85 de la loi de finances pour 1978, à 33 points d'indice. Aussi, depuis de nombreuses années, les associations demandent, à juste titre, que ce montant soit porté à 48 points d'indice.

Lorsque, en 2002, je vous avais interpellé sur ce sujet, vous nous aviez annoncé qu'une réflexion serait engagée dès les premiers mois de 2003, car le Gouvernement était soucieux de faire avancer cette question. Lors de la discussion du budget des anciens combattants pour 2004, vous nous aviez rappelé que le Gouvernement demeurait attaché à cette mesure, qui ne pouvait cependant être appliquée que progressivement, à raison de deux ou trois points par étape. Une revalorisation de 15 points représente en effet un coût particulièrement élevé puisque l'augmentation d'un seul point d'indice induit une dépense de 18 à 19 millions d'euros supplémentaires.

Plusieurs députés du groupe socialiste. 16 millions !

M. Pierre Lasbordes. Si vous voulez !

Il est donc indispensable de procéder par étapes, mais la démarche doit être engagée. Aujourd'hui comme en 2002, comme en 2003, je me permets de me faire à nouveau l'écho du monde combattant sur ce sujet important et de vous demander, monsieur le ministre, dans quelle mesure le Gouvernement compte prendre le chemin de la revalorisation de la retraite du combattant, après presque trente ans d'immobilisme ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. La revalorisation de la retraite du combattant, monsieur le député, est une priorité pour le Gouvernement depuis notre arrivée aux affaires.

M. Alain Néri. On n'a rien vu !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Les exercices budgétaires 2004 et 2005 permettent de financer les conséquences de l'accroissement du nombre de bénéficiaires...

M. François Rochebloine. Vous l'avez déjà dit !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je me répète, je suis constant.

M. François Rochebloine. Comme le rapport ! (Rires.)

M. le président. C'est trop facile ! (Rires.)

M. le ministre délégué aux anciens combattants. L'attribution de la carte du combattant AFN pour une campagne de quatre mois, revendication générale de toutes les associations et de tous les parlementaires, est une mesure d'équité. Au terme de cette démarche qui répondait à l'évidence à une exigence de justice, nous pourrons entreprendre la valorisation des montants de la retraite du combattant. On ne peut évidemment pas tout faire en même temps, mais c'est la priorité du Gouvernement pour 2006.

M. François Rochebloine. C'est une annonce ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Tout à fait.

Vous avez également évoqué la hausse du plafond majorable de la rente mutualiste, monsieur Rochebloine. Le Gouvernement ne perd pas non plus de vue cet objectif. Je vous rappelle tout de même les progrès déjà accomplis : les 7,5 points qui nous font arriver à 122,5 points, et nous arriverons ensuite à 130 points.

Enfin, le Gouvernement est déterminé à s'appuyer sur les services départementaux de l'ONAC. C'est un engagement que nous prenons également pour 2006.

M. François Rochebloine. Merci, monsieur le ministre.

M. Alain Néri. Et pour 2005, il n'y a rien ?

M. Jean-Louis Dumont. Tout arrive à qui sait attendre !

M. le président. La parole est à M. Alain Marleix.

M. Alain Marleix. Depuis le 1er juillet 2004, on le sait, la carte du combattant est accordée aux militaires ayant effectué quatre mois en Algérie, au Maroc ou en Tunisie entre le 2 juillet 1952 et le 2 juillet 1962, les quatre mois étant décomptés de date à date.

La carte a ainsi été refusée à des militaires ayant accompli 120 jours en Afrique du Nord, car cela ne faisait pas quatre mois de date à date. C'est injuste. C'est le cas par exemple d'un appelé arrivé le 1er janvier et reparti le 30 avril, ce qui fait bien quatre mois de présence, 120 jours, ou d'un militaire arrivé le 1er juillet et reparti le 31 octobre, soit quatre mois de présence, 123 jours. Il est anormal que certains aient droit à la carte pour 120 jours et d'autres non, certains ayant même fait 123 jours.

Afin que chacun soit logé à la même enseigne, il me semblerait équitable que la carte soit attribuée à tous pour 120 jours de présence, sans autre précision.

Ma question est donc très simple. Le Gouvernement a-t-il l'intention de mettre un terme à une telle situation, qui concerne certes un petit nombre d'anciens combattants d'AFN, mais qui apparaît au mieux comme une incohérence administrative ou technocratique supplémentaire et, au pire, comme une injustice qu'il convient, vous en conviendrez, de réparer ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le député, la carte du combattant au titre de l'AFN est désormais attribuée à ceux qui ont servi pendant quatre mois sur les théâtres d'opération du Maroc, de Tunisie ou d'Algérie. Cette présence s'apprécie bien en mois, comme le prévoit le texte. Cependant, la commission de la carte du combattant examine les cas particuliers - et les cas que vous citez sont des cas limites - afin de proposer au ministre une solution d'équité.

M. le président. La parole est à M. Pierre Lasbordes, pour une seconde question.

M. Pierre Lasbordes. Monsieur le ministre, depuis votre prise de fonctions, vous vous êtes attaché à renforcer les droits des anciens combattants et à répondre aux nombreuses attentes du monde combattant. Parmi les mesures de solidarité et de reconnaissance que vous avez engagées, vous avez notamment souhaité revaloriser les pensions des veuves de guerre, veuves d'invalides et veuves de grands invalides de quinze points. Cette mesure, particulièrement attendue depuis de nombreuses années, témoigne de l'intérêt et de la reconnaissance que le Gouvernement leur porte.

Aux termes du décret du 13 juillet 2004, cette disposition devait s'appliquer à compter du 1er juillet 2004. Cependant il semble qu'à ce jour, il n'y ait eu aucun commencement de réalisation. Qu'en est-il aujourd'hui ? Quelles seront les conditions de rattrapage ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le député, vous le rappelez avec justesse, la mise en œuvre de l'augmentation de quinze points des pensions versées aux veuves, inscrite dans la loi de finances pour 2004, avec effet au 1er juillet, a commencé tardivement.

Ce retard tient, vous le savez, au délai nécessaire à l'adaptation du logiciel informatique. Ce problème est aujourd'hui réglé. Les pensions sont versées. Bien entendu, la mesure s'appliquera avec effet rétroactif au 1er juillet 2004. Je suis heureux que cette mesure de justice, destinée à des personnes qui méritent hautement le respect de la nation, soit désormais entrée en vigueur.

M. Alain Néri. C'est ce qui explique l'augmentation de votre budget !

M. le président. Nous en arrivons à la première série de questions du groupe socialiste.

La parole est à Mme Claude Darciaux.

Mme Claude Darciaux. Monsieur le ministre, le contenu de votre budget est des plus décevants. Il ne compense même pas l'érosion due à l'inflation et ne comporte aucune mesure nouvelle en 2005, même si vous prétendez le contraire : toutes les mesures nouvelles datent du budget pour 2004.

Je souhaite évoquer la situation des veuves d'anciens combattants. M. le rapporteur vient d'évoquer un rapport, mais ce n'est pas de rapport dont nous avons besoin : nous attendons des mesures concrètes.

Les veuves d'anciens combattants sont aujourd'hui 1,6 million et leur nombre augmente encore. La seule FNACA en a compté 13 000 de plus en 2004. Or un quart d'entre elles se trouvent confrontées à une situation financière précaire qui ne leur permet pas de vivre dans des conditions décentes. Ces femmes, dont les époux se sont engagés pour la nation, méritent d'être aidées avec plus de détermination.

