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mis en distribution
le 18 décembre 2003

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N° 1291

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 décembre 2003.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et la Commission préparatoire de l'Organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires sur la conduite des activités relatives aux installations de surveillance internationale, y compris les activités postérieures à la certification (ensemble une annexe),

PAR M. RICHARD CAZENAVE,

Député

--

Voir les numéros :

Sénat : 425 (2002-2003), 7 et T.A. 18 (2003-2004)

Assemblée nationale : 1283

Traités et conventions

SOMMAIRE

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INTRODUCTION 5

I - LA MISE EN PLACE DIFFICILE D'UN DISPOSITIF INTERNATIONAL
     VISANT À INTERDIRE LES ESSAIS NUCLÉAIRES
7

A - LE LENT MOUVEMENT VERS L'INTERDICTION
      DES ESSAIS NUCLÉAIRES
7

B - LE TRAITÉ D'INTERDICTION COMPLÈTE DES ESSAIS NUCLÉAIRES :
      UNE DIFFICILE MISE EN œUVRE
8

II - UN ACCORD QUI MARQUE L'ENGAGEMENT DE LA FRANCE POUR
      L'INTERDICTION COMPLÈTE DES ESSAIS NUCLÉAIRES
9

A - LA FRANCE EST TRÈS ENGAGÉE DANS LA MISE EN œUVRE DU
      TRAITÉ D'INTERDICTION COMPLÈTE DES ESSAIS NUCLÉAIRES
9

B - LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DE L'ACCORD DU 13 JUILLET 2001
      ENTRE LA FRANCE ET LA COMMISSION PRÉPARATOIRE DE L'OTICE
9

CONCLUSION 11

EXAMEN EN COMMISSION 13

Mesdames, Messieurs,

La France et la Commission préparatoire de l'Organisation du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (OTICE) ont conclu, le 13 juillet 2001, un accord sur la conduite des activités relatives aux installations de surveillance internationale, y compris les activités postérieures à la certification.

En effet, si le traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE), ratifié par la France en avril 1998, n'est toujours pas entré en vigueur, les signataires de ce traité ont créé dès 1996 un Comité préparatoire de l'OTICE, organisme avec lequel la France a conclu le présent accord.

Cet accord a pour but d'organiser les modalités de mise en œuvre des activités de surveillance réalisées par le Secrétariat technique du Comité préparatoire de l'OTICE sur le territoire français. Cela illustre la volonté de la France de s'engager pour promouvoir l'interdiction complète des essais nucléaires sans attendre la ratification du TICE.

I - LA MISE EN PLACE DIFFICILE D'UN DISPOSITIF INTERNATIONAL VISANT À INTERDIRE LES ESSAIS NUCLÉAIRES

A - Le lent mouvement vers l'interdiction des essais nucléaires

Si la réalisation d'essais nucléaires n'est pas indispensable à la maîtrise de l'armement nucléaire, comme semble le montrer l'exemple de la Corée du Nord qui n'a jamais fait de tels essais, elle semble indispensable à la crédibilité d'un arsenal nucléaire. Cela explique donc que l'objectif de l'interdiction totale de ces essais soit depuis longtemps considéré comme un axe important de la lutte contre la prolifération nucléaire.

La réalisation de son premier essai dans ce domaine est d'ailleurs généralement le signe qu'un Etat appartient au « club » des puissances nucléaires : ce fut donc le cas pour les Etats-Unis le 16 juillet 1945, et pour l'URSS le 29 août 1949, rejoints par le Royaume-Uni en 1952, la France en 1960, la Chine en 1964, l'Inde en 1974 et le Pakistan en 1998.

Ainsi, le thème de l'interdiction complète des essais nucléaires est pratiquement aussi ancien que les essais eux-mêmes : dès 1954, l'Inde effectuait une proposition de traité d'interdiction. Si, compte tenu de la guerre froide, ce projet n'a pas abouti, il faut néanmoins remarquer que les essais nucléaires ont été concernés dès les prémices de la non prolifération, sous l'impulsion des deux « grands », soucieux de conserver le monopole de l'arme nucléaire. Ainsi, dès 1963, soit cinq ans avant la signature du Traité de non-prolifération, fut adopté le Traité d'interdiction partielle des essais nucléaires qui prohibait tout essai dans l'atmosphère, l'espace extra atmosphérique et sous les mers. Par ailleurs, en 1974, Américains et Soviétiques signaient un traité limitant la puissance de leurs essais à 150 Kilotonnes.

A partir du début des années 1990, la donne a cependant considérablement évolué pour des raisons à la fois politiques et techniques. Ainsi, les Etats-Unis ont cessé leurs essais nucléaires depuis le 23 septembre 1992 et ont annoncé en janvier 1995 le maintien de ce moratoire jusqu'à l'entrée en vigueur du traité d'interdiction complète. Le dernier essai soviétique remonte à 1990, aucune campagne d'essais n'ayant été réalisée depuis l'effondrement de l'URSS. Le dernier essai britannique a été réalisé en novembre 1991. La France avait décrété un moratoire unilatéral sur les essais nucléaires le 8 avril 1992, puis a repris une ultime campagne de 6 essais réalisés entre le 5 septembre 1995 et le 27 janvier 1996, tout en annonçant son intention, à l'issue de cette campagne, de renoncer définitivement aux essais. Quant à la Chine, elle a effectué ses deux derniers essais les 8 juin et 29 juillet 1996.

C'est donc dans ce contexte qu'a pu être adopté, le 19 septembre 1996, le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires.

B - Le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires : une difficile mise en œuvre

Le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE ou CTBT) interdit, comme la France l'avait proposé le 10 août 1995 (« option zéro »), toute explosion nucléaire, militaire ou civile, de quelque puissance que ce soit, dans l'atmosphère ou souterraine.

Au-delà de l'interdiction des essais nucléaires qu'il prévoit, le grand intérêt du TICE est d'avoir établi un système de surveillance international, reposant sur un dispositif de vérification apte à détecter et à interpréter à distance tout événement susceptible de constituer une explosion nucléaire kilotonnique.

Cependant, la rédaction de ce Traité comportait un défaut, même si celui-ci était assumé, celui de conditionner son entrée en vigueur à la signature et à la ratification du Traité par les 44 Etats membres de la Conférence du désarmement qui possèdent des capacités nucléaires, de recherche ou de production d'énergie (Etats dits de l'annexe 2). Or, si 170 Etats ont signé ce traité, dont 108 l'ont ratifié, sur les 44 pays de l'annexe 2, seuls 41 l'ont signé1, et 32 l'ont ratifié2.

Après des débuts encourageants, le processus d'entrée en vigueur du TICE est en effet entré dans une profonde crise pour deux types de raisons :

- les essais nucléaires indiens et pakistanais effectués en mai 1998 ont tout d'abord éloigné la perspective d'une signature du traité par ces deux pays, et ont incité les Etats considérés comme proliférants (Corée du Nord, Iran...) à ne pas s'engager par des règles juridiques contraignantes ;

- le refus des Etats-Unis de ratifier le traité suite à un vote serré au Sénat (51 voix contre 48) en octobre 1999 lui a porté un coup à la fois symbolique et concret. En effet, ce refus de ratification, même si les Etats-Unis maintiennent leur moratoire volontaire, a renforcé la position des tenants d'une modernisation de la doctrine nucléaire américaine. De fait, la nouvelle Nuclear posture review de 2002 envisage la possibilité d'employer l'arme nucléaire dans certaines conditions (arme anti-bunker), ce qui rendrait nécessaire le développement de nouveaux types d'armes et donc de procéder éventuellement à de nouveaux essais.

Ainsi, votre Rapporteur est assez pessimiste quant à la perspective d'une entrée en vigueur du Traité dans un avenir proche, voire à moyen terme. Pour autant, il est souhaitable que la France montre qu'elle reste très attachée au principe de l'interdiction complète des essais nucléaires.

II - UN ACCORD QUI MARQUE L'ENGAGEMENT DE LA FRANCE
POUR L'INTERDICTION COMPLÈTE DES ESSAIS NUCLÉAIRES

A - La France est très engagée dans la mise en œuvre du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires

Après une dernière campagne d'essais en 1995, la France a pu annoncer le 28 janvier 1996 qu'elle ne procéderait plus à des essais nucléaires. En effet, si cette campagne d'essais avait été fortement critiquée dans de nombreux pays, elle était indispensable pour permettre à la France de maîtriser la simulation, et donc de renoncer aux essais nucléaires, sans remettre en cause la crédibilité de sa force de dissuasion.

Par ailleurs, la France est le seul Etat doté de l'arme nucléaire à avoir démantelé toutes les installations de son centre d'expérimentations et à avoir ouvert son site d'essais nucléaires à des experts internationaux indépendants.

La France a donc joué logiquement un rôle important dans les négociations qui ont abouti à l'adoption du traité d'interdiction compète des essais nucléaires (TICE) le 10 septembre 1996. Il faut ainsi rappeler que c'est notre pays qui a proposé « l'option zéro », c'est-à-dire l'interdiction complète des essais nucléaires quelle que soit leur puissance. En outre, la France a beaucoup insisté pour que l'interdiction établie par le traité fasse l'objet d'un mécanisme de vérification : elle a ainsi mis à la disposition de la future Organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires (OTICE) 17 installations faisant partie du réseau de surveillance internationale prévu par le traité (15 en outre-mer, deux en métropole, dont le laboratoire du CEA de Bruyères-le-Châtel dans l'Essonne).

La France a signé le TICE dès le 24 septembre 1996, et l'a ratifié le 6 avril 1998. Depuis, elle s'est engagée fortement pour une entrée en vigueur rapide du traité, notamment lors des conférences des Etats signataires, réunies en 1999, 2001 et 2003.

Dans la mesure où le TICE n'est toujours pas entré en vigueur, l'organisation chargée d'en surveiller l'application, l'OTICE, n'a donc toujours pas vu le jour. Mais, une Commission préparatoire de l'OTICE, assistée d'un secrétariat technique provisoire, a été mise en place afin de préparer le système de vérification prévu par le traité, lorsque celui-ci entrera en vigueur. En signant l'accord que nous examinons aujourd'hui, la France a donc voulu faciliter les activités du secrétariat technique provisoire.

B - Les principales dispositions de l'accord du 13 juillet 2001 entre la France et la Commission préparatoire de l'OTICE

L'accord, signé le 13 juillet 2001, entre la France et la Commission préparatoire de l'OTICE, vise à déterminer les modalités d'organisation des activités de surveillance exercées par le Secrétariat technique provisoire dans les 17 installations du système de surveillance international situées sur le territoire français.

L'accord prévoit ainsi le mode de constitution des équipes envoyées en France par le Secrétariat technique provisoire (une consultation préalable du Gouvernement français est prévue), le statut juridique et fiscal de ces équipes (ils bénéficieront des privilèges et immunités accordés aux personnels des Nations unies), les délais de préavis de l'arrivée d'une équipe (14 jours) etc.

La mise en œuvre des stipulations de cet accord permettra de préciser clairement le statut des équipes de surveillance présentes sur le territoire français. En effet, bien que le TICE ne soit pas entré en vigueur, les dispositifs de surveillance qu'il a institué, notamment sur le territoire français, existent déjà.

CONCLUSION

La ratification de l'accord du 13 juillet 2001 contribuera au bon fonctionnement de la Commission préparatoire de l'OTICE, seule organisation de contrôle dans le domaine des essais nucléaires dans l'attente d'une hypothétique mise en œuvre du traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Votre Rapporteur vous recommande donc d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 16 décembre 2003.

Après l'exposé du Rapporteur, et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (no 1283).

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* *

La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l'accord figure en annexe au projet de loi (n° 1283).

N° 1291 - rapport sur le projet de loi - accord France - Commission préparatoire de l'Organisation du traité d'interdiction complète des essais nucléaires sur la conduite des activités relatives aux installations de surveillance internationale ( M. Richard Cazenave)

1 N'ont pas signé : la Corée du Nord, l'Inde et le Pakistan.

2 N'ont pas ratifié : la Chine (qui devrait bientôt achever son processus de ratification), la Colombie, la République démocratique du Congo, l'Egypte,les Etats-Unis, l'Indonésie, l'Iran, Israël et le Vietnam


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