Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session ordinaire 2004-2005)

 

Première séance du mercredi 9 février 2005

143e séance de la session ordinaire 2004-2005



PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

AVENIR D'EDF ET DE GDF

M. le président. La parole est à Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à l'industrie.

Lors du débat sur le statut d'EDF et de GDF, le Gouvernement avait promis que les salariés conserveraient leur statut et que la fusion entre EDF et GDF, comme l'ouverture du capital de ces entreprises publiques, feraient l'objet d'études approfondies avant toute décision. On sait ce que valent vos promesses !(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Hier, vous avez fait voter, au Conseil supérieur de l'électricité et du gaz, la séparation des salariés actifs et des salariés inactifs, mettant fin à la cohérence de ces entreprises. Vous voulez ainsi enlever 5 milliards d'euros de provision au bilan d'EDF afin que l'entreprise soit plus présentable pour sa mise sur le marché.

Le deuxième pas que vous avez déjà franchi, c'est le rejet de la fusion d'EDF et de GDF et l'annonce de l'ouverture de 30 % du capital au privé. Rien ne justifie cette évolution si ce n'est votre volonté de permettre à des financiers de prendre pied dans des fleurons de notre industrie publique, avec la menace que constitue la recherche de la rentabilité immédiate pour les missions mêmes de ces entreprises, pour leur avenir et celui de notre politique énergétique, avec le risque, soulevé par la Cour des comptes, que ces financiers laissent à l'État les charges de démantèlement et de gestion des déchets qui pèseront sur la rentabilité de leurs capitaux.

Le nouveau réacteur EPR peut se réaliser, mais il ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt.

Vous attaquez les salariés. Vous fragilisez des entreprises qui sont parmi les meilleures du monde en les lançant dans l'aventure libérale. Vous mettez en péril des outils industriels essentiels à l'activité économique de notre pays. Vous poussez à des hausses de tarifs pour augmenter les fonds propres de l'entreprise et favoriser la concurrence. C'est le résultat de votre politique de désengagement de l'État et de votre participation à une construction européenne qui donne la priorité à la rentabilité du capital, y compris sur les ruines de nos entreprises publiques. (« La question ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est cela que la Constitution européenne veut pérenniser et que nous appelons à repousser, car nous pensons qu'une autre politique est possible.

Monsieur le ministre, allez-vous prendre conscience des dangers que vous faites courir à ces entreprises en les soumettant aux règles de rentabilité libérales dictées par la recherche d'une rémunération maximale et à court terme ?

M. le président. Monsieur Paul, veuillez poser votre question s'il vous plaît !

M. Daniel Paul. Allez-vous entendre les inquiétudes des salariés, des usagers, des collectivités locales et de nombreuses entreprises face à la dérive que vous imposez à EDF et à GDF ? (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur Paul, c'est la directive de 1998 qui a conduit le gouvernement que vous souteniez à faire adopter la loi du 10 février 2000 par laquelle votre majorité a ouvert le marché de l'électricité à la concurrence ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est vous qui l'avez fait ! C'est vous qui l'avez voulu ! Acceptez-en aujourd'hui les conséquences ! Quelles sont-elles ?

C'est, d'abord, la nécessité pour EDF d'être une entreprise européenne, de recourir aux marchés financiers, dans l'intérêt des salariés et de l'ensemble de la population française, pour pouvoir financer son développement au lieu de s'endetter et de mettre la société en péril comme vous l'aviez fait lorsque vous étiez au gouvernement.

M. Gilbert Biessy. Baratin !

M. le ministre délégué à l'industrie. C'est, ensuite, l'obtention d'une réciprocité. En effet, on ne peut pas vouloir conquérir des parts de marché en Italie et refuser que les Européens viennent chez nous.

Enfin, c'est l'occasion de remplir une condition indispensable : ouvrir notre marché national, comme est ouvert le marché européen.

Nous voulons faire d'EDF un champion non seulement national, mais européen, une grande entreprise. De votre temps, elle a été supplantée par des entreprises allemandes alors qu'elle était leader mondial et elle a régressé. Nous rattrapons cette politique par une politique d'ouverture qui n'est que la conséquence des décisions, souvent malheureuses, que vous avez prises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CANNABIS

M. le président. La parole est à M. Richard Dell-Agnola, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Richard Dell'Agnola. Monsieur le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, il y a quelques jours, vous avez lancé une grande campagne nationale d'information en direction des jeunes sur les dangers du cannabis. Cette campagne, d'une ampleur sans précédent, était très attendue. Elle est le signe d'un changement majeur d'attitude face à ce problème.

Après la banalisation, que l'on a regrettée pendant tant d'années, un discours vrai est enfin tenu sur les risques réels de la consommation de cannabis pour la santé. Toutes les études ont démontré sa dangerosité : risques accrus de développer un cancer ou une schizophrénie, troubles de la mémoire, difficultés scolaires, désocialisation. On connaît également ses conséquences sur la sécurité routière.

Cette campagne est le premier pas important vers une autre politique de lutte contre la drogue. Pour autant, la situation dans notre pays reste très préoccupante, parce que la consommation a triplé en dix ans et que près d'un jeune sur cinq consomme régulièrement du cannabis, ce qui fait de la France le premier pays consommateur en Europe, devant les Pays-Bas.

La politique de prévention dès le plus jeune âge que vous mettez en place est indispensable, mais nous devons aller plus loin. Il faut aussi rendre plus efficace notre politique de soins et réfléchir à une modification de la loi de 1970 qui est aujourd'hui dépassée et, de ce fait, inapplicable et inappliquée. Tel est le sens de la proposition de loi que j'ai déposée avec 150 de mes collègues, il y a quelques semaines.

Monsieur le ministre, ma question est double. Pouvez-vous informer la représentation nationale sur cette compagne de sensibilisation, la première du genre, et lui dire si cet effort sera poursuivi dans les années à venir ? Pouvez-vous également nous indiquer selon quelles méthodes et quel calendrier le Gouvernement entend mettre en place une politique globale qui rappelle, par une nouvelle loi, l'interdit dans ce domaine ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Monsieur le député, nous allons commencer aujourd'hui la première campagne de prévention, de lutte contre la consommation de cannabis. Pourquoi ?

Première raison : notre pays est le premier consommateur de cannabis en Europe avec l'Angleterre et la République tchèque. Un garçon de dix-huit ans sur cinq et une fille de dix-huit ans sur dix en consomment régulièrement, c'est-à-dire plus de onze jours par mois. Les chiffres ont été multipliés par trois en l'espace de vingt ans.

Deuxième raison : les consommateurs sont de plus en plus jeunes - des adolescents de quatorze à seize ans.

Troisième raison : la concentration en THC, composant le plus dangereux du cannabis, a triplé en quinze ans dans la cigarette.

Enfin, quatrième raison : depuis quatre ans, nous disposons de données scientifiques objectives qui montrent que le cannabis est dangereux et qu'il est à l'origine de troubles non seulement respiratoires, mais aussi neuropsychiques - diminution de l'attention, troubles de la mémoire responsables d'échec scolaire, intoxication aiguë, troubles relationnels avec l'entourage, en particulier avec les parents.

Voilà pourquoi nous menons une grande campagne de prévention, en direction du grand public, et mettons en place 230 consultations de cannabis. Surtout, les jeunes et leurs parents peuvent appeler un « numéro azur » gratuitement et de manière anonyme,...

M. Yves Nicolin. Très bien !

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. ...car l'on s'aperçoit qu'ils se posent de plus en plus de questions et souhaitent être pris en charge. La seule manière de combattre ce fléau est de dire la vérité aux jeunes et ne pas leur faire croire que ce produit, ce n'est rien, c'est moderne. Il est dangereux et occasionne des troubles neuropsychiques. Voilà la réalité ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

RACISME SUR LES TERRAINS DE SPORT

M. le président. La parole est à M. Louis-Joseph Manscour, pour le groupe socialiste.

M. Louis-Joseph Manscour. Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière, dans cet hémicycle, un député de votre majorité interpellait le ministre de l'intérieur sur les actes antisémites qui se développent sur le territoire national. Après les avoir condamnés avec fermeté, le ministre indiqua les mesures qu'il envisageait de prendre pour éradiquer ce fléau. La représentation nationale, dans son ensemble, approuva sa démarche. Mais force est de constater que la haine de l'autre et les préjugés raciaux ne transparaissent pas seulement dans les propos et actes de quelques milliers de néo-nazis. Le mal est beaucoup plus profond.

Nos terrains de sport, qui devraient être des sanctuaires de tolérance, sont hélas de plus en plus souvent le théâtre de spectacles bien désolants ! Nombre de sportifs portant dignement les valeurs du sport français au-delà même de nos frontières se font traiter de « singes », de « mangeurs de bananes » ou de « sales nègres ». (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Le 22 janvier dernier, à Strasbourg, lors d'un match de la Ligue nationale de basket, Nathalie Lesdema, joueuse émérite de l'équipe de France, se fait traiter de « sale noire » par des individus assis à quelques mètres de l'aire de jeu et contrefaisant des gestes de singes. Très choquée, Nathalie Lesdema porta plainte.

Ces propos imbéciles ne sont pas tenus par quelques individus isolés. Le phénomène gagne nos stades, la rue, notre société tout entière. Il est dangereux de laisser évoluer les consciences dans ce prisme odieux qui va du racisme le plus radical aux préjugés les plus stupides, en passant par toutes les formes de discrimination.

Face à ce mal pernicieux, les fédérations nationales et de nombreux sportifs de renom - Thierry Henry, Claude Makélélé, Lilian Thuram, pour ne citer qu'eux - se mobilisent pour mener une campagne médiatique de sensibilisation destinée à enrayer le phénomène. Quel merveilleux symbole, samedi dernier, au Parc des Princes, que cet échange de maillots noirs et blancs entre les joueurs du Paris Saint-Germain et ceux du Racing Club de Lens !

La mise en place de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité ne suffit pas. Des actes forts et significatifs sont nécessaires. Nos compatriotes attendent légitimement le soutien et la solidarité de votre gouvernement. Monsieur le Premier ministre, quelles réponses concrètes proposez-vous pour lutter contre ces imitateurs de singes et ces sauvages de gradins ? Quelles mesures plus globales et générales comptez-vous prendre pour qu'enfin, au sein de notre communauté nationale, le ventre de la bête immonde ne soit plus fécond ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains ainsi que sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je veux saluer avec vous les initiatives qui ont été prises par des joueurs, des clubs de supporters, des organisateurs de manifestations sportives pour lutter contre le racisme. En effet, celui-ci est inacceptable partout sur notre territoire, dans tous nos stades. Aucun slogan, aucune banderole, aucune manifestation de racisme ne peuvent être tolérés sur nos terrains de sport. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.) C'est pourquoi, avec Jean-François Lamour et Dominique Perben, nous avons décidé de renforcer les mesures de sécurité par des contrôles systématiques aux abords et à l'entrée des stades, par des fouilles, par la multiplication des caméras de vidéo surveillance, par la présence d'équipes de policiers en civil prêtes à intervenir à tout moment. Et j'entends prochainement autoriser les préfets à prononcer des interdictions administratives et à demander aux interdits de stade d'être présents dans un commissariat ou une gendarmerie pendant le déroulement des matchs.

M. François Rochebloine. C'est déjà le cas !


M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
En outre, j'entends prochainement autoriser les préfets à prononcer des interdictions administratives, qui imposeront aux interdits de stade d'être présents dans les commissariats ou les brigades de gendarmerie pendant les matchs.

M. Yves Bur. Très bien !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais nous voulons aller plus loin et, au-delà des stades, éliminer l'ensemble des groupes qui prônent le racisme et la violence.

C'est pourquoi, au terme de rapports circonstanciés de mes services, je serai amené à proposer en Conseil des ministres la dissolution des groupes concernés. Je veux croire que l'ensemble de ces dispositifs permettra d'éliminer le racisme des stades et des terrains de sport.

Vous savez que les Britanniques ont été amenés à prendre des décisions draconiennes, comme celle d'avancer l'heure des matchs en les déplaçant de la soirée vers la fin de la matinée ou le début de l'après-midi.

M. Pierre-Christophe Baguet. Cela n'a jamais été fait !

M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'espère que nous n'aurons pas à recourir à de telles mesures. Mais le racisme est contraire à l'esprit du sport et à l'esprit de la République, et notre détermination à le combattre est totale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française ainsi que sur plusieurs autres bancs.)

ENQUÊTE SUR L'EFFONDREMENT
DU TERMINAL 2E DE ROISSY

M. le président. La parole est à M. Rodolphe Thomas, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Rodolphe Thomas. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports et de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer, les conclusions de l'enquête administrative sur l'accident du terminal 2E de Roissy seront rendues publiques la semaine prochaine.

Les échos contradictoires rapportés dans la presse donnent une impression de confusion : de nombreux intervenants se mettent en cause les uns les autres et l'on parle même de mises en examen. À ce jour, les causes du drame, les fautes éventuelles et les responsabilités restent inexpliquées. Pourtant, quatre personnes ont perdu la vie.

Monsieur le ministre, par-delà les différentes enquêtes en cours, pouvez-vous faire le point sur la seule question qui intéresse les Français : quelles sont les causes de cet effondrement et qui sont les responsables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Vous avez raison, monsieur le député : dans une affaire comme celle-là, on ne peut pas cultiver l'ambiguïté et il ne saurait y avoir de confusion. Toute la lumière doit être faite.

Cette lumière, je l'ai demandée à la mission Berthier, dont le rapport, encore inachevé, me sera remis la semaine prochaine.

M. Francis Delattre. Encore un rapport à enterrer !

M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Ce rapport technique déterminera les causes matérielles du sinistre et comportera des recommandations à l'attention d'ADP, qui sera à même de dévoiler ses intentions et d'adapter en conséquence son plan d'investissement, ce qui contribuera à éclaircir la situation.

Par ailleurs, vous savez qu'une instruction judiciaire est en cours. Il lui appartiendra de déterminer, le cas échéant, les responsabilités, alors que le rapport Berthier est purement technique.

En outre, je vous confirme que le projet de loi sur les aéroports sera examiné ici même au début du mois de mars, donc avec un léger retard qui n'est dû qu'à l'encombrement du calendrier parlementaire.

Enfin, Hervé Gaymard et moi-même sommes d'accord sur le fait que l'ouverture du capital d'ADP pourra intervenir fin 2005 ou début 2006. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

SÉCURITÉ ROUTIÈRE

M. le président. La parole est à M. André Schneider, pour le groupe UMP.

M. André Schneider. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer, depuis 2002, le Gouvernement a eu à cœur de mettre en œuvre l'un des chantiers prioritaires du quinquennat fixés par le Président de la République : celui de la sécurité routière.

Chaque année, des milliers de morts et de blessés dus à l'irresponsabilité de certains conducteurs pesaient lourdement sur le vécu quotidien de nos concitoyens.

Face à ce drame national, le Gouvernement a mobilisé les moyens nécessaires pour réduire l'insécurité routière de manière significative. Les chiffres régulièrement publiés ont révélé un bilan très encourageant pour l'année 2004, puisque le nombre des accidents corporels a baissé de 6,5 %, le nombre des tués de 9 % et celui des blessés de 7,5 %.

Ces baisses sont d'autant plus significatives qu'elles font suite à celles des années 2002 et 2003, qui étaient respectivement de 6,2 % et de 20,9 % pour les tués, alors que, depuis vingt ans, les baisses avaient rarement dépassé le chiffre de 6 %.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer si cette dynamique observée depuis 2002, qui repose sur l'ensemble cohérent des actions volontaristes du Gouvernement, se poursuit en 2005 ? Par ailleurs, pensez-vous que les comportements positifs de nos concitoyens sur les routes vont s'inscrire dans la durée ? Enfin, quelles initiatives comptez-vous prendre pour améliorer la situation ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur le député, sans vouloir vous accabler de chiffres, je crois devoir en ajouter quelques-uns.

En janvier 2002, nous déplorions 592 tués sur les routes ; en janvier 2005, il y en a eu 385, ce qui représente 207 victimes en moins sur les routes de France. Ce résultat n'est pas seulement dû à la détermination du Gouvernement - à laquelle je vous remercie néanmoins d'avoir rendu hommage - mais au civisme renouvelé et renforcé de tous les conducteurs, que je remercie.

Les résultats de janvier sont à la fois positifs, puisqu'on enregistre une baisse de 4,7 % du nombre de tués, mais légèrement inquiétants. En effet, si le nombre de victimes a baissé, le nombre d'accidents corporels, lui, a augmenté.

Dès lors, nous devons prendre de nouvelles mesures. Je peux d'ores et déjà en citer trois.

Nous avons commencé d'expérimenter l'usage des feux de croisement le jour. Ce matin, nous avons entendu au ministère un expert de l'Union européenne qui a étudié l'application de cette mesure dans sept pays, dont l'Italie. Il nous a confirmé qu'elle est bénéfique et ne comporte aucune contre-indication. Allumer ses feux de croisement ne permet pas seulement de voir la route, mais d'être vu.

M. Maurice Leroy. Très bien !

M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. La deuxième mesure ne fera pas plaisir à tout le monde. Nous allons continuer à installer les radars sur les routes de France, parce que la vitesse est un facteur d'aggravation des risques et que, chaque fois que l'on installe des radars à un endroit accidentogène, le nombre d'accidents diminue de 85 %, ce qui est considérable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, nous nous attachons de façon précise, pendant cette période de vacances, à contrôler les départs et les arrivées des cars qui transportent des enfants ou des grandes personnes, car leur responsabilité est grande.

Vous le constatez, monsieur le député, la détermination des pouvoirs publics est intacte et même renforcée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

CONTRÔLES DE CONDITIONNALITÉ
DANS LES EXPLOITATIONS AGRICOLES

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Anciaux, pour le groupe UMP.

M. Jean-Paul Anciaux. Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité, les agriculteurs sont soumis, vous le savez, à des contrôles de plus en plus nombreux et complexes, qui ont parfois un caractère inquisitorial.

La notion de sensibilisation par un premier avertissement gratuit, en cas de légère infraction ou de non-respect des règlements par omission ou difficulté de compréhension, n'existe pas explicitement. Une seule erreur et l'ensemble des aides d'une exploitation peut être réduit.

Le principe de conditionnalité mis en place depuis le 1er janvier 2005, l'exigence de la grille nationale et la rigueur des sanctions prévue en cas d'écart alarment les agriculteurs.

La profession craint légitimement de manquer de temps et d'information pour se mettre en conformité avec les conditions qu'impose la nouvelle réglementation des aides directes.

Je vous soumets donc deux propositions.

La première est la création d'une mission d'information ou d'une commission d'enquête sur les écarts constatés entre les États membres tant dans la traduction des directives et réglementations européennes applicables, que dans la mise en place des outils de contrôle et dans la définition du statut, des fonctions et des qualifications exigées des contrôleurs.

En un mot, monsieur le ministre, je souhaite vérifier si la tendance nationale à trop en faire ne s'exerce pas aussi dans ce domaine. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

En second lieu, serait-il envisageable de considérer l'année 2005 comme une année presque « blanche », où pourraient être privilégiés la pédagogie, l'adaptation et le dialogue ?

J'aimerais connaître votre sentiment sur ces deux propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité. Votre question, monsieur Anciaux, qui vous a sans doute été posée dans votre département de Saône-et-Loire, est légitime et tous les agriculteurs français se la posent à juste titre.

En contrepartie des 8 milliards d'euros que l'Union européenne apporte chaque année à la ferme France, qui représentent 20 % des aides de la politique agricole, un certain nombre de mesures ont été mises en place, dont les contrôles des mesures environnementales auquel vous avez fait allusion.

Percevant bien la difficulté qu'ils posent, le Gouvernement a pris, sur instruction de M. le Premier ministre, des mesures pour qu'ils se passent bien.

Ils seront d'abord organisés dans le temps. J'ai donné instruction aux préfets et aux directeurs départementaux de l'agriculture de faire en sorte que les contrôles de toute nature sur les exploitations agricoles soient étalés, pour éviter l'accumulation anormale qui se produit parfois.

Ensuite, en ce qui concerne les mesures environnementales, les anomalies mineures et autres petites erreurs d'inattention ne seront pas constatées et, si l'on en relève plusieurs, elles seront dans un premier temps indiquées à l'exploitant sans qu'il y ait sanction. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il s'agit là d'une mesure de bon sens et vous avez raison, mesdames et messieurs les députés, de la saluer comme telle.

Enfin, si par hasard il y a sanction, en raison d'une erreur, elle n'interviendra jamais avant un dialogue préalable entre l'agriculteur et la direction de l'agriculture, ce qui est juste et républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

J'ajoute, monsieur Anciaux, que je vous propose de faire partie d'une mission d'information composée de parlementaires, de représentants des organisations agricoles et de spécialistes pour étudier comment les contrôles se déroulent dans les autres pays de l'Union européenne.

Peut-être pouvons-nous inverser la charge de la preuve, en envisageant, en accord avec l'Union européenne, l'instauration d'une norme préalable, sur le modèle des normes ISO, qui serait attribuée aux exploitations de manière à éviter une avalanche de contrôles.

Mme Sylvia Bassot. Très bien !

M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité. Avec vous et avec vos collègues, monsieur Anciaux, nous allons travailler sur ces propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Permettez-moi une précision, monsieur le ministre : les missions parlementaires sont décidées par l'Assemblée nationale. Celle que vous venez d'évoquer pourra s'effectuer si l'Assemblée le décide.

M. Jean Le Garrec. Très bien !

DÉCLARATIONS DE COMMISSAIRES EUROPÉENS
SUR LES DÉLOCALISATIONS

M. le président. La parole est à M. Henri Emmanuelli, pour le groupe socialiste. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Henri Emmanuelli. Monsieur le Premier ministre, le chômage, qui frappe près de 3 millions de personnes, reste, comme vous le savez, la préoccupation des Français et, je l'espère, du Gouvernement.

M. Charles Cova. Et le grand échec de Jospin !

M. Henri Emmanuelli. Les délocalisations représentent un des aspects les plus sensibles de ce problème. (« Oui ! » sur les bancs du groupe socialiste.) C'est si vrai que, à l'automne dernier, votre précédent ministre des finances, M. Sarkozy, s'en était saisi et avait annoncé des propositions. Je ne sais pas si elles se sont concrétisées, mais l'intention y était.

M. Michel Bouvard. En effet !

M. Henri Emmanuelli. Or hier, Mme Danuta Hübner, commissaire européen en charge des politiques régionales, a fait des déclarations publiées simultanément dans deux quotidiens, l'un français, l'autre allemand, qui me paraissent poser un problème sérieux.

Je la cite : « Prévenir les délocalisations, en France ou en Allemagne par exemple, les stopper par des règles artificielles travaillerait contre la compétitivité des entreprises. Ce que nous devons faire, au contraire, c'est faciliter les délocalisations au sein de l'Europe. Ainsi, les sociétés européennes seront globalement plus fortes, car elles pourront abaisser leurs coûts. »

Ces déclarations font suite à celles de Mme Kroes, commissaire à la concurrence, qui, la semaine dernière, condamnait par avance toute forme d'aide publique régionale, et donc toute possibilité de politique industrielle telle que préconisée par le rapport Beffa.

Ma question est donc simple, monsieur le Premier ministre : quelle va être la réaction du gouvernement français ? Votre majorité tolérera-t-elle longtemps que des commissaires européens piétinent les orientations politiques qu'elle annonce dans l'Hexagone ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le député, nous avons été surpris et choqués (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) par les propos de Danuta Hübner tels que les rapportait hier le quotidien La Tribune. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Il n'est pas concevable qu'un membre de la Commission, en particulier chargé de la politique régionale, fasse un plaidoyer en faveur des délocalisations. Nous avons dit très clairement à Mme Danuta Hübner que nous désapprouvions ses propos, qui ne servent ni la Commission ni l'Europe. (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le Premier ministre aura l'occasion de le redire à M. Barroso, président de la Commission, qu'il rencontre demain.

M. Jean-Pierre Brard. Ça va l'impressionner !

Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Il est normal que les entreprises cherchent à conquérir de nouveaux marchés, notamment dans les nouveaux États membres, mais nous devons combattre les délocalisations, qui sont des transferts d'emplois, où qu'elles se fassent, par une politique active et déterminée au niveau national et européen.

Au plan national, nous devons augmenter l'attractivité de notre pays. C'est ce que nous tentons de faire en développant des pôles de compétitivité : le Premier ministre et le Gouvernement ont pris des mesures importantes en ce sens. Nous devons également avoir une politique industrielle et de recherche ambitieuse. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) C'est l'objectif de l'Agence pour l'innovation industrielle que soutient le Président de la République.

Au plan européen, il nous faut avancer sur l'harmonisation fiscale, tant au niveau de l'assiette que des taux, et lutter contre le dumping fiscal. La France a fait des propositions, dont certaines ont déjà été retenues par la Commission. Ensuite, nous devons durcir les conditions d'attribution des fonds structurels, et Jacques Barrot, le vice-président de la Commission, a obtenu de lier ces subventions européennes au maintien de l'emploi. Enfin, il faut développer une politique de recherche ambitieuse au niveau européen. La France est déterminée et elle fait des propositions dans le cadre de la révision de la stratégie de Lisbonne.

Comme vous le voyez, monsieur le député, il n'y a pas de double langage du Gouvernement. Nous désapprouvons les propos de Danuta Hübner, et je dirai avec vous : oui à la solidarité, oui à l'emploi en Europe (« Non à cette Europe-là ! » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), et non aux délocalisations. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

APPLICATION DE LA LOI
SUR LA PRÉVENTION DES RISQUES TECHNOLOGIQUES

M. le président. La parole est à M. Alain Venot, pour le groupe UMP.

M. Alain Venot. Monsieur le ministre de l'environnement, le 30 juillet 2003, notre assemblée a voté le projet de loi sur la prévention des risques technologiques et naturels et la réparation des dommages. Première loi environnementale du gouvernement de M. Raffarin, elle a tiré, dans son volet consacré aux risques industriels, les enseignements de la catastrophe de Toulouse du 21 septembre 2001.

Cette loi vise à traiter les problèmes à leur source en développant la conscience du risque dans l'esprit de tous les partenaires, en donnant une place plus importante aux salariés dans la prévention et en remédiant aux problèmes d'urbanisme hérités du passé. Deux dispositifs sont fondamentaux à cet égard : les comités locaux d'information et de concertation, les CLIC, et les plans de prévention des risques technologiques, les PPRT.

Pour être régulièrement invité, en tant que rapporteur de ce projet de loi, à des colloques, débats ou conférences, je puis témoigner que ces dispositifs ont globalement donné satisfaction. Toutefois, on attend que la loi puisse s'appliquer complètement, et notamment que les CLIC et les PPRT soient créés. Depuis dix-huit mois, les décrets d'application les plus importants n'ont toujours pas paru,...

M. Michel Bouvard. Eh oui !

M. Alain Venot. ...ce qui suscite, je dois le dire, une certaine impatience, voire des doutes.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous dire dans quel délai ces décrets seront publiés ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député, ainsi que vous l'avez indiqué, la loi relative à la prévention des risques technologiques et naturels, qui a été élaborée à la suite de la catastrophe de Toulouse, est essentielle et très novatrice. Elle améliore la sécurité de nos concitoyens ainsi que leur information sur ces risques, et j'attache la plus grande importance à sa mise en œuvre effective.

S'agissant des comités locaux d'information et de concertation, le décret a été publié au Journal officiel vendredi dernier. Avant même la publication du décret, 130 comités ont été mis en place, ce qui témoigne de notre détermination et de notre mobilisation dans ce domaine. En ce qui concerne les plans de prévention des risques technologiques, huit expérimentations sont en cours. Il nous faut mettre l'accent sur la diminution des risques à la source ; c'est désormais chose faite. La saisine du Conseil d'État est en cours et la publication du décret interviendra dans les trois mois.

Enfin, pour ce qui est de l'ensemble du texte, je tiens à vous préciser que huit décrets ont été publiés, que sept sont en cours de publication et que neuf sont prêts à être soumis à l'examen du Conseil d'État. Le Premier ministre nous a demandé de nous mobiliser pour accélérer la publication des décrets d'application, afin de respecter le Parlement et les textes que vous votez. Les résultats sont là et sachez que ma détermination est totale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

IMMIGRATION ILLÉGALE EN GUADELOUPE

M. le président. La parole est à Mme Gabrielle Louis-Carabin, pour le groupe UMP.

Mme Gabrielle Louis-Carabin. Madame la ministre de l'outre-mer, la Guadeloupe est confrontée à une question particulièrement sensible, celle de l'immigration. En 2004, en particulier au mois de décembre, les incidents se sont multipliés. Ainsi, le 4 décembre, seize clandestins originaires de La Dominique sont repêchés au large des côtes de La Guadeloupe - deux d'entre eux ont disparu. Le 12 décembre, quarante-cinq clandestins haïtiens et cubains originaires de Haïti sont jetés à la mer, abandonnés par des passeurs. Le 14 décembre, une dizaine de clandestins originaires de Haïti sont arrêtés dans une camionnette accidentée. Le jeudi 3 février, trois clandestins originaires de La Dominique et de Sainte-Lucie, en proie à une mer déchaînée, échouent sur les côtes de ma commune : un mort. Ces faits révèlent que l'immigration illégale a pris de l'ampleur. Elle suscite un sentiment d'insécurité qui engendre la peur et des réactions xénophobes que je déplore.

Ils seraient, madame la ministre, plus de cinq cents à entrer illégalement, chaque mois, en Guadeloupe, à la recherche d'un certain bien-être social et économique, car notre archipel apparaît comme une zone de richesse dans la Caraïbe. L'augmentation du nombre des victimes de filières mafieuses et de celui des demandeurs d'asile suscite de graves interrogations sur l'adaptation de la politique migratoire de l'archipel guadeloupéen.

Si ma région reste une terre d'accueil, la forte pression migratoire qu'elle subit pèse lourdement sur ses services publics et bouleverse de manière durable son tissu économique et la cohésion sociale. Il faut savoir que certains immigrés viennent chercher du travail, mais que d'autres en profitent pour se livrer à des trafics illicites.

Il est donc urgent de réagir et d'adapter le dispositif législatif de la politique migratoire dans notre archipel. C'est pourquoi mon collègue Beaugendre et moi-même avons déposé une proposition de loi visant à étendre à l'archipel guadeloupéen le caractère non suspensif des recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière, comme cela est déjà le cas à Saint-Martin et en Guyane.

Par ailleurs, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les conditions de traitement des demandeurs d'asile, dont le nombre, qui a considérablement augmenté, est une preuve supplémentaire de l'inadaptation du dispositif aux réalités locales. Ne pensez-vous pas, madame la ministre, que des services de l'OFPRA pourraient être déconcentrés en Guadeloupe, afin de traiter plus humainement, plus efficacement et plus rapidement les dossiers des demandeurs d'asile ?

La maîtrise des frontières relevant du pouvoir régalien de l'État, une action forte et urgente s'impose. Pouvez-vous m'indiquer, madame la ministre, les mesures pragmatiques et durables que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour endiguer la recrudescence de l'immigration clandestine et ses conséquences néfastes ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'outre-mer.

Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Madame la députée, le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin mène depuis bientôt trois ans une action déterminée et énergique pour lutter contre l'immigration clandestine outre-mer. En 2004, les reconduites à la frontière ont concerné plus de 15 500 personnes, soit autant qu'en métropole. En Guadeloupe, où - vous avez raison de le souligner - ce phénomène a pris de l'ampleur, leur nombre a augmenté de près de 60 % par rapport à 2001.

Ces chiffres ne traduisent pas une augmentation de la pression migratoire ; ils résultent d'une lutte efficace contre l'immigration clandestine qui explique également l'augmentation du nombre des demandes d'asile, lesquelles proviennent de clandestins qui sont installés depuis de longues années en Guadeloupe et qui demandent aujourd'hui la régularisation de leur situation.

En 2005, le Gouvernement renforcera ses moyens d'action en Guadeloupe dans trois directions.

Tout d'abord, nous allons améliorer nos moyens de surveillance maritime sur l'ensemble des côtes de Guadeloupe. Nous étudions actuellement la possibilité d'y installer un radar de surveillance.

Ensuite, nous allons, avec Michel Barnier, réactiver les négociations avec La Dominique qui, comme vous le savez, est un point de passage privilégié pour l'immigration haïtienne et avec laquelle nous voulons conclure un accord de réadmission. Ces accords sont en effet efficaces. Nous en avons conclu avec le Brésil et le Surinam et nous en signerons un prochainement avec Sainte-Lucie.

Enfin, comme vous le souhaitez, l'OFPRA, qui doit jouer tout son rôle sur place, enverra désormais tous les deux mois une mission en Guadeloupe pour traiter les demandes d'asile.

J'ajoute que je soutiens sans réserve votre proposition visant à élargir à l'ensemble de la Guadeloupe le caractère non suspensif des recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière, qui n'est actuellement prévu que pour Saint-Martin et la Guyane. Je rappelle que cette mesure s'appliquait auparavant à l'ensemble des DOM mais qu'il y a malheureusement été mis fin en 1998 par le gouvernement socialiste. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Celui-ci a, en outre, supprimé les visas pour les ressortissants de certains États, notamment Sainte-Lucie, qui sont responsables d'une forte immigration clandestine.

Comme vous pouvez le constater, madame la députée, l'État exerce désormais sans laxisme ses compétences régaliennes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

TOGO

M. le président. La parole est à M. Serge Janquin, pour le groupe socialiste.

M. Serge Janquin. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

« Avec lui disparaît un ami de la France qui était, pour moi, un ami personnel », a déclaré le Président Jacques Chirac. Que Gnassigbé Eyadéma ait été un ami personnel de Jacques Chirac, seul ce dernier peut le dire.

M. Éric Raoult. Et de Mitterrand !

M. Serge Janquin. Il l'a remis à sa place à La Baule ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Qu'il ait été un ami de la France, qui se caractérise par des valeurs démocratiques, le respect de l'État de droit et des droits de l'homme et du citoyen, permettez-moi d'en douter.

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et votre ami Gbagbo ?

M. Serge Janquin. Le Togo vient de vivre un moment politique ubuesque et tragique. Le 6 février dernier, quelques heures après la mort du président Eyadéma, un successeur a été désigné par les forces armées, au mépris des règles fixées par la Constitution : il s'agit de Faure Eyadéma, l'un des fils du dictateur décédé. Les auteurs de ce coup de force ont bricolé un « pontage » institutionnel en l'installant manu militari à la présidence de la chambre des députés. L'intérim présidentiel est, en effet, selon la loi fondamentale togolaise, assuré par le président de l'Assemblée nationale, aujourd'hui démis et exilé.

Alpha Oumar Konaré, président de la commission de l'Union africaine, Mamadou Tandja, président de la CEDEAO, et le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, ont immédiatement et fermement condamné la violation des règles constitutionnelles. Ce tour de passe-passe institutionnel est inacceptable. La République héréditaire n'est plus la République, et la solidarité démocratique africaine nous interpelle.

Témoin de violations des lois électorales lors des élections présidentielles de 1993, auxquelles j'assistais en tant qu'observateur, j'avais publiquement dénoncé cet état de fait avant de suspendre ma participation à la mission de l'Assemblée. Il y a deux ans, le Parti socialiste a vivement regretté les félicitations adressées par le Président de la République, Jacques Chirac, après la réélection dans des conditions tout aussi contestables du président Eyadéma. La mort de Eyadéma et le tollé international que suscite l'organisation de sa succession risquent fort de marquer dans la sous-région un nouveau recul de l'influence politique de Paris, influence déjà contestée en Côte-d'Ivoire (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Claude Lenoir et M. Jean Leonetti. Papamadit !

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Janquin.

M. Serge Janquin. J'espère qu'au lendemain de cette farce institutionnelle à Lomé, le Gouvernement ne se contentera pas de suggérer comment le coup d'État pourrait être légitimé...

M. le président. Il faut conclure, monsieur Janquin !

M. Serge Janquin. ...et qu'il manifestera à l'égard du pouvoir en place au Togo fermeté démocratique et sanctions appropriées (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Le président Gnassingbé Eyadéma est décédé le 5 février dernier. Avec lui disparaît l'un des plus anciens responsables africains qui, parmi ses pairs, jouait un rôle important dans un grand nombre de médiations. Comme vous le savez, la constitution togolaise prévoyait que l'intérim de la présidence devait être assuré par le président de l'Assemblée nationale. Sous la pression militaire, la constitution a été révisée afin d'installer Faure Eyadéma, le fils du président, dans les fonctions de président de la République, jusqu'en 2008.

Contrairement à ce que vous affirmez, la France s'est montrée particulièrement vigilante. Elle a aussitôt pris contact avec les institutions internationales concernées, avec les États voisins du Togo, ainsi qu'avec la CEDEAO et son président. Par ailleurs, j'ai rencontré il y a deux jours le président Tandja à Niamey, avec qui j'ai évoqué cette question.

Faure Eyadéma a déclaré ce matin qu'il souhaitait organiser très rapidement des élections libres et démocratiques, qu'il voulait rouvrir les frontières du pays, et que le président de l'Assemblée nationale, qui se trouve aujourd'hui hors du Togo, y serait le bienvenu. Nous allons vérifier si ces choses sont justes. En ce moment même se tient à Niamey une réunion de la CEDEAO à laquelle nous sommes également très attentifs, qui doit vérifier si les promesses sont tenues. Si ce n'est pas le cas, la France jouera une fois de plus son rôle plein et entier dans le cadre des institutions internationales, en particulier dans le cadre de l'Union européenne, qui avait décidé de reprendre des négociations de partenariat avec le Togo à partir du mois d'avril prochain. Quoi qu'il en soit, la France encourage le respect de la légalité républicaine, au Togo comme ailleurs (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

DESSERTE AÉRIENNE DE L'OUTRE-MER

M. le président. La parole est à M. Joël Beaugendre, pour le groupe UMP.

M. Joël Beaugendre. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Limiter les conséquences de l'éloignement géographique entre la France continentale et ses départements d'outre-mer est un enjeu majeur pour ces économies insulaires tributaires de l'offre de transport. Éloignement et étroitesse du marché font du transport aérien le moyen le plus rapide et le plus fiable pour la libre circulation des personnes et des marchandises. Dès lors, pour l'outre-mer, on ne peut dissocier la problématique du développement économique de la baisse des tarifs aériens. Si aujourd'hui, le dispositif de continuité territoriale s'est enrichi de mesures concrètes, le prix des billets d'avion n'a pas connu de baisse sensible.

Au mois de mars 2004, mon rapport sur la desserte aérienne outre-mer préconisait l'institution d'une politique tarifaire spécifique. Elle poserait les conditions d'une diminution de tarif plus adaptée aux besoins des ultramarins. Dans ce cadre, une révision des obligations de service public sur les liaisons entre l'outre-mer et la France continentale s'impose. Telle est la proposition figurant dans mon rapport. Aujourd'hui, la notion de service public doit prévaloir, et la rentabilité de la desserte aérienne doit être plus économique que financière. Le groupe Air France a décidé l'été dernier d'une augmentation du prix du billet, au prétexte d'une montée du prix du baril de pétrole. Depuis, bien que le coût du pétrole ait diminué et que le groupe Air France et KLM aient rendu publics leurs bons résultats, les réductions tarifaires ne sont pas pour autant d'actualité. Il me paraît souhaitable que votre ministère fasse en sorte que les populations ultramarines bénéficient dès que possible de ces retombées. Aussi, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous fassiez connaître à la représentation nationale les décisions du Gouvernement sur ce dossier d'importance pour mes compatriotes, tant en matière tarifaire que pour renforcer les obligations de service public (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État aux transports et à la mer.

M. François Goulard, secrétaire d'État aux transports et à la mer. La desserte aérienne des départements et territoires d'outre-mer est effectivement d'une importance vitale. C'est la raison pour laquelle, monsieur le député, votre rapport remis au titre de la mission parlementaire consacrée à ces questions, a fait l'objet d'un examen particulièrement attentif de la part du Gouvernement.

La loi de programme pour l'outre-mer du 21 juillet 2003 a déjà changé la donne, avec l'instauration d'une dotation de continuité territoriale s'élevant à 30 millions d'euros en 2004 et 31 millions d'euros en 2005, dont 20 millions d'euros consacrés aux départements d'outre-mer. Cette dotation a d'ores et déjà permis aux régions de proposer des réductions de l'ordre de 30 % pour les plus modestes.

En ce qui concerne les Antilles et la Réunion, on peut considérer que la présence de trois compagnies assure une certaine concurrence et que c'est bien l'augmentation du prix du pétrole, donc du kérosène, qui est à l'origine de la hausse des tarifs de l'année dernière. Il n'en est pas de même pour la Guyane. Quoi qu'il en soit, le Gouvernement est convaincu qu'il faut travailler à la question des obligations de service public, et a émis deux propositions en ce sens. La première consiste à étendre le tarif spécifique dont bénéficient les jeunes de moins de douze ans aux jeunes de moins de dix-huit ans. La deuxième consiste à instaurer une priorité absolue à l'embarquement pour nos compatriotes qui doivent se déplacer en raison d'un décès dans leur famille. Ces propositions ont été soumises aux collectivités territoriales, dont nous attendons de connaître la position. En tout état de cause, nous souhaitons modifier ces obligations de service public dès l'été prochain. Comme vous le voyez, monsieur le député, les préoccupations du Gouvernement en matière de desserte aérienne de l'outre-mer rejoignent totalement les vôtres (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

PLAN DE SAUVETAGE D'ALSTOM

M. le président. La parole est à M. Damien Meslot, pour le groupe UMP.

M. Damien Meslot. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, l'été dernier, votre prédécesseur Nicolas Sarkozy bouclait un plan de sauvetage du groupe Alstom au terme d'une longue négociation avec la commission européenne. Ce plan a évité le démantèlement du groupe et a permis à Alstom d'entamer son redressement. Or, il y a quelques jours, la commissaire européenne à la concurrence, Mme Nelly Kroes (« Ah ! » sur plusieurs bancs), a menacé d'attaquer la France en justice, lui reprochant de ne pas tenir ses engagements. Mme Kroes a affirmé que le non-respect des engagements pris lors de la négociation du plan de restructuration du groupe Alstom en juillet 2004 en contrepartie de l'aide de l'État de 2,4 milliards d'euros, l'obligerait à la déclarer illégale et à en demander le remboursement. Cette perspective a évidemment provoqué une grande inquiétude parmi les salariés du groupe, en particulier à Belfort.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer quant à la pérennité du plan de sauvetage mis en place en juillet dernier, et nous dire où en sont les négociations entre vos services et ceux de la Commission européenne ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l'industrie.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Je vous prie de bien vouloir excuser M. Gaymard, retenu par des obsèques qui touchent d'ailleurs l'ensemble du Gouvernement.

La lettre adressée par Mme Kroes au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est claire. Elle rappelle que pour autoriser l'intervention du Gouvernement dans la sauvegarde d'Alstom, la Commission a exigé des contreparties de la part d'Alstom et de l'État français. La société Alstom a rempli ses obligations et la Commission ne lui réclame rien. Le Gouvernement, lui, est parfaitement décidé à remplir ses engagements en matière d'ouverture du marché ferroviaire, notamment de mise en œuvre anticipée de la directive ferroviaire de 2004, mais il est un peu en retard pour des raisons techniques. Nous sommes en discussion avec la Commission pour renégocier le calendrier, un dialogue que la commissaire a qualifié de constructif, et nous sommes confiants quant à son aboutissement. Je vous rassure, le Gouvernement respectera ses engagements et n'a pas l'intention d'abandonner les salariés d'Alstom (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)


Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

    2

RÉFORME DE L'ORGANISATION
DU TEMPS DE TRAVAIL DANS L'ENTREPRISE

Explications de vote et vote,
par scrutin public, d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise (nos 2030, 2040).

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué aux relations du travail, monsieur le rapporteur, chers collègues, faisant preuve d'un autoritarisme éhonté et de mépris - comme à l'habitude - à l'égard des mouvements sociaux auxquels on a assisté le week-end dernier partout dans le pays, le Gouvernement et la majorité sont allés jusqu'au bout avec cette proposition de démantèlement des 35 heures. Ce faisant, vous allez contre le processus historique de réduction du temps de travail. Au lieu de poursuivre en ce sens, vous mettez brutalement un coup d'arrêt à ce processus, en rouvrant la semaine des 40 heures. Jamais depuis 1936 (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), un gouvernement n'avait osé allonger la durée du travail !

M. Jean Marsaudon. C'est fait !

M. Yves Fromion. Nous n'allongeons pas la durée du temps de travail, nous apportons des assouplissements à la législation !

M. Maxime Gremetz. C'est un recul historique sans précédent.

Pourtant, en nous appuyant sur les dispositions de la loi de 1998, nous aurions pu aller plus loin. En effet, cette loi trouvait tout son sens en privilégiant une réduction du temps de travail négociée, qui conciliait l'obligation de créer des emplois stables, des aides publiques, et une nouvelle organisation du travail. Elle avançait également pour la première fois la notion d'accord majoritaire et des droits nouveaux pour les comités d'entreprise et les salariés en matière d'intervention et de contrôle.

Ce qui ne fut plus le cas, malheureusement - et nous l'avons dit, à l'époque -, avec la seconde loi Aubry en janvier 2000 qui a permis la flexibilité et l'intensification du travail associées à un blocage, et même parfois à une diminution, des salaires. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est pour cela qu'elle a été diversement appréciée.

M. Patrick Ollier. Il ne fallait pas la voter, monsieur Gremetz !

M. Arnaud Lepercq. Cette loi a été une catastrophe !

M. Maxime Gremetz. Engagés dans une cabale idéologique, votre seul souci avec ce texte a été de confirmer votre soumission devant les diktats du MEDEF et du patronat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il suffit, pour s'en convaincre, d'entendre le baron Seillière vous applaudir.

M. Arnaud Lepercq. Le bon temps des maîtres de forges, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Vous proposez donc une véritable supercherie aux salariés qui pourront travailler plus pour gagner moins. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Ollier. C'est faux !

M. Arnaud Lepercq. Mensonge !

M. Maxime Gremetz. Vous imposez les heures supplémentaires moins payées, l'instauration du salaire à crédit avec le détournement du compte épargne temps et un temps « choisi » décidé unilatéralement par l'employeur qui pourra faire travailler jusqu'à 48 heures par semaine sans passer par l'autorisation de l'inspection du travail.

M. Jean Marsaudon. C'est la liberté !

M. Maxime Gremetz. Vous pressez les salariés dans des accords individuels avec l'employeur pour les isoler, empêcher leur organisation collective et donc renforcer la subordination. C'est un nouveau recul dans notre législation sociale.

Tout cela est dans la lignée de ce que vous proposez, par le biais du projet de Constitution européenne, avec vos amis chefs d'États européens, MM. Blair, Schröder, Zapatero, qui sont vos modèles ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

De nombreux députés du groupe UMP. Ce sont des socialistes !

M. Maxime Gremetz. J'en veux pour preuve deux faits d'une gravité exceptionnelle : tout d'abord la directive Bolkestein, dont la Commission européenne vient de refuser le retrait - et vous n'en avez rien dit, monsieur le ministre ! La Constitution européenne que vous voulez faire accepter aux Françaises et aux Français va entériner cette directive et c'est le droit social du pays d'origine qui s'appliquera. Ainsi, des travailleurs slovaques ou polonais qui travailleront en France seront soumis à la législation de leur pays ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Yves Fromion. Il n'a rien compris !

M. Jean-Jacques Descamps. Quel amalgame !

M. Maxime Gremetz. Cela remet en cause les fondements de notre démocratie sociale, qui veut que tous les salariés soient protégés par le code du travail.

Autre fait révélateur : c'est Danuta Hübner, commissaire européen à la politique régionale, annonçant tranquillement hier, dans un quotidien, qu'il faut faciliter les délocalisations, que c'est bon pour le pays, pour l'économie et pour le marché ! Mais est-ce bon pour les salariés ?

Voilà le vrai visage de votre prétendue Europe sociale. Il n'y a pas, contrairement à ce que certains affirment, une politique de régression sociale en France et une politique de progrès en Europe. Toute votre action est au service du MEDEF (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...

M. Francis Delattre. Il vaut mieux être au service du MEDEF que du goulag !

M. Maxime Gremetz. ...des multinationales et des marchés financiers, contre les salariés et les peuples européens. Je lis dans la presse que les partisans du oui s'inquiètent, à juste titre. Plus que jamais, ceux qui veulent une Europe sociale, démocratique, solidaire et pacifique doivent se rassembler derrière le non. C'est la seule perspective de changement, dans notre pays et en Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean Marsaudon. Vous faites déjà la campagne pour le référendum !

M. Maxime Gremetz. Dans ce contexte, et face à cette entreprise de démolition, qui n'a pas d'autre justification que de conforter les intérêts privés de certains patrons, au détriment des droits des salariés et de leur pouvoir d'achat, il faut au contraire affirmer une ambition nouvelle pour la réduction du temps de travail. Nous l'avons dit, nous ne sommes pas pour un retour brutal à la loi Aubry II. Nous préférons, et nos amendements l'ont démontré, développer autour d'un axe fort réduction du temps de travail, aides publiques et obligation de créer des emplois stables et correctement rémunérés.

Il faut assurer une réelle démocratie dans l'entreprise, avec un comité d'entreprise aux pouvoirs rénovés et donner aux salariés un droit de regard sur les choix stratégiques.

Plusieurs députés du groupe UMP. Vous parlez depuis plus de cinq minutes !

M. Maxime Gremetz. Il conviendrait également de revenir sur la législation sur le travail de nuit des femmes dans l'industrie, qui représente un recul social de cent ans, mais aussi sur la définition des astreintes et sur le contrôle des fonds publics destinés à l'emploi. Autant de points qui dessinent la réforme qu'il faudrait engager en matière de législation sur le temps de travail pour en faire un véritable outil de transformation sociale.

Les sondages de la semaine passée ont été confortés par l'exceptionnelle mobilisation de ce week-end qui a ressemblé 500 000 personnes dans tout le pays. Mais vous n'entendez pas, monsieur le ministre, vous n'écoutez que d'une oreille, et c'est la droite, celle du patronat et du MEDEF ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous n'entendez pas les 77 % de Français qui soutiennent les 35 heures, ni les lycéens ! Monsieur le ministre, dans l'intérêt de la France, écoutez davantage les Français et prenez en compte leurs exigences.

Le débat sur cette proposition de loi, prétendument de l'UMP puis reprise par le Gouvernement...

M. Patrick Ollier. Oui monsieur Gremetz, c'est une proposition de loi de l'UMP, et nous en sommes fiers !

M. Maxime Gremetz.... ne va pas s'arrêter aujourd'hui avec le vote ! Vous avez la majorité ici, mais vous êtes ultra-minoritaires dans le pays ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Mais nous en reparlerons, car le débat sur la loi sur la réduction du temps de travail ne fait que commencer.

Dans l'intérêt de notre pays et des salariés, le groupe communiste et républicain, qui a proposé des amendements essentiels, votera résolument contre la mort de la réduction du temps de travail. Mais quel que soit le résultat du vote, nous construirons, avec les travailleurs et toutes les catégories de salariés, une véritable réduction du temps de travail, car elle est inscrite dans l'histoire de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Novelli, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Alain Néri. La voix du MEDEF !

M. Hervé Novelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans quelques instants nous nous prononcerons sur l'adoption de la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise. Je souhaite avant tout vous parler de la fierté que j'éprouve en cet instant et évoquer les convictions qui m'animent.

M. Jacques Desallangre. C'est de la fierté mal placée !

M. Hervé Novelli. Je suis fier d'être cosignataire de cette proposition de loi, avec mes collègues Pierre Morange, le rapporteur, Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires sociales et Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, mais surtout, je suis fier de contribuer à donner un nouvel élan à notre économie. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

Cette proposition de loi que nous avons déposée a été soutenue par l'ensemble des parlementaires du groupe UMP, et je les en remercie, car elle traduit la vitalité de notre assemblée. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Il est intéressant de noter qu'à un moment où certains se plaignent de l'effacement du Parlement, c'est une initiative parlementaire qui sera soumise dans quelques instants à votre vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je souhaite également remercier M. le ministre délégué aux relations du travail qui, sous l'autorité du Premier ministre et en accord avec la présidence, a inscrit ce texte à l'ordre du jour de notre assemblée.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C'est normal, c'est le texte du Gouvernement !

M. Hervé Novelli. J'ai la conviction que cette proposition de loi est de nature à résoudre, sans dogmatisme et de façon réaliste, une partie du problème du pouvoir d'achat de nos concitoyens.

M. Jean Le Garrec. Non, pas cela !

M. Hervé Novelli. Cette proposition de loi, en permettant à ceux qui le souhaitent, et seulement à ceux-là, de travailler plus, dans le cadre d'un accord collectif, (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) donc d'être payés en conséquence, améliorera le pouvoir d'achat d'une partie de nos concitoyens. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gaëtan Gorce. Laquelle ?

M. Hervé Novelli. J'ai également la conviction qu'en permettant aux salariés de travailler, toujours de manière volontaire et sous couvert d'un accord collectif, au-delà du contingent fixé d'heures supplémentaires, nous leur donnons une liberté supplémentaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. André Chassaigne. Cela ne se passe pas comme cela dans les entreprises !

M. Hervé Novelli. Je vous pose la question, mes chers collègues : au nom de quel archaïsme, au nom de quelle injonction empêcherions-nous les salariés d'être un peu plus libres après l'adoption de cette proposition de loi qu'ils ne l'étaient auparavant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

J'ai enfin la conviction qu'en plaçant ces libertés nouvelles sous le contrôle de l'accord d'entreprise ou de branche, nous affirmons notre foi dans une relance du dialogue social et de la négociation, qui ont été ces dernières années très pénalisés, vous le savez bien.

M. François-Michel Gonnot. Oui !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Le dialogue social, vous ne savez pas ce que c'est !

M. Hervé Novelli. Je pense bien sûr, comme vous tous, à l'application brutale des lois Aubry et au désarroi dans lequel celles-ci ont placé de nombreux salariés de notre pays.

Mes chers collègues, le groupe UMP adoptera cette proposition de loi, car en l'adoptant nous disons oui à une augmentation des salaires et à l'amélioration du pouvoir d'achat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Vidalies. Quelle honte !

M. Hervé Novelli. En l'adoptant, nous disons oui à la relance du dialogue social dans ce pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous disons enfin oui aux libertés supplémentaires, gage d'un meilleur épanouissement personnel.

En votant ce texte, mes chers collègues, nous votons pour l'avènement d'un nouveau contrat social, basé sur la primauté de la négociation et du contrat, susceptible de revaloriser le rôle des acteurs sociaux et de faire de notre pays une démocratie adulte et apaisée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Avant de donner la parole aux orateurs suivants, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de rejoindre l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste.

M. Gaëtan Gorce. La voix que nous venons d'entendre n'est pas celle de la liberté ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La voix que nous venons d'entendre, c'est celle qui veut faire reculer dans ce pays les droits sociaux, (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) qui veut s'attaquer au code du travail (Mêmes mouvements) et qui considère qu'il n'y a de cohésion que s'il n'y a plus ni protection ni règle collective.

C'est vrai, monsieur Novelli, que nous avons sur ce sujet des points de vue différents, on peut même parler de fracture.

M. Jean-Michel Fourgous. Ce qui compte, c'est ce que pensent les salariés dans les entreprises !

M. Gaëtan Gorce. J'observe d'ailleurs que de nombreux membres de votre majorité s'inquiètent, ne sachant pas où veut les conduire ce gouvernement (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) tant vous allez loin dans la remise en question des règles sociales qui étaient l'usage et la tradition dans ce pays.

M. Jean-Michel Fourgous. Les 35 heures sont indéfendables ! Vous êtes ridicule !

M. Gaëtan Gorce. Le texte que vous nous avez présenté n'est pas acceptable pour de nombreuses raisons, et pour éviter une trop longue énumération, je n'évoquerai que quatre d'entre elles.

La première est que ce texte a été élaboré et qu'il va être soumis à notre vote au mépris des règles de la concertation sociale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et au mépris des règles du dialogue social que vous aviez vous-mêmes établies. Dans la loi Fillon, vous avez pris l'engagement solennel d'une concertation préalable à toute modification substantielle des règles du droit du travail. Vous l'avez oublié dès que vous en avez eu la possibilité et, la semaine dernière, vous avez tenté de passer en force en imposant votre volonté au pays.

Monsieur Novelli, monsieur le ministre, vous recevez dans cet hémicycle les applaudissements de votre majorité. Profitez-en, car lorsque vous en sortirez, vous entendrez la réprobation du pays, des salariés et de leurs représentants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. -Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La seconde raison est que vous mettez à mort la durée légale du travail dans notre pays.

M. Jean-Michel Fourgous. C'est minable !

M. Gaëtan Gorce. À compter du vote de ce texte, il n'y aura plus de référence en matière de durée légale du travail. En augmentant les contingents d'heures supplémentaires, vous organisez le retour aux 40 heures. (« Ce n'est pas vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Si ce que je vous dis ne vous dérangerait pas, vous ne chercheriez pas à m'interrompre, mais vous n'aimez pas que l'on remette en cause le texte que vous allez voter aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

La durée légale du travail est remise en cause à travers ce texte par les contingents d'heures supplémentaires, par tous les mécanismes de dépassement que vous avez prévus et qui inviteront les salariés à faire des heures en plus sans qu'elles soient rémunérées au tarif des heures supplémentaires ni inscrites sur le contingent.

Mme Marylise Lebranchu. Très bien !

M. Gaëtan Gorce. Votre slogan : « Travailler plus pour gagner plus » est un leurre ! C'est une tartufferie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.- Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est une tartufferie dont les salariés ont déjà pris conscience car ils savent depuis trois ans que lorsque vous parlez de pouvoir d'achat, vous êtes incapables de le concrétiser sur leur feuille de paie. C'est tout aussi vrai pour la fonction publique.

M. Jean-Michel Fourgous. Et travailler moins pour gagner plus, qu'est-ce que c'est ? Une fumisterie !

M. Gaëtan Gorce. Monsieur Fourgous, gardez votre sang-froid !

La troisième raison, c'est que vous vous attaquez aux règles fondamentales de notre droit du travail. Vous introduisez dans ses dispositions ce qu'il faut bien qualifier une dérive à l'anglo-saxonne...

M. François-Michel Gonnot. Et alors ?

M. Gaëtan Gorce. ...puisque pour la première fois dans ce pays, on organise un système dans lequel l'employeur et le salarié, supposés à égalité, pourront remettre en question les fruits d'une négociation collective. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Autrement dit, vous invitez les salariés à renoncer individuellement aux avantages qu'ils ont collectivement négociés par l'intermédiaire des partenaires sociaux. Il s'agit d'un changement radical dans notre conception du droit du travail. Cette brèche que vous ouvrez dans nos traditions et nos principes sociaux est dangereuse, il faudra la colmater.

Mais le plus grave, c'est que vous instaurez définitivement dans ce pays un système à deux vitesses, système amorcé avec la loi Fillon. (« Et vos cinq SMIC » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)Au travers de ce texte, vous signifiez aux millions de salariés qui ne sont pas encore passés aux 35 heures qu'ils ne bénéficieront jamais de ce progrès et de cette avancée ! Les salariés des petites entreprises, de moins de vingt salariés, ne bénéficieront pas des 35 heures ! Nous devons leur dire ce soir, car telle est la réalité ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Lucien Degauchy. Baratineur !

M. Gaëtan Gorce. Alors, je conçois bien que vous soyez pressés d'en finir ! Comme vous n'êtes pas capables d'entendre la voix des partenaires sociaux, celle de l'opposition vous dérange ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Pour autant, je tiens à vous dire que vous n'en avez pas fini avec ce débat, ni dans cet hémicycle, ni au Sénat, ni dans l'ensemble du pays (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), car vous êtes en train de mener un combat d'arrière-garde ! Vous défendez une vision ringarde de notre économie et de notre société (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) en considérant que l'avenir pour les salariés consiste à augmenter la durée du temps de travail plutôt que de chercher à agir sur leur qualité et leur rémunération ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.- Brouhaha et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Arrêtez ! Ridicule !

M. Gaëtan Gorce. Au fond, quand je vois les réactions que peut susciter la voix de l'opposition qui défend le principe d'un progrès social et l'idée de la réduction du temps de travail pour les salariés, je me dis qu'en votant la loi du 19 janvier 2000, nous avons bien fait ! Nous avons servi à la fois le progrès économique et le progrès social, ce dont vous êtes incapables ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vous pouvez toujours voter les lois que vous voulez, elles ne seront pas acceptées par ce pays et elles seront revues, discutées et corrigées dès lors que la concertation et la négociation retrouveront tous leurs droits.

Monsieur le ministre, à cause des dangers qu'il comporte, je suis convaincu que ce texte que vous vous apprêtez à faire voter ne pourra pas être appliqué et n'obtiendra pas l'assentiment des Français. Je vous invite donc, le débat parlementaire n'étant pas définitivement clos, à écouter, enfin, la voix des Français qui condamnent votre politique économique, votre politique sociale et vos débordements idéologiques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.- Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Perruchot, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Nicolas Perruchot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs, je commencerai par poser une question : cette proposition de loi justifiait-elle un tel débat, de tels affrontements ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Oui !

M. Nicolas Perruchot. Il semble bien que non. Aux yeux du groupe UDF, la proposition de loi portant réforme du temps de travail n'est ni le « grand soir » attendu par la droite, ni la remise en cause insupportable d'acquis sociaux invoquée par la gauche (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) : elle n'est pour nous qu'un aménagement à la marge, technique, de l'organisation du temps de travail dans notre pays.

Ce à quoi on se heurte ici pourrait être qualifié de « problème de méthode ». D'abord, on l'a dit, ce texte n'est pas la grande réforme annoncée et ne fait qu'accentuer les clivages en empêchant tout débat apaisé.

Au-delà du débat de fond, cela s'explique largement par une légère erreur de calendrier. La question des 35 heures aurait dû être débattue dès le début de la législature. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.) Mais le Gouvernement n'a pas eu le courage d'aborder cette question de la réforme du temps de travail dès 2002 (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.). On peut donc se satisfaire des assouplissements proposés, mais on peut surtout regretter le retard avec lequel nous traitons ce sujet pourtant majeur.

M. Bruno Le Roux. Il faut retirer le texte !

M. Nicolas Perruchot. Malgré la grande persévérance et le travail de Pierre Morange, rapporteur du texte, et d'Hervé Novelli, rapporteur de la mission d'information et auteur du rapport d'information sur l'évaluation des conséquences économiques et sociales de la législation sur le temps de travail (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), je suis au regret de constater que ce texte ne reprend quasiment aucune de ses conclusions.

Soulignons d'abord à quel point, loin de créer des emplois, les lois Aubry ont contribué à la destruction d'un trop grand nombre d'emplois. (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Certes, les grandes entreprises nous exhortent aujourd'hui à ne pas défaire un système auquel elles commencent tout juste à se faire.

M. Jacques Desallangre. Elles en ont bien profité !

M. Nicolas Perruchot. Mais la situation des PME est bien différente, et je ne crois pas qu'il s'y trouve beaucoup de monde pour y défendre les 35 heures.

Pour autant, soulignons qu'il ne serait pas opportun de revenir de manière autoritaire aux 39 heures, comme il avait été décidé, en son temps, de passer arbitrairement aux 35 heures.

Ensuite, il est aussi nécessaire de rappeler que la réforme du temps de travail a profondément modifié la mentalité des salariés, avec une augmentation du stress lié au décompte précis de leur temps de travail. Elle a généré des disparités, créant une société de salariés à plusieurs vitesses, ce qui est pour le moins paradoxal pour une loi dite de gauche.

Mais que la polémique, qui peut parfois s'instaurer dans ces travées avec un peu trop de facilité, ne nous fasse pas oublier la gravité du sujet. Derrière les chiffres, il y a des salariés, et il est grandement nécessaire de veiller à ce que les personnes occupant les emplois les plus défavorisés ne soient pas, à chaque fois, les perdantes de nos textes.

M. Jean Dionis du Séjour et M. Maurice Leroy. Très bien !

M. Nicolas Perruchot. C'est pourquoi le groupe UDF a abordé cette proposition de loi portant réforme du temps de travail avec un sentiment mêlé de satisfaction et de perplexité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Satisfaction, comme l'a exprimée notre président de groupe, Hervé Morin, lors de la discussion générale, du fait de l'assouplissement du compte épargne temps, certes peu utilisé et peu alimenté lorsqu'il est en place, mais somme toute bienvenu, tout comme l'est la création du régime des heures choisies.

À l'UDF, nous pensons que tout ce qui permet une plus grande liberté de choix pour les salariés est une bonne chose.

M. Maurice Leroy et M. François Rochebloine. Très bien !

M. Nicolas Perruchot. Les députés de notre groupe restent toutefois perplexes sur plusieurs points.

D'abord, le texte n'a pas apporté de réponse à la question majeure de la relance du pouvoir d'achat des salariés, fortement réduit par le coût de la mise en place des 35 heures. Le débat n'a pas permis de creuser la question essentielle du lien entre durée du travail et pouvoir d'achat.

Ensuite, une question se pose. Les partenaires sociaux ont été invités à ouvrir de nouvelles négociations pour que les assouplissements aient lieu : est-ce bien réaliste ? Compte tenu du paysage syndical, des difficultés que connaissent les syndicats qui se sont engagés dans des accords comme celui sur les retraites, il semble aujourd'hui que non.

Ainsi ce texte, qui se veut une réforme, n'en est pas une. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean Le Garrec. Voilà !

M. Nicolas Perruchot. On peut le qualifier de débat de posture. Ce ne sont pas les propositions attendues qui devaient permettre une hausse du pouvoir d'achat des salariés et participer à la baisse des coûts salariaux pour les entreprises. Ce n'est en aucun cas le texte que nous attendions pour permettre la relance de l'économie française !

Nous pensons que cette proposition risque de faire l'unanimité des mécontents : de celles et ceux qui souhaitent travailler plus, car le texte ne change rien, comme de celles et ceux qui, étant attachés aux 35 heures, ont le sentiment qu'on remet en cause un droit acquis.

Et surtout, ce texte crée une injustice : il proroge pour les salariés des entreprises de moins de vingt salariés un régime de majorations des heures supplémentaires moins avantageux. Le groupe UDF n'accepte pas cette situation, alors même que ces salariés ont des avantages sociaux moindres, comme l'absence de comité d'entreprise ou l'absence d'accès à un régime de prévoyance.

L'UDF, convaincue de la nécessité de payer de manière égale les heures supplémentaires des salariés des entreprises de plus ou de moins de vingt salariés, et de la nécessité d'exonérer les entreprises des charges sociales à due proportion, a proposé par voie d'amendement un dispositif juste, permettant de relancer le pouvoir d'achat des salariés. Nous n'avons pas été entendus. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Malgré tout, au nom de l'équité, nous demandons au Gouvernement de réfléchir au cours de la navette à un dispositif assurant la même bonification des heures supplémentaires, quelle que soit la taille de l'entreprise, avec un dispositif d'exonération des charges sociales supplémentaires.

Avec cette proposition de loi, ce sont les petites entreprises, celles qui ont le plus besoin de faire effectuer des heures supplémentaires, qui seront pénalisées. Monsieur le ministre, vous devez trouver le moyen de mettre fin à cette injustice : les salariés de ces entreprises donnent autant que les autres, ils doivent donc recevoir autant.

Mme Marylise Lebranchu. Vous votez contre ?

M. Nicolas Perruchot. Mes chers collègues, le groupe UDF votera cette proposition (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.- Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour saluer les assouplissements qu'elle introduit, même s'ils sont insuffisants, sans toutefois se faire d'illusions sur sa portée économique et sociale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Mes chers collègues, je vais maintenant soumettre à votre vote l'ensemble de la proposition de loi portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise.

Le scrutin est ouvert.

..................................................................

M. le président. Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin :

                    Nombre de votants 550

                    Nombre de suffrages exprimés 550

                    Majorité absolue 276

        Pour l'adoption 370

        Contre 180

L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Je suspends la séance pour quelques minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de Mme Paulette Guinchard-Kunstler.)

PRÉSIDENCE DE MME PAULETTE GUINCHARD-KUNSTLER,

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

    3

ASSISTANTS MATERNELS ET FAMILIAUX

Suite de la discussion d'un projet de loi
adopté par le Sénat

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux (nos 1623, 1663).

Hier soir, l'Assemblée a entendu les orateurs inscrits dans la discussion générale.

Discussion des articles

Mme la présidente. J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er A

Mme la présidente. Je constate que Mme Valérie Pecresse, inscrite sur l'article 1er A, n'est pas présente.

Je mets aux voix l'article 1er A.

(L'article 1er A est adopté.)

Article 1er B

Mme la présidente. Mme Patricia Adam, inscrite sur l'article 1er B, est également absente.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Madame la présidente, le projet de loi relatif aux assistants maternels et familiaux a certes déjà été examiné au Sénat, mais il est très important et plusieurs députés qui souhaitaient s'exprimer ne nous ont pas encore rejoints. Je me demande donc si, dans l'intérêt du débat, il ne serait pas judicieux de suspendre la séance quelques minutes.

Mme la présidente. La suspension de séance est de droit et je propose que, lorsqu'ils seront là, les orateurs qui n'ont pu s'exprimer s'inscrivent sur un autre article.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Très bien ! D'autant que Mme Pecresse vient d'arriver !

M. Philippe Rouault. Pour les socialistes, c'est vraiment le minimum syndical !

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures douze.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Je ne peux pas revenir en arrière, mais Mme Pecresse et Mme Adam pourront s'inscrire sur l'article 1er.

Je suis saisie d'un amendement n° 106, troisième rectification.

La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Cet amendement vise à consacrer dans la loi et à renforcer la place accordée à la commission départementale de l'accueil des jeunes enfants.

La commission est favorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 106, troisième rectification.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Favorable.

M. Philippe Rouault. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 106, troisième rectification.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 1er B est ainsi rédigé.

L'amendement n° 63 de Mme Adam tombe.

Avant l'article 1er

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 81, visant à insérer un article additionnel avant l'article 1er.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans la discussion générale, plusieurs intervenants ont, comme moi, relevé les insuffisances de la politique menée en faveur de la petite enfance et les carences quantitatives et qualitatives des différents modes d'accueil. Si nous voulons rendre plus efficaces les politiques publiques dans ce domaine et faire en sorte que les parents puissent librement choisir le mode d'accueil de leurs enfants, au lieu de se le voir imposé par défaut, il faut que nous nous dotions d'outils susceptibles d'apporter une connaissance précise de la situation, de l'état des besoins et de l'offre existante. Je disais hier que, malgré les efforts accomplis dans le département de la Seine-Saint-Denis, le besoin se faisait sentir de mieux connaître la réalité en matière d'accueil du jeune enfant.

La loi du 2 janvier 2002 a créé les commissions départementales de l'accueil des jeunes enfants, instances de réflexion et de suivi des politiques menées en ce domaine. Elles ont le mérite d'exister, même si, nous le déplorons, elles ne fonctionnent pas toutes correctement, car, parfois, l'engagement des exécutifs départementaux fait défaut et les financements qu'accordent les départements ou les caisses d'allocations familiales sont insuffisants.

L'article L. 214-5 du code de l'action sociale et des familles définit les missions de ces commissions. Mon amendement vise à les compléter et fait explicitement référence à leur rôle en matière d'évaluation des besoins en professionnels qualifiés. En effet, de nombreuses études font état non seulement d'une véritable crise des vocations dans ce secteur, mais aussi d'un manque criant de personnel qualifié. Vous avez dit hier, monsieur le ministre, qu'il s'agit de métiers d'avenir, et nous aurons l'occasion de revenir sur cette question lors de notre débat. En attendant, la pénurie risque de s'aggraver avec de prochains et nombreux départs en retraite.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable, car c'est au président du conseil général de définir et de financer la politique de l'emploi. Il faut lui en laisser la responsabilité.

M. Philippe Rouault. C'est le principe de subsidiarité !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. En fait, Mme Jacquaint soulève un problème important auquel sont confrontées certaines structures d'accueil collectif, la pénurie de personnels qualifiés.

Conscient de ces difficultés, Christian Jacob, lorsqu'il était ministre délégué à la famille, avait demandé à Mme Petit d'animer un groupe de travail sur ces questions. Ce groupe lui a remis en avril 2003 un rapport sur les métiers de la petite enfance dans les structures d'accueil collectif.

Plusieurs des propositions formulées par ce rapport sont en cours de mise en œuvre, je pense notamment à la mise en œuvre de la VAE, la validation des acquis de l'expérience, pour les diplômes du secteur de la petite enfance. Le diplôme d'éducateur de jeunes enfants, qui vient d'être réformé, sera accessible par la VAE dès cette année, et celui d'auxiliaire de puériculture devrait l'être dès l'année prochaine.

Les commissions départementales de l'accueil des jeunes enfants sont bien placées pour évaluer les besoins en professionnels qualifiés sur leur territoire afin d'alerter ou de saisir les institutions compétentes en matière de formation.

Toutefois, je me permets de faire remarquer que cette compétence découle des missions qui leur sont déjà attribuées par l'article L.214-5 du code de l'action sociale et des familles. Il n'y a pas lieu de le préciser, comme il n'y a pas lieu, me semble-t-il, de pointer cette question particulière plus que celle, tout aussi importante, de l'accès au mode d'accueil des familles en difficulté, ou de l'accueil des enfants porteurs de handicap.

Cela dit, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de votre assemblée sur cette proposition.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 81.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er

Mme la présidente. Plusieurs orateurs n'ont pas pu intervenir alors qu'ils étaient inscrits sur les articles précédents. Je vais leur donner la parole maintenant.

La parole est à Mme Valérie Pecresse.

Mme Valérie Pecresse. Je tenais à saluer cette réforme du statut des assistants maternels et des assistants familiaux. Elle constitue, je crois, la pierre angulaire de la politique familiale moderne et plus humaine que souhaite mener le ministre de la famille, Philippe Douste-Blazy. Moderne, parce qu'elle prend pleinement acte de l'activité professionnelle des mères et qu'elle cherche à l'encourager. Plus humaine, parce qu'elle s'attache à donner aux enfants des familles les plus déstructurées des conditions d'accueil encore meilleures qui leur permettent de se reconstruire.

Je voudrais évoquer les améliorations apportées au statut des assistantes maternelles, qui sont au cœur de notre politique familiale. En effet, si on ne donne pas aux familles les moyens de faire garder leurs enfants, elles n'auront pas le nombre d'enfants qu'elles souhaitent, mais seulement le nombre d'enfants qu'elles peuvent élever sans aide. Ce n'est pas acceptable. La vitalité de notre démographie est notre meilleur atout pour l'avenir. Nous ne pouvons pas nous résoudre à la perdre faute d'avoir assuré des modes de garde adaptés.

Comme l'a rappelé le Haut conseil de la population et de la famille dans son rapport de janvier 2003, en un siècle, une question qui ne se posait pas - comment faire garder ses enfants ? - est devenue une préoccupation de premier plan pour la majorité des familles. C'est même un parcours du combattant pour une majorité de femmes qui travaillent et un obstacle insurmontable pour les familles monoparentales qui connaissent déjà de lourdes difficultés.

Nous avons su créer un droit à l'éducation pour chaque enfant jusqu'à seize ans. Aujourd'hui, il faut créer une nouvelle frontière dans le droit de la famille, et instaurer pour l'enfant de moins de trois ans un droit à être gardé. Ce droit recouvrirait deux facettes, l'aide aux couples bi-actifs qui ont des enfants et qui souhaitent continuer de travailler, et l'affirmation de la primauté de l'intérêt de l'enfant dans les décisions qui le concernent.

Le texte que nous examinons aujourd'hui pose les fondations de ce nouveau droit. Tout d'abord, parce que le métier d'assistant maternel est pour les parents le mode de garde privilégié, il s'adapte à leurs horaires de travail, c'est un bon équilibre entre la garde à domicile et la crèche et son coût est raisonnable. Ensuite, parce qu'il faut répondre aux attentes des assistantes maternelles, en professionnalisant leur métier et en leur donnant la reconnaissance qu'elles méritent. Elles ont droit à un vrai statut, des conditions de travail plus favorables et une rémunération plus juste. Elles ont droit également à une meilleure formation et à de vraies perspectives de carrière, nous venons d'en parler. Le texte apporte sur tous ces points des améliorations concrètes et justes qui ont déjà été très bien présentées.

Enfin, ce texte est important parce qu'il rappelle que la politique de la petite enfance est centrée sur l'enfant et que le développement des modes de garde, qui sont un instrument de cette politique, est là pour permettre son épanouissement. En d'autres termes, la priorité absolue - tel est d'ailleurs bien l'objet de l'article 1er A sur lequel je souhaitais prendre la parole - c'est l'intérêt de l'enfant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Sans revenir sur la discussion générale, je veux souligner que ce texte aura des conséquences importantes sur les familles mais également sur les assistants maternels et familiaux, en abordant un point très sensible, le travail des femmes et en proposant un nouveau statut pour les professionnels.

L'examen de ce texte doit nous permettre d'avancer, de nous montrer créatifs en formulant des propositions alternatives pour la garde des enfants. Si nous continuons de raisonner sur des concepts anciens, qui, pour certains d'entre eux, commencent à être dépassés compte tenu de l'évolution tant du monde du travail que de la famille, nous ne parviendrons pas à améliorer les conditions de travail des femmes dans notre société.

Les assistantes maternelles et familiales sont devenues, tout le monde le reconnaît, de véritables professionnelles. Elles méritent une formation de base validée par des examens, en particulier le CAP « petite enfance », qui leur permettent de rebondir sur d'autres professions car on peut comprendre qu'elles aient la volonté, à un moment, de changer de métier et d'avoir un trajet professionnel différent.

Le texte qui nous est soumis améliore la formation, apporte de nouveaux droits, mais il ne répond pas à toutes les questions. Il est encore trop minimaliste. En particulier, il ne pose pas le principe d'un véritable service public autour de l'organisation des modes de garde de la petite enfance. Nous ferons des propositions pour l'améliorer. J'espère que, dans sa sagesse, l'Assemblée nous suivra.

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Comme viennent de le rappeler Mme Pecresse et Mme Adam, le texte que nous examinons aujourd'hui va dans le sens que nous souhaitons tous, c'est-à-dire l'amélioration de l'accueil des jeunes enfants. Mais la qualification, la formation, la rémunération, les acquis sociaux - retraite, congés payés... - des personnels, aussi bien les assistants maternels que les assistants familiaux, sont également des éléments très importants, qui donnent de la valeur à un métier. Pour rendre attractif un métier, il faut le reconnaître, il faut valoriser l'expérience professionnelle. On met encore trop souvent en avant le dévouement des personnels, notamment quand ils sont essentiellement féminins - je pense notamment aux infirmières. Le dévouement, la qualité professionnelle ne sont pas les seuls critères. Ce sont des métiers d'avenir parce que les besoins en matière d'accueil du jeune enfant sont importants. Les parents attendent des modes de garde qu'ils soient souples mais également pas trop onéreux. On nous parle de crédit d'impôt, je veux bien, mais quel bénéfice vont pouvoir en retirer les familles qui ne sont pas assujetties à l'impôt sur le revenu ?

Tout cela demande des moyens financiers considérables. Je suis sceptique quand je constate que les services publics prennent tous les jours de nouveaux coups. Je souhaiterais que ces professions soient reconnues comme un véritable service public. Cela montrerait toute l'importance de ces métiers.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

Mme la présidente. Sur l'article 2, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Valérie Pecresse.