Ces veuves peuvent prétendre bien sûr aux aides dispensées par l'ONAC. Ainsi, 16 060 veuves ont reçu une aide ponctuelle de l'ONAC en 2003 et cet organisme attend une augmentation du nombre de demandes pour 2004. L'augmentation de 470 000 euros que prévoit le projet de loi de finances pour 2005 au titre des subventions de l'action sociale de l'ONAC est certes louable mais ces aides ponctuelles versées aux veuves ne constituent en rien une source de revenu régulière et pérenne. De plus, l'ONAC ne pourra couvrir des demandes toujours croissantes.

M. Néri a proposé une solution pour financer une allocation différentielle de solidarité. Je vous en propose une autre, ainsi vous aurez le choix. Les anciens combattants d'Afrique du Nord disposent d'un fonds de solidarité qui leur garantit un revenu minimum en attendant qu'ils perçoivent leur retraite professionnelle. Pour 2005, l'arrivée à l'âge de soixante-cinq ans de gros contingents d'anciens combattants d'Afrique du Nord entraîne une baisse de plus 10 millions d'euros des crédits affectés à ce fonds de solidarité. Cette somme est donc disponible.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous demande de créer cette allocation différentielle de solidarité au profit des veuves d'anciens combattants les plus démunies et âgées de plus de soixante-cinq ans dont les ressources sont inférieures au SMIC. Cette majoration des pensions des veuves répond à un devoir de réparation - et non d'assistance - de la part du Gouvernement. Face à une réalité sociale dégradante, pour ces femmes dont les hommes se sont battus pour nos valeurs républicaines, il est légitime de prendre de telles mesures qui leur redonnent leur dignité. Je vous demande solennellement de leur donner satisfaction. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattant. Madame la députée, je vous ai écoutée avec la plus grande attention et avec gravité même, car le problème que vous soulevez nous touche tous et on ne peut pas y rester insensible. Le Gouvernement, croyez-le bien, en a fait une de ses priorités. Mais un certain nombre d'attentes devaient être satisfaites après les concertations que nous avons régulièrement avec les associations représentatives. Cette volonté s'exprime, comme en 2004, dans le projet de budget pour 2005, si on veut le regarder sans esprit partisan,...

M. Jérôme Lambert. Et en fermant les yeux !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. ...avec des comparaisons loyales, honnêtes. En effet, les veuves seront les principales bénéficiaires de l'augmentation de 4 % des crédits sociaux de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Cet effort supplémentaire va permettre de mieux venir en aide à celles qui, j'en suis conscient, rencontrent des difficultés financières et matérielles.

Vous souhaitez que les crédits du fonds de solidarité en faveur des anciens combattants d'Indochine et d'AFN soient progressivement orientés vers les veuves. Telle n'est pas la vocation de ce fonds. On voit mal d'ailleurs comment ces crédits pourraient être réorientés.

M. Alain Néri. En changeant simplement de ligne budgétaire !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Néri, nous avons étudié cette proposition avec le plus grand sérieux. D'un côté, on aide 5 000 chômeurs et, de l'autre, vous demandez qu'on oriente des crédits vers 1,6 million de ressortissants. Vous voyez la disproportion !

M. Jean Dionis du Séjour et M. Alain Néri. Non, c'est une allocation différentielle !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Nous sommes bien, vous en conviendrez, dans deux logiques différentes. Néanmoins, je suis extrêmement sensible à ce problème. La situation des veuves doit nous préoccuper tous.

M. Jérôme Lambert. Ce sont des mots ! Nous attendons des actes !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Ce gouvernement, je le répète, en fait une de ses priorités et recherchera des solutions.

M. Alain Néri. Nous en avons proposé deux !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. On ne peut pas laisser une catégorie de nos concitoyens dans la difficulté alors même que l'on peut faire autrement.

M. Jérôme Lambert. Faites-le !

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. Monsieur le ministre, l'attente des réfractaires au service du travail obligatoire persiste sans qu'aucune réponse y soit apportée. Ces hommes, mobilisables pour le travail forcé en Allemagne durant la seconde guerre mondiale, ont volontairement opté pour la clandestinité, devenant des hors-la-loi selon les forces allemandes d'occupation et le gouvernement français d'alors. Ainsi ils ont, à leur manière, fait acte de résistance, encourant la déportation, et leur famille l'emprisonnement ou la destruction de ses biens. Ils méritent la reconnaissance de la nation.

En septembre 2003, avec le président Ayrault et l'ensemble du groupe socialiste, j'ai déposé une proposition de loi visant à accorder à ces Français, qui se sont soustraits à la réquisition au STO, le titre de reconnaissance de la nation. Le 6 novembre 2003, dans cet hémicycle, je vous demandais, à l'occasion de la discussion du budget des anciens combattants pour 2004, quelles suites le Gouvernement comptait donner à cette proposition ainsi qu'à celle, poursuivant le même objet, de nos collègues Gilbert Biessy, Yves Cochet et Georges Colombier. Vous m'indiquiez alors vouloir « progresser sur ce dossier très important », qualifiant de « légitimes » les attentes des réfractaires.

M. Jérôme Lambert. Il veut toujours, mais il ne fait rien !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. De la même manière, le 11 décembre 2003, vous auriez assuré le président du Groupement national des réfractaires et maquisards de votre détermination à procéder à un nouvel examen de ce dossier afin d'aboutir à une solution satisfaisante, pour finalement l'informer, le 2 mars dernier, de la mise en place prochaine d'une instance chargée d'étudier la question.

Mais le temps passe, monsieur le ministre, et malgré vos déclarations de bonnes intentions, les réfractaires au STO ne voient toujours rien venir, ressentant chaque jour un peu plus durement le fait de se voir refuser la reconnaissance de la nation pour leurs actes courageux.

À l'approche du soixantième anniversaire de la fin de la seconde guerre mondiale, ne pensez-vous pas qu'il serait temps d'apporter une réponse concrète aux attentes des réfractaires, en leur attribuant le titre de reconnaissance de la nation, en accord avec l'esprit de consensus qui anime la représentation nationale comme le monde des anciens combattants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le député, comme je l'ai indiqué l'année dernière à M. Colombier et à vous-même, le Gouvernement est conscient des attentes des réfractaires au STO, qui souhaitent se voir attribuer le titre de reconnaissance de la nation. Mais le TRN a été créé par la loi de 1967 pour les militaires ayant pris part pendant quatre-vingt-dix jours aux opérations d'Afrique du Nord à une époque où ces opérations n'ouvraient pas droit à la carte du combattant. Une loi de 1993 a étendu le bénéfice de ce titre aux participants à tous les autres conflits. Dès lors, c'est bien la participation à un conflit armé, comportant un risque d'ordre militaire, qui constitue le critère d'attribution de ce titre.

À l'évidence, les réfractaires au service du travail obligatoire, ne relèvent pas de cette logique. Néanmoins, je m'étais engagé, comme vous l'avez rappelé, à rechercher une forme spécifique de reconnaissance envers ces personnes contraintes de vivre dans la clandestinité pour échapper au STO. Cette étude est aujourd'hui terminée. Elle a abouti à la création d'un diplôme d'honneur qui permette de distinguer l'attitude courageuse de ces réfractaires. Telle est la réponse que je me propose d'apporter à leur requête légitime. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jérôme Lambert. Un diplôme !

M. Alain Néri. Pourquoi pas une médaille en chocolat !

M. le président. La parole est à M. René Rouquet.

M. René Rouquet. Monsieur le ministre, je veux dire, à mon tour, notre déception, partagée par les associations d'anciens combattants, au regard du manque d'ambition de ce budget et de ses promesses non tenues, qu'il s'agisse de la retraite ou de la carte du combattant, du remboursement des soins, de la solidarité, de la campagne double, de l'ONAC ou de la politique de mémoire, dont la baisse des crédits, en cette année de commémorations, est difficilement admissible.

