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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Troisième séance du mardi 6 décembre 2005

91e séance de la session ordinaire 2005-2006


PRÉSIDENCE DE M. MAURICE LEROY,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

dates des renouvellements du Sénat mandat des conseillers
municipaux ET GÉNÉRAUX

Suite de la discussion d’un projet de loi organique et d’un projet de loi,
adoptés par le Sénat

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion :

Du projet de loi organique, adopté par le Sénat, modifiant les dates des renouvellements du Sénat (nos 2576, 2 716) ;

Du projet de loi, adopté par le Sénat, prorogeant la durée du mandat des conseillers municipaux et des conseillers généraux renouvelables en 2007 (nos 2577, 2 716).

Discussion générale commune (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits.

La parole est à M. Louis Giscard d’Estaing.

M. Louis Giscard d'Estaing. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué aux collectivités territoriales, mes chers collègues, mon intervention dans ce débat portera exclusivement sur le projet de loi organique visant à proroger le mandat des sénateurs.

Ce texte n° 2576 a un mérite : il est possible de le rejeter franchement sans pour autant s’opposer au Gouvernement, puisque le projet de loi initial, tel qu’il a été présenté par le Gouvernement devant le Sénat, recevrait l’accord total de notre assemblée.

M. Jacques Brunhes. Exact !

M. Louis Giscard d'Estaing. Il visait en effet à proroger d’un an, de 2007 à 2008, le mandat des sénateurs élus en 1998,…

M. Jacques Brunhes. Tout à fait !

M. Louis Giscard d'Estaing. …ce qui avait pour conséquence de porter à dix ans la durée de leur mandat initialement fixé à neuf ans et, s’inscrivant dans la logique de la réforme progressive de la durée du mandat des sénateurs et de la composition du Sénat – qui, je le rappelle en passant, a été majorée de vingt-quatre sièges –, de ramener exceptionnellement à cinq ans la durée du mandat des sénateurs élus en 2008. Tel était l’intitulé exact de l’article 1er du projet de loi organique présenté par le Gouvernement devant le Sénat. Le texte se limitait à cette disposition. Il faut donc, mes chers collègues, soutenir le texte initial du Gouvernement et, je le crains, rejeter le texte modifié.

Vous avez fait référence, monsieur le ministre, à la « sagesse » du Sénat, mais quels ont été les apports de celle-ci ?

M. Jacques Brunhes. Vous mettez « sagesse » entre guillemets, j’espère !

M. Louis Giscard d'Estaing. C’est bien ainsi que je l’ai écrit, cher collègue !

M. Guy Geoffroy, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration de la République. Cela s’entendait à l’intonation !

M. le président. Soyez sage, vous-même, monsieur Brunhes !

M. Jacques Brunhes. C’est M. Giscard d’Estaing qui est sage, monsieur le président, dans son analyse !

M. Louis Giscard d'Estaing. J’essaie d’éclairer cette assemblée au même titre que le ministre a essayé d’éclairer le Sénat.

Le Sénat a saisi l’occasion de cette réforme imposée par le calendrier particulier de 2007 pour proroger d’un an, non seulement la série des sénateurs dont le renouvellement du mandat était prévu en 2007, mais également les deux autres séries des sénateurs dont le renouvellement du mandat était prévu, respectivement, en 2010 et 2013.

Cela soulève deux problèmes de principe.

Tout d’abord, cette décision va à l’encontre du principe de périodicité raisonnable, comme l’a fort justement relevé notre excellent collègue Jean-Luc Warsmann, dont la pertinence des arguments est aussi remarquable que l’impartialité dont il fait preuve, comme vous, monsieur le président, dans la présidence de nos débats.

En s’en tenant au projet de loi organique du Gouvernement, le Sénat aurait fait preuve de sagesse. En décidant de proroger d’un an les deux autres séries, il se rend un mauvais service car il attire l’attention de nos concitoyens sur la durée du mandat de ses membres, dont eux-mêmes ont récemment admis qu’elle ne correspondait plus ni au nouveau rythme de notre vie politique ni à l’exigence de modernisation de nos institutions. Cette modernisation a été marquée en particulier par le raccourcissement du mandat présidentiel, et devrait donner lieu, comme Jérôme Chartier l’a écrit, à d’autres « liftings » de notre République. Tout signal de retour en arrière est donc particulièrement malvenu.

Les modifications apportées par le Sénat ont, ensuite, des conséquences sur le calendrier électoral : elles perturbent gravement le processus initié par Charles Pasqua visant à regrouper aux mêmes dates le renouvellement de la moitié des conseillers généraux et les élections régionales, le renouvellement de l’autre moitié coïncidant, comme l’a fort justement rappelé M. Guy Geoffroy, avec les élections municipales. L’adoption en l’état du projet de loi organique aurait pour conséquence de décaler définitivement en 2010 puis en 2016 les élections régionales et les élections cantonales.

Le Sénat aurait d’ailleurs dû, étendant sa sagesse à d’autres domaines que la durée du mandat de ses propres membres, aller jusqu’au bout de sa logique en proposant d’allonger d’un an le mandat des conseillers régionaux.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Très bien !

Mme Marie-Jo Zimmermann. Cela aurait, en effet, été intéressant !

M. Louis Giscard d'Estaing. Je savais que nombre de députés présents ce soir seraient sensibles à cet argument.

Cela aurait évité qu’il y ait en 2010-2011 puis en 2016-2017 un décalage définitif entre les régionales et le renouvellement d’une moitié des conseillers généraux, annihilant des années d’efforts en vue de les regrouper.

Je m’en tiens donc, monsieur le ministre, au texte initial que vous avez défendu devant le Sénat. Je regrette qu’il ait été dénaturé par ce dernier. Je ne pourrai que voter contre le texte modifié, qui va à l’encontre de la modernisation de nos institutions, à laquelle nous sommes tous très attachés. (Applaudissements sur certains bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Guy Geoffroy, vice-président de la commission. Très bien !

M. Jacques Brunhes. Voilà qui devient intéressant !

M. le président. La parole est à M. Gilles Bourdouleix.

M. Gilles Bourdouleix. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est vrai qu’un texte était nécessaire. Mais, si le texte du Gouvernement me semblait imparfait, celui qui nous est transmis par le Sénat est totalement inacceptable.

Un texte était nécessaire parce qu’on ne peut nier l’encombrement électoral qui s’annonçait pour 2007. L’élection présidentielle puis les législatives devant avoir lieu à la fin du printemps, il était impossible de tenir les élections municipales et cantonales en mars. Il fallait donc les décaler, et, par voie de conséquence, les sénatoriales aussi. Il était, en effet, hors de question d’organiser les élections municipales au mois de juin, comme en 1995.

Cependant, le texte du Gouvernement me paraissait imparfait car repousser d’un an les élections est exagéré. Nous aurions pu tout à fait envisager de décaler les élections cantonales et municipales de quelques mois seulement – ce qui aurait permis, moyennant des mandats réduits à cinq ans et demi, de conserver l’échéance de 2013 pour les élections suivantes – et d’organiser les élections sénatoriales dans la foulée, dans les deux ou trois mois qui suivaient, ce qui aurait laissé inchangé le calendrier des élections sénatoriales suivantes.

Si ce projet était déjà imparfait, son « bricolage » par le Sénat le rend totalement inacceptable.

Les bricolages que je faisais lorsque j’étais enfant avec des mécanos ressemblaient au moins à quelque chose. Là, cela ne ressemble à rien : le Sénat octroie, de sa propre autorité, un mandat de dix ans à la majorité de ses membres et de sept ans pour les autres, en allongeant au passage le mandat des conseillers généraux, sans qu’il n’y ait, in fine, un véritable objectif permettant de construire quelque chose.

J’avais déposé des amendements – qui malheureusement n’ont recueilli que ma voix – dans un double objectif. Le premier était de balayer des habitudes qui me paraissent totalement désuètes, à savoir le renouvellement partiel du Sénat et des conseils généraux.

Le renouvellement partiel du Sénat était justifié lorsque le mandat des sénateurs était de neuf ans : le renouvellement tous les trois ans permettait de garder une certaine actualité par rapport aux conseils municipaux qui, eux, n’avaient qu’une durée de six ans. À partir du moment où le mandat sénatorial est, lui aussi, de six ans, cela ne se justifie plus. Si les sénatoriales ont lieu au mois de septembre qui suit les municipales – je rappelle que les grands électeurs municipaux représentent 95 % du collège électoral du Sénat –, il n’y a aucune raison qu’il y ait une élection intermédiaire au bout de trois ans, puisque ce sera le même conseil municipal qui élira ces sénateurs. Dans un souci de ne pas multiplier les échéances électorales, pour ne pas troubler l’opinion publique, il est donc logique d’avoir des élections sénatoriales regroupées.

Le même raisonnement vaut pour les conseils généraux : le mandat de conseiller général est théoriquement de six ans, mais les exécutifs ont en réalité une durée de vie de trois ans puisqu’ils peuvent, au bout de ce délai, être remis en cause. C’est là un problème qui aurait pu être balayé à l’occasion de cette loi.

En second lieu, mes amendements tendaient à inscrire dans la loi électorale l’obligation de décaler les élections locales lorsqu’elles ont lieu l’année d’une élection présidentielle. Ce que nous allons connaître en 2007 se répétera.

A priori, les élections municipales ne devraient pas, d’après ce que nous a indiqué le rapporteur en commission, coïncider avec l’élection présidentielle avant 2032. Cela laisse une certaine marge. Mais c’est tabler sur la bonne santé des présidents de la République, sur l’accomplissement du mandat de cinq ans sans interruptions et sur l’absence de dissolution, tous éléments dont nous ne pouvons être sûrs.

Les élections cantonales et régionales, quant à elles, interviendront en même temps que l’élection présidentielle avant cette date, et nous devrons donc revenir devant le Parlement pour décaler à nouveau les élections locales de ces années-là. Il eût été sage de le prévoir dans le code électoral.

Le texte qui nous est proposé passe à côté de ces grands objectifs. Nous nous retrouvons totalement prisonniers des exigences des sénateurs. Est-ce le Sénat, la deuxième chambre, qui dirige aujourd’hui ? On nous dit que nous devons voter ce projet de loi organique, car un avis conforme à celui des sénateurs est nécessaire.

M. Bruno Le Roux. Eh oui !

M. Gilles Bourdouleix. Personnellement, je suis sceptique. C’est balayer un peu rapidement ce que représentent les députés, à savoir la nation ! J’ai beaucoup de respect pour le Sénat mais, jusqu’à nouvel ordre, il ne représente pas la nation de la même façon que nous.

Parce qu’il n’y a pas d’objectif clair dans le texte proposé par le Gouvernement, et encore moins dans celui qui nous est transmis par les sénateurs et parce que j’estime que l’Assemblée nationale n’a pas à se placer sous les ordres du Sénat, je voterai contre ces textes, même si je reconnais qu’une modification du calendrier électoral s’impose pour éviter l’encombrement de 2007. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques Brunhes. De plus en plus intéressant !

M. Bernard Derosier. Ils sont bien ces députés UMP !

M. le président. La discussion générale commune est close.

La parole est à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.


M. Brice Hortefeux,
ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais d’abord remercier M. Houillon, président de la commission des lois, qui était présent tout à l’heure, son vice-président, M. Geoffroy, ainsi que l’ensemble des membres de la commission des lois.

Monsieur Delattre, votre rapport était remarquable. Nous arrivons aux mêmes conclusions, ce qui facilite le qualificatif. (Sourires.) Vous avez souligné la volonté du Gouvernement d’avancer et de procéder par consensus. La concertation avec l’ensemble des groupes politiques – je l’ai dit tout à l’heure – et en particulier les groupes représentés à l’Assemblée a été utile, même si, à l’évidence, et la démonstration en a été faite, cela n’a pas permis d’épuiser tous les sujets.

Votre constat rejoint celui du Gouvernement : le calendrier actuel est intenable.

M. Bruno Le Roux. C’est vrai !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Si tous les orateurs ont reconnu que le calendrier n’était pas tenable, tant pour des raisons juridiques, techniques, que pour des raisons institutionnelles, les avis divergent sur la meilleure solution à retenir.

M. Le Roux a souligné la nécessité constitutionnelle qui s’attache à reporter les élections sénatoriales après les élections locales. J’ai bien noté qu’il aurait préféré un report plus limité. J’ai eu le sentiment que cette préférence n’était pas simplement personnelle et dépassait peut-être, là aussi, les groupes politiques.

Je ne reviens pas sur les propos tenus par M. Warsmann, même s’il était difficile de ne pas entendre ce qu’il a dit avec beaucoup de force. Cela ne signifie pas que l’on rejoint sa position.

M. Jacques Brunhes. Mais si ! Faites un effort !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Geoffroy, monsieur Bourdouleix, j’ai pris note de vos préoccupations sur les difficultés qui ne manqueront pas de ressurgir à l’avenir. Le Gouvernement en a conscience et souhaitera, naturellement, engager une réflexion sur le sujet.

Monsieur Giscard d’Estaing, j’ai bien entendu vos préoccupations, qui reprennent avec votre style, votre vocabulaire, vos mots, certains des points de vue évoqués précédemment par M. Warsmann, avant l’interruption de séance. Je sais que vous les partagez, car nous avons eu l’occasion d’en parler dans notre région.

Il est de mon devoir – cela doit être interprété ainsi – de rappeler les principes qui ont conduit à ne pas déroger, même de manière ponctuelle, au principe du renouvellement triennal. Le souhait était d’éviter que certains sénateurs ne soient élus par des conseillers municipaux en fin de mandat – cela me semble un argument assez cohérent. Nous avions la volonté d’éviter que les conseils municipaux élus en 2008 n’aient à élire deux fois les sénateurs de l’actuelle série A, et c’est aussi un bon argument.

Je persiste à penser qu’en matière de régime électoral des assemblées, il est de tradition que le Gouvernement s’en remette à la sagesse des parlementaires, sous le contrôle vigilant et actif du Conseil constitutionnel. Je serai donc fidèle à cette attitude dans le débat d’aujourd’hui.

Monsieur Chartier, je répondrai d’un mot aux différentes pistes que vous avez évoquées. Celles-ci n’étaient nullement hors sujet, contrairement à ce qu’a prétendu M. Brunhes – lequel partage d’ailleurs largement les mêmes préoccupations. M. Chartier a évoqué de nombreuses réformes : le vote par procuration, la simplification du régime des commissions électorales, ainsi que des modifications à intervenir dans les règles relatives au contrôle de l’éligibilité des candidats. Vous avez également évoqué, monsieur Chartier, la comptabilité des votes blancs et un certain nombre d’autres aspects. Ces sujets sont importants, utiles à l’exercice de notre démocratie, à sa transparence. Mais ils ne rejoignent pas directement nos préoccupations actuelles. Je m’engage très clairement à ce que vos propositions soient étudiées et reprises pour l’essentiel, dès le dépôt d’un projet de loi de modernisation du droit électoral, quand ce sera possible. J’aurai moi-même quelques suggestions à apporter.

Enfin, je remercie les orateurs pour la qualité de leurs interventions et pour la franchise de leurs propos.

M. Guy Geoffroy, vice-président de la commission. Très bien !

DATE DES RENOUVELLEMENTS DU SÉNAT

Discussion des articles

M. le président. J’appelle en premier lieu les articles du projet de loi organique dans le texte du Sénat.

Article 1er

M. le président. Sur l’article 1er, je suis saisi d’un amendement n° 4.

La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le défendre.

M. Bruno Le Roux. Nous n’avons pas déposé beaucoup d’amendements, mais celui-ci est particulièrement important.

Nous pensons que le renouvellement du Sénat doit intervenir après les élections locales, celles-ci étant fixées, par un autre amendement, en octobre 2007.

Cela nous conduit à proroger le mandat des sénateurs – sans que cela ait de conséquences sur le renouvellement de la série suivante – de quatre mois, et donc jusqu’au mois de janvier 2008.

Je me permets de rappeler que, ce faisant, nous respectons les principes énoncés par le Conseil constitutionnel.

D’abord, l’ordre naturel des élections, notamment l’antériorité des élections sénatoriales, est respecté.

Ensuite, le droit de suffrage est sauvegardé, puisque la modification a un caractère exceptionnel et transitoire, limité dans le temps et strictement nécessaire à la réalisation de l’objectif de la loi.

Enfin, nous respectons le calendrier de mise en œuvre de la réforme du Sénat, tel qu’adoptée par le législateur en 2003.

Je comprends bien, monsieur le ministre, votre approche – nous sommes au cœur du débat – mais je ne l’accepte pas. Vous pourriez, ici, à l’Assemblée, penser à l’intérêt général de notre pays, et non pas uniquement à la position que vous avez adoptée devant le Sénat en vous en remettant à la sagesse des sénateurs.

Autant nous pouvons comprendre le délai d’un an supplémentaire que les sénateurs se sont octroyé à partir de votre projet de loi pour la série renouvelable en 2007, autant il nous semble inacceptable, et même à la limite de la plaisanterie, que soit décidé un allongement de la durée du mandat de tous les sénateurs pour la simple raison que ceux qui étaient renouvelables en 2007 auraient vu leur mandat prolongé. Même si votre projet initial ne nous semblait pas extraordinairement bon, il avait le mérite de régler le problème momentané de 2007.

Ce qu’a fait le Sénat est inacceptable d’un point de vue républicain, d’un point de vue démocratique. Nous ne pouvons pas laisser passer l’allongement de la durée des mandats de neuf à dix ans même pour ceux qui ne sont pas concernés par le renouvellement de l’année 2007. C’est un point sur lequel nous porterons la contestation dans les prochaines semaines.

M. Bernard Derosier. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 4.

M. Francis Delattre, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Notre système bicaméral entraîne un certain nombre de contraintes qui engagent, de mon point de vue, les deux assemblées à observer un respect mutuel.

Pour ce qui concerne les modalités électorales des assemblées, une grande autonomie est traditionnellement préservée pour celle qui est concernée en premier lieu.

J’ai entendu beaucoup de choses. Notre vice-président, M. Warsmann, qui est féru d’histoire, a engagé le débat sur des références historiques un peu dépassées. Je regrette de devoir lui rappeler que M. Bonnet, rapporteur au Sénat, n’avait pas critiqué en tant que telle la prolongation de deux mois du mandat des députés, mais avait critiqué fortement l’inversion même du calendrier. Et nous sommes nombreux ici à ne pas avoir voté l’inversion du calendrier.

Historiquement, les Sénateurs ont aussi sauvé, en 1981, les institutions de la Ve République et nous ont largement aidés, à l’époque, à sauver la liberté de l’école ; ils méritent toute notre considération.

M. Jean-Luc Warsmann. Cette polémique est inutile.

M. Francis Delattre, rapporteur. L’autorité du Sénat est une réalité dans ce pays. Nous devons tous observer un minimum de respect pour les références historiques qui sont les nôtres.

S’agissant de l’amendement, je rappelle que le Conseil constitutionnel exige que les sénateurs soient élus par un corps électoral renouvelé. Cela signifie donc qu’il faut absolument que les élections municipales aient lieu avant les élections sénatoriales.

Si les élections sénatoriales avaient lieu en janvier 2008, les élections municipales se dérouleraient forcément en septembre ou octobre 2007. Le Conseil constitutionnel a indiqué que le corps électoral aurait du mal à supporter des consultations aussi importantes sur une période brève de quatre ou cinq mois. Nous devons être attentifs à cela.

Ainsi, monsieur le député-maire de Chartres, par exemple, allez-vous repartir en campagne pour les municipales à peine trois mois après les législatives ? Ne pensez-vous pas connaître quelques difficultés pour distinguer dans les comptes de campagne ce qui relevait de la campagne municipale et ce qui relevait de la campagne législative ?

Tout le monde s’accorde à reconnaître que les élections nationales et les élections locales doivent disposer d’un temps distinct, afin que les électeurs ne risquent pas de confondre les enjeux nationaux et locaux.

Croyez-vous vraiment que, si une élection municipale avait lieu en septembre ou octobre, elle serait totalement dégagée du résultat des élections législatives ou présidentielles ? On a suffisamment d’expérience ici pour savoir que non.

Quand le Conseil constitutionnel nous invite à un réaménagement, il vise les cinq élections de l’année. Les députés du groupe socialiste estiment qu’un an c’est trop long. Je les renvoie à la loi Rocard, qui, en 1990, avait rallongé d’un an les mandats des conseillers généraux sans que cela entraîne une sanction du Conseil constitutionnel.

M. Bernard Derosier. Une fois !

M. Francis Delattre, rapporteur. Nous avons connu huit changements de dates d’élections depuis le début de la Ve République. Bien souvent, les élections du conseil général ont servi de variables d’ajustement.

Il est facile de prétendre que le Sénat exagère, mais il faut respecter une certaine cohérence. On ne peut pas, d’un côté, vouloir des élections avec des enjeux bien séparés et, de l’autre, mélanger les comptes de campagne. On risque même d’aboutir à une confusion des campagnes.

Certains trouveront peut-être mes explications un peu longues, mais c’est peut-être le seul amendement qui nous permettra d’engager une réflexion sur ce sujet, afin que chacun soit conscient de ses responsabilités.

Je répète qu’il est facile de prétendre que le Sénat exagère, et nous partageons largement les critiques qui ont été faites. Mais il faut sortir du virtuel, pour apprécier les réalités concrètes en entrant dans les détails.

M. Bernard Accoyer. Très bien !

M. Francis Delattre, rapporteur. Nous avons besoin d’un accord conforme du Sénat.

M. Bernard Accoyer. Tout à fait !

M. Francis Delattre, rapporteur. Sinon, nous devrons nous contenter d’une loi ordinaire, et il n’y aura pas d’autre choix que d’organiser les élections municipales en même temps que les élections législatives. Cela devrait, mes chers collègues, vous interpeller.

M. Bernard Accoyer. Tout à fait !

M. Bernard Derosier. Non, les municipales sont en en mars et les législatives en juin !

M. Francis Delattre, rapporteur. En conclusion, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?


M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.
Monsieur Le Roux, le rapporteur a fait une réponse intéressante et argumentée. Je serai donc bref.

La commission des lois a adopté un texte cohérent. Votre amendement remettrait en cause la cohérence de ce texte. C’est la raison pour laquelle je demande le rejet de votre amendement.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Bruno le Roux.

M. Bruno Le Roux. Tout a été dit par le rapporteur sur la teneur de nos débats de ce soir quand il a admis que nous avions besoin d’un vote conforme, sans quoi ce serait la politique du pire. Il n’envisage aucune autre possibilité qu’un blocage du Sénat !

Or nous pourrions faire passer un message clair aux sénateurs ce soir en votant le projet de loi initial. Nous aurions même pu, je le répète, voter ce projet à l’unanimité.

Je vous incite du reste par commencer à déposer ce genre de texte à l’Assemblée pour ne pas être soumis au chantage inacceptable qui a lieu aujourd’hui. Soit nous cédons au chantage inacceptable du Sénat qui veut imposer des durées de mandat inacceptables concernant les sénateurs qui ne sont pas soumis à renouvellement. Soit, nous votons, non pas le texte initial, mais une proposition de prorogation de six mois pour les élections locales et de quatre mois pour les élections sénatoriales, délais strictement nécessaires à une bonne organisation des scrutins. Dans ces conditions, je serais curieux de savoir ce qui se passerait au Sénat si nous présentions un texte voté ici à l’unanimité – preuve que l’Assemblée nationale a eu le dernier mot – et strictement consacré aux mesures électorales nécessaires à la bonne organisation de l’année 2007. Je balaie les arguments d’opportunité du rapporteur, uniquement destinés à défendre les sénateurs, et fondés sur des considérations purement techniques de procédure.

Nous ne pouvons pas nous cacher derrière notre petit doigt. Ce qu’ont fait les sénateurs est politiquement inacceptable, et les arguments techniques ne permettent pas de le justifier.

Je vous demande donc soit de voter à l’unanimité le texte initial, soit d’adopter la proposition contenue dans notre amendement, et je suis prêt ce soir à engager mon groupe à vous suivre ! Je serais curieux de voir la réaction du Sénat si nous adoptions un texte à l’unanimité !

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Vous n’avez rien répondu, monsieur le ministre, à l’intervention du groupe communiste…

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Si !

M. Jacques Brunhes. …ce que je comprends parfaitement puisque notre intervention, mises à part quelques parenthèses sur une possible future Constitution, portait sur le texte initial du Gouvernement, qui nous convient parfaitement, comme j’ai eu l’occasion de le dire.

M. Bruno Le Roux. Voilà !

M. Jacques Brunhes. Nous ne pouvons donc pas être favorables à l’amendement déposé par le groupe socialiste. La raison en est simple : depuis le phénomène institutionnel majeur qu’a été l’inversion du calendrier électoral – et je rappelle que le groupe socialiste l’a votée – nous connaissons, qu’on le veuille ou non, monsieur Derosier, la prééminence de l’élection présidentielle, laquelle décide des autres élections. C’est elle qui conduit à la présidentialisation du régime, car les élections législatives qui suivent forment des majorités présidentielles. Je rappelle que l’UMP s’est d’abord appelée Union pour la majorité présidentielle !

C’est bien pour éviter une succession de scrutins qui suivent l’élection présidentielle de trop près que nous souhaitions dissocier les élections nationales et locales. Or quatre mois ne sont pas suffisants pour cela. De plus, octobre n’est pas une bonne période, mais je l’ai déjà dit. Mais la question de fond demeure les conséquences de l’inversion du calendrier.

Nous souhaitons que les élections municipales aient lieu comme il était proposé dans le texte initial, en mars 2008. C’est la raison pour laquelle nous n’approuvons pas l’amendement du groupe socialiste.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. Nous avons entendu beaucoup de choses, mais nous devons nous en tenir à quelques principes. L’intervention du rapporteur a été claire sur des sujets particulièrement techniques. M. Le Roux a joué le rôle du parfait opposant, éclairé, et M. Brunhes celui de représentant du groupe communiste. (Sourires .)

M. Bruno Le Roux. Pas du tout : je soutiens le texte du Gouvernement ! Je ne peux vraiment pas faire mieux !

M. Jean-Luc Warsmann. C’est une bonne résolution !

M. Jérôme Chartier. Si vous souhaitez à l’avenir soutenir les textes du Gouvernement, nous vous en remercions par avance et nous ne manquerons pas de vous le rappeler !

M. Bruno Le Roux. N’y comptez pas trop !

M. Jérôme Chartier. Permettez-moi d’évoquer le précédent de 1985. Le gouvernement de l’époque avait décidé de modifier le mode d’élection des députés pour passer du scrutin uninominal au scrutin proportionnel. Tout le monde se souvient que la majorité sénatoriale était une majorité de droite,...

M. Jean-Paul Bacquet. Comme d’habitude !

M. Jérôme Chartier. …et le Sénat pouvait faire le choix de repousser ce dispositif et par conséquent de repousser la loi organique. L’Assemblée ne pouvant réunir la majorité des deux tiers au Congrès, le projet de loi n’avait alors aucune chance d’aboutir.

Le Sénat a préféré faire fi des préférences partisanes et respecter le principe, à valeur quasi constitutionnelle, selon lequel une assemblée ne se charge pas de régler le mode de désignation ou la durée du mandat de l’autre assemblée.

M. Bruno Le Roux. L’exemple est mal choisi !

M. Jérôme Chartier. Pas du tout, c’est exactement la même chose aujourd’hui.

Est-ce à nous de décider de la durée du mandat des sénateurs ?

M. Bernard Derosier. Oui !

M. Jérôme Chartier. Que faites-vous de l’indépendance des chambres l’une par rapport à l’autre ?

M. Jean-Luc Warsmann. Ce n’est pas cela la Constitution !

M. Jérôme Chartier. Regardez ce qui s’est passé en 1985.

M. Jean-Luc Warsmann. Le Sénat a fait de l’obstruction !

M. Jérôme Chartier. En 1985, la situation était exactement la même qu’aujourd’hui.

M. Bruno Le Roux. Non, c’est un mauvais exemple !

M. Jacques Brunhes. Absurde !

M. Jérôme Chartier. Au contraire, l’exemple est parfait, monsieur Le Roux ! Il s’agit de savoir si une assemblée décide de ce qui concerne l’autre. C’est la raison pour laquelle l’opposition au sein de la Haute assemblée s’en est tenue à une abstention consentante, reconnaissons-le honnêtement. Vous pouvez soit contredire vos collègues de la Haute assemblée, soit rester fidèles au principe de 1985 qui a permis de modifier de mode de scrutin parce que la Haute assemblée, malgré son orientation politique, a décidé de respecter la tradition républicaine.

M. Jean-Luc Warsmann. Faux !

M. Bruno Le Roux. Mauvais exemple !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 6.

La parole est à M. Jacques Brunhes, pour le soutenir.

M. Jacques Brunhes. Par la suppression des deux derniers alinéas de l’article 1er, nous proposons de revenir au texte initial du Gouvernement.

Si nous débattons aujourd’hui de la date des élections sénatoriales, c’est bien parce que se pose le problème de la date des élections des conseillers municipaux.

Je voudrais dire à M. Chartier qu’il suit une étrange logique. Selon lui, le groupe socialiste joue son rôle d’opposant et M. Brunhes son rôle de communiste. Mais vous, monsieur Chartier, quel rôle jouez-vous ?

Je vais vous le dire, car je vous ai entendu à cette tribune dans la discussion générale. J’ai constaté que vous n’aviez strictement rien à nous proposer. Quelle était la structure de votre intervention ? Vous avez commencé par nous lire, parce que vous n’aviez rien à nous dire, le texte des deux projets de loi en discussion aujourd’hui !

Ensuite, vous vous êtes lancé dans des digressions tout à fait passionnantes certes, mais qui ne se rapportaient nullement au sujet . Quand il s’est agi de faire des propositions, vous vous êtes tu !

