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(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à M. Philippe Feneuil.
Si la concertation s’avère relativement aisée dans les sociétés à actionnariat, qu’elles soient cotées ou non, celle-ci peut être plus complexe pour de petites sociétés, voire difficile s’agissant d’entreprises individuelles. Difficile, en effet, de déterminer un bénéfice là où le chef d’entreprise ne se donne pas de salaire et ne pense à lui et à sa famille qu’après avoir rémunéré son ou ses deux ou trois salariés et avoir assuré l’avenir de sa petite entreprise, le bon fonctionnement de la boutique !
Mais je me pose des questions sur l’alinéa 4 de l’article 6 selon lequel il faut déterminer le bénéfice « sans que ce bénéfice puisse être diminué du report des déficits antérieurs. » Je pense en ce moment au petit commerçant victimes d’impayés, au petit artisan, sous-traitant dans l’aéronautique par exemple, qui subit un report de commande, à l’agriculteur dont toute la récolte est détruite en un quart d’heure à cause d’un orage de grêle. Comment leur expliquer que l’on ne tiendra pas compte, pour les années suivantes, de ces aléas des années précédentes ?
Madame et monsieur les ministres, si nous affirmons clairement notre volonté d’encourager la participation dans les très petites entreprises, il faut pour cela ne pas les effrayer et leur donner tous les moyens de poursuivre cette dynamique. Nous sommes tous passionnés par ce dossier : donnons-nous alors les moyens d’aller au bout des choses. Je présenterai tout à l’heure, avec des collègues, un amendement en ce sens. J’espère qu’il sera adopté ; sinon, ce serait nier cette volonté d’encourager les très petites entreprises à s’orienter vers la participation.
Je fais confiance à la sagesse du Gouvernement et de l’Assemblée nationale pour bien mesurer la responsabilité qui nous incombe aujourd’hui.
L’alinéa 4 de l’article 6 indique : « La phrase est complétée par les mots suivants : “, sans que ce bénéfice puisse être diminué du report des déficits antérieurs.” ; » L’article 6 prévoit donc de modifier la base de calcul de la réserve spéciale de participation, le bénéfice ne tenant plus compte des déficits antérieurs reportables. Or je pense que cette disposition est très dangereuse et contre-productive.
De quoi s'agit-il exactement ? Aujourd'hui, le déficit constaté par une entreprise au titre d'un exercice constitue une charge des exercices suivants – par une technique fiscale dite du report, autorisé par le code des impôts et surveillé par les services fiscaux – et vient donc réduire, le cas échéant, les bénéfices réalisés par celle-ci. Cette faculté de report est ouverte sur une période de cinq ans s'il s'agit d’un déficit ordinaire, ou sans limitation de durée s'il s'agit d'amortissements réputés différés – technique très largement utilisée par les entreprises.
L’interdiction prévue dans l’article revient à considérer le report des déficits antérieurs comme un outil d'optimisation fiscale, alors que, au contraire, ce report s'inscrit dans la logique des textes adoptés depuis longtemps et se justifie par la logique économique.
Le report des déficits antérieurs ne constitue pas un outil d'optimisation fiscale, il s'inscrit dans une logique de dividende du travail.
L'objectif de la participation est de distribuer aux salariés une partie de la valeur qu'ils ont contribué à créer. Pour respecter cette logique, il faut considérer les résultats de manière cohérente dans le temps. Lorsque l'entreprise dégage un bénéfice, la participation s'impose. Mais lorsqu'une entreprise réalise une perte, il n'y a pas d'accroissement réel de valeur. L'imputation d'un déficit antérieur n'est donc pas un avantage fiscal, une simple optimisation qu'il conviendrait de corriger.
Dans les textes et comme en témoigne la circulaire du 14 septembre 2005, la participation ne peut s’assimiler à un salaire – nous l’avons redit très longuement ce matin –, mais plutôt à un dividende du travail. Ainsi, la participation est marquée par son caractère aléatoire. La circulaire précise ainsi que « les versements effectués au titre de la participation seront requalifiés en salaires dès lors que l'accord ne présente pas ce caractère aléatoire ».
La participation s'apparente en réalité aux dividendes versés aux actionnaires. Or, selon les règles applicables en droit des sociétés, aucun dividende ne peut être servi tant que la société affiche à son bilan un report à nouveau négatif. On rendrait possible pour la participation ce qui est interdit pour la distribution des dividendes.
L’interdiction de reporter les déficits antérieurs est une mesure contraire à toute logique économique.
Ce report n'est pas un moyen commode pour contourner la législation sur la participation, comme on essaie de nous le faire croire. Il s'agit de ne pas effectuer un prélèvement sur un résultat fictif, sans tenir compte des difficultés économiques rencontrées par l'entreprise.
Ce report permet, au contraire, un lissage légitime pour des sociétés qui connaissent des périodes difficiles, attestées par les déficits réalisés. Souvent, les entreprises se redressent et, à ce moment-là, la participation entre en jeu. Il s'agit donc souvent de ne pas compromettre la situation d'une société encore fragile qui a besoin de tous les capitaux possibles pour stabiliser sa situation.
Exiger le versement d'une participation dans de telles conditions affaiblira ces entreprises et occasionnera le versement immédiat de sommes importantes non provisionnées.
Or, c'est là une des carences majeures du dispositif : aucune mesure transitoire n'est prévue. Tout cela devrait s'appliquer dès 2007 en fonction de l'exercice 2006, et donc de déficits antérieurs à 2006. On aurait pu, le cas échéant, prévoir notamment que seuls les déficits réalisés à compter de l'entrée en vigueur du texte soient concernés par l'interdiction d'imputation, afin d'éviter toute rétroactivité du dispositif.
Enfin, cette mesure d’interdiction de report donne un très mauvais signal aux entreprises de moins de 50 salariés et s'avère contraire à l'esprit du texte.
Pour les PME de moins de 50 salariés qui voudraient adopter des dispositifs volontaires de participation – qui constituent, faut-il le rappeler, l'un des enjeux majeurs du texte, « le turbo », comme le disait le ministre de l’économie –, cette interdiction donne un très mauvais signal et est un véritable coup de frein.
Voilà pourquoi il est très important de revenir sur cette disposition.
La participation est actuellement un dispositif obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés. Elle repose sur une formule légale, dans laquelle intervient le résultat fiscal, et non le résultat comptable.
Le Gouvernement propose de retenir dorénavant le résultat comptable, ce qui correspond à un souhait des organisations syndicales. Maintenez-vous cet engagement, monsieur et madame les ministres ?
Car, derrière un débat d'apparence technique, se profilent des enjeux qui ne sont pas négligeables pour les salariés.
Actuellement, la participation est calculée sur la base du résultat fiscal, c'est-à-dire en fonction du résultat pris en compte pour le calcul de l'impôt sur les sociétés.
Ce résultat diffère du résultat comptable par la prise en compte d'un certain nombre de dispositions visant à permettre aux entreprises de bénéficier d'un certain nombre d'avantages fiscaux, par exemple les amortissements dits « dérogatoires » ou le report des déficits des années antérieures. Le résultat fiscal est donc souvent inférieur à ce que serait le résultat affiché par la simple application des normes comptables strictes.
Le passage du résultat fiscal au résultat comptable permettrait d'améliorer le montant de la participation versée aux salariés dans un certain nombre de cas.
D'après une étude réalisée par l’INSEE pour le Conseil supérieur de la participation, ce changement de formule de calcul aurait un impact limité sur les entreprises qui versent déjà de la participation.
En revanche, les effets seraient importants pour celles qui n'en versent pas actuellement, puisque 18 % des entreprises qui ne versent pas actuellement de participation en verseraient d'après l'étude de l'INSEE.
En outre, le code général des impôts autorise l'imputation des déficits sur les exercices ultérieurs, qui évitent de payer des impôts. Dans le cadre d'un groupe en particulier, cela permet un « pilotage du résultat » au niveau du groupe de manière à optimiser le résultat fiscal au niveau du groupe.
Certaines filiales peuvent très bien être toujours déficitaires – et donc leurs salariés n'avoir jamais de participation, et j’ai cité des cas –, tandis que le groupe sera globalement excédentaire. Substituer le bénéfice comptable au bénéfice fiscal permettrait vraisemblablement, dans de nombreux cas, aux salariés de bénéficier de la participation.
Enfin, il n'y a aucune logique à ce que le salaire pris en compte soit le salaire brut et exclue donc les cotisations dites patronales. Celles-ci constituent un élément de salaire et doivent être prises en compte pour le calcul de la participation.
Telles sont les remarques que nous souhaitions formuler à l'occasion de l'examen de cet article et sur lesquelles nous souhaiterions avoir des réponses précises de la part du Gouvernement.
L’objectif, tout à fait normal et positif, de l’article 6, est d’élargir le champ des entreprises concernées par la participation, d’éviter que les salariés ne soient privés de participation pendant plusieurs années, en raison du report de déficits antérieurs, alors même que leur entreprise aurait, d’un point de vue comptable, des bénéfices sur l’exercice. Aujourd’hui, nous constatons des situations contrastées, notamment dans les grandes entreprises. Certaines n’ont rien fait, pour des raisons comptables et fiscales ; d’autres ont mis en place des accords d’intéressement, voire des accords dérogatoires de participation pour pallier l’absence de versement de participation de droit commun. Ces accords, qui participent au dialogue social auquel nous sommes attachés − et c’est tout l’objet du débat −, constituent un temps fort de la négociation sociale dans l’entreprise.
C’est pourquoi je souhaite que l’on sanctionne positivement les entreprises qui ont déjà fait quelque chose et que l’on incite celles qui n’ont rien fait à progresser. Je défendrai tout à l’heure un amendement rédigé dans cet esprit et j’espère, monsieur le ministre, que vous y serez attentif : nous devons continuer de porter un regard bienveillant sur les entreprises qui ont démontré qu’elles avaient cette préoccupation depuis des années, afin d’éviter qu’elles ne soient pénalisées par la mesure, et faire en sorte que d’autres, qui n’ont rien fait, s’impliquent dans le dispositif. Ainsi, nous pourrons, autant que possible, homogénéiser les situations. Je développerai rapidement cet amendement tout à l’heure : il est, je crois, important de l’adopter si l’on ne veut pas porter atteinte au dialogue social au sein de l’entreprise.
Cet article vise, entre autres − pourquoi ne pas le reconnaître ? −, à mettre un terme aux pratiques abusives qui existent en matière de participation. Certaines entreprises, usant de la faculté légale du report des déficits antérieurs, ont été conduites à ne pas verser de sommes au titre de la participation pour la simple raison qu’elles avaient été déficitaires quelques années auparavant et alors même que leurs résultats étaient devenus largement positifs. C’est un fait qu’il faut garder présent à l’esprit. Je ne crois pas que quiconque puisse contester la bonne intention qui a présidé à la rédaction d’un article qui veut en finir avec ces pratiques.
Dans le même temps, des questions ont été posées à la commission et je voudrais les relayer ici. Il me semble nécessaire qu’elles reçoivent des réponses claires de la part du Gouvernement. La principale inquiétude est la suivante : étant donné que la technique du report des déficits antérieurs est consacrée en droit fiscal, certaines entreprises étalent des résultats négatifs sur plusieurs années. Dès lors, elles présentent, en pratique, un résultat négatif, ne reversent pas de dividendes à leurs actionnaires et ne sont pas soumises à une imposition sur le bénéfice, puisque celui-ci est nul. Or l’on voudrait que, dans cette situation, l’entreprise soit néanmoins soumise à l’obligation de verser une réserve spéciale de participation. N’est-ce pas quelque peu paradoxal ? Je suis persuadé, madame la ministre, que vous aurez, sur ce point, des éclaircissements à nous apporter.
Je sais que vos services sont sensibles à ces débats et qu’ils ont travaillé à des formules alternatives. Qu’en est-il ? Notre commission a eu, en tout cas, l’occasion d’examiner une solution consistant à exonérer de cette obligation les entreprises ayant conclu, par ailleurs, un accord d’intéressement. On peut se demander si une telle réponse ne crée pas un risque de confusion entre la logique de l’intéressement et celle de la participation, qui ont vocation à rester distinctes. C’est en tout cas une réponse à l’excellente question posée par M. Gaillard.
La commission a également dû rejeter, comme à regret, d’autres solutions imaginées par les auteurs d’amendements qui visaient à exclure de la nouvelle obligation les entreprises ayant conclu un accord obligatoire de participation ou à en exclure les déficits antérieurs provenant des dotations aux amortissements. Avec cet article, nous abordons un des points clefs de la discussion du projet de loi. Notre débat a beaucoup de sens et je vous remercie, monsieur le président, de l’avoir laissé couler au rythme lent et particulièrement sensé de tous les députés qui se sont exprimés.
L’article 6 du projet de loi soumis à votre examen vise exclusivement la participation et, plus spécifiquement, l’assiette servant au calcul de la RSP, la réserve spéciale de participation. Nous avons longuement parlé, ce matin, des modalités, des bénéficiaires, du champ d’application, du suivi de ces régimes, notamment celui de la participation. À présent, nous abordons un article qui vise essentiellement à élargir l’assiette du calcul de la RSP, en donnant une définition spécifique du bénéfice et en retenant comme base de calcul le bénéfice fiscal de l’entreprise, mais en en excluant diverses mesures liées à des régimes fiscaux spécifiques qui ont été mis en place au titre de zones particulières d’implantation, tels les pôles de compétitivité, pour y encourager l’investissement.
Dans la seconde partie de l’article 6 figure une disposition qui fait l’objet de plusieurs amendements et qui consiste à exclure, pour la définition du bénéfice fiscal servant au calcul de la RSP, les reports déficitaires qui sont par ailleurs utilisables par les entreprises ayant réalisé des pertes dans le passé. Deux raisons à cela. D’une part, le Gouvernement a eu le souci − qui a été longuement évoqué dans les débats en commission − d’élargir l’assiette servant au calcul de la réserve spéciale de participation et, d’autre part, il convenait de lever l’obstacle technique résultant de la modification de la règle du report déficitaire qui, jusqu’à une époque récente − 2004 −, permettait de reporter les déficits pendant une période de cinq ans. Une petite subtilité voulait qu’une partie du déficit soit reportable pour une durée illimitée, l’essentiel du report déficitaire s’étalant sur une période de cinq ans : aujourd’hui, tout le report déficitaire peut être étalé sur une durée indéterminée. Par conséquent, il est très difficile d’arriver à identifier dans le temps la partie du report déficitaire que l’on voudrait éventuellement utiliser pour réduire ou élargir le bénéfice fiscal servant à calculer la réserve spéciale de participation.
J’ai exposé, aussi simplement que j’ai pu, le but poursuivi par le Gouvernement dans cet article 6, qui supporte huit amendements : certains visent à clarifier les éléments que nous pouvons déduire du bénéfice fiscal ; d’autres à supprimer l’alinéa qui exclut l’utilisation du report déficitaire pour la définition du bénéfice que l’on utilisera pour le calcul de la RSP.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, pour le soutenir.
(L’amendement est adopté.)
La parole est à M. Philippe Feneuil, pour soutenir l’amendement n° 27.
J’avais cru pourtant comprendre que nous avions tous la volonté d’encourager la participation. Il ne faut donc pas que le chemin soit seulement pavé de bonnes intentions, car l’on sait où cela mène. Si l’on a réellement la volonté de faire adopter le système de la participation par les PME, il faut le montrer. Les bonnes intentions ne peuvent rien à elles seules.
Si quelques sociétés ont failli, ce que personne ne met en doute, donnez-nous leur nom, procédez à un contrôle fiscal, qui sera donc positif, et redressez-les, indiquez-nous sur les articles du code fiscal qui permettent de telles aberrations, mais ne pénalisez pas celles qui font bien leur travail. Ne donnez pas un coup de frein qui serait fatal au projet de loi.
M. Alain Joyandet l’a souligné avec chaleur, la mesure proposée est très mal préparée et injustifiée. Un effort de réflexion est nécessaire pour éviter qu’elle ne soit extrêmement pénalisante.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
Des abus manifestes existent, dont il faut tenir compte. Il nous faut donc trouver un équilibre qui permette de préserver l’esprit de l’article.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Nous avons le souci à la fois d’élargir la base de calcul de la RSP et d’empêcher les abus commis par certaines entreprises qui, pour se dérober à l’obligation de distribuer de la participation à leurs salariés, ont cumulé des reports de déficits dans le cadre d’une stratégie fiscale bien comprise. L’exemple un peu extrême qui a été décrit tout à l’heure a ainsi montré que des difficultés de paiement de réserve spéciale de participation pouvaient exister alors que, pour autant, la situation fiscale l’entreprise ne lui permettait pas d’échapper à son obligation.
L’amendement qui nous sera proposé par la suite par M. Cornut-Gentille peut être une autre façon d’aborder le problème.
En l’état, le Gouvernement n’est pas favorable à ces amendements. Il en demande le retrait ou, à défaut, le rejet.
Si l’on a décidé tout récemment – en 2004 – de reporter de façon illimitée dans le temps les déficits, la question d’une éventuelle modification de l’assiette de la réserve spéciale de participation s’est d’ores et déjà posée l’an dernier, à l’occasion de l’examen de la loi pour la confiance et la modernisation de l’économie. À l’époque, il avait déjà été envisagé de substituer le résultat comptable au bénéfice fiscal, mais on s’est vite rendu compte, au vu de simulations, que si cette prise en compte du résultat comptable était intéressante pour les salariés des entreprises qui ne distribuaient pas de participation, elle aurait pénalisé tous les autres. Dans le doute, nous avons préféré nous abstenir de modifier quoi que ce soit.
Ce que l’on nous propose aujourd’hui me semble n’être qu’une mesure de rattrapage de cette volonté de substituer le résultat comptable au bénéfice fiscal, ce que je ne trouve pas satisfaisant.
À partir du moment, ainsi qu’Alain Joyandet l’a parfaitement souligné, où une entreprise redeviendrait bénéficiaire après avoir cumulé les déficits et vu ses capitaux propres diminuer, il faudrait que sa priorité absolue soit, plutôt que de reconstituer ses capitaux propres, de distribuer de la participation ? Cela, je le répète, n’est pas satisfaisant.
Un tel résultat serait même contradictoire avec le dispositif de suppression de la limitation dans le temps des reports des déficits que nous avons décidé voilà deux ans.
Il existe, certes, une logique comptable, mais une autre logique veut qu’il faut dégager des bénéfices pour distribuer de la participation. Si les deux logiques se heurtent, on risque de n’arriver à rien, tout simplement parce que l’entreprise risque de connaître des difficultés majeures.
Pourquoi – c’est une question à laquelle je n’ai pas réfléchi car la commission des affaires économiques n’était pas saisie de ce sujet – n’a-t-on pas décidé de limiter la durée des reports, comme cela était le cas avant 2004 ?
Pour ma part, je ne serais choqué ni par le report du déficit de l’année précédente ni, ainsi que M. Alain Joyandet l’a très bien expliqué, par celui enregistré pendant un certain temps. Ce que je trouverais choquant, c’est que l’on puisse reporter sans limite tous les déficits antérieurs. Entre supprimer tout report, comme cela nous est proposé, et permettre un report illimité, la bonne solution, madame la ministre, ne résiderait-elle pas dans un juste milieu ?
Pour laisser le temps à l’entreprise de retrouver toute sa vigueur financière, fixons à deux ans au lieu de cinq comme auparavant la limite du report des déficits. Cela pourra paraître encore beaucoup. Pour ma part, un tel report des déficits des deux années antérieures ne me choquerait pas – et encore moins le report du seul déficit de l’année précédente –, sachant qu’aller au-delà de ces deux années me paraîtrait excessif. Voilà en tout cas ce qui me paraîtrait une solution de bon sens. En revanche, vouloir tout laisser faire serait aussi absurde que vouloir tout interdire.
Je souhaite donc qu’une solution de compromis puisse être trouvée. Ce texte, madame la ministre, ne reviendra pas devant l’Assemblée, car l’urgence a été déclarée. D’ici à son examen par le Sénat puis par la commission mixte paritaire – que présidera peut-être le rapporteur ici présent –, nous pouvons encore travailler à cette solution.
N’adoptons pas aujourd’hui une position trop brutale qui irait à l’encontre des bonnes intentions affichées.
Dans ma région, plus une seule entreprise ne fait de bénéfices. Toutes sont en déficit : Goodyear, Dunlop, Valeo, Laperche, Saint-Gobain ! Par de simples jeux d’écritures comptables entre les différents sièges, elles arrivent en effet à s’arranger : en faisant basculer de la France vers l’étranger les bénéfices, elles n’ont plus à verser de participation.
Au lieu de relancer la participation comme vous voulez faire, vous allez en fait aboutir à l’affaiblir ! Car si la loi s’applique à tous, de plus en plus d’entreprises pourront se soustraire à leur obligation. Nos collègues veulent les y aider, et je ne trouve pas ça bien. Je suis donc tout à fait d’accord avec Mme la ministre.
Le débat n’est pas d’ordre dogmatique, mais au contraire fondé sur l’expérience. Si l’on ne distingue pas la stratégie fiscale des entreprises de la réalité comptable de leur bilan, on se retrouve en pleine contradiction : on fait ainsi dépendre la situation des salariés en matière de participation de cette stratégie fiscale.
À cet égard, l’interrogation du président Ollier est quelque peu étonnante. Il se demande comment on pourrait ne pas limiter le report des déficits dans le temps. Si le problème se pose, n’est-ce pas la majorité qui l’a voulu ? La possibilité de report a en effet été limitée dans le temps à une certaine époque. Certes, la question du report pouvait toujours se poser, mais les conséquences étaient moins graves qu’aujourd’hui. Que ceux qui ont levé toute contrainte, même s’ils ont ainsi donné une certaine autonomie à la stratégie fiscale des entreprises, ne viennent donc pas se plaindre maintenant !
Si vous vous placez dans cette logique – après tout, c’est vous la majorité – il ne faut pas que les salariés soient, in fine, prisonniers de la stratégie fiscale des entreprises.
Les propos du Gouvernement sont empreints d’une certaine logique : on a jusqu’à présent donné beaucoup de libertés aux gestionnaires d’entreprises sur le plan de la stratégie fiscale, étant entendu que ces marges de manœuvre ne peuvent pas avoir d’incidences sur la participation, qui est l’objectif de ce projet de loi. Si les amendements de suppression étaient adoptés, pour le coup, il ne resterait pas grand-chose des objectifs que vous avez bien voulu afficher tous ensemble jusqu’à maintenant.
Il faut que la philosophie du texte soit la plus cohérente possible. Aujourd’hui, 6 millions de salariés n’ont pas accès à la participation. Si le texte est voté en l’état, ils n’auront, demain, toujours pas accès à la participation. En revanche, ceux qui bénéficient déjà de cette mesure verront leur participation augmenter même si l’entreprise est en déficit. Ce n’est pas une caricature, c’est ce que nous sommes en train de décider aujourd’hui.
Sur un plan plus technique, je sais que l’intention du président Ollier est louable et je ne veux pas le contrarier, mais je ferai remarquer que ce qui compte dans cette affaire, ce n’est pas la notion de temps, ce n’est pas le nombre d’années pris en compte, mais bien la situation financière de l’entreprise sur un certain nombre d’exercices cumulés.
On peut faire tout ce qu’on veut, on peut décider de réintégrer les déficits de l’année antérieure pour calculer la prime de participation, si, dans l’année N, il n’y a aucun bénéfice, le résultat sera toujours 0, car 0 – quelque chose, cela fera toujours 0, quelle que soit la formule imaginée.
Si j’ai bien compris, le Gouvernement aurait l’intention de régler le problème au Sénat. Dans ce cas, prenons le texte comme il est aujourd’hui, adoptons, pour être parfaitement cohérents, l’amendement n° 43 déposé après l’article 6, et puis réglons les affaires au Sénat. J’emploie le ton de la dérision,…
Quant aux entreprises qui trichent, la meilleure façon de les encourager serait de prendre les deux dernières années parce que, sur deux ans, on peut faire quelques manipulations entre décembre et janvier.
Au départ, j’étais favorable à la proposition initiale, c'est-à-dire au texte du Gouvernement. Ensuite, j’ai trouvé l’argumentation de M. Joyandet et de nos collègues pertinente. Puis, le moyen terme proposé par Patrick Ollier me semble intelligent.
L’alinéa pourrait mentionner que le bénéfice pourrait être diminué du report des déficits antérieurs du ou des deux derniers exercices clos. Toutefois, comme nous ne pouvons plus déposer d’amendement, il faudrait que le Gouvernement rédige un amendement en ce sens. Ou alors, on avance et on règle ça après.
Pour examiner la situation, monsieur le président, je vous demande, sous l’autorité de Mme Lagarde, une suspension de séance de quelques minutes.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures trente.)
Je suis saisi d’un amendement n° 330…
La parole est à M. Philippe Feneuil.
La parole est à M. Dominique Tian.
(La séance, suspendue à seize heures trente-cinq, est reprise à seize heures quarante.)
Alain Vidalies, d’autres orateurs et moi-même nous sommes efforcés, au cours du débat, de montrer que le problème nous paraissait posé hâtivement dans ce texte fourre-tout où tout est mélangé. Nous n’étions pas certains que les résultats soient à la hauteur des déclarations emphatiques prononcées lors de l’ouverture du débat. Eh bien, en voici la preuve !
Nous nous félicitions que l’article 6, présenté par Mme la ministre déléguée au commerce extérieur, constitue manifestement une avancée, ce dont M. le ministre délégué à l’emploi est convenu. Celui-ci a même rappelé qu’il fallait tenir compte des préoccupations et des intérêts des salariés. Mais cet amendement – assez mal écrit, d’ailleurs – verrouille le dispositif. En matière de report de déficit, trois ans viendront s’ajouter à l’année en cours, ce qui représente un total de quatre ans. Ainsi, vous apportez la preuve que, de ce texte turbo, il ne restera rien sinon un coup de sifflet, ou plutôt de trompette, sans aucun effet positif. Et vous donnez satisfaction à des lobbies bien connus.
Vous prenez prétexte de la situation des petites entreprises pour justifier de ce projet de loi. Or ce n’est pas à elles que ce texte s’adresse, mais aux majors, comme l’a rappelé M. Vidalies. Alors, je vous en prie, un peu de pudeur ! Évitez de nous servir votre couplet sur votre grand projet de société !
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
Nos collègues de l’opposition ne peuvent pas reprocher à la majorité de chercher à trouver la bonne solution, ni d’exercer librement sa décision, ni de légiférer en toute indépendance. Or c’est exactement ce que nous faisons.
Quant à nos propositions sur la participation et l’actionnariat salarié, vous parlez de déclarations emphatiques, monsieur Le Garrec. Moi, je m’en tiens aux faits et je vous réponds, avec toute l’amitié et le respect que j’ai pour vous, que, grâce à notre majorité – je l’affirme devant Édouard Balladur, qui, plus qu’un autre, a fait avancer cette cause –, le choix ambitieux du général de Gaulle en faveur de la participation a progressé. Nous n’avons par conséquent aucune leçon à recevoir de vous !
Nous ne pouvons pas entendre certaines de vos accusations. Notre position s’explique par le seul souci de tenir compte des réalités. Face au manichéisme qui consiste soit à supprimer tout report de déficit dans le calcul de la réserve de participation, soit au contraire à laisser les déficits se reporter indéfiniment, il y a un juste milieu, qui commande une position de sagesse.
Plus sérieusement, je ne ferai aucune leçon au ministre, qui peut bien penser ce qu’il veut. Mais vous, monsieur le rapporteur pour avis, ne vous lancez pas dans des discours philosophiques sur la nouvelle société. M. le rapporteur en reste bouche bée, d’ailleurs, alors qu’il était en forme hier. Vive le gaullisme !
À présent, vous proposez la rédaction suivante : « sans que ce bénéfice puisse être diminué des déficits constatés au cours des exercices antérieurs de plus de trois ans à l’exercice en cours. » Bravo !
La majorité s’est rendu compte que, de plus en plus souvent, les bénéfices des grandes entreprises diminuaient, alors même que, selon la Banque de France, 1 300 milliards de dollars vont aux placements financiers – n’est-ce pas, monsieur Balladur ? Cet argent ne s’investit ni dans la production ni dans la technologie ni dans les hommes, mais dans les placements financiers où il fait des petits. L’argent est là et on ne sait pas qu’en faire, aux dires même de la Banque de France. C’est extraordinaire !
Quant à la participation reversée aux salariés, elle diminue, puisque toutes les entreprises, et je peux vous emmener dans des dizaines d’entre elles, dans ma région – Valeo, Dunlop, Goodyear, Procter et Gamble, Plastic Union, Laperche –, il n’y a jamais de bénéfice. L’intéressement a disparu. De mon temps, j’avais deux actions chez Valeo ; aujourd’hui, tout cela est passé de mode. Cette société ne fait plus de profit ni à Amiens ni à Abbeville. Pourquoi ? Un observateur l’a étudié attentivement : on déduit des profits les impôts, les cotisations sociales, dont on nous assure qu’elles n’appartiennent pas au salaire, alors qu’elles sont payées par les salariés, et désormais on déduira aussi les déficits antérieurs. C’est formidable !
Pour ma part, j’aurais voté l’amendement du Gouvernement. Mais celui-ci se trouve isolé. De ce fait, il est obligé de battre en retraite et de nous proposer cet amendement n° 330, qui tend à diminuer les sommes à reverser « des déficits constatés au cours des exercices antérieurs de plus de trois ans à l’exercice en cours ». Mais quelle entreprise n’a pas eu de déficit durant les trois dernières années ?
À côté de ce dividende, nous avons choisi de rassembler sous une même appellation le fruit de la participation financière sous le label « dividende du travail ». Cela signifie que le conseil d’administration d’une entreprise doit, à notre sens, formuler une proposition pour déterminer ce dividende du travail, ce qui sera d’autant plus facile que siégeront au conseil d’administration des représentants des actionnaires salariés, qui apportent en même temps capital et travail.
Le problème est un peu le même pour le dividende du travail. Il paraît difficile de le distribuer quand les résultats sont négatifs. C’est ainsi qu’il faut poser le problème.
Il est convenu que la réserve spéciale de participation dont est issu le dividende du travail est définie non pas par l’assemblée générale des actionnaires mais par une négociation, la somme étant calculée sur la base d’une formule légale, qui fixe un minimum. Mais il est clair que, lorsque les résultats sont mauvais, on ne peut distribuer de dividendes ni aux actionnaires, ni au travail. De la même manière, lorsqu’une entreprise a un résultat positif mais qu’elle est obligée d’intégrer des résultats négatifs antérieurs, elle ne distribue pas de dividendes aux actionnaires, et il est donc normal qu’elle ne verse pas de dividende du travail. Je souscris donc entièrement à la proposition qui nous est faite.
Toutefois, monsieur le ministre, la rédaction de l’amendement ne me paraît pas satisfaisante. Si j’ai bien compris, il s’agit de permettre d’imputer sur le résultat de l’année en cours les déficits constatés au cours des trois années antérieures. Je propose donc un sous-amendement, dont la rédaction me semble plus claire, puisqu’il vise à substituer aux mots : « de plus de trois ans à l’exercice en cours » les mots : « à l’exercice en cours dans la limite de trois ans ».
La parole est à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur.
L’amendement n° 330 rectifié est libellé comme suit :
« Rédiger ainsi l’alinéa 4 de l’article 6 :
« b) La phrase est complétée par les mots : “ sans que, pour les entreprises qui n’ont pas conclu d’accord dérogatoire de participation, ce bénéfice puisse être diminué des déficits constatés au cours des exercices antérieurs de plus de trois ans à l’exercice en cours.” »
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures vingt.)
La parole est à M. le ministre délégué à l’emploi.
Je précise que seront imputables sur la réserve spéciale les déficits constatés au cours des années n – 1, n – 2 et n – 3. Nous avons également tenu compte des préoccupations exprimées par M. Gaillard et M. Cornut-Gentille.
J’invite par conséquent l’Assemblée à adopter cet amendement rectifié, étant précisé que je souhaite que le délai correspondant à l’examen du projet par le Sénat soit mis à profit pour mener une réflexion approfondie et prendre en compte l’ensemble des préoccupations qui ont été exprimées, afin d’aboutir à un texte répondant en tout point aux questions soulevées par les uns et les autres.
J’ai bien noté, par ailleurs, que M. Gaillard retirait son amendement.
Je suppose que vous retirez aussi votre sous-amendement, monsieur Guillaume ?
Nous allons maintenant procéder au scrutin qui a été annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 330 rectifié.
Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
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Voici le résultat du scrutin :
L'Assemblée nationale a adopté.
Je mets aux voix l'article 6, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 6, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. François Guillaume, pour le soutenir.
Le dispositif proposé s’inspire du système britannique des phantom shares, c’est-à-dire les « actions fantômes », ainsi dénommées parce qu’elles ne sont jamais attribuées. Lors du départ du salarié, celui-ci bénéficie d’une somme correspondant à une partie de ces actions fantômes – dont il n’a pas la possession –, qui représente sa part contributive à l’enrichissement de la société durant la période où il y a exercé son activité.
Notre proposition s’apparente également à un dispositif que nous avons adopté au profit de la coopération agricole, exemple même de la participation réussie, puisqu’il aboutit à conférer aux agriculteurs la double qualité d’actionnaires et d’apporteurs en industrie – ils sont en effet à la fois détenteurs de parts sociales et fournisseurs de leur production en nature. Ayant constaté que les coopératives s’enrichissaient sans que cela profite à personne, à la façon d’une mainmorte, nous avions cherché à faire en sorte qu’une partie de cet enrichissement puisse bénéficier aux coopérateurs au moment de leur cessation d’activité, afin de compenser une retraite généralement assez faible. C’est donc également de ce dispositif, adopté en son temps par le Parlement, que nous nous inspirons aujourd’hui pour l’amendement n° 292.
Deuxièmement, les actions fantômes concernent essentiellement des entreprises qui ne sont pas cotées. Lors du départ des salariés, l’évaluation de ce qui leur est dû par l’entreprise – des parts sociales plutôt que des actions – se fait à dire d’expert à partir de ratios portant notamment sur la valeur des actifs.
Par ailleurs, j’ai bien noté que le dispositif que vous proposez concerne essentiellement des entreprises non cotées, ce qui justifie que vous parliez de parts sociales plutôt que d’actions. Le problème, c’est que la rédaction de votre amendement ne comporte pas cette précision, mais mentionne simplement « un nombre préalablement fixé d’actions ». C’est ouvrir le champ à des entreprises et des actions de toute nature, et il me semble que personne – pas même vous, sans doute – ne mesure la réelle portée de ce que vous nous proposez : un changement de nature de la participation, introduit au moyen d’un simple amendement, et que le Gouvernement s’apprête à entériner sans plus d’explications.
Par ailleurs, cette disposition correspond à une pratique déjà mise en œuvre, l’amendement de M. Guillaume visant surtout à en fixer juridiquement le principe. Quand la valeur de l’action – de l’entreprise, et non de l’inter-entreprise – augmente, les salariés en bénéficient. À l’inverse, une baisse de la valeur de l’action n’a aucune conséquence pour les salariés.
J’espère, monsieur Vidalies, que ces précisions très claires sont de nature à dissiper les craintes que vous avez exprimées au sujet d’un amendement qui, je le répète, ne vise qu’à consacrer sur le plan juridique une pratique existante.
(L'amendement est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, pour le soutenir.
Je précise d’ores et déjà au Gouvernement que nous ne sommes pas bloqués sur le montant de la prime prévu à hauteur de 1 000 euros dans l’amendement. Nous sommes tout prêts à faire preuve de souplesse, l’important étant d’envoyer un signal aux salariés des PME.
Monsieur le président, si vous le permettez, je reprendrai la parole après avoir entendu le Gouvernement.
En pratique, toutefois, je m'interroge sur le dispositif proposé par cet amendement. Il établit en effet un intéressement « du troisième type », sous la forme d'une « prime de partage des profits » pour l'ensemble des salariés des petites entreprises, dans des conditions très différentes de celles applicables aux accords d'intéressement et de participation. Or je crains que nous n'allions ainsi vers une complexification accrue des dispositifs d'épargne salariale, ce que le présent projet de loi cherche justement à éviter.
C'est la raison pour laquelle j'ai pris l'initiative, avec Patrick Ollier, de déposer un autre amendement qui poursuit le même objectif, mais en se coulant dans les dispositifs existants. Il propose en effet aux entreprises de moins de cinquante salariés de mettre en place, à l’initiative de l’employeur, un régime de participation dans le cadre de l'article L. 442-12 du code du travail, qui définit d'ores et déjà un régime de participation simplifié –une seule modalité de gestion, les comptes courants bloqués, et une seule modalité de répartition, le salaire. Le chef d'entreprise aurait en outre la possibilité de choisir une formule dérogatoire de participation, dans les conditions elles aussi déjà définies à l'article L. 442-6 du code du travail.
Pour l'ensemble de ces raisons, qui, je le redis, touchent plus les moyens que la fin, il me paraît donc préférable de ne pas accepter l'amendement n° 43, qui a été repoussé par la commission.
Outre le risque que M. Larcher mentionnera sur les aspects négatifs du développement des régimes d’intéressement et de participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés auquel nous aspirons, cet amendement a un coût. Celui-ci, chiffré de manière un peu sommaire, je l’avoue, donne, en montée en puissance du mécanisme, 250 millions d’euros en termes de cotisations de sécurité sociale et pourrait aller jusqu’à 1 milliard d’euros en année pleine et dans l’hypothèse où la plupart des entreprises utiliseraient cette disposition. Cette somme est importante et aurait, en tout état de cause, un impact significatif sur les régimes sociaux. Dans ces conditions, votre amendement aurait plus sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale qui viendra prochainement en discussion devant l’Assemblée.
En outre, en l’état de sa rédaction, je me demande si nous pourrions véritablement lever le gage qu’il prévoit.
Votre amendement, dont nous comprenons bien les motivations, pose, comme l’a dit Mme Lagarde, un certain nombre de problèmes, et notamment celui de la franchise de cotisations sociales pour des versements qui ne relèvent pas de la participation. Il s’agit plutôt de primes ou de bonus. Vous aviez d’ailleurs intitulé votre proposition de loi, dont on retrouve l’esprit dans cet amendement, « Prime de partage ». Mais vous aviez précisé que ce dispositif ne devait pas percuter les systèmes d’intéressement, de participation ou d’épargne salariale. À ce titre, votre amendement fait échapper à l’assiette des cotisations sociales des revenus qui, de fait, sont très proches des revenus salariaux. Comme l’a dit Mme Lagarde, l’Assemblée va examiner dans quelques semaines le projet de loi de financement de la sécurité sociale, et ce sera là précisément une question majeure.
Votre proposition est d’ailleurs proche dans son esprit du bonus de 1 000 euros que le Premier ministre a mis en place il y a un an. Mais ce bonus était encadré : valable pour un an seulement et conditionné à la conclusion d’un accord afin qu’il ne vienne pas en concurrence des négociations que nous avions engagées. Nous devrions pouvoir dire dans quelques mois quel a été l’impact de ce bonus.
Ainsi que l’a souligné Mme Lagarde, les conséquences financières de votre proposition, notamment sur les finances sociales, doivent être examinées. Dans le cadre d’un parallélisme entre votre mesure et le bonus voulu par le Premier ministre, nous souhaitons, monsieur Joyandet, que vous retiriez votre amendement.
Le Gouvernement a décidé ce matin de faire voter un amendement qui ne nous satisfait pas. Celui-ci prévoit en effet qu’il appartiendra au chef d’entreprise de prendre unilatéralement la décision, avec cependant des modalités de calcul qui s’inscrivent dans celles de la participation.
Mais avec votre amendement, monsieur Joyandet, on change complètement d’approche et c’est alternatif : soit les entreprises de moins de cinquante salariés restent sur les mécanismes de la participation et on essaie de les généraliser, soit on admet que cela n’est pas possible et on invente un nouveau système, telle cette prime de partage des profits. Pour une fois, je ferai miens les arguments de M. le ministre. Qui ne voit en effet que cette affaire va aboutir à une franchise de cotisations sociales et à un supplément d’abattements de cotisations sociales pour un montant compris entre 250 millions et un milliard d’euros ?
Si, dans un texte d’une telle nature, on en arrivait à un tel résultat, ce serait une forme de provocation pour ceux qui croient un peu – et je ne mets pas en doute leur sincérité – à la démarche qui nous est proposée. Nous sommes tout à fait hostiles à cet amendement.
Pour les très petites entreprises, je défendrai en revanche l’amendement de M. Joyandet, car leurs chefs répugnent – et nous pouvons les comprendre – à s’engager dans des démarches administratives lourdes et assorties de divers contrôles. En revanche, ils ne sont pas opposés à donner à leurs salariés des avantages liés aux résultats de leur entreprise. Ils le font directement, en dehors de tout contrôle. Et là, on échappe à toutes les dispositions fiscales et sociales.
Pour régulariser cette situation, le rapporteur pour avis de la commission des finances aurait donc tout intérêt à préciser dans son amendement que ce dispositif s’adresse aux très petites entreprises, celles comptant moins de dix salariés et pour lesquelles il faut un système simple. Leurs dirigeants doivent pouvoir l’appliquer en effet sans être contraints par des dispositions législatives et réglementaires complexes qui les obligeront à accroître encore le temps qu’ils dépensent à régler tous les problèmes administratifs auxquels ils sont confrontés pour leur toute petite entreprise.
Sur la question des 1 000 euros, monsieur Joyandet, j’ai bien compris que vous étiez ouvert. Pour ma part, je préférerais un pourcentage car une somme se dévalorise avec le temps, et cela nous obligerait à en débattre à nouveau au Parlement. Mais ce point pourrait être rectifié plus tard. L’essentiel est d’adopter une telle disposition, faute de quoi la participation ne touchera pas les très petites entreprises.
Mme la ministre craint que cette disposition ne nous prive de cotisations sociales. Mais si ces petites entreprises signaient un accord d’intéressement – ce qu’elles ne feront pas, j’ai expliqué pourquoi –, elles bénéficieraient aussi d’exonérations fiscales et sociales, ce qui entraînerait une perte de recettes pour la sécurité sociale et les finances publiques.
Tout cela est assez amusant, sauf pour les gens qui vous regardent…
Mais revenons à l’amendement de la commission des finances. Franchement, vous vous moquez du monde ! Vous ne cessez de dire, au fil des heures, qu’il faut tout faire pour encourager l’actionnariat salarié, l’intéressement des salariés et la participation des salariés à la gestion de l’entreprise, et pour réconcilier le capital et le travail – exploit que nul n’a jamais réalisé, car leurs intérêts sont toujours contradictoires. Mais, comme le disait Karl Marx, c’est la contradiction qui fait avancer les choses ! Les béni-oui-oui n’ont jamais fait progresser le monde, on l’a vu avec les assemblées de godillots ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) La formule n’est pas de moi : c’est l’UNR qui a été désignée comme le parti godillot, le groupe godillot qui n’était là que pour lever et baisser le bras !
Je reviens au sujet qui nous occupe. Vous dites vouloir favoriser l’intéressement. Mais que faites-vous pour les millions de salariés des entreprises de moins de cinquante salariés qui n’en bénéficient pas, sans parler de la fonction publique, que vous avez exclue ? Je rappelle que seuls 8 millions de salariés sur 22,5 millions bénéficient aujourd’hui de la participation. Il reste donc beaucoup de chemin à faire.
Après nous avoir proposé de laisser le choix aux entreprises de moins de cinquante salariés, vous proposez maintenant que celles qui seraient réticentes puissent s’en sortir en versant une prime à leurs salariés, naturellement exonérée de charges sociales – alors que le montant total des exonérations de cotisations patronales est déjà de 23 milliards d’euros, ce qui explique pourquoi notre sécurité sociale est dans le rouge !
Il ne faut pas contraindre les petites entreprises, dites-vous, mais vous les encouragez à ne pas signer d’accords d’intéressement et de participation. Monsieur Dubernard, cela devrait vous interpeller !
Comme l’indique un récent rapport sur les salaires et l’intéressement, alors que les salaires stagnent, on distribue de plus en plus de primes. Je vous fais observer qu’une prime peut être supprimée du jour au lendemain et qu’elle ne compte pas pour le calcul de la retraite.
Telle est votre politique : bas salaires et primes exonérées de charges, versées au bon vouloir de l’employeur. Un employeur qui ne fera pas de profits n’accordera pas de primes. Il est vrai que les grandes entreprises, celles qui emploient les 8 millions de salariés concernés, ne font jamais de bénéfices, ou bien elles les investissent ailleurs…
Nous sommes donc résolument opposés à cet amendement qui va à l’encontre de l’objectif affiché d’encourager et de développer l’intéressement, la participation et l’actionnariat salarié.
J’en reviens à l’amendement. Je comprends très bien le problème qu’a évoqué M. Joyandet. Les salariés des petites entreprises ne doivent pas être exclus de la participation. Cela étant dit, bien des points demeurent flous. Quelles sont les entreprises visées ? Quel doit être le montant de la somme allouée ? Sur le fond, ce qui m’inquiète, c’est l’impact de ce texte sur les cotisations sociales et sur la prime de 1 000 euros instituée par le Premier ministre. Il faudra très rapidement évaluer l’impact de ce texte dans les petites entreprises, pour s’assurer notamment que le nouveau dispositif est un complément des autres, et non une alternative.
Je ne suis personnellement pas favorable à cet amendement, mais pas pour les mêmes raisons que la gauche, et M. Gremetz, qui, en étant resté à la lutte des classes, ne veut pas de la participation et s’opposera à tous nos amendements. Le problème est bien réel, mais cet amendement risque d’être contre-productif.
En revanche, je conteste formellement les chiffres avancés quant au coût de cette disposition, car le montant total des primes versées est plafonné à 15 % des bénéfices et les entreprises de moins de cinquante salariés qui réalisent des bénéfices sont peu nombreuses.
Alors que depuis le début de notre débat, nous sommes prêts à tout pour renforcer la participation dans les grandes entreprises, où elle existe déjà, je regrette ce refus d’ouverture en direction des petites et moyennes entreprises, mis à part l’amendement que notre commission a cosigné avec la commission des affaires économiques. Je ne souhaitais pas relancer le débat, mais je tiens à ce que mes propos figurent au Journal officiel : cette disposition ne coûterait pas plus de 100 à 150 millions d’euros, en tout cas beaucoup moins que l’ensemble des dispositifs adoptés depuis hier soir, notamment en levant un certain nombre de gages. Compte tenu du plafond fixé à 15 % des bénéfices, ce ne sera pas 1 000 euros, mais, si quelques centaines de milliers de salariés pouvaient en profiter, ce ne serait déjà pas si mal !
Je regrette cet état d’esprit qui ne prend pas en compte ce qui se passe sur le terrain. Je vous signale que l’amendement que nous avons cosigné n’aura aucun effet sur le développement de la participation dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Quant à celui sur le report des déficits antérieurs, que nous avons adopté tout à l’heure avec une certaine gêne, il dissuadera bien davantage les petites entreprises les plus frileuses de verser de la participation à leurs salariés que ne l’aurait fait celui-ci.
Je pourrais maintenir cet amendement, d’autant qu’il a été adopté par la commission des finances, mais il n’est pas dans mon habitude de m’opposer au Gouvernement. Je vais donc le retirer, tout en regrettant que nous n’ayons rien fait pour les salariés des petites entreprises, qui n’auront pas, eux, leur livret d’épargne salariale. Cela étant, nous continuerons le combat, chers collègues, parce qu’un certain nombre d’entre nous sont confrontés aux problèmes des petites et moyennes entreprises, et nous le ferons toujours de manière constructive. Mais je n’oublie pas que j’appartiens à une majorité, et je suivrai donc le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir ces amendements.
Je mets aux voix l’amendement n° 87.
(L’amendement est adopté.)
(L’amendement est adopté.)
(L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir cet amendement.
Par cet amendement, nous proposons qu’avant la négociation annuelle sur les salaires soit fourni un indicateur portant à la fois sur la masse salariale et sur les dispositifs d’intéressement et de participation afin que les données soient connues de tous dans la négociation salariale. Cela nous paraît être une précaution utile.
Avec Patrick Ollier, nous avons déposé deux amendements identiques, nos 109 et 313, portant article additionnel après l’article 14, qui visent au contraire à regrouper dans un même rapport toutes les informations, dans un autre domaine, il est vrai.
Votre amendement, monsieur Vidalies, ne nous paraît pas crédible.
Premièrement, depuis l’origine de la participation, c’est un souci permanent que de ne pas mélanger les genres.
Deuxièmement, il importe de prendre en compte les évolutions récentes des salaires, particulièrement les plus bas, notamment avec la revalorisation du SMIC.
Troisièmement, n’est-il pas paradoxal de vouloir entraver un processus qui permet, encore aujourd’hui, à environ 8 millions de salariés de toucher près de 2 000 euros supplémentaires chaque année ?
La commission a émis un avis défavorable.
Nous disposons des outils qui permettent de prévenir toute substitution grâce au Conseil supérieur de la participation et à la Commission nationale de la négociation collective. Nous avons déjà souligné leur rôle et leur place : l’un veille à l’évolution de la participation, l’autre à l’évolution salariale, avec en son sein une sous-commission des salaires qui se penche précisément sur ces sujets.
Par ailleurs, il existe déjà de nombreux indicateurs et nous sommes en train d’en construire de nouveaux, sur le temps partiel en particulier. Il appartient aux partenaires sociaux de les concevoir et de les bâtir ensemble, notamment dans le cadre des lieux de dialogue social que je viens de mentionner.
Voilà pourquoi nous ne sommes pas favorable à cet amendement.
Votre argumentation ne me paraît pas pertinente, monsieur le ministre.
(L'amendement n'est pas adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir ces amendements.
Il s’agit d’une précision technique, qui vise à harmoniser les procédures. Le projet de loi prévoit la possibilité d’un dépôt commun d’un accord d’intéressement et d’un accord de participation. Néanmoins, il laisse à l’écart les règlements des plans d’épargne.
Il nous a semblé plus rationnel de favoriser le dépôt commun de ces règlements et accords.
La commission a adopté ces amendements dans un souci de simplification et de clarification des dispositifs de participation.
(Ces amendements sont adoptés.)
« L'arrivée de Fernand Grenier, l'adhésion du parti communiste au Comité national qu'il m'a apportée en votre nom, la mise à ma disposition, en tant que commandant en chef des Forces françaises combattantes, des vaillantes formations de francs-tireurs que vous avez constituées et animées, voilà autant de manifestations de l'unité française, voilà une nouvelle preuve de votre volonté de contribuer à la libération et à la grandeur de notre pays. Convaincu que votre décision apporte une contribution importante à l'intérêt national, je vous en remercie sincèrement.
« De grands efforts, de grands sacrifices vous seront demandés après tous ceux que les membres de votre parti ont déjà consentis au service de la France.
« Vous savez comme moi qu'une coordination efficace des organisations de résistance est indispensable au but que nous poursuivons en commun : la libération de la France aussi tôt que possible avec la participation active et efficace des Français. Je suis certain que les représentants que j'ai désignés trouveront chez les responsables du parti communiste français une volonté de coopération poussée jusqu'à l'esprit de sacrifice et la même loyale discipline qui existe déjà à l'intérieur de vos organisations. Mes représentants vous feront part des décisions prises ici et auxquelles Fernand Grenier a participé.
« Vous aurez su que, dès sa réception, j'ai acheminé sur l'Afrique du Nord la lettre destinée aux députés communistes emprisonnés. » …
« L'heure des plus durs efforts approche. Au moment où, sous les coups des vaillantes armées russes, la puissance militaire allemande chancelle, il importe que les Français patriotes prennent leur part, aux côtés de nos alliés russes et anglo-saxons, à la libération du territoire national. Je sais que la France combattante peut compter sur le parti communiste français. »
Je vais avoir le plaisir de vous remettre une copie de ce texte.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Je mets aux voix l’amendement n° 90.
(L'amendement est adopté.)
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
(L'amendement est adopté.)
(L'article 8, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre cet amendement.
(L'amendement est adopté.)
Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 9.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour les soutenir.
Le Gouvernement, dès lors qu’il est soucieux de voir se diffuser le projet participatif dans toutes les strates de la société, devrait en effet être le premier à mettre en œuvre l’intéressement dans la fonction publique, qu’il s’agisse de la fonction publique d’État, de la fonction publique hospitalière ou la fonction publique territoriale. Le projet d’intéressement permettra la participation de l’ensemble des agents à la définition et à l’évaluation des critères de performance.
Nos amendements visent à préciser que les indemnités prévues par l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983 peuvent être calculées en fonction des résultats ou des performances d’un service, selon une formule comparable à celle des accords d’intéressement passés sur le fondement du code du travail. Ils précisent également que les modalités des accords d’intéressement prévus par le code de la santé publique sont identiques à celles des accords prévus par le code du travail. Ces amendements ouvrent ainsi la voie à l’extension de l’intéressement dans la fonction publique.
En tant que maire de Rueil-Malmaison, j’ai essayé, avec l’ensemble des 2 400 salariés et agents de la ville, de mettre en place un projet d’intéressement. Celui-ci comporte des objectifs de service, une évaluation et une prime liée au respect de ces objectifs. Il fonctionne bien, à la satisfaction de tous. Nous avons pu constater non seulement un enthousiasme certain, mais aussi une véritable volonté de s’approprier cette forme de participation, ce qui est de nature à nous rassurer sur la réception d’un tel projet au sein de la fonction publique.
Le Gouvernement s’honorerait d’aller dans le sens de nos propositions. Après les très petites entreprises, il est opportun d’ouvrir maintenant le débat sur la participation dans la fonction publique et les entreprises publiques.
Comme vient de l’indiquer M. Ollier, de nombreux établissements et services semblent prêts à multiplier ce genre d’expérience. Il serait dommage que le législateur ne puisse, le moment venu, favoriser celle-ci, et c’est pourquoi nous adressons un signe fort dans cette direction.
L’absence de la participation au niveau de la fonction publique est une des lacunes de ce texte. Ce sont 8 millions de salariés, soit environ la moitié des 15 millions de salariés du secteur non marchand, qui sont déjà concernés. Pourquoi mettre à l’écart de ce grand projet les fonctionnaires des trois fonctions publiques ? Patrick Ollier a cité l’exemple de sa mairie de Rueil-Malmaison, et de nombreuses autres expériences sont en cours dans d’autres villes. Nous savons que la fonction publique territoriale est intéressée. De même, on ne peut que s’étonner de voir mettre à l’écart la fonction publique hospitalière alors que le rapport de François Cornut-Gentille et de Jacques Godfrain dit clairement que la participation doit être une ambition pour tous.
Nous ne souhaitons pas que la discussion d’aujourd’hui s’achève sans que ce chantier ait été ouvert. Nous attendions du Gouvernement des signes dans cette direction.
Nous avons entendu, lors des auditions, les représentants de chacune des administrations concernées, et nous avons identifié avec eux les pistes qui permettraient d’aller plus loin, tout en gardant à l’esprit l’absence de résultats, au sens comptable du terme, dans la fonction publique. Mais il y a d’autres manières d’apprécier les choses.
Je me souviens d’avoir été à l’origine de l’introduction, dans la loi de 1991, dite loi Évin, de la notion de conseils de service, devenus conseils de pôle avec les ordonnances de 2005 portant réforme de la gouvernance hospitalière. Ceux-ci ont permis d’informer et d’associer le personnel hospitalier à ce qui se passe dans le service. Monsieur l’ex-président de la Fédération hospitalière de France, j’appelle votre attention sur le fait qu’à ce niveau-là les structures ne correspondent pas à ce que souhaite la base, c'est-à-dire les aides-soignants, les infirmiers, les infirmières, les internes, les médecins, les chefs de clinique, à savoir une information générale, une optique. Si l’hôpital n’est pas une entreprise, ses objectifs sont plus beaux que ceux de n’importe quelle entreprise !
Pourquoi donc ne pas aller plus loin ? Nous pensons qu’il faut aller au-delà de l’expérience de Rueil-Malmaison et de l’expérience hospitalière, même si les ordonnances de 2005 portant réforme de la gouvernance hospitalière constituent un progrès. Pensons aussi à la fonction publique d’État, où la participation existe déjà, mais seulement dans certains secteurs, dans des formes assez limitées et pour certaines catégories de la hiérarchie !
Nous vous demandons donc, monsieur le ministre, de nous donner un signal.
Permettez-moi, au nom du Gouvernement et plus particulièrement de Christian Jacob, de faire le point sur ce sujet.
Vous avez évoqué la fonction publique territoriale et cité l’expérience de Rueil-malmaison – d’autres existent – et l’expérience hospitalière lancée, il y a quinze ans, par vous-même, monsieur Dubernard, dans le cadre de la loi Évin.
La notion d’intéressement n’est pas totalement étrangère à la fonction publique. Il existe déjà des dispositifs qui permettent de rémunérer les agents en fonction de leur manière de servir ou des objectifs atteints. Nous disions ce matin que l’intéressement n’était pas fondé sur les seuls critères financiers : nous parlions d’objectifs de qualité, de productivité. Les objectifs ne sont pas toujours liés aux bénéfices financiers ou au chiffre d’affaires.
La rémunération à la performance a ainsi été mise en place pour les directeurs d’administration centrale, pour certains agents du ministère de l’économie et des finances et pour les policiers en 2004. Cette question a été abordée dans le cadre des conférences de gestion des ressources humaines conduites par le ministère de la fonction publique avec chacun des ministères. Le prochain cycle de conférences qui sera lancé portera notamment sur la question de l’harmonisation et de la refondation indemnitaire en lien avec la notion d’intéressement.
Christian Jacob a récemment installé un groupe de travail sur la modernisation du dialogue social dans la fonction publique. Nous évoquons le dialogue social dans le secteur privé, auquel, monsieur Dubernard, monsieur Ollier, vous avez fait référence à plusieurs reprises. Nous aurons, sans aucun doute, l’occasion de nous retrouver ici même pour en débattre. Le ministre de la fonction publique a proposé aux partenaires sociaux de travailler sur les critères qu’il convient de retenir pour évaluer la performance d’un service. Ceci rejoint des préoccupations que vous avez exprimées pour l’hôpital, monsieur Dubernard. Ainsi, on peut imaginer de progresser vers l’intéressement collectif par service.
Le Gouvernement souhaite aussi avancer sur l’intéressement des fonctionnaires, ce qui répond aux préoccupations que vous avez exprimées. Il peut s’engager à informer le Parlement des démarches entreprises dans la fonction publique en faveur de la prise en compte des résultats et de la performance dans la gestion des parcours professionnels et des régimes indemnitaires des fonctionnaires. Voilà pourquoi le Gouvernement est favorable aux amendements identiques nos 98 et 6, qui seront appelés dans quelques instants.
Nous répondons donc à votre souhait d’engager le dialogue sur ces sujets dans le cadre de la fonction publique et d’en rendre compte au Parlement.
M. Dubernard et moi-même sommes conscients des difficultés auxquelles se heurte le règlement de ce problème dans la fonction publique et dans les entreprises publiques. Nous comprenons donc votre souci d’avancer progressivement, grâce au dialogue social et aux négociations avec les intéressés.
Nous souhaitons seulement interpeller Christian Jacob, avec qui nous en avons déjà discuté. Vous êtes vous-même un fin connaisseur de la fonction publique hospitalière. Nous avons ferraillé ensemble, si je puis dire, sur ces sujets il y a quelques années et je sais que vous êtes soucieux de voir avancer les choses dans ce domaine.
J’ajoute que vous avez milité en faveur de la participation, notamment dans la fonction publique hospitalière, quand vous étiez président de la commission des affaires économiques du Sénat. Je tiens à vous rendre hommage car nous avons partagé et nous partageons encore le même combat. N’allez pas imaginer que nous souhaitons mettre en difficulté le Gouvernement que nous soutenons : nous voulons seulement vous interpeller et nous vous demandons un geste fort. Ne nous contentons pas de déclarations d’intention !
Christian Jacob nous avait dit que vous prendriez des engagements sur l’ouverture des négociations en vue de mettre en œuvre l’intéressement et dans les entreprises nationales et dans les fonctions publiques. Vous répondez à notre appel avec le groupe de travail qui aboutira, je l’espère, à des propositions, et je pense que M. Dubernard partage ce sentiment. Comme vous répondez à l’appel du Parlement, nous sommes prêts à retirer les amendements nos 96 et 5 si vous acceptez les amendements nos 98 et 6 qui prévoient que, dans un délai d’un an suivant la date de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport. Ainsi, les négociations et cette évolution seront encadrées dans le temps. Nous estimons que ce délai d’un an doit permettre, non seulement d’ouvrir les négociations, mais aussi de les faire suffisamment avancer pour qu’elles se rapprochent d’un accord.
Je suis saisi des deux amendements identiques, nos 98 et 6.
La parole est à M. le rapporteur, pour les défendre.
(Ces amendements sont adoptés.)
La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir cet amendement.
Il conviendrait de laisser subsister une faculté qui donne pleine satisfaction à la fois aux entreprises et aux salariés.
J’avoue ne pas très bien comprendre le sens de l’article 10.
Le projet de loi vise notamment à confirmer la place centrale qu’occupe d’ores et déjà le PEE au sein des dispositifs de participation. En organisant de façon systématique le fléchage des sommes constituant la réserve spéciale de participation vers le PEE, l’article 10 contribuera à l’objectif, de même que l’article 16, qui autorisera le placement d’actions gratuites sur le PEE.
Je souhaite insister sur le rôle central du PEE et sur son succès au sein des dispositifs d’épargne salariale. Selon le dernier rapport du Conseil supérieur de la participation, l’accès et l’utilisation des PEE sont en forte hausse : près de 5 % des entreprises proposent désormais un PEE à leurs 4,9 millions de salariés. Parmi eux, 3,6 millions utilisent réellement cette possibilité pour épargner et ce chiffre a augmenté régulièrement ces dernières années. Le même rapport note que la participation demeure la principale source d’alimentation des plans d’épargne entreprise. Il est vrai que le PEE présente des avantages considérables pour les employeurs, comme pour les salariés : par exemple, le régime fiscal et social de l’abondement par l’employeur est très attractif.
Mais, en droit, les sommes versées au titre de la participation peuvent être gérées par d’autres moyens que les PEE : attribution d’actions de l’entreprise, souscription d’actions émises par les sociétés créées par les salariés en vue de la reprise de leur entreprise, acquisition de titres de fonds communs de placement de l’entreprise ou de SICAV, affectation à un fonds d’investissement d’entreprise sous forme de compte courant bloqué. Toujours selon le Conseil supérieur de la participation, les trois principaux types de placement retenus sont : les FCPE, le PEE et les comptes courants bloqués.
Si l’on tient compte du fait que les FCPE peuvent être proposés dans le cadre d’un plan d’épargne, seule la disparition des comptes courants bloqués – du fait de l’article 10 – serait susceptible de poser problème. De fait, les auditions nous ont montré qu’il paraît scandaleux à certains d’éliminer les autres modèles de gestion des sommes versées au titre de la participation. Le débat porte en particulier, comme le souligne l’exposé des motifs de l’amendement, sur l’avenir des comptes courants bloqués.
Mais de là à supprimer l’article 10 dans son intégralité, voilà qui serait abusif. C’est la raison pour laquelle il n’est pas possible de voter cet amendement. J’indique dès à présent que la commission a accepté un amendement de M. Cornut-Gentille, proposant une voie moyenne, pour laisser ouverte la possibilité de placer les sommes perçues au titre de la participation sur des comptes courants bloqués.
Je me tourne vers le Gouvernement afin de savoir comment vous entendez, madame et monsieur les ministres, prendre en considération la question délicate des comptes courants bloqués.
La commission a repoussé l’amendement n° 184.
Les accords de participation peuvent prévoir que la réserve spéciale de participation soit exclusivement gérée sur des comptes courants bloqués. C’est ce que vous souhaiteriez voir maintenu, monsieur Tian. Or de tels comptes au sein de l’entreprise peuvent poser un problème de sécurité pour les salariés en cas de difficultés financières de l’entreprise. Dans le cadre de la sécurisation des avoirs, nous nous interrogeons.
Le Gouvernement comprend la volonté des partenaires sociaux de conserver ce mécanisme dont la rémunération peut être favorable aux salariés, mais il souhaite aussi laisser aux partenaires sociaux d’autres possibilités. Voilà pourquoi l’amendement n° 221 nous paraît pouvoir répondre à l’objectif de modernisation de l’épargne salariale. En effet, il instaure l’obligation d’ouvrir un PEE dès lors qu’un accord d’intéressement ou de participation est signé, sans supprimer pour autant le versement sur les comptes courants bloqués s’il se fait parallèlement à l’alimentation du PEE et fait l’objet d’un accord.
Cependant, le Gouvernement a déposé un sous-amendement, n° 333, à l’amendement n° 221.
Ce sous-amendement vise à supprimer le dernier alinéa de l’amendement, qui pose un problème de rétroactivité.
Au bénéfice de ces explications, je vous demande donc, monsieur Tian, de vous rallier à l’amendement de M. Cornut-Gentille, modifié par le sous-amendement du Gouvernement. Nous apporterions ainsi une réponse pragmatique et sécurisante à la question que vous posez.
Je suis en effet saisi d’un amendement n° 221.
Sur cet amendement, le Gouvernement a déposé un sous-amendement, n° 333.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 221 et donner l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 333..
Quant à l’amendement n° 221 de M. Cornut-Gentille que j’ai repris, il a été adopté par la commission. Il propose une solution équilibrée qui laisse ouverte la possibilité de placer la participation sur des comptes courants bloqués, comme cela se pratique dans certaines entreprises.
(Le sous-amendement est adopté.)
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.
(L'amendement est adopté.)
(L'article 10, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour défendre cet amendement.
Au surplus, cette mesure aura un coût en raison des exonérations fiscales. Le dispositif est destiné à favoriser la retraite par capitalisation, plutôt que la retraite par répartition. Nous en avons déjà débattu, mais nous souhaitons proposer la suppression de dispositions qui s’inscrivent dans un projet politique que nous ne partageons pas.
Sans entrer dans les détails, les articles 11 et 12 ont pour objectif commun de favoriser le développement des PERCO, à propos desquels on a entendu tout et n’importe quoi. Les PERCO marchent bien. Le ministre nous a communiqué les chiffres établis par l’Association française de gestion financière qui datent de juin 2006 : la progression des PERCO s’est accélérée d’un seul coup à partir d’août 2003.
Le dispositif marche, mais il peut encore être développé dans l’intérêt des salariés. Le montant moyen détenu, 3 240 euros, est encore faible, d’où les mesures importantes que nous proposons dans ces deux articles.
Une telle négociation, qui crée les conditions d’un bon dialogue entre partenaires sociaux, n’est assortie d’aucune obligation de résultat. Elle paraît donc de nature à donner une impulsion à la diffusion des plans d’épargne d’entreprise pour les PERCO. Ce sont des plans qui marchent, notamment auprès de souscripteurs assez jeunes, et qui récoltent des fonds importants.
En outre, cet amendement supprimerait la possibilité pour les anciens salariés de continuer à effectuer des versements sur un PERCO lorsque leur nouvelle entreprise n’a pas mis en place un tel plan. Ce serait défavoriser les anciens salariés par rapport à leurs collègues qui peuvent continuer à bénéficier d’une telle disposition.
Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut être que défavorable à l’amendement n° 21.
(L'amendement n'est pas adopté.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour le soutenir.
Vous comprendrez facilement que nous soyons totalement opposés à cette dénaturation du compte épargne temps, que les textes adoptés depuis 2002 cherchent systématiquement à vider de son contenu. Il s’agit encore, puisque vous n’avez pas voulu vous y attaquer de front, d’une remise en cause insidieuse de la réforme des 35 heures.
Je le répète : les articles 11 et 12 visent à améliorer les PERCO et je ne souhaite surtout pas rouvrir le débat fort polémique que nous avions déjà eu sur le sujet il y a plus d’un an, d’autant qu’il a également une portée juridique.
Monsieur Vidalies, permettez-moi de me référer au sociologue Jean Viard, dont les travaux ont fort bien montré que nous entrons dans une forme d’« arythmie » des temps de travail.
Toutefois, cet amendement, monsieur le président Dubernard, est pour moi l’occasion de rappeler le bilan que j’ai présenté, devant votre commission, de la loi sur l’assouplissement des 35 heures. Faisant suite à une proposition de loi que le président Ollier et d’autres parlementaires avaient déposée, son examen avait ici même donné lieu à des débats passionnés.
Or, un peu plus d’une année après l’adoption de ce texte, 1,5 million de salariés avaient déjà fait le choix d’utiliser le compte épargne temps comme dispositif d’assouplissement, en optant ou non pour le PERCO. La progression est, sinon exponentielle, du moins quasi géométrique, puisque nous sommes passés en quatorze mois de 200 millions d’euros à 500 millions d’euros. C’est du reste un sujet dont le Conseil supérieur de la participation a débattu.
Je partage donc totalement le point de vue de la commission.
Du reste, alors qu’on nous avait promis le sauvetage du régime vieillesse, c'est la « Bérézina ». À refuser de prendre des mesures de justice sociale et de responsabiliser les entreprises dans le financement de ce régime, vous avez fait supporter l'intégralité de ces mesures scélérates aux salariés et aux retraités.
Notre système par répartition est donc sérieusement en danger puisque rien n'est fait pour assurer son financement. D'ailleurs, la réforme des cotisations sociales patronales que nous demandons et proposons depuis plusieurs années, et qui a été annoncée par le Président de la République, semble tout à fait enterrée. Vous avez disqualifié toutes les options envisagées ! Avec ce Gouvernement, il faudrait tout changer pour ne rien changer ! Telle est la réalité : sur les trois voies qui avaient été proposées, aucune n’a été choisie sous prétexte qu’elles ne pouvaient améliorer le dispositif ! Donc, on ne fait rien !
Le régime vieillesse est également en danger parce que vous avez mis en concurrence ce système avec la capitalisation, laissant à chacun la responsabilité d'assurer la troisième partie de son existence. Loin d'engager des mesures courageuses et efficaces en matière de financement, qui ne rogneraient pas les droits des assurés, vous complétez, avec l’article 11 et la généralisation des plans de capitalisation – les PERCO –, la panoplie des « coups de canif ».
Ce n'est pas de cette façon qu'on garantira le bénéfice du droit à la retraite pour tous et qu'on assurera un haut niveau de pension, niveau qui, je le rappelle, a baissé de 10 % en dix ans.
La généralisation des PERCO entérine le renoncement à une véritable réforme de notre système de retraite par répartition. On ne saurait pourtant accepter un modèle de société fondé sur la généralisation des fonds de pension puisque, selon une telle conception, chacun devrait assurer son niveau de retraite en fonction des moyens d’épargne dont il dispose à cette fin ! Cela ne ferait que renforcer les inégalités.
Pour toutes ces raisons, nous rejetons avec force le développement massif des PERCO, quels que soient par ailleurs les chiffres que vous pourrez nous donner, monsieur le ministre. Personne n’en est satisfait et ceux qui utilisent cette possibilité, je le répète, le font parce qu’ils y sont contraints et forcés. Un tel développement sera bientôt prétexte à abandonner notre système par répartition et les principes de solidarité entre les générations qui le fondent.
N’oublions pas, enfin, qu’il s’agit d’un nouveau détournement du CET au profit de l'épargne retraite puisque, après être devenu un outil de contournement des 35 heures, vous en faites maintenant un outil de capitalisation pour la retraite. C’est encore une fois le salariat de notre pays, c'est-à-dire le monde du travail, qui en fera les frais – nous aurons l’occasion de revenir plus précisément sur le sujet à l'article 12.
Telles sont les raisons qui justifient notre soutien à l’amendement n° 22.
(L'amendement n'est pas adopté.)
(L'amendement est adopté.)
(L'article 11, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour soutenir cet amendement.
Nous avons déjà dit combien nous étions défavorables à ce principe. Or, la disposition visée par l’amendement va jusqu’à mettre en exergue un tel transfert par l’octroi d’un avantage refusé dans les autres hypothèses ! Inutile de vous préciser que nous y sommes encore plus défavorables !
Je tiens simplement à rappeler ici, monsieur et madame les ministres, combien je suis attaché à la notion de retraite par capitalisation : le PERCO constitue un apport essentiel de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, loi sur laquelle nous avons travaillé 170 heures, si mes souvenirs sont bons.
(L'amendement n'est pas adopté.)
En effet, je tiens à le rappeler – il s’agit en quelque sorte d’un devoir de mémoire –, le compte épargne temps a été institué par la loi de 1994, M. Balladur étant alors Premier ministre. L’objectif était d'inciter les salariés à préférer une rémunération en temps plutôt qu'en salaire ou en primes, à l'instar de la réforme des modalités de compensation des heures supplémentaires opérée par la loi quinquennale sur l'emploi du 20 décembre 1993, laquelle, tout en pénalisant le recours aux heures supplémentaires, favorise leur rémunération en repos compensateur de manière à favoriser l'embauche.
Ces principes, qui présidaient déjà avant les lois Aubry, sont ceux-là mêmes que nous défendons aujourd'hui par nos amendements. Cela constitue pour vous un formidable aveu puisque vous vous employez à prendre le contre-pied de la politique conduite en la matière par M. Balladur, que vous avez par ailleurs abondamment cité ! L’article 12, en effet, en développant la monétarisation du compte épargne temps et donc en autorisant l'employeur à fonctionner à crédit pour ce qu’il doit à ses salariés, s’oppose à tout ce que l’ancien Premier ministre a dit et fait.
Cette monétarisation – dois-je le rappeler ? – a été impulsée par la loi du 17 janvier 2003 de François Fillon, laquelle a permis la constitution d'une telle épargne. Nous étions réservés – vous le savez – sur le principe même du compte épargne temps car il s'agissait d'une RTT à crédit et donc de créations d'emploi à crédit. Toutefois, nous devions reconnaître qu’il s'agissait d'une forme de compensation en raison des heures supplémentaires effectuées par les salariés.
Aujourd'hui, vous ouvrez une autre possibilité d'utilisation de ce compte avec le transfert des droits cumulés dans le cadre du CET vers les plans épargnes retraites, les PEE.
Comme d'autres l’ont observé avant moi, avec cette mesure, non seulement les salariés pourraient dépasser la durée légale du travail fixée à 35 heures sans être payés pour cela puisqu’ils affecteraient ces sommes à un CET, mais ils seraient de plus encouragés à les placer pour leur retraite dans le cadre d’une épargne, placement à l'issue incertaine, et vous le savez bien. Cette mesure s’accompagnera évidemment de larges exonérations fiscales et sociales – il s’agit toujours de se montrer généreux envers les plus riches – qui mettront encore un peu plus à mal le budget de la nation et les comptes sociaux.
C'est une erreur économique totale, nous en avons la conviction : on freine l'embauche, on diminue les recettes des comptes de la nation ou de la sécurité sociale, on fragilise la croissance et, de plus, on favorise la capitalisation dont les économies de tous les pays capitalistes, la nôtre comprise, crèvent aujourd'hui – il suffit pour s’en convaincre de se reporter à l’étude de la Banque de France.
Nous proposons donc de supprimer l’article 12, qui renforce le détournement du compte épargne temps pour en faire un outil d'épargne salariale ou d'épargne retraite.
La parole est à M. Michel Charzat, pour soutenir l’amendement n° 23.
Cet article doit être rejeté dans la mesure où il s’inscrit dans le cadre d’une attaque générale contre les 35 heures, qu’il reviendrait à contourner de manière plus ou moins subreptice. En outre, nous considérons que cette remise en cause de la retraite par répartition au profit de la retraite par capitalisation – désormais encouragée – conduit à une impasse.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques ?
C’est donc faire un bien mauvais procès au Gouvernement que de prétendre qualifier cette disposition de tentative de contournement de la loi des 35 heures. Comme vous le savez, le CET peut être alimenté non seulement par la RTT, mais aussi, notamment, par les primes spécifiques ou par le treizième mois. Aussi, vous comprendrez que le Gouvernement soit défavorable au deux amendements identiques.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 23 et 59.
Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
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Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 10
Nombre de suffrages exprimés 10
Majorité absolue 6
Pour l’adoption 3
Contre 7
L'Assemblée nationale n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Nous en venons à l’article 13.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour défendre cet amendement.
(L'amendement est adopté.)
Cet amendement est défendu et le Gouvernement y est également favorable.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le défendre.
Cet amendement vise à rénover la gouvernance des fonds communs de placement d’entreprise par un double objectif – puisqu’on parle toujours de participation, de gestion, de gouvernance.
Il est ainsi proposé, d’abord, que les conseils de surveillance soient obligatoirement composés en majorité de représentants des salariés. L’épargne salariale ne relève pas du paritarisme : les fonds épargnés déposées sur le FCPE appartiennent aux salariés, et non aux employeurs. Il est normal, de ce point de vue, que, lorsque ce sont les salariés qui alimentent, qui paient, ce soient eux qui gèrent.
Ensuite, les FCPE sont fréquemment des fonds « multi-entreprises ». Un même fonds est fréquemment souscrit par les salariés de plusieurs entreprises, en particulier dans le cas des PME. Actuellement, la législation impose que l’ensemble des entreprises adhérentes soient représentées au conseil de surveillance du fonds. Pour un fonds collectant l’épargne d’une centaine d’entreprises – cas fréquent –, cela représenterait un conseil de surveillance d’au moins 200 membres. Pour résoudre ce problème, il est proposé que les conseils de surveillance des fonds « multi-entreprises » soient désignés sur la base des règles de représentativité du code du travail de manière à permettre de former des conseils de surveillance de taille limitée. Les conseils de surveillance seraient ainsi désignés par les organisations syndicales et patronales représentatives.
Nous n’allons pas demander de scrutin public puisque, si nous votons tout de suite, je constate que nous serons majoritaires.
L’amendement de M. Gremetz a pour objet de rénover la gouvernance des fonds communs de placement. Certes, à ce moment du débat, ce but revêt une grande importance et je félicite M. Gremetz pour cette noble ambition. Or, si le projet vise lui aussi non seulement à rénover certains de ces mécanismes, mais également à les redéfinir, la démarche poursuivie…
La démarche qui sous-tend le projet, disais-je, diffère largement de l’idée qui inspire votre amendement. En effet, là où la loi de modernisation sociale de 2002, acceptez de le reconnaître,…
Mes chers collègues, nous allons devoir trancher dans quelques instants et je ne suis pas sûr…
Si je vous ai uniquement répondu, monsieur Gremetz, sur le plan économique,…
Quoi qu’il en soit, je pense qu’une brève suspension de séance me permettrait d’affiner ma réponse, que je n’ai pas eu le temps de préparer. (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à dix-neuf heures vingt.)
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je mets aux voix l'article 13, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 13, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Courageusement, donc, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée. Notre groupe, pour sa part, votera contre cet amendement…
(L'amendement est adopté.)
J’en viens à l’amendement n° 104.
Cet amendement a une portée rédactionnelle.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
(L'amendement est adopté.)
(L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. François Guillaume, pour le soutenir.
Je le retire.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 107 et 311.
La parole est à M. le rapporteur, pour les soutenir.
Cette négociation présente un intérêt majeur tant pour les employeurs que pour les salariés. Dans les faits, le comité d’entreprise y est souvent déjà associé. Il nous a semblé important de consacrer cette réalité dans la loi. Le comité d’entreprise est une pièce centrale de la concertation dans l’entreprise – c’est du moins ainsi que l’avait conçu le général de Gaulle…
Comme le fait remarquer le professeur de droit Alain Supiot, que je citerai encore une fois, « la complexité assurément excessive du droit des comités d’entreprise et l’inégalité des garanties qu’ils apportent aux salariés selon les entreprises ne doivent pas faire oublier la fonction simple et essentielle qui est la leur : obliger les employeurs à nouer un dialogue avec les représentants de leurs salariés sur toutes les décisions qui les concernent collectivement ».
La disposition proposée entre directement dans le cadre de ce que j’appelle la concertation. Je suis persuadé, monsieur Gremetz, que vous y souscrirez.
Vous avez souhaité, messieurs les rapporteurs, renforcer le dialogue et l’information mutuelle sur la vie de l’entreprise, sur ses perspectives. Cet amendement, qui donne plus d’effectivité au rôle du comité d’entreprise, trouve pleinement sa place à cet endroit du texte. Si certaines mesures techniques ou à caractère financier peuvent parfois sembler ésotériques, nous sommes là au cœur du dialogue social, qui porte tant sur les perspectives de développement de l’entreprise que sur la formation des hommes. Nous sommes aussi au cœur des valeurs de la participation, et c’est pourquoi le Gouvernement est favorable à ces amendements.
Je considère que ces amendements vont dans le bon sens, je le répète, et je ne voterai pas contre. Mais vous ne pouvez pas, alors que vous dites souhaiter promouvoir la participation dans l’entreprise, en rester à une simple association, comme si l’employeur était le seul maître à bord ! Comme si c’était à lui de proposer aux petits gars de les associer à la gestion prévisionnelle de l’emploi ! Il faut décidément aller beaucoup plus loin. Je suis profondément convaincu que les expériences menées par le passé ont failli – même s’il y a eu des avancées – parce que nous avons eu peur de donner des droits nouveaux aux salariés. Ce serait pourtant pour la France un gage d’efficacité, de productivité et de créativité !
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
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Je vais donc mettre aux voix les amendements nos 107 et 311.
Je vous prie de bien vouloir regagner vos places.
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Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 17
Nombre de suffrages exprimés 12
Majorité absolue 7
Pour l’adoption 11
Contre 1
L'Assemblée nationale a adopté.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi, nos 3175, 3337, pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié :
Rapport, n° 3339, de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ;
Avis, n° 3334, de M. Patrick Ollier, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire ;
Avis, n° 3340, de M. Alain Joyandet, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral
de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton