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Compte rendu
intégral

Commission des finances, de l’économie générale et du plan

Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Commission élargie

Mardi 6 novembre 2007

(Application de l’article 117 du règlement )

Projet de loi de finances pour 2008

Solidarité, insertion et égalité des chances

Présidence de M. Didier Migaud
et de M. Pierre Méhaignerie
.

(La réunion de la commission élargie commence à seize heures quinze.)

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Chers collègues, le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales Pierre Méhaignerie et moi-même avons le plaisir d’accueillir, dans le cadre de l’examen en commission élargie, du budget de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », une délégation gouvernementale importante puisque nous comptons parmi nous Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité ; Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports ; Christine Boutin, ministre du logement et de la ville ; Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité ; et Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Il s’agit là d’une mission importante tant sur le plan budgétaire que politique.

Xavier Bertrand m’a courtoisement prévenu qu’il nous quitterait autour de dix-huit heures, en fonction de l’avancement d’autres débats. Vous ne pourrez pas tous en faire autant, mesdames les ministres, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, puisque vous devrez répondre aux questions des parlementaires. (Sourires.)

Nous suivrons la méthode de travail arrêtée en conférence des présidents, avec l’accord du Gouvernement. Il est convenu que nous en venons directement aux observations et questions des rapporteurs. Les ministres répondront aux questions qui les concernent. Ensuite, les orateurs des différents groupes politiques interviendront avant que les députés ne posent leurs questions.

Le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan est Jean-Marie Binetruy et nous avons deux rapporteures pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales : Mme Valérie Boyer pour la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances, et Mme Bérengère Poletti pour le handicap et la dépendance.

La parole est à M. le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Jean-Marie Binetruy, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Messieurs les présidents, mesdames et monsieur les ministres, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, chers collègues, intervenant dans le cadre d’une commission élargie, je n’entrerai pas dans le détail de la mission que nous examinons. Vous disposez d’une note de présentation et le bleu fournit le détail des crédits.

En préambule, je tiens à saluer le travail de mon prédécesseur, Marie-Hélène des Esgaulx, dont l’excellent rapport qu’elle a rédigé l’année dernière m’a permis de m’informer sur une mission qui ne m’était pas familière. Je remercie également le président et le rapporteur général de la commission des finances pour la confiance qu’ils m’ont accordée, ainsi que les administrateurs dont je souligne la compétence.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ne regroupe pas moins de sept programmes : le n° 177 « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables » auquel le retour des grands froids donne toute son actualité ; le n° 106 « Actions en faveur des familles vulnérables », le n° 157 « Handicap et dépendance » qui représente les deux tiers du budget consacré à cette mission, soit plus de 8 milliards d’euros ; le n° 183 « Protection maladie » qui recouvre les actions « Accès à la protection maladie complémentaire » – c’est-à-dire la CMUc –, « Aide médicale d’État » – l’AME – et « Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante » ; le programme n° 137 « Égalité entre les hommes et les femmes » ; le programme support n° 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » qui présente la particularité de centraliser les dépenses de personnel et de fonctionnement de trois missions et un programme – « Solidarité, insertion et égalité des chances », « Santé », le programme « Veille et sécurité sanitaires » et la mission « Sécurité sanitaire ». Il regroupe aussi les dépenses des services déconcentrés de l’administration sanitaire et sociale qui mettent en œuvre la mission « Immigration, asile et intégration » ; enfin, le nouveau programme n° 304 « Lutte contre la pauvreté : expérimentations » sous la responsabilité du haut-commissaire pour les solidarités actives contre la pauvreté.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » connaît une évolution notable sous l’effet conjugué de mesures législatives et gouvernementales récentes et d’une nouvelle définition du périmètre des compétences ministérielles dans le gouvernement de François Fillon.

De nombreux textes législatifs ont eu un impact sur cette mission, à commencer par la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat du 21 août 2007. Il y a eu également la loi relative au droit au logement opposable du 5 mars 2007, la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005, la loi du 11 février 2005 sur l’égalité des droits, des chances et la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, la loi du 4 juillet 2005 relative à l’adoption, ou encore la loi relative à l’égalité salariale entre les hommes et les femmes du 23 mars 2006. Je m’en tiens là.

Par ailleurs, l’exécution du budget de cette mission relève de trois ministres, de deux secrétaires d’État et d’un haut-commissaire. Ce doit être un record. Cette mission témoigne de la générosité de la France, mais les crédits sur lesquels la représentation nationale devra se prononcer – 12,044 milliards d’euros en crédits de paiement – ne représentent qu’une partie de l’effort de la nation pour la solidarité puisque s’ajoutent à ce montant les multiples mesures d’exonération fiscale, les efforts remarquables des associations et le financement des collectivités. Lors des auditions, j’ai essayé – sans succès – d’obtenir le montant global de l’effort de la nation pour chacune de ces missions. Sans doute faudrait-il parvenir au moins à une estimation.

Quatre réflexions me viennent à l’esprit : la complexité des dispositifs, la multitude d’intervenants qui risque de nuire à l’efficacité, la difficile conciliation de la solidarité et de l’équilibre budgétaire, nécessaire pour ne pas obérer le futur de nos enfants ainsi que la difficulté des indicateurs à renseigner, d’où la difficulté à apprécier les objectifs.

Monsieur le ministre du travail, madame la secrétaire d’État chargée de la solidarité, la mise en œuvre de la loi du 11 février 2005 s’accompagne de la montée en charge de la prestation de compensation du handicap, laquelle se substitue à d’autres dispositifs tels que ceux pour la vie autonome et l’allocation compensatrice pour tierce personne.

Premièrement, s’agissant spécifiquement de la suppression des crédits alloués aux auxiliaires de vie dans le projet de loi de finances pour 2008, quelles sont les garanties prises pour que le passage à la PCH se fasse sans rupture de charge pour les personnes handicapées ?

Deuxièmement, les personnes handicapées en recherche d’emploi sont deux à trois fois plus nombreuses en proportion que les autres. Elles mettent quatre fois plus de temps pour trouver un emploi. À ce sujet, un rapport d’audit de modernisation relatif à l’allocation d’adulte handicapé, publié en 2006, faisait état de l’absence de stratégie d’insertion dans l’emploi des personnes handicapées. Quelles sont les mesures prises par le Gouvernement ou celles qu’il envisage pour surmonter les obstacles que rencontrent les handicapés ?

Troisième question, plus anecdotique : le défenseur des enfants, mis en place en 2000, joue un rôle très important. Sa présence sur le territoire est assurée par des correspondants territoriaux, généralement au sein des préfectures, qui exercent à titre bénévole et ne bénéficient que d’une indemnité forfaitaire destinée à compenser les frais qu’ils engagent dans le cadre de leur activité. Je m’interroge sur l’opportunité de leur accorder une exonération de charges et d’impôt sur le revenu au titre des indemnités perçues. Cette exonération existe d’ailleurs en faveur des délégués du médiateur de la République. Monsieur le ministre, cette mesure vous paraît-elle légitime ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Oui ! Avec un support législatif.

M. Jean-Marie Binetruy, rapporteur spécial. Madame la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, le projet de loi de finances pour 2008 consacre un point capital, je veux parler de l’apurement de la dette de l’État vis-à-vis de la sécurité sociale, pour plus de 5 milliards d’euros, dont 920 millions d’euros au titre de l’aide médicale d’État au 31 décembre 2006. Dans le prolongement de cet effort inédit de régularisation, la dotation à l’AME pour 2008 connaîtra une hausse importante puisque 180 millions d’euros supplémentaires sont prévus. Le financement total de 413 millions d’euros laisse espérer qu’aucune dette nouvelle n’apparaîtra sur ce poste en 2008, mais cette régularisation ne règle pas le problème de la dette – environ 250 millions – pour l’exercice 2007. Le Gouvernement entend-il prendre des mesures ?

Toujours au sujet de l’AME, les crédits prévus reposent sur une hypothèse d’économies qui passeraient en 2008 par l’extension du contrôle médical aux bénéficiaires de l’AME votée il y a une dizaine de jours dans le cadre du PLFSS pour 2008 ; par une limitation de la prise en charge des médicaments princeps quand les génériques existent – ce sera l’objet de l’article 50 du projet de loi de finances – ; et par l’instauration d’un ticket modérateur, dont le principe est déjà inscrit dans la loi, mais qui n’a reçu à ce jour aucune application. Le décret que nécessite cette mesure d’économie sera-t-il adopté en 2008, alors même que le rapport d’audit de modernisation mené par l’IGF et l’IGASS sur la gestion de l’AME exprime des réserves sur l’opportunité d’appliquer un ticket modérateur aux bénéficiaires de l’AME ?

Monsieur le haut-commissaire, conformément aux dispositions de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, le projet de loi de finances pour 2008 prévoit une dotation de 25 millions d’euros pour l’expérimentation du revenu de solidarité active. Le choix des départements candidats pour la seconde vague d’expérimentation devait être arrêté au 1er novembre et vous avez déjà signé plusieurs contrats, notamment hier à Creil avec M. Yannick Turpin. Monsieur le Haut-commissaire, pouvez-vous nous faire part de l’état d’avancement du dispositif, et nous exposer ses différentes étapes ?

Par ailleurs, le Président de la République vous a également confié l’organisation d’un Grenelle de l’insertion. Quels sont les axes prioritaires de ce chantier ? Quel en est le calendrier prévisionnel ?

Enfin, madame la ministre du logement et de la ville, l’année 2008 consacre l’entrée en vigueur d’un droit important, le droit au logement opposable, mis en place par la loi du 5 mars 2007. Le plan d’action renforcé en faveur des sans-abri sera poursuivi. Votre engagement est remarquable, mais je me permets de relayer l’inquiétude manifestée par certaines associations qui considèrent que les engagements ne sont pas respectés, s’agissant notamment des moyens budgétaires alloués au logement et à l’hébergement. Pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?

Par ailleurs, j’aimerais souligner une difficulté spécifique rencontrée par les maisons relais créées avant 2007 qui reçoivent un financement moindre. Qu’en est-il, madame la ministre, des efforts du Gouvernement ?

Enfin, et parce que c’est une piste qu’il me semble essentiel d’explorer, quelles sont les voies envisageables pour stimuler le financement privé en matière d’hébergement ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Avant de laisser la parole à Mme Valérie Boyer, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, je la remercie d’avoir choisi d’approfondir un thème, à savoir la couverture maladie universelle et la couverture maladie universelle complémentaire. Sinon, on n’évite pas les répétitions.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances.

Mme Valérie Boyer, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances Mesdames et messieurs les ministres, messieurs les présidents, chers collègues, conformément à l’habitude prise à la commission des affaires sociales, j’ai centré mon rapport sur un thème particulier : cette année la couverture maladie universelle, notamment les mesures de contrôle existantes ou envisageables, les échanges d’informations entre administrations pour lutter contre les abus et les fraudes.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 comprend lui-même des dispositions de cette nature et il a été complété par plusieurs amendements d’origine parlementaire. Pour certains, j’en ai pris l’initiative, et j’en ai cosigné d’autres. Nous avons notamment acté le principe de l’inscription obligatoire des bénéficiaires de la CMU complémentaire dans le parcours de soins, au même titre que les autres assurés.

Je ne présenterai pas le rapport qui est en cours de finalisation, même s’il a été distribué comme de coutume. L’objectif aujourd’hui est d’entamer le débat et d’interroger le Gouvernement.

Il reste encore à faire tant en termes législatifs que réglementaires. À cet égard, avant d’évoquer les points particuliers sur lesquels mon attention a été appelée lors des auditions que j’ai menées, je m’interroge sur la lutte contre les fraudes sociales. De nombreux parlementaires y ont travaillé, des missions d’information y ont été consacrées, notamment celle de la commission des affaires sociales sur les fraudes à l’assurance chômage. Je suis convaincue que l’Assemblée nationale devrait être associée en amont à l’élaboration du plan de lutte confié à Éric Woerth. Quelle est l’opinion du Gouvernement à ce sujet ? Et comment faire ?

S’agissant spécifiquement de la CMU complémentaire, ne faudrait-il pas rompre le lien automatique avec le RMI ? En effet, des dérives sont constatées compte tenu d’une organisation administrative défaillante. La CMUc est proposée par les caisses primaires d’assurance maladie, dès qu’elles reçoivent une demande de RMI à la caisse d’allocations familiales, mais, ensuite, elles ne sont pas systématiquement informées si, finalement, le RMI n’est pas accordé. La CMUc peut donc être attribuée à des personnes, au demeurant de bonne foi, qui ne bénéficieront pas du RMI. Il faudrait au moins prévoir un retour d’informations en cas de refus. Il y va de la crédibilité des organismes prestataires.

Par ailleurs, plusieurs mesures législatives et réglementaires pourraient faciliter l’établissement et le contrôle des déclarations de ressources pour l’accès à la CMU. Je pense en particulier à trois mesures.

Premièrement : autoriser les caisses des régimes de base maladie qui gèrent l’essentiel de la CMUc, à accéder directement a priori, comme les caisses d’allocations familiales, aux fichiers du fisc pour apprécier les ressources des demandeurs. Or, actuellement, l’article L. 114-14 du code de la sécurité sociale ne prévoit cette possibilité que dans le cadre des opérations de contrôle.

Deuxièmement : harmoniser les périodes de référence pour la déclaration des revenus et la CMUc en retenant l’année civile au lieu des douze derniers mois.

Troisièmement : revoir les dispositions réglementaires permettant d’obtenir des prestations, dont la CMUc, sur présentation d’une déclaration sur l’honneur. Je sais qu’une circulaire sur les pièces justificatives est prévue, mais il me semble qu’il serait possible d’aller plus loin et de mettre en conformité certaines dispositions réglementaires avec l’article L. 161-1-4 du code de la sécurité sociale. Selon cet article, les organismes de sécurité sociale sont tenus, pour le service de toute prestation, de demander des pièces justificatives, les seules dérogations étant les cas de force majeure et les situations où les organismes sont en mesure d’effectuer des contrôles par d’autres moyens, notamment en accédant aux fichiers d’autres administrations.

Comment le Gouvernement envisage-t-il de rendre l’aide à la complémentaire santé, l’ACS, plus accessible et plus généreuse, conformément au souhait exprimé par le Président de la République ?

Si nous sortons du seul champ de la CMU pour envisager l’ensemble des minima sociaux, la question des effets de seuil et des trappes d’inactivité dues à l’accumulation d’avantages divers, appelés droits connexes, ne me paraît toujours pas résolue, même si elle est dorénavant beaucoup mieux connue et bien cernée grâce aux travaux menés notamment par la secrétaire d’État Valérie Létard.

En matière d’aide sociale, les dispositifs nationaux et locaux se superposent. S’agissant de ces derniers, un travail de l’INSEE en a révélé 250 différents dans dix localités seulement. Il s’agit de mesures à la générosité très variable puisqu’elles peuvent, selon les communes et la situation de famille, majorer de 6 % à plus de 60 % les transferts nationaux destinés aux plus démunis. Un préalable nécessaire ne serait-il pas d’obliger, peut-être d’abord les zones d’expérimentation du RSA, puis les autres collectivités, à répertorier ces aides ?

Par ailleurs, une réflexion administrative est engagée sur les conditions de prise en compte du patrimoine, en particulier du logement, pour l’évaluation des ressources fictives. Le système du forfait logement peut en effet conduire à des situations abusives, voire incohérentes. Peut-on aller plus loin dans cette réflexion ?