J'appellerai pour ma part votre attention sur une préoccupation constante du groupe socialiste, qui fait l'objet d'un large consensus dans cet hémicycle et au sein du monde combattant : la décristallisation des pensions des anciens combattants d'outre-mer, qui a été engagée dans des conditions défavorables et qui tarde à être effective pour tous et équitable partout.

Votre réponse précédente, monsieur le ministre, est loin de nous avoir convaincus. En cette période où la France commémore son histoire avec ferveur, chacun attend qu'elle reconnaisse pleinement l'engagement de ces combattants venus d'Afrique, du Maghreb ou d'Asie, dont les pensions se sont cristallisées à un niveau inférieur à celui dont bénéficient leurs frères d'armes français, et qui tardent à se voir garantir une égalité de traitement sous le prétexte que le dispositif législatif mis en place tient compte du niveau de vie de leurs pays de résidence respectifs - autant dire, de facto, de leur nationalité.

Évoquant la parité de pouvoir d'achat, vous avez retenu le prix du sucre. Mieux aurait valu prendre pour référence le coût de la santé dans ces pays, compte tenu de l'aggravation des invalidités des anciens combattants. De ce point de vue, la situation est préoccupante. Pour ceux qui résident en Afrique, en effet, les soins coûtent beaucoup plus cher que pour les métropolitains, car il leur faut souvent quitter leur pays pour se faire soigner en France.

Nous savons, monsieur le ministre, que vous partagez notre préoccupation et je vous remercie de nous indiquer un peu plus précisément les moyens que la France va engager pour exprimer une égale reconnaissance à ceux qui se sont battus pour sa libération sous le même uniforme, quelle que soit leur origine, et pour renouer ainsi avec la fraternité qui a uni tous ces compagnons d'armes et pour réaliser la décristallisation juste et totale que nous attendons tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le député, je crains que mes réponses ne puissent vous satisfaire, puisque je les ai déjà faites et que je connais votre position. Cependant, nous nous honorons d'avoir réalisé cette opération de décristallisation. C'est pour nous une vraie fierté.

Vous avez évoqué le coût de la santé, exemple propre à sensibiliser les esprits : ma référence au sucre était moins dramatique. Surtout, il faut rappeler que la décristallisation ouvre à ces ressortissants des droits en matière de santé : comme tous les autres ressortissants du monde combattant, ils bénéficient de soins gratuits - y compris pour les cures thermales. La question de la santé est donc extérieure à celle des indemnités et pensions de retraite.

M. le président. La parole est à M. Francis Hillmeyer, pour le groupe UDF.

M. Francis Hillmeyer. Monsieur le ministre, chacun ou presque dans cet hémicycle rend hommage à la qualité de votre action et à votre sens de l'équité. Chacun vous témoigne son respect et son soutien. Chacun sait aussi que, ne pouvant faire l'impossible, vous tentez au moins de faire tout ce qui est possible pour témoigner à ceux qui ont servi notre pays sous les armes ou qui ont souffert sous le joug de l'ennemi, à ceux qui ont perdu parents ou enfants, la reconnaissance de la nation.

Pour la première fois, écriviez-vous récemment, après une décennie de baisse significative, le budget des anciens combattants est en augmentation : si modeste soit-elle, avec un chiffre de 0,14 %, le symbole est parlant.

Vous n'avez rien prévu, en revanche, pour revaloriser en 2005 la retraite du combattant et cela est très mal vécu, car des promesses avaient été faites. Cette retraite est actuellement de 35,42 euros par mois, soit 425 euros par an. Même si le nombre de ses bénéficiaires est en hausse en raison de l'harmonisation du 1er juillet 2004, 1,386 million de personnes seront déçues, car il semblait convenu que le niveau indiciaire de cette retraite, actuellement fixé à l'indice 33 des PMI, serait porté à l'indice 48 d'ici à trois ans.

Un autre point d'incompréhension est l'absence de crédits, dans ce budget, pour la revalorisation du plafond majorable de la retraite mutualiste, mesure attendue depuis 2003, alors même qu'un accord semblait intervenu sur la base de 130 points d'indice PMI.

Le projet de budget affirme votre volonté de renforcer les moyens de l'ONAC. Qu'en sera-t-il de la pérennité des services départementaux après l'actuel contrat d'objectifs et de moyens, qui arrivera à terme en 2007 ?

Je vous rappelle également les démarches entreprises pour régler le problème des RAD-KHD : vous avez réuni à Strasbourg, autour de M. André Bord, les parlementaires et les membres de l'Entente franco-allemande, mais aucune solution n'est apparue jusqu'ici.

Le monde combattant attend des réponses claires à ses demandes. S'il a vu prendre en 2004, sous votre direction, des mesures importantes dont nous vous sommes reconnaissants, il demande à être rassuré sur ce que lui réservera réellement votre budget 2005. Je vous demande donc expressément de bien vouloir prendre en considération les questions que je viens d'évoquer.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Hillmeyer, je vous remercie pour l'hommage que vous avez rendu, au début de votre intervention, à l'action bien réelle du Gouvernement.

M. Alain Néri. D'autant plus que cet hommage était inattendu !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Si certains peuvent la critiquer, on peut aussi l'exhiber comme une avancée sur de nombreux points : c'est ce que nous ferons à l'heure du bilan, et on verra qu'il n'est pas si mauvais !

La croissance du budget, que vous avez évoquée, est certes de 0,14 % en masse, mais elle est aussi de 3,9 % par ressortissant : le symbole est donc encore plus fort.

La revalorisation de la retraite de combattant et celle des retraites mutualistes sont, je le répète, nos priorités pour 2006.

Quant à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, je tiens à redire toute ma détermination et celle du Gouvernement pour mener à son terme l'actuel contrat d'objectifs et de moyens.

M. Alain Néri. Alors, arrêtez de supprimer des postes !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Cela ne signifie pas pour autant que la pérennisation de cet organisme ne sera pas assurée au-delà de l'expiration de ce contrat en 2007 - vous pourrez le constater.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le ministre, permettez-moi, avant d'entrer dans le vif du sujet, ...

M. le président. Mon cher collègue, je vous rappelle que le temps imparti à chaque question est de deux minutes !

M. Jean Dionis du Séjour. ...de saluer l'action du Gouvernement, qui, par le décret du 27 juillet 2004, a tenu parole sur un sujet particulièrement sensible dans ma région du Sud-Ouest, victime des exactions horribles commises par la division Das Reich, au cours de l'été 1944, durant sa remontée vers le front de Normandie. Je tiens à saluer particulièrement la mémoire du village martyr de Saint-Pierre de Clairac et à vous faire part de la gratitude des familles concernées et du sentiment qu'elles éprouvent que justice leur a été rendue.

Sous la pression amicale de notre président, j'en viens à ma question.

M. le président. Votre remarque préliminaire était justifiée, je le reconnais.

M. Jean Dionis du Séjour. Merci, monsieur le président.

Ma question porte, comme l'an dernier, sur la situation des veuves d'anciens combattants non pensionnées. Comme vous le savez, les principales fédérations d'anciens combattants demandent aujourd'hui la reconnaissance d'un statut pour les veuves d'anciens combattants non pensionnées. En effet, bien que ressortissantes à part entière de l'ONAC, ces veuves ne bénéficient d'aucune prestation particulière, les seules bénéficiaires de prestations sociales liées au statut de combattant étant les veuves pensionnées et les veuves d'invalides. Par ailleurs, les aides de l'ONAC ne concernent que les plus démunies de ces veuves, dans le cadre du droit à la solidarité. Elles seraient, selon le chiffre évoqué tout à l'heure, au nombre de 16 000.

Les principales fédérations d'anciens combattants soutiennent la proposition que je vous avais faite l'an dernier de créer un fonds de solidarité alimenté par les fonds rendus disponibles du fait de la disparition d'anciens combattants et par les crédits que l'ONAC consacre à répondre à certaines détresses exceptionnelles. Nous pensons que la nation a les moyens de créer une telle allocation différentielle, calculée par rapport à un revenu minimum de solidarité.

L'article 22 de la loi de finances pour 2004, reprenant l'amendement de notre collègue Patrick Beaudouin, prévoyait que le Gouvernement remette au Parlement un rapport destiné à répertorier le nombre des anciens combattants et des veuves âgés de plus de soixante ans dont les ressources sont inférieures au SMIC. Vous nous avez transmis ce rapport le 15 septembre et je vous en remercie d'avoir, en cela aussi, tenu parole.

Toutefois ce rapport - indigeste, mais que nous avons lu avec attention - est tout à fait insuffisant. Je ne citerai que sa conclusion, qui vaut, si j'ose dire, son pesant de cacahuètes : « Au terme de cette étude, force est de constater qu'il n'est pas possible d'avancer un nombre précis d'anciens combattants et de veuves disposant d'un revenu réel inférieur au salaire minimum de croissance. Une réponse précise supposerait une enquête préalable longue faisant intervenir l'administration fiscale sur des fichiers nominatifs très difficiles à constituer. »

Permettez-moi de témoigner ici des situations de détresse que connaissent nombre de veuves de combattants, toujours dignes et souvent trop discrètes, que je reçois à ma permanence. Ces situations font la preuve que la procédure déclarative, qui est l'approche de l'ODAC, n'est pas assez efficace. Pourquoi ce qui est possible pour l'instruction des dossiers de RMI, qui concernent deux millions de personnes, ne l'est-il pas pour les veuves des anciens combattants ? Ce n'est pas admissible ! Vous ne pouvez pas vous contenter de ce rapport, qui est une fin de non-recevoir.

Monsieur le ministre, ayez l'audace d'une vraie avancée sociale, qui est à la portée financière de la nation. Vous pourrez fixer librement la barre, puisque cette prestation destinée aux veuves de nos anciens combattants - pour l'essentiel ceux de l'AFN - est une allocation différentielle de ressources.

Ma question est double. Allez-vous, tout d'abord, comme le préconise le rapport du SGA dans ses conclusions, commander l'enquête préalable faisant intervenir l'administration fiscale sur des fichiers nominatifs pour identifier d'une manière indiscutable et complète les situations de détresse que connaissent les veuves non pensionnées ? Envisagez-vous de créer, au terme de cette enquête préalable, l'allocation différentielle que réclame désormais la très grande majorité du monde combattant et, j'ose le dire, de la représentation parlementaire qui s'intéresse à ce dossier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Dionis du Séjour, je tiens à vous remercier pour votre encouragement à l'action menée par le Gouvernement en faveur des victimes d'actes de barbarie.

Je tiens par ailleurs à réaffirmer avec force que le Gouvernement est très attentif à la situation des veuves. Celles-ci, pensionnées ou non, sont toutes ressortissantes de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre et peuvent prétendre, à ce titre, à l'aide matérielle, morale et administrative dispensée par cet établissement placé sous ma tutelle. Comme je l'indiquais dans ma présentation du budget, les crédits d'action sociale de l'ONAC sont en augmentation de 430 000 euros, soit 4 %, dans le projet de budget pour 2005 : ils atteindront ainsi plus de 12,5 millions d'euros.

Le rapport remis en application de l'amendement adopté à l'initiative de M. Beaudouin a mis en lumière la difficulté d'appréciation des situations financières individuelles des anciens combattants et de leurs veuves. De plus, la mise en place d'une allocation spécifique pour l'ensemble des veuves d'anciens combattants viendrait inévitablement en concurrence avec les prestations déjà servies aux intéressées dans le cadre du régime actuel.

M. Jean Dionis du Séjour. Non ! Le mécanisme serait le même que pour le RMI !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. C'est pourquoi le Gouvernement, pour l'heure, poursuit l'étude de cette question. Il privilégie toutefois, dans l'immédiat, un mode d'intervention fondé sur les crédits sociaux de l'ONAC, qui se révèle plus ciblé, plus concret dans des situations parfois dramatiques.

M. Jean Dionis du Séjour. Beaucoup de femmes très dignes ne font pas les démarches nécessaires pour déclarer leur situation de veuve d'ancien combattant !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Nous restons attentifs à cette question.

M. le président. La parole est à M. Gilles Artigues.

M. Gilles Artigues. À la suite de mes collègues, j'appelle votre attention, monsieur le ministre, sur la situation, parfois très délicate, dans laquelle se trouvent les veuves de victimes civiles de guerre. Je pense particulièrement aux veuves d'agriculteurs, qui ne savent pas toujours faire valoir leurs droits ou ne possèdent plus les documents nécessaires.

Dans les conditions fixées actuellement, elles ne peuvent bénéficier, en règle générale, de la demi-pension de réversion que si le taux d'invalidité attribué à leur mari était au moins égal à 80 %. Afin d'améliorer sensiblement leur condition, ne serait-il pas possible que ce taux soit fixé, dans ce projet de loi de finances pour 2005, à 60 %, comme pour les invalides militaires de guerre ?

Par ailleurs, toujours dans l'optique d'améliorer leurs ressources, serait-il envisageable de créer une allocation spécifique, égale à la moitié du montant de la retraite du combattant défunt ?

Enfin, sachant qu'actuellement elles ne peuvent prétendre à rien en matière de retraite mutualiste du combattant, quelles dispositions entendez-vous mettre en place afin que tout titulaire d'une carte de ressortissant de l'ONAC ait droit, sur présentation de ce document, à cette retraite ?

Monsieur le ministre, ces veuves, que nous ne verrons jamais bloquer les routes, ni manifester dans les rues, méritent pourtant la solidarité et la reconnaissance de la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux anciens combattants.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Artigues, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre prévoit effectivement que les veuves des victimes civiles de guerre ne perçoivent la pension de réversion que si le taux d'invalidité attribué à leur mari était supérieur à 85 %, contre 60 % pour les veuves d'invalides militaires de guerre. Je suis conscient que cette différence peut faire naître un sentiment d'inégalité. Elle procède de raisons historiques dont il serait trop long d'exposer le détail.

Quant au deuxième point de votre question, je précise que la retraite du combattant constitue une récompense pour l'ancien combattant lui-même et ne peut donc pas faire l'objet d'une réversion. Le Gouvernement souhaite maintenir ce principe.

Enfin, s'agissant de la retraite mutualiste du combattant, celle-ci n'est pas en relation directe avec la carte de ressortissant de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Elle concerne les titulaires de la carte de combattant et du titre de reconnaissance de la nation, à l'exclusion de toute autre catégorie de ressortissants. Dévier de ce principe reviendrait à dévaloriser l'expression de la gratitude de la nation à l'égard des anciens combattants.

M. le président. J'indique dès à présent que, sur le vote des crédits inscrits au titre III, ainsi que sur celui des crédits inscrits au titre IV, je suis saisi par le groupe socialiste et par le groupe des député-e-s communistes et républicains d'une demande de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Nous en revenons aux questions du groupe socialiste.

La parole est à M. Julien Dray.

M. Julien Dray. Monsieur le ministre, contrairement à ce que vous avez répondu à Alain Néri, le débat sur la date du 19 mars n'est pas clos. (« Si ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marc Roubaud. Clos et enterré !

M. Julien Dray. On peut considérer que vous avez commis une erreur et, comme dit le proverbe si « l'erreur est humaine, persévérer est diabolique ». Il me semble donc nécessaire de vous rappeler l'émoi suscité par cette décision, mais je veux aussi vous apporter un témoignage. Depuis maintenant un bon nombre d'années, je participe à plusieurs congrès de fédérations d'anciens combattants.

M. Jean-Marc Roubaud. Hors sujet !

M. Julien Dray. Et je dois faire part de la tristesse que j'ai ressentie, l'année dernière, en voyant des collègues parlementaires, même si j'ai des divergences avec eux, se faire siffler et chahuter à ce point pour avoir assumé - courageusement d'ailleurs - cette date du 5 décembre qui n'a aucun sens.

C'est pourquoi je vous dis que le débat n'est pas clos. Il n'y a pas, d'un côté, ceux qui étaient pour le 19 mars et, de l'autre, ceux qui se résigneraient au 5 décembre. Il faudra y revenir parce que, de toute manière, un jour ou l'autre, la date du 19 mars sera celle qui rassemblera le monde des anciens combattants.

M. Édouard Landrain. Ce n'est pas vrai !

Plusieurs députés du groupe UMP. Hors sujet !

M. Julien Dray. Chers collègues, quand je parle du 19 mars, je ne m'exprime pas simplement en tant que parlementaire, mais aussi comme un enfant de la guerre d'Algérie, qui aurait toutes les raisons de considérer que ce n'est pas forcément la meilleure date pour commémorer la fin de ce conflit puisque, pour ma famille comme pour des centaines de milliers d'autres, elle a signifié le départ de cette terre qui était la leur.

J'en viens maintenant à ma question. Beaucoup de parlementaires se sont émus de la façon dont est traité l'Office national des anciens combattants et de la situation très difficile vécue par ses personnels, eu égard à leurs missions et aux tâches nouvelles que vous leur avez attribuées. On a en partie répondu sur ce sujet, mais il me semble que l'intérêt du débat budgétaire, c'est que le ministre prenne des engagements clairs et fermes devant la représentation nationale.

Pouvez-vous nous garantir, ici et maintenant, la pérennité de cet établissement et de la totalité de ses services départementaux, au-delà du contrat d'objectifs pour 2007 ?

Vous engagez-vous à maintenir les effectifs à un niveau suffisant et à autoriser, pour répondre aux situations d'urgence, l'embauche de vacataires ? Il faut maintenant permettre à ces services de fonctionner correctement et de bien accueillir les anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Dray, je tiens tout d'abord à réaffirmer que, pour nous, le contrat d'objectifs et de moyens a un sens. Je suis d'autant plus à l'aise pour en parler que ce contrat n'est pas mon œuvre ni celle de ce gouvernement, mais celle du précédent. Nous l'avons soutenu et mis en place. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Telle a été la première revendication du conseil d'administration que j'ai présidé, dès sa première réunion : faire accepter au ministre du budget le contrat d'objectifs et de moyens. Je ne revendique aucune paternité en la matière, seulement le droit de défendre une logique et la pérennité de l'Office national des anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je ne vois pas pourquoi on m'interroge sans cesse sur la pérennité de l'Office.

M. Alain Néri. Appelez à voter mon amendement pour lever toute incertitude !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur Néri, vous gagneriez beaucoup à m'écouter. Si vous faites à la fois les questions et les réponses, vous ne serez jamais satisfait. S'il y avait un risque de disparition de l'Office national des anciens combattants, je ne vois pas pourquoi nous nous serions fatigués à mettre en place tout le dispositif du contrat d'objectifs et de moyens.

Monsieur Dray, sur cinq ans, 100 postes de catégorie A prévus dans le contrat d'objectifs et destinés à la préservation de la mémoire seront créés. Il est vrai que 250 postes de catégorie C seront supprimés.

M. Gérard Charasse. Eh oui !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Mais nous privilégions la solidarité et la mémoire. Nous l'avons dit dès le début. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Je ne veux pas polémiquer et je n'en ai pas le temps, mais simplement apporter des informations utiles à la représentation nationale. Que cela déplaise à certains, c'est leur droit, mais qu'ils écoutent au moins ma réponse. Chaque département disposera d'une assistante sociale à temps plein ou à temps partiel. C'est concret. Un concours de catégorie B sera prochainement ouvert, auquel seront préparés les agents de catégorie C de l'ONAC. Sa mise en œuvre tient compte de la volonté des agents, mais aussi des impératifs de service public, ce qui est normal.

S'agissant de l'Essonne, département qui vous intéresse directement, monsieur Dray, l'effectif départemental est de huit agents : un agent de catégorie A, un agent de catégorie B et six de catégorie C. Il est prévu de ramener les effectifs à sept agents en 2007 : deux agents de catégorie A, trois agents de catégorie B - dont une assistante sociale - et deux agents de catégorie C. Cette adaptation sera faite en concertation avec le service départemental, dans l'unique but de lui permettre d'assurer sa mission dans les meilleures conditions. Voilà ce que j'avais à dire ; tout le reste n'est qu'affabulation.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, entre autres cérémonies du souvenir, l'année 2004 a été marquée par la commémoration du soixantième anniversaire du débarquement de Provence. Après celui de Normandie, il a contribué d'une façon essentielle à accélérer le processus de libération de notre pays et de l'Europe du joug nazi. Lors des cérémonies de Toulon, le Président de la République, devant des chefs d'État d'Afrique noire francophone, a évoqué la contribution humaine de leurs pays au succès de nos armes et rappelé le sang versé par leurs soldats pour libérer nos territoires. Suite à ces cérémonies, le président de la république du Sénégal, maître Abdoulaye Wade, a institué le 23 août comme Journée du tirailleur sénégalais. Chacun sait que cette expression générique désigne l'apport des pays d'Afrique noire à nos forces combattantes.

M. Desallangre et M. Rouquet vous ont interrogé sur le problème de la décristallisation ; je voudrais y revenir, mais d'une autre manière.

Être frères d'armes - vous en savez quelque chose, monsieur le ministre -, quelle que soit l'origine ethnique, nationale, culturelle, religieuse, et quelle que soit la génération du feu - 14-18, 39-45, l'Indochine, l'Algérie, voire les opérations extérieures -, cela signifie avoir exécuté les mêmes ordres, rempli le même devoir, mais aussi avoir les mêmes droits. J'ai bien entendu votre réponse, et je n'oublie pas que j'ai été, il y a quelques années, rapporteur du budget de votre ministère. Par conséquent, c'est avec beaucoup de mesure que j'aborde cette question.

S'il y a un geste symbolique, réel, « concret » - pour reprendre votre terme - à faire, c'est bien évidemment sur la rente viagère qui est attachée à la carte du combattant. Frères d'armes, cela veut dire reconnaissance de la nation républicaine. Cette reconnaissance passe par l'attribution du titre d'ancien combattant et de la carte du combattant. La rente qui y est attachée s'élève aujourd'hui à 425 euros par an. Le monde combattant s'est exprimé le 23 août à Dakar, par la voix de ses responsables les plus titrés, que ce soient des anciens combattants ou des représentants d'associations patriotiques, mais aussi en France, lors de plusieurs congrès, comme celui de la Fédération Maginot. Et chacun s'accorde à dire : frères d'armes, frères de combat, frères aussi dans les droits, y compris pour percevoir l'allocation viagère.

