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N
° 3115

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2015.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES
SUR LE PROJET DE LOI
de finances pour 2016 (n° 3096)

TOME I

ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION 

par M. Jean-David Ciot

Député

——

Voir le numéro : 3110 (annexe 7)

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

PREMIÈRE PARTIE : L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION POUR 2016 7

I. LE PROGRAMME 167 « LIENS ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE » 7

A. LA JOURNÉE DÉFENSE ET CITOYENNETÉ 7

1. Un nouveau programme pour la JDC en 2016 8

2. La poursuite des démarches de modernisation 9

B. LA POLITIQUE DE MÉMOIRE 10

1. La préparation d’une année riche en commémorations 10

2. Le renouvellement du protocole d’accord avec l’Éducation nationale 12

II. LE PROGRAMME 169 « RECONNAISSANCE ET RÉPARATION EN FAVEUR DU MONDE COMBATTANT » 13

A. LA RETRAITE DU COMBATTANT ET LES PENSIONS MILITAIRES D’INVALIDITÉ 13

1. La retraite du combattant 14

2. Les pensions militaires d’invalidité 15

B. L’ACTION SOCIALE ET LES DROITS LIÉS AUX PENSIONS MILITAIRES D’INVALIDITÉ 17

1. L’évolution globale des crédits 17

2. La nouvelle politique d’action sociale de l’ONAC-VG 18

3. Un nouvel avenir pour l’Institution nationale des Invalides 19

III. LE PROGRAMME 158 « INDEMNISATIONS DES VICTIMES DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE » 20

A. L’INDEMNISATION DES ORPHELINS DE LA DÉPORTATION ET DES VICTIMES DE SPOLIATIONS 21

1. L’indemnisation des victimes de spoliation 21

2. L’indemnisation des orphelins de parents victimes de persécutions antisémites 22

B. L’INDEMNISATION DES VICTIMES D’ACTES DE BARBARIE 23

DEUXIÈME PARTIE : LES ACTIONS EN FAVEUR DES RAPATRIÉS ET DES HARKIS 25

I. UNE PROFONDE RÉORGANISATION DE LA GESTION DE L’AIDE EN FAVEUR DES RAPATRIÉS ET DES HARKIS 25

A. LA CENTRALISATION DU TRAITEMENT DES DISPOSITIFS AU SEIN DE L’ONAC-VG 25

1. Une rationalisation des structures 25

2. Une simplification des procédures et des circuits 27

B. UN PLAN EN FAVEUR DES HARKIS 27

1. Les mesures en faveur de la reconnaissance 27

2. Les mesures visant à la réparation 29

II. UN EFFORT DE LA NATION QUI S’INSCRIT DANS LA DURÉE 30

A. LE DISPOSITIF DE RÉPARATION EN FAVEUR DES RAPATRIÉS ET DES HARKIS 30

1. L’allocation de reconnaissance 30

2. Les mesures pérennes 31

3. Les autres mesures en faveur des rapatriés 31

B. DES DROITS MAINTENUS ET AMELIORÉS EN 2016 32

1. Des droits maintenus 32

2. La levée de forclusion pour les conjoints survivants 32

TRAVAUX DE LA COMMISSION 33

I. AUDITION DE M. JEAN MARC TODESCHINI, SECRÉTAIRE D’ÉTAT CHARGÉ DES ANCIENS COMBATTANTS ET DE LA MÉMOIRE 33

II. AUDITION DE REPRÉSENTANTS D’ASSOCIATIONS D’ANCIENS COMBATTANTS 53

III. EXAMEN DES CRÉDITS 71

ANNEXE : Liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis 73

INTRODUCTION

Les crédits de la mission interministérielle « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » sont répartis en trois programmes : le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée », qui promeut l’esprit de défense et de citoyenneté au sein de la population et qui inclut sa dimension mémorielle, le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », qui témoigne de la reconnaissance de la Nation à l’égard des anciens combattants et des victimes de guerre, et le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale ».

Alors que le cycle mémoriel du soixante-dixième anniversaire de la Seconde Guerre mondiale s’achève en 2015, les crédits affectés à la politique de mémoire connaissent une légère inflexion en 2016. La saison mémorielle de l’année 2016 sera néanmoins dense avec la commémoration du centenaire des batailles de Verdun et de la Somme.

La Journée défense et citoyenneté (JDC) poursuivra sa mue en 2016 pour recentrer son message sur les questions de défense, conformément aux préconisations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, intégrer une présentation du nouveau service militaire volontaire (SMV) ou encore développer ses outils de communication.

L’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONAC-VG) a engagé une nouvelle étape de sa longue histoire en mettant en œuvre, depuis le début de l’année 2015, son nouveau contrat d’objectif et de performance qui doit lui permettre notamment de se mettre pleinement au service de la nouvelle génération du feu.

L’Institution nationale des Invalides (INI) est également en pleine transformation et sur le point de se doter d’un projet ambitieux et moderne qui permettra, en partenariat avec le service de santé des armées (SSA), d’offrir aux blessés en opérations extérieures (OPEX) une prise en charge globale dans la durée.

Loin de l’image surannée que l’on pourrait parfois en avoir, l’administration au service du monde combattant est donc une administration pleinement en prise avec les problématiques contemporaines, vivante et en mouvement constant.

Enfin, malgré un contexte budgétaire contraint, le projet de loi de finances pour 2016 consolide le droit à réparation de l’ensemble du monde combattant.

La première partie de ce rapport est consacrée à l’analyse des crédits de la mission. La deuxième partie étudie un aspect plus particulier d’une des politiques financée par cette mission. Le choix du rapporteur s’est porté cette année sur les actions en faveur des rapatriés et des harkis, qui ont été intégrés aux crédits de cette mission depuis l’année dernière.

Le rapporteur avait demandé que les réponses à son questionnaire budgétaire lui soient adressées au plus tard le 10 octobre 2015, date limite résultant de l’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

À cette date, 92 réponses sur 94 lui étaient parvenues, soit un taux de 97,8 %.

PREMIÈRE PARTIE :
L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION POUR 2016

Les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » s’inscrivent dans une trajectoire tendancielle de baisse tenant compte de la diminution du nombre de bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité et de la retraite du combattant.

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit néanmoins la mise en place de mesures nouvelles à destination des veuves des plus grands invalides de guerre, des conjoints des anciens membres des formations supplétives ainsi qu’une augmentation sensible des crédits d’action sociale de l’Office national des anciens combattants. Il traduit ainsi un réel effort de la Nation à l’égard de ceux qui l’ont servie.

I. LE PROGRAMME 167 « LIENS ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE »

En finançant la Journée défense et citoyenneté ainsi que la politique de mémoire, le programme 167 vise à promouvoir la diffusion de l’esprit de défense au sein de la société et à renforcer le lien entre l’armée et la Nation.

Pour 2016, les autorisations d’engagement (AE) s’élèvent à 37,3 millions d’euros, en baisse de 29,8 % par rapport à 2015, et les crédits de paiement (CP) à 37,5 millions, soit une baisse de 11,6 %.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 167

(en millions d’euros)

   

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

Numéro et intitulé
de l’action et du titre

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 1

Journée défense et citoyenneté

29,8 

19,1

15,1

15,3

-49,3%

-19,7 %

Action 2

Politique de mémoire

23,4

23,4

22,2

22,2

-0,7 %0

-5,1%

TOTAL

53,2

42,5

37,3

37,5

-29,8 %

-11,6 %

Source : Projet annuel de performances pour 2016.

A. LA JOURNÉE DÉFENSE ET CITOYENNETÉ

Le budget 2016 de la JDC s’établit à 15,1 millions d’euros en AE, 15,3 millions en CP et comprend essentiellement des crédits de titre 3 (dépenses de fonctionnement). Ces crédits correspondent aux dépenses nécessaires à la préparation et à la conduite de la JDC par la direction du service national (DSN).

Pour mémoire, la maquette budgétaire avait connu une évolution significative en 2015 puisque l’ensemble des crédits de personnel du programme 167 avaient été transférés au programme 212 « Soutien de la politique de défense », placé sous la responsabilité du secrétaire général pour l’administration du ministère de la Défense.

La baisse des crédits alloués à la JDC par rapport à 2015, et notamment l’importante variation en AE du titre 3, s’explique essentiellement par le non-renouvellement du marché de formation au secourisme puisque ce module est remplacé par un module sur la sécurité routière à partir du 1er janvier 2016.

Enfin, cette baisse résulte également du transfert des crédits de communication externe au programme 212 « Soutien de la politique de défense » (110 000 euros).

1. Un nouveau programme pour la JDC en 2016

Recentrée sur la défense depuis les conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, la JDC est également l’occasion de sensibiliser environ 780 000 jeunes chaque année aux enjeux de défense et de sécurité mais aussi à l’engagement citoyen. En qualité de troisième étape du parcours de citoyenneté, elle concourt à la légitimation de l’effort de défense.

Dans le cadre de la réforme du permis de conduire (décret n° 2014-1295 du 31 octobre 2014), le Premier ministre a souhaité que soit inscrit un module de sensibilisation à la sécurité routière à partir de 2016. Ce dernier module remplace la formation au secourisme jusqu’alors dispensée et également présentée dans les établissements scolaires. Afin de déterminer les conditions de mise en œuvre du nouveau module « sécurité routière », qui devrait être regroupé sous un module unique sécable avec l’ensemble de l’information hors défense, la DSN a travaillé avec la délégation à la sécurité et à la circulation routières (DSCR). Durant 20 à 30 minutes, les jeunes appelés seront donc sensibilisés aux dangers de la route autour de deux thèmes :

– la perception des risques routiers et le partage de la route entre les différentes catégories d’usagers ;

– les différents modes d’apprentissage de la conduite et les dispositifs d’aides publiques au financement des formations préparatoires à l’examen du permis de conduire.

À partir de 2016, les jeunes seront également informés sur le service militaire volontaire (SMV), opérationnel depuis octobre 2015, à l’instar de l’information procurée sur les établissements publics d’insertion de la défense (EPIDe) en métropole et du service militaire adapté (SMA) en outre-mer. De plus, dans le cadre du protocole de janvier 2015 avec l’agence du service civique (ASC), une information est donnée sur le service civique, qui intéresse de plus en plus en plus de jeunes.

2. La poursuite des démarches de modernisation

Dans le cadre de la modernisation de l’action publique, la DSN s’est engagée dans le développement de plusieurs services destinés à améliorer les relations entre l’État et ses usagers. Ce projet est articulé autour de l’amélioration du service de recensement en ligne et du développement d’une application mobile d’information et de géolocalisation des sites de JDC.

L’application « ma JDC sur mon mobile » est opérationnelle depuis avril 2015. Depuis son lancement, le téléchargement a constamment augmenté puisque les dernières données concernant son utilisation montrent une montée en puissance (cf. tableau ci-dessous), malgré un certain ralentissement pendant la période estivale. Une campagne d’information sera réalisée au second semestre 2015.

TÉLÉCHARGEMENT DE L’APPLICATION « MA JDC SUR MON MOBILE »

Source : ministère de la Défense.

Par ailleurs, environ 3 % de la population française n’est pas recensée pour les classes de naissance pour lesquelles les jeunes ont encore la possibilité de remplir cette obligation. Se faire recenser en ligne est désormais possible via le site « mon.service-public.fr » et le déploiement de ce service est porté par les communes, le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, la direction de l’information légale et administrative et la DSN. Au second trimestre, 44,04 % de la population française métropolitaine est couverte, mais en pratique, seulement 3,77 % des jeunes pouvant se faire recenser en ligne ont utilisé la voie dématérialisée. Les résultats doivent être confortés par une meilleure adhésion des communes et une meilleure communication de celles-ci.

B. LA POLITIQUE DE MÉMOIRE

La politique de mémoire participe à l’éducation citoyenne car elle permet notamment d’éclairer la politique de défense actuelle tout en contribuant à renforcer le lien entre l’armée et la Nation. Mise en œuvre par la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA) avec le concours d’opérateurs, cette politique se décline en trois axes principaux :

– l’hommage au monde combattant par des actions commémoratives ;

– la transmission de la mémoire et le renforcement du lien armée-Nation au moyen d’actions pédagogiques et civiques ;

– la préservation et la mise en valeur du patrimoine mémoriel.

Les moyens budgétaires consacrés à la politique de mémoire s’élèvent à 22,2 millions d’euros pour 2016, en baisse par rapport à 2015 en raison notamment de la conclusion du cycle mémoriel du soixante-dixième anniversaire de la Seconde Guerre mondiale. Néanmoins, ces crédits permettent d’assurer un programme commémoratif encore dense puisque le cycle de commémorations 2014-2018 du centenaire de la Première Guerre mondiale se poursuit, sous la coordination du secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire.

1. La préparation d’une année riche en commémorations

L’action 2, « Politique de mémoire » du programme 167 se compose de deux opérations stratégiques (OS) : l’OS « Mémoire » et l’OS « Sépultures de guerre et lieux de mémoire » (SGLM). L’enveloppe totale pour 2016 s’élève à 22,2 millions d’euros, 2016 étant une marquante dans le cadre du centenaire de la Première Guerre mondiale.

Les crédits prévus pour l’OS mémoire financent les manifestations commémoratives des journées nationales à hauteur de 1,69 million d’euros. De plus une enveloppe de quatre millions d’euros est prévue pour financer le programme commémoratif de 2016 : en plus des onze journées nationales, les commémorations des batailles de Verdun et de la Somme auront respectivement lieu le 29 mai et le 1er juillet 2016 dans le cadre du cycle du centenaire de la Première Guerre mondiale. « Acte II » du cycle commémoratif du centenaire, 2016 donnera lieu à des événements d’ampleur internationale : outre l’enjeu que constitue la mémoire de ces batailles pour la France et l’Allemagne, la commémoration de la bataille de la Somme est un rendez-vous majeur pour le Royaume-Uni et les pays membres ou anciens membres du Commonwealth tels que l’Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande, l’Irlande et l’Afrique du Sud.

Deux comités ministériels ont été établis : « Verdun 2016 » est composé des représentants des collectivités territoriales concernées (conseil régional de Lorraine, conseil départemental de la Meuse, ville de Verdun), des services déconcentrés de l’État, l’ambassadeur d’Allemagne en France, le président de la fondation du souvenir de Verdun, le président du conseil d’administration de la mission du centenaire de la Première Guerre mondiale et le président de son conseil scientifique. Il prépare l’organisation des 300 jours de commémoration de Verdun, commençant le 21 février sur le début de l’offensive allemande et se concluant par la cérémonie présidentielle internationale le 29 mai 2016.

Le comité « Somme 2016 » accueille quant à lui, outre les représentants de l’État et le conseil départemental de la Somme, les ambassadeurs des anciens pays belligérants. Le 1er juillet 2016 devrait concentrer d’importantes cérémonies commémoratives dans la Somme dont une cérémonie franco-britannique à Thiepval, une cérémonie organisée par le gouvernement du Canada à Beaumont-Hamel ainsi qu’une cérémonie en Irlande du Nord et en Allemagne. Les cérémonies organisées par d’autres États s’étaleront sur un calendrier précis.

En tout, le budget des commémorations s’élève pour 2016 à 9,71 millions d’euros avec les 3,67 millions d’euros qui constituent le budget des subventions et des transferts permettant de contribuer au financement d’opérations de mémoire menées par des partenaires de la DMPA.

L’enveloppe de l’OS SGLM s’élève quant à elle à 12,49 millions d’euros : 1,96 million d’euros sont consacrés à la création, la rénovation et l’entretien des lieux de mémoire en France et à l’étranger et 10,53 millions d’euros recouvrent les subventions versées à l’ONAC-VG et celles destinées au « tourisme de mémoire » – terminologie que le rapporteur juge peu heureuse.

Monument OPEX : l’épilogue ?

La loi de finances pour 2013, votée en décembre 2012 par le Parlement, comprenait une enveloppe d’un million d’euros pour l’édification d’un monument en mémoire des soldats morts en opérations extérieures (OPEX).

Cette enveloppe traduisait la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre les conclusions du groupe de travail présidé par le général d’armée Bernard Thorette, qui avait été remis au ministre de la Défense et des Anciens combattants le 10 octobre 2011.

Le projet de construction a été lancé en 2012 : un appel d’offres a été lancé, un jury a été réuni le 10 décembre 2012 pour examiner les sept candidatures reçues et la commission de choix a été réunie le 29 mars 2013.

Malheureusement, malgré la qualité des projets proposés, aucune décision d’attribution n’a été prise par le ministère et l’appel d’offres a été déclaré sans suite. Les raisons invoquées étaient l’opposition des riverains au lieu d’implantation (la place Vauban, située derrière les Invalides, dans le septième arrondissement parisien) ainsi que le périmètre des opérations concernées et la notion de « Mort au service de la France en opérations extérieures », qui n’a pas de fondement juridique.

À la suite de la réflexion complémentaire sur ces trois points, confiée au général d’armée (2e section) Pierre de Percin Northumberland, le cabinet du ministre de la Défense a rendu ses premiers arbitrages concernant le lieu d’implantation, qui sera le parc André Citroën, à Paris, 15e arrondissement, le type de monument - « mur des noms » avec une éventuelle sculpture simple – ainsi que la liste des noms : seuls les « Morts pour la France » y seront inscrits.

Dans une lettre du 29 juin 2015, la maire de Paris a émis un avis favorable quant à l’installation du monument sur l’esplanade du parc André Citroën. Ce projet doit être soumis à la délibération du conseil de Paris en novembre prochain.

À ce jour, les seules dépenses engagées sont les indemnités versées aux trois candidats qui avaient présenté un projet dans le cadre du marché déclaré sans suite, soit au total 45 000 euros, l’enveloppe d’un million d’euros reste donc disponible.

2. Le renouvellement du protocole d’accord avec l’Éducation nationale

Un partenariat entre les ministères de la Défense et de l’Éducation nationale est mis en place depuis 1982 afin de sensibiliser les jeunes aux valeurs de la citoyenneté et aux enjeux de la défense. Le dernier protocole en date a été établi le 31 janvier 2007, renforcé par un protocole additionnel signé avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche.

À la suite de travaux d’évaluation de la mise en œuvre des différents protocoles, un nouveau protocole a été préparé. Plus ambitieux, il intègre, outre l’enseignement de défense et la valorisation de la recherche, la contribution à la lutte contre le décrochage scolaire, des actions en faveur de la jeunesse et de l’égalité des chances et la reconversion des militaires. Ce nouveau protocole est élargi au ministère de l’Agriculture et devrait être signé le 11 novembre 2015

Il est structuré en trois axes opérationnels :

– développer l’enseignement de défense ;

– favoriser l’insertion des jeunes par la défense et le lien entre l’armée et la Nation ;

– faciliter le recrutement du ministère de la Défense et la reconversion des militaires dans la société civile.

De plus, des actions concrètes et lisibles, regroupées autour de cinq axes d’effort seront menées et permettront de poursuivre en 2016 les actions engagées conjointement :

1) Renforcer l’enseignement de défense et la formation des enseignants. L’enseignement de défense est déjà dispensé dans les programmes scolaires des établissements du second degré et constitue la première étape du parcours de citoyenneté. Il sera ainsi renforcé et intégré à la formation initiale des enseignants dans les écoles supérieures du professorat et de l’éducation ;

2) Développer les relations entre la défense et l’enseignement supérieur. Le protocole 2015 favorise la constitution de pôles de compétence et d’excellence dans des domaines de recherche intéressant la défense et la sécurité ;

3) Participer à la lutte contre le décrochage scolaire et contribuer à la détection des jeunes en difficulté de lecture. Un effort sera mené conjointement pour moderniser les outils de détection, d’évaluation et de remédiation, pour favoriser la dématérialisation des procédures (e-recensement, accès à l’information sur téléphone mobile, plate-forme de gestion sur Internet) et les échanges de données dématérialisées ;

4) Favoriser le lien défense-jeunesse, l’égalité des chances et l’insertion professionnelle. Le protocole vise à promouvoir les partenariats (lycées de la défense, tutorat, classes de défense et de sécurité globales) et l’insertion ;

5) Favoriser la reconversion des militaires au sein du ministère de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur.

II. LE PROGRAMME 169 « RECONNAISSANCE ET RÉPARATION EN FAVEUR DU MONDE COMBATTANT »

Les crédits du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » s’élèveront en 2016 à 2,47 milliards d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, en diminution de 4,9 % par rapport à la loi de finances pour 2015.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 169

(en millions d’euros)

 
   

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

   

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01

Administration de la dette viagère

2 080,25

2 080,25

1 946,32

1 946,32

- 6,43 %

- 6,43 %

02

Gestion des droits liés aux pensions militaires d’invalidité

146,37

146,37

153,05

153,05

+ 4,56 %

+ 4,56 %

03

Solidarité

351,86

351,86

356,71

356,71

+ 1,38 %

+ 1,38  %

07

Actions en faveur des rapatriés

19,4

19,4

17,5

17,5

- 9,79 %

- 9,79 %

TOTAL

2 597,89

2 597,89

2 473,58

2 473,58

- 4,79 %

- 4,79 %

Source : Projet annuel de performances pour 2016.

A. LA RETRAITE DU COMBATTANT ET LES PENSIONS MILITAIRES D’INVALIDITÉ

L’action 1 « Administration de la dette viagère » représente l’essentiel des crédits du programme 169 car elle assure le paiement de près de 250 000 pensions militaires d’invalidité (PMI) et d’un million de retraites du combattant. Le paiement de ces deux prestations est assuré par l’intermédiaire du compte d’affectation spéciale « Pensions ». Conformément à la baisse continue du nombre de bénéficiaires, les crédits affectés à cette action s’établissent à 1,95 milliard d’euros pour 2015, soit une diminution de 6,43 % par rapport à 2015.

1. La retraite du combattant 

Les titulaires de la carte du combattant âgés de 65 ans bénéficient, en application de l’article L. 256 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, de la retraite du combattant. Le montant de cette retraite est de 48 points PMI, soit de 670,56 euros par an.

Pour 2016, le nombre de retraites du combattant en paiement est estimé à un peu plus d’un million, pour un montant de 756,60 millions d’euros, soit une diminution de 28,1 millions par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. Les hypothèses de sorties sont de 55 000 sorties brutes en 2016 contre 10 010 entrants, dont 2 010 au titre des opérations extérieures (OPEX).

La généralisation du critère de 120 jours de présence sur un théâtre pour l’attribution de la carte du combattant au titre des OPEX à partir du 1er octobre 2015, prévue par l’article 87 de la loi de finances pour 2015, ne devrait pas produire d’effets significatifs dans les prochaines années car seulement environ 1 % de la population concernée est pour l’instant en âge d’obtenir la retraite du combattant : l’âge moyen des 98 753 titulaires de la carte du combattant au titre des OPEX est en effet aujourd’hui de 33 ans.

La répartition par conflit des retraites du combattant versées est présentée dans le tableau ci-après :

RÉPARTITION DES RETRAITES DU COMBATTANT PAR CONFLIT

Conflits

Effectifs
au 31 décembre 2013

Effectifs au
31 décembre 2014

Guerre 14-18 (1)

1 522

1 441

Guerre 39-45 (2)

128 617

109 965

Algérie (+ Tunisie et Maroc)

969 263

944 500

Hors guerre (3)

29 702

29 157

Non déterminé (4)

71 081

74 104

TOTAL

1 200 185

1 159 167

(1) Les retraites du combattant de la catégorie  « guerre 14-18 » comprennent toutes les opérations de guerre avant 1939.

(2) Les retraites du combattant de la catégorie « guerre 39-45 » concernent également la guerre d’Indochine.

(3) Comprend les OPEX, ainsi que les pensions attribuées à des militaires alors qu’ils n’étaient pas sur des territoires en guerre.

(4) Correspond à des retraites payées dans les États ayant accédé à l’indépendance dont la nature du conflit n’est pas codifiée.

Source : ministère de la Défense.

La diminution du nombre de titulaires de la carte du combattant au titre de la période 39-45 est quasi-constante (- 14,03 % en 2013, - 14,5 % en 2014). Les entrées dans le dispositif, devenues très faibles, ne compensent plus les extinctions en forte hausse en raison de l’âge avancé des bénéficiaires pour cette période.

En ce qui concerne les titulaires de la carte du combattant au titre de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc, une lente diminution du nombre de bénéficiaires se vérifie (+ 2,7 % en 2013, - 2,5 % en 2014). Le nombre de nouveaux entrants ne compense plus le nombre de sortants.

La campagne double enfin accordée à tous les anciens combattants d’Afrique du Nord.

Le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord a été publié le 30 juillet 2010.

Il dispose que les appelés du contingent et les militaires d’active qui ont été exposés à des situations de combat en Algérie, au Maroc, en Tunisie, entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962, bénéficient du droit à la campagne double, prévu par le code des pensions civiles et militaires de retraite, pour toute journée durant laquelle ils ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu.

L’application du décret avait suscité un grand mécontentement au sein des associations d’anciens combattants : il n’accordait en effet le droit aux bénéfices de campagnes qu’aux seuls individus dont les pensions de retraite ont été liquidées postérieurement à la date d’entrée en vigueur de la loi du 18 octobre 1999 reconnaissant l’état de guerre en Algérie. A contrario, les anciens militaires et appelés du contingent ayant liquidé leurs pensions avant octobre 1999 n’ont pu bénéficier de la campagne double.

Si le Conseil d’État avait précisé, une décision du 9 mai 2011, qu’« il ne résultait ni des termes de la loi, ni de ses travaux préparatoires que le législateur ait entendu donner une portée rétroactive aux dispositions qu’il a édictées, seule à même de permettre la révision des pensions liquidées avant leur entrée en vigueur », le décret de 2010 n’avait aucune portée pratique : entre son édiction et le 1er juillet 2013, seuls quatre anciens combattants avaient obtenu la révision de leur pension au titre de la campagne double sur 673 dossiers déposés !

L’extension du bénéfice de la campagne double aux pensions liquidées antérieurement au 19 octobre 1999 est enfin inscrite au PLF 2016, ce dont le rapporteur se réjouit. Le coût annuel de cette mesure a été évalué à 0,6 million d’euros pour 2016 et 0,5 million pour 2017. Cette mesure n’est pas portée par les crédits de la mission « Anciens combattants » mais financée à partir du compte d’affectation spéciale « Pensions » du programme 741. Elle concernerait moins de 6 000 ayants droit et ayants cause.

2. Les pensions militaires d’invalidité

Les crédits consacrés au paiement des pensions militaires d’invalidité diminueront en 2016 de 105,83 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2015. Cette évolution est la traduction d’une hypothèse de baisse des effectifs des pensionnés de 11 558, soit de 5 %. Pour 2016, les crédits s’établiront donc à 1,19 milliard d’euros pour une population estimée à 236 753 personnes.

Ces crédits intègrent encore une fois cette année une mesure nouvelle en faveur des conjoints survivants des plus grands invalides de guerre. Le projet de lois finances initiale pour 2015 avait revalorisé de 100 points la majoration spéciale prévue à l’article L. 52-2 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre. Cette majoration spéciale compense la perte de revenu du conjoint survivant qui, en raison de soins prodigués à son conjoint avant son décès, a abandonné l’exercice d’une activité professionnelle. La durée minimale de mariage exigée pour toucher cette majoration avait en outre été abaissée de quinze à dix ans.

Le projet de loi de finances prévoit d’abaisser à nouveau la durée minimale de mariage exigée en la faisant passer de dix à cinq ans. Le coût de cette mesure est estimé à 1,9 million d’euros en 2016.

S’il se félicite que le Gouvernement continue d’avancer sur ce dossier si important, qui concerne une population mal connue et très fragile, le rapporteur s’interroge néanmoins sur la portée réelle de cette mesure nouvelle. L’abaissement de la durée minimale de mariage votée l’an passé n’a ainsi donné lieu en 2015 qu’à la majoration de trois pensions de veuves. C’est donc plutôt sur le montant des pensions de réversion qu’il faudrait se concentrer, afin que celles-ci soient plus en proportion avec le montant des pensions versées aux invalides et permettent ainsi d’éviter une chute de revenus trop brutale pour les veuves. Le groupe de travail installé par le secrétaire d’État l’année dernière sur ce sujet doit donc poursuivre ses réflexions.

La refonte du code des pensions militaires d’invalidité : point de situation

La refonte du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre a été inscrite, en tant que chantier de simplification, au programme de travail gouvernemental. Cette opération est menée par la direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de la Défense, en lien avec la Commission supérieure de codification (CSC) relevant des services du Premier ministre.

La loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019 a habilité le Gouvernement à refondre par ordonnance la partie législative du code.

Cette refonte se fait à droit constant, c’est-à-dire de façon à éliminer les dispositions du code irrégulières ou caduques, à respecter la hiérarchie des normes, à simplifier son plan et sa présentation générale, mais sans qu’il soit touché, en aucune manière, aux droits des anciens combattants.

Les travaux de refonte se font en concertation avec tous les ministères et services concernés. Dans ce domaine sensible, il est indispensable de tenir informées les associations du monde combattant et des victimes de guerre et de connaître leurs observations. Elles sont légitimement attachées au strict respect du droit à réparation et ont exprimé leur refus de toute atteinte à la spécificité du code. Le ministère s’est engagé à les associer à l’avancée des travaux pour recueillir leur avis et les rassurer sur l’objectif de la refonte.

Depuis le début des travaux, sept réunions avec les principales associations (« groupe des douze élargi ») ont ainsi été organisées sous la présidence du secrétaire général pour l’administration, la dernière réunion s’étant tenue le 20 mai 2015.

Le groupe des douze élargi est tenu informé à chaque étape importante de la procédure de refonte. Les projets de textes sont communiqués aux membres du groupe et à un groupe de travail ad hoc constitué de plusieurs associations, qui présentent en retour des observations et propositions qui sont examinées attentivement par l’administration et permettent fréquemment d’améliorer la rédaction des textes.

Le CSC devrait terminer l’examen de la partie législative du code cet automne avant qu’elle ne soit transmise au Conseil d’État. La publication de l’ordonnance devra avoir lieu avant le 31 décembre 2015 et le dépôt au Parlement du projet de loi de ratification de l’ordonnance intervenir dans les six mois suivant la parution de l’ordonnance.

B. L’ACTION SOCIALE ET LES DROITS LIÉS AUX PENSIONS MILITAIRES D’INVALIDITÉ

1. L’évolution globale des crédits

L’action 2 « Gestion des droits liés aux PMI » regroupe les prestations versées au titre des droits accessoires liés aux PMI. Sa dotation 2016 s’établit à 153,05 millions d’euros, soit une augmentation de 6,68 millions d’euros par rapport à 2015. Cette hausse s’explique principalement par des raisons de périmètre. En effet, cette action porte, à compter du PLF 2016, les crédits relatifs aux affections présumées imputables au service (APIAS) des militaires. Un transfert de 10,35 millions d’euros depuis le programme 178 vers le programme 169 a ainsi été opéré par le projet de loi de finances.

Les crédits consacrés aux soins médicaux gratuits prodigués aux pensionnés et aux appareillages des mutilés de guerre s’établissent en 2016 à 56,25 millions d’euros, en hausse de 7,95 millions d’euros par rapport à 2015. Cette hausse traduit, d’une part le transfert des crédits au titre des dépenses APIAS précitées et, d’autre part, une baisse des dépenses prévisionnelles concernant les soins et appareillages (-2,4 millions d’euros).

Les légères baisses des crédits consacrés aux remboursements transport SNCF (-0,17 million d’euros) et au financement de la section « Invalides de guerre » du régime général de l’assurance maladie (-1,1 million d’euros) sont la conséquence de la baisse des populations concernées.

L’action 3 « Solidarité » finance les majorations des rentes mutualistes, des subventions de fonctionnement versées aux fondations, œuvres ou associations d’anciens combattants et victimes de guerre ainsi que les subventions pour charges de service public à l’ONAC-VG et à l’Institution nationale des Invalides.

La dotation 2016 destinée à la majoration des rentes mutualistes auxquelles les anciens combattants peuvent souscrire s’établit à 261,7 millions d’euros, soit une augmentation de 3,4 millions d’euros par rapport à 2015. Cette hausse résulte notamment de l’augmentation du coût moyen de la majoration par bénéficiaire observée ces dernières années.

Le budget de l’action sociale de l’ONAC-VG est de 25,4 millions d’euros pour 2016, en hausse de deux millions d’euros par rapport à 2015, pour accompagner la refonte de sa politique d’action sociale (cf. infra).

L’action 7 « Actions en faveur des rapatriés » regroupe les différents dispositifs en faveur des rapatriés et harkis, notamment le financement de l’allocation de reconnaissance. La dotation 2016 s’élève à 17,5 millions d’euros, en baisse de 1,9 million par rapport à 2015, ce qui semble correspondre à l’ajustement des prévisions de dépenses d’allocation de reconnaissance aux projections démographiques de la population bénéficiaire. Elle tient compte des effets de la levée de la forclusion pour les conjoints survivants, prévue dans le projet de loi de finances 2016, dont le coût est estimé à 1,9 million d’euros (cf. supra).

2. La nouvelle politique d’action sociale de l’ONAC-VG

Dans le cadre de son contrat d’objectifs et de performance pour les années 2014 à 2018, adopté par son conseil d’administration le 20 octobre 2014, l’ONAC-VG a entrepris la mise en place d’une politique d’action sociale plus visible et plus transparente, prioritairement orientée vers les plus fragiles. Le conseil d’administration de l’Office en a approuvé les grands axes le 24 mars dernier et une circulaire viendra prochainement préciser ses modalités d’application.

Financés par une subvention de l’État, complétée par les dons et legs et les collectes au profit du Bleuet de France, les crédits de solidarité de l’Office ont pour vocation d’apporter une aide à ses ressortissants, anciens combattants, veuves et orphelins, en complément des aides de droit commun. Ces crédits sont en constante augmentation depuis 2012, puisqu’ils sont passés de 21,71 millions d’euros à 25 millions en 2015, dont 23,4 millions de subventions de l’État. Pour 2016, cette subvention sera augmentée de deux millions pour être portée à 25,4 millions d’euros.

Cette augmentation doit permettre de rééquilibrer la politique d’action sociale en faveur des plus isolés et des plus démunis de ses ressortissants, en particulier des anciens combattants. Les services de l’ONAC-VG étudient toutes les demandes des ressortissants et proposent, au vu de la situation particulière de chacun, d’attribuer l’aide qui leur paraît la plus adaptée. Celle-ci peut prendre la forme d’une aide financière ou d’une prestation de services. Les critères qui seront examinés pour accorder les aides seront précisés par la circulaire d’application.

C’est dans ce cadre que la décision a été prise de supprimer l’aide différentielle au conjoint survivant (ADCS), créée en 2007. Cette aide présentait en effet l’inconvénient d’exiger plusieurs conditions cumulatives, très contraignantes : être âgé de plus de soixante ans, justifier un niveau de ressources mensuelles inférieur à un certain seuil, résider en France. Si le critère de résidence était particulièrement fragile juridiquement, au regard du principe d’égalité, les autres étaient autant de seuils qui ne permettaient pas à l’Office d’utiliser cette ressource avec la souplesse requise : quand certaines veuves ne pouvaient entrer dans le dispositif parce qu’elles avaient 59 ans, d’autres recevaient des aides d’un montant parfois inférieur à ce qu’il aurait été souhaitable de leur accorder, le seul objectif étant d’arriver à un certain seuil de ressources.

Les crédits consacrés à cette aide, qui disposait d’une ligne budgétaire spécifique, sont désormais intégrés dans l’enveloppe financière globale de l’action sociale. Les dossiers des conjoints survivants feront donc l’objet d’un examen individuel, comme ceux des autres ressortissants.

Par ailleurs, un effort particulier sera engagé en direction de la quatrième génération du feu, celle des OPEX. L’objectif fixé par le conseil d’administration est de renforcer l’accompagnement de ces nouveaux ressortissants et tout particulièrement des militaires blessés. L’accompagnement dans la durée des blessés en opération et en service a été concrétisé par la signature de conventions de partenariat et protocoles d’accord avec l’armée de l’air, la marine nationale, l’armée de terre et le service de santé des armées.

Enfin, la mise en œuvre de cette nouvelle politique d’action sociale s’accompagne d’une professionnalisation des acteurs de la chaîne « solidarité » de l’Office. Pour venir en appui des services départementaux, des pôles de compétence thématiques seront mis en place et des assistants de service social seront désignés comme référents thématiques. Il s’agira de rendre plus visible et compréhensible l’action sociale de l’ONAC-VG, pour les partenaires institutionnels, les armées et les ressortissants. Une typologie précise des aides accordées sera également définie par la circulaire d’application ainsi que les modalités d’examen et de recours.

3. Un nouvel avenir pour l’Institution nationale des Invalides

Depuis deux ans et l’audit interministériel conjoint du contrôle général des armées, de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale des affaires sociales de juillet 2013, l’avenir de l’Institution nationale des Invalides semblait s’inscrire en pointillé. Alors que son précédent contrat d’objectifs et de performances (COP) s’était achevé en 2013, aucune décision n’avait été prise depuis pour fixer les orientations du prochain COP et ouvrir ainsi des perspectives d’avenir à l’Institution.

Les réflexions initiées par l’audit interministériel de 2013 se sont poursuivies au sein d’un groupe de travail relatif à la définition du futur projet d’établissement de l’INI qui s’est réuni à plusieurs reprises au cours de l’année 2015. Ses premiers travaux, portant exclusivement sur le projet médical de l’Institution, avaient pour objectif d’identifier les pistes d’évolutions possibles dans l’organisation actuelle de l’INI.

Le futur projet d’établissement de l’INI est aujourd’hui en phase d’achèvement et constituera, dans une seconde phase, la base de construction du prochain COP de l’Institution.

Lors de son entretien avec le rapporteur, le directeur de l’INI, le médecin général inspecteur Christian Plotton, a indiqué que ce projet était très étroitement lié au projet du service de santé des armées (SSA) pour 2020. L’objectif est de favoriser la complémentarité des deux organismes : le SSA prendra en charge les blessés lourds de retour d’OPEX tandis que l’INI interviendrait dans un second temps, en prenant en charge les blessés en phase de stabilisation et en leur proposant un projet de réhabilitation. À cette fin, le centre d’études et de recherche sur l’appareillage des handicapés (CERAH) devrait être rapatrié sur le site des Invalides.

Le plateau technique de chirurgie médullaire, dont l’activité annuelle est insuffisante, devrait être fermé au profit de la création d’un pôle de réhabilitation post-traumatique pour l’ensemble de la communauté de défense, tandis que le centre des pensionnaires serait en revanche conservé.

Tel que présenté, le projet de l’INI vise donc à proposer une prise en charge globale des blessés, grâce à une meilleure coordination de la chaîne de soins. D’importants travaux d’infrastructure vont devoir être engagés dans les trois prochaines années pour réussir la mise en place de ce projet, permettant ainsi à cette institution pluriséculaire de proposer une offre en adéquation avec la réalité des conflits contemporains.

III. LE PROGRAMME 158 « INDEMNISATIONS DES VICTIMES DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE »

Le programme 158 assure le financement des dispositifs d’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait de législations antisémites (décret n° 99-778 du 10 septembre 1999), des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites (décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000) et des orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie (décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004).

L’instruction des dossiers est réalisée par la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations (CIVS), pour les spoliations et par le département reconnaissance et réparation de l’ONAC-VG l’aide aux orphelins.

Les décisions accordant ou refusant des mesures de réparation financière sont prises par le Premier ministre. La mise en paiement est confiée à l’ONAC-VG par les trois décrets.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 158

(en millions d’euros)

   

LFI 2015

PLF 2016

Évolution

Numéro et intitulé de l’action

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01

Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation

45,75

46,05

46,17

46,47

+ 0,92 %

+ 0,91 %

02

Indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale

54,50

54,50

54,58

54,58

+ 0,15 %

+ 0,15 %

TOTAL

100,25

100,25

100,55

100,75

+ 0,5%

+ 0,5 %

Source : Projet annuel de performances pour 2016.

A. L’INDEMNISATION DES ORPHELINS DE LA DÉPORTATION ET DES VICTIMES DE SPOLIATIONS

1. L’indemnisation des victimes de spoliation

Le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999, modifié par le décret n° 2000-932 du 25 septembre 2000, a mis en place un dispositif d’indemnisation à destination des personnes, ou descendants de personnes, ayant été victimes de spoliations matérielles ou bancaires intervenues du fait des législations antisémites en vigueur en France durant la période de l’Occupation (1940-1944).

Les crédits d’intervention de cette action s’élèveront en 2016 à 6,5 millions d’euros, contre six millions d’euros en 2015 et 12 millions en 2014. Après douze années de travaux, la CIVS a en grande partie rempli sa mission et le nombre de dossiers déposés diminue chaque année (927 indemnisations accordées en 2011 pour 1 998 bénéficiaires, 201 indemnisations en 2013 pour 452 bénéficiaires, 164 indemnisations accordées au premier semestre 2015 pour 416 bénéficiaires). Le coût moyen des indemnisations accordées, qui traduit mal la grande diversité des patrimoines spoliés, et donc des indemnités versées, est de 20 000 euros.

BILAN DE L’APPLICATION DU DÉCRET DU 10 SEPTEMBRE 1999

 

Nombre de
recommandations
traitées

Nombre de
bénéficiaires
indemnisés

Coût (en millions d’euros)

2000/2001

726

1 576

13,655

2002

1 883

4 353

35,729

2003

2 117

4 719

53,378

2004

1 970

4 465

46,208

2005

2 381

5 290

44,039

2006

2 560

5 345

66,232

2007

2 712

5 565

59,337

2008

1 872

4 119

51,257

2009

1 318

3 090

27,590

2010

939

2 104

14,654

2011

927

1 998

17,220

2012

974

2 119

11,697

2013

470

972

7,792

2014

333

728

7,609

1er semestre 2015

164

416

2,270

total au 30 juin 2015

21 346

46 859

458,667

Source : services du Premier ministre.

2. L’indemnisation des orphelins de parents victimes de persécutions antisémites

Le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 a institué une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. La mesure de réparation concerne toute personne dont le père ou la mère, déporté(e) de France en raison des persécutions antisémites alors qu’elle avait moins de vingt-et-un ans, est décédé(e) ou disparu(e) en déportation.

Contrairement aux indemnisations versées aux victimes de spoliations, les montants versés aux orphelins de parents victimes de persécutions antisémites ainsi qu’aux orphelins de parents victimes d’actes de barbarie sont déterminés par des dispositions réglementaires. Les bénéficiaires ont le choix entre un capital au montant fixe de 27 440,82 euros ou une rente viagère dont le montant mensuel s’élève à 543,64 euros en 2015.

Les crédits d’intervention prévus par le projet de loi de finances s’élèvent à 37,14 millions d’euros pour 2016, correspondants à 5 555 crédirentiers attendus au 31 décembre 2015. Six nouvelles entrées dans le dispositif sont prévues pour l’exercice 2016, dont le financement devrait être couvert par les sorties du dispositif. Le coût moyen annuel par crédirentier s’élève à 6 687,76 euros.

BILAN DE L’APPLICATION DU DÉCRET DU 13 JUILLET 2000

 

Nombre de
demandes reçues

Nombre de bénéficiaires
indemnisés

Coût (en millions d’euros)

2000

12 135

4 000

24,994

2001

3 465

7 800

163,445

2002

1 072

845

50,690

2003

278

256

44,801

2004

195

201

39,789

2005

121

125

37,789

2006

112

112

38,374

2007

34

55

36,958

2008

19

18

35,722

2009

40

35

36,102

2010

44

28

36,330

2011

30

49

37,189

2012

31

22

36,475

2013

19

25

36,716

2014

14

10

36,359

Premier semestre 2015

8

6

18,330

Total au 30 juin 2015

17 617

13 587

710,063

Source : services du Premier ministre.

B. L’INDEMNISATION DES VICTIMES D’ACTES DE BARBARIE

Le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 a institué une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Le bénéfice de cette aide financière est accordé aux orphelins de déportés résistants et politiques morts en déportation, aux orphelins de personnes arrêtées et exécutées dans les conditions définies aux articles L. 274 et L. 290 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre, ainsi qu’aux personnes dont le père ou la mère a été déporté à partir du territoire national, durant l’Occupation et dans des conditions mentionnées aux articles L. 272 et L. 286.

Comme les bénéficiaires du décret du 13 juillet 2000, les bénéficiaires du décret de 2004 ont le choix entre un capital au montant fixe de 27 440,82 euros ou une rente viagère dont le montant mensuel s’élève à 543,64 euros en 2015.

Les crédits d’intervention prévus par le projet de loi de finances s’élèvent en 2014 à 54,58 millions d’euros, correspondant à une hypothèse de 7 840 crédirentiers attendus au 31 décembre 2015. 40 nouveaux dossiers sont attendus en 2016.

BILAN DE L’APPLICATION DU DÉCRET DU 27 JUILLET 2004

 

Nombre de
demandes reçues

Nombre de bénéficiaires
indemnisés

Coût
(en millions d’euros)

2004

20 755

1 999

 

2005

4 021

12 000

207,481

2006

2 260

4 736

190,561

2007

2 056

1 231

61,686

2008

1 091

496

56,653

2009

1 229

926

65,168

2010

818

507

55,839

2011

419

277

55,400

2012

583

150

53,734

2013

295

93

50,992

2014

260

54

51,270

Premier semestre 2015

110

58

26,366

Total au 30 juin 2015

33 897

22 527

875,150

Source : services du Premier ministre.

DEUXIÈME PARTIE :
LES ACTIONS EN FAVEUR DES RAPATRIÉS ET DES HARKIS

Depuis le 1er janvier 2015, l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre est le guichet unique autour duquel ont été regroupés l’ensemble des dispositifs consacrés à l’accompagnement des rapatriés et des harkis.

Ces dispositifs ont pour objectif de mettre fin à l’ensemble des difficultés liées aux conditions de réinstallation des Français de toutes origines ayant dû quitter, en raison des événements, des territoires précédemment placés sous souveraineté ou protectorat de la France. En outre, dans le cadre de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, elles contribuent également à favoriser l’intégration professionnelle et sociale des anciens membres des formations supplétives et de leurs familles.

Intégrées depuis le projet de loi de finances initiale pour 2015 aux crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », ces mesures forment un dispositif cohérent, d’un coût annuel de 17,5 millions d’euros.

I. UNE PROFONDE RÉORGANISATION DE LA GESTION DE L’AIDE EN FAVEUR DES RAPATRIÉS ET DES HARKIS

A. LA CENTRALISATION DU TRAITEMENT DES DISPOSITIFS AU SEIN DE L’ONAC-VG

Dans le cadre des mesures générales issues du plan de modernisation de l’action publique (MAP), un vaste plan d’action réformant la gestion des prestations en faveur du monde combattant, des victimes de guerre, des rapatriés et des harkis a été approuvé par le Gouvernement le 17 juillet 2013. Cette réforme structurelle avait pour principal objectif de simplifier et de raccourcir les circuits complexes de traitement des dossiers, tout en garantissant la poursuite des missions et des actions en faveur des rapatriés et anciens combattants harkis.

1. Une rationalisation des structures

La centralisation du traitement des dispositifs en faveur des harkis au sein de l’ONAC-VG est désormais chose faite.

L’article 68 de la loi de finances pour 2014 avait tout d’abord prononcé la dissolution de l’Agence nationale pour l’indemnisation des Français d’outre-mer (ANIFOM) et dévolu ses biens, droits et obligations à l’ONAC-VG. L’ANIFOM était un établissement public administratif, placé sous la tutelle du ministère des Finances, créé en 1970. Elle avait joué un rôle important dans la mise en œuvre des différentes lois d’indemnisation des rapatriés mais avait vu son activité considérablement se réduire au cours des dernières années.

Le décret n° 2014-1696 du 29 décembre 2014 a prononcé la dissolution de la mission interministérielle aux rapatriés (MIR) et transféré ses attributions à l’ONAC-VG.

Le décret n° 2014-1698 du 29 décembre 2014 portant modification de divers décrets relatifs à certaines allocations et aides en faveur des anciens membres des formations supplétives, des rapatriés et de leurs familles a, enfin, transféré à l’ONAC-VG les attributions jusqu’alors exercées par les préfets concernant la population rapatriée et les harkis.

En matière d’emplois, les compétences exercées par la MIR et l’ANIFOM ont été prises en charge, à l’échelon central de l’ONAC-VG, par deux ETP, dont un obtenu par le transfert d’un emploi en loi de finances pour 2015. À terme, trois ETP assumeront ces missions. Les compétences antérieurement exercées par les préfectures n’ont en revanche fait l’objet d’aucun transfert d’effectifs.

Le service central des rapatriés (SCR), service d’administration centrale du ministère de l’Intérieur, n’a pas encore été pleinement intégré à l’ONAC-VG : le décret n° 2014-1696 précité dispose que, dans l’exercice de ses nouvelles missions, l’Office « bénéficie du concours » du SCR. Une convention de partenariat a été signée à cette fin entre le ministère de l’Intérieur, le ministère de la Défense et l’ONAC-VG, le 6 mai 2015.

Cette convention prévoit que les personnels du SCR continuent d’exercer leur activité sous l’autorité hiérarchique du chef du service. Au terme prévu à l’article 4 de cette convention, le 31 décembre 2017, le SCR deviendra un des pôles spécialisés de l’ONAC-VG, et les agents du SCR seront transférés à l’ONAC-VG. Ils se verront proposer un droit d’option entre, d’une part, une mutation au sein du ministère de l’Intérieur et, d’autre part, une affectation à l’ONAC-VG, au titre du détachement ou de la position normale d’activité, dans les conditions de gestion et de rémunération prévues par la réglementation relative aux conditions d’exercice des fonctions en position d’activité dans les administrations de l’État.

Le service central des rapatriés

Créé en 1956, le service central des rapatriés s’est vu confier, dès sa création, une mission visant à organiser juridiquement le retour en France des personnes originaires de l’ex-Indochine, du Maroc et de la Tunisie. Au premier rang de ses attributions, figure l’application de la loi du 26 décembre 1961 relative à l’accueil et à la réinstallation des Français d’outre-mer, qui régit les conditions de reconnaissance de la qualité de rapatrié. Le SCR dispose à cet effet de l’ensemble des dossiers individuels de rapatriement, indispensables à la reconnaissance de la qualité de rapatrié. Il dispose d’un important fond d’archives, de plus de deux millions de dossiers, situé à Périgueux. Il assure également la mise en œuvre de la loi n° 85-1274 du 4 décembre 1985 portant amélioration des retraites des rapatriés. Il dispose d’un effectif de 33 agents et est situé à Agen.

2. Une simplification des procédures et des circuits

Depuis le 1er janvier 2015, la gestion de l’ensemble des dispositifs en faveur des rapatriés et des harkis et leurs familles est la suivante :

– réception des demandes auprès des services départementaux de l’ONAC-VG ;

– instruction par le service central des rapatriés ;

– prise de décision par le directeur général de l’ONAC-VG ;

– paiement par l’agent comptable de l’ONAC-VG.

Après six mois de fonctionnement, le guichet unique donne satisfaction : depuis le début de l’exercice budgétaire 2015, près de 8,2 millions d’euros d’aides diverses ont été versés au titre des différents dispositifs : allocation de reconnaissance pour les harkis, aides spécifiques aux conjoints survivants, bourses d’études, aides à la formation, subventions accordées aux associations, secours divers.

Si le rapporteur se félicite de la rationalisation des structures et de la simplification des circuits engagées depuis deux ans, il ne méconnaît pour autant pas le trouble qu’a pu susciter parmi différentes associations de harkis ou de rapatriés la perte de leurs interlocuteurs habituels. Il estime donc important qu’une place puisse leur être offerte au sein des structures permanentes de l’ONAC-VG.

B. UN PLAN EN FAVEUR DES HARKIS

Un plan d’action a été élaboré dans le cadre d’une concertation menée par le secrétaire d’État aux Anciens combattants et à la Mémoire avec les représentants des associations d’anciens supplétifs et leurs familles, au sein d’une structure permanente de dialogue, le « G12 harki ».

Présenté par le Premier ministre le 25 septembre 2014, ce plan d’action en faveur des harkis, fort de dix mesures, vise une intégration des harkis et de leurs familles à la communauté nationale. S’il est encore trop tôt pour en dresser un bilan, ce plan a soulevé de grandes attentes au sein de la communauté harki, qui attend une véritable reconnaissance de la part des pouvoirs publics depuis de trop longues années.

1. Les mesures en faveur de la reconnaissance

Au titre de la reconnaissance, le Gouvernement s’est engagé à poursuivre les efforts engagés depuis une quinzaine d’années pour faire connaître l’histoire des harkis, notamment au travers d’actions éducatives et culturelles.

Si l’action des anciens supplétifs a été longtemps méconnue, une série de mesures prises par l’État, à partir des années 2000, a contribué à conférer à cette mémoire une notoriété publique.

L’initiative la plus symbolique a été la création, en 2001, d’une journée d’hommage national, destinée à témoigner à ces anciens combattants la reconnaissance de la République pour leur engagement au service de la France et les épreuves qu’ils ont endurées. Cet hommage s’est concrétisé par l’apposition, dans des lieux emblématiques, de plaques commémoratives. La décision ayant été prise de pérenniser cet hommage, le décret du 31 mars 2003 a institué une « Journée nationale d’hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives », fixée le 25 septembre de chaque année.

Concernant l’histoire douloureuse des harkis, la République a reconnu à plusieurs reprises une part de responsabilité dans le sort qui leur fut réservé en 1962 et leur a rendu hommage à de nombreuses occasions. S’inscrivant dans cette démarche, le président de la République, dans le message qu’il a délivré le 25 septembre 2012, dans le cadre de cette journée d’hommage, a déclaré : « Il y a cinquante ans, la France a abandonné ses propres soldats, ceux qui lui avaient fait confiance, ceux qui s’étaient placés sous sa protection, ceux qui l’avaient choisie et qui l’avaient servie ».

À la suite d’un amendement parlementaire (1), le Gouvernement avait entrepris une réflexion sur la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie, des combats du Maroc et de Tunisie, créée par la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.

Le Gouvernement a alors décidé de réorienter les travaux de cette fondation. Celle-ci s’est ainsi engagée dans un vaste programme d’études consacré aux harkis, dont les premiers résultats ont été présentés lors d’un colloque de restitution (« Les harkis, des mémoires à l’histoire ») au Musée de l’armée, les 29 et 30 novembre 2013. Après une année 2014 consacrée à l’Afrique française du Nord pendant la Grande Guerre, les travaux de la fondation se sont poursuivis en 2015 grâce à la mise en place d’un centre de ressources documentaires et d’outils spécifiques d’aide à la recherche (fiches de lectures, fiches pédagogiques, publications spécialisées).

L’ensemble des études conduites par la fondation est placé sous l’autorité d’un conseil scientifique regroupant chercheurs, témoins et responsables associatifs. Ce conseil a vocation à s’élargir afin de garantir que les travaux de la fondation représentent, dans son domaine d’intérêt, « la mémoire de tous et la mémoire de tout ».

Par ailleurs, le Gouvernement a décidé de donner à l’ONAC-VG la mission de recueillir les témoignages oraux des harkis. Il a également été décidé de créer un lieu de mémoire et de recueillement au mémorial de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de Tunisie, quai Branly à Paris, de transformer en lieux de mémoire les anciens hameaux de forestage qui accueillirent plus de 10 000 harkis, conjoints et enfants de harkis après 1962, dans des conditions de vie extrêmement précaires et, enfin, d’identifier les lieux d’inhumation spécifiques des harkis et de leurs enfants morts à l’intérieur des camps et enterrés de manière anonyme. Ces initiatives doivent permettre une réelle diffusion géographique de la mémoire des harkis sur de nombreux territoires et son intégration pleine et entière à la mémoire nationale.

2. Les mesures visant à la réparation

Le plan présenté le 25 septembre 2014 par le Gouvernement comprend également des mesures visant à la réparation. Il s’agit ainsi de :

– créer des comités régionaux de concertation, composés de représentants associatifs des anciens supplétifs et de leurs proches, et destinés à faciliter et simplifier le dialogue avec l’administration ;

– informer les membres de ces comités sur l’accès au logement social et notamment le droit au logement opposable ;

– promouvoir le dispositif des emplois réservés pour les enfants de harkis auprès des trois fonctions publiques. Le bilan actuel du dispositif des emplois réservés en faveur des enfants de harkis est en effet très inégal selon les fonctions publiques concernées. Afin de l’améliorer, un effort d’information a ainsi été conduit auprès des recruteurs des fonctions publiques territoriale et hospitalière pour promouvoir ce dispositif ;

– revaloriser l’allocation de reconnaissance de 167 euros par an (pour un montant total d’un million d’euros par an) ;

– aider au rachat de trimestres de cotisation retraite pour les enfants de harkis, dont nombre ont été victimes de freins dans l’accès à la formation et à l’emploi du fait de leur hébergement dans des camps militaires. Ceux-ci bénéficieront d’une aide forfaitaire de 2 000 euros par trimestre, ce qui représente 60 % du coût moyen pour ce type de rachat. Cette aide pourra aller jusqu’à 8 000 euros par personne, pour un rachat de quatre trimestres de cotisations.

II. UN EFFORT DE LA NATION QUI S’INSCRIT DANS LA DURÉE

A. LE DISPOSITIF DE RÉPARATION EN FAVEUR DES RAPATRIÉS ET DES HARKIS

1. L’allocation de reconnaissance

L’allocation de reconnaissance, dont le régime actuel a été fixé par l’article 6 de la loi du 23 février 2005, a pour vocation d’indemniser les anciens membres des forces supplétives françaises.

Le dispositif avait été créé par la loi n° 87-59 du 16 juillet 1987 relative au règlement de l’indemnisation des rapatriés, plusieurs fois complété depuis pour, selon les mots du secrétaire d’État aux anciens combattants de l’époque, indemniser « le préjudice moral qu’ils ont subi du fait du rapatriement ».

L’article 52 de la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019 a précisé que le bénéfice de cette allocation était réservé aux personnes de statut civil de droit local, soit celles dont la situation a rendu nécessaire la création de l’allocation. La décision du Conseil constitutionnel du 4 février 2011 avait en effet censuré l’article 9 de la loi du 16 juillet 1987 qui opérait une distinction entre les personnes de droit local et les personnes de droit civil européen, c’est-à-dire les rapatriés d’origine européenne. Ces derniers ne peuvent donc plus se prévaloir de l’allocation de reconnaissance.

L’allocation de reconnaissance peut prendre trois formes :

– le versement d’un capital de 30 000 euros ;

– le versement d’un capital de 20 000 euros et d’une rente de 1 857,50 euros par an, dont le montant a été depuis revalorisé chaque année en fonction de l’évolution annuelle des prix à la consommation des ménages ;

– le versement d’une rente de 2 800 euros par an, également indexée sur l’évolution annuelle des prix à la consommation des ménages.

ÉVOLUTION DU MONTANT DE L’ALLOCATION DE RECONNAISSANCE DEPUIS 2005

 

Octobre 2005

Octobre 2006

Octobre 2007

Octobre 2008

Octobre 2009

Octobre 2010

Octobre 2011

Octobre 2012

Juillet 2013

Juillet 2014

Juillet 2015

Rente (1)

2 844

2 903

2 940

3 021

3 042

3 073

3 125

3 196

3 230

3 248

3 415

Rente et capital (1)

1 887

1 926

1 951

2 005

2 018

2 039

2 073

2 121

2 143

2 155

2 322

(1) En euros par an

Source : ministère de la Défense.

Revalorisé régulièrement, le montant de l’allocation de reconnaissance a progressé de 16 % depuis 2005 pour atteindre 2 155 ou 3 248 euros selon le cas. Elle est perçue aujourd’hui par un peu moins de 6 000 personnes, pour un coût de 15,3 millions d’euros en 2015. Depuis sa création, un peu plus de 500 millions d’euros ont été versés aux anciens supplétifs.

2. Les mesures pérennes

Des mesures pérennes s’adressent aux membres des formations supplétives et à leurs familles. Ces actions comprennent :

– l’aide spécifique aux conjoints survivants, instituée la loi n° 94-488 du 11 juin 1994, est destinée aux veuves de plus de 60 ans dont le revenu n’excède pas l’allocation aux vieux travailleurs salariés ;

– les compléments de bourses pour les enfants scolarisés et les étudiants éligibles aux bourses de l’Éducation nationale (article 10 de la loi du 23 février 2005), revalorisés chaque année en fonction de l’indice des prix à la consommation (hors tabac) ;

– les aides à la formation professionnelle, instituées par le décret n° 2013-834 du 17 septembre 2013, sont accordées aux enfants d’anciens supplétifs demandeurs d’emploi. Une prise en charge financière peut être attribuée à hauteur maximale de 90 % du coût de la formation en vue de permettre un retour immédiat à l’emploi ;

– les secours exceptionnels destinés à la sauvegarde du toit familial : le décret du 23 mars 2007 permet aux préfets la possibilité d’accorder des secours exceptionnels aux rapatriés qui n’ont pu bénéficier des précédentes mesures de désendettement et dont la propriété du toit familial se trouve menacée par les poursuites de créanciers.

3. Les autres mesures en faveur des rapatriés

Le service central des rapatriés continue d’instruire les derniers dossiers de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée (décret n° 99 -969 du 4 juin 1999) et les remises de prêts de réinstallation (article 44 de la loi de finances rectificative de 1986).

Il prend en charge des cotisations de retraites au titre de la loi du 4 décembre 1985 lesquelles sont versées aux différents organismes de retraite : caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), Ircantec, Association pour la prévoyance collective, etc.

Cette dernière mesure concerne le paiement des retraites complémentaires dues aux anciens salariés du service des eaux d’Oran et des manufactures de tabac en Algérie en application de l’article 7 de la loi de finances rectificative n° 63-1293 du 21 décembre 1963 qui fait obligation aux institutions des régimes complémentaires vieillesse d’avancer les allocations de retraites, notamment aux rapatriés salariés ayant cotisé en Algérie.

Des subventions aux associations d’anciens membres des formations supplétives peuvent être attribuées selon les critères par le décret n° 2013-834 du 17 septembre 2013 et l’arrêté du 21 novembre 2013 en fixe le plafond réglementaire. Enfin, des secours exceptionnels peuvent être attribués au titre des dispositions de la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 relative à l’accueil et à la réinstallation des Français d’outre-mer et du décret n° 62-261 du 10 mars 1962.

B. DES DROITS MAINTENUS ET AMELIORÉS EN 2016

1. Des droits maintenus

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit le maintien de l’ensemble des mesures en faveur des rapatriés et des harkis. Sa dotation de 17,5 millions d’euros marque l’engagement des pouvoirs publics à maintenir le niveau des prestations et à reconnaître leur action, leur courage et leur engagement pendant la guerre d’Algérie. L’ensemble des crédits est regroupé au sein de l’action 7 du programme 169.

L’allocation de reconnaissance constitue la principale dépense de cette action puisqu’elle représente, avec 15,3 millions d’euros inscrits pour 2016, 87 % de ces crédits.

Les crédits consacrés aux dispositifs en faveur des rapatriés sont stables. Ils comprendront 2,2 millions d’euros et serviront au désendettement des rapatriés installés (0,6 million d’euros), au versement d’aides à la formation, par le biais de compléments de bourses scolaires ou universitaires (0,3 million), des aides à la formation professionnelle (0,16 million), des aides spécifiques aux conjoints survivants (0,3 million), des remboursements de cotisations de retraites complémentaires (0,4 million), des mesures de sauvegarde du toit familial (0,2 million) et enfin des subventions aux associations de harkis (0,24 million).

2. La levée de forclusion pour les conjoints survivants

La dotation pour l’allocation de reconnaissance fera l’objet d’une mesure nouvelle en 2016.

Depuis décembre 2014, date de l’expiration du délai d’un an suivant l’entrée en vigueur de la loi de programmation militaire pour les années 2014 à 2019, le bénéfice de cette allocation n’est en effet plus ouvert, ni aux ayants droit, ni à leurs conjoints ou ex-conjoints survivants. Le PLF prévoit donc la levée de cette forclusion pour ces derniers.

Les conjoints ou ex-conjoints non remariés disposeront ainsi d’un délai d’un an, selon le cas, à compter de la publication de la loi de finance pour 2016, ou à partir du décès de l’ayant droit pour formuler leur demande d’allocation sous forme d’une rente unique. Le coût de cette mesure est estimé à 0,74 million d’euros en 2016.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE M. JEAN MARC TODESCHINI, SECRÉTAIRE D’ÉTAT CHARGÉ DES ANCIENS COMBATTANTS ET DE LA MÉMOIRE

La commission de la Défense nationale et des forces armées a entendu M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État chargé des Anciens combattants et de la Mémoire, sur le projet de loi de finances pour 2016 (n° 3096), au cours de sa réunion du mardi 6 octobre 2015.

Mme la présidente Patricia Adam. Mes chers collègues, je suis heureuse d’accueillir aujourd’hui M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire, sur le projet de loi de finances pour 2016. Je vous laisse d’autant plus volontiers la parole que vous avez, me semble-t-il, de bonnes nouvelles à nous annoncer, monsieur le secrétaire d’État.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État chargé des Anciens combattants et de la Mémoire. Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je me réjouis que nous puissions échanger sur ces sujets qui nous préoccupent tous, puisqu’ils sont ceux de la juste reconnaissance et de la réparation à l’égard des anciens combattants et victimes de guerre.

Je connais les attentes des associations et j’ai engagé avec elles, dès mon arrivée, un dialogue régulier et confiant. J’étais la semaine dernière, au lendemain de la présentation du projet de loi de finances pour 2016 en conseil des ministres, face aux membres du G12 « anciens combattants » pour leur exposer les grandes lignes budgétaires. Naturellement, je connais aussi vos attentes : j’ai été moi-même parlementaire et je sais quelles peuvent être les revendications des associations dans les territoires, mais aussi quels sont les enjeux de la politique de mémoire dans nos régions.

Le projet de budget que je suis venu vous présenter est le résultat de choix politiques, mais aussi budgétaires. Des choix assumés, et qui constituent le résultat de plusieurs mois de réflexion et de travail avec l’ensemble des associations ayant participé aux groupes de travail que j’ai maintenus – pour ceux mis en place par mon prédécesseur, Kader Arif – ou mis en place à mon entrée en fonction. Ce travail de concertation est pour moi une priorité. Je tiens à maintenir un dialogue constructif avec l’ensemble des associations d’anciens combattants, de harkis et rapatriés et des soldats de retour d’OPEX.

C’est un budget ambitieux que je suis venu vous présenter. Le ministre des Finances et des comptes publics et le secrétaire d’État chargé du budget ont exposé mercredi dernier les lignes directrices du projet de loi de finances pour 2016 en conseil des ministres, et présenté les différentes priorités de ce budget qui poursuit les efforts de réduction du déficit public engagés depuis 2013.

En ce qui concerne les programmes de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » relevant de ma responsabilité, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit un budget total à hauteur de 2,51 milliards d’euros, soit une diminution de 4,9 % par rapport à 2015, strictement liée à la baisse naturelle du nombre de bénéficiaires.

Non seulement ce budget préserve et consolide intégralement les droits des anciens combattants en maintenant l’ensemble des dispositifs budgétaires et fiscaux, mais il va au-delà. Dès mon entrée en fonction il y a près d’un an, j’ai pris des engagements face aux parlementaires, dans le cadre de l’examen du budget au Sénat – mon prédécesseur l’ayant pour sa part présenté à l’Assemblée nationale. J’ai alors indiqué vouloir concentrer mon action sur les anciens combattants eux-mêmes, ainsi que sur les ressortissants de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) les plus démunis.

Aujourd’hui, notre projet témoigne que ces engagements sont tenus. Le PLF 2016 intègre ainsi quatre mesures nouvelles qui sont destinées à consolider le droit à réparation, dans un souci de justice sociale et d’équité.

La première mesure consiste en l’extension du bénéfice de la campagne double pour les anciens combattants d’Afrique du Nord, militaires d’active et appelés du contingent, agents de la fonction publique et assimilés, dont les droits à pension ont été liquidés avant 1999. Environ 5 500 personnes pourront bénéficier de cette mesure d’équité, qui était une revendication très ancienne des associations, à laquelle il était temps de répondre – ses modalités ont été discutées dans le cadre d’un groupe de travail auquel elles ont participé. Je connais particulièrement bien le sujet, puisque j’ai eu l’honneur d’être le chef de cabinet du secrétaire d’État chargé des anciens combattants, Jean-Pierre Masseret, qui a fait voter en 1999 la proposition de loi ayant pour objet de substituer l’expression « guerre d’Algérie » à celles qui prévalaient auparavant – notamment celle d’« événements d’Algérie ».

J’ai également tenu à ce qu’un effort financier conséquent soit fait en faveur des plus démunis. C’est ainsi que la politique sociale de l’ONACVG se trouve renforcée : deux millions d’euros supplémentaires y sont consacrés, ce qui représente une augmentation de 26 % depuis 2012. Cet effort financier accompagne la refonte totale de la politique d’action sociale de l’ONACVG, adoptée par le conseil d’administration de l’Office le 27 mars dernier, et qui vise à améliorer dans un cadre légal la situation des plus démunis, des plus fragiles et des plus isolés.

Cette augmentation permettra notamment de mettre en œuvre un dispositif élargi adapté à la situation de chacun, fondé sur des critères de vulnérabilité et non plus au vu des seuls revenus, en substitution du dispositif d’aide différentielle au conjoint survivant (ADCS). C’est en effet la vocation première de l’ONACVG que d’être à l’écoute de l’ensemble de ses ressortissants, de les accueillir, de les informer, de les soutenir financièrement et moralement au quotidien.

La troisième mesure concerne les conjoints et ex-conjoints survivants d’anciens membres des formations supplétives touchés par la forclusion des demandes d’allocations de reconnaissance, qui vont bénéficier d’un nouveau dispositif d’aide. C’est le témoignage de la poursuite des efforts menés pour exprimer la reconnaissance de la Nation à l’égard des harkis et de leurs familles. Notre volonté de reconnaissance et de réparation a trouvé une traduction concrète dans le plan « harkis » annoncé par le Premier ministre il y a un an, dont je présenterai un premier bilan en conseil des ministres demain. Je précise que l’ensemble des dispositifs du plan « harkis » est mis en place au terme de cette première année, et que des pistes d’amélioration de certains dispositifs, notamment pour l’accès au logement et à l’emploi, sont d’ores et déjà identifiées.

Enfin, j’ai tenu à continuer le travail entrepris en faveur des conjoints survivants des grands invalides de guerre, qui se trouvent parfois dans des situations difficiles, appelant des réponses de notre part. C’est pourquoi le dispositif de majoration spéciale prévu à l’article L. 52-2 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) a été revalorisé dans le cadre de la loi de finances initiale 2015 de cinquante points au 1er janvier dernier, puis de cinquante points supplémentaires au 1er janvier prochain, ce qui représente une augmentation totale de 116 euros nets par mois – près d’un SMIC mensuel par an.

Au terme de l’examen budgétaire du PLF 2015, soucieux, là encore, d’employer la méthode de la concertation, j’ai souhaité maintenir le groupe de travail mis en place quelques mois auparavant, autour duquel une véritable dynamique s’était créée. Ce groupe s’est réuni en mai dernier afin d’identifier les mesures les plus favorables et d’étudier les possibilités de renforcement de la politique de réparation vis-à-vis des conjoints de grands invalides.

Aujourd’hui, le PLF 2016 prévoit d’élargir au plus grand nombre de bénéficiaires cette majoration spéciale, qui vient compenser la perte de revenu du conjoint survivant ayant abandonné ou réduit son activité professionnelle en raison des soins prodigués à son conjoint grand invalide avant son décès. La majoration sera appliquée désormais progressivement dès cinq ans de soins, avec un lissage de l’effet de seuil, contre dix ans depuis la LFI 2015 et quinze ans auparavant. Cette mesure devrait toucher jusqu’à 40 % des veuves des plus grands invalides de guerre selon nos estimations. Je sais que certains auraient souhaité voir privilégier une autre approche, mais c’était pour moi une priorité de pouvoir faire profiter de ce dispositif un plus grand nombre de bénéficiaires pour une plus grande justice, dans un contexte budgétaire contraint. C’est une mesure forte, signe de notre volonté de reconnaissance et de réparation à l’égard de cette population.

Pour ce qui est du monde combattant, je voudrais dire un mot de la nouvelle génération. Permettez-moi, quelques jours après la remise des premières croix du combattant aux côtés du ministre de la Défense, au titre des 120 jours de présence sur un théâtre d’opérations extérieures, d’avoir une pensée pour tous nos soldats engagés aujourd’hui en Afrique et au Moyen-Orient. Ils portent haut les couleurs de la France, veillent sur la sécurité de nos concitoyens et honorent l’héritage de nos anciens combattants. Dans chacun de vos départements, selon les termes de la circulaire que j’ai adressée aux préfets, une cérémonie est organisée pour la remise de ces cartes du combattant. Vous le savez, la généralisation du critère des 120 jours, décidée en loi de finances 2015, est financée dans ce budget pour 2016. Cette mesure devrait bénéficier à terme à près de 150 000 personnes.

Nos combattants d’aujourd’hui méritent une reconnaissance au même titre que les combattants d’hier. Ils doivent pouvoir également bénéficier des structures d’aide, d’accueil et d’accompagnement du monde combattant. Cela me conduit à évoquer le maintien des structures d’aide et d’accueil, à commencer par l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, dont le centenaire en 2016 est l’occasion de rappeler son importance, notamment en termes de maillage territorial.

Les services départementaux sont un relais indispensable dans nos territoires de la politique de reconnaissance et de réparation, mais aussi de la politique de mémoire. Le contrat d’objectifs et de performances (COP) signé en 2015 traduit ma volonté de renforcer ce maillage. Par ailleurs, ce COP permet d’accompagner l’Office dans l’élargissement de ses compétences. Je pense bien sûr à l’accueil des nouveaux publics : aux harkis et rapatriés, dont il est devenu le guichet unique – en témoigne l’implication forte des services départementaux dans la mise en place du plan « harkis » –, mais aussi aux soldats d’aujourd’hui, bénéficiaires depuis peu de la carte du combattant.

L’Institution nationale des Invalides (INI) est également un sujet qui préoccupe beaucoup les anciens combattants, je le sais. C’est pourquoi j’en ai fait un dossier prioritaire dès mon arrivée au ministère. J’ai reçu le 25 novembre les partenaires sociaux, puis rencontré la gouvernance de l’INI, le directeur du service de santé des armées et les personnels sur site au mois de décembre – et j’ai encore reçu le général Plotton, directeur de l’INI, ce matin même. L’INI est une institution de référence, dont l’avenir doit être garanti. Je m’y emploie avec force, et je soutiens un projet de pérennisation de l’institution, afin qu’elle s’inscrive en complémentarité avec les autres structures du parcours de soins, et continue d’offrir des prestations de grande qualité aux anciens combattants, pensionnaires et blessés en opérations.

Enfin, nous avons décidé de consolider la politique de mémoire ambitieuse initiée ces dernières années par la rencontre exceptionnelle de deux cycles commémoratifs, afin de faire face aux défis de l’année mémorielle 2016 et de l’enjeu de transmission. Les crédits alloués à la politique de mémoire sont globalement stabilisés à 22,2 millions d’euros. L’année 2016 promet d’être une grande année commémorative, notamment avec le centenaire des batailles de Verdun et de la Somme. J’ai mis en place, dès la fin de l’année 2014, deux comités de pilotage afin de préparer ces commémorations en associant l’ensemble des partenaires locaux et étrangers – je pense aux pays ayant participé à ces batailles. Je me suis rendu la semaine dernière à Londres, afin de m’entretenir avec le ministre de la Culture britannique, dont les services œuvrent depuis plusieurs mois, en étroite collaboration avec la Mission du centenaire, à la préparation des commémorations de la bataille de la Somme qui vont avoir lieu le 1er juillet, mais aussi tout au long de l’année 2016.

J’ai aussi rencontré à cette occasion les acteurs britanniques du tourisme, comme j’avais rencontré quelques jours auparavant les professionnels allemands à Verdun. Je souhaite en effet faire du développement du tourisme de mémoire – dont l’enveloppe budgétaire est consolidée à 1,65 million d’euros – un axe fort de ma politique de mémoire. De ce point de vue, il est à noter que la fréquentation des principaux lieux de mémoire a augmenté de presque 50 %.

À l’heure où les témoins de la Grande Guerre ont disparu et où ceux de la Seconde Guerre mondiale, particulièrement mis à l’honneur dans toute la France en 2015, notamment à travers la remise des légions d’honneur le 8 mai dernier, disparaissent à leur tour, le ministère de la Défense se doit s’inscrire dans la postérité, donc dans la pierre, le souvenir de l’engagement de ces femmes et de ces hommes. Les lieux de mémoire, qui font vivre l’histoire de France dans toutes nos régions, sont autant de lieux d’apprentissage et d’éveil à la citoyenneté. Une enquête Ipsos réalisée en septembre 2014 dans trente et un pays révèle que 38 % des 16-29 ans estiment que la visite des lieux de mémoire est le meilleur moyen de transmettre l’histoire.

Une enveloppe de 10,64 millions d’euros est prévue en 2016 pour l’entretien, la rénovation et la valorisation culturelle et touristique des nécropoles nationales et des hauts lieux de la mémoire nationale. Depuis près d’un an, je me déplace sur ces lieux de mémoire. J’étais encore le mois dernier au mémorial du Mont-Faron à Toulon, un an après l’annonce de sa refonte par le Président de la République ; au Hartmannswillerkopf pour inaugurer un chantier de jeunes apprentis franco-allemands ; ou encore à Navarin pour le centenaire de la deuxième bataille de Champagne. Ce matin même, je me suis rendu à Bobigny pour soutenir le projet d’aménagement de l’ancienne gare de déportation, d’où 22 400 juifs de France ont été conduits à Auschwitz.

Partout, j’ai rencontré et échangé avec des jeunes qui se nourrissent de ces lieux. Des lieux qui valent plus que certains discours et certains manuels d’histoire, et qui continuent de nous parler quand tous les témoins se sont tus. C’est pourquoi, au-delà d’une volonté personnelle de faire vivre notre histoire et nos mémoires sur l’ensemble du territoire, c’est, pour le ministre que je suis, une responsabilité importante que celle consistant à préserver ces lieux. Responsabilité face à notre patrimoine de pierre, celui de la France. Responsabilité aussi face aux jeunes générations, qui doivent affronter l’histoire pour aborder l’avenir avec l’esprit de résistance dont aucune société ne saurait se passer. Autour de cette mémoire de pierre doit se nouer un véritable maillage social et intergénérationnel. Les moments d’échanges et de partage sont un vecteur essentiel du lien armée-nation et de l’esprit de défense auprès des plus jeunes.

Ce lien se renforce aussi autour de la journée défense et citoyenneté (JDC), qui accueillera près de 800 000 jeunes en 2016. Avec près de 225 000 fiches de liaison transmises aux armées, l’attrait des jeunes pour les métiers de la défense est à la hausse depuis la mise en place d’une JDC rénovée, c’est-à-dire recentrée sur le volet défense et les différentes formes d’engagement et engagée dans la révolution numérique. Elle doit être l’occasion de développer auprès des jeunes, encore à l’aube de leur citoyenneté, une véritable culture de défense.

Telles sont les grandes lignes de ce budget. Elles traduisent financièrement l’ensemble des priorités que je me suis fixé, à savoir consolider les droits des anciens combattants et victimes de guerre, dans un souci de justice sociale et d’équité ; concentrer mon action sur les anciens combattants eux-mêmes et sur les ressortissants de l’ONACVG les plus démunis ; travailler de concert avec les représentants des associations ; enfin, maintenir une politique de mémoire volontariste et ambitieuse.

Elles traduisent aussi des engagements pris devant vous et devant le monde combattant dès mon entrée en fonction. Je vous remercie de votre attention et me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.

M. Jean-David Ciot, rapporteur pour avis. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, pour ce budget qui est financièrement à la hauteur de ce que nous attendions. J’aimerais que vous nous apportiez quelques précisions quant aux moyens alloués à la journée de citoyenneté, dont l’importance a été mise en relief par les événements survenus en janvier. En matière de solidarité, plus particulièrement à l’égard des conjoints de grands invalides, des efforts ont été accomplis sur la base d’un élargissement des bénéficiaires : pouvez-vous nous indiquer sur quels critères il a été procédé à cet élargissement ?

Je me félicite de constater que la promesse faite de longue date au sujet de la campagne double est enfin tenue. Pouvez-vous nous confirmer que les mesures correspondantes seront mises en place au cas par cas et à la demande, et non généralisées comme certains l’imaginent peut-être ?

Pour ce qui est des conjoints survivants de harkis et de formations supplétives, il serait intéressant que vous nous précisiez le détail du nouveau système d’aide mis en place.

Enfin, je veux dire ma satisfaction de voir le montant des crédits alloués à la politique mémorielle rester à un niveau extrêmement élevé, ce qui permet de respecter les engagements pris précédemment.

M. Razzy Hammadi, rapporteur de la commission des Finances. Ma première question porte sur les dépenses fiscales, notamment le montant de ces dépenses, qui croît régulièrement : il est estimé à 789 millions d’euros pour 2016, ce qui représente près du tiers des crédits budgétaires du programme 169, contre une estimation de 505 millions d’euros dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013. La cause principale de cet alourdissement est l’arrivée à l’âge de 75 ans des anciens combattants d’Algérie, âge à partir duquel ils peuvent bénéficier d’une demi-part fiscale supplémentaire. Le ministère réfléchit-il à un mode de répartition moins injuste, c’est-à-dire plus équitablement réparti, de l’effort de réparation consenti au profit des anciens combattants ? Il me semble que la carrière après le retour du front fait partie des éléments à prendre à compte.

Ma seconde question porte sur l’avancement du projet de monument aux morts en OPEX, qui devait primitivement être érigé place Vauban. Pouvez-vous nous dire où en est ce projet ?

M. le secrétaire d’État. Pour ce qui est de la journée de citoyenneté, évoquée par M. Ciot, la JDC rénovée est en place depuis peu de temps et il n’est pas prévu d’y apporter des changements substantiels à brève échéance. Seul un module de sensibilisation à la sécurité routière sera mis en place à partir de 2016. Le budget pour 2016 s’établit à 15,3 millions d’euros, la diminution par rapport à 2015 s’expliquant par un transfert de crédits vers le programme 212 de la mission « Défense » pour financer le système d’information PRESAJe, mais cela n’implique pas de changement de format pour la JDC, et je ne souhaite pas que l’on aille piocher dans ce programme pour financer d’autres mesures. Avec ce qui se passe actuellement dans notre pays, les jeunes ont besoin de la journée de citoyenneté. Bien sûr, des améliorations de la JDC sont possibles, mais il serait dommage que l’on en vienne à réduire ses crédits.

Le Président de la République a décidé de mettre en place le service militaire volontaire (SMV), dont les premiers stagiaires seront accueillis à compter du 15 octobre prochain dans trois centres, dans le cadre d’une expérimentation prévue pour deux ans, financée sur le budget du ministère de la Défense. Cette expérience, calquée sur le modèle du service militaire adapté qui fonctionne depuis très longtemps dans les outre-mer, semble très intéressante pour les jeunes non formés, qui vont se voir offrir des propositions de stages et de formations par des entreprises locales demandeuses de main-d’œuvre – les territoires devraient donc également y trouver leur compte.

En ce qui concerne les veuves de grands invalides de guerre, j’ai expliqué que mon choix consistait à aider le plus grand nombre de ces veuves ayant interrompu leur activité professionnelle pour s’occuper de leur conjoint invalide, plutôt que de servir ce qui ressemble parfois à des rentes de situation – même si je n’aime guère cette expression – à des veuves dont le niveau de vie n’est pas plus détérioré que celui d’autres catégories de nos compatriotes. Nous sommes donc allés dans le sens d’un élargissement du nombre de bénéficiaires : alors qu’il y a un an, la majoration spéciale était versée à partir de quinze ans d’interruption de l’activité professionnelle, nous sommes passés à dix ans en 2015, puis avec le PLF 2016 à un versement progressif à partir de cinq puis sept ans, afin de pallier les effets de seuil. Ainsi, 40 % des veuves de très grands invalides devraient bénéficier de cette mesure qui vient s’ajouter aux deux majorations de cinquante points chacune que j’ai citées précédemment. C’est une satisfaction pour moi que d’avoir pu trouver une traduction budgétaire aux propositions qui m’avaient été faites à ce sujet.

Jusqu’à présent, le bénéfice de la campagne double ne s’appliquait qu’aux personnes dont les pensions de retraite avaient été liquidées à compter de 1999. Toute la difficulté de l’extension aux personnes dont les droits à pension ont été liquidés avant cette date réside dans la nécessité de rouvrir les dossiers qui avaient été clos. J’ai trouvé une oreille attentive auprès du secrétaire d’État au budget, grâce à qui j’ai pu finaliser cette proposition issue d’un groupe de travail mis en place avec des associations d’anciens combattants. La mesure n’a pas d’effet rétroactif, et l’on applique le dispositif existant à chaque personne demandant la réouverture de son dossier – mais je pense que, dès lors que la mesure sera définitivement adoptée par le Parlement, les associations d’anciens combattants feront leur travail d’information auprès de leurs adhérents.

Les conjoints de harkis touchés par la forclusion, depuis 2014, des demandes d’allocations de reconnaissance, étaient victimes d’une injustice que la mesure d’équité qui est proposée a pour objet de réparer avec la mise en place d’une aide spécifique. Je précise qu’il n’est pas laissé le choix entre le versement d’une rente et celui d’un capital : ce sera obligatoirement une rente, car le conjoint peut avoir touché un capital par le passé.

La politique mémorielle est un sujet important à l’heure où les témoins de la Seconde Guerre mondiale sont de moins en moins nombreux.

M. Hammadi m’a interrogé, au nom de la commission des Finances, sur la dépense fiscale. Il n’a pas été mené de réflexion sur une réforme visant à plus de justice fiscale, et je ne serai pas le ministre qui rouvrira le dossier de la fiscalité. Le rapport Marini est au fond d’un tiroir, et je ne souhaite pas donner à certains l’idée de l’en ressortir.

M. Philippe Vitel. Qu’il y reste, dans le tiroir !

M. le secrétaire d’État. Le problème, c’est qu’il y aura toujours des personnes cherchant à le ressortir. Si aujourd’hui, je suis interpellé par des veuves qui ne peuvent bénéficier de la demi-part fiscale parce que leur mari n’en a pas bénéficié lui-même, il est tout à fait exclu d’ouvrir de nouvelles dépenses fiscales dans le contexte actuel, et je ne le proposerai donc pas.

Pour ce qui est du mémorial OPEX, une mission avait été confiée au général Bernard Thorette en 2011, qui avait conclu à l’impossibilité de faire ériger le monument aux Invalides. Quant au projet de le situer place Vauban, il s’est heurté à l’opposition des riverains, ce qui fait qu’il a finalement été décidé de l’installer dans le parc André-Citroën, à proximité du nouveau site du ministère de la Défense à Balard. Le financement est prévu, le seul problème réside dans le fait que les architectes et paysagistes ayant aménagé le parc André-Citroën ont la propriété intellectuelle de leur création. De ce point de vue, je me heurte à des problèmes qu’il me faut régler avec l’aide de la Mairie de Paris, seule habilitée à dialoguer avec les aménageurs. En dépit de cet obstacle, j’espère finaliser le projet durant l’année 2016, avec un cahier des charges acceptable par les créateurs.

M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai étudié votre budget avec une grande attention, et je me suis aperçu qu’il était en diminution de 129 millions d’euros, soit 5 %, par rapport au budget 2015. Il y a 5 millions d’euros, soit presque 12 % en moins pour le programme 167 « Lien entre la nation et son armée ». À l’heure où la France est en guerre en de nombreux points du globe, comment développer l’esprit de défense avec un budget en diminution ? Comment faire connaître aux jeunes les différentes possibilités d’engagement au sein de notre défense ?

Pour ce qui est du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », on note une diminution de 124 millions d’euros, soit 5 %. Le budget des Anciens combattants ne comporte aucune grande mesure nouvelle, à part l’extension du bénéfice de la campagne double, qui est une excellente proposition. Votre budget ne contient aucune mesure de revalorisation de la valeur du point de pension militaire d’invalidité (PMI), alors qu’il s’agit là de la revendication principale du monde combattant. J’ai eu la surprise de lire, en page 77 de la plaquette de présentation du budget 2016 du ministère de la Défense, que « par le biais du mécanisme du rapport constant, les PMI, la retraite du combattant (RC) et le plafond majorable des rentes mutualistes (RM) continueront à bénéficier de revalorisations proportionnelles à celles des rémunérations dans la fonction publique » – autant dire zéro, puisque les rémunérations des fonctionnaires sont gelées depuis plusieurs années ! Un tel budget ne peut donc me satisfaire, monsieur le secrétaire d’État.

Comme je le dis chaque année, à budget constant et compte tenu du nombre de disparitions annuelles d’ayants droit – environ 60 000 par an –, il me semble qu’en quelques exercices, nous pourrions répondre légitimement aux revendications des anciens combattants.

M. Joaquim Pueyo. Monsieur le secrétaire d’État, ma collègue Marianne Dubois et moi-même travaillons actuellement à la rédaction d’un rapport d’information sur les dispositifs citoyens du ministère de la Défense, en nous intéressant notamment au lien entre l’armée et la Nation, ainsi qu’à la réserve. À cet égard, nous proposons la mise en place d’un parcours citoyen qui favoriserait l’engagement de la jeunesse, la participation des écoliers, collégiens, lycéens et élèves des établissements publics d’insertion de la défense (EPIDE), afin de vivifier les cérémonies patriotiques, qui ne peuvent plus guère s’appuyer sur la présence des vétérans. Êtes-vous favorable à un renforcement de la réserve et des cadets de la défense – ces derniers étant en nombre très réduit en France, alors qu’on en compte plus de 7 000 au Canada ?

Par ailleurs, la politique mémorielle est également un enjeu économique. Les grandes commémorations constituent des événements internationaux qui drainent une population importante lors des cérémonies, mais aussi dans la durée, comme j’ai pu le constater en tant que député du département de l’Orne, qui se trouve tout près des plages du débarquement. J’ai appris avec un grand intérêt que la Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la Défense, ainsi que la Direction générale des entreprises, réunissaient l’ensemble des acteurs publics qui font vivre la filière du tourisme de mémoire en France à l’occasion des Rencontres du tourisme de mémoire 2015, qui se tiendront le 26 novembre prochain à l’École militaire de Paris. Je crois savoir qu’il vous reviendra l’honneur de clore la matinée consacrée à deux questions dont notre commission pourrait, me semble-t-il, s’emparer : d’une part, quel est l’impact touristique du cycle commémoratif sur les territoires, d’autre part, comment pérenniser la fréquentation touristique des lieux de mémoire ?

Enfin, le tourisme de mémoire présente indéniablement une dimension universelle qui favorise l’amitié entre les peuples. Aussi, je souhaite que nous puissions comparer notre politique en la matière avec celles mises en œuvre ailleurs en Europe et dans le reste du monde.

M. Jean-Michel Villaumé. En ce qui concerne la politique mémorielle, deux manifestations à caractère exceptionnel sont prévues pour 2016, à savoir la commémoration de la bataille de Verdun – le 29 mai – et celle de la Somme – à compter du 1er juillet. Ces événements s’inscrivent dans le cycle de commémorations organisées à l’occasion du centenaire de la grande guerre, qui va se poursuivre jusqu’en 2018.

En 2014, les cérémonies officielles, notamment le soixante-dixième anniversaire du débarquement en Normandie, ont été marquées par un grand afflux de visiteurs tout au long de l’année : la fréquentation touristique s’est accrue de 42 % par rapport à l’année précédente. En 2015, nous avons encore vécu une séquence mémorielle exceptionnelle, à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la Seconde Guerre mondiale et de celui de la libération des camps.

Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous dresser un premier bilan de l’année 2015 et des retombées touristiques des commémorations qui ont eu lieu ? On peut penser que les manifestations prévues dans la Somme et la Meuse en 2016 vont également être profitables au tourisme mémoriel dans ces départements : êtes-vous en mesure de nous donner une estimation de l’impact touristique de ces événements ? Enfin, selon vous, de quelle manière pourrions-nous pérenniser la fréquentation touristique des lieux de mémoire et développer la mise en valeur du patrimoine mémoriel, en association avec les collectivités territoriales associées à l’organisation de ces manifestations ?

M. Daniel Boisserie. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez annoncé des mesures positives au bénéfice des conjoints survivants de grands invalides de guerre. Les veuves – seules des femmes sont en effet concernées par cette mesure – font valoir que l’amélioration dont il est ici question est tout à fait limitée, puisqu’elle ne concernerait qu’une vingtaine de personnes. Je souhaite que, d’ici à la deuxième lecture, vous nous produisiez une simulation des effets de cette mesure, afin de nous permettre d’y voir clair.

Par ailleurs, je veux évoquer le village martyr d’Oradour-sur-Glane. Comme je l’ai déjà fait dix ou quinze fois auprès de vos prédécesseurs, je sollicite l’appui du ministère chargé des Anciens combattants afin d’entreprendre auprès du ministère de la Culture une démarche visant à ce que quelque chose soit fait pour Oradour. Comme vous le savez, le village, qui est propriété de l’État, est en fort mauvais état : des murs menacent de s’effondrer, ce qui constitue un danger particulièrement préoccupant à un moment où le nombre de visiteurs est en forte hausse. Or, la responsabilité d’un éventuel accident incomberait partiellement à l’État, mais aussi au maire de la commune. Je sais que le projet consistant à entreprendre des travaux de sauvegarde du site est complexe et coûteux, mais j’insiste sur le caractère unique d’Oradour, et la nécessité de ne pas oublier ce qui s’y est passé.

M. Philippe Vitel. Je reprends cette année la métaphore du verre aux trois quarts vide que j’avais employée l’année dernière pour qualifier le budget des Anciens combattants, monsieur le secrétaire d’État.

Pour ce qui est du quart plein, je suis d’accord avec vous sur trois points. Premièrement, je vous rejoins sur la nécessité de laisser le rapport Marini au fond de son tiroir – et vous assure de la volonté des députés de l’opposition ici présents de l’y maintenir après l’alternance qui aura lieu en 2017. Deuxièmement, nous nous félicitons que vous soyez venu à bout de ce serpent de mer qu’était l’extension du bénéfice de la campagne double aux pensions liquidées avant le 19 octobre 1999, désormais acquise. Troisièmement, à titre personnel, je rejoins mon collègue toulonnais Razzy Hammadi pour vous dire ma satisfaction de voir le mémorial du Mont-Faron rénové, ce qui contribuera à donner au débarquement de Provence toute l’importance qu’il mérite, et qui ne lui est pas toujours suffisamment reconnue par rapport au débarquement de Normandie.

J’en viens aux trois quarts vides, à savoir les interrogations que m’inspire votre budget. La majorité a voté une programmation triennale prévoyant une diminution globale des crédits de 150 millions d’euros en 2015 – sur ce point, vous avez tenu parole –, suivie de deux autres diminutions : l’une de 114 millions d’euros en 2016, l’autre de 113 millions d’euros en 2017. Or, nous constatons que la diminution pour 2016 vient de passer de 114 à 129 millions d’euros ! Quelle est votre explication sur ce point ?

Par ailleurs, le montant de la retraite du combattant est bloqué depuis le 1er juillet 2012 à quarante-huit points. L’an dernier, nous avions évoqué la possibilité de ne plus se focaliser sur le niveau de barème, et de jouer plutôt sur la valeur du point PMI – le montant de la retraite étant égal à la multiplication par quarante-huit du point PMI, fixé à 13,97 euros au 1er avril 2014. Comme l’a très bien dit notre collègue Candelier, il est pour le moins étonnant de lire que le point PMI va continuer à bénéficier de revalorisations proportionnelles à celles des rémunérations dans la fonction publique, quand on sait que celles-ci sont gelées depuis 2010. Lorsqu’on additionne les sommes allouées au titre de la PMI et celles correspondant à la retraite du combattant, on aboutit à un total de deux milliards d’euros sur votre budget total de 2,5 milliards d’euros, soit 80 %. Nous souhaitons pour notre part que la retraite du combattant fasse à nouveau l’objet de revalorisations, comme celles auxquelles nous avions procédé de 2007 à 2012, faisant passer son montant de trente-sept à quarante-huit points, c’est-à-dire de 488 euros à 609 euros.

Enfin, je lis à la page 87 de votre budget que les missions de l’Agence nationale pour l’indemnisation des Français d’outre-mer (ANIFOM) et de la Mission interministérielle aux rapatriés (MIR) ont été confiées à l’ONACVG, respectivement en 2014 et 2015. Les associations que j’ai reçues m’ont fait part de leur vif désaccord sur ce point : elles se sentent complètement laissées de côté, surtout en ce qui concerne les dossiers d’indemnisation des rapatriés qui se sont endettés pour s’installer en France. On assiste à l’heure actuelle à la vente forcée de biens constituant le domicile de personnes de 90 ans, qui se trouvent expulsées de chez elles. Certes, il n’a pas encore été trouvé de solution satisfaisante à ce problème qui se pose depuis de nombreuses années, mais nous devons continuer à nous efforcer de le résoudre, comme le souhaitent les associations de rapatriés dont je me fais le porte-parole, qui s’inquiètent de voir le sort de leurs membres confié aux mains de l’ONAC, dont ce n’est pas le cœur de métier.

M. le secrétaire d’État. On peut toujours essayer de remplir le verre, monsieur Vitel, mais on n’arrivera jamais à faire tenir un litre dans une chopine ! Nous parlons de problèmes qui sont sur la table depuis des dizaines d’années… Nous allons essayer de les résoudre dans le calme, mais aussi dans la mesure de nos moyens budgétaires. Et même quand une disposition est décidée, elle ne paraît pas toujours satisfaisante à ceux qui s’étaient imaginé tout autre chose !

Les moyens budgétaires sont effectivement en baisse de 4,9 %, mais les prévisions de dépenses fiscales augmentent de 11,1 % – elles s’élevaient à 420 millions dans la loi de finances initiale pour 2008, elles sont de 789 millions aujourd’hui. Les anciens combattants d’Algérie atteignent en effet l’âge où ils bénéficient de la demi-part fiscale. Si l’on additionne moyens budgétaires et dépenses fiscales, le budget ne diminue que de 1,5 %.

J’ai été parlementaire, et je sais bien qu’il y a souvent du monde dans les gradins – et dans l’hémicycle – pour le vote du budget des Anciens combattants, davantage en tout cas que pour des budgets bien plus considérables : les associations de défense des anciens combattants font leur travail. Je souligne donc que ce budget a diminué chaque année depuis 2008, à l’exception de 2010.

M. Philippe Vitel. Vous prévoyez tout de même une baisse de 533 millions du budget des anciens combattants entre 2013 et 2017 !

M. le secrétaire d’État. Je ne le nie pas, au contraire. N’oublions pas la réalité démographique, et ne confondons d’ailleurs pas non plus constatations et prévisions : la loi de programmation des finances publiques est fondée sur des prévisions, qui ont été actualisées.

Je ne reviens pas sur la JDC.

S’agissant du point PMI, je vous rappelle qu’un accord avec les grandes associations d’anciens combattants est intervenu en 2004, selon la règle du rapport constant. Le point PMI est aujourd’hui de 13,97 euros ; un nouvel arrêté doit le porter à 14,02 euros à compter du 1er janvier 2015. Il augmente donc – contrairement au point d’indice de la fonction publique, bloqué – puisqu’il est fonction de l’évolution des traitements bruts de la fonction publique d’État. Depuis 2005, il a été réévalué à plus de vingt reprises.

Aucun changement de méthode de calcul n’est envisagé : ce serait contraire aux objectifs de rétablissement des comptes publics.

Je me réjouis de ce que la commission travaille sur le lien entre l’armée et la Nation, sur le parcours citoyen, sur les cadets de la défense. Nous sommes preneurs de toutes vos réflexions sur de possibles évolutions.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué le tourisme de mémoire, et notamment sa pérennisation après les commémorations que nous vivons en ce moment. La fréquentation des sites de mémoire, je l’ai dit, a augmenté de 42 % en 2014 ; des investissements importants ont été consentis, par les collectivités territoriales surtout, accompagnées par l’État, ce qui me paraît une bonne chose. Élu lorrain, je connais un peu mieux Verdun que les autres sites : le conseil départemental, le conseil régional, la ville de Verdun se sont impliqués fortement – les investissements consentis jusqu’en 2018 devraient s’élever globalement à plus de 30 millions d’euros. Il en va de même dans la Somme et le Pas-de-Calais. J’ai ainsi inauguré l’historial de Souchez, résultat d’un effort important des collectivités territoriales accompagnées par l’État – l’entrée sera gratuite. Toutes les collectivités territoriales ont su investir intelligemment pour prolonger les commémorations en développant le tourisme venu de Belgique ou du Royaume-Uni, mais aussi de bien plus loin – pour les Australiens et les Néo-Zélandais, la bataille de la Somme est un acte politique fondateur. La Mission du centenaire a travaillé en relation étroite avec les Britanniques : des déplacements d’élèves, avec tout un programme culturel et pédagogique, sont par exemple prévus tout au long de l’année. Je souligne que la commémoration de la bataille de la Somme organisée le 1er juillet au mémorial de Thiepval sera, pour la première fois, une cérémonie franco-britannique. Notre inconscient national a surtout retenu Verdun, mais nous avons perdu énormément de soldats sur la Somme.

Tout doit être fait pour qu’au-delà des commémorations, ces lieux de mémoires accueillent des jeunes, ce qui est d’ailleurs prévu par le plan de lutte contre le racisme et l’antisémitisme.

Vous m’interrogez sur le bilan de la fréquentation de ces sites en 2015 : il est trop tôt pour le dire. Elle devrait être au moins égale à celle de 2014. Je participe pour ma part à de nombreuses cérémonies, et, avec Matthias Fekl, en charge plus globalement du tourisme au sein du Gouvernement, je fais la promotion du tourisme de mémoire dès que je le peux – à Londres récemment, au salon du tourisme international à Berlin bientôt…

Quant à Oradour-sur-Glane, je m’y suis bien sûr rendu cette année, à la suite du déplacement du Président de la République et du Président fédéral d’Allemagne : le maire n’a pas manqué de soulever ces problèmes. L’État est disposé à accompagner les collectivités, mais il ne peut pas agir seul, même si Oradour est bien sûr un lieu majeur pour notre histoire. Nous avons en Moselle un village qui s’appelle maintenant Charly-Oradour parce que plusieurs de ses habitants, expulsés de Moselle, ont péri dans l’église d’Oradour.

M. Daniel Boisserie. Je suis député d’Oradour depuis 1997 : rien ne bouge, et je suis très inquiet. Le conseil départemental a fait de gros efforts, comme vous l’avez constaté lors de votre visite – qui a été appréciée. Mais le village appartient à l’État : il lui revient donc d’apporter les financements nécessaires.

M. le secrétaire d’État. J’espère que nous arriverons à un résultat pour votre cinquième mandat… Plus sérieusement, de nombreux gouvernements se sont succédé depuis 1997. Il est exact que des mesures de sécurité doivent être prises, même si certains travaux de consolidation ont déjà eu lieu.

J’en viens à la retraite du combattant : si nous l’augmentions de façon conséquente, cela représenterait pour l’État une dépense astronomique !

M. Yves Fromion. Qu’entendez-vous par « astronomique » ?

M. le secrétaire d’État. Des dizaines de millions d’euros ! Le choix fait par mon prédécesseur, qui me paraît judicieux, est d’augmenter plutôt le nombre de bénéficiaires de la carte du combattant. Je vous rappelle la décision prise sur la « carte à cheval », qui a permis à 10 000 personnes d’obtenir la carte du combattant, et la décision sur la carte OPEX.

Nous nous efforçons de répondre aux revendications du monde combattant – la « carte à cheval » en était une. Parfois, d’ailleurs, certains gouvernements font des promesses qu’il revient à leurs successeurs d’honorer… C’est de bonne guerre, semble-t-il !

S’agissant des harkis et des rapatriés, je connais bien leurs problèmes. Deux groupes de travail ont été mis en place, et j’ai demandé au contrôle général des armées deux rapports, l’un sur la représentativité des associations de harkis, l’autre sur la représentativité des associations de rapatriés. C’est un sujet très délicat, vous le savez. Le premier de ces rapports est prêt, et je réunirai prochainement, comme je me suis engagé à le faire, le G12 « harkis » pour le leur présenter. Il formule diverses propositions d’amélioration.

La question du désendettement des rapatriés se pose depuis des décennies. Nous avons tous été saisis d’un cas d’expropriation, notamment, où j’ai pu constater que les gouvernements successifs avaient apporté des aides. Il faut traiter ces sujets difficiles au cas par cas. Aucune mesure générale n’est aujourd’hui possible, même si je n’ignore pas le mécontentement de certaines associations.

Enfin, s’agissant de la pension des conjoints survivants de grands invalides de guerre, les deux augmentations de cinquante points ont concerné 892 personnes. Sur la base d’une étude du contrôle général des armées, le ministère estime que la mesure prise cette année devrait toucher environ 1 400 personnes. Je sais bien qui défend ce que j’ai appelé tout à l’heure une rente de situation – et une rente élevée, puisque l’on pourrait dépasser les 4 000 euros ! Je souligne que ces pensions sont défiscalisées, et viennent s’ajouter à tous les autres revenus perçus.

Ma priorité, c’est d’agir pour les plus démunis, les plus isolés. Je suis bien conscient des grands sacrifices consentis par ces veuves. La revalorisation proposée cette année devrait concerner plus de 40 % d’entre elles : les mesures que nous proposons sont donc très loin d’être négligeables.

Ces propositions, je le rappelle, émanent d’un groupe de travail qui les a approuvées à l’unanimité moins une voix – celle, sans doute, de la personne qui vous a donné ces chiffres, monsieur Boisserie.

M. Damien Meslot. Ce budget n’est pas satisfaisant : au rythme où le verre se vide, un dé à coudre suffira bientôt ! Bien sûr, des efforts budgétaires sont nécessaires, mais le Gouvernement ne les fait pas toujours porter au bon endroit.

À vouloir tout faire lors de la journée défense et citoyenneté, j’ai peur que l’on en arrive à un curieux pot-pourri où le sens de cette journée serait perdu. Je souhaite que l’on ait moins d’exigences.

Avez-vous prévu d’améliorer les décrets sur les orphelins de la guerre de la Seconde Guerre mondiale ?

M. Francis Hillmeyer. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez comme moi que 535 personnes sont décédées en Algérie après le 2 juillet 1962. Elles sont reconnues comme mortes pour la France : il s’agissait donc bien de combattants, qui ont d’ailleurs droit au titre de reconnaissance de la Nation. Ne peut-on pas attribuer la carte du combattant aux soldats qui ont servi après le 2 juillet 1962, en assimilant ces opérations à des OPEX par exemple ?

Mme Marianne Dubois. Vous avez détaillé les efforts faits en faveur de la reconnaissance des conjoints survivants des grands invalides de guerre ainsi que des blessés en OPEX, mais qu’en est-il des grands blessés qui veulent se réinsérer dans la vie active ? La fonction publique propose-t-elle des emplois réservés ? Un budget spécifique est-il prévu ?

Mme la présidente Patricia Adam. Excellente question.

M. Yves Fromion. Je suis de ceux dont la famille compte des morts pour la France, et l’expression « tourisme de mémoire » me choque : le devoir de mémoire, le respect du sacrifice de ceux qui sont morts à la guerre, semble s’y réduire à une source de profit. Ne peut-on pas inventer un autre terme ? Parler aux jeunes de tourisme de mémoire plutôt que de devoir de mémoire me paraît même contre-productif – pour reprendre la métaphore économique que je contestais plus haut. Soyons vigilants !

Ma question porte sur l’indemnisation des orphelins de la guerre de 1939-1945. Comme vous le savez, deux décrets ont été pris, le premier en faveur de ceux dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites, le second pour tous les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Vous savez aussi que des enfants de personnes mortes pour la France, mais qui ne correspondent pas à ces critères restrictifs, demandent leur extension. Cette revendication paraît tout à fait légitime. Pierre-Yves Le Borgn’, député de la majorité, et moi-même, avons déposé une proposition de loi en ce sens : quel accueil lui réserverez-vous, lorsqu’elle viendra en débat, ce que j’espère ?

Mme la présidente Patricia Adam. Et quel serait le montant d’une telle indemnisation ?

Mme Nathalie Chabanne. Vous avez évoqué les mesures prises en faveur des veuves de harkis. Pouvez-vous nous apporter des précisions ? De quels montants parle-t-on ?

Quant aux orphelins de la Seconde Guerre mondiale, différentes associations plaident en effet pour une modification des décrets. Le contrôle général des armées estime le nombre de personnes concernées à plus de 220 000, quand un groupe de réflexion auquel avait participé l’ONACVG en 2011 s’était arrêté à 90 000 à peu près. Cette discordance freine-t-elle l’élaboration de nouvelles mesures ?

M. Christophe Guilloteau. Je crois que tout a été dit ! Monsieur le secrétaire d’État, il y a de bonnes mesures dans votre budget, il faut bien le reconnaître. Je pense à l’extension du bénéfice de la campagne double, à la revalorisation des pensions des conjoints survivants des grands invalides de guerre, aux mesures en faveur des anciens combattants les plus démunis – même si l’on peut noter aussi que les veuves de harkis non remariées ne doivent pas être bien nombreuses. Néanmoins le budget est en baisse. Tous les parlementaires présents dans cette salle ont certainement reçu comme moi les associations d’anciens combattants : leur préoccupation, c’est surtout le montant des retraites. La dernière revalorisation remonte à MM. Marleix et Laffineur…

M. le secrétaire d’État. Et c’est le gouvernement suivant qui a payé !

M. Christophe Guilloteau. Je le sais bien, mais c’est la règle du jeu ! Mais entre 2005 et 2012, on est passé de 33 à 48 points. Je comprends bien votre discours ; mais sachez qu’ils ne l’entendent pas.

C’est donc un budget en trompe-l’œil, même s’il contient des mesures qui étaient attendues. J’espérais une meilleure reconnaissance de la Nation envers nos anciens combattants, qui ne demandent, au fond, que cela.

Mme Édith Gueugneau. L’exceptionnelle année de commémorations qui s’achève a créé entre tous nos territoires une véritable émulation. Que l’on parle de tourisme de mémoire, de devoir de mémoire, ou de tourisme culturel, nous avons une obligation de transmettre. Notre Gouvernement agit en ce sens, puisque 1,65 million d’euros permettront de soutenir les collectivités territoriales : je m’en réjouis.

Combien de personnes seront concernées par les mesures prises en faveur des conjoints ou ex-conjoints survivants de harkis ?

M. le secrétaire d’État. Merci de ces questions. Je suis solidaire du Gouvernement auquel j’appartiens ; nous voulons réduire les déficits. Vous contestez les baisses de budget, mais ailleurs, on propose de réduire plus encore nos dépenses, et plus vite… Vous nous demandez de réduire les déficits tout en répondant à des revendications coûteuses auxquelles vous n’avez vous-même pas répondu. On ne peut pas proposer tout et son contraire.

M. Yves Fromion. Dans les années précédentes, on avait tout de même progressé !

M. le secrétaire d’État. Vous évoquez la question des orphelins. Le Gouvernement est sensible à leur souffrance, comme vous tous. Nous cherchons à appliquer les décrets de 2000 et 2004 de façon éclairée ; mais, si l’on veut donner la plus grande portée possible à ces mesures, il faut réexaminer tous les dossiers au cas par cas, afin que des situations équivalentes soient traitées de la même façon.

Il faut toutefois préserver le caractère spécifique de cette indemnisation ; l’extension à tous les orphelins de guerre n’est pas envisageable, ni sur un plan symbolique, ni sur un plan financier.

Les orphelins concernés peuvent en effet bénéficier d’un capital de 27 400 euros, ou d’une rente viagère mensuelle de 544 euros. Ce ne sont pas des montants anodins. Aujourd’hui, 36 000 personnes environ ont été indemnisées : 13 500 au titre du décret de 2000, et 22 500 au titre de celui de 2004. J’ai été parlementaire, après avoir été chef de cabinet d’un secrétaire d’État aux anciens combattants : je connais bien les associations, elles font bien leur travail, et il est normal que des parlementaires de tous bords estiment leurs revendications légitimes. Certains voudraient d’ailleurs étendre l’indemnisation aux orphelins de tous les conflits.

M. Yves Fromion. Il faut avancer, lentement, mais avancer !

M. le secrétaire d’État. Vous serez peut-être amené à mettre cette politique en application vous-même, mais d’ici là, laissez-moi vous répondre.

Nous ne disposons d’aucune nouvelle étude sur le nombre des orphelins qui pourraient être concernés. On estime qu’une indemnisation générale de tous les orphelins de la Seconde Guerre mondiale coûterait jusqu’à 1,3 milliard d’euros ; et si l’on étendait l’indemnisation à tous les conflits, il faudrait trouver plus de 2 milliards. Mon budget est en baisse – vous vous en plaignez suffisamment – et vous proposez de le doubler ! Il y a des choses qui ne sont simplement pas possibles aujourd’hui. Je ne serai pas, je l’ai dit, le ministre qui rouvrira le dossier des dépenses fiscales – dépenses fiscales qu’il faut d’ailleurs mettre en regard de la faiblesse de certaines indemnisations. Mais je ne serai pas non plus le ministre qui étendra l’indemnisation à tous les orphelins de la Seconde Guerre mondiale – et des autres conflits, car quelle raison y aurait-il alors de ne pas indemniser tous les orphelins de tous les conflits ? Tous, ils ont perdu un papa – ou une maman, car au vu de l’évolution démographique de nos forces armées ce cas sera de plus en plus fréquent. Je vous tiens, vous le voyez, le langage de la vérité – que je tenais déjà comme parlementaire.

Les associations, je le répète, font leur travail, et bien. Mais les parlementaires doivent aussi prendre en considération la nécessité de faire des économies. Ne nous livrons pas à une surenchère irresponsable, évitons les promesses que nul ne pourra tenir.

M. Yves Fromion. Ce que nous proposons, c’est de compléter notre dispositif progressivement : ne fermons pas la porte définitivement à une revendication que l’on ne peut qu’estimer légitime. Ouvrons des perspectives. Votre réponse n’est pas très bonne à nos yeux.

M. le secrétaire d’État. Puisque vous m’y forcez, je vais compléter ma réponse. La précédente majorité avait annoncé, en 2007, une réflexion sur un troisième décret, qui couvrirait tous les orphelins de guerre ; elle a renouvelé cette promesse en 2012, juste avant les élections.

M. Yves Fromion. Mais oui, cette promesse a été faite, y compris par Nicolas Sarkozy ! On peut le dire, puisque c’est vrai.

M. le secrétaire d’État. La porte est fermée aujourd’hui à cause des montants qu’une large extension de cette indemnisation représenterait. Je ne peux pas vous répondre autrement.

Entre 2007 et 2012, les réponses négatives aux demandes d’indemnisation ont été gelées ; nous avons repris, lentement, l’étude des dossiers en 2013, afin d’appliquer le décret de 2004 de la façon la plus éclairée possible. Je sais que certaines associations sont mécontentes, mais je me dois d’être solidaire de la politique gouvernementale.

J’en reviens au budget, dont vous me dites qu’il n’est pas satisfaisant. Je ne vous assommerai pas de chiffres ; je note seulement qu’il a baissé de manière continue depuis 2008, à l’exception de 2010. Le nombre des anciens combattants diminue, c’est la rude loi de la démographie. En revanche, les prévisions de dépenses fiscales ont quant à elle continûment progressé depuis 2009.

Le budget que je vous ai présenté est ambitieux, je le répète, et il satisfait plusieurs grandes revendications du monde combattant ; mais nous ne pouvons pas répondre à toutes les revendications, fussent-elles parfaitement légitimes, des associations, qui font leur travail.

S’agissant de la JDC, rien n’a changé, hormis la sensibilisation à la sécurité routière que j’ai mentionnée. Un sondage fait parmi les jeunes qui participent à cette journée donne un taux de satisfaction de 86 %.

Monsieur Hillmeyer, s’agissant de la date du 2 juillet 1962, les associations d’anciens combattants ne souhaitent pas la généralisation de l’attribution de la carte du combattant. Celle-ci revêt pour eux une vraie valeur. La « carte à cheval » est déjà une avancée certaine, et depuis quelques années, les critères sont beaucoup plus larges qu’ils ne l’étaient. Je reste donc très prudent.

S’agissant de la réinsertion des blessés, c’est effectivement une excellente question. C’est l’une des grandes préoccupations du ministère de la Défense ; chaque armée dispose de sa propre organisation. L’ONACVG apporte sa pierre à l’édifice. C’est pour le ministère de la Défense un grand honneur que de s’occuper de ceux qui ont été blessés au service de la Nation.

Monsieur Fromion, vous regrettez l’usage de l’expression « tourisme de mémoire ». Je n’en connais pas d’autre : le tourisme est un secteur économique important. Nous souhaitons tous que le tourisme de mémoire contribue au travail de mémoire – expression que je préfère d’ailleurs pour ma part à celle de devoir. Espérons que l’on inventera un meilleur mot !

M. Yves Fromion. Il faut le souhaiter.

M. le secrétaire d’État. Vous m’interrogez enfin sur le montant du nouveau dispositif en faveur des veuves de harkis : il s’élève à 3 415 euros par an. Chaque année, une centaine de personnes supplémentaires devraient être concernées.

Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, de ce dialogue constructif.

Mme la présidente Patricia Adam. Merci.

II. AUDITION DE REPRÉSENTANTS D’ASSOCIATIONS
D’ANCIENS COMBATTANTS

La commission de la défense nationale et des forces armées a entendu des représentants d’associations d’anciens combattants, sur le projet de loi de finances pour 2016 (n° 3096), au cours de sa réunion du jeudi 15 octobre 2015.

Mme la présidente Patricia Adam. Merci d’avoir répondu à notre invitation pour cette audition concernant le budget des anciens combattants et de la mémoire.

Je vous présente : M. Jacques Goujat, président de l’Union française des associations de combattants et victimes de guerre (UFAC) ; M. Pierre Dürr, secrétaire général de la Fédération nationale des combattants prisonniers de guerre et combattants d’Algérie, Tunisie et Maroc (FNCPG-CATM) ; amiral Henri Lacaille, président délégué de la Fédération nationale André Maginot ; M. André Cognard, secrétaire général de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA) ; M. Laurent Attar-Bayrou, président national de la Fédération nationale des anciens des missions extérieures – OPEX (FNAME-OPEX) ; général André Soubirou, président national de l’Association nationale des participants aux opérations extérieures (ANOPEX) ; général Pierre Saint-Macary, président de l’Union nationale des combattants (UNC) ; général Bertrand de Lapresle, vice-président de l’Union des blessés de la face et de la tête (UBFT) « Les Gueules Cassées » ; M. Patrick Staat, secrétaire général de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre, des combattants pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix (ARAC) ; M. Michel Hadj, directeur général du Souvenir français ; M. Dominique Lépine, président de l’Union fédérale des associations françaises d’anciens combattants, victimes de guerre et des jeunesses de l’Union fédérale ; Mme Anita Baudouin, secrétaire générale de la Fédération nationale de déportés et internés, Résistants et patriotes (FNDIRP) ; général Henri Pinard Legry, président de l’Association de soutien à l’armée française (ASAF).

M. Jacques Goujat, président de l’Union française des associations de combattants et victimes de guerre (UFAC). Je laisserai à mes amis le soin de traiter de ce budget dans le détail et me bornerai à rappeler que le monde combattant est particulièrement uni dans le domaine de la reconnaissance et de la défense des droits. L’élément fondamental de notre réflexion est que les anciens combattants doivent être traités sur la base du droit à réparation. Ce droit fait de l’ancien combattant un « citoyen plus », bénéficiant non seulement de l’ensemble des dispositions du droit commun mais aussi – c’est le témoignage de la reconnaissance de la Nation à leur égard – d’un droit à réparation imprescriptible.

Général Pierre Saint-Macary, président de l’Union nationale des combattants (UNC). Merci, madame la présidente, de me permettre de m’exprimer devant votre commission, alors que je viens de prendre, il y a quelques jours, la présidence de l’UNC, une association ancienne qui va bientôt fêter son centenaire, et forte de 218 000 adhérents.

Le budget pour 2016 maintient certes l’ensemble des dispositifs de reconnaissance et de réparation en faveur du monde combattant mais comporte aussi quelques manques – des catégories sont oubliées –, et certaines mesures de solidarité nous laissent perplexes dans la mesure où elles risquent d’engendrer des difficultés d’application.

Le sujet sur lequel nous souhaitons en priorité appeler l’attention de votre commission est l’extension de la carte du combattant OPEX aux soldats de l’Afrique du Nord (AFN) entre 1962 et 1964. L’article 87 de la loi de finances pour 2015 a accordé, à partir du 1er octobre 2015, la carte du combattant aux militaires ayant servi quatre mois ou plus en OPEX. Cette avancée significative a mis fin à une discrimination en matière d’attribution de la carte entre combattants de deux générations, AFN et OPEX, mais n’est pas allée jusqu’au bout.

La question est de savoir si cette loi peut concerner les militaires français ou supplétifs présents en Algérie entre juillet 1962 et juillet 1964. Ces 80 000 anciens militaires environ, en grande partie des appelés, âgés de soixante-douze ans pour les plus jeunes, n’ont pas droit à la carte du combattant, au motif que la guerre d’Algérie s’est terminée le 2 juillet 1962. Seuls ceux dont le séjour de quatre mois a été à cheval sur cette période ont obtenu la carte du combattant en 2014.

Or des opérations dites « d’apaisement » ont été menées, après le cessez-le-feu et l’indépendance de l’Algérie, pour une durée de vingt-quatre mois, en vertu des accords d’Evian. Les forces françaises demeuraient en territoire étranger pour des missions de sécurité, dans un contexte très dangereux. Au moins 535 militaires ont été tués ou ont disparu pendant cette période ; ce nombre démontre que nos soldats ont fréquemment risqué leur vie. Enfin, il est paradoxal d’avoir reconnu l’appellation de « morts pour la France » à ceux qui ont été tués et de refuser la qualification d’anciens combattants aux survivants.

La loi de finances pour 2015 a mis fin à l’inégalité de traitement entre les soldats d’OPEX et les anciens combattants d’Algérie, mais elle a provoqué une nouvelle inégalité vis-à-vis des militaires présents en Algérie entre 1962 et 1964. L’UNC sollicite une inscription de ce pays pour la période de juillet 1962 à juillet 1964 dans l’arrêté définissant les opérations extérieures, afin de mettre fin à toute discrimination. Ces cartes seraient attribuées au titre des OPEX puisque ces soldats intervenaient dans un pays indépendant, comme pour toutes les OPEX de notre génération.

Notre seconde priorité porte sur la solidarité, l’aide aux plus démunis et la réinsertion professionnelle. L’aide différentielle a disparu fin juin 2015. Il n’y a plus moyen d’amener au seuil de pauvreté les plus démunis. C’est une régression dans le traitement de la solidarité du monde combattant, et les deux millions d’euros prévus ne sont pas à la hauteur de l’aide complémentaire antérieure. La suppression des subventions pour l’aide sociale aux associations il y a deux ans et le transfert de l’aide différentielle au pôle commun solidarité sont une brèche dans le paritarisme entre l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) et les associations. L’ONACVG pratiquant l’anonymat dans les débats, cela interdit toute action conjointe des associations pour valoriser ces aides et faire appel à des cofinancements. Bref, c’est davantage de saupoudrage et moins de solidarité.

S’agissant de la réinsertion professionnelle des anciens combattants OPEX, la synergie entre les armées, l’ONACVG et les associations ne fonctionne pas suffisamment bien. Les armées ont certes un dispositif efficace, l’Agence de reconversion de la défense, mais il reste insuffisant puisque 12 500 ex-combattants sont toujours demandeurs d’emploi. Quant à l’ONACVG, dont la réinsertion est, selon le code des pensions militaires, la mission principale, il ne traite que 200 ou 300 cas par an. Les associations, avec leur réseau d’employeurs potentiels, pourraient aider mais ne sont guère sollicitées. Réaffirmer la reconversion comme mission principale de l’ONACVG, et faire en sorte que les opérateurs se rencontrent, semble indispensable.

La revalorisation du point d’indice ainsi que la refonte du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre seront évoqués par Bertrand de Lapresle. Nous soutenons le groupe de travail établi par les associations en vue de participer à la refonte de ce code. Nous souhaitons que cette refonte à droits constants aboutisse à un code pratique, lisible et moderne, adapté à l’ensemble des générations du feu.

Enfin, après les attentats, et suite aux discours du président de la République et de la ministre de l’Éducation, un appel aux bonnes volontés a été lancé pour promouvoir les valeurs de la République. Il s’agit de renforcer la citoyenneté, notamment auprès d’une jeunesse en quête de repères ou tentée par des idéologies malsaines. Nos adhérents se sont portés volontaires dans toutes les provinces pour promouvoir ces valeurs, dans le cadre des activités périscolaires ou à d’autres occasions, comme les voyages sur les lieux de mémoire.

Général Bertrand de Lapresle, vice-président de l’Union des blessés de la face et de la tête (UBFT) « Les Gueules Cassées ». La loi de programmation militaire (LPM) a prescrit une refonte du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre qui devra être menée à bien au 30 juin 2016. Cette refonte doit être effectuée à droits constants. S’appuyant sur cette prescription, la direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de la Défense envisageait de conduire cette mission à son niveau, en limitant le rôle du monde combattant et des pensionnés à une information périodique de caractère général.

Les sept associations de grands invalides de guerre se sont naturellement senties particulièrement concernées par cette refonte, du fait des problèmes que rencontrent nombre de leurs membres pour que soient satisfaits en temps et en heure leurs droits actuels. Elles ont donc décidé de s’impliquer activement dans le processus et ont créé un groupe de travail spécifique, intitulé GT-Refonte, en s’appuyant sur cinq autres importantes associations du monde combattant, les douze associations en question constituant ainsi un comité d’entente des grands invalides de guerre élargi. C’est au nom de ces douze associations, qui représentent une très large majorité du monde combattant ainsi que la quasi-totalité des associations de pensionnés, que je m’exprime aujourd’hui devant vous.

Avec l’aval du secrétaire général pour l’administration du ministère, la DAJ a pris acte de cette création, et une coopération s’est progressivement instaurée entre cette direction et le GT-Refonte. Depuis le mois de septembre 2014, la DAJ informe régulièrement le GT-Refonte de ses travaux, et nous avons proposé, au fur et à mesure que nous étaient communiqués les documents, les aménagements qui nous semblaient pertinents.

Les travaux conduits par la DAJ arrivent à leur terme, et les sept livres du code refondu doivent être prochainement soumis à la commission sociale du Conseil d’État, avant d’être transmis au Parlement le 1er janvier 2016. Le Parlement disposera alors de six mois pour étudier le projet, avant la date du 30 juin 2016.

Dans leur état actuel, les sept livres du projet de code refondu retiennent l’essentiel des compléments proposés par le GT-Refonte, qui estime que ses rapports avec la DAJ ont été, globalement, très fructueux, dans le strict respect des attributions de chacun.

Quelques-unes de nos propositions n’ont cependant pas été retenues par l’administration, pour des raisons généralement liées à une interprétation de la notion de droits constants qui nous semble très restrictive. Cette notion, selon nous, ne devrait pas faire perdurer la bêtise de certaines formulations incompréhensibles. Nous espérons que nos propositions seront prises en considération par le Conseil d’État.

Dès le début de l’année 2016, c’est ensuite du Parlement que nous tenterons d’obtenir les ultimes aménagements que nous souhaitons promouvoir. Nous voudrions, par exemple, obtenir que la carte d’un grand invalide de guerre lui permette de bénéficier de tous les droits dont bénéficient les grands invalides civils grâce à la carte que leur délivrent les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Nous apprécierions vivement que vous acceptiez de désigner deux ou trois parlementaires pour être les correspondants du GT-Refonte. Nous pourrions ainsi plaider auprès de personnalités motivées et influentes les amendements souhaités par le monde combattant, bien sûr à droits constants, pour le soutien moral et la réparation de nos camarades blessés et pensionnés, mais aussi de leurs conjoints survivants, orphelins et ascendants.

Mon second point sera un plaidoyer pour les blessés de la moelle épinière, titulaires de l’article L. l15 du code des pensions militaires d’invalidité. C’est un sujet très lourd, sur lequel j’aimerais vous faire partager l’inquiétude que ressentent les sept associations du comité d’entente des grands invalides de guerre, soutenues désormais par le comité d’entente élargi de douze associations, en espérant qu’une action des parlementaires pourra faire disparaître cette inquiétude.

Celle-ci porte sur les conditions dans lesquelles sont pris charge par le service de santé des armées (SSA) les plus lourds blessés de nos armées que sont les blessés de la moelle épinière. Depuis des décennies, ces blessés sont traités et soignés à l’Institution nationale des Invalides (INI), dans des conditions qui conviennent à leur pathologie très spécifique et mal connue. Elle exige notamment que ces blessés, pratiquement intransportables en raison du risque de dramatiques aggravations d’escarres, reçoivent dans un lieu unique les soins chirurgicaux exigés par leur pathologie à dimension tant cutanée qu’urologique. L’INI, notamment grâce à son bloc opératoire, au cœur de son centre médico-chirurgical, remplit bien cette mission, et nos camarades blessés de la moelle épinière considèrent véritablement cette institution comme leur maison.

Dans le cadre des études actuellement en cours sur l’évolution du SSA – le plan SSA 2020 – il semble que soit pratiquement prise la décision de fermer définitivement le Val-de-Grâce et le bloc opératoire de l’INI. Dans le plan initial, il avait été envisagé de créer au Val-de-Grâce une structure qui aurait satisfait les conditions évoquées plus haut pour la prise en compte efficace à chaud, puis dans la durée, des blessés médullaires. La décision de fermer le Val-de-Grâce réduit ce projet à néant. Avec la fermeture du bloc opératoire de l’INI, il semble que soit imaginée la possibilité de traiter les blessés médullaires soit à l’hôpital Percy, soit à l’hôpital Bégin, soit dans les deux. Dans ce cas, un très grave problème serait à résoudre : le choix de l’hôpital où seraient traités à la fois les problèmes cutanés et les complications urologiques. Or les projets actuels envisagent, à notre connaissance, les soins cutanés à Percy et les soins urologiques à Bégin, solution inenvisageable pour des blessés pratiquement intransportables. La réponse qui nous est faite, selon laquelle des urologues pourraient se déplacer de Bégin pour opérer à Percy, avec des équipes de bloc chirurgical qui ne sont pas les leurs, est totalement surréaliste.

En toute hypothèse, Percy et Bégin sont encore en travaux, et ce pour plusieurs années. La solution que nous préconisons de toutes nos forces, et qui calmerait les inquiétudes, est donc de mettre un terme, au moins provisoirement, au processus déjà largement entamé de fermeture du bloc opératoire de l’INI, et de doter ce dernier, ne serait-ce que pour les trois ou quatre années à venir, des moyens nécessaires à la poursuite de sa mission – ces moyens sont modestes –, en attendant que Percy puisse éventuellement accueillir décemment nos blessés médullaires.

Ces blessés ne sont certes pas très nombreux, et c’est heureux, même si c’est ce qui rend difficile de faire prévaloir leurs exigences. Ils nécessitent des soins très spécifiques, lourds et peu gratifiants pour le corps médical. Ils n’en méritent que davantage de faire l’objet d’une attention toute particulière de la part des autorités de la Nation. Il apparaît du devoir le plus élémentaire de celles-ci de calmer leurs profondes inquiétudes, et ce dès le budget 2016.

Mme la présidente Patricia Adam. Sur la question des droits des grands invalides, je vous invite à prendre contact avec les deux rapporteurs concernés de la commission de la Défense et de la commission des Finances, que j’informerai de votre demande. Vous avez également la possibilité de contacter les groupes politiques de l’Assemblée.

La question du bloc opératoire de l’INI a été évoquée par notre commission avec le secrétaire d’État. Je me rendrai personnellement sur place, avec les collègues qui souhaitent m’accompagner. Nous avons travaillé sur la prise en charge des blessés dans le cadre d’une mission d’information conduite par M. Audibert Troin et Mme Poumirol.

M. André Cognard, secrétaire général de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA). Le projet de loi de finances pour 2016 comporte plusieurs avancées, dont l’extension de la campagne double à tous ceux qui ont fait valoir leur droit à la retraite avant le 18 octobre 1999. La rétroactivité de la loi a toujours été possible dès lors qu’elle est précisée dans le texte. En l’occurrence, c’était inscrit dans le code des pensions de retraite de la fonction publique en ce qui concerne la campagne double, du fait du caractère recognitif de ce droit spécifique. Nous l’avons toujours affirmé mais n’avons jamais été entendus.

Le choix du 18 octobre 1999 avait pour seul but de priver la grande majorité des combattants d’Afrique du Nord de la fonction publique concernée, tout comme le fait de ne tenir compte que des seules actions de feu et de combat répertoriées, alors que nous savons que des unités sont privées, totalement ou partiellement, d’historique. Dans les conflits précédents et ceux qui ont suivi, c’est la notion de territoire et de période qui a toujours prévalu ; pourquoi prévoir une exception pour les seuls militaires de la troisième génération du feu ?

La dotation sociale de l’ONACVG a été confortée de deux millions d’euros pour aider les plus démunis. Ce progrès masque l’effet déplorable, pour ne pas dire inique, de la suppression de l’aide différentielle de solidarité en faveur des conjoints survivants. Des raisons juridiques impliquaient de revoir ce dispositif, que notre secrétaire d’État, au Sénat, le 20 août, considérait comme nécessaire du fait que les veuves éprouvaient des difficultés grandissantes. Pour autant, depuis juin, malgré le vote de la loi de finances pour 2015 portant le plafond de ressources à 987 euros, plus aucune aide complémentaire nouvelle de solidarité n’est accordée. Au 31 décembre 2015, les veuves bénéficiant du dispositif en seront totalement privées, d’où, par exemple, pour celles percevant l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), pour laquelle le plafond de ressources est à 800 euros par mois, une perte nette de 187 euros par mois, soit 2 244 euros par an.

Pour 2016, il avait été laissé entendre que le nouveau dispositif serait étendu aux anciens combattants dans le besoin. Désormais, chacun entrera dans le dispositif commun, à savoir devra faire état de besoins exceptionnels en présentant les justificatifs des charges et ressources, et sera soumis aux aléas d’une aide facultative ne leur assurant plus un revenu qui était certes modeste mais permettait à chacun de s’organiser sans avoir le sentiment de recourir à l’assistanat. C’est une méthode humiliante qui s’écarte totalement du précédent dispositif, qui donnait satisfaction, et c’est en contradiction avec les engagements pris en loi de finances pour 2015.

Nous demandons qu’il y soit remédié en garantissant des ressources à hauteur du seuil de pauvreté INSEE, seuil décidé par un groupe de travail auquel étaient associés les administrations concernées ainsi que les parlementaires. Vous porterez seuls la responsabilité de cet abandon d’une population déjà socialement affectée.

Enfin, entre le 1er janvier 2013 et ce jour, le point de pension militaire d’invalidité (PMI) n’a augmenté que de quatre centimes d’euro, soit un centime par an, pour celui qui perçoit la retraite du combattant. Depuis le 1er janvier 2005, quand le nouveau mode de calcul a été décidé, c’est une perte de pouvoir d’achat de 8,61 %, qui touche particulièrement les pensionnés militaires d’invalidité et les ressortissants, alors que l’allocation de reconnaissance en faveur des harkis et supplétifs, par exemple, est indexée sur l’indice des prix à la consommation hors tabac. Sans envisager de rattraper ce retard d’un seul coup, il nous paraît honnête de profiter des marges de manœuvre laissées par la mortalité pour échelonner un rattrapage. Les associations regroupées au sein de l’UFAC, dont la FNACA, ont demandé la création d’une commission tripartite entre le Gouvernement, les parlementaires et le monde combattant pour examiner ce dossier. Pour l’instant, le secrétaire d’État se refuse à toute évolution.

Amiral Henri Lacaille, président délégué de la Fédération nationale André Maginot. La Fédération nationale André Maginot se déclare solidaire de ce qui a été dit au sujet du GT-Refonte et des demandes formulées par ce groupe de travail.

Les mesures octroyées aux anciens combattants dans le projet de budget pour 2016, d’un peu moins de 12 millions d’euros, représentent moins de 10 % des économies réalisées sur la totalité du programme, qui est de 133 millions d’euros, du fait de la disparition de 55 000 anciens combattants dans l’année.

La population des OPEX fuit nos associations car elles ne veulent pas être considérées comme des « anciens » combattants. Je suggère donc que, comme au moment de la création de l’Office national des anciens combattants en 1916, qui s’appelait alors Office national des combattants, nous supprimions la mention d’« anciens » qui déplaît aux jeunes générations.

M. Dominique Lépine, président de l’Union fédérale des associations françaises d’anciens combattants, victimes de guerre et des jeunesses de l’Union fédérale. Souscrivant pleinement à tout ce qui vient d’être dit, je souhaite compléter l’argument de M. Saint-Macary au sujet de la carte du combattant pour les soldats présents en Algérie de juillet 1962 à juillet 1964, en soulignant qu’ont déjà droit à cette carte les soldats français présents au Maroc et en Tunisie de 1956 à 1962, alors que ces deux pays, alors déjà indépendants, ne connaissaient plus l’état de guerre.

Nous constatons une avancée réelle au profit des veuves de grands invalides de guerre. Cependant, le chiffre cible de 1 400 avancé par le secrétaire d’État risque, comme les années précédentes, de ne pas être atteint. Les cibles ne sont en effet généralement atteintes qu’à 15 %. Cela dégage des fonds qui pourraient permettre de conduire des actions dans le domaine.

Général André Soubirou, président national de l’Association nationale des participants aux opérations extérieures (ANOPEX). Au moment où plus de 10 000 militaires français sont engagés, en OPEX, pour environ 4 000 d’entre eux, ou en opérations intérieures (OPINT), dans le cadre de la mission Sentinelle, pour 7 000 autres, je souhaite les saluer et leur exprimer la solidarité du monde combattant, et en particulier de leurs camarades aînés des OPEX, dont je suis. Je forme le vœu que leur emploi dans le cadre des OPINT soit moins statique et moins routinier, et s’inscrive dans une manœuvre d’ensemble plus mobile, conforme à leur capacité d’action sur de vastes zones.

S’agissant du droit à reconnaissance et à réparation, mon intervention se bornera à vous demander de ne pas remettre en cause la consolidation des droits. Surtout ne revenez pas en arrière, en particulier pour la carte à 120 jours en OPEX, qui a déjà permis d’octroyer 5 000 cartes à des combattants qui auraient probablement été écartés sous l’ancienne réglementation, et qui permettra d’en attribuer progressivement quelque 140 000 supplémentaires dans les années à venir.

Le sujet du mémorial des OPEX, ensuite, reste flou, et les combattants des OPEX regrettent la discrétion du projet de budget sur ce point. Comme vous le savez, le ministre de la Défense et des anciens combattants a approuvé, au mois d’octobre 2011, les conclusions d’un groupe de travail « Monument aux morts en opérations extérieures » présidé par le général d’armée Bernard Thorette. Ce projet, dont la réalisation était envisagée pour 2014, reste virtuel. Le ministre de la Défense a bien déclaré, dans son discours du 1er octobre 2015 aux Invalides, à l’occasion de la remise solennelle des premières cartes de combattant OPEX à 120 jours, que ce mémorial verrait le jour, mais sans préciser ni le lieu ni la date.

En réponse à la motion de notre association appelant l’attention du ministre sur ce projet resté au point mort, le secrétaire d’État nous a indiqué, le 28 août 2015, que, souhaitant s’assurer de la pertinence de la démarche retenue au regard des enjeux, il a demandé des études complémentaires concernant notamment le futur emplacement du mémorial et sa finalité. Par ailleurs, la direction de la mémoire et du patrimoine des armées ne nous a pas donné de réponse sur l’emploi des crédits votés pour conduire les études. Nous apprécierions vivement que des parlementaires interpellent le ministre sur l’état d’avancement de ce mémorial.

Mon second point, s’agissant de la mémoire, concerne la commémoration du traité de Paris de 1995. L’an dernier, ici même, l’ANOPEX avait proposé que soit commémoré le vingtième anniversaire du traité de Paris signé en décembre 1995 en conclusion de la négociation de Dayton mettant fin au conflit en Bosnie-Herzégovine. La France avait joué un rôle majeur dans les opérations militaires qui avaient ouvert la voie aux négociations puis au traité. Une commémoration, sous la forme d’un colloque, a été envisagée ; elle aurait du sens, au moment où le séparatisme par la force resurgit en Europe. On nous dit que ce projet de colloque ne serait pas opportun au moment de la campagne électorale. Un report en début d’année 2016 resterait pertinent pour faire entrer les OPEX dans le processus de transmission de la mémoire, sans faire d’ombre au cycle mémoriel du centenaire de la Première Guerre mondiale autour de la bataille de Verdun et de la bataille de la Somme.

Mme la présidente Patricia Adam. Le général Bosser, que nous avons auditionné cette semaine, a précisé que l’emploi statique des militaires dans l’opération Sentinelle était progressivement abandonné. Ces militaires sont à présent employés dans un registre beaucoup plus dynamique sur l’ensemble des sites concernés.

En ce qui concerne le mémorial des OPEX, le secrétaire d’État nous a indiqué que les crédits, de l’ordre d’un million d’euros, étaient toujours en place. Le site retenu est le parc André Citroën, près de Balard. Les autorisations des urbanistes et architectes de la ville de Paris sont encore attendues. Le projet n’est en tout cas pas remis en cause.

M. Patrick Staat, secrétaire général de l’Association républicaine des anciens combattants et victimes de guerre, des combattants pour l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix (ARAC). Les anciens combattants et les soldats des OPEX sont, comme vous le savez, très massivement issus des milieux populaires et défavorisés. Nous avons exprimé l’an dernier notre vive inquiétude devant la situation économique dramatique faite à l’ensemble de la population active et retraitée de notre pays, et particulièrement celle des anciens combattants et victimes de guerre et leurs ayants-droits. Force est de constater que le Gouvernement ne nous entend pas et que la situation de la grande majorité des Français, salariés, retraités, veuves, anciens combattants des OPEX qui retournent à la vie civile, s’aggrave.

En cette année du soixante-dixième anniversaire de la capitulation de l’Allemagne nazie, il est bon de rappeler que des combats contre l’envahisseur et du rassemblement des forces de la Résistance est né un formidable espoir, dans un pays détruit par la guerre. Le programme du Conseil national de la Résistance (CNR) a rendu possibles, dans une situation économique très difficile, des innovations économiques et sociales qui sont encore un atout des valeurs de la République.

Le projet de budget pour 2016 est frappé de la même démarche d’austérité imposée par le Gouvernement à l’ensemble de la population française. Les crédits, à hauteur de 2,51 milliards, sont en baisse de près de 130 millions par rapport à 2015, soit 5 %. Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée » chute de près de cinq millions, soit 13 %. Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » perd 124 millions, soit 5 %. Ce dernier programme concerne pourtant un million de retraites de combattants et 900 000 pensionnés des PMI.

Quant à la valeur du point de PMI, le document budgétaire affirme, sans rire, page 77, que, « par le biais du mécanisme du rapport constant », les PMI des retraites du combattant et les plafonds de rente mutualiste d’anciens combattants « continueront de bénéficier de revalorisations proportionnelles à celles des rémunérations dans la fonction publique ». La vérité, c’est que cela veut dire zéro, puisque la valeur du point d’indice de la fonction publique est gelée depuis 2010 et que le Gouvernement a déjà annoncé qu’il resterait gelé en 2016.

Autre mesure annoncée, le bénéfice de la campagne double pour les anciens combattants d’Algérie, Tunisie et Maroc (ATM) fonctionnaires, travailleurs de l’État et assimilés ayant pris leur retraite avant la loi du 19 octobre 1999, aura un coût de 0,6 million d’euros en 2016, puis de 0,5 million d’euros en 2017. Encore que cette campagne double sera accordée sur la base des actions de feu et de combat. Or la carte du combattant est aujourd’hui accordée à partir de 120 jours de présence en OPEX ; il convient donc d’accorder la campagne double à tous les anciens combattants d’Afrique du Nord qui totalisent 120 jours de présence.

L’élargissement de la majoration des pensions coûtera 1,9 million d’euros en 2016 et 3,8 millions d’euros en 2017. Le financement de la deuxième tranche de revalorisation de cinquante points, majoration spéciale, au 1er janvier 2016, coûtera 99 millions d’euros.

La rallonge de deux millions de la dotation sociale de l’ONACVG est essentiellement destinée à remplacer à partir de 2016 l’allocation différentielle de solidarité des conjoints survivants dont les ressources ne dépassaient pas 987 euros par mois. Le nouveau système devrait concerner tous les ressortissants de l’ONACVG en difficulté. Cependant, les éléments fournis au conseil d’administration de l’Office faisaient état de crédits à hauteur de quatre millions d’euros. Cette rallonge ne couvrirait donc que la moitié. Nous exigeons que les quatre millions annoncés soient respectés afin que l’office puisse accomplir sa mission de solidarité envers tous.

Enfin, 165 000 cartes de combattant devraient être accordées aux soldats d’OPEX, pour un coût de quatre millions d’euros en 2015 et de 6,9 millions en 2016. L’accompagnement des militaires blessés en opération ou en service est souligné dans le document, et c’est en effet indispensable. Encore faudrait-il s’occuper de tous, blessés physiquement ou non, psycho-traumatisés ou non, les soigner si nécessaire, les aider à se réinsérer dans la vie professionnelle, à trouver des logements, des emplois… À la sortie de leur activité d’OPEX, nombre d’entre eux se retrouvent seuls face aux difficultés de la vie. Rien n’est prévu, si ce n’est la disparition des écoles de réinsertion professionnelle de l’ONACVG ! Nous sommes très inquiets sur l’avenir de cet office, et c’est à se demander si le Gouvernement n’envisage pas purement et simplement de s’en séparer.

M. Pierre Dürr, secrétaire général de la Fédération nationale des combattants prisonniers de guerre et combattants d’Algérie, Tunisie et Maroc (FNCPG-CATM). Parmi les mesures acquises dans le domaine du droit à réparation, il convient de souligner la carte du combattant à quatre mois, la carte du combattant à cheval sur le 2 juillet 1962 – ce sont des moments importants qui ont permis de donner satisfaction à un grand nombre de camarades –, la retraite du combattant à l’indice 48 – ce n’est peut-être pas suffisant mais c’est malgré tout une avancée –, la retraite mutualiste, la valeur du point d’indice à 13,97 – comme cela a été souligné, c’est une augmentation de quelques centimes seulement, mais c’est le maintien de ces mesures, leur reconduction dans le budget 2016, qui sont importants. Un rapport en circulation il y a quelque temps avait de quoi nous inquiéter, mais il a heureusement fini dans un tiroir. Nous resterons néanmoins vigilants.

Des mesures nouvelles sont annoncées : carte du combattant pour les OPEX au bout de 120 jours – c’est mérité –, extension du bénéfice de la campagne double, élargissement du dispositif de majoration de la pension de cinquante points, et, pour l’action sociale de l’ONACVG, deux millions d’euros supplémentaires – remplaçant l’aide différentielle, ces deux millions seront-ils suffisants ?

La demi-part fiscale à soixante-quinze ans n’a pas encore été évoquée. C’est une mesure que nous devons faire avancer. Il ne faut pas non plus oublier les harkis, qui ont leur rôle à jouer, comme ils l’ont joué il y a cinquante ans. De même, il convient d’aider les soldats d’OPEX face aux difficultés qu’ils rencontrent de retour de mission.

Le centenaire de la bataille de Verdun et de la bataille de la Somme en 2016 – 300 jours de cycle commémoratif du 21 février au 21 décembre – recevra bien sûr toute notre attention.

Mme Anita Baudouin, secrétaire générale de la Fédération nationale de déportés et internés, Résistants et patriotes (FNDIRP). La FNDIRP rassemble toutes les catégories de victimes du nazisme et de ses complices vichystes, combattants de l’ombre, hommes et femmes persécutés au nom d’une idéologie raciste, patriotes Résistants à l’Occupation (PRO), familles de disparus, de fusillés, de massacrés. Elle se préoccupe depuis soixante-dix ans des intérêts de toutes ces personnes revenues des prisons et des camps de la mort, ainsi que de leurs familles, veufs, veuves et descendants. Notre objectif est d’assurer les droits que leur confère le code des pensions militaires d’invalidité et d’améliorer le quotidien de tous ceux qui souffrent encore des affres des conditions imposées par le régime hitlérien.

Aujourd’hui, soixante-dix ans plus tard, nous demandons qu’il soit attribué au conjoint survivant de l’invalide décédé qui percevait une pension d’au moins 40 % mais inférieure à 85 % une pension de réversion sans que le décès soit imputable aux invalidités reconnues ; et que les veuves ou veufs des PRO soient considérés comme veuves ou veufs de guerre et puissent, à partir de soixante-quinze ans, bénéficier de la demi-part fiscale supplémentaire.

La FNDIRP se préoccupe de ces veuves qui se sont dévouées pour assister, durant de longues années, de très grands invalides de guerre, anciens Résistants et déportés, et se trouvent démunies au moment du décès de leur conjoint. Nous souhaitons la mise en place d’un dispositif qui prenne en considération le niveau d’invalidité du grand invalide de guerre à la date de son décès, et demandons que les pensions de veuves soient réévaluées.

En ce qui concerne l’invalide lui-même, en cas de demande d’invalidité ou d’aggravation, nous souhaitons que, lors de la notification de concession ou de rejet d’une demande, les motifs de la décision soient systématiquement communiqués. Nous demandons aussi la revalorisation de la valeur du point de PMI, en accord avec les associations du monde combattant.

S’agissant des PRO, nous continuons de demander que leur soit attribué le titre de reconnaissance de la Nation, ce qui ne serait que justice puisque, dans les départements d’Alsace et de Moselle, il est déjà attribué aux « malgré nous ».

Enfin, nous demandons une nouvelle fois que le cas des orphelins de PRO soit traité dans le cadre du décret du 27 juillet 2004.

M. Michel Hadj, directeur général du Souvenir français. Le Souvenir français est une association mémorielle dont la mission première est d’entretenir les tombes des morts pour la France. La demande, répétée pendant des années par l’ancien directeur général du Souvenir français, le général Delbauffe, d’une revalorisation de la dotation allouée à notre association par l’ONACVG, a enfin été entendue, et cette dotation est passée au 1er janvier de 1,20 euro à 1,50 euro par tombe. Si cette somme augmentait chaque année de cinquante centimes, nous parviendrions à faire aussi bien que nos amis belges ou anglais.

Général Henri Pinard Legry, président de l’Association de soutien à l’armée française (ASAF). L’ASAF est une association strictement indépendante qui ne sollicite aucune subvention d’État. Elle est souvent aidée, notamment pour ses publications, par des partenaires privés et par quelques-unes des 500 associations adhérentes à l’ASAF.

En ce qui concerne le soutien aux anciens combattants, l’ASAF, qui est impliquée dans les travaux pilotés par l’UBFT « Les Gueules Cassées », la Fédération nationale André Maginot, l’UNC et l’ANOPEX, exprime son soutien total aux propositions émises et aux actions menées par les responsables de ces associations.

L’ASAF estime que la mémoire est un élément essentiel de l’identité et de la cohésion nationales. L’histoire de notre pays constitue un patrimoine qui doit être connu, expliqué et valorisé. Elle ne doit en aucun cas être instrumentalisée, occulté ou, pire encore, reniée. Vous comprendrez que l’ASAF rejette donc toute démarche de repentance et privilégie l’action pédagogique. C’est ainsi qu’en 2015 elle a dénoncé les propos de repentance tenus en Algérie au sujet des événements de Sétif. C’est dans cet esprit également qu’avec d’autres associations elle avait proposé au chef de l’État pour le Panthéon, en lieu et place de Jean Zay, marqué par un texte assez détestable sur l’emblème national, plusieurs noms de jeunes Résistants au comportement héroïque.

C’est aussi dans cet esprit que l’ASAF a édité un numéro hors-série consacré à la présence française en Indochine, que vous avez reçu, et un album valorisant le patrimoine photographique cédé par un de ses adhérents et illustrant le lien entre les soldats d’Algérie et ceux des OPEX, concrétisant ainsi le continuum des combattants anciens et actuels.

Pour 2016, l’ASAF soutiendra l’action nationale de commémoration des batailles de la Somme et surtout de Verdun, particulièrement symbolique pour notre pays. Elle souhaite qu’aucune réécriture de l’histoire n’ait lieu à cette occasion, occultant par exemple le nom de certains chefs militaires ayant conduit cette bataille décisive. Elle rappellera également l’opération de Suez, ignorée par la plupart des jeunes Français mais particulièrement riche d’enseignements opérationnels et stratégiques.

Enfin, le Cercle pour la défense des combattants d’AFN (CDCAFN), qui regroupe une vingtaine d’associations d’anciens combattants d’Afrique du Nord, et dont le délégué national est le président de l’ASAF, soutient l’association Soldis – pour « soldats disparus » – créée par l’un de ses membres. Cette association, agissant en liaison avec la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA), a pour but de rechercher le maximum d’informations sur les soldats français disparus en Algérie entre 1954 et 1962, soit environ 600, l’équivalent d’un bataillon. Elle se donne deux ans pour établir une liste fiable.

Par ailleurs, en liaison avec plusieurs historiens, le CDCAFN a relevé dans certains manuels scolaires des erreurs, des jugements et des oublis sur la guerre d’Algérie qui relèvent plus de l’idéologie marxiste que de la réalité historique. Il alertera donc les services de l’Éducation nationale et les éditeurs sur ces contre-vérités.

En ce qui concerne le lien armée-Nation, l’ASAF ne peut que se réjouir de la confiance que les Français manifestent envers leur armée, à plus de 80 %, bien que, dans le même sondage, nos compatriotes expriment la nécessité de moderniser rapidement ses matériels. Au-delà de ce chiffre, reconnaissons que les Français, qui côtoient pourtant leurs soldats au quotidien, dans le cadre de l’opération Sentinelle mais également pendant les opérations de secours menées lors des catastrophes naturelles, ne connaissent pas, ou connaissent peu, leur armée. L’information sur nos forces est encore très insuffisante, d’autant plus que les conflits sont complexes, lointains, et que la communication des armées se réduit, pour l’essentiel et depuis longtemps, à la communication du ministre. Peut-on exiger des chaînes publiques de télévision, largement subventionnées par l’État, des reportages plus nombreux sur l’organisation, le fonctionnement, l’équipement et l’emploi de nos armées ? Peut-on autoriser, voire inciter, les chefs d’état-major à s’exprimer à la télévision aux heures de grande écoute, pour expliquer directement aux Français, de façon simple et concrète, les capacités et l’emploi des forces, les atouts et les limites de notre armée, comme ils le font devant les membres de cette commission ?

Enfin, en ce qui concerne l’Éducation nationale, l’ASAF veillera à ce que les classes défense – une centaine actuellement – ne soient pas pénalisées par la réforme des collèges.

Alors que la Nation est engagée dans des combats longs et difficiles qui exigent une grande cohésion, il nous paraît indispensable que tous les citoyens aient une bonne connaissance des capacités et des besoins de leur armée. Les jeunes, notamment, le demandent. Cette information contribuerait aussi à améliorer la qualité de son recrutement, indispensable pour garantir sa valeur dans le futur.

M. Laurent Attar-Bayrou, président national de la Fédération nationale des anciens des missions extérieures – OPEX (FNAME-OPEX). Les soldats d’OPEX ne vont pas en OPEX par désœuvrement mais parce qu’ils sont convaincus de servir leur pays. On ne parlait pas de ces soldats il y a quelques années ; à présent qu’on en parle, évitons d’en donner une image qui ne correspond pas à la réalité. Ce ne sont pas des jeunes en rupture de ban.

Je remercie le législateur d’avoir complété le dispositif de la loi du 4 janvier 1993, en 2013 et par l’article 87 de la loi de finances de cette année. Le 1er octobre, les anciens des OPEX ont été mis à l’honneur. Toute une génération de combattants a ainsi été reconnue. Nous souhaitons que ce rite perdure dans le cadre d’une journée des OPEX.

En 2016, nous suivrons l’action mémorielle nationale, notamment sur les vingt-ans de l’épopée de l’opération Daguet dans le Golfe. Nous notons que cela fait huit mois que la commission mise en place au sujet du monument OPEX ne s’est pas réunie et que nous ne sommes plus informés des avancées de ce dossier.

Soucieux de la préservation des droits de ceux qui ont combattu et combattent pour la France, nous soutenons le groupe GT-Refonte, auquel nous participons. Nous souhaitons que l’administration et le législateur nous entendent et fassent droit à nos demandes.

L’ONACVG est un établissement essentiel pour les combattants d’hier et d’aujourd’hui, et nous nous félicitons qu’il reprenne sa place dans le dispositif d’accompagnement des blessés. Nous souhaitons qu’il s’investisse davantage dans la reconversion des militaires des OPEX et qu’une politique de labellisation de centres de formation soit conduite. Nous soumettrons à votre commission une demande de reconnaissance.

En cette année d’anniversaire de la reprise du pont de Vrbanja à Sarajevo, il convient de rappeler que plus d’une centaine de nos compagnons ont été faits prisonniers dans ce conflit, reconnus en tant que tels par les Nations unies et visités par la Croix-Rouge. Nous souhaitons qu’ils obtiennent le statut de prisonniers de guerre.

Fidèles à nos fondements, selon lesquels le statut de militaire ne consiste pas uniquement à porter un uniforme mais est avant tout un attachement à l’institution, nous souhaitons qu’un effort soit consenti envers nos camarades qui servent dans des conditions difficiles en raison soit d’une rotation trop importante des OPEX soit d’un manque de formation lui-même dû aux OPEX. Il conviendrait notamment d’améliorer leur équipement. Nous souhaitons que soit préservée l’indépendance de la France par un renforcement de la politique industrielle qui permette d’équiper nos forces avec du matériel français.

Mme la présidente Patricia Adam. Avant de passer la parole à mes collègues, je vous précise que la commission élargie qui examinera le budget des Anciens combattants se tiendra jeudi prochain et qu’il vous est possible d’y assister. Quant à la discussion en séance publique, elle aura lieu le jeudi suivant.

Mme Geneviève Gosselin-Fleury. Certains d’entre vous ont évoqué l’implication de leurs associations dans des actions d’information et dans un travail de mémoire auprès des enfants et de la jeunesse française. Pourriez-vous nous donner quelques exemples d’actions réalisées cette année ?

M. Régis Juanico. Nous avons adopté hier en séance publique, à l’initiative de la commission des Finances, un amendement qui abaisse de soixante-quinze à soixante-quatorze ans l’âge à partir duquel il est possible de bénéficier de la demi-part fiscale supplémentaire, ce qui coûtera à l’État 44 millions d’euros supplémentaires, pour une dépense fiscale qui s’élève déjà à 500 millions d’euros. Nous souhaitons que le Gouvernement ne revienne pas sur cette avancée par une seconde délibération.

En ce qui concerne les craintes formulées par certains d’entre vous au sujet des mesures sociales en faveur des conjoints survivants, il doit être bien entendu que, lorsque nous avons, l’an dernier, transformé l’aide différentielle en aide complémentaire, c’était avec une garantie de ressources correspondant au seuil de pauvreté, soit 987 euros, et avec l’idée de pouvoir étendre le dispositif aux anciens combattants eux-mêmes. Il est vrai, cela étant que l’évolution du dispositif vers un dispositif de droit commun, qui contraint les demandeurs à fournir à l’ONACVG un certain nombre de justificatifs de situation comporte des aléas, mais nous serons extrêmement vigilants sur ce point et avons déjà interrogé le secrétaire d’État aux Anciens combattants Jean-Marc Todeschini pour s’assurer que les deux millions de crédits supplémentaires octroyés à l’ONACVG – en hausse de 26 % depuis 2012 – permettront bien qu’aucun aucun conjoint survivant ne soit lésé et qu’un revenu minimum continue de leur être garanti.

M. Philippe Meunier. La transmission entre les générations du feu et l’intégration des participants aux OPEX au monde des anciens combattants sont à nos yeux essentielles, et l’idée d’y contribuer en ne parlant plus d’anciens combattants mais de combattants est une proposition intéressante. Je constate d’ailleurs que vos associations s’impliquent de plus en plus dans ce travail de transmission et d’intégration de la nouvelle génération du feu, qui incarne la relève du monde patriotique.

Mme Anita Baudouin. La FNDIRP intervient depuis longtemps auprès des jeunes. Je peux notamment citer le prix Marcel-Paul, qui récompensait un étudiant pour son mémoire, ou encore le Concours national de la Résistance et de la déportation, organisé dans les collèges et les lycées.

En cette année mémorielle du soixante-dixième anniversaire de la libération des camps, de très nombreuses manifestations ont eu lieu partout en France dans l’enseignement secondaire, voire dans l’enseignement primaire. Qu’il s’agisse de témoignages de survivants, d’expositions ou de colloques, nous organisons régulièrement des actions visant notamment à sensibiliser les jeunes générations.

Pour ce qui concerne l’éducation nationale, nous sommes également très vigilants sur le contenu des manuels d’histoire, l’enseignement récent de la période 1933-1945 ayant parfois tendance à malmener la chronologie.

M. Jacques Goujat. Il serait en effet intéressant de songer à modifier notre qualification d’anciens combattants. Pour faire avancer les choses, nos associations doivent consulter leurs organes délibérants, de façon à ce que nous réfléchissions à l’idée de rebaptiser l’ONAC en Office national des combattants : les anciens combattants ne sont-ils pas en effet des combattants de toujours ?

Mme la présidente Patricia Adam. Madame et messieurs, il me reste à vous remercier pour vos interventions respectives.

III. EXAMEN DES CRÉDITS

Après l’audition de M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État chargé des Anciens combattants et de la Mémoire, lors de la commission élargie (voir le compte rendu de la réunion du 22 octobre 2015 à 9 heures 30 (2)), la commission de la Défense examine, pour avis, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » pour 2016.

Article 24 : État B – Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

La commission examine l’amendement DN3 de M. Guilloteau.

M. Philippe Vitel. Lors de la précédente législature, nous avons répondu à l’anomalie que représentait la stagnation de la retraite du combattant depuis de nombreuses années. Nous avions donc enclenché une dynamique vertueuse de revalorisation de la retraite, pour arriver jusqu’à 48 points PMI.

Depuis 2012, cette dynamique s’est interrompue. Nous vous proposons donc, comme nous l’avions déjà proposé l’année dernière, de la reprendre, en augmentant la retraite du combattant de deux points en 2016.

M. Jean-David Ciot, rapporteur pour avis. Plutôt qu’à une mesure générale s’appliquant à tous les anciens combattants, le budget 2016 préfère accentuer l’effort en direction des publics les plus fragiles : les veuves des anciens combattants, les anciens combattants les plus démunis ou encore les conjoints d’anciens membres des forces supplétives. J’émettrai donc un avis défavorable.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission rejette l’amendement DN3.

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable sur les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

ANNEXE

Liste des personnes auditionnées par le rapporteur pour avis

(Par ordre chronologique)

—  Mme Myriam Achari, directrice de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la Défense, et M. Renaud Ferrand, sous-directeur de la mémoire et de l’action éducative ;

—  M. Michel Sabourdy, vice-président délégué de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA) ;

—  M. le général (2s) Paul Dodane, secrétaire général de l’Association nationale des participants aux opérations extérieures (ANOPEX) ;

—  M. Joseph Perez, président du Centre de documentation historique sur l’Algérie (CDHA), et M. Félix-Jean Vallat, représentant du CDHA à Paris ;

—  M. Jacques Goujat, président de l’Union française des associations de combattants et victimes de guerre (UFAC) ;

—  M. Pierre Saint-Macary, président de l’Union nationale des combattants (UNC), et M. Éric Euzen, directeur du service juridique et social de l’UNC ;

—  M. le médecin général-inspecteur Christian Plotton, directeur de l’Institution nationale des Invalides (INI), et M. le lieutenant-colonel Joël Orvoen, adjoint au directeur ;

—  Mme Rose-Marie Antoine, directrice générale de l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONAC-VG), et M. Frédéric Charlet, directeur de projet auprès de la directrice générale ;

—  Mme Gisèle Grosz, membre du conseil d’administration de l’Union fédérale des associations françaises d’anciens combattants, victimes de guerre et des jeunesses de l’Union fédérale (UF) ;

—  M. François Le Puloc’h, directeur du service national, et M. l’adjudant-chef Frédéric Boucly, chef du bureau des études générales ;

—  M. Slimane Djera, président du collectif des harkis du pays d’Aix-en-Provence ;

—  Mme Khadra Safrioune, présidente de l’association des harkis et des rapatriés d’Algérie du département de l’Aube et de Bourgogne ;

—  M. Kader Benhabreuche, président des associations de harkis de Fréjus et Saint-Raphaël.

© Assemblée nationale

1 () Article 99 de la loi de finances pour 2013.

2 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/commissions_elargies/cr/