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DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 153

Réunion du mercredi 21 décembre 2005 à 16 heures 15

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président

Audition de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, sur les conclusions du Conseil européen de Bruxelles des 15 et 16 décembre 2005

Le Président Pierre Lequiller a remercié Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, pour la qualité de la coopération qui existe entre elle et la Délégation, et a souligné le travail qu'elle mène pour placer l'Europe au cœur des débats du Parlement. Parallèlement aux initiatives nombreuses et importantes du Gouvernement, la Délégation a pris une série de mesures dans le même but : missions des « missi dominici » sur les perspectives financières, réunion de la Délégation au Parlement européen le 30 novembre 2005, publication de la « Lettre Européenne de l'Assemblée nationale » et des deux premiers « Le point sur » envoyés à tous les députés, participation au débat en séance publique qui a précédé le Conseil européen.

Il s'est déclaré heureux qu'un accord ait pu être conclu lors du Conseil européen, ce qui a nécessité sans aucun doute beaucoup d'efforts et de ténacité. Le Royaume-Uni, qui a joué pendant un certain temps contre ses propres intérêts, sort finalement grandi de cette affaire.

Le Président Pierre Lequiller a interrogé la ministre sur le climat du Sommet. Les observateurs ont pu avoir le sentiment que la France et l'Allemagne ont très bien travaillé ensemble, que l'Espagne et le Luxembourg ont appuyé les positions franco-allemandes, et que le « Triangle de Weimar » associant la France, l'Allemagne et la Pologne a fonctionné.

Enfin, le Président de la République ayant annoncé qu'il présenterait prochainement des propositions sur le plan institutionnel, dans quelle direction ces propositions vont-elles s'orienter ? Le résultat du référendum a fait apparaître une crise profonde dans l'Union européenne. L'accord obtenu sur le budget permet de penser qu'il peut y avoir un redémarrage de l'Europe, notamment sur le plan des institutions.

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, a souligné que l'année 2005 se terminait de manière positive pour l'Europe.

Le Conseil européen a été principalement consacré aux perspectives financières pour 2007-2013. Il faut savoir reconnaître que ce Conseil s'est bien déroulé, l'Europe est dotée d'un bon budget. C'est un bon budget pour l'Europe et un bon budget pour la France. Ceci est d'une importance capitale. L'absence d'accord aurait été perçue de manière très négative. L'utilité d'un accord et la nécessité politique de donner un signal positif ne devaient toutefois pas conduire à chercher un accord à n'importe quel prix.

Il y a vingt-cinq Etats dans l'Union depuis 2004, la Bulgarie et la Roumanie devraient voir leurs traités d'adhésion ratifiés au cours du printemps 2006, et du côté des nouveaux Etats membres une certaine inquiétude était manifeste face au risque d'absence d'accord. Dans ce contexte, la France avait rappelé les exigences fondamentales à respecter :

- tenir les engagements pris vis-à-vis des nouveaux Etats membres, conformément au principe de solidarité ;

- assurer le financement de l'Union élargie de façon équitable, ce qui imposait de corriger le mécanisme du « rabais britannique » ;

- permettre le financement des politiques communes dans le respect des accords passés, en particulier pour la PAC, et le financement des politiques nouvelles ;

- établir un budget pluriannuel pour assurer la stabilité et la visibilité sur sept ans, et non pas sur deux ou trois ans comme la Présidence a pu l'envisager.

Le Président de la République bénéficiait du soutien tant de l'Assemblée nationale que du Sénat. La France a organisé de nombreuses rencontres avec ses partenaires depuis le mois de juin. La ministre a remercié à cette occasion les membres de la Délégation qui se sont rendus dans plusieurs Etats pour présenter les positions françaises. Elle s'est dite convaincue que la stratégie choisie avait été la bonne, et que la démarche des députés avait contribué au succès final.

L'accord n'a été possible qu'en modifiant profondément les propositions britanniques. Les propositions faites par la Présidence le 5 décembre, puis le 14 décembre, avaient profondément déçu, elles n'étaient pas à la hauteur du projet européen. Quelles inflexions ont été apportées à ces propositions ?

Concernant les dépenses, le budget est aujourd'hui établi à 862,363 milliards d'euros pour la période 2007-2013, soit 1,045 % du RNB de l'Union européenne. Ce total est inférieur de 9 milliards à la proposition luxembourgeoise de juin. Mais il est supérieur de 13 milliards par rapport à la proposition britannique du 14 décembre. Enfin, par rapport à une reconduction à l'identique du budget 2006, cela représente 50 milliards en plus pour l'Europe.

Ainsi, ce budget permettra le financement de l'Europe élargie. L'Europe aura les moyens de ses ambitions. Un total de 308 milliards d'euros sera consacré à la politique de cohésion, dont 157 milliards pour les nouveaux Etats membres. Ceci permettra de réunir les conditions d'un rattrapage économique, social et environnemental de chacun de ces pays, dans l'intérêt de l'ensemble de l'Union. Les fonds ainsi versés représenteront 2 à 3 points du PIB des nouveaux Etats membres. Il convient donc de corriger une idée fausse : celle selon laquelle l'Union européenne consacrerait moins de moyens à son élargissement de 2004 qu'à ses élargissements antérieurs. Dans le cas de l'Espagne, les fonds versés avaient représenté 1 point de PIB.

Le deuxième motif de satisfaction concerne les politiques de compétitivité, qui bénéficieront de la même enveloppe que celle qui était prévue par la proposition luxembourgeoise (72 milliards d'euros). La présidence britannique a repris sur ce point la proposition de M. Jean-Claude Juncker. En outre, le Conseil européen a invité la Commission, en coopération avec la Banque européenne d'investissement, à examiner la possibilité d'augmenter de 10 milliards le soutien communautaire à la recherche.

L'Europe est donc désormais en mesure de développer des politiques d'avenir qui vont lui permettre d'accroître sa compétitivité.

Une autre politique importante pour la France est la PAC. L'accord du Conseil européen conforte l'accord d'octobre 2002. La France a dû accepter que les dépenses agricoles destinées à la Bulgarie et à la Roumanie soient imputées sur l'enveloppe de 293 milliards fixée en 2002. Mais les crédits de la PAC-marchés sont les dépenses les mieux préservées, et l'assurance a été obtenue que les aides directes seront garanties jusqu'en 2013. La France obtiendra 57 milliards d'euros de « retours » sur la période. Les dépenses consacrées au développement rural représenteront au total 69 milliards d'euros, dont 6 milliards pour la France.

S'agissant des crédits consacrés à la culture, aux médias, à la jeunesse, à la santé et à la protection des consommateurs, ils seront en très légère augmentation : +1 % par rapport à 2006. C'est moins que ce que prévoyait la proposition luxembourgeoise. Certains ont pu s'en émouvoir. Il n'est donc pas exclu que le Parlement européen revoie ces crédits à la hausse.

S'agissant des ressources propres, la question du rabais britannique était la clef de la négociation. En l'absence de révision, l'évolution de son montant conduisait à grignoter les marges de manœuvres budgétaires et à exonérer le Royaume-Uni du financement de l'élargissement. Aucun accord n'était donc possible sans un changement. La France a fait un important travail de fond qui a permis de rallier à sa position la quasi-totalité des Etats membres.

Le climat du Conseil européen n'a jamais été tendu, même si la négociation était difficile et exigeait, notamment à la fin, une grande vigilance.

Il faut saluer le choix du Premier ministre du Royaume-Uni, M. Tony Blair, auquel il faut rendre hommage comme le Président de la République l'a fait. Ce choix de l'Europe était difficile dans un contexte marqué par les fortes pressions au sein de son gouvernement ainsi que de la part de la presse britannique.

Le résultat du Conseil est satisfaisant à plusieurs titres. C'est la première fois que le dispositif de l'abattement est modifié. Il l'est d'une manière pérenne et qui conduit le Royaume-Uni à participer pleinement au coût de l'élargissement, la base de calcul n'excluant plus à terme que les dépenses de marché de la PAC et une partie de celles du FEOGA. Il ne s'agit pas non plus d'une mesure unilatérale et ponctuelle.

Cela représente pour le Royaume-Uni un effort financier de 10,5 milliards d'euros par rapport au mécanisme actuel. Le mécanisme prévu sera mis en œuvre d'une manière progressive et pourra atteindre son plein effet à partir de 2011.

Cette réforme permet d'assurer un financement équitable de l'Union.

S'agissant de la France, l'accord permet le respect des intérêts français et de la PAC. Les retours prévus au titre de la cohésion sont de 12,7 milliards d'euros, dont 9 milliards pour l'objectif 2, même s'il y a une baisse par rapport à la situation actuelle.

La contribution brute prévue pour l'ensemble de la période 2007-2013 est de 135 milliards d'euros, égale à celle acceptée au Conseil européen de juin, et s'inscrit dans le respect des intérêts budgétaires nationaux.

Le solde net négatif de la France se dégrade d'une façon mathématique, puisque le budget auquel elle contribue augmente. Il devrait atteindre -0,37 % du RNB en fin de période, contre -0,21 % actuellement.

La situation est similaire pour les autres pays contributeurs nets, pour lesquels on constate une convergence. La France se trouvera ainsi avec un solde net proche de ceux de l'Italie, de l'Autriche, de la Suède, des Pays-Bas et du Royaume-Uni. A raison de -0,42 % du RNB en fin de période, le solde net de l'Allemagne sera plus élevé.

En l'absence d'aménagement à son rabais, le Royaume-Uni aurait été dans une situation plus favorable que la France.

L'accord contient par ailleurs une clause de « rendez-vous » qui convient à la France. Il est prévu que la Commission remette au Conseil en 2008-2009 un rapport sur la structure des recettes comme des dépenses, y compris la PAC. Celui-ci concernera également l'abattement britannique. La rédaction adoptée n'emporte aucune obligation ni aucune date pour une éventuelle réforme des perspectives financières. Si une décision intervient, elle sera prise à l'unanimité par le Conseil européen.

En revanche, la clause permet d'engager la réflexion sur la structure du futur budget et, si le Conseil le souhaite, de prendre d'ici 2013 des décisions qui ne seront applicables qu'après cette même année.

La ministre a ensuite apporté des informations sur le rôle joué par la France au cours des négociations, et en particulier par le Président de la République, qui a multiplié les entretiens à deux, trois ou quatre, auxquels le ministre des affaires étrangères et elle-même ont participé. La France est intervenue en amont, et main dans la main avec l'Allemagne, de telle sorte que cette entente s'est révélée décisive dans l'obtention d'un accord. En effet, la proposition franco-allemande, présentée le vendredi matin, a d'abord reçu le soutien de l'Espagne, de l'Italie puis de la Pologne, ce qui était un signe politique important en direction des nouveaux pays membres. Avec l'appui simultané de la précédente présidence luxembourgeoise et de la future présidence autrichienne de l'Union, la proposition franco-allemande a ainsi progressivement réuni un consensus, autour de deux éléments principaux : d'une part, l'augmentation du volume du budget, conformément à une exigence de solidarité européenne, et d'autre part un nouveau mécanisme pérenne de calcul du « chèque » britannique.

Puis la ministre a mentionné l'accord obtenu sur deux dossiers importants pour la France :

- une allocation, compte tenu de leurs spécificités, pour le Hainaut français et la Corse, respectivement à hauteur de 70 millions et 30 millions d'euros ;

- l'obtention d'une nouvelle clé de répartition 2007-2013 pour le Fonds européen de développement (FED), en concertation avec l'Allemagne, et avec le soutien du Luxembourg. En 1995, la France avait en effet accepté de compenser la diminution des contributions britannique et allemande en augmentant sa part à 24,30 % du montant total. L'accord conclu à la suite d'une négociation conduite par la ministre elle-même ramène ce taux à 19,55 %, ce qui représente une économie d'environ 1 milliard d'euros pour la France sur la période. L'enveloppe globale du FED s'établit ainsi à 22 milliards d'euros, ce qui représente un geste fort de solidarité au moment, notamment, où l'Union définit une stratégie ambitieuse pour l'Afrique.

Il convient désormais d'être vigilant sur la mise en œuvre des perspectives financières qui viennent de faire l'objet d'un accord politique afin de maintenir l'esprit et la lettre de l'accord du 16 décembre dernier. Une série de négociations vont maintenant s'engager en vue de l'adoption d'un accord interinstitutionnel entre le Conseil, la Commission et le Parlement européen, qui servira de base juridique formelle à ce cadre budgétaire pluriannuel. Les règlements de mise en œuvre des politiques communes devront ensuite être approuvés par le Conseil et le Parlement européen. Quant au parlement français, il lui appartiendra de ratifier la décision « ressources propres ».

La ministre a ensuite évoqué d'autres sujets abordés lors du Conseil européen. S'agissant de la reconnaissance du statut de pays candidat à l'Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM), elle a rappelé la position exprimée par la France lors du Conseil « Affaires générales » du 12 décembre 2005, selon laquelle il lui apparaissait inopportun de reconnaître à la Macédoine le statut de candidat sans débat préalable sur la stratégie d'élargissement dans son ensemble. Un premier débat avait eu lieu lors de ce CAG, et un autre débat est prévu en 2006 entre les chefs d'Etat ou de gouvernement. Au cours du Conseil européen, la France a conditionné l'ouverture de négociations avec l'ARYM de façon précise. L'Union ne peut pas se lancer sans débat et sans réflexion approfondie dans une nouvelle vague d'élargissement. Le Conseil européen a confirmé la tenue en 2006 d'un débat général sur ce sujet. Dans ces conditions, aucune raison ne justifiait de s'opposer à la reconnaissance du statut de candidat à la Macédoine. Il s'agit d'un geste politique important et utile pour la stabilisation des Balkans.

En ce qui concerne les taux réduits de TVA, l'absence de consensus a conduit la présidence britannique à renvoyer la question au Conseil Ecofin du 24 janvier prochain. Après avoir salué la résolution adoptée par l'Assemblée nationale le 14 décembre dernier, la ministre a rappelé la détermination du Premier ministre et du Gouvernement en faveur d'un accord global traitant à la fois des taux réduits pour le bâtiment et les services à domicile, qui pourront en tout état de cause continuer à s'appliquer après le 1er janvier 2006, et des taux réduits pour la restauration.

Enfin, la ministre s'est félicitée de l'adoption de deux documents importants : l'un sur le partenariat stratégique entre l'Union européenne et l'Afrique, et l'autre relatif sur l'approche globale en matière de migrations.

Ainsi, l'année 2005 se termine mieux qu'elle n'avait commencé et les conditions d'une relance européenne sont désormais réunies. Les chefs d'Etat ou de gouvernement se sont mis d'accord à Hampton Court sur les actions prioritaires à mener au niveau européen et l'Union dispose désormais d'un budget pour les mettre en œuvre. Dès l'issue du Conseil européen, le Président de la République a ainsi annoncé qu'il entendait prochainement faire des propositions ambitieuses sur l'avenir des institutions européennes. S'exprimant sur le calendrier et sur la méthode, la ministre a indiqué que le Président pourrait définir des orientations dès le mois de janvier, en étroite concertation avec notre partenaire allemand ; la Chancelière Mme Angela Merkel sera à Paris le 23 janvier. Des discussions doivent également s'engager avec la présidence autrichienne de l'Union. En ce qui concerne le contenu des propositions, celles-ci devraient s'inscrire dans le cadre des orientations économiques et sociales fixées lors du Conseil européen informel de Hampton Court. Sans anticiper sur ce qui sera proposé en matière institutionnelle, il s'agira de réfléchir à ce qui pourra être entrepris à traités constants, qu'il s'agisse notamment du recours aux coopérations renforcées, des règles de composition de la Commission européenne ou de la durée des présidences de l'Union. Une attention particulière pourrait également être portée à l'Eurogroupe, non seulement comme interlocuteur politique de la Banque Centrale Européenne mais également en tant que groupe organisé à partir duquel des approfondissements sectoriels pourraient être envisagés. En attendant le rendez-vous que le Conseil européen s'est fixé en juin 2006, il n'est pas inutile de formuler dès à présent un certain nombre de propositions pour stimuler la réflexion sur l'avenir de l'Europe.

M. Robert Lecou, tout en se félicitant que le Conseil européen soit parvenu à conclure un budget qu'il a qualifié de bon, s'est déclaré toutefois préoccupé par la nécessité dans laquelle se trouvent les gouvernements des Etats membres de transmettre aux peuples un tel message concernant une question aussi aride que le budget.

Evoquant le problème du réchauffement climatique, au sujet duquel il a déclaré que ses liens avec les activités humaines étaient avérés, il a estimé qu'il n'existait pas de « bons élèves » mais de « moins mauvais élèves », parmi lesquels figurent l'Union européenne et le Japon, qui peuvent servir d'exemples à l'Inde et à la Chine. Il a souhaité savoir si le Conseil européen avait procédé à une réflexion sur l'accord auquel est parvenu la Conférence de Montréal sur le changement climatique.

Abordant la question de l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % au bâtiment et à la restauration, M. Robert Lecou a déclaré que cette mesure était favorable à l'emploi et à la croissance. Il a souhaité que la rencontre qui aura lieu le 23 janvier 2006 entre le Président de la République et la Chancelière Mme Angela Merkel aboutisse à la pérennisation du taux réduit dans la restauration, non seulement parce qu'elle est attendue en France, mais aussi parce qu'il importe d'éviter que l'Europe ne soit perçue comme un facteur de blocage.

M. Jacques Myard, tout en se félicitant qu'un accord ait pu être arraché à la Grande-Bretagne, a souhaité savoir à quel moment précis cette dernière avait accepté une réduction de 20 % de son « chèque ». Il a estimé que l'on ne pouvait se satisfaire d'un accord purement comptable à ses yeux, puisqu'une telle mesure ne prendrait effet qu'à compter de 2009. Il a considéré que le problème essentiel résidait dans la structure du budget communautaire qu'il a qualifiée de très mauvaise, laquelle reflète mal les fonctions de l'Union européenne. La PAC, dans laquelle il a vu le seul système au niveau communautaire et mondial apte à corriger les excès du marché, disparaîtra en 2013, du fait de l'accord conclu à la Conférence ministérielle de l'OMC de Hong-Kong. S'agissant des fonds structurels, il a déclaré que s'il importait de verser des aides aux nouveaux Etats membres, le recours à des protocoles financiers serait tout aussi efficace et lisible au plan politique. Enfin, il a déploré que l'ajout du niveau communautaire aux différents échelons administratifs déjà existants en France aboutisse à une déperdition qu'il a qualifiée d'aberrante de l'efficacité de la dépense publique, jugeant, par exemple, que l'Europe ne devait pas financer la culture.

Evoquant l'accord interinstitutionnel, qui devra être approuvé par le Parlement européen, il a jugé nécessaire que le Parlement français en soit également saisi, conformément à l'article 53 de la Constitution.

Il a souhaité savoir quelles étaient les causes des disparités existant dans la fixation du taux d'appel de la TVA.

Abordant la contribution des Etats membres au FED, il s'est enquis de la logique présidant au calcul de la clé de répartition, estimant que la France contribuait davantage que d'autres Etats membres sur la base de la valeur de son PIB. Déclarant que s'il était indispensable d'investir en Afrique, une telle situation nécessiterait toutefois de substituer un mécanisme de financement bilatéral à celui, multilatéral, du budget communautaire qui, selon lui, débouche sur une déperdition des crédits.

M. François Guillaume, tout en notant l'existence d'un soulagement général du fait de la conclusion d'un accord, a douté que ce dernier puisse être conforme aux attentes de la France. Par rapport aux propositions, qu'il a qualifiées de raisonnables, présentées par le Luxembourg, il manquerait, selon lui, 9 milliards d'euros. S'interrogeant sur la variable d'ajustement qui sera retenue, il a craint que celle-ci ne réside dans la baisse des restitutions, car la Commission gère celles-ci non pas en fonction de l'intérêt des exportations, mais sur la base de motifs comptables. Il s'est déclaré préoccupé par le fait qu'à la Conférence ministérielle de l'OMC de Hong-Kong, l'Union européenne ait accepté de supprimer les restitutions, dont le montant est de 2,8 milliards d'euros.

Evoquant la réduction du « chèque » britannique, il a considéré que les attaques dont M. Tony Blair faisait l'objet dans la presse britannique étaient de nature purement tactique. A ses yeux, l'argument employé pour amener M. Tony Blair à faire des concessions a consisté à évoquer la crainte que, du fait de ses propositions initiales, les dix nouveaux Etats membres ne puissent s'intégrer pleinement dans l'Union européenne. M. François Guillaume a constaté que, d'un autre côté, les restitutions n'étaient pas intégrées dans les dépenses prises en compte dans le solde recettes-dépenses, dont le « chèque » britannique représente les deux tiers. Dans ces conditions, M. François Guillaume a estimé que la Grande-Bretagne avait finalement pu obtenir le maintien de son « chèque » au même montant, soit environ 5 milliards d'euros. Il a déploré que, de ce fait, l'Union européenne poursuive la même voie reposant sur la notion du « juste retour » laquelle, selon lui, est un système vicié ainsi que la négation même de l'idée d'Union européenne. C'est pourquoi il a estimé qu'il convenait d'éviter de se réjouir trop rapidement des résultats du Conseil européen.

M. Pierre Forgues a déclaré que le Conseil européen était parvenu à conclure l'accord qui, à ses yeux, est le moins mauvais possible. Il a toutefois regretté que cet accord soit très éloigné des propositions du Luxembourg, puisque la présidence britannique, tout en émettant des propositions qui ont permis de faire machine arrière, a été en mesure de préserver ses intérêts. Evoquant les propos de la ministre selon lesquels la France et l'Allemagne auraient joué un rôle solidaire important dans la conclusion de l'accord, il a constaté que, d'après les commentaires de la presse, la France ne figurait pas parmi les protagonistes essentiels qui étaient M. Tony Blair et Mme Angela Merkel, puisque c'est cette dernière qui a été à l'origine de la proposition plafonnant le budget communautaire à 1,045 % du RNB de l'Union. En revanche, il s'est félicité que la France ait été l'Etat membre le plus ferme sur la question du « chèque » britannique et sur le respect de l'accord concernant la PAC.

Il a déploré que les décisions prises par le Conseil européen soient difficilement lisibles, au plan des principes de la solidarité et de l'équité, considérant que chaque Etat membre a prêché pour sa paroisse, ce qui rend très délicate, selon lui, l'explication de la construction européenne aux citoyens.

Il a souhaité savoir quelles mesures la France entendait prendre pour l'avenir sur la base de ces perspectives financières et si, en particulier, elle serait capable de proposer des initiatives dans le cadre de la clause de « rendez-vous ». En outre, il s'est enquis des conditions dans lesquelles la France pourrait promouvoir une relance politique de l'Union et contribuer au dépassement des égoïsmes nationaux.

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, a fourni les réponses suivantes :

- le climat est une question qui n'a pas été débattue en profondeur parce qu'elle avait déjà été abordée par le Conseil européen informel de Hampton Court, mais les conclusions du dernier Conseil européen y font référence au paragraphe 14. Après un premier effort au G8 de Gleneagles, devaient être mis en place les éléments d'une politique européenne pour 2006. L'Union européenne fait partie des ensembles les plus vertueux pour affronter un problème global, en l'absence du principal pays concerné, les Etats-Unis, dont la population, représentant 5 % de la population mondiale, émet 20 % des gaz à effet de serre, ainsi que des pays émergents comme la Chine et l'Inde, ayant un fort effet de serre potentiel ;

- le Gouvernement est déterminé à obtenir un accord global sur le taux réduit de TVA, compte tenu des résultats de l'expérience sur les travaux dans le bâtiment et les services à la personne, mais aussi pour la restauration à condition que les restaurateurs « nous aident à les aider » ;

- M. Tony Blair a marqué une première inflexion de sa position au dîner du jeudi soir, où le Royaume-Uni est apparu très isolé au milieu de partenaires qui lui ont tenu un langage amical mais ferme. Ensuite la proposition franco-allemande présentée le vendredi matin a progressivement formé une coalition autour d'elle. Enfin, à l'ouverture de la séance conclusive, il n'y avait pas encore de certitude d'aboutir à un accord dans la mesure où un écart subsistait avec les calculs du Trésor britannique sur le « chèque ». Le Premier ministre a bien confirmé, à notre demande, en début de réunion, que l'abattement serait bien réduit de 10,5 milliards d'euros ;

- la progressivité de la réduction du rabais britannique a facilité la conclusion de l'accord. Contrairement à ce que pourrait laisser croire une lecture rapide du tableau figurant à l'annexe III des conclusions sur les perspectives financières 2007-2013, compte tenu du décalage d'un an dans les paiements, le Royaume-Uni ne dispose que d'un délai de grâce d'un an et non de deux, et l'ajustement de la compensation est intégralement réalisé dès 2011. Même si, comme M. Jacques Myard l'a observé, l'ajustement ne prend pas en compte les dépenses de marché de la politique agricole commune, il faut se rappeler que la présidence luxembourgeoise avait présenté une proposition pour convaincre le Royaume-Uni en juin. Il convient aussi de relever que, sans accord, la décision sur les ressources propres aurait continué de s'appliquer en vertu de la règle de l'unanimité et de l'accord du Conseil européen de Fontainebleau ;

- la structure du budget évolue et cette question fera l'objet d'un examen qui débouchera sur des décisions après 2013, mais il était important que la PAC fût sauvegardée jusque-là, ce qui n'allait pas de soi ;

- l'Union européenne se mêle de la culture parce que son intervention est utile. Des crédits de 100 millions d'euros pour la culture et de 500 millions pour les médias peuvent sembler modestes, mais l'expérience de la ministre au Centre national de la cinématographie lui permet d'affirmer qu'ils seront bien utiles pour lutter contre la culture dominante et favoriser l'expression de la diversité des cultures et des identités nationales européennes. Il faut d'ailleurs encourager le Parlement européen à relever le niveau des aides pour favoriser en Europe la diffusion des œuvres européennes ;

- le solde net se dégrade quand le budget croît, ce dont il faut se féliciter car c'est le résultat du principe même de fonctionnement de l'Union européenne. La logique comptable ne peut pas résumer la logique économique européenne. La contribution nette de la France représentera 0,37 % de son PIB en fin de période 2007-2013. Sa contribution brute s'élèvera à 135,7 milliards d'euros sur sept ans, soit 19,3 milliards d'euros par an en moyenne et 18 milliards l'an prochain. C'est un effort que peut consentir notre pays dont les exportations vers nos partenaires de l'Union ont été multipliées par 4,5 en dix ans. Le coût supporté par les Français est largement compensé par ce que l'Europe nous rapporte par ailleurs. Une relation d'équité doit justifier la variation des contributions des Etats membres. A cet égard, si la France est le deuxième contributeur brut au budget de l'Union après l'Allemagne, les Pays-Bas restent, par habitant, de loin le plus fort contributeur devant tous les autres, ce qui ne facilite pas toujours l'ancrage du sentiment européen ;

- la décision « ressources propres » devra être ratifiée par le Parlement français ;

- en ce qui concerne le FED, alors qu'il devient de plus en plus évident qu'aider l'Afrique constitue un impératif majeur pour l'Europe, la Grande-Bretagne a obtenu, en 1995, une réduction de sa contribution, l'Allemagne ayant suivi la pente de cette diminution. La France a dû compenser ce manque à gagner, ce qui est tout à son honneur. La nouvelle clé de répartition pour l'enveloppe du FED prévue par l'accord sur les perspectives financières rapproche le niveau de la quote-part française de celui qui résulterait d'une clé de répartition calculée sur le PIB. En outre, l'Allemagne a fait un geste important, de plusieurs milliards d'euros, pour augmenter sa contribution au FED ;

- la Déclaration ministérielle adoptée par l'OMC à Hong-Kong ne contient que des engagements compatibles avec la PAC. La réforme de cette politique adoptée en 2003 a permis à l'Europe de mettre sur la table des concessions, qui ont effectivement débloqué les négociations. Notre geste s'accompagne d'une condition qui est absolue : nos partenaires doivent fournir des efforts équivalents. A cet égard, l'accord négocié sur l'élimination des subventions aux exportations répond à cette conditionnalité. Par ailleurs, la suppression de ces soutiens était déjà convenue à Doha, par tous les membres de l'OMC, au moment du lancement du Cycle. D'autre part, le texte adopté à Hong-Kong engage très clairement nos partenaires à réformer leurs subventions, y compris celles qui sont « déguisées ». Enfin, en ce qui concerne l'Europe, l'effort qui lui est demandé est progressif, puisqu'il ne sera totalement accompli que fin 2013. Et à cette première garantie s'ajoute une seconde garantie : le parallélisme intégral des efforts, comme cela a déjà été souligné ;

- en ce qui concerne le « chèque » britannique, l'accord intervenu oblige la Grande-Bretagne à assumer sa part du financement de l'élargissement. Si le « chèque » britannique n'avait pas été réformé, la dépense qui lui est imputable aurait augmenté mécaniquement. Ainsi, sans modification du calcul de la correction budgétaire bénéficiant à la Grande-Bretagne, la dépense totale liée au « chèque » se serait élevée à 52,8 milliards d'euros pour la période 2007-2013. Avec la réforme décidée par le Conseil européen, le « chèque » britannique s'élèvera, pour la même période, à 42,3 milliards d'euros. Par ailleurs, la clause de « rendez-vous » doit permettre un réexamen de l'ensemble du budget européen, y compris du « chèque » ;

- le « couple franco-allemand » a manifesté sa solidité durant le Conseil européen, contrairement à ce qu'a affirmé une partie de la presse. Ce sont des propositions franco-allemandes conjointes qui ont permis de débloquer la négociation sur deux points clés : l'augmentation de l'enveloppe budgétaire globale pour la période, avec un montant bien supérieur à celui proposé par la Présidence le 14 décembre dernier, et le nouveau mécanisme de calcul de la correction budgétaire. Ces deux initiatives ont été présentées le vendredi matin à la Présidence et ont clairement enclenché la dynamique qui a permis d'aboutir à un accord. Ces initiatives ont été préparées en amont, notamment à l'occasion de la rencontre du 7 décembre entre le Président de la République et la Chancelière allemande ;

- l'appréciation globale qui peut être portée sur cet accord est triple : nos objectifs ont été atteints, nos intérêts ont été préservés et la structure du budget, ainsi que celle des dépenses, nous satisfont. En ce qui concerne la nature du budget de l'Union, celui-ci évolue, contrairement à ce que peut laisser penser une partie des commentaires. La politique de cohésion devient, dans les faits, la première politique communautaire. Parallèlement, la PAC, qui représentait plus de 70 % du budget en 1984, au moment du Conseil européen de Fontainebleau, occupe, aujourd'hui, une part beaucoup moins importante. Par ailleurs, cette politique ne cesse de s'adapter depuis plus de dix ans ;

- en ce qui concerne les initiatives « institutionnelles » que pourrait proposer la France, le Président de la République s'exprimera à ce sujet.

Mme Anne-Marie Comparini a souhaité évoquer les programmes nationaux de réforme, un nouvel outil qui a été adopté lors du renforcement de la Stratégie de Lisbonne. En particulier, elle a interrogé la ministre sur la date de présentation de ce programme, sa transmission à la Commission et les modalités éventuelles d'association du parlement national à l'élaboration de ce programme. Elle s'est en outre demandée si les autres Etats membres avaient tous transmis leurs programmes nationaux. Enfin, elle a souhaité disposer de précisions sur le calendrier et les méthodes prévus pour la mise en œuvre des programmes nationaux.

M. Didier Quentin a souhaité obtenir quelques précisions sur la question de la TVA à 5,5 % dans la restauration. Il a estimé que les élus ne pourraient faire l'économie d'une véritable explication pédagogique sur le sujet, notamment sur les raisons du résultat du Conseil européen. Il est vrai qu'il s'agit d'un débat particulièrement difficile. Certains n'hésitent pas à brandir le principe de subsidiarité pour justifier une décision souveraine de la France en la matière. Il est incontestable, d'ailleurs, que beaucoup de citoyens ont du mal à comprendre que ce type de mesure soit décidé à Bruxelles.

Ayant noté que la TVA à taux réduit dans la restauration serait de nouveau débattue par le Conseil Ecofin le 24 janvier prochain, soit le lendemain de la rencontre franco-allemande prévue pour le 23 janvier, M. Didier Quentin s'est interrogé sur le fait de savoir comment on pourrait éviter que l'Allemagne ne soit présentée comme un mauvais partenaire. Il a en outre demandé quelle serait la bonne stratégie pour ne pas laisser trop d'espérance à nos concitoyens quant à un résultat hypothétique car, en l'absence d'explications, le choc en retour risque d'être important.

M. Didier Quentin a par ailleurs interrogé la ministre sur le rôle que pourra jouer le Parlement européen dans la négociation de l'accord interinstitutionnel. Il a souhaité savoir, puisque cette institution a indiqué qu'elle pèserait dans les débats, dans quel type de domaines celle-ci serait susceptible de vouloir négocier une augmentation des crédits.

Enfin, observant la régression démographique que connaissent certains Etats membres, l'Allemagne et l'Italie notamment, il a demandé quelle serait la stratégie de l'Europe dans un domaine aussi sensible pour son avenir et sa place dans le monde.

M. Daniel Garrigue a jugé que l'accord obtenu est « important ». Il s'est par ailleurs réjoui que la mécanique franco-allemande se soit remise en marche. Il s'est en outre félicité que la négociation finale sur les perspectives financières ait permis un rapprochement entre la France et le nouveaux Etats membres après la « mauvaise passe » provoquée par le conflit en Irak. L'annonce de futures initiatives franco-allemandes visant à relancer l'avenir institutionnel de l'Europe constitue une autre bonne nouvelle. Cependant, il convient de souligner que l'adoption d'initiatives au sein de l'Eurogroupe n'est pas nécessairement la meilleure des solutions. En effet, comme les nouveaux Etats membres n'en font pas partie, toute proposition qui tendrait à faire avancer l'Europe au travers de l'Eurogroupe aboutirait à ce que ces pays se sentent marginalisés. Ces germes d'une nouvelle division en Europe doivent être écartés.

M. Daniel Garrigue a alors interrogé la ministre sur trois points :

- M. Tony Blair est présenté comme « le plus européen des Premiers ministres britanniques ». Il faut croire qu'un futur Premier ministre britannique « modérément » européen aurait des positions équivalentes à celles de notre collègue Jacques Myard. Dans ces conditions, il est légitime de se demander ce que les Britanniques attendent encore de l'Europe.

- Le différentiel entre le compromis de la présidence luxembourgeoise et le montant résultant de l'accord négocié par le Conseil européen est de 9 milliards d'euros. Quelles sont donc les rubriques et les actions qui ont été « sacrifiées » pour parvenir à ce différentiel ? Est-ce que ce sont notamment la recherche et les réseaux transeuropéens, qui pourtant répondent à de grands engagements ?

- Il serait souhaitable d'obtenir des précisions sur les programmes nationaux de réforme, ainsi que l'a demandé Mme Anne-Marie Comparini. Il semble qu'en ce domaine l'Espagne et la République tchèque soient en pointe. De son côté, la France a été quelque peu prise de court par la date butoir fixée pour présenter le programme national, à savoir le 15 octobre. M. Daniel Garrigue a demandé quand le programme en question serait transmis au Parlement.

Enfin, M. Daniel Garrigue a conclu son intervention par quelques remarques sur le taux réduit de TVA dans la restauration. Tout en estimant qu'une telle réduction se justifiait pleinement, au regard des résultats obtenus, dans le secteur du bâtiment, il a jugé légitime de s'interroger sur l'opportunité d'un tel dispositif pour la restauration, en raison du coût que ce dernier ferait peser sur nos finances publiques. Il ne serait peut-être pas très sage de mettre en œuvre une telle réduction, quand on sait que l'endettement de notre pays atteint 1 100 milliards d'euros. D'ailleurs, si l'Allemagne a fait preuve de fermeté, en refusant une telle réduction en la matière, c'est parce qu'elle connaît, elle aussi, une situation financière difficile et combat, par conséquent, les mesures qui, d'une manière générale, accroissent les déficits.

En réponse aux différents intervenants, Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, a apporté les éléments de réponse suivants :

- la stratégie de Lisbonne est une stratégie cohérente, qui souffre d'une mise en œuvre insuffisante par les Etats membres. C'est pourquoi le Conseil européen a décidé que chaque Etat doit adopter tous les ans un programme national de réforme avant la mi-octobre, qu'il transmet à la Commission afin qu'elle prépare un rapport, débattu par le Conseil européen de printemps qui a lieu en mars. Ce mécanisme a été mis en œuvre cette année pour la première fois, et le calendrier fixé a été difficile à tenir. Le programme national de réforme français a été transmis à la Commission à la fin du mois d'octobre, à temps pour avoir honoré nos obligations avant le Conseil européen informel de Hampton Court. En revanche, le Gouvernement a pris un peu de marge en ce qui concerne la consultation des partenaires sociaux et du Parlement. Le plan a été présenté au comité du dialogue social sur les questions européennes et internationales (CDSEI) par le ministre de l'emploi et de la cohésion sociale ainsi qu'au Conseil économique et social français par la ministre déléguée. Il a également été présenté par le ministre de l'économie et des finances, M. Thierry Breton, à la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale lors de son audition le 30 novembre 2005. Les observations formulées par ces diverses instances ont été transmises en annexe au plan national de réforme ;

- en ce qui concerne la TVA à taux réduit, les choses ne sont pas jouées et le Gouvernement est déterminé à obtenir un accord global. Le gouvernement allemand reste réticent au sujet de la diminution de la TVA sur la restauration, car il s'apprête à augmenter le taux de TVA et craint qu'une telle réduction entraîne des demandes similaires en Allemagne. Les restaurateurs français bénéficient déjà d'un plan d'allégement de charges, qui sera supprimé si la baisse du taux de TVA est obtenue ;

- le Parlement européen doit maintenant se prononcer sur les perspectives financières proposées par le Conseil. Il avait fait savoir que le niveau d'ambition fixé par la présidence britannique, à 1,03 % du RNB européen, serait refusé, mais l'on peut espérer qu'il acceptera l'accord obtenu qui se situe à un niveau supérieur et comporte des transferts de solidarité plus importants. Il exercera peut-être son pouvoir de modification, comme il l'a fait par le passé, pour augmenter certaines lignes budgétaires ;

- la plupart des pays européens sont en recul démographique. Cela est particulièrement frappant en Allemagne, mais cette tendance tend à gagner l'ensemble des pays européens. La France a obtenu que cette question figure sur l'agenda européen parmi les grands défis auxquels l'Union européenne est confrontée. Deux propositions françaises, formulées dans la perspective du Livre vert de la Commission européenne sur les changements démographiques, ont ainsi été retenues. Une conférence annuelle sur la démographie, qui donnera lieu à une étude d'ensemble sur la démographie en Europe, sera organisée afin d'échanger des informations et de disposer d'un diagnostic global. La Commission devra en outre présenter au Conseil européen des propositions détaillées lors de la présidence autrichienne ;

- l'Eurogroupe est une structure existante, qui fonctionne et qui peut être utilisée sans bouleverser les équilibres existants et sans provoquer de craintes injustifiées chez nos partenaires ;

- la relation entre les Britanniques et l'Europe est une relation complexe, pour ne pas dire ambiguë ou ambivalente. Le Royaume-Uni a une conception différente de l'Europe car c'est un pays à la fois européen et tourné vers l'Atlantique. Il faut aider ceux qui ont, au Royaume-Uni, de réelles convictions européennes. Le courage du Premier ministre britannique, M. Tony Blair, en 1998 lorsqu'il a adopté la déclaration de Saint-Malo sur l'Europe de la défense, et lors de ce Conseil européen sur le rabais britannique, doit être salué ;

- la diminution de neuf milliards d'euros de l'accord sur les perspectives financières par rapport à la proposition luxembourgeoise concerne principalement la cohésion et l'agriculture, en particulier le développement rural. Le budget européen en matière de recherche est en augmentation, ce qui est bienvenu alors que l'effort total de recherche en Europe reste aujourd'hui insuffisant du point de vue du Gouvernement français. La France fait, au niveau national, des efforts de recherche importants, et se situe au dessus du niveau européen (2 % du RNB) avec 2,2 % de son RNB. Ces efforts doivent être poursuivis car il s'agit d'un investissement pour l'avenir.

M. Jacques Myard a souligné qu'aucune disposition spécifique des perspectives financières n'est prévue pour le fonds d'ajustement à la mondialisation, qui sera financé par les montants budgétaires sous-utilisés.

Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, a rappelé que les montants budgétaires fixés ne sont jamais intégralement utilisés et qu'il reste toujours des reliquats, par exemple en ce qui concerne l'utilisation des fonds structurels, et que ceux-ci seront affectés au financement de ce fonds.