Entendez-vous, monsieur le ministre, avec l'appui certainement unanime de la représentation nationale, donner suite à l'observation du rapporteur spécial, votée à l'unanimité par la commission des finances, et satisfaire ainsi une juste revendication en attribuant cette rente viagère à tous les anciens combattants, ...

M. Jacques Desallangre. Sans distinction !

M. Jean-Louis Dumont. ...quelle que soit leur origine, quel que soit leur pays de résidence. Ce serait grandir la France que d'y consentir.

C'est une dette d'honneur que nous devons acquitter. Merci d'y contribuer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le député, j'entends bien votre question, qui n'est pas simplement une affaire de cœur. Le cœur, personne n'en a le monopole. Nous regardons tous les choses avec objectivité et avec sensibilité.

Vous avez évoqué la journée de Dakar. Lorsque nous avons décidé, il y a quelques mois, de décristalliser les pensions et les retraites, j'avais pris la décision, avant même d'avoir entrepris quoi que ce soit, d'aller voir un certain nombre de dirigeants de pays amis concernés. Et vous savez quel a été le premier chef d'État que j'ai rencontré ? Le président sénégalais, M. Wade. Je lui ai dit que c'était une question d'amitié, une affaire franco-française, que la France devait honorer une dette. Je lui ai indiqué le chemin que nous avions l'intention de prendre. Il m'a alors proposé que les vingt-trois pays concernés puissent se réunir autour d'une table pour en débattre, ce qui me semblait difficile à réaliser.

L'important, c'était la promptitude de la décision. Car tous les anciens combattants - et je parle sous le contrôle des associations - étaient pressés et voulaient que l'on aille vite. Cela faisait plus de quarante ans que tout le monde attendait. C'est ainsi que nous avons pris la décision qui nous semblait la plus sage, celle que j'ai expliquée tout à l'heure, à savoir la parité du pouvoir d'achat.

S'agissant de l'amitié, de la coopération dans les relations entre États, nous avons fait en sorte que rien ne soit opaque. Nous sommes allés à Madagascar, en Tunisie, au Maroc, au Sénégal, au Vietnam. Nous n'avons rien fait en catimini, nous avons agi au grand jour, en consultant en permanence les associations d'anciens combattants. Accordez-nous quand même un petit bénéfice, reconnaissez au moins que nous avons fait quelque chose. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Monsieur le ministre, il y a beaucoup à dire sur votre budget, et beaucoup à regretter, par exemple au sujet de l'indice de la retraite du combattant, ou encore à propos du 19 mars. Pour ma part, je souhaiterais connaître votre sentiment sur une question qui, je le sais, vous tient à cœur.

Élu du département de l'Ariège, où est basé l'un des régiments les plus prestigieux, le 1er RCP, je souhaite évoquer ici la condition de ceux qui furent de jeunes volontaires pour défendre les armes de la France loin de nos frontières. Car si nos anciens combattants des deux guerres mondiales et ceux d'Afrique du Nord ont reçu l'hommage de la nation, il en est d'autres à qui le lieu ou l'époque n'ont pas permis d'accorder une reconnaissance qui soit à la mesure des risques qu'ils ont encourus. Je veux parler des AMEX, les anciens des missions extérieures, que l'on n'appelait pas encore les OPEX.

À la jonction de l'histoire et de la démographie, ces jeunes des années 1969, 1970 approchent aujourd'hui de l'âge de la retraite. Et comme pour l'ensemble de nos concitoyens, il arrive que les temps soient durs pour ces quinquagénaires, je pense en particulier au chômage.

De telles situations ont été prises en considération pour les anciens combattants d'Indochine, en faible nombre il est vrai, et pour les anciens d'Afrique du Nord de façon plus importante. Personne parmi nous n'a oublié qu'avait été créé un fonds de solidarité, doté sur les crédits des anciens combattants. Cette action a été une réussite. Il s'agissait, je le rappelle, de verser une allocation aux anciens combattants chômeurs, sous certaines conditions, afin de leur permettre d'atteindre de façon décente l'âge de jouissance d'une pension de retraite. Aujourd'hui, le plus grand nombre d'entre eux ont atteint l'âge requis, et le fonds va disparaître faute de bénéficiaires.

Dès lors, monsieur le ministre, pourquoi ne pas financer un dispositif identique, quoique infiniment moins coûteux, au bénéfice des AMEX ? Ils ne sauraient passer aux oubliettes de l'histoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le député, le fonds de solidarité, qu'il concerne les anciens combattants d'Indochine ou d'Afrique du Nord, a été créé par la loi pour venir en aide aux anciens combattants de la troisième génération du feu en situation de chômage de longue durée. Sa modification est donc du ressort de la loi.

Les anciens combattants des OPEX ou les AMEX, qui sont plus âgés, sont souvent en difficulté et nous demandent de consentir des efforts et de faire preuve d'imagination pour trouver les moyens les plus adaptés. C'est ce que nous essayons de faire. Une étude est en cours. Elle est « confidentielle », non au sens où elle serait secrète, mais au sens où elle relève du travail de cabinet.

Nous sommes disposés à emprunter un chemin qui pourra peut-être ressembler à celui que vous proposez. Sachez, en tout cas, que nous n'ignorons pas ce problème. Nous ne pouvons pas l'ignorer. Si les pistes que nous sommes en train d'explorer - je ne peux pas en dire plus aujourd'hui - peuvent déboucher sur des résultats concrets, ce sera une bonne chose.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour poser la dernière question.

M. Jean-Louis Dumont. Notre collègue Jacques Bascou aurait souhaité, monsieur le ministre, vous interroger sur la politique de mémoire.

Une observation, tout d'abord : les crédits dédiés à la mémoire sont en diminution. Certes, à la page 55 de son rapport, M. Mathis nous explique pourquoi. Et il est vrai, le président de la commission des finances pourra en témoigner, que nombreux sont les ministres, quelles que soient les majorités, qui arrondissent leur « fin de budget » avec la réserve parlementaire, laquelle, en principe, n'est pas prévue à cet effet. Dans le budget du logement, dont j'ai été aussi le rapporteur, et bien sûr dans celui des anciens combattants, cet expédient a été utilisé à de nombreuses reprises.

Mais au-delà de la diminution des moyens qui lui sont consacrés, c'est bien la politique de mémoire elle-même qui est en cause. Nous avons, tout au long de cet après-midi, échangé des propos qui ont pu être, ici ou là, cordiaux et avenants. Mais la plupart du temps, nous avons montré, au titre de nos mémoires respectives, presque un acharnement à défendre nos positions. Or la politique de mémoire est dédiée à la jeunesse. C'est une œuvre pédagogique. Il s'agit de dire aux jeunes d'aujourd'hui, aux citoyens de demain, quelles sont leurs responsabilités, dans quel cadre elles doivent s'exercer. Il s'agit de leur expliquer les conditions qu'il a fallu remplir pour qu'il nous soit donné de vivre aujourd'hui dans une République qui connaît la démocratie et la paix. C'est tout cela, la politique de mémoire. C'est dire son importance.

Encore faut-il s'assurer que la mémoire ne soit pas sélective, tronquée ou maquillée. Qui rappellera que les ressortissants de la religion israélite déportés dans les camps de concentration ont été accompagnés, en partie, par la police française, même si d'autre part elle a compté des résistants ? Qui nous parlera de la main-d'œuvre immigrée, de la fameuse Affiche rouge ? Qui nous dira que, sur ordre, des juges - qui ont ensuite continué leur travail - ont condamné des résistants français et des hommes politiques ?

M. le président. Monsieur Dumont...

M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le président, on peut quand même poser des questions !

M. le président. Oui, mais il y a une règle que je fais respecter par tout le monde, même si c'est avec souplesse.

M. Jean-Louis Dumont. Eh bien, si j'ai atteint les deux minutes, vous me faites signe, je pose ma question très poliment à M. le ministre, et comme cela nous aurons respecté la police de l'Assemblée.

M. le président. Voilà !

M. Jean-Louis Dumont. Monsieur le ministre, quels moyens entendez-vous mettre en oeuvre, en accord avec le monde combattant, pour assurer qu'à l'avenir la mémoire soit transmise dans toutes ses dimensions, dans sa profondeur, dans sa plénitude, et pour éviter les dérives ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le député, la préservation de la mémoire combattante est une priorité de mon ministère. Ce n'est pas un scoop. Et il me plaît de rappeler qu'au plus haut niveau de l'État, le Président de la République donne lui-même l'impulsion nécessaire en présidant chaque année - comme ce fut encore le cas la semaine dernière - la réunion du Haut conseil de la mémoire combattante.

S'agissant des moyens, quelque 23 millions d'euros seront consacrés à la mémoire en 2005. Cette politique recouvre bien évidemment une grande variété d'actions, tournées, dans toute la mesure du possible, vers les jeunes générations. Cela va de l'organisation de cérémonies à la réalisation d'ouvrages, de l'encouragement donné aux associations et aux éditeurs à la collecte de témoignages : nous avons lancé une grande opération consacrée à la mémoire orale. Tel est l'essentiel de nos activités concernant le recueil et la transmission de la mémoire.

M. le président. Nous avons terminé les questions.

J'appelle maintenant les crédits inscrits à la ligne « Anciens combattants », sur lesquels nous allons procéder aux deux scrutins précédemment annoncés.

Je vais d'abord mettre aux voix la réduction de crédits inscrite au titre III de l'état B.

Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 53

                    Nombre de suffrages exprimés 53

                    Majorité absolue 27

        Pour l'adoption 41

        Contre 12

L'Assemblée nationale a adopté.

Je vais maintenant mettre aux voix les crédits inscrits au titre IV de l'état B.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 56

                    Nombre de suffrages exprimés 56

                    Majorité absolue 29

        Pour l'adoption 43

        Contre 13

L'Assemblée nationale a adopté.

Après l'article 72

M. le président. En accord avec la commission des finances, j'appelle maintenant deux amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 72.

Ce sont deux amendements du Gouvernement.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 150 rectifié.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Mesdames et messieurs les députés, cet amendement vise à simplifier et à rationaliser l'évolution du point de pension militaire d'invalidité. Il s'agit de mettre fin à un système qui, depuis près de quinze ans, souffre d'un manque évident de lisibilité. Nombre d'entre vous ont souhaité cette évolution, qui était aussi revendiquée par les associations du monde combattant. Le Gouvernement, dans son souci de clarifier l'action de l'administration, a voulu mettre fin à cette situation.

Il vous est donc proposé d'adopter une méthode d'ajustement du point de pension, qui sera désormais directement lié à l'évolution de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique. Il faut y voir beaucoup plus qu'un changement technique, et ce pour trois raisons : la nouvelle procédure est lisible par tous les ayants droit, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent ; la hausse sera répercutée immédiatement à chaque changement d'indice ; l'évolution des pensions sera rattachée directement à celle des salaires de la fonction publique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. La commission des finances n'a pas examiné cet amendement auquel je suis, à titre personnel, très favorable puisqu'il permettra de rendre plus lisible le rapport constant et devrait également accélérer la revalorisation des prestations.

M. le président. Même opinion, monsieur le président de la commission des finances ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Très favorable également !

M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.

M. Georges Colombier. Monsieur le ministre, le groupe UMP vous remercie. Je vous ai, en effet, posé cette question dans ma précédente intervention. Il s'agit d'une demande formulée depuis très longtemps par de nombreuses associations d'anciens combattants, de nombreux députés sur tous les bancs de cette assemblée et par le groupe des douze que vous avez réuni récemment. Il permettra de tirer un trait sur ce serpent de mer qu'était devenu le rapport constant. C'est une très bonne chose. Je souhaite simplement que les anciens combattants n'aient pas à le regretter dans le temps.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Monsieur le ministre, je l'avais laissé entendre, le groupe UDF ne peut qu'être satisfait de cette proposition. Depuis de nombreuses années - vous avez parlé de quinze ans, j'irais même au-delà - nous réclamions cette meilleure lisibilité que vous nous proposez aujourd'hui. J'émettrai une seule réserve : les salaires de la fonction publique ne reposent pas seulement sur le point d'indice INSEE, mais comportent aussi des primes. Celles-ci seront-elles prises en considération lors de la publication des décrets ?

Quoi qu'il en soit, nous voterons cet amendement. Nous pouvons enfin, aujourd'hui, annoncer le décès du rapport constant !

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Comme vient de le préciser le rapporteur spécial, cet amendement du Gouvernement, tout comme le second, n'a pas été présenté en commission des finances et nous regrettons de n'avoir pu en débattre. En revanche, les nôtres, pourtant nombreux, ont été balayés d'un simple revers de main.

M. Jean-Louis Idiart. Voilà !

M. Alain Néri. Cela étant, monsieur le ministre, le monde combattant et les représentants de tous les groupes de l'Assemblée demandaient cette simplification que vous proposez et que nous voterons. Vous voyez que, lorsque vous nous présentez des mesures positives, nous les approuvons ! Toutefois, le traitement de la fonction publique évolue, certes, en fonction du point d'indice, mais il comporte aussi une grande part de primes. Le calcul limité au point d'indice n'est donc pas tout à fait équitable. Je n'irai pas jusqu'à proposer un sous-amendement tendant à intégrer les primes dans le calcul de la somme prise en référence. Mais nous ne manquerons pas, lors d'un prochain budget, de demander que le rapport constant soit établi sur l'ensemble traitement plus primes. Nous considérons toutefois cet amendement comme une première avancée. En conséquence, le groupe socialiste le votera.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont. Un peu de nostalgie, monsieur le président. C'est à l'instigation du ministre du budget, M. Charasse, et du secrétaire d'État chargé des anciens combattants, M. Méric, que le rapport constant avait été transformé une première fois. Il s'agit donc de la deuxième. Le temps passe. Ce qui est possible aujourd'hui, pour la lisibilité, l'augmentation quasi automatique des pensions versées aux anciens combattants en fonction de l'indice des prix, ne l'était pas il y a quelques décennies.

M. Édouard Landrain. Oh !

M. Jean-Louis Dumont. Il était devenu nécessaire de clarifier certains modes de calcul pour se conformer à la réalité. Même si nous n'avons pas eu le temps d'en étudier les conséquences par des simulations, cet amendement, comme vient de l'indiquer M. Néri au nom du groupe socialiste, nous paraît aller plutôt dans le bon sens. Veillons simplement à ce que ne réapparaissent pas des motifs de polémique, comme nous en avons connu, nous ou François Rochebloine, à une certaine époque, et à ce que, dans le cadre du respect de la politique due aux anciens combattants et du devoir de réparation, ce nouveau dispositif permette d'améliorer autant que de besoin, par sa simple application, les pensions versées aux anciens combattants.

