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No 128
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 juillet 2002.
PROPOSITION DE LOI
tendant à instaurer une régionalisation de la santé.
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
par M. Jean-Luc PRÉEL
et les membres du groupe UDF (1),

(1) Ce groupe est composé de : MM. Jean-Pierre Abelin, Gilles Artigues, Pierre-Christophe Baguet, François Bayrou, Bernard Bosson, Mme Anne-Marie Comparini, MM. Charles de Courson, Stéphane Demilly, Jean Dionis du Séjour, Gilbert Gantier, Francis Hillmeyer, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Olivier Jarde, Jean-Christophe Lagarde, Jean Lassalle, Maurice Leroy, Claude Leteurtre, Hervé Morin, Nicolas Perruchot, Jean-Luc Préel, Jean-François Régère, François Rochebloine, Rudy Salles, André Santini, François Sauvadet, Rodolphe Thomas, Gérard Vignoble.


Députés


Santé.


EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Cette proposition de loi a pour objet de mettre en _uvre la régionalisation de la santé.
Alors que notre système de santé connaît actuellement une crise grave, il est nécessaire de :
- clarifier les relations entre l'Etat, les régions, les caisses;
- développer une politique de santé de proximité prenant en compte les besoins;
- rendre effective une politique de prévention et d'éducation à la santé;
- mettre un terme à la non-fongibilité des enveloppes;
- rendre acteurs tous les professionnels;
- la régionalisation aidera également à résoudre le problème de la démographie médicale.
Elle sera mise en _uvre de manière pragmatique et progressive.
Elle devra s'accompagner d'autres mesures pour rendre notre système de santé plus performant (un vrai ministère de la Santé, un INSEE santé, une réforme de la formation initiale et continue, la généralisation de l'évaluation et de l'accréditation...).
Notre système de soins est l'objet d'un paradoxe, reconnu comme le meilleur au monde, il est au bord de l'explosion. La confiance doit être rétablie. Chaque Français a droit à des soins de qualité.
Nous refusons la poursuite de l'étatisation ou la privatisation, c'est pourquoi nous préconisons une régionalisation vraie réalisant une politique de santé de proximité, prenant en compte les besoins de la population et des professionnels, et des relations basées sur la contractualisation.
Il est en effet nécessaire de rendre les professionnels et les usagers (associations de malades et d'anciens malades) acteurs et responsables.
Quelques considérations préalables :
· La santé est l'une des préoccupations majeures des Français, très attachés à leur système de soins. Nous devons répondre à leur attente.
· La santé ne se limite pas à l'organisation des soins, au curatif, encore moins aux seules dépenses remboursables, mais elle doit prendre en compte tous les facteurs contribuant à l'équilibre, au bien-être de la personne et à son intégration épanouie dans la société.
· Notre système de soins est l'objet d'un paradoxe : reconnu comme l'un des meilleurs au monde par l'OMS, il est confronté à une crise extrêmement grave dont les causes sont clairement identifiées et pour lesquelles nous devons proposer des solutions.
Quelle sont nos préoccupations?
1re préoccupation : permettre l'accès de tous à des soins de qualité dans le cadre d'un financement solidaire sur l'ensemble du territoire. Ce souci est partagé par beaucoup. Sa mise en _uvre n'est pas simple.
2e préoccupation : maintenir et accroître la liberté ce qui en principe a pour corollaire la responsabilité. Comment responsabiliser chacun des acteurs professionnels mais aussi les patients? Par le contrat, établi après un dialogue confiant puis respecté.
3e préoccupation : répondre aux besoins de la population. Par la régionalisation permettant de les évaluer au mieux et par des choix effectués par tous les acteurs au sein des conseils régionaux de santé élus.
4e préoccupation : la qualité, à laquelle chacun des Français a droit avec accès aux nouvelles thérapeutiques. Elle passe clairement par la formation initiale et continue, par l'évaluation des pratiques : les références médicales opposables (RMO), le bon usage du médicament. Ces préoccupations ne sont pas exhaustives mais il ne faut pas les perdre de vue si nous voulons rénover notre organisation des soins.
Aujourd'hui, nous sommes devant une situation paradoxale.
Alors que notre système est plutôt performant, il est soumis à une crise extrêmement grave. Tous les secteurs sont touchés : ambulatoire, cliniques, hôpitaux. Tous les professionnels sont désabusés et ont perdu confiance.
1. Notre système est plutôt performant pour le curatif...
L'OMS nous a même placés à la première place au monde. C'est peut-être en partie contestable mais ne boudons pas notre plaisir, acceptons notre médaille d'or, même si nous sommes médiocres pour la prévention.
Mais il est relativement coûteux, environ 137,4 milliards d'euros de dépenses annuelles pour le soin dont 113 milliards d'euros pour l'ONDAM (dépenses remboursées par l'assurance maladie). Il représente 9,7 % du PIB, ce qui nous classe à la cinquième place mondiale après les États-Unis, le Canada, la Suisse, l'Allemagne.
Les dépenses de soins correspondent, comme le dit Claude le Pen, à «un bien supérieur», c'est-à-dire qu'elles augmentent naturellement plus vite que le revenu, en raison d'un choix des individus qui veulent bénéficier des nouvelles techniques et être soignés par les nouvelles molécules.
La dépense de soins tend donc à augmenter dans la dépense des ménages, plus vite que la nourriture, l'habillement... Il faut en tenir compte.
Notre système de soins autorise encore une grande liberté de choix du médecin, de son lieu d'hospitalisation publique ou privée, de prescription, sans connaître de files d'attente pour des maladies sérieuses, comme dans de très nombreux pays : Angleterre, Canada, Danemark.
Donc, globalement, le système est satisfaisant. Il convient plutôt de le conforter que de vouloir faire table rase.
2. ...mais il connaît une crise extrêmement grave
Crise dont les causes sont connues de tous et pourtant non corrigées.
- Nous sommes médiocres pour la prévention en raison de multiples intervenants non coordonnés (chaque caisse, chaque mutuelle, plusieurs ministères, associations et ligues), chacun y consacrant un tout petit budget.
- Il n'y a pas de prise en compte des besoins, et donc pas d'adéquation offres/besoins, il existe de grandes inégalités en terme de morbidité, mortalité, moyens financiers.
- Les professionnels libéraux sont désabusés, ils refusent d'être désignés comme boucs émissaires. Ils n'ont plus confiance envers les décideurs successifs. A la question «conseilleriez-vous cette profession à vos enfants?» la réponse est non à 56 % pour les médecins et 85 % pour les infirmières. Ceux qui partent à la retraite ne trouvent pas de remplaçants.
- La crise hospitalière est profonde :
· les moyens financiers ne sont pas attribués en fonction de l'activité réelle, le surcoût des traitements chimiothérapique n'est pas pris en compte;
· l'insuffisance des crédits conduit à des reports de charge et à un retard dans les investissements;
· l'afflux des malades aux urgences;
· les problèmes de la démographie médicale (postes non pourvus et spécialités sinistrées) et paramédicale aggravés par l'application irréfléchie des 35 heures;
· l'absence de réel responsable : C.A.? directeur?
- Les établissements privés sont pour la plupart dans une situation critique : avec une rentabilité quasi nulle, une pénurie de personnel aux rémunérations inférieures à celles des hôpitaux, de nombreuses restructurations indispensables.
- Le médicament : les médicaments innovants sont taxés, le service médical rendu n'est pas pris en compte la recherche en France recule.
- La non-fongibilité des enveloppes est un sérieux problème avec la séparation artificielle : de l'ambulatoire et des établissements, du sanitaire et du médico-social.
- Pour couronner le tout, le principe de précaution qui consiste à ouvrir en grand et en permanence le parapluie en refusant de considérer que toute action comporte un risque, notamment en médecine.
Quelles réponses souhaitons nous apporter : la régionalisation, la responsabilisation, la contractualisation?
· L'organisation : l'étatisation est quasi achevée.
Alors que la réforme Juppé précisant le rôle de chacun des partenaires institutionnels : Gouvernement - Parlement - caisses - professionnels était basée sur la contractualisation, l'étatisation est quasi achevée.
1. Le paritarisme n'est plus qu'un souvenir : il n'a plus de justification dans la branche maladie
Autant il est justifié et doit être renforcé dans la branche retraite base et complémentaire, dans l'assurance chômage, pour les accidents du travail, qui sont directement liés au travail et financés par des cotisations salariales et patronales, autant il est remis en cause pour la branche maladie.
Le départ du MEDEF sans doute définitif le condamne.
Les soins concernent tous les Français de leur naissance à leur mort quelque soit leur activité et donc sans lien avec le travail salarié. Il n'y a donc aucune justification à une gestion paritaire, d'autant que :
- Le financement n'est plus assuré par les cotisations salariées et patronales. Les cotisations salariées ont été remplacées par la CSG prélevée (5,1 % pour la maladie) sur l'ensemble des revenus, y compris sur le patrimoine et les revenus de remplacement, 47,63 milliards d'euros.
- Les cotisations patronales (12,80 % : 47,32 milliards d'euros) connaissent de nombreuses exonérations en principe compensées par l'Etat : 15,2 milliards d'euros. L'Etat affecte à l'assurance maladie ou au financement des 35 heures divers impôts et taxes (alcool, tabac, CSSS), 13,7 milliards d'euros.
- La CMU : 5 à 6 millions de personnes sont couvertes sans lien avec le versement de cotisations mais uniquement sur le principe de résidence.
2. Le ministre est responsable de la quasi-totalité des soins : sans rendre compte de ses décisions au Parlement
Aujourd'hui, le ministre est responsable des hôpitaux, des cliniques, du médicament (diverses agences technocratiques), de la nomenclature, de l'ONDAM, décide seul des enveloppes et sous-enveloppes régionales, enfin, valide les décisions de la CNAM. Seul l'ONDAM est voté souvent à la virgule près par le Parlement. De quoi n'est-il pas responsable? Et curieusement en régime démocratique, il ne rend compte d'aucune de ses décisions devant le Parlement.
3. La CNAM : quelle est sa légitimité?
Les conseils d'administration et de surveillance sont désignés et non élus. Y siège curieusement la mutualité (complémentaire) dont les intérêts sont opposés mais pas l'assurance ou les institutions de prévoyance.
Elle se voit affecter arbitrairement par le ministre les dépenses déléguées (honoraires, frais de transport, analyses) pour 2001 : 22,85 milliards d'euros ODD.
A charge de la CNAM de répartir cette enveloppe entre les diverses catégories de professionnels, de suivre l'évolution, de faire un rapport tous les quatre mois et de présenter au ministre des propositions permettant de respecter l'enveloppe.
Le ministre décide de valider partiellement ou non les propositions, il lui arrive de les annuler. De quoi la CNAM est-elle responsable?
4. Le Parlement
Avant la réforme Juppé de 1995, le Parlement ne pouvait discuter des dépenses sociales du pays, pourtant supérieures au budget de l'Etat.
La réforme instituant un débat au Parlement a donc constitué un progrès.
Elle prévoyait une préparation du débat et la contractualisation : les conférences régionales de santé et la conférence nationale devaient permettre au Gouvernement de préparer son projet de loi puis un débat sur la santé était prévu : (le rapport annexé) le Parlement votait l'ONDAM, enfin la contractualisation devait organiser le partage des responsabilités entre l'Etat et les caisses, les caisses nationales et les caisses locales, les caisses et les professionnels.
En réalité, le Gouvernement ne prend pas en compte les travaux des conférences régionales, qui sont d'ailleurs des grand-messes, la conférence nationale n'est pas l'émanation des conférences régionales, le Gouvernement présente l'ONDAM comme un taux d'augmentation pifométrique décidé par Bercy, appliqué aux dépenses prévisionnelles (en octobre) de l'année en cours, taux restrictif sans lien avec les besoins, l'ONDAM est voté sans débat préalable, le débat sur le rapport est renvoyé en fin de discussion, sans amendement, à la virgule près : 113 milliards d'euros pour 2002.
Le ministre décide ensuite seul sans en référer au Parlement, et sur quels critères? des diverses enveloppes nationales et régionales. Les parlementaires les découvrent dans la presse...
En cas d'augmentation des dépenses, en cours d'année, il n'est pas prévu de loi rectificative.
Enfin, l'absence de fongibilité des enveloppes ambulatoires, établissements, médico-social représente un réel problème.
Il est indispensable que :
1° Nous disposions d'un vrai ministère de la santé. Il sera un interlocuteur clairement désigné, responsable, chargé de la politique de santé publique, du financement et de la formation.
2° Que nous reconnaissions que les dépenses de santé sont un «bien supérieur» et augmentent éventuellement plus vite que le PIB, l'ONDAM doit être fixé à un niveau réaliste, tenant compte des besoins, définis au niveau régional, des innovations technologiques, du vieillissement de la population.
3° L'organisation : nous refusons l'étatisation et la privatisation.
Nous proposons une réelle régionalisation : c'est l'objet de cette proposition de loi.
Cette régionalisation permettra de :
- de prendre en compte les besoins des usagers et des professionnels;
- de réaliser une politique de santé de proximité;
- d'impliquer les professionnels et les usagers en les rendant acteurs.
La région est le niveau pertinent pour organiser la complémentarité des équipements (greffe, neurochirurgie, chirurgie cardio-vasculaire, néo-natalogie...).
D'ailleurs existent déjà dans le cadre d'une «déconcentration» de nombreuses structures régionales : ARH, ORS, URCAM, conférence régionale, CROSS, SROS, comité régional des politiques de santé.
Trois remarques préalables sont cependant nécessaires :
- Régionaliser ne veut pas dire que l'Etat ne doit pas assurer la solidarité nationale, les grandes orientations de santé et veiller à l'équité, bien au contraire.
- Régionaliser ne conduit pas à l'inégalité. En effet, aujourd'hui, nous avons une «politique nationale», et pourtant existent de nombreuses inégalités en terme de mortalité, morbidité, de financement, de démographie des professionnels. On peut même penser que chaque région aura à c_ur de corriger ces inégalités.
- Plusieurs pays se sont orientés vers la régionalisation, Espagne, Italie, et s'en portent plutôt bien.
- Enfin, si la taille des régions est inégale, attendre un redécoupage administratif pour régionaliser reviendrait à renvoyer aux calendes grecques cette réforme indispensable.
Comment régionaliser? Les principes : partir des besoins, associer tous les acteurs, contrôler l'exécutif.
1° Premier maillon : renforcer les observatoires régionaux de la santé : leur donner les moyens humains et financiers pour étudier la morbidité, la mortalité, les conditions souhaitables pour une bonne santé, et créer des observatoires régionaux de la démographie médicale et paramédicale.
2° L'échelon essentiel de la régionalisation est la création de conseils régionaux, élus par collèges. Tous les acteurs de la santé seront invités à y participer : représentants des établissements de soins, des professionnels libéraux, des associations de malades et d'anciens malades et ils devront être élus pour avoir la légitimité, par collèges, pour assurer une représentation équitable.
Ses trois missions :
- estimer les besoins à partir des travaux de l'ORS;
- veiller à l'adéquation offre/besoins;
- contrôler l'exécutif régional, ce qui est essentiel en démocratie.
En effet, qui contrôle aujourd'hui l'ARH? à qui rend-il compte de ses décisions?
Le conseil régional de santé se réunira en séance plénière 3 à 4 fois par an et réunira en son sein des commissions qui travailleront tout au long de l'année.
3° L'exécutif : l'agence régionale de santé regroupera l'hôpital, les cliniques, l'ambulatoire, la prévention.
Il sera composé d'un conseil d'administration : élus par le conseil régional de santé, élus régionaux, financeurs, y compris les complémentaires.
Le directeur à terme pourrait être nommé par la région comme elle nomme aujourd'hui son directeur des services.
La mise en place de cette régionalisation se fera de manière pragmatique par l'expérimentation en prévoyant des domaines de compétence croissants :
- premier niveau : responsable de la prévention et de l'éducation de la santé;
- deuxième niveau : responsabilité de la formation professionnelle médicale et paramédicale et donc de la démographie des professionnels. Les régions sont déjà responsables de la formation professionnelle. Il conviendra de prévoir un numerus clausus régional par spécialités en s'appuyant sur les travaux de l'observatoire régional de la démographie. Il s'agit là de l'un des moyens de répondre aux problèmes de démographie. 75 % des professionnels s'installent en effet dans les régions de formation. (Ils ont tissé un réseau professionnel, ils se sont mariés...);
- troisième niveau : les investissements : murs et équipements. Les régions ont construit et rénové les lycées, faisons leur confiance pour répondre aux besoins et investissements;
- quatrième niveau, le plus vite possible : la santé régionale dans son ensemble réalisera l'aboutissement de la régionalisation.
Le problème du financement :
- le plus simple est la régionalisation de l'ONDAM voté par le Parlement sur des critères objectifs (démographie, morbidité) et abondement par la région par ses ressources propres;
- il serait possible d'envisager d'affecter à la santé la CSG collectée dans la région abondée éventuellement par la région ou la création d'un impôt régional dédié à la santé avec suppression du financement actuel.
4° Le Parlement :
Son rôle doit être renforcé. Il est nécessaire de prévoir au printemps un débat d'orientation définissant à partir des travaux des conseils régionaux de santé et de la Conférence nationale les priorités de santé avec un vote sur un texte amendable puis débat et vote à l'automne sur le financement de ces priorités et la répartition des enveloppes régionales avec éventuellement présentation en cours d'année au printemps d'une loi de financement rectificative.
En démocratie, et contrairement à la pratique actuelle, le ministre doit rendre compte de ses décisions au Parlement.
5° La Conférence nationale de la santé doit être l'émanation des conseils régionaux de santé, ses représentants doivent être élus.
Elle sera chargée de préparer, à partir des priorités régionales, le rapport annuel proposant au Gouvernement et au Parlement les priorités nationales.
6° La prévention doit devenir une réelle priorité :
- il est nécessaire de coordonner les différents intervenants dans une agence nationale et de définir une politique pluriannuelle à partir de la mortalité prématurée évitable;
- de prévoir le vote par le Parlement parallèlement à l'ONDAM d'une enveloppe dédiée à la prévention (aujourd'hui, 1984 euros par an et par habitant pour le curatif et 3,05 euros pour la prévention);
- de régionaliser l'enveloppe prenant en compte les besoins définis par le conseil régional de santé permettant ainsi une action de proximité sur le terrain mobilisant tous les acteurs;
- la prévention sera intégrée au sein de l'agence régionale de santé (ARS) regroupant les établissements, l'ambulatoire, la prévention, et sera contrôlée par le conseil régional de santé élu par collèges;
- les taxes prélevées sur l'alcool et le tabac seront en priorité affectées à la prévention de ces fléaux et non aux 35 heures;
- les actions de prévention et d'éducation doivent se faire au plus près du terrain, départements, cantons, établissements d'enseignements en coordonnant tous les acteurs.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

I. - Il est inséré, dans le titre II de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la compétence entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, après la section IV, une section IV bis ainsi rédigée :

«Section IV bis
«Régionalisation de la santé

«Art. 86 bis. - La région assure à titre principal la mise en _uvre des actions relatives à la santé. L'Etat demeure compétent en ce qui concerne les actions relevant de la solidarité nationale et qui ne peuvent à ce titre être rattachés à une région.
«Les transferts de compétence définis par l'alinéa précédent prennent effet au plus tard le 31 décembre 2005. Jusqu'à cette date, certaines compétences de l'Etat peuvent être transférées à la région, à titre expérimental, par la voie de conventions pluriannuelles entre l'Etat et la région concernée, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, prioritairement dans les domaines suivants : prévention et éducation à la santé, formation initiale et continue et régulation démographique des personnels médicaux et paramédicaux, infrastructures des établissements de santé publics.»
II. - Les transferts de compétence prévus au I du présent article s'accompagnent du transfert des services correspondants dans les conditions définies aux articles 8 et 9 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 susvisée.
III. - Les transferts de compétences prévus au I du présent article s'accompagnent au profit des régions du transfert des ressources nécessaires à l'exercice normal de ces compétences dans les conditions définies à l'article 5 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 susvisée.
A compter du 31 décembre 2005, il est transféré au profit des régions une part du produit de la contribution sociale généralisée visée, à due concurrence des charges pour les régions, créées par la présente loi.
Cette part évolue comme le produit global de la contribution sociale généralisée.
A compter du 31 décembre 2005, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, des objectifs régionaux pour les dépenses d'assurance maladie sont fixés et une enveloppe régionale est déterminée sur des critères objectifs (âge, morbidité, mortalité).
IV. - Avant le 31 décembre 2003, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport relatif aux expériences faites par chaque région, en application du I du présent article. Y sont également analysées les perspectives de généralisation de la régionalisation de la santé.

Article 2

L'article L. 1411-3 du code de la santé publique est ainsi nouvellement rédigé :
«I. - Le conseil régional de santé est l'organisme essentiel pour définir la politique de proximité. Tous les acteurs de la santé sont représentés de façon à assurer une représentation équilibrée des différentes professions. La formation plénière comprend des représentants, élus par collège, des collectivités territoriales, des professionnels de santé libéraux, médicaux et paramédicaux, des établissements publics et privés, des patients. Elle élit en son sein le président du conseil régional de santé.
«II. - Le conseil régional assure trois missions :
«- Estimer les besoins à partir des travaux des ORS, veiller à l'adéquation de l'offre aux besoins et contrôler l'exécutif régional, l'agence régionale de santé.
«- La mise en place se fait de manière pragmatique par l'expérimentation, en prévoyant des domaines de compétence croissants : la prévention et l'éducation à la santé, la formation professionnelle médicale et paramédicale avec un numerus clausus régional par spécialité, ce qui permettra de répondre aux problèmes de démographie, les investissements, enfin au stade ultime, compétence sur la totalité de la santé régionale.
«III. - Le mode d'élection et la représentation est définie par décret.»

Article 3

Après l'article L. 1411-3 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1411-3-1 ainsi rédigé :
«I.- A compter du 31 décembre 2005, est mis en place dans chaque région un organisme dénommé agence régionale de santé, exécutif régional, qui est compétent pour : l'hôpital, les cliniques, l'ambulatoire, la prévention.
«Elle réalise ainsi la nécessaire coordination avec la fongibilité des enveloppes. Son rôle consiste à :
«- proposer et mettre en _uvre les priorités de santé publique selon les orientations du conseil régional de santé;
«- traiter globalement de l'ensemble des problèmes de planification sanitaire;
«- soutenir la création et le fonctionnement de réseaux de santé publique, de prévention et de soins;
«- elle est aussi consultée sur l'affectation de l'enveloppe régionale budgétaire fixée par la loi de financement de la sécurité sociale.
«II. - L'Agence régionale de santé réunit l'ensemble des acteurs suivants :
«- agence régionale de l'hospitalisation;
«- union régionale des caisses d'assurance maladie;
«- représentants des établissements de santé publics et privés;
«- élus du conseil régional et des conseils généraux;
«- représentants de l'ordre des médecins, des ordres des infirmières, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes, podologues-pédicures, orthoptistes;
«- représentants des associations de malades et anciens malades.
«III. - L'Agence régionale de santé est administrée par une commission exécutive et dirigée par un directeur nommé par le conseil régional. Il rend compte de son action devant le conseil régional de la santé.»

Article 4

L'article L. 1411-1-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
«I. - La conférence nationale de santé est constituée des représentants élus des conseils régionaux de santé.
«II. - La conférence nationale de santé élabore un rapport annuel, avant le 1er mars de chaque année, à partir des priorités définies par les conseils régionaux de santé qui sera ensuite remis au Gouvernement.
«III. - Le mode d'élection et la représentation sera définie par décret.»

Article 5

Chaque année au printemps, le Gouvernement présente un projet de loi d'orientation préparée à partir des travaux des conseils régionaux de santé et de la conférence nationale. Ce
projet de loi définit les priorités de santé qui seront financées par la loi de financement de la sécurité sociale.

Article 6

Les pertes de recettes et les charges nouvelles pour l'Etat et les régimes sociaux résultant de l'application de la présente proposition de loi sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle à ces mêmes droits.
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N° 0128 - Proposition de loi tendant à instaurer une régionalisation de la santé (M. Jean-Luc Préel)


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