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DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 178

Réunion du mardi 4 juillet 2006 à 15 heures

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président

I. Examen du rapport d'information de M. René André sur l'avant-projet de budget européen pour 2007

Le Président Pierre Lequiller, suppléant M. René André, rapporteur, a souligné que le budget de l'Union européenne pour l'année 2007 sera le premier à s'inscrire dans le nouveau cadre financier conclu pour la période 2007-2013. La préparation de ce budget a été techniquement difficile, puisqu'elle a eu lieu alors que le résultat des négociations sur les perspectives financières, qui ont été très délicates, notamment à cause du problème du « chèque » britannique, n'était pas encore connu.

L'année 2007 doit en principe être marquée par deux évènements : l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie, et le démarrage de la nouvelle génération de programmes communautaires pluriannuels dans des domaines aussi divers que la recherche, les Fonds structurels, l'aide au développement, ou l'aide à la mobilité des étudiants.

La réalisation de ces deux évènements est encore incertaine : d'une part, la décision concernant la date d'intégration de la Bulgarie et de la Roumanie ne sera pas prise avant le mois d'octobre ; il convient de rappeler à ce sujet que la Délégation a largement évoqué cette question et a adopté, sous quelques réserves, une position favorable à l'adhésion dès 2007 de ces deux pays. Il serait en effet difficile d'envisager de refuser à ces pays ce qui a été accordé aux Dix Nouveaux Etats membres en 2004.

D'autre part, de nombreux actes devant servir de base juridique aux nouveaux programmes sont encore en cours de négociation, soit au Conseil, soit au Parlement européen.

Le projet de budget présenté par la Commission est, malgré tout, basé sur l'hypothèse que l'année 2007 sera la première année d'une Union à 27 membres et l'année du démarrage pour les programmes pluriannuels.

Il met aussi l'accent sur la réalisation du volet communautaire de la « stratégie de Lisbonne », puisque 43 % de ce budget sont consacrés aux actions qui relèvent de cette stratégie. Ceci représente 54,3 milliards d'euros en crédits d'engagement, sur un montant total de 126,8 milliards d'euros pour l'ensemble du projet de budget. A quoi serviront précisément ces 54,3 milliards d'euros ? Ces crédits sont ceux de la Rubrique 1, qui regroupe le septième programme-cadre de recherche, le Programme pour l'innovation et la compétitivité (PIC), les Réseaux transeuropéens de transport et d'énergie (RTE), les mesures d'éducation et de formation, les Fonds structurels et le Fonds de cohésion.

Les dépenses de cette Rubrique sont les dépenses les plus « dynamiques » de ce projet de budget : elles augmentent en moyenne de 14,3 % par rapport au budget 2006, alors les autres Rubriques augmentent peu, ou même diminuent. C'est le cas notamment pour les dépenses agricoles. Le « premier pilier » de la PAC demeure en volume la politique la plus importante dans le budget de l'Union, avec 35 % des crédits d'engagement. Mais leur montant global n'augmente que de 1,2 % par rapport à 2006, et il convient de rappeler que la part des dépenses agricoles dans le budget était bien supérieure dans le passé.

Ce faisant, la Commission respecte les choix politiques formulés par le Conseil européen de décembre 2005 et qui ont mené à l'accord final sur les perspectives financières. Un exemple : le Conseil européen avait réaffirmé solennellement un impératif de solidarité entre Etats au profit des nouveaux Etats membres ; en conséquence, dans l'avant-projet de budget pour 2007, 40 % des crédits de la politique régionale vont aux dix nouveaux Etats membres, contre 23 % dans le budget 2006.

Mais si le budget 2007 doit permettre de réaliser le triple objectif mis en avant par la Commission, il ne peut se soustraire à une double contrainte.

D'une part, 2006 marque l'achèvement de la période de programmation antérieure mais beaucoup d'actions pluriannuelles ont été lancées en 2006, en 2005 ou même avant et doivent être poursuivies ou clôturées en 2007. Une partie des crédits du budget 2007 sera donc affectée à ces actions.

D'autre part et surtout, les Etats membres ont indiqué à la Commission que le budget 2007 devra être caractérisé par un niveau de rigueur budgétaire semblable à celui appliqué par les Etats membres dans chacun de leurs budgets nationaux. La France et les autres principaux contributeurs au budget de l'Union manifestent donc une grande vigilance concernant la fixation du niveau des crédits de paiement pour ce budget 2007. La Commission a proposé un montant total de 116,4 milliards d'euros, en augmentation de 3,9 % par rapport au budget 2006. Ce montant est certes inférieur au plafond fixé pour 2007 par les perspectives financières, mais de nombreux Etats ont fait valoir qu'il serait préférable de réduire ce montant, pour deux raisons : pour disposer d'une marge plus importante pour faire face aux imprévus, et parce que le niveau des crédits de paiement détermine le montant de la participation de chacun des Etats membres au budget européen.

A ce jour, un premier compromis élaboré au niveau du Conseil atteint un montant de 114,7 milliards d'euros en crédits de paiement. Les résultats des négociations au sein du Conseil, puis entre le Conseil et le Parlement européen, sont encore incertains. Le Conseil se prononcera en première lecture sur le projet de budget le 14 juillet, et le Parlement européen le 26 octobre.

Quel que soit le résultat final de la navette, il est important de noter que c'est nécessairement le budget 2007 - son montant, ses choix politiques, son exécution - qui servira de référence lorsque commenceront les travaux de réflexion sur la révision d'ensemble du système budgétaire communautaire. En effet, l'accord sur les perspectives financières pour 2007-2013 comporte une « clause de rendez-vous » pour 2008-2009. S'il est prévu que la Commission mènera un échange de vues approfondi avec le Parlement européen, il est aussi prévu que celui-ci associera à ses travaux les parlements nationaux. Il conviendra de veiller à ce que le Parlement et le Gouvernement français débattent de cette modernisation du budget communautaire et apportent ainsi la contribution de la France à cette réforme essentielle.

Le Président Pierre Lequiller a informé les membres de la Délégation qu'en Conférence des présidents, il a été proposé que le débat sur le prélèvement au profit du budget de l'Union européenne, qui aura lieu le 23 octobre prochain dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, ait lieu non pas en séance publique mais en commission élargie. Le Président Pierre Lequiller et le Président Edouard Balladur se sont déclarés défavorables à cette proposition et ont obtenu que ce débat ait bien lieu dans l'hémicycle, afin de contribuer à assurer un plus large écho aux questions européennes.

Le Président Pierre Lequiller a donné lecture de la proposition de résolution sur l'avant-projet de budget communautaire pour 2007, en remarquant, s'agissant du paragraphe 4 relatif à la stratégie de Lisbonne, qu'en la matière les carences viennent plus souvent des gouvernements nationaux que des institutions communautaires.

Il a ensuite informé les membres de la Délégation qu'il a invité M. Alain Lamassoure et Mme Catherine Guy-Quint, députés français au Parlement européen, membres de la commission des budgets, à venir présenter devant la Délégation leurs travaux sur les ressources propres des Communautés européennes. Relevant qu'il importait de développer le travail commun entre le Parlement européen et les parlements nationaux, il a rappelé que les membres de la Délégation ont pris part aux rencontres interparlementaires organisées cette année. Le semestre de présidence autrichienne a été, en la matière, déterminant. On peut ainsi considérer qu'un « Congrès » a eu lieu, rassemblant parlementaires européens et nationaux, en présence du président du Conseil en exercice, du président de la Commission et du président du Parlement européen, et que les parlementaires ont eu la possibilité de les interroger. Ce fait a été peu souligné par les observateurs mais constitue un acte important.

M. Jérôme Lambert a estimé que se dessinent ainsi de nouvelles pistes après le résultat négatif des referenda français et néerlandais.

Le Président Pierre Lequiller a considéré que l'implication croissante des parlements nationaux est un mouvement inéluctable et que la présidence autrichienne a joué un rôle majeur. D'autre part, le président de la Commission s'est engagé à transmettre directement aux parlements nationaux à partir du 1er septembre tous les textes communautaires, et la Délégation sera appelée à donner son avis sur l'application du principe de subsidiarité. Aussi la Délégation va-t-elle mettre en place une structure de travail, composée de MM. Jérôme Lambert et Didier Quentin, pour examiner tous ces textes au regard du principe de subsidiarité et pour rapporter tous les cas posant problème.

M. Jérôme Lambert a souligné l'importance d'une implication accrue des parlementaires nationaux dans le fonctionnement de l'Union et a estimé que si cette implication avait été effective, la campagne du référendum sur le projet de Constitution aurait été différente.

Le Président Pierre Lequiller a considéré qu'il était essentiel que les parlementaires nationaux parlent fréquemment de l'Europe dans leur circonscription. Il a rappelé, dans le même esprit, les initiatives prises par l'Assemblée nationale et la Délégation pour que les questions européennes soient davantage prises en compte dans le cadre des travaux de l'Assemblée nationale : l'organisation d'un débat en séance publique avant chaque Conseil européen, l'audition de personnalités européennes dans l'hémicycle, l'institution d'une séance de questions d'actualité européenne le premier mercredi de chaque mois, l'organisation de missions parlementaires à Bruxelles, l'envoi de « missi dominici » auprès de nos partenaires de l'Union, la publication d'une « Lettre européenne », la mise en place d'un site sur l'Europe. Il a néanmoins estimé qu'encore trop peu de députés étaient réellement informés des enjeux européens. Il a enfin évoqué l'ouvrage d'un auteur britannique, M. Mark Leonard, intitulé « Pourquoi l'Europe dominera le 21ème siècle », et en a recommandé la lecture.

A l'issue de ce débat, la Délégation a adopté la proposition de résolution suivante :

« L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu l'article 272 du traité instituant la Communauté européenne et l'article 177 du traité Euratom,

Vu l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006 entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission européenne sur la discipline budgétaire et la bonne gestion financière,

Vu la communication de la Commission sur l'ajustement technique du cadre financier pour 2007 à l'évolution du RNB et des prix (COM [2006] 327 final),

Vu l'avant-projet de budget général de la Commission européenne pour l'exercice 2007 (SEC [2006] 531/E 3175) et la lettre rectificative n° 1 à cet avant-projet de budget
(SEC [2006] 762/E 3173),

1. Prend acte des grandes orientations de l'avant-projet de budget général pour 2007, premier budget de la période couverte par les nouvelles perspectives financières ;

2. Observe que la Commission a proposé pour le budget communautaire une progression des crédits de paiement nettement supérieure à celle qu'enregistreront les dépenses du budget national en 2007, du fait de l'impératif de rigueur budgétaire qui s'impose aux Etats membres ;

3. Souligne la nécessité de procéder à une évaluation réaliste des besoins en crédits de paiement qui, sans nuire au démarrage des nouveaux programmes pluriannuels pour 2007-2013 ni à l'achèvement des programmes de la période antérieure, évitera une surestimation des contributions nationales au budget européen ;

4. Constate avec satisfaction la progression des crédits proposée pour la réalisation du volet communautaire de la « stratégie de Lisbonne », en volume comme en proportion du budget communautaire, et appelle le gouvernement à poursuivre résolument la mise en œuvre de cette stratégie au niveau national ;

5. Invite le Conseil et le Parlement européen à dégager le plus rapidement possible un accord sur les bases juridiques du Septième programme-cadre de recherche-développement afin que ce programme, élément essentiel de la « stratégie de Lisbonne », puisse effectivement démarrer dès le 1er janvier 2007 ;

6. Approuve l'allocation dès 2007 d'une part croissante des Fonds structurels et du Fonds de cohésion aux nouveaux Etats membres, conformément à l'engagement réaffirmé de solidarité entre les Etats membres qui a trouvé sa traduction budgétaire dans l'accord sur les perspectives financières pour 2007-2013 ;

7. S'oppose à toute réduction des dépenses agricoles par rapport aux propositions de la Commission pour 2007, compte tenu du caractère très raisonnable des augmentations proposées pour cette catégorie de dépenses ;

8. Demande au gouvernement d'engager dès à présent, en y associant étroitement les parlementaires, une réflexion d'ensemble sur la modernisation du système budgétaire communautaire, dans la perspective de la réforme annoncée pour 2008-2009 ; indique d'ores et déjà que cette réforme devra comporter la suppression définitive de la correction budgétaire dont bénéficie le Royaume-Uni. »

II. Examen du rapport d'information de M. Christian Philip sur les transpositions des directives européennes

M. Christian Philip, rapporteur, a rappelé que la Délégation avait décidé, il y a trois ans, de publier un rapport annuel sur les directives en retard de transposition, avec pour objectif de faire pression sur le Gouvernement et les administrations concernées pour améliorer le déficit de transposition de notre pays qui, à l'époque, était régulièrement dernier du classement établi par la Commission européenne. Ce quatrième rapport annuel étant le dernier de la législature, il ne se contente pas de faire le point sur la situation au 30 juin 2006 et il tente d'établir un bilan de l'évolution de ces trois dernières années.

Il faut souligner tout de suite l'amélioration constatée puisque le déficit français de transposition est passé de 2,4 % au 30 juin 2005 à 1,9 % au 30 juin 2006. Ce ratio, qui correspond à 33 directives relatives au marché intérieur en retard de transposition, demeure supérieur à l'exigence communautaire fixée à 1,5 %. La France est aujourd'hui 17ème sur 25 et l'on ne peut se satisfaire d'un tel classement.

Si l'on prend en compte l'ensemble des directives et non pas simplement celles concernant le marché intérieur, et si l'on retient l'ensemble des textes pour lesquels le processus de transposition n'est pas entièrement achevé, on constate, là aussi, des progrès dans la situation de la France. Le stock est ainsi passé de 84 directives en retard au 30 juin 2003 à 63 directives au 30 juin 2006.

Depuis le Conseil européen de Barcelone de mars 2002, une tolérance zéro est préconisée à l'encontre des directives ayant un retard de transposition supérieur à deux années. Or, notre pays rencontre des difficultés spécifiques pour satisfaire cette exigence et 17 directives sur les 63 précitées ont un retard supérieur à deux ans. Cette situation est certainement liée au fait que la France est, avec l'Allemagne, l'Etat membre dont le délai moyen de transposition est le plus élevé, à savoir 15 mois en moyenne contre 4 mois pour la Finlande.

Il importe de souligner néanmoins les progrès remarquables accomplis par plusieurs ministères. Le ministère de l'écologie et du développement durable, traditionnellement l'un de ceux accusant le plus grand nombre de retards de transposition, n'a cette année qu'une seule directive de recensée. Le ministère de la justice fait encore mieux puisqu'il n'a aucune directive en retard au 30 juin 2006. Des progrès importants ont également été accomplis par le ministère de l'agriculture et de la pêche. En revanche, avec 15 directives en retard de transposition, le ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer apparaît, à première vue, comme le mauvais élève de cette année. Il faut cependant indiquer que 7 de ses 15 directives viennent de voir expirer leur délai de transposition ces dernières semaines et que, par ailleurs, le champ de compétence de ce ministère donne lieu à l'adoption de nombreuses directives, dont plusieurs soulèvent des problèmes politiques. Depuis 2003, c'est en fait le ministère de l'économie et des finances qui rencontre le plus de difficultés pour transposer dans les délais et qui semble susceptible de réaliser des progrès en terme d'organisation.

L'année qui vient de s'écouler a surtout été marquée par un renforcement de la contrainte juridique. Pour la première fois, la France a été condamnée au paiement d'une astreinte dans le cadre de l'affaire dite « poissons sous taille » et dans un autre dossier lié à une directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux. Notre pays est ainsi le troisième Etat membre après la Grèce et l'Espagne à faire l'objet d'une condamnation pécuniaire. Il faut ajouter que l'astreinte prononcée dans l'affaire « poissons sous taille » est, en outre, la plus lourde jamais infligée par la Cour de justice et que c'est également la première fois qu'une astreinte est cumulée avec une somme forfaitaire. A cet égard, le Gouvernement a opportunément décidé d'imputer les sommes de ces condamnations sur le budget des ministères responsables. La contrainte juridique est accrue également au niveau national car, dans sa décision n° 2006-535 DC du 30 mars 2006, le Conseil constitutionnel a laissé entendre qu'il pourrait censurer, dans l'avenir, une loi de transposition méconnaissant les objectifs de la directive transposée.

Si le bilan de ces trois dernières années apparaît finalement plutôt positif, d'autant qu'un stock d'une vingtaine de directives en retard de transposition semble incompressible, c'est surtout grâce à l'implication politique qui a caractérisé cette période. Cette implication politique a commencé par la déclaration de politique générale de M. Jean-Pierre Raffarin, puis s'est traduite par le plan d'action de 2002 et surtout par la circulaire du 27 septembre 2004 créant un groupe de haut niveau sous l'autorité conjointe du Secrétaire général du Gouvernement et de la Secrétaire générale aux affaires européennes. On doit noter également les deux communications semestrielles en Conseil des ministres effectuées par la ministre déléguée aux affaires européennes, ainsi que la création récente du Comité interministériel pour l'Europe. Sans trop de modestie, on peut supposer que le rapport de la Délégation a aussi permis d'obtenir de meilleurs résultats.

Des améliorations demeurent pourtant envisageables. Au niveau législatif, on doit relever que 45 des 63 directives en retard de transposition sont, au moins en partie, de la compétence du législateur, qui a manifestement des difficultés pour intervenir avant l'expiration de l'échéance de transposition. Ces problèmes pourraient être résolus partiellement par un recours régulier aux projets de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire (DDAC) et par l'utilisation de la procédure d'examen simplifiée déjà autorisée par les articles 103 à 107 du Règlement de l'Assemblée nationale. Il serait souhaitable, en outre, que la Délégation profite de l'audition des ministres pour les interroger systématiquement sur l'état de la transposition dans leur département ministériel, en les prévenant à l'avance afin que l'audition puisse avoir un effet stimulateur sur l'administration concernée.

Au niveau administratif, le rapport recense, comme chaque année des problèmes d'anticipation, des difficultés de concertation entre les multiples intervenants ministériels, des retards imputables aux obligations consultatives et la permanence du perfectionnisme juridique dans notre démarche de transposition. L'anticipation devrait reposer sur les études d'impact, qui sont encore, souvent, insuffisantes. On pourrait s'inspirer, dans ce domaine, d'expériences étrangères, en particulier celle du Royaume-Uni décrite dans le dernier rapport public du Conseil d'Etat. Il pourrait être opportun de renforcer la pression sur l'administration en demandant au Gouvernement de fournir une réponse écrite aux critiques, remarques ou propositions inscrites dans le rapport de la Délégation. Un assouplissement de la procédure administrative de transposition apparaît également nécessaire et l'on doit signaler qu'une mission d'étude vient d'ailleurs d'être confiée par le Premier ministre au Conseil d'Etat.

Le Président Pierre Lequiller a remercié le rapporteur pour cette quatrième analyse annuelle de la transposition des directives en France, dont il a souligné la qualité. Il a estimé que, malgré les progrès accomplis, les retards de transposition constatés par le rapport restaient difficilement acceptables. Il a par ailleurs considéré qu'il convenait de privilégier les procédures de transposition simplifiées et que les méthodes pourraient être allégées en recourant à des transpositions a minima.

M. Jérôme Lambert a regretté le fait que la France ait été, pour la première fois, condamnée à payer des amendes et des astreintes. Il a interrogé le rapporteur sur la destination des fonds versés à ce titre.

Mme Arlette Franco a souhaité avoir des précisions sur les raisons des retards de transposition constatés.

En réponse aux intervenants, M. Christian Philip, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- même si des efforts importants restent nécessaires, il ne faut pas sous-estimer les efforts réalisés par la France, qui se trouve à présent à peu près au niveau de la Belgique ou de l'Irlande. Les plus « mauvais élèves » de l'Union dans ce domaine sont actuellement l'Italie, la Grèce et le Luxembourg. Le pays le mieux situé est le Danemark. La Grande-Bretagne est en bonne position avec un taux de non-transposition de l'ordre de 1,2 % ;

- ce n'est que récemment que la Cour de justice a décidé d'imposer des amendes ou des astreintes à des Etats membres pour défaut de transposition (en 2000 pour la Grèce et en 2003 pour l'Espagne). La décision prise par la Cour à l'encontre de la France dans l'affaire des « poissons sous taille » concerne une directive qui date de 1991 et dont la mauvaise transposition a occasionné une procédure de manquement. Par conséquent, tous les gouvernements en charge depuis 1991 peuvent être, à cet égard, considérés comme responsables ;

- les fonds versés par les Etats membres au titre d'amendes ou d'astreintes sont affectés au budget de l'Union ;

- il faut distinguer les directives posant des difficultés politiques de celles soulevant des problèmes d'ordre technique. Les retards rencontrés pour la transposition des directives suscitant des difficultés politiques, telles celles relatives aux transports, à l'énergie ou aux OGM, s'expliquent aisément et sont compréhensibles. Il n'en va pas de même pour les directives soulevant des problèmes d'ordre technique, pour lesquels il ne devrait pas y avoir de retard. Ces retards s'expliquent notamment, lorsque la transposition nécessite l'intervention du législateur, par l'encombrement de l'ordre du jour parlementaire. Lorsque la transposition est réglementaire, les insuffisances dans l'effort d'anticipation et dans la réalisation des études d'impact, ainsi que les difficultés liées aux nombreuses procédures consultatives, peuvent être citées parmi les principaux facteurs d'explication. L'implication politique intervenue depuis 2002, qui s'est notamment traduite par la création du « groupe à haut niveau », doit cependant être soulignée. Il serait sans doute possible d'aller plus loin, en s'inspirant du modèle espagnol par exemple, où la commission générale des secrétaires d'Etat et sous-secrétaires assure un suivi hebdomadaire. Une mobilisation politique permanente au plus haut niveau est indispensable pour réaliser de nouveaux progrès. Le retard enregistré est encore trop important, mais aujourd'hui il y a une véritable volonté politique et administrative.

Le Président Pierre Lequiller a souligné le rôle incitatif qui revient à la Délégation pour l'Union européenne sur cette question. Il a indiqué qu'il attirerait l'attention des ministres concernés sur les retards relevant de leur ministère, y compris lors de leurs auditions par la Délégation, et a souhaité qu'une large publicité soit faite à ce rapport.