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(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Conformément à l’article 107 du règlement, je vais mettre successivement aux voix chacun de ces textes.
(L’article unique du projet de loi est adopté.)
(L’article unique du projet de loi est adopté.)
(L’ensemble du projet de loi est adopté.)
(L’article unique du projet de loi est adopté.)
La parole est à M. Émile Blessig.
Dans son dernier rapport, intitulé « Téléphonie mobile, Internet, TNT dans les territoires : 2002-2007, de la fracture numérique à la convergence des réseaux », la délégation a vérifié, d’une part, les conditions de la réduction de la fracture numérique constatée en 2002 en matière de téléphonie mobile et d'Internet, et, d'autre part, que le déploiement de la TNT n'allait pas se faire lui aussi dans le cadre d'une nouvelle fracture numérique. La délégation s'est inquiétée des conditions de ce déploiement. Le plan du CSA ne comportait en effet que la couverture de 85 % du territoire ; la conséquence en était que, par exemple, aucun déploiement n'était prévu pour un département comme celui des Hautes-Alpes, y compris pour les villes de Gap et Briançon. De plus, si les quatre premières phases de déploiement, couvrant 65 % du territoire, se sont déroulées selon les cadences prévues, des difficultés se sont fait jour pour la phase V, qui concerne les zones de partage de fréquences avec les pays voisins, notamment en Alsace. Il y avait là un risque de non-couverture pour 30 % de la population.
La délégation a donc abouti à trois conclusions : en premier lieu, la nécessité d’un déploiement de la diffusion terrestre au-delà de 85 % de la population : une couverture entre 90 % et 95 % paraît raisonnable en termes de coût ; en deuxième lieu, le recours à un complément satellitaire gratuit dans les zones inaccessibles, la délégation notant que le recours à la loi était alors indispensable ; enfin, l'ensemble des chaînes de la TNT devraient être présentes sur le satellite, et pas seulement les six anciennes chaînes nationales. Dans ces conditions, on pourra parler de couverture généralisée et de diffusion nationale.
En fixant un objectif de 95 % de taux de couverture de la population par voie hertzienne et en imposant les dix-huit chaînes sur le satellite, le Sénat a beaucoup avancé dans le sens préconisé par la délégation.
En fixant, par son amendement no 79 rectifié, un objectif de 100 % de couverture gratuite, à décliner par tous moyens – relais hertzien, satellite mais aussi réseaux locaux d'initiative locale –, le rapporteur pour avis propose un amendement qui répond pleinement aux souhaits de la délégation. Il en est de même des amendements des rapporteurs qui organisent la diffusion par satellite, sur l’ensemble du territoire, des vingt-quatre décrochages régionaux de France 3.
La mention par l'amendement no 79 rectifié du concours des réseaux d’initiative locale au dispositif est un point essentiel dans un autre domaine : celui de la convergence numérique. La délégation, dans son rapport, a insisté sur l'utilité pour les territoires de la prise en compte de cette convergence, qui permet de faire passer l'ensemble de l'information numérique – image, son et données – par des outils de diffusion d'abord prévus pour être spécialisés. C’est une révolution que nous avons connue pendant cette législature : en 2002, tout était séparé ; aujourd’hui, la convergence est généralisée. Cette convergence rend moins coûteuse et plus facile la couverture d'un territoire. Ainsi, il est prévu d'achever la couverture du territoire en Internet haut débit par le système de diffusion hertzienne WiMax. Si l'on peut ensuite utiliser le réseau WiMax pour faire passer la télévision, ce sera toujours autant de coûts d'installation économisés. En zone de montagne, il y a des parties de territoire qui ne pourront capter le satellite ; l'utilisation du réseau d'initiative locale sera alors la bonne solution.
La délégation s'est aussi intéressée à ce qu'on appelle le dividende numérique et à la façon dont il pourrait concourir à la couverture numérique du territoire. La numérisation, on le sait, aboutit à diviser par six le besoin de fréquence pour faire passer un signal audiovisuel, une chaîne de télévision par exemple. Avec les nouvelles normes de compression, dites MPEG4, le besoin n'est plus divisé par six mais par douze. De plus, la récente conférence régionale de radiocommunications, en remodelant les fréquences pour l'après-extinction de l’analogique, a dégagé, notamment aux frontières, des espaces de fréquences utilisables.
Comment utiliser ces nouveaux espaces désormais disponibles ? On peut multiplier les chaînes de télévision, créer des chaînes de télévision sur portable, des chaînes locales. Une telle diversification de l'offre est très souhaitable, mais elle a ses limites : la limitation par le CSA des chaînes nationales gratuites à vingt parce que, selon lui, c'est la limite du nombre de chaînes gratuites que la publicité permet de financer. Par ailleurs, quoique très réduit par rapport à la diffusion analogique, le coût de diffusion par les 115 émetteurs les plus importants sur 85 % du territoire est d’environ 2 millions d’euros par chaîne. Or la quasi-totalité des chaînes du câble et du satellite ne peut payer ce coût. On peut alors décider d'utiliser le dividende pour accroître la qualité du signal des chaînes : c'est la télévision haute définition. Mais elle consomme deux à trois fois plus de fréquence que la définition standard.
La délégation s'est donc souciée que le service public et les territoires ne soient pas les oubliés du dividende numérique. Le dividende doit pouvoir permettre des liaisons en visiophonie pour la sécurité civile, pour le SAMU, pour la météo ou le contrôle aérien, par exemple. Le dividende numérique est aussi un instrument d'égal accès des territoires ruraux aux réseaux numériques. Je voudrais insister sur l’importance des conclusions de la délégation sur ce point, en me félicitant qu'elles aient été entendues, notamment par le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
L'un des éléments clés de la couverture numérique du territoire est la téléphonie mobile. Pour que cette couverture soit complète, il a fallu élaborer un plan de résorption des zones non couvertes, dites « zones blanches » ; ce plan est aujourd'hui en cours d'achèvement, après bien des épisodes difficiles. Il s'agit de construire des pylônes, de poser des relais en nombre suffisant pour faire passer partout le signal, et surtout d’organiser la coopération entre les opérateurs, soit par mutualisation, soit par itinérance. La téléphonie mobile actuelle, dite 2G, qui ne transmet que la voix, est diffusée sur la bande GSM, c'est-à-dire celle des 900 mégahertz. La prochaine génération, la 3G et au-delà, sera encore plus essentielle pour les territoires difficiles d’accès puisqu’elle permettra de transmettre l'image. Outre son intérêt pour les communications personnelles, on voit l’importance de l’ajout de l’image en matière de services à la population : services à la personne, santé ou sécurité.
Avec le passage à la 3G, qui consomme plus de bande passante, c’est-à-dire d’ondes, des risques de saturation de la bande GSM existent. Ces risques ont été soulignés dans le rapport d'information de la délégation. Il est alors prévu l'utilisation par les opérateurs de la bande des 2,1 gigahertz, c’est-à-dire les « fréquences d’or ». Or, dans cette configuration, les ondes portent beaucoup moins loin. Il faut donc tripler le nombre de relais, de pylônes et d'équipements. Dans les territoires peu peuplés, le coût serait prohibitif. De ce fait, on peut en être certain, la téléphonie 3G n'y serait pas installée. Il y a donc une légitimité, pour des raisons d'aménagement et d'équité d'accès des territoires aux services, à ce que, dans ces territoires, la téléphonie mobile accède, en cas de saturation de la bande GSM, à des fréquences plus basses, celles du dividende numérique – l’espace laissé libre par l’installation de la télévision numérique terrestre.
Au nom de la délégation, je me félicite donc de la présentation, par le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'amendement n° 74, qui mentionne, parmi les objectifs du schéma de réallocation des fréquences du dividende numérique, l'égalité d'accès aux réseaux de communication électronique, l’amélioration sur le territoire de la couverture numérique et le développement de l'efficacité des liaisons hertziennes des services publics. En effet, c’est la loi qui doit prévoir l'utilisation du dividende numérique en faveur de l'égal accès des territoires aux réseaux de communication numérique.
Enfin, je voudrais insister sur la conduite du processus d’implantation de la TNT dans les zones de partage de fréquence, c’est-à-dire les zones frontalières. Ces zones sont délicates à traiter. Dans certaines zones limitées, pour accéder au numérique, il faudra mettre fin à l'analogique. Ces zones, notamment les zones rurales, ne reçoivent souvent qu'une ou deux chaînes nationales. L'accès aux chaînes hertziennes étrangères y est vécu, depuis longtemps, comme la juste contrepartie de cette réception souvent partielle de l'offre française. Le basculement devra donc y être organisé de façon soigneuse. En l'état, le projet de loi indique que, pour le basculement au numérique, le CSA tient compte « des spécificités des zones frontalières et des zones de montagne ». Au-delà de ces dispositions législatives, l'État devra désigner aux collectivités locales un interlocuteur unique ; celui-ci devra être en liaison avec les responsables du basculement de l'autre côté de la frontière ; une communication et une information précises devront être mises en place, notamment pour que les populations sachent comment elles peuvent, si elles le souhaitent, retrouver l'accès aux chaînes dont elles avaient l'habitude. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner des assurances sur ce point ?
En conclusion, il faut constater que, bien mieux que d'autres plans d'équipement du territoire, le projet de loi sur la modernisation de la diffusion télévisuelle se préoccupe de la couverture effective du territoire. Nous constatons avec satisfaction que plusieurs amendements des rapporteurs améliorent encore le texte sur ce point. C'est pourquoi, en ma qualité de président de la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire, je ne peux qu'être favorable à ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Depuis une dizaine d'années, avec l'arrivée du câble, du satellite, et maintenant de la TNT, nous avons encore franchi un cap supplémentaire dans la place occupée par le petit écran : quels que soient ses goûts, quels que soient ses centres d'intérêt, le spectateur peut toujours, désormais, trouver de quoi se satisfaire parmi les centaines de chaînes qui lui sont proposées. Mordu de sport ou féru de chasse, « accro » à l'actualité ou au séries en tous genres, le spectateur est devenu un véritable consommateur qui n'a qu'à faire son marché par télécommande interposée.
Cette mutation correspond bien évidemment aux transformations profondes de notre société, dans laquelle les outils de communication ont pris une place centrale. Elle passe également par une recherche qualitative accrue, celle d'une image et d'un son toujours plus performants. En nous présentant aujourd'hui ce projet de loi relatif à la « modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur », vous nous prouvez, monsieur le ministre, que la France a bel et bien décidé de ne pas rester spectatrice de cette révolution en marche, mais au contraire d'être à la pointe des mutations technologiques en cours et à venir. La fin programmée de la télévision traditionnelle ou analogique et l'avènement du numérique placent la France dans le wagon de tête des pays européens à la pointe de la modernité.
Gardons-nous bien, toutefois, de nous laisser déborder par ce signe extérieur de modernité. Je le disais en préambule, la télévision a changé notre rapport au monde et occupe désormais une place prépondérante dans les foyers français. Or, si cette révolution a du bon, elle présente aussi des travers que la puissance publique ne peut négliger. En premier lieu, qui dit offre de programmes élargie doit dire aussi vigilance accrue quant au contenu des programmes diffusés, notamment à destination des plus fragiles et des plus jeunes.
La place de nos enfants face à la télévision est en effet paradoxale : s’ils sont parmi les plus grands consommateurs de télévision, ils sont aussi les spectateurs les plus vulnérables, ceux que nous devons protéger. Les chiffres sont sans appel : un enfant de cinq ans regarde la télévision deux heures et demie par jour en moyenne, et un enfant de douze ans environ quatre heures. On estime par ailleurs que le temps passé devant la télévision par les plus jeunes augmente de deux à trois minutes chaque année. Or une étude menée en 2003 par le CNRS montre que 80 % du temps passé par les enfants de quatre à dix ans devant le petit écran ne l'est pas devant des dessins animés ou des émissions pour la jeunesse mais devant des émissions pour tous publics.
Les enfants ne doivent pourtant pas être livrés à eux-mêmes dans ce qui est selon moi une véritable jungle de l'image. L'impact de la télévision peut en effet être important, et on sous-estime trop souvent les dégâts que des programmes incluant des scènes de violence peuvent avoir sur les plus jeunes. Les pédopsychiatres s'accordent sur le fait qu’avant huit ans un enfant n'a pas de conscience claire du temps et de l'espace, et s’imagine que ce qu'il voit à la télévision se déroule à l'instant même où il le voit. Ses repères sont complètement brouillés.
Au-delà de la perception immédiate, la violence télévisée exerce également des effets durables sur le psychisme des plus jeunes : elle donne aux enfants un modèle qui valorise l'agressivité et la destruction de l'autre et les présente comme des moyens de résoudre les problèmes. Si certains enfants réagissent par le dégoût et le rejet de ce type de comportements, au risque d'être choqués et traumatisés, d'autres, en revanche, choisissent plutôt l'identification à des héros violents dont ils intériorisent les systèmes de valeurs. Si des progrès ont été réalisés en matière de classification et de signalisation des programmes présentant des scènes de violence, notamment à la suite de la publication du rapport Kriegel en 2002, il semble que bien des progrès restent à accomplir en la matière. Ce n'est qu'en menant une action conjointe que nous parviendrons à protéger nos enfants.
Le rôle des parents, notamment, est essentiel. Chacun doit prendre ses responsabilités. Nous devons inviter les parents à la vigilance et les amener à être attentifs aux programmes regardés par leur progéniture. Il est essentiel de mettre en place, très tôt, un code et des règles par rapport à la télévision. Trop souvent, la télévision fait office de nounou et n'est soumise à aucun contrôle parental. Il importe donc de rappeler à chacun le rôle qu'il a à jouer en la matière.
Si une mauvaise consommation télévisuelle est inquiétante, une surconsommation peut l'être tout autant. Oui, malgré toutes les controverses sur le sujet, le rôle de la télévision quant à l'obésité est réel, et il existe bien un lien entre le temps passé devant le petit écran et la corpulence des spectateurs. De nombreuses études scientifiques ont montré que, au-delà de quatre heures passées devant la télévision, le poids augmentait dangereusement. La faute en revient bien sûr à l'inactivité, mais aussi à la quantité de messages publicitaires délivrés, au cours des programmes, en faveur de produits diététiquement plus qu’incorrects. En tant que président du groupe d'études sur les professions de santé, je ne peux que m'en inquiéter. Si nous avons longtemps raillé les États-Unis et caricaturé l'Américain moyen, assis devant la télévision avec un paquet de chips dans une main et un soda dans l'autre, nous devons aujourd'hui nous méfier car cette image commence de plus en plus à nous ressembler.
Tout comme Internet, la télévision est donc un formidable outil d'ouverture sur le monde, à condition qu'il demeure maîtrisé. Je regrette donc que le projet de loi qui nous est présenté ne comporte rien, ou presque, sur les deux problèmes que je viens de soulever : d’après moi tout est lié, et la télévision ne pourra demeurer un véritable objet de modernité que si son utilisation reste pleinement maîtrisée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Qu'il faille adapter nos modes de diffusion télévisée aux évolutions technologiques ne fait naturellement aucun doute. Nul doute non plus qu'il faille saisir cette opportunité à des fins de diversification et de pluralisme du paysage audiovisuel, qui en a d'ailleurs bien besoin :…
À la lecture de ce texte, il est pourtant difficile de parler d'« imagination au pouvoir » – sinon lorsqu'il s'agit de faire la part belle aux opérateurs historiques privés. Je pourrais moi aussi me prêter à ce petit jeu des grands auteurs et, à mon tour, évoquer André Malraux, qui écrivait dans ses Antimémoires : « La vérité d'un homme, c'est d'abord ce qu'il cache. Sa réalité : le masque qu'il porte. » M’appuyant sur cette illustre citation, je pourrais dire que la « vérité » du projet de loi ne réside pas tant dans ses objectifs affichés – que nous partageons – que dans les moyens qu'il met en œuvre pour y parvenir, que nous ne partageons pas. Je pourrais alors dire que la « réalité » de ce texte, ou plus précisément sa temporalité, n'est pas l'avenir mais plutôt le passé : à l'évidence, l’expression de « télévision du futur » apparaît quelque peu décalée, tant ce projet de loi relève d'une vision archaïque des médias à l'ère du numérique. À moins qu'il ne s'agisse tout simplement d'une erreur de concordance des temps. En ce cas, acceptez, monsieur le ministre, la correction de votre copie proposée par l'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel – l’AVICCA –, qui estime plus approprié de parler de « télévision du futur antérieur ».
Vision datée, donc. Mais comment aurait-il pu en être autrement ? Il est en effet évident que le parti pris qui a présidé à l'élaboration de ce texte vous a conduit à faire l'impasse sur les évolutions majeures opérées ces dernières années dans le domaine de l'audiovisuel. La relation des téléspectateurs au petit écran s'est considérablement transformée. En témoignent par exemple l'émergence de nouveaux modes de consommation, comme la vidéo à la demande, les « webtélés » ou encore le podcasting. Même Étienne Mougeotte estime, dans le journal Le Monde du 30 décembre dernier, qu'« il n'y a plus d'effet de chaînes ». Pourtant, la télévision que vous nous proposez, monsieur le ministre, reste ce média unidirectionnel et prescriptif.
Voilà pourquoi, faute d'avoir engagé une réflexion sur ce qu'est et sera la télévision, le Gouvernement nous propose un projet de loi à contre courant des évolutions. Et voilà pourquoi votre texte – que l'on peut sans aucun esprit polémique qualifier de conservateur – ne pourra, hélas, recueillir ce vote dépassant les clivages partisans que vous appelez de vos vœux. Ce manque criant de vision à long terme vous conduit en effet à deux écueils majeurs.
Le premier est de considérer que la multiplication des canaux suffit à répondre aux exigences de diversité culturelle et de pluralisme, comme si les tuyaux importaient plus que ce qui y circule. Ainsi, alors que le passage au numérique représente l'occasion de modifier la donne et de remédier au niveau élevé et préoccupant de concentration des médias dans notre pays, le Gouvernement semble se satisfaire des déséquilibres existants, quitte, même, à les accentuer. Sous prétexte d'adaptation technologique, ce texte aura ainsi pour conséquence de concentrer dans les mains de quelques-uns les chaînes de télévision, les programmes et l'information.
De quel pluralisme parlons-nous, de quelle indépendance des médias et de quelle diversité culturelle quand de grands éditeurs nationaux privés se voient accorder autant de faveurs ? La liste en est longue.
Deuxième faveur, et non des moindres : les « chaînes bonus ». Cette disposition, que vous appelez « juste compensation », n'est pas acceptable. Des garde-fous sont déjà prévus pour que ces chaînes ne pâtissent pas du passage au numérique, puisqu'il reviendra au CSA, qui a largement contribué à la mise en œuvre de la TNT, de fixer les dates des extinctions en analogique en « tenant compte de l'équipement des foyers pour la réception de la TNT ».
Alors, en rajouter avec l'octroi de chaînes bonus à des groupes dont certains ont tenté d'entraver le développement de la TNT lors de son lancement laisse quelque peu songeur sur les réelles intentions du Gouvernement, surtout à la veille d'échéances électorales de premier ordre. Nul ne sera donc surpris que le groupe socialiste suive l'avis de l'ARCEP et du CSA et propose la suppression de cette disposition.
Troisième faveur, la question – sensible, il est vrai – de la numérotation. Les distributeurs, souvent liés à des grands éditeurs privés ne peuvent se retrouver juges et parties et, en la matière, les chaînes gratuites de la TNT ne doivent pas être exposées au risque d'une numérotation discriminatoire. Elles doivent au contraire bénéficier d'une même numérotation, celle attribuée par le CSA, quel que soit le support de diffusion : câble, satellite, ADSL ou TNT.
Quant aux chaînes indépendantes, l'autre parent pauvre de ce projet de loi, elles ne peuvent être les oubliées de la numérisation. C'est tout le sens d'une série d'amendements que nous avons déposés que de donner au CSA des moyens de régulation en faveur du pluralisme des programmes et de la diversification des opérateurs dans le domaine de la télévision locale ainsi que dans les nouveaux modes de diffusion que sont la TVHD et la TMP.
Enfin, que vient faire la radio dans un projet de loi relatif à la télévision, alors même que le CSA a lancé une procédure de consultation publique en vue du lancement de la radio numérique ? Je sais que ce n’est guère votre faute, monsieur le ministre, et que cela vient du Sénat, mais cet article 5 quater, dont nous demandons naturellement la suppression…
Et c'est là le second écueil de ce projet de loi : il occulte totalement les nouveaux modes de production et de consommation de la télévision à l'ère numérique. Internet est le grand absent de ce texte ! Il est vrai que cela ne nous étonne guère, puisque nous connaissions déjà, monsieur le ministre – les débats sur la DADVSI l'ont illustrée –, votre méfiance face à ce mode de communication décentralisé et votre propension à freiner les échanges sur les réseaux. Quoi qu'il en soit, les faits sont là. La convergence entre l'Internet et la télévision est aujourd'hui une réalité. La plupart des fournisseurs d'accès proposent des offres « triple-play », comprenant un bouquet de chaînes de télévision, et, parallèlement, les web-télés attirent un nombre croissant d'internautes.
Le CSA a émis un avis très réservé sur la qualité des programmes actuellement diffusés sur la TNT. Pourquoi, dès lors, ne pas mieux prendre en compte l'essor des télévisions sur Internet et encourager le soutien aux contenus qui y sont produits ?
Aussi le groupe socialiste souhaite-t-il s'inscrire, à travers une série d'amendements, dans une démarche résolument constructive. Nous proposons tout d'abord qu'une part du dividende numérique soit utilisée pour le développement des réseaux de communications électroniques et de téléphonie, autrement dit pour la couverture du territoire en haut débit et pour la lutte contre le fossé numérique. Par pitié, ne gaspillons pas ce dividende numérique : sachons en diversifier l’utilisation.
Afin de soutenir toutes les nouvelles formes de création, nous sommes également à l'initiative d'un amendement visant à ce que les fournisseurs d’accès à Internet, qui jouent sur le web le rôle de distributeurs, contribuent aux comptes de soutien aux industries cinématographiques et audiovisuelles.
L'adoption d'une telle mesure doit bien évidemment être accompagnée d'une évolution réglementaire visant à ce que les créateurs diffusant leurs œuvres en ligne puissent accéder aux différents fonds de soutien à la création.
Posons clairement, par ailleurs, le principe selon lequel les télévisions gratuites ne peuvent s'opposer à la reprise intégrale et simultanée de leurs programmes. Il n'est en effet pas satisfaisant – soyons justes – que les fournisseurs d’accès à Internet proposant des bouquets doivent négocier avec les chaînes gratuites pour les intégrer à leur offre.
Garantissons, pour finir, à tous les développeurs de logiciels, notamment ceux du libre, d'être en mesure de créer les logiciels nécessaires à la réception des programmes télévisuels et, par conséquent, veillons à ce que toutes les informations nécessaires soient disponibles et librement utilisables. Il serait pour le moins paradoxal de s'opposer à une telle mesure, alors même que notre assemblée s'est déjà prononcée, pour son propre fonctionnement, en faveur de la mise en place de standards ouverts.
Toutes ces dispositions, si elles étaient adoptées, permettraient de donner toute sa place à Internet dans le paysage audiovisuel. Car la télévision du futur, telle que nous la concevons en tout cas, ne saurait aller à rebours de l'histoire.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, le passage au tout numérique représente une formidable chance pour répondre aux enjeux d'une offre télévisuelle pluraliste, indépendante et diverse.
En premier lieu, je souhaite souligner les avancées de ce projet de loi qui est l'un des grands dossiers du ministère de la culture. Préparée depuis des mois par vous et votre équipe, monsieur le ministre, cette réforme poursuit trois objectifs : garantir à tous les Français l'accès à la télévision numérique, permettre à la France de mener à son terme cette nouvelle révolution industrielle et renforcer son rôle dans la diversité culturelle. Ce texte révèle un incroyable potentiel. Il doit tout d'abord permettre de parachever le chantier de la télévision numérique terrestre, lancé le 31 mars 2005. Aujourd'hui accessible à 65 % de la population, la TNT a permis de multiplier par trois l'offre de programmes gratuits, avec un son et une image d'une qualité très supérieure. Le 30 novembre 2011, la télévision analogique cédera la place à la télévision numérique terrestre.
Ce texte met également en valeur le développement de la télévision du futur. L'augmentation du nombre de canaux hertziens permet d'envisager de nouvelles offres en matière de télévision. La télévision haute définition permet une réception de qualité sur des écrans beaucoup plus grands que les écrans actuels ; la télévision mobile personnelle est destinée, elle, à être reçue sur de petits écrans transportables.
Le passage au numérique, la haute définition et l'audiovisuel mobile sont de véritables révolutions telles que la télévision n'en n'avait pas vécu depuis son passage à la couleur. C'est bien pour cela que je souhaite intervenir sur l'enjeu, en termes d'accès, que représentent ces nouvelles technologies.
Le progrès ne vaudra que s'il est partagé par tous et partout, quel que soit le lieu d'habitation ou la situation sociale du téléspectateur. L'objectif est de garantir sur la TNT dix-huit chaînes gratuites – au lieu de six actuellement – pour 100 % des Français, au 30 novembre 2011, sachant que la TNT sera le seul vecteur possible après l'extinction de l'analogique en 2011.
Ainsi, le projet de loi organise la couverture totale, à 100 %, de la population comme un objectif incontournable, puisqu'il n'est pas question que des téléspectateurs cessent de pouvoir recevoir la télévision gratuitement. Pour pouvoir couper définitivement la télévision analogique, encore faut-il s'assurer que tous les Français puissent accéder au numérique. Sans ce projet de loi, ce n'est pas le cas. La TNT couvre aujourd'hui 65 % de la population, les foyers n’étant équipés de l'adaptateur TNT qu'à hauteur de 18 %, et, dans le système actuel, certaines zones, à l'instar des zones blanches privées d'accès à l'ADSL, n'ont pas la possibilité de recevoir des chaînes comme M6 ou Canal +. Le CSA entend que la couverture soit étendue à 85 % de la population courant 2007. Pour atteindre un taux de 100 %, le projet prévoit qu'un service satellite, relayant les chaînes de la TNT, soit proposé gratuitement dans les zones où le signal hertzien numérique ne passera pas. Mais le matériel de réception – parabole et décodeur – sera, comme c'est le cas des décodeurs TNT classiques, à la charge des foyers, soit environ cent euros. C'est là pour nous un enjeu majeur. Et c'est la raison d'être du fonds mis en œuvre dans le projet de loi, à l’article 103, pour permettre une aide à l'équipement des foyers modestes, avec un double souci d'équité géographique et sociale. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce point majeur du texte, qui nous permettra d'affirmer qu'il ne saurait y avoir de laissés-pour-compte du progrès numérique.
Plus globalement, nous veillerons à ce que les objectifs que nous affichons deviennent bien une réalité tangible pour nos concitoyens et que nous ne nous perdions pas dans des considérations techniciennes, souvent mises en avant pour expliquer que c'est impossible. Nous attendons, là aussi, que vous nous donniez des assurances.
Enfin, je souhaiterais dire quelques mots concernant le nécessaire pluralisme des chaînes représentées sur ce qui sera le nouveau réseau audiovisuel. À partir du 31 mars 2008, la diffusion de la télévision analogique sera coupée progressivement, par zones géographiques, jusqu'à la conversion complète fin 2011. Le projet de loi confère d'office un droit de transfert sur la TNT aux petites chaînes locales, du moins jusqu'en 2015. Concernant les conditions mêmes de ce transfert, une chaîne comme France 3 Régions verrait l'arrêt de la diffusion analogique, service par service, pour chaque zone géographique. Pour que cela se fasse dans des conditions favorables pour tous, j’ai déposé un amendement à l'article 5.
Cette question de la visibilité des chaînes régionales est également au cœur des débats, et je reprends cette thématique dans un amendement à l'article 5 ter, pour que soit instituée l'obligation de transport des programmes régionaux de France 3, le « must carry », sur l'ensemble des réseaux de diffusion, et pas seulement sur l'offre satellitaire.
Cette réforme doit garantir l'accès de tous à cette révolution audiovisuelle et je sais, monsieur le ministre, que c'est, pour vous, une réelle préoccupation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
J'ai choisi d'axer mon intervention sur un sujet qui me tient à cœur, comme vous avez pu en juger il y a quinze jours, monsieur le ministre, dans votre bureau : les territoires de montagne. Du fait de leurs caractéristiques géographiques particulières, ils appellent des mesures spécifiques, notamment en matière de technologies de l'information et de télécommunications. Les zones de montagne sont trop souvent les laissées-pour-compte de l'innovation technologique. À ce titre, il est impératif que la couverture du territoire, pour la télévision numérique terrestre comme pour le haut débit, soit géographique. Elle ne doit pas seulement se référer à un pourcentage de la population concernée. Toute politique d'aménagement du territoire doit conjuguer ces deux critères : l'un démographique, l'autre géographique. Le basculement par zones et le calendrier prévisionnel prennent largement en compte le premier critère mais n'intègrent pas suffisamment le second. Ramené à l’échelon national, le seuil de 90 ou 95 % de couverture induit un reliquat de 5 à 10 %, qui laisse de marbre le peuple français et les médias. S’agirait-il de zones inhabitées, si ce n’est par les ours et les loups ? Non, elles sont habitées par des citoyens français comme les autres ! Mais, comme si c’était une fatalité, ce sont les éternelles victimes de la dictature des chiffres et des ratios. Cessons d’utiliser des seuils nationaux : ramenons-les au niveau départemental, comme on l’a fait pour La Poste. Je citerai quelques chiffres pour donner le « tempo » : alors qu’il faut 115 émetteurs pour couvrir 90 % de la population, il faudra en ajouter 2 000 pour atteindre 95 % et 1 000 de plus pour remplacer totalement l’actuelle diffusion analogique, qui couvre près de 99 % de la population. Cela a un coût, mais c’est la responsabilité de la République. L'objectif est de ne pas voir se renouveler la situation que nous avons connue pour les réseaux de haut débit et d’éviter que ne s'ouvre une nouvelle fracture numérique territoriale, les élus locaux se trouvant désarmés face à l'absence de diffusion de la TNT sur de vastes parties du territoire.
J'exprime ici les inquiétudes de nombreux élus de la montagne devant le basculement complet de la télévision traditionnelle ou analogique vers la télévision numérique terrestre, programmé dès mars 2008, pour être réalisé au 30 novembre 2011, ce qui risque de laisser plusieurs territoires de montagne sans accès à la télévision. Le spectre de l’écran noir n’est pas à écarter. Ceci a d'ailleurs fait l'objet d'une motion, votée à l'unanimité lors du dernier congrès de l’association nationale des élus de la montagne, à Ax-les-Thermes.
Nous partageons évidemment l'objectif affiché par le Gouvernement d'une couverture complète du territoire, à savoir adopter le dispositif le plus efficace possible, avec une mise en application la plus prompte possible afin de permettre aux Français, sur tout le territoire, de recevoir par le numérique ou via le satellite les dix-huit chaînes gratuites de la TNT et de basculer progressivement vers le tout numérique d'ici à 2011.
Il convient donc d’optimiser les dispositions prévues à l'article 5, que nos collègues sénateurs ont déjà grandement améliorées. Cependant, si ces derniers ont obtenu du Gouvernement des avancées considérables comme la fixation d'un objectif de couverture de 95 % de la population et la garantie que l'arrêt de la diffusion analogique se fera en tenant compte « des spécificités des zones frontalières et des zones de montagne », la définition du taux de couverture reste problématique.
Nous prenons acte que l’amendement n° 79 rectifié du rapporteur pour avis, M. Soulier, ayant reçu l’appui de M. Ollier, a été adopté par la commission des affaires économiques de notre assemblée. Mais nous attendons, monsieur le ministre, un engagement ferme pour que les habitants des territoires de montagne et du monde rural isolé ne soient pas, une fois de plus, les victimes des 5 % résiduels. Nous demandons pour ces zones l’égalité devant les délais d’accès au numérique et l’extinction de la diffusion analogique, ainsi que le conditionnement de ce dispositif par la capacité de réception de ces différents publics. Nous y serons particulièrement attentifs. Nous sommes convaincus de votre volonté, comme le souhaitent les élus de l’ANEM, de réussir ensemble le passage de l’analogique au numérique. Avant ce débat, vous avez montré votre capacité d’écoute. Nous espérons qu’au cours du débat, et surtout après, vous montrerez la même volonté. Vous savez que les montagnards sont comme Saint Thomas : ils ne croient que ce qu’ils voient, c’est le cas de le dire !
De nombreux rapports, ceux de la direction du développement des médias, celui de Michel Boyon en février 2003 ou, plus récemment, celui du sénateur Claude Belot, ont pointé le retard français en matière de développement de la télévision locale en France. Alors que, dans la plupart des grands pays voisins, la télévision de proximité, locale ou régionale, est devenue depuis plusieurs années un média couvrant la quasi-totalité du territoire national, il existe en France moins d'une centaine de chaînes locales, diffusées sur un bassin de moins de 10 millions de téléspectateurs potentiels.
Tous ces rapports ont pourtant souligné le rôle citoyen qu'une télévision locale peut jouer, et tous ont insisté sur la nécessité de créer les conditions de son développement. Ceux, encore trop peu nombreux, qui ont la chance de bénéficier d'une télévision locale savent en effet qu'elle est un élément essentiel de l'information de proximité, créateur de lien social, instrument de citoyenneté et facteur du pluralisme de l'information sur les territoires, dont elle conforte l'identité en misant, à travers ses programmes, sur l'innovation, le lien social, la valorisation des atouts et des initiatives locales. Ils savent aussi qu'elle rencontre son public dans sa plus grande diversité et, dans ce domaine, les différentes études menées par Médiamétrie montrent bien que, là où les télévisions locales existent, elles peuvent afficher des taux d'audience cumulée très élevés, les situant avant de grandes chaînes nationales.
Dans une intervention sur les enjeux de la télévision numérique locale, en novembre 2001, Dominique Baudis, alors président du CSA, soulignait déjà que « la dimension locale est un contrepoids à la mondialisation, un lieu d'enracinement et de refondation qui donne à chacun d'entre nous des repères structurants et concrets ». Il poursuivait en mettant l'accent sur « le lien social et affectif qui se construit au cœur du proche entourage et qui fournit l'essentiel des informations nécessaires à la vie quotidienne. » Enfin, il ajoutait : « À l'échelon local, on se connaît, on se comprend. »
La télévision locale est attendue du public français, il suffit de constater l'impatience des habitants des zones limitrophes de régions déjà desservies. Nous devons favoriser une réelle présence de ce média de proximité sur l'ensemble du territoire. Avec les lois de 2000, puis de juillet 2004, des avancées législatives et réglementaires très positives ont permis une clarification du cadre juridique des télévisions locales en France : ouverture des secteurs interdits, ajustement de la taxe sur la publicité télévisée, clarification du financement par les collectivités territoriales avec l'extension des contrats d'objectifs et de moyens, des contrats liés aux missions de service public confiées aux chaînes. De leur côté, les télévisions locales ont professionnalisé leurs équipes, mis en place une syndication publicitaire nationale et développé des outils communs d'étude d'audience et de syndication de programmes pour mieux assurer leur économie.
Aujourd'hui, pourtant, moins d'un Français sur six bénéficie d'une télévision locale, car les fréquences disponibles ont été réservées à des usages nationaux et non locaux. Cette couverture totale – moins de dix millions d'habitants – entrave aussi le développement des chaînes existantes, car elle est encore trop faible pour intéresser les annonceurs nationaux, même si l'audience de chaque chaîne est bonne.
Les fréquences analogiques locales qui existaient ont pour la plupart été réservées à la TNT. Mais, aujourd'hui, aucune place n'est plus disponible sur la TNT pour les chaînes locales. De surcroît, la numérisation – qui est une avancée majeure – a provoqué depuis deux ans une érosion de l'audience des chaînes hertziennes, qu’il s’agisse de l’analogique ou du câble.
Heureusement, vous avez décidé, monsieur le ministre, de libérer une fréquence sur le multiplex R1 pour la télévision locale, qui doit servir aussi à une meilleure diffusion des éditions régionales de France 3. Le Sénat a par ailleurs enrichi le projet de loi initial en demandant au CSA de planifier les fréquences et de donner une place sur la télévision numérique aux chaînes et aux projets de territoires aujourd’hui non couverts par une télévision locale et qui seraient inadaptés au R1. J’espère que l’Assemblée ne modifiera pas cette décision.
Pour être efficace, cet excellent travail doit être complété par deux mesures.
D'une part, il ne faut pas que les nouvelles chaînes qui peuvent se créer soient handicapées par la montée en charge de l'hertzien numérique. Il est impératif qu'elles puissent bénéficier d'une double diffusion, en analogique et en numérique, pour toucher tous leurs publics. Si les chaînes existantes vont pouvoir le faire grâce à ce projet de loi, c'est aussi indispensable pour les nouvelles, et ce jusqu'à l'extinction à la date prévue pour l'analogique.
D'autre part, dans un contexte d’élargissement de l'offre audiovisuelle, il est essentiel d'instaurer un fonds d'amorçage. Je regrette que les amendements de certains de nos collègues allant en ce sens aient été rejetés par la commission des finances. Ce fonds d’amorçage bénéficierait aux chaînes à faibles ressources publicitaires, le temps de leur montée en puissance. Cela conforterait chacune d’entre elles, et indirectement, par la création de chaînes partout en France, l'économie de toutes, en permettant l'arrivée d'annonceurs nationaux. La presse écrite et la radio bénéficient de nombreuses aides indispensables à leur diversité. Pourquoi la télévision de proximité n'en a-t-elle jamais eu ? On estime à 200 millions d'euros le supplément de recettes publicitaires pour les chaînes nationales dès 2007 grâce à l'ouverture du secteur de la grande distribution. Il en résultera des suppléments de recettes pour la taxe sur la publicité télévisée qui permettraient de financer la mesure sans diminuer l'aide consentie aux radios.
J'en suis persuadé, nous pouvons réussir à installer un paysage audiovisuel de proximité, avec une véritable économie, à la hauteur de la décentralisation, qui donne des responsabilités considérables aux territoires, et surtout conforme aux attentes de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
L’Europe s’inscrit également en filigrane dans le texte que nous examinons aujourd’hui. Mes propos, d’ailleurs, gagneraient en force, monsieur le président, si l’on associait derrière vous le drapeau européen à notre drapeau national. Mais cela viendra.
C’est sous l’angle européen que j’aborderai mon propos.
À l'occasion de cette visite, du haut du promontoire naturel des Vosges, vous avez également pu vous rendre compte des particularités de la géographie alsacienne : vous avez vu la plaine, le filet argenté du Rhin…
Pour répondre à ces inquiétudes, deux mesures ont d’ores et déjà été prises par le Gouvernement : la signature – le 14 décembre avec la Suisse et le 8 janvier avec l'Allemagne – de deux accords de coordination de fréquences, et la mise en place d'une expérimentation grandeur nature du tout-numérique sur la commune de Niederbronn-les-Bains, située chez mon collègue Frédéric Reiss. J'aimerais, monsieur le ministre, que vous puissiez nous préciser la portée de ces deux initiatives. Quelle sera, en définitive, l'offre télévisuelle accessible dans notre région ?
Ma deuxième interrogation porte sur le contenu des émissions diffusées car, avant d'être le ministre des moyens de communication, vous êtes celui de la culture.
Et d'abord, je veux me réjouir du fait que, grâce à la TNT, le public alsacien pourra enfin capter Arte sans passer par le réseau câblé. En effet, nous vivons aujourd’hui encore dans une situation paradoxale : la chaîne franco-allemande, dont le siège est à Strasbourg, ne peut pas être captée par voie hertzienne dans la plupart des communes d’Alsace. C'est regrettable, d'autant que les émissions sont d'une grande qualité et s'inscrivent dans une perspective européenne largement plébiscitée par la population locale. Je vous remercie par avance de réparer cette anomalie.
La promotion de la langue et de la culture alsaciennes est un autre centre d'intérêt de mes concitoyens, mais j’y reviendrai lors de l'examen des articles.
Pour clore mon propos, je tiens, monsieur le ministre, à vous exprimer mon soutien pour les choix politiques que vous défendez dans ce texte. En effet, loin de constituer un vulgaire marchandage, comme certains voudraient le faire croire, demander aux chaînes de télévision de soutenir financièrement la production cinématographique et audiovisuelle représente un choix stratégique essentiel, car si la TNT permet d'évoluer vers la haute définition, c'est-à-dire vers la qualité visuelle, elle ne garantit en rien la qualité et la diversité culturelle des émissions.
Seul un effort de création, avec des moyens adaptés, nous protégera d'une massification des banalités. Et je vais plus loin : seul un effort accru de coproduction avec des opérateurs étrangers, notamment européens, permettra de diffuser très largement le travail de nos artistes et, en retour, d'offrir à nos téléspectateurs des œuvres étrangères, reflétant des cultures et des sensibilités originales. C’est un facteur de connaissance et de respect mutuel entre les peuples.
Monsieur le ministre, lors de votre visite en Alsace, vous avez émis le vœu que le Haut-Koenigsbourg, après avoir servi de décors à La Grande illusion de Jean Renoir, puisse à nouveau accueillir des tournages et des spectacles vivants. J’ai la conviction que les choix que nous défendons dans ce texte y contribueront, de même qu’ils m’apparaissent comme indispensables pour que la culture française reste une référence en Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Trois points particuliers retiennent l'attention parce qu'ils posent un problème d'équité : l'attribution d'une fréquence supplémentaire aux opérateurs dits historiques, la couverture à 100 % du territoire, non seulement en TNT mais aussi en haut débit, et enfin la réception par tous les habitants de chacun des programmes régionaux de France 3.
Nous avons déjà longuement évoqué, hier, la question de la fréquence supplémentaire. L’intervention, ce matin, du rapporteur de la commission des affaires culturelles dans l’émission de télévision Les Quatre vérités a enrichi le débat. Bien que l’attribution d’une nouvelle fréquence aux chaînes anciennes soit dénoncée par certains comme une faveur qui pénaliserait les autres chaînes, plusieurs raisons me portent à en soutenir le principe. D’abord, les chaînes historiques ont investi des sommes importantes en contrepartie de l'autorisation de diffuser. Le passage au numérique réduit la période pendant laquelle elles avaient des droits ; une juste compensation est donc logique, et c’est d’ailleurs ce qu’a demandé le Conseil d'État.
Ensuite, la solution retenue par le Gouvernement est plus satisfaisante qu'une compensation financière, car les éditeurs de services bénéficiaires de la fréquence supplémentaire devront souscrire à des engagements particuliers en matière de diffusion et de production cinématographique et audiovisuelle française et européenne.
Enfin, le téléspectateur sera gagnant. Grâce à un simple adaptateur TNT, au prix très modeste et donc accessible à tous, il bénéficiera, avec l'accroissement du nombre de chaînes, d’un choix infiniment plus vaste d'œuvres télévisuelles et cinématographiques. Ainsi, chaque Français aura à sa disposition dix-huit chaînes gratuites au lieu de trois aujourd’hui. Pourriez-vous, monsieur le ministre, développer ce thème pour nous conforter dans l'idée qu'il ne s'agit pas d'un cadeau, mais du respect du pluralisme ?
Quant à la couverture du territoire en TNT, elle a largement progressé depuis sa mise en œuvre en mars 2005 et elle doit encore s'étendre dans les tout prochains mois. Le projet de loi a pour objectif d'encourager le développement de la TNT, de la télévision haute définition, de la télévision mobile personnelle et de l'Internet. Il prévoit actuellement une couverture à 95 % pour les chaînes historiques diffusées en analogique mais seulement à 85 % pour les autres chaînes.
Or il est nécessaire d'offrir la même couverture à l'ensemble de la population, et vite : l'exemple de la Charente montre que de nombreuses zones blanches subsistent en matière de haut débit, et qu’elles sont préjudiciables non seulement à nos concitoyens pour l'utilisation personnelle qu'ils peuvent faire des technologies de l'information et de la communication, mais aussi à l'ensemble des acteurs du développement économique, entreprises et collectivités territoriales en particulier. Vous comprendrez donc, monsieur le ministre, que je fasse le lien entre la couverture en TNT et la couverture en haut débit. Vous avez affirmé qu'il n'y aurait pas de laissés-pour-compte. La couverture en haut débit va-t-elle connaître une accélération, de façon à atteindre 100 % ? Selon quel calendrier ? Par ailleurs, quels moyens seront mis à la disposition des consommateurs pour permettre à tous d’accéder à la TNT ?
Enfin, comme l'ont précisé nos collègues sénateurs dans un article 5 ter nouveau, il me semble impératif de mettre en œuvre les moyens techniques et financiers pour que tous les supports permettent la réception gratuite des déclinaisons régionales des programmes de France 3. Cependant, la rédaction proposée par le Sénat est susceptible de prêter à confusion. Le principe que nous souhaitons établir dans le cadre de ce projet de loi – la commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques sont tombées d’accord sur ce point – est d'assurer la réception non pas de chaque programme régional spécifique dans la seule région concernée mais de tous les programmes dans toutes les régions.
En conclusion, il est nécessaire de réaliser la couverture numérique et en haut débit de l'ensemble du territoire, le plus rapidement possible, et en tout état de cause avant le 30 novembre 2011.
Sur l'ensemble de ces points, je vous remercie des précisions que vous pourrez nous apporter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Le service public est un garant du lien social ; c’est aussi, à travers la chaîne France 3, un élément de proximité auquel les Français sont attachés. Il faut impérativement que les opérateurs commerciaux de satellites puissent permettre à tous nos concitoyens, sur l’ensemble du territoire, d’accéder aux programmes régionaux de France 3. Vous l’avez évoqué hier, monsieur le ministre, lors des questions d’actualité, et j’ai moi-même déposé des amendements en ce sens. J’espère qu’une solution sera trouvée pour régler d’une manière satisfaisante ce problème difficile. Il y va de l’intérêt général et de la préservation du service public de l’audiovisuel.
Par ailleurs, il me semble que l’ensemble des chaînes du service public doivent être reprises sur l’ensemble des supports télévisuels. J’ai beaucoup œuvré en ce sens, et je souhaite que cette idée soit retenue dans le projet de loi, au nom de l’intérêt général et en raison des obligations faites au service public et des charges qui lui incombent. Si tel n’était pas le cas, nous grèverions très largement son aptitude à toucher nos concitoyens ainsi que sa capacité créatrice.
Enfin, et bien que ce point ne soit pas abordé par le projet de loi, je crois qu’il faudra un jour traiter de manière pérenne la question du financement du service public …
J'ai aujourd'hui à cœur de vous demander, monsieur le ministre, de ne pas oublier nos campagnes. L'accès aux nouvelles technologies est aujourd'hui une nécessité impérieuse qui permet de maintenir ou d'attirer des populations dans nos territoires qui en ont bien besoin. Déjà, des voix s'élèvent dans mon département de la Lozère devant les lenteurs observées pour équiper les grands émetteurs desservant les zones rurales en TNT. Que répondre aux habitants dont le portable ne passe pas partout, qui ne peuvent être câblés et qui n'ont pas accès au dégroupage total ? Que le basculement total ne sera possible que lorsque l'analogique aura soufflé ses dernières ondes ?
La révolution technologique va vite, trop vite parfois. Auteur d'un rapport sur le télétravail, face au constat de l'extraordinaire développement des nouvelles technologies de l'information et des communications, je peux en témoigner. Le premier ordinateur individuel est né il y a seulement vingt-cinq ans En 1995, 15 % des foyers en étaient équipés et, dix ans plus tard, 54 %. Le nombre d'abonnés à Internet a été multiplié par quatre entre 2000 et 2005, avec treize millions d'abonnés. Il y a cinq ans, 62 % des foyers étaient équipés en téléphonie mobile, 80 % le sont aujourd'hui. Selon un sondage Eurostat de juin 2006, quatre personnes sur dix ne maîtrisent pas l'informatique.
Cette révolution technologique, même si elle nous dépasse, implique que les pouvoirs publics s’adaptent rapidement et anticipent ces changements, afin que notre pays prenne le train de la modernité. Demain, la télévision sera numérique, gratuite et de meilleure qualité. Elle pourra participer à une plus large diversité culturelle, à condition que la TNT soit vraiment la « télévision numérique pour tous », comme l’a souhaité le Président de la République.
Afin d’établir une comparaison, je citerai quelques chiffres concernant mon département. Depuis octobre 2006, la TNT est accessible à 65 % de la population métropolitaine, mais à 17,5 % seulement pour les habitants de la Lozère. C'est pourquoi je me réjouis que nos collègues sénateurs aient adopté un amendement à l'article 5 imposant aux chaînes aujourd'hui diffusées en mode analogique une couverture par voie hertzienne terrestre de 95 % de la population, alors que le taux fixé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel est aujourd'hui de 85 % de la population. C'est bien, mais ce n'est pas suffisant. Mes collègues Patrick Ollier, Martial Saddier, au nom des élus de la montagne, et Frédéric Soulier, rapporteur pour avis, qui a fait hier soir l’apologie de la montagne, …
En laissant la possibilité aux opérateurs d'utiliser tous les moyens disponibles pour arriver à une diffusion totale – la voie hertzienne terrestre, la voie satellitaire et les réseaux établis par les collectivités locales –, on leur demande une obligation de moyens, non de résultat. Ils pourront toujours en partie se décharger sur les particuliers ou les collectivités, du moins dans les zones où les difficultés de couverture seront les plus tenaces.
Même si l'article 5 prévoit la mise en place d'un fonds d'aide pour l'équipement des Français les plus démunis, il serait préférable de fixer un seuil de diffusion de la TNT, par voie hertzienne terrestre, à 95 % par département, comme le demande le président de l'Association des maires ruraux de France, qui exige une garantie d'équité entre les départements, demande à laquelle je souscris pleinement. Le taux de pénétration par les moyens de diffusion terrestre devrait ainsi être apprécié au niveau départemental et la décision d'arrêt de la diffusion analogique sur une zone ne devrait pouvoir être prise par le CSA qu'après le constat que cette couverture est atteinte. Je ne saurais par ailleurs assez insister sur les limites de la diffusion satellitaire en période hivernale dans les zones de montagne.
En outre, privilégier la voie terrestre allégera la facture pour la collectivité et les particuliers. Entre un adaptateur à 30 euros et une installation satellitaire à 300 euros, je vous laisse juger ! Cela irait de plus dans le sens des efforts de lutte contre la prolifération des paraboles menée depuis quelques années.
Plus sérieusement, une étude d'Arthur D. Little parue en novembre dernier et intitulée « La facture cachée de la future télévision gratuite » démontre que le coût sera moindre en poursuivant le développement du réseau terrestre, à l'instar des exemples finlandais ou suédois, que d'opter pour la voie satellitaire. Elle prouve en effet que, jusqu’à 96 % de la population, l'extension de la couverture terrestre est plus rentable pour tous les acteurs de la filière que la couverture satellite. Aux opérateurs donc de prendre en charge le réseau de réémetteurs terrestres nécessaires pour atteindre la desserte à 95 % de chaque département, ceux-ci réalisant des économies substantielles lors de l'arrêt des réémetteurs analogiques. Au-delà, il appartiendrait aux collectivités locales de choisir entre l'équipement d'un réémetteur local, sous leur maîtrise d'ouvrage, ou de privilégier l'équipement en réception satellite des particuliers. Cela nécessite par ailleurs, avant même de procéder à la distribution du dividende numérique, que les émetteurs principaux analogiques qui n'ont pu être planifiés en TNT pour cause de brouillage ou de pénurie de fréquences nouvelles soient convertis en numérique simultanément avec l'arrêt de l'analogique, afin de garantir aux habitants un service équivalent à ce qui existait auparavant. Là encore, je m'associe à la demande de Gérard Pelletier de créer un groupe de suivi impliquant État, collectivités, opérateurs et diffuseurs, chargé de rendre compte à la représentation nationale de l'état d'avancement de ce grand chantier.
Il restera ensuite à faire pénétrer davantage la TNT dans les foyers par la mise en place d'une politique ambitieuse. Aujourd'hui en effet, moins de 35 % des ménages français sont équipés en réception numérique. Mais je ne doute pas de la volonté du Gouvernement en la matière. C’est pourquoi je voterai bien évidemment votre texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Le projet de loi que nous avons à examiner est sage. Il ne prétend pas tout définir dans un monde numérique en cours de construction permanente, mais s'attache à apporter, de manière ciblée, des réponses indispensables pour mettre le plus vite possible à la disposition de tous les progrès du numérique.
La loi ne prétend pas définir pour toujours. C’est une autre preuve de sagesse. Elle prévoit par exemple que le CSA remettra un an après la promulgation de la loi un rapport sur la mise en œuvre des dispositions relatives à la TVHD et à la TMP. La loi est en effet technodégradable. Il importe de l’évaluer rapidement et de la réviser si besoin sans attendre.
Certains reprochent au Gouvernement le calendrier de la discussion de cette loi. Le constat est pourtant simple. Il fallait attendre les excellents résultats de la conférence régionale des radiocommunications du printemps 2006 pour être sûr des conditions nouvelles d’utilisation du spectre au plan international. Et il aurait été très dangereux d'attendre la prochaine législature, donc de perdre un an, pour réduire les incertitudes juridiques en créant, comme nous allons le faire maintenant, le cadre légal indispensable à la TNT pour tous, à la télévision haute définition et à la télévision mobile personnelle. Le Gouvernement a donc choisi le calendrier optimal pour permettre au CSA et aux différents opérateurs de mener les consultations et de préparer les évolutions. Il donne ainsi à notre pays les meilleures chances de faire face à des enjeux culturels et industriels considérables.
Certains contestent aussi l’attribution d’une fréquence supplémentaire aux trois chaînes privées historiques. On mesurera la volonté polémique en se souvenant que la loi de 2000 de Mmes Trautmann et Tasca a autorisé une attribution identique, mais sans exiger aucune contrepartie !
Si on veut préparer l'avenir, il faut prendre un peu de recul. Dans notre nouvel univers numérique, chacun peut choisir de ne consommer que ce qui lui plaît grâce à la multiplication des chaînes thématiques, à l'interactivité qui permet de personnaliser la consommation, et à la création de son propre contenu, avec une communauté partageant les mêmes goûts. Jamais le risque « d'autisme audiovisuel » n’a été aussi grand. Il n’y a pas de remède miracle mais il me semble qu’il faut avancer dans deux directions. Tout d’abord, former à la maîtrise de l'image : conserver une capacité critique et le « goût pluriel» m’apparaît fondamental. Ensuite, soutenir l'offre de chaînes généralistes qui permettent de s’exposer à d'autres centres d'intérêt, à d'autres opinions et de rester ouverts. Le pluralisme commence aussi au niveau individuel. Je souhaite donc que la fréquence complémentaire soit utilisée pour conforter la présence des chaînes généralistes.
Je souhaite aussi que notre débat permette de définir la compensation financière par l'État du coût de diffusion satellitaire des décrochages régionaux de France 3 – j'ai déposé un sous-amendement en ce sens –, et les contreparties dont les nouveaux entrants de la TNT ont besoin pour conforter leur installation dans le paysage audiovisuel, comme une numérotation sur l'offre satellitaire rappelant celle de la TNT, sur laquelle nous devons nous concerter, et un effort plus grand de promotion de la TNT par les chaînes historiques de l'analogique, qui ont souvent fait le service minimum.
En conclusion, je me réjouis de la politique menée visant à permettre à tous les Français d’accéder à la diversité culturelle. Oui, notre bel objectif est bien que 100 % d’entre eux aient accès à la télévision numérique, en veillant cependant à ce que les territoires ruraux, d’autres en ont parlé avant moi, n’aient pas à investir trois fois : pour l’ADSL – afin d’avoir l’Internet haut débit –, pour la TNT – le satellite sera naturellement un investissement plus limité –, et pour compléter le réseau de téléphonie mobile de troisième génération. Essayons d’utiliser la convergence numérique pour alléger le coût des investissements. J’ai déposé un amendement, déclaré irrecevable au titre de l’article 40, visant à assurer la couverture en téléphonie mobile de l’ensemble du territoire, notamment des axes principaux de circulation. Le Gouvernement, favorable à ce principe, est en train de passer un accord avec les opérateurs et l’ARCEP. Je souhaiterais que nous puissions en débattre, la téléphonie mobile étant un des supports possibles pour la réception en mobilité de la télévision.
Je me félicite également de la politique très volontariste menée depuis 2002. Je rappelais tout à l’heure la création cinématographique, audiovisuelle et musicale. Je suis satisfait que le crédit d’impôt pour les jeux vidéo soit à nouveau évoqué ici. J’avais défendu un amendement sur ce point lors de la discussion de la loi de finances pour 2007, puis lors du débat de la loi de finances rectificative pour 2006. Il nous faut avancer en la matière, sans quoi, et vous l’avez expliqué lors du colloque que j’ai organisé en septembre dernier, nous serons durablement désavantagés par rapport à d’autres pays concurrents comme le Canada, alors que nous avons de réels atouts dans le domaine de la création comme dans beaucoup d’autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
(M. Yves Bur remplace M. Jean-Luc Warsmann au fauteuil de la présidence.)
La TNT constitue incontestablement un progrès en termes de qualité des images. Il faudrait qu'elle le soit aussi pour la démocratie et le pluralisme. L'augmentation du nombre de canaux disponibles doit avant tout servir ces deux objectifs. Or vos propositions ne semblent pas aller dans ce sens. Si votre aspiration à ne pas retarder le passage au numérique peut se justifier(« Ah ! »sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire), il serait souhaitable d’accorder aux télévisions locales des autorisations provisoires de diffusion en mode analogique. Or votre texte s’y oppose et risque ainsi de compromettre la création comme la survie de chaînes locales. Les télévisions locales devront rapidement et impérativement capter le maximum de téléspectateurs pour espérer asseoir leur économie.
Le lancement de ces chaînes suppose aussi, dès le début, qu'elles disposent de moyens importants. C'est en ce sens que nous proposons de mettre en place un dispositif d'amorçage – opinion partagée par une majorité de ceux qui vous soutiennent, monsieur le ministre – pour les télévisions à faibles ressources publicitaires et de parrainage inférieur à 20 % de leur chiffre d'affaires total.
De même, l'article 5 prévoit que le basculement de l'analogique vers le numérique se fera sur une période de plusieurs mois. Ainsi le CSA fixera-t-il « neuf mois à l'avance, pour chaque zone géographique, service par service et émetteur par émetteur, une date d'arrêt de la diffusion analogique. » Cette rédaction n'est pas satisfaisante, elle présume que l'arrêt de la diffusion analogique est possible pour certaines chaînes, avant leurs concurrentes, sur une même zone géographique. Les chaînes sélectionnées pour un arrêt anticipé pourraient subir un préjudice important au bénéfice de leurs concurrentes.
L'arrêt de la diffusion analogique doit intervenir dans des conditions équitables pour l'ensemble des chaînes d'une même zone géographique.
TF1, M6 et Canal Plus auront ainsi bénéficié d’autorisations d’usage de trente à trente-deux ans sans appel à candidatures, compromettant le caractère limité de la durée de reconduction apte à garantir la démocratie et le pluralisme.
Autre exemple : vous accordez une seconde chaîne bonus aux chaînes privées historiques qui se sont développées en mode analogique hertzien, alors même que ces opérateurs ont déjà bénéficié d’un tel bonus lors du démarrage de la TNT.
Ce second canal bonus risque de déséquilibrer l’offre TNT. Vous fragilisez la situation des nouveaux entrants ainsi que le pluralisme au regard du libre choix laissé pour le format éditorial de la nouvelle chaîne.
Ces avantages criants ne s’accompagnent pas de contreparties suffisantes. À défaut de la suppression de ce canal bonus, nous demandons au minimum qu’un certain nombre de conditions soient imposées.
Premièrement, le bénéfice de cinq années supplémentaires d’autorisation, comme l’attribution de chaînes bonus, au détriment d’autres éditeurs, ne saurait s’appliquer à des chaînes qui n’auraient pas rempli l’objectif fixé pour l’extinction de l’analogique.
Deuxièmement, il faut interdire aux chaînes de la TNT de s’opposer à une diffusion de leurs programmes par les opérateurs de l’ADSL et de réseaux câblés. C’est en effet l’un des moyens pour permettre une meilleure couverture du territoire.
Troisièmement, le fonds d’aide à l’équipement en récepteurs numériques des ménages à faibles revenus doit être abondé à parts égales entre l’État et les éditeurs de services de télévision membres du groupement d’intérêt public, ce qui est prévu par l’article 102. Ces chaînes de télévision sont les principales bénéficiaires de ce basculement vers le numérique. Il apparaît équitable qu’elles contribuent pour moitié à l’effort consenti par l’État pour l’équipement des téléspectateurs ayant de faibles ressources.
Quatrièmement, il faut interdire la pub sur les chaînes bonus. Cette mesure permettrait d’éviter que les chaînes privées hertziennes, déjà en situation de position dominante par rapport au service public de télévision et aux nouveaux entrants, ne perçoivent des ressources publicitaires supplémentaires et nuisent de ce fait au développement des nouveaux éditeurs.
C’est aussi en ce sens qu’il apparaît indispensable de rendre accessibles à tous les vingt-quatre programmes régionaux de France 3, sur l’ensemble du territoire. Le bouquet satellitaire gratuit des chaînes de la TNT doit permettre d’y accéder.
Le projet de loi adopté par le Sénat prévoit que le bouquet satellitaire gratuit permet d’assurer dans chaque zone concernée la réception des déclinaisons régionales de France 3. Cette formulation est ambiguë car elle peut être comprise comme une obligation pour l’opérateur satellitaire d’assurer au téléspectateur l’accès au seul programme régional diffusé localement par voie hertzienne.
Nous avons beaucoup parlé de la diffusion de nouvelles chaînes, mais nous n’en restons pas moins attentifs aux conséquences sur la santé des ondes électromagnétiques. C’est un sujet que la représentation nationale ne peut ignorer. Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi impose une obligation de réception dans les bâtiments de la télévision personnelle mobile. La qualité de réception à l’intérieur des bâtiments suppose un niveau d’émission d’ondes très élevé, qui s’ajoutent aux ondes déjà existantes, niveau qui pourrait être incompatible avec la santé publique. Le principe de précaution, que nous avons inscrit dans la Constitution, nécessite que les pouvoirs publics puissent contrôler et limiter le niveau d’émission d’ondes électromagnétiques. Il serait cohérent que la loi prévoie les moyens de contrôle et renvoie expressément à un décret la détermination des niveaux admissibles.
À défaut de réponses claires sur ces différents éléments, monsieur le ministre, les députés Verts voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
Un certain nombre d’interventions ont totalement gommé l’enjeu de ce projet, qui est de faire en sorte que 100 % des Français, sur 100 % du territoire national, puissent bénéficier d’une offre de télévision gratuite multipliée par trois.
Un grand nombre de nos concitoyens ne bénéficient aujourd’hui que de six chaînes gratuites. C’est grâce à ce gouvernement et à cette majorité que la TNT a pu être mise en place. Progressivement, sur le territoire national, la qualité numérique du son et de l’image, la multiplication de l’offre par trois de la télévision gratuite deviennent une réalité. Nous avons à organiser ce qui est une chance pour notre pays, ce que le progrès scientifique et technologique rend possible. La qualité numérique permet une plus grande diffusion et une extension du nombre de chaînes ou tout simplement de ce qui peut être diffusé grâce au numérique.
Alors oui, si l’on part des Français et de leurs aspirations à la diversité, de leur exigence de pluralisme, je crois sincèrement qu’un accord est possible, parce que personne n’a de plan B, personne n’a de véritable alternative. Nous nous situons résolument dans une dynamique qui nous permet d’envisager des comparaisons de manière très honorable avec les autres pays européens. Nous ne voulons pas être en retard et nous voulons faire en sorte que ces évolutions technologiques apportent un progrès à nos concitoyens.
On a l’impression que certains d’entre vous ont totalement oublié les métiers qui concourent à la télévision, aux programmes, qu’il s’agisse de la musique, du cinéma, des fictions audiovisuelles ou de l’information. On a l’impression surtout que tout est réglé et qu’il est inutile de protéger un certain nombre d’équilibres. Moi, je dis haut et fort qu’il faut les protéger pour que la presse écrite puisse continuer d’exister face à la radio, à la télévision et à Internet, pour que, dans le domaine de l’audiovisuel, le secteur public et le secteur privé puissent fonctionner en bonne intelligence, avec de véritables moyens. C’est très important et il faut le rappeler.
Sans être rétrograde, conservateur ou archaïque, j’assume le fait de vouloir défendre les équilibres des sociétés de l’audiovisuel privé comme de l’audiovisuel public, ce qui n’est en aucune manière mépriser ou ignorer la nécessité et la possibilité qu’il y ait des ouvertures extraordinaires grâce à Internet, les fournisseurs d’accès à Internet pouvant d’ailleurs être une chance pour les créateurs. C’est ce que nous voulons organiser.
Plusieurs interventions, mais malheureusement pas toutes, ont rappelé les enjeux de ce texte. Il s’agit d’abord des téléspectateurs, de la diversité de l’offre des programmes qui leur sont offerts. Il s’agit aussi des emplois dans le secteur de la création et dans l’industrie française.
Monsieur le rapporteur, vous avez rappelé à juste titre l’importance du travail préparatoire réalisé par votre commission et par la commission des affaires économiques. Vous avez passé les uns et les autres plusieurs dizaines d’heures à procéder à des auditions, de la même manière que, pour préparer ce projet de loi, nous avions mené une concertation très large et très approfondie. Il est important de le rappeler pour mettre l’accent de façon positive sur le travail du Parlement.
Ce texte prépare l’avenir de l’audiovisuel et du développement technologique de notre pays. Vous avez cerné l’ensemble des enjeux : un enjeu démocratique, un enjeu culturel et un enjeu industriel. Vous avez raison, le Conseil supérieur de l’audiovisuel doit être doté de moyens appropriés pour mener à terme ces chantiers ambitieux. Le budget pour 2008 doit être à la hauteur de cette ambition.
Monsieur le rapporteur pour avis, je pense comme vous que la couverture de la population et du territoire doit être de 100 %. Celles et ceux qui nous écoutent dans les tribunes viennent certainement de régions différentes, de départements différents. Il y a des départements où il y a traditionnellement des zones d’ombre, il y a des régions de montagne, des régions frontalières qui ont des difficultés précises. L’objectif est de faire en sorte, de manière concrète et opérationnelle, que 100 % du territoire national bénéficient de ce progrès technologique.
Cette couverture complète doit être atteinte principalement grâce à la couverture terrestre et, de manière complémentaire, à la couverture satellitaire. Il s’agit bien d’une double réconciliation, comme vous le soulignez : celle des territoires ruraux et de l’innovation technologique, et celle des professionnels des télécommunications et des professionnels de l’audiovisuel.
Monsieur Frédéric Dutoit, vous semblez découvrir, mais je n’en crois rien, que la télévision nécessite des capitaux importants. Il n’existe pas de télévision sans financement, il n’existe pas de pluralisme sans financement.
Vous avez dit à juste titre, et je vous en remercie, parce que, sur les bancs de la gauche, vous avez été quasiment le seul à le faire, que la question des contenus était vitale. Effectivement, pour que le pluralisme soit vivant, il faut des investissements, mais il faut aussi des programmes de qualité, parce que c’est ce que recherchent nos concitoyens. Une telle offre est essentielle. L’on peut dire également que la multiplication des contenus développe les emplois, l’ensemble des emplois dans le domaine audiovisuel, qu’il s’agisse des journalistes, des artistes, des techniciens ou de tous ceux qui participent à la création, et c’est très important.
Il n’existe pas d’œuvres audiovisuelles et cinématographiques sans financement. Il n’existe pas d’emplois culturels sans financement. Il n’existe pas d’information sans financement. Le rappeler n’est pas faire ressurgir je ne sais quel capitalisme torride (Exclamations)…
Le droit à l’information est lié au pluralisme dans les médias, je suis d’accord avec vous. C’est la raison pour laquelle le nombre de canaux de la télévision publique passe de trois à six.
Je vous rappelle enfin que ce projet de loi permettra à l’ensemble des Français d’avoir accès à deux chaînes d’information en continu, et de pouvoir suivre l’ensemble des interventions grâce à la chaîne parlementaire. Voilà ce qui, je crois, s’appelle agir pour le pluralisme.
Monsieur Dominique Richard, vous avez montré une fois de plus la pertinence de vos analyses et le lien nécessaire entre la culture et la communication.
Vous saluez la réussite de la télévision numérique terrestre et l’ambition de ce projet de loi. C’est effectivement un projet fondateur pour la télévision du XXIe siècle, qui permet à chaque Française et à chaque Français d’avoir accès à une offre trois fois plus riche. Comme vous le soulignez, c’est la meilleure des réponses à la concentration des médias.
Vous avez raison d’être fier de la réforme du compte de soutien. C’est une réforme importante pour l’avenir des films, des œuvres d’animation et des documentaires français. Faut-il rappeler, mesdames, messieurs les députés de la majorité, que c’est l’addition de toutes vos initiatives, qu’il s’agisse des budgets, des crédits d’impôt ou de toutes les mesures de financement complémentaires que nous avons mises en œuvre, qui permet le soutien à l’activité dans le domaine du cinéma, de l’audiovisuel et, bien sûr, de la musique.
C’est vrai à propos du Haut-Kœnigsbourg mais cela s’applique à chacune de nos régions, chaque lieu doit être une chance, chaque lieu doit être l’occasion éventuellement d’une émission de télévision, qu’il s’agisse d’information, d’une fiction, d’un film ou de toutes sortes d’autres émissions.
Je souhaite que nous prenions des initiatives pour mettre les chaînes de télévision en réseau européen. Je rêve – j’espère que ce rêve deviendra réalité, mais je ne suis pas chargé des programmes, ni dans l’audiovisuel public, ni dans l’audiovisuel privé, et je ne donne de leçon à personne – de nuits de la culture européenne, où l’on passera d’un groupe de rock à Budapest à un groupe de musique baroque au Haut-Kœnigsbourg, à un groupe de slam à Glasgow, à un groupe de poésie dans telle ou telle autre ville européenne. Un tel pluralisme est attendu et plébiscité par nos concitoyens. Dans ce projet de loi, il s’agit de faire en sorte qu’il y ait des financements à la clé et que ce pluralisme soit une réalité. Oui, monsieur Richard, ce que vous préconisez en permanence est une idée particulièrement lumineuse et passionnante.
Monsieur Alain Gouriou, les orateurs du parti socialiste se succèdent, et une fois n’est pas coutume, ils sont unis par un même principe : la seule urgence que vous puissiez désirer, c’est l’urgence de l’attente. Votre seul projet, c’est de repousser constamment les échéances. Peut-être que l’échéance principale, c’est le 11 février, date à laquelle nous connaîtrons enfin votre programme… Encore une fois, il est urgent d’attendre !
Pourtant vous l’avez remarqué, et je vous remercie de cette franchise, la TNT est une avancée remarquable. C’est la raison pour laquelle il y a urgence : tous les Français doivent pouvoir en bénéficier le plus rapidement possible.
Je dirai à François Bayrou – qui le lira dans le compte rendu de nos débats au Journal officiel – qu’il est urgent de rendre la télévision du futur accessible à 100 % des Français sur 100 % du territoire. Dès cet été, l’offre satellitaire sera gratuite, la télévision mobile personnelle sera lancée, ainsi que la télévision haute définition. « La loi ne dispose que pour l’avenir » : vous serez sensible à cette si belle et si claire langue du code civil. Même si, pour qui a l’œil rivé sur le printemps 2007, 2012 peut paraître bien loin, c’est l’horizon des choix technologiques.
Je suis heureux que M. Bayrou se soit référé à des avis récents du Conseil supérieur de l’audiovisuel et en ait salué l’indépendance. Alors, respectons les institutions, respectons leur liberté d’analyse et cessons, au gré des circonstances, des humeurs, des opportunités ou des prises de position, de vouloir les modifier !
La gauche avait initié un certain nombre de changements : nous les avons concrétisés alors que beaucoup pensaient que nous n’en aurions pas le courage, que nous étions incapables de prendre les décisions permettant à nos concitoyens, après être passés du noir et blanc à la couleur, de passer de la couleur à la TNT – en multipliant par trois l’offre gratuite de chaînes.
Qu’est-ce que le pluralisme ? C’est certes la diversité des opérateurs, mais c’est aussi – et c’est essentiel – le pluralisme interne, qui doit faire l’objet d’une vigilance constante : j’entends par là la diversité des contenus. J’ai toujours défendu l’indépendance des journalistes, ainsi que le principe français de la séparation des producteurs et des diffuseurs. Notre réglementation prévoit qu’au moins deux tiers de notre production audiovisuelle est indépendante, comme plus des trois quarts de notre production cinématographique. La diversité culturelle, c’est aussi cela ! M. Bayrou se prétend le héraut d’une République impartiale, mais malheureusement la partialité qui l’anime l’empêche de saisir les vrais enjeux de ce projet de loi. Je ne l’ai pas entendu parler de diversité culturelle. C’est pourtant une notion qui devrait tous vous réunir ici.
Cher Christian Kert, vous avez raison, le téléspectateur est au centre du projet de loi : c’est une préoccupation que nous partageons.
Je voudrais demander à M. Michel Françaix, sans faire de provocation inutile,…
Michel Herbillon a eu raison de souligner que la télévision numérique terrestre doit être un progrès partagé par l’ensemble de nos compatriotes : c’est bien le sens de l’ensemble des dispositifs prévus par ce projet de loi.
Cher Émile Blessig, je partage totalement vos affirmations sur la couverture du territoire. Ce projet répond aux préoccupations que vous avez exprimées en prévoyant un taux de couverture de 95 % de la population par les chaînes analogiques, et en incitant les autres chaînes à aller au-delà de 85 %, l’ensemble étant complété par une offre satellitaire gratuite, disponible dès l’adoption du texte, en particulier dans les zones de montagne et dans les zones d’ombre.
Monsieur Richard Mallié, je partage votre préoccupation concernant les effets de la télévision, et notamment des scènes de violence, sur les plus jeunes des téléspectateurs. C’est évidemment une question redoutable, mais qui n’est pas liée uniquement, on peut l’imaginer, à la télévision. Je salue la déontologie des équipes qui préparent les jeux vidéos, mais l’actualité internationale, comme intérieure, est parfois extraordinairement brutale et ces images de violence peuvent bouleverser les consciences les plus jeunes.
À cet égard, outre l’action du CSA, le service public doit être exemplaire. C’est la raison pour laquelle je suis particulièrement attaché à ce que les programmes de la télévision publique aient pour objectifs, inscrits dans les contrats d’objectifs et de moyens, de diffuser des programmes culturels, ainsi que d’assurer une meilleure représentation de la diversité des composantes de la société française. Si les effets de la télévision peuvent être négatifs, ils peuvent aussi être positifs et c’est bien en ce sens qu’il faut travailler.
Monsieur Patrick Bloche, j’ai été étonné que vous puissiez dénier aux vidéo-clips leur caractère culturel ou artistique. Je suis d’accord avec vous : les spots publicitaires font appel à des talents artistiques tout à fait remarquables, mais ne mélangeons pas tout.
Monsieur Jean-Pierre Decool, vous avez bien rappelé les enjeux : enjeux de diversité, enjeux industriels. Je veux vous rassurer, il n’y aura pas de laissés-pour-compte de la télévision numérique. L’offre satellitaire gratuite sera disponible dès la promulgation du texte. Un fonds pour les plus démunis sera mis en place. Ce texte réduira la fracture numérique et renforcera la cohésion sociale.
Monsieur Henri Nayrou, nous partageons le même objectif et je m’en réjouis : il est essentiel que les dix-huit chaînes gratuites de la TNT soient accessibles sur l’ensemble du territoire et, bien sûr, dans les zones de montagne, dont vous êtes un éloquent porte-parole. Ce projet de loi vous donnera satisfaction : les habitants de ces territoires pourront regarder, dès cet été, la TNT grâce à l’offre satellitaire gratuite.
Cher Antoine Herth, je me réjouis avec vous du fait qu’ARTE, comme les autres chaînes publiques et l’ensemble de l’offre gratuite de la TNT, soit accessible au public alsacien, comme elle le sera sur la totalité du territoire. Vous avez évoqué ce moment magnifique où l’État vous a confié le château du Haut Koenigsbourg. Je souhaite que ce lieu, comme de nombreux lieux alsaciens, eux aussi de toute beauté, contribue au rayonnement de notre pays en Europe et au-delà. Je sais que vous agissez de conserve avec Émile Blessig, Adrien Zeller et l’ensemble des parlementaires de l’Alsace pour que la diversité, la richesse des cultures locales progressent. Vous avez raison d’insister sur la dimension européenne. En effet, au cours des prochaines années, la dimension culturelle sera essentielle pour l’avenir du projet politique européen, et l’audiovisuel a, à cet égard, une mission particulièrement importante à assumer.
Cher Jacques Bobe, je vous remercie de votre intervention, qui traduit une parfaite compréhension des objectifs et des enjeux du texte. Je rappellerai après vous la raison d’être du canal compensatoire : l’attribution, encadrée d’obligations particulières, de ce canal supplémentaire à certains opérateurs vise à compenser l’extinction des autorisations analogiques des chaînes nationales, qui interviendra de manière très anticipée, région par région, à partir de 2008.
Quant aux objectifs du texte en matière de couverture du territoire, que vous avez rappelés, ils constituent une obligation que nous allons assumer ensemble.
Je partage totalement, cher Dominique Paillé, votre préoccupation concernant le financement de l’audiovisuel public. Garantir l’indépendance, et donc les moyens, de l’audiovisuel public n’est pas seulement ma mission : c’est ma passion. Il est également de ma responsabilité de garantir la pérennité de son périmètre tel qu’il est dessiné aujourd’hui. C’est dans cette perspective que s’inscrit le contrat d’objectifs et de moyens en cours d’élaboration, qui donnera une lisibilité pluriannuelle aux grands opérateurs de l’audiovisuel public. C’est chose faite pour l’INA, Radio-France ou Arte-France, qui bénéficieront de moyens très satisfaisants grâce aux arbitrages positifs du Premier ministre : je le remercie au nom de ces grandes institutions, dont nous sommes fiers. En ce qui concerne France-Télévisions, les discussions sont en cours, dans des conditions tout à fait positives.
Le contrat d’objectifs et de moyens sera la meilleure manière de garantir l’avenir de ce grand groupe qu’est France-Télévisions. C’est la raison pour laquelle, dans le souci d’éviter les polémiques sans objet, je ne donnerai pas mon accord à la modification des règles de publicité concernant France-Télévisions.
Il s’agit également, je l’assume tout à fait, de préserver les équilibres nécessaires entre la presse écrite et la presse audiovisuelle, et je le dis au moment où nous venons d’ouvrir la publicité télévisée à un nouveau secteur : celui de la grande distribution. Assumer ses responsabilités, préparer l’avenir, c’est aussi savoir faire preuve de la plus grande vigilance. Je suis fier de France-Télévisions et de l’ensemble de l’audiovisuel public, et je pense que nous devons travailler la main dans la main pour conforter son avenir.
Vous avez exposé de façon remarquable, monsieur Morel-A-L'Huissier, les enjeux technologiques auxquels nous sommes confrontés. Pour disposer du gain numérique, qu’il s’agisse des nouvelles technologies ou du hertzien terrestre, il faut en effet adopter ce projet de loi. L’optimisation du spectre hertzien est nécessaire si on veut faire entrer la France dans l’ère numérique.
Une fois de plus, Patrice Martin-Lalande, vous avez manifesté votre passion pour l’ensemble de ce domaine. Vous avez notamment évoqué, de manière très pertinente, deux éléments très importants du contexte dans lequel s’inscrit notre démarche commune.
Premièrement la formation des plus jeunes, dès l’école, à la maîtrise de l’image est essentielle, car elle leur donnera une intelligence et une capacité de décryptage de l’image qui est une ouverture à la liberté.
Deuxièmement, vous avez rappelé que les enjeux de diversité culturelle sont aussi des enjeux en termes d’emplois. Vous avez déjà activement participé à la sauvegarde de l’emploi par l’instauration d’un crédit d’impôt en faveur de la création musicale : vous proposez aujourd’hui un dispositif similaire en faveur des jeux vidéo, respectant certains critères artistiques et culturels afin de satisfaire aux exigences européennes. Ayant travaillé très étroitement avec la Commission et rencontré la commissaire en charge de ce domaine, je peux affirmer qu’il n’y a pas d’antagonisme entre votre proposition et les orientations souhaitées par la Commission. Ce crédit d’impôt est une avancée très importante pour le monde de l’intelligence et de la création artistique ; il permettra, comme c’est déjà le cas pour l’industrie phonographique, la production audiovisuelle et le cinéma, de maintenir ou de relocaliser cette activité sur le territoire national. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
Cher Noël Mamère, j’ai été heureux de constater que nous nous rejoignons sur les principaux objectifs et sur presque tous les moyens de les atteindre, ce qui n’est pas si surprenant étant donné votre atavisme de journaliste passionné par l’information. J’espère que l’examen des articles nous permettra, au-delà de divergences ponctuelles, de nous réunir sur l’essentiel.
Mesdames et messieurs les députés, au terme de cette discussion générale, il faut avoir la franchise de reconnaître que l’objectif de ce projet de loi est de faire bénéficier l’ensemble de nos concitoyens des progrès de la technologie. Des améliorations sont certainement possibles, et j’examinerai avec la plus grande attention et une totale honnêteté intellectuelle les amendements que vous proposerez, pourvu qu’ils ne versent pas dans la caricature. Nous devons tenir compte des réalités économiques et financières, et loin de les mépriser, les mettre au service des contenus et des métiers.
Que cette télévision, par sa diversité et son pluralisme, restaure l’égalité entre nos concitoyens, qu’elle leur permette la découverte, qu’elle les interpelle ! Nul ne peut affirmer sérieusement que le triplement de l’offre de télévision gratuite ne constitue pas une chance pour nos concitoyens. Je ne doute pas que, sur certaines dispositions, la majorité et l’opposition sauront parvenir dans cette assemblée à l’accord minimal qu’elles ont déjà trouvé au Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Christian Paul, pour le soutenir.
Aux yeux de tous les observateurs objectifs, et en dépit de toutes vos tentatives de démontrer le contraire depuis hier, l’audiovisuel français se caractérise par une réduction croissante du pluralisme économique, et le CSA par un recul accéléré du pluralisme politique. À la concentration des industries audiovisuelles répond la concentration des nominations dans un camp politique, comme le prouvent les événements des derniers jours : ce sont des collaborateurs ou des collaboratrices que le pouvoir a nommés au CSA. Aussi talentueux soient-ils – vous avez rappelé leurs qualités –, ils ne peuvent en aucune façon assurer l’indépendance prétendue de cette autorité administrative.
Cette divergence que nous avons avec votre majorité, monsieur le ministre, traduit deux conceptions différentes de l’indépendance. Et ne nous renvoyez pas à l’histoire et aux différents avatars de cette instance de régulation de l’audiovisuel. Nous sommes aujourd’hui en 2007. À la veille d’échéances démocratiques importantes, nous vous le disons les yeux dans les yeux : dans la nouvelle République que nous souhaitons, la composition des autorités administratives indépendantes devra garantir, et non étouffer, le pluralisme.
Tel est, mes chers collègues, le sens de l’amendement que nous vous proposons. C’est un premier remède à la maladie chronique dont souffre le CSA et à laquelle les dernières nominations ne mettront certainement pas fin.
Premièrement, c’est à un gouvernement de votre famille politique que nous devons cette procédure de nomination, qui date de 1989 : vous n’aviez alors rien trouvé à redire à cette procédure, qui semblait au contraire tout à fait vous convenir à l’époque.
J’ajoute qu’il ne me semble pas opportun de modifier les règles du jeu, au détour d’un texte de loi dont ce n’est pas l’objet, et sans même avoir consulté l’ensemble des acteurs concernés.
Pour toutes ces raisons, la commission a rejeté votre amendement.
Cette institution a déjà, en dépit de sa jeunesse, fait preuve de son indépendance, comme le prouve le fait que vous ayez, comme vous en avez le droit, argué de certains de ses avis pour essayer de mettre le Gouvernement dans l’embarras. Vouloir aujourd’hui réformer le mode de désignation du CSA est une erreur en soi.
Deuxièmement, je répète avec solennité et gravité, sans vouloir donner de leçon, qu’il faut se garder deds procès d’intention et veiller à ne pas mettre en cause a priori l’impartialité de membres d’une autorité indépendante. (Dénégations sur les bancs du groupe socialiste.) Ce sont des serviteurs impartiaux de l’État, soucieux de remplir les missions qui leur sont confiées et dont l’engagement obéit à une déontologie personnelle.
Je fais confiance au Conseil supérieur de l’audiovisuel ; je veille scrupuleusement à ne pas empiéter sur son domaine de compétences, même si nos objectifs sont communs ; je respecte totalement son indépendance et je mets quiconque au défi de prouver la moindre pression de ma part. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Vous me permettrez d’ajouter qu’aucune des nominations auxquelles j’ai procédé en tant que ministre de la culture et de la communication n’a obéi à des considérations politiques : la capacité à exercer une responsabilité est en effet totalement étrangère aux étiquettes. De même, les autorités de nomination, Président de la République, président du Sénat, président de l’Assemblée nationale, désignent en conscience les membres du CSA. À ceux qui sont nommés d’assumer ensuite leurs responsabilités.
Enfin, puisque vous vous interrogez sur les motivations de certaines nominations que vous jugez univoques, permettez-moi de souligner que les récentes nominations à la tête de l’INA, d’Arte France ou de France Culture, par exemple, montrent bien que notre seul critère de choix est la compétence professionnelle.
Pour ce qui est des nominations, il manque à cette institution d’être aussi démocratique que possible et de refléter la diversité de la France, de la République et du peuple français.
Je souscris donc à l’idée qu’il faut revisiter le mode de nomination au Conseil supérieur de l’audiovisuel, car il me semble un peu archaïque que seuls le président de la République, le président du Sénat et le président de l’Assemblée nationale en soient les maîtres.
Je suis cependant plus sceptique sur la proposition de mes amis du groupe socialiste visant à ce que trois des membres du CSA soient désignés par le président du groupe le plus nombreux de la majorité de l’Assemblée nationale et trois par le président du groupe le plus nombreux de l’opposition.
Vous comprendrez aisément les raisons de mon scepticisme face à un tel mécanisme,…
Avec ce bémol, cet amendement a, je le répète, le mérite d’ouvrir le débat. Je ne doute pas que nous pourrons poursuivre cette réflexion et que, lorsque la majorité actuelle sera dans l’opposition, nous serons capables…
Vous avez donc raison de dire que, lorsque la gauche est revenue aux affaires, nous avons recréé une instance de régulation conforme à nos vœux, le CSA, chargé de prendre des décisions qui ne doivent pas être prises directement par les politiques. Nous n’avons, à cet égard, aucune difficulté.
Cependant, le mode de nomination des membres de cette instance ne correspond plus à la réalité d’aujourd’hui.
Pour que les choses soient claires, je précise que je souhaite que le CSA soit une instance de régulation, et non de régularisation.
(L'amendement n'est pas adopté.)
(L'article 1er est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.
On critique souvent les textes de loi qui, en multipliant les organismes, génèrent de la complexité. La mission de la commission parlementaire du dividende numérique créée par le Sénat ressemble fort à celle qui est déjà dévolue à la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, dont je suis membre. Dans un souci de simplicité, l’amendement n° 280 propose donc de confier à cette commission les questions d’attribution du dividende numérique.
Du point de vue de la convergence, compte tenu du rapprochement qui s’opère aujourd'hui, dans l’intérêt des parties, entre le monde de l’audiovisuel et celui des télécommunications, il me semble également intéressant de donner cette compétence, certes temporaire, à la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, qui serait rebaptisée « Commission supérieure de la convergence numérique et des postes ».
Nous pourrions ainsi, au nom de la simplicité et de la convergence, nous unir à propos du dividende numérique.
D’abord, pour une raison de forme : la commission du dividende numérique est provisoire, puisqu’elle a vocation à prendre fin en 2011, alors que la CSSPPCE est un organisme permanent.
Ensuite, pour une raison de fond : le système mis en place avec la création de la commission du dividende numérique assure une grande neutralité et il serait regrettable de créer un déséquilibre entre le secteur des télécommunications et celui de l’audiovisuel, qui ont chacun vocation à trouver son expression et son identité à l’occasion de l’examen de ce texte de loi. L’amendement proposé risque de déséquilibrer ce dispositif. Je souhaite donc, à titre personnel, qu’il soit retiré.
Vous proposez, monsieur le rapporteur pour avis, de confier cette mission à la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, que vous rebaptisez pour l’occasion « Commission supérieure de la convergence numérique et des postes ». Si je comprends le souci de simplification administrative qui vous anime, j’ai toutefois quelques interrogations. J’ai la charge et la passion des contenus…
La Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques est chargée d’une mission à la fois pérenne et plus large que celle que le Sénat propose de confier à la Commission du dividende du numérique, dont la mission transitoire, qui a pour horizon l’extinction de la diffusion terrestre analogique, prendra fin le 30 novembre 2011, comme le dispose le projet de loi. Je comprends donc parfaitement votre volonté de simplification et votre souhait d’éviter d’empiler les structures, mais il se trouve que l’une de ces structures, qui accomplit d’ailleurs un travail remarquable, est pérenne, tandis que l’autre a un objet précis et doit disparaître au 30 novembre 2011.
Il s’agit donc là d’une mission quelque peu différente de celle que le Parlement a confiée à la Commission du service public des postes et des communications électroniques, qui veille à l’évolution équilibrée des secteurs des postes et des communications électroniques, émettant par exemple des avis sur le projet de cahier des charges de La Poste et des opérateurs chargés du service universel des communications électroniques, ainsi que sur les projets de contrats de plan de La Poste. Par-delà la volonté commune d’associer la représentation nationale à certaines problématiques d’intérêt général, sa composition repose donc sur des principes différents de ceux de la Commission du dividende numérique. Ainsi, le Sénat a tenu à ce que vos représentants au sein de cette dernière soient désignés à parité parmi les membres des deux commissions permanentes respectives. Cette parité me paraît un principe juste, à l’instar de celui qui anime nos débats. Vous ne pouvez cependant le reprendre dans votre proposition, compte tenu des missions naturellement plus larges de la Commission du service public des postes et des communications électroniques.
Toutefois, compte tenu de l’objet même de cet amendement, je vous laisse apprécier pleinement ces différents éléments et m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.
Le fait d’associer le Parlement à l’attribution du dividende numérique n’en est pas moins, je le répète, une très bonne chose, et il conviendra de trouver des solutions appropriées.
J’invite donc mes collègues à ne pas voter l’amendement n° 280.
La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le défendre.
Toutefois, il nous paraît nécessaire et conforme tant à l’esprit qui a présidé à la création du Conseil supérieur de l’audiovisuel qu’à l’importance de l’Autorité de régulation des communications électriques et des postes, d’inscrire dans la loi que le Premier ministre travaille de concert avec ces autorités afin que les décisions soient prises de manière équitable et dans la transparence.
La ressource numérique étant un bien public, donc commun, les décisions ne sauraient être prises que dans l’intérêt général, en confortant la diversité et le pluralisme qui caractérisent le paysage audiovisuel français.
Par ailleurs, la dérogation qu’il est proposé de supprimer est liée à l’existence d’un schéma national de réutilisation des fréquences, qui servira de cadre à la réaffectation de ces dernières, et dont l’adoption sera bien sûr soumise à l’avis du CSA.
Je vous demande donc, monsieur Dutoit, de retirer votre amendement. Dans le cas contraire, j’inviterais l’Assemblée à le rejeter à son tour.
Je suis saisi d’un amendement rédactionnel, n° 206, de M. Hamelin.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d’un amendement de clarification, n° 16 rectifié, de la commission des affaires culturelles.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d’un amendement n° 74 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Dans le premier objectif, l’audiovisuel est introduit : l’accroissement de la diversité des services audiovisuels fait donc partie des tous premiers objectifs fixés.
La rédaction du deuxième objectif est modifiée pour une meilleure lisibilité. Il s’agit, au-delà de la réalisation de la couverture numérique, d’introduire l’importante notion d’égalité d’accès entre les territoires.
Enfin, l’objectif relatif aux services publics inclut la nécessité, pour les instances et les personnels qui sont au service de la sécurité de nos concitoyens, de bénéficier de systèmes de liaison en progrès constant.
(L'amendement est adopté.)
Nous en venons à l’amendement n° 75.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
La première a trait à la mise en place d’une commission du dividende du numérique, qui comprend des parlementaires.
La seconde tient à la grande qualité des fréquences : elles portent le son et l’image loin et avec solidité.
Il s’agit donc de donner à l’arbitrage du Premier ministre toute sa plénitude.
Surtout, je crois beaucoup plus sage de ne pas prédéterminer dès aujourd’hui l’usage qui devra être fait de ce gain numérique. Nous mettons en place, pour cette nouvelle affectation, un instrument de décision nouveau et entièrement transparent et public, auquel la représentation nationale sera associée. Ce dispositif me paraît offrir toutes les garanties de la meilleure utilisation possible du spectre hertzien.
Je suis donc favorable à cet amendement de suppression du seuil.
Vos déclarations, monsieur le ministre, comme les hésitations de la majorité, tant au Sénat que dans cet hémicycle, montrent en effet que le travail d’anticipation sur l’usage du dividende numérique n’a pas été réellement effectué. Le rapport Lévy-Jouyet, que j’ai cité hier, n’a-t-il pas souligné la diversité des utilisations qui peuvent en être faites ? En réalité, le Gouvernement est partagé entre l’envie d’en faire une distribution accélérée et sans doute très aventureuse – on le voit avec l’affaire choquante et scandaleuse des chaînes bonus – et le principe de précaution, qui conduit plutôt à se donner le temps de la réflexion pour en permettre la meilleure allocation possible.
Faute d’avoir pu défendre l’amendement n° 157, je tiens à rappeler à nos collègues de la majorité, en particulier à ceux qui ont collaboré à la rédaction du rapport de M. Blessig sur le déploiement de la couverture numérique sur le territoire, que si le Parlement ne donne pas quelques orientations claires sur l’utilisation du dividende numérique, notamment en faveur de la couverture en téléphonie mobile et de l’accès à l’Internet haut débit, aucune garantie n’existera en la matière.
Quand j’entends le ministre de la culture et de la communication évoquer la couverture universelle du territoire s’agissant de la TNT, j’ai en écho le discours du ministre délégué à l’aménagement du territoire, M. Estrosi, selon lequel la question de la fracture numérique pour l’Internet serait réglée. Eh bien non, mes chers collègues, cette question n’est pas réglée ! Les élus des territoires ruraux qui siègent ici le savent bien : dans un tiers de leurs circonscriptions environ, la question de la fracture numérique, de l’accès à l’Internet haut débit reste posée. Tous les jours, les maires et les internautes les interpellent à ce sujet .
Aujourd’hui, monsieur le ministre, vous aviez l’occasion, avec l’article 2, de donner un signal fort sur la manière dont la France utiliserait ces fréquences, non pas comme des caramels distribués au gré du prince, mais selon une vraie stratégie d’aménagement du territoire. Vous y avez renoncé.
Pour en revenir à l’amendement n° 75, il est de bon sens qu’une part importante des fréquences libérées soit affectée au secteur audiovisuel. Cet amendement ne nous choque donc en rien. Néanmoins, il aurait été bon d’encadrer, par une décision politique claire du Parlement, les travaux de la commission du dividende dont l’existence vient d’être confirmée. En refusant de le faire, monsieur le ministre, vous signifiez que le dividende numérique sera distribué sans filet.
Après l’excellent travail accompli par la délégation de l’Assemblée nationale à l’aménagement et au développement durable du territoire, sous la conduite de M. Blessig, un tel refus témoigne encore une fois d’une bien piètre considération à l’égard du travail parlementaire.
Dans ces conditions, il me paraissait essentiel de poser le principe du caractère public du dividende numérique et du caractère transparent de sa réaffectation au bénéfice non seulement de la diffusion audiovisuelle, mais également de l’aménagement du territoire.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je suis saisi d’un amendement n° 207 de M. Hamelin.
Il s’agit d’un amendement rédactionnel auquel le Gouvernement est favorable.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
La parole est à M. le ministre, pour le défendre.
Il n'apparaît pas en effet opportun que les présidents du CSA et de l'ARCEP siègent à la commission du dividende du numérique dans la mesure où ils sont, en tant qu'affectataires d'une partie du spectre hertzien, intéressés aux avis de la commission. En outre, le CSA et l'ARCEP seront, en tant qu’autorités indépendantes, saisis pour avis par le Premier ministre du projet d'arrêté qui réaffectera le dividende numérique par application de l'article 21 de la loi du 30 septembre 1986. Ce sera alors aux collèges de chacune de ces autorités de se prononcer, ce qui peut placer leurs présidents respectifs dans une position délicate.
De même, il serait paradoxal que le directeur général de l’Agence nationale des fréquences, établissement public administratif dont le conseil d’administration est largement composé de représentants de l’État, soit membre de cette commission dont l’objet est précisément d’éclairer le Gouvernement sur l’affectation du dividende.
(L'amendement est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
(L'amendement est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement.
(Le sous-amendement est adopté.)
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 222 rectifié.
Parallèlement, les nouvelles méthodes de planification de fréquences utilisées lors de la conférence de Genève de 2006, qui a coordonné les fréquences du plan tout numérique, reposent sur le principe, beaucoup plus efficace, de l’allotissement. Dans ce cas, pour couvrir une zone donnée avec une fréquence donnée, quel que soit le nombre de sites sur cette zone, on se contente de définir le contour de la zone et le niveau de champ maximal en limite de zone, sans avoir à prédéterminer tous les sites utilisés.
Si on veut déployer la TMP, seule la méthode par allotissement convient à cause du grand nombre de sites nécessaire. L’objet du présent amendement est donc de modifier l’article 25 de la loi de 1986 pour permettre la mise en œuvre de cette méthode, sans quoi il n’y aura probablement pas de télévision mobile personnelle.
Je mets aux voix l'amendement n° 222 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Plusieurs amendements, notamment ceux portant articles additionnels après l’article 3, ont trait à cette question. Je ne suis pas certain qu’il faille adopter des dispositions législatives mais je pense que les débats que nous avons aujourd’hui devraient être l’occasion pour vous de faire connaître vos intentions.
La parole est à M. Frédéric Dutoit, pour le soutenir.
La commission a d’ailleurs envisagé cet aspect puisqu’elle propose une modification de prudence prévoyant l’extinction progressive et par zone géographique de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Mais le schéma proposé n’apporte pas aux législateurs que nous sommes des assurances suffisantes de préservation et de continuité du service public de la télévision sur l’ensemble du territoire.
Or, bousculé par la concurrence commerciale d’un côté et par les diktats de la LOLF de l’autre, le service public de la télévision pas plus que la chaîne culturelle européenne Arte ne doivent pâtir des imprévus, qu’ils soient technologiques ou humains. C’est pourquoi nous demandons que, dans ce domaine également, le CSA soit consulté par nos gouvernants et que son travail d’interface vigilante entre les responsables politiques et les exécutants de ce projet s’accomplisse au mieux compte tenu des moyens qui lui sont consacrés.
Cet amendement vise donc bien un double objectif : le renforcement du CSA, mais en vue d’un aménagement harmonieux du territoire. Vous comprendrez ainsi pour quelles raisons l’amendement proposé tout à l’heure par mes amis socialistes sur la composition du CSA est si important à mes yeux.
(L'amendement n'est pas adopté.)
La parole est à M. le rapporteur pour le soutenir.
L’article 44 de la loi de septembre 1986 confie déjà à RFO la mission de transmettre l’ensemble des programmes du groupe France Télévisions. Depuis 2000, en effet, RFO peut être distributeur de services pour le groupe et donc distribuer l’ensemble des chaînes du groupe outre-mer.
Cette disposition importante n’a pas encore pu être mise en œuvre en raison de l’imprécision de la loi, que nous souhaitons clarifier avec cet amendement.
(L'amendement est adopté.)
(L'article 3, ainsi modifié, est adopté.)
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le soutenir.
L’amendement précise donc que l’autorisation nationale ouvre droit à la réalisation d’une effective couverture du territoire national pour son titulaire. C’est lui qui devra financer les études techniques, mais il faut que l’autorisation qui lui est donnée corresponde à une réalité. Autrement dit, il faut apporter un peu de sérieux à ces autorisations.
La loi en vigueur depuis 2004 répond totalement, monsieur Dionis du Séjour, à votre souhait de développer la radio numérique dans le respect de la diversité et du pluralisme. Le projet de loi ne vise pas à modifier ce cadre qui est opérationnel depuis 2004, surtout au moment où le CSA va commencer à lancer des appels à candidatures.
On ne peut pas non plus être insensible à la volonté de certaines radios généralistes et d’information d’améliorer leur couverture, ce qui ne pourrait que renforcer le pluralisme de l’information radiophonique. Toutefois, l’introduction d’un droit d’attribution prioritaire aux services de radio dits nationaux s’effectuerait nécessairement, compte tenu de la rareté des fréquences, au détriment des radios locales et en particulier des radios indépendantes et associatives. Le risque d’une déstabilisation du paysage radiophonique est donc très grand.
Suite à la consultation sur la planification de la bande FM, le CSA a lancé des appels à candidatures généraux dès la fin janvier 2006. Ceux-ci se poursuivront région par région jusqu’en juillet 2007.
Parallèlement, la question de la radio numérique a pris une importance croissante. De nombreux acteurs ont ainsi mis en avant la nécessité d’une politique volontariste en sa faveur, y voyant en général l’occasion de trouver des réponses aux difficultés constatées aujourd’hui sur la bande FM : saturation, couverture limitée, cohabitation difficile des émetteurs de puissance différente, etc. Le Gouvernement vient de lancer une consultation publique relative aux normes de diffusion de ces nouveaux services et le CSA en a lancé une autre sur les modalités d’introduction de la radio numérique en France. La radio numérique devrait ainsi pourvoir être disponible dès 2007.
Vous le voyez, tout le monde s’emploie à répondre aux demandes légitimes des acteurs radiophoniques en recherchant un large consensus. Celui-ci n’est pas facile à trouver parce qu’il faut respecter des aspirations parfois contradictoires. Mais chacun essaie de trouver les bonnes solutions.
Pour toutes ces raisons, monsieur Dionis du Séjour, j’aimerais que vous retiriez votre amendement. À défaut, le Gouvernement serait défavorable à l’introduction d’une disposition qui ne manquerait pas de déstabiliser le secteur radiophonique.
Nous poursuivons avec votre amendement n° 235 rectifié, monsieur Dionis du Séjour.
D’abord, je ne suis pas certain qu’une telle proposition soit cohérente avec l’esprit de la loi de 1986.
Ensuite, les missions dont il est question sont déjà prévues par la loi et définies très précisément dans le cahier des charges de France 3. Il ne me semble donc pas utile d’y revenir.
Enfin, la reprise de l’ensemble des décrochages régionaux de France 3 donnera une visibilité accrue de sa vocation régionale.
France 3 n’est ni une chaîne nationale comme les autres ni une chaîne locale ; c’est une télévision nationale de proximité. Je crains que votre proposition ne lui fasse perdre cette identité, voire ne porte atteinte à la fierté de ses équipes. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
(L’amendement n’est pas adopté.)
(L’amendement est adopté.)
(L’article 4, ainsi modifié, est adopté.)
Questions au Gouvernement.
Suite de la discussion du projet de loi, n° 3460, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur :
Rapport, n° 3604, de M. Emmanuel Hamelin, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ;
Avis, n° 3613, de M. Frédéric Soulier, au nom de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.
A vingt et une heures trente, troisième séance publique :
Suite de l’ordre du jour de la deuxième séance.
La séance est levée.
(La séance est levée à douze heures trente-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral
de l’Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton