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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 15 novembre 2006

50e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LUC WARSMANN,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Loi de finances pour 2007

SECONDE PARTIE

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007 (nos 3341, 3363).

anciens combattants

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs aux anciens combattants, à la mémoire et aux liens avec la Nation.

La parole est à M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué aux anciens combattants, mes chers collègues, il y a quelques jours, dans l'ensemble de nos villes et de nos villages, la France s'est souvenue, avec émotion, des combattants de la Première Guerre mondiale.

Cette journée nationale nous a également permis de rendre un hommage particulier à nos quatre derniers « poilus » qui justifient, à eux seuls, l'attention que la nation doit porter à celles et ceux qui ont combattu sur les champs de bataille, à différentes époques, pour défendre les valeurs qui font le socle de notre République.

L’exercice budgétaire pour 2007 est le deuxième à être préparé dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances. C'est aussi le dernier de cette législature.

Les crédits destinés à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » s'élèveront, pour 2007, à 3,752 milliards d'euros, dont 3,484 milliards d'euros directement en faveur du monde combattant. Ils représentent 8 % des 36,285 milliards d'euros de crédits mis à la disposition du ministère de la défense. Ils sont répartis en trois programmes : « Liens entre la Nation et son armée », « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » et « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale ».

Certes, on note une baisse en masse de 3,6 % de ce budget par rapport à 2006, mais, compte tenu de l'évolution démographique, la dotation moyenne par pensionné augmente de 2,25 %. Les droits de chaque ancien combattant seront donc, à nouveau, en hausse.

Depuis 2002, la dotation moyenne par pensionné est passée de 7 830 euros à 8 628 euros, soit une hausse de 10,2 % sur l'ensemble de cette période.

Toutefois, les droits des anciens combattants ne sont pas uniquement constitués d'aides financières. Il s'agit aussi de leur offrir des services dont l'efficacité s'est améliorée ces dernières années. Non seulement les droits des anciens combattants seront donc maintenus, mais de nouvelles mesures viendront les renforcer.

Je me félicite, tout d'abord, d'une nouvelle hausse de deux points de l'indice de la retraite du combattant au 1er janvier prochain. Elle passe ainsi de 35 à 37 points. Rappelons que ce relèvement de deux points de la retraite du combattant intervient après une première hausse, de deux points, entrée en vigueur le 1er juillet 2006. C'est une mesure particulièrement significative après l'augmentation mise en œuvre en 2006. Cette progression supplémentaire est évidemment un geste fort du Gouvernement : il faut rappeler que cet indice n'avait pas évolué entre 1978 et 2006, soit pendant près de trente ans.

Avec une première revalorisation de la valeur du point au 1er juillet 2006 et une seconde prévue au 1er janvier prochain, la retraite devrait ainsi atteindre en 2007 le montant annuel d'environ 490 euros. Cela correspond à une revalorisation de plus de 12 % en six mois.

Il faut rappeler que la carte du combattant est attribuée à ceux qui justifient de quatre mois de présence en AFN. Les appelés du dernier contingent à avoir participé à la guerre d'Algérie – classe 42 – atteindront soixante-cinq ans en 2007. C'est ainsi que 1 516 932 ressortissants seront bénéficiaires de la retraite du combattant – chiffre en augmentation de 34 105 par rapport à 2006, après une augmentation de près 50 000 entre 2005 et 2006.

Au total, 116 millions d'euros supplémentaires seront consacrés à la retraite du combattant afin de tenir compte de cette mesure et de l'évolution du nombre des ayants droit – au total 755 millions d'euros.

Cette mesure traduit la bonne volonté du Gouvernement dans un contexte budgétaire difficile.

Votre rapporteur souhaite que la valorisation de la retraite du combattant puisse se poursuivre de manière régulière au cours des années à venir.

M. Jacques Desallangre. Il était temps !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Un effort spécifique va être fait en faveur d'une meilleure prise en compte de l'appareillage des mutilés de guerre pour un montant de 635 000 euros, ce qui correspond à une augmentation de près de 7 %. C'est une action très importante pour la vie quotidienne des anciens combattants handicapés.

Pour la troisième année consécutive, les crédits sociaux de l'ONAC seront augmentés – de 500 000 euros – afin de poursuivre la politique d'aide aux ressortissants en situation difficile. La totalité des crédits sociaux atteindra ainsi le montant de 13,6 millions d'euros en 2007. Au total, depuis 2002, cette dotation aura augmenté de 28 %. Ces crédits permettront notamment d'aider les veuves en situation difficile et de développer les services à la personne.

La subvention de fonctionnement en faveur de l'ONAC se monte à 36 millions d'euros, ce qui devrait assurer durablement son avenir.

À signaler que 2007 sera la dernière année d'application du contrat d'objectifs et de moyens de l'ONAC qui aura ainsi finalisé sa modernisation entamée en 2003 au travers du contrat d'objectifs et de moyens. Cela a permis à l'ONAC d'être conforté dans l'exercice de ses missions, en disposant notamment de plus d'autonomie. L’Office a pu ainsi moderniser la gestion de ses effectifs et rationaliser ses structures départementales.

Quant à l'Institution nationale des Invalides, elle est sur la voie de la certification. La subvention prévue pour 2007 s'élève à près de 10 millions d'euros, ce qui doit permettre de maintenir un service de bonne qualité pour les pensionnaires et les patients.

Il est également nécessaire et urgent d'entamer l'alignement des pensions militaires d'invalidité des différentes armes sur ceux de la Marine. Une somme de 850 000 euros est inscrite pour ce début.

En outre, à la demande du Président de la République, le Gouvernement a décidé, lors du conseil des ministres du 27 septembre dernier, d'engager une nouvelle étape dans la décristallisation des prestations versées aux anciens combattants citoyens des États anciennement placés sous souveraineté française.

M. Patrick Roy. Enfin !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Il est prévu qu'un amendement d'origine gouvernementale, modifiant l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, propose un alignement de la valeur du point. De la sorte, à partir du 1er janvier 2007, les retraites du combattant et les pensions militaires d'invalidité, ainsi que les pensions de réversion, seront toutes à égalité en valeur nominale.

Cette mesure – si elle est adoptée – coûtera environ 110 millions d'euros, concernera 56 000 titulaires de la retraite du combattant et 28 000 pensionnés issus de vingt-trois pays : Maghreb, ancienne Afrique noire française, Indochine et Madagascar.

Votre rapporteur spécial se réjouit de cette mesure d'équité (« Nous aussi ! » sur les bancs du groupe socialiste),

M. Jacques Desallangre. On aurait préféré que cela se fasse autrement !

M. Christian Vanneste. Vous avez eu quinze ans pour le faire, mesdames, messieurs les socialistes, mais vous n’avez rien fait ! Un peu de modestie, tout de même ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. M. Mathis, et lui seul, a la parole !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Votre rapporteur spécial, disais-je, se réjouit de cette mesure d’équité, dont le financement devrait faire appel à la solidarité interministérielle, et non pas au seul budget des anciens combattants.

M. Jean-Claude Sandrier. C’est-à-dire ?

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Un groupe de travail sur la situation des veuves d'anciens combattants a associé des parlementaires – dont votre rapporteur spécial –, les associations et l'administration.

M. François Rochebloine. Les parlementaires étaient en nombre insuffisant !

M. Alain Néri. En effet !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Le 19 octobre dernier, ce groupe de travail a achevé ses travaux.

Deux solutions ont été envisagées pour répondre à la situation des veuves les plus démunies : d’une part, la création d'une indemnité différentielle par la loi, assortie de textes réglementaires définissant les mesures concrètes d'application ;…

M. François Rochebloine et Mme Martine David. Ce serait très bien !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. …d’autre part, la prise en compte par l'ONAC de cette indemnité en s'appuyant sur son enveloppe de crédits sociaux, évidemment abondée en conséquence.

C'est cette dernière solution qui a eu la préférence des membres du groupe de travail pour – notamment – des raisons tenant à une mise en œuvre moins complexe et moins longue qu'un passage par la loi (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et parce qu'elle est le prolongement de l'action de l'ONAC.

M. Alain Néri. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Le Gouvernement va donc étudier cette dernière solution avec attention.

M. Alain Néri. Et le Parlement, zéro ! Il n’y a qu’à régler tout cela par ordonnances !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Cette solution a le mérite d'être simple, de ne pas mettre en péril l'existence de l'ONAC, et même de le conforter et d'être cohérente avec l'action du Gouvernement et de la majorité depuis 2002.

M. Alain Néri. Que de contorsions !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Les crédits sollicités au titre de la sous-action « Majoration des rentes mutualistes » des anciens combattants et victimes de guerre s'élèvent à 217,4 millions d'euros. Les rentes mutualistes du combattant ont été créées après la Première Guerre mondiale, dans le souci de créer un lien de solidarité entre l'effort personnel d'épargne des anciens combattants et la reconnaissance de la nation par l'intermédiaire d'un concours financier de l'État. Pour l'année 2007, le nombre de bénéficiaires se chiffre à 438 444.

Le plafond majorable de cette retraite mutualiste est déterminé, depuis 1998, par référence à un indice de point de pension militaire d'invalidité. La loi de finances 2003 a déterminé le plafond à 122,5 points d'indice. Il est important de souligner l'effort du Gouvernement lors du vote de la loi de finances pour 2003 puisqu'il avait été décidé d'augmenter le plafond de 7,5 points, pour le porter à 122,5 points.

Des amendements, adoptés respectivement par les commissions des finances et des affaires sociales et proposant une revalorisation du plafond de la rente mutualiste, vous seront présentés tout à l'heure.

Afin de répondre à l'attente de nombreux parlementaires et associations d'anciens combattants de la guerre d'Algérie, le ministre délégué aux anciens combattants a décidé de conduire une étude sur l'éventuelle attribution de la « campagne double » aux fonctionnaires et agents publics ayant participé à ce conflit. Cette étude a été confiée à M. Christian Gal, inspecteur général des affaires sociales.

M. Alain Néri. Il a fait son travail, lui !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Ses travaux ont permis d'entendre l'ensemble des parties concernées et d'actualiser les données disponibles sur cette question complexe.

Avant de communiquer les conclusions de ce rapport, le Gouvernement a saisi pour avis le Conseil d'État. La saisine – longtemps différée pour des raisons de procédure – a enfin abouti. Votre rapporteur spécial ne peut qu'inciter le ministre délégué à informer la représentation nationale…

M. Alain Néri. Ce serait la moindre des choses !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. …dès que l'ensemble des éléments sur le sujet sera en sa possession.

M. Alain Néri. Merci, monsieur le rapporteur spécial !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. J'en arrive aux budgets des principales actions contenues dans les trois programmes.

D’abord, 2,720 milliards d'euros sont consacrés à l'administration de la dette viagère. Les crédits destinés à la retraite du combattant augmentent donc de plus de 18 %, pour prendre en compte la hausse du nombre de points, mais également l'arrivée à l'âge de soixante-cinq ans d'une grande part des appelés du dernier contingent à avoir participé à la guerre d'Algérie. L'effectif global devrait atteindre le chiffre record de plus de 1,5 million de ressortissants ; ensuite, devrait s'amorcer une décroissance du nombre de bénéficiaires.

Les crédits destinés à la majoration par l’État des rentes mutualistes s’élèvent à 217,4 millions, en augmentation de 3,4 millions.

L’action de l’ONAC et de l’Institution des Invalides bénéficie d’un soutien continu de la part du Gouvernement, avec 45,7 millions d’euros de subventions pour charges de service public. Leur processus de modernisation touchant à son terme, la pérennité des deux opérateurs est dorénavant bien assurée.

Notons également le rôle des écoles de conversion de l’ONAC, qui offrent des formations d’avenir et dont l’objectif est de former 1 000 personnes par an. En 2006, l’ONAC a consacré 1,2 million d’euros à la formation.

Cent cinquante millions d’euros sont destinés à l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Ces crédits sont en baisse notable, car certaines catégories de bénéficiaires − notamment les orphelins − auront fait valoir leurs droits dans leur quasi-totalité. Par ailleurs, une majorité d’entre eux a opté pour des indemnisations sous forme de capital, et non pour l’attribution d’une rente annuelle. En revanche, le nombre de dossiers instruits pour l’indemnisation des victimes de spoliations est en nette augmentation de 30 %. Le montant moyen des indemnisations accordées au titre des spoliations est de 22 000 euros.

Il est à signaler que, à ce jour, ont été traitées plus de 17 000 demandes de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. De même, environ 18 000 décisions d’indemnisation sont intervenues en faveur des orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale.

Enfin, en ce qui concerne les plus jeunes, la Journée d’appel et de préparation à la défense sera dotée de 169 millions d’euros. Ces crédits sont en légère baisse, grâce aux efforts de rationalisation et d’automatisation. L’objectif fixé à la Direction du service national est de sensibiliser chaque classe d’âge à l’esprit de défense pour une JAPD de qualité à un coût maîtrisé.

Toutes ces mesures doivent bien évidemment être accompagnées d’une ambitieuse politique de la mémoire : 5,7 millions d’euros sont prévus à cet effet. C’est un chiffre en baisse, mais qui n’est pas significatif en raison notamment − et même si votre rapporteur spécial le regrette − de l’imputation des dépenses de personnel liées à cette action au sein du programme 212, « Soutien de la politique de la défense ».

Enfin, il convient de souligner que de bonnes pratiques de gestion publique ont été introduites dans le pilotage de cette mission. Pour tenir compte des recommandations formulées par la Cour des comptes et par le Parlement en 2005, le nombre d’objectifs et d’indicateurs a été réduit et recentré sur la performance.

À cet effet, constatant l’absence totale d’indicateurs pour le programme « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale », la commission des finances souhaite que − conformément à l’article 51, alinéa 5, de la LOLF − ces indicateurs soient fournis au Parlement, portant notamment sur le délai de traitement des dossiers.

Mes chers collègues, la législature qui touche à sa fin aura été inspirée par une politique ambitieuse et efficace, de nature à répondre aux attentes des anciens combattants. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. Henri Houdouin et M. Patrick Delnatte. La gauche n’a rien fait pendant quinze ans !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Monsieur le ministre délégué aux anciens combattants, soyez en remercié.

Il a été notamment mis fin à des situations inéquitables, parfois vieilles de plusieurs décennies, mais des droits nouveaux ont également été ouverts.

M. Patrick Roy. C’est du pur comique troupier !

M. Christian Vanneste. Il y a des vérités qui fâchent, mesdames, messieurs les socialistes !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. De nombreux dossiers ont été réglés et, nous le savons bien, il nous reste à en faire aboutir d’autres. Nous y réussirons grâce à la poursuite d’une démarche responsable (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) et partenariale avec les associations.

M. Patrick Roy. Vous ne serez plus là !

M. Maxime Gremetz. Poursuivons le combat !

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. En effet, compte tenu de leur ampleur, ces dossiers ont fait, tout au long de la législature, l’objet de consultations qui ont permis d’engager à la fois des actions nouvelles et de moderniser et de pérenniser les institutions du monde combattant.

C’est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à adopter, comme la commission des finances, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à exprimer ma fierté d’avoir eu l’honneur d’être rapporteur pour avis du budget des anciens combattants pour 2007.

M. Maxime Gremetz. On a les honneurs qu’on choisit !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. En effet, bien que, par son montant, il ne soit pas le plus important, ce budget n’en a pas moins une valeur à mes yeux essentielle : il nous permet de nous acquitter d’une dette éternelle, celle que nous avons contractée à l’égard de celles et de ceux qui risquèrent leur vie pour défendre la patrie en danger et qui restent aujourd’hui les témoins de ces périodes douloureuses de notre histoire. Mais c’est aussi la dette que nous avons à l’égard de tous leurs camarades morts au champ d’honneur et qui reposent dans les nécropoles nationales, dans les modestes cimetières communaux ou au bord des routes qui sillonnaient l’ancienne Union française.

De cette Union française, autrefois gloire de notre pays, il reste de nombreux soldats, que les civils ont surnommés « indigènes », tandis que les militaires métropolitains qui combattaient à leurs côtés les appelaient respectueusement « tirailleurs », « spahis », « goumiers » ou « turcos », et qui faisaient la fierté d’une armée qui n’a jamais renié la vaillance et le courage de ces soldats.

M. Maxime Gremetz. Mais qui les payait moins que les autres !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Nous pouvons donc nous réjouir de l’amendement qu’a déposé le Gouvernement et qui vise enfin à harmoniser le montant de la retraite du combattant et des pensions militaires d’invalidité pour tous les soldats de l’ancien Empire français, sans aucune exception : désormais, chaque année, 110 millions d’euros seront consacrés à cela. Cette disposition, évoquée par le Président de la République le 14 juillet dernier et annoncée au début du mois d’octobre, est pour moi la mesure phare de ce budget, qui associe reconnaissance, réparation et mémoire.

Le devoir de réparation se traduit également, cette année, par une augmentation de deux points de la retraite du combattant, dont le niveau d’indice sera porté à 37 points PMI à compter du 1er janvier 2007.

M. Alain Néri. Des promesses !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Jugée insuffisante par le monde combattant, cette mesure sera complétée par l’augmentation des crédits sociaux de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, à hauteur de 500 000 euros, afin de venir en aide aux ressortissants les plus démunis, qu’ils soient anciens combattants, pupilles de la nation ou conjoints survivants.

La situation financière des conjoints survivants préoccupe d’ailleurs tous ceux qui sont réunis aujourd’hui pour débattre de ce budget. Plusieurs d’entre nous ont déposé des amendements visant à créer une allocation différentielle, afin d’apporter une aide aux veuves ou conjoints survivants qui vivent en dessous du seuil de pauvreté ou qui disposent de bas revenus.

M. Jacques Desallangre. On en parlait déjà l’année dernière !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Sur ce sujet, monsieur le ministre, nous attendons tous de connaître votre arbitrage, d’autant que, pour avoir ausculté l’ONAC au cours des trois derniers mois, je reste convaincu que ses seuls crédits sociaux peuvent nous permettre d’assurer une telle aide.

De l’ONAC, il a justement été question dans le rapport pour avis que j’ai présenté la semaine dernière à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de notre assemblée. À l’heure où cette institution − créée pendant les heures les plus sombres de la Grande Guerre − fête son quatre-vingt-dixième anniversaire et où s’achève le contrat d’objectifs et de moyens pour 2003-2007, il m’était apparu essentiel de poser la question de l’avenir de l’ONAC. Au cours de la vingtaine d’auditions que j’ai menées et des trois déplacements que j’ai réalisés sur le terrain − à Rennes, à Laon et à Boulogne-Billancourt −, j’ai eu l’occasion d’affronter véritablement cette question. J’ai pu découvrir le travail considérable de ces femmes et de ces hommes de terrain, œuvrant au service des intérêts du monde combattant, mais aussi de l’ensemble de la société, parfois dans le silence, mais toujours par une action de proximité bienveillante.

Ce constat permet déjà d’anticiper sur la réponse à la question de l’avenir de l’ONAC : en effet, celui-ci a apporté la preuve qu’il pouvait s’adapter aux évolutions du monde contemporain et se moderniser. Spécificité bien française, disposant du statut d’établissement public administratif à caractère national, l’ONAC est, aux yeux de tous, la maison du combattant. Plus qu’une administration, il est reconnu comme une véritable institution. Ce statut spécifique se traduit dans les faits par une gestion paritaire des conseils d’administration − national comme départementaux − renforçant son enracinement dans la société.

Par ailleurs, l’ONAC dispose d’un budget propre, qui s’élevait, pour l’année 2005, à 110,8 millions d’euros, exclusivement consacrés à l’exercice de ses missions : reconnaissance, réparation, solidarité et mémoire.

La mission solidarité se caractérise par la diversité des types d’interventions − qui ne sont pas exclusivement financières − au profit des ressortissants dans le besoin, ainsi que par la multiplicité des publics concernés. Cette réalité du terrain est confirmée par les chiffres établis au niveau national, puisque, en 2005, plus de 60 000 dossiers ont été instruits dans les différents départements et 58 804 entretiens individuels réalisés.

La politique de mémoire s’est beaucoup développée à partir des années 1980. L’ONAC joue d’ailleurs un rôle actif en ce domaine, aux côtés d’autres acteurs, tels le Haut Conseil à la mémoire combattante, placé auprès du Président de la République et dont l’ONAC assure le secrétariat, ou la Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la défense, la DMPA.

L’action de terrain des délégués à la mémoire combattante est particulièrement déterminante, comme j’ai eu l’occasion de le constater à Rennes ou près de Laon, sur le Chemin des Dames.

Il est cependant à regretter que les directions départementales ne disposent pas de moyens suffisants pour assurer l’entretien ou la rénovation des lieux de mémoire et soient condamnés à faire assaut d’imagination et de débrouillardise.

Malgré cela, l’ONAC semble paré pour s’adapter aux défis du xxe siècle, différents exemples montrant que l’Office affronte déjà aujourd’hui les grands défis de son avenir.

Tout d’abord, en matière de solidarité, la question de la situation des conjoints survivants les plus démunis semble avoir trouvé une réponse, sur la base des conclusions du groupe de travail qui s’est penché sur ce sujet.

M. Alain Néri. Il n’y a rien du tout, pour le moment !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Par ailleurs, il faut saluer l’action considérable accomplie par les écoles de reconversion professionnelle de l’ONAC au service des personnes handicapées, ainsi que la participation toute récente de ces écoles à la bataille pour l’emploi, comme j’ai eu l’occasion de le constater à l’école Jean Janvier de Rennes.

Ensuite, les transformations des neuf maisons de retraite de l’ONAC constituent un autre exemple, à l’image de la modernisation de l’établissement de Boulogne-Billancourt. Grâce à la signature de conventions tripartites passées entre les établissements, les conseils généraux et les directions départementales des affaires sanitaires et sociales, ces maisons s’adaptent aux évolutions législatives en matière médico-sociale. La politique de labellisation des établissements, poursuivie par l’ONAC, va également dans le sens d’une amélioration accrue de la réponse à de nouveaux besoins liés à l’évolution démographique.

Enfin, la politique de mémoire se transforme elle aussi au gré des mutations du temps présent, en particulier par la mise en œuvre de deux concepts novateurs, le tourisme de mémoire et la mémoire partagée.

Ainsi donc, en ce qui concerne la question de l’avenir de l’ONAC à moyen et à long terme, il faut d’abord rappeler que, en 2002, à la veille du contrat d’objectifs et de moyens, la pérennité de l’ONAC n’était pas assurée. Par ailleurs, un premier bilan d’application du contrat d’objectifs et de moyens, sur la période 2003-2005, a montré qu’il avait permis une modernisation de l’Office et garanti ses sources de financement.

C’est dans ce cadre qu’a été menée une première réorientation des missions de reconnaissance et de réparation vers la politique de mémoire. On peut en effet se demander si la mémoire et la solidarité, sinon la seule mémoire, ne constitueront pas à long terme les seules missions prises en charge par l’Office. Encore faudra-t-il répondre à diverses questions : comment l’ONAC peut-il affronter seul ce défi, en particulier sans un partenariat avec l’éducation nationale ? Quels moyens budgétaires accompagneront cette évolution ? Quelles que soient les réponses à ces questions, la mémoire n’en restera pas moins un héritage commun à conserver, à faire vivre, mais surtout à entretenir pour que le sacrifice des différentes générations du feu de tombe pas dans l’oubli.

Or, j'ai le regret de constater que la mémoire reste le parent pauvre de ce budget, qui honore à juste titre les survivants, mais semble ignorer les morts.

Si nous sommes unanimes à vouloir augmenter le plafond de la rente mutualiste ou le montant de la retraite du combattant, aucun d'entre nous n'a proposé d'amendements tendant à augmenter les crédits nécessaires à l'entretien et à la restauration des sépultures de soldats français, parfois laissées à l'abandon faute de crédits. Je pense au cimetière français de Diégo-Suarez, à celui de Bir-Hakeim, au monument Pershing-Lafayette de Versailles – et je pourrais poursuivre longuement mon inventaire.

Les 1 400 000 combattants morts entre 1914 et 1918, les 535 000 victimes françaises de la Seconde Guerre mondiale ou encore les soldats tués en Indochine, en AFN ou dans le cadre des OPEX, j'ai l'impression que nous les avons oubliés, ce qui est un comble lorsqu'il est question du devoir de mémoire !

Je sais que ce genre d'argument pèse peu en termes électoraux (Exclamations sur divers bancs),...

M. François Rochebloine. Ne parlez pas en termes électoraux !

M. Jacques Desallangre. Il y songe beaucoup !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. ...puisque l'on a heureusement cessé de faire voter les morts.

Pour autant, il est de notre devoir d'élus et de représentants de la nation de nous fixer pour les prochaines années de véritables objectifs en ce domaine,...

M. Alain Néri. Vous ne serez plus là pour les appliquer !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. ...sans quoi l'œuvre des associations sera restée vaine, l'avenir de l'ONAC remis en question et notre identité effacée, puisque, comme le rappelait à juste titre Lamartine, « c'est la cendre des morts qui créa la patrie ».

Si l'État ne dispose pas de crédits suffisants pour entretenir les tombes de ses soldats morts au champ d'honneur, alors encourageons la générosité publique, comme savent le faire les Britanniques avec leur œuvre du Coquelicot, dont les recettes assurent l'entretien de l'ensemble des cimetières du Commonwealth.

C'est la raison pour laquelle cette année, avec certains de mes collègues, j'ai souhaité soutenir la noble action du Bleuet de France en arborant son symbole la semaine dernière au cours de la séance d'actualité,...

M. François Rochebloine. Sa distribution a été sélective !

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. ...ainsi qu'aujourd'hui devant vous. Il faut réfléchir à l'avenir de cette action, déclarée cette année grande cause d'utilité publique. Le Bleuet de France est en effet une œuvre étroitement liée à l'ONAC, que ce soit par son histoire, par sa gestion et par les objectifs qu'ils partagent.

Je conclurai mon propos par le devoir de reconnaissance – cette dette dont je parlais dans mon propos introductif – que la nation doit avoir à l'égard des combattants de toutes les générations du feu. Le prix du sang ne doit pas varier selon les conflits, selon leur caractère politique ou non : une parfaite égalité doit régner entre les différentes générations de combattants. Ainsi, dès lors que des mesures – notamment concernant l'attribution de la carte du combattant – ont été prises en faveur des anciens combattants d'Algérie, les mêmes règles doivent s'appliquer à la deuxième ou à la quatrième génération du feu.

Peut-on encore refuser la carte du combattant à des soldats ayant servi entre mai et juillet 1940 dans des unités déclarées combattantes et s'étant battus entre Sedan et Bordeaux, au seul motif qu'ils ne justifient pas de 120 jours de combats, en raison de l'armistice signé par Pétain ? Nos unités engagées depuis vingt-cinq ans en Afrique, en ex-Yougoslavie ou en Afghanistan, courraient-elles à ce point moins de risques que leurs aînés, pour refuser de la leur attribuer dans les mêmes conditions ? Une telle ligne de conduite ne me semble pas tenable encore très longtemps.

En tout cas, bien que ces avancées me paraissent essentielles, je ne ferai pas le reproche au Gouvernement de ne pas les avoir traduites dans son budget. En effet, toutes les autres dispositions que j'ai énumérées démontrent que ce budget est très satisfaisant puisqu’il gomme enfin les inégalités qui existaient entre anciens combattants, qu’il réévalue la retraite du combattant et qu’il assure une fois de plus une augmentation des crédits sociaux de l'ONAC.

Toutes les réformes, aussi importantes et aussi justes soient-elles, ne peuvent se faire en une seule fois. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. C’est vrai, mais en quatre ans vous avez fait du surplace !

M. Patrick Beaudouin. Et les quatorze ans de Mitterrand ?

M. Marc Bernier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelle Aussi, monsieur le ministre, je voterai ce budget, en espérant que nous-mêmes ou nos successeurs auront à cœur de réparer l’injustice qui demeure entre les générations du feu. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Viollet, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées.

M. Jean-Claude Viollet, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la suspension du service national depuis 1997 continue à susciter des inquiétudes quant au maintien, sur le long terme, d'un lien étroit entre l'armée de la République et la nation. Même si la bonne opinion qu'ont les Français de leurs armées atteint un niveau élevé et sans précédent, cet état de l’opinion ne saurait sans danger être considéré comme définitivement acquis.

De ce point de vue, la mise en œuvre de la LOLF constitue un progrès, avec la création d'un programme « Liens entre la nation et son armée », décrivant les quatre principales politiques menées dans ce domaine par le ministère de la défense : Journée d'appel et de préparation à la défense, politique de mémoire, promotion et valorisation du patrimoine culturel et, enfin, communication.

Les montants de crédits concernés restent modestes au regard des masses du budget de la défense, mais ils ne doivent pas pour autant être négligés, même si ceux concernant, par exemple, le coût d'opérations de rénovation des locaux de stockage des archives peuvent paraître limités, car cette rénovation est souvent indispensable et urgente sous peine de dommages irréversibles et inacceptables.

En 2007, les crédits du programme 167 baissent globalement de 6,6 % en autorisations d'engagement et de 3 % en crédits de paiement par rapport à 2006. II convient toutefois d'aborder une telle comparaison avec une grande prudence en raison des mouvements et transferts intervenus entre la loi de finances de 2006 et le projet de loi de finances pour 2007.

S’agissant par ailleurs du périmètre retenu, certains choix opérés pour la délimitation du programme apparaissent peu pertinents en ce qu’ils ne permettent pas de disposer d'une vision exhaustive de l'ensemble des moyens mis au service de plusieurs politiques, telles celles relatives aux musées ou à la communication.

S'agissant de l'action « Communication » et, tout particulièrement, de l'ECPAD, je ne reviens pas en détail sur l'important travail mené pour la sauvegarde des films et photographies de son fonds exceptionnel. L'établissement cherche à enrichir ce dernier par une politique de collecte qui s'appuie sur l'appel aux bonnes volontés des donateurs. Compte tenu de la valorisation actuelle des documents photographiques anciens sur le marché de l'art, il ne serait pas inutile de réfléchir à une dotation permettant certaines acquisitions, afin d'éviter qu'une partie du patrimoine national soit dispersée à l'étranger.

Par ailleurs, un effort doit être consenti pour les ressources humaines, afin de doter le pôle Archives des moyens nécessaires.

En ce qui concerne la DICoD, l'indicateur de performance retenu est purement financier. Or, en matière de communication, la qualité de la dépense s'exprime assez largement par l'image des armées. Il faut donc poursuivre la réflexion pour créer de nouveaux indicateurs de performance.

S'agissant du patrimoine et de la mémoire, je me contenterai ici d'aborder les questions relatives au service historique des armées, le SHD – service historique de la défense. Le principal défi auquel ce dernier doit faire face porte sur les infrastructures, notamment pour lutter contre l'engorgement et pour assurer des conditions de conservation conformes aux normes, ce qui est actuellement loin d'être le cas. Dans ce domaine, trois grands projets sont envisagés d'ici à 2010 pour un montant de l’ordre de 20 millions d'euros. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer quel degré de priorité est accordé à ce programme d’investissement ? L'effort à réaliser pourrait être accompagné d'une réflexion sur une réduction du nombre des implantations du SHD, certaines d'entre elles n'accueillant plus de dépôts nouveaux depuis plusieurs années.

J’en viens, pour terminer, à la Journée d’appel de préparation à la défense – la JAPD –, qui est, de loin, la plus importante des quatre actions du programme et qui en constitue la politique la plus connue, et parfois la plus critiquée.

Si une journée ne peut, à l'évidence, fournir qu'une sensibilisation aux questions de défense, disposer de l'ensemble d'une classe d'âge, fût-ce pour un temps aussi bref, n'est pas négligeable. Pour les armées, il s'agit d'une occasion exceptionnelle de se faire mieux connaître. Elles doivent prendre davantage conscience de l'importance des messages qu'elles peuvent adresser aux jeunes à cette occasion, car ils peuvent avoir au moins autant d'effet que certaines campagnes de communication.

Par ailleurs, l'attractivité de la JAPD doit continuer à être améliorée, même si l'indicateur mesurant le taux de satisfaction de l’« usager » témoigne de bons résultats. La maîtrise du coût unitaire doit également constituer un objectif, et il conviendra à cet effet de continuer à étudier les alternatives possibles aux modalités actuelles de sous-traitance du module secourisme notamment.

Sans être prioritaire, le rôle social de la JAPD a pris de l'ampleur, notamment par la détection de l'illettrisme et des difficultés sociales des jeunes. Son rôle de filtre a par ailleurs été accru, avec la mission qui lui a été confiée de détecter les jeunes susceptibles d'être volontaires pour l'insertion dans le cadre du dispositif « Défense deuxième chance ». Il semble toutefois que l'établissement public d'insertion de la défense – l’EPIDe – s'appuie désormais pour son recrutement davantage sur le réseau des missions locales, sur les PAIO et, aujourd’hui, sur les maisons de l'emploi, que sur la JAPD.

On peut par ailleurs s’inquiéter des difficultés matérielles et financières, mais également humaines rencontrées avec la montée en charge extrêmement rapide du dispositif « Défense deuxième chance ». La pérennité de l'EPIDe passe désormais par l'inscription de ressources certaines et adaptées aux objectifs très ambitieux. Elle suppose aussi qu'une véritable dimension interministérielle soit donnée à une démarche qui, à ce jour, n’associe que deux ministères, la défense et l’emploi.

Pour conclure cette présentation du programme « Liens entre la nation et son armée », on ne peut faire l'économie d’une double réflexion : d’une part, sur l'évaluation de la qualité de la dépense, dans la mesure où les indicateurs de performance du programme relèvent malheureusement avant tout d'un souci comptable ; d’autre part, sur la lisibilité des politiques menées, la dispersion encore trop grande des moyens entre différents programmes, missions et actions continue à faire obstacle à une véritable cohérence des politiques menées.

Lors de la présentation de mon rapport à la commission, je m'en suis remis à la sagesse de celle-ci. Elle a émis un avis favorable au programme « Liens entre la nation et son armée » ainsi qu'à l'adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Nous en arrivons aux orateurs inscrits.

La parole est à M. Alain Néri.

M. Robert Lecou. On va faire dans la finesse !

M. Alain Néri. Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous voici réunis pour examiner le dernier budget de la législature, fait, comme d’habitude, de tours de passe-passe d’illusionnistes. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe socialiste.– Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Daniel Spagnou. Ce n’est pas vrai !

M. Alain Néri. En effet, monsieur le ministre, vous annoncez sans rire que les anciens combattants ont la chance de voir augmenter la dotation qui leur est destinée. La réalité ne résiste pas à l’analyse d’un élève de deuxième année de cours élémentaire : alors que le montant de votre budget était de 3 613,6 millions en 2006, il n’est plus que de 3 484 millions, soit une diminution de 3,58 % et, en tenant compte de l’inflation, de 5,4 %.

Il n’y a donc pas lieu, monsieur Mathis, monsieur Bernier, de se réjouir comme vous l’avez fait. En vous écoutant, je me demandais d’ailleurs si je devais vous plaindre de défendre l’indéfendable ou si je devais être admiratif devant l’exercice de funambule que vous réalisiez. Je pencherais plutôt pour la première solution.

Il y a bien, il est vrai, la mesure de décristallisation annoncée, dont nous nous réjouissons tous. Permettez-moi cependant de vous faire remarquer qu’elle aurait pu être prise dès votre arrivée en 2002. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Pourquoi ne l’a-t-elle pas été en 2001 ?

M. Jean Dionis du Séjour. Dès 1997 même !

M. Michel Voisin. Dès 1981 même !

M. Alain Néri. Vous avez bien raison, mes chers collègues, de vous défouler : la suite sera encore plus dure !

M. le président. Poursuivez je vous prie, monsieur Alain Néri.

M. Alain Néri. Dois-je vraiment rappeler que la commission mise en place par M. Jacques Floch et M. Jean-Pierre Masseret et présidée par M. Le Pors, conseiller d’État, avait remis ses conclusions en février 2002 – je parle sous le contrôle de notre collègue, M. Colombier, qui était membre comme moi de cette commission ? Vous aviez donc, monsieur le ministre, tous les éléments pour trancher dès le mois de juin 2002, lorsque vous êtes arrivé aux responsabilités.

M. Patrick Roy. Pourquoi ne l’a-t-il pas fait ?

M. Alain Néri. Pourtant, il a fallu attendre cinq ans et le film Indigènes pour que Bernadette dise à Jacques : « Il faut faire quelque chose ». (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Heureusement qu’il y a eu ce film !

M. Patrick Roy. Vive le cinéma !

M. Alain Néri. Je me demande même si, pour régler tous les problèmes des anciens combattants, il ne faudrait pas remplir les cinémathèques pour obtenir enfin des résultats ?

De plus, vous nous avez encore dit des menteries. Au congrès de la FNACA à Lyon, au mois de juillet, vous nous avez dit avoir prévu la décristallisation. Alors comment se fait-il qu’aucun million...

M. Jacques Desallangre. Pas un centime !

M. Alain Néri. ...sur les 110 millions correspondants ne figure au budget ?

Mme Martine David. C’est bien une menterie.

M. Alain Néri. Et nous attendons toujours l’amendement du Gouvernement à ce sujet. Ce n’est pas sérieux ! Vous nous mentez constamment ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Cela ne concerne pas ce budget !

M. Alain Néri. Autre sujet qui fâche, monsieur le ministre, la retraite du combattant. L’an dernier, vous nous avez fait un exercice d’illusionniste qui n’a pas résisté à la sagacité des associations d’anciens combattants ni à celle de la représentation nationale : alors que vous nous avez annoncé que la prestation serait augmentée de deux points, soit deux fois 18 millions, vous n’avez inscrit au budget que 18 millions. La mesure ne s’est en effet appliquée qu’à partir du 1er juillet pour le second versement semestriel.

Pour 2007, vous faites un effort considérable : deux points d’un coup ! J’ai cependant compté : sachant que la valeur du point est de 13,98 euros, vous attribuez donc à chaque ancien combattant une augmentation de 2,19 euros par mois,…

M. Michel Voisin. C’est mieux que ce que vous avez fait !

M. Alain Néri. …soit de quoi acheter deux baguettes – et il restera 19 centimes pour la noisette de beurre ! (Sourires.) L’effort n’est finalement pas si considérable que cela.

Les rapporteurs ont parlé de bilan de législature. Eh bien, monsieur le ministre, vous vous étiez engagé à augmenter de quinze points la retraite du combattant sur la législature. Vous n’en avez fait que quatre, soit 0,80 point par an. Il n’y a pas de quoi se glorifier. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. C’est mieux que zéro !

M. Alain Néri. Cela signifie que vous avez augmenté la retraite du combattant de 10,55 euros. Ce n’est pourtant pas de mendicité qu’il s’agit.

M. Jean-Louis Dumont. C’est mesquin !

Mme Martine David. C’est une aumône !

M. Alain Néri. C’est une insulte envers le monde combattant ! (interruptions sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Il est un autre engagement à propos duquel vous vous êtes moqué de la représentation nationale et des associations d’anciens combattants, celui concernant l’allocation différentielle pour les veuves.

L’an dernier, nous avions voté un amendement que vous nous avez fait retirer au motif que vous alliez mettre en place une commission. Comme le disait Clemenceau, quand on veut enterrer un problème, on crée une commission. Sans doute êtes-vous un bon élève de Clemenceau, au moins dans ce domaine-là.

Aujourd’hui, vous nous demandez d’attendre les conclusions de cette commission mais, dans le même temps, vous annoncez vouloir confier le dossier à l’ONAC,…

M. Patrick Beaudouin. Cela pérennise l’ONAC !

M. Alain Néri. …quelle que soit notre décision à nous, la représentation nationale. Je trouve cette façon de faire un peu cavalière. Une telle attitude n’a qu’un mérite, pour vous, je le comprends bien, celui de repousser la décision.

M. Daniel Spagnou. Ce n’est pas vrai !

M. Alain Néri. Si vous acceptiez l’amendement que nous discuterons tout à l’heure qui propose d’affecter 20 millions d’euros au financement de l’allocation différentielle pour les veuves, nous pourrions immédiatement agir en faveur des 94 000 veuves qui attendent.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Eh oui ! Nous verrons si vous le votez.

M. Alain Néri. Vous avez encore une occasion de vous rattraper : l’amendement qui a été déposé par votre majorité proposant 5 millions étant notoirement insuffisant, reprenez le nôtre à votre compte. Et si vous manquez d’argent, je vous rappelle que vous pourriez utiliser l’allocation différentielle que nous avons créée pour les anciens combattants d’Algérie chômeurs qui avaient quarante annuités de cotisations et moins de soixante ans.

Mme Martine David. Exactement !

M. Alain Néri. Ils recevaient 5 700 francs par mois. Mais, aujourd’hui, les anciens combattants d’Algérie ont tous atteint l’âge de la retraite. Donc, cette allocation différentielle ne sert plus. Prenez donc cet argent pour financer l’allocation différentielle pour les veuves, le problème sera réglé et ce sera porté à votre crédit.

Mme Martine David. On l’a déjà dit à M. le ministre, mais il n’écoute pas.

M. Alain Néri. Nous aurions ainsi une occasion de nous réjouir, et vous auriez au moins laissé une trace dans votre action ministérielle.

Mme Martine David. Il ne veut pas le faire !

M. Patrick Roy. Alain Néri est excellent !

M. Alain Néri. Monsieur le ministre, je voudrais évoquer un autre sujet qui fâche : la campagne double. Je sais que vous n’avez pas apprécié que je vous dise que vous aviez proféré un mensonge d’État, mais je suis obligé de le répéter : vous avez fait un mensonge d’État, et ça, ce n’est pas bien. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Georges Colombier. Il ne faut pas exagérer !

M. Alain Néri. Une fois encore, vous nous avez dit que vous vouliez créer une commission, et M. Christian Gal a été amené, en tant qu’inspecteur général des affaires sociales, à rédiger un rapport. Vous aviez également affirmé que dès que vous seriez en possession du rapport, vous le communiqueriez au Conseil d’État. Tout le monde vous a cru, jusqu’au jour où, comme Sœur Anne, ne voyant rien venir, nous nous sommes interrogés, et avec nous les associations d’anciens combattants. Celles-ci ont questionné le Conseil d’État et là, stupéfaction, indignation, le Conseil d’État a répondu qu’il voulait bien statuer mais qu’il n’avait pas reçu le document.

Mme Martine David. C’est incroyable !

M. Patrick Roy. C’est scandaleux !

M. Alain Néri. Là, monsieur le ministre, vous y êtes allé un peu fort. Vous auriez dû avoir le courage de dire la vérité.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. On ne ment pas aux anciens combattants !

M. Alain Néri. Monsieur le ministre, la référence à une campagne double était simplement l’occasion de traduire dans les faits la proposition de loi socialiste, adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale et par le Sénat et promulguée en octobre 1999, qui a permis de reconnaître officiellement qu’en Algérie, c’était la guerre. La guerre d’Algérie étant reconnue officiellement, les anciens combattants d’Algérie doivent bénéficier des mêmes droits que les anciens combattants des autres conflits, en particulier sur la campagne double. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Roy. Remarquable, monsieur Néri !

M. Jean-Louis Dumont. Quel talent !

M. Alain Néri. Monsieur le ministre, j’aimerais vous faire plaisir, vous féliciter, mais je ne le peux pas, et je vais aborder un autre sujet qui fâche : le plafond de la retraite mutualiste.

Nous, nous relevions régulièrement le plafond de 5 points par an, ce qui fait que, en une législature, le plafond avait été augmenté de 25 points. De plus, nous avions pris une mesure transformant la retraite mutualiste à partir d’une somme forfaitaire en points d’indice. D’ailleurs, le Premier ministre ne s’y est pas trompé, puisqu’il nous a chaleureusement félicités de cette décision par un courrier envoyé le 5 octobre 2006 au président de notre groupe Jean-Marc Ayrault, dans lequel il note que le plafond de la rente mutualiste fait d’ores et déjà l’objet d’une revalorisation annuelle fondée sur l’évolution du traitement des fonctionnaires grâce à la mesure que nous avions prise. Merci.

À votre arrivée au ministère, vous aviez déclaré que nous allions voir ce que nous allions voir et vous aviez annoncé un relèvement de 7,5 points d’un coup. Là, nous nous sommes dit : vraiment, il est fort. (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.) Mais l’effort était trop important, et vous n’avez pas pu poursuivre. Vous vous êtes arrêté en route et, depuis quatre ans, vous n’avez rien fait de plus.

M. Patrick Roy. Eh oui !

M. Alain Néri. Cette année, subitement, vous nous proposez une hausse homéopathique de 2,5 points. Au total, vous arriverez à 125 points. C'est-à-dire que l’engagement des 130 points ne sera pas atteint. Une fois de plus, ce n’était que des promesses – Dalida aurait dit « Paroles, paroles ». (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Roy. Elle l’aurait chanté !

M. Alain Néri. Dans un autre domaine, je trouve qu’il serait juste d’abaisser de soixante-quinze à soixante-dix ans l’âge de jouissance d’une demi-part fiscale supplémentaire accordée aux titulaires de la carte de combattant.

Nous pourrions peut-être aussi nous pencher sur le problème des RAD et des KHD qui n’est toujours pas réglé, mais je sais bien ce n’est pas entièrement de votre responsabilité, monsieur le ministre.

Quant à l’ONAC, nous nous félicitons des 500 000 euros supplémentaires, dont il va bénéficier. Je remarque simplement que les crédits sociaux de l’ONAC étaient régulièrement augmentés par les précédentes majorités, par le biais d’un prélèvement sur la réserve parlementaire. L’important, c’est qu’il y ait de l’argent qui soit mis à disposition de ceux qui en ont le plus besoin.

Je suis heureux d’avoir entendu le rapporteur dire que nous ne devions pas nous inquiéter quant à la pérennité de l’ONAC, mais je me demande alors pourquoi vous n’avez pas voté régulièrement nos amendements qui demandaient que la pérennité de l’ONAC soit assurée au-delà des contrats d’objectifs et de mission.

Autre problème : les orphelins de guerre. C’est vrai que des progrès ont été réalisés.

M. Jean Dionis du Séjour. Ah ! Il est bon, Néri, quand il est raisonnable !

M. Alain Néri. Toutefois, monsieur le ministre, il faut aller au bout, et, en particulier, je souhaiterais, je vous l’avais dit l’an dernier, que les orphelins victimes de la barbarie nazie soient tous traités de la même façon et donc que ceux dont les parents sont morts les armes à la main dans les combats de la résistance ne soient pas exclus de la mesure. Il est urgent de prendre cette mesure parce qu’il ne peut pas y avoir de traitement à deux vitesses des orphelins de guerre : ceux dont les parents dont les combats de la résistance ont permis la libération de la France et le rétablissement de la République doivent être reconnus dans leurs droits.

M. Michel Voisin et M. Daniel Spagnou. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ?

M. Patrick Roy. Quelle mauvaise foi ! C’est nous qui avons commencé !

M. Michel Voisin. Par clientélisme !

M. Alain Néri. Il est un autre sujet qu’il faudra bien trancher, celui du 19 mars. Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas continuer ainsi. La guerre d’Algérie, qui a longtemps été une guerre sans nom – il a fallu la proposition de loi socialiste pour qu’elle soit reconnue officiellement en 1999 –…

M. Patrick Roy. Enfin.

M. Alain Néri. …doit pouvoir bénéficier, comme les autres conflits, d’une date historique et symbolique pour la mémoire, le recueillement et le souvenir de toutes les victimes civiles et militaires de ce conflit. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Dumont. Et une date unique !

M. Alain Néri. Une seule date s’impose à nous, celle du 19 mars.

M. Michel Voisin. Pourquoi n’êtes-vous pas allés jusqu’au bout ?

M. Alain Néri. Nous ne pouvons pas accepter, vous le savez bien, la mascarade du 5 décembre, qui ne correspond à rien, si ce n’est à un trou dans l’agenda du Président de la République.

M. Patrick Beaudouin. Ces propos sont scandaleux !

M. Alain Néri. Celui-ci était indisponible à la date prévue, le 27 novembre, alors on a pris le 5 décembre. Je vous l’ai dit l’autre jour, vous auriez pu tout aussi bien choisir le 1er avril. Ce n’est pas sérieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Loncle. C’est même lamentable !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Cela ne veut rien dire !

M. Alain Néri. C’est une façon indigne de traiter les anciens combattants d’Algérie. Reconnaissez la date du 19 mars, ce sera l’honneur de la nation et celui de la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Enfin, je souhaiterais, parce qu’ayant répondu à l’appel de la nation à vingt ans, les anciens d’Algérie ont aussi contribué à sauver la République, notamment en s’opposant au putsch des généraux félons d’Alger, que tous ceux qui sont tombés en Algérie se voient reconnus et que sur les actes d’état civil figure l’inscription « mort pour la France » à condition qu’ils soient tombés dans le respect de la République et des institutions de la République.

Voilà, monsieur le ministre, des mesures qui pourraient être prises, dont certaines ne coûtent pas cher.

En conclusion, vous comprendrez bien, monsieur le ministre, que le groupe socialiste votera contre votre budget parce que ce dernier est indéfendable. Finalement, le principal reproche que je vous ferai, ce n’est pas de n’avoir pas fait grand-chose, même si l’an dernier, je vous avais dit que vous étiez d’une inefficacité jamais égalée. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Non, ce que je vous reproche le plus aujourd’hui, au terme de la législature, ce que vous reproche le monde combattant, c’est de n’avoir pas dit la vérité.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Ces propos sont scandaleux !

M. Bernard Pousset. Les socialistes auraient-ils toujours dit la vérité ? On peut en douter.

M. Alain Néri. Si seulement vous nous aviez dit la vérité, peut-être ne serions-nous pas en train de nous fâcher. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Daniel Spagnou. Aucun respect de la fonction !

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce matin, nous examinons les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ». Toutefois, au-delà de cette importante discussion budgétaire, l'heure est au bilan. Nous arrivons en effet au terme d'une législature complète et nous sommes donc en mesure d'évaluer les quelques avancées enregistrées durant cinq années, et surtout de les mettre en perspective avec les engagements pris et les attentes du monde ancien combattant. C'est ainsi qu'en toute objectivité, sans langue de bois, monsieur le ministre, je m'apprête à vous préciser ce que nous pensons de votre bilan et des principaux aspects du contentieux entre les pouvoirs publics et le monde combattant, contentieux certes ancien mais que vous n'avez pas voulu prendre en considération comme tel.

Si mes propos sont parfois sévères, je crois toujours avoir personnellement gardé la même ligne de conduite, reconnaissant que la mission est difficile; les contraintes nombreuses, les marges étroites, et les arbitrages souvent défavorables. Cependant, je persiste à penser que là où il y a une volonté, il y a un chemin.

M. Alain Néri. Eh oui !

M. François Rochebloine. Puis, n'oublions jamais que la nation a une dette envers les anciens combattants. Et ce ne sont pas, dans le contexte actuel, les effets d'annonce et la médiatisation à outrance d'une politique spectacle qui doivent nous faire changer d'opinion.

M. Gilles Artigues. Très bien !

M. François Rochebloine. Regardons de plus près la décision récente et très médiatisée prise par le Président de la République concernant le dossier de la « décristallisation » que nous suivons tous depuis de nombreuses années, aussi bien les responsables des organisations du monde combattant que les parlementaires.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Le Président de la République ne devait pas savoir avant !

M. François Rochebloine. Qu'avons-nous constaté ?

Il a fallu la sortie d'un film – par ailleurs remarquable – pour rendre enfin possible ce que l'on nous avait dit impossible. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Christophe Lagarde. Le Parlement n’a jamais été entendu, c’est vrai.

M. François Rochebloine. Vous m'accorderez qu'il y a là de quoi méditer sur l'état de notre démocratie parlementaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)

Certes, voilà déjà quelques années, sous la précédente législature et sous la pression conjointe des associations du monde combattant et des parlementaires et après l'arrêt Diop du Conseil d'État, le Gouvernement avait enfin accepté la création d'une commission chargée d'étudier la décristallisation. Le processus était engagé, vous l'aviez poursuivi, monsieur le ministre, mais timidement.

M. Alain Néri. Très juste !

M. François Rochebloine. Sur ce point, l'histoire retiendra l'existence, bien que tardive, d'un consensus et d'une réelle continuité de l'action au niveau gouvernemental, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Je sais que nombre d'organisations du monde combattant ont défendu le principe de l'égalité des droits depuis l'origine, montrant ainsi qu'elles n'étaient pas enfermées dans des revendications à caractère catégoriel.

Aujourd'hui, les choses s'accélèrent après le film Indigènes, qui est, reconnaissons-le, un bel hommage aux tirailleurs africains de la Seconde Guerre mondiale. Je dis bravo, il s'agissait d'une question d'honneur pour la France !

M. Jacques Desallangre. C’est ici que cela aurait dû être discuté, pas au cinéma !

M. François Rochebloine. Par voie d’amendement, 110 millions d’euros de dépenses non prévues initialement viendront compléter votre budget, monsieur le ministre, lequel devrait en conséquence ne baisser que de 0,54 % au lieu des 3,58 % que faisait apparaître la comparaison des budgets 2007 et 2006. Cette nouvelle baisse vient s'ajouter aux 8,51 % résultant des quatre exercices précédents.

En clair, la « décristallisation » ne doit pas occulter les insuffisances du budget pour 2007, ni faire oublier celles des exercices passés, ce qu’a pointé de manière unanime l’ensemble des associations du monde ancien combattant. Le budget diminue encore, mais faut-il préciser qu’il n’a jamais été dans nos intentions, pas plus de celles du monde combattant, de demander l’augmentation des crédits de la mission dont vous avez la responsabilité. Monsieur le ministre, nous souhaitons simplement, comme le monde combattant, son maintien de manière à régler, une bonne fois pour toutes, les principaux points du contentieux avec le monde combattant.

Il est du devoir de la nation de prendre en considération les différentes situations qui ont pu être pointées, sachant que nous sommes non pas sur le registre de l’assistanat, mais bien au contraire dans une logique de réparation. Les quelques mesures nouvelles programmées vont dans le bon sens, mais avouez qu’elles sont nettement insuffisantes. Comme chaque année, reprenons l’énumération.

Premièrement, le relèvement du montant de la retraite du combattant. L’objectif des quinze points que vous vous étiez fixé au début de cette législature ne sera pas atteint. Certes, après les deux points au 1er juillet 2006, vous nous proposez deux nouveaux points supplémentaires, et ce dès le 1er janvier 2007. Cela est positif, mais insuffisant. C’est pour cela que j’ai déposé un amendement modeste en faveur de deux points supplémentaires, ce qui ferait six points de gagnés pour cette législature…

M. Jean Dionis du Séjour. C’est très bien ! Il faut le faire !

M. François Rochebloine. …et correspondrait à deux années de votre engagement, monsieur le ministre. A cet égard, il est plus que jamais nécessaire d’être vigilant quant au maintien du principe de droit à réparation.

Deuxièmement, le plafond majorable de la rente mutualiste : les 130 points auraient dû être atteints en 2007, alors qu’on en reste à 122,5 points. Aussi, j’espère que vous accepterez l’amendement tendant à une revalorisation de 2,5 points que j’ai déposé, comme l’a d’ailleurs fait mon collègue et ami Georges Colombier, dont l’amendement a été accepté en commission des affaires sociales. Ce serait un acte positif pour le monde combattant.

M. Georges Colombier. Très bien !

M. François Rochebloine. Mais là encore, quoi qu’il en soit, les engagements pris d’atteindre les 130 points ne seront pas respectés. Je le regrette profondément, ainsi que mes collègues Nicolas Perruchot, Jean-Christophe Lagarde, François Sauvadet, Gilles Artigues et Jean Dionis du Séjour.

M. Alain Néri. Et tutti quanti !

M. François Rochebloine. Le troisième point concerne plus particulièrement l’aide en faveur des conjoints survivants les plus démunis avec l’attribution d’une allocation différentielle de solidarité chère à Michel Bouvard, qui avait déposé, l’an dernier déjà, un amendement qu’il avait retiré, ce que je regrette, car il aurait permis de faire avancer les choses plus rapidement.

M. Jean Dionis du Séjour. Cette année, cela sera mieux !

M. François Rochebloine. Un groupe de travail a été constitué, et je me dois de le saluer en soulignant la contribution du monde combattant, et en particulier celle de mon ami ligérien Michel Huet, déjà auteur d’une réflexion pertinente sur le coût de la retraite anticipée en fonction du temps passé en Algérie, qui malheureusement ne fut pas prise en compte à l’époque. Comme mon collègue Jean Dionis du Séjour, je regrette que vous n’ayez pas jugé utile d’inscrire une mesure de financement dans le cadre de votre budget. J’ose espérer que vous prendrez en considération l’amendement déposé par mon collègue et ami Georges Colombier avec l’inscription de 5 millions d’euros pour une première année. J’ai, pour ma part, déposé un amendement identique.

M. Alain Néri. Allez, un petit effort ! C’est 20 millions qu’il faudrait prévoir !

M. François Rochebloine. Enfin, je regrette la polémique qui s’est développée au cours de l’année 2006 autour de la campagne double pour les anciens combattants en AFN. Comment ne pas considérer, comme on le dit dans le jargon sportif, que le Gouvernement joue délibérément « la montre » ? Quelle triste affaire que le parcours du fameux rapport Gal, du nom de ce haut fonctionnaire que vous aviez chargé, monsieur le ministre, d’étudier le dossier en 2004. Après que M. Gal eut rendu ses conclusions, le Gouvernement a tardé à consulter le Conseil d’État en raison d’un obscur problème d’embouteillage à la porte du secrétariat général du Gouvernement, de sorte qu’aujourd’hui, nous ne savons toujours pas ce que contient le rapport Gal.

M. Alain Néri. C’est un gag !

M. Maxime Gremetz. C’est un OBNI : un objet non identifié !

M. François Rochebloine. Est-il si difficile de nos jours de chiffrer une mesure et d’en informer les intéressés ? Nous voulons bien admettre que le retard ne résulte pas de votre fait, monsieur le ministre,…

Mme Martine David. De qui, alors !

M. François Rochebloine. …mais sur le fond, nous savons que vous avez toujours été réservé par rapport à cette demande.

M. Alain Néri. Ceci explique cela !

M. François Rochebloine. N’avez-vous pas écrit encore récemment qu’il y avait au mieux à « conduire une démarche de clarification relative à une attribution éventuelle » de la campagne double aux intéressés ? Difficile de faire plus vague, vous en conviendrez ! Aussi, nous demandons plus que jamais la mise en place d’une commission tripartite, les chiffres les plus fantaisistes circulant sur ce dossier. C’est une question d’équité entre les générations du feu.

Par ailleurs, on peut regretter, monsieur le ministre, que les dispositifs d’indemnisation des victimes de persécution et de la barbarie nazie pendant la Seconde Guerre mondiale laissent subsister des situations inéquitables et créent des sentiments d’injustice entre catégories de pupilles de la nation et d’orphelins de mère ou de père mort du fait de la guerre.

M. Jean-Christophe Lagarde. Très juste !

M. François Rochebloine. Je souhaiterais m’arrêter quelques instants sur la demande des anciens militaires français ayant participé aux missions et aux opérations extérieures que leur soit reconnue la qualité de combattant. Monsieur le ministre, vous nous aviez précisé qu’une étude avait été lancée. Où en sommes nous aujourd’hui ? Au moment où notre pays se doit d’être présent sur de nombreux théâtres d’opérations, nous devons être particulièrement attentifs. Aussi, nous aimerions connaître les intentions du Gouvernement sur cette importante question.

M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !

M. François Rochebloine. S’agissant des cérémonies commémoratives du 19 mars, lors du dernier congrès national de la FNACA auquel j’ai participé avec de nombreux collègues des différents groupes parlementaires, vous avez semblé jouer l’apaisement.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il serait temps !

M. François Rochebloine. Je ne peux que m’en féliciter. Aussi, il est indispensable que les consignes gouvernementales à l’adresse des préfets soient claires et ne laissent pas de liberté d’interprétation.

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est un minimum !

M. François Rochebloine. Il est bon, en effet, que les autorités civiles et militaires puissent participer à ces cérémonies du 19 mars sur l’ensemble du territoire national. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. Maxime Gremetz. Absolument !

M. François Rochebloine. Une telle directive constituerait un geste d’ouverture et d’apaisement.

Mme Martine David. Ce serait un geste responsable !

M. François Rochebloine. N’oublions pas qu’une très forte majorité de Français retient aujourd’hui la date du 19 mars, qui, en toute objectivité, tend à s’imposer dans la conscience nationale comme la seule date historique.

M. Maxime Gremetz. Bien sûr !

M. François Rochebloine. Des milliers de communes ont déjà des lieux publics qui lui sont dédiés et des milliers de conseils municipaux ont reconnu cette date par l’adoption de voeux.

Disant cela, je ne porte pas de jugement sur les événements et ne souhaite pas participer à des polémiques indignes au regard des 30 000 soldats tués et des 300 000 soldats blessés lors des combats en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Ne confondons pas commémoration et célébration ! Il ne s’agit pas de consacrer la victoire des uns ou la défaite des autres. Le 19 mars 1962, c’est la proclamation en Algérie d’un cessez-le-feu, fruit des accords d’Évian, qui furent approuvés à 90,71 % par le peuple français lors du référendum du 8 avril 1962 proposé par le général de Gaulle.

Je crois qu’une cérémonie commémorative doit d’abord servir la paix, comme c’est le cas chaque année, par des rassemblements dignes et recueillis devant les monuments aux morts ou les plaques commémoratives de nos villes et villages de France. Au-delà des anciens combattants d’Algérie, j’ai une pensée particulière pour les appelés du contingent : la date du 19 mars appartient à notre peuple, à notre histoire et à tous ceux qui sont épris de paix. Nous avons un devoir de mémoire à remplir ; il doit s’accomplir dans le respect le plus large des convictions et des choix individuels de nos concitoyens.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, la position du groupe UDF se veut – et s’est toujours voulue – constructive et parfaitement claire. Il ne s’agit pas de s’enfermer dans une attitude de critique systématique d’opposants ou de se contenter d’approuver ce qu’hier nous avions dénoncé, parce que nous étions dans l’opposition.

M. Maxime Gremetz. Très bien !

M. François Rochebloine. Non, nous jugeons les actes !

M. Maxime Gremetz. Bravo ! C’est une attitude responsable !

M. François Rochebloine. En conséquence, si nos deux amendements, relatifs à la revalorisation de 2,5 points sur la rente mutualiste et à une première inscription de 5 millions d’euros pour l’allocation différentielle destinée aux veuves les plus démunies, sont adoptés, notre groupe ne s’opposera pas à ce budget et s’abstiendra, ce qui montre son ouverture. Dans le cas contraire, nous serions dans l’obligation de voter contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, votre difficile parcours va prendre fin. C’est en effet le dernier budget que vous aurez à défendre pour cette législature. C’est la dernière fois que vous aurez à défendre l’indéfendable. C’est le dernier budget que vous nous présentez et vous avez réussi, en à peine cinq ans, à réduire le droit à reconnaissance des anciens combattants, cela malgré la mobilisation des associations.

Certes, vous avez, monsieur le ministre, au cours de cette législature, fait preuve d’une double constance. D’abord, la constance de vos prêches déconnectés du principe de réalité affirmant que vos moyens étaient en hausse, que tout allait pour le mieux et que les anciens combattants devaient se satisfaire de leur sort. Ensuite, la constance la plus flagrante est sûrement celle de vos engagements non tenus et de la descente dans les profondeurs de votre budget qui n’a cessé au fil du temps de s’évaporer malgré l’utilisation de tous les artifices budgétaires chargés de lui redonner une apparente vigueur. Les anciens combattants sont, une nouvelle fois, sacrifiés au nom de petits calculs budgétaires. Même si des mesures de dernière heure nous sont proposées – la peur est bonne conseillère ! – pour tenter de sauver la face, elles n’atténueront pas la sévérité de notre jugement, qui est aussi celui de toutes les associations d’anciens combattants, sur votre action. Par ailleurs, il faudrait que vous précisiez l’origine des fonds. C’est une précision capitale. Vous trouverez peut-être le constat sévère, mais puisque vous nous invitez à faire votre bilan, faisons-le brièvement !

Dressons, pour commencer, le bilan financier de la législature. Votre budget a régressé de 6 % dès votre arrivée au ministère, puisque vous l’avez amputé de plus de 200 millions d’euros. L’arrêt Diop du Conseil d’État vous a obligé à abonder les crédits de 60 millions, mais vous n’avez alors opéré qu’une décevante décristallisation, partielle et discriminatoire. L’année suivante, vous avez poursuivi sur la même pente avec 3 % de régression, soit encore 100 millions économisés sur le dos des anciens combattants. En 2004, vous avez pratiquement stoppé l’hémorragie grâce à des mécanismes comptables reportant sur l’exercice 2005 des mesures déjà votées en 2003. Toutefois, cette stabilisation n’est que de courte durée puisque, en 2005, vous nous présentiez un budget à nouveau en baisse de 1,5 %, soit 53 millions d’euros. Nous voilà maintenant en 2006 avec une nouvelle dégradation de près de 4 %, c’est-à-dire une nouvelle ponction de 130 millions d’euros sur le budget des anciens combattants. On ne peut pas dire que votre dernière année soit la meilleure !

Vos résultats, sur l’ensemble de la législature, sont accablants. Vous avez, à périmètre constant, réduit de 14 % le budget dont vous aviez la charge. Les anciens combattants ont ainsi vu près de 480 millions d’euros s’évaporer, plutôt que de servir à la reconnaissance de la nation à leur égard ou à la solidarité envers leurs veuves, ou veufs. Je tiens bien évidemment le tableau récapitulatif à votre disposition.

Venons-en à votre bilan moral, c’est-à-dire au respect des engagements que vous aviez solennellement pris devant la représentation nationale ou devant les associations d’anciens combattants. Vous vous étiez engagé à sanctuariser le budget. Comme nous l’avons vu, c’est un échec patent avec 14 % de baisse. La promesse n’est pas tenue !

Monsieur le ministre, vous vous étiez aussi engagé solennellement à poursuivre le travail entrepris sous la précédente législature visant à relever graduellement le plafond majorable de la rente mutualiste. La gauche parlementaire avait en effet institué une coutume de revalorisation de cinq points par an pour atteindre 130 points en janvier 2006. La première année, vous avez fait de l’esbroufe en revalorisant de 7,5 points, mais depuis plus rien, vous avez calé ! Pour justifier le reniement de votre parole, vous avez utilisé l’argument fallacieux selon lequel cette mesure profiterait aux nantis. Mais les anciens combattants sont représentatifs de la population française et il y a parmi eux beaucoup plus de pauvres que de riches.

Puisqu’il manque sept points et demi, je vous proposerai par amendement de réparer ces errements, en portant dès le 1er janvier 2007 la rente à 130 points. Nous verrons alors ce que valent vos engagements face à la réalité. Sur cet amendement, je demanderai un scrutin public.

Pour la retraite du combattant, vous aviez promis d’atteindre 48 points à la fin de la législature. À l’origine, cette pension représentait un mois de salaire ouvrier. Elle est aujourd’hui de 461 euros, c’est-à-dire 3 000 francs, et vous proposez de la porter à 488 euros. Voudriez-vous que l’on vous applaudisse pour cette obole de 150 francs par an ? Les anciens combattants ne demandent pas l’aumône ; ils exigent le respect, notamment celui de la parole donnée.

M. Maxime Gremetz. Absolument !

M. Jacques Desallangre. En termes de pouvoir d’achat, leur retraite a diminué de 25 %, ce qui rend la revalorisation indispensable. Je vous proposerai donc par amendement de porter la retraite à 48 points dès 2007, soit à 633 euros. Pour le moment, il s’agit de votre part d’une promesse non tenue – une de plus ! M. Gremetz reviendra sur ces questions, que je n’ai pas le temps de traiter en détail.

Quant à la date du 19 mars, vous vous étiez engagé à apaiser les passions, mais vous n’avez même pas tenu compte du vote majoritaire de notre assemblée, qui s’était prononcée en faveur de cette date. En effet, la procédure n’a pas été jusqu’à son terme. Vous n’avez fait que raviver les plaies en choisissant la date du 5 décembre.

Enfin, j’ai été l’un des premiers, après l’arrêt Diop, à exiger une décristallisation totale. J’ai ainsi interpellé votre prédécesseur, puis vous-même, afin que soit respecté le principe d’égalité. La décristallisation partielle a certes minimisé les coûts, mais au prix de l’honneur de la France. Puis il a suffi que, un jour, un couple monarcho-républicain (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire) visionne un film, verse une larme, et qu’une voix s’élève : « – Jacques, il faut faire quelque chose ! » (Même mouvement)

M. Michel Voisin. Vous n’avez rien fait pendant cinq ans !

M. Jacques Desallangre. Oui, c’est comme cela que cela s’est passé : « – Jacques, il faut faire quelque chose ! »

M. Daniel Spagnou. Non ! Cela ne s’est pas passé ainsi !

M. Jacques Desallangre. La mesure qu’on nous a refusée a été prise uniquement à cause d’un film. Vivement que quelqu’un en tourne un sur le sort des veuves d’anciens combattants !

Nous approuvons la décristallisation complète, mais le caractère monarchique de la procédure est affligeant.

M. Alain Néri. Très juste !

M. Michel Voisin. Cette décision, la gauche ne l’avait même pas prise !

M. Jacques Desallangre. Votre bilan ne l’est pas moins, monsieur le ministre. Même si, à la veille de rendez-vous électoraux importants, majeurs, la crainte de la sanction vous conduit à prendre des mesures de dernière minute, le caractère d’improvisation de ces propositions est éclatant. C’est une preuve supplémentaire de l’insuffisance de la politique que vous avez menée pendant cinq ans dans votre ministère, insuffisance que nous jugeons sévèrement, comme tous les anciens combattants. Le prochain gouvernement devra en réparer les conséquences de manière volontariste. L’attente des associations est grande. Elle mérite une réponse positive, que vous n’avez pas su ou voulu leur donner. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Georges Colombier.

M. Bernard Pousset. Qui va rétablir la vérité !

M. Georges Colombier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette année encore, je poursuis sans relâche mon action en faveur du monde combattant,…

M. Marc Le Fur. C’est vrai !

M. Georges Colombier. …qui comprend 4 millions de ressortissants.

M. Maxime Gremetz. Et nous ? Nous n’arrêtons pas !

M. Georges Colombier. Lorsque notre pays a eu à affronter l’adversité et à défendre ses valeurs, il y avait ceux qui se demandaient ce que la France pouvait faire pour eux et ceux qui se demandaient ce qu’ils pouvaient faire pour la France. Les anciens combattants font partie de ceux-là, et il est de notre devoir de se souvenir constamment de ce sacrifice. Je salue leur courage et leur dévouement.

Les crédits réservés par la nation aux anciens combattants s’élèvent pour 2007 à 3 484,1 millions d’euros. Bien sûr, chaque année, je formule le même regret relatif à l’absence de report d’une année sur l’autre des crédits votés. Toutefois, force est de reconnaître que, au regard de l’évolution démographique et à périmètre constant depuis 2002, la dotation moyenne par pensionné augmentera en 2007 de 2,25 %.

Au-delà des chiffres qui peuvent toujours être source d’interprétations diverses et variées, je souhaite, au cours de mon intervention, souligner deux points. Le premier concerne les mesures positives de ce budget, qui s’inscrivent dans la continuité des efforts engagés par M. le ministre Mekachera depuis 2002. Le second concerne les revendications en attente de réponse.

D’emblée, monsieur le ministre, j’évoquerai la carte du combattant AFN, qui est une importante avancée à mettre à votre actif. Désormais, tous les anciens combattants ayant servi plus de quatre mois en Afrique du nord avant le 2 juillet 1962 peuvent l’obtenir, ce qui leur donne droit à la retraite du combattant à soixante-cinq ans.

J’y insiste : la retraite du combattant est un témoignage de reconnaissance de la nation pour les services rendus. C’est pourquoi, l’année dernière, avec mes collègues parlementaires, nous avons fait preuve d’opiniâtreté pour obtenir une première avancée, avec l’augmentation de deux points au 1er juillet 2006.

M. Michel Voisin. Très bien !

M. Georges Colombier. Grâce à l’implication de tous, nous avons enfin réussi à ouvrir la voie de la revalorisation de la retraite du combattant, mesure qui était attendue – j’y insiste – depuis 1978, date de la dernière revalorisation. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Michel Voisin. Il faut le rappeler !

M. Jean-Christophe Lagarde. M. Néri ne l’a pas dit !

M. Georges Colombier. Bien sûr, j’aurais souhaité moi aussi un geste encore plus rapide et plus fort. Néanmoins, nous avons la preuve que notre démarche a été positive, puisque, cette année, le Gouvernement poursuit son effort en revalorisant de deux points supplémentaires l’indice de référence de la retraite du combattant.

M. Alain Néri. À ce rythme, il ne risque pas de se fatiguer !

M. Georges Colombier. Monsieur Néri, nous travaillons ensemble depuis longtemps pour les anciens combattants, et nous avons même des points communs.

M. Alain Néri. Oui, sur le choix du 19 mars, par exemple !

M. Georges Colombier. Mais vous avez parlé tout à l’heure de « tour de passe-passe », de « mensonge d’État » et traité M. le ministre « d’illusionniste », c’est lui manquer de respect. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Alain Néri. C’est lui qui manque de respect aux anciens combattants !

M. Georges Colombier. Ce qui est excessif n’est pas bon. Par ailleurs, la démagogie ne paie pas toujours.

M. Jean-Claude Mathis, rapporteur spécial. Elle ne paie jamais !

M. Georges Colombier. Vous qui parlez de décristallisation, de revalorisation de la retraite du combattant, de la pérennité de l’ONAC et de la rente mutualiste, pourquoi n’avez-vous rien fait quand vous étiez dans la majorité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Néri. Je vous prends au mot : comparons nos bilans !

Mme Martine David. Ce n’est pas bien, ce que vous faites, monsieur Colombier.

M. Georges Colombier. Ce qui est dit est dit, et on ne sait pas de quoi demain sera fait. Votre argumentation pourrait se retourner contre vous ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Vous savez très bien tout ce que nous avons fait !

M. Georges Colombier. Néanmoins, nous avons la preuve que notre démarche a été positive, puisque le Gouvernement poursuit son effort, je l’ai dit, en revalorisant de deux points supplémentaires l’indice de référence de la retraite du combattant, et ce dès le 1er janvier 2007. Cette disposition représente un geste fort de la part du Gouvernement, car la mesure touche l’ensemble des anciens combattants des différents conflits.

La décristallisation des droits des anciens combattants des pays autrefois sous souveraineté française constitue également un autre dossier pour lequel nous nous sommes battus pendant de nombreuses années par solidarité. Il a fallu attendre 2002 pour que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin y procède. Face à la persistance d’un sentiment d’injustice, je me réjouis que la décristallisation totale de la retraite du combattant et des pensions militaires d’invalidité soit mise en œuvre dès le 1er janvier 2007.

M. Jean-Christophe Lagarde. Grâce à un film !

M. Georges Colombier. Comme vous le soulignez fort justement, monsieur le ministre, cette mesure rend pleinement justice, honneur et dignité à ces combattants, et répond à leur souhait d’être égaux aux autres combattants, comme ils l’ont été devant le feu.

M. Jean-Christophe Lagarde. Merci au réalisateur !

M. Jean-Christophe Lagarde. Par ailleurs, je constate dans le projet de budget pour 2007 de bonnes dispositions telles que la nouvelle augmentation des crédits sociaux de l’ONAC, qui permettront de répondre aux besoins de solidarité bien réels des anciens combattants en difficulté, l’harmonisation des pensions militaires d’invalidité des sous-officiers ou encore la meilleure prise en compte de l’appareillage des mutilés de guerre.

Les motifs de satisfaction sont donc réels. Toutefois, certaines revendications n’apparaissent pas dans le projet de budget et restent en attente de réponse.

Tout d’abord, la mise en place d’une allocation différentielle pour les veuves ressortissantes de l’ONAC, pourtant les plus démunies, n’apparaît pas dans le budget. Or la situation de ces veuves de guerre ou d’anciens combattants me tient particulièrement à cœur.

M. Alain Néri. Si ce n’est pas un tour de passe-passe, qu’est-ce que c’est ?

M. Georges Colombier. Ayant participé au groupe de travail que vous avez mis en place, monsieur le ministre, je m’exprimerai plus en détail lors de la discussion de l’amendement que j’ai cosigné avec mes collègues.

Je tiens cependant à saluer la qualité du travail de notre rapporteur pour avis, Marc Bernier, sur l’ONAC, dont la situation constitue une préoccupation majeure. En effet, 2007 sera la dernière année d’application du contrat d’objectifs et de moyens de l’ONAC, qui aura ainsi parachevé sa modernisation entamée en 2003. Nous sommes tous attachés à la pérennisation de cet office, qui doit impérativement disposer des moyens nécessaires à son fonctionnement. En tant que représentant de l’Assemblée nationale au sein du conseil d’administration de l’ONAC, j’évoquerai plus précisément ce point lors de la discussion des amendements.

La rente mutualiste constitue une autre revendication prioritaire. La loi du 3 décembre 2002, portant loi de finances pour 2003, a prévu un relèvement exceptionnel du plafond majorable de la rente mutualiste, qui est passé de 115 à 122,5 points, ce qui représente un effort important. Depuis, je vous sollicite chaque année afin que le relèvement du plafond soit poursuivi. Je connais le coût d’une telle mesure. Toutefois, une augmentation de 2,5 points en 2007 serait un signal très important dans le cadre du dernier budget de la législature. J’y reviendrai également lors de la discussion des amendements.

Concernant la campagne double, je ne peux que partager les préoccupations exprimées sur l’absence de publication du rapport de M. Christian Gal, inspecteur général des affaires sociales, qui a été transmis au Conseil d’État pour avis.

M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !

M. Alain Néri. Qui manque de respect à qui, en l’occurrence ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Georges Colombier. J’espère que vous aurez à cœur d’informer dès que possible la représentation nationale et les associations sur la suite que vous comptez donner à cette revendication.

En ce qui concerne le rapport constant, le mode de calcul complexe de revalorisation de la valeur du point d’indice de PMI est désormais remplacé par une méthode simple et transparente. J’ai souhaité cette simplification, mais à la condition que les anciens combattants ne soient pas lésés. Il convient de veiller à ce que l’évolution du rapport constant ne soit pas inférieure au coût de la vie.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Georges Colombier. D’autres revendications sont à prendre en considération : l’abaissement à soixante-dix ans de l’âge d’accès à la demi-part fiscale accordée aux anciens combattants à soixante-quinze ans ; l’octroi de la mention « Mort pour la France » à tous les militaires morts en Algérie, Maroc et Tunisie entre 1952 et 1962, ayant servi loyalement la République ; une indexation des pensions militaires d’invalidité, attendue par le monde combattant, qui ne soit pas inférieure à l’évolution du coût de la vie, l’indice INSEE des traitements bruts de la fonction publique retenu en application de l’article 117 de la loi de finances pour 2005 ne prenant pas en compte les primes ; enfin, la situation des anciens incorporés de force dans le RAD et KHD.

Alors que, en 1998, une solution semblait se mettre en place, consécutivement à la décision du comité directeur de la fondation Entente franco-allemande de juin 1998 de débloquer des fonds pour assurer l’indemnisation des anciens incorporés de force dans le RAD et KHD, à la condition expresse que l’État participe lui aussi au financement,…

M. Jacques Floch. Ce qui serait injuste !

M. Georges Colombier. …il semblerait que ce ne soit plus d’actualité aujourd’hui.

M. Jacques Floch. Heureusement !

M. Georges Colombier. Devant un tel blocage, quelles sont les pistes envisagées pour trouver une solution ?

Reste le problème de l’iniquité que rencontrent les anciens des missions extérieures. La quatrième génération du feu composée de militaires français ayant participé aux missions et opérations extérieures se voit refuser la qualité de combattant alors que, le 3 janvier 1993, leur était ouvert le droit à la reconnaissance de la nation pour les actions entreprises.

Telles sont les principales remarques que je souhaitais formuler. Au regard des points positifs que comporte ce projet en faveur du monde combattant et des améliorations que nous vous demandons d’apporter, le groupe UMP votera votre budget pour 2007.

Mme Martine David. Quel scoop !

M. Alain Néri. En voilà une surprise !

M. Georges Colombier. À titre personnel, je souhaite aborder la question du 19 mars, journée du recueillement et du souvenir. Vous connaissez bien ma position à ce sujet. Je l’évoque par honnêteté. En effet, dans mon groupe, au nom de la liberté, puisque nous sommes en République, nous ne sommes pas tous sur la même longueur d’onde, ce qui n’empêche pas, entre mes collègues et moi-même, un respect mutuel.

Lors du congrès national de la FNACA, organisé à Lyon le 22 octobre dernier, vous avez précisé, monsieur le ministre – ce qui a été apprécié –, que vous souhaitiez une solution « où chacun pourra trouver son point de repère, dans le respect des convictions de chacun, dans le respect que nous devons à nos morts. » Vous avez ajouté que la situation actuelle ne pouvait pas durer indéfiniment.

M. Marc Le Fur. Très juste !

M. Georges Colombier. Je vous remercie de bien vouloir nous apporter quelques précisions à ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre, un immense sentiment de déception a de nouveau envahi le monde combattant lorsque, à l'annonce des mesures contenues dans votre projet de budget pour 2007, on a constaté une nouvelle diminution des crédits, alors que les promesses ne sont toujours pas honorées.

M. Alain Néri. C’est vrai !

M. Jean-Christophe Lagarde. Je ne prononcerai pas de propos insultants, comme ceux que l’on a entendus tout à l’heure. J’ai suffisamment de respect pour vous et pour votre fonction pour ne pas verser dans de tels excès oratoires, mais votre bilan est regrettable et mérite d’être dénoncé.

Ce budget, à périmètre constant, est en baisse de 3,6 % par rapport à 2006, compte non tenu de l'inflation, et vous ne pouvez pas, pour justifier le non-respect des engagements, vous abriter derrière l'évolution de la démographie.

Ce budget, le dernier de la législature, nous permet de dresser un véritable bilan de votre action gouvernementale. Au cours des dix-huit derniers mois, vous avez relevé de quatre points d'indice la retraite des anciens combattants. Vous pouvez vous en satisfaire, certains peuvent s’en réjouir, mais vous vous étiez engagé devant nous à le relever progressivement jusqu’à ce qu'il atteigne 48 points en 2007. On est donc bien loin du compte : il manque toujours 11 points et les intéressés se sentent de nouveau spoliés.

M. Alain Néri. Votez mon amendement !

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur Néri, je dois à la vérité de rappeler, après m’être renseigné auprès de François Rochebloine, que si le point d’indice a été indexé, il n’avait pas bougé depuis 1978, et vous en êtes responsable autant que les autres. Ce n’est pas parce que les élections approchent qu’il faut faire de la démagogie et la danse du ventre devant les tribunes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Tous les gouvernements sont responsables de cette situation, y compris ceux auxquels l’UDF a participé par le passé. Il faut être lucide, et je souhaite que l’on parle vrai.

M. François Rochebloine. La France en a besoin !

Mme Martine David. Il n’y a que des saints à l’UDF !

M. Jean-Christophe Lagarde. Les promesses qui avaient été faites concernant la retraite n’ont malheureusement pas été tenues, même si la situation a un peu évolué.

Les anciens combattants attendent en outre une revalorisation du point. Ils vous l'ont fait savoir, nous aussi, mais, encore une fois, le Gouvernement n'a pas jugé bon de donner suite à leur demande.

Le deuxième sujet que je voudrais aborder concerne le plafond majorable de la retraite mutualiste, pour le relèvement duquel, avec mes collègues de l'UDF, notamment François Rochebloine, nous avons déposé un amendement. Ce plafond reste, depuis 2003, bloqué à l'indice 122,5 du point de pension militaire d'invalidité. Vous vous étiez engagé à le porter à 130 points d'indice.

M. Alain Néri. Eh oui !

M. Jean-Christophe Lagarde. Vous aviez suscité un grand espoir en l’augmentant, au début de la législature, de 7,5 points en un an. Mais cet espoir a été déçu, car plus rien ne bouge et l’objectif ne sera pas atteint. La commission des finances a adopté un amendement visant à respecter cet engagement. Nous le soutenons, et je souhaiterais que vous l’acceptiez. Ce serait enfin un signe positif adressé au monde combattant.

Par ailleurs, en septembre dernier, j'ai interpellé le Premier ministre afin que le bénéfice de la loi Madelin, qui accorde une déduction fiscale pour l'acquisition d'une complémentaire santé, puisse être étendu à tous ceux qui ne bénéficient pas de contrat collectif obligatoire au sein de leur entreprise. Une incitation fiscale pour les personnes qui souscrivent un contrat dépendance partielle ou totale serait de nature à rétablir l'égalité de traitement et à soulager les finances de l'État et des conseils généraux concernant la couverture de ces risques. Je n'ai, à l'heure actuelle, reçu aucune réponse.

Mais bien d'autres sujets suscitent, à juste titre, la déception, et même la colère des anciens combattants. Je citerai en particulier l'attribution d'une allocation de solidarité en faveur des veuves d'anciens combattants les plus démunies. Plus de 15 % d'entre elles vivent avec des ressources mensuelles indécentes, au-dessous du seuil de pauvreté. Sans les services sociaux de l'ONAC, elles seraient dans une situation d'abandon total. Quant à leur statut, il n'est pas non plus satisfaisant, puisqu’elles relèvent de l'ONAC, mais n'ont aucun droit spécifique découlant de cette qualité. L'an dernier, nous avions exigé qu'une mesure concrète, sous la forme d'une allocation différentielle de solidarité, intervienne dès le budget 2007. La mise en place d'un véritable système solidaire constituerait une vraie avancée sociale et permettrait de rendre leur dignité à ces personnes, sans que cela coûte si cher, puisque l’aide qui leur est accordée aujourd’hui grève déjà le budget de l’ONAC. Vous pourriez faire ce calcul, monsieur le ministre.

M. Gilles Artigues. Très juste !

M. Jean-Christophe Lagarde. Par ailleurs, par équité, il serait juste d'attribuer aux fonctionnaires et assimilés le bénéfice de campagne, auquel ont droit les autres générations du feu, afin de prendre en compte le temps passé en Afrique du nord. Encore une fois, le Gouvernement a adopté envers les ressortissants du monde combattant une attitude de déni. Vous aviez mandaté M. Gal pour qu’une étude du coût d’une bonification de campagne double pour les anciens combattants d'Afrique du nord fonctionnaires et assimilés puisse être élaborée et transmise à la représentation nationale. Or, vous avez gagné du temps et, surtout, vous nous avez menti. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. On peut mentir à la représentation nationale, ce n’est pas si grave !

M. Jean-Christophe Lagarde. Ce rapport n'a été transmis au Conseil d'État que le 30 mai 2006, contrairement à ce que vous aviez affirmé, monsieur le ministre. Plusieurs membres de la représentation nationale, sur tous les bancs, vous ont interpellé à ce sujet, mais en vain. Cette attitude n’est pas acceptable et elle a été légitimement ressentie comme une véritable provocation par le monde combattant et par un certain nombre de nos collègues.

Enfin, votre conception de la mémoire historique est à ce point contestable que le Gouvernement n’a pas réussi à éviter la polémique quand il a choisi les dates de commémoration, alors même que le Président de la République, lorsqu’il était candidat à un deuxième mandat, s'était engagé à trouver un consensus sur ce sujet. Depuis de nombreuses années, la majorité des anciens combattants d'Algérie demandent que la date du 19 mars soit reconnue comme date de commémoration de la fin de la guerre en Algérie. Le 5 décembre que, en septembre 2003, vous avez érigé en journée mémorielle, ne correspond en rien à la réalité des événements qui se sont déroulés en Algérie. C’est une date farfelue, choisie au hasard du calendrier et de l’agenda du chef de l’État.

M. Patrick Roy. Il faut respecter l’histoire !

M. Jean-Christophe Lagarde. Non seulement vous n'avez pas respecté les engagements du Président de la République – il est vrai que ce n’est pas la première fois –, mais vous avez pris le risque certain que cette date ne survive pas à votre présence au ministère et tombe dans les oubliettes de l'histoire. Le 19 mars, date du cessez-le-feu, est, malgré les exactions commises ensuite, la seule date commémorative valable, puisque c’est celle qui restera dans les livres d’histoire. J’ajoute que la moindre des choses serait que l’État prenne position sur la participation de ses représentants à ces commémorations.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Jean-Christophe Lagarde. Je ne vois pas pourquoi, même si vous refusez la date du 19 mars, vous seriez gênés que des représentants de l’État et du Gouvernement soient présents à un rassemblement d’anciens combattants commémorant la fin de la guerre d’Algérie et le soulagement qu’a été pour eux…

M. Alain Néri. Et pour leurs familles !

M. Jean-Christophe Lagarde. …la proclamation du cessez-le-feu. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe socialiste.)

M. Daniel Spagnou. Très bien !

M. Jean-Christophe Lagarde. En conclusion, les vraies mesures sans cesse réclamées ne sont toujours pas au rendez-vous : rien pour la rente mutualiste, rien pour les veuves et si peu pour les retraites.

Nous nous réjouissons bien sûr de la décristallisation, qui était réclamée sur tous les bancs de cette assemblée depuis des décennies. Vous êtes le premier à avoir fait en sorte que l’on décristallise les rentes, mais vous n’êtes pas allé jusqu’à l’égalité entre les combattants français et ceux issus de nos colonies. Cette égalité a finalement été obtenue, mais je vous invite tous, mes chers collègues, ainsi que nos collègues sénateurs, à vous interroger sur la manière dont elle l’a été et sur ce que cela révèle de l’état de cette démocratie qui se dit parlementaire. Pendant des années, nous avons demandé, ainsi que les associations d’anciens combattants, que les gouvernements successifs prennent cette mesure, gouvernements qui reconnaissaient sa légitimité mais regrettaient de ne pas avoir les moyens de la financer. Nous n’avons pas obtenu satisfaction et il aura suffi qu’un film, au demeurant remarquable, rende hommage à ces combattants et émeuve le Président de la République…

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Ou plutôt sa femme !

M. Guy Teissier. C’est votre vision des choses, monsieur Lagarde !

M. Jean-Christophe Lagarde. …ou son entourage, pour que la République bouge et que l’on parvienne à trouver les moyens que l’on ne trouvait pas auparavant. C’est regrettable et c’est la marque que la démocratie française est malade.

M. Alain Néri. Quel manque de respect pour la représentation nationale !

M. Jean-Charles Taugourdeau. La gauche n’a pas fait mieux !

M. Jean-Christophe Lagarde. Après tout, puisque la décristallisation complète n’était pas inscrite dans votre budget et que l’on a tout de même trouvé les quelque 110 millions d’euros nécessaires grâce à un film, peut-être le débat parlementaire permettra-t-il d’améliorer un peu la situation du monde combattant. Ce ne serait que justice et le rôle du Parlement serait reconnu. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Permettez-moi d’abord de saluer toutes les associations d’anciens combattants, présentes dans les tribunes, qui sont venues observer ce débat. À force d’entendre les uns et les autres opposer ce que certains ont fait à ce que d’autres n’ont pas fait, on risque d’oublier que c’est grâce à ces gens qui se mobilisent et se battent que toutes les avancées concernant les anciens combattants ont été obtenues. Sans leur action, rien ne se serait passé ! La décristallisation, que l’ensemble du monde combattant revendiquait depuis des années, est la victoire des associations. Le film y a un peu aidé, mais pas plus. On a l’air de dire que nous faisons la pluie et le beau temps et que les associations ne joueraient aucun rôle. C’est faux !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. C’est pourtant ce qui s’est passé !

M. Maxime Gremetz. Cela se passe toujours ainsi à la veille d’échéances électorales. Je me souviens que, à la fin de la dernière mandature, l’Assemblée avait voté la date du 19 mars.

M. Guy Teissier. Ce n’est pas allé loin !

M. Maxime Gremetz. Parce qu’on ne l’a pas voulu ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) C’est honteux. Les partis politiques quels qu’ils soient n’ont pas le droit de jouer, à la veille des élections, avec les revendications du droit à réparation des anciens combattants. La date du 19 mars avait bien été votée mais, la majorité des deux tiers n’ayant pas été atteinte, on nous a dit que, finalement, elle ne serait pas adoptée !

M. Jean Dionis du Séjour. Il a raison !

M. Maxime Gremetz. L’enjeu dépasse les clivages politiques : il s’agit de la reconnaissance de la nation vis-à-vis des anciens combattants. Je ne me satisfais pas des opérations politiciennes : on est révolutionnaire à la veille des élections et, le lendemain, on ne fait rien !

La mesure de décristallisation, qui n’était pas prévue dans le budget, représente 129 millions d’euros.

M. Jean Dionis du Séjour. Non, 110 !

M. Maxime Gremetz. Le budget pour 2007 diminue, mais il aurait suffi qu’il reste constant pour financer non seulement la décristallisation, mais aussi les 6 millions nécessaires pour porter à 130 points le plafond majorable des rentes mutualistes, et 16,6 millions seraient encore restés.

M. Jean-Christophe Lagarde. On pouvait financer toutes les promesses !

M. Maxime Gremetz. En ce qui concerne le 19 mars, nous n’avons pas changé, nous. La proposition de loi que nous avons déposée pour que cette date soit reconnue comme marquant la fin de la guerre d’Algérie est toujours d’actualité.

M. Guy Teissier. Ce n’est pas la fin de la guerre !

M. Maxime Gremetz. Sans doute ferions-nous bien de commander tous ensemble un beau film sur le sujet, et tout serait alors plus facile, comme pour la décristallisation.

Par ailleurs, vous affirmez, monsieur le ministre, que le rapport Gal a été retrouvé et qu’il se trouve au Conseil d’État. Or ce dernier dit qu’il ne l’a pas ! Il y a là, à l’évidence, un problème d’honnêteté.

L’augmentation de la retraite du combattant de deux points ne fait pas le compte, mais c’est toujours ça ; nous verrons si le Gouvernement l’acceptera. Quant au relèvement de deux points du plafond de la rente mutualiste, il n’est pas prévu dans le budget ; les associations vont-elles obtenir ce qu’elles voulaient ?

Le sort des veuves constitue l’une des autres priorités du monde combattant. Une mesure sera-t-elle prise en faveur des plus défavorisées d’entre elles, qui vivent dans des conditions très difficiles ?

Je ne sais pas si les amendements déposés sur ce sujet vont être adoptés…

M. Alain Néri. Certains pourraient bien être retirés !

M. Maxime Gremetz. …et l’expérience m’a appris à ne croire que ce que je vois. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Michel Voisin. Saint Thomas !

M. Maxime Gremetz. Saint Thomas et Lagardère en même temps !

D’autre part, quelle honte de voir que le sort des orphelins des victimes de la barbarie nazie n’était pris en compte qu’à la veille d’une échéance électorale, …

M. Michel Voisin. Clientélisme !

M. Maxime Gremetz. …et que seulement une partie d’entre eux bénéficierait d’une indemnisation ! Il a fallu que, par un amendement que j’avais proposé, soutenu par l’ensemble de l’Assemblée nationale, nous corrigions cette injustice fondée sur une base ethnique, pour que tous les orphelins des victimes, quelle que soit leur origine, aient droit à une indemnisation.

M. Michel Voisin. Très bien !

M. Maxime Gremetz. Je veux saluer le travail de M. Dechartre, qui nous a beaucoup aidés à dégager les critères d’indemnisation. Alors que la mesure ne devait initialement bénéficier qu’à 8 000 personnes, elle en concerne aujourd’hui 30 000. Certes, il reste des cas à régler – au sujet desquels je vous interpelle souvent, monsieur le ministre –, mais je me félicite de l’avancée qu’a constituée cette mesure de justice.

Sachez bien que je ne ferai jamais des anciens combattants et de leurs revendications un objet de polémique ou un enjeu électoral.

M. Daniel Spagnou. Très bien !

M. Maxime Gremetz. Les voix ne s’achètent pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française, du groupe socialiste et du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Si nous soutenons leurs revendications – notamment par l’intermédiaire des conseils parlementaires –, si nous nous battons à leurs côtés, s’ils savent qu’ils peuvent compter sur nous, ce n’est pas parce que nous sommes les plus beaux (Sourires) ; c’est parce que nous défendons ce qui est juste. Les associations d’anciens combattants méritent notre respect.

Notre vote sur ce budget ne pourra se déterminer qu’à l’issue de l’examen des amendements. Nous nous poserons alors la question de savoir si ce budget va dans la bonne direction. C’est pourquoi le groupe communiste demandera une suspension de séance avant le vote afin de consulter les associations d’anciens combattants. (Applaudissements sur divers bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains, du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe socialiste.)

M. Jean Dionis du Séjour. Encore un partisan de la démocratie participative !

M. Michel Voisin. Gremetz à l’UMP !

M. le président. La parole est à M. Patrick Beaudouin.

M. Patrick Beaudouin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget 2007 pour les anciens combattants est dans la lignée de ceux que nous a présentés le Gouvernement depuis le début de la mandature. Il répond à une double préoccupation : d’une part, assurer le droit inaliénable à la réparation, d’autre part, mettre en œuvre une politique dynamique et constante sur le thème de la mémoire. Si ce budget baisse en volume global, la dotation moyenne par pensionné augmente tout de même de 2,25 % du fait de l’évolution démographique.

Je ne reviendrai pas sur l’ensemble du budget, brillamment présenté par mes collègues rapporteurs dans un contexte budgétaire difficile et complexe. Je voudrais pour ma part exprimer ma satisfaction de voir se renforcer quatre éléments majeurs de la politique de solidarité.

Le premier élément est la revalorisation de deux points de l’indice de retraite du combattant à compter du 1er janvier 2007. Après une première augmentation l’année dernière, alors que cet indice n’avait jamais évolué depuis 1978, cela traduit la poursuite de l’effort du Gouvernement en direction de plus de 1,4 million d’ayants droit.

Deuxièmement, la majorité avait adopté, en 2003, une première mesure de décristallisation des pensions des anciens combattants de l’Union française, attendue depuis quarante ans, en décidant de verser 130 millions de prestations avec quatre années d’arriérés, puis 30 millions chaque année. Répondant au souhait d’égalité unanimement exprimé, le Gouvernement et la majorité proposent aujourd’hui, par voie d’amendement, que les pensions de ces combattants soient mises au niveau de celles de leurs frères d’armes français. Cette solution équitable met définitivement fin à une injustice de l’histoire.

Troisièmement, le budget pour 2007 prévoit, pour la troisième année consécutive, une revalorisation des crédits sociaux de l’ONAC de 500 000 euros. Cette mesure devrait permettre d’améliorer le quotidien des plus démunis de nos anciens combattants et d’apporter une réponse complémentaire au problème des veuves, après l’augmentation de 15 points d’indice décidée en 2004.

Je me réjouis que, conformément à l’amendement que j’avais déposé en loi de finances pour 2004 et qui avait été repris par la commission des finances l’année suivante, le groupe de travail demandé ait pu travailler sereinement et nous apporter une réponse. Son rapport n’a pas été officiellement déposé, mais il semble que la solution envisagée consiste en la prise en compte par l’ONAC d’une indemnité d’allocation différentielle prélevée sur l’enveloppe des crédits sociaux de l’ONAC, abondée en conséquence. Cela aura le mérite de s’inscrire dans le prolongement de l’engagement social de l’ONAC conciliant simplicité de procédure et efficacité pour les futurs ayants droit. Notre amendement, présenté par Georges Colombier,…

M. François Rochebloine. Excellent amendement !

M. Patrick Beaudouin. …constitue un rappel adressé au Gouvernement sur la question des veuves. Les crédits sociaux de l’ONAC devraient permettre une expérimentation dès 2007, en vue d’une application définitive à partir de 2008. (Exclamations sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Gilles Artigues. On ne peut plus attendre !

M. Patrick Beaudouin. Pour ce qui est de la rente mutualiste, si nous avons relevé le plafond majorable de 7,5 points en 2003, j’espère, monsieur le ministre, que vous accepterez notre amendement prévoyant une nouvelle revalorisation de 2,5 points. Cela constituerait une mesure juste et équilibrée pour les cotisants.

Le Gouvernement poursuit son soutien aux deux établissements publics du monde des anciens combattants. Ainsi, l’office national des anciens combattants et l’institution nationale des invalides percevront 45,7 millions d’euros en 2007. L’ONAC et l’INI vont ainsi achever la réalisation du contrat d’objectifs et de moyens 2003-2007, voté à une très forte majorité par les membres du conseil d’administration en 2002. La mise en œuvre concertée du contrat d’objectifs et de moyens s’est traduite par une rénovation des méthodes de travail et par un ajustement des emplois aux nouvelles missions de l’ONAC, lui permettant ainsi de préparer son avenir dans la sérénité.

Vous avez annoncé au conseil d’administration de l’office, il y a quinze jours, la signature prochaine du nouveau contrat d’objectifs et de moyens pour 2008-2012. Nous y voyons un gage du maintien de cet instrument au bénéfice du droit à réparation, mais aussi d’une politique de mémoire digne et forte.

La volonté de conserver le souvenir des sacrifices consentis par les Français pour défendre les valeurs qui fondent la patrie n’est pas nouvelle. Hélas, le temps fait son œuvre et les témoins de ces périodes, qui étaient les gardiens du souvenir, entrent un à un dans l’éternité. Leurs associations – celles de la 2e DB, de Rhin-et-Danube, et bien d’autres – se regroupent maintenant en grandes fondations qui, associant les générations nouvelles, garderont à leur tour le souvenir du passé : Fondation de la déportation, Fondation de la résistance, Souvenir français, Fondation de la France libre…

Au-delà des chiffres, la politique de la mémoire se distingue par l’engagement de ses acteurs : les associations d’anciens combattants, l’État et, surtout, les collectivités territoriales. Elle se dote d’outils nouveaux, comme la charte « Jeunesse et mémoire » signée entre le ministère des anciens combattants et celui de la jeunesse et des sports, ou celle qui lie le ministère des anciens combattants à celui du tourisme pour organiser le tourisme de la mémoire.

Un deuxième aspect, qui intéresse particulièrement les collectivités territoriales, est la coopération pour la création et l’entretien des monuments, mémoriaux et cimetières. L’historial Charles de Gaulle, aux Invalides, sera inauguré en 2007 et le programme 2004-2008 de rénovation des nécropoles, notamment celle de Mers El-Kébir, monte en charge, ce dont je me félicite.

Le troisième aspect de la politique de la mémoire est le rassemblement des témoignages, essentiel sur le plan quantitatif. La réforme des services historiques des armées, situés à Vincennes, la collecte des témoignages vivants, la création de sites internet, doivent être salués ; de même, il convient d’encourager la mémoire familiale.

Vous avez décidé, monsieur le ministre, de partager cette mémoire avec tous les pays, même ceux qui furent nos ennemis lors des précédents conflits. Le remarquable colloque international sur la mémoire partagée, que vous avez organisé les 26 et 27 octobre dernier à Paris, a constitué un hommage aux combattants, mais, surtout, un moment de partage d’expérience, de coordination, de partenariat, en un mot un hymne à la paix.

Votre politique dynamique et conduite avec résolution, constance et enthousiasme, a été placée depuis cinq ans sous le signe du pragmatisme et de l’équité. En témoignent, par exemple, les ajustements, même imparfaits, apportés à l’indemnisation des orphelins de victimes d’actes de barbarie pendant la Deuxième Guerre mondiale et l’octroi de la carte du combattant en AFN à tous ceux qui ont servi plus de quatre mois.

Pour cela et pour les nombreuses autres actions que vous avez engagées dans un contexte budgétaire difficile, soyez remercié du fond du cœur, monsieur le ministre.

Nous remercions également l’ensemble des personnels du ministère et ceux de l’ONAC, qui supportent l’essentiel de l’effort dans cette délicate mission consistant à assurer sur le terrain la nécessaire coordination des services de l’État, des collectivités territoriales et des associations de combattants auxquelles je rends également hommage. Faisant fi du défaitisme et des paroles démagogiques, voire électoralistes, prononcées sur certains bancs (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), le groupe UMP vous apportera son soutien et votera votre budget réaliste. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, malgré l’interdiction constitutionnelle du mandat impératif, les parlementaires non-inscrits sont à la peine lorsqu’il s’agit pour eux de s’exprimer, quand bien même ils sont détenteurs, comme chacun d’entre nous ici, d’une parcelle indéfinie de la souveraineté nationale.

M. Georges Colombier. Tout à fait !

M. Gérard Charasse. Ainsi, je ne dispose que de cinq minutes sur le sujet d’actualité qui nous réunit aujourd’hui, sujet d’actualité car, jour après jour, j’en ai la conviction, la mémoire des combats pour la liberté et la République doit éclairer le présent et le futur.

Un an avant un scrutin majeur, c’est avec tristesse que j’entends des propositions et que je constate des comportements en contravention avec les principes qui nous ont portés ici.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, si vous n’avez pas encore fait entièrement droit à ma demande de placer le régime de Pétain au cabinet noir des dictatures

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Très bien !

M. Gérard Charasse. …je tiens à saluer la contribution que vous avez apportée au travail de mémoire sur le sujet, avec le film L’année dernière à Vichy, et à vous en remercier sincèrement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Union pour la démocratie française et sur divers bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Si ce film contribue à faire que Vichy, l’Allier, la France regardent l’histoire en face, notre travail et celui de la DMPA, placée sous votre responsabilité, n’auront pas été inutiles.

Monsieur le ministre, les compliments ont une fin : l'histoire en face oui, mais la parole en face également. Je vais cependant limiter mon propos à trois engagements qui avaient été pris.

Il s'agit, en premier lieu, du relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant. En juin dernier, j'ai, avec d'autres ici, appuyé votre démarche destinée à obtenir les crédits nécessaires à son relèvement à 130 points. Quoi de plus normal ? C'est une priorité du monde combattant depuis plusieurs années. Or, depuis 2002, aucun relèvement n'a eu lieu. Je pensais sincèrement qu'après vos promesses de cinq ans, ce débat serait épuisé aujourd'hui.

Il en va de même pour la retraite du combattant. On passe de 35 à 37 points d'indice PMI alors que vous aviez annoncé que nous en serions à 48 en fin de législature. Monsieur le ministre, nous sommes en fin de législature, mais pas à 48 points d’indice PMI !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Eh oui !

M. Gérard Charasse. Enfin, nous avons, à plusieurs reprises, évoqué la mémoire et la réparation. Cette dernière, qui s'incarne dans des textes, des cadres, des tableaux, comporte nécessairement des injustices surtout, comme je viens de le souligner, lorsque la parole politique est mise à mal.

La mémoire ne se gère pas ainsi. Dans les temps troublés que nous vivons, nous ne pouvons faire l'impasse sur un seul combattant. Nous ne pouvons pas distinguer entre le feu qui mérite l’hommage de la nation et celui qui pourrait tomber dans l’oubli.

Je souhaite donc, monsieur le ministre, que soit engagé un travail sur les combattants de 1954, ceux qui, même après le 20 juillet sur le 17e parallèle, ont continué de combattre, non spécifiquement pour leur pays d'ailleurs, mais pour que le droit international et la parole de la France soient respectés.

M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !

M. Gérard Charasse. Telles sont les trois remarques qu'il me semblait utile de formuler dans ce temps, court, d'intervention. Je soutiendrai, bien sûr, les amendements visant à améliorer le texte, notamment ceux concernant les anciens combattants et les veuves. Votre budget a bien besoin, en effet, de ces améliorations.

Je conclurai par une demande supplémentaire.

La parole politique que j'ai évoquée, monsieur le ministre, s'accompagne, quand on la comprend comme je le fais, d^une certaine transparence.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Gérard Charasse. J’irai donc droit au but, en posant à nouveau et simplement la question : quand la représentation nationale aura-t-elle enfin accès au rapport Gal ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Alain Néri. Répondez, monsieur le ministre !

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comment rester indifférent à nos anciens combattants ? Je suis même surpris que nous ne soyons ce matin, dans cet hémicycle, qu’une petite cinquantaine pour examiner ce budget. Comment laisser dans l'oubli et la misère ceux qui ont servi notre pays ?

II y a quelques jours, nous avons commémoré le 11 novembre 1918. Je ne sais pas s’il en est allé de même dans toute la France, mais – et c’était une bonne nouvelle – dans le Lot-et-Garonne, à Agen, les gens sont venus nombreux assister à ces cérémonies. C'est dans ce contexte qu'intervient la discussion du budget de la mission « Anciens combattants ». Plus qu'un budget, c'est donc un symbole d'importance pour la mémoire, la cohésion et l'identité de notre pays.

Tout d'abord, ce budget est en diminution de 3,6 % par rapport à l'année 2006, soit une baisse en valeur absolue de 130 millions d'euros. Pour moi, cette réduction n'est pas choquante en soi puisque le nombre des anciens combattants diminue et que la dotation par ancien combattant augmente légèrement. Elle n'est pas choquante non plus dans la mesure où ce budget, comme les autres, doit contribuer équitablement à la réduction de nos déficits publics. C’est pour cela qu’à l’UDF, nous allons saisir les possibilités de la LOLF : à budget constant, monsieur le ministre, nous souhaitons en effet apporter des corrections importantes. Un budget n’est pas seulement fait de chiffres ; il est également fait de choix. Et c'est de ces choix que je souhaite vous entretenir ici.

Le Gouvernement a fait le choix d'affecter, par voie d'amendement, 110 millions d'euros au titre de la décristallisation. Nous ne pouvons que nous en réjouir. Cette décristallisation était une mesure de justice et d’équité. Le monde combattant l’a réclamée depuis longtemps et il est heureux qu’un consensus national se soit fait sur ce point.

Toutefois on peut s’interroger sur la méthode choisie. Après un blocage pendant trente ans, puis l’émotion suscitée par le film Indigènes, la monarchie républicaine a donné un ordre à application immédiate ! Tout cela est vraiment très bizarre, comme l’a très bien relevé mon collègue Jean-Christophe Lagarde. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour la démocratie française.)

Plusieurs députés du groupe socialiste. Eh oui !

M. Jean Dionis du Séjour. On a donc débloqué 110 millions d’euros.

Monsieur le ministre, nos anciens d’Afrique n’auraient-ils pas compris que cette mesure soit mise en œuvre sur deux ou trois ans ? Moi, je pense que si. Cela aurait peut-être permis que, au-delà de cette décision, des mesures majeures, promises, soient prises.

En premier lieu, je tiens à manifester mon désaccord sur la question de la revalorisation de la retraite du combattant. Elle est figée à 33 points depuis 1978. Il avait été promis de passer à 48 points. L’an dernier, deux points ont été accordés. En somme, c’est une sorte de moitié de mesure. De nouveau, vous proposez deux points. Certes, vous avez fait un pas et, là encore, j’appelle nos collègues socialistes à de l’humilité.

À cet égard, le discours de notre collègue M. Néri était quelque peu décalé. Quand on n’a rien fait, au moins on est humble ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Le monde combattant connaît notre action ! Il n’a rien oublié !

M. Jean Dionis du Séjour. Cela étant, les promesses du Président de la République sont loin d’avoir été pleinement tenues.

M. François Rochebloine. Il faut voter nos amendements !

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le ministre, les anciens combattants attendent un effort supplémentaire et vous pouvez le faire, à budget constant, en vous appuyant sur le Parlement, qui est là pour vous aider alors que les arbitrages sont âpres. Comme me le demandent mes enfants qui me trouvent souvent trop rigide, soyez donc open et flex ! Vous allez trouver des propositions très intéressantes dans les amendements de mes collègues.

S’agissant des veuves, voilà quatre ans qu’un groupe de plus en plus large vous demande une vraie réforme en la matière. À cet égard, un travail remarquable a été accompli par la commission des finances autour de Michel Bouvard. Nous allons donc vous proposer des amendements fondés et très raisonnables.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Alain Néri. Il ne fallait pas retirer les amendements l’année dernière !

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le ministre – et je travaille sur ce dossier depuis quatre ans –, nous vous demandons de mettre en place un véritable système solidaire, différent de la gestion très inégale des ODAC. Nous vous exhortons d’accepter cette avancée dans ce dernier budget de la législature. Comme l’a dit Patrick Beaudouin : tout ce qui sera renvoyé à 2008 pourra souffrir d’un manque de crédibilité.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le ministre, n’ayez pas peur d’écouter le Parlement. Nous serons raisonnables.

En ce qui concerne la politique de mémoire, nous devons, en liaison avec le monde combattant, mener une réflexion sur la façon dont notre pays se recueille et se remémore notre histoire. Le nombre de journées commémoratives a été porté à neuf. C’est épuisant : pour les associations, pour le public et pour les services de l’État. Il en résulte que de moins en moins de monde assiste à ces cérémonies. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Gérard Voisin. Pas du tout !

Plusieurs députés du groupe socialiste. Non !

M. Jean Dionis du Séjour. Tel est le cas dans ma circonscription. Je peux reprendre avec vous, chers collègues, les chiffres de chaque journée de mémoire. J’appelle donc à un vrai effort de réflexion sur cette question.

Les crédits existent à budget constant. Il faut simplement les répartir différemment pour les affecter à de légitimes revendications : la retraite du combattant, les veuves. Je sens un frémissement consensuel sur ces questions. Alors faites mentir nos critiques sur le caractère un peu monarchique de ce budget. Soyez open et flex avec nos amendements !

Chers collègues de l’UMP, votre groupe a été particulièrement actif en la personne notamment de M. Colombier et de M. Bouvard.

M. François Rochebloine. Et nous ?

M. Jean Dionis du Séjour. Je vais y venir !

En tout cas, les amendements de l’UMP sont excellents. La séance d’aujourd’hui doit être historique : il faut que nos amendements, les leurs et les nôtres, soient adoptés. Rendez-vous cet après midi !

M. Michel Voisin. Vous pourriez l’applaudir !

M. le président. La parole est à M. Bernard Perrut.

M. Bernard Perrut. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’attention que nous portons à ce budget, sur tous les bancs, révèle un attachement fort à tous ceux qui ont marqué l’histoire et qui ont fait notre histoire commune. D’ailleurs, les dirigeants d’associations représentatives des anciens combattants sont aujourd’hui nombreux, dans les tribunes, à suivre ces débats, de même que des jeunes, venus d’une commune de province.

Nous sommes au lendemain des commémorations du 11 novembre 1918 et nous ne devons pas oublier l’engagement personnel de tous ceux qui ont lutté pour notre République et notre liberté. Je pense en particulier aux poilus de la Grande Guerre. Je rappelle ce grand témoignage : « Les vivants sont sous la terre, les morts sur la terre ». Cela résume bien quelle fut l’atrocité de cette guerre.

Ce budget est aussi l’occasion de rendre hommage aux combattants de la Seconde Guerre mondiale, à ceux d’Indochine, d’Algérie et des opérations extérieures, sans oublier toutes celles et tous ceux, les hommes, les femmes, les enfants qui, par leur implication et leur souffrance, méritent respect et soutien. Du reste, c’est en assumant son passé que la France peut regarder avec confiance son avenir et vivre le présent, fidèle aux valeurs qui nous animent.

Vous nous présentez, monsieur le ministre, un budget de 3,48 milliards d’euros, avec une dotation moyenne par pensionné qui augmente de 2,25 % par rapport à l’année dernière, soit 10 % depuis 2002. Il faut le souligner. Toutefois, certaines revendications demeurent légitimes, à la fois dans leur permanence et dans leur évolution. Tel est le cas de la revalorisation de la retraite des anciens combattants, de la juste indexation du niveau des pensions militaires d’invalidité, du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant, de la question de l’assouplissement des conditions d’attribution d’une demi-part fiscale aux détenteurs de la carte du combattant. Beaucoup d’efforts supplémentaires restent à accomplir. Les rapporteurs ainsi que de nombreux collègues se sont déjà exprimés sur ce sujet ; nous pouvons leur faire confiance.

En tout état de cause – il faut le rappeler – le Gouvernement conduit une politique efficace en la matière, notamment avec la décristallisation des pensions des anciens combattants des pays autrefois placés sous souveraineté française. Cette année, selon l’engagement du Président de la République, un pas supplémentaire est accompli.

On pourrait aussi évoquer l’indemnisation des orphelins des victimes d’actes de barbarie pendant la Deuxième Guerre mondiale ou l’obtention de la carte du combattant pour tous les anciens combattants ayant servi plus de quatre mois en Afrique du Nord avant le 2 juillet 1962.

Voilà toutes les mesures que vous avez prises, monsieur le ministre, et que nous avons adoptées à vos côtés.

Il convient également de souligner le renforcement des droits des anciens combattants. Il faut ainsi évoquer l’augmentation de la retraite du combattant qui a été concrétisée puisqu’elle est passée, le 1er juillet 2006, de l’indice 33 à l’indice 35, et ce projet de loi de finances prévoit une nouvelle augmentation de deux points à compter du 1er janvier 2007. C’est un pas supplémentaire. Nul ne peut le nier et nous devons soutenir cet effort.

Il convient encore de rappeler la progression de plus de 12 % de la retraite du combattant mise en place en l’espace de quelques mois. En 2007, 755 millions d’euros lui seront ainsi consacrés. Soulignons enfin l’augmentation des pensions des veuves, qui avait été décidée en 2004 et qui concerne 134 000 veuves. Toutefois il reste encore à faire dans ce domaine.

Sur la rente mutualiste, que son relèvement exceptionnel a permis de porter de 115 à 122,5 points, des attentes demeurent. Certains de nos collègues, notamment Georges Colombier, membre de la commission des affaires sociales, souhaitent la relever encore de 2,5 points. Certes, cela coûterait 4,45 millions d’euros supplémentaires, mais cette mesure est nécessaire et nous devons progresser sur ce point.

Le budget de l’ONAC est un autre motif de satisfaction. Je mesure l’importance de cette institution car une maison de retraite pour les anciens combattants, qui se trouve dans ma circonscription, sera prochainement rénovée et adaptée aux besoins des personnes qu’elle accueille. Ce budget, qui s’élèvera en 2007 à 13,6 millions d’euros, traduit la solidarité nécessaire de notre pays à l’égard des veuves d’anciens combattants qui sont parfois dans une situation de détresse matérielle. À ce titre, il importe de développer les services à domicile, créateurs d’emploi.

En réalité, la mission de l’ONAC est beaucoup plus étendue que ce que l’on croit. Outre l’action qu’il mène dans les domaines de la mémoire et de la solidarité, il agit en faveur de l’emploi puisque vous souhaitez, monsieur le ministre, développer des actions dans ce domaine.

Enfin, je tiens à souligner l’importance du devoir de mémoire.

Nous organisons en France de nombreuses commémorations, trop aux yeux de certains. Pour ma part, je pense qu’elles ont toutes une signification parce que ces moments forts nous permettent de nous retrouver autour de noms gravés dans la pierre. Or nous leur devons beaucoup puisqu’ils expliquent ce qu’est notre histoire aujourd’hui.

Sous la présidence du Président de la République, nous avons célébré, il y a quelques semaines, le quatre-vingt-dixième anniversaire de la bataille de Verdun, avec l’ampleur qui lui était due. Votre budget, monsieur le ministre, doit vous donner les moyens nécessaires pour conserver, voire valoriser ces lieux de mémoire. Il faut développer ce « tourisme de mémoire », mais les moyens budgétaires, il faut le reconnaître, sont encore insuffisants.

Les sacrifices consentis par tous ces hommes pour la France libre nous obligent à progresser sur la voie de la reconnaissance attendue par les anciens combattants. Ce n’est que justice ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à mon tour, je tiens à saluer la revalorisation de deux points supplémentaires de la retraite du combattant, même si nous souhaitions un effort plus important.

M. Alain Néri. Très bien !

M. Didier Quentin. Celle-ci passe ainsi de 35 à 37 points d’indice de la pension militaire d’invalidité. À son coût, qui s’élève à 41 millions d’euros, il faut ajouter 75 millions d’euros pour tenir compte des nouveaux ayants droit qui font valoir leur droit à réparation.

Dans un contexte budgétaire contraint, ce nouvel effort du Gouvernement traduit l’engagement que nous avions pris d’amorcer une revalorisation attendue depuis de nombreuses années et d’adresser un message de reconnaissance au monde combattant.

M. Alain Néri. Peut-on dire que tout va bien ?

M. Didier Quentin. Permettez-moi de rappeler que, lors de l’examen du budget pour 2006, j’avais déposé avec notre collègue Georges Colombier et de nombreux autres députés du groupe UMP, un amendement visant à revaloriser de deux points la retraite du combattant, sachant que celle-ci – cela a été rappelé à maintes reprises ce matin – n’avait pas été réévaluée depuis 1978.

Le Gouvernement avait repris cet amendement à son compte et vous nous aviez déclaré, monsieur le ministre, vouloir aller encore plus loin. Ce projet de loi de finances respecte cet engagement ; c’est heureux et je note avec satisfaction que cette revalorisation prendra effet, cette fois, le 1er janvier 2007.

M. Georges Colombier. Très bien !

M. Didier Quentin. En second lieu, je tiens à revenir sur la décision annoncée par le Premier ministre, Dominique de Villepin, le 27 septembre dernier, de procéder à la décristallisation totale de la retraite du combattant et des pensions militaires d’invalidité, et ce dès le 1er janvier 2007. Comme l’a déclaré le Président Chirac le 15 août 2004, lors des cérémonies commémoratives du soixantième anniversaire du débarquement de Provence, les combattants originaires du Maghreb, d’Afrique noire, de Madagascar, d’Asie « ont droit à notre respect et à notre reconnaissance éternelle ». Il convenait donc que celle-ci se concrétise. Déjà en 2002, le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin avait amorcé la décristallisation des pensions en réévaluant les droits des anciens combattants des pays autrefois sous souveraineté française.

Ce sont maintenant près de 57 000 bénéficiaires de la retraite du combattant et environ 27 000 titulaires de pensions militaires d’invalidité qui vont voir leurs prestations alignées sur celles de leurs camarades de combat français.

Une regrettable injustice est donc enfin réparée. Bien avant le beau film Indigènes, nous étions nombreux à demander cet alignement depuis longtemps. Je me souviens qu’en 1998, lorsque le président de l’Assemblée nationale a demandé à chaque député de choisir un poème pour le recueil Anthologie de la poésie française, j’ai choisi, avec une collègue socialiste de l’Aisne, un poème de Léopold Sédar Senghor : Hommage aux tirailleurs sénégalais.

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est un magnifique poème !

M. Didier Quentin. Je ne vous le fais pas dire, monsieur Lagarde !

Si ces mesures, monsieur le ministre, constituent des avancées significatives, d’autres sont toujours attendues par le monde combattant. Permettez-moi de vous interroger sur certaines d’entre elles.

Tout d’abord, des divergences persistent sur le mode de calcul des pensions militaires d’invalidité. En effet, il semble que l’indice INSEE des traitements bruts de la fonction publique retenu ne prenne pas véritablement en compte le coût de la vie. Je vous serais donc reconnaissant de m’indiquer les mesures que vous entendez prendre pour établir une juste indexation de ces pensions.

Par ailleurs, il apparaît également urgent de revaloriser les pensions de réversion des veuves les plus démunies. Dans cet esprit, nous vous avons demandé l’année dernière d’étudier la possibilité du versement par l’office national des anciens combattants d’une allocation différentielle de solidarité à ces veuves pour parvenir à une pension mensuelle de 700 euros en vue d’améliorer leur pouvoir d’achat.

Vous aviez souscrit à cette requête en ouvrant une concertation avec différentes associations. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur les éventuelles conclusions de ce groupe de travail et, surtout, sur ce qui va en résulter ? C’est une question de dignité humaine ; c’est la raison pour laquelle je voterai les amendements qui vont en ce sens.

Ensuite, vous avez à plusieurs reprises exprimé l’intention de relever à 130 points le plafond majorable des rentes mutualistes. Pouvez-vous nous faire connaître la position du Gouvernement sur cette lancinante affaire ?

Enfin, je vous ai interrogé à plusieurs reprises sur le bénéfice de la double campagne. Je souhaite que vous puissiez nous informer précisément des conclusions du rapport Gal et de ses suites concrètes. Je vous remercie par avance de bien vouloir apporter des réponses à ces quatre questions.

Monsieur le ministre, chers collègues, ce projet de budget traduit notre ambition de répondre aux principales préoccupations du monde combattant, fondées sur le droit à réparation et sur le devoir de mémoire, auquel nous sommes tous très attachés.

Je terminerai mon propos en évoquant une scène vécue il y a quelques jours à Colombey-les-deux-Églises – où vous étiez présent, monsieur le ministre – après la pose par le Président de la République de la première pierre du mémorial dédié à Charles de Gaulle. Dans le car reconduisant les Compagnons de la Libération à la gare de Chaumont, j’ai entendu le jeune chauffeur dire au micro : « J’ai vingt-quatre ans. Je ne suis pas un orateur, mais je tiens à vous dire : de tout cœur, merci ! ». Quel simple mais bel encouragement à poursuivre votre action, monsieur le ministre ! C’est pourquoi je voterai sans réserve les crédits de la mission « Anciens combattants ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Michel Voisin.

M. Michel Voisin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, année après année, nous pourrions reprendre nos interventions d’autant que, depuis une vingtaine d’années, nous entendons, sur tous les bancs, les mêmes remarques. Pour une fois, je rejoins notre collègue Maxime Gremetz…

M. Alain Néri. Quel étrange rassemblement !

M. Michel Voisin. …quand il dit que nous devons cesser de nous déchirer à propos du budget des anciens combattants et nous tourner vers ceux qui sont dans les tribunes car ce qu’ils ont fait, sans forcément le demander, mérite notre reconnaissance et notre admiration.

M. Jean Lassalle. Très juste !

M. Michel Voisin. Monsieur le ministre, certains appréhendent ce projet de budget dans sa globalité. Certes, de 3,61 milliards l’an dernier, il est passé à 3,4 milliards d’euros cette année ; il a donc diminué. Cependant s’en tenir là serait aller un peu vite en besogne. N’est-ce pas, madame le ministre de la défense ? En effet si l’on procède à une analyse budgétaire, si l’on prend en compte ligne par ligne les populations et ses composantes, on s’aperçoit qu’il contient des avancées significatives. Elles vous reviennent, monsieur le ministre : soyez-en remercié.

M. Georges Colombier. Très bien !

M. Michel Voisin. La mission « Anciens combattants » comporte trois programmes : « Liens entre la nation et son armée », « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », « Indemnisation des orphelins des victimes de persécutions antisémites et d’actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale ». Sur de tels sujets, nous disons tous la même chose.

Je m’attarderai simplement sur la mémoire et les réparations en faveur du monde combattant, ainsi que sur l’indemnisation des orphelins des victimes de persécutions antisémites.

Sur le premier point, personne n’avait rien fait depuis 1978 pour modifier l’indice 33. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme Martine David. Quelle mauvaise foi !

M. Michel Voisin. Il a fallu que vous arriviez, monsieur le ministre, pour ajouter deux points l’an dernier et deux autres cette année. Les faits parlent d’eux-mêmes !

M. Patrick Roy. Votre discours est empreint de la plus grande mauvaise foi !

M. Michel Voisin. J’en viens à la retraite mutualiste du combattant qui pose un vrai problème. Les revalorisations demandées sont légitimes. J’espère que notre assemblée votera l’amendement tendant à la réévaluer de 2,5 points ; ce serait parfaitement équitable.

Monsieur le ministre, les veuves d’anciens combattants qui vivent en dessous du seuil de pauvreté attendent que l’on s’intéresse à elles ; nous devons donc faire quelque chose. Nous attendons vos propositions en ce sens et nous y souscrivons par avance. Il est temps de prendre des mesures car le monde combattant attend, et il n’attendra pas encore très longtemps.

M. Alain Néri. Il ne fallait pas retirer votre amendement sur ce sujet l’année dernière !

M. Michel Voisin. En ce qui concerne les orphelins des victimes de persécutions antisémites et d’actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale, je me souviens, mes chers collègues de l’opposition, du décret pris par M. Jospin lorsque vous étiez dans la majorité. Ce décret clientéliste ne concernait qu’une catégorie d’orphelins ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Georges Colombier. C’est vrai !

Mme Martine David. Ou nous ne faisons rien, ou c’est du clientélisme ! Quoi que nous fassions, cela ne vous va pas !

M. Michel Voisin. Madame, le devoir du Parlement est de traiter les Français d’une manière équitable, et l’équité exige de traiter de la même façon l’ensemble de la population.

Le Président de la République s’était engagé à le faire en 2002 ; vous l’avez fait, monsieur le ministre, en 2004. Il subsiste toutefois un problème du fait que les orphelins qui ne sont pas juifs et qui sont décédés entre le décret de 2000 et celui de 2004 ont été lésés. Il convient de conduire une réflexion en la matière.

Je ne reviendrai pas sur le problème du 19 mars et sur l’hypocrisie, monsieur Néri, qui vous a conduit à prendre la parole à ce sujet. Étant en effet présent dans l’hémicycle à l’époque des faits, je peux vous les rappeler avec précision. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Lorsque M. Floch, ici présent, a proposé, en sa qualité de ministre des anciens combattants, le 19 mars comme date de commémoration, l’Assemblée a adopté cette proposition à quelque 57 %. Après quoi, certains ont mis en avant l’argument selon lequel la majorité des deux tiers du Parlement était nécessaire. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Qui a pris cet argument ?

M. Michel Voisin. M. Floch !

M. Gérard Voisin. C’est M. Jospin !

M. Alain Néri. M. Forni a transmis le texte au Sénat ! Rien n’empêchait qu’il soit inscrit à l’ordre du jour !

M. Michel Voisin. Monsieur Néri, j’attendais que vous me disiez cela ! En effet j’ai assisté, en la matière, à un témoignage de la plus parfaite hypocrisie !

N’ai-pas vu, au cours d’une séance du conseil régional Rhône-Alpes, M. Queyranne, au nom de son groupe, défendre une motion sur le 19 mars, alors que, en tant que ministre chargé des relations avec le Parlement, il aurait pu faire inscrire à l’ordre du jour du Sénat le texte voté à l’Assemblée ? Je le répète : quelle hypocrisie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Gérard Voisin. C’est la vérité !

Mme Martine David. Ce n’est pas le conseil régional qui fait les lois !

M. Jean Lassalle. C’est à l’Assemblée d’avoir le dernier mot !

M. Jacques Floch. Vos amis avaient voté contre à l’Assemblée !

M. Alain Néri. Et vous osez prétendre qu’ils auraient voté pour au Sénat ! C’est de votre côté qu’est l’hypocrisie !

M. le président. Laissez M. Voisin conclure, mes chers collègues.

M. Michel Voisin. Monsieur Néri, ne vous en prenez pas à moi : j’ai voté pour cette date !

M. Pierre Cohen. Qui a sorti la date du 5 décembre ?

Mme Martine David. Ils récrivent l’histoire !

M. Michel Voisin. Madame le ministre, monsieur le ministre, je terminerai en évoquant la situation de nos militaires présents sur les théâtres d’opérations extérieures.

Ils y accomplissent un travail remarquable, comme j’ai pu le constater à Douchanbé, en Afghanistan, lorsque je me suis rendu auprès de nos forces. Nos soldats vivent là-bas des situations périlleuses, sur des terrains difficilement maîtrisables. Or ils rencontrent des difficultés pour se voir attribuer la carte du combattant, alors qu’ils méritent notre reconnaissance au même titre que tous ceux qui ont combattu, et cela parce qu’ils sont les meilleurs ambassadeurs de la France, en dehors de nos agents des services diplomatiques. La leur accorder serait faire œuvre de justice ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Patrick Roy. Qui a proposé la date du 5 décembre ?

M. le président. La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier.

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, la France vient de commémorer l'Armistice du 11 Novembre autour de ses monuments aux morts. Ce fut l'occasion de rendre hommage au doyen des poilus, Maurice Floquet, décédé la veille, et à tous les autres braves qui se sont battus pour la France. Or, alors que la mémoire des conflits s’éteint avec la disparition de leurs acteurs et de leurs témoins, le ministère des anciens combattants doit jouer un rôle accru en vue de garder cette mémoire vivante et de transmettre à nos enfants une vérité historique qui construit notre identité française.

Aujourd'hui, le monde combattant compte plus de 4 millions de ressortissants dans l'hexagone ; c'est dire le rôle fondamental de votre ministère qui doit rester dédié spécifiquement aux anciens combattants.

M. François Rochebloine. C’est indispensable !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. J’ai toujours défendu cette position depuis 2002, notamment au cours de la mission sur les sorties de crises internationales et la reconversion des anciens combattants, que vous avez bien voulu me confier. J'ai en effet toujours plaidé en ce sens dans les différents contacts que j'ai eus, aux États-Unis, en Allemagne, en Angleterre et au Timor oriental. Par ailleurs, j'ai également proposé que l'ONAC, notre maison du combattant, soit à la fois confortée dans ses missions nationales et orientée sur l'international afin d'exporter l'expérience française dans la prise en charge des anciens combattants. Vous m’avez suivi sur ce point, monsieur le ministre.

J'ai eu l'occasion de réaffirmer ces positions à vos côtés, lors de l’excellent colloque international sur la mémoire partagée, organisé à l'UNESCO sous l'égide de la France et à votre initiative. Je tiens d’ailleurs à vous remercier à la fois de promouvoir la mémoire partagée et de faire réfléchir au problème, ô combien difficile, des enfants soldats et des femmes soldats dans le monde entier.

Au-delà de ces considérations, je salue le travail accompli depuis 2002 – telle est la raison pour laquelle j’ai tenu à m’exprimer aujourd'hui –, notamment en ce qui concerne les droits des anciens combattants, qu’il s’agisse de l'augmentation de la retraite du combattant de l'indice 33 à l'indice 35, puis, demain, à l’indice 37, et ce après un gel de près de trente ans ; de celle du plafond majorable de la rente mutualiste de 7,5 points ; de la création d'un bilan médical gratuit, permettant le dépistage des psycho-traumatismes de guerre ; de l'augmentation des pensions des veuves de quinze points ; de celle des crédits sociaux de l'ONAC de 500 000 euros en 2005, en 2006 et en 2007 ; de l'égalité entre les hommes et les femmes dans le code des pensions militaires d'invalidité ; d’une meilleure prise en charge de l'appareillage pour les anciens combattants handicapés.

Je veux également saluer le travail mené en matière d'équité – cela a déjà été rappelé – avec la décristallisation totale,…

M. Patrick Roy. Enfin !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. …mesure attendue depuis quarante ans, les cures thermales remboursées à cinq fois le taux de la sécurité sociale, l'indemnisation des orphelins des victimes d'actes de barbarie et la carte du combattant AFN à quatre mois pour tous.

De plus, les institutions et leur budget ont été confortés, avec l'adaptation de l'ONAC, la modernisation de l'INI, les actions internationales et un plan en faveur de l'emploi.

Bien évidemment, je ne saurais non plus oublier, monsieur le ministre, votre implication personnelle dans le domaine de la mémoire, avec l’institution d'une journée nationale pour les harkis le 25 septembre et d’une autre dédiée aux morts pour la France en Indochine le 8 juin, avec l’instauration de la journée commémorative pour l'appel du général de Gaulle, sans compter votre participation à d'importantes manifestations qui ont jalonné ces quatre dernières années.

Reste la question du 19 mars. Vous êtes venu, ainsi que M. Guy Collet, en visite officielle dans le département où je suis élu et où vous avez, du reste, inauguré la maison de retraite de Fournels, dont je suis le maire. Or la majorité des communes de ce département ont délibéré pour la reconnaissance officielle de cette date. C’est pourquoi, sans méconnaître le choix du Gouvernement en faveur du 5 décembre ni votre engagement pour que les autorités civiles et militaires puissent participer aux commémorations du 19 mars, je tiens une nouvelle fois à vous demander de lever certaines ambiguïtés, constatées ici et là, quant à la présence autorisée, à cette date, du préfet, de la gendarmerie et des autorités militaires aux côtés des autorités civiles. En Lozère, peu de combattants se déplacent le 5 décembre, alors qu’ils sont nombreux le 19 mars.

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. C'est un fait qu’on ne saurait nier. Il est de mon devoir de vous le rappeler.

M. Alain Néri. Abrogeons le 5 décembre !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Par ailleurs, monsieur le ministre, au regard d'un budget de 3,48 milliards d'euros, qui représente une dotation moyenne par pensionné en augmentation de 2,25 % par rapport à l'an dernier, je me permets de vous demander, au nom de mes concitoyens, quelques précisions relatives notamment à la revalorisation de la retraite du combattant.

En effet une augmentation de trois points par an avait été souhaitée, de façon à arriver à l’indice 48. Nous sommes sur le bon chemin, mais un effort reste encore à faire, de même qu’en ce qui concerne l'indexation des pensions militaires sur le coût de la vie et la solidarité envers les veuves les plus démunies, notamment en milieu rural, avec la création d'une allocation différentielle de solidarité. Un groupe de travail s'est réuni plusieurs fois sur le sujet, en vue d’évaluer le coût d'une telle mesure : où en est la réflexion ?

De même, qu’en est-il de l'attribution de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique-du-Nord, fonctionnaires et assimilés ? Le Conseil d'État, le 30 mai 2006, a été saisi pour avis sur les conclusions du rapport de M. Christian Gal. Où en est également la réflexion sur le sujet ?

M. Alain Néri. Est-on au moins certain que le rapport a bien été transmis au Conseil d’État ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Il convient aussi de ne pas oublier la question du relèvement de la rente mutualiste ni celle de l'abaissement de l'âge d'accès à la demi-part fiscale accordée aux anciens combattants.

Des amendements ont été déposés sur tous ces sujets par le groupe de l’UMP, ainsi que par M. Georges Colombier. Je les soutiendrai.

Enfin, permettez-moi d'appeler votre attention sur la situation des délégations départementales de l'ONAC, dont la proximité est essentielle. Le volet social augmente largement avec les services à la personne, en lieu et place de la délivrance des titres. Dans mon département, l'action sociale du service de l'ONAC va ainsi doubler en un an. Or ce service ne dispose que d'un effectif réduit, même s'il est en liaison étroite avec les services de la préfecture et avec ceux du conseil général. Une attention de votre part serait très appréciée.

En conclusion, monsieur le ministre, je veux souligner que beaucoup de choses ont été faites grâce à vous et à toute votre équipe, grâce au Gouvernement dans son ensemble, grâce enfin à des personnes comme M. Guy Collet, directeur de l'ONAC. Le ministère des anciens combattants a vu aujourd'hui sa place réaffirmer.

M. Maxime Gremetz. Ne dites pas ça ! Il n’existe pas de ministère des anciens combattants !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Vous avez incontestablement été l'acteur efficace de cette évolution moderne. C'est pourquoi, je le répète, je soutiendrai votre action en votant le budget des anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrick Roy. Le Gouvernement va abroger la date du 5 décembre !

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle, dernier orateur inscrit.

M. Jean Lassalle. Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, c’est avec beaucoup d’humilité que je m’exprime aujourd’hui sur le budget de cette mission, parce que j’ai l’immense chance d’appartenir à une génération d’hommes qui n’ont jamais eu à partir au front après avoir quitté la maison familiale au petit matin, pour des terres étrangères, la peur au ventre. D’ailleurs un grand nombre d’entre eux ne sont jamais plus revenus au pays qu’ils avaient tant aimé, voyant simplement défiler, sous leurs paupières qui se fermaient, les souvenirs des terres pour lesquelles ils avaient donné leur vie.

Depuis les guerres d’Algérie, du Maroc et de Tunisie, nous avons connu une période de paix exceptionnelle dont nous devrions tirer beaucoup de satisfaction.

Telle est la raison pour laquelle je ne souhaite pas faire de polémique sur ce sujet, qui nous concerne tous. Nous parlons, ce matin, de quatre millions de personnes, qui incarnent la France, la résistance et une certaine idée de la liberté. Or, ce que je crois, c’est que nous n’avons été, ni les uns ni les autres, notamment ceux qui n’ont jamais dû partir, à la hauteur de nos responsabilités à l’égard des anciens combattants.

Le budget baisse de 3,6 %, chacun l’a rappelé.

M. Patrick Roy. Il baisse, en effet !

M. Jean Lassalle. Je ne suis pas opposé, par principe, à la baisse d’un budget ; encore faut-il qu’il permette de remplir ses objectifs ; ce n’est malheureusement pas le cas !

Vous avez sûrement fait ce que vous avez pu, monsieur le ministre, vous qui incarnez de façon si particulière le monde combattant.

Le fait que le plafond majorable de la rente mutualiste reste bloqué à l’indice 122,5, alors que l’objectif était de le porter à 130 points, est regrettable. J’espère que nos amendements sur le sujet seront adoptés, et je salue, à ce titre, le combat inlassable de M. Rochebloine, qui appartient à notre groupe.

M. François Rochebloine. Merci !

M. Jean-Christophe Lagarde. C’est vrai !

M. Jean Lassalle. De même, en ce qui concerne la retraite du combattant, portée à l’indice 35 en juillet 2006, mais vous avez choisi de l’amener à l’indice 37, mais nous sommes loin de l’objectif affiché des 48 points pour 2007. En vingt-huit ans, la retraite du combattant aura donc augmenté en tout et pour tout de 40 euros par an, soit une hausse de quatre euros par mois ! Cela montre notre incapacité collective – il faut savoir le reconnaître – à nous hisser à la hauteur de nos responsabilités.

Comment parler des anciens combattants sans aborder également la question de leurs veuves, parfois laissées dans la misère ? Plus de 15 % d’entre elles vivent en effet avec des ressources mensuelles indécentes, bien inférieures au seuil de pauvreté. Sans les services sociaux de l’office national des anciens combattants et victimes de guerre, elles seraient dans un abandon total. En effet, leur statut n’est pas satisfaisant. Bien que ressortissantes de l’ONAC – je tiens à rendre hommage à l’office, comme l’a fait un de mes collègues –, elles n’ont toutefois aucun droit spécifique découlant de cette qualité. Les associations réclament donc depuis longtemps la création d’une allocation différentielle de solidarité leur permettant de vivre décemment. Rien n’est fait. Certes, vous prévoyez 500 000 euros supplémentaires pour l’action sociale de l’ONAC, mais ce n’est pas suffisant pour répondre aux besoins.

Quant aux fonctionnaires et assimilés, il serait juste de leur attribuer, par équité avec les conflits précédents, le bénéfice de campagnes auquel ils peuvent prétendre, ce qui permettrait de multiplier par trois, pour leur décompte d'annuités, le temps passé en Afrique-du-Nord. Or, là non plus, rien n'est fait.

Enfin, monsieur le ministre, je souhaite évoquer la politique de mémoire, notamment les décisions qui ont été prises d'indemniser les orphelins de la déportation et les victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur durant l'occupation. Ce programme se voit cette année revalorisé ; c’est une avancée. Cependant, il reste inéquitable que toutes les pupilles de la nation, orphelins de guerre ou du devoir n'aient pas accès à ce droit à réparation.

M. Kelly Éric-Guillon, président de l'association Homega, se bat, met sa vie en péril en se privant de nourriture – je sais de quoi je parle ; je l’ai rencontré à plusieurs reprises –, pour la reconnaissance de ce droit à réparation pour toutes les pupilles de la nation. Les derniers décrets ont consommé cette rupture d'égalité. Toute personne reconnue pupille de la nation, orphelin de guerre, quelles que soient les circonstances de la disparition de son ou de ses parents, devrait pouvoir obtenir réparation du préjudice subi.

La politique de mémoire, c'est aussi et surtout le choix des dates de commémoration. Très franchement, je pense qu’il n’est pas digne de nous, de notre peuple et de notre histoire de laisser des associations d’anciens combattants continuer de se battre sur ce point. Pour ma part, j’observe que le cessez-le-feu en Algérie est entré en vigueur le 19 mars 1962, qu’il a été reconnu comme tel par le général de Gaulle et que les accords d’Évian ont été approuvés par 90 % du peuple français. Il faudrait en tenir compte et, quelle que soit la décision prise, en finir avec cette question.

Ensuite, permettez-moi de dire combien je sens, dans toutes les manifestations d’anciens combattants, comme une blessure ressentie par ceux d’Afrique-du-Nord ou d’Indochine qui ont le sentiment de ne pas être traités tout à fait comme les autres. Or ils seront, d’ici peu de temps, les derniers témoins vivants de ceux qui, un jour, ont tout quitté pour défendre une certaine idée de la France, avec toute l’incertitude que ce geste impliquait.

Je suis par ailleurs très heureux de la clarification opérée par le Président de la République à propos du régime de Vichy. Il faut continuer dans ce sens, cela honore et grandit notre pays.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Jean Lassalle. Je souhaite vous dire aussi, madame la ministre, puisque vous êtes parmi nous, que je suis fier de la politique que conduit la France, présente avec ses moyens sur tous les théâtres d’opérations – souvent les plus délicats –, et dans la plus pure tradition française, sans désir de vaincre à tout prix, mais plutôt avec la volonté de convaincre et d’ouvrir la voie à la démocratie et à la justice. Cela nous honore et doit, je le crois, rendre heureux ces quatre millions d’anciens combattants qui ont ainsi le sentiment de ne pas s’être battus pour rien, constatant que la France est restée la France et que vous incarnez parfaitement une certaine tradition.

Enfin, monsieur le ministre, courage ! Il faut réussir à obtenir davantage.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous allons l’aider !

M. Jean Lassalle. Nous allons essayer de vous y aider car personne ne comprendrait que nous n’y parvenions pas. Nous faillirions à notre tâche ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué aux anciens combattants.

M. Patrick Roy. Il va annoncer l’abrogation de la commémoration du 5 décembre !

M. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué aux anciens combattants. Monsieur le président, madame le ministre, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, c'est la cinquième fois que j'ai l'honneur de présenter devant cette assemblée le projet de budget des anciens combattants. Une nouvelle fois, je salue l'intérêt que vous manifestez pour le monde combattant. Une nouvelle fois, je salue votre présence si nombreuse qui traduit bien le respect de la représentation nationale pour celles et ceux qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes, parfois jusqu’au sacrifice suprême, pour notre pays.

Samedi dernier, le 11 novembre, dans toute la France, mais aussi dans de nombreux pays sur tous les continents, on s'est souvenu des combattants de la Grande guerre. Près de quatre-vingt-dix ans après la fin de ces combats, c'est le signe, fort et émouvant, de la fidélité de nos peuples pour les combattants ; c'est le signe de notre volonté commune de ne pas oublier les enseignements des grandes épreuves du XXe siècle.

Cette reconnaissance, que nous devons aux anciens combattants, et la nécessité de transmettre la mémoire aux jeunes générations sont au cœur de notre projet de budget pour 2007 et je remercie vos rapporteurs, Jean-Claude Mathis, Marc Bernier et Jean-Claude Viollet de l'avoir relevé. Messieurs les rapporteurs, vous avez présenté l'essentiel de ce budget. Qu'il me soit cependant permis de revenir plus particulièrement sur deux mesures que je n'hésite pas à qualifier d'historiques.

La première est, bien évidemment, la décristallisation.

M. Patrick Roy.. Enfin !

M. Jean-Marc Nudant. Enfin ? Vous n’avez rien fait !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Cet après-midi, par voie d'amendement,…

Mme Martine David. Pourquoi ne pas l’avoir inscrit au budget ?

M. Jean Dionis du Séjour. Pourquoi par amendement ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. …vous allez mettre fin à une trop longue injustice…

M. Jean-Louis Dumont. Il faut en effet le rappeler, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. …que vous aviez cependant déjà atténuée en 2002.

Ce moment restera gravé dans nos mémoires. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Union pour la démocratie française.)

Oui, après quarante-cinq ans d'attente,…

M. Jean-Louis Dumont. Par la volonté de vos amis politiques de l’époque !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. …nos anciens combattants des pays autrefois placés sous souveraineté française vont enfin voir leurs droits pleinement reconnus.

Sur ce sujet emblématique, mesdames, messieurs les députés, je ne souhaite vraiment pas polémiquer.

M. François Rochebloine et M. Guy Teissier. Très bien !

M. Jacques Desallangre. C’est peut-être mieux pour vous !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je me dois néanmoins de répondre à certaines interrogations.

M. Jean-Louis Dumont. Il faut admettre ses torts, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Permettez-moi de rappeler très brièvement la position du Gouvernement quand vous étiez majoritaires.

M. Jean-Marc Nudant. Très bien ! Cela aussi fait partie du devoir de mémoire !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je cite le document officiel que je tiens à votre disposition : « S’agissant de la décristallisation, je ne pense pas que l’on puisse approcher cette question en termes de sommes nominales. On ne peut pas verser aux anciens combattants de nos anciennes colonies le même montant que celui que nous versons aux anciens combattants français. »

M. Marc Le Fur. Ils l’ont dit !

M. Jean-Louis Dumont. En quelle année ces propos ont-ils été tenus ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Il convient donc de rester humbles.

M. Jean-Christophe Lagarde et Mme Martine David. De qui sont ces propos ?

M. Jean-Louis Dumont. Dans le passé, vous nous avez servi des raisonnements très comparables !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je tiens ce document à votre disposition ; c’est la déclaration du représentant du Gouvernement de l’époque.

M. Jean-Louis Dumont. J’ai été rapporteur assez longtemps. Alors dites-nous quel est l’auteur de cette déclaration !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je le répète, je tiens ce document à votre disposition.

Tout observateur de bonne foi sait qui a réglé ce dossier et de quelle manière. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Aucun propos de tribune, fût-il brillant comme les vôtres le sont souvent, ne pourra faire illusion : les anciens combattants jugeront par eux-mêmes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française.)

Mme Martine David. C’est vous qu’ils vont juger !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. En effet, il a fallu attendre 2002 pour que le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin et l'actuelle majorité mettent fin à la cristallisation des pensions et retraites accordées aux anciens combattants de nos ex-colonies.

En 2002, donc, en instaurant la parité de pouvoir d'achat entre tous les combattants, nous avons rétabli l'équité. Nous l’avons expliqué et cela a été un premier pas honorant l’ensemble de la représentation nationale.

Il est toutefois vrai que le montant des prestations versées en euros de part et d'autre faisait toujours apparaître des différences, d'où un sentiment d'injustice persistant. C'est pourquoi, le 14 juillet dernier, le Président de la République nous a demandé d'aller plus loin ; et je vous renvoie à son intervention de façon à dissiper toute polémique sur la supposée influence du film Indigènes.

Mme Martine David. C’est votre version des choses !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Dès le 27 septembre, le gouvernement de Dominique de Villepin a fait connaître sa décision : à compter du 1er janvier 2007, la retraite du combattant et les pensions militaires d'invalidité seront égales pour tous les anciens combattants de l'armée française, qu’ils soient de nationalité française ou de nationalité étrangère.

Je salue publiquement les parlementaires et les associations françaises d'anciens combattants qui n'ont jamais oublié ce dossier, faisant preuve d'une remarquable fraternité d'armes.

M. Georges Colombier. Très bien !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Avec l'achèvement de la décristallisation, avec cette égalité totale, nous rendons pleinement justice et dignité à ceux qui ont secouru la patrie lorsqu’elle était en danger.

Mesdames et messieurs les députés, la deuxième grande mesure que contient ce budget est la nouvelle progression de la retraite du combattant. (Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Roy. Elle est historique ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jean-Marc Nudant. Et vous, qu’avez-vous fait ?

M. Guy Teissier. Rien !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Chacun sait sur ces bancs, comme dans les tribunes, que, pendant près de trente ans, rien n’a été fait. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) L'indice de référence de la retraite du combattant n'a jamais évolué depuis 1978. Une hausse a été décidée le 1er juillet dernier. C'était la première, en effet, depuis 1978. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Guy Teissier. Un peu de modestie, mesdames et messieurs de l’opposition !

M. Michel Voisin. Vous n’avez donc aucune pudeur !

M. Jean-Marc Nudant. C’est l’histoire de la paille et de la poutre !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Une nouvelle hausse de deux points sera effective le 1er janvier 2007.

Monsieur Rochebloine, monsieur Dionis du Séjour, monsieur Lassalle, vous savez bien que ce passage de 33 à 37 points d’indice représente un effort majeur dans un budget d’État extrêmement difficile à maîtriser.

M. François Rochebloine. Allons : un point représente 20 millions d’euros !

M. Alain Néri. Dix-huit !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Permettez-moi une seule remarque : quel dommage que rien n’ait été fait pendant ces trente années ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Dino Cinieri. Il a raison !

M. François Rochebloine. Quel que soit le Gouvernement et quel que soit le Premier ministre !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Sinon nous aurions été dans une situation qui nous aurait permis de faire l’économie de toutes ces discussions. Là encore, messieurs Néri et Desallangre, le monde combattant connaît la vérité et il saura reconnaître quelles actions auront effectivement été menées par les uns ou par les autres.

M. Roland Chassain. Tout à fait !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Mesdames et messieurs les députés, avec 3,484 milliards d'euros, ce projet de budget pour 2007…

M. Alain Néri. Est en baisse !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. …assure une croissance du crédit par pensionné…

M. Alain Néri. Pas par ressortissant !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. …de 2,25 % par rapport à 2006. Il ne s’agit pas d’une comparaison globale, comme vous voulez le faire car, malheureusement, s’il est une chose qu’on ne peut pas maîtriser, c’est la mort.

M. François Rochebloine. Si tous les problèmes étaient réglés, nous aurions accepté le budget ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je remercie M. Mathis et M. Beaudouin d'avoir montré combien ce budget permettait de prendre des mesures utiles et ô combien attendues.

Je pense au meilleur remboursement de l'appareillage de nos invalides et grands invalides. En effet, une enveloppe supplémentaire exceptionnelle de 635 000 euros y est consacrée pour faire face à l'augmentation des prix des prothèses tenant compte de l’utilisation de nouvelles technologies.

Nous allons également engager l'harmonisation des pensions militaires d’invalidité des sous-officiers des armées de terre et de l'air avec celles des officiers mariniers. Une enveloppe de 850 000 euros a été réservée à cet effet. Cela s’appelle la justice.

Enfin, nous allons à nouveau augmenter les crédits sociaux de l'ONAC. Comme cela a été souligné, les difficultés concernant les veuves d’anciens combattants n’étaient jusqu’à présent satisfaites que par le recours à la réserve parlementaire.

M. Alain Néri. C’est vrai !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Pour la troisième année consécutive, ces crédits vont progresser de 500 000 euros pour atteindre le montant de 13,6 millions d’euros.

À ce propos, je souhaite traiter de l'avenir de l'ONAC et de la situation des veuves, deux sujets sur lesquels vous avez bien voulu m’interroger.

En cinq ans, comme l'a parfaitement démontré M. Bernier, l'ONAC est devenu une institution moderne et dynamique qui répond aux besoins du monde combattant. On nous avait prédit des catastrophes. Que nenni : nous avons réalisé ce contrat d’objectifs et de moyens dans de bonnes conditions. Dans chaque département – et vous en êtes témoins – cela fonctionne comme on le souhaitait dès le départ.

À cet égard, je confirme que nous allons engager les travaux préparatoires à la conclusion d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens pour la période 2008-2012.

J’ajoute que l’augmentation régulière des crédits sociaux, la préservation des services départementaux et le rôle donné aux écoles de reconversion dans le plan Emploi démontrent et confortent cette volonté de pérenniser l’ONAC. Comme vous, mesdames et messieurs les députés, je crois que l’office doit être au cœur de notre politique en faveur des veuves d’anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Sur ce sujet important, nous avions remis, dès 2004, un rapport à la demande de votre collègue M. Patrick Beaudouin. Il y a un an, je m’étais engagé à constituer un groupe de travail associant parlementaires, administrations et fédérations d’anciens combattants.

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Ce groupe, auquel participaient M. Mathis et M. Colombier, vient de me remettre ses conclusions. Plutôt que de recourir à des mécanismes lourds, complexes, coûteux et difficiles à mettre en œuvre, il propose de s’appuyer sur les crédits sociaux de l’ONAC, lesquels seraient bien entendu abondés en conséquence.

M. Alain Néri. Quand ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Dès l’année prochaine, monsieur Néri. (« Très bien !» sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. Roland Chassain. Vous avez encore perdu une occasion de vous taire, monsieur Néri !

M. Alain Néri. Combien ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Ce choix cohérent et pragmatique confortera cet établissement et permettra d’agir avec plus de rapidité. Il convenait en effet de satisfaire aux demandes répétées, et cette voie mérite d’être examinée avec attention.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous allons améliorer les choses !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Les crédits que nous avions prévus pour l’ONAC permettront d’aller dans cette direction dès 2007. Il n’est donc pas nécessaire de les abonder dans le cadre de ce budget.

M. Jean Dionis du Séjour. Nous allons tout de même essayer de l’amender, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Je ne saurais conclure sur ce sujet sans rappeler qu’en 2004 nous avons augmenté de quinze points les pensions des veuves de guerre, des veuves d’invalides et des veuves de grands invalides. Le budget pour 2007 constitue donc, en quelque sorte, le point d’orgue de cinq années de progrès en faveur du monde combattant.

Je remercie tout spécialement les députés du groupe UMP, qui ont toujours soutenu l’action du Gouvernement…

M. Alain Néri. Ils ont eu bien du mérite en effet !

M. Patrick Beaudouin. Ce n’est pas du mérite, c’est du réalisme !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. …et qui ont eu un rôle moteur à maintes reprises.

Non, messieurs Néri, Lagarde, Desallangre, personne ne peut raisonnablement contester l’importance des avancées obtenues pour le monde combattant depuis 2002. Je tiens à votre disposition la liste exhaustive des actions que nous avons menées. Comment peut-on nier les résultats obtenus ?

M. Jacques Desallangre. Ce sont les chiffres eux-mêmes qui vous démentent, monsieur le ministre !

M. Alain Néri. Les intéressés jugeront !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Sans revenir sur la retraite du combattant et la décristallisation, rappelons simplement l’harmonisation des critères d’attribution de la carte du combattant au titre de l’AFN à quatre mois pour tous…

M. Jacques Desallangre. C’était une obligation !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. … – obligation morale, en effet,…

M. Jacques Desallangre. Non, légale !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. …à laquelle nous avons donné une traduction politique et juridique.

M. Marc Le Fur. Ce que vous n’aviez pas fait quand vous étiez aux affaires, messieurs de l’opposition !

M. Alain Néri. Allons donc ! Qui a créé le dispositif, selon vous ?

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Soyez assez aimable pour écouter, monsieur Néri. Vous risquez de ne pas entendre certaines choses et vous nous ferez ensuite le reproche de les avoir omises ! (Sourires.)

M. Guy Teissier. Très juste !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. J’en reviens aux résultats que nous avons obtenus.

Nous avons rétabli le remboursement des cures thermales que le gouvernement précédent avait fait passer, sans aucune explication plausible, de cinq fois à trois fois le taux de la sécurité sociale pour l’hébergement et que nous sommes fiers d’avoir ramené à son niveau initial. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Citons encore l’indemnisation des orphelins de déportés, fusillés et massacrés, conformément à ce qu’exigeaient l’équité et la morale, l’augmentation du plafond majorable des rentes mutualistes de sept points et demi, auxquels il faut ajouter les deux points et demi de cette année, ce qui porte la moyenne d’augmentation sur les cinq ans à deux points. Les mesures adoptées sont si nombreuses que je ne peux ici les énumérer toutes.

Quelques sujets devront toutefois trouver leur solution dans les prochains mois.

Aux nombreux orateurs qui ont abordé la question de la campagne double, je veux rappeler que, là encore, si ce sujet avait été réglé entre 1962 et 2002, nous n’aurions pas à en parler.

M. Didier Quentin. Bien sûr !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. À bien des égards, nous faisons du rattrapage. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

J’ai souhaité que ce dossier soit ouvert. Une fois que le Conseil d’État aura rendu son avis, ce qui ne saurait tarder, nous aurons alors tous les éléments nécessaires à une prise de décision, dont j’informerai bien évidemment les parlementaires et les associations.

Concernant le plafond majorable de la rente mutualiste, le Gouvernement a entendu le message que lui ont adressé les députés de la majorité, notamment M. le rapporteur spécial et MM. Colombier, Beaudouin, Quentin et Rochebloine. Je confirme que nous porterons ce plafond à cent vingt-cinq points par amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)

M. François Rochebloine. Merci, monsieur le ministre !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. La mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » regroupe également les crédits de la JAPD, de la communication de la défense, de la culture et de la mémoire. Ces crédits attestent l’importance que Mme le ministre de la défense accorde au lien entre les armées et la nation.

Monsieur Viollet ayant présenté ces actions en détail, je serai bref.

Grâce à la JAPD, le ministère de la défense est, avec celui de l’éducation nationale, la seule structure qui peut s’adresser à une classe d’âge complète chaque année. Près de huit cent mille jeunes sont ainsi sensibilisés aux questions de défense. Par ailleurs, la JAPD est un lieu privilégié d’apprentissage de la citoyenneté et de responsabilisation des jeunes sur les enjeux de leur vie future. Elle permet de détecter les difficultés de lecture des jeunes et d’identifier les cas d’illettrisme.

À ce titre, elle est un outil complémentaire au dispositif « Défense deuxième chance » mis en place en 2005 par Mme Alliot-Marie. Celui-ci permet de resocialiser des jeunes en perte de repères et de les conduire vers un retour à la vie professionnelle. Dix centres « Défense deuxième chance » ont été ouverts en moins d’un an.

M. Marc Le Fur. C’est une excellente chose !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Par ailleurs, depuis la suspension de la conscription, la communication est un vecteur essentiel de la diffusion de l’esprit de défense. L’objectif est ambitieux : maintenir le haut niveau de confiance des Français en leur armée tout en maîtrisant la dépense de communication. Je salue à cette occasion la qualité du travail accompli par la DICOD et souligne l’importance du rôle de l’ECPAD dans la politique de mémoire, notamment en raison des fonds documentaires qu’il détient. Enfin, 58 millions d’euros seront consacrés en 2007 à la valorisation du patrimoine culturel de la défense, notamment aux musées.

J’en viens à la politique de mémoire.

Nous sommes tous convaincus de son importance et je remercie M. Gérard Charasse de l’avoir souligné avec force. Je reviendrai sur le sujet des dates de commémoration en répondant aux questions que vous mes poserez dans la suite de ce débat, mesdames et messieurs les députés.

Plus fondamentalement, l’année 2006 aura été marquée par la commémoration des batailles de Verdun et de la Somme, par l’inauguration du monument aux combattants musulmans morts pour la France pendant la Grande Guerre, par l’officialisation du 18 juin comme journée nationale, par plusieurs hommages aux combattants de la quatrième génération du feu – c’est en effet justice, monsieur Michel Voisin – et par les premières rencontres internationales de la mémoire partagée, qui ont rassemblé les 26 et 27 octobre vingt-cinq pays des cinq continents. Je remercie M. Morel-A-L’Huissier d’avoir souligné l’intérêt et la réussite de cette initiative française.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. Merci !

M. le ministre délégué aux anciens combattants. Malgré l’achèvement de plusieurs grands projets, nous maintiendrons un haut niveau d’action en 2007. Je compte sur vous, mesdames et messieurs les députés, sur votre sens des responsabilités, sur votre attachement à la politique de mémoire, sur votre attention au lien armée-nation, pour ne pas amputer ces crédits indispensables lors de l’examen des amendements. Comme l’a dit très justement M. Perrut : nous devrons poursuivre nos efforts en 2007.

Les commémorations seront dominées par celles de l’année 1917 : le Chemin des Dames, l’entrée en guerre des États-Unis, l’arrivée au pouvoir de Clemenceau… Plusieurs cérémonies auront une forte dimension internationale, notamment à Vimy avec les Canadiens, et à Arras.

Tels sont, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, les commentaires et les réponses que je souhaitais apporter à la représentation nationale sur notre budget pour 2007. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Rappelss au règlement

M. Jacques Floch. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Floch, pour un rappel au règlement.

M. Jacques Floch. Monsieur le ministre, vous avez cité, dans votre intervention, un passage d’un rapport dont il se trouve que je suis l’auteur, puisque je l’ai élaboré lorsque j’étais secrétaire d’État à la défense chargé des anciens combattants.

À cette époque, nous avons, pour la première fois, ouvert le dossier de la cristallisation des pensions des combattants de nos anciens territoires et colonies. Nous avons essayé de mesurer le coût de l’opération consistant à porter au même niveau qu’en métropole les pensions des anciens combattants africains, malgaches, maghrébins ou vietnamiens.

M. Michel Bouvard. Vous vous êtes contenté d’essayer de mesurer, comme vous dites.

M. Jacques Floch. Nous avons engagé des discussions avec les représentants des États concernés, avec l’idée – que vous avez reprise, monsieur le ministre – qu’il fallait tenir compte de la parité des monnaies afin que la valeur nominale de la pension versée à ces anciens combattants soit la même que pour les anciens combattants métropolitains.

Que n’avez-vous reconnu, monsieur le ministre, que cela était inscrit dans mon rapport !

Votre présentation du dossier a suscité quelques murmures. Que n’avez-vous rappelé à quelle occasion cette mesure a été prise pour la première fois ? C’était en 1958, après que la Guinée se soit opposée à la Constitution de la Ve République tout juste votée. Aussitôt, toutes les pensions des civils, des militaires et des anciens combattants guinéens avaient été stabilisées.

M. Michel Bouvard et M. Michel Voisin. C’est exact !

M. Jacques Floch. Puis, en 1959, alors que l’ensemble des États africains n’avaient pas encore pris leur indépendance, c’est Michel Debré qui avait proposé, dans la loi de finances pour 1960, la cristallisation des pensions, invoquant des arguments plus terribles encore que ceux, purement comptables, que j’avais utilisés dans mon rapport de 2002 : il fallait que cela serve de leçon aux autres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Ça, c’est une vérité historique !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je demande une suspension de séance de dix minutes.

M. le président. Je propose plutôt de lever la séance.

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour des prochaines séances

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007, n° 3341.

Rapport, n° 3363, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ; article 43 (suite) :

Rapport spécial, n° 3363, annexe 6, de M. Jean-Claude Mathis, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan,

Avis, n° 3364, tome II, de M. Marc Bernier, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 3367, tome I, de M. Jean-Claude Viollet, au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Direction de l’action du Gouvernement (programme coordination du travail gouvernemental) ; Publications officielles et information administrative (budget annexe) :

Rapport spécial, n° 3363, annexe 12, de M. Jean-Pierre Brard, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

Culture ; Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale (compte spécial) :

Rapport spécial, n° 3363, annexe 7, de M. Olivier Dassault, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan,

Rapport spécial, n° 3363, annexe 8, de M. Nicolas Perruchot, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan,

Avis, n° 3364, tome III, de M. Christian Kert, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures quarante-cinq.)