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Compte rendu
intégral

Commission des finances,
de l’économie générale et du plan

Commission des affaires économiques,
de l’environnement et du territoire

Commission élargie
Mardi 13 novembre 2007

(Application de l’article 117 du règlement)

Projet de loi de finances pour 2008

Ville et logement

Présidence
de M. Didier Migaud et de M. Patrick Ollier

(La réunion de la commission élargie commence à neuf heures.)

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. Madame la ministre du logement et de la ville, madame la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville, Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire et moi-même sommes heureux de vous accueillir dans le cadre de cette réunion de commission élargie pour vous entendre sur les crédits de la mission « Ville et logement » inscrits au projet de loi de finances pour 2008. M. Gilles Carrez, rapporteur général, qui préside ce matin le comité des finances locales, vous prie de bien vouloir excuser son absence.

La procédure de la commission élargie doit permettre de privilégier les échanges entre les ministres et les députés. Il s’agit notamment de donner la priorité aux principales observations et questions des rapporteurs, plutôt qu’à l’exposé de leurs rapports. Après que Patrick Ollier se sera exprimé, nous donnerons donc la parole à Yves Jego, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, et à Philippe Pemezec, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, qui s’exprimeront sur les crédits de la ville ; puis à François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances, et à Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, qui interviendront sur les crédits du logement.

Après les réponses du Gouvernement, nous donnerons la parole à un orateur de chaque groupe pour une première série de questions et de réponses. S’exprimeront ensuite les députés inscrits, qui souhaitent poser des questions complémentaires.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Je remercie également Mme Boutin et Mme Amara d’être présentes ce matin. La commission des affaires économiques voue un intérêt particulier à deux sujets d’une actualité brûlante, sur lesquels nous aimerions obtenir des informations : l’accession sociale à la propriété et le Grenelle de l’environnement.

S’agissant de l’accession sociale à la propriété, je souhaiterais que Mme Boutin puisse nous donner un premier bilan du dispositif mis en place ou, tout au moins, qu’elle nous indique les tendances du processus engagé. Le fait qu’en Espagne et au Royaume-Uni le taux de propriétaires soit respectivement de 85 % et de 72 % contre 56 % en France doit nous conduire – et c’est précisément ce que fait le Gouvernement – à prendre des dispositions fortes pour aider rapidement les Français dont les salaires sont les plus bas.

Quant au Grenelle de l’environnement, auquel nous avons tous deux participé, madame Boutin, je souhaiterais que vous nous en indiquiez, au fur et à mesure que vous répondrez à nos questions, les grandes orientations qui se traduiront dans le budget de votre ministère pour 2008. Je pense en particulier aux mesures concernant le bâtiment, les économies d’énergie et, plus généralement, la lutte contre le réchauffement climatique. Nos rapporteurs auront à cœur de vous poser des questions plus précises, notamment sur la politique de la ville.

La parole est à M. Yves Jego, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour la ville.

M. Yves Jego, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour la ville. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, je suivrai bien volontiers la proposition du président de la commission des finances et, plutôt que de vous présenter un résumé de mon rapport – que vous lirez, j’en suis sûr, avec beaucoup d’intérêt –, je vais vous interroger sur la politique de la ville. Celle-ci est au cœur des problématiques de notre société, comme nous l’ont rappelé, si besoin était, les événements de 2005.

Ma première question portera sur le programme national de rénovation urbaine qui, compte tenu de son importante montée en puissance, nécessitera des sommes conséquentes dans les mois et les années à venir, essentiellement dans le budget des deux prochaines années. L’État s’est engagé dans le cadre d’un programme de 465 millions d’euros et il a mobilisé des crédits provenant de la Caisse des dépôts et des SACI. Le budget pour 2008 permet de faire face à ces programmes pour l’année prochaine, mais j’aimerais savoir si l’on peut avoir la garantie que les appels d’offre que nous lançons aujourd’hui sur la base des conventions signées seront bien suivis par des crédits de paiement en 2009 et 2010 ?

Ma deuxième question, plus générale, m’a été inspirée par l’enquête sur la gestion des crédits d’intervention de l’État au titre de la politique de la ville, réalisée par la Cour des comptes à la demande de la commission des finances du Sénat. Elle soulève à nouveau la question de la disparité des outils de la politique de la ville : l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’Établissement public d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, ou encore la Délégation interministérielle à la ville. Comment entendez-vous rationaliser ces outils afin d’accroître leur efficacité et de permettre un meilleur suivi de l’utilisation des crédits ?

Par ailleurs, je souhaiterais vous interroger sur le ciblage de la politique de la ville. On constate en effet que les listes des quartiers susceptibles de faire l’objet d’opérations de la politique de la ville diffèrent selon les objectifs ou les moyens considérés. Ne pourrait-on pas définir un ciblage plus précis et mesurer plus simplement les priorités, plutôt que de mener des interventions à géographie variable ?

Je m’étonne, au sujet des zones franches urbaines, de l’absence de vérification des remboursements consentis au titre des déductions de charges sociales par les organismes chargés de collecter ces charges sociales. J’ai eu la surprise, en interrogeant le délégué interministériel à la ville, d’apprendre que l’État remboursait des sommes considérables sans aucun contrôle des montants déclarés. Est-il possible d’envisager la mise en place d’un contrôle, afin que le budget de l’État ne serve pas à compenser des mesures qui ne seraient pas justifiées ?

Enfin, je m’interroge sur le suivi du programme des adultes-relais. Il est difficile d’obtenir des informations précises, donc d’évaluer l’efficacité de ce programme, qui représente un coût unitaire annuel de 19 000 euros. Si, en tant qu’élu, je mesure bien l’utilité de ce contrat d’emploi, qui constitue la base de nombreux dispositifs, j’ai tout de même le sentiment que le pilotage de la formule n’est pas assuré et j’ai quelques doutes quant au fait que cette politique d’emplois subventionnés poursuive des objectifs ciblés.

Telles sont, messieurs les présidents, mesdames les ministres, les questions que je souhaite poser en tant que rapporteur spécial pour la ville.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je vous remercie pour votre concision, monsieur Jego. Vous pourrez évidemment intervenir à nouveau au cours de la discussion.

La parole est à M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour la ville.

M. Philippe Pemezec, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour la ville. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, je veux tout d’abord rappeler mon attachement à la politique de la ville. Je me pose toutefois certaines questions à ce sujet.

Dans le cadre du plan national de rénovation urbaine, l’État a ouvert des autorisations d’engagements pour plus de 2 milliards d’euros. J’aimerais savoir s’il restera des sommes à mobiliser après 2008 et si un échéancier réaliste a été prévu.

Par ailleurs, les versements extrabudgétaires que la Caisse des dépôts et consignations doit effectuer en 2007-2008 seront-ils bien effectués ? Le nombre de zones concernées par l’ANRU n’est-il pas trop élevé ? N’est-il pas le signe d’une dispersion des moyens et ne serait-il pas préférable de concentrer nos efforts sur un certain nombre de quartiers ? À l’issue des premiers mois de fonctionnement de l’ACSE, peut-on considérer que les actions entreprises par cette agence aient amélioré la situation en matière de cohésion sociale et d’égalité des chances ?

La question des infrastructures de transport est très importante, car la réussite de la politique de la ville passe obligatoirement par le renforcement des moyens de transport, en particulier dans les zones sensibles. C’est pourquoi j’aimerais savoir quelle part des crédits sera affectée à cette action.

Le coût important du service civil volontaire est-il justifié, et les publics visés à l’origine par ce programme sont-ils bien ceux qui en bénéficient ? Ne serait-il pas opportun de modifier la loi sur l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, afin d’étendre le domaine sur lequel il doit exercer sa fonction d’évaluation à toutes les dimensions de la politique de la ville ?

Est-il possible de dresser un premier bilan des stages de citoyenneté, auxquels sont affectés des crédits non négligeables ? Par ailleurs, il est question d’une réorientation du contenu du programme « Ville-vie-vacances ». Qu’en est-il ? Pouvez-vous également nous parler des équipes de réussite éducative et des internats de réussite éducative, du nombre de sites concernés et des résultats obtenus ?

Dans le cadre de l’action de prévention et de développement social du programme « Équité sociale et territoriale et soutien », les sommes consacrées au financement des mesures pour l’amélioration de l’habitat s’élèvent actuellement à 2 millions d’euros pour les quartiers de plus de 500 logements. Cette somme est-elle suffisante, ou avez-vous l’intention de l’augmenter ?

Pouvez-vous nous expliquer le fonctionnement de l’opération « Une grande école : pourquoi pas moi ? » et nous en communiquer les premiers résultats ? Comment la phase de démarrage des contrats urbains de cohésion sociale s’est-elle déroulée – en particulier la discussion avec les élus locaux ? Y voyez-vous un outil efficace pour résoudre les problèmes de la cité ?

Enfin, la Cour des comptes a rendu un rapport critiquant la gestion des crédits de la politique de la ville. Quelles leçons en tirez-vous ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je vous informe que M. François Scellier, rapporteur spécial pour le logement, nous rejoindra plus tard.

La parole est à M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour le logement.

M. Jean-Pierre Abelin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, pour le logement. Votre budget, madame la ministre du logement et de la ville, illustre la priorité accordée au logement si l’on se réfère à l’augmentation sensible des sommes qui lui sont consacrées, tant en autorisations d’engagement et en crédits de paiement qu’en termes d’effort fiscal – au-delà de 12 milliards d’euros. Destinés à répondre aux besoins, les objectifs fixés par le Président de la République et le Gouvernement sont très ambitieux : création de 500 000 logements neufs et 140 000 logements sociaux par an, vente de 40 000 logements HLM.

Quelle stratégie comptez-vous adopter pour atteindre ces objectifs dans un environnement économique difficile, marqué par l’augmentation des taux d’intérêt, le durcissement du crédit bancaire, le niveau élevé du marché et la relative saturation de l’appareil productif ?

Par ailleurs, les représentants des associations du droit au logement, que nous avons entendus, craignent qu’à défaut d’un effort plus important, le droit opposable reste purement virtuel. Pouvez-vous apaiser leur inquiétude à ce sujet ? Quelles seront les conséquences du fait que le PARSA n’ait pas été intégralement réalisé, notamment en ce qui concerne les maisons-relais ? Parmi les 37 propositions figurant dans le rapport remis au Président de la République par le comité de suivi, lesquelles comptez-vous reprendre ?

Envisagez-vous de nouvelles mesures foncières en Île-de-France ? Quel résultat les cessions de terrains publics appartenant à l’État ont-elles permis d’obtenir en termes de logement, en particulier de logement social ? L’objectif très ambitieux de 40 000 logements a été fixé en matière de ventes HLM. Pouvez-vous nous préciser les modalités de cette opération et le calendrier retenu pour son exécution ?

Le président Ollier vient d’évoquer le Grenelle de l’environnement, qui revêtira effectivement une grande importance pour l’avenir. Des objectifs ont été fixés par le Président de la République, notamment en matière de réhabilitation de logements anciens, et des normes très ambitieuses en matière de consommation d’énergie ont été définies, pour le neuf comme pour l’ancien. Quels moyens nouveaux consacrera-t-on à la poursuite de ces objectifs, et selon quel calendrier législatif ? Nous sommes nombreux à souhaiter connaître dès que possible les différents dispositifs qui seront mis en place.

Enfin, la Cour de justice européenne doit rendre prochainement une décision relative au financement du logement social, en particulier sur la banalisation de la collecte au moyen du Livret A. Quelle sera votre position en cas de rejet du recours de la France ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Yves Jego, suppléant M. François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour le logement.

M. Yves Jego, suppléant M. François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour le logement. La loi sur le droit opposable au logement comportait un objectif de financement de 591 000 logements sociaux sur la période 2005-2009, ce dont nous nous félicitons tous. Toutefois, un problème important se pose aujourd’hui, celui de l’augmentation considérable du coût de la construction, qui a des répercussions sur le logement social et l’accession sociale à la propriété. J’ai fait partie de ceux qui soutenaient le projet de la maison à 100 000 euros. Malheureusement, si ce projet était réalisable il y a trois ans, il ne l’est déjà plus : aujourd’hui, avec la meilleure volonté du monde, il faut au moins 125 000 ou 130 000 euros pour faire construire une maison. Quelles réponses pourrait-on apporter à cette dérive du coût de la construction, qui va peser lourdement sur le logement social ?

Par ailleurs, 47 880 PALULOS ont été octroyés hors ANRU en 2006. Ne serait-il pas pertinent d’augmenter ces crédits, ce qui permettrait d’éviter l’intervention de l’ANRU dans un certain nombre de cas – notamment dans les quartiers se trouvant à la limite entre la restructuration urbaine lourde et la simple rénovation ? Cette question rejoint en fait celle du ciblage de la politique d’intervention dans les quartiers. Il est sans doute possible, en de nombreux endroits, de recourir à des dispositifs de droit commun – notamment la PALULOS – évitant la mise en œuvre d’outils plus spécifiques et l’alourdissement financier qui en résulte.

François Scellier aimerait également connaître la position du Gouvernement au sujet des dispositifs d’investissement locatif Robien et Borloo, en particulier quant à la perspective de rendre ceux-ci plus cohérents et plus lisibles pour le grand public. Il propose que leur mise en œuvre soit soumise à un agrément préalable susceptible d’accroître leur efficacité territoriale.

Enfin, ne serait-il pas possible de permettre à l’ANAH de jouer davantage sur la fongibilité des crédits d’intervention qui se trouvent dans ses délégations de compétences ? Si l’utilité de cette agence n’est plus à démontrer, il est étonnant de constater que 25 millions d’euros n’ont pu être consommés en 2006 en raison de l’impossibilité de recourir à la fongibilité.

Telles sont, messieurs les présidents, mesdames les ministres, les questions que souhaitait vous poser M. le rapporteur spécial pour le logement.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Messieurs les présidents, mesdames et messieurs les députés, je me réjouis que nous ayons pu trouver une date pour cette réunion de travail, dont la forme est un peu inédite pour moi. Je répondrai essentiellement aux questions concernant la politique de la ville et du logement. Mme Amara répondra plus spécifiquement sur les sujets la concernant dans le cadre de la mise en place du plan pour les jeunes. Je remercie en tout cas les différents orateurs pour leurs questions concises mais riches.

Le président Ollier m’a interrogée sur le plan d’accession à la propriété, souhaitant connaître le bilan du dispositif. S’agissant de l’accession à la propriété, la France est très en retard par rapport à un certain nombre de pays européens. Ainsi, nous comptons une moyenne de 56 % de propriétaires, contre 80 % en Italie et en Espagne. Le Président de la République nous a donné l’objectif de faire passer ce pourcentage à 70 % et nous nous efforcerons, bien sûr, d’y parvenir. J’appelle cependant votre attention sur le fait que le nombre de propriétaires varie en France en fonction des classes d’âge. Entre soixante et soixante-cinq ans, par exemple, 80 % de nos compatriotes sont propriétaires. Le rêve de devenir propriétaire se réalise donc majoritairement puisque, du fait de l’allongement de la durée de vie, nombre d’entre nous atteignent cette classe d’âge.

S’agissant de l’objectif de 70 %, il faut développer l’accession à la propriété pour tenter de le tenir. Mais nous n’irons pas au-delà de ce taux. Je suis renforcée dans cette analyse après les contacts que j’ai eus avec nos voisins européens, et en particulier avec les Espagnols. Ils nous ont alertés en effet sur le fait que le taux de 80 % posait un certain nombre de difficultés. En outre, je souhaite conserver la diversité d’offre existant aujourd’hui, tant en matière d’accession à la propriété que dans le locatif, et tant dans le privé que dans le secteur social. Ce principe est inscrit au fronton de mon ministère.

Concernant plus particulièrement l’accession sociale, il est possible de cumuler PTZ et crédit d’impôt. Je vous confirme à cet égard que, contrairement à une rumeur qui avait couru, il n’est nullement question de remettre en cause le PTZ. Celui-ci reste un instrument très intéressant pour les primo-accédants.

S’agissant du Pass-foncier, nous avons signé une convention à Lyon, à l’occasion de la décentralisation de mon ministère, pour améliorer le dispositif et faire en sorte que la TVA passe à 5,5 %, avec une exonération de taxe sur le foncier bâti pendant vingt-cinq ans. Cela se traduira dans la loi de finances. Le financement de 20 000 opérations par an après 2008 est également prévu.

Concernant la vente de HLM, la question a été posée lors de la décentralisation de mon ministère à Lyon, qui avait pour but de créer une synergie entre tous les acteurs majeurs du monde de la construction. Rappelons que le Président de la République a donné pour objectif 500 000 constructions par an, 40 000 logements HLM vendus, 120 000 constructions sociales et 70 % de propriétaires.

J’ai espéré pouvoir signer à Lyon une convention avec l’ensemble du monde HLM portant sur la vente de ces 40 000 logements sociaux. À l'exception des offices, tout le monde était prêt à signer. Je le sais, l’expérience de Lyon a été regardée avec curiosité par certains. Je peux vous dire que cette opération a été très importante au regard de nos objectifs, et notamment de celui de respecter les obligations prévues dans la loi sur le droit au logement opposable. La vente d’HLM était symboliquement forte. Pour ne pas faire exploser l’unité du monde HLM, qui est très importante, je n’ai cependant pas signé à Lyon la convention avec tous les autres partenaires concernés.

Cela étant, j’ai très clairement fixé au 15 décembre la date butoir de façon que nous puissions continuer de négocier avec les offices. Les négociations n’ont pas complètement abouti aujourd’hui, mais la signature devrait bien avoir lieu aux alentours du 15 décembre. Je pense qu’un accord sera trouvé, d’ici là, avec les offices. Si j’y parviens, après six mois à la tête de ce ministère, ce sera pour moi une grande joie. L’objectif, en effet, est d’en finir avec ce scandale français qui fait que nous n’arrivons pas à loger toutes les personnes vivant sur notre territoire. Un effort très important de construction doit être consenti. La vente des 40 000 logements HLM souhaitée par le Président de la République vise, non pas à déposséder le monde HLM, mais à accroître la capacité financière des organismes HLM pour permettre la construction de nouveaux logements.

M. Marcel Rogemont. On en vend deux pour en construire un !

Mme la ministre du logement et de la ville. S’agissant du Grenelle de l’environnement, qu’il soit clair que le ministre du logement souhaite, comme tous les Français, sauver la planète. Levons toute ambiguïté à cet égard : nous voulons tous sauver la planète. (Rires et exclamations.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Le problème, c’est le porte-monnaie !

Mme la ministre du logement et de la ville. Cela étant, et sans vouloir polémiquer puisque nous avons tous le même objectif, le secteur du bâtiment et de la construction est actuellement à l’origine d’une production de 45 % de CO2 au grand maximum. Dans les orientations données à la louche, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, on demande cependant à l’habitat de réduire de 70 % ses émissions. C’est un effort important, d’autant que nous avions déjà commencé à travailler sur la nécessité de réduire la consommation d’énergie dans les logements. Le Grenelle de l’environnement ne pourra que développer cette dynamique.

Monsieur Jego, vous m’avez interrogée sur la maison à 100 000 euros. Je ne vais pas tout dévoiler aujourd’hui, (Sourires) mais, vous le verrez, j’ai dans mes cartons des formules qui permettront de construire des maisons moins chères et répondant à toutes les contraintes environnementales. Je n’ai qu’un problème : le foncier. (Exclamations.)

M. Marcel Rogemont. C’est le problème de tout le monde !

Mme la ministre du logement et de la ville. Pour en revenir au Grenelle de l’environnement, et j’engage ma responsabilité de ministre sur ce point, il est évident que les aides financières qui accompagneront les décisions prises devront être prioritairement orientées vers les familles dont les budgets sont les plus fragiles. Les mises aux normes de logements anciens au vu des exigences du Grenelle de l’environnement vont coûter cher. Or je n’oublie pas que je suis aussi en charge de l’exclusion et de la précarité – c’est dans mon décret d’attribution même si cela n’apparaît pas dans le titre de mon ministère. Je serai donc très vigilante. Il est hors de question de créer une nouvelle précarité, la précarité énergétique. Le Parlement pourra m’apporter son soutien en la matière. Les aides financières de l’État devront être prioritairement affectées aux plus fragiles. Il ne faut absolument pas créer – n’est-ce pas, monsieur Pinte ? – ce que j’appelle la double peine énergétique : les familles qui n’arriveraient pas à mettre leur logement aux normes seraient sanctionnées à ce titre et pénalisées ensuite par le coût de leur chauffage. Je lutterai donc pour éviter cette double peine énergétique.

S’agissant du programme ANRU, monsieur Jego, je vous rappelle que 531 quartiers sont actuellement concernés, 189 quartiers prioritaires et 342 quartiers supplémentaires. J’ai la volonté de poursuivre cette action. Je souhaite cependant donner une dimension sociale plus importante à ces projets de reconstruction. Les opérations plus lourdes nécessiteront certainement une poursuite du programme. Mais l’ANRU ne me semble pas appropriée pour les petites opérations, pour lesquelles j’entends travailler à la mobilisation des crédits spécifiques déconcentrés auprès des préfets.

