Accueil > Projet de loi de finances pour 2008 > Les comptes rendus intégraux des réunions des commissions élargies > Compte rendu intégral de la séance

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit

Compte rendu
intégral

Commission des finances, de l’économie générale et du plan

Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Commission de la défense nationale et des forces armées

Commission élargie

Mardi 23 octobre 2007

(Application de l’article 117 du règlement)

Projet de loi de finances pour 2008

Sécurité

Présidence de M. Didier Migaud, de M. Guy Teissier et de M. Jean-Luc Warsmann

(La réunion de la commission élargie commence à neuf heures)

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Madame la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, monsieur le ministre de la défense, nous sommes heureux, M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois, M. Guy Teissier, président de la commission de la défense, et moi-même, de vous accueillir au sein de cette commission dite élargie, qui a pour objet de débattre, au titre de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2008, qui débute aujourd’hui, des crédits de la sécurité.

Je rappelle que la procédure de la commission élargie a été mise en place il y a maintenant quelques années et a vocation à être étendue l’année prochaine à toutes les discussions budgétaires. Elle a pour but d’instaurer un débat que nous souhaitons dynamique entre les ministres et les députés à partir de questions précises et de réponses tout aussi précises.

M. Hervé Morin m’a informé qu’il doit nous quitter impérativement à dix heures pour se rendre à Cherbourg. Il nous en donnera sans doute la raison. Les questions le concernant devront donc être posées en premier afin qu’il puisse y répondre.

M. Warsmann devra, pour sa part, se rendre en séance publique pour la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile.

Mme Delphine Batho. Je demande la parole pour un rappel au règlement, monsieur le président.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Il n’y a pas de rappels au règlement en commission élargie.

Mme Delphine Batho. Je souhaite intervenir sur le déroulement de la séance, monsieur le président.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Alors que les commissions élargies doivent examiner les missions budgétaires à titre principal et que la mission « Sécurité » est particulièrement importante pour les fonctions de l’Etat, nous regrettons que la présente réunion se tienne au même moment que l’examen en séance publique de la CMP sur le projet de loi de M. Hortefeux. Cela a pour conséquence que les membres de la commission des lois qui suivent ce texte ne peuvent pas être présents pour l’examen de la mission « Sécurité », ce qui est d’autant plus regrettable que le texte qui va être débattu dans sa version définitive en séance publique impacte le budget dont nous allons parler ce matin, tant en ce qui concerne la police des étrangers qu’en ce qui concerne les tests ADN.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Ce sont les aléas de l’ordre du jour. Je peux témoigner qu’il n’est pas simple d’établir le programme des commissions élargies. Cela peut effectivement, donner lieu, parfois, à des télescopages malheureux.

La parole est à M. le président de la commission de la défense nationale et des forces armées.

M. Guy Teissier, président de la commission de la défense nationale et des forces armées. Je tiens à exprimer ma satisfaction de coprésider cette commission élargie, qui est une première pour la commission de la défense. Je demande à mes collègues de rester présents après les débats avec Mme et M. les ministres pour procéder aux votes.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Je suis très heureux de cette audition commune des deux ministres. Comme M. Migaud vient de le dire, je vais devoir partir à neuf heures et demie mais M. Jacques-Alain Bénisti prendra le relais et je reviendrai ensuite.

Madame la ministre, nous serons particulièrement attentif aux informations que vous nous donnerez sur le calendrier et le contenu de la future loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, indépendamment de la présentation de votre budget.

Je demande également à mes collègues de la commission des lois de rester après les débats avec Mme et M. les ministres pour donner leur avis sur le budget après la commission de la défense et procéder aux votes.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Il est demandé à tous les commissaires de rester. Ceux de la commission des finances exprimeront leur avis après ceux de la défense et des lois.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la note de présentation du rapport ayant été diffusé ce matin, il est plus efficace que j’en vienne immédiatement aux questions. Je me limiterai, dans un premier temps, à trois interrogations.

La première concerne la loi d’orientation.

Chacun reconnaît que la LOPSI I a été un succès par les moyens qu’elle a dégagés et par les résultats auxquels elle est parvenue, qu’il s’agisse de la baisse de la délinquance ou de l’augmentation des taux d’élucidation. Il se prépare aujourd’hui une LOPPSI II dans un contexte différent. Le cadre budgétaire est plus contraint en matière d’effectifs et il y a une recherche plus systématique, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, de résultats de l’ensemble des services. Comment la LOPPSI II se présente-t-elle par rapport à la LOPSI I et dans quelles conditions les premières conclusions de la RGPP vont-elles influer sur le contenu même de la LOPPSI II ?

La deuxième question concerne les rapports entre la police et la gendarmerie.

Les deux forces ont longtemps vécu à la fois séparées et concurrentes. Les maîtres mots aujourd’hui sont le rapprochement, le redéploiement et la mutualisation. S’agissant de cette dernière, on voit toute une série de domaines dans lesquels les deux forces sont en train de travailler ensemble : mise en place d’un système commun d’analyse et de recherche criminelles, moyens aériens, nautiques et véhicules, mutualisation des procédures de passation des marchés, formation d’un certain nombre de personnels. Cependant il est un domaine qui échappe à cette mutualisation et qui sera probablement le plus important évoqué par la LOPPSI II : la police scientifique. Les laboratoires de la police et de la gendarmerie relèvent, en effet, encore d’autorités séparées. J’avoue que les arguments qui ont été donnés pour justifier la pérennité de cette situation ne me paraissent pas complètement convaincants. L’un de ceux-ci est l’expertise ou, plus exactement la contre-expertise. Or je ne suis pas tout à fait convaincu que, pour qu’une contre-expertise soit à la fois efficace et objective, elle doive être assurée par un service relevant d’une autorité différente de celui qui fait l’objet de cet examen.

Le troisième point concerne les compétences du ministre de l’intérieur et du ministre de la défense par rapport à la gendarmerie.

Depuis 2002, on constate que les pouvoirs du ministre de l’intérieur ont tendance à s’élargir. En 2002, il devient responsable de l’emploi des services de gendarmerie. Depuis 2007, il définit, conjointement avec le ministre de la défense, l’utilisation des moyens budgétaires de la gendarmerie. Ne faut-il pas, à terme, aller jusqu’au bout de la logique, c’est-à-dire confier l’intégralité de la responsabilité budgétaire de la gendarmerie au ministre de l’intérieur, le ministre de la défense restant évidemment l’autorité hiérarchique et le gestionnaire des corps ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Madame la ministre, monsieur le ministre, prolongeant les propos de M. Diefenbacher, je souhaite vous interroger sur quatre sujets qui ont trait : le premier à l’exécution de la LOPSI, le deuxième à l’articulation entre la police et la gendarmerie, le troisième à la fusion entre la DST et les Renseignements généraux et le quatrième à la politique de formation.

En votant la LOPSI, nous savions que la gendarmerie partait de plus loin, si je puis dire, que la police et que les efforts inscrits dans la loi d’orientation et de programmation étaient beaucoup plus importants et contraignants pour elle. De fait, elle a été assumée pratiquement à 100 % par la police nationale et aux environs de 90 % en moyenne par la gendarmerie. Peut-on envisager que ce qui n’a pas pu, malgré les efforts continus effectués par le Gouvernement, être opéré dans le cadre de la LOPSI I en ce qui concerne la gendarmerie servira de point de départ et que, éventuellement, il y aura quelques effets de rattrapage, si ce n’est intégral, du moins partiel, dans le cadre de la LOPPSI II dont vous présenterez certainement les premiers éléments d’orientation ?

L’articulation qui a déjà été réalisée entre les forces de police et de gendarmerie nous conduit à nous interroger sur la suite de l’évolution. L’essentiel est déjà opéré, du moins l’essentiel de ce qui ne posait pas ou pas trop de problèmes. Là où d’autres redéploiements sont encore possibles, seront –ils réalisés ? Seront-ils encouragés dans le cadre de la nouvelle LOPPSI et de quelle manière ? Comment pourront être mieux prises en compte les évolutions de la délinquance dans la définition des effectifs nécessaires sur le terrain ?

Quelques-uns de mes collègues de la commission des lois et moi-même avons eu l’occasion de parler de la fusion DST-RG avec le directeur général de la police nationale. L’expérimentation en cours semble bien se dérouler. Quelques interrogations ont été exprimées au fil des auditions que nous avons organisées, notamment de la part des représentants des personnels, sur l’affectation des policiers des Renseignements généraux au sein du dispositif de la sécurité publique. Comment peut-il être garanti qu’il n’y aura pas de « tentation » de la part de certains membres des directions départementales de la sécurité publique, les DDSP, d’affecter, en fonction des circonstances, ces nouveaux personnels à leur disposition sur des missions de sécurité publique traditionnelles au détriment des missions qui leur sont actuellement confiées par la direction départementale des Renseignements généraux ?

En matière de formation, les informations dont nous disposons sur les intentions du Gouvernement laissent penser qu’il devrait être recherché une performance accrue dans la prochaine LOPPSI. Dans ce cadre, comment les politiques de formation actuellement menées par la gendarmerie d’un côté et la police nationale de l’autre seront-elles amenées à se rapprocher pour tenir compte de la nécessité de plus en plus prégnante non pas d’une dichotomie entre formation initiale et formation continue, mais d’un véritable continuum dans le parcours de formation ? Jusqu’où pouvons-nous penser pousser la mutualisation des éléments de formation entre police et gendarmerie, sachant que des liens se sont déjà établis, des gendarmes bénéficiant de formations au sein du dispositif de la police nationale et inversement ?

Dans le droit fil du rapprochement qui ne cesse de s’amplifier entre la police et la gendarmerie, est-il envisageable de parachever le mouvement initié en 2002 et de suggérer le regroupement des deux forces de sécurité civile et militaire que constituent la police nationale et la gendarmerie dans ce qui pourrait être un grand ministère unique de la sécurité intérieure ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées.

M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la gendarmerie n’échappe pas à un plan de restrictions budgétaires qui s’inscrit dans un contexte de dégradation généralisée des finances publiques. Afin de ne pas obérer ses capacités opérationnelles, il convient d’orienter les efforts qu’elle doit consentir vers une meilleure rationalisation de ses missions.

Je souhaite insister particulièrement sur la charge que représentent les missions de transfèrement et d’extraction de détenus. Les incohérences et dysfonctionnements que j’ai constatés dans leur exécution ne sont plus acceptables.

Ces opérations, auxquelles il convient d’ajouter les escortes d’étrangers en situation irrégulière, sont très coûteuses en personnel et en temps : 5 000 à 6 000 personnes, dont 1 000 gendarmes, sont mobilisés quotidiennement, à temps plein, sur ces tâches. En 2006, la gendarmerie a réalisé 119 349 mouvements, auxquels elle a consacré 1 813 348 heures/gendarme. Toute escorte mobilise trois militaires pour assurer la sécurité de l’individu, celle du public et, s’il y a lieu, la présentation devant le magistrat. L’un d’entre eux remplit les fonctions de chauffeur. Les destinations ne se limitent pas aux juridictions compétentes ou aux lieux de rétention administrative les plus proches.

Pour les étrangers en situation irrégulière, je suggère d’étudier dans quelle mesure il pourrait être recouru au bracelet électronique pour les suivre et, pour ceux placés en centre de rétention administrative, aux moyens de visioconférence pour les procédures.

La gendarmerie n’a aucun moyen d’anticiper l’augmentation des charges de transfèrement et d’extraction et l’absence de toute planification ne permet aucune optimisation ni prévision d’effectifs en conséquence. Lorsque les magistrats demandent la présentation de plusieurs détenus à autant d’horaires différents dans une même journée, la charge qui en résulte, faute d’un minimum de rationalisation, est inadmissible.

La multiplication des déplacements pour présenter des prévenus pour des notifications ne nécessitant qu’une dizaine de minutes est très regrettable. Le GIGN m’a signalé l’importance des moyens mobilisés, le temps nécessaire et les risques encourus pour une présentation formelle ou une notification, qui pourraient être effectuées sans un déploiement de force disproportionné au regard de l’acte judiciaire qui l’a motivé.

Les pertes de temps qui m’ont été signalées sont inacceptables. Elles perturbent le fonctionnement des unités. Comme il est impossible de tenir compte de la durée de ces missions pour l’organisation du service, les gendarmes affectés à cette tâche sont considérés comme non disponibles pour d’autres missions le même jour. En particulier, le non-respect de leurs horaires de convocation par les magistrats entraîne un allongement indu de la durée de nombreuses extractions.

Il est urgent de desserrer la contrainte liée aux transfèrements et extractions pesant sur la gendarmerie. L’autorité judiciaire doit prendre conscience de la charge exorbitante qu’ils représentent.

La visioconférence est actuellement expérimentée dans le ressort de la juridiction interrégionale spécialisée – JIRS – de Nancy entre les juridictions équipées et les établissements pénitentiaires de Metz et de Nancy. Le ministère de la justice a décidé de relancer les travaux communs avec la police nationale et la gendarmerie nationale pour une utilisation plus intensive de cette visioconférence. Je soutiens cette démarche mais je constate que la lenteur de la mise en œuvre de ce moyen technologique moderne se heurte à des habitudes et à des mentalités que je souhaite voir évoluer.

Plutôt que de déplacer de nombreux détenus, je crois plus rationnel d’organiser la venue d’un magistrat à la maison d’arrêt. Je propose de remédier à leur refus d’aller au justiciable par l’aménagement, à proximité de la prison, d’un local adapté à la présentation des détenus. Couplée avec les possibilités ouvertes par les articles 664, 712 et D.298 du code de procédure pénale permettant aux magistrats initialement saisis de déléguer un acte de procédure ou de transférer l’ensemble d’une procédure aux juridictions du lieu de détention de la personne, cette solution permettrait de limiter les mouvements de détenus.

Des mesures de bonne gestion comme le respect d’un préavis pour toute demande de mouvement d’un détenu, le traitement des comparutions escortées prioritairement aux comparutions libres, des efforts de mutualisation ou encore l’instauration de jours de convocation, doivent être mises en œuvre. Je suggère de confier aux magistrats la responsabilité des transfèrements en leur attribuant un plafond de dépenses.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Messieurs les présidents, mesdames, messieurs les commissaires, permettez-moi d’abord d’exprimer mon plaisir de retrouver un certain nombre d’entre vous avec qui j’ai beaucoup travaillé pendant cinq ans et de faire la connaissance d’autres avec qui j’aurai également l’occasion de travailler.

Les différentes questions qui ont été posées peuvent être regroupées en cinq thèmes : la LOPSI I, le projet de LOPPSI II, l’articulation entre police et gendarmerie, la formation et le rapprochement DST-RG.

La LOPSI I a été intégralement exécutée, en dehors d’un retard concernant les effectifs de la gendarmerie : sur les 7 000 emplois prévus, il en manquait 950. Nous allons achever l’exécution de la LOPSI I gendarmerie avec la création, en 2008, de 475 ETP, représentant un budget de 20,2 millions d’euros.

Les résultats de la LOPSI I ont été brièvement évoqués. Nous avons pu constater une baisse sensible de la délinquance entre 2002 et 2008 et une augmentation des taux d’élucidation. Ces tendances semblent, au vu des constatations faites au cours des trois derniers mois, s’amplifier.

Cela nous amène à poursuivre nos efforts avec la LOPPSI II. Le projet de texte vient d’être transmis au Président de la République et au Premier ministre ; il devrait passer en conseil des ministres dans le courant du mois de novembre et être inscrit ensuite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale et du Sénat, en fonction des contraintes de leur calendrier, lequel, comme cela a été rappelé en début de séance, est particulièrement chargé en cette période d’examen du projet de loi de finances.

Le contenu de la nouvelle LOPPSI répondra à trois orientations majeures.

La première est la modernisation.

Il est indispensable, face aux risques que nous voyons se développer et aux nouvelles formes prises par la délinquance, de donner aux forces de police et de gendarmerie les moyens, si possible, d’être en avance sur celle-ci. La délinquance se traduit aujourd’hui par une plus grande mobilité, avec une action transfrontalière. Les dangers qui pèsent sur nos concitoyens résultent à la fois du terrorisme, du risque d’utilisation par ce dernier d’armes NRBC, c’est-à-dire nucléaires, radiologiques, biologiques ou chimiques, et du développement de la cybercriminalité. Tout cela implique que nos policiers et nos gendarmes disposent des moyens nécessaires. C’est la raison pour laquelle je développerai dans ce projet tout ce qui a trait à la police scientifique et technique, qui doit être très fortement encouragée.

La deuxième orientation de la LOPPSI II est la mutualisation.

Pour des raisons d’efficacité autant que de bonne utilisation de l’argent public qui est mis à notre disposition, il est bon de rechercher les moyens de créer des synergies, ce qui nous permet en même temps de développer les possibilités d’activité des forces de police et de gendarmerie. La complémentarité entre ces deux forces aura pour but de leur permettre de mieux s’adapter encore aux nouveaux enjeux des risques futurs en matière de délinquance.

La troisième orientation est un meilleur management de nos atouts.

Ceux-ci sont d’abord les personnels, d’où un travail important sur la formation, en particulier permanente, et sur les développements de carrières, et un recentrage des personnels sur la vocation qu’ils ont exprimée en entrant dans la police ou dans la gendarmerie en les dégageant d’un certain nombre de tâches qui pourraient être assumées par d’autres : transfèrements et tâches administratives.

Les atouts de la France sont également internationaux. Le développement de l’efficacité de nos forces de police passe aussi par de meilleures coordinations avec l’Europe. Comme la France assurera la présidence européenne à l’été 2008, ce sera pour nous l’occasion de renforcer un certain nombre de synergies et de mettre sur pied des actions concrètes avec nos pays voisins.

Je ne vais pas rentrer dans des détails financiers sur la LOPPSI II, d’abord parce que le conseil des ministres ne s’est pas prononcé et, ensuite, parce que nous aurons d’autres occasions.

La troisième grande série de questions portait sur l’articulation entre la police et la gendarmerie.

Vous avez ainsi parlé des compétences réciproques du ministre de la défense et du ministre de l’intérieur. J’ai la conviction profonde – ceux qui me connaissent le savent – que nous avons absolument besoin, dans une démocratie, de deux forces de statut différent : une force de police à statut civil et une force de gendarmerie à statut militaire. C’est une garantie pour la démocratie. Cela étant, je suis également convaincue que la gendarmerie doit demeurer rattachée, pour tout ce qui concerne le statut de ses personnels notamment, au ministère de la défense. Vous noterez que c’est sans doute une grande première qu’un ministre refuse un élargissement de son périmètre de compétence.

Cela ne veut pas dire, au contraire, que le ministre de l’intérieur ne doit pas avoir compétence sur un certain nombre des aspects de la gendarmerie, en particulier les aspects opérationnels. Des rapprochements ont déjà été opérés en 2002. Mon périmètre de compétences a été élargi, notamment en matière budgétaire et d’affectation des personnels d’encadrement. Il peut continuer à y avoir une certaine rationalisation de façon à ce que tout ce qui est opérationnel corresponde à une véritable unité.

Pour autant – je le dis très clairement – la limite pour moi est le besoin indispensable de rattachement significatif des personnels au ministère de la défense. M. Hervé Morin et moi-même en avons discuté à plusieurs reprises et nous sommes en train de préparer des propositions au Premier ministre pour avoir véritablement une ligne de partage qui garantisse le rattachement des militaires de la gendarmerie au ministère de la défense, tout en donnant au ministre de l’intérieur les moyens optimaux de participer à la lutte contre l’insécurité.

Les redéploiements sont de deux ordres : géographiques et thématiques.

Pour les redéploiements géographiques, une première ligne de partage a été fixée – et cela a donné lieu à discussion dans les collectivités locales – consistant à considérer la zone police comme plutôt urbaine et la zone gendarmerie plutôt rurale. Cela correspond non seulement à la tradition de notre pays, mais aussi et surtout à des savoir-faire et à des cultures différents, voire, dans un certain nombre de cas, à des missions également différentes. L’ancrage territorial de la gendarmerie en zone rural s’accompagne chez elle d’une mission de renseignement sur ce qui se passe, qui est l’une des caractéristiques de son action et de ce que l’on attend d’elle. C’est sur la base de ces missions différentes qu’il convient aujourd’hui, parce que notre société, nos villes et nos campagnes bougent, de revoir un certain nombre de frontières entre les zones police et les zones gendarmerie.

Dans un certain nombre de cas, vous trouvez des zones gendarme dans des secteurs périurbains. Que voulez-vous que les gendarmes fassent dans des cités dortoirs où il n’y a personne ? Ce n’est pas leur travail ni leur métier. Il faudra donc procéder, dans les mois qui viennent, à des ajustements, lesquels devront certainement être revus par la suite parce que notre tissu humain et social bouge et qu’il faut savoir s’adapter à ces évolutions.

Les redéploiements thématiques correspondent, non seulement aux rapports entre la gendarmerie et la police, mais également à des transferts de compétences qui devraient, comme M. Moyne-Bressand vient de le souligner, être effectués vers d’autres types de forces de sécurité.

Concernant le problème des transfèrements de prisonniers vers les tribunaux, je pourrais reprendre intégralement son analyse. Il est évident que ces tâches sont consommatrices d’énergie, de temps et d’argent pour la gendarmerie et correspondent à une vision assez passéiste de l’organisation judiciaire. Des aménagements doivent être réalisés : on peut, d’une part, utiliser les moyens modernes de communication et, d’autre part, tenir compte des coûts réels pour montrer que ce ne sont pas forcément les prisonniers qu’il convient de déplacer, avec tout le système de protection de la sécurité que cela implique, mais plutôt les juges.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je crois savoir, madame la ministre, que cette question a fait l’objet d’un échange entre vous-même et le garde des sceaux.

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Absolument. Nous en avons parlé à plusieurs reprises. L’idée avance, d’autant que, lors de la construction des nouvelles prisons et dans certains aménagements réalisés dans les prisons anciennes, sont créées des salles spécifiques pour prendre en compte ce besoin. De telles salles seront réalisées au fur et à mesure. Je souhaite, pour ma part, que ce soit le plus rapidement possible.

Le dispositif des gardes statiques doit également être revu. Cela fait très longtemps – je le disais déjà en tant que ministre de la défense – que je considère qu’un nombre trop élevé de gendarmes participent à ces gardes alors que ce n’est pas véritablement leur travail. La remarque vaut également pour les policiers. Les gardes statiques ne seront pas supprimées partout. Il faudra les garder dans un certain nombre d’endroits. Cependant, il existe des moyens pour les éviter, tels que la vidéo-surveillance ou le recours à une externalisation de ces gardes, comme cela se fait déjà, y compris dans les tribunaux. Nous parviendrons ainsi à recentrer les policiers et les gendarmes sur le cœur de leur métier qui n’est pas de rester immobiles sous la chaleur ou dans le froid pour garder tel ou tel immeuble.

La police scientifique et technique doit, bien entendu, s’inscrire aussi dans le souci de mutualisation qui est le mien pour renforcer les synergies et éviter les gaspillages à la fois d’argent, de compétences et d’énergie comme cela se produit quand on demande deux fois la même chose à des personnes différentes. Tout ce qui est déjà commun entre les deux instituts de la police et de la gendarmerie, l’INPS et l’IRCGN, doit pouvoir être mutualisé. Il faudra ensuite examiner jusqu’où et dans quelle mesure il est possible de rapprocher, voire d’intégrer, les deux instituts. Un travail de réflexion est mené actuellement qui prend en compte toutes les questions soulevées, notamment les demandes de contre-expertise qui peuvent être formulées par la justice. Je n’ai pas de tabou en la matière. Ce que je recherche, c’est la plus grande efficacité possible.

La formation est un domaine que je veux développer parce qu’elle est la garantie à la fois de l’efficacité de nos forces de police et de gendarmerie et de leur propre sécurité. C’est un point qu’il ne faut jamais oublier. La formation permanente, quant à elle, est une garantie de promotion professionnelle, donc de promotion sociale. Cela est important, non seulement pour les personnes concernées, mais également pour notre pays.

Il faut distinguer différents cas.

Parfois, la mutualisation est très facile. Je pense, en particulier, aux corps de soutien. Quand vous formez quelqu’un pour entretenir du matériel pour la police et la gendarmerie, si, comme c’est la plupart du temps le cas, c’est le même matériel ou des matériels voisins, l’intérêt de la mutualisation de la formation est évidente. Cela vaut également pour la formation de gens à la passation des marchés publics, les règles régissant cette dernière étant les mêmes dans un cas comme dans l’autre.

Pour la formation des forces plus opérationnelles, les choses sont plus contrastées : certaines sont évidentes, d’autres un peu plus compliquées.

Parmi les choses évidentes, il y a mon projet de centre d’entraînement commun à tous les problèmes de sécurité posés par les violences urbaines où l’une et l’autre forces peuvent intervenir. Le centre de Saint-Astier devrait être le lieu de ces premiers exercices communs.

Par contre, en ce qui concerne le contenu de la formation permanente, il existe des divergences assez fortes. Sa durée est de vingt-six jours par an en moyenne pour la gendarmerie et de seize jours pour la police. Il y a donc des besoins d’adaptation et d’ajustement. Pour ma part, je souhaite que ceux-ci se fassent en relevant à la fois la durée et le niveau des formations.

Concernant le rapprochement entre la DST et les RG, une double action est menée.

La première consiste à recentrer au sein d’une direction centrale de la sécurité intérieure les forces de la DST et celles des RG en gardant les savoir-faire spécifiques des uns et des autres. Il ne s’agit pas de faire faire par les uns ce que faisaient les autres, mais de permettre aux gens d’exprimer totalement ce qu’ils savent faire le mieux au sein de quatre missions. D’ailleurs, deux des missions continueront à être exercées exactement dans les mêmes conditions qu’auparavant. Dans les deux autres missions, en particulier celle de la lutte contre le terrorisme, les gens vont être amenés à travailler au sein de la même mission, mais en gardant leurs spécificités, telles que celle du maillage territorial pour les RG ou celle des méthodes de travail pour la DST.

Par ailleurs, un certain nombre de missions qui étaient par tradition effectuées par les RG ne relèvent pas réellement du renseignement de la sécurité intérieure. C’est le cas du contrôle des jeux et des courses. Pour autant, il est vrai qu’avoir du renseignement dans ces domaines est important pour les responsables du secteur des jeux et des courses. C’est la raison pour laquelle il a été décidé de sortir ces missions du domaine de la sécurité intérieure pour les rattacher, pour les uns, aux services en charge des jeux et des courses et, pour les autres, comme le suivi des manifestations, aux services en charge de la sécurité publique.

Pour autant, les personnels – qui partiront sur une base volontaire – devront continuer à mettre en œuvre les mêmes savoir-faire. C’est pourquoi il est prévu, monsieur Moyne-Bressand, d’avoir une surveillance afin de vérifier que, au sein de leur nouvelle direction d’affectation, ces personnels continuent bien à faire du renseignement, tel qu’ils ont appris à le faire, dans les domaines spécifiques de compétences de ces nouvelles directions.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. le ministre de la défense.

M. Hervé Morin, ministre de la défense. Tout d’abord, la cause de mon départ précipité, monsieur le président, est la venue du vice-premier ministre de Malaisie à Cherbourg pour la livraison du premier Scorpène. Je suis chargé de l’accueillir pour ce moment important pour la DCN et pour les chantiers de Cherbourg.

Pour que mon propos ne soit pas redondant avec celui de Mme Alliot-Marie, je le bornerai à quelques compléments d’information concernant le rapprochement entre la police et la gendarmerie.

Une grande partie du chemin a été fait sur l’emploi – qui est commun –, sur l’affectation budgétaire et la répartition des crédits et sur les conditions de nomination et d’emploi du personnel. Ce qui est certain, pour la police comme pour la gendarmerie, c’est qu’il doit exister deux forces de sécurité dans le pays, l’une à statut civil et l’autre à statut militaire. Il peut, bien entendu, y avoir des formations communes – comme en matière de dressage de chiens –, et des emplois et des services communs.

Un projet de loi sera examiné par le Parlement au printemps prochain ou à l’hiver prochain, dans lequel sera clairement réaffirmé le statut militaire de la gendarmerie. Cela signifie que, même s’il peut y avoir des formations continues communes avec la police, la formation initiale doit rester militaire. La raison principale en est que les gendarmes ont un certain nombre de spécialisations qui leur sont propres.

Les premières sont la prévôté et les opérations extérieures. J’ai signé, la semaine dernière, le traité créant la force de gendarmerie européenne – qui était une initiative du précédent gouvernement et de Mme Alliot-Marie – laquelle force sera peut-être amenée à intervenir au Kosovo. Cet exemple montre qu’un rôle spécifique est dédié à la gendarmerie qui l’oblige à conserver son statut militaire au-delà des grands principes qu’a rappelés Mme Alliot-Marie.

Il existe également une gendarmerie aérienne et une gendarmerie maritime. Tous ces éléments nous conduiront à réaffirmer le statut militaire des gendarmes tout en continuant à mutualiser ce qui peut l’être et à effectuer les travaux nécessaires pour que chaque euro dépensé le soit le mieux possible.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Madame la ministre, monsieur le ministre, nous considérons que votre tâche est difficile compte tenu des réalités d’aujourd’hui : montée des violences contre les personnes, délinquance très endurcie installée sur un certain nombre de territoires. A cet égard, nous tenons à rendre hommage au travail des hommes et des femmes de la police nationale et de la gendarmerie nationale, qui exercent leur fonction avec courage et dévouement dans un contexte parfois tendu et difficile.

C’est au regard de cette réalité et de ces difficultés que nous jugeons le projet de budget. Les événements récents ont montré qu’une stratégie consistant à assurer une certaine visibilité des forces de l’ordre dans les grands centres urbains, en laissant de côté un certain nombre de territoires, ne fonctionnait pas et qu’il y avait désormais des affrontements entre bandes dans ces grands centres urbains. Les policiers que nous avons rencontrés pour préparer cette réunion nous ont dit être à flux tendu, constamment sur le fil du rasoir, et rencontrer des difficultés d’intervention considérables, la moindre patrouille ou la moindre perquisition devant donner lieu à un déploiement de force très important. Le recours à un arsenal militaire, comme les drones – que nous pouvons comprendre – illustre à quel point la situation est dégradée et entérine un état de fait qui est très inquiétant.

Depuis votre nomination, des annonces successives ont été faites sur l’ouverture d’un certain nombre de chantiers. Nous regrettons de ne pas avoir pu vous auditionner avant la tenue de la commission élargie d’aujourd’hui. Je sais que ce n’est pas de votre fait.

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Je suis en permanence à la disposition des commissions.

Mme Delphine Batho. Je le sais bien, mais nous tenons à distinguer les orientations saillantes de la politique de sécurité.

Le budget pour 2008 a été présenté comme un budget de transition. Je le qualifierais plutôt de budget d’attente permettant, peut-être, de gagner un an par rapport à la nouvelle LOPPSI. Vous avez annoncé un calendrier somme toute assez rapide pour l’élaboration de cette deuxième loi de programmation. Nous nous interrogeons sur les consultations préalables, notamment des organisations syndicales, qui pourront être organisées.

Personne n’a proposé de remettre en cause le statut militaire des gendarmes. Cependant des engagements avaient été pris, notamment par le Président de la République pendant la campagne électorale, pour qu’il n’y ait plus, dans le cadre budgétaire, de mission interministérielle mais que tout soit chapeauté par un ministère de la sécurité. Les réponses que vous venez de donner aux rapporteurs laissent donc planer des interrogations.

Nous voyons surtout dans ce budget un mauvais signal. La LOPSI I n’est pas complètement appliquée concernant la gendarmerie, où le non-remplacement d’une partie des départs à la retraite entre en vigueur. Il manque 1 400 emplois dans la police nationale, 140 gardiens de la paix, 805 équivalents temps plein dans l’action consacrée à la sécurité et à la paix publique. Qui plus est, nous avons appris hier que, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, était envisagée, d’ici à 2011, la suppression de 8 000 à 10 000 emplois dans les forces de sécurité, avec la suppression de la moitié des brigades de gendarmerie.

Nous considérons que notre pays ne peut pas se permettre de baisser la garde. Des réformes de structure sont nécessaires mais tailler ainsi dans les effectifs n’est pas concevable, d’autant que cela reviendrait à défaire ce que les architectes de la précédente loi de programmation ont fait depuis 2002. Quelles sont les intentions réelles du Gouvernement ? La suppression de 8 000 à 10 000 emplois dans la mission sécurité est-elle une hypothèse sérieuse de travail ?

Nous avons voté l’article 2 de la LOPSI et, chaque fois qu’il a fallu donner des moyens supplémentaires aux forces de sécurité, l’opposition a toujours été au rendez-vous depuis cinq ans. Nous jugerons donc sur les actes et sur les résultats.

D’un certain point de vue, madame la ministre, vous avez une redoutable mission, à savoir accomplir des réformes, notamment de structures, qui ont été annoncées mais n’ont pas été réalisées au cours des cinq dernières années, Avez-vous la confiance du Président de la République pour accomplir des réformes que, d’un certain pont de vue, il n’a pas faites lui-même ?

Nous avons une autre série de questions plus techniques que nous poserons plus tard.

M. Christophe Caresche. L’héritage est lourd !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Michel Voisin.

M. Michel Voisin. J’ai écouté avec beaucoup d’attention les rapports de nos collègues et l’excellent travail qu’ils ont produit. Je ne vous surprendrai pas, madame la ministre, monsieur le ministre, en vous rappelant que je suis très attaché au statut militaire de la gendarmerie. Les missions en milieu rural sont, en effet, tout à fait différentes de celles en milieu urbain et, si les deux forces de sécurité étaient réunies, je pense qu’elles auraient une efficacité beaucoup plus réduite qu’aujourd’hui.

Ma première question concerne les rapports entre les élus locaux et les gendarmes. C’est un problème qui est évoqué à chaque réunion de maires. Les liens qui existaient entre les gendarmes et les élus locaux se distendent. Or ces derniers représentent une source de renseignements indispensable à la gendarmerie. Une communication entre les deux mérite d’être développée.

Ma deuxième question porte sur les moyens de lutte contre certaines bandes qui utilisent les moyens informatiques aussi bien que notre gendarmerie et notre police. Quelles avancées ont été faites en ce domaine ?

Ma troisième question est consécutive à une annonce faite ce matin sur une radio nationale qui diffuse en boucle des informations concernant les contrôles radars. J’ai été effaré d’entendre que, selon que l’on dispose le radar de façon parallèle ou non à la voie, on obtient des différences sur l’estimation de la vitesse. Cela met les conducteurs dans des situations délicates car il semblerait qu’ils aient été nombreux à se faire contrôler alors qu’ils roulaient à la vitesse réglementaire. La perte de points, en plus de celle d’argent, entraîne certaines difficultés pour ceux qui utilisent leur voiture pour leur travail.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion. Ma question s’adresse à M. le ministre de la défense et concerne la gendarmerie. C’est dire l’intérêt que les parlementaires portent à cette arme d’élite et la satisfaction qu’ils ont du travail qu’elle accomplit.

Les dispositions budgétaires telles qu’elles nous sont annoncées ne permettent pas d’envisager un recrutement des réservistes à la hauteur qui avait été fixée. Nous sommes nombreux à le regretter et à souhaiter pouvoir aller plus loin que ce qui figure dans le document budgétaire. Tout le monde est conscient, notamment dans les départements ruraux, du travail considérable accompli par les réservistes de la gendarmerie. Ils sont un renfort très précieux non seulement parce qu’ils viennent soutenir les brigades sur certaines missions, mais aussi parce qu’ils ont une bonne connaissance du terrain et alimentent bien la fonction renseignement.

Comment peut-on faire pour que les réservistes de la gendarmerie soient mieux territorialisés, c’est-à-dire collent mieux aux dispositifs des brigades et des groupements de brigades ?

La plupart des jeunes gendarmes viennent d’un milieu urbanisé et, lorsque qu’ils sont affectés sur un territoire, l’efficacité de leur travail souffre un peu de leur méconnaissance du terrain. Si les gendarmes d’active professionnels pouvaient s’appuyer sur un terreau de gendarmes issus du terroir et ayant une bonne connaissance de celui-ci, cela démultiplierait leur capacité à agir. En m’exprimant ainsi, je ne fais que relayer un souhait exprimé par les gendarmes.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Jean-Claude Viollet.

M. Jean-Claude Viollet. Madame la ministre, monsieur le ministre, 2008 est une année de transition : nous sommes à la fin de la première loi de programmation militaire, et un Livre blanc « Défense et sécurité » est en cours de rédaction, dont la première traduction sera la prochaine loi de programmation militaire. Les membres de la commission de la défense ne peuvent donc pas ne pas être vigilants sur les missions défense et sécurité de la gendarmerie. La mission défense ne doit pas être négligée au profit de la mission sécurité. Il est important que l’équilibre des deux missions soit préservé.

Nous avons insisté sur ce point en commission lors de l’audition du général Paraire et lors de celle du ministre de la défense. Celui-ci a réaffirmé son attachement, comme vous-même, madame la ministre, au statut militaire de la gendarmerie. Toutefois ce n’est pas simplement un problème de statut : ce qui est en jeu c’est la complémentarité des missions de défense et de sécurité, laquelle est au cœur de la problématique du Livre blanc en cours de rédaction.

Nous sommes dès lors inquiets quand nous lisons, sous la plume de l’inspecteur des finances Mongin, chargé de mission sur la réforme de l’Etat dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, qu’il est envisagé la « mise sous l’autorité organique du ministère de l’intérieur ». Je ne dis pas que c’est votre sentiment, madame, monsieur les ministres puisque vous avez dit vous-mêmes que ces propos n’engageaient que leur auteur.

Cela étant, parce que ces propositions sont écrites et parce qu’elles sont reprises ailleurs, les parlementaires que nous sommes se doivent d’exercer une vigilance particulière sur ce point. Il ne s’agit pas pour nous de maintenir un quelconque statu quo. Il faut passer, vous l’avez dit, d’une conception territoriale statique à une conception dynamique et humaine des choses. C’est ce qui a commencé à être fait, mais, je le répète, préservons la dimension défense de la mission : non seulement la prévôté mais également la défense de notre territoire exercée aujourd’hui par la gendarmerie.

Quand M. Mongin prévoit, dans ses sept propositions, la suppression de la moitié des brigades de gendarmerie, chacun comprend bien que ce ne peut être envisageable, à moins de renoncer à la défense et à la sécurité de notre territoire, ce que personne, j’espère, n’est prêt à faire.

Nous avons besoin d’avoir des éclaircissements, madame, monsieur les ministres. Il faut jouer cartes sur table. Puisque la presse a le rapport Mongin, nous devons également y avoir accès afin de voir quelles sont à la fois l’origine et la finalité de ces propositions, afin de faire connaître le point de vue des parlementaires.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. le ministre de la défense.

M. le ministre de la défense. Nous sommes totalement d’accord avec vous, monsieur Viollet. Un tel enthousiasme ne peut que vous conduire à voter la prochaine LOPPSI !

Il faut certes faire en sorte que l’emploi des forces de sécurité soit le plus intelligent possible, que les moyens de soutien, quand ils le peuvent, soient mutualisés, que les formations continues soit le plus possible communes, mais il y a aussi un continuum défense-sécurité qui fait que la gendarmerie doit conserver son statut militaire au-delà de la prévôté et des missions extérieures, en raison des missions particulières qui lui appartiennent.

Parler d’un rapport Mongin me semble excessif. Je sais que nous avons, au sein de la République, les hommes les plus brillants et les esprits les plus vifs et les plus éclairés. Mais le principe même de la RGPP – la révision générale des politiques publiques – est de permettre à des hommes brillants, vifs, intelligents et ayant toujours des idées d’avance sur les autres de s’exprimer et de mettre sur la table un certain nombre de propositions. S’il fallait vous communiquer toutes les idées fécondes et merveilleuses issues des hommes et des femmes qui travaillent sur la RGPP, vous auriez de quoi vous agiter tous les jours. Leur rôle est de se poser des questions et d’avancer des propositions qu’ils nous soumettent le moment venu.

Cependant, rassurez-vous. Même si une partie de la réponse dépend de Mme Alliot-Marie, il n’y a aucun souci à avoir, ni sur les suppressions de postes, ni sur les suppressions de brigades. Je me permets d’ailleurs de vous signaler que, pour 2008 et contrairement à une grande partie de la fonction publique et même à l’armée, les effectifs des forces de sécurité ont été globalement sanctuarisés. M. Mongin a le droit d’écrire ce qu’il veut mais je peux vous assurer que ce qu’il propose n’est pas dans les intentions du ministre de la défense. Comme l’emploi appartient au ministre de l’intérieur, je pense que Mme Alliot-Marie vous dira la même chose.

L’objectif global, monsieur Fromion, est d’avoir 40 000 réservistes en 2012. En 2007, ils sont entre 23 000 et 25 000. Nous espérons pouvoir monter à 28 000 en 2008, avec au moins vingt jours d’emploi par an. J’ai pu constater comme vous combien ils pouvaient être utiles, notamment dans les zones de gendarmerie qui connaissent des afflux de population très importants l’été. Ils font un travail formidable et, qui plus est, avec beaucoup d’enthousiasme.

L’idée de rapprocher les réservistes, non pas des brigades parce que, dans les petits cantons, ce serait peut-être compliqué, mais des communautés de brigades est assez séduisante. Ils sont déjà territorialisés dans la mesure où ils sont affectés au niveau départemental. Il faudra peut-être réfléchir, avec la direction générale de la gendarmerie nationale, à la possibilité d’une préaffectation. Néanmoins une certaine souplesse doit être maintenue pour pouvoir, si des besoins se font sentir dans tel ou tel coin du département, les y affecter. On pourrait travailler sur la planification des moyens des réserves, et les affecter, dans un premier temps, au niveau des compagnies, qui est déjà un échelon de proximité important. Je vous promets d’examiner la question de près car ce n’est pas une mauvaise idée.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Y a-t-il d’autres questions précises pour le ministre de la défense, avant que celui-ci ne nous quitte ?

La parole est à M. Thierry Carcenac.

M. Thierry Carcenac. Monsieur le ministre, le parc des casernes de gendarmerie est très vétuste. Plus de 70 % d’entre elles ont plus de vingt-cinq ans. Or, lorsque des reconstructions sont réalisées, à l’aide de BEA ou de contrats PPP, les loyers passent d’un niveau relativement faible à des niveaux très élevés. Si l’on veut maintenir en milieu rural des gendarmes dans des locaux non vétustes, il faut donc prévoir un peu plus de moyens.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Nous sommes tous attachés au statut militaire de la gendarmerie, mais force est de constater que, sur un certain nombre de missions, les deux forces sont en concurrence. C’est le cas, par exemple, pour le secours en montagne pour lequel la gendarmerie, la police nationale et les services locaux et départementaux sont mobilisés. Des efforts de rationalisation et de mutualisation s’imposent.

Le fait que, après une longue et âpre discussion pour savoir si la gendarmerie rentrait ou non dans la mission « Sécurité », on ait maintenu deux programmes totalement distincts dans le cadre de cette mission n’encourage pas à cette rationalisation budgétaire. Pourquoi ne pas envisager que, sur un certain nombre de missions, il y ait des programmes conjoints entre la police et la gendarmerie ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Christophe Guilloteau.

M. Christophe Guilloteau. Le hasard du calendrier a fait que, hier soir, je présidais un syndicat intercommunal de gendarmerie qui gère les bâtiments. Les brigades nous demandent de plus en plus de nous occuper des travaux d’entretien des abords et de la tonte des pelouses alors qu’elles avaient auparavant les moyens de s’en charger. Votre ministère a-t-il prévu de laisser quatre sous dans les brigades pour, d’une part, que les commandants de brigade puissent nous recevoir de temps en temps et, d’autre part, qu’ils prennent en charge les travaux d’entretien des abords et ne les transfèrent pas aux collectivités, qu’il s’agisse des syndicats de gendarmerie ou des mairies ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. le ministre de la défense.

M. le ministre de la défense. Le budget de fonctionnement de la gendarmerie a augmenté de 3 %, c’est-à-dire beaucoup plus que celui des forces armées qui a connu une légère diminution. On pourra donc mettre un peu d’argent pour la tonte des pelouses. L’élu local que je suis aussi considère par ailleurs que l’organisation de ces travaux procède d’une bonne entente entre les gendarmes et les élus locaux. Cela leur permet de se voir et de discuter.

M. Christophe Guilloteau. Il y a un problème de moyens !

M. le ministre de la défense. La hausse du budget de fonctionnement de la gendarmerie devrait permettre de dégager votre syndicat de gendarmerie de cette charge.

M. Christophe Guilloteau. Merci, monsieur le ministre.

M. le ministre de la défense. La hausse des loyers, monsieur Carcenac, a, en effet, été importante puisqu’il y a fallu ajouter 30 millions d’euros au budget 2007. Un énorme effort a été effectué pour le logement locatif puisqu’un très grand programme de construction a été réalisé ces dernières années et les conditions de logement d’une grande partie des gendarmes se sont nettement améliorées. Un effort important reste à effectuer sur le domanial pur et devra être poursuivi au cours des prochaines années.

Comme le budget semble s’être équilibré sur le locatif et que les loyers ne sont pas repartis à la hausse, on devrait avoir, sur l’année 2008, un peu plus de marge pour lancer de nouveaux programmes.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous vous remercions, monsieur le ministre, et vous souhaitons un bon voyage jusqu’à Cherbourg.

La parole est à Mme la ministre de l’intérieur.

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Je répondrai aux questions les unes après les autres dans la mesure où elles ne se recoupent pas.

Madame Batho, la situation, si elle reste difficile – il y aura toujours des vols et des agressions –, s’est néanmoins améliorée et je ne peux que m’en réjouir. En 2002, la délinquance était en augmentation sensible. Or, de 2002 à 2006, avec les mêmes instruments, nous constatons une baisse de 9,44 %.

Cela étant, la délinquance et l’insécurité changent de nature, en même temps que la société évolue. Des formes nouvelles de délinquance apparaissent, ce qui doit nous inciter à nous projeter dans l’avenir. Il y a quinze ans, le terrorisme n’était pas l’une de nos préoccupations au quotidien. Aujourd’hui, il l’est. Il y a sept ans, ou même cinq, la cybercriminalité n’avait pas pris sa dimension actuelle. Il y a trois ans, les violences aux personnes représentaient une part moindre de la délinquance. C’est la raison pour laquelle, dans un souci de clarté et de pragmatisme, j’ai demandé à l’Observatoire national de la délinquance d’essayer d’affiner ses statistiques de façon à suivre dans le détail les différentes formes de délinquance et à être en mesure de réagir.

Malgré tout, nous continuons, depuis le mois de juin, à enregistrer une baisse exponentielle de la délinquance. Ainsi, le mois dernier est le mois de septembre au cours duquel nous avons constaté le moins de délinquance depuis 1995. Je veux rester prudente sur ces chiffres, dont j’ignore s’ils se confirmeront dans les prochains mois, mais la baisse est effective, y compris pour les violences aux personnes, sur lesquelles, madame, vous m’avez interrogée. Les violences aux personnes ont en effet diminué de 7,45 % par rapport à septembre 2006. C’est significatif même si j’ignore ce qu’il adviendra. En tout état de cause, cette évolution prouve avant tout le travail accompli par les forces de police et de gendarmerie et nous devons leur en savoir gré.

Parmi les phénomènes nouveaux, figurent les affrontements entre bandes. Ils sont récents, mais pas forcément nouveaux ; j’ai déjà eu à en traiter, de très violents, en tant que ministre de la jeunesse et des sports entre 1993 et 1995. Peut-être vous souvenez-vous de la destruction de l’ensemble du parvis de La Défense et des magasins alentour à l’occasion d’un règlement de compte entre bandes de la couronne parisienne. Ces événements vont et viennent. Je les fais surveiller de près.

Il arrive que l’on appelle bagarres entre bandes des violences qui n’en sont pas, comme à la Gare du Nord. En revanche, à Pigalle, c’en était. Les bandes elles-mêmes prennent des configurations différentes et variées par rapport à ce qu’elles étaient. Certaines bandes se mesurent sur fond de trafic de drogue, donc de « rivalité commerciale » en quelque sorte, d’autres sont d’origine ethnique ou communautariste. Bref, tout ce que l’on peut dire, c’est que le phénomène réapparaît aujourd’hui, qu’il doit être suivi de très près et susciter une réaction de notre part, en liaison avec tous les acteurs de la chaîne de la sécurité – c’est-à-dire les maires et les municipalités, qui sont les premiers au contact de la réalité ; l’éducation nationale, qui a un grand rôle à jouer ; les associations ; la police ou la gendarmerie, selon les cas ; la justice ; les organismes de réinsertion – afin d’être à l’affût et d’agir.

Vous m’avez demandé les orientations saillantes de ce budget.

Il s’agit d’abord de la priorité que j’accorde à la police scientifique et technique. Elle sera encore développée dans la LOPPSI II, mais, pour les matériels – et même les locaux, avec les perspectives de regroupement des laboratoires en région parisienne –, 1 milliard d’euros seront dégagés dès cette année. Ils serviront à enrichir les différents fichiers d’empreintes qui constituent un élément important d’élucidation.

Par ailleurs, la vidéosurveillance sera renforcée car nous avons constaté que l’utilisation de ces technologies permet de faire sensiblement baisser la délinquance. J’étais l’autre jour en Seine-Saint-Denis et un maire communiste me disait que, aussitôt que la vidéosurveillance avait été installée dans des parkings où sévissait une forte délinquance, elle en avait disparu totalement. D’une façon générale, la vidéosurveillance fait diminuer la délinquance de près de 40 %. C’est donc un moyen important pour assurer la sécurité. Avant la fin de l’année, j’aurai dégagé des crédits sur le budget de 2007, pour établir des relais entre les centres municipaux et la police nationale de façon à améliorer la réactivité dès qu’une agression est constatée, et à aider à l’élucidation des affaires.

Une autre orientation nette réside dans le maintien de l’effort en matière de personnel. Je crois, madame Batho, que vos informations sont inexactes sur ce point. Vous comprenez mal, me semble-t-il, la différence qui existe entre emplois et plafond d’emplois. En réalité, on ne constate aucune diminution du nombre de gardiens de la paix ou de policiers. Certes, le ministère respecte la règle d’un remplacement sur deux départs à la retraite, mais j’ai veillé à ce que l’effort porte sur les adjoints de sécurité, et non pas sur les policiers. Cela a été facilité par le fait que nous avons beaucoup de mal à recruter des adjoints de sécurité. Je vous confirme qu’il n’y a aucune diminution du nombre de policiers ou de gardiens de la paix, ni même de l’encadrement.

La troisième orientation, liée d’ailleurs au personnel, réside dans le développement de la formation – et des entraînements – ainsi que son ouverture. Il est indispensable, et ce sera le cas dans la LOPPSI II, d’envisager les problèmes de sécurité au niveau européen, et de favoriser, dans le déroulement des carrières, la diversité des expériences.

Dans la police comme dans la gendarmerie, il est important de passer du temps sur le terrain, mais aussi de connaître l’administration, d’avoir l’expérience de l’international – dans un autre pays, ou dans un organisme international – et des autres administrations. Dans la mesure où nous voulons approfondir nos rapports avec les autres pays, afin de renforcer le renseignement, l’action et la surveillance aux frontières, il faut aussi que les agents parlent des langues étrangères. Ils doivent donc se former et, parallèlement, nous devons ouvrir nos écoles, qui ont une réputation d’excellence, à des personnels étrangers dans le cadre de stages ou de leur parcours de formation. J’ai donc donné des instructions à nos écoles pour qu’elles réservent davantage de place aux stagiaires étrangers.

Le budget pour 2008 sera sollicité également pour prendre en compte les problèmes personnels, notamment des policiers, afin de les fidéliser. Il n’est pas normal de n’avoir que des policiers en début de carrière dans les zones difficiles. Or, lorsque je me suis rendue sur place, j’ai constaté que l’un des problèmes majeurs n’était pas tant la difficulté du travail, que celle à se loger ou à installer sa famille, qu’il s’agisse de l’emploi des conjoints ou de la garde des enfants. C’est la raison pour laquelle vous trouverez, dans le budget pour 2008, les crédits nécessaires pour la réservation de 500 logements en région parisienne pour les jeunes policiers, et la création de 100 places de crèche supplémentaires. Si les roulements sont nécessaires, il faut aussi veiller à ce que les jeunes policiers s’intègrent dans des équipes plus expérimentées, ayant une connaissance plus approfondie du terrain et des personnes.

Voilà donc les quatre orientations majeures pour 2008, même s’il y en a d’autres. Elles seront encore accentuées dans la LOPPSI 2.

En ce qui concerne les conclusions d’un inspecteur des finances qui a été chargé, avec d’autres, de faire des propositions pour la révision générale des politiques publiques, la RGPP, dont plusieurs d’entre vous ont parlé, je rappelle que les propos tenus n’engagent que leurs auteurs. Je considère pour ma part que la sécurité des Français est un sujet suffisamment important et majeur, pour ne pas se perdre dans des solutions à la fois simplistes et dépourvues de tout contact avec la réalité. Je me réjouis que nous en ayons parlé ce matin.

Si toutes les élucubrations sont permises aux personnes les plus intelligentes, comme l’a déclaré Hervé Morin, il y a tout lieu de se réjouir que tous ceux qui connaissent le terrain soient d’accord sur les solutions à apporter. Il n’est pas question de tailler à la hache dans les effectifs. Ceux qui me connaissent savent qu’il en faut plus pour m’émouvoir.

S’agissant des rapports avec les élus locaux, qui préoccupent M. Voisin, il ne s’agit pas d’un problème nouveau. Je rappelle d’ailleurs systématiquement depuis plusieurs années devant les promotions qui sortent des écoles de gendarmerie que nous avons réorganisé la gendarmerie sur le terrain, afin, justement, que les gendarmes soient davantage présents et visibles. Cela veut dire aussi qu’ils doivent avoir des contacts avec les élus locaux et, de façon générale, avec les gens qui comptent. Cela contribue à leur connaissance du tissu local. Or, dans certains cas, notamment dans la lutte contre le terrorisme, de telles relations ont contribué à obtenir des résultats marquants ; je pense surtout à des opérations contre l’ETA. Je rappelle également aux jeunes gendarmes et aux jeunes officiers de gendarmerie que ce lien est absolument indispensable.

Il est vrai qu’il faut en tenir compte dans la formation qui leur est dispensée. Je l’ai dit et même écrit aux écoles, et je continuerai de le faire. Il faut apprendre aux élèves ce que sont les contacts. En sortant de l’école, on sait beaucoup de choses, mais on n’a pas forcément le sens des contacts humains. S’y ajoute une forme de timidité qu’éprouvent les jeunes gens – nous connaissons ça ! – et elle crée une distance. La grande force de la gendarmerie, c’est sa capacité de contact avec les élus ou avec ceux qui comptent dans les petites communes. Il faut faire un effort, de part et d’autre, et j’encourage également les élus locaux et les maires à inviter les gendarmes à participer à certaines manifestations, ce qui leur donne l’occasion de faire connaissance. Une fois que les liens sont établis, les contacts sont plus faciles.

S’agissant des contrôles routiers, le service logistique de Metz a rédigé, au mois de mai de l’année dernière, une fiche qui fait état de certains risques dans le fonctionnement des radars, notamment des radars embarqués, en cas de changement d’angle de prise de vue. Elle a été transmise à la DGPN, au fabricant et au service de la métrologie. Nous avons par ailleurs attiré l’attention des personnels sur la nécessité de bien positionner les matériels de contrôle.

Normalement, les utilisateurs sont formés et connaissent les paramètres qui conditionnent la qualité des prises de vue. Cela étant, en cas d’erreur manifeste ou même de doute sur la réalité de l’infraction, le centre automatisé de constatation des infractions rejette les messages d’infraction. De temps en temps, nos électeurs – j’en ai aussi – se déclarent sûrs de leur vitesse. De toute façon, il y a une marge que les services de la gendarmerie évaluent à 10 %. Nous sommes vigilants et, en cas d’erreur, le procès-verbal d’infraction est rejeté et c’est normal car le doute doit profiter à l’accusé.

Yves Fromion a parlé des réservistes de la gendarmerie et Hervé Morin a commencé à lui répondre. J’ajoute que je réaffirme mon attachement à la réserve. Il est pour moi évident que, sans les réservistes, la gendarmerie ne pourrait pas se charger de certaines tâches. Il faudrait d’ailleurs étendre ce principe à la police car je suis persuadée que beaucoup de policiers quittent à regret leur activité et déplorent que les savoir-faire qu’ils ont acquis et que leur dévouement à la chose publique ne soient pas mieux utilisés.

Dans la chaîne de la sécurité, bien des actions, notamment dans le champ de la prévention, qui ne font pas partie du cœur de métier de la police, pourraient être prises en charge par d’anciens policiers. Ils pourraient encadrer et accompagner utilement les jeunes. Je le pense sincèrement : nous devons, mesdames, messieurs les parlementaires, agir ensemble. Ce serait une façon d’enrichir notre communauté de savoir-faire de personnes qui partent en ayant encore le goût et l’envie de participer à l’action commune en faveur de la sécurité et, partant, de l’unité de notre pays. Tel est bien l’enjeu du soutien, de l’encouragement des jeunes.

Monsieur Viollet, ma réponse sur la RGPP était suffisamment claire pour tous, mais je peux la répéter s’il le faut.

M. Carcenac a évoqué le parc des casernes de gendarmerie et la question des loyers. Hervé Morin lui a largement répondu. J’ajoute seulement, à l’intention de ceux qui pourraient être concernés, qu’il est important de discuter avec les organismes privés. J’ai eu l’occasion de constater, dans mes précédentes fonctions, que certains organismes de gestion et de construction de locaux de gendarmerie exagéraient. Normalement, les prix des loyers sont ceux du marché mais, au motif que le marché serait captif, des exagérations sont commises. C’est la raison pour laquelle nous pouvons peser sur la négociation. Je l’ai d’ailleurs dit à la gendarmerie et elle l’a fait, en globalisant, puisque les opérateurs sont très peu nombreux au plan national. Comme un énorme effort a été réalisé en matière de logement ces dernières années et qu’il va se poursuivre, nous pouvons demander un effort général en contrepartie des marchés qui sont obtenus.

J’ai, pour ma part, demandé à Bercy une modification du décret de 1993, de façon à permettre aux départements d’intervenir dans les cas où les petites communes sont en position de faiblesse. Je n’ai pas eu de réponse, mais je ne doute pas d’en obtenir une un jour ou l’autre ! J’espère qu’elle sera positive.

En ce qui concerne les secours en montagne, monsieur Caresche, je ne partage pas la vision que l’on peut en avoir de Paris.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. En Isère, cela fonctionne bien !

M. Christophe Caresche. Heureusement sinon cela serait inquiétant, mais cela coûte cher !

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. J’ai l’impression que votre président n’est pas de votre avis non plus.

M. Christophe Caresche. Tant mieux si tout va bien !

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Des améliorations sont certes toujours possibles. Les rivalités, si rivalités il y a, ne se passent pas sur le terrain. La motivation des hommes et des femmes qui servent dans les différentes forces fait passer la mission avant toute autre considération. J’ai entendu ici ou là quelques revendications. Cela est normal car c’est humain. Sur le terrain, en revanche, les rouages fonctionnent plutôt bien.

J’examinerai le problème comme je le fais en ce moment en analysant les rapports entre les SAMU et les pompiers. Bien que la question n’ait pas été abordée, ils sont parfois conflictuels. J’essaie de voir avec le ministère de la santé comment régler le problème, mais, dans un cas comme dans l’autre, il y a suffisamment à faire et le sujet est suffisamment sensible pour conjuguer les énergies au lieu de les annuler par des querelles stériles.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous allons poursuivre avec une autre série de questions.

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Alors, il va falloir que je réponde plus rapidement ! (Sourires.)

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. Deux points, rapidement, monsieur le président.

Le premier concerne la réorganisation de la direction centrale de la sécurité publique avec, notamment, le projet de création de compagnies de sécurisation.

Lorsqu’il se produit un « coup de grisou » dans une banlieue, ou ailleurs, comme à Saint-Dizier, les moyens disponibles au niveau du département sont rapidement insuffisants, et il faut faire appel à des moyens extérieurs, notamment aux CRS et aux gendarmes mobiles, ce qui n’est pas sans inconvénients : délai de mise en place, absence de connaissance des spécificités du terrain et règles d’emploi contraignantes qui ne correspondent pas toujours à ce qui serait nécessaire.

J’ai cru comprendre qu’il était question de créer, au sein même de la direction centrale de la sécurité publique, de nouvelles unités, les compagnies de sécurisation, qui auraient vocation à intervenir sur le terrain au niveau régional, voire moins. L’idée me paraissant intéressante, je voudrais savoir où en est la réflexion et si elle peut aboutir rapidement. D’où viendraient les moyens ? Ferait-on appel aux CRS, comme je l’ai compris ? Si oui, le projet aurait-il un impact sur leur organisation propre ?

Le second a trait aux investigations judiciaires.

Il n’existe pas, pour le moment, de protocole de répartition des compétences entre la police et la gendarmerie. Il en existe dans certains départements, mais pas partout. À défaut, ce sont les parquets qui décident, d’où des problèmes de cohérence au niveau national, d’efficacité et de formation des agents. J’ai cru comprendre qu’un protocole national était en cours de discussion. Est-il susceptible de voir le jour rapidement ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Philippe Goujon.

M. Philippe Goujon. Je tiens, à mon tour, à rendre hommage aux forces de police et de gendarmerie, dont le travail et l’engagement au service de la sécurité et de nos concitoyens sont grands. Elles ont contribué, sous votre autorité, à faire baisser la délinquance, ce dont nous nous réjouissons, et le taux d’activité des services a été systématiquement amélioré. Nous nous félicitons également de la mise en chantier de la LOPPSI 2 qui complétera la première, dont l’application a été quasi parfaite. Dans ce cadre, je veux vous interroger sur la vidéosurveillance pour obtenir davantage de précisions.

Un rapport de l’inspection générale vous a été remis récemment sur le plan national de vidéosurveillance, destiné à équiper notre pays et qui est tout à fait justifié, compte tenu des avantages à en attendre dans la lutte contre le terrorisme, la sécurisation des sites sensibles, et même la prévention des incivilités et la recherche des auteurs de crimes et délits.

La vidéosurveillance permet également, vous venez de le dire, madame la ministre, le redéploiement des forces de sécurité sur le terrain. Bref, l’efficacité de la vidéosurveillance n’est plus à démontrer. Des centaines de villes en France s’en sont équipées, ainsi que de grandes métropoles étrangères, notamment Londres où plus de 60 000 caméras sont reliées à Scotland Yard, tandis que Paris n’en compte que 330, abstraction faite des caméras installées dans le réseau de transport en commun en sous-sol de la RATP et la SNCF.

Pourriez-vous, madame la ministre, nous donner davantage d’éléments sur ce plan national ? Sa mise en œuvre pourra-t-elle être accélérée à Paris ? Depuis plusieurs années, nous sommes nombreux à demander un plan « 1 000 caméras » étalé sur cinq ans, mais ce délai nous semble long, compte tenu du niveau d’équipement des autres capitales étrangères, et des menaces très fortes qui pèsent aujourd’hui sur Paris.

S’agissant des violences urbaines, les bandes opèrent sur l’ensemble de la plaque urbaine du cœur d’agglomération de l’Île-de-France. Vous avez récemment organisé des réunions pour améliorer la coordination entre les différents services de police et de gendarmerie. Toutefois ne faut-il pas aller plus loin pour mieux appréhender le phénomène ? N’est-il pas aujourd’hui nécessaire de mettre en œuvre une police du « Grand Paris » ? Cela permettrait, sur une zone beaucoup plus étendue qui reste à définir, de donner autorité à la préfecture de police, par exemple, pour gérer l’ensemble des problèmes de sécurité. Une telle organisation favoriserait une réaction rapide et directe à la délinquance, et aux violences urbaines.

En accompagnement, vous l’avez dit, mais il faut aller plus loin, des mesures de fidélisation doivent être prises au niveau régional. Il est très important de faciliter le logement et la garde des enfants. À cet égard, les 500 logements supplémentaires sont indispensables pour attirer des policiers dans la région, même si la préfecture de police gère déjà un parc important. Quelles mesures statutaires et indemnitaires peuvent être encore renforcées au profit du recrutement régional et du maintien dans cette zone ?

Enfin, j’ai une dernière question qui préoccupe grandement les Parisiens, je veux parler de la circulation.

Les causes des embarras de Paris sont multiples, mais la police peut aider à les maîtriser, notamment si les effectifs affectés à cette mission sont renforcés. La vidéosurveillance peut être également sollicitée. Les compagnies de circulation ont été vidées de leur substance il y a quelques années et la mission de circulation n’est quasiment plus assurée par la préfecture de police. Une réforme interne est en cours : un redéploiement doit permettre d’affecter plusieurs centaines de policiers à la circulation parisienne et les agents de surveillance de Paris – les « pervenches » – doivent être réorganisés de façon à ce qu’ils soient associés à la circulation, non pas des 2 millions de Parisiens, mais bien des 7 à 8 millions d’automobilistes qui traversent Paris tous les jours.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Arlette Grosskost.

Mme Arlette Grosskost. Madame la ministre, ma question sera brève puisque vous avez évoqué le sujet à maintes reprises.

Nous avons observé une baisse générale de la délinquance et les chiffres de l’Observatoire national de la délinquance marquent d’ailleurs un recul de 3,3 % sur les neuf derniers mois. Toutefois qu’en est-il des violences faites aux personnes qui, elles, malheureusement, ne suivent pas la même tendance ? Ainsi, dans ma circonscription, elle est carrément inverse.

Quels seront les moyens mis en œuvre ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Jean-Claude Bouchet.

M. Jean-Claude Bouchet. Ma question porte sur les modalités de dotation des commissariats de police en moyens humains.

Actuellement, l’effectif théorique est calculé essentiellement selon un critère démographique, le nombre de policiers affectés dans un commissariat étant proportionnel à celui des habitants de son rayon d’action. Il serait plus conforme à la réalité de fixer l’effectif en fonction du niveau et du type de délinquance observé sur zone, et d’opposer au critère démographique l’adaptabilité des moyens. On ne peut en effet traiter avec les mêmes moyens une ville de 25 000 habitants, comme Cavaillon dans le Vaucluse, que je représente, exposée à une forte délinquance de voie publique, et une ville de même importance au climat plus serein.

L’exemple de Cavaillon n’est pas anodin. Même si la délinquance générale y baisse régulièrement depuis cinq ans, celle enregistrée sur la voie publique y reste particulièrement élevée. Les faits de voie publique représentent plus de 60 % de la délinquance globale. Or c’est ce type de délinquance qui est le plus durement ressenti par nos concitoyens et qui alimente un sentiment légitime d’insécurité.

Les moyens humains, tels qu’ils sont actuellement calculés, ne permettent pas d’organiser une présence policière permanente et suffisante, sept jours sur sept, de jour comme de nuit. Non seulement l’effectif théorique se révèle insuffisant face à une délinquance urbaine importante, mais cet effectif n’est de surcroît que rarement au complet à cause des arrêts maladie, des départs à la retraite, etc.

Le Gouvernement envisage-t-il de définir l’effectif théorique en fonction de la délinquance constatée et de la délinquance urbaine ? À l’échelle de Cavaillon, cela se traduirait par une dotation supplémentaire de cinq agents.

Dans le même esprit, les services de nuit seront-ils rendus plus attractifs ? Améliorera-t-on le système de mutation, de façon à éviter qu’un départ entraîne systématiquement une vacance de poste pendant plusieurs mois ? Des mesures dans ce sens permettraient de mieux coller à la réalité de la délinquance car le cas de Cavaillon peut être généralisé à d’autres villes.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Michel Vergnier.

M. Michel Vergnier. Madame la ministre, je vais parler du département le plus sûr de France – la Creuse – en vous demandant d’abord d’inverser l’ordre de classement des statistiques. Arrêtez donc de mettre les meilleurs élèves en dernier. Placez-les en tête ! Pour une fois ! (Sourires.)

Vous avez répondu en partie, mais je souhaite insister sur plusieurs points.

On pourrait dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Je n’ai jamais dit ça !

M. Michel Vergnier. En effet et certaines de vos réponses m’ont déjà rassuré. Cependant je veux attirer à nouveau votre attention sur la nécessité de maintenir un maillage suffisant sur l’ensemble du territoire. J’ai pris acte de votre déclaration sur les rapports qui n’engagent que ceux qui les écrivent. Cela étant, on a déjà vu des rapports sortir par la porte et rentrer par la fenêtre, histoire de préparer les esprits.

Madame la ministre, les communautés de brigade ont été mises en place dans la difficulté, avec hésitation, voire confusion parfois. Je ne dis pas que les élus n’ont pas été consultés, mais les choses ont évolué au fil du temps. Ne pourrait-on pas évaluer les résultats ? Un bilan est-il prévu ? Si oui, les élus seront-ils consultés ? Comment et sous quelle forme ?

Par ailleurs, vous avez, avec raison, évoqué les modifications importantes intervenues dans la gendarmerie : plus de jeunes, plus de femmes. Tant mieux ! Ce n’est pas une mauvaise chose, mais les liens avec la population se distendent. Je ne suis pas un nostalgique du gendarme enfant du pays, qui venait prendre l’apéritif chez les habitants – pardon de le dire, mais cela correspondait à une certaine réalité – ni même du gendarme de Saint-Tropez. Néanmoins les anciens gendarmes reconnaissent, sans forcément critiquer leurs collègues, que les contacts ne sont plus ce qu’ils étaient. Peut-être la formation peut-elle y remédier.

En tout cas, j’insiste sur les spécificités du milieu rural, que certains qualifient de « rural profond ». Il faut y assurer la sécurité des biens et de leurs propriétaires, des personnes âgées qui ont besoin d’être sécurisées et qui aiment leurs gendarmes. On ne va pas s’en plaindre et il vaudrait mieux que cela continue, parce que c’est important.

Je suis aussi dans une préfecture et je dois dire deux mots sur la police.

Dans les petits commissariats, c’est un peu la même chose qu’en banlieue : les personnels changent et, à effectifs constants – ce qui reste à vérifier compte tenu des difficultés rencontrées –, la part des adjoints de sécurité augmente, si bien qu’il y a plus d’agents plus ou moins bien formés, et moins de fonctionnaires ayant « de la bouteille ». Madame la ministre, je crains que le maintien de la quantité ne se fasse au détriment de la qualité.

Il faut prendre pour modèle les départements qui ont les meilleures statistiques, mais sans les comparer aux zones fortement urbanisées. En tout cas, ils ne doivent pas être des variables d’ajustement au point de perdre leur rang et d’être ravalés en milieu de classement. Il faut des bons élèves et nous devons rester en tête de classe.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Pierre Cardo.

M. Pierre Cardo. S’il y a des choses positives dans ce budget, quelques questions restent toujours en suspens.

En ce qui concerne la répartition des effectifs sur le territoire, les rapports remontent à plus de quinze ans et ils soulignaient déjà les disparités entre Paris, la petite et la grande couronne. Le rapport était de un à quatre. Or il n’a pas beaucoup changé. Il va tout de même falloir s’interroger sur une telle disparité, d’autant qu’une partie des populations en difficulté a été progressivement éjectée vers la grande couronne. Les moyens devront bien suivre à un moment donné.

Par ailleurs, il existe des disparités au sein même de la grande couronne. Ainsi, Saint-Germain-en-Laye a un rapport entre le nombre de policiers et la population nettement plus favorable que la circonscription de Conflans-Sainte-Honorine qui, elle, compte trois quartiers sensibles, dont La Noé et Achères. J’échange tout de suite !

Ensuite, en 2002, les maires de banlieue, devant le très faible taux d’élucidation, ont demandé que la police scientifique – au sens large – soit plus présente dans les quartiers. Cela a été fait en créant des brigades spécialisées, comme dans les transports, mais à effectifs constants. Autrement dit, on a prélevé dans les commissariats. Force est de constater aujourd’hui que, dans un grand nombre de quartiers, la police judiciaire, les différentes polices scientifiques et les GIR n’interviennent que rarement. Ce n’est pas nous qui déclenchons les opérations. Du coup, la présence policière s’est fortement réduite, qu’il s’agisse de la police locale dont les rangs se sont éclaircis ou de la police scientifique dont la présence est très épisodique.

De toute façon, même quand elle intervient, la police spécialisée manque de renseignements de terrain et d’indicateurs qui lui permettraient de fonctionner correctement, car nos quartiers sont plutôt bien « sécurisés » par les filières, de drogue notamment. Pour avoir fait des statistiques, je sais qu’elles peuvent être la forme la plus élaborée du mensonge. Il faut toujours s’en méfier. Alors, c’est vrai, la délinquance diminue en apparence, mais cela ne signifie pas qu’il y ait moins de délinquants et moins d’actes de délinquance, surtout quand l’omerta règne.

Bref, la question de la répartition des forces se pose non seulement entre Paris et la grande couronne, mais aussi au sein même de la grande couronne, et même entre brigades spécialisées et commissariats.

Pour en revenir aux polices spécialisées, je suis assez surpris d’observer que les GIR, dont la création nous a semblé à tous indispensable, ne sont pas très actifs contre le blanchiment, lequel s’effectue, entre autres, par le biais de commerces qui sont rachetés. Ainsi, depuis une quinzaine de jours, j’ai eu la surprise d’observer à plusieurs reprises – et c’est vraiment exceptionnel – une Lamborghini circuler dans mon quartier. Certes, elle est en location, mais, si je me promenais même dans un véhicule plus modeste, je risquerais fort de ne pas en ressortir vivant. Elle sert manifestement d’outil de présentation pour les gamins. C’est un exemple parmi d’autres.

La technologie peut nous aider, assurément, mais en complément. Elle ne remplacera jamais la présence humaine. Il n’est pas certain que les communes qui n’ont pas beaucoup d’argent puissent développer la vidéosurveillance suffisamment pour venir appuyer les forces de police. Je n’entrerai pas dans les détails car votre budget n’est pas le seul concerné, madame la ministre. D’autres crédits sont en réduction, de source extra-nationale.

Je me félicite de la lutte qui est menée contre la délinquance routière. J’observe néanmoins, depuis deux ans, que le permis à points a des effets pervers. Les infractions sont sanctionnées par des retraits de points que le titulaire met un certain temps à récupérer. La conduite sans permis se banalise dans les quartiers et les jeunes ne sont pas les seuls concernés ; il y aussi les adultes. On a désacralisé le permis de conduire. Cela mérite de réfléchir aux modalités de retrait et de récupération des points. Sinon, nous irons au-devant de graves problèmes.

Enfin, je note avec intérêt que des places en crèche seront créées pour les enfants des forces de l’ordre, mais je m’étonne d’avoir chez moi la seule crèche, ou presque, ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il me semble que la famille a évolué au cours des dernières décennies, les horaires aussi. Il n’y a pas toujours une femme au foyer pour s’occuper des gosses. Beaucoup sont seules et, dans la police, les horaires sont tout sauf banals. Il faudrait peut-être que le service public de la garde d’enfants soit adapté aux exigences de la société.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Christophe Caresche.

M. Christophe Caresche. Trois questions, madame la ministre.

La première concerne le fichier national automatisé des empreintes génétiques, le FNAEG. Parti de rien, il ne peut que s’étoffer, mais vous êtes-vous fixé des objectifs quantitatifs ? Et estimez-vous que le rythme auquel ce fichier est alimenté est satisfaisant ou pas ? Certains échos me laissent à penser qu’il est faible. Pourriez-vous nous donner des précisions ?

Deuxièmement, la fusion des services de renseignement est une bonne chose et nous l’avons approuvée. En revanche, elle aura pour conséquence que les services des Renseignements généraux qui suivaient les bandes ou les violences urbaines, et dont le travail permettait aux forces de l’ordre d’être plus efficaces, notamment dans la lutte contre les différents trafics, seront placés auprès de la sécurité publique. Pourriez-vous nous en dire davantage sur la réforme ? Les fonctionnaires concernés sont inquiets et il faut veiller, dans le droit-fil de ce que disait Pierre Cardo, à ce que le renseignement soit maintenu où et quand il le faut, car il constitue une priorité pour suivre certains phénomènes.

Troisièmement, vous avez déclaré que des crédits d’État seraient affectés à la vidéosurveillance. Je ne les ai pas identifiés. Pourriez-vous nous indiquer où ils sont logés et quel en est le montant ? Ces crédits seront-ils pris sur ceux consacrés à la prévention de la délinquance ? Notre inquiétude à ce sujet est-elle fondée ? Je voudrais savoir à quelle hauteur l’État s’engage pour financer ces équipements.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

M. Jean-Christophe Lagarde. Madame la ministre, depuis 2002, les budgets retraçaient les efforts de l’État en matière d’effectifs. Je m’inquiète de voir baisser le plafond d’emplois pour les agents de terrain – moins 1 200 – même si, en équivalents temps plein, il reste supérieur de 700 aux réalisations pour 2006. Vous nous avez expliqué avoir privilégié le non-remplacement des ADS, en raison de leur moindre expérience. Toujours est-il que ce sont autant de personnes en moins dans les commissariats. Or les patrouilles dans nos quartiers sont tout de même bien utiles. Nous nous inquiétons de la future LOPPSI, et nous vous appuierons pour que vous puissiez obtenir de meilleurs arbitrages.

D’une façon générale, la règle de ne remplacer qu’un départ à la retraite sur deux n’est pas tenable au ministère de l’intérieur, sinon au prix d’une réduction substantielle de ses effectifs au cours de la mandature. Je ne vois pas comment elle pourrait s’appliquer à la lutte contre l’insécurité. Tout au plus l’administration « de papier » pourrait-elle être concernée, mais pas les effectifs de terrain de la police nationale.

Par ailleurs, je partage l’avis de Pierre Cardo sur les GIR. Cela fait cinq ans que j’alerte régulièrement les services de police de la Seine-Saint-Denis à propos de tel ou tel commerce, racheté à un prix faramineux alors que le chiffre d’affaires n’excède pas quelques euros. Le GIR s’occupe du contrôle des gens du voyage, mais pas de ces commerces qui sont pourtant si nombreux. Ainsi, ma commune de Drancy compte soixante-quatorze sandwicheries. Elles ne peuvent pas vivre en nourrissant la population, à moins de la menacer d’obésité ! Les ouvertures de cabines téléphoniques se multiplient car ces officines manipulent des sommes en liquide. Malgré les demandes réitérées des élus, le GIR ne s’y est jamais intéressé.

La période qui vient sera peut-être plus troublée, mais le calibrage des effectifs mobiles, qu’il s’agisse de gendarmerie ou de police, date des années soixante. Or, à l’époque, la contestation sociale était plus importante. Vos prédécesseurs ont fait le choix d’utiliser à la sécurisation des quartiers les effectifs disponibles, mais je ne suis pas convaincu du tout de leur efficacité, notamment de celle des CRS. Leur utilisation est tout sauf souple et les commissaires en place vous diront qu’ils préfèrent travailler avec les gendarmes mobiles.

J’ignore si c’est une question de formation – à propos de laquelle vous avez parlé avec le ministre de la défense de mutualisation, et ce serait sans doute une bonne chose – mais il serait peut-être bon, au cours de la législature, de prévoir de diminuer les effectifs mobiles pour les affecter dans les commissariats. Je sais qu’une telle décision se heurterait à des problèmes de statut et à des résistances syndicales, mais la rupture, c’est aussi cela : une meilleure utilisation des effectifs et à moindres frais.

J’appelle enfin votre attention, madame la ministre, sur des curiosités.

L’indicateur d’élucidation est détaillé par catégorie, mais, comme nous n’avons pas la même ventilation pour les infractions, il n’est pas très utile.

Ensuite, qu’allez-vous faire des heures supplémentaires ? C’est un héritage très lourd.

Par ailleurs, je m’intéresse depuis des années au logement des policiers en Île-de-France. Des crédits sont inscrits sous cette rubrique, mais jamais, à ma connaissance, les préfectures n’ont sollicité les élus ou les bailleurs sociaux pour participer aux réservations. C’est dommage. J’ignore comment sont choisis les réservataires, mais, comme j’étais déjà volontaire gratuitement, je le serai a fortiori à titre onéreux. À 41 154 euros pour un appartement, et le 1 % patronal étant ce qu’il est, vous trouverez sûrement beaucoup de bonnes volontés ! Il y aurait sans doute des économies à faire : à moitié moins, vous trouveriez des logements acceptables. Je le répète, je suis volontaire.

Je conclurai par la politique de sécurité à l’aéroport de Roissy.

Il va de soi que tout le monde aspire au maximum de sécurité. Il existe désormais un sous-préfet chargé de la sécurité aéroportuaire et il est compétent, avec le préfet de département, pour accorder les badges autorisant l’accès à la plate-forme. Or les conditions dans lesquelles ils sont attribués sont, aux yeux de nombreux élus du département, très aléatoires. Certains refus sont totalement injustifiés, même si l’on arrive parfois à faire revenir l’administration sur sa décision.

Si certaines activités extrémistes menacent la sécurité, elle n’est pas mise en cause par quelqu’un qui a siphonné le réservoir d’essence d’une voiture il y a dix ans. On ne doit pas mettre au chômage un trentenaire parce qu’il a fait une bêtise quand il avait vingt ans. Le sujet mérite vraiment que l’on s’y penche sérieusement. Beaucoup de gens ont perdu leur emploi sans véritable motif, alors qu’ils travaillaient sur la plate-forme depuis plusieurs années.

Une dernière information : cet été, après des licenciements à peu de frais, y compris de responsables syndicaux, une grande entreprise américaine de logistique a embauché le sous-préfet chargé de la distribution des badges, qui est devenu directeur des ressources humaines. Une telle pratique ne me paraît guère recommandable.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous sommes parfois quelque peu sortis du sujet budgétaire.

La parole est à Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Vous avez parlé de police localisée, ou territorialisée, madame la ministre, à propos de l’échelon zonal et des compagnies de sécurisation. Quels sont les changements attendus dans l’organisation locale, en particulier concernant les liens entre la police et la population ?

Quant à l’économie souterraine, un bilan a-t-il été fait de la décision d’affecter les saisies au budget de l’État ? Il semblerait qu’elle soit très difficile à mettre en pratique.

En ce qui concerne la modernisation en cours, il y a un paradoxe puisque, dans le budget pour 2008, les crédits d’investissement – notamment ceux affectés aux salles d’information et de commandement – sont en baisse.

Par ailleurs, les opérateurs privés de téléphonie et les fournisseurs d’accès Internet verront-ils leurs obligations légales renforcées, pour améliorer leurs coûts et leurs délais de réponse en cas de réquisition judiciaire ? Qu’en est-il par ailleurs de l’équipement des services en haut débit, sachant qu’il y a de plus en plus de messages e-mail à intercepter, d’adresses IP à identifier ?

Pour compléter la question de Christophe Caresche sur le FNAEG, je voudrais connaître le budget alloué à ce fichier.

Selon des informations que nous avons recueillies, il y aurait un stock de 80 000 à 100 000 empreintes ADN en attente de saisie à cause de l’engorgement des services. Le délai moyen de traitement serait de dix-huit mois environ, sauf affaire urgente. Confirmez-vous ces informations ? Certaines fuites ont laissé entendre qu’il y aurait une base regroupant l’ADN des policiers eux-mêmes, pour éviter toute confusion dans les enquêtes. Est-ce le cas ? Si oui, dans quel cadre légal et réglementaire a-t-elle été constituée ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Claude Bodin.

M. Claude Bodin. Ma question, madame la ministre, concerne la sécurité de nos concitoyens dans les transports en commun franciliens.

Chaque jour, plus de 7 millions de Franciliens empruntent les lignes de métro, de RER ou de train. Dans le Val-d’Oise, la gare d’Ermont-Eaubonne constitue un important nœud ferroviaire où se croisent le RER et les trains en provenance des gares du Nord et de Saint-Lazare : près de 30 000 personnes y transitent chaque jour. Les actes délictueux y sont très nombreux : vols à la tire, à la roulotte, vols avec violence, agressions...

Le Gouvernement a fait de la lutte contre la délinquance dans les transports en commun d’Île-de-France un objectif prioritaire. La création en 2003 du service régional de la police des transports a permis un net recul de la délinquance sur les réseaux ferrés de la région, notamment grâce au déploiement de 1 300 policiers chargés de sécuriser le plus grand nombre de trains et de métros possible. Cette présence policière visible est rassurante pour les voyageurs, et dissuasive pour les délinquants. Il existe toujours, néanmoins, un sentiment récurrent d’insécurité, en particulier en soirée et pendant les heures creuses.

Envisagez-vous, madame la ministre, de renforcer la présence policière dans les transports en commun d’Île-de-France, afin de rendre le dispositif encore plus performant ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Patrice Calméjane, pour une dernière question.

M. Patrice Calméjane. Madame la ministre, vous avez fait plusieurs visites en Seine-Saint-Denis, dont je suis député. Que les Creusois me pardonnent ! Vous avez rencontré de nombreux acteurs locaux : élus, membres d’associations, fonctionnaires, citoyens. Qu’en avez-vous retiré et quelles décisions vous auront inspiré ces contacts sur le terrain ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la ministre, pour répondre à ces nombreuses questions.

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Faut-il que je sois plus ou moins concise ? (Sourires.) Je vais essayer de répondre brièvement, mais ce ne sera pas chose facile !

Monsieur le président, mesdames, messieurs les commissaires, je reprendrai les questions dans l’ordre, selon leur thème, ce qui m’amènera parfois à répondre à plusieurs personnes à la fois.

Plusieurs d’entre vous m’ont interrogée sur les compagnies de sécurisation. Il est vrai que, la plupart du temps, les départements ne sont pas dotés de capacités de réaction immédiate. Pour y remédier, j’ai souhaité d’abord améliorer la coordination – et c’est déjà une réalité en région parisienne – par une mise en commun plus systématique et plus organisée des capacités de réaction. J’ai demandé que le préfet de police de Paris et les sept préfets des départements de la couronne parisienne se réunissent tous les mois, de façon à établir un échange permanent de renseignements, pour pouvoir anticiper et réagir. Dans le même temps, ils devront prévoir une mutualisation automatique des forces en cas de problème, où qu’il se produise.

C’est une première réponse, mais elle est encore insuffisante puisque le même cas existe ailleurs, d’où l’idée d’une réorganisation de la police territoriale et la création de groupements de forces, différentes des CRS, puisqu’elles seraient mieux ancrées localement, mais tout de même mobiles. Il s’agirait de forces intermédiaires pour faire face à des situations intermédiaires. J’ai donc demandé au directeur général de la police nationale de faire une étude sur le sujet. Il examinera également la question corrélative du reversement d’une partie des forces mobiles de sécurité sur ces groupements. Une estimation doit me parvenir à la fin du mois.

Vous avez également évoqué les GIR. L’idée de réunir des compétences différentes était excellente. Ils ont mené notamment des opérations de lutte contre la drogue, vous l’avez dit. Après une montée en charge, leur activité est en baisse. J’ai donc demandé, compte tenu des bons résultats obtenus, à ce qu’ils soient relancés et j’y veillerai très attentivement.

J’en viens à la sécurité dans les transports en commun, puisqu’il s’agit d’opérations particulières.

Le service régional de police des transports a été créé en 2002, avec une structure opérationnelle forte de 1 200 policiers sous un commandement unique. Depuis, la délinquance sur les réseaux ferrés a baissé de façon sensible, et le mouvement s’est poursuivi en 2007. Une salle unique de commandement, que j’ai d’ailleurs visitée récemment, a été créée pour la surveillance des réseaux RATP et SNCF. Elle participe à la prévention dans la mesure où elle permet de repérer les déplacements de population – la mobilité est l’un des caractéristiques de la délinquance – et renforce la réactivité. Nous l’avons bien vu la semaine dernière. Cette structure suppose l’équipement des gares et de certains locaux en vidéosurveillance qui lui sont reliés, tout comme les trains et rames.

La RATP et la SNCF m’ont informée que plusieurs milliers de caméras viendront compléter celles qui sont déjà installées, pour contribuer à la plus grande sécurité possible dans les transports, laquelle constitue un droit pour nos concitoyens. Nous disposons aujourd’hui d’un personnel suffisant même si nous n’aurons jamais une patrouille dans chaque véhicule. Néanmoins il faut que la vidéosurveillance soit de bonne qualité. Dans l’accident dramatique qui a coûté la vie cet été à un journaliste italien, nous nous sommes heurtés à l’absence de caméra sur le lieu même de l’agression – il manque donc encore du matériel – et au flou des images disponibles. Il faut avoir des images exploitables et c’est sur la vidéosurveillance que nous devrons nous appuyer pour optimiser les moyens humains qui sont indispensables et irremplaçables.

S’agissant du plan national de vidéosurveillance, j’ai dégagé 4 millions d’euros sur la fin du budget de 2007 pour effectuer des raccordements entre des petites communes ou des sociétés de transport de fonds et la police nationale. L’année prochaine, 30 millions d’euros seront affectés aux équipements de vidéosurveillance, et ils ne seront pas prélevés sur le Fonds de prévention de la délinquance. J’ai décidé de tripler le nombre de caméras sous notre contrôle pour arriver à 20 000, non pas en cinq ans, mais en trois, c’est-à-dire à la fin de 2009. Si l’on y ajoute les projets des communes, ceux de la SNCF et de la RATP, la couverture sera très large. L’accélération du plan national répond à vos demandes.

D’aucuns se préoccupent des violences urbaines et soulignent la nécessité de fidéliser notre personnel. Nous y contribuerons à la fois par des mesures de carrière qui figureront dans la LOPPSI 2 et des mesures d’environnement, notamment en matière de logement et de crèche.

Monsieur Lagarde, il me semble vous l’avoir déjà dit lorsque je me suis rendue en Seine-Saint-Denis : j’ai lancé un appel à tous les maires de la couronne pour mettre des logements à la disposition des forces de police. Vous imaginez bien qu’il est impossible de loger sur place les policiers qui travaillent dans des zones dangereuses. Ils doivent pouvoir échapper, ainsi que leurs familles, à des agressions verbales, voire physiques. J’ai donc besoin, mesdames, messieurs les maires, d’une mise en commun, d’une sorte de bourse des logements, lesquels doivent être à proximité des lieux de travail ou desservis par les transports, pour garantir des conditions de vie acceptables à leurs occupants.

Quant aux crèches, nous nous efforçons d’adapter leurs horaires aux besoins des parents, y compris en les faisant fonctionner en horaire décalé. Je l’ai fait pour les personnels de la défense, en particulier les personnels médicaux travaillant à Percy et autres, qui rencontrent ces problèmes.

Pour la circulation, la vidéosurveillance peut également être utilisée. En région parisienne, elle ne doit pas servir qu’à la lutte antiterroriste, bien que les terroristes soient toujours à l’affût des symboles qu’abrite une capitale. Cette technologie participe à la prévention de la délinquance et à sa répression car elle contribue à l’élucidation, mais pas seulement. Certaines des implantations qui ont été choisies ont aussi pour but d’aider à fluidifier la circulation.

Cela étant, je rappelle les modifications législatives et réglementaires intervenues, notamment la loi du 27 février 2002 qui a transféré du préfet de police au maire de Paris la réglementation des conditions de circulation. La police nationale continue à être compétente sur les voies principales, mais pas pour l’ensemble de la circulation. Le préfet de police est chargé de la mise en œuvre des plans de gestion du trafic qui dépassent le cadre du département, de la coordination des mesures de gestion et d’information routière, essentiellement en cas de crise ou d’événements majeurs, comme ceux qui ont eu lieu ces derniers jours.

Madame Grosskost, vous avez raison : la baisse globale de la délinquance dissimule une montée des violences aux personnes. Les statistiques que je vous ai transmises sont exactes, puisqu’établies sur une base homogène, mais cela ne veut pas dire que la violence n’augmente pas ici ou là. De juin à septembre, les violences aux personnes ont baissé de plus de 2 %, alors qu’elles étaient en augmentation continue depuis plusieurs années. Elles ont même diminué, en septembre, de 7,45 % par rapport à l’année dernière. Ce sont les chiffres de l’Observatoire national, mais je ne dis pas que, dans votre ville, ce type de violences n’augmente pas. Cela constitue bien notre priorité et nous sommes conscients que nous devons nous adapter. C’est la raison pour laquelle je veux une police plus souple et plus réactive.

Quant aux commissariats de police, certes, la norme de référence est la population, mais cela ne signifie pas que nous ne tenons pas compte de la réalité de la délinquance, monsieur Bouchet. Tous les commissariats ne sont pas dans la moyenne. D’ailleurs, les élus nous font remarquer que leurs commissariats sont en dessous. Certains autres sont au-dessus à cause des besoins. La référence n’est pas une règle absolue ; c’est une question de bon sens. La nouvelle organisation doit nous permettre de réagir en milieu sensible sans faire systématiquement appel à l’intervention des CRS, souvent disproportionnée.

J’en reviens à la gendarmerie, avec les communautés de brigade.

Ont-elles fait l’objet d’une évaluation ? Oui. Elles ont globalement donné satisfaction. Certaines remarques justifiées ont été faites sur le sentiment d’éloignement de la population. Encore une fois, ce n’est pas qu’il y ait moins d’emplois. Au contraire, la LOPSI prévoyait 13 000 personnes supplémentaires. Elles sont bien quelque part ! Néanmoins la culture, les comportements évoluent, et il faut être extrêmement vigilant pour préserver ce lien avec la population, auquel je tiens beaucoup. Je vais régulièrement dans un village qui compte soixante habitants, où je rencontre le monde rural profond et on m’en parle souvent. Il est important de tisser des liens avec les élus.

J’ai demandé une circulaire prévoyant que l’on veille à ce que les élus soient informés systématiquement sur la délinquance commise sur place. Il n’est pas normal que le maire d’une petite commune rurale ne soit pas tenu au courant d’une arrestation ou d’autres incidents qui se déroulent sur son territoire.

Certains se sont plaints de la proportion grandissante d’adjoints de sécurité, au détriment des personnels bien formés. C’est précisément pour cette raison que les diminutions d’effectif ont porté sur les premiers. Mon but est bien d’avoir de plus en plus de policiers formés, ne serait-ce que pour qu’ils sachent utiliser les nouvelles technologies.

Par ailleurs, la motivation repose aussi sur la promotion professionnelle, et sociale, laquelle s’appuie sur la formation. Quant aux adjoints de sécurité, nous n’arrivons pas à pourvoir les postes ouverts, tout simplement parce que le métier n’est pas suffisamment valorisant. Il faut pouvoir proposer une formation, avec une promotion à la clef. Cela étant, il faudra aussi améliorer la communication. De la même façon que nous avons créé une journée « défense nation », je veux une journée « sécurité nation » pour manifester les liens et l’attachement des Français à leur police, comme ils ont l’occasion de le faire à l’adresse de leurs militaires. Il faut notamment montrer la police scientifique et technique, et les matériels qu’elle utilise. C’est un bon moyen non seulement pour se faire connaître, mais aussi pour intéresser les jeunes à des métiers trop souvent méconnus.

Pierre Cardo s’est inquiété de la répartition des effectifs, mais je lui ai indiqué ce que nous ferons à partir du rapport que doit me fournir le directeur général de la police nationale. J’espère que nous répondrons alors à ses préoccupations. Il faut à la fois une police bien implantée sur le terrain, des capacités de renfort dans la durée, ce qui n’implique pas d’employer des CRS à un travail qui n’est d’ailleurs pas le leur. Je ne vois pas ce qu’un car de CRS a à faire devant un centre de rétention administrative. Ce n’est ni valorisant pour ces personnels ni efficace.

Je le répète, une plus grande souplesse s’impose si nous voulons nous adapter à toutes les situations. N’oubliez pas que 13 000 postes ont déjà été créés, sans compter ceux qui le seront. Trop de policiers et de gendarmes, qui ont pourtant été formés à la sécurité, travaillent sur des ordinateurs ou derrière des comptoirs d’accueil. Ce n’est pas leur place. Chacun doit faire le métier pour lequel il a été formé. De trop nombreux postes pourront alors se libérer. Quant aux GIR, je l’ai dit, nous allons les relancer.

Vous nous avez indiqué, monsieur Cardo, que moins de délinquance ne signifiait pas forcément moins de délinquants, en raison de l’omerta. Elle existe, mais pas toujours. D’ailleurs, les gens commencent à parler. Il arrive même, paradoxalement, que les bonnes statistiques entraînent une activité renforcée de nos services. Nous avons ainsi pu constater tout au long des derniers mois, une augmentation considérable du nombre d’affaires découvertes par les services eux-mêmes. La baisse de la délinquance ne vient pas uniquement du moindre nombre de plaintes. Elle est bien réelle. Les intimidations persistent, notamment envers les gardiens d’immeubles qui savent beaucoup de choses, et qui sont directement menacés. Je le sais, mais nous progressons sur ce point.

Les nouvelles technologies doivent aussi être au service des victimes. Aussi sera-t-il possible, dès le début de l’année prochaine, de déposer plainte en ligne ou de procéder à des signalements, de façon à éviter des déplacements qui risquent d’être repérés. De même, j’ai demandé à ce que les témoignages sous X garantissent totalement l’anonymat. Ce n’est pas la même chose qu’une dénonciation anonyme. En effet le juge connaît alors l’identité du témoin qui doit être protégé d’un entourage potentiellement dangereux.

En ce qui concerne la délinquance routière, le permis à points soulève des problèmes, mais n’oublions pas qu’il a aussi contribué à économiser un grand nombre de vies et à éviter de nombreux blessés. Nous ne pouvons que nous en réjouir, mais j’admets volontiers que tout est perfectible.

Nous avons d’abord porté notre effort sur ceux qui circulent sans permis sans le savoir. Cela existe, compte tenu des délais d’avertissement. Depuis le mois de juillet, il est possible de consulter en ligne le nombre de ses points. Nous en sommes à 400 000 demandes de codes d’accès, puisque l’information est strictement confidentielle. Il faut continuer et, pour aller plus loin, j’ai demandé à ce que chaque personne soit informée dès lors qu’il ne lui reste plus que la moitié de ses points. Il s’agit d’une alerte, qui permet aux intéressés de faire les stages nécessaires pour récupérer leurs points et adopter une conduite plus raisonnable.

Dans le même temps, je souhaite renforcer les sanctions contre les trafics de points qui ont été constatés. Un projet de loi vous sera soumis pour aggraver les sanctions. Nous pouvons aussi agir en direction des lycéens, en diffusant auprès d’eux une information ou en leur offrant la possibilité de passer une partie du permis, le code ou autre, de façon à faire baisser le coût du permis. Il arrive que des jeunes conduisent sans permis parce qu’ils estiment que le permis est trop cher. Il faut donc revoir la conception même du permis. Les conducteurs récupèrent des points lorsqu’ils n’ont pas commis de faute. Alors, ne pourrait-on pas imaginer des bonus pour les bons éléments ? C’est une piste à laquelle nous travaillons.

Le FNAEG regroupe désormais 500 000 empreintes, monsieur Caresche, et l’objectif est de 2 millions, comme le FNAED. Les événements de Saint-Dizier, entre autres, ont montré l’utilité de ces outils, qui nous ont permis de réagir à ces violences urbaines scandaleuses. En dépit des améliorations obtenues, le taux d’élucidation reste autour de 35 % et nous devons atteindre 40 %. C’est important pour les victimes, et dissuasif pour les coupables qui, s’ils ont toutes les chances de se faire prendre, y réfléchiront à deux fois avant de commettre un délit ou un crime.

Les services de renseignement mériteraient une séance à part de votre commission. En tout état de cause, je suis favorable à l’organisation de visites destinées aux commissaires. Nous l’avons fait systématiquement au ministère de la défense, et je souhaite continuer à l’intérieur. Il est important que les Français sachent comment fonctionnent les services. Bien entendu, la protection des personnels sera assurée. Je suis la première à avoir laissé entrer des caméras de télévision à la DST et aux Renseignements généraux. Je suis a fortiori pour l’accueil des parlementaires !

J’ai déjà parlé de la vidéosurveillance, des effectifs aussi, de même que des GIR, qui seront relancés car j’y vois un excellent moyen de lutter contre certains types de délinquance. Quant au calibrage des effectifs, j’attends un rapport en fin de mois.

Le dossier des heures supplémentaires est en cours de règlement, selon le protocole « corps et carrières ». J’ai relancé la discussion et elle a abouti à plusieurs accords. Toutes les heures supplémentaires des officiers – soit 5,2 millions – seront comptabilisées et j’ai proposé le choix entre le paiement et la récupération. La moitié des officiers ont déjà opté pour le paiement et le règlement interviendra dès le mois de décembre prochain. Nous avons beaucoup progressé sur ce sujet compliqué.

Sur l’attribution des badges à Roissy, je ne peux pas répondre, faute d’information.

Madame Batho, je crois vous avoir répondu sur l’organisation locale en évoquant les projets en cours. Quant aux réaffectations au budget de l’État des saisies au titre de l’économie souterraine, il y en a eu quelques-unes, notamment des véhicules, mais, pour prendre la décision définitive, il faut attendre la fin des procédures judiciaires qui sont longues.

En ce qui concerne la modernisation des services, vous avez parlé d’une baisse des budgets qui financent les salles de commandement. Cela m’étonne. Le budget global est en hausse de 4 % et je rappelle qu’une salle est équipée une fois pour toutes. De même, nous équipons les services en haut débit, au fur et à mesure. Encore faut-il que les zones rurales soient desservies. Nous ne pouvons pas installer le haut débit à nous tous seuls.

S’agissant du fichier d’empreintes génétiques, le retard initial est en train d’être rattrapé, j’ai pu le constater moi-même à Lyon hier. Depuis 2003, le nombre d’empreintes disponibles a doublé tous les ans. Un tel rythme est tout de même satisfaisant. Quant à la base concernant les policiers eux-mêmes, l’idée a été lancée après avoir retrouvé, à deux reprises, des empreintes différentes de celles relevées sur la scène de crime. Elles appartenaient en fait à des policiers. D’où ce projet, pour éviter toute confusion, mais les syndicats y ont porté, pour l’instant, un coup d’arrêt.

Mme Delphine Batho. Il faudrait un cadre légal.

Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales. Affaire à suivre.

J’ai répondu aussi à M. Bodin, sur les transports parisiens.

Monsieur Calméjane, vous m’avez interrogée sur les réunions de cohésion en Seine-Saint-Denis. J’ai été très intéressée par les expériences qui y ont été menées, par les besoins qui ont été exprimés, et par les problèmes, dont quelques-uns ont été évoqués, tels que la fidélisation, les liens entre les acteurs ou les demandes de l’encadrement. J’ai mentionné l’utilisation des réservistes dans certains cas. Nous y reviendrons au cours de la conférence de cohésion qui interviendra au mois de novembre en Seine-Saint-Denis. La démarche se renouvellera dans d’autres départements. J’interviendrai personnellement dans les cinq départements les plus sensibles et, ailleurs, certains préfets travaillent déjà dans ce sens.

J’espère, monsieur le président, avoir répondu à vos questions, parfois trop longuement, mais aussi complètement que possible.

La sécurité est la première des libertés et les Français y sont attachés parce qu’elle conditionne les autres. Cependant la police ne détient pas seule la réponse. Nous sommes tous concernés. La sécurité dépend d’une chaîne où chacun a sa place. Je souhaite que, dans nos travaux ultérieurs, qu’il s’agisse du budget ou du fond, nous puissions y travailler ensemble très étroitement. Nos concitoyens n’attendent pas tant des idées personnelles de notre part qu’une action collective, en vue de renforcer leur sécurité et celle de leurs enfants.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir répondu complètement à nos très nombreuses questions.

Je rappelle que le vote en séance publique des crédits de la mission « Sécurité » aura lieu le 16 novembre.

Les commissaires vont maintenant se prononcer sur les crédits.

(La réunion de la commission élargie s’achève à douze heures cinq.)