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(La séance est ouverte à quinze heures.)
Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.
Le Conseil d’État vient d’annuler l’accord de 2004 sur le temps de travail dans le secteur de l’hôtellerie-restauration, accord d’ailleurs dénoncé dès l’origine par les deux organisations syndicales majoritaires car contraire à la législation sur la réduction du temps de travail. Il n’y a donc pas de vide juridique, mais simplement l’obligation d’appliquer la loi en vigueur sur les 35 heures.
Cette manœuvre fermerait la porte à toute nouvelle négociation sur un accord révisé portant sur les 35 heures et les salaires, plus favorable aux dizaines de milliers de salariés de l’hôtellerie-restauration, dont chacun connaît – ou devrait connaître – les difficiles conditions d’embauche et de travail, alors que le secteur n’est pas exposé à une concurrence internationale acharnée.
Monsieur le Premier ministre, les salariés de l’hôtellerie-restauration ne sont pas des travailleurs de seconde zone. Ils ont droit à un accord progressiste. Nous vous demandons donc d’appliquer la loi et de faire retirer cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
Ce secteur, madame la députée, s’est engagé dans une stratégie positive reposant sur deux éléments : d’abord, le contrat de croissance, signé par le Gouvernement et les organisations patronales pour baisser les charges sociales en vue de créer de l’emploi : 40 000 emplois supplémentaires sont ainsi attendus dans un secteur qui en a déjà créé 30 000 au cours des deux dernières années. Ensuite, l’engagement des organisations patronales de renégocier la grille salariale, toujours libellée en francs et qu’il faut évidemment actualiser.
La décision du Conseil d’État vient perturber cette stratégie positive de dialogue social et de reconstruction d’un secteur fragile. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement regardera favorablement toute initiative parlementaire à même de sécuriser les salariés et les entreprises,…
Nous sommes un certain nombre d’élus à avoir régulièrement appelé votre attention, monsieur le ministre d’État, ainsi que celle du ministre de l’outre-mer, sur la gravité des problèmes liés à l’immigration illégale dans les départements et collectivités d’outre-mer – je pense tout particulièrement à Mayotte, à la Guyane et à la Guadeloupe, où la pression migratoire demeure très forte.
Si l’immigration non maîtrisée constitue un grave problème pour la métropole, elle est, vous le savez, un drame pour l’outre-mer, où le pacte social est plus fragile qu’ailleurs. Elle est également sans rapport avec les capacités d’accueil et les besoins économiques locaux. Elle crée enfin un fort sentiment d’exaspération.
Monsieur le ministre d’État, outre les dispositions législatives qui ont permis de réformer notre politique d’immigration, qu’il s’agisse de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité ou, plus récemment, de la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, vous avez donné, à l’automne 2005, des orientations très précises aux préfets concernés pour renforcer significativement la lutte contre l’immigration irrégulière outre-mer. Pouvez-vous dresser devant la représentation nationale un bilan des actions engagées sous votre égide ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
En juillet, avec François Baroin, nous avons fait voter un texte adaptant certaines dispositions législatives, comme la fouille sommaire de véhicules, qui était déjà permise en Guyane et qui l’est aujourd’hui en Guadeloupe. En outre, nous avons renforcé les moyens : 300 gendarmes et policiers supplémentaires ont été affectés en outre-mer, et nous allons en envoyer 160 de plus, ainsi que du matériel – une vedette sur-motorisée pour la Guadeloupe, un troisième radar pour Mayotte.
Cette politique amène des résultats assez spectaculaires. Sur les neuf premiers mois de l’année, le nombre de clandestins éloignés de Guadeloupe a augmenté de 57 % ; pour la Guyane, le chiffre est de 54 %. Quant au nombre de clandestins éloignés de Mayotte pendant la même période, il a augmenté de 134 %.
En 2003, la Commission européenne vous avait laissé libre d’appliquer une stratégie de répartition équitable. Contrairement à ce qu’ont fait d’autres pays européens, vous avez pérennisé les injustices et accru la complexité en basant les droits à paiement unique sur des aides perçues par chaque agriculteur entre 2000 et 2002. À ce jour, deux agriculteurs qui pratiquent les mêmes cultures sur des surfaces identiques ne reçoivent pas les mêmes aides, car leurs exploitations n’ont pas le même passé.
En vérité, monsieur le ministre, on a l’impression que vous ne croyez pas en l’avenir de l’agriculture. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est d’ailleurs ce que montrent certains documents émanant de l’UMP, qui expliquent que « la contribution de l’agriculture au monde rural repose désormais moins sur son potentiel d’emploi que sur son rôle d’animateur de la ruralité ».
Eh bien non, monsieur le ministre, les agriculteurs n’acceptent pas d’être réduits au rôle d’animateurs ! Ce sont des producteurs, des créateurs d’emplois. Ils participent largement à notre puissance économique et à l’aménagement de notre territoire, et attendent des pouvoirs publics un soutien juste et cohérent à des agricultures diversifiées, durables et performantes.
Comment la France applique-t-elle la politique agricole réformée en 2003 ? Notre pays a fait le choix du découplage des aides sur la base des références historiques des exploitants. Ainsi les droits sont-ils calculés sur la base des aides perçues entre 2000 et 2002.
Ce choix ayant été fait, la principale difficulté consistait à prendre en compte les évolutions intervenues depuis les années 2000, afin que les aides distribuées en 2006 s’ajustent au mieux à la situation des exploitants à cette date, notamment du point de vue des superficies.
Les clauses de transfert de droits, premier dispositif d’ajustement mis en place, ont bien fonctionné : plus de 300 000 clauses liées à des transferts fonciers ont été enregistrées, portant sur près de 4,5 millions d’hectares. Les exploitants ont ainsi, dans leur majorité, pu reconstituer leur niveau d’aide.
Ensuite, il a été possible d’apporter des dotations complémentaires aux exploitants ayant connu des évolutions dans leur activité : installations, investissements ou circonstances exceptionnelles. Au total, ce sont aujourd’hui 97 % des agriculteurs qui bénéficient de l’aide découplée. Une avance leur a été versée le 16 octobre, le solde le sera le 1er décembre. Nous aurons ainsi répondu à l’attente du monde agricole…
L'heure est grave. L'ensemble des acteurs locaux – préfet, procureur, commandant des forces armées guyanaises et commandant de Gendarmerie – qui remplissent la délicate mission de représenter l'État dans ce département ont impérativement besoin d'être mieux soutenus. À titre d'exemple, j'ai pu moi-même constater les conditions extrêmement difficiles et périlleuses des actions menées par les forces de gendarmerie sur place, notamment dans le cadre des opérations Anaconda, pour lesquelles ces militaires méritent tout le respect de la représentation nationale.
Toutefois, loin des clichés négatifs et réducteurs – bagne, moustiques, enfer vert –, ce beau et grand département, qui a la même superficie que le Portugal, ne manque pas d'atouts pour relever les défis de l'avenir avec, au-delà de la vitrine qu'est le Centre Spatial Guyanais, ses grands espaces et ses ressources naturelles.
Monsieur le Premier ministre, que comptez-vous faire, pour que nos compatriotes guyanais n'aient plus à subir une insécurité grandissante, des atteintes intolérables à l'environnement et une immigration clandestine paralysante, en un mot pour que l'État de droit et les principes républicains soient respectés en Guyane ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Vous interrogez donc le Premier ministre sur ce que le Gouvernement compte faire. Il continuera de faire ce qu’il a fait. Le ministre d’État, ministre de l’intérieur, a rappelé les statistiques. J’avais moi-même, il y a un an, pris des positions, largement commentées, pour appeler l’attention de l’opinion publique sur la situation. L’UDF avait d’ailleurs soutenu ces propositions avec une certaine élégance et beaucoup de compréhension de la réalité du terrain. Après l’arbitrage du Premier ministre, nous avons obtenu un bloc législatif dans le texte défendu par Nicolas Sarkozy. Cela a produit des effets significatifs. La délinquance de voie publique a diminué de 18 %, et plus de 6 600 reconduites à la frontière ont été effectuées sur les neuf premiers mois. Ainsi, et cela a été également évoqué tout à l’heure, les reconduites à la frontière auxquelles il a été procédé en Guyane, en Guadeloupe et à Mayotte avoisinent les 54 %.
Je remercie la ministre de la défense de l’aide apportée avec la mise à disposition d’un hélicoptère Écureuil EC 145. Sous notre impulsion collective, le préfet a mis en place un groupe d’intervention rapide. Soyez assuré que l’État, aux côtés des élus locaux et de la population guyanaise, agira dans le discernement, mais sans faiblesse pour maintenir l’équilibre de ce magnifique territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Monsieur le ministre, je souhaiterais appeler votre attention sur la récente escroquerie à la sécurité sociale de 20 millions d’euros dans le cadre d’un trafic de médicaments. Les services de la Caisse nationale d’assurance maladie ont, en effet, mis à jour ce trafic qui concernerait une vingtaine départements, dont celui de l’Île-de-France, et impliquerait une centaine de prescripteurs. Les médicaments étaient acheminés vers l’Asie du Sud-Est et l’Afrique, où ils étaient revendus. Ce trafic toucherait également des pays d’Europe centrale.
Après la révélation de ce vaste trafic de médicaments prescrits, achetés et remboursés en France, puis revendus à l’étranger par de faux patients, cette fraude sociale a dépassé le stade de l’artisanat individuel pour devenir le fait d’escrocs en bandes organisées. Mais cette arnaque n’est que la partie visible de l’iceberg, puisque, chaque année, ce sont 100 millions d’euros qui sont escroqués à la sécurité sociale par le biais d’arrêts de travail abusifs, de prestations versées aux fausses familles, aux faux résidents ou encore aux faux assurés. Ces escroqueries sont facilitées par l’autonomie des caisses et le manque de coordination des informations entre elles. C’est pourquoi nous avons mis autant de temps à nous apercevoir d’une telle fraude.
À l’heure où les prélèvements sont à la limite du supportable pour l’ensemble des Français, il ne serait absolument pas scandaleux de prendre des mesures draconiennes pour éviter tout gaspillage d’argent public et tout détournement frauduleux. Votre ministère a annoncé la création d’un comité national de lutte contre les fraudes afin de limiter les abus en matière d’assurance sociale ; c’est bien, mais encore insuffisant.
En conséquence, monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre afin de faire cesser ces fraudes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Vous souhaitiez que nous allions plus loin. J’ai installé hier le Comité national de lutte contre les fraudes. Le but est que tout le monde travaille avec les mêmes outils et de façon coordonnée. Le Gouvernement défendra des amendements dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale visant notamment à permettre de vérifier, grâce aux justificatifs, les conditions de ressources, en tenant compte des éléments de patrimoine et de train de vie. Il en va ainsi en matière fiscale ; je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas agir de même dans le domaine social.
Enfin, la carte Vitale 2, avec photo, nous permettra de remettre totalement à plat le système de la carte Vitale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Vous le voyez, nous employons tous les moyens pour mettre un terme à ces abus et à ces fraudes insupportables. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Enfin, la France a toujours eu des relations privilégiées et constructives avec le peuple hongrois.
Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous faire part de votre sentiment sur cette page de l’histoire et nous rappeler la place de ces pays dans l’Europe aujourd’hui réunifiée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
En 1956, le peuple hongrois a su, par son courage, montrer au monde entier que les peuples d’Europe centrale et orientale rejetaient le régime totalitaire communiste qui leur était imposé. Ce combat du peuple hongrois était aussi le nôtre. Il était celui de la liberté contre la dictature, celui de l’aspiration à la démocratie contre l’oppression. En ces heures terribles de 1956, le peuple français a partagé la fraternité et les espoirs du peuple hongrois, dont le sacrifice n’a pas été vain. En 1989, le vent de la liberté a à nouveau soufflé, et, ne l’oublions pas, ce sont les Hongrois qui, les premiers, ont ouvert une brèche dans « le rideau de fer » en sectionnant les fils de fer barbelés.
Puisque ce cinquantième anniversaire nous invite aussi à réfléchir sur l’histoire et sur l’évolution de l’Europe, sachons mesurer le chemin parcouru. En 1956, l’Europe était divisée, meurtrie et, à l’Est, opprimée.
Je ne peux m’empêcher de dire à quel point les Guyanais sont sensibles à la sollicitude du Gouvernement face aux difficultés qu’ils rencontrent, même s’ils sont évidemment frappés par son exposé misérabiliste. Nous aurions préféré une évaluation de la politique menée (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), et, notamment, une explication du retour en Guyane de tous ces expulsés trois heures après leur expulsion ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Madame la ministre de la défense, la France, représentée par l’ambassadeur François Rivasseau, présidera la troisième Conférence d’examen des États parties à la Convention de 1980 sur certaines armes classiques qui se tiendra à Genève du 7 au 17 novembre. Cinq protocoles de cette convention réglementent ou interdisent l’usage d’armes qui frappent les populations civiles sans distinction ou qui provoquent des traumatismes excessifs. Les bombes à sous-munitions – les BASM – ne sont pas concernées par ces interdits.
Les BASM sont des obus, des missiles ou des roquettes remplis de dizaines ou de centaines de petites bombes appelées sous-munitions.
Ces bombes à sous-munitions sont prises par les enfants pour des jouets ou des friandises.
Il est donc évident que leur usage est un crime, avec circonstances aggravantes : préméditation, parce que ces armes ne sont pas réservées aux affrontements entre combattants et confondent les cibles militaires et les populations civiles, intention manifeste de dévaster, puisqu’on les appelle également des armes de saturation de zone, et délit de fuite : selon les conditions climatiques et topographiques, 30 % d’entre elles en moyenne n’explosent qu’après les conflits.
Puisque la communauté internationale a élaboré un droit de la guerre à travers les conventions de Genève, êtes-vous disposée à prendre en considération la gravité des faits et à introduire cette question à l’ordre du jour de la conférence de Genève ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Nous sommes particulièrement sensibles aux conséquences désastreuses de ces munitions, sur le plan humanitaire et même sur le plan de la reconstruction. Je rappelle que l’armée française participe largement au déminage, notamment en Afghanistan et au Liban.
Madame Taubira, la France est attachée à l’application du droit international humanitaire en matière de protection des populations civiles, mais les armes à sous-munition sont légales en droit international, même si leur usage est réglementé par le droit international humanitaire. Une convention internationale a ainsi établi en 2002, pour les États parties seulement, malheureusement, une obligation de dépollution après la fin du conflit et un cadre d’assistance internationale en la matière.
La plupart des États détenteurs ou utilisateurs de telles armes sont opposés à leur interdiction totale. La France, soucieuse de garantir la protection des populations, a présenté une initiative visant au moins à fiabiliser toutes les munitions, dont les sous-munitions, dans un but de protection.
La France possède effectivement des armes à sous-munitions, mais notre doctrine d’emploi permet une stricte protection des populations civiles. En tout état de cause, de telles armes n’ont plus été utilisées depuis 1991. Les dernières à avoir été fabriquées en France l’ont été au début de l’année 2002, avant mon arrivée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Monsieur le ministre, la commission chargée du débat national université-emploi, présidée par le recteur de Limoges, Patrick Hetzel, a remis hier, à la Sorbonne, son rapport. C’est une bonne nouvelle. Cette commission a été mise en place en avril dernier, à la demande du Premier ministre, à la suite de la crise liée au contrat première embauche mais aussi parce que, chaque année, 80 000 à 100 000 jeunes, soit 20 % des étudiants, sortent de la fac sans le moindre diplôme et 11 % des diplômés de l’enseignement supérieur sont toujours au chômage trois ans après avoir quitté l’université, sans compter ceux qui sont obligés d’accepter un travail sans rapport avec leur formation.
Près de 20 000 personnes ont été consultées lors du débat national qui a donné lieu à environ 120 réunions. Des représentants de syndicats étudiants et enseignants ont été auditionnés, ainsi que des représentants des PME, et des cadres de grandes entreprises. C’est tout de même un peu plus sérieux qu’un hypothétique jury citoyen ! (Sourires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Ce débat avait pour objectif d’apporter des réponses concrètes et d’application rapide aux préoccupations des jeunes. Le rapport préconise une cinquantaine de mesures pour limiter le taux d’échec, c’est-à-dire mettre en adéquation formation et emploi. La société est un tout. Il n’y a pas, d’un côté, les universités et les étudiants et, de l’autre, le monde des entreprises. Les jeunes, mais aussi leurs parents et leurs grands-parents, attendent avec impatience des propositions concrètes.
Trois axes prioritaires innovants se dégagent de ces conclusions, comme le développement des formations professionnalisantes à l’université, la réforme du système d’orientation, qui ne fonctionne pas, et un plus grand rapprochement entre l’université et le monde du travail. Pourriez-vous nous détailler les mesures que le Gouvernement, dans le cadre de la bataille pour l’emploi, compte retenir afin que l’université prépare mieux au travail ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Ce rapport, c’est d’abord le constat d’une situation profondément anormale : l’échec massif à l’université – 20 % des jeunes qui s’inscrivent sortiront sans aucun diplôme après, parfois, plusieurs tentatives dans plusieurs filières différentes –, et des taux de chômage anormalement élevés pour les jeunes diplômés d’assez nombreuses filières universitaires.
Le rapport remis par M. Hetzel contient une cinquantaine de propositions, qui tournent autour de l’orientation et de l’amélioration des formations.
Dès le mois de juin, nous avons commencé à prendre des décisions qui vont nous permettre d’améliorer dès cette année l’orientation des lycéens qui choisissent de faire des études supérieures. Des entretiens de conseil systématiques leur seront proposés, avec notamment une inscription plus précoce à l’université pour favoriser une orientation plus active. Un délégué interministériel à l’insertion a été nommé.
En matière de formation, à la suite de ce qui a été fait dès cette rentrée, à savoir la création d’une dizaine de départements d’IUT et de 225 licences professionnelles, nous allons développer les enseignements à finalité professionnelle, rapprochant effectivement l’université de l’emploi. Nous allons dès cette année développer les stages et créer dans chaque université un service de l’emploi pour que tout étudiant ait avant la fin de ses études une première expérience de l’entreprise, favorisant ainsi son insertion.
Monsieur le ministre, la TNT est un véritable succès. Plus de la moitié de notre territoire est aujourd’hui couvert et plus de 3 millions de nos concitoyens ont fait le choix de s’équiper. La télévision numérique, je le rappelle, c’est l’accès gratuit à dix-huit chaînes, une meilleure qualité d’image et de son, et, à terme, l’accès à de nouveaux services qui vont très rapidement révolutionner la vie quotidienne de nos concitoyens.
Jeudi 19 octobre dernier, vingt-quatre nouveaux émetteurs ont été mis en place, ce qui permet de couvrir 65 % du territoire, que je compare aux 35 % de mars 2005, l’année du lancement de la télévision numérique dans notre pays. Le déploiement se fait donc de manière régulière et rapide sur l’ensemble de notre territoire.
Cependant, au moment où un certain nombre de nos concitoyens s’équipent de cette nouvelle technologie, un certain nombre d’autres se demandent si, un jour, ils y auront accès.
Puisque votre objectif est de couvrir 100 % du territoire pour que l’ensemble des Français bénéficient de la télévision numérique, comment souhaitez-vous faire pour respecter votre calendrier et votre objectif ? Qu’en sera-t-il notamment des zones frontalières et des zones d’ombre, qui sont concentrées dans les territoires ruraux ? L’ensemble des Français pourront-ils, à terme, bénéficier de la télévision numérique terrestre ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Cela dit, même si cela n’a rien à voir puisque la redevance finance uniquement le service public, 35 % de nos concitoyens ne peuvent pas comprendre pourquoi, alors qu’ils paient la même redevance, eux qui sont dans des territoires difficiles et accidentés ne reçoivent que trois, quatre ou cinq chaînes, en qualité analogique, et parfois dans de mauvaises conditions.
Nous avons donc décidé, avec l’ensemble des opérateurs, de lancer dans les trois ou quatre mois qui viennent un bouquet satellitaire qui permettra de diffuser dix-huit chaînes gratuites en qualité numérique, tout en atteignant en même temps, grâce à de nouveaux émetteurs terrestres, un taux de couverture de 80 %.
La démocratisation de la télévision a un immense avantage, c’est qu’un plus grand nombre de Français peuvent prendre connaissance de la médiocrité du programme défendu par les socialistes dans leurs débats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Les ateliers et chantiers d’insertion vont-ils disparaître le 31 décembre 2006, après de longues années d’activité au service de la réinsertion des plus démunis ? On peut le craindre, car, de partout en France, montent des appels au secours émanant d’associations les plus diverses, mais qui ont en commun de redonner une dignité à celles et ceux qui sont en danger de rupture sociale, qui n’ont plus d’emploi, plus de logement, plus de revenus et qui n’ont plus accès aux soins. C’est ainsi que sont menacées les associations Humanis à travers tout le pays, Le Vert Bocage dans le Calvados, Pain contre la Faim à Strasbourg et à Reims, l’association Espoir à Mulhouse, et bien d’autres encore. Près de 450 associations, plus de 10 000 emplois sont aujourd’hui menacés de disparition. Après les associations de quartier, c’est aujourd’hui le tour des associations d’insertion. Leur action constitue pourtant une étape importante et indispensable dans le parcours des personnes les plus en difficulté, conciliant action humanitaire, création d’emplois, réinsertion, recyclage d’ordures ménagères.
Votre loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005 montre aujourd’hui sa véritable teneur : elle plonge dans la plus grande incertitude le secteur de l’insertion par l’économique. En effet, le taux de prise en charge par l’État dans le cadre des nouveaux contrats aidés – le contrat d’avenir, en particulier – et l’incitation à une augmentation des ressources propres des associations jusqu’à un seuil de 49,9 % mettent en péril l’équilibre financier des structures supports des ateliers et chantiers d’insertion.
Le Gouvernement demande aux collectivités locales, qui se rebiffent, de se substituer à l’État pour prendre en charge cette mission de solidarité, qui est pourtant une compétence étatique par essence.
S’agissant plus particulièrement de l’association Pain contre la Faim, vous avez signé, de votre main, le premier contrat d’avenir du Bas-Rhin, le 11 avril 2005. En réalité, vous avez signé l’arrêt, à terme, de cette aventure unique de solidarité autour du symbole que représente le pain non consommé,…
Ma question, monsieur le président, la voici (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) : quel sera le sort de toutes ces personnes qui vont perdre leur emploi dans les prochains mois ? Quelles mesures spécifiques comptez-vous prendre pour redonner un souffle nouveau à l’insertion dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Vous auriez pu rappeler, dans ce qui n’était pas à vrai dire une question mais une sorte de réquisitoire, que, depuis la formation du gouvernement de Dominique de Villepin, ce sont plusieurs centaines de milliers d’emplois qui ont été créés (Exclamations sur les mêmes bancs) et que le chômage connaît un recul sans précédent dans notre pays. (Mêmes mouvements.)
Ces résultats, monsieur le député, tiennent d’abord naturellement à notre politique en faveur de la croissance, qui produit tous ses fruits. Ils tiennent aussi à notre politique de cohésion sociale et à notre grande loi de cohésion sociale (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), laquelle nous permet d’aider les Français en difficulté à saisir les emplois générés par la croissance.
Enfin, vous avez parlé des contrats d’avenir. Sachez que nous avons pris la décision d’augmenter dès maintenant la prise en charge des contrats d’avenir dans les chantiers d’insertion à hauteur de 90 % sans dégressivité. Jamais, monsieur le député, l’effort de l’État n’aura été aussi important en faveur de l’insertion de nos compatriotes en difficulté. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
L’outre-mer peut apporter à la France des ressources situées sur le plateau continental que la convention sur le droit de la mer de 1982 permet aux états côtiers d’exploiter au-delà des 200 milles marins de leurs côtes. C’est ainsi des ressources du sous-sol, sur près d’un million de kilomètres carrés, que l’outre-mer peut apporter à notre pays.
Les récentes rencontres franco-canadiennes d’Ottawa ont démontré, si cela était encore nécessaire, que la zone économique exclusive française autour de Saint-Pierre-et-Miquelon se situe au cœur d’une région très riche en hydrocarbures offshore que le Canada a déjà largement commencé à exploiter. La France doit tout faire pour prendre sa part de ces ressources transfrontalières.
En avril dernier, le Premier ministre m’avait confirmé que Saint-Pierre-et-Miquelon figurait au programme d’extension Extraplac pour que la France puisse « se réserver la possibilité de déposer un dossier d’extension auprès de la Commission des limites du plateau continental ». Le conseil général de Saint-Pierre-et-Miquelon vient de transmettre au Gouvernement une délibération visant à ce que la France officialise sa position. En effet, l’arbitrage de New York de 1992 lui réserve le droit de revendiquer son plateau continental, sans avoir pour cela d’autorisation à demander à quiconque – Canada inclus. Pour se faire la préparation d’un dossier est nécessaire.
Monsieur le ministre, je souhaiterais donc connaître l’enveloppe budgétaire prévue dans la loi de finances pour 2007, les moyens qu’IFREMER mettra en place, ainsi que le calendrier afin de respecter la date limite de dépôt de demande fixée par la Commission à mai 2009.
Et puisqu’il s’agit de l’avenir de Saint-Pierre-et-Miquelon et, j’en suis convaincu, de la condition du maintien de la présence française en Amérique du Nord, vous comprendrez, monsieur le ministre, ma détermination quasi obsessionnelle à défendre ce dossier et l’importance que la population de l’archipel apportera à votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
C’est la raison pour laquelle, – le Gouvernement vous le confirme – l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon reste sur la liste préparatoire en vue de la présentation d’une demande d’extension du plateau continental devant la Commission des Nations unies, et les inscriptions budgétaires sont prévues à cet effet.
D’autre part, le Canada – c’est un aspect important, sur lequel vous aviez mené, à l’époque, un combat fort utile et qui avait porté ses fruits – nous a fait savoir qu’il s’engageait à ne pas dénoncer unilatéralement les accords de 1994 à partir de l’année prochaine. Nous sommes donc dans une logique de négociation, et le dialogue se poursuit.
Enfin, au cours des réunions d’Ottawa des 2 et 3 octobre dernier, auxquelles vous avez participé, beaucoup de dossiers ont progressé. Nous sommes en phase de discussion pour signer une convention décennale qui nous permettra de mettre en perspective l’évolution du plateau continental et les modalités de ressources de financement public pour accompagner les collectivités territoriales encore déficitaires – ce qui doit cesser– ainsi que les perspectives d’ouverture à de nouveaux marchés qui pallieront au déclin de la morue, qui était, il y a peu encore, une grande richesse pour Saint-Pierre-et-Miquelon. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Depuis le début du mois de septembre, le nord de la France est confrontée au développement d’une épidémie de maladie nosocomiale, le clostridium difficile. Il s’agit d’une souche très virulente qui a été détectée pour la première fois en 2003 outre-Atlantique et qui s’est maintenant répandue en Belgique, aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne.
Aujourd’hui, le Nord-Pas-de-Calais est touché et le bilan est déjà extrêmement sévère : trente-neuf nouveaux cas la semaine dernière, ce qui porte le nombre des victimes à 348, vingt et un décès, vingt-neuf hôpitaux et cliniques touchés, trois maisons de retraite concernées, notamment à Tourcoing et Neuville-en-Ferrain. Il est temps de prendre les mesures qui s’imposent, car nous avons affaire à un adversaire extrêmement redoutable. Il s’agit d’une souche dix fois plus virulente que la moyenne et qui résiste particulièrement dans le milieu ambiant.
Quelles mesures prendrez-vous, monsieur le ministre, afin d’éradiquer cette maladie des maisons de retraite et des cliniques, où elle frappe les plus fragiles, notamment les personnes les plus âgées, et en empêcher la propagation au reste du territoire ?
D’ailleurs, les centres hospitaliers de Lens, comme ceux de Lille, se situent parmi les tout premiers en matière de lutte contre les infections nosocomiales. Ils figurent régulièrement dans les établissements qui ont fait le maximum d’effort. La vérité est que la souche C027 du Clostridium difficile est particulièrement virulente.
Nous avons élaboré des protocoles pour l’ensemble des établissements de santé – hôpitaux comme maisons de retraite – et diffusé l’information auprès des praticiens libéraux afin que tout le monde ait le même niveau d’information pour pouvoir réagir et anticiper dans les meilleurs délais.
La moitié des 370 cas dont vous avez parlé tout à l’heure se trouvent à Lens et Valenciennes. Il ne faut pas hésiter à fermer des blocs opératoires et à isoler les malades dans des services spécifiquement dédiés – l’État couvrira toute charge supplémentaire que cela entraîne : j’ai déjà débloqué un million d’euros pour la région Nord-Pas-de-Calais. Car une chose est certaine : si nous avons besoin d’aller au-delà, nous le ferons, mais l’essentiel est de permettre aux établissements concernés de contenir l’épidémie et aux autres établissements – dans le Nord-Pas-de-Calais, comme dans les autres régions – de s’en prémunir. Je salue la réactivité, la mobilisation et l’anticipation des professionnels de santé face à cet épisode particulièrement difficile. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Jean-Luc Warsmann.)
Dans la suite de cette discussion, la parole est à Mme Christine Boutin.
Avec un taux de fécondité de 1,9 enfant par femme, nous sommes sur la bonne voie, même si cela n'est pas encore suffisant, ni pour notre pays, ni pour nos familles. En effet, si la France est bien placée au niveau européen, le renouvellement des générations n’y est pas assuré, alors même que de nombreuses femmes avouent ne pas avoir autant d'enfants qu’elles le souhaiteraient – il en manquerait 0,7 par femme, selon les statistiques. Pourtant ce choix de vie ne peut être que positif pour l'ensemble de notre société. C’est pourquoi il est de notre devoir de l'encourager en permettant aux familles d'avoir le nombre d'enfants qu'elles désirent. Nous devons donc saisir l’occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour leur exprimer notre reconnaissance.
Reconnaître les familles, c'est tout d'abord reconnaître leur existence, en leur prodiguant toute l'aide économique qui leur est nécessaire : cela suppose une réelle politique de soutien, notamment sur le plan fiscal. En effet, monsieur le ministre, je constate avec inquiétude une certaine paupérisation des ménages avec enfants, encore accentuée par la « smicardisation » de la population qu’a révélée la loi de finances pour 2007. En dix ans le nombre de salariés au SMIC a plus que doublé, passant de 8 % en 1996 à 17 % en 2006, et les familles avec enfants ne sont pas épargnées, bien au contraire !
Selon le rapport rendu par M. Godet et Mme Sullerot au nom du Conseil d'analyse économique, le niveau de vie d'une famille ouvrière comptant trois ou quatre enfants est inférieur respectivement de 29 % et 39 % à celui d'un couple sans enfant de la même catégorie sociale. Nul n'ignore le coût engendré par l'arrivée d'un enfant, et certaines de ces familles paient jusqu'à deux fois plus au titre de la CSG que de l’impôt sur le revenu.
Cela n'est plus possible, et il est légitime de mettre en place une fiscalité familiale adaptée. Il s’agirait, comme je l’ai déjà proposé l’an dernier, de « familialiser » la CSG, c'est-à-dire d’intégrer le nombre d'enfants dans son calcul de façon à prendre en compte les capacités contributives réelles de chaque ménage. Il faut reconnaître aux futures naissances leur valeur positive pour l'ensemble de la société en attachant des avantages fiscaux supplémentaires à la venue du troisième enfant. Ce signal serait perçu par nos concitoyens comme un message de foi en l'avenir lancé par les politiques à une société trop morose.
Parce que fonder une famille ne doit pas être la porte d'entrée dans la précarité, mais au contraire une promesse de croissance économique, il est temps de mettre en place des politiques familiales positives, reconnaissantes, volontaristes, traduisant une préoccupation forte d’une redistribution juste, seul gage de confiance dans l'avenir.
Je sais bien, monsieur le ministre, que cette « familialisation » de la CSG ne sera pas adoptée aujourd'hui, mais il est urgent de réfléchir à une meilleure prise en compte de la famille par notre système fiscal. J'invite donc le Gouvernement à engager ce grand chantier.
Reconnaître les familles, c'est aussi leur exprimer toute notre gratitude en leur octroyant ce qui leur est dû : on devrait notamment avoir le droit de bénéficier d'une pension de retraite et d'une protection sociale à part entière lorsqu’on a choisi d'être « parent au foyer », véritable activité professionnelle s'il en est ! Il serait grand temps en effet de reconnaître le travail des parents qui élèvent leurs enfants et les services éminents qu’ils rendent. En ce sens, plus qu'une simple compensation des charges consécutives à l’éducation, les allocations familiales doivent être surtout la reconnaissance de la participation des parents à la création de richesses et à la cohésion sociale.
C'est pourquoi la prestation Accueil Jeune enfant me semble un dispositif judicieux, et je souhaiterais qu’on aille plus loin dans ce sens. Nous devons offrir aux familles une véritable liberté de choix en étendant le bénéfice du complément dit de libre choix d’activité à tous les parents, sans condition d'activité professionnelle antérieure minimale, et en ouvrant le droit à bénéficier d’une retraite et d’une protection sociale au parent qui a choisi de rester au foyer. Il faudrait également rendre possible le cumul de la prestation équivalente à trois ans pour chaque enfant, afin d'assurer un réel accompagnement des familles à l'occasion de chaque naissance ou adoption.
Je tiens enfin à saluer la création, annoncée lors de la Conférence de la Famille de 2006, d’un congé de soutien familial. Il s’agit là, monsieur le ministre, d’une excellente mesure, car il est essentiel de reconnaître que la solidarité entre les époux, entre les générations, notamment celle des enfants avec leurs parents, est un socle sur lequel nous devons nous appuyer. C'est pourquoi j'encourage de tous mes vœux cette nouvelle mesure. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Ce rappel pourra aussi redonner du sens à notre débat : la question qui nous est posée dans le cadre de cette discussion budgétaire n’est pas seulement une question d’argent, mais aussi d’humanité.
Compte tenu du temps dont je dispose, je prendrai quelques exemples, dans un style quelque peu télégraphique.
Ce texte est le dernier PLFSS que nous examinons au cours de cette législature. C’est l’occasion de tirer quelques éléments de bilan des cinq dernières années en matière de sécurité sociale et de santé. Plus qu’aux questions financières, je m’attacherai ici aux évolutions qui permettent de faire changer les choses. En effet, si notre système de santé et de sécurité sociale a certes connu quelques évolutions réelles – comme l’usage des médicaments génériques –, beaucoup de choses n’ont pas évolué. Ainsi, même si je peux en comprendre les raisons, je ne peux que m’interroger en vous voyant réduire de 20 % les crédits des réseaux de santé, qui sont pourtant l’un des dispositifs permettant l’évolution de notre système.
Autre sujet de profonde inquiétude : les « testings » lancés cet été par le fonds de la CMU ont révélé que 50 % des médecins spécialistes ne souhaitaient pas prendre en charge les personnes qui ont droit à la CMU. Quelles actions comptez-vous engager, monsieur le ministre, pour faire changer ces comportements et enrayer des évolutions qui conduisent à l’exclusion et au refus.
Je défendrai au cours du débat un amendement visant à permettre aux personnes âgées titulaires de l’aide sociale et vivant en maison de retraite d’accéder aux soins dans de bonnes conditions.
Il est encore, monsieur le ministre, un troisième point qui m’inquiète : cela a été une grande erreur, lors de la réforme des retraites, de ne pas nous donner les moyens d’évaluer ce qu’il adviendrait de ceux qui ont de faibles revenus et ont eu parfois une vie professionnelle hachée. J’en veux pour preuve la situation d’une retraitée de ma région : cette femme – qui ne vit d’ailleurs pas dans ma circonscription – a travaillé toute sa vie mais, du fait qu’elle a cotisé à plusieurs régimes différents, elle touche 200 euros de moins après la réforme qu’elle n’en aurait touché avant, soit 330 euros par mois au lieu de 553.
Il nous faut donc répondre très rapidement à la paupérisation qui menace les retraités qui touchent des basses retraites.
Arrivant au terme de mon temps de parole, je me contenterai d’évoquer très rapidement deux points. Pour ce qui est, tout d’abord, du FFIPSA, les décisions que vous avez prises mettent clairement en difficulté l’ensemble de ce régime. Sans doute certains d’entre nous connaissent-ils mieux que moi cette question, mais je puis au moins vous assurer que nous avons tous été abondamment interrogés par les responsables de ce secteur. Je tenais à tirer le signal d’alarme à cet égard.
Si vous le permettez, monsieur le président, j’évoquerai pour finir un problème sur lequel vous vous êtes vous-même penché : le télescopage entre deux réformes, ou deux politiques – la politique de soutien à domicile que vous menez pour assurer aux personnes âgées et aux personnes handicapées une qualité de service correcte, et la loi de M. Borloo sur les emplois de service. Il est clair que la cohabitation de ces deux systèmes se traduira soit par une concurrence très grave dans certains départements, soit par l’éclatement du service.
En effet, alors que le choix de la qualité du service a été consacré par la loi du 2 janvier 2002, qui permet d’appliquer, par l’intermédiaire du CROMS, une tarification correcte, et donc une rémunération qui l’est aussi, la loi Borloo permet l’ouverture, sur simple agrément, de nombreuses structures privées ou associatives – car, de fait, il ne s’agit pas seulement d’établissements privés à but lucratif – et déstructure toute l’organisation du soutien à domicile, qui voyait pourtant converger la volonté de tous les acteurs, qu’il s’agisse des conseils généraux, de l’État ou de la CNSA.
Je tiens donc à lancer ici un cri d’alerte quant à la situation de certaines régions, où la question de la qualité n’est pas posée – ni pour les personnes prises en charge, ni pour les salariés. La convention collective que j’avais lancée a heureusement été poursuivie et la FEPEM a mis en place, pour les employés de maison, une convention collective correcte, mais il n’existe rien pour couvrir les salariés de tous les établissements qui s’ouvrent dans le cadre de ce nouveau marché. Je suis, je le répète, très inquiète tant pour les personnes qui travaillent que pour celles chez qui elles travaillent, et j’insiste, monsieur le ministre, sur l’urgence qu’il y a à poser enfin la double question de la qualité du service et des conditions de travail des salariés. Si nous voulons, en effet, structurer correctement ce secteur, nous serons obligés d’y répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Le PLFSS que nous abordons est donc fondamental, non seulement parce que sa masse, qui représente 402 milliards d’euros, est supérieure aux dépenses du budget de l’État, mais aussi est surtout parce que c’est le dernier PLFSS de la législature et donc, comme nous l’avons rappelé hier, la concrétisation de l’effort national que nous avons engagé en 2002 et que nous avons poursuivi avec la réforme des retraites, la journée de solidarité, la loi d’août 2004 et la loi organique de 2005.
La poursuite du redressement financier est en effet un objectif essentiel. En 2005, la responsabilisation des assurés sociaux a été privilégiée et nos concitoyens ont montré l’exemple, puisque trois Français sur quatre ont déjà choisi leur médecin traitant. D’autres efforts ont été demandés, tant à l’industrie pharmaceutique qu’aux organismes complémentaires, et il faut saluer le sens civique de chacun.
Alors que les comptes de la sécurité sociale étaient mauvais en 2004 et préoccupants en 2005, les chiffres de 2006 traduisent une amélioration très nette et très significative, avec une baisse de 20 % des déficits, celui du régime général étant ramené à 8 milliards tandis que celui de la branche maladie passera, je le rappelle, sous la barre des 4 milliards d’euros.
Des objectifs ambitieux sont affichés pour 2007, dans le droit fil d’ailleurs du débat d’orientation sur les finances sociales qui s’est tenu à l’Assemblée nationale le 22 juin dernier. La poursuite de la lutte contre les déficits est notre feuille de route. Elle porte ses fruits et ne vise pas à solliciter de nouveau les assurés sociaux.
Pour ce faire, une partie des droits de tabac sera redirigée de l’État vers la sécurité sociale et la hausse d’un euro du forfait hospitalier ne doit pas pénaliser les assurés sociaux, dans la mesure où elle sera prise en charge par les organismes complémentaires.
Il est essentiel que l’ONDAM de ville soit porté à 1,1 %, au lieu du taux de 0,8 % initialement prévu, afin que les assurés sociaux, les infirmières et les médecins puissent en bénéficier.
Le texte qui nous est soumis contient des mesures allant dans le sens d’une plus grande justice sociale. Le dispositif d’aide à l’acquisition d’une mutuelle est amélioré et devrait permettre à 2,9 millions de personnes de bénéficier de cette disposition.
Le défi de l’allongement de la vie est au cœur de ce PLFSS, qui concrétise le plan solidarité grand âge. Le Gouvernement anticipe l’avenir tout en s’attelant aux défis présents.
Trois mesures phares doivent être soulignées à cet égard. D’abord, la prévention des facteurs de dépendance chez les personnes de plus de soixante-dix ans. Après s’être intéressé aux tout-petits avec les soins bucco-dentaires, on propose aujourd’hui à nos aînés cette consultation de prévention destinée aux personnes de plus de soixante-dix ans, dans le droit fil de l’engagement que nous avons pris en faisant de la maladie d’Alzheimer une grande cause nationale. La prévention est en effet fondamentale et nous nous engageons en ce sens.
Ce PLFSS se veut aussi pragmatique et tient compte de l’augmentation des besoins liés au vieillissement de la population. À l’heure actuelle, en effet, les personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans sont plus d’un million, et on en comptera le double dans dix ans. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que le PLFSS a déjà prévu 5 000 places en établissements d’hébergement pour personnes âgées, 2 125 places d’accueil de jour et 1 125 places d’hébergement temporaire ;…
Vous souhaitez aussi, monsieur Bas, favoriser le maintien à domicile des personnes qui le souhaitent et 6 000 places supplémentaires vont être créées à cette fin pour les services de soins à domicile. Lorsque ce n’est pas possible, les maisons de retraites du futur, que vous souhaitez plus humaines et répondant aux besoins liés à la longévité, doivent pouvoir s’adapter. Il s’agit là aussi d’une priorité que vous avez identifiée. Cette solidarité concrète, je l’ai vue à l’œuvre lorsque vous vous avez visité, dans la circonscription dont je suis l’élu, un établissement pour personnes handicapées.
La famille, quant à elle, est la cellule de base de notre société, le lieu de l’apprentissage de la vie en collectivité. C’est la responsabilité du Gouvernement que de répondre à l’ensemble des préoccupations légitimes des familles. Nous poursuivons dans ce domaine un objectif double : favoriser la natalité tout en tenant compte des réalités socio-économiques. Aujourd’hui, en effet, 80 % des mères de famille exercent une activité professionnelle tout en ayant des enfants. Elles ont le mérite d’œuvrer pour le renouvellement des générations et de permettre par leur travail le financement la réforme des retraites. Les trois quarts de celles et ceux qui cessent leur activité pour se consacrer à l’éducation de leurs enfants souhaitent retourner dans la vie active à l’issue de leur congé parental d’éducation, et nous devons les y aider.
La politique familiale du Gouvernement consacre la montée en puissance de la PAJE, dont bénéficieront quelque 250 000 familles. Je regrette toutefois, monsieur le ministre, que le versement de cette prestation ne prenne effet qu’au premier jour du mois suivant la naissance de l’enfant : revenir à la prise en compte de la date de naissance satisferait les familles concernées. Pour ce qui est des crèches, 10 000 places ont été créées en 2006, contre quelques centaines seulement en 2000.
Je tiens encore à évoquer l’action sociale que mènent les CAF par l’intermédiaire de la branche famille. Si certains, se référant à un accroissement des crédits qui avait atteint 60 % entre 2001 et 2005, peuvent trouver insuffisant le taux de croissance de 7,5 % en moyenne annuelle sur la période 2005-2008 dans le cadre de la nouvelle COG, il nous faut cependant être réalistes et savoir nous maintenir dans une mesure acceptable.
Afin de concrétiser les mesures proposées par la conférence de la famille, vous mettez en œuvre le congé de soutien familial, qui est désormais créé et devrait satisfaire nombre d’aidants familiaux.
Parmi les amendements adoptés par notre commission, j’ai présenté celui visant à ne plus pénaliser les ménages à faibles revenus qui ne perçoivent plus l’aide au logement parce que celle-ci est inférieure à 24 euros par mois. Je sais que cet amendement n’est pas nécessairement recevable dans le cadre de cette discussion. Il est pourtant essentiel.
Je pourrais aussi, mais le temps m’est compté, parler de la responsabilisation, qu’il s’agisse bien sûr du développement des médicaments génériques, qui est essentiel, ou de la lutte contre les fraudes par la mise en place, comme l’a très bien dit Xavier Bertrand lors de la séance des questions au Gouvernement de cet après-midi, d’un comité national de lutte contre les fraudes. Il faut à la fois lutter contre les prescriptions injustifiées, contre les abus, contre ceux qui bénéficient de droits auxquels ils ne devraient pas normalement avoir accès, et ce au détriment de la vraie solidarité qui vise à aider ceux qui en ont réellement besoin.
D’autres collègues, mieux que je ne pourrais le faire, ont exprimé les revendications des médecins à diplômes extracommunautaires : il faut mettre fin à l’injustice dont ces praticiens sont victimes. Nous avons évoqué en commission les médecins libéraux, les pharmaciens – maillons essentiels dans la chaîne des soins –, la modernisation de l’hôpital à travers l’effort mené par ses personnels et le plan Hôpital 2007. Nous avons aussi évoqué les cliniques privées, qui nous ont fait part, monsieur le ministre, de leurs préoccupations. Ne faudrait-il pas d’ailleurs créer un observatoire économique de l’hospitalisation publique et privée, qui pourrait être un bon outil pour asseoir certaines décisions que nous prenons vis-à-vis de ces établissements ?
Bien évidemment, ce PLFSS traite également des retraites. Vous avez apporté un certain nombre de garanties à cet égard, et la possibilité offerte de partir plus tôt en retraite aux personnes ayant commencé à travailler très jeunes a été particulièrement bien accueillie. Vous avez annoncé dans la presse, ces jours derniers, la tenue, début 2007, d’une conférence sur la revalorisation des pensions de retraite ; c’est une mesure importante et intéressante, et, bien sûr, nous comptons qu’elle soit suivie d’effet, car les retraités nous regardent, les retraités attendent. Le Gouvernement a fait de l’emploi des seniors une priorité : il convient à ce sujet de souligner les liens entre l’augmentation de la masse salariale et le niveau de recettes pour la sécurité sociale.
Je voudrais dire un mot avant de conclure, monsieur le ministre, sur la protection sociale et les retraites agricoles, parce que c’est une source récurrente d’inquiétudes.
En conclusion, je partage totalement l’analyse de notre ministre de la santé, Xavier Bertrand, qui a affirmé devant la commission des affaires sociales et ici même le bien-fondé de la réforme de l’assurance maladie. Car, si une telle initiative n’avait pas été prise, le déficit, mes chers collègues, serait aujourd’hui de l’ordre de 16 milliards d’euros. Grâce à la réforme, nous allons pouvoir parvenir, à terme et le plus rapidement possible, à une situation d’équilibre. Pour autant, je ne céderai pas à l’autosatisfaction ; mais je rejette dans le même temps le dénigrement systématique pratiqué par certains élus sur certains bancs alors que nous sommes au cœur de la solidarité nationale. L’augmentation de la durée de la vie, la précarité économique, les difficultés pour l’accès au logement, sont autant de sources d’inquiétudes et de fragilisation de la confiance de nos concitoyens. Le risque pour notre société serait de ne plus maintenir ce terreau fertile qu’est la cohésion sociale. Que serait la société française si la protection de l’ensemble des Françaises et des Français, si la protection des plus faibles, n’étaient plus assurées ?
Je terminerai – j’en ai l’habitude – par des citations. Cette fois-ci, j’ai retenu celles de deux grands hommes que nous connaissons bien : l’un s’appelle Xavier Bertrand, l’autre Jean-Michel Dubernard. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Xavier Bertrand, ici même, mettait en exergue ce PLFSS à travers trois mots : « continuité, persévérance, vigilance » ; et Jean-Michel Dubernard, en écho, apportait, avec sa dimension humaniste et sociale, les trois qualificatifs de cet engagement pour notre protection sociale : « concertation, solidarité, générosité ». Faisons en sorte, mes chers collègues, que ces mots se conjuguent pour l’avenir de notre société et de notre protection sociale. Je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Cet hommage se déclinera plus concrètement autour de trois observations principales.
Tout d’abord, la réduction significative du déficit de la branche maladie en 2005 et 2006 rend crédible un objectif encore meilleur pour 2007.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : un déficit de presque 12 milliards en 2004 descend à 8 milliards en 2005 pour atteindre 6 milliards en 2006 : une division par deux en deux ans. Un objectif de 4 milliards en 2007 est désormais crédible, soit une division du déficit par trois en trois ans – qui le serait par quatre si la réforme de 2003 n'avait pas vu le jour. Tous les secteurs de la santé publique ont participé à cette forte décélération de la progression des dépenses : les hôpitaux, les cliniques, les médecins libéraux, les pharmaciens, notamment par la réussite accélérée de la diffusion des génériques. Il faut souligner le comportement civique des acteurs des soins de ville – 1,5 % de progression en 2006 –, les dépenses de médicaments étant pratiquement stabilisées ; civisme que partagent les assurés sociaux, auxquels, cette année, un effort supplémentaire ne sera pas demandé.
Je n'énumérerai pas les nombreuses mesures destinées à conforter ces résultats, sinon pour souligner l'aide à l'acquisition d'une assurance complémentaire pour les plus fragiles, et la lutte accrue contre la fraude, à laquelle contribuera la nouvelle carte Verte, qu'il sera très difficile de détourner de son usage normal. Ainsi l'assurance maladie apporte-t-elle une contribution essentielle au redressement de nos comptes sociaux.
Deuxième observation : même la branche famille contribue au redressement des comptes.
En effet, le déficit de 2006, divisé par deux en 2007, tombe largement en dessous du milliard d'euros. Ce résultat comptable est obtenu sans sacrifier la politique familiale qui fait l'heureuse originalité de la politique sociale française et suscite l'intérêt de pays à la démographie fortement déclinante – comme j'ai pu le constater lors de la visite d'une délégation parlementaire japonaise. Je n’en suis que plus à l'aise pour souligner que le progrès comptable ne se fait pas au détriment de la qualité du service social et permet même des progrès significatifs : congé de soutien familial – dispositif que je considère comme très important –, prêt « avenir jeunes » à taux zéro, partage des allocations familiales en cas de garde alternée, etc.
Ma troisième observation, et seule ombre au tableau, c’est l'accroissement du déficit de la branche vieillesse, limité toutefois à un milliard d'euros.
L'allongement de la vie dans notre pays, largement imputable aux progrès de la médecine et à leur meilleure diffusion dans l'ensemble de la population, est obligatoirement la cause, très positive en elle-même bien sûr, de ce déficit. Si l’on ne veut pas alourdir les prélèvements obligatoires et encore moins réduire les prestations, la mesure la plus immédiatement efficace est d'inciter les seniors qui le peuvent à retarder leur départ à la retraite : c’est ce que fait le Gouvernement, en concertation avec les partenaires sociaux, par ses mesures en faveur de l'emploi des seniors.
Certes, monsieur le ministre, tout n'est pas parfait. La commission a ainsi souhaité, à juste titre, relever de 0,3 ou 0,4 % la progression de l'ONDAM des soins de ville, qui profitera aux assurés, aux infirmières et aux médecins de ville. Nous avons aussi, vous le savez, d'autres souhaits : le versement de la PAJE dès la naissance, et non après le premier mois,…
Une réflexion très large devra s'engager sur un financement pérenne de notre protection sociale et de nos retraites. Alors, bien sûr, nous devons poursuivre notre chemin, mais je crois que nul ne peut nier que nous soyons sur la voie d'un redressement salutaire et sans précédent. C'est pourquoi je voterai naturellement ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Permettez-moi de vous raconter ce qui m'est arrivé dans une réunion de quartier il y a quelques semaines. Au fond de la salle, un vieil homme m’adressait de nombreux signes d’amitié. Je me disais que je le connaissais, mais je n’arrivais à le situer vraiment. À la fin de la réunion, j’allais vers lui et il me dit, en me tapant amicalement sur l’épaule : « Je suis heureux de te revoir, ça me rappelle les bons moments du football quand on était juniors. » Je n’en croyais pas mes yeux : c’était mon vieux copain Daniel. Devant son état de lassitude et son visage fatigué, j’étais triste et honteux de voir que son dur métier de maçon l’avait usé avant l’âge. Un juste sentiment de révolte m’a envahi, et je suis sûr que vous le partagez. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, votre collègue Xavier Bertrand, lorsqu’il était rapporteur pour avis du projet de loi portant réforme des retraites, avait en particulier défendu l'article 12 qui prévoyait que, dans un délai de trois ans après la publication de la loi, les organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau national seraient invitées à engager une négociation interprofessionnelle sur la définition et la prise en compte de la pénibilité. Et il avait raison ! Cette négociation a été ouverte le 11 février 2005, soit dix-huit mois après le vote de la loi. Neuf réunions se sont tenues. La dernière a eu lieu le 30 mars 2006 ; mais la réunion prévue le 2 mai a été annulée et aucune autre date n'est programmée à ce jour. Il faut donc d'urgence débloquer cette négociation. La pénibilité du travail doit être prise en compte et il faut envisager une durée d'activité professionnelle proportionnelle à la pénibilité du travail.
L'analyse des partenaires sociaux sur les dispositifs de départ anticipé existants montre que l'exigence de réparation est plus que jamais légitime. Les inégalités entre les secteurs sont considérables. Celui de la construction et du bâtiment est presque exclusivement concerné par le chômage et l’invalidité, alors que les caisses d’assurance des travailleurs salariés ont été mobilisées par la chimie, l’automobile et la construction navale. Les petites et moyennes entreprises ont peu accès aux dispositifs conventionnels les plus favorables. Enfin, le nombre d'allocataires en invalidité a bondi de plus de 20 % en trois ans.
Ces chiffres démontrent à l'évidence la nécessité d'une forte action de prévention en matière de conditions de travail, de vieillissement prématuré des salariés et de protection contre le licenciement des salariés les plus âgés. Ils démontrent également qu'il y a urgence à prendre des dispositions pour que ces salariés puissent bénéficier d’un départ anticipé à la retraite à taux plein. Il faut répondre à cette situation d'urgence sociale, de justice, d'humanité et de respect de la dignité de tous.
Je voudrais aussi aborder le douloureux problème de la retraite d’invalidité. Arrivés à l'âge de soixante ans, de nombreux invalides voient leurs revenus chuter brutalement en raison des modes de calcul issus de la loi portant réforme des retraites de 2003, véritable loi de régression sociale.
Le groupe socialise a déposé un amendement qui propose de garantir au titulaire d'une pension d'invalidité un niveau de pension de retraite au moins identique à cette pension si la prise en compte de sa carrière professionnelle, du fait de la réforme de 2003, ne lui permet pas d'avoir une pension de retraite servie par la sécurité sociale supérieure à sa pension d'invalidité. J’espère que les députés, sur tous les bancs, voteront cet amendement car il y va de la justice sociale.
Messieurs les ministres, il faut prendre ces douloureuses questions à bras-le-corps et mettre en œuvre rapidement les réponses de justice sociale légitimement et impatiemment attendues par celles et ceux qui sont victimes d'une véritable discrimination sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Certes, grâce aux efforts de chacun dans cet hémicycle, des progrès ont été réalisés : ainsi, en 1994, les débats relatifs à la loi d’orientation agricole avaient été positifs. Je voudrais néanmoins insister sur ce que nous avons fait depuis 2002. Ne l’oublions pas : c’est nous qui avons mis en œuvre la mensualisation, qui était revendiquée depuis des années.
Autre sujet sur lequel nous avons également progressé, et dont on parle peu car il n’est pas spécifique au secteur agricole : les carrières longues, qu’évoquait Alain Néri. La disposition que nous avons adoptée profite à tous les régimes, y compris au régime agricole. Ceux qui ont commencé à travailler avant dix-huit ans peuvent ainsi prendre leur retraite avant soixante ans, pour autant qu’ils aient cotisé pendant quarante ans. Depuis 2004-2005, 62 000 personnes relevant du régime MSA ont ainsi pu bénéficier d’un départ anticipé.
En outre, nous avons adopté avec la dernière loi d’orientation agricole la disposition relative aux AVPF – assurance vieillesse des parents au foyer –, qui permet d’améliorer notamment la retraite des mères de famille.
Que reste-t-il à faire ? L’objectif fondamental est de nous occuper des petites retraites – les « laissés pour compte ». Hervé Gaymard, puis Dominique Bussereau, y ont travaillé. Pierre Méhaignerie nous a confié, à Yves Censi, Daniel Garrigue et moi-même, le soin de parcourir les régions et de faire des propositions. Nous nous y sommes d’autant mieux employés que nous étions déjà sensibilisés à ces problèmes, que nous rencontrons dans nos circonscriptions respectives. Mais que répondre à des personnes disposant de retraites de 150 ou 200 euros ? Après avoir rencontré les instances du monde agricole, et en particulier les syndicats, nous avons pu esquisser des solutions. Si nous n’avons pas, loin s’en faut, réglé tous les problèmes, la volonté de faire progresser les choses de manière concrète est réelle. Je me réjouis ainsi que, le 5 octobre dernier, le Président de la République ait accepté d’intégrer nos propositions dans des directives gouvernementales.
Il fallait en finir : si nos propositions sont adoptées, le coefficient de minoration sera ramené à 5,5 % dès le 1er janvier 2007, et à 4 % au 1er janvier 2008. La situation serait ainsi linéaire, comme pour les autres régimes. Le coût de cette mesure est de 205 millions d’euros sur deux ans, dont 162 millions en 2007.
Prenons un exemple significatif et concret : aujourd’hui, une épouse dont la carrière est de 27,5 ans touche une pension annuelle de 2 207 euros. Est-ce digne ? Avec les mesures que nous proposons, cette pension s’élèverait à 3 132 euros dès 2007 et à 3 441 euros en 2008, soit une progression d’un peu plus de 51 % sur deux ans.
Il faut aller vite, notamment pour éviter le « syndrome » de la RCO en 2002. Nous ne sommes pas là pour voter des pétitions de principe, fussent-elles nobles, mais des décisions concrètes. En l’occurrence, celle-ci doit s’appliquer dès le 1er janvier prochain, et être prise en compte sur les feuilles de pension MSA dès février. C’est possible, notamment si le Gouvernement signe rapidement les décrets d’application. Je suis convaincu que les MSA, de leur côté, et grâce à leur système informatique, s’y emploieront.
Beaucoup de progrès restent à faire, notamment sur la RCO. Aujourd’hui, 17,5 années d’activité en tant que chef d’exploitation sont nécessaires pour en bénéficier : cette durée est une vraie barrière pour beaucoup. Autre problème : les retraites de réversion. Actuellement, une veuve ne bénéficie plus des 54 % de la retraite complémentaire obligatoire de son mari défunt. J’invite les candidats à la Présidence de la République à se positionner sur ces sujets, qui doivent clairement figurer dans leurs propositions.
Prenons l’exemple d’une région que je connais bien, la Bretagne du centre : les médecins y sont moins nombreux que dans le reste de la Bretagne, et ils sont aussi plus âgés. Ainsi, les plus de 55 ans représentent 25 % des médecins en Bretagne, et 35 % en Bretagne intérieure.
Par ailleurs, si l’on considère la période de 1995 à 2005, le nombre de médecins a diminué de 8,1 % dans cette région, alors qu’il a progressé de 3,1 % en Bretagne, et que la démographie connaît un nouvel essor. J’ajoute – ce qui constitue un signe inquiétant pour l’avenir – que la proportion de femmes est beaucoup plus faible en Bretagne du centre qu’ailleurs : seulement 12 %, contre 25 % pour l’ensemble de la Bretagne.
Enfin, les médecins sont surchargés. En termes d’actes, la moyenne en Bretagne est de 4 807. En Bretagne intérieure, elle s’élève à 6 028, soit une proportion de 25 % supérieure à la moyenne régionale. Bref, si les médecins sont en Bretagne intérieure plus âgés, moins nombreux, ils sont aussi plus fatigués.
Un exemple concret sera peut-être plus éloquent que ces chiffres. Je suis l’élu d’une circonscription où pas un jeune médecin ne s’est installé depuis deux ans, et pas une seule jeune femme médecin depuis cinq ans ! Peut-être mon manque de séduction est-il en cause (Sourires), toujours est-il que la situation est préoccupante. Elle l’est d’autant plus, d’ailleurs, qu’à la faculté de Rennes, 65 % des jeunes diplômés sont des femmes.
Comment attirer ces jeunes médecins ? Je veux l’affirmer clairement : je ne crois plus à l’incitation…
Je crois donc qu’il faut tarir l’installation dans les zones où il y a trop de médecins.
Mon idée est très simple, monsieur le ministre : il faut que, dans les secteurs où la démographie médicale est satisfaisante, un médecin ne puisse s’installer que s’il succède à un confrère. Il s’agit de s’inscrire dans la logique du un pour un, sauf pour les secteurs qui connaissent une pénurie de médecins et où la liberté d’installation doit rester totale.
Monsieur le ministre, cette mesure ne coûte rien et elle est la seule qui permette demain d’orienter vers les secteurs en difficulté le flux des nouveaux médecins généré par le relèvement du numerus clausus.
Je sais qu’une telle décision ne peut être prise dans l’instant, mais je mets la question en débat et je voudrais que chacun ici soit conscient du fait que les mesures incitatives ne peuvent être que du placebo !
Les résultats obtenus pour la médecine de ville sont parlants. La progression des dépenses de soins a été limitée à 1,5 %, ce qui constitue un chiffre jamais atteint et témoigne à la fois des efforts faits par l’ensemble des professionnels de santé et de l’efficacité du nouveau parcours de soins mis en place. Cela montre également que les Français ont compris que c’était la contribution de chacun qui permettrait d’équilibrer les comptes en maintenant l'accessibilité aux soins pour tous et en privilégiant les capacités d’innovation qui font l’avenir de la médecine.
Tous ces éléments vont dans le bon sens, mais ne sont pas sans conséquences. La première de ces conséquences concerne le secteur pharmaceutique, où la diminution d’activité a entraîné pour les officines une baisse du chiffre d’affaires. Il serait bon, dès lors, de réfléchir à des modes de compensation qui puissent permettre au pharmacien, qui est l’un des maillons indispensables de la chaîne de soins, d’avoir accès à d’autres activités – je pense notamment au soutien à l’automédication, mais aussi à la possibilité de faire des prescriptions. Sans doute faudrait-il également revoir la question des marges bénéficiaires, car, si la diminution de la consommation de médicaments est une bonne chose – et elle doit beaucoup aux pharmaciens –, elle ne doit pas peser sur leurs revenus.
Le secteur hospitalier, lui, est toujours en difficulté, car il a du mal à se réformer et demeure pénalisé par la queue de comète des 35 heures, encore mal assimilées. Il est désormais primordial d’identifier clairement les missions de l’hôpital public et d’envisager sa réforme en complémentarité avec les structures privées.
LA T2A mise en place fait en sorte que les établissements privés voient leur chiffre d’affaires augmenter. Toute la question est de savoir ce que cela signifie : ces établissements ont-ils été sous-financés pendant des années ou orientent-ils désormais leurs activités en sélectionnant les pathologies réputées les plus rentables ?
Là encore, il est important de définir l’offre de soins dans son ensemble, car il n’y a plus, d’un côté, la médecine publique et, de l’autre, la médecine privée : c’est une organisation globale, qui doit permettre de préserver l’accessibilité aux soins.
Je terminerai mon propos par la question des chirurgiens. La chirurgie française a longtemps été au firmament de la chirurgie mondiale ; tous les étrangers venaient alors se former en France. Elle fait face aujourd’hui à des difficultés qui sont avant tout des difficultés démographiques, et je ne peux qu’inciter les jeunes qui sont ici dans les tribunes à réfléchir aux métiers de la médecine et de la chirurgie, car la question qui se pose aujourd’hui est de savoir par qui nous serons opérés demain.
Les accords passés en 2004 entre le Gouvernement, l’assurance maladie et les chirurgiens ont été en partie respectés et des décrets ont été publiés récemment, concernant la part variable pour la chirurgie publique. Il s’agit là de bonnes incitations à l’activité pour l’hôpital public, mais il faut encore travailler pour finaliser ce dossier.
Nous devons également aborder le problème de la chirurgie libérale, laquelle a souvent mauvaise presse du fait des dépassements d’honoraires et d’une judiciarisation de plus en plus importante.
Aujourd’hui, quand un chirurgien de secteur 2 effectue un acte opératoire – je ne parle pas ici des consultations –, sans pratiquer de dépassement d'honoraires, cet acte lui est payé à un tarif inférieur à celui du secteur 1. Cela n’existe pour aucun des autres actes techniques et constitue une iniquité qu’il est urgent de corriger, non seulement par souci de justice mais aussi parce que cela inciterait les chirurgiens qui en ont la possibilité à ne plus pratiquer de dépassements d’honoraires. De la sorte, nous ferions taire les critiques adressées à la profession, et les Français bénéficieraient d’une chirurgie accessible, homogène et de qualité.
Je ne sais quelle solution sera retenue, mais nous avons besoin des chirurgiens et il est indispensable aujourd’hui que l’on fasse un geste envers eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Les réformes engagées permettent d'assurer la pérennité de notre système de soins en poursuivant dans la voie de réduction des déficits. Par votre texte, vous nous proposez aujourd'hui de réduire le déficit du régime général de 9,7 milliards prévus en 2006 à 8 milliards en 2007. C'est donc en organisant mieux notre système et en le modernisant que nous pourrons faire face aux défis futurs.
Je voudrais revenir un moment sur l'amendement du groupe UMP adopté en commission et permettant de financer une hausse de 1,1 % de l'ONDAM soins de ville. En moins de quatre ans, l'évolution des dépenses d'assurance maladie pour les soins de ville a enregistré une baisse historique, puisqu'elle a été divisée par cinq. Ces bons résultats découlent tout particulièrement des effets de la nouvelle convention médicale du 12 janvier 2005 et du climat de confiance qui s'est installé entre les pouvoirs publics et les médecins dans le cadre d'objectifs négociés. Quelles que soient les difficultés à négocier ces efforts, les médecins savent fort bien que l'actuel gouvernement est loin de l'esprit de ses prédécesseurs qui avaient voulu réguler les dépenses par des techniques comptables telles les lettres-clés flottantes.
Ces résultats ont été obtenus, conformément à l'esprit de la réforme de 2004, qui consiste à « dépenser moins en dépensant mieux », tout en préservant la qualité des soins offerts aux malades. Il importe cependant de ne pas casser cette dynamique par un ONDAM trop strict et inéquitable. Il ne serait pas normal en effet que seuls les « bons élèves » de la maîtrise médicalisée subissent une baisse de leur ONDAM. Pour mémoire, l'ONDAM hospitalier passe de + 3,44 % en 2006 à + 3,5 % en 2007, alors que l'hospitalisation n'est que très peu concernée par les efforts de régulation lancés par la réforme de 2004 et que son enveloppe augmente chaque année de 2 milliards d'euros depuis 2000, comme l'a souligné le rapport Pébereau.
L'ONDAM fixé par le projet de loi initial est, de l'aveu général, intenable si l'on veut notamment revaloriser le « C », mieux indemniser la permanence de soins et remettre à niveau les conditions faites aux professions paramédicales.
C'est la raison pour laquelle je tiens à féliciter le Gouvernement d'avoir entendu les arguments du groupe UMP en faveur de l'augmentation de l'ONDAM soins de ville de 200 millions d'euros.
Lors de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre dernier, le ministre de la santé avait d’ailleurs déjà indiqué que la ventilation de l'ONDAM soins de ville devrait permettre d’augmenter de 3 à 4 % les honoraires médicaux. Ces sous-ONDAM n'ayant pas de valeur juridique, je voudrais souligner qu'il est utile que la commission des affaires sociales ait aussi accepté l'amendement par lequel nous proposons, avec mon collègue Dominique Tian une annexe au PLFSS, détaillant la ventilation des évolutions par poste des dépenses de soins de ville, en distinguant notamment les dépenses de produits de santé des dépenses hors produits de santé, lesquelles incluent les honoraires.
Toutefois, le fait de retenir une évolution de 1,1 % au lieu de 1,2 % diminue de 100 millions d'euros la marge de manœuvre dégagée, ce qui est significatif lorsque l'on sait, d'une part, que les professionnels de santé évaluaient à 500 millions d'euros les besoins non couverts et que, d'autre part, un tiers de cette enveloppe sera consacré à une meilleure prise en charge des dispositifs médicaux.
À cet égard, je souhaiterais d’ailleurs interroger le ministre sur le point de savoir si cette hausse de l’ONDAM intègre ou non la mise en place du secteur optionnel, conformément à l'accord chirurgie d'août 2004.
Dans cette perspective, il serait donc prudent de ne pas grever outre mesure l'enveloppe supplémentaire dégagée pour les soins de ville au détriment des honoraires des médecins, car la mise en place du secteur optionnel, qu'il soit instauré par les instances de la branche maladie ou par un amendement gouvernemental, nécessitera une enveloppe significative.
Toutefois, messieurs les ministres, après avoir exprimé ces quelques observations, je soutiendrai naturellement votre projet de loi, qui contribue à sauvegarder les fondements de notre sécurité sociale.
Monsieur le ministre, les comptes de la sécurité sociale sont en déficit et, contrairement à ce qu'affirmait avec aplomb votre prédécesseur, M. Douste-Blazy, l'équilibre ne sera pas atteint en 2007.
L’assurance maladie connaît, c’est vrai, une amélioration,…
Monsieur le ministre, votre PLFSS n'est pas à la hauteur des enjeux de santé publique dans notre pays. Certes, vous proposez quelques mesurettes qui vont dans le bon sens, telles que l'augmentation de la contribution des grossistes répartiteurs. Encore faut-il se rappeler que, lorsque Mme Aubry avait proposé cette mesure, votre groupe l’avait repoussée.
Vous proposez également une plus grande liberté de sortie au cours des arrêts de travail lorsque la pathologie, clairement identifiée, le justifie. Pourtant, sous la précédente législature, votre groupe, et en particulier Bernard Accoyer, avait dénoncé avec virulence l'obligation de motiver les arrêts de travail sur les imprimés de sécurité sociale.
Nous approuvons encore la décision de régulariser la situation des médecins ayant obtenu leur diplôme hors Union européenne, même si votre méthode n'est pas celle que nous préconisons.
Mais, monsieur le ministre, et je rejoins les propos de M. Le Fur, vous n’avez pas dit un mot sur les inégalités territoriales d'accès aux soins, sur la désertification médicale des zones rurales et sur l'inefficacité totale des incitations financières – préconisées tant par la gauche que par la droite – et des aides accordées par les collectivités territoriales dans le cadre de la loi relative au développement des territoires ruraux. Cela montre que ce problème n’existe pas qu’en milieu rural et que ce n’est pas non plus un problème de revenus.
Pas un mot non plus sur le manque de choix pour les postes de généralistes lors de l'internat, ni sur la difficulté à mettre en place la permanence des soins. Pas un mot sur les difficultés d'accès aux soins que rencontrent les titulaires de la CMU, refusés par 10 % des médecins, ou de l'AME, refusés par 50 % des médecins, en particulier par les médecins en secteur 2. Pas un mot sur la probable mise en place d'un système de bonus-malus par certaines mutuelles, mesure qui incitera à ne plus se soigner. Pas un mot sur le secteur optionnel qui ne pourra qu'aggraver l'insuffisance de prise en charge des soins en vidant le secteur 1. Pas un mot sur le dossier médical personnel…
Pas un mot sur la situation dramatique des hôpitaux ni sur les 250 millions qui manquent pour finir l'année 2006, ce qui se traduira par l'abandon des projets d'investissement. Pas un mot sur les rapprochements entre les secteurs privé et public, qui conduisent le plus souvent à l'abandon de l'hôpital public au profit des établissements privés et à un nouveau recul de l’accès aux soins…
Je m’étonne aussi que vous incitiez à vendre le plus rapidement possible les biens immobiliers des hôpitaux pour faire de l'investissement, alors que, nous le savons, leur situation financière ne permettra qu'un autofinancement pour boucler les fins de mois. Ne s'agirait-il pas plutôt de vendre l'argenterie pour payer le loyer ?
Monsieur le ministre, non seulement votre PLFSS n'est pas à la hauteur des enjeux de santé, mais il manque de sincérité.
Oui, ce PLFSS de fin de législature, qui se refuse à aborder les vrais problèmes de la protection sociale et de l’accès aux soins, est un texte préélectoral et sans envergure. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
La sécurité sociale, dont la généralisation s’est achevée avec la loi du 27 juillet 1999, créant la couverture maladie universelle et fondant une plus grande cohésion nationale, a permis que maladie et misère n’aillent plus nécessairement de pair. L'égalité dans l'accès à des soins de qualité, voilà notre ambition et notre responsabilité, s’agissant notamment des plus fragiles. Or les inégalités se sont accentuées.
On observe en premier lieu des inégalités entre les territoires. En 2006, le nombre de médecins par habitant varie de un à quatre pour les spécialistes et de un à deux pour les généralistes entre le département le moins bien doté et le département le mieux doté.
De graves difficultés sont à venir, car le vieillissement de la population médicale et les nombreux départs à la retraite, la féminisation des professions médicales, ainsi que les choix de spécialité des étudiants bouleversent la carte sanitaire. En 2004, 500 postes offerts en médecine générale n'ont pas été pourvus et, pour la période 2008-2015, les prévisions sont inquiétantes. À ce déficit de l'offre médicale, s'ajoutent les nouvelles exigences des médecins concernant leur qualité de vie, et les seules incitations financières prévues par la loi ne les feront pas s’installer davantage en milieu rural ou dans des bassins urbains déficitaires.
À l’inégalité territoriale s’ajoute une inégalité dans la prise en charge des soins, qui est de plus en plus partielle. Certes, le régime général prend encore en charge en moyenne les trois quarts de la dépense, mais cette proportion, en diminution constante depuis quatre ans,…
En outre, le nombre de médicaments déremboursés ne cesse de croître, le forfait hospitalier d'augmenter, de nouveaux forfaits d’être imposés. La liste s'allonge des dépenses non prises en charge par l'assurance maladie obligatoire. Elles sont aujourd'hui en grande partie couvertes et remboursées par une mutuelle ou par un contrat souscrit auprès d'une compagnie d'assurance privée. Cette logique engendre trois autres formes d'inégalités liées directement au revenu des usagers.
La première oppose ceux qui ont une couverture complémentaire et ceux qui n'en ont pas, soit 8 % des ménages. La deuxième concerne le financement, qui peut être entièrement à la charge de l'assuré ou partiellement pris en charge par l'entreprise, et prendre en compte, ou non, l'âge de l'assuré et la composition du ménage, comme le font les assureurs privés et un nombre croissant de mutuelles – concurrence oblige. La troisième inégalité concerne le niveau de la couverture apportée. Certaines complémentaires maladie offrent un haut niveau de prestations, d'autres sont lacunaires. Or, l'accès à une complémentaire, en raison du niveau des remboursements, est globalement proportionnel au revenu. Autant dire que ceux qui en auraient le plus besoin n'y ont pas accès et renoncent bien souvent à se soigner, faute de moyens.
Par ailleurs, on sait que les couvertures complémentaires offertes par les mutuelles sont plus homogènes et leur coût inférieur à celles proposées par les assureurs commerciaux, dont le principe financier est adossé à l'âge et à l'état de santé de la personne. La couverture mutualiste est donc plus solidaire et plus égalitaire que les couvertures individualisées offertes pas les assureurs commerciaux. Or on constate que ce sont les plus pauvres qui ont le plus souvent recours aux assureurs commerciaux.
Aux inégalités territoriales et financières, s’ajoute l’inégalité sociale. La santé publique reste l'enfant pauvre de la politique de santé en France, même si des efforts importants ont été consentis. L'assurance maladie prend principalement en charge les soins et néglige encore la prévention : 1,2 % seulement du total des dépenses y est consacré.
L'enjeu, pourtant, n'est pas seulement de faire des économies, mais de réduire les inégalités sociales face à la maladie et à la mort. Ainsi, si les taux de décès ont diminué pour toutes les causes de mortalité et pour toutes les catégories sociales, la surmortalité des ouvriers et des employés par rapport aux cadres supérieurs et aux professions libérales demeure importante. La France est, parmi les pays européens, celui dans lequel les écarts de durée de vie selon les catégories socioprofessionnelles sont les plus marqués. Ces écarts résultent d'abord des inégalités inhérentes aux conditions de vie et de travail. Les inégalités dans l'accès aux soins ne font qu'ajouter un risque supplémentaire.
Les inégalités en matière de santé s'étendent évidemment aux enfants et aux adolescents en fonction de la catégorie sociale à laquelle appartiennent leurs parents. Par exemple, une étude récente montre que l'obésité est dix fois plus fréquente chez les enfants d'ouvriers non qualifiés que chez les enfants de cadres. Une vraie réforme de la sécurité sociale supposerait donc d’envisager les problèmes de santé dans un cadre plus vaste.
Votre politique, monsieur le ministre, ne répond donc que très partiellement aux enjeux de la santé. Votre réforme n'atteint pas les résultats escomptés pour, me semble-t-il, deux raisons : elle aurait dû privilégier une approche plus globale et ne pas se limiter à une gestion comptable. Elle vise avant tout à faire baisser les dépenses de santé prises en charge par l'assurance maladie, et donc à faire basculer une part plus importante des frais de soins sur les assurés sociaux – comme le montre la hausse de la CSG – et sur les malades – je pense au forfait d’un euro et forfait hospitalier –, alors que le système comporte déjà de nombreuses inégalités d’accès aux soins.
D'autres réformes du système de santé français doivent donc être engagées. Mais cela, tout comme la « chasse au gaspi », ne nécessite pas l'effacement du service public au profit du privé, mais une meilleure coordination – des mesures ont d’ailleurs été prises en ce sens. Avec le système actuel, les coûts de gestion – inférieurs à 7 % – sont contenus et, en tout cas, bien inférieurs aux modèles privés. Pour mieux soigner, il faut mettre en œuvre un système plus égalitaire, plus préventif et plus éducatif. Notre pays se développe, la population s'accroît et l'espérance de vie augmente. Il existe des besoins de santé non satisfaits à ce jour, qui peuvent exiger – c'est un choix de société – de consacrer une plus grande part de nos richesses à notre système de santé en recherchant de nouvelles sources de financement. Il faut donc, dans ce même mouvement, mieux utiliser les ressources et mieux les répartir, pour que notre devise républicaine d’égalité, de liberté et de fraternité retrouve son sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Le premier concerne la revalorisation de l’ONDAM libéral, que vous avez bien voulu accepter à la demande de nombreux parlementaires. J’en suis d’autant plus satisfait que vous avez annoncé devant la commission des affaires sociales, le 11 octobre, que cette mesure servirait non seulement à la revalorisation des actes des infirmiers libéraux, ce qui est justice, mais également à l’augmentation des remboursements pour les assurés sociaux, notamment dans le domaine de l’optique – il y avait là une nécessité absolue et je vous remercie de l’avoir prise en compte.
Second motif de satisfaction : l’article 41 du projet fait enfin droit aux revendications, elles aussi légitimes et que j’appuie depuis de nombreuses années,…
Permettez-moi cependant de vous faire part de quelques inquiétudes que, je n’en doute pas, vous aurez à cœur de balayer dans votre réponse.
La première concerne la désertification médicale des zones rurales. Vous avez mis en place un système incitatif à l’installation, mais il n’a pas produit les résultats escomptés. Il serait bon de l’amplifier avant d’être contraint d’adopter des mesures coercitives.
La seconde inquiétude concerne l’assurance responsabilité civile des praticiens à risque. Je vois que mon ami Pierre-Louis Fagniez opine du chef et je me réjouis qu’il partage cette préoccupation.
Je souhaiterais également, monsieur le ministre, que vous précisiez l’utilisation des 170 millions d’euros supplémentaires affectés au Fonds d’aide à la qualité des soins de ville, alors que les 140 millions d’euros votés l’an dernier n’ont pas été intégralement consommés.
Enfin, j’ai une préoccupation constante, à laquelle vous répondez régulièrement, ce dont je vous remercie, mais qui m’inquiète compte tenu des récentes circonstances, et notamment de la récente victoire de France Télécom en référé. Je m’interroge en effet sur le cheminement du dossier médical personnel. Je souhaite que vous nous donniez un calendrier précis…
Ce souhait de vouloir aborder le PLFSS sous cet angle s’explique par l’attention toute particulière qu’un élu rural, ayant été parlementaire en mission auprès du ministre de l’agriculture, est naturellement enclin à prêter à ce secteur essentiel de notre économie, à ses représentants et au travail qu’ils exercent.
De plus, le fait de siéger, avec mon collègue Yves Censi, au sein du comité de surveillance de l’établissement de gestion du FFIPSA me conduit à faire preuve d’une vigilance toute particulière à l’égard de la protection sociale agricole dans toutes ses dimensions.
Enfin, lorsque j’ai été chargé par le Premier ministre d’étudier l’avenir de l’agriculture française, la transmission des exploitations et leur viabilité économique, j’ai fréquemment été alerté par les professionnels sur la protection sociale agricole, ainsi que sur les retraites des agriculteurs ou de leurs conjoints, pour lesquelles de fortes attentes ont été exprimées.
À cet égard, j’ai tout lieu de me réjouir de l’annonce faite par le Président de la République, le 5 octobre dernier, de revaloriser, dès le 1er janvier 2007, les retraites agricoles les plus modestes. Je tiens tout particulièrement à saluer cette mesure, inscrite à l’article 26, qui bénéficiera à 300 000 retraités, dès lors qu’elle s’adresse en priorité aux catégories qui n’ont pas bénéficié jusqu’à présent des mesures successives de revalorisation.
Pour autant, cette disposition, chiffrée à 162 millions d’euros, aura des conséquences évidentes sur le FFIPSA qui, rappelons-le, doit d’ores et déjà faire face à un déficit estimé à 2,1 milliards d’euros pour 2007.
C’est d’ailleurs le point que je souhaite développer, dans la seconde partie de mon intervention.
En effet, en 2005, il a été décidé de remplacer le BAPSA par le FFIPSA, sans modifier pour autant les modalités de versement des prestations dues aux non-salariés agricoles.
Face à cette situation préoccupante, le Gouvernement avait décidé de reprendre une partie de la dette du FFIPSA, pour un montant de 2,5 milliards d’euros, laissant au fonds une charge de 700 millions d’euros.
Malgré tout, le déficit du FFIPSA ne fait que s’accroître puisqu’il a atteint 1,4 milliard d’euros en 2005, 1,9 milliard en 2006 et qu’il atteindra probablement 2,1 milliards en 2007, soit un déficit cumulé de près de 6 milliards d’euros. Il faut donc accepter sans réserve les incidences que la revalorisation des petites retraites agricoles aura sur ce déficit, car la justice sociale est à ce prix.
Cependant, en tant que membre du comité de surveillance du FFIPSA, je profite de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui pour vous alerter, monsieur le ministre, et vous demander quelles perspectives nous serons en mesure d’offrir au régime agricole. Je n’ignore pas que cette question vous préoccupe et que vous avez manifesté à plusieurs reprises votre volonté de trouver rapidement une solution. D’ailleurs, le Gouvernement a confié à M. Jean-François Chadelat, inspecteur général des affaires sociales, une mission d’expertise, afin de trouver un mode de financement pérenne pour le FFIPSA.
Sans préjuger des propositions faites par la mission Chadelat et soucieux de trouver une issue qui puisse garantir l’avenir de la protection sociale agricole, je suis favorable à la proposition qui a été formulée par le comité de surveillance du FFIPSA, présidé par Yves Censi et au sein duquel j’ai l’honneur de représenter notre assemblée.
Ainsi, il a été proposé de recourir à un emprunt sur dix ans, dès le 1er janvier prochain, à hauteur du besoin de financement pour 2007, et avec une prise en charge par l’État du remboursement de l’annuité comprenant capital et intérêts. Cette proposition, bien qu’imparfaite, offrirait le temps nécessaire pour les négociations et les arbitrages, rendus indispensables, entre solidarité professionnelle et solidarité nationale. Cette mesure transitoire permettrait d’assurer le financement des prestations pour l’année 2007, tout en évitant de recourir à la création d’un nouveau prélèvement, qui serait en contradiction avec la politique de notre gouvernement.
Vous le voyez, monsieur le ministre, cette question me tient tout particulièrement à cœur dès lors qu’elle concerne l’ensemble du monde agricole français qui, ne l’oublions pas, travaille chaque jour pour faire de notre agriculture non seulement la première en Europe et la deuxième au niveau mondial, mais surtout une fierté nationale que nous devons préserver. J’en appelle à votre arbitrage souverain afin de résoudre, au plus vite et pour l’avenir, la question du financement de la protection sociale des femmes et des hommes du monde agricole. Sachez, en tout cas, que vous pourrez compter sur mon soutien et sur celui du monde rural. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Les outils mis en place, que ce soit le dossier médical partagé, le parcours de soins ou le médecin traitant, ont été autant d’instruments qui ont fait porter le poids des changements de comportements sur les seuls assurés sociaux.
Notre système de santé est en crise. Les inégalités d’accès aux soins n’ont jamais été aussi fortes. La part de financement individuel est de plus en plus importante. Des zones entières de notre territoire deviennent de véritables déserts médicaux. Les tensions entre l’hôpital public et la médecine de ville sont sources d’incompréhension et de désordre. Les professionnels de santé se sentent abandonnés face à des difficultés autant sociales que sanitaires.
Face à cette situation, la loi sur l’assurance maladie n’est pas, une nouvelle fois, à la hauteur des enjeux. Elle ne permet ni de préserver notre système de sécurité sociale ni d’améliorer l’offre et la qualité des soins dans notre pays. Les quelques bonnes idées que comportait cette loi …
Monsieur le ministre, nous vous disions en 2004, lors du débat parlementaire, que le DMP serait un succès si c’était un instrument médical…
Les conséquences pour les Français de cette réforme de l’assurance maladie sont lourdes : franchise de 1 euro sur les consultations et les actes, franchise de 18 euros sur les actes lourds, diminution du taux des indemnités journalières, moindre remboursement pour les bénéficiaires de la CMU hors du parcours de soins, sans oublier les hausses de CSG et de CRDS.
Aujourd’hui, chacun s’aperçoit, et en premier lieu les professionnels de santé, que les hypothèses de progression des dépenses d’assurance maladie pour 2007 sont totalement irréalistes et intenables. C’est tout l’équilibre du raisonnement sur la réussite de la politique menée qui s’effondre. La baisse affichée du déficit de l’assurance maladie ne repose sur rien d’autre que sur la volonté de masquer la réalité.
Une réalité n’est pas prise en compte : celle de la situation de l’hôpital, et singulièrement de l’hôpital public.
J’appelle particulièrement votre attention sur ce sujet, monsieur le ministre de la santé. L’hôpital est le grand absent de la réforme de l’assurance maladie, alors qu’il joue un rôle déterminant pour l’accès aux soins.
Comme les années précédentes, aucune réforme n’est proposée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, alors que l’hôpital doit être le premier bénéficiaire et le premier acteur d’une politique de solidarité.
Les besoins de financement des hôpitaux s’accumulent chaque année. Ils représentent 750 millions pour l’année 2006, dont 250 pour les seuls CHU. Ces sommes s’imputent sur les capacités d’autofinancement et freinent la dynamique du plan Hôpital 2007.
Pour l’an prochain, la Fédération hospitalière de France estime que les hôpitaux auront besoin de 635 millions en plus de l’enveloppe définie dans le projet de loi de financement, qui seront indispensables pour assumer l’impact des décisions salariales et des plans de santé publique décidés par votre gouvernement : le plan cancer, le plan santé mentale ou encore le plan grand âge.
Mais les problèmes des hôpitaux ne sont pas simplement des problèmes de moyens.
La communauté hospitalière publique est déterminée à poursuivre les efforts d’amélioration de gestion et les réformes structurelles. Elle pourra le faire à la condition que les pouvoirs publics cessent d’accroître ses difficultés.
La tarification à l’activité est une autre bonne idée qui a été dévoyée. Les modalités d’application de cette réforme doivent absolument être rediscutées et revues. Elles ne doivent pas avoir pour effet d’aboutir à une unification des tarifs entre le public et le privé.
La convergence est dangereuse et irréaliste. Il est indispensable de tenir compte des missions de service public de l’hôpital. L’enveloppe prévue pour ces missions doit être spécifique et élevée.
Aujourd’hui, l’hôpital – je pense particulièrement aux urgences – est un excellent reflet des maux et de la crise que connaît notre société. L’hôpital est tout à la fois à la pointe de l’excellence en termes de soins et le dernier recours, voire le seul, en matière d’accès aux soins. Il ne faut pas casser l’hôpital public. Il ne faut pas décourager le personnel, soignant ou non.
Pourtant, en 2007, la convergence entre le public et le privé sera poursuivie. Elle ne se comprend, elle n’est acceptable que s’il y a, entre les deux secteurs, un périmètre commun d’actions, des missions communes et des réglementations proches. Tel n’est pas le cas. Ainsi, la convergence tarifaire n’est pas accompagnée d’une convergence réglementaire.
Ces solutions, auxquelles vous poussez la communauté hospitalière publique, à savoir la reprise sur les capacités d’autofinancement, l’emprunt, les suppressions d’emplois ou de services, handicapent lourdement l’hôpital public.
La modernisation de la gestion hospitalière est indispensable. Elle ne peut se résumer à une manœuvre qui contraint le secteur hospitalier à se restructurer en organisant une pénurie de ses moyens.
Comme vous le voyez, monsieur le ministre de la santé, voilà beaucoup de questions, qui sont autant de sources de difficultés pour l’hôpital public.
J’en viens au problème des urgences. Si les chiffres que je vais citer s’avéraient faux, je suis prêt à être contredit.
Dans le cadre du plan de santé publique « Urgences », sur une enveloppe de 106 millions d’euros, 61 sont affectés aux établissements publics, qui assurent 91 % des passages aux urgences, et 45 millions sont versés aux établissements privés, qui n’assurent que 9 % des passages. Pourtant, l’hôpital public doit prendre en charge les urgences les plus lourdes et souvent les plus coûteuses.
L’hôpital public va mal, comme la sécurité sociale. Pourtant, le projet de loi de financement pour 2007 n’apporte, comme les quatre qui l’ont précédé, aucune garantie d’amélioration de l’accès aux soins pour tous et sur tout le territoire.
La spirale infernale qui a conduit la sécurité sociale vers plus de déficits et moins d’accès aux soins, vers plus de prélèvements et moins de remboursements, doit être enrayée le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Quel formidable challenge que celui que la majorité unie, déterminée, volontaire a relevé aux côtés de votre prédécesseur, Philippe Douste-Blazy, et aux vôtres durant ce beau mois de juillet 2004 !
Quel formidable challenge que d’essayer de concilier rigueur, modernisme, pragmatisme et fidélité à un système âgé de soixante ans, épuisé, endetté et bien entendu condamné avant l’heure par ceux qui, aujourd’hui encore, allient le scepticisme à la démagogie, ou se complaisent dans le rôle d’épouvantail qu’ils affectionnent et qui les rend imperméables à l’évidence, et aigres devant toute évolution positive contraire à leur idéologie rétrograde.
Oui, nous pouvons sans scrupule et sans fausse honte déclarer aujourd’hui que ce formidable challenge, nous sommes en passe de le gagner, pour permettre à des générations de nos compatriotes de continuer à bénéficier d’un système de santé juste, universel, solidaire, système que tous nous envient, car comme vous, monsieur le ministre, je n’en connais pas de meilleur au monde.
Ce challenge consistait à essayer d’équilibrer financièrement le système, le plus rapidement possible, tout en le modernisant par la mise en place d’une gouvernance enfin lisible et responsable, par une amélioration à la fois quantitative et qualitative du parcours des soins, nécessitant une indispensable responsabilisation de tous les acteurs et une lutte sans merci contre tous les fraudeurs.
Ce formidable challenge, oui, nous sommes en passe de le remporter. Bien sûr, des efforts sont encore nécessaires, nous ne l’avons jamais caché, mais nous n’avons jamais promis le grand soir !
La médecine de ville est en passe de réussir sa mutation et l’engagement de tous a permis de générer des économies considérables, tout en mettant en place un nouveau parcours de soins qui permettra aux patients d’être pris en charge mieux et plus vite.
Passer d’une progression de dépense de 8 % en 2003 à 1,4 % en 2006 ne s’est pas fait sans effort. Faire virer au vert les feux clignotants qu’étaient par exemple les arrêts maladies et les prescriptions de médicaments n’est pas le fruit d’un hasard, mais le résultat d’un engagement constant de tous les acteurs de terrain, tant sur les objectifs de maîtrise médicalisée que sur les accords de bon usage de soins.
Non, la baisse de 3,4 % des indemnités journalières, de 9,8 % des prescriptions d’antibiotiques, et l’augmentation de 8 % des prescriptions de génériques ne doivent rien au hasard.
Parallèlement, la remise à niveau des honoraires est en route. Le retard était considérable. Espérons par ailleurs que la CCAM clinique verra bientôt le jour et complétera utilement cette avancée ! Le financement de la permanence des soins, reconnu mission d’intérêt général, est en marche. La coordination des soins n’est plus un mythe, mais une véritable réalité du terrain.
Aujourd’hui, d’autres chantiers sont ouverts.
La CCAM technique 2 doit rapidement compléter la première version. C’est, à mon sens, la meilleure réponse à apporter au fameux rapport de l’IGAS sur la chirurgie, utilement relooké par le professeur Guidicelli.
La définition des secteurs d’activités est aujourd’hui un facteur d’inquiétude pour tous. En ce sens, les négociations tripartites sur la mise en place d’un secteur optionnel, qui ont débuté le 4 octobre, sont une bonne chose.
Toutefois, permettez-moi de proclamer ici haut et fort la nécessité d’étendre ce secteur à tous et de ne pas le réserver exclusivement aux chirurgiens. Cette mesure, demandée de longue date, ne doit en effet en aucun cas paraître réductrice et, par là même, discriminatoire.
Comme chaque année, la discussion parlementaire du projet de loi de financement de la sécurité sociale va être l’occasion d’un débat riche, animé, coloré par nos différences, mais certainement enrichi de nos expériences.
Nous userons sans abuser de notre pouvoir d’amendement afin de définir le plus précisément possible les moyens par lesquels nous comptons faire face aux défis de demain.
La troisième étape de la feuille de route fixée il y a trois ans, lors de la réforme de l’assurance maladie, et matérialisée par le PLFSS que nous voterons dans quelques jours, montre notre volonté de continuer les réformes structurelles engagées et notre souci de consolider l’évolution des comportements ayant amené les bons résultats que nous obtenons aujourd’hui.
Depuis trois ans, nous avons remis le malade au centre du système.
Alors, monsieur le ministre, continuons tous ensemble notre labeur, sans complexes mais sans autosatisfaction exagérée, avec détermination et bon sens. Nous pourrons être fiers d’avoir eu le courage de mettre en place une réforme aussi structurante.
Le PLFSS pour 2007 répond aux exigences de résultats que nous nous étions fixées. Nous le voterons donc sans états d’âme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
S’agissant du budget de l’État, dont on a voté la première partie hier, une démarche de redressement des comptes est clairement engagée depuis quelques années. En 2007, les dépenses ne progresseront que de 0,8 %, c’est-à-dire un point de moins que l’inflation. Quant aux recettes, depuis 2004, tous les surplus sont affectés au déficit et en aucun cas à des dépenses supplémentaires. Toutefois, en dépit de ces efforts, le déficit prévisionnel s’élève, pour 2007, à plus de 41 milliards d’euros. Cela signifie que les dépenses excèdent encore les recettes de 13 % et que, si la dette se stabilise en pourcentage du PIB, elle continue d’augmenter en montant.
Aussi le Premier ministre a-t-il eu totalement raison d’organiser en janvier dernier une conférence des finances publiques, destinée à réunir tous les partenaires de la dépense autour d’une table afin qu’ils coordonnent leur action. Cette démarche est d’autant plus indispensable que, si le budget de l’État s’élève à 275 milliards d’euros, celui de la sécurité sociale s’élève, lui, à 400 milliards d’euros.
Par ailleurs, nous sommes bien conscients qu’il va nous falloir trouver des marges de manœuvre pour financer l’inévitable accroissement des dépenses liées à la maladie, à la dépendance, aux retraites, et dues au vieillissement de la population. Mais nous ne pourrons les trouver que si nous parvenons à stabiliser la dépense de l’État ainsi que celle des collectivités locales et si nous mobilisons les éventuels excédents engendrés par la baisse du chômage. Il n’en demeure pas moins absolument nécessaire d’examiner nos dépenses sociales avec la même rigueur et le même souci de justice et d’efficacité. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Dans ce contexte, comment se présentent les relations entre le budget de l’État et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ?
Ces relations sont tout d’abord régies par le principe de compensation, qui est un bon principe, défini dans la loi de 1994 et repris dans la loi organique sur les lois de financement de l’an dernier. Ainsi, en 2006, le transfert du panier de recettes au titre de la compensation de l’allégement des baisses de charges sur l’emploi a été réalisé de telle manière que les comptes sociaux soient totalement garantis. Si un écart supérieur à 2 % devait être constaté, un processus de rééquilibrage serait immédiatement enclenché.
Vous devez être conscients, messieurs les ministres, que le budget de l’État pour 2007 consent un effort absolument considérable en faveur des comptes sociaux. Tout d’abord, les 320 millions d’euros de baisses de charges supplémentaires pour les entreprises de moins de vingt salariés – 2,1 points au niveau du SMIC – sont totalement compensés par un transfert équivalent des droits sur les tabacs. Ensuite, les frais financiers liés à la créance que les comptes sociaux ont vis-à-vis de l’État depuis plusieurs années sont pour la première fois compensés. En tant que rapporteur général du budget, j’ai souscrit à cette démarche, qui me paraît légitime.
Le rapporteur général du budget est donc dans une disposition d’esprit extrêmement positive pour ce qui est de favoriser l’équilibre des comptes sociaux. Aussi, je voudrais aborder deux questions sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La première porte sur la décision de supprimer l’article 21, afin d’imposer une compensation à l’euro près pour les exonérations des stages et des contrats de transition notamment.
Par ailleurs, nous avons fait en sorte, dans le cadre de la discussion budgétaire, que, chaque fois que l’État délègue sa mission de service public à un opérateur et qu’il délègue à cette fin des recettes, le Parlement décide chaque année de l’utilisation des éventuels surplus de ces recettes. Il me semble donc – et c’était le sens de l’intervention d’Yves Bur – que, s’il doit y avoir des surplus annuels, ceux-ci ne doivent pas être délégués de manière définitive à l’opérateur de service public qu’est la CNAM. Il faut que notre assemblée puisse en décider chaque année.
Nous avons intérêt à adopter ensemble des règles de bonne gouvernance communes.
Chers professeurs rapporteurs, le budget de l’État est à peine convalescent et il risque la rechute à tout moment. Il serait donc illusoire de penser que l’on peut régler tel ou tel problème des collectivités locales, voire de la sécurité sociale, en usant d’un droit de tirage sur le budget de l’État qui ne peut pas le supporter.
La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
Plusieurs d’entre vous ont abordé le financement de la sécurité sociale, notamment M. Carrez, M. Fagniez, rapporteur pour l’équilibre général, M. Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, ainsi que M. Door, M. Desallangre et Mme Jacquaint.
Comme l’a dit fort justement M. Bur, c’est en effet une question centrale. Le Gouvernement a mené une large concertation sur ce thème, en consultant experts et partenaires sociaux. C’est un premier pas. Il nous ouvre des perspectives, mais cette réflexion ne pouvait pas aboutir dès le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le Conseil d’analyse économique et le Conseil d’orientation pour l’emploi ont d’ailleurs demandé davantage de temps pour approfondir leurs travaux et débattre de certaines pistes de réforme, telles que la TVA sociale ou une contribution élargie à des formes de rémunération qui échappent actuellement au prélèvement social, contrairement aux principes fondamentaux qui avaient été retenus par les pères fondateurs de notre protection sociale.
La sécurité sociale doit en effet bénéficier de financements dédiés à des droits permanents qui ne sauraient être remis en cause chaque année à l’occasion de la discussion de notre loi de financement de la sécurité sociale, laquelle n’est pas exactement la transposition du budget de l’État à la sécurité sociale,…
Le Parlement doit désormais contribuer à cette réflexion sur le financement de la protection sociale, comme le souhaite à juste titre M. Door. Le sujet est bien sûr complexe, mais nous ne pourrons assurément pas rester immobiles, alors que nos voisins, en particulier les Allemands, modifient les modalités de leurs prélèvements sociaux, ce qui affecte d’ailleurs les conditions de la compétition économique.
Il y a eu, de ce point de vue, beaucoup de confusion à une certaine époque – une époque pas si éloignée –, mais nous sommes en train de prendre toute la mesure des effets pernicieux qu’un tel comportement peut avoir sur le financement de la sécurité sociale.
Vous estimez, monsieur le rapporteur général, que la compensation est un bon principe. J’y suis moi aussi très attaché, et souhaite qu’elle s’effectue à l’euro près. Je me félicite, comme vous, que l’État ait affecté cette année une partie des droits sur le tabac pour couvrir les frais financiers de sa dette – d’un montant de 5 milliards – à l’égard de la sécurité sociale. Mais ce serait encore mieux, vous en conviendrez, si nous parvenions, comme le Gouvernement le souhaite pour les années à venir, à apurer cette dette et à revenir à plus de clarté dans les comptes. Nous progressons vers cet objectif mais il y a encore, c’est vrai, beaucoup de travail.
Pour ce qui est de la démographie médicale, vous me permettrez de prendre mes distances avec les propositions du groupe socialiste. Je ne crois pas qu’il y ait une réponse simple, ni même une réponse unique, à ce défi, et je le souligne également à l’intention de Marc Le Fur, dont j’ai écouté avec beaucoup d’attention les propositions à cet égard.
Quand vous évoquez le nombre de places de crèches, madame la rapporteure, permettez-moi de vous dire que vous ne pouvez stipuler pour compte d’autrui. C’est trop facile !
Vous m'avez également interrogé sur l’évolution du décret du 1er août 2000. Je partage entièrement votre préoccupation de qualité. Je suis même particulièrement attentif à ce point. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas faire des économies administratives. Parfois, la rigidité des textes, sans amélioration de la qualité, peut conduire à des coûts exorbitants pour les collectivités locales et les caisses d’allocations familiales.
Vous m’avez interrogé, monsieur le rapporteur, sur le calendrier de parution du décret majorant le taux de surcote. Le projet a déjà recueilli un avis favorable du conseil d'administration de la CNAV du 4 octobre. Il est actuellement en cours de contreseing et paraîtra d'ici à la mi-novembre. La majoration du taux de surcote prendra effet au 1er janvier 2007. Rappelons-le, cette surcote atteindra 5 % à soixante-cinq ans.
Concernant la mise en place d'une surcote dans les régimes complémentaires, j'ai écrit à cette fin, avec Xavier Bertrand, aux partenaires sociaux gestionnaires des régimes complémentaires de retraite. Je souhaite que la négociation qui vient de s'ouvrir dans ces régimes complémentaires soit l'occasion d'apporter une réponse favorable.
Monsieur le rapporteur, je m'associe pleinement à vos propos quant à la nécessité d'une amélioration de l'emploi des seniors. C’est le sens des décisions prises sur la surcote, mais aussi de celles prises dans le cadre du plan seniors sur la retraite progressive et le cumul emploi-retraite en faveur des salariés qui avaient un très petit salaire. Les règles de cumul leur étaient en effet spécialement défavorables. Là encore, nous avons pensé à nos compatriotes les plus défavorisés en renforçant la possibilité pour eux de poursuivre une activité professionnelle. Je sais que vous y avez beaucoup travaillé et je tenais publiquement à vous en donner acte et à vous en remercier.
Concernant la situation des veuves, vous le savez, le Gouvernement y attache une attention toute particulière. La réforme des retraites d'août 2003 a amélioré les dispositifs existants : suppression du double plafond, de la condition d'âge, de la condition de durée, de la condition de non-remariage. Un certain nombre de verrous ont ainsi été levés. Le Conseil d'orientation des retraites examine actuellement la question des avantages familiaux, que vous avez soulevée. Je souhaite qu’il parvienne à une conclusion positive qui sera utile dans la perspective du rendez-vous de 2008. Il établira à ce sujet un rapport spécifique d’ici à la fin de l'année.
Monsieur le rapporteur pour avis Yves Bur, une fois de plus, je partage tout à fait votre appréciation : les réformes mises en œuvre en matière de sécurité sociale auront marqué cette législature et auront permis de sauvegarder notre système en restant fidèles à ses principes fondateurs. Je remercie également MM. Door, Perrut, Gilles et Mme Aurillac, qui ont souligné la réussite de la réforme de l’assurance maladie.
Vous avez comparé, monsieur Bur, la progression des dépenses de personnel dans le projet de loi de finances, qui est de 0,8 %, avec celle de la progression de l'ONDAM, qui de 3,5 %. Or la progression des dépenses de personnel n'explique que 1,39 % de la progression de l'ONDAM dans un secteur, la santé, où les besoins de soins et de présence humaine auprès des personnes vieillissantes et des malades vont croissant. De surcroît, les établissements de santé et médico-sociaux remplissent des missions qui nécessitent la présence permanente du personnel pour assurer qualité et continuité des soins. Si écart il y a entre projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale, il est relativement faible et s'explique par une dynamique différente des besoins à satisfaire.
L'assurance maladie, avez-vous dit, monsieur Bur, et je cite vos propos, doit devenir « un acheteur de soins avisé et ne plus être un guichet aveugle ouvert à tous les abus ». Comme vous avez raison ! Pour avoir été associé à l’élaboration de toutes les grandes réformes de la législature, vous savez à quel point le Gouvernement partage cette préoccupation. L’époque où l’on gérait la sécurité sociale à guichet ouvert est révolue depuis longtemps. Nous continuons à progresser. L’installation du Comité national de lutte contre les fraudes, hier, par le ministre de la santé et des solidarités en témoigne. La lutte contre les fraudes et les abus en matière de sécurité sociale est une priorité partagée à la fois par le Gouvernement et nombre d’entre vous, y compris Mme Jacquaint, qui a convenu dans son intervention qu'on ne saurait être hostile à un tel objectif.
Le président Dubernard s’est également exprimé avec beaucoup de pertinence sur les ordonnances de mai et septembre 2005. Je souscris tout à fait à son analyse : ces ordonnances apportent une réponse positive à la question de la gouvernance hospitalière et nous continuons, Xavier Bertrand et moi-même, avec détermination, sur la voie de l’amélioration de la gestion des hôpitaux publics.
Monsieur Préel, vous êtes difficile à satisfaire. C'est un signe d'exigence, mais il faut aussi savoir reconnaître quand les réformes marchent et portent leurs fruits. Vous voyez toujours le verre à moitié vide, même lorsqu’il est plein aux deux tiers, comme c’est le cas aujourd’hui. Il est vraiment dommage de conserver cette disposition d’esprit si systématiquement critique. Le médecin traitant, on prétendait que ça ne marcherait pas. Or plus de 40 millions de Français ont désigné leur médecin traitant,…
La pénétration des génériques progresse, et là non plus vous n'êtes pas content.
Vous n'êtes pas content non plus de l'ONDAM, monsieur Préel. Vous nous dites qu’il est trop faible et n'a pas été concerté. J'observe que l'ONDAM voté par les partenaires sociaux dans le cadre de l'UNCAM était de 2,2 %. Le Gouvernement a proposé 2,5 %, et les parlementaires souhaitent le porter, s'agissant des soins de ville, de 0,8 % à 1,1 % soit, pour le total de l'ONDAM, à 2,6 %. Je ne sais donc pas ce qu'il faut faire, monsieur Préel, pour que vous reconnaissiez l’ouverture du Gouvernement au dialogue et la qualité de la concertation qui a eu lieu, non seulement avec les partenaires sociaux, mais également avec la majorité.
Monsieur Terrasse, j’ai été attristé par vos propos. (« Oh ! sur les bancs du groupe socialiste.)
Vous prétendez néanmoins, et c’est profondément blessant pour le Gouvernement mais aussi pour l’ensemble des Français qui s’y sont mis et pour tous les médecins qui ont joué le jeu de la convention médicale, que nous sommes les exécuteurs testamentaires de la réforme de l'assurance maladie. C'est particulièrement triste venant de quelqu'un dont le parti est le notaire de l'immobilisme en matière de sécurité sociale, et qui a laissé filer les dépenses pendant cinq ans.
S'agissant de la modernisation des systèmes d'information, nous n’entendons aucune proposition de votre part, mais seulement des critiques, auxquelles il faut bien répondre.
Ainsi, vous êtes contre la nouvelle carte Vitale 2, plus sécurisée et plus personnalisée, qui sera la porte d'entrée vers le dossier médical personnel.
Madame Hoffman- Rispal, vous savez combien j’apprécie notre dialogue. Oui, nous avons présenté deux plans pour relever le défit de la longévité et je comprends que vous et vos amis regrettiez de ne pas l’avoir fait vous-mêmes. Une fois encore, c’est l’initiative de l’actuelle majorité qui a permis d’avancer. Nous avons créé 183 000 places médicalisées en maisons de retraite depuis 2002 quand vous n'en n'aviez crée que 45 000 entre 1998 et 2002.
Vous soulignez que nous manquons de places d'hospitalisation à domicile. C’est vrai, mais leur nombre est passé de moins de 5 000 en 2002 à 8 000 actuellement et devrait atteindre 15 000 en 2010.
Vous évoquez les besoins en personnel des établissements soignants, s’agissant notamment des postes de psychologue ou d’animateur. À cet égard, des mesures spécifiques annoncées dans le cadre du plan « Solidarité grand âge » sont financées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il ne vous reste donc plus qu’à le voter, madame la députée !
Je voudrais dire à Mme Boutin que nous sommes attentifs à la progression des droits sociaux des parents.
Madame Guinchard, nous veillons à renforcer l’accès aux soins en augmentant le nombre des bénéficiaires de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire de santé.
À M. Perrut et à Mme Aurillac, qui ont bien voulu saluer le fait que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ait placé l’impératif de solidarité au cœur de sa logique, je veux dire que ce texte permet en effet de renforcer la solidarité pour les personnes handicapées, les personnes âgées et les familles. C’est essentiel pour nous car nous n’avons pas seulement pour objectif de faire baisser le déficit. Nous voulons aussi renforcer notre protection sociale grâce à un certain nombre de progrès que nous réussissons à financer tout en diminuant les déficits.
Bernard Perrut s’est inquiété à juste titre de l’évolution des financements des réseaux de soins palliatifs. Je tiens à lui dire que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale soutient l’ensemble des réseaux de soins, et en particulier ceux auxquels il a fait allusion. Nous y tenons, c’est très important pour nous.
M. Bernier et M. Le Fur ont évoqué le FFIPSA, qui est un élément essentiel du pacte noué, au temps du général de Gaulle, entre la République et ses agriculteurs, et auquel tous les gouvernements de la Ve République ont été fidèles. Nous voulons, nous aussi, lui rester fidèles. Le changement juridique qui nous a fait passer du BAPSA au FFIPSA n’emporte en lui-même aucune conséquence sur le financement des prestations sociales agricoles. Avec les ministères de l’agriculture et des finances, nous cherchons une solution pérenne.
Il subsiste cependant une réelle difficulté : le choix du secteur par les anciens chefs de clinique chirurgiens. Dans la mesure où il s’agit d’un domaine conventionnel, le Gouvernement a exercé les pressions les plus fortes pour que s’engage la négociation, et celle-ci a débuté le 16 octobre. Je vous demande donc, monsieur le député, de la laisser se poursuivre, étant entendu que nous la suivons avec attention. Si elle n’aboutit pas, alors le Gouvernement demandera au Parlement de se prononcer, au plus tard lors de l’examen de ce projet de loi au Sénat.
Après Mme Fraysse, M. Renucci a abordé la question du taux de couverture des dépenses de santé par la sécurité sociale : de 75,7 % en 2002, celui-ci est passé à 77,1 % en 2005. Nous progressons.
Enfin, à M. Paillé et M. Le Fur, qui m’ont interrogé sur la démographie médicale, je réitère la réponse que j’ai faite tout à l’heure sur cette question, et je salue l’intervention de M. Vitel, que j’ai écouté avec beaucoup d’attention.
Mesdames et messieurs les députés, j’ai répondu à l’ensemble de vos interventions sans peut-être entrer suffisamment dans les détails,…
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.)
La parole est à M. Gérard Bapt.
Votre inefficacité durable en ce qui concerne le redressement des comptes sociaux, en dépit de ce que vous venez d’affirmer, est soulignée par votre ami politique M. Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales du Sénat, qui écrit : « L’évolution globalement positive des comptes sociaux repose sur des projections optimistes cachant une nouvelle dégradation du résultat de l’assurance vieillesse, dont le déficit progressera de plus d’un milliard, atteignant 3,5 milliards en 2007. »
M. Vasselle indique également que le projet de loi n’apporte pas de réponse sérieuse aux obligations de l’État vis-à-vis des organismes de sécurité sociale, qui ne bénéficient d’aucune subvention pour combler des déficits structurels. À cet égard, le débat qui s’est instauré tout à l’heure entre M. le rapporteur général de la commission des finances et M. le ministre délégué à la sécurité sociale était fort instructif : des problèmes structurels existent au sein même de ce gouvernement concernant les rapports entre le budget de l’État et le budget de la sécurité sociale, le malheur étant que c’est le budget de la sécurité sociale qui en fait les frais !
S’agissant des dépenses, l’optimisme du Gouvernement me semble nettement exagéré. Je ne fais pas référence aux critiques émises par votre propre majorité, monsieur le ministre, qui vous reproche de ne pas respecter les objectifs affichés et de ne pas contrôler l’ONDAM – soit parce qu’il paraît à certains trop élevé, notamment l’ONDAM hospitalier, soit parce que d’autres souhaiteraient le voir plus élevé, notamment l’ONDAM concernant les soins de ville.
Il est vrai que vous vous vantez beaucoup des fruits de votre action, mais ceux-ci sont malheureusement très incomplets. Si les progrès constatés en matière d’indemnités journalières ne sont pas négligeables, chacun sait que leurs effets ne seront pas éternels. Vos résultats sont donc fragiles et de portée désormais limitée. À cela s’ajoute la baisse des crédits affectés à l’innovation : par exemple, les moyens dont bénéficient les réseaux de soins sont en recul de 20 %, pour des raisons purement administratives – la rigidité administrative sert sans doute de prétexte à quelques économies sur la dotation nationale pour les réseaux de soins.
Pour la première fois, cette année, monsieur le ministre, un engagement présidentiel n’est pas respecté. Je pensais que les engagements présidentiels étaient, pour vous, sacrés – je constate avec peine que vous ne respectez pas la sanctuarisation des crédits du plan cancer –, alors que, jusqu’à maintenant, ils l’étaient. Ainsi, le réseau de cancérologie du pôle Est de l’Île-de-France serait arrêté – alors qu’il était sur le point d’être lancé –, du fait de l’annulation de 20 % des crédits de la dotation pour l’Île-de-France.
En matière de médicaments, il est vrai que certains facteurs structurels contribuent à une plus grande maîtrise des dépenses, comme le passage de nombreuses molécules du statut de princeps à celui de générique, dont le principe, auquel nous adhérons, est par ailleurs de mieux en mieux accepté par la population. De tels éléments ne sauraient toutefois cacher le bilan des cinq dernières années : beaucoup de temps a été perdu, et nous avons enregistré de véritables reculs en matière d'égalité et de protection sociale. Cela se vérifie dans tous les domaines, qu'il s'agisse de l'assurance maladie, de la vieillesse ou de la famille.
Par ailleurs, le poids de la dette s'est encore accru. La CADES, qui avait dû reprendre à son compte 35 milliards d'euros supplémentaires en 2004, supporte aujourd'hui une charge de 98 milliards. Selon les prévisions de la Cour des comptes, la dette sociale s'alourdira d'au moins 39 milliards supplémentaires d'ici à 2009, sans compter ce qui relève du FFIPSA.
C'est que le déficit de l'assurance vieillesse croît plus vite que prévu, et que l'assurance maladie ne revient pas à l'équilibre aussi vite que vous le prétendiez. Rappelons seulement qu'on nous promettait en 2004, grâce à l'arrivée du DMP – cet instrument magique ! – un retour à l'équilibre dès 2007 ! Puisque vous n'avez pas les moyens de remplir cet objectif, malgré vos manipulations comptables, vous repoussez l'échéance à 2009. Qu'en sera-t-il à cette date si nous nous référons aux prévisions annexées au projet de loi ? Il y aurait encore 3,5 milliards d'euros de déficit, malgré des prévisions conjoncturelles très optimistes – croissance de 2,5 %, progression de 4,4 % de la masse salariale et hausse limitée à 2,2 % des dépenses.
Le chemin dans lequel s'engage notre protection sociale est donc toujours aussi incertain. Malgré de nombreuses manifestations d'autosatisfaction – nous les avons constatées à l’instant, mais nous les constations aussi chez M. Fillon –, le déficit des retraites s'accélère. La confiance des salariés est d'ailleurs si faible que le système de bonus et de malus est un échec. Les Français se précipitent pour valider leurs droits, pensant que les critères de demain seront encore plus défavorables pour eux.
Quant au fonds de réserve pour les retraites, il n’est plus doté que ridiculement, comme par routine.
À côté du problème de l’équilibre des comptes, se pose aussi celui, essentiel, de la réponse aux besoins de santé.
Comme l'a souligné M. le président de la commission, le professeur Dubernard, il est important de parler finances, mais il l'est tout autant de savoir comment les fonds sont utilisés. Je me dois donc de souligner l'insuffisance des politiques de nutrition et de santé au travail, la régression concernant la lutte contre l'alcoolisme, la lenteur de la mise en œuvre d'une politique anti-tabac, l'absence de priorité accordée à la santé publique dont témoigne la manifestation, avant-hier, des médecins scolaires. Quant à avancer l'idée d'une consultation pour les personnes âgées de plus de soixante-dix ans, c’est bien mais largement insuffisant au regard de l'ampleur des problèmes liés au vieillissement.
L’accès aux soins est essentiel en matière de politique de santé dans un pays comme le nôtre : c’est un droit pour tous, et chacun doit pouvoir bénéficier de soins de qualité, quelle que soit son origine ou sa condition sociale.
Or l’étude de l’IRDES cet été a montré le poids du gradient social dans les statistiques de santé. Les ménages ouvriers et les employés sont ceux qui se déclarent le plus en mauvaise santé. Ce sont également ceux qui bénéficient le moins d’une couverture complémentaire et qui renoncent le plus souvent à des soins pour des raisons financières.
On s’en doutait : les riches se portent mieux et vivent plus longtemps que les pauvres – le constat chiffré de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, dans son rapport au Premier ministre, l’a démontré de manière éclatante.
La France est par ailleurs le pays où la mortalité prématurée est la plus élevée en Europe, mais aussi le pays où la différence de mortalité prématurée entre les hommes exerçant une profession manuelle et ceux exerçant une profession non manuelle est la plus forte !
Ces inégalités sociales apparaissent dès la naissance, qu’il s’agisse de la surveillance de la grossesse, qui apparaît corrélée au niveau d’emploi chez la femme enceinte – la précarité de l’emploi a donc une incidence sur la santé – ou de la prévalence de l’obésité chez l’enfant, le taux de prévalence étant beaucoup plus élevé dans les milieux populaires et défavorisés.
Quant aux résultats de l’enquête du fonds CMU, ils sont affligeants, et je ne doute pas que les nombreux médecins ici présents partagent cette affliction. En effet, 40 % des médecins spécialistes et des dentistes refusent de recevoir les patients bénéficiaires de la CMU.
Enfin, l’INPES, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, constate dans son dernier rapport que ceux qui bénéficient le plus de la prévention – et on connaît désormais l’importance à accorder à cette dimension – sont ceux qui en ont le moins besoin. Nous l’avons constaté en matière de dépistage du cancer du sein.
Enfin, c’est trop souvent pour répondre au mal-être social que sont prescrits tant de psychotropes – et pas simplement à cause des prescripteurs y ayant trop facilement recours.
Une autre question se pose, monsieur le ministre : l’ONDAM hospitalier. En effet, 750 millions d’euros manquaient en 2006, ce qui va aggraver les difficultés en fin d’exercice annuel d’un grand nombre d’établissements hospitaliers. D’après les estimations de la Fédération hospitalière de France, 700 millions manquent pour 2007, notamment pour répondre à vos propres engagements de revaloriser – ce qui est bien – certains statuts et situations, mais aussi de mener les plans de santé publique dont le secteur hospitalier lui-même doit être, pour partie, en charge, mais dont le financement ne lui est pas assuré.
Je souhaite aussi vous interroger sur l’absence de parution d’un document qui aurait dû parvenir à tous les députés avant le 15 octobre : le rapport annoncé de l’IGAS concernant les MIGAC, les missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation. Monsieur le ministre, pourquoi ne nous est-il pas parvenu, alors qu’il nous aurait permis de juger d’un élément aussi important que la réforme de la tarification à l’activité ?
Selon moi, ces problèmes concernent aussi bien l’hospitalisation publique que l’hospitalisation privée, et je n’apprécie guère les critiques sur le surcoût du secteur public par rapport au secteur privé, notamment en médecine, en chirurgie et en obstétrique.
À l’évidence, les surcoûts de plus de 50 % évoqués par quelques communiqués-circulaires sont majorés. Il n’empêche que, dans le cadre des conventions, les établissements du secteur privé peuvent désormais participer au service public et être mis en difficulté par des décisions non concertées. Ainsi, on a parfois constaté des diminutions autoritaires de tarif de 8 % sur l’ensemble de l’année, en trois étapes.
Quant à la campagne budgétaire pour 2007, j’ai appris avec surprise que, dans le cadre de la mise en place des objectifs quantifiés d’activité, des propositions impératives des ARH indiquaient désormais aux établissements qu’ils avaient à diminuer leur activité dans tel ou tel secteur de 5 à 12 % : au fond, avec l’instauration de ces quotas d’activité, ne s’agit-il pas de favoriser la maîtrise comptable au détriment de la maîtrise médicalisée ? À cet égard, monsieur le ministre, il serait bon que vous apportiez des éclaircissements sur la façon dont les objectifs quantifiés d’activité dans le secteur privé seront mis en place en 2007.
Vous considérez ensuite que les dépenses d’éducation pourraient être « redéployées en faveur des lycées, des universités, de la recherche ». De même, des marges de manœuvre pourraient être gagnées avec « les dépenses d’indemnisation du chômage » qui seraient redéployées.
J’ai cru comprendre que M. Carrez n’était pas tout à fait sur la même ligne que vous, monsieur le ministre, pas plus qu’il n’est sur celle de son collègue de la majorité, M. Marini, rapporteur général de la commission des finances du Sénat. Celui-ci considère en effet qu’il faut désormais financer la branche assurance maladie sur le budget de l’État. La part fiscale du financement de la sécurité sociale pourrait être augmentée, au bénéfice des branches santé et famille, par une part raisonnable du produit de la TVA, avec l’instauration de la TVA sociale. Les branches santé et famille seraient ainsi intégrées au budget de l’État, tandis que serait affirmée l’autonomie des branches vieillesse et accidents du travail, qui relèvent d’une logique assurancielle et contributive. Il me semble que M. Marini lance ainsi un énorme pavé dans la mare.
Monsieur le ministre, je parlais tout à l’heure de l’accès aux soins. Dans votre projet de loi, vous reconnaissez que l’opposition avait raison lorsqu’elle disait que l’aide à l’acquisition d’une couverture maladie complémentaire pour les personnes dont les ressources n’excèdent pas plus de 10 % du plafond d’attribution de la CMU serait insuffisante, le coût de la mutuelle étant aujourd’hui très élevé. Or les chiffres figurant dans les documents officiels montrent que seuls 10 % des bénéficiaires éventuels ont profité de cette aide. En relevant le plafond à 15 %, vous ne résolvez pas le problème de fond : les bénéficiaires éventuels sont une infime minorité.
Dans le même temps, nous constatons que le secteur privé avance et se réforme. Les MMA démutualisent l’assurance, et le président du groupe, M. Seys, met en place, le 1er décembre, une nouvelle forme d’assurance complémentaire, comportant une réserve dont 50 % du montant seront remboursés si le cotisant n’utilise pas de service de soins, l’autre partie étant conservée par l’assureur. C’est une grave atteinte à la mutualisation du risque complémentaire. Il serait important que vous nous fassiez connaître votre sentiment à cet égard, monsieur le ministre.
Interrogé sur la démutualisation du risque en assurance santé, M. Jean-Claude Seys, président du groupe MMA, déclare : « La réponse à cette question ne peut être catégorique. Au prix actuel des complémentaires santé, beaucoup de gens se retirent de l’assurance, ce qui représente une démutualisation extrêmement lourde. Chez les étudiants par exemple, l’évolution est notable : 12 % d’entre eux ne disposent pas d’une assurance complémentaire contre 6 % auparavant. Nous essayons donc de lutter contre une démutualisation totale en offrant une démutualisation partielle. » Il faudra qu’on nous explique comment un tel processus est positif et porteur de progrès en ce qui concerne l’égalité d’accès aux soins.
Monsieur le président, mes chers collègues, il est une autre raison de soutenir cette motion de renvoi en commission. C’est la déclaration très intéressante du rapporteur pour avis, M. Yves Bur, qui, dans une intervention fort intéressante, regrette « l’impréparation de la mise en œuvre de la T2A, qui semble se réduire à un système de facturation alors qu’elle devrait permettre une meilleure performance de l’ONDAM hospitalier ».
M. Bapt est membre de la commission des finances, ce qui explique qu’il ait longuement parlé des relations entre le budget de l’État et les finances sociales, allant même jusqu’à évoquer le deuxième porte-avions ! Cependant, on est assez loin du projet de loi de financement de la sécurité sociale !
Nous avons tout de même bien senti que nous étions à quelque mois d’une échéance électorale significative lorsque M. Bapt, abordant enfin le domaine de la santé, a défendu l’hôpital public et la Fédération hospitalière de France, dont on connaît le mode de fonctionnement et qui joue pourtant toujours à demander plus sans jamais faire l’effort de se restructurer dans l’intérêt des patients et de la qualité des soins. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Quant aux propos que j’aurais tenus, tirés du compte rendu analytique, qui ne les a pas déformés, je confirme qu’il nous faut revoir les conditions d’exercice. Nous en sommes d’ailleurs tous d’accord, et le Gouvernement comme celui qui l’a précédé, a fait beaucoup d’efforts dans ce domaine.
Je ne vois pas bien pourquoi renvoyer le texte en commission. La commission des affaires sociales, monsieur le membre de la commission des finances, travaille beaucoup. Elle a tenu trois séances avant le rapport, et elle a été saisie de 220 amendements contre 132 l’an dernier. Elle a adopté 52 amendements, 29 émanant des rapporteurs, 12 du groupe de l’UMP, 7 du groupe UDF et 3, tout de même, du groupe socialiste.
Je suis tout de même choqué de la manière qu’a mon collègue et confrère de manipuler les arguments et de stigmatiser les uns et les autres dans le seul but de créer la sinistrose et d’éviter de reconnaître tout ce qu’il y a de positif dans le PLFSS.
Pour ce qui est de la politique en faveur des personnes âgées, la lutte contre le vieillissement n’est-elle pas une priorité nationale qui a été affirmée comme telle par Hubert Falco, par Catherine Vautrin et, maintenant, par Philippe Bas ? Augmenter de 13 % dans le PLFSS les crédits affectés aux maisons de retraite, n’est-ce pas prendre en compte cette préoccupation ? Décider une augmentation de 5,6 % de l’ONDAM médico-social, n’est-ce pas rendre service aux personnes âgées, développer une politique efficace et cohérente vis-à-vis des personnes handicapées et permettre l’accès aux soins pour tous ?
Je suis affligé par cet état d’esprit qui tend à vouloir faire croire de façon redondante qu’en France on ne pourrait pas accéder aux soins. Je vous défie, mon cher collègue, de m’amener quiconque qui aurait besoin d’un soin et qui ne pourrait pas être soigné ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Au-delà de la comparaison entre le public et le privé, c’est surtout le rapprochement entre ces deux mondes qui nous intéresse. Tel est l’objet de la T2A, et j’apprécie fortement que M. le ministre ait insisté pour que le seuil de convergence tarifaire soit réalisé à 50 % en 2008.
Certes, pour ce qui est des étudiants, un problème de prise en charge se pose. Je vous renvoie cependant tous à l’amendement de notre ami Richard Mallié sur ce point. Nous en reparlerons lors de la discussion des articles et je suis sûr que nous trouverons alors une solution.
J’ai beau relire mes notes prises pendant votre intervention, je n’y vois pas de motif à retourner en commission. Je demande donc à mes amis du groupe UMP de ne pas vous suivre dans votre requête. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Comme l’a rappelé le président de la commission saisie au fond, nous avons étudié 220 amendements en quatre heures, soit 50 amendements à l’heure environ c’est-à-dire un peu plus d’une minute par amendement ! C’est, là encore, un peu rapide pour aller au fond des choses ! Certes, certains amendements sont simplement rédactionnels et peuvent être examinés en quelques secondes, mais qu’en est-il des autres ? Et tout cela pour entendre après, en séance publique, qu’il n’est pas besoin de reprendre le débat qui a eu lieu en commission – argument qu’il m’a souvent été donné d’entendre aussi bien quand j’étais dans la majorité que dans l’opposition ! Nos débats mériteraient vraiment d’être mieux préparés.
J’espère donc, monsieur le ministre, que vous nous donnerez des réponses lors de la discussion des articles. Je rappelle en effet que je vous ai posé quelques questions dans mon intervention générale, cela pour m’entendre simplement répondre que je voyais le verre à moitié vide alors qu’il était à moitié ou aux trois quarts plein !
Le fait est, monsieur le ministre, qu’après les réformes de l’assurance maladie et des retraites, il était prévu que nous arriverions à l’équilibre des comptes en 2007.
Je vous pose donc deux questions, auxquelles je vous laisse me répondre plus tard.
À propos du FFIPSA, vous avez répondu à M. Le Fur que vous alliez étudier et réétudier les choses. Mais le problème se pose depuis au moins 2005 : le Gouvernement aurait déjà dû apporter une réponse ! Au minimum, il pourrait s’engager à payer les intérêts de l’emprunt que vous proposez au FFIPSA – mais peut-être le préciserez-vous.
Ensuite, si l’on a confié à la CADES les déficits antérieurs, qui s’arrêtent en 2006, comment allez-vous financer le déficit de 2007 ?
Si retourner en commission peut permettre de vous entendre répondre à ces questions, pourquoi pas ? J’espère cependant que vous pourrez nous en dire plus à l’occasion de nos débats à venir.
J’ai peur d’avoir compris que, devant l’impossibilité d’emprunter, vous demanderez aux branches d’emprunter pour financer le déficit actuel. Elles auraient donc des intérêts à rembourser. Cela ne paraît pas une politique très sérieuse ni très satisfaisante pour l’avenir. Nous aurons toutefois l’occasion d’en reparler.
J’espère donc que nous allons incessamment passer à la discussion des articles, en espérant encore une fois que l’Assemblée travaillera un jour dans de meilleures conditions.
Je ne reprendrai pas l’argument du temps, que vient de développer de façon très pertinente M. Préel, sinon pour souligner combien le temps de travail que nous avons consacré à l’assurance maladie, en particulier, est insuffisant, ne serait-ce que par rapport au montant du budget de la sécurité sociale. C’est là une vraie question qui se pose à nous, parlementaires, si l’on se place dans une logique démocratique bien comprise.
Je voudrais surtout répondre à M. Vitel, qui a fait comme M. Bas à propos des créations de places de crèches.
Monsieur Vitel, au début de la prochaine séance, lorsque nous reprendrons nos travaux, je vous présenterai le travail réalisé par le conseil de surveillance du fonds de la CMU. Il n’accuse pas, il constate : un testing, comme cela se fait ailleurs en matière de discriminations, a montré qu’un certain nombre de médecins – des spécialistes plutôt que des généralistes – refusent les bénéficiaires de la CMU. Vous ne m’avez pas répondu sur ce point, monsieur le ministre.
Tout d'abord, j’évoquerai les conditions du déroulement des travaux de nos commissions. Les amendements ont eu peine à parvenir jusqu'aux parlementaires. M. Préel l’a expliqué tout à l’heure, on a pu consacrer une minute seulement par amendement. C’est peu ! Certains amendements ne sont même pas arrivés jusqu’aux commissions, réunies en hâte, justement pour tenter de les examiner tous, ce qui n’a pas été possible !
Mme Fraysse, qui représentait notre groupe ce matin, m'a expliqué que l'amendement scélérat de l'UMP, ce cavalier scélérat – pourtant, les cavaliers sont en général des gens bien élevés – qui rétablit l'accord de 2004 sur la réduction du temps de travail dans la restauration et l'hôtellerie n'a même pas été examiné en commission. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
En outre, les amendements qui ont pu arriver jusqu'aux parlementaires méritent qu'on y regarde à deux fois et que des débats de fond se tiennent sur certains d'entre eux, notamment ceux du Gouvernement, je pense tout particulièrement, je le dis solennellement, à l'amendement scandaleux du Gouvernement qui porte le numéro 442.
Sous couvert de lutte contre la fraude, objectif que nous partageons tous, vous vous livrez, monsieur le ministre, à une véritable remise en cause du droit aux prestations familiales et à la solidarité nationale. J’attire votre attention, mes chers collègues, sur ce point car personne n’a, semble-t-il, vu les dégâts qu’un tel amendement pouvait produire.
Vous voyez la fraude partout,…
Là, sur cette délinquance financière des « patrons voyous », comme dit le Président de la République, en haut lieu, dans les sphères financières et industrielles, qui jouent dans une autre cour compte tenu des sommes manipulées, vous fermez les yeux et ne dites rien.
Au lieu de cela, vous êtes prêt à faire des économies sur tout, et de la façon la plus grossière et la plus immorale qui soit, je pèse mes mots.
La dérive est telle que vous en oubliez le sens commun. En témoigne cet amendement n° 442 qui vise à conditionner le versement des prestations au train de vie des allocataires. Ainsi, la prestation ne serait plus versée – sans doute ne l’avez-vous pas vu, mes chers collègues – en raison d'une situation sociale, mais en fonction du train de vie.
Vous dénaturez du même coup le sens de ces prestations, qui répondent à des droits, à des réparations de préjudices ou à des situations sociales qui méritent l'intervention de la solidarité nationale. Cela n'a rien à voir avec le train de vie !
Jusqu'où voulez-vous aller dans cet esprit ? La traque aux chômeurs, aux étrangers, aux enfants d’étrangers, aux assurés sociaux, ça suffit ! Sortez de cette paranoïa ! Regardez le monde qui vous entoure et vous verrez que les délinquants les plus sérieux ne sont pas ceux que vous visez.
Mais vous voulez, avec cet amendement, détourner l'attention sur le véritable pillage de nos richesses nationales par les nantis et les privilégiés.
Enfin, les dispositions du IV de l’amendement sont stupéfiantes.
Vous modifiez, vous osez modifier l'assiette des revenus pris en compte pour l'attribution de la CMU alors que les bénéficiaires connaissent de véritables difficultés pour accéder aux soins.
Quand nous avons institué la CMU, nous avons relevé de 50 euros le seuil des revenus à prendre en compte, éliminant 2 millions de personnes âgées et handicapées.
Comme le dirait avec moi l'abbé Pierre, cet amendement est indigne de la France et justifie, à lui seul, un retour en commission.
(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, n° 3362 :
Rapport, n° 3384, tomes I à V, de M. Pierre-Louis Fagniez, M. Jean-Marie Rolland, Mme Marie-Françoise Clergeau et M. Denis Jacquat au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ;
Avis, n° 3388, de M. Yves Bur, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral
de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton