Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session ordinaire 2004-2005)

 

Première séance du jeudi 10 février 2005

145e séance de la session ordinaire 2004-2005



PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS BAROIN,

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

    1

DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES RURAUX

Transmission et discussion du texte
de la commission mixte paritaire

M. le président. M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :

                  « Paris, le 3 février 2005

« Monsieur le président,

« Conformément aux dispositions de l'article 45, alinéa 3, de la Constitution, j'ai l'honneur de vous demander de soumettre à l'Assemblée nationale, pour approbation, le texte proposé par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération. »

En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire (n° 2057).

La parole est à M. Yves Coussain, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Yves Coussain, rapporteur de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales, mes chers collègues, l'adoption du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux marquera une étape essentielle de l'effort de la représentation nationale pour donner un nouveau souffle à nos campagnes. Après plus d'un an de travail et la réunion de la commission mixte paritaire jeudi dernier, le projet de loi sur lequel nous allons nous prononcer, qui comptait à l'origine soixante-seize articles, en comporte désormais plus de deux cent cinquante. C'est dire combien nous l'avons enrichi. Il est vrai qu'il traite de sujets divers, mais cette diversité est à l'image de celle de nos zones rurales et de la variété des problèmes qu'on y rencontre.

S'agissant du volet relatif aux zones de revitalisation rurale, la commission mixte paritaire a étendu l'exonération de taxe professionnelle aux reprises d'activités libérales, alors que le texte issu de la deuxième lecture de notre assemblée la réservait aux créations d'activités commerciales et aux reprises d'activités commerciales et artisanales. Dès 2005, l'exonération de taxe professionnelle sera étendue aux créations d'activités commerciales et libérales, ainsi qu'aux reprises d'activités commerciales, artisanales ou libérales. L'exonération d'imposition sur le revenu sera, quant à elle, étendue aux créations d'activités libérales. La durée de l'exonération sur le revenu est portée à taux plein de quatre à cinq ans, tandis que la progressivité de l'imposition passe ensuite de trois à neuf ans : la durée globale de l'exonération passe donc de sept à quatorze ans ! On voit que les ZRR disposeront d'un arsenal d'avantages fiscaux très attractifs.

Dans le domaine du foncier et du bâti, le dispositif d'amortissement exceptionnel sur l'immobilier industriel a été prolongé jusqu'en 2007 et étendu aux travaux de rénovation ; la durée de l'exonération de charges sur le foncier bâti a été portée de deux ans à cinq ans. Une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties d'une durée de quinze ans a été créée pour les logements acquis et rénovés grâce à une aide financière de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH ; par ailleurs, une déduction forfaitaire de 40 % des revenus bruts tirés des logements acquis neufs ou en état futur d'achèvement en vue de leur location a été créée en ZRR. Enfin, le périmètre à l'intérieur duquel seront applicables ces exonérations sera étendu de près de 10 %, ce qui constitue un vrai engagement du Gouvernement, et marque clairement notre volonté d'aider les zones les plus fragiles à sortir de la spirale du déclin et de la désertification.

Prétendre, dans ces conditions, que le projet de loi ne contient pas de ligne directrice ni ne s'accompagne de moyens financiers en faveur des territoires ruraux est, non seulement totalement faux, mais de plus contraire à l'intérêt de ces territoires, auxquels on doit rendre foi en leur avenir.

S'agissant de la relance du tourisme en milieu rural, les deux assemblées ont adopté des améliorations au dispositif fiscal existant qui prévoit une réduction d'impôt sur le revenu pour les résidences de tourisme : suppression de l'obligation de disposer d'un permis de construire pour pouvoir bénéficier de la réduction d'impôt en vigueur ; extension aux villages résidentiels de tourisme du bénéfice du dispositif, de même qu'aux meublés de tourisme ; enfin, la prorogation du dispositif jusqu'en 2010.

Pour ce qui concerne les activités agricoles, je me réjouis que les assouplissements et les mesures fiscales déjà prévus pour faciliter la vie des agriculteurs aient été complétés par l'introduction d'un « coefficient multiplicateur » pour réguler les prix des fruits et légumes en période de crise : il s'agissait là d'une attente très forte de la profession. Je constate aussi avec satisfaction que la disposition relative aux règles encadrant la publicité de certaines boissons alcoolisées, introduite par le Sénat en première lecture dans une rédaction un peu excessive, fait aujourd'hui l'objet d'un consensus, la rédaction proposée par le Gouvernement en deuxième lecture au Sénat rejoignant entièrement l'esprit de celle votée à l'Assemblée nationale.

Je tiens par ailleurs à rappeler que, si nous avons renoncé en CMP à une disposition visant à rattacher plus largement les entreprises paysagères au régime social agricole parce qu'elle relevait du règlement, le seuil de 10 % maximum d'activités non paysagères retenu dans le décret le plus récent nous semble beaucoup trop bas pour stimuler l'activité de ces entreprises et doit donc être revu.

S'agissant de l'équarrissage, j'observe avec plaisir que le Gouvernement a tenu ses engagements en proposant au Sénat un long article qui permettra de réduire le coût de ce service sans mettre en danger la santé des consommateurs.

Concernant le patrimoine rural bâti, le projet de loi favorise l'hébergement des salariés saisonniers et des apprentis, et par conséquent leur embauche.

Ce projet de loi nous permettra par ailleurs de mieux défendre les zones agricoles et naturelles dans les espaces périurbains, grâce à l'instauration de périmètres spécifiques. Je me réjouis à cet égard que le Sénat ait finalement accepté une protection effective, puisqu'il a confirmé qu'il faudra un décret pour qu'un terrain puisse être retiré après coup d'un périmètre.

Pour ce qui touche à l'accès aux services au public, les deux assemblées ont adopté un dispositif de concertation préalable en cas de projet de réorganisation de services publics locaux. Ce dispositif est synonyme de démocratie locale, de prévention et de transparence. Cette mesure est une garantie essentielle pour la préservation et le développement en milieu rural d'une offre de services publics de qualité pour tous nos concitoyens.

Quant à l'installation des professionnels de santé, le projet de loi prévoit l'octroi par les collectivités territoriales d'aides au maintien ou à l'installation de ces professionnels en milieu rural.

En ce qui concerne la santé vétérinaire et la protection des végétaux, les deux assemblées ont adopté un dispositif prévoyant qu'en cas de carence des laboratoires nationaux et départementaux l'administration pourra agréer des laboratoires privés pour faire les analyses nécessaires au contrôle du respect des dispositions sanitaires.

Sur l'ensemble de ces sujets, le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux apportera à nos concitoyens des réponses concrètes, conformément à sa vocation de « boîte à outils ». Je ne suis d'ailleurs pas surpris que la CMP ait travaillé la semaine dernière dans un climat constructif et consensuel.

Parce qu'elle a été enrichie par les nombreux apports des parlementaires, dont l'implication constante doit être saluée, cette loi est en phase avec le quotidien du monde rural, ses difficultés, ses attentes, ses espoirs. À cet égard, chers collègues, je suis convaincu qu'elle restera comme une « grande loi ».

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. C'est clair !

M. André Chassaigne. C'est la méthode Coué !

M. Yves Coussain, rapporteur. Avant d'en terminer, je voudrais remercier tous mes collègues qui ont largement participé à la discussion, ainsi que les administrateurs de notre commission des affaires économiques pour leur aide très précieuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur de la commission mixte paritaire. Comme vous le savez, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, les questions relatives aux activités cynégétiques ont été très longuement débattues dans cet hémicycle depuis 2002, à l'occasion notamment de l'examen du projet de loi relatif à la chasse, promulguée le 30 juillet 2003.

Si ces questions ont été abordées à plusieurs reprises, c'est parce qu'il était nécessaire aux yeux de tous d'apaiser le climat délétère qui régnait alors autour des questions relatives à la chasse, d'améliorer l'image de ce sport souvent caricaturé, et de redonner confiance et espoir aux chasseurs ainsi qu'à tous les ruraux très attachés à cette pratique et à ses traditions.

À ces fins, il est apparu nécessaire de consolider cette activité, dont le principe même était mis en danger par quelques détracteurs activistes et intégristes, de la réformer, pour l'adapter aux évolutions des territoires et de la faune sauvage et permettre une cohabitation harmonieuse avec les autres usagers de la nature, notamment avec ceux qui en tirent des revenus, c'est-à-dire les agriculteurs et les forestiers.

On peut constater que, grâce à la première loi du 30 juillet 2003 et aux mesures réglementaires prises pour son application, un pas très important a été franchi. Aujourd'hui, grâce au volet relatif à la chasse, opportunément inclus dans la loi sur le développement des territoires ruraux - opportunément parce que la chasse est partie intégrante de ces territoires - nous avons franchi une deuxième étape. Et nous avons tous à nous féliciter du texte adopté, sans difficulté et à une large majorité, par la commission mixte paritaire, avec une identité de vues et d'analyses remarquable entre les deux rapporteurs, celui du Sénat et celui de l'Assemblée nationale.

Ce texte ne modifie pas l'équilibre général du projet de loi issu de la deuxième lecture.

Sur la question, longuement débattue à l'Assemblée, des moyens d'assistance électronique, le Sénat s'est finalement rallié à notre point de vue, selon lequel il est préférable, pour l'image de la chasse, de poser le principe de leur interdiction, hormis ceux qui sont expressément autorisés par arrêté ministériel.

La commission mixte paritaire a par ailleurs adopté la rédaction du Sénat sur l'obligation de prévenir la police ou la gendarmerie avant de charger dans son véhicule un animal accidenté. Nous ne sommes pas persuadés que cette rédaction permettra à ceux qui n'ont pas de portable ou qui sont dans des zones non couvertes de se conformer à la loi, mais nous nous en remettons à la sagesse de nos amis sénateurs.

S'agissant de l'équilibre agro-sylvo-cynégétique, et plus particulièrement de l'équilibre entre l'activité des propriétaires forestiers et des chasseurs, le subtil compromis trouvé à l'Assemblée en deuxième lecture n'a été modifié ni par le Sénat, ni par la commission mixte paritaire.

Ces dispositions constitueront, à n'en pas douter, le point de départ d'une nouvelle ère dans les relations entre chasseurs, agriculteurs et propriétaires forestiers. Elles permettront, nous semble-t-il, d'atteindre l'objectif que nous nous sommes fixé dans la discussion de ce projet, à savoir pérenniser une chasse responsable et respectueuse des autres usages de la nature et de la préservation de la faune.

Mais certains sujets n'ont pas été épuisés lors de la discussion de ce volet chasse, notamment lors des échanges entre la représentation nationale et le Gouvernement ou, pour être plus précis, entre les parlementaires et l'actuel ministre en charge de la chasse.

En deuxième lecture ici même, certains amendements ont été retirés en contrepartie de l'engagement du ministre de satisfaire nos demandes par voie réglementaire. Les engagements ont été tenus s'agissant du timbre amende, des moyens d'assistance électronique, à l'exception notable du sonnaillon électronique pour lequel les règlements devront être modifiés. En revanche, et en dépit de la demande insistante de nombreux parlementaires, le ministre n'a pas tenu ses promesses relatives à la révision régulière de la liste des espèces chassables, ce qui est indispensable à la survie de certains gibiers sédentaires, et même à l'existence de certaines espèces d'élevage. C'est la raison pour laquelle le principe de cette révision, visant à la régulation des espèces protégées lorsqu'elles sont trop prolifiques, a été adopté en commission mixte paritaire contre l'avis du Gouvernement. Cette révision doit s'accompagner d'une régulation. Sinon, nous serons obligés de revenir sur cette disposition lors de l'examen de futurs textes législatifs tels que celui sur l'agriculture ou celui sur le patrimoine.

Avant de terminer, permettez-moi de vous faire part de quelques remarques et de quelques souhaits qui s'adressent particulièrement à M. le ministre chargé du dossier. Il est absent ce matin, mais je vous fais confiance, monsieur le secrétaire d'État, et je suis sûr que vous pourrez les lui répercuter.

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Vous pouvez compter sur moi.

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Depuis 2002, monsieur le secrétaire d'État, nous avions l'habitude de travailler en parfaite symbiose avec l'Avenue de Ségur, son locataire et son cabinet. Aujourd'hui, cette période semble révolue puisque nous sommes dans l'ignorance complète du contenu des décrets, des arrêtés, de leur achèvement, et de leurs dates de parution.

M. François Brottes. C'est une attaque en règle !

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Pourtant Mme Bachelot, prédécesseur de l'actuel ministre, avait pris 1'initiative heureuse de soumettre ses projets d'actes réglementaires à la représentation nationale. Ce qui avait été, je vous l'affirme, fort apprécié par les parlementaires.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C'est vrai !

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. De même, le groupe de travail sur la simplification, mis en place par Mme Bachelot, paraît aujourd'hui installé dans un coma très profond. Il faudrait le réveiller.

M. François Brottes. Ça relève du SAMU !

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. J'ajoute que nous avons été blessés - je choisis un terme modéré - par votre collègue le ministre en charge de la chasse, étant donné la décision qu'il a prise en date du 17 janvier dernier, relative aux dates de fermeture de la chasse, bafouant ainsi le compromis qui nous semblait accepté par son cabinet le même jour à dix-neuf heures, sans même que l'Avenue de Ségur daigne nous en informer.

Voilà pour les remarques.

Quant aux souhaits, monsieur le secrétaire d'État, il reste encore beaucoup à faire, et je n'ai bien évidemment pas le temps d'en dresser une liste complète.

En dehors de la publication des décrets à réaliser rapidement, de la modification des dates d'ouverture, sous certaines conditions, de la chasse à la perdrix - ce qui avait été promis -, de la chasse au renard, des mesures de simplification à poursuivre, je pense tout particulièrement à l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, structure qui nous est enviée par tous nos voisins européens, et dont il faut assurer un financement pérenne en évitant une augmentation des redevances. Je pense aussi et surtout au problème franco-français insupportable des dates de chasse aux oiseaux migrateurs qu'il faut régler en prenant en compte, d'une part, l'accord AEWA qui a été ratifié par la France et, d'autre part, le guide interprétatif de la directive « oiseaux » dont le ministre aurait dû demander qu'il soit annexé à la directive. Mais cette annexion sera faite. Il faut également prendre en compte les conclusions de l'Observatoire de la faune sauvage, même si celles-ci n'ont pas été adoptées à l'unanimité parce que certains ont pratiqué la politique de la chaise vide.

Soyez sûr que nous resterons vigilants pour que tous ces problèmes soient réglés. Mais soyez également sûr que nos souhaits de travailler de concert avec les services du ministère en charge de la chasse sont intacts.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous remercie de votre attention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Bravo, monsieur Lemoine !

M. le président. La parole est à M. Francis Saint-Léger, rapporteur de la commission mixte paritaire.

M. Francis Saint-Léger, rapporteur de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le texte de compromis auquel la commission mixte est parvenue est un texte riche, et donc complexe. Sa complexité est à l'image de la diversité de nos territoires, comme de la complexité de leurs difficultés.

Pour la plupart de ces problèmes, nous avons réussi à trouver des solutions législatives équilibrées. Ainsi, je ne puis que saluer les efforts que nous déployons pour inciter les professionnels, et notamment les libéraux, à s'installer en ZRR.

Pour les quelques problèmes non résolus, j'estime que le fait de les avoir soulevés constitue un premier pas vers leur règlement. Il s'agit, par exemple, de la distribution de certains produits vétérinaires nocifs ou du ramassage des champignons, évoqués par nos collègues Gabriel Biancheri et André Chassaigne. Il s'agit aussi du financement, dans nos communes de montagne, des installations dédiées aux nouveaux loisirs de neige, évoqué par M. Michel Bouvard. Ces loisirs alternatifs, la randonnée nordique, la raquette, l'escalade hivernale, le ski jöering ont un potentiel de croissance très important : ils permettront aux stations françaises de diversifier leur offre pour assurer leur prospérité. L'architecture financière de ces projets sera étudiée par un groupe de travail prochainement constitué par la DATAR.

En évoquant ces chantiers que nous avons ouverts, je pense surtout à la prolifération du loup. Depuis plusieurs années, comme vous le savez, notre commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire soulève régulièrement cette question. Nos débats ont permis de dégager un quasi-consensus : il faut réguler cette prolifération nuisible. Mais nos débats nous ont aussi permis de prendre la mesure des obstacles juridiques, pratiques et financiers qu'il faudra surmonter. Quels que soient ces obstacles, il appartient désormais au Gouvernement de lever l'inquiétude légitime des élus et des populations de nos montagnes.

Heureusement, sur tous les autres sujets de préoccupation, la CMP nous a permis de trouver un certain nombre de compromis qu'il nous revient désormais, mes chers collègues, de faire entrer en vigueur. Je ne vous en dresserai pas un catalogue exhaustif, et donc ennuyeux, mais comme j'entends souvent dire que ce texte manquerait de lignes directrices claires, je vais essayer de vous démontrer le contraire, pour ce qui est de la montagne du moins.

Le texte qui ressort de la CMP s'articule autour de trois grands axes.

Le premier de ces axes fonde une stratégie claire : pour développer nos territoires de montagne, il faut d'abord organiser leur représentation politique. L'échelon décisionnel de référence devient le massif, entité géographique et économique plus pertinente que les découpages administratifs traditionnels. Le comité de massif voit ses pouvoirs et ses responsabilités renforcés ; des ententes de massif pourront impulser, au niveau politique, une stratégie adaptée à chaque massif. En outre, notre texte réaffirme et clarifie les principes généraux de notre politique de la montagne : c'est une politique de développement durable et équitable.

