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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale

Compte rendu
intégral

Troisième séance du jeudi 23 novembre 2006

64e séance de la session ordinaire 2006-2007

PRÉSIDENCE DE M. YVES BUR,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

rappel au règlement

M. Michel Vaxès. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès, pour un rappel au règlement.

M. Michel Vaxès. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéas 1er et 4.

Monsieur le président, depuis le début de cette discussion, nous subissons des modifications de l’ordre du jour extrêmement gênantes pour le bon fonctionnement de notre assemblée.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout à fait !

M. Michel Vaxès. Un projet de loi est venu en discussion, que nous n’attendions pas, puis un amendement est déposé sur le présent texte, qui porte en fait sur le précédent. On nous annonce encore qu’un amendement portant article additionnel après l’article 12 sera discuté avant l’article 1er, en raison des obligations d’un ministre. Je peux comprendre qu’il y ait des contraintes d’emploi du temps, mais il ne faudrait pas que cela nous prive de la possibilité de répondre aux interpellations. C’est pourtant ce qui s’est produit à la fin de la séance précédente. C’est pourquoi nous avions convenu, avec votre prédécesseur à la présidence, que je ferai un rappel au règlement au début de la présente séance pour répondre aux commentaires de M. Bénisti s’agissant d’un fameux colloque sur la prévention de la délinquance.

Vous seriez bien inspiré, monsieur Bénisti, de faire preuve de modération dans vos appréciations. Lorsque votre rapport, qui a largement inspiré le présent projet de loi, est paru, l’émotion a été grande. Avec mon collègue Patrick Braouezec, nous avons pris l’initiative d’organiser un colloque sur la prévention de la délinquance, dont vous avez minimisé l’importance en prétendant qu’il ne fut que la réunion d’un quarteron de syndicalistes…

M. Jean-Christophe Lagarde. Le couteau entre les dents !

M. Michel Vaxès. …résolument hostiles à votre rapport. En fait de syndicalistes, se sont exprimés dans ce colloque, qui a réuni beaucoup de personnalités aussi diverses que reconnues, notamment un psychiatre spécialiste du monde des adolescents et directeur de clinique, ni syndicaliste ni communiste, plusieurs magistrats, dont certains chargés de cours à l’École de la magistrature, des juges pour enfants, trois sociologues directeurs de recherche au CNRS, deux chercheurs, un écrivain, un philosophe, une directrice départementale de la PJJ, un directeur départemental de l’enfance et de la famille, un juriste docteur en droit international, le secrétaire général de la défenseure des enfants.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tous des révolutionnaires !

M. Michel Vaxès. Le travail fort sérieux effectué durant ce colloque a débouché sur des orientations totalement à contre-pied de votre rapport, mon cher collègue, ainsi que des dispositions du projet de loi soumis à notre discussion.

L’incident est clos. Je vous remercie de votre attention.

prévention de la délinquance

Suite de la discussion d’un projet de loi
adopté par le Sénat

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la prévention de la délinquance (nos 3338, 3436).

Cet après-midi, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 25 portant article additionnel avant l’article 1er.

Discussion des articles (suite)

Avant l’article 1er (suite)

M. le président. Avant de donner la parole à M. Blazy, qui me l’a demandée, je précise que, afin que nos travaux se déroulent le plus normalement possible, je donnerai la parole, pour chaque amendement, à un orateur chargé de le défendre, puis au rapporteur et au ministre, et enfin à un orateur pour et à un autre contre. Si vous estimez que le débat mérite d’être prolongé, faites-le moi savoir. Je vous propose cette règle pour que la discussion puisse progresser, en laissant à chacun la possibilité de s’exprimer.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Nous avons eu, au cours de la précédente séance, un excellent président, mais nous savons que celui de ce soir est bon aussi.

M. Philippe Houillon, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Entre excellent et bon, il y a une nuance !

M. le président. Je tâcherai, moi aussi, d’être excellent ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Blazy. Nous ne doutons pas de votre intégrité et nous vous faisons confiance, monsieur le président. Mais nous souhaiterions obtenir une clarification avant que nous n’entamions la discussion.

À la fin de la séance précédente, on nous a annoncé que nous examinerions, avant l’article 1er, un amendement portant article additionnel après l’article 12. Or, peu de temps auparavant, on nous pressait d’en arriver à l’article 1er, nous reprochant presque de faire de l’obstruction.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire. Je n’ai jamais dit cela !

M. Jean-Pierre Blazy. D’où notre surprise. J’ajoute que nous aimerions avoir connaissance de l’amendement déposé par le Gouvernement. Faute de quoi, au nom du groupe socialiste, je serai contraint de demander une suspension de séance pour que l’opposition puisse s’informer de sa teneur. Les quelques échos que nous en avons eus dans la presse sont insuffisants, nous devons pouvoir en disposer en séance.

M. le président. L’amendement avait été distribué puis a été soumis à rectification. Il vous sera remis dès que possible. S’il s’avère que vous avez besoin de temps pour l’analyser, je vous accorderai une suspension de séance. Essayons d’aborder ce débat dans un bon esprit !

Je suis saisi de quatre amendements, nos 25, 599, 600 et 603, portant articles additionnels avant l’article 1er, qui peuvent être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 599, 600 et 603 sont identiques.

La parole est à M. Noël Mamère, pour soutenir l’amendement n° 25.

M. Noël Mamère. Nous allons certes débattre dans un bon esprit, mais un esprit à la fois critique et constructif, comme l’opposition, dont c’est la fonction, s’y attache depuis le début de la discussion.

M. le ministre de l’intérieur était présent cet après-midi devant l’Association des maires de France et il était également présent ce soir au journal de TF 1. Mais, après avoir fait un passage éclair dans cet hémicycle, il en est désespérément absent. Nous y discutons pourtant d’un texte qu’il considère comme fondamental ! Puisqu’il ne fait pas à la représentation nationale l’honneur de sa présence,…

Mme Patricia Adam. C’est dire s’il nous accorde quelque importance !

M. Noël Mamère. …nous sommes contraints de nous reporter à ses déclarations à la presse ou à nos collègues maires ! Ainsi, une dépêche de l’AFP nous apprend que, cet après-midi, M. Sarkozy s’est attaché à rassurer les maires. Cela prouve bien que l’AMF, présidée par un membre de la majorité, M. Pélissard, est extrêmement critique quant au rôle que le ministre de l’intérieur entend faire jouer aux maires dans la prévention de la délinquance : de médiateurs, ils deviendront shérifs !

L’Association des maires de France est en tel accord avec nous sur ce point que M. le ministre de l’intérieur a été contraint d’affirmer que « le maire ne serait ni un shérif ni un procureur ». Il a cependant confirmé – ce qui nous inquiète fortement – le maintien du Conseil des droits et devoirs de la famille, et surtout la possibilité pour le maire de centraliser toutes les informations de l’inspection académique et des caisses d’allocations familiales sur l’absence d’assiduité scolaire. Ce n’est pas une fonction du maire. Il y a là une dérive extrêmement grave, qui vise à mieux contrôler la population et à faire du maire une sorte de garde-chiourme. Cela s’inscrit dans les politiques que symbolise aujourd’hui M. le ministre de l’intérieur.

Je rappelais à la fin de la séance précédente que le ministre de l’intérieur avait l’habitude de fonctionner « en faisceaux », c’est-à-dire de cloisonner les domaines. Et lorsque tout est mis bout à bout, on s’aperçoit qu’il y a réellement danger.

On découvre qu’un rapport sur les fichiers de police et de gendarmerie a été commandé par M. le ministre de l’intérieur à l’Observatoire national de la délinquance – présidé par M. Bauer et où a été nommé très récemment, M. Charles Pasqua, qui représente le symbole de l’intégrité et de l’honnêteté dans ce pays.

M. Philippe Pemezec. C’est quoi ces insinuations ?

M. Noël Mamère. Il est assez amusant de voir que la délinquance est à géométrie variable, selon l’idée que s’en font le Gouvernement et le ministre de l’intérieur.

Il est intéressant de remarquer que dans le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance ne figure pas la délinquance économique. (Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Vous pouvez aboyer autant que vous voulez, mesdames et messieurs de la majorité, c’est la vérité.

Le rapport commandé à l’Observatoire national de la délinquance met en garde contre les dérives et indique que les libertés individuelles sont menacées. Nous savons que le croisement des fichiers et, en particulier, la mise en œuvre du fichier STIC – invention de ce gouvernement – ont entraîné des dérives. On peut « entrer », si je puis dire, dans ce fichier en étant simple témoin d’un accident de la circulation. Nous connaissons des cas où des personnes figurant dans le fichier STIC n’ont pu trouver d’emploi alors qu’elles n’étaient pas délinquantes et n’avaient commis ni délit ni infraction.

L’amendement n° 25 a pour objectif de montrer que le ministre de l’intérieur procède à une entreprise d’accaparement, de manipulation tendant à la « privatisation » de ce qui relève de la sphère interministérielle. Il y a un comité interministériel de prévention de la délinquance, mais il est présidé par le ministre de l’intérieur.

Cet amendement tend à rappeler que la prévention de la délinquance est transversale, interministérielle, et ne peut être accaparée par le ministre de l’intérieur. Il propose, en conséquence, la création d’un conseil interministériel de la délinquance, présidé par le Premier ministre.

L’exposé des motifs de l’amendement n° 25 détaille…

M. le président. Nous nous y reporterons donc !

M. Noël Mamère. …les raisons qui nous ont conduits à déposer celui-ci et montre que l’on ne peut pas mener une véritable politique de prévention de la délinquance si elle n’a pas un caractère interministériel. Et celui qui peut garantir ce caractère, c’est le Premier ministre et non le ministre de l’intérieur, même si ce dernier se prend pour un vice-Premier ministre.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour soutenir les amendements identiques nos 599, 600 et 603

M. Jean-Pierre Blazy. Je voudrais faire comprendre à nos collègues de la majorité – même si ce sera difficile – le sens, la logique, la cohérence de cette série d’amendements portant articles additionnels avant l’article 1er.

Nous avons essayé, en vain, de proposer une définition de la politique publique de prévention de la délinquance. Nous avons ensuite rappelé le rôle de l’État en matière de sécurité, et donc de prévention de la délinquance.

Nous avons également indiqué qu’il fallait aujourd’hui plus que jamais une convention, si l’on voulait que soient apportées de véritables solutions aux problèmes qui se posent, et que le maire soit au niveau local le pivot de la mise en œuvre des politiques publiques de prévention de la délinquance. L’État doit pour cela s’engager sur des objectifs et des moyens.

Nous en venons à présent à l’architecture institutionnelle au niveau de l’État. Depuis 2003, le ministre d’État – toujours absent de cet hémicycle – nous parle de la prévention de la délinquance. Or le comité interministériel de prévention de la délinquance n’a été mis en place qu’au début de l’année 2006. C’est étrange !

On prétend que la prévention est une notion complexe, difficile à définir, qui nécessite des arbitrages compliqués entre les différents ministères. Toutefois, il n’y a pas eu de réelle volonté d’aboutir. La meilleure preuve en est que ce comité interministériel, présidé par le Premier ministre, n’a été mis en place – c’est sans doute sa volonté plus que celle du ministre d’État – qu’au mois de janvier. Depuis, il a été réuni deux fois.

La prévention de la délinquance relève forcément d’une politique interministérielle car elle concerne plusieurs ministères. Pourtant, les ministères concernés ont été fort peu associés jusqu’à maintenant – le ministère de la ville, par exemple. La présence du ministre de l’équipement est annoncée pour ce soir, soit. Nous aurons donc la chance de le voir, même s’il n’était pas prévu dans le casting.

Bref, comme la prévention de la délinquance est une politique interministérielle, elle doit être conçue au plus haut niveau et pilotée par le Premier ministre. C’est la raison pour laquelle les amendements identiques proposent que la prévention de la délinquance ne soit pas rattachée au seul ministre de l’intérieur, parce que cela concerne aussi la justice, l’éducation, le social, l’emploi, la politique de la ville, la santé, mais dépende logiquement du Premier ministre, comme c’était le cas entre 1997 et 2002, avec un conseil interministériel de sécurité qui pilotait la politique de prévention de la délinquance.

J’ai du mal à croire que nos amendements puissent être refusés par la majorité.

M. le président. La parole est à M. le président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur les amendements en discussion.

M. Philippe Houillon, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. L’amendement n° 25 de M. Mamère a été examiné par la commission, qui l’a repoussé.

J’ai une bonne nouvelle à annoncer à M. Mamère, qui demande, par son amendement, la création d’un conseil interministériel de prévention de la délinquance : ce conseil existe déjà, puisqu’il a été institué par un décret du 17 janvier 2006.

M. Jean-Pierre Blazy. Tardivement !

M. Noël Mamère. Qui le préside ?

M. Philippe Houillon, rapporteur. Par conséquent, votre amendement est satisfait.

Les auteurs des amendements nos 599, 600 et 603 seront heureux de savoir qu’ils ont satisfaction. Ils souhaitent que le Premier ministre dirige la politique de prévention de la délinquance : eh bien, je leur rappelle que, aux termes de l’article 21 de la Constitution, le Premier ministre dirige l’action du Gouvernement. Par conséquent, la prévention de la délinquance étant un sous-ensemble de l’action du Gouvernement, le Premier ministre dirige l’action, et donc les actions, en matière de la prévention de la délinquance.

M. Jean-Pierre Blazy. C’est tiré par les cheveux !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Ces trois amendements n’ont pas été examinés par la commission, mais, à titre personnel, j’y suis défavorable. Ils alourdiraient inutilement à la loi.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire, pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements en discussion.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l’aménagement du territoire. C’est extraordinaire : M. Mamère nous propose de créer quelque chose qui existe déjà ! Il est vrai qu’il ne lit ni les dossiers, ni les rapports, ni les textes. Il vient simplement faire des effets de tribune dans cet hémicycle.

Le 17 janvier 2006 a été créé par décret, comme l’a rappelé M. le rapporteur, un comité interministériel de prévention de la délinquance. Il est présidé par le Premier ministre.

Or vous nous demandez, monsieur Mamère, de créer un comité interministériel de la prévention de la délinquance, présidé par le Premier ministre.

M. Noël Mamère. Pas un comité, mais un « conseil » !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Ah ! M. Mamère veut créer un « conseil », qui remplacerait un comité ! (Sourires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Et il tient absolument à ce qu’il soit présidé par le Premier ministre. (Sourires sur les mêmes bancs.)

M. Noël Mamère. Cela n’a pas le même sens !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Monsieur Mamère, êtes-vous un parlementaire de si fraîche date pour ignorer qu’un comité interministériel, quel qu’il soit, est, par principe, présidé par le Premier ministre ?

M. Noël Mamère. Il n’y a pas un « comité des ministres », il y a un « conseil des ministres » !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Il n’est pas de comité interministériel, dans quelque domaine que ce soit, qui ne soit présidé par le Premier ministre.

Vous voudriez, monsieur Mamère, que le Gouvernement donne un avis favorable à votre amendement, pour que nous inscrivions dans la loi quelque chose qui existe déjà et dont la présidence est déjà assurée par le Premier ministre ! (Sourires sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Je vous demande de reconnaître avec modestie, monsieur Mamère, que vous avez commis une erreur d’inattention et de bien vouloir retirer votre amendement, qui n’a aucun sens et n’a pas lieu d’être débattu.

Quant aux amendements identiques nos 599, 600 et 603, ils sont satisfaits. Leurs auteurs demandent un délégué interministériel placé auprès du Premier ministre. Or, nous avons mieux que cela : un comité interministériel présidé par le Premier ministre.

Le Gouvernement est donc défavorable aux quatre amendements.

En fait, monsieur Mamère, vous saisissez toutes les opportunités pour essayer de caricaturer l’action du ministre d’État !

Vous avez fait référence à l’Observatoire national de la délinquance, que le ministre de l’intérieur a décidé de mettre en place, suivant en cela les conclusions d’un rapport de M. Pandraud et M. Caresche.

M. Michel Vaxès. Mais, aujourd’hui, il y a Pasqua !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Sachez que cet observatoire a rendu aujourd’hui un rapport qui préconise un certain nombre d’améliorations pour éviter des dérives sur les fichiers de police et de gendarmerie, notamment de renforcer les garanties individuelles afin d’écarter des informations inexactes ou non actualisées. Le ministre de l’intérieur a décidé d’appliquer toutes les recommandations de l’Observatoire national de la délinquance. M. Sarkozy a décidé de suivre de manière sereine et ouverte toutes les préconisations de ce rapport ; il fait confiance à ses auteurs.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je déplore que l’on écarte avec un tel dédain des amendements présentés par les députés de l’opposition : ce mépris est indigne d’un ministre de la République, monsieur Estrosi !

M. le président. Je vous en prie.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je persiste, monsieur le président. Un ministre de la République n’a pas à utiliser un tel ton à l’égard d’un parlementaire.

M. François Scellier. Vous ne pouvez pas dire cela !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En quatre ans et demi, le comité interministériel pour la ville a été réuni deux fois : une fois sous le gouvernement Jospin, et quatre ans plus tard, avec M. de Villepin, M. Raffarin ne l’ayant jamais convoqué après avoir déclaré vouloir le faire. Il dépend donc du bon vouloir politique. À nos yeux, cela ne suffit pas pour construire la démarche transversale dans laquelle doit s’inscrire la politique de la prévention de la délinquance, comme du reste celle de la ville, intitulée désormais politique de cohésion urbaine et sociale.

Nos amendements prévoient d’inscrire dans la loi que le Premier ministre conduise un travail interministériel, car l’action transversale est au cœur de la politique de la prévention de la délinquance. S’il n’en va pas ainsi au niveau de l’État, comment cela pourrait-il fonctionner au niveau des communes ? Je ne comprends donc pas que l’on traite ces amendements avec un tel mépris.

Au niveau des communes, en matière de prévention de la délinquance, l’idée est de réunir les principaux de collèges, les services de police et de santé, les acteurs sociaux, les équipes de prévention spécialisées et les représentants des juridictions, sous l’autorité du préfet ou de son représentant.

Inscrire une telle démarche transversale – engageant l’ensemble des ministères sous l’autorité fort légitime du point de vue constitutionnel du Premier ministre – est donc loin d’être une idée saugrenue, monsieur le ministre délégué. Tel est le sens de nos amendements.

Je rappelle qu’un Conseil national de prévention de la délinquance a existé pendant de nombreuses années avant d’être supprimé. Je précise qu’il n’était pas interministériel et qu’il était ouvert aux représentants du Parlement.

M. Jacques-Alain Bénisti. Vous confondez tout !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il a été supprimé au profit du Conseil de sécurité et de prévention de la délinquance, installé par décret en juillet 2002, lequel prévoyait déjà la participation de plusieurs ministères.

M. le président. Veuillez conclure.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Par ces amendements, nous voulons inscrire dans la loi l’exigence, que doit porter le Gouvernement mais que doit vérifier le législateur, de l’engagement transversal des pouvoirs publics à tous les niveaux, depuis le niveau local jusqu’à celui de l’État.

M. le président. Je veux bien accepter d’autres interventions, mais je demande à chacun d’être bref.

La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. Votre initiative de soumettre à une discussion commune l’ensemble de ces amendements manifeste votre clairvoyance, monsieur le président. En agissant ainsi, vous n’avez pas porté de jugement sur la forme, mais sur le fond, car ces amendements sont en effet inspirés par une même volonté.

Je regrette, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre délégué, que vous n’ayez pas fait preuve de la même perspicacité, puisque vous n’avez porté qu’une appréciation sur la forme, et non sur le fond. En tout cas, telle est ma lecture.

Sur le fond, ces amendements, que je soutiens, posent la question de la prévention de la délinquance sur son véritable terrain. Et pour en discuter, j’imaginais – naïvement sans doute – que seraient présents au banc des ministres pour en débattre, M. Borloo, ministre de l’emploi et de la cohésion sociale, le ministre de l’éducation nationale, le ministre de la jeunesse et des sports,…

M. Lilian Zanchi. Le garde des sceaux !

M. Michel Vaxès. …bref, tous ceux qui peuvent contribuer par leur action – transversale – à la politique de prévention, …

M. Lilian Zanchi. Le Premier ministre.

M. Michel Vaxès. …y compris le Premier ministre.

C’est donc sans réserve que je soutiens l’ensemble de ces amendements, qui participent de l’état d’esprit que nous défendons depuis le début du débat. C’est la raison pour laquelle nous manifestons aussi notre opposition au texte qui nous est présenté.

M. le président. La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.

M. Jacques-Alain Bénisti. Le ministre s’est exprimé sur la forme, car, sur le fond, nous sommes tous d’accord. Les politiques de prévention de la délinquance, menées jusqu’à présent, tant par la droite que par la gauche,…

M. Michel Vaxès. Ce qui nous gêne, c’est que ce texte soit piloté par le ministère de l’intérieur !

M. Jacques-Alain Bénisti. … ont échoué en raison de carences de coordination, de suivi et de gouvernance. Le projet de loi remédie à ces trois problèmes au niveau local et départemental par le biais du comité départemental de prévention de la délinquance placé sous l’autorité du préfet.

Pour le niveau national, M. Mamère propose un conseil interministériel, et M. Blazy un délégué interministériel. Pour ma part, je propose à mes collègues qu’ils retirent leurs amendements au profit de celui que j’ai déposé, qui viendra en discussion ultérieurement et qui propose la création d’un secrétariat d’État à la prévention de la délinquance, regroupant les différents ministères que vous avez énumérés, monsieur Vaxès. Il est en effet important que les actions soient réparties par ministère et que le secrétariat d’État soit rattaché directement au Premier ministre.

Mon amendement, comme l’ensemble du projet de loi, propose des changements auxquels je vous demande de vous rallier.

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. J’aurais pu, monsieur le président, faire un rappel au règlement vu la manière dont le ministre délégué à l’aménagement du territoire m’a fait passer pour un amateur et un agité.

M. Jacques-Alain Bénisti. Mais non !

M. Noël Mamère. Cela dit, je ne vois pas très bien, monsieur Bénisti, comment il serait possible d’instituer un secrétariat d’État à la prévention de la délinquance par la loi.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. En effet !

M. Noël Mamère. Par ailleurs, je souhaite rappeler à mon collègue Houillon, président de la commission des lois, que nous savons, pour l’avoir étudié sur les bancs de la faculté, que l’article 21 de la Constitution prévoit que le Premier ministre conduit la politique du Gouvernement. J’aimerais cependant qu’il m’explique si c’est vraiment le Premier ministre qui conduit la politique du Gouvernement pour tout ce qui concerne le domaine réservé, en particulier la politique africaine de la France – conduite par le Président de la République – et sur laquelle le Parlement n’a aucun contrôle. Et le Président de la République, ce n’est pas le Gouvernement.

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire qui m’a tourné en dérision en déclarant que le comité interministériel dépendait du Premier ministre. Mais il ne nous a pas dit de qui dépend le secrétaire général de ce comité. Du ministre de l’intérieur !

Or si vous aviez lu mon amendement, et si vous vous étiez intéressé à nos propositions, vous vous seriez rendu compte que nous demandons que le secrétaire général du Conseil interministériel de prévention de la délinquance ne soit plus rattaché au ministre de l’intérieur, mais au Premier ministre. Nous voulons le détacher du ministre de l’intérieur car celui qui assure la conduite du Gouvernement et garantit l’interministérialité, c’est le Premier ministre.

Vous ne dites pas non plus que votre comité interministériel de prévention de la délinquance, institué par un décret du 17janvier 2006, n’a pour l’instant aucune mission.

M. François Grosdidier. Ségolène va le rattacher au ministère de la défense !

M. Jean-Pierre Blazy. Vous anticipez !

M. Noël Mamère. Il ne rend pas compte au Parlement, ne coordonne ni l’action des ministères ni l’utilisation des moyens budgétaires qui sont consacrés à la politique de prévention de la délinquance, notamment ceux qui pourraient provenir – et c’est ce que nous proposons – d’un fonds interministériel pour la prévention de la délinquance.

Nous demandons également une évaluation…

M. le président. Veuillez conclure.

M. Noël Mamère. Il ne s’agit pas d’effets de manche ni d’amateurisme !

M. le président. Vous avez eu tout le temps de vous exprimer.

M. Noël Mamère. Je réponds à un ministre qui ne lit même pas nos amendements et qui, par des artifices politiciens, veut discréditer l’opposition ! Or nous faisons des propositions sérieuses.

M. le président. Personne ne met en doute votre sérieux, monsieur Mamère.

M. Noël Mamère. Notre proposition de créer un conseil interministériel s’inspire de l’esprit de la LOLF – nous sommes dans une démarche constructive –, qui impose dorénavant de mesurer la performance des politiques budgétaires autour de trois critères : l’efficacité socio-économique ou la pertinence de la politique ; la qualité du service rendu à l’usager ; l’efficacité de la gestion des ressources.

L’ensemble s’appelle l’évaluation, ce que nous ne faisons pas dans cette maison, ce que nous ne faisons pas dans notre pays.

M. Lilian Zanchi. En effet !

M. Noël Mamère. Nous n’avons aucune politique d’évaluation, ni des lois que nous votons – et elles sont nombreuses – ni de nos nombreux comités Théodule !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Vous mettez en avant, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, la Constitution pour nous opposer la prétendue inanité de nos amendements, mais les arguments que vous en tirez ne s’appliquent pas en l’espèce.

Entre 1997 et 2002, il y avait un conseil de sécurité intérieure, présidé par le Premier ministre et qui réunissait tous les ministres concernés. Si l’on veut faire de la prévention de la délinquance un enjeu de la nation – ce que nous voulons tous –, le Premier ministre doit en être le pilote.

Dans la mesure où, si comme vous l’affirmez, monsieur le ministre, M. Sarkozy s’attache à tirer tout le bénéfice des rapports qu’il commande, j’aimerais qu’il étudie celui qui émane de cinq inspections générales sur la mise en œuvre des contrats locaux de sécurité de nouvelle génération, qui date de juillet 2005. Selon ce rapport, le pilotage national des dispositifs territoriaux de prévention de la délinquance doit être renforcé. Il propose très clairement qu’une structure nationale de suivi soit constituée auprès d’un délégué interministériel à la prévention de la délinquance qu’il conviendra de mettre en place. Ce délégué, nommé en conseil des ministres, pourrait, à l’instar du délégué interministériel à la sécurité routière, être directement placé auprès du Premier ministre tout en disposant de l’appui fonctionnel que peut conférer un poste de direction dans l’un des grands ministères concernés par la prévention de la délinquance.

M. Lilian Zanchi. C’est d’ailleurs ce que nous proposons !

M. Jean-Pierre Blazy. En effet, car c’est précisément le sens de nos amendements. Vous devriez les adopter, monsieur Bénisti.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 25.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 599, 600 et 603.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 609, 610 et 613.

La parole est à M. Lilian Zanchi, pour les soutenir.

M. Lilian Zanchi. Avant d’en venir à la discussion des articles, nous voulons poser les fondements d’une politique de prévention partagée par l’ensemble des partenaires.

Les contrats locaux de sécurité, créés il y a sept ans sous le gouvernement de Lionel Jospin, doivent être rénovés et modernisés, comme le souligne Jean-Pierre Blazy dans le rapport qu’il a remis au ministre de l’intérieur. Et il nous faut espérer que cette préconisation fera partie des propositions que le Gouvernement retiendra, monsieur le ministre délégué.

Ces contrats doivent désormais se fonder sur de véritables diagnostics et des enquêtes de victimation cofinancées par chacun des contractants et non plus uniquement pas les villes, comme c’est bien souvent le cas aujourd’hui.

Ils doivent également définir des actions précises de coproduction de sécurité mais aussi de prévention, avec des engagements conjoints financiers et humains. Car il n’est plus possible que certains partenaires concernés, notamment l’État, donnent leur accord pour telle ou telle action puis refusent d’engager les moyens financiers pour l’accompagner. Je pense, par exemple, aux très faibles moyens financiers et humains que le ministère de la justice a alloués aux maisons de justice et du droit et aux crédits réduits comme peau de chagrin dévolus par les conseils départementaux d’accès au droit à l’aide aux victimes.

En outre, il convient que des évaluations soient régulièrement menées pour examiner l’efficacité des politiques et des actions mises en place. Elles pourraient être conduites tous les trois ans, comme les enquêtes de victimation.

Le maire, le préfet, le procureur, l’inspecteur d’académie, le président du conseil général, en signant ces contrats, qui scellent un véritable partenariat, posent les bases d’un diagnostic d’enquêtes de victimation, d’actions de coproduction de sécurité et de prévention, et d’une évaluation périodique. Ces contrats locaux de sécurité pourraient ainsi constituer une politique pertinente de prévention et de sécurité pour nos villes et nos concitoyens.

M. Jean-Pierre Blazy. Voilà qui est clair !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Houillon, rapporteur. Ces amendements n’ont pas été examinés par la commission.

Mme Patricia Adam. Eh oui !

M. Philippe Houillon, rapporteur. À titre personnel, je ne vois pas très bien ce qu’ils apportent par rapport à ce qui existe déjà.

Il est proposé que les contrats locaux de sécurité rénovés soient signés par le maire, le préfet et le procureur de la République, ce qui est déjà le cas.

M. Lilian Zanchi. Nous proposons que les présidents de conseil régional y participent aussi !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Par ailleurs, le conseil pilote les actions prévues dans les contrats.

M. Lilian Zanchi. Oui, mais aucun indicateur d’évaluation et de suivi n’est prévu !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Je ne vois pas quelle est la valeur ajoutée de ces amendements. Avis défavorable donc.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Ces amendements sont totalement satisfaits par une circulaire interministérielle relative aux contrats locaux de sécurité de nouvelle génération, destinée aux préfets, procureurs et recteurs, qui vient d’être signée par le ministre d’État.

M. Lilian Zanchi. Quand ?

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Hier !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est scandaleux ! C’est uniquement par des bruits de couloir que nous en avons appris l’existence. Personne au ministère n’a pris la peine d’en informer la représentation nationale !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Attendez : nous sommes en plein débat, et vous savez pertinemment que nous n’allons pas faire entrer dans la loi des dispositions définies dans une circulaire.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mieux vaut les faire entrer dans la loi que de faire entrer des dispositions législatives dans une circulaire !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Une circulaire ne s’invente pas à la dernière minute, c’est le fruit d’un long travail interministériel. Il se trouve que celui-ci a abouti : M. le ministre d’État a signé la circulaire hier, les autres ministres concernés vont la signer à leur tour, dans les jours qui viennent.

Permettez-moi maintenant d’apporter à la représentation nationale quelques éléments d’information sur son contenu. Je pense, monsieur Le Bouillonnec, que vous serez satisfait d’en avoir la primeur.

Les CLS nouvelle génération reposent sur quatre principes. Le premier principe consiste en une évaluation préalable de la situation. Le deuxième repose sur une coordination des actions.

M. Lilian Zanchi. Avec quels moyens ?

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Certaines dispositions du texte de loi découlant de cette circulaire vous donneront satisfaction.

Le troisième principe est la priorité donnée au traitement des difficultés concrètes plutôt qu’au traitement de zones. Enfin, le quatrième principe réside dans une coordination avec la politique de la ville. Les actions qui seront définies pour une période de trois dans le cadre des CLS auront vocation à être financées par le fonds interministériel de prévention de la délinquance que nous vous proposons de créer à l’article 2 bis du projet de loi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Lilian Zanchi. La circulaire précède donc la loi ! C’est extraordinaire !

M. Jean-Pierre Blazy. C’est scandaleux, ce fonds n’est même pas encore créé !

Mme Patricia Adam. À quoi sert-on ?

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Il vous appartiendra à l’article 2 bis de reprendre ce débat pour dire si vous êtes favorables à la création de ce fonds.

À intervalles réguliers, vous demandez des suspensions de séance pour exiger la présence de M. le ministre d’État, qui n’a eu de cesse, depuis dix-huit mois, de rappeler qu’il formait avec son ministre délégué aux collectivités locales et son ministre délégué à l’aménagement du territoire une seule et même équipe et que, par délégation, chacun d’entre eux était qualifié pour défendre les textes présentés. Il se trouve que le sujet qui nous occupe relève partiellement de mon ministère, celui de l’aménagement du territoire. Pour clarifier et simplifier les dispositifs contractuels, la grande majorité des CLS de nouvelle génération seront en effet intégrés aux contrats urbains de cohésion sociale – auxquels vous avez fait référence, monsieur Blazy – qui sont du ressort direct de mon ministère et de la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires qui y est rattachée. Comme ces contrats doivent être conclus entre le 15 décembre 2006 et le 15 janvier 2007 par les préfets et les maires, il paraît particulièrement important que les instructions contenues dans la circulaire puissent être transmises très rapidement dans chacun des départements.

La représentation nationale est maintenant pleinement informée. Vos amendements sont d’un grand intérêt, que je ne saurais remettre en cause. Ils m’ont permis de vous apporter des précisions sur ces CSL avant même que l’ensemble des ministres ait fini de signer la circulaire. Je pense qu’elle répond à vos demandes. Il n’y a donc aucun décalage entre votre démarche et la nôtre, si ce n’est que nous avons choisi la voie réglementaire.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le président, je demande, au nom du groupe socialiste, une suspension de séance. Nous sommes plongés dans un monde irréel, de plus en plus virtuel ! Quelle étrange journée : nous allons devoir discuter des articles 18 à 24 alors même qu’ils feront l’objet d’une ordonnance – nous avons voté une loi d’habilitation ce matin ; il nous faudra débattre, avant l’article 1er, d’un amendement portant article additionnel après l’article 12, et ce pour des raisons d’urgence médiatique que j’ai du mal à saisir ; enfin, avant même que la loi soit promulguée, est signée une circulaire sur les contrats locaux de sécurité, qui, pour nous, doivent relever de la loi. De surcroît, nous n’avons pas été informés de cette démarche.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Notre affliction est grande. Manifestement, l’Assemblée nationale n’a plus aucune utilité aux yeux du Gouvernement.

M. Lilian Zanchi. C’est inacceptable !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il est pour le moins inacceptable, alors que nous examinons un texte que le Gouvernement a jugé nécessaire de soumettre en premier lieu au Sénat, le ministre dénie la pertinence d’un amendement au motif qu’une circulaire a été signée, la veille, par un seul des ministres auxquels il revient de le faire.

De qui se moque-t-on ? Ce matin et ce soir, nous avons assisté, à deux reprises, à une manipulation des règles de la procédure législative, manipulation dont l’objet n’est pas d’empêcher l’opposition de s’exprimer – il y a très longtemps que le Gouvernement ne l’écoute plus –, mais de s’inscrire dans une démarche d’affichage, de communication. Alors que toute la journée on a vu le ministre de l’intérieur sur tous les écrans de télévision déclarer aux maires, réunis en congrès, qu’il discutera des amendements à l'Assemblée nationale, celui-ci n’est pas là. C’est un scandale ! (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Outre qu’il est parfaitement désobligeant et insultant à notre égard, ce comportement l’est aussi pour le président de la commission des lois. Étant donné qu’il ignorait, comme nous, qu’une circulaire avait été signée hier au ministère de l’intérieur, il a repoussé nos amendements – ce qui est son droit le plus absolu – en usant de mauvais arguments.

M. Jean-Pierre Blazy. De telles pratiques sont scandaleuses !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. M. Houillon nous dit que la disposition que nous proposons faisant déjà l’objet d’un décret, il n’est pas nécessaire de l’inscrire dans la loi. Si l’on utilise cet argument pour l’ensemble du texte relatif à la prévention de la délinquance, on s’aperçoit qu’il n’y a pas beaucoup d’innovations,…

Mme Patricia Adam. Il n’y a plus rien dans le texte !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …à commencer par le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance présidé par le maire, qui figure déjà dans le décret qui a suivi le vote de la loi d’orientation et de programmation pour la justice.

Soit l’on considère que la politique de prévention est importante, auquel cas on fait en sorte que les mesures qui la caractérisent figurent dans une loi dont le Parlement évalue l’application, soit l’on s’en tient aux décrets et l’on ne touche à rien tout en faisant croire que l’on place d’un seul coup le maire au cœur de la prévention. Mais, dans ce cas, il s’agit d’un effet d’affichage et d’une mauvaise stratégie.

M. Jacques-Alain Bénisti. Vous répétez constamment la même chose !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Dans tous les cas, l’opposition ne peut pas se taire et être complice de telles pratiques.

Monsieur le ministre, malgré tout le respect que je vous dois, produire une telle circulaire « interministérielle » qui n’a été signée que par le seul ministre de l’intérieur pour réfuter la pertinence de nos amendements, c’est avouer que le ministre d’État n’a que faire de ce que nous faisons ici. C’est le plus grand des scandales ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

M. le président. La parole est à M. Jacques-Alain Bénisti.

M. Jacques-Alain Bénisti. Monsieur le Bouillonnec, la sérénité de nos débats demande que vous arrêtiez de répéter inlassablement les mêmes arguments. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Si l’on veut pouvoir enfin aborder la discussion de l’article 1er,…

M. Jean-Pierre Blazy. Si ce n’est qu’il nous faudra au préalable examiner l’amendement portant article additionnel après l’article 12…

M. Jacques-Alain Bénisti. …il faut cesser de rabâcher. Depuis tout à l’heure, vous ne faites que répéter que le ministre d’État n’est pas là, bien que le ministre délégué vous réponde que ce projet est le fruit d’un travail d’équipe.

M. Jean-Pierre Blazy. C’est pourquoi la circulaire a été signée par le seul ministre de l’intérieur !

M. Jacques-Alain Bénisti. Je pourrais, pour ma part, vous faire remarquer que M. Dray, qui est le porte-parole du parti socialiste, qui connaît parfaitement les problèmes de la délinquance (« Nous aussi ! » sur les bancs du groupe socialiste)

M. Lilian Zanchi. C’est insultant et scandaleux !

M. Jacques-Alain Bénisti. … et qui a déposé des amendements sur ce texte, est le grand absent des débats aujourd’hui.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Parce que vous, vous êtes le grand spécialiste de la prévention de la délinquance au sein de la majorité ?

M. Jacques-Alain Bénisti. Je pourrais répéter dix fois qu’il n’est pas là que cela ne ferait pas avancer nos débats sur le fond !

Mesdames, messieurs de l’opposition, faites en sorte que nous puissions en venir à l’examen de l’article 1er, qui nous permettra d’aborder enfin les problèmes de fond.

Mme Patricia Adam. De tels propos sont honteux !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 609, 610 et 613.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 614, 615 et 618.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour les soutenir.

M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le président, nous sommes scandalisés par la manière dont on nous répond ! Monsieur Bénisti, nous sommes les représentants du groupe socialiste. Ne parlez pas des absents !

M. Jacques-Alain Bénisti. J’ai dit que je regrettais que M. Dray ne soit pas là car nous pourrions au moins avoir un débat de fond ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Blazy. M. Sarkozy – qui, lui, devrait être là – signe une circulaire sur un texte relatif à la prévention de la délinquance, inspiré du rapport des cinq inspections générales, mais sans reprendre toutes les propositions qu’il contient, notamment – et pour cause – le pilotage par le Premier ministre de la politique de prévention de la délinquance.

Le Parlement doit se préoccuper de la prévention de la délinquance, tant l’exécutif manipule, tergiverse et essaie de l’empêcher de légiférer dans de bonnes conditions. Je le répète, c’est une véritable journée de dupes, et l’attitude du Gouvernement est proprement scandaleuse !

Mme Patricia Adam. Irrespectueuse !

M. Jean-Pierre Blazy. Le Parlement doit assumer ses responsabilités. Il faut des garde-fous. C’est pourquoi nos amendements visent à constituer une délégation parlementaire d’évaluation des actions conduites par l’État et par les collectivités locales en matière de prévention contre la délinquance – la politique de prévention de la délinquance est un enjeu national qui se décline au niveau local. Nous proposons également que la délégation publie un rapport d’évaluation public et qu’elle soit constituée de quinze députés et de quinze sénateurs.

Il y a bien déjà un Institut de la sécurité intérieure, un Observatoire national de la délinquance et un comité interministériel de prévention de la délinquance, mais ces organes sont placés sous la tutelle directe du ministère de l’intérieur. Ils n’ont donc aucune indépendance, aucune autonomie. J’en veux pour preuve la mise sous tutelle renforcée, depuis quelques jours, de l’Institut de la sécurité intérieure. Des chercheurs ont été remerciés, la direction remaniée et la recherche n’y est plus libre. C’est grave parce que Pierre Joxe avait précisément créé cet institut pour qu’il bénéficie de l’autonomie et de l’indépendance nécessaires. Et, puisque je n’ai pas eu d’explication lors de la discussion du budget de l’intérieur – il me semble d’ailleurs que ce n’était pas vous qui étiez là, monsieur le ministre –, j’aimerais aujourd’hui obtenir des réponses.

Cela dit, il en va de même de l’Observatoire national, même si, sur les fichiers, le ministre consent à suivre les recommandations judicieuses de cet organe. Toutefois, sur des questions aussi délicates, pouvait-il faire autrement à quelques mois des élections ?

Nos amendements ont un objectif : permettre au Parlement, compte tenu de l’enjeu pour la nation, d’évaluer avec les moyens adaptés. Tel est le but de la délégation parlementaire que nous proposons de créer.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Houillon, rapporteur. Monsieur Blazy, je ne peux pas vous laisser parler d’une journée, ou plutôt, d’une nuit de dupes.

M. Jean-Pierre Blazy. Mais si !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Reprenons les derniers amendements que nous avons examinés.

Il nous a d’abord été demandé de créer un comité interministériel de la prévention de la délinquance. Nous avons refusé parce qu’il existe déjà !

M. Jean-Pierre Blazy. Mais il n’est inscrit dans aucune loi !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Ensuite, vous nous avez demandé de préciser que c’est le Premier ministre qui conduit la politique du Gouvernement en matière de prévention de la délinquance. À cet égard, je vous renvoie à la Constitution. En outre, il préside ledit comité. Que vous faut-il de plus ?

M. Lilian Zanchi. C’est le ministre de l’intérieur qui se charge de cette politique !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Vous demandez ensuite des contrats locaux de sécurité « rénovés », mais les signataires sont les mêmes.

Mme Patricia Adam. Pas du tout ! Actuellement, il n’y a pas le président du conseil général !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Cela relève bien du domaine de la circulaire, et non de celui de la loi.

M. Noël Mamère. Et le fait qu’une circulaire présume des décisions de la représentation nationale, cela ne vous dérange pas ?

M. Philippe Houillon, rapporteur. Ce n’est pas une journée de dupes, nous vous avons apporté les réponses qu’appellent vos arguments !

Quant aux amendements en discussion et qui concernent la création d’une délégation parlementaire, ils n’ont pas été examinés par la commission.

Mme Patricia Adam. Ce n’est pas notre faute !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Je ne vous en fais pas le reproche, je me contente d’en informer mes collègues. C’est mon rôle.

À titre personnel, je vous demande, mes chers collègues, de ne pas adopter ces amendements, ...

Mme Patricia Adam. C’est dommage !

M. Philippe Houillon, rapporteur. ... parce qu’ils mettent en cause le travail habituel des commissions parlementaires, et particulièrement de la commission des lois.

Mme Patricia Adam. Pas du tout !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Je ne peux pas laisser adopter ce type d’amendements car il ne faut pas banaliser les délégations parlementaires, lesquelles ne peuvent être créées que dans des domaines à la spécificité indiscutable. Ainsi, un projet de création d’une délégation parlementaire sur le contrôle des services de renseignement est en cours.

M. Jean-Christophe Lagarde. Enfin !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Oui, et c’est bien ainsi.

S’agissant des compétences normales du Parlement, en particulier de celles des commissions permanentes de l’Assemblée nationale, il n’y a aucune raison de créer une délégation parlementaire, a fortiori depuis la réforme de notre règlement, dite réforme Warsmann. Désormais, aux termes de l’article 86, le rapporteur d’un texte peut exercer un droit de suite qui lui permet d’aller en vérifier les conditions d’application. Mais, indépendamment de cette disposition, le travail que vous appelez de vos vœux en matière de prévention de la délinquance ressortit à la compétence normale des commissions permanentes et non d’une délégation parlementaire. Il faut arrêter de multiplier les organes de ce genre pour traiter de sujets qui relèvent de la compétence de droit commun de nos commissions permanentes.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de ne pas adopter les amendements nos 614, 615 et 618.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Sincèrement, monsieur Blazy, je ne comprends pas pourquoi vous voulez toujours polémiquer.

M. Jean-Pierre Blazy. Mais pas du tout !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Sur un sujet aussi sérieux que celui de la sécurité, le ministre de l’intérieur n’a eu de cesse d’associer l’ensemble de la représentation nationale.

M. Lilian Zanchi. À coup d’ordonnances et de circulaires !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Vous ne l’aviez pas fait avant !

Par précaution, on s’est contenté, dans un premier temps, de mesurer la délinquance avec les statistiques existantes en publiant l’état 4001, même si l’outil était loin d’être parfait. Vous ne l’aviez pas fait non plus. Quand nous sommes arrivés en 2002, nous nous sommes dit que, si nous changions l’outil statistique, on nous le reprocherait. Mais, à partir du moment où nous sommes tous, vous comme nous, arrivés à la même conclusion, à savoir que l’instrument de mesure était perfectible, nous avons confié à deux parlementaires, l’un de l’opposition, l’autre de la majorité, en l’espèce M. Caresche et M. Pandraud, le soin de nous faire des propositions,...

M. Jean-Pierre Blazy. Ce n’est pas vous, c’est nous !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. ...lesquelles ont abouti à la création de l’Observatoire national de la délinquance. Il a rendu des conclusions et il nous a surtout permis de croiser les données de l’état 4001 avec les enquêtes de victimation, contribuant ainsi à la transparence la plus totale.

M. Lilian Zanchi. Mais non !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Ne polémiquez pas !

Vous nous reprochez ensuite d’avoir adressé une circulaire aux préfets.

M. Jean-Pierre Blazy. Disons plutôt que nous la découvrons !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Les parlementaires – de tous bords – se plaignent systématiquement, et c’est bien naturel, que, lorsqu’une loi est votée, il faille attendre des mois, voire des années que les décrets d’application soient pris ou ses dispositions mises en œuvre.

M. Lilian Zanchi. Quelle mauvaise foi !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Écoutez-moi, pour éviter les malentendus !

L’action gouvernementale, pour le ministre de l’intérieur, s’exerce au quotidien.

M. Lilian Zanchi. Mais il faut respecter le travail parlementaire !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Il ne suffit pas de débattre des semaines et d’attendre ensuite des mois la mise en œuvre des textes qui ont été votés. Et il n’y a rien d’anormal à ce que le ministre de l’intérieur adresse d’ores et déjà une circulaire aux préfets pour les préparer aux contrats locaux de sécurité de nouvelle génération, qui permettront dans quelques mois de mettre en œuvre la loi sans retard.

M. Jean-Pierre Blazy. Il faudra quinze textes d’application !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Convenez que c’est une modernisation que de se préparer à appliquer un texte !

M. Lilian Zanchi. À quoi servons-nous donc ?

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Cela évite de perdre des mois.

Ensuite, en ce qui concerne votre demande de création d’une délégation parlementaire, je souscris bien entendu aux remarques légitimes du président et rapporteur de la commission des lois : cette commission est le lieu naturel pour débattre de ces questions. J’ajoute que l’Observatoire national de la délinquance créé par le ministre de l’intérieur en 2003 permet d’ores et déjà d’associer à la fois les parlementaires de la majorité et ceux de l’opposition. L’Assemblée nationale y est représentée par M. Pandraud et M. Caresche, et le Sénat par M. Courtois et M. Mahéas.

M. Jean-Pierre Blazy. M. Pasqua vient même de le rejoindre !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Vous nous avez proposé tout à l’heure de créer un conseil interministériel de prévention de la délinquance. Or je vous rappelle que, par un décret du 17 janvier 2006, a été institué un comité interministériel de prévention de la délinquance. Je précise à ceux qui n’auraient pas examiné dans le détail son organisation et son fonctionnement, qu’il est présidé par le Premier ministre et qu’il doit remettre un rapport annuel à la représentation nationale. Ainsi, vous pourrez en débattre, en particulier au sein de la commission des lois. Il nous semble que vous disposez, en toute transparence, des outils nécessaires à votre information.

Dès lors, ces amendements ne nous paraissent pas utiles, et je demande à l’Assemblée de les repousser.

M. le président. La parole est à M. Michel Vaxès.

M. Michel Vaxès. J’avoue avoir quelques difficultés à suivre la cohérence de l’argumentation de M. le ministre.

Mme Patricia Adam et M. Jean-Pierre Blazy. Nous aussi.

M. Lilian Zanchi. Elle est pour le moins brouillonne !

M. Jacques-Alain Bénisti. Il se fait tard !

M. Michel Vaxès. Ce n’est pas que j’ai du mal à suivre, mais c’est la cohérence du propos qui fait défaut ! N’inversez pas les choses.

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Je peux recommencer, à l’envers, si vous voulez !

M. Michel Vaxès. Quel que soit le sens, le propos manque de cohérence !

Imaginons que l’Assemblée décide de prendre le contre-pied des orientations de cette circulaire. Cela pourrait se produire ! Qu’arriverait-il si, entre-temps, les préfets avaient mis en œuvre la circulaire ? Avouez que la situation serait singulière !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. La circulaire n’empiète pas sur le domaine législatif.

M. Lilian Zanchi. J’avais cru comprendre qu’elle traduisait la loi et l’anticipait !

M. Michel Vaxès. La circulaire doit traduire les orientations décidées par le législateur. Il faut donc attendre que le débat ait pris fin et ne pas préjuger les décisions du Parlement. Ces amendements sont donc justifiés : il faut évaluer les actions menées, et pas seulement établir des constats. Certes, l’Observatoire joue un rôle important, personne ne le conteste, mais il faut créer une délégation parlementaire pour évaluer les actions conduites. Le sujet le mérite.

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Je tiens, pour soutenir les amendements identiques en discussion, à abonder dans le sens de Michel Vaxès en constatant, non sans un certain étonnement, la précipitation de M. le ministre de l’intérieur. Il fait preuve en effet d’autant de précipitation à précéder la représentation nationale et le vote du projet de loi qu’à être candidat à l’élection présidentielle. Il est dans une telle période d’agitation qu’il va décidément trop vite ! Nous n’avons même pas encore eu le temps d’examiner ce texte que nous risquons de voir paraître une circulaire ministérielle qui ne respecte pas l’esprit de la loi !

Monsieur le président de la commission des lois, selon vous, les délégations parlementaires n’ont pour objet que des champs très spécifiques. L’argument est recevable. Toutefois, vous conviendrez aisément avec nous que la maison à laquelle nous appartenons n’a pas pour habitude d’évaluer les conséquences de l’application des lois que nous votons, notamment en termes de progrès de l’État de droit.

M. Philippe Houillon, rapporteur. Ce n’est pas vrai !

M. Noël Mamère. Pouvez-vous nous dire à combien d’évaluations la commission des lois a procédé depuis que vous en êtes le président ? Je serais curieux de le savoir. Nous nous apercevrions alors très certainement que les commissions qui sont chargées d’évaluer l’application des lois le font bien peu. Du reste, l’idée de la délégation parlementaire me paraît d’autant plus judicieuse que cela permettrait de réunir des représentants des deux chambres qui, me semble-t-il, se complètent utilement au sein de notre démocratie parlementaire, surtout quand il s’agit de traiter de sujets que vous ne cessez vous-mêmes de qualifier de primordiaux, du fait qu’ils déterminent l’avenir de la France.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous avons décidément eu bien raison de déposer l’ensemble de ces amendements avant l’article 1er : ils auront eu le mérite de faire immédiatement tomber les masques. La façon dont vous manipulez les outils de l’action publique, lois, ordonnances, décrets, règlements, circulaires,…

M. Lilian Zanchi. Sans oublier le recours aux ordonnances !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …sans oublier effectivement le recours aux ordonnances, est tout de même singulière. Tout cela pour l’affichage et le petit commerce de stratégies qui deviennent vulgaires lorsqu’elles vont à l’encontre des fondements de l’action publique que vous prétendez conduire.

Vous nous avez dit – cela correspond d’ailleurs au constat que je fais – que les contrats locaux de sécurité étant déjà prévus dans un décret d’application, ils n’avaient pas besoin d’être mentionnés de nouveau dans la loi.

M. Philippe Houillon, rapporteur. Ils ont été créés par une circulaire !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Vous nous avez dit la même chose pour le comité interministériel. Dois-je vous rappeler que les maires président les contrats locaux de sécurité ? Pourquoi ne pas faire figurer dans la loi les dispositifs de contractualisation des rapports que devront entretenir tous ceux qui seront chargés de coordonner l’action publique, et ce alors même qu’ils seront au nombre de cinq ? Le projet de loi ne prévoit même pas les conditions dans lesquelles travailleront, à tous les niveaux, ceux à qui il confie les missions de coordination. Telle est votre méthode.

Les contrats urbains de cohésion sociale, que nous négocions actuellement, ne sont-ils pas visés dans la loi de cohésion sociale ? Ils sont même des outils du fonds de cohésion sociale qui, lui aussi, figure dans la loi de cohésion sociale. Pourquoi le fonds de cohésion sociale et les contrats urbains de cohésion sociale, que nous négocions avec l’État via le département, ainsi que le nouveau fonds de prévention de la délinquance, figurent-ils dans le projet de loi, et non pas les contrats locaux de sécurité ? Expliquez-moi cette logique d’État, qui consiste à aller à la supérette des instruments de l’action publique !

En réalité, vous choisissez d’inscrire dans la loi les mesures dont vous souhaitez qu’elles soient largement connues. Je ne parle pas de vous, monsieur le ministre délégué ; je vous remercie d’ailleurs d’être présent ce soir. En revanche certain ministre se répand partout sur certaines mesures, que ce soit à la télévision ou devant l’Association des maires de France, mais surtout pas dans cet hémicycle !

Cependant, en dépit de son importance, vous refusez que le dispositif de prévention de la délinquance figure dans la loi et qu’y soit clairement précisé comment les cinq acteurs chargés de la coordination de l’action publique en la matière – le Premier ministre et le comité interministériel, le procureur de la République, le préfet, voire, le cas échéant, le préfet de police, et les maires – pourront travailler ensemble. Il s’agit donc bien d’un problème de méthode, bien qu’on ne puisse y réduire la question de la prévention de la délinquance.

Pour vous, celle-ci n’est qu’un article à promouvoir dans le stock de la supérette que constitue à vos yeux la sécurité. Ces procédés donnent raison à tous ceux qui vous suspectent de ne pas défendre la prévention de la délinquance que beaucoup d’entre nous, sur tous les bancs, pratiquons pourtant quotidiennement dans nos communes. Vous cherchez seulement, à quelques mois d’une échéance électorale majeure, à rouler pour quelqu’un qui en a manifestement bien besoin car, dois-je le rappeler, ce projet de loi marque également un constat d’échec.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Houillon, rapporteur. Monsieur Le Bouillonnec, je vais vous répondre très tranquillement !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je me suis exprimé tranquillelment !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Qu’eût-ce été dans le cas contraire !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Je l’ai trouvé bouillonnant, au contraire.

M. Philippe Houillon, rapporteur. Monsieur Le Bouillonnec, vous qui êtes juriste, vous ne pouvez pas ignorer qu’on inclut les contrats dans la loi pour les rendre obligatoires.

Monsieur Mamère, puisque vous souhaitez avoir des informations en matière d’évaluation de l’application des lois, je vous les donne bien volontiers.

Depuis que je préside la commission des lois, celle-ci a présenté plusieurs rapports d’application : deux de notre collègue Jean-Luc Warsmann sur la loi Perben, un de notre collègue Thierry Mariani sur la loi relative à l’immigration et un de notre collègue Alain Gest sur la loi relative aux libertés et responsabilités locales. Xavier de Roux nous présentera, quant à lui, avant la fin de l’année, son rapport sur l’application de la loi relative à la sauvegarde des entreprises et Thierry Mariani le sien sur la loi relative à la sécurité civile. Vous le voyez, notre commission assure parfaitement sa mission d’évaluation.

M. Noël Mamère. Tous les rapporteurs sont de la majorité !

M. le président. Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 614, 615 et 618.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. À la demande du Gouvernement, les articles 1er à 12, ainsi que l’amendement n° 190 portant article additionnel après l’article 12, sont réservés jusqu’après l’amendement n° 293 rectifié portant article additionnel après l’article 12.

Celui-ci, mes chers collègues, vous a été distribué il y a environ une heure.

M. Jean-Pierre Blazy. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Monsieur le président, nous avons tout à l’heure demandé une suspension de séance pour prendre connaissance d’un projet de circulaire que nous n’avons d’ailleurs toujours pas. J’espère, monsieur le ministre délégué, que vous le communiquerez à la représentation nationale, d’autant que vous en avez déjà abondamment parlé.

Nous sommes maintenant contraints de demander une autre suspension de séance pour lire dans le détail l’amendement du Gouvernement, dont nous avons pris à peine connaissance et qui vient d’être rectifié.

M. Philippe Houillon, rapporteur. La rectification tient simplement en l’intégration dans le corps de l’amendement de trois sous-amendements de la commission des lois !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue, pour trois minutes.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures dix, est reprise à vingt-trois heures treize.)

M. le président. La séance est reprise.

Après l’article 12

M. le président. Nous en venons donc à l’amendement n° 293 rectifié, portant article additionnel après l’article 12. Cet amendement fait l’objet de trois sous-amendements, nos 627, 711 et 712.

La parole est à M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer, pour soutenir l’amendement n° 293 rectifié.

M. Dominique Perben, ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Mesdames, messieurs les députés, l’amendement n° 293 rectifié reprend les mesures à caractère législatif annoncées par le Premier ministre à l’issue du comité interministériel de sécurité routière du 8 novembre dernier. Il est en effet apparu nécessaire de toiletter le permis à points, dispositif institué en 1992. Je rappelle à cet égard que la politique de sécurité routière que nous menons depuis 2002 a incontestablement porté ses fruits, permettant d’éviter 8 700 morts et quelque 110 000 blessés.

Le toilettage qui vous est proposé, pour sa partie législative, comprend quatre mesures.

La première consiste, par souci de cohérence, à aligner le statut des organismes de stages de sensibilisation à la sécurité routière sur celui des auto-écoles. C’est un gage de qualité.

La deuxième mesure prévoit l’attribution progressive, et non plus en une seule fois, des points supplémentaires aux titulaires du permis probatoire. Le capital initial du conducteur concerné passera de six à douze points non plus d’une traite mais à raison de deux points chaque année pendant trois ans. Je pense qu’il s’agit d’une incitation à la bonne conduite pour les jeunes qui viennent d’obtenir leur permis.

La troisième disposition est une mesure d’équité. Elle consiste à mettre en place un dispositif technique qui permet de recouvrer son permis au terme d’un délai de six mois francs après la restitution de son précédent titre. Autrement dit, la durée des démarches administratives sera comprise dans ce délai puisqu’elles pourront désormais être entamées dès la remise du permis de conduire en préfecture.

Enfin, le quatrième dispositif, que j’appellerais « un point-un an », permettra au conducteur concerné de récupérer l’unique point perdu au bout d’un an, à condition de ne pas commettre de nouvelles infractions entre-temps, mesure qui exclut de fait les infractions les plus graves ou les infractions multiples.

Je souhaite à présent vous donner une explication sur le dialogue que le Gouvernement a eu avec la commission des lois qui avait présenté, sur l’amendement initial, plusieurs sous-amendements relatifs aux conditions techniques d’application de la loi. Nous y avons travaillé ensemble et le Gouvernement a décidé de faire sien ces sous-amendements puisqu’il est d’accord avec les orientations qu’ils définissent.

Ainsi le Gouvernement a repris dans l’amendement n° 293 rectifié la date d’entrée en vigueur des dispositions relatives aux stages de sensibilisation, prévue par le sous-amendement n° 627 de la commission des lois.

Comme le proposait le sous-amendement n° 628 sur le permis probatoire, le Gouvernement a retenu la date d’entrée en vigueur du 31 décembre 2007.

S’agissant du sous-amendement n° 629 relatif au délai de six mois francs au-delà duquel il est possible d’obtenir un nouveau permis, nous avons également repris ce que proposait la commission. Toutefois, en ce qui concerne la mesure que j’ai appelée « un point-un an », après une étude approfondie menée en particulier avec le service du ministère de l’intérieur gérant le fichier des permis, je vous suggère de reprendre la rédaction initiale de notre amendement n° 293, en la complétant par la mention des infractions non définitives que le service gestionnaire pourra ainsi prendre en compte. Pour le reste, le stock des infractions, il conviendrait que nous examinions – parlementaires et administrations concernées – l’éventuelle possibilité d’aller au-delà du texte afin que des difficultés techniques réelles, si elles ne pouvaient être surmontées, ne rendent pas la loi inapplicable.

Ainsi, je le répète, après examen précis des sous-amendements présentés par la commission, je propose leur reprise dans le texte de l’amendement n° 293 rectifié qui en intègre l’esprit, sous réserve des points techniques que je viens d’évoquer.

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde pour défendre ses sous-amendements nos 711 et 712.

M. Jean-Christophe Lagarde. Avant de défendre mes deux sous-amendements qui ont le même objet, permettez-moi de souligner, monsieur le président, que la façon dont se déroule le débat me gêne profondément. Vous conviendrez que je ne suis pas un habitué des demandes de suspension de séance pour le principe mais, si je veux savoir à quels articles du code de la route les dispositions de l’amendement n° 293 rectifié se rapportent, j’ai besoin de quelques minutes pour recueillir les informations nécessaires et savoir de quoi l’on parle.

En effet, j’ignore par exemple pourquoi il est précisé que les dispositions de l’article additionnel proposé après l’article 12 sont applicables à Mayotte. Qu’en est-il pour le reste de l’outre-mer ? Je ne sais pas non plus à quelle disposition fait référence l’alinéa dans lequel les mots : « passible d’une amende forfaitaire » sont remplacés par les mots : « des quatre premières classes au présent code ». Que sont ces « quatre premières classes » ?

Vous conviendrez donc sans doute avec moi que, si les parlementaires ont un droit d’amendement, ils ont aussi le droit de sous-amender. Or, ne sachant si les dispositions que le Gouvernement propose sont bonnes ou non, je ne veux pas voter en aveugle.

De plus, honnêtement, comment bien suivre la discussion alors que cet amendement rectifié a été déposé il y a un quart d’heure ? A moins de sortir de séance nous ne pouvions en prendre connaissance alors que nous étions en train de débattre avec M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.

Je crois n’avoir jamais demandé de suspension de séance. Reste que j’ai besoin de quelques minutes pour aller consulter le code de la route à la bibliothèque de l’Assemblée, mes recherches sur le site legifrance.gouv.fr se révélant insuffisantes pour que je sache si je puis voter l’amendement rectifié en l’état ou bien s’il faut que je propose, éventuellement, un sous-amendement.

Rappels au règlement

M. Jean-Pierre Blazy. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Pierre Blazy. Je ne peux que soutenir la demande de suspension de séance de M. Lagarde, mais je veux d’abord – et j’espère qu’il voudra bien répondre – interroger M. le ministre des transports sur un point.

Monsieur le ministre, vous êtes évidemment le bienvenu dans notre hémicycle.

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. J’espère bien !

M. Jacques-Alain Bénisti. M. Blazy est trop gentil !

M. Jean-Pierre Blazy. Néanmoins, tout à l’heure, on nous pressait d’en venir à l’article 1er, nous reprochant d’avoir multiplié les articles additionnels avant ledit article, articles additionnels pourtant ô combien utiles, comme l’a montré la discussion. Or, monsieur le ministre, vous surgissez juste après que nous avons appris l’imminence de votre venue, avant la dernière interruption de séance. Je souhaite donc comprendre pourquoi il est opportun d’aborder dès maintenant cet amendement portant article additionnel après l’article 12.

Mme Patricia Adam. C’est en effet hors sujet !

M. Jean-Pierre Blazy. Y a-t-il une raison ? Pouvez-vous nous expliquer cette urgence, puisque, manifestement, il y a urgence ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Oui, pourquoi ce soir ?

M. Jean-Pierre Blazy. Vous pourriez au moins nous éclairer sur ce point, après quoi nous pourrions, si M. le président en est d’accord, suspendre nos travaux quelques minutes.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Houillon, rapporteur. Je ne peux pas accepter les propos que vient de tenir M. Lagarde. En effet l’amendement du Gouvernement a été examiné de manière complète par la commission des lois qui l’a accepté a une très large majorité.

M. Lilian Zanchi, M. Jean-Pierre Blazy et M. Jean-Christophe Lagarde. Il a été rectifié depuis !

M. Philippe Houillon, rapporteur. J’ai alors présenté quatre sous-amendements qui ont été acceptés par la commission des lois parce qu’il paraissait nécessaire d’apporter des précisions au texte. Or le Gouvernement, dans cet amendement n° 293 rectifié, a intégré les sous-amendements en question. N’affirmez donc pas qu’on découvre maintenant le texte de l’amendement rectifié !

Je m’exprimerai plus tard davantage sur le sujet en fonction de votre décision, monsieur le président, de répondre à la demande de suspension de séance qui vous a été adressée.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Je réponds très simplement à M. Blazy que je dois me rendre demain au sommet franco-italien. Je ne pourrai donc être présent parmi vous, raison pour laquelle j’ai demandé à mon collègue M. Estrosi de pouvoir présenter cet amendement ce soir. Étant chargé de la sécurité routière, je souhaitais que la discussion se tienne en ma présence.

M. Jean-Pierre Blazy. Voilà qui est clair, mais nous ne le savions pas !

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Je remercie M. le ministre des transports d’être présent devant la représentation nationale et je lui recommande, à l’issue de l’échange que nous allons avoir, de prendre contact avec M. le ministre de l’intérieur pour lui demander de l’imiter, puisque c’est lui qui présente ce texte.(Murmures sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. Jacques-Alain Bénisti. Oh, là, là !

M. Noël Mamère. Reste, monsieur le ministre des transports, que je me pose la question de savoir pourquoi ces dispositions figurent dans un texte censé être consacré à la prévention de la délinquance.

Par ailleurs, après l’agression d’une femme par des chiens de race rottweiler, il se dit que M. le ministre de l’intérieur – ce n’est pas à nous qu’il l’a annoncé mais peut-être à la télévision, peut-être aux maires de France, peut-être ailleurs – aurait décidé de déposer un amendement sur le sujet. Mais qu’examine-t-on donc ici ? S’agit-il bien de prévention, ou alors, encore une fois, de sanctions ? À qui ce texte s’adresse-t-il ?

M. Jacques-Alain Bénisti. S’il s’adressait aux députés aboyeurs, nous serions plusieurs à le voter !

M. Noël Mamère. S’adresse-t-il aux conducteurs automobiles, aux propriétaires de chiens ? Qu’est-ce que cela signifie ? Il s’agit d’un texte fourre-tout qui montre bien le peu de cas que vous faites de la prévention, d’un texte de circonstance, d’un texte politicien, électoraliste, discuté à la veille d’une élection présidentielle.

M. Lilian Zanchi. Très bien !

M. Noël Mamère. Je veux bien croire que M. le ministre des transports devra participer demain à un sommet franco-italien, mais nous savons aussi qu’il est toujours bon pour un gouvernement, à la veille d’une élection, d’annoncer qu’on va réduire la sanction notamment de ceux qui commettent des délits, quelquefois des crimes, au volant de leur voiture.

M. le président. Monsieur Lagarde, maintenez-vous votre demande de suspension de séance ?

M. Jean-Christophe Lagarde. Oui, monsieur le président.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt-cinq, est reprise à vingt-trois heures trente-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

M. Jean-Pierre Blazy. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Pierre Blazy. Nous ignorions, monsieur le ministre des transports, que vous vous rendiez demain au sommet franco-italien. Nous connaissons maintenant l’explication de votre présence ce soir. Cela étant, vous aviez largement le temps d’aller en Italie et d’en revenir : l’examen de l’article 12 n’est pas pour demain ! (Sourires.)

M. Philippe Houillon, rapporteur. Certes !

M. Jean-Pierre Blazy. Notez que cet article traite de la question des infractions au code de la route commises par les étrangers. J’espère que vous serez également présent lorsque nous l’examinerons. Les Italiens, au demeurant, sont concernés.

M. Jacques-Alain Bénisti. Justement ! Mieux vaut que le ministre se rende en Italie avant ! (Sourires.)

Reprise de la discussion

M. le président. Monsieur Lagarde, êtes-vous maintenant à même de défendre vos deux sous-amendements ?

M. Jean-Christophe Lagarde. Oui, monsieur le président, et je vous remercie de m’avoir accordé cette suspension de séance.

J’appelle l’attention de M. le président de la commission des lois sur le fait que l’on n’est pas nécessairement présent à toutes les réunions de la commission, et que le compte rendu de la réunion en question ne consacre qu’une dizaine de lignes à l’amendement du Gouvernement. C’est beaucoup, certes, pour un examen au titre de l’article 88 du règlement. En général les amendements, en général, défilent à toute vitesse – pro forma, dirais-je poliment – et ne sont pas débattus, ce qui explique d’ailleurs que l’on se dispense d’assister à de telles réunions.

M. Philippe Houillon, rapporteur. Cet amendement-là a été débattu.

M. Jean-Christophe Lagarde. Par la suite, le Gouvernement a voulu intégrer dans son amendement les sous-amendements adoptés par la commission. Ceux-ci ont-ils été mal rédigés ? Toujours est-il que vous « re-sous-amendez », monsieur le rapporteur !

M. Jacques-Alain Bénisti. Nous y voilà !

M. Jean-Christophe Lagarde. Eh oui, monsieur Bénisti : j’aurai mis un peu de temps à comprendre le processus, mais convenez qu’on ne peut pas rédiger la loi comme ça, sur un coin de table.

M. Jean-Pierre Blazy. Quelle cuisine en effet !

M. Jean-Christophe Lagarde. J’en viens à la présentation de mon sous-amendement n° 711.

L’ajout que je propose n’étonnera pas M. le ministre des transports, puisqu’il fait écho à un échange que nous avions eu ici même lors de la discussion du projet de loi d’amnistie qu’il présenta en 2002, lorsqu’il était garde des sceaux.

Six mois nous séparent de l’élection présidentielle. Je sais que les dispositions proposées dans l’amendement gouvernemental ne seront pas d’application immédiate, puisqu’un délai de deux ans est prévu, en raison de problèmes informatiques, ai-je cru comprendre. Il n’en reste pas moins que l’on observe déjà l’anticipation d’une loi d’amnistie réputée conforme à la tradition républicaine . À ce propos, il faudra m’expliquer ce que la tradition d’une loi d’amnistie, censée célébrer l’avènement du chef de l’État, a de républicain !

On s’attend à ce que de nombreuses infractions soient effacées, notamment celles qui sont punies par le code de la route. Il est heureux que les infractions visées à l’article L. 223-5 n’aient pas été concernées la dernière fois, mais cela pourrait venir : imaginons un candidat ou une candidate qui, dans l’euphorie de la victoire ou par accès de démagogie, se mette en tête d’effacer telle ou telle infraction.

Le système de récupération de points que vous proposez présente un certain équilibre, monsieur le ministre. Il faudrait donc éviter qu’une loi d’amnistie vienne le rompre. Ainsi, les candidats à l’élection présidentielle ne seront pas soumis à la tentation de caresser l’électeur dans le sens du poil au détriment de la sécurité routière, tout en continuant de proclamer que celle-ci est essentielle !

Le recul de l’insécurité routière et, pour la première fois dans l’histoire de notre pays, la baisse du nombre de tués et de blessés sur les routes doivent être mis à l’actif de ce gouvernement. Il ne serait pas sain que l’on affaiblisse la loi en laissant planer l’éventualité d’une amnistie qui participe, à mon sens, d’une sorte de fête bien peu républicaine après l’élection du chef de l’État.

Enfin, lisant quotidiennement les rapports de la police municipale qui est de mon ressort, je peux vous dire que, depuis deux ou trois mois, les contrevenants qui se font verbaliser pour un stop grillé, un feu rouge brûlé, un stationnement gênant devant une école, etc, s’en prennent régulièrement aux policiers, leur demandant s’ils n’ont pas mieux à faire – alors que ceux-ci ne font que leur métier ! – et leur disant que de toute façon ils s’en fichent, car dans six mois tout sera effacé.

M. Jacques-Alain Bénisti. C’est malheureusement vrai !

M. Jean-Christophe Lagarde. Je le répète : il n’est pas sain de maintenir cette « tradition républicaine ». Je trouve que le nouvel équilibre proposé pour la récupération des points est intelligent et j’espère qu’il sera efficace. Il ne faudrait pas permettre qu’on le brise tous les cinq ans, à chaque élection présidentielle.

Mme Patricia Adam. Tout à fait d’accord !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour présenter le sous-amendement no 627, et donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 293 rectifié ainsi que sur les sous-amendements nos 711 et 712.

M. Philippe Houillon, rapporteur. L’amendement du Gouvernement a reçu un avis favorable de la commission. Lors de son examen, j’ai été amené à déposer quatre sous-amendements. Celui qui subsiste, monsieur Lagarde, n’a pas été déposé après que le Gouvernement a rectifié son amendement : c’est bien l’un des sous-amendements initiaux.

M. Jean-Christophe Lagarde. Ce qui veut dire qu’en deux jours on n’a pas trouvé moyen de le recopier correctement !

M. Philippe Houillon, rapporteur. C’est à peu près cela.

Les sous-amendements tendaient respectivement : à sauver le permis probatoire, car la rédaction initiale me donnait à penser qu’il était quasiment supprimé ; à déterminer la date d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions relatives au permis probatoire et à la récupération progressive des points ; enfin, s’agissant de la récupération annuelle d’un point, à permettre que la loi pénale plus douce s’applique immédiatement aux situations en cours. Toutes ces dispositions ont été intégrées dans l’amendement rectifié.

Le Gouvernement ayant pris en compte, comme l’a indiqué M. le ministre, les observations salvatrices de la commission, j’ai retiré trois de mes sous-amendements pour n’en conserver qu’un, certes mineur, mais qui tend à préserver l’orthodoxie à laquelle, vous le savez, la commission des lois est très attachée : nous proposons de substituer au futur employé dans l’amendement le présent qui est d’usage dans les textes législatifs.

En revanche je ne peux approuver les sous-amendements de M. Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Comme d’habitude !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Non, pas « comme d’habitude » !

M. Jean-Christophe Lagarde. Sur ce sujet !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Ainsi que je viens de le souligner, la commission des lois essaie de préserver une certaine orthodoxie. Or ces sous-amendements sont clairement en dehors des clous, car une loi ne peut pas encadrer l’action future du législateur, sauf si c’est une loi constitutionnelle, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence.

M. Philippe Edmond-Mariette. Bien sûr !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Je ne me prononce pas sur le fond, mais sur la forme. C’est aux candidats à l’élection présidentielle qu’il appartiendra de s’engager sur le périmètre qu’ils entendent donner à une éventuelle loi d’amnistie, voire de promettre de supprimer cette pratique.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il faudrait qu’ils le fassent vite, pour empêcher les gens de faire des bêtises !

M. Philippe Houillon, rapporteur. Là n’est pas mon sujet. C’est pour des raisons techniques que je suggère le rejet de ces deux sous-amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois sous-amendements ?

M. le ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer. Le Gouvernement est favorable au sous-amendement n° 637, qui est en effet plus conforme à la tradition juridique en matière d’emploi des temps grammaticaux.

Concernant les deux sous-amendements de M. Lagarde, je ne peux qu’abonder dans le sens des remarques formulées par le président Houillon : la loi ne peut pas encadrer la loi ; elle ne peut limiter le travail futur du législateur.

Vous vous souvenez sans doute, monsieur Lagarde, qu’en 2002 nous avions exclu les infractions aux règles de la sécurité routière de la loi d’amnistie, n’y laissant que le stationnement non gênant. Nous étions allés très loin dans la restriction, nous préoccupant par exemple du problème du stationnement des handicapés.

C’est pour des raisons constitutionnelles que je suis défavorable à ces deux sous-amendements.

M. le président. Les maintenez-vous, monsieur Lagarde ?

M. Jean-Christophe Lagarde. Je n’ai défendu qu’un seul de mes sous-amendements, les deux ayant le même objet, pour compenser la suspension de séance que j’ai demandée pour examiner le texte de l’amendement.

Je me souviens en effet, monsieur le ministre, de cette exclusion, que j’avais approuvée, à défaut d’approuver l’ensemble du texte.

Je n’ignore pas davantage, monsieur le président de la commission des lois, que les sous-amendements que je présente sont techniquement difficilement recevables et qu’une commission mixte paritaire aurait tôt fait de les écarter, mais il me semblait utile que nous puissions avoir ce débat avant l’élection présidentielle. J’ai d’ailleurs vu sur tous les bancs des signes d’approbation lorsque j’ai dénoncé l’irresponsabilité qu’engendre la perspective d’une amnistie.

Il était souhaitable que l’Assemblée nationale fasse clairement savoir aux Français que la proximité d’une élection présidentielle ne saurait justifier que l’on se comporte n’importe comment sur la route et que l’on mette en danger ses concitoyens.

Il faut également rappeler que la dernière loi d’amnistie ne concernait pas de telles infractions, contrairement à ce qu’une tradition ancienne a pu faire croire à certains Français.

M. le président. Cela signifie-t-il que vous retirez les sous-amendements nos 711 et 712 ?

M. Jean-Christophe Lagarde. Oui, monsieur le président.

M. le président. Les sous-amendements nos 711 et 712 sont donc retirés.

La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Le permis à points a une longue histoire et a déjà été réformé à plusieurs reprises. Le gouvernement en place a été de plus en plus sévère en matière de retrait de points, ce qui se traduit par un risque accru de perte du permis de conduire. La dernière aggravation des sanctions en la matière date de 2005.

Nous reconnaissons tous, cependant, que le système du permis à points, mis en œuvre depuis une bonne quinzaine d’années, conjugué avec d’autres mesures, a contribué à réduire très sensiblement le nombre de morts et de blessés sur les routes de France. Les Nations unies elles-mêmes ont reconnu ce bon résultat de la France, qui tient sans doute à la performance du dispositif.

Que ce soit parce que vous reconnaissez un excès de sévérité ou parce que nous approchons des élections et que ce sont les citoyens qui vous reprochent cette sévérité, vous proposez aujourd’hui de faciliter la reconstitution des points avant la perte du permis, ce qui évitera le risque de perte du permis et de tout ce qui en découle pour certaines personnes, comme la perte d’emploi ou de stage et la nécessité de repasser le permis.

Cet assouplissement est bienvenu, monsieur le ministre, à condition toutefois qu’il ne donne pas un signal malheureux. L’amendement n° 293 rectifié nous semble, de ce point de vue, équilibré et le groupe socialiste le soutiendra.

M. le président. La parole est à M. Philippe Edmond-Mariette.

M. Philippe Edmond-Mariette. Je souscris volontiers à cet amendement, mais je suis gêné par une autre difficulté. Je dois avouer que, par naïveté peut-être, ou parce que je découvre depuis peu le fonctionnement de notre assemblée, je ne comprends pas le déroulement du débat de ce soir.

D’abord les articles 1er à 12 ont été réservés, alors que l’article 12 commence exactement par les mêmes mots que l’article additionnel que nous examinons actuellement : « Le code de la route est ainsi modifié ». Pourquoi ne l’examinons pas également maintenant ?

Ce désordre s’ajoute à deux autres difficultés.

Tout d’abord, M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire a répondu que le fait qu’une circulaire ministérielle soit en cours de signature dispensait notre assemblée de débattre d’un amendement. Je suis donc curieux de voir comment nous examinerons les articles 18 à 24, car je souhaite comprendre l’alchimie qui, avant que nous ne commencions l’examen du texte relatif à la prévention de la délinquance, a permis d’habiliter le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnances sur ce sujet. En effet, si cette procédure est prévue par la Constitution, l’article 41 de celle-ci dispose aussi que le Gouvernement, une fois habilité spécialement à légiférer par ordonnances, peut à tout moment déclarer irrecevable tout amendement proposé sur le sujet en cause. Il ne s’agit certes là que d’une faculté, mais je caricature à dessein : si cette caricature devient réalité, quel sera l’intérêt du débat que nous aurons sur les articles 18 à 24 ?

Je tiens d’autant plus à le souligner que je me demande si le Gouvernement n’attendait pas que nous ayons délibéré exactement dans les mêmes termes que le Sénat pour faire sa cuisine comme bon lui semble, au mépris des droits du Parlement.

Je me pose donc de nombreuses questions.

Ainsi, ne serait-il pas utile que M. le ministre des transports reste après le vote de cet article additionnel après l’article 12 et demande que notre assemblée délibére spécialement sur l’article 12, qui le concerne aussi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Je n’ai pas grand-chose à ajouter aux propos de M. Edmond-Mariette qui, pour quelqu’un qui ne connaîtrait pas bien le fonctionnement du Parlement, nous a fait une belle démonstration de sa connaissance tant de la Constitution que des règles du droit.

Je ne puis donc que confirmer ses propos. Je ne comprends pas, en effet, monsieur le ministre des transports, pourquoi cet article additionnel a été détaché de l’article 12, dont il partage l’économie et l’esprit. Nous avons d’ailleurs déposé des amendements visant à la suppression pure et simple de cet article 12, qui confirme que ce texte qui prétend améliorer la prévention de la délinquance n’est qu’un fourre-tout.

Puisqu’il est question de prévention, M. le ministre aurait sans doute été mieux inspiré, au lieu d’envoyer des signaux à ceux qui commettent des infractions en leur disant qu’ils vont récupérer plus vite leurs points, de contrôler et de sanctionner plus strictement les publicités des constructeurs automobiles qui expliquent que les voitures peuvent rouler à 200 ou 250 kilomètres à l’heure alors que la vitesse est limitée à 130 kilomètres à l’heure sur les autoroutes et à 110 et 90 kilomètres à l’heure sur d’autres voies.

M. Jacques-Alain Bénisti. On peut rouler en Allemagne !

M. Noël Mamère. Il pourrait être judicieux que M. le ministre des transports incite les constructeurs automobiles à brider les moteurs. Cette mesure aurait des effets sur la prévention des accidents, car on roulerait moins vite, et l’on sait que la vitesse et l’alcool au volant sont les deux principaux facteurs d’accidents. Elle aurait un autre effet positif pour la planète, car des voitures au moteur bridé produiraient moins de gaz à effet de serre.

J’observe que le Gouvernement et tous les partis politiques se piquent aujourd’hui d’être à la pointe de la lutte contre l’effet de serre, sans pour autant mettre en oeuvre les politiques nécessaires en ce sens.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je souscris à l’analyse que vient de faire M. Edmond-Mariette quant au dysfonctionnement manifeste qui rend incompréhensible pour notre assemblée la stratégie compliquée du Gouvernement. Pourquoi proposer cet article additionnel après l’article 12 ? Je regrette qu’on ne nous réponde pas. La seule explication raisonnable est celle du ministre, qui nous dit qu’il ne sera pas là demain : tout le monde peut admettre les contraintes d’un agenda. Pourquoi, en revanche, ne pas examiner le texte ensemble le moment venu ? Cette démarche n’est guère compréhensible ; cela tend à confirmer que cette loi est instrumentalisée et qu’elle a une fonction d’affichage.

Je saisis toutefois cette occasion pour suggérer une amélioration du dispositif qui s’applique aux contraventions.

Au-delà du délai de recours de 45 jours – à la suite duquel le ministère public ou la juridiction n’ont d’ailleurs, quant à eux, pas de délai pour statuer – une amende majorée est prélevée de plein droit par le Trésor public. Cette procédure pose un problème dont le médiateur de la République a saisi plusieurs ministres et sur lequel un audit est en cours. Même s’il a fait une réclamation, le contrevenant sanctionné se voit prélever l’amende majorée, car il semble qu’il n’y ait pas de lien entre l’action de l’officier ministériel qui engage les poursuites et examine le bien-fondé de la réclamation, et le Trésor public qui est chargé du recouvrement de l’amende majorée.

La nécessité d’examiner les conséquences de cette situation revêt pratiquement un caractère social, car, même lorsque la réclamation est suivie d’une restitution en cas d’exécution forcée, les frais de banque occasionnés ne sont pas remboursés. Il importe donc d’harmoniser la procédure d’examen des réclamations avec celle du recouvrement de la majoration automatique appliquée après le délai de contestation. En effet, je le répète, même si le bien-fondé de la réclamation est reconnu ultérieurement, le Trésor public aura prélevé de plein droit, en utilisant le titre exécutoire constatant le défaut de paiement, le montant de l’amende majorée sur le compte bancaire du contrevenant, par l’avis à tiers détenteur.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 627.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 293 rectifié, modifié par le sous-amendement n° 627.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Je souhaite apporter à la représentation nationale une information qui l’intéressera sans doute au plus haut point,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je crains les informations du ministre !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. …en réponse à plusieurs interventions que nous avons entendues hier et aujourd’hui dans cet hémicycle, notamment à celle qu’a faite hier M. Julien Dray, qui n’est malheureusement pas présent ce soir.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il est sans doute avec M. Sarkozy !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Évoquant le renouvellement de la représentation syndicale de la police, M. Dray n’a cessé d’annoncer à la tribune la défaite des syndicats qui avaient pris plus particulièrement position en faveur de la politique conduite par le ministre de l’intérieur depuis 2002.

M. Noël Mamère. C’est-à-dire les syndicats de droite et d’extrême-droite !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Je tiens à annoncer à la représentation nationale que les deux syndicats engagés dans le soutien de cette politique, à savoir Synergie pour les commandements et Alliance pour le corps d’encadrement et d’application, voient leurs scores progresser respectivement de 4 % et de plus de 4 points par rapport à 2003.

Quant à l’UNSA, dont M. Dray lui-même, si j’en crois les propos que j’ai relevés dans un grand quotidien, a affirmé qu’elle s’était déjà engagée dans un soutien très actif aux côtés de Mme Ségolène Royal, elle enregistre, malgré sa fusion avec un autre syndicat, le SNPT, une baisse de 7 points par rapport à 2003.

La représentation nationale est maintenant éclairée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Rappels au règlement

M. Noël Mamère. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, pour un rappel au règlement.

M. Noël Mamère. Je suis très choqué par la déclaration que vient de faire M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Je pensais qu’il était tenu à une certaine obligation de réserve et de neutralité vis-à-vis des syndicats.

L’un de nos collègues, parce que certains syndicats ne lui plaisent pas, les a traités tout à l’heure de syndicats « gauchistes ». A présent, c’est M. le ministre délégué, proche collaborateur du ministre de l’intérieur, qui ôte le masque au fur et à mesure que se poursuit la discussion : vous êtes tellement content que les syndicats qui vous sont proches aient réalisé un bon score que vous venez l’annoncer ici !

M. François Grosdidier. Vous auriez été tellement content du résultat contraire !

M. Noël Mamère. La représentation nationale est capable, comme vous, de lire la presse et les résultats sur les dépêches de l’AFP. Elle n’a pas besoin qu’un ministre de l’aménagement du territoire se fasse le petit télégraphiste des syndicats proches de la droite, voire de l’extrême droite pour certains d’entre eux. (Murmures sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.) Je le répète, je suis très choqué par ce que vous venez de faire. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

Mme Gabrielle Louis-Carabin. Il n’y a pas de quoi !

M. Jean Tiberi. Ce n’est pas le sens de ses propos !

M. François Grosdidier. C’est ridicule !

M. Noël Mamère. C’est la réponse du berger à la bergère.

M. François Grosdidier. Ce sont des syndicats, pas des partis politiques ! Monsieur Mamère, vous êtes grotesque !

M. Noël Mamère. Vous venez de faire de la politique politicienne. Vous faites des effets de manche pour flatter la partie la plus droitière de votre majorité ; vous saluez les syndicats de droite et d’extrême droite pour continuer votre politique répressive. Les banlieues, elles, pourront continuer à s’enflammer !

M. François Grosdidier. L’amalgame avec l’extrême droite est diffamatoire ! Vous nous insultez !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Est-ce le rôle du ministre de l’aménagement du territoire de nous donner les résultats des élections professionnelles qui viennent d’avoir lieu dans la police nationale ?

M. François Grosdidier. Ce n’est pas parce qu’ils vous sont défavorables qu’il ne faut pas les donner !

Mme Gabrielle Louis-Carabin. Absolument !

M. Jean-Pierre Blazy. Vous avez, monsieur le ministre délégué, franchi la ligne jaune. (Protestations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. François Grosdidier. Pas du tout ! Il est dans son rôle !

M. Jean-Pierre Blazy. Ce sont des points en moins sur votre permis de ministre !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Deux points en moins !

M. François Grosdidier. M. Blazy parle en état d’ivresse !

M. Jean-Pierre Blazy. Votre esprit partisan l’a, une fois de plus, emporté sur votre fonction ministérielle. Au moins pourriez-vous, puisque vous vouliez réserver à l'Assemblée nationale la primeur de ces résultats, nous donner les résultats complets, c'est-à-dire les scores par syndicat.

M. François Grosdidier. Je croyais que ça ne vous intéressait pas !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire.

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Il ne s’agit en aucun cas d’une annonce officielle.

M. Jean-Pierre Blazy. Ah !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il faudrait au moins attendre que les résultats soient homologués !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. A aucun moment ni le ministre de l’intérieur ni moi-même n’avons pris l’initiative de faire allusion dans cet hémicycle à la manière dont se déroulaient les élections des représentants des personnels de police. C’est M. Dray et vous-même, au nom du groupe que vous représentez, qui avez fait le choix, hier, d’engager une polémique, en promettant l’échec de certains syndicats policiers et le succès des autres.

M. François Grosdidier. C’est vrai !

M. Jean-Pierre Blazy. Je n’ai personnellement rien dit à ce sujet !

M. Patrick Delnatte. C’est l’arroseur arrosé !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. C’est vous qui avez voulu décréter quel soutien tel ou tel d’entre eux apporterait aux uns ou aux autres.

Je voulais simplement vous apporter un éclairage. Quant aux résultats définitifs, vous aurez tout le loisir d’en prendre connaissance ailleurs.

M. Jean-Pierre Nicolas. Dans la PQR !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Je retiens que, une fois de plus, monsieur Mamère, vos propos ont été très excessifs à l’égard des policiers, tout comme les vôtres, monsieur Blazy. Vous feriez mieux de porter plus de respect au libre choix qui s’est exprimé démocratiquement dans la désignation par les policiers de leurs représentants syndicaux.

M. Jean-Pierre Blazy. Je vous répète que je n’ai rien dit là-dessus.

M. François Grosdidier. Il n’est pas d’accord avec M. Dray !

M. le ministre délégué à l’aménagement du territoire. Ils méritent, de la part de chacun sur ces bancs, tout le respect qui correspond à l’engagement qui est le leur, au service de la sécurité des personnes et des biens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. le président. Je n’ai pas proposé d’arrêter les débats à minuit pour que nous les continuions sur ce thème.

La parole est à M. Michel Vaxès qui sera le dernier à s’exprimer.

M. Michel Vaxès. Je veux simplement exprimer mon attachement et celui de mon groupe à l’indépendance des organisations syndicales. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)

M. François Grosdidier. C’est un gag ! Nous terminons sur une note d’humour !

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

ordre du jour des prochaines séances

M. le président. Aujourd’hui, à neuf heures trente, première séance publique :

Suite de la discussion du projet de loi, n° 3338, adopté par le Sénat, relatif à la prévention de la délinquance :

Rapport, n° 3436, de M. Philippe Houillon, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République ;

Avis, n° 3434, de M Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

À quinze heures, deuxième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la première séance.

À vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée, le vendredi 24 novembre 2006, à zéro heure cinq.)