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31/01/2005 - Message à l'occasion du colloque Henri-Alexandre Wallon

Mes obligations de maire et de député d'Évreux me tiennent malheureusement éloigné de Paris et m'empêchent d'être présent parmi vous pour évoquer la figure éminente d'Henri-Alexandre Wallon, dont les historiens et les constitutionnalistes se souviennent comme l'un des acteurs décisifs de la fondation de la IIIe République.

Il était tout naturel que l'Assemblée nationale, qui s'efforce, avec l'appui de ses services, de développer et de soutenir la recherche en matière d'histoire parlementaire, accueille cette journée d'étude et d'analyse de la personnalité et de l'œuvre d'Henri-Alexandre Wallon. Il était tout à fait opportun de le faire au lendemain du 130ème anniversaire de l'adoption du célèbre amendement Wallon qui venait clore quatre années de querelles politiques au sujet de la nature du régime à fonder au lendemain de la chute du Second Empire et qui ancrait la République dans la loi constitutionnelle. Il était légitime, enfin, d'honorer la mémoire d'un homme d'une extraordinaire densité intellectuelle et personnelle au seuil de cette année qui marque le 100ème anniversaire de sa disparition.

Les différents intervenants de cette journée, juristes ou historiens, permettront de souligner l'originalité et le caractère exceptionnel de ce parcours au confluent des principaux courants politiques et philosophiques du XIXe siècle au terme duquel Henri-Alexandre Wallon a acquis la stature d'une grande figure républicaine.

« Intellectuel engagé » avant l'heure, ce professeur d'histoire, fit de l'abolition de l'esclavage son premier combat en consacrant son premier ouvrage à l'histoire de l'esclavage dans l'Antiquité, et en devenant en 1848 secrétaire de la Commission pour l'abolition de l'esclavage présidée par Victor Schœlcher.

Toute la personnalité d'Henri-Alexandre Wallon était révélée par ces débuts : homme de foi et humaniste, il a toujours voulu marier l'héritage politique de la Révolution française avec son christianisme profond et il a constamment œuvré à la construction d'une société conciliant justice sociale et liberté politique, lui qui fut l'ami d'Ozanam et le disciple de Michelet.

L'originalité et la modernité de la pensée d'Henri-Alexandre Wallon s'expriment dans ses combats ultérieurs : homme d'ordre, il fut en même temps un partisan intransigeant du suffrage universel, au point de démissionner en 1850 de l'Assemblée pour protester contre les restrictions apportées au caractère universel du droit de vote ; homme de foi, il proclama toujours son attachement à la liberté de conscience et à la liberté de l'enseignement tout en étant le défenseur intransigeant de l'Université et de l'enseignement public, allant jusqu'à refuser de voter la loi Falloux ; homme de lettres et de recherche, il nourrit son combat politique de son inlassable travail d'historien, menant de front ses activités de parlementaire et de membre puis Secrétaire perpétuel de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.

Moderne, Henri-Alexandre Wallon le fut peut-être plus encore en étant au nombre des premiers responsables politiques catholiques convaincus de la nécessité de rendre autonomes les sphères politique et religieuse.

Il était donc juste que l'Assemblée nationale s'associe à l'hommage rendu aujourd'hui à cette grande figure républicaine.

Qu'il me soit permis, pour clore mon propos, de remercier les descendants d'Henri-Alexandre Wallon qui, aux côtés de Jean Garrigues et de Didier Maus, ont été les chevilles ouvrières de cette journée et qui, par leurs multiples travaux et contributions à la connaissance de l'œuvre de leur aïeul, ont démontré que la piété familiale ne cède en rien à l'exigence scientifique et historique, ce qui n'aurait pas manqué de réjouir le grand historien que fut Henri-Alexandre Wallon.