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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du vendredi 18 novembre 2005

69e séance de la session ordinaire 2005-2006

Relations avec les collectivités territoriales

Avances aux collectivités territoriales (p.


PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Loi de finances pour 2006

DEUXIÈME PARTIE

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006 (nos 2540, 2568).

relations avec les collectivités territoriales (suite)

M. le président. Nous poursuivons l’examen des crédits relatifs aux relations avec les collectivités territoriales.

Ce matin, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion.

La parole est à M. Bernard Derosier.

M. Bernard Derosier. Monsieur le ministre délégué aux collectivités territoriales, cette année encore, on ne peut que constater, à travers vos propositions budgétaires concernant les collectivités territoriales, que ces dernières sont devenues les variables d'ajustement de la politique gouvernementale.

M. Jérôme Chartier, suppléant M. Marc Laffineur, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, pour les relations avec les collectivités territoriales et pour les avances aux collectivités territoriales. Ce n’est pas vrai !

M. Michel Piron. Ça commence bien !

M. Bernard Derosier. En effet, vos propositions portent en elles les difficultés financières que connaîtront les collectivités territoriales pour boucler leur budget pour l'année 2006.

Confrontés à l'opacité des mesures budgétaires qui nous sont soumises et à l'absence de confiance qui caractérise depuis trois ans, contrairement à l’affirmation du rapporteur spécial, les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales,…

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Ce n’est pas vrai non plus !

M. Bernard Derosier. …les élus locaux verront leur marge de manœuvre financière réduite une fois encore, et de plus en plus.

Monsieur le rapporteur, un de nous deux ment, soit vous, soit moi. Comme je pense que ce n’est pas moi, ce ne peut être que vous, monsieur le rapporteur.

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Je pense exactement l’inverse, monsieur Derosier.

M. le président. Personne ne ment dans cette assemblée.

M. Jean-Pierre Balligand. Sauf le président ! (Sourires.)

M. Jean-Claude Lemoine. Tout dépend de la présentation. Celle-ci peut être tronquée.

M. Bernard Derosier. Dès lors, le coût réel des transferts de charges de l'État vers les collectivités territoriales devra être compensé par une augmentation de la fiscalité locale.

Mais ce ne sont pas les contribuables les plus aisés qui supporteront le coût des mesures gouvernementales. Car, plutôt que d'envisager une réforme de la fiscalité locale, le Gouvernement se contente de proposer des ajustements fiscaux injustes. Le débat qui s'est déroulé ici mercredi, après-midi et soir, a permis à mes collègues députés socialistes de le démontrer.

M. Michel Piron. Le terme « démontrer » est excessif !

M. Bernard Derosier. Le débat budgétaire pour 2006 devait, grâce à l'application de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, être un véritable exercice de transparence et un modèle de démocratie parlementaire. Or le Gouvernement ne respecte pas ce cadre désormais le nôtre. C'est notamment vrai lorsque M. Copé, M. « Euro près », oppose le secret fiscal à la représentation nationale. Les promesses de la LOLF ne sont en outre pas tenues puisqu'on assiste, au contraire, à une fragmentation des débats qui masque la triste réalité des relations financières de l'État avec les collectivités territoriales.

Ainsi l'annexe explicative présentant la mission ministérielle « Relations avec les collectivités territoriales » ne prend son sens qu'une fois rapprochée, d'une part, des articles de la première partie de la loi de finances relatifs aux ressources affectées aux collectivités territoriales ainsi qu'aux prélèvements opérés sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales, et, d'autre part, des articles de la seconde partie de la loi de finances relatifs à la réforme de la taxe professionnelle ou à la mise en place de votre fameux « bouclier fiscal ». Or les articles de la première partie ont été approuvés il y a près d'un mois, le 20 octobre, tandis que les articles non rattachés de la seconde partie sont encore en discussion.

L'empilement des dotations versées aux collectivités territoriales et l'hétérogénéité juridique de ces concours paralysent l'initiative parlementaire par sa complexité et son absence de clarté, et masque la cohérence des stratégies budgétaires retenues.

Dans ces conditions, que révèle une analyse globale du projet qui nous est soumis ?

Dans la continuité du gouvernement précédent, le projet de loi de finances programme l'asphyxie de la démocratie locale et vide de leur sens l'autonomie financière des collectivités territoriales et les principes fondateurs de la décentralisation.

Contrairement aux intentions affichées par un Gouvernement qui prétend reconduire le « contrat de croissance et de solidarité » initié par le gouvernement Jospin, les ressources allouées aux collectivités, au regard des charges qui leur sont imposées, sont en baisse, et votre projet aggravera encore cette situation !

Ainsi, les assemblées délibérantes locales verront leur capacité de décision considérablement réduite par des mesures législatives de plafonnement qui entameront leur capacité à dégager de nouvelles ressources, même dans votre commune, monsieur le rapporteur spécial.

Non seulement vous vous abritez, monsieur le ministre, derrière ce « bouclier » pour masquer vos turpitudes fiscales, mais ce bouclier est en fait une arme tournée contre les collectivités. Elle n'est une protection que pour les contribuables les plus aisés, sans doute les moins touchés par les hausses d'impôts locaux ou les effets économiques de votre réforme de la taxe professionnelle.

M. Jean-Claude Lemoine. Ils sont partis à l’étranger !

M. Bernard Derosier. Alors que la réforme de la fiscalité locale est une exigence pour restaurer une justice fiscale mise à mal par les transferts de charges auxquels nous assistons depuis maintenant plus de trois ans, le Gouvernement propose une nouvelle réforme de la taxe professionnelle qui ne tient aucun compte des travaux de la commission Fouquet.

Votre réforme est une erreur, même si le manque à gagner qu'elle générera pour les collectivités est compensé par un versement de l'État. En effet, le versement d'une dotation limite l’autonomie financière des collectivités et ne constitue pas un financement pérenne. Les effets induits de cette réforme, notamment sur les intercommunalités à fiscalité unique, ne sont pas maîtrisés. Les collectivités les plus défavorisées seront, à l'évidence, pénalisées. Le plafonnement conduira alors à se tourner vers d'autres types de ressources fiscales, lesquelles reposent, bien souvent, sur les ménages.

En l'occurrence, l'empressement de la majorité parlementaire à réformer l'impôt de solidarité sur la fortune contraste singulièrement avec sa pusillanimité à réformer véritablement la taxe professionnelle et plus généralement la fiscalité locale.

Une véritable réforme de la fiscalité locale alliant justice sociale et efficacité économique est pourtant nécessaire.

Le montant des transferts de compétences dus à la seule loi relative aux libertés et aux responsabilités locales est évalué à 9,8 milliards d'euros. Le transfert d'une part de la TIPP ou de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance ne peut constituer un financement pérenne, utile à la compensation.

Par ailleurs, la compensation des charges induites par les transferts de compétences et les nouvelles missions demeure insuffisante, voire absente.

L'exemple du transfert des routes nationales dans le domaine routier départemental est à cet égard édifiant.

M. Jean-Pierre Balligand. Bon exemple !

M. Bernard Derosier. Le décret dont doit découler ce transfert, pourtant annoncé pour fin juillet 2005, n'est pas encore paru.

Par ailleurs, la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales prévoit qu'« il est établi, dans les douze mois de l'entrée en vigueur de la présente loi, une étude exhaustive portant sur l'état de l'infrastructure au moment de son transfert, ainsi que sur les investissements prévisibles à court, moyen et long termes liés à la gestion de ce domaine routier ». Cette étude n'est pas disponible, alors qu'elle devrait l'être depuis le 13 août 2005. Quand le sera-t-elle ?

Les crédits que consacrait jusqu'à présent l'État à l'entretien des routes nationales sont très insuffisants. La remise en état de ces dernières est donc inévitable, qu'il s'agisse d'une remise à niveau qualitative ou de leur simple sécurisation. Ce projet de loi de finances laisse apparaître une compensation s'élevant pour 2006, en matière de voirie, à 92,5 millions d'euros – je vous renvoie au rapport de notre collègue Marc Laffineur. Rien que pour le département du Nord, cette remise à niveau représente 430 millions d'euros, auxquels s'ajoute le coût d'entretien normal de ce même réseau, qui s'élève à 4,3 millions d'euros par an.

D'autres charges pèsent dès maintenant sur les finances des collectivités, sans réelles compensations. Ainsi les services départementaux d'incendie et de secours assument-ils désormais la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires, créée par la loi du 13 août 2004 portant modernisation de la sécurité civile. Le décret du 13 septembre 2005 prévoit que le financement de cette prestation est assuré par une cotisation personnelle – une obligatoire annuelle et une facultative – et une contribution publique à la charge du SDIS.

Le coût pour les départements de cette prestation est évalué à 60 millions d'euros par an. Pour 2006, l’abondement de la DGF pour les départements serait porté de 20 à 30 millions d'euros. Cette charge concerne l'année 2006, mais nous devons aussi payer l'année 2005. Pour cette dernière, l’État n'a pas respecté ses engagements, et ce sont les départements qui doivent assumer le manque créé par votre reniement. J'attends de votre part une explication sur ce point.

Que dire du montant de la TIPP qui doit être transféré aux départements et qui s'élève à 4,949 milliards d'euros, compensation qui ne parviendra pas à contenir l'augmentation du nombre d'allocataires du RMI, d'autant moins qu'elle se fonde sur les chiffres des comptes administratifs pour 2004 et ne tient pas compte de l'année 2005 ?

Dans ces conditions, il est peu probable que les compensations promises en contrepartie des transferts de charges soient effectivement intégrales et concomitantes à l'entrée en vigueur des transferts.

En synthèse, l'agrégation des enjeux financiers concernant les différents domaines sensibles a été évaluée à 1,2 milliard d’euros pour les impacts des transferts de charges auxquels s'ajouteraient 1,5 milliard d’euros liés à la mise en œuvre de la prestation de compensation du handicap.

Je n'oublie pas le coût réel qui sera engendré par le transfert des personnels TOS aux départements et aux régions pour faire face dans les prochaines années aux conséquences d'une insuffisance de personnel et d'une médiocrité des régimes indemnitaires servis actuellement par l’État.

Les transferts de charges que vous organisez depuis maintenant trois ans ajoutent l'injustice fiscale à l'inégalité territoriale.

Non content de faire financer les transferts de charge par les contribuables locaux, vous négligez toute péréquation financière. Or, en l'absence de mise en place d'un mécanisme de péréquation, les effets de ces mesures seront encore plus néfastes.

La confiance entre l'État et les collectivités doit être restaurée au plus vite, afin d'éviter l'installation durable d’un climat d'incompréhension.

Les formes d'un véritable contrat de confiance devraient être déterminées. J'ai déposé un amendement en ce sens, qui crée un programme destiné à afficher de manière globale les compensations des transferts de charge.

Parce que la Constitution pose le principe de l'exacte compensation financière des compétences transférées, parce que ce projet de loi de finances préfère plafonner la fiscalité plutôt que la réformer et qu'il néglige l'importance de la péréquation entre les collectivités,…

M. Michel Piron. Non !

M. Bernard Derosier. …péréquation réclamée par le rapporteur de la commission des lois, parce que le projet de loi de finances pour 2006 révèle les incohérences d'une politique plus soucieuse d'affichage et de transfert de charges que d'une décentralisation dotée de réels moyens,…

M. Michel Piron. Oh !

M. Jean-Claude Lemoine. Vous préjugez !

M. Bernard Derosier. …le groupe socialiste votera contre les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l'adoption de la loi sur l'organisation décentralisée de la République, la mise en œuvre des dernières lois de finances et les conséquences de la loi relative aux responsabilités locales et de la loi organique sur les finances des collectivités territoriales, le débat sur la situation concrète des collectivités territoriales et des finances locales a connu, ces trois dernières années, de nombreux développements.

Dernier chapitre en date, le rapport de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les finances locales, rendu public le 12 juillet dernier.

M. René Dosière. Un vrai scandale !

Mme Muguette Jacquaint. Ce rapport a pris la forme d'un réquisitoire tendancieux, sinon scandaleux, à l'égard des exécutifs locaux de gauche.

M. René Dosière. Tout à fait !

Mme Muguette Jacquaint. La décision de créer cette commission était portée par le souci de détourner l'attention de nos concitoyens des problèmes et des difficultés attachés au désengagement de l'État vis-à-vis des collectivités et d'opérer une forme de « règlement de comptes politique ».

M. Jean-Michel Fourgous. Quel sens de l’autocritique !

Mme Muguette Jacquaint. Mais jamais n'a été abordée dans ce rapport la seule question fondamentale, à savoir si, oui ou non, les collectivités territoriales disposent aujourd’hui des moyens financiers d'exercer leurs compétences et de répondre aux besoins et aux aspirations de nos concitoyens.

La crise que traverse notre société, les souffrances qui minent nos quartiers populaires confirment, s'il en était besoin, l'exigence d'un engagement fort et durable en faveur des populations que le libéralisme…

M. Jean-Michel Fourgous. Dites plutôt l’ultralibéralisme !

Mme Muguette Jacquaint. …condamne à la relégation. Cela est vrai des populations comme de nos territoires et de nos collectivités.

Dans ce contexte, l'État doit assumer pleinement ses responsabilités. Comment nos collectivités territoriales pourront-elles prendre leurs propres responsabilités si elles ne peuvent compter sur la solidarité nationale, si l'État persiste à vouloir nouer un véritable garrot fiscal et budgétaire destiné à les étouffer, tout en se désengageant et en se défaussant de ses missions ?

C'est ce contexte qui doit guider la lecture du présent budget. Nous lisons, dans sa présentation, que « l'effort financier de l'État en faveur des collectivités locales constitue un vecteur puissant de soutien à leurs initiatives ». Cet effort, force est pour nous de constater qu'il demeure très en deçà tant des besoins de nos concitoyens que de ceux attachés à la compensation des transferts de charges aux collectivités locales.

Les efforts consentis par le Gouvernement ces dernières années sont, je le répète, insuffisants ! Très souvent, par exemple, les créances attachées au transfert des routes nationales, du RMI ou de l'allocation personnalisée d’autonomie aux départements n'ont été que partiellement compensées. Les inquiétudes demeurent pour l'avenir.

Et qu'il ait fallu la mobilisation des élus, des associations d'usagers, des syndicats, des partis politiques pendant plusieurs mois pour obtenir enfin, le 6 octobre dernier, que l'État s'engage à financer à hauteur de 200 millions d'euros le coût du transfert à la région Île-de-France du Syndicat des transports d'Île-de-France souligne l'importance des difficultés rencontrées dans les relations entre l'État et les collectivités.

De fait, le Gouvernement ne s'est jamais vraiment soucié de la pertinence de tel ou tel transfert, mais seulement d'alléger par ce moyen le déficit de l'État. Il ne s'est jamais véritablement interrogé sur les moyens d'assurer et de garantir la pérennité du service rendu aux usagers, mais, le plus souvent, s’est montré seulement préoccupé de rayer des lignes budgétaires pour satisfaire à des critères de gestion comptable des deniers publiques.

Dans le cadre étroit des contraintes budgétaires imposées par la Banque centrale européenne, vous avez, en vérité, fait le choix de vous délester sur les collectivités locales des missions d'intérêt général qui devraient relever de la compétence de l'État, au nom de l'intérêt général et de la solidarité nationale, comme on l’entend souvent dire.

Vous avez ainsi contribué à fragiliser nos collectivités, à réduire leurs marges de manœuvre, à aggraver les inégalités géographiques fiscales. Vous les avez de fait condamnées à ne plus pouvoir infléchir la tendance, constatée depuis maintenant deux ans, d'une croissance plus soutenue de leurs dépenses de fonctionnement que de leurs recettes.

La conséquence pour la population sera l'augmentation de la fiscalité locale, mais vous ne voulez pas en assumer le coût politique et préférez stigmatiser la bonne ou la mauvaise gestion des uns et des autres. Or, il n'est pas ici question de bonne ou de mauvaise gestion, comme vous voulez le faire systématiquement accroire à nos concitoyens. La vérité est tout simplement que vous vous êtes engagés dans une logique d'abandon, d'étranglement et de mise sous tutelle financière des collectivités.

À travers les collectivités, ce sont nos concitoyens que vous visez pourtant, ce sont eux les grands oubliés ! J'en veux pour preuve les propos tenus récemment par le président de la commission des finances, qui tentait de justifier la réforme du plafonnement de la taxe professionnelle, qui sera votée la semaine prochaine. Il a expliqué à la représentation nationale que l'État va apporter cette année trois milliards d'euros pour protéger les entreprises, et cela sans aucune exigence de créations d’emploi ou de formation. C’est vrai qu’il est préférable de protéger les entreprises qui licencient, boursicotent, plutôt que d'augmenter la DGF des communes de 8,5 % !

C'est faire bien peu de cas du rôle de levier économique que jouent les collectivités territoriales, qui, avec 63 milliards d'euros de dépenses d'investissement, assument les deux tiers des dépenses d'équipement public, tandis qu'elles emploient plus de 1,7 million d’agents, de techniciens et de cadres territoriaux.

De nouveau, certaines entreprises sont davantage épargnées que les citoyens, sans aucun souci de garantie des services publics. C'est la philosophie de votre Gouvernement. Mais en quoi ces choix sont-ils synonymes de création de richesse, de développement économique et de plein emploi ? Vous ne le dites pas, préférant vous réfugier dans cette pseudo-arithmétique qui voudrait nous faire croire que moins les entreprises paient d'impôts, plus elle créent d'emplois – recette usée qui n'a jamais permis, depuis vingt ans, de résorber le chômage.

Revenons, pour finir, sur la mise en place du fameux « bouclier fiscal ». Les impôts directs ne pourront plus dépasser désormais 60 % des revenus, et les collectivités locales, directement ou sous forme mutualisée, rembourseront leur quote-part à l'État. Or, la suppression du « plafonnement du plafonnement » induite par cette réforme ne bénéficiera qu'aux plus gros contribuables assujettis à l'ISF. Cette mesure coûtera 250 millions d'euros au seul bénéfice des 10 000 contribuables les plus aisés.

M. Jean-Michel Fourgous. C’est ceux qui investissent le plus !

Mme Muguette Jacquaint. Les collectivités territoriales devront contribuer à ce cadeau fiscal indigne, à hauteur de plus de 40 millions d'euros ! La somme peut paraître symbolique, mais la réforme, elle, est symptomatique de la désinvolture avec laquelle vous envisagez les relations entre l'État et les collectivités locales. Nous voterons évidemment contre ce budget.

M. Jean-Michel Fourgous. C’est bien triste !

M. le président. La parole est à M. Michel Piron.

M. Michel Piron. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues. C’est, certes, dans un contexte général très contraint que s’écrit ce projet de loi de finances relatif aux collectivités, tant il est vrai que la maîtrise, voire la réduction de la dépense publique en volume conditionne désormais la capacité de l’État à assumer les politiques qu’il définit. Voilà pourquoi, me semble-t-il, on ne peut que saluer l’effort consenti, cette année encore, en faveur des collectivités territoriales.

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Très bien !

M. Michel Piron. En progression de quelque 5 % à structure constante, les concours de l’État affichent en effet – hors fiscalité transférée – un total de 64,5 milliards d’euros. C’est là le résultat d’un choix qui propose de reconduire pour 2006 le contrat dit « de croissance et de solidarité » avec un taux d’indexation de 2,37 %, portant l’enveloppe normée à plus de 43,5 milliards d’euros, choix qui permet surtout à la DGF d’augmenter de près d’un milliard d’euros, soit de 2,7 %. Ces seuls chiffres attestent que, bien au-delà du contenu de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », l’ensemble des concours que l’État apporte à ces dernières demeure bien l’une des priorité budgétaires nationales.

On me permettra, par ailleurs, de relever le souci réaffirmé de prendre en compte les territoires les plus en difficulté avec l’extension du champ de la DDR, d’une part, et l’aménagement des conditions de répartition de la DSU, d’autre part. N’est-ce pas là rappeler que de la relation État-collectivités dépend aussi l’aménagement du territoire ?

À ce point d’une intervention nécessairement brève, je voudrais encore évoquer deux sujets de préoccupation.

M. Jean-Pierre Balligand. Est-ce utile d’aller plus loin ?

M. Michel Piron. Le premier concerne les compensations. Je me souviens, monsieur Balligand, du débat sur la loi de décentralisation du 13 août 2004 et des craintes exprimées sur de nombreux bancs concernant les charges transférées.

M. Bernard Derosier. Elles sont vérifiées aujourd’hui !

M. Michel Piron. Constatons aujourd’hui que les engagements d’alors ont été tenus. Ils ont été tenus vis-à-vis des régions, avec la TIPP, ils l’ont été pour les départements…

M. Jean-Pierre Balligand. Avec le RMI, par exemple !

M. Michel Piron. …grâce à la TSCA et ils le seront vis-à-vis des communes pour l’exonération de 20 % du FNB.

S’il y a un problème des finances locales, il n’est donc pas là. Il est plutôt, nous semble-t-il, dans les conséquences d’une production normative croissante – j’ai failli dire d’inflation normative inextinguible – qui, effectuée trop souvent sans étude d’impact préalable, induit des charges supplémentaires dont on découvre fréquemment après coup l’ampleur, voire l’inapplicabilité.

M. Jean-Pierre Balligand. Sans doute parlez-vous de la loi de finances qui nous occupe !

M. Michel Piron. Le deuxième sujet de préoccupation concerne les composantes de la fiscalité locale et, plus spécifiquement, le lien, décrié ou loué, entre communes et intercommunalité. Si je partage les interrogations de beaucoup sur l’accroissement des dépenses de fonctionnement de certaines collectivités – comment ne pas penser en particulier aux régions –,…

M. René Dosière. C’est de l’ordre d’epsilon !

M. Michel Piron. …je m’étonne cependant que, pointant du doigt l’augmentation des charges de personnel des communautés qui ont repris de nombreuses compétences communales, l’on ne manifeste pas la même surprise en constatant que les communes n’ont pas toujours pour autant allégé ces mêmes dépenses.

Convaincu pour ma part de la nécessité de conforter le couple communauté-communes, j’ai déjà eu l’occasion de rappeler combien les discussions qui l’entourent méritent qu’on prenne en compte l’extrême diversité des situations, comme leurs différents statuts – communauté urbaine, communauté d’agglomération, communauté de communes – nous y incitent déjà.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, je vous suggère d’écrire la première page d’un livre bleu des intercommunalités – plutôt que de l’intercommunalité –, afin de compléter utilement son récent livre noir.

Voilà également pourquoi nous devons sans doute rappeler en conclusion que la question de l’empilement des structures pose celle de leur complémentarité. Dans le contexte général difficile où nous sommes, peut-on imaginer que les collectivités puissent échapper à toute contrainte quand l’État doit s’y soumettre ? Évidemment non ! La solidarité réclamée dans la répartition des richesses – c’est la péréquation – n’a-t-elle pas pour contrepoint la co-responsabilité dans la maîtrise des dépenses, que ce soit au niveau de l’État, des régions, des départements ou des communes.

Tels sont les thèmes et les termes d’une architecture dont la bonne articulation garantit seule la bonne gouvernance. Mais c’est ouvrir là, j’en conviens, un autre débat, celui qui, de l’État à la commune, interroge l’ensemble de nos instances et l’équilibre territorial des pouvoirs. Nous en reparlerons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis surpris par le discours que le Gouvernement et sa majorité tiennent depuis un certain temps sur les collectivités locales. À les entendre, ce sont elles qui sont responsables des difficultés financières de notre pays ! Elles augmentent les impôts…

M. Charles Cova. C’est vrai pour ce qui est des régions en tout cas !

M. Jean-Michel Fourgous. Nous avons parlé des régions !

M. René Dosière. …quand l’État diminue les siens ! Elles dépensent beaucoup trop quand l’État dépense moins ! Leurs élus sont soumis à un électoralisme auquel l’on ne peut pas résister ! Il suffit de lire le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur la fiscalité locale – pardon le tract UMP ! – rédigé par M. Mariton pour mesurer à quel point il a inspiré les déclarations du Gouvernement, en particulier du ministre chargé du budget.

M. Jean-Pierre Balligand et Mme Muguette Jacquaint. Ça c’est vrai !

M. René Dosière. Pour résoudre tous ces problèmes, il faut donc asphyxier financièrement les collectivités locales, et c’est ce que vous proposez de faire avec le plafonnement de la taxe professionnelle – nous en reparlerons mardi. En attendant, face à ce discours idéologique, à cette propagande,…

M. Charles Cova. Vous en connaissez un bout en la matière !

M. René Dosière. …je souhaite m’en tenir aux faits et vous exposer des données concernant quatre domaines des collectivités locales. Je précise d’emblée que tous les chiffres que je vais donner sont issus du rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances. Ils portent sur l’année 1993 pour les plus anciens, 2004 pour les plus récents, puisque c’est la période pendant laquelle nous avons des chiffres cohérents en base 2000 de la comptabilité nationale.

Je commencerai par les impôts. Les collectivités locales augmentent-elles leurs impôts ? Oui, puisqu’en 1993 elles prélevaient 5,2 % du PIB, alors qu’elles en ont perçu 5,3 % en 2004. En dix ans, elles ont augmenté leurs impôts de 0,1 point du PIB, c’est-à-dire de 1,6 milliard. Rendez-vous compte ! Et pendant la même période, l’État a bien plus augmenté ses impôts : de 15,9 % du PIB en 1993, ils sont passés à 16,3 % en 2004, autrement dit une augmentation de 0,4 point – plus 6,4 milliards –, soit quatre fois plus que les collectivités locales ! Alors, je sais bien que cette comparaison sur la fiscalité est un peu faussée par la suppression, durant cette période, de certains impôts locaux, par des compensations fiscales, des modifications dans les versements de celles-ci. Peut-être ces chiffres ne sont-ils pas d’une rigueur absolue, je l’admets. Je note néanmoins que, s’il y a eu des suppressions d’impôts locaux et des compensations fiscales, c’est bien parce que les gouvernements – quels qu’ils soient d’ailleurs – ont été incapables de réformer la fiscalité locale et qu’ils ont pris des mesures anesthésiantes pour le contribuable local, mais pas pour le contribuable national. On ne peut pas pointer du doigt les collectivités locales quand on est responsable de tout cela !

Et ces impôts pour quoi faire ? Des dépenses ! Je prendrai celles que la comptabilité nationale appelle la formation brute de capital fixe, l’investissement : les routes, les écoles, les crèches, les maisons de retraite, les universités, bref, tout ce qui fait le bonheur des Français, tout ce qui fait que notre pays est l’un de ceux où il est le plus agréable de vivre ! Mais que fait l’État dans ce domaine ? Il lui consacre 7,2 milliards d’euros, c’est-à-dire moins de 2 % de son budget. Et ces dépenses d’investissement ne cessent de diminuer. Elles sont passées de 0,7 % du PIB à 0,4 %. Voyons maintenant ce que font les collectivités locales ! Elles dépensent 36 milliards en matière d’investissements publics, soit 20 % de leur budget, et cette dépense est restée stable durant toute la période considérée. Autrement, si notre pays est équipé, c’est bien grâce aux collectivités locales et pas grâce à l’État.

Maintenant, où en sommes-nous sur le plan de l’équilibre budgétaire ? Le secteur public local a pratiquement toujours été en excédent sur cette période. C’est en 2004 seulement qu’il présente un déficit de 0,1 point du PIB, soit 1,9 milliard d’euros, ce qui représente 1 % des recettes des collectivités locales. Et l’État, durant la même période, a toujours connu un déficit supérieur à 3 %, sauf sous le gouvernement Jospin où il a été réduit à 2,5 %.

M. Michel Piron. Ô paradis perdu !

M. Jean-Michel Fourgous. Quel talent ce Jospin !

M. René Dosière. Il est actuellement à 3,2 % du PIB, c’est-à-dire 52,2 milliards d’euros, ce qui représente 16 % des recettes !

Je terminerai par le dernier indicateur, qui est l’endettement. Celui des collectivités locales ne cesse de diminuer : de 9,4 % du PIB en 1993, il est passé à 6,8 % aujourd’hui – 112 milliards. Quant à l’État pendant la même période, son endettement a augmenté de façon vertigineuse ! De 31 % du PIB en 1993, il est passé à 51 % en 2004 – 840 milliards –, et il a encore progressé depuis.

M. Jean-Michel Fourgous. Et vous n’y êtes pour rien !

M. René Dosière. Voilà la « vérité vraie », la « vérité bête », comme aurait dit Péguy.

M. Michel Piron. Invoquer Péguy dans un débat sur les collectivités territoriales, c’est tout de même tiré par les cheveux !

M. René Dosière. La réalité, c’est que l’État est mal géré et que les collectivités sont très bien gérées. Et si elles sont bien gérées, c’est d’abord parce qu’il y a une stabilité des élus – en moyenne, les maires restent douze ans –, alors qu’il faut remonter à 1978 pour trouver une élection où la majorité sortante a été réélue. C’est, ensuite, en raison de la qualité du personnel de la fonction publique territoriale. Il ne sort ni de l’ENA, ni de Polytechnique, ni de Centrale. Il a seulement fréquenté l’université où il a parfois obtenu un DESS, mais il connaît bien les réalités.

M. Jean-Pierre Balligand. Il a René Dosière comme prof ! (Sourires.)

M. René Dosière. Il sait que un plus un cela fait deux. Il sait répondre aux besoins des habitants. Voilà pourquoi notre secteur public local est très bien géré.

Monsieur le ministre, je me permettrai de vous donner un conseil : prenez donc exemple sur la gestion publique locale et cessez d’accuser les collectivités locales de vos propres turpitudes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. Merci, monsieur Dosière, pour tous les universitaires qui siègent dans cet hémicycle !

La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, René Dosière vient de parler de l’accusation que le Gouvernement porte sur les collectivités locales en essayant de leur faire porter la responsabilité de l’échec de sa politique. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai réagi tout à l’heure lorsqu’il a été question d’un climat de confiance. Vous ne faites pas confiance aux collectivités locales, monsieur le ministre. Vous les accusez et les mettez dans une situation impossible qui devient dangereuse, puisque, par un effet de ciseaux, vous aggravez leurs charges tout en plafonnant leurs recettes.

Vous aggravez les charges avec la décentralisation. Vous transférez la voirie avec des crédits d’investissement dérisoires que vous reprenez en partie avec la réforme de la dotation globale d’équipement. Vous attribuez 90 000 euros à l’Ariège pour ce transfert de voirie, mais vous en reprenez presque la moitié sur la DGE. Et pour la Creuse c’est pis, puisque ce que vous reprenez avec la DGE représente 2 % des impôts !

Vous nous aviez dit que le transfert du RMI serait compensé par la TIPP, « recette évolutive ». C’est faux et nous avions raison de le dire à l’époque. On nous avait assuré que les régions pourraient faire évoluer cette taxe, mais nous n’avons toujours pas de réponse aujourd’hui. Pour les départements, le déficit du RMI en 2004 est de 562 millions. Il sera compensé, soit. Mais pour 2005 ce déficit sera deux fois plus élevé pour deux raisons. D’abord, parce que le nombre de RMIstes augmente, même si quelques départements s’évertuent à le freiner – c’est le cas du mien. Ensuite, parce que les recettes de TIPP se sont réduites. Ce déficit va-t-il être compensé ? Nous n’en savons rien ! Dans mon département, il représente 4 % des impôts. Comment vais-je faire, sachant que vous m’avez réduit la dotation globale d’équipement et que d’autres transferts vont intervenir ? Ces transferts doivent être compensés par la taxe sur les conventions d’assurance. On nous avait promis que cette taxe serait évolutive, que nous pourrions la moduler. On nous dit maintenant que cela n’est plus possible. Cela prouve bien que cette décentralisation était improvisée et que le Gouvernement ne l’a faite que pour équilibrer le budget de l’État sur le dos des collectivités locales.

M. René Dosière et Mme Muguette Jacquaint. Bien sûr !

M. Augustin Bonrepaux. Cela explique d’ailleurs la précipitation avec laquelle s’est réalisé le transfert du RMI.

Pour les TOS, que nous devrons prendre en charge au 1er janvier, nous ne savons toujours pas quelle sera la compensation pour les emplois contractuels. Par ailleurs, les charges de personnel augmentent chaque année de 3,5 % du fait du GVT, des cotisations à la CNRACL, du jour férié, etc. La taxe sur les conventions d’assurance suivra-elle le même mouvement alors que les primes d’assurance vont baisser cette année, ce dont nous nous réjouissons ? En outre, cette taxe suit les mêmes évolutions que la TIPP avec la hausse du pétrole et les limitations de vitesse.

Parce que mes collègues l’ont déjà signalé, je passe sur le problème des SDIS, pour lesquels le Gouvernement édicte des règles en laissant aux collectivités locales le soin d’en supporter le coût.

À présent, celles-ci doivent en plus s’occuper du problème du handicap et, cette fois, ce n’est plus le Gouvernement, mais le département qui devra financer les associations, auxquelles on a laissé une grande marge de manœuvre.

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Les communes paient aussi !

M. Augustin Bonrepaux. En somme, vous aggravez de plus en plus les déficits. Et le bouquet, c’est le bouclier fiscal. À mon sens, il faut être mesquin pour réduire la DGF de 20 millions quand l’État doit tant de milliards aux collectivités !

Mais le plafonnement de la taxe professionnelle, que personne n’avait demandé, est sans doute plus grave encore. Une convention a travaillé pendant un an pour préparer cette réforme que le Gouvernement n’a pas le courage de mettre en œuvre. Il est vrai que, puisque certaines entreprises paient trop et d’autres pas assez, la justice impose de procéder à un rééquilibrage et d’instaurer une péréquation entre les entreprises.

M. Jean-Pierre Balligand. Toutes les entreprises l’ont demandé !

M. Augustin Bonrepaux. Seulement, ce sera douloureux, car on ne peut pas réduire la participation des unes sans baisser celle des autres.

M. Jean-Michel Fourgous. Elles n’ont pas toutes les mêmes coûts de production !

M. Augustin Bonrepaux. Alors, parce qu’il n’a pas le courage d’aller jusqu’au bout, le Gouvernement a eu l’idée de faire payer les collectivités locales, ces irresponsables qui augmentent leurs dépenses de manière inconsidérée ! Il décide donc de les mettre au pas en instaurant un plafonnement.

Seulement, celui-ci aura pour effet de priver certaines d’entre elles de tout moyen, par exemple celles qui se trouvent dans une zone industrielle ancienne, où le textile disparaît, ou encore dans une zone pauvre. D’autres conserveront des marges de manœuvre importantes. Ainsi, avec un plafonnement à 28 %, les Hauts-de-Seine n’éprouveront aucune difficulté. Mais qu’en sera-t-il des neuf départements qui seront plafonnés à plus de 70 % ? Quelle sera leur marge de manœuvre ?

Prenons un exemple concret. Dans mon département se trouve une petite commune de 500 habitants, située dans un canton de 1 500 habitants. L’entreprise la plus importante, Pechiney, a fermé, de sorte que les bases ont diminué de moitié. Ce canton conserve, par chance, un barrage d’EDF, désormais seul contribuable au titre de la taxe professionnelle. Avec un plafonnement à 97 %, de quelle marge cette communauté de communes dispose-t-elle, alors qu’elle vient de signer un contrat de revitalisation pour générer un peu d’activité afin de faire face à la disparition de 300 emplois ? Aucune. La seule solution qui lui reste est de faire payer les 1 500 habitants.

Monsieur le ministre, en ajoutant la méfiance aux accusations et en créant d’aussi graves injustices, vous engagez notre pays dans une voie dangereuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, contrairement aux apparences, les missions et programmes budgétaires que nous examinons – « Relations avec les collectivités territoriales », « Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux », « Avances aux collectivités territoriales » – ne constituent ni la première ni la seule partie du projet de loi de finances pour 2006 qui concerne les collectivités territoriales.

La politique des territoires a déjà été examinée le 8 novembre, le bouclier fiscal le 16 et la réforme de la taxe professionnelle devrait l’être le 22. Vingt millions d’euros ont été ôtés hier à la DGF au nom du bouclier fiscal et près de 500 millions d’euros seront retirés demain aux collectivités locales au titre de la réforme de la taxe professionnelle. L’éclatement des débats, qui vise à diluer la violence des coups et à amoindrir la contestation, nuit considérablement à la bonne compréhension des enjeux qui touchent nos collectivités. Il n’est pas dû à la forme particulière de la LOLF, mais à une construction du projet de loi de finances et à une organisation du débat parlementaire délibérées et voulues telles par le Gouvernement.

Ce non-respect formel pour les collectivités territoriales corrobore hélas le sentiment quasi unanime qui prévaut chez les élus locaux depuis l’adoption contrainte et forcée de l’acte II de la décentralisation, il y a un peu plus d’un an.

Je vais citer quelqu’un qui n’est pourtant pas un de mes amis. Jean Puech, président de l’observatoire de la décentralisation créé au Sénat en janvier 2005 pour suivre le déroulement de cette réforme dite « loi Raffarin », a eu le courage de dire publiquement ce que beaucoup pensent tout bas, même au sein de la majorité. Dans une interview au quotidien économique La Tribune, datée du 2 novembre 2005, il déclare en effet à propos du RMI : « L’État transfère des ressources financières insuffisantes, puis les complète après négociation ; mais les personnels n’ont pas été transférés. Ce n’est pas normal. » À propos du budget pour 2006, il indique : « Certaines conséquences du bouclier fiscal portent atteinte à notre autonomie financière. » Et il ajoute, à propos des relations entre l’État et les collectivités territoriales : « Les élus locaux ne sont pas aujourd’hui suffisamment entendus et ils ne sont pas associés à la mise en œuvre des grandes réformes. »

Parce qu’il ne vient pas de moi, mais d’un sénateur UMP, qui plus est ancien président de l’Assemblée des départements de France, je n’imagine pas un seul instant que la majorité puisse contester la justesse et la pertinence de ce constat attristant pour la décentralisation et alarmant pour le Gouvernement.

Encore ce constat n’est-il pas complet : il faudrait également parler de la charge polémique et démagogique qui a été menée cette année contre l’augmentation des impôts locaux,…

M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, pour les remboursements et les dégrèvements. Des impôts régionaux !

M. Jean-Pierre Balligand. …et qui vient d’être réitérée, alors que la hausse moyenne de 3,1 % des taux de la fiscalité locale intervenue cette année a permis aux collectivités territoriales – particulièrement aux régions – d’augmenter leurs investissements de 6,3 % en 2005 !

Nous pourrions aussi revenir sur les propos perfides distillés régulièrement, notamment par le ministre de tutelle, ici présent, contre le principe même de l’intercommunalité.

Nous pourrions enfin évoquer la masse des promesses non tenues depuis juillet 2004, date mémorable de la naissance provoquée de l’acte II de la décentralisation et du décès prématuré de l’autonomie financière. Pas de rapport d’évaluation de la réforme des dotations. Aucune trace de la modulation promise de la TIPP ou de la taxe sur les conventions d’assurance. Aucune compensation permanente des déficits structurels liés au RMI – qui s’élèvent à un milliard d’euros cette année –, mais le maintien d’un rattrapage ex post parfaitement discrétionnaire. Et que dire de la résistance ubuesque du Gouvernement, encore constatée dans notre hémicycle il y a quelques jours, à communiquer aux élus de la nation les simulations nominatives qu’exige l’examen serein par le Parlement de la réforme de la taxe professionnelle ?

Le résultat est là. L’État a clairement perdu toute crédibilité dans ce dossier. La décentralisation, pour laquelle il y a encore tellement à faire – c’est le coprésident de l’Institut de la décentralisation qui vous le dit –, éprouve plus de mal aujourd’hui qu’hier à mobiliser et faire rêver nos concitoyens. Quant aux élus locaux de tous bords, ils n’hésitent plus à exprimer ouvertement leur déception, leur mécontentement et leur mal-être. Le prochain congrès des maires de France devrait encore leur offrir une tribune.

J’en viens au problème de l’intercommunalité. Vous avez eu l’amabilité, monsieur le ministre, de vous rendre au congrès de l’Association des petites villes, à Autun et, la semaine suivante, nous nous sommes retrouvés à Angers.

M. Bernard Derosier. Vous ne nous quittez plus ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Balligand. C’est dans notre hémicycle – et non au Sénat – qu’a été faite, en février 1992, la « loi Joxe » sur l’intercommunalité, que nous avons ensuite corrigée à la demande du monde urbain. En effet, l’intercommunalité, dont cette loi posait les bases, s’était beaucoup développée dans le monde rural, les petites villes ou les villes moyennes, mais le maillage urbain, lui, n’avait pas bien fonctionné.

Ce second texte aurait dû porter le nom de Dominique Perben, qui l’avait préparé. Mais, du fait de la dissolution, c’est devenu la « loi Chevènement », qui a été votée à l’unanimité. C’est ainsi que l’intercommunalité est montée en puissance.

M. Jean-Michel Fourgous. En même temps que les dépenses !

M. Jean-Pierre Balligand. Les gens de la région parisienne sont mal placés pour en parler, monsieur Fourgous. D’ailleurs, ils sont loin d’être exemplaires !

M. Jean-Michel Fourgous. Ceux de Saint-Quentin-en-Yvelines, par exemple ?

M. Jean-Pierre Balligand. Les élus, de droite comme de gauche, doivent faire attention. Voilà dix ans que je préside, avec Adrien Zeller, l’Institut de la décentralisation. Je ne suis pas connu pour être sectaire.

M. Michel Bouvard. C’est vrai !

M. Jean-Pierre Balligand. Mais je vous mets en garde, monsieur le ministre : vous êtes en train de rompre le pacte intercommunal en France.

M. Jean-Michel Fourgous. Urbain ou rural ?

M. Jean-Pierre Balligand. Vous savez que notre pays, du fait de son grand nombre de communes, ne pouvait pas évoluer. C’est pourquoi, pour avancer, nous avons trouvé le système de l’intercommunalité, qui conservait, en excluant la fusion de plusieurs communes, l’identité communale. Nous l’avons inventé et assumé collectivement.

Nous avons, et c’était fondamental, décommunalisé la taxe professionnelle, notamment par la création de la TPU, la taxe professionnelle unique, consubstantielle à la création de la communauté d’agglomération, mais – grâce à un amendement que j’avais cosigné avec quelques collègues de droite – ouverte aux communautés de communes. Un tiers d’entre elles a adopté la TPU.

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. En effet !

M. Jean-Pierre Balligand. Par cette décision, les élus, de droite comme de gauche, ont réuni et unifié les taxes professionnelles, en prévoyant un lissage, généralement pour dix ans.

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. C’est exact.

M. Jean-Pierre Balligand. Ce système permettait d’asseoir l’intercommunalité sans toucher aux impôts sur les ménages que sont la taxe d’habitation et le foncier bâti.

M. Michel Piron. C’était peut-être là l’erreur !

M. Jean-Pierre Balligand. Il est vrai que nous étions quelques-uns à nous demander s’il ne valait pas mieux une base fiscale mixte. Mais enfin, la loi a tranché.

Quoi qu’il en soit, le pacte intercommunal s’est mis en place dans toute la France. Or nous sommes aujourd’hui au bord de la rupture, puisque le plafonnement de la taxe professionnelle à 3,5 %, que nous devons voter dans trois jours, bloquera la progressivité des ressources, en particulier dans les zones de vieille industrie.

Dans l’Essonne, pour prendre un exemple que connaît bien mon ami Michel Berson, il n’y a aucun problème. Les entreprises ont un profil bien différent et le plafonnement est inférieur à 30 %. Mais, dans les Ardennes, même si le conseil général est de droite, le plafonnement est de 70 %. Le taux est le même dans le Nord.

M. Bernard Derosier. …où le conseil général n’est pas de droite !

M. Jean-Pierre Balligand. Dans le Pas-de-Calais, il est de 72 %. Ainsi, au-delà du plafonnement, ce sont toutes les intercommunalités à taxe professionnelle unique qui seront touchées. C’est pourquoi je vous mets en garde, monsieur le ministre : celles-ci vont devoir basculer à nouveau vers une fiscalité mixte.

M. Michel Piron. Le raisonnement est un peu rapide !

M. Jean-Pierre Balligand. Les libéraux que vous êtes ne favoriseront pas la baisse des prélèvements obligatoires en leur faisant changer de régime fiscal !

M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Ce sont souvent de meilleurs gestionnaires que les autres !

M. Jean-Pierre Balligand. Peut-être mais, mes chers collègues, faites attention à ne pas rompre le pacte intercommunal. Vous risquez de déstabiliser la seule structure qui soit en mouvement aujourd’hui.

Nous le savons pour avoir assisté à la commission d’enquête, l’intercommunalité s’occupe de la petite enfance.

M. Jean-Michel Fourgous. Ce sont les collectivités locales qui s’en occupent, pas l’intercommunalité !

M. Jean-Pierre Balligand. En raison de la dilatation territoriale, les rurbains, c’est-à-dire les urbains qui quittent la ville pour s’installer en milieu rural, exigent en effet le même niveau de service qu’en ville. C’est d’ailleurs ce qui fait la richesse des intercommunalités.

M. Michel Piron. C’est du Alphonse Allais : ils veulent bâtir des villes à la campagne !

M. Jean-Pierre Balligand. De même, les communes rurales ne peuvent pas assumer l’assainissement toutes seules.

M. Bernard Derosier. Le département intervient parfois.

M. Jean-Pierre Balligand. C’est pour cela qu’elles se mettent en commun, exerçant ainsi peu à peu un nombre de compétences de plus en plus grand.

Attention, monsieur le ministre, à ne pas tuer la montée en puissance des compétences des intercommunalités, qui sont peut-être la seule structure qui ait bien fonctionné durant les douze ou treize dernières années, quels qu’aient été leurs gestionnaires.

M. Jean-Michel Fourgous. Il y a tout de même un seuil critique de population !

M. Jean-Pierre Balligand. Mon propos, vous le voyez, n’est pas partisan. Mais vous prenez une lourde responsabilité et je vous mets en garde. Répondez de manière moins laconique et donnez-nous clairement les règles du jeu, car la pire des choses est de changer les lois sans cesse.

M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. C’est vrai.

M. Jean-Pierre Balligand. On ne peut pas construire les intercommunalités en changeant leur organisation au bout de cinq ans. Ce n’est ni sérieux ni crédible. Et, si vous le faites, vous ne pourrez plus demander aux élus communaux qui y travaillent de s’occuper des minorités ou de l’insertion des jeunes dans la société.

Dans notre pays, les agglomérations connaissent d’énormes problèmes. Il faut donc adresser aux collectivités un discours non pas répressif mais fort, et leur garantir qu’elles pourront travailler encore pendant des années sur des bases solides. Pour l’instant, nous sommes loin du compte, et le groupe socialiste s’interroge vraiment sur cette question. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, il me revient de vous présenter les principaux axes du projet de loi de finances s’agissant des recettes des collectivités territoriales et, plus particulièrement, des concours financiers de l’État aux collectivités et de la compensation des transferts de compétences.

Ainsi que l’ont rappelé les rapporteurs, ce budget est le premier à mettre pleinement en œuvre la loi organique du 1er août 2001. Dans ce cadre, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » regroupe quatre programmes représentant un montant de 2,9 milliards d’euros en crédits de paiement, contre 2,8 milliards d’euros en 2005. Les trois premiers correspondent naturellement aux trois strates de collectivités territoriales et comportent, pour chacune d’entre elles, deux actions distinctes : d’une part, le soutien aux projets de développement ou l’aide à l’équipement de la collectivité et, d’autre part, la dotation générale de décentralisation. Le dernier programme, n° 122, est d’ordre général et regroupe à la fois les aides exceptionnelles aux collectivités territoriales et l’administration des relations avec les collectivités par la direction générale des collectivités locales du ministère de l’intérieur, dont je salue l’ensemble des services pour le travail qui a été accompli à mes côtés au service de vos collectivités.

Je ne m’attarderai pas sur l’ensemble des questions relatives aux impôts locaux, qui seront débattues mardi prochain. Je souhaite néanmoins répondre à M. Le Guen, qui m’a interrogé ce matin sur le bouclier fiscal et la réforme de la taxe professionnelle. Pour reprendre les termes utilisés dans cet hémicycle par le ministre délégué au budget, nous devons comprendre que ces deux mesures répondent à un souci de justice et d’attractivité.

En ce qui concerne le bouclier fiscal, l’idée me semble pertinente. En effet, qui peut sérieusement considérer comme normal que certains de nos concitoyens, pour cent jours travaillés, versent le revenu de soixante-cinq jours en impôts et taxes diverses ? Au reste, ce bouclier existe chez un certain nombre de nos voisins européens, notamment en Allemagne, où il a été inscrit dans la Constitution et fixé à 50 %.

M. Jean-Jacques Descamps, rapporteur spécial. Absolument !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. S’agissant de l’application de ce dispositif aux impôts locaux, si le montant vous paraît faible, un souci de cohérence évident a conduit à les inclure dans ce mécanisme de plafonnement de l’ensemble des « impôts ménages ». Toutefois, les amendements présentés par MM. Carrez et Mariton sont à même de répondre aux attentes du Gouvernement, tout en apaisant – j’en suis convaincu – les inquiétudes des collectivités,…

M. Augustin Bonrepaux. Oh non !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. … inquiétudes que j’avais parfaitement perçues, comme je l’avais dit au cours des réunions évoquées par M. Balligand. Ces amendements vont donc dans le bon sens. Lorsque les impôts d’État font franchir, à eux seuls, le plafonnement à 60 %, les impôts locaux resteront en dehors du mécanisme. Dans l’hypothèse, qui demeurera exceptionnelle, où ceux-ci feraient franchir le seuil de 60 %, la charge de ce dépassement – effectivement évaluée à 20 millions d’euros – sera mutualisée au sein de la DGF. Je précise d’ailleurs, pour rassurer les uns et les autres, qu’elle ne représentera alors que le cinq millième du montant total de la DGF.

S’agissant de la taxe professionnelle, le mécanisme du ticket modérateur est un des outils qui permettent d’assurer un juste équilibre entre les besoins des entreprises et des collectivités. Il s'agit d'un partage raisonnable de l'effort entre l'État et les collectivités, au bénéfice des entreprises et de l'emploi. Qui peut estimer normal que 1 % des entreprises assument 70 % du produit ? Les collectivités dont les bases plafonnées représentent la majeure partie des bases totales de TP pourraient effectivement être mises en difficulté par la réforme telle que présentée dans le projet initial.

M. Michel Bouvard. Eh oui !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. J’ai entendu votre message et celui des élus locaux à ce sujet. Le président Bonrepaux a cité l’exemple de l’Ariège ; je peux évoquer le cas de la commune d'Issoire, dans mon département, dont le maire a siégé à deux reprises sur les bancs de l’Assemblée nationale. Dans cette ville, les bases des entreprises plafonnées s'élèvent à 64 millions d’euros sur 74 millions d’euros de bases totales de TP, soit 86 % des bases TP totales. De même, aux Ancizes, les bases plafonnées représentent 98 % des bases totales.

C'est pourquoi, sans revenir sur le principe de la réforme, mais pleinement conscients des effets indésirables qu’elle pourrait produire en l'état actuel du texte, nous veillerons, avec Jean-François Copé, à ce que le dispositif soit précisément adapté. Afin de ne pas pénaliser les collectivités qui se sont montrées jusqu'à présent les plus vertueuses, et dans le but de préserver celles qui ne pourraient supporter un ticket modérateur trop important au regard de leurs finances, plusieurs aménagements demeurent possibles, notamment le plafonnement du ticket modérateur en fonction de différents critères, tels que l’année de référence. Toutefois, je laisse au ministre du budget le soin de vous les détailler au cours de la discussion budgétaire et, surtout, de vous en présenter la faisabilité technique. Mais j’ai bien conscience que nous répondrons ainsi à une attente dans laquelle je me reconnais et pour laquelle je vous apporte mon soutien. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Bernard Derosier. Quelle improvisation !

M. Jean-Pierre Balligand. J’espère que vous viendrez aussi !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Cela aurait été avec grand plaisir, mais je serai, ce jour-là, devant la commission des finances du Sénat.

Le projet de loi de finances est marqué par la volonté du Gouvernement, et, en son sein, du ministère de l'intérieur, de poursuivre l’effort engagé en faveur des collectivités territoriales, malgré une contrainte budgétaire que vous avez, les uns et les autres, soulignée – et je me félicite de ce témoignage de lucidité et d’honnêteté.

Notre premier objectif a été de reconduire le contrat de croissance et de solidarité et de consolider la réforme de la DGF qui figure dans la loi de finances pour 2005. Nous avons souhaité également rénover le soutien de l'État à l'investissement des collectivités locales. En outre, conformément aux vœux du ministre d'État, l'effort de solidarité continuera de s'accroître en faveur des zones urbaines, dans la continuité du plan de cohésion sociale, surtout – j’insiste sur ce point – compte tenu des derniers événements qui ont marqué les banlieues. De plus, j'ai souhaité que ce projet de loi de finances contienne des mesures adaptées au monde rural, qu'il ne faut pas oublier pour autant.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Enfin, 2006 sera la seconde année de mise en œuvre des transferts de compétences prévus par la loi du 13 août 2004. Dans ce cadre, nous nous attachons à poursuivre ce processus, en permettant aux collectivités – j’espère vous le démontrer – d'exercer au mieux leurs nouvelles compétences.

S’agissant des concours financiers de l'État, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne reflète que partiellement l'effort financier total de l'État en faveur de celles-ci. Les prélèvements sur recettes financent l'essentiel des concours de l'État aux collectivités, qui s'élèveront cette année à 47,2 milliards d’euros, ce qui représente 74 % de l'effort financier total de l'État en leur faveur. Comme l'a justement rappelé Jean-Jacques Descamps, la mission « Remboursements et dégrèvements » – examinée en même temps que la mission « Relations avec les collectivités territoriales » – a le mérite de mettre en évidence, dans son programme « Impôts locaux », le fait que l'État reverse, dans ce cadre, plus de 13,4 milliards d’euros.

Dans un souci de cohérence et de visibilité, tant pour les collectivités que pour les contribuables, il semblerait à première vue plus rationnel d'intégrer ce programme dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales », afin que chacun puisse reconnaître plus facilement l'ampleur de l'effort financer total de l'État en faveur des collectivités. J'attire cependant votre attention, monsieur Descamps, sur la difficulté technique de joindre les deux missions, compte tenu de la nature des crédits en cause. En effet, nous examinons principalement aujourd'hui des crédits limitatifs et les crédits évaluatifs liés aux futurs remboursements et dégrèvements pourraient empêcher juridiquement une telle liaison. Cette difficulté ne vous avait d'ailleurs pas échappé lors des débats parlementaires sur la LOLF.

En réalité, l'effort total s'élève, cette année, à plus de 64,9 milliards d’euros, soit environ un cinquième du budget de l'État.

S’agissant du contrat de croissance et de solidarité, j’ai souhaité que ses règles d'indexation soient de nouveau reconduites en 2006, comme elles l'ont été depuis 1996, d'abord de façon pluriannuelle, puis annuellement depuis 2002. Avec une hypothèse d'inflation pour 2006 de 1,8 % et une hypothèse de progression du PIB en 2005 de 1,75 %, l'enveloppe du contrat de croissance progressera de 2,49 % en 2006. Afin que vous mesuriez l’effort consenti, je vous rappelle que le contrat avait progressé de 2,87 % en 2005, de 1,7 % en 2004 et de 2,3 % en 2003.

M. Michel Piron. Ce n’est pas rien !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Au total, cette enveloppe, qui regroupe notamment la DGF, atteindra près de 44 milliards d’euros en 2006. À elle seule, la DGF progressera de 2,73 %, ce qui représente plus de 1 010 millions d'euros. Celle des communes et des EPCI augmentera ainsi de plus de 577 millions, celle des départements de 297 millions et celle des régions de 135 millions. Permettez-moi de saluer la clairvoyance de M. Piron, qui sait reconnaître les efforts du Gouvernement s'agissant de la DGF et du contrat de croissance – ce qui n'est pas un dû. Croyez-moi, la reconduction n’allait pas de soi : rien n’était acquis.

Monsieur Derosier, je constate que nous parvenons plus facilement à des positions communes lorsque je siège avec vous au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, dont vous êtes le président, que dans cet hémicycle. Tout d’abord, je souhaiterais vous rappeler un élément factuel : contrairement à ce que vous avez dit, la paternité du contrat de croissance doit être attribuée au gouvernement d’Alain Juppé, qui en a jeté les bases. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Augustin Bonrepaux. Il s’agissait du contrat de stabilité !

M. Bernard Derosier. Vous êtes jeune dans le métier, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Qui peut dire que ce contrat de croissance est une simple variable d’ajustement quand il progresse de 2,49 %, alors que les dépenses de l’État se limitent à une croissance zéro ?

M. Bernard Derosier. Parce que vous gérez mal l’État ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Michel Piron. Ne crachez pas dans la soupe !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. S'agissant des communes, la reconduction du contrat de croissance offrira au Comité des finances locales la possibilité de procéder à la répartition de la DGF dans des conditions à la fois équilibrées et solidaires. Celui-ci pourra ainsi caler l'indexation des différentes parts de la dotation forfaitaire des communes sur la limite haute de leurs fourchettes respectives.

Par ailleurs, cette année, madame Jacquaint, la DSU progressera de 120 millions d’euros. En outre – et c'est là le sens de l'article 84 qui vous est présenté – la réforme de la DSU sera consolidée par trois mesures.

Tout d'abord, la consolidation de la majoration de 20 millions d’euros de l'enveloppe des communes de 5 000 à 10 000 habitants intervenue en 2005. En l'absence d'une telle mesure, ces communes auraient subi une chute brutale de leurs dotations.

Tout d’abord, la consolidation de la majoration de 20 millions d’euros de l’enveloppe des communes de 5 000 à 10 00 habitants intervenue en 2005. En l’absence d’une telle mesure, en 2006 les communes de 5 000 à 10 000 habitants auraient subi une chute brutale de leur dotation, ce que nous n’avons pas voulu.

Ensuite, afin de répondre à l’attente de certains d’entre vous, le Gouvernement propose d’étendre aux communes de plus de 200 000 habitants les deux coefficients multiplicateurs proportionnels à la population en ZUS et en ZFU. Seraient concernées des villes comme Strasbourg, Lille, Marseille ou Toulouse, sans pour autant revenir sur la progression dont ont bénéficié en 2005 les villes de moindre importance.

M. René Dosière. Où prendrez-vous cet argent ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. J’y viens, monsieur Dosière.

La troisième consolidation proposée est relative à la mise en place d’une deuxième tranche de garantie pour les communes ayant perdu leur éligibilité en 2005. Elles ont bénéficié en 2005 d’une garantie à 100 %. Pour 2006, il est donc proposé de leur attribuer 50 % du montant perçu précédemment.

Avant de conclure sur la question de la DSU, je voudrais souligner tous les efforts du Gouvernement en faveur des banlieues. Je suis un peu surpris par vos propos, madame Jacquaint, car je crois savoir qu’à plusieurs reprises vous aviez salué cet effort, notamment lorsqu’il avait bénéficié aux communes de votre département. Je vous rappelle les chiffres : la DSU a augmenté de 94 % pour La Courneuve, de 147 % pour Clichy-sous-Bois…

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Tout cela, pour quel résultat ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. …de 74 % pour Épinay-sur-Seine, de 48 % pour Aulnay-sous-Bois et enfin de 34 % pour Stains.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Il fallait tout de même le rappeler ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. J’aurais apprécié, madame Jacquaint, que vous souligniez vous-même les efforts qui ont été accomplis.

Mme Muguette Jacquaint. Je pourrais vous donner d’autres chiffres !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. L’État consacre chaque année des montants très importants pour aider les communes confrontées aux problèmes de quartiers sensibles. Dans l’ensemble des dotations aux collectivités locales que gère le ministère de l’intérieur, un effort particulier a été fait depuis 2005 au travers de la dotation de solidarité urbaine, dont les critères ont été réformés début 2005 dans le cadre du plan de cohésion sociale.

Le Gouvernement s’est engagé à faire augmenter cette dotation de 120 millions d’euros par an pendant sept ans. La DSU est donc passée de 600 à 720 millions d’euros. Cet effort a été ciblé sur des communes qui comprennent des zones urbaines sensibles et des zones franches urbaines. 115 communes comportant des zones urbaines sensibles ont ainsi vu, madame Jacquaint, leur DSU progresser en moyenne de 43 %.

Mme Muguette Jacquaint. Ce sont des réparations bien méritées !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Pour les communes comprenant les zones urbaines sensibles, la DSU représentait ainsi 564 millions d’euros en 2005, et atteindra 677 millions d’euros en 2006, soit une augmentation de 20 %. Enfin, pour répondre à l’interrogation de M. Dosière, les critères ZUS et ZFU seront effectivement étendus en 2006 aux villes de plus de 200 000 habitants, ce qui représente un effort de 6 millions d’euros.

M. René Dosière. Ce sera prélevé sur les autres communes !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Par exemple, à Vénissieux, dans le Rhône, la DSU sera en progression de 69 % et au total les dotations pour les communes s’élèveront à 15,3 millions d’euros pour un montant de 263 euros par habitant.

Les dispositions qui vous sont présentées dans cette mission devraient permettre de poursuivre l’effort global consenti envers les zones urbaines, nonobstant un certain nombre de mesures spécifiques que le Gouvernement prendra prochainement, à la suite des dégâts occasionnés par les émeutes.

Concernant l’utilisation de la régularisation 2004 au profit de la péréquation, j’aurais souhaité aller plus loin dans l’équilibre et dans la solidarité. Ainsi, il est proposé d’abonder la DGF 2006 du montant de la régularisation 2004, qui s’élève à 92 millions d’euros. Il ne s’agit pas de l’allouer aux communes et aux EPCI au prorata des attributions 2004, mais d’en faire une utilisation qui soit au contraire beaucoup plus souple et dynamique, conformément à l’esprit qui a présidé l’an dernier à la réforme de la DGF.

M. Jacques Le Guen. Très bien !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. D’abord, le projet de loi de finances prévoit d’allouer un montant de 4,2 millions d’euros au financement d’une garantie de sortie de deux ans pour les communes ayant perdu en 2005 le bénéfice de la dotation « élu local ». Pour répondre à M. Le Guen, ainsi qu’à beaucoup de maires, s’il ne me paraît pas souhaitable de revenir sur le passage du potentiel fiscal au potentiel financier, je reste cependant ouvert à la discussion sur ce point, tant j’ai reçu de messages de collectivités ou d’élus concernés. Comme je l’ai suggéré lors de l’audition devant la commission des lois du Sénat, il me semble que la solution la plus efficace et la plus claire serait de rebaser définitivement la dotation en assurant aux communes sortantes le versement d’une attribution de garantie compensant intégralement la perte de la dotation pour 2005. Le solde à la régularisation, d’un montant de 80 millions d’euros, sera affecté à la DGF 2006. Cette mesure permet d’assurer, parallèlement à la croissance de la DSU, une croissance exactement similaire de la dotation de solidarité rurale. Elles connaîtront donc toutes deux une progression de 15,8 %.

M. Jacques Le Guen. Très bien !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. En ce qui concerne le soutien à l’investissement des collectivités territoriales, nous avons voulu engager une politique permettant de rénover concrètement et efficacement ce soutien. Si une réforme de la DGE des départements est nécessaire, je crois qu’elle doit être accompagnée pour éviter certaines difficultés.

M. Michel Bouvard. Ah !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Vous savez comme moi que le taux de concours de la fraction principale de la première part de la DGE des départements est très faible : 2,77 % en 2005. À titre de comparaison, le taux de concours de la deuxième part s’élève à 14 %. Il a donc été décidé que la première part de la DGE des départements serait supprimée, dans un souci de rationalité. Je vous rappelle d’ailleurs que c’est une analyse similaire qui avait conduit à décider, en 1996, la suppression de la première part de la DGE des communes.

Je précise bien que cette suppression de la première part ne se fera pas sans contreparties. Elle sera en fait accompagnée de trois mesures.

D’abord, les opérations en cours seront naturellement soldées – il n’est pas question de revenir sur les engagements qui ont été pris –, ce qui se traduit par l’inscription en PLF 2006 de 98,4 millions d’euros.

Deuxièmement, les crédits correspondants à l’actuelle fraction « voirie », ainsi qu’à la majoration « potentiel fiscal », à hauteur de 54 millions d’euros, seront basculés dans la dotation de compensation de la DGF des départements.

Troisièmement, nous mettrons en place une compensation de 15 millions d’euros spécifique aux SDIS, répartie entre les départements au prorata de la moyenne des attributions de DGE perçues par le SDIS en 2002, 2003 et 2004.

J’ajoute en ce qui concerne les SDIS que l’État tiendra les engagements pris au sujet du financement de la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires. Ainsi, l’abondement de la DGF des départements figurant en loi de finances pour 2005 sera porté de 20 à 30 millions d’euros.

Enfin, la suppression de la première part est compensée partiellement et incluse dans la dotation de compensation de la DGF. Dans la version initiale du Gouvernement, cette compensation s’élevait à 73,6 millions d’euros et bénéficiait à 71 départements. Par un amendement gouvernemental répondant à une demande formulée par Michel Bouvard, nous avons étendu cette compensation qui concerne désormais 76 départements pour un montant de 89 millions d’euros.

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Afin de répondre à une demande largement exprimée, j’ai également souhaité que la rénovation du soutien à l’investissement passe par une mesure positive : la clarification des règles d’attribution du FCTVA.

Reconnaissons ensemble que le dispositif actuel a généré beaucoup d’incompréhension, en grande partie du fait d’une jurisprudence quelque peu hésitante. La réforme proposée ouvre désormais le bénéfice du FCTVA dès lors que l’utilisation de l’équipement par le tiers constitue une simple modalité d’exécution d’un service public, ou répond le cas échéant à un besoin d’intérêt général.

Très concrètement, une collectivité pourra désormais bénéficier plus sûrement du FCTVA lorsqu’elle construit une maison de retraite et en confie la gestion à un tiers, ou encore lorsqu’elle met à la disposition d’une association dépourvue d’activité concurrentielle les locaux dont elle est propriétaire.

Ce projet de texte règle également le cas des biens confiés par les collectivités territoriales à l’État pour l’exercice de ses missions de service public.

Au-delà de ses avantages en termes de simplification, la mesure proposée présente un double intérêt. D’abord un intérêt financier, puisque le montant du FCTVA inscrit dans le projet de loi de finances est supérieur à 4 milliards d’euros, ce qui représente une progression de 6,3 % par rapport à 2005 ; ensuite, un intérêt opérationnel, puisque les conditions d’intervention du FCTVA ne viendront plus interférer dans les choix effectués par la collectivité pour la gestion de ses services publics.

Troisièmement, nous avons souhaité que le PLF 2006 comporte plusieurs mesures manifestant notre volonté de soutenir le développement du monde rural.

D’abord, l’affectation de la régularisation 2004 à la péréquation garantit une progression de la dotation de solidarité rurale de 15,8 %, dans un souci d’équilibre avec la péréquation urbaine.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Un encouragement spécifique à l’investissement en milieu rural est également prévu. J’ai veillé à ce que la réforme de la DGE préserve les territoires ruraux. La compensation de 74 millions d’euros que je vous ai annoncée bénéficiera notamment à 23 des 24 départements bénéficiant de la dotation de fonctionnement minimale avant son élargissement en 2005, et, en tout, à 59 des 64 départements actuellement éligibles à la DFM – ce qui répond, je le sais, à une préoccupation forte sur certains bancs.

Par ailleurs, la réforme du FCTVA concernera bien évidemment les investissements que réalisent les collectivités locales pour maintenir et développer les services de proximité en milieu rural – épiceries municipales, points postes, et cetera – offrant aux interventions des collectivités locales la souplesse dont elles ont besoin.

Enfin, une enveloppe de 20 millions d’euros est prévue pour soutenir les projets innovants de services au public en milieu rural. C’est une manière de rénover les conditions d’utilisation de la dotation de développement rural, comme indiqué à l’article 82 du présent projet. Le ministre d’État a souhaité que soient redéployés ces 20 millions d’euros, afin de dynamiser leur utilisation. J’ai eu l’occasion de souligner ici même la souplesse de l’utilisation de ces crédits, qui peuvent être utilisés aussi bien par les EPCI que par les communes, tant en investissement qu’en fonctionnement.

Enfin, le projet de loi de finances 2006 traduira, sur le plan financier, la mise en œuvre des transferts de compétences prévus par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Les charges ainsi transférées en deux ans, au titre de 2005 et 2006, s’élèvent à 1,4 milliard d’euros, dont 963 millions d’euros l’ont été au profit des régions et 294 millions d’euros au profit des départements.

Ces transferts ont été intégralement compensés dans le respect des principes posés par la loi du 13 août 2004.

M. René Dosière. Ce n’est pas vrai ! Pas le RMI !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Ces transferts de charges, je vous le rappelle, ont été évalués de manière contradictoire et transparente sous le contrôle vigilant de la commission consultative sur l’évaluation des charges, qui examine tous les ans la justesse de la compensation opérée pour chaque transfert, et donne son avis sur chacun des projets d’arrêtés interministériels.

M. Michel Piron. Tout à fait !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Cette commission s’est réunie à huit reprises en 2005 afin d’examiner la compensation des transferts intervenus cette année et examinera durant les prochains mois les projets d’arrêtés interministériels.

C’est ainsi qu’est mis en œuvre l’engagement de l’État d’assurer une compensation à la fois intégrale et concomitante. La commission en a d’ailleurs donné publiquement acte au Gouvernement, notamment lors de sa réunion du 6 octobre dernier.

M. Bonrepaux et M. Balligand ont parlé de « turpitude », reprenant le terme précédemment employé par M. Derosier…

M. Bernard Derosier. Je n’ai parlé que de « turpitude fiscale » !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Je vous donne acte de cette précision, monsieur Derosier.

Vos collègues ont laissé entendre que l’on « piquerait » de l’argent aux collectivités locales. Comment peuvent-ils dire cela, alors que l’État a fait la preuve de son esprit d’ouverture sur les transferts de compétences, notamment dans les cas où la compensation avait été mal calculée ? Je ne sais pas si vous vous en souvenez – si vous avez oublié, cela prouve que vous n’attachez pas d’importance à ces sommes-là, et vous serez donc mal fondés à les citer à titre de comparaison –, mais c’est tout de même 31 millions d’euros qui ont été réinjectés à la suite des observations formulées. Cela montre bien que l’État sait reconnaître et corriger les inexactitudes ou les erreurs d’appréciation qui ont été commises.

M. Jean-Pierre Balligand. Et les routes nationales ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Dosière, vous avez soulevé des points très intéressants. J’ai d’ailleurs écouté avec une grande attention – et ce n’est pas simplement une formule – le raisonnement que vous avez développé. Dans un premier temps, j’ai même été séduit. Malheureusement, ce raisonnement est inexact, ce qui ne veut pas dire faux. En effet, la période que vous prenez en référence concernant la situation des collectivités n’est pas suffisante. Entre 1983 et 1996, les collectivités étaient lourdement déficitaires, jusqu’à un point du PIB. Il n’y a eu excédent qu’entre 1996 et 2004 et celui-ci était limité à 0,1. Donc votre raisonnement est juste, mais il fallait l’appliquer à une période plus longue. Et cela vous aurait sans doute amené à une conclusion différente.

M. René Dosière. C’est parce que nous n’avons pas de bases statistiques cohérentes pour la période que vous évoquez !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. En tout cas, les bases que je vous donne sont justes.

Je dirai en conclusion que tout budget, et plus particulièrement toute initiative concernant les collectivités locales, doit faire l’objet – et c’est logique et sain – d’un débat. Mais, par honnêteté, il faut reconnaître, au moins, trois points.

Tout d’abord, il y a eu des avancées, comme la réforme du FCTVA.

Ensuite, les acquis sont clairement préservés, comme le contrat de croissance et de solidarité le garantit.

Enfin, il existe dans ce projet des gages de transparence et de loyauté s’agissant de la compensation des transferts de compétences.

Je ne pense pas avoir convaincu tout le monde. J’espère cependant que chacun aura compris que la solidarité et l’équilibre sont les objectifs recherchés par ce projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en arrivons aux questions.

Nous commençons par le groupe des député-e-s communistes et républicains.

La parole est à Mme Muguette Jacquaint.

Mme Muguette Jacquaint. Un mot avant de poser ma question. M. le ministre m’a fait remarquer que, s’agissant de la DSU, j’aurais pu évoquer les efforts consentis en faveur de La Courneuve, de Stains ou d’autres villes de mon département. Je rappellerai simplement, et on ne le répétera jamais assez, que ces villes – et l’actualité l’a malheureusement montré – sont très pauvres, de même que leur population. Voici quelques chiffres significatifs : à Neuilly, le salaire moyen est de 3 500 euros contre 550 à Stains et 600 euros à La Courneuve. À Aubervilliers, 60 % des familles ne sont pas assujetties à l’impôt sur le revenu. La solidarité prend là tout son sens, et ces villes ont plus besoin que d’autres d’en bénéficier.

Ma question porte sur les créances de l’État envers le conseil général de Seine-Saint-Denis. L'actualité des dernières semaines a bien montré l'ampleur des difficultés sociales de ce département dit populaire. Plus personne aujourd'hui ne peut nier leur ampleur. Plus personne ne peut contester que ce département ait plus besoin que d’autres de la solidarité nationale. Tel n’est malheureusement pas le cas.

Ainsi, il manque cette année à ce conseil général plus de 145 millions d'euros pour boucler un simple budget de reconduction. Je tiens à préciser qu'un point de fiscalité représente 4,2 millions d'euros dans ce département.

Comme je l’ai déjà dit, ce problème budgétaire n'est pas la conséquence d'une mauvaise gestion. Ainsi, au titre du transfert du RMI, l'État a une créance de 24 millions d'euros pour l'année 2004, qui devrait être prochainement versée. Mais il a aussi une créance de 50 millions d'euros au titre de l'exercice 2005. En effet, la dégradation de la situation de l'emploi a conduit à une augmentation de 13 % du nombre des allocataires du RMI.

L'intégration de la dotation de compensation de la taxe professionnelle dans la DGF des départements conduira à une perte de revenus de 3,7 millions d'euros pour ce département.

La prise en charge des mineurs isolés est un poste budgétaire important dans ce département du fait, non pas de l'irresponsabilité des parents, mais de la proximité de l'aéroport international de Roissy. La solidarité nationale ne devrait-elle pas jouer pour les 11 millions d'euros occasionnés par cette prise en charge de mineurs isolés ?

Les critères de compensation de l'allocation personnalisée à l'autonomie sont défavorables à ce département urbain. Ainsi, 25 % de ces dépenses sont compensées par l'État, contre 33 % en moyenne nationale. Presque 5 millions d'euros font donc encore défaut au budget du département.

Le transfert des TOS coûtera la même somme au conseil général. Les critères de compensation du transfert des routes nationales aux départements n'ont pas été étudiés pour les départements urbains. C'est donc 20 millions d'euros qui ne seront pas compensés, encore une fois, du fait de la décentralisation.

Monsieur le ministre, l’État et la solidarité ont un rôle à jouer pour compenser les charges supplémentaires que vous avez créées avec les lois de décentralisation. Que comptez-vous faire pour ce département ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Madame la députée, j’ai bien entendu vos remarques et je vous remercie d’avoir validé au passage les chiffres que j’ai donnés concernant les différentes communes du département dont vous êtes l’élue.

Vous évoquez la situation particulière du conseil général de Seine-Saint-Denis. J’entends bien votre préoccupation et j’ai intégré les chiffres que vous avez communiqués. Je me dois cependant de préciser, de manière que l’information soit complète et peut-être pour apaiser en partie vos inquiétudes, que ce conseil général va recevoir au titre de l’abondement RMI 24,4 millions d’euros.

Mme Muguette Jacquaint. Pour 2004 seulement !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. J’indique au passage, m’adressant notamment au président Derosier qui a fait fort justement observer que j’étais un peu jeune dans l’exercice gouvernemental, que jeune ne signifie pas naïf. J’ai donc pris la précaution de venir avec la totalité des éléments concernant les différents conseils généraux, y compris celui du Nord. (Sourires.)

Madame Jacquaint, vous avez évoqué une sorte de déficit de 20 millions d’euros : je vous précise que les droits de mutation à titre onéreux ont progressé de plus de 19 millions d’euros entre 2003 et 2004.

Voilà les informations que je souhaitais porter à votre connaissance.

Mme Muguette Jacquaint. Cela ne comble pas le trou de 145 millions.

M. le président. Monsieur le ministre, « aux âmes bien nées, la valeur n’attend pas le nombre des années » ! (Sourires.)

La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour poser une seconde question.

Mme Muguette Jacquaint. Ma question, monsieur le ministre, concerne la péréquation financière horizontale entre les communes.

Un des premiers instruments de cette péréquation horizontale est constitué des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. Ces fonds permettent d'atténuer les inégalités de base de taxe professionnelle existant entre les communes d'un même département. Votre projet de loi de finances a fait cependant le choix de poursuivre le rétrécissement des bases de la TP. Tous les nouveaux investissements seront ainsi encore exonérés de TP. Au fur et à mesure de ces allégements, les ressources de ces fonds de péréquation ne pourront donc aller qu'en s'asséchant.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous préserver les ressources de ces fonds départementaux et maintenir une péréquation horizontale minimale dans les départements ?

La question est encore plus complexe en Île-de-France. Le fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France – le FSRIF –, créé en 1991, a perdu en effet une grande partie de ses ressources à la suite de la suppression de la part salariale de la TP, mais surtout de la création de nombreuses communautés d'agglomération dans la région. La mise en commun des ressources de TP dans une communauté d'agglomération dispense en effet les communes concernées de contribuer au FSRIF.

Vous prétendez, avec la loi de finances, atténuer l'impact de la suppression de la part salariale de la TP sur les ressources du FSRIF.

Mais l'essentiel du problème est ailleurs. En France, la plupart des groupements intercommunaux ont agrégé autour d'une ville-centre plutôt aisée des communes qui le sont moins, afin de mutualiser leurs ressources. L'Île-de-France est la seule région où les villes riches aient réussi à se regrouper entre elles, obligeant les plus pauvres à s'organiser de leur côté. Les communes nanties de la région se sont ainsi souvent unies pour conserver le pactole de la taxe professionnelle, et donc ne plus alimenter le FSRIF.

Au vu des ravages créés par la segmentation sociale en Île-de-France, quelles décisions comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour relancer la péréquation horizontale dans cette région ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Madame la députée, je ne reviendrai pas dans le détail sur la situation que j’ai évoquée tout à l’heure. J’ai noté d’ailleurs que tout le monde au moins était d’accord sur le principe : il fallait réformer la taxe professionnelle.

Je vous rappelle, madame, que le rapport commandé à M. Fouquet avait fait apparaître un certain nombre de carences dans le dispositif. Nous n’avons cependant pas repris ses conclusions.

M. René Dosière. Parce que vous l’avez mis à la poubelle !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Pas du tout ! Il a au contraire nourri les réflexions. Simplement, la réforme proposée dans le rapport Fouquet aurait eu sans doute des conséquences positives pour l’Île-de-France mais aurait pénalisé un grand nombre de départements, au moins dans la durée. Le dispositif aurait été neutre au départ et négatif sur la durée. C’est pour cela que nous ne l’avons pas repris.

Pour répondre plus précisément à votre interrogation, madame la députée, je vous indique que les fonds départementaux de taxe professionnelle ont représenté 600 millions d’euros en 2004 à l’échelle nationale. L’écrêtement évolue comme les bases de la taxe professionnelle. Si les bases de la TP évoluent plus vite que la dotation globale de fonctionnement, il y a alors une indexation sur la DGF. Le mécanisme est conçu de façon à garantir le pouvoir d’achat des FDTP. Et je peux vous assurer que,dans la réalité, ce mécanisme fonctionne bien !

M. le président. Nous passons au groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

La parole est à M. Étienne Pinte.

M. Étienne Pinte. Monsieur le ministre, le 20 octobre, lors de la discussion de la première partie de la loi de finances, nous avons eu, en présence de M. Méhaignerie, président de la commission des finances, et de M. Copé, ministre du budget, un très vif débat sur les relations entre l’État et les collectivités territoriales. Si l’État – ce que personne ne conteste – est devenu le plus gros contributeur des collectivités territoriales, ce n’est pas par altruisme, contrairement à ce que laisse supposer le président de la commission des finances, mais parce qu’il ne parvient pas, souvent, à maîtriser ses interventions.

En matière d’interventions budgétaires de l’État, la perte annuelle de recettes due aux modifications successives de réglementation est très importante. Dans le budget de ma ville de Versailles, les différentes mesures prises depuis 1992 ont causé une perte équivalente à 8,4 millions d’euros, soit plus de 20 points d’impôt.

En outre, sur une base de 100 en 1990, la dotation globale de fonctionnement est passée à 108,5 en 2003, alors que l’inflation atteignait 125 sur la même période : il faut donc ajouter 1,2 million d’euros aux 8,4 millions dont je viens de parler, ce qui correspond à 23 points d’impôt.

S’agissant des compensations financières de l’État, monsieur le ministre, la prise en charge par nos villes, à la place de l’État, de certaines missions régaliennes est de plus en plus difficile à supporter.

Je voudrais vous citer deux exemples, monsieur le ministre. Au début de l’année, j’ai saisi le Conseil d’État qui a annulé le décret organisant le transfert de la gestion des passeports par les communes. Pourquoi ? Parce que ce décret, pris par un gouvernement de la majorité précédente, l’avait été de façon illégale et ne prévoyait aucune compensation du budget de l’État. De la même manière, avant l’été, j’ai été amené à faire condamner l’État par le tribunal administratif de Versailles à compenser le transfert de l’instruction des cartes d’identité.

Ces deux exemples, choisis parmi d’autres, vous montrent à quel point les relations entre l’État et les collectivités territoriales manquent de clarté.

Enfin, je souhaite appeler votre attention sur la démarche insidieuse de certains ministères chargés de compétences hautement régaliennes qui sollicitent l’aide des communes pour réaliser leurs programmes d’investissements prioritaires.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, il est indispensable d’engager un débat afin de clarifier les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales, ce qui nous éviterait peut-être de nous accuser injustement les uns et les autres.

M. René Dosière. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le député, tous ces sujets m’amènent à une conclusion, à laquelle vous souhaitez certainement que j’aboutisse. L’arrêt du Conseil d’État auquel vous avez fait allusion est bien connu des services du ministère de l’intérieur. Mais vous êtes bien placé, monsieur Pinte, pour savoir que cette décision du Conseil d’État n’était pas justifiée par l’absence de transfert financier, mais parce que nous nous trouvions devant un vide législatif, qui sera d’ailleurs comblé très prochainement.

En ce qui concerne la situation financière de la commune de Versailles, nous ferons en sorte, en 2006, que le Comité des finances locales cale l’indexation de la dotation forfaitaire à son maximum. J’espère avoir ainsi répondu à votre préoccupation.

Monsieur le député, si tous les chiffres relatifs à la commune de Versailles sont justes, ce que je crois, cela signifie tout simplement que c’est une commune très bien gérée, ce qui ne me surprend pas ! (Sourires.)

M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Chers collègues, plusieurs groupes ayant exprimé le souhait que la séance soit levée en début de soirée, j’invite chaque orateur à faire preuve de concision.

relations avec les collectivités territoriales

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » inscrits à l’état B.

État B

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 621.

La parole est à M. Bernard Derosier, pour le soutenir.

M. Bernard Derosier. Monsieur le ministre, tout à l’heure, j’ai fait référence à votre jeunesse et, vu votre réaction, j’ai cru comprendre que mes propos vous avaient touché, vexé. Prenez-les comme la reconnaissance d’une qualité que j’ai personnellement de moins en moins et que je vous envie un peu ! (Sourires.) J’ai employé ces termes dans la mesure où vous avez fait un amalgame entre le plan de stabilisation du Premier ministre Juppé et le plan Jospin qui était fondamentalement différent !

Monsieur le ministre, je pense que cet amendement est, pour l’Assemblée, pour le Gouvernement, l’heure de vérité. Vous vous targuez, sans doute à juste titre, de votre volonté de vérité, de franchise. Vous avez l’opportunité de la manifester en acceptant, au nom du Gouvernement, cet amendement de transparence.

À de multiples reprises, nous avons interrogé le Gouvernement, en particulier le ministre chargé du budget, qui nous a toujours garanti de la part de l’État la compensation à l’euro près. Désormais, dans notre pays, cette notion d’« euro près » est devenue synonyme de Copé.

Cette possibilité de transparence est également offerte car, à travers cet amendement, ce serait l’occasion, pour l’Assemblée nationale et le Gouvernement, de faire bon usage de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF.

Monsieur le ministre, dans votre intervention, vous avez fait référence aux collectivités les plus vertueuses, qui, d’une certaine façon, se verraient peut-être récompensées.

Je ne ferai pas de comparaison avec l’État. Je ne m’interroge pas pour savoir s’il est ou non vertueux, dans la mesure où cette notion n’est pas, à mes yeux, définie juridiquement. Je ne vois pas quels critères pourraient être avancés pour reconnaître la vertu des collectivités ou de l’État.

Plutôt que de vertu, monsieur le ministre, je vous propose de parler d’honnêteté, valeur à laquelle vous êtes, comme moi, je pense, attaché. L’honnêteté est ce qui caractériserait le respect des engagements par l’État.

La création d'un programme intitulé « Compensation des transferts de compétences aux collectivités territoriales » donnerait à l’État, au Gouvernement qui le dirige, l’opportunité de manifester sa volonté de transparence, de vérité, d’honnêteté. Monsieur le ministre, ne perdez pas cette occasion de nous prouver que vous mettez vos actes en conformité avec vos déclarations.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier, suppléant M. Marc Laffineur, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, pour les relations avec les collectivités territoriales et pour les avances aux collectivités territoriales, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 621.

M. Jérôme Chartier, suppléant M. Marc Laffineur, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan, pour les relations avec les collectivités territoriales et pour les avances aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mes chers collègues, la commission n’a pas examiné cet amendement, mais, à titre personnel, j’y suis défavorable.

Tout l’intérêt de la loi organique relative aux lois de finances est d’introduire de la clarté. Nous avons créé, dans cette mission, des programmes très spécifiques pour chacune des catégories de collectivités. Or l’adoption de l’amendement de M. Derosier reviendrait à déstructurer cette clarté.

En effet, que se passera-t-il dans les années à venir si cet amendement est adopté ? Le montant de ce programme supplémentaire sera systématiquement contesté et fera l’objet d’une joute entre la majorité et l’opposition, ce qui dénaturera la qualité des débats telle qu’elle l’est aujourd’hui avec notre excellent ministre et les excellents parlementaires présents ce soir dans cet hémicycle.

Aussi, à titre personnel, je serai d’avis de repousser cet amendement au nom précisément de la transparence, de la qualité des débats et de la clarté apportée au budget grâce à la loi organique relative aux lois de finances.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je souscris pleinement aux explications très claires que vient de donner Jérôme Chartier. La structuration des missions en programmes différents pour chaque niveau de collectivités offre une vision claire et immédiate des dotations qui les concernent. Votre proposition produirait l’effet inverse, car le fait de rassembler en un même programme l’ensemble des crédits relatifs à la compensation des transferts de compétences donnerait de facto au responsable de programme la possibilité d’effectuer lui-même des arbitrages entre niveaux de collectivités. Cela ne favoriserait nullement la clarté et l’efficacité. Si cet amendement n’était pas retiré, je proposerais qu’il soit rejeté.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Monsieur le rapporteur spécial, vos observations ne sont recevables que dans la mesure où l’on peut isoler, dans le cadre des programmes de concours financiers aux communes, aux départements ou aux régions, ce qui concerne la compensation des transferts de compétences. Si vous globalisez trop, ces programmes recouvriront des sommes de natures très différentes. Que le Gouvernement accorde de l’importance aux transferts de compétences n’empêche nullement la création d’un programme qui permettrait de suivre les transferts financiers. Le rapporteur spécial considère que cela donnerait lieu à des polémiques : penserait-il que les compensations ne seront pas suffisantes ? Il n’y aura pas de polémiques dès lors que, tous les ans, les transferts seront calculés, comme le dit le ministre, à l’euro près.

Notre collègue Bouvard, grand spécialiste de la LOLF, est sans doute favorable à la création de ce nouveau programme favorisant la transparence dans les transferts financiers.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Je comprends bien l’intention de nos collègues socialistes, mais cette éventualité n’a été évoquée à aucun moment par aucun des parlementaires qui ont participé aux travaux préparatoires à la mise en œuvre de la maquette. Or la loi de décentralisation était en marche, des transferts avaient déjà eu lieu.

D’autre part – et plus fondamentalement −, un programme doit être assorti d’objectifs et d’indicateurs si l’on veut pouvoir juger de l’efficacité de l’argent que l’État consacre à la mise en œuvre d’une politique publique. Si l’on se contente d’y mettre des crédits de transfert, on se prive d’indicateurs sur l’efficacité du transfert, puisque cet argent n’est plus géré par l’État dans le cadre du budget de la nation. On perdrait donc là une grande partie de l’intérêt que nous offre la mise en œuvre de la loi organique.

Il faut que les crédits soient identifiés dans des actions, comme c’est actuellement le cas. C’est la bonne formule, celle qui permet d’avoir un suivi. Cela n’empêche aucunement la commission d’évaluation des charges ou les rapporteurs spéciaux de travailler pour savoir si le transfert et ses compensations sont justes.

Je comprends bien la mécanique intellectuelle qui conduit à une telle proposition, mais celle-ci est dépourvue d’intérêt pour le pilotage et la mise en œuvre de la loi organique.

M. Bernard Derosier. Vous avez peur !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial suppléant.

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Je voudrais apporter deux précisions. D’une part, je voudrais dire à M. Dosière que, membre depuis dix ans, au titre de l’AMF, de la commission consultative sur l’évaluation des charges, j’ai pu constater que, chaque année, on débat du montant des compétences transférées.

D’autre part, j’attire l’attention de M. Dosière sur la page 20 du « bleu », où figure le détail du montant des compétences transférées, domaine par domaine. La reconfiguration dans un nouveau programme n’apporterait rien de plus.

M. Michel Bouvard. C’est astucieux !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 621.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

(Les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » sont adoptés.)

M. le président. Je vais maintenant appeler les articles 82 à 85 du projet de loi de finances, relatifs aux relations avec les collectivités territoriales.

Article 82

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 636, tendant à supprimer l’article 82.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour soutenir cet amendement.

M. Augustin Bonrepaux. Sans doute certains considèrent-ils que l’article 82 représente un atout pour les collectivités locales, mais, en réalité, il ne se justifie pas du tout. Vous prenez en effet ces crédits sur la régularisation de 2005 : les collectivités n’auront donc rien de plus. Il peut être dangereux de donner l’illusion que l’État compense la disparition de ses propres services. Que l’État assume ses services et qu’il laisse les collectivités locales assumer les leurs. Nous n’avons pas besoin de ces artifices.

Nombre de caisses de la Banque de France ont disparu, et la Banque de France nous adresse aujourd’hui un rapport vantant la façon dont elle s’acquitte du service public. S’en acquitte-t-elle vraiment en supprimant douze emplois dans un département ? Désormais, pour avoir le même service, il faut parfois faire cent kilomètres.

M. Michel Bouvard. Il va nous faire pleurer !

M. Augustin Bonrepaux. Mes chers collègues, ma région est certainement favorisée : sur huit départements, il ne reste que trois caisses, alors que, dans la plupart des régions, on a maintenu une caisse par département. Ne secouez donc pas trop la tête : je sais de quoi je parle. Dans les stations d’Ax-les-Thermes ou de Guzet − qui est encore plus éloigné −, quand on a besoin de faire un dépôt à la Banque de France, ce n’est plus à Foix qu’on doit se rendre, mais à Toulouse.

De même, les services de La Poste fonctionnent tellement bien que, désormais, le courrier arrive une demi-heure plus tard et que les levées se font une demi-heure plus tôt.

M. Michel Bouvard. C’est la faute des 35 heures !

M. Augustin Bonrepaux. On veut que les services fonctionnent mieux, et c’est comme ça qu’on s’y prend ? On compte sur les collectivités locales pour la compensation. En matière de transport ferroviaire, les trains ne peuvent plus circuler, mais c’est la région qui finance le matériel roulant.

Monsieur le ministre, vous n’avez pas besoin de ce petit artifice de 20 millions. Que l’État assume le financement de ses services publics. Les collectivités locales sont capables de faire fonctionner les leurs. D’ailleurs, ce sont les services des collectivités locales qui se développent, alors que ceux de l’État disparaissent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. La commission n’a pas examiné cet amendement, mais, à titre personnel, j’y suis défavorable. La dotation de développement rural est destinée à soutenir des projets en milieu rural, mais on constate qu’elle est sous-consommée ces dernières années : il restait ainsi 43 millions en 2002, et 30 en 2003. En termes de prélèvement sur recettes, 150 millions sont aujourd’hui disponibles, qui, certes, sont reportables. En créant cette dotation spécifique, l’État a voulu faire un accélérateur de développement, sans pénaliser les projets en cours ni l’action conduite par les communes. Je ne peux donc être que favorable à l’article du Gouvernement et défavorable à l’amendement de M. Bonrepaux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Bonrepaux, je ne veux pas vous noyer sous les chiffres, mais la DDR représente 124 millions d’euros. Au rythme actuel de consommation des crédits de paiement, la part de 20 millions est sans aucune incidence. Toutefois, cette nouvelle clef de répartition va entraîner, pour votre département de l’Ariège, une augmentation de 26 % de la DDR. Je prends bonne note que vous ne la souhaitez pas et que vous voulez nous priver de cette souplesse qui permet d’accompagner un effort d’imagination et d’innovation : voilà les deux mauvaises nouvelles que vous vouliez nous apporter. Je suis sûr que certains de vos collègues ne manqueront pas de populariser vos idées.

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. M. le ministre n’a pas bien compris. Je prétends que cet article n’apporte rien de plus aux collectivités locales, puisqu’il affecte à la dotation de développement rural des crédits qui figuraient dans la régularisation et dont nous aurions de toute façon bénéficié. Je n’ai rien contre la DDR. C’est d’ailleurs nous qui l’avons instituée en 1992, à l’époque où la droite refusait de voter la loi créant les communautés de communes.

Je fais remarquer au rapporteur spécial que, si certains départements ne consomment pas tous les crédits, c’est simplement qu’ils n’en ont pas besoin. Pourquoi ne pas ventiler ces sommes, l’année suivante, dans les départements qui sauront les utiliser ?

J’ai écrit à M. Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire, et lui ai demandé de quels moyens il disposait pour favoriser la création d’entreprises dans les départements ruraux. Il m’a répondu que tous les crédits − ceux de l’État comme ceux de l’Europe − étaient épuisés. Il est vrai que la DDR est un élément important, mais ce qu’il y a de malheureux, c’est que nous n’en avons pas assez. On laisse entendre que nous en aurons davantage, mais c’est faire miroiter des crédits qui appartiennent déjà aux collectivités locales : ce tour de passe-passe ne peut faire longtemps illusion. Je ne refuse pas ce qu’on va nous donner, mais on nous donne ce que nous avons déjà.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Mais ce n’est pas utilisé en totalité !

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. J’étais président de la commission spéciale chargée de l’examen de la loi relative aux communautés de communes et la rédaction de l’amendement concernant l’utilisation de la DDR est de ma main. Je me souviens que nous avions un objectif précis : il s’agissait de permettre aux collectivités locales de mener des projets de développement créant de la richesse fiscale et des emplois.

Dans un autre texte, nous avions ensuite, à l’initiative d’Augustin Bonrepaux, réservé l’utilisation de cette dotation aux intercommunalités et non plus aux communes. Là encore, il s’agissait de bien établir que les projets de développement devaient être portés par des intercommunalités.

Votre article propose d’utiliser une partie de la DDR. Certes, il y a des reports, mais pas partout, et l’on peut demander aux préfets de faire un peu plus. Mais vous proposez également de distraire cette somme pour financer le maintien et le développement des services publics en milieu rural. Autrement dit, pour s’acquitter d’une tâche qui lui incombe, l’État va prendre aux collectivités locales l’argent réservé à leurs projets de développement, au lieu de dégager les sommes nécessaires sur son propre budget.

En même temps, cet article propose que la DDR soit désormais attribuée à la plupart des communes françaises − 34 471 sur 36 000 −, alors qu’elle est aujourd’hui réservée aux intercommunalités. Cela reviendrait à distribuer des sommes très faibles et nous avons toujours refusé ce saupoudrage. Nous ne pouvons donc pas accepter ces deux modifications.

M. le président. Je mets aux voix…

M. Augustin Bonrepaux. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. Le vote est commencé, monsieur Bonrepaux.

Je mets aux voix, disais-je, l'amendement n° 636.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Augustin Bonrepaux. Rappel au règlement ! Si vous ne m’aviez pas refusé la parole, monsieur le président,…

M. le président. Monsieur Bonrepaux, vous connaissez le règlement : lorsqu’un vote est appelé, personne ne peut plus intervenir. Je ne devrais pas avoir à le rappeler au député expérimenté et à l’ancien président de la commission des finances que vous êtes.

M. Augustin Bonrepaux. Si vous m’aviez laissé parler, j’aurais peut-être retiré l’amendement.

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 594.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 594.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 595.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Il s’agit également d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Favorable.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Est-ce qu’un rapport, qui m’aurait échappé, fait apparaître les conséquences, en matière de dotation des communes, de ce passage de « potentiel financier » à « potentiel fiscal » ? Un tel changement est certainement significatif.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Dosière, je suis très surpris par votre question. Il aurait été d’ailleurs préférable que vous la posiez en dehors de cet hémicycle de manière qu’elle ne figure pas au procès-verbal. En effet, le rapport a été diffusé, il est vrai au mois d’août, comme l’article 50 de la loi de finances pour 2005 le prévoit. Je regrette que vous ne l’ayez pas lu.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 595.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 82, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 82, ainsi modifié, est adopté.)

Article 83

M. le président. La parole est à M. Bonrepaux, inscrit sur l’article 83.

M. Augustin Bonrepaux. Je souhaite quelques précisions sur la modification de l’affectation de la dotation pour les bibliothèques. Les départements vont-ils perdre une partie de ce qu’ils percevaient ? Nous avons déjà eu une petite surprise avec la dotation globale d’équipement dont la modification ne s’est pas traduite par une meilleure répartition, contrairement à ce que l’on nous avait annoncé, mais par une diminution de 150 millions d’euros, ce qui n’est pas neutre pour les départements.

Quel est, par ailleurs, l’intérêt de cette réforme ? Les départements, monsieur le ministre, jouent un rôle important pour la lecture publique puisqu’ils ont la charge des bibliothèques départementales de prêt dont ils financent à ce titre, c’est du moins le cas du département de l’Ariège, la création et l’équipement.

M. Michel Bouvard. Tout à fait.

M. Augustin Bonrepaux. Ces crédits vont-ils aller directement aux communes du même département ou aux grandes bibliothèques, au détriment des départements ruraux ?

Je ne m’oppose pas à une amélioration du dispositif. Mais je ne voudrais pas que les départements, qui ont là une compétence importante, se voient privés de crédits dont ils disposaient en ce domaine.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Chaque année, nous sommes conduits, au comité des finances locales, à répartir cette dotation spécifique de fonctionnement pour les bibliothèques, qui est une résurgence de celles qui existaient avant 1982. Nous avons constaté, année après année, que le taux de la première part tendait, petit à petit, vers zéro, et que l’on ne pouvait donc pas continuer à faire du saupoudrage.

Un groupe de travail, constitué au sein du CFL avec nos collègues Philippe Laurent et Jacky Darne, a proposé cet été – je parle sous le contrôle de M. le ministre – une réforme qui est reprise dans cet article.

Je tiens à cet égard à rassurer M. Bonrepaux : ce travail ne tend en rien à supprimer la dotation ou à la réduire. Il ne s’agit pas de la même réforme que celle de la DGE des départements. Son montant est maintenu, mais, progressivement, la première part, c’est-à-dire le fonctionnement, va diminuer pour être réaffectée à une dotation d’équipement qui, elle, sera beaucoup plus efficace.

Il ne s’agit donc pas d’une économie pour l’État, mais d’une simplification qui, je le répète, répond à une demande du comité des finances locales relayée par nos collègues.

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 322.

La parole est à M. le rapporteur spécial suppléant, pour le soutenir.

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 322.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 83, modifié par l'amendement n° 322.

(L'article 83, ainsi modifié, est adopté.)

Article 84

M. le président. Sur l’article 84, je suis d’abord saisi d’un amendement n° 596 troisième rectification.

La parole est à M. Gilles Carrez, pour le soutenir.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La prise en compte des recensements complémentaires donnera plus de poids à la part « population » dans la répartition de la DGF pour 2006, ce qui diminuera la fraction affectée à la péréquation.

Par cet amendement, il est proposé, pour les départements, de laisser plus de choix au comité des finances locales dans l’affectation des crédits au titre des dotations de péréquation – dotation de péréquation urbaine ou dotation de fonctionnement minimale pour les départements moins urbains.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Le Gouvernement est favorable à cet amendement car, compte tenu des sommes en jeu pour la DSU – 120 millions d’ici à 2009 – nous devons disposer de données aussi fiables, lisibles et précises que possible.

M. le président. Je n’ai pas demandé son avis à la commission des finances, mais il sera certainement favorable…

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. En effet, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 596 troisième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 637.

La parole est à M. René Dosière, pour le soutenir.

M. René Dosière. Il s’agit, par cet amendement, d’éviter que les augmentations de crédits prévues en faveur de la DSU ne se fassent au détriment de l’ensemble des communes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Le principe de la DGF est clair : assurer une compensation à partir d’une dotation fixe.

Cette année, la DGF augmente de 2,7 %, soit d’un petit peu plus d’un milliard d’euros. Dans ces conditions, il ne me semble pas du tout incohérent qu’une partie de la somme bénéficie aux villes de plus de 200 000 habitants, d’autant que, les récents événements l’ont montré, une dotation supplémentaire leur serait plus que nécessaire.

J’émets donc un avis défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Dosière, je ne comprends pas votre raisonnement.

M. René Dosière. Je vous l’expliquerai.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Vous en aurez besoin.

La mesure que le Gouvernement propose s’applique à sept villes et coûte 6 millions d’euros. Est-elle prise à enveloppe constante ? Non, puisqu’elle l’est sur la DSU, qui augmente de 120 millions d’euros, comme je l’ai déjà précisé.

En conséquence, aucune commune ne sera pénalisée par cette mesure. En revanche, les populations de Lille, Marseille et d’autres villes concernées en bénéficieront. Si vous ne le souhaitez pas, dites-le clairement !

Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Monsieur le ministre, ainsi que vous pouvez le lire dans l’exposé des motifs, nous ne sommes pas opposés à ce que les villes de plus de 200 000 habitants bénéficient de la mesure, encore que, par le passé, elles étaient mises un peu à part, leur richesse étant assez nettement supérieure aux autres.

Certes, la somme que vous avez indiquée, soit 6 millions, n’est pas considérable compte tenu de la population de ces villes. Il n’en reste pas moins que, sur le plan des principes, ce qui est l’objet de notre amendement, et même si la DSU augmente, dès lors que l’on ouvre la mesure à d’autres catégories de villes, ce que toucheront les villes de plus de 200 000 habitants sera, de façon mathématique, prélevé sur ce qui était auparavant distribué aux villes moins importantes. Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement.

Pour autant, nous ne sommes pas opposés à ce que les villes de plus de 200 000 habitants qui ont des quartiers difficiles puissent percevoir une partie de la DSU.

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Le problème, c’est que nous ne savons pas quelle est l’incidence de cette mesure sur les bénéficiaires actuels.

Nous ne sommes pas opposés à ce que l’on prenne des crédits sur la masse de la DSU pour les donner aux plus défavorisés, et nous sommes favorables à la péréquation. Mais la moindre des choses serait, je le répète, de connaître l’incidence de la mesure pour ceux qui seront privés de ces 6 millions. Une telle demande nous paraît vraiment justifiée.

Cela dit, l’amendement est retiré.

M. le président. L’amendement n° 637 est retiré.

Je mets aux voix l'article 84, modifié par l'amendement n° 596 troisième rectification.

(L'article 84, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 84.

Après l’article 84

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 547 rectifié.

La parole est à M. Léonce Deprez, pour le soutenir.

M. Léonce Deprez. Cet amendement, que j’ai proposé lors de la dernière réunion du groupe d’études sur le tourisme de l’Assemblée nationale et que, à ma demande, certains membres de la commission des finances qui y assistaient ont accepté de cosigner, m’avait déjà été inspiré l’année dernière par mon collègue Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. Je vous demande toute votre attention, monsieur le rapporteur spécial suppléant, car il traite d’un sujet essentiel aujourd’hui.

Les 2 280 communes touristiques de France assument une fonction économique importante. Il s’agit en général, monsieur le ministre, de villes petites ou moyennes qui dynamisent la vie de leur région par leurs investissements, et leurs efforts de création d’une économie touristique donnent de plus en plus de résultats.

J’ai déjà insisté sur ce point auprès de M. le rapporteur général, Gilles Carrez : nos régions ont de moins en moins de sources de développement industrielles. Quant à l’agriculture, nous nous battons pour la sauvegarder. Or il existe une source nouvelle de développement : celle de l’organisation de séjours sur des territoires adaptés à cet effet.

«J’ai dressé un inventaire de ces 2 280 communes. Une liste m’a d’ailleurs été communiquée par le ministère de l’intérieur, mise à jour régulièrement de 1966 à 1993, des villes appelées à ne vivre que de l’économie touristique puisque ne disposant pas de ressources industrielles.

En vingt ans, j’ai fait le tour de France des communes touristiques, d’abord du fait de mes responsabilités à la tête de l’association nationale bien connue présidée par Guy Petit puis par Christian Bonnet, ensuite en ma qualité de rapporteur à l’Assemblée nationale puis comme chargé de mission auprès de M. Bernard Bosson sous le gouvernement de M. Édouard Balladur.

Il y a quinze jours, j’ai visité, de ma propre volonté, sept ou huit d’entre elles réparties sur le littoral breton et atlantique, en gros de Bagnoles-de-l’Orne jusqu’à Capbreton, gérées par des maires qui sont de réels chefs d’entreprise d’économie partenariale.

M. René Dosière. Vous avez fait le tour des communes propres !

M. Léonce Deprez. J’ai constaté que, pour ces communes, la dotation touristique était une condition de vie, et même de survie.

Celle-ci n’a pas été supprimée mais elle a été, depuis 1993, comme le dit l’administration en termes élégants, « cristallisée » dans la dotation forfaitaire de la DGF.

M. Michel Bouvard. C’est pire !

M. Léonce Deprez. Cela signifie qu’elle est maintenue dans le potentiel de ressources venant de l’État mais qu’elle est de moins en moins importante puisque pratiquement gelée.

Il est nécessaire de reconnaître ces communes touristiques et de leur maintenir leur identité sur la carte de France pour stimuler les investissements et encourager les maires comme les conseillers municipaux à poursuivre leurs efforts pour, comme on s’y emploie dans toute la France, générer des emplois. Ces communes touristiques participent, en effet, à la croissance et créent des emplois.

Je me suis attaché à le démontrer à M. le président de la commission des finances qui est venu, pour la première fois, dans le Pas-de-Calais dans une certaine station touristique que je connais et qui a créé 650 emplois pour assumer la marche de la station à l’année alors qu’elle n’a que 5 800 habitants. Même si elles ont quelquefois des capacités d’accueil importantes, il ne faut pas oublier que ce sont des petites communes.

M. René Dosière. « Petites » ? C’est vite dit !

M. Jean-Pierre Balligand. Vous ne voulez pas qu’on fasse la quête, tout de même !

M. Léonce Deprez. Voilà pourquoi je demande la modification de l’article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales afin qu’il soit pris comme base de calcul de la DGF en supplément des habitants permanents de la commune, non plus un habitant fictif par résidence secondaire mais au moins deux.

C’est le bon sens car la prise en compte de deux habitants est vraiment le minimum du minimum dans des résidences créées pour servir d’hébergements touristiques.

L’effet sur les finances de l’État sera compensé par la croissance économique générée par ces communes touristiques. Rares sont en effet les communes qui peuvent s’enorgueillir d’avoir une fonction économique par elles-mêmes. Dans le domaine du tourisme, en effet – et je parle en connaissance de cause –, ce ne sont pas les forces privées qui sont moteurs ; c’est le dynamisme public qui entraîne les investissements privés et permet que ceux-ci soient rentables et créent des emplois à l’année.

À l’heure où le Premier ministre demande de faire des efforts pour la croissance économique, cet amendement concourt à la lutte contre l’emploi précaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Comment ne pas être sensible à un argumentaire défendu avec tant de passion …

M. René Dosière. Je sors mon mouchoir !

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. …et à l’évocation de cette merveilleuse commune du Pas-de-Calais que nous connaissons tous et qui compte 8 000 résidences secondaires pour 5 800 habitants ?

M. Michel Bouvard. C’est le vrai « Paris-Plage » !

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. On ne peut qu’être favorable au développement du potentiel financier de cette commune afin de permettre encore une amélioration des équipements.

Néanmoins, je ferai deux observations.

La première concerne le potentiel financier, pour lequel il existe une disparité qu’il convient de signaler.

Pour les départements, nous avons pris en compte, avec un lissage sur cinq ans, les droits de mutation dans le potentiel financier. On aurait très bien pu faire la même chose avec la taxe de séjour.

M. Michel Bouvard. Ah non ! C’est de la provocation ! La taxe de séjour ne paie même pas l’hébergement des gendarmes supplémentaires pendant la saison touristique !

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Il demeure que, dans un certain nombre de communes touristiques, la taxe de séjour peut être considérée comme une ressource pérenne et peut faire l’objet d’un certain lissage sur cinq ans. Et, mis à part certains cas particuliers comme les communes situées au bord de torrents, dans la plupart de celles-ci, cette taxe pourrait finalement être considérée au même titre que les droits de mutation. Le fait de l’omettre dans le potentiel financier représente, il faut le reconnaître, un avantage considérable pour les communes touristiques.

Seconde observation : après une brève évaluation, le coût de la mesure s’élèverait à 130 millions d’euros, somme qui serait ôtée à la répartition.

M. Michel Bouvard. C’est vrai !

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Les communes touristiques sont, certes, un atout du point de vue du développement économique et de la création d’emplois. L’analyse de Léonce Deprez est à cet égard parfaitement juste. Mais est-ce aujourd’hui la priorité des priorités, après les événements qui viennent de se produire dans les banlieues ? La modification de la répartition de la DSU issue de la loi de cohésion sociale et qui est traduite en termes budgétaires cette année me paraît nettement préférable à l’accroissement des subventions pour les communes touristiques.

Telles sont les raisons pour lesquelles, à contrecœur, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Je souscris totalement à tous les compliments que vous a adressés M. le rapporteur, monsieur Deprez. J’en ajouterai même un pour les couleurs chatoyantes de votre tenue, qui nous réconfortent en cette fin d’après-midi de vendredi.

Je sais que la mesure que vous nous proposez vous tient à cœur. Vous avez tenté de convaincre le président Méhaignerie en l’accueillant dans votre commune. Vous m’avez exposé en détail la disposition. Malheureusement, elle reviendrait à remettre en cause la clé de répartition de l’ensemble des dotations.

Vous évoquez la situation particulière des communes touristiques. Mais les touristes ne représentent pas exclusivement des charges. Les détenteurs d’une résidence secondaire paient la taxe d’habitation. Ils n’entraînent pas non plus les mêmes charges qu’une population permanente, ne serait qu’en équipements collectifs, comme les crèches ou les haltes-garderies. Pour ne pas heurter M. Bouvard je n’évoquerai pas à nouveau la taxe de séjour, me bornant à évoquer les prélèvements possibles sur les casinos.

J’entends bien tous vos arguments, monsieur Deprez, mais il en est un que le Gouvernement ne peut pas écarter d’un revers de main : le coût de la mesure que vous proposez, 133 millions d’euros, soit beaucoup plus que la simple croissance de la dotation de solidarité urbaine ou de la dotation de développement rural. Vous comprendrez que le Gouvernement ne puisse, dans la situation actuelle, consentir cet effort.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Je suis conscient du coût de la mesure et comprends bien la position du Gouvernement. Si j’ai cosigné l’amendement de M. Deprez, c’est qu’il s’agit à mes yeux d’un amendement d’appel concernant deux problèmes qu’il nous faut traiter.

Je veux d’abord évacuer la polémique au sujet de la taxe de séjour. Dans la plupart des communes touristiques, elle ne paie même pas l’équivalent des charges générées. Un rapport a été rédigé par la commission des finances…

M. René Dosière. Un très bon rapport !

M. Michel Bouvard. …qui montre que, dans certaines communes, elle ne paie même pas le coût du logement des gendarmes supplémentaires qu’il faut accueillir l’été pour assurer la sécurité dans certaines communes touristiques. Arrêtez donc de nous faire miroiter cette taxe ! Si elle représente une très belle recette pour quelques grandes communes touristiques, elle est infime pour la plupart d’entre elles.

Deux problèmes se posent, monsieur le ministre, qu’il faudra bien régler un jour.

Premièrement, la cristallisation de la dotation touristique et son intégration dans la DGF ont été une bêtise. Cette dotation avait son propre mécanisme interne de péréquation, qui permettait de donner plus aux communes qui investissaient et d’éviter les effets de rente. La cristallisation a conforté ces derniers : toutes les communes qui ont touché une dotation touristique en 1993 perçoivent, même si elles n’investissent plus dans le tourisme, une rente à vie, qui est maintenant indexée sur l’évolution de la DGF. Quant aux communes qui ont continué à investir, à créer des lits, de la richesse et des emplois, elles n’ont rien de plus que ce qu’elles avaient à l’époque. Cette injustice a été reconnue dans un rapport. Il faudra bien trouver le moyen d’y remédier.

L’autre problème est celui de l’intégration de la dotation touristique dans le potentiel financier. Cette dotation correspond en fait à des charges. Les intégrer dans le potentiel financier revient à enrichir artificiellement les communes touristiques et donc à les pénaliser sur la part de péréquation qu’elles seraient en droit de recevoir.

Je comprends bien que le Gouvernement ne puisse pas mettre 130 millions d’euros sur la table pour la disposition proposée par M. Deprez, d’autant que cette somme serait prise sur des communes qui ont des besoins importants. Ce que je voudrais, c’est que l’on accepte d’ouvrir le débat sur les deux points que je viens d’évoquer. L’enjeu est important puisqu’il s’agit, d’une part, de corriger des injustices entre communes touristiques et, d’autre part, de cesser de pénaliser ces communes en matière de dotations de péréquation.

Certes, il existe des recettes, mais les charges sont beaucoup plus importantes. Il n’est que de penser au coût que représente pour une population permanente de 10 000 habitants la réalisation d’une station d’épuration ou d’une usine d’incinération prévues pour 50 000 ou 100 000 habitants. Ces réalisations se voient moins que les bacs à fleurs mais coûtent beaucoup plus cher !

M. le président. La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan. Je suis très sensible aux arguments de M. Bouvard et à la passion de M. Deprez. J’ai visité sa ville et j’ai vu les efforts exceptionnels qui y étaient réalisés.

En tant que président de la commission des finances, ce n’est, bien évidemment, pas moi qui proposerai une augmentation de la dépense publique ni une reprise sur d’autres collectivités.

Cela étant, monsieur le ministre, il est vrai que la cristallisation de la dotation touristique apporte une rente à certaines communes tandis que celles qui s’équipent pour accueillir plus de touristes ne sont pas aidées en proportion. Au moment où le pays est confronté à des problèmes de délocalisation, il faut être bien conscient que son potentiel touristique est un élément extraordinaire de développement dans une Europe de 400 millions d’habitants. Nous aurions tort de ne pas voir tous les goulets d’étranglement qui nuisent à son essor : les problèmes dénoncés par M. Bouvard et M. Deprez en sont deux, mais le foncier et les voiries en sont deux autres. Il importe de les régler pour que le potentiel touristique de la France soit mieux utilisé.

Je considère qu’il y a, aujourd’hui, un peu trop de rente, un peu trop de rigidité, beaucoup de règlementation et une mauvaise utilisation de notre potentiel touristique au moment où se pose un problème d’emplois important.

Il convient donc, monsieur Deprez, d’envisager plus un redéploiement qu’un prélèvement sur d’autres collectivités.

En tout cas, monsieur le ministre, un vrai débat sur ces questions doit avoir lieu dans les prochaines semaines.

M. le président. La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez. J’aborderai dans ma réponse quelques points précis.

Premièrement, il y a trente ans, j’ai voulu relever le défi de convertir cette région minière du Pas-de-Calais en créant un nouveau gisement d’activités et d’emplois. Je pensais qu’il s’agissait d’une chance d’avenir. Je l’ai jouée. Je souhaite qu’il en aille de même pour d’autres coins de France.

Il faut pour ce faire mener une politique nationale en direction des communes qui ont peu de moyens mais sont dotées d’un riche patrimoine naturel. Il faut jouer sur l’attractivité de leur territoire, afin que l’économie touristique soit un nouveau gisement d’emplois. Si cela a été possible dans la région du Pas-de-Calais, qui n’était pas réputée être une région touristique, cela peut l’être aussi dans le reste de la France. Mais les élus qui auraient l’ambition de tenter cette aventure ne sont pas aidés par une véritable politique nationale. J’ai rendu visite à ces élus, je les défends et je continuerai sans relâche à les encourager.

Deuxièmement, je vous remercie, monsieur le ministre, pour les compliments que vous m’avez adressés. Mais je suis parvenu à un moment de ma vie où les compliments comptent moins que les résultats. En dépit de vos encouragements et de vos compliments, vous devez prendre conscience que je parle pour tous ceux qui ont besoin d’être entendus.

J’ai réuni, le 3 octobre, à l’Assemblée nationale, sans que personne ne le sache, 120 maires. Ils sont venus, à leurs frais, de toute la France parce qu’ils espéraient que je les défendrais.

Je suis porteur d’un message lancé par Olivier Guichard, par Guy Petit, par de grands types depuis Anthonioz, par des élus de toutes tendances. Certains maires ont fait de gros efforts pour créer des ports de plaisance, comme à Cap-Breton, ou pour que des stations thermales, telles que Bagnoles-de-l’Orne,vivent toute l’année afin d’assurer la mise en valeur du territoire.

Nous parlons bien d’aménagement du territoire. La France a d’énormes atouts sur le plan touristique, et votre ambition doit en sortir renforcée.

Troisièmement, s’agissant des taxes de séjour, M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances, a une autorité morale suffisante pour que vous puissiez, monsieur le ministre, retenir ses propos. Je ne reviendrai donc pas sur ce point.

On ne connaît pas la structure territoriale de l’économie touristique en France, parce que l’on ne l’a pas définie. On dénombre 2 280 communes touristiques, majoritairement petites et moyennes. Elles triment, font d’importants efforts d’investissement, pour générer des emplois et attirer des touristes français ou en provenance des pays voisins.

Au-dessus, on trouve 520 stations classées, qui visent l’excellence et méritent le classement.

Enfin, au dernier étage, si je puis m’exprimer ainsi, 180 stations classées possèdent, depuis quelques décennies, un casino, ce qui leur assure une source d’activités et un apport supplémentaire de recettes.

Pour élaborer une politique nationale touristique, il faut partir de la base. Il faut prendre en considération la fonction économique des petites communes. Si ces communes touristiques sont aidées, des recettes seront générées pour le budget national, une croissance sera possible.

Dernier point…

M. le président. Veuillez conclure !

M. Léonce Deprez. J’ai bien conscience qu’il ne faut pas priver de ressources les communes pauvres. Les communes littorales du Pas-de-Calais ont créé des emplois là où a surgi une source de vie nouvelle apportée par l’économie touristique, dans des régions qui ne sont pas industrielles.

La dotation touristique a été supprimée en 1993, à tort, par manque de courage – Michel Bouvard l’a rappelé. Cette dotation touristique est cristallisée. Je demande qu’elle soit compensée, puisqu’elle n’existe pratiquement plus en tant que telle, et que l’on prenne en considération le nombre de résidents par rapport à la population permanente. On compte actuellement un habitant fictif par résidence secondaire. Je me souviens du débat, au cours duquel la décision a été prise. Michel Delebarre était alors ministre et Olivier Guichard avait parlé avant moi. Ce dernier avait dit : « Ce n’est pas sérieux de compter un habitant fictif par résidence secondaire. » Certains tiennent aujourd’hui des discours selon lesquels les habitants des résidences secondaires ne seraient là que quelques jours, quelques semaines par an. C’est faux ! Sinon, il s’agirait d’emplois précaires, d’une économie qui ne marche pas. L’économie du temps libre doit devenir une source de travail pour ceux qui ont besoin d’emplois.

M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur Deprez.

M. Léonce Deprez. Si la dotation touristique a été supprimée à tort, il faut trouver une compensation. Il faut maintenir l’identité de ces communes touristiques à travers la France.

Mon amendement propose donc une forme de péréquation tenant compte des charges. Comme le dit M. Michel Bouvard, ces charges sont supportées non deux mois par an, quand il neige ou qu’il y a du soleil, mais douze mois par an, puisque le temps libre des uns génère le temps de travail des autres.

M. Jean-Pierre Balligand. Vous êtes donc pour les 35 heures !

M. le président. Monsieur Deprez, maintenez-vous l’amendement n° 547 rectifié ?

M. Léonce Deprez. M. Michel Bouvard est vice-président de la commission des finances et a cosigné mon amendement. Avec la sagesse qui le caractérise en dépit de son tempérament bouillant, il m’a fait comprendre que nous devions donner rendez-vous au Gouvernement très prochainement, et sûrement en 2006, pour préparer 2007.

Pour tenir compte de ce qu’ont dit M. le président de la commission des finances, M. le ministre, M. Michel Bouvard et M. le rapporteur spécial suppléant, je vais retirer l’amendement. Je veux cependant donner rendez-vous à M. le ministre de l’intérieur dans quelques mois...

M. le président. C’est, je suppose, un lapsus : M. Hortefeux n’est pas encore ministre de l’intérieur (Sourires) : il est le ministre chargé des collectivités territoriales.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Je remercie M. Deprez, à tout point de vue, y compris pour son lapsus. (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 547 rectifié est retiré.

Mes chers collègues, j’appelle votre attention sur le fait qu’il est dix-huit heures cinq. J’ai cru comprendre qu’un certain nombre d’entre vous devaient prendre un train pour se rendre dans une autre ville de France. (Dénégations sur les bancs du groupe socialiste.)

Je vous suggère donc d’accélérer le rythme de la discussion.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 453 rectifié et 497.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour défendre l’amendement n° 453 rectifié.

M. Augustin Bonrepaux. Je tiens à préciser, monsieur le président, que je suis disponible jusqu’à demain soir, puisque des séances ont été prévues demain par la Conférence des présidents.

Par l’amendement n° 453 rectifié, je souhaite éviter que ne soient pénalisées les communes de montagne dont le montant de la dotation forfaitaire est très élevé du fait de la part prépondérante de la dotation de garantie par rapport à leur potentiel fiscal.

En effet, pour les communes de montagne de la première strate, l'incorporation de la dotation globale de fonctionnement de l'année précédente représente près de 38 % du potentiel financier, alors que ce taux est en moyenne de 29 %.

Je rejoins là les propos de M. Dosière. Lorsque l’on a introduit la dotation forfaitaire dans le potentiel financier, les simulations nécessaires n’ont pas été réalisées. Cela a produit des aberrations, qu’il faudra, un jour, corriger.

Je vais prendre l’exemple des départements, puisque nous n’avons pas eu d’autres simulations. Les départements les plus pauvres se sont retrouvés, en l’espace d’un dispositif, les plus riches de France – je peux citer la Corse-du-Sud et la Haute-Corse. N’est-ce pas une anomalie ?

Ma proposition est donc justifiée. Chacun reconnaît que l’espace est un handicap pour les communes de montagne. On leur attribue donc un peu plus de dotation forfaitaire. Mais cela devient un handicap pour la péréquation, puisque leur potentiel financier augmente.

Je comprends bien que cet amendement ne peut pas être adopté immédiatement. Mais je vous demande, monsieur le ministre, de bien réfléchir, car une amélioration du dispositif doit être trouvée.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour défendre l’amendement n° 497.

M. Michel Bouvard. Nous avons un problème technique, comme l’a parfaitement exposé Augustin Bonrepaux.

Pour les petites communes, la part de la garantie pèse très lourd et crée des effets pervers. Il faudra mener une réflexion sur les incidences de l’apparition de ce potentiel financier et envisager, sans doute, à l’avenir des correctifs.

Il s’agit d’abord de poser le problème. Cette discussion concerne également le Comité des finances locales.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ces amendements ont été rejetés.

Il s’agit d’un sujet compliqué.

Savez-vous quelles sont les deux communes de France qui ont la garantie la plus élevée, et de très loin ? Lourdes et Vichy ! Pourquoi ? Parce que ces communes avaient, depuis des temps immémoriaux, une grosse taxe locale.

Lorsque nous avons supprimé la taxe locale, nous l’avons remplacé par le VRTS au même niveau. Ensuite, le VRTS a été remplacé, à son tour, par la DGF au même niveau.

Dans cette garantie, certaines situations devaient manifestement être prises en compte. La richesse qu’apportait la garantie n’était pas prise en compte dans le potentiel fiscal. Maintenant, c’est chose faite.

En revanche, on prend en compte un autre phénomène qui pose problème : c’est celui qu’ont évoqué Augustin Bonrepaux et Michel Bouvard. Entre 1985 et 1993, on a fait dans la DGF un gros effort de péréquation, ce que l’on a appelé : la « part péréquation ». Des communes en ont bien bénéficié. Leur montant de DGF a donc été augmenté. La réforme de 1993 a « cristallisé », comme l’a fort justement rappelé Michel Bouvard. La réforme que nous venons de faire prend en compte ce niveau élevé et pénalise, en quelque sorte, ceux qui avaient bénéficié de péréquation, parce qu’ils en avaient besoin.

L’expérience montre, monsieur le ministre, que l’on réforme la DGF tous les dix ans. Nous venons de le faire. Nous sommes conscients qu’il y a des inconvénients. On l’avait vu dans le groupe de travail du CFL. On remettra l’ouvrage sur le métier quand ce sera le moment. Mais on ne peut pas, sans arrêt, modifier le système.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Je ferai quelques réflexions rapides.

Quand il y a des erreurs dans les simulations, je suis le premier à le reconnaître. J’ai demandé des simulations, notamment sur la taxe professionnelle. J’ai fourni tout à l’heure un certain nombre de chiffres. Cela m’a conduit à demander à M. le ministre délégué au budget des modifications sensibles sur le sujet qui vous préoccupait.

Je citerai un exemple : la dotation élu local. Lorsque j’ai vu qu’on sortait 1 778 communes et que 786 entraient, je me suis demandé s’il y avait eu des simulations. Dans ce cas-là il n’y a pas eu d’erreur : aucune simulation n’avait été effectuée. J’ai donc été amené à demander une correction.

Cela dit, monsieur Bonrepaux, monsieur Bouvard, je ne peux vous suivre sur ce terrain. Ce n’est plus le critère de richesse qui est pris en compte : c’est celui des ressources stables.

M. le rapporteur général a bien décrit la réalité. Une réforme a eu lieu l’année dernière. On ne va pas la modifier cette année – et cela vaut pour un certain nombre d’autres amendements – car on ne va pas remettre en cause le potentiel financier. Pourquoi ? C’est un thermomètre, et, honnêtement, il n’est pas très utile de casser le thermomètre.

Voilà pourquoi je n’émets pas un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Je veux bien retirer mon amendement.

Monsieur le ministre, il n’est pas question de « casser le thermomètre ». Nous avons changé le thermomètre et fait apparaître des températures différentes, sans nous rendre compte de ce que cela pouvait donner. Le malade n’est donc pas guéri pour autant.

Je souhaite un engagement ferme de la part du Gouvernement, faute de quoi je serai amené à reprendre l’amendement de M. Pélissard, président de l’Association des maires de France, de M. Merville et de M. Bourg-Broc, pour qui il apparaît que le nouveau critère du potentiel financier n’est ni plus simple, ni plus lisible, ni surtout plus juste dans la mesure des inégalités des richesses des communes.

Je demande que le Gouvernement et le président du Comité des finances locales s’engagent à réexaminer les conséquences de ce potentiel financier et à y apporter quelques correctifs, sans le changer. Cela ne me semble pas excessif. Il suffit que le Comité de finances locales dispose de toutes les simulations nécessaires et de nos propositions.

On ne pourra peut-être pas le changer l’année prochaine, mais on ne doit pas dire qu’un dispositif n’est pas bon et, parce qu’il a été adopté – contre notre avis –, qu’il sera maintenu.

M. Michel Bouvard. Je retire également mon amendement.

M. le président. Les amendements nos 453 rectifié et 497 sont retirés.

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 192, 454 rectifié et 486.

M. Michel Bouvard. L’amendement n° 192 est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. le président. Qu’en est-il de l’amendement n° 454 rectifié ?

M. Augustin Bonrepaux. Je le retire.

M. Michel Bouvard. Je retire également l’amendement n° 486.

M. le président. Les amendements nos 454 rectifié et 486 sont retirés.

Je mets aux voix l’amendement n° 192.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 620.

La parole est à M. Axel Poniatowski, pour le soutenir.

M. Axel Poniatowski. Cet amendement, auquel s’associent mes collègues Michel Bouvard et Denis Merville, concerne les communes membres d’une communauté d’agglomération issue d’un syndicat d’agglomération nouvelle ou d’une communauté d’agglomération nouvelle, qui en sont sorties ou qui en sortiront pour constituer une communauté d’agglomération.

Le régime spécifique de ces communes, voulu par le législateur au moment où l’on voyait se profiler la fin des syndicats d’agglomération nouvelle, permettait de diminuer leur potentiel financier car n’était pas prise en compte la dotation de compensation reçue au titre de la suppression de la « part salaires » des bases de la taxe professionnelle. Ces communes devenaient ainsi plus facilement éligibles à une part plus importante des diverses dotations de péréquation DSU, DNP, mais en particulier pour les SAN relevant du fonds de solidarité régionale Île-de-France.

La loi de finances pour 2006 prévoit la suppression brutale de ce régime particulier. Autant, sur le plan général, il ne me paraît pas normal de maintenir indéfiniment ce régime spécifique, autant son interruption brutale ne paraît pas raisonnable. Aussi, mon amendement vise-t-il à éviter cette rupture brutale et à réintroduire progressivement, par tranches de 20 % chaque année, la dotation de compensation de la « part salaires » dans le calcul du potentiel financier, de sorte que ces communes rejoignent le régime général en 2010.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. La commission a émis un avis favorable pour les excellentes raisons qui ont été exposées par M. Poniatowski en présence de l’ancien secrétaire général des syndicats d’agglomération nouvelle. Je ferai remarquer que le même dispositif s’applique à onze communes relevant du fonds de solidarité de la région Île-de-France. Leur situation devra donc être examinée à la faveur d’une prochaine loi de finances rectificative.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Le Gouvernement émet un avis favorable à votre proposition, monsieur Poniatowski. Nous comprenons bien qu’il faut lisser dans le temps l’impact de la réintégration dans le droit commun. J’en profite pour souligner tout le sérieux du travail que vous avez mené en coopération avec la direction générale des collectivités locales, en évitant toute surenchère et en vous concentrant sur l’essentiel.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. L’examen de cet amendement me donne l’occasion de revenir sur une question que j’ai posée tout à l’heure. Je crains, en effet, monsieur le ministre, que vous n’en ayez pas tout à fait compris le sens.

Les deux amendements de M. Pélissard que nous n’avons pas examinés sont la preuve qu’il subsiste un problème. Quel est-il ? Lors de la réforme la DGF, nous avons l’an dernier, pour un certain nombre de collectivités, substitué la notion de potentiel financier à celle de potentiel fiscal, qui n’est pas calculé de la même manière. Or il n’y a pas eu de simulations suffisantes sur les conséquences de cette modification.

Les quelques chiffres que vous avez donnés montrent bien qu’il y a des conséquences importantes, car le nombre de communes qui rentrent et qui sortent selon la répartition des dotations semble tout à fait important.

A-t-on véritablement fait le point sur la situation aujourd’hui ? Vous nous dites qu’il existe un rapport. Je n’en ai pas eu connaissance, mais, rassurez-vous, je saurai me le procurer ! Cela dit, je doute qu’il fasse autorité, car personne ne le mentionne. Or j’ai beaucoup lu sur le thème des finances locales. Si ce rapport faisait réellement le point sur les conséquences de cette modification, cela se saurait !

Le problème subsiste donc, et les amendements de M. Pélissard en sont la preuve. Il faudra le traiter. J’ajoute qu’un certain nombre de collectivités en sont restées au potentiel fiscal et ne sont pas passées au potentiel financier : il faut là aussi éclaircir les choses.

Bref, quand on modifie la fiscalité, surtout la fiscalité locale, il faudrait disposer de simulations complètes. Cela vaut tant pour le potentiel financier que pour la taxe professionnelle, mais de cela nous parlerons mardi.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 620.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 662 de M. Valls est satisfait.

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 193, 455 rectifié et 487.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. L’amendement n° 193 de M. Saddier est défendu, comme l’est du reste mon amendement n° 487.

M. Augustin Bonrepaux. L’amendement n° 455 rectifié est également défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 193, 455 rectifié et 487.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 488.

La parole est à M. Michel Bouvard, pour le soutenir.

M. Michel Bouvard. Je vous indique d’emblée, monsieur le président, que je ne reviendrai pas sur l’amendement n° 489 tout à l’heure.

Un projet de loi relatif aux parcs nationaux et aux parcs naturels marins viendra en discussion dans quelques jours. Il s’agit de savoir si certaines de ses dispositions fiscales doivent se trouver dans cette loi à venir ou bien en loi de finances. Le but de l’amendement n° 488 est avant tout de poser la question au ministre.

Cet amendement pose le problème des charges réelles supportées par les communes où sont implantés des parcs nationaux. Ces communes, notamment les plus anciennes, ont fait le choix de renoncer à un mode de développement touristique très profitable, à l’inverse de grandes stations de sports d’hiver notamment. Elles ont fait ce choix pour préserver le patrimoine naturel et pour en faire profiter la collectivité.

Si l’État a pris en charge l’entretien de l’espace, la surveillance de la faune et de la flore, ces communes, qui en général ont de très faibles ressources, doivent accueillir des populations importantes, des touristes le plus souvent à la journée. Cela génère des coûts importants en matière d’entretien, d’aménagement des lieux accueils et des parkings, ou de nettoyage. À cet égard, il faut bien reconnaître que les touristes fréquentant les parcs nationaux ne respectent pas forcément l’environnement autant qu’on le souhaiterait.

Je tiens à vous faire part, monsieur le ministre, d’une conviction très profonde. On ne peut pas durablement protéger l’environnement, le plus beau capital naturel de notre pays, sans associer les populations locales. On ne peut pas le faire si la population locale a le sentiment que le patrimoine qu’elle est d’accord pour protéger représente une charge inéquitable qui la prive de toute capacité de développement.

Le rapport de notre collègue Jean-Pierre Giran a proposé de prendre en compte cet aspect des choses. Si le Gouvernement me dit aujourd’hui que nous traiterons le problème dans la loi sur les parcs nationaux, je retirerai volontiers mon amendement, d’autant que d’autres rédactions pourraient être envisagées. Mais je souhaiterais d’abord connaître la position du ministre en charge des collectivités territoriales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. La commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Cet amendement reprend les termes du projet de loi sur les parcs nationaux et les parcs naturels marins, qui crée dans la dotation forfaitaire une part spécifique réservée aux communes situées dans un parc naturel. Le comité des finances locales a, à l’unanimité, émis un avis défavorable à la création d’une cinquième part de dotation forfaitaire. Pourquoi ? Vous savez les uns et les autres, et je sais que vous en êtes vous-même convaincu, monsieur Bouvard, que la dotation globale de fonctionnement est une dotation globale et libre d’emploi. Elle n’a pas vocation à financer les politiques particulières, aussi légitimes soient-elles.

Je vous propose, monsieur Bouvard, non de « traiter » la question, mais de l’examiner dans le cadre du projet de loi relatif aux parcs nationaux, tout en tenant compte des observations du Comité des finances locales. Je vous remercie donc de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Sous le bénéfice des observations du ministre, je retire mon amendement. Nous sommes d’accord sur le fait que sa rédaction puisse poser problème, et je ne suis pas étonné de la position du CFL. D’autres possibilités existent, sur lesquelles nous devons travailler.

M. le président. L’amendement n° 488 est retiré.

Je suis saisi de trois amendements, nos 194, 456 rectifié et 489,pouvant faire l’objet d’une discussion commune.

Les amendements nos 194 et 456 rectifié sont identiques…

M. Michel Bouvard. L’amendement n° 194 de M. Saddier est défendu, comme du reste l’amendement n° 489.

M. le président. Qu’en est-il de l’amendement n° 456 rectifié ?

M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement est lui aussi défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 194 et 456 rectifié.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 489.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendenent n° 76 rectifié n’est pas défendu…

M. Augustin Bonrepaux. Un mot cependant …

M. le président. Je vous en prie, monsieur Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. L’amendement déposé par MM. Giscard d’Estaing, Marleix et Proriol me donne l’occasion de revenir sur les problèmes que nous avons nous-mêmes soulevés. Un an après la réforme de la fiscalité locale, nos collègues de la majorité se rendent compte des conséquences de la substitution du potentiel financier au potentiel fiscal.

Je voudrais, monsieur le ministre, que vous entendiez une fois pour toutes les préoccupations qui s’expriment, sur tous les bancs de cette assemblée, aussi bien par la voix de M. Pélissard que par celles de M. Bouvard, de M. Giscard d’Estaing ou de moi-même. Tout le monde est conscient qu’il y a un problème entre le passage du potentiel fiscal au potentiel financier.

Je renouvelle donc ma proposition de moins prendre en compte la dotation forfaire dans le potentiel financier, afin de ne pas faire croire que les pauvres sont plus riches qu’ils ne le sont en réalité.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Monsieur le président, je dois reconnaître que je n’ai pas prêté à cet amendement l’attention qu’il méritait. Il aborde un sujet important qui appelle quelques explications : la dotation « élu local ». Dans un premier temps, nous avons essayé de régler la question au Comité des finances locales en mettant en place une dotation spécifique, qui permet une sortie en sifflet pour les communes qui perdent le bénéfice de cette dotation. Il faut savoir en effet qu’elle représente une somme non négligeable pour les budgets des petites communes auxquelles elle est destinée.

Du fait de la substitution du critère du potentiel financier au critère de potentiel fiscal, 1 778 communes ne bénéficieront plus de la dotation. Mais soulignons que ces communes avaient une DGF par habitant de 228 euros alors que les 781 communes qui en bénéficient dorénavant ont une DGF par habitant de 93 euros seulement. La réforme est donc juste.

Reste qu’il conviendrait de prolonger ce premier effort fait par le Comité des finances locales. Mais je crois que vous avez des propositions à nous faire, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Bonrepaux, vous avez raison d’aborder ce difficile problème que constitue la dotation « élu local ». Les uns et les autres, nous avons tous été sollicités à ce propos. Dans ma région, l’Auvergne, 132 communes sont concernées, dont 68 dans le seul département du Puy-de-Dôme. Inutile de vous dire qu’avant de me rendre au congrès annuel des maires de France, j’ai préféré anticiper et imaginer quelques pistes de réflexion pour corriger tout cela. (Sourires.) Cela a constitué un puissant stimulant.

Je ne reviendrai pas sur les chiffres donnés par le rapporteur général. Un telle situation n’est pas acceptable. Et ce n’est pas le fait qu’il y ait eu une erreur de simulation qui explique cela : il n’y a pas eu de simulation du tout.

Ce que je vous propose est très simple : il s’agit d’engager une réflexion sur les modifications des seuils d’éligibilité et de les intégrer, soit en les soumettant au Sénat, soit dans le cadre de la loi de finances rectificative. Cela permettra aux communes entrantes de venir et aux communes sortantes de revenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Très bien !

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 598.

La parole est à M. Gilles Carrez, pour le défendre.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. J’ai déjà défendu cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Chartier, rapporteur spécial suppléant. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 598.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 448 rectifié.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour le soutenir.

M. Augustin Bonrepaux. Je livre à la réflexion de M. le ministre la liste des départements qui est jointe à cet amendement. Il pourra se rendre compte des aberrations du passage du potentiel fiscal au potentiel financier : la Corse-du-Sud est devenue plus riche que les Alpes-maritimes !

Les propositions que j’ai faites tout à l’heure devraient être mises à l’ordre du jour. Il s’agit de rechercher un dispositif qui atténuerait un peu ces aberrations. Je ne demande pas que cela se fasse dans l’immédiat mais, avec l’aide du Comité des finances locales, nous devrions y parvenir. Si ce thermomètre n’est pas meilleur que le précédent, au moins pouvons-nous lui apporter des correctifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Comme je l’ai déjà expliqué, la réforme des dotations a eu lieu. À côté des dotations générales, il y a les dotations ciblées, qui permettent la péréquation, et la péréquation s’appuie sur le potentiel financier. Ce potentiel financier, c’est le thermomètre : n’y touchons pas, sinon nous risquons de le casser.

M. le président. Maintenez-vous l’amendement, monsieur Bonrepaux ?

M. Augustin Bonrepaux. Oui, je le maintiens.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 448 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 447 rectifié.

La parole est à M. Bonrepaux, pour le soutenir.

M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement devrait recueillir un avis favorable.

L’année dernière, j’avais souligné que la réforme de la DGF était préjudiciable aux départements les plus pauvres. Je demande qu’ils aient au moins la garantie que leur dotation évoluera conformément au taux de progression de l’ensemble de la DGF. Ce n’est pas excessif, tout de même !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement n’ayant pas été examiné par la commission, c’est à titre personnel que je m’exprimerai.

Je comprends parfaitement l’esprit de M. Bonrepaux. Nous souhaitons tous que les vingt-quatre départements qui étaient éligibles à la dotation de fonctionnement minimale avant la réforme restent protégés, car ce sont des départements qui ont de véritables difficultés financières. Leur liste, établie depuis une quinzaine, si ce n’est une vingtaine d’années, n’a pas bougé. Mais, depuis l’année dernière, ils ont été fondus dans un ensemble d’une soixantaine de départements, nouvellement éligibles à la dotation minimale, du fait de son extension.

Augustin Bonrepaux sait parfaitement que la dotation par habitant de ces vingt-quatre départements est parfois plus élevée que pour d’autres départements, guère plus riches, qui viennent juste après dans le classement. Mais je suis très favorable à l’idée que l’évolution de leur dotation soit au moins égale au taux de progression général. Après, il faudra voir si l’amendement, tel qu’il est rédigé, permet une application dès aujourd’hui. C’est un sujet qui mérite réflexion.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Bonrepaux, le Gouvernement comprend et partage votre préoccupation d’assurer une progression et une garantie minimales à ces départements. Nous sommes plutôt ouverts à votre proposition mais il faudrait en examiner la rédaction. Peut-être pourrait-elle être reprise dans la discussion à venir, sous la forme d’un amendement gouvernemental, si vous en acceptiez le principe et si vous retiriez le vôtre.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur Bonrepaux ?

M. Augustin Bonrepaux. Je remercie le Gouvernement de son attention et je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 447 rectifié est retiré.

Je suis saisi d’un amendement n° 597.

La parole est à M. Gilles Carrez, pour le soutenir.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement de précision concerne le calcul du potentiel fiscal utilisé pour la répartition de la dotation de péréquation des régions.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 597.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Nous en venons à huit amendements pouvant être soumis à une présentation commune : les amendements identiques nos 515 et 640, les amendements identiques nos 516 et 641, les amendements identiques nos 513 et 638 et les amendements identiques nos 514 et 639.

La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. Je peux parler aussi bien au nom de M. Bur qu’en mon propre nom et soutenir tous les amendements, pour éviter de multiplier les interventions. En effet, ils sont tous issus de l’Association des communautés urbaines, dont M. Mathus est président, et ils ont été répartis entre majorité et opposition.

Les dotations des communautés urbaines sont indexées sur la dotation forfaitaire des communes. Mais du fait de la réforme de la loi de finances pour 2005, qui a modifié cette dernière, les trois dotations des communautés urbaines – la dotation d’intercommunalité, la dotation de compensation et la dotation de compensation de taxe professionnelle – n’ont progressé que de 0,8 %. Les communautés urbaines se trouvent donc dans une situation financière un peu difficile alors qu’elles percevaient auparavant des dotations intéressantes. Or des communautés comme Strasbourg ou Lille connaissent de gros problèmes.

L’Association des communautés urbaines appelle l’attention du Gouvernement sur ce point. M. Bur et M. Mathus sont très inquiets pour l’année prochaine, car le taux de progression pour 2005 est en deçà même de l’inflation, et aucun dispositif correctif n’est prévu.

Qu’entend faire le Gouvernement pour les 7 millions d’habitants qui vivent au sein des communautés urbaines aujourd’hui, système d’intégration intercommunale le plus fort ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Monsieur Balligand, en matière de finances locales, il ne faut pas seulement considérer les pourcentages d’évolution, mais aussi les valeurs absolues. C’est un débat constant au Comité des finances locales, et si notre collègue Charles de Courson était là (Exclamations sur divers bancs)

M. René Dosière. On en aurait pour la nuit !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. …il nous expliquerait à nouveau ces choses en termes choisis.

Le montant moyen de la DGF par habitant varie selon l’EPCI. Il est de 17 euros pour les communautés de communes, de 44 euros pour les communautés d’agglomération et de 82 euros pour les communautés urbaines.

Au sein du Comité des finances locales, nous avons souhaité, et ces propositions ont été reprises dans la réforme, non pas éliminer ces différences qui sont très importantes, chacun reconnaissant que le niveau de dépenses peut être plus élevé dans les grandes villes, mais faire en sorte que les communautés de communes bénéficient d’une augmentation régulière et importante. D’ailleurs, si ma mémoire est bonne, Augustin Bonrepaux fut le premier à défendre cette évolution en 1999. On avait prélevé une part de la dotation de régularisation pour accélérer l’augmentation au profit des petites communautés de communes. Le Comité des finances locales a repris cette orientation, puisqu’il a prévu une indexation plus rapide pour les communautés de communes. Tout ceci n’est possible que si l’augmentation des communautés urbaines est ralentie.

J’émets un avis défavorable sur ces amendements car ils remettraient en cause notre souci de favoriser l’évolution des communautés de communes.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. J’observe à quel point Gilles Carrez sait susciter l’unanimité sur les bancs de l’Assemblée en évoquant la mémoire et l’esprit d’un de ses collègues.

Dans cette affaire, il y a trois chiffres à retenir : 80 euros par habitant pour les communautés urbaines, 40 euros pour les communautés d’agglomération et 21 euros pour les communautés de communes.

S’agissant de l’amendement n° 515, monsieur Balligand, le Gouvernement n’est pas du tout hostile à ce que l’on rouvre la discussion. Faites cependant attention, car tout sera alors mis à plat et je ne suis pas sûr que, compte tenu des règles d’indexation différentes selon les trois niveaux de collectivités, cela bénéficie aux communautés urbaines. C’est en tout cas la teneur du message que j’ai perçu lorsque j’ai assisté à la passation de pouvoir entre le Premier ministre Pierre Mauroy et Didier Mathus.

M. René Dosière. Mais les communautés urbaines savent bien se faire entendre !

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen.

M. Jacques Le Guen. L’année dernière, nous avions mis en place un système visant à resserrer les mécanismes de DGF. En tant que président d’un petit EPCI, je me retrouve avec une DGF largement inférieure à celle des communautés d’agglomération et des communautés urbaines. Certes, comme l’a rappelé Gilles Carrez, nous n’avons pas de fonction de centralité. Mais il n’en demeure pas moins que nous avons des besoins financiers. Heureusement que ce système est mis en place, sinon nous n’aurions pas pu nous en sortir financièrement.

Il est évident qu’on ne peut pas laisser les choses déraper puisque les systèmes d’indexation permettent de rattraper les différents niveaux en partant du plus bas.

Le système qui a été mis en place l’année dernière arrivera à maturité dans les années à venir, ce qui permettra aux représentants des EPCI que nous sommes de récupérer des moyens financiers permettant d’assurer l’intercommunalité dont on sait très bien qu’elle est nécessaire pour un certain nombre d’opérations.

M. le président. La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez. Nous sommes plusieurs ici à présider une communauté de communes et je dois dire que M. Balligand a un certain mérite à défendre l’amendement de M. Bur car je sais à quel point il est attaché à la cause de ces communautés de communes et combien il ressent leur pauvreté.

M. Jean-Pierre Balligand. Il ne faut pas exagérer !

M. Léonce Deprez. Il faut faire savoir à nos concitoyens que les communautés de communes ne perçoivent que 17 euros par habitant et qu’on est en train de procéder à un rééquilibrage, afin de créer les conditions d’une véritable justice territoriale, et je suis heureux que M. Carrez le dise.

Monsieur le ministre, les communautés de communes, qui sont une exigence pour le futur, sont de plus en plus sollicitées pour créer des équipements lourds, des quais de transfert des ordures ménagères, des stations d’épuration, car les communes ne peuvent plus prendre en charge de tels investissements.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 515 et 640.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 516 et 641.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 513 et 638.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 514 et 639.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 599 rectifié.

La parole est à M. Gilles Carrez, pour le soutenir.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Cet amendement, adopté par la commission des finances, vise à compenser les pertes subies par les collectivités.

Cette mesure de compensation n’est pas applicable en l’état, les règles de répartition et d’évolution de la DGF n’étant pas compatibles avec un système faisant varier le montant attribué à certaines collectivités, chaque année, en fonction de données totalement extérieures à celles utilisées pour la répartition de la DGF.

Il est donc proposé de compenser les pertes subies par les collectivités au titre du dispositif prévu par la loi relative au développement des territoires ruraux.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Monsieur le président, vous aurez compris que je n’interviendrai pas uniquement sur l’amendement. Toutes les discussions que nous venons d’avoir nous montrent bien que la réforme de la DGF soulève de nombreux problèmes, mais ce n’est pas en raison d’erreurs de simulation car il n’y en a pas eu. Il est invraisemblable de faire une réforme de la DGF sans que des simulations suffisantes aient été réalisées !

M. Jean-Pierre Balligand. C’est ça, la droite !

M. René Dosière. Par ailleurs, ce gouvernement a pris l’habitude de présenter des réformes en matière de fiscalité locale ou de dotation aux collectivités dans le cadre des lois de finances. Il serait de bien meilleure méthode de recourir à un projet de loi spécifique qui serait étudié par les commissions compétentes et de procéder à des auditions et à des simulations qui permettraient d’éviter toutes ces erreurs, plutôt que d’étudier de telles mesures dans le cadre de la loi de finances, ce qui nous impose de respecter des délais, et donc d’aller vite.

Tous les problèmes que pose la DGF, nous les retrouverons mardi lorsque nous aborderons l’examen de la réforme de la taxe professionnelle car la méthode est la même.

C’est une nouveauté de traiter de problèmes aussi importants en matière de finances locales dans le cadre de la loi de finances, car les réformes de la DGF ont toujours fait l’objet de projets spécifiques.

M. le président. La parole est à M.  le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Monsieur Dosière, vous qui connaissez bien le sujet des finances locales, vous devriez vous souvenir que la réforme de la DGF, comme d’ailleurs celle de 1993, a fait l’objet d’un travail préparatoire d’un an au sein du Comité des finances locales, présidé par M. Fourcade et dont faisait partie M. Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Il n’y a pas eu de simulations !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Si, il y en a eu, monsieur Bonrepaux !

On ne peut pas mettre en cause le Gouvernement puisqu’il a repris les propositions du Comité des finances locales qui a travaillé en associant majorité et opposition et, surtout, l’ensemble des représentants des différentes catégories de collectivités locales. Car il est très compliqué de concilier les intérêts des maires des petites communes, des communes moyennes, des grandes villes, des EPCI à TPU, des départements et des régions. Nous étions parvenus à un équilibre et le Gouvernement n’a pas du tout trahi les propositions du Comité des finances puisqu’il les a reprises très fidèlement, en les adaptant bien sûr. Voilà pourquoi, monsieur Dosière, je trouve votre critique un peu injuste.

S’agissant de la taxe professionnelle, il est normal de procéder à des réformes fiscales dans le cadre des lois de finances, même si la taxe professionnelle est un impôt local.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. M. Carrez n’a pas du tout répondu de façon satisfaisante à M. Dosière. Au demeurant, nous avons, nous aussi, commis des erreurs, notamment lorsque nous avons supprimé la « part salaires » de la taxe professionnelle. En procédant de même en ce qui concerne son plafonnement, vous allez aboutir à la même catastrophe : vous allez créer le même hiatus, la même incompréhension avec les élus locaux.

En 1993, les discussions sur le potentiel fiscal ont duré très longtemps en commission des finances. Quand on fait des réformes dans un pays qui se veut décentralisé, notamment pour la taxe professionnelle, avec tout le télescopage que cela va engendrer sur les EPCI, les communautés de communes, d’agglomération, il est nécessaire de présenter des projets spécifiques. Si l’on se contente de discuter ici pendant une journée et une nuit, on créera un pataquès général lorsque les élus découvriront ce qui a été voté.

S’agissant de la DGF, des questions ont été posées sur les différents bancs de cette assemblée. On n’assiste donc pas à un procès d’intention de la part d’un groupe. Le président de l’AMF par exemple, M. Pélissard, qui ne passe pas pour un esprit agité, a déposé plusieurs amendements. Les interpellations d’un certain nombre de nos collègues vont vous revenir, monsieur le ministre, en boomerang.

Dans un État qui se veut décentralisé, ce n’est pas une bonne méthode que de discuter rapidement, au détour d’une loi de finances, de dotations ou d’impôts fondamentaux pour les communautés de communes et les communautés d’agglomération.

(M. René Dosière remplace M. Éric Raoult au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ DOSIÈRE,
vice-président

M. le président. La parole est à M. Augustin Bonrepaux.

M. Augustin Bonrepaux. Je voudrais faire un petit rappel des faits.

Il y a effectivement eu un groupe de travail sur les finances locales mais il n’a jamais disposé de simulations sur le potentiel financier, sorti de l’imagination du sénateur Fréville. On en est resté là. Vous devez vous souvenir, monsieur le rapporteur général, que vous-même, à la veille de la discussion en séance, vous n’étiez pas en mesure de nous fournir les simulations concernant les potentiels financiers des départements, tout simplement parce que, après examen, on s’était rendu compte des bouleversements à venir. Les simulations de la réforme de la taxe professionnelle, c’est pareil. Notre collègue l’a bien dit : c’est une bombe ! Monsieur le ministre, je ne comprends pas votre opposition de principe à une étude, d’autant que je ne demande pas de remettre en cause l’ensemble de la réforme.

Certaines orientations, Gilles Carrez l’a rappelé, ont été retenues par le groupe de travail et le Comité des finances locales, même si je ne les ai pas votées. Ce qui est en cause, c’est le potentiel financier. On ne se rend pas compte tout de suite des conséquences, surtout en l’absence de simulations. L’année dernière, j’étais le seul à protester contre le potentiel financier que je trouvais particulièrement injuste ; aujourd’hui, des voix s’élèvent, sur tous les bancs. Ce n’est pas un bon thermomètre ! Alors, prenez la responsabilité – qui n’est pas très grande – de l’améliorer avec le Comité des finances locales.

Il en va de même pour la taxe professionnelle. Avant de vous lancer dans des bouleversements dont les élus se rendront compte progressivement et qui susciteront de larges protestations, mieux vaudrait prendre le temps de se pencher sur les simulations, même incomplètes, que vous devez nous fournir. Je maintiens que les résultats sont différents selon qu’il s’agit de simulations anonymes ou nominatives. Peut-être la direction générale des collectivités locales pourrait-elle nous expliquer ce mystère. En tout cas, la suppression de la « part salaires » de la taxe professionnelle, elle, a été compensée, tandis que, dans le cas présent, certaines collectivités sont condamnées à l’asphyxie.

Alors, monsieur le ministre, il faudrait être plus ouvert à l’idée d’une réflexion sur le potentiel financier et beaucoup plus prudent mardi prochain !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Bonrepaux, je me contenterai de quelques remarques.

Premièrement, à propos de la réforme elle-même, dont je peux parler avec détachement puisque je n’y ai pas pris part, il n’est pas possible de prétendre qu’il n’y a pas eu de concertation ni de simulations. Le Comité des finances locales y a travaillé pendant un an, la réforme a été soumise au vote et les propositions ont été adoptées à l’unanimité.

M. Augustin Bonrepaux. C’est faux !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. C’est ce qui m’a été rapporté en tout cas.

M. Augustin Bonrepaux. J’y étais !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Justement !

M. Augustin Bonrepaux. Je ne l’ai pas votée !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. En tout cas, vous n’avez pas voté contre. Ce n’est pas un reproche, monsieur Bonrepaux : c’est un constat.

Deuxièmement, en ce qui concerne les simulations, je suis prêt à vous donner des informations. D’ailleurs, c’est précisément ce que je vous propose de faire pour la dotation « élu local » qui n’a pas fait l’objet de simulations. Je vous renvoie seulement au rapport qui a été diffusé au mois d’août. Le mois d’août n’est sans doute pas la meilleure période, j’ai pu m’en rendre compte avec une circulaire aux préfets en date du 2 août que personne n’a lue, et c’est tant mieux parce qu’il y avait des erreurs. Dans la dernière partie du document, vous trouverez des simulations. Commençons par les examiner et tirons-en les conclusions. Vous devriez trouver une bonne partie des réponses, même s’il doit être possible de les affiner, aux questions que vous posez.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 599 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 449 rectifié.

La parole est à M. Augustin Bonrepaux, pour le défendre.

M. Augustin Bonrepaux. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 449 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 649.

La parole est à M. Didier Migaud, pour le soutenir.

M. Didier Migaud. Dans le contexte actuel, notre amendement mérite toute notre attention puisqu’il concerne le logement social. La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains prévoit que le parc de logements sociaux des communes doit atteindre 20 %. Sinon, un constat de carence est établi, qui donne lieu au paiement de pénalités. Dans la pratique, le mécanisme s’est révélé insuffisamment dissuasif. Il faut donc des dispositions qui garantissent le respect de la loi.

Notre amendement prévoit que la dotation forfaitaire attribuée aux communes qui ne respectent pas leurs obligations soit diminuée, tout en tenant compte de l’effort pluriannuel et du pourcentage de logements sociaux construits chaque année.

Il est temps, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, de ne plus s’en tenir aux discours. L’autre soir, le Président de la République, dans sa déclaration, a rappelé cette obligation de 20 %. Encore faut-il ne pas en rester aux intentions et imposer de plus lourdes contraintes aux communes dépassant certains critères de taille et de population, qui ne souhaitent pas jouer le jeu du logement social. La situation du logement, qui n’est pas à l’honneur de notre pays, justifie de prendre ce type de disposition, au moins pour commencer à rendre la crise du logement social moins aiguë.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. La commission n’a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, monsieur Migaud, je considère qu’il est satisfait. La réforme de la dotation globale de fonctionnement repose sur l’idée de péréquation : une dotation de solidarité rurale destinée au monde rural, et une dotation de solidarité urbaine pour les agglomérations.

Les critères d’attribution de la dotation de solidarité urbaine sont, entre autres, – et avec une très forte pondération : 40 % – les logements sociaux et les bénéficiaires d’allocations. Dans le cadre du plan de cohésion sociale, nous avons en outre décidé d’augmenter de 20 % la dotation de solidarité urbaine, soit une hausse de 120 millions d’euros en 2005 et en 2006 aussi. L’effort est donc très important.

De plus, pour être maire d’une commune qui est en dessous du plancher de 20 %, je mesure les problèmes auxquels nous nous heurtons.

La loi SRU ne tient compte que des stocks, et pas des flux. Or, dans ma commune, il se construit une centaine de logements par an. Nous nous efforçons, dans l’intérêt général, de faire au moins 20 %, voire 25 %, de logements locatifs sociaux, mais cela ne suffit pas aux yeux de la loi qui retient comme dénominateur l’ensemble des logements de la commune. Pour 14 000 logements, il faut 20 % de 14 000, soit 2 800 logements sociaux, alors que la commune n’en compte que 1 000. Il faut donc en construire 1 800 le plus rapidement possible. Au rythme de 100 logements par an, comment faire quand on n’a pas de terrain ?

Ma commune n’a rien à voir avec Neuilly-Auteuil-Passy, il s’agit d’habitat pavillonnaire – des petits pavillons dits « loi Loucheur » occupés par des gens modestes. Du reste, le plafonnement ou l’exonération de taxe d’habitation concerne entre 36 et 38 % des ménages. Au fond, ce qui doit primer, c’est non pas la nature du logement, mais la population. Pourtant, la plupart des habitants étant propriétaires, ils ne sont pas pris en compte, même si leur taxe d’habitation est plafonnée.

Je ne vais pas recommencer le débat de 2000. Certes, la mixité sociale est indispensable. Certes, le logement locatif social doit représenter une part substantielle des constructions nouvelles. Mais, pour rendre la loi applicable, il faut l’adapter, indépendamment de notre bonne volonté et de notre bonne foi qui ne sont pas en cause. J’espère que chacun saura quitter sa posture idéologique pour que nous puissions trouver ensemble une solution d’intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Premièrement, monsieur Migaud, le Gouvernement partage votre préoccupation puisque le plan de cohésion sociale prévoit la réalisation de 500 000 logements locatifs sociaux sur la période 2005-2009, soit deux fois plus que ce qui a été construit sur la période 1997-2002.

M. Jean-Pierre Balligand. C’est la différence entre les prévisions et les réalisations !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Deuxièmement, votre proposition est incompatible avec le mécanisme des dotations.

Troisièmement, ce que vous proposez revient concrètement à infliger une double peine.

M. Jean-Pierre Balligand. En quoi ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. On ne peut donc pas vous suivre sur ce terrain.

Quatrièmement, il est vrai que le sujet est sensible et que nous nous sentons tous concernés. C’est pourquoi le Premier ministre m’a demandé de réunir un groupe de travail avec des maires pour proposer des initiatives en ce domaine et qu’il a nommé un délégué interministériel au développement de l’offre de logements, M. Beysson.

Pour toutes ces raisons, je vous demande de rejeter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Didier Migaud.

M. Didier Migaud. Monsieur le rapporteur général, si on suit votre raisonnement, on n’est pas près de régler le problème !

Il faut plus de logements sociaux, y compris dans des communes comme la vôtre, ou comme la mienne. La commune dont je suis maire n’atteint pas non plus le plancher de 20 %, mais nous n’avons pas payé de pénalité cette année compte tenu des efforts que nous faisons pour construire davantage de logements sociaux. Ce sont précisément ces communes, plus encore que les autres, qui ont l’ardente obligation de construire plus de logements sociaux pour parvenir à un meilleur équilibre du logement dans nos agglomérations.

Le dispositif actuel a montré ses limites, et celui auquel notre collègue René Dosière vient de succéder au fauteuil de la présidence en est la vivante illustration. Il a fallu que le Président de la République hausse le ton pour qu’il entende raison.

Mais les discours ne suffisent plus : il faut des mesures concrètes. Or quel décalage entre les annonces du Gouvernement, les objectifs du plan de cohésion sociale et la réalité du terrain ! D’ailleurs, le problème des banlieues ou des violences urbaines est bien là.

Vos contradictions sautent aux yeux : vous annulez des crédits, vous taillez dans ceux qui étaient destinés à la politique de la ville ou qui bénéficiaient à des associations qui font un travail considérable dans les quartiers. Votre politique est stupide, au point que le Premier ministre a dû faire volte-face et revenir sur des coupes budgétaires qu’il avait décidées quelques jours auparavant. Et vous annoncez un grand nombre de logements sociaux à construire pendant une période où, je l’espère, vous ne serez plus aux responsabilités. Raisonner au-delà de 2007 ne vous engage à rien.

Dans ces conditions, il est un peu facile pour un ministre d’annoncer que la plus grande partie de l’effort concernera les années 2008 et 2009. Or c’est bien ce que vous proposez. Cela n’est pas sérieux et ne saurait tromper nos concitoyens.

Nous proposons des mesures concrètes. Si elles ne sont pas retenues dans le cadre de la loi de finances, il convient à tout prix que, dans le cadre d’un texte spécifique, des dispositions puissent être adoptées visant à contraindre les communes. La pénalité ne suffit pas. Une commune qui dispose des moyens nécessaires préfère payer la pénalité – qui, au fond, lui coûte peu – et se soustraire à toutes ses obligations. Il en est de même de certaines entreprises qui ne souhaitent pas embaucher des handicapés : elles préfèrent payer des pénalités afin de ne pas avoir à remplir leurs obligations légales en la matière.

Nous proposons, sinon une double peine, du moins un renforcement des pénalités vis-à-vis des communes qui ne jouent pas le jeu. Nous ne souhaitons pas, monsieur le rapporteur général, voir condamner les communes qui sont dans la situation de celle dont vous êtes le maire, et qui entreprennent de construire progressivement un plus grand nombre de logements sociaux.

M. André Schneider. Encore faut-il avoir les terrains !

M. Didier Migaud. Tel est l’objectif de l’amendement n° 649, et c’est pourquoi nous le maintenons.

M. le président. La parole est à M. Jacques Le Guen.

M. Jacques Le Guen. Aucun d’entre nous, sur les bancs de cette assemblée, n’est opposé à la mixité sociale. Il faut le rappeler.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Très bien !

M. Didier Migaud. Mais certains y sont plus favorables que d’autres !

M. Jacques Le Guen. Nous assumons la mixité sociale depuis des années dans toutes nos communes, quelles que soient leur taille ou les difficultés qu’elles connaissent.

Mais des communes sont soumises à des contraintes, notamment de surface, qui leur interdisent de construire autant qu’il le faudrait.

M. André Schneider. C’est vrai !

M. Jacques Le Guen. Alors, monsieur Migaud, je suis étonné que vous affirmiez qu’il faille construire des ensembles plus grands ! Voudriez-vous que l’on édifie de nouveau des barres et des tours, de façon à créer, plus tard, de nouveaux problèmes dans les banlieues ?

M. Didier Migaud. Je n’ai pas dit ça !

M. Jacques Le Guen. Il faut être raisonnable : on ne peut accepter une telle solution !

Essayons de trouver d’autres pistes. Ne pourrait-on pas envisager que le pourcentage des 20 % de logements sociaux soit atteint dans le cadre des pays, par exemple, en tout cas dans le cadre de secteurs plus larges que la commune, comme une EPCI ? Ce serait plus logique…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Évidemment !

M. Jacques Le Guen. …plutôt que d’imposer aux communes qui manquent de surfaces constructibles des contraintes trop lourdes pour elles. La répartition du logement social en serait facilitée et cela soulagerait certains secteurs.

Il convient, de plus, de ne pas oublier que le logement social a également pour objectif d’accueillir des jeunes qui débutent dans la vie ou des personnes âgées qui souhaitent revenir dans les centres-ville.

Voilà quelques pistes qui mériteraient, à mon sens, d’être suivies.

M. le président. La parole est à M. Léonce Deprez.

M. Léonce Deprez. Nous avons un objectif commun : assurer le logement pour tous au travers d’une politique dirigée envers ceux qui, aujourd'hui, n’ont pas de logement.

M. Didier Migaud. Quel beau discours !

M. Léonce Deprez. Le Parlement a adopté le schéma de cohérence territoriale, le SCOT. Je fais partie de ceux qui ont soutenu la loi SRU…

M. Gilles Carrez, rapporteur général. « Solidarité et renouvellement urbains » !

M. Léonce Deprez. …qui a créé les SCOT.

C’est dans le cadre du schéma de cohérence territoriale qu’il convient d’aborder désormais la question de la répartition des logements, puisqu’il a précisément pour objectif de régler les problèmes non plus à l’échelle de la commune, qui n’a souvent ni les moyens ni la surface nécessaires, mais à celle d’un territoire plus large.

C’est pourquoi il faudrait désormais encourager tous ceux qui dirigent des communautés de communes à s’associer en vue de constituer des pays ou des agglomérations et de les doter de schémas de cohérence territoriale. Tel est le cadre dans lequel le problème du logement pour tous sera réglé en France dans des conditions dignes de notre temps.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 649.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 85

M. le président. Sur l’article 85, je suis saisi d’un amendement n° 600.

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Je serai bref.

Il s’agit de préciser la rédaction de l’article 85, qui permet aux fonctionnaires locaux, dans le cadre de la décentralisation, d’opter soit pour l’intégration soit pour le détachement. Or cet article ne prévoit pas explicitement le cas des fonctionnaires qui n’opteront pas.

C’est pourquoi l’amendement déposé par M. Laffineur vise à préciser que, si l’agent n’exerce pas son droit d’option, il sera placé, à l’expiration du délai de deux ans, en position de détachement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 600.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 85, modifié par l'amendement n° 600.

(L'article 85, ainsi modifié, est adopté.)

avances aux collectivités territoriales

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Avances aux collectivités territoriales » inscrits à l’État B.

État B

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 665.

La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Le montant des recettes du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » a été majoré de 4 940 millions d’euros en première partie, pour tenir compte du produit de la taxe intérieure sur les produits pétroliers transféré aux départements, et retracé sur ce compte à partir de 2006. Ce montant n’avait pas été pris en compte dans la version initiale du fait d’une erreur technique. En cohérence, le montant du plafond de dépenses du programme n° 833 est majoré de 4 940 millions d’euros.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 665.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Avances aux collectivités territoriales », modifiés par l’amendement n° 665.

(Les crédits de la mission « Avances aux collectivités territoriales », ainsi modifiés, sont adoptés.)

M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs aux relations avec les collectivités territoriales.

La suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour de LA prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2006, n° 2540 :

Rapport, n° 2568, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

Engagements financiers de l’État ; Gestion et contrôle des finances publiques ; Provisions ; Stratégie économique et pilotage des finances publiques ; Remboursements et dégrèvements (programme : Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État) ; Monnaies et médailles ; Accords monétaires internationaux :

Rapport spécial, n° 2568, annexe 15, de M. Daniel Garrigue, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan,

Rapport spécial, n° 2568, annexe 17, de M. Thierry Carcenac, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan,

Rapport spécial, n° 2568, annexe 28, de M. Jean-Jacques Descamps, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan,

Rapport spécial, n° 2568, annexe 36, de M. Camille de Rocca Serra, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

Articles non rattachés (suite).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)