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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 25 octobre 2006

25e séance de la session ordinaire 2006-2007


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LOUIS DEBRÉ

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Souhaits de bienvenue à deux délégations étrangères

M. le président. Je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de l’Assemblée législative de la République d’El Salvador, conduite par son vice-président, M. Roberto Lorenzana, ainsi qu’à une délégation du groupe d’amitié Égypte-France de l’Assemblée du peuple d’Égypte, conduite par le Dr Abdel Ahad Gamal Edin, président du groupe d’amitié. (Mmes et MM. les députés, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)

questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions aux Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe des député-e-s communistes et républicains.

Temps de travail dans l’hôtellerie-restauration

M. le président. La parole est à Mme Janine Jambu.

Mme Janine Jambu. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Le Conseil d’État vient d’annuler l’accord de 2004 sur le temps de travail dans le secteur de l’hôtellerie-restauration, accord d’ailleurs dénoncé dès l’origine par les deux organisations syndicales majoritaires car contraire à la législation sur la réduction du temps de travail. Il n’y a donc pas de vide juridique, mais simplement l’obligation d’appliquer la loi en vigueur sur les 35 heures.

M. Charles Cova. Il faut les supprimer !

Mme Janine Jambu. Pourtant, le groupe UMP s’est empressé de voler au secours des patrons de la profession (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire)

M. Bernard Deflesselles. Non ! Des salariés !

Mme Janine Jambu. …en déposant, dans le cadre du PLFSS, un amendement destiné à maintenir les 39 heures et à donner force de loi à l’accord de 2004.

Cette manœuvre fermerait la porte à toute nouvelle négociation sur un accord révisé portant sur les 35 heures et les salaires, plus favorable aux dizaines de milliers de salariés de l’hôtellerie-restauration, dont chacun connaît – ou devrait connaître – les difficiles conditions d’embauche et de travail, alors que le secteur n’est pas exposé à une concurrence internationale acharnée.

M. Patrick Roy. Eh oui !

Mme Janine Jambu. Une telle attitude offre un saisissant contraste avec les récents propos du chef de l’État tendant à consacrer le primat du dialogue social. Décidément, à vos oreilles, le chant des sirènes patronales est toujours plus harmonieux que les attentes du monde du travail !

Monsieur le Premier ministre, les salariés de l’hôtellerie-restauration ne sont pas des travailleurs de seconde zone. Ils ont droit à un accord progressiste. Nous vous demandons donc d’appliquer la loi et de faire retirer cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et des professions libérales.

M. Renaud Dutreil, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et des professions libérales. Madame la députée, les 100 000 restaurateurs français ne ressemblent pas à la caricature de grands patrons capitalistes que vous avez brossée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Charles de Courson. Très bien !

M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et des professions libérales. Pour 95 %, ils dirigent de très petites entreprises, comprenant moins de vingt salariés, qu’ils ont souvent créées avec leurs économies, après avoir été eux-mêmes salariés. Ils méritent donc le respect. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Ce secteur, madame la députée, s’est engagé dans une stratégie positive reposant sur deux éléments : d’abord, le contrat de croissance, signé par le Gouvernement et les organisations patronales pour baisser les charges sociales en vue de créer de l’emploi : 40 000 emplois supplémentaires sont ainsi attendus dans un secteur qui en a déjà créé 30 000 au cours des deux dernières années. Ensuite, l’engagement des organisations patronales de renégocier la grille salariale, toujours libellée en francs et qu’il faut évidemment actualiser.

La décision du Conseil d’État vient perturber cette stratégie positive de dialogue social et de reconstruction d’un secteur fragile. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement regardera favorablement toute initiative parlementaire à même de sécuriser les salariés et les entreprises,…

M. Christian Bataille. Amendement scélérat !

M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et des professions libérales. …au moins pour la période qui court du 1er janvier 2005, date d’application de l’accord, au 31 décembre 2006. Mais vous pouvez être certaine, madame la députée, qu’il le fera dans l’unique objectif de favoriser l’émergence d’une solution par le dialogue social. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

lutte contre l’Immigration irrégulière
outre-mer

M. le président. La parole est à Mme Gabrielle Louis-Carabin, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Gabrielle Louis-Carabin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Nous sommes un certain nombre d’élus à avoir régulièrement appelé votre attention, monsieur le ministre d’État, ainsi que celle du ministre de l’outre-mer, sur la gravité des problèmes liés à l’immigration illégale dans les départements et collectivités d’outre-mer – je pense tout particulièrement à Mayotte, à la Guyane et à la Guadeloupe, où la pression migratoire demeure très forte.

Si l’immigration non maîtrisée constitue un grave problème pour la métropole, elle est, vous le savez, un drame pour l’outre-mer, où le pacte social est plus fragile qu’ailleurs. Elle est également sans rapport avec les capacités d’accueil et les besoins économiques locaux. Elle crée enfin un fort sentiment d’exaspération.

Monsieur le ministre d’État, outre les dispositions législatives qui ont permis de réformer notre politique d’immigration, qu’il s’agisse de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité ou, plus récemment, de la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, vous avez donné, à l’automne 2005, des orientations très précises aux préfets concernés pour renforcer significativement la lutte contre l’immigration irrégulière outre-mer. Pouvez-vous dresser devant la représentation nationale un bilan des actions engagées sous votre égide ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire.

M. Nicolas Sarkozy, ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Vous avez parfaitement raison, madame la députée : l’immigration clandestine est un drame pour l’outre-mer, où le pacte social est plus fragile. Nous avons donc agi pour la combattre et obtenu des résultats.

En juillet, avec François Baroin, nous avons fait voter un texte adaptant certaines dispositions législatives, comme la fouille sommaire de véhicules, qui était déjà permise en Guyane et qui l’est aujourd’hui en Guadeloupe. En outre, nous avons renforcé les moyens : 300 gendarmes et policiers supplémentaires ont été affectés en outre-mer, et nous allons en envoyer 160 de plus, ainsi que du matériel – une vedette sur-motorisée pour la Guadeloupe, un troisième radar pour Mayotte.

Cette politique amène des résultats assez spectaculaires. Sur les neuf premiers mois de l’année, le nombre de clandestins éloignés de Guadeloupe a augmenté de 57 % ; pour la Guyane, le chiffre est de 54 %. Quant au nombre de clandestins éloignés de Mayotte pendant la même période, il a augmenté de 134 %.

M. Bernard Deflesselles. Très bien !

M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire. Il est évident que si l’on veut préserver le pacte social dans nos collectivités d’outre-mer, il faut que les malheureux qui sont exploités par des filières clandestines et viennent sans papiers soient reconduits chez eux. Sinon, c’est tout l’outre-mer français qui paiera la facture sociale, économique, politique et financière. Il n’y a pas d’autre solution que la fermeté en la matière. Des orientations ont été définies, des décisions ont été prises, les résultats sont là. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

aides européennes à l’agriculture

M. le président. La parole est à M. Germinal Peiro, pour le groupe socialiste.

M. Germinal Peiro. Monsieur le ministre de l’agriculture et de la pêche, votre politique de gestion des aides européennes crée un profond malaise dans le monde agricole, à tel point qu’un mouvement de grève de la faim a été décidé dans l’Ouest pour protester contre les injustices.

En 2003, la Commission européenne vous avait laissé libre d’appliquer une stratégie de répartition équitable. Contrairement à ce qu’ont fait d’autres pays européens, vous avez pérennisé les injustices et accru la complexité en basant les droits à paiement unique sur des aides perçues par chaque agriculteur entre 2000 et 2002. À ce jour, deux agriculteurs qui pratiquent les mêmes cultures sur des surfaces identiques ne reçoivent pas les mêmes aides, car leurs exploitations n’ont pas le même passé.

M. Christian Paul. Quelle bêtise !

M. Germinal Peiro. Non content d’accepter la réforme de la PAC en 2003, vous en avez accentué les effets néfastes en refusant la redistribution et en favorisant la spéculation foncière, qui rend plus difficile l’installation des jeunes.

M. Christian Paul. Scandaleux !

M. Germinal Peiro. De plus, en fragilisant la prime à l’herbe, vous remettez en cause une agriculture de qualité, respectueuse de l’environnement.

En vérité, monsieur le ministre, on a l’impression que vous ne croyez pas en l’avenir de l’agriculture. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) C’est d’ailleurs ce que montrent certains documents émanant de l’UMP, qui expliquent que « la contribution de l’agriculture au monde rural repose désormais moins sur son potentiel d’emploi que sur son rôle d’animateur de la ruralité ».

Eh bien non, monsieur le ministre, les agriculteurs n’acceptent pas d’être réduits au rôle d’animateurs ! Ce sont des producteurs, des créateurs d’emplois. Ils participent largement à notre puissance économique et à l’aménagement de notre territoire, et attendent des pouvoirs publics un soutien juste et cohérent à des agricultures diversifiées, durables et performantes.

Mme Sylvia Bassot. Démagogie !

M. Germinal Peiro. Monsieur le ministre, ma question est simple : vous engagez-vous à rendre plus juste, plus cohérente et plus efficace la répartition des aides à l’agriculture française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le député, je vous prie d’excuser M. Dominique Bussereau, retenu à Luxembourg par un Conseil des ministres de l’agriculture.

M. Pascal Terrasse. Comme d’habitude ! Il n’est jamais là quand on a besoin de lui !

Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Il fait son travail, et m’a demandé de vous répondre à sa place.

Comment la France applique-t-elle la politique agricole réformée en 2003 ? Notre pays a fait le choix du découplage des aides sur la base des références historiques des exploitants. Ainsi les droits sont-ils calculés sur la base des aides perçues entre 2000 et 2002.

M. André Chassaigne. C’est une rente de situation !

Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Certains regrettent qu’à cette occasion nous n’ayons pas procédé à une redistribution massive et radicale des aides directes, mais nous voulions éviter une rupture brutale dans le niveau des aides et favoriser une adaptation progressive à la PAC réformée.

Ce choix ayant été fait, la principale difficulté consistait à prendre en compte les évolutions intervenues depuis les années 2000, afin que les aides distribuées en 2006 s’ajustent au mieux à la situation des exploitants à cette date, notamment du point de vue des superficies.

Les clauses de transfert de droits, premier dispositif d’ajustement mis en place, ont bien fonctionné : plus de 300 000 clauses liées à des transferts fonciers ont été enregistrées, portant sur près de 4,5 millions d’hectares. Les exploitants ont ainsi, dans leur majorité, pu reconstituer leur niveau d’aide.

Ensuite, il a été possible d’apporter des dotations complémentaires aux exploitants ayant connu des évolutions dans leur activité : installations, investissements ou circonstances exceptionnelles. Au total, ce sont aujourd’hui 97 % des agriculteurs qui bénéficient de l’aide découplée. Une avance leur a été versée le 16 octobre, le solde le sera le 1er décembre. Nous aurons ainsi répondu à l’attente du monde agricole…

M. André Chassaigne. Il attendait mieux !

Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. …en maintenant les aides à un niveau proche de celles d’avant la réforme de la PAC en 2003. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. André Chassaigne. Quelle injustice !

situation en guyane

M. le président. La parole est à Philippe Folliot, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Philippe Folliot. Monsieur le Premier ministre, imaginons un instant qu'il y ait quinze à vingt millions de clandestins sur le territoire métropolitain, que des territoires entiers se trouvent sous la coupe de mafias pillant nos ressources naturelles et que soient commis une dizaine de milliers d'homicides par an. Un tel scénario apocalyptique est, toutes proportions gardées, la situation que vit à ce jour le département de la Guyane. Oui, monsieur le Premier ministre, l'UDF, comme beaucoup, pense qu'il y a un grave et réel problème de souveraineté au cœur même de la République, et, de difficile aujourd'hui, la situation pourrait devenir explosive demain et inextricable après-demain. Ceux qui pensent que l'on gardera le stratégique centre spatial sans tenir le territoire en seront réduits aux mêmes désillusions que ceux qui souhaitaient à l'époque conserver le Sahara tout en quittant l'Algérie.

L'heure est grave. L'ensemble des acteurs locaux – préfet, procureur, commandant des forces armées guyanaises et commandant de Gendarmerie – qui remplissent la délicate mission de représenter l'État dans ce département ont impérativement besoin d'être mieux soutenus. À titre d'exemple, j'ai pu moi-même constater les conditions extrêmement difficiles et périlleuses des actions menées par les forces de gendarmerie sur place, notamment dans le cadre des opérations Anaconda, pour lesquelles ces militaires méritent tout le respect de la représentation nationale.

Toutefois, loin des clichés négatifs et réducteurs – bagne, moustiques, enfer vert –, ce beau et grand département, qui a la même superficie que le Portugal, ne manque pas d'atouts pour relever les défis de l'avenir avec, au-delà de la vitrine qu'est le Centre Spatial Guyanais, ses grands espaces et ses ressources naturelles.

Monsieur le Premier ministre, que comptez-vous faire, pour que nos compatriotes guyanais n'aient plus à subir une insécurité grandissante, des atteintes intolérables à l'environnement et une immigration clandestine paralysante, en un mot pour que l'État de droit et les principes républicains soient respectés en Guyane ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’outre-mer.

M. François Baroin, ministre de l’outre-mer. Monsieur le député, vous avez tout à fait raison de décrire ainsi la situation en Guyane. La réalité du quotidien est difficile. Ce département, d’une superficie en effet égale à celle du Portugal et encadré par deux fleuves sublimes – le Maroni et l’Oyapock –, dont les richesses sont pillées par l’orpaillage clandestin, est de surcroît menacé par les politiques de conquête de clandestins qui procèdent, notamment, à des occupations sans droit ni titre, singulièrement à Cayenne, empêchant le maire de la ville de mener une politique d’urbanisme adaptée à la réalité des besoins de sa population. Aujourd’hui, selon les statistiques, environ 25 % de clandestins occupent le territoire guyanais.

Vous interrogez donc le Premier ministre sur ce que le Gouvernement compte faire. Il continuera de faire ce qu’il a fait. Le ministre d’État, ministre de l’intérieur, a rappelé les statistiques. J’avais moi-même, il y a un an, pris des positions, largement commentées, pour appeler l’attention de l’opinion publique sur la situation. L’UDF avait d’ailleurs soutenu ces propositions avec une certaine élégance et beaucoup de compréhension de la réalité du terrain. Après l’arbitrage du Premier ministre, nous avons obtenu un bloc législatif dans le texte défendu par Nicolas Sarkozy. Cela a produit des effets significatifs. La délinquance de voie publique a diminué de 18 %, et plus de 6 600 reconduites à la frontière ont été effectuées sur les neuf premiers mois. Ainsi, et cela a été également évoqué tout à l’heure, les reconduites à la frontière auxquelles il a été procédé en Guyane, en Guadeloupe et à Mayotte avoisinent les 54 %.

Je remercie la ministre de la défense de l’aide apportée avec la mise à disposition d’un hélicoptère Écureuil EC 145. Sous notre impulsion collective, le préfet a mis en place un groupe d’intervention rapide. Soyez assuré que l’État, aux côtés des élus locaux et de la population guyanaise, agira dans le discernement, mais sans faiblesse pour maintenir l’équilibre de ce magnifique territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

fraudes à la sécurité sociale

M. le président. La parole est à M. Gérard Weber, pour le groupe UMP.

M. Gérard Weber. Monsieur le président, monsieur le ministre de la santé et des solidarités, permettez-moi d’associer à cette question mon collègue Jean-Marc Roubaud.

Monsieur le ministre, je souhaiterais appeler votre attention sur la récente escroquerie à la sécurité sociale de 20 millions d’euros dans le cadre d’un trafic de médicaments. Les services de la Caisse nationale d’assurance maladie ont, en effet, mis à jour ce trafic qui concernerait une vingtaine départements, dont celui de l’Île-de-France, et impliquerait une centaine de prescripteurs. Les médicaments étaient acheminés vers l’Asie du Sud-Est et l’Afrique, où ils étaient revendus. Ce trafic toucherait également des pays d’Europe centrale.

Après la révélation de ce vaste trafic de médicaments prescrits, achetés et remboursés en France, puis revendus à l’étranger par de faux patients, cette fraude sociale a dépassé le stade de l’artisanat individuel pour devenir le fait d’escrocs en bandes organisées. Mais cette arnaque n’est que la partie visible de l’iceberg, puisque, chaque année, ce sont 100 millions d’euros qui sont escroqués à la sécurité sociale par le biais d’arrêts de travail abusifs, de prestations versées aux fausses familles, aux faux résidents ou encore aux faux assurés. Ces escroqueries sont facilitées par l’autonomie des caisses et le manque de coordination des informations entre elles. C’est pourquoi nous avons mis autant de temps à nous apercevoir d’une telle fraude.

À l’heure où les prélèvements sont à la limite du supportable pour l’ensemble des Français, il ne serait absolument pas scandaleux de prendre des mesures draconiennes pour éviter tout gaspillage d’argent public et tout détournement frauduleux. Votre ministère a annoncé la création d’un comité national de lutte contre les fraudes afin de limiter les abus en matière d’assurance sociale ; c’est bien, mais encore insuffisant.

En conséquence, monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre afin de faire cesser ces fraudes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le député, la sécurité sociale est un système solidaire où l’on cotise pour sa santé et pour celle des autres, et non pour payer les abus et les fraudes de quelques-uns. Pour lutter contre les abus, il faut une volonté politique. Nous l’avons. Depuis la réforme de l’assurance maladie, il y a aujourd’hui de nouveaux outils, car, au-delà de la volonté politique, les outils juridiques sont indispensables. Nous pouvons infliger des sanctions. Nous allons aujourd’hui jusqu’au bout de chacune des nouvelles affaires. Contrairement à ce que vous venez d’affirmer, celle que vous citez n’est pas récente. Cela fait maintenant des mois que l’assurance maladie travaille sur ce dossier dans le but de démanteler l’intégralité de ce réseau. En effet, notre objectif est de mettre un terme aux fraudes organisées, qu’elles soient de 10, 50 ou 5 000 euros. Pour cela, nous avons aussi décidé de renforcer les outils informatiques. Celles et ceux qui sont aujourd’hui tentés par les abus ou par les fraudes doivent, en effet, être conscients qu’ils ne pourront pas échapper aux contrôles, que nous irons jusqu’au bout des sanctions et de la récupération de toutes les sommes indûment versées.

M. Bernard Deflesselles. Très bien !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Ce message très clair s’adresse également à tous les acteurs du système de santé – professionnels de santé, établissements de santé, employeurs – et aux assurés sociaux, car nous nous sommes déterminés à lutter contre le travail dissimulé qui prive notre système des cotisations attendues et dont il a besoin.

Vous souhaitiez que nous allions plus loin. J’ai installé hier le Comité national de lutte contre les fraudes. Le but est que tout le monde travaille avec les mêmes outils et de façon coordonnée. Le Gouvernement défendra des amendements dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale visant notamment à permettre de vérifier, grâce aux justificatifs, les conditions de ressources, en tenant compte des éléments de patrimoine et de train de vie. Il en va ainsi en matière fiscale ; je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas agir de même dans le domaine social.

Enfin, la carte Vitale 2, avec photo, nous permettra de remettre totalement à plat le système de la carte Vitale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Vous le voyez, nous employons tous les moyens pour mettre un terme à ces abus et à ces fraudes insupportables. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

commémoration de l’insurrection hongroise de 1956

M. le président. La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour le groupe UMP.

M. Alain Moyne-Bressand. Madame la ministre déléguée aux affaires européennes, vous vous êtes rendue à Budapest dimanche et lundi derniers pour représenter la France aux cérémonies de commémoration de l’insurrection hongroise de 1956 contre le régime communiste et l’occupation soviétique.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Bravo !

M. Alain Moyne-Bressand. Vous avez manifesté à cette occasion la solidarité du peuple français et avez salué en son nom le courage des combattants hongrois et la justesse de leur combat pour la liberté. En effet, le bouleversement provoqué en 1956 par le peuple hongrois a été la première faille dans le bloc soviétique et a enfin montré à tous la volonté des peuples d’Europe centrale de se libérer du joug du totalitarisme communiste.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Très bien !

M. Alain Moyne-Bressand. Cette commémoration a aussi été l’occasion de rappeler les fondements mêmes de la construction de l’Europe, qui ont été, à n’en pas douter, un leitmotiv et un espoir fort pour ces pays de l’Est : paix, liberté et démocratie pour tous les peuples qui la composent.

Enfin, la France a toujours eu des relations privilégiées et constructives avec le peuple hongrois.

Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous faire part de votre sentiment sur cette page de l’histoire et nous rappeler la place de ces pays dans l’Europe aujourd’hui réunifiée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le député, j’ai, en effet, eu l’honneur de représenter la France aux cérémonies commémorant le cinquantième anniversaire de l’insurrection de Budapest, le 23 octobre 1956.

En 1956, le peuple hongrois a su, par son courage, montrer au monde entier que les peuples d’Europe centrale et orientale rejetaient le régime totalitaire communiste qui leur était imposé. Ce combat du peuple hongrois était aussi le nôtre. Il était celui de la liberté contre la dictature, celui de l’aspiration à la démocratie contre l’oppression. En ces heures terribles de 1956, le peuple français a partagé la fraternité et les espoirs du peuple hongrois, dont le sacrifice n’a pas été vain. En 1989, le vent de la liberté a à nouveau soufflé, et, ne l’oublions pas, ce sont les Hongrois qui, les premiers, ont ouvert une brèche dans « le rideau de fer » en sectionnant les fils de fer barbelés.

Puisque ce cinquantième anniversaire nous invite aussi à réfléchir sur l’histoire et sur l’évolution de l’Europe, sachons mesurer le chemin parcouru. En 1956, l’Europe était divisée, meurtrie et, à l’Est, opprimée.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Tu entends, Gremetz ? (Exclamations sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Mme la ministre déléguée aux affaires européennes. Elle est aujourd’hui unie dans la paix, la diversité et la démocratie. C’est le plus bel hommage que l’on puisse rendre à la construction européenne. Pour vous dire le fond de ma pensée, mesdames, messieurs les députés, je préfère mille fois l’Europe d’aujourd’hui à celle d’hier, quand les chars soviétiques écrasaient dans le sang les combattants de la liberté ! (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

Bombes à sous-munitions

M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira, pour le groupe socialiste.

Mme Christiane Taubira. Monsieur le président, oui, chers collègues d’en face (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) si l’heure de la digestion convient bien à vos plaisanteries, le sujet de ma question ne s’y prête pas ! (Vives protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Vous allez vous en rendre compte !

Je ne peux m’empêcher de dire à quel point les Guyanais sont sensibles à la sollicitude du Gouvernement face aux difficultés qu’ils rencontrent, même s’ils sont évidemment frappés par son exposé misérabiliste. Nous aurions préféré une évaluation de la politique menée (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), et, notamment, une explication du retour en Guyane de tous ces expulsés trois heures après leur expulsion ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Madame la ministre de la défense, la France, représentée par l’ambassadeur François Rivasseau, présidera la troisième Conférence d’examen des États parties à la Convention de 1980 sur certaines armes classiques qui se tiendra à Genève du 7 au 17 novembre. Cinq protocoles de cette convention réglementent ou interdisent l’usage d’armes qui frappent les populations civiles sans distinction ou qui provoquent des traumatismes excessifs. Les bombes à sous-munitions – les BASM – ne sont pas concernées par ces interdits.

Les BASM sont des obus, des missiles ou des roquettes remplis de dizaines ou de centaines de petites bombes appelées sous-munitions.

Ces bombes à sous-munitions sont prises par les enfants pour des jouets ou des friandises.

M. Guy Teissier. Ce n’est pas du misérabilisme, ça ?

Mme Christiane Taubira. En fait, la plupart d’entre elles équivalent à des mines antipersonnel, armes interdites d’usage et de fabrication par la convention internationale d’Ottawa.

Il est donc évident que leur usage est un crime, avec circonstances aggravantes : préméditation, parce que ces armes ne sont pas réservées aux affrontements entre combattants et confondent les cibles militaires et les populations civiles, intention manifeste de dévaster, puisqu’on les appelle également des armes de saturation de zone, et délit de fuite : selon les conditions climatiques et topographiques, 30 % d’entre elles en moyenne n’explosent qu’après les conflits.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. La question !

Mme Christiane Taubira. Ce n’est donc pas un dysfonctionnement mais bien leur fonctionnement qui en fait des restes explosifs de guerre, et l’on en connaît parfaitement les effets retards, 69 % des victimes étant des enfants.

Puisque la communauté internationale a élaboré un droit de la guerre à travers les conventions de Genève, êtes-vous disposée à prendre en considération la gravité des faits et à introduire cette question à l’ordre du jour de la conférence de Genève ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. La problématique spécifique des armes à sous-munitions, c’est effectivement l’existence de munitions non explosées à la fin du conflit, qui explosent par la suite, causant de lourds dégâts à la population.

Nous sommes particulièrement sensibles aux conséquences désastreuses de ces munitions, sur le plan humanitaire et même sur le plan de la reconstruction. Je rappelle que l’armée française participe largement au déminage, notamment en Afghanistan et au Liban.

M. Jean-Claude Lenoir. Absolument !

Mme la ministre de la défense. Un militaire français est mort au mois de mai au cours d’une telle opération. Je pense qu’il serait souhaitable que nous lui rendions tous hommage.

Madame Taubira, la France est attachée à l’application du droit international humanitaire en matière de protection des populations civiles, mais les armes à sous-munition sont légales en droit international, même si leur usage est réglementé par le droit international humanitaire. Une convention internationale a ainsi établi en 2002, pour les États parties seulement, malheureusement, une obligation de dépollution après la fin du conflit et un cadre d’assistance internationale en la matière.

La plupart des États détenteurs ou utilisateurs de telles armes sont opposés à leur interdiction totale. La France, soucieuse de garantir la protection des populations, a présenté une initiative visant au moins à fiabiliser toutes les munitions, dont les sous-munitions, dans un but de protection.

La France possède effectivement des armes à sous-munitions, mais notre doctrine d’emploi permet une stricte protection des populations civiles. En tout état de cause, de telles armes n’ont plus été utilisées depuis 1991. Les dernières à avoir été fabriquées en France l’ont été au début de l’année 2002, avant mon arrivée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

université et emploi

M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour le groupe UMP.

M. Michel Raison. Ma question s’adresse au ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche.

Monsieur le ministre, la commission chargée du débat national université-emploi, présidée par le recteur de Limoges, Patrick Hetzel, a remis hier, à la Sorbonne, son rapport. C’est une bonne nouvelle. Cette commission a été mise en place en avril dernier, à la demande du Premier ministre, à la suite de la crise liée au contrat première embauche mais aussi parce que, chaque année, 80 000 à 100 000 jeunes, soit 20 % des étudiants, sortent de la fac sans le moindre diplôme et 11 % des diplômés de l’enseignement supérieur sont toujours au chômage trois ans après avoir quitté l’université, sans compter ceux qui sont obligés d’accepter un travail sans rapport avec leur formation.

Près de 20 000 personnes ont été consultées lors du débat national qui a donné lieu à environ 120 réunions. Des représentants de syndicats étudiants et enseignants ont été auditionnés, ainsi que des représentants des PME, et des cadres de grandes entreprises. C’est tout de même un peu plus sérieux qu’un hypothétique jury citoyen ! (Sourires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Ce débat avait pour objectif d’apporter des réponses concrètes et d’application rapide aux préoccupations des jeunes. Le rapport préconise une cinquantaine de mesures pour limiter le taux d’échec, c’est-à-dire mettre en adéquation formation et emploi. La société est un tout. Il n’y a pas, d’un côté, les universités et les étudiants et, de l’autre, le monde des entreprises. Les jeunes, mais aussi leurs parents et leurs grands-parents, attendent avec impatience des propositions concrètes.

Trois axes prioritaires innovants se dégagent de ces conclusions, comme le développement des formations professionnalisantes à l’université, la réforme du système d’orientation, qui ne fonctionne pas, et un plus grand rapprochement entre l’université et le monde du travail. Pourriez-vous nous détailler les mesures que le Gouvernement, dans le cadre de la bataille pour l’emploi, compte retenir afin que l’université prépare mieux au travail ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche.

M. François Goulard, ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. En effet, monsieur le député, le recteur Hetzel, qui présidait une commission consacrée au rapprochement entre l’université et l’emploi, a remis hier son rapport au Premier ministre à la Sorbonne, après un premier rapport d’étape au mois de juin.

Ce rapport, c’est d’abord le constat d’une situation profondément anormale : l’échec massif à l’université – 20 % des jeunes qui s’inscrivent sortiront sans aucun diplôme après, parfois, plusieurs tentatives dans plusieurs filières différentes –, et des taux de chômage anormalement élevés pour les jeunes diplômés d’assez nombreuses filières universitaires.

Le rapport remis par M. Hetzel contient une cinquantaine de propositions, qui tournent autour de l’orientation et de l’amélioration des formations.

Dès le mois de juin, nous avons commencé à prendre des décisions qui vont nous permettre d’améliorer dès cette année l’orientation des lycéens qui choisissent de faire des études supérieures. Des entretiens de conseil systématiques leur seront proposés, avec notamment une inscription plus précoce à l’université pour favoriser une orientation plus active. Un délégué interministériel à l’insertion a été nommé.

En matière de formation, à la suite de ce qui a été fait dès cette rentrée, à savoir la création d’une dizaine de départements d’IUT et de 225 licences professionnelles, nous allons développer les enseignements à finalité professionnelle, rapprochant effectivement l’université de l’emploi. Nous allons dès cette année développer les stages et créer dans chaque université un service de l’emploi pour que tout étudiant ait avant la fin de ses études une première expérience de l’entreprise, favorisant ainsi son insertion.

M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !

M. le ministre délégué à l’enseignement supérieur et à la recherche. Ce qui est réconfortant, c’est que la communauté universitaire est mobilisée dans cet effort considérable au service des jeunes, de l’emploi et de notre pays, de la même façon que nos universités sont mobilisées pour figurer, dans la grande compétition internationale, parmi les universités d’excellence. C’est un défi considérable, mais c’est aussi notre ambition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

TélévisIon numérique terrestre

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Hamelin, pour le groupe UMP.

M. Emmanuel Hamelin. Ma question s’adresse au ministre délégué à l’aménagement du territoire.

Monsieur le ministre, la TNT est un véritable succès. Plus de la moitié de notre territoire est aujourd’hui couvert et plus de 3 millions de nos concitoyens ont fait le choix de s’équiper. La télévision numérique, je le rappelle, c’est l’accès gratuit à dix-huit chaînes, une meilleure qualité d’image et de son, et, à terme, l’accès à de nouveaux services qui vont très rapidement révolutionner la vie quotidienne de nos concitoyens.

Jeudi 19 octobre dernier, vingt-quatre nouveaux émetteurs ont été mis en place, ce qui permet de couvrir 65 % du territoire, que je compare aux 35 % de mars 2005, l’année du lancement de la télévision numérique dans notre pays. Le déploiement se fait donc de manière régulière et rapide sur l’ensemble de notre territoire.

Cependant, au moment où un certain nombre de nos concitoyens s’équipent de cette nouvelle technologie, un certain nombre d’autres se demandent si, un jour, ils y auront accès.

M. François-Michel Gonnot. Absolument !

M. Emmanuel Hamelin. Dans un premier temps, en effet, la priorité a été d’avoir le plus fort taux de couverture possible, et le problème aujourd’hui, ce sont les zones frontalières ou les zones d’ombre dans lesquelles se trouvent certains de nos concitoyens, principalement ceux qui habitent dans les territoires ruraux.

Puisque votre objectif est de couvrir 100 % du territoire pour que l’ensemble des Français bénéficient de la télévision numérique, comment souhaitez-vous faire pour respecter votre calendrier et votre objectif ? Qu’en sera-t-il notamment des zones frontalières et des zones d’ombre, qui sont concentrées dans les territoires ruraux ? L’ensemble des Français pourront-ils, à terme, bénéficier de la télévision numérique terrestre ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire. Monsieur le député, depuis le lancement de la télévision numérique terrestre il y a deux ans, près de 4 millions de foyers français ont eu accès à dix-huit chaînes de télévision gratuites en qualité numérique. Jeudi dernier, avec le président du CSA et le président de TDF, en lançant vingt-quatre émetteurs de plus, nous avons permis à 65 % de foyers français d’y accéder.

Cela dit, même si cela n’a rien à voir puisque la redevance finance uniquement le service public, 35 % de nos concitoyens ne peuvent pas comprendre pourquoi, alors qu’ils paient la même redevance, eux qui sont dans des territoires difficiles et accidentés ne reçoivent que trois, quatre ou cinq chaînes, en qualité analogique, et parfois dans de mauvaises conditions.

Nous avons donc décidé, avec l’ensemble des opérateurs, de lancer dans les trois ou quatre mois qui viennent un bouquet satellitaire qui permettra de diffuser dix-huit chaînes gratuites en qualité numérique, tout en atteignant en même temps, grâce à de nouveaux émetteurs terrestres, un taux de couverture de 80 %.

M. Maxime Gremetz. Quel cadeau à TF1 !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Nous aurons donc réalisé en 2007 la couverture à 100 % du territoire pour la téléphonie mobile, pour l’internet à haut débit et pour la TNT. C’est une politique de justice et d’équité pour tous les Français, quelles que soient leurs conditions sociales et quels que soient les territoires sur lesquels ils sont.

La démocratisation de la télévision a un immense avantage, c’est qu’un plus grand nombre de Français peuvent prendre connaissance de la médiocrité du programme défendu par les socialistes dans leurs débats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Avenir des associations d’insertion

M. le président. La parole est à Armand Jung, pour le groupe socialiste.

M. Armand Jung. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Les ateliers et chantiers d’insertion vont-ils disparaître le 31 décembre 2006, après de longues années d’activité au service de la réinsertion des plus démunis ? On peut le craindre, car, de partout en France, montent des appels au secours émanant d’associations les plus diverses, mais qui ont en commun de redonner une dignité à celles et ceux qui sont en danger de rupture sociale, qui n’ont plus d’emploi, plus de logement, plus de revenus et qui n’ont plus accès aux soins. C’est ainsi que sont menacées les associations Humanis à travers tout le pays, Le Vert Bocage dans le Calvados, Pain contre la Faim à Strasbourg et à Reims, l’association Espoir à Mulhouse, et bien d’autres encore. Près de 450 associations, plus de 10 000 emplois sont aujourd’hui menacés de disparition. Après les associations de quartier, c’est aujourd’hui le tour des associations d’insertion. Leur action constitue pourtant une étape importante et indispensable dans le parcours des personnes les plus en difficulté, conciliant action humanitaire, création d’emplois, réinsertion, recyclage d’ordures ménagères.

Votre loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005 montre aujourd’hui sa véritable teneur : elle plonge dans la plus grande incertitude le secteur de l’insertion par l’économique. En effet, le taux de prise en charge par l’État dans le cadre des nouveaux contrats aidés – le contrat d’avenir, en particulier – et l’incitation à une augmentation des ressources propres des associations jusqu’à un seuil de 49,9 % mettent en péril l’équilibre financier des structures supports des ateliers et chantiers d’insertion.

Le Gouvernement demande aux collectivités locales, qui se rebiffent, de se substituer à l’État pour prendre en charge cette mission de solidarité, qui est pourtant une compétence étatique par essence.

S’agissant plus particulièrement de l’association Pain contre la Faim, vous avez signé, de votre main, le premier contrat d’avenir du Bas-Rhin, le 11 avril 2005. En réalité, vous avez signé l’arrêt, à terme, de cette aventure unique de solidarité autour du symbole que représente le pain non consommé,…

M. le président. Pouvez-vous poser votre question, monsieur Jung ?

M. Armand Jung. …qui ne doit pas être considéré comme un déchet mais comme le levain de la solidarité.

Ma question, monsieur le président, la voici (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) : quel sera le sort de toutes ces personnes qui vont perdre leur emploi dans les prochains mois ? Quelles mesures spécifiques comptez-vous prendre pour redonner un souffle nouveau à l’insertion dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Où sont les ministres ?

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement et cette majorité ne vous ont pas attendu, monsieur Jung, pour se mobiliser en faveur des travailleurs privés d’emploi qui ont besoin de mesures d’accompagnement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Vous auriez pu rappeler, dans ce qui n’était pas à vrai dire une question mais une sorte de réquisitoire, que, depuis la formation du gouvernement de Dominique de Villepin, ce sont plusieurs centaines de milliers d’emplois qui ont été créés (Exclamations sur les mêmes bancs) et que le chômage connaît un recul sans précédent dans notre pays. (Mêmes mouvements.)

Ces résultats, monsieur le député, tiennent d’abord naturellement à notre politique en faveur de la croissance, qui produit tous ses fruits. Ils tiennent aussi à notre politique de cohésion sociale et à notre grande loi de cohésion sociale (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), laquelle nous permet d’aider les Français en difficulté à saisir les emplois générés par la croissance.

M. Albert Facon. À les mettre au fond du trou plutôt !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le plan de cohésion sociale permet de mettre l’accent sur les chantiers d’insertion puisque l’État leur consacre chaque année 24 millions d’euros. Ces sommes vont augmenter l’année prochaine de 5 %.

M. Albert Facon. Et combien de RMIstes en plus ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Rien que pour l’Alsace, cela représentera 300 000 euros supplémentaires, monsieur le député.

Enfin, vous avez parlé des contrats d’avenir. Sachez que nous avons pris la décision d’augmenter dès maintenant la prise en charge des contrats d’avenir dans les chantiers d’insertion à hauteur de 90 % sans dégressivité. Jamais, monsieur le député, l’effort de l’État n’aura été aussi important en faveur de l’insertion de nos compatriotes en difficulté. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Martine David. Tout va bien, en somme !

Exploitation du plateau continental
de Saint-Pierre-et-miquelon

M. le président. La parole est à M. Gérard Grignon, pour le groupe UMP.

M. Gérard Grignon. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’outre-mer.

L’outre-mer peut apporter à la France des ressources situées sur le plateau continental que la convention sur le droit de la mer de 1982 permet aux états côtiers d’exploiter au-delà des 200 milles marins de leurs côtes. C’est ainsi des ressources du sous-sol, sur près d’un million de kilomètres carrés, que l’outre-mer peut apporter à notre pays.

Les récentes rencontres franco-canadiennes d’Ottawa ont démontré, si cela était encore nécessaire, que la zone économique exclusive française autour de Saint-Pierre-et-Miquelon se situe au cœur d’une région très riche en hydrocarbures offshore que le Canada a déjà largement commencé à exploiter. La France doit tout faire pour prendre sa part de ces ressources transfrontalières.

En avril dernier, le Premier ministre m’avait confirmé que Saint-Pierre-et-Miquelon figurait au programme d’extension Extraplac pour que la France puisse « se réserver la possibilité de déposer un dossier d’extension auprès de la Commission des limites du plateau continental ». Le conseil général de Saint-Pierre-et-Miquelon vient de transmettre au Gouvernement une délibération visant à ce que la France officialise sa position. En effet, l’arbitrage de New York de 1992 lui réserve le droit de revendiquer son plateau continental, sans avoir pour cela d’autorisation à demander à quiconque – Canada inclus. Pour se faire la préparation d’un dossier est nécessaire.

Monsieur le ministre, je souhaiterais donc connaître l’enveloppe budgétaire prévue dans la loi de finances pour 2007, les moyens qu’IFREMER mettra en place, ainsi que le calendrier afin de respecter la date limite de dépôt de demande fixée par la Commission à mai 2009.

Et puisqu’il s’agit de l’avenir de Saint-Pierre-et-Miquelon et, j’en suis convaincu, de la condition du maintien de la présence française en Amérique du Nord, vous comprendrez, monsieur le ministre, ma détermination quasi obsessionnelle à défendre ce dossier et l’importance que la population de l’archipel apportera à votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’outre-mer.

M. François Baroin, ministre de l’outre-mer. Monsieur le député, vous avez, à juste titre, assuré un plaidoyer pro domo en valorisant votre détermination. Je peux témoigner, en ma qualité de ministre de l’outre-mer, que peu de parlementaires défendent, avec autant d’obstination, l’action de la France sur des territoires aussi lointains, en l’occurrence sur les territoires côtiers proches du Canada, et le droit des populations qui y résident à bénéficier des richesses de leur territoire.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est gentil !

M. le ministre de l’outre-mer. Permettez-moi de rappeler que la France, par la présence ultramarine de ses territoires, bénéficie de 11 millions de kilomètres carrés de zones économiques exclusives. S’agissant du plateau continental proche du Canada, vous avez eu raison de rappeler que Saint-Pierre-et-Miquelon, situé à vingt-cinq kilomètres de Terre-Neuve, bénéficie de perspectives très intéressantes en termes de retombées économiques.

C’est la raison pour laquelle, – le Gouvernement vous le confirme – l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon reste sur la liste préparatoire en vue de la présentation d’une demande d’extension du plateau continental devant la Commission des Nations unies, et les inscriptions budgétaires sont prévues à cet effet.

D’autre part, le Canada – c’est un aspect important, sur lequel vous aviez mené, à l’époque, un combat fort utile et qui avait porté ses fruits – nous a fait savoir qu’il s’engageait à ne pas dénoncer unilatéralement les accords de 1994 à partir de l’année prochaine. Nous sommes donc dans une logique de négociation, et le dialogue se poursuit.

Enfin, au cours des réunions d’Ottawa des 2 et 3 octobre dernier, auxquelles vous avez participé, beaucoup de dossiers ont progressé. Nous sommes en phase de discussion pour signer une convention décennale qui nous permettra de mettre en perspective l’évolution du plateau continental et les modalités de ressources de financement public pour accompagner les collectivités territoriales encore déficitaires – ce qui doit cesser– ainsi que les perspectives d’ouverture à de nouveaux marchés qui pallieront au déclin de la morue, qui était, il y a peu encore, une grande richesse pour Saint-Pierre-et-Miquelon. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Épidémie nosocomiale
dans le nord-Pas-de-Calais

M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste, pour le groupe UMP.

M. Christian Vanneste. Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Depuis le début du mois de septembre, le nord de la France est confrontée au développement d’une épidémie de maladie nosocomiale, le clostridium difficile. Il s’agit d’une souche très virulente qui a été détectée pour la première fois en 2003 outre-Atlantique et qui s’est maintenant répandue en Belgique, aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne.

Aujourd’hui, le Nord-Pas-de-Calais est touché et le bilan est déjà extrêmement sévère : trente-neuf nouveaux cas la semaine dernière, ce qui porte le nombre des victimes à 348, vingt et un décès, vingt-neuf hôpitaux et cliniques touchés, trois maisons de retraite concernées, notamment à Tourcoing et Neuville-en-Ferrain. Il est temps de prendre les mesures qui s’imposent, car nous avons affaire à un adversaire extrêmement redoutable. Il s’agit d’une souche dix fois plus virulente que la moyenne et qui résiste particulièrement dans le milieu ambiant.

Quelles mesures prendrez-vous, monsieur le ministre, afin d’éradiquer cette maladie des maisons de retraite et des cliniques, où elle frappe les plus fragiles, notamment les personnes les plus âgées, et en empêcher la propagation au reste du territoire ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Monsieur le député, depuis maintenant de nombreux mois, le Nord-Pas-de-Calais connaît la même épidémie que nos voisins belges mais aussi néerlandais et anglais. Je tiens à saluer l’engagement des professionnels de santé, notamment dans les établissements concernés, depuis l’arrivée de cette maladie sur notre territoire. J’ai demandé au directeur général de la santé, pendant l’été, de se rendre sur place. Je me suis rendu moi-même à Lens et à Liévin le 10 septembre, à Lille le 10 octobre, où j’ai pu constater la mobilisation de ces professionnels, et je ne laisserai pas dire que l’on n’a pas fait ce qu’il fallait.

D’ailleurs, les centres hospitaliers de Lens, comme ceux de Lille, se situent parmi les tout premiers en matière de lutte contre les infections nosocomiales. Ils figurent régulièrement dans les établissements qui ont fait le maximum d’effort. La vérité est que la souche C027 du Clostridium difficile est particulièrement virulente.

Nous avons élaboré des protocoles pour l’ensemble des établissements de santé – hôpitaux comme maisons de retraite – et diffusé l’information auprès des praticiens libéraux afin que tout le monde ait le même niveau d’information pour pouvoir réagir et anticiper dans les meilleurs délais.

La moitié des 370 cas dont vous avez parlé tout à l’heure se trouvent à Lens et Valenciennes. Il ne faut pas hésiter à fermer des blocs opératoires et à isoler les malades dans des services spécifiquement dédiés – l’État couvrira toute charge supplémentaire que cela entraîne : j’ai déjà débloqué un million d’euros pour la région Nord-Pas-de-Calais. Car une chose est certaine : si nous avons besoin d’aller au-delà, nous le ferons, mais l’essentiel est de permettre aux établissements concernés de contenir l’épidémie et aux autres établissements – dans le Nord-Pas-de-Calais, comme dans les autres régions – de s’en prémunir. Je salue la réactivité, la mobilisation et l’anticipation des professionnels de santé face à cet épisode particulièrement difficile. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Jean-Luc Warsmann.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LUC WARSMANN,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2007

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 (nos 3362, 3384).

Discussion générale (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

Dans la suite de cette discussion, la parole est à Mme Christine Boutin.

Mme Christine Boutin. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, mes chers collègues, que ce soit pour assurer le renouvellement des générations ou pour dynamiser notre croissance économique, une natalité soutenue est un impératif.

Avec un taux de fécondité de 1,9 enfant par femme, nous sommes sur la bonne voie, même si cela n'est pas encore suffisant, ni pour notre pays, ni pour nos familles. En effet, si la France est bien placée au niveau européen, le renouvellement des générations n’y est pas assuré, alors même que de nombreuses femmes avouent ne pas avoir autant d'enfants qu’elles le souhaiteraient – il en manquerait 0,7 par femme, selon les statistiques. Pourtant ce choix de vie ne peut être que positif pour l'ensemble de notre société. C’est pourquoi il est de notre devoir de l'encourager en permettant aux familles d'avoir le nombre d'enfants qu'elles désirent. Nous devons donc saisir l’occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour leur exprimer notre reconnaissance.

Reconnaître les familles, c'est tout d'abord reconnaître leur existence, en leur prodiguant toute l'aide économique qui leur est nécessaire : cela suppose une réelle politique de soutien, notamment sur le plan fiscal. En effet, monsieur le ministre, je constate avec inquiétude une certaine paupérisation des ménages avec enfants, encore accentuée par la « smicardisation » de la population qu’a révélée la loi de finances pour 2007. En dix ans le nombre de salariés au SMIC a plus que doublé, passant de 8 % en 1996 à 17 % en 2006, et les familles avec enfants ne sont pas épargnées, bien au contraire !

Selon le rapport rendu par M. Godet et Mme Sullerot au nom du Conseil d'analyse économique, le niveau de vie d'une famille ouvrière comptant trois ou quatre enfants est inférieur respectivement de 29 % et 39 % à celui d'un couple sans enfant de la même catégorie sociale. Nul n'ignore le coût engendré par l'arrivée d'un enfant, et certaines de ces familles paient jusqu'à deux fois plus au titre de la CSG que de l’impôt sur le revenu.

Cela n'est plus possible, et il est légitime de mettre en place une fiscalité familiale adaptée. Il s’agirait, comme je l’ai déjà proposé l’an dernier, de « familialiser » la CSG, c'est-à-dire d’intégrer le nombre d'enfants dans son calcul de façon à prendre en compte les capacités contributives réelles de chaque ménage. Il faut reconnaître aux futures naissances leur valeur positive pour l'ensemble de la société en attachant des avantages fiscaux supplémentaires à la venue du troisième enfant. Ce signal serait perçu par nos concitoyens comme un message de foi en l'avenir lancé par les politiques à une société trop morose.

Parce que fonder une famille ne doit pas être la porte d'entrée dans la précarité, mais au contraire une promesse de croissance économique, il est temps de mettre en place des politiques familiales positives, reconnaissantes, volontaristes, traduisant une préoccupation forte d’une redistribution juste, seul gage de confiance dans l'avenir.

Je sais bien, monsieur le ministre, que cette « familialisation » de la CSG ne sera pas adoptée aujourd'hui, mais il est urgent de réfléchir à une meilleure prise en compte de la famille par notre système fiscal. J'invite donc le Gouvernement à engager ce grand chantier.

Reconnaître les familles, c'est aussi leur exprimer toute notre gratitude en leur octroyant ce qui leur est dû : on devrait notamment avoir le droit de bénéficier d'une pension de retraite et d'une protection sociale à part entière lorsqu’on a choisi d'être « parent au foyer », véritable activité professionnelle s'il en est ! Il serait grand temps en effet de reconnaître le travail des parents qui élèvent leurs enfants et les services éminents qu’ils rendent. En ce sens, plus qu'une simple compensation des charges consécutives à l’éducation, les allocations familiales doivent être surtout la reconnaissance de la participation des parents à la création de richesses et à la cohésion sociale.

C'est pourquoi la prestation Accueil Jeune enfant me semble un dispositif judicieux, et je souhaiterais qu’on aille plus loin dans ce sens. Nous devons offrir aux familles une véritable liberté de choix en étendant le bénéfice du complément dit de libre choix d’activité à tous les parents, sans condition d'activité professionnelle antérieure minimale, et en ouvrant le droit à bénéficier d’une retraite et d’une protection sociale au parent qui a choisi de rester au foyer. Il faudrait également rendre possible le cumul de la prestation équivalente à trois ans pour chaque enfant, afin d'assurer un réel accompagnement des familles à l'occasion de chaque naissance ou adoption.

Je tiens enfin à saluer la création, annoncée lors de la Conférence de la Famille de 2006, d’un congé de soutien familial. Il s’agit là, monsieur le ministre, d’une excellente mesure, car il est essentiel de reconnaître que la solidarité entre les époux, entre les générations, notamment celle des enfants avec leurs parents, est un socle sur lequel nous devons nous appuyer. C'est pourquoi j'encourage de tous mes vœux cette nouvelle mesure. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard.

Mme Paulette Guinchard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens, en préalable à mon intervention, rendre hommage aux chirurgiens décédés la semaine dernière à Besançon dans un accident d’avion alors qu’ils allaient procéder au prélèvement d’un organe destiné à une greffe.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l’équilibre général. Très bien !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociale. M. Fagniez et moi-même, nous nous associons d’autant plus volontiers à cet hommage que sommes tous deux chirurgiens transplanteurs !

Mme Paulette Guinchard. Je souhaitais que toute l’Assemblée puisse rendre hommage à ces médecins et aux pilotes, qui ont pris le même risque. M. le ministre a, quant à lui, assisté vendredi à Besançon à la cérémonie qui a eu lieu à leur mémoire.

Ce rappel pourra aussi redonner du sens à notre débat : la question qui nous est posée dans le cadre de cette discussion budgétaire n’est pas seulement une question d’argent, mais aussi d’humanité.

Compte tenu du temps dont je dispose, je prendrai quelques exemples, dans un style quelque peu télégraphique.

Ce texte est le dernier PLFSS que nous examinons au cours de cette législature. C’est l’occasion de tirer quelques éléments de bilan des cinq dernières années en matière de sécurité sociale et de santé. Plus qu’aux questions financières, je m’attacherai ici aux évolutions qui permettent de faire changer les choses. En effet, si notre système de santé et de sécurité sociale a certes connu quelques évolutions réelles – comme l’usage des médicaments génériques –, beaucoup de choses n’ont pas évolué. Ainsi, même si je peux en comprendre les raisons, je ne peux que m’interroger en vous voyant réduire de 20 % les crédits des réseaux de santé, qui sont pourtant l’un des dispositifs permettant l’évolution de notre système.

Autre sujet de profonde inquiétude : les « testings » lancés cet été par le fonds de la CMU ont révélé que 50 % des médecins spécialistes ne souhaitaient pas prendre en charge les personnes qui ont droit à la CMU. Quelles actions comptez-vous engager, monsieur le ministre, pour faire changer ces comportements et enrayer des évolutions qui conduisent à l’exclusion et au refus.

Je défendrai au cours du débat un amendement visant à permettre aux personnes âgées titulaires de l’aide sociale et vivant en maison de retraite d’accéder aux soins dans de bonnes conditions.

Il est encore, monsieur le ministre, un troisième point qui m’inquiète : cela a été une grande erreur, lors de la réforme des retraites, de ne pas nous donner les moyens d’évaluer ce qu’il adviendrait de ceux qui ont de faibles revenus et ont eu parfois une vie professionnelle hachée. J’en veux pour preuve la situation d’une retraitée de ma région : cette femme – qui ne vit d’ailleurs pas dans ma circonscription – a travaillé toute sa vie mais, du fait qu’elle a cotisé à plusieurs régimes différents, elle touche 200 euros de moins après la réforme qu’elle n’en aurait touché avant, soit 330 euros par mois au lieu de 553.

M. Jacques Domergue. Si l’on évoque des cas particuliers…

Mme Paulette Guinchard. Ce n’est pas un cas particulier : c’est un sujet sur lequel nous avons beaucoup travaillé. La question des cotisations et de la validation des différents régimes, y compris les régimes spéciaux, n’est pas toujours claire et met en jeu des approches diverses, qui se traduit parfois par des situations difficiles, notamment pour les femmes. L’affaire que je viens d’évoquer a été jugée en première instance en faveur de cette dame retraitée. Il ne s’agit pas là, cependant, d’un cas particulier, mais de la situation des retraites pour les gens qui sont les plus en difficulté. C’est une question importante, dont je suis certaine qu’elle vous a déjà été posée dans vos circonscriptions.

Il nous faut donc répondre très rapidement à la paupérisation qui menace les retraités qui touchent des basses retraites.

Arrivant au terme de mon temps de parole, je me contenterai d’évoquer très rapidement deux points. Pour ce qui est, tout d’abord, du FFIPSA, les décisions que vous avez prises mettent clairement en difficulté l’ensemble de ce régime. Sans doute certains d’entre nous connaissent-ils mieux que moi cette question, mais je puis au moins vous assurer que nous avons tous été abondamment interrogés par les responsables de ce secteur. Je tenais à tirer le signal d’alarme à cet égard.

Si vous le permettez, monsieur le président, j’évoquerai pour finir un problème sur lequel vous vous êtes vous-même penché : le télescopage entre deux réformes, ou deux politiques – la politique de soutien à domicile que vous menez pour assurer aux personnes âgées et aux personnes handicapées une qualité de service correcte, et la loi de M. Borloo sur les emplois de service. Il est clair que la cohabitation de ces deux systèmes se traduira soit par une concurrence très grave dans certains départements, soit par l’éclatement du service.

En effet, alors que le choix de la qualité du service a été consacré par la loi du 2 janvier 2002, qui permet d’appliquer, par l’intermédiaire du CROMS, une tarification correcte, et donc une rémunération qui l’est aussi, la loi Borloo permet l’ouverture, sur simple agrément, de nombreuses structures privées ou associatives – car, de fait, il ne s’agit pas seulement d’établissements privés à but lucratif – et déstructure toute l’organisation du soutien à domicile, qui voyait pourtant converger la volonté de tous les acteurs, qu’il s’agisse des conseils généraux, de l’État ou de la CNSA.

Je tiens donc à lancer ici un cri d’alerte quant à la situation de certaines régions, où la question de la qualité n’est pas posée – ni pour les personnes prises en charge, ni pour les salariés. La convention collective que j’avais lancée a heureusement été poursuivie et la FEPEM a mis en place, pour les employés de maison, une convention collective correcte, mais il n’existe rien pour couvrir les salariés de tous les établissements qui s’ouvrent dans le cadre de ce nouveau marché. Je suis, je le répète, très inquiète tant pour les personnes qui travaillent que pour celles chez qui elles travaillent, et j’insiste, monsieur le ministre, sur l’urgence qu’il y a à poser enfin la double question de la qualité du service et des conditions de travail des salariés. Si nous voulons, en effet, structurer correctement ce secteur, nous serons obligés d’y répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la sécurité sociale – notre sécurité sociale ! – a célébré l’an dernier ses soixante ans et, plus que jamais, cette institution majeure est indispensable à la cohésion sociale dans notre pays. Pour assurer sa pérennité, ce patrimoine commun de l’ensemble des Français doit faire face à des défis que comme vous, monsieur le ministre, les parlementaires de la majorité souhaitent relever.

Le PLFSS que nous abordons est donc fondamental, non seulement parce que sa masse, qui représente 402 milliards d’euros, est supérieure aux dépenses du budget de l’État, mais aussi est surtout parce que c’est le dernier PLFSS de la législature et donc, comme nous l’avons rappelé hier, la concrétisation de l’effort national que nous avons engagé en 2002 et que nous avons poursuivi avec la réforme des retraites, la journée de solidarité, la loi d’août 2004 et la loi organique de 2005.

La poursuite du redressement financier est en effet un objectif essentiel. En 2005, la responsabilisation des assurés sociaux a été privilégiée et nos concitoyens ont montré l’exemple, puisque trois Français sur quatre ont déjà choisi leur médecin traitant. D’autres efforts ont été demandés, tant à l’industrie pharmaceutique qu’aux organismes complémentaires, et il faut saluer le sens civique de chacun.

Alors que les comptes de la sécurité sociale étaient mauvais en 2004 et préoccupants en 2005, les chiffres de 2006 traduisent une amélioration très nette et très significative, avec une baisse de 20 % des déficits, celui du régime général étant ramené à 8 milliards tandis que celui de la branche maladie passera, je le rappelle, sous la barre des 4 milliards d’euros.

Des objectifs ambitieux sont affichés pour 2007, dans le droit fil d’ailleurs du débat d’orientation sur les finances sociales qui s’est tenu à l’Assemblée nationale le 22 juin dernier. La poursuite de la lutte contre les déficits est notre feuille de route. Elle porte ses fruits et ne vise pas à solliciter de nouveau les assurés sociaux.

Pour ce faire, une partie des droits de tabac sera redirigée de l’État vers la sécurité sociale et la hausse d’un euro du forfait hospitalier ne doit pas pénaliser les assurés sociaux, dans la mesure où elle sera prise en charge par les organismes complémentaires.

Il est essentiel que l’ONDAM de ville soit porté à 1,1 %, au lieu du taux de 0,8 % initialement prévu, afin que les assurés sociaux, les infirmières et les médecins puissent en bénéficier.

Le texte qui nous est soumis contient des mesures allant dans le sens d’une plus grande justice sociale. Le dispositif d’aide à l’acquisition d’une mutuelle est amélioré et devrait permettre à 2,9 millions de personnes de bénéficier de cette disposition.

Le défi de l’allongement de la vie est au cœur de ce PLFSS, qui concrétise le plan solidarité grand âge. Le Gouvernement anticipe l’avenir tout en s’attelant aux défis présents.

Trois mesures phares doivent être soulignées à cet égard. D’abord, la prévention des facteurs de dépendance chez les personnes de plus de soixante-dix ans. Après s’être intéressé aux tout-petits avec les soins bucco-dentaires, on propose aujourd’hui à nos aînés cette consultation de prévention destinée aux personnes de plus de soixante-dix ans, dans le droit fil de l’engagement que nous avons pris en faisant de la maladie d’Alzheimer une grande cause nationale. La prévention est en effet fondamentale et nous nous engageons en ce sens.

Ce PLFSS se veut aussi pragmatique et tient compte de l’augmentation des besoins liés au vieillissement de la population. À l’heure actuelle, en effet, les personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans sont plus d’un million, et on en comptera le double dans dix ans. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que le PLFSS a déjà prévu 5 000 places en établissements d’hébergement pour personnes âgées, 2 125 places d’accueil de jour et 1 125 places d’hébergement temporaire ;…

M. Alain Néri. Rien de cela n’est inscrit au PRIAC !

M. Bernard Perrut. …14 000 emplois seront créés dans les maisons de retraite : il faut rappeler ces chiffres, tout comme le prêt à taux zéro destiné à la modernisation des structures. Ce sont là des mesures concrètes, qu’on ne peut nier.

Vous souhaitez aussi, monsieur Bas, favoriser le maintien à domicile des personnes qui le souhaitent et 6 000 places supplémentaires vont être créées à cette fin pour les services de soins à domicile. Lorsque ce n’est pas possible, les maisons de retraites du futur, que vous souhaitez plus humaines et répondant aux besoins liés à la longévité, doivent pouvoir s’adapter. Il s’agit là aussi d’une priorité que vous avez identifiée. Cette solidarité concrète, je l’ai vue à l’œuvre lorsque vous vous avez visité, dans la circonscription dont je suis l’élu, un établissement pour personnes handicapées.

M. Gérard Bapt. C’est du copinage !

M. Bernard Perrut. La solidarité envers les personnes handicapées est un axe fort de notre politique et les crédits qui lui sont consacrés augmenteront de 5,5 %. En 2007, 40 000 places en établissements auront été créées depuis 2003, ce qui mérite d’être salué.

La famille, quant à elle, est la cellule de base de notre société, le lieu de l’apprentissage de la vie en collectivité. C’est la responsabilité du Gouvernement que de répondre à l’ensemble des préoccupations légitimes des familles. Nous poursuivons dans ce domaine un objectif double : favoriser la natalité tout en tenant compte des réalités socio-économiques. Aujourd’hui, en effet, 80 % des mères de famille exercent une activité professionnelle tout en ayant des enfants. Elles ont le mérite d’œuvrer pour le renouvellement des générations et de permettre par leur travail le financement la réforme des retraites. Les trois quarts de celles et ceux qui cessent leur activité pour se consacrer à l’éducation de leurs enfants souhaitent retourner dans la vie active à l’issue de leur congé parental d’éducation, et nous devons les y aider.

La politique familiale du Gouvernement consacre la montée en puissance de la PAJE, dont bénéficieront quelque 250 000 familles. Je regrette toutefois, monsieur le ministre, que le versement de cette prestation ne prenne effet qu’au premier jour du mois suivant la naissance de l’enfant : revenir à la prise en compte de la date de naissance satisferait les familles concernées. Pour ce qui est des crèches, 10 000 places ont été créées en 2006, contre quelques centaines seulement en 2000.

Je tiens encore à évoquer l’action sociale que mènent les CAF par l’intermédiaire de la branche famille. Si certains, se référant à un accroissement des crédits qui avait atteint 60 % entre 2001 et 2005, peuvent trouver insuffisant le taux de croissance de 7,5 % en moyenne annuelle sur la période 2005-2008 dans le cadre de la nouvelle COG, il nous faut cependant être réalistes et savoir nous maintenir dans une mesure acceptable.

Afin de concrétiser les mesures proposées par la conférence de la famille, vous mettez en œuvre le congé de soutien familial, qui est désormais créé et devrait satisfaire nombre d’aidants familiaux.

Parmi les amendements adoptés par notre commission, j’ai présenté celui visant à ne plus pénaliser les ménages à faibles revenus qui ne perçoivent plus l’aide au logement parce que celle-ci est inférieure à 24 euros par mois. Je sais que cet amendement n’est pas nécessairement recevable dans le cadre de cette discussion. Il est pourtant essentiel.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. La commission a salué votre générosité !

M. Bernard Perrut. La commission, à l’unanimité, a souhaité que l’on permette aux familles concernées de bénéficier à nouveau de l’allocation logement. Monsieur le ministre, que pouvons-nous faire pour ces familles ? C’est un droit. Il faut le respecter.

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. Bernard Perrut. Ce projet de loi de financement, mes chers collègues, traduit aussi un certain nombre de décisions annoncées lors de la Conférence de la famille, comme l’institution d’un prêt à taux zéro pour les jeunes s’engageant dans la vie professionnelle. C’est un vrai coup de pouce pour leurs premiers investissements.

Je pourrais aussi, mais le temps m’est compté, parler de la responsabilisation, qu’il s’agisse bien sûr du développement des médicaments génériques, qui est essentiel, ou de la lutte contre les fraudes par la mise en place, comme l’a très bien dit Xavier Bertrand lors de la séance des questions au Gouvernement de cet après-midi, d’un comité national de lutte contre les fraudes. Il faut à la fois lutter contre les prescriptions injustifiées, contre les abus, contre ceux qui bénéficient de droits auxquels ils ne devraient pas normalement avoir accès, et ce au détriment de la vraie solidarité qui vise à aider ceux qui en ont réellement besoin.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !

M. Bernard Perrut. Ce PLFSS s’adresse aussi, bien entendu, aux professionnels de santé.

D’autres collègues, mieux que je ne pourrais le faire, ont exprimé les revendications des médecins à diplômes extracommunautaires : il faut mettre fin à l’injustice dont ces praticiens sont victimes. Nous avons évoqué en commission les médecins libéraux, les pharmaciens – maillons essentiels dans la chaîne des soins –, la modernisation de l’hôpital à travers l’effort mené par ses personnels et le plan Hôpital 2007. Nous avons aussi évoqué les cliniques privées, qui nous ont fait part, monsieur le ministre, de leurs préoccupations. Ne faudrait-il pas d’ailleurs créer un observatoire économique de l’hospitalisation publique et privée, qui pourrait être un bon outil pour asseoir certaines décisions que nous prenons vis-à-vis de ces établissements ?

M. Jean-Marie Rolland, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l’assurance maladie et les accidents du travail. Tout à fait !

M. Bernard Perrut. Je voudrais aussi dire un mot des soins palliatifs, sujet auquel je suis très attaché. Il convient de parler des réseaux de santé en soins palliatifs, qui prennent en compte les personnes malades, les proches et les professionnels. Ces réseaux sont pertinents, et je souhaite que vous soyez très vigilant, monsieur le ministre, à ne pas diminuer les enveloppes budgétaires indispensables à leur fonctionnement.

Bien évidemment, ce PLFSS traite également des retraites. Vous avez apporté un certain nombre de garanties à cet égard, et la possibilité offerte de partir plus tôt en retraite aux personnes ayant commencé à travailler très jeunes a été particulièrement bien accueillie. Vous avez annoncé dans la presse, ces jours derniers, la tenue, début 2007, d’une conférence sur la revalorisation des pensions de retraite ; c’est une mesure importante et intéressante, et, bien sûr, nous comptons qu’elle soit suivie d’effet, car les retraités nous regardent, les retraités attendent. Le Gouvernement a fait de l’emploi des seniors une priorité : il convient à ce sujet de souligner les liens entre l’augmentation de la masse salariale et le niveau de recettes pour la sécurité sociale.

Je voudrais dire un mot avant de conclure, monsieur le ministre, sur la protection sociale et les retraites agricoles, parce que c’est une source récurrente d’inquiétudes.

M. Alain Néri. Excellente remarque, monsieur Perrut !

M. Bernard Perrut. J’avais déjà alerté vos prédécesseurs lorsque j’étais rapporteur du PLFSS, il y a deux ans. Le régime agricole est spécifique. Nous savons que, depuis le passage du BAPSA au FFIPSA, en 2003-2004, nous sommes devant une situation quelque peu difficile : le déficit atteint 1,9 milliard d’euros en 2006 – ce qui est déjà considérable – et devrait dépasser les 2,7 milliards d’euros en 2007. Il faut prendre des dispositions. Lesquelles, monsieur le ministre ?

M. Alain Néri. Celles qu’on avait prises durant la précédente législature !

M. Bernard Perrut. Il faut que l’État finance les intérêts de la dette. Cela paraît essentiel.

En conclusion, je partage totalement l’analyse de notre ministre de la santé, Xavier Bertrand, qui a affirmé devant la commission des affaires sociales et ici même le bien-fondé de la réforme de l’assurance maladie. Car, si une telle initiative n’avait pas été prise, le déficit, mes chers collègues, serait aujourd’hui de l’ordre de 16 milliards d’euros. Grâce à la réforme, nous allons pouvoir parvenir, à terme et le plus rapidement possible, à une situation d’équilibre. Pour autant, je ne céderai pas à l’autosatisfaction ; mais je rejette dans le même temps le dénigrement systématique pratiqué par certains élus sur certains bancs alors que nous sommes au cœur de la solidarité nationale. L’augmentation de la durée de la vie, la précarité économique, les difficultés pour l’accès au logement, sont autant de sources d’inquiétudes et de fragilisation de la confiance de nos concitoyens. Le risque pour notre société serait de ne plus maintenir ce terreau fertile qu’est la cohésion sociale. Que serait la société française si la protection de l’ensemble des Françaises et des Français, si la protection des plus faibles, n’étaient plus assurées ?

Je terminerai – j’en ai l’habitude – par des citations. Cette fois-ci, j’ai retenu celles de deux grands hommes que nous connaissons bien : l’un s’appelle Xavier Bertrand, l’autre Jean-Michel Dubernard. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Xavier Bertrand, ici même, mettait en exergue ce PLFSS à travers trois mots : « continuité, persévérance, vigilance » ; et Jean-Michel Dubernard, en écho, apportait, avec sa dimension humaniste et sociale, les trois qualificatifs de cet engagement pour notre protection sociale : « concertation, solidarité, générosité ». Faisons en sorte, mes chers collègues, que ces mots se conjuguent pour l’avenir de notre société et de notre protection sociale. Je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Dans le Rhône, nous sommes des humanistes ! (Sourires.)

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Pas seulement dans le Rhône, dans la Manche aussi ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Aurillac.

Mme Martine Aurillac. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, je ne suis pas membre de la commission des affaires sociales,…

M. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l’assurance maladie et les accidents du travail. C’est un tort ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Nul n’est parfait ! (Sourires.)

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. On aimerait tellement vous y accueillir !

Mme Martine Aurillac. …mais j’ai assisté, comme chaque année, à la séance où fut examiné le PLFSS qui vient en discussion devant notre assemblée. Sans aller jusqu’au lyrisme de mon ami Bernard Perrut, je tiens à dire que cette année, plus encore qu’auparavant, nous avons été impressionnés par la qualité du travail gouvernemental, plus spécialement par celui des deux ministres en charge de la sécurité sociale, M. Xavier Bertrand et M. Philippe Bas, auxquels je tiens à rendre hommage. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Cet hommage se déclinera plus concrètement autour de trois observations principales.

Tout d’abord, la réduction significative du déficit de la branche maladie en 2005 et 2006 rend crédible un objectif encore meilleur pour 2007.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : un déficit de presque 12 milliards en 2004 descend à 8 milliards en 2005 pour atteindre 6 milliards en 2006 : une division par deux en deux ans. Un objectif de 4 milliards en 2007 est désormais crédible, soit une division du déficit par trois en trois ans – qui le serait par quatre si la réforme de 2003 n'avait pas vu le jour. Tous les secteurs de la santé publique ont participé à cette forte décélération de la progression des dépenses : les hôpitaux, les cliniques, les médecins libéraux, les pharmaciens, notamment par la réussite accélérée de la diffusion des génériques. Il faut souligner le comportement civique des acteurs des soins de ville – 1,5 % de progression en 2006 –, les dépenses de médicaments étant pratiquement stabilisées ; civisme que partagent les assurés sociaux, auxquels, cette année, un effort supplémentaire ne sera pas demandé.

Je n'énumérerai pas les nombreuses mesures destinées à conforter ces résultats, sinon pour souligner l'aide à l'acquisition d'une assurance complémentaire pour les plus fragiles, et la lutte accrue contre la fraude, à laquelle contribuera la nouvelle carte Verte, qu'il sera très difficile de détourner de son usage normal. Ainsi l'assurance maladie apporte-t-elle une contribution essentielle au redressement de nos comptes sociaux.

Deuxième observation : même la branche famille contribue au redressement des comptes.

En effet, le déficit de 2006, divisé par deux en 2007, tombe largement en dessous du milliard d'euros. Ce résultat comptable est obtenu sans sacrifier la politique familiale qui fait l'heureuse originalité de la politique sociale française et suscite l'intérêt de pays à la démographie fortement déclinante – comme j'ai pu le constater lors de la visite d'une délégation parlementaire japonaise. Je n’en suis que plus à l'aise pour souligner que le progrès comptable ne se fait pas au détriment de la qualité du service social et permet même des progrès significatifs : congé de soutien familial – dispositif que je considère comme très important –, prêt « avenir jeunes » à taux zéro, partage des allocations familiales en cas de garde alternée, etc.

Ma troisième observation, et seule ombre au tableau, c’est l'accroissement du déficit de la branche vieillesse, limité toutefois à un milliard d'euros.

L'allongement de la vie dans notre pays, largement imputable aux progrès de la médecine et à leur meilleure diffusion dans l'ensemble de la population, est obligatoirement la cause, très positive en elle-même bien sûr, de ce déficit. Si l’on ne veut pas alourdir les prélèvements obligatoires et encore moins réduire les prestations, la mesure la plus immédiatement efficace est d'inciter les seniors qui le peuvent à retarder leur départ à la retraite : c’est ce que fait le Gouvernement, en concertation avec les partenaires sociaux, par ses mesures en faveur de l'emploi des seniors.

Certes, monsieur le ministre, tout n'est pas parfait. La commission a ainsi souhaité, à juste titre, relever de 0,3 ou 0,4 % la progression de l'ONDAM des soins de ville, qui profitera aux assurés, aux infirmières et aux médecins de ville. Nous avons aussi, vous le savez, d'autres souhaits : le versement de la PAJE dès la naissance, et non après le premier mois,…

M. Alain Néri. Ça, c’est une bonne idée ! Très bien !

Mme Martine Aurillac. …ou bien encore le chèque-santé étudiant.

Une réflexion très large devra s'engager sur un financement pérenne de notre protection sociale et de nos retraites. Alors, bien sûr, nous devons poursuivre notre chemin, mais je crois que nul ne peut nier que nous soyons sur la voie d'un redressement salutaire et sans précédent. C'est pourquoi je voterai naturellement ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, on n’a jamais autant parlé qu’aujourd’hui de l’égalité des droits et de l’égalité des chances.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ah !

M. Alain Néri. Et pourtant, force est de constater que l'égalité des chances est particulièrement malmenée et qu'il y a urgence à mettre en œuvre une véritable politique d'égalisation des chances. C'est particulièrement vrai pour ce qui concerne l'espérance de vie de nos concitoyens, qui varie considérablement selon leurs conditions de travail et leur profession, en un mot selon la pénibilité du travail exercé. C’est profondément injuste et intolérable.

Permettez-moi de vous raconter ce qui m'est arrivé dans une réunion de quartier il y a quelques semaines. Au fond de la salle, un vieil homme m’adressait de nombreux signes d’amitié. Je me disais que je le connaissais, mais je n’arrivais à le situer vraiment. À la fin de la réunion, j’allais vers lui et il me dit, en me tapant amicalement sur l’épaule : « Je suis heureux de te revoir, ça me rappelle les bons moments du football quand on était juniors. » Je n’en croyais pas mes yeux : c’était mon vieux copain Daniel. Devant son état de lassitude et son visage fatigué, j’étais triste et honteux de voir que son dur métier de maçon l’avait usé avant l’âge. Un juste sentiment de révolte m’a envahi, et je suis sûr que vous le partagez. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Bapt. Oui, tout à fait ! Chers collègues de la majorité, c’est vous qui avez refusé de prendre en compte la pénibilité du travail ! (Mêmes mouvements.)

M. Alain Néri. Au XXIe siècle, il n’est pas tolérable que des hommes et des femmes usent leur santé au travail et vieillissent prématurément. Toutes les études montrent que l'écart d'espérance de vie entre un ouvrier et un cadre est de sept ans, et qu’il a tendance à s'accroître.

Monsieur le ministre, votre collègue Xavier Bertrand, lorsqu’il était rapporteur pour avis du projet de loi portant réforme des retraites, avait en particulier défendu l'article 12 qui prévoyait que, dans un délai de trois ans après la publication de la loi, les organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau national seraient invitées à engager une négociation interprofessionnelle sur la définition et la prise en compte de la pénibilité. Et il avait raison ! Cette négociation a été ouverte le 11 février 2005, soit dix-huit mois après le vote de la loi. Neuf réunions se sont tenues. La dernière a eu lieu le 30 mars 2006 ; mais la réunion prévue le 2 mai a été annulée et aucune autre date n'est programmée à ce jour. Il faut donc d'urgence débloquer cette négociation. La pénibilité du travail doit être prise en compte et il faut envisager une durée d'activité professionnelle proportionnelle à la pénibilité du travail.

L'analyse des partenaires sociaux sur les dispositifs de départ anticipé existants montre que l'exigence de réparation est plus que jamais légitime. Les inégalités entre les secteurs sont considérables. Celui de la construction et du bâtiment est presque exclusivement concerné par le chômage et l’invalidité, alors que les caisses d’assurance des travailleurs salariés ont été mobilisées par la chimie, l’automobile et la construction navale. Les petites et moyennes entreprises ont peu accès aux dispositifs conventionnels les plus favorables. Enfin, le nombre d'allocataires en invalidité a bondi de plus de 20 % en trois ans.

Ces chiffres démontrent à l'évidence la nécessité d'une forte action de prévention en matière de conditions de travail, de vieillissement prématuré des salariés et de protection contre le licenciement des salariés les plus âgés. Ils démontrent également qu'il y a urgence à prendre des dispositions pour que ces salariés puissent bénéficier d’un départ anticipé à la retraite à taux plein. Il faut répondre à cette situation d'urgence sociale, de justice, d'humanité et de respect de la dignité de tous.

Je voudrais aussi aborder le douloureux problème de la retraite d’invalidité. Arrivés à l'âge de soixante ans, de nombreux invalides voient leurs revenus chuter brutalement en raison des modes de calcul issus de la loi portant réforme des retraites de 2003, véritable loi de régression sociale.

M. Marc Bernier. Oh, que de grands mots !

M. Alain Néri. Ces personnes sont doublement pénalisées : après avoir subi une diminution importante de leurs revenus au moment du passage de l'activité salariée à la pension d'invalidité, la diminution de leurs ressources peut aller jusqu'à 60 % lorsqu’ils atteignent l’âge de soixante ans.

Le groupe socialise a déposé un amendement qui propose de garantir au titulaire d'une pension d'invalidité un niveau de pension de retraite au moins identique à cette pension si la prise en compte de sa carrière professionnelle, du fait de la réforme de 2003, ne lui permet pas d'avoir une pension de retraite servie par la sécurité sociale supérieure à sa pension d'invalidité. J’espère que les députés, sur tous les bancs, voteront cet amendement car il y va de la justice sociale.

Messieurs les ministres, il faut prendre ces douloureuses questions à bras-le-corps et mettre en œuvre rapidement les réponses de justice sociale légitimement et impatiemment attendues par celles et ceux qui sont victimes d'une véritable discrimination sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je voudrais évoquer la question des retraites agricoles. C’est peu dire qu’en ce domaine, la situation n’est pas satisfaisante : bien souvent, elle est indigne !

M. Jean-Yves Hugon. Tout à fait !

M. Marc Le Fur. Le problème est toujours le même : les modalités de calcul des retraites et des cotisations ayant été élaborées profession par profession, on constate des inégalités insupportables.

Certes, grâce aux efforts de chacun dans cet hémicycle, des progrès ont été réalisés : ainsi, en 1994, les débats relatifs à la loi d’orientation agricole avaient été positifs. Je voudrais néanmoins insister sur ce que nous avons fait depuis 2002. Ne l’oublions pas : c’est nous qui avons mis en œuvre la mensualisation, qui était revendiquée depuis des années.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est vrai !

M. Marc Le Fur. « On veut être comme tout le monde », nous disaient les retraités du secteur agricole : leur demande était simple !

M. Jean-Paul Bacquet. Nous préférerions la revalorisation de leurs retraites !

M. Marc Le Fur. Nous avons financé la RCO – retraite complémentaire obligatoire – (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), sur laquelle vous n’aviez voté, chers collègues socialistes, qu’une pétition de principe ! La RCO n’avait pas été mise en œuvre avant que notre majorité n’arrive aux affaires. C’est donc là un indéniable progrès.

M. Alain Néri. Nous avions voté 28 milliards sur l’ensemble de la législature : faites-en autant !

M. Marc Le Fur. Cependant, la RCO concerne essentiellement les carrières complètes, et le problème des carrières incomplètes n’en est que plus accusé.

Autre sujet sur lequel nous avons également progressé, et dont on parle peu car il n’est pas spécifique au secteur agricole : les carrières longues, qu’évoquait Alain Néri. La disposition que nous avons adoptée profite à tous les régimes, y compris au régime agricole. Ceux qui ont commencé à travailler avant dix-huit ans peuvent ainsi prendre leur retraite avant soixante ans, pour autant qu’ils aient cotisé pendant quarante ans. Depuis 2004-2005, 62 000 personnes relevant du régime MSA ont ainsi pu bénéficier d’un départ anticipé.

En outre, nous avons adopté avec la dernière loi d’orientation agricole la disposition relative aux AVPF – assurance vieillesse des parents au foyer –, qui permet d’améliorer notamment la retraite des mères de famille.

Que reste-t-il à faire ? L’objectif fondamental est de nous occuper des petites retraites – les « laissés pour compte ». Hervé Gaymard, puis Dominique Bussereau, y ont travaillé. Pierre Méhaignerie nous a confié, à Yves Censi, Daniel Garrigue et moi-même, le soin de parcourir les régions et de faire des propositions. Nous nous y sommes d’autant mieux employés que nous étions déjà sensibilisés à ces problèmes, que nous rencontrons dans nos circonscriptions respectives. Mais que répondre à des personnes disposant de retraites de 150 ou 200 euros ? Après avoir rencontré les instances du monde agricole, et en particulier les syndicats, nous avons pu esquisser des solutions. Si nous n’avons pas, loin s’en faut, réglé tous les problèmes, la volonté de faire progresser les choses de manière concrète est réelle. Je me réjouis ainsi que, le 5 octobre dernier, le Président de la République ait accepté d’intégrer nos propositions dans des directives gouvernementales.

M. Jean-Yves Hugon. Enfin !

M. Marc Le Fur. Le problème, aujourd’hui, est le suivant : la retraite agricole comprend deux parts, la retraite forfaitaire et la retraite proportionnelle. Cette dernière reste insuffisante, même si elle a été revalorisée pour ceux qui ont des carrières pleines dont la durée dépasse 37,5 années. Mais elle est encore bien pire pour les autres,…

M. Alain Néri. C’est vrai !

M. Marc Le Fur. …qui se voient appliquer des coefficients de minoration : 15 % pour chacune des deux années de cotisation manquantes ; puis 10 % pour chaque année suivante. Les minorations peuvent ainsi atteindre jusqu’à 60 % !

Il fallait en finir : si nos propositions sont adoptées, le coefficient de minoration sera ramené à 5,5 % dès le 1er janvier 2007, et à 4 % au 1er janvier 2008. La situation serait ainsi linéaire, comme pour les autres régimes. Le coût de cette mesure est de 205 millions d’euros sur deux ans, dont 162 millions en 2007.

Prenons un exemple significatif et concret : aujourd’hui, une épouse dont la carrière est de 27,5 ans touche une pension annuelle de 2 207 euros. Est-ce digne ? Avec les mesures que nous proposons, cette pension s’élèverait à 3 132 euros dès 2007 et à 3 441 euros en 2008, soit une progression d’un peu plus de 51 % sur deux ans.

Il faut aller vite, notamment pour éviter le « syndrome » de la RCO en 2002. Nous ne sommes pas là pour voter des pétitions de principe, fussent-elles nobles, mais des décisions concrètes. En l’occurrence, celle-ci doit s’appliquer dès le 1er janvier prochain, et être prise en compte sur les feuilles de pension MSA dès février. C’est possible, notamment si le Gouvernement signe rapidement les décrets d’application. Je suis convaincu que les MSA, de leur côté, et grâce à leur système informatique, s’y emploieront.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Bien sûr !

M. Marc Le Fur. Reste évidemment à notre assemblée à adopter l’amendement que j’ai cosigné avec Yves Censi et Daniel Garrigue, et que je défendrai au cours de nos débats.

Beaucoup de progrès restent à faire, notamment sur la RCO. Aujourd’hui, 17,5 années d’activité en tant que chef d’exploitation sont nécessaires pour en bénéficier : cette durée est une vraie barrière pour beaucoup. Autre problème : les retraites de réversion. Actuellement, une veuve ne bénéficie plus des 54 % de la retraite complémentaire obligatoire de son mari défunt. J’invite les candidats à la Présidence de la République à se positionner sur ces sujets, qui doivent clairement figurer dans leurs propositions.

M. Gérard Bapt. Commencez par financer le FFIPSA !

M. Marc Le Fur. Je voudrais par ailleurs revenir sur une question peu débattue : celle des modalités de rachat des périodes effectuées comme aide familiale. Si des progrès ont été réalisés pour ceux qui bénéficient d’une retraite agricole, tel n’est pas le cas pour ceux qui ont eu une activité d’aide familiale de quatre, cinq, six ou sept ans, et sont soumis au régime général.

M. Alain Néri. C’est vrai.

M. Marc Le Fur. Certes, le rachat est théoriquement possible, mais il en coûte de 12 000 à 13 000 euros par année rachetée : autant dire que les conditions sont dissuasives. Même si des progrès, je le répète, ont été réalisés, chacun conviendra que d’autres sont possibles.

M. Alain Néri. Et nécessaires !

M. Marc Le Fur. Je voudrais aussi évoquer la démographie médicale : loin d’être général et abstrait, ce sujet se révèle particulièrement sensible dans certains secteurs, pour les médecins généralistes comme pour les spécialistes. Il y a ainsi dans ce pays des déserts ophtalmologiques ! Il faut, monsieur le ministre, que vous preniez en compte ces réalités. La densité médicale pour 100 000 habitants est en moyenne de 329 médecins sur l’ensemble de notre territoire, mais de 423 médecins en Île-de-France et de 249 en Picardie – région de notre ministre Xavier Bertrand. Mon collègue Marc Bernier pourrait citer d’autres régions en difficulté.

M. Alain Néri. Et le même problème se pose pour les pharmaciens !

M. Marc Le Fur. Nous avons certes relevé fortement le numerus clausus de 4 700 à 7 000, mais rien ne dit que les nouveaux médecins se tourneront vers la médecine libérale, ni qu’ils iront s’installer dans les zones les plus défavorisées, qu’il s’agisse des territoires ruraux ou des quartiers urbains difficiles.

Prenons l’exemple d’une région que je connais bien, la Bretagne du centre : les médecins y sont moins nombreux que dans le reste de la Bretagne, et ils sont aussi plus âgés. Ainsi, les plus de 55 ans représentent 25 % des médecins en Bretagne, et 35 % en Bretagne intérieure.

Par ailleurs, si l’on considère la période de 1995 à 2005, le nombre de médecins a diminué de 8,1 % dans cette région, alors qu’il a progressé de 3,1 % en Bretagne, et que la démographie connaît un nouvel essor. J’ajoute – ce qui constitue un signe inquiétant pour l’avenir – que la proportion de femmes est beaucoup plus faible en Bretagne du centre qu’ailleurs : seulement 12 %, contre 25 % pour l’ensemble de la Bretagne.

Enfin, les médecins sont surchargés. En termes d’actes, la moyenne en Bretagne est de 4 807. En Bretagne intérieure, elle s’élève à 6 028, soit une proportion de 25 % supérieure à la moyenne régionale. Bref, si les médecins sont en Bretagne intérieure plus âgés, moins nombreux, ils sont aussi plus fatigués.

Un exemple concret sera peut-être plus éloquent que ces chiffres. Je suis l’élu d’une circonscription où pas un jeune médecin ne s’est installé depuis deux ans, et pas une seule jeune femme médecin depuis cinq ans ! Peut-être mon manque de séduction est-il en cause (Sourires), toujours est-il que la situation est préoccupante. Elle l’est d’autant plus, d’ailleurs, qu’à la faculté de Rennes, 65 % des jeunes diplômés sont des femmes.

Comment attirer ces jeunes médecins ? Je veux l’affirmer clairement : je ne crois plus à l’incitation…

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. Marc Le Fur. …car le sujet n’est pas financier.

M. Jean-Paul Bacquet. Bien sûr !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Ce sont plutôt les conditions de travail difficiles qui sont en cause.

M. Marc Le Fur. Le vrai sujet, ce sont les contraintes, les gardes supplémentaires. Bien qu’en zone rurale le rythme de celles-ci soit moins soutenu que naguère, il reste beaucoup plus lourd qu’en zone urbaine, surtout si un centre de « SOS médecins » est là pour décharger d’autant les confrères citadins.

Je crois donc qu’il faut tarir l’installation dans les zones où il y a trop de médecins.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est soviétique !

M. Marc Le Fur. Je pense par exemple à la Côte d’Azur – et je parle sous le contrôle d’élus de cette région, que je vois d’ailleurs opiner du chef –, où l’offre est pléthorique et suscite du coup une demande excessive.

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. Marc Le Fur. La difficulté à résorber le déficit de la sécurité sociale tient aussi à la surmédicalisation de certains secteurs.

Mon idée est très simple, monsieur le ministre : il faut que, dans les secteurs où la démographie médicale est satisfaisante, un médecin ne puisse s’installer que s’il succède à un confrère. Il s’agit de s’inscrire dans la logique du un pour un, sauf pour les secteurs qui connaissent une pénurie de médecins et où la liberté d’installation doit rester totale.

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. Marc Le Fur. Je ne romps pas avec le sacro-saint principe de la liberté d’installation ! Tout un chacun peut s’installer, mais à une condition : succéder à un médecin.

Monsieur le ministre, cette mesure ne coûte rien et elle est la seule qui permette demain d’orienter vers les secteurs en difficulté le flux des nouveaux médecins généré par le relèvement du numerus clausus.

Je sais qu’une telle décision ne peut être prise dans l’instant, mais je mets la question en débat et je voudrais que chacun ici soit conscient du fait que les mesures incitatives ne peuvent être que du placebo !

M. Alain Néri. Vous avez raison, monsieur Le Fur. Vos propositions sont intéressantes !

M. Marc Le Fur. Nous devons adopter des orientations plus nettes. Mon collègue Bernard Perrut évoquait tout à l’heure les termes devant servir à qualifier notre politique ; un mot doit qualifier notre politique sociale, c’est le mot de prospective. Si nous n’appréhendons pas notre démographie médicale dans une dimension prospective, nous allons nous heurter à des problèmes majeurs dans les dix ans à venir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Domergue.

M. Jacques Domergue. C’est une véritable réforme de la santé que vient de nous proposer Marc Le Fur, et sans doute y a-t-il des choses intéressantes dans ce qu’il a dit, mais ce n’est pas l’objet du débat aujourd’hui.

Plusieurs députés du groupe socialiste. Mais si !

M. Jacques Domergue. Nous faisons aujourd’hui le constat que la réforme de 2004 a des effets positifs, et il faut s’en réjouir. Reste à analyser ces signes d’efficacité.

Les résultats obtenus pour la médecine de ville sont parlants. La progression des dépenses de soins a été limitée à 1,5 %, ce qui constitue un chiffre jamais atteint et témoigne à la fois des efforts faits par l’ensemble des professionnels de santé et de l’efficacité du nouveau parcours de soins mis en place. Cela montre également que les Français ont compris que c’était la contribution de chacun qui permettrait d’équilibrer les comptes en maintenant l'accessibilité aux soins pour tous et en privilégiant les capacités d’innovation qui font l’avenir de la médecine.

Tous ces éléments vont dans le bon sens, mais ne sont pas sans conséquences. La première de ces conséquences concerne le secteur pharmaceutique, où la diminution d’activité a entraîné pour les officines une baisse du chiffre d’affaires. Il serait bon, dès lors, de réfléchir à des modes de compensation qui puissent permettre au pharmacien, qui est l’un des maillons indispensables de la chaîne de soins, d’avoir accès à d’autres activités – je pense notamment au soutien à l’automédication, mais aussi à la possibilité de faire des prescriptions. Sans doute faudrait-il également revoir la question des marges bénéficiaires, car, si la diminution de la consommation de médicaments est une bonne chose – et elle doit beaucoup aux pharmaciens –, elle ne doit pas peser sur leurs revenus.

Le secteur hospitalier, lui, est toujours en difficulté, car il a du mal à se réformer et demeure pénalisé par la queue de comète des 35 heures, encore mal assimilées. Il est désormais primordial d’identifier clairement les missions de l’hôpital public et d’envisager sa réforme en complémentarité avec les structures privées.

LA T2A mise en place fait en sorte que les établissements privés voient leur chiffre d’affaires augmenter. Toute la question est de savoir ce que cela signifie : ces établissements ont-ils été sous-financés pendant des années ou orientent-ils désormais leurs activités en sélectionnant les pathologies réputées les plus rentables ?

Là encore, il est important de définir l’offre de soins dans son ensemble, car il n’y a plus, d’un côté, la médecine publique et, de l’autre, la médecine privée : c’est une organisation globale, qui doit permettre de préserver l’accessibilité aux soins.

Je terminerai mon propos par la question des chirurgiens. La chirurgie française a longtemps été au firmament de la chirurgie mondiale ; tous les étrangers venaient alors se former en France. Elle fait face aujourd’hui à des difficultés qui sont avant tout des difficultés démographiques, et je ne peux qu’inciter les jeunes qui sont ici dans les tribunes à réfléchir aux métiers de la médecine et de la chirurgie, car la question qui se pose aujourd’hui est de savoir par qui nous serons opérés demain.

Les accords passés en 2004 entre le Gouvernement, l’assurance maladie et les chirurgiens ont été en partie respectés et des décrets ont été publiés récemment, concernant la part variable pour la chirurgie publique. Il s’agit là de bonnes incitations à l’activité pour l’hôpital public, mais il faut encore travailler pour finaliser ce dossier.

Nous devons également aborder le problème de la chirurgie libérale, laquelle a souvent mauvaise presse du fait des dépassements d’honoraires et d’une judiciarisation de plus en plus importante.

Aujourd’hui, quand un chirurgien de secteur 2 effectue un acte opératoire – je ne parle pas ici des consultations –, sans pratiquer de dépassement d'honoraires, cet acte lui est payé à un tarif inférieur à celui du secteur 1. Cela n’existe pour aucun des autres actes techniques et constitue une iniquité qu’il est urgent de corriger, non seulement par souci de justice mais aussi parce que cela inciterait les chirurgiens qui en ont la possibilité à ne plus pratiquer de dépassements d’honoraires. De la sorte, nous ferions taire les critiques adressées à la profession, et les Français bénéficieraient d’une chirurgie accessible, homogène et de qualité.

Je ne sais quelle solution sera retenue, mais nous avons besoin des chirurgiens et il est indispensable aujourd’hui que l’on fasse un geste envers eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. Chacun peut reconnaître aujourd'hui que le travail de fond engagé par les différents gouvernements depuis 2002 pour réformer l'assurance maladie commence enfin à porter ses fruits. Les résultats observés depuis deux ans et demi sont constants et durables.

Les réformes engagées permettent d'assurer la pérennité de notre système de soins en poursuivant dans la voie de réduction des déficits. Par votre texte, vous nous proposez aujourd'hui de réduire le déficit du régime général de 9,7 milliards prévus en 2006 à 8 milliards en 2007. C'est donc en organisant mieux notre système et en le modernisant que nous pourrons faire face aux défis futurs.

Je voudrais revenir un moment sur l'amendement du groupe UMP adopté en commission et permettant de financer une hausse de 1,1 % de l'ONDAM soins de ville. En moins de quatre ans, l'évolution des dépenses d'assurance maladie pour les soins de ville a enregistré une baisse historique, puisqu'elle a été divisée par cinq. Ces bons résultats découlent tout particulièrement des effets de la nouvelle convention médicale du 12 janvier 2005 et du climat de confiance qui s'est installé entre les pouvoirs publics et les médecins dans le cadre d'objectifs négociés. Quelles que soient les difficultés à négocier ces efforts, les médecins savent fort bien que l'actuel gouvernement est loin de l'esprit de ses prédécesseurs qui avaient voulu réguler les dépenses par des techniques comptables telles les lettres-clés flottantes.

M. Jean-Paul Bacquet. Le plan Juppé, c’est vrai !

M. Bruno Gilles. Cette méthode est fructueuse puisque l'engagement des médecins dans la maîtrise médicalisée a permis à l'assurance maladie de dégager 722 millions d'euros d'économies en 2005 et 475 millions d'euros pour les huit premiers mois de l'année 2006. Ces bons résultats devraient se poursuivre dans les années à venir, l'assurance maladie espérant 612 millions d'euros d'économies pour l'année 2007.

Ces résultats ont été obtenus, conformément à l'esprit de la réforme de 2004, qui consiste à « dépenser moins en dépensant mieux », tout en préservant la qualité des soins offerts aux malades. Il importe cependant de ne pas casser cette dynamique par un ONDAM trop strict et inéquitable. Il ne serait pas normal en effet que seuls les « bons élèves » de la maîtrise médicalisée subissent une baisse de leur ONDAM. Pour mémoire, l'ONDAM hospitalier passe de + 3,44 % en 2006 à + 3,5 % en 2007, alors que l'hospitalisation n'est que très peu concernée par les efforts de régulation lancés par la réforme de 2004 et que son enveloppe augmente chaque année de 2 milliards d'euros depuis 2000, comme l'a souligné le rapport Pébereau.

L'ONDAM fixé par le projet de loi initial est, de l'aveu général, intenable si l'on veut notamment revaloriser le « C », mieux indemniser la permanence de soins et remettre à niveau les conditions faites aux professions paramédicales.

C'est la raison pour laquelle je tiens à féliciter le Gouvernement d'avoir entendu les arguments du groupe UMP en faveur de l'augmentation de l'ONDAM soins de ville de 200 millions d'euros.

Lors de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre dernier, le ministre de la santé avait d’ailleurs déjà indiqué que la ventilation de l'ONDAM soins de ville devrait permettre d’augmenter de 3 à 4 % les honoraires médicaux. Ces sous-ONDAM n'ayant pas de valeur juridique, je voudrais souligner qu'il est utile que la commission des affaires sociales ait aussi accepté l'amendement par lequel nous proposons, avec mon collègue Dominique Tian une annexe au PLFSS, détaillant la ventilation des évolutions par poste des dépenses de soins de ville, en distinguant notamment les dépenses de produits de santé des dépenses hors produits de santé, lesquelles incluent les honoraires.

Toutefois, le fait de retenir une évolution de 1,1 % au lieu de 1,2 % diminue de 100 millions d'euros la marge de manœuvre dégagée, ce qui est significatif lorsque l'on sait, d'une part, que les professionnels de santé évaluaient à 500 millions d'euros les besoins non couverts et que, d'autre part, un tiers de cette enveloppe sera consacré à une meilleure prise en charge des dispositifs médicaux.

À cet égard, je souhaiterais d’ailleurs interroger le ministre sur le point de savoir si cette hausse de l’ONDAM intègre ou non la mise en place du secteur optionnel, conformément à l'accord chirurgie d'août 2004.

M. Jean-Paul Bacquet. Bonne question !

M. Bruno Gilles. Alors que les négociations tripartites entre l’UNCAM, l’UNOCAM et les syndicats de médecins n'ont à ce jour pas encore été lancées, n’est-il pas nécessaire de passer par la loi, et donc par un amendement au présent projet ? Le ministre de la santé a d’ailleurs lui-même indiqué en juillet dernier que, faute d'accord entre ces instances, il avait l'intention de déposer un amendement au PLFSS pour instaurer ce nouveau secteur d'exercice.

Dans cette perspective, il serait donc prudent de ne pas grever outre mesure l'enveloppe supplémentaire dégagée pour les soins de ville au détriment des honoraires des médecins, car la mise en place du secteur optionnel, qu'il soit instauré par les instances de la branche maladie ou par un amendement gouvernemental, nécessitera une enveloppe significative.

Toutefois, messieurs les ministres, après avoir exprimé ces quelques observations, je soutiendrai naturellement votre projet de loi, qui contribue à sauvegarder les fondements de notre sécurité sociale.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. Monsieur le président, messieurs les ministres, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je me suis quelque peu reconnu dans les propos de M. Le Fur. Je suis en effet un médecin vieillissant, exerçant en milieu rural, et je sais que je n’aurai pas de successeur…

Monsieur le ministre, les comptes de la sécurité sociale sont en déficit et, contrairement à ce qu'affirmait avec aplomb votre prédécesseur, M. Douste-Blazy, l'équilibre ne sera pas atteint en 2007.

L’assurance maladie connaît, c’est vrai, une amélioration,…

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Très nette !

M. Jean-Paul Bacquet. …mais celle-ci n’est malheureusement due qu’à des recettes traditionnelles, que nous avons, les uns et les autres, maintes fois utilisées : hausse des cotisations, baisse des remboursements, hausse du forfait hospitalier, de la franchise sur les actes médicaux, de la CSG, de la CRDS, du forfait de dix-huit euros sur les actes lourds. Il y a certes une amélioration des comptes, mais elle est fragile et certainement précaire, car assise sur un recul de la protection sociale et de l'accès aux soins.

Monsieur le ministre, votre PLFSS n'est pas à la hauteur des enjeux de santé publique dans notre pays. Certes, vous proposez quelques mesurettes qui vont dans le bon sens, telles que l'augmentation de la contribution des grossistes répartiteurs. Encore faut-il se rappeler que, lorsque Mme Aubry avait proposé cette mesure, votre groupe l’avait repoussée.

Vous proposez également une plus grande liberté de sortie au cours des arrêts de travail lorsque la pathologie, clairement identifiée, le justifie. Pourtant, sous la précédente législature, votre groupe, et en particulier Bernard Accoyer, avait dénoncé avec virulence l'obligation de motiver les arrêts de travail sur les imprimés de sécurité sociale.

Nous approuvons encore la décision de régulariser la situation des médecins ayant obtenu leur diplôme hors Union européenne, même si votre méthode n'est pas celle que nous préconisons.

Mais, monsieur le ministre, et je rejoins les propos de M. Le Fur, vous n’avez pas dit un mot sur les inégalités territoriales d'accès aux soins, sur la désertification médicale des zones rurales et sur l'inefficacité totale des incitations financières – préconisées tant par la gauche que par la droite – et des aides accordées par les collectivités territoriales dans le cadre de la loi relative au développement des territoires ruraux. Cela montre que ce problème n’existe pas qu’en milieu rural et que ce n’est pas non plus un problème de revenus.

Pas un mot non plus sur le manque de choix pour les postes de généralistes lors de l'internat, ni sur la difficulté à mettre en place la permanence des soins. Pas un mot sur les difficultés d'accès aux soins que rencontrent les titulaires de la CMU, refusés par 10 % des médecins, ou de l'AME, refusés par 50 % des médecins, en particulier par les médecins en secteur 2. Pas un mot sur la probable mise en place d'un système de bonus-malus par certaines mutuelles, mesure qui incitera à ne plus se soigner. Pas un mot sur le secteur optionnel qui ne pourra qu'aggraver l'insuffisance de prise en charge des soins en vidant le secteur 1. Pas un mot sur le dossier médical personnel…

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. C’est faux ! J’en ai parlé !

M. Jean-Paul Bacquet. …que vous aviez tant défendu l'an dernier et qui, si les délais de mise en place à marche forcée sont tenus, ne répondra pas à l’objectif fixé. En la matière, un accouchement tardif serait bien préférable à une naissance prématurée et insuffisamment préparée !

Pas un mot sur la situation dramatique des hôpitaux ni sur les 250 millions qui manquent pour finir l'année 2006, ce qui se traduira par l'abandon des projets d'investissement. Pas un mot sur les rapprochements entre les secteurs privé et public, qui conduisent le plus souvent à l'abandon de l'hôpital public au profit des établissements privés et à un nouveau recul de l’accès aux soins…

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Vous êtes déprimant !

M. Jean-Paul Bacquet. Pas un mot, enfin, sur les déremboursements à venir, en particulier pour des médicaments dont les plus hautes autorités médicales avaient expérimenté, puis vanté les propriétés curatives et préventives.

M. le ministre de la santé et des solidarités. J’en ai parlé ce matin.

M. Jean-Paul Bacquet. Par ailleurs, je m’étonne que vous vouliez réduire le fond d'aide à la qualité des soins de ville, au prétexte que trop de crédits seraient inutilisés, alors que nombre de maisons médicales en milieu rural – bien qu’elles ne soient pas, à mon sens, assez nombreuses – n’ont pas obtenu d’aide, faute de moyens.

Je m’étonne aussi que vous incitiez à vendre le plus rapidement possible les biens immobiliers des hôpitaux pour faire de l'investissement, alors que, nous le savons, leur situation financière ne permettra qu'un autofinancement pour boucler les fins de mois. Ne s'agirait-il pas plutôt de vendre l'argenterie pour payer le loyer ?

Monsieur le ministre, non seulement votre PLFSS n'est pas à la hauteur des enjeux de santé, mais il manque de sincérité.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Oh !

M. Jean-Paul Bacquet. Car, si vous augmentez l'ONDAM des soins de ville, mesure dont je ne conteste pas la nécessité, vous le faites plus pour des raisons comptables – parfois sous la pression des organisations professionnelles – que pour des raisons médicales. Vous allez également réduire de 3 % les actes en clinique privée pour des raisons, hélas, beaucoup plus comptables que médicales.

Oui, ce PLFSS de fin de législature, qui se refuse à aborder les vrais problèmes de la protection sociale et de l’accès aux soins, est un texte préélectoral et sans envergure. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Simon Renucci.

M. Simon Renucci. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale est un élément majeur de la vie parlementaire. Étant le dernier de la mandature, il sonne l'heure des bilans et envisage de nouvelles perspectives avec pour mission – celle-ci figure dans le préambule de notre Constitution – de garantir à tous « la protection et la santé ». À tous, c’est-à-dire à tous nos concitoyens, et c'est pour cette raison que notre système d'assurance maladie doit rester un système d'assurance sociale.

La sécurité sociale, dont la généralisation s’est achevée avec la loi du 27 juillet 1999, créant la couverture maladie universelle et fondant une plus grande cohésion nationale, a permis que maladie et misère n’aillent plus nécessairement de pair. L'égalité dans l'accès à des soins de qualité, voilà notre ambition et notre responsabilité, s’agissant notamment des plus fragiles. Or les inégalités se sont accentuées.

On observe en premier lieu des inégalités entre les territoires. En 2006, le nombre de médecins par habitant varie de un à quatre pour les spécialistes et de un à deux pour les généralistes entre le département le moins bien doté et le département le mieux doté.

De graves difficultés sont à venir, car le vieillissement de la population médicale et les nombreux départs à la retraite, la féminisation des professions médicales, ainsi que les choix de spécialité des étudiants bouleversent la carte sanitaire. En 2004, 500 postes offerts en médecine générale n'ont pas été pourvus et, pour la période 2008-2015, les prévisions sont inquiétantes. À ce déficit de l'offre médicale, s'ajoutent les nouvelles exigences des médecins concernant leur qualité de vie, et les seules incitations financières prévues par la loi ne les feront pas s’installer davantage en milieu rural ou dans des bassins urbains déficitaires.

À l’inégalité territoriale s’ajoute une inégalité dans la prise en charge des soins, qui est de plus en plus partielle. Certes, le régime général prend encore en charge en moyenne les trois quarts de la dépense, mais cette proportion, en diminution constante depuis quatre ans,…

M. le ministre de la santé et des solidarités. C’est faux !

M. Simon Renucci. …est très variable selon le type de soins. La prise en charge atteint 93 % pour les dépenses en hôpital public, mais elle n'est plus que de 70 % pour les consultations de médecins et de 64 % pour la pharmacie. Certaines prestations, pourtant essentielles, demeurent mal prises en charge par l'assurance maladie.

En outre, le nombre de médicaments déremboursés ne cesse de croître, le forfait hospitalier d'augmenter, de nouveaux forfaits d’être imposés. La liste s'allonge des dépenses non prises en charge par l'assurance maladie obligatoire. Elles sont aujourd'hui en grande partie couvertes et remboursées par une mutuelle ou par un contrat souscrit auprès d'une compagnie d'assurance privée. Cette logique engendre trois autres formes d'inégalités liées directement au revenu des usagers.

La première oppose ceux qui ont une couverture complémentaire et ceux qui n'en ont pas, soit 8 % des ménages. La deuxième concerne le financement, qui peut être entièrement à la charge de l'assuré ou partiellement pris en charge par l'entreprise, et prendre en compte, ou non, l'âge de l'assuré et la composition du ménage, comme le font les assureurs privés et un nombre croissant de mutuelles – concurrence oblige. La troisième inégalité concerne le niveau de la couverture apportée. Certaines complémentaires maladie offrent un haut niveau de prestations, d'autres sont lacunaires. Or, l'accès à une complémentaire, en raison du niveau des remboursements, est globalement proportionnel au revenu. Autant dire que ceux qui en auraient le plus besoin n'y ont pas accès et renoncent bien souvent à se soigner, faute de moyens.

Par ailleurs, on sait que les couvertures complémentaires offertes par les mutuelles sont plus homogènes et leur coût inférieur à celles proposées par les assureurs commerciaux, dont le principe financier est adossé à l'âge et à l'état de santé de la personne. La couverture mutualiste est donc plus solidaire et plus égalitaire que les couvertures individualisées offertes pas les assureurs commerciaux. Or on constate que ce sont les plus pauvres qui ont le plus souvent recours aux assureurs commerciaux.

Aux inégalités territoriales et financières, s’ajoute l’inégalité sociale. La santé publique reste l'enfant pauvre de la politique de santé en France, même si des efforts importants ont été consentis. L'assurance maladie prend principalement en charge les soins et néglige encore la prévention : 1,2 % seulement du total des dépenses y est consacré.

L'enjeu, pourtant, n'est pas seulement de faire des économies, mais de réduire les inégalités sociales face à la maladie et à la mort. Ainsi, si les taux de décès ont diminué pour toutes les causes de mortalité et pour toutes les catégories sociales, la surmortalité des ouvriers et des employés par rapport aux cadres supérieurs et aux professions libérales demeure importante. La France est, parmi les pays européens, celui dans lequel les écarts de durée de vie selon les catégories socioprofessionnelles sont les plus marqués. Ces écarts résultent d'abord des inégalités inhérentes aux conditions de vie et de travail. Les inégalités dans l'accès aux soins ne font qu'ajouter un risque supplémentaire.

Les inégalités en matière de santé s'étendent évidemment aux enfants et aux adolescents en fonction de la catégorie sociale à laquelle appartiennent leurs parents. Par exemple, une étude récente montre que l'obésité est dix fois plus fréquente chez les enfants d'ouvriers non qualifiés que chez les enfants de cadres. Une vraie réforme de la sécurité sociale supposerait donc d’envisager les problèmes de santé dans un cadre plus vaste.

Votre politique, monsieur le ministre, ne répond donc que très partiellement aux enjeux de la santé. Votre réforme n'atteint pas les résultats escomptés pour, me semble-t-il, deux raisons : elle aurait dû privilégier une approche plus globale et ne pas se limiter à une gestion comptable. Elle vise avant tout à faire baisser les dépenses de santé prises en charge par l'assurance maladie, et donc à faire basculer une part plus importante des frais de soins sur les assurés sociaux – comme le montre la hausse de la CSG – et sur les malades – je pense au forfait d’un euro et forfait hospitalier –, alors que le système comporte déjà de nombreuses inégalités d’accès aux soins.

D'autres réformes du système de santé français doivent donc être engagées. Mais cela, tout comme la « chasse au gaspi », ne nécessite pas l'effacement du service public au profit du privé, mais une meilleure coordination – des mesures ont d’ailleurs été prises en ce sens. Avec le système actuel, les coûts de gestion – inférieurs à 7 % – sont contenus et, en tout cas, bien inférieurs aux modèles privés. Pour mieux soigner, il faut mettre en œuvre un système plus égalitaire, plus préventif et plus éducatif. Notre pays se développe, la population s'accroît et l'espérance de vie augmente. Il existe des besoins de santé non satisfaits à ce jour, qui peuvent exiger – c'est un choix de société – de consacrer une plus grande part de nos richesses à notre système de santé en recherchant de nouvelles sources de financement. Il faut donc, dans ce même mouvement, mieux utiliser les ressources et mieux les répartir, pour que notre devise républicaine d’égalité, de liberté et de fraternité retrouve son sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. la parole est à M. Dominique Paillé.

M. Dominique Paillé. Monsieur le ministre, une fois n’est pas coutume, je voudrais, à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, exprimer deux motifs de satisfaction.

Le premier concerne la revalorisation de l’ONDAM libéral, que vous avez bien voulu accepter à la demande de nombreux parlementaires. J’en suis d’autant plus satisfait que vous avez annoncé devant la commission des affaires sociales, le 11 octobre, que cette mesure servirait non seulement à la revalorisation des actes des infirmiers libéraux, ce qui est justice, mais également à l’augmentation des remboursements pour les assurés sociaux, notamment dans le domaine de l’optique – il y avait là une nécessité absolue et je vous remercie de l’avoir prise en compte.

Second motif de satisfaction : l’article 41 du projet fait enfin droit aux revendications, elles aussi légitimes et que j’appuie depuis de nombreuses années,…

M. le ministre de la santé et des solidarités. C’est vrai !

M. Dominique Paillé. …des médecins titulaires de diplômes extracommunautaires qui pratiquent sur notre territoire national, notamment dans les hôpitaux publics. Certes, le dispositif peut encore être amélioré – j’ai déposé deux amendements à cet effet –, mais vous avez apporté là une réponse très attendue et je tenais à vous en rendre hommage.

Permettez-moi cependant de vous faire part de quelques inquiétudes que, je n’en doute pas, vous aurez à cœur de balayer dans votre réponse.

La première concerne la désertification médicale des zones rurales. Vous avez mis en place un système incitatif à l’installation, mais il n’a pas produit les résultats escomptés. Il serait bon de l’amplifier avant d’être contraint d’adopter des mesures coercitives.

La seconde inquiétude concerne l’assurance responsabilité civile des praticiens à risque. Je vois que mon ami Pierre-Louis Fagniez opine du chef et je me réjouis qu’il partage cette préoccupation.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. C’est un gros problème !

M. Dominique Paillé. La loi About oblige ces praticiens à souscrire une assurance, avec une prise en charge allant jusqu’à 3 millions d’euros par cas faisant l’objet d’un litige. Cette loi était utile, mais ce plafond nous semble extrêmement élevé. Avec Jean-Pierre Door, j’ai donc déposé un amendement qui, malheureusement, ne sera pas examiné par l’Assemblée pour des raisons de procédure,…

M. le ministre de la santé et des solidarités. Nous pourrons néanmoins avoir une discussion sur ce point !

M. Dominique Paillé. …mais qui visait à diminuer à hauteur d’un million et demi la part assurancielle, le reste étant à la charge de la solidarité. Cela me semble « jouable », si vous me permettez l’expression, dans la mesure où il n’y a annuellement que très peu de sinistres dépassant cette limite.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Une dizaine !

M. Dominique Paillé. Une telle mesure pousserait les assureurs à proposer aux médecins concernés des contrats plus abordables. D’ailleurs, la CHAM, que je connais bien, défend cette hypothèse de travail qui, je l’espère, retiendra votre attention.

Je souhaiterais également, monsieur le ministre, que vous précisiez l’utilisation des 170 millions d’euros supplémentaires affectés au Fonds d’aide à la qualité des soins de ville, alors que les 140 millions d’euros votés l’an dernier n’ont pas été intégralement consommés.

Enfin, j’ai une préoccupation constante, à laquelle vous répondez régulièrement, ce dont je vous remercie, mais qui m’inquiète compte tenu des récentes circonstances, et notamment de la récente victoire de France Télécom en référé. Je m’interroge en effet sur le cheminement du dossier médical personnel. Je souhaite que vous nous donniez un calendrier précis…

M. Pascal Terrasse. On le connaît déjà ! C’est fait !

M. Dominique Paillé. …pour que, à l’occasion des prochaines échéances, nous puissions donner à nos concitoyens des réponses à la hauteur de leurs espérances. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Marc Bernier.

M. Marc Bernier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’objet de mon propos sera d’aborder le projet de loi de financement de la sécurité sociale au travers du prisme de l’agriculture, de ses retraites, de sa protection sociale et de sa spécificité.

Ce souhait de vouloir aborder le PLFSS sous cet angle s’explique par l’attention toute particulière qu’un élu rural, ayant été parlementaire en mission auprès du ministre de l’agriculture, est naturellement enclin à prêter à ce secteur essentiel de notre économie, à ses représentants et au travail qu’ils exercent.

De plus, le fait de siéger, avec mon collègue Yves Censi, au sein du comité de surveillance de l’établissement de gestion du FFIPSA me conduit à faire preuve d’une vigilance toute particulière à l’égard de la protection sociale agricole dans toutes ses dimensions.

Enfin, lorsque j’ai été chargé par le Premier ministre d’étudier l’avenir de l’agriculture française, la transmission des exploitations et leur viabilité économique, j’ai fréquemment été alerté par les professionnels sur la protection sociale agricole, ainsi que sur les retraites des agriculteurs ou de leurs conjoints, pour lesquelles de fortes attentes ont été exprimées.

À cet égard, j’ai tout lieu de me réjouir de l’annonce faite par le Président de la République, le 5 octobre dernier, de revaloriser, dès le 1er janvier 2007, les retraites agricoles les plus modestes. Je tiens tout particulièrement à saluer cette mesure, inscrite à l’article 26, qui bénéficiera à 300 000 retraités, dès lors qu’elle s’adresse en priorité aux catégories qui n’ont pas bénéficié jusqu’à présent des mesures successives de revalorisation.

Pour autant, cette disposition, chiffrée à 162 millions d’euros, aura des conséquences évidentes sur le FFIPSA qui, rappelons-le, doit d’ores et déjà faire face à un déficit estimé à 2,1 milliards d’euros pour 2007.

C’est d’ailleurs le point que je souhaite développer, dans la seconde partie de mon intervention.

En effet, en 2005, il a été décidé de remplacer le BAPSA par le FFIPSA, sans modifier pour autant les modalités de versement des prestations dues aux non-salariés agricoles.

M. Gérard Bapt. Voilà le problème !

M. Marc Bernier. En revanche, depuis cette date, ce régime social ne fait plus l’objet ni de dotation de l’État ni d’affectation de recettes suffisantes, ce qui creuse inexorablement son déficit.

Face à cette situation préoccupante, le Gouvernement avait décidé de reprendre une partie de la dette du FFIPSA, pour un montant de 2,5 milliards d’euros, laissant au fonds une charge de 700 millions d’euros.

Malgré tout, le déficit du FFIPSA ne fait que s’accroître puisqu’il a atteint 1,4 milliard d’euros en 2005, 1,9 milliard en 2006 et qu’il atteindra probablement 2,1 milliards en 2007, soit un déficit cumulé de près de 6 milliards d’euros. Il faut donc accepter sans réserve les incidences que la revalorisation des petites retraites agricoles aura sur ce déficit, car la justice sociale est à ce prix.

Cependant, en tant que membre du comité de surveillance du FFIPSA, je profite de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui pour vous alerter, monsieur le ministre, et vous demander quelles perspectives nous serons en mesure d’offrir au régime agricole. Je n’ignore pas que cette question vous préoccupe et que vous avez manifesté à plusieurs reprises votre volonté de trouver rapidement une solution. D’ailleurs, le Gouvernement a confié à M. Jean-François Chadelat, inspecteur général des affaires sociales, une mission d’expertise, afin de trouver un mode de financement pérenne pour le FFIPSA.

Sans préjuger des propositions faites par la mission Chadelat et soucieux de trouver une issue qui puisse garantir l’avenir de la protection sociale agricole, je suis favorable à la proposition qui a été formulée par le comité de surveillance du FFIPSA, présidé par Yves Censi et au sein duquel j’ai l’honneur de représenter notre assemblée.

Ainsi, il a été proposé de recourir à un emprunt sur dix ans, dès le 1er janvier prochain, à hauteur du besoin de financement pour 2007, et avec une prise en charge par l’État du remboursement de l’annuité comprenant capital et intérêts. Cette proposition, bien qu’imparfaite, offrirait le temps nécessaire pour les négociations et les arbitrages, rendus indispensables, entre solidarité professionnelle et solidarité nationale. Cette mesure transitoire permettrait d’assurer le financement des prestations pour l’année 2007, tout en évitant de recourir à la création d’un nouveau prélèvement, qui serait en contradiction avec la politique de notre gouvernement.

Vous le voyez, monsieur le ministre, cette question me tient tout particulièrement à cœur dès lors qu’elle concerne l’ensemble du monde agricole français qui, ne l’oublions pas, travaille chaque jour pour faire de notre agriculture non seulement la première en Europe et la deuxième au niveau mondial, mais surtout une fierté nationale que nous devons préserver. J’en appelle à votre arbitrage souverain afin de résoudre, au plus vite et pour l’avenir, la question du financement de la protection sociale des femmes et des hommes du monde agricole. Sachez, en tout cas, que vous pourrez compter sur mon soutien et sur celui du monde rural. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Alain Claeys.

M. Alain Claeys. Monsieur le ministre, nous sommes face au cinquième et dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale de cette législature. Cela fait donc cinq ans que votre gouvernement et votre majorité sont comptables de la sécurité sociale. Quel constat pouvons-nous faire ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Cela va mieux !

M. Alain Claeys. Quel bilan pouvons-nous tirer ? Les déficits se sont accumulés.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Non !

M. Alain Claeys. Les prélèvements sociaux ont augmenté et les déremboursements se sont multipliés. La prise en charge des dépenses de santé par la collectivité a diminué. On observe plus de 50 milliards d’euros de déficits cumulés sur une législature et les inégalités d’accès aux soins se creusent. La loi sur l’assurance maladie n’a apporté aucune réponse sur la qualité et l’organisation du système de santé.

Les outils mis en place, que ce soit le dossier médical partagé, le parcours de soins ou le médecin traitant, ont été autant d’instruments qui ont fait porter le poids des changements de comportements sur les seuls assurés sociaux.

Notre système de santé est en crise. Les inégalités d’accès aux soins n’ont jamais été aussi fortes. La part de financement individuel est de plus en plus importante. Des zones entières de notre territoire deviennent de véritables déserts médicaux. Les tensions entre l’hôpital public et la médecine de ville sont sources d’incompréhension et de désordre. Les professionnels de santé se sentent abandonnés face à des difficultés autant sociales que sanitaires.

Face à cette situation, la loi sur l’assurance maladie n’est pas, une nouvelle fois, à la hauteur des enjeux. Elle ne permet ni de préserver notre système de sécurité sociale ni d’améliorer l’offre et la qualité des soins dans notre pays. Les quelques bonnes idées que comportait cette loi …

M. le ministre de la santé et des solidarités. Merci !

M. Alain Claeys. …ont été dévoyées. Le dispositif du médecin traitant et le parcours de soins sont finalement une source de complications pour les assurés sociaux pris dans le maquis des remboursements, ou plus exactement des déremboursements.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vous ne croyez pas ce que vous dites !

M. Alain Claeys. C’est une formidable opportunité pour les spécialistes de pratiquer des dépassements d’honoraires.

M. Pascal Terrasse. Absolument !

M. Alain Claeys. Le dossier médical personnel est d’abord un instrument de régulation financière, mais certainement pas un outil pour mieux suivre les malades, pour assurer une meilleure coordination des soins.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Mais si !

M. Alain Claeys. La loi sur l’assurance maladie prévoit que le remboursement par la sécurité sociale dépend de l’autorisation donnée par chaque patient au médecin qu’il consulte d’accéder à son dossier. Ce principe est très clair : si vous ne présentez pas votre dossier, vous serez moins bien remboursé.

Monsieur le ministre, nous vous disions en 2004, lors du débat parlementaire, que le DMP serait un succès si c’était un instrument médical…

M. le ministre de la santé et des solidarités. Tout à fait !

M. Alain Claeys. …avant d’être un instrument financier.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Cela n’est pas un instrument financier !

M. Alain Claeys. Nous vous suggérions de privilégier la coordination des soins et non la sanction financière.

Les conséquences pour les Français de cette réforme de l’assurance maladie sont lourdes : franchise de 1 euro sur les consultations et les actes, franchise de 18 euros sur les actes lourds, diminution du taux des indemnités journalières, moindre remboursement pour les bénéficiaires de la CMU hors du parcours de soins, sans oublier les hausses de CSG et de CRDS.

Aujourd’hui, chacun s’aperçoit, et en premier lieu les professionnels de santé, que les hypothèses de progression des dépenses d’assurance maladie pour 2007 sont totalement irréalistes et intenables. C’est tout l’équilibre du raisonnement sur la réussite de la politique menée qui s’effondre. La baisse affichée du déficit de l’assurance maladie ne repose sur rien d’autre que sur la volonté de masquer la réalité.

Une réalité n’est pas prise en compte : celle de la situation de l’hôpital, et singulièrement de l’hôpital public.

J’appelle particulièrement votre attention sur ce sujet, monsieur le ministre de la santé. L’hôpital est le grand absent de la réforme de l’assurance maladie, alors qu’il joue un rôle déterminant pour l’accès aux soins.

Comme les années précédentes, aucune réforme n’est proposée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, alors que l’hôpital doit être le premier bénéficiaire et le premier acteur d’une politique de solidarité.

Les besoins de financement des hôpitaux s’accumulent chaque année. Ils représentent 750 millions pour l’année 2006, dont 250 pour les seuls CHU. Ces sommes s’imputent sur les capacités d’autofinancement et freinent la dynamique du plan Hôpital 2007.

Pour l’an prochain, la Fédération hospitalière de France estime que les hôpitaux auront besoin de 635 millions en plus de l’enveloppe définie dans le projet de loi de financement, qui seront indispensables pour assumer l’impact des décisions salariales et des plans de santé publique décidés par votre gouvernement : le plan cancer, le plan santé mentale ou encore le plan grand âge.

Mais les problèmes des hôpitaux ne sont pas simplement des problèmes de moyens.

La communauté hospitalière publique est déterminée à poursuivre les efforts d’amélioration de gestion et les réformes structurelles. Elle pourra le faire à la condition que les pouvoirs publics cessent d’accroître ses difficultés.

La tarification à l’activité est une autre bonne idée qui a été dévoyée. Les modalités d’application de cette réforme doivent absolument être rediscutées et revues. Elles ne doivent pas avoir pour effet d’aboutir à une unification des tarifs entre le public et le privé.

La convergence est dangereuse et irréaliste. Il est indispensable de tenir compte des missions de service public de l’hôpital. L’enveloppe prévue pour ces missions doit être spécifique et élevée.

Aujourd’hui, l’hôpital – je pense particulièrement aux urgences – est un excellent reflet des maux et de la crise que connaît notre société. L’hôpital est tout à la fois à la pointe de l’excellence en termes de soins et le dernier recours, voire le seul, en matière d’accès aux soins. Il ne faut pas casser l’hôpital public. Il ne faut pas décourager le personnel, soignant ou non.

Pourtant, en 2007, la convergence entre le public et le privé sera poursuivie. Elle ne se comprend, elle n’est acceptable que s’il y a, entre les deux secteurs, un périmètre commun d’actions, des missions communes et des réglementations proches. Tel n’est pas le cas. Ainsi, la convergence tarifaire n’est pas accompagnée d’une convergence réglementaire.

M. Gérard Bapt. Exactement !

M. Pascal Terrasse. C’est d’ailleurs un vrai scandale !

M. Alain Claeys. Les missions de service public sont le cœur même des missions de l’hôpital. Pourtant, aujourd’hui, leur périmètre, fixé par décret, est très incomplet. Sont exclues, par exemple, les charges liées à la médecine légale ou à la protection maternelle et infantile. Les missions de service public et la nécessité de proximité doivent être prises en compte par la tarification à l’activité, sans quoi les hôpitaux publics continueront, comme aujourd’hui, à recourir à des solutions périlleuses, susceptibles de menacer la qualité du service public et de porter atteinte à la sécurité des soins.

Ces solutions, auxquelles vous poussez la communauté hospitalière publique, à savoir la reprise sur les capacités d’autofinancement, l’emprunt, les suppressions d’emplois ou de services, handicapent lourdement l’hôpital public.

La modernisation de la gestion hospitalière est indispensable. Elle ne peut se résumer à une manœuvre qui contraint le secteur hospitalier à se restructurer en organisant une pénurie de ses moyens.

Comme vous le voyez, monsieur le ministre de la santé, voilà beaucoup de questions, qui sont autant de sources de difficultés pour l’hôpital public.

J’en viens au problème des urgences. Si les chiffres que je vais citer s’avéraient faux, je suis prêt à être contredit.

Dans le cadre du plan de santé publique « Urgences », sur une enveloppe de 106 millions d’euros, 61 sont affectés aux établissements publics, qui assurent 91 % des passages aux urgences, et 45 millions sont versés aux établissements privés, qui n’assurent que 9 % des passages. Pourtant, l’hôpital public doit prendre en charge les urgences les plus lourdes et souvent les plus coûteuses.

L’hôpital public va mal, comme la sécurité sociale. Pourtant, le projet de loi de financement pour 2007 n’apporte, comme les quatre qui l’ont précédé, aucune garantie d’amélioration de l’accès aux soins pour tous et sur tout le territoire.

La spirale infernale qui a conduit la sécurité sociale vers plus de déficits et moins d’accès aux soins, vers plus de prélèvements et moins de remboursements, doit être enrayée le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous voici réunis pour discuter et, je n’en doute pas, approuver le troisième PLFSS de l’après-réforme. Oui, monsieur le ministre de la santé, voilà déjà trois ans de travail, d’efforts, de concertation et de dialogue, trois années passées à convaincre, à expliquer et à informer.

Quel formidable challenge que celui que la majorité unie, déterminée, volontaire a relevé aux côtés de votre prédécesseur, Philippe Douste-Blazy, et aux vôtres durant ce beau mois de juillet 2004 !

Quel formidable challenge que d’essayer de concilier rigueur, modernisme, pragmatisme et fidélité à un système âgé de soixante ans, épuisé, endetté et bien entendu condamné avant l’heure par ceux qui, aujourd’hui encore, allient le scepticisme à la démagogie, ou se complaisent dans le rôle d’épouvantail qu’ils affectionnent et qui les rend imperméables à l’évidence, et aigres devant toute évolution positive contraire à leur idéologie rétrograde.

M. Pascal Terrasse. Pour de tels propos, nous pourrions vous faire passer devant un jury populaire ! (Sourires.)

M. Philippe Vitel. J’allais vous le proposer, cher ami !

Oui, nous pouvons sans scrupule et sans fausse honte déclarer aujourd’hui que ce formidable challenge, nous sommes en passe de le gagner, pour permettre à des générations de nos compatriotes de continuer à bénéficier d’un système de santé juste, universel, solidaire, système que tous nous envient, car comme vous, monsieur le ministre, je n’en connais pas de meilleur au monde.

Ce challenge consistait à essayer d’équilibrer financièrement le système, le plus rapidement possible, tout en le modernisant par la mise en place d’une gouvernance enfin lisible et responsable, par une amélioration à la fois quantitative et qualitative du parcours des soins, nécessitant une indispensable responsabilisation de tous les acteurs et une lutte sans merci contre tous les fraudeurs.

Ce formidable challenge, oui, nous sommes en passe de le remporter. Bien sûr, des efforts sont encore nécessaires, nous ne l’avons jamais caché, mais nous n’avons jamais promis le grand soir !

M. Gérard Bapt. Même quand vous parlez de la rupture ?

M. Philippe Vitel. Ces bons résultats, nous n’aurions pu les obtenir sans l’engagement, à nos côtés, des professionnels tant de ville que d’hôpital. C’est par l’établissement d’un dialogue permanent, d’une concertation en matière d’objectifs et de moyens, que la nécessaire évolution du cadre conventionnel a pu aboutir. Et, aujourd’hui, ils sont les premiers à apprécier d’être passés d’un système autoritaire, rigide et répressif, à un système fondé sur la négociation et la confiance.

M. Gérard Bapt. En êtes-vous sûr ?

M. Philippe Vitel. L’hôpital, lui, a accepté des efforts majeurs évoluant vers une gestion plus transparente et plus efficace.

M. Jacques Domergue. Il faut le dire vite !

M. Philippe Vitel. Il est heureux que vous souteniez, pour les hôpitaux, l’objectif de 50 % de TAA pour 2008.

La médecine de ville est en passe de réussir sa mutation et l’engagement de tous a permis de générer des économies considérables, tout en mettant en place un nouveau parcours de soins qui permettra aux patients d’être pris en charge mieux et plus vite.

Passer d’une progression de dépense de 8 % en 2003 à 1,4 % en 2006 ne s’est pas fait sans effort. Faire virer au vert les feux clignotants qu’étaient par exemple les arrêts maladies et les prescriptions de médicaments n’est pas le fruit d’un hasard, mais le résultat d’un engagement constant de tous les acteurs de terrain, tant sur les objectifs de maîtrise médicalisée que sur les accords de bon usage de soins.

Non, la baisse de 3,4 % des indemnités journalières, de 9,8 % des prescriptions d’antibiotiques, et l’augmentation de 8 % des prescriptions de génériques ne doivent rien au hasard.

Parallèlement, la remise à niveau des honoraires est en route. Le retard était considérable. Espérons par ailleurs que la CCAM clinique verra bientôt le jour et complétera utilement cette avancée ! Le financement de la permanence des soins, reconnu mission d’intérêt général, est en marche. La coordination des soins n’est plus un mythe, mais une véritable réalité du terrain.

Aujourd’hui, d’autres chantiers sont ouverts.

La CCAM technique 2 doit rapidement compléter la première version. C’est, à mon sens, la meilleure réponse à apporter au fameux rapport de l’IGAS sur la chirurgie, utilement relooké par le professeur Guidicelli.

La définition des secteurs d’activités est aujourd’hui un facteur d’inquiétude pour tous. En ce sens, les négociations tripartites sur la mise en place d’un secteur optionnel, qui ont débuté le 4 octobre, sont une bonne chose.

Toutefois, permettez-moi de proclamer ici haut et fort la nécessité d’étendre ce secteur à tous et de ne pas le réserver exclusivement aux chirurgiens. Cette mesure, demandée de longue date, ne doit en effet en aucun cas paraître réductrice et, par là même, discriminatoire.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Il faut le dire à l’UNCAM !

M. Philippe Vitel. Quant à l’option de coordination, qui a déjà été choisie par près de mille médecins, elle ne pourra constituer une préfiguration du secteur optionnel que si les caisses s’investissent franchement dans sa mise en place et son développement. Force est de constater que ce n’est pas toujours le cas aujourd’hui.

M. Jean-Pierre Door. Il y a du pain sur la planche !

M. Philippe Vitel. Je ne m’étendrai pas sur la simplification nécessaire des tâches administratives, qui exaspèrent chaque jour davantage les praticiens libéraux ou hospitaliers. Je suis sûr que vous avez pris, monsieur le ministre, la mesure du fardeau qu’elles représentent pour tous. Je vous fais entièrement confiance pour trouver très rapidement une solution à ce problème.

M. Jean-Pierre Door. Très bien !

M. Pascal Terrasse. Il faut avoir la foi !

M. Philippe Vitel. Enfin, vous venez de promulguer la création de la filière universitaire de médecine générale. Cette évolution de la formation des médecins de famille était attendue de longue date. Sa mise en place est aujourd’hui grandement appréciée.

Comme chaque année, la discussion parlementaire du projet de loi de financement de la sécurité sociale va être l’occasion d’un débat riche, animé, coloré par nos différences, mais certainement enrichi de nos expériences.

Nous userons sans abuser de notre pouvoir d’amendement afin de définir le plus précisément possible les moyens par lesquels nous comptons faire face aux défis de demain.

La troisième étape de la feuille de route fixée il y a trois ans, lors de la réforme de l’assurance maladie, et matérialisée par le PLFSS que nous voterons dans quelques jours, montre notre volonté de continuer les réformes structurelles engagées et notre souci de consolider l’évolution des comportements ayant amené les bons résultats que nous obtenons aujourd’hui.

Depuis trois ans, nous avons remis le malade au centre du système.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Système qui était lui-même malade !

M. Philippe Vitel. Il apprécie au plus au point le nouveau parcours, qui lui permet de recevoir les meilleurs soins du praticien le plus à même de le soulager. Les professionnels désenchantés, sans illusion et sans espoir en l’avenir, que nous rencontrions dans nos circonscriptions au début de la législature, reprennent peu à peu confiance.

M. Jean-Pierre Door. C’est exact !

M. Philippe Vitel. Ils nous ont accompagnés depuis que nous les avons concrètement associés à nos réflexions et à nos engagements. Ils sont aujourd’hui conscients des difficultés qui sont encore à venir, mais justement impatients de pouvoir définitivement exercer leur art dans la sérénité et l’enthousiasme.

Alors, monsieur le ministre, continuons tous ensemble notre labeur, sans complexes mais sans autosatisfaction exagérée, avec détermination et bon sens. Nous pourrons être fiers d’avoir eu le courage de mettre en place une réforme aussi structurante.

Le PLFSS pour 2007 répond aux exigences de résultats que nous nous étions fixées. Nous le voterons donc sans états d’âme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, dernier orateur inscrit.

M. Gilles Carrez. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaite évoquer les relations financières entre le budget de l’État et celui de la sécurité sociale,…

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Elles sont très bonnes !

M. Pascal Terrasse. Catastrophiques, plutôt !

M. Gilles Carrez. …budgets qui poursuivent tous deux un même but, celui du redressement de nos finances publiques. Pour que l’effort soit collectif et coordonné, il nous faut tous respecter certaines règles de bonne gouvernance financière.

S’agissant du budget de l’État, dont on a voté la première partie hier, une démarche de redressement des comptes est clairement engagée depuis quelques années. En 2007, les dépenses ne progresseront que de 0,8 %, c’est-à-dire un point de moins que l’inflation. Quant aux recettes, depuis 2004, tous les surplus sont affectés au déficit et en aucun cas à des dépenses supplémentaires. Toutefois, en dépit de ces efforts, le déficit prévisionnel s’élève, pour 2007, à plus de 41 milliards d’euros. Cela signifie que les dépenses excèdent encore les recettes de 13 % et que, si la dette se stabilise en pourcentage du PIB, elle continue d’augmenter en montant.

M. Pascal Terrasse. Ça, c’est sûr !

M. Gilles Carrez. Dans cette dette de plus de 1 100 milliards d’euros, 900 milliards proviennent du budget de l’État, 120 milliards des collectivités locales et près de 70 milliards des comptes sociaux, si l’on inclut la CADES. L’État n’est donc pas le seul décideur en matière de dépenses publiques puisque, outre les collectivités locales, il faut compter avec tout un ensemble de prescripteurs de dépenses sociales.

Aussi le Premier ministre a-t-il eu totalement raison d’organiser en janvier dernier une conférence des finances publiques, destinée à réunir tous les partenaires de la dépense autour d’une table afin qu’ils coordonnent leur action. Cette démarche est d’autant plus indispensable que, si le budget de l’État s’élève à 275 milliards d’euros, celui de la sécurité sociale s’élève, lui, à 400 milliards d’euros.

Par ailleurs, nous sommes bien conscients qu’il va nous falloir trouver des marges de manœuvre pour financer l’inévitable accroissement des dépenses liées à la maladie, à la dépendance, aux retraites, et dues au vieillissement de la population. Mais nous ne pourrons les trouver que si nous parvenons à stabiliser la dépense de l’État ainsi que celle des collectivités locales et si nous mobilisons les éventuels excédents engendrés par la baisse du chômage. Il n’en demeure pas moins absolument nécessaire d’examiner nos dépenses sociales avec la même rigueur et le même souci de justice et d’efficacité. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Dans ce contexte, comment se présentent les relations entre le budget de l’État et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ?

Ces relations sont tout d’abord régies par le principe de compensation, qui est un bon principe, défini dans la loi de 1994 et repris dans la loi organique sur les lois de financement de l’an dernier. Ainsi, en 2006, le transfert du panier de recettes au titre de la compensation de l’allégement des baisses de charges sur l’emploi a été réalisé de telle manière que les comptes sociaux soient totalement garantis. Si un écart supérieur à 2 % devait être constaté, un processus de rééquilibrage serait immédiatement enclenché.

Vous devez être conscients, messieurs les ministres, que le budget de l’État pour 2007 consent un effort absolument considérable en faveur des comptes sociaux. Tout d’abord, les 320 millions d’euros de baisses de charges supplémentaires pour les entreprises de moins de vingt salariés – 2,1 points au niveau du SMIC – sont totalement compensés par un transfert équivalent des droits sur les tabacs. Ensuite, les frais financiers liés à la créance que les comptes sociaux ont vis-à-vis de l’État depuis plusieurs années sont pour la première fois compensés. En tant que rapporteur général du budget, j’ai souscrit à cette démarche, qui me paraît légitime.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Très bien !

M. Gilles Carrez. Au reste, je préférerais que l’on supprime une bonne fois pour toutes ces 4 ou 5 milliards de dette. Au moins, les relations seraient plus claires.

M. Pascal Terrasse. C’est ça, supprimez la CADES !

M. Gilles Carrez. J’ajoute qu’une centaine de millions sont définitivement acquis pour l’assurance maladie en 2007. Le panier de recettes transféré en 2006 au titre des allégements de charges ayant en effet rapporté 300 millions supplémentaires, l’État a décidé de laisser, par un jeu d’écriture, plus de 100 millions à l’assurance maladie.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. C’est vrai !

M. Gilles Carrez. Par ailleurs, il faut tenir compte de l’incidence d’un certain nombre de réformes fiscales en termes de CSG. Grâce à la réforme de l’impôt sur le revenu, on constate un produit supplémentaire de 500 millions d’euros de CSG au bénéfice, là encore, des comptes sociaux. Mais cela peut jouer en sens inverse, comme lors de la réforme de l’avoir fiscal. De la même manière, lorsque l’amendement Fourgous a été adopté l’an dernier, j’ai attiré l’attention sur les pertes de CSG que cette mesure entraînerait.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l’assurance vieillesse. Exact !

M. Gilles Carrez. En effet, plus on transforme des contrats d’assurance-vie en euros en contrats multi-supports, plus il y aura un différé de perception de la CSG au détriment des comptes sociaux.

Le rapporteur général du budget est donc dans une disposition d’esprit extrêmement positive pour ce qui est de favoriser l’équilibre des comptes sociaux. Aussi, je voudrais aborder deux questions sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La première porte sur la décision de supprimer l’article 21, afin d’imposer une compensation à l’euro près pour les exonérations des stages et des contrats de transition notamment.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. On ne le supprime pas !

M. Gilles Carrez. J’en comprends le principe, mais je m’interroge sur la « soutenabilité » de ce type de mesure. Les mesures destinées à lutter contre le chômage ont l’avantage, si elles atteignent leur objectif, de faire affluer des cotisations sociales supplémentaires. Il est impossible – et Yves Bur le confirmera – d’ajouter, en dispositions de compensation, 100 millions d’euros de dépenses supplémentaires dans un budget de l’État qui accuse un déficit de 41 milliards. Ce ne serait pas raisonnable. Ou alors il faudra dire, dans une approche d’un juridisme étriqué, que la compensation des frais financiers n’ayant pas de base légale, c’est là qu’il faut finalement prendre les 100 millions. Mais je ne pense pas que nous ayons intérêt, les uns et les autres, à nous engager dans ce type de débat.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Nous sommes d’accord !

M. Gilles Carrez. Ma deuxième question porte sur l’article 14 du projet de loi, qui dispose que, en cas de surplus de recettes, ceux-ci sont automatiquement affectés à la caisse nationale d’assurance maladie – je parle des droits sur le tabac. Or il me semble que la règle que nous avons adoptée pour le budget de l’État devrait inspirer la même démarche pour les comptes sociaux. Selon cette règle, les surplus éventuels sont obligatoirement affectés au déficit. En l’espèce, ils n’iraient pas à la CNAM, mais au déficit.

Par ailleurs, nous avons fait en sorte, dans le cadre de la discussion budgétaire, que, chaque fois que l’État délègue sa mission de service public à un opérateur et qu’il délègue à cette fin des recettes, le Parlement décide chaque année de l’utilisation des éventuels surplus de ces recettes. Il me semble donc – et c’était le sens de l’intervention d’Yves Bur – que, s’il doit y avoir des surplus annuels, ceux-ci ne doivent pas être délégués de manière définitive à l’opérateur de service public qu’est la CNAM. Il faut que notre assemblée puisse en décider chaque année.

Nous avons intérêt à adopter ensemble des règles de bonne gouvernance communes.

M. Marc Le Fur. Très bien !

M. Gilles Carrez. Ce propos, je ne le tiens pas uniquement à l’égard des comptes sociaux. Je l’ai tenu de la même manière, la semaine dernière, vis-à-vis des collectivités locales. Dans le budget de l’État, celles-ci représentent, dotations et dégrèvements confondus, 60 milliards d’euros, c’est-à-dire un cinquième de la dépense. Il faut que nous fassions preuve de la même rigueur et de la même coordination, que ce soit dans les relations du budget de l’État avec les collectivités locales ou avec les comptes sociaux.

Chers professeurs rapporteurs, le budget de l’État est à peine convalescent et il risque la rechute à tout moment. Il serait donc illusoire de penser que l’on peut régler tel ou tel problème des collectivités locales, voire de la sécurité sociale, en usant d’un droit de tirage sur le budget de l’État qui ne peut pas le supporter.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. On ne peut pas opposer les uns aux autres !

M. Gilles Carrez. Pour suivre un excellent article que j’ai lu avant-hier dans un journal, monsieur le ministre,…

M. Pascal Terrasse. Cet article des Échos est d’ailleurs contradictoire avec les propos du rapporteur général !

M. Gilles Carrez. …je pense que nous devons avoir une approche commune et utiliser toutes les marges de manœuvre possibles, qu’il s’agisse de l’emploi, des dépenses de l’État ou de celles des collectivités locales, pour faire face au vieillissement de la population. Mais, quels que soient les budgets, la règle de la maîtrise de la dépense et de la recherche de la meilleure efficacité s’impose à tous. Je suis sûr, messieurs les ministres, que ce sera le cœur de la discussion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Pascal Terrasse. Il va falloir vous expliquer, monsieur le ministre !

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, je remercie tous les orateurs qui viennent de s’exprimer avec beaucoup de pertinence dans des interventions de qualité, parfois passionnées ou polémiques, bien sûr, mais qui témoignent toutes de l’importance que vous attachez à la discussion de ce projet de loi. Comme chaque année – M. Door et M. Préel l’ont fait remarquer –, il s’agit de discuter de masses financières bien supérieures à celles du budget de l’État.

Plusieurs d’entre vous ont abordé le financement de la sécurité sociale, notamment M. Carrez, M. Fagniez, rapporteur pour l’équilibre général, M. Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, ainsi que M. Door, M. Desallangre et Mme Jacquaint.

Comme l’a dit fort justement M. Bur, c’est en effet une question centrale. Le Gouvernement a mené une large concertation sur ce thème, en consultant experts et partenaires sociaux. C’est un premier pas. Il nous ouvre des perspectives, mais cette réflexion ne pouvait pas aboutir dès le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Le Conseil d’analyse économique et le Conseil d’orientation pour l’emploi ont d’ailleurs demandé davantage de temps pour approfondir leurs travaux et débattre de certaines pistes de réforme, telles que la TVA sociale ou une contribution élargie à des formes de rémunération qui échappent actuellement au prélèvement social, contrairement aux principes fondamentaux qui avaient été retenus par les pères fondateurs de notre protection sociale.

La sécurité sociale doit en effet bénéficier de financements dédiés à des droits permanents qui ne sauraient être remis en cause chaque année à l’occasion de la discussion de notre loi de financement de la sécurité sociale, laquelle n’est pas exactement la transposition du budget de l’État à la sécurité sociale,…

M. Pascal Terrasse et M. Gérard Bapt. Absolument !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …car, s’agissant du budget de l’État, nous avons affaire à des crédits d’une autre nature.

Le Parlement doit désormais contribuer à cette réflexion sur le financement de la protection sociale, comme le souhaite à juste titre M. Door. Le sujet est bien sûr complexe, mais nous ne pourrons assurément pas rester immobiles, alors que nos voisins, en particulier les Allemands, modifient les modalités de leurs prélèvements sociaux, ce qui affecte d’ailleurs les conditions de la compétition économique.

M. Pascal Terrasse. C’est vrai !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Nous devons être attentifs à ce que la sécurité sociale demeure, du point de vue de ses financements aussi, un sanctuaire inattaquable.

M. Marc Le Fur. Très bien !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Sur ce point, je voudrais souligner, en réponse à M. Carrez, que si l’État n’a pas de marge de manœuvre et si la solution ne peut consister à vouloir réexaminer les relations financières complexes entre l’État et la sécurité sociale, cette dernière ne dispose pas non plus de marges de manœuvre. Le Gouvernement estime que l’essentiel est de justifier l’imputation de chaque dépense à chacun de ces budgets, afin de s’assurer que la frontière entre les deux masses financières est bien fondée sur des principes politiquement acceptés par la représentation nationale.

M. Pascal Terrasse. Le contribuable, lui, n’a qu’une poche !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le travail effectué dans le cadre de la loi de finances, de la loi de financement de la sécurité sociale, mais aussi de la conférence nationale des finances publiques, instituée par Dominique de Villepin, doit nous permettre d’y voir plus clair. La sécurité sociale ne saurait en effet servir de variable d’ajustement au budget de l’État…

M. Gilles Carrez. Ce ne doit pas être l’inverse non plus !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …comme ce fut trop souvent le cas par le passé, notamment entre 1998 et 2002. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Eh oui ! Avec les 35 heures et le FOREC !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. La réflexion sur le financement de la sécurité sociale doit évidemment prendre en compte la question des exonérations de charges, comme l’a fait observer M. Fagniez avec beaucoup de pertinence. Ces exonérations avoisinent désormais un montant de 25 milliards d'euros, ce qui est considérable. Les analyses économiques montrent qu’elles ont un effet positif sur l’emploi…

M. Pascal Terrasse. Ce n’est pas vrai !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …sauf lorsqu’elles sont employées à financer la réduction du temps de travail, au lieu de l’être à abaisser le coût du travail ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Il y a eu, de ce point de vue, beaucoup de confusion à une certaine époque – une époque pas si éloignée –, mais nous sommes en train de prendre toute la mesure des effets pernicieux qu’un tel comportement peut avoir sur le financement de la sécurité sociale.

M. Pascal Terrasse. Cela fait cinq ans que vous êtes au pouvoir, et qu’avez-vous fait ? Dépêchez-vous, il ne vous reste plus que six mois !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. La poursuite des allégements de charges est ciblée cette année sur les entreprises de moins de vingt salariés, parce que ce sont les plus sensibles au coût du travail en termes d’embauche, et parce qu’elles représentent un très important gisement d’emplois, comme le montre le succès du contrat nouvelles embauches.

Vous estimez, monsieur le rapporteur général, que la compensation est un bon principe. J’y suis moi aussi très attaché, et souhaite qu’elle s’effectue à l’euro près. Je me félicite, comme vous, que l’État ait affecté cette année une partie des droits sur le tabac pour couvrir les frais financiers de sa dette – d’un montant de 5 milliards – à l’égard de la sécurité sociale. Mais ce serait encore mieux, vous en conviendrez, si nous parvenions, comme le Gouvernement le souhaite pour les années à venir, à apurer cette dette et à revenir à plus de clarté dans les comptes. Nous progressons vers cet objectif mais il y a encore, c’est vrai, beaucoup de travail.

M. Pascal Terrasse. C’est une bataille interne à l’UMP ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le rapporteur Rolland, vous avez salué le succès de la réforme de l’assurance maladie. Je vous en remercie, de même que l’ensemble de la majorité, qui a permis de mettre en œuvre cette réforme et d’en obtenir aujourd’hui les résultats encourageants que l’on sait. Vous avez analysé fort justement les préoccupations des professionnels de santé, notamment celles des médecins généralistes, qui souhaitent la reconnaissance universitaire de leur discipline. C’est désormais chose faite, avec notamment l’instauration d’un stage obligatoire de médecine de ville en deuxième cycle, qui devrait valoriser et renforcer l’attractivité de cette spécialité.

M. Philippe Vitel. Très bien !

M. Gérard Bapt. Un stage qui n’est pas financé !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Les médecins généralistes souhaitent également pouvoir consacrer plus de temps à leurs malades, ce qui suppose moins de tracasseries administratives !

M. Philippe Vitel. Tout à fait !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Xavier Bertrand et moi-même allons faire dans les prochains jours une première série de propositions visant à faciliter la vie de ces professionnels et à améliorer ainsi la qualité de leurs relations avec l’assurance maladie.

Pour ce qui est de la démographie médicale, vous me permettrez de prendre mes distances avec les propositions du groupe socialiste. Je ne crois pas qu’il y ait une réponse simple, ni même une réponse unique, à ce défi, et je le souligne également à l’intention de Marc Le Fur, dont j’ai écouté avec beaucoup d’attention les propositions à cet égard.

M. Gérard Bapt. C’était une bonne intervention !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Améliorer la permanence des soins, favoriser la conciliation de la vie professionnelle et familiale, inciter au regroupement, faciliter les remplacements, tels sont les objectifs que nous devons poursuivre simultanément pour obtenir des résultats dans le domaine de la démographie médicale. Il nous faut aussi former davantage de professionnels et rompre avec les politiques malthusiennes du passé – vous savez de quoi je parle, mesdames et messieurs de l’opposition ! Je rappelle que, durant la législature 2002-2007, nous aurons augmenté de 50 % le numerus clausus des études médicales. Il était temps !

M. Pascal Terrasse. Nous l’avons fait aussi ! C’est Juppé qui l’avait réduit !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la rapporteure Clergeau et monsieur Terrasse, nous n’avons pas, contrairement à ce que vous prétendez, institué un impôt sur les naissances. Au contraire, nous avons créé la prestation d’accueil du jeune enfant, une initiative dont vous ne pouvez certainement pas vous prévaloir.

M. Pascal Terrasse. Ce que vous donnez d’une main, vous le reprenez de l’autre !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous vous êtes étonnés de ce que nous proposions des mesures ambitieuses destinées à renforcer la solidarité entre les générations en application des décisions prises à la conférence de la famille de juillet dernier…

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille. Au détriment des familles !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. ...tout en prévoyant le retour à l’équilibre de la branche famille en 2008. Pour ma part, je m’en félicite, car cela prouve que l’on peut mener une politique à la fois ambitieuse et respectueuse de l’équilibre des comptes. Je déplore, madame Clergeau, que vous ayez cru bon d’affirmer que nous donnions la priorité aux familles aisées, car c’est tout le contraire. (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Philippe Vitel. C’est ça qui les embête !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En réalité, nous avons donné la priorité aux familles en difficulté. Alors que nous espérions que 200 000 familles supplémentaires par rapport à l’ancien dispositif bénéficieraient de la prestation d’accueil du jeune enfant, 250 000 y ont été éligibles. Alors que vous vous étiez contentés de laisser ronronner le dispositif existant entre 1997 et 2002, grâce à la PAJE, un couple de salariés payés au SMIC a vu ses aides pour la garde de ses jeunes enfants augmenter de 54 %.

M. Pascal Terrasse. Tous les smicards emploient des nounous, c’est bien connu !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Par ailleurs, alors que seulement 39 000 logements sociaux avaient été construits en 2001, 80 000 l’ont été l’an dernier, et nous espérons porter ce chiffre à 100 000 très prochainement.

M. Patrick Roy. Combien à Neuilly ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Une fois de plus, et contrairement à ce que vous ne cessez de répéter avec un aplomb stupéfiant, ce n’est pas la gauche qui apporte le mieux-disant social, c’est nous ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Pascal Terrasse. Nous ne vivons pas dans le même monde, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. J’espère que vous m’approuverez lorsque je vais vous dire que nous allons doubler les crédits des réseaux d’écoute et d’aide aux parents dans le budget de l’État pour 2007. L’ampleur de cet effort, ainsi que de celui consenti en matière de construction de crèches…

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. Combien de crèches construisez-vous ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …devrait vous conduire à reconnaître, avec un peu de bonne foi et d’objectivité, la qualité et l’efficacité de la politique familiale que nous pratiquons à l’égard des familles les plus modestes, sans que cela nous empêche de réduire le déficit de la branche famille. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Quand vous évoquez le nombre de places de crèches, madame la rapporteure, permettez-moi de vous dire que vous ne pouvez stipuler pour compte d’autrui. C’est trop facile !

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. Mais c’est la réalité !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Après avoir toléré les carences de la politique familiale conduite de 1997 à 2002, vous êtes malvenue à vous prévaloir aujourd’hui du fait que, quelques mois avant de quitter le pouvoir, le gouvernement de l’époque avait décidé d’augmenter les financements des places de crèches ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. Bien sûr !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Seulement 264 places de crèches ont été créées en 2000, contre 8 500 places l’an dernier, et 10 000 places cette année. L’année prochaine, nous en créerons 12 000 ! Là encore, c’est nous qui avons agi, et pas vous !

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. Nous en reparlerons !

M. Pascal Terrasse. M. le ministre a besoin d’une tisane !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je suis un peu surpris des réticences que vous exprimez devant notre proposition de partage des allocations familiales en cas de garde alternée. En effet, j’ai eu la semaine dernière à m’exprimer au nom du Gouvernement sur une proposition de loi socialiste présentée au Sénat par M. Dreyfus-Schmidt, qui prévoyait un partage systématique – dans des conditions manifestement mal étudiées – de toutes les allocations, et pas seulement les allocations familiales. Il me semble que votre famille politique gagnerait à harmoniser ses positions entre l’Assemblée nationale et le Sénat ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Vous êtes mal placé pour dire ça !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Quant au prêt à taux zéro d’un montant maximal de 5 000 euros, que nous prévoyons d’instituer pour permettre aux jeunes gens de familles modestes de pouvoir bénéficier facilement d’un crédit garanti par le fonds de cohésion sociale…

M. Pascal Terrasse. Un tel dispositif a déjà été mis en place par de nombreux conseils généraux !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …pour permettre l’achat d’un outillage, d’un véhicule d’occasion, le versement d’une caution pour louer un appartement, l’achat de vêtements de travail, je ne crois pas que les Français aux revenus modestes qui nous écoutent estimeront qu’il s’agit d’une « coquille vide ». C’est au contraire une réponse très concrète aux besoins de familles modestes et l’Assemblée nationale s’honorera si, comme je le crois, elle vote cette nouvelle disposition.

M. Jean-Pierre Door. Évidemment !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. J’entends dire çà et là que les financements accordés aux collectivités et aux associations dans le cadre des contrats « enfance et temps libre » ne seraient plus assurés.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. J’ai dit qu’ils le seraient moins !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Or c’est totalement faux. Tous les financements des contrats en cours sont maintenus au niveau prévu lors de leur signature…

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille. Non !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …à moins que les gestionnaires de telle ou telle caisse d’allocations familiales ne prennent des initiatives contraires aux consignes qui leur sont données par la Caisse nationale des allocations familiales.

M. Pascal Terrasse. Ah ! Ça se passe comme ça ? On le leur dira !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Les contrats venant à expiration seront renouvelés et convergeront progressivement vers les nouvelles règles, lesquelles prévoient en effet de donner la priorité pour l’attribution de nouvelles places de crèches aux territoires qui en manquent le plus. Pourquoi aurions-nous à rougir de prévoir cette sélectivité des financements, qui nous a été demandée par les partenaires sociaux unanimes dans le cadre de la négociation de la convention d’objectifs et de gestion ? Non, madame la rapporteure, nous ne regrettons pas ces initiatives visant à assurer le développement continu des modes de garde de la jeune enfance dans des conditions optimales de qualité et de sécurité, tout simplement parce que nous sommes convaincus de répondre ainsi à un besoin fondamental des parents. Nous sommes fiers de notre politique dans ce domaine et souhaitons par conséquent la poursuivre.

Vous m'avez également interrogé sur l’évolution du décret du 1er août 2000. Je partage entièrement votre préoccupation de qualité. Je suis même particulièrement attentif à ce point. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas faire des économies administratives. Parfois, la rigidité des textes, sans amélioration de la qualité, peut conduire à des coûts exorbitants pour les collectivités locales et les caisses d’allocations familiales.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Il arrive un moment où cela devient déraisonnable !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je tiens à remercier M. Denis Jacquat pour la très grande qualité de son intervention.

Vous m’avez interrogé, monsieur le rapporteur, sur le calendrier de parution du décret majorant le taux de surcote. Le projet a déjà recueilli un avis favorable du conseil d'administration de la CNAV du 4 octobre. Il est actuellement en cours de contreseing et paraîtra d'ici à la mi-novembre. La majoration du taux de surcote prendra effet au 1er janvier 2007. Rappelons-le, cette surcote atteindra 5 % à soixante-cinq ans.

Concernant la mise en place d'une surcote dans les régimes complémentaires, j'ai écrit à cette fin, avec Xavier Bertrand, aux partenaires sociaux gestionnaires des régimes complémentaires de retraite. Je souhaite que la négociation qui vient de s'ouvrir dans ces régimes complémentaires soit l'occasion d'apporter une réponse favorable.

Monsieur le rapporteur, je m'associe pleinement à vos propos quant à la nécessité d'une amélioration de l'emploi des seniors. C’est le sens des décisions prises sur la surcote, mais aussi de celles prises dans le cadre du plan seniors sur la retraite progressive et le cumul emploi-retraite en faveur des salariés qui avaient un très petit salaire. Les règles de cumul leur étaient en effet spécialement défavorables. Là encore, nous avons pensé à nos compatriotes les plus défavorisés en renforçant la possibilité pour eux de poursuivre une activité professionnelle. Je sais que vous y avez beaucoup travaillé et je tenais publiquement à vous en donner acte et à vous en remercier.

Concernant la situation des veuves, vous le savez, le Gouvernement y attache une attention toute particulière. La réforme des retraites d'août 2003 a amélioré les dispositifs existants : suppression du double plafond, de la condition d'âge, de la condition de durée, de la condition de non-remariage. Un certain nombre de verrous ont ainsi été levés. Le Conseil d'orientation des retraites examine actuellement la question des avantages familiaux, que vous avez soulevée. Je souhaite qu’il parvienne à une conclusion positive qui sera utile dans la perspective du rendez-vous de 2008. Il établira à ce sujet un rapport spécifique d’ici à la fin de l'année.

Monsieur le rapporteur pour avis Yves Bur, une fois de plus, je partage tout à fait votre appréciation : les réformes mises en œuvre en matière de sécurité sociale auront marqué cette législature et auront permis de sauvegarder notre système en restant fidèles à ses principes fondateurs. Je remercie également MM. Door, Perrut, Gilles et Mme Aurillac, qui ont souligné la réussite de la réforme de l’assurance maladie.

Vous avez comparé, monsieur Bur, la progression des dépenses de personnel dans le projet de loi de finances, qui est de 0,8 %, avec celle de la progression de l'ONDAM, qui de 3,5 %. Or la progression des dépenses de personnel n'explique que 1,39 % de la progression de l'ONDAM dans un secteur, la santé, où les besoins de soins et de présence humaine auprès des personnes vieillissantes et des malades vont croissant. De surcroît, les établissements de santé et médico-sociaux remplissent des missions qui nécessitent la présence permanente du personnel pour assurer qualité et continuité des soins. Si écart il y a entre projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale, il est relativement faible et s'explique par une dynamique différente des besoins à satisfaire.

L'assurance maladie, avez-vous dit, monsieur Bur, et je cite vos propos, doit devenir « un acheteur de soins avisé et ne plus être un guichet aveugle ouvert à tous les abus ». Comme vous avez raison ! Pour avoir été associé à l’élaboration de toutes les grandes réformes de la législature, vous savez à quel point le Gouvernement partage cette préoccupation. L’époque où l’on gérait la sécurité sociale à guichet ouvert est révolue depuis longtemps. Nous continuons à progresser. L’installation du Comité national de lutte contre les fraudes, hier, par le ministre de la santé et des solidarités en témoigne. La lutte contre les fraudes et les abus en matière de sécurité sociale est une priorité partagée à la fois par le Gouvernement et nombre d’entre vous, y compris Mme Jacquaint, qui a convenu dans son intervention qu'on ne saurait être hostile à un tel objectif.

Le président Dubernard s’est également exprimé avec beaucoup de pertinence sur les ordonnances de mai et septembre 2005. Je souscris tout à fait à son analyse : ces ordonnances apportent une réponse positive à la question de la gouvernance hospitalière et nous continuons, Xavier Bertrand et moi-même, avec détermination, sur la voie de l’amélioration de la gestion des hôpitaux publics.

Monsieur Préel, vous êtes difficile à satisfaire. C'est un signe d'exigence, mais il faut aussi savoir reconnaître quand les réformes marchent et portent leurs fruits. Vous voyez toujours le verre à moitié vide, même lorsqu’il est plein aux deux tiers, comme c’est le cas aujourd’hui. Il est vraiment dommage de conserver cette disposition d’esprit si systématiquement critique. Le médecin traitant, on prétendait que ça ne marcherait pas. Or plus de 40 millions de Français ont désigné leur médecin traitant,…

M. Pascal Terrasse. Évidemment, ils n’avaient pas le choix !

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. C’est faux !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …et les médecins participent au dispositif à 99 %. Comme ça marche, vous nous dites maintenant, monsieur Préel – pardon : c’est M. Terrasse qui le dit –, que c'est parce que les assurés n'ont pas le choix. La parenté des arguments est telle qu’on ne sait plus qui s’exprime… Bien sûr que oui, ils ont le choix puisque nous avons voulu précisément leur laisser cette liberté dans la réforme de 2004. Et s'ils y adhèrent si massivement, monsieur Préel, c'est d'abord parce qu'ils considèrent que c'est un bon dispositif. Il leur est naturel tout comme l’était, il y a quelques années encore, la consultation de son médecin de famille.

La pénétration des génériques progresse, et là non plus vous n'êtes pas content.

M. Jean-Luc Préel. C’est simplement que ce n’est pas un critère de qualité du système !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Mais si nous voulons continuer d'avoir des marges pour prendre en charge les vraies innovations – et je rappelle que chaque année nous admettons au remboursement des nouveaux médicaments pour un montant de l'ordre du milliard d’euros –, il faut payer le médicament à son juste prix, à son plus juste prix. C'est pourquoi le développement des génériques est, et restera, un axe majeur de la politique du Gouvernement. Contrairement à vous, je me réjouis donc de l'amélioration de la pénétration des génériques, et je remercie les Français, les pharmaciens et les prescripteurs de bien vouloir continuer à jouer le jeu.

Vous n'êtes pas content non plus de l'ONDAM, monsieur Préel. Vous nous dites qu’il est trop faible et n'a pas été concerté. J'observe que l'ONDAM voté par les partenaires sociaux dans le cadre de l'UNCAM était de 2,2 %. Le Gouvernement a proposé 2,5 %, et les parlementaires souhaitent le porter, s'agissant des soins de ville, de 0,8 % à 1,1 % soit, pour le total de l'ONDAM, à 2,6 %. Je ne sais donc pas ce qu'il faut faire, monsieur Préel, pour que vous reconnaissiez l’ouverture du Gouvernement au dialogue et la qualité de la concertation qui a eu lieu, non seulement avec les partenaires sociaux, mais également avec la majorité.

Monsieur Terrasse, j’ai été attristé par vos propos. (« Oh ! sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Pascal Terrasse. Je suis dans mon rôle, monsieur le ministre : je ne suis pas là pour être aimé !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Nous avons mis en œuvre – mais vous avez refusé, hélas ! d’y apporter votre concours – des moyens importants pour préserver le taux de couverture des dépenses de santé par l’assurance maladie tout en réduisant fortement nos déficits puisque nous les avons divisés par quatre en trois ans.

Vous prétendez néanmoins, et c’est profondément blessant pour le Gouvernement mais aussi pour l’ensemble des Français qui s’y sont mis et pour tous les médecins qui ont joué le jeu de la convention médicale, que nous sommes les exécuteurs testamentaires de la réforme de l'assurance maladie. C'est particulièrement triste venant de quelqu'un dont le parti est le notaire de l'immobilisme en matière de sécurité sociale, et qui a laissé filer les dépenses pendant cinq ans.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Très juste !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Or les dépenses de la législature précédente ont fait les déficits que nous avons connus et corrigés le plus rapidement possible à partir de 2004.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. On peut le prouver !

M. Pascal Terrasse. Monsieur le ministre, répondez à ma question sur l’audit !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Il a fallu payer les 35 heures et, à cet égard, la sécurité sociale a été pour vous une vache à lait !

M. Pascal Terrasse. Pourquoi ne les avez-vous pas supprimées ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Et tout cela pour permettre aux Français qui, interrogés sur la diminution du temps de travail avaient expliqué ce qu’ils feraient du temps libéré : dormir plus, regarder la télévision et faire du jardinage. Tout cela pour 110 milliards de francs prélevés sur la sécurité sociale et en sabotant la politique de l’emploi par la baisse du coût du travail !

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Eh oui !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Les socialistes en répondront devant l’Histoire !

M. Pascal Terrasse. Monsieur le ministre, revenez donc aux 40 heures, comme Mme Parisot vous le demande !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ce brillant bilan, monsieur Terrasse, devrait vous porter à plus de discrétion et de retenue dans la critique. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Quelles sont donc vos propositions alors que les finances sociales se redressent très rapidement grâce au soutien de cette majorité ?

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Ils n’ont pas de propositions à faire !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous souhaitez mettre fin au système du médecin traitant, alors même que 69 % des Français estiment qu'il améliore notre système de santé.

S'agissant de la modernisation des systèmes d'information, nous n’entendons aucune proposition de votre part, mais seulement des critiques, auxquelles il faut bien répondre.

Ainsi, vous êtes contre la nouvelle carte Vitale 2, plus sécurisée et plus personnalisée, qui sera la porte d'entrée vers le dossier médical personnel.

M. Pascal Terrasse. Non, nous n’y sommes pas opposés !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Ah ! Vous êtes pour ? Tant mieux !

Madame Hoffman- Rispal, vous savez combien j’apprécie notre dialogue. Oui, nous avons présenté deux plans pour relever le défit de la longévité et je comprends que vous et vos amis regrettiez de ne pas l’avoir fait vous-mêmes. Une fois encore, c’est l’initiative de l’actuelle majorité qui a permis d’avancer. Nous avons créé 183 000 places médicalisées en maisons de retraite depuis 2002 quand vous n'en n'aviez crée que 45 000 entre 1998 et 2002.

Vous soulignez que nous manquons de places d'hospitalisation à domicile. C’est vrai, mais leur nombre est passé de moins de 5 000 en 2002 à 8 000 actuellement et devrait atteindre 15 000 en 2010.

Vous évoquez les besoins en personnel des établissements soignants, s’agissant notamment des postes de psychologue ou d’animateur. À cet égard, des mesures spécifiques annoncées dans le cadre du plan « Solidarité grand âge » sont financées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il ne vous reste donc plus qu’à le voter, madame la députée !

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Très bien !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous ne l’ignorez pas, la signature des conventions tripartites avec les maisons de retraite permet d'employer de 7 à 8 personnels supplémentaires par établissement : 159 millions sont dédiés à la fin du conventionnement.

Je voudrais dire à Mme Boutin que nous sommes attentifs à la progression des droits sociaux des parents.

Madame Guinchard, nous veillons à renforcer l’accès aux soins en augmentant le nombre des bénéficiaires de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire de santé.

À M. Perrut et à Mme Aurillac, qui ont bien voulu saluer le fait que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ait placé l’impératif de solidarité au cœur de sa logique, je veux dire que ce texte permet en effet de renforcer la solidarité pour les personnes handicapées, les personnes âgées et les familles. C’est essentiel pour nous car nous n’avons pas seulement pour objectif de faire baisser le déficit. Nous voulons aussi renforcer notre protection sociale grâce à un certain nombre de progrès que nous réussissons à financer tout en diminuant les déficits.

Bernard Perrut s’est inquiété à juste titre de l’évolution des financements des réseaux de soins palliatifs. Je tiens à lui dire que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale soutient l’ensemble des réseaux de soins, et en particulier ceux auxquels il a fait allusion. Nous y tenons, c’est très important pour nous.

M. Bernier et M. Le Fur ont évoqué le FFIPSA, qui est un élément essentiel du pacte noué, au temps du général de Gaulle, entre la République et ses agriculteurs, et auquel tous les gouvernements de la Ve République ont été fidèles. Nous voulons, nous aussi, lui rester fidèles. Le changement juridique qui nous a fait passer du BAPSA au FFIPSA n’emporte en lui-même aucune conséquence sur le financement des prestations sociales agricoles. Avec les ministères de l’agriculture et des finances, nous cherchons une solution pérenne.

M. Gérard Bapt. Cela fait quatre ans que vous cherchez !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Celle-ci ne saurait en aucun cas porter préjudice à l’équilibre du régime général de la sécurité sociale – ce que personne ne soutiendrait. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Quoi qu’il en soit, il est urgent de trouver une solution.

M. Pascal Terrasse. C’est urgent, en effet, comme la réforme des régimes spéciaux !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En attendant, comme nous l’avons fait depuis la création du FFIPSA, nous continuerons à assurer la pérennité du système de prestations sociales agricoles et même, comme l’a souligné Marc Le Fur, à le renforcer, puisque ce projet de loi consacre 160 millions supplémentaires à l’amélioration des pensions déjà liquidées des exploitants agricoles. Nous nous attachons en particulier à revaloriser les toutes petites pensions, versées après des carrières incomplètes, qui ne sont pas dignes de ce que la République doit à ses agriculteurs. Je suis heureux, à la suite de la décision du Président de la République, de vous présenter des dispositions en ce sens. Le Gouvernement, monsieur Le Fur, accueillera favorablement votre amendement, qui a le mérite de mettre les points sur les i à la faveur de la discussion parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Marc Le Fur. Je vous remercie !

M. Gérard Bapt. Les points sur les i de « déficit » !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Domergue, vous avez évoqué la situation des chirurgiens. Je vous rappelle que, lorsque notre majorité est arrivée aux affaires, les tarifs avaient été gelés pendant cinq ans, le nombre des chirurgiens formés était en forte diminution, et les conditions de cette formation étaient presque dramatiques, la responsabilité civile médicale traversait une crise aiguë. L’accord du 24 août 2004 a enrayé cette dérive grave, notamment grâce à l’augmentation à 550 du nombre d’internes en spécialité chirurgicale, au paiement des astreintes dans les services d’urgence et les cliniques, à hauteur de 150 euros par nuit, et à la revalorisation de 25 % des tarifs des actes – 14 % pour le secteur 2. Ce sont là des mesures concrètes.

Il subsiste cependant une réelle difficulté : le choix du secteur par les anciens chefs de clinique chirurgiens. Dans la mesure où il s’agit d’un domaine conventionnel, le Gouvernement a exercé les pressions les plus fortes pour que s’engage la négociation, et celle-ci a débuté le 16 octobre. Je vous demande donc, monsieur le député, de la laisser se poursuivre, étant entendu que nous la suivons avec attention. Si elle n’aboutit pas, alors le Gouvernement demandera au Parlement de se prononcer, au plus tard lors de l’examen de ce projet de loi au Sénat.

Après Mme Fraysse, M. Renucci a abordé la question du taux de couverture des dépenses de santé par la sécurité sociale : de 75,7 % en 2002, celui-ci est passé à 77,1 % en 2005. Nous progressons.

Enfin, à M. Paillé et M. Le Fur, qui m’ont interrogé sur la démographie médicale, je réitère la réponse que j’ai faite tout à l’heure sur cette question, et je salue l’intervention de M. Vitel, que j’ai écouté avec beaucoup d’attention.

Mesdames et messieurs les députés, j’ai répondu à l’ensemble de vos interventions sans peut-être entrer suffisamment dans les détails,…

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. C’est très bien ainsi !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …mais je me tiens naturellement à la disposition de chacun d’entre vous pour des réponses complémentaires. Je me réjouis avec la majorité que nous progressions sur la voie de la suppression de nos déficits : c’est la garantie de l’avenir de notre protection sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je vais suspendre la séance pour quelques minutes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinq, est reprise à dix-neuf heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Motion de renvoi en commission

M. le président. J’ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste une motion de renvoi en commission déposée en application de l’article 91, alinéa 7, du règlement.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, trois raisons nous ont amenés à déposer une motion de renvoi en commission.

M. Patrick Roy. Trois au minimum !

M. Gérard Bapt. La première a trait aux nombreuses questions demeurées sans réponse concernant le financement des diverses actions que vous affichez pour chacune des branches du régime général, et je dois dire que nous avons été stupéfaits de vous entendre à l’instant annoncer avec aplomb la suppression des déficits. La deuxième raison concerne l’insuffisante réponse de ce projet de loi aux besoins de santé de nos concitoyens, et la troisième s’explique par les interventions de certains membres de la majorité, notamment dans des interviews à la presse, qui mériteraient des explications et devraient vous amener à réfléchir.

Votre inefficacité durable en ce qui concerne le redressement des comptes sociaux, en dépit de ce que vous venez d’affirmer, est soulignée par votre ami politique M. Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales du Sénat, qui écrit : « L’évolution globalement positive des comptes sociaux repose sur des projections optimistes cachant une nouvelle dégradation du résultat de l’assurance vieillesse, dont le déficit progressera de plus d’un milliard, atteignant 3,5 milliards en 2007. »

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Cela n’était pas caché !

M. Gérard Bapt. Un certain nombre de mes amis ont bien démontré que la diminution affichée du déficit du régime général est surcompensée par le déficit grandissant de régimes tels que le FFIPSA ou le FSV.

M. Vasselle indique également que le projet de loi n’apporte pas de réponse sérieuse aux obligations de l’État vis-à-vis des organismes de sécurité sociale, qui ne bénéficient d’aucune subvention pour combler des déficits structurels. À cet égard, le débat qui s’est instauré tout à l’heure entre M. le rapporteur général de la commission des finances et M. le ministre délégué à la sécurité sociale était fort instructif : des problèmes structurels existent au sein même de ce gouvernement concernant les rapports entre le budget de l’État et le budget de la sécurité sociale, le malheur étant que c’est le budget de la sécurité sociale qui en fait les frais !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous êtes bien placé pour le dire !

M. Gérard Bapt. C’est pourquoi je suis très heureux de le dire, monsieur le ministre ! (Rires sur divers bancs.)

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Très bonne réponse !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. M. Bapt a beaucoup d’esprit !

M. Gérard Bapt. Les auteurs de ce rapport ajoutent enfin que le Gouvernement n’a pas fait le moindre geste – c’est dur de la part du Sénat ! – pour réduire, au moins partiellement, les créances détenues sur l’État, et qu’il est inadmissible que ce dernier améliore ses résultats en se défaussant de ses responsabilités à l’égard de la sécurité sociale, traitée ainsi en variable d’ajustement budgétaire.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. C’est un rapport stimulant ! (Sourires.)

M. Gérard Bapt. Voilà un diagnostic que je partage, monsieur le ministre, et que, d’après ce que vous avez dit tout à l’heure, vous partagez aussi, ce qui est fort cocasse !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. J’ai rappelé que cela avait été le cas entre 1997 et 2002 !

M. Gérard Bapt. Oui, mais vous avez dit aussi que vous partagez ce constat s’agissant de la situation actuelle – à cet égard, le débat avec M. Gilles Carrez tout à l’heure était très instructif ! Parlons du présent et de l’avenir, monsieur le ministre, et ne nous tournons pas sans arrêt vers la législature précédente !

M. Jean-Pierre Door. Si, parlons de ce que vous avez fait !

M. Gérard Bapt. Nous sommes d’ailleurs actuellement en fin de législature et vous savez, monsieur Door, qu’elle révélera, au bout du compte, une dette sociale accrue de 50 milliards d’euros.

M. Jean-Pierre Door. À combien s’élevait-elle auparavant ?

M. Gérard Bapt. Elle était moindre : la même moins 50 milliards d’euros, moins ce qu’a remboursé la CADES de plus en plus péniblement au fil des années, à mesure que les taux d’intérêt montaient, ce qui l’a obligée à rembourser toujours moins de capital et toujours plus d’intérêt, et ce qui a contraint à en prolonger la durée…

M. Philippe Vitel. C’est faux !

M. Gérard Bapt. C’est faux ? C’est écrit en toutes lettres à la page consacrée à la CADES de l’annexe au PLFSS ! Cela découle d’ailleurs d’un vote, ici même, obtenu pratiquement à l’unanimité, sur les documents annexés au PLFSS.

S’agissant des dépenses, l’optimisme du Gouvernement me semble nettement exagéré. Je ne fais pas référence aux critiques émises par votre propre majorité, monsieur le ministre, qui vous reproche de ne pas respecter les objectifs affichés et de ne pas contrôler l’ONDAM – soit parce qu’il paraît à certains trop élevé, notamment l’ONDAM hospitalier, soit parce que d’autres souhaiteraient le voir plus élevé, notamment l’ONDAM concernant les soins de ville.

Il est vrai que vous vous vantez beaucoup des fruits de votre action, mais ceux-ci sont malheureusement très incomplets. Si les progrès constatés en matière d’indemnités journalières ne sont pas négligeables, chacun sait que leurs effets ne seront pas éternels. Vos résultats sont donc fragiles et de portée désormais limitée. À cela s’ajoute la baisse des crédits affectés à l’innovation : par exemple, les moyens dont bénéficient les réseaux de soins sont en recul de 20 %, pour des raisons purement administratives – la rigidité administrative sert sans doute de prétexte à quelques économies sur la dotation nationale pour les réseaux de soins.

Pour la première fois, cette année, monsieur le ministre, un engagement présidentiel n’est pas respecté. Je pensais que les engagements présidentiels étaient, pour vous, sacrés – je constate avec peine que vous ne respectez pas la sanctuarisation des crédits du plan cancer –, alors que, jusqu’à maintenant, ils l’étaient. Ainsi, le réseau de cancérologie du pôle Est de l’Île-de-France serait arrêté – alors qu’il était sur le point d’être lancé –, du fait de l’annulation de 20 % des crédits de la dotation pour l’Île-de-France.

M. Jean-Pierre Door. Ce n’est pas tout à fait juste ! Nous en reparlerons !

M. Gérard Bapt. De la même façon, dans les établissements de santé, notamment ceux de votre région, monsieur Domergue, les investissements en personnel pour la consultation d’annonces dans le cadre du plan cancer ne seront pas assurés, m’a-t-on dit, malgré les promesses de financement.

En matière de médicaments, il est vrai que certains facteurs structurels contribuent à une plus grande maîtrise des dépenses, comme le passage de nombreuses molécules du statut de princeps à celui de générique, dont le principe, auquel nous adhérons, est par ailleurs de mieux en mieux accepté par la population. De tels éléments ne sauraient toutefois cacher le bilan des cinq dernières années : beaucoup de temps a été perdu, et nous avons enregistré de véritables reculs en matière d'égalité et de protection sociale. Cela se vérifie dans tous les domaines, qu'il s'agisse de l'assurance maladie, de la vieillesse ou de la famille.

Par ailleurs, le poids de la dette s'est encore accru. La CADES, qui avait dû reprendre à son compte 35 milliards d'euros supplémentaires en 2004, supporte aujourd'hui une charge de 98 milliards. Selon les prévisions de la Cour des comptes, la dette sociale s'alourdira d'au moins 39 milliards supplémentaires d'ici à 2009, sans compter ce qui relève du FFIPSA.

C'est que le déficit de l'assurance vieillesse croît plus vite que prévu, et que l'assurance maladie ne revient pas à l'équilibre aussi vite que vous le prétendiez. Rappelons seulement qu'on nous promettait en 2004, grâce à l'arrivée du DMP – cet instrument magique ! – un retour à l'équilibre dès 2007 ! Puisque vous n'avez pas les moyens de remplir cet objectif, malgré vos manipulations comptables, vous repoussez l'échéance à 2009. Qu'en sera-t-il à cette date si nous nous référons aux prévisions annexées au projet de loi ? Il y aurait encore 3,5 milliards d'euros de déficit, malgré des prévisions conjoncturelles très optimistes – croissance de 2,5 %, progression de 4,4 % de la masse salariale et hausse limitée à 2,2 % des dépenses.

Le chemin dans lequel s'engage notre protection sociale est donc toujours aussi incertain. Malgré de nombreuses manifestations d'autosatisfaction – nous les avons constatées à l’instant, mais nous les constations aussi chez M. Fillon –, le déficit des retraites s'accélère. La confiance des salariés est d'ailleurs si faible que le système de bonus et de malus est un échec. Les Français se précipitent pour valider leurs droits, pensant que les critères de demain seront encore plus défavorables pour eux.

Quant au fonds de réserve pour les retraites, il n’est plus doté que ridiculement, comme par routine.

À côté du problème de l’équilibre des comptes, se pose aussi celui, essentiel, de la réponse aux besoins de santé.

Comme l'a souligné M. le président de la commission, le professeur Dubernard, il est important de parler finances, mais il l'est tout autant de savoir comment les fonds sont utilisés. Je me dois donc de souligner l'insuffisance des politiques de nutrition et de santé au travail, la régression concernant la lutte contre l'alcoolisme, la lenteur de la mise en œuvre d'une politique anti-tabac, l'absence de priorité accordée à la santé publique dont témoigne la manifestation, avant-hier, des médecins scolaires. Quant à avancer l'idée d'une consultation pour les personnes âgées de plus de soixante-dix ans, c’est bien mais largement insuffisant au regard de l'ampleur des problèmes liés au vieillissement.

M. Jean-Pierre Door. Vous n’êtes jamais content ! C’est pourtant déjà un progrès !

M. Gérard Bapt. Monsieur Door, l’insatisfaction qui nous anime devrait également vous animer, pour faire, demain, mieux qu’aujourd’hui ! Je ne suis d’ailleurs pas sûr que la situation d’aujourd’hui soit meilleure par rapport à celle d’hier concernant un sujet important : l’accès aux soins.

L’accès aux soins est essentiel en matière de politique de santé dans un pays comme le nôtre : c’est un droit pour tous, et chacun doit pouvoir bénéficier de soins de qualité, quelle que soit son origine ou sa condition sociale.

Or l’étude de l’IRDES cet été a montré le poids du gradient social dans les statistiques de santé. Les ménages ouvriers et les employés sont ceux qui se déclarent le plus en mauvaise santé. Ce sont également ceux qui bénéficient le moins d’une couverture complémentaire et qui renoncent le plus souvent à des soins pour des raisons financières.

On s’en doutait : les riches se portent mieux et vivent plus longtemps que les pauvres – le constat chiffré de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, dans son rapport au Premier ministre, l’a démontré de manière éclatante.

La France est par ailleurs le pays où la mortalité prématurée est la plus élevée en Europe, mais aussi le pays où la différence de mortalité prématurée entre les hommes exerçant une profession manuelle et ceux exerçant une profession non manuelle est la plus forte !

Ces inégalités sociales apparaissent dès la naissance, qu’il s’agisse de la surveillance de la grossesse, qui apparaît corrélée au niveau d’emploi chez la femme enceinte – la précarité de l’emploi a donc une incidence sur la santé – ou de la prévalence de l’obésité chez l’enfant, le taux de prévalence étant beaucoup plus élevé dans les milieux populaires et défavorisés.

Quant aux résultats de l’enquête du fonds CMU, ils sont affligeants, et je ne doute pas que les nombreux médecins ici présents partagent cette affliction. En effet, 40 % des médecins spécialistes et des dentistes refusent de recevoir les patients bénéficiaires de la CMU.

M. Jean-Pierre Door. Nous sommes d’accord : c’est choquant !

M. Gérard Bapt. Plus récente, l’enquête de Médecins du monde indique que 10 % des généralistes – pourtant les plus proches des patients et des familles, du moins pouvait-on l’espérer – refusent de recevoir les bénéficiaires de la CMU complémentaire et que 40 % des généralistes refusent de recevoir les étrangers présents sur notre sol et bénéficiaires de l’aide médicale d’État.

Enfin, l’INPES, l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, constate dans son dernier rapport que ceux qui bénéficient le plus de la prévention – et on connaît désormais l’importance à accorder à cette dimension – sont ceux qui en ont le moins besoin. Nous l’avons constaté en matière de dépistage du cancer du sein.

Enfin, c’est trop souvent pour répondre au mal-être social que sont prescrits tant de psychotropes – et pas simplement à cause des prescripteurs y ayant trop facilement recours.

Une autre question se pose, monsieur le ministre : l’ONDAM hospitalier. En effet, 750 millions d’euros manquaient en 2006, ce qui va aggraver les difficultés en fin d’exercice annuel d’un grand nombre d’établissements hospitaliers. D’après les estimations de la Fédération hospitalière de France, 700 millions manquent pour 2007, notamment pour répondre à vos propres engagements de revaloriser – ce qui est bien – certains statuts et situations, mais aussi de mener les plans de santé publique dont le secteur hospitalier lui-même doit être, pour partie, en charge, mais dont le financement ne lui est pas assuré.

Je souhaite aussi vous interroger sur l’absence de parution d’un document qui aurait dû parvenir à tous les députés avant le 15 octobre : le rapport annoncé de l’IGAS concernant les MIGAC, les missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation. Monsieur le ministre, pourquoi ne nous est-il pas parvenu, alors qu’il nous aurait permis de juger d’un élément aussi important que la réforme de la tarification à l’activité ?

Mme Paulette Guinchard. C’est une très bonne question ! Pourquoi, en effet ?

M. Gérard Bapt. J’espère que vous nous répondrez, monsieur le ministre.

Selon moi, ces problèmes concernent aussi bien l’hospitalisation publique que l’hospitalisation privée, et je n’apprécie guère les critiques sur le surcoût du secteur public par rapport au secteur privé, notamment en médecine, en chirurgie et en obstétrique.

À l’évidence, les surcoûts de plus de 50 % évoqués par quelques communiqués-circulaires sont majorés. Il n’empêche que, dans le cadre des conventions, les établissements du secteur privé peuvent désormais participer au service public et être mis en difficulté par des décisions non concertées. Ainsi, on a parfois constaté des diminutions autoritaires de tarif de 8 % sur l’ensemble de l’année, en trois étapes.

Quant à la campagne budgétaire pour 2007, j’ai appris avec surprise que, dans le cadre de la mise en place des objectifs quantifiés d’activité, des propositions impératives des ARH indiquaient désormais aux établissements qu’ils avaient à diminuer leur activité dans tel ou tel secteur de 5 à 12 % : au fond, avec l’instauration de ces quotas d’activité, ne s’agit-il pas de favoriser la maîtrise comptable au détriment de la maîtrise médicalisée ? À cet égard, monsieur le ministre, il serait bon que vous apportiez des éclaircissements sur la façon dont les objectifs quantifiés d’activité dans le secteur privé seront mis en place en 2007.

M. Patrick Roy. Tout cela fait beaucoup de diminutions !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Voilà une réflexion constructive !

M. Gérard Bapt. Par ailleurs, monsieur le ministre, vos affirmations sur la création de nouvelles places en crèches sont contredites par les chiffres cités par Mme la rapporteure pour la famille. Direz-vous que les chiffres sont faux ? Ceux que donne Mme Clergeau concernent pourtant les créations de places en crèches issues du Fonds d’investissement à la petite enfance, créé par le gouvernement de Lionel Jospin et à l’initiative de la ministre de la famille de l’époque, Mme Ségolène Royal.

M. Bruno Gilles. Tiens, tiens ! Encore elle ? Déjà elle !

M. Gérard Bapt. Son objectif était d’augmenter la capacité d’accueil des enfants de zéro à trois ans, en subventionnant les projets locaux de création ou d’aménagement des structures d’accueil à but non lucratif présentés par les collectivités territoriales et les associations.

M. Jacques Domergue. Ce n’était qu’un objectif !

M. Gérard Bapt. Le nombre de places nouvelles passe de 3 300 en 2001 à 4 000 en 2002, 5 400 en 2003, 8 300 en 2004 et ce n’est qu’à partir de 2005 qu’un nouveau type de financement peut être porté au crédit du Gouvernement actuel.

M. Jacques Domergue. C’est bien de le reconnaître !

M. Gérard Bapt. Il est donc malhonnête de citer, pour condamner la politique du gouvernement précédent, des chiffres antérieurs à 2002, alors que c’est bien le fonds mis en place en 2001 qui a permis la création de places pendant les trois années suivantes.

Mme Paulette Guinchard. C’est vrai !

M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, si la motion de renvoi en commission était votée, vous pourriez venir vous expliquer devant la commission des affaires sociales sur le contenu de l’entretien que vous avez accordé aux Échos le mardi 24 octobre.

Mme Paulette Guinchard. C’est aussi une très bonne question !

M. Gérard Bapt. Vous y faites des propositions extrêmement novatrices et audacieuses : « L’État doit réduire ses dépenses pour transférer des recettes aux régimes sociaux. » J’ignore si M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, a lu cette interview, mais il serait utile qu’il le fasse. Il serait en tout cas intéressant pour l’Assemblée que vous puissiez nous expliquer comment vous concevez, pour l’avenir, l’articulation entre les dépenses de l’État et les recettes des régimes sociaux. Vous affirmez en effet que « l’État devra et pourra réduire ses dépenses, de manière à transférer des financements à la sécurité sociale » et vous citez les postes sur lesquels des crédits pourraient être redéployés, puisqu’il ne s’agit pas de trouver des recettes nouvelles. Vous parlez d’abord de réduire les intérêts de la dette. Certes, mais nous n’en sommes pas tout à fait là. Vous identifiez donc d’autres chapitres : « Les moyens consacrés à la défense qui, après un effort de rattrapage indispensable, devraient se stabiliser. » Serait-ce une remise en cause du second porte-avions ? Juste au-dessous de votre interview, Les Échos annoncent qu’on débloque 452 millions d’euros pour financer l’intervention au Liban. On sait malheureusement que, étant donné la situation géopolitique du bassin méditerranéen ou de l’Europe centrale, nous aurons encore de nombreuses opérations extérieures à financer. Il serait intéressant de savoir comment vous expliquerez à M. le Président de la République pourquoi vous vous en prenez à ces priorités.

Vous considérez ensuite que les dépenses d’éducation pourraient être « redéployées en faveur des lycées, des universités, de la recherche ». De même, des marges de manœuvre pourraient être gagnées avec « les dépenses d’indemnisation du chômage » qui seraient redéployées.

J’ai cru comprendre que M. Carrez n’était pas tout à fait sur la même ligne que vous, monsieur le ministre, pas plus qu’il n’est sur celle de son collègue de la majorité, M. Marini, rapporteur général de la commission des finances du Sénat. Celui-ci considère en effet qu’il faut désormais financer la branche assurance maladie sur le budget de l’État. La part fiscale du financement de la sécurité sociale pourrait être augmentée, au bénéfice des branches santé et famille, par une part raisonnable du produit de la TVA, avec l’instauration de la TVA sociale. Les branches santé et famille seraient ainsi intégrées au budget de l’État, tandis que serait affirmée l’autonomie des branches vieillesse et accidents du travail, qui relèvent d’une logique assurancielle et contributive. Il me semble que M. Marini lance ainsi un énorme pavé dans la mare.

M. Jean-Pierre Door. Pourquoi un « pavé » ? Ça fait partie du débat. Ces questions méritent d’être posées !

M. Gérard Bapt. Il est dommage que ce débat soit ouvert en toute fin de législature. Le communiqué de M. Marini est ébouriffant.

M. Jean-Pierre Door. Non, il est intéressant ! N’êtes-vous pas pour la démocratie participative ? (Sourires.)

M. Gérard Bapt. Ne nous lançons pas dans des querelles sémantiques, alors que nous posons déjà de nombreuses questions sur la cohérence de la majorité en ce qui concerne les relations entre les finances de l’État et celles de la sécurité sociale.

Monsieur le ministre, je parlais tout à l’heure de l’accès aux soins. Dans votre projet de loi, vous reconnaissez que l’opposition avait raison lorsqu’elle disait que l’aide à l’acquisition d’une couverture maladie complémentaire pour les personnes dont les ressources n’excèdent pas plus de 10 % du plafond d’attribution de la CMU serait insuffisante, le coût de la mutuelle étant aujourd’hui très élevé. Or les chiffres figurant dans les documents officiels montrent que seuls 10 % des bénéficiaires éventuels ont profité de cette aide. En relevant le plafond à 15 %, vous ne résolvez pas le problème de fond : les bénéficiaires éventuels sont une infime minorité.

Dans le même temps, nous constatons que le secteur privé avance et se réforme. Les MMA démutualisent l’assurance, et le président du groupe, M. Seys, met en place, le 1er décembre, une nouvelle forme d’assurance complémentaire, comportant une réserve dont 50 % du montant seront remboursés si le cotisant n’utilise pas de service de soins, l’autre partie étant conservée par l’assureur. C’est une grave atteinte à la mutualisation du risque complémentaire. Il serait important que vous nous fassiez connaître votre sentiment à cet égard, monsieur le ministre.

Interrogé sur la démutualisation du risque en assurance santé, M. Jean-Claude Seys, président du groupe MMA, déclare : « La réponse à cette question ne peut être catégorique. Au prix actuel des complémentaires santé, beaucoup de gens se retirent de l’assurance, ce qui représente une démutualisation extrêmement lourde. Chez les étudiants par exemple, l’évolution est notable : 12 % d’entre eux ne disposent pas d’une assurance complémentaire contre 6 % auparavant. Nous essayons donc de lutter contre une démutualisation totale en offrant une démutualisation partielle. » Il faudra qu’on nous explique comment un tel processus est positif et porteur de progrès en ce qui concerne l’égalité d’accès aux soins.

Monsieur le président, mes chers collègues, il est une autre raison de soutenir cette motion de renvoi en commission. C’est la déclaration très intéressante du rapporteur pour avis, M. Yves Bur, qui, dans une intervention fort intéressante, regrette « l’impréparation de la mise en œuvre de la T2A, qui semble se réduire à un système de facturation alors qu’elle devrait permettre une meilleure performance de l’ONDAM hospitalier ».

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Ce n’est pas forcément ce que vous recherchez !

M. Gérard Bapt. Nous sommes d’accord sur cette déclaration de principe, pour la mise en place de la T2A et pour la convergence intrasectorielle.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. C’est bien, vous commencez à bouger !

M. Gérard Bapt. Par contre, nous sommes opposés à la convergence intersectorielle qui se fait au détriment de l’hôpital public. Nous sommes donc prêts à vous approuver, monsieur Bur, rejoignant en cela le rapport de la Cour des comptes, qui dénonce la façon dont la réforme de la T2A se fait à l’aveugle, à tâtons et sans repères, notamment à cause de l’absence d’échelle de coût, y compris dans le secteur privé − cette échelle ne sera connue, en effet, qu’en 2007. Voilà donc une raison de plus pour reprendre le débat en commission.

M. Patrick Roy. Nous allons le reprendre !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Non !

M. Gérard Bapt. M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales lui-même souhaite le renvoi en commission.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, voilà une demi-heure que M. Bapt parle pour ne rien dire ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Je dispose d’une heure et demie !

M. le président. Non, de trente minutes, et vous le savez bien, monsieur Bapt ! Du reste, les ampoules rouges qui vous signalent que votre temps de parole est épuisé s’allument progressivement devant vous.

M. Gérard Bapt. Mais je n’ai pas fini ! Monsieur Dubernard, ce n’est pas parce que j’approuve ce que vous dites qu’il faut protester.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. C’est un fait personnel ! Je vais être obligé de répondre ! (Sourires.)

M. Gérard Bapt. Vous pensez que c’est un piège. Mais j’ai, moi aussi, été à l’école de grands maîtres.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Quels sont ces maîtres ?

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Douste-Blazy ! (Sourires.)

M. Gérard Bapt. C’était la Faculté, avec un grand F !

M. le président. Ne vous laissez pas détourner de votre propos, monsieur Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur le président, ce sont les professeurs qui s’allient pour m’en détourner, car ils savent que je tiens là un excellent motif de renvoi en commission. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous l’aviez gardé pour la fin ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Ça arrive un peu tard !

M. Gérard Bapt. Après avoir parlé du plan Hôpital 2007, M. le professeur Dubernard pose en effet une question : « Comment mieux souder tous les professionnels concernés dans l’intérêt du malade ? » Et il répond : « En ville, les schémas traditionnels ne tiennent plus. Le système britannique, décrié pendant des années − système étatisé, avec des médecins fonctionnaires, mais dont le salaire est fixé par capitation ; solitude du médecin, à la disposition de ses patients 365 jours par an et 24 heures sur 24 − commence à faire figure de modèle. »

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, il dit n’importe quoi !

M. Jacques Domergue. Qui a écrit cela ?

M. Gérard Bapt. M. Dubernard continue : « Les médecins britanniques se sont regroupés ; ils se sont vu associer des infirmières, des secrétaires ; la délégation de tâches comme la surveillance de la tension, le renouvellement de certaines ordonnances ou le deuxième pansement sont devenus la règle, et chacun y trouve son compte. […] Les maisons de santé peuvent répondre à ces attentes, notamment en milieu rural. » Ainsi, en cette fin de législature, monsieur le président de la commission, vous rejoignez les propositions du parti socialiste…

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Jamais !

M. Gérard Bapt. …qui entend favoriser les regroupements, le développement de nouvelles formes d’exercice, la mise en place de maisons de santé là où il en manque, et qui préconise de reconsidérer les conditions d’installation. À cet égard, j’ai bien apprécié l’intervention de M. Le Fur…

M. Jean-Pierre Door. C’est de la manipulation !

M. Gérard Bapt. …qui, lui-même, dans un grand accent de sincérité, a reconnu l’échec de la politique gouvernementale en matière de démographie médicale et d’accès aux soins sur tout le territoire.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. M. Bapt est en campagne électorale !

M. Jacques Domergue. Caricature !

M. Gérard Bapt. On ne contestera pas mon argument, monsieur le président de la commission, puisque je me contente de reprendre vos propos en les approuvant. Ils mériteraient d’être approfondis à l’occasion d’une nouvelle réunion de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Vous ne serez pas surpris, monsieur le président, mes chers collègues, que j’intervienne, puisque le discours que nous venons d’entendre ne comporte pas un seul argument justifiant le renvoi en commission.

M. Bapt est membre de la commission des finances, ce qui explique qu’il ait longuement parlé des relations entre le budget de l’État et les finances sociales, allant même jusqu’à évoquer le deuxième porte-avions ! Cependant, on est assez loin du projet de loi de financement de la sécurité sociale !

Nous avons tout de même bien senti que nous étions à quelque mois d’une échéance électorale significative lorsque M. Bapt, abordant enfin le domaine de la santé, a défendu l’hôpital public et la Fédération hospitalière de France, dont on connaît le mode de fonctionnement et qui joue pourtant toujours à demander plus sans jamais faire l’effort de se restructurer dans l’intérêt des patients et de la qualité des soins. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Roy. Leurs représentants apprécieront !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. M. Bapt semble choqué par mes propos. Il est vrai qu’il a pris soin également de défendre l’hospitalisation privée ! En revanche, on ne l’a pas beaucoup entendu parler de l’ONDAM de médecine de ville, question qui présente pourtant quelque intérêt.

M. Gérard Bapt. Je pourrais poursuivre mon intervention ! (Sourires.)

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. S’agissant des mutuelles, je trouve quelque peu choquant – comme quoi l’on peut se rejoindre de temps en temps ! – que les mutuelles de santé commencent à se comporter comme les compagnies d’assurances de voitures. C’est une dérive qu’il nous faudra corriger, et si nous sommes tous d’accord, cela pourra être simple.

Quant aux propos que j’aurais tenus, tirés du compte rendu analytique, qui ne les a pas déformés, je confirme qu’il nous faut revoir les conditions d’exercice. Nous en sommes d’ailleurs tous d’accord, et le Gouvernement comme celui qui l’a précédé, a fait beaucoup d’efforts dans ce domaine.

Je ne vois pas bien pourquoi renvoyer le texte en commission. La commission des affaires sociales, monsieur le membre de la commission des finances, travaille beaucoup. Elle a tenu trois séances avant le rapport, et elle a été saisie de 220 amendements contre 132 l’an dernier. Elle a adopté 52 amendements, 29 émanant des rapporteurs, 12 du groupe de l’UMP, 7 du groupe UDF et 3, tout de même, du groupe socialiste.

M. Patrick Roy. Bel effort !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Depuis, trois autres réunions ont été tenues en application de l’article 88 du règlement, au cours desquelles ont notamment été examinés 56 autres amendements. Je rappelle en outre qu’une réunion se tiendra au titre de l’article 91 ce soir à vingt et une heures quinze, pour examiner, après les 30 d’hier au titre de l’article 88, quelque 108 amendements supplémentaires. La commission a donc, je le répète, beaucoup travaillé.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Elle a réalisé un travail formidable !

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles. Dans ces conditions, il me semble que nous sommes prêts à entrer dans le fond du débat et à analyser les articles. Il n’y a donc pas lieu d’accepter un renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, si le président de la commission des affaires sociales, dont les arguments m’ont totalement convaincu, estime lui-même qu’il n’y a pas lieu de réunir de nouveau la commission pour réexaminer l’ensemble du projet de loi, d’autant qu’il la réunit de toute façon dans le cadre de l’article 91 de votre règlement pour examiner des amendements, je ne vois pas pour quelle raison il y aurait lieu de renvoyer le texte en commission. Il n’y a en effet pas meilleur juge que lui en la matière.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Tout à fait !

M. le président. Dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, la parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe UMP.

M. Philippe Vitel. Monsieur le président, mes chers collègues, j’ai écouté avec attention mon collègue et confrère Gérard Bapt, demandant que l’on retourne en commission pour réexaminer le texte. Ainsi que vient de le dire le président de la commission saisie au fond, celle-ci a énormément travaillé, et, comme M. le ministre, je ne vois pas ce qui pourrait nous pousser à perdre du temps à réétudier ce qui a déjà été parfaitement étudié pendant de nombreuses heures.

Je suis tout de même choqué de la manière qu’a mon collègue et confrère de manipuler les arguments et de stigmatiser les uns et les autres dans le seul but de créer la sinistrose et d’éviter de reconnaître tout ce qu’il y a de positif dans le PLFSS.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. La sinistrose, ça va avec la gauche !

M. Philippe Vitel. Comment parler d’inefficacité à redresser les comptes sociaux, quand la branche maladie passe de 16 milliards de déficit à 3,9 ? Comment stigmatiser l’amputation de 20 % d’une ligne budgétaire des réseaux de soins, quand des lignes non utilisées sont reportées et que, quoi qu’il en soit, le financement des réseaux est compris dans les 178 millions du FAQSV et dans les 150 millions de la DNDR ? Il n’y a vraiment pas lieu de faire sortir un diable du chapeau !

Pour ce qui est de la politique en faveur des personnes âgées, la lutte contre le vieillissement n’est-elle pas une priorité nationale qui a été affirmée comme telle par Hubert Falco, par Catherine Vautrin et, maintenant, par Philippe Bas ? Augmenter de 13 % dans le PLFSS les crédits affectés aux maisons de retraite, n’est-ce pas prendre en compte cette préoccupation ? Décider une augmentation de 5,6 % de l’ONDAM médico-social, n’est-ce pas rendre service aux personnes âgées, développer une politique efficace et cohérente vis-à-vis des personnes handicapées et permettre l’accès aux soins pour tous ?

Je suis affligé par cet état d’esprit qui tend à vouloir faire croire de façon redondante qu’en France on ne pourrait pas accéder aux soins. Je vous défie, mon cher collègue, de m’amener quiconque qui aurait besoin d’un soin et qui ne pourrait pas être soigné ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est la vérité.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Surtout si l’on est très malade !

M. Philippe Vitel. Vous stigmatisez, monsieur Bapt, vos confrères, professionnels de santé, en vous appuyant sur des statistiques qui ne correspondent en rien à ce que nous constatons dans nos circonscriptions et dans les cabinets médicaux que nous pouvons visiter. Des médecins refuseraient de recevoir des personnes relevant de la CMU ou de l’AME, des médecins qui, comme vous et moi, ont prêté le serment d’Hippocrate ? S’il y en a, ils ne peuvent être nombreux, et je souhaiterais donc que vous justifiiez le pourcentage de 45 % que vous avez évoqués !

Mme Paulette Guinchard. Le fonds CMU l’a dit, et le ministre lui-même l’a reconnu !

M. Gérard Bapt. Le nier, c’est vouloir ne rien faire !

M. Philippe Vitel. Lorsque l’on met ainsi en cause des professionnels, il faut s’appuyer sur des éléments fiables et présenter les preuves de ce que l’on avance. Stigmatiser une profession comme vous le faites est très grave !

Au-delà de la comparaison entre le public et le privé, c’est surtout le rapprochement entre ces deux mondes qui nous intéresse. Tel est l’objet de la T2A, et j’apprécie fortement que M. le ministre ait insisté pour que le seuil de convergence tarifaire soit réalisé à 50 % en 2008.

Certes, pour ce qui est des étudiants, un problème de prise en charge se pose. Je vous renvoie cependant tous à l’amendement de notre ami Richard Mallié sur ce point. Nous en reparlerons lors de la discussion des articles et je suis sûr que nous trouverons alors une solution.

J’ai beau relire mes notes prises pendant votre intervention, je n’y vois pas de motif à retourner en commission. Je demande donc à mes amis du groupe UMP de ne pas vous suivre dans votre requête. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe UDF.

M. Jean-Luc Préel. Il est vrai que nous attendons tous avec impatience de passer à la discussion des articles puisque le projet de loi de financement de la sécurité sociale permettra, comme j’ai eu l’occasion de le souligner hier, de financer les soins des Français, leurs retraites et la politique familiale, et que beaucoup a déjà été dit lors de la discussion générale. Il est vrai également que la commission saisie au fond a beaucoup travaillé, mais souvent un peu vite.

M. Gérard Bapt. Trop vite !

M. Jean-Luc Préel. Lors des auditions, on a peu de temps pour poser des questions aux personnes entendues, notamment aux ministres, lesquelles, bousculées par le temps, ne peuvent donner que des réponses souvent succinctes. Je regrette, avec l’expérience des années, qu’on n’ait jamais l’occasion de prendre quelques heures pour aller au fond du débat et pour obtenir des réponses à nos questions.

Comme l’a rappelé le président de la commission saisie au fond, nous avons étudié 220 amendements en quatre heures, soit 50 amendements à l’heure environ c’est-à-dire un peu plus d’une minute par amendement ! C’est, là encore, un peu rapide pour aller au fond des choses ! Certes, certains amendements sont simplement rédactionnels et peuvent être examinés en quelques secondes, mais qu’en est-il des autres ? Et tout cela pour entendre après, en séance publique, qu’il n’est pas besoin de reprendre le débat qui a eu lieu en commission – argument qu’il m’a souvent été donné d’entendre aussi bien quand j’étais dans la majorité que dans l’opposition ! Nos débats mériteraient vraiment d’être mieux préparés.

J’espère donc, monsieur le ministre, que vous nous donnerez des réponses lors de la discussion des articles. Je rappelle en effet que je vous ai posé quelques questions dans mon intervention générale, cela pour m’entendre simplement répondre que je voyais le verre à moitié vide alors qu’il était à moitié ou aux trois quarts plein !

Le fait est, monsieur le ministre, qu’après les réformes de l’assurance maladie et des retraites, il était prévu que nous arriverions à l’équilibre des comptes en 2007.

M. Maxime Gremetz. Absolument !

M. Gérard Bapt. Eh oui !

M. Gérard Bapt. En 2009 !

M. Jean-Luc Préel. C’est vous qui avez repoussé l’échéance à 2009 !

Je vous pose donc deux questions, auxquelles je vous laisse me répondre plus tard.

À propos du FFIPSA, vous avez répondu à M. Le Fur que vous alliez étudier et réétudier les choses. Mais le problème se pose depuis au moins 2005 : le Gouvernement aurait déjà dû apporter une réponse ! Au minimum, il pourrait s’engager à payer les intérêts de l’emprunt que vous proposez au FFIPSA – mais peut-être le préciserez-vous.

Ensuite, si l’on a confié à la CADES les déficits antérieurs, qui s’arrêtent en 2006, comment allez-vous financer le déficit de 2007 ?

Si retourner en commission peut permettre de vous entendre répondre à ces questions, pourquoi pas ? J’espère cependant que vous pourrez nous en dire plus à l’occasion de nos débats à venir.

J’ai peur d’avoir compris que, devant l’impossibilité d’emprunter, vous demanderez aux branches d’emprunter pour financer le déficit actuel. Elles auraient donc des intérêts à rembourser. Cela ne paraît pas une politique très sérieuse ni très satisfaisante pour l’avenir. Nous aurons toutefois l’occasion d’en reparler.

J’espère donc que nous allons incessamment passer à la discussion des articles, en espérant encore une fois que l’Assemblée travaillera un jour dans de meilleures conditions.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard, pour le groupe socialiste.

Mme Paulette Guinchard. Je n’avais pas prévu d’explication de vote car les arguments de Gérard Bapt suffisent à motiver le renvoi en commission. Cependant, les propos de notre collègue de l’UMP, M. Vitel, m’amènent à réagir.

Je ne reprendrai pas l’argument du temps, que vient de développer de façon très pertinente M. Préel, sinon pour souligner combien le temps de travail que nous avons consacré à l’assurance maladie, en particulier, est insuffisant, ne serait-ce que par rapport au montant du budget de la sécurité sociale. C’est là une vraie question qui se pose à nous, parlementaires, si l’on se place dans une logique démocratique bien comprise.

Je voudrais surtout répondre à M. Vitel, qui a fait comme M. Bas à propos des créations de places de crèches.

Monsieur Vitel, au début de la prochaine séance, lorsque nous reprendrons nos travaux, je vous présenterai le travail réalisé par le conseil de surveillance du fonds de la CMU. Il n’accuse pas, il constate : un testing, comme cela se fait ailleurs en matière de discriminations, a montré qu’un certain nombre de médecins – des spécialistes plutôt que des généralistes – refusent les bénéficiaires de la CMU. Vous ne m’avez pas répondu sur ce point, monsieur le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je ne peux répondre à tout !

Mme Paulette Guinchard. Je sais bien, mais j’espère que vous répondrez, sinon en commission, du moins dans cet hémicycle, à cette question primordiale. Comme M. Bapt, je serai très claire : comment faire pour que ces spécialistes changent d’attitude ?

M. Philippe Vitel. Le conseil de l’Ordre est là pour ça !

Mme Paulette Guinchard. Ne serait-ce que pour cette seule question, qui est au cœur même de notre système, il nous faudrait retravailler en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. Maxime Gremetz. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y aurait mille raisons pour justifier le renvoi en commission de ce texte qu’a proposé Gérard Bapt.

Tout d'abord, j’évoquerai les conditions du déroulement des travaux de nos commissions. Les amendements ont eu peine à parvenir jusqu'aux parlementaires. M. Préel l’a expliqué tout à l’heure, on a pu consacrer une minute seulement par amendement. C’est peu ! Certains amendements ne sont même pas arrivés jusqu’aux commissions, réunies en hâte, justement pour tenter de les examiner tous, ce qui n’a pas été possible !

Mme Fraysse, qui représentait notre groupe ce matin, m'a expliqué que l'amendement scélérat de l'UMP, ce cavalier scélérat – pourtant, les cavaliers sont en général des gens bien élevés – qui rétablit l'accord de 2004 sur la réduction du temps de travail dans la restauration et l'hôtellerie n'a même pas été examiné en commission. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Bruno Gilles. C’est faux ! Il a été examiné et il a été adopté !

M. Jacques Domergue. Vous n’étiez pas là, monsieur Gremetz !

M. Maxime Gremetz. Mme Fraysse était présente : nous nous répartissons le travail. Proportionnellement, vous n’êtes pas nombreux.

M. Jean-Pierre Door. Vous n’y étiez pas ! On ne vous a pas vu !

M. Jacques Domergue. C’est parce que vous n’étiez pas là, monsieur Gremetz, que nous avons pu travailler rapidement.

M. Maxime Gremetz. Ne faites pas diversion. Je le répète, il n’a même pas été examiné en commission !

En outre, les amendements qui ont pu arriver jusqu'aux parlementaires méritent qu'on y regarde à deux fois et que des débats de fond se tiennent sur certains d'entre eux, notamment ceux du Gouvernement, je pense tout particulièrement, je le dis solennellement, à l'amendement scandaleux du Gouvernement qui porte le numéro 442.

Sous couvert de lutte contre la fraude, objectif que nous partageons tous, vous vous livrez, monsieur le ministre, à une véritable remise en cause du droit aux prestations familiales et à la solidarité nationale. J’attire votre attention, mes chers collègues, sur ce point car personne n’a, semble-t-il, vu les dégâts qu’un tel amendement pouvait produire.

Vous voyez la fraude partout,…

M. Jacques Domergue. Heureusement !

M. Maxime Gremetz. …chez tout le monde, sauf lorsqu'il s'agit de la fraude fiscale des grands argentiers ou financiers qui multiplient leurs arrangements entre amis fortunés. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Là, sur cette délinquance financière des « patrons voyous », comme dit le Président de la République, en haut lieu, dans les sphères financières et industrielles, qui jouent dans une autre cour compte tenu des sommes manipulées, vous fermez les yeux et ne dites rien.

M. Patrick Roy. Ils ferment les yeux, les oreilles et la bouche !

M. Maxime Gremetz. Vous ne dites rien non plus des 25,6 milliards d'euros de cotisations sociales patronales qui ne servent à rien, comme le souligne dans son rapport M. Séguin, le président de la Cour des comptes, pas plus que vous ne pipez mot sur les sous-déclarations du patronat à la branche AT-MP, qui coûtent chaque année à la branche maladie plusieurs centaines de millions d'euros. Rien que cette année, ce sont 340 millions qui sont dus à l'assurance maladie.

Au lieu de cela, vous êtes prêt à faire des économies sur tout, et de la façon la plus grossière et la plus immorale qui soit, je pèse mes mots.

La dérive est telle que vous en oubliez le sens commun. En témoigne cet amendement n° 442 qui vise à conditionner le versement des prestations au train de vie des allocataires. Ainsi, la prestation ne serait plus versée – sans doute ne l’avez-vous pas vu, mes chers collègues – en raison d'une situation sociale, mais en fonction du train de vie.

Vous dénaturez du même coup le sens de ces prestations, qui répondent à des droits, à des réparations de préjudices ou à des situations sociales qui méritent l'intervention de la solidarité nationale. Cela n'a rien à voir avec le train de vie !

Jusqu'où voulez-vous aller dans cet esprit ? La traque aux chômeurs, aux étrangers, aux enfants d’étrangers, aux assurés sociaux, ça suffit ! Sortez de cette paranoïa ! Regardez le monde qui vous entoure et vous verrez que les délinquants les plus sérieux ne sont pas ceux que vous visez.

Mais vous voulez, avec cet amendement, détourner l'attention sur le véritable pillage de nos richesses nationales par les nantis et les privilégiés.

M. Bruno Gilles. Et allez donc !

M. Richard Mallié. Il ne nous a pas encore parlé du MEDEF !

M. Maxime Gremetz. J'ajoute que cette notion « de train de vie » est pour le moins aléatoire. Qui va le déterminer ? Vous être en train de légaliser la violation de la vie privée, avec tous les risques de délation, de suspicion que cela va entraîner. Vous faites déraper cette société dans une voie extrêmement préoccupante quand on observe tout ce qui se profile à l'horizon : fichiers, fichage, listings, déclarations obligatoires, contrôles, etc.

Enfin, les dispositions du IV de l’amendement sont stupéfiantes.

M. le président. Merci, monsieur Gremetz…

M. Maxime Gremetz. J’en termine, monsieur le président.

Vous modifiez, vous osez modifier l'assiette des revenus pris en compte pour l'attribution de la CMU alors que les bénéficiaires connaissent de véritables difficultés pour accéder aux soins.

Quand nous avons institué la CMU, nous avons relevé de 50 euros le seuil des revenus à prendre en compte, éliminant 2 millions de personnes âgées et handicapées.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Ça, ce n’est pas la droite qui l’a décidé : c’est la gauche !

M. Maxime Gremetz. J’assume. Mais, là, vous allez encore en éliminer plus de 2 millions.

Comme le dirait avec moi l'abbé Pierre, cet amendement est indigne de la France et justifie, à lui seul, un retour en commission.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Quelle référence !

M. le président. Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

M. le président. La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, n° 3362 :

Rapport, n° 3384, tomes I à V, de M. Pierre-Louis Fagniez, M. Jean-Marie Rolland, Mme Marie-Françoise Clergeau et M. Denis Jacquat au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ;

Avis, n° 3388, de M. Yves Bur, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)