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le 8 juillet 2005

N° 2455

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 juillet 2005.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION (N° 2441) de M. MARC LAFFINEUR, RAPPORTEUR DE LA DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE, sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour 2006 (n° E 2902),

PAR M. GILLES CARREZ,

Rapporteur général,

Député.

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INTRODUCTION 5

I.- UN MOMENT CLEF DE LA CONSTRUCTION BUDGÉTAIRE COMMUNAUTAIRE 7

A.- L'ENJEU DES PERSPECTIVES FINANCIÈRES 7

B.- LA POSITION RESPONSABLE ET ÉQUILIBRÉE DE LA FRANCE DANS LES NÉGOCIATIONS RELATIVES AUX PERSPECTIVES FINANCIÈRES 2007-2013 9

1.- La discipline budgétaire est une nécessité impérieuse 10

2.- L'inéquité manifeste du système de financement européen ne peut perdurer sans risque pour la cohésion européenne 12

II.- POUR 2006, UN BUDGET DE « CLÔTURE » DE LA PROGRAMMATION 2000-2006 17

A.- LA MOBILISATION DES MOYENS PRÉVUS PAR LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES 17

B.- EXAMEN PAR RUBRIQUE 20

EXAMEN EN COMMISSION 27

TEXTE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION 29

TABLEAU COMPARATIF 31

Mesdames, Messieurs,

Comme il est désormais traditionnel, l'Assemblée nationale est appelée à se prononcer en amont de la procédure budgétaire communautaire sur les finances annuelles de l'Europe.

La Délégation pour l'Union européenne a déposé, pour la quatorzième année consécutive, une proposition de résolution sur l'avant-projet de budget des Communautés européennes soumis par le Gouvernement au Parlement en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Cette résolution constitue à vrai dire la seule opportunité qu'aient les assemblées parlementaires des Etats membres de pouvoir peser sur les choix financiers européens annuels. En effet, la procédure budgétaire communautaire fait intervenir le Conseil dès la fin du mois de juillet précédant l'exercice, qui statue en première lecture sur l'avant-projet déposé par la Commission européenne, avant que l'examen par le Parlement européen ne débute en séance plénière en septembre.

Lorsque l'Assemblée nationale examine l'article du projet de loi de finances évaluant le montant du prélèvement sur recettes au profit des Communautés européennes, les grandes orientations du budget européen sont ainsi très largement déterminées.

Aujourd'hui, cependant, les débats portent moins sur le budget pour 2006, qui, en raison de sa situation en fin de la programmation 2000-2006, consiste essentiellement à « solder » les engagements réalisés dans le passé (en particulier s'agissant des fonds structurels) et à assurer la montée en puissance des dépenses liées à l'élargissement conformément aux conclusions du Conseil européen de Copenhague de décembre 2002, que sur la définition des perspectives financières pluriannuelles qui encadreront les budgets annuels de 2007 à 2013.

A cet égard, les difficultés rencontrées dans les négociations ne doivent pas masquer la profonde cohérence de la position du Gouvernement articulée autour des principes de responsabilité budgétaire (l'efficacité de la dépense est intrinsèquement liée à sa maîtrise résolue) et d'équité contributive (seule l'équité dans la répartition de la charge commune du financement du budget est susceptible de préserver l'adhésion de tous aux missions de l'Union européenne). Ces principes constituent un pôle d'équilibre pouvant rallier nos partenaires.

I.- UN MOMENT CLEF DE LA CONSTRUCTION BUDGÉTAIRE COMMUNAUTAIRE

A.- L'ENJEU DES PERSPECTIVES FINANCIÈRES

· L'année 2006 est la dernière année durant laquelle s'applique le cadre financier pluriannuel défini à Berlin en mars 1999.

On peut rappeler qu'aux termes du paragraphe 9 de l'accord institutionnel du 6 mai 1999, qui engage les deux autorités budgétaires que sont le Conseil de l'Union et le Parlement, le budget de la Communauté européenne est encadré par des perspectives financières pluriannuelles qui « visent à assurer, sur une période de moyen terme, une évolution ordonnée, par grandes catégories, des dépenses de l'Union européenne, dans la limite de leurs ressources propres ».

La pratique des perspectives financières remonte à 1988, année durant laquelle, confrontées aux risques de désaccords entre le Conseil de l'Union et le Parlement, et face aux tensions budgétaires croissantes entre les États membres, les autorités communautaires ont décidé de se doter d'un cadre budgétaire de référence encadrant strictement les budgets annuels à moyen terme et permettant d'éviter la répétition annuelle d'un débat d'ensemble sur les grandes orientations du budget. Ces perspectives financières, qui prennent la forme juridique d'accords interinstitutionnels, actes non prévus par les Traités mais néanmoins créateurs de droits, dont le respect est sanctionné par la Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE), lient la Commission, le Conseil et le Parlement qui sont leurs signataires. Leur négociation ressort, cependant, du fait de l'unanimité des États membres requise pour leur adoption, du Conseil européen qui précède leur signature formelle au cours duquel sont rendus les arbitrages essentiels.

Cette programmation à un horizon de sept ans, juridiquement contraignante tant au stade de l'élaboration du budget qu'au cours de son exécution, détermine des plafonds annuels de crédits (et, par voie de conséquence, de recettes, le budget étant soumis à une obligation d'équilibre) tant pour la dépense globale (en crédits pour paiements) que pour chacune des catégories de dépenses (en crédits pour engagements). Dans ces conditions, les montants maxima de crédits déterminés dans les perspectives financières sont des plafonds, qui ne peuvent être dépassés dans chaque budget, et non pas des objectifs annuels de dépenses.

Il convient, cependant, de rappeler que ce cadre financier n'est pas pour autant exempt de souplesse. Un instrument dit « de flexibilité », doté de 200 millions d'euros par an, permet de financer des dépenses non prévues, de même que l'exigence d'unanimité est levée pour des adaptations portant sur moins de 0,03% du RNB de l'Union. Il est en outre toujours possible de procéder à une adaptation des perspectives financières suivant les mêmes règles que celles qui président à leur adoption, comme ce fut notamment le cas lors du sommet de Copenhague en décembre 2002 qui a pu tirer les conséquences financières de l'élargissement sans remettre en cause l'architecture d'ensemble des perspectives financières 2000-2006 signées à Berlin en mars 1999.

En outre, en miroir des plafonds de dépenses, le budget communautaire est caractérisé par un plafond de ressources. La décision 2000/597/CE Euratom du Conseil du 29 septembre 2000 relative aux ressources propres, prise en application de l'article 269 du Traité instituant la Communauté européenne qui stipule que le budget de l'Union « est, sans préjudice des autres recettes, intégralement financé par des ressources propres », a fixé ce plafond à 1,24% du revenu national brut.

Il apparaît donc que les négociations pluriannuelles revêtent une importance cruciale puisqu'elles engagent les autorités communautaires, ainsi que les finances publiques des États membres qui contribuent au financement du budget, pour une durée importante. Elles déterminent le champ des missions et des dépenses de l'Union, et permettent d'apprécier leurs coûts à moyen terme.

Un bref aperçu de l'histoire des précédentes programmations permet de mieux en cerner les enjeux.

Chacune des trois précédentes perspectives financières a en effet reflété l'état du débat politique sur les missions que les États membres ont souhaité confier à l'Union.

Ainsi, le cadre financier 1988-92 (« Paquet Delors »), outre le dénouement des crises budgétaires des années 80 par l'adoption d'un cadre de référence à moyen terme, a été marqué par la mise en œuvre des politiques structurelles, liées en particulier à l'accession de l'Espagne et du Portugal à la CEE, dans un contexte de forte progression des crédits, de 1,15% à 1,20% du produit national brut (PNB) communautaire.

Les perspectives financières 1993-1999 (« Second Paquet Delors »), adoptées par le Conseil européen d'Édimbourg en décembre 1992, ont prolongé ce mouvement, l'objectif de la monnaie unique imposant une accélération de la convergence économique rendue possible au moyen d'une augmentation de plus de 40% des fonds structurels. Ce renforcement des actions structurelles combiné au maintien de la politique agricole commune (dont les crédits ont progressé au même moment de 10% environ) a induit le franchissement d'un nouveau cap de dépenses, le plafond des perspectives atteignant 1,27% du PNB en 1999.

Face à cette inflation du budget communautaire, les États membres ont décidé, lors de l'adoption par le Conseil européen de Berlin en mars 1999 des perspectives financières 2000-2007 (« Agenda 2000 »), de freiner la progression des dépenses, en maintenant le plafond des ressources propres à 1,27% du PNB (devenu 1,23% du revenu national brut communautaire). La conciliation du respect de cette stabilité d'ensemble de la dépense et du financement des besoins induits par l'élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale a rendu nécessaire de dégager des économies sur les autres postes de dépense du budget communautaire. À cette fin, les dépenses agricoles pour les 15, après la montée en puissance des nouveaux programmes entre 2000 et 2003, se sont rapprochées à l'horizon 2006 du niveau atteint en 2000, tandis qu'en leur sein la priorité a été donnée au développement rural dont les crédits ont bénéficié d'un dixième de l'enveloppe agricole totale. Parallèlement, les fonds structurels ont été réduits au moyen d'une concentration géographique et thématique. Enfin, les dépenses au titre des politiques internes comme à celui des actions extérieures et les dépenses administratives sont restées stables, encourageant la recherche d'une meilleure efficacité dans les opérations financées.

Cette montée en puissance du budget communautaire a évidemment eu d'importantes répercutions sur les finances publiques des États-membres. On rappellera qu'en application de la décision précitée relative aux ressources propres, le financement du budget communautaire est assuré à hauteur de 65% par la ressource dite « Revenu national brut » (RNB), qui consiste en l'application d'un taux à la somme des RNB de tous les États membres et, pour 20%, par la ressource TVA, via l'application d'un taux de 0,50% à une assiette uniformisée et écrêtée qui doit être inférieure à 50% du RNB. Les autres ressources (prélèvements sur les importations agricoles des pays tiers afin de compenser la différence entre les prix mondiaux et les prix communautaires et droits de douane) ont pour leur part tendance à se réduire fortement compte tenu de l'évolution générale des tarifs douaniers dans le cadre de l'OMC.

Quelles que soient les modalités de financement du budget, force est de constater que l'effort financier des États membres s'est fortement accru depuis le début des années 1980. Ainsi, la France devrait consacrer 16,6 milliards d'euros au budget communautaire en 2005, (prévision du prélèvement sur recettes dans la loi de finances initiale pour 2005) soit 5,9 % de ses recettes fiscales nettes. C'est plus du double en volume du niveau constaté au début des années 1980.

B.- LA POSITION RESPONSABLE ET ÉQUILIBRÉE DE LA FRANCE DANS LES NÉGOCIATIONS RELATIVES AUX PERSPECTIVES FINANCIÈRES 2007-2013

Les autorités communautaires ont engagé depuis le début de l'année 2004, les négociations relatives aux nouvelles perspectives financières pour 2007-2013. La présentation par la Commission européenne, le 10 février 2004, d'une communication (COM 2004) 101, « Construire notre avenir commun, défis politiques et moyens budgétaires de l'Union élargie - 2007-2013 » a lancé un débat nourri et parfois difficile qui n'a pas trouvé son terme lors du sommet de Bruxelles en juin dernier durant lequel les positions des États membres sont apparues contradictoires.

Votre Rapporteur général renvoie à son rapport n° 1724 du 8 juillet 2004 sur l'avant-projet de budget pour 2005 (pages 7 à 17), ainsi qu'au rapport d'information, au nom de la Délégation pour l'Union européenne n° 2367 du 9 juin 2005 de nos collègues, MM. René André et Marc Laffineur, pour une présentation détaillée des propositions de la Commission européenne et des positions respectives des États membres sur les perspectives financières. Il apparaît cependant utile, à ce stade, de rappeler la cohérence et le caractère équilibré de la position française en se plaçant en particulier dans la perspective de la soutenabilité des finances publiques à laquelle il appartient à votre Commission d'être attentive.

1.- La discipline budgétaire est une nécessité impérieuse

Le premier débat concerne la taille du budget communautaire. Les divergences s'articulent autour des deux positions contradictoires de la Commission européenne, d'un côté, qui propose de porter le plafond des dépenses jusqu'à 1,24% du RNB (1) en 2013 (soit un plafond moyen entre 2006 et 2013 de 1,22% du RNB), privilégiant sans ambiguïté l'addition de priorités nouvelles aux politiques existantes plutôt que la démarche, plus exigeante, des redéploiements, tandis que six chefs d'Etat et de Gouvernement (2), confrontés à une forte contrainte budgétaire, se sont prononcés dans une lettre au Président de la Commission européenne, en faveur de la stabilisation des dépenses communautaires en dessous de 1,00% du RNB de l'Union entre 2007 et 2013.

Votre Rapporteur général remarque qu'en l'absence de transfert de compétences réellement nouvelles au budget européen, l'abandon de la discipline budgétaire au niveau européen constituerait un précédent tout à fait regrettable.

_ Il faut tout d'abord remarquer que le respect d'un budget limité à 1% du revenu national brut communautaire autorise de fait une augmentation des crédits d'engagement de 11% en volume entre 2007 et 2013, soit une croissance annuelle de 1,6% en volume par an. S'agissant des crédits pour paiements, la croissance rendue possible par le maintien du plafond de 1% du RNB atteint même 25%, soit 3,2% par an en volume. Cette progression de la dépense publique européenne est d'ores et déjà très généreuse, en particulier lorsqu'on la rapproche du niveau d'exigence auquel se soumettent de nombreux États membres qui privilégient souvent un gel pur et simple en volume de la dépense.

_ Ensuite, votre Rapporteur général ne peut que rappeler qu'un brusque ressaut des dépenses budgétaires européennes aurait des répercutions extrêmement fortes sur les États membres, et rendrait un peu plus difficile encore la tâche impérieuse de l'assainissement des finances publiques à laquelle nombre d'entre eux s'astreignent.

Il faut en effet rappeler que l'élargissement pèse d'ores et déjà lourdement sur le budget communautaire et que son coût est encore loin d'être absorbé, les paiements, qui servent de base au calcul des contributions nationales, intervenant avec un décalage important par rapport aux engagements. Dès lors, les contributions nationales subiront, quels que soient les choix budgétaires retenus pour 2007-2013, une forte augmentation à très court terme. Le prélèvement sur recettes versé par la France à l'Union européenne, compte tenu des engagements pris à l'égard des dix nouveaux États membres pour la seule période 2004-2006, qui s'élèvent à plus de 45 milliards d'euros, devrait en effet atteindre en 2008, « pic d'absorption » maximal des crédits d'engagements consacrés à l'élargissement, 20,5 milliards d'euros après 19,5 milliards d'euros en 2007 et avant de se réduire à 18 milliards d'euros d'ici 2010, dans le cas d'un scénario de budget limité à 1,0% du RNB en moyenne sur la période de programmation et du maintien du système de financement actuel.

Le graphique ci-après montre bien l'incompatibilité des propositions de la Commission européenne avec le respect, par la France, de ses engagements européens en matière de finances publiques.

ÉVOLUTION DE LA CONTRIBUTION FRANÇAISE, À SYSTÈME DE FINANCEMENT DU BUDGET COMMUNAUTAIRE INCHANGÉ, SELON LES SCÉNARIOS RELATIFS AUX PERSPECTIVES FINANCIÈRES 2007-2013

(en milliards d'euros 2004)

graphique

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, cité dans le rapport d'information n° 2367 de MM. René André et Marc Laffineur, « perspectives financières 2007-2013, quelles ambitions pour l'Union élargie ? », juin 2005.

Il apparaît en effet que les propositions de la Commission européenne induiraient une augmentation de près de 7 milliards d'euros de la contribution française au financement du budget européen, un niveau supérieur de 5 milliards d'euros à celui qu'entraînerait un budget limité à 1,0% du PIB. Cet effort serait équivalent à une dégradation de 0,3 point de PIB du déficit structurel de notre pays, qui est manifestement incompatible avec la nécessité de freiner notre endettement public et de retrouver des marges de manœuvre budgétaires.

2.- L'inéquité manifeste du système de financement européen ne peut perdurer sans risque pour la cohésion européenne

Au-delà des débats sur le « juste niveau » du budget communautaire, la négociation des perspectives financières ne peut aboutir sans que soit examinée, sans complaisance mais avec réalisme, la question de la répartition de la charge commune. A cet égard, votre Rapporteur général souligne, d'ailleurs, que l'accentuation du caractère redistributif du budget européen au profit des États les moins riches rend de moins en moins pertinente et, à vrai dire, de plus en plus mesquine, la problématique du « juste retour » fondée sur le calcul des contributions nettes des États membres.

· Le tableau ci-après, qui rapproche le montant de la contribution acquittée par chaque Etat membre à leur part dans le PIB de l'Union en 2003, montre l'inéquité du mode de financement du budget communautaire, au détriment principalement de la France (qui finance près de 18% du budget pour un poids dans la richesse européenne inférieur à 17%) et au profit exclusif du Royaume-Uni (qui n'acquitte que 13% du budget communautaire pour plus de 18% de son PIB).

CONTRIBUTION DES ÉTATS MEMBRES
AU FINANCEMENT DU BUDGET COMMUNAUTAIRE EN 2003

(en milliards d'euros)

Montant de la contribution

Part dans le financement du budget
(en pourcentage)

Part dans le PIB de l'Union
(en pourcentage)

Montant versé par habitant
(en euros)

Belgique

3,53

4,0

2,9

344

Danemark

1,92

2,2

2,0

359

Allemagne

20,33

22,9

22,8

247

Grèce

1,60

1,8

1,6

152

Espagne

7,65

8,6

7,7

192

France

15,91

17,9

16,8

263

Irlande

1,17

1,3

1,2

309

Italie

12,62

14,2

13,8

218

Luxembourg

0,21

0,2

0,2

465

Pays-Bas

5,13

5,8

4,8

322

Autriche

2,06

2,3

2,3

253

Portugal

1,37

1,5

1,4

134

Finlande

1,40

1,6

1,5

270

Suède

2,47

2,8

2,8

278

Royaume-Uni

11,43

12,9

18,2

191

UE 15

88,77

100,0

100,0

253

Cette situation résulte exclusivement de la « correction britannique ».

Cette correction, qui consiste à rembourser au Royaume-Uni les deux tiers du déséquilibre de l'année précédant son versement entre les dépenses communautaires dont il bénéficie et le montant de sa contribution calculé selon l'application des règles relatives aux ressources propres, a été instituée en juin 1984 afin de compenser le « déséquilibre budgétaire » alors supporté par le Royaume-Uni.

Ce remboursement est financé par les autres États membres au prorata de leur part dans le PNB communautaire. Cependant, l'aggravation des soldes nets (la différence entre dépenses communautaires dont bénéficie chaque État membre et le montant de sa contribution annuelle au financement du budget) induite par ce financement a conduit à mettre en place de nombreuses exceptions. Dès 1984, la participation de l'Allemagne au financement de la correction britannique a été réduite d'un tiers. Puis, lors du sommet de Berlin en mars 1999, les participations au financement de la correction britannique de l'Allemagne, de l'Autriche, de la Suède et des Pays-Bas ont été diminuées à un quart de leur montant normal.

Dès lors, la charge de la France, seul contributeur net important qui n'a pas bénéficié d'un « rabais sur le rabais », est ainsi passée de moins d'un quart à près du tiers du total de la correction britannique. Désormais, comme le montre le graphique ci-dessous, la France consacre chaque année à son financement 1,5 milliard d'euros, soit l'équivalent d'une baisse de 2,5% de l'impôt sur le revenu. Depuis 1986, le coût cumulé de la correction a représenté pour la France plus de 19 milliards d'euros.

ÉVOLUTION DU COÛT DE LA CORRECTION BRITANNIQUE ET DE LA PART ASSUMÉE PAR LA FRANCE DANS SON FINANCEMENT

(en milliards d'euros)

graphique

Bien plus, le Royaume-Uni s'est vu exonéré pour une très large part, lors du sommet de Berlin précité, du financement de l'élargissement. Il y a en effet été décidé que les aides de préadhésion à l'attention des dix pays accédants, s'élevant à environ 3 milliards d'euros par an, n'entreraient pas dans le calcul de la contribution. En revanche, après leur adhésion, les dépenses en faveur des nouveaux États membres pourront être réparties entre les États membres, mais elles seront diminuées d'un montant correspondant aux aides de préadhésion versées l'année précédant l'adhésion. En pratique, le Royaume-Uni se voit ainsi rembourser les 2/3 de ce qu'il verse au titre de l'élargissement, ce qui augmente mécaniquement le coût de ce dernier pour les autres États membres.

· Or, les raisons qui ont présidé à l'adoption du rabais britannique sont aujourd'hui manifestement obsolètes.

En premier lieu, la prospérité relative du Royaume-Uni par rapport aux autres États membres, qui était nettement défavorable en 1984, s'est totalement inversée : désormais le RNB britannique par habitant est supérieur de 11% à la moyenne de l'UE à 15 (alors qu'il lui était inférieur de 10% en 1984), tandis que celui de la France ne dépasse cette moyenne que de 4,2% et celui de l'Allemagne lui est inférieur de 1,4%.

En second lieu, l'argument principal de Mme Margaret Thatcher en 1984, qui dénonçait le fait que le Royaume-Uni payait structurellement plus que les autres (3) et qu'il recevait structurellement moins que les autres (4) a perdu de sa pertinence. D'un côté, les ressources propres TVA et droits de douane sont marginales dans le financement du budget. De l'autre, la part des dépenses agricoles dans le budget s'est considérablement réduite, passant de 70% en 1984 à 54% en 2002 et 43% en 2005. En outre, le compromis atteint sur la politique agricole commune lors du Conseil européen de Bruxelles des 24 et 25 octobre 2002, qui prévoit la stabilisation du montant des dépenses de marché et des paiements directs à 25 d'ici 2013, en appliquant un taux de progression de 1% par an aux dépenses prévues pour les 15 en 2006 majorées des dépenses correspondantes au profit des nouveaux États membres (soit 2,5 milliards d'euros en 2006), devrait conduire à un nouvel allégement du poids de la PAC dans le budget (ramené à environ 35%), et, surtout, renforcer la dimension « redistributive » de cette politique au bénéfice des nouveaux États membres.

Ce dernier aspect est le plus important pour votre Rapporteur général. L'enjeu principal des perspectives financières pour 2007-2013 est l'effort croissant assumé par les anciens États membres pour accélérer le rattrapage des pays de l'élargissement, notamment grâce à l'accroissement des fonds structurels à leur intention. Il est injustifiable que le Royaume-Uni se voie exonérer de cette solidarité commune.

· La Commission européenne a proposé, dans sa communication précitée, de remplacer le mécanisme de la correction britannique et de la répartition inégalitaire de son financement par un mécanisme très technique dit « d'écrêtement généralisé des soldes » permettant aux États membres, dont le solde net serait supérieur à 0,35% de leur PIB, de bénéficier d'un remboursement partiel et plafonné de leur contribution :

- l'assiette du remboursement serait le montant du solde net qui excède le seuil de 0,35% du PIB d'au moins 35% ;

- le montant global des remboursements accordés à tous les bénéficiaires ne pourrait excéder un plafond global de 7,5 milliards d'euros par an ;

- le taux de remboursement serait par conséquent variable d'une année sur l'autre. Toutefois, il serait plafonné à 66% de l'assiette du remboursement de manière à ne jamais dépasser le niveau de l'actuelle compensation britannique.

Ce système, d'une complexité redoutable, s'est heurté à l'opposition de l'immense majorité des États membres. Il n'aboutit en effet qu'à une correction marginale des déséquilibres budgétaires : les soldes nets de l'Allemagne ou des Pays-Bas, principaux contributeurs nets, ne passeraient, en moyenne entre 2008 et 2013, que de respectivement - 0,54% et - 0,56% de leur PIB dans le système actuel à - 0,48% pour les deux États. Le progrès est encore plus négligeable s'agissant de la France, dont le solde net passerait de - 0,37% du PIB à - 0,33%. En outre, il n'est guère indifférent de constater que la situation du Royaume-Uni serait quasiment la même si le mécanisme d'écrêtement généralisé était mis en œuvre (son solde net passerait de - 0,25% du PIB selon le système actuel à
- 0,51%) ou si la correction était purement et simplement abandonnée (son solde net s'établirait, dans cette dernière hypothèse, à - 0,62%).

Dès lors, la préférence de votre Rapporteur général ne peut qu'aller à une suppression totale du rabais britannique, la question de la définition d'un dispositif transitoire permettant de « lisser » son impact budgétaire pour le Royaume-Uni, essentiellement technique, pouvant constituer l'élément de compromis susceptible de rapprocher les positions des États membres.

II.- POUR 2006, UN BUDGET DE « CLÔTURE »
DE LA PROGRAMMATION 2000-2006

A.- LA MOBILISATION DES MOYENS PRÉVUS
PAR LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES

L'avant-projet de budget pour 2006 (APB 2006), dont le tableau ci-dessous détaille la structure par rubriques, concilie une indéniable discipline d'ensemble avec la mobilisation des moyens prévus dans la programmation 2000-2006. L'accroissement des crédits s'explique principalement, comme durant les deux dernières années, par la montée en puissance des dépenses consacrées à l'élargissement, conformément aux engagements pris lors du Conseil européen de Copenhague, en décembre 2002. En outre, la fin de la programmation 2000-2006 impose de « solder » autant que faire ce peut les engagements réalisés depuis le début de la programmation en dégageant les crédits de paiements qui s'y rapportent afin de limiter le niveau des engagements « restant à liquider » (RAL) qui pourraient peser sur la prochaine programmation.

Ainsi, les crédits d'engagements, qui atteindraient 121,27 milliards d'euros, conserveraient une croissance soutenue (+ 4,0 % par rapport au budget pour 2005), quoiqu'en repli par rapport aux deux premières années de l'élargissement (+ 11,6% en 2004, puis + 5,2% en 2005). Cette progression est la conséquence de la troisième étape dans la phase d'introduction progressive des fonds structurels dans les nouveaux États membres (les engagements disponibles à leur intention augmenteront de 27,6%) et de leur accès croissant aux aides agricoles.

Parallèlement, l'« amortissement » progressif du ressaut des engagements liés à l'élargissement conjugué à la forte consommation des crédits pour engagements des fonds structurels due à la situation du budget 2006 en fin de programmation 2000-2006 dans l'UE à 15 impriment un taux de croissance élevé aux crédits pour paiements.

Votre Rapporteur général rappelle en effet que la nature du budget communautaire, qui est à 95% un budget d'intervention, introduit un découplage temporaire entre l'évolution des engagements et celle des paiements, lesquels servent de base au calcul des contributions nationales annuelles. Cela explique la croissance progressive des taux de consommation des crédits, en particulier structurels, dans les États membres. En outre, les investissements réalisés dans les pays d'Europe centrale et orientale ne sont réalisés que progressivement, et leur paiement intervient donc après un décalage souvent important par rapport à leur engagement. Dès lors, le coût réel de l'élargissement est masqué durant ses premières années, les crédits pour paiements au profit des nouveaux États membres, qui servent de fondement au calcul des contributions nationales annuelles, ne représentant en moyenne entre 2004 et 2006 que 72% des crédits pour engagements qui leur sont affectés.

Ce phénomène explique la montée en charge des crédits pour paiements du budget pour 2006 : la Commission européenne propose en effet de porter leur niveau global à 112,55 milliards d'euros, soit une hausse de 5,9% par rapport au budget 2005 (après + 4,4% en 2005). Les 6,74 milliards d'euros supplémentaires par rapport à 2005 ont pour origine :

- à hauteur de 3,24 milliards d'euros, les paiements au titre des actions structurelles, dont 0,83 milliard d'euros consacrés aux nouveaux États membres ;

- pour 2,24 milliards d'euros, les paiements agricoles, dont 0,51 milliard d'euros au bénéfice des pays de l'élargissement et 1,73 milliard d'euros à celui des anciens États membres, répercussions budgétaires du régime de paiement unique découplé introduit par la réforme de la politique agricole commune (PAC) en 2003 (voir plus bas) ;

- et pour 0,93 milliard d'euros, les paiements au titre des politiques internes se rapportant principalement à l'absorption des engagements contractés après l'élargissement, notamment dans le domaine de la recherche.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES PRÉVUE PAR L'AVANT-PROJET DE BUDGET POUR 2006

(crédits pour engagements, en millions d'euros)

 

Budget 2005

Perspectives financières pour 2006 (plafonds de dépenses)

APB 2006

Évolution APB 2006/budget 2005

En pourcentage

1.- AGRICULTURE

49.677

52.618

51.412

1.736

3,5

Marge au plafond des perspectives financières

1.763

1.206

Dépenses agricoles (à l'exclusion du développement rural)

42.836

43.641

806

1,9

Développement rural et mesures d'accompagnement

6.841

7.771

930

13,6

2.- ACTIONS STRUCTURELLES

42.424

44.617

44.555

2.132

5,0

Marge

17

62

Fonds structurels

37.292

38.523

38.523

1.231

3,3

Fonds de cohésion

5.132

6.094

6.032

900

17,5

3.- POLITIQUES INTERNES

9.052

9.385

9.218

166

1,8

Marge

- 40

167

Dont dépenses de recherche et technologie

5.047

5.285

238

4,7

4.- ACTIONS EXTÉRIEURES

5.317

5.269

5.392

75

1,4

Marge

- 198

- 123

5.- ADMINISTRATION

6.293

6.708

6.683

390

6,2

Marge

67

25

6.- RÉSERVES

446

458

458

12

2,7

Marges

0

0

Réserve pour garanties

223

229

6

2,7

Réserve pour aides d'urgence

223

229

6

2,7

7.- AIDE DE PRÉADHÉSION

2.081

3.566

2.481

400

19,2

Marge

1.391

1.085

Agriculture (SAPARD)

250

300

50

19,9

Instrument structurel de préadhésion (ISPA)

526

585

59

11,3

PHARE (pays candidats)

899

977

79

8,7

Turquie

286

479

193

67,5

8.- COMPENSATION

1.305

1.074

1.074

- 232

- 17,7

Marge

11

 

0

0

TOTAL DES CRÉDITS POUR ENGAGEMENTS

116.594

123.695

121.273

4.680

4,0

Marge de CE

3.000

2.422

CRÉDITS POUR PAIEMENTS

106.241

119.292

112.552

6.311

5,9

Marge de CP

7.993

6.740

CP en % du RNB

1,01%

1,08%

1,02%

B.- EXAMEN PAR RUBRIQUE

· La Commission européenne propose de budgéter 51,41 milliards d'euros de crédits d'engagements relatifs aux dépenses agricoles, soit une hausse de 3,5% par rapport au budget pour 2005. La marge sous le plafond des perspectives financières s'inscrirait ainsi en baisse (1,21 milliard d'euros contre 1,76 milliard d'euros prévus pour 2005).

Le premier pilier de la PAC (dépenses agricoles hors développement rural) bénéficierait de 43,64 milliards d'euros de crédits (+ 1,9%).

- Les interventions sur le marché agricole se replieraient nettement de 767 millions d'euros, deux mouvements contraires aboutissant à ce repli.

D'un côté, les dépenses d'intervention hors produits animaux devraient progresser de 784 millions d'euros.

Cette augmentation résulte d'importants besoins de déstockage dans le secteur des céréales (+ 472 millions d'euros), l'exceptionnelle abondance de la campagne 2004/2005 ayant entraîné un fort ressaut des stocks publics qui ne devraient pas être absorbés dès 2006 compte tenu d'une prévision de récolte normale cette saison. Parallèlement, la baisse du prix mondial du maïs et du coton induit des besoins de restitutions élevés pour les deux secteurs (+ 116 millions d'euros).

Concomitamment, la réforme de la PAC adoptée par le Conseil le 29 septembre 2003 induit une forte baisse des dépenses d'intervention au détriment en particulier du secteur laitier (- 1.085 millions d'euros) en raison de la baisse des prix institutionnels du beurre et du lait écrémé en poudre, et du secteur de la viande bovine (- 106 millions d'euros).

- En contrepartie de la baisse de ces interventions, la réforme de la PAC, qui a profondément modifié le périmètre des aides directes, entraîne une augmentation de 1,24 milliard d'euros des crédits destinés aux aides directes.

Il est ici utile de rappeler que la réforme de la PAC a pour objet d'introduire une rupture progressive du lien entre la production et les aides directes aux agriculteurs, le calcul des aides devant se faire progressivement non plus en fonction de la production effective, mais à l'inverse sur la base des aides moyennes perçues entre 2000 et 2002 (principe dit du « découplage »), de subordonner de façon croissante le versement des aides au respect de normes environnementales et d'emploi, de diminuer le montant des aides en les faisant basculer vers la rubrique du développement rural, un taux minimum de retour aux agriculteurs restant cependant fixé à 80% et au-delà d'une franchise de 5.000 euros (principe dit de la « modulation ») et, en contrepartie, de baisser les prix d'intervention (dans le secteur du lait en particulier).

Dès lors, en 2006, le « découplage » des aides directes à la production devrait provoquer un vaste transfert de crédits, les aides « couplées » diminuant de 13,7 milliards d'euros tandis que les aides « découplées » progresseraient de 15 milliards d'euros. L'augmentation nette des aides directes se ferait en 2006 au bénéfice du secteur laitier (+ 1,6 milliard d'euros), touché en contrepartie, on l'a vu, par une baisse des prix d'intervention.

La « modulation », c'est-à-dire le transfert de 3% des aides directes octroyées aux agriculteurs (jusqu'à 5% à partir de 2007), à l'exception des premiers 5.000 euros d'aides, en dépenses de développement rural soumises à des normes environnementales ou d'emplois, se traduit par une diminution de 655 millions d'euros des crédits des aides directes et une augmentation d'un même montant des aides au développement rural (deuxième pilier de la PAC).

- Enfin, l'élargissement induirait une hausse des besoins agricoles de 511 millions d'euros dont 346 millions d'euros d'aides directes correspondant à la troisième étape de la montée en charge du bénéfice des aides directes aux agriculteurs des dix nouveaux États membres. On peut rappeler à cet égard qu'une solution d'échelonnement a été retenue pour l'élargissement de la PAC, les paiements directs dans ces États devant représenter 25% des paiements « théoriques », calculés par rapport aux paiements dus en application intégrale des règles de la PAC applicables aux anciens États membres, en 2004, puis 5% supplémentaires les trois années suivantes, puis 10% de plus par an pour atteindre 100% en 2013.

· Le volume des crédits pour engagements pour les actions structurelles devrait continuer à s'accroître fortement (+ 5,0% pour atteindre 44,56 milliards d'euros) au bénéfice quasi exclusif des dix nouveaux États membres qui toucheront, en 2006, 10,06 milliards d'euros de fonds structurels (soit une augmentation de 29,8% par rapport à 2005). Ce ressaut est partiellement compensé par la réduction, pour la deuxième année consécutive, des engagements pour les programmes des fonds structurels pour l'UE à 15 (- 0,4%), dont la programmation 2005-2006 s'achève.

Les crédits pour engagements du fonds de cohésion (États dont le PIB par habitant est inférieur à 75% du PIB moyen de l'Union) progresseraient de 17,5%, l'augmentation de 900 millions d'euros se faisant au bénéfice des nouveaux États membres, conformément aux conclusions du Conseil européen de Copenhague.

S'agissant des fonds structurels proprement dits, le tableau ci-après montre que la tendance à la concentration des crédits sur les aides au développement régional se confirmerait en 2006 :

RÉPARTITION DES FONDS STRUCTURELS PAR OBJECTIFS

(en millions d'euros)

Politique régionale

Emploi et affaires sociales

Agriculture et développement rural

Pêche

Initiatives communautaires

TOTAL

Dont nouveaux États membres

20.574

10.975

3.807

694

2.372

38.523

6.832

Les dépenses effectives (crédits pour paiements) pour les fonds structurels devraient pour leur part s'accroître considérablement de 3,24 milliards d'euros (+ 10,0%, après + 14,8% en 2005).

- Les crédits pour paiements au bénéfice des nouveaux États membres devraient continuer leur montée en charge (+ 831 millions d'euros, + 22,1%), représentant, conformément aux conclusions du Conseil européen de Copenhague, 63% des engagements annuels moyens pour la période 2004-2006. Il est encore trop tôt pour juger de la conformité des taux de consommation retenus aux capacités réelles d'absorption des pays de l'élargissement.

- Cependant, l'essentiel de l'augmentation des paiements devrait concerner l'UE à 15 (+ 2,41 milliards d'euros, + 8,4%). Les paiements en 2006 seraient exclusivement constitués de remboursements, la programmation 2000-2006 touchant à sa fin. Dès lors, la Commission européenne retient pour hypothèse, comme en 2005, des paiements correspondant à 95% de la tranche annuelle moyenne des engagements pour les principaux programmes, prenant acte, d'une part, de la situation de 2005 en fin de programmation (la sous-consommation des crédits étant largement liée aux retards dans leur mise en œuvre) et, d'autre part, de la forte accélération de l'exécution des crédits dans les États membres (le taux d'exécution étant passé de 66% à 78% puis 88% entre 2002, 2003 et 2004), la perspective du dégagement d'office des engagements dormants pendant plus de deux ans ayant stimulé des efforts considérables chez les États membres (5).

· Les engagements proposés au titre de la troisième rubrique consacrée aux politiques internes de la Communauté, pour rester globalement contenus (augmentation limitée à 1,8% pour atteindre 9,22 milliards d'euros), ne reflètent que partiellement la volonté de la Commission européenne de mobiliser des moyens pour relancer la stratégie de Lisbonne en donnant la priorité à la croissance et à l'emploi.

A cette fin, les crédits affectés aux sixièmes programmes cadres pour la recherche et le développement technologique européen institués par la décision n° 2002/1513/CE du Parlement et du Conseil progresseraient de 4,7% pour s'établir à 5,29 milliards d'euros. Le principal effort budgétaire concerne la recherche et le développement technologique dans le domaine de la société de l'information (1.083 millions d'euros, + 4,1%), le programme-cadre étant axé sur la future génération de technologie qui permettra d'intégrer de manière homogène ordinateurs et réseaux dans l'environnement quotidien. Viendraient ensuite le financement d'études, les subventions, le suivi et l'évaluation de programmes entrant dans le champ de la structuration de l'Espace européen de la recherche (recherche fondamentale, 632 millions d'euros, + 8,6%) et dans celui du dévelop-pement durable et des changements écologiques planétaires (451 millions d'euros, + 7,0%). Les nanotechnologies et les matériaux dits « intelligents », qui s'avancent plus en aval du cycle de recherche en portant sur de nouveaux procédés et dispositifs de production, bénéficieraient de 383 millions d'euros,  (+ 8,5%), tandis que les recherches consacrées à l'aéronautique se verraient affecter 222 millions d'euros (+ 8,9%). Le centre commun de recherche (CCR), qui a pour mission de fournir un appui scientifique et technique axé sur l'utilisateur pour la conception, l'élaboration, la mise en œuvre et le suivi des politiques de recherche de l'Union (avec en particulier un appui aux nouveaux États membres pour les aider à mettre en œuvre la législation communautaire), bénéficierait de 330 millions d'euros.

- Une enveloppe de 548 millions d'euros serait consacrée, à la sécurité et la citoyenneté européenne, afin d'accélérer la mise au point du système intégré d'information pour les visas (VIS) et de prolonger l'action du Fonds européen pour les réfugiés pour la période 2005-2010. Il convient de remarquer qu'un montant de 310 millions d'euros est inclus afin d'aider les nouveaux États membres à contrôler les nouvelles frontières extérieures de l'Union.

RÉPARTITION DES CRÉDITS D'ENGAGEMENT
DESTINÉS AUX POLITIQUES INTERNES

(en millions d'euros)

APB 2006

Sixièmes programmes-cadres de recherche

5.285

Education et culture

793

Affaires économiques et financières

61

Emplois et affaires sociales

177

Entreprises

174

Environnement

237

Justice et affaires intérieures

548

Santé et protection des consommateurs

143

Energie et transports

1.116

Autres

683

TOTAL

9.218

· Les dépenses relatives à l'aide extérieure atteindraient 5,39 milliards d'euros (en engagements), en hausse de 1,4% par rapport au budget pour 2005. Les crédits dépasseraient ainsi de 124 millions d'euros le plafond fixé par les perspectives financières, la Commission européenne proposant à cet effet de recourir à l'instrument de flexibilité qui permet de s'écarter, dans la limite de 200 millions d'euros, des plafonds fixés par rubrique par la programmation pluriannuelle.

Le dynamisme des besoins serait principalement lié à l'engagement de l'UE de contribuer de façon significative et pérenne à l'effort de reconstruction des régions asiatiques dévastées par le tsunami, pour lequel l'APB propose de mobiliser 180 millions d'euros après 170 millions d'euros en 2005, ce qui permettrait d'atteindre l'enveloppe d'aide de 350 millions d'euros approuvée par le Conseil et le Parlement au début de 2005.

Les actions thématiques représenteraient 2,29 milliards d'euros dont 500 millions d'euros d'aide humanitaire, 559 millions d'euros d'actions sectorielles de développement et 440 millions d'euros d'aide alimentaire.

La répartition des actions géographiques ne serait guère modifée. L'Afrique mobiliserait 3,50 milliards d'euros, tandis que le bassin méditerranéen et le Moyen-Orient bénéficieraient de 1,11 milliard d'euros d'aides (dont 200 millions d'euros pour la reconstruction de l'Irak), l'Asie 823 millions d'euros, les Balkans 523 millions d'euros, l'Europe orientale et l'Asie centrale 555 millions d'euros et l'Amérique latine 320 millions d'euros.

· L'APB 2006 propose une augmentation de 390 millions d'euros (+ 6,2%) des dépenses administratives, qui s'élèveraient à 6,68 milliards d'euros.

L'essentiel de cette progression est lié aux recrutements rendus nécessaires par l'élargissement. Après 780, puis 700 postes créés en 2004 et 2005, la Commission européenne juge nécessaire d'augmenter ses effectifs permanents de 700 postes supplémentaires, auxquels elle propose d'ajouter 100 postes de personnel externe pour préparer l'élargissement à la Bulgarie et à la Roumanie. Le coût prévisionnel de ces recrutements (financés pour six mois) s'élèverait à près de 40 millions d'euros, l'effort passant à 75 millions d'euros compte tenu de la nécessité de financer sur une année complète les 700 postes supplémentaires demandés par la Commission européenne en 2005 et budgétisés pour six mois. Votre Rapporteur général remarque que cet accroissement des recrutements, conforme aux besoins depuis longtemps exprimés par la Commission européenne (qui estime nécessaire de bénéficier de 3.900 postes supplémentaires entre 2003 et 2008 pour gérer convenablement l'Europe à 25), est à bien des égards inéluctable, 40% des nouveaux effectifs étant affectés aux services de traduction et d'interprétation. La dérive des loyers, imposée en particulier par la nécessité d'assurer l'accueil des nouveaux effectifs, en particulier de traducteurs, apparaît cependant spectaculaire (+ 30 millions d'euros, + 10,0%), les dépenses de sécurité des bâtiments officiels progressant parallèlement de 15 millions d'euros (+ 9,8%). De même, on peut s'interroger sur la très forte augmentation de la rémunération des Commissaires (dont pensions), qui,
de 16,7 à 19,4 millions d'euros, progresse de 16,5%, les pensions des anciens membres imprimant, cependant, un rythme élevé d'augmentation à ce poste de dépense. Enfin, il n'est pas inutile de préciser que, sur les 128 millions d'euros de crédits supplémentaires demandés au titre des rémunérations du personnel de la Commission européenne, seulement 60 millions d'euros représentent, comme on l'a vu, le coût des recrutements supplémentaires.

· Enfin, les dépenses relevant de la stratégie de préadhésion devraient connaître une brusque augmentation de 19,2% pour atteindre (en crédits d'engagement) 2,48 milliards d'euros, l'augmentation de 399 millions d'euros résultant du quasi-doublement (de 300 à 500 millions d'euros) de l'aide à la Turquie, conformément à la stratégie d'adhésion révisée et de l'augmentation de 40% de l'assistance financière à la Roumanie et à la Bulgarie, conformément à la « feuille de route » dressée pour leur adhésion.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné la proposition de résolution (n° 2441) au cours de sa séance du 6 juillet 2006.

Après l'exposé de votre Rapporteur général, la Commission a procédé à l'examen de l'article unique de la proposition de résolution.

M. François Scellier s'est interrogé sur la terminologie brutale du dernier alinéa (6) de la proposition de résolution qui dispose que l'Assemblée nationale « s'oppose » à toute réduction des dépenses agricoles.

M. Charles de Courson a douté de la portée réelle de cet alinéa en estimant que les dépenses agricoles sont des « dépenses obligatoires » dans la nomenclature européenne, qui découlent obligatoirement du traité ou des actes arrêtés en vertu de celui-ci et sur lesquelles les autorités européennes n'ont guère de marges de négociation ou d'amendement.

Votre Rapporteur général a précisé, d'une part, que la notion de « dépenses obligatoires » a pour objet de confier au Conseil une compétence décisionnelle exclusive à leur sujet. Cela signifie simplement que le Conseil décide en dernier lieu du niveau de ces dépenses, quelle que soit l'opinion du Parlement. Les dépenses n'en sont pas pour autant figées dans la procédure budgétaire. Ensuite, au sein des dépenses agricoles, seules celles au titre du FEOGA-garantie, qui mobilise l'essentiel des crédits du premier pilier de la politique agricole commune, sont des « dépenses obligatoires ». En revanche, toutes les autres dépenses agricoles, en particulier celles relatives au développement rural qui représentent près de 8 milliards d'euros dans le budget européen, n'appartiennent pas à cette catégorie.

Le Président Pierre Méhaignerie a suggéré de clarifier cet alinéa de la proposition de résolution en substituant aux termes « toute réduction » des dépenses agricoles à laquelle s'opposerait l'Assemblée nationale dans la résolution les termes « une remise en cause », qui montrent clairement l'attachement de la Commission au maintien de la politique agricole commune et au respect des engagements pris à son propos en 2002.

La Commission a adopté cet amendement.

M. Didier Migaud a regretté que la proposition de résolution, qu'il a jugé terne, sans saveur et témoignant d'une absence totale de volonté, trahisse, comme trop fréquemment, une excessive timidité du Parlement dont la majorité ne parvient pas à peser réellement sur les choix européens pris par le Gouvernement. Il a rappelé que l'opposition regrette fermement la position du Président de la République dans les négociations relatives aux perspectives financières, avec en particulier un attachement dogmatique et à courte vue sur un plafonnement à 1,0% des dépenses européennes qui est manifestement contradictoire avec notre devoir de solidarité à l'égard des pays de l'élargissement et avec le financement d'une politique volontariste et efficace de croissance au niveau européen, laquelle implique à tout le moins un effort de mobilisation pour la recherche et la mise en œuvre d'une politique de grands travaux. Il est déplorable que la Représentation nationale ne se saisisse pas d'un débat de cette ampleur.

Votre Rapporteur général a rappelé que l'Assemblée nationale s'est saisie des perspectives financières 2007-2013 au travers des débats ayant abouti à l'adoption de la résolution n° TA 455, à l'initiative de MM. René André et Marc Laffineur, et à l'occasion de la discussion organisée le 15 juin 2005, en séance publique, après une déclaration du Gouvernement sur le Conseil européen de Bruxelles.

M. Charles de Courson s'est interrogé sur les positions exprimées sur l'avant-projet de budget pour 2006 par les groupes politiques du Parlement européen.

Votre Rapporteur général a observé que ces positions ne peuvent être connues avant que le Parlement européen ne débute l'examen du budget en septembre prochain.

La Commission a adopté l'article unique ainsi modifié de la proposition de résolution.

TEXTE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

ADOPTÉ PAR LA COMMISSION (6)

Proposition de résolution sur l'avant-projet du budget général
de la Commission européenne pour l'exercice 2006 (n° E 2902)

Article unique

L'Assemblée nationale,

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

- Vu l'article 272 du traité instituant la Communauté européenne et l'article 177 du traité Euratom,

- Vu l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire,

- Vu l'avant-projet de budget général de la Commission européenne pour l'exercice 2006 (COM (2005) 300 final / document E 2902),

1. Prend acte des grandes orientations de l'avant-projet de budget général pour 2006, dernier budget de la période couverte par les perspectives financières en vigueur ;

2. Approuve la poursuite par la Commission de ses efforts de discipline budgétaire conduisant à ménager sous les plafonds fixés par les perspectives financières des marges importantes, pour les crédits d'engagement comme pour les crédits de paiement ;

3. Souligne que cet effort de rigueur revêt une portée particulière s'agissant du budget pour l'exercice 2006, dans la mesure où ce budget aura valeur de base de référence pour la période suivante, en cas d'échec des négociations sur le prochain cadre financier pluriannuel ;

4. Soutient l'augmentation de l'effort financier en faveur du développement rural et l'allocation d'une part croissante des Fonds structurels et du Fonds de cohésion aux nouveaux Etats membres ;

5. Rappelle que la politique communautaire en faveur de la recherche et du développement est un élément fondamental pour la réalisation de la stratégie de Lisbonne, et exprime son soutien aux propositions de la Commission d'affecter en 2006 des moyens financiers importants à cette politique ;

6. S'oppose à une remise en cause des dépenses agricoles au cours de la procédure budgétaire.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte de la proposition de résolution (n° 2441)

___

Conclusions de la Commission

___

PROPOSITION DE RÉSOLUTION
sur l'avant-projet du budget général
de la Commission européenne
pour l'exercice 2006 (n° E 2902)

PROPOSITION DE RÉSOLUTION
sur l'avant-projet du budget général
de la Commission européenne
pour l'exercice 2006 (n° E 2902)

Article unique

Article unique

L'Assemblée nationale,

Alinéa sans modification.

- Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Alinéa sans modification.

- Vu l'article 272 du traité instituant la Communauté européenne et l'article 177 du traité Euratom,

Alinéa sans modification.

- Vu l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire,

Alinéa sans modification.

- Vu l'avant-projet du budget général de la Commission européenne pour l'exercice 2006 (COM (2005) 300 final /document E 2902).

Alinéa sans modification.

1. Prend acte des grandes orientations de l'avant-projet de budget pour 2006, dernier budget de la période couverte par les perspectives financières en vigueur :

Alinéa sans modification.

2. Approuve la poursuite par la Commission de ses efforts de discipline budgétaire conduisant à ménager sous les plafonds fixés par les perspectives financières des marges importantes, pour les crédits d'engagement comme pour les crédits de paiement ;

Alinéa sans modification.

3. Souligne que cet effort de rigueur revêt une portée particulière s'agissant du budget pour l'exercice 2006, dans la mesure où ce budget aura valeur de base de référence pour la période suivante, en cas d'échec des négociations sur le prochain cadre financier pluriannuel ;

Alinéa sans modification.

4. Soutient l'augmentation de l'effort financier en faveur du développement rural et l'allocation d'une part croissante des Fonds structurels et du Fonds de cohésion aux nouveaux Etats membres ;

Alinéa sans modification.

5. Rappelle que la politique communautaire en faveur de la recherche et du développement est un élément fondamental pour la réalisation de la stratégie de Lisbonne, et exprime son soutien aux propositions de la Commission d'affecter en 2006 des moyens financiers importants à cette politique ;

Alinéa sans modification.

6. S'oppose à toute réduction des dépenses agricoles au cours de la procédure budgétaire.

6. S'oppose à une remise en cause...
...budgétaire.

(Amendement n° 1 de M. Pierre Méhaignerie)

------------------

N° 2455 - Rapport sur la proposition de résolution sur l'avant-projet de budget général des Communautés européennes pour 2006 (M. Gilles Carrez)

1 () En crédits d'engagement. Tablant sur la persistance d'une sous-consommation chronique des engagements, la Commission européenne évalue à 1,14% en moyenne le plafond des crédits de paiement, ce qui témoigne d'une regrettable résignation à l'un des maux du budget européen.

2 () Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Autriche, Suède et France.

3 () À l'époque, la Communauté se finançait exclusivement par les ressources propres traditionnelles et la ressource TVA, et le Royaume-Uni était un contributeur important pour ces deux ressources en raison de l'importance de ses installations portuaires et d'une assiette TVA proportionnellement plus importante que celle des autres États membres par rapport à son PNB.

4 () L'essentiel du budget communautaire était alors consacré à la PAC dont le Royaume-Uni bénéficie peu.

5 () Voir notamment le rapport n° 1017 de votre Rapporteur général sur l'avant-projet de budget des Communautés européennes pour 2004, juillet 2003.

6 () Ce texte sera considéré comme définitif dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de l'article 151-3 du Règlement de l'Assemblée nationale.


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