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Séance du mercredi 13 avril 2005

204e séance de la session ordinaire 2004-2005


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

    1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

MOUVEMENT DES LYCÉENS

M. le président. La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Frédéric Dutoit. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Monsieur le ministre, dans notre pays, les jeunes sont particulièrement touchés par les divers fléaux qui frappent notre société : chômage accru, difficulté à se loger, stigmatisation à l'embauche pour ceux qui sont issus des quartiers défavorisés, discriminations en tout genre.

Dans un tel contexte, la responsabilité des politiques est de proposer un projet d'avenir pour l'école, facteur indispensable pour l'épanouissement des jeunes dans leur vie sociale et pour leur vie future.

Or les jeunes, ces forces vives de la nation, connaissent désillusion sur désillusion. Ainsi la Constitution européenne leur promet un avenir sombre, celui d'une société régulée par la loi de la jungle (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) que les tenants du oui au référendum nomment pudiquement « la concurrence libre et non faussée ».

Quant à votre projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école, il consacre l'abandon de l'idéal républicain qu'est l'égalité des chances pour tous les jeunes.

Aussi les lycéens sont-ils aujourd'hui en proie au désespoir. Pour autant, certains débordements, commis par une infime minorité, sont inexcusables, et nous les condamnons. Nous appelons les lycéens à ne pas céder aux provocations, à aucune provocation. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Ferrand. C'est vous qui êtes provocateur !

M. Frédéric Dutoit. Quant au Gouvernement, il ne peut se contenter de répondre par une approche sécuritaire, qui n'a pas de sens, ni à nos yeux, ni à ceux des lycéens.

Monsieur le ministre, hier vous avez accepté la discussion, sans toutefois répondre aux questions posées par les lycéens. Aujourd'hui, nous vous demandons solennellement si vous aurez la volonté de poursuivre le dialogue amorcé, de reconstruire un système éducatif juste et cohérent, et de revenir sur une réforme et un budget que l'ensemble de notre pays rejette. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, les lycéens ont regagné leurs lycées, où ils travaillent et préparent leur baccalauréat. (« Très bien ! » et vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Certains d'entre eux, c'est exact, ont manifesté contre la loi que le Parlement a votée et qui est désormais la loi de la République. S'ils n'ont pas fait reculer le Gouvernement, c'est qu'ils n'ont jamais été majoritaires, ni dans les lycées, ni dans l'opinion publique. Et s'ils n'ont jamais été majoritaires, c'est parce que leur mouvement est né d'un mensonge, d'une caricature, diffusée par certaines organisations, de la loi que le Parlement a votée. Or cette loi répond justement à vos préoccupations, monsieur le député !

Fixer des priorités éducatives, s'assurer que tous les jeunes Français sans exception maîtrisent les bases de la culture générale de notre pays, mettre en place un système de soutien à raison de trois heures par semaine pour les élèves en difficulté - ce que vous n'avez jamais fait - tout cela, monsieur le député, c'est lutter contre les inégalités ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Le Gouvernement est prêt à aller plus loin. Comme je l'ai indiqué aux organisations lycéennes, nous pourrons, dans l'esprit de la loi d'orientation, élargir le dispositif de soutien aux lycées, avec la mise en place d'un système de tutorat.

M. Henri Emmanuelli. La matraque !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Mais une chose est sûre, monsieur le député : jamais je n'accepterai qu'une infime minorité de lycéens - si ce sont effectivement des lycéens - empêche les établissements scolaires de travailler, agresse les personnels d'encadrement et compromette les examens. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

LUTTE CONTRE L'IMMIGRATION CLANDESTINE

M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

M. Pierre Cardo. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, depuis trois ans, notre majorité, sous l'impulsion du Premier ministre, a fait de la maîtrise des flux migratoires et de la lutte contre l'immigration clandestine un axe fort de sa politique de sécurité intérieure. Plusieurs textes ont été adoptés en matière de droit d'asile, tant à l'initiative de votre prédécesseur au ministère de l'intérieur qu'à la vôtre. Cette politique, pour être pleinement efficace, nécessite que des actions nouvelles soient menées, en France comme en Europe.

Cependant, dans un monde en pleine mutation, il ne peut exister dans un domaine aussi complexe de politique qui ne prenne en compte les pressions migratoires provoquées par la misère ou les conflits, les contraintes liées à l'entrée de nouveaux pays au sein de l'Union et la volonté de certains autres d'obtenir des statuts privilégiés.

Dans ce contexte, si la France se doit, au sein de l'espace européen, de rester fidèle à sa conception des droits de l'homme, elle ne peut pour autant ignorer l'augmentation des fraudes à l'identité, les mariages arrangés ou forcés, les différents trafics de personnes qui encouragent l'exploitation de l'homme par l'homme.

Face à cette double exigence, ma question est la suivante, monsieur le ministre : dans la perspective de la consultation sur le traité constitutionnel, pouvez-vous éclairer l'Assemblée et nos concitoyens sur l'impact qu'aura la Constitution sur ce phénomène et sur les mesures qui seront adoptées pour lutter contre l'immigration clandestine ? Je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

M. Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, la lutte contre l'immigration irrégulière est un enjeu national qui implique à la fois détermination et fermeté. C'est le sens des propositions que je ferai dans quelques jours au Président de la République et au Premier ministre.

Dans cette lutte, l'Europe est une nécessité et elle est une chance. C'est une chance pour la mise en œuvre d'une grande politique de coopération avec les pays d'origine de l'immigration ; c'est une chance pour la politique de coopération aux frontières de l'Europe. Dans un pays comme la Roumanie, par exemple, nous avons envoyé des officiers de liaison qui travaillent aux côtés d'officiers de liaison allemands, autrichiens, et demain espagnols. Dès le 1er mai prochain, nous irons encore plus loin grâce à l'agence européenne des frontières. Voilà pour la coopération aux frontières extérieures de l'Europe.

Quant à la coopération aux frontières intérieures, elle dispose de deux outils essentiels : d'une part, les patrouilles et les équipes communes d'enquête ; d'autre part, les conseils de coopération policiers et douaniers. Ces outils nous permettent d'intensifier notre coopération avec l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et la Belgique. Cette coopération a porté ses fruits dans la lutte contre le terrorisme, notamment l'ETA.

L'enjeu du référendum est très important (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains), car si nous voulons aller plus loin, les projets européens en matière de lutte contre l'immigration irrégulière doivent pouvoir être adoptés, non plus à l'unanimité, mais à la majorité qualifiée. C'est ce que nous offre le projet de traité constitutionnel. En répondant oui, nous nous donnerons les moyens d'aller plus loin dans la lutte contre l'immigration irrégulière. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

ÉDUCATION NATIONALE

M. le président. La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste.

M. Yves Durand. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Enfin, monsieur le ministre, vous avez reçu les lycéens ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il était plus que temps ! Mais pourquoi avez-vous tant tardé à organiser cette rencontre que vous demandaient toutes les organisations syndicales depuis plusieurs semaines ? Cela aurait sans doute évité les actes de violence qui ont été commis contre les lycéens dans de nombreuses villes de France, comme à Paris ou à Lille, la semaine dernière. Cette violence est grave, et il faudra bien expliquer son origine et le déroulement des faits. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Hier soir, vous avez sorti de votre chapeau, monsieur le ministre, des milliers de postes d'assistant pédagogique - puisque vous les appelez ainsi - alors que vous avez supprimé vous-même plus de 5 000 postes pour la rentrée prochaine et sacrifié les maîtres d'internat et les surveillants qui, eux, jouaient un rôle d'assistant pédagogique dans les lycées et les collèges.

Mme Sylvia Bassot. Provocateur !

M. Yves Durand. Certains membres de votre administration, monsieur le ministre, considèrent que cette rentrée sera catastrophique, comme la rectrice de l'académie de Toulouse qui a préféré démissionner de ses fonctions parce qu'elle considère ne pas avoir les moyens de faire une rentrée décente dans son académie. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est vrai !

M. Yves Durand. Ces assistants pédagogiques sont-ils un nouvel effet d'annonce, monsieur le ministre, comme la programmation virtuelle de votre loi d'orientation qui ne sera appliquée qu'en 2006 ? Le seul moyen pour vous d'être crédible serait de traduire cette annonce par un véritable collectif budgétaire visant à rétablir les moyens que vous avez vous-même supprimés dans le budget pour 2005. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Par ailleurs, quel sera leur statut et où recruterez-vous ces personnels que vous avez soudainement promis d'embaucher hier soir ?

Mais surtout, monsieur le ministre, et sur ce point nous attendons une réponse claire de votre part, sur quels crédits allez-vous financer les postes annoncés, alors que vous avez déjà gelé 300 millions d'euros de crédits sur un budget 2005 déjà en baisse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, à vos trois questions je ferai trois réponses.

Tout d'abord, ma porte a toujours été ouverte aux lycéens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ils le savent et je l'ai répété ici à maintes reprises. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine David. Et les CRS ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Je les ai d'ailleurs rencontrés plusieurs fois. Il est exact que, depuis quatre semaines, nous ne nous étions pas vus, mais c'est parce que les organisations syndicales ne voulaient pas me rencontrer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ensuite, la rentrée de septembre prochain ne peut pas être catastrophique, monsieur le député, puisque Jack Lang avait déjà annoncé que la précédente avait été la pire depuis la Libération ! Je ne vois donc pas comment nous pourrions faire plus mal cette année ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Manuel Valls. Si, on peut toujours faire pire !

M. Alain Néri. La prochaine !

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. La vérité, c'est qu'à force de surenchères, de caricatures, vous contribuez à déresponsabiliser un système éducatif qui, au contraire, a besoin de repères, de rigueur dans sa gestion et d'objectifs clairs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.) C'est ce que la loi d'orientation et de programmation met en place, ne vous en déplaise, parce qu'il faut bien mettre un terme aux carences et aux dérives que vous n'avez pas su corriger, malgré un accroissement considérable des moyens affectés à l'école. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quant aux assistants pédagogiques, monsieur le député, ils n'ont rien à voir avec les emplois-jeunes que vous aviez imaginés. Ces postes seront proposés à des étudiants qui poursuivent leurs études en vue de devenir enseignants.

Mme Martine David. Que feront-ils ?

M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Nous leur confierons des tâches de tutorat et d'accompagnement des élèves en difficulté dans les établissements les plus difficiles de notre pays.

Enfin, monsieur le député, soyez rassuré : sur un budget de 57 milliards d'euros, qui représente 25 % des dépenses de l'État, nous trouverons bien le moyen de financer le dispositif des assistants pédagogiques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Mme Martine David. Ce n'est pas une réponse !

GÉNOCIDE ARMÉNIEN

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. François Rochebloine. Monsieur le garde des sceaux, à quelques jours du quatre-vingt-dixième anniversaire du génocide arménien, premier génocide du XXe siècle, il est juste de rappeler que la France a été le premier pays à le reconnaître officiellement par une loi, la loi du 29 janvier 2001.

Cette reconnaissance est une réponse à ceux qui justifiaient les déportations et l'extermination des minorités dans l'histoire. Chacun s'accorde à dire que l'œuvre de mémoire est indispensable, que le révisionnisme et le négationnisme n'ont plus leur place dans un État de droit.

Le droit pénal français s'est ainsi voulu protecteur de la mémoire, notamment depuis la loi de 1990. Malheureusement, de par sa rédaction, cette loi limite le champ d'application de l'interdiction aux seuls crimes contre l'humanité commis durant la seconde guerre mondiale.

Loin de vouloir remettre en cause la spécificité de ces crimes contre l'humanité, il conviendrait cependant de renforcer la cohérence des textes applicables, en élargissant le champ couvert par la loi de 1881 sur la presse.

En effet, la lutte contre le négationnisme doit être globale et identique envers tous les génocides et crimes commis contre l'humanité.

Partant de ce constat, nous sommes nombreux dans cette assemblée, et de toutes sensibilités, à avoir déposé une proposition de loi en ce sens. Des Arméniens à la Shoah, c'est finalement une même logique, voire une même idéologie, qui a conduit, tout au long du XXe siècle, à bafouer les droits fondamentaux, pour nous inviolables et inaliénables, de la personne humaine.

Je souhaiterais donc savoir, monsieur le garde des sceaux, si le Gouvernement envisage enfin d'adapter notre législation en ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État aux droits des victimes.

Mme Nicole Guedj, secrétaire d'État aux droits des victimes. Monsieur le député, vous l'avez souligné, le législateur français a souhaité, en 1990, réprimer le délit de négationnisme. Par cette loi, la France a voulu définir un cadre limitatif au délit de négation de crime contre l'humanité, et ce en se fondant sur l'article 6 du statut militaire international, annexé à l'accord de Londres du 8 mai 1945.

La question qui se pose est donc de savoir si, en France, nous tenons compte du génocide arménien aujourd'hui. C'est le cas ! (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n'est pas le cas !

Mme la secrétaire d'État aux droits des victimes. Comme vous le savez, par la loi du 29 janvier 2001, la France - et vous l'avez dit, elle a été la première - a reconnu publiquement la réalité du génocide arménien de 1915.

Il faut rappeler que, aujourd'hui, les textes punissent, répriment les délits, tels que celui d'apologie de crime contre l'humanité. Vous avez rappelé la loi du 29 juillet 1881, et elle s'applique effectivement de façon extrêmement sévère puisque, à la fois, des peines d'emprisonnement allant jusqu'à cinq ans et des amendes jusqu'à 45 000 euros sont régulièrement prononcées contre tous ceux qui s'autorisent des comportements tels que des jugements de valeur sur la réalité du génocide ou encore des tentatives de justification de ce génocide.

M. Jean-Pierre Brard. C'est ennuyeux pour le Premier ministre turc !

Mme la secrétaire d'État aux droits des victimes. Ce sont donc, en France, des délits et des crimes qui sont à la fois reconnus et sanctionnés. Le législateur l'a dit et le répète avec beaucoup de sévérité. Votre question me donne l'occasion aujourd'hui de dire toute ma solidarité et celle du gouvernement français envers nos compatriotes arméniens, mais au-delà envers tous les membres du peuple arménien. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

DROITS DES MALADES ET FIN DE VIE

M. le président. La parole est à M. Jean Leonetti, pour le groupe de l'UMP.

M. Jean Leonetti. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités, de la santé, de la famille.

Cette nuit, monsieur le ministre - et vous le savez, puisque vous y étiez -, le Sénat a adopté par un vote conforme la proposition de loi relative aux droits des malades et à la fin de vie. Cette loi est donc devenue de manière définitive la loi de la France, la loi de la République.

Je vous rappelle à tous, s'il en était besoin, que c'est l'Assemblée nationale qui a porté ce projet et qui l'a fait de manière unanime après un an de travail collectif pour trouver le point d'équilibre auquel nous sommes parvenus.

Cette loi donne plus de droits aux malades qui, désormais, peuvent refuser un traitement même si leur vie en dépend et, en même temps, exiger des soins palliatifs.

Cette loi donne plus de sécurité à l'ensemble du corps médical qui peut, désormais, fidèle à son éthique et dans le respect des bonnes pratiques, arrêter des traitements qui lui paraissent disproportionnés ou inutiles et qui maintiennent artificiellement des hommes et des femmes en survie, plutôt qu'en vie.

C'est une loi, c'est vrai, qui ne donne pas le droit de tuer, mais qui accepte la mort tout en respectant la vie.

C'est enfin une loi qui donne une part importante aux consciences et à la confiance. Aux consciences de chacun et à la confiance que chacun doit avoir dans l'autre. Elle permet ainsi de traiter de manière spécifique chaque cas complexe et difficile qu'est la mort de chacun d'entre nous.

Dans cette société qui nie la mort et où, souvent, le sujet est considéré comme tabou, je me permets de remercier collectivement l'ensemble des députés, sur tous les bancs, qui, dépassant les clivages politiques, qui sont souvent des terres d'affrontement stériles, ont contribué de manière positive à ce travail et ont réussi à trouver une voie originale et française sur ce sujet.

Mes remerciements vont aussi à vous-même, monsieur le ministre, ainsi qu'à M. le Premier ministre, pour avoir fait vôtre cette loi en la défendant... (« C'est quoi la question ? » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. Monsieur Leonetti, pouvez-vous poser votre question ?

M. Jean Leonetti. ...avec fermeté et pédagogie, cette nuit au Sénat - et je peux en témoigner.

Cette loi est attendue par le pays, mais elle est aussi attendue de manière universelle par l'Europe. À la fin du mois, le Conseil de l'Europe doit examiner un projet de résolution sur l'accompagnement des malades en fin de vie.

Monsieur le ministre, comment pouvez-vous aider l'ensemble des députés pour que cette loi française devienne une loi européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Monsieur Leonetti, vous l'avez rappelé, cette nuit, le Sénat a voté conforme le texte que vous avez adopté à l'unanimité il y a quelques mois. Il s'agit d'une avancée essentielle pour les malades en fin de vie.

Je tiens à remercier M. Gaëtan Gorce, Mme Nadine Morano et vous-même, monsieur Leonetti, d'avoir été au départ de ce texte, d'y avoir travaillé pendant plus d'un an avec la commission que vous avez présidée.

Je voudrais également remercier M. Nicolas About et M. Gérard Dériot qui, durant la nuit, au Sénat, ont su tout faire pour que ce vote conforme puisse avoir lieu, seule solution pour réussir à trouver un texte d'équilibre.

Je le sais : ce texte ne va pas suffisamment loin pour certains, il va trop loin pour d'autres. Mais je sais qu'il est un texte d'équilibre qui permettra à un malade conscient de choisir entre une chimiothérapie - peut-être de trop - et l'installation d'une pompe à morphine permettant la mort dans une dignité retrouvée. Et cela, nous le devons au Parlement.

Au Gouvernement d'accompagner cette loi de deux manières.

D'abord, en élaborant un plan de soins palliatifs. Le Premier ministre a décidé un plan sans précédent de 65 millions d'euros, avec des unités mobiles de soins palliatifs, pour permettre la mort dans la dignité, à domicile. Mais je ne veux pas d'unités spécifiques, de lieux où se trouveraient concentrées des personnes en fin de vie, car cela ne voudrait absolument rien dire. Au contraire, étendons aux maisons de retraite médicalisées et aux hôpitaux cette culture de soins palliatifs, en dispensant la formation nécessaire aux médecins.

Ensuite, oui, je m'engage devant vous à proposer à mes homologues européens cette vision française de la fin de vie. Elle est, tout simplement, une garantie de la dignité de toutes les personnes qui sont en fin de vie, qui n'en peuvent plus et pour lesquelles les médecins, dans le respect du principe de collégialité, ont décidé que c'est terminé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

VÉHICULES DU FUTUR

M. le président. La parole est à M. Claude Gatignol, pour le groupe de l'UMP.

M. Claude Gatignol. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer, le Gouvernement se préoccupe, à juste titre, de toutes les mesures favorables à l'environnement, et le Parlement y est également très attentif.

Nous savons que le secteur des transports, qu'il s'agisse des véhicules légers ou des poids lourds, contribue fortement à l'émission de gaz à effet de serre, tout particulièrement le gaz carbonique, à hauteur de 35 % environ dans notre pays. Par ailleurs, ce transport est entièrement dépendant des produits pétroliers et le cours actuel du baril ne peut que nous faire réfléchir à des solutions de remplacement.

Il y a donc à la fois une question d'économies d'énergie et de carburants de substitution, mais aussi une question de santé publique et de responsabilité écologique vis-à-vis d'éventuelles variations climatiques.

Dans ce domaine, l'Europe s'engage dans un programme expérimental, le programme CUTE - « transport urbain propre en Europe » - qui propose de faire rouler des autobus à hydrogène dans diverses métropoles européennes. L'objectif est d'aller vers un développement du véhicule du futur, ce véhicule de demain que nous souhaitons plus économe, plus écologique et plus sûr. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Yves Cochet. Oh ! là là !

M. Claude Gatignol. L'office parlementaire des choix scientifiques et technologiques est d'ailleurs chargé d'un rapport sur ce sujet, qui sera rendu cet été. Mais nous savons que nos constructeurs automobiles font déjà des efforts importants, en liaison avec les chercheurs de l'Institut français du pétrole, pour obtenir des moteurs plus performants, plus efficaces et moins polluants.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur les actions et les projets de notre pays en la matière qui pourraient bénéficier des orientations européennes ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur Gatignol, avec le logement, le secteur des transports est, c'est vrai, le secteur le plus contributeur de gaz à effet de serre, hélas ! Jusqu'à présent, les réponses se faisaient souvent en termes de limitation, de bridage de la demande, en quelque sorte de perte de liberté. Pour notre part, nous pensons que le développement économique et la préservation de l'environnement sont conciliables : il est possible de garder sa liberté de déplacements à condition d'être raisonnable, de savoir évoluer et d'encourager d'autres types de motorisation.

Bien sûr, les motorisations ont fait des progrès considérables depuis quelque temps. Néanmoins, ce n'est pas suffisant car le pétrole est rare, se raréfie, devient de plus en plus cher et reste évidemment producteur de gaz à effet de serre.

Il y a des réponses à court terme : le tout électrique, les moteurs hybrides, les véhicules - une grande marque française vient de sortir un tel modèle - avec arrêt du moteur lorsqu'ils n'avancent pas, le biocarburant. Tout cela est très intéressant à court terme.

Nous pensons, nous, qu'à moyen et à long termes, il faut une véritable révolution en matière de motorisation pour se passer du pétrole. À cet égard, les expérimentations dans le domaine de la motorisation à hydrogène ou de la pile à combustible, par exemple, sont de vraies solutions, à condition de passer du stade expérimental au stade de la diffusion. Savez-vous, par exemple, qu'en Californie il existe d'ores et déjà une autoroute à hydrogène ?

Oui, nous avons le devoir, au ministère des transports, non seulement de sensibiliser les usagers, mais aussi d'encourager les constructeurs, français en particulier, à être des pionniers en ce domaine en transformant, le plus vite possible, ce qui est aujourd'hui expérimental en produits de grande diffusion. En tout cas, nous nous y employons. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

SITUATION FINANCIÈRE DES HÔPITAUX

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le ministre des solidarités, de la santé et de la famille, permettez-moi, en premier lieu, d'avoir une pensée pour les victimes du drame survenu hier soir à l'hôpital de Mont-de-Marsan.

Monsieur le ministre, tous les présidents de conseil d'administration des centres hospitaliers régionaux et universitaires constatent, comme moi, la dégradation continue de la situation budgétaire des hôpitaux. L'extension de la tarification à l'activité se fait dans la précipitation, sans aucune expérimentation.

Selon votre circulaire budgétaire du 3 mars dernier, la tarification à l'activité s'appliquera à 100 % en 2012, en totale contradiction avec vos engagements. Vous aviez en effet assuré qu'elle ne dépasserait pas le seuil de 50 %.

Il y a là, monsieur le ministre, un important risque de dérive. Il y a là un important risque de précarisation des ressources des établissements, alors que certains sont déjà confrontés à de dramatiques difficultés de trésorerie qui pourraient même compromettre, pour certains, leur capacité à payer les salaires des personnels au cours des prochaines semaines.

À ce jour, aucun hôpital n'a encore bouclé son budget pour 2005 : cela ne s'était jamais vu. De plus, la baisse des tarifs imposée aux hôpitaux publics atteint près de 3 %, alors que, dans le même temps, ceux des cliniques privées progressent de 1,4 %. Les efforts de redressement des hôpitaux publics, les contrats de retour à l'équilibre sont compromis. La parole de l'État est discréditée auprès des hospitaliers. C'est d'autant plus préoccupant que l'objectif national d'évolution des dépenses de santé a été fixé à un niveau très insuffisant, ce qui risque d'aggraver les reports de charges et de placer les hôpitaux dans une situation intenable. Le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie a été saisi.

Monsieur le ministre, la situation est critique. Elle risque de conduire à de brutales et inacceptables restrictions de l'offre de soins. Allez-vous, monsieur le ministre, proposer un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif, comme vient de le réclamer la fédération hospitalière de France dans un courrier que nous avons reçu il y a quelques jours ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Vous le savez aussi bien que moi, monsieur le député, il y a deux budgets hospitaliers : celui de l'investissement et celui du fonctionnement. Grâce au plan Hôpital 2007, le premier est désormais doté de 10 milliards d'euros, ce qui, en vingt ans, ne s'était jamais vu. D'ailleurs, si vous vous en étiez occupés avant, nous ne serions pas, aujourd'hui, obligés de rattraper le retard. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Alain Néri. C'est du vent, et ça ne fait même pas tourner les éoliennes !

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Quant au budget de fonctionnement pour 2005, il ne baissera pas et sera exécuté tel que nous l'avons décidé : nous avons même décidé, la semaine dernière, d'y ajouter 180 millions d'euros, ce qui permettra de donner à chaque établissement ce dont il a besoin.

Les récentes négociations salariales pour la fonction publique hospitalière, qu'a conduites M. Dutreil, ont débouché sur une augmentation de 1,8 %, qui s'ajoute à ce budget de fonctionnement.

Enfin, monsieur le député, vous êtes le seul en France à penser que la tarification à l'activité n'a pas fait l'objet d'expérimentations : il y en a eu dans cent établissements. J'ai dit qu'elle n'augmenterait pas de plus de 50 %, et ce sera le cas.

Enfin, si nous sommes aujourd'hui obligés d'augmenter les budgets de fonctionnement, c'est parce que nous n'avons pas encore fini de payer les 35 heures : ça, c'est vous qui en êtes responsables. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. − Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Albert Facon. Ils n'ont que ces mots-là à la bouche : les 35 heures !

PRIX DES FRUITS ET LÉGUMES

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Ferrand, pour le groupe de l'UMP.

Monsieur Ferrand, pour une fois, c'est moi qui vous donne la parole et non vous qui la prenez. (Sourires.)

M. Jean-Michel Ferrand. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.

Monsieur le ministre, dans leur grande sagesse, l'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté, lors de la discussion de la loi de développement des territoires ruraux, un amendement reprenant ma proposition de loi sur l'instauration d'un coefficient multiplicateur pour les fruits et légumes périssables en cas de crise. Cette mesure n'est pas un retour à un contrôle des prix, mais une moralisation des marges. Elle permettra de mieux payer les producteurs, de faire baisser les prix pour les consommateurs et, donc, de relancer la consommation en période difficile.

La profession ne peut se permettre de connaître une nouvelle saison catastrophique comme celle de 2004. Il convient donc de promulguer dans les meilleurs délais le décret d'application de ce dispositif, et de définir ses modalités d'application en concertation avec la production.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire quand le décret d'application sera promulgué, et si vous entendez en préciser le contenu en concertation avec les producteurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Vous voyez, monsieur Ferrand, comme il est agréable de parler quand personne ne le fait en même temps que vous. (Sourires.)

La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, j'ai plaisir à répondre à M. Ferrand, qui fait beaucoup pour le secteur économique majeur des fruits et légumes, dont il a pu me montrer récemment, dans sa circonscription, qu'il est grand créateur d'emplois et donc particulièrement important pour notre pays.

Mais ce secteur connaît des crises récurrentes, qu'il faut anticiper, prévenir et gérer. Dans le cadre de la loi sur les territoires ruraux, quatre importants amendements d'origine parlementaire ont été adoptés : la première mesure, sur l'encadrement de l'annonce de prix, est déjà applicable ; la deuxième le sera dès qu'aura été publié, dans quelques jours, un arrêté sur la définition de la crise ; le troisième arrêté, sur l'encadrement des remises, rabais et ristournes, n'attend que le contreseing de plusieurs de mes collègues ; le quatrième, qui concerne les prix bas, va être adopté dans quelques jours.

Par votre proposition de loi, dont je vous remercie, vous avez lancé l'idée du coefficient multiplicateur, mesure qui vise à réglementer les marges en cas de crise et à faire en sorte qu'elles ne soient pas excessives lorsque le cours d'un produit est très bas. Cette disposition, très importante et très attendue, nécessite un décret qui sera envoyé dans les prochains jours en Conseil d'État et pris ensuite dans les meilleurs délais. Si nous devions connaître de nouvelles difficultés ce printemps ou cet été, nous disposerions ainsi de l'instrument dont vous avez eu l'idée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

COOPÉRATION EUROPÉENNE CONTRE LE CANCER
ET LE SIDA

M. le président. La parole est à Mme Marcelle Ramonet, pour le groupe de l'UMP.

Mme Marcelle Ramonet. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

Monsieur le ministre, le cancer tue chaque année 150 000 personnes en France et le sida, avec plus de 40 millions de personnes séropositives dans le monde, est l'une des plus grandes catastrophes sanitaires de tous les temps. Conscient de la gravité de ces deux fléaux, le Président de la République a tout d'abord fait de la lutte contre le cancer l'un des trois chantiers majeurs de son mandat. Ainsi, depuis mars 2003, tous les acteurs de la santé et les chercheurs ont commencé à mettre en œuvre les soixante-dix mesures innovantes que comporte le plan cancer élaboré par le Gouvernement. Pour répondre au défi international que représente le sida, le Président Jacques Chirac a décidé de faire de la France le deuxième contributeur au fonds mondial de lutte contre ce virus, avec une contribution de 150 millions d'euros par an, et a soutenu l'initiative du Gouvernement qui a voulu faire de la lutte contre le sida la grande cause nationale pour 2005.

Pour autant, si la France est en pointe dans ces deux dossiers, elle ne peut être le seul pays à se mobiliser pleinement. Face au cancer et au sida, notre action ne sera efficace et couronnée de succès que par la coopération et la mise en commun des moyens et des connaissances du plus grand nombre d'États possible.

À cet égard, l'Europe peut et doit être exemplaire. Monsieur le ministre, à votre initiative, une conférence consacrée à la lutte contre le cancer et le sida, réunissant les vingt-cinq ministres européens de la santé, se déroule aujourd'hui et demain à Paris. Quelles initiatives concrètes en attendez-vous pour renforcer l'Europe de la santé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.

M. Philippe Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Nous avons en effet invité, ce soir et demain, nos vingt-quatre homologues, ministres de la santé européens, pour dessiner l'Europe de la santé et, surtout, pour dire que l'on est beaucoup plus forts ensemble que tout seul. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. − Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

C'est la raison pour laquelle nous avons décidé d'une alliance des vingt-cinq pays européens contre le cancer, avec la création de l'Institut européen du cancer − la France est candidate pour le secrétariat général −, avec une tumorothèque européenne, avec des protocoles communs pour le dépistage, les soins et la recherche.

Quant au sida, l'Europe dispose aujourd'hui d'une vingtaine de candidats de vaccins de première génération, soit autant que les États-Unis.

Pourtant, 90 % des essais cliniques sont américains, car les Américains ont décidé de mettre le paquet sur un seul site de recherche, alors que nous sommes en permanence éclatés, nous distribuons à tout le monde, nous nous éparpillons, nous n'avons pas réussi à nous mettre d'accord pour faire l'Europe politique de la recherche. Tel est, aujourd'hui, l'enjeu, et c'est pourquoi nous sommes ensemble derrière le traité constitutionnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Pierre Brard. Et on vote quoi ?

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. Si nous voulons aller de l'avant, nous devons également lutter contre les nouvelles pandémies, comme le SRAS ou la grippe aviaire. Pour cela, il nous faut un bouclier sanitaire, de façon à coordonner nos réponses aux infections.

M. Jacques Desallangre. Il faut donc voter « oui » ! CQFD !

M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille. L'Europe, ce ne sont pas seulement des mots ou une idéologie : c'est du concret. Les gens qui nous écoutent savent de quoi nous parlons quand il est question de cancer et de sida. Lorsqu'on est ensemble, on est plus fort que tout seul. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire - Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Henri Emmanuelli. Ça, c'est bien vrai !

DÉCENTRALISATION

M. le président. La parole est à M. Bernard Derosier, pour le groupe socialiste.

M. Bernard Derosier. Monsieur le Premier ministre, je n'ose imaginer un seul instant que vous ne connaissiez pas la loi du 13 août 2004. Il est vrai que vous l'avez fait voter à la sauvette, en vous abritant derrière l'article 49-3 de la Constitution. Il est tout aussi vrai que cet acte II de la décentralisation que vous avez tenté de mettre en œuvre s'est rapidement dégonflé pour se réduire à un simple transfert de responsabilités vers les collectivités territoriales, voire à un démantèlement pur et simple des services publics. (« Oh ! », sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Aujourd'hui, vous accusez les exécutifs départementaux et régionaux de ne pas respecter la loi sous prétexte qu'ils n'ont pas signé les conventions provisoires de transfert de services. La loi est pourtant très claire : la commission de conciliation, prévue à cet effet, se réunira pour examiner les refus ; si ceux-ci persistent, c'est un arrêté du Gouvernement qui assurera les transferts − bel exemple de décentralisation, soit dit en passant. Ce que la loi n'avait pas prévu, c'est que quatre-vingts départements sur cent deux et la plupart des régions ne signeraient pas les conventions.

M. Jean-Pierre Soisson. C'est une honte !

M. Yves Nicolin. Ce sont des desperados !

M. Bernard Derosier. Vous allez sans doute dire que, à ce jour, plus d'une centaine de conventions ont déjà été signées, mais, si l'on en compte cinq par département et deux ou trois par région, cela ne représente qu'une centaine sur 6 ou 700 conventions. Avouez que c'est bien peu.

Dans ces conditions, monsieur le Premier ministre, allez-vous persévérer (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) dans la voie que vous semblez avoir choisie et imposer le fait du prince, ou, à l'inverse, pour sortir de l'impasse dans laquelle vous vous êtes engagé, avez-vous l'intention de rechercher, avec les départements et les régions, une solution au problème posé ?

Enfin, monsieur le Premier ministre, vous avez fait une déclaration époustouflante : « L'État se montrera généreux pour augmenter de l'ordre de 5 % la dotation globale des départements qui seront prêts à coopérer. » (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pouvez-vous nous dire sur quelle ligne budgétaire vous allez prendre les crédits qui vous permettront de verser ce bonus de 5 % aux collectivités qui ont signé ? (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Monsieur Derosier, posez votre question.

M. Bernard Derosier. Aucune loi n'a prévu cette prime. N'avez-vous pas là outrepassé vos droits, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, la loi sera respectée par tous les départements.

M. Henri Emmanuelli. On n'est pas à vendre !

M. le Premier ministre. Et ce n'est pas un président de département qui peut se mettre en dehors de la loi : il y a une République et une loi républicaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je connais bien les processus de décentralisation.

M. Henri Emmanuelli. Oh non !

M. le Premier ministre. Quand j'étais président de région, j'ai été le premier à signer, avec Lionel Jospin, la convention Université 2000. J'ai été le premier à signer le contrat de plan avec Mme Voynet. Et j'ai été le premier à signer le contrat de plan avec Édouard Balladur et Charles Pasqua. Pourquoi ? Parce que quand il y a convention, il y a négociation, et tous ceux qui se mettent en dehors de la négociation...

M. Alain Néri. Seront punis !

M. le Premier ministre. ...se mettent en dehors de la défense des intérêts de ceux qu'ils représentent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Nous sommes dans une décentralisation républicaine.

M. Henri Emmanuelli. Non !

M. le Premier ministre. C'est donc une négociation entre l'État et les collectivités territoriales.

M. Richard Mallié. Comme en 1983 !

M. le Premier ministre. Vouloir faire de la décentralisation un front contre l'État, ce n'est pas être fils de Defferre et de Mauroy ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) C'est vouloir diviser les Français.

La convention, c'est une négociation. Aux départements, aux régions, qui ont engagé le processus de négociation, je dis que l'État...

M. Jean-Pierre Brard. Girondin !

M. le Premier ministre. ...est attentif et ouvert : s'il constate sur le terrain des situations déficitaires, c'est-à-dire anormales, des dysfonctionnements,...

M. Henri Emmanuelli. Ce n'est pas cela dont a parlé M. Derosier !

M. le Premier ministre. ...il se doit de les corriger, afin que dans la République tout le monde soit traité de la même façon. Mais, naturellement, l'État ne peut discuter qu'avec ceux qui sont autour de la table.

Je fais respecter la loi républicaine. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Il n'y a pas d'avantages pour les uns, d'inconvénients pour les autres : il y a seulement cette responsabilité coupable prise par un certain nombre de collectivités territoriales, qui veulent faire de la décentralisation un affrontement avec l'État. Ce n'est ni l'esprit de Gaston Defferre (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste), ni celui de l'acte II de la décentralisation, et de la sorte vous en arrivez à contester les bienfaits du contrat.

M. Henri Emmanuelli. Qu'on appelle le SAMU !

M. le Premier ministre. Ceux qui défendent la République et le droit ne peuvent que défendre le contrat,...

M. Henri Emmanuelli. Le SAMU !

M. le Premier ministre. ...et féliciter ceux qui négocient bien, dans l'intérêt de leurs habitants, des conventions pour leur département ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

POLITIQUE EN FAVEUR DES ENTREPRISES

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Nicolas, pour le groupe UMP.

M. Jean-Pierre Nicolas. Ma question s'adresse à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation.

Monsieur le ministre, sous l'impulsion de M. le Premier ministre - que je félicite pour le brio de sa réponse (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) - le Gouvernement s'est résolument engagé dans le renforcement du potentiel de croissance de l'économie française pour développer l'emploi et réduire ainsi le chômage. C'est pourquoi il a mis au cœur de ses préoccupations le développement et la sauvegarde des entreprises, car ce sont bien elles qui créent des richesses et, par voie de conséquence, de l'emploi.

La loi pour l'initiative économique du 1er août 2003 a largement contribué au renouveau de la création d'entreprises, avec plus de 200 000 entreprises nouvelles en 2004, chiffre jamais atteint jusqu'alors.

Le projet de loi de sauvegarde des entreprises donnera une nouvelle chance aux chefs d'entreprise vertueux, victimes de la conjoncture ou de clients indélicats. Mais il convient également d'assurer la pérennité des entreprises puisque 500 000 chefs d'entreprise feront valoir leurs droits à la retraite dans les dix années qui viennent, ce qui représente 2,5 millions d'emplois.

Aussi le Gouvernement a-t-il la volonté de garantir la pérennité des entreprises nouvellement créées comme celle des entreprises existantes, d'améliorer les conditions de transmission afin de préserver les savoir-faire et l'emploi, et de parfaire le financement de l'économie. Les enjeux sont majeurs comme je le constate chaque jour à Évreux et dans ma circonscription.

Vous avez, monsieur le ministre, présenté ce matin un projet de loi répondant à ces défis. Pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur les grands axes de ce texte et sur les dispositions novatrices qu'il contient ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation.

M. Christian Jacob, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation. Monsieur Nicolas, chacun ici connaît votre attachement au monde des PME, des artisans et des commerçants, et vous avez bien raison puisque, en France, 60 % des actifs du secteur privé travaillent dans des PME.

L'objectif fixé par le Premier ministre est de lever tous les freins au développement économique de ces petites et moyennes entreprises, de l'artisanat et du commerce.

M. Jean Le Garrec. Baratin !

M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation. Nous avons travaillé dans quatre directions, et, tout d'abord, sur le plan financier, puisque nombre de porteurs de projets ne peuvent réaliser ces derniers faute de moyens.

M. Jean-Claude Perez. Baratin !

M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation. Il s'agissait donc de développer les fonds de caution, les fonds de garantie, de faire en sorte que les banques puissent mieux accompagner les porteurs de projets, et de défiscaliser les investissements.

Il convenait également d'améliorer, ainsi que vous l'avez souligné à juste titre, le régime des transmissions. Pour prendre un exemple concret, les droits de transmission représentent aujourd'hui à peu près 10 % de la valeur du bien. Lorsque la loi sera votée, ils ne représenteront plus que 2,5 %, c'est-à-dire que nous allons diviser par quatre les droits de transmission, notamment lorsqu'il y aura réserve d'usufruit.

Il fallait, par ailleurs, revoir le statut des personnes, et notamment des conjoints collaborateurs d'artisans, de commerçants ou de professions libérales. Avec ce texte, ce sont 300 000 conjoints qui pourront enfin bénéficier d'une couverture sociale et de droits à la retraite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, la simplification administrative était une nécessité. Nous avons, sur ce point qui était cher au Premier ministre, avancé de manière concrète, et je ne doute pas que le débat parlementaire enrichira notre réflexion.

L'objectif du Premier ministre est de donner de l'oxygène, d'assouplir les contraintes, d'encourager ceux qui créent de l'activité, de l'emploi et de la richesse, c'est-à-dire les patrons de PME, les artisans et les commerçants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. Monsieur Nicolas, vous serez ainsi en mesure de rassurer ceux qui, à Évreux, vous interpellent. (Sourires.)

DÉVELOPPEMENT DE L'APPRENTISSAGE

M. le président. La parole est à M. Michel Lejeune, pour le groupe UMP.

M. Michel Lejeune. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes.

Monsieur le secrétaire d'État, face aux départs à la retraite qui vont s'accélérer dans les dix années à venir, il importe que l'activité économique de notre pays ne soit pas freinée du fait de difficultés rencontrées par les entreprises pour trouver des collaborateurs formés à l'ensemble de leurs métiers.

Alors que le taux d'emploi des jeunes est de 26 % en France, il dépasse les 50 % chez nos voisins européens. Il apparaît donc nécessaire d'augmenter ce taux d'emploi sans toutefois remettre en cause la qualité de la formation initiale. S'il faut que plus de jeunes travaillent, il est en effet nécessaire que le niveau de formation continue de progresser dans notre pays.

Avec le plan de cohésion sociale, le Gouvernement souhaite développer l'apprentissage en passant de 350 000 apprentis aujourd'hui à 500 000 en 2009. L'apprentissage est en effet une voie de formation par excellence, qui permet aujourd'hui à tous ces jeunes de suivre une formation initiale, d'être diplômés mais aussi d'acquérir une expérience professionnelle significative au sein d'une entreprise et d'intégrer plus facilement le monde du travail.

L'apprentissage souffre cependant, en France, d'un déficit d'image, à l'inverse de ce qui se passe chez certains de nos partenaires européens.

Monsieur le secrétaire d'État, nous sommes ici tous convaincus de la nécessité du développement de l'apprentissage dans notre pays. (« La question ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Comment comptez-vous convertir à l'apprentissage les jeunes, les familles, les entreprises qui n'y ont pas encore recours ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes.

M. Laurent Hénart, secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur Lejeune, les chiffres que vous venez de citer sur l'activité des 16-25 ans nous obligent à agir, d'autant plus que la France fait face à un retournement démographique. Dans les années qui viennent, nombreux sont les secteurs économiques qui risquent de manquer de collaborateurs formés, compétents et motivés.

L'apprentissage est une bonne réponse en ce qu'il permet, d'abord, de rompre le cercle vicieux dans lequel on enferme les jeunes : il leur faut, en effet, une expérience professionnelle pour obtenir un premier emploi, alors que cette expérience ne peut s'acquérir qu'avec un premier emploi. Avec l'apprentissage, on fait d'une pierre deux coups : on prépare un diplôme, le même que par la voie scolaire, en même temps que l'on travaille deux ou trois ans dans une entreprise, ce qui permet de sortir armé et expérimenté de la formation initiale.

Il sera, ensuite, nécessaire de rapprocher l'offre de formation des besoins des employeurs puisque, par définition, il faut, en apprentissage, être à la fois en centre de formation et avoir un contrat de travail.

Le plan de cohésion sociale s'adresse aux trois acteurs et, en premier lieu, aux chefs d'entreprise. Nous avons beaucoup travaillé sur ce point avec Christian Jacob. C'est ainsi qu'un crédit d'impôt de 1 600 à 2 200 euros par an et par apprenti est applicable dès maintenant, le décret ayant été publié. En outre, une grande campagne sera conduite par Henri Lachman, afin que les patrons, exemplaires en matière d'apprentissage, convainquent leurs homologues.

En deuxième lieu, 150 millions seront accordés dès 2005 aux centres de formation des apprentis pour leur permettre de moderniser leurs locaux et leurs matériels, et dans le cadre des nouvelles pratiques pédagogiques, nous signons lundi le premier contrat avec une région, la Bourgogne.

M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur le secrétaire d'État.

M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Enfin, (Exclamations sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains) nous nous adressons aux jeunes, en lançant aujourd'hui même, avec Jean-Louis Borloo, une campagne d'information afin de souligner combien l'apprentissage a changé et qu'il est temps d'y penser, sachant qu'il prépare à 450 métiers et à tous les diplômes accessibles.

M. le président. Monsieur Cochet, je n'ai pas de conseils à recevoir de vous ! Je vous prie donc d'arrêter de me faire des signes. C'est moi qui préside, ce n'est pas vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je coupe la parole quand je le décide, et sachez que, jusqu'à présent, tous les orateurs devant poser des questions au Gouvernement ont toujours pu intervenir pendant l'heure consacrée aux questions d'actualité et retransmise par la télévision. Je m'arrange toujours pour que tout le monde passe. Aussi, arrêtez de mal vous conduire ! (Applaudissements et huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

« PAQUET MONTI »

M. le président. La parole est à M. Émile Zuccarelli.

M. Émile Zuccarelli. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, après la directive Bolkestein sur les services dans l'Union, la résolution votée en février 2005 par le Parlement européen, et relative aux aides d'État sous forme de compensation du service public, démontre, s'il était encore besoin, l'orientation éminemment libérale de la construction européenne. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Charasse. Eh oui !

M. Émile Zuccarelli. Cette résolution, votée par le Parlement et notamment par les députés européens UMP, sur proposition du rapporteur, Mme In't Veld, relève, en effet, d'une conception dangereusement restrictive des services publics.

Dans ses propositions initiales, dénommées « paquet Monti », la Commission définissait les critères à remplir pour faire sortir du régime d'interdiction des aides d'État les aides publiques compensant les charges de service public.

Afin d'assurer pleinement la cohésion sociale et territoriale, et de défendre une conception ambitieuse du service public, ce régime aurait dû, au moins, épargner les services sociaux. Non seulement ce ne fut pas le cas, mais l'exemption initialement prévue pour le logement social et les hôpitaux vient d'être tout simplement écartée par le Parlement européen.

Suivant la même logique, ce dernier a également remis en cause la spécificité des petits services publics locaux directement ou indirectement gérés par l'autorité publique, en exigeant une procédure d'appel d'offres préalable à toute attribution d'une aide compensatoire. Dois-je insister sur les effets d'une telle préconisation quant à l'égalité des citoyens devant la santé, à la diminution du nombre de lits et de personnels soignants au sein de l'hôpital public, ainsi qu'à la disparition programmée du logement social ? Est-ce vraiment à ces effets auxquels le Gouvernement veut aboutir ?

Monsieur le Premier ministre, face à ce nouvel assaut contre les services publics, le Gouvernement peut-il préciser sa position sur cette résolution particulièrement dangereuse du Parlement européen ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.

Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le député, les services d'intérêt général sont, vous l'avez rappelé, l'un des fondements du modèle social européen auquel le Gouvernement est tout particulièrement attaché.

M. Jean-Pierre Brard. Que deviennent les services publics ?

Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. J'étais hier encore au Parlement européen. J'ai pu discuter avec l'eurodéputé allemand, M. Rapkay, qui travaille actuellement sur la résolution de définition des services d'intérêt général et des services d'intérêt économique général et leur apport, ou non, à l'activité marchande par rapport aux services publics. L'article III-122 du traité constitutionnel offrira une base juridique spécifique, avec un instrument transversal, pour préciser cela clairement.

Le « paquet Monti », vous l'avez rappelé, avait pour but d'essayer de clarifier la jurisprudence en ce qui concerne le financement des services d'intérêt économique général. Une décision, confirmée au cours du conseil des ministres du 15 mars en présence des ministres du logement, a prévu, et la Commission l'a redit, d'exclure du « paquet Monti » les hôpitaux et le logement social afin de préserver leurs spécificités, avec des financements publics qui resteront en dehors des notifications à la Commission.

Le Gouvernement est très attaché à la définition de ces services publics, quelles que soient leurs formes, ainsi qu'à la façon dont la subsidiarité peut se mettre en place pour prendre en charge l'activité et le financement.

Vous avez évoqué la directive « Services ». Vous savez que nous travaillons précisément pour faire en sorte que les services publics bénéficiant de financements publics ne soient pas concernés par ces instruments. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Jean Le Garrec.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

    2

MISSION TEMPORAIRE DE DÉPUTÉS

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre m'informant de sa décision de charger M. François Cornut-Gentille, député de la Haute-Marne, et M. Jacques Godfrain, député de l'Aveyron, d'une mission temporaire auprès de M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale et de M. le ministre délégué aux relations du travail.

    3

ASSISTANTS MATERNELS ET FAMILIAUX

Discussion, en deuxième lecture,
d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux (nos 2224, 2230).

La parole est à Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État aux personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames les députées, madame la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, la famille a profondément évolué au cours de ces dernières décennies. Il nous faut donc construire ensemble un nouveau mode d'aide et d'accompagnement des parents adapté à l'évolution de la société.

Contrairement à ce qui pouvait être observé dans les années soixante, la plupart des mères conservent désormais une activité professionnelle et les pères sont de plus en plus présents dans l'éducation des enfants. Mais aujourd'hui, 45 % des parents déclarent recourir à un mode de garde pour leurs enfants qui ne recueille pas leur adhésion. Sur les 2,2 millions d'enfants de moins de trois ans de notre pays, 300 000 ne bénéficient d'aucun mode de garde identifié. Nous ne pouvons l'accepter.

Philippe Douste-Blazy s'est fixé un objectif : que, d'ici à 2010, plus de la moitié des enfants de moins de trois ans bénéficie d'un mode de garde en crèche ou chez une assistante maternelle, contre moins d'un tiers aujourd'hui. C'est pourquoi il a proposé, dans « La France des proximités », de nouveaux modes alternatifs d'accueil, souvent mieux adaptés aux besoins des familles modernes.

Il est donc nécessaire de libérer les contraintes des crèches privées pour que les maires de France qui le souhaitent puissent, à un moindre coût, en doter leur ville sans avoir d'obstacle ou de délais inutiles. Il faut également développer les crèches d'entreprise pour ne pas briser ce nouvel élan que manifestent aujourd'hui de nombreux groupes français pour leurs salariés. Pour répondre à ces attentes, le ministre propose le développement du ticket crèche-garde d'enfants qui permettra à chaque entreprise qui souhaite investir en faveur de la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle de répondre aux attentes de ses salariés.

Mais il importe surtout de professionnaliser les assistants maternels et familiaux, qui offrent une solution de proximité humaine adaptée aux attentes des parents. C'est l'objet du projet de loi que vous allez examiner aujourd'hui et que vous allez, j'en suis sûre, à nouveau enrichir.

Je tiens à remercier en mon nom, et en celui du ministre, le président de la commission des affaires culturelle, familiales et sociales, Jean-Michel Dubernard, pour son écoute, ainsi que Mme Marland-Militello, la rapporteure, qui a fortement contribué à améliorer ce texte.

Je vous en rappelle très brièvement les principales orientations. Ce projet de loi vise à répondre tout d'abord aux difficultés rencontrées par les familles et leurs enfants dans des domaines bien distincts. Il s'agit, en effet, d'aider les familles à surmonter les obstacles qui se présentent pour concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle ; de pallier temporairement les défaillances de familles, submergées par des difficultés de tous ordres, qui ne peuvent plus accompagner leur enfant.

Les assistants maternels jouent un rôle majeur dans la politique de la petite enfance et les assistants familiaux dans celle de la protection de l'enfance.

La reconnaissance de ces professionnels a une incidence toute particulière sur la politique familiale. Nombre de familles souhaitent avoir un autre enfant. Elles renoncent à ce deuxième ou ce troisième enfant tout simplement par crainte de ne pas avoir les moyens de le prendre en charge. Nous ne pouvons nous y résoudre, alors que la France ne parvient pas à assurer le renouvellement des générations. Cela sera d'ailleurs l'un des thèmes de la conférence de la famille du mois de juin prochain. Il est de notre devoir, face à l'allongement de l'espérance de vie et au vieillissement de la population, de tout mettre en œuvre pour faciliter les dispositifs susceptibles de favoriser les naissances et, par là même, le renouvellement des générations.

Si aujourd'hui près de 20 % des jeunes enfants sont gardés par une assistante maternelle, comme je viens de le rappeler, 15 % de ces enfants ne bénéficient pas encore d'un mode de garde identifié. Nous devons répondre à l'attente légitime de leurs parents.

Je voudrais replacer ce projet dans le cadre de la politique d'accueil de la petite enfance.

Déjà, le Gouvernement avait décidé, lors de la conférence de la famille de 2003, un ensemble de mesures destinées à développer l'offre d'accueil des enfants.

La mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, depuis le 1er janvier 2004, permet d'améliorer considérablement l'accès des familles, notamment celles disposant de moyens et bas revenus, aux modes d'accueil individuels. Le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfant, que le Parlement a adopté dans la loi de finances 2005, assure désormais une équité entre les familles, quel que soit leur niveau de revenu. Ce projet de loi complète cet ensemble de mesures, car en rendant plus attractif ce métier nous créerons des vocations qui répondront aux besoins d'un développement de l'offre d'accueil.

Ce texte vise aussi à mieux répondre aux besoins des familles et des enfants en souffrance. Les assistants familiaux sont des acteurs essentiels du dispositif de l'aide sociale à l'enfance.

Je tiens aussi à souligner le rôle essentiel des départements. A travers l'aide sociale à l'enfance, ils contribuent à la qualité de l'accueil des enfants pris en charge par la protection de l'enfance.

Ce projet de loi complète en profondeur les réformes intervenues en 1977 et 1992. Il permet surtout de franchir une nouvelle étape. La reconnaissance de ces deux professions passe désormais par une redéfinition des modalités d'agrément et un renforcement des exigences en matière de formation. Il est indispensable de faire évoluer les droits de ces professionnels vers le droit commun, notamment en matière de rémunération, de temps de travail, de congés et de garantie en cas de licenciement.

Comme vous le savez, ces propositions ont été largement discutées avec de nombreuses organisations syndicales et professionnelles représentant les assistants maternels, leurs employeurs, l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France et la Caisse nationale d'allocations familiales. Je sais que Philippe Douste-Blazy veillera personnellement à ce qu'il en soit de même pour l'élaboration des décrets d'application.

Vous avez déjà, mesdames, messieurs les députés, voté en première lecture ce projet de loi en l'enrichissant de nombreuses dispositions. Je suis certaine que votre assemblée contribuera à le rendre plus efficace encore.

Je voudrais souligner une nouvelle fois ici les avancées significatives réalisées par ce texte.

Les dispositions concernant les assistants maternels, permettant de mieux assurer les qualités de service, reposent sur l'agrément, son contrôle, la formation des professionnels, l'accompagnement et l'encadrement des relations entre parents et professionnels.

L'agrément doit constituer une garantie de sérieux et de sécurité. C'est le sens du formulaire unique de demande d'agrément. Les candidats au métier d'assistant maternel seront agréés au vue de leurs capacités éducatives. Part ailleurs, le Gouvernement a souhaité, avec votre soutien, que la maîtrise orale de la langue française soit une condition de l'agrément. C'est en effet un gage de communication entre l'assistant maternel et les enfants qui constitue un aspect essentiel de leur développement.

Il est indispensable de former les assistants maternels à prendre de la distance par rapport à leur expérience personnelle de parents, afin de s'adapter à la singularité de chaque enfant accueilli.

Pour les assistants maternels, la formation se déroulera en deux temps : une première partie se fera avant l'accueil de tout enfant ; la seconde partie de formation sera délivrée dans les toutes premières années d'activité. Cette formation correspondra à la première unité du CAP petite enfance.

Par ailleurs, l'accès des assistants maternels à la formation professionnelle continue, instaurée par la loi du 4 mai 2004, et l'ouverture progressive des diplômes et des qualifications à la validation des acquis de l'expérience favoriseront la professionnalisation et l'évolution de carrière. J'ajoute que, s'agissant de la formation de ces assistants, il faudra veiller à ce que les décrets n'omettent pas l'accueil des enfants handicapés qui pourront bénéficier utilement de ces dispositifs.

En outre, vous avez souhaité, comme le Gouvernement, que les assistants maternels puissent bénéficier systématiquement d'une formation aux gestes de premiers secours avant de commencer leur activité.

Pour les assistants familiaux, le projet de loi prévoit également deux temps de formation :

Un stage de préparation à l'accueil d'enfants - il sera organisé pour tout nouvel assistant familial par son employeur dans les deux mois suivant sa première embauche - ;

Une formation d'adaptation à l'emploi délivrée au cours des trois premières années d'activité professionnelle. Cette formation conduira à un diplôme soit par des épreuves de certification, soit par la validation des acquis de l'expérience.

Le second volet de ce projet de loi vise à améliorer les conditions de travail des professionnels de la petite enfance et de l'enfance en tenant compte du caractère spécifique de leur activité.

S'agissant des assistants maternels, les améliorations du droit du travail portent sur le contrat de travail - cette nouveauté est également prévue par la nouvelle convention collective des assistants maternels du particulier employeur - et la rémunération - l'assistant maternel sera rémunéré pour toute période d'accueil prévue dans le contrat de travail, même si l'enfant est absent.

Le projet de loi prévoit, par ailleurs, le passage de la rémunération journalière à une rémunération horaire qui représente une vraie reconnaissance du travail effectué. En outre, les assistants maternels pourront bénéficier d'un repos quotidien de onze heures.

S'agissant des assistants familiaux, plusieurs mesures sont proposées afin d'améliorer leur statut professionnel. Parmi celles-ci, je soulignerai la nouvelle définition de la structure de leur rémunération, qui concerne, d'une part, la rémunération globale d'accueil correspondant à la disponibilité requise quels que soient le nombre d'enfants et le nombre de jours de présence de ces enfants et, d'autre part, la rémunération liée à l'accueil de chaque enfant.

Comme vous le voyez, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement a cherché à apporter des réponses concrètes et justes aux attentes des professionnels, mais aussi à celles des parents qui recourent aux services des assistants maternels et familiaux. Le Gouvernement a agi dans un souci de réalisme : celui de ne pas alourdir les coûts pour les familles, les collectivités locales et la branche « famille » de la sécurité sociale.

Ce secteur de service de proximité est aussi un prodigieux gisement d'emplois qui n'a d'égal que le confort qu'il apportera à toutes les familles françaises, quel que soit leur département ou leur niveau de vie.

De plus, Philippe Douste-Blazy a souhaité qu'une évaluation de la loi que vous allez adopter soit réalisée dans les trois ans suivant sa mise en place. Il est en effet de la responsabilité de l'État de s'assurer de la mise en œuvre des dispositions introduites par une loi.

Mesdames et messieurs les députés, en donnant à ces professions la reconnaissance et la crédibilité qu'elles méritent, vous ne faites pas seulement droit à des attentes légitimes, vous contribuez également à structurer un secteur de services devenu indispensable à un grand nombre de parents. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État aux personnes handicapées, mes chers collègues, voici, en quelques mots, la position de la commission et de la rapporteure sur cette seconde lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi sur les assistants maternels et familiaux.

Préalablement à cette lecture, la commission des affaires culturelles familiales et sociales a adopté un certain nombre d'amendements votés par le Sénat en deuxième lecture. Elle est également revenue sur d'autres amendements pour répondre pleinement aux attentes des familles et des professionnels, et éviter de marquer un recul par rapport à l'objectif affiché par le Gouvernement de revaloriser et de professionnaliser ces métiers, tout en leur assurant la souplesse nécessaire à leurs spécificités.

Je me fais également l'écho des multiples témoignages recueillis directement auprès des familles et des assistants maternels et familiaux, rencontrés sur le terrain lors de réunions ou au cours des longs débats que nous avons eus lors de leurs assemblées générales. Ces rencontres m'ont permis de disposer d'un échantillonnage considérable et varié des différentes opinions, de reconnaître la qualité du travail effectué par ces professionnels et de mesurer leur dévouement. Je tiens à leur rendre hommage.

Les amendements votés par la commission ont permis de réaliser l'équilibre nécessaire entre un meilleur statut pour les professionnels et le maintien d'un mode de garde très souple permettant aux familles de concilier vie professionnelle et vie privée, tout en laissant une grande liberté d'initiative aux présidents des conseils généraux. Il serait donc très regrettable de revenir sur des dispositions qui marquaient de réelles avancées sociales et permettaient à ces professionnels de se rapprocher du droit commun des salariés, sans pour autant perdre la spécificité d'un accueil familial personnalisé et souple.

J'attire l'attention de l'Assemblée sur la vocation des RAM, les relais assistants maternels, qui est d'informer les assistants maternels sur la spécificité de leur métier. Permettre aux employés de maison d'être accueillis dans ces RAM serait en contradiction avec l'esprit de la loi.

Mme Claude Greff. Tout à fait !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Le but de la loi est de requalifier cette profession afin de la distinguer des autres modes d'accueil des enfants. Or les assistants maternels et les employés de maison sont deux professions distinctes qui relèvent chacune de deux conventions collectives différentes.

Mme Claude Greff. Exactement !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Les conditions d'accès à ces deux professions sont elles-mêmes distinctes.

Mme Claude Greff. Bien sûr !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Les employés de maison n'ont aucune obligation de qualification et, pour la majorité d'entre eux, n'assument pas de garde d'enfant. C'est la mission des assistants maternels qui, après agrément, devront suivre une formation préalable à l'embauche comme gage de sécurité et de qualité du service rendu aux parents.

Mme Claude Greff. Absolument !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Par ailleurs, nous avons été sensibles à un principe que nous voulons appliquer à cette profession : celui de l'équité. Nous avons tenu à le mettre en œuvre dans trois domaines.

Le premier est celui de l'agrément. En la matière, l'équité suppose l'existence de critères nationaux. De nombreux professionnels se sont plaints de l'arbitraire de cette procédure et de la très grande hétérogénéité des exigences des conseils généraux. Les critères nationaux d'agrément sont une garantie de qualité, de transparence des procédures et les parents y sont très attachés. En tout état de cause, il faut se rappeler que les présidents des conseils généraux ont toujours la possibilité d'effectuer des dérogations - ce qui est une bonne chose - pour des cas particuliers. Il est donc inutile et inopportun de mentionner ceux-ci dans la loi. En la matière, nous tenons à ce que les présidents de conseils généraux gardent une grande liberté d'initiative.

Dans le même temps, la lutte contre toutes les formes d'iniquité a continué à inspirer les travaux de la commission en deuxième lecture. Comme pour l'agrément, la détermination des indemnités et fournitures d'entretien doit continuer à être fondée sur des critères identiques pour l'ensemble du territoire national. Il s'agit d'atténuer les disparités entre les départements, en imposant notamment un seuil minimal à tous. Rien n'empêchera les départements qui le souhaiteront de déterminer des montants qui seront supérieurs.

Ce même souci d'équité a conduit la commission à proposer de revenir sur l'initiative sénatoriale qui tend à faire primer les dispositions de la convention collective sur celles de la loi, s'agissant du régime de la rémunération des assistants maternels en cas d'absence de l'enfant dix jours par an. Nous avons maintenu le système des 50 % de rémunération avec le soutien du Gouvernement.

M. Pierre-Christophe Baguet. Très bien !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. D'autre part, l'Assemblée nationale a jugé important, ce qui représente un autre aspect de notre engagement, que, lors de la procédure d'attribution d'agrément et lors du contrôle de la pratique professionnelle, un représentant de ces professions, expérimenté et n'exerçant plus le métier, puisse participer à l'évaluation de la compétence des professionnels.

Mme Claude Greff. Très bien !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Qui mieux qu'eux pourrait contribuer à l'évaluation d'un métier qu'ils connaissent bien pour l'avoir pratiqué ?

Mme Claude Greff. Personne, en effet !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Si ces interventions devaient être bénévoles, ce dispositif important perdrait tout le sens de son contenu et nuirait à l'image de ces professionnels vis-à-vis des services sociaux avec lesquels ils seront amenés à travailler. C'est pourquoi nous y sommes opposés.

J'estime au contraire important d'améliorer la pratique pluridisciplinaire de l'équipe qui instruit l'agrément. Il importe donc d'inciter ces professionnels expérimentés à faire partie de cette équipe en prévoyant une rémunération sous la forme de vacations payées par le conseil général.

De même, il me paraît indispensable d'associer les assistants familiaux à l'équipe des travailleurs sociaux qui accompagnent les mineurs en difficulté. Les assistants familiaux ne veulent plus être de simples auxiliaires des travailleurs sociaux de la protection de l'enfance en danger. La revalorisation de leur métier passe par une obligation de formation et par une insertion réelle dans les équipes de l'aide sociale à l'enfance.

Dans l'intérêt des familles, une garde d'enfant de qualité est à la fois une sécurité pour l'enfant et une garantie d'épanouissement personnel. Je suis convaincue qu'un certain nombre de contraintes doivent être maintenues pour protéger les enfants et rassurer les parents. Ainsi, la production de l'extrait judiciaire n° 3 pour les adultes vivants au domicile des assistants ne doit pas se limiter aux seuls délits portant atteinte aux personnes mais aussi à toutes les condamnations mentionnées dans cet extrait judiciaire. Il ne s'agit donc pas de le protéger contre un délit, mais contre tous les délits, de façon à ce que la garantie morale de l'éducation qui lui est prodiguée soit totale.

Concernant les dispositions modifiant le code du travail, le Sénat a, au cours de sa deuxième lecture, tenu à laisser subsister une souplesse suffisante au profit des assistants maternels et familiaux. La commission y a été extrêmement sensible. Pour l'essentiel, elle a approuvé les modifications ainsi apportées au texte : l'ouverture au versement « proratisé » des indemnités et fournitures d'entretien, le rétablissement de la procédure d'annualisation du temps de travail dans le respect d'un plafond pour les assistants maternels, la précision relative à l'absence de prise en charge de la rupture du contrat par le particulier employeur dans le cas de la suspension ou du retrait d'agrément, ou encore les modalités de prise de congés des assistants maternels selon le nombre d'employeurs.

Il nous a paru également important que la discussion en séance publique devant le Sénat ait permis par ailleurs au ministre des solidarités, de la santé et de la famille, de dissiper les craintes relatives au passage à la rémunération horaire des assistants maternels, déjà en vigueur aux termes de la convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur.

Par ailleurs, deux mesures importantes se détachent, qui ont trait à l'application à venir de la loi et assurent toutes deux, ce dont on ne peut que se féliciter, la prise en compte de la réalité des situations au plus près du terrain.

La première prévoit la présentation par le Gouvernement au Parlement, au plus tard le 30 juin 2008, d'un rapport d'évaluation quantitative et qualitative de la loi.

La seconde précise que les principales associations d'élus seront consultées pour avis sur les projets de décret d'application. Sans doute n'était-il pas absolument nécessaire de faire figurer dans la loi cette deuxième mesure, le ministre ayant pris un engagement dans ce sens en séance publique. Néanmoins, je suis attachée au souci de concertation qui l'inspire.

En conclusion, requalifier et favoriser le développement du mode de garde préféré des familles constitue une véritable valeur ajoutée à l'éducation et à l'encadrement psychologique des enfants, en une période où les parents, de par leur activité professionnelle, sont moins présents au domicile familial.

Mme Claude Greff. C'est vrai ! Ce texte représente une avancée.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Je rends donc hommage au Gouvernement, car ce projet de loi répond à un enjeu fondamental pour notre société : l'équilibre entre la vie professionnelle des parents et le cadre familial quotidien des enfants.

Mme Claude Greff. C'est un enjeu majeur !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Encore, une fois, je salue cette profession indispensable à la cohésion sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Très belle intervention !

Mme Claude Greff. Je constate qu'il a beaucoup de femmes dans l'hémicycle aujourd'hui, et bien peu d'hommes !

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Corinne Marchal-Tarnus.

Mme Corinne Marchal-Tarnus. Le statut des assistants maternels a été élaboré par la loi du 17 mai 1977. Il a peu évolué depuis et la dernière loi les concernant date de 1992.

L'Assemblée nationale a examiné ce projet de loi en première lecture au cours du mois de février. Il définit clairement, pour la première fois, deux professions distinctes : les assistants maternels, qui accueillent de jeunes enfants à leur domicile et sont directement employés par la famille, et les assistants familiaux, salariés des conseils généraux, plus spécifiquement chargés de l'accueil permanent de mineurs ou de jeunes majeurs, dans le cadre de la protection de l'enfance.

Le Sénat a modifié le projet de loi, notamment pour prendre en compte la convention collective qui régit désormais les relations de travail entre les parents employeurs et les assistants maternels. Le 6 avril dernier, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a conservé certaines de ces modifications sénatoriales et a souhaité revenir sur d'autres, afin de respecter l'esprit et les objectifs fondamentaux du projet de loi, qui tend avant tout à revaloriser ces professions et à promouvoir leur image.

Cette réforme, très attendue par les professionnels, doit favoriser la reconnaissance de leur profession et les compétences de ceux qui l'exercent, dont les responsabilités sont considérables. La profession d'assistant maternel, considérée à tort comme un « sous-métier », n'attire plus assez de vocations, sa rémunération demeurant précaire et aléatoire, ses horaires souvent imprévisibles. À l'heure où le besoin de garde d'enfants devient crucial, particulièrement en milieu rural où la géographie et les moyens des collectivités territoriales ne permettent pas la mise en place de structures de garde collectives, ce projet de loi doit assurer une meilleure reconnaissance de ces métiers.

Un agrément plus lisible et délivré sur la base de critères fixés au niveau national, seuls à même de garantir cohérence et équité, contribue à cette reconnaissance.

La formation - qui est à géométrie variable, puisque sa durée pourra s'échelonner de 60 à 120 heures - est à la fois un gage de qualité de l'accueil pour les parents et une chance pour la profession, qui peut ainsi se voir ouvrir des droits à l'obtention de diplômes dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience. À l'heure où le droit à la formation tout au long de la vie est reconnu à tous les salariés, il est juste que toutes les professions en bénéficient. L'obtention d'un CAP « petite enfance » permettrait de choisir une reconversion vers d'autres métiers de la petite enfance.

Le contrat de travail ne doit pas être considéré comme une contrainte, car il clarifie les engagements des deux parties, salariés et employeurs. Plutôt que de provoquer des conflits, il permettra de les prévenir, la majorité des mésententes provenant essentiellement du non-dit et de l'interprétation des usages. En tout état de cause, la tradition française exige que l'engagement soit écrit.

L'un des atouts majeurs de ce mode de garde est la souplesse et l'adaptabilité aux besoins de la famille. Il convient donc que cette qualité essentielle soit préservée. Dès lors, il est heureux que le Sénat et la commission se soient mis d'accord pour que familles et assistants maternels parties au contrat définissent ensemble les horaires de travail, ainsi que les congés, désormais planifiés au 1er mars de l'année. Par ailleurs, grâce au contrat, il devient possible, si les salariés le souhaitent, d'annualiser leur rémunération, donc de leur garantir un salaire régulier. Dans cet esprit, il est cohérent de prévoir qu'une indemnité leur sera versée pendant les dix premiers jours d'absence de l'enfant malade, dans la mesure où le montant de la PAJE n'est pas diminué pour les parents.

Mme la rapporteure vous ayant excellemment exposé les avancées contenues dans le projet de loi, je n'ai mentionné que les améliorations concrètes qu'il apporte. Mais d'autres dispositions sont essentielles, telles que l'encadrement du délai de notification et des motivations des décisions d'agrément, la mise en place d'équipes pluridisciplinaires pour le suivi de la pratique professionnelle des assistants et l'harmonisation des indemnités d'entretien.

Enfin, comme l'a fait Mme Gallez en commission, j'attire l'attention du Gouvernement sur le fait que d'autres personnes, notamment des assistantes maternelles, employées par les collectivités locales dans des crèches familiales souhaitent également voir leurs carrières évoluer. Or une telle évolution aurait des conséquences financières que le seul budget des collectivités territoriales aurait du mal à assumer.

Madame la secrétaire d'État, ce texte représente une réelle avancée et une véritable valorisation de ces professions. Je suis favorable à l'ensemble des dispositions qui ont été adoptées conjointement par les deux assemblées et qui s'inscrivent dans la politique du Gouvernement. Il semble que nous soyons parvenus à un juste équilibre entre les attentes des familles et celles des professionnels, qui obtiennent la revalorisation de leur statut, à toutes les étapes de leur vie professionnelle. La souplesse de ce mode de garde, qui en fait le préféré des familles, doit absolument être préservée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, l'examen de ce texte s'inscrit dans le débat sur le renforcement du principe d'égalité entre les hommes et les femmes. En effet, le taux d'activité des femmes et le taux de natalité étant en France parmi les plus élevés d'Europe, se pose la question de la conciliation des temps de vie, donc celle des systèmes de garde d'enfants.

Avec le programme EQUAL, l'Europe a permis d'innover en ce domaine, en associant, dans de nombreux territoires, collectivités, entreprises et familles. Aussi aurions-nous aimé, madame la secrétaire d'État, qu'à l'occasion de l'examen de ce texte, ces expérimentations puissent être reconnues et bénéficier d'un cadre juridique, afin de répondre aux besoins des familles. Des parlementaires de différents groupes, dont le groupe socialiste, avaient fait des propositions en ce sens, concernant notamment la possibilité d'exercer la profession d'assistante maternelle en dehors du domicile. Nous attendons que vous confirmiez les engagements pris par le ministre sur ce point.

Par ailleurs, en 2002, une enquête de la DARES et du CREDOC décrivait un temps partiel spécifiquement féminin qui, exercé dans un petit nombre de secteurs d'activité peu qualifiés, offre des horaires atypiques qui rendent la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle très problématique, voire impossible, faute de modes de garde adaptés, lesquels, lorsqu'ils existent, sont financièrement inaccessibles à de petits revenus.

L'insuffisance ou le caractère onéreux de l'offre de garde collective pose le problème du libre choix du mode de garde. Dès lors, légiférer sur la profession d'assistant maternel devrait conduire non seulement à améliorer les conditions de travail et les perspectives de carrière de milliers de salariées, mais aussi à se donner un levier supplémentaire pour agir sur l'emploi et faciliter l'organisation des familles en tenant compte de la place de l'enfant.

En ce qui concerne la profession d'assistant familial, qui l'un des piliers de la politique d'aide sociale à l'enfance, il convient de résorber la précarité de ces professionnels et de les intégrer de plein droit dans les équipes chargées du suivi des enfants en difficulté.

Nous examinons, en seconde lecture, un texte dont on peine à distinguer le sens politique. En effet, non seulement les travaux respectifs des deux assemblées ont été à ce point dilués dans le temps qu'ils divergent très sensiblement, mais la négociation paritaire a été avalisée par le ministère du travail avant même que le cadre législatif ne soit fixé.

Cette situation révèle l'impossibilité de concilier, dans un même texte, les intérêts des familles, ceux des professionnels et ceux des collectivités locales. En prétendant revenir à un équilibre supposé, la Haute assemblée a adopté un texte en net recul par rapport aux dispositions statutaires que nous avions contribué à enrichir en première lecture, sans pouvoir influer sur les effets immédiats de la convention collective des assistants maternels employés par des particuliers, ni vouloir améliorer davantage le statut des assistants familiaux, réduit à la portion congrue.

Au milieu du gué, il nous faut progresser vaille que vaille vers la rive, en prenant acte des quelques avancées offertes qui marquent une étape vers la reconnaissance et la professionnalisation des métiers d'assistants maternels et familiaux, même si nous regrettons l'absence d'une formation qualifiante et diplômante, seule garantie de professionnalisation de ces métiers.

Nos débats ont néanmoins permis quelques progrès concernant notamment la compensation des dépenses des collectivités - l'article 29 bis ayant été voté conforme par les deux assemblées -, la réorganisation des services, la revalorisation des rémunérations des professionnels et le financement de droits nouveaux, ainsi que l'accroissement des missions de formation, d'agrément et de contrôle. Toutefois, ces missions entraîneront des dépenses non négligeables, sans que le budget alloué à cette réforme ait été précisément évalué à ce jour. Nous serons particulièrement vigilants, le Sénat ayant prévu - et nous tenons à cette disposition - la consultation des principales assemblées élues dans le cadre de l'élaboration des très nombreux décrets d'application.

L'un des objectifs du projet de loi était de combler le déficit de reconnaissance des assistants maternels et familiaux, dont les situations diffèrent selon la nature de leur employeur - public ou privé - et le secteur dans lequel ils travaillent, libéral ou salarié. À cet égard, je m'interroge sur le statut applicable aux 34 000 assistants maternels agents non titulaires des collectivités locales. Le groupe socialiste est déçu que cette question soit restée, comme d'autres, sans réponse, bien que nous ayons tenté d'améliorer ce texte.

Quoi qu'il en soit, nous défendrons à nouveau nos amendements qui visent à fixer des critères nationaux d'agrément et un cadre national uniforme de la formation et des diplômes et à garantir le caractère qualifiant de la formation. Comment, en effet, se contenter de l'introduction d'une initiation au secourisme pour toute avancée et du renvoi au décret pour les dispositions relatives à la durée, au contenu, à l'organisation et au financement de la formation ? Nous proposerons également à nouveau l'allongement à six mois de la durée possible de la procédure d'agrément des assistants familiaux, qui jouent un rôle éducatif difficile et essentiel. Cette demande, qui fait l'objet d'une sollicitation particulière des conseils généraux, n'empêche pas que le délai soit plus court lorsque c'est possible.

Les revendications des professionnels en matière de protection sociale, de maladie, de maternité et de retraite n'ont pas été entendues. Sur ce point, tout reste à faire.

Quant aux parents, qui ne manquent pas de nous appeler à ce propos, ils sont désemparés face aux nouvelles obligations nées de la convention collective applicable aux particuliers employeurs et face au renchérissement brutal du coût journalier de la garde, car la référence à une rémunération horaire n'est ni prévue ni compensée dans la prestation d'accueil du jeune enfant. Le Gouvernement s'est engagé à reprendre la discussion sur ce point. Pouvez-vous, madame la secrétaire d'État, nous donner plus de précisions sur un éventuel calendrier, voire sur des pistes de réflexion ?

Compte tenu des multiples questions restées sans réponses et des attentes déçues, ce texte, en dépit des avancées qu'il comporte, ne peut être qu'une étape, malgré l'affichage politique que le Gouvernement ne manquera pas d'en faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la famille a profondément évolué au cours de ces dernières décennies. Pour répondre à cette évolution, il nous faut construire un nouveau mode d'accompagnement des parents, adapté à la société actuelle.

Aujourd'hui, et c'est heureux, la plupart des mères qui le souhaitent ont une activité professionnelle. Quant aux pères, ils sont de plus en plus présents dans l'éducation de leurs enfants. Cependant, 45 % des parents déclarent que le mode de garde auquel ils ont recours ne les satisfait pas. Pire, sur les 2,2 millions d'enfants de moins de trois ans que compte notre pays, 300 000 ne bénéficient d'aucun mode de garde identifié. Nous devons faire en sorte que cela change.

Il convient, pour cela, de développer la garde des enfants de moins de trois ans, en crèche ou chez une assistante maternelle. Cela nécessite, d'une part, de supprimer les contraintes qui pèsent sur les crèches privées pour que les maires de France qui le souhaitent puissent, à un moindre coût, doter leur ville de telles structures et, d'autre part, d'aider au développement des crèches d'entreprises.

Surtout, il convient de professionnaliser les assistants maternels et les assistants familiaux, qui offrent une solution de proximité bien adaptée aux attentes des parents. Nous ne pouvons donc qu'approuver l'objectif de ce projet de loi qui consiste à reconnaître les professions d'assistants maternels et d'assistants familiaux, en redéfinissant les modalités d'agrément et en renforçant les exigences en matière de formation. Il est indispensable de faire évoluer les droits de ces professionnels vers le droit commun, notamment en matière de rémunération, de temps de travail, de congés, de garanties en cas de licenciement et de retraite.

Les dispositions relatives aux assistants maternels permettront d'assurer une meilleure qualité du service. Elles concernent 1'agrément, son contrôle, la formation des professionnels, leur accompagnement et l'encadrement des relations entre parents et professionnels. Nous saluons en particulier la mise en place d'une nouvelle formation, plus longue, menant à la délivrance d'un certificat d'aptitude professionnelle « petite enfance ».

Le second volet de ce projet de loi est tout aussi important : il s'agit d'améliorer les conditions de travail des professionnels de la petite enfance et de l'enfance en tenant compte du caractère spécifique de leur activité. Les assistants maternels et familiaux l'attendaient avec impatience.

Le travail de nos collègues sénateurs me paraît aller dans le bon sens, en particulier l'institution d'un forfait annuel maximal d'heures travaillées permettant de laisser aux parents et à l'assistant maternel la liberté de déterminer ensemble des horaires qui respectent une moyenne hebdomadaire de 48 heures travaillées.

Par ailleurs, en ce qui concerne la rémunération et les horaires de travail des assistants maternels, il est bien et juste de garantir aux familles qu'elles n'auront pas à supporter une augmentation des frais de garde de leurs enfants excédant les aides apportées par la PAJE.

Mais la question du financement de ces nouvelles dispositions se pose. Ainsi que nous le regrettions déjà en première lecture, l'évaluation du coût des différentes mesures envisagées n'a manifestement pas été établie avec précision à ce jour puisque nous n'avons pu disposer d'aucune étude d'impact sur le calcul de ces charges nouvelles. Il est pourtant évident que de nouvelles charges vont peser sur les collectivités territoriales, dans la mesure où le temps de formation préalable ou concomitant des assistants maternels ou familiaux a doublé, triplé, voire quadruplé. S'y ajoutent de légitimes augmentations de salaire, droits à congés, remplacements nécessaires pendant les formations et améliorations en matière de retraite, très attendues par les assistantes maternelles. L'opération sera lourde pour les départements, dont les charges vont augmenter. Nous connaissons la situation dramatique des finances publiques, mais celle-ci ne doit pas constituer un prétexte pour reporter le poids de nouvelles dépenses sur les collectivités territoriales.

M. Alain Néri. Très bien !

M. Pierre-Christophe Baguet. N'oublions pas que le travail féminin contribue puissamment à la croissance du pays. Développer l'offre de garde à disposition des mères de familles, c'est leur permettre si elles le souhaitent d'exercer une activité professionnelle, c'est-à-dire de participer à l'activité économique et à la croissance de notre pays. Le Gouvernement a donc tout à gagner avec une telle mesure.

Les assistants maternels et les assistants familiaux remplissent réellement une mission de service public : les assistants maternels en assurant l'accueil personnalisé de nombreux enfants, les assistants familiaux en aidant des enfants en difficulté à retrouver leur équilibre psychologique et leur insertion dans la société. Les assistants maternels permettent également aux jeunes mamans - à leur convenance - de concilier leur vie personnelle de femme, leur vie de mère et leur vie professionnelle, ce qui demeure une préoccupation et même une difficulté pour de nombreuses familles.

Parce que cette réforme nous semble répondre aux attentes des assistants maternels et des assistants familiaux, parce qu'elle prend en compte l'intérêt de l'enfant, qui nous réunit tous, et les préoccupations de leurs parents, le groupe UDF votera ce projet de loi.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, mes chers collègues, lors de la discussion de ce texte sur les assistants maternels et les assistants familiaux en première lecture, le groupe des députés communistes et républicains s'était abstenu. J'avais alors indiqué que cette abstention avait valeur d'encouragement à améliorer un projet de loi qui, certes, permettait des avancées attendues depuis de nombreuses années par les professionnels de la petite enfance et par les parents, mais laissait trop de questions sans réponses sur de nombreux points,

Le parcours législatif de cette loi a pourtant été bien long. Il y avait urgence à donner un véritable statut aux 300 000 assistants maternels et aux 45 000 assistants familiaux de notre pays qui, depuis trop longtemps, vivent dans un flou juridique qui, en les maintenant à l'écart du droit commun du travail, contraint la plupart d'entre eux à la précarité et à des conditions de travail inadmissibles en l'absence de durée légale du travail.

Il y avait urgence à leur accorder la reconnaissance et la considération auxquelles ce métier devenu si important dans notre société leur donne droit. Il y avait aussi urgence à professionnaliser l'exercice de cette activité pour la rendre plus sûre aux yeux des parents et lui permettre de mieux correspondre à l'intérêt des enfants.

Je reconnais, madame la ministre, que votre texte a apporté des mesures positives sur certaines questions. Notre discussion en première lecture avait fortement contribué à lui apporter des modifications significatives.

Je pense notamment au fait que les assistants familiaux puissent désormais accueillir des enfants jusqu'à l'âge de vingt et un ans. Je pense également aux critères d'agrément nationaux pour les assistants maternels qui permettent d'évaluer de la même façon les candidats sur tout le territoire et de tempérer la notion subjective de « capacité éducative » dont l'application pourrait être différente d'un département à l'autre.

La fixation uniforme dans tout le pays du montant des indemnités et fournitures attribuées aux assistants maternels est une autre mesure positive à mettre à l'actif de notre assemblée.

En matière de formation, nous avions amélioré le dispositif que vous aviez prévu, en instaurant une formation qualifiante ou diplômante établie suivant des critères nationaux et en ajoutant une formation au secourisme. Nous avons enfin complété ce dispositif en incitant les départements à prévoir pendant les temps de formation un mode de garde de substitution adapté aux horaires des parents.

Pour rapprocher le statut de ces professions du droit commun du travail, nous avons également permis que les litiges avec les employeurs soient examinés dans les mêmes conditions que ceux concernant les autres salariés de droit privé et relèvent des conseils de prud'hommes.

Enfin, c'est à notre initiative que la durée minimale du repos quotidien des assistants maternels a pu être fixée à onze heures consécutives, ce qui consacre la reconnaissance des difficultés de leur travail et la nécessité d'assurer la qualité de l'accueil des jeunes enfants.

La deuxième lecture devant le Sénat a-t-elle été l'occasion de nouvelles améliorations de ce texte ? Force est constater que non, puisque le Sénat est revenu sur un grand nombre de dispositions favorables aux assistants maternels et familiaux que nous avions introduites, que ce soit sur l'uniformisation des salaires et une formation professionnelle reconnue sur tout le territoire, ou bien encore l'obtention de l'agrément à partir d'une grille nationale ou des indemnités et fournitures identiques dans chaque département.

Cette régression est encore plus sensible en ce qui concerne les dispositions relatives au droit du travail. Sous prétexte d'harmoniser ce projet de loi avec la convention collective nationale signée entre les assistants maternels et les particuliers employeurs, entrée en vigueur le 1er janvier dernier, le Sénat a modifié les mesures que nous avions adoptées concernant la rémunération de l'assistant familial en cas d'absence de l'enfant gardé, les congés des assistants maternels et la définition des indemnités et des fournitures à verser aux assistants familiaux.

Il a surtout assoupli les règles en ce domaine dans un sens moins protecteur pour les intérêts des salariés. C'est ainsi qu'il a considéré que le transfert du contentieux des contrats de travail vers les conseils de prud'hommes n'était pas souhaitable car il risquait d'allonger les délais de jugement, et que le nouveau décret définissant une norme nationale en matière d'indemnités et de fournitures ne répondait pas à l'esprit des lois de décentralisation.

De même, en ce qui concerne les horaires de travail, il a modifié l'équilibre que nous avions établi entre les légitimes revendications des assistants maternels et les attentes tout aussi légitimes des familles. Certes, concilier vie familiale et vie professionnelle suppose pour les familles de pouvoir faire garder leurs enfants non seulement pendant leurs propres horaires de travail, mais également durant le temps de trajet entre leur domicile et leur lieu de travail. Mais cela ne doit pas se faire au détriment des assistants maternels par un allongement excessif de la durée hebdomadaire de leur temps de travail, rendu possible par l'existence d'un rapport de forces entre l'employeur et le salarié qui ne joue évidemment pas en faveur de ce dernier.

Le Sénat vient pourtant de réintroduire cette disposition qu'il avait adoptée en première lecture. J'espère que notre assemblée saura rétablir au cours de cette deuxième lecture toutes les mesures qu'elle avait adoptées pour concilier au mieux les intérêts des familles et ceux des professionnels de la petite enfance.

Toutefois, même si nous revenions au texte issu des travaux de notre première lecture, il est évident que les questions qui avaient motivé notre abstention d'alors demeureraient.

En effet, malgré quelques avancées, votre texte, madame la ministre, ne permet pas une reconnaissance pleine et entière des métiers d'assistants maternels et d'assistants familiaux. Pourtant les attentes de ces professionnels, mais aussi de leurs employeurs, sont grandes. Un trop grand nombre de mesures prévues dans la loi risquent de les décevoir au moment de leur application concrète car elles sont renvoyées au domaine réglementaire.

C'est ainsi, par exemple, que nous légiférons sur des principes mais que nous ne savons rien du contenu réel des formations et du taux de rémunération. Nous sommes également dans l'incertitude pour savoir si la qualification obtenue aura une valeur nationale.

Qu'en est-il par ailleurs de la validation des acquis de l'expérience, qui constituerait pourtant un pas important dans la reconnaissance de ces professions ?

De même, votre texte ne permet toujours pas d'apporter de réponse précise sur le niveau minimum des salaires ni sur la réduction des inégalités de rémunération suivant les départements. La question des salaires des assistants familiaux employés par des personnes morales de droit privé, et d'une façon générale, la rémunération de l'ensemble des accueillants à titre permanent ou non, fait partie de ces points.

Pourtant, l'augmentation des salaires et la légitime évolution du mode de rémunération des assistants familiaux et maternels auraient certainement eu un impact positif sur l'attractivité du métier et la stabilité de cette profession que vous souhaitez promouvoir.

Rappelons-nous que le rapport d'avril 2002, qui reprenait les conclusions des groupes de travail animés par la direction générale de l'action sociale, avait mis en évidence les considérables différences de niveau de rémunération entre les départements.

Le rapport fait état de « la dispersion des salaires pouvant aller du simple au double par le biais de l'indemnité d'entretien, avec une moyenne nationale qui s'établit autour de 105 ou 110 fois le SMIC horaire par mois ». Or, votre projet de loi n'inclut aucune mesure détaillée de revalorisation salariale concernant les assistants familiaux employés par des personnes morales de droit privé, puisque la redéfinition de la structure même de leur rémunération est renvoyée à une mesure réglementaire.

Dès lors, comment poser le problème de l'indispensable revalorisation salariale de ces professions ? Comment amener le Gouvernement à prendre des engagements précis et concrets en matière salariale, sinon en mettant en débat cette question ?

J'aurais souhaité pouvoir le faire par voie d'amendement, mais celui que nous avions déposé sur ce point est tombé sous le coup de l'article 40.

Vous vous en êtes remis à la sagesse du Sénat, qui a adopté un amendement prévoyant que les principales associations d'élus seraient consultées sur les projets de décrets d'application. Cette garantie n'est que partielle car d'une part rien ne vous obligera à suivre les avis des dites associations, d'autre part les différents acteurs de la petite enfance auraient certainement préféré que la loi soit dès aujourd'hui plus précise.

Il en est de même des questions de financement, sur lesquelles nous avions insisté en première lecture et que la discussion au Sénat n'a pas permis de faire beaucoup avancer.

Le problème reste entier puisque de nombreuses mesures de ce projet de loi auront des incidences financières sur les parents employeurs et sur les conseils généraux sans que ceux-ci soient à même de les quantifier, dans la mesure où nous ne disposons toujours pas d'étude d'impact ni de chiffrage du coût de leur application.

Les compensations prévues par l'État - s'il y en a car cette question n'est toujours pas réglée - sont actuellement du domaine virtuel.

Enfin des questions importantes, que les organisations syndicales représentant les deux professions ont posées avec force et qui contribueraient à une véritable reconnaissance de ces métiers, ne sont pas abordées dans votre texte. Rien, en effet, sur les droits syndicaux, la protection sociale, les retraites et notamment la validation des périodes travaillées avant 1992.

En dernier lieu, vous ne répondez pas non plus aux préoccupations de nombreux assistants familiaux et assistants maternels employés par des collectivités locales qui souhaiteraient que s'engage une véritable réflexion sur la définition des cadres de métier de leur profession.

Au total, madame la secrétaire d'État, les assistants maternels et les assistants familiaux espéraient un véritable statut qui soit le signe de la reconnaissance et du respect auxquels ils ont droit. Mais ils restent, comme moi, sur leur faim, car si vous avez su revaloriser et professionnaliser leur métier, en revanche, sur de trop nombreuses questions vous n'êtes pas allée jusqu'au bout de la démarche.

En l'état actuel, nous ne pouvons donc que maintenir notre abstention.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, mes chers collègues, ce texte était d'une nécessité brûlante car le statut et le rôle des assistants familiaux et des assistants maternels avaient grandement besoin d'être précisés dans le pays. Le fait d'inclure dans le même texte la situation de ces professionnels et la place des familles contribuent toutefois à maintenir un certain flou que nous tenterons de dissiper.

Tout d'abord, il importe de souligner le rôle essentiel d'intégration que jouent les assistants familiaux pour les enfants en difficulté. Grâce à ces familles d'accueil, ces enfants ont souvent pu retrouver, en effet, toute leur place dans la société. Il faut donc remercier les assistants familiaux pour leur dévouement.

Les assistants maternels, quant à eux, sont de plus en plus nécessaires dans une société où les familles, souvent éclatées, ne peuvent plus assurer la garde des enfants, et où les femmes ont, elles aussi, le droit de souhaiter s'investir dans leur vie professionnelle.

Mme Muguette Jacquaint. Les hommes aussi ont besoin d'assistants maternels, monsieur Néri !

M. Alain Néri. Madame la secrétaire d'État, alors que tout le monde s'accorde à reconnaître que tout se joue dès la petite enfance, il est indispensable de prévoir un service et un accueil de qualité pour les enfants. Qui pourrait aujourd'hui prendre le risque de compromettre l'avenir de son enfant, et de négliger cet élément ? Or cet accueil de qualité passe forcément par une professionnalisation des assistants et donc par une formation de qualité. Avec ce texte, celle-ci est aujourd'hui reconnue et allongée. Par un amendement, nous avions également souhaité qu'elle soit qualifiante ou diplômante. Malheureusement, la commission n'a pas retenu notre proposition. Je le regrette car cela aurait permis une évolution des carrières, voire une autre orientation après un début dans ce métier, puisqu'il s'agit bel et bien d'un métier.

Madame la secrétaire d'État, nous nous préoccupons par ailleurs - je rejoins ici M. Baguet - qu'il n'y ait aucune évaluation des coûts des nouvelles mesures, lesquelles seront forcément à la charge des collectivités et en particulier des conseils généraux. Or vous ne pourrez pas faire l'impasse sur ce point. Les conseils généraux sont prêts à jouer tout leur rôle, mais il faut que l'État assume sa participation à la formation des assistantes maternelles.

Soulignons-le, il va revenir aux conseils généraux d'assurer le suivi de la formation et, par là même, le contrôle et la gestion de l'ensemble de cette profession et de son organisation. Je me réjouis donc qu'on en soit revenu à la disposition initiale qui prévoyait que la formation serait assurée par les conseils généraux.

Madame la secrétaire d'État, tout le monde s'accorde à reconnaître que les personnes s'occupant de très jeunes enfants doivent être bien formées. C'est précisément l'objectif que nous poursuivons s'agissant des assistants maternels. Mais avez-vous réfléchi au problème que pose la garde à domicile ? La formation demandée aux assistants maternels gardant des enfants chez eux doit-elle être différente de celle qu'on est en droit d'attendre pour les personnes gardant des enfants au domicile des parents ?

Cela nous ramène à la définition de l'AGED. S'il s'agit bel et bien d'une allocation de garde d'enfant à domicile, il convient de recentrer essentiellement l'action des personnes intervenant à domicile sur la garde et le suivi des enfants. Elle ne doit pas être dévoyée par les tâches ménagères. Le rôle d'employé de maison est tout à fait respectable, mais il est différent de celui d'assistant maternel.

Madame la secrétaire d'État, ce texte ne règle pas tout et nous aurons besoin de précisions. Ainsi que l'a rappelé Patricia Adam, nous sommes très souvent interrogés par les familles. Il faudra donc prévoir une information claire et précise sur les droits des assistants maternels. Ces personnes, par leur volonté de participer à l'éducation des enfants, par leur engagement, leur dévouement et leurs compétences, jouent un rôle essentiel dans la première éducation. Mais les familles ont aussi le droit de savoir quelles seront leurs charges.

Il conviendrait de prévoir une bonne information sur les droits respectifs des familles et des assistants maternels, s'agissant en particulier des rémunérations et des congés. Nous ne pouvons les laisser dans le doute qui ne serait bon ni pour les uns ni pour les autres. Il y va de l'harmonie entre les assistants maternels et les familles qui leur confient leurs enfants.

Madame la secrétaire d'État, ce texte comporte de nombreuses avancées. Mais, Mme Adam et Mme Jacquaint l'ont dit, il reste encore beaucoup à faire. C'est pourquoi, tout en nous félicitant de ces premières avancées, nous nous abstiendrons sur ce texte que nous pensons pouvoir encore améliorer ensemble.

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je tiens tout d'abord à saluer une fois encore le travail tout à fait remarquable qu'a accompli votre rapporteure.

Madame Marchal-Tarnus, vous avez eu raison d'insister sur l'importance de ce texte et sur la nécessité de donner aux assistants familiaux et maternels un véritable statut. En effet, les enjeux sont multiples. Vous avez notamment souligné l'implication de ce texte dans le renforcement de la protection de l'enfance. Et je m'associe à votre propos sur ce point particulièrement sensible.

Ce texte, et c'est l'un de ses atouts, s'est efforcé de concilier l'exercice de ces métiers, et la souplesse qui doit le caractériser, avec la recherche de la clarification statutaire. Oui, madame la députée, l'exercice de l'emploi c'est également l'évolution de l'emploi, c'est l'emploi en perspective, c'est l'emploi dans la carrière, avec la formation et la validation des acquis de l'expérience.

Madame Adam, je vous remercie d'avoir noté les avancées contenues dans ce texte en matière de formation ou de droit du travail. Comme vous, je pense qu'une harmonisation des critères d'agrément, notamment, est nécessaire sur l'ensemble du territoire.

Concernant la rémunération des assistants familiaux, je veux vous rappeler ici les garanties qui ont déjà été apportées par Philippe Douste-Blazy et qui déboucheront sur une forte revalorisation. En effet, la future rémunération des assistants familiaux dépendra moins du nombre d'enfants accueillis, grâce à sa division en deux parts, l'une correspondant à la fonction globale d'accueil, et l'autre à l'accueil même de l'enfant. Cette nouvelle structure de rémunération permettra de réduire la précarité de ces professionnels. Les décrets clarifieront ces différents éléments, mais l'esprit est d'ores et déjà fixé.

Monsieur Baguet, vous avez rappelé qu'il existe à ce jour 300 000 enfants - et ce nombre est considérable - dont le mode de garde n'est pas clairement identifié. C'est pourquoi Philippe Douste-Blazy a pris l'option extrêmement volontariste, notamment dans son intervention sur la France des proximités, de développer des modes de garde alternatifs afin de proposer une offre aussi large et personnalisée que possible, en particulier dans le cadre des crèches d'entreprise, mais aussi avec le ticket-crèche, innovation tout à fait majeure.

Vous avez fort justement rappelé l'importance de la mission de service public rendue par les assistants maternels et familiaux. C'est tout l'esprit du texte initial, que vous avez su, au fil des débats, enrichir largement.

Concernant le coût de la réforme en général, le Gouvernement a cherché à apporter des réponses visibles mais aussi réalistes, justes et concrètes pour répondre aux attentes des professionnels et des parents qui recourent aux services des assistants maternels. Il l'a fait aussi avec le souci de ne pas alourdir exagérément les coûts pour les familles, les conseils généraux, pour la branche famille de la sécurité sociale et pour les communes. Bien entendu, cette réforme a un coût et il est légitime que chacun, à sa mesure, y prenne sa part.

Sachez en tout cas, monsieur le député, qu'avec Philippe Douste-Blazy, je salue la qualité des échanges qui ont eu lieu.

Madame Jacquaint, vous avez rappelé l'ensemble des améliorations apportées par votre assemblée sur le texte. Le Gouvernement partage votre sentiment. Et je tiens à renouveler les remerciements du ministre pour votre implication et celle de tous les députés ici présents.

Vous m'avez également interpellée sur la mise en œuvre du texte. Je sais que le ministre s'est déjà engagé devant vous à faire en sorte que les textes réglementaires paraissent rapidement afin de permettre une application rapide de ce texte attendu par les familles et les professionnels.

En revanche, sur le sujet plus particulier de la formation, je ne vous rejoins pas, madame la députée, parce que, en ce qui concerne notamment l'accès au CAP petite enfance par la validation des acquis de l'expérience, le texte comporte des avancées tout à fait considérables, qui permettront aux assistants maternels et familiaux, comme le prévoit la loi du 17 janvier 2002, de bénéficier d'une véritable qualification professionnelle qui fera l'objet d'une reconnaissance sur l'ensemble du territoire.

Monsieur Néri, vous avez salué les avancées du texte et remarqué, à juste titre, combien la qualité de l'accueil est primordiale pour l'enfant, puisque c'est dès son plus jeune âge que son avenir se joue. Or, ce souci est au cœur du projet de loi, qui marque un progrès en matière d'agrément et de formation, laquelle, dans une démarche réaliste, se fera en deux temps : la formation en amont et la formation en aval.

Quant au coût de la mesure, je vous renvoie à la réponse que j'ai faite à M. Baguet qui m'a posé la même question.

Discussion des articles

M. le président. J'appelle maintenant dans le texte du Sénat les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Article 1er B

M. le président. Sur l'article 1er B, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1 et 16.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 1.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. J'ai déjà abordé la question au cours de mon intervention.

Je tiens seulement à rappeler que les relais assistants maternels ont pour mission essentielle d'informer les familles sur les possibilités d'accueil des enfants et les assistants maternels sur la spécificité de leur métier.

Alors que le projet de loi a pour objet la requalification d'une profession en la distinguant des autres modes d'accueil des enfants, il serait contraire à son esprit que d'y inclure des personnes dont on cherche précisément à distinguer les assistants maternels, notamment les employés de maison qui n'ont pas vocation à garder des enfants.

M. Alain Néri. Très bien !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. À moins d'être contre le projet de loi, il me paraît fondamental, pour respecter l'esprit du texte ainsi que la profession d'assistant maternel, de ne pas mêler au sein des relais d'assistants maternels une autre fonction que celle qui assure ce mode d'accueil privilégié des enfants auxquels les parents tiennent.

C'est pourquoi l'amendement n° 1, comme l'amendement n° 16, vise à supprimer le dernier alinéa de l'article L. 214-2-1 du code de l'action sociale et des familles. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Patricia Adam. En effet, l'amendement n° 16 est identique à l'amendement n° 1.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Ces amendements visent à supprimer une modification apportée au texte par le Sénat, modification qui avait paru intéressante au Gouvernement.

L'évocation par M. Néri, au cours de son intervention, du cas particulier du mode de garde à domicile pouvait apparaître comme une possibilité. Mais je comprends également le souci qui est le vôtre. Je tenais simplement à préciser la sensibilité particulière du Gouvernement en la matière.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La sagesse du Gouvernement me convient parfaitement : je rappelle en effet que le Gouvernement avait émis un avis favorable en première lecture à l'Assemblée.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Nous partageons le point de vue de Mme la rapporteure.

Au travers de ce projet de loi, nous souhaitons la reconnaissance d'une véritable professionnalisation des assistants maternels. Certes, aujourd'hui, la bonne volonté, le dévouement et l'amour des enfants sont toujours indispensables pour exercer ce métier, mais ils ne suffisent plus. Une formation est indispensable, que nous souhaiterions qualifiante, voire diplômante.

Monsieur le président, nous allons voter ces deux amendements identiques, dont l'un a été rédigé en commun par Mme Adam et par les membres du groupe socialiste. Mais il serait souhaitable qu'un autre texte nous permette bientôt d'examiner la garde des enfants à domicile, afin que celle-ci soit assurée par des personnels agréés par le conseil général, comme c'est le cas pour les assistants maternels aujourd'hui.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 1 et 16.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je mets aux voix l'article 1er B, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er B, ainsi modifié, est adopté.)

Article 5

M. le président. Sur l'article 5, je suis saisi de deux amendements, nos 2 et 17, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 2.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement vise à respecter la volonté du ministre, à laquelle nous adhérons, qui tient à ce que l'équité règne entre les assistants maternels et familiaux sur l'ensemble du territoire. C'est ce qui rend nécessaires des critères nationaux définis par décret en Conseil d'État, quitte à ce que les présidents des conseils généraux puissent évidemment, compte tenu des cas particuliers, émettre des dérogations.

Mme Muguette Jacquaint. Bien.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 17.

Mme Patricia Adam. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Je partage évidemment le point de vue de Mme la rapporteure, selon lequel le décret qui précisera les procédures d'agrément des assistants maternels et des assistants familiaux doit prévoir des critères généraux qui seront valables sur l'ensemble du territoire.

Le fait d'évoquer des critères nationaux d'agrément définis en Conseil d'État doit avoir pour objectif l'harmonisation des pratiques des services départementaux. Ces critères nationaux définiront les grands domaines obligatoires et exclusifs de l'évaluation faite dans le cadre de l'agrément. Dans cette perspective, il devra néanmoins être possible de tenir compte des réalités propres à telle ou telle configuration locale, ce qui, dans certains cas, se révélera tout à fait indispensable, notamment en matière de logement : les conditions générales de surface de logement ne peuvent évidemment pas être les mêmes d'un endroit à l'autre du territoire.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. J'ai bien compris votre réponse, madame la ministre. Je tiens néanmoins à rappeler que nous attendons depuis un an cette discussion.

Aujourd'hui que nous abordons la question des critères retenus pour l'agrément, il me paraît urgent que le décret paraisse car les personnels assistants maternels et familiaux attendent avec impatience la mise en application des textes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

En conséquence du vote de l'amendement n° 2, l'amendement n° 17 tombe.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 3 et 18.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 3.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement vise à exprimer la reconnaissance de la nation et du Gouvernement envers la qualité professionnelle des assistants maternels et familiaux en les intégrant dans les équipes pluridisciplinaires, aussi bien pour les conditions d'agrément que pour le suivi et les contrôles de la profession. On ne saurait expliquer les raisons pour lesquelles il y aurait, d'un côté, les services sociaux des départements qui seraient rémunérés et, de l'autre côté, une sous-catégorie de professionnels qui seraient présents à titre bénévole.

Mme Muguette Jacquaint. Très juste !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. C'est une forme de mépris pour la profession, à laquelle la commission n'adhère pas.

M. le président. La parole est à Mme Adam, pour soutenir l'amendement n° 18.

Mme Patricia Adam. Cet amendement vise à prendre en compte la réalité du travail fourni. Puisque le projet de loi vise à une véritable professionnalisation des assistants maternels, cet amendement permet un début de reconnaissance professionnelle - un début seulement, nous y reviendrons.

Nous sommes en accord avec la commission sur ce point et nous ne comprenons pas comment un projet de loi peut évoquer une présence « à titre bénévole ».

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Favorable.

La rémunération d'un tel service paraît tout à fait juste au Gouvernement.

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. Alain Néri. C'est une mesure d'équité !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 3 et 18.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je suis saisi d'un amendement n° 19.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. Dans le texte qui a été amendé par le Sénat, il est précisé que les assistants maternels ou familiaux qui seront consultés pour donner un avis sur l'agrément devront disposer d'une expérience professionnelle d'au moins dix ans et être titulaires d'un des diplômes prévus par voie réglementaire.

Or une telle exigence se révèle aujourd'hui impossible à satisfaire puisqu'il n'existe pas encore de formation. C'est pourquoi notre amendement vise à substituer le mot « ou » au mot « et ». Dans le cas contraire, il faudra attendre dix ans avant que ce genre de collaboration ne puisse être demandée aux assistants maternels ou familiaux.

J'ajoute que je n'ai toujours pas compris la raison pour laquelle notre amendement a été refusé par la commission.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Madame Adam, je comprends très bien l'esprit dans lequel vous avez déposé cet amendement. Il a en effet été repoussé par la commission et je tiens à expliquer pourquoi.

Si on permet l'alternative - le diplôme ou l'expérience -, des jeunes diplômés pourront avoir la responsabilité de juger et contrôler des professionnels qui auront déjà plusieurs années d'ancienneté. En cumulant les deux exigences, le projet de loi de loi cherche à conjuguer qualification professionnelle par un diplôme et expérience. C'est cette double exigence qui légitime la participation à l'équipe pluridisciplinaire : si l'une des deux fait défaut, cette légitimité sera sujette à caution. L'expérience seule ne permet pas de prouver que l'on peut s'élever à la hauteur d'un diplôme ; de même, le diplôme seul ne suffit pas à juger d'une profession. Si nous avons réussi à imposer que les assistants matériels et familiaux soient dans les équipes pluridisciplinaires, c'est en vertu de cette double exigence.

C'est pourquoi, madame Adam, je vous demande de vous ranger à mon avis. Je suis convaincu que tel est l'intérêt des professionnels.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Les arguments que Mme la rapporteure vient de développer sont tout à fait convaincants. Il ne s'agit pas d'une alternative, mais de la nécessité de cumuler diplôme et expérience professionnelle antérieure.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Sur le fond, nous sommes d'accord. Mais, à l'heure actuelle, une telle mesure est inapplicable.

Je comprends bien que l'adoption de cet amendement permettrait à des professionnels récents de donner leur avis dans le cadre des équipes pluridisciplinaires. Mais, aujourd'hui, pour les autres professions dans le cadre desquelles des agréments sont prévus, cette double exigence n'est pas demandée. On n'exige pas, par exemple, des travailleurs sociaux habilités à participer à la validation des agréments une telle ancienneté professionnelle. Pourquoi ferait-on une différence ? Si la formation permet une véritable professionnalisation, celle-ci pourra se voir reconnue sans ancienneté professionnelle. Je ne pense pas que votre argument soit pertinent.

Nous sommes en revanche d'accord sur le fond : en l'état actuel des choses, ce n'est pas applicable.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Vous avez mille fois raison, madame Adam : c'est bien parce que cette expérience professionnelle fait défaut dans les services sociaux que nous intégrons les assistants maternels et familiaux aux équipes pluridisciplinaires. Cela manquait, à l'évidence, et l'on pouvait avoir le sentiment que les services sociaux jugeaient ces métiers sans en avoir une grande connaissance.

Toutefois, je ferai valoir un deuxième argument : il se peut que, au lendemain de la promulgation de la loi, tout le monde ne réponde pas aux critères énoncés dans l'article - encore que, sur le terrain, beaucoup d'assistants maternels bénéficient de la VAE. Il est en revanche certain que la simplification administrative que le Gouvernement compte mettre en œuvre facilitera l'accès à la VAE. Il y aura sans doute un petit intervalle de temps, mais la loi doit-elle gérer le présent immédiat ? Sommes nous là pour faire une loi toutes les cinq minutes, ou pour assurer l'avenir de la profession sur le long terme ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous en venons à l'amendement n° 4, de la commission. Sauf erreur de ma part, il s'agit de revenir au texte voté par l'Assemblée en première lecture, madame la rapporteure...

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. En effet, monsieur le président.

M. le président. Le Gouvernement y est-il favorable ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 29.

La parole est à M. Pierre Bédier, pour le soutenir.

M. Pierre Bédier. Cet amendement vise à introduire une disposition particulière pour les zones urbaines sensibles.

Je félicite le Gouvernement pour la qualité de son projet de loi et Mme la rapporteure pour les améliorations qu'elle y a apportées. Reste que cet excellent texte ne peut s'appliquer sur l'ensemble du territoire national du fait du caractère très particulier des quartiers d'habitat difficile, confrontés de surcroît à une forte stigmatisation. En effet, il ne peut y avoir rencontre entre l'offre des assistants maternels qui y habitent et la demande des parents qui n'y habitent pas. De peur d'exposer leurs enfants aux comportements illicites ou violents qu'ils associent à ces quartiers, ceux-ci n'osent pas les y faire garder.

Il nous semble donc nécessaire de confier à des assistants maternels, sur la base du volontariat, un lieu aménagé par la mairie et fortement encadré par le système, puisqu'il serait agréé conjointement par le conseil général et la caisse d'allocations familiales. Ce dispositif, j'y insiste, serait limité aux zones urbaines sensibles, lesquelles sont définies par le législateur : il n'y a donc aucun risque de dérive, et nous apporterions une réponse à un véritable problème. Je suis l'élu d'un de ces territoires défavorisés et stigmatisés et il est de mon devoir de vous dire que sans cette disposition, une excellente loi ne sera pas applicable à ces zones.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Je comprends très bien votre motivation, monsieur Bédier, et votre volonté d'aider les assistants maternels qui ne trouvent pas d'employeur parce qu'ils habitent dans des zones sensibles. Je vais cependant tenter de vous prouver que le dispositif que vous proposez n'est de l'intérêt ni des assistants maternels ni des familles ni des mairies.

Si nous privilégions la garde au domicile d'un assistant maternel, c'est qu'elle présente à la fois l'avantage objectif d'une qualité professionnelle reconnue et l'avantage subjectif d'un accueil chaleureux dans l'appartement où vit l'assistant maternel. Rien ne peut remplacer l'humanité d'un lieu de vie où l'enfant se retrouve dans un cadre familial en compagnie d'une personne qualifiée. La valeur ajoutée que représentent les assistants maternels, c'est aussi l'atmosphère familiale qu'ils peuvent offrir. Ils sont à même de porter une attention particulière à chaque enfant, puisqu'ils ne peuvent en accueillir plus de trois simultanément. L'enfant est véritablement au cœur de leurs préoccupations.

Votre dispositif, monsieur le député, ne répond pas non plus à l'intérêt profond des assistants maternels. Une partie importante de leur rémunération - parfois plus des trois quarts - provient en effet des déductions fiscales liées à l'utilisation de leur domicile : deux heures de SMIC par jour leur sont déduites, alors que le plancher de rémunération est de 2,25 heures de SMIC. S'ils exercent hors de leur domicile, ils perdront le droit à ces déductions et devront de surcroît acquitter des frais de déplacement et contracter une police d'assurance complémentaire, car la garantie au titre de la responsabilité civile est liée au domicile. Ce n'est donc pas leur intérêt financier. En touchant au statut général, on risque de mettre à mal la spécificité et l'esprit de leur profession au seul bénéfice d'un petit nombre. Et où trouverait-on les locaux mis à disposition ? Je vous rappelle que le Sénat a bien précisé que les assistants maternels bénéficieront d'une priorité dans l'affectation des logements sociaux.

Enfin, ce n'est pas l'intérêt des mairies. Ce texte vise à offrir une qualification et des perspectives de carrière au plus grand nombre de personnes possible, afin de faire naître de plus en plus de vocations chez les jeunes. Il permettra donc de pallier le déficit dont souffrent certaines communes. Au rebours, l'amendement risque de mettre les mairies en danger : à qui incombera la responsabilité d'un éventuel accident dans le cadre du lieu aménagé ? Faudra-t-il que des fonctionnaires en contrôlent en permanence la sécurité ? Et qui arbitrera les conflits entre assistants maternels ? La mairie devra-t-elle instituer une hiérarchie, avec tous les problèmes que cela peut impliquer ?

Un des avantages de la profession d'assistant maternel est de disposer d'horaires très élastiques. Mais ce n'est un avantage que si l'on reste à son domicile, d'autant que certains assistants maternels ont choisi cette profession parce qu'ils ont eux-mêmes un enfant en bas âge. Leur faudra-t-il emmener cet enfant dans le local aménagé par la mairie, pour le ramener à la maison à neuf heures du soir ? Alors que vous voulez leur rendre service, vous risquez d'imposer à ces personnes des contraintes matérielles où je vois presque un commencement d'esclavage. (Murmures sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est pourquoi je rejette cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Le Gouvernement comprend votre point de vue, monsieur Bédier : vous cherchez par cet amendement à remédier à la pénurie de l'offre de garde dans un contexte urbain spécifique. Mme la rapporteure, pour sa part, a bien mis en évidence les difficultés que peut présenter le dispositif proposé. Si M. Douste-Blazy est particulièrement soucieux du développement de modes de garde innovants, comme il l'a encore rappelé récemment en présentant le programme d'action « La France des proximités », le Gouvernement ne peut néanmoins vous suivre, monsieur le député, eu égard au caractère particulier de ce texte qui tend à définir le statut des assistants maternels et familiaux. Il s'en remet donc à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Cet amendement pose un problème de fond dont nous avons longuement débattu en première lecture, en présence de M. Douste-Blazy. À la faveur d'une suspension de séance, nous étions même arrivés pratiquement à une rédaction de consensus.

Tel qu'il est rédigé, l'amendement est difficilement acceptable car il laisse en suspens de nombreuses questions. Il n'est guère possible, à ce stade de la discussion, de le réexaminer, mais nous devons poursuivre notre réflexion. De trop nombreuses personnes - essentiellement des femmes, j'en conviens, madame Jacquaint, mais pourquoi pas des hommes ? (Sourires) - qui pourraient devenir assistants maternels ne le peuvent pas en raison des critères de conditions d'accueil fixés pour l'agrément délivré par les conseils généraux. Un logement par trop précaire interdit donc l'accès à cette profession à des personnes qui ont pourtant les qualités, le talent et la formation pour l'exercer.

Vous posez une bonne question, monsieur Bédier, mais nous ne disposons pas des bonnes réponses. Nous ne pourrons donc voter votre amendement.

Mme Patricia Adam. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Il me paraît en effet important de rappeler le débat que nous avons eu en première lecture sur l'agrément.

L'amendement de M. Bédier et de Mme Brunel procède d'une bonne intention : permettre aux assistants maternels de travailler dans un bon environnement, dans des logements adaptés, meublés et équipés, voire dans des pavillons. Mais voyons la réalité ! Dans mon seul département, il manque 50 000 logements et il nous est déjà demandé d'accorder la priorité pour le logement aux femmes victimes de violences et aux familles ayant un enfant présentant un handicap.

Comment pouvons-nous aujourd'hui répondre à cette demande ?

Le manque de logements rend ce dispositif inapplicable. Des efforts doivent être réalisés dans ce domaine, je vous le concède. Pour autant, ce ne sont pas les interventions en faveur de la construction de logements qui ont manqué dans cet hémicycle ni les mesures pour éviter la constitution de quartiers « stigmatisés » comme il en existe tant aujourd'hui. Certaines villes ont refusé de construire sur leur territoire des logements sociaux ; or il n'y pas que des délinquants ou des personnes infréquentables dans ce type de logements.

Si cet amendement était adopté, la municipalité qui se verrait dans l'impossibilité de mettre à disposition un local permettant un accueil des enfants dans de bonnes conditions en porterait la responsabilité.

Plusieurs députés du groupe de L'Union pour un mouvement populaire. Quelle caricature !

Mme Muguette Jacquaint. Or il existe bien d'autres causes à cette impossibilité.

Mme Patricia Adam. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. Pierre Bédier.

M. Pierre Bédier. Je serai bref, monsieur le président. Je vous remercie d'avoir permis à ce débat d'importance d'avoir lieu tout comme je remercie le Gouvernement de s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée.

Mme la rapporteure a - ô combien ! - raison de souligner l'importance de privilégier ce mode de garde familiale. Mais c'est bien parce qu'il faut le privilégier que les crèches ne constituent pas une alternative. J'ai trouvé sa plaidoirie d'autant plus brillante qu'elle abondait dans le sens de notre amendement.

Elle a exprimé des inquiétudes concernant les déductions fiscales et les horaires. Elle craint que cela ne plaise pas aux assistants maternels. Mais, madame la rapporteure, peut-être avez-vous raison, mais peut-être aussi avez-vous tort. Ni vous ni moi ne le savons.

Deux mots sont sacrés dans cet hémicycle. Le premier est liberté ! Laissons donc la liberté jouer. Aucun assistant maternel ne sera contraint d'adopter ce mode de garde. Le second est égalité et il inspire cet amendement. Si la loi est adoptée sans la disposition que nous proposons, elle s'appliquera dans la quasi-totalité du territoire... à l'exception des quartiers sensibles, stigmatisés. Cet amendement n'a pas d'autre vocation que de rétablir l'égalité, et ce de façon très rapide.

Madame la rapporteure, vous avez évoqué l'engagement de la responsabilité des maires en cas d'accidents. Je vous souhaite, madame, d'être un jour maire...

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. C'est fait !

M. Pierre Bédier. ...car c'est le plus beau des mandats. Or un maire, lorsqu'il se lève le matin, sait qu'il va prendre des risques. Laissons donc les maires en prendre ! D'ailleurs, il existe des compagnies d'assurance qui couvrent ce genre de risques.

Il est vrai qu'il existait une autre solution : loger les assistants maternels hors des quartiers défavorisés. D'abord, ils ne le souhaitent pas toujours. Il ne faut pas croire que les personnes qui habitent un quartier stigmatisé veulent obligatoirement en partir. Ensuite, lorsque ces personnes n'exerceront plus leurs fonctions d'assistant maternel, seront-elles obligées de rendre leur logement ? Cette solution me paraît trop compliquée à gérer.

Voilà pourquoi, monsieur Néri - et j'en suis confus -, j'ai dû rompre le consensus auquel nous étions arrivés. J'ai interrogé les assistants maternels et leurs représentants et j'ai compris leurs inquiétudes : ils ne veulent pas qu'à l'occasion de cet amendement, la spécificité de leur métier soit remise en cause. J'ai donc proposé une nouvelle rédaction de l'amendement afin de limiter le dispositif proposé aux assistants maternels habitant dans des zones urbaines sensibles.

Enfin, je considère que le législateur ne peut pas tout régler dans le détail. La loi fixe des règles générales, dans le respect des principes de liberté et d'égalité. Elle ne règle pas les points de détail. C'est pour cela que l'amendement renvoie à la sagesse du Gouvernement et à la discussion avec les partenaires syndicaux, c'est-à-dire au décret. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Permettez-moi de répondre d'un mot, monsieur le président.

M. le président. Je vais vous donner la parole, madame la rapporteure, mais reconnaissez que j'ai largement permis au débat de se dérouler, d'autant qu'il s'agit d'un examen en deuxième lecture !

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Je vous en remercie, monsieur le président.

Au mot liberté, monsieur Bédier, il faut ajouter celui de responsabilité. Et, en tant que députée, je ne prendrai pas la responsabilité de mettre en cause l'harmonie d'un statut professionnel. Oui à la liberté, mais oui aussi à la responsabilité. Et j'en assume les conséquences.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je vais suspendre la séance quelques instants.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures quinze, sous la présidence de M. Éric Raoult.)

PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Article 6

M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi d'un amendement n° 20.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. L'amendement n° 20, tout comme le n° 21 qui le suit et qui est un amendement de repli, vise à fixer à six mois le délai d'instruction du dossier d'agrément des assistants familiaux, comme le demandent l'ensemble des départements. Une durée de quatre mois est trop courte pour évaluer la qualité d'une profession qui est particulièrement difficile et qui demande une qualification particulière.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 31, 21 et 15, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme la rapporteure, pour défendre l'amendement n° 31.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Nous sommes arrivés, dans le cadre de la commission, à un accord avec Mme Adam.

Afin de parvenir à une enquête plus complète, cet amendement vise à prévoir que le délai de quatre mois pour l'instruction du dossier d'agrément des assistants familiaux peut être prolongé, après décision motivée du président du conseil général, de deux mois supplémentaires.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour défendre l'amendement n° 21.

Mme Patricia Adam. J'ai déjà défendu cet amendement. De plus, nous sommes d'accord sur la proposition discutée en commission.

M. le président. La parole est à M. Yves Simon, pour soutenir l'amendement n° 15.

M. Yves Simon. Peu de choses séparent ces amendements.

Dans certains cas, il peut être nécessaire d'approfondir les critères qui permettront de formuler un agrément en toute sécurité.

Dans ce sens et dans l'intérêt de l'enfant, l'introduction de la possibilité d'un délai supplémentaire de deux mois apparaît indispensable. La décision doit être dûment motivée par le président du conseil général.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 21 et 15 ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. L'amendement n° 31 adopté par la commission satisfait l'amendement n° 21.

La commission comprend parfaitement le souci exprimé par M. Simon. Mais l'amendement n° 15 a été repoussé par la commission. En effet, nous qui sommes souvent accusés de lourdeurs administratives, nous voulons laisser beaucoup de libertés aux présidents des conseils généraux.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 31 et défavorable aux amendements nos 21 et 15.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 21 et 15 tombent.

Je suis saisi d'un amendement n° 14.

La parole est à M. Yves Simon, pour le soutenir.

M. Yves Simon. Actuellement, les notifications d'agrément sont portées à la connaissance des maires. Or comme certaines communautés de communes mettent en place des politiques « jeunesse » sur leur territoire, la transmission d'une telle information au président de la communauté de communes concernée apparaît aujourd'hui indispensable pour une meilleure approche des véritables besoins en matière d'accueil des jeunes enfants.

Nous sommes conscients du risque couru par certaines communautés rurales de délocalisation de la scolarisation des enfants si les assistants sont installés dans une commune voisine.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission. Les communautés de communes n'ont pas vocation à s'occuper des modalités de garde d'enfant. Il nous semble de plus inutile d'alourdir la procédure.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Madame la rapporteure, le Gouvernement ne peut pas vous suivre sur ce point. Il est, en effet, favorable à l'amendement n° 14.

Les communautés de communes, comme vous le savez, se dotent parfois de la compétence d'accueil des jeunes enfants. Il est donc tout à fait normal de suivre la proposition de M. Simon.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. On a pu constater que des communautés de communes s'étaient octroyées cette compétence. Il faudrait dans ce cas faire parvenir la décision d'agrément à la communauté de communes, et non à la mairie. Sinon, on risque d'alourdir le processus.

Mme Muguette Jacquaint. C'est pour une plus grande transparence !

M. le président. La parole est à M. Yves Simon.

M. Yves Simon. Je ne pense pas que cela alourdisse la procédure, si j'en juge par les avis des conseils généraux et si l'on considère le nombre de communautés de communes par département.

Madame la rapporteure, des communautés de communes se dotent aujourd'hui de la compétence « petite enfance », en complémentarité des conseils généraux.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 35.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement vise à prévoir dans les relais assistants maternels une formalité de publicité de la liste des assistants agréés, pour que les parents puissent être informés des coordonnées des professionnels en toute objectivité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

Le souhait de Mme la rapporteure est satisfait par la rédaction du projet de loi. Les relais assistants maternels font partie des services chargés d'informer les familles qui seront destinataires des listes d'assistants maternels agréés. Je ne vois cependant pas d'objection à le préciser une nouvelle fois.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 32.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Actuellement, il n'est pas prévu d'affichage des listes des assistants maternels agréés. Il faut les demander, ce qui entraîne certaines formalités. Par cet amendement, nous demandons que ces listes soient affichées.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Je comprends, madame la rapporteure, votre souci que soient informées en toute objectivité les familles afin qu'elles connaissent l'ensemble des assistants maternels agréés susceptibles de répondre à leurs besoins d'accueil.

Toutefois, les coordonnées professionnelles des assistants maternels se confondant avec celles de leur domicile privé, je ne suis pas sûre, compte tenu du nécessaire respect des libertés individuelles, qu'il soit possible de les afficher sans l'accord des intéressés.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Avec leur accord !

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)

Article 7

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 7.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Actuellement, les assistants familiaux doivent suivre au minimum 120 heures de formation initiale dans un délai de trois ans suivant leur premier contrat de travail.

Le projet de loi que nous examinons prévoit qu'ils devront bénéficier d'un stage préparatoire dans les deux mois précédant l'accueil du premier enfant au titre du premier contrat de travail. Il prévoit aussi une formation qualifiante qui se déroulera également en cours d'emploi.

Cette formation comportera un volet pratique et théorique d'une durée assez longue pour conduire à un premier niveau de certification, même si celle-ci n'est pas obligatoire pour exercer.

Le problème du financement se posera, ainsi que celui de la rémunération des personnels dans le cadre de la formation en cours d'emploi et avant l'accueil du premier enfant. Le problème de leur remplacement se posera également.

Il est vraisemblable que la partie des fonds disponibles au titre des cotisations de formation continue ne suffira pas.

C'est la raison pour laquelle je pense qu'il faut préciser que ces charges incombent au département dans le cadre de ses compétences en matière de tarification des institutions sociales et médico-sociales. Les employeurs étant, par ailleurs, tenus d'assurer l'accueil des enfants pendant l'absence des assistants familiaux en formation obligatoire, il est nécessaire qu'ils puissent bénéficier des financements correspondants.

Il me semble que cette charge supplémentaire imposée aux départements ne devrait pas poser de problème étant donné que l'État s'est constitutionnellement engagé - à moins que je n'aie mal compris - à compenser à l'euro près tout transfert de charges. Toutefois, madame la secrétaire d'État, cela ne me paraissait pas aussi évident que cela étant donné votre réponse à ce sujet. Il s'agira de charges supplémentaires et il serait logique que l'on assiste à une compensation à l'euro près.

(M. Jean Le Garrec remplace M. Éric Raoult au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN LE GARREC,

vice-président

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, inscrit sur l'article 7.

M. Alain Néri. Je souscris tout à fait à l'argumentation de Mme Muguette Jacquaint.

Nous pensons que la formation est absolument indispensable. La formation des assistants familiaux sera plus longue et à la charge des conseils généraux. Nous souhaiterions que Mme la secrétaire d'État puisse nous rassurer.

Si, comme nous le répète à l'envi M. Copé, ce transfert de charges est compensé à l'euro près, nous serons pleinement satisfaits. Une incertitude demeure cependant. Pouvez-vous nous assurer, madame la secrétaire d'État, en vous appuyant sur l'amendement que M. Fourcade a fait voter au Sénat concernant les charges de formation qui incomberont aux conseils généraux, que ce transfert sera bien compensé à l'euro près par le Gouvernement ?

M. le président. Madame la secrétaire d'État, êtes-vous en mesure de rassurer M. Néri ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Sur ce volet du texte, le Gouvernement a travaillé en liaison étroite avec l'ADF, l'Assemblée des départements de France. Le travail est en cours, mais nous ne disposons pas encore de toutes les études d'impact : l'incidence financière des mesures, notamment en matière de validation des acquis de l'expérience, n'étant pas si simple que cela à évaluer.

Cela dit, la préoccupation exprimée est légitime, mais, je le répète, le travail est en cours. En tout état de cause, à ce stade, c'est la seule réponse que je puisse vous donner. Mais je puis vous assurer que tout se passe dans la concertation et en partenariat avec l'ADF.

M. le président. Sur l'article 7, je suis saisi d'un amendement n° 22.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour le soutenir.

Mme Patricia Adam. L'ensemble de ce projet de loi est fondé sur la professionnalisation. À cet égard, l'article 7 relatif à la formation des assistants maternels et des assistants familiaux est essentiel.

L'amendement n° 22 vise à prévoir que la formation qui sera dispensée aux assistants maternels sera qualifiante ou diplômante, ce qui contribuera à la professionnalisation effective de ce métier. Je me réjouis par ailleurs de l'adoption d'un amendement - à notre grande surprise au demeurant - autorisant son exercice en dehors du domicile, dans les zones sensibles.

Il faudra considérer les modalités d'exercice de ce métier aussi bien en termes de fiscalité que de garanties données aux professionnels et aux parents.

Parce qu'il s'agira d'une formation qualifiante ou diplômante, il sera possible à ces professionnels d'exercer au domicile des parents. Par notre amendement, nous proposons donc une garantie supplémentaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement a été repoussé par la commission. En effet, la formation prévue correspond au premier volet du CAP Petite enfance. Par définition, celui-ci n'est ni qualifiant, ni diplômant.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Pour être validée par un diplôme ou une qualification, une formation doit avoir, madame Adam, une durée minimale.

Mme Patricia Adam. Tout à fait !

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Ainsi, la formation qui prépare au diplôme d'État d'auxiliaire de vie sociale comporte 500 heures de formation théorique et 560 heures de stages. Si nous adoptions un tel dispositif, il y aurait un immense décalage entre les besoins qui sont considérables et la réponse qui est apportée en termes de formation. Or il faut concilier les deux.

Si la durée de formation ne permet pas d'engager une validation par un diplôme, nous nous sommes préoccupés de la reconnaissance de ce premier temps de formation, et au-delà du simple certificat ou de la simple attestation de suivi.

Ainsi, nous nous sommes employés, avec le ministère de l'éducation nationale qui y est très attaché, à faire en sorte que cette formation corresponde, en termes de compétences, à une première unité du CAP Petite enfance rénové. Le fait d'obtenir cette première unité dans le cadre d'un contrôle continu pendant la formation ou par un examen oral et pratique constituera pour les assistants maternels une réelle plus-value et un premier pas vers l'obtention, pour ceux qui le souhaitent, d'un CAP Petite enfance, qui, lui, correspond à un diplôme et à une qualification.

Ces précisions étant apportées, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Notre amendement ne dit pas le contraire, puisqu'il y est question de formation qualifiante « ou » diplômante, ce qui n'implique pas forcément l'obtention d'un diplôme.

Même si votre réponse me satisfait en partie, il est néanmoins important d'inscrire notre proposition dans la loi.

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. S'agissant de la formation, j'ai dit, lors de mon intervention dans la discussion générale, qu'il y avait encore beaucoup de chemin à faire dans ce domaine !

Vous avez vous-même indiqué, madame la secrétaire d'État, que les professionnels pourront passer un CAP Petite enfance, ce qui nous satisfait pleinement, et, plus encore, les personnes concernées, qui pourront, pourquoi pas, aller plus loin encore. Dans ces conditions, je ne comprends pas pourquoi vous vous opposez à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 11.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. La formation adaptée aux besoins spécifiques des enfants accueillis qui est dispensée aux assistants familiaux étant plus complexe et plus technique qu'auparavant, nous souhaitons qu'elle puisse être étalée sur cinq ans. En effet, les assistants familiaux sont aujourd'hui confrontés à des problèmes nouveaux. Nous avons eu cette discussion en première lecture, et je ne reviendrai pas sur les raisons de cette évolution. En tout état de cause, cela justifie une formation technique poussée. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons porter le temps de formation à cinq ans, ce qui en ferait une véritable formation continue.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a rejeté cet amendement. D'une part, parce que le délai de trois ans nous paraît raisonnable et, d'autre part, parce que nous pensons qu'une formation est d'autant plus efficace que les heures de formation sont rapprochées dans un délai court. Par ailleurs, rien n'empêche les assistants familiaux de suivre ensuite une formation continue.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Même avis que la commission.

Attention, madame Jacquaint : trois ans correspondent à un délai utile. Allonger la durée de formation serait contre-productif. Votre proposition va à l'encontre même du but que vous recherchez. Trois ans, c'est un bon délai pour consolider une pratique par une formation théorique.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. On ne peut qu'être satisfait que désormais plus aucun assistant familial ne puisse accueillir un enfant sans avoir reçu une formation.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. Alain Néri. Je partage l'avis de Mme la rapporteure et de Mme la secrétaire d'État sur la nécessité d'une formation resserrée.

J'appelle par ailleurs votre attention sur le fait que les assistants familiaux sont parfois confrontés à des cas complexes, qui exigerait une formation spécifique. Le manque de places dans les établissements spécialisés conduit en effet des parents à confier leurs enfants qui nécessiteraient une prise en charge appropriée à des assistants familiaux.

Une formation de base s'impose donc, et ce dans un délai très court. Mais cette formation de base étalée sur trois ans doit impérativement être complétée par une formation continue au fur et à mesure que l'enfant grandit et que ses besoins évoluent. Il convient d'accompagner les assistants familiaux dans leur démarche éducative.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Article 8

M. le président. Sur l'article 8, je ne suis saisi d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 8 est adopté.)

Article 9 bis

M. le président. Sur l'article 9 bis, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 5 et 23.

La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement n° 5.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement a été adopté par la commission, car il n'y a aucune raison pour que les assistants maternels et familiaux confirmés participent au sein d'équipes pluridisciplinaires au contrôle de la profession à titre bénévole. Ils doivent être rémunérés par des vacations.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 23.

Mme Patricia Adam. L'amendement n° 23 est identique à l'amendement n° 5.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 5 et 23.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9 bis, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 9 bis, ainsi modifié, est adopté.)

Article 10 bis A

M. le président. Sur l'article 10 bis A, je suis saisi d'un amendement n° 6.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. C'est un amendement de codification.

M. le président. Le Gouvernement est favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10 bis A, modifié par l'amendement n° 6.

(L'article 10 bis A, ainsi modifié, est adopté.)

Article 14

M. le président. Sur l'article 14, je suis saisi d'un amendement n° 7.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement propose une clarification de la rédaction de l'ensemble du dispositif, conformément à la volonté du Sénat de rendre possible la proratisation de la détermination des fournitures et indemnités selon la durée de l'accueil pour les assistants maternels.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Je me permets, monsieur le président, de vous faire remarquer que je n'ai pas pu m'exprimer sur le précédent amendement. Vous avez interprété mon geste vers le micro comme un signe d'acquiescement.

M. le président. C'était un amendement de coordination, si je ne m'abuse.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Certes, mais je n'ai pas pu m'exprimer.

M. le président. Dans ces conditions, souhaitez-vous une deuxième délibération ? (Sourires.)

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Je m'en tiendrai au vote qui a eu lieu, monsieur le président. (Sourires.)

M. le président. Parfait !

M. Pierre-Louis Fagniez. C'est un président censeur ! (Sourires.)

M. le président. Sur l'amendement n° 7, quel est votre avis, madame la secrétaire d'État ? Exprimez-vous, je vous en prie ! (Sourires.)

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 24 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 14, modifié par l'amendement n° 7.

(L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)

Article 15

M. le président. Sur l'article 15, je ne suis saisi d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 15 est adopté.)

Article 16

M. le président. Sur l'article 16, je suis saisi d'un amendement n° 28 rectifié.

La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour le soutenir.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Cet amendement tend à permettre aux assistants maternels qui accueillent un enfant de façon régulière, mais non pendant une année complète, de percevoir un salaire mensuel moyen égal sur toute l'année. Le salaire mensuellement versé sera calculé en fonction des semaines et des temps d'accueil programmés pour l'année. Ce lissage de la rémunération des assistants maternels les fera bénéficier d'un salaire mensuel stable, indépendant des variations du nombre d'heures d'accueil programmées et effectuées chaque mois.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Cet amendement permet fort opportunément aux assistants maternels accueillant un enfant sur une année incomplète de percevoir un salaire mensuel moyen égal pendant toute l'année, ce qui correspond aux préoccupations de la commission. Elle a donc émis un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié par l'amendement n° 28 rectifié.

(L'article 16, ainsi modifié, est adopté.)

Article 17

M. le président. Sur l'article 17, je suis saisi d'un amendement n° 8.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Il s'agit d'un amendement ayant pour objet de revenir au texte adopté par l'Assemblée en première lecture, qui nous semble plus équitable pour les assistants maternels. Il propose de déroger à la convention collective pour les dix premiers jours d'absence de l'enfant dans l'année en rendant possible, dès le premier jour d'absence, l'indemnisation de l'assistant maternel à hauteur de 50 %.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié par l'amendement n° 8.

(L'article 17, ainsi modifié, est adopté.)

Article 18

M. le président. Sur l'article 18, je suis saisi d'un amendement n° 13.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le soutenir.

Mme Muguette Jacquaint. L'article 18 a pour objet de définir de nouvelles règles en matière de temps de travail des assistants maternels. Il interdit à l'employeur de lui demander d'effectuer plus de quarante-huit heures de travail par semaine et précise que la durée du travail sera calculée sur une moyenne de quatre mois. En outre, dans des conditions définies par décret, il prévoit la possibilité de déroger à la règle, avec l'accord de l'intéressant.

Mais ce dispositif n'est protecteur qu'en apparence. En rendant possible une dérogation, il autorise toutes sortes de dérives, compte tenu de la réalité du monde du travail aujourd'hui.

Quant à la limite des quarante-huit heures hebdomadaires, il ne s'agit en fait que d'un alignement sur le droit européen, qui est d'ailleurs nettement en retrait par rapport à la législation encore en vigueur dans notre pays.

J'ai le sentiment que la volonté légitime de garantir la qualité de l'accueil des jeunes enfants est inconciliable avec l'application aux assistants maternels et familiaux d'un statut de salarié, qui serait certes protecteur pour les employés mais trop contraignant pour les employeurs. Il faut trouver un équilibre entre, d'une part, l'amélioration des conditions matérielles de travail des accueillants, grâce à un alignement sur le droit commun du travail, et, d'autre part, les demandes des parents eux-mêmes, victimes de la précarité et d'horaires décalés. Mais cet équilibre ne peut être établi que par le haut, en se rapprochant le plus possible des possibilités économiques et sociales de notre pays.

Les assistants maternels ont aussi besoin de repos : il y va de leur sécurité comme de celle des enfants. Or on sait que 38 % des assistants maternels déclarent travailler déjà plus de quarante-cinq heures par semaine et qu'ils sont de plus en plus nombreux à avoir des horaires irréguliers.

Le rôle du législateur n'est pas de céder aux exigences et aux contraintes de l'économie mais de bien prendre en compte les membres de cette profession en veillant à réduire leur temps de travail. Aussi proposons-nous dans cet amendement de faire passer la durée maximale hebdomadaire de temps de travail de quarante-huit à quarante heures.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Comme en première lecture, la commission a rejeté cet amendement, car il ne correspond pas aux règles du droit interne en matière de durée maximale hebdomadaire de temps de travail.

En outre, le plafond retenu dans le projet correspond aux exigences de souplesse requises pour l'exercice de la profession, au bénéfice des assistants maternels comme des familles.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 18.

(L'article 18 est adopté.)

Articles 19 et 20

M. le président. Les articles 19 et 20 ne font l'objet d'aucun amendement.

Je vais les mettre successivement aux voix.

(Les articles 19 et 20, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Article 28

M. le président. Sur l'article 28, je suis saisi d'un amendement n° 33.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Monsieur le président, je retire cet amendement au bénéfice de l'amendement n° 9, qui précise qu'« un décret définit les modalités de report des congés annuels ».

M. le président. L'amendement n° 33 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 9. Nous pouvons considérer qu'il a été défendu.

Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 28, modifié par l'amendement n° 9.

(L'article 28, ainsi modifié, est adopté.)

Article 29 bis A

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 10.

La parole est à Mme la rapporteure, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 29 bis A, modifié par l'amendement n° 10.

(L'article 29 bis A, ainsi modifié, est adopté.)

Article 31 A

M. le président. L'article 31 A ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 31 A est adopté.)

Article 31 bis A

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 25, tendant à supprimer l'article 31 bis A.

La parole est à Mme Patricia Adam, pour soutenir l'amendement n° 25.

Mme Patricia Adam. L'article 31 bis est un cavalier, qui n'a pas lieu d'être dans ce projet de loi. Nous demandons sa suppression, d'autant qu'il soulève un certain nombre de questions.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'article 31 bis A.

(L'article 31 bis A est adopté.)

Article 31 bis B

M. le président. L'article 31 bis B ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 31 bis B est adopté.)

Après l'article 31 bis B

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 27, deuxième rectification, portant article additionnel après l'article 31 bis B.

La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour le soutenir.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Lors de la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant - PAJE -, le 1er janvier 2004, il a été prévu, pour des raisons de simplification des démarches des familles particuliers employeurs, que le centre PAJEMPLOI, organisme national chargé de la prise en charge des cotisations et contributions sociales dans le cadre du complément de libre choix du mode de garde de la PAJE, délivre aux salariés une attestation d'emploi.

Cette attestation s'inspire des dispositifs existants en matière de chèque emploi-service, de chèque emploi-associatif, de titre emploi-entreprise ou encore de titre de travail simplifié.

Contrairement à ces dispositifs, le principe de l'attestation d'emploi délivrée dans le cadre de la PAJE n'a été prévu que par décret simple. Il était par conséquent nécessaire de prévoir ce principe dans la loi, la partie législative du code du travail prévoyant que les salariés reçoivent un bulletin de paie remis par l'employeur.

L'établissement de ce document par le centre PAJEMPLOI constitue un allégement des démarches des familles à l'occasion de la garde de leur enfant. Il apparaît donc souhaitable de donner une base législative à ce dispositif afin de pérenniser cette mesure de simplification.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. La commission a émis un avis favorable car cet amendement va dans le sens de l'intérêt des assistants maternels et des familles, qui n'auront pas de double démarche à effectuer.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Je ne vois pas très bien comment se fera l'articulation entre l'attestation d'emploi et le bulletin de paie, que la convention collective rend obligatoire.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Il n'y a pas de contradiction entre ces deux documents. L'attestation d'emploi, émise par PAJEMPLOI, est une facilité offerte aux familles.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam.

Mme Patricia Adam. Oui, mais qu'en est-il des obligations liées au bulletin de paie, en particulier celles qui s'imposent à l'employeur ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Madame la députée, il est précisé dans l'amendement que l'attestation d'emploi vaut bulletin de paie, avec tout ce que cela implique en termes d'obligations.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Madame la ministre, j'aimerais savoir quels éléments apparaîtront sur l'attestation d'emploi. On sait bien qu'en cas de litige, sur le montant du salaire versé ou sur les horaires notamment, le bulletin de paie peut être très utile. L'attestation d'emploi sera-t-elle aussi sûre ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. On voit bien l'importance de faire figurer dans la loi la mention « valant bulletin de paie » pour que l'attestation d'emploi ait la valeur d'un bulletin de paie. Elle comportera tous les éléments indispensables à ce type de document.

M. le président. Sans doute les modalités d'établissement de ce document seront-elles précisées ultérieurement, mais en dehors du cadre de la loi.

Je mets aux voix l'amendement n° 27, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

Article 31 bis C

M. le président. L'article 31 bis C ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 31 bis C est adopté.)

Article 36

M. le président. Sur l'article 36, je suis saisi d'un amendement n° 30.

La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour le soutenir.

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 36, modifié par l'amendement n° 30.

(L'article 36, ainsi modifié, est adopté.)

Article 37

M. le président. L'article 37 ne fait l'objet d'aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L'article 37 est adopté.)

Après l'article 37

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 26 rectifié, portant article additionnel après l'article 37.

La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour le défendre.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Dans le texte définitif de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, on a omis de mentionner le III de l'article 38, ce qui a pour conséquence d'abroger l'article L. 323-29 du code du travail à compter de la date de publication de la loi au Journal Officiel, soit le 12 février 2005, alors que cette loi prévoit que les dispositions de remplacement ne seront mises en place qu'à partir du 1er janvier 2006. Le vide juridique qui en découle prive les employeurs concernés de la compensation pour l'emploi protégé en milieu ordinaire de personnes handicapées. Pour pallier cet oubli, le Gouvernement vous demande, mesdames et messieurs les députés, d'adopter cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Muriel Marland-Militello, rapporteure. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à Mme Corinne Marchal-Tarnus, pour le groupe de l'UMP.

Mme Corinne Marchal-Tarnus. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, assurément, le groupe de l'UMP votera le projet de loi avec enthousiasme.

Nous nous félicitons des nombreuses avancées de ce projet qui répond aux attentes légitimes des assistants familiaux et maternels en termes de statut, de formation ou de rapprochement de leur régime avec le droit commun en matière de droit du travail. Il s'agit également, par ce biais, de susciter des vocations car les besoins en matière de garde d'enfants sont très nombreux et tendent à devenir pressants.

Surtout, nous avons réussi à préserver un équilibre entre la souplesse et l'encadrement, tous deux également nécessaires.

Ce texte est aussi un moyen de reconnaître et d'honorer une profession qui, depuis tant d'années, assume avec compétence et patience la garde de nos enfants. N'oublions pas que ce mode de garde est de loin le préféré des parents qui le plébiscitent. Si seulement 20 % d'entre eux y recourent, c'est non par choix, mais par nécessité. Si l'offre était plus développée, ce mode de garde serait largement majoritaire. En outre, il constitue un important gisement d'emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Adam, pour le groupe socialiste.

Mme Patricia Adam. Sur les aspects positifs du texte, j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer, notamment en début de séance. En particulier, le texte a le mérite de reconnaître deux métiers - assistant maternel et assistant familial - conformément aux attentes des professionnels. Il apporte aussi des assurances en ce qui concerne la formation, il en donne aussi aux départements sur le plan financier. Nous sommes également tombés d'accord avec Mme la rapporteure sur un certain nombre d'articles, notamment aujourd'hui, et je l'en remercie.

Cependant, nous n'avons pas obtenu de réponses suffisantes sur certains points, parmi lesquels la formation, que nous aurions voulue qualifiante et diplômante, et la complexité à laquelle seront confrontés les parents du fait de leurs obligations d'employeurs : établissement des fiches de paie, détermination des congés. Les autorités devront fournir des explications aux nombreux parents qui n'y sont pas habitués, pour les aider à s'y retrouver.

Je suis également surprise de l'amendement présenté tout à l'heure par M. Bédier et qui a été adopté par l'UMP. Nous en avions longuement discuté en première lecture. Si, à mon sens, ce texte se devait d'innover en proposant de nouvelles formes de garde ou de nouveaux métiers, ce ne sera pas le cas avec cet amendement qui a été déposé au dernier moment sans avoir été discuté en commission. Il laisse en suspens notamment les questions de responsabilité et d'assurance. En outre, le problème ne se pose pas que dans les zones urbaines. En milieu rural aussi, des assistants maternels souhaiteraient exercer en dehors de leur domicile. Je ne suis donc pas satisfaite de la mesure qui a été votée et je pense que nous aurons l'occasion d'en reparler.

Ma conclusion sera pour déplorer que la convention collective entre employeurs et employés ait été conclue avant l'examen de ce texte. De ce fait, il a été très difficile à discuter et n'a pas réussi à concilier les intérêts de toutes les parties - assistants maternels, assistants familiaux, parents -, dans l'intérêt général. C'est pourquoi, mes chers collègues, le groupe socialiste s'abstiendra.

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

Mme Muguette Jacquaint. Dans la discussion générale, j'ai rappelé pourquoi le groupe des député-e-s communistes et républicains maintiendrait son abstention sur le texte, même si j'ai pris acte des avancées qui ont été apportées au cours de nos discussions.

M. Pierre-Louis Fagniez. Abstention positive !

Mme Muguette Jacquaint. La reconnaissance des deux métiers d'assistant maternel et d'assistant familial est un élément essentiel. Mais je ne suis pas entièrement satisfaite pour ce qui est de la formation. Plus grave, nous sommes restés sur notre faim, madame la secrétaire d'État, en ce qui concerne les salaires, les retraites et les congés payés. Revaloriser une profession et la rapprocher du droit commun, cela passe avant tout par la formation, les salaires et les retraites. Pour toutes ces raisons, je m'abstiendrai aussi en deuxième lecture.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour le groupe UDF.

M. Pierre-Christophe Baguet. Ce texte aboutit à la juste reconnaissance d'une profession non seulement appréciée mais aussi indispensable à l'amélioration de la vie quotidienne de milliers de familles.

Je forme le vœu que les décrets d'application soient pris dans le même esprit de compréhension car il s'agit d'un secteur excessivement complexe. Nous avons, je crois, réussi à maintenir un équilibre. Il fallait prendre en compte à la fois les aspirations d'une profession en devenir, qui ne cherche qu'à s'améliorer et à être plus performante, et la liberté de choix des familles.

J'ai bien noté l'appel de Mme la secrétaire d'État pour parvenir à un financement partagé d'une évolution positive pour l'ensemble du pays.

En conclusion, je confirme que l'UDF votera le texte. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme la secrétaire d'État aux personnes handicapées. Je tiens tout d'abord, mesdames et messieurs les députés, à remercier en mon nom et au nom de Philippe Douste-Blazy tous ceux d'entre vous qui ont participé aux débats, pour la qualité et la pertinence de leurs observations et leur connaissance de ce sujet de proximité. Grâce à eux, le texte a été amélioré. Je remercie également le président de votre commission des affaires culturelles, familiales et sociales, Jean-Michel Dubernard, ainsi que votre rapporteure, Muriel Marland-Militello qui connaît le texte mieux que personne et a joué un rôle très important tout au long de nos travaux. Je ne vous oublie pas non plus, monsieur le président, car vous avez présidé à nos débats de façon remarquable. J'aurai également une mention à l'intention du président Raoult qui a fait une brève apparition mais à qui nous devons aussi beaucoup.

La loi relative aux assistants maternels et familiaux est attendue depuis longtemps par l'ensemble des professionnels. C'est avec une satisfaction mesurée, mais sincère, que je vais clore nos travaux. Votre assemblée a largement contribué à l'enrichissement du texte. Vous avez d'abord apporté à des professionnels qui le méritent une réelle reconnaissance, en distinguant bien, comme vous l'avez dit, madame Jacquaint, les deux métiers, en renforçant leur qualification, et en permettant aux anciens assistants maternels et familiaux de participer à la procédure d'agrément ainsi qu' au suivi contre rémunération, ce qui est exemplaire d'une dynamique de corps professionnel. Vous avez aussi fait faire des avancées en matière de droit du travail : le droit à un repos quotidien et hebdomadaire est reconnu, de même qu'un droit aux congés, avec notamment l'adoption, dans un souci de réalisme, d'un décret relatif aux reports de congé pour les assistants familiaux.

Vous avez souligné un point majeur, monsieur Baguet, à savoir l'importance de la qualité de l'accueil des enfants, garantie par la possibilité de demander le casier judiciaire n° 3 des candidats et par l'instauration de critères nationaux d'agrément pour aboutir à une réelle harmonisation des pratiques.

Pour ce travail constructif et consensuel, soyez assurés, mesdames et messieurs les députés, de la reconnaissance de Philippe Douste-Blazy et du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

    4

ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président. Jeudi 14 avril, à neuf heures trente, première séance publique :

Suite de la proposition de loi, n° 2195, de M. Yves Nicolin, Mme Michèle Tabarot et plusieurs de ses collègues portant réforme de l'adoption :

Rapport, n° 2231, de Mme Michèle Tabarot, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Débat sur la lutte contre la toxicomanie.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, n° 2157, relatif à la régulation des activités postales :

Rapport, n° 2229, de M. Jean Proriol au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures quinze.)

        Le Directeur du service du compte rendu intégral
        de l'Assemblée nationale,

        jean pinchot