M. le président. Souhaitez-vous répondre sur la question des primes, monsieur le ministre ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je n'ai pas de grands commentaires à faire. Ce point, qui demande réflexion, a toujours été soulevé. L'intégration des primes n'est pas d'actualité dans le projet que nous présentons aujourd'hui, mais je vous ai bien entendus, les uns et les autres. Je ne peux que vous répondre que j'y serai attentif.

M. Jean-Louis Dumont. Ce sera une mesure nouvelle pour 2006 !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 149 rectifié.

M. le ministre délégué aux anciens combattants. La loi de finances pour 2000 avait inscrit les crédits relatifs à l'indemnisation des invalidités résultant des infirmités contractées par les prisonniers de l'armée de libération nationale pendant la guerre d'Algérie. Cependant, le code des pensions militaires d'invalidité n'avait pas, à l'époque, été modifié pour prendre en compte ce droit nouveau à réparation. De ce fait, les ressortissants concernés par cette mesure n'ont pas pu, jusqu'à présent, bénéficier des crédits ouverts. L'amendement présenté par le Gouvernement vise à mettre fin à cette situation afin que les anciens prisonniers de l'armée de libération nationale pendant la guerre d'Algérie puissent bénéficier des dispositions du code général des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. La commission des finances n'a pas non plus examiné cet amendement auquel je suis, là encore, à titre personnel, très favorable. Cet outil juridique permettra le versement effectif d'indemnités déjà provisionnées.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Le groupe socialiste votera cet amendement bien que ni la commission des finances ni celle des affaires culturelles n'en aient été saisies, ce qui est bien regrettable. Même si ces deux amendements donnent satisfaction aux propositions faites dans les budgets précédents, il ne faudrait tout de même pas que cela devienne une habitude !

Nous sommes, les uns et les autres, attachés au travail parlementaire et à sa reconnaissance. Je suis donc un peu triste que nous n'ayons pu discuter en séance que ces deux amendements et que ceux que j'avais présentés en commission aient été écartés, pour certains, en application de l'article 40. Peut-être instruit par l'expérience de l'année dernière, vous avez fait preuve de prudence, monsieur le ministre : plutôt que de partir à la recherche de M. Méhaignerie quelque part dans Paris, vous l'avez mobilisé d'emblée au banc de la commission pour qu'il puisse, au cas où je demandé des explications sur l'article 40, me répondre immédiatement !

M. Bernard Carayon. C'est normal !

M. François Rochebloine. C'est un bon président !

M. Alain Néri. Certains de mes amendements ne me paraissaient pas tomber sous le coup de l'article 40. Remplacer « veuves» par « conjoints survivants » ne doit pas coûter bien cher. Or cette proposition n'a pas été prise en compte. Demander que figure sur la soie des drapeaux de régiments ayant servi en Algérie la mention « Algérie », alors que des régiments présents sur d'autres théâtres d'opérations ont eu droit à la reconnaissance de leur action au service de la nation, cela ne relève pas non plus de l'article 40 ! Là encore, nous n'avons pas obtenu satisfaction. Et je pourrais citer d'autres exemples, mais je ne veux pas allonger les débats.

Plus généralement, et je me tourne vers le président Méhaignerie, lorsqu'un parlementaire dépose des amendements et qu'il met en face les crédits nécessaires, on devrait pouvoir au moins en débattre. Il en va ainsi de mes deux amendements tendant à valoriser la retraite du combattant, pour la faire passer de 33 à 48 points d'indice, soit de quinze points d'un coup, soit en trois étapes de cinq points. J'avais proposé, pour financer les 80 millions nécessaires, de recourir au Fonds de l'allocation différentielle dont nous avions fait voter le principe dans le budget de 1998 et qui n'a plus de raison d'être, puisque les anciens combattants d'Algérie ont dépassé l'âge de soixante ans. Enfin, un dernier amendement proposait une hausse d'un point seulement.

Je me tourne maintenant vers le président Dubernard qui n'était pas là pour entendre mon rappel au règlement. Je souhaite que nous constations officiellement que la commission n'a pas travaillé convenablement puisque la procédure n'a pas été respectée. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous me répondrez que cela ne porte pas à conséquence, puisque l'amendement proposé à la commission, tendant à revaloriser la retraite du combattant d'un seul point, n'a pas été retenu non plus. Mais la procédure eût voulu que nous procédions tout de même à l'examen des trois amendements, en partant du plus coûteux pour arriver au plus modeste, de quinze points à un point. (« On a compris ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M.  le président. Merci, monsieur Néri !

M. Jean-Louis Dumont. Cela aurait changé la nature de la discussion, monsieur le président !

M. Alain Néri. Nous devons être vigilants sur ce point : il y va des droits de la représentation parlementaire et de la défense des anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. André Chassaigne. Très bien !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Je pourrais demander à répondre, monsieur le président !

M. le président. Ah non ! Vous n'allez pas vous y mettre ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Si, si, je pourrais : j'ai été mis en cause...

M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.

M. Georges Colombier. Je serai très bref. Monsieur le ministre, le groupe UMP se félicite de cet amendement même s'il n'a pas été examiné en commission. L'essentiel est que la cause des anciens combattants progresse. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour que, sur la durée de la législature, vous fassiez le maximum pour répondre à leur attente. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Néri. Il faut se dépêcher !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Par courtoisie pour M. Néri, je lui rappellerai que le président de la commission des finances a tout simplement pour devoir de faire respecter l'article 40 de la Constitution, dans l'application duquel les gouvernements successifs n'ont jamais varié. Or le premier amendement dont vous avez parlé tendait à étendre certains droits à pension.

Quant au second, celui relatif aux drapeaux régimentaires, je reconnais qu'il ne prête guère à conséquence sur le plan financier, mais cela s'appelle un « cavalier ».

M. Bernard Carayon. Absolument !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Et vous savez bien que le Conseil constitutionnel, quand nous ne faisons pas notre travail en la matière, se charge lui-même de le faire.

M. Jean-Louis Dumont. Il faut entendre la voix du peuple !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Enfin, nous devons tous avoir à l'esprit que les gouvernements des vingt dernières années, quels qu'ils fussent, ont réformé plusieurs fois la Constitution sans jamais avoir l'idée de toucher à l'article 40.

M. François Rochebloine. Et pour cause !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Il y a donc continuité dans la reconnaissance par la République de la nécessité de l'article 40. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je peux, en connaissance de cause, confirmer les propos du président de la commission des finances : en la matière, il y a toujours eu continuité.

Mais tout de même, utiliser le mot « cavalier » dans un débat sur les drapeaux et les anciens combattants... (Rires.)

M. Bernard Carayon. Il ne faut pas être à cheval sur les principes, monsieur le président !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 149 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Nous avons terminé l'examen des crédits du ministère des anciens combattants.

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

    2

ORDRE DU JOURDE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005, n° 1800 :

Rapport, n° 1863, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Économie, finances et industrie : services financiers, budget annexe des monnaies et médailles, Trésor, commerce extérieur, charges communes ; article 73 ;

Charges communes :

Rapport spécial, n° 1863 annexe 12, de M. Daniel Garrigue, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Commerce extérieur :

Rapport spécial, n° 1863 annexe 16, de M. Camille de Rocca Serra, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan ;

Avis, n° 1866 tome 6, de M. Jean-Paul Bacquet, au nom de la commission des affaires étrangères ;

Avis, n° 1865 tome 6, de M. Jean Gaubert, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Trésor et entreprises publiques :

Rapport spécial, n° 1863 annexe 41, de M. Michel Diefenbacher, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Services financiers, monnaies et médailles :

Rapport spécial, n° 1863 annexe 20, de M. Thierry Carcenac, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures quinze.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot