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Assemblée nationale

Commission élargie

commission Élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires sociales

(Application de l’article 120 du Règlement)

Mercredi 2 novembre 2011

Présidence de M. Dominique Baert,
secrétaire de la Commission des finances,
et de M. Pierre Méhaignerie,
président de la Commission des affaires sociales

La réunion de la commission élargie commence à dix-sept heures.

projet de loi de finances pour 2012

Solidarité, insertion et égalité des chances

M. Dominique Baert, président. Nous sommes heureux, M. Méhaignerie et moi-même, d’accueillir pour cette réunion en commission élargie, Mme Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale, ainsi que Mme Greff et Mme Montchamp, secrétaires d’État. Le président de la Commission des finances, M. Jérôme Cahuzac, retenu ailleurs, vous prie d’excuser son absence.

Nous examinons les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2012. Je rappelle que les débats seront chronométrés, cette année, pour nous inciter à respecter la durée de trois heures qui a été prévue.

M. Jean-Marie Binetruy, rapporteur spécial. Le budget de cette mission, essentiellement constitué de crédits d’intervention, s’élèvera à 12,750 milliards d’euros en 2012, soit une hausse de 3,1 % des moyens.

Ces derniers ne représentent toutefois qu’une partie de l’effort national en matière de solidarité : les organismes de sécurité sociale, les collectivités territoriales et les associations y participent largement, et il faut ajouter à cela plus de 22 milliards de dépenses fiscales au titre des impôts d’État et des impôts locaux.

Le périmètre de la mission étant aujourd’hui à peu près stabilisé, deux faits sont à remarquer.

Le premier est l’ajustement de la contribution de l’État au fonds national des solidarités actives, destiné à assurer le financement du RSA « activité » en complément du prélèvement de 1,1 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement. La contribution de l’État sera portée à 528 millions en loi de finances initiale pour 2012, contre 686 millions en LFI pour 2011, et 453 millions en exécution.

Second fait saillant, l’augmentation continue du programme 157, « Handicap et dépendance », dont les crédits de paiement passeront de 9,885 milliards en 2011 à 10,481 milliards en 2012, les crédits prévus pour l’allocation aux adultes handicapés (AAH) devant être portés, pour leur part, de 7,2 à 7,770 milliards – je rappelle que le coût ne dépassait pas quatre milliards en 2000. Un rapport de la Cour des comptes sur cette évolution était joint à mon rapport de l’an dernier ; pour cette année, nous attendons un complément sur l’évolution territoriale de l’AAH.

Je souhaiterais poser quatre questions.

S’agissant du RSA, qui nécessite un certain nombre d’ajustements et de simplifications, le rapport Daubresse formulait un certain nombre de recommandations. Quelle appréciation portez-vous sur ces propositions, et quelle suite entendez-vous leur donner ? Pourriez-vous, en particulier, faire le point sur la compensation des charges induites par le RSA « socle », ex – RMI, et le RSA « majoré », ex – API, qui ont été transférés aux conseils généraux ?

En ce qui concerne l’AAH, l’augmentation des coûts est due à l’engagement – tenu – du Président de la République de majorer de 25 % le montant de la prestation, mais aussi à l’augmentation du nombre des bénéficiaires, en particulier ceux dont le taux d’incapacité est compris entre 50 et 80 %. Cette dernière évolution pourrait être liée à l’amélioration de la prise en compte du handicap psychique, mais j’aimerais savoir si vous avez des explications plus précises sur l’augmentation des coûts. Comment le Gouvernement envisage-t-il d’y faire face ?

Ma troisième question concerne l’évolution de l’adoption dans le contexte actuel – l’adoption interne se développe dans certains pays et l’offre devrait se réduire.

Enfin, pouvez-vous faire le point sur le programme 124, qui sert de support à de nombreuses politiques interministérielles et semble en voie de stabilisation ? Je tiens à saluer l’engagement remarquable des administrations centrales et déconcentrées dans l’application des réformes, qui étaient indispensables.

M. Élie Aboud, rapporteur pour avis de la Commission des affaires sociales pour le handicap et la dépendance. Je suis heureux de constater que le budget de la mission dépasse 12,7 milliards d’euros en crédits de paiement et autorisations d’engagement, contre 12,3 milliards ouverts en LFI l’an dernier.

Environ 80 % de ces crédits vont au programme consacré au handicap et à la dépendance, qui sera doté de 10,4 milliards, en augmentation de 6 % par rapport à l’an dernier. Cet effort permettra notamment la revalorisation de l’AAH, pour tenir l’engagement pris par le chef de l’État en juin 2008, lors de la conférence nationale sur le handicap.

Malgré les temps difficiles que nous traversons, la politique sociale n’a donc pas servi de variable d’ajustement, bien au contraire. On peut s’en féliciter, car plus le contexte économique est défavorable, plus il faut préserver la solidarité avec les plus fragiles.

La préparation de mon avis budgétaire, centré sur la question du mode de vie des personnes âgées dépendantes, à domicile ou en établissement, et les auditions que j’ai menées me conduisent à vous poser les questions suivantes.

Tout d’abord, à quelle échéance une réforme globale de la dépendance pourrait-elle être mise en œuvre ?

Dans cette perspective, les débats organisés au premier semestre 2011 vous ont-ils conduit à fixer votre opinion sur le mode de financement qui serait le plus approprié pour le 5e risque ?

Avez-vous reçu des échos de la mission confiée à notre collègue Bérengère Poletti sur les difficultés des services d’aide à domicile ? L’une des principales organisations représentatives m’a fait part, lors de son audition, des graves difficultés financières d’un certain nombre de ses adhérents. Pour répondre à ce problème, vous avez récemment proposé de créer un fonds d’urgence de 50 millions, mesure que je tiens à saluer. Quelles orientations devrait-on plus généralement retenir pour assainir la situation financière des structures d’aide à domicile ?

S’agissant des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), les résultats du plan « solidarité grand âge » sont très satisfaisants en matière de création de places et de médicalisation, mais on se heurte à un problème de recrutement d’infirmières et d’aides soignantes dans certaines régions. Comment y remédier ?

M. Christophe Sirugue, rapporteur pour avis de la Commission des affaires sociales pour la solidarité. Hors programme « Handicap et dépendance », les crédits de la mission diminuent cette année de 8,4 %.

Déjà ramené de 1,7 milliard en 2010 à 700 millions en 2011, le budget alloué au RSA devrait revenir à 528 millions en 2012. Cette réduction des crédits, liée au nombre des prestations versées, signifie-t-elle que le dispositif ne parvient pas à trouver sa place, ou bien que la volonté de le développer est moindre qu’auparavant ? Comme il en de même pour le RSA « jeunes », dont la baisse significative nous porte très en deçà des objectifs initiaux, j’aimerais savoir si le Gouvernement souhaite que le dispositif perdure.

En ce qui concerne l’action 2 du même programme 304, j’ai été extrêmement surpris de voir apparaître, au titre des expérimentations sociales, un montant d’1,2 million de crédits relatifs au fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Est-ce la conséquence d’un changement d’approche dans le domaine de la lutte contre la pauvreté ? Votre cabinet n’a pas apporté de réponse à mes interrogations.

Le programme 106, « Actions en faveur des familles vulnérables », subit également une baisse significative : les crédits concernant la parentalité se réduisent de 17 % et, là non plus, je n’ai pas obtenu de réponse. Les crédits du planning familial sont certes maintenus, à hauteur de 2,1 millions, de même que ceux relatifs à la carte « enfant famille », mais il manque 2,18 millions sur l’ensemble de la ligne budgétaire. Les associations de conseil conjugal et familial pourraient être concernées, ainsi que la médiation familiale, les points « info familles » ou encore les Réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents (REAPP).

Pour l’action 3, qui concerne les mineurs et les majeurs faisant l’objet d’un suivi, il manque aussi 7 millions. En l’absence de réponse aux questions que j’ai posées, il m’est difficile de me prononcer.

S’agissant du programme 137 « Egalité entre les hommes et les femmes », je constate une refonte conséquente de la ventilation des crédits. Ce type d’opération complique singulièrement notre tâche. S’il faut saluer l’augmentation de trois millions d’euros des moyens affectés au 3e plan triennal de lutte contre les violences faites aux femmes, je m’étonne, en revanche, de la baisse de certains crédits, notamment ceux prévus pour la lutte contre la prostitution : il me semblait que cette question devait être une priorité.

En ce qui concerne le programme 124, j’ignore si l’on peut se fier aux chiffres fournis, compte tenu de l’annulation considérable décidée, l’an dernier, en cours d’exercice budgétaire. On peut se demander si les crédits prévus pour 2012, qui sont déjà en nette diminution par rapport aux prévisions pour l’année dernière, permettront de faire fonctionner les services concernés, notamment les administrations centrales des ministères sociaux.

J’ai souhaité, dans mon rapport, mettre l’accent sur la question des majeurs protégés. Personne ne conteste la réforme adoptée en 2007, mais bien des questions se posent aujourd’hui. Toutes les mesures annoncées avant l’entrée en vigueur de la loi devaient être revues avant le 31 décembre 2013. Or, il ressort des auditions que ni les juges, ni les travailleurs sociaux, ni les associations n’y sont prêts. À cela s’ajoute la question du contrôle des fonds publics – je pense, en particulier, aux missions de suivi des jeunes majeurs, non pas tant pour les associations, qui doivent bénéficier d’un agrément préfectoral, que pour les mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM), structures libérales d’accompagnement dont les représentants eux-mêmes souhaiteraient être contrôlés, afin d’éviter toute interrogation sur l’utilisation des fonds publics. Un rapport devait être présenté dès 2010 sur la mise en œuvre de la loi, mais il n’a toujours pas été remis. Je défendrai donc un amendement sur ce point.

M. le président Pierre Méhaignerie. Comme l’a noté Elie Aboud, les dépenses de solidarité continuent à augmenter malgré les temps difficiles que nous traversons. Nos concitoyens ne sont pas assez conscients du fait que les dépenses publiques sont, pour plus de 60 % d’entre elles, de nature sociale, et que les inégalités sont aujourd’hui beaucoup plus corrigées par les prestations sociales que par notre système fiscal. Pourra-t-on continuer, face au poids de la dette ?

J’en viens au RSA « activité » : quelle perception peut en avoir quelqu’un qui reprend un travail ou qui ne bénéficiait pas auparavant du dispositif ? N’aurait-on pas intérêt à remplacer ce dispositif par la prime pour l’emploi, plus incitative et plus valorisante pour les bénéficiaires ?

S’agissant de l’AAH, comment expliquer les différences extraordinaires entre les départements ? Je rappelle que les chiffres varient de un à quatre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Avant de répondre aux questions des rapporteurs, je ferai un bref exposé liminaire.

À propos de la dépendance d’abord. Beaucoup d’entre vous ont participé au débat sur la réforme de la dépendance que Mme Montchamp et moi-même avons organisé au cours du premier semestre. Grâce aux 26 débats régionaux et aux cinq colloques nationaux qui ont eu lieu, nous avons pu consulter les partenaires sociaux, les responsables professionnels et ceux des associations, ainsi que l’ensemble des partis politiques et les commissions parlementaires. Les quatre groupes de travail m’ont ensuite remis des propositions pour améliorer la prise en charge de nos aînés.

Comme le Premier ministre l’a indiqué le 24 août dernier, à l’occasion de la conférence de presse sur les mesures de réduction des déficits, il n’aurait pas été responsable de traiter le dossier de la dépendance dans le contexte économique et financier très tendu que nous connaissons. Au demeurant, une des principales conclusions des groupes de travail est que les besoins financiers les plus importants commenceront à se faire sentir à partir de 2025. Nous avons donc décidé de reporter les mesures financières les plus lourdes – elles interviendront quand le contexte le permettra. Cela étant, la réforme de la dépendance est en marche : dès cette année, nous proposons d’importantes mesures pour les personnes âgées, que j’ai eu l’occasion de présenter lors de l’examen du PLFSS pour 2012.

En ce qui concerne le PLF, j’ai obtenu qu’on apporte une réponse aux difficultés auxquelles sont confrontées les associations et les entreprises en charge des services d’aide à domicile. Comme M. Aboud l’a indiqué, nous allons mettre en place un fonds d’aide de 50 millions, qui sera placé auprès de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), en vue d’accompagner les restructurations nécessaires. Ce fonds sera abondé à partir du budget général de l’État, et non par un recyclage de crédits au sein du PLFSS – comme certains le redoutaient.

J’en viens, second point, à l’expérimentation des contrats d’une journée par semaine qui est prévue pour les bénéficiaires du RSA : nous devons nous doter d’un maximum d’outils pour faciliter l’insertion de ces publics, notamment ceux qui rencontrent des difficultés sociales ou de santé et ceux qui sont éloignés du marché du travail depuis trop longtemps. Un contrat de travail de 20 heures représentera déjà beaucoup pour eux.

Je souhaite que le programme 304 finance dès l’année prochaine, dans la limite de trois millions d’euros, une expérimentation visant à créer un nouveau contrat aidé, d’une durée de 6 mois et renouvelable une fois, au profit des bénéficiaires du RSA « socle ». Seront concernées des activités rémunérées reposant sur la base du volontariat et limitées, dans un premier temps, au secteur non marchand, à raison d’une journée de travail par semaine. J’ai pu constater sur le terrain, notamment en Savoie, que cette mesure correspondait à un public bien identifié de bénéficiaires. Rémunérés sur la base du SMIC, ils continueront de percevoir le RSA « socle » et seront éligibles au RSA « activité ». Pour 2012, 10 000 contrats sont prévus et nous attendons des conseils généraux qu’ils jouent le jeu – je tiens à remercier ceux qui se sont déjà portés volontaires.

Je souhaite également que les présidents de conseils généraux puissent choisir le mode d’organisation qui leur paraîtra le plus approprié – gestion directe ou gestion déléguée aux communes ou à des opérateurs extérieurs –pour la prescription des contrats uniques d’insertion (CUI), le repérage des employeurs potentiels, l’accompagnement des bénéficiaires et l’évaluation du dispositif.

Outre les directions centrales concernées, le pilotage de l’expérimentation regroupera des représentants des départements. Un comité de pilotage se réunira chaque trimestre afin de suivre la mise en œuvre du dispositif, de lever les freins identifiés et de réaliser un travail d’évaluation. Si ce contrat à vocation sociale est une réussite, l’expérimentation sera ensuite généralisée. Cette démarche, chère au Président Méhaignerie, me semble la bienvenue pour remettre la valeur travail au cœur du RSA.

Troisième chantier, la lutte contre les fraudes aux prestations sociales.

Le dispositif actuel fonctionne bien, mais nous pouvons aller plus loin, notamment en ce qui concerne les prestations versées par les caisses d’allocations familiales (CAF) dans le cadre du RSA. Il convient en particulier de renforcer la collaboration opérationnelle entre les CAF et les administrations ou organismes partenaires, à commencer par les conseils généraux, ce qui permettra de détecter plus vite les faits générateurs de fraudes. Rappelons que c’est sur le versement des minima sociaux qu’est recensé le plus grand nombre de fraudes.

C’est pourquoi j’ai lancé, le 4 avril dernier, une expérimentation de coopération renforcée. Ces actions, qui ont été menées durant quatre mois, dans 14 départements, ont permis de doubler le taux de détection des fraudes – rapportées au total des prestations versées par les CAF – de 5 %, en 2010, à 10 %.

En 2011, comme en 2010, plus d’un tiers des fraudes détectées par les CAF avaient trait au versement du RSA. Le taux de détection par rapport au montant total contrôlé – 653 millions d’euros en 2010 –, était de 9 %, soit une progression de deux points en un an. Les CAF seraient en mesure de recouvrer, dès 2012, 70 % de ces versements indus, soit près de 9 millions d’euros. En considérant que 75 % de ces indus portent sur le RSA « activité », l’État ferait donc une économie de 6,6 millions d’euros au titre de ce dernier.

Prenant acte de ces résultats, j’ai décidé de réduire d’autant les crédits dévolus au RSA « activité » au titre du programme 304. Cette évolution représente les deux tiers des 10 millions d’euros d’économies supplémentaires qu’il m’était demandé de réaliser sur les crédits de la mission « Solidarité », conformément à l’annonce du Premier ministre, le 24 août dernier, d’une réduction supplémentaire d’1 milliard d’euros des dépenses du budget général de l’État.

Les 3,4 millions restants portent sur le programme 157, « Handicap et dépendance ». Il s’agit en premier lieu d’une réduction de 1,3 million d’euros des opérations d’investissement dans les établissements et services d’aide par le travail (ESAT) : le projet de loi de finances pour 2012 prévoit leur financement à hauteur de 4 millions en autorisations d’engagement, mais de 1 million d’euros en crédits de paiement – ce qui ne remet nullement en cause leur efficacité.

Par ailleurs, on observe depuis plusieurs années une baisse soutenue du nombre d’allocataires de l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI) – en moyenne annuelle, la diminution était de 3,7 % en 2009 et de 4,7 % en 2010. Au lieu des 3 % initialement prévus, il est donc proposé de retenir pour 2012 une diminution de 3,79 %, ce qui paraît cohérent eu égard aux exécutions passées. D’où une économie de 2,1 millions d’euros.

J’en viens maintenant aux questions des rapporteurs.

Monsieur Binetruy, la poursuite du plan de revalorisation de 25 % du montant de l’AAH entre 2008 et 2012, représentera cette année une dépense de 924 millions d’euros. Au-delà, nous avons dû revoir à la hausse l’évolution tendancielle de la dépense liée à l’AAH, en raison d’une croissance plus importante que prévue du nombre de bénéficiaires au titre de l’article L.821-2 du code de la sécurité sociale – c’est-à-dire ceux dont le taux d’incapacité permanente est compris entre 50 et 80 %, et auxquels la Commission départementale a reconnu une restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi.

Dans le cadre du PLF 2012, nous avons retenu, pour une prévision de dépenses de 7 515,2 millions d’euros, une revalorisation moyenne de 4,45 % de l’allocation ; à l’issue du plan, le montant mensuel de l’AAH, à taux plein, sera ainsi, au 1er septembre, supérieur de 155 euros nets à celui de 2007. Le nombre d’allocataires devrait augmenter de 2,5 % en 2012, soit un dépassement de 307 millions par rapport aux prévisions initiales.

Quant aux disparités entre les départements, elles s’expliquent par des spécificités locales, mais surtout par le fait que certaines collectivités ont cédé à la tentation de faire basculer nombre de bénéficiaires du RSA vers l’AAH, c’est-à-dire du budget départemental vers celui de l’État.

M. le président Pierre Méhaignerie. Que faire pour y remédier ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. J’attends vos suggestions ! Il est certain qu’il faut améliorer les indicateurs et le pilotage de la dépense.

Nous allons donc poursuivre les mesures mises en place au second trimestre 2011 : révision trimestrielle de la base ressources des bénéficiaires, rapprochement des taux d’évolution des deux grandes catégories d’allocataires, révision des modalités d’appréciation de la restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi, élaboration d’outils méthodologiques et de formations destinés aux services déconcentrés et aux équipes pluridisciplinaires ; il s’y ajoutera l’obligation d’un réexamen systématique, tous les deux ans, de l’éligibilité à l’allocation. L’effet cumulé de ces mesures devrait permettre de réduire la dépense de 74 millions en 2012, et de ramener le dépassement au titre de l’AAH de 307 à 200 millions en 2012.

S’agissant de la compensation des charges de RSA, je vous transmettrai une note détaillée.

En 2011, à la suite du regroupement des services des ministères sociaux, tant au niveau central que territorial, les deux programmes 124 et 210 avaient été fusionnés. Le programme 124 porte désormais l’ensemble des moyens de fonctionnement des politiques de santé, de solidarité, du sport, de la jeunesse et de la vie associative. Il assure la gestion des ressources humaines et des moyens de fonctionnement de neuf directions d’administration centrale, de quatre délégations interministérielles, de l’inspection générale des affaires sociales, de l’inspection générale de la jeunesse et des sports, ainsi que du réseau territorial.

L’inscription sur un seul programme de soutien transversal de l’ensemble des dépenses de personnel et de fonctionnement permet d’éviter les rigidités, de réduire les coûts de gestion, de professionnaliser la fonction financière et la fonction ressources humaines et d’unifier, au plan local, le budget des directions régionales de la jeunesse, de la solidarité et de la cohésion sociale, qui gèrent les emplois et les crédits. Les efforts de rationalisation en matière de politique immobilière et de mutualisation des crédits et des services produisent des économies d’échelle, tout en améliorant le soutien aux services et la professionnalisation des équipes. La comptabilité analytique aboutit à une ventilation des dépenses de fonctionnement, qui permet de connaître le coût de fonctionnement de chaque politique publique.

Monsieur Aboud, la réforme de la dépendance est en marche. Même si les mesures financières les plus lourdes sont reportées, l’ONDAM médico-social en direction des personnes âgées est en augmentation de 6,3 %, ce qui va permettre la médicalisation de 83 000 places supplémentaires en EHPAD. Le projet de loi de finances prévoit en outre un programme d’investissement en faveur des services d’aide aux personnes âgées.

La réforme de la dépendance ne se limite pas cependant à des mesures coûteuses. Le fléchage des crédits d’investissement vers les structures intermédiaires répond à une demande forte des associations et des familles, qui réclament le développement des services à domicile et des structures de répit.

Il ressort de même des travaux menés par le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie que 2 milliards d’euros d’économies peuvent être réalisées en supprimant les hospitalisations injustifiées. Des expérimentations ont donc été lancées en ce sens.

Le plan solidarité grand âge (PSGA) avait initialement prévu la création de 90 500 nouvelles places destinées à l’accompagnement des personnes âgées : 59 % pour le maintien à domicile – 40 % pour les soins infirmiers à domicile (SIAD) et 19 % pour les structures de répit – et 40 % pour les EHPAD. Ce plan a été révisé à plusieurs reprises : en 2008 pour augmenter la cible annuelle d’EHPAD ; en 2010 pour réévaluer le développement des SIAD, avec le maintien d’une tranche annuelle à 6 000 places au lieu des 7 500 initialement prévues.

Au 31 décembre 2010, 87 % des places ont été notifiées – les places en EHPAD ayant été privilégiées – et 30 753 places installées, soit 40 %. Cette différence s’explique par le fait que 100 % des SIAD sont installés dans les quatre ans, contre 70 % pour les EHPAD. Pour assurer une mise en œuvre cohérente du PSGA, le solde des enveloppes anticipées à notifier en 2012, qui s’établit à 20,35 millions, devra être essentiellement consacré à l’installation de SIAD.

Monsieur Sirugue, en dépit d’un budget certes modeste, l’État joue un rôle essentiel dans le soutien à la parentalité. Il est attendu, dans le tour de table, par les autres financeurs, principalement la CNAF et les collectivités territoriales. Il est engagé, par des protocoles nationaux, dans le financement du conseil conjugal et familial et de la médiation familiale. Il tiendra ses engagements. Le développement des réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents est inscrit dans la convention d’objectifs et de gestion signée avec la CNAF. Le financement des projets en 2012 sera plus sélectif, en coordination étroite avec la branche « Famille » de la sécurité sociale.

S’agissant du FIPD, le projet de loi de finances prévoit une contribution interministérielle de 15 millions d’euros ; 1,2 million d’euros s’imputent sur le programme 304.

Le coût du RSA « activité » en régime de croisière avait, lors des études de préfiguration, été évalué à 2,9 milliards d’euros, pour 1,659 million de bénéficiaires. La dépense prévisionnelle pour 2012 est de 1,559 milliard ; je vous ferai parvenir le tableau de financement détaillé. Les résultats des études d’évaluation du RSA seront disponibles à la fin de l’année ; vous serez invité à la Conférence nationale qui se tiendra le 15 décembre afin de colliger les travaux.

En septembre 2010, 650 000 foyers percevaient le RSA « activité » ; en juin 2011, ils étaient 698 690. Ces chiffres ne rendent cependant pas compte du nombre de bénéficiaires sur une année, en raison de l’importance des entrées et des sorties. Dès 2008, la direction générale de la cohésion sociale avait d’ailleurs signalé qu’il était délicat de réaliser des extrapolations à partir de données annuelles, dans la mesure où il s’agissait d’une allocation trimestrielle.

La progression tend toutefois à se ralentir, notamment du fait de la crise. En métropole, entre décembre 2010 et juin 2011, le nombre de bénéficiaires du RSA « socle » a augmenté de 2,3 %, tandis que celui des bénéficiaires du RSA « activité » n’a crû que de 0,4 %.

Quant à une fusion avec la prime pour l’emploi (PPE), j’ai déjà eu l’occasion de dire que j’y étais favorable. Cela demandera cependant des travaux préparatoires importants. J’aimerais par ailleurs que cette fusion soit le signe d’un décrochage encore plus important entre le RSA « activité » et le RSA « socle ».

M. le président Pierre Méhaignerie. Quel pourrait être le nom de ce nouveau dispositif ? Il serait important de mettre l’accent sur le travail plutôt que sur l’assistance.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Pourquoi ne pas conserver la dénomination de « prime pour l’emploi » ?

S’agissant de la protection juridique des majeurs, les crédits passeront de 213,1 millions en 2011 à 216 en 2012 et 221 en 2013, soit une progression annuelle inférieure à 2 %, liée à la mise en place d’une politique de réduction des écarts de dotation entre les services mandataires. Cela permettra de réaliser en 2012 et 2013, par rapport aux prévisions, des économies de respectivement 17 et 23 millions d’euros.

Plus précisément, le nombre de personnes placées sous mesure de protection prises en charge par des mandataires judiciaires professionnels s’élevait, à la fin de l’année dernière, à 393 000. Les services mandataires sont cogérés par des associations, les unions départementales des associations familiales (UDAF), des mandataires individuels et des préposés d’établissement. Les personnes concernées sont placées, pour 51,7 % d’entre elles, sous curatelle renforcée et, pour 38,1 %, sous tutelle. Il s’agit, principalement, de personnes âgées dépendantes et de personnes handicapées, dont les ressources sont très faibles : 34,7 % d’entre elles perçoivent des revenus inférieurs ou égaux à l’AAH, et 86 % ont un niveau de ressources inférieur ou égal au SMIC.

Par ailleurs, la réforme du barème a permis, d’une part, la diminution de la participation des personnes ayant les revenus les plus bas, d’autre part, l’augmentation de la participation des plus aisées.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Je souhaite revenir brièvement sur l’évolution de la dépense liée à l’AAH.

L’explication du dynamisme de cette ligne budgétaire est complexe. Mme Bachelot a souligné que, dans certains cas, il était difficile de distinguer ce qu’on peut appeler le « handicap social » et le handicap réel, ce qui peut conduire à des arbitrages d’opportunité. Toutefois, l’augmentation la plus forte concerne les bénéficiaires ayant un taux d’incapacité compris entre 50 et 80 %. Or, c’est à cette catégorie que sont rattachés, depuis la loi du 11 février 2005, nos compatriotes frappés de handicap psychiatrique qui se trouvent empêchés de travailler pour tout ou partie de leur temps. Il nous appartiendra donc, dans les prochaines années, de faire clairement la distinction entre le « handicap social » et ce qui relève du handicap psychique stricto sensu, sous peine d’entretenir une confusion dommageable à la fois au budget de l’État et à l’accompagnement des personnes concernées.

Mme Claude Greff, secrétaire d’État chargée de la famille. Monsieur Binetruy, il convient, en matière d’adoption, de prendre en considération le double contexte national et international. Les profils des enfants adoptés évoluent : plus rares, ceux-ci sont également plus âgés ; au plan international, l’interdiction de l’adoption individuelle est un fait. Il importe donc de revoir la procédure actuelle.

Avec Mme Bachelot, nous avons pris acte du rapport de l’IGAS et de la proposition de loi Tabarot ; ces deux textes explorent des pistes intéressantes. Le Gouvernement doit maintenant arrêter une position, en se fondant sur le principe que l’adoption doit toujours être considérée en fonction de l’intérêt de l’enfant. Nous sommes actuellement en train d’élaborer un site Internet ainsi qu’un guide de l’adoption ; nous allons par ailleurs procéder à des rencontres régionales de l’adoption, dont la première aura lieu le 5 décembre prochain.

En ce qui concerne enfin le soutien à la parentalité, en particulier par la prévention, j’annoncerai un ambitieux programme ministériel le 17 novembre, après avoir réuni le 10 le Conseil national de la parentalité.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Je précise à M. Sirugue que le rapport sur l’application de la loi de 2007 sera remis avant la fin 2011. En ce qui concerne la prostitution, il n’y a pas de baisse, mais un transfert de 1,9 million d’euros du programme 177 au programme 137. De même, pour le fonds CNAF-REAAP, en ajoutant aux crédits du programme 106 ceux qui sont inscrits dans la COG État-CNAF, on obtient une augmentation de 0,2 million en 2012. Quant à l’action 3 du programme 106, 10 millions destinés au Fonds national de financement de la protection de l’enfance ont été votés en 2010 et 1 million attribué au titre de la réserve parlementaire ; à périmètre constant, l’évolution est de 4 millions d’euros.

M. Dominique Baert, président. Nous en arrivons aux questions des députés, en commençant par les porte-parole des groupes.

Mme Marianne Dubois. Je me concentrerai sur le programme 137, « Égalité entre les hommes et les femmes ».

Dans notre société, hélas, la famille n’est plus toujours un fondement solide. À cause des contraintes quotidiennes nées de l’activité ou de l’inactivité professionnelles, des choix conjugaux ou des accidents de la vie, bien des familles sont en difficulté, voire en déshérence. Les difficultés financières s’ajoutent aux difficultés sociétales.

Les femmes sont les premières concernées. 31,7 % des familles monoparentales vivent sous le seuil de pauvreté ; or, neuf fois sur dix, le chef de famille est une femme. 70 % des travailleurs pauvres sont des femmes, en raison du type d’emplois occupés – non qualifiés, précaires, à temps partiel. En outre, les femmes de plus de 75 ans, qui ont moins travaillé que leurs cadettes et souvent interrompu leur carrière pour élever leurs enfants, touchent une retraite modeste.

Madame la ministre, par quelles mesures spécifiques comptez-vous éviter aux femmes d’être ainsi pénalisées par des conditions de vie subies plutôt que choisies ?

Je vous sais par ailleurs sensible au sort des enfants de parents handicapés. Quelles mesures proposez-vous pour accompagner ces familles ?

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Nous l’avons maintes fois souligné, ce PLF ne tient pas compte de la réalité. Je le montrerai à propos du programme 157, sur plusieurs points dont nous avons déjà discuté la semaine dernière.

Les moyens alloués à l’insertion professionnelle des personnes handicapées, dont la situation, déjà fragile, risque de pâtir de la crise financière et économique, ne progressent que de 2,1 % : ils ont rarement été aussi réduits. Bien des associations s’en inquiètent.

Dès lors, comment honorer tous les engagements contractés en début de quinquennat ? Si certains objectifs ont été atteints, d’autres sont revus à la baisse, ce qui laisse augurer de difficultés en 2012.

Quant aux établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, 1415 millions d’euros doivent financer les places existantes et les 1 000 places supplémentaires que le Gouvernement s’est engagé à créer, ce qui représente une augmentation de 1,31 % par rapport à 2011. Toutefois, étant donné l’inflation et l’augmentation de la masse salariale, cela ne suffira pas à financer les places existantes. De nombreux gestionnaires d’associations le signalent. L’accueil et l’accompagnement assurés par ces établissements ne pourront qu’en souffrir. Avez-vous l’intention de revoir ces crédits afin de financer les mesures dont les ESAT ne peuvent faire l’économie ?

D’autre part, 4 millions d’euros sont destinés aux opérations d’investissement dans ces mêmes établissements. En la matière, les besoins sont très importants, comme le montrait le plan triennal de 12 millions d’euros que vous avez annoncé en 2011. Pourtant, les crédits de paiement ne dépassent pas 1 million en 2011 et 2,3 millions en 2012. Comment aider ces établissements, nombreux à faire l’objet d’un avis défavorable quant à leur fonctionnement, à se moderniser ?

S’agissant des entreprises adaptées, les 1 000 aides au poste supplémentaires prévues semblent bien tenir compte des engagements du Président de la République lors de la Conférence nationale du handicap, mais ce n’est qu’une apparence.

Enfin, si l’AAH continue d’augmenter, sa trimestrialisation annoncée, qui implique de recommencer périodiquement les démarches, risque de décourager certains bénéficiaires. Nous l’avions dit l’an dernier. L’AAH n’est attribuée qu’après évaluation attentive des besoins des demandeurs par des équipes pluridisciplinaires : on ne peut dire qu’elle le soit à mauvais escient ou trop largement.

M. Francis Vercamer. En cette période de crise, le Nouveau Centre salue l’effort du Gouvernement, qui, en gratifiant la mission d’une hausse de 3 % en crédits de paiement et de 3,5 % en autorisations d’engagement, continue de faire preuve de solidarité envers nos concitoyens les plus fragiles.

Ces populations n’ont pas choisi leur sort, et les dépenses de solidarité sont essentielles pour lutter contre la pauvreté. Voilà pourquoi nous soutenons les politiques de la mission, notamment le RSA. Ainsi, l’examen de ce budget est l’occasion d’assurer nos concitoyens de la solidarité nationale, en un moment où ils se sentent de plus en plus stigmatisés par la résurgence du discours sur l’assistanat,. Du reste, les dispositifs qui y concourent ne se réduisent pas aux mesures relevant de cette mission.

Cela étant, comment expliquer la baisse des crédits alloués au RSA, si peu de temps après le rapport Daubresse ? Disposerons-nous bientôt d’une étude précise sur les conditions d’intégration de l’ASS et du RSA, objet de l’article 6 de la loi du 1er décembre 2008, et sur la convergence et la simplification des dispositifs des minima sociaux ? Comment, sans renoncer à une logique de droits et de devoirs, adapter les conditions d’accès au RSA jeunes au parcours des jeunes de moins de 25 ans en mal d’insertion professionnelle ? Enfin, les conditions de réattribution du RSA après une reprise d’activité de moins de trois mois continuent de freiner le retour à l’emploi.

D’autre part, si nous prenons acte de la hausse de 6 % des crédits du programme « Handicap et dépendance », les aides au poste affectées aux ESAT ne semblent pas suffisantes pour financer les postes existants ou programmés. Quelles précisions le Gouvernement peut-il apporter sur ce point ?

Saluons enfin l’augmentation, si modeste soit-elle, des crédits alloués aux chambres régionales de l’économie sociale et solidaire et aux organismes de l’économie sociale. Pour assister aux travaux du Conseil supérieur de l’économie sociale et solidaire, je sais la détermination de ses acteurs en dépit des moyens contraints dont ils disposent. Ainsi, 30 des 50 propositions de mon rapport au Premier ministre ont été appliquées ou sont en voie de l’être. Source d’innovation sociale et économique, ce secteur peut créer de l’emploi et de la croissance en cette période de crise. Le groupe Nouveau Centre souhaite donc que nous adoptions une loi-cadre pour le développement de l’économie sociale et solidaire, comme l’ont fait d’autres pays européens. Quelle est la position du Gouvernement sur ce point ?

Mme Martine Billard. Ce sont 4 millions 720 000 personnes, toutes catégories confondues, qui sont aujourd’hui inscrites à Pôle emploi ; de janvier à juillet, près de 630 000 chômeurs sont arrivés en fin de droits, ce qui a fait exploser le nombre d’allocataires de minima sociaux. Le 30 juin 2011, 1,4 million de foyers touchaient le RSA socle en France métropolitaine, ce qui représente une hausse de 4 % en un an. Le nombre de bénéficiaires du RSA activité a également augmenté de 4 % en un an, 434 000 foyers étant concernés en juin 2011. En d’autres termes, on constate à la fois une hausse du nombre de personnes n’ayant d’autre ressource que le RSA socle et une augmentation du nombre de travailleurs pauvres éligibles au RSA activité. Pourtant, le nombre d’allocataires du RSA activité est très inférieur à ce qui était attendu.

D’autre part, la hausse du chômage de longue durée accroît la pauvreté. Ainsi, en 2009, 13,5 % des Français vivaient sous le seuil de pauvreté et le nombre de pauvres a été porté à 8,17 millions depuis lors. De fait, 83 % des centres communaux d’action sociale ont constaté une augmentation du nombre de demandes d’aides ponctuelles, qui résulte notamment des difficultés à payer les factures énergétiques.

La crise ne suffit pas à expliquer le développement limité du RSA activité. Selon l’UNIOPSS, seul un bénéficiaire potentiel sur trois a demandé à percevoir le RSA. À la crise s’ajoute la complexité des dossiers, qui fait craindre de devoir rembourser un trop perçu en cas d’erreur, ainsi que le manque d’information, qui fait croire à bien des travailleurs pauvres qu’ils n’ont pas droit au RSA. En outre, de nombreux travailleurs modestes, sensibles à la propagande actuelle, redoutent d’être considérés comme des assistés.

Le nouveau contrat de sept heures par semaine, qui doit être expérimenté dans quinze départements, est censé être rémunéré au taux horaire du SMIC, mais la diminution afférente du RSA revient à réduire ce taux. Loin d’accompagner une activité minimale, le dispositif consiste en réalité à imposer des heures de travail, à l’instar du défunt CI-RMA.

Comme celui de la mission « Travail et emploi », le budget de la mission « Solidarité, insertion, égalité des chances » régresse fortement. La réduction de la pauvreté disparaît même de la liste des objectifs et indicateurs de performance ! C’est d’autant plus surprenant qu’avant même la crise, le Président de la République en avait fait un objectif central de son quinquennat dans un discours prononcé le 17 octobre 2007.

En outre, la contribution au Fonds national des solidarités actives diminue de nouveau, faisant passer le programme 304, « Lutte contre la pauvreté », de 692 à 535 millions d’euros, soit une baisse de 23 %. Rappelons que le PLF 2010 attribuait 1,5 milliard au RSA activité. Rien ne justifie cette baisse, puisque la pauvreté continue malheureusement d’augmenter, y compris chez les travailleurs. On l’a vu à propos de la mission « Travail et emploi », le nombre de contrats aidés diminue également. En d’autres termes, aucune solution n’est proposée aux personnes en difficulté, pourtant constamment stigmatisées au prétexte qu’elles seraient assistées.

Vous réduisez également de 4 % les crédits du programme 106, « Actions en faveur des familles vulnérables ». Les excédents ainsi dégagés sont apparemment reversés au budget général de l’État au lieu de servir à des actions ciblées, destinées aux plus modestes. Pourquoi, madame la ministre, ne pas revaloriser le RSA socle, à l’image de l’AAH et du minimum vieillesse, indexés sur le revenu médian ? L’UNIOPSS vous le demande.

Enfin, la légère hausse des crédits de l’action « Expérimentation sociale » est loin de compenser la réduction de moitié qui les avait fait tomber l’an dernier de 10 à 5 millions d’euros. Les subventions aux organismes de l’économie sociale chutent de 60 %, comme les crédits du Fonds d’innovation et d’expérimentation sociale. Enfin, si les crédits du programme 157, « Handicap et dépendance », sont maintenus, l’action 5, « Personnes âgées », est amputée.

Quant au programme 137, « Égalité entre les hommes et les femmes », il est comme d’habitude le parent pauvre de la mission, revenant de 21,1 à 20,1 millions, soit une baisse de 5 % qui s’ajoute aux précédentes. L’égalité entre les hommes et les femmes n’est donc pas pour demain !

Pour toutes ces raisons, notre groupe ne votera pas ce budget.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. À Mmes Carrillon-Couvreur et Billard, je rappelle que nos politiques sociales sont en forte progression et que notre protection sociale est préservée, ce qui est méritoire dans le contexte actuel. Au regard de bien des pays, qui réduisent les salaires des fonctionnaires, leur nombre, les pensions de retraite, et qui reviennent sur leurs politiques sociales, la France apparaît bien comme un îlot. Quant aux questions techniques, j’y ai déjà répondu en m’adressant à M. Sirugue.

Madame Dubois, la monoparentalité, devenue l’un des principaux facteurs d’exclusion et de pauvreté, me préoccupe particulièrement, comme les droits des femmes, qui ont toujours été l’un des axes de mon engagement. Les mesures essentielles destinées aux familles monoparentales figurent dans le PLFSS : l’article 57 crée un plafond spécifique de ressources pour les parents isolés, augmenté de 40 %, de manière à leur assurer le montant maximal du complément du libre choix de mode de garde ; l’article 58 revalorise l’aide versée par les CAF en cas de versement partiel d’une pension alimentaire. D’autre part, avec la CNAF, nous avons invité les gestionnaires des modes de garde à revoir leurs critères d’attribution prioritaire, qui privilégient les personnes exerçant une activité. En effet, les mères isolées doivent avoir accès à un mode de garde pour se réinsérer.

Quant à l’assistanat, je n’aime pas ce terme, auquel je préfère le beau mot d’assistance, et j’ai toujours combattu la stigmatisation des bénéficiaires d’aides. Madame Billard, la rémunération des nouveaux contrats d’insertion ne sera en aucun cas inférieure au SMIC et ces contrats seront conclus sur la seule base du volontariat : il ne s’agit absolument pas d’une contrepartie au versement du RSA !

Mme Martine Billard. On verra ce qu’il en est le moment venu !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur Vercamer, à propos de l’économie sociale et solidaire – dont je suis venue parler dans votre commune de Hem –, je suis favorable à une loi-cadre, à laquelle nous travaillons à partir de votre excellent rapport. Quant au rapport Daubresse, j’en approuve pour l’essentiel les conclusions ; lors de la conférence nationale du 15 décembre prochain, nous indiquerons celles de ses propositions auxquelles nous donnerons suite.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Sur le handicap, je répondrai à la fois à Mme Carrillon-Couvreur et à M. Vercamer.

La revalorisation trimestrielle de l’AAH concerne les personnes qui travaillent en milieu ordinaire, soit 80 000 des 920 000 bénéficiaires de l’AAH – environ 8 %. Cette mesure se fonde sur le caractère très évolutif de leur situation, imputable à la nature de leur travail ou à leur handicap lui-même, notamment lorsqu’il est psychique.

Quant aux ESAT, ce sont à la fois des structures médico-sociales et des lieux de travail. Ils accueillent les handicapés âgés de plus de vingt ans dont la capacité de travail représente environ un tiers de la capacité dite ordinaire, en leur évitant les difficultés qu’ils rencontreraient en milieu ordinaire. Il faut distinguer ici les crédits d’aide au poste, qui sont évaluatifs et s’ajustent aux besoins, des crédits de fonctionnement des établissements, qui sont limitatifs. Cela étant, on peut effectivement s’interroger sur la formation des coûts dans les ESAT, car, dans un secteur tendu, il peut être difficile d’accompagner et de soigner tout en réalisant une performance économique.

Comme le montrent les chiffres de l’AGEFIPH, en cette période de crise, ces structures ont paradoxalement mieux résisté aux difficultés que les entreprises ordinaires. Le modèle est donc vertueux. Cela dit, conscients des difficultés auxquelles il est confronté et de la nécessité de le moderniser, nous avons lancé une étude afin de pouvoir nous faire , dès le début du deuxième trimestre 2012, une idée plus précise de ce qui forme un coût dans ces établissements et services. D’autres groupes de travail viendront compléter cette étude. Seront ainsi traitées les questions de l’accompagnement des travailleurs handicapés, de la valorisation de leurs compétences, de la meilleure insertion des ESAT dans une filière économique et d’un meilleur partenariat avec les entreprises ordinaires. La sous-traitance et le recours au secteur protégé permettront aux employeurs de répondre en partie à l’obligation d’employer des personnes handicapées, qui a été renforcée par la loi du 11 février 2005.

M. Francis Vercamer. L’article 6 de la loi du 1er décembre 2008 préconisait un rapport sur les conditions d’intégration de l’ASS au RSA. Où en est ce rapport ?

M. Bernard Perrut. La situation économique, le chômage et l’évolution de notre société, avec un nombre important de familles monoparentales, ne sont pas sans conséquences sur la vie de nos concitoyens. Nous mesurons chaque jour, sur le terrain, les difficultés rencontrées par les familles pour accéder à un logement et s’y maintenir. Nous sommes aussi confrontés à la précarité, d’autant plus sensible en période d’hiver, au surendettement, voire aux maltraitances et aux violences conjugales et familiales.

Nous savons que l’État fait un effort important pour développer l’offre d’accueil des jeunes enfants, mais nos concitoyens ne connaissent pas toujours toutes les aides humaines et financières destinées à accompagner les parents, notamment pour leur permettre de concilier vie professionnelle et vie familiale, ou encore pour assurer aux enfants une protection et des conditions de vie propices à leur bon développement.

Mesdames les ministres, quels sont vos objectifs, vos priorités, vos moyens dans ces domaines pour soutenir les familles qui rencontrent des difficultés financières, sociales, relationnelles dans l’éducation de leurs enfants ? Quelles mesures envisagez-vous pour mieux accompagner les familles à différents moments-clés de la vie, dans les périodes de crises relationnelles et affectives que rencontrent les couples et les familles, ou encore pour soutenir les jeunes au moment de l’adolescence ?

Ce budget de solidarité ne peut être analysé seul. Il faut se demander de façon générale si l’État dans ses domaines de compétences, la protection sociale, la CNAF, les collectivités locales et les associations, répondent à toutes les attentes. Et avec quels moyens financiers globaux ? Je sais que les familles peuvent vous faire confiance.

Mme Annick Girardin. Ma question concerne une rupture d’égalité des chances. Les jeunes de l’outre-mer qui participent à des concours de la fonction publique organisés en métropole sont privés du soutien effectif qui leur permettrait de faire face au coût prohibitif du trajet. Des aides sont, certes, proposées par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, mais elles ne peuvent satisfaire la totalité des demandes. Quant aux jeunes salariés à faibles ou moyennes ressources, ils ne peuvent bénéficier d’aucun dispositif.

Nombreuses sont donc les personnes qui ont dû soit assumer seules le coût élevé de ces billets, soit renoncer à intégrer la fonction publique pour des motifs exclusivement économiques. Quel regard portez-vous sur cette inégalité, madame la ministre ? L’État ne pourrait-il pas intervenir pour que les Français d’outre-mer bénéficient d’un égal accès à ces concours ?

M. Alain Ferry. Ces dernières années, les charges fixes pesant sur les ménages ont considérablement augmenté du fait de la meilleure qualité des logements, du coût croissant des combustibles et de la présence, désormais incontournable, du téléphone, de la télévision et d’Internet. Tous ces biens sont devenus des standards de la vie courante, et ils devraient être accessibles à chacun. Malheureusement, de plus en plus de familles, touchées par la crise, n’arrivent plus à assumer ces dépenses.

Pour sortir de cette situation, une notion de droit universel au réseau, portée par des organisations caritatives comme le Secours catholique, pourrait être testée et élevée au niveau des services publics fondamentaux que sont l’éducation et la santé.

Aujourd’hui, chaque abonné à l’eau, au gaz ou à l’électricité paye un forfait, l’abonnement fixe qui couvre les coûts de construction et d’entretien du réseau, auquel s’ajoute une somme qui dépend du volume consommé. Il est normal que le prix de consommation varie avec les quantités utilisées. Cela responsabilise les usagers et il ne faut pas remettre en cause ce principe. En revanche, pour être accessibles à tous les ménages, les réseaux pourraient être tarifés en fonction du revenu de l’abonné. Aujourd’hui, chaque ménage paye au moins 500 euros par an, avant toute consommation, pour être simplement raccordé aux réseaux indispensables de la vie moderne. L’allocataire du RSA vivant seul y consacre environ 7 % de ses ressources, contre 4 % pour un smicard isolé, environ 1,5 % pour un ménage moyen d’une personne et 0,75 % pour un ménage disposant du double revenu moyen.

Pour mettre en œuvre un droit universel au réseau ne serait-il pas possible de prévoir une cotisation de 1,5 % du revenu, sous forme, par exemple, de 1,5 point de CSG avec un plafonnement pour les hauts revenus ? Cette règle simple, valable dans toutes les situations, assurerait l’égalité d’accès au réseau.

Mme Catherine Coutelle. Ma question porte sur l’égalité entre les hommes et les femmes. Depuis 1993, l’État a reconnu devoir assurer l’accueil, l’information et l’orientation sur les questions concernant la sexualité, la préparation des jeunes à la vie de couple, l’entretien préalable à l’IVG, ainsi que l’accueil et le conseil pour les personnes confrontées à des dysfonctionnements familiaux. Pour assurer cette mission, l’État rembourse les établissements assurant ces entretiens à un tarif horaire de 8 euros, montant qui n’a pas changé depuis 2002.

Après un problème de financement en 2009, le Gouvernement avait signé avec le Planning familial une convention couvrant les années 2009 à 2011 pour la prise en charge d’une partie de ces missions. Cette convention prévoyait un financement de 2,6 millions : 2,1 millions sur le programme 106 et 0,5 million sur l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances.

Avez-vous, madame la ministre, l’intention de relever le tarif horaire de 8 euros dont le faible montant grève le budget des associations ?

Par ailleurs, le financement du Planning relevant de l’Acsé est l’objet d’interprétations très variées selon les territoires et nécessite l’élaboration de dossiers très lourds. Ne serait-il pas possible de l’améliorer ?

L’évaluation des besoins existants a-t-elle été réalisée ?

Enfin, une nouvelle convention est-elle en préparation ? Et si oui, sur quelles bases ?

M. Denis Jacquat. Les différents intervenants ayant posé les questions que je voulais poser, j’éviterai la redondance !

M. Dominique Baert, président. Voilà une concision qui vous honore !

Mme Martine Pinville. De plus en plus d’enfants handicapés, notamment souffrant de troubles psychiques, sont scolarisés à la demande de leurs parents, mais les auxiliaires de vie scolaire sont en nombre insuffisant et n’ont pas toujours la formation requise. Quelles mesures envisagez-vous, madame la ministre, pour mieux accompagner ces enfants ?

Ensuite, vous nous avez dit que la réforme de la dépendance avait commencé. Lors de la discussion du PLFSS, vous nous avez annoncé un fonds de 50 millions d’euros pour les associations d’aide à domicile qui sont en grande difficulté. Mais les personnes âgées sont de plus en plus nombreuses et il y a urgence à organiser leur accompagnement. Il faut aussi assurer le lien entre leur domicile et les établissements, soutenir les aidants. Bref, un projet de loi inspiré par une vision globale de la dépendance est indispensable. Or, je ne vois rien de tel dans le PLF 2012.

Mme Bérengère Poletti. Selon certains de mes collègues, nous ne ferions jamais assez en matière de politique sociale. La France est pourtant l’un des pays qui fait le plus en la matière. Elle n’a pas à rougir de sa politique sociale.

Je salue l’action du Gouvernement qui a tenu les engagements du Président de la République, s’agissant de l’augmentation de l’AAH de 25 % en cinq ans.

Deux questions. La première portera sur les MDPH qui semblent sortir des difficultés rencontrées ces dernières années. L’adoption de la proposition de loi de M. Paul Blanc devrait leur permettre de connaître la sérénité en matière budgétaire et de mettre un terme à leurs contentieux avec l’État. Je souhaiterais avoir des précisions sur les critères qui ont présidé à l’affectation des crédits délégués aux MDPH.

La seconde concerne l’aide à domicile. Mme Bachelot m’a confié une mission sur ce sujet, et j’ai entendu certains collègues dire que cela ferait un rapport supplémentaire. C’est injuste : Mme la ministre a souhaité que des propositions lui parviennent avant l’examen du PLF et du PLFSS, ce qui atteste son intention de répondre très rapidement à certaines situations. Par amendement au PLFSS, vous avons ainsi réintroduit les familles en difficulté dans les publics fragiles. Quant au PLF, il prévoit un fonds doté de 50 millions pour aider les services à domicile, et j’aimerais avoir plus de précision sur ce fonds. Enfin, toujours dans le cadre du PLF, un amendement du Gouvernement prévoit l’expérimentation de tarifications différentes pour les services à domicile. L’Association des départements de France et l’IGAS ont proposé des pistes à cet égard. Que nous suggérez-vous dans ce domaine, madame la ministre ?

Mme Pascale Crozon. Les crédits du programme « Égalité entre les hommes et les femmes » baisseront de 5 % en 2012. Si la présentation du budget met en avant la stabilité du financement des structures nationales, on note une baisse des financements aux associations locales : moins 3 % pour les 114 CIDFF, moins 2,5 % pour les 180 lieux d’écoute pour les femmes victimes de violence, moins 16 % pour les associations de lutte contre la prostitution.

Le décret d’application de l’article 99 de la loi portant réforme des retraites a été pris le 7 juillet dernier. Il demeure très en deçà de nos espérances. Cet article de loi prévoyait des sanctions financières allant jusqu’à 1 % de la masse salariale. Dans l’esprit de la présidente de la Délégation des droits des femmes, à l’initiative de l’article, la sanction présentait le double intérêt d’être dissuasive et d’apporter des ressources nouvelles pour financer des actions en faveur de l’égalité. Ces ressources nouvelles n’apparaissent pas dans le programme. À combien le Gouvernement les évalue-t-il ?

De plus, ce décret laisse une très large liberté d’appréciation pour l’application ou non de sanctions en l’absence d’accord. Quand allez-vous le modifier ?

J’en viens à la loi sur les violences. Là encore, derrière l’affichage, la « grande cause nationale » et le vote à l’unanimité, les cris d’alerte se multiplient pour dénoncer les difficultés d’application de la loi. En juillet dernier, soit un an après le vote de la loi, un comité de vigilance pointait que 80 ordonnances de protection avait été prises en Seine-Saint-Denis, mais seulement quatre en Seine-et-Marne. Après avoir réuni, dans mon département, les professionnels concernés et visité la chambre des affaires familiales du TGI de Lyon, j’ai senti un désarroi face à un nouvel instrument juridique, vécu comme un casse-tête, en raison surtout de l’absence de formation, d’effectifs et de directives. L’application de la loi est laissée à la sensibilité personnelle des magistrats et des policiers, ce qui est anormal. Comment pensez-vous faire évoluer la situation ?

Enfin, la conciliation entre vie professionnelle et vie privée faisait l’objet d’une action à part entière dans le budget 2011, mais elle est aujourd’hui noyée dans l’action 11. Quels sont les crédits consacrés à cette sous-action ? Qu’allez-vous faire pour favoriser l’articulation des temps de vie ?

M. Guy Malherbe. La mise en place du CESU social se traduit par des économies non négligeables pour certains départements, mais pas pour les « plus pauvres » dans la mesure où les dépenses de l’APA qui dépassent 30 % de leurs recettes fiscales sont prises en charge intégralement par la CNSA. Je souhaiterais savoir si une réflexion est engagée sur un schéma de répartition du financement entre les départements et la CNSA afin de limiter ces effets contre-productifs pour les départements les plus pauvres, faisant l’effort de moderniser leur gestion des dépenses sociales ?

La plupart des maisons départementales des personnes handicapées ont atteint leur vitesse de croisière et ont surmonté les difficultés de fonctionnement rencontrées lors de leur mise en place, mais dans mon département de l’Essonne, le retard dans l’examen des dossiers est de six mois, et semble augmenter encore. Je souhaitais appeler l’attention du Gouvernement sur ce point.

M. Vincent Descoeur. La réforme de la dépendance a fait l’objet d’un large débat en 2011, mais sa mise en œuvre a été contrariée par un contexte économique et financier qui, pour reprendre les propos du Premier ministre, ne facilite pas le traitement dans l’urgence de cette question. Si quelques mesures sont prévues dans le projet de loi de finances, la question centrale du financement de l’APA par les départements demeure un sujet de préoccupation pour beaucoup d’entre eux. Dans l’attente de la mise en œuvre effective de la réforme, une première réponse avait été apportée par le Gouvernement en 2011 : trente départements choisis au regard de critères pertinents – potentiel fiscal, revenu moyen par habitant, population de plus de 75 ans – ont bénéficié de 75 millions d’euros – provenant d’un excédent de la CNSA. Or, il y a fort à craindre que la CNSA n’enregistre pas d’excédent cette année. Quelle réponse le Gouvernement envisage-t-il donc d’apporter à ces départements, principalement ruraux, dont les dépenses obligatoires continuent d’augmenter mécaniquement et dont les droits de mutation sont moins dynamiques ? Cette mesure, dont le Premier ministre a eu l’initiative, a été saluée comme une première réponse dans l’attente d’une réforme en profondeur du financement de l’APA, elle mériterait d’être reconduite.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur Vercamer, le rapport ASS-RSA sera fait début décembre 2011.

Madame Girardin, je pense que vous avez voulu évoquer indirectement la situation de l’Institut de formation aux carrières administratives, sanitaires et sociales auquel s’adressent les ultramarins souhaitant préparer des concours administratifs dans ces secteurs. Vous aurez bientôt l’occasion d’interpeller M. Apparu sur ce sujet, qui concerne le programme 177 et relève clairement de ses responsabilités.

Madame Coutelle, pour le Planning familial, la convention 2009-2011 est prorogée d’un an. En 2012, nous travaillerons à une nouvelle convention pour trois ans, avec une simplification du double financement. Nous nous pencherons aussi sur l’augmentation souhaitable du tarif horaire.

Mme Poletti a accompli un excellent travail, qui nous a permis d’étayer une demande pouvant apparaître exorbitante dans le contexte budgétaire, et d’obtenir des arbitrages favorables – en particulier pour l’exonération des cotisations sociales sur les rémunérations des aides à domicile à destination des familles fragiles.

L’autorité de tarification est bien le département pour les services d’aide à domicile, qui ne sont d’ailleurs pas tous en difficulté. Certes, des erreurs de gestion ont parfois été commises et la question de la taille critique se pose – il faut regrouper ceux qui ont fleuri à partir d’initiatives individuelles. Il arrive que les services d’aide à domicile accomplissent des actes qui relèvent de la compétence des SIAD. Il faut donc recadrer les SAD : ils n’ont pas à donner de soins infirmiers. Enfin, face à la lourdeur des publics pris en charge, les services à domicile ont constaté la nécessité d’une professionnalisation.

S’agissant du fonds de restructuration des SAD, c’est la section IV de la CNSA qui va abriter les 50 millions, et nous allons très vite déléguer 25 millions. Il reviendra aux directeurs généraux d’ARS de piloter le comité régional qui va examiner les comptes financiers et les contraintes des services à domicile. Viendra ensuite le plan de retour à l’équilibre, en liaison avec les présidents de conseils généraux qui sont les premiers compétents en la matière. Nous sommes en train d’élaborer une circulaire, qui sera soumise à consultation. Nous souhaitons naturellement encore bénéficier de vos lumières sur ces questions.

Monsieur Malherbe, le versement de prestations sociales comme l’APA ou la PCH sous forme de CESU permet au département de contrôler en amont l’effectivité de la dépense. Même si certaines anomalies ont été constatées, les bénéficiaires ne peuvent utiliser ces allocations que pour rémunérer un service ou un emploi à domicile. Le centre de remboursement des CESU reverse le montant des chèques non utilisés, qui peuvent représenter 10 à 20 % de la prestation, au département, qui n’a donc plus à contrôler a posteriori la bonne utilisation des sommes verséesni à récupérer les sommes non utilisées. Ce système représente un gain financier pour la collectivité, grâce au concours de la CNSA. Le premier département qui l’a mis en place a économisé 17 % de l’APA, ce qui donne idée du coulage existant dans ce domaine. Mais seuls vingt départements l’utilisent, ce qui est encore trop peu.

La garantie offerte aux départements que leurs dépenses nettes d’APA ou de PCH ne dépasseront pas 30 % de leur potentiel fiscal protège la libre administration des collectivités locales. Le Conseil constitutionnel l’a rappelé en juin, en réponse à une QPC engagée par plusieurs départements sur le financement par la solidarité nationale de l’APA et de la PCH, indépendamment du CESU. Pour l’APA, la garantie a bénéficié à moins d’une dizaine de départements par an, et à seulement quatre en 2000. Elle n’a jamais été mise en œuvre pour la PCH, compte tenu du niveau élevé de compensation de la dépense pour l’ensemble des départements.

Si, en première analyse, la mise en place du CESU ne semble pas intéressante financièrement pour le petit nombre de départements concernés par la garantie, ils y trouvent cependant leur compte, car on peut bénéficier de celle-ci une année, sans que ce soit nécessairement le cas l’année suivante. En outre, la mise en place du CESU procure des avantages, particulièrement pour le suivi des plans d’aide. C’est pourquoi le Gouvernement n’envisage pas d’articuler les deux dispositifs.

Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion. Madame Pinville, nous avons accompli un effort de scolarisation considérable depuis 2005. En se mobilisant, l’éducation nationale a réussi à accueillir 50 000 enfants handicapés supplémentaires, soit un total de 214 000. À la rentrée, on comptera 2 000 auxiliaires de vie scolaire de plus, dont les deux tiers sont d’ores et déjà recrutés. Le 8 juin, lors de la Conférence nationale du handicap, le Président de la République a annoncé que les enfants affectés d’un handicap psychique ou de troubles envahissants du développement seraient désormais accompagnés par des « assistants de scolarisation ». Ce changement de désignation correspond à une évolution du contrat de travail. Avec les associations, nous songeons à définir de nouveaux profils, ayant atteint un certain niveau de formation.

Cela dit, on ne peut résumer la situation de l’enfant handicapé en école ordinaire à son accompagnement par un AVS. Souvent, c’est l’école qui doit l’accompagner, et, si, souffrant d’un handicap lourd, il est confié à un établissement spécialisé, elle doit venir vers lui dans l’environnement qui lui est le plus favorable. Le souhait de voir augmenter le nombre d’AVS se fonde parfois sur une vision schématique de la scolarisation.

Madame Poletti et monsieur Malherbe, la compensation aux conseils généraux de la charge des MDPH a été portée à 57 millions, soit une augmentation de 10 millions. Ces crédits éteignent la dette contractée par l’État pour qu’on y embauche le personnel qui faisait défaut. À cet effort s’ajoute le concours de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, à hauteur de 15 millions, ce qui porte à 60 millions le concours financier de la CNSA aux conseils généraux. Au total, le concours national aux MDPH atteint 120 millions, soit 50 % des coûts engagés par les conseils généraux, ce qui semble l’épure du dispositif à atteindre. Cet effort sans précédent améliorera la situation de ces établissements et leur capacité de gestion. Chaque année, les services de l’État, par le biais des directions départementales de la cohésion sociale, mènent une enquête pour fiabiliser les données qui retracent l’évolution des effectifs et définissent les montants à verser. C’est ainsi qu’ils s’ajustent aux coûts de fonctionnement, qui sont très élevés.

Mme Claude Greff, secrétaire d’État chargée de la Famille. Monsieur Perrut, la famille joue en effet un rôle primordial dans l’éducation. À cet égard, le Gouvernement mène une politique volontaire, en versant 100 milliards de prestations. Pour rendre plus compatibles vie familiale et professionnelle, plusieurs structures accueillent les enfants non encore scolarisés. Nous atteindrons en 2012 l’objectif, fixé par le Président de la République, de 200 000 solutions de garde supplémentaires. Aux personnes dont les horaires professionnels sont atypiques, des solutions innovantes offrent des structures d’urgence, en cas de maladie des enfants ou des adultes qui les gardent. Le plan des métiers petite enfance est opérationnel. Le site de la CAF monenfant.fr a été repensé.

Le soutien à la parentalité se concrétise aussi au moyen de 101 réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents (REAP). En 2009, 8 200 actions ont bénéficié à 540 000 parents. Le financement des REAL est prévu dans la convention d’objectifs et de gestion (COG) 2009-2012, comme il le sera dans la COG 2013-2016. Leur budget, qui se situait à 8,5 millions en 2009, a atteint 9,5 millions en 2011.

La médiation familiale représente un mode alternatif de gestion des conflits. En 2009, 269 services ont accompagné 29 400 familles, pour un budget de 9,2 millions. Les 490 points information famille (PIF) sont autant de lieux d’information, de conseil et d’orientation. Je rappelle également l’existence des contrats locaux d’accompagnement à la scolarité (CLAS), des conseils conjugaux et familiaux, financés à hauteur de 2,8 millions, et de 220 établissements d’information, de consultation et d’accueil destinés aux familles.

La visibilité de notre action est réelle. Depuis que j’ai le plaisir de travailler avec Mme Bachelot, j’ai instauré un site netecoute.fr, et un numéro vert, le 08 200 000, destinés à aider les parents à jouer leur rôle vis-à-vis des nouvelles technologies. L’implication du Parlement sur ces questions nous encourage à nous y intéresser encore davantage.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur Descoeur, les 75 millions prélevés sur la section 4 de la CNSA constituaient une aide exceptionnelle non reconductible, conformément à l’arbitrage du Premier ministre. Les réserves de la CNSA sont estimées fin 2011, toutes sections confondues, à 57 millions, pour un budget total de 20 milliards. La question, chère au cœur de M. Méhaignerie, des relations entre l’État et les collectivités locales, pose le problème de la décentralisation à la française. Dans un pays comme la Suède, la collectivité décentralisatrice porte la responsabilité de la dépense et de la recette, alors que l’État français met en place des guichets gérés, avec plus ou moins de succès – on l’a vu dans le cas de l’AAH –, par les collectivités territoriales. Mais, même si la péréquation fonctionne mal, et que la décentralisation n’est pas parfaite, les Français accepteraient-ils que les prestations ne soient pas les mêmes dans le Cantal et en Île-de-France ?

Madame Billard, madame Crozon, les crédits de paiement du programme 137, inscrits en loi de finances pour 2011, ont augmenté de près de 2 millions, mais les 21 millions de crédits de paiement inscrits en loi de finances initiale pour 2011 ne l’ont été qu’à la suite de l’adoption d’un amendement de Mme Brunel portant sur 3 millions.

Le changement de nomenclature proposé en 2012 vise à simplifier et à mieux rendre compte de nos priorités. L’action 1.1 concerne l’égalité dans la vie professionnelle et économique, et l’action 1.2 l’égalité dans la vie politique et sociale. Quant à l’action 2, elle a été renommée, afin que son contenu, la promotion des droits, de la prévention et de la lutte contre les violences sexistes, apparaisse plus clairement.

Monsieur Ferry, la question du droit universel au réseau est quasi philosophique. En pratique, il faut aider les publics éloignés de l’emploi, particulièrement les titulaires du RSA, à accéder à certains services. Quand on cherche du travail, il est essentiel d’avoir un téléphone portable. C’est pourquoi, avec mes collègues Besson et Lefebvre, nous avons instauré un tarif social du téléphone mobile, qui permet, en acquittant dix euros par mois, de disposer de quarante minutes de communication et de passer quarante SMS. En outre, la convention que nous avons signée avec les principaux opérateurs – Orange, Bouygues et SFR –, exclut tout frais d’activation ou de résiliation. Nous avons mis en œuvre la même démarche pour l’internet haut débit. Votre préoccupation a donc été prise en compte, dans une démarche qui vise à faciliter la recherche d’emploi et la socialisation.

Madame Poletti, au-delà de l’aide d’urgence, qui sera portée par le fonds, nous sommes face à un réel problème de tarification différenciée, que nous avions cerné quand nous avons réfléchi ensemble aux services à domicile. Les départements ont entamé un travail à ce sujet. Dans ce cadre, j’ai rencontré M. Lebreton, président de l’Assemblée des départements de France. Pour l’heure, il nous manque un support législatif, mais le problème sera résolu dans le PLF.

M. Dominique Baert, président. Je vous remercie.

La réunion de la commission élargie s’achève à dix-neuf heures vingt-cinq.

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