Enfin, l’expérimentation du RSA m’intéresse d’autant plus que Marseille est concernée. Je voudrais en savoir davantage sur sa mise en œuvre sur le terrain.

Pour conclure, je remercie toutes les personnes que nous avons auditionnées et l’équipe des administrateurs.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour le handicap et la dépendance.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour le handicap et la dépendance. Messieurs les présidents, mesdames et messieurs les ministres, chers collègues, les rapporteurs ont coutume d’intervenir sur un sujet qui les intéresse. En ce qui me concerne, j’ai choisi de faire le point sur la maladie d’Alzheimer avant l’annonce du plan préparé par la commission présidée par Joël Ménard. Il y a un risque de chevauchement entre le PLF et le PLFSS, mais il faudra sans doute, dans les années à venir, améliorer la lisibilité de la dépendance.

Les crédits du handicap et de la dépendance sont pour l’essentiel dévolus au versement de l’allocation adulte handicapé, l’AAH, pour 5,7 milliards d’euros, et à l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans une entreprise ou une société de services d’aide par le travail, soit 2,3 milliards d’euros, sur un total de 8,1 milliards d’euros. Ces crédits financent une troisième action importante, la compensation du handicap, par le canal de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, – qui a bénéficié notamment des reliquats de crédits de la première année de mise en place de la solidarité vieillesse –, et des compléments départementaux.

La revalorisation de 2,1 % de l’AAH se fera en deux temps : en janvier et en septembre. Le Gouvernement envisage-t-il dans les prochaines années de poursuivre la revalorisation ? Comment parviendra-t-il à tenir l’engagement du Président de la République d’augmenter de 25 % les ressources des handicapés ?

S’agissant de la maladie d’Alzheimer, la France est, me semble-t-il, le seul pays d’Europe à avoir pris conscience à ce point de l’importance de l’enjeu. En effet, le sujet n’est pas neuf et deux plans ont été d’ores et déjà mis en place : le premier en 2001 et le second, dans son prolongement, en 2003. Il reste beaucoup à faire et les propositions de la commission Ménard sont attendues avec impatience.

La maladie d’Alzheimer n’atteint pas seulement le malade. Elle plonge dans la détresse ceux qui gravitent autour de lui. Cette maladie devient un véritable problème de santé publique. Les proches d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer, ou d’une maladie cérébrale dégénérative, voient diminuer leur espérance de vie, sont plus souvent malades et victimes de dépression nerveuse. En tant que responsables politiques, nous devons aussi nous occuper des aidants, souvent au bord de l’épuisement. C’est ce qui n’a pas été fait suffisamment dans les deux premiers plans, selon les témoignages que nous pouvons recueillir.

Comment parvenir à un diagnostic plus rapide de la maladie, sans ignorer le problème éthique sous-jacent puisqu’on n’a pas de traitement ? Néanmoins un dépistage plus précoce peut aider à déceler des maladies qui nécessitent des traitements différents. Comment mettre en place en aval un accompagnement immédiat du malade et des aidants ? Comment le Gouvernement entend-il organiser l’information et la formation des familles ? Quelles sont ses propositions pour améliorer la prise en charge à domicile ? Par des soins à domicile, en ménageant des phases de répit pour les aidants, ou encore en augmentant les places en accueil de jour et en accueil temporaire ? Y aura-t-il un fléchage des crédits destinés à ces structures, dégagés notamment par la mise en place des franchises médicales ?

Actuellement, dans les établissements d’hébergement des personnes âgées dépendantes – les EHPAD –, les personnes que nous avons auditionnées nous ont dit que les deux tiers, voire les trois quarts des lits étaient occupés par des personnes atteintes à des degrés divers de dégénérescence cérébrale. Quels seront les efforts consentis par l’État en faveur de ces établissements, afin d’améliorer et d’adapter l’environnement, d’assurer une meilleure formation des personnels, qui est indispensable, et de mieux accompagner les familles en détresse ?

Certains experts contestant l’efficacité des quatre molécules utilisées dans les traitements, l’espoir réside donc dans la recherche. Faute d’un effort indispensable, en 2020, 1,3 million de personnes seront touchées. C’est considérable. Quels sont donc les projets du Gouvernement en la matière tant au niveau national qu’européen car la coordination me semble nécessaire ?

Enfin, et j’en reviens à mon point de départ, pour rendre l’intervention de l’État plus lisible, et pour répondre financièrement à la problématique de la dépendance, où en est la réflexion du Gouvernement sur la création d’un cinquième risque ? Fera-t-il des propositions en 2008 ? Si oui, lesquelles ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Avant de donner la parole aux membres du Gouvernement, je vais leur demander de faire preuve de concision.

La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité. Oui, monsieur le rapporteur spécial, je suis favorable à une exonération en faveur des correspondants territoriaux du défenseur des enfants, mais il nous faut un vecteur juridique. Une exonération fiscale des charges sociales a été décidée par le ministre du budget. Le PLF n’étant pas le cadre ad hoc, il faudrait soit une proposition de loi soit un projet de loi. Jouons cartes sur table : l’enjeu tourne autour de 100 000 euros par an, ce qui est tout à fait supportable au regard du rôle déterminant de ces correspondants. Il faudra voir qui de nous prendra l’initiative, mais nous devrions pouvoir régler le problème dans le courant de l’année 2008.

Madame Boyer, vous avez mis en cause le forfait logement, mais des progrès ont été réalisés, notamment son harmonisation dans le calcul de l’API et celui du RMI, sur la base la plus élevée.

Quant à la lutte contre la fraude qui vous préoccupe, la procédure de prise en compte du train de vie lorsqu’il est totalement déconnecté des déclarations effectuées permettra de sanctionner les comportements les plus abusifs. Je pense en particulier aux occupants de logements fastueux ou aux propriétaires de résidences secondaires. En revanche, une réforme d’ensemble aurait des conséquences majeures pour un grand nombre d’allocataires si bien qu’elle ne peut être conduite que parallèlement à la réflexion d’ensemble sur le RSA que mène Martin Hirsch, et en collaboration avec Christine Boutin. Tout est lié.

Quant à la lutte contre les fraudes, elle est coordonnée par Éric Woerth. La semaine dernière, nous présidions avec Roselyne Bachelot le comité national de lutte contre les fraudes que j’avais installé dans mes précédentes fonctions il y a un peu plus d’un an. Notre idée, c’est-à-dire le renforcement des pouvoirs de contrôle des administrations et des sanctions, s’est traduite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui vient d’être voté. Nous envisageons également le croisement des fichiers ainsi que la mise en place au niveau de la CNAF d’un fichier national des allocataires. Il est d’ailleurs en cours de constitution. En outre, j’ai demandé au directeur général de la CNAF que les contrôles, notamment sur l’allocation de parent isolé, soient désormais inopinés. Jusqu’à maintenant, les allocataires étaient prévenus qu’un contrôle aurait lieu à leur domicile. Je vous laisse juges de l’efficacité de la procédure sur celles et ceux qui fraudent.

Néanmoins il est indispensable d’aller plus loin. Au-delà de la délégation nationale de lutte contre les fraudes, voulue par le Président de la République, il faut décliner le comité national de lutte contre les fraudes sur le terrain. Autrement dit, dans le ressort des CPAM, des CAF et des centres des impôts, les gens doivent travailler ensemble et se parler. Sur de très nombreux sujets, le ressort de l’action ne se situe pas au niveau législatif. Il s’agit surtout de méthodes de travail et il y a beaucoup à faire.

Quand j’étais ministre de la santé, j’ai engagé la lutte contre les fraudes, mais, avec le recul, j’ai le sentiment de ne m’être attaqué qu’à la partie visible de l’iceberg. Nous avons besoin, pour renforcer la confiance dans notre modèle social auquel je suis, tout comme vous, particulièrement attaché, de faire reculer la fraude. Il faut que celles et ceux qui fraudent sachent que la volonté politique, les outils juridiques et informatiques sont là et qu’il ne leur sera plus possible de continuer comme par le passé.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Monsieur Binetruy, les crédits consacrés en 2007 à l’aide médicale d’État sont en effet insuffisants et j’ai demandé un abondement en collectif budgétaire. La réponse dépendra évidemment de l’équilibre général du budget. Vous avez souligné l’effort important réalisé puisque 920 millions d’euros ont déjà été remboursés à l’assurance maladie et l’augmentation de 180 millions de la dotation nous rapproche de la réalité.

Comment contenir la dépense en 2008 ?

Le rebasage de la dotation budgétaire pour 2008 s’accompagnera, conformément à la recommandation de l’audit que vous avez évoqué, de différentes mesures de rationalisation du coût de la prestation. Plusieurs mesures, législatives ou réglementaires, sont destinées à mieux contrôler l’efficience des dépenses. Deux d’entre elles sont proposées dans le cadre du PLF et du PLFSS pour 2008 et leur objectif commun est d’aligner autant que possible les droits et les devoirs des bénéficiaires de l’AME sur ceux des assurés sociaux, et de mieux gérer l’ouverture des droits.

Il s’agit, dans le PLF, de la non-prise en charge des médicaments en cas de refus du bénéficiaire de l’AME d’accepter la substitution par un produit générique ; et, dans le PLFSS, de l’extension du contrôle médical aux bénéficiaires de l’AME.

D’autres décisions de gestion sont destinées à renforcer le contrôle de l’accès à l’AME et la lutte contre les fraudes : l’établissement au cours de l’année 2008 d’un titre d’admission à l’AME non photocopiable comportant la photographie de chaque bénéficiaire ; l’harmonisation des pratiques de contrôle des caisses sur les ressources et les adresses, communication des fichiers de rejet des demandes. Enfin, dans le domaine réglementaire, une participation financière à leurs dépenses de soins sera demandée aux bénéficiaires de l’AME. Mes services étudient actuellement quelle option retenir entre un calcul proportionnel, sous forme de ticket modérateur, ou un forfait.

Sur la lutte contre la fraude, Xavier Bertrand a parfaitement répondu, et ce qu’il a dit vaut tout autant pour la CMU.

Madame Boyer, vous vous inquiétez des abus à ce titre. Je le dis d’emblée : aucun élément ne permet d’affirmer que la fraude à la CMUc atteint des niveaux significatifs. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Le nombre de bénéficiaires reste largement inférieur aux prévisions initiales et le niveau moyen de dépenses cohérent avec ce qui était attendu. En outre, le risque de fraude est moindre s’agissant d’une prestation en nature. Pour autant, et même si les fraudes sont marginales, le Gouvernement ne saurait s’y résigner, ne serait-ce que par souci d’équité envers nos concitoyens aux ressources modestes qui n’y ont pas accès.

Depuis la création de la CMU, les outils de lutte contre la fraude ont été considérablement renforcés. Dès l’origine, une amende a été instaurée contre les fraudeurs. Les échanges d’informations, limités initialement aux caisses d’assurance maladie et aux ASSEDIC, seront bientôt étendus à l’administration fiscale – le chantier est ouvert – ainsi qu’aux autres organismes de sécurité sociale, notamment les CAF. Le PLFSS pour 2008 prévoit l’extension du dispositif aux établissements bancaires. Depuis 2006, les organismes de sécurité sociale ont l’obligation de déposer plainte avec constitution de partie civile lorsqu’ils constatent une fraude d’un montant trois fois supérieur au plafond mensuel de la sécurité sociale et le PLFSS pour 2008 étendra le régime de pénalités applicable aux assurés sociaux en cas de responsabilité de l’assuré dans l’octroi indu d’une prestation, aux bénéficiaires de la CMUc. Une expérience de croisement des fichiers des caisses et de ceux des services fiscaux est en cours. Je ne manquerai pas de vous tenir informés de ses résultats.

Vous avez suggéré, madame Boyer, d’aligner la période de référence pour le calcul des droits à la CMUc sur l’année civile, comme pour l’impôt sur le revenu. Le décalage, il est vrai, rend plus difficile le contrôle des ressources. Cela étant, les échanges d’information avec la direction générale des impôts peuvent permettre aux caisses d’assurance maladie de déceler des incohérences dans les déclarations. La modification de la période de référence est néanmoins à l’étude dans mes services. Toutefois, les ressources prises en compte n’étant pas les mêmes – les allocations familiales sont retenues pour la CMUc, mais pas pour les impôts –, l’harmonisation des périodes de référence ne suffirait pas pour que les caisses d’assurance maladie puissent contrôler l’ensemble des ressources déclarées, ou non, par les bénéficiaires de la CMU complémentaire. Je vous demande donc un peu de temps pour mener une étude plus approfondie.

Quant aux déclarations sur l’honneur, sur lesquelles vous m’avez déjà interrogée dans le cadre du PLFSS, madame la rapporteure, la disposition relative aux pièces justificatives, introduite dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, donne toute latitude aux caisses pour demander tous les justificatifs nécessaires à l’examen des droits à prestation, par exemple à la CMUc. Les organismes ont tout de même la possibilité de solliciter une déclaration sur l’honneur attestant que le demandeur ne dépasse pas le plafond de ressources lorsqu’il n’est pas capable de justifier son revenu. L’absence de revenu est difficile à justifier autrement... Une circulaire en préparation rappellera aux caisses de sécurité sociale qu’elles doivent systématiquement demander tous les justificatifs requis, sans pour autant refuser la production, à titre exceptionnel, d’une déclaration sur l’honneur.

En ce qui concerne l’amélioration de l’aide à la complémentaire santé, le relèvement de l’aide en 2006 – de 33 % pour les personnes de moins de soixante ans, et de 60 % pour les plus âgées – et celui du plafond de ressources en 2007 n’ont pas rendu le dispositif pour attractif, contrairement à ce que certains avaient craint.

M. Gérard Bapt. Ou espéré !

Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Cela dépend si l’on se place sur un plan financier ou social, monsieur Bapt !

D’après les enquêtes menées, l’absence de demandes tient davantage à un manque d’information et à une mauvaise compréhension du dispositif qu’à un niveau d’aide insuffisant. C’est pourquoi des actions de communication de la part des caisses sont actuellement en cours, notamment l’envoi de courriers ciblés par les CAF et les caisses d’assurance vieillesse. Comment élargir l’accès à l’ACS ? C’est indispensable, mais, avant toute revalorisation, il faut améliorer l’information. Ce n’est qu’après un bilan de l’impact de ces actions que l’on pourra élargir la population éligible. S’il s’avère qu’elles n’incitent toujours pas les bénéficiaires potentiels à demander cette aide, il faudra en tirer toutes les conséquences.

Enfin, Bérengère Poletti m’a interrogée sur les aidants des victimes de la maladie d’Alzheimer et sur la recherche dans ce domaine. Une partie du sujet relève de Xavier Bertrand et de Valérie Létard, mais, en ce qui concerne le pôle santé, nous attendons dans quelques jours la présentation du rapport de Joël Ménard à partir duquel nous pourrons aller beaucoup plus loin.

D’ores et déjà, un rapport d’étape a été diffusé, dont le Président de la République s’est largement fait l’écho. La formation des personnels et des aidants constituera l’une des orientations nécessaires de ce plan. En matière de recherche, en particulier celle portant sur les médicaments nécessaires, l’amélioration substantielle du crédit impôt recherche profitera à l’industrie pharmaceutique qui finance les programmes. J’ai également demandé qu’une part importante des programmes hospitaliers de recherche clinique soit consacrée à la maladie d’Alzheimer. Enfin, pendant la présidence française de l’Union européenne, je présiderai le conseil santé et je souhaite que la maladie d’Alzheimer soit l’un des axes forts de notre action.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Quand un hebdomadaire reconnu chiffre les fraudes à 30 milliards d’euros, le devoir du Gouvernement, du Parlement et de la Cour des comptes est d’agir. On ne peut pas laisser l’opinion publique sans réponse. Que l’information soit vraie ou fausse, nous devons nous en préoccuper dans l’année. Je souhaite que nos deux commissions s’emparent du sujet.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Tout à fait. Nous aurons l’occasion d’y revenir.

La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Monsieur le rapporteur spécial, je vais vous répondre aussi complètement et brièvement que possible, pour respecter les consignes du président.

Vous savez mon attachement au droit au logement opposable. J’avais déposé une proposition de loi, que le Gouvernement a reprise dans un projet de loi dont j’ai été la rapporteure. Je ne pensais pas, à l’époque, avoir la responsabilité de sa mise en œuvre. Aujourd’hui que je suis ministre, ma détermination est absolue. On m’avait dit, à mon arrivée au ministère, qu’il me serait déjà très difficile de respecter le calendrier prévu. Je développerai ce sujet devant la commission élargie qui sera consacrée au logement, mais sachez que le calendrier sera scrupuleusement respecté, tout particulièrement l’échéance du 1er janvier 2008.

On m’avait dit que les commissions départementales de médiation ne pourraient pas être mises en place. Pourtant, elles le seront, et j’ai pu obtenir, monsieur le rapporteur spécial, le budget nécessaire. Dans un contexte budgétaire très contraint, j’ai même obtenu des créations de poste, ce qui n’est pas vraiment la règle.

Certaines associations – que je respecte car elles travaillent depuis des années à l’insertion et à l’hébergement – pensent que la réponse est surtout d’ordre budgétaire et réclament des moyens supplémentaires. J’en parlerai également la semaine prochaine, mais je vous déclare d’ores et déjà que le problème est avant tout un problème de construction. Il faut du foncier pour construire.

Les objectifs en matière d’hébergement sont atteints, notamment ceux fixés pour la fin décembre 2007 dans le plan d’action renforcé pour les sans-abri, le PARSA. Le respect des objectifs signifie-t-il que les besoins sont satisfaits ? C’est une autre question. En tout état de cause, les objectifs chiffrés qui m’avaient été notifiés en matière d’hébergement et d’hébergement d’urgence seront respectés. Mes demandes, aussi surprenant que cela puisse paraître, ne portent pas en priorité sur des moyens budgétaires supplémentaires. Nos urgences sont ailleurs.

Nous avons ainsi du retard sur les maisons relais. Je rappelle qu’elles sont destinées à la réadaptation de personnes en très grande exclusion dans toutes les composantes de la citoyenneté. Ce concept très intéressant répond à un véritable besoin, mais il demande plus de temps à concrétiser que les autres. Nous avons pu réaliser la moitié de ce qui nous avait été demandé. L’autre moitié, ce sera pour l’année prochaine. Le budget pour les maisons relais augmentera de 55,2 % par rapport au projet de loi de finances pour 2007. Nous aurons donc les moyens financiers de rattraper notre retard.

Ainsi que je l’ai dit à la présidente de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale, la FNARS, et à l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux, l’UNIOPSS, la participation de l’État aux frais de fonctionnement qui était au départ de 8 euros par place est passée à 12 euros, puis à 16 euros pour les nouvelles places. Pourquoi ne pas étendre cette mesure à tout le monde ? On peut penser que ceux qui ont bénéficié d’une aide de 12 euros sont désormais installés et que leurs besoins financiers ne sont pas les mêmes que ceux des nouveaux venus. La dotation qui sera donnée aux préfets sera globale et il leur reviendra de l’adapter en fonction des besoins. Si une maison relais qui touche 12 euros par place a besoin de 13 ou 14 euros, peut-être un relèvement sera-t-il possible à l’intérieur de l’enveloppe départementale. Une très grande souplesse sera laissée aux préfets. Je rappelle que nous sommes passés de 8 à 16 euros ; l’effort est important. Au total, l’augmentation des crédits destinés aux maisons relais augmentera de 55,2 %.

Vous m’avez aussi questionnée à propos de la nécessité de mobiliser le parc privé pour répondre aux besoins d’hébergement.

Lors de la décentralisation du ministère du logement et de la ville à Lyon, nous avons réuni l’ensemble des partenaires et des accords ont été signés, ou sont en voie de l’être, avec les partenaires privés pour réserver 4 000 logements dans des structures d’hébergement du parc privé, et 3 000 logements HLM, sous réserve de la signature des partenaires sociaux. Nous sommes en train de réfléchir à des aménagements fiscaux qui figureraient dans la loi de règlement. Je voudrais permettre aux associations de trouver des propriétaires qui accepteraient de sous-louer leur bien à des loyers sociaux. Nous étudions tous les moyens possibles, mais, à côté des problèmes d’hébergement et d’hébergement d’urgence, le plus grave problème est le manque de fluidité dans l’ensemble de la chaîne du logement.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la solidarité.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Mesdames, messieurs les députés, je commencerai par répondre à votre rapporteur spécial qui m’a interrogée sur le basculement du forfait « auxiliaire de vie », qui existait avant la loi de 2005, laquelle lui a substitué la prestation compensation du handicap.

Compte tenu de la montée en charge naturelle de la PCH, les dépenses attendues concernant le forfait pour auxiliaire de vie sont d’ores et déjà en forte réduction : 15 millions d’euros prévus en 2008, au lieu de 55 millions en loi de finances initiale pour 2007. Les forfaits étaient ciblés sur les personnes les plus lourdement handicapées. Or ce sont elles les premières à avoir touché la PCH. Avec 15 millions d’euros, nous devrions basculer sans difficulté.

S’agissant de l’accès à l’emploi ou du maintien dans l’emploi des personnes handicapées, M. Binetruy a souligné à juste titre qu’il y a proportionnellement deux fois plus de chômeurs parmi les handicapés. Le premier blocage identifié est constitué par l’accessibilité des locaux, aussi bien dans la fonction publique que dans les entreprises, qui conditionne très largement celui du monde du travail. Notre objectif est donc de travailler avec le fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPH, et l’Association nationale pour la gestion du fonds d’insertion professionnelle des handicapés, l’AGEFIPH, afin d’élargir les modalités de financement des travaux d’accessibilité en les conditionnant au recrutement de personnes handicapées, sous forme d’un accompagnement forfaitaire. Il suffirait souvent d’un petit coup de pouce pour surmonter cet obstacle. Aujourd’hui, on peut aider à l’adaptation du poste de travail, à la formation, mais pas au-delà.

Vous savez tous combien l’accès à la formation initiale – deuxième obstacle – est au cœur de nos préoccupations. Cet été, nous nous sommes mobilisés avec Xavier Darcos et Xavier Bertrand dans le cadre de la préparation de la rentrée scolaire. Ainsi, 2 700 postes supplémentaires d’auxiliaire de vie scolaire sont prévus de même que 1 250 places dans les services d’éducation spécialisée et de soins à domicile, les SESSAD, en vue de soutenir l’intégration scolaire en milieu ordinaire. Nous savons que c’est le meilleur moyen pour pousser les jeunes le plus loin possible. Cette entreprise s’est poursuivie par la signature avec Valérie Pecresse d’un contrat prévoyant 1 000 inscriptions supplémentaires d’étudiants handicapés en université.

L’accès à la formation professionnelle continue des travailleurs handicapés – troisième obstacle – fera l’objet d’une réflexion sur le partenariat avec les régions, l’AFPA, les organismes collecteurs – AGEFIPH et FIPH –, afin de mutualiser les moyens à l’échelon de la région. La création de passerelles entre milieu de travail adapté et milieu ordinaire sera facilitée. C’est ainsi que, sur 2 000 places nouvelles dans les établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, créées par le PLF pour 2008, 1 000 seront consacrées à des projets expérimentaux d’« ESAT hors les murs » qui ont vocation à rendre possible et durable l’entrée dans le monde du travail ordinaire.

La stratégie d’insertion des bénéficiaires de l’AAH comprendra une expérimentation décidée à la suite de l’audit de modernisation. Les maisons départementales des personnes handicapées et les Cap emploi s’associeront pour proposer à 4 000 personnes un bilan d’employabilité et un soutien renforcé pour la recherche d’emploi. Le Gouvernement souhaite, dans ce cadre, approfondir la démarche au sein d’un groupe de travail spécifique sur la question des ressources et de l’emploi, mis en place dans le cadre du comité de suivi de la réforme de la politique du handicap créé le 23 octobre dernier. Ce comité sera chargé de dresser le bilan d’étape à la fin du premier semestre de l’année prochaine. Cette évaluation servira à la réflexion qui sera menée avec Martin Hirsch sur l’articulation ressources-emploi.

J’en viens à la question de Bérengère Poletti sur la revalorisation de l’AAH.

Le Président de la République s’est en effet engagé à revaloriser, au cours du quinquennat, le pouvoir d’achat des personnes en situation de handicap. Cela passe non seulement par une nécessaire revalorisation de l’AAH, laquelle ne constitue qu’un aspect du sujet, mais aussi par une approche plus globale de la question des ressources des personnes handicapées. Il ne faut pas oublier la PCH, les revenus d’activité et les droits connexes. Nous tiendrons l’objectif du Président de la République en agissant sur tous les leviers, car il ne faudrait pas pénaliser ceux qui ont une activité professionnelle rémunérée et risquer de les dissuader de l’exercer. Il convient au contraire de valoriser ceux qui se sont engagés dans un parcours professionnel.

La réflexion sera menée avec les partenaires associatifs et les conseils généraux. Le bilan qui sera établi en 2008 permettra de faire des propositions concrètes, constructives et valorisantes en termes de pouvoir d’achat pour toutes les personnes en situation de handicap.

La prise en charge des personnes âgées dépendantes et des victimes de la maladie d’Alzheimer est le chantier prioritaire du Président de la République. Cette année, le PLFSS fera un effort en direction des personnes âgées dépendantes en prévoyant la création de 1 600 places spécifiquement dédiées à la maladie d’Alzheimer dans les EHPAD, et de 3 200 places d’accueil de jour et d’hébergement dans des structures destinées à soulager les aidants.

En ce qui concerne l’accueil de jour, vous m’avez questionnée sur le différentiel entre le nombre de places programmé et celui qui est réalisé. Des promoteurs peuvent avoir des difficultés à concrétiser leur projet. Nous avons pris plusieurs mesures et textes réglementaires pour lever les obstacles. S’agissant tout d’abord des modalités de la médicalisation et de la tarification des prestations de soins dans les établissements de moins de vingt-cinq places autorisées, dont les accueils de jour autonomes, le décret du 10 février 2005 dote ces petites structures d’un budget de fonctionnement prévisionnel pour les dépenses prises en charge par l’assurance maladie. Les structures d’accueil de jour autonomes, c’est-à-dire celles qui ne sont pas rattachées à un établissement d’hébergement, se verront appliquer un forfait soins élargi à 70 % des rémunérations des aides soignants et des aides médicopsychologiques.

Pour ce qui est du coût et de l’organisation des transports des patients entre leur domicile et l’accueil de jour, un forfait pris en charge par l’assurance maladie est prévu dans les textes réglementaires du 30 avril et du 11 mai 2007, dans la limite de 3 000 euros par place autorisée et par an. Le PLFSS pour 2008 prévoit le transport des patients souffrant de la maladie d’Alzheimer vers les accueils de jour. Cette mesure répond à une attente très forte des familles qui voient dans le transport un véritable obstacle à l’accueil de jour des malades.

Pour l’hébergement temporaire, nous avons annoncé, sur la période 2008-2012, 5 625 places sur la base d’une valorisation à 10 600 euros chacune, ce qui représente un coût de 60 millions d’euros sur cinq ans. Des associations ont commencé à organiser des cycles de formation destinés aux aidants familiaux des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Un appel à projet conjoint de la CNSA, de la délégation interministérielle à l’innovation sociale et à l’économie sociale, et de la direction interministérielle de la famille, ainsi que de la direction générale de l’action sociale, a été lancé pour susciter des actions collectives de sensibilisation, de soutien, d’information et de formation pour les aidants familiaux. En ce qui concerne les professionnels, des formations sur les principales pathologies liées à la dépendance, dont la maladie d’Alzheimer, sont inscrites au programme des études d’auxiliaire de vie sociale, d’aide soignante, d’aide médicopsychologique et d’infirmier.

Enfin, s’agissant du cinquième risque, le 18 septembre dernier, le Président de la République a fixé le cadre de la réforme destinée à répondre au défi majeur de notre société que représente la perte d’autonomie. Entre 2005 et 2015, le nombre des personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans passera de 1 à 2 millions. La réforme ouvrira un nouveau droit à la protection sociale, un droit universel à la compensation. Elle reposera sur deux piliers : la solidarité et la responsabilité.

Les objectifs sont au nombre de quatre : une meilleure prise en charge des personnes en perte d’autonomie pour laisser le choix entre le maintien à domicile et l’hébergement en établissement ; la maîtrise du reste à charge pour les personnes hébergées en maison de retraite ; un meilleur partage entre solidarité nationale, prévoyance individuelle et collective ; la garantie du financement dans la durée. Une concertation sera ouverte très rapidement puisque nous venons de recevoir le rapport de la CNSA dont Xavier Bertrand a reçu les représentants pas plus tard qu’hier. Tous les acteurs seront associés et les pistes de financement des prestations seront examinées dans ce cadre.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Mesdames et messieurs les députés, votre rapporteur spécial m’a interrogé sur l’avancement du RSA, et votre rapporteure pour avis sur le Grenelle de l’insertion et l’expérimentation menée dans les Bouches-du-Rhône.

Le RSA entre maintenant dans sa phase opérationnelle, et cela fait du bien, au terme de deux ans de préparation, de voir des gens reprendre du travail ou augmenter leur activité grâce à ce nouveau dispositif. Plusieurs départements sont passés à l’acte.

Je veux d’abord faire un bref rappel.

La loi a été promulguée il y a deux mois et demi. Depuis, tous les textes réglementaires ont été pris, les avis sollicités, les systèmes informatiques des CAF mis à niveau. Au départ, dix-sept départements – ce sont eux qui ont l’initiative – avaient manifesté leur intérêt pour les nouvelles dispositions de la loi TEPA. Les dix-sept ont confirmé leur intention et tous ont été autorisés à expérimenter. D’autres départements avaient jusqu’au 31 octobre – le cachet de la poste faisant foi – pour se lancer dans l’aventure. Ils sont entre vingt et vingt-cinq. Au total, une quarantaine de départements seront donc concernés, sans compter ceux qui ont demandé à expérimenter les dérogations aux contrats aidés, pour simplifier et fluidifier les dispositifs dans ce domaine.

Il y a donc plus de volontaires que prévu et j’ai demandé au Premier ministre s’il était d’accord pour allonger la liste des départements autorisés et, par voie de conséquence, pour abonder les 25 millions d’euros initiaux, afin de ne pas décourager les bonnes volontés. La phase de préparation mobilise les différents acteurs et, plus ils sont nombreux à être convaincus qu’il faut changer les règles du jeu, mieux c’est pour engager une réforme de grande ampleur.

Dans le premier département concerné, l’Eure, et, pour être précis, dans la petite zone de Louviers, il y a 120 titulaires du RSA, ce qui recouvre 82 reprises d’activité, 26 prolongements d’activité de personnes qui auraient dû arrêter de travailler, et plusieurs augmentations du régime de temps de travail. On observe donc bien une dynamique de retour à l’emploi, dont on espère qu’elle aura lieu ailleurs. Plusieurs démarrages sont prévus au début du mois de novembre et de décembre. Nous nous efforcerons d’accélérer de nouvelles expérimentations dès le mois de janvier.

L’État a pris des engagements clairs sur sa participation à hauteur de 50 % du surcoût, calculé d’après une évaluation partagée. Pour chaque autorisation donnée, j’ai écrit au président du conseil général pour confirmer la somme qui serait versée et prévoir une clause de revoyure si les réalisations n’étaient pas conformes aux prévisions. Une partie des coûts d’accompagnement sera prise en charge, de même que certaines dépenses expérimentales. Ainsi, dans certains départements, des RMIstes étaient convaincus de l’intérêt du RSA et ce sont les meilleurs ambassadeurs auprès des entreprises qu’il faut convaincre que les RMIstes peuvent travailler. On a donc rajouté de l’argent pour favoriser leur embauche et créer un effet boule de neige.

Parallèlement aux expérimentations qui sont soumises à un protocole d’évaluation rigoureux, nous travaillons à la future réforme des minima sociaux en nous préparant à tirer les enseignements de l’expérimentation. Lors des discussions, l’ensemble des partenaires sociaux, de la CGT au MEDEF en passant par la FNSEA, se sont déclarés partants pour participer à la conception du revenu de solidarité active. C’est extraordinairement important dans la mesure où nous voulons apporter une réponse à la fois à ceux qui ne gagnent pas d’argent quand ils reprennent du travail, et aux employeurs intéressés par l’insertion, mais qui se plaignent que personne ne réponde à leurs offres d’emploi. Il faut agir dans les deux directions : c’est la condition sine qua non de la réussite.

Nos principes sont simples. Premièrement, il faut lier les prestations sociales au travail. Les premières ne sont pas un substitut au second, sauf quand il est impossible. Elles sont un complément aux revenus du travail, et doivent être adaptées à chaque situation. C’est un changement fondamental par rapport à la philosophie du RMI, et même de la prime pour l’emploi, d’où la nécessité d’une méthode progressive.

Deuxièmement, il convient de mettre un peu d’ordre, de logique et de cohérence dans les différentes prestations, notamment les droits connexes. Personne ne s’y retrouve, ni les bénéficiaires, ni les travailleurs sociaux, ni les élus, ni les administrations centrales. Personne ! Et, en la matière, il y a deux règles à suivre : fondre toutes les aides en une seule, qui doit venir en complément du revenu et être adaptée au régime de travail et à la situation familiale ; ensuite, faire du sur-mesure car les cas ne sont pas les mêmes selon que l’on travaille en bas de chez soi ou que l’on habite à quarante kilomètres de son lieu de travail ; que l’on doive faire garder ses enfants pour aller travailler, ou non ; que l’on vive dans un logement social bien isolé et peu consommateur d’énergie ou non ; que l’on traîne un surendettement depuis des années ou non. Le RSA est un fil qui relie les CCAS, les conseils généraux, les associations. Il faut le dérouler jusqu’au bout pour examiner les conditions d’attribution des différentes aides.

Troisièmement, il faut partir de la réalité. Les personnes. en grande difficulté sont toujours confrontées à plusieurs problèmes en même temps – emploi, formation, logement, transport... Si les politiques publiques sont tellement cloisonnées qu’elles ne peuvent résoudre parfaitement qu’un seul problème à la fois, elles créent des individus qui ne peuvent plus reprendre le travail et ne croient plus au système.

J’ai été frappé de rencontrer, au moment de la signature des contrats, des personnes qu’on avait laissées sans la moindre proposition pendant cinq ans ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Dans certains départements, cela se passe ainsi. Je ne les mets pas en cause ; ils sont volontaires pour changer les choses, mais, quand on apporte la preuve à ces gens qu’ils ne perdront pas forcément à reprendre le travail, que les employeurs les considéreront non pas comme des naufragés mais comme de futurs employés, le déclic se produit assez rapidement. Il faut donc évaluer le dispositif, pour voir s’il fonctionne. Vous serez tenus régulièrement au courant de la façon dont l’expérimentation avance.

Je tiens à dire un mot sur l’organisation nécessaire pour faire travailler ensemble et plus vite tous les services, toutes les administrations, tout en évitant de mettre trois mois à conclure un contrat d’insertion.

Mme Boyer a parlé des personnes bénéficiaires de la CMU complémentaire, parce qu’elles étaient censées être au RMI alors qu’elles n’y étaient plus. En ce qui me concerne, j’ai été plutôt frappé par les cas inverses, c’est-à-dire par le nombre de RMIstes qui devraient avoir la CMU mais qui ne l’ont pas.

Mme Martine Billard. Absolument !

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Dans certains départements, ils représentent la moitié des cas. Il y a un moyen simple et bon marché pour y remédier. Dans l’Eure, on a fait se rencontrer un responsable de la CAF et un de la CPAM. Le dossier est rempli une seule fois et 100 % des gens qui ont droit à la CMU en bénéficient. Il suffit d’en faire autant avec un responsable de l’ANPE, et ainsi de suite.

Le Grenelle de l’insertion sera lancé à Grenoble les 23 et 24 novembre prochains en commençant par des débats. Des parlementaires y participeront et seront impliqués dès le départ dans le processus. Tous les acteurs de l’insertion et les partenaires sociaux se retrouveront.

En 2008, le RMI aura vingt ans. Il est grand temps de se demander à quoi rime le « I » d’insertion. Il faut définir ce qu’est être éloigné de l’emploi ; reconnaître celui qui a besoin d’un soutien transitoire pour retrouver le plus vite possible un emploi classique, de celui qui ne pourra occuper qu’un emploi durablement aidé ou qui ne vivra que des prestations sociales ; réfléchir à la logique des droits et devoirs pour la puissance publique, pour les employeurs, pour les bénéficiaires.

Il est également indispensable de se demander où est le centre de gravité de l’insertion. S’agit-il de l’État, de la région, du département, de la commune ? Comment mesurer la performance dans ce domaine ? Un conseil général nous a expliqué avoir versé une subvention de 500 000 euros à un organisme pour suivre les allocataires du RMI dans leur parcours de retour à l’emploi. Mais, sur 200, quatre seulement ont retrouvé du travail. Cela ne peut plus durer, cela coûte trop cher alors que l’argent est nécessaire ailleurs.

Telles sont les questions qui seront abordées au cours de ce colloque. Nous commençons en province, nous y finirons aussi sans doute. Entre-temps, des débats seront organisés là où vous le souhaiterez, avec peut-être une même grille d’analyse, pour pouvoir faire remonter des informations utiles à la réforme des minima sociaux, à celle des contrats aidés, de la réinsertion par l’activité économique, le tout en s’appuyant sur une plus forte implication des employeurs.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous allons maintenant passer aux questions des représentants des groupes avant de donner la parole à Pierre Méhaignerie.

Je rappelle que les explications de vote auront lieu le 16 novembre.

La parole est à M. Guénhaël Huet, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Guénhaël Huet. Quelques questions pour préciser les réponses qui ont été faites.

Le groupe UMP tient à souligner que le budget qui nous est présenté est à la fois un budget de solidarité et de responsabilité. Le Gouvernement pourrait-il confirmer l’augmentation globale de 3,5 % des crédits des sept programmes, laquelle traduit un effort significatif en faveur de la solidarité, de l’insertion et de l’égalité des chances ? Peut-il nous préciser la ventilation de cette hausse entre les programmes, notamment l’augmentation de celui consacré à la lutte contre la pauvreté ? Toutefois, la forte implication des pouvoirs publics suppose, en parallèle, de responsabiliser les acteurs en menant des contrôles et en prenant les sanctions nécessaires en cas d’abus et de fraude. À cet égard, quelles sont les possibilités de croiser les fichiers évoquées par Mme Bachelot ?

Enfin, comment les conclusions des différents audits réalisés ces dernières années sur les minima sociaux – AAH et API notamment – ont-elles été prises en compte dans l’élaboration du budget ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Christophe Sirugue, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Christophe Sirugue. Mes questions porteront sur l’hébergement d’urgence, le RSA et la CMU.

En ce qui concerne l’hébergement d’urgence, le projet de loi de finances pour 2008 annonce une hausse de 67 millions d’euros des crédits de paiement, soit 8,5 % de plus environ qu’en 2007. Cependant, sauf erreur de ma part, le dénominateur ne prend pas en compte les financements apportés tout au long de l’année 2007, notamment ceux consacrés au PARSA. Si on les ajoute, ainsi que les crédits destinés à la transformation de certains hébergements, on obtient une enveloppe de 882 millions d’euros. Si on les compare aux 855 millions inscrits dans le projet de loi de finances pour 2008, la réalité est plutôt une baisse de 3 % qu’une hausse de 8,5 %. Madame la ministre du logement, qu’en est-il exactement ?

Le PARSA prévoit la création de 4 500 places dans les centres d’hébergement et de réinsertion, objectif qui sera atteint, selon la direction générale des affaires sociales, fin 2007. Or le projet de loi de finances table sur le financement de 3 113 places. Faut-il en déduire que l’objectif a été revu à la baisse au moment où la situation, c’est le moins que l’on puisse dire, demande encore un effort significatif ?

Toujours sur les CHRS, il avait été annoncé la transformation de 787 places et 400 places de stabilisation, pour un montant respectif de 12 millions d’euros et de 5,6 millions. Or les crédits correspondants n’apparaissent pas dans le projet de loi de finances.

Vous avez rappelé, madame la ministre, l’augmentation à 16 euros par jour et par personne du forfait versé aux maisons relais, soit un coût total de 4,63 millions. Il semble qu’un rééchelonnement soit programmé. Où en est-on ?

S’agissant de l’hébergement d’urgence, on a le sentiment d’un sous-dimensionnement budgétaire qu’il faudrait corriger, à moins que le Gouvernement n’ait changé d’ambition.

Le deuxième thème que j’aborderai aura trait aux outils d’insertion et aux contrats aidés.

Même si ces derniers relèvent de l’emploi, ils constituent, pour une politique d’insertion qui se veut ambitieuse, sinon la panacée, du moins des outils importants. Là aussi, je m’interroge sur les chiffres annoncés. Au titre du programme 102, et plus particulièrement de l’action « Mise en situation d’emploi des publics fragiles », les crédits de paiement étaient en 2007 de 2,126 milliards d’euros contre 2,033 milliards pour 2008. La baisse est significative.

Quelle est l’implication sur les contrats aidés tels que les contrats d’accompagnement dans l’emploi, les contrats emploi consolidé, les contrats initiative emploi, les contrats d’avenir ? Cela veut-il dire, monsieur le haut-commissaire, un moindre recours à ces outils l’année prochaine ? Si tel est le cas, comment réagiront les structures d’insertion, dont certaines ne pourront pas fonctionner sans eux ? Incidemment, qu’en est-il des contrats aidés dépendant directement de l’État, je pense à ceux de l’éducation nationale ?

M. Hirsch a évoqué la question du RSA et du Grenelle de l’insertion. Il semble qu’il y ait désormais des Grenelle sur tous les sujets. Les départements ont certes été volontaires, mais on a bien compris que le dispositif, prévu pour durer trois ans, serait généralisé dans un an. De son côté, le rapport Lambert, sorti cet après-midi, annonce une révision importante dans la mesure où la seule exception à la pause dans les transferts de compétences qu’il propose serait la politique de solidarité. J’avoue avoir besoin d’y voir clair. Dans un tel contexte, le RSA a-t-il encore un sens ? Cela concernera-t-il les seuls départements qui auront contractualisé ? Ou bien l’ampleur de la réforme à venir fera-t-elle du RSA une question annexe ?

S’agissant de la CMU, personne ne conteste la nécessité de lutter contre les abus. D’ailleurs, tout le monde y contribue, selon ses responsabilités. Il faudrait tout de même sortir du discours culpabilisateur, voire accusateur. Il n’est pas certain que la proportion de ceux qui abusent de la CMU soit plus grande que celle de nos concitoyens qui abusent de la sécurité sociale. Plus généralement, pour le groupe socialiste, une politique d’action sociale ne saurait se fonder sur la lutte contre la fraude. Cette remarque ne vaut pas pour Mme la ministre qui a tempéré sa réponse à la curieuse question sur les bénéficiaires de la CMU.

Il n’en demeure pas moins que l’article 49 du projet de loi de finances nous inquiète. Il prévoit un dispositif qui risque d’exclure de la CMU bon nombre de demandeurs et de procéder à une harmonisation par le bas. Quand M. Bertrand était ministre délégué à la sécurité sociale, il déclarait que la prise en charge des enfants devait être mise en œuvre « avec efficacité et rigueur », qu’« elle méritait d’être bien préparée » et qu’il y « travaillait personnellement ». Or l’évolution montre une économie estimée à 7 millions d’euros l’année dernière, ce qui n’est pas considérable, mais au prix de l’exclusion de plus de 20 000 bénéficiaires, principalement des familles avec enfants. Le PLF anticipe 14 millions d’économie, Que s’est-il passé depuis les déclarations du ministre ? Quelle est la volonté du Gouvernement ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Martine Billard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Mme Martine Billard. En ce qui concerne l’accès à la complémentaire santé, le budget affiche une baisse très significative entre 2008 et 2007, qui, elle-même, fait suite à une baisse de 2007 par rapport à 2006 où le budget prévu était de 323 millions. Oui, aujourd’hui, toutes les personnes qui pourraient en bénéficier ne font pas les démarches nécessaires et il faudrait, en effet – Mme la ministre de la santé a raison – plus d’information. Afficher d’emblée une diminution des crédits, n’est-ce pas justement baisser les bras au lieu d’engager une action pourtant nécessaire en faveur des bénéficiaires potentiels qui, avec les nouvelles franchises et les dépassements d’honoraires, auront d’autant plus besoin de la CMUc ? Je remercie M. le haut-commissaire d’avoir souligné que bien des personnes manquent de très peu le droit à la CMU. La première bataille à mener serait de rendre la CMU accessible à ceux qui peuvent y prétendre, plutôt que de se focaliser sur la fraude.

La CNAF doit certes avoir un fichier national, c’est la moindre des choses, mais faire a priori de tout demandeur de la CMU un fraudeur pour justifier l’interconnexion de tous les fichiers, cela tend à devenir une obsession. Il faudrait commencer par se pencher sur tous ceux qui n’ont pas accès à ces dispositifs. Des études récentes montrent que leur santé est moins bonne.

Le décret de février 2007 réduit à un an, au lieu de quatre, le maintien de la couverture médicale gratuite découlant d’une activité salariée. Il s’agissait d’empêcher les personnes quittant la France de continuer à en bénéficier. Soit, mais, par ricochet, cette mesure frappe aussi des salariés précaires, des divorcés sans activité professionnelle, des veuves qui n’ont droit ni à une retraite ni à une pension de réversion. Pour eux, la cotisation volontaire est trop élevée et ils se retrouvent sans couverture maladie. Un rattrapage est-il possible pour ces catégories qui risquent d’être les victimes collatérales d’une lutte justifiée contre les fraudeurs ?

Comme Christophe Sirugue, je m’interroge sur le forfait logement qui exclut beaucoup de familles de la CMU. Plutôt que de baisser les crédits inscrits à l’action « Accès à la protection complémentaire », il serait plus judicieux de mieux les gérer et d’en faire bénéficier ceux qui en ont particulièrement besoin.

Madame Boutin, en Île-de-France, et dans les grandes villes, des familles en situation régulière sont hébergées dans des hôtels à un prix qui vaut très largement un loyer. La présence d’enfants rend difficile l’hébergement dans les CHRS. Les mères n’ont pas la possibilité d’y préparer les repas pour leurs enfants, lesquels peuvent difficilement suivre une scolarité normale. En attendant des programmes de construction, madame la ministre, envisagez-vous d’utiliser la loi de réquisition que seul l’État peut utiliser, par l’intermédiaire des préfets ? Les mesures d’hébergement d’urgence ne règlent pas la situation difficile de ces familles.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Au cours de cette commission, j’ai observé des visages perplexes devant la montagne d’informations et de chiffres qui ont été fournis en pensant aux questions d’actualité posées cet après-midi sur le pouvoir d’achat. Une question de fond me venait à l’esprit, sur la performance de notre État providence. Cette année, nos dépenses sociales dépasseront probablement celles de la Suède avec plus de 700 milliards d’euros.

Dans l’étude du CERC de Jacques Delors, il est écrit page 207 : « La France a privilégié pendant les vingt dernières années le salaire indirect au détriment du salaire direct ». Il y a là un vrai débat de fond à mener sur l’évolution du pouvoir d’achat, du salaire direct qui responsabilise, et sur la performance de l’État social. Je m’en tiens là car ce n’est pas une question.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. C’est une question de fond en tout cas, mais il faut prendre garde aux comparaisons. Il ne suffit pas de raisonner en volume ; il faut aussi tenir compte de la richesse du pays.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Je parlais en proportion.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous ne sommes pas encore au niveau de la Suède.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Nous n’avons pas non plus les mêmes résultats.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Étant attendu pour une réunion à Bercy, je vais céder ma place à M. René Couanau.

Avant de m’en aller, je donne la parole à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

(M. René Couanau remplace M. Didier Migaud, président de la commission des finances.)

Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Je tiens à remercier M. le président Méhaignerie d’avoir élargi le débat en se posant la question de la part qui revient, dans un État moderne, à l’État providence et à la production de richesses – réflexion que nous devons mener en commun.

Je demeure quant à moi très attachée au modèle social français, car il constitue une bonne synthèse, même s’il convient de le perfectionner au fil des années. Je relève d’ailleurs que nombre de questions ont porté sur la fraude, certains m’accusant d’être trop rigoureuse et d’autres trop laxiste. Ma position doit donc être équilibrée, ma politique dans ce domaine délicat refusant autant l’angélisme que la stigmatisation.

Si nous voulons que le modèle français reste partie intégrante du pacte social, la lutte contre la fraude ne doit pas faiblir, non qu’il faille stigmatiser quiconque, mais parce que toute révélation d’une fraude peut avoir des effets dévastateurs chez les plus modestes de nos concitoyens et entraîner une remise en cause des indispensables mécanismes de solidarité. Lorsqu’une personne dépassant juste les seuils d’attribution des allocations apprend qu’un bénéficiaire du RMI habite une superbe maison ou se déplace dans une voiture luxueuse, cela entraîne des perturbations sociales considérables. Telle est la raison pour laquelle, je le répète, il convient de refuser tout angélisme.

Je participe évidemment, aux côtés de Xavier Bertrand, à l’action interministérielle présidée par M. Woerth visant à lutter contre la fraude. Mme Valérie Boyer m’a demandé si on pouvait y associer les parlementaires : je la prie de bien vouloir m’excuser de ne pas lui avoir répondu sur le moment mais, selon moi, la proposition de M. Méhaignerie de mener une réflexion à l'Assemblée nationale sur le sujet permettrait de maintenir une claire séparation des pouvoirs. Rien n’empêche en revanche les parlementaires de s’associer à toutes les expérimentations qui ont lieu sur le terrain dans le cadre de la lutte contre la fraude.

En ce qui concerne l’aide médicale d’État, c’est vrai, le titre d’admission ne sera pas photocopiable, les pratiques de contrôle des caisses seront harmonisées – ressources et adresse – et les fichiers de rejet de demande seront communiqués à tous les organismes concernés. Pour la CMU – je l’ai indiqué – les échanges entre les services gérant les allocations chômage seront étendus à l’administration fiscale. Vous savez combien toute relation avec cette administration est difficile, mais notre expérimentation avance. De même, les pénalités applicables aux assurés responsables de l’octroi d’une prestation au bénéficiaire de la CMUc seront étendues.

Si le financement par l’État du fonds CMU a, quant à lui, baissé, c’est tout simplement parce que les autres recettes ont augmenté. Je rappelle que le financement de la CMU complémentaire est assuré par le Fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie, qui est abondé non seulement par une ressource propre, mais également par le produit de la contribution due par les organismes de protection complémentaire sur leur chiffre d’affaires santé, par la contribution sur les alcools de plus de 25° – 387 millions d’euros en 2005 et 404 millions d’euros en 2006, augmentation qu’on peut par ailleurs regretter, mais qui est un fait – ainsi que par une part de 4,34 % des droits sur le tabac ; à savoir 400 millions en 2007 et 2008.

La dotation budgétaire de l’État destinée à équilibrer les comptes du fonds s’élèvera à 50 millions d’euros en 2008 sur la base des prévisions d’équilibre du fonds CMU. Dans l’état actuel de nos prévisions, les sommes budgétées permettront de faire face aux dépenses de CMU.

Par ailleurs, monsieur Sirugue, en ce qui concerne l’article 49 et la simplification des règles de prise en compte des aides personnelles au logement dans les ressources des demandeurs de CMUc, laissez-moi vous répondre, avant que Mme Boutin ne complète éventuellement mon propos, que ces aides sont effectivement prises en compte à concurrence d’un forfait déterminé mensuellement par rapport au RMI et qui varie en fonction de la composition du foyer. Ce forfait est actuellement calculé selon des règles différentes selon qu’il s’agit d’une première demande de bénéfice de la CMUc ou d’un renouvellement.

Ces règles se sont toutefois révélées d’un maniement très complexe pour les caisses d’assurance maladie complémentaire instructrices des dossiers de CMU complémentaire. La mesure proposée vise donc à les unifier pour tous les demandeurs en leur appliquant les pourcentages prévus dans la réglementation du RMI et en retenant la définition du foyer unique qui est celle de la réglementation de la CMU complémentaire. Cette mesure mettra fin à une différence de traitement, qui n’avait aucune raison d’être, entre les primo demandeurs et les demandeurs d’un renouvellement de droit, tout en allégeant la gestion des dossiers de demandes de CMU complémentaire par l’accélération de la procédure d’instruction.

M. René Couanau. La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme la ministre du logement et de la ville. Monsieur Sirugue, je vous le dis d’emblée : non seulement notre ambition n’a pas changé, mais elle est peut-être plus forte qu’il y a six mois pour résoudre les problèmes qui, relevant de ma compétence, sont loin d’être simples, comme vous le savez !

Le président de la commission des affaires culturelles a regretté le trop grand nombre des chiffres donnés au cours de cette commission élargie. Il me faut toutefois en rappeler quelques-uns.

Monsieur Sirugue, vous avez fait des suppositions,…

M. Christophe Sirugue. Pas du tout !

Mme la ministre du logement et de la ville. …voire votre petite cuisine, ce qui vous a conduit à vous poser certaines questions. Or non seulement l’ambition n’a pas changé mais, de plus, les crédits de l’hébergement d’urgence augmentent, bien que l’objectif du PARSA soit de diminuer les places d’urgence au profit de places de stabilisation. Le PLF pour 2008 prévoit bien la réalisation de 6 000 places et les crédits étant désormais fongibles sur l’ensemble du programme, des ajustements seront possibles.

Sans vouloir trop entrer dans le détail, je tiens à rappeler que les moyens prévus devant assurer la mise en œuvre des mesures prises dans le cadre du PARSA, 10 000 places d’hébergement d’urgence seront transformées en 6 000 places de stabilisation et en 4 000 places CHRS. En outre, conformément au plan triennal pour l’hébergement d’urgence annoncé le 12 mai 2006 dans le CIL, 2 500 places hivernales seront transformées en places d’hébergement à l’année. Quant au principe de continuité inscrit dans la loi instaurant le droit au logement opposable, dite loi DALO, du 5 mars 2007, il a évidemment entraîné la nécessité de maintenir en activité des places qui, jusque-là, étaient disponibles uniquement l’hiver.

Le projet de loi de finances pour 2008 couvre donc le financement de 5 600 places de stabilisation, 5 500 places d’urgence pérenne et, selon les besoins, 3 000 places supplémentaires pour la période des grands froids.

En ce qui concerne les dépenses CHRS, où l’ambition est la même, comme je vous l’ai déjà dit, nous souhaitons transformer, dans le cadre du PARSA, 4 500 places d’urgence et 6 000 places CHU en places CHRS. De plus sachez, monsieur Sirugue, pour le cas où vous auriez encore besoin d’être rassuré, que les dépenses CHRS étant juridiquement obligatoires, les besoins, même supplémentaires, seront financés. Du reste, j’ai bien souligné dans mon propos introductif que les objectifs chiffrés du PARSA seront atteints fin 2007 ! Cela étant, personne ne peut savoir aujourd'hui si les prévisions de mon prédécesseur couvriront les besoins.

La question du financement des maisons relais et celle de son rééchelonnement vous inquiètent également, monsieur le député, et je vous comprends. Je rappelle qu’une partie des maisons relais a été financée sur la base de 8 euros puis de 12 euros, mais cette partie est moins importante que celle qui repose sur la base de 16 euros. Comme il s’agit d’une dotation départementale passant par les préfectures, les associations pensent comme moi qu’il sera toujours possible de procéder à une adaptation selon les besoins locaux. J’ai évoqué le sujet avec Mme Maestracci, qui dirige la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale. Ce n’est du reste offenser personne que de noter que les frais de fonctionnement d’une maison relais sont moins élevés hors de l’Île-de-France. Un équilibre doit donc être trouvé.

Madame Billard, je vous remercie de vos questions ; elles sont toujours aussi pertinentes.

Mme Martine Billard. C’est qu’à l’heure actuelle je suis très intéressée par votre réponse ! (Sourires.)

Mme la ministre du logement et de la ville. J’ai bien compris !

Je vous répète donc, dans ce temple de la démocratie qu’est l’Assemblée nationale, que le ministre du logement que je suis n’exclut pas la possibilité d’utiliser la réquisition. Aujourd'hui la situation du logement en France est catastrophique et il n’est pas concevable que notre pays accepte l’idée de ne pas loger toutes les personnes qui sont sur son territoire. Malheureusement, il n’existe pas un nombre de logements suffisant. Je n’exclus dont aucun des instruments qui sont à ma disposition et je demande même à chacun de faire preuve de créativité. Qu’on m’invente des moyens, tant la situation est tendue.

Toutefois, la réquisition n’est pas facile à mettre en œuvre, car ce n’est pas parce qu’un logement a des volets fermés qu’il est vacant et qu’il peut être requis. Deux ministres chargés du logement ont recouru à la réquisition : M. Périssol et Mme Lienemann. Or les disponibilités offertes n’ont permis de reloger que quarante-deux personnes. La réquisition ne répond donc pas à l’ampleur des problèmes qui se posent même si, je le répète, je n’exclus pas d’y recourir en application de la loi.

M. René Couanau. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité.

Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur Huet, les 120 millions d’euros supplémentaires affectés à l’AAH correspondent à 60 millions d’euros de rebudgétisation, en raison d’une sous-estimation pour 2007, et à 60 millions de crédits nouveaux liés à la revalorisation au 1er janvier 2008. Il s’agit donc d’un budget sincère.

En ce qui concerne l’API, la hausse de 150 millions d’euros correspond à 20 millions d’euros de rebudgétisation, à 40 millions de hausse liée à 1 % de revalorisation et à 2 % d’augmentation de volume, et à 90 millions d’euros d’économies, liées aux contrôles.

L’audit de modernisation de l’API doit nous conduire, du reste, à l’amélioration des contrôles, laquelle porte déjà des fruits. Un article du PLFSS prévoit le droit de communication et d’information aux organismes de sécurité sociale. Xavier Bertrand a par ailleurs demandé au directeur général de la CNAF de développer les contrôles inopinés sur place et sur pièces des bénéficiaires de l’API.

Toutes les recommandations de l’audit de l’AAH ont été incluses dans le plan d’action validé en juin 2006. La grande majorité a été mise en œuvre, notamment en ce qui concerne la qualité des services et l’harmonisation des pratiques. C’est du reste une mission d’appui à l’harmonisation des pratiques qui a débouché sur un travail commun avec la CNSA sur l’information, la formation et le cadrage des pratiques.

S’agissant du retour à l’emploi – plan d’action AAH-emploi –, un volet sur l’insertion professionnelle des allocataires de l’AAH est prévu, dont l’objectif est inclus dans les conventions État-ANPE et État-AGEFIPH. Le suivi des allocataires est effectué dans chaque plan départemental pour l’insertion des travailleurs handicapés – PDITH – en application de la circulaire du 14 janvier 2007 sur la politique d’emploi des personnes handicapées. Des indicateurs sur la sortie vers l’emploi ont été créés dans le cadre de la LOLF. Une expérimentation pour évaluer l’employabilité est menée ; je l’ai déjà évoquée. Les allocations AAH sont rendues éligibles à tous les contrats aidés d’activation des minima sociaux. Enfin un dispositif d’intéressement pérenne a été mis en place. Voilà pour le volet emploi.

En ce qui concerne le pilotage et le contrôle, l’AAH est incluse dans le dispositif général de lutte contre la fraude et la revue générale des politiques publiques reprendra la question de la gouvernance locale : dans le cadre du comité de suivi, lequel procédera à une évaluation intermédiaire au premier semestre 2008 de la politique sur le handicap menée en application de la loi de 2005, un groupe travaillera sur le fonctionnement des MDPH et le statut de leurs personnels. Vous pouvez le constater : nous avons respecté toutes les préconisations de l’audit.

M. René Couanau. La parole est à M. le haut-commissaire.

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Monsieur Huet m’a critiqué parce qu’il considère que je suis responsable de l’augmentation des crédits de la mission 304 : ils augmentent en effet de 100 % ! (Sourires.) Cet argent ira dans les poches des allocataires du RSA via les conseils généraux. Ces crédits étant le nerf de l’expérimentation, nous allons même vous proposer par voie d’amendement, si le Premier ministre en est d’accord, une nouvelle hausse afin de prendre en compte d’autres départements.

Madame Boyer, les Bouches-du-Rhône, après délibération, ont mis en place début novembre un barème qui leur est propre pour l’expérimentation du RSA, les conseils généraux étant libres de choisir leur barème. Le dispositif prévu varie selon que les personnes travaillent moins de dix heures, entre dix et trente heures, ou entre trente et trente-cinq heures. Nous l’évaluerons afin de le comparer aux barèmes des autres départements.

Monsieur Sirugue, vous m’avez interrogé sur le calendrier des expérimentations jusqu’à la généralisation de celles qui auront fait leur preuve et sur un éventuel transfert de compétences à la suite de leur adoption. Je le répète : nous essayons de concilier des démarches contradictoires. En effet, notre engagement sur une aide financière pour trois ans auprès des départements et auprès des personnes ayant signé un contrat RSA – c'est-à-dire jusqu’en 2010 – n’interdira pas une généralisation précoce des programmes expérimentaux qui auront porté des fruits avant cette date, les départements qui le souhaitent pouvant toutefois aller jusqu’au terme de l’expérimentation commencée.

Les programmes expérimentaux n’ont évidemment pas pour objectif de dépenser l’argent en dehors de toute évaluation, mais il faut d’ores et déjà comprendre que l’expérimentation créera des iniquités entre les territoires des départements expérimentateurs et au sein même de ces territoires, entre ceux qui bénéficieront du RSA et ceux qui n’en bénéficieront pas. Dans un même territoire, certains RMIstes pourront en effet y avoir droit tandis que d’autres travailleurs pauvres ne le pourront pas. On ne saurait maintenir trop longtemps de telles iniquités : c’est pourquoi nous y allons à marches forcées.

Si l’expérimentation se révèle positive, il sera nécessaire de la généraliser le plus rapidement possible sur des bases de répartition qui restent à définir entre l’État, le département et les autres collectivités. Actuellement, nous modifions des prestations dont certaines relèvent du département et d’autres de l’État. Je m’y engage de nouveau : une discussion aura lieu afin de faire le bilan des actions menées dans les mois, voire les années passés et de savoir si les conseils généraux souhaitent ou non devenir chefs de file pour le RSA.

Telle est la raison pour laquelle je suis demandeur de rendez-vous avec le bureau de l’ADF afin de débattre de la question de la répartition des tâches.

Quant au budget des contrats aidés, je pourrais éluder votre question en vous disant qu’il appartient à Mme Lagarde de vous répondre. Je dois cependant admettre qu’il diminuera en 2008.

Mme Martine Billard. On le sait !

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. En conséquence, car il ne s’agit pas de tourner autour du pot, moins de contrats aidés seront signés en 2008 qu’en 2007 !

M. Alain Néri. On l’avait compris !

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Quelle justification donner ?

Un premier argument consiste à rappeler que les contrats aidés sont utiles en période de hausse du chômage. Quand les chiffres de celui-ci sont à la baisse, ces contrats sont moins nécessaires. (Exclamations.)

Mme Martine Billard. C’est déjà ce que nous avait dit François Fillon en 2002 !

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Selon un deuxième argument, 80 % des personnes ayant signé certains types de contrats aidés sont revenues à la case départ un an après. C’est aussi la raison pour laquelle – parlons sans langue de bois – le nombre de contrats aidés a tendance à augmenter en période électorale (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

M. Gérard Bapt. Ah bon ?

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Vous le savez bien !

M. Christophe Sirugue. Ils font pourtant l’objet d’une négociation !

M. Gérard Bapt. C’est vrai qu’ils ont augmenté en 2006, en prévision des échéances électorales !

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Je n’ai pas dit cela pour créer une polémique ! Cependant, depuis vingt-cinq ans que les TUC, CES, CEC, contrats d’avenir et autres contrats d’accompagnement pour l’emploi existent – j’en passe des meilleurs et des moins bons –, on observe des stop-and-go permanents.

C’est la raison pour laquelle, dans le cadre d’un Grenelle de l’insertion, il faudra mener une réflexion accélérée visant à redéfinir les contrats aidés afin qu’ils puissent garantir un retour à l’emploi supérieur à six mois. Tel est l’objet de la réflexion sur le contrat unique d’insertion. Nous aurons d’autant plus à faire nos preuves sur le sujet qu’en période de tension budgétaire les dispositifs qui ne sont pas efficaces sont évidemment les premiers à être dénoncés. Les contrats aidés, je le répète, doivent assurer un retour durable à l’emploi : leur redéfinition est donc nécessaire. Nous n’avons devant nous que quelques mois pour savoir si nous pourrons, au printemps 2008, repartir sur des bases nouvelles et saines en matière d’insertion et de contrats aidés.

M. René Couanau. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont Contrairement à ce matin, où j’ai jugé la procédure de la commission élargie trop lourde, je dois reconnaître qu’elle me permet, cet après-midi, sans être membre de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, de m’exprimer sur un sujet qui me tient à cœur.

Tordons avant tout, une bonne fois, le cou à l’idée que vous venez de défendre, monsieur Méhaignerie, selon laquelle il y aurait d’un côté ceux qui seraient pour l’assistanat et de l’autre ceux qui y seraient opposés et qui œuvreraient pour l’insertion.

Monsieur le haut-commissaire, bien avant l’invention du RSA, les conseils généraux ont mené des politiques d’insertion ; mais vous ne pouvez à la fois prétendre vouloir ramener les chômeurs vers le travail et casser tous les outils de l’insertion. Or la mise à mal des contrats aidés ou des chantiers d’insertion, enlève autant d’outils utiles pour conduire des politiques d’insertion ! (Exclamations.)

La suppression de l’obligation réglementaire faite il y a deux ans de consacrer une partie du RMI à l’insertion porte également un coup à ces politiques, même si la plupart des conseils généraux continuent de consacrer, comme celui que je préside, plus de 20% à cette fin. Aucun de nous ne se satisfait de l’assistance ! Nous sommes des élus responsables : c’est pourquoi notre objectif commun est de conduire ceux qui en ont besoin vers l’insertion, le travail et la dignité que celui-ci leur confère (Exclamations.)

Les politiques de solidarité et d’insertion, qui sont décidées par l’État - et c’est normal - relèvent surtout pour leur mise en oeuvre des départements, dont le social est la mission essentielle. Toutefois, comme cela est relevé dans la dernière lettre de l’Observatoire national de l’action sociale décentralisée – l’ODAS –, les limites financières du possible sont atteintes. Ainsi que l’a souligné tout récemment le président du Sénat lors du congrès de l’ADF, si l’on continuait ainsi,  on irait dans le mur ; ce sont ses propos. En effet, entre 2005 et 2006, la dépense nette d’action sociale des départements a progressé de quelque 7 %. « Cette évolution - affirme la lettre de l’ODAS - renforce les inquiétudes sur les capacités d’intervention des départements pour résoudre les multiples défis d’une précarité qui s’étend », alors que « les marges de manœuvre dont disposent ces collectivités pour conduire leurs missions sociales continuent à s'amenuiser ».

Je me contenterai de donner trois exemples.

Alors que, en 2001, l’APA était prise en charge à parts quasiment égales par les départements et par l’État, avec des clauses de révision annuelle, la part de ce dernier ne s’élève plus aujourd'hui qu’à 32%, le reste étant à la charge des collectivités locales. On a beau jeu, ensuite, de les stigmatiser parce qu’elles augmentent la fiscalité alors qu’elles y sont contraintes !

Le Président de la République, comme du reste les principaux candidats à l’élection présidentielle, avaient annoncé la prise en compte du « cinquième risque ». Or on parle maintenant d’une cinquième branche qui mettrait encore à contribution les conseils généraux et ouvrirait la porte au système assurantiel privé. La différence n’est pas uniquement sémantique. En effet les personnes prises en charge en établissement y arrivent aujourd'hui de plus en plus souvent en état de très grande dépendance, en raison du succès rencontré par les dispositifs de maintien à domicile permettant de vieillir chez soi ; elles relèvent désormais du sanitaire et non plus du médico-social mais lorsqu’elles sont en EPAD, elles financent, ainsi que le conseil général, une partie de la construction de l’établissement et des frais de personnel, ce qui n’est pas le cas des malades à l’hôpital ! Cela n’est pas normal et il faudra, à terme, recourir à la solidarité nationale pour couvrir le cinquième risque.

Enfin, en dépit d’une baisse du nombre des RMIstes, on constate que les montants des allocations augmentent parce que la précarité s’aggrave et parce que la paupérisation s’étend. Les plans moyens de RMI servis aux allocataires sont dès lors plus élevés, notamment ceux alloués aux familles monoparentales, sans qu’on puisse mettre en cause une triche quelconque, toutes les collectivités locales ayant recruté des personnels pour surveiller les dépenses sociales. On constate également une explosion des montants de l’aide à l’enfance en danger à cause des difficultés sociales.

Dans ce contexte, mesdames les ministres, madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, quelle ligne de partage pensez-vous tracer entre la solidarité nationale et la solidarité locale afin que les politiques sociales aient encore un sens et que les politiques d’insertion puissent être sauvegardées ?

M. René Couanau. La parole est à M. Yves Bur.

M. Yves Bur. Monsieur le haut-commissaire, vous avez évoqué la réforme des minima sociaux et je souhaite vous interroger sur la réforme de l’allocation parent isolé qui est attendue depuis longtemps.

Le rapport de l’IGAS de l’an dernier a dressé un constat accablant que, pourtant, même le précédent gouvernement a refusé de prendre en compte : 16 % des bénéficiaires déclarent ne pas vivre seuls et 40 % reçoivent l’allocation au-delà de trois ans, grâce à l’arrivée d’un nouvel enfant. Il y a là un problème majeur. On dénombre en effet 217 000 bénéficiaires en 2007, soit 5 % de plus qu’en 2006. C’est l’exemple même de l’allocation qui engendre des comportements sociaux. Si l’accès à cette allocation n’était pas aussi libre, les comportements seraient sans doute différents.

Cela est d’autant plus vrai que les efforts d’insertion vers l’emploi restent extrêmement limités, voire extrêmement difficiles à mettre en œuvre. Ce que j’ai tenté de faire en tant que maire a échoué de façon flagrante. Je souhaite donc savoir si le Gouvernement a effectivement l’intention de rénover l’API, par exemple en favorisant l’aide à la parentalité la première année, d’autant qu’aucun dispositif contraignant n’est prévu. Ainsi 29 000 personnes seulement – c'est-à-dire un peu plus de 10 % – ont bénéficié de l’accompagnement par un travailleur social mis en place par les caisses d’allocations familiales. Le Gouvernement compte-t-il, afin de favoriser l’insertion par le retour à l’emploi, reprendre la proposition de l’IGAS en vertu de laquelle, à défaut d’accepter l’insertion, l’allocataire retournerait vers le RMI ?

M. René Couanau. La parole est à M. Jean-Marc Lefranc.

M. Jean-Marc Lefranc. Je souhaite appeler l’attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité sur la situation des parents d’enfants atteints de maladie ou de handicap. Ces parents subissent en effet une triple angoisse : celle de l’évolution de la maladie ou du handicap, celle de l’insertion de leur enfant dans la société et celle de la façon dont il pourra subvenir à ses besoins après leur disparition.

Dans ce dernier cas, il existe deux possibilités de constituer un complément de ressources : la rente survie et l’épargne handicap. La première permet au père et à la mère de souscrire des contrats collectifs ou individuels assurant une rente à leur enfant à leur décès. Cette formule présente l’avantage de pouvoir être cumulée, quel que soit le montant de la rente, avec l’AAH.

L’épargne handicap qui est, quant à elle, constituée directement par la personne handicapée, présente l’inconvénient d’être plafonnée à 1 830 euros ; je vous renvoie à l’article R 821-4 du code de la sécurité sociale. Alors qu’une étude portant sur 6 000 rentes révèle que la rente moyenne est de 2 875 euros par an, au-delà des 1 830 euros cette rente, dans le cas de l’épargne handicap, est réduite à due concurrence du montant de l’allocation adulte handicapé. Il paraîtrait donc équitable de relever le plafond à 2 875 euros d’autant que la rente survie pénalise les fratries, les années de cotisations étant perdues en cas de décès de l’enfant handicapé avant le terme du contrat ou en cas d’interruption, même temporaire, des versements par la famille.

Madame la secrétaire d'État, je n’ai pas déposé d’amendement sur le sujet car il s’agit d’une question réglementaire, mais je souhaite, au nom des familles des personnes handicapées, que le Gouvernement fasse droit à cette demande.

M. René Couanau. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité, je souhaite vous poser sur le programme 157 « Handicap et dépendance » quelques questions qui n’ont pas encore reçu de réponse.

En ce qui concerne l’évaluation et l’orientation personnalisée des personnes handicapées qui sont intégrées à l’action 1, la question de la contribution de l’État aux fonds départementaux pour la compensation n’est pas abordée alors qu’un désengagement de l’État serait un signal démobilisateur. Pouvez-vous nous apporter des éclaircissements sur le sujet ?

En ce qui concerne la compensation, la loi du 11 février 2005 a supprimé la barrière d’âge pour l’obtention de la prestation de compensation. L'allocation d'éducation de l'enfant handicapé – l’AEEH – et la prestation de compensation du handicap – la PCH – devraient fusionner en un dispositif unique. Or les dispositions prévues ne nous paraissent pas acceptables en l’état et les associations que nous avons reçues nous ont fait part de leurs inquiétudes à ce sujet. En effet, l’accès d’un enfant à la PCH dépend non seulement d’un taux d’invalidité – ce qui est justifié – mais également de certains critères comme les charges effectives ou l’emploi des parents. Tout cela manque de clarté et j’aimerais que vous nous apportiez des précisions sur ce point.

En ce qui concerne l’emploi des personnes handicapées et l’incitation à l’activité professionnelle, je tiens à rappeler d’emblée que, bien plus que d’une incitation à exercer une activité professionnelle, les personnes handicapées ont surtout besoin d’un accompagnement et d’une véritable politique de compensation du handicap leur permettant de surmonter les divers obstacles auxquels elles doivent faire face.

Or, s’agissant des ESAT, on annonce pour 2008 la création de 2 000 places, contre 3 000 en 2007, sans qu’on dispose d’un état effectif des créations. Pouvez-vous nous répondre sur ce point, madame la secrétaire d'État ? De plus, non seulement le coût de la place n’est pas revu mais les règles trop rigides imposées par les organismes de tarification sont difficiles à appliquer du fait que les métiers évoluent : la prise en charge s’en trouve considérablement alourdie.

La diminution des crédits destinés aux entreprises adaptées nous inquiète également. Le coût moyen des subventions reste au même montant que l’année dernière tandis que l’effectif pris en charge passe de 20 099 à 17 811 places, ce qui entraîne une baisse prévisionnelle des crédits de l’ordre de 5 millions d’euros. Madame la secrétaire d'État, que sont devenus les 278 postes manquants ?

S’agissant enfin des ressources d’existence, je souhaite souligner à la suite de la DGAS que le nombre des allocataires de l’AAH a tendance à diminuer, le nombre des personnes de plus de soixante ans augmentant. Ne serait-ce pas précisément l’occasion de faire un effort important en faveur du montant de l’AAH et de ses compléments ?

M. René Couanau. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité.

Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité. S’agissant tout d’abord du comité de suivi de la politique du handicap et de la gouvernance sur le territoire des MDPH, je confirme que l’Assemblée des départements de France y sera associée ; on peut donc parler d’un co-pilotage avec l’État.

Madame Carrillon-Couvreur, en ce qui concerne la participation de l’État au fonds de compensation, les engagements pris par l’État, tenus en 2006 et en 2007 grâce à l’inscription de crédits budgétaires en loi de finances, continueront d’être tenus en 2008, mais dans le cadre d’un versement par un fonds de concours, toujours à hauteur de 14 millions d’euros.

S’agissant du droit d’option entre l’AEEH et la PCH, il paraît évident qu’on ne peut pas s’aligner sur la PCH adulte dès lors qu’il s’agit d’enfants, car se pose pour eux la question de la compensation du handicap. En effet, un enfant de quatre ans n’a pas un handicap consolidé et, de plus, aucun enfant du même âge, handicapé ou non, n’est autonome. C’est pourquoi nous avons besoin de progresser dans l’évaluation de la PCH pour les enfants. Cette réflexion sera menée par le groupe de travail sur la compensation. Si le droit d’option entre l’AEEH et la PCH est ouvert, c’est tout simplement pour que la famille et l’enfant puissent bénéficier de la prestation la plus avantageuse, en fonction du calcul effectué par la MDPH. Ce droit d’option est donc dans l’intérêt de la famille et de l’enfant.

J’ai déjà répondu sur les ambitions du Gouvernement pour l’AAH ; j’ai l’intention de tenir mon engagement d’une revalorisation de 2,5 %. Avant d’aller plus loin, il convient de s’assurer qu’une revalorisation plus importante ne risque pas de compromettre les ressources globales des personnes handicapées qui peuvent accéder à l’emploi ou travaillent déjà. Il s’agit donc avant tout de prendre en considération la question du revenu global des handicapés : qu’elle puisse ou non travailler, le pouvoir d’achat de la personne handicapée ne doit pas diminuer mais au contraire connaître une vraie revalorisation.

S’agissant des ESAT, les créations de places s’élèvent à 8 000 dans le cadre du dernier plan. Les 2 000 places créées en 2008 correspondent à la première phase d’un plan quinquennal de création qui sera annoncé d’ici la fin de l’année. Le coût de 11 698 euros par place – plus 0,8 % – est conforme au GVT. Avec les départs en retraite l’ancienneté, et donc le GVT, diminuent.

Les entreprises adaptées bénéficieront, quant à elles, en 2008, de 244 millions d’euros au titre de l’aide au poste – le PLF prévoyant le maintien de l’enveloppe des crédits au niveau de 2007 – et de 42 millions au titre des subventions spécifiques. Du fait de la revalorisation du SMIC, cela revient à subventionner 19 625 postes, soit 387 de moins qu’en 2007, mais les crédits restent supérieurs aux postes réellement consommés. Un meilleur suivi devrait permettre de réallouer les emplois situés dans les entreprises sous-consommatrices pour les affecter dans les nouvelles entreprises. Il sera ainsi plus facile de saturer l’effectif ouvert en loi de finances initiale.

En complément, dans le cadre du programme « Handicap » dont nous sommes gestionnaires, 2 000 créations de places en ESAT sont prévues dont 1 000 hors les murs, c'est-à-dire affectées aux entreprises ordinaires. En ce qui concerne les subventions spécifiques, si le PLF pour 2008 prévoit, je le rappelle, 42 millions d’euros, contre 47 millions en 2007, c’est au regard de la consommation de la subvention de 2006, qui a été de l’ordre de 36 millions d’euros. L’objectif pour 2008 est de poursuivre la mise en œuvre du plan gouvernemental de soutien à une modernisation des entreprises adaptées lancé en 2006 par le Gouvernement. Ce plan permet d’accompagner les structures en difficulté dans leur environnement concurrentiel ainsi que celles qui se développent économiquement.

Monsieur Bur, je laisse M. le haut-commissaire répondre à votre question sur l’API.

Monsieur Lefranc, votre question tient à cœur à toutes les familles concernées, et elles sont nombreuses ! Il faut effectivement encourager et récompenser la prévoyance des personnes handicapées et de leurs familles lorsqu’elles concluent une rente sur vie ou un contrat épargne handicap. Cette question pourra être traitée par le groupe de travail sur les ressources et sur l’emploi au sein du comité de suivi de la réforme de la politique du handicap afin que des propositions globales puissent être faites lors de la première conférence nationale sur le handicap qui se tiendra en 2008. J’espère que le groupe de travail pourra répondre favorablement à votre demande ; j’ai en tout cas été sensible aux propositions que vous avez faites.

M. René Couanau. La parole est à M. le haut-commissaire.

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Monsieur Bur, le nombre des allocataires à l’API a augmenté assez naturellement du fait à la fois de l’augmentation du nombre des familles monoparentales et de l’accroissement démographique. Cette allocation n’en pose pas moins un problème de conception, puisqu’elle engendre les comportements que chacun connaît. Toutefois, il ne faut pas oublier qu’on parle de revenus très faibles. Ce sont parfois les travailleurs sociaux eux-mêmes qui, de façon assez rationnelle, encouragent des familles à poser une seconde boite aux lettres pour toucher 440 euros de plus.

M. Yves Bur. Il y a aussi la colocation !

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Il faut donc sortir d’un tel système.

C’est pourquoi j’ai tenu à ce que l’État expérimente des méthodes de retour à l’emploi non seulement pour le RMI mais aussi pour l’API, dont les bénéficiaires étaient exclus des contrats aidés et des primes de retour à l’emploi. Depuis qu’ils bénéficient, dans le cadre du RSA, du dispositif du retour à l’emploi, on sent un frémissement, alors que plus de la moitié d’entre eux retournaient auparavant au RMI. C’est pour éviter ces effets pervers que nous allons, dans le cadre du RSA, remplacer le RMI et l’API par un barème différent.

Madame Pérol-Dumont, je ne crois pas qu’il y ait une culture de l’assistance dans les conseils généraux, qu’ils soient de gauche ou de droite – où chacun cherche à faire avancer les choses – et encore moins chez les personnes en difficulté. Si certains ont cru que j’avais redécouvert l’insertion, c’est que je me suis mal exprimé. Il n’est pas question de faire table rase, au contraire : rarement une politique aura autant reposé sur les pratiques locales et j’ai déjà évoqué le barème propre aux Bouches-du-Rhône.

Chaque fois, nous partons des problématiques spécifiques des conseils généraux et nous concevons un programme sur mesure reposant sur ce qui a déjà été fait au plan local. Loin de vouloir plaquer un système radicalement nouveau, nous essayons de mener une évaluation rigoureuse afin de savoir, parmi tant de programmes différents, lesquels ont donné les meilleurs résultats et permis d’utiliser l’argent de la façon la plus efficace.

La question du rapport entre solidarité nationale et solidarité locale est, avec celle du rapport entre le RSA et les salaires – qu’ont évoquée M. le président Méhaignerie et M. Sirugue –, l’une des plus importantes que nous aurons à traiter en 2008. On connaît les arguments de chacun : la solidarité locale est prônée par ceux qui mettent en avant la proximité et le surmesure tandis que ceux qui considèrent que l’État doit assurer un rôle prédominant en la matière choisissent la solidarité nationale.

La question sera donc de savoir si l’État doit assurer la solidarité envers les territoires et les territoires envers les personnes, si l’État doit assurer également la solidarité envers les personnes ou si de nouvelles combinaisons sont à trouver. C’est ce débat de fond que je souhaite ouvrir avec les départements, car la question n’est pas tant celle des transferts de compétences que celle du rôle de l’État et des collectivités territoriales en matière de solidarité, laquelle entraînera à son tour une réflexion sur l’éclatement des compétences.

Vous avez paru surpris lorsque j’ai affirmé que des personnes demeuraient parfois cinq années sans qu’on s’occupe d’elles. Or vous savez très bien qu’on dissuade un grand nombre d’allocataires du RMI de s’inscrire à l’ANPE de peur qu’ils n’apparaissent dans les statistiques ! (Exclamations.) C’est la stricte vérité ! Ce n’est tout de même pas un hasard si moins de la moitié d’entre eux sont inscrits à l’ANPE. Il existe donc un grand nombre de personnes pour lesquelles la question de l’accompagnement professionnel ne s’est jamais posée : c’est inacceptable !

Vous savez également très bien que les dépenses de formation sont mal réparties, puisque ce sont les personnes les moins qualifiées, les plus en difficulté et les plus éloignées de l’emploi qui en bénéficient le moins ! Il y a de plus un jeu compliqué entre l’État, les grands services publics comme l’ANPE, les régions et les départements. Il faut donc revoir le rôle de chacun : il convient de redéfinir les prestations dans la plus grande transparence.

M. René Couanau. Il nous reste à entendre les questions de quatre de nos collègues.

La parole est à Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Je souhaite appeler l’attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité sur le sixième programme consacré à l’égalité entre les hommes et les femmes.

Notre groupe regrette qu’il n’y ait pas de véritable ministère des droits des femmes et de l’égalité entre les hommes et les femmes. Nous regrettons également de devoir aborder autant de sujets en un seul après-midi car nous ne faisons que les survoler.

Nous reconnaissons tous que des progrès considérables restent à réaliser pour passer de l’affichage à la réalité en matière d’égalité des droits entre les hommes et les femmes. Il en est ainsi, par exemple, de la vie politique : aucune femme n’est présidente de commission à l'Assemblée nationale ! Cette inégalité s’aggrave dans la vie économique pour devenir scandaleuse en raison de la précarisation du travail féminin, du temps partiel non choisi, des horaires décalés, de la difficulté d’accéder à des responsabilités en dépit d’un niveau de formation souvent supérieur et des écarts de salaire avec les hommes qui sont toujours de l’ordre de 15 % à 25 %.

De plus, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint ou de son compagnon, qu’ils habitent au non sous le même toit. Comptez-vous, madame la secrétaire d'État, proposer une loi-cadre sur les violences faites aux femmes, sujet dont on n’a découvert la gravité qu’assez récemment, même si elles existaient auparavant ?

Améliorer la vie des femmes, c’est améliorer la vie de toute la société. Vous annoncez, dans ce domaine, cinq axes prioritaires, mais il semble que le ministère se concentre sur deux axes : l’égalité professionnelle et la dignité des femmes.

S’agissant de l’égalité professionnelle, après la loi Roudy de 1983, à bien des égards fondatrice, et la loi Génisson de 2001, une nouvelle loi a été votée en 2006, qui porte sur l’égalité salariale, laquelle devrait être réalisée en 2010. Quel bilan peut-on dresser à l’heure actuelle, sachant que les auditions de la Délégation aux droits des femmes, à laquelle j’appartiens, ne nous permettent que très difficilement de nous faire une idée exacte de la situation, les partenaires sociaux auxquels il revient d’établir des diagnostics dans les entreprises paraissant démunis pour les réaliser ? La loi prévoit un accompagnement des PME : demandent-elles à en bénéficier ?

Parmi les axes prioritaires, l’articulation des temps de vie concerne les deux parents et pas seulement les femmes. Toutefois ce sont celles-ci qui, majoritairement, assument les tâches domestiques, l’éducation des enfants et les soins aux personnes âgées, comme le souligne l’état des lieux, page 60.

La France a vécu une révolution silencieuse : l’entrée massive des femmes sur le marché du travail conjuguée à une fécondité très élevée. Or notre société n’a pas suffisamment accompagné cette révolution. Cela est notamment vrai pour la politique de la petite enfance où on note, en matière d’accueil, une insuffisance des capacités et une carence des modalités pour répondre à la multiplication des horaires décalés, voire tronçonnés, à l’absence de délai permettant de prévenir et à la forte augmentation du nombre de familles monoparentales. Cela est vrai également pour l’accueil des enfants qui ne vont plus en crèche, mais ne sont pas encore d’âge scolaire, c’est-à-dire autour de trois ans. De plus, les collectivités locales s’inquiètent de la diminution des crédits des CAF lors des renouvellements des contrats locaux de l’enfance.

Si j’insiste pour connaître la politique que vous allez mener et les moyens que vous entendez mobiliser pour répondre à notre attente, c’est que l’arrêt d’activité auquel les femmes recourent lorsqu’elles occupent des emplois peu qualifiés a le plus souvent des effets inverses de ceux qui étaient attendus.

Favoriser l’emploi des femmes, leur accès à tous les métiers, une formation adaptée et l’égalité des salaires, ce n’est pas seulement mener une politique d’égalité, c’est également mener une politique économique efficace. Quels moyens allez-vous consacrer pour assurer aux femmes une place normale sur le marché du travail ?

Enfin, à la page 62 de l’état des lieux, vous évoquez la politique des bureaux du temps, développée de manière expérimental dans les agglomérations. En 2001, ces bureaux bénéficiaient des crédits de la DATAR dans le cadre du programme « Temps et Territoire » ainsi que d’aides européennes. Le financement de la DATAR a disparu. Comment dès lors favoriser une politique de l’articulation des temps de vie et l’adaptation des services publics locaux pour le bien-être de tous nos concitoyens, qui sont à la fois salariés, parents, usagers et consommateurs ?

M. René Couanau. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Madame la ministre du logement, afin de compléter les questions de M. Sirugue tout en anticipant sur l’examen de budget du logement, je tiens à rappeler que, en janvier 2007 on annonçait 26 millions de crédits pour le PARSA. Or ni les associations, qui nous ont posé la question, ni nous-mêmes n’en trouvons trace dans le projet de budget pour 2008. Où sont-ils ou comment va-t-on les y inscrire ?

Vous dites que la veille sociale progresse, mais les crédits sont stables pour les équipes mobiles, le 115, l’accueil de jour et le SAO, ces quatre dispositifs étant pris en charge conjointement par l’État et les départements, même si l’État participe pour deux d’entre eux de façon très majoritaire. Comment peut-on améliorer la veille sociale sans augmenter les engagements financiers ?

En ce qui concerne l’ALT, qui permet de loger des personnes très défavorisées, le PLF pour 2008 annonce 1 000 places supplémentaires, mais les crédits sont stables par rapport à 2007. Comment va-t-on les créer ?

S’agissant enfin du logement d’urgence, la pérennisation pose un véritable problème, souligné par les associations, ce qu’ont pu constater tous les députés qui ont assisté aux auditions en commission. En effet, le choix de basculer d’une politique d’urgence vers une politique de pérennisation comme y invite l’article 4 de la loi relative au DALO – laquelle vous est aussi chère qu’à nous, madame la ministre –, article qui prévoit un maintien dans les lieux et non un retour à la rue, entraîne la mise en œuvre de moyens importants, notamment en personnels. Selon toutes les associations, le coût serait sous-évalué : le PLF prévoit 11 700 euros par place alors qu’il faudrait 13 800 euros. Si la différence est bien de 2 000 euros, le volume de prise en charge diminuera.

Alors que nous soutenons votre politique de pérennisation, nous ne voyons pas comment le projet de budget permet de répondre à cette montée en charge, d’autant que, vous ne l’ignorez pas, les coûts des personnels représentent 82 % des dépenses des centres d’hébergement. Consacrer plus d’effectifs à la pérennisation va naturellement accroître le problème.

M. René Couanau. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Madame la ministre du logement, vous avez proposé aux départements de contractualiser sur les PLAI afin d’en accroître le nombre, l’État accordant 12 000 euros si le département en accordait 10 000. Vous demandez donc aux collectivités d’accompagner votre politique en la matière en raison des difficultés que vous rencontrez pour la mettre en application. Nous le faisons, car nous ne voulons pas que les places de PLAI soient détournées pour l’hébergement d’urgence. Toutefois il faudra nous préciser dans quelles conditions vous souhaitez contractualiser, notamment en ce qui concerne la possibilité de transférer le PLAI sur tout le département et la garantie que le PLAI restera au département, en cas de dépassement des ressources par un bénéficiaire.

Vous dites également être preneur de nos propositions pour trouver des logements.

Mme la ministre du logement et de la ville. Absolument !

M. Alain Néri. Je me permets de vous rappeler que j’en ai fait, lors du débat sur le DALO, et que je les ai reprises dans le cadre d’une proposition de loi. J’ai proposé par exemple de créer un fonds national de garantie des loyers qui permettrait de remettre sur le marché des logements vacants et de supprimer la caution.

Mme la ministre du logement et de la ville. Vous avez raison.

M. Alain Néri. D’après l’enquête que j’ai faite dans ma seule circonscription, plus de 300 logements deviendraient disponibles.

J’en viens à la question du nombre de places dans les maisons de retraite.

Le succès rencontré par l’APA a permis de maintenir plus de personnes à domicile. Même si, à la suite de Mme Pérol-Dumont, je constate moi aussi que son financement était d’abord assuré à égalité par l’État et par les départements, mais que la part de l’État est tombée en quatre ans de 45 % à 32 %, il n’en reste pas moins que cette allocation nous permet de conduire une politique de maintien à domicile ambitieuse, dynamique et réaliste.

Toutefois, avec le maintien à domicile, les personnes âgées ne rentrent plus en maison de retraite vers soixante-quinze ans, mais vers quatre-vingt-cinq ans. On a donc besoin d’un plus grand nombre de maisons de retraite médicalisées, avec un prix de journée naturellement plus élevé, mais la plupart des départements manquent cruellement de places dans ce genre d’établissement. Or, pour prendre l’exemple du Puy-de-Dôme, qui m’est cher, cinq projets ont reçu l’avis favorable du CROSS mais sont en attente de financement, car il n’y a pas d’ouverture de lits au programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie, le PRIAC. Ce sont ainsi 413 lits que nous ne pouvons pas créer dans notre département alors qu’ils pourraient être rapidement opérationnels si le PRIAC acceptait de dégager les moyens nécessaires.

Par ailleurs – cette question est liée à la précédente –, les personnes âgées qui entrent en maison de retraite à quatre-vingt-cinq ans ont souvent, en tant qu’anciens ouvriers ayant cotisé toute leur vie au taux du SMIC ou en tant que retraités de l’artisanat ou de l’agriculture, des ressources trop modestes pour couvrir le prix de journée. On se tourne alors vers les « obligés alimentaires », c'est-à-dire leurs enfants. Or ceux-ci ont eux-mêmes atteint l’âge de la retraite, si bien que leurs ressources diminuent et qu’ils ne peuvent pas payer pour leurs parents. Que se passe-t-il alors, quand on sait de plus combien le Gouvernement est attaché au pouvoir d’achat ? On se tourne vers l’aide sociale, c’est-à-dire les contribuables du département. Vous dites qu’on va mettre en place un cinquième risque sécurité sociale. D’accord mais, madame Boutin, monsieur Hirsch – vous êtes également concerné –, qui va le financer ? Si l’État se désengage et qu’on compte sur les conseils généraux, cela ne tiendra pas longtemps !

M. René Couanau. Je vous prie de conclure, mon cher collègue.

M. Alain Néri. D’autant que l’État ne paye pas ce qu’il doit aux collectivités locales ! Dans le Puy-de-Dôme par exemple, il nous doit encore 9 millions au titre du RMI, soit six points de fiscalité.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Vous avez de la chance : il me doit bien plus !

M. Alain Néri. Quand allez-vous nous payer ce que vous nous devez et nous rassurer sur la question du cinquième risque sécurité sociale ?

M. René Couanau. La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Monsieur Hirsch, vous avez évoqué la création d’un contrat unique pour les contrats aidés, ce qui m’intéresse en tant que maire, puisque le maire est au premier bout de la chaîne qui va du contrat aidé à la stagiarisation et, sauf exception rarissime, à la titularisation. Or ne jugez-vous pas contre-productif qu’on ait en quelque sorte augmenté la durée du chômage en contraignant les demandeurs d’emploi à attendre deux ans avant de pouvoir prétendre à un contrat aidé ?

J’aimerais aussi connaître votre opinion sur l’article 49, d’autant que j’ai l’impression que, de nouveau, comme en 2006, on tente de faire des économies dans le cadre du forfait logement, en excluant ainsi un grand nombre de familles de l’accès à la couverture médicale universelle complémentaire. En 2006, l’application du forfait logement avait pour prétexte la rationalisation du calcul du RMI par rapport au plafond de la CMU. Députés de la majorité comme de l’opposition avaient obtenu de M. Xavier Bertrand, alors ministre de la santé, de revenir en partie sur la nouvelle disposition, si bien que seuls les entrants y étaient soumis. Elle avait assurément permis d’économiser 7 millions d’euros, mais elle avait exclu quelque 20 000 personnes, dont un grand nombre d’enfants, le forfait logement étant plus élevé pour les familles.

Or l’article 49 du PLF pour 2008 reconduit la disposition initiale de 2006 puisque ce sont tous les bénéficiaires, et pas seulement les entrants, qui seront concernés, afin de réaliser quelque 21 millions d’euros d’économie, mais toujours en excluant des dizaines de milliers de foyers de l’accès direct à la CMUc. C’est pourquoi je souhaite que le Gouvernement soit aussi sensibilisé cette année à cette question qu’en 2006 et revienne sur cette disposition en seconde lecture.

M. René Couanau. La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme la ministre du logement et de la ville. Monsieur Le Bouillonnec, vous êtes toujours très précis, et je vous en remercie.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Avez-vous besoin de quelque chose, madame la ministre ? (Sourires. )

Mme la ministre du logement et de la ville. Non, mais si vous avez des logements, je suis preneur !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il y a des maires qui n’en ont pas !

Mme la ministre du logement et de la ville. Je le sais, mais nous en reparlerons.

Mme Catherine Coutelle. Il faudrait appliquer la loi sur les 20 % de logements sociaux !

Mme la ministre du logement et de la ville. Monsieur Le Bouillonnec, je vous confirme que les 26 millions d’euros relatifs à la veille sociale et à l’hébergement d’urgence figurent bien dans le budget. En revanche les 27,5 millions auxquels vous avez fait allusion avaient été dégagés l’année dernière de manière exceptionnelle pour couvrir des déficits qui traînaient depuis de nombreuses années.

S’agissant de la veille sociale, 1 000 postes ont été créés l’an dernier – un gros effort avait été fourni – et la dotation sera maintenue cette année. Pour l’ALT, l’effort consenti l’an dernier – 1 000 postes également – est lui aussi reconduit. Pour ces deux lignes, l’augmentation est bel et bien de 8,5 %, ce qui traduit la volonté du Gouvernement en la matière.

Sans doute, monsieur Néri, avez-vous fait allusion à l’aide à la pierre. Nous en reparlerons lorsque nous examinerons le budget du logement, mais je ne vois pas à quelle difficulté particulière la mobilité départementale pourrait être confrontée.

Votre proposition de loi créant un fonds de garantie entre naturellement dans le cadre de nos réflexions actuelles. Je cherche, vous le savez, des logements partout. C’est pourquoi je voudrais remettre sur le marché les logements libres qui n’y sont pas. La garantie du risque locatif, que nous voulons rendre universelle, a du reste été prévue dans la loi DALO, qui est le patrimoine politique du pays puisqu’elle a été adoptée à l’unanimité. Peut-être cette garantie prendra-t-elle une autre forme que celle que vous prévoyez au travers de votre proposition de fonds de garantie, mais l’objectif sera le même : inciter les propriétaires à remettre des logements libres sur le marché locatif à partir du moment où le paiement du loyer et la récupération en bon état du logement leur seront garantis.

Les négociations actuelles, qui sont en voie d’achèvement, avec l’UNPI – l’Union nationale de la propriété immobilière – nous permettent de prévoir la remise sur le marché locatif de 100 000 logements en France pour 2008. Vous pensez bien que cela m’intéresse, parce que nous aurons ainsi, sinon résolu tous les problèmes, du moins amorcé une fluidité bien nécessaire au secteur du logement locatif. Monsieur Néri, nous poursuivons les mêmes objectifs.

M. René Couanau. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité. Je souhaite vous rappeler, madame Coutelle, que les groupes de travail de la Conférence sur l’égalité professionnelle se réunissent régulièrement.

Mme Catherine Coutelle. Y serons-nous invités ?

Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité. Les partenaires sociaux y sont associés ainsi que les délégations parlementaires aux droits des femmes, qui peuvent faire part de leurs propositions. La Conférence, qui rendra ses conclusions à la fin du mois, souhaite la relance des négociations à la fois sur l’égalité des chances et la lutte contre les discriminations professionnelles ainsi que sur l’élargissement du contenu de la négociation collective en vue d’améliorer son impact sur le facteur structurel affectant la rémunération des femmes – parcours, recrutement, formation, conciliation –, cette réflexion intégrant naturellement le volet que vous avez évoqué sur les modes de garde, pour lesquels toutes les pistes nouvelles doivent être explorées.

Cette réflexion rejoint l’ambition exprimée en début de séance par M. Xavier Bertrand pour la branche famille, dans le cadre des engagements du Président de la République visant à renforcer les modes de garde.

La question du temps partiel subi est également au centre des réflexions en cours avec les branches professionnelles, certains corps de métiers étant particulièrement concernés par le temps partiel féminin, comme les services à la personne. C’est la raison pour laquelle nous travaillons à la réalisation d’un plan des métiers du secteur médico-social, dont l’objectif sera la création de véritables filières professionnelles et l’amélioration des parcours afin de donner aux employées de ce secteur – ce sont le plus souvent des femmes – des perspectives d’avenir réelles.

Trop souvent, en effet, elles n’ont pas un accès suffisant à la formation. Or, comme Martin Hirsch l’a rappelé, moins on est qualifié, plus on est éloigné de l’emploi, les emplois trouvés étant d’un bas niveau de qualification. Nous travaillons donc pour 2008 à une expérimentation en ce sens dans le cadre d’un partenariat associant l’État, les régions candidates, la CNSA et les branches professionnelles. En effet, grâce à une mutualisation des moyens à l’échelon régional et à la définition de plans pluriannuels de métiers, 400 000 emplois pourront être créés afin de répondre, notamment, aux besoins du secteur de la dépendance puisque, aux 200 000 départs en retraite s’ajoute la création de 200 000 emplois par les PRIAC comme dans le cadre de la mise en œuvre de la politique du handicap.

Les départements, les régions et l’État devront se mobiliser avec les OPCA et les branches professionnelles afin d’utiliser ce gisement d’emplois non délocalisables que sont les services à la personne, car il y va de l’intérêt général. C’est tous ensemble que nous devrons atteindre cet objectif essentiel parce que ni l’État, ni les départements, ni les régions n’y arriveront tout seuls.

Pour lutter contre les violences conjugales, une loi-cadre est-elle nécessaire ? Je n’y suis pas opposée, mais je tiens à souligner que si l’Espagne s’est dotée d’un tel texte, c’est qu’elle n’avait en la matière aucun dispositif législatif. En France, une loi-cadre serait plutôt symbolique, car les dispositions nécessaires relèvent désormais bien davantage du réglementaire que du législatif. Il serait peut-être plus utile de rassembler dans un code commenté tous les textes de lois et les dispositions réglementaires existant en matière de lutte contre les violences faites aux femmes. Cet outil permettrait de remettre un peu d’ordre en la matière.

Il n’empêche qu’un second plan de lutte contre les violences à l’encontre des femmes portant sur la période 2008-2010 vous sera présenté à la fin du mois, plan dans lequel vous retrouverez traités certains des sujets que vous avez évoqués. Sans vouloir anticiper sa présentation, je tiens à vous dire que nous avons bien l’intention de poursuivre l’effort engagé, voire de l’amplifier, notamment en matière d’amélioration de la prise en charge des victimes.

En dépit des progrès réalisés, l’un des obstacles qu’elles rencontrent après avoir eu le courage de porter plainte ou de rencontrer une association, c’est de devoir affronter le véritable parcours du combattant que constitue trop souvent leur démarche, en raison, notamment, du manque de proximité. C’est une piste qu’il convient d’explorer.

S’agissant des crédits de la CNAF, madame Coutelle,…

Mme Catherine Coutelle. Ma question, madame la secrétaire d'État, portait sur la diminution des crédits de la CNAF, dans le cadre d’une politique nationale, lors du renouvellement des contrats. Les collectivités locales sont très inquiètes sur l’avenir de la politique menée en direction de la petite enfance, voire des pré-adolescents, vis-à-vis desquels la CNAF se désengage.

Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité. …M. Xavier Bertrand vous fera des propositions relatives au droit à la garde d’enfants opposable car une mise à plat était nécessaire. Il reviendra avec des propositions et je ne doute pas que les choses évoluent de manière positive pour les collectivités.

Monsieur Néri, vous avez estimé que les départements étaient fortement sollicités et qu’il était difficile d’obtenir des créations de places. Je vous rappelle que le projet de budget prévoit 7 500 places nouvelles pour 2008 contre 5 000 l’année dernière. C’est la marque d’un effort important en vue d’augmenter la capacité d’accompagnement des territoires.

Quant aux PRIAC, ils correspondent à l’expression des besoins locaux, mais les crédits de la CNSA sont octroyés en fonction de critères visant à assurer l’équilibre territorial et, donc, l’équité. Il est exact que certains territoires éprouvent des difficultés à obtenir des moyens : c’est que la CNSA a eu pour premier souci de réparer certaines inégalités territoriales. Cet objectif d’équité pour l’ensemble du territoire national ayant été atteint, nous avons désormais pour préoccupation d’augmenter le nombre des places afin d’accompagner les départements déficitaires, comme le vôtre. Nous travaillons également avec les DDASS à raccourcir les délais entre le dépôt du projet et sa réalisation.

Enfin, la question du reste à charge pour les familles nous tient particulièrement à cœur et le Président de la République souhaite que le sujet soit traité dans le cadre du cinquième risque. Je rappelle que, sans attendre, dans le cadre du PLFSS pour 2008, 250 millions de crédits d’investissement ont été débloqués, lesquels réduisent d’autant le reste à charge.

M. René Couanau. La parole est à M. le haut-commissaire.

M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. S’agissant de l’article 49, je ne saurais, monsieur Bapt, vous répondre mieux que ne l’a fait Mme Bachelot.

Quant à l’exemple que vous avez cité, selon lequel il faut être demandeur d’emploi pendant deux ans avant de pouvoir bénéficier d’un contrat aidé, il administre la preuve qu’une remise à plat des règles s’impose. Nous avons quelques mois pour en discuter.

M. René Couanau. Au nom de la commission des finances et de la commission des affaires culturelles, je remercie Mmes les ministres, Mme la secrétaire d'État et M. le haut-commissaire de s’être prêtés aussi longtemps à cet échange intéressant. Nous vous saurions gré, monsieur Hirsch, de nous tenir informés des premiers résultats des expérimentations menées dans les départements pilotes, car nous y sommes tous très attentifs.

(La réunion de la commission élargie s’achève à dix-neuf heures trente-cinq.)