Accueil > Archives de la XIIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus intégraux (session ordinaire 2006-2007)

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Première séance du vendredi 17 novembre 2006

55e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-LUC WARSMANN,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Loi de finances pour 2007

SECONDE PARTIE

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007 (nos 3341, 3363).

transports

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs aux transports. Je rappelle que, conformément à la décision de la Conférence des présidents, la discussion de ces crédits a eu lieu, à titre principal, en commission des finances élargie.

Le compte rendu de la réunion de cette commission est annexé à celui de la présente séance.

La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, j’ai présenté les crédits de mon ministère devant la commission élargie, le 8 novembre. À cette occasion, j’ai tenté de répondre à vos questions dans la plus grande transparence. Depuis, j’ai pris connaissance avec beaucoup d’intérêt des différents rapports de l’Assemblée nationale sur la mission « Transports », établis au nom de la commission des finances et de celle des affaires économiques. Je remercie les rapporteurs pour leur travail très minutieux et de grande qualité. Je note que, sur de nombreux points, leurs rapports portent une appréciation positive de l’action du Gouvernement en matière de politique des transports, dont je voudrais rappeler quelques éléments.

Pour ce qui concerne la politique de sécurité des transports, je veux évoquer la réussite incontestable en matière de sécurité routière. C’est avant tout, bien sûr, un succès pour les Français et pour les familles. Entre 2002 et 2005, ce sont ainsi 8 700 vies qui ont été épargnées et plus de 110 000 blessés évités. Les chiffres de 2006 sont d’ailleurs encourageants puisque, pour les neuf premiers mois, la baisse se poursuit avec 15,3 % de tués en moins.

Nous entendons bien sûr poursuivre en 2007 la politique de renforcement de la sécurité dans tous les modes de transport. Ainsi, les rapports de l'Assemblée saluent-ils la hausse, en 2007, des crédits d'entretien des routes – élément important pour la sécurité – et celle des crédits de renouvellement des voies ferrées, ce dont vous vous étiez déjà inquiétés à juste titre l’an dernier. À ce sujet, nous devons continuer à suivre les orientations que j’avais définies précédemment, notamment pour favoriser l’effort de régénération des voies. Les rapports saluent par ailleurs l’augmentation des investissements dans le domaine de la sécurité maritime.

Plusieurs rapports soulignent également l'ampleur de l'effort consenti en faveur de la politique d'investissement. Grâce à la création de l'AFITF – Agence de financement des infrastructures de transport de France – et à l'affectation en 2006 de 4 milliards d’euros de recettes issues de la privatisation des sociétés concessionnaires d'autoroutes, le Gouvernement a pu accélérer les chantiers de construction de grandes infrastructures de transport : vous avez pu vous en rendre compte dans l’ensemble des départements où vous êtes élus. Ces chantiers de construction d’infrastructures, d’ailleurs, sont aussi des éléments de soutien à la croissance de l’activité et de l’emploi : le secteur du bâtiment et des travaux publics participe en effet activement à la création d’emplois depuis plusieurs mois.

L'AFITF est un outil qui permet à la fois d'accélérer les chantiers définis par le CIADT – comité interministériel d’aménagement et du développement du territoire – de 2003, mais aussi de réaliser des projets contractualisés avec les régions. Les résultats sont encourageants. L'AFITF est aussi un outil de multimodalité, qui permet de réorienter des ressources exclusivement issues du secteur routier vers le financement de projets ferroviaires, maritimes ou fluviaux.

Certains rapporteurs ont pu regretter le caractère indépendant de l'AFITF, eu égard au rôle de contrôle du Parlement. Nous devons en effet y réfléchir ensemble, et je m’engage à améliorer votre information, par exemple en transmettant aux commissions concernées le rapport annuel d'activité de l'AFITF. Au-delà de la présence de parlementaires au sein du conseil de l’AFITF, il faut améliorer l’information du Parlement, compte tenu du rôle que joue désormais l’Agence dans le financement des investissements.

Enfin, la politique du Gouvernement va dans le sens d’une meilleure protection de l'environnement. Certes, la route assure encore près de 80 % des transports de marchandises. Toutefois, je souhaite, par une politique volontariste, accélérer la croissance des modes non routiers. Vous connaissez en particulier mon engagement en faveur des autoroutes ferroviaires ou maritimes, comme M. Saddier a bien voulu le rappeler dans son rapport. Hier, avec le Président de la République, nous avons signé un engagement avec nos partenaires espagnols pour que soit lancé avant la fin de l’année l’appel à projets pour l’autoroute maritime atlantique entre le Nord-Ouest de l’Espagne et le Nord de la France.

Je voudrais aussi souligner le succès incontestable du transport fluvial, qui a déjà enregistré une croissance de 30 % depuis 2002. Si le recul de la circulation routière concerne essentiellement les voitures particulières – avec un baisse globale de 1,4 % enregistrée cette année –, je veux aussi souligner le dynamisme des transports collectifs, notamment des TER, avec des taux de croissance à deux chiffres, fruit de l’implication de RFF, de la SNCF et de l’ensemble des régions de France. Cette évolution atteste un réel transfert modal des moyens de transports, dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Au-delà des efforts en matière d’investissements, nous devons aussi mettre en œuvre des politiques incitatives adaptées, comme l'adaptation des péages routiers en fonction du niveau de pollution du véhicule : je travaille en ce moment à cette piste intéressante, qui nous permettrait d’encourager les comportements vertueux et de progresser en matière de protection de l'environnement.

Tels sont, mesdames et messieurs les députés, les quelques éléments de réflexion dont je voulais vous faire part après avoir pris connaissance des rapports de vos commissions, et qui font suite aux débats que nous avons eus lors de la commission élargie du 8 novembre dernier. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à Mme Annick Lepetit, pour le groupe socialiste.

Mme Annick Lepetit. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le cadre budgétaire que le Gouvernement nous présente apparaît davantage comme le simple résultat de décisions déjà prises que comme la réelle expression d’une volonté politique : je pense en particulier à la décentralisation et à la privatisation des sociétés concessionnaires d'autoroutes, qui ont pour conséquence le dévoiement du rôle de l'AFITF.

Le budget soumis à notre vote fait apparaître une baisse de 4 %. Celle-ci, à vrai dire, est due au transfert des routes nationales, et, à périmètre identique, c'est une impression de stabilité qui prévaut au regard du budget de 2006.

En ce qui concerne les routes, 13 % des 16 180 kilomètres de routes transférées sont en très mauvais état, faute d'avoir été régulièrement entretenues par le passé. Seulement 185 millions d'euros sont prévus pour que les départements les entretiennent et les mettent aux normes. Cela est bien sûr très insuffisant et nous proposerons des amendements pour abonder les moyens des départements.

Loin de demeurer stable, le programme « Transports terrestres et maritimes », pourtant censé contribuer à l'amélioration de la desserte des territoires et favoriser le rééquilibrage des modes de transport, affiche lui aussi une baisse significative de 9 %.

M. François Liberti. Eh oui !

Mme Annick Lepetit. Quand on sait qu'à lui seul, le transport routier est responsable de 94 % des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports, cela n'est pas le moindre des paradoxes ! Cette baisse prouve le désintérêt du Gouvernement pour le transfert modal et, d'une manière plus générale, pour le développement durable.

M. Michel Bouvard. Oh !

Mme Annick Lepetit. Les crédits du rail sont ainsi particulièrement sanctionnés. Nous sommes bien loin des promesses de mars 2006 sur la régénération. Je rappelle que 1 500 kilomètres de notre réseau ont été mis en ralentissement et que bien d'autres tronçons ne sont plus aux normes. L'audit de l'École polytechnique de Lausanne avait préconisé une augmentation de 500 millions d’euros par an des crédits affectés au réseau pour en garantir la qualité. Vous avez annoncé, monsieur le ministre, 110 millions de crédits supplémentaires en 2006 et 260 millions pour 2007 consacrés au renouvellement des voies et au traitement des ralentissements. On est bien loin des 500 millions préconisés !

Pendant ce temps, le réseau se dégrade : en témoigne le déraillement d’un train Corail à Saint-Flour, en février dernier, où la rupture d’un rail, à l’origine de l’accident, aurait pu avoir des conséquences bien plus graves sur une voie en remblai !

De surcroît, sur les 110 millions d’euros de 2006, seuls 70 millions d’euros ont été transférés de la ligne « Contribution au désendettement » à la ligne « Subvention de régénération », les 40 autres millions ayant dû être dégagés sur les ressources de RFF et de la SNCF.

La même observation vaut pour les 260 millions d’euros pour 2007 : 70 millions correspondent à simple transfert, et seuls les 46 millions d’euros versés par l’AFITF correspondent à l’expression d’une véritable volonté politique, le reste relevant d’économies, de réalisations d’actifs ferroviaires ou d’augmentations des péages qui, dans de très nombreux cas, seront payés par les collectivités locales.

Et, puisque nous parlons de l’AFITF, je rappelle que 40 milliards d’euros de dividendes été attendus, que la vente des sociétés d’autoroutes devait rapporter 14 milliards d’euros, sur lesquels seuls 4 milliards ont été affectés à l’AFITF. Mais surtout, l’Agence, qui devait initialement, à partir des dividendes versés par les sociétés d’autoroute, financer uniquement les projets du CIADT, doit désormais prendre en charge les contrats de plan État-régions, les transports urbains et même la protection du littoral ! Si bien qu'en fin de compte la route recueille 45 % des crédits, les autres modes de transport se partageant les 55 % restants. Plus grave encore : il manque à l'AFITF 7 milliards d’euros pour financer les projets dont elle a la charge jusqu’en 2012 !

Monsieur le ministre, plusieurs questions se posent alors : Quels seront les projets sacrifiés ? Quelles seront les recettes nouvelles, sachant que les difficultés de financement de l'AFITF apparaîtront dès le deuxième semestre 2008 ? Le partenariat public-privé semble être votre seule réponse ; or le porter à ce niveau-là de participation est déraisonnable.

Ce budget confirme aussi, hélas, la non-reconduction des subventions de l'État aux plans de déplacement urbain. Vous persistez dans le refus d'accompagner les collectivités dans ces exercices de réflexion, qui s'avéraient pourtant particulièrement pédagogiques.

Quant aux transports en commun en site propre, une dotation de 50 millions d’euros a été prévue, mais des disparités importantes subsistent entre les projets. Cette somme sera très insuffisante pour corriger les disparités si, comme vous l'avez annoncé, des projets nouveaux sont susceptibles d'en bénéficier.

Concernant l'Île-de-France, le désengagement de l'État en matière de transports collectifs est alarmant. En commission, vous nous avez dit, monsieur le ministre, que vous pourriez revoir à la hausse ce que l'État propose dans le cadre du futur contrat de projets. Ce serait en effet primordial.

Quant au chèque transport – facultatif –, qui ne s'applique qu'aux salariés et qui est financé par les seuls employeurs pour un montant maximum de 200 euros, il ne saurait à lui seul promouvoir les transports collectifs ni davantage compenser le surcroît de frais de transports auxquels doivent faire face nos concitoyens. Comme nous l'avions proposé dans notre proposition de loi, il eût été plus efficace de rétablir la TIPP flottante.

Concernant enfin le volet transport aérien, les crédits, hors dépenses de personnels, sont en baisse de 13 % par rapport à 2006. Odile Saugues, rapporteure pour avis, a mis en évidence que ce budget n'est pas à la mesure des défis posés par la reprise du trafic aérien.

Aussi, pour l'ensemble de ces raisons, nous émettrons un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe UDF.

M. Charles de Courson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de l'examen en commission des finances élargie, Philippe Folliot a rappelé, au nom du groupe UDF, le grand nombre de questions lié à la politique des transports : l'impact des retraites sur les comptes des entreprises publiques de ce secteur, les problèmes du transport combiné et du ferroutage, les autoroutes de la mer, la sécuritaire aérienne, le chèque transport, les retards pris dans certains investissements d'infrastructures routières et autoroutières, dans le Sud-Ouest notamment, le financement de certaines lignes ferroviaires, l'assouplissement du permis à points, les contraintes environnementales, entre autres. Je pourrais continuer longtemps à énumérer les questions auxquelles votre budget ne répond qu'en partie.

Je préfère m'arrêter, dans cette explication de vote, sur deux points qui nous semblent très importants. La dette de la SNCF, tout d'abord, et plus précisément la question des retraites des cheminots. On apprend aujourd’hui que, en application des normes comptables IFRS, cette dette considérable de 8,2 milliards d’euros sera comptabilisée dans les comptes 2007 de la SNCF. Tout le débat porte sur sa contrepartie puisque, la SNCF ayant déjà 6,2 milliards d’euros de dettes pour seulement 4,8 milliards d’euros de capitaux propres, il en résulterait pour l’entreprise un passif net de 3,4 milliards d’euros. En l’absence de contrepartie à l’actif du bilan, cela obligerait donc la présidente de la SNCF à saisir le procureur pour recapitaliser son entreprise.

Nous avons été plusieurs, sur tous les bancs de cette assemblée, à être choqués par votre réponse prudente, monsieur le ministre, mais surtout par celle de votre homologue du budget, qui, à la question de savoir si nous allions être saisis, dans la loi de finances initiale ou dans le projet de loi de finances rectificative, d’un amendement permettant à la SNCF d’inscrire à l’actif de son bilan la contrepartie de ce passif, a répondu qu’il n’était pas forcément besoin d’une disposition législative. Cette réponse est contestée par plusieurs membres de la commission des finances : l’État ne peut pas, par une simple lettre ministérielle, fût-elle du ministre des finances, s’engager à hauteur de 8,2 milliards d’euros, sans une disposition législative.

Nous voudrions rappeler que l’UDF est la seule famille politique qui, tout en soutenant la loi Fillon, a dit qu’elle n’allait pas assez loin et qu’il fallait avoir le courage de mettre les régimes spéciaux en extinction et de décider que tous les nouveaux entrants devaient dépendre du régime général, avec négociation d’un régime complémentaire. C’est la seule solution raisonnable, qui permette à la fois de maintenir les droits acquis des personnes bénéficiant des régimes spéciaux et de sortir en une génération d’un système de plus en plus inégalitaire en raison de l’absence de réforme.

Voilà la première raison pour laquelle le groupe UDF ne souhaite pas voter ce budget.

La seconde raison touche à l'AFITF. Le groupe UDF a de la constance, monsieur le ministre. Nous avons appuyé votre prédécesseur – j’y ai personnellement contribué à l’époque – dans le montage de la première version du financement de l’AFITF, qui consistait en un certain nombre de recettes affectées auxquelles s’ajoutait le produit des dividendes des sociétés d’autoroutes. Quand le Gouvernement, dix-huit mois plus tard, a changé de braquet en expliquant qu’une partie seulement de la cession des sociétés d’autoroutes serait affectée à l’AFITF, nous avons exprimé notre désaccord. C’est ainsi que 4 milliards d’euros seulement, prélevés sur le produit de la cession, ont été affectés à l’AFITF : ce qui fait que, à partir de 2008, l’Agence ne pourra plus financer les investissements dont elle a la charge. Cela nous paraît complètement déraisonnable !

En tant que porte-parole du groupe UDF sur les questions budgétaires, j’ai beaucoup critiqué le Gouvernement, et M. Copé en particulier, sur cet incroyable montage. Dans les farces et attrapes budgétaires, l’AFITF est probablement l’une des plus belles !

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour le programme « Transports aériens ». M. de Courson a raison, c’est une machine à tromper les citoyens.

M. Charles de Courson. Jugez plutôt : l’État cède des actifs et reverse une partie – 4 milliards d’euros – du dividende ainsi obtenu à l’AFITF qui, à son tour, verse des fonds de concours à l’État, lui permettant du même coup d’afficher un budget en diminution, tandis que le ministre des transports prétend que cette baisse n’est qu’apparente et que ces fonds de concours permettront de financer davantage les investissements routiers. Incroyable !

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis, pour le programme « Transports aériens ». Ubuesque !

M. Charles de Courson. On retrouve le même procédé pour le financement de l’établissement public chargé de verser les ASS, à qui l’on cède des créances sur l’UNÉDIC, à hauteur de 550 ou 600 millions d’euros, ce qui permet de réduire de 650 millions la dotation budgétaire.

Votre budget est donc un budget d’artifices !

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis, pour le programme « Transports aériens ». Quelle clairvoyance !

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, je vous plains, car vous êtes un homme raisonnable. Je plains plus encore votre successeur qui devra financer, en 2008 et en 2009, le budget du ministère des transports : il n’aura pas d’autre solution que de continuer à céder des actifs publics pour en affecter une partie à l’AFITF. Ce n’est pas une gestion sérieuse !

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis, pour le programme « Transports aériens ». Merci de le dire !

M. Charles de Courson. Il y a certes de bonnes choses dans votre budget. Nous sommes très ouverts et avons voté en commission pour le transport aérien, où vous faites preuve d’un début de rigueur, même s’il y a encore beaucoup à faire. De même, en matière de sécurité routière, où nous prônions quelques assouplissements et où quelques efforts ont été faits en ce sens. Je pourrais citer d’autres exemples, mais, globalement, les éléments positifs de votre budget ne compensent pas les éléments négatifs, en particulier sur les deux questions principales que j’ai soulevées.

C’est pourquoi le groupe UDF ne votera pas ce budget.

M. le président. La parole est à M. François Liberti, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. François Liberti. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'heure où les transports sont la première source d'émissions de gaz à effet de serre, le budget des transports se doit de relever le défi écologique. Pourtant, une fois de plus, vous nous proposez un budget où l'intervention de l'État n'est pas à la hauteur des défis à relever.

Quantitativement, tout d'abord, puisque les crédits de la mission « Transports » diminuent de 5,3 %, que le niveau des dépenses n'est maintenu que grâce aux fonds de concours des collectivités locales sur des projets contractualisés, qu’enfin 1,4 milliard d'euros provient d'une recette ponctuelle : la privatisation des autoroutes, traduction d'une nouvelle perte de maîtrise publique dans un secteur économique important.

Mais surtout, une fois de plus, c'est la politique du laisser-faire et le mythe du marché régulateur qui guident vos lignes d'action pour 2007.

Ainsi, le rail, mode de transport le plus sûr et le moins polluant, souffre une fois encore d'un déficit de soutien clair. Vous n'octroyez aucun soutien aux tarifs du rail, ce qui aiderait pourtant les régions à maintenir ou rouvrir des lignes et à réaliser des efforts d'investissement. Votre manque de volontarisme est patent également, quand on considère votre contribution à la gestion de la dette de RFF : elle est maintenue à 730 millions d'euros. Elle avait été réduite de 70 millions en 2006, mais les péages payés par la SNCF à RFF sont en hausse constante et constituent un frein réel à la modération tarifaire, pourtant nécessaire si l’on veut favoriser les déplacements par le train.

Manque de volontarisme également dans le domaine fluvial, avec une baisse de 10 millions d'euros des crédits de fonctionnement en faveur des infrastructures fluviales, portuaires et d'aménagement du littoral. Une dynamisation de ce mode de transport permettrait pourtant un gain écologique réel. En effet, avec un kilo de pétrole, on peut déplacer des marchandises sur une distance de 50 kilomètres par la route, contre 275 kilomètres par les voies navigables !

Enfin, le transport combiné ne bénéficie d'aucune aide au démarrage. Pire, entre 2001 et 2006, le montant de l'aide allouée a été divisé par quatre, alors même que son périmètre d'intervention était élargi, puisque les subventions sont étendues à tous les types de transport combiné : rail-route, fluvial-route, mer-route.

En revanche, vous confirmez votre choix en faveur de la route, qui est pourtant la responsable majeure – à hauteur de 94 % – des émissions de gaz à effet de serre causées par les activités de transport. Ainsi, 45 % des crédits de l'AFITF y sont consacrés, tandis que l'ensemble des autres modes de transport doivent se partager les 55 % restants.

N'est-il pas temps de considérer les conséquences réelles de l'explosion du transport routier, d'autant que, là aussi, le pavillon français perd des parts de marché et que la solution viable ne peut être de s'aligner sur les conditions de travail et de rémunération des concurrents à bas coûts !

La sécurité routière, deuxième défi que doit relever la politique des transports, risque également de souffrir de cette politique du laisser-faire, qui cède au lobbying du patronat routier, au lieu de penser d’abord à l'intérêt général. Ainsi, l'exonération de cotisations sociales pour les employeurs favorise le tout routier, alors que les camions sont souvent impliqués dans les accidents de la route. Pas étonnant, d'ailleurs, quand on connaît les conditions de travail auxquels sont soumis les salariés !

Dans le secteur aérien, les crédits sont en baisse de 12,9 % par rapport à l'an passé, ce qui, dans le contexte de déréglementation du secteur, est dramatique. Que pèsera la création de trente postes de contrôleurs pour la sécurité des voyageurs face à la baisse des coûts, due à la concurrence accrue qui contraint les opérateurs à recourir à des entreprises sous-traitantes pour les questions de maintenance, en dépit de la moindre qualification des personnels ?

Enfin, dans le secteur maritime, les efforts se concentrent sur la volonté de concrétiser le pavillon RIF. En effet, 55 millions seulement sont consacrés à l'entretien et à l'exploitation des infrastructures et ouvrages des ports autonomes. Quant à l'enseignement maritime, il voit son budget seulement maintenu, alors que les difficultés de recrutement sont avérées. Avez-vous le secret espoir d'utiliser le RIF pour activer le dumping social en recourant à des équipages étrangers sous-rémunérés ?

Au final, ce budget consacre un désengagement de l'État, dans un contexte de crise énergétique et de pollution atmosphérique. Une fois de plus, vous évacuez le débat sur les recettes du secteur des transports, vous contentant de compter sur les forces du marché pour organiser ce secteur.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, le groupe communiste et républicain ne votera pas votre budget.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour le groupe de l’UMP.

M. Michel Bouvard. Je profite de ce dernier budget, monsieur le ministre, pour vous adresser, ainsi qu’à toute votre équipe, les remerciements du groupe UMP, pour la qualité du travail accompli ainsi que celle des relations établies avec la représentation nationale.

La commission élargie a permis de répondre à un certain nombre de questions, même si nous n’avons pu trouver de solution à certaines, comme la dette ferroviaire, le financement de la liaison nouvelle Lyon-Turin et du projet Seine-Nord, le transfert des parcs des DDE aux départements, les conséquences de l’annulation du décret relatif au transport routier et, d’une manière plus générale, le financement à long terme des infrastructures de transport.

Cette législature, comme entre 1993 et 1997, où nous avions fait voter la création de RFF et la régionalisation – que le groupe socialiste avait combattues –, a permis de nombreuses avancées dans le secteur des transports : la décentralisation de la majeure partie du réseau routier national, le décroisement des financements, le renouvellement du réseau ferroviaire, avec 1,870 milliard d’euros – même si certains considèrent que ces avancées sont insuffisantes, l’évolution est positive tant la situation était dégradée –, le renouveau de la politique portuaire avec les projets Le Havre Port 2000 et Marseille XXL et, enfin, l’ouverture du fret ferroviaire à la concurrence. On peut ajouter à ce bilan la réforme du Syndicat des transports d’Ile-de-France, attendue depuis des décennies : le Parlement avait déjà voté, il y a trente ans, une loi – jamais appliquée – transférant cette compétence aux régions. En outre, la sécurité routière est un succès que personne ne peut contester, ainsi que la mise en place de financements de grande ampleur pour les infrastructures.

Les crédits de la mission « Transports » diminuent de 1,7 %, comme il est logique après la décentralisation du réseau routier national. Les crédits de l’AFITF, en revanche, augmentent considérablement, avec 2,2 milliards d’euros, soit une hausse de 15 % par rapport à 2006. Je rappelle que ces crédits n’étaient que de 900 millions en 2005. Si la moitié d’entre eux est consacrée aux transports ferroviaires et fluviaux, il n’a jamais été question que l’AFITF ne finance pas d’infrastructures routières. Ceux qui ont supprimé en leur temps le fonds d’investissement des transports terrestres et des voies navigables sont d’ailleurs mal placés pour critiquer aujourd’hui le fonctionnement et les priorités de l’AFITF !

Ce projet prévoit le financement de trois nouvelles lignes ferroviaires à grande vitesse, ce qui est une première dans notre pays : le TGV Est, qui doit être bientôt livré, le TGV Rhin-Rhône et la liaison Perpignan-Figueras. Nous nous réjouissons de la hausse des crédits d’entretien des routes nationales demeurées dans le patrimoine de l’État, ainsi que de l’inscription de 180 millions d’euros au titre de la compensation du transfert aux départements. Et nous nous félicitons de l’augmentation des crédits destinés à la sécurité maritime : ils sont très utiles, car, dans ce domaine, il faut savoir prévoir.

Le groupe UMP apportera donc son soutien à ce budget, qui est un bon budget. Cela étant, des problèmes demeurent, qu’il faudra régler à l’avenir. Ainsi en est-il de la dette ferroviaire, qui a fait beaucoup parler, mais qui, contrairement aux idées reçues, n’a pas diminué entre 1997 et 2002 – on le voit bien avec la réapparition du problème du traitement du service auxiliaire de la dette. De même, il faudra assurer durablement le financement d’infrastructures. Les moyens de l’AFITF, en dépit des recettes affectées durablement – redevance domaniale et taxe autoroutière –, ne permettront pas d’engager dans la durée les financements d’infrastructures. Il faudra donc, au-delà des partenariats public-privé, qui constituent une véritable avancée, trouver des solutions innovantes. Il faudra aussi conforter la politique en faveur de la multimodalité et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Tels sont les défis que nous aurons à relever demain. Pour l’heure, en visant à renforcer la politique d’investissement, ce budget pour 2007 marque de bonnes orientations, avec le renforcement de la politique d’investissement. C’est pourquoi le groupe UMP lui apportera son soutien total. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mission « Transports »

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Transports », inscrits à l’état B.

État B

M. le président. Sur l’état B, je suis saisi d’un amendement n° 139.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Cet amendement vise à augmenter les montants prévus initialement pour les droits à compensation au profit des collectivités territoriales, qui concernent à la fois la décentralisation des services de voyageurs pour le programme « Transports terrestres et maritimes » et le transfert des routes nationales d’intérêt local.

En effet, le projet de loi de finances a été conçu avant que la commission consultative d’évaluation des charges n’arrête définitivement les montants des droits à compensation. Il est donc nécessaire de tenir compte de ces décisions qui vont nous conduire à majorer de 1 251 154 euros le droit à compensation pour les services de voyageurs et à arrêter, pour le transfert des routes nationales, le montant définitif à hauteur de 191 551 384 euros.

Ces chiffres, si vous les votez, reprennent précisément les chiffres de la commission d’évaluation, ce qui signifie que les transferts de compétences sont bien compensés à l’euro près, selon des montants validés par la commission consultative. Je m’inscris donc en faux contre les allégations de certains, qui justifient des augmentations de fiscalité complémentaires par des charges indues, alors que cet amendement démontre que la compensation se fait à l’euro près. Je pense en particulier au débat sur la TIPP : en aucun cas, les augmentations de la TIPP, auxquelles viennent de procéder les régions ne peuvent s’expliquer par une insuffisance de compensation des compétences transférées.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour donner l'avis de la commission.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Cet amendement, qui est cohérent avec l’examen des crédits de la première partie, n’a pas été examiné par la commission.

À titre personnel, je partage l’analyse de M. le ministre. Cet amendement, ainsi que les auditions préparatoires à l’établissement de mon rapport, permet d’analyser les critères et de constater la rigueur des transferts de financements, s’agissant des routes nationales. Nombre de régions tentent de justifier l’augmentation de la part régionale de la TIPP. Il semble en effet qu’elles aient décidé d’appliquer l’augmentation maximale de TIPP autorisée par la loi, en la justifiant par l’insuffisance de la compensation des transferts et en s’appuyant sur l’exemple des routes nationales. Cet amendement n° 139, ainsi que les démonstrations que nous avons eu l’occasion de faire au cours de ces derniers mois, montre que cette justification est infondée.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Sans compter que ce sont les départements, et non les régions, qui se sont vu transférer les routes nationales…

M. François Liberti. Eh oui !

M. Michel Bouvard.…sans qu’ils aient, eux, la possibilité de moduler la part de la TIPP qui leur revient ! Nous voterons, bien sûr, cet amendement.

Tout en vous donnant acte, monsieur le ministre, de la compensation scrupuleuse des transferts, je rappelle que n’ont toujours pas été réglées la question des postes actuellement non pourvus dans les DDE et celle de la base de compensation – pied de corps ou moyenne de corps. C’est une question importante. Des discussions sont en cours, et nous serons attentifs aux conclusions qui en découleront.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 139.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. je suis saisi d’un amendement n° 180.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. La commission a voté cet amendement visant à diminuer les crédits du programme « Soutien et pilotage des politiques de l’équipement » pour augmenter du même montant ceux du programme « Transports terrestres et maritimes ». Nous nous inquiétons en effet du financement des tarifs sociaux de la SNCF, et en particulier du tarif famille nombreuse. Il semblerait – la seule lecture des documents budgétaires rend l’analyse difficile – que les contreparties financières versées par l’État à la SNCF diminuent au fil des ans, pouvant laisser craindre une remise en cause du dispositif à l’occasion d’arbitrages budgétaires au sein de la SNCF. Or ces tarifs familiaux sont un élément essentiel de la politique familiale, très symbolique de l’importance que nous accordons à celle-ci et très lisible par nos concitoyens.

L’objet de cet amendement est de souligner notre attachement à une mise en œuvre pleine et entière de la politique familiale dans le domaine des transports. Il ne doit pas être porté atteinte à celle-ci à l’occasion de débats budgétaires dont la SNCF tirerait seule les conclusions.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, mais le dialogue qui va s’instaurer à l’occasion de son examen devrait permettre de parvenir à une bonne solution.

Monsieur le rapporteur, votre amendement vise à majorer de 15 millions d’euros la compensation par l’État des tarifs sociaux accordés par la SNCF.

Le Gouvernement, bien sûr, n’a aucunement l’intention de réduire les avantages accordés par la SNCF aux titulaires de la carte famille nombreuse. Ce dispositif, qui a plus de quatre-vingts ans, contribue à l’utilisation par les familles du chemin de fer, dont on sait que c’est le mode de transport le moins polluant et le plus performant au plan énergétique. Toutefois, son utilisation est coûteuse pour les familles nombreuses, pour lesquelles la voiture présente rapidement un avantage. Il nous faut donc en tenir compte et maintenir le système de la carte famille nombreuse, qui prévoit une réduction en fonction de la composition de la famille. Ce dispositif fait partie intégrante de la politique de développement durable que j’évoquais tout à l’heure et que le Gouvernement veut mettre en place. Nous voulons promouvoir ce dispositif, qui connaît d’ailleurs un réel succès. Vos propos, monsieur le rapporteur, vont dans le sens des comportements des familles. Cette politique est donc un vrai succès tant pour la politique familiale que pour celle des transports, et, monsieur le rapporteur, je vous confirme que nous n’entendons pas y renoncer ou y apporter des modifications.

En effet, la carte famille nombreuse donne droit à des réductions dans tous les trains de la SNCF, sans quotas de places ni exception. Son maintien est une priorité pour le Gouvernement. Je m’en suis entretenu à plusieurs reprises avec mon collègue Philippe Bas : il est très attaché à cette forme d’aide aux familles. Compte tenu de ces précisions, je vous demande donc de retirer cet amendement.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur le rapporteur spécial ?

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. Merci, monsieur le ministre, d’avoir mis les points sur les i en ce qui concerne cet élément important de notre politique familiale. En conséquence, je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 180 est retiré.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Transports », modifiés par l’amendement n° 139.

(Les crédits de la mission « Transports », ainsi modifiés, sont adoptés.)

Mission « Contrôle et exploitation aérien »

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Contrôle et exploitation aériens », inscrits à l’état C.

État C

M. le président. Sur l’état C, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Contrôle et exploitation aériens ».

(« Les crédits de la mission « Contrôle et exploitation aériens » sont adoptés.)

Mission « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route »

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », inscrits à l’état D.

État D

M. le président. Sur l’état D, je suis saisi d’un amendement n° 68.

La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai aussi nos deux amendements après l’article 62.

M. le président. Je vous en prie.

Mme Annick Lepetit. Notre collègue Philippe Martin souhaite prendre en compte la situation nouvelle créée par la décision du Gouvernement de transférer aux départements une large part du domaine routier national. Il apparaît en effet logique que le produit des amendes issu des contrôles réalisés par les radars automatiques installés sur ce domaine transféré revienne aux départements, afin que ceux-ci disposent des moyens de réaliser les investissements nécessaires et d’assumer pleinement leur rôle en matière de sécurité des infrastructures.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. Cet amendement n’a pas été examiné par la commission.

Je ferai deux observations. D’abord, la situation des départements, dans le cadre de la décentralisation du domaine routier, est saine et justifiée. Il n’est donc pas utile d’accroître la participation financière de l’État. Ensuite, les crédits que vous souhaitez supprimer sont en partie destinés à la modernisation du fichier national du permis de conduire, qui prévoit notamment la mise en place d’un site internet de consultation des points. Les citoyens pourront ainsi connaître facilement leur situation au jour le jour. Une telle initiative était indispensable pour assurer la transparence de la politique de sécurité routière, dont M. Bouvard a souligné l’importance, et lui donner une efficacité durable. Il serait donc particulièrement dommage de supprimer ces crédits.

Le compte d’affectation spéciale qui a été créé l’année dernière – mais dont nous défendions l’idée depuis le début de la législature – recueille une partie du produit des amendes collectées à la suite de contrôles réalisés par les radars automatiques, une autre partie étant attribuée à l’AFITF. À la suite d’un amendement déposé par notre collègue Michel Bouvard, il a été décidé que l’éventuel surplus reviendrait aux conseils généraux. Ainsi, les sommes recueillies permettent de financer aussi bien les dépenses d’investissement routier des départements que les actions de l’AFITF. C’est donc une solution raisonnable, parce qu’elle garantit un lien direct entre produit des amendes et financement de la politique de sécurité routière.

Nous nous étions cependant interrogés, l’an dernier, sur la justification des crédits de l’AFITF relatifs à la sécurité routière. Comme je l’indique dans mon rapport, les dépenses routières de l’Agence sont en grande partie destinées à la mise à deux fois deux voies de routes existantes. Or la preuve a été faite que de tels aménagements permettaient de diminuer l’accidentalité. Ainsi, non seulement les recettes liées aux contrôles automatiques contribuent à l’autofinancement du système, à la modernisation du fichier national du permis de conduire, mais elles permettent également de financer des investissements pertinents en termes de sécurité routière, ce qui confirme la cohérence de notre politique en ce domaine.

Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Défavorable, pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. L’amendement de notre collègue pose tout de même une vraie question, même si la solution qu’il apporte n’est pas nécessairement adaptée. Monsieur le ministre, si un conseil général réclamait un loyer, ou un pourcentage du produit des amendes, pour l’occupation du domaine public départemental par des radars, sa délibération serait-elle légale ?

Mme Annick Lepetit. Bonne question !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur le rapporteur, je crois que nous n’avons pas la même conception de la décentralisation. Je considère que l’intérêt général est l’affaire de l’ensemble des collectivités publiques, qui s’en partagent la charge. Votre conception étonnamment patrimoniale de la prise en charge de l’intérêt général me paraît totalement décalée.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Je regrette que vous le preniez ainsi, monsieur le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. C’est ridicule !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Y a-t-il des radars sur les anciennes routes départementales ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Évidemment !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Évidemment que non !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. On peut même en mettre sur des voies communales !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Il n’y a aucun cas de radar automatique installé sur des voiries qui étaient communales ou départementales avant le transfert du 1er janvier. Aucun.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Il y en aura !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Ne dites pas cela, parce qu’il faudra l’autorisation du président du conseil général. S’il vous la refuse ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Il en assumera les conséquences politiques !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Il faudra négocier avec les détenteurs du domaine public.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Et pour les radars mobiles, que fait-on ?

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Pourquoi ne répondez-vous pas plutôt à ma question : si un conseil général décide d’un loyer, cette délibération est-elle légale ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je ferai examiner la question que vous me posez, qui est d’ordre juridique. Toutefois, le débat que vous ouvrez, lui, est politique. L’enjeu, qui n’est pas médiocre, est de savoir qui a la responsabilité de la sécurité des Françaises et des Français.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Bien sûr !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je pense que, dans l’esprit de la collectivité nationale, c’est l’État. Et c’est à l’État de mettre en mesure l’ensemble des collectivités publiques d’assumer cette charge avec lui. Je vous le dis avec amitié et respect : votre question traduit une vision de la prise en charge de l’intérêt général qui n’est absolument pas la mienne. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Je suis choqué de votre réponse, monsieur le ministre, parce que mon conseil général conduit une politique de sécurité routière extrêmement active. Nous avons accru significativement nos investissements en ce domaine, notamment s’agissant des sectionnements. Cette responsabilité ne relève pas seulement de l’État, mais aussi de la collectivité territoriale dont dépendent les infrastructures. Ce que j’affirme, c’est que la loi de décentralisation qui a transféré une partie des routes nationales vers les départements manque de cohérence. Vous ne pouvez pas, sans l’accord du propriétaire du domaine public, installer un radar fixe automatique. C’est incontestable.

M. Jean-Pierre Gorges. C’est d’utilité publique !

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Cela ne suffit pas !

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Le groupe UMP considère bien évidemment que la politique de sécurité forme un tout. Elle est assumée par l’État, même si elle est aussi mise en œuvre par les collectivités territoriales de différents niveaux qui ont la charge de l’entretien de la voirie et, dans certains cas, la responsabilité de fixer les limitations de vitesse.

S’agissant des amendements déposés par nos collègues du groupe socialiste, l’idée peut paraître séduisante. Comme l’a rappelé Hervé Mariton, nous avons eu l’an dernier, lorsqu’il s’est agi de déterminer les ressources du compte d’affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », un débat sur ce qu’il convenait de faire avec le surplus d’argent récolté, c’est-à-dire déduction faite des sommes affectées à l’entretien des radars ou à l’AFITF. Historiquement, le produit des amendes de police a toujours été réparti par l’État entre les départements, selon des règles bien connues et en appliquant une péréquation, dans le but de financer des travaux de sécurité, des places de stationnement, etc.

J’avais donc déposé un amendement, que le Gouvernement a bien voulu accepter, visant à ce que le surplus reste affecté aux départements. D’après les informations dont nous disposons, la somme ainsi rétrocédée aux conseils généraux est d’environ 60 millions d’euros en 2006, ce qui n’est pas négligeable. Le Parlement ayant voté cette règle, il me paraît difficile de revenir dessus très vite. Or elle apporte une réponse au moins partielle à la préoccupation de nos collègues du groupe socialiste. C’est la raison pour laquelle leurs amendements ne me paraissent plus d’actualité, indépendamment de la question de savoir qui doit encaisser le produit des amendes sur les routes nationales transférées.

M. le président. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. Au fond, le vrai problème est celui des conditions financières dans lesquelles s’est opérée la décentralisation.

Mme Annick Lepetit. Bien sûr !

M. François Liberti. En effet, et contrairement à ce que vous prétendez, monsieur le ministre, la compensation à l’euro près n’est pas une réalité. La confusion que vous entretenez, vous et le rapporteur, entre les compétences des régions et celles des départements montre d’ailleurs votre embarras. Le transfert n’a pas pris en compte de nombreuses charges de personnel, non plus que les charges financières liées aux avances que sont obligés de faire les départements en attendant la compensation. La même observation vaut d’ailleurs pour le RMI et pour toutes les charges mises sur le dos des collectivités territoriales. Le vrai problème, c’est celui-là. L’amendement proposé mérite donc réflexion, d’autant qu’il n’est pas en contradiction avec les règles fixant la répartition du produit des amendes de police.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 68.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ».

(Les crédits de la mission « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » sont adoptés.)

Après l’article 62

M. le président. Nous en venons à deux amendements portant articles additionnels après l’article 62.

Je suis saisi d’un amendement n° 67 rectifié.

Mme Lepetit a déjà défendu cet amendement.

La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je mets aux voix l'amendement n° 67 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 28 rectifié.

Cet amendement a également été défendu.

La commission et le Gouvernement y sont défavorables.

Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. J’aimerais obtenir une information. Qu’est-il advenu de l’amendement initialement déposé par notre collègue Michel Bouvard sur la dérégulation des salaires des chauffeurs routiers ?

M. Michel Bouvard. Je l’ai retiré, car le problème a été réglé au Sénat lors de l’examen du texte relatif à la participation !

M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs au transport.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures trente, est reprise à dix heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

médias : Avances à l’audiovisuel public

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs aux médias.

Je rappelle que la discussion des crédits de cette mission a eu lieu à titre principal en commission élargie. Le compte rendu de cette réunion est annexé à celui de la présente séance.

La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je tiens à vous remercier pour le travail remarquable que vous avez accompli dans ce domaine qui, vous le savez, passionne les Français, parce qu’il prend une part sans cesse croissante dans leur vie quotidienne. Je tiens en particulier à féliciter pour la qualité de leurs rapports M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial, et Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles.

Mesdames, messieurs les députés, votre vote positif, que j’appelle de mes vœux au nom du Gouvernement, permettra de traduire en actes notre politique en faveur de la diversité culturelle, de la création, de l’emploi, de la multiplication des offres de programmes et de la défense du pluralisme, enjeux essentiels à l’aube d’un XXIsiècle, qui annonce des mutations profondes, rapides et radicales non seulement des technologies, mais aussi des usages de l’information, des comportements des usagers – nos concitoyens – et de l’économie des médias. L’essor de l’Internet, les évolutions de la presse écrite qui doit de plus en plus lutter pour survivre, le bouleversement du paysage audiovisuel français avec le lancement réussi de la télévision numérique terrestre et l’arrivée prochaine de la télévision du futur grâce au projet de loi dont vous serez prochainement saisis, les pouvoirs publics : toutes ces mutations, le Gouvernement et la représentation nationale ont non seulement le devoir de les comprendre et de les observer, mais avant tout de les anticiper et de les accompagner.

Ce budget est un bon budget non pas parce qu’il est en hausse, mais parce que chaque augmentation de ressources est une augmentation fléchée, clairement identifiée et qui répond de façon efficace et pérenne aux priorités de ce secteur. Ainsi, les priorités fixées au secteur audiovisuel public pour 2007 consistent à renforcer la spécificité du service public en développant une offre de qualité en télévision numérique terrestre et en haute définition et en favorisant la sauvegarde du patrimoine audiovisuel. La progression de la dotation publique de France Télévisions, l’augmentation des dotations d’ARTE France, la poursuite et l’accélération du plan de sauvegarde et de numérisation de l’INA, mais aussi la négociation du contrat d’objectifs et de moyens avec RFI, vont dans ce sens.

La diversité et le pluralisme sont également des valeurs clés de ce secteur essentiel qu’est la presse écrite dont je tiens à dire aujourd’hui un mot. En présentant à l’Assemblée nationale constituante en 1945 le budget de l’information, André Malraux auquel le président de l’Assemblée nationale a rendu hommage cette semaine, comme je le ferai le 23 novembre prochain, jour du trentième anniversaire de sa mort, déclarait : « La liberté existe pour et par ceux qui l’ont conquise. » C’est une très belle maxime. Aujourd’hui comme hier, la presse écrite est fille et sœur de cette liberté si chèrement acquise. Elle est un pilier de notre démocratie, et cela seul justifie l’ampleur de l’engagement de l’État à son égard. Mesdames, messieurs les députés de la majorité, votre vote positif sur les lois de finances pour 2005 et 2006 a permis de lui consacrer des moyens exceptionnels par leur ampleur. Avec un budget total de 274 millions d’euros, le projet de loi de finances pour 2007 représente, à périmètre constant, un montant de crédits supérieur de plus de 22 % aux moyens consacrés à la presse écrite, il y a encore deux ans. Comme en 2005 et en 2006, j’ai voulu que ces crédits appuient prioritairement les efforts engagés par le secteur pour conforter durablement les conditions de son indépendance économique et de son développement futur, qu’il s’agisse de la modernisation des entreprises, d’actions innovantes ou de la recherche d’une plus grande autonomie financière.

Oui, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, ce budget traduit une véritable politique d’avenir cohérente et efficace, dans ce secteur des médias en pleine mutation où notre pays dispose de nombreux talents et atouts auxquels nous devons donner toute leur chance.

Tel sera le sens fort du vote que vous allez émettre dans un instant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Union pour la démocratie française.

M. Charles de Courson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de l'examen de la mission « Médias » en commission élargie, le groupe UDF a apporté son soutien à votre budget.

En dépit des réponses alors apportées, je souhaite néanmoins réitérer quelques-unes des inquiétudes du groupe UDF quant à l'avenir de nos médias et l'accès de nos concitoyens à ces derniers.

Au premier rang de ces inquiétudes, figure la situation de la presse écrite. Nous souhaitons la tenue rapide d'états généraux qui doivent également concerner la presse régionale, où certains regroupements n'ont pas tenu bon. Ce secteur est menacé par l'arrivée sur le marché de quotidiens gratuits, d'abord à Paris et maintenant en province.

S'agissant de la création tant attendue de la chaîne d'information internationale, l'UDF regrette que vous n'ayez pas saisi cette occasion pour rationaliser notre paysage audiovisuel extérieur. Pourquoi ne pas avoir mutualisé les moyens actuellement disponibles de TV5 Monde, de Canal France International ou de la radio en langue arabe de RMC, filiale de RFI ? Il existe, hélas, bien d'autres interrogations, notamment sur les zones non couvertes par la TNT ou par Radio Bleue. Quelles mesures envisagez-vous, monsieur le ministre, pour développer ces réseaux ? Sur quels critères vous appuierez-vous ?

Je souhaite, enfin, évoquer l'avenir des chaînes indépendantes sur le câble et le satellite, qui ont été omises dans le projet de loi qui va venir en discussion devant le Sénat. Vous avez prévu des avantages pour les opérateurs analogiques, oubliant que les chaînes indépendantes placent elles aussi de grands espoirs dans les nouveaux modes de diffusion numérique. Elles n'ont pas été autorisées à exploiter la TNT nationale et leurs chances d'accéder à la TNT locale sont minces. Il y va pourtant du maintien du pluralisme.

Pour conclure sur une note plus optimiste, j'appelle votre attention sur l'amendement déposé par le groupe UDF et adopté en commission élargie. Il permettra, sans modifier l'assiette de la redevance, d'exonérer les centres de formation des apprentis du paiement de la redevance au même titre que les établissements d'enseignement publics ou privés. Il s'agit d'une disposition juste qui, je l'espère, recueillera votre soutien.

Le groupe UDF votera cette mission.

Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales et M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Très bien !

M. le président. Dans les explications de vote, la parole est à M. François Liberti, pour le groupe des député-e-s communistes et républicains.

M. François Liberti. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget pour 2007 prévoit une augmentation des crédits de l'audiovisuel public de 2,57 % par rapport à 2006. Ces crédits, qui atteindront 2,79 milliards d'euros, serviront en priorité à la révolution numérique.

Je tiens à souligner une nouvelle fois combien la situation de la presse écrite d'information générale et politique à l'échelon national est toujours incertaine. Les difficultés rencontrées par Le Monde, Libération ou l'Humanité ne sont que des exemples parmi d'autres. Les causes de ce qu'il convient d'appeler une véritable crise tiennent à la baisse des recettes publicitaires, à la diminution de la diffusion et à l'augmentation des coûts de production et d'acheminement. Il faudrait donc un meilleur soutien de l'État.

Au-delà d'une remise en cause progressive de la liberté d'expression du journaliste, on constate une tendance accrue à la pensée unique sur les sujets traités et une frilosité des rédactions dès qu'il s'agit de s'opposer au pouvoir établi. Comment ne pas évoquer, à ce propos, ces deux opérations policières, à quelques jours d'intervalle, qui ont fait l'objet d'une médiatisation à outrance sur les chaînes publiques et ont suscité de très vives réactions de la part du Syndicat national des journalistes ? Dans les deux cas, les journalistes ont été invités, voire convoqués, à être les témoins « privilégiés » de ce déploiement de forces digne d'une fiction télévisée ! Aux Mureaux, deux jours après une altercation entre des policiers et certains habitants, fallait-il montrer que « la police entre dans les cités » ? D'ailleurs, certains policiers, parmi les plus sérieux, contestent cette médiatisation qui annihile l'effet de surprise nécessaire à un vrai travail et « crée des tensions inutiles ».

L'élection présidentielle de 2002 a démontré les dangers de cette« sécurité-spectacle ». Les principaux responsables des médias publics s'engouffrent à nouveau dans cette manipulation et cette communication ultra-sécuritaire qui ne profitent qu'à l'extrême droite et à Nicolas Sarkozy, président de l’UMP.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. C’est n’importe quoi !

M. François Liberti. Non, ce n’est pas n’importe quoi !

Monsieur le ministre, pensez-vous vraiment qu’en ces circonstances, la neutralité des médias soit respectée ?

Ensuite, je m’associe à mon ami André Chassaigne pour évoquer une nouvelle fois les inquiétudes exprimées par le syndicat national des journalistes de Radio France concernant la diminution de l’information rédactionnelle des radios locales France Bleu.

En effet, de nouvelles coupes budgétaires ont été pratiquées par Radio France, notamment dans les budgets jusqu’alors consacrés à l’information. Les journalistes de France Bleu, qui sont aussi les correspondants régionaux de France Inter et France Info, devront, pour la première fois depuis des années, réduire le volume d’information à l’antenne. Or les reportages des radios locales représentent plus de la moitié du temps d’antenne pour l’information.

Cette situation est perçue comme une catastrophe pour une radio de service public en cette année électorale. C’est pourquoi elle a entraîné, le 26 septembre dernier, une grève d’une ampleur historique : 100 % de grévistes dans vingt-trois rédactions, entre 50 et 85 % dans quatorze rédactions, entre 33 à 46 % de grévistes dans quatre d’entre elles, une seule rédaction, sur quarante-deux, étant restée hors du mouvement. En commission élargie, nous n’avons eu aucune réponse de votre part.

De même, l’un des articles du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle promet des chaînes « bonus » aux opérateurs privés historiques, TF1, M6 et Canal Plus. En contrepartie, il leur est demandé de libérer au plus vite leur fréquence analogique. Un tel bonus n’est pas du goût des nouveaux entrants de la TNT, qui dénoncent les risques de déstabilisation et celui de voir cette technologie confisquée au profit de quelques-uns. Votre explication en commission élargie n’a pas du tout convaincu.

L’audiovisuel et la presse ne peuvent être régis par les seules lois du marché. La défense du pluralisme des idées et des expressions artistiques impose une intervention publique régulatrice. Ce projet de budget, j’ai le regret de vous le dire, ne répondra pas à cette nécessité. En conséquence, le groupe communiste et républicain ne le votera pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le ministre de la culture et de la communication. Et les crédits pour L’Humanité ? (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Hamelin, pour le groupe de l’UMP.

M. Emmanuel Hamelin. Le budget que vous nous présentez, monsieur le ministre, est le dernier de la législature, et je souhaite profiter de l’occasion qui m’est donnée pour vous dire qu’en matière d’audiovisuel, ce gouvernement a un réel bilan, et un bon bilan.

M. le ministre de la culture et de la communication. Merci !

M. Emmanuel Hamelin. Il y a, en effet, le lancement réussi de la télévision numérique terrestre, la perspective d’un réel développement des télévisions locales, un grand chantier qui est celui de la haute définition et de la télévision mobile personnelle.

Pour l’audiovisuel extérieur, même si nous aurions aimé, comme l’a dit Charles de Courson, qu’il se réorganise à l’occasion de la création de la chaîne française d’information internationale, nous ne pouvons que nous féliciter du lancement prochain de la chaîne France 24.

Pour 2007, le service public de l’audiovisuel bénéficiera d’un budget en hausse de plus de 112 millions d’euros. Il s’établit à 3 706 millions d’euros, ce qui représente une progression de 3,1 %. Ce n’est pas négligeable, compte tenu d’un contexte difficile et alors que les dépenses globales de l’État ne progresseront en 2007 que de 0,8 %.

Pour la troisième année consécutive, le montant de la redevance audiovisuelle due par les particuliers reste inchangé, à 116 euros en France métropolitaine et 74 euros en outre-mer. Malgré cela, il est prévu que les ressources du compte de la redevance atteignent plus de 2 790 millions d’euros en 2007, soit une progression de 2,6 %.

Je tiens également à souligner l’amélioration des outils qui permettent d’évaluer l’activité des organismes du secteur public de l’audiovisuel, ainsi que la mise en œuvre de la LOLF, qui améliore la mesure de la performance.

Parlons d’abord du programme « Presse ».

Comme nous le savons, la presse écrite contribue de manière essentielle à l’information des citoyens et à la diffusion des courants de pensées et d’opinions. Sa vitalité et son avenir sont ainsi des enjeux majeurs de notre vie démocratique.

Les lois de finances pour 2005 et pour 2006 avaient consacré à la presse des moyens importants, avec une progression de près de 30 %. On peut se réjouir de la pérennisation de cet effort en 2007. Dans un contexte marqué par le développement des nouvelles technologies et de la presse gratuite, l’action du Gouvernement vise donc prioritairement à accompagner les mutations profondes que connaît la presse et à l’accompagner dans les difficultés qu’elle rencontre, notamment, je le souligne à l’intention de mon collègue communiste qui s’exprimait à l’instant à la tribune, au profit du journal L’Humanité.

S’agissant du programme « Chaîne française d’information internationale », France 24 a pour objectif d’offrir un point de vue français sur l’actualité du monde à destination d’un public international.

À la fin de 2005, la chaîne d’information a bénéficié d’une dotation exceptionnelle de 15 millions d’euros, dont 2 millions pour son fonctionnement et 13 millions pour son équipement. Pour la première année de démarrage de la chaîne, les crédits votés en loi de finances initiale de 2006 s’élèvent à 65 millions d’euros, dont 12 millions au titre de la subvention d’investissement. Le montant de la subvention à la société proposé au budget 2007 s’établit à 70 millions d’euros.

Je me réjouis bien sûr du lancement prochain, et d’abord le 6 décembre sur Internet, de France 24.

Le programme « Audiovisuel extérieur », regroupe l’ensemble des crédits consacrés par le ministère des affaires étrangères, avec deux objectifs majeurs : rendre les plus accessibles possible les programmes audiovisuels français aux publics étrangers et à nos compatriotes expatriés mais également favoriser la diversité culturelle et la démocratisation des pays du Sud en soutenant la modernisation de leurs médias. Ses crédits pour 2007 s’élèvent à plus de 160 millions, ce qui est une quasi-reconduction par rapport à 2006.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, le groupe UMP votera les crédits de la mission « Médias » pour 2007. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste.

M. Patrick Bloche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un rendez-vous budgétaire, a-t-on coutume de dire, est toujours un moment de vérité. Il traduit des choix, marque des volontés. Les crédits de la mission « Médias » et du compte spécial « Avances à l’audiovisuel public » de ce projet de loi de finances pour 2007 en sont la parfaite illustration.

Oui, mes chers collègues, à l’actif de ce gouvernement, les députés socialistes reconnaissent le mérite de la cohérence. Oui, les propositions budgétaires que le Gouvernement nous demande d’approuver sont en parfait accord avec son incapacité à prendre la mesure des enjeux auxquels sont confrontés la presse écrite et l’audiovisuel public. (Rires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Même l’orateur sourit !

M. Patrick Bloche. Je souris de mon effet, bien sûr !

Comment, en effet, ne pas être saisi par ce manque criant de volontarisme face aux difficultés que rencontre ce secteur aujourd’hui en pleine mutation ? Comment, en effet, ne pas déplorer l’absence totale de réponse face à des changements profonds qui, si nous n’y prenons garde, risquent de porter atteinte aux principes de pluralisme de l’information et d’indépendance des médias auxquels nous sommes tous ici particulièrement attachés ?

M. Jean-Pierre Gorges. Qu’avez-vous fait lorsque vous étiez au pouvoir ?

M. Patrick Bloche. À l’heure où, plus que jamais, l’audiovisuel public a besoin, face aux défis posés par la révolution numérique, de voir ses moyens d’action renforcés, nous exprimons une vive inquiétude quant à l’avenir que vous nous proposez, monsieur le ministre.

Sous prétexte d’adaptation technologique, le projet de loi relatif à la télévision du futur, qui va être examiné au Sénat, aura pour conséquence de concentrer dans les mains de quelques puissants industriels les chaînes de télévision, les programmes et l’information. Toute ressemblance avec la loi Gasparri de 2004 en Italie, dont l’objectif affiché était de renforcer le pluralisme mais qui, en réalité, n’a fait que renforcer la position de Médiaset, groupe détenu par Silvio Berlusconi, ne saurait être naturellement que fortuite.

TF1, Canal Plus et M6 vont pouvoir bénéficier d’une nouvelle chaîne « bonus » lors de l’extinction de leur signal en analogique. Et, comme si cela ne suffisait pas, un autre cadeau est fait à l’ensemble des groupes audiovisuels privés éditeurs de la TNT, qui consiste à leur donner une priorité pour l’obtention d’une autorisation d’émettre en haute définition ou en télévision mobile.

Face à la révolution numérique, les défis qui attendent le service public sont colossaux. Or ne risque-t-il pas demain d’être marginalisé ? Rien n’est certain sur ce point tant la stagnation du montant de la redevance audiovisuelle, qui est l’une des plus faibles d’Europe, empêche depuis quatre ans toute possibilité d’évolution des ressources de l’audiovisuel public.

Pour 2007 une fois encore, les ressources publiques n’augmentent que très faiblement, 0,7 % en euros constants, alors que les ressources propres augmentent, elles, de 3,6 %. Cela ne peut conduire qu’à faire la part trop belle aux recettes publicitaires et à la course à l’audience. La qualité a pourtant un prix. Or quelle place le service public occupera-t-il s’il n’obtient de sa tutelle que des moyens lui permettant de survivre ? Aura-t-il les moyens financiers de réaliser sa mutation en haute définition et, surtout, pourra-t-il rester une véritable alternative pour les téléspectateurs ?

Nous exprimons pareille inquiétude sur l’avenir des radios publiques. Depuis trois ans, l’augmentation des moyens alloués à Radio France s’explique principalement par la dotation accordée pour les travaux de la Maison de la radio. La marge de manœuvre est donc insignifiante. Comment, dans ces conditions, le premier groupe radiophonique français peut-il maintenir son rang face à la concurrence des radios commerciales et étendre la diffusion de la FM, déployer la radio numérique ou encore développer des chaînes thématiques ? De même pour Radio France Internationale, qui devra, avec un budget diminuant de 3 %, poursuivre la numérisation de sa production engagée depuis 2003 et développer son offre sur Internet.

Le secteur de la presse écrite est, lui aussi, en pleine mutation. Cette année, pour la première fois, Internet a dépassé les journaux et les magazines comme principal fournisseur d’informations aux lecteurs européens.

M. Jean-Pierre Gorges. C’est l’évolution !

M. Patrick Bloche. C’est particulièrement vrai pour la France, où la presse écrite traverse une crise de grande ampleur. Les exemples de France Soir, de L’Humanité ou encore de Libération sont malheureusement là pour illustrer ce déclin du lectorat et les difficultés que connaissent nombre de titres historiques à trouver un second souffle pour garder leur place dans un marché remodelé par l’introduction des journaux gratuits et d’Internet. La presse nationale d’information connaît une baisse de son chiffre d’affaires de près de 4 % quand, dans le même temps, celui de la presse gratuite enregistre une hausse de 5 %.

Là où il aurait fallu engager un effort considérable pour sauver la presse d’information quotidienne et garantir aux citoyens un véritable pluralisme…

M. Jean-Pierre Gorges. Il n’y a pas de pluralisme ! Il n’y a que des gauchistes dans la presse !

M. Patrick Bloche. … – et comment ne pas avoir cette préoccupation à six mois de l’élection présidentielle ? –, le Gouvernement préfère diminuer les aides : 178 millions d’euros pour 2005, 172 millions d’euros pour 2006, et seulement 164,5 millions d’euros pour 2007. Le montant global des aides directes à la presse, hors AFP, ne cesse de diminuer : près de 10 % en deux ans.

M. le ministre de la culture et de la communication. Une hausse de 63 % par rapport aux budgets de Mme Tasca !

M. Patrick Bloche. Vous êtes face à une situation de crise, monsieur le ministre. Ne nous renvoyez donc pas toujours à la période 1997-2002.

M. le ministre de la culture et de la communication. C’est sûr, il faut l’oublier !

M. Patrick Bloche. La situation qu’a eue à affronter Mme Tasca rue de Valois n’était pas la même qu’aujourd’hui. Entre 1997 et 2002, il n’y avait pas de gratuits, il n’y avait pas Internet. Vous êtes face à une nouvelle situation, et le Gouvernement doit relever les défis au nom du pluralisme et de la liberté d’expression !

M. Jean-Pierre Gorges. Quel pluralisme ? 95 % des journalistes sont de gauche !

M. Patrick Bloche. Il est scandaleux que de grands quotidiens nationaux comme France Soir, L’Humanité, Libération et peut-être La Croix puissent éventuellement disparaître avant une échéance fondamentale, dans six mois, au moment où les Français feront des choix décisifs, et la responsabilité de l’État en ce domaine est majeure.

Là où il aurait fallu un véritable plan Marshall, une véritable volonté politique, en faveur de la presse écrite, vous préférez malheureusement prendre le risque de donner réalité à la triste prédiction de Ray Bradbury qui, dans ce chef-d’œuvre du roman d’anticipation, Fahrenheit 451, prévoyait le pire : « Je me souviens des journaux qui mouraient comme des papillons géants. On n’en voulait plus. Ça ne manquait plus à personne ».

Le pire, les députés socialistes ne peuvent et ne veulent s’y résoudre. C’est la raison pour laquelle nous présenterons un amendement visant à ce qu’un effort significatif de 16 millions d’euros soit engagé en direction de nombreux titres de la presse quotidienne comme Libération, L’Humanité, France Soir et La Croix.

Vous l’aurez deviné, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe socialiste votera contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

mission « médias »

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Médias », inscrits à l’état B.

État B

M. le président. Sur l’état B, je suis saisi d’un amendement n° 278.

La parole est à M. Patrick Bloche, pour le défendre.

M. Patrick Bloche. Par cet amendement, nous proposons de verser 16 millions d’euros sur le programme « Presse » afin de majorer les crédits de l’action « Aide aux quotidiens nationaux d’information politique et générale à faibles ressources publicitaires » et de compenser cette majoration par une diminution d’un même montant du programme « Chaîne française d’information internationale ».

La chaîne française d’information internationale est une société anonyme détenue à parité par TF1 et France Télévisions. Le seul problème, et nous avons été nombreux sur tous les bancs de cette assemblée à le dénoncer, c’est qu’elle est financée uniquement sur fonds publics, à savoir la redevance.

M. le ministre de la culture et de la communication. Non !

M. Patrick Bloche. Après de nombreux atermoiements, puisque son lancement était prévu au printemps 2006, elle ne commencera à émettre que le 6 décembre sur le câble et le satellite, c’est-à-dire quasiment en fin d’année. Pourtant, elle sera dotée pour 2007 de 70 millions d’euros de crédits et de 16 millions d’euros de crédits non consommés ouverts dans la loi de finances de 2006, qui ne serviront à rien puisque cette chaîne n’émettra que trois semaines durant l’année 2006.

Le présent amendement, de manière cohérente et dans un souci de bonne gestion des finances publiques, propose de supprimer 16 millions d’euros en 2007 à la chaîne française d’information internationale, qui est en phase de démarrage. Pour compenser cette perte, on pourrait envisager, au-delà des crédits non consommés, un financement à parité avec le principal partenaire privé de France Télévisions, c’est-à-dire, le groupe TF1. Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à juger scandaleux que TF1 participe à parité à cette chaîne d’information internationale, sans débourser un seul centime d’euro ! Grâce à cet amendement, l’effort financier serait réparti de façon plus équitable et dégagerait de façon durable – et vous pourriez, monsieur le ministre, y trouver quelque avantage – des moyens supplémentaires pour soutenir d’autres actions de la mission « Médias », comme l’aide aux quotidiens nationaux d’information politique et générale à faibles ressources publicitaires.

Veiller au maintien du pluralisme de la presse est un des objectifs que se fixe l’État. D’ailleurs, dans le « bleu » de la mission « Médias » pour 2007, il est précisé que le rôle de l’État en la matière ne saurait être d’agir sur la création de titres nouveaux et se limite, par conséquent, à préserver les conditions actuelles d’expression du pluralisme en luttant contre les disparitions de titres.

Les difficultés financières que connaissent de nombreux titres de la presse quotidienne nécessitent que l’État face un effort budgétaire significatif pour les défendre.

Comment peut-on imaginer, en ce lieu même de la diversité et du pluralisme, que des titres aussi emblématiques que l’Humanité, Libération –j’étais samedi dernier dans ses locaux – France Soir ou La Croix, disparaissent à six mois des choix fondamentaux qui attendent les Français ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour donner l’avis de la commission sur cet amendement ?

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Cet amendement n’a pas été examiné par la commission des finances. Il soulève deux questions distinctes, qui portent, d’une part, sur les moyens donnés à France 24 et, d’autre part, sur les aides accordées aux quotidiens en difficulté.

Nous sommes bien évidemment tous vigoureusement attachés au maintien du pluralisme. Nous suivons donc de près les difficultés que traversent des titres tels que Libération, France Soir, l’Humanité et, à un degré moindre, La Croix. Les aides de l’État peuvent toujours être augmentées, mais on ne saurait raisonnablement reprocher au Gouvernement de ne pas avoir pris, ces dernières années, de nombreuses initiatives en ce sens. Non seulement les aides à la presse ont augmenté de 22 % depuis 2004, mais elles sont recentrées, dans le budget pour 2007, sur la presse quotidienne d’information politique et générale.

Dans ce cadre, le problème actuel – qui nous préoccupe tous – peut trouver une solution grâce au concours nécessaire de l’État. Malheureusement, comme vous le savez, les problèmes de la presse sont beaucoup plus complexes et dépassent les seuls moyens budgétaires de l’État.

En ce qui concerne le second volet de votre amendement –les moyens donnés à France 24 –, le financement prévu ne repose pas sur la redevance, mais sur des crédits budgétaires. Il ne faudrait pas déshabiller Pierre pour habiller Paul, et priver France 24 de 16 millions d’euros à la veille de son lancement. Al-Jazira vient de lancer une version en anglais. Beaucoup d’autres télévisions renforcent leur présence sur le plan international. Ce n’est pas le moment de baisser la garde lorsque le lancement de France 24, qui répond à une ambition forte, est proche.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement en discussion ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, je suis défavorable à l’adoption de votre amendement. Celui-ci soulève plusieurs questions. D’abord, sachez que le budget de l’État soutient, par des mesures concrètes, les quotidiens à faibles ressources publicitaires, dont font partie, je vous le rappelle, La Croix, l’Humanité, France Soir, mais non Libération. Sans faire de chantage, je vous signale qu’en refusant de voter le budget et les mesures fiscales qui l’accompagnent, vous priveriez Libération de ressources financières supplémentaires.

En d’autres termes, l’avenir de la presse écrite, dépend, bien sûr, non seulement de l’intervention de l’État, mais aussi de la possibilité de trouver des financements nouveaux, donc de la possibilité pour les investisseurs de bénéficier de réductions fiscales, dès lors qu’ils investissent dans la presse quotidienne d’information à caractère politique et général. Cela concernera aussi bien l’Humanité, Libération que l’ensemble de la presse. Ces mesures fiscales sont donc absolument essentielles pour permettre à des financeurs nouveaux d’apporter de l’argent à ces quotidiens.

Par ailleurs, comme je l’ai dit en réponse à une question au Gouvernement, nous travaillons avec Bercy sur la possibilité d’ouvrir certaines dispositions liées au mécénat au financement de la presse, puisque dans certains journaux, notamment l’Humanité, les lecteurs souhaitent d’apporter leur concours financier à la diversité de la presse.

J’en viens au lancement de la chaîne d’information internationale. Il s’agit d’un défi fantastique. Cette chaîne est attendue, c’est une nécessité. Dans un monde de violence, il est important que l’indépendance de journalistes françaises puissent rayonner partout dans le monde.

Pas un euro n’est prélevé sur la redevance pour financer cette chaîne. Nous ne toucherons ni au budget de France Télévisions, ni à celui groupe TF1. Le financement de France 24 est assuré par le budget de l’État.

J’espère que vous aurez à cœur de visiter cette nouvelle rédaction. Ce qui a été réalisé en huit mois est fantastique. C’était un défi redoutable que de trouver, en toute liberté, la manière de traiter l’information sur le plan international. Cette chaîne n’est pas la vitrine publicitaire de la France, mais un regard libre sur l’actualité internationale. Elle sera en concurrence avec CNN, BBC World, Al-Jazira, mais elle pourra se greffer sur les réseaux de journalistes de l’AFP et de Radio France Internationale. Bref, c’est un magnifique défi.

Il n’est pas question, au moment où France 24 démarre, de la priver des moyens financiers nécessaires. Et lorsque des analystes ou des journalistes nous dirons qu’il n’y a pas assez d’argent pour la chaîne d’information internationale, je leur répondrai que le groupe socialiste avait proposé de diminuer leurs crédits !

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Il y a deux débats dans le débat. Je veux bien commencer par l’audiovisuel extérieur. Vous menez en ce domaine une politique de gribouille ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Des choix honteux ont été faits, qui ont été dénoncés sur tous les bancs de cet hémicycle. Vous savez qu’une mission parlementaire, dont les travaux ont été très médiatisés, proposait un projet radicalement différent du vôtre, monsieur le ministre. Et nous continuons de considérer qu’il est tout à fait scandaleux que TF1 et France Télévisions figurent à parité dans cette chaîne et qu’elle ne soit financée que sur des fonds publics, comme vous venez d’ailleurs de le confirmer, monsieur le ministre.

M. le ministre de la culture et de la communication. En tout cas, pas par la redevance !

M. Patrick Bloche. Peu importe ! Ce sont des fonds publics, alors que TF1 est à parité dans cette chaîne. C’est scandaleux ! Les députés de la mission d’information avaient, pour cette raison, prévu un autre schéma de financement, qui aurait inclus TF1 en cas de participation de cette chaîne, mais l’aurait exclue dès lors que seuls des fonds publics étaient mobilisés.

Politique de gribouille encore, car vous allez laisser en héritage en 2007 un paysage audiovisuel extérieur d’une incohérence totale à cause de votre politique de saupoudrage, dont TV5 subit déjà les conséquences. M. Kert, à cette tribune, il y a quarante-huit heures, nous a rappelé que cette chaîne n’était plus diffusée en Roumanie !

Je rappelle enfin que l’objet de notre amendement n’est pas de déshabiller Pierre pour habiller Paul, comme vous le faites, monsieur le ministre. France 24 ne devant être lancée qu’en fin d’année, elle n’a donc nul besoin des 16 millions d’euros qui avait été crédités pour 2006. Elle dispose de 70 millions d’euros pour fonctionner en 2007. On ne tue pas France 24, mais, en revanche, on estime que ces 16 millions d’euros pourraient servir utilement au pluralisme de la presse écrite, à la liberté d’expression et à cette diversité à laquelle nous sommes tous attachés. C’est réellement une occasion manquée.

Une nouvelle fois, comme vous l’avez fait lors de la séance des questions au Gouvernement mardi dernier lorsque vous avez répondu à M. Françaix, vous montrez la grande faiblesse de la réponse du Gouvernement face à une crise aussi grave que celle que connaît actuellement le quotidien Libération.

M. le président. La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti. Permettez-moi d’ajouter que la question de fond qui est posée n’est pas de remettre en cause l’effort accompli par l’État depuis 2004 – plus 22 % – en faveur de la presse, et en particulier celle qui bénéficie de faibles recettes publicitaires. Il s’agit simplement de renforcer l’aide de l’État à la presse écrite en utilisant ces 16 millions d’euros qui n’ont pas été consommés en 2006. Vous le faites, ou vous ne le faites pas, mais il ne s’agit que de cela.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 278.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Médias ».

(Les crédits de la mission « Médias » sont adoptés.)

Après l’article 49

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 96, portant article additionnel après l’article 49.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour le soutenir.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Cet amendement prévoit que le Gouvernement présente, sous forme d’une annexe « jaune » au projet de loi de finances, un rapport sur l’activité et les moyens de l’audiovisuel extérieur. Lors de votre audition en commission élargie, vous avez en effet déclaré, monsieur le ministre : « je suis d’accord sur l’idée de rassembler les informations concernant l’audiovisuel extérieur dans un document cohérent, qui pourrait être une annexe annuelle ». C’était une hypothèse de votre part.

Je voudrais insister sur le fait que cet amendement vise surtout à obliger l’État à avoir une vision exhaustive des participations publiques dans l’audiovisuel extérieur français.

L’audiovisuel extérieur fait l’objet de nombreuses critiques liées à l’empilement des structures, aux coûts de fonctionnement, à l’adéquation insuffisante des modes de communication aux usages de chaque région du monde ou encore à l’absence de synergies entre des intervenants souvent complémentaires, comme TV5 Monde, Radio France Internationale ou Canal France International.

La création de France 24, chaîne qui sera pilotée en dehors des tutelles administratives des autres opérateurs, le développement des projets européens d’ARTE et le positionnement particulier du groupe public France Télévisions – actionnaire d’Euronews et présent au capital de nombreux opérateurs extérieurs – au sein de ce paysage, rendent désormais nécessaires une rationalisation des moyens et une mise en cohérence des outils.

De plus, le Conseil de l’audiovisuel extérieur de la France, le CAEF, ayant cessé d’exister, certaines entreprises doivent parfois dialoguer avec deux, trois ou quatre administrations différentes, dont le discours n’est pas toujours convergent.

Enfin, la qualité des documents budgétaires est très inégale, et le « bleu » révèle un grand déséquilibre entre les objectifs et les indicateurs pilotés par le Premier ministre, en liaison avec le ministre de la culture, et ceux pilotés par le ministre des affaires étrangères. En particulier, le projet annuel de performance du programme « Audiovisuel extérieur », rédigé par le ministère des affaires étrangères, est très insuffisant : doté d’une seule action et d’indicateurs de performance très critiquables, il ne répond pas aux attentes et aux besoins d’information des parlementaires

La création d’un « jaune » – ou d’un document de politique transversale – en annexe au projet de loi de finances serait de nature à servir de support à l’unification du discours de l’État et à la mise en cohérence des différents opérateurs de l’audiovisuel extérieur.

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

Les projets annuels de performance et les rapports annuels de performance comportent des informations précises sur chacun des organismes de l’audiovisuel extérieur. Toutefois, je vous rejoins, monsieur le député, sur la nécessité de faire en sorte que les documents budgétaires abordent la question de l’audiovisuel extérieur de manière globale. On est perfectible, il faut qu’on s’améliore.

Il existe déjà un document qui a cette fonction : il s’agit du document de politique transversale de l’action extérieure de la France, lequel décrit notamment l’action audiovisuelle extérieure de la France. Cependant il faut l’améliorer encore pour que son contenu satisfasse vos attentes.

Je m’engage d’autre part à ce que le projet annuel de performance soit amélioré dans les prochaines années. Cela va d’ailleurs dans le sens de l’engagement que j’ai pris devant vous d’une réactivation du conseil de l’audiovisuel extérieur de la France, à laquelle le Gouvernement travaille. Ce conseil pourrait analyser les missions des différents outils dont la France dispose en matière d’audiovisuel extérieur.

C’est donc parce qu’il existe déjà un document présentant l’audiovisuel extérieur que je suis défavorable à cet amendement. Il faut certes l’enrichir, mais je m’engage à le faire.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Je prends acte de vos engagements, monsieur le ministre, qui vont dans le sens que nous souhaitons. Nous aurions cependant préféré qu’on aille plus vite dans la voie de la cohérence, qui gagne toujours à être rapidement acquise.

Je pense, à titre personnel, que nous pouvons retirer cet amendement, au regard de la promesse d’une réalisation rapide des engagements du Gouvernement de réunir le CAEF et d’améliorer le document budgétaire actuel, trop large pour être satisfaisant.

M. le président. L’amendement est-il retiré ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Les engagements du ministre nous permettent de le retirer.

M. le président. L’amendement n° 96 est retiré.

Avances à l’audiovisuel public

État D

M. le président. Sur l’état D, je suis saisi d'un amendement n° 97.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour le soutenir.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Cet amendement, adopté par la commission des finances, propose de modifier la nomenclature du compte de concours financier qui répartit le produit de la redevance entre les cinq organismes de l'audiovisuel public.

Rappelons que, l'an dernier, le compte « Avances à l'audiovisuel public » avait été présenté au Parlement sous la forme d'une mission monoprogramme, en violation de la lettre comme de l'esprit de la LOLF. Je n'avais pas manqué, avec d'autres, de critiquer cet état de fait. Le Conseil constitutionnel nous a donné raison dans sa décision du 29 décembre 2005.

Aussi le Gouvernement a-t-il revu sa copie et présenté, cette année, une mission structurée en trois programmes regroupant les cinq opérateurs financés par le compte de concours financier : le programme « Télévision » réunit France Télévisions et ARTE France ; le programme « Radio » réunit Radio France et Radio France Internationale ; enfin le programme « Patrimoine audiovisuel » concerne l'Institut national de l'audiovisuel.

Si cette structuration est meilleure, puisqu’on passe d’un à trois programmes, elle n'est pas encore satisfaisante. La logique de la LOLF impose en effet que chaque opérateur bénéficiant d'une affectation du produit de la redevance doit disposer d'un programme distinct.

L'amendement n° 97 vise donc à structurer la mission en autant de programmes que d'opérateurs, c’est-à-dire cinq, pour deux raisons principales : d’une part, un tel découpage permettrait de se passer du vote, redondant par rapport à celui sur le compte de concours financiers, de l'article de la deuxième partie procédant à la répartition du produit de la redevance entre les cinq opérateurs, à savoir l'article 63 ; d'autre part, le vote de cet amendement inciterait à une meilleure harmonisation entre les dispositifs de performance de chaque programme et les contrats d'objectifs et de moyens que chaque opérateur doit signer avec l'État, en application de l'article 53 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

Dans une perspective de revalorisation de cet outil indispensable que constitue le contrat d’objectifs et de moyens, l'existence d'un programme par opérateur doit permettre d'établir un lien direct entre celui-ci et le projet annuel de performances présenté chaque année au Parlement lors de l'examen du projet de loi de finances.

La mission « Avances à l'audiovisuel public » devrait donc être constituée d'un programme pour France Télévisions, d’un deuxième pour Radio France, d’un troisième pour ARTE France, d’un quatrième pour RFI et d’un cinquième pour l'INA.

L’année dernière, monsieur le ministre, nous n’avions pas été entendus, mais il y a eu un progrès. Il reste un dernier coup de collier à donner, en votant la répartition en cinq programmes.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Je me demandais à l’instant, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, si je ne devais pas garder du travail à faire pour mes prochaines années à la tête de ce ministère, auquel j’espère être reconduit si, bien entendu, le vote populaire le permet ! (Sourires.)

J’émets malheureusement, monsieur le rapporteur spécial, un avis défavorable, qui me semble s’inscrire cependant dans votre logique. En effet, le Gouvernement a déjà tenu compte de vos remarques…

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Et de celles du Conseil constitutionnel !

M. le ministre de la culture et de la communication. …en mettant fin à la mission monoprogramme, qui avait fait l’objet de critiques. Je ne suis pas pour autant favorable à la mise en place d’un programme par opérateur, compte tenu des risques de contagion que comporterait une telle répartition, soit à l’intérieur de mon ministère, soit pour d’autres budgets de l’État, au moment où la tendance est au contraire au regroupement à l’intérieur de blocs cohérents. Nous avons cependant, comme vous m’en avez donné acte, franchi une première étape.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Nous ne pouvons pas retirer cet amendement, car il traduit exactement la logique de la LOLF et la mission du Parlement.

D’ailleurs le rapport de nos deux collègues, Alain Lambert et Didier Migaud, tirant le bilan de la première année de mise en œuvre de la LOLF, confirme clairement que le contrôle du Parlement doit s’exercer sur l’affectation des ressources.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous ne pouvons ni retirer cet amendement ni même nous contenter d’émettre un avis de sagesse.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Le groupe UDF a voté en faveur de cet amendement en commission des finances.

En ce qui concerne l’INA, cette proposition ne change rien, puisque son budget est déjà individualisé dans la solution du Gouvernement. En revanche, le programme « Télévision » serait divisé en deux programmes, « France Télévisions » et « ARTE France », de même que le programme « Radio », en « Radio France » et « Radio France Internationale ». Une telle répartition, conforme à la réalité des structures juridiques, nous permettrait de jouer notre rôle de parlementaires, augmentant ou diminuant les ressources de chaque programme en fonction des débats en commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 97.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Avances à l’audiovisuel public », modifiés par l’amendement n° 97.

(Les crédits de la mission « Avances à l’audiovisuel public », ainsi modifiés, sont adoptés.)

Article 63

M. le président. L’amendement n° 285 qui tend à supprimer l’article 63 est la conséquence de l’adoption de l’amendement n° 97.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Avis défavorable malgré tout !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 285.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 63 est supprimé.

Après l’article 63

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 63.

La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l’amendement n° 279.

M. Patrick Bloche. Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai aussi l’amendement n° 280 car ils tendent tous deux à faire bénéficier d’un dégrèvement de redevance : le premier les étudiants disposant de revenus modestes, c’est-à-dire allocataires d’une bourse à caractère social : le second les titulaires de l’allocation spécifique de solidarité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Ces amendements n’ont pas été examinés par la commission.

Le dégrèvement de redevance au profit des étudiants bénéficiant d'une bourse à caractère social est une initiative d’une générosité dont nous aimerions avoir les moyens. Je dois cependant rappeler, comme je serai amené à le faire à propos des nombreux amendements étendant les exonérations de redevance, que la réforme de la redevance a déjà permis des progrès considérables en la matière : ce sont désormais cinq millions de foyers, contre quatre auparavant, qui sont exonérés, soit une augmentation de 25 %, ce qui n’est pas négligeable.

Le coût des exonérations de redevance est d’environ 640 millions d’euros, ce qui n’est pas davantage négligeable. En principe ces exonérations sont intégralement compensées par le budget général ; même si cette compensation est légèrement moindre dans les faits, cela reste une dépense significative.

Pour toutes ces raisons, j’émets, à titre personnel, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 279.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 280.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche, pour défendre l’amendement n° 281.

M. Patrick Bloche. Rien n’obligeait, dans le cadre de la réforme de la redevance, à adosser cette imposition sur la taxe d’habitation, sinon la volonté du Gouvernement d’introduire une confusion chez les contribuables. Recevant leur avis d’imposition au titre de la taxe d’habitation, les Français sont en effet enclins à penser que la redevance est dorénavant prélevée au bénéfice des collectivités locales. Le premier effet est donc un effet de confusion.

Surtout cet adossement aura des conséquences directes pour les contribuables puisque le régime des exonérations est aligné sur celui de la taxe d’habitation. Si les possesseurs de résidences secondaires seront exonérés au titre de cette résidence, les contribuables jusque-là exonérés de redevances mais qui sont redevables de la taxe d’habitation seront, à compter de 2007, redevables de la redevance. Si un million de foyers sont désormais exonérés, 900 000 risquent de ne plus l’être. Il s’agit pourtant de foyers modestes, qui ont bénéficié d’un dispositif préservant les droits acquis jusqu’en 2007 : allocataires du RMI, et, sous condition de ressources, titulaires des diverses allocations de solidarité, personnes âgées de plus de soixante ans, veuves et veufs et invalides.

Cette disposition constitue une bombe à retardement pour les futurs gouvernements et une grave menace pour nos concitoyens les plus modestes. (« Eh ! oui » sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Quel que soit le verdict des urnes, que nous serons les premiers à respecter, nous ne souhaitons cela à aucun gouvernement. C’est pourquoi nous proposons que la redevance ne soit plus adossée à la taxe d’habitation et que l’avis d’imposition à la redevance soit émis avec celui de l’impôt sur le revenu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. La commission a rejeté cet amendement.

Je rappelle que les deux contributions qui sont les plus largement payées sont la taxe d’habitation et la redevance. Avec plus de vingt millions de redevables, pour un montant unitaire faible, le coût de perception de la redevance était élevé : 150 millions d’euros tout compris, ce qui n’est pas rien. Il s’agissait de l’un des reproches significatifs faits à cette taxe, et l’on a cherché le moyen de faire diminuer ces frais de traitement. C’est ce qui a justifié son adossement à la taxe d’habitation.

M. François Liberti. Argument spécieux !

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Cela a été un choix purement pratique puisqu’il s’agissait de réaliser les économies les plus substantielles en matière de perception tout en évitant de pénaliser une ressource indispensable au service public de l’audiovisuel et sur laquelle étaient finalement imputés les coûts de perception.

Quant à votre argument selon lequel le Gouvernement aurait eu la volonté d’entretenir la confusion entre responsabilité de l’État et responsabilités locales, il me semble particulièrement injuste. Nous avons tous ici veillé, au contraire, à ce que l’avis d’imposition présente distinctement, sur une page la taxe d’habitation, dont le but est de financer le fonctionnement de nos collectivités locales, et sur l’autre la redevance audiovisuelle, qui finance le fonctionnement du service public de l’audiovisuel.

Les deux impositions sont présentées avec des couleurs différentes et il est clairement indiqué de quoi il s’agit de part et d’autre.

Il serait certes possible d’aller encore plus loin à cet égard : le ministère de l’économie et des finances pourrait, par exemple, fournir une information plus détaillée sur ce point, tant dans les brochures accompagnant les déclarations de revenus, sur lesquelles il faut cocher une case, que lors de l’émission des titres de perception de la taxe d’habitation et de la redevance.

La commission est donc favorable à une amélioration de l’information, qui a d’ailleurs déjà été conçue d’emblée pour éviter toute confusion entre la taxe d’habitation et la redevance. Elle est opposée, en revanche, à une perception groupée de la redevance et de l’impôt sur le revenu, qui se solderait par une perte d’argent public sur les coûts de perception.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Avis défavorable.

Cette réforme, représente un grand progrès et elle permet des économies de gestion. Ce qui est perfectible ne relève pas de la loi, mais de la diffusion de l’information : au verso du titre de perception de la redevance et de la taxe d’habitation, ou dans un des documents qui l’accompagnent, pourrait figurer un encart présentant l’utilité de la redevance. Certains de nos concitoyens ne savent probablement pas, en effet, que celle-ci contribue, par exemple, au financement de Radio France.

Améliorons l’information – ce qui, je le répète, ne relève pas de la loi –, mais ne bouleversons pas un équilibre qui fonctionne, au risque de créer des perturbations inutiles.

M. François Liberti. Il faut surtout préciser qui perçoit la redevance !

M. le ministre de la culture et de la communication. Oui, il faut préciser qui en sont les bénéficiaires.

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. L’idée de notre collègue n’est pas bonne, à cause de la nature même de l’impôt sur le revenu en France. La mesure proposée par l’amendement se traduirait en effet par une déperdition, du fait de l’augmentation de la fraude.

Si, en effet, du point de vue juridique, tout foyer fiscal doit déposer une déclaration d’impôt, telle n’est pas la réalité : bien des gens non imposables ne le font pas. Ils n’encourent d’ailleurs aucune sanction, car ils ne fraudent pas stricto sensu, puisqu’ils n’ont rien à payer. Le recouvrement de la redevance serait alors très difficile.

Le système adopté, qui a fait l’objet de longs débats au sein de la commission des finances, a été agréé par toutes les sensibilités politiques. Je regrette donc l’absence de M. Migaud et de certains de ses collègues.

La disposition proposée par l’amendement n° 281 est assez surprenante, car elle n’est par opérationnelle.

M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche.

M. Patrick Bloche. Je suis surpris que ni le rapporteur spécial, ni le ministre, ni même vous, monsieur de Courson, n’ayez évoqué le problème principal que nous avons voulu soulever avec cet amendement. J’ai certes évoqué la confusion qui laisse penser à de nombreux contribuables que le produit de la redevance est affecté aux collectivités locales,…

M. le ministre de la culture et de la communication. Les Français ne sont pas fous !

M. Patrick Bloche. …mais je tenais avant tout à rappeler – et vous y serez sensible, monsieur de Courson – que la réforme de la redevance votée dans cet hémicycle, qui visait à dissuader les fraudes, n’a pas, c’est le moins qu’on puisse dire, produit les effets escomptés. Alors que l’État espérait en effet collecter 60 millions d’euros de recettes supplémentaires dès la première année, il n’en a finalement guère obtenu plus de 15 millions, au point que le budget de l’État est sollicité, malgré les annonces du Gouvernement à propos du financement de l’audiovisuel public.

Surtout, chers collègues, il nous faut voir plus loin que cette fin d’année 2006 et penser à 2007, quels que soient l’Assemblée et le Gouvernement que les Français auront choisis. Après les élections de 2007, des contribuables modestes, jusqu’à présent exonérés de la redevance, mais redevables de la taxe d’habitation, seront redevables aussi de la redevance. Cet avantage acquis, qui a été maintenu jusqu’à 2007, touche près d’un million de contribuables modestes.

C’est une bombe à retardement, qui touchera à la fois le futur gouvernement dans ses équilibres budgétaires et, bien entendu, le million de contribuables modestes qui pourront n’être plus exonérés de redevance.

Je m’étonne donc, je le répète, que vous ne répondiez pas à cette question essentielle.

Mme Muguette Jacquaint. C’est la question essentielle, en effet !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 281.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour soutenir l’amendement n° 93.

Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis. L’amendement n° 93, adopté à l’unanimité par la commission des affaires culturelles et la commission des finances, vise à faire bénéficier de l’exonération de la redevance les centres de formation pour apprentis.

Le Gouvernement a réalisé un effort important pour rénover et moderniser le statut des étudiants en CFA. Cette mesure, qui s’inscrit dans la même démarche, vise donc à les mettre au même niveau que les autres étudiants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Très favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Je vais inventer un concept politiquement fécond, en m’en remettant à la sagesse bienveillante de l’Assemblée.

Mme Muguette Jacquaint. Ce n’est pas nouveau !

M. le ministre de la culture et de la communication. La sagesse, non, mais la sagesse bienveillante, si !

M. le président. Et vous levez le gage ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Bien sûr !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 93, compte tenu de la suppression du gage.

(L’amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. Je constate que le vote est acquis à l’unanimité.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour défendre l’amendement n° 286.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 286 est retiré.

La parole est à M. le rapporteur spécial, pour soutenir l’amendement n° 98.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. L’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée, relative à la liberté de communication, impose à chaque organisme de l’audiovisuel public de négocier avec l’État un contrat d’objectifs et de moyens, ou COM.

Grâce à l’adoption d’un amendement en loi de finances rectificative pour 2005, l’implication du Parlement dans la négociation des COM est désormais plus grande, et je m’en réjouis. Les projets de COM doivent en effet être transmis avant leur signature aux commissions chargées des affaires culturelles et des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, ce qui a par exemple été le cas cet été pour le projet de contrat entre Radio France et l’État. Je rappelle d’ailleurs que, voici quelques jours, un accord s’est fait sur ce point en commission élargie : les projets de COM peuvent faire l’objet d’un débat au Parlement et les commissions des affaires culturelles et des finances peuvent formuler un avis dans un délai de six semaines.

Cependant, les COM signés jusqu’ici n’ont pas toujours été respectés, en particulier par l’État, ou ont pu faire l’objet d’une modification unilatérale de leur équilibre et des engagements respectifs des parties. Ainsi, le décalage du lancement de la TNT et la volonté de la nouvelle majorité de 2002 de recentrer les objectifs du groupe France Télévisions sur l’amélioration des programmes des chaînes existantes ont rendu caduque une partie des dispositions des contrats d’ARTE et de France Télévisions.

Si de telles inflexions sont légitimes, il n’est pas normal que les COM ne soient pas modifiés ou amendés sous la forme d’un avenant en cas de modification importante de leur contenu.

À l’image de l’Agence France-Presse qui a négocié avec l’État un avenant à son contrat d’objectifs et de moyens afin de prendre en compte une réorientation de sa stratégie vers la vidéo et le multimédia, il convient de systématiser cette pratique contractuelle et d’imposer la négociation systématique d’un avenant au contrat chaque fois qu’intervient un changement stratégique majeur. C’est une question de crédibilité de la démarche contractuelle, qui est une démarche forte.

Afin de garantir l’implication du Parlement, qui vote le montant et l’assiette de la redevance et les abonnements de l’État à l’AFP, dans l’exécution des COM, l’amendement n° 98 propose de prévoir la transmission systématique des avenants aux COM dans les mêmes conditions que les projets de contrats.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Si les progrès souhaités par le Gouvernement et par la majorité présidentielle pour que l’ensemble de nos concitoyens bénéficient d’une offre audiovisuelle nouvelle intéressent visiblement le groupe communiste, je constate qu’ils ne semblent pas intéresser, en revanche, le groupe socialiste. Aucun des membres de ce groupe, en effet, n’est plus présent dans l’hémicycle pour examiner cette mesure, qui vise à renforcer et jalonner la véritable révolution que représente la multiplication par trois, pour toutes les Françaises et tous les Français, de l’offre télévisuelle gratuite que permettent la TNT et la démarche partenariale que nous devons avoir avec chacune des sociétés de l’audiovisuel public.

Lorsque des modifications interviennent, il faut en effet que le Parlement soit au cœur de ces réalités. Vous avez, mesdames et messieurs les députés, un rôle très important à jouer et vous le jouez magnifiquement bien.

J’émets donc, monsieur le rapporteur spécial, malgré l’absence totale du groupe socialiste en séance, un avis favorable à l’amendement n° 98.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 98.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs aux médias.

Suspension et reprise de la Séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

enseignement scolaire

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’enseignement scolaire.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, mes chers collègues, nous allons, en cette fin de matinée et en début d’après-midi, examiner le plus gros budget de l’État, et de loin, puisqu’à lui seul il pèse 59,5 milliards d’euros, le service de la dette ne représentant que 40 milliards, le budget de la défense 35 milliards, celui de la recherche une vingtaine de milliards, les autres budgets étant presque tous inférieurs à 10 milliards.

Il est de très loin le plus gros budget. Il représente plus que le produit de l’impôt sur le revenu – 57 milliards –, plus que celui de l’impôt sur les sociétés : 46 milliards.

En outre il est le seul budget de l’État à être dans une telle proportion destiné à rémunérer des personnels : presque 97 % de ses crédits, soit 1 070 000 équivalents temps plein. Le budget de la défense, qui vient en deuxième, n’en compte que 335 000, soit le tiers. Si l’on ajoute l’enseignement supérieur et la recherche, ce sont 53 % des emplois de la fonction publique d’État qui sont placés sous votre autorité, monsieur le ministre.

Pour certains, juger du budget de l’enseignement scolaire est d’une simplicité biblique : si le nombre de postes augmente fortement, c’est un excellent budget ; s’il augmente peu, c’est un budget médiocre ; s’il diminue, c’est un très mauvais budget. Peu importe que les enseignants enseignent, que l’utilisation de l’argent public soit adéquate. Cependant je sais que ce jugement à l’emporte-pièce n’est pas celui des députés, quelle que soit leur couleur politique, qui connaissent un tant soit peu la réalité de l’enseignement. D’ailleurs, l’un de vos prédécesseurs, Claude Allègre, ne disait pas autre chose que moi. Il l’a exprimé sans doute de façon trop abrupte pour ses amis politiques, mais, sur le fond, ce que je vais exposer, il l’a déjà largement dit lui-même.

Examinant un tel budget, nous ne pouvons pas nous priver de comparaisons internationales. À cet égard nous disposons de deux documents qui vont me servir pour mesurer l’efficacité du système français par rapport aux autres : un rapport de l’OCDE, publié en septembre 2006, qui compare la situation de la France avec celle des autres pays ; et les résultats de l’audit commandé par le Gouvernement sur la grille horaire des enseignements dans les lycées généraux et technologiques.

Tout d’abord, nous sommes, avec 6,1 % du PIB consacré à l’éducation, nettement au-dessus de la moyenne de l’OCDE, précédés seulement par les États-Unis et par la Suède. Si l’on prend en compte seulement la part de dépense publique consacrée à l’éducation, la France se classe même première.

Autre critère : la dépense moyenne par élève. À cet égard je ne vais parler que du secondaire car le problème que je veux souligner n’existe pas dans le primaire.

Le coût de formation d’un élève dans le secondaire est de 8 653 dollars, soit le plus cher du monde après les États-Unis avec 9 590 dollars. Nous dépensons en moyenne pour l’ensemble du secondaire – premier et second degré – 25 % de plus que la moyenne des pays de l’OCDE. Dans l’audit que j’ai évoqué, il est mentionné que la dépense moyenne par lycéen a augmenté de 50 %, en euros constants, de 1990 à 2004 ; aujourd’hui, le coût par élève et par an dans les lycées est de 10 000 euros. Selon le rapport de l’OCDE, la dépense par élève du second cycle du secondaire est supérieure de 32 % à la moyenne de l’OCDE et de 35 % à la moyenne des pays européens. L’audit en conclut que l’allocation des ressources publiques est défavorable à l’enseignement supérieur, car dans celui-ci nous sommes en dessous de ces deux moyennes. La France est très au-dessus des moyennes dans le secondaire, notamment dans le second cycle, et un peu en dessous dans le supérieur.

Telle est donc la situation décrite par l’OCDE. On pourrait se dire que cela coûte plus cher, mais que les résultats sont nettement supérieurs. Hélas non, chers collègues ! C’est l’OCDE qui nous l’apprend, par l’enquête PISA : program for international student assessment. Cette étude sur la compréhension écrite a été menée dans les quarante et un pays les plus développés, sur un échantillon de 250 000 élèves de quinze ans. Le résultat global place la France exactement dans la moyenne : 496 points alors que la moyenne est de 494. La Finlande, dont je vais reparler plus tard, obtient 543.

L’ancien prof de maths que je suis a regardé d’un peu plus près les résultats sur les items scientifiques : pour les maths, on est un peu meilleurs, au seizième rang, avec 511 pour une moyenne de 500 ; de même pour la culture scientifique.

Toutefois que peut-on penser d’un système qui, en dépensant 25 % de plus que la moyenne dans le secondaire, obtient des résultats qui se situent dans la stricte moyenne ?

Le problème n’est pas de savoir s’il faut des moyens supplémentaires, puisque les moyens sont là, nous venons de le démontrer, mais de comprendre pourquoi il y a un tel surcoût et de tenter de réformer le système pour le rendre plus efficient. C’est à cette lecture du projet de budget que je vous invite. Nous allons examiner si certaines des mesures présentées aujourd’hui commencent à rendre le système plus efficient.

Examinons d’abord les causes principales du surcoût dans le secondaire ; j’insiste sur le fait que je ne parle pas du primaire.

J’ai déjà évoqué dans mes rapports budgétaires des années précédentes ce que je vais vous dire. Je me suis appuyé sur deux rapports de la Cour des comptes, l’un d’avril 2003 sur la gestion du système éducatif, l’autre de janvier 2005 sur les enseignants qui n’enseignent pas, sur les audits lancés par le Gouvernement. Celui-ci a enfin décidé de se doter lui-même des outils d’analyse nécessaires : ce sont les audits que vous avez commandés, monsieur le ministre, avec votre collègue Jean-François Copé. Ils ont permis, pour l’essentiel, de corroborer les conclusions de la Cour des comptes, mais ils vont plus loin dans leurs propositions. Ils commencent à apporter cet éclairage indispensable à la bonne gestion et à la bonne efficience des sommes considérables – presque 60 milliards – que nous consacrons à l’éducation en France.

Les constats que je vais faire ne sont pas hiérarchisés.

Premier constat : le personnel est sous-employé.

Le rapport de la Cour des comptes ne propose pas de demander aux enseignants de faire 35 heures dans les établissements scolaires, contrairement à ce que la candidate du parti socialiste, désignée hier soir, propose. En revanche, la Cour démontre un certain nombre de dysfonctionnements. Elle chiffre à 32 000 équivalents temps plein le nombre d’enseignants qui n’ont ni classe ni activité pédagogique : les remplaçants inoccupés – 9 500 ETP –, les décharges non statutaires – 4 000 –, les surnombres disciplinaires – 2 500 –, etc.

Monsieur le ministre, plusieurs mesures dans ce projet de budget vont dans le sens d’une meilleure occupation des enseignants, notamment s’agissant des remplaçants inoccupés. Vous avez également commencé à revoir les décharges non statutaires, soit en les supprimant purement et simplement si elles n’avaient aucun lieu d’être, soit en modifiant le système : l’État subventionne le poste occupé, mais c’est l’organisme concerné qui devient l’employeur.

Deuxième élément de surcoût : un système de décharges obsolète.

Un audit récent, que vous avez commencé à prendre en compte, montre que celles-ci représentent environ 32 000 équivalents temps plein, dont 12 000 sont peu ou pas justifiées.

Troisième cause de surcoût : un nombre extrêmement élevé d’options et de matières rares puisque l’on dénombre 250 matières enseignées, avec autant de formations d’enseignants différentes.

Sur les 6 millions d’heures enseignées, 20 % le sont devant moins de quinze élèves. Parfois cela est complètement justifié, mais ce l’est beaucoup moins lorsque cela est seulement dû au faible nombre d’inscrits dans l’option en question, le pic se situant dans l’enseignement professionnel et dans celui des langues étrangères.

Quatrième cause de surcoût : un nombre d’heures de cours particulièrement élevé.

Je tiens à insister sur ce point parce qu’il est écrit dans l’audit que « l’investissement massif dans le volume d’heures d’enseignement n’a amélioré ni les performances ni l’équité du système français ». L’horaire annuel d’un lycée français est de 20 % supérieur à la moyenne européenne, avec une charge de travail, y compris le travail à la maison, de 45 heures. Est-ce raisonnable, chers collègues ?

Mme Chantal Bourragué. Pas du tout !

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. Je ne crois pas que les parents soient toujours satisfaits de voir leurs enfants crouler sous le travail. Comme on n’a amélioré ni les performances ni l’équité, ne serait-il pas heureux de réduire certains horaires pour consacrer au moins une partie des moyens ainsi dégagés à un soutien plus individualisé et personnel de nos jeunes vraiment en difficulté ?

Mme Chantal Bourragué. Eh oui !

Mme Muguette Jacquaint. Par qui ?

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. Je le dis souvent : l’équité, ce n’est pas donner plus à tout le monde ; c’est donner plus à ceux qui en ont réellement besoin. C’est à cette condition qu’on peut vraiment aider ces derniers.

Mme Chantal Bourragué. Vous avez bien raison !

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. L’OCDE dit la même chose que moi concernant le nombre d’heures de cours. Il a étudié le nombre d’heures suivi par un élève entre sept et quatorze ans : 7 500 heures en France, alors que la moyenne se situe à 6 850 et que la Finlande est même à 5 500. La Finlande a donc 25 % d’heures en moins. Je parle de ce pays parce qu’il arrive premier dans l’enquête PISA. Avec 25 % d’heures en moins, la Finlande a néanmoins une réussite bien supérieure à la nôtre.

Je suggère que, l’année prochaine, une délégation de parlementaires et de collaborateurs du ministre se rende en Finlande pour étudier les raisons du succès de ce pays. Non seulement il a les meilleurs résultats dans l’enquête PISA, mais, en plus, notamment en nombre d’heures de travail, donc en matière de coût global, il est beaucoup plus performant que nous.

Cinquième raison du surcoût : un taux de redoublement record.

Sur dix jeunes de quinze ans, quatre ont déjà redoublé au moins une fois, soit 40 %, alors que la moyenne de l’OCDE est de 13 %. L’OCDE souligne que « ce taux inutilement élevé ne prévient pas l’échec scolaire ». Il y aura évidemment un travail de pédagogie à mener, notamment vis-à-vis des enseignants. Je suis enseignant moi-même, et je sais que beaucoup de collègues sont persuadés que, lorsqu’un élève est en difficulté, le mieux est de le faire redoubler, alors que ce n’est pas toujours vrai. Mieux vaudrait prendre assez tôt des mesures de soutien individualisé ou organiser des études surveillées, afin que les élèves les plus en difficulté ou les plus fragiles, du fait de leur situation familiale ou de raisons personnelles, puissent, s’ils le souhaitent, et en accord avec leurs parents, être encadrés dans leur travail hors des heures de cours obligatoires.

La sixième cause de surcoût réside dans un encadrement pédagogique élevé et en hausse continue.

Selon l’OCDE, nous avons en France, sur l’ensemble du secondaire, un taux de 12,2 élèves par enseignant ; ce taux est de 13,6 en moyenne pour l’OCDE, et il est supérieur à 15 pour l’Allemagne et les États-Unis. Pour le deuxième cycle, c’est-à-dire uniquement les lycées, la différence est encore plus importante : le taux est de 10,6 élèves par enseignant en France, et de 13 pour l’OCDE. Cet écart de 25 % engendre automatiquement un surcoût, sans que cela se traduise par de meilleurs résultats.

Après une rapide présentation des éléments du budget, que le ministre détaillera lui-même dans quelques instants, je vais mettre en lumière les mesures qui constituent le début du processus d’amélioration de notre système pédagogique. Je vous remercie, monsieur le ministre, de les avoir engagées, car le plus difficile est toujours d’ouvrir la voie.

Les crédits du budget pour 2007 sont en hausse de 1,3 %. S’ils apparaissent en baisse dans leur présentation, c’est parce que les TOS seront à la charge des départements et des régions à compter du 1er janvier prochain et que, dans l’enseignement privé, le forfait d’externat fait également l’objet d’un transfert. Je me propose de dire « Bingo ! » à chaque fois que j’entendrai l’un de nos collègues affirmer que le budget est en baisse.

Le budget total est de 59,5 milliards d'euros. Il était de 59,7 milliards d'euros l’an dernier, mais il convient de déduire près d’un milliard de cette dernière somme pour rester à périmètre constant.

Le budget du primaire public s’élève à 16 milliards, celui du secondaire public à 28 milliards, celui de la vie de l’élève à 6 milliards, celui du privé à 7 milliards, celui du soutien de la politique de l’éducation nationale à 2 milliards, et celui de l’enseignement technique agricole à 1,3 milliard d'euros. Les budgets en baisse correspondent à ceux dont on a extrait les TOS ou, pour le privé, le forfait d’externat.

Les crédits de personnel représentent 93 % du budget, sachant que si l’on intègre toutes les dépenses destinées in fine aux rémunérations, ce taux atteint près de 97 %. La suppression de 4 623 équivalents temps plein travaillé, concomitante au recrutement de 50 000 contrats aidés, n’affecte pas le taux d’encadrement pédagogique. Je m’en suis assuré auprès de M. le ministre, car c’est pour moi la seule chose qui compte. Au contraire, la présence des enseignants auprès des élèves s’améliore, grâce au redéploiement ; si un problème risque de se poser, ce sera lorsque les contrats aidés devront prendre fin.

La suppression de 4 600 postes résulte d’une diminution de 2 400 postes dans le secondaire et d’une augmentation de 600 postes dans le primaire, afin de faire face à l’augmentation du nombre d’élèves. Par ailleurs, 3 600 emplois de stagiaires actuellement vacants le resteront en 2007 ; en effet, la réforme des retraites de la fonction publique a incité un certain nombre d’enseignants à différer leur départ en retraite, ce qui fait que le nombre de départs a été inférieur aux prévisions. Ce facteur comportemental ne pouvait pas être anticipé. Le ministère a réduit en conséquence le nombre de postes proposés au concours de recrutement, ce qui se traduit par une diminution du nombre de stagiaires. Enfin, les langues étrangères en primaire étant de plus en plus enseignées par les titulaires, 200 postes d’assistant de langue sont supprimés.

Je le répète, l’encadrement pédagogique reste constant, avec un taux de 23 élèves par enseignant dans le primaire et de 12,2 dans le secondaire. Je réponds donc à l’avance, à ceux qui auraient l’intention d’affirmer qu’il est scandaleux de déshabiller l’éducation, que leur indignation n’est pas fondée. Ce budget ne remet pas en cause la priorité que constitue l’éducation nationale : au contraire, il optimise les crédits qui lui sont consacrés.

Mme Muguette Jacquaint. Ne parlez pas pour les autres !

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. Parmi les priorités du budget pour 2007 figurent la promotion de l’égalité des chances et le renforcement des services sanitaires et sociaux. Dans la perspective d’assurer la présence d’une infirmière par établissement en 2010, le Gouvernement propose de créer 300 postes d’infirmière, vingt postes de médecin de prévention…

Mme Muguette Jacquaint. Vingt postes !

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. … – étant précisé qu’un amendement prévoit de porter cette augmentation à trente –, ainsi que cinquante postes d’assistant de service social.

Ce budget traduit un effort de meilleure gestion des moyens à taux d’encadrement pédagogique constant, par une diminution du nombre de postes dans le secondaire, un renforcement des moyens consacrés aux remplacements de courte durée – qui s’améliorent grâce aux effets de la loi Fillon – et l’intéressement des personnels aux gains de productivité par divers moyens, notamment la poursuite de la transformation de postes d’instituteur en postes de professeur des écoles à hauteur de 20 700 postes.

Je dirai également un mot de l’enseignement agricole, même si vous n’en êtes pas chargé, monsieur le ministre.

Nombre de nos collègues se sont en effet émus l’année dernière de ce que l’engagement pris par l’État à l’égard des maisons familiales rurales ne soit pas tenu dans le projet de budget. Nous l’avons finalement tenu, et je remercie ceux de nos collègues ainsi que les deux ministres qui ont permis de trouver une solution en faveur de l’alternance dans le monde agricole. Quelques progrès restent à accomplir, notamment la prise en compte du nombre réel d’élèves. Enfin, dans l’enseignement public agricole, on a constaté, lors des cinq dernières années, une forte réduction des crédits de formation, dont il serait bon de nous indiquer la cause.

Dans l’enseignement privé, il est incontestable que le rapport historique « 80-20 » – cinq postes créés ou supprimés dans le public, pour un seul dans le privé – ne correspond plus à la réalité du nombre d’élèves inscrits dans le public et dans le privé. La nécessaire réflexion qu’il conviendra de mener sur ce point doit trouver sa place lors des prochaines élections présidentielles et législatives. Il semble qu’il faille se diriger vers un assouplissement de la règle non écrite consacrant ce rapport, à la condition, évidemment, de ne pas déclencher une nouvelle guerre scolaire. Je suis personnellement favorable à ce que l’on aille vers une répartition des postes plus adaptée au nombre réel d’élèves inscrits dans le public et dans le privé.

Dans le même temps, il conviendra d’abroger l’amendement Charasse, à moins que le conseil d’État ne s’en charge. En effet, si tout maire peut refuser l’inscription dans son école publique d’un enfant d’une autre commune – car c’est une charge financière supplémentaire – il doit en revanche financer les élèves inscrits dans l’enseignement privé d’une autre commune, même dans le cas où il existe une école publique sur le territoire de la commune de résidence. La suppression de cette mesure intenable, et dont les maires se plaignent, doit être, selon moi, le préalable à la modification de la répartition des postes entre le public et le privé.

En ce qui concerne la recherche de performance, les améliorations pourraient être amplifiées. Le contenu des projets annuels de performance – les PAP – fait l’objet d’une présentation plus claire. La stratégie est plus précise et approfondie, mais il subsiste des lacunes : l’analyse des coûts, en particulier, reste embryonnaire, et la comptabilité analytique reste à faire.

Pour ce qui est de l’évolution des objectifs et des indicateurs, un progrès a été accompli. Un certain nombre d’indicateurs peu utiles ont été supprimés, tandis que d’autres ont été créés. Cela n’était pas prévu initialement, ce qui montre que la culture de ce ministère était très éloignée de la recherche de l’efficience. Ainsi, aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’existait aucun indicateur du taux de redoublement, ni aucun indicateur du taux de personnels enseignant dans plusieurs disciplines. Or nous sommes nombreux à considérer que la bivalence est une pratique à encourager. Ces deux lacunes sont désormais comblées.

Je ne reviens pas sur les critiques formulées l’an dernier et qui demeurent, pour lesquelles vous pourrez vous référer à mon rapport.

Un travail considérable a été accompli par votre administration centrale, monsieur le ministre, en ce qui concerne la mise en œuvre de la LOLF. Beaucoup reste à faire, en revanche, au niveau académique. Aucun objectif stratégique, aucune cible de résultats n’ont été communiqués aux académies. Par ailleurs, le fléchage de certaines dépenses par l’administration centrale est maintenu, ce qui est contradictoire avec la globalisation recherchée.

Des rapports d’audit commencent – enfin ! – à être rendus. Cela fait cinq ans que je suis rapporteur spécial du budget de l’enseignement scolaire, et j’ai demandé chaque année – en vain jusqu’à présent – l’application par le ministère des préconisations de la Cour des comptes. C’est aujourd’hui chose faite, avec un début de mise en œuvre sur l’organisation des examens et les décharges statutaires.

Pour ce qui est de la grille horaire des lycées, les recommandations du rapport qui vient de sortir rejoignent en grande partie celles que j’ai formulées lors des années précédentes. Un rapport vient également d’être rendu au sujet de la grille horaire des collèges, et trois autres sont en cours.

Je terminerai, monsieur le ministre, par quelques recommandations.

En premier lieu, il convient de mesurer la valeur ajoutée dans chaque classe et dans chaque établissement. On ne peut se contenter de classer un établissement en fonction des résultats aux examens, puisque tout dépend du niveau initial des élèves. Cette mesure doit être effectuée au moyen d’un test pratiqué à l’entrée et à la sortie de chaque classe, et d’une comparaison entre les deux scores obtenus. Le résultat doit ensuite être rendu public, afin de répondre à l’exigence croissante de nos concitoyens de connaître la qualité de l’enseignement dans tel ou tel établissement.

Si, de surcroît, on doit s’acheminer vers un desserrement des contraintes en matière de carte scolaire – comme l’UMP et Mme Royal le proposent – l’exigence de transparence ne peut qu’augmenter. La mise en place de ce contrôle de la valeur ajoutée se fera progressivement – ainsi, dans les lycées, on peut commencer par un test à l’entrée en seconde et un autre à la sortie de terminale – mais il est indispensable que nous disposions d’indicateurs dans ce domaine. Il faudra également créer un indicateur du coût de formation d’un élève au sein de chaque établissement ; des logiciels très simples d’utilisation sont prévus à cet effet, je peux vous en recommander un si vous le souhaitez. Enfin, pour chaque établissement, la mesure de la valeur ajoutée et celle du coût doivent être croisées.

Il convient d’alléger les horaires du secondaire et d’attribuer une partie des marges de manœuvre ainsi dégagées non pas aux recteurs ou aux inspecteurs d’académie, mais aux chefs d’établissement. Si, dans un lycée, on réduit les horaires d’une ou plusieurs matières, une partie du volume d’heures dégagé doit servir à améliorer l’efficience globale du système et une autre être mise à disposition des chefs d’établissement et de l’équipe pédagogique qui pourront, par exemple, décider d’un meilleur suivi des élèves en difficulté.

Par ailleurs, il convient de réduire le nombre d’options dans les secteurs à faibles débouchés et de rationaliser l’offre globale d’options ; de limiter le nombre de redoublement et de privilégier le suivi individualisé réservé aux seuls élèves en ayant besoin ; d’informer les élèves du deuxième cycle, notamment en première et en terminale, sur les débouchés des diverses filières de formation après le bac. Le système d’orientation actuel est ubuesque : il n’est pas rare qu’un élève choisisse une filière uniquement pour rester avec ses copains ; de même, le nombre de jeunes qui se précipitent dans une formation en sport, en psychologie ou en sociologie, par exemple, est complètement absurde. Il faut les informer bien avant le bac.

Il faut aussi revoir en profondeur la sélection et la formation des futurs enseignants. Le rapport que vient de rendre à ce sujet le haut conseil de l’éducation va dans le bon sens : les compétences académiques ont à l’évidence leur importance, mais il faut aussi savoir gérer la diversité des élèves ou tenir une classe ; il est indispensable de leur apprendre, au lieu de jeter directement les étudiants d’IUFM dans une classe. On pourrait même faire entrer dans la sélection leur capacité à innover.

J’ajoute qu’il faut se préoccuper de donner confiance aux élèves : lorsqu’on dit à un élève qu’il est mauvais, il le devient. C’est ce que les sportifs appellent le mental. N’en déplaise à M. Frêche, quand les All Blacks proclament qu’ils vont gagner, ils le font plus facilement ! Chacun est libre de vérifier ce principe au niveau électoral.

Il faut aussi développer la bivalence laquelle est bonne pour les élèves et facilite l’adéquation entre les heures dues et les heures faites. Une prime est déjà instaurée, mais on pourrait aussi réserver une partie des places mises au concours du CAPES à des enseignants bivalents. Par exemple on prévoirait un certain nombre de postes pour l’enseignement des mathématiques, un certain nombre pour la physique, mais aussi des postes réservés à l’enseignement conjoint des mathématiques et de la physique. À mon avis, ce ne serait pas très compliqué techniquement, et je rappelle que M. Ayrault a lui-même prôné la bivalence. Il s’agit donc d’une proposition largement partagée par les élus, si ce n’est par les syndicats d’enseignants. Enfin, il faut évaluer plus précisément le nombre d’heures payées et non faites, et donner davantage de liberté aux chefs d’établissement dans leur utilisation.

En conclusion, grâce à la LOLF, grâce à la volonté de M. le ministre et de ses collaborateurs, grâce à une forte mobilisation de l’appareil – notamment les recteurs et les inspecteurs d’académie –, la demande récurrente de la commission des finances quant à une optimisation de l’argent de l’État est en cours. Soyez-en félicité.

Dans la campagne électorale qui s’ouvre, il faudra distinguer entre ceux qui souhaitent mettre de l’argent là où c’est nécessaire, comme dans l’enseignement supérieur, et ceux qui, de manière irresponsable et démagogique, demandent toujours plus, même là où l’argent est mal utilisé. Pour toutes ces raisons, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter le budget de l’enseignement scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Mme Irène Tharin, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Monsieur le Président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la mission « Enseignement scolaire » est, de loin, le premier budget de l'État, avec 59,5 milliards d'euros de crédits en 2007, soit 22 % des dépenses totales de l'État. Cependant le défi à relever, aujourd'hui, est, non plus celui de l'augmentation des moyens consacrés à l'enseignement scolaire, mais celui de leur meilleure utilisation dans l'intérêt des élèves, en vue d'une meilleure performance de l'ensemble du système éducatif.

Selon les deux audits de modernisation de l'État publiés le 17 octobre et établis conjointement par les inspections générales des finances et de l'éducation nationale, en quinze ans, le coût annuel moyen d'un collégien a augmenté de 33 %, pour s’établir à 7 401 euros en 2004, et celui d'un lycéen de 50 %, pour atteindre 10 000 euros en 2004, sans cependant que les performances globales des élèves soient à la hauteur de cet investissement.

À cette recherche d'une plus grande efficacité et d'une amélioration des résultats scolaires de tous les jeunes, il faut, incontestablement, associer les parents. Historiquement, l'école de la République, investie d'une mission émancipatrice des futurs citoyens, se concevait comme un sanctuaire, aussi protégé que possible, des influences extérieures, notamment de celle des familles. Toutefois, au fil des années, on est passé d'une école sanctuaire à une école ouverte sur la société, ce qui ne va pas toujours de soi.

C'est pourquoi j’ai choisi de développer ici le thème du rôle et de la place des parents dans le fonctionnement de l'école. Je vous présenterai les progrès réalisés dans ce domaine et les efforts qui restent à faire, après avoir rapidement évoqué les points forts du projet de budget pour 2007 en matière scolaire.

Les crédits proposés pour 2007 affichent une baisse par rapport à 2006 d'environ 2 % en euros constants, mais cette baisse résulte, d’une part, du transfert de 23 403 équivalent temps plein – ETP – de personnels techniciens, ouvriers et de services – TOS – en application de la décentralisation vers les collectivités locales, et, d'autre part, des évolutions démographiques.

En effet, la tendance générale est à la baisse des effectifs d'élèves, même si cette tendance s'est légèrement inversée dans le primaire : les classes élémentaires de CP et de CM2 ont vu leurs effectifs augmenter de 1,1 % dans le secteur public et de 0,3 % dans le secteur privé depuis 2004. En revanche, dans le second degré, depuis 1990, les établissements publics et privés ont perdu 224 300 élèves.

Pour tenir compte de cet élément démographique, le projet de loi de finances prévoit la suppression de 2 400 emplois dans le secondaire : 2 000 dans le public et 400 dans le secteur privé. À l’inverse, le budget prévoit la création de 500 emplois de professeur des écoles dans le secteur public et de 100 emplois dans les écoles privées. Le nombre de postes offerts pour les concours de recrutement des deux niveaux restera stable : 11 000 pour le premier degré et 10 000 pour le second.

Cette rationalisation des crédits permettra par ailleurs de créer 300 postes d'infirmière pour la rentrée de 2007 et 50 emplois d'assistant de service social, afin de respecter les engagements de la loi d'orientation pour l'avenir de l'école.

Il importe également de souligner que ce budget concentre les efforts financiers sur les catégories d'élèves qui en ont le plus besoin. Il faut ainsi noter l’attribution de 89 000 bourses au mérite pour les élèves qui ont obtenu une mention au brevet.

Il convient également de souligner la montée en puissance des programmes personnalisés de réussite éducative – PPRE –, qui mobilisent les équipes éducatives autour des élèves ayant des difficultés pour acquérir les connaissances et les compétences du socle commun. Au 1er janvier 2007, 1 000 assistants pédagogiques seront recrutés afin d'accompagner la généralisation de ce dispositif. Le projet de loi de finances prévoit en outre le financement, en année pleine, de 50 000 emplois vie scolaire, recrutés sur des contrats d'avenir, dans le premier et dans le second degrés. Cofinancés par le ministère de l'éducation nationale et par le ministère de l'emploi et de la cohésion sociale, ces emplois seront affectés à des tâches administratives et à des fonctions d'assistance éducative.

On doit enfin rappeler l'accompagnement des élèves en situation de handicap avec la création de 166 unités pédagogiques d'intégration – UPI – pour lesquels 200 emplois d'enseignant et 166 emplois d'auxiliaire de vie scolaire seront créés.

Je terminerai ce rapide tour d'horizon en formulant deux remarques.

La première concerne l'amélioration de l'enseignement des langues vivantes.

Outre la généralisation de l'enseignement d'une langue vivante à l'école primaire, la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école a mis l'accent sur la nécessité d'améliorer l'enseignement des langues vivantes dans le secondaire, notamment en procédant au dédoublement des classes lorsque les effectifs le justifient, en commençant par la classe terminale.

M. Jean-Yves Hugon. C’est une très bonne chose !

Mme Irène Tharin, rapporteure pour avis. L'effort dans ce sens doit être poursuivi et étendu comme l'a souhaité M. Gilles de Robien.

Ma seconde observation porte sur un sujet qui me tient à cœur : il s'agit des progrès effectués dans le domaine de l'orientation.

Dans mon rapport remis au Premier ministre le 8 septembre 2005, j'avais formulé de nombreuses propositions tendant à améliorer l'orientation des élèves tant au niveau scolaire qu'universitaire. Parmi ces propositions, j'insistais sur l'importance de l'apprentissage, dès l'âge de quatorze ans, pour remédier à l'échec scolaire et à l'abandon prématuré de leurs études par trop de jeunes. Je souhaitais également que l'éducation nationale s'efforce d'améliorer les relations entre l'école et l'entreprise et que soit prévue dans les programmes une véritable éducation à l'orientation. Je constate avec satisfaction que les choses ont bougé depuis et que j'ai été entendue.

En effet, l'apprentissage junior est désormais une réalité, et l'apprentissage est devenu une voie d'orientation au même titre que les autres. La création de l'option découverte professionnelle mériterait toutefois d'être étendue. Une circulaire du 27 mars 2006 prévoit en particulier qu'au lycée, à titre expérimental, il serait souhaitable de consacrer dix heures par an à l'information sur les métiers et l'enseignement supérieur.

Par ailleurs, tous les recteurs ont été invités à coordonner l'action des différents services de l'État et des établissements publics qui ont compétence en matière d'orientation, d'insertion et d'information sur les métiers. De plus, il conviendrait d'améliorer la formation des conseillers d'orientation psychologues afin de pallier leur manque de connaissance du monde économique et du marché de l'emploi.

Enfin, le décret du 11 septembre 2006 institue un délégué interministériel à l'orientation placé auprès des ministres chargés de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle des jeunes. Ce délégué est notamment chargé de la mise en place et du suivi d'un schéma national de l'orientation et de l'insertion professionnelle.

C'est par le biais de l'orientation que j'aborderai la question du rôle des parents dans la réussite scolaire de leurs enfants, car l'institution se substitue bien souvent aux familles dans les choix essentiels pour l'avenir des enfants.

Un récent sondage effectué auprès de parents et d'enseignants montre que 77 % des parents interrogés et 74 % des enseignants estiment qu'à l'heure actuelle, l'école fonctionne bien. Toutefois, les appréciations sont plus contrastées sur les relations entre l'école et les parents, ou encore sur l'encadrement et le suivi des élèves par les professeurs.

L'école ne peut pas tout toute seule et elle doit s'appuyer sur des compétences externes. L'accord des acteurs concernés est large à ce propos, et le Gouvernement a consacré ce principe avec l'adoption d'un décret en date du 28 juillet 2006 consolidant le rôle et la place des parents d'élèves à l'école.

La collaboration de l'institution et des familles, mais aussi des associations, qui peuvent, dans certains cas, contribuer au rapprochement entre l'école et les parents les plus éloignés de la culture scolaire, est largement reconnue comme l’une des conditions de la réussite des élèves. Cette exigence avait été particulièrement mise en évidence dans le cadre du débat national sur l'école qui s'est déroulé de septembre 2003 à mars 2004, à la demande du Président de la République. Des divergences existent cependant entre les différents acteurs quant à la nature exacte de cette nécessaire collaboration et de ses limites.

Mettre du lien, au-delà des textes réglementaires, entre l'institution et les familles, et ouvrir largement l'école sur le monde extérieur c'est, à l'instar de ce que font de nombreux pays étrangers, améliorer les chances de réussite de tous les élèves.

Les droits des parents d'élèves ont été consolidés. Une large concertation a été menée pour la préparation du décret du 29 juillet 2006 et de la circulaire du 25 août sur le rôle et la place des parents à l'école. Ils ont été approuvés par tous les acteurs du système éducatif ce qui est suffisamment rare pour être souligné. Les parents se voient ainsi reconnus un droit d'information, un droit de participation et un droit de réunion.

Le droit d'information signifie l'accès des parents aux informations nécessaires au suivi de la scolarité de leurs enfants et à celles relatives à l'organisation de la vie scolaire. Le conseil d'école, ou le conseil d'administration dans le secondaire, doit prévoir les conditions d'organisation du dialogue avec les parents.

Des réunions de rentrée doivent être organisées au cours desquelles le contenu du règlement intérieur de l'établissement est présenté aux parents et chaque enseignant doit préciser les enjeux et les programmes de l'année.

Des rencontres trimestrielles avec les parents sont également prévues pour faire le point sur la situation de leur enfant et les informer des actions de soutien personnalisé envisagées. À cette occasion, les livrets et les bulletins scolaires doivent être remis en mains propres aux parents par un enseignant de la classe, afin d'avoir un échange sur les progrès de leur enfant ou ses difficultés. S'il y a lieu, il est prévu de s'assurer de l'aide d'un interprète extérieur.

Les parents sont représentés dans les différentes instances scolaires tels que le conseil d'école, le conseil d'administration, les conseils de classe ou encore les commissions d'appel compétentes en matière d'orientation.

Pour ce qui est des recours, exercés par les parents contre les décisions des conseils de classe, depuis dix ans, les taux d'appel baissent, et les taux d'appels satisfaits augmentent.

Néanmoins il faut également améliorer les pratiques, car ces droits ne valent évidemment que par l'usage que l'on en fait. Il faut, de ce point de vue, déplorer les forts taux d'abstention qui caractérisent les élections des représentants des parents d'élèves dans les différentes instances.

Dans le même ordre d'idées, je fais état, dans mon rapport, d'une note d'étape sur le rôle et la place des parents à l'école émanant d'inspecteurs généraux de l'éducation nationale qui plaident pour que la participation des parents aille au-delà de la présence formelle aux instances participatives de l'établissement et pour qu'ils soient consultés sur le projet éducatif des établissements.

Au cours de mes auditions pour la préparation de cet avis budgétaire, j'ai rencontré plusieurs interlocuteurs qui considèrent que le rôle des parents ne devrait pas se limiter au fonctionnement de la cantine et à la préparation de la kermesse.

Tout cela revient à dire que des efforts sont encore nécessaires pour rapprocher l'école et les familles, l'effort majeur devant porter sur la formation des enseignants. Tous les acteurs de la communauté éducative s'accordent à reconnaître que la transformation de la relation des enseignants et des parents passera par la formation et que cet apprentissage est une garantie de professionnalisme.

Le cahier des charges réformant le fonctionnement des IUFM, qui devrait être prochainement adopté, devra proposer un module de formation obligatoire sur la prise en compte du rôle des parents et la résolution des conflits avec les familles. Il est en effet essentiel de mettre en œuvre une véritable politique d'accueil des parents afin que l'école leur devienne plus familière et plus accessible.

La circulaire de rentrée du 25 août 2006 prévoit, en application du décret que j'ai déjà cité, la mise à disposition des locaux scolaires en dehors des heures de classe pour des séances de formation des parents. Il ne faut pas que cette disposition reste lettre morte.

Il est important que le Gouvernement confirme, par un signal clair, cette politique de l'ouverture de l'école aux parents, en indiquant rapidement quels financements sont prévus pour encadrer ces activités hors du cadre habituel des obligations de service des différents personnels et pour rémunérer les différents intervenants.

Conformément à la demande des chefs d'établissement, il faudrait également apporter une clarification juridique et financière au problème du partage des responsabilités entre les EPLE et les collectivités territoriales pour toutes les activités périscolaires qui se déroulent dans les établissements.

Voilà mes chers collègues, l'essentiel de ce que vous trouverez dans mon rapport. Bien entendu, je vous invite à suivre la commission des affaires culturelles, familiales et sociales et à émettre un vote favorable sur l'adoption des crédits de la mission enseignement scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Hugon, premier orateur inscrit dans la discussion.

M. Jean-Yves Hugon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au risque d’être légèrement hors sujet, j’ai décidé de consacrer ces quelques minutes de temps de parole aux conditions dans lesquelles sont aujourd’hui organisés les examens, plus particulièrement le baccalauréat.

J’appuierai mon analyse et mon propos sur une expérience professionnelle de près de trente ans et sur un rapport d’audit, commandé dans le cadre de la réforme de l’État par le ministère du budget et émanant de l’inspection générale de l’administration, de l’éducation nationale et de l’inspection générale des finances.

Aujourd’hui, la mobilisation de moyens, financiers et surtout humains, est mal connue. Les coûts afférents aux examens sont appréciés de façon partielle et imprécise. Pour 2004, par exemple, selon le SICEC – le système d’information sur les coût des examens et concours – ce poste budgétaire serait évalué à 150 millions d’euros.

Ce constat repose sur quatre réalités.

La première est l’extrême complexité de l’organisation des examens, due à une inflation du nombre d’épreuves proposées dans les différentes filières, mais également à un souci d’équité des candidats devant ces épreuves.

Vient ensuite le cloisonnement entre les prescripteurs et les gestionnaires, c’est-à-dire entre celles et ceux qui conçoivent les épreuves et les sujets, et celles et ceux qui organisent matériellement le bon déroulement de ces épreuves.

Par ailleurs, la lourdeur de l’organisation des examens, plus particulièrement le baccalauréat, a pour conséquence directe une réduction importante du temps d’enseignement, notamment au mois de juin.

Enfin, la symbolique attachée aux diplômes nationaux et à leur valeur est très forte : le baccalauréat est un diplôme presque mythique, qui fait partie de notre patrimoine national et auquel il est toujours difficile de toucher, sous peine d’attiser les passions et de déboucher sur un blocage.

Permettez-moi, monsieur le ministre, mes chers collègues, de revenir brièvement sur chacun de ces constats.

J’ai parlé tout d’abord de la complexité de l’organisation des examens.

Prenons quelques exemples concrets : aujourd’hui, sur la « collante » d’un candidat au bac S, à savoir le relevé de ses notes, on compte jusqu’à seize ou dix-sept épreuves différentes, la moyenne, sur l’ensemble des baccalauréats, étant de douze épreuves. Doit-on obligatoirement continuer à organiser cette inflation du nombre d’épreuves ? Notre pays compte aujourd’hui soixante-cinq bacs professionnels, et soixante-treize épreuves facultatives sont proposées au bac général. Des études très précises ont montré que, avec trois épreuves majeures, on obtiendrait globalement les mêmes résultats.

J’en viens au cloisonnement entre prescripteurs et gestionnaires.

S’il est incontestable que le contenu d’une épreuve, la confection d’un sujet et l’affectation d’un coefficient doivent dépendre étroitement du programme abordé pendant l’année, il conviendrait de demander aux responsables de la pédagogie de mieux intégrer la problématique organisationnelle et le coût réel de mise en place lors de la conception des épreuves et de la fabrication des sujets.

Je ne prendrai qu’un seul exemple : l’oral de français à l’issue de la classe de première. Depuis deux ans, le candidat est évalué sur des objectifs étudiés pendant l’année scolaire. Savez-vous, monsieur le ministre, que chaque professeur examinateur à l’oral reçoit, bien avant le début des épreuves, un dossier atteignant parfois plusieurs dizaines de pages et résumant le travail effectué pendant l’année dans les classes des différents candidats, ce qui occasionne pour les lycées un très lourd et très coûteux travail de reprographie et de distribution.

Il conviendrait donc de réfléchir à la création d’un véritable pilotage de l’organisation des examens afin de supprimer ce cloisonnement entre concepteurs et gestionnaires, fort coûteux en deniers publics.

Je veux insister sur le baccalauréat, que je qualifierai de « chronophage ». On évalue en effet aujourd’hui la charge consacrée à l’élaboration des sujets à 500, voire 550 équivalents temps plein, c’est-à-dire 300 000 à 400 000 heures de travail ! Concrètement, cela signifie que 500 enseignants consacrent dix-huit heures par semaine pendant un an à cette tâche. Une étude plus fine fait apparaître des différences importantes selon les académies. Si l’on s’alignait sur les cinq académies les plus performantes, on pourrait économiser plus de la moitié des équivalents temps plein.

De plus, on constate que, dans les établissements où se déroulent les épreuves, les cours se terminent début juin, voire fin mai, bien que la moitié des enseignants ne soit pas concernée par les corrections ou les interrogations. J’ajoute que les convocations pour les épreuves facultatives interviennent de plus en plus tôt au cours du mois de mai.

Il serait à cet égard légitime de s’interroger sur la nécessité absolue de conserver ces épreuves facultatives, voire les épreuves orales de rattrapage, qui pourraient être remplacées par un examen plus attentif du livret scolaire.

D’où vient cette complexité excessive, de plus en plus lourde, dans l’organisation du baccalauréat ? Sans aucun doute de la valeur hautement symbolique qui lui est attachée. Le bac est un véritable sésame pour les études universitaires et la course au diplôme qui, nous le savons bien, conditionne très fortement la réussite d’une première recherche d’emploi.

Le véritable enjeu est double : maintenir la valeur du baccalauréat et garantir l’équité de tous les candidats devant les épreuves subies. Alors une question se pose et s’impose : la complexité est-elle garante de la qualité et de l’équité ?

En France, nous partons du principe qu’un professeur ne peut corriger ou interroger dans le département où il enseigne, ce qui entraîne d’importants frais de déplacements des membres du jury. En Allemagne, l’organisation est décentralisée à l’extrême et confiée à chaque établissement pour ses propres élèves, évalués et jugés par leurs professeurs sur la base du contrôle en cours de formation. Nous savons bien que cette méthode ne serait pas applicable chez nous et entraînerait les plus vives réactions. Il faut néanmoins noter qu’elle existe déjà en éducation physique, en physique et en SVT – sciences et vie de la terre – où le contrôle en cours de formation intervient pour un quart de la note finale.

La solution est certainement intermédiaire, et elle mérite une approche plus approfondie, en concertation étroite avec les personnes directement concernées : concepteurs, gestionnaires, enseignants et bien entendu, en premier lieu, les élèves examinés. Je suis persuadé que, sur un sujet aussi sensible, sans oublier la gestion des deniers publics, nous pourrions parvenir, par l’écoute et le dialogue, à un véritable consensus.

En attendant, je serai bien entendu aux côtés de mes collègues pour voter ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. La parole est à Mme Martine David.

Mme Martine David. Monsieur le président, je tiens avant tout à remercier mes collègues Yvan Lachaud, François Liberti et Frédéric Reiss de me permettre de prendre la parole avant eux.

Monsieur le ministre, certains de vos collègues ont présenté un projet de budget moins consternant que celui des années précédentes afin de tenter de faire oublier en partie le désengagement de l’État depuis le début de la législature. En ce qui concerne l’enseignement scolaire, cette manœuvre n’a même pas été utilisée et les crédits que vous présentez sont sans rapport avec l’ambition de favoriser l’égalité des chances que vous avez mise en avant.

Alors que l’éducation nationale constituait la priorité de l’action du Gouvernement lors de la précédente législature, vous supprimez des postes pour la cinquième année consécutive. Ainsi, depuis 2002, ce sont 22 000 adultes qui ne sont plus présents dans les établissements scolaires.

Les problèmes rencontrés à chaque rentrée risquent donc de perdurer dangereusement ; mon collègue Yves Durand reviendra plus largement sur ce point. Pour ma part, j’ai examiné plus précisément les problématiques de la santé scolaire, de l’accueil des enfants en situation de handicap, ainsi que les crédits dédiés à l’enseignement professionnel.

J’évoquerai tout d’abord la santé à l’école.

Lors du vote de la loi d’orientation sur l’avenir de l’école, le Gouvernement s’était engagé à ce que chacun des quelque 8 000 établissements du secondaire bénéficie des services d’une infirmière. Une telle décision, qui reconnaissait le rôle indispensable de ces personnels, en termes d’accompagnement et d’écoute des élèves, n’a malheureusement toujours pas été suivie dans les faits.

Plus inquiétant, vous annoncez la création de 300 nouveaux postes d’infirmière dans ce projet de budget, mais il s’agit en fait de 100 équivalents temps plein qui ne permettront évidemment pas de couvrir les besoins, d’autant que les interventions de ces personnels s’effectuent souvent sur plusieurs établissements pour compenser les lourdes insuffisances. Pire encore, aucun poste de médecin scolaire n’est créé !

Il faut comparer les lois de finances pour 1998, 1999 et 2000, qui consacraient la création de 1 050 postes de médecin scolaire, d’infirmière et d’assistante sociale. Vous avez donc interrompu l’effort de rattrapage enclenché sous la précédente législature. Un tel choix, sur un budget d’avenir comme celui de l’éducation nationale, n’est pas acceptable. Il a des conséquences directes pour de nombreux enfants qui, notamment à l’école élémentaire, ont besoin non seulement d’un dépistage précoce, mais aussi d’une surveillance médicale que, parfois, les familles n’ont pas les moyens d’assurer. De même, on sait la nécessité de disposer au sein de chaque collège d’une infirmière à plein temps, pour des raisons sanitaires évidentes, mais aussi pour initier des actions de prévention et accompagner les adolescents, souvent fragiles. En l’état actuel des choses, l’objectif affiché reste utopique et le projet de budget que vous présentez est très éloigné de réalités trop souvent dramatiques.

J’en viens à l’accueil des élèves en situation de handicap.

Censée être l’un des grands chantiers du quinquennat, l’intégration des personnes handicapées continue de poser de sérieux problèmes. Dans de nombreux établissements scolaires, le décalage reste grand entre les annonces et ce qui se passe sur le terrain. Plus gênant est le fait que c’est souvent en redéployant des personnels, jusqu’alors en charge d’autres actions éducatives, que l’assistance aux élèves handicapés est organisée. De fait, sans moyens humains supplémentaires, l’intégration se traduit souvent par une détérioration des conditions de travail des enseignants en charge de ces publics fragilisés.

Dans le programme « Vie de l’élève » l’action « Accompagnement des élèves handicapés » subit même une baisse budgétaire de 3 %. De même, les subventions globalisées aux établissements publics locaux d’enseignement – action 14 – qui se spécialisent parfois dans l’accueil d’enfants en situation de handicap diminuent de 9,2 %, passant de 134,5 millions à 122 millions d’euros dans le projet de budget pour 2007.

Les chiffres viennent donc cruellement démentir les gesticulations médiatiques, qui ne trompent personne et surtout pas les familles qui souhaitent la scolarisation la plus sereine pour leurs enfants. Le plan Handiscol, adopté lors de la précédente législature, avait pourtant ouvert la voie, notamment en mettant en place les auxiliaires de vie scolaire et en réformant l’allocation d’éducation spéciale. Malheureusement, ces moyens ambitieux ont fait long feu et la scolarisation de tous dans des conditions acceptables reste un objectif lointain.

Quant aux nouveaux emplois « vie scolaire », censés accompagner les enfants en situation de handicap, ils posent des problèmes significatifs en termes de qualification et de formation. En effet, l’attention nécessaire à une bonne intégration au sein de la classe ne peut s’improviser, et les inquiétudes des parents et des enseignants sont vives. Une fois de plus, les annonces précipitées se révèlent imprudentes et maladroites, car, face à la réalité et à l’absence de marge de manœuvre, la déception des élèves et des familles concernées est grande et nous ne sommes pas, sur le terrain, en mesure de les rassurer. Je l’ai déjà souligné la semaine dernière en commission. Dans ce domaine, la culpabilité du Gouvernement est grande.

Je veux, enfin, évoquer l’enseignement professionnel.

Il y a quelques mois, le texte très décrié sur l’égalité des chances, en plus de l’inacceptable CPE, avait préconisé la formation d’apprentis juniors. Mes collègues du groupe socialiste et moi-même avions alors dénoncé cette mesure d’affichage inefficace. Décidée après les violences urbaines survenues à l’automne 2005, elle n’apportait aucune solution réelle aux problèmes de scolarisation des élèves les plus fragilisés, et risquait même d’aggraver la situation.

De fait, au lieu d’accorder une attention supplémentaire et de mobiliser les moyens adéquats pour offrir à chaque enfant optant pour une filière professionnelle une chance de se former, votre gouvernement a fait le choix scandaleux de faire sortir un certain nombre d’élèves de l’école de façon anticipée. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Frédéric Reiss. Mais non !

Mme Martine David. Pourtant, le développement de l’apprentissage devrait être effectué en parfaite synergie avec celui du service public de l’enseignement professionnel. Alors que la majorité parlementaire précédente avait engagé des efforts significatifs et des moyens accrus pour une pédagogie innovante et des « lycées des métiers », aptes à assurer formation initiale, formation continue et insertion, vous cassez cette ambition !

De même, la formation des adultes et la validation des acquis de l’expérience, qui ont pourtant prouvé leur efficacité, subissent une importante baisse de crédits de 6,3 % et passent de 189 à 177 millions d’euros dans le budget pour 2007.

L’enseignement professionnel ne pourra pleinement participer à la formation des collégiens et lycéens que s’il en a les moyens. Malheureusement, le lycée professionnel semble complètement ignoré et l’on peut craindre que l’assèchement de ses ressources budgétaires, combiné à terme à la réduction de la taxe d’apprentissage, ne conduise à la disparition de cette filière, voire – le risque est important – à la privatisation de la formation professionnelle.

Monsieur le ministre, il est paradoxal que, dans notre pays, le chômage reste à un niveau élevé et préoccupant, alors qu’il existe, dans de nombreux secteurs d’activité, des postes non pourvus. L’enjeu de l’enseignement professionnel est bien d’offrir un avenir aux jeunes tout en formant des personnels qualifiés. Pour remplir cet objectif, il convient de consentir un effort budgétaire significatif en faveur d’une formation professionnelle initiale de qualité.

Les PLP et tous les intervenants des établissements d'enseignement professionnel sont profondément attachés à la réussite de leurs élèves. Ils cherchent à donner une chance d'avenir à ces jeunes qui ne sont, pour eux, ni des statistiques ni des variables d'ajustement.

Monsieur le ministre, vous devez aux Français la vérité, celle d'avoir fait le choix politique d'une réduction forcenée de l'emploi public au détriment des besoins d'encadrement éducatif et de la qualité de notre système scolaire. Ce choix, je le désapprouve car il est injuste, inefficace et à courte vue. L'éducation comme la santé n'ont pas de prix.

M. Jean-Yves Chamard, rapporteur spécial. Bingo !

Mme Martine David. Je n’ai pas donné de chiffres, monsieur le rapporteur !

M. le président. Veuillez conclure, madame !

Mme Martine David. Monsieur le ministre, vous vous réfugiez derrière des annonces et des formules peu convaincantes. Les enseignants et les acteurs du système éducatif qui, eux, mettent des noms, des visages et des situations sociales sur les statistiques des élèves en difficulté, vous répondent simplement qu'ils souhaitent faire mieux.

M. Yves Durand. Très bien !

Mme Martine David. Ils mériteraient que vous les entendiez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

Ordre du jour des prochaines séances

M. le président. Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007, n° 3341 :

Rapport, n° 3363, de M. Gilles Carrez, rapporteur général, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

Enseignement scolaire (suite) :

Rapport spécial, n° 3363, annexe 16, de M. Jean-Yves Chamard, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan,

Avis, n° 3364, tome IV, de Mme Irène Tharin, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Participation financière de l’État (compte spécial) ; Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics (compte spécial) :

Rapport spécial, n° 3363, annexe 42, de M. Michel Diefenbacher, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan,

Engagements financiers de l’État ; Gestion et contrôle des finances publiques ; Provisions ; Stratégie économique et pilotage des finances publiques ; Remboursements et dégrèvements (programme remboursements et dégrèvements d’impôts d’État) ; Accords monétaires internationaux (compte spécial) :

Rapports spéciaux, n° 3363, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du plan : annexe n° 15 de M. Daniel Garrigue, annexe n° 17 de M. Thierry Carcenac, annexe n° 28 de M. Jean-Jacques Descamps, annexe n° 36 de M. Camille de Rocca Serra.

Direction de l’action du Gouvernement (programme fonction publique) ; Régimes sociaux et de retraite ; Pensions (compte spécial) ; Prêts et avances à des particuliers ou des organismes privés (compte spécial) ; Gestion du patrimoine immobilier de l’État (compte spécial) :

Rapports spéciaux, n° 3363, au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du Plan : annexe n° 13 de M. Georges Tron, annexe n° 17 de M. Tony Dreyfus ;

Avis, n° 3368, tome II, de M. Bernard Derosier, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

Articles non rattachés : articles 38 à 40 ; articles 34 (et état B annexé), 35 (et état C annexé), 36 (et état C annexé), 37 (et état E annexé).

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures quarante-cinq.)

Comptes rendus de commissions Élargies

Commission des finances, de l’économie générale et du plan

commission DES AFFAIRES économiques, de l’environnement et du territoire

Réunion du 8 novembre 2006
(en application de l’article 117 du règlement)

Mission Transports

Budget annexe Contrôle et exploitation aériens

Compte spécial Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route

Sommaire

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.

M. le président de la commission des finances.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial de la commission des finances.

M. le ministre.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial.

M. le ministre.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial.

M. le ministre.

M. le président de la commission des finances.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances.

M. le ministre.

M. Martial Saddier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. le ministre.

M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis.

M. le ministre.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

M. le président de la commission des finances.

M. François Brottes.

M. Maxime Bono.

M. Daniel Paul.

M. le ministre.

M. Michel Bouvard.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

M. le ministre.

M. le président de la commission des finances.

M. le ministre.

M. Philippe Folliot.

Mme Marcelle Ramonet.

Mme Geneviève Gaillard.

M. le ministre.

M. le président de la commission des finances.

M. le ministre.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

(M. Michel Bouvard remplace M. Pierre Méhaignerie à la présidence.)

Mme Chantal Brunel.

M. Yves Deniaud.

M. Jacques Desallangre.

M. le ministre.

M. Gérard Voisin.

Mme Annick Lepetit.

M. Yves Coussain.

M. Joël Beaugendre.

M. Yannick Favennec.

M. Jean Proriol.

M. Thierry Mariani.

M. Richard Cazenave.

M. Maxime Bono.

M. Daniel Paul.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial.

Mme Odile Saugues, rapporteure spéciale.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances.

M. le ministre.

Mme Odile Saugues, rapporteure spéciale.

M. le ministre.

M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Maxime Bono.

M. le président de la commission des affaires économiques.

M. le vice-président de la commission des finances.

M. le ministre.

Présidence de M. Pierre Méhaignerie
et de M. Patrick Ollier

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Nous abordons l’examen en commission élargie des crédits de la mission « Transports », du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et du compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ».

Monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi d’abord de souhaiter la bienvenue au sein de cette commission élargie – que je suis heureux de coprésider avec Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire – aux membres de la délégation de la Jeune Chambre économique française, qui assistent à une journée de travaux parlementaires.

Je profite de l’occasion pour rappeler le principe qui doit régir les commissions élargies, à savoir l’interactivité, ce qui implique des questions rapides et des réponses brèves. Pour que le débat soit, conformément aux souhaits du président de l’Assemblée nationale, de qualité, je demande donc aux rapporteurs de s’en tenir à une courte intervention.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Monsieur le ministre, je me félicite d’autant plus de votre venue que ce jour est, si j’ose dire, privilégié du fait de la grève à la SNCF… Je tiens en effet à rappeler sur ce point que la commission des affaires économiques a engagé depuis 2003 avec le Gouvernement et plus particulièrement avec vous depuis votre arrivée au ministère, une action tendant à privilégier le dialogue social plutôt que la loi, avec la mise en place d’un service minimum garanti. Or, selon les prévisions de trafic qui viennent de nous être fournies, l’accord prévoyant un minimum de trafic de 33 % est largement respecté.

La mise en œuvre, que vous aviez annoncée au mois de juillet, de la charte sur la prévisibilité des transports en période de perturbation, ainsi que la mise en place du comité de suivi, auquel plusieurs membres de notre commission participent, constituent de bonnes nouvelles. Au moment où nous discutons de votre budget, je souhaite que les moyens vous soient donnés pour poursuivre cette politique qui produit des résultats à l’évidence satisfaisants.

M. Daniel Paul. Spectaculaires !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Puis-je rappeler, monsieur Paul, que j’ai refusé de désigner un rapporteur pour la proposition de loi qui tendait à imposer une législation en la matière, afin, justement, de privilégier le dialogue social ? Je suis donc reconnaissant à M. Perben d’avoir œuvré en ce sens et permis d’aboutir à des résultats, je le répète, satisfaisants.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Messieurs les présidents, mesdames et messieurs les députés, puisque M. Patrick Ollier a évoqué la grève à la SNCF, permettez-moi, pour votre information, de faire le point à ce sujet. À l’heure qu’il est, un TER sur deux dans l’agglomération parisienne – soit un chiffre supérieur à celui du minimum garanti de 33 % –, deux TGV sur trois et un train Corail sur trois circulent. Le trafic est donc nettement supérieur à celui constaté lors de la dernière grève nationale de l’automne 2005.

Pour en venir au sujet qui nous réunit aujourd’hui, c’est-à-dire le budget de la mission « Transports », je répondrai à la demande du président Méhaignerie et le présenterai rapidement, afin de laisser plus de temps aux questions et aux réponses.

Entre 2006 et 2007, les crédits du ministère, toutes missions confondues, passent d'environ 17 à 17,4 milliards d’euros, soit une hausse de plus de 2 %.

Pour les seuls transports, c'est-à-dire la mission « Transports » plus le compte d’affectation spéciale « radars » et l'Agence de financement des infrastructures de transport de France – l’AFITF –, et hors budget annexe de l'aviation civile, les crédits progressent de 1 %. Surtout, les crédits d'investissement dans les transports sont particulièrement significatifs, puisque ceux de l'AFITF connaissent un bond de près de 16 %.

L’esprit qui a prévalu à l’élaboration de ce budget a été de le faire participer à la croissance économique et à l’emploi. À cet égard, deux grands secteurs ont connu au cours des années récentes des créations d’emplois, celui que Jean-Louis Borloo appelle les services à la personne et celui du bâtiment et des travaux publics. Sur ce dernier plan, les trois principaux secteurs liés au ministère – les transports, la construction et le tourisme – comptent plus de 3,6 millions d'emplois fin 2005. Ils ont créé 258 000 emplois salariés permanents et non salariés en cinq ans, soit une augmentation d’environ 10 % dans la construction, de 7 % dans le tourisme et de 5 % dans les transports. En particulier, l'activité de la construction augmente, après une hausse de 3,6 % en 2005, à un rythme de 5 % en 2006.

Quant à l'emploi salarié permanent, qui était de 1 350 000 fin 2005, il devrait croître d'environ 50 000 en 2006, tandis que l'emploi intérimaire devrait augmenter de 15 000 équivalents temps plein.

Pour sa part, l'emploi salarié dans les hôtels et restaurants augmentera de près de 2 % en 2006, l'emploi non salarié et intérimaire devant être également très dynamique.

Selon des estimations réalisées par mes services, les dépenses d'investissement de l'État en matière de transports prévues dans le budget pour 2007 devraient induire, dans l'ensemble de l'économie, 7,1 milliards d’euros d'activité, ce qui correspond à 92 000 emplois par an, dont 61 000 emplois directs.

On le voit, une politique dynamique en termes d’infrastructure est également une politique positive en termes de croissance, sans oublier ses effets indirects – les représentants de la Jeune Chambre économique française ici présents le savent bien. En effet, de meilleures infrastructures permettent – indépendamment de l’effet chantier, c’est-à-dire de dépenses qui font marcher l’économie – d’améliorer les communications économiques au sein du pays, ce qui est aussi un facteur de croissance.

Les priorités pour 2007 sont de quatre ordres : lancer de grands projets d'infrastructures, améliorer la sécurité, mettre en place une vraie politique de développement durable et réussir la décentralisation.

Pour ce qui est des grands projets d'infrastructures, l'État poursuit en 2007, grâce à la mobilisation des recettes de privatisation des sociétés d'autoroutes, l'effort en faveur d'une relance des grands chantiers d'infrastructures, l'AFITF étant la clé de voûte du financement des investissements.

Pour établir une petite comparaison, les dépenses de l'AFITF étaient d'environ 900 millions d’euros en 2005 et de 1,9 milliard d’euros en 2006. Il vous est proposé de les faire passer à 2,2 milliards d’euros en 2007, soit une progression de 16 %. Le résultat de ces mesures se fait d’ailleurs d’ores et déjà sentir sur le terrain en termes d’ouvertures de chantiers et de reprises de travaux.

Nous pourrons ainsi accélérer les projets retenus au cours du fameux CIADT de 2003. En 2007, trois lignes à grande vitesse seront simultanément en chantier : la LGV Est, la LGV Rhin-Rhône et la LGV Perpignan-Figueras, qui doit améliorer nos relations avec l’Espagne. Nous préparons aussi l'avenir, avec un programme d'études et de débats publics consacré aux futures LGV : on compte, parmi elles, la LGV Sud-Europe-Atlantique, c’est-à-dire la ligne Paris-Bordeaux-Bayonne-Toulouse, et la deuxième phase de la liaison TGV Est, très importante pour nos amis Alsaciens – sans compter sa dimension internationale. En effet, si elle va permettre de gagner du temps pour relier Strasbourg à Paris, elle va surtout autoriser la connexion avec le réseau à grande vitesse allemand et rendre ainsi crédible la concurrence du train à grande vitesse par rapport à l’aérien pour les liaisons entre Paris et les grandes villes de l’Ouest de l’Allemagne.

M. Alain Marsaud. Qu’en est-il de la ligne Limoges-Poitiers ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Nous continuerons également en 2007 certains grands projets routiers, par exemple la mise à deux fois deux voies de la RN 7, ou encore la poursuite des autoroutes A34 et A75.

En matière portuaire, après les gros efforts fournis en faveur du port du Havre, nous poursuivrons les travaux de deux nouveaux terminaux conteneurs à Marseille-Fos XXL.

Par ailleurs, L'État remplira ses engagements – ce qui était une préoccupation pour nombre de parlementaires – au titre de l'actuelle génération de contrats de plan État-régions. Les crédits prévus en 2007 permettront d'atteindre un taux d'avancement du volet routier des contrats de plan de 92 %. Ceux-ci devraient être achevés au cours de l’année 2008, ce qui constitue, en deux ans, une belle performance.

Les nouveaux contrats de projets 2007-2013 démarreront aussi l’année prochaine. Ils sont en cours de négociation avec la plupart des régions et comprennent généralement un volet transports ambitieux. Or, qui dit volet ambitieux, dit financement lourd, ce qui implique que les parties à la négociation parviennent à s’entendre sur son montant.

Le budget pour 2007 de l'AFITF devrait également permettre d'engager la mise en œuvre des premiers programmes de développement et de modernisation d'itinéraires. Des crédits seront ainsi réservés, dans le budget pour 2007, pour la route Centre-Europe Atlantique, pour la rénovation de l'autoroute Lyon-Saint-Étienne, pour la rocade de Bordeaux, pour le nouveau contournement de Strasbourg ainsi que pour la voie des Mercureaux à Besançon. Au total, l'Agence consacrera plus d’un milliard d’euros aux projets contractualisés avec les collectivités territoriales, tous modes de transports confondus.

En outre, l'AFITF innovera en concluant des partenariats public-privé. Ceux-ci sont en cours d'élaboration aussi bien en matière ferroviaire – en particulier avec le projet GSM-R de réseau de téléphonie ferroviaire – que dans le domaine fluvial, avec le canal Seine-Nord, ou encore en matière de transports collectifs, comme le projet de liaison CDG Express entre Paris et l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle.

La deuxième priorité a trait à la sécurité. À cet égard, je soulignerai plus particulièrement l’action en faveur de la sécurité des infrastructures routières. Dans cet esprit, je propose, avec le directeur général des routes, une hausse de 16 % en 2007, soit plus 63 millions d’euros, des crédits destinés à l'entretien de notre patrimoine routier. Il s’agit là d’une inversion complète de tendance par rapport à l'érosion des années précédentes. Ces crédits permettront, en particulier, d'accélérer le programme de mise en sécurité des tunnels, notamment en Île-de-France où ils constituent, pour les élus comme pour le ministre des transports, un motif d’inquiétude. Les études ont été engagées pour savoir quels travaux étaient indispensables pour mettre ces tunnels aux normes européennes. L’augmentation des crédits s’explique donc aussi par l’ouverture prochaine des chantiers correspondants.

S’agissant de la sécurité des infrastructures ferroviaires, et conformément au plan de renouvellement des voies ferrées que j'ai annoncé en mai dernier, les crédits consacrés à la rénovation des voies augmenteront en 2007. Les ressources des acteurs du système ferroviaire, la SNCF et Réseau ferré de France, seront également mobilisées, et un contrat d'objectifs sera signé avec ce dernier. D'ici à 2010, ce sont 1,870 milliard d’euros supplémentaires qui devraient être mobilisés pour le renouvellement des voies.

Pour ce qui est de la sécurité maritime, un effort d'investissement sera réalisé en 2007 pour la modernisation des équipements de surveillance maritime et l'extension du périmètre opérationnel des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage – les CROSS. De nouvelles stations radio et radars seront installées, les voies radio et le système mondial de détresse seront rénovés. Ces actions sont essentielles pour notre pays qui compte nombre de côtes, mais, surtout, qui est riverain, sur la Manche, du plus grand passage maritime du monde.

En matière aérienne, nous concourrons également à l’effort de sécurité au moyen de recrutements supplémentaires afin d’effectuer le contrôle de sécurité des avions.

Enfin, s’agissant à nouveau de la route, 500 nouveaux radars seront déployés en 2007 pour contrôler la vitesse, mais également pour lutter contre d’autres infractions très préoccupantes, en particulier en agglomération – je veux parler du non-respect des feux rouges ou, dans les tunnels, des espacements entre véhicules.

La troisième priorité porte sur le développement durable. À cet égard, 77 % des crédits finançant des projets retenus par le CIADT au sein de l'AFITF sont destinés aux modes ferroviaire, fluvial et maritime, contre 23 % pour le mode routier. Cette structure de financement est quasiment l’inverse de celle du trafic. L’effort d’investissement tend donc à modifier l’offre de transport pour faire évoluer le trafic.

Je me suis d’ailleurs battu pour que l'année 2007 – nous serons certainement nombreux à nous en réjouir – soit celle de la mise en service de l'autoroute ferroviaire entre Perpignan et le Luxembourg, en dépit des retards intervenus dans la fabrication des wagons. Nous sommes un pays où il faut beaucoup d’opiniâtreté, voire d’entêtement, pour changer les habitudes, et je remercie mes collaborateurs au ministère qui m’ont aidé dans cette démarche. En tout cas, en début d’année 2007 – ou du moins en fin de premier trimestre, du fait d’un problème de livraison des wagons –, il sera possible d’offrir aux transporteurs routiers, sur une longue distance, un système d’autoroute ferroviaire. Celle-ci les intéresse parce qu’il est long, justement, et parce qu’il leur permet de jouer le jeu du transfert modal dans des conditions économiques satisfaisantes.

Nous sommes également parvenus, avec nos amis espagnols, à mettre au point un projet d'autoroute de la mer sur la façade atlantique. Ceux d’entre vous qui sont élus du Sud-Ouest le savent mieux que quiconque, la situation routière dans cette région, en particulier le week-end, est insupportable, et le franchissement des Pyrénées est devenu un cauchemar. Nous devons donc tout faire pour développer autant que faire se peut des solutions alternatives. Nos voisins n’ont pas toujours été très enthousiastes à cet égard. Aujourd’hui, les choses ont évolué et je pense que nous devrions, lors du sommet franco-espagnol qui doit se réunir dans les tout prochains jours, officialiser ce projet d’autoroute de la mer.

Les subventions au transport combiné, versées à partir du budget de mon ministère, seront aussi confortées dans le but de favoriser les grands axes « massifiés ».

Enfin, quatrième priorité, la décentralisation. Nous pouvions, voilà un an, avoir les uns et les autres des motifs d’inquiétude s’agissant des conditions du transfert des routes aux départements. J’étais, pour ma part, bien conscient que les discussions avec les conseils généraux ainsi qu’avec les organisations syndicales représentant les salariés des services routiers de l’équipement étaient difficiles. Je crois pouvoir dire aujourd’hui que nous avons, les uns et les autres, bien travaillé. Nous sommes ainsi parvenus à des accords avec l’essentiel des conseils généraux, même si, de façon marginale, quelques contentieux restent à résoudre. De même, s’il y avait beaucoup d’inquiétudes chez les personnels, leur vision des choses est maintenant beaucoup plus sereine.

Nous devrions donc parachever la décentralisation dans des conditions satisfaisantes, qu’il s’agisse des relations entre l’État et les départements ou du volet social de la démarche. Je rappelle en effet que ce sont 30 000 personnes qui devraient être transférées. Cette opération, me semble-t-il, est en train de réussir.

Tels sont les objectifs que je tenais à vous présenter rapidement.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Pour rendre le débat le plus réactif possible, je vous demanderai, monsieur le ministre, de bien vouloir répondre au fur et à mesure aux questions que vous poseront les cinq rapporteurs.

M’adressant par ailleurs aux membres de la Jeune Chambre économique française, Patrick Ollier et moi-même serions très heureux s’ils pouvaient nous faire connaître par écrit, d’ici à la fin de la séance, leurs réactions sur le déroulement de ce débat.

La parole est à M. Hervé Mariton, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan pour les programmes « Réseau routier national », « Sécurité routière », « Transports terrestres et maritimes », « Passifs financiers ferroviaires », « Sécurité et affaires maritimes », « Soutien et pilotage des politiques de l’équipement », et pour le compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ». Monsieur le ministre, je me réjouis du chemin parcouru depuis un peu plus de quatre ans grâce à une politique des transports et de l’équipement qui a beaucoup gagné en contenu et en sens, tant sur le plans de la compétitivité économique que sur celui de l’amélioration du service, avec toutes ses conséquences pour l’emploi, ou de la dimension environnementale, sachant qu’une politique de l’environnement doit, inversement, être aussi une politique des transports. De même, un grand pas a été accompli en matière de contenu, mais aussi de moyens, avec l’effort considérable qui a été réalisé en matière d’investissement.

Enfin, sur le plan de la méthode, de réels progrès, y compris dans l’ajustement des effectifs du ministère, ont été accomplis en termes d’efficacité, même s’ils restent insuffisants. Nous verrons par la suite, à l’occasion de l’examen d’un amendement, le caractère extrêmement lacunaire de la justification au premier euro que vous nous apportez – ou plus exactement que vous ne nous apportez pas – s’agissant de certaines dépenses.

Si la politique que vous nous proposez a ainsi connu, au fil de ces quatre années, de grands progrès sur le fond, je ne dirai pas la même chose des conditions d’exercice du contrôle parlementaire. Je suis même allé jusqu’à me demander si notre séance avait beaucoup de sens au vu du rapport remis au Parlement sur le service annexe d’amortissement de la dette de la SNCF.

L’an dernier, le parlement a voté l’article 159 de la loi de finances pour 2006, disposant que le Gouvernement remettrait avant le 30 juin 2006 aux commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances, un rapport sur les conditions de gestion et les perspectives d’évolution du service annexe d’amortissement de la dette, en particulier dans la perspective de la mise en œuvre des normes comptables IFRS à la SNCF – il en va, excusez du peu, de 9 milliards d’euros !

Certes, nous avions bien été prévenus que nous recevrions un rapport « léger ». Cependant, ce n'est pas un rapport léger que nous avons reçu hier soir à 22 heures 13, monsieur le ministre, mais un rapport nul ! Ce n'est pas votre faute, et je mesure d’ailleurs combien le sujet, en particulier pour votre administration, qui n’est pas seule concernée en la matière, est difficile. Reste que c'est à vous, en tant que membre du Gouvernement, que nous sommes bien obligés d’adresser cette interpellation : sur un sujet aussi important, qui porte sur un montant de 9 milliards d’euros et qui met en cause l’équilibre même de la SNCF et la conformité de ses comptes pro forma au 30 juin ou peut-être même dès le 31 mars 2007, il n’est pas acceptable que le Parlement ne soit pas mieux informé et, au-delà de toute prudence diplomatique, que la loi ne soit pas respectée.

Je sais que l’exécutif a heureusement un peu plus travaillé que ne le laisse apparaître son rapport, qui vraiment, monsieur le ministre, ne comporte rien de rien. Aussi est-il indispensable, avec toutes les précautions méthodologiques nécessaires et que nous respectons – encore qu’il ne s’agisse pas d’un sujet « secret défense » –, que nous en sachions plus sur la préparation de la mise en conformité des comptes de la SNCF aux normes IRFS. Le bureau de la commission des finances a rencontré encore hier soir la présidente de l’entreprise à ce propos – comme d’ailleurs à celui des retraites, pour lesquels les engagements sont d’un montant du même ordre.

Pour en rester au service annexe d’amortissement de la dette, les informations que l’on peut glaner de-ci de-là laissent à penser que la question, pour être difficile, n'est pas tout à fait sans solution. Puisqu’il en existe, pourquoi, monsieur le ministre, ne nous en fait-on pas part ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. La question du SAAD est complexe, et vous avez d’ailleurs eu la gentillesse de rappeler que le ministère des transports n’était pas seul responsable en la matière.

Si la question se pose maintenant – il n'est peut-être pas inutile de le rappeler –, c’est parce que la SNCF doit passer en 2007 aux normes IRFS et qu’un certain nombre de choses doivent être clarifiées. En tout cas, le sujet a été examiné en particulier par le ministère des finances et la somme en jeu est de l’ordre de celle que vous avez indiquée. La dette isolée au sein du SAAD est une dette de la SNCF, dont l’amortissement et le service sont subventionnés par l’État. À cet égard, la subvention de désendettement allouée à la SNCF sera d’un montant de 627 millions d’euros en 2007.

Les modalités d’évolution du SAAD dans le contexte du passage aux normes IFRS devaient en effet faire l’objet du rapport qui avait été promis au Parlement, et je regrette, au nom du Gouvernement, que la date du 30 juin n’ait pas été respectée. Je puis cependant vous indiquer que l’État est prêt à confirmer à la SNCF son engagement à subventionner l’amortissement et le service de la dette dans le cadre du SAAD, ce qui devrait permettre sa consolidation dans les comptes de la SNCF, sans que les fonds propres de celle-ci soient dégradés.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. Je vous remercie, monsieur le ministre, et vous demanderai cependant de nous préciser si, dans le cadre de la LOLF, cette question peut être réglée sans passer par une disposition législative.

Ma deuxième question portera sur l’AFITF. Si l’on peut se féliciter que les crédits d’investissement pour les infrastructures soient garantis, au moins jusqu’en 2007, il n’en reste pas moins que, là aussi, se pose la question du contrôle parlementaire. En effet, si les crédits nous sont bien présentés dans le document budgétaire, ils ne font pas l’objet d’un vote de notre part. Ils sont en effet votés par le conseil d’administration de l’AFITF au mois de décembre.

En tout état de cause, il nous est extrêmement difficile de bien comprendre le « bleu » de la mission « Transports », sachant que, si l’on nous propose un tableau des grands postes d’emploi des crédits pour l’Agence en 2006 et 2007, les chiffres correspondent à la seule année 2007. Il nous faut donc retrouver, si j’ose dire, les petits respectifs des années 2006 et 2007.

Ma question portera donc à la fois sur la forme et sur le fond.

Pour ce qui est de la forme, quelle vision avez-vous de notre contrôle de l’AFITF ?

S’agissant du fond – encore que les deux aspects de la question soient liés –, l’agence est-elle, selon vous, un acteur de la politique des transports, qui a vocation à avoir sa propre vision des choses – ce qui serait une évolution somme toute assez naturelle de cet organisme, à l’image d’ailleurs de l’être humain –, ou bien un « tiroir » budgétaire parmi d’autres, sachant alors que la plus grande transparence s’impose ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Le fait que le président Ollier – je parle sous son contrôle – siège au conseil d’administration montre qu’il existe une articulation presque institutionnelle entre le Parlement et l’AFITF. Aussi le compte rendu annuel de l’emploi des crédits de l’agence présenté au conseil d’administration pourrait-il être diffusé – je ne pense pas que le président Longuet s’y opposerait – à l’ensemble des parlementaires ou, en tout cas, aux membres des commissions compétentes, afin qu’ils disposent d’éléments de transparence complémentaires.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je souscris pleinement à cette idée.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. Vous n’avez pas répondu, monsieur le ministre, à la question de savoir s’il était nécessaire pour le SAAD d’en passer par la loi.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Il ne semble pas qu’il y ait besoin d’une disposition législative en la matière.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. Ma troisième question porte sur les grands choix d’infrastructures annoncés par les différents gouvernements depuis 2002. La confrontation entre l’annonce politique et la réalisation est en effet toujours intéressante.

Vous avez évoqué, pour le canal Seine-Nord, le recours au partenariat public-privé. Les difficultés d’arbitrage à propos de ce projet ne sont pas un secret, et je comprends que les récentes décisions de lancement des procédures d’utilité publique aient posé beaucoup de problèmes au sein du Gouvernement, mais où en est-on aujourd’hui ? Est-on toujours dans une phase administrative ? L’exécutif a-t-il fait le choix politique de réaliser ce canal ?

Pour dire les choses de manière un peu provocatrice, un grand nombre d’experts du secteur des transports que j’ai rencontrés dans le cadre de l’élaboration de mon rapport, considèrent, au regard des capacités de financement – même en prenant en compte les PPP –, que l’on ne peut probablement faire que l’un ou l’autre des deux grands projets que sont la liaison Lyon-Turin et le canal Seine-Nord. Le Gouvernement a t-il décidé de faire l’un et l’autre ?

S’agissant des PPP, on doit donner acte à l’exécutif d’avoir su mobiliser et stimuler cet outil. Cependant, quels sont, à court terme, les investissements dont vous pouvez dire aujourd’hui qu’ils seront réalisés en PPP ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Pour ce qui est du canal Seine-Nord, nous tenons les délais prévus puisque l’enquête d’utilité publique sera réalisée courant 2007, la DUP l’étant en fin de la même année. Je considère, pour ma part, que la décision politique est prise, mais un projet d’une telle ampleur nécessite – ne soyons pas naïfs – une continuité dans la décision. Celle de départ a été prise par le CIADT de 2003. Il restera donc, après les étapes importantes que constituent l’enquête publique puis la DUP, à mettre en place la programmation, sachant que nous avons déjà déposé des demandes de crédit auprès de la Commission européenne pour cofinancer l’opération. Cependant, nous le savons, le combat sera permanent.

Voilà cinquante ans, pour ne pas dire plus, que certains, au sein de notre système politico-administratif, ne croient pas au fluvial. Le canal Rhin-Rhône, auquel j’étais favorable, a ainsi été abandonné voilà quelques années pour des raisons politiques, certes, mais qui s’expliquaient aussi par un grand scepticisme de certaines forces politico-administratives en la matière. Autant certains types d’investissement sont relativement faciles à faire accepter parce qu’ils sont soutenus par des forces sociales et économiques constituées en véritables lobbies, autant d’autres ont plus de mal à avancer. Il faut être lucide – et il n’est pas interdit d’être à la fois ministre et lucide...

S’agissant des PPP, il faut aussi se battre, et le Parlement doit aider ceux des ministres qui y sont favorables. Je crois à ces projets, pas pour tout, bien entendu – il ne faut pas passer d’un excès à l’autre. En tout cas, ne nous en servons pas comme d’un simple replâtrage des concessions. Les PPP – sortons un peu de nos habitudes ! – peuvent servir à bien d’autres choses.

Des évaluations préalables sont en cours sur des PPP routiers, et des appels à candidature pourraient intervenir d’ici à la fin de l’année. J’ai ainsi évoqué, en matière ferroviaire, le projet de liaison CDG Express et le projet GSM-R, mais la ligne LGV Sud-Ouest devrait également pouvoir bénéficier de ce dispositif. Vous le voyez, nous sommes déjà passés à une application concrète de celui-ci.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. Qu’en est-il au juste pour la LGV Sud-Europe-Atlantique ? Est-ce décidé ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Oui. La décision a été prise de recourir au PPP en la matière.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Existe-t-il, monsieur le ministre, des pays dans le monde qui peuvent mener de front le fluvial, l’autoroutier, le ferroviaire, le maritime et l’aérien ? Je crois qu’il sera inévitable de faire des choix.

La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan pour les transports aériens et la météorologie.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan pour les programmes « Transports aériens » et « Météorologie », et pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Monsieur le ministre, ma première question portera sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », où la productivité, entre 2001 et 2003, a chuté de 10 %. Depuis, une partie de la perte – la moitié ou les deux tiers selon les activités – a été récupérée, sans pour autant que l’on soit revenu au niveau de 2001. Peut-on, dans ces conditions, continuer d’augmenter, même faiblement – puisque vos services nous ont indiqué que vous envisagiez une réévaluation d’un montant légèrement inférieur à l’inflation – les recettes de redevances, que vous allez fixer par décret à la fin de cette année ? Ne faudrait-il pas plutôt bloquer purement et simplement ces redevances et exiger que les efforts de productivité soient poursuivis, voire amplifiés ?

Ma seconde question a trait à la part croissante du produit de la taxe de l’aviation civile imputé sur le budget annexe, ce qui ne correspond pas du tout d’ailleurs à l’esprit de la LOLF. La raison tient, d’une part, au déficit important du service alors que les redevances devraient couvrir les coûts de la continuité territoriale avec les DOM-TOM – vous avez commencé à redresser la barre puisqu’ils sont maintenant à peu près couverts – et, d’autre part, ce qui est plus grave, à la normalisation, entreprise par la direction du budget, en matière de retraite, du taux de cotisation employeurs applicable aux personnels du budget annexe. Ce taux, qui était de 33 % cette année, doit passer à 39,5 % l’année prochaine, pour atteindre dans trois ans le taux normal des fonctionnaires de l’État, qui est actuellement de 50,7 % et qui sera probablement de 53 % ou de 54 % d’ici à 2010.

Doit-on vraiment faire payer, au moyen de la taxe de l’aviation civile, le coût du régime de retraite des fonctionnaires de l’État par les usagers du budget annexe, c’est-à-dire les compagnies aériennes et les passagers ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je ne peux me prononcer sur le blocage des taux de redevance. En revanche, je peux m’engager à inciter les services à fournir un effort de productivité.

Il serait en tout cas imprudent de ma part de m’engager à instaurer une sorte de moratoire sur les taux, d’autant que nous ne savons rien des contraintes à venir, en particulier en matière de sécurité.

Je rappelle par ailleurs que, depuis 2006, nous faisons progressivement couvrir les charges par les redevances. Il est vrai qu’une part de ces redevances reste affectée au budget de l’État. Il convient, comme vous l’avez suggéré, de la résorber de façon progressive. Cependant, s’il ne faut pas relâcher l’effort, il ne faut pas non plus oublier que nous sommes dans une phase de transition avec ce passage d’un système à un autre.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je vous remercie. Je vais maintenant donner la parole aux rapporteurs pour avis, et M. Charles de Courson l’aura de nouveau par la suite, pour poser ses autres questions.

La parole est à M. Martial Saddier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Martial Saddier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire pour la mission « Transports ». Monsieur le ministre, vous avez évoqué l’augmentation des moyens en matière de sécurité routière, en particulier dans les tunnels d’Île-de-France, et je salue cet engagement. Pourriez-vous cependant nous donner des précisions concernant la galerie de sécurité du tunnel du Fréjus, prévue par les deux gouvernements italien et français, et nous confirmer qu’il ne s’agit pas là d’un moyen d’augmenter la capacité de circulation ?

Concernant plus généralement les tunnels, qu’en est-il du projet de décret d’application de l’article 10 de la loi du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports ?

S’agissant par ailleurs du réseau ferré national, un audit a été lancé l’an passé en matière de sécurité. Pouvez-vous nous préciser les mesures du plan que vous avez annoncé le 22 mai dernier concernant les améliorations en la matière ?

Dans le domaine fluvial, les barrages manuels nécessitent un programme de rénovation de grande ampleur. Les besoins de financement sont évalués à près de 500 millions d’euros, et l’on parle de partenariats public-privé – Voies navigables de France conduit une étude à ce sujet. Pouvez-vous nous indiquer si des décisions sont d’ores et déjà prévues en la matière ?

Enfin, concernant la sécurité des usagers, nous avons toutes et tous été marqués par les récents événements survenus dans les transports en commun à Marseille. Pouvez-vous nous préciser les mesures décidées par le Gouvernement lors de la réunion de crise ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire pour le programme « Transports aériens ». Monsieur le ministre, le budget du transport aérien appelle d’abord de ma part quelques réflexions.

Il s’agit d’un budget atone, dont les défauts se situent dans la continuité de ceux des années précédentes. Il est en effet construit sur des prévisions qui sont clairement sous-estimées, au regard de la hausse du trafic constatée au premier semestre de cette année, et qui, en outre, ne concordent pas entre elles. L'hypothèse de croissance retenue par la direction générale de l’aviation civile pour 2007 dans le calcul du taux de la taxe de l’aviation civile est de 3 % seulement alors que l'hypothèse de croissance du trafic aérien est de 4,5 % à 5 % pour l'ensemble du trafic passagers de la France, avec une hausse importante du trafic international.

Ces prévisions ont pour conséquence le maintien de taux à un niveau élevé, qu'il s'agisse de la TAC, pour contribuer au financement du budget annexe, ou du plafond de la taxe d'aéroport, pour financer les mesures de sûreté.

Je déplore par ailleurs le maintien d'inégalités, comme l'exonération de taxe d'aéroport pour l'aviation d'affaires, qui bénéficie pourtant des efforts de sûreté consentis par l'aviation générale.

Concernant l'ouverture de nouvelles lignes, aucun crédit n’est prévu cette année alors qu’il en va de l'aménagement du territoire. Les seules lignes qui sont ouvertes le sont par des compagnies low cost, dont le modèle socio-économique reste fort discutable, sachant qu’elles se désengagent sans vergogne lorsqu'elles n'y trouvent plus leur compte.

De même, le budget est très timide quant à l'augmentation du personnel destiné à exécuter les contrôles de l’Organisation de l’aviation civile internationale et de l’Union européenne. Il est sans commune mesure avec une véritable politique de sécurité à la hauteur des enjeux.

Toujours concernant les problèmes de sécurité, le bureau d’enquêtes et d’analyses voit augmenter ses effectifs de 3 %, ce qui est nettement insuffisant. Dois-je rappeler que la mission parlementaire sur la sécurité du transport aérien avait préconisé, au vu des charges du BEA attachées à sa compétence nationale et internationale, une augmentation immédiate de 20 % de ses moyens en personnel ?

Je terminerai ce bref propos par une remarque relative à Aéroports de Paris. À la suite de l’adoption de la loi du 20 avril 2005 relative aux aéroports, qui a transformé le statut de l’entreprise et ouvert son capital, ADP a donné pour objectif à son personnel une augmentation de la productivité de 15 % par employé d'ici à 2010. Or, dans le même temps, elle va distribuer 50 % de son résultat net sous forme de dividendes à ses actionnaires – je livre cette remarque à la réflexion de mes collègues.

Lors de leur audition, les responsables d’Air France, devenue société privée, se sont d’ailleurs plaints de la situation monopolistique d'ADP, elle-même privatisée, et de son souci de rentabilité dans la négociation du contrat de régulation économique.

Permettez-moi à présent, monsieur le ministre, de vous poser quelques questions.

Premièrement, où en est le projet de décret qui vise à ce qu'un transporteur aérien exerçant son activité à partir d'une base située sur le territoire national ne puisse plus s'exonérer de ses obligations en matière de paiement de cotisations sociales, particulièrement en matière de retraite ? Selon la DGAC, l'application de ce décret entraînerait une augmentation des coûts qui pourrait être absorbée par une hausse du tarif des billets de deux euros, ce qui paraît relativement minime.

Cette question concerne nombre de compagnies low cost à fort développement dont le personnel est basé en France. Il convient vraiment, si l’on veut éviter toute mesure de type directive Bolkestein dans ce domaine, d’assainir le monde du transport aérien.

Deuxièmement, quel rôle jouera l’Agence européenne de la sécurité aérienne dans l'harmonisation des conditions de travail des personnels du transport aérien ?

Troisièmement, la Commission européenne a publié, le 9 décembre 2005, ses lignes directrices sur le financement des aéroports et les aides d'État au démarrage pour les compagnies aériennes au départ d'aéroports régionaux – je pense là à Marseille. Pouvez vous apporter des précisions sur ce régime et sur la circulaire en préparation ?

Quatrièmement, quelle a été la position défendue par la France concernant la licence MPL – multicrew pilot license – qui fait passer le temps de formation des pilotes de 140 à 60 heures réelles de vol ? Ce nivellement par le bas a été proposé par l'OACI et adopté par le Parlement européen en dépit des recommandations des professionnels de l'aérien et du rejet énoncé par la mission parlementaire, que j’ai présidée, dans sa recommandation n° 6.

Cinquièmement, enfin, un accord provisoire est intervenu le 5 octobre 2006 entre la Commission européenne et les États-Unis en matière de transferts de données personnelles par les transporteurs aériens. À cette occasion, les membres des délégations pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale et du Sénat ont souligné que le Parlement français était l'un des rares parlements nationaux à ne pas s'être prononcé par un vote, après débat en séance publique. Il apparaît nécessaire que l'accord définitif, touchant aux libertés publiques, soit soumis à la procédure d'approbation parlementaire. Pouvez-vous, monsieur le ministre, vous engager à soumettre au Parlement cet accord ? Quels sont, par ailleurs, les termes de la négociation ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je vous remercie, ma chère collègue, d’avoir respecté votre temps de parole.

La parole est à M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire pour la sécurité et les affaires maritimes.

M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire pour le programme « Sécurité et affaires maritimes ». Monsieur le ministre, la mer est un vaste sujet, mais je me contenterai de revenir sur quatre points la concernant.

En matière de sécurité maritime, de grands progrès ont indiscutablement été réalisés depuis plusieurs années. À cet égard, si le radar du CROSS Corsen sera installé au mois de novembre, vous nous avez indiqué que ceux des CROSS Jobourg et Gris-Nez le seraient en juillet 2007. Cette annonce ne me satisfait pas, car voilà tout de même de nombreux mois que les crédits ont été votés. Si des problèmes de sous-traitance existent, comme cela semble être le cas, pouvez-nous dire précisément ce qu’il en est et ce qu’il conviendrait de faire pour raccourcir le délai ?

Quant aux tribunaux de grande instance appelés à juger des affaires maritimes, ceux de Brest, du Havre et de Marseille sont aujourd’hui parfaitement opérationnels, et les mesures sévères qui ont été prises – dans le cadre d’une loi que vous connaissez bien – portent leurs fruits. Ne serait-il pas opportun de décharger le tribunal de Paris de ses compétences rémanentes en matière de pollution maritime au profit de ces trois tribunaux ?

Le deuxième point a trait au pavillon français et à la formation des marins. Là aussi des progrès très importants ont été réalisés. Aujourd’hui, quinze nouveaux navires sont immatriculés au registre d’immatriculation français – dont je ne rappellerai pas ici la philosophie – et vingt à vingt-cinq autres le seront d’ici à la fin de l’année. Ces trente-cinq à quarante nouveaux navires représentent 250 emplois de marins.

Ma première question à cet égard portera sur le GIE fiscal. Celui-ci est en débat à Bruxelles et les choses avancent. Cependant, pourriez-vous nous garantir, comme on le fait à Bruxelles régulièrement, qu’il sera voté le 31 décembre, de façon que ce dispositif soit un élément de dynamisme redoublé de la flotte de commerce ?

Ma seconde question sur ce point est également liée à l’emploi. Dans le monde maritime, il n’y a pas de chômage, mais pénurie de marins. Or, avec la nouvelle dynamique créée par le pavillon français et par la mise en place du GIE fiscal, les emplois de marins sont encore appelés à se développer, ce qui pose la question des écoles de la marine marchande. À cet égard, si je suis favorable à la décentralisation, je n’en estime pas moins que le transfert de ces écoles aux régions a été une erreur. La formation de marin doit, selon moi, relever d’un plan stratégique de développement au niveau national, et la régionalisation fait perdre un temps très précieux.

Le troisième point concerne les ports, secteur où le bilan est plus contrasté.

Où en est, d’abord, le dialogue social à Marseille concernant notamment les portiqueurs, sujet ô combien sensible ?

Ma seconde question sur ce point est d’actualité, puisque je crois avoir compris que la grève d’aujourd’hui à la SNCF était – paradoxe des paradoxes – suscitée par les problèmes du fret ferroviaire. Quelle est la politique suivie en la matière par l’entreprise ? La question est d’ordre stratégique puisque, vous l’avez dit, il faut éviter de continuer à faire rouler des camions sur les routes.

Le dernier point a trait à l’autoroute de la mer. Nous ne pouvons à ce sujet qu’être satisfaits de l’accord enfin intervenu entre la France et l’Espagne sur la façade atlantique. Peut-on connaître le calendrier qui a été arrêté ainsi que les contraintes que vous avez imposées à nos voisins espagnols qui, vous l’avez dit, étaient réticents ?

La politique maritime de la France est un secteur dans lequel des richesses exceptionnelles s’offrent à nous. Le transport maritime croît de 10 % par an. Monsieur le ministre, mes chers collègues, quel est le secteur de l’économie nationale qui croît autant ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je vous remercie d’avoir également respecté votre temps de parole.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. En ce qui concerne la régénération des voies ferrées, évoquée par M. Saddier, je rappelle qu’un financement de 1,8 milliard d’euros est prévu sur cinq ans. Conformément au plan annoncé en mai, un effort de 260 millions d’euros a été fait cette année. Les sommes investies seront portées à 992 millions d’euros en 2007, suite à l’audit des experts de Lausanne.

Je viens par ailleurs de signer le décret d’application de l’article 10 de la loi relative à la sécurité et au développement des transports, qui achève de transposer la directive sur la sécurité des tunnels de plus de 500 mètres.

S’agissant du tunnel du Fréjus, dont nous avons souvent eu l’occasion de parler, notamment avec M. Saddier et M. Bouvard, la commission intergouvernementale franco-italienne a défini les caractéristiques techniques d’une galerie de sécurité de 8 mètres, laquelle ne pourrait en aucune façon servir à augmenter les flux de circulation.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. La largeur « roulable » de cette galerie ne serait d’ailleurs que de 6,60 mètres. En tout état de cause, la convention alpine n’autorise la circulation que sur une voie par sens. Il n’est pas question de revenir là-dessus.

Pour la sécurité aérienne, il est prévu d’augmenter les effectifs budgétés en 2007 : ils passeront de 820 à 850. Les contrôleurs, quant à eux, passeront de 29 à la fin 2004 à 37 en 2007, avec une augmentation significative des contrôles réalisés : 1 200 contrôles en 2003, 2 000 prévus en 2007. Il s’agit d’un effort significatif, qui place la France devant tous les autres pays européens pour le nombre de contrôles.

Le projet de décret sur les bases des sociétés low cost est en cours de signature. En ce qui concerne la clarification des droits applicables, la direction générale de l’aviation civile a préparé un projet de décret pour qu’en matière de transport aérien, l’existence d’une base d’exploitation répondant à la définition introduite dans le projet caractérise le fonctionnement de cet établissement. C’est ce qui nous permettra, à Marseille, d’imposer le respect d’un certain nombre de normes sociales propres à la France. Quant à l’Agence européenne de sécurité aérienne, elle n’est pas compétente en matière sociale.

Au sujet de la licence des contrôleurs aériens, nous avons prévu de compenser les temps de formation des personnels de la DGAC.

J’en viens au secteur maritime. Vous avez raison, monsieur Besselat, de souligner les retards pris en matière d’équipements de sécurité : ils sont effectivement imputables au fabricant et à ses sous-traitants. Les difficultés sont du même ordre que celles que j’ai évoquées s’agissant de l’autoroute ferroviaire entre Perpignan et le Luxembourg. Nous allons toutefois nous battre pour accélérer le rythme.

Je m’attache à préserver la spécificité du régime des marins, qui trouve sa justification dans les conditions particulières d’exercice des métiers de la mer. Le RIF fonctionne bien, et il importe de régler maintenant la question du GIE fiscal. Nous discutons avec la Commission pour trouver une solution raisonnable, à même d’éteindre les contentieux passés – sujets d’inquiétude pour les armateurs – et de nous permettre, pour l’avenir, de procéder aux adaptations nécessaires.

En ce qui concerne les écoles de la marine marchande, le décret en Conseil d’État est en cours d’élaboration. J’ai demandé au Conseil supérieur de la marine marchande de réfléchir à la formation et à l’attractivité des métiers. Dans cette affaire, je ne fais qu’appliquer la loi, en tentant de concilier la décentralisation de la gestion des écoles et l’harmonisation de leur enseignement.

M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis. Pardonnez-moi de vous interrompre, monsieur le ministre. Je sais que cela ne se fait pas…

M. Michel Bouvard. Mais si !

M. Jean-Yves Besselat, rapporteur pour avis. Le vrai problème n’est pas de savoir qui va gérer ces écoles. Nous avons un problème d’ampleur nationale, la pénurie de marins. Il faut donc élaborer un plan stratégique de développement des unités de marin, afin de tenir compte des perspectives qu’offre le secteur du transport maritime et des nouvelles dispositions législatives prises par la France.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je suis d’accord. Je parle sous le contrôle du directeur des affaires maritimes, présent à mes côtés, mais il me semble possible de discuter d’un plan de ce type avec les régions concernées, d’autant qu’elles sont très motivées, l’activité maritime constituant généralement une part très importante de leur économie. L’État, de son côté, a pu se montrer insuffisamment attentif sur le sujet. L’essentiel est de développer ce secteur prometteur en termes d’emplois.

S’agissant des ports, et en particulier de la situation sociale à Marseille, les discussions vont s’engager suite à l’approbation, par le conseil d’administration du port, de la première convention d’exploitation de Fos XXL. Ce qui s’est passé au Havre nous incite à l’optimisme, même si les deux agglomérations n’ont pas les mêmes traditions. Sur le plan économique, les enjeux sont en tout cas très importants.

En ce qui concerne le rail, nous devons relever un défi : réussir la politique du fret ferroviaire à la SNCF alors que le marché est désormais ouvert à la concurrence depuis mars dernier – même si, pour l’instant, la part de marché prise par les opérateurs privés reste tout à fait marginale. Il est en tout état de cause impératif que le service de fret ferroviaire proposé par la SNCF soit de meilleure qualité commerciale. La fiabilité du service, en particulier, est déterminante. Aux yeux des clients, le fait que le transport nécessite un jour de plus n’a pas tant d’importance dès lors qu’on le sait à l’avance. Mais ce qui est préjudiciable au transfert modal vers le ferroviaire, c’est le manque de fiabilité. Il est par ailleurs très important de mieux articuler le ferroviaire et le portuaire, afin de doter nos grands ports, Le Havre et Marseille, d’un arrière-plan logistique plus efficace.

Enfin, j’ai déjà évoqué l’autoroute maritime en direction de l’Espagne ; je n’y reviens pas.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je vais maintenant donner la parole aux représentants des groupes politiques, puis à Charles de Courson, dans la mesure où il ne s’est exprimé que deux minutes.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Nous avions convenu d’une règle simple : chacun pouvait, à son tour, poser une question au ministre.

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis. Convenu avec qui ?

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Or je vois qu’un certain nombre de mes collègues tendent à déraper vers une intervention traditionnelle. Respectons les règles, sans quoi nous ne pourrons pas nous en sortir.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Certains de nos collègues souhaitent conserver leur liberté et regrouper toutes leurs questions en une seule intervention. Quant à moi, je ne peux imposer une discipline aux députés qui ne sont pas membres de la commission des finances.

Monsieur Brottes, je vois que vous souhaitez ajouter un mot.

M. François Brottes. J’entends bien les efforts que vous faites, monsieur le président, et je suis conscient que cette commission élargie était souhaitée par les uns et par les autres…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Surtout par les autres ! (Sourires.)

M. François Brottes. Lors de l’examen en commission élargie des crédits de la recherche et de l’enseignement supérieur, l’an dernier, un rapport de synthèse avait été réalisé pour éviter de multiplier le temps d’intervention des rapporteurs – quitte à ce que ces derniers interviennent par la suite de façon prioritaire dans la discussion. Un tel système permet à l’opposition de mieux s’exprimer, ce qui est de notre intérêt si nous voulons une discussion plus animée.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Maxime Bono.

M. Maxime Bono. Je me livrerai pour ma part à une intervention générale sur le cadre budgétaire qui nous est présenté, et qui nous apparaît davantage comme la conséquence de certaines décisions déjà prises – je pense à la décentralisation, ou bien à la cession des sociétés concessionnaires d’autoroutes – que comme l’expression d’une véritable volonté politique.

Certes, les crédits diminuent en apparence, mais si on les ramène à leur nouveau périmètre pour tenir compte du transfert de la gestion des routes au profit – si l’on peut dire – des départements, la tendance est plutôt à la stabilité.

Une somme de 185 millions d’euros est attribuée aux départements pour l’entretien et la mise aux normes de sécurité de 16 180 kilomètres de routes. Quand on sait que 13 % d’entre elles sont en très mauvais état et n’ont pas bénéficié d’un entretien satisfaisant, ces crédits apparaissent très insuffisants. Nous proposerons donc des amendements pour abonder les moyens des départements.

Les crédits du programme « Transports terrestres et maritimes » accusent une baisse de 9 %. Ils doivent pourtant contribuer à l’amélioration de la desserte des territoires et favoriser le rééquilibrage entre les modes de transport. Cet objectif me paraît bien compromis. Prenons l’exemple du rail : ce n’est pas tout à fait un hasard si cette belle entreprise qu’est la SNCF est aujourd’hui en grève ! Les crédits destinés au rail sont loin de répondre aux attentes suscitées par votre discours de mars 2006 sur la régénération du réseau. L’audit de l’école polytechnique de Lausanne avait préconisé une augmentation de 500 millions par an des crédits affectés au réseau pour le maintenir en état en conservant l’ensemble des voies. Je vous rappelle qu’environ 1 500 kilomètres ont été mis en ralentissement ! Et en bien d’autres points, le réseau n’est plus aux normes, compte tenu des vitesses que peuvent atteindre les nouveaux matériels – notamment les nouveaux TER dont se sont dotées les régions. Vous nous annoncez 110 millions d’euros en 2006, et 260 millions en 2007. Première constatation : nous sommes loin des 500 millions nécessaires. Et pendant ce temps, le réseau se dégrade. Je rappelle qu’un accident s’est produit il y a quelques mois, à la suite du bris d’un rail sur une voie en déblai. Si cela s’était produit sur une voie en remblai, les choses auraient été beaucoup plus graves.

En outre, ces 110 millions d’euros ne correspondent qu’à un jeu d’écriture, à un tour de passe-passe budgétaire : vous prenez 70 millions d’euros sur la ligne « Contribution au désendettement » pour subventionner la régénération. Pour le reste, comme vous l’avez pudiquement expliqué, on a fait appel aux ressources de RFF et de la SNCF. La même observation vaut pour les 260 millions d’euros de 2007 : 70 millions correspondent à un simple transfert, et seuls les 46 millions d’euros versés par l’AFITF correspondent à une véritable expression de volonté politique. D’où ma première question, monsieur le ministre : envisagez-vous de consacrer des moyens supplémentaires à la régénération du réseau ?

Nous sommes par ailleurs très inquiets pour l’AFITF. Sa création résultait pourtant, à nos yeux, d’une bonne idée : employer les dividendes des sociétés d’autoroutes pour financer le transfert modal en faveur du rail ou d’autres modes de transport. Alors que l’on attendait 40 milliards d’euros de dividendes, la vente des sociétés d’autoroutes n’a rapporté que 14 milliards, dont seulement 4 ont été affectés à l’AFITF. Or l’agence devait financer les projets du CIADT, dont les trois quarts – et c’est une révolution – concernaient un autre mode de transport que la route. Désormais, elle doit financer les contrats de plan État région, voire la protection du littoral ! Dès lors, la route représente 45 % des crédits de l’agence, les autres modes se partageant les 55 % restants. Au vu de l’ensemble des projets que doit financer l’AFITF d’ici à 2012, il manquera 7 milliards d’euros. Où trouverez-vous les ressources nécessaires ? Nous savons qu’à partir du deuxième semestre de 2008, l’agence va commencer à éprouver des difficultés pour financer les projets. Y aura-t-il des recettes nouvelles ? Si oui, lesquelles ? Je crains que vous n’ayez déjà répondu : la solution résiderait dans les partenariats public-privé. Que l’on ne se méprenne pas : nous ne sommes pas contre cette procédure, mais à un tel niveau de participation, l’expression de la puissance publique risque de s’en trouver amoindrie. Selon nous, le budget de l’État doit intervenir de façon à affirmer une volonté politique. Vous l’avez reconnu vous-même, monsieur le ministre, lors de la conférence de presse organisée pour présenter votre budget.

En ce qui concerne les transports en commun, je regrette votre décision de ne plus financer les plans de déplacement urbains. À l’heure où des bus sont incendiés, ces plans représentent pourtant une occasion d’expliquer ce qu’est le service public des transports, de montrer son intérêt pour les villes et les quartiers, et pour le lien social. Votre budget ne garde plus aucune trace de tout cela. Quant aux transports en commun en site propre, chers à notre collègue Michel Destot, une dotation est destinée à financer les projets en cours, mais on observe, dans le traitement des différentes villes, des disparités importantes : le projet de Saint-Étienne est financé à 67 %, celui de Marseille à 66 %, celui de Bordeaux à 38 %, celui de Strasbourg à 36 %. En revanche, cette part s’élève à 15 % à Montpellier, à 12 % au Mans, à 10 % à Clermont-Ferrand et à 0 % à Nantes !

M. François Brottes. Incroyable !

M. Maxime Bono. De telles disparités sont surprenantes. Les 50 millions d’euros supplémentaires seront-ils réservés à ces projets ou permettront-ils de financer des projets nouveaux ?

Enfin, je n’ai rien trouvé sur le chèque transport dans les crédits de votre ministère. Je n’ose croire, monsieur le ministre, que vous n’ayez pas prévu de faire pour vos propres agents l’effort que vous demandez aux entreprises.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Aujourd’hui, les lieux de travail sont de plus en plus éloignés des lieux d’habitation : comme on peut aisément s’en apercevoir en voyageant sur la ligne Le Havre-Paris, certaines personnes n’hésitent plus à parcourir 200 kilomètres matin et soir. Plus généralement, le nombre de déplacements personnels et professionnels augmente, de même qu’à la faveur de la mondialisation se multiplient les échanges économiques, au plan national comme au plan international – le trafic maritime en témoigne. Le budget des transports d’un pays comme la France doit être en mesure de relever ces défis.

Force est pourtant de constater qu’il est loin de répondre à cette exigence. Comme l’a relevé notre collègue Bono, les crédits de la mission « Transports » diminuent de 5,3 % à périmètre constant. Il est vrai que l’on peut faire dire ce que l’on veut aux chiffres, vous en avez encore fourni la preuve tout à l’heure, monsieur le ministre. Le niveau des dépenses n'est maintenu que grâce aux fonds de concours des collectivités locales sur des projets contractualisés. En réalité, l'effort de l'État décroît. Ainsi 1,4 milliard d'euros proviennent d'une recette ponctuelle, la privatisation des autoroutes, qui traduit un nouveau désengagement de l'État dans le domaine des transports. Quand aux partenariats public privé – cette tarte à la crème –, on sait ce que valent leurs promesses : l’intervention privée est en effet étroitement liée à une bonne rémunération des capitaux investis.

Outre le manque de moyens, vos orientations mêmes sont critiquables.

Première faute, vous confirmez votre choix pro-routier, comme en témoigne la répartition du budget de l'AFITF : 45% au routier, 55 % pour l'ensemble des autres modes. Une telle décision a des conséquences à la fois écologiques, économiques et sociales. Votre engagement en faveur du développement durable trouve vite ses limites, car on sait que le transport routier est responsable de 94 % des émissions de gaz à effet de serre liées au secteur des transports, lui-même le plus émissif. C’est dire si votre action sur ce levier essentiel de la politique énergétique est faible.

Vous confirmez la faiblesse de vos engagements dans le transport combiné. Non seulement aucune aide au démarrage n’est prévue, mais des changements importants tendent à compromettre la politique de soutien en sa faveur : ainsi, la subvention dont bénéfice la technique du transport combiné rail-route n’est plus versée à la SNCF mais prend, depuis 2003, la forme d’une aide directe aux opérateurs, attribuée en fonction du nombre de transbordements. Cela ne poserait pas de problème si ce changement de mode d'attribution ne s’était accompagné d'une réduction des montants, passés de 95 à 24 millions d'euros entre 2001 et 2006, soit une division par quatre, alors même que le périmètre d'intervention était élargi ! On le voit, les effets d'annonce de votre gouvernement nécessiteraient quelques bémols…

La sécurité, qui fait pourtant partie des objectifs affichés par votre gouvernement, pâtira également de l’exonération de cotisations sociales pour les employeurs favorisant le tout-routier. On connaît les pratiques en vigueur dans ce secteur, avec la concurrence « libre et faussée » des compagnies d’Europe de l'Est qui exercent une pression à la baisse sur les conditions de travail des salariés au détriment des exigences de sécurité.

Le rail, mode de transport le plus sûr et le moins polluant, souffre une fois encore d'un manque de soutien clair. Alors que le réseau routier et autoroutier est saturé et engendre de fortes pollutions, le fret ferroviaire européen est en déclin : le transport de marchandises a plus que doublé depuis les années 1970, mais le fret ferroviaire a perdu un quart de ses parts de marché : 40 milliards de tonnes-kilomètre en 2006 contre 55 milliards en 2000. Cette évolution n'est pas acceptable. Le plan fret, validé en mars 2005 par la Commission européenne, misait sur le versement de 1,5 milliard d'euros à l'activité pour assurer son redressement. Assorti de contreparties fixées par Bruxelles, il s'avère aujourd'hui catastrophique.

Dans les conditions économiques actuelles, si nous l’abandonnons aux lois du marché, le secteur du fret ferroviaire est condamné. Or les enjeux liés à l’effet de serre et aux changements climatiques nous imposent de donner la priorité au fret ferroviaire de moyenne et de longue distance. La solution n’est donc pas de favoriser la concurrence entre opérateurs, ni de conserver l’actuelle structuration de la SNCF, prélude à une filialisation du fret ferroviaire, synonyme de nouvelles fermetures de lignes et de nouvelles suppressions d'emplois statutaires, après les 14 000 déjà survenues depuis 2002 sur les lignes et dans les ateliers.

Sans une réorientation de notre politique, nous irons dans le mur. Il faut donc rééquilibrer les transports en faveur du rail et diminuer le volume des transports routiers, premiers responsables des émissions de gaz à effet de serre. À cet égard, le projet d’autoriser le transport routier de 44 tonnes va aggraver la concurrence déloyale dont souffre le ferroviaire, en permettant en réalité de transporter 29 tonnes par camion au lieu de 25 actuellement.

Il faut, d'urgence, une aide forte au réseau ; l'audit de l'an passé avait révélé l'ampleur des efforts à fournir pour assurer des lignes et des ouvrages de qualité sur l'ensemble du territoire.

Enfin, nous demandons que cesse le chantage à l’encontre des cheminots, pris eux aussi dans l'étau de la concurrence entre les salariés et entre les entreprises. La force de ce secteur, c'est d'avoir des salariés bien formés et bénéficiant de conditions de travail raisonnables. Comptez-vous, dans ce domaine essentiel compte tenu de la position géographique de notre pays, vous soumettre en permanence aux pressions du marché, ou y résister ?

Dans le secteur portuaire et maritime, comment ne pas rappeler l'ouverture à la concurrence dans le remorquage au Havre, par le biais d'un agrément donné à une seconde entreprise ? Alors que le marché n'est pas en expansion – la diminution des trafics, déjà patente en 2005, va se poursuivre en 2006 –, la concurrence risque de mettre à mal l'une ou l'autre des entreprises, voire les deux. Je rappelle qu'une étude de 2003 montrait qu'il n'y a pas place pour deux compagnies au Havre, sauf à mettre en cause les équilibres économiques et donc sociaux, avec, à terme, le passage de quatre à trois hommes à bord des remorqueurs, ce qui poserait un problème de sécurité.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Paul, vous avez épuisé votre temps de parole. Veuillez conclure.

M. Daniel Paul. Ce budget consacre un désengagement de l'État, dans un contexte où la crise énergétique et la pollution atmosphérique sont parmi les problèmes les plus préoccupants. Il évacue une fois de plus le débat nécessaire sur les recettes dans le secteur des transports !

Une fois de plus, vous comptez sur les forces du marché, sur les partenariats public-privé, pour organiser ce secteur. Le constat à dresser est pourtant amer. La concurrence interne qui sévit dans tous les secteurs dégrade les conditions de travail des salariés et menace leurs droits sociaux.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Paul, nous avons compris vos arguments. Je vous demande de respecter les règles de notre commission : votre temps de parole était de cinq minutes.

M. Daniel Paul. Les services de l’Assemblée m’ont indiqué que j’en avais dix.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je le regrette. Veuillez conclure.

M. Daniel Paul. Nous demandons, sur toutes ces questions, une réorientation de la politique, tant au niveau national qu’à l’échelle européenne.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je vous remercie.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Les dernières lois de décentralisation ont conduit à un débat sans fin sur l’ampleur des compensations financières à apporter pour tenir compte des transferts de compétence. La somme de 185 millions d’euros correspond, à l’euro près, aux crédits d’entretien réalisés par l’État sur les routes décentralisées. Cette mesure a d’ailleurs été validée par la commission de concertation.

Monsieur Bono, vous avez évoqué le plan de régénération des voies ferrées. Avec les budgets pour 2006 et pour 2007, nous appliquons les orientations que j’avais fixées en mai dernier. En cinq ans les crédits consacrés à la régénération atteindront 1,8 milliard d’euros. Il s’agit d’une vraie rupture positive à moyen terme. Les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, avaient jusqu’à présent tendance à laisser de côté le secteur ferroviaire. Ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui, car un consensus national s’est fait jour sur la nécessité d’une réorientation – et on ne peut que s’en réjouir. Je rappelle qu’en 2007, la contribution globale de l’État aux charges d’infrastructures ferroviaires sera de 992 millions d’euros, ce qui représente un effort significatif.

Qu’en est-il des réalisations concrètes ? En 2006, nous aurons renouvelé l’équivalent de 470 kilomètres de voies, contre 420 kilomètres en 2005. En 2007, nous devrions parvenir à 540 kilomètres. Par ailleurs, les travaux réalisés auront permis en 2006 de lever 340 kilomètres de ralentissements – dont se plaignent beaucoup les opérateurs, régions ou autres – et d’éviter 90 kilomètres de nouveaux ralentissements. Bien entendu, cet effort sera poursuivi l'année prochaine, conformément à l’engagement de lever 80 % des ralentissements d’ici la fin de 2007 – même si l’accident de Saint-Flour pourrait nous conduire à en décider de nouveaux.

S’agissant du financement de l’AFITF, je rappelle que l’effort consenti en 2005, 2006 et 2007 a été considérable. On l’observe d’ailleurs sur le terrain : la participation de l’agence au financement des contrats de plan État-régions a conduit à la reprise de chantiers qui avait dû être arrêtés et à l’engagement de nouveaux chantiers. C’est ce qui nous permettra de réaliser, en 2007, 92 % des volets routiers des contrats de plan. Jamais on n’avait atteint un tel chiffre.

Aujourd’hui l’AFITF bénéficie de revenus pérennes et de recettes exceptionnelles, celles des privatisations des sociétés d’autoroute. Il convient de réfléchir à d’autres sources de financement. L’abondement budgétaire est toujours possible : nous y avons eu recours l’année dernière, et ce sera peut-être à nouveau nécessaire en 2008. Les PPP sont un élément de réponse, mais ils ne régleront pas tout. Après plus d’une année à la tête de ce ministère, je suis plus que jamais convaincu que notre pays n’évitera pas une réflexion de fond sur le financement de ses grandes infrastructures de transport. Si nous voulons consentir un effort durable dans ce domaine – et cela me paraît indispensable –, nous devrons trouver d’autres moyens de financement. Le système actuel est complexe, hybride : certaines autoroutes sont à péage, d’autres non ; nous n’avons pas de système de financement en milieu urbain, ni de paiement par le consommateur, etc. Il manque une logique d’ensemble. Reste que nous devons tenir compte d’une situation héritée de notre histoire. C’est une source d’habitudes, donc un élément de contrainte.

La Suisse a su faire des choix, mais ce pays, par sa dimension et l’homogénéité de sa géographie, est très différent du nôtre, où la Savoie et le Sud-Ouest, par exemple, ne sont pas du tout exposés aux mêmes contraintes.

En ce qui concerne le chèque transport, les crédits correspondants figurent dans l’action « Compensation sociale en faveur de la politique de mobilité » à l’intérieur du programme « Transports terrestres et maritimes ».

M. Maxime Bono. Très bien.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. J’en viens aux transports urbains. Michel Destot le sait bien : j’ai fait tout mon possible, en concertation avec le Groupement des autorités responsables de transports publics et l’Association des maires des grandes villes de France – des institutions politiquement hétérogènes – afin de remettre tout à plat et de veiller à ce que toutes les agglomérations soient traitées de la même façon en matière d’aide au financement des transports en site propre. C’est aujourd’hui le cas, compte tenu des décisions que le Premier ministre a bien voulu prendre à ma demande. Au moment où les contrats de projets arrivent en discussion, la situation me paraît assainie, et l’heure n’est plus aux procès d’intention.

Je vous rappelle, monsieur Paul, que le transport combiné bénéficie d’une aide de 32 millions d’euros. Ce n’est tout de même pas rien !

En ce qui concerne le débat entre ferroviaire et non-ferroviaire, il ne faut pas faire preuve de misérabilisme ! N’oublions pas que le budget de l’AFITF, qui finance en majorité le non-routier, est en réalité intégralement financé par la route, y compris par la privatisation des sociétés d’autoroutes. Quant à l’évolution du trafic, elle a de quoi nous réjouir : une augmentation de 10 % pour les TER, une fréquentation des transports urbains en forte hausse, un trafic voyageurs de la SNCF qui augmente de 5 %, tandis que le trafic routier voyageurs diminue de 1,4 %. Nos efforts ont donc porté leurs fruits.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Sans revenir sur les chiffres, difficiles à comparer compte tenu des modifications de périmètre, je veux insister sur l’importance que le groupe UMP attache à la progression des crédits consacrés à l’investissement, qu’ils proviennent directement du budget ou bien de l’AFITF. C’est la raison pour laquelle nous soutenons ce projet.

Beaucoup a été fait au cours de la législature : réorientation vers la régénération du réseau ferroviaire ; lancement de plusieurs lignes à grande vitesse en même temps, ce qui constitue une première depuis 1982 ; décentralisation du réseau routier ; politique audacieuse en matière de sécurité routière ; acceptation de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire, décidée dans le cadre de l’adoption du « paquet ferroviaire » par les gouvernements précédents ; réforme des transports parisiens, avec le passage du STP au STIF ; développement des autoroutes ferroviaires ; relance de la politique portuaire… Nous n’avons pas à rougir d’un tel bilan.

Cela étant, certaines questions demeurent. Je partage l’analyse de Maxime Bono s’agissant de la capacité de l’AFITF à faire face, au-delà de 2008, aux 17,5 milliards d’euros d’investissements prévus sur la période 2006-2012, à quoi il convient d’ajouter le canal Seine-Nord et le Lyon-Turin, à propos duquel vous n’avez pas répondu.

S’agissant de l’AFITF, nous sommes dans le schéma qui figure à la page 117 du projet annuel de performance, et qui n’apparaît pas simplifié par rapport à celui que nous avions dénoncé dans le cadre de la MEC consacrée au ferroviaire. Nous étions à l’époque dans une logique de triangle ; nous n’avons pas progressé depuis, puisque nous en sommes aujourd’hui à un quadrilatère… Il y aura lieu de réfléchir à des mesures de financement nouvelles.

J’en viens à mes questions. S’agissant de la compensation des transferts de compétences, même si nous avons dû procéder à quelques ajustements en première partie de loi de finances, nous ne sommes sans doute pas loin d’un schéma honnête. Mais que deviennent les parcs de l’équipement ? Il y a un an, suite aux conclusions du rapport Courtial, j’avais posé la même question, et on nous avait promis une décision en début d’année. Or nous n’avons toujours pas d’informations, alors que le sujet est important pour les départements, qui gèrent désormais l’essentiel du réseau.

Par ailleurs, où en sont les négociations sur la demande française de financements dans le cadre des réseaux transeuropéens de transport ? C’est un point important pour plusieurs infrastructures ferroviaires. Vous avez répondu avant l’été s’agissant du financement de Lyon-Turin, mais il serait souhaitable que nous disposions d’un tableau d’ensemble et de réponses précises.

Je ne reviens pas sur ce qui a été dit à propos du SAAD. Compte tenu des règles posées par la LOLF, je ne partage pas l’analyse selon laquelle cette affaire pourrait être traitée sans passer par la voie législative.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. En effet.

M. Michel Bouvard. Il s’agit toutefois d’un débat juridique que nous pouvons avoir par ailleurs.

Quelle mesure le Gouvernement entend-il prendre après l’annulation du décret sur le temps de travail dans le transport routier ?

S’agissant des PPP, où en sont les crédits prévus par la Caisse des dépôts et consignations ?

L’eurovignette constitue une ressource potentielle d’avenir pour l’AFITF. Où en est la négociation européenne sur ce sujet ?

Enfin, s’agissant des transports urbains de voyageurs, quel est le taux de mobilisation des crédits à taux minoré proposés par la Caisse des dépôts ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Les dépenses de sûreté aérienne explosent, passant de 90 millions d’euros en 2000 à environ 600 millions en 2007. Or elles restent financées par la taxe d’aéroport. Faut-il continuer à couvrir à 100 % des dépenses qui vont encore s’alourdir en raison des nouvelles exigences posées par les États-Unis ? Vous étiez d’accord, l’année dernière, pour faire évoluer le système de façon à mieux responsabiliser les compagnies aériennes. La taxe d’aéroport n’a pas, en effet, un caractère incitatif.

Voilà trois ans que je ne cesse de dire que la France n’occupe que des parts de marché extrêmement faible dans le secteur des low cost, qui ne représentent que 17 % des sièges offerts dans notre pays, contre 30 % en moyenne en Europe, 32 % en Allemagne, 45 % en Italie, 49 % en Espagne et 52 % au Royaume-Uni. La frilosité de la politique française en la matière nous coûte très cher en termes de dessertes et de retombées économiques. Envisagez-vous de passer à une attitude défensive à une attitude offensive, au bénéfice de notre pays ?

Enfin, il nous faut trouver dans les deux ans qui viennent plusieurs milliards d’euros pour soutenir EADS. Je fais depuis trois ans des propositions sur le soutien à la recherche, autour de l’idée très simple que l’on demande aux entreprises du secteur, telles que Safran, de rembourser par anticipation un certain nombre d’avances – de façon à ne pas dégrader le solde budgétaire – et que l’on majore les subventions à la recherche, qui apparaissent très faibles. Les chefs d’entreprise, la commission des finances, votre prédécesseur, tout le monde est d’accord, mais on n’avance pas.

M. Michel Bouvard. Après trois ans !

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis. Pourrait-on enfin s’engager dans ce sens ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. S’agissant de la liaison Lyon-Turin, la conférence intergouvernementale poursuit son travail dans les délais prévus. Le groupe économique et financier nous remettra très rapidement ses propositions. L’avant-projet de référence qui ressemble à un avant-projet détaillé devrait être validé par la CIG au cours du mois de décembre prochain. Les ministres français et italien ont confirmé en juillet dernier leur intention d’engager l’opération avant 2010 et l’ont fait savoir à la Commission européenne.

Des difficultés préoccupantes se posent en Italie, dans le Val de Suse : les travaux de la galerie de Venaus ont un an et demi de retard. Je suis un peu préoccupé par les bruits qui nous viennent d’Italie, relatifs à une modification d’itinéraire. Si on envisage d’abandonner l’itinéraire qui avait été convenu par le traité franco-italien, l’opération sera décalée et on ne sera plus dans l’hypothèse où celle-ci devait débuter au cours de la période budgétaire 2007-2013 du budget européen. Ce ne sera plus un sujet d’actualité pour la Commission. Rouvrir le débat sur l’itinéraire serait donc très dangereux.

En France, nous poursuivons le processus : une enquête publique a été lancée en juin dernier et ses résultats sont positifs puisque aucune opposition de fond n’a été exprimée. Le décret de déclaration d’utilité publique est attendu pour fin 2007 après avis du Conseil d’État. S’agissant des accès français au tunnel international, vous aviez fait le choix de l’itinéraire du Bas-Dauphiné. RFF a reçu la commande d’études d’avant-projet sommaire, qui seront réalisées dans les dix-huit mois. J’ai également demandé à RFF de faire des propositions de phasage de l’opération. Côté français, donc, les choses se passent dans de très bonnes conditions.

Le rapport qui a été rendu à propos des parcs de l’équipement a permis de détendre quelque peu l’atmosphère et de sortir d’une approche trop idéologique. Les présidents de conseils généraux me paraissent avoir adopté une attitude pragmatique et ouverte. Dès que le rapport que je dois au Parlement lui aura été remis, c’est-à-dire avant la fin de l’année, nous procéderons à un examen au cas par cas avec les départements, l’idée étant que le texte législatif reflète la situation concrète département par département, avec les différentes hypothèses souhaitées par les uns et par les autres. Le projet de loi sera la transcription de ce qui apparaît souhaitable sur le terrain.

M. Michel Bouvard. Pourra-t-on aboutir d’ici à la fin de la législature ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je ne le pense pas, mais ce sujet fait l’objet d’un consensus politique.

S’agissant de la sûreté, je mesure comme vous, monsieur de Courson, l’évolution des contraintes et donc des coûts. Il faut un système plus incitatif et je suis preneur de toutes les suggestions pour qu’il soit le plus vertueux possible.

S’agissant des compagnies à bas coût, je suis assez d’accord avec vous : la culture ambiante nous a fait passer à côté de chances pour notre économie comme pour nos consommateurs. Il faut que nous soyons plus offensifs dans ce domaine.

Je rappelle que les difficultés d’EADS et d’Airbus ne sont pas liées à la conception de l’A 380, mais à sa mise en œuvre industrielle – des problèmes de câblage électrique. Le groupe va lancer une vaste réorganisation lui permettant de dégager des éléments de productivité. J’ai rencontré les représentants des sous-traitants et j’ai constaté une volonté des différents partenaires d’accompagner ces derniers, qui seront évidemment sollicités dans le cadre du plan du groupe. EADS va devoir prendre également une décision concernant le lancement de l’A 350.

Enfin, se pose la question de l’aide à la réalisation de tel ou tel type d’avion et de l’aide à la recherche. Je n’ai pas oublié votre suggestion sur l’utilisation des avances remboursables. Nous discutons actuellement avec le groupe pour voir comment l’aider à développer son prochain avion et comment l’accompagner dans sa croissance. Quoi qu’il en soit, le dispositif que vous avez rappelé est pertinent sur le plan budgétaire.

M. Michel Bouvard. Vous n’avez pas répondu sur l’eurovignette ni sur les crédits PPP de la Caisse des dépôts.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Vous n’avez pas répondu non plus sur le chèque transport, à propos duquel de nombreux membres de la commission des finances sont très réservés. Il existe déjà le chèque restaurant et le chèque emploi service universel. Quelle contribution financière est prévue par l’État pour compenser la perte de cotisations sociales ? Comment le dispositif sera-t-il étendu aux collectivités locales, aux hôpitaux et à la fonction publique ? Nous sommes un peu dans le brouillard. Le président de la Jeune chambre économique française, qui assiste à nos travaux, nous a également interrogés à ce propos par écrit, car les entreprises se posent beaucoup de questions.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Comme je l’ai répondu à M. Bono, nous avons inscrit 10 millions d’euros pour le chèque transport, compte tenu de l’incertitude que nous avons quant à la montée en puissance du dispositif.

S’agissant du temps de travail dans les transports routiers, je prépare un nouveau décret en Conseil d’État. La consultation des partenaires est en cours et nous devrions aboutir avant la fin de l’année. Je précise qu’il ne saurait être rétroactif.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Le débat sur le chèque transport reste encore à conduire, car de nombreuses interrogations subsistent.

La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. Pour l’UDF, la politique des transports revêt une importance fondamentale au regard de la performance de nos entreprises, de la qualité de vie de nos concitoyens, des enjeux environnementaux forts liés au réchauffement climatique, de l’impact social qu’aura l’augmentation du coût de l’énergie sur le budget et sur les conditions de vie de nos concitoyens. C’est pourquoi nous nous interrogeons sur certains choix – ou sur certains non-choix – de ce budget.

Je ne reviendrai pas sur le problème des retraites à la SNCF, sur les inquiétudes qui ont été exprimées concernant le financement de l’AFITF après 2008, sur l’impact qu’aura le coût des retraites sur les taxes aériennes, ni sur les questions relatives aux transports combinés, au ferroutage, aux autoroutes de la mer, à la sécurité aérienne ou au chèque transport. Je centrerai mon propos sur le lien entre la politique des transports, la qualité des infrastructures et l’aménagement du territoire.

Monsieur le ministre, vous vous êtes félicité que 25 % seulement des investissements soient consacrés à la route et qu’un effort de rattrapage soit effectué en faveur des autres modes de transport. Vous avez aussi reconnu que la situation dans le Sud-Ouest était intenable, en évoquant les retards d’équipements et d’infrastructures routières et autoroutières et la problématique de la traversée des Pyrénées. Je vous donnerai l’exemple d’une agglomération que vous connaissez, celle de Castres-Mazamet, qui compte 100 000 habitants mais ne dispose ni d’autoroute, ni de TGV ni d’aéroport international.

Ma première question porte donc sur les perspectives de désenclavement de cette agglomération par rapport à Toulouse et plus généralement sur la stratégie que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour aider les bassins d’emploi qui demeurent totalement enclavés.

Ce désenclavement se fera-t-il dans le cadre d’un financement public par le biais d’un contrat d’itinéraire ou d’une concession et d’un partenariat public-privé, notamment entre Puylaurens et Toulouse ? En matière de PPP, je sais que vous avez pris une décision à propos de l’A68 et de la RN 88. Pourriez-vous nous en dire davantage ?

Il existe des lignes ferroviaires secondaires, en particulier entre Mazamet et Toulouse, où la vitesse est limitée à 60 kilomètres à l’heure. Il ne s’agit plus de TGV, mais de TPV : trains à petite vitesse ! Quels moyens spécifiques l’État peut-il consacrer à la résolution de ces difficultés, surtout vers les bassins d’emploi qui ne disposent ni d’autoroute ni d’aéroport international ?

Concernant les crédits de l’ancien Fonds d’intervention pour les aéroports et le transport aérien, je m’inquiète en raison de la diminution des interventions pour le financement de certaines lignes. Il faut veiller, au moment des renégociations, à ce qu’elles restent régulières.

L’UDF est par ailleurs très attachée aux questions relatives à l’environnement. Je voudrais connaître votre politique en matière de biocarburants et s’agissant du vélo en ville.

Enfin, monsieur le ministre, comment entendez-vous concilier la politique de sécurité routière avec l’assouplissement annoncé des règles relatives au permis de conduire ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à Mme Marcelle Ramonet.

Mme Marcelle Ramonet. Monsieur le ministre, vous avez répondu à mes interrogations sur la création d’une autoroute de la mer sur la façade atlantique. Votre budget accorde une forte priorité à la promotion de la sécurité dans tous les modes de transport, notamment le transport maritime, et je vous en remercie.

En ce qui concerne la concrétisation du projet de TGV Paris-Quimper et Paris-Brest en trois heures, attendue par tous les Bretons, j’aimerais connaître l’état des lieux ainsi que les moyens budgétaires dégagés pour concourir à la poursuite de cet objectif.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à Mme Geneviève Gaillard.

Mme Geneviève Gaillard. Avant de poser mes deux questions, je tiens à rappeler quelques chiffres : les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 2 % par an depuis 1990 ; environ 300 000 décès anticipés sont dus chaque année à la pollution atmosphère urbaine ; la prévalence des maladies allergiques respiratoires a doublé depuis vingt ans ; 55 % des accidents mortels au travail sont des accidents de la circulation ; selon l’OMS, le coût annuel de la pollution est évalué en France à 67 euros par habitant ; la congestion routière nous coûte chaque année 1% du PIB national.

La loi sur l’air oblige les villes de plus de 100 000 habitants à réaliser et à mettre en œuvre un plan de déplacement urbain, ou PDU. Ces PDU ont permis de prendre conscience de l’importance de favoriser les déplacements durables par des politiques urbaines cohérentes et audacieuses.

Les agglomérations de moins de 10 000 habitants, qui représentent à elles seules plus de 12 millions d’habitants, se sont investies elles aussi, et 98 PDU volontaires ont ainsi été recensés en 2005. Pourtant, vous avez supprimé en 2003 l’aide à la mise en place des PDU. Or on sait désormais que le développement des transports en commun nécessite que la détermination des élus des agglomérations grandes et moyennes soit soutenue afin qu’ils renouvellent effectivement leurs systèmes de transport.

Ce projet de budget pour 2007 semble confirmer l’absence de subventions aux projets de transports collectifs en site propre comme aux PDU. Vous avez bien annoncé une enveloppe supplémentaire de 50 millions d’euros pour les transports en site propre, mais cela ne se fait qu’à projets fermés. Cela signifie que les agglomérations ne disposent d’aucune aide pour la mise en place des nouveaux systèmes – investissements comme études.

On avait pu mobiliser le FNADT dans le cadre des contrats de plan État-régions pour pallier les conséquences de cette suppression de crédits. Mais il semble que les conditions posées aux préfets dans le cadre des négociations sur les contrats de projets pourraient donner lieu à une subvention forfaitaire, uniquement pour les agglomérations de plus de 400 000 habitants. Cela signifie que pour l’État, la mobilité durable n’est plus digne d’intérêt en deçà de 400 000 habitants ! Pouvez-vous confirmer ces informations et nous dire quelle politique des transports en commun vous envisagez de développer, pour inciter et aider les collectivités à mener à bien leur programme de développement des transports durables ?

Enfin, alors que la part du transport de marchandises par route était de 63 % en 1985, elle a atteint 84 % en 2003. Pourtant, on sait aujourd’hui que ce mode de transport est à l’origine d’importants coûts externes supportés par la société et non par les transporteurs. Avez-vous l’intention d’instituer une éco-redevance dont le produit pourrait être affecté aux autres modes de transport et faire ainsi progresser le rééquilibrage modal ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Vous auriez pu éviter les considérations générales !

Mme Martine Gaillard. Non, elles étaient nécessaires.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je dirai à M. Folliot combien il apparaît prioritaire de veiller à l’accessibilité de l’agglomération de Castres-Mazamet.

S’agissant du ferroviaire, j’ai évoqué tout à l’heure les travaux de régénération qui seront financés pour réduire les ralentissements. C’est dans ce cadre qu’on pourra réduire ces zones de ralentissement à 60 kilomètres à l’heure qui sont évidemment préjudiciables à la région.

Dans le domaine routier, pour la RN 126, la mise à deux fois deux voies de la déviation de Puylaurens est en cours, la mise en service est prévue en 2008. Les travaux de la rocade nord-ouest ont été réalisés. Les travaux pour la liaison Soual-Castres devraient débuter l’an prochain, pour une durée de trois ans, avec une section en rase campagne dont la déclaration d’utilité publique devrait intervenir en janvier prochain. Les travaux prévus à Saint-Alby et les autres aménagements prévus sur la RN 112 seront également réalisés.

Vous m’avez interrogé sur la manière de moderniser substantiellement la RN 126 entre Castres et l’A68. En effet, une concession permettrait de réaliser l’opération beaucoup plus vite et d’assurer une liaison satisfaisante entre l’agglomération toulousaine et Castres-Mazamet, d’autant qu’un certain nombre de groupes industriels s’interrogent sur leur présence dans l’agglomération castraise si cet aménagement n’intervient pas rapidement. Les conclusions techniques montrent qu’il est possible de procéder par voie de concession. J’ai demandé au préfet de région de voir s’il était possible d’obtenir l’accord des différentes collectivités sur ce projet. Il semble que le consensus politique soit assez large, compte tenu des réalités économiques. J’ai donc bon espoir. Mais l’accord explicite des collectivités est nécessaire pour fournir des explications à la population, faire la pédagogie nécessaire et engager l’opération.

N’ayez aucune inquiétude pour les lignes d’aménagement du territoire : les crédits figurent au budget 2007, y compris pour les conventions renouvelables. J’ai bien compris l’année dernière, au cours du débat budgétaire, qu’il y avait eu un petit flottement entre l’administration du ministère et le Parlement, qui considère qu’il s’agit d’une priorité. J’ai demandé que l’on en tienne compte lors de la préparation du budget. Cela permettra, en particulier, d’accompagner la liaison Castres-Paris mais aussi celle qui nous est chère à tous deux, entre Castres, Rodez et Lyon.

La mobilisation est forte en Bretagne s’agissant du TGV. Le lancement des travaux est prévu pour 2009. L’enquête publique a eu lieu entre mai et juillet derniers. J’ai bon espoir que les discussions entre l’État et les collectivités territoriales aboutissent sur le financement de la partie de 180 kilomètres entre l’est du Mans et l’est de Rennes. Le lancement de ce projet, d’un montant de 2,2 milliards d’euros, devrait pouvoir intervenir à la date prévue. Ce sera évidemment un atout pour la Bretagne et les Pays-de-la-Loire.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La clé de répartition des financements sera-t-elle la même que pour le TGV Est ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Oui, à ceci près qu’aucun pays étranger n’est concerné.

Madame Gaillard, vous avez évoqué les réseaux de transports en commun en site propre. Le Premier ministre a répondu favorablement au souhait des présidents de région qui souhaitent que les préfets de région disposent de davantage de latitude dans leurs discussions avec les différents interlocuteurs. Je pense que les transports en commun en site propre font partie des sujets concernés.

J’ai par ailleurs souhaité qu’une réflexion soit conduite sur la façon de prendre en compte la dimension environnementale dans le montant des péages autoroutiers. Je disposerai en décembre des premières analyses de ce groupe de travail dirigé par M. Jean-Pierre Beltoise et je pourrai alors faire des suggestions.

Si nous voulons, à infrastructures constantes, améliorer leur rendement global, il nous faut réfléchir à la prise en compte du niveau de pollution du véhicule et à une tarification en fonction des horaires et des encombrements. Il serait absurde d’en rester à un système uniforme quelle que soit l’heure d’utilisation de l’infrastructure alors que certains peuvent choisir leurs horaires. Quand vous prenez le train, vous ne payez pas le même prix selon les horaires. Quand vous empruntez une autoroute, si. Il y a des gens qui n’ont pas le choix, bien sûr, mais il y en a d’autres qui peuvent choisir de circuler aux heures creuses. C’est une des conclusions que j’ai tirées du grand débat public sur la vallée du Rhône, pour laquelle nous aurons de toutes façons des décisions à prendre au regard des difficultés de circulation que l’on y rencontre.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Monsieur le ministre, la grande majorité des 16 180 kilomètres de routes nationales transférées aux départements n’ont bénéficié que de travaux a minima les années passées. Les moyens afférents transférés aux conseils régionaux le sont également a minima, avec 185 millions d’euros, alors que ces axes nécessitent d’importants travaux d’aménagement et d’entretien.

En vertu du principe de décroisement, les départements vont désormais assumer seuls ce volet routier, l’État faisant également seul son affaire de la question des routes nationales. Mais il semble que ce principe de décroisement soit d’ores et déjà mis à mal. En effet, les débuts de discussion sur les futurs contrats d’itinéraires font apparaître une sollicitation des collectivités territoriales en fonds de concours pour, nous dit-on, accélérer les programmes qui risquent, à défaut, de s’étaler fortement dans le temps, en raison du contexte financier plus que tendu qui est celui de l’État. Monsieur le ministre, trouvez-vous normal que le décroisement ne fonctionne que dans un sens ?

Sans revenir sur la nouvelle situation dans laquelle se trouve l’AFITF à la suite de la vente des sociétés d’autoroutes, je veux vous faire part de mon inquiétude pour l’avenir des grandes infrastructures – pas seulement routières, puisque 55 % des moyens de l’AFITF sont consacrés aux autres modes de transport. Pourriez-vous me rassurer et me dire franchement, monsieur le ministre, si les projets de lignes à grande vitesse actuellement soumis au débat public ont une chance réelle de voir le jour ou s’ils relèvent plus de l’effet d’annonce ? Je pense plus particulièrement au projet, actuellement soumis au débat public, de liaison Limoges-Paris via Poitiers, projet essentiel et urgent pour que le centre du pays ne reste pas exclu du réseau à grande vitesse après l’abandon regretté de la liaison Paris-Orléans-Limoges-Toulouse lors du CIADT de décembre 2003. Je m’interroge d’autant plus à ce propos que vous n’avez pas parlé de ce projet, autour duquel les élus de tous bords de la région se sont mobilisés. J’aimerais que notre implication ne reste pas lettre morte.

Pour conclure sur une note un peu plus positive, j’ai pris note avec intérêt de vos propositions sur l’avenir des parcs. : on ne peut que souscrire à la gestion au plus près des réalités de chaque département.

(M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, remplace M. Pierre Méhaignerie à la présidence.)

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La parole est à Mme Chantal Brunel.

Mme Chantal Brunel. Monsieur le ministre, le schéma directeur d’Île-de-France de 1994 a confirmé le rééquilibrage à l’Est de la région Île-de-France en s’appuyant sur la poursuite de l’aménagement de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée. Ce territoire, qui accueille de nombreuses entreprises françaises et étrangères de renommée mondiale, a donc un réel intérêt national et se doit de leur offrir des conditions de circulation adaptées à leur développement. Par ailleurs, Marne-la-Vallée présente un potentiel considérable pour la politique de développement de logements que favorise le Gouvernement. Pour répondre, il est donc impératif de faire des efforts en matière de transport.

Le projet de loi de finances pour 2007 prévoit de prendre en charge le financement des voiries primaires des villes nouvelles. Je viens donc vous demander si l’achèvement de la voirie primaire de Marne-la-Vallée, et en particulier la desserte de la cité Descartes à Champs-sur-Marne, la déviation de Chanteloup-Montévrain, la desserte de la ZAC de la Malnoue à Émerainville, l’avenue de l’Europe à Bussy-saint-Georges et les aménagements de la route départementale 418 à Saint-Thibault-des-Vignes sont bien inscrits dans cette mission de politique publique.

Pourriez-vous, monsieur le ministre, me confirmer les montants prévus et le calendrier envisagé pour ces infrastructures routières ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La parole est à M. Yves Deniaud.

M. Yves Deniaud. Je me réjouis, monsieur le ministre, que vous ayez confirmé que, pour la première fois, les contrats de plan en cours seraient exécutés en totalité. Pouvez-vous nous confirmer que dans ce cadre les deux opérations prévues pour la RN 12, le doublement de la déviation d’Alençon ainsi que les acquisitions foncières et les travaux de rétablissement de Saint-Denis-sur-Sarthon, seront bien exécutées ?

Par ailleurs, on avait annoncé pour la fin de l’année la publication des programmes de modernisation de cet itinéraire. Pouvez-vous nous dire où nous en sommes s’agissant d’un certain nombre d’opérations, en particulier la liaison Dreux-Nonancourt, la déviation de Verneuil-sur-Avre et la jonction avec l’Orne, la déviation de Sainte-Anne et Saint-Maurice-lès-Charancey, ainsi que Douvres-Mortagne, Alençon-Pré-en-Pail et au-delà, les opérations qui doivent être réalisées dans la Mayenne ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je vous remercie d’avoir respecté votre temps de parole.

La parole est à M. Jacques Desallangre.

M. Jacques Desallangre. Monsieur le ministre, vous avez fait des partenariats public-privé une mesure phare de votre politique, avec l’objectif affiché de pallier l’insuffisance des crédits publics en permettant à des fonds privés de s’investir. Mais l’exemple d’un projet sur l’aéroport de Brive suscite mes doutes quant à l’efficacité de ce dispositif. En effet, alors qu’un PPP avait été signé avec le groupe Vinci, ce dernier semble considérer que les dépenses avaient été sous-estimées et que sa rémunération s’en trouvait menacée. Il demande aux collectivités locales de financer le surplus, y compris par un emprunt. La venue de Vinci avait été présentée comme une solution pour que l’opération ne coûte rien aux collectivités publiques. Or, aujourd’hui, l’objectif est de sauvegarder le retour sur investissement de l’opérateur privé.

Monsieur le ministre, confirmez-vous cette situation ? Quelles réflexions vous inspire-t-elle ?

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je ne reviendrai pas sur les observations de Mme Pérol-Dumont, qui reviennent tel un refrain. Je me contenterai d’indiquer que, conformément à la loi, j’ai inscrit à l’euro près dans les crédits de transferts les sommes précédemment dépensées par l’État pour les routes qui ont été transférées.

Je confirme que le décroisement joue dans les deux sens. Certes, l’environnement est totalement nouveau : les régions n’ont plus à discuter de ce sujet avec l’État, alors qu’il était très important au cours des années précédentes ; les départements ont la gestion des routes qui ont été départementalisées et l’État élabore les programmes de développement et de modernisation des itinéraires. J’ai demandé à la direction générale des routes que cette élaboration, qui doit s’étaler sur le premier semestre 2007, se fasse en concertation avec les élus. On ne saurait fixer les PDMI sans en parler aux collectivités territoriales, ne serait-ce que pour des raisons de coordination. Pour autant, l’État n’a pas l’intention de solliciter celles-ci : nous dirons quels seront les programmes, les échéanciers. Si un conseil général ou un conseil général veut participer, cela ne lui sera pas interdit. Mais les PDMI ne seront pas le résultat d’une négociation financière : ils seront établis en fonction des priorités et des suggestions des uns et des autres.

Je confirme également, s’agissant de la LGV Limoges-Poitiers, que le débat public est en cours. Il s’achèvera le 29 décembre. L’étape suivante sera la décision du maître d’ouvrage, RFF, qui définira le cahier des charges des infrastructures, lequel sera confirmé par décision ministérielle. Il conviendra alors de mener les études préalables. Il y a bien de la part de chacun, et de l’État en particulier, la volonté de mener à bien cette opération.

Madame Brunel, les crédits relatifs à la voirie primaire des villes nouvelles relèvent effectivement des engagements pris dans le cadre du contrat de plan 2000-2006 entre l’État et la région Île-de-France. Ont été inscrits à ce titre 38 millions d’euros, financés par l’État et la région. En accord avec le conseil régional, cette enveloppe a été abondée et l’engagement total a été porté à 60,88 millions d’euros fin 2006. Chaque année, la programmation des crédits est arrêtée au mois de juin par un comité État-région sur la base des dossiers présentés par les établissements publics d’aménagement. C’est ainsi qu’en 2006, la programmation a inclus la déviation de Chanteloup-Montévrain pour un montant de 6,2 millions d’euros, ce qui porte le total des engagements pour Marne-la-Vallée, au cours de la période 2000-2006, à 31,23 millions d’euros, dont 15,61 millions pour l’État – soit plus de la moitié de l’enveloppe globale. Au titre de 2007, des financements seront mis en place par l’État dans le cadre des futurs contrats de projets. Nous verrons comment se concrétiseront nos discussions avec la région.

Monsieur Deniaud, je vous confirme le maintien des financements destinés au doublement de la déviation au nord-ouest d’Alençon et de la déviation de Saint-Denis-sur-Sarthon, dans le volet routier du contrat de plan État-région. S’agissant plus généralement de la RN 12, l’élaboration des PDMI se poursuit et la consultation des élus sur les aménagements prioritaires de l’État sur son réseau routier devrait intervenir d’ici à la fin de l’année ou au tout début de 2007. L’objectif est de compléter cet itinéraire à deux fois deux voies en privilégiant l’aménagement de sections en continuité, comme vous l’aviez souhaité ; les opérations doivent en effet être cohérentes pour être efficaces.

Monsieur Desallangre, s’agissant du nouvel aéroport de Brive, Vinci intervient dans le cadre d’un appel d’offres et doit donc respecter un certain nombre d’engagements. Mes services examineront la situation et je vous fournirai éventuellement un complément de réponse.

M. Jacques Desallangre. Merci, monsieur le ministre.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La parole est à M. Gérard Voisin.

M. Gérard Voisin. M. le ministre connaît bien les élus du tiers central de la route Centre-Europe Atlantique, dont je fais partie. Ma première question revêt un caractère quasi rituel : le montant des crédits pour 2007 sera-t-il suffisamment conséquent pour nous rassurer quant à l’achèvement rapide de cette infrastructure importante pour le centre de la France ?

Ma deuxième question concerne la sécurité aérienne liée au transfert des aéroports d’intérêt régional, opéré par la loi d’août 2004. Ce transfert de propriété de l’État vers une collectivité territoriale implique un transfert de fonctionnement et devra intervenir avant le 31 décembre de cette année. De nombreux problèmes risquent de se poser. On ne peut que veiller à ce que les préfets de région, qui signent ces transferts, s’assurent du devenir de ces plates-formes aéronautiques – en termes de pérennité de l’exploitation aérienne et, surtout, de sécurité des personnes et des biens. En ont-ils les moyens ?

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. L’Île-de-France donne un exemple très significatif du désengagement de l’État dans le cadre de la décentralisation. Je ne reviendrai pas sur le rocambolesque amendement de M. Devedjian, qui a retardé pendant de nombreux mois le transfert au Syndicat des transports d’Île-de-France des compétences en matière de transports publics. Je dirai seulement, monsieur le ministre, que les compensations financières de l’État ne sont toujours pas à la hauteur de la situation et que cela empêche les collectivités franciliennes de pouvoir exercer concrètement leurs nouvelles compétences. Un simple exemple : l’État a promis 400 millions d’euros sur dix ans pour la rénovation du matériel roulant de la SNCF et de la RATP. C’est très insuffisant : les départements doivent répondre à une forte demande – 12 millions d’usagers par jour ; le réseau est très vétuste – il a plus de vingt ans.

L’exécution du contrat de plan État-région ne sera pas achevée au 31 décembre prochain, l’État étant encore redevable de 800 millions d’euros. Onze projets d’infrastructures au moins sont bloqués de ce fait. Si l’État ne les aide pas, comment les collectivités territoriales vont-elles pouvoir payer ?

S’agissant du futur contrat de projets pour 2007-2016, le Gouvernement propose une enveloppe de 650 millions d’euros pour les transports collectifs. Aucun projet d’envergure ne pourra donc être lancé, qu’il s’agisse de la modernisation, pourtant nécessaire, des RER B, C et D ou du dédoublement de la ligne 13 du métro. Cette dernière est un exemple significatif de l’abandon de l’État ; elle souffre de lourds dysfonctionnements depuis de nombreuses années et d’une saturation sans précédent. Mais l’État ne prévoit rien.

Monsieur le ministre, je vous ai déjà interrogé le 4 juillet dernier sur votre position s’agissant du dédoublement de la ligne 13, réclamé par de nombreux élus. Je vous interroge à nouveau, même si la lecture de votre projet de budget me laisse augurer de votre réponse.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole est à M. Yves Coussain.

M. Yves Coussain. J’interviens en mon nom et en celui de M. Alain Marsaud.

La RN 122 qui relie Massiac à Figeac – et j’associe donc à cette question M. Jean Launay et M. Alain Marleix – a été maintenue dans le réseau national. Sa modernisation et sa mise à niveau des grandes liaisons d’aménagement du territoire sont urgentes et indispensables pour le bassin d’Aurillac. Lors de la décision de maintien dans le réseau national, il avait été question de mettre à deux fois deux voies la portion de cette route servant de barreau de liaison entre l’A70 à Massiac, et l’A20 à Montfaucon.

Quelles sont les caractéristiques et exigences de ce nouveau réseau national ? Peut-on envisager dans des délais proches une modernisation de la RN 122, notamment pour le contournement d’Aurillac, par exemple dans le cadre du contrat de projets ? Enfin, est-il possible d’étendre la RN 122 de Figeac à Montfaucon ? Il s’agit pour le moment d’une route départementale lotoise.

La question de M. Marsaud concerne le projet LGV Limoges-Poitiers. Le CIADT du 18 décembre 2003 a décidé l’abandon du projet pendulaire sur la ligne ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Au cours de ce CIADT a été annoncée la mise à l’étude d’une ligne à grande vitesse entre Limoges et Poitiers. Cette nouvelle ligne permettrait à la capitale régionale du Limousin d’être à moins de deux heures de Paris, ce qui représente un potentiel considérable en matière de développement pour la région limousine. Le débat public sur ce projet a été lancé en septembre dernier et doit se clore à la mi-décembre. Les collectivités territoriales ont annoncé leur soutien politique, mais aussi sans doute financier, à ce projet.

Le Gouvernement peut-il confirmer ce projet de ligne à grande vitesse entre Limoges et Poitiers et indiquer la date possible de son inscription au schéma national du réseau des trains à grande vitesse ? Peut-il préciser le calendrier de réalisation de cette infrastructure ainsi que les modalités de son financement ? Les collectivités territoriales seront-elles sollicitées, et à quelle hauteur ?

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole est à M. Joël Beaugendre.

M. Joël Beaugendre. Monsieur le ministre, je salue tout d’abord votre décision de prolonger l’exploitation, par la chambre de commerce et d’industrie, des infrastructures aéroportuaires de la Guadeloupe. Elle est de nature à garantir leur modernisation et leur développement dans la lignée des objectifs que vous vous êtes fixés dans le cadre de ce projet de budget.

Par ailleurs, si la mise en œuvre de la loi programme pour l’outre-mer a enrichi de mesures concrètes le dispositif de continuité territoriale, le prix des billets d’avion et le coût du fret n’ont pas connu de baisse sensible. Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter des indications précises sur l’avancée de la mise en œuvre des obligations de service public par les compagnies aériennes ? Où en sont les travaux de la mission interministérielle chargée de faire la transparence sur les pratiques des compagnies aériennes ? Au-delà du dispositif de la dotation de continuité territoriale et du passeport mobilité, il est plus que temps de concrétiser les réductions tarifaires sur la desserte aérienne.

J’appelle votre attention sur le fait que l’obligation de service public récemment validée au niveau européen tendant à réduire le coût du billet d’avion en cas de décès d’un parent proche ne serait pas appliquée. Les originaires de l’outre-mer se heurtent à des refus systématiques de la part des compagnies, en violation des dispositions européennes.

Enfin, je salue le vote, par le Sénat, d’une disposition permettant de financer une aide au passage aérien des personnes ne résidant pas outre-mer en cas d’évènements graves survenant à un membre de leur famille résidant lui-même en outre-mer. Cela correspond à l’une des propositions de mon rapport sur la desserte aérienne, à savoir la création d’un billet social pour évènement familial. Pourriez-vous d’ores et déjà indiquer s’il s’agit d’une mesure concédée par les compagnies aériennes, conformément aux obligations de service public adoptées au niveau européen ? Comment sera-t-elle financée ?

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole est à M. Yannick Favennec.

M. Yannick Favennec. Monsieur le ministre, ma question concerne la RN 12, sujet déjà abordé par mon collègue Yves Deniaud. Je me permettrai d’insister plus particulièrement sur sa traversée du nord de la Mayenne, entre Pré-en-Pail et Ernée.

Alors que la RN 12 a fait l’objet de travaux dans les départements de l’Eure-et-Loir, de l’Eure et de l’Orne, rien n’a été fait dans mon département. Rien n’a été programmé ni réalisé depuis des décennies entre Pré-en-Pail et Ernée. Or l’attractivité et le développement économique du nord de la Mayenne dépendent pourtant de l’avenir qui sera réservé à la RN 12. Nombre d’entreprises conditionnent, en effet, leur maintien, leur développement ou leur installation sur cette partie du territoire mayennais à notre capacité à nous doter d’une infrastructure routière performante, moderne et sécurisée. C’est pourquoi les élus et les acteurs économiques se sont mobilisés l’année dernière pour que cette route d’intérêt national reste dans le giron de l’État ; c’est une bataille que nous avons gagnée. Mais si nous avons gagné cette bataille importante pour notre territoire, nous n’avons pas encore gagné la guerre, qui consiste à ce que l’État sécurise et modernise considérablement cette portion de la RN 12.

Lors de votre entretien du mois de juin, vous m’aviez donné un certain nombre d’orientations positives, que vous souhaitiez voir concrétisées à l’occasion du prochain plan de développement et de modernisation des itinéraires. Malheureusement, je crains que, vue du bureau du préfet de région, à Nantes, la RN 12 ne soit par trop éloignée et ne soit pas retenue comme une priorité par le représentant de l’État dans la région des Pays-de-la-Loire.

Monsieur le ministre, pouvez-vous me confirmer le discours positif tenu en juin, dans lequel vous m’indiquiez qu’il y aurait bien dans le prochain PDMI des crédits fléchés sur la RN 12, entre Pré-en-Pail et Ernée, comprenant non seulement la sécurisation de cette route – avec, entre autres, la réalisation du rond-point de Saint-Georges Buttavent – mais également sa modernisation avec une priorité absolue accordée à la réalisation du contournement d’Ernée ?

J’ajoute que ce dossier est porté par de nombreux élus, aussi bien de la Mayenne que des départements voisins.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol. Monsieur le ministre, vous avez gardé dans le giron des routes nationales la RN 88 et la RN 102, qui intéressent la Haute-Loire. Nous sommes allés vous en parler et vous nous avez donné satisfaction. Je rappelle que ces deux routes sont inscrites au contrat de plan 2000-2006 signé par M. Giscard d’Estaing et le préfet de l’époque. La DUP de la déviation du Puy-en-Velay a été signée par M. Jospin en l’an 2000. Nous avons mis sur cette opération 110 millions d’euros au contrat de plan. Cette déviation sera peut-être achevée, nous dit-on, dans deux ou trois ans : dix ans pour faire une déviation d’une ville moyenne ! Je pourrais tenir un propos équivalent s’agissant de la RN 102 s’agissant de la jonction Brioude-Lempdes, qui représente 10 kilomètres de route en pleine et à laquelle nous avons consacré 75 millions dans le contrat de plan. Il aura fallu quatre ans pour choisir l’itinéraire, un an pour la DUP. Elle devrait être terminée au bout de onze ans ! Monsieur le ministre, serait-il possible d’accélérer les procédures, et surtout les travaux ?

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani. Monsieur le ministre, ma question a pour objet la problématique des transports dans la vallée du Rhône et concerne plus particulièrement les attentes des membres de la fédération « Mieux vivre dans la vallée du Rhône en Vaucluse », qui représente les préoccupations des habitants des communes de l’axe rhodanien entre Bollène et Orange.

L’échangeur autoroutier au nord d’Orange pourrait être réalisé sur le territoire de la commune de Piolenc, où existe déjà une entrée avec péage sur l’autoroute A7, en direction du sud. Il s’agirait de réaliser en priorité la sortie d’autoroute dans le sens Sud-Nord, ce qui permettrait de désengorger Orange et de mieux desservir le Haut-Vaucluse grâce aux échangeurs d’Orange-Sud et d’Orange-Nord.

Cette opération nécessite la réalisation d’une collectrice sur l’autoroute A7, mais n’impose aucune construction d’ouvrage. Il faudrait également prévoir, dans le même temps, la construction de l’entrée d’autoroute vers le nord, très peu coûteuse puisqu’elle ne nécessite aucune construction d’ouvrage ni aucune acquisition foncière. Où en sommes-nous, monsieur le ministre ?

Par ailleurs, l’autoroute A7 est saturée sur la portion Orange-Valence. On nous annonçait un grand débat depuis 2001. Vous avez personnellement assisté le 27 mars dernier à la réunion d’ouverture de ce débat public. Où en sommes-nous ? Plusieurs hypothèses s’offrent à nous : aménager une nouvelle autoroute ou doubler les voies existantes. Je dois vous dire que nous sommes très réservés sur cette dernière solution, qui serait source de nuisances aggravées.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole est à M. Richard Cazenave.

M. Richard Cazenave. Monsieur le ministre, ma question porte sur la liaison ferroviaire entre Grenoble et Lyon. J’ai été surpris, lors d’une récente réunion en préfecture, de constater que ni dans la présentation faite par le préfet de région, ni dans les interventions des représentants des collectivités territoriales, n’ait été évoquée cette liaison à grande vitesse, qui est pourtant nécessaire. Je suis surpris : il faut une heure ou une heure dix pour relier Grenoble et Lyon, contre une heure cinquante ou deux heures pour relier Lyon et Paris !

La question me paraît essentielle pour le développement économique de l’agglomération grenobloise dans les années qui viennent. Je n’ai pas obtenu toutes les réponses à mes questions lors de cette réunion en préfecture de l’Isère. Où en est la réflexion de l’État ?

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole et à M. Maxime Bono.

M. Maxime Bono. Mon collègue Jean Launay m’a chargé de vous interroger, monsieur le ministre, au sujet des investissements de la SNCF en zone rurale, destinés à l’entretien du réseau là même où ses installations sont menacées. Il a été question tout à l’heure de 260 millions d’euros, dont 46 millions versés par l’AFITF, mais la SNCF aurait également la possibilité de réaliser certains travaux en interne, par exemple grâce au dernier chantier de traverses bois, situé à Biars-sur-Cère dans le Lot, contribuant ainsi à satisfaire un objectif local important en termes d’aménagement du territoire. Les moyens de la SNCF peuvent-ils être mobilisés au maximum pour permettre de lever ces investissements ?

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. La ligne Le Havre-Paris souffre des encombrements liés à l’entrée en Île-de-France, lesquels entraînent à certaines heures des ralentissements considérables. Le moindre incident, dans ces conditions, est source de retards extrêmement préjudiciables. Où en êtes-vous dans la recherche d’une solution à ce problème ?

Ma deuxième question portera sur le registre international français. Il convient de rappeler que les armements, ces dernières années, ont obtenu plusieurs avantages non négligeables de la part de l’État : remboursement des cotisations sociales de l’ENIM, exonération de la taxe professionnelle, remboursement des cotisations à la caisse d’allocations familiales des marins, exemption des cotisations ASSEDIC, aides financières relatives à la loi sur les 35 heures, instauration – plus récemment – de la taxe au tonnage. Mais cela ne leur suffit pas, et l’on sait par ailleurs que la Cour de justice des Communautés européennes juge incompatible avec le droit communautaire le privilège de nationalité du capitaine et de son suppléant. L’enjeu est pourtant bien de maintenir et de développer l’emploi des marins et officiers français, tant le sauvetage de la marine et du pavillon français, sans présence de navigants français, serait injustifié et motiverait évidemment une condamnation unanime. Les enjeux sont aussi le respect des normes sociales pour tous les marins embarqués, le lien nécessaire entre les marins et l’armateur, l’application de conventions collectives étendues et d’accords particuliers dans les entreprises. Compte tenu de la menace que fait peser la Cour de justice et du lien nécessaire, d’une part, entre formation et emploi pour pérenniser la filière et, d’autre part, entre emploi et GIE pour accentuer le pourcentage de marins français afin d’atteindre les objectifs de formation et de renouvellement, quelles initiatives précises comptez-vous prendre sur ce dossier ?

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. La parole est à M. Hervé Mariton, rapporteur spécial.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial. À propos du compte d’affectation spéciale recevant le produit des amendes du contrôle et de sanction automatique, je souhaiterais que vous nous précisiez les modalités de la modernisation du fichier du permis de conduire, et en particulier le calendrier de création d’un site Internet permettant aux conducteurs d’accéder à leur décompte de points.

Je me permets aussi, monsieur le ministre, de vous rappeler les termes de la loi de la République. L’article 10 de la loi du 12 juin 2003, que vous aviez porté en qualité de garde des sceaux, ministre de la justice, dispose que le Gouvernement présente chaque année au Gouvernement un rapport sur les conditions d’utilisation du produit des amendes engendrées par les infractions au code de la route. Ce rapport est censé en particulier préciser la répartition de ce produit entre l’État et les collectivités locales ainsi que ses conditions effectives d’affectation à des actions de sécurité routière. Or je crois que nous ne l’avons pas reçu depuis plusieurs années.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La parole est à Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis.

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis. Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, que comptez-vous entreprendre pour que se tienne une conférence parlementaire faisant le point sur la sécurité aérienne ? C’est la 40e préconisation – et elle est très importante – du rapport de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur la sécurité aérienne dans le transport de voyageurs, qui avait été adopté à l’unanimité, je le rappelle. Alors que nombre de mesures concernant la sécurité aérienne émanent de l’Europe – mes questions précédentes l’ont montré –, il est indispensable que vous fassiez le point avec les parlementaires français, force d’impulsion en la matière. Vous devriez vous pencher un peu plus sur ce rapport car la sécurité aérienne n’est pas une mince affaire ; faire montre d’un peu de commisération lorsqu’une catastrophe se produit ne suffit pas.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. Je me permets par ailleurs de vous faire remarquer, monsieur le ministre, que je n’ai pas obtenu de réponse à propos de l’eurovignette ni de la ventilation des demandes françaises de crédits au titre des RTE…

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Monsieur Voisin, la totalité des crédits relatifs à la partie centrale de la route Centre-Europe Atlantique sont en place : les travaux peuvent par conséquent se dérouler sans obstacle d’ordre financier.

J’ai déjà partiellement répondu à la question laissée par M. Marsaud. Le débat public est en cours. Les étapes suivantes seront le verdict du maître d’ouvrage, en l’occurrence RFF, la définition d’un cahier de charges, la décision ministérielle puis le lancement des études préliminaires.

Quoique étant ministre, je reste un homme politique, mais permettez-moi de vous faire remarquer, madame Lepetit, que cette réunion de travail avait été constructive jusqu’à votre intervention : cette déclaration polémique m’a beaucoup surpris, je le dis tout net. Franchement, en ce qui concerne le STIF, l’État a largement fait son devoir.

Mme Annick Lepetit. On peut avoir une opinion différente tout en restant poli.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je suis parfaitement poli et correct. Je remarque simplement que, du point de vue la pertinence au regard de la réalité, votre discours tranche considérablement par rapport à tous les autres discours de la matinée. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Maxime Bono. Le ministre n’a pas à juger de la pertinence de nos questions !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Aucun projet de transports en commun n’a été interrompu du fait d’une insuffisance de financement de la part de l’État. Je le dis tout net et je souhaite que cela figure au compte rendu car c’est un mensonge que vous répandez depuis plusieurs mois, avec un certain nombre d’autres élus de la région parisienne.

Mme Annick Lepetit. Ce n’est absolument pas un mensonge, mais un constat, monsieur le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. C’est inexact, vous le savez très bien.

M. Maxime Bono. Nous pourrions aussi juger de la pertinence de vos réponses !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je porte la responsabilité de mes réponses, monsieur le député.

Mme Annick Lepetit. Et moi celle de mes questions, monsieur le ministre !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est très bien ainsi. Laissez parler M. le ministre, je vous prie.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Quand on sait ce que l’État fait en faveur des transports en commun en Île-de-France, par comparaison avec les autres régions françaises, certaines affirmations sont inadmissibles.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. C’est scandaleux ! La province proteste !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Poursuivez, monsieur le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Le montant des dépenses de 2006 au titre du contrat de plan État-région, avec 254 millions d’euros, est le plus gros jamais atteint dans l’histoire des dernières années. Je n’admets pas d’entendre un tel discours alors même que nous consentons cet effort.

M. Maxime Bono. Il faut apprendre à tout entendre, monsieur le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Dans le contrat de projets en cours de discussion, plus de 2 milliards sont prévus pour le transport, y compris les 400 millions de matériel roulant, et peut-être sera-t-il possible d’élargir encore cette enveloppe ; les discussions sont ouvertes. Dans cette affaire, l’État est animé par la volonté d’aboutir à une conclusion positive, notamment sur le volet transports, dont j’ai la charge. Les faits ne doivent pas être présentés de manière caricaturale : la région comme l’État sont résolus à accomplir des efforts considérables en faveur de transports en commun dans la région Île-de-France ; il n’est pas nécessaire de caricaturer la situation et l’action des différents partenaires. Pour ma part, je n’ai jamais évoqué les difficultés pouvant résulter de décisions prises ou non par la région Île-de-France ; je n’accepte pas que d’aucuns affirment que des travaux ont été stoppés à cause de l’insuffisance du financement de l’État, car c’est faux.

Pour la ligne 13, vous le savez, madame la députée, des problèmes techniques de régulation de la circulation des trains se posent, ne serait-ce que du fait du projet Ouragan. Mais le président de la RATP juge ce projet prioritaire et nous devrons régler les difficultés, sans doute dans le cadre du prochain contrat de projets.

Monsieur Coussain, s’agissant de la nationale 122, nous avons pris le parti d’aménager une route à deux voies, j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire. Il convient néanmoins d’améliorer le niveau de service.

Un avenant au volet routier du contrat de plan État-région a été signé fin 2005. Dans le Cantal, le scénario retenu a effectivement privilégié l’achèvement du tunnel du Lioran ainsi que l’opération d’aménagement entre Aurillac et les Quatre-Chemins, sur la RN 122. Pour faire face à ces priorités, l’État a abondé son engagement de près de 5,9 millions d’euros, par redéploiement de moyens affectés aux autres départements de la région. Cette réaffectation de crédits permettra, vous le savez, d’ouvrir le tunnel du Lioran en juillet prochain, ce qui constituera une petite révolution dans le département. Par ailleurs, il est clair que l’aménagement du carrefour de Comblat, à Vic-sur-Cère, pourra également bénéficier d’un financement au titre de ce contrat afin d’être réalisé en 2007. Au-delà, il importe de faire en sorte que la programmation à venir nous permette de poursuivre l’indispensable aménagement de la RN 122.

La route reliant Figeac à Montfaucon est départementale, et les discussions locales pour modifier son statut n’ont pas abouti. Mais cet axe est de bonne qualité et assure la connexion à l’A20 dans des conditions satisfaisantes.

J’ai omis de rappeler tout à l’heure que l’axe Poitiers-Limoges étant bien inscrit sur la carte du CIADT de décembre 2003.

Monsieur Beaugendre, s’agissant de la continuité territoriale aérienne, nous voulons évidemment mettre en œuvre les observations dégagées par la mission mise en place en liaison avec mes collègues M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, et M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Cette mission ayant identifié comme source principale d’insatisfaction les prix en période de pointe, le Gouvernement envisage un assouplissement des obligations de service public afin de favoriser une augmentation de l’offre sur ces créneaux.

S’agissant de la réduction du coût du billet d’avion en cas de décès d’un parent proche, les obligations de service public ont été révisées en juin 2005 pour assurer aux passagers concernés un accès prioritaire au premier vol en partance et une application des conditions tarifaires les plus avantageuses. En outre, dans le cadre de la continuité territoriale, vous n’ignorez pas que les régions qui le souhaitent peuvent concourir à l’apport d’aides spécifiques pour leurs résidents traversant une telle épreuve familiale. Enfin, le projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer, qui a été adopté en première lecture par le Sénat et transmis à l’Assemblée nationale début novembre, complète ce dispositif en prévoyant que les collectivités d’outre-mer puissent à l’avenir utiliser la dotation de continuité territoriale pour financer des aides à des personnes résidant en métropole en cas d’événement grave survenant outre-mer à un membre de leur famille résidant là-bas.

Monsieur Favennec, je vous confirme ce que je vous ai dit lors d’une réunion de travail : l’objectif est de compléter l’itinéraire à deux fois deux voies de la RN 12 en privilégiant l’aménagement de sections continues plutôt qu’un saupoudrage de sections isolées, comme c’était le cas jusqu’à présent. Dans les discussions en cours, il faudra veiller à l’application de ce principe.

Monsieur Proriol, la déviation du Puy-en-Velay, en cours de réalisation, est une opération assez considérable : son coût total dépasse 160 millions d’euros, dont 93 millions inscrits à l’actuel contrat de plan. Ce dispositif devrait être complété par l’achèvement à l’horizon 2007 de la liaison entre la RN 88 et la départementale 103, dont les travaux sont financés. Sur les autres sections, les études de détail sont abouties. Nous devrons ensuite intégrer les sections prioritaires dans le cadre du PDMI, qui prendra le relais en 2008-2009.

M. Jean Proriol. Et je tiens beaucoup à la liaison Lyon-Toulouse, monsieur le ministre !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je le sais.

M. Jean Proriol. Vous ne m’avez pas répondu à propos de la RN 102.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Les opérations prévues au contrat de plan État-région concernant cet axe seront réalisées.

M. Daniel Paul. M. Proriol ne semble pas d’accord…

M. Jean Proriol. Un kilomètre et demi sur dix !

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Les contrats de plan État-régions seront achevés juridiquement fin 2006. Du point de vue technique, ils nécessiteront encore des travaux en 2007, et pour certains, à titre exceptionnel, en 2008. Je répète cependant une fois encore que les engagements de l’État, en matière routière, seront tenus à l’euro près. Chaque opération sera réalisée, sauf si l’État et la région décident conjointement, comme il est déjà arrivé, d’y renoncer ou de transférer les moyens sur une autre. Par contre, en l’absence de modification du plan, elles verront toutes le jour.

Les contrats de plan s’achevant juridiquement fin 2006 et pratiquement en 2008, il n’en demeure pas moins qu’il est nécessaire de préparer d’autres opérations, en particulier dans le cadre des PDMI. Nous en reparlerons.

Monsieur Mariani, je vous assure que nous travaillons en liaison avec Autoroutes du sud de la France pour chiffrer et préciser les conditions de modernisation technique de l’échangeur et de la bretelle supplémentaire de Piolenc. Nous regardons ce que pourrait être la participation d’ASF à une telle opération, qui apporterait une réponse très significative aux difficultés que connaît actuellement l’agglomération d’Orange.

Monsieur Cazenave, dans le cadre des futurs phasages de l’aménagement des accès au tunnel international, il faudra bien entendu tenir le plus grand compte de l’amélioration des liaisons ferroviaires entre les villes concernées de Rhône-Alpes, en particulier entre Lyon et Grenoble.

Monsieur Mariani, avant que vous partiez, je vous indique que nous examinons actuellement les conclusions du rapport public concernant la vallée du Rhône et l’arc languedocien. Ces conclusions me conduiront à prendre des décisions pour ce qui concerne le ministère de l’équipement.

M. Thierry Mariani. À quelle date ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. D’ici à la fin de l’année 2006, c’est-à-dire dans le délai légal qui m’est imparti.

Monsieur Bono, le plan de rénovation de la SNCF permettra d’apporter les réponses et de programmer les travaux attendus par votre collègue.

Monsieur Paul, l’ensemble du dispositif d’aides et d’exonérations prévues a été notifié à la Commission européenne, qui a effectivement lié l’aboutissement du dossier à celui de la nationalité du capitaine.

M. Daniel Paul. Et de son suppléant.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Absolument. Nous avons répondu à la Commission que nous poursuivions les négociations interministérielles à ce sujet. Le dossier est en effet un peu compliqué du point de vue juridique. J’ai donc saisi le Conseil d’État pour recueillir son avis sur la compatibilité des normes européennes avec notre ordre juridique interne, compte tenu des responsabilités spéciales que celui-ci semble conférer aux capitaines de navire. Le Conseil d’État devrait nous aider à sortir de cette difficulté.

L’entrée en Île-de-France, sur l’axe Paris-Le Havre, est effectivement délicate. Une opération inscrite au contrat de plan devrait améliorer la régularité des trajets : la réalisation d’équipements de signalisation et de travaux dans le cadre de la liaison rapide Normandie-Val-de-Seine.

Monsieur le rapporteur spécial Mariton, le site Internet permettant à chacun d’accéder à son compte de points sera créé le 1er juillet 2007. La refonte du fichier national, conduite par le ministère de l’intérieur, sera réalisée grâce en particulier au produit des amendes. Quant au rapport sur l’utilisation de celui-ci, il sera établi en lien avec le ministère des finances. Je crois qu’un rapport a été publié en 2003 mais aucun depuis, ce qui est anormal ; il faudrait le faire chaque année.

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis. Vous ne m’avez pas répondu !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Quelle était votre question, ma chère collègue ? Je vous remercie de la formuler rapidement car il est déjà midi cinquante.

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis. Je n’ai pas l’intention d’ennuyer qui que ce soit mais j’avais posé une question précise : que comptez-vous entreprendre pour que se tienne une conférence parlementaire annuelle faisant le point sur la sécurité aérienne ? C’est ce que préconisait le rapport de la mission de l’Assemblée, dont les conclusions ont été adoptées à l’unanimité.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je ne suis absolument pas hostile à cette idée ; je ne vois aucun inconvénient à ce que nous en discutions avec les commissions compétentes. Cependant, soyons précis dans la mise en œuvre de la recommandation et dans la définition du contenu de la conférence parlementaire pour éviter de créer une structure qui aurait du mal à trouver ses points d’application. Pardonnez-moi de ne pas vous avoir répondu.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Compte tenu de la disponibilité du ministre, nous pourrions effectivement mettre en œuvre ensemble cette conférence parlementaire.

Mme Odile Saugues, rapporteure pour avis. Je vous remercie pour cette précision, monsieur le président.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. La parole est à M. Maxime Bono.

M. Maxime Bono. Je voudrais simplement revenir sur le ton employé par M. le ministre dans sa réponse à la question posée par Mme Lepetit. Puisqu’il a demandé que sa remarque figure au compte rendu…

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. En commission élargie, il n’y a pas de rappels au règlement.

M. Maxime Bono. J’ai demandé la parole, elle m’a été accordée et je m’exprime.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Posez une question mais n’intervenez pas sur des problèmes de forme. Je pourrais moi aussi faire un rappel au règlement à propos du ton employé par Mme Lepetit. À question polémique, réponse polémique.

M. Maxime Bono. Mme Lepetit a questionné M. le ministre. Celui-ci peut certes contester les chiffres…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Il n’a pas manqué de le faire.

M. Maxime Bono. …mais il est tout à fait déplacé qu’il se permette de juger de la pertinence de son intervention.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Votre observation figurera au compte rendu.

M. Maxime Bono. Très bien.

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances. Monsieur le ministre, la commission des finances va devoir examiner dans un instant un amendement concernant le décret annulé. Vous avez indiqué tout à l’heure qu’un nouveau décret serait pris, mais qu’il ne serait pas rétroactif. De quelle manière le Gouvernement entend-il répondre au problème ? Envisage-t-il d’accepter des amendements d’origine parlementaire permettant la rétroactivité ? Si oui, dans quel texte ? Une réponse éclairerait nos futurs débats.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Souhaitez-vous répondre, monsieur le ministre ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Un amendement parlementaire doit être déposé au Sénat – je ne crois pas que ce soit déjà fait, mais c’est imminent – pour régler ce problème. J’avais fait savoir que j’étais tout à fait d’accord…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. On me fait signe que l’amendement est déposé.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. C’est une affaire d’heures. L’affaire devrait pouvoir se régler de cette double manière.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous vous remercions, après ces trois heures et demie de débats, pour la précision de vos réponses aux très nombreuses questions, quel que fût l’esprit dans lequel on vous les a posées.

(La séance de la commission élargie est levée à douze heures cinquante-cinq.)

Commission des finances, de l’économie générale et du plan

commission des affaires culturelles, familiales et sociales, commission des affaires étrangères

Réunion commune du jeudi 2 novembre 2006

(en application de l’article 117 du règlement)

Sommaire

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication.

M. Hervé de Charette, vice-président de la commission des affaires étrangères.

M. Dominique Richard, secrétaire de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. le ministre

Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

M. le ministre.

MM. Didier Mathus, Patrick Braouezec, Gilles Artigues, Jacques Myard, Henri Nayrou.

M. le ministre.

M. le président de la commission des finances.

Présidence de M. Pierre Méhaignerie

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Monsieur le ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, entre le mercredi de la Toussaint et leur travail dans leur circonscription, certains de nos collègues ne sont pas revenus pour cette réunion en commission élargie. Je tiens donc à saluer particulièrement ceux qui sont là. Quant à vous, monsieur le ministre, votre présence est normale, puisque vous n’avez pas de circonscription. (Sourires.)

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Mais si !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Pas directement, du moins. (Sourires.)

Nous allons aborder l’examen en commission élargie des crédits de la mission « Médias » et du compte spécial Avances à l’audiovisuel public.

Je suis heureux de coprésider cette réunion avec Hervé de Charette et Dominique Richard. Je vais donner la parole d’abord à M. le ministre, puis à Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial, à Chantal Bourragué, rapporteure pour avis et à François Rochebloine, rapporteur pour avis.

Je tiens à redire que la commission élargie nécessite souplesse et dynamisme dans les débats. Je souhaite que chacun s’astreigne, pour le succès de cette formule, à des interventions courtes et revêtant plutôt la forme de questions, de manière à éviter de reproduire ici la succession de monologues à laquelle nous assistons trop souvent lors des discussions générales dans l’hémicycle. C’est ainsi que cette formule trouvera tout son intérêt : si en effet elle fonctionne parfois remarquablement, nous observons qu’elle reproduit parfois aussi les travers de la séance publique.

Une fois le Gouvernement parti, nous en viendrons aux amendements, en commençant, si elle en est d’accord, par la commission des affaires culturelles.

La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Messieurs les présidents, monsieur le rapporteur spécial, madame la rapporteure pour avis, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames et messieurs les députés, je suis très heureux de vous présenter aujourd’hui le troisième projet de budget que je soumets à vos suffrages, et le dernier de cette législature.

Je suis heureux aussi de voir cette mission examinée dans le cadre d’une commission élargie, formule qui laisse encore plus de temps pour un débat approfondi entre le Gouvernement et la représentation nationale. Dans le palmarès que ne manquera pas d’établir Pierre Méhaignerie, j’espère recevoir, sinon la palme d’Or, à tout le moins un satisfecit quant à mon respect de la vivacité des débats et des droits du Parlement.

Aussi ai-je tenu à ne pas me limiter au seul exercice 2007, qui est parfaitement analysé dans les rapports de Patrice Martin Lalande et de Chantal Bourragué et sur lequel nous reviendrons probablement dans le débat, et à le placer dans la perspective des deux exercices précédents et des enjeux d’avenir d’un secteur dont je n’ai pas besoin de vous rappeler la place éminente et croissante qu’il tient dans la vie quotidienne de nos concitoyens.

Dans ce secteur comme dans les autres, ce projet de budget, comme les précédents, traduit une politique. En effet, la politique que je mène dans l’ensemble des domaines dont j’ai la charge, en faveur de la diversité culturelle, de la création, de l’emploi, de la multiplication des offres de programmes et de la défense du pluralisme, se traduit également dans le budget des médias.

Le domaine des médias dans son ensemble est, vous le savez, en plein bouleversement. Il connaît des mutations rapides, accélérées, brutales parfois, liées aux extraordinaires progrès technologiques, qui multiplient, diversifient et transforment les usages et qu’il nous faut non seulement comprendre, observer et analyser, mais surtout anticiper et accompagner.

Jamais sans doute depuis bien longtemps ce secteur des médias n’avait connu en trois ans autant d’évolutions, aussi rapides, aussi profondes, aussi concrètes, impliquant autant d’actions, de réformes et de modernisations de la part des pouvoirs publics, et notamment du Gouvernement et de la représentation nationale.

Je ne citerai que deux exemples.

En premier lieu, l’essor de l’Internet, désormais présent dans la vie quotidienne, à la fois professionnelle et personnelle, des Français, dans plus d’un foyer sur deux, et majoritairement en haut débit. Ceux d’entre vous qui ont voté la loi sur le droit d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information peuvent être fiers d’avoir adapté notre législation pour protéger et garantir les droits des créateurs en permettant le développement d’une offre légale nouvelle face à cette nouvelle donne de l’Internet, marquant l’avènement de l’ère numérique qui concerne désormais chaque média et chaque Français. Les décrets d’application de ce texte sont tous en cours de rédaction et font l’objet d’un travail interministériel intense, avec l’objectif partagé d’être publiés entre la fin du mois de novembre prochain et le début de l’année 2007. Je pense en particulier au décret portant création de l’Autorité de régulation des mesures techniques, qui sera prêt avant la fin de l’année en vue d’une installation de cette autorité au tout début de l’année 2007.

Le deuxième exemple qui vient immédiatement à l’esprit est bien sûr celui de la télévision. Jamais sans doute depuis vingt ans le paysage audiovisuel français n’avait été autant bouleversé. Le lancement réussi, contre toute attente et contre tout scepticisme, de la télévision numérique terrestre a multiplié le nombre de chaînes gratuites par trois, ce nombre passant de six à dix-huit. Ce n’est pas là le fruit d’une génération spontanée, ni du seul progrès technique, mais avant tout d’une volonté politique forte, de choix politiques et techniques politiquement assumés par ce gouvernement et par la majorité parlementaire. Parmi ces choix, il y a bien sûr, les choix budgétaires qu’il vous revient de faire. J’insiste sur ce point : jamais une majorité n’avait permis la création d’autant de chaînes. Cela se traduit positivement pour le téléspectateur, qui bénéficie d’une offre élargie. C’est également très positif pour le monde de la création et les entreprises de production, qui représentent des emplois et s’intègrent dans une stratégie globale d’attractivité de notre économie.

Ces résultats, monsieur le président de la commission des finances, aussi positifs soient-ils, n’ont pas pour corollaire une explosion sans contrôle des deniers publics affectés notamment à l’audiovisuel public.

Il ne s’agit pas pour moi d’affirmer devant votre commission que mon budget est bon parce qu’il augmente, mais d’affirmer que toute augmentation des ressources que je soumets à votre vote et à votre contrôle correspond à des ressources fléchées et clairement identifiées.

Deux exemples illustrent mes propos. D’abord, l’extension de la démarche contractuelle. Je sais que vous y tenez beaucoup. Moi aussi. Les contrats d’objectifs et de moyens n’enlèvent rien à votre contrôle annuel et ils permettent au législateur et aux entreprises publiques de l’audiovisuel de définir une stratégie sur plusieurs années.

Deuxième exemple : le fléchage des dépenses supplémentaires. L’augmentation de 20 millions d’euros que vous avez votée à la suite d’un arbitrage du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin lors de la loi de finances rectificative de 2005 avait du sens. Elle a permis une contribution directement affectée aux programmes d’ARTE et de France Télévisions pour leur permettre un passage à la TNT dans de bonnes conditions.

En d’autres termes, monsieur le président de la commission des finances, toute demande de financement supplémentaire doit correspondre à une priorité clairement identifiée et productive. Je partage avec vous cette exigence – qui s’applique aussi bien dans le domaine de la communication que dans celui de la culture.

Par ailleurs, les décisions politiques du Gouvernement, sous l’impulsion du Président de la République, et les choix budgétaires de la majorité parlementaire ont aussi permis la création de la chaîne française d’information internationale, qui s’appelle depuis cet été France 24 et qui commencera à émettre dès les premiers jours de décembre pour proposer au monde un regard, un point de vue français sur une actualité internationale de plus en plus suivie par nos concitoyens, conscients des enjeux de la mondialisation.

Cette législature a aussi permis de réformer, grâce à l’action du Gouvernement et des services de l’État, aux travaux de votre mission d’évaluation et de contrôle et à votre vote du budget pour 2005, la redevance audiovisuelle.

Cette réforme a permis de rationaliser et de moderniser le mode de recouvrement de cette ressource publique essentielle au service public, et s'inscrit plus globalement dans la réforme de l'État conduite par le Gouvernement. Un bilan est en cours au sein du ministère de l'économie et des finances.

Grâce à la progression de leurs ressources, les organismes de l'audiovisuel public ont les moyens de participer pleinement aux mutations technologiques en cours, tout en renforçant la spécificité et la richesse de leurs programmes.

Ainsi, les priorités fixées au secteur audiovisuel public pour 2007 consistent à renforcer la spécificité du service public : développer une offre de qualité en télévision numérique terrestre et en haute définition, et favoriser la sauvegarde du patrimoine, notamment.

La progression de la dotation publique de France Télévisions permettra au groupe de poursuivre plusieurs priorités.

Tout d'abord, parce que le succès de la télévision numérique repose sur les programmes qui sont offerts aux téléspectateurs, France Télévisions doit renforcer la grille des chaînes de la télévision numérique de terre, France 4, France 5, et France Ô, dont le Président de la République a annoncé la diffusion sur la TNT en Île-de-France. J'ai donc demandé au Conseil supérieur de l'audiovisuel, en début d'année, de permettre la diffusion de France Ô sur la TNT en Île-de-France sur le multiplexe public. Ce dernier pourrait alors également diffuser en province les chaînes locales analogiques et certains décrochages de France 3 qui sont aujourd'hui mal diffusés sur la TNT. Il est grand temps que ce transfert se réalise.

Ensuite, la poursuite et l'accélération du déploiement sur le territoire de la TNT : France Télévisions doit en effet se montrer exemplaire quant au respect du calendrier de déploiement défini par le CSA pour l'ensemble des chaînes de la TNT, qui prévoit une couverture de 85 % de la population à partir de 110 sites pour fin 2007 ; le groupe doit également poursuivre son déploiement au-delà de ces 110 sites afin de compléter sa couverture, dans la perspective de l'extinction de la diffusion analogique prévue fin 2011 dans le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, qui vous sera bientôt soumis.

Troisième priorité : le développement des programmes en haute définition. France Télévisions, qui a d'ores et déjà diffusé des programmes en haute définition grâce à la préemption de l'État dans le cadre des expérimentations, continuera à diffuser un maximum de programmes haute définition, dans ce cadre expérimental puis dans le cadre des autres préemptions que le Gouvernement réalisera pour les chaînes de service public. Comme le sait bien Jean-Jacques Descamps, député d’Indre-et-Loire, j’ai pu assister l’autre jour à la diffusion expérimentale en haute définition de Paris-Tours, une course cycliste dont l’intérêt ne vous échappe pas ! C’était une répétition générale pour le Tour de France. Autant dire que ces rendez-vous avec la technologie du futur sont essentiels. Ce service public ne sera pas le laissé-pour-compte des évolutions technologiques.

Enfin, le sous-titrage des programmes pour les personnes sourdes et malentendantes : la loi historique du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, pose le principe général de l'adaptation de la totalité des programmes télévisés, à l'exception des messages publicitaires, dans un délai maximum de cinq ans suivant la publication de la loi, pour toutes les chaînes publiques. L'enjeu est important et ambitieux pour France Télévisions, qui doit notamment réaliser le sous-titrage de l'ensemble des programmes régionaux de France 3.

Par ailleurs, l'augmentation des dotations d'ARTE France permettra à la société d'être motrice sur les nouvelles technologies de diffusion, tout en lui permettant de poursuivre ses efforts en faveur de la création.

S'agissant de Radio France, l'année 2007 doit lui permettre de concrétiser les orientations du contrat d'objectifs et de moyens, qui a été approuvé par le conseil d'administration du 12 juillet dernier et qui est en cours d'examen par les commissions compétentes du Parlement. Je m'attacherai à prendre en compte vos remarques. Je salue au passage cette procédure qui consiste à vous associer davantage à l'élaboration des contrats d'objectifs et de moyens. Elle est un facteur d'amélioration de ces contrats et, j'en suis convaincu, un gage de leur efficacité. Votre vote permettra de donner à Radio France les moyens de réaliser de nouveaux développements – extension de la diffusion FM, déploiement de la radio numérique, développement de chaînes thématiques dérivées et de nouveaux services – et d'engager le chantier de réhabilitation de la Maison de la Radio, tout en confortant ses sept chaînes et ses formations musicales dans leurs missions de service public.

L'action en faveur du patrimoine – j'aurai l'occasion d'y revenir devant vous lors de l'examen du budget de la culture – est une priorité de la politique culturelle du Gouvernement. Dans l'ère numérique où nous sommes entrés, cette priorité vaut aussi, bien sûr, pour l'audiovisuel, et les budgets que vous avez votés, comme le projet que je vous soumets aujourd'hui, permettent de renforcer encore l'effort de sauvegarde et de mise en valeur de notre patrimoine audiovisuel accompli par l'Institut national de l'audiovisuel.

L'INA apporte la preuve concrète qu'il y a continuité, cohérence et articulation entre le budget et les contrats d'objectifs et de moyens. Ainsi, j'ai inscrit dans le COM de l'INA signé fin 2005 ma volonté que soit poursuivi et accéléré le plan de sauvegarde et de numérisation, afin de permettre la numérisation à l'horizon 2015 de l'intégralité des fonds audiovisuels. C'est l'une des priorités du projet de budget de l'audiovisuel public pour 2007 : l'objectif est de permettre la sauvegarde, à la fin 2007, de plus de 40 % du stock d'archives menacées.

En ce qui concerne RFI, je travaille avec Philippe Douste-Blazy au contrat d'objectifs et de moyens de cette société qui est une grande et belle maison. RFI doit poursuivre ses efforts de modernisation. RFI a d'ailleurs commencé cette tâche en renégociant le contrat qui la lie à TDF. Elle doit aussi développer encore son offre sur Internet. L'objet de ce contrat sera, de manière concertée avec les équipes de RFI, de déterminer la stratégie éditoriale la plus adaptée au monde moderne ainsi que les moyens financiers appropriés pour lui permettre d'accomplir ses missions. À cet égard, je suis convaincu, et la visite que j’ai faite avant-hier à BBC World, à Londres, n'a fait que me conforter dans cette conviction, que des synergies doivent être trouvées avec France 24. Pour 2007, la part de financement de RFI issue de la redevance progresse à hauteur de 1,2 %.

L'audiovisuel, c'est aussi la proximité. Vous savez la place particulière que les radios associatives occupent dans le paysage radiophonique français. Seul média audiovisuel de proximité qui couvre l'ensemble du territoire national, elles s'adressent en priorité à des populations isolées et ont un rôle social primordial. J'ai décidé d'engager une réforme du fonds de soutien à l'expression radiophonique qui gère l'aide dont bénéficient près de 600 radios associatives, pour améliorer son fonctionnement et optimiser l'utilisation de ses ressources, tout en maintenant l'équilibre général du système. Cette réforme sera effective à compter de 2007 puisque le décret qui la met en œuvre a été publié le 25 août dernier. Est ainsi garanti, définitivement garanti, le soutien public aux radios associatives.

La politique de l'audiovisuel, que je conduis au nom du Gouvernement et grâce aux budgets que vous avez votés, est aussi une politique en faveur de l'emploi.

Dans le secteur dynamique et créateur d'emplois de la production et de la création cinématographiques et audiovisuelles, cette politique de relocalisation des tournages, d'incitation et d'encouragement à l'emploi, porte ses fruits, notamment grâce aux mesures de crédit d'impôt, élargies à l'audiovisuel, mais aussi à l'addition des énergies, aux partenariats, qui donnent, dans ces domaines en particulier, un fort effet de levier aux actions de l'État. Ainsi, j'ai intensifié le partenariat entre l'État et les régions, en renouvelant les conventions État-régions et en mettant en œuvre le dispositif « un euro de l'État pour deux euros des régions ».

L'ensemble de ces mesures a permis une très forte progression et une réelle relocalisation des tournages en France. Là encore, il s'agit d'évaluer avec vous la bonne utilisation des deniers de l'État. Je crois que vous avez été comme moi frappés par la rapidité des conséquences concrètes et opérationnelles des décisions que vous avez prises – je pense notamment au crédit d’impôt. Les résultats sont là : votre vote a permis une hausse des tournages de 35 % dans nos régions en seulement un an. La qualité et la visibilité internationale de la création française sont unanimement reconnues, au moment même où la diversité culturelle entre dans le droit international, ce qui est d'abord la reconnaissance des talents et du travail des créateurs, des artistes et des techniciens français.

La diversité, le pluralisme, ce sont aussi les valeurs clés de ce secteur essentiel auquel est consacrée une part importante du budget des médias : la presse écrite.

Dans ce domaine, pilier de notre démocratie, les budgets que vous avez votés et celui que je vous soumets permettent de soutenir le développement de la diffusion de la presse écrite, de conforter les conditions de son pluralisme et de son indépendance, de favoriser sa modernisation et donc de garantir sa liberté.

Les lois de finances pour 2005 et 2006 avaient consacré à la presse des moyens exceptionnels par leur ampleur. Avec un budget total de 274 millions d'euros, le projet de loi de finances pour 2007 représente, à périmètre constant, un montant de crédits supérieur de plus de 22 % aux moyens consacrés à la presse écrite il y a encore deux ans. Cette année, grâce à l'engagement personnel et à l'arbitrage du Premier ministre, le Gouvernement a arrêté des mesures fiscales structurantes en faveur de la presse. Nous le savons, l'une des difficultés chroniques des entreprises de presse dans notre pays réside dans la faiblesse de leurs fonds propres, qui obère leur capacité d'investissement. Dans le cadre du présent projet de loi de finances, le dispositif spécifique de provision pour investissements des entreprises de presse – dit « du 39 bis » –, qui venait à échéance à la fin de l'année, sera prorogé jusqu'en 2010 et adapté pour mieux répondre aux besoins des entreprises. La prorogation de ce mécanisme jusqu'en 2010 sera accompagnée d'un aménagement significatif : l'extension du périmètre des investissements éligibles à la prise de participation dans d'autres entreprises de presse ou dans des entreprises intervenant dans la chaîne de fabrication ou de distribution de la presse.

Par ailleurs, un nouveau mécanisme de réduction de l'impôt sur les sociétés, pour les entreprises entrant dans le capital des entreprises de presse éditant des publications d'information politique et générale, sera mis en place avant la fin de l'année. La réduction d'impôt sera égale à 25 % du montant des sommes versées au titre des souscriptions en numéraire au capital de ces sociétés.

Ces mesures visent à rendre attractifs les investissements dans ce secteur, plus particulièrement pour la presse quotidienne d'information politique et générale. Elles peuvent et doivent être une chance pour des titres, qu'ils traversent des difficultés, et je pense bien sûr au journal Libération, ou qu'ils souhaitent renforcer leur capital.

L'engagement traditionnel de l'État en faveur du pluralisme est bien sûr maintenu. Cet engagement implique d'accompagner aussi la presse dans l'univers numérique. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de confier à Marc Tessier une mission prospective sur ce sujet. Les conclusions me seront rendues en janvier prochain et je réunirai à cette occasion l'ensemble des représentants de la presse écrite. Nul doute que vous serez associés à cette réflexion. Ce défi du numérique est un enjeu majeur pour l'avenir de la presse. Il faut qu'il soit une chance et non un facteur de déséquilibre.

Par ailleurs, le Gouvernement s'attache à convaincre Bruxelles, la Commission, nos partenaires européens de l'importance d'appliquer à la presse en ligne le taux réduit de TVA dont bénéficie la presse « papier ». Vous avez eu, je le sais, ce débat lors de la première partie de la loi de finances. Vous mesurez la mobilisation du Gouvernement sur ce sujet, désormais inscrit à l'ordre du jour du prochain conseil Ecofin.

Revenons au caractère fondamental des aides traditionnelles. Comme en 2005 et en 2006, j'ai voulu que les crédits dédiés à la presse écrite appuient prioritairement les efforts engagés par le secteur pour conforter durablement les conditions de son indépendance économique et de son développement futur, qu'il s'agisse de la modernisation des entreprises, d'actions innovantes ou de la recherche d'une plus grande autonomie financière. 60 millions d'euros seront donc consacrés à ces objectifs en 2007, afin d'assurer le maintien du pluralisme de l'information et la vitalité du débat démocratique. 22,5 millions d'euros seront mobilisés pour continuer d'accompagner la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne, qu'elle soit nationale, régionale ou départementale.

Ainsi, cette législature est marquée par une puissante progression du montant des aides à la presse, par un effort important de rationalisation et de rénovation des dispositifs existants, et par la création de nouveaux dispositifs, principalement dédiés à la modernisation du secteur et donc au renforcement des fonds propres des entreprises de presse.

Mesdames, messieurs, ce projet de budget, comme les précédents, est l'expression concrète de l'engagement fort de l'État pour préparer l'avenir, dans ce secteur des médias où notre pays dispose d'une créativité, d'une diversité, d'atouts, de talents et d'expressions qui le placent en bonne voie pour réussir.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Merci, monsieur le ministre, pour cette photographie complète et ambitieuse du sujet.

Avant de donner la parole à Patrice Martin-Lalande, j’invite Hervé de Charette et Dominique Richard à s’exprimer successivement.

M. Hervé de Charette, vice-président de la commission des affaires étrangères. Je formulerai seulement deux observations relatives à la structure d’une mission qui comprend trois programmes. Pour deux d’entre eux, le ministre concerné est le Premier ministre ; pour le troisième, c’est le ministre des affaires étrangères. Mais c’est le ministre de la culture que nous avons le plaisir d’entendre pour les trois ! Il y a donc un problème.

M. le ministre de la culture et de la communication. J’ai une vocation interministérielle !

M. Hervé de Charette, vice-président de la commission des affaires étrangères. Je ne le conteste pas, et je suis d’ailleurs ravi que vous soyez parmi nous aujourd’hui.

Seconde observation, liée à la première : dans la loi de finances de 2006, le programme 115, « Audiovisuel extérieur », était rattaché à la mission « Action extérieure de l’État ». La commission des affaires étrangères avait alors, en bonne logique, suggéré d’associer les programmes 115 et 116 – celui-ci étant dédié à la chaîne française d’information internationale – dans la mission « Action extérieure de l’État ». La commission des affaires étrangères, eu égard à ses compétences, regrette que cela n’ait pas été le cas.

M. Dominique Richard, secrétaire de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Nous sommes à une année-charnière pour le paysage audiovisuel français. Nous ne pouvons que nous réjouir du succès avéré du lancement de la TNT dans notre pays : 65 % de la population est déjà couverte par le réseau et 4 millions d’adaptateurs ont été vendus. Autre succès : les orientations de France Télévisions en ce qui concerne la logique de groupe et de complémentarité des chaînes, ainsi que le renouvellement, considérable, des programmes – 20 % d’entre eux ont ainsi été changés lors de la dernière rentrée, ce qui une première. Enfin, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, France 24 arrivera dans notre paysage audiovisuel au début du mois de décembre.

Votre budget permet de répondre aux besoins immédiats de notre audiovisuel public, compte tenu en particulier de deux facteurs conjoncturels : l’augmentation du taux de remboursement des exonérations sociales et l’arrivée, au 1er janvier 2007, des secteurs de la grande distribution dans le domaine publicitaire, ce qui permettra d’augmenter les ressources du groupe France Télévisions comme des autres chaînes.

Reste que, dans les années à venir, ce dernier et l’audiovisuel public en général auront à financer les contraintes prévues par le législateur : dispositions relatives au sous-titrage ; passage à la haute définition – domaine où il serait inconcevable que l’audiovisuel public soit à la traîne par rapport au privé – ; inflation du coût des programmes, du fait, notamment, de l’arrivée du secteur des télécommunications sur le marché. Or la ressource dont nous disposons n’est que moyennement dynamique : pour la cinquième année consécutive, la redevance reste inchangée – 116 euros –, alors qu’elle s’élève en moyenne à 195,40 euros dans l’Union européenne.

Si nous voulons que la télévision publique réponde à l’impératif de diversité culturelle que nous lui avons assigné, nous devrons dans les prochains mois, et au-delà du texte relatif à la télévision du futur qui sera examiné fin novembre au Sénat puis en janvier à l’Assemblée nationale, nous interroger sur la définition de l’œuvre audiovisuelle, la fluidité des droits – qui pose d’importants problèmes aux chaînes entrantes – et les moyens de consolider les ressources du service public, afin que ce dernier ait une meilleure lisibilité de son avenir.

Vous vous êtes enfin félicité, monsieur le ministre, que le Parlement soit associé au contrat d’objectifs et de moyens : il s’agit d’un geste sympathique, mais encore homéopathique.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour une première série de questions brèves, selon… son souhait.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. C’est aussi le vôtre, monsieur le président ! Je m’y plierai donc et renvoie, pour le reste, au rapport que je publierai dans les prochains jours. Certaines réponses ont d’ailleurs déjà été apportées, monsieur le ministre, aux questions que je souhaitais vous poser.

En ce qui concerne les contrats d’objectifs et de moyens – COM –, deux seulement ont été signés à la suite de la loi de 2000 : l’un avec France Télévisions, l’autre avec ARTE, celui de l’INA ayant été signé avant la loi. En l’absence d’avenants, les COM signés n’ont pas été systématiquement respectés, et des modifications importantes y ont été apportées. Acceptez-vous, monsieur le ministre, de systématiser l’introduction d’avenants, en suivant la procédure de consultation du Parlement, pour marquer les inflexions, quand elles sont nécessaires, des COM ? J’ai d’ailleurs déposé un amendement en ce sens.

S’agissant du groupe France Télévisions, des retards ont été pris, puisque la première mouture du COM qu’il a proposé date d’avril dernier. Nous espérons que la réponse de l’État, que nous ne connaissons pas encore, interviendra rapidement : il y a urgence, puisque le COM devait être mis en œuvre en 2006. Or nous ne sommes pas sûrs qu’il le sera au début de 2007 : il devrait donc y avoir un décalage d’un an. Des groupes de travail ont été mis en place entre France Télévisions et l’État. Quand le COM sera-t-il signé ?

En ce qui concerne les propositions de France Télévisions, les prévisions de recettes publicitaires sont peut-être sous-évaluées. Qu’en pensez-vous ? Quant à la gestion, les ambitions du groupe ne sont-elles pas un peu trop limitées, eu égard aux exigences d’économies qui ont toujours été affichées, y compris dans le précédent COM ?

Puisque vous m’avez demandé d’être bref, monsieur le président, je m’en tiendrai là.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Si Mme Bourragué et M. Rochebloine en sont d’accord, je vais donner la parole à M. le ministre pour lui permettre de répondre. J’en profite pour glisser deux questions brèves. L’évaluation est à la base de toutes nos politiques et de la LOLF. A-t-on procédé à une évaluation internationale des différentes télévisions dans le monde ? Par ailleurs, comment se situe notre pays par rapport aux autres pays européens en ce qui concerne les aides à la presse ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Je répondrai de la façon la plus concise possible.

Tout d’abord, monsieur de Charette, les responsabilités sont par définition partagées. En l’occurrence, tout se place sous l’autorité du Président de la République et, pour ce qui concerne la stratégie d’ensemble, du Premier ministre, même lorsque le ministre des affaires étrangères, celui de la communication, celui de l’économie et des finances ou encore celui de l’industrie sont associés. Le ministre de la communication que je suis – et peut-être aussi l’ancien membre de la commission des affaires étrangères – s’est ainsi fortement impliqué dans ce défi majeur qu’a été le lancement de la chaîne d’information internationale, dont je suis particulièrement heureux et fier. Cela montre que, dans une équipe, seule compte l’addition des énergies.

Autre point important, sur lequel nous reviendrons : la redevance. Si la réforme a accru son rendement, le plus important pour l’audiovisuel public est la décision que votre assemblée a prise de garantir elle-même les ressources de ce dernier, à charge ensuite pour l’État de définir le produit de la redevance et de l’argent qu’il met à sa disposition.

Quant aux contrats d’objectifs et de moyens, ils sont pour moi une occasion privilégiée de discuter de la stratégie et des objectifs fondamentaux avec les entreprises audiovisuelles publiques. Peut-être même est-ce la seule occasion pour de tels échanges, puisque ces entreprises sont ensuite libres d’élaborer elles-mêmes leurs programmes.

À cet égard, le concours du Parlement est essentiel, et je n’ai aucune objection à ce qu’il soit régulièrement associé aux avenants et aux évolutions des COM. Je tiens en tout cas à ce que les calendriers soient respectés. Nous y travaillons de manière active et partagée : les services de l’État peuvent en effet avoir des idées sur le contenu. Nous ne nous contentons donc pas de recevoir les propositions de tel ou tel groupe de l’audiovisuel public et d’en estimer les conséquences budgétaires ; nous fixons des objectifs que nous jugeons nécessaires.

S’agissant du calendrier, notamment pour France Télévisions, je souhaite que le contrat d’objectifs et de moyens soit signé dès janvier 2007. En ce qui concerne la déclinaison budgétaire annuelle de nos contrats, comme je l’ai rapidement indiqué dans mon exposé liminaire, elle s’inscrit, comme pour l’INA et Radio France, dans les recommandations et dans le contrat. Les services de mon ministère et ceux du ministère des finances continuent de travailler activement avec ARTE et France Télévisions afin qu’une conclusion puisse être transmise à votre assemblée à la fin de l’année, et que le contrat puisse être signé au début de l’année prochaine : il n’y aura donc pas de retard.

J’ai répondu sur les avenants ; quant à la question de Pierre Méhaignerie relative à l’évaluation internationale, je me suis rendu à Londres quelques semaines avant le lancement de France 24 pour y rencontrer les responsables de la BBC et de BBC World. Nous rattrapons notre retard, et nous nous plaçons dans une logique de ressemblance.

Concernant les aides à la presse, chaque pays a évidemment son propre système. Peut-être le pluralisme français des entreprises de presse et des structures capitalistiques est-il plus important que chez certains de nos voisins européens. Je pourrai vous fournir, monsieur le président Méhaignerie, des informations complémentaires à ce sujet.

Pour ce qui est des ressources publicitaires et de leur éventuelle sous-estimation, il faut partir d’un fait nouveau : dès le début de l’année 2007, la publicité sur les chaînes de télévision sera ouverte à un nouveau domaine, celui de la grande distribution.

La sagesse, avant toute décision nouvelle, sera de mesurer l’impact de l’ouverture des recettes de publicité à la grande distribution. Il ne faut pas non plus oublier la presse écrite ni menacer certains équilibres encore fragiles.

Le Gouvernement n’a donc pas l’intention aujourd’hui de faire évoluer les recettes publicitaires à la télévision ou d’entreprendre des réformes structurelles sans avoir au préalable apprécié les conséquences de la nouvelle place faite à la grande distribution. En d’autres termes, les nouvelles coupures de publicité ne sont pas à l’ordre du jour.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, il est également important de regarder ce que va donner la taxe instituée par le Parlement sur les publicités dans les boîtes aux lettres, car elle transfère déjà une partie des recettes publicitaires issues des grandes surfaces vers la presse. L’équilibre peut donc se faire dans les deux sens. Cette taxe incite en effet un certain nombre de grandes surfaces à ne plus pratiquer la distribution de tracts publicitaires dans les boîtes, et les premiers effets s’en font déjà sentir.

La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Je me félicite, comme M. Martin-Lalande, de l’ambition affirmée dans ce budget. La stabilité de la redevance ne constitue, comme vous le dites, qu’une contrainte apparente, puisque la nouvelle collecte et la compensation des dégrèvements permettent une augmentation des ressources de l’audiovisuel public.

Je m’attarderai sur le rôle de France 3 dans les régions, car il est d’usage que la commission des affaires culturelles, examine un aspect de la politique publique dont ce budget est l'illustration.

Comme le rappelait M. de Carolis devant la commission le 19 septembre, France 3 est la chaîne de proximité et de médiation et veut s'affirmer comme le reflet d'une France riche de sa diversité. C'est d'ailleurs la mission que lui assigne l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

La politique de régionalisation accrue de France 3 s'inscrit dans le cadre du « virage éditorial » mis en œuvre au sein du groupe France Télévisions par M. de Carolis, afin que les programmes des chaînes se complètent et s'harmonisent, au lieu de se faire concurrence comme par le passé.

Cette politique semble payer puisque, comme l'a rappelé Mme Geneviève Giard, directrice générale de France 3, devant la commission, sur les 37 premières semaines de l'année 2006, France 3 est la seule chaîne du paysage audiovisuel français à avoir vu son audience progresser. La chaîne se porte bien, à la différence de l'année dernière où les recettes publicitaires étaient en berne.

J'estime pour ma part que la chaîne doit continuer à être à l'écoute des téléspectateurs en privilégiant l'information régionale, les programmes de proximité, mais également les productions régionales à vocation nationale, afin que les régions françaises soient plus visibles au sein de l'audiovisuel public.

Je rappellerai que France 3 est une chaîne à vocation régionale depuis sa création, puisque Couleur 3, la troisième chaîne de l'ORTF, a émis pour la première fois en 1972. En 1983, les stations régionales de la chaîne diffusent pour la première fois, quotidiennement, trois heures de leurs propres programmes avant 20 heures.

L'action de France 3 dans les régions, est largement développée dans mon avis, mais je reviendrai sur quelques points.

En 2005, la diffusion des treize antennes régionales a représenté un volume global de 14 000 heures, réparties en 6 500 heures d'information – journaux régionaux et éditions locales – et 7 600 heures de programmes, incluant les magazines des rédactions, le sport et la météo.

France 3 poursuit depuis de nombreuses années une politique de partenariats avec les collectivités locales et territoriales, ainsi qu'avec les grands acteurs économiques régionaux, notamment à travers le parrainage. Cette coopération originale a permis la diffusion de nouvelles locales, la production de documentaires régionaux et la retransmission des débats de certaines assemblées territoriales.

Le budget de France 3 reflète l'importance de sa présence territoriale, même si la chaîne connaîtra toujours des tensions et des débats sur le bon équilibre des moyens entre l'antenne nationale et les antennes régionales. Il convient malgré tout de ne pas oublier que les antennes régionales sont la raison d'être de France 3. La croissance des effectifs régionaux est en grande partie liée à la création de nouvelles antennes locales dans les villes moyennes de province. Ces charges de personnel croissantes expliquent que les antennes régionales souhaitent des moyens complémentaires, hors budget de personnel, afin de mieux innover dans leurs programmes.

Les budgets des antennes régionales sont assez stables depuis quelques années et oscillent entre 22 millions d'euros pour France 3 Alsace et 40 millions d'euros pour France 3 Rhône-Alpes-Auvergne. Ces importantes variations budgétaires s'expliquent par des différences dans le nombre de bureaux régionaux d'information. Ainsi France 3 Alsace ne dispose que d'un BRI alors que France 3 Rhône-Alpes-Auvergne en a trois.

Mais les budgets sont également établis en fonction des objectifs de programme et des audiences de chaque antenne. Il conviendrait de mieux prendre en compte ce deuxième aspect, afin de responsabiliser encore davantage les antennes et de renforcer la qualité des émissions produites.

Les budgets publicitaires des antennes régionales viennent uniquement du parrainage publicitaire, et dans une très faible mesure puisque, selon les informations qu'on m'a fournies, 20 % seulement de ces recettes sont reversés aux antennes, le reste retournant dans le budget publicitaire national. Il en est de même pour les recettes publicitaires générées par les sites Internet. Il conviendrait de réfléchir à un système plus décentralisé car, à l'heure actuelle, seules les recettes extérieures abondant intégralement le budget des antennes régionales sont liées aux partenariats développés avec les collectivités, lesquels ont connu une croissance considérable au cours des dernières années. Or une implication financière trop importante des pouvoirs locaux n'est pas souhaitable si l'on veut préserver l'impartialité des antennes régionales.

Il convient aussi de saluer l'amélioration de la coordination entre les antennes régionales et l’antenne nationale, ainsi qu’avec les autres chaînes du groupe France Télévisions : un fonds d'intervention des programmes régionaux, géré par la direction des programmes régionaux, joue un rôle d'incitation à l'innovation et à la création d'émissions interrégionales. Il assure le financement de pilotes et accorde des aides à la production de magazines et documentaires en favorisant les projets coproduits par plusieurs régions. Seul un renforcement de la qualité des émissions produites en région permettra un développement important des échanges interrégionaux et des échanges entre les régions et le national ou les autres chaînes du groupe.

Il faut encore accélérer cette tendance, afin de rentabiliser au mieux les programmes produits en région et de leur donner une visibilité nationale. Certains programmes produits par les régions sont déjà repris par des chaînes du groupe. C'est le cas, par exemple, de France 4 qui rediffuse une émission mensuelle produite par France 3 Paris-Île-de-France.

Pour terminer, j'émettrai plusieurs vœux et ferai le point sur quelques chantiers. Si la plupart des acteurs du secteur s'accordent à reconnaître le dynamisme et la qualité croissante des programmes diffusés par France 3, la chaîne a encore de nombreux défis à relever pour tenir pleinement sa place au sein du groupe France Télévisions.

Le premier chantier est celui de la filière production. Cette filière affichait en 2005 un déficit de 1,6 million d'euros. Début 2006, un rapport de l'inspection générale des finances recommandait sa cession, mais M. de Carolis a préféré engager sa rationalisation, afin de rétablir son équilibre financier. Dans le cadre de la négociation du prochain contrat d'objectifs et de moyens, le succès de ce chantier est fondamental : France Télévisions doit prouver ainsi qu'il est possible de réformer et d'améliorer la productivité des outils à sa disposition, à périmètre budgétaire constant.

Le deuxième chantier concerne la politique rédactionnelle à l'heure de l'information instantanée. Face aux questions sur l'objectivité des informations, dans une période qui s'annonce très tendue sur le plan politique, j'ai eu l'occasion de débattre avec les responsables de l'information de la chaîne et tiens à souligner leur souci exprimé du respect des personnes et de l'impartialité.

La qualité des journaux de France 3 s'est améliorée au cours des dernières années et l'audience suit, puisque l'ensemble des journaux réalisent une audience qui est d’un tiers supérieure à celle de France 2. La présence de France 3 en région est un atout, les rédactions étant présentes au plus près du terrain. Mais cet atout doit être bien maîtrisé car l'afflux immédiat d'images et d'informations en tout genre constitue également un danger, lorsque le journaliste oublie de prendre ses distances avec l'image et la diffuse sans analyse préalable. Il convient que l'audiovisuel public soit exemplaire dans ce domaine et s'interroge également sur la diffusion d'images violentes, dont l'intérêt est parfois discutable.

Le troisième chantier consiste à tirer le meilleur parti des nouveaux réseaux et services de télécommunications, ce dont vous avez largement parlé, monsieur le ministre. Les premiers résultats sont déjà très prometteurs. Le développement de l'ADSL et des sites Internet régionaux, la modification des comportements contribuent à une véritable modernisation des chaînes. Les partenariats développés avec les opérateurs ADSL en télévision permettent également la visualisation des antennes de chacune des régions. Free est le premier opérateur à avoir signé un contrat avec France Télévisions en ce sens, et 21 décrochages régionaux sont donc aujourd'hui disponibles en simultané sur la Freebox. Dans le cadre de cet accord, Free prend à sa charge l'ensemble des coûts liés à la distribution de ces chaînes.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Nous en sommes à dix minutes. Veuillez conclure, s’il vous plaît.

Mme Chantal Bourragué, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles. Les deux derniers défis regardent le coût budgétaire des évolutions technologiques et la mobilisation des ressources humaines. Sur ce dernier point, les marges de manœuvre des gestionnaires du personnel de France 3 sont extrêmement limitées depuis plusieurs années, mais la nécessaire mobilisation du personnel et sa dynamisation doivent conduire la chaîne à revenir sur la question du point d’indice et des rémunérations. Il faut saluer, cela étant, l’effort accompli pour optimiser les relations entre les rédactions du groupe. Les premiers résultats sont très prometteurs.

En conclusion, je souhaite que la commission donne un avis favorable à l’adoption de ces crédits.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Madame la rapporteure pour avis, il y a beaucoup de bonnes questions dans votre intervention, mais je rappelle que, pour la qualité du débat, le président de l’Assemblée a souhaité que les interventions ne dépassent pas cinq minutes.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères qui, j’en suis persuadé, va respecter cette règle.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Je vais essayer. Avant de poser mes questions, je ferai quelques observations limitées au volet audiovisuel extérieur de la mission « Médias », à savoir les programmes 115 et 116.

J'informe également les membres des commissions représentées ce matin que j'assure la présidence d'une mission d'information, créée au sein de la commission des affaires étrangères à la demande du président Édouard Balladur, sur l'organisation et le financement de l'audiovisuel extérieur. Cette mission d'information rendra ses conclusions dans les prochaines semaines.

L'éclatement institutionnel et la dispersion des moyens de l'audiovisuel extérieur font l'objet de critiques récurrentes. Les rapports se suivent et se ressemblent. L'absence d'instance de pilotage et la pluralité des structures contrastent avec ce qui se passe chez nos voisins, qui s'appuient sur un opérateur unique, comme la BBC au Royaume-Uni ou encore la Deutsche Welle en Allemagne.

La création d'un programme spécifique consacré à l'audiovisuel extérieur, et son rattachement à la mission « Médias » représente un progrès en termes de simplification et de cohérence. De quatre sources de financement différentes, le projet de loi de finances pour 2007 passe à deux : d'une part, la mission « Médias » pour l'ensemble des opérateurs et, d'autre part, la redevance pour le financement complémentaire de RFI.

Pour autant, quatre tutelles subsistent : les services du Premier ministre – pour France 24 –, ainsi que trois ministères : les finances, en tant que tuteur des entreprises publiques, la culture et la communication et les affaires étrangères – je déplore d’ailleurs l’absence de M. le ministre des affaires étrangères.

Auditionné au printemps 2003 par la mission d'information commune sur la CII – que j'ai eu l’honneur de présider et dont Christian Kert était le rapporteur – M. Jean-Jacques Aillagon, alors ministre de la culture et de la communication, voyait dans la création de la CFII « une chance, parce qu’elle permettra » disait-il, « de rationaliser un paysage audiovisuel extérieur désorganisé et centrifuge ».

Je persiste à penser que, bien loin de clarifier les choses, le choix de placer France 24, créée ex nihilo, sous la tutelle du Premier ministre, et de la doter d'un capital 50 % public et 50 % privé, ajoute à la désorganisation, d'autant que la multiplicité des tutelles ne s'accompagne d'aucune structure de coordination de nature à assurer le pilotage stratégique des différents opérateurs. Dans son rapport au Président de la République pour 2002, la Cour des comptes dénonçait déjà ce manque de coordination. Il existe pourtant un Conseil de l'audiovisuel extérieur de la France – le CAEF. Créé en 1989, il ne s’est toutefois plus réuni depuis 1996. Quelles en sont les raisons ? Est-il envisagé de le réactiver, monsieur le ministre ? Et, si oui, quelles seraient ses compétences ?

Mes chers collègues, l'addition des montants des programmes 115 – 160 millions d'euros – et 116 – 70 millions d'euros –, auxquels il faut ajouter la contribution de la redevance à RFI, et marginalement à TV5 à travers France Télévisions, fait progresser le total des ressources publiques consacrées à l'audiovisuel extérieur de 7,52 %, entre la loi de finances 2006 et le projet de loi de finances pour 2007. Toutefois, cette progression, certes importante, et qui traduit la volonté de rapprocher l'audiovisuel extérieur français du niveau de financement des médias internationaux des grands pays développés, est totalement concentrée sur France 24 et masque le fait que les autres opérateurs, TV5 Monde et RFI, connaissent depuis plusieurs années une stagnation de leurs moyens, quand ce n'est pas une régression.

On observe ainsi, pour la troisième année consécutive, hors effet France 24, un différentiel négatif important entre l'évolution des ressources des opérateurs financés sur le programme 115 et celles de l'audiovisuel public non extérieur, qui connaissent une progression moyenne de 2,6 %. Le fait que, RFI mis à part, les opérateurs de l'audiovisuel extérieur ne bénéficient pas de la redevance, génère, entre audiovisuel extérieur et intérieur, une iniquité d'autant plus forte que les opérateurs de l'audiovisuel extérieur sont soumis aux aléas de la régulation budgétaire, ce qui freine toute stratégie de développement pluriannuel.

La réalité, et je le déplore, est donc celle d'un audiovisuel public à deux vitesses, au détriment de l'audiovisuel extérieur. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : la chaîne de télévision RFO – qui couvre l'outre-mer français – percevra 228,6 millions d'euros en 2007 au titre de la redevance. De même, ARTE France, pour une couverture géographique européenne, va bénéficier de 214,32 millions d'euros. Or, à titre de comparaison, la subvention versée par le ministère des affaires étrangères à TV5 ne sera que de 65,27 millions d'euros pour une couverture mondiale, soit 3,5 fois moins que pour RFO…

Malgré ce cadre budgétaire très contraignant, la stratégie déployée ces dernières années par TV5 se révèle payante. L'audience mondiale de la chaîne francophone a continué de progresser à un rythme soutenu, en dépit d'un environnement concurrentiel accru. Avec près de 73,5 millions de téléspectateurs en 2005, contre 36,4 millions en 2001, TV5 Monde a connu une augmentation de plus de 100 % du nombre de ses téléspectateurs. TV5 doit avoir les moyens de maintenir son rang mondial et d’atteindre les objectifs fixés par son autorité de tutelle en matière de sous-titrage des programmes. Elle ne doit pas subir une nouvelle fois la régulation budgétaire, comme cela a été le cas en 2006.

RFI en a également été victime en 2006. L'équilibre du budget de la radio n'a pu être atteint que grâce à une économie annuelle pérenne de 5,3 millions d'euros, réalisée à l'occasion d'une renégociation du contrat « ondes courtes », conclu avec TDF. RFI va mal, et l'exercice 2007 s'annonce difficile. Les efforts réalisés depuis plusieurs années par la station n’ont pas eu les résultats escomptés, en particulier en Europe. D'une façon générale, alors que la plupart des radios françaises publiques ou privées peuvent désormais être écoutées n'importe où dans le monde grâce à Internet, c'est la pertinence même du concept de radio transnationale qui se pose. RFI est donc appelée à développer une offre « bi-média » multilingue – radio plus Internet. Cette stratégie devrait faire l'objet d'un contrat d'objectifs et de moyens avec l'État.

J'en viens à France 24, dont le lancement est prévu le 6 décembre prochain, d'abord sur Internet, puis, trente-six heures plus tard, sur le câble et sur le satellite. La chaîne émettra dans un premier temps sur deux canaux : l'un 100 % en français, et l'autre 75 % en anglais et 25 % en français. Chacun s'accorde sur la nécessité, pour la France, de disposer d'une grande chaîne d'information internationale, à l'instar de BBC World, de CCN ou d’Aljazira. Espérons seulement qu'il n'est pas trop tard…

Nous sommes tous très favorables à la création de cette chaîne, mais le lancement de France 24 est un pari incertain, lorsqu'on sait qu'une nouvelle chaîne a besoin d'au moins dix ans pour s'installer durablement dans le paysage audiovisuel. Un pari incertain, donc, mais qu'il faut gagner. Cela signifie avant tout réussir à faire coexister France 24 et TV5 Monde.

France 24 est l'unique chaîne financée par les services du Premier ministre. La subvention prévue par le projet de loi de finances pour 2007 s'établit à 70 millions d'euros. En réalité, le budget 2007 de France 24 sera de 86 millions d'euros, grâce à un report de crédits non utilisés sur l'exercice 2006. À la différence des autres opérateurs de l'audiovisuel extérieur, France 24 bénéficie d'un régime de faveur puisque la société – détenue à parité par TF1 et France Télévisions – a signé avec l'État une convention qui lui garantit jusqu'au 31 décembre 2010 le versement d'une subvention annuelle de 80 millions d'euros en valeur 2005.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Cela fait neuf minutes que vous parlez, monsieur Rochebloine.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Je termine, monsieur le président.

En application de la formule d'indexation, inscrite à l'article 8 de ladite convention, 80 millions d'euros en 2005 valent automatiquement 86 millions d'euros en 2007, soit une augmentation de 7,5 %.

Si l’on ne peut que se féliciter de la visibilité budgétaire donnée à France 24, pourquoi l'État ne s'engage-t-il pas de la sorte avec TV5, CFI et RFI ? On est en droit de s'interroger. Il serait regrettable que la création de France 24 ajoute à l'iniquité budgétaire dont souffrent les opérateurs du programme 115.

Telles sont les observations que je souhaitais formuler sur la mission Médias, pour son volet audiovisuel.

J’en viens, monsieur le ministre, aux questions que je souhaite vous poser. Elles sont au nombre de cinq. Les deux premières concernent plus particulièrement le ministre des affaires étrangères, mais peut-être pourrez-vous y répondre.

Premièrement, France 24 dépend des services du Premier ministre. Quelles raisons s'opposent à son rattachement au ministère des affaires étrangères ?

Deuxièmement, seriez-vous favorables, votre collègue et vous, à la réactivation du Conseil de l'audiovisuel extérieur français, qui ne s'est pas réuni depuis 1996 ? Si oui, à quelle échéance et avec quelles compétences ?

Troisièmement, certains opérateurs bénéficient de la redevance, d'autres pas. Seriez-vous favorable à ce que TV 5 et France 24 en bénéficient, au même titre que ARTE ?

Quatrièmement, vous nous avez indiqué la conclusion d’un contrat d’objectifs et de moyens avec RFI. Pouvez-vous nous en indiquer les grandes lignes et le calendrier d’application ?

Enfin, dernière question : TV5 et France 24 sont financées par le contribuable et visibles en France par diffusion satellitaire. Pourquoi ne seraient-elles pas disponibles gratuitement sur la TNT ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la culture et de la communication. Je lirai attentivement l’intégralité du rapport de Chantal Bourragué sur France 3.

France 3 doit sa réussite à sa stratégie et à une double attractivité : une programmation nationale particulièrement réussie et une proximité locale et régionale. Il ne faut surtout pas concevoir France 3 comme une sorte de fédération d’antennes régionales sans concept global. Au moment de l’élaboration du contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions, nous conforterons cette orientation réussie, suivie par France 3. La tranche d’information, articulée entre l’actualité nationale et locale, d’une grande attractivité, génère une forte audience et constitue une vraie réussite en termes de programme.

Vous avez évoqué par ailleurs le sujet particulièrement sensible des filières de production, et je souscris à vos propos. Les réflexions menées au sein du groupe France Télévisions consistant à mieux utiliser la filière de production sont positives. Mais il faut veiller à ne pas déstabiliser le secteur de la production indépendante française, notamment dans le domaine de la fiction et du documentaire. Un équilibre doit être respecté et nous en reparlerons lors de la négociation du contrat d’objectifs et de moyens. Je partage votre point de vue sur la nécessité d’articuler informations de proximité et stratégie nationale. Il ne faut pas oublier que c’est cette spécificité qui assure la réussite de France 3.

En ce qui concerne l’audiovisuel extérieur, le fait que le conseil des ministres siège au moment où vous vous réunissez rend difficile la présence du ministre des affaires étrangères. Mais, comme je travaille en étroite collaboration avec mon collègue, vous pouvez considérer que nous avons une parfaite identité de vues sur l’ensemble des sujets que vous avez évoqués. Vous connaissez la raison historique pour laquelle le budget de France 24 a été rattaché directement au budget du Premier ministre. Lors du lancement d’une opération nouvelle, chaque ministre se demande, à juste titre, si les moyens nécessaires s’imputent sur son budget. J’étais dans le bureau du Premier ministre quand il a été décidé que le budget affecté à France 24 s’imputerait sur le budget du Premier ministre et non sur les crédits extérieurs du ministère des affaires étrangères.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Qu’en sera-t-il à l’avenir ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Une évolution est toujours possible, mais, si les rattachements fonctionnels ont une grande importance, ce qui compte, c’est le lancement de cette chaîne d’information internationale. C’est une nécessité stratégique, directement inspirée de la volonté du Président de la République et du Premier ministre, et le fait qu’elle voie le jour nous permet de rattraper notre retard.

S’agissant du Conseil de l’audiovisuel extérieur de la France, le fameux CAEF, il est exact qu’il ne s’est pas réuni récemment. Mais il va le faire prochainement, car la concertation est toujours nécessaire. C’est la raison pour laquelle je souscris à votre proposition de réunir ce conseil, et je ferai le point sur cette question avec le Premier ministre et avec le ministre des affaires étrangères.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Quelles seront ses compétences ?

M. le ministre de la culture et de la communication. La mission du Conseil est de mettre au point la stratégie de coordination des différentes entités de l’audiovisuel extérieur et de rappeler, comme je vais le faire devant vous, les différences entre les missions de TV5 et celles de France 24. La vocation de TV5, c’est la diffusion de la langue française et la promotion de la francophonie. S’agissant de la chaîne d’information internationale, vous auriez pu mentionner la perspective de diffusion en langue arabe. Nous commençerons en langue anglaise et en langue française d’ici à la fin de l’année. Pour renforcer la communication à travers le monde, la diffusion en langue arabe se fera au cours de l’année 2007. Nous serons au rendez-vous, à l’instar de BBC World, qui commencera aussi à diffuser des émissions en langue arabe en 2007. L’enjeu est d’une extrême complexité, car il suppose le recrutement de journalistes pratiquant la langue arabe.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. À l’évidence, 86 millions n’y suffiront pas.

M. le ministre de la culture et de la communication. C’est une première étape. Une décision stratégique a été prise : mettre en place un outil de communication en langues étrangères à diffusion mondiale. Nous avons parlé de câble et de satellite, mais n’oublions pas que la chaîne sera aussi diffusée par Internet, et donc visible partout dans le monde. Les formats, les sujets et le contenu des programmes de France 24 ont été conçus pour être « interneto-compatibles ». Avant l’ouverture officielle de l’antenne, le 6 décembre à vingt heures vingt, la diffusion par Internet tiendra lieu de « répétition générale ». J’espère qu’elle sera une réussite. Par ailleurs, il me paraît effectivement naturel de renforcer les synergies entre RFI, l’AFP, France 24. Certaines sont d’ailleurs déjà prévues. C’est particulièrement important pour les journalistes présents en différents endroits du monde.

Il n’est pas prévu que France 24 et TV5 bénéficient de la redevance. Pour cette dernière, il s’agirait d’ailleurs d’une « redevance au carré », puisqu’une partie de ses programmes proviennent de chaînes qui en ont elles-mêmes bénéficié. Sauf à modifier profondément tout le système, le financement doit donc être assuré directement par l’État.

Les chiffres sont toujours perfectibles, mais ne croyez pas que leur évolution traduise un désintérêt de l’État pour Radio France Internationale, dont le rayonnement est exceptionnel et que nous soutenons. Chaque fois que vous intervenez sur RFI, vous sentez d’ailleurs peser sur vos épaules une responsabilité particulière du fait de sa diffusion au-delà de nos frontières. L’occasion m’est d’ailleurs donnée de rendre hommage à ses équipes, d’une remarquable diversité rédactionnelle et linguistique. Quant à la date de la signature du contrat d’objectifs et de moyens, elle n’est pas encore arrêtée. Nous continuons à y travailler avec mon collègue des affaires étrangères.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Et la TNT ?

M. le ministre de la culture et de la communication. J’ai parlé d’une diffusion par Internet en plus du câble et du satellite, mais pas de la TNT.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Monsieur Rochebloine, qu’il s’agisse de l’agriculture, des médias, des anciens combattants, de l’éducation, on peut toujours penser qu’il manque des crédits. Je vous suggère toutefois d’organiser une réunion de coordination avec un certain membre de votre groupe qui nous reproche sans cesse de ne pas maîtriser la dépense publique et de ne pas réduire le déficit (Sourires) 

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Charles de Courson !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. En bref, je vous invite à faire preuve de cohérence politique.

Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.

M. le ministre de la culture et de la communication. Les dépenses que je vous propose correspondent à une nécessité stratégique.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Ce n’était pas à vous que mes propos s’adressaient…

M. le ministre de la culture et de la communication. Je l’ai bien compris.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Ma remarque ne portait pas sur une question de financement.

M. le ministre de la culture et de la communication. Dans l’état actuel des choses, il est prévu une diffusion par câble, satellite et Internet. Les ressources liées à la TNT n’étant pas infinies, des arbitrages sont nécessaires. L’objectif reste la diffusion la plus large possible, et à cet égard, Internet représente une chance que nous comptons bien saisir.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je maintiens l’observation que j’ai faite, et je constate que M. le rapporteur général du budget et de nombreux membres de la commission des finances partagent mon point de vue. Nous devons tenir compte de la réalité. On ne peut pratiquer le double langage.

M. Jacques Myard. C’est ce qu’on appelle les partis charnières…

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Ma remarque n’était pas d’ordre financier. Je souhaitais seulement faire une comparaison entre audiovisuel externe et audiovisuel interne.

M. le ministre de la culture et de la communication. Sachez en tout cas que chaque euro supplémentaire consacré à la culture et à la communication est un investissement pour l’avenir de notre pays. De telles dépenses, il convient d’en user sans modération.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Dans tous les cas, une évaluation critique me semble toutefois nécessaire…

M. le ministre de la culture et de la communication. Certainement.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Nous en venons aux questions.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. J’ai supprimé une grande partie de mes questions pour aller plus vite, mais il en reste tout de même quelques-unes.

Quand signerez-vous, monsieur le ministre, le contrat d’objectifs et de moyens entre Radio France et l'État ? Envisagez-vous, le cas échéant, de négocier un avenant à ce contrat si les décisions qui seront prises sur la radio numérique en bouleversaient le contenu et l'équilibre ?

De même, envisagez-vous d'actualiser la définition de la publicité autorisée sur les antennes de Radio France ? Compte tenu de l’évolution du statut juridique d’un certain nombre d’annonceurs, il n’est plus réaliste de s’en tenir aux critères de 1975.

S'agissant du contrat d’objectifs et de moyens d'ARTE, sur quel calendrier de signature pouvez-vous vous engager ?

En ce qui concerne la redevance, sa réforme a plutôt bien réussi. Si on voulait toucher à son montant, …

M. Gilles Carrez, rapporteur général. À la baisse, vous voulez dire ? (Sourires.)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. N’en demandez pas trop, monsieur le rapporteur général !

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. …il ne faudrait le faire, me semble-t-il, qu’après avoir épuisé les possibilités d’économies et de synergies dans la gestion des entreprises qui en bénéficient et après avoir été jusqu’au bout du remboursement des dégrèvements ainsi que des possibilités de perception sur des récepteurs autres que les téléviseurs. Ce n’est que dans l’hypothèse où toutes ces voies auraient été explorées, et si les besoins de l’audiovisuel public le justifiaient vraiment, que l’on pourrait se poser la question d’une augmentation de la redevance, actuellement à l’état de rumeur.

En matière de télévision numérique terrestre, où en sont les accords transfrontaliers ? Ils représentent une condition importante pour atteindre l’objectif d’une couverture de 85 % du territoire à la fin de l’année 2007. L’État est-il prêt à financer des mesures pour favoriser l’équipement des Français et accélérer le basculement vers la TNT ? Comment fonctionne le fonds créé à cet effet ? Où en est la réflexion sur la TNT outre-mer ? Avez-vous déjà un bilan des travaux confiés à Jean-Michel Hubert sur ce sujet ?

François Rochebloine a largement abordé la question de l’audiovisuel extérieur. Je souhaite cependant savoir si vous soutenez l’idée d’une réactivation du Conseil de l’audiovisuel extérieur de la France. Par ailleurs, je suggère la création d’une annexe au projet de loi de finances consacrée à l’activité et aux moyens de l’audiovisuel extérieur. Il me semblerait intéressant, en effet, de disposer d’une lecture d’ensemble de cette politique.

S’agissant de la radio, pouvez-vous nous préciser le calendrier et les enjeux réels du déploiement de la radio numérique ? Où en est la réallocation des fréquences dans le cadre du projet FM 2006 ?

En ce qui concerne la mise en œuvre de la LOLF, je constate que les aides à la presse font encore le grand écart entre la mission « Médias » et la mission « Développement et régulation économiques » : ce n'est pas normal.

Les 161,7 millions d'euros prévus pour l'aide au transport postal en 2007 et fondus parmi les crédits du ministère de l'industrie devraient figurer dans le programme « Presse » : une imputation de tous les crédits sur le même programme nous permettrait peut-être de comprendre pourquoi l'aide au transport postal du ministère de l'industrie baisse de 5,2 % entre 2006 et 2007, alors que celle du ministère de la culture progresse de 6,3 %.

Enfin, s’agissant de la mission « Avances à l'audiovisuel public », quelles raisons s’opposent à un découpage en autant de programmes que d'opérateurs, c'est-à-dire cinq, plutôt que trois actuellement ? Des programmes plus étroitement liés aux contrats d’objectifs et de moyens iraient dans le sens de la transparence, que nous souhaitons tous promouvoir.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la culture et de la communication. Cela fait beaucoup de questions ! En ce qui concerne Radio France, le contrat d’objectifs et de moyens sera signé par le ministre délégué au budget et moi-même quand nous aurons recueilli les remarques et propositions de votre commission des finances. Je le répète, il me paraît logique et de bon sens de procéder à un avenant au contrat en cas de modification de l’environnement technologique, économique ou juridique d’une société de l’audiovisuel public. Cela vaut pour Radio France, et notamment pour la radio numérique.

Je connais les propositions de modification du périmètre de la publicité autorisée sur les antennes de la radio publique formulées par le président de Radio France. Mais Jean-Paul Cluzel connaît également ma position : je ne souhaite pas déstabiliser le marché publicitaire de la radio au moment de l’ouverture de la publicité télévisée au secteur de la distribution. La prudence me semble nécessaire en ce domaine. Quoi qu’il en soit, la signature du contrat ne saurait avoir lieu plus tard qu’au début de l’année prochaine.

Je suis très heureux que vous évoquiez la singularité d’ARTE. C’est une source de fierté. Pour autant, je ne voudrais pas qu’ARTE apparaisse comme une sorte d’alibi culturel dans le paysage audiovisuel français : l’ensemble de l’audiovisuel public est tenu à une présence forte dans ce domaine. France Télévisions s’acquitte d’ailleurs de cette mission avec talent.

Je souhaite que le contrat d’objectifs d’ARTE France soit prêt avant la fin de l’année. Dans ce but, je me concentre sur la stratégie d’avenir de la chaîne et la définition de ses objectifs. En septembre, son président a orienté sa stratégie, baptisée « ARTE global », autour de la notion générique de média global. C’est autour de l’approfondissement de ce concept que les discussions se poursuivent avec l’État. Elles portent sur la stratégie éditoriale de la chaîne et sur la nécessité d’une valeur ajoutée en termes d’identité européenne, de qualité des programmes et d’effet d’entraînement sur les industries cinématographique et audiovisuelle. Beaucoup d’entre vous sont, à juste titre, particulièrement attachés à cet aspect.

La stratégie future passe aussi par un approfondissement de la dimension européenne. J’aurai au début de l'année prochaine une réunion de travail avec les ministres de la culture et de la communication des vingt-cinq pays membres de l’Union européenne ainsi qu’avec des représentants européens de l’audiovisuel public.

Pour toute entreprise audiovisuelle, je n’ai qu’une exigence : que tout financement supplémentaire soit orienté vers les programmes et vers le soutien à la création et à la diversité, pour le plus grand bénéfice des spectateurs et des auditeurs.

S’agissant de la redevance et du bilan de sa réforme, les recettes pour 2005 ont été moindres que prévu, malgré une augmentation de 1,3 % par rapport à 2004. Depuis le début de l’année 2006, de nouvelles demandes d’exonérations pour non-détention de téléviseurs en 2005 ont été adressées au service et ont, depuis, donné lieu à de nouveaux dégrèvements. Parallèlement, le dispositif de contrôle est monté progressivement en puissance en 2006. Dans ces conditions, les prévisions pour 2006 et 2007 sont empreintes d’une certaine prudence et justifient que l’on reconduise pour 2007 le montant proposé en loi de finances pour 2006, soit 2,3 milliards d’euros.

Ces prévisions nous confortent d’ailleurs dans le jugement globalement positif, que vous partagez, sur la réforme : une plus grande justice sociale – je rappelle que près d’un million de personnes supplémentaires, principalement des personnes âgées et des bénéficiaires du RMI, ont été exonérées –, une plus grande simplicité pour les contribuables grâce à l’adossement de la redevance à la taxe d’habitation ; enfin, la modernisation de l’administration, avec une réduction des coûts et une plus grande efficacité. Il ne faut pas nier, pour autant, les difficultés rencontrées et les questions que pourraient poser, à terme, les évolutions technologiques. Néanmoins, tous les enseignements de cette réforme récente n’ont pas encore été tirés. Une nouvelle réforme de la redevance n’est, par conséquent, pas d’actualité. C’est pourquoi le projet de loi de finances pour 2007 n’intègre ni modification de l’assiette ni augmentation du montant de la redevance.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Très bien !

M. le ministre de la culture et de la communication. Il est proposé de reconduire les dispositifs de garanties de ressources en complétant par un abondement, au budget général, des recettes tirées de la redevance.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Cela vient spontanément du Gouvernement !

M. le ministre de la culture et de la communication. Vous garantissez ainsi à l’audiovisuel public, et vous avez raison, les ressources nécessaires. Je souhaite, de manière plus globale, que l’on mène ensemble une véritable réflexion sur le financement de ce secteur public, notamment au regard de l’impact de la convergence des médias. J’ai été, de ce point de vue, très attentif aux travaux menés par la mission d’information sur l’audiovisuel public conduite par Dominique Richard, qui peuvent constituer une base de réflexion dans les mois à venir. Je rejoins les propos de Pierre Méhaignerie : les comparaisons européennes doivent nous inciter collectivement à débattre en profondeur de la stabilité et de l’évolution du financement de l’audiovisuel public dans le cadre doublement concurrentiel de l’achat de programmes et des ressources publicitaires.

Il ne s’agit pas de nous aligner immédiatement sur le prix de la redevance beaucoup plus élevé dans d’autres pays de l’Union européenne, mais de garantir des recettes pérennes à l’audiovisuel public.

Pour ce qui est des accords transfrontaliers et de la TNT, j’aurais peut-être l’occasion d’y revenir en réponse à d’autres questions, notre objectif est très clair : faire en sorte que l’ensemble de nos concitoyens bénéficient de cette révolution technologique extraordinairement positive, puisqu’elle a consisté à multiplier par trois le nombre de chaînes gratuites. Le plan se déroule de manière très cadencée. Depuis le 19 octobre et le lancement de la quatrième phase de la TNT, le taux de couverture en France est de 65 % contre 58 % en juin dernier. Pour parvenir à couvrir l’ensemble du territoire, nous travaillons autour de trois axes avec un calendrier précis : ouvrir d’ici à 2007 les 115 sites programmés pour atteindre un taux de couverture de 80 % ; planifier l’accélération de la mise en place de services complémentaires, mesure qui figurera d’ailleurs dans le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur que je présenterai au Sénat puis à l’Assemblée nationale ; lancer au plus tard au début de l’année 2007 un bouquet de satellites sans abonnement reprenant les chaînes gratuites de la TNT, afin de compléter la couverture terrestre pour que l’égalité de nos concitoyens face à la TNT devienne une réalité. Ce complément satellitaire est indispensable pour que les chaînes de la TNT puissent être reçues dans les zones où la diffusion en numérique hertzien terrestre sera impossible. Les discussions sont, comme vous le savez, engagées et se poursuivent. Le comité stratégique pour le numérique examine les différentes options possibles, y compris celles qui consisteraient à diffuser ces chaînes sur plusieurs positions orbitales. J’espère que ce comité pourra faire émerger un consensus. Il y travaille très activement.

En ce qui concerne l’outre-mer, il est évidemment très important que nos concitoyens soient égaux dans ce domaine. J’ai eu l’occasion, dans le courant du mois de septembre, de me rendre en Martinique et en Guadeloupe, de visiter les studios de RFO et de constater l’importance des dispositions prises et des investissements réalisés dans le domaine du numérique. Même si je ne l’ai pas relevé tout à l’heure, je trouve, pour utiliser une expression diplomatique – je m’exprime ici devant des membres de la commission des affaires étrangères –, absolument inapproprié de mélanger dans un même agrégat les crédits de TV5 et de RFO et ceux de l’action extérieure de la France.

Mme Christine Boutin. Très bien !

M. le ministre de la culture et de la communication. L’égalité sur le territoire national dans le domaine de la communication, de la presse, est un objectif politique d’égalité entre nos concitoyens, l’action extérieure de la France correspond à une autre réalité.

J’ai déjà partiellement répondu aux questions portant sur la nécessaire réunion du Conseil audiovisuel extérieur de la France sur la radio, la numérisation et la réallocation d’un certain nombre de fréquences. Je tiens tout d’abord à saluer le travail considérable effectué par ce conseil, travail qui permet, par les fréquences supplémentaires qui ont pu être trouvées, de valoriser la pluralité et la très grande diversité de l’offre française dans le domaine de la radio. La radio numérique, qui ne se présente pas tout à fait de la même manière que la télévision numérique hertzienne, est évidemment un enjeu très important pour l’avenir du paysage radiophonique. Le paysage radiophonique français est très riche et très diversifié, même si – et on peut, bien sûr, le regretter –, toutes les radios ne sont pas présentes partout. Ce n’est pas un univers de pénurie, mais ce n’est pas, loin s’en faut, une raison pour ne rien faire. Ainsi, la loi du 9 juillet 2004 a créé le cadre juridique pour la radio numérique. Après une première consultation publique qui a montré l’intérêt des éditeurs de services de radio pour la radio numérique, le CSA vient d’en lancer une autre, le 3 octobre dernier, en vue d’un appel aux candidatures pour la diffusion en mode numérique de services locaux et nationaux de radios. De mon côté, j’ai décidé, avec le ministre délégué à l’industrie, de recueillir l’avis des acteurs sur les normes techniques de diffusion de la radio numérique. Nous sommes, en la matière, dans une phase très active.

Qu’il faille un document de cohérence en matière d’audiovisuel extérieur ne me pose strictement aucun problème. La LOLF a en effet permis des évolutions. Les synergies ont beaucoup d’importance. Les observations que nous pouvons mener dans d’autres pays de l’Union européenne sont riches d’enseignements, même si chaque pays a sa structure spécifique.

Enfin, je n’ai pas d’objection au rapatriement vers mon propre budget des crédits du transport postal de la presse inscrits au budget de l’industrie.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Ce serait plus clair, en effet !

M. le ministre de la culture et de la communication. J’y suis même favorable. Je suis généralement d’ailleurs un assez bon défenseur de mes propres crédits !

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Absolument !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Personne ne contestera cette dernière information, monsieur le ministre !

M. le ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président de la commission des finances, je souhaiterais que mon budget soit proportionnel au nombre de sollicitations que je reçois des parlementaires le mardi et le mercredi lors des questions au Gouvernement. (Sourires.)

On pourrait d’ailleurs élaborer une sorte de tableau des sollicitations et indexer les évolutions de mon budget en fonction des réponses que je dois apporter à vos demandes toutes légitimes !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. D’où la nécessité de mieux délimiter les compétences des uns et des autres !

La parole est à M. Didier Mathus.

M. Didier Mathus. Force est de constater que la procédure de la commission élargie n’est guère propice à l’expression de points de vue. J’essaierai d’être bref et je me limiterai à deux questions.

Il faut replacer l’examen de ce budget dans un contexte. Il serait en effet fallacieux d’examiner les chiffres hors de tout contexte quand il s’agit des médias, de l’information et, donc, de la démocratie. Le paysage audiovisuel français est marqué, contrairement aux propos de M. le ministre, par le très faible pluralisme des moyens d’information dans notre pays. La réalité est presque statistique. Ils sont détenus dans notre pays par des groupes puissants peu nombreux – Lagardère, Dassault et Bouygues –, qui ont tous, de plus, des activités dans d’autres branches industrielles. Nous sommes le seul pays à peu près démocratique où le patron d’un magazine peut être limogé parce qu’une couverture a déplu au ministre de l’intérieur. Cela crée donc un climat quelque peu singulier et un contexte très particulier dont nous ne pouvons faire abstraction lorsque l’on parle des missions de l’audiovisuel public. En effet, ces groupes dominent à eux seuls environ 70 % de l’information. La faiblesse du pluralisme doit être un sujet de préoccupation pour l’État.

Nous sommes, de plus, confrontés à un changement profond qui a résulté de la révolution numérique, avec la désagrégation des grands médias fédérateurs que nous avons connus dans le passé et la possibilité de tailler sur mesure des médias quasi individuels : je pense notamment à l’apparition de la VOD, d’Internet, des blogs et des wikis.

Les questions qui se posent sur le destin de l’audiovisuel public sont aujourd’hui très graves. Les ressources des médias privés augmentent régulièrement et de façon assez spectaculaire certaines années. Dans le même temps, les ressources de l’audiovisuel public sont réduites par nécessité budgétaire – j’ai bien entendu le message de nos collègues de la commission des finances –, à la portion congrue. Le rythme d’évolution des dépenses est sans commune mesure entre l’audiovisuel public et l’audiovisuel privé à l’heure où la révolution numérique pose justement toute une série de questions extrêmement importantes sur le rôle de cet audiovisuel public.

Je suis frappé par l’incapacité de l’État à dire précisément ce qu’il attend de l’audiovisuel public, qu’il s’agisse de télévision ou de radio. Ce n’est pas lié au budget de cette année ou aux précédents, mais c’est récurrent dans notre pays. Nous ne disposons en effet pas des outils administratifs, financiers et politiques adaptés en dépit des sommes importantes mises sur la table.

Contrairement à ce que beaucoup croyaient, il y a vingt ans, la télévision et la radio publiques sont absolument essentielles. Peut-on faire confiance, par exemple, aux journaux de M. Lagardère pour nous informer sur la crise que traverse Airbus ou à ceux de M. Dassault lorsqu’ils parlent du programme Rafale ? Évidemment, non ! Nous avons donc besoin d’une télévision et d’une radio publiques indiscutables, rigoureusement indépendantes. Nous ne pouvons guère que faire confiance à l’information publique sur des enjeux aussi essentiels que seront dans les prochaines années la santé et l’environnement. L’État est aujourd’hui incapable de fixer dans ce domaine des grandes missions à l’audiovisuel public. La télévision publique, France 2 en particulier, vit une crise profonde d’identité qui n’est pas sur le point de s’estomper, au contraire. On ne sait plus très bien à quoi sert cette chaîne, quelles sont ses missions.

J’ajoute que la croissance des ressources publiques est bien plus faible que celle des ressources propres. On va demander plus à la publicité, et donc à l’audience. Une fois encore, ce que la nation attend de l’audiovisuel public paraît dilué dans des contingences budgétaires car, si l’on accroît l’impact de l’audience sur le financement, on est forcément moins exigeant en matière d’indépendance et d’esprit public.

Il y a quelques années, une loi a essayé de définir ce que devaient être les parts respectives de la publicité et des ressources publiques dans la télévision publique, dans le groupe France Télévisions. Avez-vous un point de vue à ce sujet ? Comment pensez-vous que cela puisse évoluer ?

Il y a tout de même un domaine dans lequel vous avez réussi, c’est le verrouillage et le noyautage politique de l’audiovisuel public. On ne pousse plus une porte à France Télévisions sans croiser un ancien membre de cabinet ministériel du gouvernement en place et, dans l’ensemble de l’audiovisuel public, on croise même souvent beaucoup de gens qui ont proclamé leurs affinités avec l’UMP. Je ne crois pas que ce soit bon au moment où l’on a besoin d’avoir un audiovisuel public indépendant, fort et puissant.

Un mot sur RFI. Elle a un potentiel formidable et il est dommage de la laisser à l’abandon comme vous le faites aujourd’hui. Je crois que la radio est un média d’avenir, sous des formes certes différentes de celles qu’on a connues, qui est déjà très puissant dans de nombreux pays, en particulier en Afrique. Il est donc vital d’essayer d’épauler RFI dans cette période un peu difficile.

Enfin, on ne peut pas en faire l’économie aujourd’hui, un dernier mot sur la crise de la presse écrite. On connaît les difficultés de Libération, mais, au-delà de Libération, de L’Humanité et de France Soir, on voit bien que tout le modèle traditionnel de la presse écrite est remis en cause. Or, encore une fois, c’est un enjeu décisif pour une démocratie d’avoir une presse diversifiée, pluraliste, vivante. Par le jeu des prises de participation croisées, les acteurs de la presse écrite sont très peu nombreux aujourd’hui. Certes, la presse écrite est confrontée au défi technologique de l’apparition des médias numériques mais, au-delà, il est vraiment temps de lancer un véritable plan Marshall. Sinon, nous ne communiquerons plus entre nous que par textos d’ici à quelques années, et je ne suis pas sûr que ce soit une bonne chose pour la démocratie. Quelles sont, monsieur le ministre, vos intentions en la matière ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Patrick Braouezec.

M. Patrick Braouezec. Je rejoins largement ce qui vient d’être dit sur l’indépendance et la déontologie d’un certain nombre de médias, et je pense notamment aux médias audiovisuels.

J’aimerais ainsi savoir, monsieur le ministre, ce que vous pensez du rôle assigné à certains médias dans des opérations policières récentes. À quelques jours d’intervalle, deux d’entre elles ont fait l’objet d’une médiatisation à outrance sur les chaînes publiques, ce qui a suscité de très vives réactions de la part du Syndicat national des journalistes, le SNJ. Dans les deux cas, les journalistes ont été invités à être les témoins privilégiés de ce déploiement de forces digne d’une fiction télévisée, voire convoqués à cette fin. Certains policiers et certains syndicats parmi les plus sérieux contestent d’ailleurs cette médiatisation qui, selon eux, est contre-productive pour leur travail de terrain.

L’élection présidentielle de 2002 a démontré les dangers de cette « sécurité-spectacle ». Les principaux responsables des médias publics s’engouffrent une fois de plus dans ce que l’on peut appeler une manipulation, en tout cas une information-spectacle, qui peut entraîner toutes les dérives. Que pensez-vous de ces opérations ? La neutralité des médias me semble être importante pour notre démocratie.

J’aimerais aussi évoquer une nouvelle fois les inquiétudes exprimées par le Syndicat national des journalistes de Radio France face à la diminution de l’information rédactionnelle des radios locales de France Bleu.

De nouvelles coupes budgétaires ont été pratiquées par Radio France, notamment dans les budgets jusqu’alors consacrés à l’information. Les journalistes de France Bleu, qui sont aussi les correspondants régionaux de France Inter et de France Info, devront, pour la première fois depuis des années, réduire le volume de l’information sur l’antenne. Or les reportages des radios locales représentent plus de la moitié du temps d’antenne pour l’information. Cette situation est perçue comme une catastrophe pour une radio de service public en cette année électorale. C’est pourquoi elle a entraîné, le 26 septembre dernier, une grève qui a été particulièrement suivie.

Enfin, je voudrais profiter de cette discussion pour parler de la TNT.

Un des articles du projet de loi promet des chaînes « bonus » aux opérateurs privés historiques, TF1, M6 et Canal +. En contrepartie, il leur est demandé de libérer au plus vite leur fréquence analogique. Un tel bonus n’est pas du goût des nouveaux entrants de la TNT : AB Groupe, BFM TV, Bolloré, Direct 8, et NRJ Group, NRJ12, qui dénoncent les risques de déstabilisation de la TNT et celui de voir cette technologie confisquée au profit de quelques-uns. Je crois qu’ils sont particulièrement remontés contre cet article. Les « indépendants » ont fait savoir qu’ils avaient adressé un courrier au Premier ministre dans lequel ils dénoncent avec la plus grande véhémence et avec indignation un projet qui « tend à renforcer encore davantage, au détriment des nouveaux entrants, la position dominante des trois groupes historiques ».

En toute logique, on ne voit pas en quoi une telle compensation était justifiable, puisque les extinctions de l’analogique ne seront validées que si l’équipement des foyers a atteint une proportion telle que ces éditeurs ne pâtiront pas du passage au tout numérique et parce qu’un canal « bonus » a d’ores et déjà été obtenu par les trois chaînes au cours du lancement de la TNT.

J’aimerais, monsieur le ministre, que vous nous répondiez sur ce point. Il y a une grande inquiétude et, comme un certain nombre de ces groupes audiovisuels sont situés dans ma circonscription, j’y suis particulièrement sensible.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Gilles Artigues.

M. Gilles Artigues. Le groupe UDF, que je représente ici, souhaitait faire des commentaires sur les chiffres, mais, selon votre souhait, monsieur le président, je m’en tiendrai à quelques questions.

Nous nous associons cependant à l’inquiétude de tous devant la situation délicate de la presse écrite. Nous souhaitons que soient organisés rapidement des états généraux de la presse écrite. Il nous semble souhaitable de nous pencher autant sur le sort de la presse régionale que sur celui de la presse nationale. Les regroupements imposés par des nécessités économiques n’ont pas que du bon, j’en suis d’ailleurs témoin dans ma ville de Saint-Étienne, où l’imprimerie du quotidien Le Progrès est appelée à se noyer dans un plus grand ensemble lyonnais, ce qui risque d’entraîner une moins bonne réactivité et, ainsi, une détérioration du service, pour des lecteurs moins nombreux.

Ce secteur de la presse écrite est d’ailleurs menacé par l’arrivée sur le marché, à Paris depuis déjà de nombreux mois et plus récemment en province, dans les grandes villes, des quotidiens gratuits. Qu’en pensez-vous, monsieur le ministre ?

J’en viens maintenant à quelques questions.

Pourquoi ne pas avoir saisi l’opportunité de la création de la CII pour rationaliser notre action audiovisuelle extérieure. Dans le budget, on parle de millions pour TV5 Monde, pour Canal France International, on évoque l’augmentation du sous-titrage de TV5, la relance de la radio en langue arabe RMC-Moyen Orient, filiale de RFI. N’aurions-nous pas pu mutualiser des moyens actuellement dispersés dans l’ensemble du secteur audiovisuel public ?

Nous souhaitions vous interroger sur les zones non couvertes par la TNT, particulièrement sur les zones frontalières, cela a déjà été évoqué tout à l’heure.

Nous avons le même souci de couverture avec le réseau France Bleu, qui est loin d’être présent sur tout le territoire. Certaines agglomérations, pourtant importantes en sont dépourvues, je pourrai là encore évoquer le territoire dont je suis l’élu. Qu’est-il envisagé pour développer ce réseau et selon quels critères ?

Les centres de formation des apprentis, sous prétexte qu’ils sont gérés par les chambres consulaires, ne se situent pas hors du champ d’application de la redevance audiovisuelle, ce qui n’est pas le cas des établissements d’enseignement public ou privé sous contrat d’association avec l’État. Ce sujet fera d’ailleurs l’objet d’un amendement défendu par l’UDF tout à l’heure, mais je souhaiterais d’ores et déjà avoir votre avis sur ce qui nous paraît être une inégalité. Cela représente une somme modique, qui ne semble pas en contradiction avec la volonté que vous avez affichée de ne pas modifier l’assiette de cette redevance.

Enfin, je souhaiterais évoquer avec vous l’avenir des chaînes indépendantes, et en particulier celles du câble et du satellite. Je vous en parle parce qu’elles ne sont pas mentionnées dans le projet de loi qui sera discuté dans quelques jours au Sénat et qui prévoit une série d’avantages pour les chaînes analogiques historiques et les récents bénéficiaires d’une autorisation en TNT. Ces chaînes indépendantes espèrent beaucoup des modes numériques futurs que constituent la télévision mobile personnelle et la télévision haute définition, alors qu’elles n’ont pu bénéficier d’autorisations en TNT nationale et que leurs chances d’accéder à la TNT locale sont minces. Il en va là encore du maintien du pluralisme.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. Monsieur le ministre, la langue française est un véhicule qui permet à la France d’avoir une stratégie d’influence, et il est tout à fait légitime que, sur le plan extérieur, nous nous appuyions sur elle.

À cet égard, je m’étonne que certains quotidiens nationaux utilisent parfois, avec l’aide de l’État, une langue autre que le français. Ainsi, un grand quotidien diffuse de manière hebdomadaire un supplément en langue anglaise. En avez-vous tenu compte dans l’attribution des aides à la presse ? Je ne vois pas pourquoi le contribuable français se ferait le relais d’une influence nord-américaine.

M. Jean-Jacques Descamps. C’est ringard !

M. Jacques Myard. Non, c’est très ouvert. Charité bien ordonnée commence par soi-même.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. Henri Nayrou.

M. Henri Nayrou. Mon intervention portera sur trois thèmes, les radios associatives, l’AFP et la presse écrite.

Concernant les radios associatives, monsieur le ministre, vous avez fait état d’une augmentation de 1,45 % du budget du fonds de soutien à l’expression radiophonique, qui passe de 23,75 à 24,1 millions d’euros.

Ce fonds est assis sur une taxe prélevée sur la publicité. Est-il exact qu’elle augmente de 8 % par an alors qu’on ne retrouve pas cette augmentation ? Je crois que la Cour des comptes a relevé cette anomalie.

Est-il exact qu’elle ait rapporté 25,1 millions d’euros en 2005 alors que la commission chargée d’attribuer le fonds ne s’est prononcée que sur 24,75 millions d’euros et que le budget de 2006 n’avait inscrit que 23,75 millions d’euros. Où est l’erreur ?

Enfin, jugez-vous normal que les professionnels demandent une enveloppe globale de 28 millions d’euros ?

Concernant l’AFP, quel est votre avis sur les missions, les moyens et l’avenir de cette agence de presse et qu’en est-il du bilan de contrat d’objectifs et de moyens signé en novembre 2003 ?

Enfin, la presse écrite. Je ne vais pas revenir sur l’état des lieux plus que préoccupant de ce secteur, qui témoigne de la respiration de la démocratie. Je renvoie à cet égard au rapport Loridant du 7 juillet 2004, qui dresse un sombre tableau. Je rappelle simplement que les ventes en 2005 ont baissé de 2,1 % pour les quotidiens et de 2,8 % pour les magazines et que 2006 voit cette chute s’accentuer. En 2006, selon le Financial Times, c’est la première fois qu’Internet a dépassé journaux et magazines comme principale source d’information aux lecteurs européens.

En réponse, vous avez énuméré quelques mesures de prévention et des chiffres. J’observe que votre budget s’élève, hors AFP, à 164,58 millions d’euros contre 172,33 l’an dernier, soit une baisse de 4,5 %. Pour parler clairement, ces mesures ne sont que des cautères sur une jambe de bois.

Essayons d’aller au-delà des éléments factuels et de répondre aux quatre questions du journaliste de base : où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?

Pourquoi ? Tout le monde le sait et je n’y reviendrai pas !

Comment concilier le sauvetage d’un levier de la démocratie citoyenne en péril, avec les aides directes ou indirectes de l’État à des entreprises privées, dont certaines, de surcroît, ne font pas du pluralisme et de liberté éditoriale l’une leurs priorités ? Le même dilemme se pose entre l’interventionnisme de l’État – qui n’est pas le tonneau des Danaïdes – et l’ambiance libérale qui incite à la concentration et aux petits arrangements entre actionnaires, aux dépens de l’intérêt des lecteurs.

Où trouver ces effets de levier – transport, distribution, diffusion, portage, promotion ? Des aides ciblées ne seraient-elles pas plus efficaces qu’une aide générique à la modernisation ? Tout cela devrait conduire à une profonde rénovation du système des aides d’État – passant selon M. Artigues, et je souscris à sa proposition, par des états généraux – qui fera peu de cas des petites supercheries ou de cachotteries budgétaires. Il faut une volonté politique, mais je ne sous-estime pas la difficulté à vaincre certains blocages.

Reste la question du « Quand ? ». Mais c’est une autre affaire ; personne ne sait ici de quoi demain sera fait !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de la culture et de la communication. Monsieur Mathus, l’action que nous menons en faveur de la presse sous toutes ses formes –audiovisuel public, presse écrite – mérite mieux qu’une caricature sommaire. Notre objectif, c’est le pluralisme. Ce n’est pas facile. D’une semaine sur l’autre, selon les évolutions économiques, la concentration est parfois crainte ou parfois souhaitée. Je crois comprendre, sans caricaturer votre propos, que vous pensiez qu’il fallait des groupes de presse plus puissants, pouvant concentrer davantage de moyens et peut-être de liens entre l’audiovisuel, l’écrit et le multimédia, sans articulation avec d’autres activités économiques. Cela suppose de faire évoluer des règles dont l’objectif est justement le pluralisme. C’est ce qui sous-tend l’ensemble de l’aide publique que l’État apporte. Ce pluralisme a donc véritablement droit de cité, même si nous restons très attentifs à certaines menaces.

Ainsi, la multiplication des chaînes d’information, rendues accessibles à nos concitoyens par la TNT, est directement issue des décisions prises par ce gouvernement, par cette majorité, et avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel.

M. Didier Mathus. Vous n’y êtes pas pour grand-chose.

M. le ministre de la culture et de la communication. Sur la TNT, j’y suis au contraire pour beaucoup ! À l’époque, personne ne pensait que nous aurions la force ni la lucidité de faire ces choix technologiques à l’image de ce qui a été réalisé en Grande-Bretagne. Je me suis rendu voilà deux ans, avec le président du CSA à Londres, à l’OFCOM ; j’y suis retourné à nouveau il y a quelques jours, pour faire le point des expériences étrangères. Il est en effet toujours très intéressant, pour pouvoir avancer, de tirer les leçons des erreurs parfois commises. Même si cela dérange, c’est à cette majorité présidentielle que revient d’avoir multiplié par trois le nombre de chaînes gratuites liées à la télévision et permis le pluralisme audiovisuel.

M. Didier Mathus. C’est la loi de 2000 qui l’a permis !

M. le ministre de la culture et de la communication. Aujourd’hui, vous avez raison, nous sommes dans une phase de grande effervescence, liée aux nouveaux modes d’information – vous avez parlé de la VOD, des blogs, d’internet. Notre objectif est de conforter ce pluralisme concret et d’anticiper les évolutions nécessaires. C’est la raison pour laquelle, avec un calendrier très précis, j’ai demandé à Marc Tessier d’établir une sorte de constat – critique s’il le faut – des modes actuels d’aide publique à la presse écrite, et d’examiner comment, dans la perspective du numérique, cette évolution peut se faire et de quelle manière l’accompagner. Nous ne faisons pas d’incantation, nous agissons. Ce projet de loi de finances porte précisément sur les ressources et les investissements nécessaires, notamment pour la presse écrite.

J’ajouterai – et ce n’est pas parce que cette réunion est ouverte à la presse – qu’à l’ère des nouvelles technologies rien ne remplacera jamais la signature d’un journaliste, d’un cameraman, d’un preneur de son, de tous ceux qui obéissent aux règles de déontologie dans l’exercice de leur profession.

Les premiers responsables de l’indépendance d’un journal sont les journalistes eux-mêmes. Que les critiques s’adressent à telle nouvelle structure de l’audiovisuel public extérieur, à tel journal ou à telle rédaction, les premiers responsables – au sens positif du terme – de l’indépendance et de la liberté d’expression restent les journalistes eux-mêmes.

M. Patrice Martin-Lalande, rapporteur spécial. Très bien.

M. le ministre de la culture et de la communication. Je trouve très choquant, qu’en matière d’information, on puisse opposer audiovisuel public et privé. Chaque rédaction – qu’il s’agisse de la presse écrite, de la radio ou de la télévision – a son propre mode de fonctionnement, ses règles de conduite. C’est à chaque journaliste qu’il appartient de dire s’il se sent libre ou non, s’il doit, comme la loi le lui permet, faire jouer parfois la clause de conscience. Cela ne veut pas dire que l’audiovisuel public n’a pas certaines missions spécifiques à accomplir dans le domaine de l’information, des magazines et de l’offre culturelle.

Vous nous reprochez d’être dans l’incapacité de définir une stratégie pour l’audiovisuel public. Au contraire, nous essayons d’accompagner son évolution, de lui donner les moyens d’accomplir librement sa fonction, ce qui est très important.

En réponse aux propos sur les verrouillages, sur les affectations des uns et des autres à tel ou tel poste, je rappelle que notre pays obéit à des règles, à des principes de déontologie. Des commissions sont parfois amenées à se pencher sur ces questions. La vie est aussi faite de mouvements professionnels. Dans l’entourage des hommes politiques – ministres comme parlementaires – les gens changent de fonction. C’est toujours leur déontologie qui est le principal moteur de l’indépendance. Ce n’est pas parce que l’on a appartenu au cabinet d’un ministre que, par définition, on n’est pas libre. Je ne citerai pas des exemples que nous avons tous à l’esprit, mais de grands dirigeants de l’audiovisuel public ont exercé d’autres responsabilités en d’autres temps. Ce qui compte c’est, à l’instant « T », le souci du pluralisme et de l’indépendance.

Vous parlez de plan Marshall. Je pourrais me contenter des chiffres. Nous avons, en effet, considérablement augmenté certaines d’aides – reposant parfois d’ailleurs sur l’expérimentation – pour répondre aux besoins. Je sens qu’il faut anticiper. C’est la raison pour laquelle dès que Marc Tessier m’aura remis, d’ici à la fin du mois de janvier, les conclusions de sa mission, j’ouvrirai une discussion avec l’ensemble de la presse et bien évidemment le Parlement y sera associé.

Le numérique est une révolution qui touche tous les domaines. Mon collègue de l’économie et des finances ira les jours prochains à Bruxelles pour défendre la diminution d’un certain nombre de taxes et l’extension aux services linéaires. Ce combat est important. Il doit permettre à chaque rédaction – radio, télévision ou presse écrite – d’adapter sa diffusion par Internet, avec des modes de rémunération qui peuvent évoluer.

Patrick Braouezec a évoqué le traitement de la violence dans les médias. Il sait très bien que chaque fois que se produisent des faits graves, la question de la responsabilité se pose. Comment traiter l’information ? De quelle manière respecter le besoin d’information ? Ce sont les rédactions qui en décident librement. Et je tiens à rendre hommage à l’esprit de responsabilité des journalistes. Nous sommes dans un monde d’images où l’image déclenche aussi parfois l’événement. Dans les conflits identitaires auxquels nous assistons, cette question de l’image est essentielle. Elle suppose encore une fois le respect de principes de déontologie que je n’ai pas à rappeler : je ne suis pas un ministre de l’information ! C’est à chaque rédaction d’apprécier. C’est l’honneur d’une équipe d’engager cette réflexion, parfois très nécessaire.

M. Patrick Braouezec. Je ne parlais pas de manière générale, je faisais référence aux deux interventions policières qui ont eu lieu au petit matin aux Tarterêts et aux Mureaux, en présence des caméras de télévision, alors que les maires n’étaient même pas avertis.

M. le ministre de la culture et de la communication. C’est, rédaction par rédaction, que s’apprécie la question de savoir si l’on couvre ou non un événement. Vous savez très bien, lorsque vous organisez un événement, que ce n’est pas parce que vous souhaitez la présence d’une équipe qu’elle viendra.

Parfois, la présence des médias au cœur de l’actualité la plus violente peut poser des problèmes de déontologie ou d’exercice des responsabilités. Les journalistes sont libres de traiter ou non tel ou tel sujet. Ce sont des questions d’une extrême difficulté. L’actualité, par définition, prime. Mais, l’esprit de responsabilité, c’est aussi de savoir de quelle manière tendre une caméra ou un micro, prendre une photo. Encore une fois, l’équilibre entre le besoin d’information, qui est une réalité, et tout ce qu’il peut générer, s’apprécie rédaction par rédaction.

En matière de TNT, je comprends la volonté des nouveaux entrants, d’autant mieux que ce sont les décisions que nous avons prises, le choix des normes que nous avons su faire en temps opportun, qui leur ont permis leur multiplication. De même, il est important de rappeler que, selon les chaînes, les budgets consacrés à la création cinématographique et audiovisuelle ou à l’information, par exemple, ne sont pas les mêmes. Toutes les chaînes ne se ressemblent pas : elles ont des structures et des budgets différents.

Cependant il ne faut pas dire n’importe quoi : il y a des principes juridiques dans notre pays, et le conseiller juridique du Gouvernement, c’est le Conseil d’État. Si nous voulons être au rendez-vous du basculement vers le numérique en novembre 2011, certains ajustements sont nécessaires. C’est la raison pour laquelle le Conseil d’État a exigé que, dans le respect de l’équilibre du projet de loi, certaines contreparties soient données aux chaînes dont la durée d’autorisation allait être réduite. C’est pourquoi nous avons fixé ces principes. Je crois que ce pluralisme est très important. Quant aux propositions des nouveaux entrants et des chaînes indépendantes, que certains d’entre vous ont évoquées, je les examinerai avec beaucoup d’intérêt.

En réponse à votre troisième question, Patrick Braouezec, je répondrai que c’est l’addition des stratégies nationales et des stratégies locales qui fait l’attractivité des chaînes de Radio France, notamment France Bleue.

Vous avez, Gilles Artigues, parlé des états généraux. Je vous rappelle que j’ai choisi de conjuguer action et anticipation : l’action, ce sont les négociations en cours visant à régler notamment, dans le respect du meilleur équilibre entre la presse nationale et la presse locale, les questions ayant trait à la modernisation sociale. Bien qu’il n’y ait pas de pénurie budgétaire, le problème est d’une complexité inouïe, puisque ces négociations sont un préalable nécessaire à toute restructuration ou concours direct. Nous avons essayé d’être le plus proches possible de réalités aussi importantes que la question des diffuseurs de presse écrite, ou du lectorat des jeunes. dans tous ces domaines, si nous sommes prêts à examiner toute proposition concrète, nous nous veillons à agir. C’est la raison pour laquelle les crédits ont beaucoup augmenté. La baisse de certaines lignes de crédits – je pense aux crédits liés à la modernisation – n’est due qu’à la non-consommation constatée au cours des années précédentes, et en aucun cas à une panne de projet.

D’autre part nous anticipons l’évolution des comportements des consommateurs. En matière de journaux gratuits par exemple, c’est l’éternel débat de savoir si le gratuit conforte ou précède le réflexe d’acquisition des autres journaux ou s’il s’y substitue.

Je voudrais d’ailleurs rendre un hommage sincère à la qualité du travail des rédactions. Il y a des réussites, en dépit de la concurrence entre supports d’information et des crises.

En ce qui concerne les chaînes d’information internationales, vous avez évoqué la nécessité d’une mutualisation ; j’ai employé le terme de synergies entre les équipes de RFI, de l’AFP, et de France 24, par la mise en commun de certains moyens. Les chaînes indépendantes doivent également jouer un rôle. Certaines seront d’ailleurs reçues au ministère pour nous présenter leurs propositions dans la perspective de la préparation du projet de loi.

Nous aurons l’occasion de débattre à nouveau de toutes ces perspectives dans les semaines qui viennent, notamment en ce qui concerne la haute définition. Nous avons rattrapé notre retard dans ce domaine et nous serons au rendez-vous, comme nous l’avons été pour le haut débit. Il y a des moments où la structure politique, administrative et économique française est un handicap, et il y a des moments où elle est un avantage. Ce sera le cas pour la feuille de route que m’a tracée le Président de la République en matière de haute définition et de télévision numérique personnelle. Notre calendrier est similaire à celui de nos amis britanniques par exemple, puisque la Grande-Bretagne basculera dans le numérique en 2012, et nous en novembre 2011. il s’agira dans les deux cas d’un basculement progressif, région par région, en fonction des besoins régionaux, l’objectif étant qu’il n’y ait pas de fracture numérique.

J’étais il y a quelques jours en Corée, dont le système offre des similitudes avec le nôtre. Ce pays a décidé d’interdire par voie législative la fabrication des postes analogiques en vue du basculement vers le numérique. Mes interlocuteurs britanniques de l’OFCOM, l’équivalent du CSA, à qui je demandais avant-hier s’ils envisageaient une telle interdiction, en ont été extrêmement choqués.

Cela me permet une transition avec votre question, Jacques Myard. je n’ai pas à décider si un journal doit ou non publier un supplément…

M. Jacques Myard. Ce n’est pas la question, monsieur le ministre, avec la permission de M. le président. Je ne conteste pas à ce journal le droit de faire ce qu’il fait. Je me demande seulement si nous, contribuables, avons à subventionner la propagation d’une culture étrangère.

M. le ministre de la culture et de la communication. Le fait que Le Monde – puisque c’est de lui qu’il s’agit, je suppose – publie en encart des extraits d’un journal européen ne remet pas en cause le système des aides directes à la modernisation de la presse écrite.

M. Jacques Myard. Mais bien sûr que si ! Charité bien ordonnée ! Est-ce que la BBC…

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Tout le monde a bien compris votre question, monsieur Myard, même si je ne suis pas sûr que chacun se la pose !

M. Jacques Myard. Eh bien nous continuerons à taper sur ce clou !

M. le ministre de la culture et de la communication. Cela aurait à la rigueur de l’importance s’il s’agissait d’une aide au portage puisqu’un supplément peut modifier le poids du journal, mais le système français d’aide à la presse n’est pas fondé là-dessus.

En ce qui concerne les radios associatives, auxquelles M. Henri Nayrou attache beaucoup d’importance, je rappelle que le montant prévisionnel du produit de la taxe alimentant le FSER est fixé à 24,1 millions d’euros pour 2007, contre 23,75 en 2006. Ce montant sera attribué à près de 600 radios associatives qui accomplissent une mission sociale de proximité essentielle et qui contribuent ainsi à la cohésion sociale. Elles occupent une place particulière dans le paysage radiophonique français. J’ai d’ailleurs assisté à leur congrès qui s’est tenu il y a quelques semaines en Charente. En réponse à leurs inquiétudes, j’ai rappelé l’importance du principe de leur indépendance et de l’automaticité des aides. Comme je l’avais annoncé l’année dernière, le système a été réformé afin d’optimiser l’utilisation des ressources tout en maintenant l’équilibre général du système. Un certain nombre de problèmes concrets d’organisation administrative et financière sont désormais réglés.

En dépit des défis et des difficultés, l’Agence France Presse est l’une des trois premières agences de presse mondiales. C’est un atout pour la presse française, le rayonnement de la France et le pluralisme de l’information dans le monde. je vous engage à aller au siège de l’AFP en cas d’événement international majeur pour voir combien de journaux du monde entier reprennent ses informations, ses graphiques, ses images. C’est une entreprise mondiale, qui travaille pour de nombreuses entreprises dans le monde entier.

Nous nous sommes engagés sur l’évolution de nos abonnements jusqu’en 2007 dans le cadre d’un contrat d’objectifs et de moyens qui a été signé le 20 novembre 2003. Cet effort se traduira en 2007 par une nouvelle augmentation substantielle des abonnements de l’État à l’Agence France Presse. Ces derniers s’élèvent en effet à plus de 109 millions d’euros, soit une progression par rapport aux crédits votés pour 2006 de 1,6 %.

L’AFP cherche légitimement à se positionner sur les marchés déterminants de la vidéo et du multimédia. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes engagés à signer sur ce sujet un avenant.

À ceux qui parlent de cautère sur une jambe de bois, je réponds que j’ai la passion du pluralisme, comme chacune et chacun d’entre vous. Les défis sont nombreux, et il faut parfois faire montre d’une grande subtilité pour apporter des solutions concrètes – je pense notamment aux dispositions que nous avons prises en faveur de quotidiens à faibles ressources publicitaires, comme La Croix ou L’Humanité. Quant à l’avenir de Libération, c’est pour moi une question essentielle en ce qu’elle concerne le pluralisme de la presse. Certaines dispositions du projet de loi de finances pour 2007 prévoient un accroissement des subventions aux journaux. Le problème est celui, général, de la capitalisation des journaux, qui ont besoin d’investissements supplémentaires. Sans vouloir interférer dans des négociations où je n’ai pas à intervenir, je souhaite que l’avenir de ce quotidien, comme celui de l’ensemble de la presse quotidienne, soit assuré.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Ma question, qui sera brève, concerne TV5 Monde. Depuis hier, la Roumanie, qui a accueilli le dernier sommet de la francophonie, en présence du Président de la République française, ne reçoit plus TV Monde à la suite d’une rupture de contrat avec le satellite Astra. Quel est votre sentiment là-dessus ?

M. le ministre de la culture et de la communication. Le câble et le satellite ne sont pas les seuls moyens de diffusion extérieure : l’Internet pallie parfois certaines exclusions.

M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Vous avez dit tout à l’heure que TV5 Monde, c’était la francophonie !

M. le ministre de la culture et de la communication. Je ne dis pas qu’il s’agit d’une solution satisfaisante, et je veillerai à ce qu’on puisse assurer sa diffusion satellitaire.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances. Je remercie personnellement M. le ministre et je salue son effort, que chacun reconnaît, pour assurer les moyens du pluralisme. Par ailleurs, je fais miennes les observations d’un certain nombre de collègues et de M. le ministre selon lesquelles il convient de rechercher, aussi souvent que possible, la mutualisation des moyens et la simplification des structures. En effet, convenons-en, il existe en France une certaine tradition d’empilement des structures qui ne facilite pas toujours la compréhension du citoyen.

Je remercie également la presse, les rapporteurs et les intervenants et je rappelle à nos collègues qu’ils doivent rester en séance afin que chaque commission se prononce sur les crédits.

(La réunion de la commission élargie s’achève à midi.)