Pour ma part, je fais une proposition simple qui semble recueillir un large accord si j’en juge par le grand nombre d’interventions en faveur d’un retour au texte initial du Gouvernement. Je vous invite donc à voter notre amendement qui tend à revenir au texte original du Gouvernement et nous donnerons ainsi satisfaction à la quasi-totalité des orateurs.

M. Bruno Le Roux. C’est logique !

M. Jacques Brunhes. M. Le Roux vient de dire à l’instant que le groupe socialiste était favorable au retour au texte initial. J’ai entendu M. Warsmann, M. Giscard d’Estaing souhaiter la même chose. Bref, tous les orateurs, à l’exception de M. Chartier !

L’épreuve est là : votez !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Il est incontestable que cet amendement nous ramène au texte présenté au Sénat, nous en sommes d’accord. Mais il faudrait aller jusqu’au bout du raisonnement.

Pourquoi la commission des lois de la Haute assemblée a-t-elle adopté l’amendement proposant que le mandat des sénateurs renouvelables en septembre 2013 soit soumis à renouvellement en septembre 2014 ? Parce que dès lors que nous reportons les élections municipales à 2008 – et tout le monde sait que les élections municipales se tiennent tous les six ans – nous arrivons à 2014. Et le Conseil constitutionnel impose que l’élection sénatoriale soit le fait d’un corps électoral renouvelé. Or 95 % du corps électoral des sénateurs sont issus des conseils municipaux. Le raisonnement du Sénat est donc techniquement imparable, même si pour certains, il est politiquement incorrect.

Il faut aller jusqu’au bout, monsieur Brunhes et accepter de dire à tous vos maires auxquels vous tenez beaucoup, puisque vous ne voulez pas faire coïncider les élections nationales avec les élections municipales, qu’une année est nécessaire afin de permettre d’avoir des campagnes bien différenciées, et de ce point de vue, vous avez raison.

Dans ces conditions, ayez le courage de sous-amender votre amendement en proposant que le mandat des conseillers municipaux soit ramené à cinq ans. À ce moment-là, le renouvellement des conseillers municipaux aurait lieu en mars 2013 et vous n’auriez pas à changer la date des élections sénatoriales à l’automne 2013. Il faut être conséquent. Si vous voulez porter cette proposition, cela suppose pour le moins que tous les groupes se réunissent ! Mais je ne crains pas grand-chose.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Une fois pour toutes, merci pour les hommages venus de tous les bancs au texte du Gouvernement. Ses auteurs n’imaginaient pas avoir atteint un tel degré de perfection !

Sur le point très précis de votre amendement, monsieur Brunhes, vous proposez en effet de revenir au texte initial du Gouvernement. Mais je ne vais pas me contredire par rapport aux propos que j’ai tenus au Sénat : j’ai déclaré que la proposition sénatoriale ne remettait pas en cause l’équilibre général du projet de loi. C’est pourquoi je demande le rejet de votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes.


M. Jacques Brunhes
. Monsieur le ministre, le reproche que je vous ai fait tout à l’heure à la tribune, je le réitère. Avec une majorité telle que la vôtre, un gouvernement peut être très persuasif pour faire passer des textes : il sait rassembler et se montrer ferme, lorsqu’il y a des dissensions au sein du groupe. Nous regrettons très vivement que vous n’ayez pas su prendre vos responsabilités vis-à-vis des sénateurs, car un problème de fond se pose, comme M. Warsmann l’a souligné à la tribune : depuis la loi de décentralisation, nous sommes à la merci d’un diktat du Sénat. Nous arrivons aujourd’hui à la situation que le rapporteur pour avis de la loi sur la décentralisation indiquait : le Sénat, élu au suffrage indirect, prévaut sur l’Assemblée nationale, élue au suffrage direct. Ce n’est pas acceptable. Vous auriez dû être beaucoup plus directif à l’égard de la majorité au Sénat. Nous regrettons beaucoup qu’il n’en ait pas été ainsi !

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Au risque de mettre mal à l’aise le ministre, je voudrais défendre le texte initial du Gouvernement, dont le rapporteur nous a dit qu’il n’était en quelque sorte ni fait ni à faire. Nous ne nous accordions pas sur les délais qu’il proposait, mais au moins s’en tenait-il à modifier les dates du calendrier de 2007, se bornant à répondre aux recommandations du Conseil constitutionnel en la matière. Les modifications que lui ont apportées par la suite les sénateurs sont absolument scandaleuses, d’un point de vue constitutionnel, eu égard aux objectifs qui doivent être fixés à cette réforme, comme d’un point de vue démocratique. Le fait que les sénateurs nous privent de la capacité même de dire notre désaccord, en nous menaçant de bloquer la réforme, n’est pas acceptable.

Nous n’avons qu’une solution pour sortir de là : c’est de montrer ce soir que nous serons demain respectueux de l’intérêt général, en votant en faveur d’un retour au texte du Gouvernement. Nous acceptons donc de nous rallier à l’amendement n° 6, s’il parvient à faire l’unanimité dans notre assemblée, même si ce n’est pas la proposition que nous voulions privilégier au départ.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. Je suis saisi de deux amendements de suppression, nos 5 et 7.

La parole est à M. Bernard Derosier, pour soutenir l’amendement n° 5.

M. Bernard Derosier. L’Assemblée vient d’adopter l’article 1er, et nous pressentons que, sur l’article 2, nous risquons également de perdre la bataille. Reste, monsieur le ministre, que vous avez une bien curieuse de l’équilibre, puisque vous avez déclaré, en donnant votre avis sur les amendements précédents, que le texte adopté par le Sénat ne modifiait pas l’équilibre recherché par le Gouvernement. Il me semble au contraire, comme Bruno Le Roux l’a montré, que vous êtes en complet déséquilibre et si vous voulez éviter de tomber, mieux vaut donner un avis favorable au présent amendement.

Ou alors faut-il s’inscrire dans la logique M. Chartier, qui nous invite à faire un renvoi d’ascenseur, au prétexte qu’en 1985, le Sénat nous aurait permis d’instaurer la proportionnelle, par la suite rapidement mise à bas par la droite, de retour aux affaires. Mais ce qu’oublie notre collègue, c’est qu’en 1985, la proportionnelle faisait partie des engagements qu’avaient pris, devant la France et les Français, le Président de la République et la majorité élus au suffrage direct. On aurait alors mal compris que les Sénateurs s’opposent à la volonté du suffrage universel. Aujourd’hui, nous sommes devant une affaire d’opportunité. Nous voulions simplifier le calendrier électoral de l’année 2007. Les Sénateurs, eux, se sont servi de l’occasion qui leur était offerte pour nous imposer un déroulement de carrière qui les concerne eux seuls. C’est cela qui est intolérable, d’un point de vue moral et d’un point de vue constitutionnel.

Tout à l’heure, le rapporteur s’en prenait à ce pauvre M. Warsmann, qui a fait référence à M. Bonnet et au coup d’État du prince-président Louis-Napoléon Bonaparte. Dans un de ses livres de mémoires, le général de Gaulle a écrit : « Un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir. » Prenez garde, chers collègues, à ne pas balayer l’histoire d’un revers de main. On sait comment s’est terminée l’action politique de Louis-Napoléon Bonaparte, et je ne voudrais pas que les sénateurs subissent le même sort, en nous imposant ce régime semi-dictatorial de dix années de mandat.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Avis défavorable, pour des raisons de cohérence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Derosier, vos conseils en matière d’équilibre me paraissent des plus originaux alors que le groupe socialiste de l’Assemblée prend des positions totalement différentes du groupe socialiste du Sénat. Vos leçons d’équilibre, vous pouvez les garder pour vous !

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Monsieur le président, afin de consulter mon groupe et d’entrer en relation avec mes collègues du Sénat, je demande une suspension de séance de deux minutes.

M. le président. Avant de vous l’accorder, je donne la parole à M. Jacques Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Monsieur le président, même si mon amendement est identique à l’amendement n° 5, j’aimerais le défendre.

Aux membres de la majorité, qui approuvent le texte du Sénat, je voudrais dire qu’à partir du moment où nous donnons la primauté, dans l’examen des textes législatifs, quelle que soit leur nature, à la chambre qui n’est pas élue au suffrage universel direct, nous allons à l’encontre du système bicaméral tel qu’il est conçu dans notre pays depuis 1946.

Je vous rappelle encore que lors de l’examen du projet de loi sur la décentralisation, son rapporteur pour avis déclarait : « Ce texte est loin d’être sans portée, car il risque de limiter le droit d’amendement du Gouvernement, voire des députés ». Eh bien, chers collègues de l’UMP, vous venez d’accepter le limiter le droit d’amendement des députés. Vous vous êtes soumis au diktat du Sénat, vous avez accepté le chantage institutionnel à la question préalable, ce qui est particulièrement grave pour l’avenir.

C’est la raison pour laquelle nous présentons cet amendement de suppression pour revenir à un peu de cohérence. Mais c’est bien l’amendement de retour au texte du Gouvernement qui aurait dû être voté. L’Assemblée est en train se lier les poings et nous ne pouvons que le regretter !

M. Bruno Le Roux. Monsieur le président, je retire ma demande de suspension de séance !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 5 et 7.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste.

M. Bruno Le Roux. Ce qui se passe ce soir est absolument scandaleux. Nous nous sommes montrés incapables d’élever la voix pour défendre une position commune, lisible non seulement par l’opinion publique, mais aussi par le Sénat ou le Conseil constitutionnel, par tous ceux qui observent le fonctionnement de notre assemblée, alors que nous vous donnions, monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, l’occasion de sortir de cet hémicycle avec un texte voté à l’unanimité. Vous ne l’avez pas saisie. Pourtant, nous nous accordions tous sur la nécessité de remanier le calendrier de 2007.

Mais, je le dis clairement, ce que se sont octroyé les sénateurs dont le mandat n’est pas renouvelable en 2007 est inacceptable. Nous voterons contre ce projet de loi organique en espérant que les démocrates sauront voir que notre assemblée n’a pas su se faire respecter. J’espère que d’autres seront comptables de ce respect dans les prochains jours.

M. le président. Pour le groupe communiste, la parole est à M. Jacques Brunhes.

M. Jacques Brunhes. À la tribune, les députés UMP, hormis un ou deux, n’ont pas eu de mots assez forts pour critiquer ce projet de loi. Je pense en particulier à M. Pandraud en commission, à M. Warsmann ou à M. Giscard d’Estaing. Tous ont affirmé que le diktat de la Haute assemblée était inacceptable. Or, le groupe auquel ils appartiennent s’apprête à s’incliner, pour ne pas dire se coucher, devant le coup de force du Sénat. C’est la deuxième ou troisième fois que, dans cet hémicycle, on donne la prééminence à la haute assemblée et qu’on accepte qu’elle nous impose ses vues, ce qui est particulièrement grave pour l’avenir et particulièrement dangereux pour la démocratie. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre ce projet de loi organique.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique.

(L'ensemble du projet de loi organique est adopté.)


mandat des conseillers municipaux

M. le président. J’appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi ordinaire relatif au mandat des conseillers municipaux.

Article 1er

M. le président. Sur l’article 1er, je suis saisi d’un amendement n° 13 rectifié.

La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le soutenir.

M. Bruno Le Roux. Puisque nous souhaitons que les élections locales aient lieu avant les élections sénatoriales, nous maintenons cet amendement. Les premières auraient lieu alors plus d’une année avant les secondes, ce qui correspondrait à un calendrier cohérent. Maintenant qu’il s’agit d’un projet de loi ordinaire, le groupe UMP va pouvoir revenir à la raison.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable car, en reportant les élections municipales trois mois après les législatives, cet amendement ne résout pas la difficulté liée à la lassitude des électeurs. En outre, il poserait des problèmes techniques réels, notamment aux petites communes, et il contraindrait les candidats à repartir en campagne, trois mois après deux campagnes. Enfin, le report des élections municipales d’une année paraît tout à fait raisonnable au regard du vœu du Conseil constitutionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Après l’article 1er

M. le président. Nous en venons à plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 1er.

Je suis saisi d’un amendement n° 11.

La parole est à M. Bernard Derosier, pour le soutenir.

M. Bernard Derosier. Il est vrai, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, que cet amendement n’a pas de lien direct avec le projet de loi, mais ce dernier concernant tout de même les assemblées départementales, il m’a semblé opportun de rappeler au Gouvernement et à mes collègues de la majorité que la loi de 1990, à laquelle il a été fait allusion tout à l’heure, avait calqué le rythme de l’assemblée départementale sur celui des autres assemblées locales, qui est de six ans. Cet amendement a donc pour objet de prévoir que les conseillers généraux sont élus pour six ans, et non renouvelés par moitié tous les trois ans.

Il est du reste souhaitable que, au moment où les exécutifs départementaux doivent assumer des responsabilités de plus en plus importantes, ils puissent disposer de plus de trois ans pour organiser la vie du département. Tous les responsables d’exécutifs départementaux souhaitent un tel rythme. En acceptant cet amendement, vous enverriez donc un signal fort en direction de ces collectivités territoriales qui se voient transférer d’importantes compétences.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, car nous parlons ce soir d’un calendrier, que tous les acteurs de la démocratie attendent. Dès lors, je ne vois pas comment nous pourrions intégrer dans le texte des dispositions qui consistent à rétablir la loi Joxe, que nous avons abrogée en 1994.

M. Bernard Derosier. Vous avez eu tort !

M. Francis Delattre, rapporteur. Vos arguments sont sûrement partagés par un certain nombre d’entre nous, monsieur Derosier, mais le texte sur lequel devraient déboucher les travaux de la commission présidée par M. Chartier fournirait un cadre plus adapté à l’examen de votre proposition. J’ajoute qu’il serait pour le moins maladroit d’engager une réforme aussi importante sans consulter les organisations représentatives des conseils généraux.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Depuis la loi de 1871, monsieur Derosier, le renouvellement triennal a toujours prévalu, même si l’on a tenté de revenir sur cette règle entre 1990 et 1994. Lorsque je me suis rendu devant l’assemblée des départements de France, lors du congrès de la Drôme – puisque vous préférez qu’on le baptise ainsi, plutôt que congrès de Valence (Sourire.) –, j’ai bien entendu la préoccupation qui a été exprimée. Toutefois, je ne suis pas sûr que cette proposition corresponde au souhait de la majorité des conseillers généraux. À titre personnel, je n’y suis pas hostile, mais elle doit faire l’objet d’une consultation plus large. Enfin, il s’agit, ce soir, de proposer un nouveau calendrier, et non de remettre en cause l’ensemble du système électoral.

Je retiens donc cette proposition qui a été faite par l’une des associations d’élus départementaux, mais ce n’est ni le lieu ni le moment d’en débattre. C’est pourquoi je demande le rejet de votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Nous pouvons tout de même en débattre, monsieur le ministre. Il y a le calendrier des joueurs du Stade français ; peut-être pourrions-nous essayer de rendre celui des sénateurs un peu plus intéressant. (Sourires.) D’autant que nous ne discutons plus du projet de loi organique, qui leur a permis de s’octroyer des prébendes exorbitantes en prorogeant leur mandat, mais d’un projet de loi ordinaire, pour lequel nous ne sommes pas tenus d’émettre un vote conforme.

Je puis vous assurer que cet amendement recueille l’assentiment de la majorité des conseils généraux et de cette assemblée. Vous pourriez donc vous en remettre à la sagesse de l’Assemblée, car il faciliterait la lisibilité des élections cantonales pour nos concitoyens.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 2.

La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le soutenir.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Si j’ai déposé plusieurs amendements concernant la parité, c’est parce que l’observatoire de la parité a publié, en mars 2005, un rapport dans lequel figure un bilan de l’application des lois de 2000 lors des dernières élections municipales, cantonales, législatives, européennes et régionales et que le moment me semblait venu de proposer de nouvelles avancées dans le cadre de la prochaine série d’élections.

L’amendement n° 2, qui m’a été suggéré par l’association des maires ruraux, tend à intégrer, dans le mode de scrutin municipal des communes de moins de 3 500 habitants, l’obligation d’être candidat pour pouvoir être élu, celle d’avoir été candidat au premier tour pour l’être au second et celle d’assurer une représentation féminine sur chaque liste présentée. Je souhaiterais que l’Assemblée prenne en compte la nécessité de réaliser de nouvelles avancées en matière de parité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable à l’ensemble des amendements déposés par Mme Zimmermann, non qu’elle conteste leur pertinence, mais parce que le texte que nous examinons a pour objet de fixer un nouveau calendrier électoral. Il est vrai que, à la différence du projet de loi organique, celui-ci pourrait être amendé, mais si nous nous engageons dans une navette avec le Sénat, l’adoption de ce texte prendra plus de temps.

La meilleure solution consiste donc, selon moi, à se tourner vers M. Chartier, qui s’est attaqué à la modernisation de notre vie politique…

M. Jean-Christophe Lagarde. Le texte ne viendra pas en débat d’ici à la fin de la mandature !

M. Francis Delattre, rapporteur. Je n’en suis pas certain : le sujet est en cours de discussion. Quoi qu’il en soit, les propositions de Mme Zimmermann auraient davantage leur place dans un tel texte, plutôt que dans ce projet de loi relatif au calendrier électoral qui, encore une fois, est attendu et avec lequel il faut en finir.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Mme Zimmermann, vous savez combien le Gouvernement est attentif à vos préoccupations. Cependant, la loi qui s’applique aux petites communes est celle de 1884, qui a pris le parti d’une absence de formalisme afin de donner une plus grande liberté de choix aux électeurs. Au cours des dernières années, elle a d’ailleurs permis de pallier l’insuffisance de candidats.

Faut-il revenir sur ce texte ? Le Gouvernement souhaiterait alléger les formalités et simplifier les normes administratives. Or vous proposez d’en ajouter de nouvelles, et ce pour 34 000 communes. Je crains donc que, sur ce point, nous ne puissions pas vous suivre, madame Zimmermann. Néanmoins, je suis prêt à en discuter avec vous. En tout état de cause, notre préoccupation, ce soir, est uniquement calendaire, comme le rapporteur l’a indiqué à juste titre.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Certes, ce texte concerne le calendrier, mais il porte aussi sur les élections sénatoriales, municipales et cantonales, et ces amendements ne sont donc absolument pas des cavaliers. Je comprends très bien votre souci, mais il faudrait que le Gouvernement prenne des engagements très fermes sur la parité en vue des prochaines échéances électorales.

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Cet amendement ne concerne pas seulement la parité, mais aussi la sincérité du scrutin dans les petites communes. Soit on nous dit que la disposition proposée pourra être intégrée dans un texte qui sera examiné dans les prochains mois, et l’amendement peut être retiré ; soit il n’y aura pas de texte dans les prochains mois, et il convient d’adopter cet amendement aujourd’hui.

En tout état de cause, le groupe socialiste votera tous les amendements qui permettront de faire avancer la parité, même s’ils ne sont pas issus de notre groupe, sauf en ce qui concerne le mode de scrutin cantonal, sur lequel nous ne sommes pas d’accord.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Je prends naturellement l’engagement, madame Zimmermann, que cette proposition sera étudiée.

M. le président. Retirez-vous l’amendement n° 2, madame Zimmermann ?

Mme Marie-Jo Zimmermann. Oui.

M. Bruno Le Roux. Je le reprends, car c’est un bon amendement !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2, repris par M. Bruno Le Roux.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 1.

La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le soutenir.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Là encore, on va m’objecter que mon amendement, qui concerne les exécutifs municipaux, ne traite pas du calendrier, mais il ne s’agit pas non plus d’un cavalier. À l'issue des élections municipales de 2001, on s’est aperçu que si, grâce aux lois de 2000, les femmes représentent plus de 47 % des élus municipaux des communes de plus de 3 500 habitants, elles ne représentent que 35 % des adjoints. Je propose donc que soit respectée une stricte alternance homme-femme dans les exécutifs municipaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Pour les raisons que j’ai déjà indiquées, la commission souhaite que l’on trouve un véhicule législatif plus approprié que le projet de loi dont nous débattons. Cela dit, la parité a fait un bond fantastique dans les communes de plus de 3 500 habitants. Nous sommes peut-être encore en période de réglage, mais il me semble que nous arriverons progressivement à la parité dans les exécutifs municipaux sans qu’il soit forcément nécessaire de légiférer à nouveau. En tout cas, dans mon département, les objectifs sont déjà largement atteints, et je parle sous le contrôle de M. Chartier.


Par ailleurs, je n’ai jamais dit que cette proposition constituait un cavalier. Nous pouvons tout à fait en discuter et avoir à ce sujet un échange intéressant avec M. le ministre. On peut se demander si le Parlement disposera dans l’année qui vient du temps nécessaire pour travailler sur ce thème, mais si vous estimez que la cause que vous défendez l’exige, il me semble qu’il devrait y avoir un large consensus parmi nous pour faire en sorte que la législation soit encore un peu plus précise sur ce point.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Je rejoins ce que vient de dire le rapporteur. La règle actuelle est l’élection au scrutin majoritaire, uninominal ou plurinominal. Ce que vous proposez mériterait d’être approfondi, madame Zimmermann, mais un certain nombre de maires ici présents pensent certainement que l’adoption immédiate de cette mesure aurait pour effet de mettre un peu d’ambiance dans les conseils municipaux – je constate d’ailleurs que le maire de Bordeaux m’approuve (Sourires.)

Sur la forme, madame la députée, je pense que ce n’est ni le lieu ni l’heure d’évoquer ce sujet, qui devrait plutôt être abordé à l’occasion d’une refonte d’ensemble du droit électoral. Si je suis tout à fait disposé à y réfléchir, dans l’immédiat, je vous invite à retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Si la loi n’avait pas imposé l’obligation de parité lors des élections municipales de 2001, je suis convaincue que les femmes ne représenteraient pas 47,5 % des élus municipaux. Avant cette loi, la bonne volonté n’avait jamais suffi.

En me fondant sur le travail d’enquête effectué par l’observatoire de la parité, je crois pouvoir affirmer que si l’on ne légifère pas sur les exécutifs municipaux, dans de nombreuses villes, on ne parviendra pas en 2008 à une stricte parité hommes-femmes.

Si la loi aboutit à une situation satisfaisante, je ne suis pas opposée à ce que son application soit limitée dans le temps. En tout état de cause, je suis convaincue qu’une telle loi est nécessaire, notamment pour les exécutifs municipaux, mais aussi au niveau des élections régionales.

Vous affirmez, monsieur le rapporteur, que la situation progresse régulièrement et qu’il suffit d’attendre que l’objectif de la parité soit atteint. Je vous rappelle que c’est loin d’être le cas en ce qui concerne les élections régionales, alors que le système était enclenché et que le Gouvernement actuel avait imposé par la loi une stricte parité sur les listes. Et soyons francs : il y a tout lieu de penser que si la droite avait été majoritaire, elle n’aurait pas mieux fait. Je ne fais pas partie de ceux qui réclament des lois à tout propos, mais en l’occurrence il faut en passer par là pour faire avancer la cause de la parité.

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Je m’excuse à l’avance de détonner dans ce qui semble être un consensus – à l’exception des désaccords sur la forme –, mais prenons garde à ne pas tomber dans l’excès de lois en voulant régir à tout prix la façon dont fonctionnent les assemblées locales élues par nos citoyens. Si je trouve légitime que l’on ait voté une loi pour que les citoyens aient le choix, je trouve en revanche illégitime que l’on retire aux élus le droit de s’organiser comme ils le souhaitent.

D’ailleurs, dans l’exposé de vos motifs, madame Zimmermann, vous faites la démonstration qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une loi, puisque vous avez cité les chiffres de 47,5 % et 35 % de femmes élues dans les exécutifs municipaux. C’est loin d’être négligeable, et en tout état de cause bien plus satisfaisant que la situation dans notre assemblée, où la présence féminine est ridiculement faible en raison du mode de scrutin. On constate dans les exécutifs municipaux une présence des femmes en forte progression si l’on considère qu’un grand nombre d’élus sont des sortants, ce qui me fait dire qu’une loi n’est pas nécessaire.

Outre cet amendement portant sur les communes, vous en avez déposé un autre en matière d’intercommunalité. Dès lors, pourquoi ne pas en faire de même pour les CCAS ou pour les syndicats intercommunaux ? Cela n’a plus de sens ! À un moment donné, il faut tout de même que les élus puissent assumer leurs responsabilités.

D’ailleurs, pourquoi prôner une parité stricte ? Puisqu’il y a 52 % de femmes et 48 % d’hommes, pourquoi n’y aurait-il pas 52 % de femmes maires adjoints ? enfin, on peut pousser le raisonnement encore plus loin, et s’interroger sur la sous-représentation de certaines tranches d’âge…

Mme Marie-Jo Zimmermann. Allons !

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est un fait : au sein des élus municipaux, les moins de quarante ans représentent environ 7 %.

S’il était nécessaire que l’on bouscule les partis, les appareils politiques et les hommes qui les dirigent depuis toujours, il me semble qu’à vouloir aller trop loin, on risque de bloquer le fonctionnement des instances. Les femmes qui sont arrivées au sein de mon conseil municipal y font leur place chaque jour. Et quand bien même un maire serait assez machiste pour décréter qu’il ne veut pas d’une femme comme maire adjoint, il ne pourrait aller contre 47 % du conseil municipal. À l’inverse, un excès de lois finirait par avoir raison des bonnes intentions que nous avions au départ.

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. En ce qui nous concerne, nous allons soutenir l’amendement de Mme Zimmermann, car nous estimons que cette proposition répond à un véritable besoin. Si l’obligation de parité sur les listes au scrutin proportionnel est respectée, dans le même temps on ordonne les candidatures selon des critères bien différents, en invoquant tantôt le poids du passé, tantôt les impératifs commandant d’attribuer les postes à responsabilité à certaines personnes plutôt qu’à d’autres. Ce faisant, on ne respecte pas l’esprit de la loi sur la parité, qui était d’opérer un changement brusque des comportements.

L’amendement proposé par Mme Zimmermann peut se concevoir soit comme la réparation d’un oubli de la loi de 2000, soit comme une seconde étape, qu’il convient aujourd’hui d’aborder.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Cessons de mettre sur le même plan la parité et la question de l’âge ! Nous parlons des hommes et des femmes…

M. Jean-Christophe Lagarde. Des jeunes et des vieux !

Mme Marie-Jo Zimmermann. Cela n’a rien à voir, ce n’est pas le même débat ! Et je m’inscrirai toujours en faux contre cette confusion !

M. Jean-Christophe Lagarde. Le fait est que les jeunes sont peu représentés au sein des assemblées !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 3 rectifié.

La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le soutenir.

Mme Marie-Jo Zimmermann. L’amendement n° 3 rectifié vise à instaurer une obligation de parité au sein des structures intercommunales. Les intercommunalités étant les endroits où se décident les grands projets pour les agglomérations, je souhaite que les femmes y soient davantage représentées, de façon à refléter la représentation des conseils municipaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Mme Zimmermann évoque une difficulté réelle, mais pour ma part je considère que la proportion de femmes dans les communautés d’agglomération va se rapprocher progressivement de celle des conseils municipaux. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Puisque vous m’interpellez, chers collègues socialistes, je ferai remarquer que les exécutifs qui me semblent le moins respecter la parité sont les exécutifs régionaux. Or, vous en dirigez vingt sur vingt et un !

M. Bruno Le Roux. Je veux bien sous-amender la proposition de Mme Zimmermann sur les exécutifs régionaux !

M. Francis Delattre, rapporteur. Vous qui avez des responsabilités importantes au parti socialiste, vous suivez les élus ! Je vous en prie, sortons du « faites ce que je dis, pas ce que je fais ».

Nous sommes d’accord sur les objectifs à atteindre, mais est-il vraiment nécessaire de légiférer sur les moindres détails ? Il me semble qu’il vaudrait mieux laisser le temps faire son œuvre. D’ailleurs – et tant pis si je choque un certain nombre d’entre vous –, tout le monde sait que la vraie réforme pour les communautés d’agglomération sera celle de l’élection au suffrage universel, qui réglera bien des problèmes.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Mais non ! C’est idiot !

M. Francis Delattre, rapporteur. Ce n’est pas idiot du tout, et nous en reparlerons dans quelques années.

M. le président. Tenons-nous en, pour le moment, à l’objet de l’amendement.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. L’amendement de Mme Zimmermann pose effectivement plusieurs questions supplémentaires, en plus de celle de la parité : non seulement celle du scrutin majoritaire ou proportionnel, mais aussi, par voie de conséquence, celle de l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires.

M. Jean-Christophe Lagarde. Et des CCAS ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Il me semble qu’il est préférable de franchir les étapes les unes après les autres, plutôt que de multiplier les questions. Qui trop embrasse mal étreint. Je vous serais reconnaissant de ne pas ouvrir la boîte de Pandore et de retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Si je soutiens ces amendements, monsieur le rapporteur, c’est qu’il est aussi difficile de mettre en œuvre l’objectif de parité dans mon parti que dans le vôtre, que ce soit au niveau des exécutifs intercommunaux ou régionaux. La règle nous aidera à le faire plus rapidement, notamment au sein des vingt conseils régionaux que nous contrôlons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 2

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 14 rectifié.

La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le soutenir.

M. Bruno Le Roux. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 9.

La parole est à M. Bernard Derosier, pour le soutenir.

M. Bernard Derosier. Je suis certain que l’amendement n° 9 rectifié va dans le sens de ce que souhaitent les élus qui s’intéressent à la vie départementale. Les députés ne sauraient être indifférents à la proposition qui leur est faite de mettre fin à cette anomalie de plus de deux siècles, qui consiste à appeler « conseils généraux » des assemblées qui n’ont rien à voir avec les généraux – pas plus, d’ailleurs, que les circonscriptions n’ont trait aux cantonniers. Nous proposons de remplacer les mots « conseils généraux » et « conseillers généraux » respectivement par les mots « conseils départementaux » et « conseillers départementaux », ce qui aura plus de sens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?


M. Francis Delattre
,
rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement tout en reconnaissant le bien-fondé de la démarche.

M. Bruno Le Roux. Vous l’avez repoussé parce que les sénateurs n’en veulent pas !

M. Francis Delattre, rapporteur. Chacun sait ici qu’il y a des précédents. Une commission mixte paritaire a ainsi échoué parce que les sénateurs n’ont pas voulu renoncer à leurs « étoiles ».

Tous ici nous reconnaissons qu’il serait beaucoup plus compréhensible pour le grand public de parler de conseil municipal, de conseil départemental et de conseil régional.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Alors ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Mais il faut d’abord en terminer avec le calendrier électoral. Or si nous nous engageons dans des négociations avec le Sénat, la CMP risque de ne pas aboutir et nous nous ferons battre d’une voix, comme c’est déjà arrivé, sous l’égide d’un gouvernement socialiste d’ailleurs. Cette action ne serait pas efficace.

J’ajoute que, même si nous admettons tous que ce changement de dénomination serait plus compréhensible, plus pédagogique, un certain nombre de présidents de conseils généraux, eux, ne sont pas d’accord. C’est la diversité française.

Un texte sera forcément présenté prochainement sur la modernisation de la vie politique dans notre pays, n’est-ce pas, monsieur Chartier ? Il sera alors opportun d’y inclure ce type de modifications. Pour l’heure, je vous en conjure, terminons l’examen de ce texte sur le calendrier. Les élus locaux, les 36 000 conseils municipaux ont besoin de le connaître pour programmer leurs investissements. Évitons les navettes avec le Sénat (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) s’agissant d’une question qui va, on le sait, susciter a priori leur hostilité.

M. Jean-Luc Warsmann. C’est insultant pour les électeurs !

M. Francis Delattre, rapporteur. Mais non !

M. Bruno Le Roux. C’était donc bien une histoire de sénateurs !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur Derosier, voilà une vingtaine d’années, une enquête de la fondation nationale des sciences politiques avait fait apparaître que 3 % des gens interrogés croyaient que les élections cantonales servaient à élire les cantonniers. C’est dire si leur nature mérite d’être précisée ! Votre proposition est donc cohérente. Mais recueille-t-elle l’approbation d’une majorité des présidents de conseils généraux ? Je n’en sais rien.

M. Bernard Derosier. Oui !

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Merci de cette information, surtout si elle a un caractère scientifique. (Sourires.) Cette proposition recueille-t-elle l’approbation d’une majorité des conseillers généraux ? Je pense que vous n’en savez rien non plus. Si cette disposition était votée, elle entraînerait de surcroît des modifications assez importantes dans les dénominations de plusieurs structures. Il existe déjà, en effet, toute une série d’appellations départementales – conseils départementaux d’hygiène, de prévention de la délinquance, etc.

Certes, je suis plutôt favorable à cette idée, mais le moment n’est pas opportun pour en discuter. Il me semble préférable d’attendre un texte plus adapté. M. le rapporteur a évoqué les réticences du Sénat. La compréhension dont vous avez fait preuve à son endroit donnera peut-être lieu à réciprocité… (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. La République nous permet parfois de vivre des moments extraordinaires : nous sommes tous d’accord, mais il ne faut pas agir. C’est regrettable. Puisque nous ne sommes pas absolument certains qu’un texte sera présenté sur le sujet, nous pourrions d’ores et déjà voter cet amendement. Lorsque, ici ou dans ma circonscription, je reçois mes concitoyens, et en particulier les plus jeunes, je parle non pas de conseillers généraux mais de conseillers départementaux car personne ne sait plus ce que sont les conseillers généraux, en particulier dans les zones urbaines. Et j’imagine que je ne suis pas le seul dans cet hémicycle à tenir un pareil discours.

Vous craignez une CMP, dites-vous, mais dans ce cas, pourquoi présentez-vous un texte pour simple avis conforme quand l’article 49-3 nous aurait évité de perdre une soirée ? La disposition proposée est simple et pédagogique et recueille l’adhésion de tous ici. Certes, il faudra revoir certaines appellations départementales. Mais ce n’est pas déterminant. S’il faut voter contre cet amendement pour attendre qu’il soit présenté à nouveau dans le cadre d’un autre texte – dont on n’est pas sûr qu’il viendra – alors que l’appellation des conseils généraux est inchangée depuis deux siècles, où allons-nous ? La dénomination « conseil général » est peut-être comprise dans les zones rurales. Il en va tout autrement dans les zones urbaines où l’on ne sait déjà pas à quoi sert cette instance. Si l’on ajoute que le conseiller général est le représentant à l’assemblée du département et qu’il est élu à l’issue des élections cantonales, on mesure à quel degré de confusion on peut arriver. On voudrait empêcher les électeurs de comprendre comment fonctionne la République qu’on ne s’y prendrait pas autrement.

Le vote de cet amendement ne va pas engendrer une crise politique ou législative majeure. Nous nous honorerions de dire aux Français que, ce soir, nous n’avons pas seulement prolongé le mandat des uns ou des autres, mais que nous avons contribué à clarifier nos institutions.

M. le président. La parole est à M. François Dosé.

M. François Dosé. Je comprends M. le rapporteur et M. le ministre. La majorité des conseillers généraux – j’en fus un – apprécie peut-être cette dénomination. Mais, telle n’est pas la question.

M. Jean-Christophe Lagarde. Ce n’est pas à eux de décider !

M. François Dosé. Cette argumentation, pour être juste, n’en est pas moins décalée. Il convient surtout de comprendre de qui l’on parle, surtout dans le cadre de la décentralisation.

M. Jean-Christophe Lagarde. Exactement !

M. François Dosé. Nous nous adressons non pas aux conseillers généraux, mais à nos concitoyens, qui se détournent de plus en plus de la politique. Il ne s’agit pas ici de flatter les conseillers généraux, que j’estime beaucoup au demeurant. Nous voulons légiférer pour les Françaises et les Français, et notamment les plus jeunes d’entre eux, qui veulent comprendre l’organisation administrative et la politique. Cet amendement, que j’appelle à voter, apportera une clarification nécessaire.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. Nous déciderions donc, en dix minutes, de changer le nom des conseils généraux et, par voie de conséquence, d’autres structures, alors qu’il est inchangé depuis deux siècles ? Certes, j’entends bien les arguments qui ont été avancés et il s’agit là d’une mesure intelligente. Mais combien d’amendements ont-ils été repoussés en commission parce qu’ils ne concernaient pas directement le calendrier électoral ?

M. Le Roux et M. Lagarde le savent bien, un certain nombre de réflexions ont lieu depuis plusieurs années sur la modernisation de nos institutions – sujet ô combien brûlant. Celle-ci passera-t-elle donc ce soir par un changement d’appellation ?

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Non !

M. Jérôme Chartier. Si c’est cela, la modernisation selon notre assemblée, que chacun prenne ses responsabilités ! Je me vois mal, demain, dire fièrement à mes concitoyens : « Hier soir, nous avons modernisé la République : nous avons changé l’appellation des conseils généraux en conseils départementaux ! » (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Bernard Derosier. Vous pourrez seulement leur dire que nous avons allongé d’un an le mandat des sénateurs !

M. Jean-Christophe Lagarde. Oui, en guise de modernisation, vous vous êtes bornés à prolonger le mandat des élus !

M. Jérôme Chartier. Et il faudra ensuite que j’explique à tous les conseils départementaux de mon département qu’ils devront changer de nom en quelques mois afin d’éviter toute confusion avec le conseil départemental ! Chers collègues, renvoyons donc cette excellente disposition…

M. Jean-Christophe Lagarde. A plus tard !

M. Jérôme Chartier. …au moment opportun. Vous savez d’ailleurs que j’appelle de mes vœux un texte consacré à la modernisation de nos institutions.

M. Bernard Derosier. Il faut faire le lifting de Chartier !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Jean-Pierre Grand. Je constate qu’une fois encore, l’UDF a voté avec les socialistes !

M. le président. Les députés UDF n’étaient pas les seuls à le faire, mon cher collègue.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 12.

La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le soutenir.

M. Bruno Le Roux. Je considère qu’il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 10.

La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le soutenir.

M. Bruno Le Roux. Je considère qu’il a été défendu par M. Derosier.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Après l’article 3

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 4 rectifié, portant article additionnel après l’article 3.

La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le soutenir.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Cet amendement, cosigné par cinquante-cinq collègues, vise, afin d’éviter les élections cantonales partielles – où l’abstention s’élève en moyenne à 80 % – à instituer des suppléants de sexe opposé aux conseillers généraux. Ceux-ci auront vocation à les remplacer en cas de vacance de siège pour quelque raison que ce soit. Cette mesure favoriserait en outre le développement de la parité puisque 10,9 % seulement des conseillers généraux sont des femmes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Avis défavorable. Cet amendement est certes intéressant, mais encore faudrait-il demander leur avis aux conseillers généraux. Pour l’heure, un tel dispositif ne serait pas à sa place dans ce texte dont l’objet, encore une fois, est le calendrier électoral.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Il me semble que cette proposition avait été faite par M. François Scellier. Quoi qu’il en soit, votre amendement, madame Zimmermann, entraînerait la suppression de toutes les élections cantonales partielles. Or je crois qu’on en dénombre une centaine chaque année, ce qui est beaucoup. Nous ne pouvons donc débattre de cette question dans le cadre de notre discussion, même si je comprends que vous restiez fidèle à votre engagement, en particulier concernant la parité.

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Il est possible de parvenir au résultat souhaité par Mme Zimmermann d’une façon beaucoup plus simple : l’élection au scrutin proportionnel dans toutes les assemblées. L’expérience prouve, dans d’autres pays d’Europe, que ce type de scrutin ne nécessite aucun des artifices auxquels vous songez, madame.

Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Tel n’est pas l’esprit de nos institutions !

M. Jacques Brunhes. Et les femmes sont ainsi mieux représentées. Regardez ce qui se passe avec le scrutin majoritaire dans cette assemblée ! Regardez ce qui se passe parfois au Sénat pour éviter l’élection d’une femme, notamment dans des groupes qui vous sont proches, madame Zimmermann !

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.


M. Bruno Le Roux
. Même si l’amendement de Mme Zimmermann renforce la parité, nous ne le soutiendrons pas. Il conforte en effet le mode de scrutin actuel et recèle une ambiguïté sur la notion de « vacance », car on ne sait pas à quel cas s’applique l’éventuel remplacement. Pour les mandats parlementaires, le recours à un suppléant est extrêmement limité et tout n’est pas possible en matière de démission. Nous souhaitons au contraire un mode de scrutin proportionnel. Celui-ci est tout à fait conforme à l’esprit de nos institutions en ce qu’il assure la stabilité des assemblées élues. La dernière réforme du mode de scrutin municipal nous a montré que des scrutins proportionnels pouvaient garantir la stabilité de nos assemblées. Nous ne soutiendrons donc pas cet amendement, malgré l’avancée qu’il représente en matière de parité.

M. le président. La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing.

M. Louis Giscard d'Estaing. J’ai cosigné cet amendement parce que je considère qu’il apporte des éléments de réponse dans le débat institutionnel actuel. Par exemple, sur le plan pratique, il permet de remédier au problème des cantonales partielles, comme l’a démontré Mme Zimmermann, car les taux de participation des élections cantonales partielles sont malheureusement très faibles. Nos concitoyens considèrent aujourd’hui que ce type d’élection est dépassé. Les scrutins uninominaux offrent d’autres possibilités.

Pour répondre à M. Le Roux, il existe certes deux types de scrutins uninominaux : les élections législatives et les élections cantonales, départementales ou au conseil général, comme on voudra les appeler.

M. Bernard Derosier. Et l’élection présidentielle !

M. Louis Giscard d'Estaing. Et l’élection présidentielle, bien entendu ! Mais il n’y a de suppléants que dans le cas des élections législatives. Cet amendement vise à combler ce manque. Il apporte en outre une modernisation bienvenue de nos pratiques électorales. Je souligne en effet, monsieur le ministre, que si l’article 3 permet d’allonger jusqu’en mars 2011 le mandat des conseillers généraux élus en 2004, ce problème de calendrier institutionnel se posera à nouveau lors du prochain renouvellement cantonal.

M. le président. La parole est à M. Alain Marty.

M. Alain Marty. Je vous rappelle que nous débattons ce soir d’un problème de calendrier plutôt que d’une réforme de fond.

Par ailleurs, ayant déjà siégé dans un conseil général, je persiste à penser que notre mode de scrutin actuel, sur un territoire comme le canton, permet aux populations de choisir leur candidat. Ce mode d’élection de proximité a une certaine force et je ne suis pas sûr que remettre en cause une élection directe soit une modernisation. L’élection d’un homme ou d’une femme qui correspond au mandat qui lui est confié me semble être un argument suffisant pour nous empêcher, à cette heure tardive, de modifier notre système électoral. Pour ma part, je suis attaché au mode de scrutin actuel.

En outre, si des élections partielles doivent avoir lieu, l’excès de démocratie n’a rien de nuisible. Lorsque j’ai choisi le mandat de parlementaire, cela a donné lieu à des élections cantonales partielles : je pense que c’est une bonne chose. À partir du moment où un candidat renonce à un mandat, les électeurs choisissent leur nouveau représentant, sans être obligés d’accepter quelqu’un qui a été choisi à l’avance. Sur ce point, je partage l’avis de la commission et du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article 3 bis

M. le président. Sur l’article 3 bis, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 7 et 15.

La parole est à M. Bruno Le Roux, pour soutenir l’amendement n° 7.

M. Bruno Le Roux. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes, pour soutenir l’amendement n° 15.

M. Jacques Brunhes. Cet amendement est au cœur du problème puisqu’il vise à supprimer l’allongement à dix ans du mandat sénatorial proposé par l’article 3 bis. Je souhaiterais que tous ceux qui ont protesté avec force tout à l’heure aient maintenant le courage de lever la main pour soutenir cet amendement, mais je ne suis pas sûr que nous soyons très nombreux à le voter. Si des voix fortes se sont élevées, la majorité de l’Assemblée se couche ce soir devant le diktat du Sénat !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. La commission n’a pas examiné ces amendements, mais à titre personnel j’y suis défavorable. J’ajoute que l’idée que l’Assemblée se coucherait devant le Sénat est tout à fait hors de propos !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Même avis défavorable, et je comprends l’indignation exprimée par le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 7 et 15.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3 bis.

(L’article 3 bis est adopté.)

Article 3 ter

M. le président. Je mets aux voix l’article 3 ter.

(L’article 3 ter est adopté.)

Article 4

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 8 et 16.

Je suppose que ces amendements sont défendus, puisqu’ils obéissent à la même logique.

M. Bruno Le Roux. En effet, il est défendu.

M. Jacques Brunhes. Mon amendement identique l’est également.

M. le président. La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 8 et 16.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 4.

(L’article 4 est adopté.)

Après l’article 4

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 6, portant article additionnel après l’article 4.

La parole est à M. Alain Ferry, pour le soutenir.

M. Alain Ferry. Cet amendement a pour objet de reconnaître le vote blanc comme comportement électoral à part entière, en le distinguant du vote nul. Je vous rappelle d’ailleurs qu’une proposition de loi en ce sens a déjà été adoptée par notre assemblée, mais elle ne fut jamais, hélas ! présentée au Sénat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Avis défavorable.

M. Bernard Derosier. Diktat du Sénat !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 6.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 5 rectifié.

La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le soutenir.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Delattre, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué aux collectivités territoriales. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 5 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article 5

M. le président. Je mets aux voix l’article 5.

(L’article 5 est adopté.)

Explications de vote

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Le calendrier électoral formant un tout, notre groupe, par cohérence, votera contre ce projet de loi ordinaire. Nous vous avions pourtant proposé une solution qui, tant en ce qui concerne le projet de loi organique que le projet de loi ordinaire, aurait pu être adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale et nous aurait permis de ne pas nous coucher devant le Sénat !

Nous avons vécu ce soir des heures peu agréables pour le Parlement. On a repoussé nos amendements, on nous a même empêchés d’en déposer ! J’ajoute, monsieur le ministre, que je n’ai pas entendu le Gouvernement s’engager à reconsidérer, dans les mois qui viennent, ces amendements qui auraient pu être adoptés ce soir à l’unanimité. J’ai le sentiment que ce que nous avons fait ce soir n’est pas du bon travail législatif et que notre soumission devant le Sénat, une fois de plus, laissera des traces au sein de la majorité, et ce n’est pas faute de l’avoir mise en garde ! Par cohérence, nous voterons contre ces deux projets de loi.

M. le président. La parole est à M. Jacques Brunhes.

M. Jacques Brunhes. Je le dis avec gravité : une réforme nous est imposée ce soir sous la menace d’un chantage institutionnel ! Et il ne s’agit pas d’un texte subalterne ou d’une simple mise en cohérence calendaire, mais d’un texte qui répond aux souhaits du Sénat. Et nous allons nous incliner, ou plutôt la majorité va s’incliner devant ce chantage institutionnel !

Je l’ai dit tout à l’heure, ce n’est pas anodin. C’est même choquant, car chacun d’entre vous, messieurs de la majorité, reconnaît qu’il y a une anomalie. Ce qui se passe ce soir est anormal, très dangereux pour la démocratie et inacceptable ! Nous voterons donc contre ce projet de loi. Mais je vous préviens, mes chers collègues, et vous aurez bientôt l’occasion de le vérifier, les conséquences de notre vote, ajoutées à celles des récentes lois de décentralisation qui accordent au Sénat la primauté sur l’Assemblée nationale, seront lourdes pour l’avenir de nos institutions et affaibliront le rôle de l’Assemblée nationale.

M. Lionnel Luca. C’est certain !

M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier.

M. Jérôme Chartier. Mes chers collègues, il serait malhonnête de dire que nous avons passé une grande soirée. (Exclamations.)

M. Bruno Le Roux. C’est vrai !

M. Jérôme Chartier. Nous avons choisi de rester concentrés sur l’objet même de ces projets de loi. Cependant, certaines réformes sont nécessaires, nous en sommes tous convaincus.

M. Jacques Brunhes. Parlez du texte ! Ne commencez pas à faire des digressions ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jérôme Chartier. Monsieur Brunhes, s’il vous plaît, écoutez-moi, comme nous l’avons fait lorsque vous vous exprimiez : c’est le moindre des respects ! Chacun de nous ressent le besoin d’une modernisation profonde, non pas tant des institutions de la République…

M. Bruno Le Roux. Mais du Sénat en particulier !

M. Jérôme Chartier. …– cela ferait partie d’un projet présidentiel – mais de la pratique de nos institutions.

Reconnaissons, monsieur le ministre, que tous les amendements qui ont été déposés sur ces textes étaient très intéressants, y compris certains qui n’ont pas été examinés, la commission des lois ayant estimé qu’il convenait de se concentrer sur le seul aspect calendaire de ces projets de loi.

Monsieur le ministre, afin de contenter tous les parlementaires présents ce soir, et ils sont nombreux, il vous faudra rapidement proposer un projet de loi…

M. Jacques Brunhes. Hors sujet !

M. Jérôme Chartier. …qui nous donne l’occasion d’examiner en profondeur les dispositions du code électoral et d’entreprendre leur modernisation, et cela sans attendre les prochaines échéances électorales.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

Ordre du jour
des prochaines séances

M. le président. Mercredi 7 décembre 2005, à quinze heures, première séance publique :

Questions au Gouvernement (1) ;

Discussion de la proposition de résolution, n2722, de MM Jean-Louis Debré et Philippe Houillon tendant à la création d’une commission d’enquête chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice dans l’affaire dite d’Outreau et de formuler des propositions pour éviter leur renouvellement.

Discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2005, n2700 :

Rapport, n2720, de M. Gilles Carrez, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.

À vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la première séance publique.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures trente.)