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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 30 juin 2010

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 93

Présidence de M. Jérôme Cahuzac, Président

–  Audition de M. Michel Bouvard, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, et de M. Augustin de Romanet, directeur général, sur l’activité de la Caisse des dépôts

–  Présences en réunion

La Commission entend M. Michel Bouvard, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, et M. Augustin de Romanet, directeur général, sur l’activité de la Caisse des dépôts.

M. le président Jérôme Cahuzac. Je suis très heureux d’accueillir notre collègue Michel Bouvard, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que le directeur général de celle-ci, M. Augustin de Romanet, à l’occasion du dépôt du rapport que la Caisse des dépôts doit au Parlement chaque année. Depuis sa création en 1816, la Caisse des dépôts et consignations est placée de façon très spéciale sous la surveillance et la garantie de l’autorité législative et, grâce à Michel Bouvard maintenant et à Jean-Pierre Balligand en son temps, la commission des Finances a veillé avec un soin jaloux à exercer ces fonctions de la façon la plus scrupuleuse. Ce mode de gouvernance spécifique a été confirmé par la loi de modernisation de l’économie en 2008. Le rapport de la Caisse des dépôts au Parlement et le rapport d’activité du groupe Caisse des dépôts montreront sans doute que 2009 aura été plus faste que le difficile exercice 2008. La Caisse des dépôts a en effet été sollicitée à l’occasion de la crise financière comme elle ne le fut jamais auparavant, même en temps de guerre, qu’il s’agisse de venir au secours de Dexia ou d’aider au financement des entreprises, directement ou par le biais du Fonds stratégique d’investissement – FSI –.

M. Michel Bouvard, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. Nous voudrions commencer cette année par un petit film retraçant les faits marquants de l’activité du Groupe pour 2009.

La Commission assiste à la projection du film sur le bilan d’activité 2009 du groupe Caisse des dépôts et consignations.

M. Michel Bouvard. Ce rendez-vous annuel devant la commission des Finances est certes une obligation de la loi, mais aussi le moyen de répondre à vos interrogations sur la situation de la Caisse des dépôts et sur ses projets. Le film que vous venez de voir montre bien toute la diversité des compétences et des activités du Groupe, sur le territoire national comme dans le monde. Les documents qui vous sont remis sont beaucoup plus détaillés et je remercie tous ceux qui ont contribué à leur élaboration, à commencer par ma directrice de cabinet, Brigitte Gotti.

Les temps forts de l'année 2009 ont confirmé l'originalité et la force du modèle économique du groupe Caisse des dépôts. Sa gouvernance a été renforcée, au service de quatre priorités.

La première est la stratégie du Groupe. Conformément à la loi de modernisation de l’économie, la commission de surveillance a été saisie pour avis des orientations stratégiques de l'établissement public et de ses filiales et de la mise en œuvre de ses missions d'intérêt général. Ses vingt-trois réunions ont montré la forte mobilisation de ses membres – et je salue nos collègues Jean-Pierre Balligand, qui m’a précédé dans ces fonctions, et Arlette Grosskost. Elles lui ont permis de suivre la montée en puissance des priorités Élan 2020, définies au début de la mandature par le directeur général en lien avec la commission, et d’assurer un suivi particulier du FSI, qui était dans sa première année de fonctionnement, un suivi effectué de très près au premier semestre puis un peu allégé.

La deuxième priorité a été la protection des fonds propres de la Caisse des dépôts. La commission de surveillance a été saisie le 15 avril 2009 par le directeur général de la question du montant des versements à l’État, versements opérés en 2009 au titre de l'exercice 2008
– année singulière, marquée par le résultat opérationnel le plus élevé jusqu’à ce jour mais aussi par un résultat comptable négatif, compte tenu des provisions à passer du fait des dépréciations intervenues sur les marchés d’actions.

La commission, unanime, a décidé qu'aucun prélèvement ne pourrait être opéré après le paiement de la contribution représentative de l’impôt sur les sociétés – CRIS –, et a souhaité une remise à plat des relations financières avec l'État, puisqu’aucune règle pérenne et transparente n’est prévue en cas de résultat exceptionnel, à la hausse ou à la baisse. Le ministre de l'Économie a confié une mission de conseil à l'inspection générale des finances, portant sur les missions d'intérêt général et le dispositif de prélèvement. Conduite dans d'excellentes conditions, elle devrait déboucher durant l’été sur un dispositif fondé sur les intérêts communs du Groupe et de l'État.

Pour ce qui est de la troisième priorité, la stabilité financière du groupe, la commission de surveillance a préparé les conditions d’intervention de l'Autorité de contrôle prudentiel – ACP –. La loi de modernisation de l’économie avait en effet prévu que l’ex-Commission bancaire, devenue Autorité de contrôle prudentiel, tiendrait un rôle de conseil envers la commission de surveillance. Un décret du 2 décembre 2009 confirme que l'Autorité n'interviendra en revanche pas à la Caisse des Dépôts comme dans les autres établissements de crédit, puisque la Caisse des dépôts n'est ni une banque, ni un conglomérat financier. Ce décret est fidèle à l'esprit de la loi et effectue les adaptations nécessaires. La commission de surveillance voit ainsi son rôle conforté puisque c'est elle qui déterminera le modèle prudentiel de la Caisse des dépôts et fixera, à partir des propositions du directeur général et des observations de l’ACP, le niveau de fonds propres approprié, compte tenu de la situation financière et des risques spécifiques de la Caisse des dépôts. Cela lui donne les moyens d'accompagner dans la durée le modèle économique et financier du Groupe, ce qui est cohérent avec sa saisine sur le prélèvement au bénéfice de l’État.

La commission de surveillance continue de bénéficier du concours de la Cour des comptes. Elle a travaillé avec Philippe Séguin puis aujourd’hui Didier Migaud sur une meilleure réactivité aux rapports de la Cour, essentiellement produits par la première chambre sous l’autorité de Christian Babusiaux, et veille à leur suivi. Le rapport sur les fonds d’épargne a ainsi permis de mettre en place un cadre de gestion avec l’État qui était très attendu par la direction des fonds d’épargne. Je salue le travail d’André-Laurent Michelson à ce propos. Les documents définitifs devraient être signés dans les prochains jours.

Dernière priorité : la pérennité du modèle économique de la Caisse des dépôts. La force de ce modèle tient à ce qu’elle ne s'inscrit pas dans une logique d'endettement et dispose de liquidités qui sont, ainsi que la crise l’a mis en évidence, un bien d'intérêt public précieux. C’est la commission de surveillance qui autorise la Caisse des dépôts à émettre des emprunts. Elle détermine chaque année son programme d'émission de titres de créances et en fixe l'encours annuel maximal. Elle veille à ce que leur volume ne modifie pas le modèle économique de la Caisse des dépôts, dont la notation AAA est un élément clé. La Caisse des dépôts étant par exemple le banquier de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale
– ACOSS –, dont les besoins de financement se sont amplifiés cette année, elle a eu l’occasion de réaffirmer la nécessité d’encadrer les émissions dans la durée.

J’en viens maintenant aux résultats de l’exercice 2009. Ces résultats sont bons, tant pour les fonds d'épargne que pour la section générale, et reflètent la prudence de la gestion financière et la maîtrise des risques permise par une correcte anticipation des évolutions de marché. La Caisse des dépôts a notamment été très attentive à l’évolution des titres souverains et a pu se dégager dans d’excellents délais de certains, dernièrement fragilisés.

La section des fonds d'épargne affiche un résultat de 1 164 millions d’euros, découlant notamment de la généralisation de la distribution du Livret A avec une marge d'intérêt améliorée. Après reconstitution des fonds propres, le résultat disponible s'élève à 742 millions d’euros et la commission de surveillance a donné un avis favorable, le 23 juin dernier, au prélèvement de ce montant pour rémunérer la garantie de l'État. Je rappelle que les fonds propres avaient été singulièrement amputés l’an dernier par une reprise sur le Fonds pour risques bancaires généraux.

Le résultat de la section générale s'élève à 1 980 millions d’euros, contre un résultat négatif de 1 468 millions en 2008, du fait du retour à des conditions de marché plus favorables et des bonnes performances des filiales, qui ont été un élément clef de la stabilité du Groupe en période de crise. Les filiales représentent 61 % du résultat récurrent du Groupe, à commencer par le groupe CNP Assurances, premier contributeur, qui apporte 385 millions d’euros.

Le double ancrage entre missions d'intérêt général et activités concurrentielles garantit à la Caisse des dépôts un développement équilibré. Il conforte sa nature d'investisseur de long terme et son action contracyclique en mutualisant les risques. Les choix judicieux faits depuis le début de cette mandature – stabiliser le périmètre du Groupe, conserver les filiales, ne pas accorder de filiale opérationnelle au Fonds stratégique d’investissement – sont confirmés.

Le 14 avril 2010, la commission de surveillance a fixé la contribution de la Caisse des dépôts au budget de l'État pour l'exercice 2009 à 413 millions d’euros au titre de la CRIS et 660 millions pour le prélèvement équivalent à un tiers du résultat net consolidé. Si l’on y ajoute le prélèvement de 742 millions d’euros sur les fonds d’épargne au titre de la rémunération de la garantie de l’État, l’apport de la Caisse des dépôts à l’État se monte à 1 815 millions.

Enfin, une brève perspective sur l’année 2010 : ce sera une année dense, avec plusieurs défis, à commencer par l'ouverture du capital de La Poste, qui nous occupe quasi quotidiennement, l’aboutissement de la fusion entre Veolia Transport et Transdev – à parité, comme nous le souhaitions – qui fera émerger le champion français de la mobilité mondiale, la mise en œuvre de l'emprunt national, pour lequel la Caisse des dépôts est fortement mobilisée, et la poursuite des quatre priorités d'Élan 2020. S’y ajouteront pour la commission de surveillance la mise en œuvre du décret concernant l’Autorité de contrôle prudentiel et la définition du modèle prudentiel pour sa première année.

Trois principes clés nous guideront : la sélectivité, la performance et la transversalité. Après des années exceptionnelles, les ressources financières de la Caisse des dépôts sont plus limitées que dans le passé et les sollicitations plus nombreuses. Compte tenu de l'impérieuse nécessité de protéger ses intérêts patrimoniaux, il lui faudra être sélective dans ses investissements pour relever les défis de l'avenir et assurer le développement de ses filiales, vis-à-vis desquelles elle doit se montrer un actionnaire responsable.

Je terminerai en remerciant le directeur général pour la qualité des relations qu’il entretient avec la commission de surveillance, émanation de la représentation nationale.

M. Augustin de Romanet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. La Caisse des dépôts a effectivement connu en 2009 de bons résultats et a pris des risques, d’autant plus facilement que sa gouvernance a changé. Depuis la loi de modernisation de l’économie, le directeur général ne peut plus prendre seul une décision au-delà de 150 millions d’euros : il doit consulter un comité spécialisé de la commission de surveillance. Ce renforcement des relations entre eux accroît encore la légitimité des choix opérés et permet une plus grande prise de risques.

Nous avons achevé en 2010 l’évolution commencée en 2007. Lorsque j’ai été nommé, la Caisse des dépôts avait du mal à affirmer son identité. Elle avait perdu IXIS et rompu ses liens historiques avec les Caisses d’épargne. C’est une étape générationnelle qui a été franchie. La Caisse des dépôts et consignations répond aux urgences du pays. Depuis le début des années quatre-vingt, elle avait en réalité mis en place une grande banque d’investissement pour pouvoir financer la dette publique : il s’agissait de disposer d’un spécialiste en valeurs du Trésor, d’être actif sur les marchés financiers… Puis, au début des années 2000, la Caisse des dépôts a décidé d’être moins présente sur les marchés financiers, d’où la cession d’IXIS. En 2007, nous avions des moyens financiers, mais l’identité de la Caisse des dépôts n’était pas exprimée et elle n’avait pas d’objectifs clairement affichés. Avec les quatre priorités d’Élan 2020, une identité d’investisseur de long terme et la création du Fonds stratégique d’investissement, nous sommes aujourd’hui clairement un grand fonds d’investissement public qui a pour vocation de prendre des risques aux côtés des entrepreneurs et des collectivités locales et de continuer à mettre en réseau le maximum d’investisseurs de long terme.

Pour 2009, le Groupe a un résultat de près de 2 milliards d’euros, dont un résultat récurrent de 1,6 milliard, en progression de 7 %. Les fonds propres s’élèvent à 19,2 milliards d’euros et les fonds d’épargne sont bénéficiaires d’1,16 milliard. En 2009, nous avons apporté 10 milliards d’euros au FSI et 2 milliards de prêts supplémentaires à Oséo Financement. L’enveloppe de prêts pour les grands projets d'infrastructures a d’ores et déjà été consommée à hauteur de 2,4 milliards d’euros, dont 786 millions effectivement signés – notamment pour les lignes de TGV –, et la ligne de prêts en faveur des collectivités territoriales a été entièrement consommée début 2009. Nous avons enfin mis en œuvre l’achat de 9 400 des 10 000 VEFA – ventes en l’état futur d’achèvement – auxquelles nous nous étions engagés fin 2008. La Caisse des dépôts, qui s’était montrée très mobilisée au cœur de la crise, entre octobre et décembre 2008, a donc continué en 2009.

Un mot sur les quatre priorités d’Elan 2020 : les PME, le logement, l’université et le développement durable.

Pour ce qui est des PME, nous sommes le premier financeur en fonds propres sur le territoire. Il est clair que c’est uniquement dû à une défaillance du marché. Il n’y a plus de compagnie ou d’institution financière en mesure de s’engager en fonds propres auprès des PME. C’est pourquoi nous avons investi depuis six ou sept ans dans 2 453 entreprises. En 2009, nous avons consenti 33 000 prêts à la création d’entreprise, dont 7 600 au titre de la convention Nacre, que nous gérons pour le compte de l’État et qui s’adresse aux chômeurs créateurs d’entreprises. Nous essayons d’être présents sur toute la palette des besoins des PME. Le partage des rôles avec Oséo est très clair : à eux les garanties et les prêts, à nous les actions et l’equity. Néanmoins, nous avons mis en place un dispositif d’obligations convertibles pour avoir constaté que les entrepreneurs n’aiment guère ouvrir leur capital : ils préfèrent être complètement maîtres de la gestion de leurs entreprises. Nous avons dégagé une enveloppe de 300 millions d’euros d’obligations convertibles à cet effet. Enfin, par le biais du dispositif FSI-France Investissement, nous avons dans chaque région des fonds d’investissement dans lesquels la Caisse des dépôts investit entre 20 et 40 %. Il s’agit maintenant d’une action reprise par le FSI. Nous avons également créé des fonds spécialisés, comme le fonds stratégique Bois doté de 20 millions d'euros, le fonds de consolidation et de développement des entreprises, destiné aux entreprises en cours de médiation du crédit, le fonds de modernisation des équipementiers automobiles, et le fonds InnoBio, dédié aux biotechnologies. Bref, le dispositif s’est considérablement modernisé depuis 2007. Notre objectif en 2010 est de continuer à aider une entreprise par jour : en 2010, nous avons investi en equity 6 millions d’euros par jour dans les PME !

S’agissant du logement, il faut noter l’extraordinaire dynamisme du prêt au logement social, appuyé sur les ressources du livret A et qui a été un élément contracyclique crucial dans la crise. Les prêts Habitat-Ville sont en hausse de 26 % et 106 000 nouveaux logements ont été financés, soit une augmentation de 16 %. Notre Groupe a probablement été un amortisseur très important du trou d’air du début de 2009 pour le BTP.

Pour ce qui est des universités, nous avons signé des conventions avec 78 % d’entre elles. Nous essayons, dans toute la mesure du possible, de donner aux présidents d’université les instruments de leur autonomie, que la loi Pécresse prévoit en matière budgétaire, immobilière et de ressources humaines. Le président Michel Bouvard et moi nous battons – nous allons encore rencontrer la ministre ce soir – pour faire admettre que des droits virtuels ne sont pas suffisants : les universités doivent notamment disposer librement de leur patrimoine. Nous espérons que nous pourrons, avant fin 2012, avoir fait sortir de terre de beaux projets de modernisation des universités. Nous espérons que l’Assemblée sera prochainement saisie de dispositions permettant aux universités qui ont des droits réels sur leur patrimoine de conclure, dans des projets de partenariat public-public, c’est-à-dire avec les collectivités locales et la Caisse des dépôts, des programmes à trente ans pour rénover leur patrimoine. Des projets sont en cours à Bordeaux et Strasbourg pour les universités traditionnelles, ainsi que pour l’École vétérinaire.

Enfin, s’agissant du développement durable, nous sommes d’ores et déjà à la tête d’une production de 450 mégawatts d’énergies renouvelables – soit l’équivalent d’un tiers d’EPR ou d’une centrale nucléaire des années soixante. Ce patrimoine se trouve majoritairement dans l’éolien, pour répondre aux objectifs de 2020, mais nous essayons de promouvoir toutes les énergies renouvelables alternatives, comme la méthanisation – nous investissons en Picardie et en Bretagne – le photovoltaïque et la micro-hydraulique. Nous faisons également des efforts pour être présents dans les zones dépendantes, et notamment en Provence-Alpes-Côte-d’Azur et dans les territoires d’outre-mer – nous avons par exemple inauguré il y a quelques semaines une centrale de valorisation du bois en Guyane.

Dans ces quatre priorités, les réalisations sont donc concrètes et extrêmement rapides.

J’en viens au détail des résultats. En année normale, la Caisse des dépôts doit être capable de réaliser un résultat de 1,5 milliard d’euros : le résultat récurrent s’élève à 1,646 milliard d’euros en 2009. Ce résultat est marqué par quatre éléments non récurrents : une plus-value sur le titre TDF, des retraitements de réserves sur Dexia, des plus-values immobilières mais surtout la prise en compte dans notre bilan des titres CNR. La Caisse des dépôts et consignations possède en effet 33 % de la Compagnie nationale du Rhône, participation qui, jusqu’à présent, du fait de subtilités comptables, n’apparaissait pas dans ses comptes. Nous avons décidé de valoriser comme il se devait cette participation, ce qui nous a permis d’enregistrer un profit exceptionnel de 224 millions d’euros. Je vous rappelle que la CNR est une entreprise exceptionnelle, dont la valorisation est comprise aujourd’hui entre 3 et 4 milliards d’euros, à propos de laquelle nous avons des projets de développement significatifs.

Le résultat récurrent du Groupe est principalement dû aux filiales. Alors même que ce résultat s’accroît, la part de l’établissement public lui-même a tendance à diminuer, en proportion et même en valeur absolue. Cela est principalement dû à la création du Fonds stratégique d’investissement, c’est-à-dire à la filialisation d’une part significative de notre activité d’investisseur.

Pour ce qui est de la gestion financière, nous n’avons pas d’actif toxique ni de défaut de crédit et sommes très bien provisionnés : nos provisions sur les portefeuilles actions sont supérieures aux moins-values latentes constatées.

J’en viens aux fonds propres, qui sont la richesse de la maison. C’est avec les fonds propres de la section générale – c’est-à-dire tout sauf les fonds d’épargne – que nous pouvons investir dans les entreprises et effectuer des dépenses d’intérêt général. Après distribution du résultat à l’État, les fonds propres étaient de 17,9 milliards d’euros en 2008, après 19,4 milliards en 2007. Ils atteignent 19,2 milliards d’euros en 2009 – compte tenu d’un résultat de presque 2 milliards et avec l’hypothèse qu’un tiers va aller à l’État. Dès 2009, nous avons donc quasiment rattrapé le trou de 2008. Par rapport à 2000, nos fonds propres sont en croissance de 56 %. Le rendement récurrent des fonds propres de la Caisse des dépôts s’élève à 8,7 %. Ce chiffre est important : c’est ce que la Caisse des dépôts est en droit d’attendre de ses investissements. Lorsqu’il s’agira d’investir dans La Poste notamment, il faudra se demander si le résultat sur capitaux engagés sera conforme à cette moyenne.

Le résultat net des fonds d’épargne est de 1,16 milliard d’euros. Le redressement des marchés financiers a permis une reprise de provisions pour dépréciations d’actifs de 1,2 milliard d’euros, alors que nous avions dû l’an dernier prendre des provisions pour 2,7 milliards. Ce résultat nous permet de reconstituer le Fonds pour risques bancaires généraux, de reconstituer nos fonds propres et même de verser 742 millions d’euros à l’État.

S’agissant du livret A, les dépôts stagnent. C’est la conséquence mécanique de la loi du 4 août 2008, qui plafonne notre stock de dépôts à 160 milliards d’euros plus la moitié de la capitalisation des intérêts. Mais parallèlement, les prêts explosent : le stock de prêts en faveur du logement social, des infrastructures, des hôpitaux ou des universités devrait atteindre 152 milliards d’euros à l’horizon 2013. En 2007, lorsque je suis arrivé, nous avions 220 milliards de dépôts et 100 milliards d’encours, soit une surliquidité de 130 milliards d’euros. En 2013, nous devrions avoir 210 milliards de dépôts et moins de 60 milliards de liquidités !

Un mot de nos objectifs pour 2010. Le premier concerne le modèle même de la Caisse des dépôts, une institution qui rend chaque année des comptes au Parlement. Cela suppose de valoriser notre seul capital, notre seule valeur ajoutée : la confiance. C’est pourquoi nous réalisons de gros investissements informatiques pour sécuriser nos trois grands mandats : les retraites, les fonds d’épargne et les dépôts des professions juridiques. Nous sommes aussi mobilisés pour gérer 8 milliards d’euros de l’Emprunt national, dans dix programmes. Enfin, nous essayons en permanence d’améliorer la gestion des régimes de retraite : les conseils d’administration de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales – CNRACL – et de l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques – IRCANTEC – se montrent légitimement très exigeants et nous servons chaque année 10 % de prestations supplémentaires à moyens constants.

Un autre enjeu pour 2010 est d’améliorer encore nos performances sur les quatre priorités d’Élan 2020. Un autre encore est relatif à l’investissement dans La Poste, que je continue à revendiquer. Dès le milieu de 2007, j’avais dit considérer comme légitime que la Caisse des dépôts vienne aider à la modernisation de ce grand service public. Nous avons en commun la confiance de la population, 17 000 points de contact sur tout le territoire et la gestion de l’épargne des Français. Aujourd’hui, le contexte a changé et les perspectives financières du courrier sont moins favorables mais nous restons convaincus que dès lors que nous trouverons un prix correct, cet investissement pourra être mutuellement utile.

