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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 23 mars 2006

181e séance de la session ordinaire 2005-2006

PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

communication relative
à l’ordre du jour

Mme la présidente. À la demande du Gouvernement, la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programme pour la recherche est retirée de l’ordre du jour d’aujourd’hui.

Lutte contre le dopage

Discussion, en deuxième lecture,
d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs (nos 2611 rectifié, 2966).

La parole est à M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

M. Jean-François Lamour, ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, j’ai l’honneur de vous présenter, en seconde lecture, le projet de loi relatif à la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage. Vous aviez adopté ce projet, à l’unanimité, le 6 avril dernier, à l’occasion d’un vote solennel. Des amendements ont été apportés au texte par les sénateurs, qui ont également fait l’objet de leur part d’un vote unanime.

Permettez-moi d’abord de vous rappeler le contexte dans lequel s’inscrit ce projet de loi.

Depuis le 23 mars 1999, date à laquelle le dispositif français de lutte contre le dopage qui est en place aujourd’hui est entré en vigueur, de profonds changements sont intervenus dans le paysage international.

L’Agence mondiale antidopage a été créée officiellement le 10 novembre 1999. Elle a la charge de coordonner les efforts accomplis par les gouvernements et le monde du sport dans la lutte contre le dopage. Elle est, par conséquent, composée à parité de représentants du mouvement olympique et de représentants des autorités gouvernementales. Elle fait l’objet d’un cofinancement des gouvernements, depuis le 1er janvier 2002.

Afin d’améliorer l’efficacité et le rôle de l’AMA, les États membres de l’UNESCO, sur proposition de la France, ont parallèlement convenu d’accroître leur coopération en la matière en mettant en œuvre, pour la première fois de l’histoire, une Convention universelle contre le dopage dans le sport. Celle-ci a été adoptée le 19 octobre dernier à l’occasion de la trente-deuxième conférence générale de l’UNESCO. Ce document permet désormais aux gouvernements d’harmoniser leur législation avec le code mondial antidopage.

La convention de l’UNESCO entrera en vigueur trente jours après qu’elle aura été ratifiée par trente pays. Pour votre information, dix États l’ont à ce jour ratifiée.

Ce projet de loi s’emploie à clarifier les responsabilités des acteurs internationaux et nationaux en s’appuyant sur un principe clair : le contrôle de la loyauté des compétitions internationales doit relever des instances internationales qui les organisent, afin d’assurer l’équité entre les sportifs de toutes les nationalités qui y participent. Le contrôle de la loyauté des compétitions nationales doit relever, quant à lui, des autorités nationales.

Permettez-moi de vous présenter, maintenant, le contenu des amendements adoptés par le Sénat.

Des ajustements sont apparus utiles pour faciliter la compréhension et la clarté des évolutions induites par ce projet. Ainsi, beaucoup de ces amendements sont d’ordre rédactionnel.

Pour ce qui concerne la future Agence française de lutte contre le dopage, les amendements apportent des précisions sur ses compétences, notamment dans la mise en œuvre des contrôles. L’AFLD pourra, par exemple, prendre l’initiative de diligenter des contrôles dans le cadre de compétitions sportives internationales, sous deux conditions cumulatives : tout d’abord, la fédération internationale ou l’AMA ne prévoit pas de diligenter des contrôles lors de cette compétition sportive ; ensuite, la fédération internationale ou l’AMA a donné son accord pour que de tels contrôles soient réalisés.

Il s’agit de se doter de tous les leviers possibles pour lutter efficacement et de manière coordonnée contre le dopage. La rédaction initiale ne donnait aucun pouvoir d’initiative dans ce domaine à l’AFLD.

La seconde modification vise à apporter des précisions quant à l’organisation interne de l’Agence française de lutte contre le dopage. Ainsi, à l’instar des autres autorités administratives indépendantes, la fonction de secrétaire général est identifiée et le cas d’une vacance possible de la présidence est prévu.

Enfin, il est apparu utile de clarifier la procédure de délivrance et d’utilisation des autorisations accordées pour usage à des fins thérapeutiques – les fameuses AUT –, compétence attribuée également à l’AFLD.

Par ailleurs, le rôle préventif des antennes médicales de prévention du dopage a été précisé. Le public cible pouvant bénéficier de leurs consultations ne sera plus limité aux personnes ayant déjà eu recours à des pratiques de dopage, mais s’étend aux personnes susceptibles d’y recourir. Le renouvellement ou la restitution de la licence est désormais lié à la production de l’attestation d’entretien entre le sportif sanctionné et un médecin d’une antenne médicale. Ces nouvelles dispositions visent à compléter le dispositif disciplinaire par des mesures de suivi sanitaire en faveur du sportif.

Enfin, le Sénat a adopté un amendement visant à confier à l’AFLD les compétences en matière de lutte contre le dopage des animaux participant à des manifestations et compétitions sportives. Cela ne concerne pas, vous l’aurez compris, les courses hippiques faisant l’objet de paris.

Mesdames et messieurs les députés, si ce projet ne concerne que les procédures disciplinaires, il va de soi que les sanctions pénales liées à la répression des trafics – tant au niveau national qu’international – doivent s’appliquer. Tel est le sens de la mise en place du groupe technique national interministériel de lutte contre les trafics et de la circulaire transmise aux parquets.

Je suis, en effet, convaincu que la lutte contre le dopage et les trafics qu’il peut générer, doit être conduite de manière globale. Les procédures pénales sont aujourd’hui, en France comme à l’étranger, à l’origine du démantèlement de filières, et elles permettent d’agir avec efficacité. Cette articulation entre les dispositifs disciplinaires et pénaux sera évoquée à l’occasion de la conférence mondiale organisée par l’Agence mondiale antidopage à Madrid, en 2007.

Dans le cadre de cette réflexion, j’ai pris l’initiative de proposer au Conseil de l’Europe de co-organiser prochainement, avec la France, un colloque sur le thème de la répression des trafics. Nous ferons ainsi le point des trafics en matière de produits dopants, et des mesures visant à développer les coopérations au niveau international seront proposées.

L’efficacité de la lutte pour la préservation des valeurs éthiques du sport et pour la protection de la santé des pratiquants nécessite une constante adaptation des dispositifs opérationnels et le renforcement de la coopération internationale. Et tel est bien, mesdames et messieurs les députés, l’objet du texte qui est soumis à votre approbation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Dominique Juillot, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs a été adopté par notre assemblée le 6 avril 2005, puis par le Sénat le 19 octobre 2005.

Lors de son examen par le Sénat, le projet a fait l’objet d’un certain nombre de modifications, principalement à l’initiative de la commission des affaires culturelles. Ainsi, sur les vingt-sept articles que compte désormais le texte, seize ont fait l’objet d’un vote conforme par les deux assemblées et onze sont toujours en navette, dont quatre articles nouveaux, introduits par la Haute assemblée.

Les modifications apportées par le Sénat obéissent aux motivations suivantes : mieux définir le fonctionnement de l’Agence ; clarifier la possibilité pour l’Agence de diligenter des contrôles à l’occasion de compétitions internationales ; améliorer l’articulation entre programme national de contrôle et groupes « cibles » ; préciser le rôle des autorisations d’usage thérapeutique ; enfin, renforcer le rôle des antennes médicales de prévention du dopage à l’égard des sportifs sanctionnés pour dopage.

Ces diverses modifications ne remettent aucunement en cause l’économie générale du texte adopté par l’Assemblée nationale. Elles en améliorent, au contraire, la lisibilité et la cohérence sur plusieurs points.

De son côté, le Gouvernement a introduit dans le texte un article qui abroge la loi n° 89-432 du 28 juin 1989, relative à la répression du dopage des animaux, et transfère à l’Agence les compétences en matière de dopage animal qui figureront désormais dans le code de la santé publique.

Pour ma part, j’insisterai plus particulièrement sur quelques avancées.

Tout d’abord, la nouvelle rédaction de l’article 2 ouvre le droit à l’Agence, en parfaite conformité avec les dispositions de l’article 15-1 du code mondial antidopage, de diligenter, de sa propre initiative, des contrôles à l’occasion d’une manifestation sportive internationale sous réserve d’agir « en coordination et avec l’accord » de la fédération internationale selon les termes du code mondial antidopage.

Ensuite, le Sénat a renforcé sur deux points le rôle de prévention du dopage dévolu aux antennes médicales : d’une part, les consultations qu’elles organisent ne seront plus désormais réservées aux personnes ayant d’ores et déjà eu recours à des pratiques de dopage, mais seront également ouvertes « aux personnes susceptibles d’y recourir » ; d’autre part, le rôle des antennes médicales de prévention du dopage, au sein du dispositif de suivi des athlètes convaincus de dopage, est opportunément renforcé. Le dispositif en vigueur est, en effet, à la fois lacunaire et trop peu contraignant.

La nouvelle rédaction adopte donc une position plus systématique. Elle prévoit, en effet, l’organisation, quelle que soit l’origine de la sanction, d’au moins un entretien entre le sportif sanctionné et un médecin appartenant à une antenne médicale. Cet entretien est validé par la délivrance d’une attestation et non plus d’un simple certificat. En cohérence avec cette nouvelle procédure, l’article 15 bis, nouvellement introduit dans le présent projet par le Sénat, prévoit que la fédération compétente subordonne la délivrance d’une licence aux sportifs sanctionnés à la production de ladite attestation. Ce dispositif ne constitue, bien entendu, qu’une ébauche d’un véritable suivi des sportifs ayant fait l’objet d’une sanction pour dopage, tout autant, d’ailleurs, dans le but de détecter des pratiques de dopage pendant la durée d’une éventuelle suspension que de fournir une aide psychologique médicale à ceux qui ont résolument tourné le dos à de telles pratiques.

Sont également précisées les plages horaires durant lesquelles peuvent avoir lieu respectivement les contrôles lors de compétitions ou d’entraînements et les contrôles au domicile de l’athlète. Dans le premier cas, ils peuvent être effectués à tout moment du déroulement de ces manifestations ; dans le second, ils ne peuvent se dérouler qu’entre six heures et vingt et une heures, afin de respecter l’intimité de la vie privée des sportifs.

Enfin, un dernier amendement précise que la compétence pour établir la composition du groupe cible des sportifs qui seront obligatoirement contrôlés appartient au directeur des contrôles, et à lui seul, en application du principe de la séparation fonctionnelle des compétences au sein de l’Agence.

Quant à l’amendement présenté par le Gouvernement, il procède de la volonté de ne pas laisser la lutte contre le dopage animal en dehors de la réorganisation des compétences des différents intervenants. Le dispositif proposé transfère donc à l’Agence les compétences jusqu’alors exercées par le ministre chargé des sports et la commission de lutte contre le dopage des animaux.

La constitution d’un tel bloc de compétences en matière de dopage au profit de la future agence n’est pas une conséquence de la création de l’AMA, puisque le dopage animal ne fait l’objet d’aucun engagement international et qu’il est encadré par une réglementation purement nationale.

Au-delà de l’adoption de ce projet de loi, indispensable à l’harmonisation et à la cohérence de la lutte contre le dopage, qui revêt désormais une dimension véritablement mondiale, je tiens à souligner la nécessité de renforcer le travail de prévention, notamment auprès des jeunes au sein des établissements scolaires et des clubs sportifs. Il reviendra au ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative, qui a pleine compétence dans le domaine de la prévention, de mener des actions de sensibilisation, à l’image de la campagne « Et toi, le dopage ? ».

À cet égard, la création d’un « référent éthique » au niveau de chaque comité régional olympique et sportif, avec ensuite une déclinaison au niveau local, est une initiative qu’il convient de saluer et d’encourager. Il est également souhaitable de renforcer la formation des éducateurs sportifs en matière de prévention et de prévoir des programmes spécifiques de sensibilisation destinés aux jeunes inscrits dans un centre de formation.

L’unanimité qui s’était faite pour l’adoption en première lecture de ce projet de loi dans notre assemblée a prévalu également pour le vote émis par le Sénat. Aujourd’hui, il apparaît urgent de mettre ces dispositions en vigueur afin que la nouvelle agence puisse travailler sereinement et lutter efficacement contre ces dérives qui ternissent, malheureusement, le sport auquel nous sommes tous, ici, très attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Henri Nayrou, pour le groupe socialiste. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Henri Nayrou. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, si ce projet de loi a fait l’objet d’un vote unanime en première lecture le 6 avril 2005, force est de constater aujourd’hui que le contexte a évolué – je précise que je ne fais pas allusion au fait que la candidature de Paris n’a pas été retenue pour les Jeux olympiques de 2012. Les réserves et les craintes que nous avions exprimées alors n’ont, pour la plupart, pas été prises en compte et l’actualité a confirmé le bien-fondé de nos critiques.

Le passage devant le Sénat n’a pas bouleversé l’équilibre général du texte, mais on peut relever des avancées notables, notamment le renforcement du rôle des antennes médicales de prévention du dopage au sein du dispositif de suivi des athlètes convaincus de dopage, même s’il reste, comme l’a souligné le rapporteur, au stade de l’ébauche.

Depuis 1999, la lutte contre le dopage renvoie inexorablement à la notion de progrès de la recherche médicale, afin que les tricheurs n’aient pas éternellement une longueur d’avance. Mais la frontière entre la prise de produits dopants et l’absorption de médicaments à usage thérapeutique est si incertaine et si évolutive, et requiert de telles compétences dans le domaine médical, que je ne m’avancerai pas beaucoup en disant à cette tribune qu’en dépit de la bonne foi de certains sportifs, le système actuel comporte une large part d’hypocrisie.

Le texte aurait donc pu être renforcé pour répondre concrètement au problème du dopage et mettre en place les modalités d’un combat efficace. Certes, le présent dispositif législatif est le bienvenu, mais la volonté politique n’est pas assez affirmée et les moyens demeurent insuffisants.

Quatre points du projet de loi marquent à nos yeux un recul notable par rapport à la loi Buffet de 1999.

Premièrement, vous avez remplacé le CPLD par la future Agence française de lutte contre le dopage, concentrant ainsi tous les pouvoirs entre les mains de cette seule entité. Autrement dit, l’autorité indépendante deviendra, de fait, juge et partie : elle diligentera les contrôles comme l’analyse des prélèvements et disposera du pouvoir de sanction, ce qui peut éventuellement engendrer certains problèmes d’éthique.

Deuxièmement, l’ALFD perd la compétence qu’avait le CPLD en matière de politique de prévention et de recherche, qui relèvera dorénavant du ministère chargé des sports, en vue – nous dit-on – d’une « meilleure coordination ». On peut a priori regretter cette décision, car le CPLD avait su fédérer autour de lui la plupart des chercheurs motivés par la question.

Troisièmement, l’article 6 présente de nombreux risques de dérives quant à la procédure de délivrance des autorisations à usage thérapeutique – les AUT – et en raison de la banalisation de l’usage de certains produits que la procédure allégée porte en son sein. À cet égard, nous avons proposé un amendement – déclaré irrecevable au titre de l’article 40 – disposant qu’un sportif ayant subi une prescription de substances ou de procédés interdits ne serait pas en état de participer à une compétition et se trouverait automatiquement en situation d’arrêt de maladie.

Nous avons également déposé un amendement – de « témoignage » – à l’article 2, visant à ce que le laboratoire de Châtenay-Malabry relève à nouveau de la double tutelle des ministères de la santé et du sport. Je ne serai malheureusement pas en mesure de défendre cet amendement, car je dois retourner au plus vite dans ma circonscription, les aléas du calendrier parlementaire ne m’ayant pas permis de me libérer de certains engagements. Je vous prie, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, de bien vouloir m’en excuser.

Quatrièmement, le contrôle du dopage lors des compétitions internationales échappe aux autorités françaises, alors que l’on sait que la tendance internationale est à une plus grande tolérance que dans l’hexagone. L’influence de la France pourrait apparaître comme diluée et son haut degré d’exigence comme laminé par des standards moins rigoureux. Or on constate que ce n’est pas l’absence de texte qui a empêché une action internationale contre le dopage, mais plutôt la multiplicité des initiatives et leur faible pouvoir de contrainte à l’encontre des États.

Les initiatives les plus récentes marquent une évolution vers la constitution d’un corps de règles unifié et opposable à tous les sportifs. Aussi faut-il espérer que l’Agence mondiale antidopage saura faire preuve d’une autorité suffisante pour imposer une lutte antidopage rigoureuse et homogène, et qu’elle aura les moyens de mobiliser les fédérations internationales, qui n’ont pas toutes montré un enthousiasme débordant en la matière – c’est le moins qu’on puisse dire.

