Accueil > Travaux en commission > Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 27 mai 2014

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 61

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, Président

– Suite de l’examen du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l'individualisation des peines (n° 1413) (M. Dominique Raimbourg, rapporteur)

La séance est ouverte à 16 heures 15.

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, président.

La Commission poursuit l’examen, sur le rapport de M. Dominique Raimbourg, du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l'individualisation des peines (n° 1413).

Section 2 : Dispositions favorisant le recours aux modes de personnalisation de la peine

Article 5 (art. 132-18-1, 132-19-1, 132-19-2, 132-20-1 et 132-24 du code pénal ; art. 362 et 706-25 du code de procédure pénale ; art. 20, 20-2, 20-3 et 48 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945) : Suppression des peines minimales prévues pour les récidivistes et les auteurs de violences aggravées

La Commission examine les amendements identiques CL107 de M. Georges Fenech, CL243 de M. Éric Ciotti et CL405 de M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Georges Fenech. Monsieur le président, madame la garde des Sceaux, mes chers collègues, je regrette que vous supprimiez les peines plancher, car vous envoyez là un très mauvais signal aux délinquants multirécidivistes. L’argument avancé par la garde des Sceaux et le rapporteur, selon lequel l’automaticité constituerait le défaut majeur des peines plancher ne tient pas, puisque le nombre de peines de ce type prononcées chaque année est en diminution : il est passé de 50 % en 2007 à 37 % en 2011. Les juges se sont donc parfaitement approprié ce dispositif.

Différentes études montrent que la récidive ne date pas d’aujourd’hui et qu’elle augmente progressivement, de même que la réitération. Il me paraît d’autant plus nécessaire de conserver l’aggravation des peines pour les récidivistes que toutes les études de criminologie britanniques et françaises ont établi que seuls 5 % des délinquants sont responsables d’environ 50 % des crimes et délits. Je ne comprends donc pas pourquoi vous vous obstinez à vouloir supprimer un dispositif qui n’est plus remis en cause par personne.

M. Jean-Frédéric Poisson. L’une des raisons avancées par le Gouvernement pour abroger le dispositif des peines plancher est qu’il serait contraire au principe d’individualisation des peines. Or, dans sa décision n° 2007-554 du 9 août 2007, le Conseil constitutionnel a considéré que ce principe ne faisait pas obstacle à ce que le législateur adopte un tel dispositif. D’autre part, le Gouvernement explique que les peines plancher seraient à l’origine d’une augmentation massive des tensions et qu’elles relèveraient d’un principe du « tout-carcéral ». Or les statistiques ne permettent pas d’étayer cette thèse. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.

M. Dominique Raimbourg, rapporteur. Avis défavorable. Tout d’abord, le dispositif des peines plancher est tout à fait marginal et n’a pas eu d’effets importants : il n’a représenté que 42 000 condamnations en cinq ans, à rapporter aux 3 millions de condamnations correctionnelles prononcées dans le même temps.

Ensuite, bien que ce soit à la suite d’un fait criminel – le viol d’un jeune garçon par un sortant de prison – que ce dispositif a été adopté dans l’urgence en 2007, on l’a appliqué non seulement aux faits criminels, mais également aux faits délictuels. Nous n’avons procédé à aucune évaluation sérieuse permettant d’affirmer que les peines prononcées par les tribunaux étaient notoirement insuffisantes. La fréquentation des tribunaux laisse au contraire penser que les peines prononcées sont sévères et que les magistrats jugent les faits à l’aune de leur gravité.

Enfin, les rapports d’évaluation des peines plancher rendus par nos collègues Christophe Caresche et Guy Geoffroy en 2009, d’une part, et par M. Jean-Paul Jean à la fin de 2013 pour la conférence de consensus sur la prévention de la récidive, d’autre part, vont dans le même sens. Les auteurs du rapport de 2009 avaient estimé qu’il était un peu tôt pour évaluer le dispositif et qu’ils ne disposaient pas des outils statistiques pour le faire. Ils avaient également souligné les difficultés d’application de la mesure, le fait que ces peines portent surtout sur les atteintes aux biens et la crainte de disparités régionales. Quant à Jean-Paul Jean, il insistait sur la réticence des magistrats à appliquer les peines plancher et sur l’importance des disparités existant d’un tribunal à l’autre.

Par conséquent, ce dispositif étant marginal, peu évalué et critiqué dans ces rapports d’application, rien ne justifie qu’on se batte avec une telle énergie en sa faveur. Les peines plancher ne sont pas le nec plus ultra de la lutte contre la délinquance et la récidive.

M. Guy Geoffroy. Les arguments du rapporteur devraient le conduire à défendre la solution inverse de celle qui nous est proposée. L’exposé des motifs du projet de loi explique que les peines plancher ont aggravé la surpopulation carcérale. Or le rapporteur indique que le dispositif est marginal. Qui croire ?

Certes, Christophe Caresche et moi-même avons pu écrire que l’impact de ce dispositif a été difficile à mesurer, mais il ne s’agissait pas d’une critique systématique. Et, si nous avons confirmé que le dispositif en tant que tel ne permettait pas de réduire la récidive, c’est de récidive légale que nous parlions. Or on entend aujourd’hui que, comme cette mesure n’a pas produit les effets attendus, il est urgent de la supprimer – comme si l’on ne pouvait laisser aux magistrats le temps de prendre en compte une évolution législative qui les trouble. De fait, ces derniers ont fait savoir que, comme la mesure ne leur plaisait pas, ils n’allaient peut-être pas l’utiliser. Ils tiennent d’ailleurs ce type de propos dans d’autres domaines. Ainsi, les juges aux affaires familiales en formation continue à l’École nationale de la magistrature se disent réticents à appliquer la loi sur l’ordonnance de protection. En déduit-on pour autant qu’il faut la supprimer ? Au contraire, on a récemment décidé qu’elle devait être mieux connue et mieux appliquée par les magistrats. Leur mission consiste à appliquer la loi, qu’elle leur plaise ou non.

Une fois de plus, vous êtes animés par une volonté a priori, systématique, idéologique, injustifiée, de supprimer une mesure mise en place il y a plusieurs années. Peut-on parler d’automaticité lorsque le juge n’est amené à appliquer la possibilité qui lui est offerte par la loi de 2007 que dans un cas sur trois ?

Vous sembliez dire ce matin que c’était ce projet de loi qui introduisait l’individualisation de la peine dans notre droit, alors qu’il s’agit d’un principe constitutionnel déjà ancien. Nous sommes d’ailleurs d’accord avec le rapporteur lorsqu’il dit que, au lieu de se restreindre au champ de la récidive légale, il vaudrait mieux tenir compte de la multiplication de la commission d’infractions et étendre ce champ à la réitération. Tous ces éléments plaident en faveur du maintien, voire de l’extension, du dispositif des peines plancher qui n’ont jamais entravé l’individualisation des peines.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il est surprenant d’entendre le rapporteur affirmer que, puisque nous sommes incapables d’évaluer précisément les effets de ce dispositif, il faut le supprimer. Je comprendrais qu’on dise cela pour un dispositif dont l’évaluation aurait permis de montrer qu’il ne fonctionne pas. Mais, en l’occurrence, ce n’est pas le cas. Le rapporteur a également invoqué les disparités dans l’application des peines plancher, mais quel texte n’en subit pas ? Si l’on est incapable d’évaluer les effets d’un dispositif, il faut le maintenir. Le rapporteur a d’ailleurs précisé que cela ne représentait qu’un pourcentage marginal des condamnations. Rien ne justifie par conséquent la suppression du dispositif, en dehors de considérations de principe qui n’ont rien à voir avec son efficacité réelle.

M. Alain Tourret. Il ne s’agit pas pour moi d’un problème d’évaluation, mais d’une mesure emblématique, symbolique et de portée philosophique. Tous les congrès de magistrats ou d’avocats auxquels je me suis rendu se sont prononcés à l’unanimité contre le dispositif des peines plancher. La question n’est pas de savoir s’il est efficace ou pas : le dispositif est clivant et j’y suis totalement opposé sur le plan philosophique.

La Commission rejette les amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ensuite les amendements identiques CL302 de M. Éric Ciotti et CL413 de M. Jean-Frédéric Poisson.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL229 de Mme Colette Capdevielle et CL196 de M. Alain Tourret.

Mme Colette Capdevielle. Cet amendement vise à maintenir les dispositions de l’article 132-20-1 du code pénal, à l’exception de la référence à la récidive légale qui serait supprimée. Il nous paraît en effet regrettable, tant pour le délinquant que pour les victimes, de faire disparaître tout avertissement solennel du président de la juridiction correctionnelle concernant les conséquences éventuelles d’une nouvelle condamnation suivant une condamnation avec sursis, qu’il y ait récidive ou réitération. Il est important que la personne condamnée soit avertie pour prendre en compte, pour l’avenir, les conséquences éventuelles d’un casier judiciaire chargé. Nous proposons donc de rédiger de façon plus adaptée l’article 132-20-1 initialement supprimé, afin de permettre au juge de rappeler le sens de la peine prononcée et de ses incidences pour l’avenir.

M. Alain Tourret. Je retire l’amendement CL196 au profit de l’amendement CL229.

M. le rapporteur. Avis favorable à l’amendement CL229.

M. Georges Fenech. Nous nous associons aux propos qui viennent d’être tenus, jugeant cet amendement tout à fait opportun.

L’amendement CL196 est retiré.

La Commission adopte à l’unanimité l’amendement CL229.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL14 du rapporteur.

En conséquence, les amendements CL415 et CL416 de M. Jean-Frédéric Poisson deviennent sans objet.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL417, CL418 et CL419 de M. Jean-Frédéric Poisson.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, elle adopte l’amendement de précision CL230 de Mme Élisabeth Pochon.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement CL420 de M. Jean-Frédéric Poisson.

Enfin, la Commission adopte l’article 5 modifié.

Après l’article 5

La Commission examine les amendements identiques CL108 de M. Georges Fenech, CL244 de M. Éric Ciotti et CL544 de M. Yannick Moreau.

M. Georges Fenech. La définition de la récidive légale est sans doute trop précise : cette dernière n’est avérée, en matière délictuelle, qu’en cas de condamnation définitive suivie d’une nouvelle infraction identique à la précédente ou assimilable à celle-ci, commise dans les cinq ans suivant l’expiration ou la prescription de la peine. Le délinquant en état de récidive légale encourt alors le doublement des peines maximales prévues par le code pénal.

Les autres infractions commises après une condamnation définitive relèvent de la notion de réitération et n’emportent pas d’effets particuliers sur le quantum des peines encourues. Afin de renforcer l’efficacité de la réponse pénale, il est proposé d’appliquer, sous certaines conditions, des peines minimales aux infractions commises en réitération.

Ces dispositions, issues de la proposition de loi de nos collègues Éric Ciotti, Philippe Goujon et Guillaume Larrivé, ont pour objet de permettre de mieux sanctionner les parcours délinquants caractérisés par la multiplication des agissements venant troubler l’ordre public selon différentes modalités, attendu que seuls 5 % des délinquants dits « prolifiques » commettent 50 % des actes de délinquance.

