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le 27 novembre 2002

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N° 395

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 novembre 2002.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE LOI (N° 380) DE MM. JEAN-MARC AYRAULT, CHRISTOPHE CARESCHE, ALAIN VIDALIES ET LES MEMBRES DU GROUPE SOCIALISTE, visant à protéger certaines catégories d'étrangers des mesures d'éloignement du territoire.

PAR M. CHRISTOPHE CARESCHE,

Député.

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Étrangers.

INTRODUCTION 5

1. L'éloignement du territoire : état du droit 6

a) L'interdiction du territoire 6

b) L'expulsion 9

2. Un régime de protection insuffisant 10

a) Une législation dépassée 10

b) Des atteintes disproportionnées à la vie privée et familiale 12

3. Les propositions : protéger les étrangers qui ont un lien fort et particulier avec la France contre les mesures d'éloignement du territoire 15

a) Les mesures proposées 16

b) La discussion générale 17

TABLEAU COMPARATIF 21

MESDAMES, MESSIEURS,

Il est Algérien, il a 32 ans : il vit dans notre pays depuis l'âge de 11 ans, il est marié avec une Française et père de six enfants français. Si son histoire n'avait pas été rendue publique, il aurait été expulsé, il y a quelques semaines, vers un pays qu'il ne connaît plus, à l'issue de la peine de détention à laquelle il a été condamné.

Un autre Algérien, de 40 ans, arrivé en France à l'âge de quatre ans et père de deux enfants français, a vécu durant quinze ans dans la « clandestinité » pour échapper à un arrêté d'expulsion. Les médias ont également relaté son histoire.

Tous n'ont pas eu la « chance », comme eux, d'obtenir un sursis en étant assignés à résidence.

Un Congolais, qui vivait en France depuis 1991, marié avec une réfugiée politique, père de trois enfants nés sur notre sol, a été condamné à huit mois de prison et à une interdiction définitive du territoire : depuis qu'il a atterri à l'aéroport de Kinshasa, que devient sa famille ? Un Algérien de 33 ans, qui vivait en France depuis l'âge de neuf ans, marié avec une Française et père d'une petite fille, a été condamné à une peine d'emprisonnement sans interdiction du territoire : à sa sortie de prison, il a été expulsé.

Ces parcours conduisent à s'interroger sur la façon dont les autorités administratives et judiciaires de notre pays prennent en compte la vie privée et familiale des étrangers qu'elles décident d'éloigner.

Ceux qui sont reconnus coupables de certaines infractions au code pénal ou à l'ordonnance du 2 novembre 1945 peuvent se voir infliger, à titre principal ou complémentaire, par une décision de justice, une interdiction, temporaire ou définitive, du territoire français. Ceux dont la présence menace l'ordre public peuvent faire l'objet d'une mesure de police définitive : l'expulsion.

Le principe de ces deux régimes juridiques n'est pas en cause. En effet, l'interdiction du territoire peut être une peine appropriée pour certaines infractions, sous réserve que leurs auteurs n'aient pas de liens particuliers avec la France. Une réflexion pourrait cependant être engagée à ce sujet sur la base des recommandations de la « commission Chanet » (1), qui proposait de réserver les interdictions définitives aux crimes passibles de peines perpétuelles et, s'agissant des infractions au séjour, de ne les prononcer qu'en cas de récidive. Quant à l'expulsion, elle peut être nécessaire pour garantir l'ordre public.

Quoi qu'il en soit, lorsque sont en cause des étrangers qui, en raison de l'ancienneté de leur présence ou de leurs attaches personnelles en France, sont sociologiquement, humainement et culturellement liés à notre pays, une interdiction du territoire, qu'elle soit temporaire ou a fortiori définitive, ou une expulsion, représente une atteinte disproportionnée au respect dû à la vie privée et familiale. C'est alors que l'on peut parler de « bannissement », comme dans l'ancien droit, ou de « double peine », l'éloignement s'ajoutant souvent à l'emprisonnement.

Ces personnes doivent être protégées contre les mesures d'éloignement du territoire.

Sans doute cette réforme aurait-elle dû être mise en oeuvre plus tôt : la gauche peut regretter de ne pas l'avoir engagée sous la précédente législature. Elle s'inscrit, néanmoins, dans le prolongement des avancées consacrées par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et la circulaire du 17 novembre 1999 (CRIM 99 - 13 E1) de la garde des sceaux. De plus, selon M. Etienne Pinte, député UMP, il serait possible, aujourd'hui, d'en débattre de façon « dépassionnée, au-delà des clivages politiques », ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent (2). Le ministre de l'intérieur a lui-même indiqué, récemment, qu'il ne croyait pas à la valeur de la double peine pour des personnes qui ont tissé des liens avec la France (3).

Faisant usage de la faculté qui lui est offerte par l'article 48, alinéa 3 de la Constitution, le groupe socialiste a donc demandé l'inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale de la proposition de loi n° 380 visant à protéger certaines catégories d'étrangers des mesures d'éloignement du territoire.

1. L'éloignement du territoire : état du droit

Il existe, en droit, une distinction entre les interdictions du territoire français, provisoires ou définitives, prononcées par une décision de justice, et les arrêtés ministériels d'expulsion, par nature définitifs, qui résultent d'une décision de police.

a) L'interdiction du territoire

L'interdiction du territoire est régie par les dispositions de l'article 131-30 du code pénal, qui dispose que : « Lorsqu'elle est prévue par la loi, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime ou d'un délit » (4). Infligée à titre principal ou complémentaire, elle entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant à l'expiration de sa peine privative de liberté.

· L'interdiction du territoire a été introduite dans notre droit par la loi n° 70-1320 du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et à la répression du trafic et de l'usage illicite des substances vénéneuses, pour certaines infractions à la législation des stupéfiants. Depuis, son champ a été régulièrement étendu.

Ainsi, la loi n° 73-548 du 27 juin 1973 a prévu qu'elle pourrait être prononcée pour une durée pouvant aller jusqu'à dix ans à l'encontre de tout étranger condamné pour certaines infractions à la législation sur l'hébergement collectif.