Les Jeux olympiques d’hiver de Turin ont d’ailleurs mis en évidence la dure réalité des choses : les moyens de contrôle ont montré leurs limites. Le véritable feuilleton médiatique autour de l’équipe autrichienne a souligné l’inefficacité des instances internationales dans la traque des tricheurs – les quelque 1 200 contrôles d’urine et de sang à Turin n’ont avéré qu’un seul cas de dopage, celui de la bi-athlète russe Olga Pyleva, et entraîné le départ de deux Autrichiens à la cloche de bois.

L’exemple de Walter Meyer est édifiant à cet égard : après avoir été impliqué dans un scandale à Salt Lake City et interdit de Jeux olympiques jusqu’en 2010, l’entraîneur autrichien a pu, cette année encore, prodiguer ses conseils jusque dans les chambres des athlètes, une situation que le comité olympique autrichien et sa fédération de ski pouvaient difficilement ignorer ! Les descentes de police se sont ajoutées aux descentes de ski alpin ! Force est de reconnaître que notre champion Antoine Dénériaz a mieux réussi que les forces de l’ordre !

Je me contenterai de faire deux remarques.

La première est qu’un tel bilan n’est pas convenable. Il faut donc tirer toutes les leçons de la tartuferie des instances internationales. Je voudrais rappeler ici ce que disait le président d’un club de rugby professionnel à propos de son buteur : « Il n’est pas payé pour tenter des buts, mais pour les réussir ! »

Ma seconde remarque pourrait laisser accroire, sur la foi de ce palmarès olympique fort peu glorieux, que le sport mondial n’est plus pratiqué désormais que par des athlètes aussi propres que les eaux de mes montagnes, ce qui constituerait un véritable scoop ! (Sourires.) Restons sérieux !

En conclusion, ce texte, qui procède de la nécessaire mise en conformité de la législation française avec les exigences internationales et qui s’inscrit dans l’esprit de la loi Buffet, n’est, en définitive, ni bon ni mauvais. Entre ses deux passages dans notre hémicycle, les Jeux olympiques de Turin ont démontré que le CIO et l’AMA ne s’étaient pas encore dotés de moyens réellement efficaces pour éradiquer le dopage. Aussi le groupe socialiste s’abstiendra-t-il, non dans l’esprit fataliste du « peut mieux faire » ou du wait and see, mais dans celui, plus constructif, du « doit absolument mieux faire ».

M. Patrice Martin-Lalande. Eh bien ! Nous avons bien fait d’applaudir avant ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Muguette Jacquaint, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

Mme Muguette Jacquaint. Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, permettez-moi, au moment où nous parlons de sport, de relever que c’est une bien mauvaise image de celui-ci que reproduisent les médias depuis plusieurs mois, qu’il s’agisse de la violence des hooligans dans les stades, ou de cette scandaleuse décision d’« importer » 40 000 prostituées des pays de l’Est en Allemagne à l’occasion du Mondial 2006, à quoi s’ajoutent les trop nombreux cas de dopage.

En outre, les récents Jeux olympiques d’hiver de Turin ont été entachés par plusieurs cas de dopage avéré. Une athlète russe a été exclue des JO et privée de sa médaille le 16 février par le Comité international olympique. Selon le responsable antidopage du comité olympique russe, l’athlète aurait tenté de soigner une blessure à l’aide d’un médicament dont elle ignorait qu’il contenait une substance interdite.

Douze fondeurs et fondeuses ont aussi été interdits de compétition pour cinq jours en raison de taux d’hémoglobine trop élevés, mais aucun n’a été contrôlé positif par la suite. Ce diagnostic n’a cependant pas convaincu le président de l’Agence mondiale antidopage, qui a fait part à la presse de son étonnement face à une telle coïncidence.

Au final, si 900 contrôles ont été effectués au sein de l’équipe autrichienne, l’inefficacité à démasquer les tricheurs reste le lot des instances internationales.

Le dopage demeure, comme l’attestent ces quelques exemples, un problème complexe et très controversé. Rappelons-nous que ce fléau s’est développé à mesure que les disciplines sportives devenaient professionnelles. En effet, dans tous les sports, l’argent tient aujourd’hui une place de plus en plus importante, reléguant – et je le regrette – l’éthique sportive au second plan. Nous ne pouvons donc appréhender le dopage sans tenir compte de ce contexte particulier.

Ainsi, dans notre société, la marchandisation du sport s’est développée à tous les échelons : des sportifs eux-mêmes au matériel qu’ils utilisent, en passant par les compétitions, les droits de retransmission, et demain, sans doute, la cotation des clubs de football en bourse ! Cette marchandisation est inacceptable, monsieur le ministre. Et que dire de ces clubs de foot auxquels vous proposez, pour se développer, de monter des holdings avec d’autres partenaires, afin de devenir propriétaires de leur stade. Ces sociétés remplaceraient les collectivités locales, qui n’ont ni les moyens ni l’envie de moderniser les enceintes, de Ligue 1 de foot notamment. Vous affirmez être disposé, y compris par des aménagements législatifs ou réglementaires, à faciliter l’investissement des clubs, en partenariat avec les collectivités locales, dans cet outil de travail qui doit, à terme, faire partie de leurs actifs. L’existence au sein d’une holding d’une société détentrice de droits réels sur le stade permettrait, selon vous, sa cotation en bourse puisque la holding aurait incontestablement une réalité économique distincte du club. En fait, cela reviendrait à appliquer le principe qui paie décide !

Dans un contexte de marchandisation, de mondialisation, de baisse des dépenses publiques et de privatisation généralisée, lutter contre le dopage pourrait conduire à demander à un sportif d’être rentable à tout prix, tout en lui interdisant l’ensemble des outils disponibles. C’est en gardant à l’esprit cette dialectique que nous devons continuer à lutter contre le dopage !

Abordons à présent votre projet de loi…

M. Jean-Marie Geveaux et M. Patrice Martin-Lalande. Enfin !

Mme Muguette Jacquaint. Ce texte poursuit deux objectifs essentiels : premièrement, renforcer la protection sanitaire des sportifs et l’efficacité de la lutte contre le dopage à l’échelon national en clarifiant les domaines d’intervention respectifs des différents acteurs ; deuxièmement, tirer les conséquences des évolutions majeures de la lutte contre le dopage à l’échelle internationale.

Les travaux du Sénat ont apporté des modifications positives au texte en ouvrant la possibilité à l’Agence française de lutte contre le dopage de diligenter des contrôles lors d’une manifestation internationale, à sa propre initiative, sous réserve d’une coordination avec la fédération internationale compétente. De même, les fédérations sportives pourront consulter l’AFLD sur les questions relevant de sa compétence. De son côté, l’AFLD leur enverra des recommandations s’agissant de matières relevant de sa compétence.

Nous saluons aussi la prise en compte de l’expérience acquise au sein des antennes médicales depuis leur mise en place et la reconnaissance de leur rôle de prévention en matière de lutte contre le dopage, via l’identification des personnes à risque parmi celles ayant accès à leurs consultations. La nouvelle rédaction du texte décrivant la procédure de délivrance des autorisations d’usage thérapeutique, adoptée dans un souci de simplification et de clarification, va également dans le bon sens.

En revanche, nombre d’interrogations demeurent. Aujourd’hui encore, certains acteurs essentiels du mouvement sportif et de la santé demeurent insuffisamment impliqués dans ces actions de prévention. Ainsi, la plupart des médecins généralistes restent peu concernés par cette politique. Au reste, il faudrait plus de médecins généralistes.

Alors que les crédits affectés à la lutte antidopage ont progressé de 200 % entre 1998 et 2002, le Gouvernement ne les a que peu augmentés en 2003. Or le coût exorbitant du suivi médical ne permet pas aux fédérations de lutter efficacement contre le dopage, comme vous l’avez d’ailleurs reconnu vous-même. Sans une augmentation des crédits, la situation a peu de chances de s’inverser.

De surcroît, les ressources de l’Agence seraient principalement, mais non exclusivement constituées de subventions de l’État. La porte de la privatisation est donc ouverte, comme dans le cas d’autres services publics. L’Agence pourrait être fortement incitée à rechercher des financements privés pour compenser la diminution des ressources publiques, voire, à terme, les remplacer. Cela produirait, en bout de chaîne, des conflits d’intérêt susceptibles de mettre en cause son indépendance.

Nous aurions également aimé vous voir plus exigeants en matière de répression du trafic de produits dopants, de prévention, de promotion de la médecine sportive, de formation des cadres techniques et des entraîneurs, et surtout plus combatifs dans la lutte contre le règne de l’argent dans le sport.

Je ne pourrai pas conclure cette intervention sans évoquer le financement du sport, et en particulier le sort réservé à l’éducation physique et sportive dans notre pays. Nous assistons depuis quelques années à la réduction du nombre de postes mis aux concours dans ce domaine. En effet, le nombre de recrutements externes entre 2002 et 2005 a été inférieur à celui des départs à la retraite. Il n’y a pourtant aucun sureffectif dans cette discipline puisque les remplacements ne peuvent même pas être assurés.

Les étudiants en STAPS sont plus que jamais confrontés au manque de débouchés et d’emplois stables, quelle que soit la filière suivie, et à une concurrence avec les titulaires de brevets d’État.

M. Jean-Marie Geveaux. Ça, ce n’est pas possible !

Mme Muguette Jacquaint. On déplore aussi les attaques portées par la loi Fillon contre l’éducation physique et sportive et la pratique du sport dans les établissements scolaires.

Le sport remplit dans la société contemporaine des fonctions diverses : vecteur d’épanouissement personnel et de santé, il est aussi facteur d’éducation, de socialisation, de bien-être, de citoyenneté, et participe au rayonnement international d’un pays. Seule une politique publique ambitieuse et cohérente permettrait de lutter contre tous les dévoiements si préjudiciables pour son image.

Nous sommes donc fermement convaincus qu’il faut faire encore plus en matière de lutte contre le dopage, afin de redonner au sport ses lettres de noblesse.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. C’est vrai !

Mme Muguette Jacquaint. En dépit de toutes ces réserves, je voterai ce texte.

M. Dominique Juillot, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Geveaux, pour le groupe de l’ UMP.

M. Jean-Marie Geveaux. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est un texte extrêmement important et attendu que nous examinons aujourd’hui, et, comme beaucoup de mes collègues, je regrette la lenteur de son processus d’adoption. C’est en effet le 6 avril 2005, donc il y a presque un an, que nous l’avons adopté à l’unanimité en première lecture. Une telle lenteur est d’autant plus regrettable que, en renforçant et en harmonisant à tous les niveaux les règles relatives à la lutte contre le dopage, ce texte doit apporter une contribution essentielle à l’action que mène la France en ce domaine depuis maintenant de nombreuses années.

En effet, notre pays a fait le choix, en matière de lutte contre le dopage, d’une politique volontariste, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter. Avec 9 000 contrôles par an et la découverte de nouvelles méthodes de détection toujours plus sophistiquées, la France est le pays qui effectue le plus de contrôles et analyse le plus de substances dans les prélèvements, y consacrant 8 à 9 millions d’euros par an. Grâce à ce texte, la France va franchir un nouveau palier et se placer à la pointe des nations dans ce combat.

Depuis votre nomination, en 2002, au ministère de la jeunesse et des sports, monsieur le ministre, vous n’avez cessé de confirmer et d’amplifier cette action. Vous y avez consacré toute votre volonté, et votre engagement personnel a d’ailleurs été reconnu sur le plan international, puisqu’il vous a valu d’être nommé à la tête de l’Agence mondiale antidopage en qualité de représentant français de l’Europe.

M. Patrice Martin-Lalande. Bravo !

M. Jean-Marie Geveaux. L’actualité récente nous prouve que cette action doit être poursuivie. Il ne faut surtout pas relâcher la pression, ni sur les fraudeurs, ni sur les industries chimiques, dont l’inventivité et la capacité à trouver des parades aux contrôles les plus sophistiqués semblent ne pas avoir de limites.

C’est dans cet esprit déterminé que nous examinons aujourd’hui ce projet de loi relatif à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs.

Comme cela a déjà été souligné, la principale innovation de ce texte réside dans la mise en place d’une nouvelle agence indépendante, l’Agence française de lutte contre le dopage, qui se substituera à l’actuel Conseil de prévention et de lutte contre le dopage et intégrera le Laboratoire national de dépistage du dopage de Châtenay-Malabry. Ses compétences ayant été élargies au contrôle, à l’analyse et à la sanction, cela laisse espérer une efficacité accrue, même si des départements différents sont créés afin de garantir l’impartialité de l’institution. Son fonctionnement, que l’examen du texte au Sénat a permis de préciser, et son autonomie financière devraient lui permettre de travailler efficacement.

Les compétitions sportives nationales et l’entraînement des sportifs français et étrangers sur notre territoire constituent le champ d’intervention de l’Agence. Les compétitions internationales relèveront, quant à elles, du pouvoir de contrôle et de sanction des fédérations internationales, du CIO ou de l’AMA, qui appliqueront leurs propres règles disciplinaires et donc le code mondial antidopage. Les recours pourront être intentés devant le tribunal arbitral du sport. Il s’agit donc d’assurer l’équité entre des sportifs de nationalités différentes, en retenant un principe simple et lisible : à compétition nationale, instances nationales ; à compétition internationale, instances internationales – fédérations internationales, CIO, AMA.

Toutefois, dans un souci de cohérence internationale, l’AFLD pourra, à la demande de l’AMA ou de fédérations internationales, effectuer des contrôles pour leur compte à l’occasion de compétitions internationales. Les sénateurs ont adopté un amendement afin de l’autoriser également, lors d’une manifestation internationale, à diligenter ces contrôles à sa propre initiative, sous réserve d’une coordination avec la fédération internationale compétente. Cette disposition permettra peut-être de pallier les insuffisances de certaines fédérations sportives internationales dont l’action en matière de lutte conter le dopage est encore trop timide. Les compétences de l’AFLD sont en outre renforcées par rapport à celles du CPLD : en plus de prononcer des sanctions disciplinaires, elle sera chargée, dans un souci d’efficacité, de la définition du programme annuel de contrôle antidopage ainsi que de l’analyse des prélèvements. Le Sénat a par ailleurs ouvert la possibilité pour les fédérations sportives de la consulter sur les questions relevant de ses compétences. Enfin, l’Agence pourra adresser à ces fédérations des recommandations sur des matières relevant de sa compétence.

Vous renforcez, monsieur le ministre, l’efficacité de la lutte contre le dopage, en France en particulier. Vous avez aussi souhaité mettre l’accent sur une autre action essentielle, la prévention, avec notamment la création des antennes médicales de prévention du dopage. C’est en effet un enjeu essentiel, puisqu’il y va de la santé de nos sportifs, de tous nos sportifs, y compris les jeunes et les non licenciés. Si la santé de nos concitoyens passe par une pratique sportive adaptée, celle-ci doit cependant être encadrée afin que soient proscrites les pratiques à risque. La possibilité nouvelle donnée aux médecins de tirer les conséquences des résultats du suivi médical des sportifs de haut niveau sur leur participation aux compétitions va également dans le bon sens. De même, le contrôle plus sérieux des certificats médicaux et le suivi plus rigoureux des sportifs constituent les points forts de ce projet de loi. Ainsi, les certificats médicaux de non contre-indication devront être renouvelés à échéance régulière. Avec la surveillance médicale des sportifs de haut niveau, les fédérations sportives disposeront de responsabilités décisionnelles concernant l’autorisation de participer aux compétitions.

Je ne doute pas que ce texte recueillera un consensus assez large. La lutte contre le dopage est une action que nous devons mener sans relâche et sans faiblesse. Je puis donc vous assurer, monsieur le ministre, que le groupe de l’UMP votera une nouvelle fois pour ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Comparini, pour le groupe UDF.

Mme Anne-Marie Comparini. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’exprimerai au nom de mon collègue François Rochebloine, retenu dans sa circonscription.

En souhaitant ajuster la loi Buffet de 1999, le Gouvernement prend acte de l’importance d’une action volontariste dans le domaine de la lutte contre le dopage. Le groupe UDF approuve pleinement cette démarche, largement soutenue par le mouvement sportif français, en particulier le Comité national olympique et sportif français. Le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage a ainsi renforcé ses contrôles, qui ont augmenté de 10 % entre 2003 et 2004. La proportion d’échantillons contenant des substances interdites est par ailleurs en baisse par rapport à 2003. Cette évolution est de bon augure, mais l’action du Conseil de prévention et de lutte antidopage peut encore être renforcée.

Au nom de mon groupe, je vous remercie, monsieur le ministre, de faire de la lutte contre le dopage une priorité. Il y va non seulement de la santé de nos sportifs de haut niveau, mais aussi de nos jeunes, qu’il importe de mettre en garde contre les conséquences souvent méconnues de l’usage des produits dopants. Cela est d’autant plus important que des cas de dopage ont malheureusement été constatés lors des derniers Jeux olympiques d’hiver à Turin.

Les modifications du Sénat vont dans le bon sens. Le fonctionnement et le rôle de l’Agence française de lutte contre le dopage sont en particulier mieux définis. L’Agence pourra ainsi procéder de sa propre initiative, et à titre dérogatoire, à des contrôles sur le territoire national lors des compétitions internationales. Le Sénat a également proposé, à juste titre, de mieux articuler le programme national de contrôle et celui des groupes « cibles ». Il a enfin précisé les plages horaires des contrôles et transféré la répression du dopage des animaux à l’AFLD.

Ces diverses modifications constituent donc une amélioration souhaitable, comme nous l’avions demandé en première lecture, toutefois nous regrettons l’introduction par le Sénat de dispositions relatives aux antennes médicales de prévention du dopage, dont le rôle a été réduit, ainsi qu’aux conditions d’usage thérapeutique, qui risquent de conduire à des malentendus.

Pour l’avenir, de nombreuses avancées demeurent nécessaires notamment pour coordonner nos dispositifs, via la création de l’Agence mondiale antidopage ou pour transposer en droit interne la liste des produits dopants interdits, élaborée au niveau international à la fin des années quatre-vingt.

Ce texte largement consensuel issu de la navette appelle cependant un certain nombre de remarques. Compte tenu de l’expérience des fédérations sportives, il aurait été utile de faire évoluer le système actuel, dans lequel l’instruction et les procédures disciplinaires sont à la charge des fédérations sportives en première instance et en appel et du Conseil de prévention et de lutte conte le dopage en cas de manquement aux délais ou pour les non-licenciés. Cette évolution pourrait prévoir que l’instruction du dossier et la définition de la sanction resteraient du ressort de la fédération sportive, l’appel étant confié à une organisation disciplinaire unique de l’Agence nationale antidopage – ANA –, comme dans les procédures civiles traditionnelles. L’expérience a en effet mis en lumière la difficulté des commissions d’appel des fédérations pour faire face à des batteries d’avocats très spécialisés.

Concernant ensuite le suivi médical, le contrôle des sportifs de haut niveau permet de préserver leur santé. Il est toutefois dommage que l’on ne soit pas allé plus loin en permettant le remboursement des examens médicaux pour tous les sportifs des listes Élite, Espoir et Jeune. Il eut sans doute été également judicieux de dissocier le suivi biologique du suivi médical des sportifs, afin de contourner le problème lié au secret médical, qui constitue, nous dit-on, le « maillon faible » du dispositif global de lutte contre le dopage, fragilise son efficacité et rend parfois impuissantes les fédérations.

Enfin, il convient de ne pas tomber dans l’excès de zèle, observé parfois dans certaines disciplines. Nous avons tous, en particulier, à l’esprit les récentes dérives qui ont malheureusement affecté le cyclisme.

Ce projet de loi n’en reste pas moins d’une grande qualité. Sa cohérence et l’articulation entre les divers types d’actions et les différents niveaux en font toute la pertinence. Le groupe UDF considère donc que ces dispositions, qui constituent une réponse appropriée aux problèmes posés, sont de nature à faire avancer efficacement la lutte contre le dopage. Elles affirmeront également la position pionnière de la France en ce domaine, en même temps que sa pleine motivation pour accueillir à l’avenir les athlètes des prochains événements sportifs.

Le groupe UDF votera donc en faveur du texte.

Je ne voudrais toutefois pas terminer cette brève intervention, monsieur le ministre, sans vous rappeler la question soulevée par François Rochebloine, voilà déjà plus d’un an, sur le statut des agents sportifs et à laquelle il est urgent d’apporter une réponse. François Rochebloine et Édouard Landrain ont déposé en février 2005 une proposition de loi apportant des solutions. Vous-même, monsieur le ministre, avez repris dans une conférence de presse de nombreux points de cette proposition. Aussi pourriez-vous nous dire cet après-midi où vous en êtes de votre réflexion et si nous aurons prochainement à légiférer sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Muguette Jacquaint. Très bien !

Mme la présidente. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Je répondrai en quelques mots aux différentes interventions.

Vous avez effectivement raison, madame Jacquaint : la pression de l’argent peut être susceptible de pousser de jeunes ou de moins jeunes athlètes mal encadrés à se doper, mais l’argent n’est pas le seul motif. Souvenons-nous d’un certain nombre de régimes totalitaires qui, il y a quelques décennies, avaient fait du sport leur outil de propagande.

Mme Muguette Jacquaint. Tout à fait !

M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Donc, soyons vigilants. Chacun d’entre vous l’a très bien dit : Jean-Marie Geveaux a, comme Dominique Juillot, conclu son intervention sur la nécessité d’être en permanence très attentif aux évolutions possibles du dopage. On parle de plus en plus de dopage génétique. Nous devons veiller – et c’est la véritable priorité du texte – à ce que les mesures prises soient en parfaite cohérence avec les dispositions internationales.

Vous avez les uns et les autres évoqué les Jeux olympiques de Turin, estimant que ce que s’y était passé était un signe négatif. Ne soyons pas naïfs. Le dopage existera toujours et il y aura en permanence des tricheurs. Cela dit, ce qui s’est passé à Turin est exemplaire. En effet, l’Agence mondiale antidopage, le CIO et les forces de police italiennes ont su coordonner leurs efforts pour retrouver les tricheurs et ceux qui leur fournissaient les produits. L’enquête est longue, comme elle l’est sur le sol français. Nous avons, nous aussi, en France, des enquêtes en cours, car la lutte contre le trafic de produits dopants est maintenant efficace, madame Jacquaint. J’ai mis en place les commissions régionales créées par la loi, et la lutte contre le dopage commence à porter ses fruits.

Vigilance, permanence, évolution des dispositifs voire des textes : nous devons faire preuve de beaucoup de ténacité, mais également de beaucoup d’humilité.