Par ailleurs, la problématique des quartiers anciens dégradés n’est pas prise en compte à la hauteur des enjeux. Je souhaite donc que nous fassions un effort particulier en la matière.

En ce qui concerne les crédits de paiement de l’ANRU, l’État tient la totalité des engagements pris au titre de la loi de programmation, monsieur Jego, soit 465 millions d’euros d’autorisations d’engagement minimum par an depuis 2004. Avec le projet de loi de finances pour 2008, nous atteindrons 2 375 millions d’euros, soit 40 % de l’enveloppe globale de la loi de programmation 2004-2013 en cinq ans.

Pour les crédits de paiement, depuis le début du programme, l’État a déjà versé directement, sur ressources extrabudgétaires, 457 millions d’euros qui devraient être portés à 957 millions d’euros fin 2008.

S’agissant de la mise en œuvre, le PNRU monte très fortement en puissance : près de 500 millions d’euros de paiement en 2007 et une tendance qui devrait mener à une consommation de 800 millions d’euros en 2008 et plus de 1 milliard en 2009.

Quant à la Caisse des dépôts et consignations, il faut rappeler qu’elle est un partenaire essentiel du programme de rénovation urbaine. Les relations avec la CDC sont d’ailleurs excellentes. Elle intervient dans les décisions comme membre du conseil d’administration et du comité d’engagement de l’ANRU. Elle intervient à hauteur de 4 millions d’euros pas an au fonctionnement de la structure. Elle intervient aussi sur ses fonds propres au financement de l’ingénierie des projets au travers d’une subvention de 20 millions d’euros par an. Elle intervient également par la mobilisation de prêts spécifiques sur fonds d’épargne à hauteur de 4 milliards d’euros. Elle intervient enfin au titre de ses actions d’intérêt général en accord avec sa commission de surveillance et le ministère des finances – sa participation s’élèvera en 2007 à 100 millions d’euros.

Vous m’avez également interrogée, monsieur Jego, au sujet du rapport de la Cour des comptes sur la gestion des crédits de la politique de la ville. Ce rapport est intéressant et légitime l’action que j’ai engagée pour réunifier la ville et tous ses habitants. Il pointe un certain nombre de dysfonctionnements et souligne notamment qu’en dix-neuf ans nous avons eu dix-sept ministres de la ville, ce qui nuit fatalement à la continuité de la politique suivie. Cela ne fait que confirmer la légitimité du Gouvernement qui entend procéder à la révision générale des politiques publiques, de manière à améliorer l’organisation administrative et politique de notre pays. Quoi qu’il en soit, ce rapport confirme l’urgence de la rupture, et Mme Amara vous dira tout à l’heure ce qu’elle en pense.

Concernant le ciblage, Mme Amara vous répondra également. Pour ma part, dans la réflexion globale que je mène sur les ruptures qui doivent intervenir dans la politique de la ville, je m’interroge sur l’opportunité des zonages, qui aboutissent à créer de véritables ghettos administratifs, politiques et financiers, et empêchent le développement des échanges entre les uns et les autres. Après sept mois dans mes fonctions ministérielles, je n’ai pas encore arrêté mon opinion définitive sur la question et aurai l’occasion, au cours de l’année à venir, de vous en reparler.

Sur la politique des adultes-relais, c’est Mme Amara qui vous répondra, puisque cela relève plus spécifiquement du cadre de sa responsabilité.

Pour ce qui concerne l’ACSE, cette agence a été créée le 31 mars 2006 afin de renforcer l’efficacité de l’action de l’État en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville et de la lutte contre les discriminations. À ses trois missions principales s’ajoutent aujourd’hui le service civil volontaire, la lutte contre l’illettrisme – qui est à mes yeux une question prioritaire –, ainsi que la gestion du fonds interministériel de prévention de la délinquance.

Les six premiers mois de 2007 ont été difficiles, mais le bilan de l’ACSE est aujourd’hui très bon, voire excellent. Nous ferons un nouveau bilan en fin d’année, et Mme Amara vous donnera des précisions supplémentaires.

Le dispositif du service civil volontaire n’a, quant à lui, pas encore trouvé son équilibre, et je compte lancer une réflexion sur cette question, qui fait également partie du champ des préoccupations de Mme Amara.

M. Pemezec m’a également questionnée sur le programme « Ville-vie-vacances ». Pour 2008, les orientations sont les suivantes : consolidation du dispositif, plus grande ouverture au monde extérieur pour sortir des quartiers et de l’entre-soi, exigences accrues sur l’encadrement éducatif et, dans une logique de droits et devoirs nécessaires, structuration du jeune, c’est-à-dire instauration d’une forme de contrepartie de sa part ou de celle de sa famille.

Une enveloppe financière suffisante a été prévue pour que puisse être poursuivies les actions de 2007 en matière de réussite éducative.

J’ai, par ailleurs, été interrogée sur le dispositif « Une grande école : pourquoi pas moi ? » Je vous rappelle que cette opération de tutorat a été lancée en 2002, à partir d’une expérience menée par l’ESSEC. En 2007, plus de trente grandes écoles et universités ont participé à l’opération, qui a concerné plus de 1 600 lycéens, pour un coût de 1,24 million d’euros. Le développement du tutorat nécessite une meilleure coordination des différentes initiatives ; un travail est donc en cours pour leur réunion en une seule opération, intitulée « Objectif réussir », qui devrait être régie par une charte nationale en cours d’élaboration.

Je pense avoir répondu à l’ensemble des questions relatives à la ville. Une fois que Mme Amara se sera exprimée, je reprendrai la parole à propos du logement.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville.

Mme Fadela Amara, secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. J’évoquerai d’abord le rapport sur la politique de la ville, que je trouve très intéressant. Ce n’est pas le premier. Dans un précédent rapport, la Cour des comptes émettaient les mêmes critiques sur des problématiques identiques ; dans un rapport du Sénat, les élus de la nation arrivent aux mêmes conclusions et, dans le cadre de nos concertations territoriales, les habitants des quartiers nous disent exactement la même chose, à savoir qu’il n’y a pas de visibilité et qu’ils ne comprennent pas la politique de la ville ; seul perdure un sentiment d’abandon.

Ce rapport fournit en tout cas de bonnes orientations sur l’avenir de la politique de la ville. J’en tiendrai compte, comme je tiendrai compte des remarques qui m’ont été faites par les représentants des associations – notamment l’association des maires de banlieue – que j’ai rencontrés.

Par ailleurs, je compte également m’appuyer sur les enseignements du préfet Lacroix, qui travaille sur la question, ainsi que sur l’audit de la revue générale des politiques publiques.

Il ne s’agit pas de bâtir une politique de la ville en rupture avec celle de mes prédécesseurs – sur lesquels je ne veux pas jeter l’opprobre – mais de la rendre plus pertinente et plus efficace, afin que les habitants des quartiers n’aient plus le sentiment d’être abandonnés.

Je pense d’ores et déjà qu’il est fondamental pour cela, d’une part, de réaffirmer l’importance du couple préfet-maire, car ils sont à mes yeux les deux acteurs de proximité les plus importants, et, d’autre part, de valoriser les associations de quartiers, qui sont les forces vives de notre pays et qui travaillent au quotidien dans les quartiers.

On a pu observer combien le couple maire-préfet était un maillon fondamental de la cohésion sociale avec la signature des CUCS, qui ont réussi ce pari extraordinaire de donner vie à des projets parfaitement adaptés à la réalité territoriale. Certes, les CUCS sont récents et leurs résultats restent à évaluer, mais il me semblent que c’est dans cette direction que nous devons nous orienter pour élaborer une politique de la ville qui tienne compte des plus récentes critiques.

À propos du ciblage, certains ont parlé de stigmatisation. Quant à moi, je pense que la première chose à faire est de stigmatiser la pauvreté dans notre pays ! Cela étant, la question du zonage se pose, car le champ des politiques de la ville s’est tellement étendu ces dernières années que les actions s’apparentent plus à du saupoudrage qu’à autre chose. Il faut donc recentrer nos actions et mettre en place un nouveau système, organisé, par exemple, à partir de couleurs. Il est essentiel en effet que la politique de la ville soit lisible et compréhensible même par ceux qui n’ont pas un bac + 15. J’ai donc proposé des couleurs parce que j’aime le métissage, mais peu importe les dénominations, pourvu que l’on atteigne notre objectif qui est de construire une politique de la ville sur mesure, la plus pertinente possible. On aurait donc les quartiers rouges – ceux qui sont le plus en difficulté et sur lesquels il faut « mettre le paquet » pour redonner espoir à leurs habitants –, les quartiers oranges – qui connaissent des difficultés moins graves mais sérieuses quand même – et les quartiers jaunes – qui présentent des signes d’alerte et nécessitent d’autres formes d’intervention. C’est comme ça, selon moi, que l’on réussira à construire une politique de la ville qui apporte une réponse adaptée aux difficultés de chaque territoire.

Voilà, dans ses grandes lignes, la politique de la ville que j’entends mettre en œuvre avec Christine Boutin.

Le dispositif des adultes-relais est très important. Il est vrai qu’il coûte cher – 88 millions d’euros, ce qui n’est pas rien –, et il est important que nous puissions l’évaluer, ce qui ne manquera pas d’être fait dans le cadre de la revue générale des politiques publiques, dont il faudra retenir les préconisations.

Le travail de l’ACSE et de ses services régionaux doivent changer de nature. Comme cela découle des critiques formulées lors des concertations territoriales, il est important de renforcer la contractualisation et la pluralité des échanges avec les associations. Il faut aussi éviter que les associations ne perdent leur temps à monter les dossiers. Le soutien des adultes-relais leur permet, à cet égard, de travailler davantage sur la durée et en profondeur. Il ne fait pas de doute, en tout cas, que le dispositif peut être amélioré.

Je compte également utiliser l’outil des contrats d’objectifs pour permettre à l’ACSE d’évoluer le plus rapidement possible, c’est-à-dire courant 2008. Il nous faut évidemment passer de la logique de guichet à la logique de respect, pour reprendre les termes de quelqu’un que vous connaissez bien.

L’ACSE n’a commencé à travailler que très récemment et on ne peut pas la faire évoluer pour l’instant, mais nous pouvons surmonter divers points négatifs. Ainsi, la signature des contrats urbains de cohésion sociale n’a pas permis le paiement rapide des associations en 2007. Il nous faut donc l’accélérer. La mise en place du nouveau circuit financier et de l’outil informatique a retardé les paiements. Aujourd’hui, tout fonctionne et il est désormais possible de suivre les mouvements de façon détaillée, pour chaque territoire – il est vrai que c’est au prix d’un effort d’apprentissage.

L’ACSE doit maintenant trouver ses marques et aller encore plus loin. Il lui faut unifier les cultures départementales, régionales et nationale, car quelques problèmes de gouvernance subsistent, et il nous faut aller vers davantage de contractualisation. Nous devons tenir compte de toutes les critiques.

Le service civil volontaire est un outil important, qui permet de favoriser la mixité dans les quartiers. Il constitue l’un des éléments de la mobilisation contre la « glandouille » – mot que j’ai déjà utilisé et que je maintiens. S’il devait se généraliser, la question de son financement devrait être clairement posée, car, à ce jour, les évaluations montrent que le service civil volontaire ne concerne que 15 % des jeunes des quartiers. La question de la mobilisation des financements de droit commun est également posée ici.

J’ai entendu les critiques visant le programme « Ville-vie-vacances ». Je suis moi-même très dure à l’égard de ce dispositif, tout en pensant qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Avec le temps, les activités sont devenues de pures activités de consommation, sans projet éducatif : le programme a mal évolué. Aujourd’hui, il permet toutefois des projets à vocation éducative et préventive, et il faut le renforcer. Ce dispositif participe à la politique de la ville, de prévention de la délinquance et en faveur de la citoyenneté. D’ailleurs, depuis janvier 2007, l’ACSE gère ce dispositif intégré au sein du fonds interministériel pour la prévention de la délinquance.

Je voudrais à présent vous faire part de mes objectifs pour 2008.

Il nous faut consolider le dispositif et l’orienter en priorité vers les adolescents et les adolescentes les plus âgés, les plus en difficulté et faisant déjà l’objet d’un suivi. Il faut mieux répondre aux attentes des filles. De plus en plus, le dispositif ne bénéficie qu’aux garçons. Il faut ouvrir sur la mixité et la parité. Il faut ouvrir les activités au monde extérieur pour sortir des quartiers et de l’entre-soi, pour favoriser un brassage social et culturel. Il faut accroître l’encadrement éducatif et favoriser l’implication des parents. Il nous faut aussi établir une forme de contrepartie de la part du jeune ou de sa famille dans une logique de droits et de devoirs nécessaire à la structuration du jeune. Cela me semble décisif pour que le dispositif soit efficace en 2008.

Je l’ai dit, les réussites éducatives sont un dispositif très important. Je me battrai de toutes mes forces – et, je l’espère, avec vous – pour que, demain, émerge l’élite des quartiers populaires, et pour qu’elle accède elle aussi aux responsabilités. Il nous faut réussir ce pari extraordinaire pour redonner espoir à beaucoup de jeunes dans les cités, pour qu’ils puissent s’identifier, pour renforcer cette dynamique. J’ai été l’une des premières personnes à soutenir dès le départ la convention avec Sciences-Po, alors même qu’elle était décriée.

Il faut, d’autre part, multiplier les internats éducatifs de réussite. Il arrive un moment où il faut sortir certains jeunes de la mouise, les protéger des pressions qui s’exercent dans certains quartiers, des tentations qui les empêchent de réussir leur processus d’insertion sociale et professionnelle. Ces dispositifs sont vraiment des réponses adaptées à cet objectif et il nous faut les renforcer. Vous êtes les élus de la nation : j’ai besoin de votre aide pour que cette parole soit entendue.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous en revenons au logement.

La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme la ministre du logement et de la ville. M. Jean-Pierre Abelin m’a posé plusieurs questions. Il m’a notamment demandé quelle était notre stratégie pour atteindre nos objectifs dans un environnement difficile. Je le remercie d’avoir souligné que l’environnement était difficile : nous sommes en effet dans une situation très délicate et il s’agit de mobiliser tous les partenaires du logement. Quand j’ai été nommée à la tête du ministère, j’ai commencé par étudier les dossiers et, surtout, j’ai auditionné les principaux partenaires, qu’ils soient constructeurs, bailleurs, locataires ou financeurs. J’ai été très étonnée de constater que tout le monde s’accordait sur le constat : la pénurie que nous connaissons s’explique par le fait que, pendant vingt ou trente ans, on n’a pas construit. Toutefois, lorsque je demandais les raisons de cette situation, chacun en rejetait la responsabilité sur l’autre. J’ai donc eu l’idée de rassembler tous ces partenaires dans une même unité de temps et de lieu, à l’occasion de trois congrès qui se tenaient à Lyon et auxquels un ministre du logement n’aurait su manquer : ce fut l’origine de la décentralisation du ministère pendant quinze jours, place Bellecour. Certains ont souri de cette initiative. Laissons sourire ceux qui ne veulent pas regarder au fond. Grâce à cette opération de décentralisation, tous les partenaires, quels qu’ils soient – publics, privés, financeurs, bailleurs ou locataires –, sont désormais sur la ligne de départ, et vous en verrez les premiers résultats dans les semaines et les mois qui viennent. À Lyon, j’ai pu signer une bonne vingtaine de conventions, dont vous pourrez prendre connaissance de façon plus approfondie lors du congrès des maires – puisque nombre d’entre vous sont également maires –, sur le stand du ministère du logement et de la ville.

Nous sommes engagés dans une course contre la montre. Quels que soient la bonne volonté, les décisions ou les effacements administratifs, des lourdeurs administratives, politiques ou autres peuvent exister : entre le moment où la décision d’une construction est prise et celui où l’on met la clef dans la serrure, il se passe du temps. Quand on fait cette démarche à titre personnel, il faut au minimum vingt-quatre mois ; quand c’est l’État qui a 500 000 logements à construire par an, il faut davantage de temps. Si j’avais laissé les choses suivre leur cours normal, il m’aurait fallu dix-huit mois pour parvenir à la signature de cette vingtaine de conventions – qui, certes, sont d’importances inégales –, alors que, là, nous sommes déjà tous sur la ligne de départ. C’est le premier fruit de la stratégie que j’ai voulu adopter : il fallait réunir tout le monde, pour créer une synergie.

Chacun prendra sa part. Je n’exclus pas – et vous n’en serez pas surpris – de faire confiance au monde HLM, au 1 %, mais également au partenariat public-privé. Je remarque en effet une volonté très vive de faciliter la construction de ces logements sociaux. Aujourd’hui, l’embolie menace toute la chaîne du logement et il faut construire d’urgence des logements de toute nature. Il est, pour l’instant, impossible de faire sortir des personnes qui sont en centres d’hébergement et de réinsertion sociale, parce que nous n’avons pas de logements ordinaires à leur proposer. Les personnes qui sont en CHRS empêchent celles qui sont en centres d’hébergement d’urgence d’aller en CHRS, et celles qui sont à la rue ne peuvent pas rentrer en CHU, faute de place. L’urgence de l’urgence, c’est de construire !

Le logement doit prendre une place importante dans le développement de la croissance de notre pays.

Mme Claude Darciaux. C’est une réalité !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Cela ne date pas d’aujourd’hui !

Mme la ministre du logement et de la ville. Ma stratégie, c’est d’abord de mettre tout le monde en route. Tout le monde est désormais sur la ligne de départ, et vous verrez bientôt les premiers résultats. Ne me demandez pas d’aller plus vite qu’il n’est possible. Mon engagement est de favoriser les maires bâtisseurs.

Mme Martine Billard. Et les autres ?

Mme la ministre du logement et de la ville. C’est, pour moi, la priorité des priorités.

Vous ne m’avez pas demandé quelle sera ma politique à l’égard de la loi SRU et de son article 55 : je vais peut-être vous laisser le soin de poser vous-même la question, à moins que je ne vous réponde par anticipation.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. C’est ce que faisait le général de Gaulle ! (Sourires.)

Mme la ministre du logement et de la ville. Il s’agit en effet d’un élément stratégique de la politique du logement que je compte mener. Nous travaillons à trouver des encouragements pour les maires bâtisseurs, à les valoriser, à leur donner des aides de nature fiscale ou financière.

Encore une fois, je répète que je ne stigmatise personne. Certains maires construisent ; d’autres ne le font pas, et ce n’est pas parce qu’ils ne le veulent pas, mais parce qu’ils ne le peuvent pas. Je veux, pour ma part, encourager la construction.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très bien !

Mme la ministre du logement et de la ville. Je voudrais que le logement devienne une cause nationale et que nous travaillions tous ensemble avec les acteurs du logement que j’ai pu rassembler.

Je me suis interrogée sur les raisons du déficit de constructions de logements que nous constatons depuis vingt ans, sous la droite comme sous la gauche – je ne veux stigmatiser personne. Un élément d’analyse m’a semblé intéressant : dans les années quatre-vingt-dix, l’INSEE a fait des prévisions démographiques bien en deçà de ce qui s’est effectivement produit.

M. Pierre Bourguignon. C’est vrai !

Mme la ministre du logement et de la ville. De même, il n’a absolument pas tenu compte des évolutions de la société et n’a pas vu que l’éclatement des familles allait rendre nécessaire de prévoir davantage de logements. L’administration et les élus, s’étant fondés sur les analyses prospectives de l’INSEE, n’ont pu anticiper le besoin de logements nouveaux. Aujourd’hui, le retard à combler est très important.

Notre stratégie est donc d’encourager les maires bâtisseurs, de les valoriser, y compris vis-à-vis de leurs citoyens. Il y a en effet, dans cette affaire, une responsabilité citoyenne. Certains élus voudraient bien construire, mais ils ne le peuvent pas car leur population s’empresse de fonder des associations de défense et de leur mettre des bâtons dans les roues.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Il faut avoir du courage !

Mme la ministre du logement et de la ville. D’autre part, l’article 55 de la loi SRU sera appliqué de façon stricte et ferme.

Mme Martine Billard. Mais encore ?

Mme la ministre du logement et de la ville. C’est assez long à mettre sur pied, mais les ordres seront donnés. Je ne reviendrai pas sur cette loi. Je l’ai déjà dit très clairement à de multiples reprises, ayant siégé parmi vous pendant des années, je sais très bien les discussions qui peuvent se développer sur certains sujets. La règle des 20 % sera donc appliquée. Si je reviens sur la loi SRU, la gauche me demandera d’augmenter le pourcentage, et la droite de le baisser. Cela ne servirait à rien, nous perdrions notre temps. (Exclamations.)

M. Marcel Rogemont. Mais c’est nous qui aurons raison !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Mes chers collègues, la parole est libre, et chacun pourra s’exprimer. Nous avons entendu vos protestations.

Mme la ministre du logement et de la ville. Je souhaite vraiment que nous mettions notre énergie créative, de gauche comme de droite, à trouver des réponses à ce problème du logement et que nous ne perdions pas nos nuits dans des discussions stériles et passionnées entre les uns et les autres. Je sais que rouvrir le débat sur l’article 55 de la loi SRU ne peut que nous amener à nous coucher très tard, après des discussions violentes. Je préférerais que vous mettiez vos intelligences au service de la création législative pour trouver le moyen d’encourager les maires bâtisseurs à construire.

Vous pourriez également utiliser vos talents à défendre cette cause auprès de Bercy, et même je vous le demande car, vous le savez, négocier avec Bercy n’est pas toujours simple.

J’espère, monsieur Abelin, avoir été suffisamment précise en ce qui concerne la stratégie.

Vous m’avez également posé la question de savoir si le DALO était, comme l’un d’entre vous l’a affirmé, un droit virtuel. Je ne peux pas laisser dire une chose pareille.

D’abord, pour une raison politique : je rappelle que la loi DALO, qui a été le dernier texte de la précédente législature, a été votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. J’aimerais que vous corrigiez votre phrase, madame la ministre : cette loi a été adoptée à l’unanimité des votants, et nous ne l’avons pas votée.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. S’il vous plaît, monsieur Le Bouillonnec, quand vous aurez la parole, vous rétablirez votre vérité.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est « la » vérité !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. On n’interrompt pas la ministre !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je voulais juste apporter une précision.

Mme la ministre du logement et de la ville. C’est la vérité, et je le montrerai.

Mme Annick Lepetit. Non ! c’est votre vérité !

Mme la ministre du logement et de la ville. La loi instituant le droit au logement opposable est une loi qui a été votée à l’unanimité des votants.

M. Marcel Rogemont. À l’unanimité de la droite !

Mme la ministre du logement et de la ville. Et j’estime que cette loi appartient, je le souligne car c’est relativement rare, au patrimoine politique de notre pays.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous sommes d’accord.

Mme la ministre du logement et de la ville. J’avais pris l’initiative comme parlementaire de déposer une proposition sur le droit au logement opposable car je crois dans ce droit et que j’estimais qu’il fallait mettre fin au scandale qui régnait dans notre pays dans ce domaine.

Cette proposition de loi a été reprise par le Gouvernement. J’ai été la rapporteure du texte. Je ne pensais pas, sincèrement, en être le ministre de l’application. Mais je savais parfaitement comme rapporteure quelle serait la difficulté de la mise en application de cette loi.

Mme Annick Lepetit. C’est le problème !

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Mme la ministre du logement et de la ville. Ceux qui me connaissent savent que j’aime les défis. Eh bien, je peux vous assurer que ce défi, nous le relèverons. Nous n’avons pas le droit de faire croire que ce droit au logement opposable pourrait être virtuel. C’est un droit de la République française, il s’appliquera en France. Lorsque Jules Ferry a décidé que l’éducation serait un droit opposable, j’imagine qu’à l’époque cela devait paraître complètement virtuel. Or il y est arrivé…

M. Maxime Bono. Jules Ferry avait mis d’autres moyens !

Mme la ministre du logement et de la ville. Nous y arriverons de la même façon.

Nous nous sommes imposés, je le rappelle aux députés de la législature précédente, un calendrier difficile. On m’avait même prédit, lorsque je suis arrivée au ministère, que je ne parviendrais pas à le tenir. Or, jusqu’à présent, le calendrier est parfaitement respecté.

La commission de suivi a été mise en place. Le décret d’application a été validé par le comité de suivi ; il est actuellement au Conseil d’État ; il va sortir dans les jours qui viennent. Les commissions de médiation seront mises en place au 1er janvier 2008. J’ai en effet obtenu dans le cadre du budget, alors que nous sommes dans un budget contraint et que la création de postes n’est pas à l’ordre du jour, la création des postes nécessaires à la mise en place de ces commissions de médiation dès le 1er janvier 2008.

Donc, pour l’instant, le calendrier, dont on me disait au départ que je n’arriverais pas à le tenir, est respecté.

J’ai laissé entendre qu’au 1er décembre 2008 il y aurait peut-être un bug. Je n’en suis pas certaine mais je savais, dès le départ, et vous aussi, que l’échéance du 1er décembre 2008 serait extrêmement difficile à respecter. Mais vous saviez fort bien aussi, parce que vous êtes des responsables politiques, que, si nous avions changé cette date lors de la discussion parlementaire, tout le monde aurait pensé qu’il n’y avait pas de volonté politique.

C’est la raison pour laquelle j’ai laissé en tant que rapporteure cette date du 1er décembre 2008. Pour moi, la volonté politique est absolue, qu’elle soit de droite comme de gauche, et, comme ministre de ce droit au logement opposable, j’en fais une priorité.

Peut-être donc connaîtrons-nous quelques difficultés au 1er décembre, et j’en parle parce que je veux anticiper cette problématique, mais au moins, si elles existent, elles seront réduites au maximum. Je ne veux pas vous en dire davantage aujourd’hui, mais j’ai déjà un certain nombre d’idées dans ma besace qui vous montreront que ce droit au logement opposable n’est pas virtuel.

Compte tenu de cette précision, je ne pense pas qu’il soit nécessaire que je développe les trente-sept propositions contenues dans le rapport remis par le comité de suivi DALO. Je dirai simplement que j’adhère à un grand nombre de propositions, que nous reprendrons à notre compte.

Ces trente-sept propositions se situent à des niveaux différents, en termes à la fois d’applicabilité dans le temps, mais également d’ambitions. Globalement, ce rapport me convient, en particulier la dernière proposition, celle qui a été reprise par la presse et qui me semble la plus importante, qui serait de lancer un plan Marshall pour la région Île-de-France en ce qui concerne le logement.

J’ai même anticipé cette proposition. Je ne vous ferai pas l’offense de vous rappeler que la situation du logement est très diverse sur le territoire, et qu’elle est très tendue en Île-de-France, en Rhône-Alpes, en PACA et dans le Nord. Mais il faut savoir que la région Île-de-France rassemble 50 % de la problématique du logement dans notre pays. Constatant cette difficulté particulière, j’ai demandé au préfet de région, M. Mutz, de rassembler au niveau de la région Île-de-France des partenaires, dont les élus, pour que nous puissions voir comment nous pouvons traiter spécifiquement, et peut-être de façon expérimentale, la situation en Île-de-France.

Du reste, lorsque le comité de suivi a présenté son rapport au Président de la République, j’ai évoqué devant lui la difficulté à laquelle tous les responsables politiques sont confrontés : dans les zones tendues, nous sommes vraiment à la croisée des chemins en ce qui concerne la décentralisation. Ainsi, soit nous allons vers davantage de décentralisation, et les élus prennent toute la responsabilité du logement, avec tout ce que cela comporte en ce qui concerne la loi DALO, soit, au contraire, nous expérimentons, pendant une période donnée, une certaine recentralisation. Le Président de la République n’a pas semblé hostile à l’idée d’une telle expérimentation.

La question m’a été posée de savoir combien il y avait eu de terrains publics cédés. Un des problèmes majeurs que nous avons à régler face à ce défi du logement, au-delà du financement, pour lequel nous arriverons à trouver une solution, au-delà de la réalisation de constructions pour lesquelles il existe un panel d’offres très important, c’est le foncier parce qu’on ne peut pas construire si l’on n’a pas de foncier.

J’ai donc demandé à mes services que l’État soit exemplaire en ce qui concerne les réserves foncières de l’État. Ainsi, il est prévu dans l’une des conventions signées à Lyon avec la SOVAFIM, Société de valorisation foncière et immobilière, que celle-ci s’engage à ne pas garder à sa disposition plus d’un an les terrains avant que ceux-ci ne soient proposés soit à la collectivité territoriale soit à un opérateur privé pour la construction. Le problème du foncier est majeur, en particulier en région Île-de-France.

En septembre 2005, le Gouvernement a considéré que la mobilisation des emprises foncières de l’État et des établissements publics devait contribuer de façon significative à la réalisation de ses objectifs ambitieux de construction de logements, notamment sociaux. L’inventaire par les préfets des terrains publics mobilisables a conduit à la réalisation d’un objectif de construction de 30 000 logements à échéance de trois ans. Au 31 décembre 2006 – naturellement, nous n’avons pas le bilan pour 2007 – il y avait 135 cessions, pour un montant total de 365 millions d’euros et une surface totale de 190 hectares.

Au 31 décembre 2006, nous constatons que 41 % des terrains répertoriés dans les deux catégories A et B ont déjà fait l’objet d’une cession. Près de la moitié du nombre des cessions observées se concentrent sur les départements de l’Île-de-France, pour un montant de 167 millions d’euros. Une dizaine de décotes ont été appliquées en 2006, pour les trois quarts à Paris. L’effort ainsi consenti par l’État s’élève à plus de 16 millions d’euros.

Les 135 opérations qui ont fait l’objet d’une cession contribuent à la production de 17 500 logements programmés, soit 60 % de l’objectif national. Sur ces 17 500 logements, 9 100 auront une destination sociale, dont 2 500 pour les étudiants. La moitié de ces opérations sont situées en Île-de-France, mais, je l’ai déjà dit, l’Île-de-France concentre 50 % de la problématique du logement du territoire national.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Permettez-moi juste une observation, madame la ministre.

Vous insistez beaucoup sur les problèmes de l’Île-de-France. Malheureusement, de nombreuses agglomérations hors de l’Île-de-France connaissent également un vrai problème d’offre de logements et de foncier.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C’est vrai !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Donc, ce qu’il faudrait, c’est un plan Marshall pour toute la France, en ciblant peut-être sur quelques agglomérations particulières en fonction des besoins, et non seulement un plan Marshall pour la seule Île-de-France. Ne réduisons pas la France à la seule Île-de-France !

Mme la ministre du logement et de la ville. Je reconnais bien là les débats ancestraux de la province vis-à-vis de l’Île-de-France !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous sommes les élus de la nation, c'est-à-dire de la France entière, madame la ministre !

Mme la ministre du logement et de la ville. Monsieur le président, ne croyez pas que je veuille opposer les uns aux autres.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je le sais, mais la précision me semblait utile.

Mme la ministre du logement et de la ville. Le comité de suivi DALO, qui a une compétence nationale, a demandé un plan Marshall pour l’Île-de-France, en raison de la gravité des problèmes observés dans cette région. Il ne s’agit en aucun cas d’opposer l’Île-de-France aux autres régions, mais simplement d’envisager une expérimentation là où les tensions sont plus importantes. Merci de m’avoir permis d’apporter cette précision.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Il serait bon également que les commissions nationales comprennent davantage de provinciaux.

Mme la ministre du logement et de la ville. Absolument.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Un rééquilibrage pourrait peut-être intervenir.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Bravo !

Mme la ministre du logement et de la ville. Je suis tout à fait d’accord avec vous, monsieur le président. Ainsi, chacun comprendrait mieux les problèmes des uns et des autres.

Un programme complémentaire de 50 000 logements s’ajoutant aux 30 000 logements de l’inventaire 2005 doit être lancé prochainement : pour 2008, il est prévu 19 900 logements sur 280 hectares publics ; pour 2009, 2 140 logements sur 48 hectares ; pour 2010, 5 560 logements sur 51 hectares ; et pour 2011, 9 400 logements sur 170 hectares. Il reste à préciser la programmation des 13 000 logements restants.

Concernant la vente d’HLM, je crois vous avoir répondu.

S’agissant du Grenelle de l’environnement, je voudrais préciser que M. Borloo va mettre en place des comités par thématique qui permettront de définir un programme d’actions. Il devrait y avoir plusieurs comités : sur le bâtiment ancien, le neuf, etc. C’est dans ce cadre que seront définies les dispositions financières et juridiques. Un des grands objectifs de M. Borloo est d’imaginer, avec les banques, des prêts qui financeraient les investissements économisant l’énergie et qui seraient remboursés grâce aux économies de charges.

Il a raison, mais je pense qu’il faudra beaucoup de travaux dans certains logements avant que l’on arrive à l’énergie positive.

J’en viens à l’importante question du Livret A, qui préoccupe à juste titre tous les Français. À la suite de la décision prise par la Commission de Bruxelles le 10 mai dernier, le Gouvernement a déposé une requête en annulation devant le tribunal de première instance des Communautés européennes. J’ai, pour ma part, demandé qu’une mission de réflexion soit engagée. Elle est confiée à Michel Camdessus, que je rencontre périodiquement pour examiner les meilleures conditions possibles d’une éventuelle banalisation. Le tribunal ne devrait pas se prononcer avant le milieu de l’année 2008 et il n’est pas exclu qu’il donne raison à la France.

À ce stade, les différents acteurs concernés – HLM, banques, associations, économistes – ont été auditionnés par la mission Camdessus qui a à l’esprit les deux contraintes importantes de son travail : assurer les meilleurs conditions possibles au logement social, ainsi que l’accessibilité bancaire des plus démunis. Les conclusions de la mission seront remises mi-décembre. Je ne peux pas encore vous en donner les grandes lignes, mais je peux d’ores et déjà vous dire que le rôle du Livret A dans le financement du logement sera maintenu. On peut même espérer une amélioration des conditions de financement du logement social.

Monsieur Scellier, vous avez eu un excellent interprète en la personne de M. Jego, mais je suis heureuse de pouvoir vous répondre personnellement.

M. François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour le logement. Je regrette d’avoir été défaillant, et vous prie de bien vouloir excuser mon retard !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. C’est tellement exceptionnel que vous êtes tout excusé !

Mme la ministre du logement et de la ville. Vous vous inquiétez de l’avenir de la maison à 100 000 euros. Je vous ferai dans quelques mois des propositions concernant les logements à faible coût.

S’agissant du développement des PALULOS, compte tenu de l’importance de la crise du logement, le gouvernement précédent avait orienté le plan de cohésion sociale vers la production d’offres nouvelles. Cependant, la nécessité de poursuivre l’amélioration du parc existant n’a pas été sous-estimée. Parmi les objectifs fixés à l’ANRU figure la réhabilitation de 400 000 logements entre 2004 et 2013.

Pour les territoires qui ne sont ni en ZUS ni en zone équivalente, c’est-à-dire qui ne font pas partie du champ d’intervention de l’ANRU, l’État s’est engagé, dans la convention signée avec l’USH en décembre 2004, à financer 40 000 PALULOS par an. En dehors des PALULOS, des bailleurs sociaux peuvent faire appel aux prêts à l’amélioration distribués par la Caisse des dépôts et consignations, qui s’est engagée pour un montant de 200 millions d’euros par an pendant la durée du plan de cohésion sociale.

D’ici au projet de loi de finances pour 2009, nous ferons le bilan des trois premières années d’application de la convention et des quatre premières années d’intervention de l’ANRU.

Sur le problème des PALULOS, ma réflexion n’est pas aboutie, mais il me semble que quelque chose ne marche pas bien. En effet, certains élus n’ayant plus suffisamment de PALULOS se rabattent sur des projets de rénovation qui ne sont absolument pas adaptés à leurs besoins. C’est comme utiliser un pilon pour écraser une mouche ! Je mène donc une réflexion très approfondie pour que nous puissions, en 2009, offrir une réponse conforme aux besoins des ces élus.

Le ciblage des quartiers fait aussi partie de mes réflexions. Je me pose beaucoup de questions sur le zonage, qui a des effets pervers sur les plans politique, financier, économique et culturel. Nous avons ainsi des quartiers les uns à côté des autres alors qu’il faudrait avoir une vision globale de la ville.

Vous m’avez demandé de remettre en cohérence les dispositifs Robien et Borloo. Un rapport au Parlement est prêt et, après accord du ministre du budget, il vous sera prochainement adressé. C’est sur cette base que pourraient être envisagés des ajustements sur les plafonds de loyers afin de mieux prendre en compte la diversité géographique des marchés immobiliers. Je suis sensible à cette nécessité, car des questions se posent en effet pour le Robien, mais je ne peux vous en dire davantage au risque de déstabiliser un marché.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour le logement.

M. François Scellier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, pour le logement. Je vous remercie, madame la ministre, pour vos réponses.

Un débat a été lancé tout à l’heure sur le plan Marshall pour l’Île-de-France. Le problème posé est en effet – nous venons encore de le constater avec le dispositif Robien – celui de l’adaptation territoriale des politiques du logement. Je sais bien qu’une telle adaptation est difficile à mettre en œuvre, si ce n’est par des politiques de zonage, au regard du principe d’égalité, mais vous avez pris la problématique par le bon bout en disant que c’est toute la chaîne du logement qui doit être examinée. Il faut prévoir des dispositifs particuliers pour chaque territoire, car la situation en province n’est pas la même qu’à Paris et, en province même, elle est encore totalement différente selon que l’on se trouve dans les grandes agglomérations ou en dehors. C’est une question importante qu’il va falloir prendre à bras-le-corps.

Je veux aussi insister sur le problème de l’hébergement d’urgence. Je sais bien que le droit au logement opposable ne restera pas virtuel – votre connaissance des dossiers et votre action dans certains domaines montrent bien que vous vous impliquerez fortement –, mais l’hébergement d’urgence concerne des publics particuliers qui exigent un véritable accompagnement social, une insertion vers l’emploi, et je me demande si les crédits prévus seront suffisants pour conduire une politique très attendue et emblématique, eu égard au mal-logement et au mal-vivre qui touchent notre société. Je défendrai donc un amendement visant à dégager des moyens supplémentaires pour une meilleure implication dans le domaine du logement d’urgence.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous allons maintenant entendre les orateurs inscrits.

La parole est à M. Michel Piron, au nom du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Michel Piron. Tout d’abord, je vous prie de bien vouloir m’excuser, madame la ministre, car je serai sans doute obligé de m’absenter avant d’entendre vos réponses, pour me rendre au Comité des finances locales. Mais je lirai attentivement ces réponses dans le compte rendu de la séance.

Vous avez lancé à Lyon, madame la ministre, une démarche visant à accroître l’offre de logements accessibles. Une des propositions consistait à mettre sur le marché des logements mobilisant le secteur locatif privé en sécurisant les propriétaires bailleurs contre les risques locatifs. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce dispositif ?

Dans un contexte de pénurie certaine de logements et d’écarts de loyers très importants entre le parc privé et le parc public, le taux de rotation du parc HLM ne cesse de s’affaiblir. Qu’envisagez-vous pour améliorer la fluidité de ce parc ? Les questions qui se posent sont évidemment celles du montant des loyers et du maintien dans le parc ou dans des lieux à l’identique.

Les financements existent pour la production de logements locatifs sociaux, mais, comme vous l’avez d’ailleurs souligné, les mises en chantier peinent à suivre. Comment réduire ce décalage ?

Vous avez évoqué l’hébergement d’urgence. Plus on transforme des lieux d’hébergement d’urgence en lieux de stabilisation, ce qui est évidemment la tendance en période hivernale, moins il en reste, et cela pose un vrai problème. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce sujet ?

Les 495 CUCS jouent un rôle majeur dans la rénovation urbaine. Leur difficulté de mise en œuvre et les lourdeurs de l’instruction administrative débouchent malheureusement sur une certaine inertie. Qu’en est-il, sachant que la rénovation urbaine concerne quelque 2,9 millions de personnes, ce qui n’est pas rien ?

Enfin, la question foncière fait depuis longtemps l’objet de débats récurrents depuis de nombreuses années déjà, de débats théoriques concernant la disponibilité foncière « sur plans », et de débats pratiques concernant la disponibilité foncière « réelle ». Envisagez-vous des mesures permettant d’augmenter l’une ou l’autre, sachant que – cela a été dit – si la région parisienne concentre entre 40 % et 50 % des problèmes, le Genevois est également très concerné, de même d’ailleurs que la région PACA, pour ne citer que les trois grandes zones reconnues nationalement comme très difficiles ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, au nom du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, avant de poser mes questions, qui seront complétées par mes collègues et qui rejoindront d’ailleurs celles des rapporteurs, je voudrais souligner que nous nous heurtons à un réel problème de méthode pour prendre en compte la question du logement.

En termes de technique budgétaire, je regrette que nous soyons obligés de vous voir dans deux commissions différentes pour parler d’un sujet unique. Le président de la commission des finances et celui de la commission des affaires économiques ont constaté chacun que l’hébergement d’urgence est évoqué dans le cadre de l’autre commission, ce qui atténue, à mon sens, l’efficacité du débat, et contraint nos rapporteurs à poser des questions auxquelles il a déjà été répondu, au moins partiellement.

Quant au fond, nous avons besoin de vérité, en matière de données, de chiffres et de résultats. Nous avons voté cinq budgets, et quatre textes promus au rang de « grandes lois nationales » : le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, le projet de loi portant engagement national pour le logement et celui instaurant le droit au logement opposable. Lors de leur examen par l’Assemblée, certains d’entre nous ont bataillé et querellé sur leurs problématiques et leurs objectifs. Pourtant, à l’heure actuelle, ils ne savent pas où l’on en est, et je crains que nul ne le sache.

Nous sommes ainsi confrontés au cumul des chiffres et à leurs contradictions. On continue à inscrire et à proclamer des financements, alors que le seul instrumentum pour lutter contre la crise du logement est le nombre de chantiers ouverts chaque année. Or, en la matière, nous n’avons gagné que de 15 000 à 18 000 logements sociaux par rapport à l’année 2000. Loin de moi toute polémique politicienne, mais n’est-il pas incroyable d’avoir autant légiféré en cinq ans pour un bénéfice de seulement 15 000 logements par an ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. C’est juste.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est pourquoi j’en reviens au problème de la méthode : pourquoi tant de volonté et d’énergie pour un aussi piètre résultat, que soulignent les explications que vous avez fournies, madame la ministre ? À mon sens, les données démographiques ou le manque de prise en compte de l’évolution sociologique de la société – à propos desquels nous partageons votre analyse – ne sont pas en cause. Ce sont bien les choix budgétaires qui sont concernés, et dont les effets se font sentir.

Vous avez évoqué les PALULOS.

Mme la ministre du logement et de la ville. Oui.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Quand nous avons abordé le projet de loi sur la solidarité et le renouvellement urbains, les orateurs de tous les groupes ont mis le Gouvernement en garde. Si l’on baissait la vigilance à l’égard du droit commun pour focaliser l’engagement de l’État sur des opérations ou des quartiers spécifiques, on risquait soit de préparer – à vingt-cinq ans d’intervalle – le prochain plan banlieues,…

Mme la ministre du logement et de la ville. Tout à fait.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …soit de manipuler volontairement les élus, en les contraignant à chercher des financements là où ils le pourraient. C’est exactement ce qui s’est passé. Et je ne le rappelle pas pour souligner que j’avais raison, à l’époque, car tout le monde partageait alors la même analyse. Quoi qu’il en soit, un autre choix a prévalu. En 2000, on évaluait à 100 000 le nombre des PALULOS. Chacun s’y était mis en France. Aujourd’hui, nous en sommes seulement à 37 000 – et encore : je ne suis pas certain que ces primes aient été perçues pleinement.

Le vrai problème réside donc dans les choix budgétaires. Le Gouvernement et les élus de la nation doivent assumer certaines décisions, dont l’opposition essaie à présent de réparer les effets. Ainsi, nous allons déposer un amendement de suppression du dispositif Robien. C’est une arme massue, direz-vous, mais vous connaissez mieux que nous la pratique parlementaire.

Mme la ministre du logement et de la ville. Certes !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous ne pouvons pas accepter, étant donné la crise actuelle, que l’on cumule plus de 500 millions d’exonérations fiscales, alors que vous raclez les fonds de tiroirs pour essayer d’exécuter vos objectifs en matière de droit au logement opposable, et que vous n’y parviendrez pas cette année.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. En effet !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous contestons les choix politiques qui ont été faits, même si, en tant que tels, ils étaient honorables, quel que soit leur aboutissement. Et j’en appelle, au nom de mon groupe, à la vérité des données et des statistiques. Sollicitée, vous avez d’ailleurs partagé notre analyse, quand nous avons souligné qu’il fallait nous donner un instrument.

Aujourd’hui, nous devons compiler les données du projet de loi portant diverses dispositions relatives à l’urbanisme, à l’habitat et à la construction, de la Fondation Abbé-Pierre et de l’Union des HLM, pour disposer d’un aperçu, et attendre enfin la correction de l’Union européenne, sept ans plus tard, pour connaître les chiffres exacts. Certains d’entre nous ne seront peut-être pas d’accord, mais je considère que les parlementaires comme les pouvoirs publics appréhendent leur politique en dehors de toute réalité, ce qui justifie notre exigence de vérité.

Quant au budget lui-même, je constate, sans entrer dans la donne générale, que sa structure n’est pas en mesure de résoudre la crise que vous dénoncez et qui justifie votre cri d’alarme. La progression de la ligne du logement pose le problème des crédits de paiement, notamment, à très brève échéance, de l’ANRU. Lors des auditions, nos collègues de la majorité ont constaté eux-mêmes que le décrochage de ses crédits provoquera bientôt un effet de ciseaux, auquel il faudra apporter une réponse financière. En outre, M. Jego a souligné que l’abondement de la ligne est assuré essentiellement par des crédits exceptionnels, et ce pour la deuxième année.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. En effet !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Cette année, on sollicite les SACI ; l’an dernier, le financement était particulièrement opaque. Une telle situation augure mal de l’avenir : quels crédits exceptionnels l’État trouvera-t-il en 2009 pour financer le plan de rénovation urbaine, alors que le fonctionnement de la machine, qui a été lourde à mettre en place, exigera des fonds ?

En outre, l’État a laissé des ardoises. Les 400 millions dus aux bailleurs sociaux ont été apurés en partie, comme M. Borloo s’y était engagé, et les dettes réduites à 200 millions d’euros. Mais elles stagnent à présent, et recommenceront bientôt à croître. Les bailleurs sociaux risquent ainsi de connaître des difficultés de financement sur les opérations qu’ils conduisent, tout en étant contraints d’en entreprendre d’autres.

La vérité du budget est donc essentielle. Au-delà des clivages politiques, c’est un enjeu nécessaire, si l’État veut prendre en main les instruments et les solutions.

Sur l’APL, nous avons pris acte de la déclaration du Premier ministre qui, par votre voix, madame la ministre, a répondu aux questions que nous lui avons posées la semaine dernière. Il annonce une augmentation de 3 %, mais, pour l’instant, le budget ne fait pas apparaître ce chiffre. Il faudra donc nous expliquer comment vous y parviendrez.

Par ailleurs, nous avons déposé un amendement sur l’APL, tendant à supprimer le seuil de versement fixé à 15 euros. Il est inacceptable à nos yeux qu’on ne puisse pas attribuer chaque mois une somme à quelqu’un qui bénéficie d’un droit. L’APL est la seule aide à n’être pas versée en dessous d’un seuil donné, ce qui est une aberration juridique. Comment la justifier ? Il y a sûrement une manière de calculer les modalités de paiement autrement, notamment par trimestre. Je l’ai signalé à plusieurs reprises. Ces 15 euros par mois correspondent à 180 euros par an. Autant dire qu’il s’agit d’une somme substantielle : pour le bénéficiaire d’une telle aide, elle représente l’équivalent d’un mois de loyer.

Mme Annick Girardin. Ou les dépenses de chauffage !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je profite de ces deux questions – comment le budget intégrera-t-il la progression de 3 % ? accepterez-vous de supprimer le seuil de versement de l’APL ? – pour saluer le combat mené de manière unanime par la commission des affaires économiques, afin de ramener à 15 euros le seuil qui avait été pernicieusement relevé à 24. Il nous aura fallu trois ans…

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Eh oui !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …pour régulariser la situation, alors que la régulation budgétaire de l’État s’exerçait à plein. À cet égard, je vous rends hommage, monsieur le président de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Merci !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Notre commission s’est fait retoquer à deux reprises par le Sénat sur le sujet.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Mais nous avons fini par avoir gain de cause !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est vrai ! Quant à l’ANRU, madame la ministre, il faut rappeler qu’elle mène une politique non de logement, mais de rénovation urbaine, ce qui n’est pas incompatible et ne lui retire aucune qualité. Mais il faut rappeler que, lorsqu’on prévoit une stratégie de renouvellement urbain sur des territoires, elle n’entre pas dans la politique du logement. Certains l’ont relevé à juste titre : si l’on atteint fin 2007, comme le prétendent les chiffres qu’on nous a fournis, une moyenne de sept constructions pour dix démolitions, cela signifie que, dans toutes les zones de renouvellement urbain, la rénovation a accentué la crise de l’offre de logement locatif social. Pouvez-vous nous répondre sur ce point ?

Quant à la question de l’intervention de l’État, est-il possible de connaître le détail exact du patrimoine qu’il a cédé durant ces trois dernières années, ainsi que la part affectée au développement économique, d’une part, et, d’autre part, au logement ? Leur rapport est, semble-t-il de 1 à 5. Autant dire que, si l’État veut favoriser en vendant son patrimoine la politique du logement et la construction, il dispose de deux solutions : soit il définit des objectifs dans lesquels doivent s’insérer les opérateurs de la mutation ; soit, en cas de cession à des collectivités ou à des partenaires, ceux-ci doivent s’engager à en affecter une partie à telle ou telle politique. Pour l’instant, le patrimoine de l’État ne sert pas prioritairement au logement. Les choix effectués à cet égard peuvent être légitimes en termes de stratégie, mais il faut poser ce problème important.

Mes collègues s’exprimeront sur la DSU, je passe donc rapidement sur ce point et j’en viens à mes deux dernières questions.

L’une concerne le problème du zonage. Nous avons intégré l’article 6 dans la loi SRU, pour pouvoir, conformément au vœu de l’Association des maires Ville et Banlieue de France, prendre en compte tous les quartiers confrontés à des problèmes, et pas uniquement ceux dits « en difficulté », au titre de l’ANRU ou des grands projets de ville. Nous avons considéré que l’État devait s’engager envers eux, afin d’alléger le poids qui pèse sur l’ANRU, qui engage actuellement des opérations en faveur de certains territoires en utilisant des fonds qui pourraient servir aussi bien à d’autres. Mais, pour l’heure, madame la ministre, il n’existe pas d’autre voie : on ne peut pas entreprendre une opération de renouvellement urbain sans entrer dans la stratégie de l’ANRU.

Pour en venir à mon dernier point, je m’étonne que l’on continue à évoquer, à propos de l’opération « Ville-vie-vacances », la ligne budgétaire interministérielle consacrée à la prévention de la délinquance. Une grande majorité de maires ne finance pas l’opération sur ce budget, qui, selon eux, ne la concerne pas de manière prioritaire.

Mme Annick Girardin. En effet.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je m’explique mal que l’on continue à évoquer en l’espèce une telle ligne budgétaire. Cela correspond, certes, à la démarche de prévention adoptée initialement, mais on y a renoncé depuis longtemps au bénéfice de la cohésion sociale. Ainsi, les CUCS englobent non seulement la ligne « prévention », mais les lignes « éducation », « loisirs », « accès à la culture », etc. C’est pourquoi je regrette que, sur le plan budgétaire, une ligne interministérielle dévolue à la prévention de la délinquance alimente l’opération « Ville-vie-vacances », qui possède, à mes yeux, une autre dimension.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Francis Vercamer, au nom du groupe Nouveau Centre.

M. Francis Vercamer. Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, ce budget prend un relief particulier à la lumière du récent rapport de la Cour des comptes sur la politique de la ville et du logement, qui pointe un certain nombre d’insuffisances. Complexité des zonages, multiplicité des instances, absence de lisibilité, incertitudes sur les financements, complexité des procédures : autant de griefs qui ne doivent pourtant pas nous faire oublier que la politique de la ville est indispensable pour agir sur les quartiers en difficulté. C'est bien pour cela que nous devons nous battre pour qu’elle gagne en efficacité.

À cet effet, il faut bien sûr intervenir massivement dans les quartiers qui concentrent les difficultés sociales et – comme vous l’avez indiqué, madame la ministre – éviter le saupoudrage. C’est ce à quoi visent certaines politiques, notamment la rénovation urbaine, qui rassemble un certain nombre de partenaires politiques, et que nous soutenons.

Néanmoins, certains problèmes semblent compromettre nos ambitions. Le rapport d’évaluation pour 2006 pointe la complexité croissante des procédures. Pour le seul critère de l’insertion par l’économie, voici le formulaire que l’on nous demande de remplir. (M. Vercamer déploie une longue liasse de documents.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Et voici le financement qui va avec ! (M. Le Bouillonnec brandit un petit porte-monnaie presque vide. – Rires.)

M. Francis Vercamer. Le suivi comptable l’emporte sur une politique du résultat ou de l’efficacité. Quant à la concertation, elle est faiblement prise en compte. Vous l’avez indiqué vous-même : lorsqu’une concertation modifie le projet, le changement de la convention financière est d’une telle complexité, compte tenu du nombre de partenaires qui doivent signer, que la concertation ne parvient pas à modifier véritablement le projet.

Enfin, l’évolution du projet du projet n’est pas envisagée de façon réaliste. Il n’est pas tenu compte des aléas potentiels comme les appels d’offre infructueux de plus en plus fréquents, en province en tout cas, qui allongent les délais et risquent de mettre les projets en péril. Adressez-vous à l’administration pour tenter de régler cette question, et elle se contentera de vous répondre qu’il vous appartient de vous débrouiller pour respecter la période de cinq ans ! Faudrait-il s’affranchir du respect des procédures d’appel d’offres pour tenir les délais ?

Nous nous demandons par ailleurs comment peut se mettre en place l’articulation entre l’ASCE et l’ANRU et quel est le rapport entre l’Association nationale pour l’égalité des chances et l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.

Quelques questions se posent sur ce premier volet. Qu’en sera-t-il des projets qui n’iraient pas à leur terme du fait des délais liés à un appel d’offres infructueux ou à la découverte tardive de la nécessité de dépolluer un site ? Y aura-t-il encore une place pour de nouveaux projets, autrement dit, quelle est votre position sur l’article 6 : maintiendra-t-on des projets qui ne sont pas prioritaires ? Quelle simplification proposerez-vous pour une plus grande efficacité du projet et surtout pour qu’il aboutisse ? En effet, l’objectif premier de l’ANRU est de mener ses actions à terme , et non pas de réaliser des économies.

Sur le volet équité territoriale, la plus grande interrogation porte sur la pérennisation des financements. Les centres sociaux, notamment la CAF, mais aussi un certain nombre d’acteurs financés par l’État, et les associations sont confrontés à des problèmes et manquent de visibilité à long terme. Le temps passé aujourd’hui à monter les dossiers et à rechercher des financements dépasse celui consacré à leur activité sociale propre. Il faut réorienter l’action de l’administration afin que les associations retrouvent leur mission première.

Quelles mesures envisagez-vous pour améliorer la visibilité financière des acteurs sociaux ? Même si les contrats urbains de cohésion sociale comportent des contrats sur trois ans, ils ne sont pas respectés par l’administration en raison de l’annualité budgétaire. Par ailleurs, certaines administrations n’admettent pas que le droit commun s’applique sur les territoires concernés par le CUCS – je pense notamment au ministère de la culture.

M. Marcel Rogemont. C’est exact !

M. Francis Vercamer. Sur la question du logement, je tiens à féliciter le Gouvernement, et notamment mesdames les ministres, pour leur fermeté sur l’accession à la propriété et sur la construction. Néanmoins, tous les Français ne pourront pas être propriétaires, certains devront rester locataires. Je constate avec intérêt votre détermination en matière de construction de logements sociaux : 142 000 ont été financés en 2008, dont 20 000 logements très sociaux. Je remarque toutefois que pour 2007, alors que la construction de 20 000 logements très sociaux de type PLAI était prévue, seulement 12 700 seraient construits. L’évolution défavorable des taux d’intérêt et les marchés publics infructueux vont rendre les objectifs annoncés encore plus difficiles à atteindre. Que pensez-vous faire pour tenter d’améliorer cette situation ?

Le rapport du comité de suivi de la loi DALO comporte des propositions. J’avais moi-même émis celle concernant le permis de louer, qui s’est transformé en déclaration de louer, notamment pour les logements indignes et les personnes en extrême difficulté. Le rapport préconise une évolution favorable des crédits de l’ANAH que je ne constate pas dans le budget 2008 : quel est votre avis à ce sujet ?

Pour conclure, mesdames les ministres, je vous félicite pour la fermeté que vous avez affichée aujourd’hui sur la loi SRU. Vous savez que j’ai été un défenseur de ce texte, au grand dam de M. Ollier puisque je m’étais opposé à son amendement sur la réforme de la loi SRU.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est parce que vous ne l’aviez pas compris ! (Sourires.)

M. Francis Vercamer. Madame la ministre, quelle est votre position sur la proposition qui a été faite de donner à l’État un droit de préemption sur les logements privés dans les communes qui n’ont pas atteint le seuil de logements sociaux prévu par la loi. Irez-vous jusqu’à mettre en place cette mesure ?

Ma seconde question portant sur la loi SRU concerne la vente des logements sociaux à leurs occupants. M. Ollier vous a également interrogée…

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Ne me mettez pas en cause, monsieur Vercamer ! Vous risquez d’allonger le débat, car je vous répondrai. (Sourires.) Interrogez plutôt la ministre.

M. Francis Vercamer. Un certain nombre de maires se demandent légitimement si les logements vendus à leurs occupants entrent toujours dans le calcul de la dotation d’État et, pendant un certain temps, dans le quota des 20 %. Le Nouveau Centre avait indiqué que le seuil des 20 % ne devait pas être modifié, mais la question que posait M. Ollier est importante en ce qui concerne la dotation de solidarité urbaine. Si la vente de logements sociaux entraîne une baisse des dotations, les maires seront tentés de les interdire sur le territoire de leur commune, afin de ne pas se priver de ressources.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Martine Billard, au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Mme Martine Billard. Madame la ministre du logement, vous nous expliquez, d’une part, que l’un des principaux problèmes de la construction de logements réside aujourd’hui dans le foncier, ce qui est vrai sur de nombreux points du territoire, et, d’autre part, qu’il faut vendre les HLM pour dégager des fonds nécessaires à la construction. Mais, confronté à un problème de foncier, je ne vois pas comment on pourra reconstruire une fois que les terrains occupés par les HLM auront été vendus. En Île-de-France – mais il y a d’autres zones de tension –, la vente des HLM risque de se solder uniquement par un recul du logement social et d’en rendre l’accès encore plus difficile aux familles qui ont des petits revenus.

Madame la ministre, vous avez beaucoup évoqué la nécessité d’inciter les maires bâtisseurs. Mais qu’en est-il des autres maires ? Un certain nombre de communes n’atteignent pas les fameux 20 % et 243 villes n’ont aucune politique active en ce domaine en 2006. Vous nous avez demandé, monsieur le président, de ne pas débattre de la loi SRU afin d’avancer plus rapidement, mais la question se pose : le Gouvernement osera-t-il utiliser les outils qui sont déjà dans ce texte ? Il est en effet inutile d’imaginer de nouvelles mesures pour faire appliquer la loi, elles sont déjà dans le texte et permettent au préfet de se substituer aux maires défaillants. L’État pourrait ainsi faire en sorte, même si son intervention allonge les délais, que dans un certain nombre de communes il y ait construction ou préemption de manière à disposer de toute la gamme des logements sociaux.

Je voudrais également vous interroger sur les familles logées en hôtel – les personnes sans enfants sont orientées vers les centres d’hébergement d’urgence, les CHU, et les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS. Le problème se pose de façon massive en Île-de-France, je m’excuse auprès de mes collègues de province car je ne connais pas la situation sur le reste du territoire. Le logement des familles avec enfants dans les hôtels d’Île-de-France coûte une fortune aux collectivités et à l’État. Cette solution ne permet pas aux familles de préparer des repas, elle les oblige à faire des dépenses énormes et engendre des carences nutritionnelles, notamment pour les enfants. Ces derniers ne peuvent pas faire leurs devoirs, ni étudier dans de bonnes conditions. Les tensions familiales sont très importantes, la famille et les enfants sont progressivement détruits. Quelles réflexions vous inspire cette situation et que comptez-vous faire pour y mettre fin alors que les sommes consacrés par les pouvoirs publics aux factures d’hôtel pourraient permettre à ces familles de se loger autrement ?

Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, j’aborderai un dernier point, relatif aux conséquences du Grenelle de l’environnement. Voilà des années que, lors des débats sur le logement, je dépose des amendements sur les questions d’isolation et de modification du chauffage des logements. Je suis donc ravie que cette question soit enfin traitée, mais je souhaite vous poser deux questions précises. Avec Jean-Louis Borloo, comptez-vous déconseiller le chauffage au fioul et proposer des formules qui en facilitent le remplacement ? Sur le long terme, compte tenu des réserves naturelles, le prix du pétrole ne peut que progresser : réfléchissez-vous à des dispositifs spécifiques d’incitation au remplacement des chauffages au fioul par d’autres modes de chauffage ? Cet aspect est essentiel parce que le budget chauffage pèse beaucoup sur les finances des familles qui ne disposent que de petits revenus.

Ma seconde question concerne les aides, qui sont toutes orientées vers les logements sociaux ou destinées aux propriétaires en oubliant les locataires du secteur privé. Le locataire est dépendant d’un propriétaire qui ne veut rien faire. Si les dispositifs incitatifs sur les propriétaires n’ont aucun effet, envisagez-vous à terme de mettre en place un dispositif qui soit un petit peu plus coercitif afin d’obliger les propriétaires à mettre leur logement aux normes ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Madame la ministre, madame la secrétaire d’état, avant que vous ne répondiez, je voudrais faire part de deux interrogations. Ce ne sera pas une réponse à M. Vercamer, je sais bien qu’il a parfaitement compris l’amendement que j’avais déposé. Je ne vais pas rouvrir un débat sur la compréhension que nous avons du social. Lorsque l’on fabrique du social, l’identité ne change pas la réalité. Si c’est social, c’est social.

Je voudrais vous féliciter, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, pour la manière dont vous nous avez répondu : votre attitude est très courageuse. Ma première question porte sur le choix entre politique de guichet et politique de projet. Monsieur Le Bouillonnec, c’est moi qui ai fait voter l’amendement qui a transformé l’article 6 de la loi de cohésion sociale.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je m’en souviens !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Pourquoi l’ai-je fait ? Parce que nos prédécesseurs – c’est vous qui étiez au pouvoir à l’époque – avaient mis en place une politique de guichet qui excluait un certain nombre de villes des aides de l’État. Pourtant, elles en avaient autant besoin que les autres. Ma conviction était qu’il fallait au contraire mener une politique de projet : lorsqu’un projet est positif pour l’environnement, pour l’ensemble de la ville, pour les équilibres sociaux, pour la mixité sociale, il doit être soutenu, quelle que soit la ville.

Monsieur Le Bouillonnec, votre ville, c’est Cachan ; la mienne, Rueil-Malmaison. Et, chaque fois que je parle de ma commune, les bras se lèvent au ciel : « Mon Dieu, mais Rueil est une ville privilégiée, un havre paradisiaque. »

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Moi, quand je parle de Cachan, je vois mes interlocuteurs rester les bras ballants.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Le Bouillonnec, j’ai fait mes études à Cachan près de la gare, et j’étais un fidèle du cinéma de la ville qui a été supprimé depuis.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pas du tout ! Il existe toujours, c’est un cinéma de trois salles.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Le Bouillonnec, dans ma commune, sur 80 000 habitants, 23 000 logent dans des cités dont les problèmes sont exactement les mêmes que ceux de Cachan. On y trouve souvent la même violence, les mêmes difficultés, et les mêmes misères et je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement n’avait pas, à l’époque, traité les difficultés de façon identique sur tout le territoire plutôt que d’imposer des règles administratives qui excluaient certains quartiers. Madame la ministre, je vous encourage donc à préférer une politique de projet à une politique de guichet, et j’aimerais que nous ayons en ce domaine plus de lisibilité. Vous voulez favoriser les maires bâtisseurs, bravo. Faites-le !

Ma seconde question portera sur une politique de la ville que je ne vois pas, pour l’instant en tout cas, se dessiner clairement – vous le dites vous-même, madame Amara. Vous ne voulez pas de zonages, mais pensez-vous que remplacer le zonage par une couleur changera les choses ? Je ne le crois pas. Il faudrait que nous puissions en discuter ensemble. D’ailleurs, je vous propose de venir devant la commission la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, compétente dans ce domaine de la politique de la ville, afin que nous ayons un vrai débat sur le sujet. Vous dites que vous avez besoin de notre aide pour le processus d’insertion, mais nous aussi, nous avons besoin de votre aide.

Madame la ministre, vous voulez des maires bâtisseurs. Mais que faites-vous des maires volontaristes, des maires qui se dévouent sur le terrain ? Vous évoquez le couple préfet-maire. Ce soir, dans ma ville, se tiendra une réunion avec l’administration, à laquelle je me rendrai, consacrée au problème de la ville. Je puis vous assurer qu’entre l’intention politique qui est la vôtre et la nôtre et la réalité sur le terrain, il y a un mur de Berlin ! Nous, les maires, sommes confrontés à d’impossibles parcours du combattant ! Par conséquent, il faudrait qu’au niveau des administrations, on fasse comprendre qu’il faut aider les maires volontaristes, car ce n’est pas le préfet qui est compétent dans la ville, c’est le maire.

Je termine sur le problème de l’aide aux jeunes non qualifiés. Le maire peut être le pivot, le pilier d’une politique en faveur du retour au travail de ces jeunes. Certaines villes, comme la mienne, accueillent des jeunes dans les services municipaux pour les former pendant un, deux ou trois mois, puis démarchent des entreprises pour les faire travailler. J’ai ainsi réussi à trouver une centaine de CDI grâce à cette méthode, mais je me sens bien seul dans ce combat !

Pourquoi ne pas engager une politique d’exonération des charges sociales pour les communes gérées par des maires volontaristes ? Aidez-nous car notre budget ne nous permet pas d’agir comme nous le voudrions ! Des exonérations de charges sociales nous permettraient d’aller beaucoup plus loin et nous serions, à ce moment-là, à vos côtés dans ce combat !

Voilà les deux directions dans lesquelles je souhaitais intervenir, et j’espère que vous allez me répondre, madame la ministre.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme la ministre du logement et de la ville. Mesdames, messieurs les députés, sachez que, pour moi, cet exercice est passionnant. Vous nous posez des questions précises, et nous essayons d’y répondre le mieux possible. Vous nous suggérez même des orientations, et, personnellement, je suis très sensible à vos propositions. C’est vrai que je vous ai demandé tout à l’heure d’être créatifs, encore créatifs et toujours créatifs !

Monsieur Scellier, s’agissant des CHRS, j’ai bien compris votre proposition, mais votre amendement étant financé sur la base de créations de postes, je crains qu’il n’aille à l’encontre de ce que je souhaite. Comme je vous l’ai dit, j’ai obtenu le financement d’une centaine de postes pour la mise en place des commissions départementales de la médiation ; je pense donc que votre proposition n’est pas tout à fait adaptée. Je peux vous répondre que, sur le plan budgétaire, nous avons obtenu le financement des objectifs qui avaient été prévus par mon prédécesseur. Sera-t-il suffisant ? Je n’en suis pas du tout certaine. Vous me connaissez bien, je suis un ministre qui parle en toute transparence : je ne suis pas du tout certaine que nous aurons les financements suffisants – même si les objectifs « arithmétiques » sont financés dans le projet de loi de finances.

Cela étant dit, si vous, parlementaires, obtenez des financements complémentaires pour la mise en état d’un certain nombre de CHRS – qui ne sont pas toujours dans un état exceptionnel – ne vous en privez pas ! Je vous encourage à le faire car il y a des hommes, des femmes et des enfants qui ne sont pas logés !

M. Piron m’a interrogée pour savoir comment il serait possible d’encourager le développement du locatif dans le secteur privé.

La garantie du risque locatif, rendue universelle par la loi DALO, est en train d’être mise en place. Je fonde de grands espoirs sur cet instrument, car il a pour objectif de garantir aux propriétaires de ne plus avoir d’impayés de loyer et de retrouver leurs logements dans l’état où ils les ont loués. Cette garantie du risque locatif – et je dois saluer aussi l’effort qui a été fait par le 1 % logement – est financée. Lorsque ce dispositif aura trouvé son rythme de croisière, je suis convaincue qu’il permettra de dégager un certain nombre des logements qui, actuellement, ne sont pas mis sur le marché.

Dans le cadre de négociations avec l’Union nationale des propriétaires immobiliers, nous avons également mis sur pied ce qu’on appelle le Pass-foncier en direction des petits propriétaires privés qui ont acheté un ou deux studios pour allonger leur retraite de fin de mois, mais qui ne les mettent pas sur le marché parce qu’ils risquent d’être confrontés à des impayés. Je parle surtout des petits propriétaires, et pas des gros investisseurs. La signature de cette convention « Pass-foncier », initiée également à Lyon, est en cours de finalisation. Elle permettra à un propriétaire privé de donner l’usufruit du logement à un organisme HLM pendant quinze ans. L’organisme HLM garantira l’utilisation et les loyers, le propriétaire gardera la propriété.

S’agissant de la fluidité du parc HLM, évoquée par M. Piron, Lyon a été un moment très important ; pardonnez-moi de vous parler encore de Lyon, mais le monde politique ne s’est peut-être pas rendu compte de l’importance de la « décentralisation » de mon ministère, les médias pas obligatoirement non plus et ont parfois vu l’apparence plutôt que le fond. À Lyon, nous avons obtenu de la part du monde HLM une véritable révolution. Il y avait la loi de 1948 et le sacro-saint principe du maintien dans les lieux. À la suite de cet accord qui va être signé – accord de principe acté par M. Delebarre –, il y aura non plus le maintien dans les lieux uniquement, mais le maintien dans le parc social, ce qui permettra une certaine forme de fluidité. Je pense aux personnes seules qui habitent un cinq pièces, par exemple. J’ignore s’il y en a beaucoup – cela dit, je ne souhaite pas que l’on considère les personnes comme des boîtes de conserve : on doit aussi respecter la personne dans son habitat. Il n’était pas possible de placer ces personnes dans un autre logement ; aujourd’hui, le maintien dans le parc social est acté par rapport au maintien dans les lieux, ce qui est très important.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Est-ce opérationnel ?

Mme la ministre du logement et de la ville. Cela va l’être.

Toujours sur la fluidité dans le parc HLM, un décret est actuellement en cours de finalisation au Conseil d’État : il met en place un surloyer très lourd, car le surloyer actuel n’est pas suffisamment dissuasif. Ce décret, qui sortira prochainement, devrait permettre de faire sortir du parc HLM des personnes qui ont des revenus suffisants pour se loger ailleurs.

Je peux vous dire, mesdames et messieurs les députés, que j’utilise tous les moyens qui sont mis à ma disposition pour rendre plus fluide l’ensemble de la chaîne du logement – je dis bien tous les moyens ! Je n’en élimine aucun ! On m’a posé une question sur la réquisition des terrains : je n’élimine pas non plus cette possibilité ! Cependant, entre ma volonté et la réalité des moyens, les choses ne sont pas aussi simples et faciles. Mais ma volonté est là !

Sur le décalage entre le financement et la mise en chantier, de nombreuses questions ont été posées. Vous avez tous la réponse, et je ne vais pas la développer.

J’en viens à l’hébergement d’urgence et à la stabilisation. La loi sur le droit au logement opposable est une loi fondamentale ; je le répète, elle n’est pas du tout virtuelle. Cette loi consacre le principe de la non remise à la rue, et nous devons en être fiers ! Quel que soit le degré d’embolie de la chaîne, toute personne, quelle que soit sa situation administrative à l’égard de l’État français – vous comprenez ce que je veux dire… –, est hébergée en CHU. C’est la vocation du CHU. Ensuite, la personne accueillie en hébergement d’urgence n’ayant pas vocation à y rester, elle doit aller en CHRS ou dans une place de stabilisation.

Aujourd’hui, la fluidité que nous appelons de nos vœux n’existe pas, et c’est la raison pour laquelle j’essaie d’utiliser tous les moyens qui sont à ma disposition.

Une question m’a été posée sur les contrats urbains de cohésion sociale. Chaque CUCS est fondé sur le partenariat entre l’État et le maire, et la circulaire du 24 mai 2006 relative à l’élaboration de ces contrats précisait bien que « le contrat est élaboré à l’initiative conjointe du maire ou du président d’établissement public de coopération intercommunale et du préfet du département. Il associe d’autres partenaires dont notamment, s’il le souhaite, le conseil général et le conseil régional ». Du reste, je dois noter qu’un certain nombre de départements et de conseils régionaux participent à cette opération. Le nombre de CUCS signés est de 495 ; pour 354 d’entre eux, ils prennent le relais des précédents contrats de ville, au nombre de 247. Sur ces 495 contrats, 282 sont signés par les communes uniquement, 213 par les EPCI. Cette première approche montre que 18 % d’entre eux sont signés par les conseils régionaux, 33 % par les conseils généraux, 26 % par les bailleurs sociaux et 41 % par les CAF.

M. Piron m’a posé une question subtile sur la distinction entre la disponibilité foncière réelle et la disponibilité foncière théorique. Honnêtement, je n’ai pas la réponse sous les yeux ; je vous la donnerai plus tard, car la question était très pertinente.

Monsieur Le Bouillonnec, toujours…

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Créatif !

Mme la ministre du logement et de la ville. Créatif, oui, mais également précis !

Mme Annick Lepetit. Et bouillonnant ! (Sourires.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. J’espère que je ne suis pas en accusation ! (Sourires.)

Mme la ministre du logement et de la ville. Au contraire, monsieur Le Bouillonnec ! Même si nous avons des divergences, tout à fait normales, j’apprécie depuis de très nombreuses années votre compétence sur le dossier du logement !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est vrai !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. J’accepte le compliment.

Mme la ministre du logement et de la ville. Ça commençait mal, puisque vous avez commencé par me parler de méthode ! Il y a toujours des problèmes de méthode, c’est vrai, et il faut les améliorer. Ma réponse est simple : il y a vraiment une volonté gouvernementale sincère sur la révision des politiques publiques, qui doivent, aussi, apporter des réponses sur la méthode. Vous avez été plusieurs à me poser la question, et je pense que nous aurons des éléments de réponse. Mais les choses ne sont pas faciles. En tout cas, j’attends personnellement beaucoup de la révision des politiques publiques.

Mesdames et messieurs les députés, il est une réalité que vous n’avez pas soulevée et que le ministre du logement que je suis doit vivre chaque jour : c’est que le ministre du logement n’a pas aujourd’hui la main sur l’urbanisme, qui dépend du MEDAD – le ministère de l’environnement, du développement et de l’aménagement durables ! On me demande de construire, mais, moi, je n’ai aucun moyen concret, juridique, pour construire puisque je n’ai pas la compétence de l’urbanisme. J’espère donc beaucoup que, dans le cadre de la révision des politiques publiques, l’urbanisme puisse être rattaché au logement, quel que soit le ministre du logement.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Ce serait plus cohérent !

Mme la ministre du logement et de la ville. Je compte sur votre soutien, mesdames et messieurs, quelle que soit votre appartenance, car c’est une question de cohérence.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Nous sommes d’accord !

Mme la ministre du logement et de la ville. Que l’urbanisme ne fasse pas partie de mes compétences est une réelle difficulté administrative et politique. Cela me gêne pour un certain nombre de mesures que je serais amenée à prendre. S’agissant de la méthode, je partage donc votre point de vue : il y a des choses à revoir.

En ce qui concerne le MEDAD, la manière dont je vois les choses est très claire : il aurait comme vocation l’aménagement du territoire sur le plan national, et le ministre du logement, quel qu’il soit, serait chargé de veiller au respect des grandes lignes de ce plan. Mais qu’il ait au moins les moyens de prendre des décisions en matière d’urbanisme ! Devoir construire 500 000 logements sans avoir la compétence de l’urbanisme, c’est tout de même compliqué !

Vous m’avez interrogée, monsieur Le Bouillonnec, sur la vérité des chiffres. J’ai comme vous le goût, l’amour de la vérité. Je vous entends donc fort bien. Cela dit, la réalité législative est ce qu’elle est, et vous l’avez rappelée : de nombreuses lois ont été adoptées récemment, si nombreuses que l’on n’y comprend rien. On ne sait plus où en est. Dans ce contexte,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. J’ai voté contre ces lois !

Mme la ministre du logement et de la ville. Peu importe, monsieur Le Bouillonnec !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Si, cela importe ! Ce n’est pas un détail. Cela pose le problème du rôle de l’État.

Mme la ministre du logement et de la ville. Si vous n’avez pas voté ces lois, c’est normal, je n’ai pas à en juger. Moi, je les ai votées. Et je pense d’ailleurs qu’elles ont apporté quelque chose de plus. Mais le fait est que leur multiplicité pose problème. On ne peut que vous donner raison quand vous dites que tout cela est très compliqué.

Dans ces conditions, ce que je peux vous dire, monsieur Le Bouillonnec, c’est que je n’ai pas l’intention de vous proposer une loi Boutin. Je vous le dis clairement ! J’estime que j’ai suffisamment d’instruments législatifs à ma disposition. Je ne vous proposerai pas une loi nouvelle sous ma responsabilité ministérielle. Cela ne veut pas dire, mesdames et messieurs les parlementaires, que nous ne procéderons pas à quelques ajustements techniques d’ordre législatif si cela s’avère nécessaire. Mais je ne veux pas ajouter une loi au corpus législatif existant, qui me semble suffisant.

Vous m’avez interrogée, s’agissant de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, sur les délais de paiement. Tout d’abord, je dois balayer devant ma porte. Il y a eu, je le dis, des difficultés propres à l’ANRU. Mais des décisions ont été prises, et les choses sont en train de s’améliorer. Je tiens, du reste, à souligner que le directeur général de l’ANRU est un homme de qualité. Je ne veux absolument pas qu’il ait d’ambiguïté. Mais malgré la compétence et les qualités des uns et des autres, chacun exerçant la responsabilité qui est la sienne, c’est un fait que nous subissons tous l’effet d’un certain nombre d’habitudes administratives, réglementaires, législatives, qui peuvent parfois ralentir l’action. Mais je tiens, je le répète, à souligner les qualités du directeur général de l’ANRU.

Un nouveau règlement financier permet de verser 70 % du montant des subventions sur la seule base des déclarations des maîtres d’ouvrage. C’est nouveau. Le développement des relations avec les acteurs de terrain, et notamment la DDE, pour le suivi des paiements est accentué. Après son renforcement – quatre personnes de plus, soit un doublement des effectifs opérationnels – et sa restructuration, le service financier de l’ANRU est maintenant opérationnel. Voilà ce que j’ai fait pour améliorer les choses.

Mais certaines difficultés proviennent des maîtres d’ouvrage eux-mêmes. Les offices publics et sociétés d’HLM ont comme priorité les travaux, et ils tardent parfois à demander le paiement des subventions de l’ANRU. Aussi étrange que cela puisse paraître, c’est ainsi.

Quant à la qualité des dossiers de demande de paiement, bien que le règlement de l’ANRU soit clair – même s’il comporte beaucoup de pages, sans doute pas aussi longues que celles que M. Vercamer nous a montrées s’agissant d’un autre dossier –, de nombreuses demandes cherchent à aller au-delà de l’encadrement propre, pour pouvoir entrer dans le projet. Cela n’est pas acceptable venant d’organismes chargés d’une mission de service public, et cela oblige à un contrôle pointilleux des demandes, ce qui fait perdre également beaucoup de temps.

Voilà ce que je peux vous dire en ce qui concerne ces difficultés, mais je pense que les choses devraient s’améliorer de façon significative.

En ce qui concerne les opérations de reconstruction-démolition financées par l’ANRU, vous savez que c’est l’une des premières choses que j’ai dites lorsque je suis arrivée à la tête de ce ministère : je sais qu’il y a un problème de logement, je sais qu’il faut construire – 500 000 logements, c’est un objectif ambitieux –, mais je ne peux pas accepter qu’il y ait un décalage trop important entre démolitions et reconstructions. Nous y veillons de près. Il y a une obligation de reconstruire autant de logements qu’on en détruit, c’est exact. Cette obligation globale est respectée. Si elle ne l’est pas dans le cadre du dossier, il n’y a pas de financement ANRU, vous le savez. Cela dit, on ne peut pas nier qu’il y ait un décalage.

Cependant, je tiens à appeler votre attention sur le fait suivant. En général, dans les programmes de démolition, il y a, avant leur conception, un taux de vacance important, de sorte qu’il n’y a pas autant de personnes à reloger que de logements démolis. C’est une réalité. Je dis cela pour répondre à l’exigence de vérité, monsieur Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mais il ne peut pas à en être autrement, madame la ministre. Il faut cinq ans pour démolir un immeuble. Pendant cette période de cinq ans, il est bien évident que personne ne les occupe. C’est un problème technique. Je ne vous mets pas en cause. Techniquement, à un moment donné, on provoque l’inoccupation.

Mme la ministre du logement et de la ville. Non, monsieur Le Bouillonnec, je vous parle de la situation avant que les programmes de démolition soient conçus.

Je rappelle que 54 % des logements sont reconstruits en lieu et place des logements détruits. Il peut y avoir momentanément une diminution du nombre de logements, mais comme les familles sont toujours relogées dans des logements neufs, ou de moins de cinq ans, c’est que, indépendamment du plan national de rénovation urbaine, la commune a fait l’effort de construire les logements sociaux adaptés. Ils ne sont pas comptabilisés dans le programme de rénovation urbaine, mais ils existent bel et bien. J’ai demandé à l’ANRU de veiller à ce que les 46 % de logements reconstruits en dehors de la zone concernée soient désormais toujours – je dis bien toujours – construits avant d’entreprendre la démolition. Et j’y veillerai personnellement.

En ce qui concerne l’APL, vous avez souligné, monsieur Le Bouillonnec, l’annonce par M. le Premier ministre d’une augmentation de son montant de 3 %. Je vous rappelle que c’est aussi la résultante de la loi que nous avons votée, sur laquelle vous vous êtes abstenu, si j’ai bien compris. La loi instituant le droit au logement opposable, dite loi DALO, a indexé, et c’est une chose très importante, la révision des loyers sur les variations de l’indice de référence des loyers, l’IRL. Par conséquent, si le Premier ministre a parlé d’une augmentation de 3 %, c’est parce que nous ne sommes pas encore au 31 décembre 2007. Nous ne savons donc pas exactement ce qu’il en est. Mais cette revalorisation sera de l’ordre de 3 %. L’indexation de la révision des loyers sur les variations de l’IRL est l’une des mesures importantes en ce qui concerne le maintien du pouvoir d’achat.

M. Marcel Rogemont. C’est une bonne mesure.

Mme la ministre du logement et de la ville. Vous m’avez dit, monsieur Le Bouillonnec, si j’ai bien compris, que l’État propriétaire de foncier n’a pas toujours pour vocation de destiner les terrains qu’il vend à la construction de logements, et qu’il faut une volonté politique forte pour aller dans ce sens. La volonté est là, monsieur Le Bouillonnec, mais les terrains vendus par l’État ne sont pas toujours des terrains libres. Ils n’ont pas tous vocation à devenir des logements. Je n’en veux pour exemple que la pratique de la Ville de Paris. Je ne fais pas de polémique, mais c’est un fait que la Ville de Paris elle-même, qui a récemment acheté des terrains, les transforme en bureaux.

La volonté est là, je le répète, mais on ne peut pas, de façon autoritaire, prévoir que le terrain vendu par l’État sera obligatoirement fléché vers le logement. Ce n’est pas toujours facile.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. A-t-on des éléments chiffrés ?

Mme la ministre du logement et de la ville. Je ne les ai pas ici, monsieur le député, mais je vous les ferai parvenir. Il est intéressant d’avoir des données en la matière. Mais il faut savoir que tout le monde est confronté à cette réalité.

S’agissant du seuil de non-versement des APL, fixé à 15 euros, ce n’est pas une question facile, cher monsieur Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je sais bien. Je ne suis pas là pour vous faciliter le travail, madame la ministre, même si je concours à vous aider.

Mme la ministre du logement et de la ville. Mais c’était une question excellente, monsieur Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Et la réponse va l’être également.

Mme la ministre du logement et de la ville. Mais très honnêtement, monsieur Le Bouillonnec, même si vous avez été le premier à me poser cette question ce matin, on me la pose sur tous les bancs de l’Assemblée, et même à l’extérieur de l’Assemblée.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Alors, quelle est la réponse ?

Mme la ministre du logement et de la ville. La réponse, je n’en ai pas vraiment. Sinon que, et je suis sincère en vous le disant, cela fait partie de ma réflexion. Je n’ai pas encore abouti. Je voudrais tout de même que vous compreniez bien que je suis arrivée à la tête de ce ministère au mois de mai 2007, à un moment où les choses étaient déjà très engagées dans la construction du budget 2008. Un certain nombre de réflexions ne sont pas abouties en ce qui me concerne, et quand elles le sont, elles le sont depuis trop peu de temps pour trouver une traduction dans le budget 2008. Mon véritable budget sera le budget 2009. Vous me demandez la vérité, et je vous réponds la vérité, monsieur Le Bouillonnec. Et vous le savez tous ici, mesdames et messieurs les députés.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est vrai.

Mme la ministre du logement et de la ville. Bien sûr que c’est vrai !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je comprends cela. Mais il y avait un moyen, dans ce budget 2008, de répondre à mes questions.

Mme la ministre du logement et de la ville. Je ne sais pas s’il y avait un moyen. Vous pourrez peut-être m’aider,…

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Un moyen très simple : adopter mon amendement.

Mme la ministre du logement et de la ville. …mais ce que je peux vous dire, et la réponse ne va pas vous plaire – et je m’adresse ici à tous –, c’est que le seuil en deçà duquel les aides personnelles au logement ne sont pas versées n’avait pas été actualisé depuis 1988.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est exact. Mais le seuil de non-versement de l’APL avait été porté de 15 à 24 euros en 2004.

Mme la ministre du logement et de la ville. Monsieur Vercamer, vous avez déploré la complexité des procédures. Nous sommes d’accord sur ce point. Je ne redirai pas ce que j’ai déjà dit sur ce problème, qui est réel. Nous en subissons tous les conséquences, à tous les niveaux.

En ce qui concerne la question que vous avez posée sur les relations entre l’ACSE et l’ANRU, je laisserai Mme Amara vous répondre. Parce qu’il faut quand même qu’elle prenne un peu la parole. (Sourires.)

M. Régis Juanico. C’est gentil de le remarquer !

Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. Cela a toujours été dur pour les banlieues ! (Sourires.)

Mme la ministre du logement et de la ville. Vous m’avez interrogée, monsieur Vercamer, sur le logement indigne. Vous le savez, j’ai lancé une opération forte il y a 48 heures, en vue de traquer les marchands de sommeil. Si je n’ai pas pu faire cette annonce plus tôt, c’est que, compte tenu de la complexité administrative et réglementaire, il fallait que je prenne la mesure des problèmes qui se posent avant de pouvoir décider des mesures pertinentes. Les préfets vont recevoir des instructions dans les jours qui viennent. J’indique, simplement pour vous montrer la complexité des choses, que la circulaire que je vais adresser aux préfets doit être signée par pas moins de quatre ministres.

Je vous confirme, monsieur Vercamer, que les logements HLM vendus gardent, du point de vue de la loi SRU, le qualificatif de logements sociaux, et ce pendant cinq ans.

M. Francis Vercamer. Y compris pour les dotations financières ?

Mme la ministre du logement et de la ville. Oui, bien sûr.

M. Marcel Rogemont. Et pourquoi ?

Mme la ministre du logement et de la ville. Parce que ce sont des logements HLM qui faisaient partie de l’ensemble des logements sociaux.

Je pense d’ailleurs qu’il faudrait aussi réfléchir à ce que l’on intègre dans la liste des logements considérés comme logements sociaux. Les CHRS ne sont pas considérés comme des logements sociaux, je trouve cela bizarre, quand même !

M. Marcel Rogemont. Vous avez raison.

Mme la ministre du logement et de la ville. Personnellement, je trouve cela étonnant que les CHRS ne soient pas comptabilisés par la loi SRU parmi les logements sociaux. Toutes ces questions font partie de ma réflexion.

S’agissant des ventes de logements HLM, vous m’avez dit, madame Billard, qu’elles ne créaient pas pour autant de foncier. C’est la raison pour laquelle j’ai lancé l’idée, qui paraît saugrenue mais qui est simple et efficace, de réfléchir à la possibilité – sur la base du volontariat, et pour peu que ce soit techniquement possible – d’augmenter d’un étage les constructions qui existent en France, qu’elles soient individuelles ou collectives.

Cela a plusieurs avantages. Le foncier est là. Du point de vue de l’environnement, cela n’occasionne pas un développement des transports ni une consommation d’espaces supplémentaires. Les transports en commun sont là, il n’est pas nécessaire de lancer d’autres opérations de viabilisation. Sur le plan intergénérationnel, on peut loger ses enfants ou ses parents au-dessus de chez soi. Pour ce qui est des mauvais coucheurs qui déposent en permanence des recours pour s’opposer aux projets de construction des élus, je pense qu’il y aura moins de recours : les gens ne seront pas gênés, parce qu’ils n’auront pas à côté de chez eux une nouvelle habitation.

C’est une idée simple et intéressante, que je ne suis d’ailleurs pas la seule à proposer ; elle est à l’étude en Italie et en Allemagne. Il reste que, dans cette affaire, je me heurte vraiment aux lois d’urbanisme.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est pour cela que vous voulez être ministre de l’urbanisme !

Mme la ministre du logement et de la ville. Vous avez tout compris, monsieur Le Bouillonnec.

S’agissant des familles logées en hôtel, il est clair que cela coûte très cher et que c’est une très mauvaise solution.

Mme Annick Lepetit. C’est la pire !

Mme la ministre du logement et de la ville. C’est pourquoi il faut absolument en finir. Vous m’avez demandé si nous avons des suggestions concrètes. M. Lamour va proposer un amendement, qui a mon soutien, prévoyant des encouragements fiscaux pour les propriétaires privés qui remettraient sur le marché des logements, mieux adaptés aux familles que les hôtels, qui sont actuellement l’unique possibilité que nous avons de les reloger. Je vous encourage très vivement à voter massivement cet amendement. La garantie des risques locatifs peut être une autre réponse.

S’agissant du coût de chauffage, et du fioul en particulier, Mme Lagarde a annoncé le doublement de la prime à la cuve, qui passera de 75 euros à 150 euros.

Mme Martine Billard. Ça ne sera pas suffisant !

Mme la ministre du logement et de la ville. Ce n’est jamais suffisant mais cela a quand même été fait.

Mme Martine Billard. Et cela ne résout pas le problème d’environnement !

Mme la ministre du logement et de la ville. Quant à adopter une attitude coercitive vis-à-vis des propriétaires, je ne sais pas si c’est la bonne méthode, madame Billard. Aujourd’hui, la crise est telle que je ne veux pas opposer le public au privé, les locataires aux propriétaires. Je veux au contraire mobiliser pour que chacun apporte ce qu’il peut, selon sa compétence. Je suis en train de négocier avec les propriétaires pour qu’ils remettent des logements sur le marché. C’est l’intérêt de tous. La coercition ne me semble pas tout à fait adaptée, mais je suis prête à réfléchir.

Je suis d’accord avec une politique de projets, monsieur Ollier. Je pense sincèrement que les maires bâtisseurs sont des maires volontaristes. J’ai bien entendu que les volontaristes agissaient plutôt sur la dimension sociale et c’est une idée que nous allons creuser.

Voilà, mesdames, messieurs les députés, ce que je voulais vous dire. Fadela Amara aura sans doute d’autres précisions à vous apporter.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville.

Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. Je voudrais d’abord revenir sur l’ANRU, dont on ne mesure jamais assez la qualité du travail. Je voudrais également rendre hommage à Jean-Louis Borloo, qui s’est formidablement battu pour créer le guichet unique. Les concertations pour l’élaboration du plan « Respect et égalité des chances » font souvent état de petits dysfonctionnements de procédure de l’ANRU, qui sont en train d’être résorbés, comme vient de le rappeler Mme Boutin. Je voudrais, moi aussi, rendre hommage à Philippe Van de Maele, qui porte un poids énorme sur les épaules. La rénovation urbaine est en effet un domaine très complexe, mais, sur le terrain, les maires que je rencontre font état d’une grande satisfaction.

S’agissant du débat sur la destruction, la reconstruction ou la réhabilitation, tout le monde est d’accord pour dire qu’il y a une grosse crise du logement, mais j’insiste sur la nécessité de discuter autour d’une table pour que la loi DALO soit bien appliquée. Les élus de terrain que vous êtes savent bien qu’il faut détruire certaines barres qui sont complètement pourries et dans lesquelles il y a une vacance de logements très ancienne.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Oui, mais elle a énormément diminué !

Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. Pas tant que cela.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Et ce n’est pas rassurant : si elle a diminué, c’est parce que le seuil d’exigence des gens a baissé à cause de la crise.

Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. Je pense que la loi DALO est parfaitement légitime, même si vous ne l’avez pas votée. Il s’agit de prendre nos responsabilités pour que chacun de nos concitoyens ait un logement décent. Mais, je vous le dis comme je le pense, cette loi ne doit pas s’appliquer dans les seuls quartiers en difficulté : si l’on parque les pauvres avec les pauvres, dans trente ans, nous devrons refaire une politique de la ville pour remédier à une mauvaise gestion de la loi DALO. Je fais entière confiance à Mme Boutin pour prendre en compte cette problématique très complexe.

S’agissant plus généralement de la politique de la ville, je mène actuellement une concertation territoriale pour construire le plan « Respect et égalité des chances », c’est-à-dire le « plan Marshall » des banlieues voulu par le Président de la République. Tant le rapport de la Cour des comptes que celui du Sénat ont insisté sur la complexité des dispositifs, la non-lisibilité et la non-accessibilité de la politique de la ville. Vous le dites aussi, mesdames, messieurs les députés, et je l’entends également de la part des premiers concernés, qui sont les habitants des quartiers. Notre objectif, avec Christine Boutin, est de faire des propositions pour donner une visibilité et faciliter l’accessibilité à la politique de la ville. C’est pourquoi j’ai proposé un zonage par couleur, qui semble faire polémique à droite comme à gauche, mais qui donnerait, me semble-t-il, une bonne vision de la politique de la ville à construire.

Nous devons maintenant abandonner la dialectique pour passer à l’action. Tout le monde sait que la situation des banlieues est catastrophique, surtout du point de vue de l’emploi. Parmi les trois axes retenus par le Président de la République, il y a d’abord le désenclavement, à propos duquel d’ailleurs je n’ai pas tout à fait répondu à M. Pemezec : il est évidemment prioritaire. Le plus magnifique plan banlieue, les dispositifs les plus pertinents et tout l’argent que je pourrais trouver, n’auraient aucune efficacité à Clichy et à Montfermeil si ces villes n’étaient pas désenclavées. Je me suis engagée à ce que l’État soit au rendez-vous, mais il faut que tout le monde regarde dans la même direction et que chacun assume ses responsabilités. La question se pose à Clichy mais aussi ailleurs, et c’est pourquoi nous travaillons à l’élaboration d’un fonds financier destiné à aider le désenclavement des quartiers.

La politique de la ville n’a de sens que si le couple préfet-maire, qui est le mieux à même de lui donner une traduction sur le terrain, est renforcé. Mais il faut également que les associations et les forces vives de ce pays y soient associées. C’est pourquoi la question de la pérennisation de leurs financements est importante. Je veux démultiplier les conventions pluriannuelles pour leur apporter la sérénité. La complexité touche, certes, les parcours d’insertion, monsieur Vercamer, mais aussi les demandes de financement : il faut avoir « bac + 10 » pour remplir une demande ! Pour que les associations puissent faire un vrai travail de fond, il faut alléger les procédures administratives et assurer, dès le début de l’année, les financements nécessaires à la mise en place de leurs actions. Je sais, pour avoir été responsable associative, que les financements interviennent en fin d’année. Ce sont donc les associations les plus riches, celles qui ont une trésorerie, qui peuvent fonctionner. Les associations les plus pauvres sont parfois celles qui ont les projets les plus innovants, les plus susceptibles de renforcer la cohésion sociale au cœur des cités. Or, celles-là crèvent du manque de financement. L’aide aux associations est une demande qui remonte de chaque concertation territoriale. J’ai donc assuré les associations que nous multiplierions les signatures de conventions pluriannuelles.

La première des priorités du plan Banlieue est l’emploi des jeunes, en particulier non qualifiés. C’est la première demande qui ressort de toutes les concertations, dans toutes les cités. Les derniers chiffres de l’INSEE tendent à montrer que la situation s’améliore et que le chômage a baissé d’un point.

Mme Claude Darciaux. Ce n’est pas vrai dans les quartiers !

Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. S’il y a eu un certain impact, on ne peut pas s’en satisfaire. La réalité, c’est qu’il y a deux ou trois fois plus de chômage dans les cités que dans les autres territoires. C’est pourquoi il faut mettre le paquet sur ce point dans l’élaboration du plan Banlieue. Ces jeunes non qualifiés sont souvent ceux que l’on trouve dans les cages d’escaliers et dont certains, à force de désœuvrement, peuvent basculer dans la délinquance. Un dispositif sera mis en place, dans lequel sera défini, non pas un profil, mais des profils de jeunes puisqu’ils sont différents, certains ayant des diplômes, d’autres pas. Ces dispositifs personnalisés les accompagneront, dans une sorte de parcours sécurisé, jusqu’à l’employabilité. Vous êtes bien placés pour savoir que certains jeunes sont dans une telle situation qu’ils n’ont aucune idée de ce que peut signifier de respecter des horaires, un certain comportement ou un certain langage. Un vrai travail de fond, un « coaching », doit être entrepris pour les préparer à entrer dans un processus d’insertion sociale et professionnelle. Nous allons nous y atteler. D’ailleurs, monsieur Ollier, votre idée d’une exonération de charges sociales pour les collectivités qui sont prêtes à embaucher des jeunes fera partie de la réflexion.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je vous interromps une minute pour préciser l’idée que vous venez d’évoquer. Lorsqu’un maire, sans aucune aide de l’État, prend l’initiative d’intégrer dans ses services, pour un mois, deux mois ou trois mois, des jeunes non qualifiés issus des cités pour les préparer, sous la direction d’un tuteur, à entrer dans une entreprise, il accomplit un vrai travail. Lorsque ce maire, toujours tout seul, va chercher dans sa ville des entreprises susceptibles d’embaucher ces jeunes non qualifiés, il contribue à créer un climat de confiance en même temps qu’un tremplin vers l’emploi. C’est ainsi que, chez moi, nous avons trouvé une centaine de CDI en un an et demi, ce qui n’est pas négligeable. Or cette démarche, comme sans doute d’autres qui peuvent exister ailleurs, n’est pas aidée.

Si l’on aidait les maires qui veulent s’engager dans un tel processus – il ne s’agit pas de faire des reproches à ceux qui ne le font pas – par un système d’aides comme l’exonération des charges sociales pour les jeunes, nous nous sentirions un peu soutenus. Mais encore faut-il être volontaires !

Mme la secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Je suis prête, monsieur Ollier, à travailler avec vous sur ce point.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Avec plaisir !

Mme la secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. La question de la lutte contre le chômage des jeunes est très importante et nous concerne tous. Toutes les propositions pour lutter efficacement contre le chômage des jeunes sont les bienvenues.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je vous prie de conclure, madame la secrétaire d’État, car une douzaine de parlementaires souhaitent encore poser des questions.

Mme la secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Je terminerai sur l’élaboration du plan Banlieue. Nous avons examiné les trois axes et les possibilités dont nous disposons, les uns et les autres, pour construire une politique de la ville pertinente et efficace. Je pense très sincèrement que la question de la gouvernance se pose, une fois encore, au niveau national et au niveau local.

Au niveau national – et Mme la ministre a eu raison de le rappeler – j’espère que les conseils prodigués lors de la revue générale des politiques économiques nous permettront de construire quelque chose de nouveau et d’efficace.

En même temps, je le répète, au niveau local, je pense que le préfet et le maire constituent le meilleur couple pour faire en sorte que tant les contrats urbains de cohésion sociale que, plus globalement, la rénovation urbaine se passent dans de bonnes conditions.

L’ANRU, comme son nom l’indique, s’occupe de rénovation urbaine. C’est un point très important, qui permet de changer, du point de vue environnemental, la vie des gens. Mais je suis déterminée à faire en sorte qu’à travers la construction de la politique de la ville, la rénovation sociale s’accomplisse.

Le préfet Lacroix formulera des propositions à l’issue de l’audit de la politique de la ville qui lui a été demandé. En ce qui concerne les liens entre l’ACSE et l’ANRU, d’une part, je suis persuadée qu’une volonté politique est nécessaire pour construire une politique de la ville efficace et pertinente en termes de gouvernance. D’autre part, il faut permettre une vraie cohésion entre l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances et l’Agence nationale pour la rénovation urbaine – je m’étais étonnée, lorsque je suis entrée au Gouvernement, à la fin du mois de juin, de voir ces deux agences travailler chacune de leur côté, alors qu’une collaboration serait souhaitable. Si l’on veut réussir, la rénovation urbaine et la rénovation sociale doivent « marcher » ensemble, dans la même direction.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Nous en arrivons à une série de questions.

La parole est à M. Étienne Pinte.

M. Étienne Pinte. Mesdames les ministres, « aide-toi, le ciel t’aidera ! » Un bon budget c’est bien, mais cela ne suffit pas.

Je voudrais aborder six points.

Premier point : les rigidités. Un maire qui a la volonté de construire des logements sociaux doit surmonter de multiples obstacles en matière de rigidités, sur le plan foncier, administratif, juridique, technique et quelquefois même – comme vous le savez – sur le plan psychologique. Je citerai plusieurs exemples.

Premier exemple : nous éprouvons beaucoup de difficultés pour que l’État rétrocède les terrains qu’il nous a promis. Il y a quatre ans, l’un de vos prédécesseurs m’avait promis un certain nombre de terrains ; je n’en ai toujours pas vu la couleur ! Nous avons également beaucoup de mal à obtenir les 35 % de réfaction sur l’évaluation des Domaines, lorsque – comme l’a dit M. Le Bouillonnec tout à l’heure – l’État est prêt à vendre des terrains destinés et dédiés au logement social.

Deuxième exemple : beaucoup de terrains appartenant à l’État, en particulier ceux appartenant aux autorités militaires, au ministère de la défense, sont pollués. Comme le ministère n’a pas l’argent nécessaire pour les dépolluer – il s’agit de centaines d’hectares –, cela signifie donc qu’ils sont gelés. J’ai proposé que l’État cède à l’aménageur ou aux collectivités territoriales ces terrains, dont le prix serait diminué du coût de la dépollution, à charge pour ceux-ci de financer la dépollution. Cela fait des années que j’ai fait cette proposition et je n’ai toujours pas obtenu de réponse.

Aujourd’hui, il est très difficile d’acheter à des prix raisonnables des terrains appartenant à Réseau Ferré de France, qui – comme vous le savez – gère l’essentiel du foncier de la SNCF.

Dernier exemple, mais je pourrais en citer beaucoup d’autres : de nombreux bailleurs sociaux seraient très intéressés par des baux emphytéotiques sur des terrains appartenant à l’État. Malheureusement, jusqu’à présent celui-ci n’a pas accepté cette idée.

Deuxième point : les surloyers. Il est impératif, me semble-t-il, d’améliorer ce système devenu aujourd’hui complètement inefficace et obsolète. Ne pourrait-on pas augmenter les taux jusqu’à un plafond déterminé ? En Île-de-France, par exemple, le prix du mètre carré est en moyenne de 18 euros et à Paris de 24 euros. Le doublement des taux, qui ferait passer le prix du mètre carré de 6 à 12 euros, en dessous même des chiffres que je viens de citer, ne permettrait-il pas d’avoir des taux de surloyer plus en rapport avec les loyers pratiqués, en tout cas en Île-de-France ?

Troisième point : le conventionnement. Aujourd'hui, les seuils de conventionnement de l’ANAH sont encore beaucoup trop bas. Il y a un bien trop grand écart entre l’aide accordée par l’ANAH et les loyers intermédiaires ou les logements intermédiaires. De ce fait, l’ANAH, qui aurait pu être un outil efficace d’aide et d’accompagnement aux collectivités territoriales, ne remplit pas son rôle.

Pendant treize ans, nous avons tenté l’expérience avec l’ANAH, ainsi que quatorze autres villes de France, de remettre sur le marché des logements appartenant au secteur privé, grâce à des subventionnements en matière de réhabilitation très importants. En contrepartie, il y avait un conventionnement sur huit ans. Nous avons été très déçus, car le système n’a pas bien fonctionné. L’ANAH a ensuite tenté de remettre sur pied un nouveau dispositif, moins intéressant que le précédent, tant et si bien que nous n’avons pas conclu de nouveau contrat avec l’ANAH et son aide a diminué.

Il me semble urgent de coordonner les politiques de financement du logement social entre l’État, les régions, les départements, les communes et les intercommunalités. Aujourd’hui, chacun met ou non au pot, et attend que l’autre fasse quelque chose.

Cinquième point : la capacité d’investissement des bailleurs sociaux. Nous en avons parlé tout à l’heure à propos des PALULOS et des démolitions-reconstructions. En principe, au bout de vingt-cinq ans, les bailleurs sociaux sont obligés de payer les taxes foncières sur le bâti. Pourquoi ne pas continuer à les exonérer en les obligeant à construire de nouveaux logements ou à réhabiliter le parc existant, puisque nous n’avons plus suffisamment de PALULOS ? J’ai fait cette proposition au Gouvernement ; elle n’a, jusqu’à présent, jamais été acceptée. J’en parle d’autant plus volontiers que, en tant qu’élu local, je serais naturellement très content de récupérer le foncier bâti au bout de vingt-cinq ans. Il faut réfléchir, car il ne serait pas inutile de permettre aux bailleurs sociaux de reconstituer leurs fonds pour construire des logements neufs ou réhabiliter le parc ancien.

Sixième point : madame la ministre, avez-vous passé à Mme la secrétaire d’État le fameux rapport de la HALDE, auquel j’ai participé, sur l’élimination des discriminations en matière d’attribution des logements dans le parc social ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Annick Lepetit.

Mme Annick Lepetit. Je souhaite obtenir des précisions, madame la secrétaire d’État, sur la baisse annoncée des crédits budgétaires. En ce qui concerne le budget de l’ANRU, les crédits de paiement baissent de 40 %, ce qui est énorme.

De grosses opérations ont été décidées en 2006. Le budget de l’ANRU sera donc très sollicité en 2007 et 2008 pour les mener à bien. Comment seront-elles financées ?

Comment allez-vous engager – compte tenu de la détermination dont vous nous avez fait part – des opérations dans les quartiers sans avoir de budget ?

Madame Boutin, la deuxième question concerne le dispositif « de Robien ». Elle peut paraître éloignée de la première, mais elle n’est pas sans rapport au regard des coûts, même si les sommes ne sont pas les mêmes. Vous nous avez indiqué qu’un rapport sur le sujet sera rendu public sous peu, si le ministère du budget y consent. Sans dévoiler le rapport, pourriez-vous nous indiquer où se situent ces logements, qui en sont les propriétaires, la façon dont cela se passe ? J’ai le sentiment que nous sommes un peu sur la même ligne, si je puis me permettre, en ce qui concerne ce dispositif.

Notre colère vient de ce que nous avons, dès l’origine, dénoncé le coût faramineux de ce dispositif pour les finances publiques. On constate aujourd’hui que des logements restent vides. Cela ne profite donc à personne. Contrairement à ce qui se passe en Allemagne, où les déductions fiscales sont plafonnées et les dépassements sanctionnés, en France le mécanisme n’est nullement encadré. Je ne tape pas sur le dispositif « de Robien », uniquement pur le plaisir, mais il me semble négatif à différents égards. Au moment où l’on fait feu de tout bois pour financer le logement, je souhaite – au-delà de l’aspect financier – obtenir des précisions sur les dispositifs « de Robien » et « Borloo », qui perdurent depuis quelques années.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. René Couanau.

M. René Couanau. Mesdames les ministres, je formulerai deux remarques.

La première porte sur la complexité des dispositifs de la politique de la ville. L’ANRU a installé dans les quartiers le guichet unique, qui permet une meilleure coordination.

J’ai signé hier un contrat urbain de cohésion sociale. Je suis effaré par les complications. Madame la ministre, un niveau bien supérieur à bac + 5 est nécessaire pour comprendre. De quoi s’agit-il ? D’une somme de miettes ramassées dans les fonds de tiroirs de plusieurs administrations, que l’on essaie de rassembler en une seule enveloppe, chaque service devant donner son avis avant d’engager le moindre centime d’euro, sans objectif ciblé.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Eh oui !

M. René Couanau. J’ai évidemment présenté, hier, en tant que maire ce contrat à ma ville de façon très positive. Mais, aujourd’hui, le parlementaire se pose des questions. (Murmures.) Messieurs de la gauche, si vous aviez simplifié, on ne se trouverait peut-être pas dans cette situation.

M. Marcel Rogemont. Cela fait cinq ans que vous êtes aux affaires !

M. René Couanau. C’est complexe, tout le monde aboutit au même constat, y compris le Gouvernement. Comme pour l’environnement, il ne s’agit pas d’une politique en soi, car elle fait appel à de multiples interventions.

Les réunions de coordination sont plus nombreuses que les réunions où l’on agit et finalement on gaspille énormément d’argent. Une fois que nous serons d’accord sur le constat, il faudra parvenir à une véritable politique de la ville.

Je ne parle pas de la banlieue parisienne, mais d’une ville de province très engagée depuis des années dans la politique de la ville et qui a besoin d’une certaine lisibilité. Il convient d’associer la population aux décisions. Mais pour associer 5 000 personnes à une opération, encore faut-il qu’elles comprennent ! Il faut trouver des solutions pour sortir de cette complexité ambiante.

Ma deuxième remarque concerne la politique du logement. Madame la ministre, nous sommes, à gauche comme à droite, engagés dans la politique que vous prônez, c’est-à-dire le développement du logement social, que ce soit par le locatif aidé ou par l’accession sociale à la propriété. Les deux sont nécessaires – sinon nous ne nous en sortirons pas – compte tenu du marché immobilier très tendu, comme sur les côtes de Bretagne, que je connais particulièrement bien.

Mais à côté des grands programmes que nous engageons, nous assistons à un glissement progressif de la demande : les classes moyennes à faibles revenus, qui, jusqu’à présent, sollicitaient le marché privé, se tournent de plus en plus – et elles en ont le droit – vers le logement social.

M. Olivier Carré et M. Marcel Rogemont. Absolument !

M. René Couanau. D’autant que les logements sociaux que nous construisons offrent tout le confort nécessaire et bénéficient d’un accès urbanistique tout à fait attrayant. Dans la région rennaise comme celle de Saint-Malo, pour ne citer que mon département, de nombreux logements privés ne trouvent plus de locataires, qu’ils relèvent du dispositif de Robien ou d’autres. Existe-t-il une solution pour mettre ces logements privés sur le marché à des loyers plus bas ?

Par ailleurs, le couple préfet-maire ne fonctionne pas en matière de politique urbaine, le maire ayant son administration, alors que le préfet en a 36 000 ! Chacun veut y mettre son grain de sel, y compris la jeunesse et les sports, parce qu’il y consacre trois centimes !

L’éventail complet de la politique de la ville incline à trouver des solutions dans le logement privé, autrement, nous assisterons à une course effrénée au logement social, dont nous ne sortirons pas.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.

Mme Chantal Robin-Rodrigo. Comme beaucoup a été dit, et compte tenu de l’heure, je souhaite seulement revenir sur les CUCS et l’ACSE, car c’est de pire en pire, comme vient de le dire mon collègue Couanau.

Les contrats de ville 2000 - 2006 ont au moins eu le mérite de la clarté et de mettre autour de la table l’ensemble des intervenants financiers, l’État notamment. Nous avions, pour ce qui nous concerne, mis en place un GIP politique de la ville : lorsque l’État mettait un euro, le conseil général et l’agglomération mettaient également chacun un euro. Nous avons ainsi pu mener des actions très importantes dans le cadre de notre territoire.

En revanche, avec l’ACSE tout est complexe, car celle-ci verse des fonds en fonction de lignes budgétaires thématiques. Pour chaque territoire, l’Agence nationale délègue plusieurs enveloppes – enveloppe CUCS, enveloppe Ville-vie-vacances, enveloppe Intégration et lutte contre les discriminations. Mais les enveloppes ne sont pas cumulables : un projet ne peut recevoir de fonds que d’une enveloppe. Expliquez-moi, madame la ministre, – mais je suis sûre que vous allez y remédier – comment monter un projet lorsque la lutte contre les discriminations est définie de façon transversale. Moi, je ne sais pas faire, pas plus que le préfet ou le responsable de l’ACSE. Cette agence est un millefeuille, qui ne fait que compliquer les critères d’intervention de la politique de la ville et décourage les élus locaux. Ce n’est pas ainsi que nous améliorerons les choses, les audits, en particulier.

Vous rappeliez tout à l’heure, madame la ministre, que dix-neuf ministres de la ville se sont succédé en dix-sept ans. Je vous souhaite à toutes les deux de rester cinq ans comme M. Bartolone, qui a mis à profit cette période pour mettre en place des conventions pluriannuelles, qui ont permis aux associations d’avoir une meilleure lisibilité sur le terrain, de savoir quel était l’impact d’une action déterminée, en termes de financement, et de disposer d’une évaluation à mi-parcours. Or aujourd’hui, nous sommes dans le brouillard le plus total.

En ce qui concerne l’ANRU, vous nous dites que la situation va s’améliorer. Pour l’instant, ce ne sont que des vœux pieux, car les organismes HLM sont les banquiers de l’ANRU, et cela ne peut pas durer, leur trésorerie n’étant pas extensible à l’infini.

Et quant à l’accompagnement à l’emploi, je souhaite préciser à M. le président de la commission des affaires économiques que les PLIE – plans locaux d’insertion par l’économique – ne disposent plus d’aucun financement. Le FSE n’est plus financé. Or il s’agissait d’un accompagnement individualisé dans le cadre d’un parcours qui amenait les jeunes jusqu’à l’insertion. Désormais, le financement n’est plus assuré.

Dans ces conditions, comment peut-on faire, mesdames les ministres ?

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Mmes les ministres seront sensibles aux vœux personnels que vous avez formulés pour elles. (Sourires.)

La parole est à M. Yves Vandewalle.

M. Yves Vandewalle. Ma préoccupation concerne surtout la fluidification du parcours résidentiel pour améliorer l’accès au logement. J’ai noté avec satisfaction ce que vous nous avez dit concernant la mobilité au sein du parc du logement social : c’est une réelle avancée, compte tenu des rigidités qui existent. J’ai également beaucoup apprécié que vous vous engagiez à revoir le surloyer de solidarité pour faciliter le passage d’un parc à l’autre, alors, que pour l’instant, tel n’est pas le cas.

Nous devrons, toujours dans le cadre de la fluidification, faciliter l’accès au parc privé, notamment par la réduction des frais d’agence, la simplification des dépôts de garantie, et un certain nombre d’autres mesures qui sont, du reste, préconisées à l’échelle européenne.

Il est nécessaire aussi de favoriser la construction durable dans les logements sociaux, notamment pour la construction neuve si l’on ne veut pas avoir, à terme, une politique à deux vitesses avec un parc privé performant et un parc social qui serait à la traîne. Or les investissements réalisés en faveur d’une meilleure performance environnementale des logements, notamment en matière énergétique, représente un coût supplémentaire de l’ordre de 10 %. Il faut donc s’interroger sur le financement. Certains organismes sociaux font valoir qu’il faudrait déplafonner les loyers et, par conséquent, les relever, pour permettre de faire face à ces investissements supplémentaires. L’impact pour les locataires devrait être nul puisque la baisse des charges induites par les économies d’énergie devrait compenser la hausse de loyer. Voilà quelques pistes.

J’ai noté qu’il y a eu beaucoup de points satisfaisants ; pour la suite, il y aura du travail !

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Mesdames les ministres, je partage le constat que la chaîne de la construction des logements est bloquée. Si, du point de vue des élus, on ne sait pas où l’on en est, comme le disait Jean-Yves Le Bouillonnec tout à l’heure, les demandeurs de logement savent, malheureusement, que la question n’est pas réglée. On le voit tous les jours dans nos villes.

Vous aurez notre soutien sur l’aide aux maires bâtisseurs, y compris pour aller plus loin. Nous avons entendu vos engagements sur le respect de l’article 55 de la loi SRU, mais il faut aller plus loin, non par une politique de sanction pour aller au-delà des 20 % de logements sociaux, mais par une politique réellement incitative. On sait très bien que la résolution de la crise du logement consisterait à passer, pour bon nombre de villes qui sont à 22 ou 23 % de logements sociaux, à 30 %. Cela nécessite que l’on aide les maires de bonne volonté, qui devront construire en plus, ou rénover, d’autres équipements : groupes scolaires, équipements sportifs et culturels, par exemple.

Pour réussir ces objectifs, il faut passer des déclarations d’intention à un dispositif concret d’incitations en ce sens. De même, il faut envisager de faire progresser la DGF beaucoup plus rapidement pour prendre en compte l’augmentation de la population dans ces communes. Aujourd’hui, le délai est presque de dix ans entre deux recensements de la DGF, pour qu’une augmentation des dotations soit prise en compte ! Avec le nouveau mode de calcul, cela sera plus rapide, mais je doute que l’on arrive à procéder à un ajustement de manière cohérente et le plus concrètement possible pour inciter les maires à aller dans ce sens.

Concernant les opérations de démolition-reconstruction, deux points n’ont pas été abordés ce matin. Mais permettez-moi d’abord de faire remarquer qu’il a fallu, tout parlementaire que je suis, que j’aille sur le site d’un quotidien pour me procurer le rapport de la Cour des comptes au Sénat.

Il y a un problème sur la typologie des logements reconstruits : quand on démolit un cinq-pièces pour reconstruire un deux-pièces, on n’est pas dans la logique du « un pour un », et c’est un vrai problème notamment dans un certain nombre de quartiers et les projets ANRU qui ont été signés.

Ensuite, indépendamment du chiffre final, il faudrait prendre en compte les décohabitations, que permet souvent la démolition-reconstruction. Je pense aux jeunes couples mariés hébergés par leurs parents. En fait, il faudrait reconstruire quatre logements pour trois logements démolis. Or ces situations ne sont pas prises en compte dans la règle du un pour un.

Mme Claude Darciaux. Tout à fait !

M. Daniel Goldberg. Sur les questions de gouvernance et sur les questions foncières en Île-de-France dont vous parliez tout à l’heure, madame la ministre, on marche sur la tête. On a, en effet, créé trois établissements publics fonciers départementaux et un établissement public foncier compétent pour l’ensemble de l’agglomération de l’Île-de-France.

Par ailleurs, on n’a pas permis que l’aide à la pierre soit globalisée sur l’ensemble de la région. Indépendamment des questions budgétaires, il faudrait que la gouvernance soit claire, ce qui nous permettrait de savoir où l’on en est.

Quand on parle de logement social, il serait bon que l’on différencie les différentes catégories dans la répartition du logement social, y compris dans les engagements des élus. Le PLS et le PLAI, ce n’est pas la même chose !

Cinquième et dernier point : l’augmentation de la dotation de solidarité urbaine dans votre projet de budget est inférieure à celle que prévoyait le plan de cohésion sociale par le biais de l’augmentation de la DGF : 94 millions d’euros au lieu de 120 millions d’euros.

Enfin, je sens une discordance entre les deux ministres sur la question du zonage. Il serait peut-être bon que la représentation nationale dispose d’une vision plus claire de ce que compte faire le Gouvernement en la matière.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Philippe Boënnec.

M. Philippe Boënnec. Mesdames les ministres, je tenais à appeler votre attention sur la primo-accession à la propriété.

Dans les zones géographiques particulièrement attractives comme les côtes – qu’il s’agisse de celles de la Méditerranée, de l’Atlantique ou de la Manche – ou les centres des grandes villes, l’augmentation des prix de l’immobilier rend de plus en plus difficile l’accès au logement pour les jeunes actifs, pourtant indispensables à la mixité sociale et au développement des économies locales. La primo-accession à la propriété représente pourtant, on le sait, un moyen particulièrement efficace de s’insérer dans le tissu économique local. Elle contribue en outre à la stabilité familiale et à l’insertion professionnelle, en même temps qu’elle constitue un début d’épargne.

Plusieurs solutions sont cependant envisageables pour encourager les premières acquisitions immobilières. Les collectivités pourraient ainsi user de leur droit de préemption pour éviter les effets spéculatifs, procédure que j’ai moi-même expérimentée dans ma commune, mais à améliorer. Par ailleurs, il serait intéressant d’inciter les organismes financiers prêteurs à faire bénéficier les primo-accédants de conditions très spécifiques afin qu’ils ne soient pas obligés de payer pendant les quelques mois que dure la construction de leur logement un loyer et les premiers remboursements d’emprunt.

Aujourd’hui, seuls 55 % de nos concitoyens sont propriétaires contre 75 % dans de nombreux pays européens. Pour augmenter cette proportion, il est indispensable de continuer à agir.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme Claude Darciaux.

Mme Claude Darciaux. Mesdames les ministres, le Président de la République a dit vouloir faire de la France « un pays de propriétaires » : slogan séduisant mais totalement irréalisable. En effet, la priorité aujourd’hui revient à la construction de nouveaux logements. Donner la possibilité d’acquérir leur logement à des Français de condition modeste qui vivent dans des HLM ne constitue pas une solution. En 2004, un quart des accédants à la propriété appartenaient aux classes modestes et populaires, et, aujourd’hui, la part des seules classes populaires recule.

L’accès au crédit est réservé à des personnes jeunes et en bonne santé et les banques multiplient les refus aux personnes ayant été malades. En outre, l’augmentation des taux d’emprunt entraîne un alourdissement de 55 euros par mois des charges supportées par les ménages, si bien que, pour maintenir leur pouvoir d’achat, une hausse de leurs revenus d’au moins 5 % leur serait nécessaire. On estime d’ailleurs qu’en raison de la hausse des taux, 2,5 millions de personnes ont perdu toute possibilité de devenir propriétaires.

Madame la ministre du logement, comme il a été dit sur tous les bancs de cette commission, il est nécessaire de construire des logements, des logements sociaux et des logements très sociaux. Je rejoins la demande de M. Goldberg : il faut mettre en place des mécanismes pour qu’il y ait davantage de PLAI que de PLS. Dans la communauté d’agglomération dont ma commune fait partie, beaucoup de logements bénéficiant de PLS sont construits mais aucun logement très social n’est envisagé.

Par ailleurs, s’agissant du droit au logement, je constate que la fracture sociale, loin de se réduire, s’est aggravée avec le logement des publics prioritaires. Madame la ministre, alors que l’opposabilité du droit au logement deviendra effective au 1er janvier, ne pensez-vous pas que ce sont les communes vertueuses, qui ont déjà largement atteint leurs quotas en matière de logements sociaux, qui se verront désigner par les préfets pour le logement des publics prioritaires ? C’est déjà le cas dans ma commune, où je constate que la fracture sociale est en train de s’approfondir.

Enfin, madame la secrétaire d’État, si le plan Banlieue est une urgence, quels financements sont prévus dans le présent projet de budget ? Il existe deux priorités, que vous avez vous-même soulignées. Soyons vigilants car la moindre étincelle pourrait mettre le feu aux quartiers. Et ce n’est pas qu’une image : deux gymnases ont été brûlés dans ma commune, je sais de quoi je parle.

À cet égard, l’emploi des jeunes est une priorité nationale. Comme je l’ai fait hier à l’occasion des rencontres territoriales organisées à Dijon, je demande la mise en place d’exonérations de charges patronales pour l’emploi de jeunes résidant dans les quartiers en difficultés, qu’ils y travaillent ou non.

Par ailleurs, je voudrais soulever le problème de l’accès à l’emploi des mères isolées, car le nombre des familles monoparentales explose dans nos quartiers. Il faudra absolument les prendre en compte dans le plan banlieue.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Madame Darciaux, je vous rappelle qu’il y a déjà 22 milliards d’exonérations de cotisations sociales. Peut-être pourrait-on d’abord mieux les cibler.

Mme Claude Darciaux. Ou alors remplacer celles qui existent pour les heures supplémentaires.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Mesdames les ministres, René Couanau expliquait que, député d’Ille-et-Vilaine, il n’en avait pas moins à l’esprit les responsabilités locales liées à son mandat de maire de Saint-Malo. Eh bien, c’est ici en tant que président d’un organisme de HLM que j’aimerais appeler votre attention sur deux sujets principaux.

Tout d’abord, je prendrai l’exemple extrêmement précis d’un logement T3 construit grâce à un PLUS pour un coût de 106 000 euros : 2 140 euros provenant de l’État – soit 2,5 % du prix plafonné et à peine 2 % du prix réel – et 36 000 euros du conseil général d’Ille-et-Vilaine et de l’agglomération de Rennes. Et, au titre de la TVA, ce sont 5 526 euros qui ont été versés par l’organisme HLM à l’État ; autrement dit, ce dernier a gagné 3 386 euros !

Mme la ministre du logement et de la ville. Vous ne pouvez pas raisonner de la sorte !

M. Marcel Rogemont. Or nous avons construit 220 logements dans le cadre des PLUS cette année, avec une aide de l’État de 744 220 euros. Ne trouvez-vous pas surprenant, madame la ministre, qu’au moment où vous annoncez une politique du logement forte, l’État gagne de l’argent sur ces opérations ? Quand acceptera-t-il ne plus s’enrichir sur la construction de tels logements ?

Par ailleurs, quand vous avez annoncé la signature, le 15 décembre prochain, d’un accord avec l’Union sociale pour l’habitat sur la vente de logements HLM, j’ai immédiatement envoyé un texto au président de la fédération nationale des offices HLM, Jean-Pierre Caroff : il m’a répondu que sa position n’avait absolument pas changé sur ce point.

En outre, le financement des logements HLM est assuré pour l’essentiel par les collectivités territoriales, je le constate à l’échelle de mon département. Dans ces conditions, ne paraît-il pas logique que ce soient ceux qui contribuent le plus au financement du logement social qui décident s’il doit y avoir vente ou pas ? Si une loi vient imposer la vente de logements HLM...

Mme la ministre du logement et de la ville. Il n’y aura pas besoin d’une loi !

M. Marcel Rogemont. Espérons-le ! Toujours est-il que les offices HLM qui vendront des logements contre l’avis des collectivités territoriales s’exposeront à des difficultés ultérieures, notamment quand ils voudront construire de nouveaux logements.

Ensuite, s’agissant des sur-loyers, l’étude du CREDOC publiée en septembre dernier montre qu’en 1997, 50 % des ménages résidant dans des HLM avaient des ressources de 60 % inférieures au plafond contre 66 % en 2006 et qu’en 1997, 82 % étaient en dessous du plafond contre 93 % en 2006. Autrement dit, les HLM sont bel et bien occupés par le public auquel ils sont destinés. Dès lors, la mise en place de sur-loyers ne contribuerait en rien à la fluidification du logement locatif : ils ne joueraient qu’un rôle marginal.

Enfin, pour ce qui est de la loi DALO, vous aurez beau nous dire que les dispositifs prennent forme le plus rapidement possible, il n’en reste pas moins que ce sont les logements qui manquent. Dans mon département, le comité régional de l’habitat vient de faire part le 19 octobre dernier des objectifs pour 2007 : l’annonce est bien tardive, mais surtout l’enveloppe réservée au financement du logement social n’a pas été augmentée en proportion du nombre de logements que nous sommes appelés à construire. Autrement dit, l’aide par logement baisse pour que soient respectés les engagements quantitatifs.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Mesdames les ministres, j’aurai deux questions très brèves.

La première porte sur le soutien à la vie associative dans les quartiers, plus précisément sur la cohérence de la politique gouvernementale en ce domaine. D’un côté, vous affichez dans le projet de budget un programme « Équité sociale et territoriale » relativement stable. Nous savons d’ailleurs en tant qu’élus locaux que ses crédits ont été très fortement diminués durant les trois premières années de la précédente législature et rétablis seulement après les émeutes de 2005, ce qui n’a pas empêché la fragilisation du tissu associatif.

Par ailleurs, la semaine dernière, l’Assemblée a voté un budget des sports, de la jeunesse et de la vie associative en diminution de 3 % par rapport à l’année précédente. Les crédits en faveur des associations d’éducation populaire, qui mènent un travail en profondeur dans les quartiers, baissent, quant à eux, de 5 %. Vous le savez, cette diminution aura un impact direct sur leur fonctionnement et entraînera la fermeture de centres sociaux, des réductions d’activités, donc des réductions de services rendus à la population. Bref, vous poursuivez ce mouvement qui consiste à plonger ces structures dans un état de précarité permanente.

Quelle est la cohérence de votre politique de soutien en direction de la vie associative dans les quartiers quand on sait que le budget des sports, de la jeunesse et de la vie associative diminue ?

Madame Boutin, vous avez semblé tout à l’heure mettre en cause la politique de zonage, mais vous n’avez pas évoqué les zones franches urbaines. Du reste, Daniel Goldberg a relevé quelques divergences de point de vue entre Mme Amara et vous-même. 340 millions d’euros sont consacrés à la compensation d’exonérations de charges sociales, chiffre à comparer aux 414 millions affectés aux actions de proximité du tissu associatif. Quand disposerons-nous d’une évaluation sérieuse de l’impact des mesures d’exonération en faveur des zones franches urbaines en termes d’emplois dans les quartiers ? Je considère que beaucoup de choses sont à revoir de ce point de vue.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Pour commencer, je ferai trois remarques, un peu perfides j’en conviens. (Sourires.)

M. René Couanau. Il ne peut en être autrement : vous avez une réputation à tenir ! (Sourires.)

M. François Brottes. Premièrement, j’ai eu raison de demander, au nom de mon groupe, le report de votre audition, madame la ministre, initialement prévue à dix-huit heures trente. Songez, vu l’intérêt que vous suscitez, le temps qu’il nous aurait fallu siéger ! Du reste, je remercie les présidents d’avoir accepté de reporter cette audition – je savais bien que je serais un peu perfide !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. C’est un euphémisme ! (Sourires.)

M. François Brottes. Deuxièmement, je note que vous vous appliquez à supprimer les crédits du dispositif Robien.

Troisièmement, lors du vote de la loi DALO, M. Karoutchi, qui n’était pas alors ministre, mais qui agissait pour les œuvres du parc de La défense, avait fait voter une disposition visant à exclure la construction de logements sociaux du quartier de La Défense pour les réserver à l’Est parisien. J’étais alors rapporteur de ce texte pour mon groupe, bien que n’étant pas un élu d’Île-de-France – comme quoi, on peut s’intéresser à ce qui se passe en Île-de-France tout en étant un député de province. Il y avait là une contradiction entre l’esprit du texte sur le droit au logement et une telle mesure quelque peu perverse, me semble-t-il.

Je poserai cinq questions.

Tout d’abord, je reçois de nombreux coups de téléphone, suite à vos annonces et à celles du Président de la République, sur le calendrier de la vente des HLM. Je leur donne désormais votre numéro de téléphone. En tout état de cause, vous ne pourrez pas prendre une telle initiative sans solliciter l’accord des communes.

Deuxièmement, chacun souhaite encourager l’accession sociale à la propriété, et en premier lieu le président de la commission des affaires économiques. Avez-vous des solutions pour éviter la spéculation sur la vente de ces logements, une fois que les gens y auront accédé ? La spéculation est en effet un frein à l’enthousiasme des collectivités en direction de l’accession sociale.

Par ailleurs, madame la ministre, je vous demande de nous aider à valoriser la notion de densité de construction.

Mme la ministre du logement et de la ville. Je suis d’accord.

M. François Brottes. Ce n’est pas un message facile à porter dans les régions. Pourtant, c’est un élément indispensable au regard du développement durable. Quand on parle d’accession à la propriété, certains pensent qu’il s’agit de devenir propriétaire d’une villa qui comprend 1 500 mètres carrés de terrain ! Si c’est ce message-là qui passe, on ne s’en sortira pas. Vu votre enthousiasme, je pense que vous pouvez nous aider à communiquer plus positivement sur le sujet.

En outre, quelles mesures envisagez-vous pour favoriser la colocation choisie, qui pourrait contribuer à résoudre une partie de la crise du logement ? Ce peut être une solution, quel que soit l’âge du locataire. Les bailleurs sociaux n’ouvrent pas spontanément ce droit alors que de grands appartements HLM sont disponibles. De plus, en matière de caution solidaire, les propriétaires n’ont pas toujours un comportement très vertueux.

Enfin, bien que vous ne soyez pas en charge de l’urbanisme, je souhaiterais que vous vous intéressiez, ainsi peut-être que la commission des finances, à l’attitude du service des Domaines. J’ai constaté à plusieurs reprises, quand on mobilise du terrain au nom de l’utilité publique, qu’il était en avance sur l’augmentation du prix du foncier. Les élus sont inquiets de voir qu’il y a une sorte de surenchère de la part de ce service. Il serait judicieux que vous procédiez à des contrôles dans certains départements, sachant que le foncier est précisément au cœur de votre action.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Mme la ministre du logement et de la ville. Messieurs les présidents, vous nous demandez de répondre très brièvement. C’est fort dommage car toutes les questions posées mériteraient un long développement.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Vous pourrez revenir, sachant que vous nous avez dit être en pleine réflexion.

Mme la ministre du logement et de la ville. Je suis prête à revenir quand vous le souhaiterez, car nous aimerions connaître le fruit de votre réflexion.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Madame la ministre, si vous le souhaitez, vous pouvez compléter votre propos par des réponses écrites.

Mme la ministre du logement et de la ville. C’est ce que je pense faire.

Je laisserai Mme Amara répondre sur l’ANRU, la diminution des crédits de paiement et sur le soutien aux associations dans les quartiers.

Monsieur Pinte, je répondrai par écrit à votre question, qui mérite des précisions. En tout état de cause, je tiens à souligner le travail social que vous faites sur Versailles, car, contrairement à ce que l’on peut croire, ce n’est pas une ville de nantis. Certes, les problèmes y sont moins importants que dans d’autres quartiers, mais le travail qui y est accompli en matière de logement social est tout à fait exemplaire.

Madame Lepetit, vous trouverez des réponses concrètes sur le dispositif Robien dans un rapport qui vous sera adressé.

Monsieur Couanau, nous devons toujours avoir en tête que 72 % de la population française répond aux critères d’attribution des logements HLM, alors que 22 % y vit, autrement dit qu’un Français sur deux est locataire dans le secteur libre.

Madame Robin-Rodrigo, c’est Mme Amara qui répondra à votre question relative aux CUCS et à l’ACSE.

S’agissant des PLI, il faut savoir qu’ils sont désormais à la charge des départements.

Monsieur Vandewalle, je répondrai par écrit à vos questions, bien que de nombreuses réponses aient été données.

Monsieur Goldberg, j’ai bien entendu vos propositions sur l’aide aux maires bâtisseurs. Nous travaillons à la piste que vous évoquiez concernant la mise en adéquation de la DGF avec la réalité du terrain.

S’agissant de la région Île-de-France où la situation est particulièrement tendue, j’ai demandé au préfet Mutz de réunir les états généraux du logement en Île-de-France. Quatre groupes de travail et un comité de pilotage sur la gouvernance, le foncier, les produits largement spécifiques et le logement des populations les plus fragiles se réuniront demain. Le président du conseil régional, le maire de la ville de Paris et les maires des villes d’Île-de-France, les présidents des conseils généraux et les préfets des huit départements franciliens assisteront à cette journée.

Quant à la question de M. Boënnec, je pense y avoir déjà répondu.

Monsieur Rogemont, vous avez une façon un peu sélective d’établir l’équilibre du financement des logements sociaux. Je vous rappelle que parmi les aides de l’État figurent les subventions mais aussi toute la dimension fiscale, que vous semblez oublier. Je pourrai en parler avec vous directement, si vous le souhaitez

Monsieur Juanico, Mme Amara répondra à votre question.

Enfin, monsieur Brottes, j’aimerais que vous rassuriez ceux qui ont des inquiétudes quant à la vente des HLM. Il ne s’agit pas de menacer quiconque d’un éventuel couperet. Tout repose sur la base du volontariat et il s’agit de tendre vers un objectif, voire le dépasser, tout comme l’est la construction de 500 000 logements neufs par an fixée par le Président de la République.

Quant à la densité, nous y avons répondu en autorisant la construction d’un étage supplémentaire.

Enfin, nous serons attentifs à la politique du service des Domaines.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville.

Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. L’État accompagne bien évidemment la montée en charge de l’ANRU en ouvrant les crédits de paiement nécessaires au règlement des opérations engagées. Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit à cet égard le versement de 200 millions d’euros de crédits de paiement à l’ANRU. Certes, ce montant est inférieur à celui de 2007 puisqu’il était de 353 millions. Des raisons techniques font que les paiements se font plus lentement que prévu. L’instruction des dossiers par les DDE mérite d’être harmonisée et l’ANRU doit sans doute développer l’assistance aux acteurs de rénovation urbaine pour améliorer le montage des dossiers et réduire les délais.

Plusieurs points vont dans le bon, comme l’a précisé tout à l’heure Mme Boutin. Le règlement général de l’ANRU, publié en avril, a clarifié les règles du jeu une bonne fois pour toutes. Nous sommes passés d’une logique de paiement de services faits à une logique de versement d’avances à hauteur de 15 % à compter de la décision attributive de subventions, ce qui permettra d’améliorer la rapidité du financement sur le terrain.

Il faut sans doute améliorer les choses pour éviter les doublons, notamment le fonctionnement avec les DDE, et réfléchir à des propositions permettant de mettre le couple que forment le maire et le préfet au cœur du dispositif de paiement et de suivi des opérations de rénovation urbaine, même si je note quelques dysfonctionnements.

Concrètement, cela signifie qu’il faut aller vers une déconcentration des paiements et un recentrage de l’action des services de l’ANRU, sur l’assistance, l’évaluation et l’échange des meilleures pratiques afin d’harmoniser les pratiques locales.

Je veux en tout cas vous rassurer sur le fait que l’État prendra toute sa part et respectera ses engagements en mobilisant les crédits de paiement nécessaires en fonction des besoins.

Je suis consciente des problèmes que pose cette « bosse » de l’ANRU, qui révèle un délai entre la phase de programmation et la réalisation des opérations. En tout cas, vous pouvez compter sur ma vigilance et sur ma force de persuasion pour accélérer le montage des opérations. À l’avenir, l’argent devra parvenir plus rapidement sur le terrain. Les échanges que j’ai eus avec l’ANRU sont prometteurs sur ce point.

S’agissant de l’élaboration des CUCS, je répondrai par écrit à Mme Robin-Rodrigo. Un effort a été fait avec tous les acteurs de terrain. Les CUCS me semblent encore trop récents pour qu’on puisse les évaluer. Peut-être faut-il accentuer nos efforts sur les intervenants, améliorer les circulaires, les guides de préparation et les formations faites par l’ACSE.

Certes, c’est un peu complexe, mais les CUCS sont ambitieux car – nous sommes là dans quelque chose de nouveau – ils couvrent les différents aspects d’une vraie crise sociale en intégrant l’emploi, la santé, la délinquance, le cadre de vie, etc. Je pense qu’il faut fortement inciter les multiples partenaires à se parler, que ce soient les associations, les services administratifs, les collectivités territoriales ; c’est nécessaire parce que l’on signe pour trois ans. Il faudra aussi évaluer le dispositif ultérieurement, pour en apprécier la pertinence.

Mme Robin-Rodrigo a regretté que l’ACSE semble adopter un mode de fonctionnement trop rigide. Mais je rappelle que le préfet a une enveloppe budgétaire qui lui permet de choisir quels projets vont être financés. Il peut attribuer les financements comme il le souhaite, sauf en ce qui concerne la réussite éducative, où, là, c’est effectivement très rigide. Cela dit, entre nous, c’est aussi pour éviter, vous le savez comme moi, que l’argent aille aux associations trop proches de l’élu du coin – je le dis sans vouloir lancer de polémique –, ce qui empêcherait les associations nouvelles, qui ont des projets innovants, de pouvoir fonctionner.

Sur le plan Banlieue, madame Darciaux, nous avons les mêmes soucis que vous. Je ne vais pas refaire le diagnostic : tout le monde sait ce qui se passe dans les quartiers et ce dont on a besoin pour que cela change. Ce plan Marshall des banlieues démontre, encore une fois, la volonté du Président de la République de faire en sorte que cela change concrètement dans les cités. Ma responsabilité est de construire le plan « Respect et égalité des chances », qui va dans ce sens. Je pense comme vous qu’il y a urgence.

Il y a deux axes forts – que vous avez soulignés, madame la députée.

Tout d’abord, c’est l’emploi des jeunes, qui doit être et rester une priorité parce que nous savons tous que nous pouvons mettre tous les dispositifs possibles pour renforcer la cohésion sociale, si le plan Banlieue n’est pas axé sur la lutte contre le chômage, en particulier celui des jeunes et des femmes vivant dans des familles monoparentales, nous allons droit à la catastrophe. C’est un axe très important dans le plan Banlieue, et nous allons faire des propositions en ce sens. Je voudrais que vous soyez rassurée sur ce point.

La question des familles monoparentales fait aussi partie des priorités du plan Banlieue. Je sais pertinemment qu’elles sont beaucoup trop nombreuses dans les banlieues. Dans les réunions de concertation – je me réjouis que vous y ayez participé – comme dans les réunions d’appartement – que je demande au préfet d’organiser systématiquement quand je descends dans les cités –, j’entends la demande de sécurité des femmes qui élèvent seules des enfants dans une situation de précarité économique. Nous devons y répondre et tout faire pour les rassurer, même si cela ne figure directement dans aucun des trois axes prioritaires prévus par le Président de la République.

Monsieur Juanico, s’agissant du financement des associations, vous avez posé une question très importante. Je ne rentrerai pas dans une polémique sur la cohésion des politiques, mais je dirai la chose suivante : la politique de la ville, vous l’avez bien souligné, est d’abord une politique transversale, et elle oblige à la mobilisation des moyens de droit commun. On discutait tout à l’heure de la pertinence du zonage, mais je crois très fortement que la politique de la ville doit être envisagée comme un plus pour des quartiers en situation de difficultés extrêmes, les politiques de droit commun devant se mobiliser et remplir toutes leurs obligations, parce que, sinon, on n’y arrivera pas.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Très bien !

Mme la secrétaire d’État chargée de la politique de la ville. Quant à votre question sur la diminution du budget du programme « Jeunesse et vie associative », je ne peux pas répondre directement parce qu’il ne dépend pas de ma responsabilité. Mais je vais voir ce qui se passe et je ferai en sorte que les membres du Gouvernement remplissent leurs obligations, ne serait-ce qu’au niveau du droit commun. J’interviendrai parce qu’il y a non seulement la question du droit commun, mais également l’importance du sens des priorités : dans les quartiers, on a un besoin urgent de sortir de toutes ces difficultés pour éviter de revivre ce que nous avons vécu en 2005.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances. Je vous remercie, madame la ministre, madame la secrétaire d’État. La discussion de ce matin n’épuise bien sûr pas le sujet, mais nous aurons l’occasion de vous réentendre.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Je remercie à mon tour Mme la ministre et Mme la secrétaire d’État.

(La réunion de la commission élargie s’achève à treize heures cinq.)