Mme Valérie Pecresse. On le sait, on l'a dit, le projet de loi distingue deux métiers, celui d'assistant familial et celui d'assistant maternel. Je crois que cette distinction était à la fois nécessaire et urgente.

Il s'agit de deux métiers fondamentalement différents, cela a été dit. L'assistant maternel a la charge de veiller sur les enfants dont les parents travaillent. L'assistant familial, lui, accueille dans son foyer un enfant ou un adolescent qui a dû être séparé de sa famille, parfois parce qu'il est maltraité, toujours parce que ses parents ne sont plus capables d'assumer leurs responsabilités à son égard. Cet enfant est une victime et l'assistant familial son secours. Sa responsabilité est éminente. Il doit l'aider à surmonter sa souffrance et à se reconstruire.

C'est une belle responsabilité, mais c'est une responsabilité qui peut être lourde aussi. Ainsi, dans certains départements, on manque de familles qui acceptent de recevoir des mineurs confiés à l'aide sociale à l'enfance car ce métier comporte des contraintes et des risques qui découragent de nombreux candidats, notamment dans les départements où la rémunération est faible. Je rappelle que, dans 90 % des cas, les enfants placés le sont sur décision de justice. Ils sont souvent issus de foyers en très grande précarité et sont eux-mêmes profondément déstructurés.

Désormais, les assistants familiaux se voient confier des cas que les établissements spécialisés eux-mêmes refusent de prendre en charge. C'est l'une des causes de la dégradation des conditions de travail de la profession à laquelle nous devons répondre.

La distinction entre assistant maternel et assistant familial était donc nécessaire, elle était aussi urgente. Il devenait prioritaire de compléter les textes de 1977 et de 1992 et d'améliorer le statut de la profession d'assistant familial, pour la rendre plus attractive.

Mais, pour moi, ce texte n'est qu'une première étape pour améliorer notre dispositif d'aide sociale à l'enfance. Je crois qu'il faudra aller plus loin, dans l'intérêt de l'enfant.

Est-il normal qu'un enfant qui a besoin de retrouver la stabilité d'un véritable foyer, de s'attacher à nouveau, de recevoir son content d'affection et de soins, puisse à tout moment être déplacé d'une famille d'accueil à une autre, sous prétexte qu'il s'attache trop, qu'il s'enracine trop dans cette famille de substitution ? Est-il normal, comme le dénonce la défenseure des enfants, Claire Brisset, que certains départements aient instauré un délit d'attachement qui impose de séparer enfant et famille d'accueil, car celle-ci n'est pas sa famille légale ? Je ne le crois pas.

La plupart des pédopsychiatres s'insurgent contre le déplacement de l'enfant accueilli au moment où il commence à renouer avec les bonheurs d'une vie normale, grâce à une famille qu'il considère comme une famille d'adoption, même si, juridiquement, ce n'est pas le cas. Bien sûr, si le placement échoue, si un enfant est malheureux dans une famille, il faut le déplacer. Mais si ce n'est pas le cas, faut-il imposer à un enfant des ruptures successives ? Je crois que non.

C'est la raison pour laquelle je souhaite que dans le fonctionnement des services de l'aide sociale à l'enfance soit posé le principe fondateur du placement unique. J'ai déposé, le 18 janvier dernier, une proposition de loi sur les droits de l'enfant et la protection de l'enfance qui va dans ce sens. Le texte a déjà été cosigné par cent quarante de mes collègues, que je remercie. C'est dire que nous sommes nombreux à souhaiter que l'intérêt de l'enfant accueilli et la stabilité de ses conditions de vie deviennent la règle. Nous devons penser à l'intérêt de l'enfant, c'est notre priorité absolue, nous l'avons inscrit en préambule de ce texte, et je crois que nous ne devons pas laisser ce principe lettre morte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. L'article 2 fait apparaître un nouveau métier, celui d'assistant familial.

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Tout à fait !

Mme Patricia Adam. C'est un début de reconnaissance de cette fonction.

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Ah ! merci de le reconnaître.

Mme Patricia Adam. Je connais bien ces personnels car je travaille régulièrement avec eux dans le cadre de mes fonctions de présidente d'une commission d'action sociale dans mon département.

Cependant, au-delà de la qualification et de la formation dont nous avons déjà parlé, c'est la rémunération qui permettra une pleine reconnaissance du statut professionnel. Beaucoup de départements vont déjà plus loin que ne le prévoient les textes, y compris celui-ci. Ils vont notamment au-delà des 120 heures de formation prévues pour l'accueil d'un premier enfant et font de même pour l'accueil d'un deuxième voire d'un troisième enfant.

Outre la reconnaissance du statut en termes de formation et de salaire, la possibilité, pour ces personnes, de cotiser à la CNRACL leur permettrait d'être recrutées ultérieurement par les conseils généraux et de continuer leur carrière en exerçant, le cas échéant, une autre profession.

Telle est la véritable reconnaissance qu'attendent les intéressés.

Il est vrai aussi que l'on confie aux assistants familiaux des situations de plus en plus complexes et difficiles, si bien qu'ils sont désormais partie intégrante des services et des équipes pluridisciplinaires. En la matière, certains départements ont encore du chemin à parcourir : bien que les dispositions soient déjà inscrites dans les textes, elles ne sont pas partout appliquées.

Il nous faudra donc être vigilants quant au respect de mesures que ce projet de loi vient, d'une certaine façon, confirmer. Les équipes pluridisciplinaires doivent s'habituer à cette profession de plus en plus reconnue.

Par ailleurs figurent, parmi les enfants accueillis, de plus en plus d'adolescents dont les problèmes réels ne trouvent de réponse ni au domicile familial ni auprès des services spécialisés. À cet égard, monsieur le ministre, il convient de souligner les graves carences qui existent en pédopsychiatrie.

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. C'est vrai !

Mme Patricia Adam. Ni les départements ni les professionnels ne peuvent obtenir le soutien nécessaire pour assurer le suivi de ces enfants. Il nous arrive ainsi de demander à des assistants familiaux qui n'ont même pas l'habilitation CAP petite enfance de prendre en charge des situations qui, parfois, dépassent même les compétences de spécialistes reconnus dans ce domaine.

La reconnaissance financière me paraît essentielle. Il convient aussi d'avancer en ce qui concerne le nombre d'heures de formation prévues pour l'accueil du premier enfant : nous aurons l'occasion de présenter des amendements en ce sens.

Mme la présidente. Madame Adam, il s'agissait davantage d'un discours relevant de la discussion générale que d'une intervention sur l'article !

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Lors de la discussion générale, je m'étais félicitée, comme nombre de mes collègues, que la distinction entre les deux métiers soit désormais établie. Je souscris d'ailleurs entièrement à ce qui vient d'être dit à propos des difficultés auxquelles sont confrontés les assistants familiaux. Ils reçoivent parfois des enfants très abîmés par la vie et on leur demande des prouesses. On parle des besoins en formation, mais ils ont également besoin d'aide, notamment en pédopsychiatrie.

Nous défendrons nous aussi des amendements visant à prendre en compte la spécificité de ce métier.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3

Mme la présidente. L'article 3 ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 3 est adopté.)

Article 4

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, premier orateur inscrit sur l'article 4.

Mme Patricia Adam. Cet article est fondateur, puisqu'il définit l'assistant maternel comme « la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon non permanente des mineurs à son domicile ».

J'aborderai, à travers un de mes amendements, le problème fondamental de l'évolution de ce métier. Les assistants maternels demandent en effet à travailler davantage en équipe. Les RAM répondent en partie à ce souhait, ainsi que les formations dispensées par les départements ou les collectivités locales, mais la demande est plus importante.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. L'article 4 est en effet fondateur, tout comme l'article 5. Les assistants maternels sont des personnes très dévouées et qui assurent leur fonction par vocation, car on ne peut pas excercer ce métier si l'on n'a pas naturellement de l'amour pour les enfants. Néanmoins, s'il s'agit d'une condition nécessaire, elle n'est pas suffisante et il nous faut réfléchir attentivement à la formation qui leur est due. À cet égard, il est bon que l'action des départements soit confortée par ce texte.

Reste que ces actions de formation ont un coût. Élaborer des normes, comme nous le faisons ici, est une bonne chose, mais nous risquons de laisser la note aux conseils généraux ! « Qui paie commande et qui commande paie », comme on dit en Auvergne. Si l'État décide, à juste titre, de lancer de nouvelles actions de formation, il faut aussi qu'il pense à transférer les crédits correspondants aux départements. Cela vaut pour les assistants maternels, mais aussi - et peut-être même davantage - pour les assistants familiaux.

Mme la présidente. La parole est à M. Louis-Joseph Manscour.

M. Louis-Joseph Manscour. Nous sommes tous d'accord  pour reconnaître qu'il y avait urgence à revaloriser les métiers de service à l'enfance. Les contraintes liées à l'emploi, au développement du travail des femmes et à la multiplication des familles monoparentales ont fait de la garde de l'enfant l'une des premières préoccupations des Français. Un texte ambitieux, répondant aux exigences du présent et tourné vers l'avenir, était nécessaire. Ce projet de loi est-il à la hauteur de cette ambition ? Si je me félicite de son existence et des dispositions qu'il contient, je n'en suis pas moins désolé de ses lacunes et de ses imperfections.

Votre texte, monsieur le ministre, comporte certaines avancées pour les salariés, mais nombreux sont ceux, professionnels de la petite enfance en tête, qui pensent qu'il n'a pas l'ambition qu'on est en droit d'attendre sur un tel sujet. La politique en matière de garde d'enfants laisse subsister trop d'inégalités : selon le territoire où il habite, selon les revenus de ses parents, ou encore selon le cadre familial où il évolue, l'enfant ne bénéficiera pas de la même qualité d'accueil. Aussi la garde d'enfants devrait-elle être portée au rang des grands services publics de l'État, à l'instar de l'éducation.

Par ailleurs, ce texte appelle la vigilance : il énonce de grands principes mais renvoie trop souvent à des décrets d'application. Ceux-ci établiront-il bien des règles communes pour l'ensemble du territoire national ?

Enfin, votre projet ne répond pas suffisamment aux attentes de la profession en ce qui concerne les salaires, les congés payés et les droits à la retraite. En particulier, il ne comporte pas de garanties en matière d'ancienneté, de prévoyance, d'incapacité de travail et d'invalidité.

Que d'insuffisances, alors que les assistants familiaux et maternels remplissent bien une mission de service public et pallient les carences de la puissance publique en la matière !

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements.

Je suis d'abord saisie de l'amendement n° 75.

La parole est à Mme Michèle Tabarot, pour le soutenir.

Mme Michèle Tabarot. Je défendrai en même temps les trois amendements, nos 75, 76 et 77, que M. Pierre Bédier a déposés sur l'article 4.

Tout en permettant une revalorisation très attendue de la profession d'assistant maternel, ce texte doit rendre les modes de garde proposés aux parents plus efficaces. Ces amendements visent à faire en sorte que les assistants maternels, en particulier dans les zones où l'immobilier est très cher - en région parisienne ou sur la Côte d'Azur, par exemple -, puissent accueillir des enfants ailleurs que chez eux, dans des appartements mis à leur disposition. Ainsi les assistants maternels qui ont des difficultés à se faire agréer obtiendraient les trois agréments réglementaires. Ils pourraient également, par ce moyen, se rapprocher du lieu de vie ou d'activité des parents.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 75 ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Elle l'a rejeté.

Tout d'abord, l'adverbe « principalement » qu'il tend à insérer dans l'article va quelque peu à l'encontre des intentions de l'auteur : se trouve alors exclue la possibilité de garder régulièrement les enfants en dehors du domicile personnel.

Sur le fond, il est exact qu'il peut y avoir pénurie de l'offre d'accueil dans les communes, notamment urbaines, où les assistants maternels ou familiaux ne peuvent disposer de logements adéquats. Malheureusement, l'essence même de ces deux métiers est de permettre à ceux qui les exercent d'accueillir des enfants à leurs domiciles. La qualité de l'accueil en dépend : il se trouve ainsi personnalisé - l'assistant maternel ne peut s'occuper que de trois enfants -, dans un cadre familial qui correspond à celui de l'enfant tout en lui étant extérieur.

Le troisième et dernier avantage de l'accueil à domicile est qu'il permet des horaires très souples. Ainsi, une assistante maternelle ou familiale peut prolonger sa garde jusqu'à vingt-deux voire vingt-trois heures sans que ses propres enfants en pâtissent.

La nécessaire souplesse et la nécessaire qualité de ce mode d'accueil nous ont conduit à refuser cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Madame la députée, vous souhaitez, par cet amendement, développer des solutions alternatives aux crèches traditionnelles, favoriser l'emploi d'assistantes maternelles agrées résidant dans des quartiers d'habitat social éloignés de la demande d'accueil. Je peux le comprendre.

Cependant, comme vient de le relever Mme la rapporteure, la rédaction que vous proposez et selon laquelle l'assistant maternel serait la personne qui accueille des mineurs « principalement » à son domicile, ne répond sans doute pas à votre objectif. Elle ne remet pas en cause le fait que le lieu principal d'exercice du métier de chaque maternel est son domicile, ce qui exclue l'exercice habituel dans un autre lieu. Pour cette simple raison juridique, je me permets de vous demander de retirer cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Même si l'on peut en revoir la rédaction, cet amendement est très pertinent, et ce pour trois raisons.

D'abord, comme l'a souligné Mme la rapporteure, le coût du logement dans certaines régions, notamment en Ile-de-France, rend inaccessible le métier d'assistant maternel pour certains, même s'ils ont la passion de ce métier et des enfants.

Ensuite, il assurerait un plus à certains, en offrant une véritable séparation entre le lieu de travail et le lieu de vie. De très nombreuses professions sont assurées à l'extérieur et l'on offrirait ainsi une plus grande liberté aux assistants maternels.

Enfin, il pourrait apporter une qualité de vie satisfaisante pour les enfants et les familles en cas d'absence ou de remplacement. Les enfants acquièrent les repères d'un lieu unique et si l'assistant maternel se trouve remplacé, ils resteront dans le même cadre de vie et ne risqueront pas d'être déboussolés.

Comme l'a dit M. le ministre, il convient de trouver une solution alternative. Quoi qu'il en soit, j'invite l'Assemblée nationale à réfléchir à ce que pourrait apporter un tel amendement au texte de loi.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Je suis ravie que la majorité ait présenté un amendement de ce type. J'en avais déposé un similaire, que vous avez modifié, ce qui est de bonne guerre.

Le problème est moins dû au prix des logements qu'à leur rareté, en particulier en région parisienne. Or la dimension du logement constitue parfois un obstacle à l'agrément des assistants maternels qui veulent accueillir deux ou trois enfants.

La possibilité d'exercer cette profession, donc la garde des enfants dans un lieu différent, répondrait à cette difficulté.

Il est un autre problème que votre amendement n'évoque pas : aujourd'hui, les assistantes maternelles souhaitent pouvoir, comme dans tout métier, échanger sur leur profession et trouver un soutien auprès de collègues quand un problème se pose avec un enfant. Ce serait, pour les parents, un gage de sécurité et la garantie que leur enfant est bien gardé, de par le soutien apporté et grâce à la surveillance exercée par des professionnels comme des puéricultrices, à même de dispenser des conseils précieux.

Voilà d'ailleurs pourquoi, dans l'amendement n° 64 qui sera appelé immédiatement après celui-ci, je demande que cette possibilité soit offerte dans le cadre d'une crèche familiale.

Un tel soutien, un tel support juridique, que nous connaissons bien, est assuré la plupart du temps par les collectivités locales et apporte toutes les garanties aux parents. Il permet également aux collectivités qui le souhaitent de proposer aux parents d'effectuer le paiement en prenant en compte les quotients familiaux. Cela répond au besoin, pour les familles modestes, de faire garder leurs enfants.

Sur le principe de pouvoir exercer dans un lieu différent de son domicile, il faut que nous avancions. Je suis ravie que ce genre de proposition ait été présentée ici. Si le problème qui se pose relève uniquement de la syntaxe, on doit pouvoir le résoudre.

Enfin, pour ma part, je souhaiterais que, si l'on adoptait cette solution, on prévoie une garantie d'encadrement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je veux intervenir à propos de tous les amendements déposés sur l'article 4, en particulier de l'amendement n° 64 de Mme Adam et de Mme Clergeau.

Aujourd'hui, il faut en effet rechercher toutes les possibilités d'accueil du jeune enfant et je partage l'idée qu'un suivi est nécessaire car cela constitue un gage de sécurité et de qualité pour les enfants comme pour les parents. Il devrait même être possible de proposer aux parents, dans une telle structure, des tarifs moins élevés qu'ailleurs.

Vous avez rappelé qu'en région parisienne, notamment à Paris, le prix des logements était très élevé. Mais personne n'ignore que le problème est dû, avant tout, au manque de logements, en particulier de logements de qualité.

Le Sénat avait été sensible à la nécessité de disposer d'appartements de qualité pour accueillir de jeunes enfants. D'ailleurs, lorsque le logement a besoin d'être transformé et réhabilité, des difficultés apparaissent. Je connais des assistantes maternelles qui ont reçu une formation, mais n'ont pas obtenu l'agrément parce que leur habitat ne remplit pas les conditions pour accueillir correctement et en nombre suffisant de jeunes enfants.

Je suis tout à fait ouverte à une recherche de quantité et de qualité, ainsi qu'à l'institution d'un suivi. D'ailleurs, de plus en souvent, les assistantes maternelles, quand elles vont en formation ou à la PMI, se retrouvent ensemble.

Enfin, pourquoi ne pas réfléchir à la forme nouvelle d'accueil du jeune enfant qui nous est ici proposée ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La proposition de loi du Sénat donne la priorité aux assistants maternels et familiaux pour les logements sociaux, priorité que pourrait leur accorder les mairies.

Mme Muguette Jacquaint. Ce n'est pas réalisable !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cela prouve qu'on a pris conscience de ce problème et qu'on cherche à y remédier.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Madame la présidente, pour l'organisation de nos débats, je demande une suspension de séance de cinq minutes afin de mettre au point une proposition de rédaction.

Mme la présidente. J'ai cru comprendre en effet que vous vouliez modifier la rédaction de l'amendement.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je ne suis pas le seul. C'est aussi le cas de l'auteur de l'amendement, qui est désormais présent.

Mme la présidente. Cependant, vous n'avez pas délégation de votre président de groupe.

M. Pierre-Christophe Baguet. Si, elle va vous parvenir.

Mme la présidente. En attendant, je donne la parole à Mme Michèle Tabarot.

Mme Michèle Tabarot. Nous sommes tous d'accord pour modifier la rédaction de cet amendement, si cela est nécessaire.

Par ailleurs, j'indique à Mme Adam que j'avais également déposé un amendement sur ce sujet, mais il est tombé sous le coup de l'article 40. Je me réjouis donc d'avoir défendu celui de mon collègue Pierre Bédier. En effet, sur le principe, en tant que maire, en tant qu'élu local, je connais les difficultés des parents comme celles des assistantes maternelles. Ces dernières se voient refuser l'agrément parce que leurs appartements ne conviennent pas.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

Mme Michèle Tabarot. Alors qu'elles souhaiteraient accueillir trois enfants, elles ne le peuvent pas. Les parents rencontrent aussi parfois des problèmes parce que les assistantes maternelles sont trop éloignées de leur lieu de vie ou du lieu de leur activité professionnelle.

Il faut bien sûr que les assistantes maternelles soient prioritaires pour les logements sociaux. Reste que c'est un peu lent à mettre en œuvre.

Mme Patricia Adam. Cela n'a rien à voir !

Mme Michèle Tabarot. Concernant la qualité des logements, l'idée était de les mettre à disposition en les meublant et en leur donnant l'aspect d'un logement habité.

Mme la présidente. Monsieur Baguet, je n'ai toujours pas reçu votre délégation.

Mme Valérie Pecresse. Madame la présidente, j'ai la délégation pour le groupe UMP. Je peux donc demander une suspension de séance.

Mme la présidente. De toute façon, j'ai pris la décision de suspendre la séance, après que nous aurons entendu M. Bédier, M. le ministre et M. Néri.

La parole est à M. Pierre Bédier.

M. Pierre Bédier. Je tiens d'abord à remercier Mme Tabarot de m'avoir suppléé pour défendre cet amendement.

Monsieur le ministre, je connais les réticences que peuvent avoir certaines assistantes maternelles sur ce sujet, mais il s'agit de celles qui ont du travail. En revanche, celles qui n'en ont pas ne sont pas réticentes.

Certes, votre gouvernement fait tout pour que la fracture urbaine se réduise. Néanmoins il est des quartiers où l'on ne va pas et dans lesquels il y a des assistantes maternelles qui n'ont pas d'enfants à garder.

Mme Valérie Pecresse. C'est exact !

M. Pierre Bédier. La solution la plus pragmatique consisterait à trouver des lieux intermédiaires.

L'amendement n° 75 essaie de répondre à ce besoin de faire travailler toutes les assistantes maternelles dans des structures qui soient naturellement encadrées par les collectivités.

Cet amendement me semble, en tant que législateur, être le meilleur des trois que j'ai déposés, car il faut faire la part entre ce qui est législatif et ce qui est réglementaire. En effet, l'adverbe « principalement » renvoie au décret d'application. Si vous voulez qu'on aille plus loin, on peut choisir entre les amendements n° 76 et n° 77 mais il me semble qu'ils vont un peu trop dans le détail. Quoi qu'il en soit, madame la présidente, on peut considérer qu'ils ont été défendus, ce qui nous fera gagner du temps.

Monsieur le ministre, je suis prêt à tous les compromis sur ce sujet à la condition qu'ils ne nous renvoient pas aux calendes grecques, car il y a une urgence sociale, que vous connaissez bien.

M. Alfred Trassy-Paillogues. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Le sujet est important. Attribuer des logements sociaux en priorité aux assistantes maternelles semble, en effet, une bonne formule pour avoir des locaux adaptés à l'accueil des jeunes enfants. Néanmoins, cela ne résout pas le problème pour toutes les personnes souhaitant devenir assistantes maternelles et qui ne peuvent pas exercer dans leur logement parce qu'il ne répond pas aux normes d'agrément. On se prive ainsi d'assistantes maternelles de qualité, qui pourraient à la fois rendre service et s'investir dans une fonction qui leur tient à cœur. Je crois que nous pouvons ensemble trouver une rédaction appropriée pour améliorer le texte.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Cette discussion est très intéressante car M. Bédier et Mme Tabarot ont en effet soulevé un point fondamental : il manque, en certains lieux, des assistantes maternelles parce que les appartements ne sont pas agréés. Comment faire ?

A cet égard on ne peut pas accepter l'existence d'inégalités géographiques dans une même ville, car cela va à l'encontre de l'idée de cohésion sociale. C'est donc un vrai sujet. Toutefois, je me demande si ce texte est bien indiqué pour régler le problème.

Je conçois la nécessité de lancer une réflexion et de trouver rapidement des solutions pour organiser l'accueil dans ces quartiers, mais il ne faudrait pas toucher à la philosophie du projet : l'assistante maternelle, parce qu'elle est chez elle, peut accueillir des enfants dans des conditions horaires souples, tout en ayant une vie de famille. Cette souplesse, c'est le propre de l'assistante maternelle.

Pour avoir été maire, je sais qu'il est indispensable de trouver des solutions autres que la crèche, qui est très coûteuse, il faut bien le reconnaître. Les assistantes maternelles ne répondent pas au problème que vous avez soulevé, mais on ne peut pas prendre ce texte en otage pour le régler, non pas que les assistantes maternelles s'opposeraient à votre proposition, mais la philosophie même de leur fonction n'y correspond pas. Cette réflexion doit s'inscrire dans le cadre de la politique familiale de notre pays.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Il faudrait assouplir la réglementation de la crèche familiale !

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. On pourrait, en effet, assouplir l'organisation et la définition même de la crèche familiale, car la proposition présentée se rapproche plus d'une telle structure que de la fonction d'assistante maternelle. Il faut trouver un moyen terme entre ces deux types d'accueil, mais pas dans ce texte.

C'est pourquoi, monsieur Bédier, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme la présidente. M. Bédier donnera sa réponse à M. le ministre après la suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures vingt.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. Pierre Bédier.

M. Pierre Bédier. Après concertation avec mes collègues au cours de la suspension de séance, je propose de rectifier l'amendement n° 76 pour le rédiger ainsi : « ou dans un autre lieu à la condition que celui-ci soit préalablement agréé par les services compétents selon les dispositions en vigueur, ou dans une crèche familiale ». Et je retire les amendements nos 75 et 77.

Je comprends les inquiétudes de Mme le rapporteur mais je considère que c'est un amendement de liberté que je propose et la liberté ne nous fait pas peur. Nous saurons l'organiser sur le plan local. Les assistantes maternelles peuvent donc être totalement rassurées.

Mme la présidente. Les amendements nos 75 et 77 sont donc retirés au profit de l'amendement n° 76 tel que M. Bédier vient de le rectifier.

Mme Adam avait déposé un amendement, n° 64. Est-il maintenu ?

Mme Patricia Adam. Je le retire également, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 64 est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 76 rectifié ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Je fais tout d'abord remarquer qu'aucune limite n'est prévue quant au nombre de personnes travaillant dans ces appartements.

La liberté, monsieur Bédier, s'arrête dès qu'il est question de responsabilité et, si plusieurs assistantes maternelles travaillent dans un même logement, il se posera immanquablement la question de la responsabilité.

Cela soulève en outre un problème de statut, comme je l'ai déjà dit, et un autre relatif au transport.

Les assistantes maternelles ont des logements dans lesquelles elles peuvent proposer énormément d'activités. C'est ce qui explique leur rémunération et la souplesse des horaires. Les avantages qui leur sont accordés tiennent à la personnalisation de l'accueil et au fait qu'une seule personne est responsable au maximum de trois enfants, ce qui place la sécurité de l'enfant au premier plan.

Il existe, vous avez raison, une pénurie d'offres mais ce n'est pas une raison pour proposer un dispositif contraire à l'esprit même du statut d'assistante maternelle. Ce qu'il faut, c'est assouplir les règles des crèches familiales, mais cela relève d'une autre loi. Il ne faut pas mélanger les deux.

Enfin, ne croyez pas que cela facilitera la tâche des mairies. Elles vont au contraire se trouver confrontées à des questions de hiérarchie et, contrairement à ce que vous croyez, cela va créer énormément de problèmes.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Je ne prendrai qu'un seul argument pour exprimer mon opposition : le statut fiscal des assistantes maternelles est fondé sur le fait qu'elles travaillent chez elles. Si vous changez cette caractéristique, vous mettez en pièce tout le système. Est-ce notre but ? Je ne le crois pas.

Je reconnais qu'il existe un problème et que nous nous heurtons à une pénurie d'offres dans certains quartiers. Cherchons plutôt à le résoudre grâce à des solutions intermédiaires ; entre la crèche familiale et les assistantes maternelles, c'est possible.

Vous comprendrez que je ne veuille pas remettre en cause le statut fiscal des assistantes maternelles. En voulant bien faire, on risque de mettre à mal un système dont nous avons un réel besoin.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Plusieurs problèmes sont posés.

Le principal est, vous avez raison, monsieur le ministre, celui de la fiscalité. C'est la raison pour laquelle, dans mon amendement, j'avais proposé que cette possibilité soit donnée dans le cadre d'une crèche familiale.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Dans ce cadre là, nous sommes d'accord !

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Oui !

Mme Patricia Adam. Tel qu'il a été rectifié l'amendement le prévoit également. Il constitue ainsi un compromis.

Quant à l'habilitation, madame la rapporteure, elle ne me paraît pas poser un vrai problème. Il est habituellement tenu compte, pour l'agrément, à la fois des capacités éducatives de l'assistante maternelle et de l'agencement de son domicile ainsi que de la sécurité qu'il offre pour l'accueil d'enfants. Ces conditions continueront à prévaloir. Il faut faire confiance à la fois aux mairies et aux conseils généraux. Un conseil général n'habilitera pas un logement destiné à accueillir cinq assistantes maternelles pouvant s'occuper chacune de trois enfants, ce qui ferait, au total, quinze enfants. Personne ne fera cela.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Rien n'est dit à ce sujet dans l'amendement !

Mme Patricia Adam. Nous avons voté des lois qui confient des responsabilités aux collectivités territoriales. Il faut leur faire confiance.

Les personnels des services de PMI ne prendront pas des décisions contraires aux intérêts des enfants. Ils ne le font pas aujourd'hui et ils ne le feront jamais. On leur reproche même quelquefois d'être un peu trop vigilants et trop restrictifs. C'est donc plutôt l'inverse qui serait à craindre.

Mme la présidente. La parole est à M. François Scellier.

M. François Scellier. En plus du problème de responsabilité soulevé par Mme le rapporteur, la proposition de M. Bédier risquerait, si elle était adoptée, d'avoir des répercussions, du fait du changement de nature du métier, sur l'attractivité de celui-ci. Des assistantes maternelles exerçant à leur domicile pourraient demander à exercer ailleurs. C'est un aspect du problème qui mérite examen.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Bédier.

M. Pierre Bédier. Je suis pleinement d'accord avec Mme Adam : on ne peut pas être pour la décentralisation et la liberté des collectivités territoriales et nourrir de la suspicion à l'égard des gestionnaires locaux. Je ne pense pas que tel était le sens des propos de Mme la rapporteure mais ils pouvaient être interprétés ainsi. C'est pourquoi je tiens à clarifier les choses.

En écoutant les objections liées à l'aspect fiscal de la question, j'ai eu le sentiment que la possibilité offerte dans l'amendement était prise pour une obligation. Ce n'est évidemment pas le cas : il existera toujours des assistantes maternelles exerçant à leur domicile. L'amendement ne s'appliquera que dans le cas où des assistantes maternelles travaillant à leur domicile ne trouvent pas de travail parce que les parents ne veulent pas emmener leurs enfants chez elles, du fait que leur domicile est excentré ou pour d'autres raisons. Nous ne révolutionnons en rien le statut des assistances maternelles.

Faisons confiance, comme l'a dit Mme Adam, aux collectivités territoriales pour faire en sorte que les choses se passent bien.

Cet amendement est donc tout à fait adapté. Il correspond à la logique de liberté qui doit être la nôtre, en tant que gestionnaires locaux, et qui est également la vôtre, j'en suis sûr, monsieur le ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur. Je veux apporter un témoignage.

J'ai ouvert, dans ma commune, un accueil d'urgence, dans un appartement de la ville, où deux ou trois assistantes maternelles s'occupent des enfants de mères de famille ayant retrouvé un travail après avoir été au RMI ou au chômage.

La difficulté majeure à laquelle je me suis trouvé confronté n'a pas été un problème de financement puisque cette démarche innovante a été soutenue par la caisse d'allocation familiale du Bas-Rhin, mais un problème de responsabilité, les services du département assimilant cet appartement à une crèche. Dans le cadre du décret de juillet 2000, qui autorise des innovations, nous avons considéré, avec le département, qu'il s'agissait d'une démarche exceptionnelle, en attendant de pouvoir faire évoluer la charge de la responsabilité, actuellement supportée, conjointement, par le président du conseil général et le maire.

Nous devons être très attentifs à ne pas nous engager dans des démarches qui peuvent se révéler hasardeuses. Les crèches existent. La mise à disposition d'appartements pour l'accueil d'enfants entraîne des problèmes de surveillance et de responsabilité individuelle.

Il faut savoir également que les assistantes maternelles travaillant dans l'accueil d'urgence de ma commune sont salariées de cette dernière à plein-temps. Leur statut est donc totalement différent de celui dont nous discutons aujourd'hui.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Nous sommes dans une situation de manque. Nous réfléchissons pour y apporter une solution. Celle proposée dans l'amendement n° 76 rectifié de M. Bédier ne prend peut-être pas en compte tous les paramètres.

Je vous propose de voter cet amendement, afin que nous ayons le temps, avant la deuxième lecture, d'approfondir les choses. Nous aurons ainsi eu le mérite de poser le problème et d'engager la réflexion sur ce point.

M. Pierre Bédier. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission. Je remercie M. Pierre Bédier et Mme Michèle Tabaro d'avoir posé le problème. Je rejoins sur ce point les propos de M. Néri.

Il existe des situations où ce type de solutions pourrait apporter beaucoup. Je constate néanmoins que des questions sérieuses se posent sur le plan de la responsabilité. M. le ministre nous a indiqué qu'il étudierait la question. Vous pouvez envisager une éventuelle réforme des crèches familiales. On pourrait, de ce fait, apporter des réponses satisfaisantes aux questions posées.

Le titre du projet de loi concerne les « assistants maternels » et les « assistants familiaux ». Nous traitons donc de leur statut. Nous avons abordé la question du statut fiscal, mais nous ne pouvons pas modifier ce qui est prévu dans le projet de loi, sinon il y perdrait en clarté.

Je trouverais logique que M. Bédier retire l'amendement n° 76 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Nous avons bien compris qu'il existait un vide qui devait être comblé. Je propose que nous y travailliions d'ici à la deuxième lecture.

Je pense que nous ne pouvons pas avoir deux fiscalités différentes pour les assistantes maternelles. Nous avons même déposé ce projet de loi pour que ces dernières disposent d'un statut, afin que leur profession soit reconnue et plus attractive.

Nous devons faire attention à ce que nous faisons.

Mme la présidente. Monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur le fait que, comme nous examinons le texte après le Sénat, il faut qu'un amendement soit dès maintenant adopté. À défaut, l'article serait adopté conforme et ne pourrait plus être modifié.

Monsieur Bédier, maintenez-vous votre amendement ?

M. Pierre Bédier. Oui, madame la présidente, je le maintiens, pour les raisons que vous venez d'évoquer. Je suis totalement ouvert à ce qu'une discussion s'établisse dès demain avec M. le ministre si celui-ci veut modifier sa rédaction en deuxième lecture.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 76 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 5

Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 5.

La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. J'y renonce.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. L'article 5 est très important. Il donne une définition des assistants familiaux.

Nous sommes de plus en plus souvent confrontés à un déficit dans le recrutement des assistants familiaux. Les problèmes d'accueil d'urgence, celui des enfants en difficultés, se posent. Il existe des structures, mais nous pouvons constater que les assistants familiaux sont souvent une réponse très adaptée aux besoins des enfants ayant connu de grandes difficultés, au début de leur vie.

Ce projet de loi doit tenir compte du rôle social essentiel qu'ils jouent, ainsi que de leur rôle éducatif. Il faut aussi prendre en considération le manque cruel d'assistants familiaux.

Cette profession doit être rendue plus attractive. Il convient donc de revoir son statut, en ce qui concerne tant les salaires que les carrières et les retraites. Il faut envisager de revoir aussi les conditions de travail des assistants familiaux afin qu'ils puissent avoir de vraies vacances, pendant lesquelles - comme l'ont souligné un certain nombre de nos collègues lors de la discussion générale, en particulier Mme Mignon - des assistants familiaux « relais » leur assurent un temps de repos.

La formation des assistants familiaux doit être le point fort de notre réflexion. Pour accueillir des enfants en difficultés, le cœur ne suffit pas. Une formation adaptée, réfléchie, de qualité est nécessaire. Aujourd'hui, elle existe, mais elle est insuffisante. Nous devons nous engager dans cette voie et définir la formation, son cadre et les personnels chargés de celle-ci. Les conseils généraux devront assumer cette fonction de formation.

Je salue, pour terminer, l'action menée par les assistants familiaux. Je tiens en effet à souligner les services rendus aux enfants et à l'ensemble de la nation en permettant aux enfants les plus défavorisés, dès leur arrivée dans la vie, de connaître une famille et, fort heureusement, de bien être insérés dans la société. On constate que, souvent, des enfants placés chez les assistants familiaux y restent au-delà de la période prévue. Même lorsqu'ils ont pris leur élan, trouvé une place dans la vie, grâce à la bonne éducation reçue, ces personnes reviennent voir les assistants familiaux, qui sont leur vraie famille.

Mme la présidente. La parole est à M. Alfred Trassy-Paillogues.

M. Alfred Trassy-Paillogues. L'agrément constitue la porte d'entrée aux métiers d'assistant maternel et d'assistant familial.

Cet agrément constitue pour les parents confiant leurs enfants, souvent très jeunes, aux assistants maternels une garantie de sérieux, de sécurité, une véritable assurance.

Cet article continue de prévoir une limitation de l'agrément, fixé réglementairement à cinq ans. Mais on pourrait fort valablement l'étendre à dix ans.

Il limite à six le nombre d'enfants que l'assistant maternel est autorisé à accueillir, ainsi que leur âge.

Outre la limite de trois enfants gardés simultanément, un amendement exclurait les enfants de l'assistant maternel pour ne pas décourager les jeunes mères qui souhaitent exercer cette activité. Cette limite de bon sens permet de conserver un accueil de grande qualité, adapté à la personnalité de chaque enfant, afin que des liens puissent se nouer avec toute l'intensité et l'affection nécessaires entre la personne qui accueille et l'enfant. Il convient néanmoins de prévoir la possibilité de dérogations, notamment en matière d'accueil périscolaire et sur une courte plage horaire, afin de répondre aux besoins, particulièrement en milieu rural.

Nos objectifs - le confort de l'enfant d'abord, l'affection qui lui est portée ensuite, le service de qualité offert aux familles enfin - seront atteints grâce à des professionnels motivés qui bénéficieront de cet agrément.

Mme la présidente. La parole est à M. Louis-Joseph Manscour.

M. Louis-Joseph Manscour. Madame la présidente, mes chers collègues, je partage l'inquiétude de mon collègue Alain Néri quant aux conséquences financières de ce projet de loi sur les budgets des conseillers généraux.

Je suis un ardent défenseur de la décentralisation. Je suis pour la responsabilité locale. Je ne vais donc pas m'en plaindre. Je me félicite des mesures contenues dans ce projet de loi car elles permettront de donner une meilleure formation et un meilleur salaire aux assistants maternels.

Je vais prendre l'exemple de la Martinique.

Nous connaissons les difficultés que rencontrent les collectivités outre-mer, qui souffrent déjà de handicaps structurels, et je suis inquiet. Je rends hommage au travail que mènent les assistantes maternelles, dans des conditions parfois difficiles, alors qu'elles ne disposent pas d'une formation satisfaisante et que leur rémunération est trop faible.

Le Gouvernement propose un menu certes alléchant, mais dont la note salée devra être payée par les collectivités départementales, comme la Martinique, qui connaissent déjà des difficultés. D'où mon inquiétude.

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements.

J'appelle d'abord l'amendement n° 104 rectifié.

La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour le défendre.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Nous voudrions permettre aux assistants familiaux qui ont élevé un enfant jusqu'à l'âge de dix-huit ans de le garder avec eux, si ce dernier le souhaite et s'il a un projet de vie professionnelle, et de continuer à être rémunérés de la même façon par les conseils généraux.

Le suivi de toute une vie ne peut s'abandonner en cinq minutes. Les assistants familiaux ne sont pas rémunérés quand ils continuent à garder les jeunes entre dix-huit et vingt et un ans. Cet amendement a donc pour but d'insérer, dans la première phrase du premier alinéa de l'article 5, après les mots : « des mineurs », les mots : « et des jeunes majeurs de moins de vingt et ans ».

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Je vais parler au nom des départements qui devront assumer financièrement la décision inscrite dans ce projet de loi. Là aussi, comme cela a été dit sur d'autres aspects de ce texte, celui qui paye doit décider.

Je n'ai rien contre le fait que les assistants familiaux puissent garder à leur domicile de jeunes majeurs, si ces derniers le souhaitent. Cela se pratique déjà lorsque l'attachement est réel entre le jeune, devenu majeur, qui est resté très longtemps dans la famille de l'assistant familial. C'est en quelque sorte une suite logique.

Je suis réservée non sur le fond, mais sur la forme, compte tenu de l'engagement financier que cela pourrait représenter pour les conseils généraux dont beaucoup avaient fait le choix d'attribuer une bourse au jeune majeur plutôt que de rétribuer l'assistant familial, dans la mesure où ces jeunes avaient un projet de vie professionnelle.

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je partage les remarques qui viennent d'être faites. Il faut, en effet, permettre aux assistants familiaux d'accueillir de jeunes majeurs qu'ils ont commencé à recevoir alors qu'ils étaient encore mineurs. C'est une mesure salutaire pour l'équilibre de jeunes qui ont connu une existence difficile.

Votre souci est louable, madame la rapporteure, mais une chose est d'avoir de bonnes idées, une autre est de les financer. Or, à cet égard, il y a une incertitude de taille.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 104 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 26.

Mme Patricia Adam. Dans un souci d'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire, et en s'appuyant sur le modèle des commissions d'adoption, je propose de compléter le premier alinéa de l'article 5 par la phrase suivante : « Le président du conseil général rend sa décision après consultation pour avis de la commission d'agrément dont la composition et les missions sont fixées par décret. »

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement pour deux raisons. La première, c'est qu'il alourdirait la procédure aux dépens des départements.

Mme Patricia Adam. Mais cela ne coûte pas cher !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. En outre, il existe déjà des équipes pluridisciplinaires et, à partir du moment où l'on a intégré les assistants maternels aux assistants familiaux, je ne vois pas l'intérêt de cet amendement.

Deuxième raison : la commission a fait remarquer que cette disposition ne présenterait un intérêt que dans les petites communes, mais il n'aurait pas d'utilité dans les grandes villes où les maires ne connaissent pas les personnes concernées. Pourquoi alourdir la procédure et la rendre plus coûteuse ?

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Je comprends vos raisons, madame Adam, mais votre amendement imposerait aux départements une contrainte qui constituerait une ingérence dans leur organisation. D'une part, il n'est pas souhaitable d'allonger les délais de l'agrément, afin d'éviter le travail illégal. D'autre part, les départements peuvent avoir besoin de nouvelles formules d'accueil dans des délais très courts ne permettant pas d'imposer une telle procédure.

La mise en œuvre de cette disposition pourrait en outre poser de grandes difficultés d'organisation aux départements qui reçoivent un très grand nombre de demandes ou, au contraire, un nombre très faible. L'inscription de cette obligation dans la loi risquerait d'entraîner l'annulation de décisions d'agrément si la consultation n'a pas eu lieu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Il s'agit certes d'un amendement de l'opposition. Cela dit, j'ai du mal à comprendre vos arguments, car nous venons d'adopter un amendement qui alourdit considérablement les charges des départements. Si ce n'est pas de l'ingérence, je ne vois pas de quoi il s'agit !

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

Mme Patricia Adam. La rétribution des assistants familiaux pour l'accueil des jeunes majeurs par les départements représente des sommes considérables, de 100 000 à 150 000 euros par département, voire plus.

Les commissions d'agrément existent déjà. Les faire fonctionner ne représentera pas un coût supplémentaire ; il ne s'agira que d'un problème d'organisation des services. En outre, j'insiste aussi sur l'égalité de traitement, car les professionnels et les maires reprochent souvent aux départements d'avoir des critères insuffisamment objectifs et clairvoyants. Ils ont d'ailleurs raison de le dire quand c'est le cas. C'est pourquoi mon amendement prévoit que la composition des commissions d'agrément sera précisée par décret. Il est peut-être même souhaitable de consulter l'association des maires du département pour avoir un avis circonstancié. C'est cela, le dialogue.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Je vous fais remarquer que nous allons examiner un amendement qui va dans votre sens, car il définit des critères nationaux, garantissant l'objectivité de l'agrément.

Je ne vois pas en quoi, je le répète, des services spéciaux seraient plus objectifs que ceux qui existent. Le laisser penser serait jeter la suspicion sur eux.

Mme Patricia Adam. Ce ne sont pas des services spéciaux !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 98 de M. Pélissard n'est pas défendu.

J'en viens donc à l'amendement n° 107 rectifié.

La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement propose une nouvelle rédaction d'un amendement adopté par la commission et vise à harmoniser les critères d'agrément qui sont actuellement très disparates selon les départements.

Il a aussi pour objectif d'associer des professionnels expérimentés à la procédure d'instruction. En effet, celle-ci doit être menée par une équipe pluridisciplinaire avec la participation d'un assistant maternel ou familial ayant une expérience concrète des contraintes de ce métier, ce qui sera un gage de son objectivité. Il devra justifier d'une expérience professionnelle d'au moins dix ans, de ne plus être en activité et d'avoir un diplôme prévu par voie réglementaire.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 107 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, pour présenter l'amendement n° 65.

Mme Patricia Adam. Cet amendement vise à prévoir une évaluation sur une grille nationale des aptitudes ou capacités éducatives selon la formation initiale du candidat à l'agrément pour les assistants maternels comme pour les assistants familiaux. Il est possible de gagner du temps en évitant aux candidats de recommencer une formation qu'ils ont déjà reçue.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. À partir du moment où l'on définit des critères nationaux, je ne vois pas l'intérêt de rigidifier le système. Ce dispositif prévoit des critères spécifiques aux départements ruraux ou aux départements urbains.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 65.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 56, 78 et 109.

La parole est à M. Rudy Salles, pour soutenir l'amendement n° 56.

M. Rudy Salles. Le terme « aptitudes » semble plus adapté que le mot « capacités » aux exigences des deux types d'accueil proposés.

L'évaluation doit porter sur les aptitudes des candidats à évoluer et à acquérir des compétences plutôt que sur des capacités qui pourront être acquises par la formation et l'expérience.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour soutenir l'amendement n° 78.

M. Laurent Wauquiez. Dès lors que l'on prévoit un dispositif de formation après l'agrément, le but est de valoriser les aptitudes et non les capacités qui seraient préexistantes à une formation. C'est un amendement de bon sens permettant de revenir à une évaluation plus juste, sans rigidifier le système.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure, pour présenter l'amendement n° 109.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. L'amendement de la commission est identique aux précédents.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 56, 78 et 109.

(Ces amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, pour défendre l'amendement n° 24.

Mme Patricia Adam. Cet amendement propose que les capacités éducatives soient évaluées à partir d'une grille présentant des critères identiques sur tout le territoire national.

Je pense qu'il va être repoussé, puisqu'il fait référence à une grille nationale.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Défavorable.

Mme. la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 82 et 79, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour soutenir l'amendement n° 82.

Mme Muguette Jacquaint. Le Sénat a eu raison de faire préciser les conditions de renouvellement et de supprimer toute notion de durée pour l'agrément des assistants familiaux. Ces conditions devront être fixées par décret. Je souhaite, par l'amendement n° 82, étendre le bénéfice de ces dispositions aux assistants maternels.

Comme pour les assistants familiaux, il serait en effet légitime que les assistants maternels puissent bénéficier d'un renouvellement automatique et sans limitation de durée de leur agrément lorsque la formation mentionnée à l'article L. 421-14 est sanctionnée par l'obtention d'une certification. Cette possibilité serait bien sûr encadrée par la PMI, et ne remettrait pas en cause le suivi, l'accompagnement et le retrait éventuel en cas de faute avérée.

Sous la réserve du maintien d'un accompagnement, d'un suivi et d'un contrôle, cette extension aux assistants maternels permettrait certainement de les inciter à passer les épreuves du CAP « Petite enfance ». De la sorte, celles et ceux qui obtiendraient ce CAP verraient leur travail officiellement reconnu et un déroulement de carrière leur serait ainsi proposé. Quant aux autres, leur aptitude ne serait nullement remise en cause, et ils pourraient continuer d'exercer leur activité.

Dans les deux cas, le bénéfice d'un renouvellement automatique et sans limitation de durée étendu aux assistants maternels ne peut que contribuer à la reconnaissance de leur professionnalisme.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour présenter l'amendement n° 79.

M. Laurent Wauquiez. Alors que le projet de loi prévoit le renouvellement automatique de l'agrément pour les assistants familiaux, il laisse subsister une procédure relativement lourde de renouvellement de l'agrément tous les cinq ans pour les assistants maternels. Nous proposons d'introduire une mesure d'équité à l'égard des assistants maternels, qui trouvent cette différence de traitement assez choquante.

Par ailleurs, on alourdit la charge de travail des services du conseil général, qui sont obligés d'organiser la procédure de renouvellement tous les cinq ans, procédure bien souvent artificielle.

Je ne propose pas de basculer vers un système de renouvellement tacite, mais je présente une mesure d'équilibre avec un renouvellement de l'agrément tous les dix ans.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a émis des avis défavorables aux deux amendements.

Si nous avons cru bon d'établir une distinction de statut entre les assistants maternels et les assistants familiaux, c'est que les conditions d'exercice de ces deux métiers et des missions qu'ils exercent sont différentes.

Les assistants familiaux accomplissent une mission difficile, mais ils bénéficient pour cela d'un accompagnement constant, ce qui explique que le contrôle permanent n'est pas utile ; le contrôle périodique l'est encore moins.

Pour les assistants maternels, le contrôle réside bien souvent en un coup de téléphone, pour dire que tout va bien. Il serait dommage que même ce coup de téléphone soit supprimé. Maintenir la procédure de contrôle tous les cinq ans n'est pas une mauvaise chose, de l'avis même des assistants maternels, et dans la mesure où cela ne coûte pas très cher aux départements, parce que la procédure n'est pas très lourde - cinq minutes - surtout pour des assistants maternels qui n'ont fait l'objet d'aucune critique.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Sur ce sujet important, je comprends que l'on soit tenté de suivre la voie que vous indiquez, monsieur Wauquiez. Il est vrai que le Sénat a fait un tel choix pour les assistants familiaux mais il s'agit néanmoins d'un métier qui diffère de plus en plus de celui d'assistant maternel.

Les assistants familiaux sont embauchés par des personnes morales, en tant que parties intégrantes des services de placement familial qui les suivent et les accompagnent. Il existe donc une relation professionnelle de qualification forte entre ces personnes morales et ces personnels. De plus, le projet de loi vise à porter le nombre de leurs heures de formation de 120 à 300, dans le cadre d'une véritable professionnalisation.

Les assistants maternels, quant à eux, sont recrutés non par des personnes morales mais par des particuliers et leur formation n'est pas obligatoirement sanctionnée par une certification.

En l'absence d'obligations d'accompagnement et de contrôle de la part des services du département, le renouvellement de l'agrément permet d'assurer un minimum de contrôle sur les assistants maternels agréés, qui ne sont pas des professionnels à la différence des assistants familiaux. Par ailleurs, pratiqué à intervalles réguliers, il constitue une garantie pour les parents. Je ne suis donc pas favorable à l'automaticité du renouvellement proposé par ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Je remercie Mme la rapporteure et M. le ministre pour leurs éclairages et je souhaite leur répondre.

Premièrement, il existe effectivement une différence de statuts et le but de ce texte est bien de distinguer les assistants familiaux des assistants maternels. D'ailleurs, mon amendement n'entend pas aligner les deux statuts et prend bien en compte la différence de situations.

Deuxièmement, nous ne parlons pas du recrutement mais de l'agrément. Dans les deux cas, l'agrément est donné par une personne morale puisque les assistants maternels sont agréés par le conseil général qui exerce son contrôle avec le même sérieux que pour les assistants familiaux.

Troisièmement, s'agissant de la formation, je trouve choquant que, d'un côté, on assouplisse ses conditions pour les assistants familiaux, et que, de l'autre, on maintienne un régime dur pour les assistants maternels. Cela donne l'impression que l'on peut moins faire confiance à un assistant maternel alors même qu'il a parfaitement exercé ses missions pendant cinq ans.

Notre idée est simple : il s'agit d'appliquer une mesure alliant confiance et souplesse aux assistants maternels, qui font déjà l'objet d'un contrôle continu de la part de la protection maternelle et infantile. Il ne semble donc pas déraisonnable de prévoir un délai de dix ans entre chaque renouvellement, une fois que l'assistant maternel a fait preuve de ses compétences pendant cinq ans.

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je ne reviendrai pas sur la différence de statut entre assistants familiaux et assistants maternels. Nous avons tous compris qu'il s'agissait de deux métiers différents. Cependant, madame la rapporteure, si les procédures de contrôle se résument à un simple coup de téléphone, pourquoi refuser l'automaticité du renouvellement ? Vos arguments sont un peu courts en la matière.

Par ailleurs, je partage les arguments de mon collègue. Je ne vois pas pourquoi un assistant maternel agréé ayant exercé pendant cinq ans devrait être contrôlé tous les cinq ans. C'est tenir en suspicion la qualité de son travail.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Je souhaite présenter un sous-amendement visant à faire bénéficier les assistants maternels de crèches familiales du renouvellement tous les dix ans car ils font partie d'une équipe et sont particulièrement bien suivis. Cela permettrait ainsi d'établir un compromis.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Ce sous-amendement me paraît une très bonne idée.

Cela étant, madame Jacquaint, notre position ne traduit pas une marque de suspicion à l'égard des assistants maternels. Il s'agit simplement de prendre en compte le renforcement du suivi et de l'encadrement dont font l'objet les assistants familiaux à travers la création de projets de services de l'aide sociale à l'enfance et des contrats d'accueil, différents des contrats de travail. C'est pourquoi nous n'avons en effet pas jugé bon d'effectuer des contrôles supplémentaires et que les conditions de renouvellement sont assouplies. La situation des assistants maternels, elle, n'a pas changé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Je ne suis pas opposée à ce sous-amendement. Cependant, j'émets des doutes sur l'automaticité du renouvellement de l'agrément. En effet, à l'heure actuelle, le renouvellement tous les cinq ans oblige les assistants maternels à reprendre contact avec les services du département. Cela n'est pas inutile quand on sait que nombre d'assistants maternels agréés, qui figurent toujours en tant que tels sur les listes, ont fait le choix d'exercer une autre activité, à l'extérieur de leur domicile, sans en prévenir la collectivité locale, le relais assistantes maternelles ou le département, même si c'est obligatoire.

Ce problème se pose dans tous les départements et dans toutes les communes. Sur des milliers d'assistants maternels inscrits, les trois quarts ou les deux tiers seulement exercent véritablement leur profession. Dès lors, pouvoir effectuer une vérification tous les cinq ans est une bonne chose.

Mme la présidente. Je donne lecture du sous-amendement n° 124 du Gouvernement : « Dans l'amendement n° 79, après les mots : " tous les dix ans ″, insérer les mots : "pour les assistants maternels employés par les crèches familiales,″. »

Je mets aux voix ce sous-amendement n° 124.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 79, modifié par le sous-amendement n° 124.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 82 tombe et j'appelle l'amendement n°108.

La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement vise à harmoniser la composition du dossier d'agrément et prévoit la production d'un extrait du casier judiciaire n° 3 pour tous les adultes vivant au domicile du demandeur afin de connaître les éventuels antécédents judiciaires de l'entourage du professionnel.

La commission a voté cet amendement qui étend les règles de sécurité à l'environnement familial majeur de l'enfant, à l'exception, évidemment, des majeurs accueillis en application d'une mesure d'aide sociale à l'enfance.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées pour donner l'avis du Gouvernement.

Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'État aux personnes âgées. Avis favorable. Il paraît très important de procéder à une vérification de l'extrait du casier judiciaire de l'ensemble des personnes vivant au domicile du professionnel concerné.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 108.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint pour défendre l'amendement n° 83.

Mme Muguette Jacquaint. Notre amendement porte sur les conditions d'agrément spécifiques aux assistants maternels et sur le nombre maximum d'enfants qu'ils peuvent accueillir.

La loi relative à l'accueil et à la protection de l'enfance avait introduit un élément de souplesse dans l'agrément, en autorisant l'accueil d'un plus grand nombre d'enfants, voir d'un nombre indéterminé d'entre eux, sans aller toutefois au-delà de trois simultanément. Votre projet de loi entérine le passage d'un nombre maximum d'enfants accueillis à un nombre de places simultanément occupées. Je comprends ce qui motive cette disposition, qui entend, d'une part, assurer aux assistants maternels une plus grande stabilité de revenus, et, d'autre part, répondre aux besoins des parents qui sont contraints par la précarité de leur emploi à temps partiel.

Toutefois, je m'inquiète des conséquences probables de cette modification : d'abord, eu égard aux intérêts de l'enfant, auquel nous devons garantir les meilleures conditions de sécurité et un accueil personnalisé ; ensuite eu égard aux assistants maternels eux-mêmes, car leurs contraintes risquent d'être plus fortes et plus diverses. De plus leurs conditions de travail pourraient se dégrader considérablement, avec des amplitudes horaires allant bien au-delà des 35 heures.

Notre inquiétude est d'autant plus fondée que votre projet de loi est loin de garantir des dispositions suffisamment protectrices en termes de durée hebdomadaire moyenne de travail puisqu'il prévoit un alignement sur la durée maximale autorisée en Europe, qui est de 48 heures, comme nous le verrons à l'article 18.

Enfin, ces assouplissements rendront plus difficiles le contrôle du respect des modalités de l'agrément, compte tenu de la pénurie de personnel dont souffrent les services de la protection maternelle et infantile.

Aussi proposons-nous, à travers cet amendement, de revenir à la rédaction initiale de l'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles, qui fixe à trois le nombre d'enfants pouvant être accueillis.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement, considérant que la disposition proposée crée des situations trop restrictives. Nous avons tenu à encadrer très strictement le nombre d'enfants susceptibles d'être accueillis chez une assistante maternelle et familiale. Nous avons pensé que trois simultanément, chiffre déjà contesté par certains, était la limite que nous devions nous imposer. Je vous rappelle qu'avec les RTT des enfants peuvent être confiés aux assistants maternels pour des temps courts. La souplesse de trois simultanément et de six au total permet, malgré tout, de préserver la sécurité des enfants.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement, pour les mêmes raisons. En effet, l'objet de ce texte est de préserver les intérêts des enfants. Pour autant, un minimum de souplesse est nécessaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 83.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour présenter l'amendement n° 80.

M. Laurent Wauquiez. Cet amendement, cosigné par Mme Lévy et M. Trassy-Paillogues, qui me tient à cœur et qui a été mûrement réfléchi, est le fruit de nombreuses rencontres sur le terrain auxquelles a participé M. Proriol.

Sachant que ce texte doit concilier deux exigences, d'une part assurer une bonne qualité d'accueil des enfants, d'autre part rendre la profession plus attractive afin de remédier à la pénurie que connaissent de nombreux départements, nous devons veiller à ne pas rigidifier le système à l'excès.

Actuellement, une assistante maternelle ne peut pas accueillir simultanément plus de trois enfants et je précise qu'il ne s'agit pas de trois enfants équivalent temps plein. Ne sont pas comptés les propres enfants de l'assistante maternelle.

Si le projet de loi contient de nombreuses avancées par ailleurs, compter désormais les propres enfants - de moins de trois ans - de l'assistante maternelle dans le nombre de ceux qu'elle peut accueillir simultanément constitue un recul important par rapport à l'attractivité du métier et, surtout en ce qui concerne la souplesse.

On adresserait un signal défavorable aux jeunes mères de famille en leur signifiant que, dès lors qu'elles ont elles-mêmes un enfant de moins de trois ans, elles sont moins aptes à accueillir d'autres enfants. Par ailleurs, cela constituerait un facteur de rigidité qui enlèverait une certaine souplesse au système et réduirait ses capacités d'adaptation. J'en veux pour preuve le cas d'une assistante maternelle qui accueille deux enfants et qui récupère, à seize heures trente, un troisième enfant de cinq ans.

Enfin, ne pouvoir accueillir simultanément que deux enfants au lieu de trois impliquerait pour l'assistante maternelle une perte de revenu qui pourrait la dissuader de s'engager dans cette voie.

M. le ministre, qui nous a malheureusement quittés, nous a expliqué que la philosophie de ce texte était de permettre aux assistantes maternelles d'exercer leur profession tout en ayant une vie de famille et de conserver un système souple. Voilà pourquoi j'estime qu'il faut en rester au système actuel.

J'ajoute que le conseil général garde la possibilité, dans le cadre de son pouvoir de dérogation, de donner un agrément pour moins d'enfants, s'il considère que la situation personnelle de l'assistante maternelle ne le lui permet pas, par exemple si elle a elle-même deux enfants de moins de trois ans.(« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a émis un avis défavorable pour des raisons similaires mais contraires à l'amendement précédent.

Nous voulons un système à la fois souple et rigoureux. Nous voulons protéger la sécurité de l'enfant. Nous pensons en effet qu'une mère de famille qui a un bébé de moins de trois ans - c'est entre zéro et trois ans qu'ils sont le plus difficile à garder - ne s'occupera pas de la même façon des autres enfants si elle en a plus de trois en tout. Ne pas le reconnaître serait ne pas reconnaître la qualité du travail qu'effectuent les assistantes maternelles qui, je le répète, assurent un rôle éducatif très important, notamment en ce qui concerne la maîtrise du langage. C'est bien pourquoi nous pensons qu'elles ne peuvent pas s'occuper en même temps de plus de trois enfants.

Bien évidemment, le président du conseil général pourra accorder des dérogations, en cas de fratrie par exemple. Il est toujours beaucoup plus facile d'autoriser que d'interdire.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Le Gouvernement partage tout à fait l'analyse que vient de développer Mme la rapporteure.

C'est reconnaître la qualité du travail des assistantes maternelles que d'imaginer qu'elles s'occuperont aussi bien des enfants dont elles ont la charge que de leurs propres enfants et c'est pour cela que le seuil de trois enfants simultanément est déjà important.

La volonté du Gouvernement n'est pas de décourager les mères de jeunes enfants qui souhaitent devenir assistantes maternelles. J'en veux pour preuve la possibilité donnée à un salarié en congé parental d'éducation qui travaille à temps partiel d'exercer cette activité professionnelle.

Je précise également que les règles relatives à l'allocation parentale d'éducation et au complètement libre choix d'activité PAJE à taux partiel sont favorables pour les parents de jeunes enfants au métier d'assistante maternelle. En retenant le seuil de trois enfants accueillis simultanément, nous avons voulu harmoniser les pratiques départementales et garantir une égale qualité de prise en charge des enfants.

Enfin, comme cela a déjà été souligné, il convient de ne pas alourdir les procédures administratives, les départements pouvant toujours, s'ils le souhaitent, accorder des dérogations.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l'amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Je suis d'accord avec les propos de la secrétaire d'État et de la rapporteure.

Monsieur Wauquiez, nous ne parlons pas seulement ici des assistantes maternelles, mais aussi de la politique de l'enfance. Je rappelle que l'article 1er A que nous avons voté précise que les assistants maternels s'inscrivent dans la politique de l'enfance qui a pour but de favoriser le développement physique et psychique de l'enfant et son épanouissement. Or ce que vous proposez ne le permet pas.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Madame la secrétaire d'État, si j'ai bien compris, une assistante maternelle a actuellement la possibilité de garder quatre enfants, mais, avec ce texte, elle ne le pourra plus.

M. Laurent Wauquiez. Exactement !

M. Marc Laffineur. Cela revient-il à dire qu'actuellement elles ne font pas bien leur travail ? Voilà qui m'interpelle.

Vous nous dites, par ailleurs, que le président du conseil général pourra accorder une dérogation aux assistantes maternelles qui voudraient garder quatre enfants. Il y a dans tout cela une logique qui m'échappe.

J'ajoute que je peux attester, en tant que maire, que tout le monde est content du travail effectué par les assistantes maternelles.

M. Alfred Trassy-Paillogues et M. Laurent Wauquiez. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Je partage l'avis de la secrétaire d'État et de la rapporteure...

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Merci, madame Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. ...et j'insiste à mon tour sur le rôle éducatif de l'assistante maternelle.

Quant à l'argument qui consiste à dire que limiter le nombre d'enfants revient à limiter le salaire, je le trouve choquant. Faut-il garder cinq, six enfants pour avoir un bon revenu ? Certes, les assistantes maternelles souhaitent une meilleure rémunération qu'actuellement, mais elles veulent aussi une amélioration de leurs conditions de travail. Favoriser le développement et l'épanouissement de l'enfant demande du temps.

De surcroît, on le sait, il est difficile de concilier vie familiale et professionnelle, même si l'on nous promet des améliorations. Il ne faudrait pas laisser entendre que la seule voie possible consisterait à devenir assistante maternelle.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Monsieur Laffineur, jusqu'à maintenant il n'y avait pas de règle, mais la pratique communément admise par les conseils généraux était de retenir un seuil de trois enfants. Au nom d'une meilleure qualité de la prise en charge des enfants, d'un meilleur accompagnement et d'une reconnaissance du rôle des assistantes maternelles, nous ne voulons pas aller plus loin.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Pecresse.

Mme Valérie Pecresse. Mme la secrétaire d'État m'a enlevé les mots de la bouche. Le débat me semblait plus théologique que pratique. Ainsi, dans les Yvelines, j'ai interrogé les assistantes maternelles qui m'ont répondu que jamais, au grand jamais, un président de conseil général ne donnerait l'agrément s'il y avait plus de trois enfants, y compris ceux de l'assistante.

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Exactement !

Mme Valérie Pecresse. Les mères que nous sommes,...

M. Pierre-Louis Fagniez. Et les pères !

Mme Valérie Pecresse. ...se rendent bien compte que trois enfants de moins de trois ans représentent un maximum.

Mme la présidente. Il y a des mères, des maires, des pères...

Mme Valérie Pecresse. Et sans doute aussi des présidents de conseil général. (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Delnatte.

M. Patrick Delnatte. Alors qu'on veut concilier vie familiale et vie professionnelle, instaurer un tel barrage ne peut qu'inciter les assistantes maternelles à repousser leurs projets de maternité, avec tous les risques liés aux grossesses tardives. Le signe que nous envoyons n'est pas très bon et je crains qu'il ne soit mal perçu, même si je conçois qu'il faille trouver une solution.

Mme Muguette Jacquaint. Laissez les femmes faire le métier qu'elles veulent !

Mme la présidente. La parole est à M. François Scellier.

M. François Scellier. Effectivement, madame Pecresse, il y a bien des présidents de conseil général ! (Sourires.)

Le dispositif que j'avais mis en place en cette qualité privilégiait l'accueil du plus grand nombre possible d'enfants. Au cours des discussions que j'ai eues avec les assistantes maternelles, je me suis rendu compte que c'est au nom de leur sens des responsabilités qu'elles demandaient une limitation du nombre d'enfants accueillis.

Je suis d'accord avec le projet de loi qui me semble aller sur ce point dans le bon sens il faut faire passer l'intérêt des enfants avant d'autres considérations, d'autant que les assistantes maternelles elles-mêmes réclament une limite.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 80.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 84 et 48, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour défendre l'amendement n° 84.

Mme Muguette Jacquaint. Cet amendement tend à préciser les situations justifiant une dérogation au nombre d'enfants accueillis. Mme la secrétaire d'État nous a d'ailleurs répondu sur ce point avant même que je défende cet amendement. En effet, les fratries, les enfants scolarisés ou en situation de handicap sont des cas qui méritent d'être pris en compte.

Mme la présidente. La parole est à M. Rudy Salles, pour soutenir l'amendement n° 48.

M. Rudy Salles. Cet amendement prévoit de nouvelles dérogations en cas de force majeure, comme les grèves dans les structures d'accueil collectives ou dans les écoles, ou les événements familiaux imprévisibles. De tels cas devront être déterminés par décret en Conseil d'État.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Imposer des limites très strictes et très spécifiques interdirait d'autres dérogations. Dans la mesure où le président du conseil général peut à tout moment, en fonction des situations, autoriser les dérogations qu'il juge judicieuses, il me semble inutile de les énumérer. Les cas prévus dans les amendements me semblent aller de soi et ne pas mériter un traitement particulier. C'est la raison pour laquelle la commission a repoussé les deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Défavorable aux deux amendements, d'autant qu'ils sont du domaine réglementaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 84.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 48.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, pour présenter l'amendement n° 66.

Mme Patricia Adam. L'amendement vise, puisque les conseils généraux sont compétents dans ce domaine, à s'assurer que l'Association des départements de France sera consultée sur le contenu du décret.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a repoussé l'amendement. Pourquoi l'ADF serait-elle la seule à être consultée ? Il faudrait aussi prendre l'avis de l'Association des maires de France, puisque les communes financent les crèches familiales, et de la sécurité sociale. Toute lourdeur administrative supplémentaire ne pourrait être qu'une gêne.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 66.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 25.

Mme Patricia Adam. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Il a été rejeté par la commission qui a jugé qu'il introduisait une rigidité inutile.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Scellier, pour défendre l'amendement n° 55.

M. François Scellier. L'amendement tend à préciser que, dans le calcul du nombre d'enfants accueillis par l'assistant familial, entrent aussi les jeunes majeurs de moins de vingt et un ans.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a adopté l'amendement et remercie son auteur. Les assistants familiaux devraient s'en réjouir.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Même commentaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 55.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

Article 6

Mme la présidente. Aucun orateur n'étant plus inscrit sur l'article 6, puisque Mme Adam a renoncé à son intervention, nous en venons aux amendements.

Je suis d'abord saisie d'un amendement n° 105 rectifié.

La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour le présenter.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. L'amendement précise que le silence de l'administration vaudra refus d'agrément, pour éviter qu'en cas de silence dû à une négligence, l'agrément soit délivré une personne qui ne remplit peut-être pas les conditions adéquates.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. L'administration restera dans son silence et s'en remettra à la sagesse de l'Assemblée. (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 105 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 95 de Mme Tabarot n'est pas défendu.

J'en viens donc à l'amendement n° 71.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Cet amendement a pour but de laisser un peu plus de temps pour instruire les demandes d'agrément, afin de permettre aux professionnels des départements de bien faire leur travail. Quatre mois entre la réception du courrier et la notification de la décision sont manifestement insuffisants pour diligenter les services, réaliser une expertise et rendre un avis définitif, d'où ma demande de passer de quatre à six mois. Un travail sérieux est dans l'intérêt de tous.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a repoussé l'amendement en considérant qu'un délai de six mois serait trop long pour les assistants familiaux dans la mesure où, pendant ce temps, ils ne sont pas payés. Nous avons voulu éviter une forme de précarité.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Même analyse.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 71.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 74 et 57, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 74 de M. Luca n'est pas défendu.

La parole est à M. Rudy Salles pour présenter l'amendement n° 57.

M. Rudy Salles. Depuis la loi n° 79-587 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, obligation est faite à l'administration de motiver ses actes. Dans un souci de transparence et de justice, il convient de soumettre la suspension d'agrément au même régime que celui du retrait ou de la modification d'agrément.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a repoussé l'amendement mais j'avoue être perplexe. En effet, laisser une trace écrite des motifs de la suspension d'agrément pourrait pénaliser l'assistant maternel ou familial, mais, d'un autre côté, ne rien dire ne lui serait peut-être pas beaucoup plus favorable, chacun étant libre d'imaginer n'importe quel autre motif, sans aucun fondement.

C'est pourquoi, si la commission a repoussé l'amendement, je m'en remets, à titre personnel, à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Le Gouvernement est plutôt défavorable à cet amendement parce qu'il nous semble que le dispositif légal est suffisant pour répondre aux intérêts particuliers des personnes titulaires d'un agrément, tout en privilégiant l'intérêt général, c'est-à-dire le principe de précaution et la protection des enfants.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 57.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François Scellier, pour soutenir l'amendement n° 54.

M. François Scellier. L'amendement proposant un allongement de la durée de suspension de l'agrément auquel se sont opposées Mme la rapporteure et Mme la secrétaire d'État, je le retire.

Mme la présidente. L'amendement n° 54 est retiré.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour défendre l'amendement n° 67.

Mme Patricia Adam. En cas de déménagement de l'assistant maternel, l'amendement prévoit de porter le délai au cours duquel aura lieu le contrôle des nouvelles conditions de logement d'un à deux mois, ce qui n'a pas de conséquence financière pour l'assistant, mais permettra aux services de travailler.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Avis défavorable dans la mesure où c'est la sécurité de l'enfant qui est en cause. Laisser durer un mois de plus l'incertitude quant aux conditions d'accueil de l'enfant peut être préjudiciable à sa sécurité.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Sur le fond, mes arguments sont les mêmes que ceux de Mme la rapporteure. J'ajoute que l'introduction dans le projet de loi de ce délai constitue une nouveauté et une avancée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. J'en conviens, madame la secrétaire d'État, et vous avez eu raison de le préciser. Je ne remets pas en cause le principe, mais la durée de ce délai me semble irréaliste.

En pratique en effet, il ne suffira pas pour permettre une vérification des conditions de logement. Entre le moment où l'on est avisé du déménagement et où la vérification est faite, il faut que le courrier soit reçu, enregistré, acheminé vers les services compétents, que les professionnels de terrain soient informés et diligentés sur place : un mois ne peut y suffire. Le contrôle ne sera pas mené à bien, auquel cas ce pourrait bien être en effet, madame la rapporteure, au préjudice de la sécurité de l'enfant.

Je suis d'accord avec vous sur la nécessité de vérifier les conditions de logement de l'assistant maternel, mais le délai prévu est impossible à tenir techniquement. Les professionnels le dénoncent à juste titre.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Vous n'ignorez pas, madame la députée, qu'un préavis de quinze jours venant s'ajouter, le délai sera en fait de six semaines, ce qui paraît suffisant au Gouvernement pour que l'administration puisse mener à bien ces contrôles.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 67.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour présenter l'amendement n° 110.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 110.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Article 7

Mme la présidente. Madame Adam, renoncez-vous également à intervenir sur l'article 7 ?

Mme Patricia Adam. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 7 est important, puisqu'il vise à professionnaliser le métier d'assistant familial, lequel requiert en effet des compétences particulières et des aptitudes psychologiques indéniables. C'est pourquoi les conditions de l'accès au métier, notamment le rôle et l'importance de la formation, doivent être étudiées de près.

L'un des principaux objets de cet article s'attache à développer quantitativement la formation initiale des assistants familiaux en prévoyant que sa durée sera répartie en deux volets, qui consisteront : le premier en un stage de préparation à l'accueil et le second en une formation qui sera délivrée au cours des trois premières années d'exercice.

Cependant la rédaction de l'article est trop générale, nombre de précisions étant renvoyées à un décret.

C'est la raison pour laquelle nous proposerons d'inscrire dans la loi que le stage préparatoire devra être organisé sous la responsabilité du département, ce qui, loin d'empêcher l'intervention du service public de l'emploi ou de la région, interdira que le stage soit exclusivement supporté financièrement par l'employeur de l'accueillant.

Nous proposerons également que la loi fixe à dix jours la durée du stage et qu'elle prévoie que cette formation devra être sanctionnée par la délivrance d'un certificat d'aptitude. Une telle précision me paraît nécessaire pour garantir la qualité de la formation dispensée et reconnaître le niveau de la qualification acquise.

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour défendre l'amendement n° 72.

Mme Patricia Adam. Cet amendement vise à mieux définir les dispositions relatives à la formation déjà contenues dans le projet de loi en précisant que la formation sera décomposée en deux temps et que les modalités d'organisation seront fixées par décret.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a repoussé cet amendement, car la formation, qui a été entièrement reconsidérée, relèvera désormais de la compétence des départements en formation initiale comme en formation alternée. L'objectif restera cependant le même.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Même avis.

Cet amendement reviendrait à distinguer, au sein de la formation obligatoire des assistants maternels, la formation qui devra être suivie avant l'accueil de l'enfant de celle qui devra être suivie après. Or il nous paraît difficile de décomposer ainsi en deux parties distinctes une formation obligatoire qui a été conçue comme formant une unité. Les organisations professionnelles et syndicales, qui représentent les assistants maternels et les particuliers employeurs et qui ont été, d'un bout à l'autre, associées à nos travaux, ont d'ailleurs fort mal accueilli cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 72.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 31 et 53, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 31.

Mme Patricia Adam. Cet amendement vise à préciser dans la loi les durées minimales de formation avant et après l'accueil de l'enfant. Il s'inscrit dans la logique de mon précédent amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. François Scellier, pour soutenir l'amendement n° 53.

M. François Scellier. Cet amendement n'a pas le même objet que l'amendement n° 31.

Mme la présidente. Ils sont simplement soumis à une discussion commune, monsieur Scellier.

M. François Scellier. Les départements devront désormais faire assurer 120 heures de formation obligatoire aux assistants maternels, préalablement à tout accueil d'enfant.

Dans la mesure où il s'agit d'une formation initiale renvoyant à un système de formation qualifiante ou diplômante, il appartient à la région de la prendre en charge, comme c'est déjà le cas pour les auxiliaires de vie sociale.

C'est la raison pour laquelle je propose de substituer aux mots : « dont les modalités de mise en œuvre par le département », les mots : « qualifiante ou diplômante, préalable à toute embauche, dont les qualités de mise en œuvre par la région ».

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. L'avis de la commission est défavorable à l'amendement n° 31.

En effet, les durées sont du domaine réglementaire. Elles n'ont donc pas à être fixées par la loi.

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Exactement !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a, avec regret, également émis un avis défavorable à l'amendement n° 53. Son adoption ferait sans doute très plaisir aux départements. (Sourires.) Malheureusement, la formation leur incombant, il est logique qu'ils la prennent en charge dans son intégralité, afin d'éviter de regrettables dysfonctionnements qui risqueraient de nuire à la qualité de la formation dispensée.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 53.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour présenter l'amendement n° 111, troisième rectification.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement vise à préciser qu'une formation au secourisme est obligatoire pour exercer la profession d'assistant maternel. L'initiation aux premiers gestes du secourisme nous paraît en effet indispensable pour permettre aux assistants maternels et familiaux, qui gardent personnellement des enfants, d'avoir les réflexes adéquats en cas d'accident.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 111, troisième rectification.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, pour défendre l'amendement n° 68.

Mme Patricia Adam. Cet amendement, qui vise à uniformiser sur tout le territoire national les modalités de rémunération des assistants maternels pendant leur temps de formation, répond à une demande très forte de la part des intéressés, qui sont désireux de voir empêcher sur l'ensemble du territoire national toute disparité en la matière.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Défavorable.

Cette disposition est déjà prévue par le code du travail. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Patricia Adam. Pardon !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 68.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Rudy Salles, pour soutenir l'amendement n° 22.

M. Rudy Salles. L'amendement précise que les départements doivent prévoir un mode de garde de substitution, pendant le temps des formations continues des assistants maternels, qui soit adapté aux horaires de travail des parents et qui ne pénalise pas l'enfant. Il est souhaitable que les lieux de formation organisent une garderie à des horaires correspondant aux horaires habituels de garde.

Au moment où l'on entend faire jouer un rôle de plus en plus important aux assistants maternels et satisfaire les besoins des familles, cet amendement trouve toute sa place dans le projet de loi.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement n'a pas été examiné par la commission.

J'y suis à titre personnel très favorable. Je n'ai rien à ajouter à l'excellente argumentation de mon collègue Rudy Salles.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Favorable.

Le Gouvernement ne peut que partager l'objectif de cet amendement, qui vise à fournir aux enfants d'excellentes conditions d'accueil.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Adam, pour défendre l'amendement n° 29.

Mme Patricia Adam. Je tiens d'abord à faire part de mon étonnement devant la réponse de Mme la rapporteure sur l'amendement n° 68, relatif à l'uniformisation sur tout le territoire des modalités de rémunération des assistants maternels pendant leur temps de formation. Elle a en effet indiqué que cette question était déjà réglée par le code du travail. Or cela me semble bien improbable.

Quant à cet amendement, qui se justifie par son texte même, il vise, notamment, à compléter la première phrase du dernier alinéa de l'article L.421-15 du code de l'action sociale et des familles par les mots : « d'une durée minimale de deux cent quarante heures ».

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Défavorable, car il relève du domaine réglementaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 5 et 28

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement vise à ce que la validation de la formation de l'assistant familial soit établie selon des critères nationaux.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes âgées. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 5 et 28.

(Ces amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 7, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à la prochaine séance.

    4

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

Mme la présidente. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, n° 1623, relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux :

Rapport, n° 1663, de Mme Muriel Marland-Militello, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot