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N° 2767

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 20 décembre 2005

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA DÉLÉGATION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

POUR L'UNION EUROPÉENNE (1),

sur la proposition de directive du Parlement européen
et du Conseil concernant l'accès au marché
des services portuaires
(COM [2004] 654 final / E 2744),

ET PRÉSENTÉ

par M. Christian PHILIP,

Député.

________________________________________________________________

(1) La composition de cette Délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne est composée de : M. Pierre Lequiller, président ; MM. Jean-Pierre Abelin, René André, Mme Elisabeth Guigou, M. Christian Philip, vice-présidents ; MM. François Guillaume, Jean-Claude Lefort, secrétaires ; MM. Alfred Almont, François Calvet, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Bernard Deflesselles, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Nicolas Dupont-Aignan, Jacques Floch, Pierre Forgues, Mme Arlette Franco, MM. Daniel Garrigue, Michel Herbillon, Marc Laffineur, Jérôme Lambert, Edouard Landrain, Robert Lecou, Pierre Lellouche, Guy Lengagne, Louis-Joseph Manscour, Thierry Mariani, Philippe-Armand Martin, Jacques Myard, Christian Paul, Didier Quentin, André Schneider, Jean-Marie Sermier, Mme Irène Tharin, MM. René-Paul Victoria, Gérard Voisin.

SOMMAIRE

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Pages

RÉSUMÉ DU RAPPORT 7

SUMMARY OF REPORT 11

INTRODUCTION 15

I. L'AMBITION DE LA COMMISSION : SURMONTER L'ECHEC DU PREMIER PAQUET PORTUAIRE POUR METTRE EN OEUVRE L'OUVERTURE A LA CONCURRENCE DES SERVICES PORTUAIRES 19

A. L'âpreté des discussions du premier paquet portuaire 19

1) Des divergences persistantes entre le Parlement et le Conseil à l'issue des première et deuxième lectures 19

a) Des divergences touchant à des dispositions essentielles 19

(1) Les services de pilotage 19

(2) La concurrence entre ports et la transparence des relations financières 20

(3) L'auto-assistance 21

(4) La durée de validité des autorisations et des mesures transitoires 21

(5) La compensation 22

b) Le maintien par le Parlement européen et le Conseil de leur position respective 22

2) Le rejet par le Parlement européen du projet commun approuvé par le Comité de conciliation 22

a) Un compromis obtenu d'extrême justesse 22

b) Le rejet par le Parlement européen du projet commun 25

B. La volonté inchangée de la Commission d'ouvrir les services portuaires à la concurrence 26

1) Un objectif qui demeure d'une actualité grandissante 26

a) Garantir le fonctionnement du marché communautaire des transports 26

b) Favoriser le jeu normal des règles de concurrence dans le respect de la législation sociale 27

(1) Favoriser le jeu normal des règles de concurrence 27

(2) L'ouverture à la concurrence dans le respect du droit social et du droit du travail 28

2) La reprise de l'essentiel du dispositif du premier paquet portuaire 29

a) La reconduction de nombreuses dispositions du premier paquet portuaire 29

b) Des changements limités 30

II. UNE DIRECTIVE QUI RESTE CONTROVERSEE 33

A. La démarche de la Commission serait précipitée et contraire à certains principes juridiques communautaires ou nationaux 33

1) Une démarche précipitée 33

a) La critique largement partagée de l'absence d'étude d'impact 33

b) La prise en compte insuffisante par la Commission des réalités portuaires 38

(1) La diversité des ports 38

(2) La situation actuelle de congestion des ports européens 39

(3) L'inadéquation de la définition du marché retenue par la Commission 42

2) Les débats sur la situation du paquet portuaire au regard de certains principes des droits communautaire ou nationaux 43

a) L'application insatisfaisante par la Commission des principes de subsidiarité et de proportionnalité 43

(1) La Commission aurait trop limité le jeu des compétences nationales 43

(2) Les doutes quant à la conformité du paquet portuaire au principe de proportionnalité 45

b) Le non-respect de certains principes juridiques nationaux 46

B. Le paquet portuaire ne favoriserait pas réellement le développement des ports européens 47

1) Un dispositif dont l'efficacité économique n'est pas optimale 47

a) Un régime d'autorisations peu incitatif pour les investissements 47

(1) Le retour sur investissement n'est pas garanti 48

(2) Un régime d'autorisations jugé bureaucratique 49

b) L'absence de mesures encadrant la concurrence entre les ports 49

2) La crainte de difficultés sociales accrues 50

a) L'absence de garanties suffisantes contre le dumping social 50

(1) Le régime de l'auto-assistance favoriserait le dumping social 50

(2) L'affirmation d'une possible application aux services portuaires de la directive sur les services 51

b) Le risque de suppressions d'emplois 54

III. MAINTENIR LE CAP D'UNE REFORME MAIS À CERTAINES CONDITIONS 55

A. La nécessité d'une directive 56

1) L'instauration d'une concurrence interportuaire plus loyale 56

a) L'amélioration de la transparence des mécanismes de financement 56

b) L'élaboration de mesures souhaitables d'accompagnement 58

2) Garantir une concurrence au sein des services portuaires respectueuse de la spécificité des services technico-nautiques 59

a) Des progrès contrastés dans l'ouverture des services portuaires à la concurrence 59

(1) L'ouverture à la concurrence a réellement progressé 59

(2) La persistance d'obstacles à une plus large ouverture à la concurrence 60

b) La nécessité d'une approche plus différenciée des services portuaires 60

(1) La délimitation des services portuaires : un sujet conflictuel 60

(2) L'attribution d'un régime spécifique aux services technico-nautiques 62

B. Mettre en place un cadre favorable au développement des ports 64

1) Le paquet portuaire doit mieux stimuler les investissements 64

a) L'allongement nécessaire de la durée des autorisations 64

b) L'institution d'un régime d'autorisation plus simple et plus équitable 65

(1) La nécessité d'instaurer un régime d'autorisation simplifié 65

(2) La mise en place souhaitable d'un régime de compensation équitable 67

2) Le paquet portuaire doit mieux prendre en compte certaines exigences sociales 69

a) Prévenir tout risque de dumping social 69

b) Les difficultés d'une solution consensuelle 70

CONCLUSION 73

TRAVAUX DE LA DELEGATION 75

PROPOSITION DE RESOLUTION 79

ANNEXES 81

Annexe 1 : Liste des personnes entendues par le rapporteur 83

Annexe 2 : Le rôle du pilotage, du remorquage et du lamanage dans la sécurité maritime et portuaire 87

Annexe 3 : L'ouverture variable des services portuaires à la concurrence 89

Annexe 4 : Un aspect de l'internationalisation renforcée des intérêts en présence: la grande activité des investisseurs asiatiques 101

Annexe 5 : Les programmes d'équipement dans le littoral de l'Europe du Nord-Ouest 103

RÉSUMÉ DU RAPPORT

Le précédent collège des commissaires de la Commission européenne a présenté le 13 octobre 2004 une proposition de directive - encore appelée deuxième paquet portuaire - visant à ouvrir les services portuaires à la concurrence.

Elle reprend, pour l'essentiel, les dispositions d'une précédente proposition de directive - qualifiée de premier paquet portuaire - qui, ayant le même objectif, avait fait l'objet d'un compromis adopté par le Comité de conciliation, mais que le Parlement européen avait rejeté en novembre 2003.

Le présent rapport s'attache, en premier lieu, à souligner que ce nouveau texte repose sur l'ambition de la Commission de surmonter l'échec de 2003. Il s'agit - selon une démarche que la Commission affirme être identique à celle adoptée lors du premier paquet portuaire - d'appliquer aux services portuaires, comme cela a déjà été le cas dans d'autres secteurs des transports, les libertés fondamentales énoncées dans le Traité instituant la Communauté européenne : liberté d'établissement, libre circulation des travailleurs, des biens et des services, ainsi que les règles de concurrence définies par le même Traité.

Comme le premier paquet portuaire, le dispositif ainsi proposé recueille rarement l'adhésion des professionnels et des Etats membres et suscite une vive controverse sur à peu près les mêmes dispositions. D'un côté, il est reproché à la Commission d'avoir agi de façon précipitée, sans avoir procédé à une étude d'impact préalable, ce qui a conduit le Conseil à suspendre ses travaux et à demander
- à l'unanimité - à la Commission de s'y atteler. De l'autre, le deuxième paquet portuaire n'est pas regardé comme un cadre susceptible de favoriser le développement des ports européens. Non seulement, la Commission a réduit la durée des autorisations nécessaires à la fourniture des services portuaires préconisée par le Comité de conciliation, ce qui ne sera pas de nature à garantir le retour sur investissement. Mais, en outre, est répandue la crainte de difficultés sociales accrues, comme l'illustre, en particulier, l'invocation - totalement infondée - de la possible application de la directive sur les services, encore appelée Bolkestein, en cas de nouvel échec de la procédure de codécision.

Devant ce contexte, qui apparaît tout aussi incertain qu'en 2003, le présent rapport - et la proposition de résolution qui l'accompagne - font le pari de vouloir maintenir le cap d'une réforme, tout en l'assortissant de correctifs.

Le rapporteur considère qu'une directive est nécessaire en vue de satisfaire à l'exigence - unanimement partagée par les milieux professionnels et même les Etats membres - d'un cadre destiné à garantir davantage de transparence financière - et partant - une concurrence interportuaire plus loyale. A défaut d'un tel cadre, c'est la jurisprudence au cas par cas, de la Commission - sous le contrôle de la Cour de justice - qui continuera de s'appliquer. La mise en œuvre de cet objectif passera par la publication de lignes directrices sur les aides d'Etat préalablement à l'entrée en vigueur de la directive et non postérieurement à celle-ci.

Le rapporteur souhaite également que l'application du principe de l'ouverture à la concurrence des services technico-nautiques - pilotage, lamanage, remorquage - tienne mieux compte du rôle qu'ils jouent dans la sécurité maritime et portuaire.

La seconde catégorie de propositions formulées par le rapporteur vise, d'une part, à mieux stimuler les investissements, afin que puissent être financés les importants programmes d'infrastructures en cours et que les ports européens soient en mesure de faire face au dynamisme de la concurrence asiatique.

D'autre part, il s'agit de prévenir tout risque de dumping social. Dans cette perspective, il importe de préciser que c'est bien la législation du lieu de prestation qui trouvera à s'appliquer et d'exclure l'auto-assistance du champ d'application de la proposition de directive, c'est-à-dire la possibilité pour un opérateur d'accomplir lui-même un service portuaire sans être tenu à cet effet de solliciter le concours d'un tiers et de conclure un contrat avec ce dernier.

SUMMARY OF REPORT

On 13 October 2004 the previous college of European Commissioners presented a proposal for a directive which is still known as the second port package and which is aimed at opening up port services to competition.

It basically reiterates the provisions of a previous proposal for a directive, known as the first port package, with the same aim and which was subject to a compromise adopted by the Conciliation Committee, but which was rejected by the European Parliament in November 2003.

Firstly, the present report attempts to highlight the fact that this new text is based on the Commission's ambition to overcome the failure of 2003. The Commission claims that the approach is identical to that adopted during the first port package and that the text is aimed at applying to port services the fundamental freedoms set out in the Treaty establishing the European Community, as is already the case in other transport sectors: freedom of establishment, and free movement of workers, and free movement of goods and services, in addition to the rules of competition defined by this Treaty.

Like the first port package, the proposal won very little support from businesses and Member States, and gave rise to intense controversy on more or less the same provisions. On the one hand, the Commission was criticised for having acted hastily without having carried out a prior impact study, which led the Council to suspend its work and unanimously request the Commission to carry out such a study. On the other hand, the second port package is not regarded as a suitable framework for encouraging the development of European ports. Not only did the Commission reduce the duration of authorisations required for the supply of port services and recommended by the Conciliation Committee, which is unlikely to guarantee the return on investment, but moreover there is the widespread fear of increased social difficulties as illustrated, in particular, by the totally unfounded argument based on the possible application of the services directive, still known as the Bolkestein directive, in the event of another failure of the co-decision procedure.

In this context, which seems as uncertain as in 2003, the present report and the accompanying motion for a resolution are aimed at maintaining the nature of the reform whilst making corrections to it.

The rapporteur considers that a directive is necessary in order to satisfy the demand - unanimously shared by business and even Member States - of a framework aimed at providing greater financial transparency and therefore more fair competition between ports. In the absence of such as framework, the Commission's judicial precedents
- under the Court of Justice's supervision - will continue to apply case by case. Implementation of this objective will require the publication of guidelines on State aid before and not after the directive comes into force.

The rapporteur also wishes for the application of the principle of opening up technical and nautical services, such as piloting, boatage and towage, to competition in order to take the role they play in maritime and port security into account more effectively.

On the one hand, the second category of proposals made by the rapporteur aims to provide increased stimulation for investment in order to supply financing for current major infrastructure programmes and for European ports to be capable of withstanding fierce competition from Asia.

These proposals are also aimed at preventing any risk of social dumping. From this point of view, it is the legislation of the location where the service is provided that must be applied excluding self-handling when covered by the proposed directive, ie. the possibility for an operator to provide a port service without being obliged for this purpose to request the support of and conclude a contract with a third party.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La proposition de directive, qui nous est soumise, résulte d'une initiative de la Commission - encore appelée deuxième paquet portuaire - destinée à ouvrir les services portuaires à la concurrence.

Approuvé le 13 octobre 2004 par le précédent Collège des commissaires, ce texte reprend, pour l'essentiel, le dispositif du premier paquet portuaire, que l'Assemblée nationale avait rejeté par une résolution du 6 février 2002, conformément à la proposition déposée par M. Daniel Paul, rapporteur de la Délégation pour l'Union européenne(1).

Quant au Parlement européen, il s'est prononcé en novembre 2003 contre le compromis élaboré - d'ailleurs non sans difficulté - par le Comité de conciliation.

Pour la Commission, de solides raisons ont justifié la présentation du deuxième paquet portuaire une année à peine après l'échec de la procédure de codécision.

Tout d'abord, cette réforme s'inscrit dans le cadre de la stratégie dite de Lisbonne, arrêtée par le Conseil européen de Lisbonne du 28 mars 2000. En second lieu, il s'agit d'adopter un cadre communautaire établissant les règles de base applicables dans les ports de l'Union européenne, afin d'y harmoniser les conditions de concurrence.

La Commission rappelle - en réponse aux critiques et craintes qui avaient été émises lors de la discussion du premier paquet portuaire - que sa proposition respecte la législation communautaire et nationale en matière de droit social et de droit du travail.

Pour autant, force est de constater que, comme le premier paquet portuaire, le deuxième paquet portuaire recueille rarement l'adhésion, que ce soit au plan communautaire ou au sein des Etats membres.

¬ Au plan communautaire, l'avis du Comité économique et social européen et celui du Comité des régions comportent de nombreuses critiques ou interrogations, qui concernent notamment la situation du deuxième paquet portuaire au regard des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

Quant au Conseil - au sein duquel, pour le moment, seule l'Espagne semble soutenir le texte - il a suspendu ses travaux, dans l'attente de la publication par la Commission d'une étude d'impact.

S'agissant du Parlement européen, le rapporteur constate, au vu des entretiens qu'il a pu avoir et du déroulement des discussions en commission, qu'il est très divisé. D'un côté, la commission des transports a approuvé, le 22 novembre 2005, la proposition de directive amendée, selon les termes de la résolution législative. Mais, le projet de rapport de M. Georg Jarzembowski ne comportera toutefois aucun amendement faute d'une majorité sur tout amendement - aussi bien ceux du rapporteur que ceux d'autres députés. La proposition de directive sera donc discutée dans sa rédaction actuelle en séance plénière. De l'autre, conformément aux conclusions de leur rapporteur, M. Stephen Hughes et Mme Eva Britt Swensson, les commissions de l'emploi et du marché intérieur saisies pour avis, ont préconisé le rejet de la proposition de directive. Dès lors, il apparaît que l'issue de la discussion, qui aura lieu en séance plénière (fixée en principe au 17 janvier 2006) risque d'être aussi incertaine qu'en 2003.

¬ Au sein des Etats membres, très rares également sont ceux qui déclarent soutenir la proposition de directive. Ainsi, en Grande-Bretagne, le débat qui a eu lieu à la Chambre des Communes le 20 juillet 2005 a fait apparaître un rejet unanime. De même, l'étude d'impact publiée par le ministère des transports le 26 août 2005 a conclu à l'inutilité d'une directive pour le Royaume-Uni, puisque le fonctionnement des ports britanniques serait déjà conforme aux mesures préconisées par la Commission, ces dernières concernant principalement les ports du continent selon les auteurs de cette étude.

C'est à des conclusions analogues que parvient l'étude d'impact que le gouvernement néerlandais a publiée le 12 septembre 2005.

En ce qui concerne l'Allemagne, le Bundestag et le Bundesrat ont, au mois de février 2005, rejeté le deuxième paquet portuaire, au motif notamment qu'il pourrait mettre en péril le dynamisme de la filière portuaire allemande.

Pour ce qui est de la France, un sentiment d'hostilité semble également prédominer. La Délégation pour l'Union européenne du Sénat a ainsi rejeté le texte de la Commission. Pour leur part, la quasi-totalité des personnalités rencontrées par le rapporteur
- hormis les représentants des chargeurs - a émis de très fortes réserves quant au bien-fondé du dispositif proposé, même si, comme c'est le cas dans les autres Etats membres, un consensus se fait jour sur la nécessité d'un cadre destiné à garantir davantage de transparence financière.

Cette position ambivalente, qui était déjà au cœur de la discussion du premier paquet portuaire - comme en témoigne, entre autres, la résolution adoptée par l'Assemblée nationale - ne facilite pas l'élaboration de ce que pourrait être une « bonne » directive, ainsi que le rapporteur a pu le déclarer à ses interlocuteurs. Tous lui ont dit souhaiter une directive, mais pas celle-là, sans vraiment lui dire ce que cette directive devrait comporter, sauf à exclure leur domaine d'activités !

L'importance des enjeux commande de se départir d'une telle ambivalence. Il est clair que nous sommes ici en présence d'un domaine économique sensible, non seulement parce qu'il est vital pour les échanges commerciaux de l'Europe(2), mais aussi parce qu'il illustre les défis de la mondialisation - en particulier, le dynamisme de la concurrence asiatique(3) - auxquels l'Europe est confrontée. En adoptant un cadre communautaire, il s'agit de développer la compétitivité des ports et du transport maritime européens.

Encore faut-il, pour prévenir tout nouvel échec et pour qu'une directive puisse être adoptée par le Conseil et le Parlement européen, porter remède à certaines lacunes que recèle le dispositif actuel, comme le préconisera la proposition de résolution présentée en conclusion du présent rapport.

Mais, au préalable, le rapporteur estime nécessaire de retracer la genèse du deuxième paquet portuaire et d'évoquer, dans un second temps, les controverses qu'il suscite.

I. L'AMBITION DE LA COMMISSION : SURMONTER L'ECHEC DU PREMIER PAQUET PORTUAIRE POUR METTRE EN OEUVRE L'OUVERTURE A LA CONCURRENCE DES SERVICES PORTUAIRES

Le rappel des conditions dans lesquelles le premier paquet portuaire a été discuté est nécessaire, car cette discussion a influencé, en partie, l'élaboration du dispositif de la nouvelle proposition.

A. L'âpreté des discussions du premier paquet portuaire

Cette âpreté est illustrée par le fait même que les débats ont duré plus de trois ans.

D'un côté, le Parlement européen et le Conseil n'ont jamais pu parvenir à aplanir leurs divergences. De l'autre, le compromis qui a été élaboré par le Comité de conciliation a été rejeté par le Parlement européen.

1) Des divergences persistantes entre le Parlement et le Conseil à l'issue des première et deuxième lectures

a) Des divergences touchant à des dispositions essentielles

(1) Les services de pilotage(4)

En première lecture, le Parlement européen avait décidé d'exclure ces services du champ d'application de la proposition de directive, au motif que, du fait de leur rôle dans la sécurité du trafic maritime, ils ne pourraient être regardés comme des services de nature commerciale devant être soumis à la concurrence.

En revanche, le Conseil avait adopté une position pour le moins contrastée. D'une part, sans préciser le motif de sa décision, il avait maintenu les services de pilotage dans le champ d'application de la proposition de directive. D'autre part, déclarant aller dans le sens des amendements du Parlement européen, il était convenu que les autorités compétentes devraient pouvoir reconnaître le caractère obligatoire du pilotage et soumettre ce service à des règles d'organisation qu'elles jugent appropriées pour des raisons de sécurité et en fonction des obligations de service public.

(2) La concurrence entre ports et la transparence des relations financières

Le Parlement européen avait adopté un article 4 ter (nouveau), par lequel il procédait à une distinction dans le financement public entre deux types de mesures : d'une part, celui de certaines infrastructures et superstructures qui ne constitue pas une aide d'Etat et n'est dès lors pas soumis aux dispositions du traité en matière de notification et de contrôle. D'autre part, le financement public d'autres infrastructures et superstructures qui est toujours soumis aux obligations de notification et d'approbation par la Commission.

Le Conseil avait approuvé l'idée que la transparence des relations financières et du financement public pourrait permettre de créer les conditions favorables à une concurrence loyale et équitable entre les ports européens. En revanche, il avait estimé plus approprié de traiter ces questions dans un autre contexte, afin de ne pas étendre exagérément le champ d'application de la directive. A cette fin, le Conseil avait adopté une déclaration dans laquelle la Commission était invitée à présenter, à bref délai, des propositions législatives notamment sur la concurrence entre les ports, le financement public des structures portuaires, les aides d'Etat et la transparence du financement public.

(3) L'auto-assistance

La proposition initiale avait défini l'auto-assistance comme la situation où un opérateur se fournit à lui-même des services portuaires et dans laquelle, normalement, aucun contrat ayant pour objet la prestation de tels services n'est passé avec un tiers.

Le Parlement européen avait précisé que l'autorisation reposerait sur le recours par l'utilisateur à son propre personnel et à ses propres équipements.

La position commune du Conseil avait, d'une part, introduit une distinction entre le personnel fixe à terre et le personnel navigant, lesquels pourraient être employés conjointement ou séparément. D'autre part, dans de nouvelles dispositions, le Conseil avait apporté plusieurs précisions selon lesquelles :

- la directive ne porte pas préjudice à l'application, par chaque Etat membre, de ses réglementations concernant l'emploi et les questions sociales ;

- les ports peuvent prélever, auprès des opérateurs recourant à l'auto-assistance, une taxe faisant office de contribution aux obligations de service public pour les services techniques nautiques qui ne peuvent être assumés par les intéressés.

(4) La durée de validité des autorisations et des mesures transitoires

Le Parlement européen avait porté de 5 à 8 ans la durée des autorisations accordées, dans les cas où le fournisseur de services ne réaliserait aucun investissement ou ne réaliserait que des investissements non significatifs. Le Conseil avait porté cette durée à 10 ans. En outre, en ce qui concerne les investissements considérés comme substantiels dans des actifs à caractère mobilier ou immobilier, le Conseil avait porté la durée des autorisations respectivement de 10 à 15 ans et de 25 à 36 ans, avec, dans le cas d'investissements considérés comme coûteux, un allongement d'une durée de dix ans.

Selon ces mêmes modalités, le Conseil avait également prolongé la durée des mesures transitoires. S'agissant d'autorisations découlant de la propriété d'un port, il avait néanmoins limité la durée maximale à 36 ans.

(5) La compensation

Le Parlement européen avait introduit une nouvelle disposition, par laquelle il avait imposé aux fournisseurs de services autorisés à l'issue d'une procédure de sélection, d'accorder une compensation à leurs prédécesseurs au taux du marché en vigueur pour la valeur des actifs immobiliers dont il hérite.

Le Conseil, tout en retenant l'idée de compensation, en avait néanmoins modifié le régime. Celui-ci serait défini par les Etats membres et ne revêtirait plus qu'un caractère facultatif.

b) Le maintien par le Parlement européen et le Conseil de leur position respective

En deuxième lecture, le Parlement européen avait suivi les conclusions du rapporteur de la commission des transports, M. Georg Jarzembowski. N'ayant pas jugé pertinentes les modifications introduites par le Conseil, la commission des transports avait alors proposé une série d'amendements à la position commune qui, pour l'essentiel, avaient reposé sur les modifications apportées par le Parlement en première lecture - en particulier sur les principaux points de désaccord précédemment évoqués - et que le Conseil n'avait pas reprises.

Quant au Conseil, il avait décidé de repousser tous les amendements adoptés par le Parlement européen.

2) Le rejet par le Parlement européen du projet commun approuvé par le Comité de conciliation

a) Un compromis obtenu d'extrême justesse

La Délégation du Parlement européen au Comité de conciliation avait approuvé les résultats de la conciliation par 8 voix contre 7.

Les principaux éléments de l'accord obtenu étaient les suivants :

1. Auto-assistance

Le Conseil avait accepté la définition de l'auto-assistance proposée par le Parlement selon laquelle cette prestation ne sera autorisée que dans les cas où les entreprises de transport maritime utiliseraient leur personnel navigant et leurs propres équipements. Chaque fois qu'un Etat membre exigera que l'auto-assistance soit subordonnée à une autorisation préalable, celle-ci devra répondre à des critères touchant non seulement à l'emploi et aux questions sociales, mais aussi aux qualifications professionnelles et aux questions d'environnement.

2. Droit exclusif de délivrer des autorisations pour les services portuaires

Le Parlement avait accepté un compromis sur la question du droit exclusif de délivrer des autorisations pour les services portuaires. En vertu du principe de subsidiarité, les Etats membres pourraient décider de se réserver ou non l'exercice du droit d'autorisation obligatoire. Toutefois, ils devraient veiller à ce que les autorités compétentes puissent exiger une autorisation préalable pour la fourniture de services portuaires.

3. Nature et durée des autorisations et des mesures transitoires

Le Conseil avait accepté les amendements du Parlement quant aux délais et aux conditions des autorisations et des dispositions transitoires. S'agissant de l'obligation de modifier ou de retirer une autorisation, un compromis avait prévu que de telles mesures seraient requises en cas d'inobservation des critères régissant l'autorisation ou l'application de la législation sociale.

4. Paiements compensatoires aux fournisseurs de services précédents

A titre de compromis, il avait été décidé que les Etats membres arrêteraient des dispositions pour qu'une compensation appropriée soit versée aux fournisseurs précédents, mais dans le seul cas où la durée de leur autorisation se trouverait réduite par la nouvelle directive. S'agissant des contrats conclus après l'entrée en vigueur de la directive, les fournisseurs précédents autorisés pourraient recevoir une compensation conformément aux dispositions nationales.

5. Services de pilotage

Le Parlement avait accepté que le pilotage demeure dans le champ d'application de la directive. Toutefois, l'importance que revêtent les services de pilotage pour la sécurité du trafic maritime et la protection de l'environnement dans les zones particulièrement sensibles avait été soulignée. Par conséquent, le Comité avait retenu la disposition adoptée par le Conseil en vertu de laquelle les autorités compétentes pourraient limiter l'activité de pilotage à un seul prestataire pour des raisons de sécurité publique. La limitation, prévue par le Conseil, de la durée de l'autorisation accordée pour les services de pilotage avait été abandonnée selon le vœu du Parlement. De plus, les Etats membres devraient faire rapport à la Commission, au terme de trois années, sur les mesures prises afin d'améliorer l'efficacité des services de pilotage.

6. Concurrence entre ports et transparence des relations financières

Le Conseil avait accepté d'ajouter aux objectifs de la directive celui d'assurer des conditions loyales de concurrence dans les ports de la Communauté et entre ceux-ci. A cette fin, tous les ports et les systèmes portuaires maritimes, de même que les fournisseurs de services portuaires, seraient tenus de faire connaître aux Etats membres et à la Commission les relations financières qu'ils entretiennent avec les autorités publiques. La Commission serait tenue de prendre les mesures qui s'imposent en vue de créer des conditions de concurrence équitables et de rendre compte au Parlement et au Conseil dans un délai de trois années. En outre, la Commission devrait arrêter, comme l'avait demandé le Parlement, des lignes directrices au sujet des aides publiques versées aux ports ou aux systèmes portuaires. La Commission s'était engagée, dans une déclaration, à commander une étude sur les modes directs ou indirects de financement public, les aides d'Etat et l'imputation des coûts dans les ports et les systèmes portuaires de la Communauté.

b) Le rejet par le Parlement européen du projet commun

Le Parlement européen avait rejeté le projet commun par 229 voix contre 209 pour et 16 abstentions.

Il avait ainsi refusé de suivre les conclusions favorables à son adoption préconisées par M. Georg Jarzembowski, rapporteur de la commission des transports, et de la Délégation du Parlement européen au Comité de conciliation.

Pour l'essentiel, la majorité(5) qui s'était prononcée contre le projet commun avait sévèrement critiqué trois dispositions :

- le maintien du pilotage dans le champ d'application de la directive. Malgré la déclaration, en séance publique, de Mme Loyola de Palacio, alors commissaire en charge des transports et de l'énergie, selon laquelle l'objectif de la Commission n'était pas de libéraliser le pilotage, pour plusieurs intervenants la disposition adoptée par le Comité de conciliation assimilait bien le pilotage à un service commercial, susceptible d'être soumis à la concurrence. Corrélativement était ainsi gravement méconnu le rôle joué par les services de pilotage dans la sécurité maritime, lequel justifierait précisément qu'ils ne soient pas regardés comme des services portuaires ordinaires ;

- le régime de l'auto-assistance : celui-ci avait été considéré comme une source de dumping social et de suppression d'emplois, malgré sa limitation au seul personnel navigant ;

- le caractère facultatif des autorisations : cette disposition avait été interprétée comme risquant de favoriser des dérives aux plans social et environnemental.

B. La volonté inchangée de la Commission d'ouvrir les services portuaires à la concurrence

Dans l'exposé des motifs, la Commission déclare que : « La philosophie, les principes et les objectifs définis dans la Communication de 2001(6) sont inchangés ».

C'est pourquoi, comme le premier paquet portuaire, le deuxième paquet portuaire justifie par les mêmes arguments la nécessité d'établir un cadre communautaire législatif, ce qui explique que leur dispositif respectif présente de très nombreux points communs.

1) Un objectif qui demeure d'une actualité grandissante

L'ouverture des services portuaires à la concurrence devrait répondre, pour la Commission, à deux séries d'exigences :

- garantir le fonctionnement du marché communautaire des transports ;

- créer des conditions de concurrence homogènes entre les ports, dans le respect du droit social.

a) Garantir le fonctionnement du marché communautaire des transports

La Commission souligne que le deuxième paquet portuaire s'inscrit dans le cadre des objectifs fixés par son Livre blanc de 2001 sur les transports, en particulier celui qui, en vue de décongestionner le trafic routier, vise au transfert d'une partie du trafic de marchandises et de passagers vers le transport maritime(7).

Peut y concourir de façon efficace le développement du transport maritime à courte distance et des autoroutes de la mer(8). La Commission estime qu'ils auront la capacité d'absorber l'augmentation du trafic prévue d'ici à 2010, ce qui, dans le même temps, pourrait favoriser l'accroissement du trafic des ports.

Afin d'encourager l'essor du transport maritime à courte distance et des autoroutes de la mer, la proposition de directive invite les Etats membres à reconnaître aux entreprises utilisant ces modes le droit de pratiquer l'auto-assistance.

b) Favoriser le jeu normal des règles de concurrence dans le respect de la législation sociale

(1) Favoriser le jeu normal des règles de concurrence

Si les libertés fondamentales énoncées dans le traité instituant la Communauté européenne - liberté d'établissement, libre circulation des travailleurs, des biens et des services ainsi que les règles de concurrence qu'il définit - s'appliquent également aux services portuaires, il n'existe toutefois pas de cadre communautaire qui leur soit propre, à la différence des autres secteurs de transports. De fait, jusqu'à présent, le contentieux découlant de l'application du traité a été réglé au cas par cas par la Commission.

C'est pour combler ces lacunes que cette dernière propose d'harmoniser les conditions de concurrence au sein des ports et entre les ports, questions qui, comme on l'a vu, ont suscité de vives controverses lors de la discussion du premier paquet portuaire.

L'exigence d'une concurrence intra-portuaire loyale impose d'ouvrir à la concurrence les services portuaires, c'est-à-dire selon la définition de la Commission : « des services à valeur commerciale qui sont fournis contre paiement aux utilisateurs d'un port et dont le prix est normalement compris dans les redevances qu'ils acquittent pour pouvoir faire escale dans un port ou y effectuer des opérations ».

Il s'agit des services technico-nautiques de pilotage, de remorquage et d'amarrage, de toutes les opérations de manutention et des services aux passagers - y compris l'embarquement et le débarquement.

Cette liste est identique à celle du premier paquet portuaire, ce qui n'a pas manqué, comme il y a quatre ans, de susciter l'opposition des professionnels, en particulier des pilotes, lesquels contestent la nature commerciale de leur profession.

Quant à la concurrence inter-portuaire, la Commission a tenu compte des souhaits que le Conseil et le Parlement européen avaient émis lors de la discussion du premier paquet portuaire. La directive 80/723/CEE modifiée par la directive 2000/52/CE relative à la transparence financière sera ainsi applicable à tous les ports entrant dans le champ d'application de la proposition de directive. Quant à la transparence des aides d'Etat, la Commission, en application de l'article 17 de sa proposition, élaborera, dans un délai d'un an suivant son entrée en vigueur, des lignes directrices concernant les fonds versés aux ports par les Etats membres et précisant quel financement en faveur des ports est compatible avec le marché intérieur.

Mais comme le montrent différentes critiques, il n'est toutefois pas certain que ces dispositions suffisent à répondre à la demande d'un cadre qui instaure et garantisse le jeu d'une concurrence loyale.

(2) L'ouverture à la concurrence dans le respect du droit social et du droit du travail

La Commission affirme que sa proposition - comme c'était déjà le cas du premier paquet portuaire - est neutre eu égard aux règles communautaires et nationales en matière d'emploi et de conditions sociales - notamment les exigences touchant à la formation et à la qualification professionnelle. De même, elle ne porterait pas non plus atteinte à la législation en matière d'environnement, de sûreté et de sécurité.

La Commission rejette ainsi les accusations de dumping social, dont le premier paquet portuaire avait été l'objet. En dépit de ces dénégations, le même débat a déjà été entamé, les opposants à la proposition de directive n'étant pas persuadés que la reprise de l'essentiel du premier paquet portuaire soit de nature à introduire de réelles avancées.

2) La reprise de l'essentiel du dispositif du premier paquet portuaire

a) La reconduction de nombreuses dispositions du premier paquet portuaire

La Commission ayant déclaré expressément qu'elle poursuivait des objectifs inchangés, le dispositif préconisé s'inspire à la fois du texte initial du premier paquet portuaire et des amendements qui ont été adoptés depuis la première lecture par le Parlement européen jusqu'à l'élaboration du compromis par le Comité de conciliation.

l C'est ainsi que demeurent inclus dans le champ d'application de la proposition de directive les ports dont le volume annuel moyen du trafic au cours des trois années précédentes est de 1,5 million de tonnes de fret et/ou de 200 000 passagers.

l S'agissant des services portuaires, leur liste est, comme on l'a vu précédemment, inchangée, étant toutefois observé que le pilotage est soumis à un régime hybride. D'un côté, est réaffirmé le fait qu'il est un service de nature commerciale. De l'autre, la Commission a repris le texte approuvé par le Comité de conciliation, qui prend en compte les spécificités du pilotage liées, d'une part, aux obligations de service public dont relève sa mission - comme c'est le cas, notamment en France(9) - et, d'autre part, au rôle qu'il joue dans la sécurité maritime. C'est pourquoi les autorités portuaires peuvent, selon les cas, se réserver le service de pilotage ou accorder directement un droit exclusif à un opérateur pour fournir des services de pilotage dans un port.

En second lieu, la directive prévoit l'auto-assistance sous la forme d'une attestation d'exemption de pilotage.

l Pour ce qui est des dispositions destinées à favoriser le jeu normal de la concurrence, les critères d'autorisation doivent être objectifs, transparents, non discriminatoires, pertinents, proportionnés et publiés.

Les raisons invoquées pour introduire une limitation du nombre des prestataires de services pour un ou plusieurs services portuaires doivent être objectives. Le nombre le plus élevé possible de prestataires de services portuaires doit être autorisé.

L'impartialité de l'autorité compétente en ce qui concerne les décisions visant à limiter le nombre de prestataires de services et les procédures de sélection doit être garantie.

Enfin, l'organisme gestionnaire du port est tenu d'établir une comptabilité transparente.

b) Des changements limités

Ces changements touchent au régime de l'auto-assistance, à celui des autorisations ainsi qu'aux dispositions destinées à garantir la transparence financière.

¬ En ce qui concerne l'auto-assistance, il est prévu qu'elle puisse être pratiquée en recourant au personnel à terre pour les opérations liées aux marchandises et aux passagers. La Commission justifie cette disposition - différente de celle qui a été adoptée par le Comité de conciliation, puisque ce dernier a visé le personnel navigant - par le fait qu'il en résultera une création d'emplois dont les collectivités locales seront les principales bénéficiaires. Comme on le verra, cet optimisme de la Commission est loin d'être partagé car, au contraire, ce sont la crainte du chômage et celle du dumping social qui lui sont opposées.

Pour ce qui est des services réguliers de transport maritime agréés opérant dans le cadre du transport maritime ou d'autoroutes de la mer, la Commission propose qu'ils puissent pratiquer l'auto-assistance non seulement en recourant au personnel à terre mais également au personnel navigant, régime similaire à celui que le Conseil avait retenu dans la position commune.

¬ S'agissant des autorisations, la Commission leur confère un caractère obligatoire. Dans un délai de 36 mois suivant l'entrée en vigueur de la directive, tous les fournisseurs des services portuaires seront ainsi tenus d'être en possession d'une autorisation pour exercer leur activité.

Ce système s'appliquera aux autorisations accordées après l'entrée en vigueur de la directive mais aussi à celles qui lui sont antérieures. Ces dernières devront être réexaminées dans un délai raisonnable, au motif que, selon la Commission, les procédures appliquées pour leur octroi n'étaient pas conformes aux nouvelles dispositions. Par cette remarque, la Commission semble vouloir mettre en cause le fait que, dans certains ports, les autorisations aient pu ne pas avoir été accordées au terme d'une procédure de sélection impartiale et transparente qui, selon le nouveau dispositif, pourra être décidée par l'autorité portuaire ou à la demande d'un fournisseur de services existant ou nouveau.

Des dispositions particulières régissent le cas où le nombre de prestataires serait limité.

Pour la Commission, cet ensemble de règles doit permettre de concilier le besoin d'ouvrir effectivement le marché aux opérateurs compétents et la nécessité de garantir la bonne gestion d'un port, avec les contraintes qui lui sont propres et un niveau de qualification professionnelle satisfaisant.

En revanche, de nombreux professionnels craignent que ce système ne soit un « nid à contentieux », en raison notamment de sa complexité et de l'insécurité juridique qu'il risque d'introduire.

¬ La durée de validité des autorisations constitue également une source importante de contestations. La Commission ne s'est que fort peu inspirée du compromis adopté par le Comité de conciliation.

Certes, la durée maximale de l'autorisation accordée au fournisseur n'ayant pas procédé à des investissements substantiels demeure fixée à huit ans. Mais dans les autres cas où des



investissements sont considérés comme substantiels par l'autorité compétente, la durée est inférieure à celle prévue par le Comité de conciliation :

- 12 ans contre 15 ans en ce qui concerne les actifs à caractère mobilier ;

- 30 ans contre 36 ans pour ce qui est des actifs à caractère immobilier ou des actifs à caractère mobilier comparables, tels que des ponts pour conteneurs, des transbordements directs navire/quai, des ponts de déchargement ainsi que des remorqueurs spécialisés.

En second lieu, la Commission a subordonné la procédure de prorogation de l'autorisation de dix ans au lancement d'une procédure de sélection.

Comme on aura l'occasion de le voir, les professionnels doutent que ce dispositif permette d'assurer un retour sur investissement. La Commission souligne cependant que les délais proposés sont en accord avec les règles générales en matière d'amortissement appliquées dans l'Union européenne.

¬ Les dispositions destinées à garantir la transparence financière constituent le deuxième nouveau volet introduit par la Commission. Le rapporteur renvoie ici aux observations qu'il a formulées précédemment sur ce point.

II. UNE DIRECTIVE QUI RESTE CONTROVERSEE

Certains interlocuteurs du rapporteur ont qualifié le deuxième paquet portuaire de « replâtrage », ou l'ont même jugé pire que le premier paquet portuaire.

Ces appréciations sévères tiennent à ce que, d'une part, la démarche de la Commission est regardée comme étant précipitée et contraire à certains principes juridiques communautaires ou nationaux et que, d'autre part, les mesures proposées ne contribueraient pas réellement au développement des ports européens.

A. La démarche de la Commission serait précipitée et contraire à certains principes juridiques communautaires ou nationaux

1) Une démarche précipitée

Il est reproché à la Commission d'avoir présenté sa proposition sans avoir procédé au préalable à une étude d'impact, ce qui expliquerait corrélativement qu'elle n'ait pas suffisamment pris en compte les données réelles des ports européens.

a) La critique largement partagée de l'absence d'étude d'impact

L'absence d'étude d'impact préalable risque fort de renforcer les doutes ou réserves quant à la pertinence de la démarche de la Commission. Le fait que sa publication ait été retardée à plusieurs reprises pose question. D'après les informations qui ont été portées à la connaissance du rapporteur, il semble qu'une telle étude serait déjà achevée. La décision de la publier serait toutefois liée à l'issue de la discussion au Parlement européen, la Commission n'y procédant que dans le cas où le Parlement adopterait la proposition en première lecture. On craindrait qu'une publication ne perturbe un débat que l'on sait déjà tendu et n'influe négativement sur l'issue du vote. En revanche, un vote de rejet pourrait conduire la Commission à entreprendre une nouvelle étude. Quoi qu'il en soit, pour l'heure, les conséquences résultant de l'absence d'étude d'impact sont loin d'être négligeables.

Pour une majorité de professionnels, faute d'étude d'impact préalable, la Commission se trouve dans l'impossibilité d'apporter la preuve que sa proposition de directive est réellement nécessaire et propre à répondre aux objectifs qu'elle s'est fixés. La démarche de la Commission reposerait, de fait, sur des préjugés, comme le reproche cette observation de l'ESPO (European Sea Ports Organization - Organisation des ports maritimes européens) :

« L'Union européenne a jusqu'à présent eu tendance à charger les ports maritimes d'une manière plutôt négative. Ou bien ils étaient pleins de " goulets d'étranglement " ou d'"obstacles" - sans jamais en apporter quelque preuve - ou ils étaient facteurs de nuisances, de pollution, et vus comme causant toutes sortes de dommages à la société »(10).

Quant au Conseil, il a suspendu ses travaux, dans l'attente de la publication de ladite étude, laquelle a été demandée à l'unanimité, d'après les renseignements communiqués au rapporteur.

Pour leur part, les gouvernements britannique et néerlandais ont publié un document qu'ils qualifient d'étude d'impact.

¬ S'agissant de celle qui a été publiée par le ministère britannique des transports le 26 août 2005(11), on relève notamment les points suivants :

- la directive concernera 45 ports de Grande-Bretagne, qui traitent 95 % du commerce maritime britannique par le tonnage et 98 % du trafic maritime de passagers ;

- la proposition de directive n'incitera pas de nouveaux opérateurs à s'établir dans les ports de Grande-Bretagne. L'étude a montré que la concurrence était présente dans les petits ports. Par exemple, le port de Goole compte 11 entreprises de manutention, 5 entreprises spécialisées dans l'entreposage, 2 dans le remorquage et 2 dans l'amarrage. Pour les auteurs de l'étude, il est peu probable que beaucoup d'entre elles puissent aller affronter la concurrence hors de leur marché local ni que d'autres entreprises viennent sur un marché déjà saturé ;

- le coût de l'accès au marché résultant de la nécessité d'obtenir une autorisation et de la compensation à accorder aux fournisseurs sortants risque d'être élevé et de dissuader la venue de fournisseurs potentiels. Il en est ainsi dans des secteurs-clés (conteneurs, ro-ro(12)), où les grands opérateurs internationaux tireront profit des possibilités offertes par la directive pour acquérir une influence tactique, en vue d'améliorer leur pouvoir de négociation ou leur part de marché ;

- la majorité des parties intéressées de Grande-Bretagne - ports et clients de ces derniers - n'attendent aucun bénéfice significatif de l'adoption de la proposition de directive. Ceci est dû dans une large mesure au fait que la directive a été élaborée pour porter remède aux défaillances endémiques du marché qui existent dans certains ports du continent, dans lesquels les opérateurs emploient les infrastructures appartenant aux collectivités publiques ou bénéficiant d'aides d'Etat. De façon générale, les disciplines du marché fonctionnent déjà dans les grands ports britanniques, dans le contexte d'une industrie possédée, gérée et financée par le secteur privé et qui permet une concurrence libre et ouverte pour l'accès aux services ;

- toutefois, de grands fournisseurs de services peuvent escompter un bénéfice théorique, parce qu'ils seront en mesure d'affronter la concurrence dans d'autres ports de la Grande-Bretagne et du continent. En revanche, il est moins certain que les petites entreprises tirent profit de la directive en vue d'étendre leurs opérations dans les ports britanniques ou ceux des autres Etats membres.

Enfin, les auteurs de l'étude font part du scepticisme des personnes consultées par le ministère des transports quant à l'aptitude des mesures envisagées à garantir la transparence du versement des aides d'Etat.

¬ L'étude demandée par le ministère des transports néerlandais(13) relève que, dans son état actuel, la proposition de directive n'apporte pas de preuve suffisante sur l'inadéquation des conditions d'ouverture à la concurrence et de fonctionnement des ports néerlandais, lesquels sont parmi les plus performants en Europe de l'Ouest.

Examinant d'abord les incidences de la proposition de directive sur la concurrence intra-portuaire aux Pays-Bas, l'étude formule notamment les observations suivantes :

Autorisations obligatoires

Les Pays-Bas sont déjà dotés d'un système de règles fonctionnant bien qui régissent l'accès au marché. C'est pourquoi, l'introduction d'un système d'autorisations obligatoires conduira à une insécurité juridique accrue, puisque les contrats ou concessions actuellement en cours d'exécution seront résiliés, leurs bénéficiaires devant subir la procédure de sélection par appel d'offres.

En outre, l'introduction d'un régime d'autorisations obligatoires accroîtra les coûts, une telle hausse étant redoutée par plus de 50 % des fournisseurs de services. Seulement moins de 3 % d'entre eux estiment que la proposition de directive contribuera à réduire les coûts.

Procédure de sélection et durée des autorisations

La mise en place d'une procédure de sélection entraînera un accroissement des charges administratives pour près de 90 % des fournisseurs actuels de services des ports néerlandais.

En ce qui concerne la durée proposée des autorisations, elle risque d'autant plus d'accroître l'insécurité juridique qu'elle est très nettement inférieure à celle existant aux Pays-Bas, où elle s'étage entre 50 et 75 ans et même plus.

Auto-assistance

La mise en œuvre de l'auto-assistance pourrait poser des problèmes juridiques délicats. Le droit des Pays-Bas considère que le titulaire d'installations portuaires est tenu responsable aux plans civil et pénal, en ce qui concerne l'application sur ses installations des dispositions régissant la sécurité, le travail et l'environnement. Or, si l'auto-assistance est autorisée sur leurs installations, les fournisseurs actuels devront assumer la responsabilité d'actes qu'ils n'auront pas commis, ce qui est inacceptable aux yeux des professionnels interrogés.

L'étude précise que seulement 12 % des utilisateurs des ports néerlandais s'attendent à ce que les dispositions sur l'auto-assistance favorisent un accroissement des prestations par les opérateurs qui y recourront.

En second lieu, seulement 15 % des utilisateurs estiment que ces mêmes dispositions se traduiront par des embauches supplémentaires. Au contraire, des suppressions d'emplois sont redoutées.

En ce qui concerne la concurrence entre les ports, l'étude d'impact constate que bien que la nécessité d'instaurer des lignes directrices en matière d'aides d'Etat soit soulignée par le secteur portuaire et maritime néerlandais, une telle proposition s'avère difficile à mettre en œuvre. La question est d'abord de savoir si un cadre communautaire peut être institué, qui reconnaisse la diversité des structures de gestion. Actuellement, l'intervention des autorités publiques dans le fonctionnement des ports revêt des modalités variées. Une fois qu'un tel cadre sera mis en place, il s'agira de savoir dans quelles conditions il sera applicable à chaque port.

Or, font remarquer les auteurs de l'étude, les professionnels ont le sentiment que la proposition de directive n'établit pas de système clair qui permette d'apprécier la licéité des investissements publics.

Les observations des deux études d'impact ne manqueront probablement pas d'être invoquées au cours des discussions à venir, d'autant qu'elles reflètent parfaitement l'ambiguïté fondamentale, dont le rapporteur a fait état dans ses propos liminaires, au sujet de la position de la majorité hostile au deuxième paquet portuaire. Car, d'un côté, de nombreux doutes sont émis quant à l'adéquation du dispositif proposé aux objectifs affichés par la Commission. De l'autre, l'étude néerlandaise - par exemple - indique que les milieux portuaire et maritime des Pays-Bas jugent nécessaire l'instauration d'un cadre garantissant la transparence financière du versement des aides d'Etat.

Au surplus, la discussion risque d'être d'autant plus vive, dans le cas où la Commission viendrait à publier sa propre étude d'impact, que les bases sur lesquelles elle reposerait pourraient susciter une forte contestation. D'après les informations communiquées au rapporteur, il ne s'agirait pas réellement d'une étude d'impact mais d'une analyse économique. En outre, elle se fonderait sur des données anciennes et non pas récentes.

b) La prise en compte insuffisante par la Commission des réalités portuaires

Il est reproché à la Commission d'avoir négligé trois aspects de ces réalités :

- la diversité des ports ;

- la congestion à laquelle ils sont confrontés ;

- le fait que le marché pertinent ne se limite pas aux seuls ports.

(1) La diversité des ports

C'est cette diversité soulignée tant par les études d'impact britannique et néerlandaise que par les professionnels qui serait le principal obstacle au bon fonctionnement du cadre proposé par la



Commission. L'étude d'impact néerlandaise souligne à cet égard que :

« Aux yeux du monde portuaire et maritime des Pays-Bas, les instruments proposés dans la directive traiteront au fond le complexe industriel et portuaire de Rotterdam comme ayant les mêmes caractéristiques que, par exemple, des ports privés ou publics. C'est simplement une hypothèse qui n'est pas réaliste ».

S'il existe une réelle hétérogénéité des ports, celle-ci ne constitue toutefois pas, aux yeux du rapporteur, un argument suffisant qui pourrait, a priori, empêcher la Commission d'élaborer des règles régissant l'ouverture à la concurrence des services portuaires, à l'exemple de ce qu'elle a déjà fait dans les autres secteurs de transport.

En second lieu, cette diversité portuaire semble devoir être relativisée. Lorsque la situation des services portuaires dans les différents Etats membres est examinée de plus près(14), on constate que les disparités tendent à diminuer, puisque des secteurs en principe ouverts à la concurrence sont en réalité des monopoles de fait.

Dès lors, on peut se demander, là encore, si une telle situation ne justifierait pas précisément la nécessité d'établir des règles communautaires favorisant l'ouverture à la concurrence.

(2) La situation actuelle de congestion des ports européens

Les Armateurs de France ont appelé l'attention du rapporteur sur l'absence de véritable réflexion, au plan communautaire, concernant la situation de congestion, qui prévaut dans la majorité des grands ports européens.

Or, selon cette organisation professionnelle, cette évolution est d'autant plus préoccupante qu'elle débouche sur la constitution de monopoles d'opérateurs provenant souvent d'Etats tiers.

C'est pourquoi, les Armateurs de France estiment indispensable que la proposition de directive pose plus clairement le principe de la pluralité d'opérateurs. A défaut, ils craignent non seulement des fermetures de marché mais aussi la perte par les pouvoirs publics de toute maîtrise de la politique de développement portuaire.

Consciente de ces risques de distorsions de concurrence, la Commission avait prévu dans le premier paquet portuaire une disposition aux termes de laquelle :

« Lorsqu'il existe des contraintes concernant l'espace ou la capacité disponibles et, en l'absence de circonstances exceptionnelles liées au volume de trafic et aux catégories de fret, l'autorité compétente autorise au moins deux fournisseurs de services totalement indépendants l'un de l'autre pour chaque catégorie de fret ».

Le Parlement européen avait abrogé cette disposition, qui n'a pas été rétablie dans la suite de la discussion.

En second lieu, la Commission a certes repris la disposition figurant dans le premier paquet portuaire qui impartissait aux Etats membres d'autoriser le nombre le plus élevé possible de fournisseurs de services, compte tenu des circonstances. Toutefois, une telle obligation est prévue à l'article 9, premier paragraphe, du deuxième paquet portuaire, en cas de limitation du nombre de fournisseurs. En revanche, le compromis du comité de conciliation avait rattaché plus clairement cette même obligation au principe de l'interdiction faite aux Etats membres de procéder à une telle limitation, hormis les cas où existeraient des contraintes liées notamment à l'espace ou à la capacité disponibles.

Dans ce contexte, les craintes formulées par les Armateurs de France amènent à s'interroger sur l'adéquation de la disposition prévue à l'article 9, premier paragraphe, avec la double évolution qui affecte le transport maritime. La première touche à la concentration des trafics sur un nombre sans cesse plus restreint de ports. Ce n'est pas un fait nouveau, selon un spécialiste(15), mais une tendance séculaire liée aux exigences croissantes des équipements techniques qui sélectionnent ceux qui sont les plus aptes et parfois les seuls à faire face.

Or, dans la situation actuelle, les installations nouvelles de grande taille n'existent que dans une dizaine de ports et leur en réservent les avantages futurs. Ceci conduit à un renforcement de la concentration des flux, à une massification qui, par ailleurs, est nécessaire au bon fonctionnement de terminaux géants. Le partage avec les ports moins favorisés, le choix des lieux où cette concentration est visible ne sont pas libres. Les grands porte-conteneurs imposent leurs exigences : les bateaux de plus de 8 000 boîtes de Maersk, de la Kline japonaise et des autres grands armements dépassent 350 mètres de long, 14,5 mètres de calaison et exigent des portiques compatibles avec leur largeur de plus de 40 mètres. Quant aux vaisseaux de 12 000 EVP (équivalent vingt pieds)(16) actuellement à l'étude, ils auront besoin de 16 mètres d'eau - d'où le besoin de quais plus longs et plus profondément fondés.

Cette concentration des échanges comporte des contraintes et des risques, qui sont à l'origine d'une autre évolution marquante du transport maritime. Face à l'ampleur des investissements exigés, les manutentionnaires acquièrent une puissance d'intervention parfois énorme, car leurs actions peuvent dans certains cas cesser d'être convergentes avec celles des autres acteurs portuaires.

Des lignes de navigation ont ainsi été détournées(17), ce qui est source de graves distorsions de concurrence :

« Des armements puissants se sont inquiétés des risques de contrôle de marché et de manipulation de tarifs de transbordement par certains groupes ou consortiums devenus maîtres des quais ; à la limite, ils peuvent peser sur l'orientation des commerces extérieurs. La gestion de ce qui était leur politique maritime échappe de plus en plus aux administrations des ports »(18).

Comme on le voit, il existe d'importants obstacles au jeu normal de la concurrence qui confirment, selon le rapporteur, le principe même d'une directive.

(3) L'inadéquation de la définition du marché retenue par la Commission

Pour certains professionnels rencontrés par le rapporteur, en se focalisant principalement sur la dimension intra-portuaire, la Commission semble n'avoir pas tiré les conséquences de deux séries de mutations - liées au rôle croissant joué par les porte-conteneurs - qui ont eu pour effet de mettre au premier plan l'importance de la concurrence inter-portuaire.

Tout d'abord, les grands ports sont en tête - ou en terminus - des chaînes logistiques de transport avec des infrastructures permettant des liaisons massives et rapides vers les hinterlands dont les limites sont sans cesse repoussées.

Par ailleurs, pour acheminer des conteneurs vers ou depuis l'arrière-pays, les ports doivent disposer désormais de dessertes qui permettent le transport des marchandises par les autres modes de transport - terrestre, ferroviaire ou fluvial. C'est ainsi, par exemple, qu'en ce qui concerne le port de Hambourg, la mise en place de services ferroviaires - acheminant plus de 30 % du trafic portuaire et plus de 70 % au-delà de 200 kilomètres - est l'un des facteurs qui a contribué à son dynamisme.

L'application dans les années 90 du système des hubs (points pivots), tout en renforçant le rôle joué par les hinterlands, a eu pour effet de faire perdre aux ports leur dimension nationale. La stratégie reposant sur les hubs a poussé les armateurs à créer un réseau complexe de ports de transbordement où croisent les grandes lignes transcontinentales en vue de réduire le nombre d'escales. Dans ce contexte, les armateurs choisissent leurs ports d'escales en fonction des coûts en vigueur dans les autres réseaux de transport (ferroviaire, routier et fluvial) et de leur situation géographique.

2) Les débats sur la situation du paquet portuaire au regard de certains principes des droits communautaire ou nationaux

Ces débats mettent en cause l'application jugée insatisfaisante par la Commission des principes de subsidiarité et de proportionnalité, ainsi que des risques de violation de règles consacrées par le droit de certains Etats membres.

a) L'application insatisfaisante par la Commission des principes de subsidiarité et de proportionnalité

(1) La Commission aurait trop limité le jeu des compétences nationales

C'est parce que la Commission aurait refusé de prendre en compte la diversité des situations portuaires que sa proposition se voit reprocher de ne pas respecter le principe de subsidiarité. Cette critique est ainsi formulée expressément par l'avis du Comité économique et social du 13 juillet 2005 :

« L'extrême diversité des situations, des règles et pratiques nationales ou locales, des obligations des gestionnaires et des autorités publiques, font que les règles à mettre en œuvre doivent tenir pleinement compte de ces particularités propres à chaque port. »

Pour le Comité, une meilleure prise en compte du principe de subsidiarité est également justifiée par le fait que :

« Les ports sont aussi le lieu d'exercice de compétences souveraines de l'Etat du port, qui ne doivent pas être affectées par la directive ; certaines fonctions (contribution à la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et l'immigration clandestine, qui obligent souvent à des dépenses et investissements laissés à la charge du port) peuvent être déléguées à l'autorité portuaire. »

Pour cet ensemble de raisons, le Comité estime dans ses conclusions que :

« Une directive-cadre beaucoup moins détaillée et laissant un espace suffisant à la subsidiarité semble préférable à la rédaction actuelle du projet de directive ; une mention de l'applicabilité des législations pertinentes en matière de transparence ou de marchés publics devrait suffire, plutôt que d'entrer dans les détails d'application aux services portuaires ; un cadre communautaire ne devrait pas entamer la prérogative que détient le gestionnaire du port de sauvegarder l'intérêt général placé sous son autorité. »

Dans le même sens que le Comité économique et social, l'avis de Mme Eva Britt-Svensson, rapporteure pour avis de la commission du marché intérieur du Parlement européen, souligne que :

« Un règlement du type "taille unique pour tous" placerait les ports en contradiction avec le principe de subsidiarité inscrit dans le traité instituant la Communauté européenne. Les éventuels problèmes liés à l'accès au marché doivent être gérés par la Commission sur la base du "cas par cas" en coopération avec l'ensemble des acteurs de la branche. »

Reprenant un argument invoqué par de nombreux professionnels, l'avis du Comité des régions du 27 avril 2005 estime quant à lui :

« être en présence d'une violation du principe de subsidiarité inscrit dans l'article 5 du traité, ainsi que du principe de proportionnalité, car la directive ne tient pas suffisamment compte du fait qu'une concurrence libéralisée entre les ports européens existe déjà à l'échelon des Etats membres. Les réglementations proposées par cette directive ne sont donc pas indispensables dans leur forme ni dans leur portée actuelles. »

Enfin, lors du débat qui s'est tenu le 20 juillet 2005 sur la proposition de directive à la Chambre des Communes, un intervenant - M. Greg Knight - a déclaré que les objectifs poursuivis par la Commission relevaient de la compétence nationale.

Par conséquent, selon lui :

« que le gouvernement britannique suive sa propre voie, parce que ce dossier concerne les attributions des Etats membres. J'espère que la ministre persuadera ses collègues du Conseil de rejeter la proposition et que, au moins, elle invoquera le principe de subsidiarité. »

Ces diverses réactions montrent, de nouveau, combien les débats sur l'application du principe de subsidiarité sont difficiles, parce que donnant lieu souvent à des appréciations ou à des contestations de nature politique sur les conditions dans lesquelles la Commission exerce sa compétence, d'autant que le secteur des transports comporte des compétences partagées entre l'Union européenne et les Etats membres.

Pour autant, à ce stade, le rapporteur observera que, parmi les objectifs de la proposition, figure l'application aux services portuaires des règles de concurrence définies par le traité. Or, la compétence de la Commission est d'autant moins contestable qu'elle est, comme on le dit traditionnellement, mais à juste titre, gardienne des traités en matière de droit de la concurrence.

En second lieu, sur de nombreux points sensibles - législation concernant la protection sociale (article 4), la sécurité, la sûreté et la protection de l'environnement (article 5), ou encore le pilotage (article 14) - il serait excessif de nier que la Commission a tenu à préserver les compétences des Etats membres.

(2) Les doutes quant à la conformité du paquet portuaire au principe de proportionnalité

Ces doutes reposent sur l'argument déjà invoqué pour critiquer le non-respect du principe de subsidiarité, selon lequel la proposition serait inutile, car la concurrence intra-portuaire existe déjà, la Commission n'ayant, au demeurant, pas apporté la preuve que des opérateurs s'étaient heurtés à des distorsions de concurrence dans l'accès au marché.

De telles distorsions peuvent survenir, puisque, comme on l'a vu, il existe des monopoles de fait ou de droit.

Mais, pour le rapporteur, les problèmes de proportionnalité seraient plutôt susceptibles de résulter de certaines dispositions particulières, telles que celles de l'article 7 posant le principe de l'obligation pour tous les fournisseurs de services d'être titulaires d'une autorisation.

La question peut être soulevée, comme ce fut d'ailleurs le cas au sein du groupe de travail du Conseil, de savoir si le dispositif proposé ne constitue pas un facteur d'alourdissement et de rigidité de nature à empêcher l'accès le plus large possible aux services portuaires, comme l'impose d'ailleurs l'article 9 de la proposition(19).

Or, de telles difficultés risquent de s'avérer insurmontables, surtout dans les ports de petite taille.

b) Le non-respect de certains principes juridiques nationaux

Le problème de compatibilité entre la proposition de directive et certains principes juridiques nationaux semble concerner la résiliation des autorisations existantes.

C'est ainsi que l'étude d'impact néerlandaise fait valoir que :

« La résiliation des contrats dans le cadre desquels d'importants investissements ont été effectués exige d'être solidement motivée. S'il n'existe aucune preuve d'activités illégales - par exemple une fraude - ou faute d'un intérêt public prépondérant le justifiant largement, il semble impossible en droit néerlandais des contrats qu'une loi rompe unilatéralement un contrat. »

En Allemagne, on estime que la résiliation des autorisations en cours prévue par la proposition de directive constituerait une immixtion dans les contrats en cours d'exécution ainsi qu'une violation des principes de protection des droits acquis et de la confiance légitime. Pour les défenseurs de cette thèse, la proposition de directive ne contient aucune disposition protectrice ni transitoire, qui permettrait aux fournisseurs existants d'amortir leurs investissements d'un montant de plusieurs centaines de millions d'euros et qui visent à bénéficier d'un rendement correct.

De telles interventions de la puissance publique dans l'activité contractuelle des entreprises doivent avoir une base légale et être justifiées par un intérêt public indéniable. A cet égard, il est hautement douteux que l'article 80, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne(20) invoqué par la Commission puisse fournir la base juridique nécessaire.

Les difficultés juridiques ainsi soulevées sont sérieuses, d'autant que, s'agissant du droit allemand, le principe de protection de la confiance légitime a la valeur d'un principe général du droit, dont l'application n'est écartée que dans des conditions bien précises.

B. Le paquet portuaire ne favoriserait pas réellement le développement des ports européens

Non seulement, l'efficacité économique du dispositif proposé ne serait pas optimale. Mais, en outre, des difficultés sociales accrues sont à craindre en l'état actuel de sa rédaction.

1) Un dispositif dont l'efficacité économique n'est pas optimale

Pour une majorité de professionnels notamment, le régime d'autorisations serait peu incitatif pour les investissements, tandis que feraient défaut des mesures encadrant la concurrence entre les ports.

a) Un régime d'autorisations peu incitatif pour les investissements

Cette critique très largement partagée repose sur deux séries de considérations :

- d'une part, la proposition de directive n'assure pas de retour sur investissement ;

- d'autre part, les mécanismes mis en place sont jugés trop bureaucratiques.

(1) Le retour sur investissement n'est pas garanti

Quatre catégories de dispositions seraient de nature à défavoriser une rentabilité élevée des investissements :

¬ Les nouvelles durées de validité des autorisations

Plus courtes, ces nouvelles durées ne tiennent pas compte du délai nécessaire à la réalisation des amortissements. Il pourra en résulter que certains investissements à long terme ne seraient plus du tout rentables, ou bien qu'une augmentation des tarifs, qui étaient jusqu'à présent compétitifs par rapport au reste du monde, serait inévitable afin de permettre un amortissement plus rapide.

¬ L'absence de prolongation des autorisations déjà délivrées

Aucune autorisation ne pourra être prolongée sans que soit mise en œuvre une nouvelle procédure d'appel d'offres.

Or, de ce fait, l'autorisation peut être retirée à son titulaire. Il est dès lors à craindre que les investissements à long terme ne puissent être effectués qu'au début de la durée de validité d'une autorisation et que, par la suite, l'incitation à investir ne diminue constamment.

En second lieu, la procédure d'appel d'offres est d'autant plus critiquée qu'elle est regardée comme un avantage offert aux grands groupes étrangers, en particulier chinois(21). Cette crainte est - en tout cas - exprimée dans les études d'impact britannique et néerlandaise, mais aussi en Allemagne, tant par la résolution adoptée par le Bundestag que par l'Association allemande des gestionnaires de ports.

¬ L'insuffisance des règles prévues en matière d'indemnisation

Certes, la proposition de directive impartit au fournisseur de services entrant d'indemniser celui qui a été évincé à la suite d'un nouvel appel d'offres. Mais ce principe est limité aux amortissements restant à courir, ce qui n'est guère attractif.

¬ L'absence de dispositions transitoires

La renégociation des autorisations en cours dans un délai de 36 mois suivant l'entrée en vigueur de la directive est considérée comme une source importante d'insécurité juridique et assimilée par certains professionnels en France comme en Allemagne à une expropriation.

(2) Un régime d'autorisations jugé bureaucratique

Le régime d'autorisations devrait alourdir la charge des autorités portuaires, celles-ci étant appelées à accorder sensiblement plus d'autorisations qu'actuellement, puisque, par exemple, les opérateurs fournissant des services portuaires sur leur propriété devront également être titulaires d'une autorisation.

A cet égard, le Comité des régions a émis la crainte que cette obligation imposée aux propriétaires terriens ne constitue une violation du droit de propriété et n'entre en contradiction avec l'article 295 du traité instituant la Communauté européenne, aux termes duquel les réglementations relatives à la propriété restent inchangées dans les Etats membres.

Ainsi, dans le cas où l'autorisation ne serait pas attribuée au propriétaire, à l'issue d'une procédure de sélection, mais à un tiers, le premier ne pourrait plus proposer des services portuaires sur son propre terrain. La situation serait d'autant plus confuse que dans un tel cas l'autorité portuaire ne pourrait conclure aucun contrat de location ou de bail avec un tiers sans l'accord du propriétaire.

b) L'absence de mesures encadrant la concurrence entre les ports

Il s'agit là d'un des principaux reproches adressés à la Commission. Il apparaît que les dispositions prévues aux articles 16 et 17 - relatifs respectivement à la transparence des relations financières et à celle du financement public - ou encore celles concernant les dispositions comptables prévues aux articles 18 et 19 ne sont pas jugées à la hauteur des enjeux, dans une Europe, dont un spécialiste déclare qu'elle « sera confirmée comme l'un des pôles mondiaux de la conteneurisation », mais « au prix d'une forte aggravation de la concurrence inter-portuaire ». (22)

En écho à ces observations, l'avis du Comité des régions :

« déplore l'absence d'une prise en considération suffisante de la structure dominante du marché des ports européens et des services portuaires. En effet, il existe une grande concurrence entre les différents ports d'Europe, qui a pour conséquence que seuls ceux qui sont efficaces et compétitifs sur le plan financier parviennent à s'affirmer au sein de la concurrence européenne. »

2) La crainte de difficultés sociales accrues

Cette crainte est suscitée par l'absence de garanties suffisantes contre le dumping social et le risque de suppressions d'emplois.

a) L'absence de garanties suffisantes contre le dumping social

Le risque de dumping social résulterait, d'une part, du régime de l'auto-assistance et, d'autre part, de l'affirmation d'une possible application de la directive sur les services, encore appelée directive Bolkestein.

(1) Le régime de l'auto-assistance favoriserait le dumping social

L'avis du Comité des régions résume bien les diverses critiques adressées au régime de l'auto-assistance. Le Comité « craint, du fait de la possibilité prévue d'embaucher son propre personnel à terre, un dumping social, une baisse de la qualité et de la productivité des services portuaires ainsi que des conflits avec les exigences techniques et politiques en matière de sécurité (ISPS)(23). En outre, le système d'appel d'offres prévu par la Commission fonctionnerait de telle manière que, par exemple, des entreprises de manutention obtiendraient certes une autorisation pour les activités de déchargement, mais qu'elles ne pourraient l'utiliser dans les faits, parce que les armateurs pratiqueraient l'auto-assistance. »

Pour sa part, l'ESPO souligne, dans la motivation de l'amendement qu'elle propose en vue de confier aux autorités nationales la définition des conditions d'exercice de l'auto-assistance, que :

« la valeur ajoutée limitée qu'il y aurait à réglementer l'auto-assistance dans un cadre légal communautaire n'est pas en proportion de l'agitation sociale que cela pourrait provoquer dans de nombreux ports européens »(24). L'ESPO souhaite ainsi prévenir des grèves de dockers analogues à celles qui ont eu lieu lors de la discussion du premier paquet portuaire.

(2) L'affirmation d'une possible application aux services portuaires de la directive sur les services

En dépit des termes de l'article 4, qui dispose très clairement que la directive n'affecte en aucun cas l'application de la législation nationale des Etats membres en matière de protection sociale, s'est répandue l'idée selon laquelle, en cas d'échec du deuxième paquet portuaire, la directive Bolkestein s'appliquera. Ce qui signifierait que le principe du pays d'origine - lequel a suscité les controverses que l'on sait lors de la campagne référendaire - pourrait régir les services portuaires.

M. Robert Bret, dans son rapport présenté à la Délégation du Sénat pour l'Union européenne, s'est ainsi fait également l'écho de cette alternative, dont les fonctionnaires de la Commission européenne lui ont fait clairement part.

De même, des professionnels belges, avec lesquels le rapporteur a pu s'entretenir à l'occasion de son déplacement à Bruxelles, lui ont indiqué que, lors de l'audition publique organisée par le Parlement européen le 14 juin 2005, le représentant de la Commission avait tenu des propos similaires.

Or, il s'agit là d'un amalgame dépourvu de tout fondement. Ainsi que le rappelle très expressément la lettre ci-contre que M. Pierre Sellal, Représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne a adressée au rapporteur, un article 2, paragraphe c), révisé a exclu les services de transport du champ d'application de la directive sur les services.

b) Le risque de suppressions d'emplois

Pour certains, c'est le régime de l'auto-assistance qui pourrait favoriser un tel risque de chômage.

A contrario, celui-ci ne serait pas nécessairement écarté par la multiplication des fournisseurs que les autorités portuaires sont tenues d'encourager, le Comité économique et social faisant remarquer sur ce point que :

« Le nombre d'emplois dans les services portuaires n'est pas lié, comme l'écrit la Commission, au nombre de fournisseurs, mais au trafic effectif du port et/ou à la diversification des services. La multiplication des fournisseurs ne multipliera pas les emplois. Seules l'augmentation du trafic et l'apparition de services non traditionnels seraient créatrices d'emplois nouveaux. »

Cette observation nous ramène à la problématique du paquet portuaire, puisqu'elle soulève la question de l'aptitude réelle de ce dernier à favoriser le développement des ports européens.

Or, selon le rapporteur, ce que l'on pourrait appeler la valeur ajoutée du texte de la Commission ne sera lisible qu'au prix de certains correctifs, qu'il convient maintenant d'examiner.

III.

IV. MAINTENIR LE CAP D'UNE REFORME MAIS À CERTAINES CONDITIONS

Deux ordres de considérations plaident en faveur de l'instauration d'un cadre communautaire. La première - de nature politique - a trait aux effets dommageables pour l'image de la construction européenne auprès des professionnels du secteur et de l'opinion publique, qu'un nouvel échec de la procédure de codécision ne manquerait pas de produire. Surtout, un échec soulèverait de nouveau l'hypothèse - quoique totalement infondée - d'une éventuelle application de la proposition de directive sur les services.

En second lieu, l'Europe court le risque de ne pas se doter d'un instrument qui, pourtant, lui permettrait de valoriser ses réels atouts. Ceux-ci tiennent à une compétitivité de tout premier plan
- soulignée par tous(25) - et à un dynamisme incontestable de l'ensemble des ports. Ainsi, d'après l'ESPO, le trafic total dans les ports de l'Union européenne élargie - Norvège et Islande incluses - a connu une augmentation de 5,8 % entre 2003 et 2004, pour atteindre 3 570 millions de tonnes. Sur la même période, le trafic des conteneurs a crû de 10,1 %, soit une croissance équivalente à la période précédente (2002-2003).

Il importe donc que la discussion du deuxième paquet portuaire soit menée à bien. Mais il ne pourra en être ainsi qu'au prix de certains correctifs destinés à en renforcer l'efficacité aux plans économique et social.

A. La nécessité d'une directive

La future directive devra d'abord répondre au souhait exprimé à l'unanimité par les professionnels d'instaurer une concurrence plus loyale entre les ports.

Mais il lui incombera aussi de fournir un cadre propre à garantir une réelle concurrence au sein des services portuaires, qui soit compatible avec le respect de la spécificité des services technico-nautiques.

1) L'instauration d'une concurrence interportuaire plus loyale

Cet objectif revêt deux aspects :

- améliorer la transparence des mécanismes de financement ;

- élaborer des mesures d'accompagnement.

a) L'amélioration de la transparence des mécanismes de financement

Cette amélioration doit passer par la publication des lignes directrices sur les aides d'Etat préalablement à l'entrée en vigueur de la directive et non postérieurement à celle-ci. L'article 17 renvoie, en effet, à un délai d'un an suivant l'entrée en vigueur de la directive l'élaboration par la Commission « des lignes directrices communes concernant les fonds versés aux ports par les Etats membres ou par les pouvoirs publics et précise quel financement en faveur des ports est compatible avec le marché intérieur. »

Cette proposition peut être regardée comme l'une des dispositions clés destinée à permettre le bon fonctionnement du futur cadre communautaire, en renforçant la sécurité juridique des investisseurs et en clarifiant davantage les règles du jeu. Car, il est clair que, en cas de nouvel échec de la procédure de codécision, on se trouverait ramené à la situation actuelle, dans laquelle la Commission se prononce au cas par cas sous le contrôle de la Cour de justice, méthode qui ne garantit pas de façon satisfaisante l'exigence de sécurité juridique. A cet égard, on se félicitera que M. Jacques Barrot, commissaire en charge des transports, ait pris la mesure de ces enjeux et fait un pas en direction de la proposition du rapporteur, en déclarant devant la Délégation, le 16 novembre 2005, que les lignes directrices devraient être publiées en même temps que la directive.

L'exigence d'une transparence accrue est au cœur des revendications des professionnels. Force est toutefois de constater que, au vu des informations dont le rapporteur a pu prendre connaissance, la situation a peu progressé depuis la publication en 2001 du document de travail de la Commission sur les aides d'Etat versées aux ports. Les modalités de leur attribution demeurent inégalement transparentes. Alors que la comptabilité analytique tenue par les ports autonomes français permet d'identifier les aides d'Etat dont ils bénéficient, en revanche, jusqu'à une période encore très récente, il n'en était pas de même de certains ports d'Europe du Nord, en particulier allemands - propriété des Länder(26) - ni du port d'Anvers, dont un spécialiste a souligné le financement opaque des investissements(27).

C'est pourquoi, il conviendrait que les futures lignes directrices encadrent clairement les investissements publics, afin que puisse être établie une distinction entre ce qui relève respectivement du financement par les usagers et par les contribuables. Une telle distinction peut toutefois s'avérer très délicate, en particulier lorsque des investissements publics et privés concourent au financement du même équipement, par exemple, l'aménagement de terres-pleins. Or, d'après les informations qui ont été fournies au rapporteur, d'importantes disparités existent entre les pratiques en vigueur dans les ports français et, notamment, ceux des Pays-Bas.

b) L'élaboration de mesures souhaitables d'accompagnement

Ce second volet confirme la nécessité de se pencher sur les autres causes de distorsions de concurrence.

Comme le rappelle l'annexe 3, certaines d'entre elles résultent de pratiques nationales, telle que l'opacité qui entoure la tarification des services portuaires. Mais, sur ce point, il n'est pas exclu que la Commission soit amenée à exercer un contrôle accru, compte tenu du fait que, en application de l'article 16 de la proposition de directive, les Etats membres seront tenus de fournir à la Commission des informations concernant la transparence de leurs relations financières avec les fournisseurs de services portuaires.

D'autres distorsions sont la conséquence de l'absence d'harmonisation de la tarification dans les autres modes de transport, en particulier les transports ferroviaires, lesquels jouent un rôle essentiel dans la desserte de l'hinterland des ports(28).

Au-delà des prestataires de services, les Etats membres et la Commission devraient également porter leur attention sur d'autres éléments concernant la sécurité et la sûreté, susceptibles de fausser la concurrence.

Pour ce qui est de la sécurité, il ne devrait pas exister - en principe - de ports stricts et de ports tolérants.

Malheureusement, comme l'a montré un rapport d'information de MM. Guy Lengagne et Didier Quentin(29), les dispositions régissant notamment le contrôle de l'Etat du port sont inégalement appliquées par les Etats membres.

Quant à la sûreté, se pose la question délicate et constamment débattue de la prise en charge de son coût par l'Etat, l'autorité portuaire et/ou les prestataires de services. Le considérant 13 de la directive 2005/65/CE du 26 octobre 2005 relative à l'amélioration de la sûreté des ports illustre bien le souhait selon lequel « le financement des mesures de sûreté supplémentaire ne devrait pas entraîner de distorsions de concurrence ». Il est à espérer que la transposition de cette directive ira effectivement dans ce sens.

2) Garantir une concurrence au sein des services portuaires respectueuse de la spécificité des services technico-nautiques

A l'évidence, la poursuite d'un tel objectif risque de n'être guère aisée. D'une part, les professionnels soutiennent qu'il n'existe pas d'obstacle à la concurrence dans les ports, ce que la réalité ne confirme pas totalement. D'autre part, les modalités de l'ouverture à la concurrence des services portuaires préconisées par la Commission suscitent de vives controverses, en particulier quant à leur compatibilité avec la nature des services publics de certains services technico-nautiques.

a) Des progrès contrastés dans l'ouverture des services portuaires à la concurrence

(1) L'ouverture à la concurrence a réellement progressé

Les résultats de l'étude demandée par le rapporteur à plusieurs missions économiques(30) montrent que, depuis la présentation du premier paquet portuaire, les services portuaires s'ouvrent davantage à la concurrence. Il en est ainsi du marché de la manutention à Rotterdam, tandis qu'une société néerlandaise a réussi son implantation sur le marché pourtant réputé fermé du remorquage à Brême et Hambourg.

En ce qui concerne la France, on notera que, depuis cet été, une seconde société de remorquage a été agréée au port du Havre, même si les conditions de son agrément n'ont pas été identiques à celles appliquées à l'opérateur historique, d'après les informations qui ont été communiquées au rapporteur.

(2) La persistance d'obstacles à une plus large ouverture à la concurrence

Ces obstacles peuvent revêtir plusieurs formes. Ou bien ils résultent de la taille des ports, dont le volume d'activités ne favorise pas - du fait de sa faiblesse - l'émergence d'un marché réellement concurrentiel. C'est le cas en Espagne où - hormis les deux grands ports de Barcelone et d'Algésiras - la plupart des ports n'ont pas de volume de trafic suffisant permettant à deux opérateurs de fournir des services dans les services technico-nautiques du pilotage, du remorquage ou du lamanage.

Ou bien les services portuaires sont assurés par des monopoles de droit ou de fait. Il en est ainsi des services technico-nautiques. Par exemple, en Allemagne, le pilotage est un monopole de droit pour des raisons de sécurité et n'est pas assimilé à un service commercial. En revanche, si le lamanage est théoriquement ouvert à la concurrence en Allemagne, il est, dans les faits, assuré exclusivement par un cartel de PME locales.

De même, en Suède, la manutention est en principe ouverte à la concurrence. Mais, en pratique, il n'existe qu'une seule société par port.

b) La nécessité d'une approche plus différenciée des services portuaires

(1) La délimitation des services portuaires : un sujet conflictuel

Les dispositions proposées par la Commission donnent lieu aux mêmes controverses que lors de la discussion du premier paquet portuaire, précisément parce que les services technico-nautiques, en particulier le pilotage, sont maintenus dans la liste des services portuaires.

Ainsi, en Allemagne, la résolution adoptée par le Bundestag le 17 février 2005 s'est prononcée contre l'assimilation du pilotage à un service commercial du fait de son rôle dans la sécurité maritime et le Bundestag a, en conséquence, demandé son exclusion de la liste des services portuaires.

De même, les commissions de l'emploi et du marché intérieur du Parlement européen ont - de par le rejet qu'elles ont préconisé dans leur avis respectif - repoussé la notion de services portuaires retenue par la Commission.

En France, les fédérations de pilotes - à la différence de la Fédération européenne - et de lamaneurs se sont prononcées contre l'inclusion de leur profession dans la liste des services portuaires, confirmant ainsi la position qu'elles avaient déjà adoptée il y a quatre ans.

Les uns et les autres fondent leur opposition sur le fait que le pilotage et le lamanage se sont vu conférer la qualité de services publics respectivement par le Conseil d'Etat et la Cour de justice.

En outre, les lamaneurs font observer que le coût de leurs services ne représente que 3 % du maximum des coûts portuaires, ce qui n'est pas de nature à les ériger en service commercial pouvant attirer une forte concurrence.

S'agissant du remorquage, qui n'est pas un service obligatoire, à la différence du pilotage, certains professionnels estiment qu'il pourrait être soumis à la concurrence comme le montre d'ailleurs l'agrément récent d'une deuxième société de remorquage au port du Havre. Pour autant, les mêmes professionnels voient dans cet exemple la confirmation du fait que la concurrence ne serait susceptible de se développer réellement en France que dans les ports dotés de projets d'infrastructures - ce qui est le cas du port du Havre. En revanche, dans les ports de l'Europe du Nord, dont le trafic est très nettement plus développé qu'en France, le remorquage est un secteur soumis à une concurrence très intense.

Cette position est contestée par d'autres interlocuteurs du rapporteur, qui ont estimé que, en tout état de cause, la taille réduite des ports du Havre et de Marseille rendait impossible une réelle concurrence entre plusieurs sociétés de remorquage. De surcroît, dans l'hypothèse d'une pluralité d'opérateurs, le risque d'écrémage - c'est-à-dire la tendance pour les opérateurs à ne viser que les segments du marché les plus profitables - ne manquerait pas d'être très élevé.

Quant aux chargeurs, à l'opposé de nombreux autres professionnels, ils jugent tout à fait normal que la Commission applique aux ports, comme elle l'a fait dans d'autres secteurs, les libertés garanties par le traité ainsi que le droit communautaire de la concurrence, d'autant qu'en France, notamment, les services technico-nautiques fonctionnent tous comme des monopoles de droit ou de fait.

Pour sa part, lors de la discussion du premier paquet portuaire, le Gouvernement avait déclaré approuver la démarche de la Commission consistant à appliquer les dispositions du traité instituant la Communauté européenne aux services portuaires. Il estimait alors que la finalité de cette démarche « est d'accroître la sécurité juridique des actes passés en ce domaine. C'est la raison pour laquelle, dans la mesure où des garanties suffisantes étaient apportées par le projet [il s'agit du premier paquet portuaire] il [le gouvernement] a pu soutenir l'inclusion dans cette directive de l'ensemble des activités spécifiquement portuaires (pilotage, remorquage, lamanage, manutention du fret, service aux passagers) citées dans l'annexe du projet actuel »(31).

(2) L'attribution d'un régime spécifique aux services technico-nautiques

Dans le souci de prévenir un nouvel échec de la procédure de codécision, il apparaît essentiel aux yeux du rapporteur de parvenir à un dispositif équilibré, même s'il est bien conscient, devant les divergences évoquées précédemment, des difficultés à rapprocher des exigences contradictoires.

Comme il a eu l'occasion de le faire observer récemment(32), le rapporteur estime qu'il n'existe pas d'incompatibilité entre la notion de service public et l'institution d'un encadrement communautaire.

Dès lors, il n'y a rien de choquant à ce que des services technico-nautiques qualifiés de services publics par la jurisprudence - comme c'est le cas du pilotage ou du lamanage - soient maintenus dans la liste des services portuaires.

Au demeurant, le rapporteur rappellera avec intérêt que certains de ses interlocuteurs lui ont indiqué que la présentation par la Commission du premier paquet portuaire avait eu pour effet d'inciter les pilotes français à exploiter les gisements de productivité existants dans les stations de pilotage.

Cela étant, l'objectif du rapporteur de parvenir à un dispositif équilibré le conduit à se demander s'il ne conviendrait pas de tenir davantage compte des missions de service public et du rôle joué par le pilotage, le lamanage et le remorquage dans la sécurité maritime et portuaire, en précisant la portée du considérant 38 de la proposition de directive qui dispose que :

« ... les autorités compétentes devraient être autorisées à reconnaître la nature obligatoire du pilotage et d'autres services techniques nautiques ».

C'est pourquoi le rapporteur souhaiterait proposer une double série d'aménagements à l'article 14 de la proposition de directive relatif aux modalités d'exercice du pilotage.

¬ La première série de modifications aurait un double objet. Il s'agirait de contraindre les Etats membres à prendre les mesures nécessaires pour que le pilotage accomplisse pleinement ses fonctions dans le domaine de la sécurité maritime. Ainsi, les Etats membres seraient désormais tenus - et non plus seulement autorisés - de subordonner l'octroi de l'autorisation nécessaire à l'exercice du pilotage à des critères particulièrement stricts de sécurité maritime et à des obligations de service public.

En second lieu, il importerait de prévoir que le caractère obligatoire du pilotage est une disposition qui s'impose quelles que soient les circonstances locales de droit ou de fait.

Corrélativement les autorités compétentes n'auront plus simplement la faculté mais l'obligation de contrôler que les fournisseurs du service de pilotage satisfont aux critères de compétence prévues par la législation nationale.

Pour ce qui est de l'exemption de l'obligation de pilotage, il convient de ne pas l'assimiler à un régime d'auto-assistance, comme le préconise la proposition de directive, mais plutôt de l'aligner sur le système existant en droit français de la détention d'une licence de capitaine pilote.

¬ La deuxième série de modifications consisterait à adapter au lamanage et au remorquage un dispositif analogue à celui de l'actuel article 14 de la proposition de directive. Une telle solution permettrait ainsi de prendre en compte à la fois la diversité des régimes juridiques et la spécificité des missions attribuées à ces deux services technico-nautiques dans le domaine de la sécurité maritime et portuaire.

B. Mettre en place un cadre favorable au développement des ports

Ce cadre pourrait remplir deux catégories de fonctions : mieux stimuler les investissements et mieux prendre en compte certaines exigences sociales.

1) Le paquet portuaire doit mieux stimuler les investissements

a) L'allongement nécessaire de la durée des autorisations

La quasi-unanimité des professionnels s'est prononcée en faveur d'un tel allongement. A leurs yeux, les propositions de la Commission ne garantiront pas un retour sur investissement, ce qui sera de nature à dissuader les investisseurs. Or, une telle situation serait d'autant plus paradoxale, que la Commission encourage le partenariat public-privé pour faire précisément face à la réduction des investissements publics dans le financement des infrastructures. En outre, les besoins en investissements sont importants, compte tenu de l'ampleur des infrastructures à réaliser(33).

C'est pourquoi - d'ailleurs soutenus par un très grand nombre d'Etats lors de la discussion générale au sein du Conseil - les professionnels demandent le retour au texte du Comité de conciliation, lequel prévoit, selon les cas, des durées maximales de 36 ou 46 ans.

Les chargeurs contestent l'opportunité de durées aussi longues, qui, selon eux, ne sont pas pertinentes au plan économique. Il convient, selon eux, de lier celle des autorisations à la durée de vie technique laquelle, par exemple, n'excède pas 15 ans dans le cas des outillages. Pour l'ensemble de ces raisons, cette profession souhaiterait limiter à 25 ans la durée maximale des autorisations.

Ce débat confirme les observations émises par la Commission devant le Conseil, selon lesquelles toute durée est arbitraire, ajoutant que les dispositions adoptées par le Comité de conciliation n'étaient pas de nature à stimuler une réelle concurrence du fait des trop longues durées qui ont été retenues.

Pour le rapporteur, - outre qu'il fait l'objet d'un large consensus - le retour au texte du Comité de conciliation offre également l'avantage de prévoir des mesures transitoires. Celles-ci permettent d'éviter l'effet analogue à une expropriation qui semble s'attacher - pour de nombreux professionnels - au dispositif actuel de la proposition.

A cet égard, l'argument invoqué par la Commission devant le Conseil, pour justifier la suppression des mesures transitoires, selon lequel elles sont des obstacles à la libéralisation, est d'autant moins convainquant que le dispositif du premier paquet portuaire en prévoyait expressément le principe.

b) L'institution d'un régime d'autorisation plus simple et plus équitable

(1) La nécessité d'instaurer un régime d'autorisation simplifié

Les deux reproches généralement formulés à l'encontre du dispositif proposé par la Commission sont parfaitement fondés.

¬ Tout d'abord, le fait qu'il impose un système d'autorisations obligatoires - à la différence du texte du Comité de conciliation qui avait laissé le soin aux Etats membres de se réserver ou non la délivrance des autorisations - est source de complexité bureaucratique.

Devant le Conseil, la Commission a ainsi expressément confirmé que la procédure d'autorisations était applicable à tous les fournisseurs existants(34), quelle que soit la durée de leurs contrats, puisqu'il leur incomberait de repartir de zéro et de se mettre en conformité avec les dispositions de l'article 12 de la proposition, relative à la durée des autorisations. En réponse aux Etats qui ont fait valoir le risque d'une bureaucratie accrue, la Commission a souligné que la procédure d'autorisation ne devrait pas générer un tel risque, car elle sera largement dans les mains des Etats membres, ce qui devrait pouvoir accélérer l'instruction des demandes

La Commission convient toutefois que la faculté accordée à l'autorité compétente ou aux fournisseurs de demander que l'autorisation soit délivrée à l'issue d'une procédure de sélection, est source de lenteurs mais aussi d'insécurité juridique. C'est d'ailleurs pourquoi, certains industriels en demandent la suppression.

¬ Quant au second reproche tenant précisément à ce même risque d'insécurité juridique, il met en cause les effets déstabilisateurs inhérents au système des autorisations obligatoires. Il est clair que celui-ci fragilise d'autant plus les contrats en cours que la proposition n'a pas prévu de périodes transitoires.

Pour prendre la mesure de l'ampleur possible de cette déstabilisation, il n'est que de se référer aux cas de la Grande-Bretagne où, d'après un rapport de la Chambre des Communes, 70 % des ports sont privés et des Pays-Bas où la durée des autorisations peut atteindre 90 ans.

Au vu de l'ensemble de ces critiques et sous réserve des propositions que le rapporteur a formulées en ce qui concerne le pilotage, le lamanage et le remorquage, qui pourraient être soumis à un régime d'autorisations obligatoires, il serait souhaitable de revenir à l'esprit du texte du Comité de conciliation. Celui-ci, tout en définissant les critères d'octroi des autorisations, reposait sur le respect du principe de subsidiarité, en ouvrant aux Etats membres la faculté d'instaurer un système d'autorisations préalables.

Il s'agit là d'une solution de bon sens tant les situations sont diverses. Par exemple, pour ce qui est de la France, la délivrance d'autorisations préalables est pour le moins indispensable dès lors que le domaine public est durablement occupé, notamment par des portiques ou des grues sur rail, ce qui est le cas des terminaux à conteneurs gérés par un opérateur privé. En revanche, le recours à la même procédure paraît moins nécessaire lorsque l'opérateur n'utilise qu'un matériel très mobile, tel que les chariots-élévateurs.

De façon générale, certains de ses interlocuteurs ont appelé l'attention du rapporteur sur la souplesse qui caractérise la législation française applicable à la délivrance des autorisations d'occupation temporaire, dont l'octroi permet des occupations plus ou moins privatives du domaine public maritime. S'il peut y être mis fin à tout moment, dès lors que l'intérêt du domaine ou un intérêt général le justifient, la jurisprudence a établi également que le titre d'occupation délivré et sa durée sont adaptés à l'importance de l'ouvrage réalisé de l'activité exercée.

En second lieu, dans le même souci de simplification du régime des autorisations, il conviendrait également de retirer aux fournisseurs la faculté qui leur est ouverte de demander qu'une autorisation puisse être accordée à l'issue d'une procédure de sélection. Cette disposition, qui a été introduite par la Commission, a été critiquée par la France en raison du risque de bureaucratie accrue qu'elle entraîne. De son côté, la Commission est convenue que la rédaction de cette disposition était obscure et méritait d'être revue.

(2) La mise en place souhaitable d'un régime de compensation équitable

Il s'agit là encore d'une mesure souhaitée par la majorité des professionnels. En effet, la proposition de directive limite l'application de la compensation par le nouveau fournisseur aux investissements effectués par le fournisseur existant dans des installations reprises par son successeur et qui ne sont pas encore amorties.

Ces dispositions sont plus restrictives que celles qui ont été prévues par le Comité de conciliation. Selon des modalités définies par les Etats membres, le compromis du Comité de conciliation impartissait aux nouveaux fournisseurs de services autorisés de verser une compensation appropriée aux fournisseurs précédents, dont la durée d'autorisation a été réduite, soit parce que le nombre de fournisseurs de services dans un port est limité, soit parce que ce même nombre devient limité après l'entrée en vigueur de la directive.

Dans tous les autres cas, il était prévu que les fournisseurs de services autorisés puissent être tenus de verser une compensation aux fournisseurs précédents ou à toute autre partie concernée conformément aux dispositions nationales.

La discussion générale intervenue au sein du Conseil révèle les difficultés à définir un régime qui, d'une part, soit équitable et, d'autre part, prévienne de trop grandes disparités entre les Etats membres.

En effet, certains Etats, tels que l'Allemagne, souhaitent qu'une compensation soit versée, en tout état de cause, même après expiration de la durée d'autorisation initiale, à défaut de quoi les fournisseurs seraient réticents à procéder à des investissements dans les dernières années de l'autorisation. La France préfère réserver le principe de la compensation à l'autorisation qui prend fin avant le terme initial. D'autres Etats défendent le principe selon lequel il est du ressort des Etats membres de déterminer les critères de la compensation. D'autres Etats encore, préoccupés par le risque de législations nationales divergentes et de distorsions de concurrence, souhaitent qu'une disposition spécifique établisse un mécanisme concret de compensation.

Le rapporteur estime que, compte tenu de la diversité des propositions, il paraît vain de parvenir à un cadre harmonisé des modalités de compensation. En revanche, en s'inspirant de l'esprit du texte du Comité de conciliation, la directive pourrait poser le principe selon lequel le nouveau fournisseur verse une compensation à son prédécesseur, dont l'autorisation est expirée avant le terme initialement fixé, les modalités de cette compensation étant arrêtées par les Etats membres.

2) Le paquet portuaire doit mieux prendre en compte certaines exigences sociales

Comme lors de la discussion du premier paquet portuaire, l'objectif est de prévenir tout risque de dumping social. La difficulté réside toutefois dans l'absence de consensus sur les moyens à mettre en œuvre.

a) Prévenir tout risque de dumping social

Une telle exigence est d'autant plus impérieuse que la Commission a étendu le champ d'application de l'auto-assistance au personnel à terre. Or, il importe de tirer les conséquences de la discussion du premier paquet portuaire qui, comme on le sait, a été marquée, en raison des craintes de dumping social suscitées précisément par la notion d'auto-assistance, par des grèves de dockers, puis par l'échec de la procédure de codécision.

Ces mêmes craintes de dumping social sont renforcées par celles - infondées pour les raisons que le rapporteur a exposées précédemment - d'une possible application de la directive sur les services en cas de nouvel échec de la procédure de codécision, auquel cas pour certains ce serait la législation du pays d'origine et non celle du pays du lieu de prestation qui trouverait à s'appliquer. Toutefois, devant le Conseil, la Commission a soutenu que l'article 4 constituait une clause de sauvegarde, de nature à empêcher ce type de dérive, puisqu'il précise que la directive n'affecte en aucun cas l'application de la législation nationale des Etats membres, notamment celle des règles applicables en matière de santé, de sécurité et de conditions d'emploi des personnes.

Quoi qu'il en soit, pour le rapporteur - à l'heure où il est nécessaire que les citoyens gardent confiance dans la construction européenne -, une directive aussi importante que celle-ci doit éviter de donner l'impression que l'ouverture à la concurrence s'accompagnera d'une régression sociale.

Il est clair qu'il s'agit là d'un enjeu à la fois social et politique, dont il n'est pas possible de faire l'économie.

b) Les difficultés d'une solution consensuelle

Les informations dont le rapporteur a pu prendre connaissance font apparaître que trois catégories de solutions sont préconisées.

- La première souhaitée par la France consisterait à clarifier davantage la rédaction de l'article 4, afin d'y faire référence aux conventions collectives et aux règles de sécurité du travail.

- La deuxième voie résiderait dans la définition d'un statut du travail portuaire, lequel serait d'autant plus nécessaire, qu'il existe de fortes disparités - source de distorsions de concurrence - entre par exemple les ports belges et néerlandais, qui ont leur propre réglementation en matière d'embauche.

S'il apparaît souhaitable d'éliminer - ou en tout cas de réduire - les distorsions de concurrence, il est, néanmoins, difficile de parvenir à une harmonisation vers le haut dans le domaine social, le risque étant plutôt celui d'une harmonisation a minima. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les autorités françaises sont réticentes à toute idée de communautarisation du volet social dans le cadre de la directive.

- La troisième solution reposerait sur l'exclusion totale ou partielle de l'auto-assistance du champ d'application de la directive.

L'exclusion totale, préconisée par l'ESPO, est fondée sur l'argument selon lequel les coûts sociaux qui pourraient résulter du risque d'une grève de dockers sont susceptibles d'être supérieurs aux avantages, qui en sont attendus, notamment la création d'emplois.

De surcroît, s'agissant de la France, certains interlocuteurs du rapporteur lui ont fait part de leur crainte d'un recul par rapport aux règles du jeu issues de la réforme sur le régime du travail des dockers intervenue en 1992.

Mérite également d'être pris en considération l'argument invoqué par M. Georg Jarzembowski, rapporteur de la commission des transports du Parlement européen, à l'appui de son amendement de suppression de l'article 13, relatif à l'auto-assistance. Il fait ainsi valoir qu'une réglementation européenne de l'auto-assistance n'est pas nécessaire, dès lors que la présente directive vise principalement les plus grands ports et que c'est principalement dans ceux-ci qu'a lieu la manutention de conteneurs, une auto-assistance par le personnel navigant n'étant pas possible faute en particulier de l'absence des équipements nécessaires à bord des navires. En outre, M. Jarzembowski estime que l'auto-assistance en ce qui concerne les autres services portuaires peut, conformément au principe de subsidiarité, faire l'objet de réglementations nationales. Pour l'ensemble de ces raisons, l'article 13 doit, selon M. Jarzembowski, être abrogé.

C'est en revanche une exclusion partielle de l'auto-assistance
- qui viserait à revenir sur son extension au personnel à terre introduite par la directive - que préconise la résolution adoptée par le Bundestag.

Compte tenu des enjeux dont il a rappelé précédemment l'importance, le rapporteur se prononce en faveur, d'une part, de la proposition des autorités françaises visant à clarifier la rédaction de l'article 4, en y mentionnant les conventions collectives et les règles de sécurité du travail, afin de mieux faire apparaître que c'est la législation sociale du lieu de prestation qui est applicable.

D'autre part, pour prévenir tout risque inutile de conflit social, susceptible d'entraver l'adoption de la directive, il serait sage d'exclure totalement l'auto-assistance du champ d'application de la directive. Il en résulte que la définition de son régime relèvera de la compétence des autorités des Etats membres.

CONCLUSION

Au terme de ce rapport, il apparaît que le processus d'ouverture à la concurrence des services portuaires confirme la difficulté, déjà rencontrée dans d'autres secteurs, à trouver un point d'équilibre.

L'existence de diverses exigences contradictoires, qui est à l'origine d'une telle difficulté, ne doit toutefois pas empêcher, bien au contraire, la recherche de solutions susceptibles de fonder un compromis.

Telle a été précisément l'ambition qui a animé le rapporteur, tant il est convaincu que le parachèvement du marché intérieur - et, au-delà, la construction européenne - ne peut être couronné de succès qu'au prix d'une conciliation entre fermeté des principes et pragmatisme de la démarche.

{texte de la conclusion...}

TRAVAUX DE LA DELEGATION

La Délégation s'est réunie le mardi 20 décembre 2005, sous la présidence de M. Pierre Lequiller, Président, pour examiner le présent rapport d'information.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

Le Président Pierre Lequiller a remercié le rapporteur pour cette présentation très complète de la directive portuaire et a salué la présence de plusieurs députés membres du groupe d'études sur la politique portuaire, dont M. Michel Delebarre est le Président.

M. Michel Delebarre s'est réjoui de l'association des membres du groupe d'études à ce débat. Il a salué la qualité et la pertinence des observations du rapporteur, qui a apporté tous les éléments d'information nécessaires pour appréhender cette proposition de directive. L'étude de cette initiative communautaire soulève d'abord une question de méthode. Le premier texte présenté par la Commission avait été rejeté par le Parlement européen et ce n'est que grâce à des artifices procéduraux contestables - la remise dans le circuit de la proposition par l'ancienne commissaire en charge des transports juste avant qu'elle ne quitte ses fonctions et l'absence de toilettage du stock des directives par la nouvelle Commission - que cette initiative est encore en cours d'examen. Pourtant, tous les acteurs concernés sont opposés à ce texte, qui a déjà été contesté par le Comité économique et social européen, le Comité des régions et par plusieurs gouvernements et parlements. Il est également inacceptable et choquant que la Commission refuse de rendre publique une étude d'impact au motif que ce document risquerait d'entraîner un rejet du texte par le Parlement européen. A cet égard, on peut regretter que la France n'ait pas réalisé sa propre étude, contrairement aux Pays-Bas, à l'Allemagne et au Royaume-Uni.

Le rapporteur a justement précisé que l'absence de directive spécifique au secteur portuaire ne conduira pas à l'application éventuelle des dispositions de la directive sur les services puisque cette dernière exclut les transports de son champ d'application.

Pour autant, il est exact que l'adoption d'une directive concernant les services portuaires pourrait se révéler utile. Les ports constituent le domaine le plus concurrentiel au monde et chacun sait qu'il subsiste une inégalité profonde dans les soutiens publics accordés aux ports de l'Union européenne. Ainsi, par exemple, le port d'Anvers bénéficie de subventions régionales qui ne sont pas comptabilisées car la tenue obligatoire d'une comptabilité analytique existant en France n'est pas prévue dans les autres Etats membres. De même, le financement du port de Rotterdam, qui est un port municipal, est très opaque. Il en découle certainement des distorsions de concurrence. Il existe dans les ports français des « quais dédiés » attribués à un chargeur ou à un transitaire à la suite d'appels d'offres très encadrés, dont on peut douter qu'ils offrent la même transparence chez tous nos partenaires.

Une directive serait donc opportune, mais elle ne doit pas chercher à traiter tous les aspects des services portuaires. L'ouverture à la concurrence des services de pilotage serait un leurre dangereux. L'entrée dans le port de Dunkerque sans l'assistance d'un pilote connaissant parfaitement les lieux conduirait inévitablement à des catastrophes. De la même façon, la volonté de modifier la réglementation de la manutention ou d'accepter l'auto-assistance, alors même que la réforme de la manutention votée en 1992 n'est même pas appliquée dans tous les ports français, aboutirait, d'une part, au blocage de tous les ports par un mouvement social de grande ampleur et, d'autre part, à de nombreux accidents car ces métiers exigent une solide formation.

La résolution proposée par le rapporteur paraît donc tout à fait acceptable, sous réserve d'une précision sur la nature des autorisations dont l'allongement est préconisé.

M. Guy Lengagne, ayant souligné que tous les grands ports sont municipaux, a souhaité que la résolution mentionne les « aides publiques » plutôt que les « aides d'Etat ».

M. Jacques Myard a affirmé comprendre la nécessité d'une meilleure concurrence dans le secteur portuaire, qui relève à la fois du service public et du secteur industriel et commercial. Toutefois, on ne voit pas pourquoi la Commission européenne souhaite disposer d'une directive pour mettre en cause les aides à l'origine de distorsions de concurrence alors que les dispositions actuelles du traité pourraient suffire pour obtenir leur suppression. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que le secteur portuaire met en jeu de nombreux aspects relevant du service public, tant du point de vue de la sécurité que de la continuité du trafic, et qu'une directive visant à mettre en œuvre les règles de droit commun de la concurrence pourrait dès lors se révéler problématique.

M. Marc Laffineur, se rappelant son expérience passée d'administrateur du port de Nantes, s'est demandé si le système peu ouvert à la concurrence auquel il avait été confronté existait toujours dans notre pays.

M. Jean Le Garrec, membre du groupe d'études sur la politique portuaire, a approuvé les observations du rapporteur et de M. Michel Delebarre et précisé que la loi du 9 juin 1992 modifiant le régime du travail dans les ports maritimes, dite « loi Le Drian », avait permis de faire évoluer l'organisation des systèmes portuaires français. Des évolutions sont encore envisageables comme - par exemple - l'extension à d'autres ports du dispositif de « l'opérateur unique » appliqué par le port de Dunkerque.

Compte tenu de l'ensemble des critiques précédemment formulées à l'encontre de la proposition de la Commission européenne, on est en droit de s'interroger sur l'opportunité d'une directive. Il faut ajouter que les problèmes juridiques - en matière de responsabilité - signalés par l'étude d'impact néerlandaise ne sont pas propres aux Pays-Bas et qu'on les retrouverait aussi dans notre pays. Il faut donc s'opposer fortement à la directive proposée, d'autant que les créations d'emplois qu'elle envisage sont loin d'être assurées.

M. Léonce Deprez, membre du groupe d'études sur la politique portuaire, après avoir approuvé les critiques formulées précédemment à l'encontre de la proposition de la Commission, a estimé qu'une directive était sûrement nécessaire pour améliorer la transparence financière et les conditions de la concurrence interportuaire, pour stimuler les investissements et pour préciser que la législation sociale applicable est celle du lieu de prestation et non pas celle du pays d'origine.

M. Christian Philip, rapporteur, a précisé qu'au regard du droit communautaire, la notion d'aides d'Etat englobait les aides accordées par les collectivités locales, mais qu'il accepterait d'utiliser la notion d'aides publiques dans la résolution. De plus, il est exact que cette dernière devrait être amendée pour indiquer que les autorisations dont le prolongement est souhaité sont les autorisations nécessaires à la fourniture de services portuaires. On peut également inclure dans la résolution une demande invitant le gouvernement français à procéder à la réalisation d'une étude d'impact, puisque, quel que soit le vote du Parlement européen en janvier prochain, il y aura probablement une proposition de directive révisée déposée par la Commission, ce qui laisse entendre que la procédure se prolongera au moins jusqu'à la fin 2007.

En ce qui concerne les raisons conduisant à affirmer la nécessité d'une directive, on peut indiquer qu'un tel texte ne se limiterait pas au contrôle des règles de la concurrence en matière d'aides publiques. Surtout, on peut faire valoir qu'en l'absence de texte spécifique, le juge communautaire, s'il était saisi, ne pourrait s'appuyer que sur les articles du traité, dont on sait qu'ils préconisent de façon générale une large ouverture à la concurrence. Dès lors, un dossier touchant à l'auto-assistance, par exemple, pourrait conduire la Cour de justice des Communautés européennes à reconnaître ce dispositif, en vertu des règles du traité, et il serait alors difficile de faire évoluer une telle jurisprudence par l'adoption d'une directive postérieure.

Une directive est donc nécessaire, mais elle doit être amendée par rapport au texte actuel, laissant toute leur place aux principes de subsidiarité et de proportionnalité. Le vote de la proposition de résolution pourrait inciter la Commission à évoluer en ce sens.

Le Président Pierre Lequiller a souhaité que la résolution se prononce en faveur d'une directive sur les services portuaires, mais « fortement » amendée par rapport à la proposition de la Commission.

A la suite de ce débat, la Délégation a adopté la proposition de résolution dont le texte figure ci-après.

PROPOSITION DE RESOLUTION

L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l'accès au marché des services portuaires
(COM [2004] 654 final/n° E 2744),

1. Déclare être favorable à une directive sur les services portuaires mais fortement amendée par rapport à la proposition présentée par la Commission sur les points suivants, tout en regrettant qu'à ce jour la Commission européenne n'ait toujours pas présenté d'étude d'impact ;

2. Estime souhaitable que la publication des lignes directrices sur les aides publiques soit préalable à l'entrée en vigueur de la directive ;

3. Juge nécessaire que la Commission et les Etats membres se penchent sur les autres causes de distorsions de la concurrence que le versement des aides publiques et prennent les mesures propres à réduire les disparités actuelles ;

4. Considère que, si les services portuaires doivent être soumis aux règles du droit communautaire de la concurrence, il importe toutefois de tenir également compte du rôle joué par le pilotage, le lamanage et le remorquage dans la sécurité maritime et portuaire. Dans cette perspective, il est nécessaire de procéder à des aménagements de l'article 14 de la proposition de directive, relatif au pilotage ;


5. Souligne la nécessité de stimuler les investissements pour renforcer la compétitivité des ports européens et préconise à cet effet :

a) l'allongement de la durée des autorisations nécessaires à la fourniture des services portuaires, selon les modalités proposées par le texte commun adopté par le comité de conciliation ;

b) l'instauration d'un régime d'autorisations simplifié et plus équitable. D'une part, les Etats membres devraient pouvoir se voir reconnaître la faculté d'instaurer un système d'autorisations préalables. D'autre part, il est souhaitable que, selon des modalités fixées par les Etats membres, le nouveau fournisseur accorde une compensation à son prédécesseur, dont l'autorisation est expirée avant le terme initialement fixé.

6. Insiste sur la nécessité de prévenir tout risque de dumping social et propose :

a) à l'article 4 de la proposition de directive, relatif à la protection sociale, de viser les conventions collectives ainsi que les règles de sécurité du travail ;

b) d'exclure l'auto-assistance du champ d'application de la directive.

7. Souhaite que les autorités françaises procèdent également à l'élaboration d'une étude d'impact, à l'exemple de certains autres Etats membres, afin que le Parlement français soit en mesure de mieux appréhender la proposition révisée que la Commission européenne pourrait présenter dans la suite de la discussion.

ANNEXES

Annexe 1 :
Liste des personnes entendues par le rapporteur

Le rapporteur tient à renouveler ses plus vifs remerciements à l'ensemble des personnalités qui ont bien voulu accepter de le rencontrer, ainsi qu'aux services des missions économiques, dont le concours lui a été très précieux.

I. A Paris

Secrétariat général des affaires européennes

- M. Jean Maïa, Conseiller juridique ;

M. Alain Correia, Chef du secteur transports et politique régionale ;

- M. Laurent Probst, Adjoint au chef de secteur.

Ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer

- M. Marc Jacquet, Sous-directeur des transports maritimes et fluviaux ;

- M. Jean-Baptiste Maillard, Sous-directeur des ports, des voies navigables et du littoral ;

- Mme Mireille Viora, Bureau de la mission Europe et International ;

Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

- M. Marc Lovergne, Chef de mission, affaires européennes, relations avec le Parlement européen.

Ministère des affaires étrangères

- Mme Anne-Laure Hare, Rédactrice du secteur politiques agricoles communes à la Direction du droit international économique et du droit communautaire ;

- Mme Marianne Cowdy, Rédactrice du secteur marché intérieur, recherche, compétitivité à la sous-direction des Affaires communautaires internes.

Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne

- M. Alexis Dutertre, Conseiller marchés publics.

Port autonome du Havre

- M. Jean-Marc Lacave, Directeur général.

Hutchinson

- M. Etienne Devisch, Directeur général.

Union nationale des industries de la manutention

- M. Xavier Galbrun, délégué général.

Association des Utilisateurs de Transport de Fret (AUTF)

- M. Pierre Karsenti, Président ;

- M. Philippe Bonnevie, délégué général.

Union des Ports Autonomes et des Chambres de Commerce et d'Industrie maritimes (UPACCIM)

- M. Alain Plaud, délégué général.

Association pour le développement des ports français

- M. Jacques Trorial, Président.

Fédération française des pilotes maritimes

- M. Claude Huaut, Président ;

- M. Jacques Sauban, Secrétaire général.

Groupe Bourbon

- M. Yves Rastouin, Directeur général des services portuaires.

Comité central des armateurs de France

- M. Patrick Decavel, Président ;

- Mme Anne Barthe, déléguée générale ;

- Mme Lamia Belkaïd, Responsable des relations institutionnelles.

Association française du lamanage des ports français

- M. Quentin Gutirrez, Président ;

- M. Christian Liguori, Délégué général.

- M. Michel Zoonkyndt, Vice-président ;

II. A Bruxelles

- M. Alain de Keghel, Consul général de France à Anvers.

Représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne

- M. Christian Masset, Représentant permanent adjoint ;

- M. Thierry Buttin, Conseiller aux transports.

Représentation permanente du Royaume-Uni

- Mme Anne Lambert, Représentante permanente adjointe ;

- Mme Johanna Keech, Conseillère aux transports.

Mission économique

- Mme Corinne Darmaillacq, Attachée économique ;

- M. Maarten Vergauwen.

Commission européenne

- M. Jacques Barrot, Vice-président, Commissaire en charge des transports ;

- Mme Kerstin Jorna, Chef de cabinet - adjointe de M. Barrot ;

- M. Rodrigo Vila de Benavent, Chef d'unité des services portuaires, direction générale des transports.

Parlement européen

- M. Stephen Hughes, Rapporteur de la commission de l'emploi ;

- M. Willi Piecyk, Rapporteur pour le Parti Socialiste Européen.

Industriels

- M. Gilles Laurent, Président-directeur-général de LogiX et Président de la chambre de commerce et d'industrie d'Anvers et du Limbourg ;

- M. Jean-Pierre Mercks, Expert à la commission belge des questions maritimes et portuaires.

Annexe 2 :
Le rôle du pilotage, du remorquage et du lamanage
dans la sécurité maritime et portuaire(
35)

1. Le pilotage

Par ses connaissances des installations portuaires et sa formation aux spécificités du port (dangers, courants, bancs de sable...), le pilote maritime est chargé d'aider le capitaine d'un navire lors de l'arrivée, du départ ou des mouvements de celui-ci dans les ports.

Suivant les modalités définies par la législation, les pilotes, pour remplir leur mission, se déplacent en mer au-devant des navires. La station de pilotage dispose de vedettes de pilotage, voire d'hélicoptères (Au Havre, à Dunkerque et Bordeaux...). Ils prennent en charge le navire pour le guider vers les passes et définir la manœuvre d'accostage la plus adaptée, avec le soutien du remorquage, puis du lamanage. De même, pour les mouvements à l'intérieur du port et au départ d'un navire, le pilote est sollicité.

Son rôle consiste à assister le capitaine du navire en apportant une compétence locale et une expérience pour assurer le passage du navire de la mer au port et effectuer la manœuvre avec ou sans remorqueur, dans les zones restreintes entourées d'installations portuaires, en un minimum de temps et dans les meilleures conditions de sécurité. Pour autant, le capitaine reste responsable de son navire.

2. Le remorquage

Le remorquage est un service d'aide aux navires dans leurs manœuvres portuaires. Les remorqueurs assistent les navires pour l'entrée, la sortie, la mise à quai et le déhalage (celui-ci consistant à déplacer le navire au moyen de ses amarres), en les tractant à l'aide de remorques ou en les poussant. Les remorqueurs se mettent à la disposition du bord qui leur transmet les consignes par l'intermédiaire du pilote. Toutefois, les limites de l'intervention dépendent, en dernier lieu, du capitaine du remorqueur qui reste responsable de la sécurité de son propre bâtiment.

3. Le lamanage

Les lamaneurs ont pour fonction de procéder à l'amarrage, au largage ou au déhalage des navires qui se présentent le long du poste prévu. Dans certains ports (Saint-Nazaire) en raison des contraintes de vents ou de courants, les amarres passées aux navires sont des amarres de quai en acier. Pour la sécurité des navires, l'amarrage est souvent doublé. En liaison avec la Capitainerie, les services du pilotage et du remorquage, les lamaneurs contribuent également à la sécurité des installations portuaires, qu'ils arpentent quotidiennement, jour et nuit.

Enfin, ils peuvent fournir des compléments d'équipages à bord des barges, sur des navires déficients en équipage ou pour les opérations nécessitant une compétence spécifique (pour tourner convenablement les amarres à bord lorsque des amarres de quai sont fournies, par exemple). Ils participent également à la lutte antipollution pour la mise en place de barrages, à la demande des autorités portuaires.Annexe-1

Annexe 3 :
L'ouverture variable des services portuaires à la concurrence

La présente étude est le fruit de la réactualisation d'informations relatives à certains Etats membres communiquées par des Postes d'Expansion Economique et contenues dans le rapport de M. Daniel Paul(36).

Sept missions économiques ont contribué à la réalisation de ce travail, lequel n'a pas concerné les éléments relatifs à la France.

Par rapport à 2001, l'ouverture des services portuaires est plus réelle : malgré les difficultés de rigueur lors de l'acquisition de nouveaux marchés, force est de constater la réussite de l'implantation de plusieurs entreprises privées, en général dans les grands ports. A contrario, des différences entre les principes proclamés par les textes et la réalité subsistent dans les ports secondaires. Le pilotage demeure exclu de l'ouverture dans presque tous les pays.

*

* *

L'ouverture variable des services portuaires à la concurrence

L'ouverture à la concurrence n'a pas touché les services portuaires de la même façon. En effet, le pilotage en a été exclu presque partout, à la différence des autres services portuaires.

En règle générale, le pilotage est exercé sous la forme d'un monopole de droit dans les ports de l'Europe du Sud et de l'Europe du Nord. Les textes qui l'encadrent lui reconnaissent soit une mission d'intérêt général, comme c'est le cas en Italie, soit, comme en Suède, la qualité de monopole de service public. En France, la loi du 28 mars 1928 en fait un service public obligatoire et organise le fonctionnement des stations de pilotage, tandis qu'un arrêt du Conseil d'Etat du 2 juin 1972 - Fédération des syndicats professionnels des pilotes - confirme qu'il a la qualité de service public.

C'est pour ces raisons, et plus particulièrement celles tirées de leur rôle dans le domaine de la sécurité des ports et de la protection de l'environnement, que, comme en Grande-Bretagne, le pilotage a été préservé des mesures de libéralisation.

Dans les Etats où celles-ci sont intervenues, on remarquera toutefois que le pilotage continue de jouir d'un statut spécifique. Aux Pays-Bas, les dispositions adoptées en juillet 2000 en vue d'ouvrir l'accès au marché sont assorties d'une période de transition de 2001 à 2005, prolongée jusqu'en 2015 en 2003. Sous réserve d'approbation par le parlement, l'ouverture serait même repoussée jusqu'en 2019(37).

De même en Espagne, bien que les autorités puissent, en principe, introduire des procédures de mise en concurrence en application, de la loi 48/2003, du 26 novembre 2003 il n'existe toujours dans les faits qu'une seule représentation de pilotes par port, la spécificité du pilotage en Espagne étant un monopole réservé à la « Federación de prácticos de puertos » (Fédération des pilotes des ports). La sensibilité aux éventuels risques d'atteinte à la sécurité liés à l'introduction de logiques commerciales plus fortes, qu'évoquent les représentants syndicaux des pilotes, d'après les renseignements qui ont été fournis au rapporteur, explique très probablement ce statu quo.

En ce qui concerne les autres services portuaires, le tableau auquel on pourra se référer ci-après, permet de mesurer la variété des régimes existants.

REGIME JURIDIQUE DES SERVICES PORTUAIRES

(ALLEMAGNE, BELGIQUE, ESPAGNE, FRANCE, ITALIE, PAYS-BAS, SUEDE)

Etats membres

Pilotage

Remorquage

Lamanage

Manutention

Allemagne

Monopole de droit. Les services de pilotage ne sont pas lbéralisés pour des raisons de sécurité

Ouverture à la concurrence, notamment dans les ports de Hambourg, Brême / Bremerhaven et Lübeck

Ouverture à la concurrence, notamment dans les ports de Brême / Bremerhaven et Hambourg. Toutefois, ce service reste assuré de facto par un cartel de PME locales

Ouverture à la concurrence. La gestion des activités de manutention est confiée à des opérateurs privés pour les ports de Hambourg, Hamburger Hafen und Lagerhaus et de Brême / Bremerhaven, BLG Logistics. Les prix sont fixés en fonction du marché sans interférence avec les autorités publiques

Etats membres

Pilotage

Remorquage

Lamanage

Manutention

Belgique

Monopole sur l'Escaut. Ouverture dans les bassins

Ouverture sur l'Escaut. A l'intérieur des bassins : Régie portuaire

Ouverture à la concurrence, au-delà du port. Règle portuaire pour l'amarrage dans les écluses

Ouverture à la concurrence

Espagne

Monopole de fait

Ouverture à la concurrence. Régime de licence depuis l'entrée en vigueur de la loi 48/2003

Ouverture à la concurrence. Régime de licence depuis l'entrée en vigueur de la loi 48/2003

Ouverture à la concurrence. Régime de licence depuis l'entrée en vigueur de la loi 48/2003

France

Monopole de droit

Ouverture à la concurrence

Monopole de fait (*)

Ouverture à la concurrence

Italie

Monopole de fait

Sociétés privées sélectionnées par l'autorité portuaire dans le cadre d'une procédure transparente et impartiale

Sociétés privées sélectionnées par l'autorité portuaire dans le cadre d'une procédure transparente et impartiale

Ouverture à la concurrence. En parallèle, existence d'une entreprise jouissant d'un monopole de fait, répartissant les dockers intermittents entre les entreprises

Pays-Bas

Monopole de droit

Ouverture à la concurrence

Ouverture à la concurrence

Ouverture à la concurrence

Suède

Monopole de droit

Ouverture à la concurrence

Ouverture à la concurrence

Ouverture théorique à la concurrence, mais en pratique une seule société par port

(*) A l'exception du port de Donges, en Loire-Atlantique, dans lequel le lamanage est assuré par une société privée et par le port autonome de Nantes-Saint-Nazaire.

Il appelle plusieurs observations de la part du rapporteur :

- En apparence, les services portuaires concernés sont déjà ouverts - ou en voie de l'être - à la concurrence. Une telle situation conduit ainsi certains Etats membres et des organisations professionnelles à mettre en cause l'utilité même de la directive et du principe de la concurrence intraportuaire qu'elle souhaite instaurer. Ils estiment que la Commission pourrait se borner à préciser le cadre du régime des aides d'Etat à l'aide de la directive 2000/52/CE dite « transparence » du 26 juillet 2000.

Pour autant, dans certains cas, des différences entre les principes proclamés par les textes et la réalité subsistent. C'est le cas notamment de l'Espagne. En effet, même si la loi 48/2003 préconise la libéralisation de tous les services portuaires sans aucune exception, on constate dans les faits que le pilotage, le remorquage et le lamanage restent l'apanage d'une seule société, à l'exception des deux grands ports de Barcelone et d'Algesiras. Cette situation résulte notamment du fait que la plupart des ports espagnols n'ont pas de volume d'activités suffisant pour permettre la viabilité de 2 intervenants dans chacun de ces domaines. La situation est identique pour les petits ports des Pays-Bas. De même, en Allemagne, le lamanage est théoriquement ouvert, mais il reste assuré exclusivement par un cartel de PME locales (Brüderschaften(38)). Néanmoins, il reste à souligner l'évolution générale de la situation depuis quatre ans : le marché de la manutention s'est réellement ouvert à 100% à Rotterdam ; une société néerlandaise a réussi son implantation sur le marché pourtant réputé fermé du remorquage à Brême et Hambourg.

- Le remorquage et le lamanage sont des secteurs où dominent le plus souvent des monopoles. Cette situation tient à ce que les contraintes techniques difficiles et le caractère peu profitable de ces secteurs sont de nature à dissuader l'apparition de nouveaux entrants.

- Malgré la libéralisation intervenue dans certains Etats membres, le législateur n'en a pas moins réaffirmé les missions d'intérêt général dévolues au remorquage et au lamanage.

Pour la loi italienne du 30 juin 2000 modifiant la loi du 28 juin 1994, le pilotage, le remorquage, l'amarrage et l'opération consistant à décharger un bateau à l'aide de barges sont considérés comme des « services d'intérêt général » parce qu'ils garantissent la sécurité de la navigation et l'abordage dans les ports. Pour ce qui est des services autres que le pilotage, l'autorité portuaire détermine les obligations spécifiques à respecter en tenant compte de la localisation et des structures portuaires concernées.

D'après les informations qui ont été portées à la connaissance du rapporteur, c'est la nature d'intérêt général de ces services et leur lien avec la sécurité du port qui a pour l'instant légitimé le maintien de l'intervention publique en Italie.

Un défi universel : les distorsions de concurrence

Au-delà de l'hétérogénéité des cadres juridiques que l'on vient d'examiner, ce problème des distorsions de concurrence touche l'ensemble des ports de l'Union. Leur ampleur, qui justifie une réelle et profonde remise en ordre, tient, d'une part, au poids prépondérant pris par les grands groupes armatoriaux dans le fonctionnement des systèmes portuaires et, d'autre part, à l'opacité entourant les modalités de financement des équipements et services portuaires.

Le poids prépondérant des grands groupes d'armateurs dans le fonctionnement des systèmes portuaires

La concentration des compagnies maritimes en méga-alliances est la principale caractéristique du transport maritime depuis les années 1980. Il s'agit en fait du deuxième temps de la « révolution du conteneur », qui remonte quant à elle aux années 1970. L'émergence de nouveaux armateurs asiatiques a créé un marché, en forte croissance(39) certes, mais où la surcapacité permanente a incité au regroupement des opérateurs.

Aujourd'hui, sur les vingt premiers armements mondiaux, dix sont asiatiques, huit européens, dont un seul français, et deux sont américains. Ils assurent à eux seuls 45 % de la capacité mondiale de transport. Dans un contexte de forte concurrence, les grands armements se sont lancés dans une politique de rationalisation, de recherche d'économies d'échelle sur les navires, et de pression sur les autorités portuaires. Les conséquences sont de plusieurs ordres.

· La taille des navires s'est accrue. Alors qu'en 1985 les grands armements possédaient des navires de 3 000 conteneurs « équivalent vingt pieds » (EVP) environ, les bâtiments actuels dits « post-panamax » ont plus de 4 000 EVP. La cinquième génération de porte-conteneurs correspond à des navires de 6 000 EVP.

· Des lignes « tour du monde » ont été créées pour rationaliser les déplacements des navires, dont le coût d'immobilisation ou de transit devient de plus en plus élevé. Elles supposent de très fortes contraintes de qualité du service portuaire (temps, fiabilité, sécurité) pour éviter que les temps morts ne se répercutent sur l'ensemble des escales.

· Le niveau des coûts d'investissement(40) dans les navires contraint les compagnies à s'allier pour partager les risques commerciaux et maritimes, ainsi que pour rechercher des positions dominantes sur les principaux marchés face à des chargeurs qui eux aussi se concentrent. L'objectif est double : il s'agit de peser tant sur les coûts portuaires que sur le taux des frets maritimes, en garantissant l'apport d'un niveau significatif de trafic.

· Chaque alliance tend à regrouper les flux d'une zone européenne, par exemple, dans un nombre limité de ports, en réduisant les escales et en concentrant leur logistique terrestre de façon à accroître la compétitivité de la chaîne de transport. Ces ports principaux sont baptisés « hubs » par référence à une pratique déjà ancienne du trafic aérien. Les alliances y concentrent leur activité, avant que le trafic ne soit ensuite éclaté par système de cabotage (feedering) dans les ports secondaires. Chaque alliance cherche à disposer de son ou de ses hubs propres, de façon à établir une position dominante vis-à-vis des acteurs portuaires. Cette évolution explique l'apparition de ports de transbordement tels qu'Algesiras et Gioia Tauro en Méditerranée.

Il apparaît donc très clairement que les grands groupes sont à l'origine de distorsions de concurrence majeures, ou en tout cas, les encouragent. D'une part, l'acquisition de terminaux qui leur soient dédiés - ce qui est l'objectif-clé de leur stratégie - leur permet non seulement de s'assurer une position dominante(41), mais également de dicter leurs conditions aux autorités portuaires. Par exemple, ils peuvent exercer un réel pouvoir de chantage sur ces dernières, en menaçant de délocaliser leur trafic. Au demeurant, indépendamment de cet aspect-là, leur obsession de réduire les coûts les pousse à rechercher constamment les ports réputés offrir les services les plus fiables et les plus productifs.

A cet égard, on peut citer l'exemple du port d'Anvers. Des 7 principaux opérateurs qui se partageaient les terminaux à Anvers (toutes spécialités confondues : marchandises générales et/ou conteneurisées), il n'en reste plus que deux aujourd'hui : le groupe Hesse Noord Natie (avec participation majoritaire du Port de Singapour) et la société P&O.

La nouvelle darse à marée, inaugurée en juillet 2005 et estimée à un coût de quelque 634 millions euros, est également divisée entre deux des plus grands manutentionnaires au monde : du côté ouest, c'est le groupe PSA/Hesse Noord-Natie qui exploitera 2,75 kilomètres de quais. (L'année dernière, PSA/HNN a traité à Anvers un trafic maritime totalisant 5,1 millions d'EVP (Equivalent vingt pieds), ce qui équivaut à 84% du trafic conteneurisé du port). Implanté sur le versant est du « Deurganckdok » et en face de son concurrent PSA/HNN, c'est P&O Ports qui a obtenu la deuxième concession. Ce terminal, baptisé « Antwerp Gateway » dispose de 2,47 kilomètres de quais, correspondant à une capacité conteneurisée de 3,5 millions d'EVP.

D'autre part, pour attirer les grands groupes, certains ports n'hésitent pas à pratiquer une tarification des services portuaires confinant au dumping. C'est le cas par exemple des ports allemands, dont les structures tarifaires constituent une incitation à l'utilisation de porteconteneurs remplis.

Ainsi, les coûts pratiqués pour les navires dépendent de leur taille (système de « coûts fixes ») et non de leur chargement.

En outre, le « libéralisme » des autorités portuaires allemandes quant au temps d'escale des navires (évalué en fonction de l'encombrement du port et non d'une grille prédéfinie) permet aux entreprises de prendre leur temps pour décharger. Cela est évidemment très positif pour l'activité des sociétés de service à quai.

En cas de dépassement d'une durée considérée comme normale de l'escale des navires une taxe supplémentaire peut être due.

L'opacité entourant le financement des équipements et des services portuaires

Cette opacité tient à l'absence d'un cadre précis des aides d'Etat et aux conditions obscures dans lesquelles est établie la tarification des services portuaires.

L'absence d'un cadre précis des aides d'Etat

Une telle lacune emporte pour conséquence que, d'une part, les ports français sont pénalisés par rapport aux ports d'Europe du Nord. D'autre part, il existe de nombreuses infractions aux règles de la concurrence.

Diverses études(42) ont souligné, à juste titre, les désavantages concurrentiels dont souffrent les ports français. En effet, le système portuaire français est marqué par une certaine volonté d'organisation rationnelle et de transparence ainsi que par des pratiques administratives de bonne gestion et de contrôle, qui imposent notamment aux gestionnaires portuaires dotés de la personnalité morale (ports autonomes, concessionnaires de ports d'intérêt national) de produire des comptes et de les publier, tout en accueillant en leur sein des administrateurs qui sont des usagers portuaires. Dans notre système, les relations entre les ports et l'Etat et les collectivités diverses sont donc transparentes et les subventions clairement identifiables dans les différents budgets.

Or, tel n'est pas le cas des ports de l'Europe du Nord, puisque ces derniers sont souvent dépourvus de l'autonomie budgétaire, les recettes et les dépenses étant intégrées dans le budget général de la collectivité gestionnaire du port sans séparation comptable. En outre, les aides venant essentiellement des collectivités locales sont plus difficilement identifiables et isolables que celles attribuées par l'Etat. Toutefois, on assiste en Allemagne à un transfert progressif de la gestion des ports par les collectivités locales vers des établissements distincts. Les ports de Brême et Bremerhaven sont administrés depuis le premier janvier 2002 par un opérateur de droit privé, Bremenports GmbH & Co KG, même si celui-ci est une filiale à 100% de la ville-Etat de Brême. A Hambourg, la gestion du port est confiée depuis le premier octobre 2005 à l'établissement public, Hamburg Port Authority.

Dans la plupart des ports suédois, les activités portuaires sont dirigées par des sociétés anonymes qui, à la fois vendent leurs services portuaires et administrent les infrastructures portuaires. Ces sociétés fonctionnent suivant les principes de l'économie de marché et financent donc leur activité grâce aux recettes issues de leur activité commerciale. Ces sociétés se sont formées suite à la fusion des ex-administrations communales portuaires avec les dockers. Les communes suédoises détiennent aujourd'hui encore la majorité des parts de ces sociétés, mais pas toujours la totalité. Les infrastructures des ports (quais, terminaux, bâtiments) sont la propriété de ces sociétés ou font l'objet de contrats de baux d'une durée moyenne de 20 ans. Le pays européen dont le modèle d'organisation se rapproche le plus de celui de la Suède serait le Royaume-Uni à ceci près que les sociétés portuaires y sont en majorité détenues par des intérêts privés.

Une série d'autres pratiques(43) ont également pour effet d'empêcher l'instauration d'une concurrence équitable : prêts à taux privilégiés, non-exigibilité d'un retour normal de capitaux, non-recouvrement de taxes sur les bénéfices, locations domaniales à des conditions privilégiées, fourniture de services gratuits, etc...

De même encore l'investisseur industriel souhaitant s'implanter dans un port peut aussi négocier sa fiscalité avec l'administration des impôts (pratique du « ruling » aux Pays-Bas).

Dans l'hypothèse où les fonds publics versés aux infrastructures ne sont pas considérés comme des aides, ils ne sont cependant pas d'un contrôle aisé et peuvent affecter le commerce entre les Etats membres. De leur côté, les autorités portuaires peuvent aider ou entraver les activités des opérateurs.

Les conditions peu claires de la tarification des services portuaires

A l'évidence, le rapporteur a eu l'impression d'être face à un « maquis », lorsqu'il a pu prendre connaissance des résultats de l'enquête qu'il a sollicitée auprès de plusieurs Missions Economiques.

D'une part, il existe des disparités entre les ports d'un même Etat membre. C'est ainsi qu'en Suède, les prix des services de manutention sont négociés au cas par cas selon le service demandé, le type et la quantité de marchandises à charger ou décharger et le client. En Allemagne, les services de remorquage et de lamanage sont très variables : ils sont négociables dans les ports de Brême / Bremerhaven et de Hambourg(44) (6). En outre, comme on a pu le voir précédemment, le système de forfaits d'utilisation des ports allemands débouche sur une situation de dumping destinée à attirer de nouveaux armateurs.

D'autre part, l'opacité est totale parce que, comme c'est le cas, par exemple, au Royaume-Uni, il n'existe pas de barème officiel, le nombre et le coût des services portuaires variant d'un port à l'autre. L'Espagne, consciente de ce manque de clarté dans la tarification de ses services portuaires, cherche dans la rédaction d'une nouvelle loi à simplifier drastiquement les taxes et leurs modalités de calcul que la loi 48/2003, actuellement en vigueur, définit de manière trop détaillée.

Commentaires généraux des Missions Economiques :

Italie :

Les autorités italiennes ne prévoient pas d'ouvrir plus largement les services portuaires à la concurrence. Notre interlocuteur du Ministère des infrastructures et des transports italien nous a en effet affirmé qu'il n'était pas prévu de modifier la législation italienne du secteur tant que la réglementation communautaire ne l'imposait pas.

Espagne :

La loi 48/2003 relative « au régime économique et à la prestation des services des ports d'intérêt général » qui a été complétée par le Décret Royal 3/2005, du 18 février de cette année, marquait clairement la volonté des autorités espagnoles d'aller plus avant dans la libéralisation de ce secteur que la directive européenne elle-même en mettant en exergue le principe de libre concurrence entre les opérateurs et en reconnaissant la liberté d'accès à la prestation de services portuaires. La loi prévoit en effet, que toute personne juridique, espagnole ou étrangère pourra être titulaire d'une licence lui permettant d'exercer son activité. Ces licences seront attribuées dans des conditions de pleine transparence, sans discrimination aucune, ni préférence locale et pour une durée maximum définie, en fonction du service, dans le texte de loi (par exemple 8 ans pour le pilotage, l'amarrage et 12 ans pour le remorquage).

Cependant avant la publication des ordonnances régulant l'octroi de ces licences, le gouvernement issu des élections de mars 2004, a lancé une procédure de révision de la loi en vigueur et un nouveau projet de texte est actuellement en cours d'élaboration qui devrait aboutir début 2006, pour une application estimée au mieux à début 2007.

Cette nouvelle loi, si elle est validée, marquera un recul en matière de libre accès au marché des services portuaires puisqu'elle prône l'abandon du système des licences pour revenir à celui des contrats privés en gestion directe ou indirecte tel que stipulé par la loi antérieure de 1992. La notion de libéralisation du marché ne se manifestera plus alors que par le biais de l'introduction d'appels d'offres gérés par l'Autorité Portuaire locale sur des contrats très limités dans le temps.

La future loi s'annonce donc plus restrictive dans ce domaine, plus simple en matière de tarification mais aussi plus souple en ce qui concerne l'auto-assistance, puisqu'elle autorise l'auto-assistance embarquée sous la seule réserve de répondre à des exigences de formation professionnelle maximales (au grand dam des arrimeurs espagnols !).

Suède :

La Suède est contre la nouvelle proposition de Directive pour plusieurs raisons. Cette proposition intervient non seulement trop tôt après la dernière proposition mais aussi sans que la Commission n'ait présenté d'analyse sur les conséquences qu'elle pourrait entraîner. Or, les principaux risques à craindre résident dans l'apparition de tensions entre les différents acteurs portuaires et le développement de lourdeurs administratives.

Selon la Suède, la Commission aurait trop tendance à généraliser sans prendre en considération la diversité et complexité des différentes organisations et activités portuaires en Europe. La Directive serait en l'espèce basée sur un modèle d'organisation des services portuaires différent du suédois. La concurrence dans les services portuaires suédois se jouerait essentiellement entre les ports et non pas dans les ports. Ainsi pour augmenter leur compétitivité les ports suédois ont tendance depuis peu à opérer des alliances régionales entre ports. Les ports de la région de Stockholm, de celle de Mälaren ou de Malmö et Copenhague se sont ainsi regroupés pour renforcer leurs activités. Le port de Göteborg (côte Ouest) a même récemment acheté des parts de la société portuaire de Gävle (côte Est). Le seuil de 1,5 million de tonnes ou de 200 000 passagers proposé par la directive est donc critiqué par la Suède puisqu'il aurait pour effet de biaiser la concurrence entre les ports légèrement en dessous ou au-dessus de ces seuils.

La Suède émet enfin des réserves quant à la définition de l'auto-assistance prévue dans la directive. Si l'organisation de ces services, encadrée en Suède par un accord collectif de 1975, est aujourd'hui contestée par la majorité, la Suède pense que ce problème est d'ordre national et ne peut être résolu par la nouvelle proposition de directive.

Sont néanmoins favorables à la directive : la Confédération des entreprises suédoises (Svensk Näringsliv), la Fédération des transporteurs industriels (Transport-industriförbundet), l'Association des armateurs suédois (Sveriges Redareförening).

Sont contre la directive : l'Association des ports suédois (Sveriges Hamnar), le Syndicat des transporteurs suédois (Svenska Transportarbetareförbundet) et la Fédération des officiers de marine (Sjöbefälsförbundet).

Etat de la réglementation concernant les services portuaires

en Pologne

D'après des premiers éléments d'information recueillis oralement auprès du Ministère de l'infrastructure, d'une administration maritime locale et d'une autorité portuaire, aucun texte particulier ne réglemente les services de remorquage, de lamanage ou de manutention.

Dès lors, dans le droit, ces services sont libéralisés. Il convient toutefois de noter qu'historiquement, sous la période communiste, ces services étaient fournis par des entités faisant partie des ports, sociétés d'Etat. Ces entités sont devenues, après 1991, des sociétés de droit commercial dont, d'après la loi, les ports doivent totalement se séparer d'ici fin 2006.

Même si ce processus de « dénationalisation » n'est pas achevé partout, sur les trois principaux ports polonais (Gdańsk - Szczeczin-Świnouście - Gdynia), il existe une offre multiple pour les services de remorquage, lamanage (2/3 sociétés par port) et surtout de manutention et entreposage (jusqu'à une dizaine d'opérateurs). Cependant, pour l'heure, peu d'investissements nouveaux ont été observés, c'est-à-dire qu'il existe peu de sociétés au-delà de celles qui proviennent de la restructuration des ports. En effet, l'offre est supérieure à la demande et ces activités se révèlent, sauf cas particulier, peu rentables. Ainsi à Szczeczin une société allemande a débuté dans le remorquage, mais a arrêté rapidement son activité.

Les terminaux à conteneurs constituent ici une exception. On note en effet plusieurs investissements privés importants dans cette activité. BCT-Baltic Container Terminal, acquise en juin 2003 par une société des Philippines : International Container Terminal Services Inc. (ICTSI) opère à Gdynia. A Gdańsk un investissement britannique est en cours pour créer le Deep Container Terminal. La société VGN, à capitaux belges, est active à Szczeczin-Świnouście.

Ainsi, on peut affirmer que les services de remorquage, de lamanage et de manutention portuaire sont libéralisés dans le droit en Pologne, que dans les faits la concurrence existe et que de nouvelles offres apparaissent pour les services où la demande peut ne pas encore être satisfaite ou se développer.

En revanche le pilotage relève d'un monopole de droit. Selon un arrêté du Ministère de l'Infrastructure, les administrations maritimes locales sont compétentes pour créer des « stations de pilotage », édicter les règles de fonctionnement de ces stations, et tenir à jour la liste des pilotes agréés. Il ne peut y avoir de services de pilotage en dehors de cette organisation.

Dans ses opinions concernant le projet de libéralisation des services portuaires, la Pologne a exprimé son soutien à une initiative ayant pour but de rendre plus compétitif le transport maritime, notamment par rapport au transport routier. Elle a toutefois souscrit au fait que la directive prévoit bien que le pilotage puisse continuer à faire l'objet d'un monopole. En effet la Pologne, mettant en avant le souci de la sécurité portuaire, n'envisage pas de libéraliser l'activité de pilotage maritime. Par ailleurs, comme d'autres pays membres de l'UE, le gouvernement polonais a relayé les craintes de certaines catégories professionnelles concernant le diminution de l'emploi, en particulier dans l'activité de manutention, si les équipages venaient à pouvoir effectuer les opérations de chargement et déchargement.

Annexe-1

Annexe 4 :
Un aspect de l'internationalisation renforcée des intérêts en présence: la grande activité des investisseurs asiatiques(
45)

Les financements en cours ont en eux-mêmes des aspects positifs par l'expansion économique qu'ils génèrent, par la multiplication des échanges, par la création d'emplois, etc. On reste cependant frappé par la pénétration des intérêts asiatiques représentés dans la manutention des conteneurs, cette dernière ouvrant la voie dans d'autres domaines portuaires; la liste ci-dessous est suggestive, et son équivalent ne pourrait pas actuellement être établi pour d'autres origines de capitaux sur le plan maritime. Elle n'est pas exhaustive. Ce sont :

- d'abord des implantations effectives; en premier lieu les manutentionnaires: Hutchison Wampoa et PSA (Singapour), qui ont assuré et contrôlé ensemble le transbordement de 15 millions d'EVP (Equivalent vingt pieds), soit la moitié des conteneurs de l'Europe du Nord-Ouest; puis c'est en 2002 le groupe de constructions navales KEPPEL, de Singapour, spécialisé aussi dans l'off-shore, qui rachète le chantier hollandais Verolme à Rotterdam, de grande réputation ;

- et encore, sous sa forme particulière, Zenha Port Machinery de Shanghaï dont les portiques sont présents dans tous les grands ports cités(46) ;

- ensuite ce sont les efforts de pénétration d'entreprises européennes qu'il faut interpréter comme une tendance de participation, voire de contrôle de la vie portuaire: en 2000, la banque japonaise Namura cherche à acheter Associated British Ports (ce qui paraît un peu comme une démesure, car il s'agit du regroupement de 23 ports anglais, assurant quelque 25 % des échanges par mer du Royaume-Uni, mais peut-être tous n'ont pas été retenus) ; il reste que Teesport qui, avec son voisin associé, a un trafic de 53,8 millions de tonnes, a été pendant un temps et jusqu'en juillet 1998, propriété de la compagnie financière nipponne Nikko Principal Investment. Dans ce domaine de l'appropriation des organismes maritimes, il ne faut pas oublier que Hutchison est propriétaire de trois ports anglais dont les deux premiers pour la conteneurisation, et en plus, de l'énorme complexe d'ECT à Rotterdam ;

- puis, dès l'annonce de la décision de construire Maasvlakte II, la firme Shanghaï Construction fait des propositions pour participer aux travaux;

- enfin, COSCO cherche à pénétrer les nations belges en proposant de prendre 20 % dans Hesse Natie et Noord Natie possédées par PSA et pour une partie minoritaire par la SNCB (Chemins de fer belges).

Sans doute ces faits ou ces souhaits de participation sont-ils à rapprocher de l'important essor des échanges conteneurisés avec l'Asie du Sud-Est, qui ont marqué le tout début du XXIème siècle.

Annexe 5 :
Les programmes d'équipement dans le littoral
de l'Europe du Nord-Ouest(
47)

Quels sont alors ces programmes d'équipement dominant le littoral de l'Europe du Nord-Ouest?

II est difficile de faire un tableau prospectif exact de ce que peuvent être les capacités de réception en conteneurs, pour un avenir proche, d'abord à cause des multiples formes de perfectionnement de détail ou partielles des installations de réception des navires. Au niveau auquel il faut se placer, il convient de raisonner en nombre de terminaux et en millions de conteneurs: c'est la norme que les faits imposent. Ne seront retenus ci-dessous et à l'échéance de 2005-2007, que les plans officiellement connus, suffisamment avancés dans leur construction, ou dans leur organisation financière ceux pris en charge par les multinationales(48) de la manutention capables d'investir les sommes énormes requises par les super-structures et leur fonctionnement.

Malgré ces précautions limitatives, les programmes restent nombreux; leur énumération peut être fastidieuse; elle reste nécessaire.

- Au Royaume Uni, où les ports retenus ont un trafic actuel important (8,1 millions d'EVP (Equivalent vingt pieds) pour les huit principaux de la moitié Sud) sont exprimés des besoins vastes d'installations nouvelles.

Felixstowe, qui vient en tête, est dominé par le groupe Hutchison. Celui-ci y a commencé l'extension de 270 m de quais au Trinity Terminal à l'Ouest et a mis en avant un autre programme, au sud-est du port dans le secteur de Land Guard, pour gagner 1000 m d'accostage; cela donnera place pour 2.8 millions d'EVP.

Les multinationales qui intéressent les ports de l'Europe du Nord-Ouest seront analysées ci-après.

Harwich, qui appartient au même puissant holding, a déposé un plan de construction pour une capacité de réception de 1.7 million de boîtes à Bathside Bay: 1 400 m de quai avec un calaison assurée de 15 m ; ce port deviendra ainsi le second d'Angleterre pour conteneurs. Le même consortium a demandé une concession d'exploitation à Dibden Bay (Southampton) où il était prévu d'attirer 2,5 millions d'EVP; les mouvements écologistes ont réussi à faire reculer ce projet; mais les besoins britanniques sont grands et Hutchison est puissant: ce ne sera retenu ici qu'à titre d'éventualité. Ce n'est pas le cas pour le Shell Haven, près de l'estuaire de la Tamise, où le grand manutentionnaire à capitaux britanniques P&O. Port travaille à construire une capacité de 3,5 millions d'EVP. Enfin, Dublin a une ambition approuvée pour 0,5 million d'EVP.

La somme de ces efforts est élevée, mais les réalisations permettraient aux Iles britanniques de dépendre beaucoup moins qu'aujourd'hui des ports continentaux, qui souvent servent de hubs. C'est une considération qui renforce les chances de réalisation.

- Pour la France, la seule grande ambition dans ce secteur géographique est Port 2000 au Havre. Les travaux sont très avancés; ils comportent un bassin de marée conquis sur l'estuaire de la Seine, avec des quais qui, en première phase, donneront quatre postes d'amarrage pour très grandes unités, avec 14,5 m de calaison au minimum; le premier navire est attendu en décembre 2005; la capacité totale sera de 3 millions d'EVP. Le financement est acquis: 540 millions d'euros prévus à l'origine, et sans doute largement dépassés avec les superstructures à l'achèvement; mais déjà une enquête d'utilité publique, ouverte en février 2004, étudie la possibilité de deux autres postes à quai pour 2006 et 2007, et une tranche d'autres travaux pour 2010: cela conduit à augmenter beaucoup les prévisions initiales de capacité d'accueil, si nécessaire.

- Pour la Belgique, Anvers est déjà un très grand partenaire international (4,8 millions d'EVP manutentionnés en 2003). Les équipements en cours, et aussi ceux très avancés, conduisent à prévoir pour 2005 l'achèvement de la darse à marée Deurgansk dans laquelle 4,5 km de quais permettront de recevoir 4 millions EVP. Presque tous les grands holdings de manutention sont présents: PSA, P&O Port, et des armateurs: Maersk, MSC ; et ici aussi, avant que ce ne soit achevé, d'autres projets se sont multipliés, soit dans des darses éclusées de la rive gauche (Verrebroek, Vrasene où il y a déjà quelques trafics), soit à plus long terme dans une autre grande darse à marée qui reste à creuser. En plus, des firmes anversoises participent à des projets extérieurs.

- On sait que la réussite aux Pays-Bas est représentée par Rotterdam (6,5 millions d'EVP de trafic effectif en 2003) ; la forte tendance actuelle est dans le regroupement des flux conteneurisés dans la Maasvlakte I, vaste installation conquise sur la mer; là se trouve ECT (European Container Terminal) qui appartient au Hutchison Group, et dont la capacité est de 6 millions d'EVP; et là aussi se trouve le Maersk Terminal (1 million d'EVP). Il existe un immense programme d'extension Maasvlakte II, également gagné sur la mer, mais non réalisable avant 2010 ou 2012. Il ne sera pas pris en compte ici parce que trop tardif pour les dates retenues; pourtant on sait déjà qu'un Terminal Euro-Max y est déjà prévu pour 1,2 million d'EVP. Cela ne| veut pas dire qu'à Rotterdam on n'agisse pas dans l'immédiat. Des accords ont été passés pour coordonner le développement de la conteneurisation avec Flessingen, ce qui permettrait à ECT de poursuivre sa politique d'expansion; cette entreprise, par ailleurs, a déjà commencé à équiper des quais sur l'Amazon Haven de la Maasvlakte I, mais dont l'ampleur n'est pas connue.

- Enfin, en Allemagne, les ports ont aussi de grandes ambitions, et bénéficient d'une poussée de croissance liée à leurs relations avec l'Asie, qui a porté le total de leurs activités à 8,5 millions d'EVP. L'expansion de la conteneurisation y a été éblouissante. Hambourg a déjà amélioré beaucoup ses terminaux, dont ceux de HHLA (Hamburg Haven Lagerhaus A.G.) qui est une entreprise à capitaux publics; ce sont les terminaux d'Alterverden dont les dernières installations ont été livrées voici quelques mois, puis le Burchardkai, puis Tolleort: le tout a déjà une capacité de 3,5 millions d'EVP. Le second manutentionnaire est Eurogate qui relève de capitaux privés. Mais dans les deux cas, les contraintes d'expansion après la phase actuelle sont dans la sérieuse pénurie d'espace pour installer de nouveaux terminaux; et face aux porte-conteneurs géants, la limitation des calaisons sur l'Elbe à 12,8 m demeure un frein malgré des dragages dont seul le principe est aujourd'hui accepté. Les prévisions mises en avant sont de 1500 m de nouveaux quais pour quatre postes d'amarrage, mais pour 2010 ; les travaux annoncés pour 2005 à 2007 ne dépasseraient pas 800 000 EVP, ce qui est nettement en-dessous de l'expansion de détail qui sans doute se fera.

Les ports de la Weser, Brême et Bremerhaven ont aussi leurs perspectives de développement. Le terminal III du premier est en cours d'allongement pour deux nouveaux postes, et deux autres pour 2005, soit une extension de capacité de 3 millions d'EVP.

Le grand programme germanique est Port de Jade, dans la baie de ce nom, et qui donnera à Wilhelmshaven un très fort potentiel, mais pas avant 2008-2012. En attendant, ce qui est déjà en place, ou en cours de réalisation, dans les ports allemands, est déjà impressionnant.

Le tableau regroupe les programmes principaux ci-dessus évoqués pour l'Europe du Nord-Ouest. Ils comportent une approximation déjà exprimée et sans doute ne sont-ils qu'une expression minimale de la réalité globale.

Tableau de l'expansion des terminaux pour conteneurs prévue à l'horizon 2005-2007, pour l'ensemble de l'Europe du Nord-Ouest

 

en millions d'EVP

Réalisation possible

Réalisation

     

pratiquement assurée

Royaume-Uni

Félixsowe

 

2,8

 

Shellhaven

 

3,5

 

Harwich

 

1,7

 

Dibden Bay (?)

2,5

 
 

Dublin

0,5

 

France

Le Havre Port 2000

 

3

Belgique

Anvers Darse Deurbanck

 

4

 

Autres darses

?

 

Pays-Bas

Rotterdam

-

?

 

Flessingue

?

 

Allemagne

Hambourg

 

0,8

 

Ports de Weser

 

3

TOTAL Europe du Nord-Ouest

 

3

18,8

Les engagements couvrant la période de 2002 à 2007 retenue s'élèvent donc à 18,8 millions d'EVP avec une augmentation possible jusqu'à 21,8 millions. Une estimation faite dans une réflexion semblable couvrant les années 1998-2005 avait avancé le chiffre de 16,1 millions d'EVP, mais n'a pas été confirmée par les réalisations. Il n'en sera pas de même pour ce qui est ici présenté, puisque l'essentiel est en cours de construction. Dans les deux cas apparaît la même aspiration à l'extension des installations pour la manutention des conteneurs.

Cette croissance potentielle de 18,8 à 21,8 millions d'EVP qui correspond à une hypothèse de dimensionnement de 220 à 256 millions de tonnes de marchandises, est à rapprocher du trafic réel actuel ci-dessus indiqué (365 millions de tonnes). Y a-t-il un risque de surcapacité des équipements ? Ce n'est pas impossible pour les premières années; mais n'y a-t-il pas une certaine sous-capacité actuelle visible à travers les encombrements rapportés, et correspondant à une part de retard à combler. De toutes façons, les extensions indiquées au tableau ci-dessus sont pour l'essentiel « des coups partis » et les programmes en cours ont aussi un rôle d'incitation à l'accroissement volontaire des trafics conteneurisés, selon le principe anversois qui consiste à mettre en place les installations avant l'essor de la clientèle, à l'inverse d'autres ports du continent où l'on ne veut construire que lorsque l'on est assuré d'amortir.

Annexe-1

1 () Daniel Paul, Les ports européens face aux dérives de la déréglementation, rapport n° 3507.

2 () D'après la Direction générale de l'énergie et des transports de la Commission européenne, 30 % du commerce intraeuropéen et 70 % du commerce extraeuropéen passent par les ports.

3 () En 2003, parmi les cinq plus grands ports du monde, Rotterdam était le seul port européen et les quatre autres (Singapour - premier port du monde - Shangaï, Hong Kong et Ningbo) étaient asiatiques. En outre, entre 2000 et 2003, l'évolution des trafics dans quelques grands ports chinois s'étageait entre 28,90 % et 69,16 % ; Institut supérieur d'économie maritime (ISEMAR), Panorama des ports de commerce mondiaux 2003, Note de synthèse n° 71, janvier 2005.

4 () Voir l'annexe 2 : Le rôle du pilotage, du remorquage et du lamanage dans la sécurité maritime et portuaire.

5 () Cette majorité était composée de membres des groupes politiques représentés au Parlement européen.

6 () Il s'agit de la communication : « Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe ». Cette communication a été présentée conjointement avec la proposition de directive - premier paquet portuaire.

7 () Le transport maritime reste un mode de transport intra-européen très efficace pour les envois de masse. En 2000, le transport routier représentait 43,8 % des échanges intra-européens contre 41,3 % pour le transport maritime (en t/km), Institut supérieur d'économie maritime (ISEMAR), note technique sur les autoroutes de la mer, 5 décembre 2003.

8 () Selon le rapport Van Miert du 27 juin 2003, « la fonction de véritables autoroutes maritimes est de remplacer les autoroutes terrestres, soit pour éviter la saturation des corridors routiers, soit pour accéder à des pays séparés du reste de l'Union européenne par la mer ».

9 () Le Conseil d'Etat l'a affirmé dans un arrêt du 2 juin 1972, Fédération syndicale des pilotes.

10 () L'ESPO, Politique des ports maritimes, Guide pratique pour les décideurs politiques de l'Union européenne, 24 novembre 2004.

11 () Initial Regulatory Impact Assessment : Market Access to Port Services Directive (Etude d'impact réglementaire initiale de la directive sur l'accès au marché des services portuaires). Ce document fait suite à une consultation qui a été lancée par le ministère des transports au printemps 2005 et résulte d'une étude d'impact réglementaire qui a été soumise au Parlement à la fin du printemps 2005.

12 () Roll on roll off : Technique de chargement ou de déchargement des navires par rampes d'accès qu'empruntent tous engins sur roues, automoteurs, tractés ou poussés.

13 () Deloitte, Impact Assessment Port Services Directive - The Netherlands (Etude d'impact de la directive services portuaires - Pays-Bas), 12 septembre 2005.

14 () Voir l'annexe 3 : L'ouverture variable des services portuaires à la concurrence.

15 () M. André Vigarié, Où va la conteneurisation en Europe du Nord-Ouest, Transports, mai-juin 2005, p. 160.

16 () Le calcul du nombre de conteneurs est fait à partir d'une « boîte » standardisée de 20 pieds de long et de 8 mètres carrés. Les autres dimensions sont ramenées à cette même norme, d'où l'expression d'équivalent vingt pieds.

17 () C'est ainsi que le manutentionnaire PSA, établi à Anvers, a détourné de Rotterdam les armements NOL (Neptune Ocean Lines) et APL (American President Lines) en 2002, ce qui représente des dizaines de milliers de conteneurs, A. Vigarié, Où va la conteneurisation en Europe du Nord-Ouest ? Article précité, Transports, mai-juin 2005, p. 161.

18 () A. Vigarié, Où va la conteneurisation en Europe du Nord-Ouest ? Article précité, p. 161.

19 () Le deuxième alinéa du premier paragraphe de cet article impartit aux Etats membres d'autoriser le nombre le plus élevé possible de fournisseurs de services en fonction des circonstances.

20 () Cette disposition prévoit que : « Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, pourra décider si, dans quelle mesure, et par quelle procédure, des dispositions appropriées pourront être prises pour la navigation maritime et aérienne ».

21 () Annexe 4, un aspect de l'internationalisation renforcé des intérêts en présence : la grande activité des investisseurs asiatiques, A. Vigarié, Où va la conteneurisation en Europe du Nord-Ouest ? Transports, mai-juin 2005, pp. 163-164.

22 () A. Vigarié, Où va la conteneurisation en Europe du Nord-Ouest ? Transports, mai-juin 2005, p. 164.

23 () Code ISPS - International Ship and Port Facility : Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires. Ce code a été adopté le 12 décembre 2002 lors d'une conférence diplomatique de l'Organisation maritime internationale. Il a été mis en œuvre au sein de l'Union européenne par le règlement (CE) 725/2004 du 31 mars 2004.

24 () L'ESPO (Organisation des ports maritimes européens), Accès au marché des services portuaires, Assemblée générale de l'ESPO, réunion de La Vallette (Malte), 28 avril 2005.

25 () Par exemple, lors du débat qui s'est tenu à la Chambre des Communes sur le paquet portuaire le 20 juillet 2005, un intervenant a indiqué que le coût de traitement des conteneurs dans les ports britanniques était d'environ 100 dollars (83 euros) contre 200 dollars (166 euros) pour les ports de la côte nord-est des Etats-Unis. Des propos similaires sur la compétitivité des ports européens ont été également tenus lors du débat qui a eu lieu au Bundestag en février 2005.

26 () La situation sera peut-être appelée à évoluer dans le sens d'une plus grande transparence, du fait de la dévolution de la gestion du port de Hambourg - depuis le 1er octobre 2005 - à un établissement public, Hambourg Port Authority.

27 () « ... il faut souligner que le port d'Anvers contribue à 20 % du PIB régional, situation qui lui confère une position puissante lui permettant parfois des manquements aux réglementations écologiques et une absence de transparence au niveau des investissements », M. Jacques Charlier, Séminaire maritime INRETS du 25 juin 2004, L'aménagement des terminaux à conteneurs de la rangée Nord : l'expérience comparée de Rotterdam et d'Anvers.

28 () La Conférence maritime de l'Allemagne, qui a tenu sa quatrième réunion au mois de janvier 2005, s'est plainte que les redevances en vigueur sur le réseau ferroviaire allemand soient quatre fois supérieures à celles perçues aux Pays-Bas.

29 () MM. Guy Lengagne et Didier Quentin, De l'Erika au Prestige : la politique européenne de sécurité maritime contrariée, rapport n° 644.

30 () Voir l'annexe 3.

31 () Réponse du ministre de l'équipement, des transports et du logement à la question écrite de M. François Liberti, JO, 3 mars 2003, p. 1617.

32 () MM. Bernard Derosier et Christian Philip, Un renforcement significatif de la sécurité juridique des compensations de service public, rapport n° 2619, p. 79.

33 () Voir annexe 5 : Les programmes d'équipements dans le littoral de l'Europe du Nord-Ouest.

34 () Au demeurant, les termes de l'article 7, paragraphe premier, sont dépourvus de toute ambiguïté, puisqu'il précise bien « Au plus tard dix-huit mois après la date visée à l'article 22, tous les fournisseurs de services portuaires présents dans un port exercent leurs activités sous couvert d'une autorisation accordée par l'autorité compétente ».

35 () Source : Lloyd's Register Quality Assurance - France.

36 () Daniel Paul, Les ports européens face aux dérives de la déréglementation, rapport n° 3507, XIème législature, pp. 20 et suivantes.

37 () En 2004, le Ministère des Transports néerlandais et le service de pilotage se sont mis d'accord sur le report de l'ouverture du marché de pilotage. Une nouvelle proposition de loi, qui doit encore être approuvé par la Deuxième Chambre, prescrit que l'accès au marché de pilotage ne sera ouvert qu'après 2019. Avant cette date, le pilotage sera exercé par un monopole. Ainsi, le service de pilotage aura suffisamment de temps pour se préparer à l'ouverture du marché et résoudre la question du régime de préretraite. En outre, les tarifs de pilotage seront surveillés par l'autorité nationale de régulation et de la concurrence (NMa) pendant cette période.

38 () Traduction littérale : confréries.

39 () Les flux de conteneurs progressent régulièrement de 7 % par an environ, soit deux fois plus que le taux de croissance économique qui atteint 2 à 3 %.

40 () Le coût d'un porte-conteneur de la dernière génération est d'environ un milliard de francs.

41 () Par exemple, dans le cas du port de Rotterdam, Maersk et P&O détiennent respectivement 66 % et 50 % des parts dans deux nouveaux terminaux, ce qui est de nature à renforcer la concurrence avec le groupe de manutention ECT déjà installé dans le port. Début août 2005, P&O Nedlloyd a été rachetée par Moller-Maersk.

42 () Il s'agit du rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques : La politique maritime et littorale de la France : les ports (T. III), p. 170, et du rapport public particulier de la Cour des comptes : La politique portuaire française, octobre 1999, p. 18.

43 () Ces divers exemples sont mentionnés par le rapport précité de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques : « La politique maritime et littorale de la France : les ports », p. 171.

44 () Le port de Hambourg a également instauré un système de droits portuaires déterminés en fonction du rendement environnemental des navires. Une diminution de 12% des droits portuaires est accordée aux navires qui utilisent un combustible à faible teneur en soufre ou dont les peintures ne contiennent pas d'oxyde de tributyrine.

45 () Extrait d'un article de M. André Vigarié, Où va la conteneurisation en Europe du Nord-Ouest ? Transports, mai-juin 2005, pp. 163-164.

46 () Avec les constructeurs italiens, Zenha s'impose sur le marché pour les portiques des navires de la classe des 8000 EVP, c'est-à-dire les plus larges. Un portique coûte environ 8 millions d'euros.

47 () Extrait de l'article de M. André Vigarié, Où va la conteneurisation en Europe du Nord-Ouest ? Transports, mai-juin 2005, pp. 158 à 160.

48 () Les multinationales qui intéressent les ports de l'Europe du Nord-Ouest seront analysées ci-après.

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