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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 26 octobre 2006

27e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. ÉRIC RAOULT,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2007

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 (nos 3362, 3384).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 19 portant article additionnel après l’article 13.

TROISIÈME PARTIE (SUITE)

Après l’article 13

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour soutenir l’amendement n° 19.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Par cet amendement, nous souhaitons ouvrir le débat sur la résorption des niches sociales. Chacun peut en effet constater l’importance de ces niches en comparant l’assiette salariale des cotisations sociales – 422,7 milliards d’euros en 2005 – avec celle de la CSG – 453 milliards d’euros –, ce qui représente une perte de plusieurs dizaines de milliards d’euros par an pour la sécurité sociale. De surcroît, l’écart entre l’assiette de la CSG et l’assiette salariale des cotisations sociales a progressé de 6,5 % en 2005. Le problème est ainsi posé d’un financement pérenne de l’assurance maladie.

Il ne s’agit pas de supprimer des niches sociales qui sont autant de manque à gagner pour la protection sociale, mais de mieux en évaluer l’efficacité. L’an dernier, nous avions d’ailleurs demandé au Gouvernement un rapport qu’il devrait déposer l’année prochaine, censé mesurer l’impact de tous ces dispositifs. Cet amendement vise donc à promouvoir des exonérations tout en limitant les pertes qui en résultent pour l’assurance maladie.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l’équilibre général, pour donner l’avis de la commission.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l’équilibre général. Cet amendement a été accepté par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Vous avez devant vous un ministre embarrassé pour donner son avis sur cet amendement (Sourires) car il en approuve totalement l’inspiration. En effet, la sécurité sociale, telle qu’elle a été créée, est un sanctuaire, ses ressources devant être affectées au financement de droits permanents que les Français acquièrent par leur travail.

Il est vrai que les régimes d’exonération qui se sont accumulés au fil des ans ont transformé peu à peu une partie du financement de la sécurité sociale en une véritable passoire. Qu’on veuille y coller quelques rustines aujourd’hui me paraît de bon aloi. Seulement, monsieur le rapporteur pour avis, l’État ne dispose pas aujourd’hui des moyens budgétaires permettant d’élargir l’assiette des financements sociaux. Ce n’est tout simplement pas possible.

Je souhaite que, dans le cadre de la réflexion lancée en janvier dernier par le Président de la République, nous puissions, dans les années à venir, approfondir cette question avec vous, monsieur Bur, afin d’examiner à nouveau chacune de ces exonérations : tickets restaurants, intéressement, chèques vacances. Il s’agit de faire en sorte que ces exonérations, qui ont leur utilité mais qui ne sont pas compensées aujourd’hui par le budget de l’État, puissent, demain, donner lieu à des financements sans que la sécurité sociale soit pénalisée.

La question que vous soulevez ne date pas d’hier, à l’évidence, mais il est vrai que, lorsqu’on constate le poids du vieillissement de la population sur l’évolution des charges de la sécurité sociale, on ne peut qu’être d’accord sur le plan des principes, avec l’inspiration de votre amendement.

Voyez-vous, monsieur Bur, il n’y a pas de désaccord entre nous, mais vous avez devant vous un ministre de la sécurité sociale qui est aussi comptable des intérêts de l’État et qui vous dit que le budget de l’État ne peut aujourd’hui compenser ces exonérations. Certes, on ne peut pas non plus réduire à néant les politiques en faveur des chèques vacances, des titres restaurant, menées depuis des années. Reste, j’insiste, qu’on ne pourrait alimenter le budget de la sécurité sociale avec de nouvelles ressources que si l’État avait la capacité de les financer. C’est pourquoi, je vous demande – et à grand regret – de bien vouloir retirer l’amendement que vous avez présenté.

M. le président. Accédez-vous à cette demande, monsieur le rapporteur pour avis ?

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, vous avez devant vous un rapporteur pour avis lui aussi embarrassé (Sourires), tiraillé entre le désir…

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. D’exister pleinement ?

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. …de satisfaire votre demande et celui de faire aboutir la réflexion. Il s’agit non pas de remettre en cause l’ensemble de ces niches sociales, mais d’en mesurer l’efficacité. À ce titre, en 2003, à mon initiative en tant que rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, nous avions obtenu du Gouvernement l’engagement qu’il déposerait tous les cinq ans un rapport détaillé sur l’évaluation financière et l’utilité du dispositif. À nos yeux, ce rapport devra prendre en compte trois critères : l’efficacité des politiques de l’emploi, l’équité des dispositifs prévus et, enfin, la simplification des niches sociales pour en renforcer la cohérence interne.

Si le Gouvernement prenait un tel engagement, monsieur le ministre, en espérant que l’État se montre capable de remédier à cette incohérence qui pèse lourd sur les finances sociales, je retirerais l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin. Je comprends l’embarras du ministre et celui du rapporteur. En effet, et ceux qui ont assumé des responsabilités au titre du ministère des affaires sociales le savent bien, ce débat est récurrent. On en comprend bien la logique au regard de certains principes car, s’il est des exonérations qui répondent certes à un objectif louable quand elles peuvent avoir un effet incitatif à la création d’emplois et favoriser le développement économique, elles pénalisent cependant les régimes sociaux du fait de la perte des recettes qu’elles provoquent.

Il est vrai que tout ministre chargé de la protection sociale s’est entendu dire par le ministre de l’économie et des finances, qu’à partir du moment où ces exonérations permettaient de créer des emplois, cela entraînerait naturellement de nouvelles recettes pour la protection sociale.

La question posée par M. Bur est sensiblement différente : il s’agit non pas d’exonérations dont on attend qu’elles soient un facteur de développement de l’emploi tout en ayant, incidemment, un effet bénéfique sur les recettes de la sécurité sociale, mais de dispositions qui s’inscrivent dans une autre politique sociale. Je me garderai bien de contester des mesures d’exonérations tendant à favoriser la consommation, notamment la consommation sociale, mais je ne pense pas que les exonérations relatives aux chèques-vacances aient pour effet automatique d’augmenter les recettes de la sécurité sociale. L’amendement présenté par M. Bur est donc tout à fait fondé et devrait être pris en considération.

Hier encore, le rapporteur général de la commission des finances, M. Carrez, interpellait les « dépenseurs » que sont les parlementaires et les ministres « sociaux ». Pourtant, il arrive aussi que les budgets sociaux puissent abonder, directement ou indirectement, le budget de l’État. Il n’est pas inutile de le rappeler ici et de prendre date pour travailler à nouveau le sujet : quelle que soit la majorité, quel que soit le ministre, nous avons tous été aux prises avec ce type de contradiction et nous nous sommes tous heurtés à la logique du ministère de l’économie et des finances.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je remercie Yves Bur et Claude Evin : ce débat important devait avoir lieu. Cependant, monsieur Evin, je ne voudrais pas, en acceptant cet amendement, me trouver dans la situation de devoir ensuite rendre des comptes à tous nos compatriotes qui utilisent le chèque-restaurant. Si l’on instaure un plafond pour les exonérations, ils auraient droit, non plus à un chèque par jour, mais à un chèque tous les trois ou quatre jours.

M. Claude Evin. Que l’État prenne en charge le reste !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En effet, comme l’a souligné M. le rapporteur pour avis, un tel plafonnement ne serait possible que si l’État compensait « à l’euro près » en faveur des comités d’entreprises, donc des salariés, la diminution du montant des exonérations de cotisations sociales.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. C’est bien cela.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Aujourd'hui, nous n’avons pas les moyens de le faire, si bien que je suis obligé d’adopter la position que j’ai exposée.

Cependant, monsieur le rapporteur pour avis, vous avez reconnu la nécessité d’un examen d’ensemble et vous vous êtes dit prêt à retirer votre amendement si le Gouvernement prenait l’engagement d’examiner l’ensemble des niches sociales. Cet engagement, je le prends solennellement devant vous.

M. Claude Evin. Vous ne pourrez pas le tenir dans les six mois qui vous restent !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. J’invite les parlementaires intéressés par cette réflexion à se joindre à nous, afin que, à tout le moins, la question soit posée en toute transparence, avec tous les calculs et toutes les évaluations nécessaires et en tenant compte de la distinction faite par M. Evin entre ce qui est nécessaire pour l’emploi et ce qui est utile au titre d’autres politiques sociales. Ainsi, la représentation nationale et les Français pourront prendre en toute connaissance de cause les décisions qui, de mon point de vue, s’imposeront tôt ou tard.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je ne voudrais pas être d’emblée désagréable, monsieur le ministre, mais vous ne pouvez dire que l’État n’a pas les moyens de prendre en charge ces exonérations alors qu’il a tout de même trouvé le moyen d’alléger l’ISF de 400 millions ! Assurément, ce sont là des choix. Nous aurions donc les moyens de compenser ces exonérations, et ce serait à l’évidence utile.

Le débat est extrêmement intéressant, j’en conviens, mais vous choisissez des dispositions qui ne vont dans le sens ni de l’intérêt des salariés ni d’un financement correct de la protection sociale.

M. le président. La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin. Je ne doute pas de votre sincérité, monsieur le ministre, mais prendre l’engagement solennel, comme vous le faites, d’initier une discussion transparente pour identifier les niches d’exonérations fiscales et sociales à six mois d’une échéance importante marquant la fin de la législature – donc l’arrivée d’un nouveau gouvernement –, et tout cela pour obtenir le retrait de cet amendement, me semble un peu fragile.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Je retire l’amendement.

M. le président. L'amendement no 19 est retiré.

La parole est à M. Bruno Gilles, pour défendre l’amendement no 347.

M. Bruno Gilles. Cet amendement très important tend à atténuer un effet indésirable de certaines dispositions de ce projet. En effet, que se passera-t-il, à terme, pour les entreprises et les salariés qui relèvent de branches ayant signé des accords de mise à la retraite avant soixante-cinq ans ?

L’enjeu est de taille : cent vingt-quatre branches sont dans ce cas, pour un total compris entre sept et dix millions de salariés.

Si ce texte était voté en l’état, des millions de salariés partiraient donc en retraite avant soixante-cinq ans – alors que 4 % des salariés sont encore en activité à cet âge ou au-delà – et des centaines de milliers d’employeurs s’en trouveraient doublement pénalisés : d’une part, le salarié recevrait une indemnité moindre, et ce montant minoré serait toujours plus amputé par les charges sociales salariales – environ 20 % – et par l’IRPP ; d’autre part, l’entreprise acquitterait les charges patronales – 45 % ou plus – sur une indemnité qui n’a plus vraiment le caractère d’un salaire, c'est-à-dire d’une rémunération versée en contrepartie d’un travail.

Pour ne pénaliser personne tout en évitant de grever les recettes sociales et fiscales, nous proposons, par cet amendement, d’ajouter aux deux modalités actuelles de départ à la retraite – le départ volontaire et la mise à la retraite – une modalité supplémentaire, ou plutôt une variante : le départ par accord conjoint du salarié et de l’entreprise, ou « double volontariat », auquel serait étendu le régime fiscal et social des mises à la retraite.

Notez, monsieur le ministre, que l’amendement ne contrarie pas l’objectif de la loi du 21 août 2003, qui tend à prolonger l’activité des seniors. Cette troisième modalité ne précipiterait nullement les salariés vers une retraite anticipée, bien au contraire : l’entreprise y trouverait le moyen d’inciter le salarié à différer son départ à la retraite, sans évidemment le contraindre.

En ce qui concerne enfin les incidences financières d’une telle disposition, on remarquera que, dans la mesure où elle limite le champ de la retraite par décision conjointe aux branches qui ont déjà signé des accords étendus de mise à la retraite avant soixante-cinq ans, l’amendement n’entraîne aucune perte de recettes par rapport au statu quo.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. L’amendement a d’abord été examiné au titre de l’assurance vieillesse. Sur le rapport de M. Jacquat, la commission l’a rejeté, car il ne s’inscrit pas pleinement dans la politique en faveur de l’emploi des seniors. Il pose toutefois une question intéressante à laquelle M. le ministre, je n’en doute pas, voudra bien répondre.

M. Gérard Bapt. Quelle diplomatie ! Je vous verrais bien au quai d’Orsay, monsieur Fagniez ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Cet amendement est intéressant, certes, mais la France a un problème : c’est le pays de l’OCDE où l’on entre le plus tard dans la vie active, où l’on travaille – hélas ! – le moins d’heures dans l’année…

M. Claude Evin. Mais où l’on est le plus productif !

M. Gérard Bapt. Et donc le plus compétitif !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …et où l’on quitte son activité professionnelle le plus tôt. C’est un immense gâchis économique, dû aux errements de la politique de l’emploi depuis 1981.

M. Alain Gest. Absolument !

M. Philippe Vitel. La gauche porte une responsabilité historique !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Contrairement à ce que l’on a pu penser naïvement, la baisse de la durée du travail ne crée pas durablement d’emplois…

M. Claude Evin. Si !

M. Philippe Vitel. Eh non !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …et ce n’est pas parce que l’on force les travailleurs de plus de cinquante-cinq ans à partir que les jeunes trouvent plus facilement du travail.

Nous avons réussi le tour de force – et nous commençons seulement à nous libérer de cette malédiction – d’avoir le plus grand nombre de chômeurs parmi les jeunes et le plus de travailleurs de plus de cinquante-cinq ans qui quittent leur activité avant d’avoir atteint l’âge de la retraite. Nous avons le taux d’activité des seniors le plus faibles de toute l’OCDE. Nous n’allons tout de même pas nous réjouir d’une telle performance !

À bien regarder les difficultés de notre système de retraites, auxquelles nous avons entendu porter remède par l’ambitieuse réforme de 2003,…

M. Claude Evin. Ambitieuse ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …il apparaît que la priorité est aujourd'hui au renforcement du taux d’activité des seniors.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour l’assurance vieillesse. Exact !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. D’où les dispositions de ce projet, préparées dans le dialogue avec les partenaires sociaux et en coordination avec Gérard Larcher. Le Premier ministre les a présentées en juin dernier au Conseil économique et social dans le cadre du plan national d’action concertée pour l’emploi des seniors : assouplissement des règles de cumul emploi-retraite pour les salariés qui avaient des revenus modestes, préretraite progressive…

M. Gérard Bapt. Ce n’est pas nouveau !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le décret a déjà été pris, en effet, mais je tenais à en souligner l’importance.

Mentionnons aussi les dispositions qui vont permettre d’améliorer la retraite de nos compatriotes qui souhaiteraient continuer à travailler alors qu’ils peuvent bénéficier des droits à la retraite à taux plein. La surcote que nous avions calibrée ensemble en 2003 s’étant révélée insuffisamment incitative, nous la portons à 5 % – contre 2 % auparavant – au-delà de soixante-cinq ans, si bien qu’elle devient vraiment très intéressante.

Mme Jacqueline Fraysse. Et au-delà de quatre-vingt-quinze ans, vous la porterez à 8 % ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Nous vous demandons d’approuver une nouvelle règle qui vise à empêcher les entreprises de recourir à la solution de facilité consistant à se séparer en priorité des salariés les plus âgés, ce qui les prive d’une expérience, d’un savoir-faire, d’un apport humain pourtant si nécessaires pour assurer leur développement.

Votre amendement va à l’encontre de cet élan que nous voulons donner à la société et à l’économie françaises, monsieur Gilles car nous devons inciter les entreprises à garder leurs travailleurs les plus âgés, et les travailleurs âgés à continuer de travailler.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Ce qu’il faut, c’est un changement de culture !

M. Gérard Bapt. Allez dire cela à vos électeurs, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer au bénéfice d’un engagement que nous avons pris puisque, sur cette question très délicate, nous avons demandé à l’inspection générale des affaires sociales et à l’inspection générale des finances un rapport…

M. Gérard Bapt. Encore un !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Oui, mais un vrai !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. …qui nous permettra d’avoir un état des lieux précis des accords d’entreprise et de branche existants qui prévoient la mise à la retraite d’office à soixante ans. Nous pourrons ainsi mesurer l’impact de ces dispositions conventionnelles et étudier les moyens de surmonter ces rigidités, dans l’intérêt des travailleurs comme des entreprises.

M. le président. La parole est à M. Bruno Gilles.

M. Bruno Gilles. Monsieur le ministre, malgré toute l’amitié que je vous porte,…

M. Jean-Michel Dubernard, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Le respect ! (Sourires.)

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Et la considération ! (Sourires.)

M. Bruno Gilles. …il m’est difficile de retirer cet amendement, d’autant que M. Tian et M. Vitel en sont cosignataires. M’attendant à votre réponse et à celle de notre rapporteur, j’avais préparé, pour tenter à nouveau de vous convaincre, une projection des trois cas de figure qui se seraient présentés si l’amendement avait été adopté.

Le salarié qui aurait droit à une retraite à taux plein avant soixante-cinq et qui partirait à la retraite sans demander l’accord de l’entreprise bénéficierait, comme aujourd’hui, du régime fiscal et social des indemnités de départ volontaire ; pour celui qui serait éligible à une mise à la retraite avant soixante-cinq ans jusqu’au 31 décembre 2009 ou à soixante-cinq ans rien ne changerait ; enfin le salarié éligible à une retraite à taux plein qui s’entendrait avec l’entreprise sur un âge de départ verrait ses indemnités bénéficier du régime social et fiscal des indemnités de mise à la retraite.

Il n’est donc nullement question de contraindre qui que ce soit ni surtout de priver – j’ai bien entendu cet argument – l’entreprise de l’expérience de ses seniors.

Je salue la vigilance de notre excellent rapporteur sur le respect de l’intégrité de la loi Fillon du 21 août 2003 relatives aux retraites. Or, si celle-ci est mise à mal, c’est bien par un article du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui abroge, avant terme, les dispositions de son article 16 sur la mise à la retraite avant soixante-cinq ans. Pour toutes ces raisons, au nom de mes collègues, je maintiens cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je reviendrai longuement, après l’article 19, sur ce sujet qui est très important, car la proposition qui nous est présentée par le Gouvernement aura des conséquences très lourdes sur l’économie de notre pays et pour des milliers de retraités.

Monsieur le ministre, lors de la discussion de la loi sur la participation, j’ai présenté un amendement presque identique, tendant à aligner la fiscalité et le paiement des charges sociales de l’indemnité de départ à la retraite, l’IDR, sur celles de l’indemnité de mise à la retraite, l’IMR. M. Larcher m’a demandé de le retirer pour le représenter au moment du PLFSS. Les ministres se succèdent au banc du Gouvernement mais ne s’engagent pas clairement. D’ailleurs, il semblerait qu’ils n’écoutent même pas !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je suis très attentif à vos propos !

M. Pierre-Christophe Baguet. Nous examinons aujourd’hui le PLFSS, et pourtant le ministre demande encore à notre collègue Bruno Gilles de retirer son amendement. Les conséquences de la suppression de l’IMR seront trop importantes pour que le Gouvernement ne prenne pas ses responsabilités.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Il faut certes augmenter le taux d’activité des seniors, mais il est également indispensable d’insérer les jeunes. Il est facile de faire de grandes déclarations sur les préretraites progressives ; mais, à voir la non-consommation des crédits qui y sont consacrés dans nos fascicules budgétaires depuis des années, force est de constater que la formule ne marche pas. Mieux vaudrait peut-être l’améliorer plutôt que d’en faire une « arme fatale ».

S’agissant des préretraites, je souhaiterais vous entendre prendre l’engagement, monsieur le ministre, qu’Airbus n’y recourra pas dans son prochain plan social à Toulouse. J’y serai très attentif.

Vous allez demander à l’IGAS un rapport de plus. Or, comme je l’ai mentionné en défendant la motion de renvoi en commission, nous attendons toujours celui sur les MIGAC que l’inspection devait nous rendre, aux termes de la loi, avant le 15 octobre. Il nous apporterait pourtant un éclairage très important sur la réforme de la TAA dans les hôpitaux, à propos de laquelle M. Bur a indiqué que l’on avance à tâtons. Avant de commander de nouveaux rapports à l’IGAS, demandez-lui de nous livrer ceux que la loi a prévus.

M. Pierre-Christophe Baguet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour l’assurance vieillesse.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Je veux insister dans le sens des propos de M. le ministre : l’emploi des seniors est une question de volonté nationale. Dès lors la commission souhaite que les salariés puissent rester dans l’emploi le plus longtemps possible. N’oublions pas que nos concitoyens veulent non seulement travailler, mais aussi avoir une retraite décente, laquelle passe par un allongement de la vie professionnelle.

M. Pierre-Christophe Baguet. Ce n’est pas comme cela qu’on va résoudre le problème !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le président !

M. le président. Je rappelle que M. Gilles maintient son amendement, que la commission y est défavorable et que le ministre, qui va de nouveau s’exprimer, l’est également.

Je mets aux voix l'amendement no 347.

(L'amendement est adopté.)

M. Pierre-Christophe Baguet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Permettez-moi, monsieur le président, de vous rappeler que j’avais demandé la parole avant le passage au vote. Vous l’avez d’ailleurs relevé mais vous avez d’abord mis l’amendement aux voix. Le Gouvernement a ainsi perdu une chance de convaincre l’Assemblée. Que puis-je faire, dans ces circonstances, sinon demander une nouvelle délibération ?

Il s’agit en effet d’un sujet extrêmement délicat. Or cet amendement va à l’encontre de toute la politique que nous voulons mettre en œuvre pour inciter à la prolongation d’activité des travailleurs les plus âgés. Actuellement, le système d’exonération des indemnités de fin d’activité est différent selon que la fin d’activité résulte d’une mise à la retraite d’office ou d’une initiative du salarié. Si vous exonérez les indemnités de cotisations sociales de la même façon dans les deux cas, vous incitez les salariés et les entreprises à privilégier les départs anticipés à la retraite.

Cet argument, que je n’ai pu développer, est déterminant. On ne peut vouloir une chose et son contraire : si nous souhaitons la prolongation d’activité des salariés âgés, nous devons en assumer de manière responsable toutes les conséquences.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Il faut une deuxième délibération !

M. le président. Voulez-vous que nous échangions nos places, monsieur Jacquat ? (Sourires.)

Monsieur le ministre, le Gouvernement peut intervenir à tout moment. J’ai cru comprendre, lorsque vous avez levé la main sans intervenir immédiatement, que vous anticipiez sur la suite du débat.

J’ai pris en tout cas bonne note que le Gouvernement demande une deuxième délibération sur le vote de cet amendement. Celle-ci aura lieu après la fin de l’examen des articles de la troisième partie du texte.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. C’est par égard pour vous, monsieur le président, que je ne me suis pas levé avant que vous ne me donniez la parole

M. le président. Monsieur le ministre, votre courtoisie légendaire…

M. Gérard Bapt. Est suspecte en l’occurrence !

M. le président. …pâtit de l’usage commun dans cet hémicycle de se lever ou de claquer des doigts.

M. Richard Mallié. Hélas !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. La bonne éducation se perd !

M. le président. La présidence saura désormais que, lorsque vous êtes au banc du Gouvernement, il conviendra d’être plus attentif. Par conséquent ne voyez pas malice dans cet incident puisque chacun avait pu s’exprimer, même M. Jacquat.

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, mais pas pour une explication de vote après le vote.

M. Pierre-Christophe Baguet. Certes non, monsieur le président, puisque nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet extrêmement important.

Je partage votre raisonnement, monsieur le ministre : il y a une différence entre l’indemnité de mise à la retraite et l’indemnité de départ en retraite. Dans le premier cas, lorsqu’une entreprise verse 100, cela lui coûte 100 et le salarié touche 100. Dans le second cas, lorsqu’elle doit verser 100, cela lui coûte 150 tandis que le salarié touche 80, que l’intervention de la fiscalité va réduire à 40. La différence est énorme ! Le Gouvernement propose aujourd’hui de supprimer l’IMR au nom de la sauvegarde de l’emploi des seniors…

Décidément, vous ne m’écoutez pas !

M. Gérard Bapt. Et on loue sa courtoisie !

M. Jean-Luc Préel. Faites présider M. Jacquat ! (Sourires.)

M. le président. Poursuivez, monsieur Baguet, les deux ministres se concertaient.

M. Pierre-Christophe Baguet. Entre l’IMR et l’IDR, il y a l’IDL, l’indemnité de licenciement. La suppression de l’IMR, la plus bénéfique pour le salarié et l’entreprise aujourd’hui, incitera les salariés à mettre une pression très forte sur les entreprises pour bénéficier de l’IDL au détriment de l’IDR. Elle ne règlera donc pas du tout le problème de l’emploi des seniors et poussera, au contraire, les salariés proches de la retraite à demander leur licenciement, avec des conséquences financières énormes pour l’économie du pays et pour les retraités.

M. le président. Afin d’éviter tout nouveau problème, je demande aux membres de l’Assemblée d’être très attentifs. Même M. Jacquat reconnaîtra qu’entre la présidence qui oublie de donner la parole au ministre et les députés qui chuchotent, la tâche n’est pas facile !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Quelle présidence extraordinaire !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Nous sommes admiratifs !

M. Bruno Gilles. Vous êtes un très bon président !

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Vous méritez d’être vice-président à vie ! (Sourires.)

Article 14

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 14.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. En lisant l’article 14, comme son exposé des motifs, nous nous interrogeons sur les objectifs visés par la disposition proposée.

En effet, il est précisé que cet article tend à affecter à la caisse nationale d'assurance maladie le surplus du produit des recettes fiscales versées aux régimes de sécurité sociale destinées à compenser les allégements généraux de charges. Cette disposition s'inscrit donc dans l'engagement pris lors de différents textes législatifs sur la compensation.

La modification proposée pour cet article prévoit qu'à compter de l'exercice 2007, en cas d'écart positif entre le produit des impôts et taxes transférés et la perte de recettes provoquée par les allégements généraux, le montant correspondant sera affecté à la CNAM.

Toutefois, si ce passage est clair, l'exposé des motifs de cet article l'est beaucoup moins et le rapport ne répond pas à notre interrogation : en cas de solde négatif, comment les choses se passent-elles ?

M. Claude Evin. Il n’y aura plus de compensation !

Mme Jacqueline Fraysse. L'exposé des motifs indique que « l'État n'assurera plus de compensation intégrale et les éventuels écarts constatés entre les recettes fiscales et le coût des allégements généraux auront donc un impact (favorable ou défavorable selon les cas) sur les comptes des organismes de sécurité sociale ».

Il s'agirait là, monsieur le ministre, d'une violation caractérisée d'un principe auquel nous tenons – j’espère qu’il en est de même pour vous – : la compensation intégrale des allégements fixée dans la loi. Vous ne pouvez pas, au détour de cet article, vider de sa substance notre législation sur ce point précis des compensations des allégements.

Non seulement cette politique d'exonération est inefficace pour l'emploi, mais elle grève nos comptes sociaux et en fait supporter le coût aux contribuables. Avec cet article, il en coûterait encore un peu plus aux assurés sociaux. Les sommes engagées sont importantes, puisque le montant des allégements généraux, censés être compensés par ce biais s’élève à plus de 20 milliards d'euros.

Nous ne pouvons accepter ce doute. Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir répondre clairement à ma question pour lever cette ambiguïté désastreuse.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Nous avons eu le regret de constater qu’un de nos amendements à l’article 14 a été déclaré irrecevable.

Il faut pourtant être clair sur l’importante question des compensations, qui a alimenté, hier, un débat entre le rapporteur général et le ministre.

Notre amendement prévoyait le dépôt d’un rapport mentionnant, outre le montant des exonérations de cotisations sociales dont sont bénéficiaires les employeurs de un à neuf salariés, les informations indispensables relatives aux recettes affectées au financement des exonérations générales de cotisations et l’incidence des nouvelles exonérations. Il nous semblait important que ces informations soient communiquées au Parlement lors de l’examen de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale, afin que les débats se déroulent dans la plus grande clarté.

Je souhaite, monsieur le ministre, puisque vous demandez des rapports, que vous preniez cette demande en considération. Ce sujet est très important. Le rapport de M. Fagniez, page 39, indique d’ailleurs : « En 2007, le montant des exonérations non compensées va s’accroître de près de 10 %. »

Nous nous posons, comme Mme Fraysse, un certain nombre de questions. Que deviendront les versements lorsqu’ils seront négatifs ? Y aura-t-il ou non, à ce moment-là, une compensation de la part de l’État ? Cet engagement de compensation euro pour euro pour certains types d’exonérations sera-t-il bien respecté, alors que l’on connaît l’ampleur – plus de 2 millions d’euros – des exonérations non compensées ? Le Président de la République y a d’ailleurs apporté sa touche avec un engagement non financé, que vous honorez vis-à-vis des agriculteurs, aux dépens du FFIPSA.

M. le président. Nous en venons aux amendements à l’article 14.

La parole est à M. Claude Evin, pour soutenir l’amendement n219.

M. Claude Evin. Le principe posé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 doit être maintenu. Nous souhaitons, en cas d’écart constaté sur une même année entre les recettes affectées à la sécurité sociale et les exonérations de cotisations, qu’une régularisation intervienne à chaque fois.

Je crois, comme Mme Fraysse et M. Bapt, que la rédaction proposée pour l’article 14, qui est une modification de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, permet de garantir, en cas d’excédent, un reversement à l’assurance maladie, donc de sécuriser la situation. Cependant cette rédaction laisse planer une incertitude, puisqu’on n’évoque pas l’hypothèse inverse d’une perte pour la sécurité sociale.

Il nous semble donc nécessaire, au regard, d’une part, des propos du Président de la République et, d’autre part, des engagements pris lors de l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, que le mouvement joue dans les deux sens.

Mme Jacqueline Fraysse. Oui !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Les propositions de M. Evin sont intéressantes. Le fond de son intervention a retenu toute notre attention, ainsi que celle de M. le ministre. Néanmoins nous évoquons une question qui relève plutôt de la loi de finances. (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Non ! Non !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Pour 2006 et 2007, la compensation est excédentaire. Cet élément devrait donc vous rassurer.

M. Claude Evin. Pour 2007, vous n’en savez rien !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général . Si !

M. Gérard Bapt. Vous avez une intuition ! (Sourires.)

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Nous avons des intuitions divinatrices ! Souvenez-vous d’Évariste Galois ! (Sourires.)

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 219.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 445 et 20, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. Bur a annoncé qu’il rectifierait l’amendement no 20 en séance.

La parole est à M. Claude Evin, pour défendre l’amendement no 445.

M. Claude Evin. Je me félicite que nous partagions avec M. Bur les mêmes incertitudes. C’est la preuve qu’il subsiste encore un doute pour 2006.

L’amendement no 445 tend à sécuriser le fait que l’excédent de recettes constaté pour 2006 sera bien affecté à la caisse nationale d’assurances maladie des travailleurs salariés.

M. Bur confortera, je crois, notre position, puisqu’il a fait la même lecture des conséquences du texte proposé par le Gouvernement, qui laisse planer une incertitude, même pour 2006.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement no 20.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Nous n’avons pas tout à fait la même lecture du texte que M. Evin. Nous souhaitons préciser que l’affectation des surplus de recettes affectés au financement des allégements de charges patronales ne sera pas systématiquement destinée à la CNAM. Le Parlement doit jouer son rôle. Nous proposons donc de ne conserver cette règle particulière que pour 2007.

Je ne connais pas l’avis du Gouvernement. Il s’agit, pour lui, d’une avancée visant à sécuriser les compensations. Nous sommes tous vigilants, afin que cela se passe de cette façon. Néanmoins je considère que le rôle du Parlement est de décider de cette affectation chaque année et non une fois pour toutes. En effet, la CNAM sera peut-être excédentaire dans un an ou deux ; d’autres branches ou fonds resteront déficitaires pour quelque temps. Il serait alors intéressant de ne pas généraliser une telle affectation et de ne conserver cette règle particulière que pour 2007.

M. le président. Pourriez-vous, monsieur le rapporteur pour avis, préciser en quoi consiste la modification de l’amendement no 20 ?

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Il s’agit de préciser que si les surplus de recettes fiscales seront affectés à la sécurité sociale il appartiendra chaque année au Parlement de déterminer leur affectation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 445 et 20 rectifié ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. L’avis de la commission est constant : il convient de sécuriser l’affectation des excédents à la CNAM, comme vient de le préciser M. Bur en défendant l’amendement no 20 rectifié.

La commission a rejeté l’amendement no 445 et la première mouture de l’amendement no 20. En revanche, à titre personnel, je donne un avis favorable à l’amendement no 20 rectifié.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement s’estime éclairé par l’échange qui vient d’avoir lieu entre MM. Evin, Bur et Fagniez.

Il comprend l’objet des deux amendements initiaux ; mais il est davantage convaincu par l’amélioration apportée par l’amendement no 20 rectifié.

C’est pourquoi je demande à M. Evin, qui est peut-être comme moi, conscient de cette amélioration, de bien vouloir rejoindre l’amendement no 20 rectifié de M. Bur auquel, en tout état de cause, le Gouvernement est favorable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. M. Evin est en train d’examiner la rectification proposée par M. Bur. Pour ma part, je constate qu’on va de repli en repli.

Le Gouvernement a d’abord habilement transformé une dépense en une recette affectée, ce qui lui permet de minorer les dépenses dans la présentation de son budget. Il en profite au passage pour ne pas garantir la compensation à l’euro près.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Si !

M. Gérard Bapt. Pour 2007, ce sera uniquement si la compensation tombe en dessous de 98 % que le Parlement sera saisi de la question.

Par ailleurs, que dit l’excellent rapport de M. Fagniez, page 39 ? Selon lui, le mécanisme « contribue à rendre plus opaque le financement de la sécurité sociale, tout en permettant à l’État de minorer le volume de ses dépenses, l’affectation de ce panier de taxe étant considérée comme un prélèvement sur recettes et non comme une dépense. »

« Il contribue à rendre plus opaque le financement de la sécurité sociale » ! Cela signifie que tous les désavantages sont pour le Parlement et pour la protection sociale.

Nous tenons à notre amendement, car la rectification proposée par M. Bur n’est qu’une protection pour l’avenir, le principe de la compensation intégrale des exonérations pouvant être remis en cause, année après année.

M. Jean-Luc Préel. Le rapporteur Fagniez est meilleur à l’écrit qu’à l’oral.

M. le président. La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin. Je ne reviens pas sur notre débat de fond. Il serait sage de considérer qu’il y a une compensation à l’euro près, qui aille dans les deux sens.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Oui !

M. Claude Evin. En l’occurrence, je note, après avoir relu l’amendement rectifié de M. Bur, que celui-ci bloque la situation pour 2007 où l’on peut espérer des excédents. Dans la mesure où il n’insulte pas l’avenir, nous pouvons, à la limite, y souscrire puisque notre amendement visait aussi à sécuriser les choses, au moins pour cette année.

Il nous faudra avancer pour sécuriser l’ensemble des exonérations, dans le cadre des recettes affectées à la sécurité sociale. De ce point de vue, le chantier est devant nous. Pour 2007, restons-en là, mais il faudra reprendre ce débat l’année prochaine.

M. le président. L’amendement no 445 est donc retiré.

Je mets aux voix l'amendement no 20 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, pour soutenir l’amendement no 375.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 375.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 14

M. le président. Nous en venons à l’amendement no 268 portant article additionnel après l’article 14.

La parole est à M. Claude Evin, pour le soutenir.

M. Claude Evin. Nous proposons une augmentation de 2 % à 6 % du taux de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine dont le produit est versé actuellement au fonds de solidarité vieillesse pour 20 %, au fonds de réserve pour les retraites pour 65 %, et à la CNAV pour 15 %.

Cette hausse de taux permettrait d’apporter un surplus de financement durable et pérenne au profit du fonds de réserve pour les retraites, mis en place pour sécuriser nos régimes de retraites. Cette hausse rapporterait environ 4 milliards d’euros par an.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Cet amendement a été repoussé par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Le fonds de réserve pour les retraites visait à garantir la retraite par répartition à l’horizon 2015. Or les nouvelles ressources affectées au fonds de réserve pour les retraites sont en décroissance depuis 2002. En 2005, le fonds a été abondé de 1,529 milliard d’euros, en diminution de 620 millions d’euros par rapport à 2004. La seule recette pérenne en augmentation est le produit du prélèvement social de 2 % sur les revenus du capital.

Les excédents de la caisse nationale d’assurance vieillesse ont fortement reculé en 2004 et leur reversement a atteint 255 millions en 2005 contre 946 millions auparavant. Les autres sources de recettes ont disparu ou sont insignifiantes. Cela veut dire qu’aujourd’hui, nous sommes à 14 % de l’objectif qui avait été fixé lors de la création du fonds en 1999, à savoir, disposer de 152 milliards d’euros en 2020.

Nous vous donnons l’occasion, monsieur le ministre délégué, de vous expliquer davantage sur les perspectives de financement du fonds de réserve pour les retraites et sur le maintien de la retraite de solidarité par répartition.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 268.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 15

M. le président. Sur l’article 15, je suis d’abord saisi d’un amendement de suppression no 314.

La parole est à M. Philippe Vitel pour le défendre.

M. Philippe Vitel. L’article 15 a pour objet d’affecter au fonds de réserve pour les retraites, les sommes issues d’un contrat d’assurance sur la vie non réclamées à l’issue d’un délai de trente ans, à compter du décès ou du terme du contrat. Il convient de supprimer cet article qui est contraire au mécanisme de mutualisation du contrat d’assurance-vie, lequel est différent d’un simple produit d’épargne de type avoirs ou dépôts.

En effet, au terme du délai de prescription, les sommes sont acquises sous forme de participation aux bénéfices techniques à la mutualité des assurés, principe même du fonctionnement de l’assurance.

De plus, il est inutile de prévoir un nouveau dispositif concernant les contrats non réclamés qui sont appelés à disparaître à la suite de l’intervention de deux dispositions. D’une part, la loi de sécurité financière du 1er août 2003 a instauré une obligation d’information annuelle pour les contrats d’assurance-vie, que le souscripteur ait payé des primes ou non au cours de l’année. Il y a donc très peu de probabilité que les héritiers ne trouvent pas trace du contrat.

D’autre part, la loi du 15 décembre 2005 a mis en place à effet du 1er mai 2006, un dispositif de recherche des bénéficiaires en cas de décès, lequel a généré plus de trois mille demandes depuis le 1er mai.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. La commission a émis un avis défavorable tout en faisant remarquer qu’il s’agissait d’un problème un peu nouveau pour nous tous. Le dossier est complexe, car nous ne savons pas exactement combien nous pouvons espérer de cette disposition, les sommes s’échelonnant sur trente ans. Il semble aujourd’hui que ce sera un montant de l’ordre de 20 millions, mais peut-être sera-t-il supérieur à l’avenir. Compte tenu de ces incertitudes et de la nécessité absolue d’abonder le FRR…

M. Gérard Bapt. Il l’a dit !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. …la commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Rappelons que le fonds de réserve pour les retraites n’est, malheureusement, pas l’alpha et l’oméga de la réforme des retraites. C’est une ressource d’appoint pour faire le lissage d’une crête, comme disent les technocrates, de dépenses qui interviendra vers les années 2020 et à laquelle aura à faire face notre assurance vieillesse.

Cette ressource d’appoint est en réalité une ressource supplémentaire, mais accessoire par rapport à l’essentiel, à savoir la réforme des retraites que d’aucuns voudraient remettre en cause, prenant ainsi une responsabilité très lourde devant le pays.

Il faut continuer à alimenter le fonds de réserve pour les retraites. À ce fonds d’appoint, nous ajoutons une recette d’appoint en ne lésant personne. Ce sont des sommes qui sont en déshérence, c’est-à-dire qu’elles n’ont plus de propriétaire. C’est comme lorsqu’une personne décède sans héritier : l’État prend l’héritage et l’incorpore au patrimoine public. Nous affectons ce patrimoine public de l’État au fonds de réserve pour les retraites. C’est aussi simple que cela.

Les sommes en cause passeront de l’État au fonds de réserve pour les retraites. Je préfère affecter de l’argent en déshérence au fonds de réserve pour contribuer à financer nos retraites à l’horizon 2020 que de le laisser dormir dans le patrimoine de l’État.

C’est la raison pour laquelle je suis au regret de demander le rejet de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Une fois n’est pas coutume, je soutiens la position du Gouvernement, puisque je viens, à l’instant, de réclamer l’augmentation des ressources affectées au fonds de réserve pour les retraites. Certes, il s’agit d’une ressource accessoire par rapport aux besoins et à la décroissance constatée. Cela dit, je ne vois pas pourquoi les banques devraient être les seules bénéficiaires du fait que l’on ne retrouve pas les ayants droit d’un défunt.

Pourquoi différencier le mode de gestion des sommes dites accessoires des règles de gestion globale des dépôts au fonds de réserve pour les retraites ? Ce goût pour la complexification est incompréhensible.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 314.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. J’en viens à deux amendements identiques, nos 99 et 21.

La parole est à M. le rapporteur, pour les recettes et l’équilibre général, pour soutenir l’amendement no 99.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Cet amendement vient à point nommé pour répondre à l’interrogation de M. Bapt.

M. Gérard Bapt. Ah ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Le fonds de réserve pour les retraites confie à des établissements financiers la gestion de ses actifs. Or le projet propose que les avoirs non réclamés des contrats d’assurance-vie soient investis exclusivement en titres de créance négociable.

Pour des motifs de bonne gestion du fonds et compte tenu du montant relativement faible des montants en cause, il paraît inopportun de réserver un sort particulier aux avoirs non réclamés de l’assurance-vie. L’amendement vise donc à supprimer cette disposition, afin que ces avoirs soient fondus dans la masse globale des avoirs du FRR, qui pourra les investir dans des produits financiers plus dynamiques.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement n 21.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Nous avons ce débat chaque année en fonction de la nature des sommes versées au fonds de réserve pour les retraites. Je rappelle que, l’an dernier, nous avions débattu de la gestion particulière de la soulte versée par les industries gazières et électriques pour l’adossement des retraites de leurs salariés au régime général.

Il ne faut pas complexifier la gestion du FRR. C’est la raison pour laquelle je propose, comme le rapporteur de la commission des affaires sociales, de supprimer cette règle particulière de gestion, dans l’intérêt des salariés.

Depuis son démarrage opérationnel en juin 2004, ce fonds de pension à la française réalise une performance globale de 18,5 %, hors frais. Suivant les hypothèses relatives au chômage, nous pourrons, à l’horizon 2020-2030, recourir aux sommes épargnées et judicieusement placées pour lisser l’évolution des besoins.

M. Gérard Bapt. N’oubliez pas de mentionner que c’est Lionel Jospin qui l’a créé !

Mme Paulette Guinchard. Oui, il faut le dire !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Sa création, avec celle du conseil d’orientation des retraites, a été la seule réponse du gouvernement auquel vous apparteniez à la question des retraites, ce qui est un peu faible.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. En effet !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. D’autant que ses ressources restaient très aléatoires. Pour notre part, nous avons continué de l’abonder…

Mme Paulette Guinchard. Pas suffisamment !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. … et ses actifs atteindront 29 milliards d’euros à la fin de l’année 2006.

Nous devrons certainement revenir sur cette question à l’occasion d’une prochaine réflexion sur l’avenir des retraites et leur financement. Il nous faudra valider l’intérêt de ce fonds qui peut jouer, outre un rôle de lissage à partir des années 2020-2030 avec la montée en charge des retraites, un rôle de stabilisateur au niveau du capital des entreprises. En effet, il a beaucoup investi en actions dans des entreprises européennes et françaises et nous avons besoin d’un investisseur institutionnel de cette importance.

Nous sommes d’accord avec M. Fagniez pour proposer une uniformité de gestion du fonds.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je comprends les préoccupations exprimées par M. le rapporteur pour avis de la commission des finances et M. le rapporteur de la commission des affaires sociales. A cette occasion, je veux rendre hommage à la très grande qualité de la gestion des fonds confiés au FRR.

M. Gérard Bapt. Et à son créateur, M. Jospin !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Les placements qu’il a opérés sont tellement judicieux que leurs intérêts représentent des sommes très importantes.

Ses gestionnaires disent qu’il serait trop compliqué de créer un segment avec obligation de placement en bons du Trésor pour une nouvelle ressource qui n’est pas la plus importante du fonds. Cependant si nous avons voulu qu’il en soit ainsi, c’est pour tenir compte des préoccupations des gestionnaires de la dette publique. Que le FRR fasse des placements en bons du Trésor n’a pas la même incidence que s’il choisit d’autres valeurs. Or la raison d’être des alinéas que vous entendez supprimer par vos amendements est de faire en sorte que ce nouveau type de placement contribue à désendetter l’État. Voilà pourquoi nous avions tenu à les faire figurer dans le projet de loi et il m’appartient de défendre la position du Gouvernement.

Je m’en remets à la sagesse de votre assemblée.

Mme Paulette Guinchard. C’est la meilleure solution !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. On ne peut pas courir deux lièvres à la fois : le financement des retraites et le désendettement de l’État. Ce qui importe ici, ce sont les intérêts des salariés.

Le fonds de réserve pour les retraites a été créé dans leur intérêt et continue d’œuvrer en ce sens. C’est ce qui doit primer et si nous complexifions, année après année, la gestion de ce fonds, il est clair que ces derniers n’en tireront pas grand avantage. Nous défendons ces amendements dans la perspective de la sauvegarde des retraites futures des salariés. Voilà pourquoi je ne retirerai pas mon amendement et je demande à mon collègue des affaires sociales d’en faire de même.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Monsieur le président, j’allais justement demander à M. Bur de ne pas flancher devant le discours persuasif du ministre (Sourires) qui, même s’il témoignait d’un certain embarras, pouvait le conduire à quelques dérives. Je ne voulais pas qu’il oublie l’intérêt de la simplification apportée par nos amendements, lesquels donnent en outre la possibilité au fonds d’utiliser des produits beaucoup plus dynamiques que ceux que vous venez d’indiquer, monsieur le ministre.

Je suis très heureux de constater la solidité de la commission des finances qui vient quelquefois nous donner des leçons de gestion.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Jamais !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Je me réjouis de voir que nous partageons les mêmes objectifs, ce qui finalement devrait satisfaire le ministre.

M. le président. La parole est M. le rapporteur pour l’assurance vieillesse.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Je me souviens d’autant mieux de la création du FRR que je l’ai soutenue en tant que rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

L’important est de conserver au fonds ses missions initiales : il doit être abondé avec des ressources pérennes destinées à un lissage sur la durée des dépenses liées au régime de base. Il ne convient pas d’étendre son champ, comme certains le suggèrent parfois, car, ne l’oublions pas, les réformes de retraite qui ont été décidées concernent les années antérieures à 2020, date à partir de laquelle le fonds interviendra.

Pierre- Louis Fagniez, avec son talent habituel, vous a dit sa pensée, monsieur le ministre, et je le rejoins.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard.

Mme Paulette Guinchard. Je suis ravie de constater que les élus de la majorité redécouvrent l’intérêt du fonds de réserve pour les retraites. Néanmoins, monsieur Jacquat, s’il faut que ses objectifs soient maintenus, il doit aussi être abondé. Depuis 2002, nous défendons cette nécessité et nous déplorons que notre amendement visant à établir un nouveau dispositif d’abondement ait été rejeté. La Cour des comptes elle-même s’inquiète des conditions dans lesquelles il a été financé depuis quatre ans.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 99 et 21.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 15, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 15

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 100 et 22, portant article additionnel après l’article 15.

La parole est à M. le rapporteur pour l’assurance vieillesse, pour soutenir l’amendement no 100.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Il s’agit de rechercher un rendement dans les meilleures conditions possibles de sécurité, tout en prenant en compte les contraintes de risques inhérentes à cette activité, afin d’offrir au fonds de réserve des retraites toutes les possibilités de placements d’actifs sur les instruments financiers fournis par le marché.

Le présent amendement vise ainsi à adapter le cadre de gestion du FRR à l’évolution des marchés financiers en lui donnant tous les moyens d’être le plus efficace possible par une plus grande souplesse de gestion et une meilleure réactivité dans le respect de sa politique d’investissement, qui reste inchangée.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l’amendement no 22.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Permettez-moi d’insister sur la complexité de ce fonds.

Sa création a été décidée en 1999 mais il n’a été opérationnel qu’en juin 2004, en raison des difficultés du montage administratif liées au respect des règles de droit public. Il est important qu’on lui donne les moyens d’une réelle efficacité pour ses placements au service des salariés afin d’améliorer sa performance, qui, depuis l’origine, est en moyenne de l’ordre de 18,5 %.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Favorable.

M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard.

Mme Paulette Guinchard. Je ne veux surtout pas polémiquer, mais chacun doit faire preuve de la plus grande honnêteté sur ce dossier d’une. Le fonds a, depuis l’origine, largement été abondé ; c’est son système de gestion qui a été mis en place par la suite.

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 100 et 22.

(Ces amendements sont adoptés.)

Article 16

M. le président. Sur l’article 16, je suis d’abord saisi de deux amendements identiques, nos 23 et 315.

La parole est à M. Bruno Gilles, pour soutenir ces amendements.

M. Bruno Gilles. Il serait très difficile aux établissements payeurs d’anticiper le montant des sorties donnant lieu à taxation et, surtout, la variation à la hausse ou à la baisse de l’unité de compte qui va générer des produits taxables au titre de la CSG et de la CRDS. Aussi le présent amendement propose-t-il d’exclure du champ d’application de l’acompte les contrats de capitalisation et d’assurance vie en unités de compte.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général Ces amendements ont été repoussés par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Gilles, si je vous ai bien compris, vous voulez éviter le risque de voir la CSG appliquée à un revenu qui n’est pas encore constaté.

Si la disposition que vous voulez amender avait une telle conséquence, j’accepterais votre amendement, mais je tiens à préciser très clairement que cet amendement ne porte que sur les revenus des placements de l’année antérieure. Ces revenus ne sont donc ni hypothétiques ni incertains, mais dûment constatés et définitivement acquis. Le risque que vous voulez corriger a été appréhendé dans la rédaction du Gouvernement qui évite cet inconvénient, l’anticipation du versement de la CSG n’étant possible que pour les revenus de l’année précédente.

Au bénéfice de cette explication formelle, messieurs les députés, je vous demande de bien vouloir retirer ces deux amendements, qui, en réalité, n’ont pas d’objet.

Mme la présidente. Monsieur Bur, acceptez-vous de retirer cet amendement ?

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Je le retire.

Mme la présidente. Monsieur Gilles, faites-vous de même ?

M. Bruno Gilles. Je suis M. Bur : je le retire.

M. le président. Les amendements nos 23 et 315 sont retirés.

La parole est à M. Gérard Bapt.

(Mme Hélène Mignon remplace M. Éric Raoult au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE MME HÉLÈNE MIGNON,
vice-présidente

M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre, quel est le montant du bénéfice attendu de cette mesure, dont je reconnais qu’elle est astucieuse puisqu’elle permettra, en 2007, d’abonder à la fois les budgets de la CNAMTS, de la CNAF ainsi que le FSV, la CNSA et le FRR. Toutefois, dans le rapport, le surcroît de recettes pour 2007 est évalué à 365 millions lorsqu’il s’agit de mesures nouvelles, mais à 430 millions dans la partie concernant les prélèvements obligatoires. Comment expliquez-vous cet écart de 70 millions d’euros ? Quel est exactement le bénéfice escompté de cette disposition ?

Mme la présidente. Monsieur le ministre, souhaitez-vous répondre à M. Bapt ?

M. Gérard Bapt. Il ne m’a pas écouté !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Défavorable ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Bapt. Oh ! C’est caricatural !

Mme la présidente. Monsieur le ministre, M. Bapt ne défendait pas un amendement !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je suis défavorable au raisonnement de M. Bapt ! (Murmures sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la présidente. Nous en venons à l’amendement no 367 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, pour le soutenir.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Cet amendement, fruit d’une longue réflexion de la commission, constitue le premier volet de la réponse apportée à une demande forte de notre commission. À l’article 53 du projet de loi, elle a en effet adopté un amendement de M. Rolland et de moi-même – M. Door ayant présenté un amendement similaire – visant à augmenter l’ONDAM de ville de 300 millions d’euros. Hélas, celui-ci a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, dans la mesure où il générait une charge publique supplémentaire.

L’amendement no 367 rectifié vise à augmenter les recettes de 2007 de 200 millions d’euros. De quelle façon ?

En matière de revenus de placement, le choix entre le prélèvement libératoire et l’imposition du barème de l’impôt sur le revenu est sans incidence pour la détermination du montant des contributions sociales dues. En revanche, compte tenu du mode de prélèvement, les recettes actives de la sécurité sociale sont décalées d’un an suivant l’option prise par l’épargnant : prélèvement obligatoire ou impôt sur le revenu.

Cet amendement tend à étendre aux contributions sociales le mode de prélèvement à la source effectué par les organismes financiers. Pour 2007, il est prévu que le produit de la CSG collectée au titre de cette mesure – qui devrait atteindre 200 millions d’euros – revienne exclusivement à la CNAMTS. Cela permettra au Parlement – nous le ferons dans un article ultérieur – d’augmenter l’ONDAM de ville du même montant sans pour autant augmenter le déficit de l’année.

M. Philippe Vitel. Très bien !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. L’ONDAM de ville devrait donc augmenter dans des proportions permettant de satisfaire un certain nombre d’exigences vis-à-vis des assurés sociaux – Jean-Marie Rolland nous en parlera tout à l’heure. Le taux de 0,8 % sur l’ONDAM de ville était jugé inacceptable. Nous corrigeons aujourd’hui cette insuffisance, tout en lui trouvant un mode de financement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre de la santé et des solidarités. Avis favorable, mais il importe de préciser que cette mesure est sans incidence pour les placements. Simplement, ces recettes sont affectées à l’exercice en cours et non plus à l’exercice n +1. Cela nous permet d’instaurer un prélèvement libératoire social, comme cela existe depuis bien longtemps en matière fiscale.

Ainsi que je l’ai expliqué hier lors des questions au Gouvernement, il n’est pas illégitime de vouloir transposer dans le domaine social ce qui donne satisfaction dans le champ fiscal. Je ne pense pas que M. Bur, membre de la commission des finances et très présent dans les débats à caractère social, me démentira.

M. Gérard Bapt. Même l’opposition est d’accord sur ce point, monsieur le ministre !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je vous remercie, monsieur Bapt, vous qui êtes également membre de la commission des finances !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Un membre éminent !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je me souviens en effet avoir siégé avec vous à la commission des finances, même si ce n’était pas sur les mêmes bancs.

Cette modalité permet donc de relever l’ONDAM, ce qui est très intéressant, mais ce qui est important, c’est de débattre de ce qu’il faut faire de ces ressources.

M. Gérard Bapt. Ah !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Politiquement, il est essentiel de comprendre que le relèvement de l’ONDAM pour les soins de ville doit bénéficier en priorité aux assurés sociaux, et ensuite aux professionnels de santé. Cette disposition n’aggrave pas le déficit : nous continuons donc notre effort.

Par ailleurs, parmi les professionnels de santé, je ne pense pas aux seuls médecins.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Ils vont être mécontents !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Mme Briot, M. Mallié et M. Préel, qui se sont beaucoup impliqués dans la création de l’ordre des infirmiers, peuvent confirmer que j’ai toujours indiqué que sa création ne serait pas la seule avancée nécessaire. Beaucoup en ont parlé. Eh bien nous, nous le faisons ! Les infirmiers et les sages-femmes attendent depuis longtemps – beaucoup trop à mon goût – de nouveaux progrès, mais notre système conventionnel, s’il a des avantages, a parfois du mal à évoluer. Quoi qu’il en soit, nous serons au rendez-vous pour leur donner satisfaction.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. Finalement, monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir fixé un ONDAM de ville initial à 8 %, car cela nous permet, depuis deux mois, d’aller à la rencontre de ces professionnels de santé qui, chaque jour, font des efforts pour que notre système de soins soit aussi bien géré que possible. N’oublions pas qu’ils sont passés d’une augmentation annuelle de 8 % en 2003 à 1,4 % en 2006. Ils seront confortés par la décision de bon sens que nous allons prendre en votant cet amendement.

Cette mesure va encore resserrer les liens qui nous unissent. Ils sont nos partenaires dans la réforme en cours, qui a des résultats très intéressants mais qui n’est pas définitivement gagnée. Nous devons continuer à nous battre année après année pour que perdure notre système universel et solidaire. Merci, monsieur le ministre, de nous avoir donné l’occasion de ce dialogue. Tout le monde sera satisfait de cette décision. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Ces débats montrent quels trésors d’ingéniosité sont déployés, tant par le Parlement que par le Gouvernement, pour améliorer le niveau de l’ONDAM sans prélèvements supplémentaires, simplement en anticipant les revenus,…

M. Philippe Vitel. C’est de la bonne gestion, monsieur Bapt !

M. Gérard Bapt. …mais je sais que toutes ces propositions sont passées au travers du filtre de Bercy.

Cela étant, j’ai noté une certaine discordance entre le Gouvernement et M. Vitel à propos de l’affection de ces ressources aux soins de ville.

Selon le ministre, cette ressource ne serait pas affectée prioritairement à telle ou telle catégorie professionnelle,…

M. Philippe Vitel. Absolument pas !

M. Gérard Bapt.… mais destinée à améliorer la qualité des soins de ville dans leur globalité. Concernant les professionnels de santé, nous devons nous en tenir à ce qui me paraît juste et adopter une démarche "donnant-donnant" – ou "gagnant-gagnant" –…

M. Philippe Vitel. Qui sont les prescripteurs essentiels ?

M. Gérard Bapt. …en précisant que toute amélioration de statut doit être subordonnée à une amélioration de la qualité du service rendu aux usagers ou au respect des engagements pris par les professionnels de santé dans le cadre de la maîtrise médicalisée des dépenses.

Voilà pourquoi j’adhère davantage à l’affirmation du ministre qu’aux déclarations générales de M. Vitel, que je rencontre pourtant sur d’autres terrains. (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Je m’associe aux propos de notre collègue Philippe Vitel et je remercie le ministre d’avoir écouté et entendu les commissaires des affaires sociales, dont l’objectif était de retenir un ONDAM pour les soins de ville plus réaliste afin de répondre aux attentes des médecins, des infirmiers et des assurés.

Je sais combien il a été difficile de trouver les ressources nécessaires sans déséquilibrer le système hospitalier. Certains ont d’ailleurs voulu faire croire que nous allions amputer les ressources de l’hôpital au profit des soins de ville.

Grâce à cet amendement, nous allons trouver les ressources nécessaires : nous le voterons donc sans réserve. Nous remercions encore le ministre d’avoir écouté les parlementaires.

M. Gérard Bapt. Cela devrait être naturel !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Je note que la redistribution de la CSG telle que la prévoit cet amendement ne porte que sur l’exercice 2007 et qu’il faudra donc rouvrir le débat pour les années suivantes.

Je m’interroge aussi sur l’ampleur des besoins à satisfaire : certains ont évoqué les attentes des médecins et des infirmiers. Je crois pour ma part que nous devons réfléchir sur les rémunérations des infirmiers, car ce n’est pas la création d’un ordre qui va régler leurs problèmes. De plus, les besoins de soins vont augmenter de façon considérable du fait du vieillissement de la population.

Je sais par ailleurs que les pharmaciens s’inquiètent d’un ONDAM insuffisant, et je n’ai pas encore rencontré mes anciens collègues chirurgiens dentistes, mais je ne doute pas qu’eux aussi auront quelques velléités. (Sourires.)

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Nous en parlerons plus tard !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Espérons que ce relèvement sera suffisant pour satisfaire tout le monde et que cet argent servira les intérêts des malades, qu’il améliorera la qualité des soins et optimisera la dépense publique.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Ne soyez pas impatient : l’article 53 vous donnera satisfaction !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 367 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 16, modifié par l’amendement no 367 rectifié.

(L’article 16, ainsi modifié, est adopté.)

Article 17

Mme la présidente. L’article 17 ne fait l’objet d’aucun amendement. Je le mets aux voix.

(L’article 17 est adopté.)

Après l’article 17

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 43, portant article additionnel après l’article 17.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement vise à créer un levier incitatif pour l’industrie pharmaceutique en faveur de la recherche.

Une importante étude, relative à l’activité pendant dix ans des plus grandes compagnies pharmaceutiques du monde, a été rendue publique le 18 septembre dernier. Elle porte sur la période 1996-2005 et a été réalisée par le professeur Léo-Paul Lauzon, titulaire de la chaire d’études socio-économiques de l’université du Québec à Montréal.

L’examen des états financiers de ces multinationales du médicament, parmi lesquelles figurent Pfizer, Johnson & Johnson, Glaxo-Smith-Kline et Novartis, est riche d’enseignements. Nous apprenons ainsi qu’entre 1996 et 2005, ces entreprises ont versé un montant cumulé de 317 milliards de dollars à leurs actionnaires, tandis que, dans le même temps, 43 milliards seulement étaient consacrés aux investissements en immobilisations. Sur ces dix années, 739 milliards ont été dépensés en marketing et publicité contre 288 milliards pour les frais de recherche et développement. Les dépenses promotionnelles ont donc été deux fois et demie plus importantes que celles susceptibles d’aboutir à la mise au point de nouvelles thérapies innovantes au service des malades.

Ces résultats sont contradictoires, indique l’auteur de l’étude, avec les prétentions de l’économie capitaliste qui postule que plus les entreprises font de profits, plus elles investissent en immobilisations et en recherche. Comme quoi, les dogmes que vous défendez sont loin d’être respectés ! Les chiffres devraient donc inciter les responsables politiques à intervenir afin de veiller à ce que les intérêts de la collectivité soient véritablement respectés. C’est d’ailleurs le message qui a été porté par de nombreuses ONG lors de la seizième édition du congrès international sur le sida qui s’est tenu à Toronto.

Avec cet amendement, nous proposons donc d’inciter les firmes pharmaceutiques à augmenter leur effort en matière de recherche. Ainsi, toute entreprise dont les dépenses de recherche-développement seraient inférieures au tiers de son chiffre d’affaires réalisé au cours du dernier exercice clos subirait une majoration de la contribution à laquelle elle est assujettie aux termes de l’article L. 245-2 du code de la sécurité sociale. C’est une proposition raisonnable qui va dans le sens de l’intérêt général.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. La commission a rejeté cet amendement après une réflexion approfondie et des échanges fructueux avec Mme Fraysse. Le parti communiste a donné l’impression, avec cet amendement, de vouloir faire revivre le Gosplan en imposant aux entreprises un cahier des charges et la structure de leurs dépenses. Je comprends très bien que Mme Fraysse, et d’autres, s’étonnent de l’importance des dépenses de marketing et de lobbying, mais ce n’est pas à la loi de dicter aux entreprises ce qu’elles doivent faire en matière de recherche, même si le produit que vend l’industrie du médicament n’est pas tout à fait comme les autres.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je n’ai pas l’ambition de faire la synthèse entre les propos de Mme Fraysse et ceux de votre rapporteur (Sourires), encore qu’il ne me déplairait pas de réussir.

La position que vous exprimez, madame Fraysse, n’est pas nouvelle et vous avez déjà déposé des amendements comparables par le passé. J’en comprends l’esprit, même si je ne suis pas d’accord avec vos propositions. Pierre-Louis Fagniez a raison de ne pas vouloir figer la situation dans la mesure où l’adoption de votre amendement reviendrait en définitive à diminuer, pour ces entreprises, les chances d’investir dans la recherche car elles seraient pénalisées. Or, au fond, ce que vous souhaitez, comme tout un chacun, c’est que l’industrie pharmaceutique consacre davantage de financements à la recherche-développement. Il faut reconnaître qu’elle a levé le pied dans ce domaine depuis trop longtemps et qu’elle a cherché à faire rémunérer comme de vraies innovations ce qui n’en était pas.

Je tiens à vous préciser que nous sommes en train de travailler avec l’industrie, notamment dans le cadre du Conseil stratégique des industries de santé – le CSIS – qui doit se réunir au tout début du mois de décembre, pour encourager et favoriser, au lieu de pénaliser, les entreprises qui investissent dans la recherche, et, pour ne rien vous cacher, surtout celles qui le font en France !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Très bien ! Au moins, vous agissez !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Cela fait longtemps que l’on en parle. En s’inspirant de ce qui se passe déjà dans d’autres pays européens, nous pourrions adopter des dispositifs qui, tout en étant compatibles avec la réglementation communautaire, permettraient de valoriser les entreprises qui font de la recherche en France.

Oui, nous avons besoin de recherche pour bénéficier de vraies innovations. Et, oui, je préfère que la recherche se fasse chez nous.

Je suis donc défavorable à votre amendement, même si j’en comprends l’esprit. Toutefois, j’ai un rêve secret, madame Fraysse, celui de vous voir adopter notre dispositif quand nous le présenterons.

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je n’accepte pas que l’on suggère que le groupe auquel j’appartiens voudrait régir les entreprises par la loi.

M. Gabriel Biancheri. Non, c’est par la terreur !

Mme Jacqueline Fraysse. Ce n’est pas l’objet de notre amendement !

En revanche, vous conviendrez que le médicament est tout de même une marchandise, ...

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Un produit...

M. le ministre de la santé et des solidarités. ...de santé !

Mme Jacqueline Fraysse. ...un produit particulier, donc l’industrie qui le fabrique une industrie particulière. D’autant que les médicaments sont remboursés par la sécurité sociale, c’est-à-dire avec de l’argent public et que les sommes ainsi versées représentent une part importante du chiffre d’affaires de ladite industrie. Cela nous donne un droit de regard sur elle – j’espère que vous nous en donnerez acte – et nous autorise à lui fixer quelques orientations en considérant, encore une fois, l’intérêt général.

Bien sûr, tout ce qui incite les entreprises à faire de la recherche me convient, monsieur le ministre, mais les chiffres que j’ai cités – et je ne polémique pas, il s’agit d’un constat – montrent un déséquilibre bien réel. Vous m’avez objecté que mon amendement pénaliserait l’industrie pharmaceutique et qu’il conduirait, par contrecoup, à diminuer la recherche. Je ne partage pas votre appréciation puisque mon amendement ne pénalisera pas les entreprises qui consacreront davantage de moyens à la recherche en contrepartie par exemple d’une diminution des dépenses de marketing. Ne seraient pénalisées que celles qui persisteraient dans une voie qui n’est pas satisfaisante au regard des immenses besoins.

C’est pourquoi je maintiens cet amendement que nous gagnerions vraiment à adopter.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. On peut effectivement discuter le seuil retenu dans l’amendement, à savoir le tiers du chiffre d’affaires. Les entreprises du médicament nous disent que le niveau de leurs investissements dans la recherche-développement est le double de la moyenne de l’industrie française. Elles font donc déjà beaucoup d’efforts et il faut les encourager.

Cela étant, votre remarque, monsieur Fagniez, était désobligeante pour Mme Fraysse : le médicament n’est pas un produit marchand comme un autre. Et l’initiative tout à fait originale du Président de la République visant à fournir aux pays en voie de développement des médicaments dont l’achat est financé par une taxe sur les billets d’avion le prouve bien.

On est dès lors fondé à agir sur la structure des dépenses des entreprises, par exemple en taxant les dépenses de marketing ; ou bien, s’agissant de l’information des médecins, en limitant le réseau des visiteurs médicaux qui incitent souvent les praticiens, hospitaliers ou libéraux, à prescrire des médicaments.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. C’est du pur fantasme ! Nous avons déjà voté des lois sur le sujet !

M. Gérard Bapt. Une taxe qui irait à la recherche fondamentale pourrait aider par exemple à la réussite du plan cancer à laquelle vous êtes attaché, monsieur le ministre. C’est surtout la recherche fondamentale qui permettra de réaliser les plus grandes avancées dans les traitements contre le cancer, plutôt que la recherche finalisée menée par l’industrie privée à qui il arrive de privilégier l’innovation de contournement. Le débat lancé par l’amendement no 43 est très important.

Puisque vous avez parlé, monsieur le ministre, d’un rendez-vous pris début décembre avec l’industrie pharmaceutique, nous regrettons que notre amendement sur la politique de mise en place des génériques n’ait pas été pris en considération. Si l’on demande à l’industrie de s’engager dans ce domaine, il faut que les règles soient claires et que la propriété intellectuelle soit protégée. Or, à l’heure actuelle, l’inquiétude est grande de voir des génériques mis sur le marché sans que la durée de validité des brevets soit respectée.

Mme la présidente. Veuillez conclure, s’il vous plaît, monsieur Bapt.

M. Gérard Bapt. Je n’aurai pas l’occasion de défendre mon amendement, madame la présidente, puisqu’il a été retoqué en commission, et je le déplore, mais je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez vos intentions exactes quant au respect de la propriété intellectuelle. C’est le prix à payer pour pouvoir lutter contre la stratégie de contournement de certains laboratoires, contre ces fameux me too.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. En commission, j’étais intervenu sur l’amendement de Mme Fraysse pour regretter le regard suspicieux qu’elle portait sur l’industrie pharmaceutique. N’oublions pas que cette industrie fait partie du patrimoine de la France depuis très longtemps, et qu’elle a développé de très nombreuses molécules nouvelles. Taxer la recherche, c’est lutter contre la recherche.

Mme Jacqueline Fraysse. Je n’ai jamais proposé de taxer la recherche !

M. Jean-Pierre Door. Récemment a eu lieu dans toute la France la semaine « Le médicament, parlons-en ! » avec des journées portes ouvertes des laboratoires. J’ai rencontré les dirigeants des gros laboratoires installés dans ma circonscription et j’ai pu constater l’importance des investissements dans la recherche. Si seulement tout le monde pouvait en faire autant ! L’effort tourne entre 18 % et 20 % ; il se situe donc à un haut niveau. Il n’y a pas de raison de porter un jugement négatif sur les laboratoires. Pénaliser les entreprises qui ne feraient pas assez de recherche, ce serait les mettre toutes dans le même sac, ce qui serait un tort.

Il faut, comme le dit le ministre, que le Conseil stratégique des industries de la santé se réunisse et qu’il définisse les modes d’action susceptibles de renforcer l’attractivité de notre territoire, peut-être en copiant ce qui se fait en Grande-Bretagne qui favorise les laboratoires qui embauchent sur place. Je fais confiance aux membres de ce conseil pour lancer des idées et je voterai contre cet amendement, madame Fraysse.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Debré.

M. Bernard Debré. Je suis à la fois surpris et peiné par cet amendement. En effet, l’industrie pharmaceutique française est – peut-être devrais-je dire : était – une des plus compétitives au monde.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Elle l’est encore !

M. Bernard Debré. Elle le demeure, assurément, mais la concurrence internationale est telle aujourd’hui, notamment avec les industries américaine et anglaise, voire avec celles de pays émergents comme la Chine, que nous avons des soucis à nous faire sur sa pérennisation. Il serait donc aberrant de la pénaliser au nom d’un dogme dépassé.

M. Claude Evin. Ce n’est pas ce que vous avez écrit dans votre livre !

M. Bernard Debré. Si, c’est exactement ce que j’ai écrit dans mon livre, relisez-le !

Mme Jacqueline Fraysse. Nous savons lire, toute de même !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. D’autant que les écrits restent !

M. Bernard Debré. Ce que j’ai écrit, monsieur Evin, et que je répète, c’est que nous devons aider les entreprises qui font de la recherche afin de sauver l’industrie française.

M. Claude Evin. Elles seront heureuses de l’apprendre.

M. Bernard Debré. Ou vous n’avez pas lu mon livre, ou vous l’avez mal interprété – ce qui ne m’étonnerait pas ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le ministre de la santé et des solidarités. Il n’a lu que les pages de gauche ! (Sourires.)

M. Bernard Debré. De plus, cet amendement ne prend pas en considération le fait que les molécules qu’on découvrira coûteront très cher car elles viseront à traiter des maladies peu nombreuses. Nous devons donc aider l’entreprise pharmaceutique et non pas la pénaliser ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme la présidente. L’Assemblée est suffisamment éclairée.

Je mets aux voix l’amendement no 43.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article 18

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l’article 18.

M. Bernard Accoyer. Madame la présidente, je demande une brève suspension de séance, en vue de réunir mon groupe pour examiner des questions d’ordre technique.

Mme la présidente. Monsieur Préel, acceptez-vous de reporter votre intervention de quelques minutes ?

M. Jean-Luc Préel. J’ai longtemps travaillé avec M. Accoyer dans le cadre de plusieurs PLFSS et nous avons souvent demandé des suspensions de séance ensemble ! J’accepte donc volontiers de ne prendre la parole qu’après la suspension.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, inscrit sur l’article 18.

M. Jean-Luc Préel. Je suis heureux que Bernard Accoyer ait trouvé le temps de réunir son groupe. J’espère qu’il a pu obtenir un résultat satisfaisant pour la suite de nos débats.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Dans votre cas, il était plus difficile de le réunir !

M. Jean-Luc Préel. Rassurez-vous, monsieur Bur, j’ai pu réunir mon groupe, et sa position est très claire !

M. Bernard Accoyer. C’est en effet plus simple quand on est tout seul en séance que quand on est cinquante !

M. Jean-Luc Préel. Il ne me semble pas que vous soyez cinquante, monsieur Accoyer.

Mme la présidente. Messieurs, je vous en prie. Seul M. Préel a la parole.

M. Jean-Luc Préel. L’article 18 fixe le taux de la contribution des laboratoires pharmaceutiques assise sur leur chiffre d’affaires. Nous avons déjà évoqué la politique du médicament hier et avant la suspension de séance, à l’occasion de l’amendement de Mme Fraysse. Le médicament, il est vrai, n’est pas un produit comme un autre, puisqu’il a vocation à soigner, et si possible, à guérir les maladies – ou, mieux encore, à les prévenir. Les malades sont toujours en attente de produits innovants, car nous manquons de produits efficaces contre les maladies infectieuses, les cancers ou d’autres maladies.

Or la recherche et le développement de nouvelles molécules deviennent de plus en plus onéreux, ce qui pose de réels problèmes. On a cité tout à l’heure le cas des entreprises multinationales. Il est vrai que certains laboratoires, comme Sanofi-Aventis, sont présents dans de nombreux pays, ce qui donne lieu à des discussions sur la localisation des investissements en recherche-développement. Il est donc indispensable d’entretenir des relations de confiance avec l’industrie pharmaceutique, notamment grâce à une vraie politique conventionnelle. J’ai entendu, monsieur le ministre, que vous alliez réunir en novembre le Conseil stratégique des industries de santé, qui ne s’était pas réuni depuis dix-huit mois. Vous l’auriez sans doute fait bien plus tôt si cela avait été possible car, comme pour toutes les industries, le pilotage d’un laboratoire pharmaceutique exige une visibilité à long terme, une gestion pluriannuelle.

L’année dernière, une majoration exceptionnelle de la contribution des laboratoires avait été décidée, le taux passant, après de longs débats, de 0,6 % à 1,76 %. Si le mot « exceptionnel » a un sens – mais j’attends de savoir, monsieur le ministre, quelle acception vous lui donnez –, la logique voudrait que l’on revienne cette année à un taux de 0,6 %. Or cette majoration n’est pas supprimée par le projet de loi ; le taux est simplement ramené à 1 %, ce que l’on peut interpréter de deux manières, soit que l’on se réjouisse en se disant que cela aurait pu être pire, soit que l’on considère qu’une nouvelle majoration exceptionnelle de 0,4 % a été décidée. J’ai peur, pour ma part, qu’elle ne soit pas exceptionnelle, mais définitive.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Monsieur Préel, vous pouvez vérifier toutes mes déclarations, ici et au Sénat : j’ai toujours indiqué que le taux diminuerait, mais jamais qu’il serait ramené à 0,6 %. Or j’ai pour habitude d’agir conformément aux propos que je tiens, ce qui m’évite de me prendre les pieds dans le tapis.

M. Jean-Luc Préel. Mais il s’agissait d’une majoration « exceptionnelle » !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Par ailleurs, je n’ai ni don, ni appétit pour la sémantique.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Il est vrai que cela nourrit mal ! (Sourires.)

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vous avez évoqué la réunion du CSIS. Je peux vous assurer que la contribution assise sur le chiffre d’affaires des laboratoires n’est pas de nature, en elle-même, à rendre notre pays moins attractif pour l’industrie pharmaceutique – elle s’applique aussi bien aux entreprises françaises qu’aux entreprises internationales.

Je rencontre régulièrement les responsables mondiaux des grands groupes et, au vu de la politique du médicament menée dans certains pays, notamment européens, je peux vous dire que nous ne sommes pas près de cesser d’innover en France, bien au contraire. Nous avons évité à différentes reprises des erreurs fatales en termes d’attractivité.

On peut réunir le Conseil stratégique des industries de santé pour le plaisir de le réunir, mais cela ne servira strictement à rien. Ce qui m’intéresse, c’est d’élaborer un ordre du jour qui nous permette d’avancer, monsieur Préel. Cela fait maintenant six mois que nous discutons avec l’industrie, qui tient à savoir, depuis l’examen du PLFSS de l’an dernier, le contenu de l’ordre du jour du CSIS. Aujourd’hui, les choses sont claires : un ordre du jour est fixé. Je souhaite que, dans les mois qui viennent, on avance notamment sur la valorisation de la recherche effectuée sur le territoire national et sur le délai, encore trop long, d’introduction d’un médicament sur le marché en France.

M. Jean-Pierre Door. Bravo !

M. le ministre de la santé et des solidarités. La responsabilité n’incombe pas seulement à la France. En effet, quand l’AMM européenne est déposée, il faut quasiment recommencer à zéro parce que les AMM européennes sont jugées par rapport aux placebos et non aux comparants. Est-ce normal ? J’ai évoqué ce sujet au comité du médicament à Bruxelles, il y a trois semaines, pour que des actions soient entreprises au niveau du dépôt de l’AMM afin de gagner du temps.

Voilà quelques-uns des points sur lesquels nous souhaitons obtenir des avancées concrètes, monsieur le député.

Mme la présidente. Sur l’article 18, je suis saisie d’un amendement no 24.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour le soutenir.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à rappeler que la taxe sur le chiffre d’affaires des laboratoires pharmaceutiques est exceptionnelle. Je vous ai parfaitement compris, monsieur le ministre. L’an dernier, il était exceptionnel qu’elle soit à 1,76 %, cette année, qu’elle soit ramenée à 1 %, et c’est à titre tout aussi exceptionnel qu’on fixera un nouveau taux l’année prochaine.

Il était essentiel que l’adjectif « exceptionnel » figure dans le texte, sauf à croire à une pérennisation à un tel taux de cette taxe.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Le fait que nous tenions nos engagements n’a rien d’exceptionnel, monsieur Bur !

Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Je reviendrai sur l’attitude des pouvoirs publics face à l’industrie pharmaceutique. Il convient, monsieur le ministre, de bien insister sur la véracité de leur souhait de concertation et sur l’importance de la lisibilité de l’attitude des pouvoirs publics par rapport aux différentes formes de taxation qui leur sont imposées.

L’an dernier, en commission mixte paritaire, nous avions limité le caractère exceptionnel de l’imposition à 1,76 %, qui, initialement, devait être plus importante. Pour 2007, il n’y a pas retour à la case départ de 0,6 %, mais fixation du taux de cette taxe à 1 %. Si on demande à l’industrie pharmaceutique des engagements sur la recherche et l’innovation véritable, elle doit connaître sa capacité de financement.

Par ailleurs, est-ce au cours de la prochaine réunion du Conseil stratégique que vous fixerez votre stratégie en ce qui concerne la protection de la propriété intellectuelle, monsieur le ministre ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Monsieur Bapt, j’espère que l’on trouvera la solution avant début décembre. Au moment où je vous parle, se tient au ministère une réunion de travail entre le Comité économique des produits de santé et les industries du médicament – LEM –, pour finaliser ce que l’on entend par « protection de la propriété industrielle ». Au-delà du cadre conventionnel, qui produit aussi des effets, et en attendant la transposition d’une directive européenne, je l’ai précisé lors de la discussion générale, nous examinons la possibilité de renforcer cette protection grâce à des dispositions législatives votées ici ou éventuellement au Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement en discussion ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. L’amendement de M. Bur a été accepté par la commission.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 24.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 44, 316 et 317, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement no 44.

Mme Jacqueline Fraysse. Cet amendement tend à supprimer la diminution de la taxe sur le chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique qui passerait de 1,76 % à 1 %. En effet, alors que les comptes de la branche assurance maladie restent fragiles en raison de l’absence de réformes structurelles du financement, pourquoi réduire encore ses ressources en diminuant la contribution des laboratoires pharmaceutiques assise sur leur chiffre d’affaires ? Pourtant, cette industrie pharmaceutique n’est pas à plaindre. Largement avantagé par l’existence de la sécurité sociale, ce secteur n’est pas ouvert au vent de la crise, et c’est tant mieux. Votre démarche visant à diminuer sa contribution de 100 millions d’euros, alors que la pression sur les assurés sociaux reste inchangée et tend même plutôt à s’accentuer, n’est pas acceptable. Les résultats des entreprises pharmaceutiques doivent être appréciés non seulement en fonction des médicaments remboursés, mais aussi des médicaments déremboursés qui continuent d’être prescrits et lesquels, selon le magazine 60 millions de consommateurs, ont enregistré des hausses de 20 à 350 %. C’est beaucoup !

M. le ministre de la santé et des solidarités. C’est trop !

Mme Jacqueline Fraysse. Dans le contexte actuel, ce cadeau de 100 millions d’euros à l’industrie pharmaceutique ne nous paraît pas acceptable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Gilles, pour soutenir l’amendement no 316.

M. Bruno Gilles. Je défendrai également l’amendement no 317, madame la présidente.

Dans le PLFSS de 2006, il a été indiqué que le taux de 1,76 % serait exceptionnel. Par notre amendement no 316, nous proposons de revenir au taux de droit commun de 0, 6 %. Notre amendement de repli, no 317, le fixe à 0, 8 %.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Ces amendements soulèvent le même problème. En effet, que l’on passe du taux de 1,76 % à 0,6 % ou à 0,8 % ou à 1 %, on reste dans le cadre d’une taxe exceptionnelle. Nous sommes d’accord sur ce point. Il a fallu trouver une solution médiane, acceptable par tous. C’est la raison pour laquelle la décision prise dans le projet de loi me paraît conforme au souhait général. La commission est donc défavorable à ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Avis défavorable également.

Le taux est fixé à 1 % parce que la décélération des dépenses sur les produits de santé n’a pas été tout à fait celle qui était prévue. En aucune façon, il n’y a de système de double peine avec une baisse déjà anticipée et prévue et une taxation qui se situerait à un niveau supérieur à ce qu’attendaient les entreprises.

Madame Fraysse, je ne trouve pas normal de voir le prix des produits qui ne sont plus admis au remboursement régulièrement fluctuer à la hausse dans des proportions incompréhensibles et inadmissibles. Je ne me satisfais donc pas de la situation actuelle. À la vérité, en l’état actuel du droit, on ne sait pas faire, ce qui ne nous satisfait pas non plus.

Deux possibilités s’offrent à nous : soit la voie amiable et conventionnelle, soit la mise en place de nouvelles dispositions juridiques. S’agissant de la première possibilité, j’ai proposé aux industriels du médicament de trouver une solution pour éviter à l’avenir toute augmentation au-delà du raisonnable des prix de médicaments qui ne sont plus remboursés : ils m’ont fait part de leur accord de principe. Nous verrons si nous allons au bout du processus et si nous trouvons une bonne solution,. Si ce n’est pas le cas, nous prendrons, comme je l’ai précisé lors de la réunion du comité technique du médicament, nos responsabilités, que ce soit au plan européen ou au plan national.

Il ne s’agit pas non plus d’anticiper de nouvelles vagues de déremboursements. Celle qui vient d’avoir lieu est la troisième et c’est là dernière à avoir été prévue, mais là n’est pas le sujet.

Il faut savoir que, actuellement, tout médicament qui n’est pas inscrit au remboursement pourrait voir, du jour au lendemain – maintenant, dans quelques mois ou dans quelques années –, son prix exploser sans que nous ayons la possibilité d’agir.

Quand on s’engage dans l’action publique et politique, c’est aussi pour pouvoir intervenir sur des sujets qui nous semblent anormaux : c’en est un. Voilà pourquoi je crois que nous allons pouvoir trouver un accord sur les prix de ces médicaments déremboursés. Si tel n’était pas le cas, nous reviendrions effectivement devant le Parlement pour expliquer nos actions sur le plan juridique.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Une fois n’est pas coutume, je ne suivrai pas Mme Fraysse. En effet, concernant le suivi de l’activité des laboratoires, il existe d’autres manières de réguler leur activité. Il est préférable de jouer sur l’effet volume et sur l’effet prix, y compris en définissant des groupes homogènes de prix par molécule ou par catégories de médicaments. Il convient d’ajuster le prix du médicament et de l’innovation, comme cela a été entrepris. Peut-être faudra-t-il améliorer la façon dont les prix sont fixés par référence à une moyenne entre l’Angleterre, l’Allemagne et l’Italie.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Cela se fait pour les innovations !

M. Gérard Bapt. Oui, mais en général, on choisit comme référence les pays où les essais cliniques sont les plus favorables aux laboratoires. Il sera préférable de procéder à une régulation au plan européen.

Monsieur le ministre, aller plus loin dans la politique des génériques et agir véritablement sur les prix amèneront, un jour ou l’autre, à pratiquer le tarif forfaitaire de responsabilité. En revanche, je vous suis lorsque vous diminuez le prix des médicaments à service médical rendu insuffisant pour conserver une maîtrise publique sur leur commercialisation.

Je ferai remarquer à Mme Fraysse que la taxation est défavorable aux assurances complémentaires puisqu’elle n’est qu’une ressource pour l’État et donc pour la CNAM. En revanche, les assurances complémentaires profitent de la réduction des prix lorsqu’elles remboursent les médicaments.

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Le point évoqué par M. Bapt est d’importance pour l’avenir du générique et du médicament. Je ne partage pas votre point de vue, monsieur le député, quand vous dites que l’avenir serait le TFR. Si vous mettez en place un TFR à niveau bas, comme cela s’est fait en Allemagne avec la jumbo klass, vous ne laissez pas le temps aux génériques de s’installer. Dans ces cas, il ne sert à rien que les professionnels de santé – pharmaciens et médecins – et les patients modifient leur comportement et s’habituent aux génériques. Cet effort ne vaudrait pas d’être mené à son terme. Comme je l’ai déjà indiqué en commission, si nous avions appliqué le TFR, nous n’aurions jamais obtenu que les médecins et les pharmaciens signent avec l’assurance maladie la convention qui nous permettra d’atteindre l’objectif de 70 %, sachant pourtant que le répertoire a été revu et que cet objectif est quasiment plus ambitieux que celui que nous nous étions fixé en début d’année. Allons jusqu’au bout des choses : parlons des effets pervers du TFR. L’existence du TFR ôte tout intérêt au générique et casse donc sa dynamique.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. L’essentiel, c’est l’économie réalisée, monsieur le ministre !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Non, l’essentiel est de parvenir à un changement des comportements et de convaincre que le générique est tout aussi bon pour la santé du malade, mais meilleur pour celle de la sécurité sociale. Aujourd’hui, les princeps, de par leur puissance, peuvent très bien s’aligner et, dans ces cas, le générique ne pourra jamais s’installer durablement sur le marché.

Je constate d’ailleurs, au vu des différentes remarques, que ce sujet vaut la peine d’être porté dans le débat. En effet, nous n’avons visiblement pas tout à fait la même position. Le générique répond avant tout à une évolution des comportements et à une responsabilisation. Je préfère sincèrement continuer dans cette voie.

Mme la présidente. Maintenez-vous vos amendements, monsieur Gilles ?

M. Bruno Gilles. Absolument, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 44.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 316.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 317.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 18, modifié par l’amendement no 24.

(L’article 18, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 18

Mme la présidente. L’amendement no 16, tendant à insérer un article additionnel après l’article 18, tombe puisque l’article 5 n’a pas été supprimé.

Article 19

Mme la présidente. Sur l’article 19, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Jean-Luc Préel, premier orateur inscrit.

M. Jean-Luc Préel. Pour plaire à M. Bur, je défendrai en même temps l’amendement no 86, ce qui nous permettra certainement de gagner beaucoup de temps.

L’investissement dans le secteur hospitalier doit être favorisé pour permettre l’adaptation des établissements et leur modernisation. L’aide à l’investissement constitue d’ailleurs un volet extrêmement important du plan « Hôpital 2007 », comme le signale le rapporteur dans son rapport. Il est d’ailleurs meilleur à l’écrit qu’à l’oral…

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. On fera des progrès en vous écoutant !

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. On ne vous demande pas de donner des notes, monsieur Préel !

M. Jean-Luc Préel. …car il y a dans le rapport de très bonnes choses qu’il n’évoque pas à la tribune, et je le regrette.

Une large part de l’investissement demeure à la charge des établissements. Or ceux-ci paient la TVA sur les investissements, et l’aide apportée par l’État peut parfois être inférieure aux sommes dues au titre de la TVA.

Si la vente éventuelle de terrains ou de bâtiments est incluse dans le plan de financement des travaux, reverser une partie du prix de vente à la CNAMTS constitue donc un frein à l’investissement hospitalier alors que cet investissement est absolument nécessaire.

Les dispositions contenues dans cet article sont peu claires. Il prévoit que les établissements peuvent reverser à la CNAMTS une partie du produit net comptable des cessions. Cela pourrait signifier que cette disposition est facultative, ce qui est curieux. Par ailleurs, on devrait déterminer à l’avance le pourcentage, car qui prendra la décision ?

Devant tant d’imprécisions et d’incohérences au regard de l’application du plan « Hôpital 2007 », il me paraît souhaitable de rejeter cette mesure, et c’est pourquoi j’ai déposé un amendement de suppression de l’article, que je viens donc de défendre.

De plus, cette disposition va à l’encontre de l’autonomie des conseils d’administration des établissements et peut mettre en difficulté les plans de financement et donc l’investissement nécessaire. À l’UDF, nous sommes favorables à une vraie autonomie, une vraie responsabilisation des conseils d’administration des établissements. Ils doivent être impliqués dans l’investissement et être responsables de la gestion des établissements.

J’ai donc regretté, monsieur le ministre, que les présidents de conseil d’administration ne soient même plus membres de droit des conférences sanitaires de secteur. Seuls le président de la CME et le directeur le sont. Cela traduit la volonté de réduire le rôle des conseils d’administration en général. C’est un exemple parmi d’autres, mais je voulais le signaler.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin. Je pense que, dans nos fonctions électives locales, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons dans cet hémicycle, nous avons tous été ou nous serons tous confrontés à ce problème. Il suffit donc de se projeter sur le dossier d’investissement d’un hôpital pour mesurer l’absurdité de cet article.

Je ne vais pas revenir sur l’autonomie des établissements que M. Préel évoquait tout à l’heure, parce que je ne suis pas certain que ce soit l’argument essentiel. La notion d’autonomie d’un établissement hospitalier…

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Est relative !

M. Claude Evin. …mériterait d’ailleurs d’être débattue, elle est toute relative en effet. Un établissement hospitalier peut prendre un certain nombre de décisions, il peut passer des marchés publics ou engager des actions en justice, mais, pour le financement de son fonctionnement ou de ses investissements, il n’est tout de même pas si autonome que ça. Il faut donc situer l’article dont nous débattons dans le cadre des procédures relatives au financement de nos investissements.

Certains établissements ont un patrimoine qui a une certaine valeur, parce qu’il s’inscrit par exemple dans une histoire. Ce patrimoine doit pouvoir être utilisé pour réaliser des investissements.

Si, lorsqu’ils font une cession en dehors d’un projet d’investissement, les établissements doivent reverser une partie du produit de la vente à la CNAMTS, je ne vois pas très bien honnêtement pourquoi ils iraient demain vendre leur patrimoine.

S’ils s’inscrivent dans une démarche d’investissement, on est dans une situation un peu absurde ou une usine à gaz comme, parfois, il arrive à tel ou tel ministère d’en inventer, et je ne pense pas en l’occurrence, monsieur le ministre, au ministère de la santé. Un établissement qui vend son patrimoine pour participer au financement de son investissement devra verser une partie du produit de cette vente à l’assurance maladie et devra par ailleurs négocier pour obtenir, dans le cadre du FMESPP, une partie du financement qu’il aura par ailleurs cédé. C’est une démarche absolument inutile, et je ne comprends vraiment pas l’intérêt de cet article.

Il faut favoriser les investissements hospitaliers pour la période 2007-2012, mais tous les projets sont négociés avec les agences régionales d’hospitalisation, voire avec le ministère, et demander que l’on reverse des fonds à l’assurance maladie pour renégocier ailleurs ce qu’on aura perdu me semble particulièrement inutile et absurde.

J’ai ainsi défendu, madame la présidente, l’amendement no 242 que j’ai déposé avec un certain nombre de mes collègues et qui tend à supprimer l’article 19, ce qui m’évitera d’intervenir à nouveau.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Nous sommes ici plusieurs députés de la Haute-Garonne. Le CHU de Toulouse est un bon exemple avec son patrimoine historique du site de La Grave. Il a besoin aujourd’hui de gros investissements. Comment expliquer aux administrateurs qu’une part des fonds provenant de la cession d’une partie de ce site à des acquéreurs dont la personnalité n’est pas encore tout à fait déterminée pourraient revenir à la CNAMTS ?

Par ailleurs, je note dans le rapport de M. Fagniez quelque chose qui dépasse l’entendement. Je m’étais demandé si tout cela concernait aussi les établissements privés. Apparemment oui, et vous écrivez, monsieur le rapporteur, qu’une clinique « peut avoir intérêt à reverser une partie du produit de ses cessions pour bénéficier d’une aide d’investissement, notamment dans une vision pluriannuelle ».

Les établissements privés peuvent bénéficier du fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés. Cela est négocié au niveau de l’ARH et validé, j’imagine, au niveau du ministère, en fonction des besoins sanitaires et des besoins d’offre de soins tels qu’ils ressortent des SROSS. Comment une clinique pourrait-elle avoir l’idée de reverser une partie d’une cession à un fonds alors même que les investissements nécessaires seront déjà pris en compte et dépendront éventuellement d’une aide du fonds en question ?

On mélange vraiment l’eau et le feu dans cette affaire, et cela rend encore plus incongrue la disposition proposée.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 45, 86 et 242, tendant à supprimer l’article 19.

La parole est à Mme J acqueline Fraysse, pour défendre l’amendement no 45.

Mme Jacqueline Fraysse. En défendant mon amendement, je vais à mon tour donner un avis négatif sur le dispositif de l’article 19.

Le Gouvernement compte en 2007 sur une accélération des cessions d’actifs des établissements hospitaliers pour abonder le fonds pour la modernisation des établissements de santé à hauteur de 100 millions d’euros et diminuer ainsi l’évolution des dépenses hospitalières.

La Fédération hospitalière de France, qui représente tous les hôpitaux publics, nous a alertés sur cette mesure tout à fait contestable, voire absurde. On ne peut, en effet, accepter un tel dispositif qui affaiblirait inéluctablement la dynamique de l’investissement hospitalier, sans permettre pour autant de faire faire des économies à la sécurité sociale.

Comme le précise la FHF, les hôpitaux réalisent déjà de nombreuses cessions d’actifs immobiliers destinées à alimenter leurs capacités d’autofinancement en vue de projets d’investissement. Par conséquent, toute réduction de leurs revenus issus de ces cessions d’actifs diminuera leur capacité d’autofinancement et compromettra leurs projets.

Ce dispositif peut en effet être qualifié d’absurde puisqu’il conduira ces mêmes établissements à demander un soutien à leur politique d’investissement au FMESPP, qu’ils auraient contribué à abonder. L’économie globale de cette mesure serait donc nulle.

On va mettre en place une usine à gaz administrative pour compliquer les affaires, et ça ne réglera rien. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l’article 19 qui, décidément, ne nous paraît pas bien adapté, et c’est le moins que l’on puisse dire.

Mme la présidente. Les amendements nos 86 et 242 ont été défendus.

Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. La commission a rejeté ces amendements.

J’ai bien écouté M. Préel, j’ai été intéressé par les propos de M. Evin et j’ai relevé les petites critiques désagréables de M. Bapt – je crois que c’est parce qu’il ne lit pas mon rapport à fond,…

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Quelle belle analyse !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. …mais peu importe.

Nous avons beaucoup discuté de ces amendements en commission. Que faut-il en retenir ? Que tout le monde est favorable à l’investissement hospitalier et loue notre grand programme hospitalier. Je comprends donc que chacun veuille, par ses amendements, laisser son empreinte.

Ces amendements permettent d’affecter davantage de fonds au financement hospitalier, personne ne peut être contre. Il n’est pas anormal en effet que des établissements puissent contribuer – il s’agit d’une faculté – au financement du plan « Hôpital 2007 ».

Cependant, je fais observer que le versement des établissements à la CNAMTS ne portera que sur une partie des produits de cession.

M. Claude Evin. Heureusement !

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Il ne sera pas automatique, mais négocié par le directeur de l’ARH dans le cadre d’un programme d’investissement pluriannuel. La valorisation de ces cessions immobilières s’inspire de la démarche mise en place par le ministère des finances pour valoriser le patrimoine de l’État. Pour mettre tout le monde d’accord, et afin que ces amendements de suppression soient repoussés, j’ai proposé un amendement qui devrait être accepté par tous.

M. Denis Jacquat, rapporteur pour l’assurance vieillesse. Quelle sagesse !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements en discussion ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Madame la présidente, très sincèrement, je serais tenté de ne rien ajouter aux propos tenus par le rapporteur (Sourires.)

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Votre prudence vous honneur, monsieur le ministre !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Tout a été dit et bien dit.

Néanmoins, pour répondre à MM. Préel, Evin, Bapt et à Mme Fraysse, j’ajouterai que la valorisation de l’actif immobilier à l’occasion d’investissements doit être bien présente dans les esprits. Certes, c’est déjà le cas, me direz-vous, pour ceux qui ont du patrimoine. Ce mouvement a été engagé par l’État ; il commence aujourd’hui à prendre sa pleine mesure, notamment pour le monde hospitalier – et je ne parle pas seulement de l’hôpital public.

Monsieur Préel, l’effort consenti par l’État, notamment pour les vingt ans qui viennent, est bien supérieur au produit de la TVA dégagé par ces opérations : les aides en capital dépassent un milliard d’euros et les aides en fonctionnement, 10 milliards d’euros.

Monsieur Evin, je vous laisse le soin de qualifier cet article, mais je pense que les qualificatifs que vous avez utilisés s’appliquaient à la rédaction initiale du texte. À la suite de nombreuses discussions avec les fédérations hospitalières et les responsables de conférences, nous avons en effet décidé de passer d’un système dans lequel les établissements « doivent » à un système dans lequel les établissements « peuvent ».

Ainsi, comme l’a remarquablement dit M. Pierre-Louis Fagniez, une discussion s’engagera avec les ARH. Toutefois, nous voulons aussi qu’un établissement qui n’a pas du tout de patrimoine ne soit pas défavorisé.

Il ne s’agit pas, comme je l’ai dit lors de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale, de vendre les bijoux de famille pour financer du fonctionnement ! Très clairement, cela ne concerne que les dépenses d’investissement. Et dans la phrase qui a été rapportée par M. Bapt à l’instant, je ne décèle aucune contradiction par rapport à cette volonté que j’ai déjà exprimée et que je réaffirme à nouveau devant vous.

Vous remarquez de surcroît que les recettes escomptées n’ont certainement rien d’illusoire puisqu’elles sont inférieures au produit des cessions de l’an dernier.

Bien évidemment, l’avis du Gouvernement est le même que celui de la commission. En revanche, il devrait émettre un avis favorable sur un amendement de la commission, qui va venir en discussion juste après ceux-ci.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Debré.

M. Bernard Debré. Monsieur le ministre, j’attends avec impatience cet autre amendement car j’avoue que l’article 19 pose un problème. Vous avez essayé de lever l’ambiguïté, mais lorsque vous dites que les établissements de santé peuvent reverser, cela implique qu’ils peuvent aussi ne pas reverser. Pourquoi voter une loi, si la décision dépend uniquement de la volonté des établissements ?

L’article 19 prévoit que les établissements peuvent reverser, mais la destination de ce reversement n’est jamais précisée. Cela peut très bien aller dans le compte courant de la CNAMTS.

J’attends donc avec impatience de prendre connaissance de l’amendement de la commission, mais je suis sûr que notre rapporteur a prévu de préciser que ces reversements seront destinés à des investissements.

D’autre part, j’attire également l’attention du Gouvernement sur le fait que de nombreux hôpitaux reçoivent des dons des familles assortis de clauses qui pourraient entrer en contradiction avec les cessions qu’ils décident.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Evin.

M. Claude Evin. En général, toute décision d’investissement fait l’objet de discussions avec l’agence régionale d’hospitalisation. Toutefois, si l’on sait qu’il faut reverser à l’assurance maladie, l’établissement y regardera à deux fois et il ne procédera vraisemblablement pas à cette vente, ce qui est aussi une démarche absurde.

Le Gouvernement aborde cette question avec ceinture et bretelles !

Puisque vous affichez une démarche de négociations, de contractualisation avec des autorités du type agence régionale d’hospitalisation, laissez donc cette démarche se développer lorsqu’il y a un projet d’investissement. Pourquoi introduire dans la loi une garantie qui ne servira à rien puis que l’agence régionale d’hospitalisation aura toujours, dans le dialogue avec l’établissement, la possibilité de négocier le financement de tel ou tel investissement ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Je suis impatient que nous puissions prendre connaissance de l’amendement de M. le rapporteur.

Monsieur Debré, monsieur Evin, je vois bien quelle est votre argumentation, mais n’oublions pas le principe de spécialité qui jusqu’à présent ne permettait pas d’inclure les cessions d’actifs dans la discussion avec l’ARH.

M. Claude Evin. Non !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Si, c’est le principe de spécialité.

M. Claude Evin. Je pourrais vous citer bien des cas contraires.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Certes, mais si parfois cela se passe bien, il est aussi des fois où c’est impossible.

M. Claude Evin. De toute façon, le principe de spécialité ne s’applique pas ici !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Si, il s’applique, de même que le principe d’autonomie. Je peux d’ailleurs vous citer le cas de Dijon ou de Marseille où les cessions de patrimoine immobilier ont permis d’apporter un financement.

L’absence de volonté des acteurs hospitaliers d’entrer dans la discussion retarde les investissements d’autant, ce qui n’est pas souhaitable.

Mme la présidente. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 45, 86 et 242.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Nous en arrivons donc à l’amendement tant attendu.

La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l’équilibre général, pour soutenir l’amendement n101.

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Les interventions des divers orateurs, notamment celle de M. Debré, qui n’était pas présent en commission, mais qui a posé des questions auxquelles nous avions répondu en commission, montre combien cet amendement est nécessaire. M. le ministre évoque les bijoux de famille, qu’il ne faut pas vendre. M. Evin, quant à lui, parle de ceinture et de bretelles : il craint des amaigrissements subits et, dans ce cas, on est bien content d’avoir un mode de contention !

Le produit de cette recette exceptionnelle, que sont les cessions immobilières, ne saurait financer les dépenses courantes de la CNAMTS. Nous proposons donc de préciser que ces recettes contribueront bien à financer des investissements hospitaliers.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Forcément favorable !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 101.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 25 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour le soutenir.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. L’amendement que je présente n’est pas en contradiction avec celui qui vient d’être adopté.

Les hôpitaux doivent être incités à mieux valoriser leur patrimoine immobilier. Pour autant, cette politique de valorisation doit, d’une part, se traduire par un dispositif d’intéressement incitatif pour les établissements et, d’autre part, privilégier leur propre politique d’investissement immobilier. On ne peut pas imaginer qu’ils vendent leur patrimoine pour le mettre dans un pot commun en espérant récupérer une partie de cet apport via d’éventuelles subventions. Nous sommes en train de monter une mécanique infernale. L’administration reprend le dessus et complique ce qui est pourtant relativement simple alors que les hôpitaux sont tout à fait capables d’utiliser eux-mêmes leur patrimoine pour développer leurs investissements.

C’est pourquoi il est proposé que le produit des cessions, lorsqu’il n’est pas utilisé à de nouveaux investissements, ne soit pas versé directement à la CNAMTS, mais au fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, qui participe à la mise en œuvre du plan « Hôpital 2007 » et peut-être « Hôpital 2010 ». C’est un amendement de bon sens que je demande à l’Assemblée d’adopter.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. Cet amendement de bon sens présenté par M. le rapporteur pour avis a été repoussé par la commission, qui lui a préféré l’amendement précédent, beaucoup plus concis.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Mais insuffisant !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la santé et des solidarités. Cet amendement présente plusieurs inconvénients majeurs. Tout d’abord, il entraînerait une dégradation du solde de la CNAMTS.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Oui, mais c’est la seule raison !

M. le ministre de la santé et des solidarités. Actuellement, ces sommes vont à l’assurance maladie. Or nous devons respecter nos objectifs de déficit.

Ensuite, n’oublions pas que les investissements ne doivent pas seulement profiter aux hôpitaux publics ; il faut aussi être capable d’intervenir sur le financement de cliniques privées. C’est un point auquel nous sommes tous particulièrement attachés.

Enfin, les investissements hospitaliers ne sont pas financés uniquement par le FMESPP, mais aussi par la prise en charge des frais d’amortissement au sein de la dotation de l’ONDAM.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’associe à M. le rapporteur et émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Votre amendement, monsieur Fagniez, est un coup d’épée dans l’eau, …

M. le ministre de la santé et des solidarités. Vous ne pouvez pas dire cela !

M. Gérard Bapt. …puisque les fonds consacrés au financement des investissements hospitaliers iront dans une enveloppe commune, faute de quoi, nous dites vous, le solde de la CNAMTS se dégraderait

Quant à l’amendement de M. Bur, il me semble poser un problème dans la mesure où, en principe, le fonds de modernisation, – sauf, monsieur le ministre, si vous en avez modifié, par voie réglementaire, les attributions – concourt à l’aide à la mobilité dans le cadre de restructurations hospitalières. Il ne participe donc pas aux investissements proprement dits.

M. le ministre de la santé et des solidarités. Si, il a bien les deux missions.

M. Gérard Bapt. Dans ce cas, je me rallie à l’amendement de M. Bur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 25 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 19, modifié par l’amendement no 101.

(L’article 19, ainsi modifié, est adopté.)

Après l’article 19

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement no 176, portant article additionnel après l’article 19.

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour le soutenir.

M. Pierre-Christophe Baguet. J’associe à cet amendement Jean-Michel Fourgous, qui ne pourra défendre son amendement no 3.

Je voudrais revenir sur le débat que nous avons commencé avec l’amendement no 347 de MM. Tian et Vitel. Les routes de l’enfer sont parfois pavées de bonnes intentions. Au motif, louable, de protéger l’emploi des seniors, le Gouvernement nous propose, avec l’article 55 du présent projet de loi, une piste dont personne n’a mesuré les effets pervers.

En effet, cet article propose de supprimer la possibilité, ouverte par l’article 16 de la loi Fillon de mettre à la retraite des salariés de moins de soixante-cinq ans, dès lors qu’un accord collectif étendu, conclu avant le 1er janvier 2008 et comportant des contreparties en termes d’emploi ou de formation professionnelle, le prévoit. L’article 16 de la loi Fillon permet, il est important de le préciser, de favoriser l’emploi.

L’article 55 du présent projet de loi tend à supprimer l’indemnité de mise à la retraite, qui n’est soumise ni aux charges sociales ni à l’impôt. La seule opportunité laissée aux entreprises serait alors de recourir à l’indemnité de départ à la retraite, elle, assujettie aux charges sociales et à l’impôt sur le revenu.

Cet amendement vise donc à aligner le régime fiscal et social de l’indemnité de départ à la retraite sur celui de l’indemnité de mise à la retraite.

La mesure présente un triple avantage : premièrement, elle évite de faire subir aux salariés concernés une baisse importante de leur indemnité de départ à la retraite ; deuxièmement, elle évite l’augmentation du coût du travail et des charges des entreprises qui résulterait de l’obligation nouvelle de provisionner les cotisations sociales afférentes aux indemnités de départ à la retraite ; troisièmement, elle satisfait les demandes légitimes – et unanimes – des organisations syndicales et patronales, comme l’avait rappelé mon collègue Maxime Gremetz lors du débat sur la participation.

Je vais vous citer des exemples concrets. M. Michel de Virville, secrétaire général de Renault, dont la compétence dans le domaine social est unanimement reconnue, m’a autorisé à citer les conséquences de la mesure proposée par le Gouvernement pour sa seule entreprise – écoutez bien, mes chers collègues. Alors que les provisions actuelles sont de 300 millions d’euros, l’actualisation et la reconstitution de la provision exigeraient entre 400 et 500 millions d’euros. Il me rappelait en outre que Renault représente un vingtième de l’Union des industries métallurgiques et minières : cela signifie que cette mesure coûtera à l’économie française dix milliards d’euros, et qu’elle aura les mêmes conséquences pour les retraités.

Si le Gouvernement s’entête ainsi, c’est dans la seule perspective que la suppression de l’IMR au profit de l’IDR générera 300 à 500 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la sécurité sociale. Tout ce qui peut rapporter à court terme séduit, notamment les services de Bercy. Quand bien même cela rapporterait un milliard d’euros supplémentaires, monsieur le ministre, si je reconnais volontiers la nécessité d’abonder les recettes de la sécurité sociale, que pèse ce milliard d’euros potentiel face au coût que je viens d’évoquer pour le pays et nos concitoyens retraités ? N’y a-t-il pas d’autres pistes moins catastrophiques à explorer ? Voilà pour le coût.

Quant à l’argument du caractère protecteur de cette mesure pour l’emploi des seniors, il est également fallacieux. Comme je l’ai dit tout à l’heure, les entreprises risquent, sous la pression de leurs salariés, de se rabattre vers l’indemnité de licenciement, l’IDL, plus avantageuse que l’IDR, fiscalisée et soumises à charges. De plus, empêcher le départ volontaire en pénalisant l’entreprise et le salarié par des coûts trop élevés ne règle pas le problème de l’emploi en général. Enfin, n’est-il pas légitime qu’un employeur puisse remercier dignement ses anciens salariés, et ceux-ci ne méritent-ils pas un traitement équitable, comparable à celui de leurs collègues partis précédemment avec une IMR exonérée de charges et défiscalisée ? C’est pourquoi je propose d’aligner le régime fiscal et social de l’IDR sur l’IMR.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre-Louis Fagniez, rapporteur pour les recettes et l’équilibre général. La commission a refusé cet amendement, dont je vous rappelle qu’il a été satisfait par l’adoption d’un amendement lors de la discussion de l’article 13.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. L’intention de votre amendement, monsieur Baguet, est généreuse. Le Gouvernement n’agit pas du tout avec l’arrière-pensée d’augmenter les recettes de l’État et de la sécurité sociale. Il a en revanche l’intention explicite de ne pas dégrader celles-ci. En effet, si on exonère de charges sociales et fiscales tous les IDR, alors les indemnités versées par les employeurs à l’occasion des départs à la retraite à l’initiative du salarié seront à terme exonérées.

C’est si vrai d’ailleurs que l’amendement qui a été adopté tout à l’heure contre l’avis du Gouvernement comportait un gage que nous nous sommes bien gardés de lever. S’il était définitivement adopté, cet amendement augmenterait les droits sur les boissons alcoolisées. Les auteurs de cet amendement reconnaissent donc qu’il a un coût pour la sécurité sociale. Cela ne correspond pas à une moins-value de recettes.

Au-delà de cette discussion sur les finances de la sécurité sociale, il y a un débat sur les départs à la retraite anticipée. Qu’une entreprise de l’industrie automobile – vous en avez cité une – ayant de mauvaises habitudes en ce qui concerne la gestion de sa pyramide des âges s’inquiète des effets des décisions qui ont été prises par les partenaires sociaux et le Gouvernement pour encourager la poursuite d’activités, c’est une chose. Mais dans le même secteur, d’autres entreprises, parce qu’elles ont des pratiques plus vertueuses, ne réclament en aucun cas une telle évolution.

Je sais que vous pensez comme moi que vous n’êtes pas ici pour légiférer pour un cas particulier.

M. Pierre-Christophe Baguet. Absolument pas !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je ne vous prête naturellement pas cette intention. Toutefois, nous devons avoir en tête l’ensemble des situations et poursuivre avec cohérence notre politique, qui consiste à favoriser la prolongation d’activité, parce que c’est l’intérêt général. Nous devons aussi faire en sorte que les décisions que nous prenons n’aient pas d’effets d’aubaine extrêmement importants liés au changement de régime des indemnités de départ à la retraite à l’initiative du salarié, qui ne feraient plus l’objet de prélèvements si votre amendement était voté.

En tout état de cause, cette discussion a déjà eu lieu tout à l’heure à propos de l’amendement présenté par M. Gilles et M. Vitel et adopté contre l’avis des deux commissions saisies et du Gouvernement. Dès lors, le vôtre n’a plus cette heure de raison d’être. C’est la raison pour laquelle j’appelle votre assemblée à le rejeter.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Entendons-nous bien, monsieur le ministre : je ne nie pas qu’il y ait aujourd’hui des recettes pour la sécurité sociale et pour l’État, puisque des IDR sont versées. Mais de là à s’engager, sans aucune estimation préalable des conséquences d’un tel acte, dans la voie d’une suppression pure et simple de l’IMR, il y a une marge ! Reconnaissez qu’il faut bien s’entendre sur les mots.

Deuxièmement, en ce qui concerne l’emploi, aujourd’hui l’IMR ne coûte rien à l’entreprise ni aux salariés, alors que l’IDL coûte aux deux et l’IDR encore plus. À partir du moment où vous supprimez le dispositif le plus favorable, tout le monde va se replier sur l’indemnité de licenciement. Cela ne va donc pas régler du tout le problème de l’emploi, au contraire : les employeurs vont se retrouver confrontés à la pression extrêmement forte des salariés, lesquels demanderont à bénéficier de l’IDL.

Soyons clairs, monsieur le ministre : vous avez demandé tout à l’heure une deuxième délibération sur l’amendement de notre collègue Gilles. Maintenez-vous cette demande ou acceptez-vous que l’amendement soit validé dans les termes où nous l’avons adopté ? Dans ce dernier cas, je retirerai mon amendement dans l’attente de la discussion au Sénat. Mais je voudrais vous l’entendre dire, monsieur le ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Permettez-moi de vous dire, monsieur le député, que je suis d’accord avec vous sur un point : il n’y a pas eu d’évaluation qui permette de mesurer l’effet, pour la sécurité sociale, de l’exonération nouvelle que vous proposez, avec les pertes de recettes sur les indemnités pour les départs en retraite volontaires, et celui, à mon avis beaucoup plus faible, de la disposition dont nous discutons.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a chargé l’IGAS et l’IGS de procéder à une étude d’impact. À l’heure qu’il est, votre assemblée – pas plus que le Gouvernement – n’est en mesure d’apprécier l’incidence des décisions que vous l’invitez à prendre en ce qui concerne les charges sociales sur les indemnités de départ en retraite.

Nous nous honorerions à ne pas prendre de décisions à l’aveugle sur un sujet aussi important : il y va de l’équilibre de nos finances sociales.

M. Yves Bur, rapporteur pour avis. Tout à fait !

M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Le Gouvernement a effectivement demandé tout à l’heure une seconde délibération. Je réfléchis actuellement sur l’opportunité de maintenir ou non cette demande, et je vous apporterai une réponse dans la journée.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet. Je tiens à préciser que je ne parle pas simplement pour l’entreprise à laquelle j’ai fait référence et qui m’est effectivement chère, puisqu’elle est installée dans ma circonscription. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Je parle au nom de l’intérêt général, monsieur Bur, puisque cela ne concerne pas la seule entreprise Renault, mais 124 accords de branche signés à ce jour, soit entre sept et dix millions de salariés qui ne vont plus pouvoir bénéficier de l’IMR dans quelques années. Comme je l’ai dit tout à l’heure, cela représente dix milliards d’euros.

Je propose une vraie mesure sociale. Quand un salarié a travaillé toute sa vie, il est légitime qu’il parte dans des conditions dignes et que l’entreprise puisse lui verser une indemnité correspondant à son engagement au sein de celle-ci pendant de longues années.

En ce qui concerne la deuxième délibération, comme je n’ai pas de réponse pour le moment, le ministre ayant dit qu’il allait réfléchir dans la journée, je préfère que l’Assemblée se prononce sur mon amendement. S’il est voté, on verra bien si l’enquête de l’IGAS nous apporte des informations supplémentaires avant l’examen par le Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement no 176.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour des prochaines séances

Mme la présidente. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, no 3362 :

Rapport, no 3384 tomes I à V, de MM. Pierre-Louis Fagniez, Jean-Marie Rolland, Mme Marie-François Clergeau et M. Denis Jacquat au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, no 3388, de M. Yves Bur, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.)