Le deuxième axe met le développement et la vie économique au cœur de la politique de la montagne, trop longtemps focalisée sur le seul souci de protection du patrimoine naturel. Non qu'il faille négliger nos paysages ou notre faune de montagne, bien entendu, mais nos montagnes n'ont pas vocation à devenir des espaces déshumanisés.

C'est pourquoi notre texte reconnaît d'intérêt général l'agriculture, le pastoralisme, l'exploitation des forêts, l'artisanat, le petit commerce et les services médicaux en zone de montagne.

C'est aussi pourquoi nous avons choisi de soutenir le logement des travailleurs saisonniers et qu'en outre nous avons réformé les règles régissant les sections de commune.

C'est pourquoi, enfin, nos territoires de montagne sont les premiers intéressés aux dispositifs fiscaux dont bénéficieront les ZRR. En effet, presque toutes les communes de montagne bénéficient du classement en ZRR, et les avantages qui y sont attachés permettent de compenser les incohérences et les variations des autres zonages. Nous autres élus le savons bien : le zonage de revitalisation rurale est cohérent et plutôt stable, alors que d'autres zonages, comme celui de la prime d'aménagement du territoire, excluent étonnamment et injustement certains territoires de montagne, comme la Lozère, département que je connais bien. Ainsi, comme l'a rappelé Yves Coussain, le statut de ZRR nous permet d'exonérer d'impôt sur le revenu, pendant quatorze ans, la création d'activités industrielles, artisanales, commerciales ou libérales. Mieux encore : il nous permet d'exonérer de taxe professionnelle la création et la reprise des mêmes activités. Afin de renforcer ces incitations, nous encourageons également la construction de bâtiments : pour les bâtiments industriels, nous portons à cinq ans l'exonération de taxe foncière et nous prolongeons de deux ans le dispositif d'amortissement exceptionnel ; pour les logements, nous complétons les aides de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat par une exonération de taxe foncière de quinze ans, et nous encourageons ceux qui construisent pour louer en leur accordant une déduction forfaitaire de 40 % des revenus tirés des loyers. Je me félicite particulièrement des aides en direction des professionnels libéraux,...

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !

M. Francis Saint-Léger, rapporteur. ...dont la pénurie est particulièrement patente dans nos communes de montagne, notamment dans le secteur médical. Ainsi, le deuxième axe de cette politique de la montagne, c'est le développement économique.

Dernier axe : l'assouplissement des règles d'urbanisme en montagne. Tous les élus le savent, on ne nous fait pas assez confiance pour développer raisonnablement nos territoires ; les règles d'urbanisme sont strictes, souvent surprotectrices et parfois contreproductives. Mais sans construction autorisée, il n'y a ni développement ni vie possible dans nos montagnes. Là non plus, il ne s'agit ni de sacrifier notre patrimoine naturel ni de bétonner la montagne comme on a bétonné certains littoraux.

Notre assemblée a assoupli les règles d'urbanisation des rivages lacustres et des abords des axes routiers, poursuivant ainsi les progrès déjà accomplis avec la loi urbanisme et habitat de 2003.

S'agissant des unités touristiques nouvelles, nous avions dû introduire dans notre texte des dispositions réglementaires, pour inciter le Gouvernement a proposé un décret qui satisfasse nos attentes. Il l'a fait, et nous ne pouvons que nous féliciter, monsieur le secrétaire d'État, de voir ces articles rétablis dans une rédaction proprement législative. Nous avons aussi rénové les procédures d'installation des centrales hydrauliques, des stations d'épuration et des équipements de télécommunication.

Voilà, mes chers collègues, les trois principales orientations du texte qu'il nous est demandé d'adopter, dans sa rédaction issue de la commission mixte paritaire. Il règle un grand nombre de problèmes propres à la montagne, et ouvre un processus de règlement de plusieurs autres.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Et tout cela grâce à la mission d'information sur la montagne !

M. Francis Saint-Léger, rapporteur. Il ressort de nos discussions et de la navette parlementaire plus équilibré, plus utile et surtout plus complet.

Je terminerai en remerciant l'ensemble des collègues qui se sont associés à l'élaboration de ce texte, particulièrement Yves Coussain, rapporteur, Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, ainsi que l'ensemble des membres du Gouvernement qui ont été à l'écoute de nombre de nos attentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales.

M. Nicolas Forissier, secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, à l'occasion de l'examen de ses conclusions, je tiens à saluer l'accord auquel la commission mixte paritaire est parvenue sur ce projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. Les débats dans les deux assemblées ont mobilisé talent et énergie, voire passion, au cours de l'année écoulée et jusqu'à aujourd'hui, mais toujours dans le même objectif de servir, ensemble, le monde rural.

M. Jean Dionis du Séjour. C'est vrai !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Je remercie tout particulièrement MM. les rapporteurs pour leurs contributions déterminantes, tout au long de l'examen du texte et jusqu'aux conclusions de la CMP ; ils sont restés animés par une volonté commune d'ouvrir de nouvelles perspectives aux acteurs du développement des territoires ruraux. Un grand merci, donc, à Yves Coussain, à Francis Saint-Léger et Jean-Claude Lemoine, pour leur travail constant et les bonnes relations que nous avons pu établir afin d'œuvrer de façon constructive. Je veux aussi remercier le président Patrick Ollier, qui a joué, lui qui connaît si bien le monde rural, un rôle important à de nombreux moments de notre discussion.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Merci !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Ce chantier législatif a pris, je le crois, toute sa dimension avec les avancées substantielles permises par le travail parlementaire. Ce sont au total plus de 3 700 amendements qui ont été déposés et discutés dans les deux assemblées. Il était donc bien naturel que la CMP ait un ordre du jour chargé. Le travail a été particulièrement constructif puisque la CMP a examiné quatre-vingt-six articles. Elle en a adopté trente dans la rédaction conjointe proposée par les deux rapporteurs ; elle a conservé la rédaction de l'une ou l'autre des deux chambres pour trente-neuf autres. Le texte proposé par la CMP comporte ainsi soixante-neuf articles susceptibles de figurer dans la loi, s'ajoutant aux cent soixante-treize articles déjà adoptés après la deuxième lecture.

La CMP a, par ailleurs, décidé de supprimer un article relatif au principe de compensation par l'État des charges résultant pour les collectivités territoriales des transferts, créations et extensions de compétence réalisée par la présente loi - il s'agissait de l'article 20 bis AA, qui avait d'ailleurs été adopté contre l'avis du Gouvernement, et qui n'était pas nécessaire puisque la Constitution prévoit déjà cette garantie.

Enfin, la CMP a confirmé la suppression, proposée par le Sénat, de seize articles.

Je vais à présent, mesdames et messieurs les députés, vous exposer la position du Gouvernement

Les travaux des commissions des affaires économiques des deux assemblées ont permis, à chaque lecture du texte, de rapprocher les positions du Gouvernement et du Parlement sur un nombre croissant d'articles. Un esprit d'ouverture et de dialogue a présidé à la discussion du projet, et le Gouvernement y est resté fidèle, prenant toujours acte de la volonté du législateur lorsque certains amendements étaient adoptés contre son avis - je tiens à le souligner. Ce texte est aussi le fruit, dans un esprit...

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Constructif !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. ...constructif, en effet, d'un travail interministériel, comme nous en connaissons rarement dans la vie politique et parlementaire de notre pays. Ainsi, sous la direction du ministère de l'agriculture, qui était le chef de file en quelque sorte, Hervé Gaymard, d'abord, Dominique Bussereau, ensuite, et moi-même avons travaillé avec Gilles de Robien, Frédéric de Saint-Sernin, Philippe Douste-Blazy, Xavier Bertrand, Serge Lepeltier, sans oublier Léon Bertrand, pour certaines dispositions touchant au tourisme. Tous ces ministres...

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Quel bel exemple de partenariat !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. ...ont travaillé en partenariat, effectivement, monsieur Ollier. Je profite de l'occasion pour remercier toutes les équipes impliquées, tant dans vos commissions à l'Assemblée que dans les ministères concernés.

Cet esprit d'ouverture, nous le conservons tous, à l'issue de la CMP. Une demi-douzaine d'articles retenus en CMP ne correspondent pas toujours exactement aux solutions qui avaient la préférence du Gouvernement, mais c'est là toute la noblesse du débat parlementaire ! Nous en resterons donc à ce texte ainsi enrichi.

Toutefois, une mesure, celle introduite à l'article 34 bis, qui prévoit l'application du taux réduit de TVA pour la transformation de bâtiments agricoles en logements dans les ZRR, pose une sérieuse difficulté quant à sa compatibilité communautaire. C'est donc la seule disposition qui fera l'objet d'un amendement substantiel du Gouvernement sur le texte de la CMP. Nous y reviendrons mais je tenais, en relevant cette exception, à souligner dès à présent la spécificité du problème.

Les autres amendements qui vous seront soumis aujourd'hui relèvent, quant à eux, de l'utile relecture finale du texte.

Quel est, globalement, l'apport de ce texte ?

Je l'ai déjà dit à cette tribune, avec cette loi, nous allons disposer maintenant d'une véritable boîte à outils, destinée à faciliter les projets et à encourager le dynamisme des acteurs des territoires ruraux, ainsi qu'à leur donner la possibilité d'agir concrètement dans l'avenir, en répondant à la très grande diversité des problèmes et en tenant compte de la variété des territoires. De ce point de vue, je m'inscris en faux, moi aussi, monsieur Saint-Léger, contre cette assertion selon laquelle le présent texte n'aurait pas de ligne directrice claire. Ce n'est pas vrai : il répond à une multitude de questions, car le monde rural lui-même est multiple et varié. Et d'ailleurs, vos enrichissements nombreux au texte du Gouvernement, mesdames et messieurs les députés, au terme de la discussion, soulignent bien cette grande diversité. C'est la preuve qu'il existait un besoin et que les parlementaires eux-mêmes ont voulu contribuer à le satisfaire.

Je rappellerai quelques mesures adoptées à l'issue de la deuxième lecture : la confirmation d'allégements de la fiscalité en ZRR, notamment en faveur de l'installation d'entreprises, la transposition au secteur agricole de mesures d'exonération de charges sociales pour les associations en ZRR, une ouverture des interprofessions agricoles sur l'agriculture biologique et les produits de montagne, l'harmonisation du statut des entreprises équestres, la possibilité du conventionnement avec des particuliers pour le transport de personnes en milieu rural - problème extrêmement important, nous le savons tous. La possibilité d'ouvrir les groupements d'employeurs aux collectivités territoriales constitue également une avancée majeure. S'y ajoutent des précisions sur le nouveau dispositif de l'aménagement foncier, l'adoption d'un dispositif d'incitation à l'installation des professionnels de santé en milieu rural - et nous savons combien ce sujet est crucial -, une simplification des modalités de constitution des associations foncières pastorales, une sécurisation législative des plans de gestion cynégétique, la reconnaissance de l'intérêt général de l'agriculture, du pastoralisme et de la forêt en montagne, une redéfinition des missions du CNASEA, ainsi que la création d'une agence dédiée à l'information et à la communication agricole et rurale.

Toutes ces mesures étaient déjà très significatives et l'accord de la CMP porte sur des dispositions tout aussi emblématiques : mesures parachevant le dispositif en faveur des zones de revitalisation rurale, adaptation de la loi Évin à la publicité sur le vin, dans des conditions de consensus - grâce au travail considérable réalisé notamment avec les parlementaires des deux assemblées -, mesures destinées à améliorer la situation du marché des fruits et légumes - on aura remarqué, à ce propos, la rapidité avec laquelle le Gouvernement s'est saisi de la question,...

M. Jean Dionis du Séjour. C'est vrai !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. ...comme il s'y était engagé.

Je n'oublie pas l'adoption des dispositions de protection des espaces agricoles et naturels périurbains, et de celles relatives à l'aménagement foncier, les précisions sur les différentes dispositions relatives aux zones humides et aux sites Natura 2000, la définition des conditions de l'équilibre entre activités cynégétiques et territoires, l'amélioration du dispositif d'autorisation des UTN, les unités touristiques nouvelles en montagne, ou encore, question essentielle aussi, la redéfinition du champ du service public de l'équarrissage.

M. Lemoine m'ayant demandé de transmettre ses propos à M. Lepeltier, je voudrais revenir sur le volet chasse quelques instants. Peut-être les paroles du rapporteur ont-elles dépassé sa pensée, car elles m'ont paru un peu injuste à l'égard de mon collègue chargé de l'écologie, absent aujourd'hui puisqu'il a dû se rendre en Isère. Ils ont une divergence d'appréciation quant aux dates de fermeture de la chasse, mais il ne faudrait pas pour autant que le rapporteur mésestime l'énorme travail de concertation conduit, avec lui d'ailleurs, sur ce texte qui, en l'état, fait l'objet désormais d'un très large consensus entre les deux chambres du Parlement et le ministre de l'écologie.

J'ai bien noté, monsieur Lemoine, les sujets de préoccupation que vous souhaitez voir traités, ainsi que vos remarques et vos attentes. Je les transmettrai, bien entendu, à Serge Lepeltier, avec lequel la discussion m'est rendue aisée par notre « proximité berrichonne ». À ce stade, permettez-moi tout de même d'insister sur le fait que le ministre de l'écologie est réputé être tout particulièrement à l'écoute de la représentation nationale, ce dont je puis témoigner personnellement. Si des malentendus subsistaient, il ne manquerait pas de tout faire pour les lever. Reste que nous sommes parvenus, je pense, et vous savez que je connais bien le sujet, à un bon équilibre grâce à son travail.

Évoquons maintenant la suite de la procédure parlementaire.

Les débats en deuxième lecture ont permis d'identifier des chantiers de réflexion et de travail à poursuivre ou à approfondir, et les trois rapporteurs s'en sont fait l'écho. Ainsi que je m'y suis engagé au cours de nos débats, nous allons continuer à travailler ensemble sur tous ces points et nous vous consulterons sur le volet chasse, mais aussi sur tous les autres, notamment pour préciser la rédaction de certains décrets d'application, afin qu'ils respectent bien l'esprit de la loi, ce qui est une préoccupation constante des parlementaires. Mais croyez bien que Dominique Bussereau et moi-même y sommes également attachés. Nous tenons à ce que ces décrets soient publiés rapidement. Une mission interministérielle sera constituée pour veiller à leur élaboration dans les meilleurs délais et poursuivre le travail interministériel qui a permis l'élaboration du projet.

L'ambition que le Gouvernement partage avec vous pour l'avenir de notre monde rural ne s'arrête pas à ce dispositif législatif. Nous avons engagé une démarche globale et cohérente en faveur du développement des territoires ruraux. Outre la « boîte à outils » dont nous achevons de nous doter aujourd'hui, il y a le travail accompli en permanence par le ministère de l'agriculture, avec le concours d'autres ministères. Je pense en particulier au plan de développement des industries agroalimentaires, première industrie nationale, constituant aussi un maillage de petites et moyennes entreprises dans les territoires ruraux. Je pense en outre à la loi d'orientation et de modernisation pour l'agriculture actuellement en préparation, destinée à fixer les perspectives, la « nouvelle frontière » qui devrait être la nôtre, pour les vingt ans à venir.

Tout cela est cohérent et nous sommes toujours en mouvement afin d'ajuster les outils mis à la disposition des acteurs du monde rural aux réalités et aux besoins de celui-ci.

De ce point de vue, la conférence de la ruralité instaurée par le projet de loi contribuera à évaluer et à améliorer la politique menée. Elle permettra également, dans un esprit d'ouverture, de dialogue et de partenariat, de prolonger l'élan que ce texte veut donner à nos territoires.

Prenons les problèmes un par un et avançons concrètement. Nous sommes dans cet hémicycle une majorité d'élus ruraux, et donc femmes et hommes de bon sens, attachés à nos racines. Or le texte est à l'image du monde rural. Continuons donc à travailler ensemble et merci à toutes et à tous d'avoir participé à l'élaboration de ce texte important pour l'avenir de nos territoires et de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Monsieur le président, mesdames, messieurs, je veux dire, au nom de la commission des affaires économiques, combien nous avons nous aussi apprécié le partenariat interactif avec le Gouvernement - quels que soient les ministres - et la majorité.

Le texte, qui concerne plusieurs ministères, s'inscrit dans une logique d'aménagement du territoire et nous avons tenu - je remercie à ce propos les rapporteurs de leur remarquable travail - à ce qu'il réponde aux différentes attentes. La présence de trois rapporteurs marque bien la pluridisciplinarité incarnée par ce projet.

Je tiens à remercier le Gouvernement de son ouverture aux propositions du Parlement, qui ont, dans le cadre de ce partenariat, fait avancer le texte. Au nom de la commission, je tiens à vous rendre hommage, monsieur le secrétaire d'État, ainsi qu'à M. Gaymard et à tous les ministres, présents et passés, qui y ont contribué, comme M. Delevoye, M. Lepeltier et bien d'autres encore.

Au terme d'une longue procédure, nous sommes parvenus à un équilibre satisfaisant. L'Assemblée a fait son travail, ainsi que la commission mixte paritaire, dès lors que vous avez accepté que le Parlement prenne des initiatives, qui n'étaient pas forcément celles du Gouvernement, et que nous sommes déterminés, en partenariat avec vous, à mener à terme.

La commission mixte paritaire a fait une grande avancée que n'avait pas prévue le Gouvernement, en adoptant un amendement relatif au coefficient multiplicateur sur les fruits et légumes. M. Dionis du Séjour et M. Ferrand, spécialistes en la matière, avaient à plusieurs reprises saisi la commission des affaires économiques de cette question d'une brûlante actualité, à laquelle répond ainsi l'initiative parlementaire.

S'agissant de la TVA à 5,5 %, vous avez exposé vos arguments, monsieur le secrétaire d'État, que nous acceptons, car nous ne voulons pas compromettre les discussions en cours qui peuvent avoir une réelle portée au plan national. Aussi voterons-nous l'amendement de suppression que vous avez déposé.

S'agissant de la chasse, il faudrait dissiper le malentendu. M. Lemoine, qui bénéficie du soutien de la commission, a dit certaines choses que le Gouvernement doit entendre. Je vous serais reconnaissant, monsieur le secrétaire d'État, de faire passer le message à M. Lepeltier qui est, je le sais, un homme disponible et ouvert à la discussion. En effet, Mme Bachelot a pris un engagement ici même, mais il n'a malheureusement pas été tenu, ce qui justifie l'attitude du rapporteur. Je souhaite que nous puissions avoir rapidement un entretien avec M. Lepeltier afin que rien de négatif n'entame les relations excellentes que nous entretenons avec lui. Il serait regrettable en effet que subsiste la moindre amertume.

Enfin, le président Debré a souhaité, et la conférence des présidents l'a approuvé, que les rapporteurs aient un droit de suite sur les textes adoptés,...

M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. ...ce à quoi je souscris, dans le cadre de la commission que j'ai l'honneur de présider. Nous l'avons déjà mis en œuvre et nous souhaitons faire de même pour ce texte. C'est pourquoi nous saisissons la main que vous nous avez tendue, monsieur le secrétaire d'État, à propos des décrets et autres textes réglementaires d'application.

Ce sera une charge de travail supplémentaire pour le rapporteur et pour le ministre, mais cela va dans le sens souhaité par le président de l'Assemblée et la conférence des présidents. Il s'agit d'un devoir essentiel des parlementaires et de la majorité que de vérifier la mise en œuvre des textes votés, d'autant plus que nous savons la difficulté qu'ont les différentes administrations à mettre en place ces fameux décrets d'application.

Nous serons donc vigilants et je proposerai en fin d'année de réunir la commission des affaires économiques pour faire le point avec vous, monsieur le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Avec plaisir !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Le procès-verbal de cette réunion officialisera la procédure que nous comptons mettre en œuvre.

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Très bien !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous transmettre à l'ensemble du Gouvernement les remerciements de la commission pour son remarquable travail de partenariat ?

Pour terminer, je remercierai également les rapporteurs et les administrateurs dont les travaux nous ont permis d'arriver au terme de cette démarche. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'associerai à mon propos l'ensemble des élus du groupe socialiste, et plus particulièrement ceux qui ont assuré le suivi de ce texte à mes côtés - je veux parler de Jean Gaubert, Jean-Paul Chanteguet, Geneviève Perrin-Gaillard et Henri Nayrou.

Au moment de voter ce projet de loi sur le développement des territoires ruraux, il est bon de rappeler l'espoir que son annonce avait suscité dans le monde rural. Une politique volontariste était attendue par ses habitants et ses élus, car ils avaient le sentiment diffus que seule comptait la politique de la ville, que la dérégulation à « marche forcée » dans les secteurs de la poste, de l'énergie, des transports ou des télécommunications allait inévitablement les exclure des dynamiques nouvelles annoncées. Ils avaient compris que la fin des fonds structurels européens et les coupes drastiques dans le budget de l'État et dans les effectifs de fonctionnaires - dans les domaines de l'éducation, de la santé, de l'équipement ou du Trésor - allaient les laisser à l'état « d'abandon en rase campagne ». Ils avaient aussi l'intuition que la réforme de la politique agricole commune allait complètement déstabiliser l'activité agricole indispensable aux territoires ruraux.

Ce texte a certes laissé libre court à l'initiative parlementaire, notamment de la majorité, mais au final, il s'apparente au Livre de la jungle. En effet, il commence comme un conte de fée en affirmant que « L'État est garant de la solidarité nationale en faveur des territoires ruraux et de montagne » et il se termine dans une logorrhée qui n'est souvent qu'une pétition de principes, trop rarement refondatrice d'une ambition forte pour les populations des territoires ruraux.

Ce fut un bon « texte occupationnel », quelques semaines avant les élections cantonales et régionales, mais chacun se souvient qu'il n'avait pas réussi, à l'époque, à convaincre.

Qu'avons-nous obtenu de ce long processus parlementaire qui a débuté il y a plus d'un an ?

On peut, c'est vrai, souligner l'intérêt de quelques dispositions qui apportent un peu d'air concernant la résolution de problèmes sérieux. Ces mesures parcellaires ont souvent une portée technique et pratique qu'on ne saurait nier. Je pense en particulier aux nouveaux droits des saisonniers - même si la caisse pivot et le guichet unique restent à inventer - ; aux avancées obtenues en dernière lecture sur la réhabilitation de l'immobilier de tourisme qui devraient permettre à de nombreux volets fermés de laisser passer la lumière ; à la question des lacs de montagne ou des unités touristiques nouvelles, sur lesquelles le Gouvernement a fait preuve d'une bonne écoute ; ou encore à la réforme des procédures d'aménagement de l'espace rural, avec le nouveau rôle des collectivités locales. Il y a sur ce dernier point, concernant la gestion du foncier, un apport certain. Mais les moyens seront-ils au rendez-vous ?

Toutes ces mesures devaient-elles obligatoirement passer par la loi ? Le texte déposé en septembre 2003 comportait soixante-seize articles. Il en compte désormais près de 240, ce qui a fait dire au rapporteur que c'était une très grande loi, et chacun en convient. Mais combien d'entre eux sont-ils réellement de portée législative ? Je laisse le soin au président Debré d'utiliser ce texte comme exemple de ce qu'il faut éviter de faire. C'est une remarque sur la forme, mais je suis sûr qu'en y réfléchissant bien, on pourrait trouver sous d'autres majorités des exemples comparables.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. En effet !

M. Jean Dionis du Séjour. Quelle lucidité !

M. François Brottes. Monsieur le secrétaire d'État, je constate que vous prenez acte de mon profond souci d'objectivité !

En revanche, nous avons un désaccord fondamental sur la stratégie choisie.

Un chapitre est consacré à l'agriculture alors qu'un grand texte d'orientation nous est annoncé pour le printemps prochain. Vous avez mis la charrue avant les bœufs ! Comment parler du développement des territoires ruraux en le déconnectant de l'activité agricole, de son avenir, de la réforme de la PAC et de son pilier, le développement rural ? Comment mettre l'agriculture à part alors que le règlement de développement rural est aujourd'hui en chantier devant les institutions européennes ? Certes, le rural ne se résume pas à l'agriculture, mais il ne peut exister sans elle qui en demeure l'un des fondements. Que seraient la vie rurale, l'économie rurale, l'agrotourisme, l'entretien de l'espace en plaine ou en montagne, sans l'activité agricole ?

C'est sur les modalités de la mutation annoncée de cette activité et sur l'avenir de ses emplois qu'il fallait au préalable faire porter l'effort.

Vous prévoyez un débat et une loi pour plus tard alors que l'inquiétude est grande dans les campagnes, et je suis certain que nous devrons réécrire les modalités du développement rural à l'issue du prochain débat annoncé.

Et ce n'est pas l'amendement de dernière minute sur la gestion de crise dans le secteur des fruits et légumes, par lequel vous tentez de réinventer les mécanismes mis en place par la loi sur les nouvelles régulations économiques - votée sous la précédente législature - qui va donner un signal suffisant.

M. Jean Dionis du Séjour. Cela n'a rien à voir !

M. François Brottes. À l'inverse, le volume qu'a pris, une fois de plus, le volet « chasse » du texte révèle un malaise supplémentaire que vous n'arrivez pas à dissimuler. D'ailleurs, le rapporteur a tiré à vue sans sommations sur le ministre en charge de ces questions ! Et j'entendais tout à l'heure l'un de nos collègues dire que, pourtant, ce n'était pas un ours !

Certes, le chasseur est mis en scène comme un agent d'intérêt général, mais au mépris d'une vision équilibrée des usages de la nature. C'est surtout la remise en cause d'une chasse de qualité maîtrisée : « La chasse de jour est même autorisée la nuit, et l'agrainage et l'affouragement ne sont plus encadrés ». Autant de risques pour la bonne gestion des espèces et pour le maintien des équilibres agro-sylvo-cynégétiques.

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. Mais non !

M. Yves Coussain, rapporteur. Ils tirent sur la chasse !

M. Jean Dionis du Séjour. Ils sont incorrigibles !

M. François Brottes. Je note tout de même quelques avancées sur la prise en charge des dégâts de gibier.

Pour le reste, une fois de plus, vous confondez « charité » et « solidarité ». Les territoires ruraux n'ont que faire de la condescendance dans laquelle le Gouvernement a en réalité voulu les enfermer. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Conforter les zones de revitalisation rurales est une chose, mais cela ne sert qu'à masquer l'accompagnement de la déshérence et la volonté de banaliser l'abandon. Combien de temps cela va-t-il durer ?

L'abandon, nous le mesurons à la politique de démantèlement des services publics, aux fausses solutions relatives à l'accès aux soins, organisées dans ce texte. Désormais, les services postaux pourront être développés par les cafés, par les épiciers !

M. Yves Coussain, rapporteur. Caricature !

M. François Brottes. Bientôt, les usagers de La Poste iront peut-être chercher eux-mêmes leur courrier au point poste le moins éloigné, puisque vous avez refusé de garantir un service de distribution à domicile.

M. Jean Dionis du Séjour. Propos tout en nuances !

M. François Brottes. Désormais, les populations rurales devront payer plus d'impôts locaux pour assurer le retour des médecins sur leur territoire, le maintien des vétérinaires ou l'installation de la télécommunication haut débit. Ce n'est pas le droit de payer pour avoir ce dont les villes disposent gratuitement dont les communes rurales ont besoin, mais c'est d'une politique volontariste et solidaire de l'État parce que lui seul en est garant.

M. André Chassaigne. C'est juste !

M. Yves Coussain, rapporteur. Démago !

M. François Brottes. Une fois de plus, la solidarité de l'État est absente de votre texte. Votre refus systématique de toute péréquation prend des proportions grossières : aux territoires les plus pauvres, les charges, aux territoires les plus riches les services !

Après la première lecture, j'avais d'ailleurs pu réciter la litanie des abandons, par le Sénat, de mesures qui nous paraissaient essentielles pour assurer une plus grande justice entre les territoires ; je dois admettre que la deuxième lecture lui a donné l'occasion de limiter la casse...

M. Jean Dionis du Séjour. Ah !

M. François Brottes. ...et de faire œuvre utile sur de nombreux points. Mais cela ne suffit pas à conférer à ce texte une importance si grande qu'elle nous aurait conduits à le voter.

La question du logement rural pour tous n'a pas été traitée.

M. André Chassaigne. Très juste !

M. François Brottes. Il manque une volonté de prendre en compte la difficulté de se loger dans le monde rural, dont nous savons qu'il devient le refuge de populations de plus en plus défavorisées, et qu'il fait l'objet de convoitises et de spéculations de plus en plus fortes. La fracture territoriale ne sera donc pas réduite par cette loi.

Pour la montagne, le résultat de ce texte est sans surprise : nous ne sommes guère allés au-delà des quelques points - au demeurant nécessaires - contenus dans le projet initial. En dépit de la décision de nommer un rapporteur spécifique, dont il faut se féliciter, ce texte au spectre très large contribue à banaliser les particularités de la montagne, alors que la loi montagne demeure la base d'une reconnaissance légitime de spécificités incontestables : les accidents du relief, la rigueur des variations climatiques ont en montagne un impact sur les modes d'exploitation agricole, le coût des constructions et les temps de déplacement. Ce texte laisse beaucoup trop de problèmes en suspens, notamment concernant les services à la population.

Au final, que retiendront les Français de ce projet de loi ? « Boîte à outils » ou « trousse à pharmacie » ?

Quelques mesures techniques bienvenues méritent d'être soulignées, mais elles sont accompagnées d'un chapelet de bonnes intentions restant en attente de décrets d'application, de moyens pas toujours promis - et qui ne viendront donc pas - ou de réponses précises, souvent renvoyées à une prochaine concertation. Beaucoup de conférences annuelles sont annoncées ; beaucoup de commissions sont à réunir pour concertation !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Ne soyez pas pessimiste !

M. François Brottes. Vous le savez, j'ai une tendresse particulière pour la filière bois. Mais le développement rural mérite autre chose qu'un « arbre à palabres ». Et la sève de l'incantation ne saurait procurer l'énergie d'une politique d'avenir !

M. Jean-Paul Bacquet. Bravo !

M. François Brottes. Parce ce projet de loi aurait dû être l'occasion d'étudier l'impact de la réforme de la PAC, parce que la péréquation et la solidarité ne sont pas au rendez-vous, parce que trop de mesures sont en trompe-l'œil et vont susciter beaucoup de faux espoirs, le groupe socialiste votera contre ce texte qui, pour sa plus grande part, fait preuve de condescendance à l'égard des territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C'est bien dommage ! Mais ne serait-ce pas une décision purement politique ?

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Contrairement à notre collègue François Brottes, je vais tenter, au nom de l'UDF, de conserver le sens de la nuance...

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Voyons quelle est votre conception d'un discours nuancé !

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voilà arrivés au terme d'une très longue séquence parlementaire, ouverte le 9 décembre 2003 en commission des affaires économiques.

Je veux rendre à Hervé Gaymard et à ses successeurs un hommage particulier pour la qualité d'écoute dont ils ont fait preuve tout au long des navettes parlementaires, mais aussi pour la continuité de l'action qu'ils ont menée auprès du ministère de l'économie en faveur des agriculteurs. J'y associe le président de la commission des affaires économiques et nos trois rapporteurs, tous quatre fins connaisseurs et brillants avocats du milieu rural, et en la matière véritables marathoniens du parcours législatif.

Après quinze mois, quel bilan pouvons-nous tirer de celui-ci ?

Lors de la première lecture, j'avais parlé de « boîte à outils » - certains outils représentant une véritable avancée, d'autres se révélant beaucoup moins utiles -, mais aussi de « législation impressionniste », le texte nous faisant procéder par petites touches successives.

Commençons par les critiques, puisque le groupe UDF est, en partie, aussi là pour les exprimer.

M. Jean-Paul Bacquet. Mais ses membres finissent toujours par voter pour !

M. Jean Dionis du Séjour. Pas toujours, mais souvent, il est vrai, ce que nous assumons d'ailleurs parfaitement.

Il faut bien le reconnaître : vu dans sa globalité, le texte que nous allons adopter manque d'une direction forte et d'un sens lisible. La loi de modernisation agricole devra impérativement pallier cette carence.

Pour notre part, ce que nous regrettons le plus, c'est l'absence de lisibilité de cette loi. Elle aurait dû s'articuler autour de la définition par la DATAR des différents types de ruralité. Je l'ai dit à plusieurs reprises pendant nos longues discussions : les réponses et les aides de l'État ne peuvent pas être les mêmes chez Jean Lassalle, dans le rural en déclin, et dans ma circonscription, située pour l'essentiel dans le périurbain rural, où il y a du vent dans les voiles.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Justement, nous en tenons compte ! Cela s'appelle l'aménagement du territoire !

M. Jean Dionis du Séjour. Le groupe UDF demandait que les dispositifs fiscaux soient massivement ciblés sur le rural profond, très en difficulté, pour éviter le saupoudrage des moyens.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Les ZRR sont là pour ça !

M. Jean Dionis du Séjour. Passons maintenant aux avancées indiscutables permises par ce texte, et que notre groupe est parfaitement capable de reconnaître. Après un examen détaillé, on ne peut en effet que se réjouir de certaines avancées significatives obtenues, en grande partie, par les parlementaires des deux assemblées, grâce à l'écoute du Gouvernement.

Je pense en particulier à l'assouplissement de la loi Évin, qui va clarifier et améliorer les conditions de la promotion des produits vitivinicoles. Après bien des hésitations et beaucoup de passion, nos travaux ont permis de trouver un nouvel équilibre et de dégager enfin, pour la promotion de nos vins, un espace de développement. Tant mieux !

En ce qui concerne le volet chasse, le travail parlementaire a été de très grande qualité et le groupe UDF, par la voix de Charles de Courson, y a pris sa part, notamment pour trouver avec le rapporteur Jean-Claude Lemoine un dispositif d'indemnisation durable sur la délicate question des dégâts forestiers. Je me réjouis aussi que l'on ait trouvé une solution acceptable sur la question de l'usage d'un véhicule dans l'action de chasse, à même de rassurer tous ceux qui pratiquent la chasse aux chiens courants dans nos vastes territoires du sud-ouest. Ce n'était pas facile. Je voudrais également saluer le travail accompli en faveur de la montagne, qui a trouvé en Patrick Ollier et François Brottes des avocats émérites.

J'en viens maintenant aux mesures en faveur du secteur des fruits et légumes, votées en deuxième lecture au Sénat et confirmées par la CMP. Parmi elles figure la mise en place, dans cette filière, d'un coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente pendant les périodes de crise. Dès la deuxième lecture, le 6 octobre, j'avais alerté notre assemblée et le Gouvernement sur la violence de la crise structurelle qui secoue la filière. Continuer à légiférer sur les territoires ruraux sans prendre en compte cette crise serait surréaliste, avais-je averti. Mais mon amendement avait été repoussé de peu. C'est donc à mon collègue sénateur Daniel Soulage qu'est revenu l'honneur d'être le buteur de cette action commune. C'est une grande victoire du Parlement, mais surtout un signal fort pour tous les producteurs, qui leur permettra d'aborder avec plus de sérénité la nouvelle campagne de production. Ce dispositif va en effet permettre de rétablir un équilibre entre les prix d'achat aux producteurs et les prix de vente aux consommateurs. Le coefficient multiplicateur permettra d'éviter l'effet pervers d'un prix minimum de référence, qui aboutit à tirer les prix vers le bas. C'est, j'en suis convaincu, un instrument indispensable pour sortir des crises conjoncturelles que nous voyons revenir tous les ans et contre lesquelles nous restons impuissants.

Je veux ici témoigner de la satisfaction profonde des professionnels, arboriculteurs, maraîchers, dont le témoignage, en août 2004, m'avait bouleversé. Je pense à eux aujourd'hui, ainsi qu'à Jean-Michel Ferrand, député UMP, précurseur dans ce combat. Je tiens également à remercier tous ceux qui nous ont aidés à réaliser cette percée, au premier rang desquels Hervé Gaymard - pour avoir tenu parole, lui qui s'était engagé, le 7 octobre, à répondre en deuxième lecture au Sénat à la détresse de nos producteurs - et le président de la commission des affaires économiques, Patrick Ollier.

À vous maintenant, monsieur le secrétaire d'État, et à votre administration de faire vivre cette mesure, en la défendant bec et ongles contre certains intégristes de la concurrence, à Bruxelles, ...

M. François Brottes. Eh oui, c'est dur, le capitalisme !

M. Jean Dionis du Séjour. ...et surtout en la mettant en œuvre dès la campagne 2005. La sortie du décret correspondant doit être pour vous une véritable urgence. Nous vous faisons pleinement confiance, et nous sommes prêts à vous aider.

Il restera, pour répondre aux problèmes structurels dont souffrent ces filières agricoles, à résoudre tout ce qui relève du coût du travail et des distorsions de concurrence avec les nouveaux pays membres de l'Union européenne. Sur ce dernier point, monsieur le secrétaire d'État, vous aviez annoncé une mission interministérielle associant agriculture, finances et travail, afin d'arrêter la position gouvernementale au sein de l'Union. Où en sommes-nous aujourd'hui ?

Le groupe UDF s'est abstenu en première et en deuxième lecture. En première lecture, Jean Lassalle avait critiqué la succession de mesures à la charge des collectivités territoriales situées en ZRR.

M. François Brottes. Il avait raison !

M. Jean Dionis du Séjour. En deuxième lecture, j'avais regretté le rejet par le Gouvernement de nos propositions concernant les crises agricoles dans le secteur des fruits et légumes.

Grâce au nouvel équilibre politique obtenu en CMP, l'UDF a pu obtenir satisfaction sur des points cruciaux. Nous ne bouderons donc pas notre plaisir. Nous avons vécu ensemble un vrai, un beau moment de vie parlementaire. C'est donc sans états d'âme, et avec bonheur, que l'UDF votera une fois de plus en faveur des conclusions de la CMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Paul Bacquet. Comme d'habitude !

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, nous clôturons aujourd'hui une longue année de débats parlementaires consacrés à l'avenir de nos territoires ruraux. Les échanges furent souvent riches, parfois exaltants, mais l'enthousiasme et les espoirs que beaucoup d'entre nous avaient placés dans ce texte ont été déçus. Une ambiance de lendemain de fête ratée - je n'oserai parler de gueule de bois - se dégage d'ailleurs de cette assemblée ce matin.

M. Jean Dionis du Séjour. Pas du tout !

M. André Chassaigne. Nous devrions donc nous demander ce qui a bien pu gâcher la fête !

Au final, en effet, la « boîte à outils » tant vantée paraît semblable à ces caisses que l'on trouve dans les brocantes, pleines d'objets disparates et souvent rouillés avant même d'avoir servi. À moins qu'il ne s'agisse du bocal des illusions perdues, destiné à être posé sur la cheminée, orné d'une étiquette ronde, à côté de l'alcool de serpent !

Quelles sont donc les raisons de ce gâchis ?

Nous pourrions chercher du côté de la discussion simultanée d'autres projets de loi. L'organisation du déménagement de La Poste hors de nos territoires, tout comme la fermeture programmée dans nos régions des services des impôts, de l'équipement, des écoles et des collèges, ont évidemment éclairé d'un jour nouveau les motivations réelles du Gouvernement à l'égard de nos territoires ruraux.

Il faut bien avouer aussi que les promoteurs de cette loi ne se sont pas donnés les moyens pour réussir leur entreprise. Alors que la politique d'aménagement du territoire de la nation n'a jamais autant manqué d'ambitions, cette loi marque surtout le refus net du Gouvernement, enferré dans le carcan budgétaire du traité de Maastricht, d'octroyer le moindre euro supplémentaire. Mais comment espérer redynamiser nos territoires sans s'en donner véritablement les moyens ? Ce simple aspect traduit à lui seul le caractère résolument factice du projet de loi. Une « grande loi », nous a dit le rapporteur Yves Coussain. Grande en nombre d'articles, peut-être, mais bien petite du point de vue du contenu !

Cette grande messe consacrée aux territoires ruraux a également pâti de la décision de votre gouvernement de placer définitivement la politique agricole commune sous les fourches caudines de l'OMC et du capitalisme mondialisé. Les agriculteurs français, confrontés aujourd'hui à la mise en œuvre de la nouvelle PAC, comprennent bien la logique funeste des choix que leur ont imposés le Gouvernement et nos partenaires européens, et que vous cherchez aujourd'hui à institutionnaliser avec ce fameux projet de constitution européenne.

Ces raisons n'expliquent pas à elles seules pourquoi ce texte, présenté initialement comme consensuel, ne pourra finalement recueillir que l'opposition résolue des députés communistes et républicains.

Nous voterons en effet, vous vous en doutez, contre ce texte, ...

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Non, on ne s'en doutait pas ! (Sourires.)

M. André Chassaigne. ...parce qu'il est empreint de la même logique que la décentralisation telle que vous la pratiquez. La responsabilité du développement économique en milieu rural est laissée à d'hypothétiques investisseurs privés, mais surtout aux collectivités territoriales, et notamment aux communes, qui seront chargées de compenser le désengagement de l'État. Compte tenu de la situation des finances locales et de la bombe financière à retardement que constitue votre décentralisation, il va de soi que cette loi consacre, avant tout, l'abandon par l'État de nos territoires. Le sort laissé aux maisons de services publics, prêtes à connaître la privatisation de leur fonctionnement, en est la meilleure illustration.

En outre, au fur et à mesure de nos discussions se sont agrégées diverses dispositions absolument inacceptables. Il en est ainsi de la remise en cause insidieuse de la loi littoral au profit de promoteurs immobiliers sans vergogne. J'ai en mémoire les cris d'orfraie poussés sur tous les bancs de cette assemblée lorsque je m'étais élevé contre ces projets. Mais les critiques qui se sont exprimées depuis ont établi la pertinence de mon opposition.

M. Jérôme Bignon. M. Chassaigne a raison !

M. André Chassaigne. Il en est de même de la place symbolique désormais accordée à l'enseignement agricole privé, à un moment où l'enseignement agricole public voit ses moyens budgétaires lourdement amputés.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. C'est faux !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C'est une contre-vérité, monsieur Chassaigne ! Pour ne pas dire plus !

M. André Chassaigne. Notre déception est d'autant plus grande que les quelques avancées politiques que nous aurions pu espérer sont, au final, bien minces.

Prenons la question fondamentale des prix agricoles. J'ai bataillé à l'Assemblée, et je n'étais pas le seul, pour que la rémunération du travail des agriculteurs soit soutenue par les pouvoirs publics. L'occurrence de plus en plus fréquente des crises de prix dans l'agriculture devient en effet insupportable. Le Gouvernement n'a cessé de louvoyer, à l'Assemblée, sur cette question pour finalement déposer au Sénat, en deuxième lecture, sans donc que nous puissions en discuter ici, quelques amendements mineurs sur ce problème. Un amendement voté au Sénat sur la question présente cependant un intérêt certain, puisqu'il concerne la réintroduction des coefficients multiplicateurs pour les fruits et légumes. Il a même résisté aux discussions feutrées de la commission mixte paritaire dont mon groupe est exclu. C'est une avancée que nous saluons !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Il faut vous entendre avec les autres groupes de l'opposition, monsieur Chassaigne !

M. André Chassaigne. Devant l'impossibilité de faire progresser des dossiers fondamentaux pour nos territoires, j'ai essayé de profiter de ces débats pour atténuer des problèmes qui empoisonnent la vie quotidienne de nos campagnes. L'Assemblée nationale s'était montrée compréhensive sur un amendement de bon sens destiné à pacifier la violence des relations entre certains propriétaires forestiers et les cueilleurs de champignons. Quitte à laisser s'envenimer la situation, le Sénat a préféré ne pas modifier la réglementation, au mépris des vœux exprimés par de nombreux élus de petites communes rurales. Je ne peux que le déplorer.

Il en est de même du grand gibier victime d'une collision avec un véhicule. J'avais obtenu une amélioration des dispositions du texte facilitant leur application sur les routes de montagne difficiles, souvent enneigées, et non couvertes par la téléphonie mobile. Le Sénat et la CMP n'ont pas souhaité retenir cet amendement.

La CMP est le reflet de cette dimension antidémocratique. Les représentants de la majorité ont capitulé en rase campagne devant l'aveuglement de sénateurs si éloignés des réalités du terrain qu'ils représentent davantage eux-mêmes que les collectivités territoriales qu'ils sont censés défendre !

M. Jacques Godfrain. Ils sont élus, quand même !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Même les sénateurs communistes ?

M. André Chassaigne. Pour toutes ces raisons, le groupe des député-e-s communistes et républicains votera contre le projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd'hui compte plus de deux cent cinquante articles, contre soixante-seize à l'origine, preuve qu'il s'est beaucoup enrichi au cours des navettes successives, même si sa structure générale demeure inchangée.

Monsieur le secrétaire d'État, le groupe UMP, affirmons-le, partage l'objectif du Gouvernement...

M. François Brottes. Cela tombe bien ! (Sourires.)

M. Serge Poignant. ...de construire une réalité plus dynamique sur le plan économique et plus attractive pour ceux qui y vivent. La réalisation de cet objectif passe par un ensemble de mesures pragmatiques, précises et concrètes, ainsi que par des mesures fiscales significatives qui répondent à la diversité des attentes du monde rural et à celle des problèmes auxquels il est confronté.

Le présent projet de loi s'articule autour de trois orientations majeures : conforter le développement économique et l'attractivité des territoires ruraux, garantir une meilleure offre de services aux populations et protéger les espaces spécifiques ou sensibles.

Afin d'accompagner le développement économique, le dispositif des ZRR est actualisé et des mesures incitatives y sont mises en œuvre : exonération de taxe professionnelle ou d'impôt sur les sociétés pour les entreprises qui s'y créent ; exonération de taxe foncière sur le bâti pendant cinq ans ; création de sociétés d'investissement pour le développement rural ; dispositions fiscales et financières pour le développement des activités agricoles et touristiques ; dispositions en faveur de la pluriactivité, des travailleurs saisonniers et des groupements d'employeurs.

Le texte met également l'accent sur le maintien des services publics de proximité. Les règles de cumul d'un emploi public et d'un emploi privé dans les petites communes sont assouplies, le régime juridique des maisons de services publics est adapté pour permettre l'accueil de services privés.

M. André Chassaigne. C'est surtout cela !

M. Serge Poignant. Enfin, la population et les élus locaux seront désormais mieux informés des projets de réorganisation des services publics.

Concernant l'offre de soins, l'installation des professionnels de santé est favorisée à travers différents dispositifs d'exonération ainsi que par la possibilité offerte aux collectivités locales d'accorder des aides en la matière.

M. André Chassaigne. Cela ne sert à rien !

M. Serge Poignant. Pour renforcer la protection des espaces sensibles, le projet de loi comporte désormais un chapitre consacré aux sites Natura 2000, qui précise, notamment, la définition des zones spéciales de protection et de conservation et renforce le rôle des élus dans leur gestion. Ce chapitre prévoit également une exonération de taxe sur le foncier non bâti.

Une attention particulière est portée à la montagne, comme en témoignent de nombreuses mesures : création des ententes de massifs, assouplissement des procédures des UTN, développement des activités agricoles, pastorales et forestières, redéfinition des règles de constructibilité sur les rives des lacs de montagne.

Le travail parlementaire a également contribué à enrichir le volet relatif à la chasse qui tend, notamment, à mieux définir l'équilibre agro-sylvo-cynégétique.

Le projet de loi s'insère dans l'action globale du Gouvernement en faveur du monde rural, dont je veux pour preuve les mesures décidées au CIADT de septembre 2003, les dispositions incluses dans d'autres textes relatives à la couverture du territoire en téléphonie mobile et en haut débit, les projets d'infrastructures et la future loi de modernisation agricole.

M. André Chassaigne. C'est le paradis champêtre !

M. Serge Poignant. La commission mixte paritaire, qui s'est réunie le 3 février dernier, est parvenue facilement à un accord sur les différents points restant en discussion. Je tiens d'ailleurs à souligner ici l'excellent travail des rapporteurs des deux assemblées et des présidents de commission pour parvenir à cet accord. Je citerai quelques exemples.

Pour les zones de revitalisation rurale, le texte actualise les critères de délimitation du périmètre de ZRR autour de l'EPCI à fiscalité propre. La CMP a notamment confirmé l'extension, dans ces zones, du régime d'exonération de la taxe professionnelle aux reprises d'activités commerciales, artisanales et libérales. Elle a également confirmé la compensation par l'État, au profit des collectivités territoriales, des exonérations de taxe professionnelle applicable dans les ZRR.

Pour ce qui concerne le développement du tourisme en zone rurale, la CMP a renforcé et prolongé jusqu'en 2010 le régime de déduction fiscale destiné à favoriser le tourisme en zone rurale. Ces réductions d'impôts sont accordées au titre des investissements immobiliers locatifs réalisés dans des résidences de tourisme classées dans les ZRR et dans d'autres catégories de zones rurales.

L'article 4 A vise à adapter le dispositif appliqué en matière de publicité sur les boissons alcoolisées afin de faciliter la promotion collective des vins bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée ou d'une indication géographique protégée. Le Sénat a, en deuxième lecture, aménagé ce dispositif en prévoyant que cette publicité peut comporter des « références aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d'origine », ainsi que des « références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives du produit ». La CMP a confirmé cette rédaction, ce dont je me félicite. Vous connaissez mon engagement sur cette question.

L'article 4 bis A dispose qu'un système de coefficient multiplicateur entre le prix d'achat et le prix de vente des fruits et légumes peut être instauré en période de crises conjoncturelles, le taux du coefficient étant fixé par les ministres de l'économie et de l'agriculture et sa durée d'application ne pouvant excéder trois mois. Par ailleurs, la CMP a confirmé le dispositif de soutien à la filière fruits et légumes qui traverse des crises récurrentes depuis plus de cinq ans. L'article 8 ter autorise, tout en les encadrant sur une période déterminée, les annonces de prix pour les fruits et légumes frais, celles-ci devant porter sur des produits ayant fait l'objet d'un accord entre le fournisseur et son client quant au prix de cession de la marchandise. Je salue, comme d'autres avant moi, l'engagement de Jean-Michel Ferrand sur cette question.

En matière de permanence des soins, la loi du 13 août 2004 portant réforme de l'assurance maladie et le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux comportent des mesures relatives à la démographie médicale et à la répartition des médecins sur le territoire. Les dispositions du projet de loi prévoient, à ce titre, la possibilité, pour les collectivités locales, d'accorder des aides destinées à favoriser l'installation ou le maintien des professionnels de santé dans les zones dans lesquelles est constaté un déficit d'offre de soins.

Par ailleurs, la CMP a confirmé le dispositif introduit à l'Assemblée visant à exonérer d'impôt sur le revenu les médecins de garde dans les petites communes.

Je ne développerai pas le volet chasse, que notre collègue Jean-Claude Lemoine a parfaitement décrit.

Monsieur le secrétaire d'État, ce texte s'inscrit parfaitement dans l'action globale du Gouvernement en faveur des territoires ruraux. Cette action rompt avec la politique menée sous la précédente législature qui a conduit, disons-le, à l'aggravation de la fracture territoriale, n'en déplaise à nos collègues François Brottes et André Chassaigne ! Non, ce n'est ni un « livre de la jungle », ni une « boîte à outils rouillés », mes chers collègues, mais la traduction d'un véritable engagement en faveur du monde rural, conformément au souhait du Président de la République. Il est dans le droit fil du CIADT du 3 septembre 2003 et s'inscrit dans la perspective de la future loi de modernisation agricole. Ce texte pragmatique répond à la diversité des attentes du monde rural.

En conclusion, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de loi répond parfaitement aux trois objectifs majeurs : conforter le développement économique et améliorer l'attractivité des territoires ruraux ; garantir une meilleure offre de services aux populations ;...

M. André Chassaigne. C'est faux !

M. Serge Poignant. ...protéger les espaces spécifiques ou sensibles.

Pour toutes ces importantes raisons, le groupe UMP votera, bien évidemment, ce texte, en se félicitant de son excellent aboutissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Monsieur le secrétaire d'État, le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux est, comme vient de souligner M. Poignant, une réelle source de satisfactions, notamment au vu des derniers aménagements contenus dans le texte élaboré par la commission mixte paritaire.

En effet, ce projet de loi complet, qui aborde et traite la ruralité dans ses multiples facettes, a été enrichi tout au long des débats parlementaires de dispositions innovantes et courageuses que l'on attendait depuis de nombreuses années. Ces avancées législatives sont le fruit, d'une part, de la très forte mobilisation des députés et sénateurs de la majorité et, d'autre part, de l'ouverture et de la capacité d'écoute - écoute fructueuse - du Gouvernement et de votre ministère au cours de la procédure législative, ce dont je vous remercie à nouveau.

Ce texte est également une source de grandes satisfactions parce qu'il comporte des mesures positives en réponse à des attentes légitimes, exprimées de longue date par nos agriculteurs et qui, aujourd'hui, relèvent d'une véritable urgence. Je veux évidemment parler de l'article 4 A qui assouplit la loi Évin et de l'article 4 bis A qui encadre les marges de la grande distribution en période de crise conjoncturelle sur le marché des fruits et légumes.

M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !

M. Thierry Mariani. Les dispositions ainsi obtenues par voie d'amendement sont le signe d'un volontarisme politique fort. Elles sont l'illustration des avancées déterminantes qui peuvent être réalisées quand tous - gouvernants, députés, sénateurs, groupes d'études et professionnels - se mobilisent pour agir dans le même sens.

Qu'il s'agisse de la loi Évin ou des fruits et légumes, nombre de parlementaires, présents aujourd'hui dans cet hémicycle, mènent depuis plusieurs années des campagnes de sensibilisation sur les dispositions législatives à mettre en œuvre.

Questions, amendements, propositions de loi, rapports, demandes d'audience : le moins que l'on puisse dire, c'est que tous les moyens d'action dont disposent les parlementaires ont été déployés pour mener un travail de fond efficace afin de sensibiliser, d'expliquer, de persuader et de rallier.

M. Jean Dionis du Séjour. C'est vrai !

M. Thierry Mariani. Le résultat du combat incessant que nous avons mené en faveur de ces causes justes se mesure aujourd'hui à travers les articles 4 A et 4 bis A, sur lesquels je souhaite m'arrêter quelques instants.

Il convient, en premier lieu, d'insister sur leur bien-fondé : ils ne relèvent ni de la démagogie, ni de l'électoralisme, mais répondent à des attentes dont la légitimité ne souffre aucune contestation.

S'agissant de l'article 4 A, je tiens à rappeler qu'il s'agit d'une grande victoire pour les viticulteurs et pour tous les parlementaires qui, depuis des années, s'élèvent, dans le respect des impératifs de santé publique, contre certaines aberrations de la loi Évin.

L'amendement de conciliation du Gouvernement va certes moins loin que celui du Sénat ou que celui que nous avions présenté en seconde lecture à l'initiative du groupe d'études sur la viticulture, mais il arrive à point nommé. Retenu par la CMP, cet amendement, né de l'audace sénatoriale, de l'enthousiasme des députés et de la sagesse du Gouvernement, constitue un message d'encouragement, équilibré mais fort, pour la viticulture, au moment où celle-ci traverse une crise sans précédent. Au-delà de la réponse qu'il apporte aux difficultés de la communication vitivinicole en France, l'article 4 A est effectivement le signe de la volonté du Gouvernement d'accompagner les viticulteurs dans leur entreprise de reconquête.

Les viticulteurs ne sont ni des attentistes, ni des assistés, ils savent parfaitement que leur avenir est entre leurs mains et qu'ils ne surmonteront les défis de la viticulture qu'au terme de certaines réorientations profondes dont ils seront les principaux acteurs. Pour autant, ils ont besoin d'être entendus, soutenus, encouragés et non entravés.

Élu d'une circonscription viticole, je mesure chaque jour les conséquences graves de la crise que traverse la viticulture française. Or, monsieur le secrétaire d'État, vous le savez puisque vous étiez encore dans mon département il y a quelques jours, quand la viticulture française va mal, c'est l'ensemble de nos campagnes qui va mal, ce sont des équilibres régionaux et de nombreux emplois qui sont menacés. Gageons donc que cette nouvelle disposition annonce un engagement soutenu, offensif et durable des pouvoirs publics aux côtés de la filière viticole française.

Quant à l'article 4 bis A, c'est le résultat d'un long travail de sensibilisation sur les difficultés des producteurs de fruits et légumes. Cette œuvre de sensibilisation a eu d'autant plus de résonance que le secteur fruitier et légumier a hélas connu une crise majeure en 2004 et que les parlementaires se sont fortement mobilisés sur ce dossier. Je pense bien sûr aux élus des Bouches-du-Rhône et du Vaucluse, mais aussi à ceux du Sud-Ouest, avec qui, tout au long de l'été dernier, nous vous avons amicalement harcelé. Cet article constitue une première mesure. Elle doit être confirmée et complétée par d'indispensables mesures visant à permettre aux producteurs de fruits et légumes de reprendre les rênes et de vendre enfin leurs récoltes sans avoir à subir le diktat des distributeurs.

Je me félicite que tout ce travail et que toute cette ardeur n'aient pas été vains, qu'ils aient débouché sur des dispositions concrètes. Trop souvent, nos concitoyens ont l'impression que nos débats sont à mille lieues de leurs difficultés quotidiennes. Avec ce texte, nous avons la satisfaction d'avoir apporté de véritables réponses à des attentes pleinement justifiées.

Permettez-moi toutefois un bémol. Nous sommes le 10 février. Dans ma région, c'est aujourd'hui la fermeture de la chasse à certains oiseaux migrateurs et notamment à la grive, et l'incompréhension persiste.

M. Jean-Claude Lemoine, rapporteur. C'est vrai !

M. Thierry Mariani. On avait demandé aux sociétés de chasse de faire des études. Elles les ont faites, elles les ont payées, la réponse est positive, et il n'y a aucun résultat. Il est temps de lever ce malentendu entre les chasseurs et le Gouvernement. « Nous avons l'impression d'être un peu cocus », nous disent les responsables de ces sociétés.

Cela dit, nous sommes satisfaits de ce texte qui apporte de véritables réponses. Nous vous en remercions et, bien sûr, je le voterai avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, élu d'un territoire rural, je suis satisfait de ce texte, mais, élu de la Baie de Somme, administrateur du Conservatoire du littoral, président de Rivages de France, je viens dire mon indignation et mon inquiétude devant l'atteinte portée à la loi littoral par le paragraphe X bis de l'article 75 sexies adopté - sans discussion dans notre assemblée - par les sénateurs à l'occasion de la deuxième lecture et retenu par la commission mixte paritaire.

Tous les amendements du Sénat visant à modifier cette loi, à part celui qui crée le Conseil national du littoral, que j'approuve bien entendu, ont été abandonnés après un combat courageux mené par le Gouvernement et renvoyés à la discussion du Conseil national du littoral, et je regrette vraiment que cet amendement défendu par M. Gélard ait été maintenu. Nous sommes en train de porter atteinte à une loi fondatrice de l'environnement dans notre pays. Il y a des lois auxquelles on ne touche pas : la loi de 1901, la loi littoral...

J'ai participé à quantité de réunions dans le cadre de la préparation du CIADT de septembre 2004 sur les problèmes posés par la loi littoral. Il y avait un consensus pour rechercher des solutions réglementaires. Ça avait commencé d'être fait pour les estuaires.

Les zones littorales non urbanisées doivent rester en l'état, écrivait Jacques Chirac en 1976. C'était il y a trente ans.

Alors que nous venons d'accueillir à Paris une conférence internationale sur la biodiversité qui a fait grand bruit tant par la détermination du Président de la République que par son discours ou par la personnalité des participants, comme le prix Nobel de la paix, Mme Maathai, qui était à Paris pour dire combien ce combat pour l'environnement est important, alors que, dans cette loi, des pans entiers sont consacrés aux zones humides, alors que le Gouvernement vient de lancer à la suite du CIADT du mois de septembre un appel à projet sur la gestion intégrée de la zone côtière, on n'hésite pas à porter atteinte à la loi littoral, au motif extrêmement spécieux - les juristes sont des spécialistes, j'en suis un, je sais de quoi je parle -, que la loi n'est pas claire.

Une décision du tribunal administratif de Rennes crée une difficulté. Doit-on légiférer et ouvrir la boîte de Pandore ? On construira dans les petits estuaires, parce que c'est l'objectif poursuivi, on construira dans l'estuaire de la Laïta, l'estuaire de la Canche, le Fier d'Ars ou l'Aber Wrach ! On a déjà oublié le tsunami et les attaques extravagantes portées par l'homme aux zones littorales, qui ont amplifié les dégâts naturels et multiplié le nombre de morts. Il y a 2 millions de kilomètres de littoral dans le monde. Chaque jour, 10 kilomètres sont dénaturés, et ce texte va aggraver la situation. Alors que 70 % de la population mondiale vit sur la grande bande côtière, c'est une erreur de l'adopter.

Je ne peux déposer d'amendement pour éviter une telle régression. C'est un signal malheureux envoyé à toutes celles et à tous ceux qui considèrent que la préservation de l'environnement et le développement économique et touristique peuvent aller de pair et s'inscrire dans des objectifs durablement compatibles.

Pour le philosophe Alain, qui aimait la Bretagne et les zones littorales, il n'y a de bonheur possible pour personne sans le soutien du courage. L'amendement de suppression de cette disposition que j'attendais n'est pas là. Le courage manquerait-il au Gouvernement ? Le combat de M. Lepeltier avait été solide au Sénat. Puis-je espérer, monsieur le secrétaire d'État, que votre réponse viendra atténuer ma crainte et ma déception ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Je remercie d'abord tout particulièrement Serge Poignant et Thierry Mariani d'avoir, au nom du groupe UMP, rappelé les avancées mais aussi l'esprit ambitieux et pragmatique, la démarche concrète du Gouvernement et de sa majorité pour élaborer un texte ouvert, qui réponde à la diversité de la problématique rurale, qui soit ambitieux et qui ait une ligne claire. À mon tour, je salue le travail de Jean-Michel Ferrand sur la question des fruits et légumes. Vous l'avez rappelé, monsieur Poignant, ce texte marque une rupture avec la précédente législature. Le Gouvernement en est bien conscient, et il est fier d'avoir pu redresser la barre. Je remercie l'ensemble du groupe UMP pour son soutien.

Monsieur Dionis du Séjour, je suis heureux du vote positif du groupe UDF.

M. Jean-Paul Bacquet. C'est tellement inattendu !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Selon vous, il y a une absence de lisibilité et l'on aurait dû se caler sur les conclusions de la DATAR dans son fameux rapport paru l'an dernier sur les trois campagnes pour élaborer ce texte. Je suis prêt à en reparler avec vous, mais, très honnêtement, j'ai le sentiment que ce texte répond précisément à la logique de la DATAR en proposant des solutions adaptées aux différents problèmes des différentes campagnes. Pour prendre des exemples concrets, le dispositif des ZRR est réservé aux campagnes fragiles, et la mise en œuvre des périmètres autour des villes, dans les zones périurbaines, concerne ce qu'on appelle la campagne des villes, où les problématiques sont totalement différentes.

Vous avez souligné les avancées que permet ce texte, en particulier sur la question des fruits et légumes ou du vin. Le Gouvernement a accepté l'apport du Parlement, qui s'est fait en deux temps, lors de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale et lors de la deuxième lecture au Sénat, et il a mis en œuvre immédiatement les conclusions du rapport Canivet pour que les dispositions permettant d'améliorer le fonctionnement du marché des fruits et légumes soient prises rapidement.

Vous avez posé une question plus précise concernant la mission interministérielle sur les distorsions de concurrence dans l'agriculture. Le Gouvernement a confié une mission parlementaire à M. Jacques Le Guen, député du Finistère, qui a commencé ses auditions. Je pense qu'au printemps, il sera à même de faire des propositions. Nous allons donc avancer rapidement.

Monsieur Brottes, monsieur Chassaigne, je ne m'attendais évidemment pas à ce que vous votiez ce texte, mais quand vous dites, monsieur Chassaigne, que vous avez l'impression d'être un lendemain de fête et d'avoir la gueule de bois, ne serait-ce pas plutôt la tête de bois ou la langue de bois ? (Sourires.)

Je suis tout de même très surpris de ce que j'ai entendu. Vous avez déclaré, monsieur Brottes, même si c'était hors micro, que vous préfériez faire du préventif plutôt que du curatif. Votre discours m'a donc paru extrêmement excessif au regard de l'évolution de ce texte. Vous avez d'ailleurs souligné avec une grande honnêteté l'écoute du Gouvernement à l'égard de l'ensemble des parlementaires et notamment des députés de cette assemblée, y compris ceux de l'opposition. Je n'ai plus en tête le nombre d'amendements proposés par l'opposition ici ou au Sénat qui ont été repris, mais il est très élevé.

Je comprends le discours de bois - ne le qualifions pas autrement - que j'ai entendu de votre part, à l'un et à l'autre, mais je sais votre passion personnelle pour l'avenir du monde rural, je sais que nous avons régulièrement en dehors de ces micros l'occasion d'avancer ensemble sur ces sujets, et je regrette que nous ne puissions pas parvenir à un plus grand consensus sur un texte qui, au fond, nous rassemble beaucoup plus que vous ne le dites.

Par contre, je m'inscris totalement en faux, monsieur Brottes, quand vous parlez de condescendance du Gouvernement vis-à-vis des territoires ruraux. C'est excessif et je le prends presque comme une insulte personnelle, tellement c'est en contradiction avec ce que nous faisons les uns et les autres, depuis des années pour certains, dans nos territoires et ici au Parlement. Quand le Gouvernement met en place une boîte à outils, puis accepte qu'elle soit doublée par le Parlement, avec qui il travaille, je ne vois pas pourquoi on parlerait de condescendance. Je crois que vos paroles ont dépassé votre pensée !

M. Jean Dionis du Séjour. C'était un peu excessif, c'est vrai.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Enfin, je suis assez surpris de vous entendre employer l'expression « d'arbre à palabres ». Il ne s'agit pas de logique de discours, ou alors il faudrait s'en référer, comme M. Poignant l'a rappelé tout à l'heure, à la multiplicité des discours qui ont été tenus ces dernières années. Dois-je vous rappeler que, depuis 1981, le parti socialiste et le parti communiste, qui ont constitué des majorités auxquelles vous apparteniez, ont gouverné trois fois cinq ans, c'est-à-dire les trois quarts du temps ?

M. André Chassaigne. Nous ne sommes pas restés aussi longtemps !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Et si, aujourd'hui, le monde rural connaît tant de difficultés, sans doute est-ce le résultat - car rien ne se fait du jour au lendemain - d'une longue évolution. Ou dois-je penser qu'il ne s'agissait, lorsque vous étiez au pouvoir, que de discours ?

Monsieur Ollier, nous continuerons à travailler avec le Parlement, notamment à la rédaction des décrets.

Je suis tout à fait conscient, avec l'ensemble des ministres concernés, que cette loi devra comporter un service « après-vote », c'est-à-dire la rédaction des décrets, la mise en œuvre sur le terrain et, enfin, une éventuelle modification du texte s'il apparaît qu'il n'est pas suffisamment adapté ou que les besoins ont évolué. Il s'agit là d'un chantier permanent. Ce texte ne clôt pas définitivement la question de l'avenir du monde rural. Nous serons au rendez-vous et vous saurez, les uns et les autres, nous le rappeler.

M. Jean Dionis du Séjour. C'est vrai !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur Bignon, vous m'avez posé une question très claire. Rassurez-vous, le Gouvernement ne manque pas de courage !

M. Jérôme Bignon. Je n'ai jamais dit cela.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. La disposition figurant à l'article 75 sexies a été adoptée contre l'avis du Gouvernement...

M. Jérôme Bignon. Je le sais, et je l'ai rappelé.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. ...et au terme d'un long débat.

M. Jérôme Bignon. Mais pas à l'Assemblée nationale !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Je parle du débat au Sénat puisque c'est là que cette disposition a été adoptée.

En tant que président de Rivages de France, vous connaissez parfaitement ces problèmes, notamment ceux des rus et étiers qui sont évoqués dans cet article.

La commission mixte paritaire n'a pas remis en cause la rédaction de l'amendement voté au Sénat. Bien que le Gouvernement soit très conscient des problèmes que soulève cette nouvelle rédaction, il n'a toutefois pas souhaité, à ce stade du débat, aller contre l'avis du Parlement. Le dispositif prévoit un décret en Conseil d'État,...

M. Jean-Luc Préel. Un décret qui ne sortira pas !

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. ...dont la rédaction ne sera certes pas facile, mais à laquelle le Gouvernement s'attellera très vite.

À cette occasion - et je me fais ici l'interprète de Serge Lepeltier, dont vous avez rappelé le travail important - le Gouvernement sera extrêmement attentif aux préoccupations que vous avez exprimées très clairement à cette tribune. Je vous propose, monsieur Bignon, de vous associer à la préparation de ce décret en Conseil d'État. Car faire avancer le monde rural - mais on peut le dire sur tous les sujets - c'est d'abord une affaire de pragmatisme, de bon sens et de partenariat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire.

Texte de la commission mixte paritaire

M. le président. Avant de mettre aux voix ce texte, je vais, conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisi.

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 1.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Cet amendement tend à supprimer les II et III de l'article 1er septies, afin de lever des gages.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. À titre personnel, j'émets un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 2 du Gouvernement, tendant à supprimer, pour coordination, l'article 3 quater du projet de loi, sur lequel les deux assemblées du Parlement étaient parvenues à un texte identique.

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir cet amendement.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Cet amendement de suppression vise à assurer la coordination du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux avec la loi du 9 août 2004 pour le soutien à la consommation et à l'investissement et la loi de finances rectificative pour 2004.

La rédaction de l'article 3 quater, relatif à la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, est totalement identique aux dispositions figurant dans les deux lois précitées. Le maintien de l'article 3 quater dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux avait été décidé lors de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale du texte au cas où celui-ci aurait été adopté avant la loi de finances rectificative pour 2004.

M. le président. La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant, vice-président de la commission mixte paritaire. Je me range à l'avis de M. le secrétaire d'État.

Le maintien de l'article 3 quater avait en effet été décidé pour garantir que nous aurions satisfaction.

Je souhaite que l'application de ce dispositif se fasse rapidement. Le nouveau mode de calcul de la TACA, pose en effet des problèmes aux petits commerces non alimentaires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. À titre personnel, j'y suis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 3.

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour le soutenir.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Cet amendement tend à supprimer l'article 34 bis relatif à la soumission au taux réduit, dans des zones de revitalisation rurale, des travaux de transformation de bâtiments agricoles en logements à usage locatif. Le Gouvernement attire à nouveau l'attention de votre assemblée, comme il l'a fait au Sénat, sur le fait que cette disposition constitue une infraction patente au droit communautaire.

Concernant les travaux de construction, seuls ceux portant sur les logements fournis dans le cadre de la politique sociale peuvent bénéficier d'un taux réduit de TVA. Le dispositif adopté en faveur des services à forte intensité de main-d'œuvre par la directive du 22 octobre 1999 permet l'application du taux réduit aux travaux de rénovation et de réparation des logements privés à l'exclusion des travaux de construction. Si cette disposition était maintenue, nous serions en totale contradiction avec le droit communautaire.

Or nous sommes en discussion avec la Commission sur l'extension de la TVA à taux réduit pour des services à forte intensité de main-d'œuvre. Je pense en particulier à l'extension prioritaire à la restauration, qui a été maintes fois affirmée. On ne peut pas agir de façon unilatérale pour modifier les règles applicables aux travaux de construction, sauf à s'exposer à un contentieux immédiat et à fragiliser la position française dans la négociation.

Enfin, en tout état de cause, on ne peut pas soumettre à un régime particulier les travaux portant sur une catégorie de bâtiments situés de façon discriminatoire dans des zones déterminées, parce que cela aboutirait à régionaliser la TVA, ce qui est totalement contraire au principe général d'unicité des taux nationaux pour une même catégorie de produits.

Tant pour des raisons communautaires - et je vous demande la plus grande vigilance parce que la discussion sur l'application de la TVA à taux réduit n'est pas facile - que pour des raisons de contradiction avec le principe d'unicité de l'impôt, nous sommes conduits à vous proposer la suppression de cet article en votant l'amendement du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. La lecture de cet amendement m'avait causé une agréable surprise. Cette disposition, adoptée en deuxième lecture en Sénat, avait l'avantage d'encourager la transformation des bâtiments agricoles en logements. Cela dit, je comprends les réticences du Gouvernement.

La transformation de la destination des bâtiments assimile, dans notre législation fiscale, ces bâtiments à du neuf. D'autre part, le risque vis-à-vis de l'Union européenne est réel - et je sais combien les négociations sont difficiles.

Je me range donc à l'avis du Gouvernement et je demande à mes collègues de voter cette suppression de la réduction de TVA pour les transformations de bâtiments agricoles.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. La suppression de cette disposition me cause un immense regret. Voilà une mesure - parmi d'autres - que j'ai citée et que vous n'avez pas relevée, monsieur le secrétaire d'État ; j'ai d'ailleurs cité beaucoup plus de mesures positives que ne l'ont fait certains de mes collègues de l'UMP !

Une fois de plus, on nous joue la partition : « C'est la faute à l'Europe ! » Ce n'est pas correct. Il faut aller au bout. Contrairement à ce que vous venez de dire, monsieur le secrétaire d'État, l'Europe autorise que l'on déroge au droit commun pour soutenir les territoires fragiles. Cette dérogation était extrêmement utile et attendue.

Malgré l'accord de l'ensemble des parlementaires sur cette question, nous sommes contraints, en dernière délibération - et c'est votre droit, monsieur le secrétaire d'État -, de supprimer cette disposition. Pourtant, s'agissant des zones de revitalisation rurale, c'est une cause que nous aurions pu plaider. D'ailleurs, n'avez-vous pas dit vous-même qu'il s'agissait de territoires fragiles, importants à conforter ? À ce titre, ces territoires méritent des mesures discriminantes au plan positif. Celle-ci, extrêmement utile, aurait constitué un véritable levier pour le milieu rural.

Pour ce qui nous concerne, nous voterons contre la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Depuis le début de cette mandature, favoriser la transformation de l'immense patrimoine immobilier autrefois dédié aux activités agricoles en logements d'habitation a été notre ligne directrice. Il s'agit d'un enjeu considérable en termes patrimonial et démographique pour nos territoires ruraux.

C'est la raison pour laquelle la loi portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction a permis la transformation d'anciennes granges agricoles en logements. Cette disposition s'inscrivait dans une continuité législative tendant à favoriser les travaux dans ces anciens bâtiments agricoles en ZRR.

Toutefois, si le premier argument que nous a présenté M. le secrétaire d'État, selon lequel il s'agit de construction et non de réparation, ne me convainc pas - le dossier était plaidable -, le second est plus pertinent. Il sera en effet très difficile de faire accepter au niveau de l'Europe une territorialisation de la TVA. L'UDF a toujours défendu, débat après débat, l'idée de la construction d'un véritable marché unique et d'une politique fiscale la plus cohérente possible.

Je soutiendrai donc le Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant, vice-président de la commission mixte paritaire. L'application d'un taux réduit de TVA est une bonne mesure, sur laquelle s'étaient entendus les députés et les sénateurs dans le cadre de la CMP. Il importe toutefois de tenir compte de la négociation en cours à Bruxelles, et l'argument selon lequel l'adoption de cette mesure pourrait faire échouer une négociation globale dont on connaît la difficulté est recevable.

Il est vrai également, comme l'a souligné notre collègue Dionis du Séjour, que le fait d'appliquer plusieurs taux à l'échelle nationale introduit un risque, même si nous n'envisagions d'appliquer ce taux réduit que dans les zones fragiles et les ZRR.

J'appelle donc les députés du groupe UMP à se ranger à la proposition du Gouvernement, comme l'a fait le rapporteur Yves Coussain.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. L'argument du Gouvernement est bien forcé ! Une fois encore, on sort du chapeau les contraintes européennes. C'est toujours la même rengaine, qu'on discute du devenir des POS ou du maintien de n'importe quel service public. Lorsque nous demandons de l'argent pour les territoires ruraux, on nous objecte les dispositions du traité de Maastricht relatives à la concurrence.

Vient aujourd'hui s'ajouter à cela un argument un peu outrancier : l'adoption de cette mesure pourrait porter atteinte à une négociation en cours sur la réduction du taux de TVA. Soyons sérieux ! Comment cela serait-il possible ?

De tels arguments doivent cacher autre chose ! Ce serait, au contraire, faire preuve d'un volontarisme politique très fort que de mettre en œuvre des mesures véritablement incitatives pour faire face au problème du logement en milieu rural.

On constate du reste que, de plus en plus souvent, en cas d'agrandissement de logements dans des bâtiments agricoles, les services de l'équipement demandent que l'on sollicite plutôt une autorisation de travaux qu'un permis de construire. Une discussion est donc possible sur la notion même de construction et de rénovation, et j'ai d'ailleurs déjà déposé une question écrite en ce sens.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. L'argument européen n'est pas un argument qu'on sort du chapeau : c'est la réalité des textes. Rassurez-vous, monsieur Chassaigne, je ne cherche pas à vous cacher quoi que ce soit ! L'objectif du Gouvernement n'est pas de détruire le monde rural, comme on en a parfois l'impression en vous entendant.

L'argumentation est très précise. Monsieur Poignant, monsieur Dionis du Séjour, il serait réellement intéressant de travailler sur l'évolution du concept de construction-rénovation en matière d'anciens bâtiments agricoles. Ce sujet pourrait être notamment abordé dans le cadre de la prochaine conférence de la ruralité. Peut-être trouvera-t-on, à l'occasion de cette conférence, des réponses qui ne remettent pas en cause le principe d'unicité fiscale sur le territoire.

En tout cas, monsieur Chassaigne, je le répète : ne croyez pas que nous ayons employé l'argument européen pour vous cacher quelque chose. C'est simplement un fait.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 4.

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour le soutenir.

M. le secrétaire d'État à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Cet amendement, qui propose de supprimer le V de l'article 35, a pour objet de supprimer un gage.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Coussain, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

Vote sur l'ensemble du texte

M. le président. Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire modifié par les amendements qui viennent d'être adoptés.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

    2

ACCORD FRANCE-TADJIKISTAN
SUR LA COOPÉRATION
EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE

Vote sur un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Tadjikistan relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure (nos 1854, 2020).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

    3

ACCORD FRANCE-SLOVAQUIE
SUR LA COOPÉRATION
EN MATIÈRE D'AFFAIRES INTÉRIEURES

Vote sur un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque relatif à la coopération en matière d'affaires intérieures (nos 1855, 2020).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

    4

ACCORD FRANCE-BULGARIE
SUR LA COOPÉRATION
EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE

Vote sur un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Bulgarie relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure (nos 1856, 2020).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

    5

PROTOCOLE À LA CONVENTION
SUR L'EMPLOI DE L'INFORMATIQUE
DANS LE DOMAINE DES DOUANES

Vote sur un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi autorisant l'approbation du protocole établi conformément à l'article 34 du traité sur l'Union européenne modifiant, en ce qui concerne la création d'un fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières, la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes (nos 1860, 2017).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

    6

CONVENTION INTERNATIONALE
POUR LA PROTECTION DES VÉGÉTAUX

Vote sur un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la Convention internationale pour la protection des végétaux (ensemble une annexe), telle qu'elle résulte des amendements adoptés à Rome par la vingt-neuvième session de la Conférence de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (nos 1915, 2018).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

    7

TRAITÉ INTERNATIONAL
SUR LES RESSOURCES PHYTOGÉNÉTIQUES
POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE

Vote sur un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation du traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture (ensemble deux annexes) (nos 1916, 2018).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

    8

ACCORD INTERNATIONAL DE 2001
SUR LE CAFÉ

Vote sur un projet de loi adopté par le Sénat

M. le président. L'ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de l'accord international de 2001 sur le café (ensemble une annexe) (nos 1917, 2019).

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que ce texte ferait l'objet d'une procédure d'examen simplifiée.

Conformément à l'article 107 du règlement, je mets directement aux voix l'article unique du projet de loi.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

    9

CONTRAT DE VOLONTARIAT
DE SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

Discussion, en deuxième lecture,
d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale (nos 1852, 2052).

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le président, monsieur le rapporteur de la commission des affaires étrangères, mesdames, messieurs les députés, cette deuxième lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale s'inscrit dans le contexte particulier des suites du tsunami en Asie du Sud-Est et de l'élan de solidarité dont nos compatriotes ont fait preuve. Nombre de volontaires se sont engagés à cette occasion auprès des ONG pour des actions humanitaires d'urgence. D'autres partiront à plus long terme pour des missions de reconstruction, d'assistance ou d'éducation. C'est dire, comme ce fut le cas pour la loi relative à la coopération internationale des collectivités territoriales et des agences de l'eau dans les domaines de l'alimentation en eau et de l'assainissement, adoptée il y a quelques jours par votre assemblée, qu'il y a une véritable nécessité à voter rapidement ce projet de loi.

M. le rapporteur connaît si bien le texte que je ne ferai pas de long exposé. Toutes les ONG qui oeuvrent à l'international nous l'ont demandé et souhaitent maintenant son adoption dans un délai rapide pour pouvoir préparer le changement de statut qu'il impliquera. Le Gouvernement, comme je vous l'ai indiqué lors de la première lecture, a voulu répondre à ce besoin en améliorant la protection et le statut des volontaires jusqu'à présent définis dans un décret vieux de dix ans. Je souhaite donc que ce texte soit adopté en l'état. C'est pourquoi le Gouvernement ne pourra être favorable à aucun amendement qui retarderait la mise en œuvre de la loi.

Ce texte est le fruit d'une navette fructueuse entre les deux assemblées. Je remercie à cette occasion ceux qui, en liaison avec les acteurs de la solidarité internationale, l'ont amendé avec le soutien du Couvernement. Ces améliorations sont, pour l'essentiel, l'extension du critère de nationalité des volontaires, l'affiliation à un régime de sécurité sociale des volontaires, la fourniture aux volontaires d'un certificat de volontariat et la validation des acquis professionnels, l'introduction dans la loi de la Commission nationale de volontariat, un délai d'entrée en vigueur de la loi qui permettra aux associations et au ministère de se préparer sans précipitation.

La discussion s'engage donc sous de bons auspices. Cela ne tient pas seulement à la qualité et à l'intérêt du contenu du texte présenté. Le travail accompli par le rapporteur, M. Jacques Godfrain, et la commission des affaires étrangères y est pour beaucoup. Qu'ils soient tous ici remerciés, notamment les orateurs des différents groupes qui, quel que soit leur futur vote, ont exprimé leur accord sur les objectifs que nous poursuivons. Si vous adoptez ce projet de loi en l'état, il entrera en vigueur trois mois après sa promulgation.

M. Jacques Godfrain, rapporteur de la commission des affaires étrangères. Très bien !

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Je veux donc rassurer ici tous nos interlocuteurs. Ce délai de trois mois sera mis à profit pour publier les décrets d'application et préparer la composition et le travail de la Commission de volontariat de solidarité internationale. Je vous rassure, le travail a été fait par anticipation et l'administration s'engage à mettre en œuvre les dispositions de la loi dans les délais impartis. Un courrier sera adressé à toutes les associations œuvrant en ce domaine dès l'approbation de la loi. Enfin, au terme de ces trois mois, la Commission sera réunie pour renouveler les agréments si, bien sûr, les associations concernées remplissent toujours les conditions requises. À ce jour, elles ne sont que vingt-deux, ce qui ne devrait poser aucun problème.

Un mot, enfin, s'agissant de la question du financement par le ministère des affaires étrangères des associations de solidarité. Lors de la précédente discussion, j'ai eu l'occasion de rappeler que seules les lois de finances ont vocation à régler ces questions, mais que les crédits alloués seraient bien sûr en augmentation. Nous avons tenu nos engagements en la matière. La loi de finances pour 2005 a porté les crédits alloués aux ONG et aux collectivités territoriales dans le cadre de la coopération décentralisée de 33,5 millions d'euros à 37 millions d'euros. Les crédits de ce chapitre augmentent de 10 % cette année.

M. le président. La parole est à M. Jacques Godfrain, rapporteur de la commission des affaires étrangères.

M. Jacques Godfrain, rapporteur de la commission des affaires étrangères. Je dois d'abord dire, monsieur le ministre, quel plaisir ce fut d'avoir affaire à vous et à vos services pour mettre au point ce texte, qui devrait susciter l'unanimité.

Ce projet de loi a été adopté par le Sénat le 12 octobre 2004.

Sous réserve d'une amélioration rédactionnelle, le Sénat a rejoint l'Assemblée nationale en adoptant le dispositif supprimant les conditions de nationalité initialement requises pour conclure un contrat de volontariat - article 2.

Le Sénat a par ailleurs adopté sans modification l'article définissant les conditions de démission des volontaires, ainsi que leur régime d'indemnisation chômage et de validation des acquis professionnels - article 3.

Il a, en revanche, ramené la limitation de la durée cumulée des missions de volontariat de trois à six ans et supprimé la disposition prévoyant la requalification des contrats de volontariat en contrats à durée indéterminée, ainsi que la compétence de la juridiction prud'homale - article 4. Il s'agit là de la divergence la plus importante entre les deux assemblées. La rédaction retenue par le Sénat autorise en effet un volontaire à enchaîner les missions de volontariat pour une durée totale de six ans, tandis que l'Assemblée nationale avait voulu limiter la durée cumulée des missions à trois ans, jugeant le droit du travail plus approprié pour les missions de longue durée. Afin de ne pas retarder l'adoption définitive du projet de loi, je vous propose de nous rallier au dispositif adopté par le Sénat, qui limite à deux ans la durée du contrat de volontariat tout en restant souple sur la durée maximale cumulée des missions.

Le Sénat a réintroduit le dispositif prévoyant l'affiliation des volontaires et de leurs ayants droit à la Caisse des Français de l'étranger - article 5 -, qu'il avait adopté en première lecture. Le Gouvernement, qui avait fait adopter en première lecture par l'Assemblée nationale un amendement laissant aux volontaires la liberté de choix de leur organisme de protection sociale, s'est finalement rallié à ce dispositif, que je vous propose d'adopter sans modification.

L'article relatif à l'indemnité du volontaire n'a pour sa part été modifié que pour des raisons de forme, afin d'harmoniser la dénomination de la Commission du volontariat dans l'ensemble du texte - article 7.

Enfin, le Sénat a, sur proposition du Gouvernement, modifié l'article 8 bis du projet de loi portant dispositions transitoires. Il a maintenu le report de trois mois de l'entrée en vigueur de la loi à compter de sa publication, conformément au souhait de l'Assemblée nationale en première lecture. En revanche, il a supprimé les dispositions prévoyant que les contrats conclus antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi demeuraient soumis au décret du 30 janvier 1995 relatif aux volontaires et aux associations de volontariat pour la solidarité internationale. Il a également supprimé les dispositions prorogeant les agréments délivrés par le ministère des affaires étrangères avant l'entrée en vigueur de la loi.

Nous notons avec satisfaction que le Gouvernement s'est rallié à la nécessité de ménager un délai de transition entre la publication de la loi et son entrée en vigueur. Dès lors qu'il est en mesure de publier les textes d'application de la loi dans le délai de trois mois prévu et qu'il peut procéder à l'agrément des associations dans les meilleurs délais, le texte issu du Sénat peut être adopté sans modification. Il importe en tout état de cause que les associations agréées à ce jour et les volontaires ayant un contrat en cours soient pleinement informés des conséquences de l'entrée en vigueur de la loi et des démarches qu'ils doivent entreprendre pour se mettre en conformité avec la situation juridique nouvelle.

Sous réserve de ces observations, je vous propose d'adopter ce projet de loi sans modifications. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. La commission des affaires étrangères nous propose de voter conformes les articles restant en discussion de ce projet, qui va donc probablement être adopté définitivement aujourd'hui. Le groupe UDF le votera, et j'ajoute que j'y suis personnellement attaché, ayant passé une partie importante de ma vie en Afrique francophone.

Ce texte prend une importance toute particulière quelques semaines après le drame qui a eu lieu en Asie. L'action remarquable des ONG et des bénévoles a été unanimement saluée et a valu à Oxfam une nomination pour le prix Nobel de la paix 2005. On a vu avec le travail du Conseil international des agences bénévoles à quel point le professionnalisme et la rigueur des ONG permettaient de faire face aux situations d'urgence et de détresse les plus extrêmes.

La France s'est mobilisée durant toute cette période, mais elle doit soutenir le développement et la professionnalisation de ses propres ONG. Le volontariat international est en effet l'un des éléments de son rayonnement à l'étranger et participe à l'expression de sa politique étrangère.

Ce projet de loi va donner un cadre juridique stable au contrat de volontariat international. Les ONG l'attendaient et le Gouvernement l'a rédigé en totale concertation avec elles, ce dont nous pouvons nous réjouir. La deuxième lecture au Sénat a permis de préciser certains éléments, notamment en ce qui concerne le rattachement des volontaires à la caisse des Français de l'étranger, qui leur garantira à l'évidence une protection sociale convenable.

En ce qui concerne la durée des contrats, qui a fait l'objet de vives discussions, l'article 4 a été récrit par les sénateurs, qui ont fixé la durée globale des contrats à six ans, contre les trois ans que l'Assemblée nationale avait adoptés à l'unanimité.

En première lecture, l'UDF avait soutenu cette position afin de responsabiliser les personnes qui choisissent le volontariat, en évitant notamment qu'elles ne se lancent à corps perdu dans ce type d'activité, aux dépens de leurs intérêts personnels.

Les associations d'anciens volontaires de la solidarité constatent en effet qu'un nombre croissant de volontaires, évalué aujourd'hui à 30 %, ce qui est énorme, se retrouvent dans une situation de grande précarité, sans ressources financières ni couverture sociale, sans même avoir cotisé, parce qu'ils sont restés trop longtemps éloignés des réalités professionnelles de leur pays d'origine.

Il faut donc encourager, au-delà d'une période « probatoire », d'une donnée raisonnablement courte, la professionnalisation de ce type d'activité, afin, d'une part, de garantir le bon niveau de ressources humaines engagées sur le terrain aux côtés des plus défavorisés, et, d'autre part, d'éviter que d'anciens volontaires, de retour au pays après des années au service des plus pauvres - je tiens à témoigner de la difficulté de ce retour et du choc qu'il représente -, ne deviennent injustement des cas sociaux, bien malgré eux.

Il est vrai que les ONG, en fonction de leur taille et de leurs moyens, ont des positions contrastées sur cette question essentielle. Pour l'UDF, ce qui compte est le maintien à deux ans de la durée du contrat initial, ce qui va obliger - et c'est parfaitement sain - le volontaire, au terme de ses deux ans, à reconsidérer son engagement en fonction de sa situation personnelle.

Mais, une fois que le volontaire a été pour ainsi dire obligé à une prise de décision, pourquoi se priver d'une relative souplesse en ce qui concerne la durée cumulée et refuser la possibilité du volontariat à ceux qui souhaitent y consacrer plusieurs périodes de leur vie et qui en font, en quelque sorte, un véritable projet de vie ?

Il reste maintenant à s'assurer de la volonté du Gouvernement de soutenir financièrement le développement du volontariat international. Mais ce texte en est un bon augure, car il importe de soutenir les petites structures associatives et humanitaires qui n'ont pas encore accès aux fonds privés et ne peuvent pas prendre leur élan sans soutien public.

Vous le savez, monsieur le ministre, la politique française de coopération doit s'appuyer sur toutes les initiatives de la société civile qui portent les valeurs d'humanisme et de solidarité dont la France s'est faite le héraut partout dans le monde.

Je tiens ainsi à saluer à cette tribune l'action exemplaire engagée par mon ami Jean Lassalle, qui préside l'Association des populations des montagnes du monde. C'est une tâche difficile, compte tenu de l'hétérogénéité de ceux que fédère cette association, que de rassembler et de mobiliser les énergies, et de donner une voix à des communautés éparpillées qui sont trop souvent ignorées des politiques de solidarité et de co-développement. En effet, au-delà des causes comme les catastrophes naturelles, qui doivent évidemment mobiliser en toute urgence les moyens des pays riches, il convient de ne pas oublier les causes plus pérennes et moins médiatiques, qui peuvent nourrir demain de graves crises internationales et humanitaires.

Quoi qu'il en soit, le groupe UDF apportera son soutien à ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le ministre, la catastrophe naturelle qui a frappé l'Asie du Sud-Est, fin décembre rend d'actualité la question de l'organisation de la solidarité de notre pays et des moyens mis à la disposition de ses acteurs pour l'exercer pleinement.

Le contrat de volontariat international de solidarité répond, en tout cas dans ses enjeux et ses principes, aux attentes des associations, des volontaires déclarés et de tous ceux qui envisagent un jour de le devenir.

J'ai précisé d'emblée « dans ses principes », car un contrat suppose un accord entre les parties, sur la base d'un équilibre entre les devoirs et les droits des cocontractants, en l'espèce les associations humanitaires et les volontaires.

Pour parvenir à un équilibre salutaire, donc à un contrat solide, deux conditions étaient nécessaires : d'une part, que les associations soient assurées d'un engagement financier conséquent de l'État afin de garantir le déroulement des missions, et, d'autre part, que l'on protège au maximum le volontaire, non seulement pour assurer les conditions dans lesquelles il va accomplir sa ou ses missions, mais aussi pour prévoir les conditions de son retour.

Le fait est que, sur le premier comme sur le second point, le compte n'y est pas.

Sans rien ajouter concrètement en matière financière, les crédits de votre ministère votés pour 2005 permettront au mieux un saupoudrage de subventions sur quelques associations, mais il est certain que les autres, les moins grandes, donc les plus nombreuses, seront fragilisées dans leur action.

Or, sans moyens supplémentaires, une association à qui l'on ne donne déjà pas les moyens d'accomplir son travail pourra d'autant moins assurer au volontaire les conditions optimales de sa mission.

En fragilisant les associations et en faisant porter au final le poids de ce déséquilibre sur le volontaire, non seulement durant sa mission, mais surtout à son retour, nous nous éloignons donc de la sécurité contractuelle tant recherchée.

Sur le déroulement de la mission, la navette parlementaire a permis quelques avancées importantes, notamment en matière de protection sociale et de préparation. Elles étaient plus que nécessaires si nous voulions accorder au volontaire la base minimale des droits sociaux.

En revanche, je ne peux que m'étonner du peu de cas accordé à un problème majeur : la réinsertion, au retour des missions.

Je m'en étonne d'autant plus que nous avons assisté, entre les deux lectures, à un retour en arrière des plus déplorables.

Tant en commission qu'en séance publique, nous avions mis en évidence en première lecture les difficultés réelles que les volontaires restés trop longtemps éloignés de France rencontrent à leur retour. Pour lutter contre elles, nous avions souligné la nécessité de limiter le cumul des missions à trois ans, au lieu de six.

Monsieur le rapporteur, vous en étiez convaincu vous-même. Vous aviez repris au nom de la commission - et je vous en remercie - l'amendement que j'avais présenté à ce sujet avec mon collègue Michel Destot. Vous étiez même intervenu en sa faveur face au Gouvernement.

Que celui-ci soit opposé à cet amendement parce qu'il ne correspond pas au projet de loi initial, je peux à la limite le concevoir. Que certaines grandes ONG estiment qu'un cumul plus restrictif de la durée des contrats est un frein à leur action et mènent une campagne de lobbying auprès des élus, c'est leur droit le plus respectable, même si leur position est sur le fond discutable. Dès lors que les missions qu'elles organisent ne durent guère plus de deux ans, j'ai du mal à comprendre leur volonté de maintenir les six années de cumul maximal.

En revanche, j'attendais de vous, monsieur le rapporteur, un peu plus de constance dans vos choix. Ce qui était vrai hier ne l'est-il donc plus aujourd'hui ? Les difficultés de réinsertion ont-elles soudainement disparu ? Les avancées de ce texte sont-elles donc si grandes que l'on puisse revenir sur un point aussi crucial ? Sans doute contentez-vous ainsi le Gouvernement et une partie des associations, mais êtes-vous sûr que vous rendiez un service aux volontaires ?

Le projet, dans sa version actuelle, prévoit bien sûr que les associations devront apporter un appui à leur réinsertion professionnelle. Mais quand ? Comment ? Dans quelles conditions ? Avec quels moyens financiers ? En recourant à quelles structures ? Rien n'est dit à ce sujet et ce n'est certainement pas avec un principe aussi général et inapplicable que l'on s'attaquera à un problème que rencontrent quotidiennement les volontaires à leur retour.

Certes, inscrire dans le projet de loi ce besoin d'aide à la réinsertion, c'est déjà reconnaître sa difficulté. Mais quel est l'intérêt de le reconnaître si l'on s'en tient, pour y remédier, à de vagues préceptes ?

Nous savons bien que seules les plus grandes associations auront l'assise technique et financière suffisante pour aider concrètement à la réinsertion. Non que les plus petites ne le souhaitent pas, bien au contraire. Mais comment le pourraient-elles, alors que, déjà, comme je le disais à l'instant, beaucoup d'entre elles auront tout juste de quoi assurer la mission elle-même jusqu'à son terme ?

La conséquence sera que les volontaires s'orienteront en priorité vers les « majors », sachant que leurs conditions de retour pourront être meilleures... éventuellement.

Les études démontrent les difficultés de réinsertion au-delà de trois ans et le caractère pénalisant, dans le parcours professionnel, des trop longues missions.

Certes, je suis conscient que ce point est controversé, que les associations sont divisées et que l'évocation du salariat au-delà de trois ans paraît ouvrir sur l'inconnu - même si les pays anglo-saxons ont depuis longtemps franchi le cap.

Il ne s'agit pas de prendre parti pour telle ou telle association ou pour telle ou telle organisation. Je leur laisse le soin de régler leurs différends. Mais, en tant que parlementaire saisi d'un projet de loi qui a pour objectif de renforcer le volontariat, je ne peux me résoudre à ce qu'une loi feigne de ne pas voir la réalité.

Or la réalité, c'est la méfiance des employeurs devant dès parcours atypiques, c'est l'impossibilité de mettre en valeur les expériences acquises et c'est l'obligation de demander le RMI, car, sans emploi et sans accès aux ASSEDIC, pas de ressources, pas de toit.

Nous sommes ici pour donner au volontaire la possibilité de réaliser une expérience formidable, mais qui ne doit pas se solder pour lui par une punition telle que la précarité.

Encore une fois, je répète qu'il ne s'agit pas de corseter les associations ni de restreindre leur marge d'action, et encore moins d'empêcher les volontaires de réaliser la mission qu'ils souhaitent.

Il s'agit simplement de ne pas créer de rupture inutile entre la réalité économique et sociale du pays et le volontaire, et de prévenir les dangers d'un marché du travail qui est déjà difficile pour ceux qui ne partent pas et qui vous exclut totalement lorsque vous l'avez quitté.

Nous aurons à discuter de nouveau cet amendement au cours du débat. J'en appelle donc à votre sagesse, monsieur le rapporteur, pour soutenir à nouveau devant cette assemblée la position que vous aviez vous-même défendue il y a quelques mois.

Mes chers collègues, l'enjeu du volontariat va bien au-delà de l'organisation, de l'accès ou du déroulement des missions de solidarité. La discussion de ce texte a permis de mettre en avant des aspects du volontariat qui étaient, pour beaucoup, méconnus. Je pense notamment aux difficultés de ceux qui ont l'expérience, qui ont été volontaires et qui sont le mieux à même de nous dire où notre action doit se diriger. Certains font du volontariat un véritable choix de vie. Mais beaucoup ne le perçoivent que comme une parenthèse, une pause dans un parcours, une expérience.

Ces expériences, nous devons sans hésitation les encourager. Mais, parce que nous sommes également conscients des difficultés qu'elles peuvent impliquer, l'honnêteté vis-à-vis des volontaires implique que nous sachions dès aujourd'hui les prévenir.

Aussi imparfait que ce texte puisse être, j'espère que la discussion qui s'engage permettra de lui apporter l'ambition et la vision qui lui manquent.

M. le président. La parole est à M. Bruno Bourg-Broc.

M. Bruno Bourg-Broc. Dans le monde, de nombreux pays, de nombreuses régions, de nombreux peuples vivent des situations de misère intolérables, contre lesquelles nous devons avoir à cœur d'être sans cesse mobilisés. Il s'agit de pays que nous connaissons tous, qu'ils soient africains, asiatiques ou latino-américains, où, jour après jour, des centaines de millions de personnes tentent de survivre à leur quotidien.

Bien évidemment loin de ce que certains dénoncent comme un ethnocentrisme européen, qui, pour ses pourfendeurs, serait par définition égoïste, nous ne restons pas aveugles ni insensibles au monde qui nous entoure, et chacun, à notre niveau, nous agissons.

C'est pourquoi les parlementaires ont aujourd'hui le devoir d'encourager ceux, hommes ou femmes, jeunes ou moins jeunes, qui souhaitent volontairement venir en aide aux plus démunis et aux victimes de catastrophes naturelles ou de conflits armés, et participer ainsi au développement.

Indéniablement, la solidarité internationale fait partie de la tradition française et de la culture de nos concitoyens. Si nous en voulons une preuve supplémentaire, il suffit de mesurer l'élan de générosité des Français, formidable et inégalé, à la suite du raz-de-marée dévastateur qui a ravagé les côtes de l'Asie du Sud-Est en ôtant la vie à près de 300 000 personnes. Jamais, de l'avis de toutes les ONG, les Français ne s'étaient à ce point mobilisés pour une cause qui, pourtant, ne les touche qu'indirectement.

Nous devons en être fiers et nous montrer à la hauteur de la générosité du peuple français et de son altruisme.

Dans ce contexte si singulier, le texte que nous examinons aujourd'hui en seconde lecture prend une dimension particulièrement symbolique.

Nous devons en effet faciliter l'engagement volontaire international en lui donnant un cadre juridique efficace et solide. C'est ce qu'envisage ce projet de loi dont, en partie grâce au travail effectué en amont par votre prédécesseur, monsieur le ministre, vous allez permettre aujourd'hui l'adoption.

C'est un texte utile, indispensable et attendu, qui répond en grande partie aux attentes exprimées par les ONG.

Il a le grand mérite de rassembler et de renforcer des dispositifs épars, tout en comblant les lacunes du précédent système.

En effet, il n'est plus possible que le volontariat international associatif continue d'être régi par le décret de 1995, qui ne concerne qu'une partie des volontaires, uniquement pour des missions d'au moins un an, et qui ne permet pas de définir correctement les droits et les obligations de l'association et du volontaire.

Ce projet de loi, qui a fait l'objet, lors de son élaboration, d'une concertation large, ouverte et approfondie avec les associations concernées, crée un nouveau contrat, qui corrige ces inconvénients. Il organise une collaboration désintéressée entre une association agréée, gage essentiel de sécurité, et une personne majeure, pour l'accomplissement d'une mission d'intérêt général à l'étranger dans les domaines de la coopération au développement et de l'action humanitaire.

Ce texte comprend de nombreuses avancées qui profiteront aux volontaires, tout en les responsabilisant. Les orientations choisies me paraissent donc aller dans le bon sens.

Tout d'abord, la limitation de la durée du contrat des volontaires à trois ans, que nous avions votée en première lecture, répondait mal, apparemment, aux besoins exprimés par les associations. La rédaction retenue par le Sénat autorise plus de souplesse, puisque l'article 4 dispose désormais qu'un volontaire pourra enchaîner les missions de volontariat pour une durée totale de six ans. Il est évident que les associations humanitaires ont besoin d'engagement de longue durée. Cette disposition va donc dans le bon sens.

Il en est de même pour les mesures tendant à assurer une formation aux volontaires. La formation professionnelle est un objectif du Gouvernement et cette disposition essentielle contribuera à améliorer l'employabilité des volontaires à l'issue de leur engagement.

Ainsi, le volontaire s'engage sur la base de dispositions légales qui lui garantissent le sérieux et l'utilité d'une mission d'intérêt général, ainsi qu'une réinsertion accompagnée d'une formation préalable.

Ce texte prévoit également, dans son article 5, une affiliation des volontaires et de leurs ayants droit à la Caisse des Français de l'étranger. La protection sociale des volontaires est assurée, dans le dispositif actuel, par cette même caisse, qui présente l'avantage d'assurer la consolidation des droits avec le régime général. Ce dispositif, qui a fait la preuve de son efficacité et de sa capacité à apporter de véritables garanties, renforcera l'attractivité du volontariat.