Autre objectif : favoriser pour chacune de nos filiales un développement créateur d’emplois et de richesse. Transdev par exemple, qui rapportait chaque année à la Caisse des dépôts et consignations un résultat de 15 millions d’euros, va être fusionnée avec Veolia Transport. Avec cet apport, plus une augmentation de capital de 200 millions d’euros, la Caisse des dépôts va posséder 50 % de Veolia-Transdev, nouveau leader mondial des services de transport de voyageurs avec 120 000 salariés et 8 milliards d’euros de chiffre d’affaires, et dont le premier directeur général sera celui de Transdev. Une autre filiale, Egis
– 5 000 salariés en France, 3 000 à l’étranger – a pour vocation d’être le consolidateur de l’ingénierie en France. Il n’y a pas de géant de l’ingénierie en France – pas de SNC-Lavalin ni de Bechtel. Egis est un des leaders en France, avec 3 % de part de marché ! C’est un fort handicap pour nos entreprises de BTP ou de tramway par exemple, qui doivent assurer cette fonction en interne. Pour projeter l’énergie de nos entreprises, il nous faut un ingénieriste de taille mondiale. Nous avons commencé par acheter Iosis, qui est un très bon ingénieriste du bâtiment, et espérons ne pas nous arrêter là. Nous allons poursuivre l’intégration d’Iosis dans Egis. Celle-ci étant une filiale à 100 % de la Caisse des dépôts, nous avons toutes les manettes pour développer ce consolidateur.

Le dernier enjeu concerne notre club des investisseurs de long terme, qui a donné lieu à des partenariats concrets, et la création de fonds partenariaux innovants. En 2009, nous avons réussi à créer une espèce de cluster des fonds d’infrastructures à Paris. Ainsi, le fonds Marguerite, qui a levé déjà 750 millions d’euros, soit la plus grosse levée de fonds mondiale dans le domaine des infrastructures, a son siège à Paris, de même que le fonds InfraMed, première initiative financière de l’Union pour la Méditerranée, qui a déjà levé 385 millions d’euros – et dont le directeur général est français. Ajoutés à CDC Infrastructure, notre filiale, dotée de 1,5 milliard d’euros, ils constituent un vrai pôle d’expertise à Paris dans un secteur d’avenir.

Pour conclure, nous espérons continuer sur notre lancée en 2010 et vous présenter des résultats encore meilleurs, en ayant fait encore plus en faveur des fonds propres des entreprises, des universités et des logements et en ayant projeté notre savoir-faire d’ingénierie et de ville durable dans le monde. L’urgence des Français, c’est l’emploi. L’emploi des Français, c’est la croissance du monde. Il faut aller chercher la croissance là où elle est : au Maroc, dans le sud de la Méditerranée, dans tous ces pays où elle dépasse 5 à 7 %. Dans les trente ans à venir, on urbanisera plus de personnes que depuis le début de l’histoire de l’humanité, c’est-à-dire trois milliards de personnes. Mettre trois milliards de personnes dans des villes, cela suppose de les transporter, d’assainir et de distribuer leur eau, de construire des écoquartiers, de les alimenter en énergie. La nouvelle frontière de la Caisse des dépôts, c’est d’employer toute cette faculté de création d’emplois au bénéfice de nos concitoyens.

M. le président Jérôme Cahuzac. Confirmez-vous que la perte latente des actions EADS dont la Caisse des dépôts est propriétaire a été effacée ? Où en êtes-vous des chantiers universitaires : les mesures réglementaires nécessaires à votre action ont-elles enfin été prises ? Au regard de la dette structurelle de long terme que l’ACOSS est obligée de porter, avez-vous été amenés à modifier la durée d’émission de ce qui vous permet de la financer ? Enfin, est-il vrai qu’une recentralisation des fonds levés par le livret A et le livret de développement durable – LDD –, qui sont aujourd’hui fongibles, serait nécessaire pour respecter vos obligations en matière de couverture de vos encours de crédit par vos fonds propres ?

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Pour ce qui est du budget de l’État d’abord, nous constatons depuis de trop longs mois une dégradation des recettes. La Caisse des dépôts va-t-elle vraiment constater une plus-value en 2010 ? Compte tenu de ses résultats, sa contribution au budget de l’État devrait être supérieure à ce qui était inscrit en loi de finances initiale pour 2010, à savoir 500 millions d’euros pour les dividendes, 400 millions au titre de la contribution représentative de l’impôt sur les sociétés mais rien pour la contribution des fonds d’épargne. J’espère qu’elle pourra revenir au niveau de ces dernières années, qui était de l’ordre de 2 milliards d’euros.

Derrière les chiffres se pose la question des relations financières entre l’État et la Caisse des dépôts, qu’il faut réussir à inscrire dans la durée. Plusieurs rapports explorent le sujet. La fixation du niveau des dividendes et du prélèvement sur les fonds d’épargne doit-elle faire l’objet d’une approche pluriannuelle ? Il est de coutume que le résultat après impôt soit réparti en trois tiers : un pour les dividendes, un pour les fonds propres et un pour les missions d’intérêt général. Cette règle va-t-elle être consolidée ? Enfin, la question récurrente des produits ou des pertes exceptionnels va-t-elle être réglée ? Nous avions déjà rencontré cette question avec la plus-value sur la cession de la part de la Caisse des dépôts dans la Caisse nationale des caisses d’épargne. Enfin, une question chère à Michel Bouvard : la Caisse des dépôts et consignations contribue explicitement à des missions d’intérêt général. Comment programmer celles-ci afin d’éviter de découvrir qu’une politique taxe en fait la Caisse des dépôts, comme cela s’est passé il y a deux ans pour 200 millions d’euros avec l’Agence nationale pour la rénovation urbaine – ANRU – ? Comment voyez-vous l’évolution des montants liés à ces missions d’intérêt général ?

Vous nous parlez depuis des années, s’agissant des fonds d’épargne, d’un effet de ciseaux entre les prêts – qui connaissent une accélération évidente dans le domaine du logement social bien sûr, mais aussi des infrastructures de transport, du plan de relance ou de l’assainissement par exemple – et les ressources, qui stagnent. Vous expliquez cette stagnation par la décentralisation des dépôts sur les livrets, mais il me semble qu’il existe également une sensibilité assez forte au taux de rémunération, qui a été particulièrement faible ces derniers temps. Si cet effet de ciseaux devait un jour se produire, ne faudrait-il pas revoir le taux de centralisation, au bénéfice de la Caisse des dépôts ? Par ailleurs, la loi de modernisation de l’économie avait prévu que les fonds d’épargne puissent emprunter. Envisagez-vous cette hypothèse ?

S’agissant de Dexia, une provision pour dépréciation de 1,5 milliard d’euros a été passée, sur la base d’un cours de l’action de 6 euros pour la section générale et 5,2 pour les fonds d’épargne, tous deux détenteurs de titres. Le cours s’établit aujourd’hui à 3 euros. Faut-il s’attendre à des dépréciations supplémentaires sur ces titres ? Par ailleurs, vous avez dit que le résultat des fonds d’épargne était en partie dû à des reprises de provisions pour dépréciations d’actifs financiers. Pour quels montants, et sur quels titres ?

Quel est l’état d’avancement des négociations concernant l’augmentation de capital de La Poste ?

Quelle est l’exposition éventuelle de la Caisse des dépôts, tant pour les fonds d’épargne que pour la section générale, aux risques souverains – obligations d’État, dettes grecque et espagnole – et bancaires – banques espagnoles ou portugaises ?

Enfin, le taux des commissions dont bénéficient les établissements financiers au titre de l’épargne réglementée a été baissé, ce qui est une excellente chose. Cela représente un produit de 700 millions d’euros par an pour la Caisse des dépôts. La Cour des comptes estime que ce résultat récurrent permettrait à la Caisse des dépôts de réduire la part des placements en actions, donc risqués, de ses fonds d’épargne. Qu’en pensez-vous ?

M. Michel Bouvard. Pour répondre au président Cahuzac, la Caisse des dépôts est fortement impliquée dans la mise en œuvre de l’autonomie des universités. Elle leur apporte l’ingénierie nécessaire pour effectuer une construction budgétaire, évaluer leurs besoins et en assurer le financement. Le volet immobilier est bien sûr central dans ce dossier. Pour le réaliser, la communauté universitaire refuse la solution du partenariat public-privé, dont elle a le sentiment qu’il bénéficierait principalement au privé. Nous avons donc imaginé un partenariat public-public impliquant la Caisse des dépôts et des collectivités territoriales, comme à Bordeaux par exemple. Nous attendons maintenant les dispositions réglementaires permettant la dévolution du patrimoine à l’université, qui conditionne le passage à la phase active des opérations de partenariat public-public. C’est ce que nous redirons tout à l’heure à la ministre de l’Enseignement supérieur Valérie Pécresse.

Pour ce qui est des fonds d’épargne, la première question qui se pose concerne la centralisation. Je rappelle que la loi de modernisation de l’économie a prévu une phase transitoire, jusqu’à fin 2011, durant laquelle les ressources de la Caisse des dépôts provenant du livret A et du LDD sont plafonnées à 160 milliards d’euros plus la moitié de la capitalisation annuelle. Auparavant, la Caisse des dépôts centralisait la totalité du livret A, mais n’avait qu’environ 10 % du LDD. Christine Lagarde avait envisagé un pourcentage pivot de centralisation aux alentours de 70 %. Il se situe aujourd’hui plutôt autour de 65 %. Cela ne pose pas de problème dans l’immédiat : la dynamique de prêts est parfaitement satisfaite, avec une priorité sur le financement du logement social. Mais le rapport de M. Camdessus a identifié un pic à l’horizon 2015, qui a d’ailleurs justifié la volonté d’élargir la distribution du livret A – outre les problèmes de concurrence qu’agitaient les banques, il démontrait la nécessité d’augmenter le volume de la ressource. Ce pic est lié essentiellement à la dynamique de la politique de la ville et du logement social, dont les besoins seront de 134 milliards d’euros à échéance 2013, contre seulement une vingtaine de milliards pour les nouveaux emplois : c’est donc d’abord pour financer le logement social qu’il faudra relever le taux de centralisation. En outre, la loi de modernisation de l’économie a fixé un plancher – c’est une nouveauté – de 125 % des encours centralisés à la Caisse des dépôts. Nous comptons sur le soutien des commissions des Finances de l’Assemblée et du Sénat pour surmonter les difficultés que nous rencontrerons auprès des établissements bancaires qui n’accepteront pas de gaieté de cœur la recentralisation d’une part de la ressource dont ils disposent aujourd’hui – et dont on peut légitimement s’interroger sur la façon dont ils l’emploient.

Le deuxième sujet est celui du niveau de résultat des fonds, qui dépend, outre de leur politique de placements, du coût de la ressource par rapport à celui des prêts et de la rémunération des réseaux. Le niveau de celle-ci avait enfin diminué – une digue sur laquelle la commission des Finances s’était brisée à plusieurs reprises – sauf pour les réseaux historiques. Étant donné le coût réel du service, cette rémunération pourrait diminuer encore, ce qui accroîtrait la profitabilité des fonds d’épargne et permettrait de répondre à l’une des attentes du rapporteur général, puisque le reversement à l’État au titre de la rémunération de la garantie en serait automatiquement augmenté.

Ce qui m’amène au versement à l’État au titre de 2010, portant sur les résultats 2009 : 413 millions d’euros au titre de la CRIS, 660 millions représentant le tiers du résultat après versement de la CRIS et 742 millions au titre des fonds d’épargne, soit 1 815 millions d’euros en tout. Où en est la négociation avec l’État ? Pour ce qui est des fonds d’épargne, la règle est claire : la totalité du résultat va à l’État, une fois tenu compte du niveau de fonds propres nécessaires. Ils ont été reconstitués cette année, après le prélèvement du Fonds pour risques bancaires généraux – FRBG – l’an dernier.

Pour ce qui est de la section générale en revanche, le système est fait de bric et de broc. S’agissant de la CRIS, nous sommes pour le statu quo, et nous pensons que c’est aussi l’intérêt de l’État. La Caisse des dépôts ne peut pas être soumise au droit commun de l’impôt sur les sociétés parce qu’elle n’est pas une société, et que tout ce qui pourrait la banaliser emporte des risques pour l’institution. Mais la CRIS est équivalente à l’impôt d’une société ordinaire. La Caisse des dépôts est même plutôt moins bien traitée que de nombreux grands groupes industriels et financiers français, qui profitent des nombreux artifices leur permettant de payer moins que le taux facial, taux dont la Caisse des dépôts s’approche, elle, très fortement.

Les choses sont moins claires s’agissant de la fraction du résultat versée à l’État, qu’on transforme souvent en « dividende ». La logique est équivalente à celle d’un dividende. Le premier impératif est qu’elle ne puisse en aucun cas affaiblir le niveau des fonds propres de la Caisse des dépôts. C’est pourquoi nous n’avons rien versé au titre du résultat l’an dernier : le résultat était nul, et si nous avions versé quelque chose, nous aurions amputé les fonds propres et fragilisé l’institution.

L’objectif aujourd’hui est de définir, outre la règle des trois tiers après versement de la CRIS – un pour les fonds propres, un pour l’État, un pour les missions d’intérêt général –, une règle de prélèvement qui intègre les résultats exceptionnels, à la hausse comme à la baisse. Cela implique qu’on puisse parfois se projeter au-delà de 33 %, mais aussi que le prélèvement ne soit jamais confiscatoire. En clair, la Caisse des dépôts revendique un bouclier fiscal à son usage. C’est l’intérêt général. En outre, le prélèvement ne doit pas être de nature à dissuader la Caisse des dépôts de réaliser des profits exceptionnels parce que l’État en prendrait l’essentiel. Enfin, le niveau des fonds propres doit constituer une barrière. Ce sont ces principes qui animent la discussion engagée avec l’État, que nous espérons voir aboutir.

Enfin, s’agissant des missions d’intérêt général, une grande clarification a été obtenue : toutes les conventions nationales passent devant la commission de surveillance. J’en remercie Augustin de Romanet, qui nous a permis de beaucoup progresser sur cette affaire. Nous vous avons transmis la liste des principales conventions conclues entre l’État et la Caisse des dépôts et des principaux mandats que l’État lui a confiés. Une partie de cet argent est utilisée dans le cadre des conventions avec l’État, le reste étant consacré au développement territorial – c’est-à-dire à tous ces projets dans lesquels la Caisse des dépôts peut contribuer à dénouer une opération d’urbanisme en centre ville ou financer un investissement dans l’énergie ou une étude sur les universités… Toutes priorités nationales qu’elle décline au niveau territorial.

M. Augustin de Romanet. S’agissant d’EADS, nous avons acheté 18,4 millions de titres pour 625 millions d’euros. Sur la base du cours d’aujourd’hui – 17 euros – notre moins-value latente est de 313 millions, intégralement provisionnés. Il n’y a donc pas de perte supplémentaire. Mais il faut noter qu’EADS se porte aujourd’hui aussi bien que le dollar.

En 2010, nous avons considérablement accru nos concours à l’ACOSS. Ils ont dépassé 30 milliards d’euros. Nous avons aussi beaucoup amélioré les conditions qui les régissent, qu’il s’agisse de leur structure, entre prêt à un an et concours à très court terme, ou de la rémunération, calculée pour que nous ne perdions pas d’argent. Nous menons des discussions très constructives avec l’Agence afin de prolonger de six mois la convention qui devait prendre fin le 30 juin. Le profil de trésorerie de l’ACOSS étant moins mauvais que prévu, les avances que nous lui accordons pourront être progressivement réduites en 2010.

Pour répondre à Gilles Carrez sur les fonds d’épargne, je ne pense pas avoir jamais parlé d’un effet de ciseaux avant la loi de modernisation de l’économie de 2008 : c’est la décentralisation qui est le générateur de cet effet de ciseaux structurel.

S’agissant de Dexia, nous avons effectivement retenu des valeurs supérieures à 3 euros dans nos comptes : 5,9 pour les fonds d’épargne et 6 euros pour les comptes sociaux de la Caisse des dépôts. Mais les commissaires aux comptes ont accepté de considérer que le titre devrait retrouver de telles valeurs dans les années qui viennent. Nous les conservons donc, tout en étant très attentifs à l’avenir de Dexia.

M. Michel Bouvard. Cette année, Dexia apporte un résultat positif.

M. Augustin de Romanet. Notre exposition aux titres d’État s’élève, pour la section générale, à 2,7 milliards d’euros pour l’Espagne et 200 millions pour la Grèce – rien pour le Portugal ; pour la section des fonds d’épargne, à 4 milliards d’euros pour l’Espagne, 300 millions pour la Grèce et 200 millions pour le Portugal. J’insiste sur le fait que l’exposition a été ramenée, entre fin 2008 et fin 2009, de 2,9 milliards d’euros à 500 millions pour la Grèce et de 1,9 milliard à 200 millions pour le Portugal. Si l’on considère notre exposition globale par pays, elle est pour la section générale de 7,6 milliards d’euros, dont 5 pour les banques : 1,2 milliard pour l’Italie, 4,9 pour le Royaume-Uni, 1,4 pour le Portugal dont 1 milliard pour les banques et toujours 200 millions pour la Grèce. S’agissant des fonds d’épargne, 6,7 milliards d’euros pour l’Espagne, dont 2,7 pour les banques, 15 milliards pour l’Italie, 3,5 pour le Royaume-Uni, 1 milliard pour le Portugal, dont 0,8 pour les banques, et 400 millions pour la Grèce.

S’agissant de La Poste enfin, les discussions se poursuivent sans qu’il soit encore possible d’en voir l’aboutissement, les premiers travaux de valorisations de l’État et de la Caisse des dépôts commençant.

M. Alain Rodet. Des inquiétudes se font entendre sur le fait que la Caisse des dépôts aurait tendance à distendre ses liens avec la SNI, grand propriétaire immobilier qui a besoin de beaucoup de fonds propres. Qu’y répondez-vous ? Ensuite, je suis heureux que l’ancien directeur général de Transdev prenne les mêmes fonctions à la tête de Transdev-Veolia, mais il approche de la retraite. Qu’en sera-t-il par la suite ?

M. Richard Dell’Agnola. Merci au président et au directeur général pour la qualité de leur exposé, et notamment pour la vision macro-économique mondiale dont nous a fait part M. de Romanet.

La Caisse des dépôts aurait donc financé 106 000 nouveaux logements sociaux. C’est son rôle central. Mais, si tous les établissements bancaires peuvent distribuer le livret A depuis le 1er janvier 2009, la collecte est passée de 18,3 milliards d’euros en 2008 à 16,5 en 2009. La rémunération, ramenée de 4 à 1,25 %, a sans doute joué, mais quelle est votre analyse sur la question et quelles sont les perspectives de collecte pour 2011 et 2012 ?

M. Pascal Terrasse. Que pensez-vous de l’amendement présenté voilà quelques jours à l’Assemblée visant à réduire la participation de 33 % de la Caisse des dépôts dans la Compagnie nationale du Rhône – CNR – ? Faut-il rappeler qu’elle a perçu 211 millions de dividendes ? Le Rhône, ainsi que le rappelaient aussi bien le général de Gaulle qu’Édouard Herriot, appartient à la nation. Il doit rester à la nation.

M. Jean-Pierre Balligand. Nous avons toujours essayé de protéger la Caisse des dépôts, et donc l’épargne des Français. Mais si nous avons connu un état de surliquidité avec des niveaux de collecte très élevés, les ressources stagnent maintenant, alors que les projections à horizon 2012 ou 2014 font état de dépenses très importantes. Contrairement à Michel Bouvard, il me semble que la baisse de la rémunération des réseaux de distribution bancaires pour le livret A a un effet négatif sur les ressources de la Caisse des dépôts. Si la rémunération des banquiers est trop faible, ils favoriseront forcément des produits de substitution – boursiers lorsque la conjoncture s’y prête, ou assurances vie par exemple. Je suis convaincu que le niveau de la collecte du livret A va baisser, et assez fortement d’ici trois ou quatre ans. Or, nous sommes dans la période transitoire. Il ne va donc pas falloir céder aux banques sur la question de la décentralisation. Je crains que ce qui s’est passé pour le LDD, ex-CODEVI, se répète pour le livret A et que l’argent mis à disposition des banques pour financer des PME et PMI ne soit que peu utilisé en ce sens, ainsi que le montrent les chiffres donnés par Mme Lagarde.

L’État a deux biais pour assurer ses recettes en provenance de la Caisse des dépôts : de très bons résultats récurrents, qui lui rapporteront beaucoup en rémunération du capital et en impôt, ou des cessions d’actifs. On ne peut pas laisser vendre les filiales de la Caisse des dépôts – je pense notamment à la CNP. C’est trop dangereux. Dans la situation politico-budgétaire que nous vivons, la tentation peut se faire sentir. Il faut y résister.

Je rappelle que si la Caisse des dépôts met 1,5 milliard d’euros de capital dans La Poste, cela représente un an de capitaux propres immobilisés – une année de « fichue ». Et si le directeur général persiste à affirmer que c’est une bonne idée, je persiste à penser que c’est surtout l’idée de l’État : la Caisse des dépôts ne s’est pas mise toute seule dans cette affaire… La vraie question est celle du retour sur investissement, des risques pris. Participer au capital de la Banque postale, qui distribue des produits de filiales de la Caisse des dépôts comme la CNP, a du sens. Cela remplacerait notre participation d’autrefois dans les caisses d’épargne. Mais il est question là de courrier et de colis, des métiers dont nous ne connaissons rien et dont la rentabilité n’est pas avérée ! Quel sera le retour sur investissement ? Il s’agit de l’argent des Français, on n’a pas le droit de jouer avec.

Enfin, au moment même où la Caisse des dépôts produit tous ces efforts pour sauver Dexia et pour investir dans La Poste, avec un retour sur investissement sans doute pluridécennal, les collectivités locales importantes, surtout les grandes villes, s’organisent pour pouvoir aller directement sur le marché contracter des prêts. On voit déjà les réseaux se mettre en place. Cela comporte des risques considérables pour ces collectivités, et pèserait beaucoup sur la Caisse des dépôts. Le débat est récurrent et, compte tenu des prêts toxiques qui ont été distribués par un certain nombre de banques, la tentation est forte. La commission des Finances doit absolument étudier la question et prendre contact avec la Caisse des dépôts et avec les banques.

M. Alain Claeys. Quel est le nombre d'universités qui souhaitent se voir rétrocéder leur patrimoine et quelles sont les dispositions légales à prendre pour cela ?

M. Pierre-Alain Muet. Toutes les collectivités locales du long du Rhône sont fortement attachées à la CNR, devenue une entreprise extrêmement rentable qui intéresse beaucoup l'un de ses actionnaires. La plupart des élus souhaitent qu'elle reste majoritairement publique parce qu’elle contribue au budget de l'État, avec une redevance importante sur l'hydraulique, et qu'elle reverse aussi une partie de ses profits à l'ensemble des collectivités territoriales en investissant le long du Rhône.

Ainsi que cela a été rappelé, « Le Rhône appartient à la nation » – formule qui, me semble-t-il, remonte à Édouard Herriot. À cet égard, Michel Bouvard est-il partisan de conserver la CNR dans le domaine public ?

M. Michel Bouvard. Pour ce qui est de Transdev-Veolia, la commission de surveillance avait fixé des conditions à l'opération, qui avaient été définies par le comité d'investissement : parité d'actionnariat, parité dans le management, parité au conseil d'administration, avec un administrateur indépendant supplémentaire choisi par Veolia mais en accord avec la Caisse des dépôts. Ces conditions ont été remplies. Les cessions d'actifs nécessaires à la fusion, soit pour désintéresser la RATP, soit pour répondre aux normes de concurrence, doivent également être équilibrées entre Veolia Transport et Transdev. La question de la succession de Joël Lebreton ne se pose pas encore. Entre-temps, il faudra notamment mener l'opération d'introduction en bourse.

Pour ce qui est de la CNR, je suis d'autant plus sensible au sujet que mon département est un de ceux qui sont restés à son capital. Il faut se poser la question de façon objective : y aurait-il un intérêt à ce que la CNR, qui fonctionne bien aujourd'hui, évolue demain dans son format ou dans son capital ? Autrement dit, l'intégration d'autres sociétés spécialisées dans l'hydroélectricité, pour ne pas dire la Société hydroélectrique du Midi
– SHEM –, peut-elle faire de la CNR un champion des énergies renouvelables ? Et dans ce cas, avons-nous intérêt à une modification de la répartition du capital ? Cela ne pourrait se faire qu’après une évolution de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite loi MURCEF, qui avait fixé la part de Suez-Electrabel à 49,99 %, le reste étant public. La qualité du projet industriel, le respect des engagements sur la gestion de la concession, les garanties sur le fait qu'il n'y ait pas de remontées de management, le respect de la répartition des dividendes au bénéfice des collectivités territoriales : tout cela sera pris en compte pour une éventuelle évolution de la loi.

Considérant que la CNR est une participation stratégique de la Caisse des dépôts, le directeur général a proposé de la mettre en équivalence dans les comptes de l'exercice qui vient d'être clos. Cette décision importante, approuvée par la commission de surveillance, montre que la Caisse des dépôts a vocation à rester un actionnaire principal et pérenne. Mais cela ne doit pas empêcher toute évolution de la société : la CNR n'est pas figée une fois pour toutes. Si le plan industriel est intéressant pour tout le monde, s’il y a des garanties aussi bien sur le respect de la concession, et donc les travaux qui doivent être faits sur le fleuve, et pour les collectivités actionnaires et la Caisse des dépôts, il ne faut pas refuser d’office le débat sur une évolution.

En revanche, les amendements déposés à l'Assemblée étaient précipités et auraient porté atteinte à l'intérêt général, représenté par la Caisse des dépôts. Un débat doit en effet être tranché avant toute évolution du capital : celui sur la valeur actuelle de la CNR. En la matière, il ne sert à rien de se rejeter les responsabilités. Ce qui est sûr, c’est que la valeur de la CNR n'a plus rien à voir avec celle de l'époque où la Caisse des dépôts a racheté les titres des collectivités qui souhaitaient les vendre et où le call – l’option d’achat – a été fixé. Or, cette nouvelle valorisation n'est pas due uniquement au travail de Suez, mais aussi à l'évolution de l'environnement économique et du marché de l'énergie. Faire sauter le cliquet de la loi MURCEF, exercer le call dans les conditions de l'époque serait une spoliation de l'intérêt général. En clair, la Caisse des dépôts se verrait privée de plusieurs centaines de millions d’euros de plus-value. Bref, les choses ne doivent pas rester figées au détriment de l’intérêt collectif mais si elles doivent bouger, cela doit être en accord avec la Caisse des dépôts et avec les différentes collectivités territoriales présentes dans le capital de la CNR ou riveraines du fleuve.

Enfin, Jean-Pierre Balligand défend toujours excellemment ses positions. Il est sûr que, dès lors que la Caisse des dépôts a investi, comme un actionnaire responsable, 2 milliards d’euros pour recapitaliser Dexia et l’État 1 milliard, dès lors que l'activité principale de Dexia Crédit local est le prêt aux collectivités, nous ne pouvons nous réjouir d'aucune initiative qui pourrait déstabiliser la société et empêcher tout retour sur investissement pour l'État et la Caisse des dépôts. Ceci étant, Dexia a aussi un problème structurel de coût de la ressource, plus élevé pour elle que pour les autres établissements financiers parce qu'elle n'a pas d'activité de dépôt en France – seulement en Belgique et au Luxembourg. Ce problème mérite effectivement une réflexion au niveau de la commission des Finances : il faut essayer de trouver une façon de réduire le coût de la ressource de Dexia tout en lui permettant de remplir sa mission de prêt aux collectivités locales dans des conditions intéressantes et qui respectent les règles de la concurrence.

M. Augustin de Romanet. La question de M. Rodet sur la SNI concerne le Limousin et la Picardie. L’objectif pour la SNI est d'essayer de construire dans les zones où il y a des tensions et de s'alléger là où il y en a moins sans pour autant faire sortir des logements du parc social : la SNI les cède à d'autres acteurs du logement social. Dans le Limousin, cela prendra quatre ans. Il n'est pas question pour la Caisse des dépôts de se désengager du logement social. J'y suis très attentif et je me tiens à votre disposition pour discuter plus avant de ce problème très complexe.

Pour ce qui est de Transdev-Veolia, après M. Lebreton directeur général… peut-être y aura-t-il M. Lebreton président ! Ce qui est sûr, c'est que la Caisse des dépôts restera longtemps dans le nouvel ensemble.

Je souscris complètement à ce qu’a dit Michel Bouvard à propos de la CNR. Dans les prochains mois, nous devrions entendre Suez nous faire valoir que pour se développer dans les énergies renouvelables, des deux véhicules : la SHEM ou la CNR, il ne pourrait choisir cette dernière qu’à condition de ne pas se sentir lié, donc d’y être majoritaire … En tout état de cause, nous sommes très attentifs à nos intérêts patrimoniaux, ce que montre notre décision de mettre en équivalence la CNR dans nos comptes.

Pour rassurer M. Dell’Agnola, les flux annuels de collecte du livret A sont historiquement élevés. Il demeure exceptionnellement attractif. En revanche, c’est aux banques que cela profite désormais, à cause du plafond de dépôts imposé à la Caisse des dépôts.

Pour répondre à la question de Gilles Carrez sur les placements des fonds d'épargne, nous allons nous désengager des actions. Les fonds d'épargne effectuaient des placements en actions pour financer les entreprises et pour augmenter leurs résultats. Maintenant que notre liquidité va décroître, nous allons les stabiliser, voire les diminuer, d'autant qu’ils sont très consommateurs en fonds propres.

Enfin, pour répondre à M. Claeys, selon le rapport du Sénat qui est paru hier, seulement une dizaine d'universités s'intéresseraient de près à la dévolution du patrimoine. Pour débloquer la situation, il faut d’une part une disposition législative – et je crois que Mme Pécresse a l'intention de faire inscrire dans la loi de finances une disposition donnant aux universités des droits réels sur leur patrimoine – et d’autre part deux décrets afin que les universités puissent apporter leurs droits aux PRES – Pôles de recherche et d’enseignement supérieur. C’est l'objet de notre rendez-vous de ce soir au ministère.

M. Laurent Hénart. Michel Bouvard a été à l'origine d'une réunion très intéressante sur la façon dont le groupe Caisse des dépôts pourrait aider les universités à mettre en œuvre la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dite loi LRU, notamment dans son aspect immobilier. Nombre d'universités préparent des candidatures pour les initiatives d'excellence, dans le cadre du grand emprunt. Avez-vous imaginé des moyens d’ingénierie pour les assister dans ce montage, qui doit se faire en quelques mois ?

M. Patrice Martin-Lalande. Comment s’articule, en matière de très haut débit, l'action de la Caisse des dépôts avec celle du comité d'utilisation du grand emprunt ? La Caisse des dépôts a déjà mené des actions en faveur du haut débit Internet dans un certain nombre de secteurs. Va-t-elle s'investir dans la couverture en très haut débit des zones rurales, ce qui implique le financement de satellites, beaucoup plus efficaces que la fibre ? Enfin, comment votre politique en matière de cyberbases va-t-elle évoluer ?

M. Charles de Courson. Au sujet de l’ACOSS, ne faudrait-il pas limiter, par voie législative, le montant de l'avance que vous lui consentez aux seuls besoins de trésorerie de son cycle annuel, toute avance de la Caisse des dépôts étant interdite pour le reste ?

S’agissant par ailleurs de la structure financière du Groupe, on assiste partout à un renforcement des fonds propres des établissements bancaires. Or, si la Caisse des dépôts est plutôt un OVNI juridique, elle n’en est pas moins soumise aux mêmes réalités financières que les autres structures bancaires. À cet égard, le ratio entre les actifs longs et les ressources longues de la Caisse des dépôts, qui est de l'ordre de 3 à 4, est-il raisonnable dans la situation actuelle ? Ne faudrait-il pas imposer à la Caisse des dépôts les mêmes ratios qu’aux banques ? Avez-vous fait des « crash-tests » concernant la Caisse des dépôts ?

M. le rapporteur général. S'agissant de la SNI, il n’est pas question, semble-t-il, que la Caisse des dépôts se désengage du logement social. Quelle est la politique d’Icade en matière de logement ?

M. Michel Bouvard. Il appartient dorénavant à la commission de surveillance de définir le modèle prudentiel de la Caisse des dépôts et donc le niveau de ses fonds propres, à partir des propositions de la direction générale et du rapport de la commission bancaire. Il est évident que la Caisse des dépôts, même si elle est singulière, ne peut faire abstraction des évolutions des normes prudentielles. Nous sommes dans une logique de durcissement des fonds propres dont elle ne peut s’exonérer. Toute la difficulté de l'exercice est de savoir dans quelle mesure adapter la norme commune, habituellement préconisée par l'Autorité de contrôle prudentiel, à la logique d'investisseur de long terme de la Caisse des dépôts, logique qui la préserve des mouvements à court terme des marchés financiers.

Par ailleurs, il faut naturellement travailler sur des scénarios de crise. L'exercice est totalement nouveau. J’espère que la démarche engagée par le directeur général avec des institutions comparables pourra aboutir : il s’agit de convaincre les autorités européennes de définir un modèle prudentiel applicable à l'ensemble des investisseurs de long terme, ou au moins de prendre en compte, dans les règles prudentielles qui seront définies pour tous les établissements financiers, l'investissement de long terme mieux qu’il ne l’est aujourd'hui. C'est la mission principale de la commission de surveillance dans les mois qui viennent. Les enjeux sont importants, qu’il s’agisse de la capacité de prélèvements de l'État ou des marges de manœuvre de la Caisse des dépôts pour financer les investissements de ses filiales et ses missions d'intérêt général. Les investissements à venir doivent prendre en compte cette évolution incontournable. Ainsi, l'investissement dans La Poste ne peut pas être déconnecté des risques qu’il comporte pour le niveau des fonds propres de la Caisse des dépôts.

M. Augustin de Romanet. Pour répondre à M. Hénart, les universités sont le seul domaine dans lequel nous avons revendiqué d’accorder des subventions pour des crédits d'études. Nous avons déjà engagé plus de 10 millions de crédits d’ingénierie à leur intention, et nos directeurs régionaux sont à la disposition de leurs présidents pour des besoins ponctuels.

Les 4,5 milliards d’euros de l’Emprunt national dédiés à l’économie numérique seront gérés par la Caisse des dépôts, en lien avec le commissaire général à l'investissement,
chargé de mettre en place le dispositif de l’Emprunt national, et les services de Nathalie Kosciusko-Morizet, Michel Mercier et Frédéric Mitterrand. Mais il semble que le vrai problème des Français ne soit pas seulement le très haut débit, mais aussi le haut débit simple. Pour l’heure, je ne sais pas ce que vont conseiller les spécialistes qui pilotent l'enveloppe de l’Emprunt national d’autant que pour le très haut débit, le besoin est de 40 milliards d’euros d'investissements alors que l'enveloppe de l’Emprunt national est de 2,5 milliards d’euros. Quant aux satellites, c’est une solution qu’Eutelsat, dont nous sommes actionnaires, promeut fortement.

Il y a 800 cyberbases en France, qui, comme cela arrive souvent dans les actions de la Caisse des dépôts, se trouvent là où les élus sont motivés. Certains départements comptent plus de cyberbases que de chefs-lieux de canton, alors qu’il y a des zones totalement blanches. Dans certains départements, nous avons du mal à développer ce service. Les publics prioritaires sont les scolaires, les détenus et les maisons de l'emploi.

Pour ce qui est de l’ACOSS, en théorie, les avances de la Caisse des dépôts sont inférieures à un an. En pratique, il y a des besoins structurels et des besoins ponctuels. En 2009, nous avons commencé à en tirer les conséquences. Il existe une ligne à un an, qui atteint, de mémoire, 20 milliards d’euros, et 11 milliards d’euros à très court terme par ailleurs. L’ACOSS avait tendance à surlever des crédits court terme et à se surcouvrir en liquidités mais les choses rentrent dans l'ordre. Naturellement, une disposition législative telle que vous l'évoquez ne m'inspirerait aucune inquiétude.

À propos d’Icade, je n'étais pas à l'initiative de la vente des 28 000 logements intermédiaires de l'an dernier. Néanmoins, j'ai été convaincu que ce n'était pas contraire à l'intérêt général de la société. Icade a à valoriser la plus belle réserve foncière du monde : 75 hectares au nord de Paris, entre la Porte d’Aubervilliers et Saint-Denis. Je souhaite qu’elle soit un acteur utile du Grand Paris et en fasse une zone intéressante. Icade sera de moins en moins présente dans le logement : c'est surtout une foncière développeuse, même si elle poursuit des dossiers d'intérêt général lancés il y a quelque temps et qui ne déboucheront que dans quelques années, en particulier celui des entrepôts MacDonald
– 600 mètres de long au nord de Paris. Pour ce qui est de l'immobilier d'entreprise, Icade sera une foncière généralement quelconque. Il faut assumer l’idée qu'à partir du moment où il a été décidé de l’introduire en bourse, il faut prendre en compte l'intérêt des actionnaires minoritaires.

M. le président Jérôme Cahuzac. Monsieur le président, monsieur le directeur général, je vous remercie.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 30 juin 2010 à 9 h 30

Présents. - M. Jean-Pierre Balligand, M. Claude Bartolone, M. Jean-Marie Binetruy, M. Pierre Bourguignon, M. Michel Bouvard, Mme Chantal Brunel, M. Jérôme Cahuzac, M. Bernard Carayon, M. Thierry Carcenac, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Alain Claeys, M. René Couanau, M. Charles de Courson, M. Jean-Yves Cousin, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Christian Eckert, M. Nicolas Forissier, M. Marc Francina, M. Daniel Garrigue, M. Georges Ginesta, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. François Goulard, Mme Arlette Grosskost, M. David Habib, M. Laurent Hénart, M. Patrick Lemasle, M. Jean-François Mancel, M. Patrice Martin-Lalande, Mme Marie-Anne Montchamp, M. Pierre Moscovici, M. Pierre-Alain Muet, M. Henri Nayrou, Mme Béatrice Pavy, M. Camille de Rocca Serra, M. Alain Rodet, M. Michel Sapin, M. François Scellier, Mme Isabelle Vasseur

Excusés. - M. Dominique Baert, M. Jean-Claude Flory, M. Jean Launay, M. Jacques Pélissard

Assistait également à la réunion. - M. Pascal Terrasse

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