J’ai apprécié dans les différentes interventions cette volonté d’avancer ensemble et de continuer à être toujours aussi vigilants. Vous avez, madame Jacquaint, effectivement rappelé la forte évolution du budget en matière de lutte contre le dopage, en hausse de plus de 25 % en trois ans. Or la réalité est là et il ne s’agit pas simplement d’un problème de moyens. En effet, cet argent – 20 millions d’euros cette année – doit être bien employé, ce qui suppose une bonne coordination internationale. Il faut, par exemple, que nous ayons les mêmes procédures et les mêmes listes de dopants que les autres pays.

L’AFLD gérera l’ensemble des dispositifs en matière de contrôle et d’analyse. Il est important de disposer entre autres du laboratoire au sein de l’établissement. Le président Bordry a bien mesuré l’ampleur et les objectifs qui doivent être atteints par la nouvelle Agence française de lutte contre le dopage. Dans le domaine de la prévention et de l’information, il existait en effet une myriade d’initiatives portées par les antennes, par « Écoute dopage » et par un certain nombre de centres de recherche, de laboratoires d’universités. Une coordination était essentielle. En rattachant cette activité au ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative, nous retrouverons de la clarté et plus de synergie.

Madame Jacquaint, vous avez rappelé le rôle du sport dans notre société au travers de l’éducation physique et sportive. Sans doute faisiez-vous référence au sport à l’école. Là aussi, soyons clairs. Il y a 50 000 jeunes dans les filières STAPS. Il est vrai que seuls 400 à 800 postes de CAPES sont ouverts. La diminution de leur nombre est toujours effectivement synonyme d’inquiétude. Malheureusement, le marché en matière d’animation sportive ne suffit pas à absorber l’ensemble de ce potentiel, ce que je regrette. J’ai fait différentes propositions : 1 000 postes seront créés pour accompagner, par exemple, la Coupe du monde de rugby et les Championnats du monde de handball féminin ; l’offre de coordination des activités dans les quartiers sera renforcée avec le recrutement de 300 jeunes issus essentiellement des filières STAPS ; il en ira de même dans les centres spécialisés qui accueillent des personnes handicapées. Nous nous attachons donc à trouver des débouchés pour ces jeunes qui le méritent, parce qu’ils sont passionnés par le sport sous toutes ses formes. Cela leur permettra d’acquérir une première expérience professionnelle dans ce domaine.

Je n’ai pas bien compris ce que vous appelez « concurrence » entre les brevets d’État et les brevets professionnels. Il n’y a pas de concurrence, puisqu’on ne se situe pas au même niveau de formation. Les brevets du ministère des sports sont pour la plupart de niveau 4, tandis que les filières STAPS préparent plutôt aux niveaux 2 et 3.

J’ai également décidé de former 2 500 jeunes supplémentaires dans un « parcours animation sport ». Ces jeunes seront totalement pris en charge, avec une expérience professionnelle à la clé, au sein d’associations sportives et pourront bénéficier d’une formation au brevet d’État ou au brevet professionnel.

Madame Comparini, vous avez conclu votre intervention par une question importante : celle des agents sportifs. On constate aujourd’hui que certains d’entre eux ont fait tout et n’importe quoi à l’occasion de tel ou tel transfert. Ce problème inquiète également les instances sportives internationales et en particulier la FIFA et l’UEFA. Je suis, comme François Rochebloine et Jean-Marie Geveaux, soucieux et je suis donc tout à fait favorable à une évolution de l’encadrement et du statut des agents. Mais je ne veux pas me mettre en contradiction avec un dispositif d’ordre international porté par la Fédération internationale de football. J’ai entendu M. Seep Blatter. Je me suis moi-même rendu à Zurich pour le rencontrer et évoquer ce sujet. Lui-même réfléchit à une organisation générale, à un encadrement et à la définition d’un statut des agents. Vous en conviendrez, il faut attendre aujourd’hui de connaître le schéma global que veut imposer la FIFA aux agents de joueurs. En effet, vous l’avez compris, ceux-ci n’évoluent pas simplement en France, mais au-delà du territoire français, voire sur d’autres continents. Là aussi, comme en matière de dopage, la coordination internationale est indispensable. J’ai donc saisi le président Blatter et le président de l’UEFA, M. Johansson, de cette problématique dont ils sont parfaitement conscients. Nous allons maintenant réfléchir à cette évolution nécessaire. J’évoquerai ensuite avec vous les résultats de ces réflexions permettant de définir un cadre général, clarifié et transparent, particulièrement en matière de gestion des transferts dans laquelle l’agent intervient pratiquement exclusivement. Vous admettrez, à la lecture d’un certain nombre de comptes rendus d’audience, que nous sommes, en la matière, loin de la transparence et de la réalité des origines et des destinations des fonds évoqués lors de ces transferts.

Discussion des articles

Mme la présidente. J’appelle maintenant dans le texte du Sénat les articles du projet de loi sur lesquels les deux Assemblées du Parlement n’ont pu parvenir à un texte identique.

Les articles 2, 3 bis, 4, 5, 6, 9,12 bis, 13, 15 bis, 19 bis et 21 ne faisant l’objet d’aucun amendement, je vais les mettre successivement aux voix.

(Les articles, successivement mis aux voix, sont adoptés).

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Je ne suis saisie d’aucune demande d’explication de vote.

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

(L’ensemble du projet de loi est adopté.)

Ordre du jour des prochaines séances

Mme la présidente. Mardi 28 mars, à neuf heures trente, première séance publique :

Questions orales sans débat.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement ;

Discussion du projet de loi, n° 2943, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire :

Rapport, n° 2976, de M. Alain Venot, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à seize heures.)