Par ailleurs, je ne peux que me féliciter de la volonté du Gouvernement de se rallier à la position exprimée par l'Assemblée nationale sur le délai de transition de trois mois entre la publication de la loi et son entrée en vigueur. Ce délai permettra au Gouvernement de définir ses modalités d'application et de procéder à l'agrément des associations le plus rapidement possible. Il est cependant indispensable que celles-ci soient agréées à ce jour et que les volontaires ayant un contrat en cours soient pleinement informés des conséquences de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi et des démarches qu'ils doivent entreprendre pour s'y adapter.

Enfin, je souhaite attirer l'attention de tous sur le fait que la contribution financière de l'État à ce nouveau dispositif ne sera fixée que dans le futur décret d'application. Or les associations craignent, à juste titre, que l'augmentation de l'enveloppe n'évolue pas au même rythme que le nombre de volontaires. À cet égard, je rappelle que le Président de la République a inscrit son action internationale sous le signe d'une France attachée au dialogue entre les nations, un dialogue respecté et respectueux, qui doit permettre l'émergence d'un monde pacifié et multipolaire et assurer une mondialisation maîtrisée et humanisée.

Au service de cette belle et grande ambition, le Gouvernement a engagé depuis bientôt trois ans une action déterminée en faveur de la coopération et du développement en mettant des moyens au service de cette ambition. Il ne faudra donc pas manquer le rendez-vous du financement, monsieur le ministre, et je me permets d'insister sur ce point.

Le projet de loi met en place un dispositif à la hauteur de la générosité des volontaires. Il permettra à ces ambassadeurs de la solidarité française, à ces porte-parole de la générosité hexagonale de participer au rayonnement de la France à l'étranger et à la défense de la francophonie, à laquelle je vous sais attaché, monsieur le ministre. Ce texte est tout à l'honneur de la France, il est tout à votre honneur, et le groupe UMP le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Merci, monsieur le député.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je concentrerai mon intervention sur les moyens financiers mis à la disposition du volontariat international par l'État et sur la question des retraites des anciens volontaires internationaux, qui n'a guère été évoquée lors des débats à l'Assemblée.

En 1970, les Nations Unies avaient fixé à 0,7 % du PNB le montant de l'aide publique au développement. Cet objectif a été réaffirmé par la déclaration de l'assemblée générale des Nations Unies de septembre 2000, mais la France, comme beaucoup d'autres pays, ne respecte pas cet engagement. Seuls cinq pays riches ont atteint ce taux : le Danemark, la Norvège, les Pays-Bas, la Suède et, récemment, le Luxembourg.

Le sénateur Jean-Marie Poirier, dans son rapport n° 245 du 31 mars 2004, et la sénatrice Monique Cérisier-ben Guiga ont rappelé que le budget consacré au volontariat sur les crédits du ministère des affaires étrangères est resté inchangé depuis plusieurs années. M. Poirier a même rappelé que les crédits dédiés au volontariat ont été amputés de 10 % au mois de février 2003, puis affectés par le gel des crédits de report intervenu au mois de mai, ce qui a conduit à réduire la commande adressée au FONJEP et à placer certaines associations, grandes ou modestes, dans des situations particulièrement difficiles.

Or, si l'on veut promouvoir le volontariat de solidarité internationale, il faudra consentir un réel effort budgétaire. J'ajoute que la création d'un véritable statut produira un effet d'aubaine et ne manquera pas d'attirer bon nombre de nouveaux volontaires, dont il faudra garantir les conditions de prise en charge. Si l'on ne veut pas se contenter de grandes idées sur l'importance de l'aide accordée par les pays du Nord à ceux du Sud, il faut, monsieur le ministre, engager les moyens financiers nécessaires. Il s'agit de l'une des conditions essentielles de cette réforme.

Par ailleurs, les personnes qui ont été volontaires internationaux avant la création du statut de 1986 s'aperçoivent, à l'âge de leur départ à la retraite, que leurs années de volontariat n'ont pas donné lieu à cotisations à une caisse de retraite. Selon la délégation catholique pour la coopération, sont concernés les coopérants ayant effectué des périodes complémentaires de six à huit mois après leur temps de service national, afin de mener à bien leur mission, par exemple pour achever l'année scolaire en cours - ils étaient alors bénévoles et ne bénéficiaient pas d'une couverture retraite -, de leurs épouses, non-cotisantes pendant vingt-quatre mois, et de certains volontaires qui, sans relever des dispositifs du service national, ont également effectué vingt-quatre mois ou plus de bénévolat à plein-temps pour effectuer des missions dont l'État a reconnu qu'elles contribuaient à la politique française de coopération puisqu'il a donné un statut à leurs successeurs. Selon le comité de liaison des organisations non gouvernementales, 20 000 personnes sont concernées.

Or, d'un côté, le projet de loi précise que la protection sociale des volontaires comprend la couverture du risque vieillesse, mais, de l'autre, il ne prévoit rien pour les anciens volontaires dont les droits à pension ont été ignorés, alors même qu'ils ont œuvré pour l'intérêt général, la solidarité internationale et le rayonnement de la France. Ne peut-on pas envisager de réparer une telle injustice en validant les périodes de volontariat des anciens volontaires ? Parce qu'elles ont initié une démarche importante, ces personnes doivent être défendues et l'État doit répondre à leurs demandes.

En conclusion, ce projet de loi ne sera intéressant que s'il existe un réel engagement financier et si l'on prend en compte la situation de ceux qui ont inauguré le dispositif du volontariat. En l'état, le groupe socialiste ne peut l'approuver.

M. le président. La discussion générale est close.

Discussion des articles

M. le président. J'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Article 2

M. le président. L'article 2 ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 2 est adopté.)

Article 4

M. le président. Sur l'article 4, je suis saisi d'un amendement n° 2.

La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour soutenir cet amendement.

M. Jean-Paul Bacquet. Cet amendement tend à substituer à la dernière phrase du premier alinéa de l'article 4 les deux phrases suivantes : « La durée cumulée des missions accomplies par un volontaire, de façon continue ou discontinue, pour le compte d'une ou plusieurs associations ne peut excéder trois ans. En cas de dépassement de cette durée, les dispositions de l'article L. 122-3-10 et du deuxième alinéa de l'article L. 122-3-13 du code du travail sont applicables. »

Cet amendement répond à la multiplicité des cas existant dans le monde du volontariat. Aux différents types de mission - urgence, développement - correspondent des durées différentes. En outre, la multiplication des missions tend à favoriser la précarisation des volontaires et freine toute possibilité de s'engager de manière professionnelle dans ce type d'activités, comme cela est déjà pratiqué dans les pays anglo-saxons notamment. Encadrer de manière stricte la durée des missions et préciser le temps au-delà duquel celles-ci s'apparentent à un vrai emploi permet de développer des missions de solidarité internationale longues, tout en empêchant que ce type de contrats enferme dans une situation précaire ceux qui souhaitent en faire leur profession. Enfin, la durée de trois ans répond aux conditions fixées par l'article 3 en matière de validation des acquis.

Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, M. le rapporteur s'était fait le défenseur, en première lecture, de l'article tel qu'il avait été voté par l'Assemblée. Entre-temps, le Sénat est revenu sur cette disposition. Or M. Godfrain écrit, à la page 8 de son rapport, que « le dispositif adopté par le Sénat a le mérite de la souplesse, puisqu'il permet aux volontaires d'effectuer des missions tout au long de leur vie active et pendant leur retraite dans la seule limite d'une durée cumulée de six ans ». Néanmoins, il relève également que « la durée cumulée des missions de volontariat risque pour sa part de poser des problèmes en cas de contentieux » et qu'« une durée de volontariat trop longue peut poser des problèmes de réinsertion pour le volontaire ».

Incontestablement, il faut revenir au texte adopté par l'Assemblée en première lecture.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Monsieur Bacquet, vous avez déclaré, au début de votre intervention lors de la discussion générale, que l'actualité commandait d'agir dans l'urgence et que ce texte arrivait à point, compte tenu de ce qui vient de se passer en Extrême-Orient. Si ce texte est voté en l'état, il entrera en vigueur dans trois mois - M. le ministre s'y est engagé. En revanche, si nous adoptons des dispositions contraires à celles que le Sénat propose, son application sera repoussée à une date ultérieure, que j'ignore.

M. Jean-Paul Bacquet. Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation !

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Par ailleurs, je ne pense pas que, comme vous l'avez dit, le volontariat international soit une pause dans une carrière : selon moi, il permet plutôt d'avoir le pied à l'étrier. On ne s'engage pas dans ce type de mission pour aller soigner son spleen au soleil lorsque l'on rencontre un problème au cours de sa vie professionnelle. J'espère, en tout cas, que ce n'est pas ainsi que vous le concevez.

M. Jean-Paul Bacquet. Pardonnez-moi, monsieur le rapporteur, mais je suis médecin libéral et, lorsque je m'engage en tant que volontaire, je marque une pause dans mon activité, et ce n'est pas pour aller au soleil !

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Ce n'est pas une pause, disais-je, mais, au contraire, un acte philosophiquement fondamental.

Vous allez cependant avoir satisfaction sur le fond sans qu'il soit nécessaire d'adopter votre amendement. En effet, les réserves que vous exprimez trouvent une réponse dans la limite de deux ans s'appliquant à la durée de chaque contrat. En revanche, le fait que la durée cumulée des missions soit limitée à trois ans ou à six ans est sans rapport avec les préoccupations dont vous faites état.

Par ailleurs, je pense qu'il serait souhaitable que les missions de volontariat - je parle des missions actuelles, effectuées au titre du décret de 1995 - soient prises en compte pour le calcul de la durée cumulée des missions prévues à l'article 4 du projet, ce qui répondrait en grande partie à votre préoccupation.

Si les questions que vous soulevez sont tout à fait légitimes, je pense qu'une réponse pourra leur être apportée par une voie autre que celle d'un amendement qui aurait pour effet de retarder l'application du projet de loi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Le Gouvernement s'est déjà exprimé sur cette question, dont je m'étonne d'ailleurs qu'elle fasse l'objet d'une telle tension.

M. Jean-Paul Bacquet. Il n'y a pas de tension !

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. En effet, qui peut le plus peut le moins : lorsqu'on a l'autorisation de partir pour six ans au total, il est tout à fait possible de le faire pour trois ans seulement. Retenir une limite de trois ans impose une contrainte qui ne me paraît pas utile. Dans les faits, comme vous le savez, la grande majorité des volontaires n'effectuent pas de mission supérieure à trois ans. Mais pourquoi empêcher quelqu'un qui serait parti deux ans à la fin de ses études de partir de nouveau trois ans à un autre moment, en fin de carrière par exemple, voire en préretraite ?

C'est la raison pour laquelle, en accord avec le Sénat, nous avons rétabli le dispositif classique qui permet l'accomplissement de plusieurs missions à différentes étapes de la vie, ce qui serait pratiquement impossible avec une durée de trois ans.

Je crois qu'il faut arrêter de chipoter avec des amendements dont l'adoption ne ferait que retarder inutilement l'adoption de ce texte.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 1.

La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour le soutenir.

M. Jean-Paul Bacquet. Cet amendement vise à compléter l'article 4 par un alinéa ainsi rédigé : « Dans le deuxième alinéa de l'article L. 225-9 du code du travail, le nombre : "six" est remplacé par le nombre "douze". »

Il s'agit de favoriser chez les salariés le développement du congé de solidarité internationale et de permettre aux associations de pourvoir faire appel à des candidats volontaires, formés, motivés et insérés dans la vie active. Actuellement, la limite est de six mois.

L'article L. 225-9 du code du travail dispose que « le salarié a droit, sous réserve qu'il justifie d'une ancienneté dans l'entreprise d'au moins douze mois, consécutifs ou non, à un congé de solidarité internationale pour participer à une mission hors de France pour le compte d'une association à objet humanitaire déclarée en application de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ».

Il précise également que « la durée de ce congé, pendant lequel le contrat de travail est suspendu, et la durée cumulée de plusieurs congés de solidarité internationale pris de façon continue ne peuvent excéder six mois ».

Si des contrats de volontariat trop longs peuvent poser d'importants problèmes en termes de réinsertion et pénaliser ceux qui ont fait une pause - je maintiens ce terme, monsieur le rapporteur - non pas pour aller se dorer au soleil, mais en termes de carrière professionnelle, à l'inverse il semble opportun de permettre à certains salariés, installés dans la vie professionnelle et bénéficiant éventuellement de la garantie de l'emploi, de partir plus longtemps.

Cet amendement me semble donc constituer un juste équilibre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Monsieur Bacquet, je constate que le texte que vous nous exposez avec enthousiasme relève de la compétence de la commission des affaires sociales, puisqu'il s'agit de modifier le code du travail. Je propose pour ma part que les dispositions que vous suggérez soient prochainement intégrées à un DDOS, c'est-à-dire un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social. Toutefois, cela ne pourrait se faire qu'après concertation avec les partenaires sociaux, dont vous n'avez pas fait mention. Je pense que le ministre va pouvoir nous répondre sur ce point.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Monsieur le député, je reconnais bien volontiers que votre amendement mérite débat et il me semblerait tout à fait justifié que ses dispositions soient examinées en une autre occasion, éventuellement lors d'une réflexion sur le droit du travail.

En ce qui concerne le texte dont nous débattons actuellement, je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'y faire figurer l'obligation pour des salariés de s'absenter douze mois - car votre proposition revient à cela, somme toute. Des absences trop longues sont, qu'on le veuille ou non, source de difficultés de réinsertion au retour. D'ailleurs, aujourd'hui, les congés utilisés par les salariés partant en mission humanitaire sont le plus souvent courts, comme on l'a vu après la catastrophe d'Asie du Sud-Est, où beaucoup ne sont partis que pour trois semaines ou un mois. On n'imagine pas d'imposer une durée de douze mois à ces volontaires. Enfin, les personnes souhaitant partir douze mois peuvent parfaitement être salariées d'une ONG. Il me semble par conséquent que cet amendement n'a pas sa place dans un texte qui traite du volontariat de solidarité internationale, et non pas des salariés des ONG.

Pour toutes ces raisons, je souhaite que cet amendement ne soit pas adopté, en dépit du bien-fondé de la réflexion qui a conduit à le proposer.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Si nous ne partageons pas tout à fait l'analyse de M. le ministre, M. Bacquet et moi sommes d'accord avec la proposition du rapporteur consistant à ce que cet amendement contenant des dispositions novatrices pour les entreprises et les salariés soit repris dans un autre contexte, et nous sommes disposés à travailler en ce sens.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Je ne suis pas certain que la mention d'une mission de volontariat international dans un curriculum vitae soit si néfaste que cela au candidat à l'embauche.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Tout à fait !

M. Jean-Paul Bacquet. Cela dépend des entreprises !

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Cette mention témoigne d'une volonté de se mettre au service d'autrui, à laquelle bien des chefs d'entreprise peuvent être sensibles.

M. le président. L'amendement n° 1 est-il maintenu ?

Mme Paulette Guinchard-Kunstler et M. Jean-Paul Bacquet. Non !

M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.

Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 5

M. le président. Sur l'article 5, je suis saisi d'un amendement n° 3.

La parole est Mme Paulette Guinchard-Kunstler, pour soutenir cet amendement.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Je considère avoir défendu cet amendement lors de la discussion générale, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Godfrain, rapporteur. Je suggère d'aborder cette question dans l'esprit de consensus qui nous a animés jusqu'à présent. Puisque cet amendement traduit le souhait de recevoir des informations, en particulier de la part du ministre, celui-ci va certainement pouvoir vous donner satisfaction, madame Guinchard-Kunstler.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement ?

M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie. Nous aussi sommes attachés à la plus grande transparence. Je m'engage à ce que le ministère transmette à la représentation nationale toutes les informations dont elle pourrait avoir besoin. En revanche, il ne me paraît pas nécessaire que la loi exige expressément la présentation d'un rapport par une commission. En tout état de cause, le sujet dont il est question suppose une concertation constante. On n'imagine pas d'organiser un volontariat de solidarité internationale impliquant vingt-deux associations tout en pratiquant la rétention d'information.

M. le président. Cet amendement est-il maintenu ?

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Compte tenu de l'engagement du ministre, nous le retirons.

M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.

Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Articles 7 et 8 bis

M. le président. Les articles 7 et 8 bis ne font l'objet d'aucun amendement.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

(Les articles 7 et 8 bis, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Explication de vote

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour une explication de vote, au nom du groupe socialiste.

M. Jean-Paul Bacquet. Nous avions essayé de tout faire en première lecture pour pouvoir voter ce texte. Arrivant ici ce matin, nous pensions voter contre. Finalement, nous nous abstiendrons, en grande partie en raison de la force de conviction du rapporteur, tant en commission qu'en séance,...

Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Tout à fait !

M. Jean-Paul Bacquet. ...qui contraste d'ailleurs singulièrement avec les hésitations du ministre. Le rapporteur a su nous persuader qu'il sera possible d'avancer dans un autre cadre sur toutes les questions que nous avons soulevées, même si nous conservons quelques doutes sur le plan financier. Je sais que vous partagez d'ailleurs cette réserve, monsieur le rapporteur, car vous faisiez mention, dans le remarquable rapport que vous avez rendu à la commission des affaires étrangères, des insuffisances budgétaires du ministère de la coopération.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

    10

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 1994, portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés :

Rapport, n° 1999, de M. Christian Kert, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Éventuellement, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures quarante-cinq.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot