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N° 1133

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 15 octobre 2003.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer le dispositif de lutte
contre les navires pollueurs
en mer Méditerranée.

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire,
à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par MM. Jean-Claude GUIBAL, Jean-Claude BEAULIEU, Jacques-Alain BÉNISTI, Jean-Louis BERNARD, André BERTHOL, Jean-Marie BINETRUY, Loïc BOUVARD, Michel BOUVARD, Philippe BRIAND, Bernard BROCHAND, François CALVET, Pierre CARDO, Mme Joëlle CECCALDI-RAYNAUD, MM. Jean-Louis CHRIST, Philippe COCHET, Georges COLOMBIER, Mme Geneviève COLOT, MM. François CORNUT-GENTILLE, Louis COSYNS, Jean-Michel COUVE, Charles COVA, Bernard DEFLESSELLES, Lucien DEGAUCHY, Francis DELATTRE, Jean-Marie DEMANGE, Léonce DEPREZ, Jean-Jacques DESCAMPS, Eric DIARD, Jean-Pierre DOOR, Dominique DORD, Philippe DUBOURG, Nicolas DUPONT-AIGNAN, Christian ESTROSI, Pierre-Louis GAGNIEZ, Francis FALALA, Jean-Michel FERRAND, Daniel FIDELIN, Jean-Claude FLORY, Marc FRANCINA, Mme Arlette FRANCO, MM. Claude GAILLARD, Jean-Jacques GAULTIER, Guy GEOFFROY, Franck GILARD, Bruno GILLES, Jean-Pierre GIRAN, Claude GOASGUEN, François GROSDIDIER, Louis GUÉDON, Jean-Jacques GUILLET, Emmanuel HAMELIN, Michel HERBILLON, Pierre HÉRIAUD, Jean-Yves HUGON, Yvan LACHAUD, Robert LAMY, Edouard LANDRAIN, Pierre LASBORDES, Dominique LE MÈNER, Jacques LE NAY, Jean-Marc LEFRANC, Michel LEJEUNE, Pierre LELLOUCHE, Céleste LETT, Lionnel LUCA, Daniel MACH, Richard MALLIÉ, Thierry MARIANI, Mme Muriel MARLAND-MILITELLO, MM. Jean MARSAUDON, Philippe Armand MARTIN, Mme Henriette MARTINEZ, MM. Alain MARTY, Jacques MASDEU-ARUS, Christian MÉNARD, Alain MERLY, Damien MESLOT, Gilbert MEYER, Pierre MORANGE, Mme Nadine MORANO, MM. Etienne MOURRUT, Alain MOYNE-BRESSAND, Robert PANDRAUD, Jacques PÉLISSARD, Philippe PEMEZEC, Pierre-André PÉRISSOL, Bernard PERRUT, Mme Bérengère POLETTI, M. Axel PONIATOWSKI, Mme Josette PONS, MM. Daniel PRÉVOST, Christophe PRIOU, Didier QUENTIN, Michel RAISON, Jean-Luc REITZER, Jacques REMILLER, Mme Juliana RIMANE, MM. Jérôme RIVIÈRE, Jean ROATTA, Camille DE ROCCA SERRA, Philippe ROUAULT, Jean-Marc ROUBAUD, André SAMITIER, Bernard SCHREINER, Jean-Marie SERMIER, Georges SIFFREDI, Guy TEISSIER, André THIEN AH KOON, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, Léon VACHET, Christian VANNESTE, Jean-Sébastien VIALATTE, Philippe VITEL, Michel VOISIN et Mme Marie-Jo ZIMMERMANN

 

Députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis dix ans, de nombreux textes à vocation répressive ou dissuasive contre les navires pollueurs sont entrés en application. Ils se sont succédés à un rythme soutenu, directement lié à celui des trop nombreuses marées noires et pollutions qui se sont produites jusqu'ici. En dépit de ces textes, les dégazages ou déballastages sauvages restent malheureusement d'actualité. Il y a peu de temps encore, c'est une partie du littoral de la Côte d'Azur, de Monaco à Menton, qui a été polluée par une nappe d'hydrocarbures provenant probablement d'un déballastage. Les moyens mis rapidement en œuvre ont permis d'en limiter les effets et les plages ont été nettoyées. Ces « navires voyous » sont néanmoins très difficilement repérables et restent par conséquent souvent impunis.

Les études qui ont été présentées en mars 2002 lors de la semaine internationale consacrée à la sécurité maritime et à la protection de l'environnement, montrent que les pollutions accidentelles par hydrocarbures ne représentent qu'une faible part de la pollution totale. L'essentiel de la pollution provient des déballastages sauvages. Ils auraient pour l'environnement des conséquences huit à dix fois supérieures à celles causées par accident. Selon certaines estimations, ces pratiques pourraient représenter chaque année une pollution équivalente à dix fois celle due à « l'Erika ». Entre 500 et 1 000 observations de pollutions par dégazages sont faites en moyenne par an dans la Manche, en mer du Nord et en mer Baltique, et entre 1 000 et 1 500 en Méditerranée. C'est 1,5 million de tonnes d'hydrocarbures qui sont ainsi déversées chaque année en Méditerranée, soit douze fois l'équivalent de la cargaison du « Prestige ». Ces actes doivent être sévèrement réprimés.

Malgré les nombreuses mesures prises afin de renforcer notre arsenal répressif, on constate qu'un très faible taux des cas de déballastages sauvages est finalement sanctionné par nos tribunaux. Les opérations « coup-de-poing » menées au lendemain du naufrage de « l'Erika » par les services de douanes et de la marine nationale en sont l'illustration. Ces opérations avaient eu lieu entre les 18 et 23 février 2000, et les 13 et 14 mars suivants. Pour la première période, sur les trente-neuf actes de pollution constatés, seuls trois ont été sanctionnés. Pour la seconde période, un seul sur les neuf dégazages observés a pu être réprimé. La loi no 2001-380 du 3 mai 2001 relative à la répression des rejets polluants a certes renforcé les sanctions applicables aux contrevenants, mais les faits commis restent impunis, notamment parce qu'il est particulièrement difficile de réunir des éléments probants devant les tribunaux.

Il est par ailleurs essentiel que la surveillance satellitaire de la pollution maritime soit mise en place. Cette option a été étudiée par le projet RAMSES, réalisé dans le cadre du cinquième programme-cadre communautaire de recherche et de développement (PCRD) couvrant la période 1998-2002. Ce projet a montré la possibilité de détecter, dans certaines conditions, des nappes ou des films d'hydrocarbures par l'imagerie satellite radar (SAR). Le procédé retenu présente cependant des insuffisances : la faible périodicité des observations permet aux contrevenants de prévoir les zones non surveillées. Par ailleurs, le taux de fausses détections peut être élevé. D'autres réponses sont actuellement envisagées, notamment avec le projet franco-italien ORFEO (Optical and Radar Federated Earth Observation), qui doit présenter une solution adaptée à l'horizon 2007. L'initiative européenne GMES (Global Monitoring of Environment and Security) a également pour objectif de mettre en œuvre, d'ici à la fin de la décennie, des services environnementaux principalement fondés sur des observations spatiales et s'est fixée pour priorité la détection des nappes de pétrole. Le système ORFEO pourrait alors constituer la clé de voûte des travaux menés dans le cadre du GMES. Bien que l'instauration d'un système de détection des pollutions maritimes par satellite ne soit pas envisageable à court terme, il n'en constitue pas moins une perspective d'avenir prometteuse, qui doit être encouragée tant en Méditerranée qu'au niveau international.

Afin de renforcer la lutte contre les pollutions maritimes, deux voies sont proposées. La première consiste à créer un corps de gardes-côtes qui, placé sous l'autorité du Premier ministre, disposera de moyens et de pouvoirs adaptés à la surveillance du trafic maritime et à la lutte contre les déballastages sauvages. La pollution ne s'arrêtant ni aux frontières ni aux limites territoriales des mers, il est bien évident qu'un tel dispositif ne doit pas rester isolé. La France doit prendre les initiatives nécessaires au sein de l'Union européenne et des pays du pourtour méditerranéen pour que de nouvelles règles de sécurité soient définies. La création dans notre pays d'un corps de gardes-côtes doit s'entendre comme le prélude à la création d'un corps spécialisé à l'échelon européen, qui pourra ainsi effectuer sa mission sur l'ensemble des mers des pays côtiers.

La deuxième proposition consiste à subordonner l'entrée de tout navire dans les eaux territoriales ainsi que dans les ports français à la présentation d'un certificat de dégazage délivré par un organisme agréé par la France. Il faut rappeler que l'article 14 de la loi no 2001-43 du 16 janvier 2001 « portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports » a eu pour objet de compléter le code des ports maritimes par deux articles nouveaux (art. L. 325-1 et L. 325-2) qui obligent les navires à déposer les déchets d'exploitation et les résidus de cargaison avant de quitter le port. L'entrée en vigueur de ce dispositif a été fixée au premier jour du sixième mois suivant la publication du décret en Conseil d'Etat qui doit préciser les modalités d'application de l'article L. 325-1. Plus de deux ans après l'adoption de cette loi par le Parlement, le décret prévu n'est toujours pas publié...

Il est donc nécessaire de ne pas laisser se prolonger une situation qui place notre pays dans l'insécurité et d'adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Il est créé un corps de garde-côtes placé sous l'autorité du Premier ministre. Chargés de la surveillance en mer, les membres de ce corps sont habilités à exercer et faire exécuter les mesures de contrôle et de coercition définies par les conventions internationales, la législation et la réglementation françaises. Par tous les moyens techniques adaptés, ils contrôlent les navires entrant dans la zone économique exclusive et dans la zone de protection écologique définie dans la loi no 2003-346 du 15 avril 2003. Ils procèdent à l'examen en mer de tout navire suspect, décident du déroutement du navire vers un port français ou une zone d'attente ou de mouillage et, le cas échéant, procèdent à l'immobilisation du navire.

Article 2

Aucun navire ne peut pénétrer dans la zone de protection écologique définie dans la loi no 2003-346 du 15 avril 2003 relative à la création d'une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République, non plus que dans les ports de cette zone, s'il ne détient un certificat de dégazage délivré par un organisme agréé par l'Etat français.

La liste des organismes habilités à délivrer le certificat de dégazage est fixée par un décret en Conseil d'Etat.

Article 3

Est puni d'une amende de 100 000 euros le fait pour tout capitaine ou responsable à bord de ne pas présenter de certificat de dégazage.

Article 4

Tout navire qui n'est pas en mesure de se conformer aux dispositions prévues par l'article 2 peut être arraisonné et conduit dans un port disposant d'installations adéquates pour y déposer ses déchets d'exploitation et ses résidus de cargaison.

Article 5

Les charges résultant pour l'Etat des dispositions de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.

Composé et imprimé pour l'Assemblée nationale par JOUVE
11, bd de Sébastopol, 75001 PARIS

Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118037-8
ISSN : 1240 - 8468

En vente au Kiosque de l'Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21

N°1133-Proposition de loi de M. Guibal visant à renforcer le dispositif de lutte contre les navires pollueurs en mer Méditerranée.


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