La loi n° 81-973 du 29 octobre 1981 a étendu son application aux cas de récidive d'infraction aux règles d'entrée et de séjour des étrangers en France : ce régime juridique a été durci par la loi n° 85-10 du 3 janvier 1985 et, surtout, n° 86-1025 du 9 septembre 1986 (suppression de la condition de récidive et allongement de la durée maximale de l'interdiction du territoire). Aujourd'hui, elle est prévue par plusieurs articles de l'ordonnance du 2 novembre 1945, pour une durée comprise entre trois et dix ans : l'article 19, en cas d'entrée ou de séjour irrégulier sur le territoire ou de dépassement de la durée de validité du visa ; l'article 21, en cas d'aide à l'entrée ou au séjour irrégulier d'un étranger en France ; l'article 27, pour les infractions à un arrêté d'expulsion, à une mesure de reconduite à la frontière ou à l'exécution d'une notification de refus d'entrée en France ; l'article 33, dans l'hypothèse d'une soustraction à l'exécution d'une décision prise en application dudit article.

La loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives (modifiée par la loi n° 93-1282 du 6 décembre 1993) prévoit la possibilité de prononcer une interdiction du territoire pour une durée égale au plus à deux ans en cas d'infraction commise lors d'une manifestation sportive.

La loi n° 91-1383 du 31 décembre 1991 renforçant la lutte contre le travail clandestin et l'organisation de l'entrée et du séjour irréguliers d'étrangers en France autorise le prononcé d'une interdiction du territoire de cinq ans contre les étrangers condamnés pour travail dissimulé, publicité tendant à favoriser celui-ci et recours à une personne qui exerce une activité non déclarée (article L. 362-5 du code du travail). La loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle a étendu son champ à l'emploi d'un étranger non autorisé à exercer une activité salariée en France (article L. 364-9).

Finalement, le nouveau code pénal prévoit qu'une interdiction du territoire peut être prononcée pour plus de 200 infractions, au-delà de celles visées par le code du travail ou l'ordonnance du 2 novembre 1945 : crimes contre l'humanité (article 213-2), tortures et actes de barbarie, violences et agressions sexuelles, trafic de stupéfiants (222-48), proxénétisme (225-21), cas les plus graves de vols, extorsions et recels (311-15, 312-4 et 321-11), destructions dangereuses pour les personnes (322-16), atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation (414-6), terrorisme (422-4), participation armée à un attroupement, à une manifestation (431-8 et 431-12) ou à un groupe de combat (431-19), atteintes à l'action de la justice (434-46) et à la confiance publique (441-11, 442-12, 443-7 et 444-8). Cette liste a été étendue par des lois postérieures (nos 95-73 du 21 janvier 1995 pour les infractions commises lors de manifestations sur la voie publique, 98-467 du 17 juin 1998 en ce qui concerne les armes chimiques et 98-564 du 8 juillet 1998 s'agissant des mines antipersonnel).

· Une motivation spéciale, au regard de la gravité de l'infraction et de la situation personnelle et familiale de la personne, est exigée du tribunal lorsque l'étranger condamné entre dans l'une des six catégories suivantes qui, pour l'essentiel, manifestent l'existence d'un rattachement particulier avec la France :

-  le parent d'un enfant français résidant en France, sous réserve qu'il exerce l'autorité parentale ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins ;

-  la personne mariée depuis au moins un an avec un conjoint de nationalité française, sous réserve que ce mariage soit antérieur aux faits ayant entraîné la condamnation et que la communauté de vie n'ait pas cessé ;

-  celui qui justifie qu'il réside habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ;

-  celui qui réside habituellement en France depuis plus de quinze ans ;

-  le titulaire d'une rente d'accident de travail ou de maladie professionnelle dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 % ;

-  celui dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale qui ne peut lui être prodiguée dans le pays dont il est originaire et dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

S'agissant des mineurs, aucune interdiction du territoire ne peut être prononcée à leur encontre en application de l'article 20-4 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, la minorité s'appréciant à la date des faits.

Cette exigence de motivation spéciale résulte également d'une évolution plus que décennale, dont les étapes sont révélatrices du degré d'ouverture ou de fermeture des lois relatives à la législation des étrangers qui se sont succédées au cours de la période considérée.

En effet, une protection de principe contre les interdictions du territoire, inspirée par les dispositions de l'article 8-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a d'abord été reconnue aux étrangers ayant des attaches fortes avec notre pays, comme en matière d'expulsion (voir infra), par la loi n° 91-1383 du 31 décembre 1991 précitée. Cette protection a été consécutivement reprise, bien que de façon plus restrictive, dans le nouveau code pénal, à l'article 131-30.

Toutefois, la loi n° 93-1027 du 24 août 1993 relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France a substitué, dans le code pénal, à ce régime de protection, une simple exigence de motivation spéciale au regard de la gravité de l'infraction.

Le droit positif aujourd'hui en vigueur résulte de la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d'asile (dite « loi RESEDA »). Le législateur, s'inspirant des propositions formulées par M. Patrick Weil dans son rapport au Premier ministre sur la nationalité et l'immigration (5), a créé deux nouvelles catégories d'étrangers pour lesquelles une motivation spéciale est requise - les accidentés du travail et ceux dont l'état de santé implique un traitement particulier (6) - et a prévu que celle-ci devrait désormais se fonder non seulement sur la gravité de l'infraction mais aussi sur la situation personnelle de l'intéressé.

Il convient de préciser, toutefois, que cette exigence de motivation peut être écartée, dans certains cas, par des dispositions spéciales, pour des crimes et des délits d'une gravité particulière. Il en est ainsi pour les crimes contre l'humanité (article 213-2), le trafic de stupéfiants (222-48), les atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation (414-6), le terrorisme (422-4), la participation à un groupe de combat (431-19) et la fausse monnaie (442-12).

· Le relèvement de l'interdiction du territoire est régit par les dispositions de droit commun prévues aux articles 702-1 et 703 du code de procédure pénale. Toute personne ayant fait l'objet d'une telle sanction peut le solliciter auprès de la juridiction qui l'a décidée.

Toutefois, cette procédure ne peut être engagée contre une interdiction définitive du territoire prononcée à titre de peine principale ; la personne concernée doit résider hors de France ; un délai minimum de six mois après la condamnation doit s'être écoulé (un nouveau délai de six mois devant s'écouler entre chacune des éventuelles demandes ultérieures).

b) L'expulsion

L'article 23 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France dispose qu'une mesure d'expulsion peut être prononcée « si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public ».

L'article 24 prévoit que l'étranger doit être préalablement avisé et entendu par une commission composée de magistrats, qui transmet un avis motivé à l'autorité administrative compétente pour statuer.

Cependant, l'article 25 énumère un certain nombre de catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion : elles recoupent, depuis la loi n° 98-349 du 11 mai 1998, les situations précitées visées à l'article 131-30 du code pénal.

On observe, toutefois, que, dans le cadre de l'ordonnance du 2 novembre 1945, est protégé de l'expulsion non seulement l'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis plus de quinze ans mais, aussi, celui qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, durant cette période, titulaire d'une carte de séjour « étudiant ». S'agissant du conjoint de français, l'antériorité du mariage par rapport à la condamnation n'est pas requise, l'expulsion étant une mesure de police et non de justice. On relève, enfin, l'existence d'une catégorie supplémentaire : l'étranger résidant régulièrement en France et qui n'a pas été condamné définitivement à une peine au moins égale à un an d'emprisonnement sans sursis.

Ainsi, en apparence, le régime de l'expulsion prend davantage en considération la vie privée et familiale des étrangers, les personnes liées à notre pays bénéficiant, dans le cadre de l'ordonnance du 2 novembre 1945, d'une protection absolue, et non pas relative comme dans le code pénal.

Toutefois, le dernier alinéa de son article 25 prévoit qu'à l'exception du mineur de dix-huit ans et de l'étranger qui réside en France depuis l'âge de dix ans, une personne entrant dans une catégorie protégée peut néanmoins faire l'objet d'un arrêté d'expulsion si elle a été condamnée à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans. Surtout, l'article 26 prévoit une procédure d'urgence et dispose que l'expulsion peut être prononcée, par dérogation à l'article 25, lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'État ou la sécurité publique.

2. Un régime de protection insuffisant

Le cadre légal des mesures d'éloignement du territoire a donc intégré le fait que certaines personnes, bien qu'étrangères, ont tissé avec notre pays des liens qui justifient la mise en _uvre de procédures particulières.

Cependant, ces « précautions » sont soit insuffisantes, soit contournées. De fait, certaines affaires emblématiques ont montré que la vie privée et familiale des personnes, indépendamment de leur nationalité, n'était pas suffisamment respectée.

a) Une législation dépassée

Sous la onzième législature, le cadre légal des mesures d'éloignement du territoire a évolué dans le sens d'une meilleure conciliation entre la maîtrise des flux migratoires et la prise en compte de la dimension humaine des situations personnelles les plus difficiles.

Ainsi, en abrogeant l'article 22-IV de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 a mis fin à cette anomalie que constituait l'interdiction administrative du territoire, qui pouvait être ajoutée par le préfet, dans certains cas, à un arrêté de reconduite à la frontière.

La loi RESEDA a également élargi, comme on l'a vu, le champ des personnes protégées, au bénéfice des étrangers qui résident en France depuis l'âge de dix ans ou dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale particulière. Elle a imposé au juge de motiver les peines d'interdiction du territoire, pour les étrangers ayant des liens forts avec la France, non seulement au regard de la gravité de l'infraction commise mais également de la situation personnelle et familiale de l'intéressé.

La circulaire du 17 novembre 1999 a rappelé certains principes essentiels : « Il revient, en tout état de cause, aux juridictions d'apprécier, dans le respect des engagements internationaux conclus par la France, la nécessaire proportionnalité entre l'atteinte à la situation privée et familiale de l'étranger que l'interdiction du territoire est susceptible d'occasionner et les impératifs liés à la préservation de l'ordre public. Il conviendra de donner toutes instructions utiles aux procureurs de la République pour que leur politique d'action publique tienne compte, autant qu'il est possible, du degré d'intégration personnelle et familiale en France des étrangers susceptibles d'encourir une peine d'interdiction du territoire français ».

Plus généralement, la circulaire rappelle l'obligation de respecter le principe de nécessité et de proportionnalité des sanctions et souligne la nécessité d'informer les étrangers sur les aspects spécifiques de la peine d'interdiction du territoire.

Pourtant, ces avancées n'ont pas été suffisantes.

· La situation personnelle et familiale des étrangers pour lesquels une motivation spéciale est requise n'est pas assez prise en compte par les juridictions, malgré le durcissement manifeste de la position de la Cour de cassation (7). Lesdites motivations sont, au demeurant, trop souvent formelles et laconiques, et se contentent de faire référence à la gravité des infractions commises.

L'obstacle principal, déjà relevé par la « commission Chanet », réside dans l'insuffisance des éléments de personnalité dont disposent les magistrats au moment de requérir ou de prononcer une interdiction du territoire (8). Bien sûr, cette difficulté est encore accrue dans le cadre de la procédure de comparution immédiate, que les magistrats sont de plus en plus encouragés à utiliser au détriment, souvent, de l'exercice des droits de la défense (9).

Au demeurant, comme on l'a vu, le code pénal prévoit que, dans un grand nombre de cas, les dispositions protectrices des sept derniers alinéas de l'article 131-30 ne sont pas applicables, y compris en matière de trafic de stupéfiants ou de fausse monnaie.

· La protection qui est prévue en matière d'expulsion pour les catégories précitées d'étrangers est, quant à elle, très relative.

De manière générale, on relève que, fréquemment, les arrêtés d'expulsion ne sont motivés que par l'existence d'une condamnation pénale, sans que soit véritablement apprécié le comportement individuel des personnes. L'avis de la commission consultative prévue par l'article 24 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, quant à lui, n'est pas suffisamment pris en compte.

Par ailleurs, le prononcé d'une peine d'emprisonnement ferme supérieure ou égale à cinq ans permet, comme on l'a vu, de contourner le régime de protection dont certains étrangers bénéficient.

Enfin, la procédure d'urgence définie par l'article 26 de l'ordonnance est souvent mise en _uvre et, surtout, « la sûreté de l'État ou la sécurité publique » est parfois invoquée de façon abusive pour déroger à la protection prévue à l'article 25. Apparue avec la loi n° 81-973 précitée du 29 octobre 1981, cette dernière exception est apparemment restrictive : en séance, à l'Assemblée nationale, le ministre de l'intérieur de l'époque, Mme Nicole Questiaux, avait considéré qu'elle ne pouvait concerner que trois catégories d'étrangers : les terroristes, les espions et les trafiquants de drogue. Toutefois, comme le relève le Dictionnaire permanent du droit des étrangers : « Elle n'a jamais fait l'objet d'une définition juridique qui permette d'en systématiser le contenu et de savoir avec une relative certitude si une situation de fait donnée, un comportement déterminé est susceptible de la constituer ». De fait, notamment à partir de 1986, la notion de sûreté de l'État ou de sécurité publique a été entendue, plus largement, comme impliquant un degré de gravité supplémentaire par rapport à la menace pour l'ordre public visée à l'article 23 de l'ordonnance (10). Ainsi, ont été considérées comme des atteintes à la sûreté de l'État ou à la sécurité publique une attitude violente et asociale durant une longue période (CE, 23 décembre 1987, Tahraoui) ou la commission de crimes sexuels (CE, 24 mai 1993, Igartùa Amondarain ; 23 juin 1993, Bouchelkia ; 22 septembre 1997, Lekouit).

Au total, il apparaît clairement que la problématique de la double peine rend nécessaire une refonte du cadre légal non seulement des interdictions du territoire mais également des expulsions. En effet, il est manifeste que l'autorité administrative se substitue trop souvent à l'autorité judiciaire lorsque celle-ci n'a pas jugé utile de prononcer une peine d'éloignement à l'encontre d'un étranger condamné. C'est d'ailleurs ce que reconnaissait M. Jean-Louis Guerrive dans la dernière édition du Dalloz : « L'autorité administrative prononce fréquemment l'expulsion des étrangers en fin de peine, dans les cas où la loi le lui permet (...). On peut comprendre que les intéressés, qui par ailleurs n'auraient pas été condamnés à une peine d'interdiction du territoire et qui ont pu faire l'objet d'une libération conditionnelle ou d'une mesure de mise à l'épreuve, voient dans cette mesure d'expulsion une véritable peine, s'ajoutant à la sanction pénale prononcée par le juge, alors précisément que le juge pénal s'est abstenu d'assortir la condamnation d'une peine accessoire d'interdiction du territoire » (11).

b) Des atteintes disproportionnées à la vie privée et familiale

L'opinion publique a été sensibilisée à la question de l'éloignement du territoire des étrangers liés à la France par la campagne nationale : « Une peine point barre », initiée par le secteur associatif. Le rapporteur s'est d'ailleurs entretenu avec ses responsables, ainsi qu'avec le président de la Ligue des droits de l'homme et des représentants du Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) et de la Cimade, dans le cadre de la préparation du présent rapport (12). Cette campagne a développé, depuis le mois de septembre 2001, plusieurs actions favorables à une prise en compte renforcée des attaches personnelles et familiales des étrangers en France, tant au regard de l'expulsion que de l'interdiction du territoire.

Au-delà des cas emblématiques, heureusement médiatisés, auxquels le rapporteur s'est déjà référé et qui ont récemment montré le caractère insupportable de certains arrêtés d'expulsion, la campagne nationale contre la double peine s'est mobilisée, par exemple, en faveur d'un Algérien né en France il y a quarante ans, résidant depuis cette date dans notre pays, père de deux enfants français, et condamné à cinq ans de prison et à une interdiction définitive du territoire national. Il y a quelques mois, un Libyen, arrivé en France en 1980, père d'un enfant français, également condamné à une interdiction définitive du territoire, a finalement été assigné à résidence à l'issue d'une longue grève de la faim.

Cependant, ces affaires ne sont que des exemples parmi d'autres. Chaque année, loin des médias, dans le silence, sitôt les portes de la prison ou du centre de rétention refermées, des étrangers vivant sur notre sol depuis leur enfance, conjoints de français, pères ou mères d'enfants français, sont reconduits vers des pays dont, souvent, ils ne maîtrisent plus la langue et ne partagent ni la culture ni les traditions. Certes, de nombreuses interdictions du territoire sont encore décidées pour de simples infractions à la législation sur les étrangers (séjour et entrée irréguliers ou soustraction à l'exécution d'une mesure d'éloignement) : 3 651 en 2000, contre 8 816 en 1996, cette baisse étant conforme aux préconisations du « rapport Chanet » (13). A priori, ces sanctions ne concernent pas des étrangers durablement installés sur notre sol. Toutefois, des personnes entrant dans les catégories énumérées à l'article 131-30 du code pénal peuvent être condamnées pour aide à l'entrée ou au séjour irrégulier. Par ailleurs, la même année, les juridictions ont prononcé 3 178 interdictions du territoire à l'encontre d'étrangers poursuivis pour des crimes ou des délits ressortissant aux dispositions du code pénal, notamment des infractions à la législation sur les stupéfiants, des vols et recels aggravés (14).

S'agissant des expulsions, on relève, également, une évolution à la baisse très marquée, qui résulte de la volonté du précédent Gouvernement de limiter ce type de décisions aux étrangers représentant une menace très grave pour la sécurité publique. Il reste que, en 2001, 521 mesures d'expulsion ont été prises, dont 223 en application de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945.

EXPULSIONS PRONONCÉES POUR MOTIFS D'ORDRE PUBLIC EN APPLICATION
DES ARTICLES 23 ET 26 DE L'ORDONNANCE DU 2 NOVEMBRE 1945 MODIFIÉE
À L'ENCONTRE DE RESSORTISSANTS ÉTRANGERS

Année

Article 23

Article 26

Total des expulsions

Exécutions

1990

282

103

385

ND

1991

366

140

506

ND

1992

402

175

577

ND

1993

453

269

722

ND

1994

678

475

1 153

566

1995

568

458

1 026

684

1996

737

429

1 166

719

1997

621

285

906

591

1998

437

199

636

535

1999

373

226

599

402

2000

348

198

546

426

2001

298

223

521

389

Source : ministère de l'intérieur.

Le caractère disproportionné de certaines mesures d'éloignement contribue sans doute à la faiblesse de leur taux d'exécution, qui était proche de 67 % en 2001 pour les arrêtés d'expulsion, mais compris entre 30 et 54 % seulement en ce qui concerne les interdictions du territoire.

Cette situation ne peut plus durer. La double peine provoque des tragédies personnelles et familiales inadmissibles. Au demeurant, elle laisse entendre que le « traitement pénitentiaire » ne parviendra jamais à remplir sa fonction de réadaptation sociale à l'égard des délinquants étrangers, ces derniers étant considérés a priori comme des récidivistes inévitables qu'il est préférable d'éloigner (15). Elle est contraire, enfin, à plusieurs principes de notre droit, national ou international.

· Ainsi, l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 prévoit que : « La loi doit être la même pour tous, soit qu'elle protège soit qu'elle punisse » ; or, la « double peine » est réservée, par définition, aux étrangers. Son article 8 dispose que : «  La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires », ce qui n'est pas toujours le cas, comme on l'a vu. Le conseil constitutionnel a consacré, par ailleurs, dès 1993, le droit de mener une vie familiale normale (13 août 1993, Maîtrise de l'immigration). On rappellera, enfin, le principe fondamental de notre droit en vertu duquel nul ne peut être puni deux fois pour les mêmes faits (non bis in idem).

· L'article 12-4 du Pacte international sur les droits civils et politiques du 16 décembre 1966 indique que : « Nul ne peut être arbitrairement privé du droit d'entrer dans son propre pays ». Or, cette disposition bénéficie à toute personne qui entretient avec un pays donné des liens particuliers et ne peut donc pas être considérée comme un simple étranger ; par ailleurs, le fait de ne pas pouvoir refuser une entrée sur ledit territoire interdit a fortiori de mettre en _uvre une mesure d'expulsion. Les articles 17 et 23 du même Pacte prévoient que l'expulsion ne doit être ni illégale, ni arbitraire, ni déraisonnable, ce qui suppose que la décision soit prise en vertu de la loi mais aussi que l'attention voulue ait été portée au cours de la procédure aux liens familiaux de l'intéressé.

· Les articles 3 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prohibent les traitements inhumains ou dégradants et imposent le respect de la vie privée et familiale des personnes.

Une décision d'expulsion doit être légale, légitime et nécessaire, c'est-à-dire justifiée par un besoin social impérieux et proportionnée au but légitime poursuivi (CEDH, Moustaquim c/ Belgique, 18 février 1991). La proportionnalité implique que l'État respecte un juste équilibre entre les intérêts en présence, à savoir le droit de l'étranger au respect de sa vie familiale et privée dans le pays d'accueil, la protection de l'ordre public et la prévention des infractions pénales (Boughanemi c/ France, 24 avril 1996).

Comme l'a rappelé la « commission Chanet », la France a déjà été condamnée pour n'avoir pas respecté ces différents principes, notamment dans le dossier Méhémi jugé le 26 septembre 1997 : « eu égard à l'absence d'attaches du requérant en Algérie, à l'intensité de ses liens avec la France et surtout au fait que la mesure d'interdiction définitive du territoire prise à son encontre a pour effet de le séparer de ses enfants mineurs et de son épouse, la Cour estime que ladite mesure n'était pas proportionnée aux buts poursuivis ».

3. Les propositions : protéger les étrangers qui ont un lien fort et particulier avec la France contre les mesures d'éloignement du territoire

La proposition de loi n° 380 présentée par M. Jean-Marc Ayrault, cosignée par le rapporteur et par M. Alain Vidalies, ainsi que par l'ensemble des membres du groupe socialiste, vise à protéger des mesures judiciaires ou administratives d'éloignement du territoire les étrangers qui, pour des raisons liées à leur vie privée et/ou familiale, ont acquis un droit à vivre en France. Corrélativement, elle élargit le champ des catégories protégées, prenant en compte l'introduction dans notre droit du pacte civil de solidarité (PACS) par la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999.

Toutefois, une réserve importante est introduite : ces protections légales ne s'appliqueront pas en cas d'atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou d'actes de terrorisme.

a) Les mesures proposées

· L'article 1er de la proposition de loi modifie le régime juridique de l'interdiction du territoire et notamment, en conséquence, l'article 131-30 du code pénal (paragraphe I).

Depuis 1998, un tribunal ne peut prononcer une interdiction du territoire à l'encontre d'un étranger qui a noué des relations fortes avec notre pays, du fait de l'ancienneté de son séjour en France, de son mariage avec un(e) Français(e) ou du lieu de naissance de ses enfants, que par une décision spécialement motivée au regard de la gravité de l'infraction commise et de sa situation personnelle et familiale.

Il est proposé que, désormais, ces étrangers bénéficient d'une protection absolue, comme en matière d'expulsion.

De fait, comme on l'a vu, cette solution avait déjà été retenue entre 1992 et 1993, mais avait été abrogée dès 1993.

De plus, cette proposition est cohérente avec les orientations du « rapport Chanet », qui préconisait déjà de proscrire les interdictions du territoire à l'encontre des étrangers ayant suivi leur scolarité en France et y résidant habituellement depuis lors. Pour les autres catégories d'étrangers, ce rapport recommandait qu'une circulaire soit adressée aux Parquets - ce qui a été fait le 17 novembre 1999 - afin que la motivation cesse de n'être qu'un simple alibi et intègre les changements introduits par la loi du 11 mai 1998 ; toutefois, il était indiqué que si les juridictions ne suivaient pas ces orientations et que la nouvelle exigence de motivation s'avérait également inopérante, il conviendrait de modifier l'article 131-30 du code pénal et de revenir, sous certaines conditions, au principe de la prohibition des interdictions du territoire.

Une exception importante est cependant prévue : cette protection ne s'appliquerait pas lorsque l'infraction commise relève d'une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, c'est-à-dire de l'espionnage, ou du terrorisme. Il s'agit, de fait, de crimes particulièrement graves, dont la nature permet de douter de la réalité des liens noués par l'étranger condamné avec notre pays.

Concomitamment, la définition des catégories visées à l'article 131-30 est modifiée afin d'étendre aux étrangers pacsés la protection dont ne bénéficiaient, jusqu'à présent, que ceux qui étaient mariés avec un(e) Français(e). Cette mesure s'inscrit dans le prolongement d'une orientation plus générale tendant à aligner les droits des couples pacsés et mariés : on rappellera que, le 3 avril dernier, le précédent Gouvernement avait ainsi décidé de réduire à un an, au lieu de trois, la durée de vie commune prévue par la circulaire du 10 décembre 1999 pour la délivrance d'un titre de séjour au partenaire étranger d'un pacsé français.

Les paragraphes II et III de l'article 1er abrogent, par coordination, certaines dispositions du code pénal qui permettaient, comme on l'a vu, d'écarter l'exigence de motivation spéciale. Il s'agit des articles 222-48, portant sur le trafic de stupéfiants, et 442-12, relatif à la fausse monnaie. Ne sont pas modifiés, en revanche, les articles 213-2 (crimes contre l'humanité), 414-6 (atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation), 422-4 (terrorisme) et 431-19 (participation à un groupe de combat) du code pénal.

· Le paragraphe I de l'article 2 modifie l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 afin d'étendre également aux étrangers pacsés avec un(e) Français(e) le régime de protection contre les expulsions. Ce changement est similaire à celui qui est proposé en ce qui concerne les interdictions du territoire, cette symétrie étant cohérente avec les mesures d'harmonisation des dispositions du code pénal et de l'ordonnance du 2 novembre 1945 mises en _uvre en 1998.

Le paragraphe II supprime le dernier alinéa de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Cette mesure renforce de façon importante le régime de protection en vigueur en matière d'expulsion, l'alinéa en question permettant, en effet, qu'à l'exception du mineur de dix-huit ans et de celui qui réside en France depuis l'âge de dix ans, un étranger entrant dans une catégorie visée à l'article 24 puisse néanmoins faire l'objet d'un arrêté d'expulsion s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans.

· L'article 3 modifie les troisième et quatrième alinéas de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 afin de limiter les possibilités d'expulsion des étrangers protégés aux cas d'espionnage et de terrorisme. Il remplace la référence à la « nécessité impérieuse pour la sûreté de l'État ou la sécurité publique », qui a été interprétée, comme on l'a vu, de façon de plus en plus large à partir de 1986 par les autorités administratives, par un renvoi, comme en matière d'interdiction du territoire, aux atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation et aux actes de terrorisme.

b) La discussion générale

Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Après avoir rappelé que la gauche était restée inactive sur le sujet pendant les cinq ans où elle était au pouvoir, M. Jean Leonetti a fait part de la surprise des associations de soutien aux étrangers, qui n'avaient obtenu de la part du Gouvernement socialiste que des fins de non recevoir.

Il a souligné que c'était à tort que les mesures d'éloignement du territoire étaient appelées « doubles peines » : établissant un parallèle avec les mesures de suspension de permis de conduire prononcées à l'encontre des chauffards ou les peines d'inéligibilité assortissant la sanction d'infractions commises par les élus, il a estimé qu'il s'agissait dans tous les cas de peines complémentaires, l'objectif n'étant nullement, pour les mesures d'éloignement du territoire, de sanctionner plus sévèrement les étrangers que les nationaux.

Tout en admettant que ces mesures pouvaient dans certains cas se révéler contre-productives, puisqu'elles incitaient l'étranger à entrer dans la clandestinité pour pouvoir regagner la France, il a observé qu'une telle législation n'était pas pour autant totalement infondée, comme l'a d'ailleurs fort justement rappelé récemment M. Daniel Vaillant, car elle permet à la France d'assurer une protection de son territoire contre les individus particulièrement dangereux.

Estimant ainsi qu'il ne convenait pas de légiférer de manière précipitée, il a considéré que les inconvénients de la loi actuelle tenaient davantage à ses conditions d'application qu'au texte lui-même ; rappelant que le ministre de l'Intérieur avait récemment décidé de mettre en place un groupe de travail consacré à ce sujet, il a jugé tout à fait souhaitable qu'une réflexion puisse être menée sur ses modalités d'application, afin de redéfinir notamment la notion de liens familiaux, en se fondant sur leur ancienneté et, corrélativement, la pertinence de la notion de pays d'origine. Il a souhaité également que soient prises en compte, préalablement au prononcé d'une mesure d'éloignement, les circonstances tenant à l'existence ou non d'une récidive, ainsi qu'à la gravité du délit commis. Plutôt que de légiférer en supprimant purement et simplement ces mesures d'éloignement, comme le propose le groupe socialiste, il a jugé qu'il fallait faire preuve, pour chaque cas, de pragmatisme, en conciliant les principes de fermeté et d'humanité. Il a rappelé que le contrat d'intégration proposé par le Président de la République permettrait à chaque étranger de se voir rappeler les droits et devoirs propres à la situation d'étranger sur le sol français.

Il a conclu son propos en considérant qu'il existait des situations bien plus dramatiques encore que celles vécues par ces étrangers délinquants, la compassion dont certains font preuve à leur égard paraissant dans bien des cas disproportionnée.

Estimant que les évènements récents survenus à Lyon étaient imputables à des dysfonctionnements administratifs, M. Alain Marsaud a tout d'abord estimé que la proposition de loi avait pour objet de donner à certains étrangers un traitement égal à celui des français alors même que ceux-ci ne sont pas, en droit, placés sur un pied d'égalité avec les nationaux. Il a rappelé, à titre d'exemple, que les étrangers ne bénéficiaient pas du droit de vote, ne pouvaient pas accéder à la fonction publique ou s'engager dans l'armée.

Soulignant qu'il aurait été utile de pouvoir disposer d'éléments statistiques sur les mesures d'éloignement prononcées au cours de ces dernières années, il a fait observer que, dans la plupart des cas, les étrangers concernés étaient des récidivistes qui avaient commis de graves délits de proxénétisme ou de trafic de stupéfiants. Il a estimé qu'il était normal que le droit pénal soit plus rigoureux à leur égard et qu'il ne fallait pas mettre certaines affaires en exergue pour condamner le principe de la double peine.

Enfin, il a rappelé que, si les procureurs pouvaient requérir l'interdiction du territoire, celle-ci était prononcée par les magistrats du siège, parfois de leur propre initiative, et qu'en conséquence, il était abusif de prétendre que le précédent Gouvernement avait tenté d'empêcher le prononcé de l'ensemble des mesures d'éloignement.

Après avoir fait observer que l'examen de la proposition de loi avait lieu le même jour que la discussion en séance publique d'un texte relatif au vote des étrangers en France, M. Guy Geoffroy a insisté sur le risque de faire croire à l'opinion, au prix de quelques raccourcis, qu'il valait mieux, au regard de l'application des règles de droit, être résident étranger que d'obtenir la nationalité française. Il a affirmé avec force la nécessité de maintenir un lien clair entre nationalité et citoyenneté, sous peine de décourager ceux qui souhaitaient obtenir la nationalité française pour exercer tous les droits qui sont attachés à cette qualité.

M. Alain Vidalies s'est dit surpris des propos tenus par les membres de la majorité et a estimé nécessaire de rendre absolue une règle de droit qui était devenue, dans cette matière, relative. A ce titre, il a regretté que la loi en vigueur, par les ambiguïtés qu'elle contenait, puisse être appliquée de manière différenciée, comme c'était le cas autrefois avec la notion de trouble à l'ordre public, et conduise à des situations humainement intolérables. En outre, il s'est étonné que le ministre de l'Intérieur, qui jugeait lui-même nécessaire de modifier la loi, puisse se contenter de prendre, pour régler ces situations, des arrêtés d'assignation à résidence avec autorisation de travailler.

Le président Pascal Clément a estimé que la proposition de loi, tout comme celle tendant à accorder aux étrangers le droit de vote et d'éligibilité aux élections locales, reposait sur le principe, éminemment contestable, selon lequel il existerait des « Français de fait », faisant valoir que ces textes conduiraient à établir un statut de l'étranger se rapprochant fortement du statut du citoyen français.

Tout en reconnaissant que l'actualité récente justifiait un réexamen du dispositif actuel, il a tenu à rappeler que l'interdiction du territoire français ne présentait aucun caractère automatique, étant laissée à la libre appréciation des magistrats du siège. Il a observé qu'il s'agissait avant tout d'une mesure de sûreté publique, même si elle a pu être utilisée dans certains cas pour aggraver la sanction applicable.

Après avoir également évoqué le groupe de travail constitué par le ministre de l'Intérieur, il a considéré que les travaux de ce dernier devraient être inspirés par la volonté de conserver à l'interdiction du territoire français son caractère de mesure de sûreté publique, tout en prenant en compte la situation des étrangers vivant depuis de nombreuses années sur le sol national.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

-  Le rapport réalisé par Mme Christine Chanet en 1998 à la demande de Mme Elisabeth Guigou, alors garde des sceaux, sur les peines d'interdiction du territoire, a révélé une mauvaise application des dispositions législatives en vigueur et suggéré la modification de certaines pratiques, l'évolution du cadre législatif ne devant être envisagée que dans un second temps. Cette réforme législative est aujourd'hui nécessaire. En effet, si la loi du 11 mai 1998 et la circulaire du 17 novembre 1999 édictée par la ministre de la Justice ont illustré la volonté du précédent gouvernement de limiter les mesures d'éloignement aux seuls cas de dangerosité extrême, la pratique demeure encore éloignée des intentions du législateur : alors que celui-ci avait souhaité protéger l'étranger condamné dès lors qu'il relevait de certaines catégories qui manifestent l'existence d'un lien particulier avec la France, force est de constater le défaut de motivation des décisions intervenant en la matière et les inconvénients de l'absence de contenu précis de la notion de « nécessité impérieuse pour la sûreté de l'État ou la sécurité publique », qui permet de déroger au régime de protection. Au demeurant, les récentes prises de position du ministre de l'Intérieur confirment la nécessité de légiférer sur cette question, les mesures individuelles qu'il a prises ne demeurant qu'un palliatif contestable, puisqu'elles ne concernent pas tous les individus ayant fait l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire revêtant un caractère disproportionné.

-  L'expression « double peine » se justifie par le fait qu'il s'agit de la seule peine complémentaire qui n'est applicable qu'aux étrangers.

-  Loin d'exprimer une quelconque compassion à l'égard des étrangers qui se seraient rendus coupables d'actes de délinquance, la proposition qui est faite à l'Assemblée nationale de revoir le régime des mesures d'éloignement du territoire remet en cause la légitimité même des décisions renvoyant dans leur pays d'origine des personnes qui n'y ont plus d'attaches.

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A l'issue de la discussion générale, la Commission a décidé de ne pas procéder à l'examen des articles et, en conséquence, de ne pas formuler de conclusions.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte de référence

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Texte de la proposition de loi

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Code pénal

Art. 131-30. - Lorsqu'elle est prévue par la loi, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime ou d'un délit.

Article premier

I. - L'article 131-30 du code pénal est ainsi modifié :

L'interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion.

Lorsque l'interdiction du territoire accompagne une peine privative de liberté sans sursis, son application est suspendue pendant le délai d'exécution de la peine. Elle reprend, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin.

a) Le quatrième alinéa de cet article est ainsi rédigé :

Le tribunal ne peut prononcer que par une décision spécialement motivée au regard de la gravité de l'infraction et de la situation personnelle et familiale de l'étranger condamné l'interdiction du territoire français, lorsque est en cause :

« Sauf en cas d'atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou d'actes de terrorisme, le tribunal ne peut prononcer l'interdiction du territoire français lorsque est en cause : »

1º Un condamné étranger père ou mère d'un enfant français résidant en France, à condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins ;

b) Le sixième alinéa de cet article est ainsi rédigé :

2º Un condamné étranger marié depuis au moins un an avec un conjoint de nationalité française, à condition que ce mariage soit antérieur aux faits ayant entraîné sa condamnation, que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ait conservé la nationalité française ;

« 2° Un condamné étranger marié ou ayant conclu un pacte civil de solidarité, depuis au moins un an avec un conjoint ou un partenaire de nationalité française, à condition que ce mariage ou pacte civil de solidarité soit antérieur aux faits ayant entraîné sa condamnation, que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ou le partenaire ait conservé la nationalité française ; »

3º Un condamné étranger qui justifie qu'il réside habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ;

4º Un condamné étranger qui justifie qu'il réside habituellement en France depuis plus de quinze ans ;

5º Un condamné étranger titulaire d'une rente d'accident de travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 % ;

6º Un condamné étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire.

Art. 222-48. -  L'interdiction du territoire français peut être prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable de l'une des infractions définies aux articles 222-1 à 222-8 et 222-10, aux 1º et 2º de l'article 222-14, aux articles 222-23 à 222-26, 222-30, 222-34 à 222-39 ainsi qu'à l'article 222-15 dans les cas visés au deuxième alinéa de cet article.

Les dispositions des sept derniers alinéas de l'article 131-30 ne sont pas applicables aux personnes coupables des infractions définies aux articles 222-34, 222-35, 222-36 et 222-38.

II. - Le dernier alinéa de l'article 222-48 du même code est supprimé.

Art. 442-12. - L'interdiction du territoire français peut être prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable de l'une des infractions définies aux articles 442-1 à 442-4. Les dispositions des sept derniers alinéas de l'article 131-30 ne sont pas applicables.

III. - La dernière phrase de l'article 442-12 du même code est supprimée.

Ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France

Art. 25. - Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 :

1° L'étranger mineur de dix-huit ans ;

2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ;

Article 2

I. - Le 4° de l'article 25 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers et portant création de l'Office national d'immigration est ainsi rédigé :

3° L'étranger qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis plus de quinze ans ainsi que l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant";

4° L'étranger, marié depuis au moins un an avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ait conservé la nationalité française ;

« 4° L'étranger, marié ou ayant conclu un pacte civil de solidarité, depuis au moins un an avec un conjoint ou un partenaire de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ou le partenaire ait conservé la nationalité française. »

5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France, à la condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins ;

6° L'étranger titulaire d'une rente d'accident de travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 % ;

7° L'étranger résidant régulièrement en France sous couvert de l'un des titres de séjour prévus par la présente ordonnance ou les conventions internationales qui n'a pas été condamné définitivement à une peine au moins égale à un an d'emprisonnement sans sursis ;

8° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi.

Toutefois, par dérogation au 7° ci-dessus, peut être expulsé tout étranger qui a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement sans sursis d'une durée quelconque pour une infraction prévue ou réprimée par l'article 21 de la présente ordonnance, les articles 4 et 8 de la loi n° 73-538 du 27 juin 1973 relative à l'hébergement collectif, les articles L. 362-3, L. 364-2-1, L. 364-3 et L. 364-5 du code du travail ou les articles 225-5 à 225-11 du code pénal.

Les étrangers mentionnés aux 1° à 6° et 8° ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de la présente ordonnance.

Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger entrant dans l'un des cas énumérés aux 3°, 4°, 5° et 6° peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application des articles 23 et 24 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans.

II. - Le dernier alinéa du même article est supprimé.

Art. 26. - L'expulsion peut être prononcée :

a) En cas d'urgence absolue, par dérogation à l'article 24 ;

Article 3

L'article 26 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers et portant création de l'Office national d'immigration est ainsi modifié :

b) Lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation à l'article 25.

I. - Le b de cet article est ainsi rédigé : « En cas d'atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou d'actes de terrorisme, par dérogation à l'article 25. »

En cas d'urgence absolue et lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, l'expulsion peut être prononcée par dérogation aux articles 24 et 25.

II. - Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : « lorsqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique » sont remplacés par les mots : « en cas d'atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou d'actes de terrorisme ».

Les procédures prévues par le présent article ne peuvent être appliquées à l'étranger mineur de dix-huit ans.

N° 0395 - Rapport sur la proposition de loi sur les mesures d'éloignement du territoire pour certains étrangers (M. Christophe Caresche)

1 () Commission de réflexion présidée par Mme Christine Chanet sur les peines d'interdiction du territoire, 18 novembre 1998.

2 () Etienne Pinte, Bertrand Tavernier : « Double peine : éloignement = bannissement », Le Monde, 27-28 octobre 2002.

3 () Depuis sa première intervention à ce propos le 23 octobre dernier sur France 2, le ministre de l'intérieur a réaffirmé plusieurs fois sa volonté de modifier la législation. Ainsi, le 12 novembre, dans un entretien accordé au journal Le Figaro, il déclarait : « Je souhaite profondément réformer la double peine, car elle est inapplicable et incohérente ».

4 () Selon les termes de l'article 1er de l'ordonnance du 2 novembre 1945, sont considérés comme étrangers « tous individus qui n'ont pas la nationalité française, soit qu'ils aient une nationalité étrangère, soit qu'ils n'aient pas de nationalité ».

5 () Parick Weil, Mission d'étude des législations de la nationalité et de l'immigration, La Documentation française, Rapports au Premier ministre, 1997.

6 () Cette dernière extension intègre la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui a estimé, le 29 avril 1997, que la prohibition des traitements inhumains (article 3 de la Convention) excluait le renvoi d'un étranger vers son pays d'origine dès lors que cette mesure placerait l'intéressé, en phase terminale de Sida, dans une situation de « souffrances physiques et morales extrêmes » (D. c/ R.-U.).

7 () Encourt la censure l'arrêt qui prononce une interdiction (temporaire ou définitive) du territoire français sans motiver le choix de cette peine au regard de la situation personnelle et familiale invoquée par la personne concernée (Cass. Crim., 12 janvier et 27 avril 2000).

8 () Le rapport de la commission Chanet relevait même que, paradoxalement, la voie administrative offrait de meilleures garanties que la voie judiciaire, dans la mesure où le passage devant la commission d'expulsion prévue par l'article 24 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 permettait à l'étranger de faire valoir ses observations et sa situation personnelle et familiale.

9 () La loi n° 2002-1138 d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 a étendu le champ de la comparution immédiate, qui peut désormais être utilisée en cas d'infraction passible d'une peine d'emprisonnement comprise entre six mois et dix ans, au lieu de douze mois et sept ans précédemment.

10 () Il convient de préciser que cette notion de « sûreté de l'Etat ou la sécurité publique » a été remplacée, par la loi n° 86-1025 du 9 septembre 1986, par celle de « menace pour l'ordre public présentant un caractère de particulière gravité ». Mais elle a été rétablie par la loi du 2 août 1989 et n'a plus été modifiée depuis.

11 () Jean-Louis Guerrive, « Double peine et police des étrangers », Le Dalloz, 2002, n° 10, page 829.

12 () Les acteurs de la campagne nationale contre la double peine sont les suivants : Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT), Act up, Agir ensemble pour les droits de l'homme (Lyon), AIDES, Association nationale des visiteurs de prison (ANVP), Aumônerie catholique des prisons, CCFD, CGT, Cimade, Coordination nationale des sans-papiers, Confédération paysanne, Centre de recherche et d'information pour le développement (CRID), Droit au logement (DAL), Droits devant, Emmaüs France, Fasti, FCPE, Fédération de l'entraide protestante, Fédération nationale des association de réinsertion sociale (FNARS), Fédération syndicale unitaire (FSU), Forum réfugiés, France-libertés, Genepi, Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), Ligue des droits de l'homme, Mouvement de l'immigration et des banlieues (MIB), Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP), Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Service national de la pastorale des migrants, SOS Racisme, Sud PTT, Sud Education, Syndicat des avocats de France, Syndicat de la magistrature.

13 () Une prise en compte exhaustive des mesures d'éloignement prononcées contre des étrangers en situation irrégulière supposerait de recenser également les simples arrêtés de reconduite à la frontière pris par les préfets (29 633 en 1996).

14 () Réponse à la question écrite n° 71 773 présentée par M. Pierre Brana, JO Assemblée nationale 18 mars 2002, page 1 580.

15 () Voir : Amar NASRI, « Brèves réflexions sur le fondement de l'interdiction du territoire français », Droit pénal, Juris-Classeur, février 2000.


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