M. Jean-Frédéric Poisson. L’amendement CL244 est défendu.

M. Yannick Moreau. L’amendement CL544 l’est également.

M. le rapporteur. Avis défavorable à l’exception d’un point d’accord, qui porte sur le fait que la notion de récidive ne correspond plus à ce qu’en comprennent nos concitoyens. Je ne souhaite cependant pas en modifier la définition, dans la mesure où nous ne voulons pas aborder la question de l’échelle des peines, mais aussi parce que, avant de procéder à une telle modification, il conviendrait de vérifier si les maxima de cette échelle ne sont pas trop bas dans certains cas.

S’agissant de l’affirmation selon laquelle 5 % des délinquants seraient auteurs de 50 % des délits, je ne connais pas l’étude anglaise à laquelle vous faites référence, mais, quant à l’étude française établie par Sebastian Roché, elle ne porte, si ma mémoire est bonne, que sur la délinquance auto-révélée des mineurs. Je ne dis pas que cette étude est inintéressante, mais qu’elle reste partielle.

M. Jean-Frédéric Poisson. J’ai cru comprendre que le rapporteur n’était pas hostile au principe qui sous-tend cet amendement, mais que, faute d’avoir pu procéder aux analyses complémentaires qui lui sont nécessaires, il ne souhaitait pas donner un avis favorable. Devons-nous considérer que le temps qui nous sépare de l’examen du texte en séance publique permettra au rapporteur de se forger une opinion, de sorte que l’amendement soit susceptible de connaître un meilleur sort lorsque nous le présenterons dans l’hémicycle ?

M. le rapporteur. Non. J’ai indiqué que j’étais favorable à une réflexion sur la notion de récidive. S’agissant de peines plancher que vous proposez d’introduire, je ne pense pas qu’elles soient utiles. Quant au temps qui nous sépare de l’examen du texte en séance publique, il me paraît trop court pour que je puisse procéder à la vérification précitée.

M. Philippe Goujon. Dans la mesure où nous avons déjà adopté un texte de loi en première lecture sous la législature précédente, il nous suffira, si cet amendement n’est pas adopté, de le faire réinscrire à l’ordre du jour de notre assemblée.

Le rapporteur s’interrogeait sur l’étude criminologique anglaise que nous avons mentionnée. Permettez-moi de citer quelques-uns des chiffres qui m’ont été communiqués : dans la capitale intra muros, un millier de « réitérants » ont commis chacun entre cinquante et cent faits délictueux. Sur le fichier du système de traitement des infractions constatées, qui concerne l’ensemble du territoire national, 19 000 personnes sont citées plus de cinquante fois pour réitération. Or, malgré ces chiffres considérables, la réitération n’est pas prise en compte, puisque non seulement vous n’étendez pas les peines plancher aux réitérants, mais vous les supprimez pour les récidivistes.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient aux amendements identiques CL301 de M. Éric Ciotti, CL383 de M. Yannick Moreau et CL558 de M. Sébastien Huyghe.

M. Éric Ciotti. L’amendement CL301 vise à étendre le principe des peines plancher aux amendes afin d’en renforcer le caractère dissuasif et donc de limiter la récidive.

M. Yannick Moreau. L’amendement CL383 est défendu.

M. Sébastien Huyghe.  L’amendement CL558 vise lui aussi à étendre les peines plancher aux amendes – ce plancher étant limité à 30 %.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

Article 6 (art. 132-29, 132-35 à 132-39 et 132-50 du code pénal ; art. 735 du code de procédure pénale) : Suppression du caractère automatique de la révocation du sursis simple – Suppression du caractère automatique de l’exécution d’une première peine d’emprisonnement assortie d’un sursis avec mise à l’épreuve en cas de révocation totale d’une seconde peine de même nature

La Commission est saisie des amendements identiques CL109 de M. Georges Fenech, CL245 de M. Éric Ciotti, CL283 de M. Bernard Gérard, CL406 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL496 de M. Yannick Moreau et CL532 de M. Sébastien Huyghe.

M. Georges Fenech. L’article 6 du projet de loi prévoit que la révocation du sursis simple, en cas de nouvelle condamnation dans les cinq ans, ne sera plus automatique, mais devra être spécialement motivée par la juridiction prononçant la nouvelle condamnation. Il prévoit aussi la suppression du caractère automatique de l’exécution d’une première peine d’emprisonnement assortie d’un sursis avec mise à l’épreuve, en cas de révocation totale d’une seconde peine de même nature. Vous inversez ainsi le principe de la révocation du sursis en cas de nouvelle condamnation, pour prévoir le maintien du sursis par principe. C’est là un véritable blanc-seing aux récidivistes et aux réitérants.

L’objectif de cet article est de supprimer un automatisme – alors même que le texte en crée au moins un pour les libérations conditionnelles – qui n’en avait que le nom, puisque les magistrats ont déjà la possibilité d’y déroger. Il suffit d’interroger les juridictions et les professionnels du monde de la justice pour apprendre que la révocation des sursis n’est pas automatique et que, au contraire, il est possible d’accumuler des peines avec sursis, ce qui est tout à fait préjudiciable à la crédibilité de la justice.

On peut se demander enfin si l’opportunité de cet article ne vient pas de ce qu’il permettra de faire diminuer automatiquement le taux de récidive, qui n’est en réalité rien d’autre qu’un taux de condamnation de personnes déjà condamnées. Ainsi, moins de récidivistes seront-ils incarcérés et le ministère de la Justice pourra faire état de chiffres trompeurs sur la récidive.

M. Éric Ciotti. L’amendement CL245 vise à supprimer l’article 6, qui me paraît dangereux : il prévoit en effet que la révocation du sursis simple, en cas de nouvelle condamnation dans les cinq ans, ne sera plus automatique, mais devra être spécialement motivée. Renforçant l’esprit qui sous-tend ce projet de loi, cette disposition rendra illisible le prononcé des peines pour les victimes. Dans le cas de l’agression d’un individu par une personne condamnée à une peine de prison avec sursis et qui récidive, la victime pourrait en effet s’attendre à ce qu’une réparation soit apportée à la société, vu le dommage qu’elle a subi. Or il n’en sera rien, puisque cette révocation ne sera plus automatique.

Cette mesure revient une fois de plus à diminuer par tous les moyens le nombre de détenus aujourd’hui en prison : sur la base des chiffres de 2010, on passerait de 20 400 à 9 600 sursis révoqués. On éviterait ainsi, si cet article était adopté, le prononcé de près de 10 000 courtes peines d’emprisonnement, ce qui contribuerait à l’affaiblissement de cette force de dissuasion qui figure au cœur de notre système pénal actuel.

M. Jean-Frédéric Poisson. L’amendement CL406 est défendu.

M. Yannick Moreau. Le caractère non automatique de la révocation du sursis simple représente un encouragement à la récidive. Cela constitue donc de ce fait un nouveau coup porté aux victimes qui verraient les coupables curieusement absous de leur peine.

M. Sébastien Huyghe. L’amendement CL532 est défendu.

M. le rapporteur. Avis défavorable. J’entends dire que les victimes pourraient être déçues qu’une peine ne soit pas prononcée. Mais n’oubliez pas que la moitié des infractions ne font pas de victime directe – notamment en cas de conduite sous l’empire de l’alcool ou sans permis, ou en cas d’usage ou de trafic de stupéfiants –, ce qui ne veut pas dire non plus qu’il s’agisse là de comportements socialement acceptables. Associer systématiquement la victime au prononcé de la peine revient à commettre une erreur statistique et une erreur de fond. La victime doit être placée dans sa position de victime, reconnue dans ses droits et indemnisée. Mais la peine est normalement indifférente à la victime, sans quoi vous empêchez que le procès soit un temps d’apaisement.

Ensuite, nous avons évoqué ce matin les difficultés que présentait la révocation automatique du sursis simple : compte tenu des délais d’inscription au casier judiciaire, le juge qui prononce une deuxième condamnation peut ne pas savoir qu’il révoque un sursis précédemment prononcé.

Par ailleurs, aucune motivation particulière n’est nécessaire pour permettre au juge de révoquer le sursis. Celui-ci en a la possibilité dans les mêmes conditions que dans le cas du sursis avec mise à l’épreuve. Cette question ne concerne pas non plus la récidive légale, la révocation pouvant intervenir dans le cadre d’une nouvelle condamnation hors situation de récidive légale en cas de nouvelle infraction.

Enfin, s’agissant des chiffres avancés par M. Ciotti, je ne vois pas comment l’on pourrait connaître à l’avance le nombre de sursis qui seront révoqués par le juge. Nous ne sommes nullement obsédés par l’idée de vider les prisons ! Simplement, nous voulons un système pénal efficace.

M. Guy Geoffroy. J’attire votre attention sur l’effet combiné des articles 5 et 6 au regard du titre du projet de loi, à savoir la prévention de la récidive. En l’état du droit, un délinquant qui commet un premier acte de délinquance bénéficie d’un sursis, autrement dit d’une nouvelle chance. L’idée même du sursis sous-entend que, en cas de récidive, il n’y aura pas de nouvelle chance. Ce serait accepter un affaiblissement, voire une disparition de l’autorité, une perte de repères et l’écroulement de l’organisation de la société, comme cela arrive dans certains établissements scolaires, où l’on ne prend plus de décisions par peur d’en prendre et où l’autorité disparaît, cédant la place à une pagaille généralisée.

Avec l’article 6, vous annoncez au délinquant, qui sait qu’il pourra avoir un sursis s’il est primo-délinquant, donc qu’on accepte de lui donner sa chance, que tout cela n’est que du baratin, puisqu’il n’y aura pas d’automaticité de révocation de cette chance s’il recommence.

Vous y ajoutez l’article 5, qui supprime les dispositions avertissant le délinquant qui serait tenté par la récidive qu’une peine minimale lui sera appliquée, sauf si le juge décidait de ne pas appliquer les dispositions en question.

Bref, il vous sera difficile de faire comprendre à nos concitoyens que votre objectif est la prévention de la récidive…

La Commission rejette les amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL468 et CL469 de M. Jean-Frédéric Poisson.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL16 du rapporteur.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL471 et CL472 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL497 de M. Yannick Moreau, CL473 et CL474 de M. Jean-Frédéric Poisson, les amendements identiques CL475 de M. Jean-Frédéric Poisson et CL498 de M. Yannick Moreau, et les amendements CL476 et CL478 de M. Jean-Frédéric Poisson.

La Commission adopte l’article 6 modifié.

Article additionnel après l’article 6 (art. 132-41, 132-44, 132-45 et 132-52 du code pénal) : Modifications au régime de la peine d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve

La Commission examine l’amendement CL17 rectifié du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement apporte plusieurs modifications au régime de la peine d’emprisonnement assortie du sursis avec mise à l’épreuve (SME). Il supprime une disposition qui limite les possibilités du juge de l’application des peines (JAP) de prononcer un SME à l’encontre d’une personne en état de récidive légale. Il remplace l’obligation pour les condamnés à un SME d’obtenir l’autorisation préalable du JAP pour se rendre à l’étranger par une obligation de l’informer de ce projet de déplacement, sauf si le JAP a maintenu l’obligation d’obtenir une autorisation préalable. Il permet au JAP d’obliger un condamné à s’inscrire et à se présenter aux épreuves du permis de conduire. Enfin, il permet la révocation partielle d’un SME après expiration du délai d’épreuve, modification technique qui nous a été demandée à plusieurs reprises par les juges de l’application des peines.

M. Georges Fenech. Cela équivaut à donner un pouvoir général au JAP. Vous faites droit à cette revendication ; c’est une remise en cause des condamnations prononcées par les tribunaux.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL151 de M. Sergio Coronado tombe.

Article additionnel après l’article 6 (art. 132-45 du code pénal) : Possibilité d’interdire à un condamné à une peine d’emprisonnement assortie du sursis avec mise à l’épreuve de prendre part à des jeux d’argent et de hasard

La Commission est saisie de l’amendement CL250 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à préciser l’obligation mentionnée au 10° de l’article 132-45 du code pénal, qui prévoit que le condamné peut se voir interdire « d’engager des paris, notamment dans les organismes de paris mutuels ». Cette obligation nous semble quelque peu dépassée à l’heure d’internet. Mieux vaudrait reprendre le terme de « jeux d’argent et de hasard » qui figure dans la loi du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Après l’article 6

Puis elle examine l’amendement CL251 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à compléter l’obligation, prévue au 11° de l’article 132-45 du code pénal, de « ne pas fréquenter de débits de boissons ». Là aussi, soyons cohérents. On peut donner libre cours à une addiction à l’alcool sans fréquenter les débits de boissons : il suffit de passer commande ou d’acheter des bouteilles ! Nous proposons donc d’élargir l’interdiction de fréquenter des débits de boissons à une interdiction d’achat et de consommation de boissons alcoolisées.

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’intention est louable, mais l’interdiction impossible à contrôler.

M. Sergio Coronado. Pas plus que l’absence de fréquentation des débits de boissons…

La Commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 6 (art. 132-49 du code pénal) : Suppression de la limitation du nombre de révocations partielles du sursis avec mise à l’épreuve

Elle en vient à l’amendement CL168 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Le premier alinéa de l’article 132-49 du code pénal prévoit que « la révocation partielle du sursis ne peut être ordonnée qu’une fois ». Cette limitation ne se justifie pas et peut être contre-productive : de nombreux juges hésitent à procéder à une révocation totale des sursis, et ne la prononcent donc pas. Or il importe de permettre une réelle souplesse en matière de désistance et de suivi des condamnés. C’est pourquoi cet amendement supprime cette limitation.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Après l’article 6

Puis elle examine l’amendement CL150 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il est possible de convertir une peine de prison inférieure à six mois en travail d’intérêt général (TIG) d’une durée de 20 à 210 heures. La conversion des mois de prison en heures de TIG est d’une durée très variable en fonction des juges et des condamnés concernés. Une étude récente, fondée sur un échantillon réduit de quarante-cinq conversions, évalue la conversion en TIG à 58,7 heures par mois de prison prononcé. Mais, dans de rares cas, un mois de prison peut être converti en 210 heures de TIG, ce qui est manifestement inadapté. Nous proposons donc de limiter la conversion des peines de prison en TIG à 150 heures par mois de prison, soit 35 heures par semaine.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le TIG n’est pas équivalent à la prison. Ce sont des heures de travail, qui peuvent être effectuées sur plusieurs mois.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL312 de M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Cet amendement tend à intégrer dans le projet de loi le dispositif visant à interdire aux criminels et aux délinquants sexuels de s’établir dans la commune de résidence de leur victime. Nous proposons que cette peine complémentaire d’interdiction de séjour à proximité de sa victime, qui existe déjà, devienne automatique pour tous les criminels et délinquants sexuels condamnés sur le fondement des articles 222-22 à 222-27 du code pénal, sauf dérogation expressément motivée par le tribunal.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à ce nouvel automatisme.

La Commission rejette l’amendement.

Article 7 (art. 132-25, 132-26-1 et 132-27 du code pénal ; art. 474 et 723-15 du code de procédure pénale) : Abaissement des quantums de peine aménageable ab initio par la juridiction de jugement et après la condamnation, pour les condamnés libres, par le juge de l’application des peines

La Commission est saisie des amendements identiques CL134 de M. Sergio Coronado, CL197 de M. Alain Tourret et CL499 de M. Yannick Moreau.

M. Sergio Coronado. L’article 7 abaisse les seuils d’emprisonnement pour lesquels il est possible d’ordonner une mesure d’aménagement de la peine avant incarcération de deux ans à un an pour les récidivistes et d’un an à six mois pour les non récidivistes. Il est contraire à l’objet du texte, qui est de permettre une meilleure prévention de la récidive et une individualisation des peines. Les courtes peines de prison sont inefficaces pour prévenir la récidive, car elles coupent le condamné de l’emploi, du logement et de sa famille ; les courtes incarcérations ne permettent pas de mettre en place de véritables projets pour lutter contre les causes de l’infraction. En outre, cet article entraînera une hausse des incarcérations dans des prisons déjà surpeuplées. Nous proposons donc de le supprimer.

M. Alain Tourret. Le principe d’aménagement de la peine ne saurait être remis en cause pour les peines comprises entre un et deux ans de prison ferme – qui sont très nombreuses. Il serait paradoxal de vouloir modifier la loi pénitentiaire de 2009, qui n’a pas seulement pris en compte les problèmes relatifs à la surpopulation carcérale, mais les effets néfastes de la peine pour les individus condamnés jusqu’à deux ans de prison ferme. De même, l’abaissement à six mois du seuil aménageable pour les condamnés en état de récidive est contraire au principe d’aménagement des peines : la plupart des récidivistes seraient exclus du principe d’aménagement, puisque la durée moyenne des peines infligées pour les délits en état de récidive est de 11,3 mois. Je sais que M. le rapporteur va nous proposer de réécrire cet article, mais je tenais à attirer votre attention sur ce point.

M. Yannick Moreau. L’article 7 vise à modifier le code pénal de telle sorte que les aménagements de peine soient possibles plus tôt qu’aujourd’hui. Il vise donc à faire de l’aménagement de peine la règle, et non plus l’exception. Il n’est en outre pas acceptable que la faible capacité des lieux privatifs de liberté soit l’élément déterminant de notre politique pénale. C’est pourquoi je demande la suppression de cet article.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il me semble que vous faites un contresens sur l’article, monsieur Moreau.

M. le rapporteur. En effet. Cet article concerne l’aménagement de peine pour les personnes libres. Le seuil d’aménagement, qui était autrefois d’un an, a été porté à deux ans par la loi pénitentiaire. Nous proposons de le ramener à un an. Il ne s’agit pas d’appréhender les peines de façon idéologique ou abstraite, mais de corriger une situation de manière pragmatique. La purge du casier judiciaire consiste, lorsqu’on a procédé à l’arrestation ou à la condamnation d’une personne, à vérifier s’il n’existe pas de peines qui n’auraient pas été exécutées, en remontant parfois plusieurs années en arrière. Je vous proposerai tout à l’heure, dans un autre amendement, de fixer le seuil à un an, y compris pour les récidivistes – nous maintenons donc le niveau qui était celui de la loi pénitentiaire. Lorsqu’on dépasse le seuil d’un an, en étant toutefois inférieur à deux ans, s’il s’agit d’un cumul de peines, c’est-à-dire de peines anciennes n’ayant pas été mises à exécution, le JAP peut, par une décision spécialement motivée par les circonstances de l’insertion ou des circonstances particulières, aménager ce cumul de peines. Il s’agit de dispositions transitoires : la suppression de la révocation automatique des sursis simples devrait permettre de ne plus avoir à procéder à des purges de casier.

Je donne un avis défavorable à ces amendements.

L’amendement CL499 est retiré.

La Commission rejette les amendements CL134 et CL197.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL64 du rapporteur et CL165 de M. Sergio Coronado.

M. le rapporteur. Je vous ai présenté l’amendement CL64 en donnant mon avis sur les précédents.

M. Sergio Coronado. Mon amendement CL165 est un amendement de repli.

M. le rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement CL165, qui est satisfait par le mien.

M. Georges Fenech. Dans l’exposé sommaire, le rapporteur juge « cohérent que les récidivistes encourent une peine plus sévère et soient sanctionnés plus lourdement que les primo-condamnés ». Certes, mais cela me paraît contraire à la philosophie de ce texte.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Le but du débat en commission étant de connaître les positions des uns et des autres et de faire progresser la réflexion, je ne doute pas que ce débat resurgira en séance publique.

L’amendement CL165 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL64.

L’article 7 est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CL534 de M. Sébastien Huyghe, CL500 et CL501 de M. Yannick Moreau tombent.

Après l’article 7

La Commission examine les amendements CL135 et CL136 de M. Sergio Coronado, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Sergio Coronado. Une récente étude conduite sur une centaine de comparutions immédiates a dressé un constat alarmant sur ce qui s’apparente à une justice d’« abattage ». En moyenne, les affaires sont jugées en trente-six minutes ; seules 2 % font l’objet d’une relaxe, alors que 57 % aboutissent à une peine de prison ferme. Dans 80 % des cas, les juges suivent les réquisitions du parquet.

Trop de délits font aujourd’hui l’objet d’une comparution immédiate. Il faut absolument que les affaires les plus graves puissent être jugées dans de meilleures conditions. L’amendement CL135 vise donc à revenir à la situation d’avant la loi de 2002, en limitant la comparution immédiate aux délits pour lesquels la peine encourue est inférieure à sept ans de prison ; l’amendement CL136 vise à aligner les conditions d’incarcération des personnes condamnées en comparution immédiate sur le droit commun.

M. le rapporteur. Avis défavorable, mais à regret.

J’invite tous ceux qui le peuvent à aller assister à des audiences de tribunaux. Ceux qui pensent que les juges ne sont pas assez sévères sortiront convaincus du contraire. Lorsqu’on assiste à une audience de comparution immédiate, on est souvent surpris – surtout dans les tribunaux qui comportent une chambre spécialisée dans les comparutions immédiates – de la rapidité avec laquelle les affaires sont jugées et de la sévérité des condamnations prononcées. Compte tenu des difficultés que connaît aujourd’hui notre appareil judiciaire, il me semble que c’est l’un des rares dispositifs qui fonctionne de façon à peu près satisfaisante. Surtout, il montre à nos concitoyens – sans doute davantage en province – que la justice passe. On apprend les faits divers dans la presse écrite ou audiovisuelle, puis les condamnations qui sont prononcées. Cela donne à nos concitoyens un sentiment de sécurité à l’encontre duquel il ne faut pas aller. Lorsque nous nous serons dotés d’un appareil de police et de justice et d’une administration pénitentiaire fonctionnant dans des conditions un peu plus sereines et avec un peu plus de moyens, nous pourrons nous poser la question. Mais, tant qu’il faudra attendre plusieurs mois pour qu’une infraction soit jugée, il nous faudra conserver ce système, aussi insatisfaisant puisse-t-il apparaître parfois.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle est saisie de l’amendement CL255 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement propose de procéder à une expérimentation des juridictions résolutives de problèmes, qui existent dans de nombreux pays, notamment au Canada. Présidées par des magistrats spécialement formés, sous l’autorité d’un juge unique spécialisé dans un type de délit, par exemple la délinquance routière, les drogues ou les violences conjugales, elles rassemblent l’ensemble des acteurs concernés par le suivi du condamné. Ceux-ci sont présents dès le prononcé de la peine, afin d’éviter toute déperdition et d’assurer un fonctionnement coordonné et optimal des différents acteurs.

L’expérimentation que nous proposons comporterait une évaluation scientifique et un rapport adressé au Parlement en vue d’une éventuelle généralisation.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Le rapport appelle d’emblée un accueil réservé. (Sourires.)

M. le rapporteur. Je crois savoir qu’une réflexion est en cours au tribunal de Bobigny pour envisager la mise en place d’un tel système. L’autoriser d’ores et déjà dans la loi serait accepter des disparités sur le territoire. Avis défavorable, donc, même si ce type de juridiction est particulièrement intéressant.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL158 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à clarifier le point de départ de la période de sûreté. Par deux arrêts du 28 février 2014, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Lyon a donné une nouvelle interprétation de la computation des périodes de sûreté. Alors que, selon la jurisprudence habituelle, la période de sûreté démarre dès le placement en détention provisoire, les deux arrêts précités ne la font partir qu’au prononcé de la condamnation. Ce revirement de jurisprudence expose la France à une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), sur le fondement du principe de non-rétroactivité de la loi pénale. Aussi proposons-nous de consacrer la jurisprudence habituelle dans la loi.

M. le rapporteur. Avis défavorable. La jurisprudence de la cour d’appel de Lyon peut en effet poser problème, mais un pourvoi est en cours. Attendons que la Cour de cassation se prononce ; nous ne légiférerons que si cela s’avère nécessaire.

La Commission rejette l’amendement.

Article additionnel après l’article 7 (art. 721 et 721-1 du code de procédure pénale) : Alignement sur le régime de droit commun des règles de calcul du crédit de réduction de peine et de la réduction supplémentaire de la peine applicables aux récidivistes

Puis elle examine l’amendement CL71 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à aligner les dispositions encadrant l’octroi des crédits de réduction de peine applicables aux récidivistes sur le régime de droit commun. Ceci a un sens qui doit être précisé. Les récidivistes sont condamnés plus fermement, ce qui est normal puisqu’ils ont déjà été avertis ; les réitérants aussi, puisque les tribunaux prennent en compte les casiers judiciaires et la situation des personnes qui comparaissent. Là encore, il suffit de fréquenter les tribunaux pour constater que l’on interroge non seulement le casier judiciaire, mais aussi les antécédents policiers. Il n’y a donc pas de difficulté particulière sur le niveau des condamnations des récidivistes et des réitérants. En revanche, les récidivistes et les réitérants sont ceux qui posent le plus de problèmes, d’où la nécessité de les suivre à la sortie. Je propose donc un article qui rend conditionnables les crédits de réduction de peine. C’est le mécanisme qui avait été inventé, à juste titre, dans la surveillance judiciaire. Je vous propose de l’étendre. Si l’on supprime le crédit de réduction de peine, les sortants de prison en sortie sèche – c’est-à-dire en fin de peine – seront libres de faire ce qu’ils veulent. Ce système est le meilleur moyen de les surveiller. Cet amendement s’articule avec un autre que je vous présenterai tout à l’heure, qui va dans le sens de la surveillance judiciaire et prévoit un contrôle à l’extérieur des prisons pour les sortants de prison.

M. Pascal Popelin. Je suis très attaché à l’équilibre de ce texte. Jusqu’ici, j’ai d’ailleurs voté tous les amendements présentés par le rapporteur. J’avoue être plus réservé à l’égard de celui-ci. L’abrogation des peines plancher pour les récidivistes et de la révocation automatique des sursis ne signifie pas que l’on soit acquis à la suppression totale du statut pénal des récidivistes. Il s’agit de prononcer des peines individualisées, non de gommer toute différence avec les primo-délinquants. Je ne voterai donc pas l’amendement.

Mme Colette Capdevielle. Pour ce qui le concerne, le groupe SRC le soutient.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 7

Puis elle examine les amendements identiques CL291 de M. Éric Ciotti, CL386 de M. Yannick Moreau et CL561 de M. Sébastien Huyghe.

M. Éric Ciotti. Cet amendement vise à supprimer les crédits de réduction de peine. Vous venez d’évoquer les incidences de l’application systématique de ces crédits de réduction de peine, que je conteste. Nous sommes aujourd’hui dans l’hypocrisie la plus totale. Les crédits de réduction de peine des articles 721 et suivants du code de procédure pénale ne devaient être accordés qu’en cas de bonne conduite. Or ils sont devenus automatiques et servent de soupape pour la population carcérale. Vous dites que les tribunaux correctionnels prononcent souvent des peines sévères, monsieur le rapporteur. Je partage votre position. Le problème réside dans l’exécution de ces peines, qui se trouvent « déconstruites » par divers biais : la pratique de l’aménagement, la non-exécution des peines, dont 80 000 à 100 000 ne sont pas exécutées aujourd’hui, et enfin ces crédits de réduction de peine. La lisibilité de la peine – et donc son caractère dissuasif – s’évapore. Revenons à un système clair, avec une réduction de peine supplémentaire pour les détenus qui fournissent des efforts de réadaptation sociale, prononcée en fonction de critères objectifs et non plus automatiquement.

M. Yannick Moreau. Une peine dont la durée est lisible permet de mettre en place des actions de formation et d’effectuer en milieu carcéral le travail nécessaire pour préparer la sortie. C’est pourquoi il faut supprimer les crédits de réduction de peine.

M. Sébastien Huyghe. Le fait de savoir à l’avance le temps qu’il passera en prison permet en effet au détenu de préparer sa sortie.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Je rappelle que les crédits de réduction de peine ont été institués en 2004 par la seconde loi Perben en remplacement des réductions de peine et des réductions de peine spéciales. Ce crédit est automatiquement accordé et calculé par le greffe dès l’entrée dans la prison. Son existence a d’ailleurs servi en 2005 à justifier la surveillance judiciaire. Vous avez le droit de brûler ce que vous avez adoré, ou du moins de changer d’avis, mais ces dispositions, c’est vous qui les avez adoptées. Elles ont d’ailleurs une certaine efficacité et relèvent d’une certaine logique. Vous voyez que l’idéologie ne nous conduit pas à détruire tout ce que vous avez réalisé : quand des dispositions sont bonnes, nous sommes capables de le reconnaître.

M. Éric Ciotti. L’idée n’est pas de remettre en cause l’esprit qui avait présidé à la rédaction du projet de loi Perben, mais son application. Nous disposons désormais d’un recul suffisant pour mesurer à quel point ces dispositions ont été perverties. D’une approche individualisée permettant de favoriser la réinsertion des détenus dès leur sortie, on est passé à une application quasi automatique – à 99 %, je crois – des crédits de réduction de peine. C’est une soupape, une mesure d’ajustement à la surpopulation carcérale. Je reconnais volontiers que cette pratique existait sous le précédent gouvernement, et j’ai eu l’occasion de la critiquer lors de l’examen de la loi pénitentiaire. Mais il convient de rétablir l’esprit originel de la loi Perben I.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il convient surtout de saluer la prouesse intellectuelle dont vient de faire preuve M. Ciotti.

M. le rapporteur. En effet. Le crédit de réduction de peine n’a pas pu être détourné de son intention initiale, puisqu’il était prévu dès le départ de l’accorder automatiquement, dès l’entrée en détention, quitte à le modifier par la suite. C’est la réduction de peine supplémentaire qui dépend du comportement du détenu.

La Commission rejette les amendements.

Elle rejette également l’amendement CL292 de M. Éric Ciotti, puis les amendements identiques CL387 de M. Yannick Moreau et CL563 de M. Sébastien Huyghe.

Article additionnel après l’article 7 (art. 723-1, 723-7, 729 et 729-3 du code de procédure pénale) : Alignement sur le régime de droit commun des dispositions applicables aux récidivistes relatives aux seuils d’aménagements de peine ordonnés en cours de détention et aux conditions d’accès à la libération conditionnelle

Elle en vient ensuite à l’amendement CL69 rectifié du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement permet aux récidivistes et aux réitérants de bénéficier d’une libération conditionnelle dans les mêmes délais que les non-réitérants, lesquels ne sont pas nécessairement des primo-condamnés.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 7

Puis elle examine l’amendement CL190 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à supprimer les nombreuses limites qui empêchent les récidivistes d’avoir accès à un aménagement de peine – qu’il s’agisse du placement à l’extérieur, de la semi-liberté ou du placement sous surveillance électronique – ou à une libération conditionnelle.

Les aménagements de peine ont pourtant un impact sur la lutte contre la récidive, et, en matière de réinsertion du détenu, la libération conditionnelle est reconnue comme un mode de sortie nettement plus efficace que les « sorties sèches ».

M. le rapporteur. L’amendement est pour l’essentiel satisfait, sauf pour ce qui concerne le neuvième alinéa de l’article 729 du code de procédure pénale. En effet, sauf exceptions, le projet de loi ne touche pas aux peines criminelles.

M. Sergio Coronado. Je le retire.

L’amendement est retiré.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ensuite successivement les amendements CL305 et CL306 de M. Éric Ciotti.

Article additionnel après l’article 7 (art. 723-17 [nouveau] du code de procédure pénale) : Convocation devant le juge de l’application des peines avant la mise à exécution des peines d’emprisonnement ferme aménageables non exécutées dans un délai de trois ans

Puis elle se saisit de l’amendement CL38 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à autoriser le « rejapage » : lorsqu’une condamnation susceptible de faire l’objet d’un aménagement de peine n’a pas été exécutée dans un délai de trois ans, sa mise à exécution est soumise à un examen préalable du dossier par le juge de l’application des peines, quand bien même l’intéressé n’a pas répondu aux convocations, parce qu’il ne les a pas reçues ou faisait preuve à l’époque de mauvaise volonté. L’objectif est d’éviter une exécution trop brutale de condamnations trop anciennes.

M. Georges Fenech. Cette disposition est une prime aux fuyards : il suffira de se mettre à l’abri pendant trois ans pour échapper à l’emprisonnement.

M. le rapporteur. S’il s’agit d’un fuyard, le juge de l’application des peines le saura et refusera d’aménager la peine. Mais la mesure peut aussi concerner une personne qui a déménagé, ou qui était sans domicile fixe au moment de la convocation, ce qui n’est pas rare chez le public visé.

Une fois encore, il faut faire confiance aux juges : ils sont capables d’apprécier les situations, le comportement des hommes et des femmes qu’ils sont chargés de juger. Les surveillants, dans les prisons, se plaignent de la mise à exécution très tardive de certaines peines. Dans le cadre de la mission sur la surpopulation carcérale, j’ai ainsi eu l’occasion de visiter le centre de semi-liberté de Lyon : un détenu y était incarcéré au nom d’une peine prononcée six ou sept ans auparavant. Dans un autre cas, il s’agissait d’un sursis datant de 2006. C’est pourquoi cette proposition est non seulement raisonnable, mais utile.

M. Philippe Goujon. Combien de peines seraient concernées par l’application de cet amendement ?

Mme Marie-Françoise Bechtel. Sans pour autant m’opposer à l’amendement, je suis perplexe. Tout d’abord, je m’interroge sur cette volonté, exprimée par l’exposé des motifs, de s’assurer que les peines ne soient mises à exécution « que si elles ont toujours un sens ». Par ailleurs, outre la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale, dont l’examen s’impose toujours, le juge devrait prendre en compte les circonstances de l’absence d’exécution, selon que la personne a des raisons de ne pas s’être présentée ou a cherché délibérément à échapper à sa peine.

Mme Colette Capdevielle. M. Fenech évoque une hypothèse dans laquelle il n’y a eu ni récidive ni réitération pendant au moins trois ans. Le juge de l’application des peines va bien évidemment apprécier l’attitude de la personne pendant cette période, chercher à savoir si elle a travaillé, si elle s’est bien conduite. Il peut recourir à tout l’éventail que lui offre le code de procédure pénale. Ce très bon amendement va donc permettre aux juges de démêler des situations inextricables et bien souvent injustes.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous parlons de situations dans lesquelles une peine n’a pas été mise à exécution dans un délai de trois ans, et non de cavale ou de fuite. L’amendement prévoit simplement que, préalablement à l’exécution de la peine, le dossier sera examiné par le juge : il ne remet donc pas en cause la peine elle-même, dont rien n’empêche que le juge la confirme. L’idée est seulement d’examiner si ce délai doit conduire à modifier les modalités d’exécution de la décision.

M. le rapporteur. Malheureusement, monsieur Goujon, je ne sais pas combien de personnes seraient concernées par l’application de cet amendement. La première raison est qu’il est difficile de comptabiliser des peines qui ont été plus ou moins oubliées ; la deuxième tient au fait que notre appareil statistique est plutôt défaillant. De la même façon, nous ne savons pas combien de peines ne sont pas exécutées, ce qui a alimenté la polémique : le chiffre de 80 000 à 100 000 peines, souvent cité, concerne plutôt les peines en attente d’exécution. À ma connaissance, aucune étude ne recense les peines prescrites avant leur exécution, c’est-à-dire, en matière délictuelle, non exécutées au bout de cinq ans. Je le déplore, tout comme vous, je suppose.

La Commission adopte l’amendement.

Après l’article 7

Elle aborde ensuite l’amendement CL189 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à supprimer le caractère automatique des périodes de sûreté, qui contrevient au principe d’individualisation des peines. Sans évaluation ni débat préalable, elles empêchent toute mesure d’aménagement de peine ou permission de sortie pendant des durées pouvant atteindre dix ans, voire dix-huit ans. Elles ne permettent pas de se projeter vers la libération ni d’entrer dans un parcours de réinsertion, et conduisent donc à démobiliser la personne condamnée. Le jury de la conférence de consensus avait d’ailleurs appelé à supprimer le caractère automatique des périodes de sûreté, que rien ne saurait justifier.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Les périodes de sûreté sont décidées à 99 % en réponse à des crimes, lesquels ne sont pas concernés par le projet de loi. Une réflexion est par ailleurs en cours sur le droit de l’exécution des peines, sous la responsabilité de M. Bruno Cotte.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL307 de M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Il tend à atténuer le caractère automatique de l’aménagement des peines. L’amendement CL308, qui suit, a le même objet.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement CL308 du même auteur.

Chapitre III

Dispositions instituant la contrainte pénale

Avant l’article 8

La Commission est saisie de l’amendement CL122 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à renommer « peine de probation » la contrainte pénale dans le dessein d’affirmer plus clairement l’objectif de cette peine d’assurer un suivi renforcé du condamné. Les mots « contrainte pénale » sont en effet proches de la tautologie. En outre, l’expression : « peine de probation » correspond à la terminologie employée par le Conseil de l’Europe et par les autres pays européens.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le choix de l’expression « contrainte pénale » – que l’on peut certes juger redondante – se justifie par le fait qu’il ne s’agit pas d’un aménagement de peine, mais d’une peine pouvant être effectuée à l’extérieur. Pour imposer cette idée dans l’imaginaire collectif, les mots ont leur importance.

La Commission rejette l’amendement.

Article 8 (art. 131-3, 131-8-2 [nouveau] et 131-9 du code pénal) : Conditions du prononcé et contenu de la peine de contrainte pénale

La Commission étudie les amendements de suppression CL110 de M. Georges Fenech, CL309 de M. Éric Ciotti, CL344 de M. Gérald Darmanin et CL479 de M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Georges Fenech. La contrainte pénale est la vraie nouveauté de ce projet de loi. Je vous renvoie à l’exposé des motifs de l’amendement pour comprendre de quelle façon cette peine indéterminée contrevient aux principes généraux du droit et au principe d’égalité des justiciables. Dans l’immédiat, je souhaite me faire l’écho du point de vue des organisations syndicales.

L’Union syndicale des magistrats, syndicat majoritaire dans la profession, émet de sérieux doutes sur l’efficacité de la contrainte pénale, qui va complexifier encore les procédures : « Imaginons qu’une personne en probation enfreigne les règles. Il se peut alors qu’elle soit incarcérée. À ce moment-là, le serpent se mord la queue et le gain en terme de surpopulation carcérale devient caduc. » Le président du syndicat lui-même, considéré comme modéré, dit ceci : « Aujourd’hui, la déception est grande. La chancellerie est enfermée dans son dogmatisme. Le système de probation, pour fonctionner, a besoin de moyens que l’on n’a pas. Dans les pays où ça marche, il y a un conseiller de probation pour 20 condamnés. Aujourd’hui en France, on en est à 1 pour 120 et, même en recrutant, en passant à 1 pour 60, cela ne sera pas assez. […] Si les magistrats en charge de la probation sont débordés, à la moindre récidive un peu spectaculaire, nous passerons encore une fois pour de dangereux laxistes. »

Le syndicat FO magistrats fait valoir de son côté que le sursis avec mise à l’épreuve (SME) ayant échoué, la contrainte pénale, qui est une sorte de super-SME, est elle-même vouée à l’échec : « L’étude d’impact reconnaît elle-même, dans des termes qui dissimulent mal l’embarras de ses rédacteurs, que “le sursis avec mise à l’épreuve est devenu une peine prononcée pour des motifs très divers, parfois peu lisibles, souvent par défaut ou pour éviter une incarcération” ».

De son côté, votre collègue André Vallini, avant d’entrer au Gouvernement, avait, en tant qu’expert des questions de justice, émis les plus expresses réserves sur cette réforme, en suggérant « qu’elle puisse être expérimentée, dans le ressort d’une ou deux cours d’appel, pendant deux ou trois ans ».

Permettez-moi également de citer le Collectif de parents et d’associations de familles de victimes, qui n’avait pas été invité à la conférence de consensus : « Les drames qui ont touché nos familles sont justement le résultat de dispositions laxistes et anti-prison dont ont bénéficié des criminels récidivistes. Maintenant, nous souhaitons avant tout que d’autres innocents ne connaissent pas le sort de nos chers disparus. Or les mesures démagogiques en préparation vont étendre des dispositifs qui mettent en péril d’autres femmes, filles, enfants, notamment en laissant en toute liberté un maximum de délinquants. Manifestement, nos vécus ne sont absolument pas pris en compte, nos tragédies sont méprisées. […] Cette soi-disant réforme ne garantira pas "“plus de sécurité”. En protégeant encore un peu plus les criminels, elle n’amènera que “du sang et des larmes” ».

Un jour, madame la garde des Sceaux, vous avez parlé de « ces faits divers inévitables », une expression particulièrement malvenue qui traduit très bien votre gêne à l’égard de leurs victimes. Je voudrais en évoquer trois.

Souvenez-vous de Chloé, cette adolescente retrouvée par miracle encore en vie dans le coffre d’un véhicule en Allemagne. Le kidnappeur, un certain Kamel Bousselat, s’était vu appliquer un sursis avec mise à l’épreuve pour plusieurs agressions sexuelles, mais ne répondait même plus aux convocations de l’agent de probation. Son nom ne figurait d’ailleurs pas au fichier des auteurs d’infractions sexuelles.

Autre fait divers, l’assassinat d’Agnès, treize ans, commis en novembre 2011 au Chambon-sur-Lignon par un lycéen âgé de dix-sept ans déjà sous le coup d’un contrôle judiciaire pour un viol commis en 2010.

Enfin, je citerai la découverte, en janvier 2011, du corps démembré de la jeune Laetitia, dix-huit ans, massacrée par Tony Meilhon, qui, au moment des faits, faisait l’objet d’un sursis avec mise à l’épreuve. On découvrira que ce dernier, faute de moyens, n’était même plus suivi par le service pénitentiaire d’insertion et de probation.

Voilà ce dont il s’agit : des « faits divers inévitables » impliquant des criminels multirécidivistes soumis à la surveillance, la mise à l’épreuve, la probation. Voilà le résultat de cette politique.

M. Éric Ciotti. Nous aurons l’occasion de débattre longuement dans l’hémicycle de ce dispositif qui s’inscrit au cœur du projet de loi. Mais je voudrais d’ores et déjà souligner le caractère extrêmement dangereux de la contrainte pénale et l’hypocrisie sur laquelle elle repose. En effet, vous la présentez comme un moyen de lutter contre la récidive, madame la garde des Sceaux, mais le rapporteur a été plus sincère en dévoilant vos véritables motivations : dans une interview au site AEF, le 28 avril, il a en effet admis que l’objectif n’était pas de vider les prisons, mais que cela serait l’une des conséquences.

Si l’article 8 est adopté, la contrainte pénale viendra se substituer à l’incarcération pour les délits pouvant être punis de cinq ans d’emprisonnement. Sont ainsi concernés les vols simples – alors que l’on compte 1 000 cambriolages par jour dans notre pays, et que leur taux d’élucidation est inférieur à 10 % –, les homicides involontaires, les coups et blessures volontaires entraînant une incapacité totale de travail de plus de huit jours, les agressions sexuelles. Pour tous ces faits très graves, la contrainte pénale va conduire à un affaiblissement de la sanction. Celle-ci a pourtant pour mission de prévenir la délinquance par son effet dissuasif. C’est donc à un véritable désarmement pénal que procède cet article. Si, par malheur, le texte est adopté, il aura des conséquences très lourdes sur l’évolution de la délinquance.

M. Gérald Darmanin. Sur le principe, nous nous étonnons du rejet dogmatique du recours à l’emprisonnement, que nous considérons comme le seul moyen de protéger efficacement la société contre des personnes qui, manifestement, porteront atteinte au pacte social républicain.

Les condamnations de cinq ans ou moins concernent des délits très graves. Comment expliquera-t-on aux victimes d’agressions sexuelles, de harcèlement moral, de violences volontaires, de vols, d’escroquerie, que ces actes ignobles pour le pacte social ne sont pas punis par des peines de prison ? Dans des lieux populaires, comme il y en a dans ma circonscription, la puissance publique est la seule source de protection pour les plus pauvres, qui attendent de l’État un minimum de justice.

On peut en outre se demander quelle sera l’efficacité de ce nouveau dispositif : il n’y a pas de différence évidente avec le sursis avec mise à l’épreuve.

Enfin se pose le problème des moyens. L’étude d’impact fait apparaître, contrairement à ce que Mme la garde des Sceaux a déclaré à plusieurs reprises, y compris au cours de l’examen du projet de loi de finances, que l’on n’aura pas les moyens d’engager des agents de probation en nombre suffisant pour assurer la mise en œuvre de la contrainte pénale. Sans moyens, cette politique ne sera rien d’autre qu’une opération de communication. Quel décalage, madame la garde des Sceaux, entre les discours du président de la République, vos propres déclarations et le budget véritable du ministère dont vous avez la charge !

Pour toutes ces raisons, il serait sage de supprimer cet article.

M. Jean-Frédéric Poisson. Tout le monde ici accepte l’idée que la société gagnerait à ne pas mettre en prison des personnes qui n’ont rien à y faire ; nous avons d’ailleurs déjà eu ce débat, notamment l’an dernier, lors de la remise par le rapporteur et notre collègue Sébastien Huyghe du rapport de la mission d’information sur les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale.

La solution que vous proposez revient à assouplir considérablement le régime actuel. Vous avez déclaré, monsieur le rapporteur, n’avoir pas voulu modifier l’échelle des peines ; cela aurait pourtant permis d’éviter le recours à des peines d’emprisonnement dans les cas où la nécessité ne s’en fait pas sentir, et nous aurions été nombreux à nous retrouver sur un objectif de cette nature.

Le système que vous proposez se heurte à plusieurs difficultés, à commencer par le champ d’application de la peine de contrainte pénale, qui recouvrira un éventail considérable de faits très graves, dont certains auront été commis par des personnes dangereuses pour le corps social.

D’autre part, on ne voit pas comment un tel dispositif pourrait être mis en œuvre, vu les moyens actuellement à la disposition des pouvoirs publics. Le nombre de personnes concernées par ce type de peines va s’accroître, et la charge de travail des personnels chargés de leur suivi va augmenter. Pourtant l’on n’a jamais entendu évoquer une augmentation des moyens qui leur sont destinés.

Voilà pourquoi je souhaite moi aussi la suppression de cet article.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Avant de donner la parole au rapporteur et à la garde des Sceaux, je voudrais revenir sur les propos de M. Fenech. Je réagis très mal à ces propos. Pour la première fois, il a été fait le rappel d’événements horribles qui, en leur temps, nous ont tous effrayés. Depuis que je suis parlementaire, j’essaie de faire la loi avec raison, et non dans l’émotion. Il ne me semble pas qu’évoquer des affaires de ce type soit productif pour nos travaux.

En outre, deux d’entre elles se sont déroulées avant l’élection de François Hollande à la présidence de la République. Nous ne vous avons jamais reproché ces faits divers. Je trouve dommage que nos échanges, qui devraient avoir une certaine tenue, renvoient à de tels éléments, inutiles pour la compréhension des enjeux du texte.

Je fais en sorte de ne pas trop intervenir dans les échanges, car il me revient de les organiser. Toutefois, j’estime, à titre personnel, que votre intervention est de nature à troubler le bon déroulement de nos débats.

M. Georges Fenech. Monsieur le président, il n’était pas dans mon intention de rendre la majorité ou même le Gouvernement responsables de ces faits divers tragiques. Ce n’est pas ce que j’ai dit, et ce n’est pas ce que je pense. D’ailleurs, comme vous l’avez rappelé, cela s’est passé avant l’élection présidentielle de 2012.

Pourquoi avoir cité ces trois exemples ? Parce que je souhaitais rappeler certaines réalités qui vous dérangent, non pas pour vous en faire supporter la responsabilité, mais pour vous montrer, preuves à l’appui, que la probation ne marche pas. Nous ne disposons pas actuellement, dans les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP), des moyens nécessaires pour assurer la surveillance de ces auteurs d’infractions, qui sont potentiellement dangereux. La contrainte pénale qui va être mise en place aggravera encore la situation et les quelque mille agents supplémentaires annoncés par la garde des Sceaux n’y suffiront pas : on peut craindre que des faits de ce genre ne se reproduisent encore plus souvent.

M. le rapporteur. Avis défavorable sur tous les amendements de suppression.

Le président Urvoas et moi ne nous sommes pas concertés, mais je pense la même chose que lui. Au-delà des postures qu’appelle notre système politique, ce que vous dites, monsieur Fenech, est de nature à effrayer inutilement nos concitoyens. Par cette énumération de crimes, vous donnez l’impression que nous allons libérer des centaines de milliers de personnes extrêmement dangereuses.

Revenons à la réalité : en 2012, sur 56 942 condamnations pour faits de violence volontaire, 27 364 ont été des condamnations avec sursis simple. Cela signifie que les agressions physiques ne sont pas punies majoritairement par des peines d’emprisonnement ferme : celles-ci n’ont représenté que 9 429 peines ! De même, vous prétendez que la contrainte pénale présente un danger au motif que les délits passibles de cinq ans d’emprisonnement recouvriraient les agressions sexuelles, mais, en 2009, sur 5 209 condamnations pour agressions sexuelles, 3 219 ont été des peines d’emprisonnement avec sursis simple.

Aujourd’hui, 175 000 personnes sont actuellement en sursis avec mise à l’épreuve ou purgent une peine en milieu ouvert. La contrainte pénale, qui ne devrait concerner que 8 000 à 20 000 personnes, ne va pas entraîner la libération d’une bande de dangereux délinquants qui menaceront la sécurité, autrefois assurée, de nos concitoyens ! Nous ne modifions pas radicalement les choses ; nous tâchons simplement de mettre en place un système qui fonctionne mieux.

Que faire des gens qui sortent de prison ? Aucune société ne peut prétendre éradiquer le crime, mais il faut essayer d’apporter une réponse à cette question – ce que vous ne faites jamais. Nous, au travers de ce texte, nous essayons de mettre en place un contrôle qui n’existe pas aujourd’hui. Ce sera peut-être imparfait, mais au moins aurons-nous eu le mérite d’essayer.

Je me permets une transgression en revenant un instant sur l’affaire de Pornic. Je pourrais vous faire un numéro attendu sur l’échec de la politique sécuritaire, mais je vous en dispense. Notons néanmoins que l’homme qui s’est rendu coupable des faits était en fin de peine quand il est sorti ; il ne restait à mettre à exécution qu’un sursis avec mise à l’épreuve, qui ne l’a pas été parce qu’il s’agissait d’un outrage à magistrat qui fut considéré à l’époque, de manière indubitablement erronée, comme insuffisamment grave. Durant la période qui s’est écoulée entre sa libération et son crime, il a été interpellé à plusieurs reprises par les services de police, mais ceux-ci ne savaient pas qu’il était sous le coup d’un sursis avec mise à l’épreuve, et ils n’ont pas prévenu le service pénitentiaire d’insertion et de probation. Du coup, on n’a pas mis en place un suivi qui lui aurait peut-être évité de retomber dans l’usage et le trafic de stupéfiants, en l’occurrence de cocaïne.

On ne refait pas l’histoire, mais c’est précisément contre ce genre de choses que nous essayons de lutter. S’il existait un minimum de coordination et de concertation entre les services de police et les services d’insertion, peut-être réussirions-nous à améliorer les choses.

Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice. Monsieur Fenech, vous avez utilisé une expression, que vous avez accolée à trois crimes odieux. Je serai plus directe que le président Urvoas : un tel procédé est abject.

Pour ce qui me concerne, s’agissant de crimes de cette nature, je ne parle pas de « fait divers inévitables », mais de drames, de tragédies, et je montre du respect pour la détresse des familles. Ce jeu est profondément malsain. Il contribue à l’amalgame auquel vous vous livrez depuis deux ans. Alors qu’il s’agit d’un projet de loi relatif aux délits, vous ne prenez comme exemple que des crimes, suivant une démarche délibérée, qui vise à troubler les esprits.

En tout état de cause, vous êtes mal placé pour donner des leçons sur les victimes, car, sous le précédent quinquennat, celles-ci ont été sans cesse instrumentalisées, et considérablement négligées. Plus précisément, le budget de l’aide aux victimes n’a cessé de baisser durant les trois dernières années du quinquennat, alors que, dès la première année de notre retour aux responsabilités, nous l’avons relevé de 25,8 %, puis, l’année suivante, d’encore 7 %. Le Conseil national de l’aide aux victimes n’avait pas été réuni depuis 2010 ; nous le réunissons désormais deux fois par an. Le 4 novembre de l’année dernière, nous avons organisé à la Chancellerie la première journée d’aide aux victimes. Le réseau des associations d’aide aux victimes et le Conseil national de l’aide aux victimes ont été consultés sur ce texte de loi. Sous l’ancien quinquennat, vous avez mis trois ans pour ouvrir trois bureaux d’aide aux victimes ; en une seule année, nous en avons ouvert cent, que j’ai fait auditer afin d’assurer la consolidation. Enfin, j’ai décidé, dès janvier 2014, de dégager des crédits pour expérimenter dans huit tribunaux de grande instance les dispositions de la directive européenne sur le suivi individualisé des victimes que nous aurons à transposer d’ici à novembre 2015.

Nous, nous respectons les victimes, nous respectons leur souffrance et leur courage ; jamais je ne les instrumentaliserai. Le travail que nous faisons, avec détermination, avec constance, en y associant les victimes, en renforçant le service de l’accès au droit et à la justice et de l’aide aux victimes (SADJAV) au sein du ministère de la Justice, nous le faisons par respect pour les victimes, en n’attendant d’elles aucune reconnaissance.

Par conséquent, je ne vois pas à quel titre vous prétendez nous donner des leçons. Je fréquente les assemblées parlementaires infiniment plus souvent que les plateaux de télévision, et j’ai toujours déclaré considérer ces faits comme des tragédies et comme des drames. Le procédé que vous avez utilisé est, je le répète, odieux et abject.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je ne peux pas ne pas réagir à ces propos, ne serait-ce que sur la forme.

Premièrement, madame la garde des Sceaux, je vous rappelle que c’est le Gouvernement qui est à la disposition du Parlement, et non l’inverse. Une telle appréciation qualitative de l’intervention de notre collègue Fenech n’a pas sa place dans cette Commission. Je souhaiterais, monsieur le président, que cela soit rappelé.

Deuxièmement, si la politique que vous conduisez était si efficace et reconnue, cela se saurait. M. Fenech est parfaitement dans son droit lorsqu’il vous interpelle sur vos résultats et sur vos intentions, tout comme nous sommes dans notre droit lorsque nous vous alertons sur les conséquences des dispositions prévues par le présent projet de loi, qui ne sont pas celles que vous prétendez. Sachez que nous continuerons à faire usage des droits de l’opposition jusqu’au bout.

Enfin, lorsque l’on travaille sur la matière pénale, le fait de rappeler certains faits graves ne devrait pas poser de problème particulier. Notre collègue Fenech n’a jamais dit que vous portiez la responsabilité de ces faits, il a simplement voulu montrer que le dispositif en place ne fonctionnait pas.

Je souhaite que, à l’avenir, aucun de mes collègues, sur aucun banc, n’ait à subir de tels propos à caractère injurieux – dans cette Commission comme ailleurs.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je vous prierai, mon cher collègue, de me laisser la possibilité de faire la police dans cette Commission.

Il n’y a pas d’arbitre des élégances : chacun est ici à égalité de droits et de devoirs. La garde des Sceaux est là parce que je l’ai invitée, et elle restera avec nous aussi longtemps que la Commission le souhaitera. Elle a le droit, autant que les parlementaires, de répondre comme il lui sied : ici, la parole est libre dans la mesure où le respect est garanti. Il ne m’a pas semblé que les mots utilisés outrepassaient cette limite.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle en vient à l’amendement CL18 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit de réorganiser le texte afin de mieux marquer la place que doit occuper la peine de contrainte pénale dans la hiérarchie des peines.

La Commission adopte l’amendement.

L’amendement CL123 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission adopte l’amendement de cohérence CL264 du rapporteur.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL274 de Mme Colette Capdevielle, CL138 de M. Sergio Coronado, CL310 de M. Éric Ciotti, les amendements identiques CL184 de M. Philippe Goujon et CL311 de M. Éric Ciotti, les amendements CL246 de M. Éric Ciotti, CL505 de M. Yannick Moreau, CL347 de M. Gérald Darmanin, CL504 de M. Yannick Moreau, CL345 de M. Gérald Darmanin, CL506 et CL507 de M. Yannick Moreau.

Mme Colette Capdevielle. L’amendement CL274 a pour objet d’étendre le champ d’application de la peine de contrainte pénale à tous les délits, quelle que soit la peine encourue. En effet, la contrainte pénale a vocation à être une peine plus contraignante que la peine d’emprisonnement assortie d’un sursis avec mise à l’épreuve (SME). Ce dernier pouvant être prononcé pour tous les délits, il serait paradoxal que la contrainte pénale ait un champ d’application plus limité que lui.

Cela permettra en outre d’enrichir la palette des outils à la disposition des juridictions pénales, en donnant à celles-ci les moyens de prononcer la peine la mieux adaptée à chaque condamné.

On peut d’ailleurs noter que les différentes peines alternatives à l’emprisonnement prévues par le code pénal peuvent être prononcées pour tout délit. Tel est le cas, notamment, de la peine de stage de citoyenneté créée par la loi du 9 mars 2004 ou de la peine de sanction-réparation créée par la loi du 5 mars 2007.

M. le rapporteur. Avis favorable.

M. Sergio Coronado. Je retire l’amendement CL138 et me rallie à celui-ci.

M. Pascal Popelin. Après le cauchemar de dimanche soir, je m’étais pris à rêver que, sans que chacun renonce pour autant à son devoir, majorité et opposition décident de ne plus réduire le débat politique à un échange de caricatures et de procès d’intention. Tant pis !

Pour ma part, au risque de me singulariser de nouveau, il me semble que nous ne pouvons pas prendre le risque de disqualifier la présente réforme par une mise en œuvre qui ne serait pas optimale. Je suis partisan de la création de cette peine nouvelle, mais je pense que nous devrions l’expérimenter avant d’en étendre le périmètre. C’est pourquoi je pense que la solution équilibrée qui avait été retenue par le Gouvernement devrait être maintenue.

L’amendement CL138 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL274.

En conséquence, les amendements CL310, CL184, CL311, CL246, CL347 et CL345 tombent, ainsi que l’amendement CL231 de Mme Élisabeth Pochon.

La Commission en vient à l’amendement CL232 de Mme Colette Capdevielle.

Mme Colette Capdevielle. Dans un souci de cohérence, nous proposons d’utiliser la même formulation que celle retenue pour justifier un aménagement de peine personnalisé.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL20 du rapporteur.

En conséquence, l’amendement CL139 de M. Sergio Coronado n’a plus d’objet.

La Commission examine ensuite les amendements CL140 et CL141 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Un suivi s’échelonnant sur cinq ans est manifestement trop long : soit la personne condamnée n’en aura plus besoin du fait de sa réinsertion, soit le suivi aura échoué avant. C’est d’ailleurs pour cette raison que, sauf récidive, la mise à l’épreuve ne peut être prononcée pour une durée supérieure à trois ans. Les différentes recherches menées aux États-Unis et en Grande-Bretagne ont montré que des peines de probation d’une durée manifestement inadaptée accompagnées d’un suivi trop rigide entraînaient systématiquement une hausse importante des incarcérations. C’est pourquoi l’amendement CL140 vise à réduire de cinq à trois ans le temps de la contrainte pénale, tandis que le CL141 propose de conserver la durée de cinq ans pour les seules obligations.

M. le rapporteur. Avis défavorable sur les deux amendements. Le texte a prévu une durée relativement longue afin de permettre le suivi dans le temps des addictions lourdes. Les magistrats pourront toujours, dans leur grande sagesse, soit ne pas prononcer des contraintes aussi longues, soit choisir d’y mettre fin avant leur terme.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l’amendement de cohérence rédactionnelle CL212 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CL249 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Dès lors que tous les délits peuvent être concernés par la contrainte pénale, il importe que les obligations nécessitant un suivi renforcé lui soient réservées et, par conséquent, de les exclure du sursis avec mise à l’épreuve, dont le suivi est moins strict. Trois obligations seraient visées : exercer une activité professionnelle ou suivre un enseignement ou une formation professionnelle ; se soumettre à des mesures d’examen médical, de traitement ou de soins ; accomplir un stage de citoyenneté.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision CL21 rectifié du rapporteur.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques CL166 de M. Sergio Coronado et CL198 de M. Alain Tourret.

M. Sergio Coronado. Mon amendement vise à préciser la durée des interdictions et obligations prononcées par la juridiction à titre provisoire, afin de lever toute ambiguïté. Elles ne seraient prononcées que jusqu’à la décision du juge de l’application des peines prévue à l’alinéa 13. Cela paraît conforme à la logique de la contrainte pénale, qui ne permet de fixer précisément les obligations et interdictions qu’après une étude du condamné et de sa situation.

M. Alain Tourret. L’amendement CL198 est défendu.

M. le rapporteur. La précision est logique mais pas indispensable, car les décisions sont provisoires jusqu’à celle du juge de l’application des peines. Afin de ne pas alourdir le texte, je vous invite donc au retrait ; faute de quoi l’avis serait défavorable.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte ensuite l’amendement de cohérence rédactionnelle CL213 du rapporteur.

Puis elle examine, en discussion commune, l’amendement CL22, deuxième rectification, du rapporteur, et l’amendement CL199 de M. Alain Tourret.

M. le rapporteur. Cet amendement complète les obligations qui peuvent être prononcées à titre provisoire.

M. Alain Tourret. L’amendement CL199 est défendu.

La Commission adopte l’amendement CL22.

En conséquence, l’amendement CL199 tombe.

La Commission adopte ensuite successivement l’amendement de précision et de cohérence CL23 et l’amendement rédactionnel CL214 du rapporteur.

Puis, suivant l’avis favorable du rapporteur, elle adopte l’amendement de précision CL233 de Mme Colette Capdevielle.

Elle en vient à l’amendement CL143 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à assouplir les conditions d’exécution de la contrainte pénale. Le fait qu’elle soit exécutoire par provision risque de compliquer l’exécution des contraintes pénales les plus courtes, dès lors que la prise en charge par les SPIP ne sera pas nécessairement immédiate, du fait de leur surcharge de travail.

Par ailleurs, il ne semble pas opportun d’appliquer une contrainte pénale à un condamné absent à l’audience.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Nous souhaitons que la prise en charge intervienne aussi vite que possible et que la contrainte pénale soit exécutoire immédiatement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 8 modifié.

Article additionnel après l’article 8 (sous-section 7 de la section 2 du chapitre II du titre III du livre Ier et art. 132-70-1 [nouveaux] du code pénal) : Possibilité pour le juge de l’application des peines de convertir une peine d’emprisonnement d’une durée maximale d’un an en contrainte pénale

La Commission est saisie de l’amendement CL256 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. L’amendement vise à donner au juge la possibilité de convertir une peine de prison inférieure à un an en contrainte pénale, s’il l’estime nécessaire. Cette souplesse pourrait permettre un meilleur suivi des personnes condamnées.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Article 9 (art. 474, titre Ier bis [nouveau] du livre V et 713-42 à 713-49 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Modalités de mise en œuvre de la peine de contrainte pénale

La Commission est saisie de deux amendements identiques, CL111 de M. Georges Fenech et CL314 de M. Éric Ciotti.

M. Georges Fenech. L’amendement CL111 est défendu.

M. Philippe Gosselin. L’article 8 instaure la contrainte pénale et l’article 9 en fixe les modalités ; par cohérence, nous proposons donc sa suppression.

De plus, le renvoi à un décret d’application paraît curieux et les pouvoirs de suppression de la contrainte pénale donnés au JAP ne sont guère compréhensibles.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

L’amendement CL124 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission adopte ensuite l’amendement de cohérence CL24 du rapporteur.

Puis elle en vient à l’amendement CL315 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. Compte tenu de l’importance de l’évaluation réalisée par le SPIP, il importe de tenir le procureur de la République informé des conclusions.

M. le rapporteur. Avis défavorable : le procureur de la République a déjà accès au dossier quand il le souhaite.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL215 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL257 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à rétablir du contradictoire dans la décision sur les obligations et interdictions applicables aux détenus. Pour permettre un respect du droit des justiciables, un strict respect du droit et la meilleure individualisation des obligations, une réelle décision, fondée sur un débat contradictoire, me paraît indispensable. L’opposition a d’ailleurs déposé un amendement similaire.

M. le rapporteur. Avis défavorable : il s’agit de fixer les modalités d’une peine, et l’amendement alourdirait considérablement le fonctionnement. Le JAP pourra tenir compte des éventuelles objections pratiques puisqu’il en sera informé par le SPIP.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte ensuite l’amendement de cohérence CL25 rectifié du rapporteur.

Puis elle en vient à l’amendement CL379 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à préciser que le travail d’intérêt général (TIG) ne peut être prononcé qu’avec l’accord du condamné, conformément aux dispositions de l’article 131-8 du code pénal, qui impose au juge de statuer en la matière par un jugement contradictoire.

Il serait en effet contraire à la convention de 1930 de l’Organisation internationale du travail relative au travail forcé d’imposer un travail d’intérêt général en l’absence d’accord de la personne condamnée.

M. le rapporteur. Je suis favorable sur le principe, mais préfère la rédaction de l’amendement CL380.

M. Sergio Coronado. Je retire donc l’amendement CL379, pour me replier sur le CL380.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Pour les travaux d’intérêt général, l’accord de la personne condamnée est déjà requis. J’ai donc un doute sur l’utilité de l’amendement.

M. le rapporteur. L’accord est requis lorsque le TIG est prononcé à l’audience – aux termes de l’article 131-8 du code pénal –, mais pas lorsqu’il est décidé par le juge de l’application des peines. La précision est donc nécessaire pour éviter que le TIG ne soit assimilé à du travail forcé.

L’amendement CL379 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL380 de M. Sergio Coronado.

Puis elle examine l’amendement CL191 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à permettre au juge de prononcer une ou plusieurs des mesures d’aide prévues à l’article 132-46 du code pénal.

La contrainte pénale doit être l’occasion de prononcer un certain nombre d’interdictions et d’obligations contre la personne condamnée, mais cette contrainte vise à faciliter sa sortie de la délinquance. Dans certains cas, des mesures d’aide peuvent être indispensables pour atteindre cet objectif.

M. le rapporteur. Cet amendement est satisfait par l’adoption de l’amendement CL25 ; je vous invite donc à le retirer.

L’amendement est retiré.

La Commission passe à l’amendement CL316 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. On parle beaucoup des droits de la défense. C’est normal mais, en l’occurrence, l’amendement concerne les droits des victimes.

L’article 9 prévoit un examen régulier de la situation de la personne, afin de permettre au JAP de réévaluer les obligations afférentes à la probation. Je propose que la victime puisse être informée des éventuelles modifications à ce sujet.

M. le rapporteur. Avis défavorable à l’amendement tel qu’il est rédigé. Si l’amendement précisait que la victime doit être avisée de la fin de la contrainte pénale lorsque figure une interdiction de la rencontrer, je pourrais y être favorable.

M. Philippe Gosselin. Je retire donc l’amendement, pour en proposer une nouvelle version lors de l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL26 du rapporteur.

M. le rapporteur. De façon assez curieuse, le texte prévoit un délai d’appel de dix jours pour les ordonnances, alors qu’il n’est que de vingt-quatre heures dans les dispositions actuellement en vigueur – le délai de dix jours s’appliquant à l’appel des jugements. Dans un souci de cohérence, je propose d’aligner le texte sur ce délai.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements identiques CL144 de M. Sergio Coronado et CL201 de M. Alain Tourret tombent.

La Commission adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL27 du rapporteur.

Puis elle passe à l’amendement CL317 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. Nous souhaitons que la réévaluation de la situation de la personne condamnée puisse être demandée par le procureur de la République.

M. le rapporteur. Le texte permet déjà au procureur de la République de demander une réévaluation au JAP. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL217 du rapporteur.

L’amendement CL258 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL222 du rapporteur.

Puis, suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement CL185 de M. Philippe Goujon.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL202 de M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret. C’est au condamné et au juge de l’application des peines qu’il revient de saisir le tribunal.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL203 de M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret. Il n’y a aucune raison de limiter à une fois par an la possibilité de saisir le tribunal d’une requête.

M. le rapporteur. Avis défavorable : avec cet amendement, le JAP risquerait d’être harcelé de demandes.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement CL29 du rapporteur, tendant à corriger une erreur de référence.

Elle passe ensuite à l’amendement CL319 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. Cet amendement de repli vise à octroyer des pouvoirs supplémentaires au procureur de la République afin de renforcer l’intensité du suivi et de compléter les obligations ou interdictions auxquelles le condamné est astreint.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL182 de M. Sergio Coronado et CL234 de Mme Colette Capdevielle.

M. Paul Molac. L’amendement CL182 vise à donner plus de souplesse au juge dans l’évolution de la contrainte pénale. Il peut arriver que l’inobservation des mesures prononcées soit due à une obligation ou à une interdiction initiale inadaptée. Dès lors, ne laisser au juge que la possibilité de « compléter » les obligations ou interdictions peut aboutir à une impasse ; aussi l’amendement prévoit-il de lui laisser également la possibilité de les « modifier ».

M. le rapporteur. Avis favorable, ainsi qu’à l’amendement CL234 sur le fond ; mais je préfère la rédaction du CL182.

Mme Colette Capdevielle. Je retire mon amendement CL234, pour me rallier au CL182.

L’amendement CL234 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL182.

Puis elle en vient à l’amendement CL146 de M. Sergio Coronado.

M. Paul Molac. Il arrive fréquemment, dans la pratique, que le juge procède à un recadrage et à un rappel des mesures, obligations et interdictions prononcées contre la personne condamnée. Cela est conforme aux bonnes pratiques en matière de probation et de suivi des personnes condamnées, et peut s’avérer d’une réelle efficacité.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL259 de M. Sergio Coronado.

M. Paul Molac. Cet amendement permettrait au juge de statuer, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, à la suite d’un débat contradictoire public, sur la révocation de la contrainte pénale.

Nous retirons néanmoins l’amendement, pour le revoir d’ici à l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL186 de M. Philippe Goujon.

M. Philippe Gosselin. Cet amendement de repli tend à augmenter, aux alinéas 18 et 20, la durée d’emprisonnement en cas d’inobservation de la contrainte pénale.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement CL247 de M. Éric Ciotti.

Elle passe à l’amendement CL32 rectifié du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement est de nature à apaiser les craintes de M. Fenech quant à l’inconstitutionnalité du texte. Dans certains cas, la durée de la contrainte, fixée en fonction de la personnalité de l’intéressé, pourrait en effet s’avérer très longue au regard de la peine prononcée.

Une personne très désinsérée qui commettrait un vol à l’étalage risque normalement une peine d’emprisonnement de deux mois au maximum ; mais, si elle est par exemple dans un état de dépendance alcoolique, la contrainte pénale pourrait être de deux ou trois ans ; or la moitié d’une telle peine représenterait tout de même dix-huit mois, ce qui serait trop lourd au regard des faits. L’amendement tend donc à laisser des moyens d’appréciation au juge, sachant que le cas inverse peut aussi se présenter : un délit grave peut être sanctionné par une contrainte courte si la personnalité de l’auteur laisse espérer sa réinsertion.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL320 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. Il s’agit d’éviter des remises en liberté trop rapides. Le texte prévoit la tenue d’un débat contradictoire devant le juge ou le président dans un délai de quinze jours, ce qui est très court au vu des moyens de la justice. Nous souhaitons donc porter ce délai à trente et un jours.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL218 du rapporteur.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CL321 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. Il convient de préciser les éléments fondamentaux dans la partie législative du texte, et non de les renvoyer à un décret, sur lequel nous n’avons, par définition, pas de prise.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de précision CL219 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 9 modifié.

Article 10 (art. 20-4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945) : Exclusion de la contrainte pénale pour les mineurs

La Commission est saisie d’un amendement, CL481 de M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je souhaite supprimer cet article, qui ajoute la contrainte pénale à la liste des exemptions prévues, pour les mineurs, dans l’ordonnance de 1945.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

L’amendement CL125 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission adopte l’article 10 sans modification.

TITRE II

DISPOSITIONS VISANT À PRÉCISER LE RÉGIME DE L’EXÉCUTION DES PEINES ET À RENFORCER LE SUIVI ET LE CONTRÔLE DES PERSONNES CONDAMNÉES

Chapitre Ier

Principes régissant la mise en œuvre des peines

Article 11 (art. 707 et 707-5 [nouveau] du code de procédure pénale ; art. 1er et 2 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire) : Définition des principes régissant l’exécution des peines

La Commission examine les amendements identiques CL112 de M. Georges Fenech et CL482 de M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Georges Fenech. Cet article est une forfaiture qui vise à cacher le véritable marqueur du texte, l’oubli total des victimes. Rien n’est prévu pour améliorer leurs droits, leur accompagnement ou leur information.

Les victimes sont une nouvelle fois les grandes oubliées de Mme la garde des Sceaux. Pourtant, il n’aurait pas été inutile d’utiliser les rapports de Mme Nieson, de M. Kaltenbach et de M. Béchu, ou encore de l’Institut pour la justice, qui ont tous formulé des propositions novatrices. Mais, ce texte étant marqué du sceau de la « théologie de la libération », selon le mot de M. Alain Bauer, rien ne pouvait être prévu pour les victimes. L’article 11, au contraire, insiste sur la nécessité d’anticiper la sortie des personnes condamnées à une peine de prison ferme.

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’exposé sommaire ne laisse pas de m’étonner, d’autant que nous allons voter un amendement qui prévoit l’abondement des associations d’aide aux victimes via une contribution additionnelle assise sur les amendes.

D’autre part, une « forfaiture » est un crime commis par des fonctionnaires. Nous n’avons pas commis de crime et nous ne sommes pas fonctionnaires.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Et, sous la monarchie, la forfaiture était la violation du serment féodal…

Mme Nathalie Nieson. J’ai dirigé une mission relative au financement des associations d’aide aux victimes. Beaucoup d’entre elles, au début de la présente législature, étaient désespérées par la façon dont elles avaient été traitées jusqu’alors. Leurs difficultés financières ont d’ailleurs été aggravées par la diminution des crédits qui leur étaient destinés.

L’ancienne majorité n’a cessé d’instrumentaliser les victimes au cours du mandat précédent ; passée dans l’opposition, elle continue de le faire. Vous avez cité des associations, mais en avez oublié d’autres, à commencer par l’INAVEM, l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation, qui est une référence. Cela montre toute votre partialité.

M. Jean-Frédéric Poisson. Les dispositions de l’article 707 du code de procédure pénale sont suffisamment fortes du point de vue des principes. Le présent article est donc superfétatoire.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement CL40 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement inverse la présentation des principes qui gouvernent l’exécution des peines en faisant figurer l’objectif de réinsertion avant les droits des victimes. Cet ordre est important, car la peine a d’abord pour but de restaurer l’ordre social troublé par l’infraction. Elle permet ensuite de reconnaître la qualité de victime et de réparer le préjudice causé. La peine et la victime ne peuvent pas être associées.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL204 de M. Alain Tourret tombe.

La Commission est saisie de l’amendement CL324 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. Cet amendement rappelle le double objectif de sanction et de réinsertion du condamné assigné au régime de l’exécution des peines.

M. le rapporteur. Avis défavorable, car l’amendement tend à rapprocher le prononcé de la peine et l’exécution de celle-ci.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission examine l’amendement CL235 de Mme Colette Capdevielle.

Mme Colette Capdevielle. Cet amendement précise que la mention de la réinsertion dans l’article 707 du code procédure pénale renvoie à l’article 130-1 du code pénal.

M. le rapporteur. Je sollicite le retrait de cet amendement, qui apporte une précision superfétatoire.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL169 du rapporteur.

La Commission est saisie de l’amendement CL205 de M. Alain Tourret.

M. Alain Tourret. Cet amendement substitue l’expression « agir en personne responsable » à celle de « mener une vie responsable » qui ne sous-tend aucune action positive de la part du condamné. Celui-ci doit être l’acteur de sa propre réinsertion.

M. le rapporteur. Avis favorable, car cet amendement souligne l’obligation positive faite au condamné.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL41 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL325 de M. Éric Ciotti.

M. Jean-Frédéric Poisson. Cet amendement rappelle la portée pédagogique du régime d’exécution des peines à l’égard de l’ensemble des citoyens, y compris ceux qui n’ont pas encore commis d’infraction.

M. le rapporteur. Avis défavorable : la valeur symbolique de la peine réside dans son prononcé, plus que dans son exécution.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CL147 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement précise que le régime d’exécution des peines doit impérativement respecter les droits des personnes et les règles pénitentiaires européennes. Ce rappel ne semble pas superflu au regard des condamnations régulières de la France par la Cour européenne des droits de l’homme.

M. le rapporteur. Avis défavorable, car la référence aux règles pénitentiaires européennes est dépourvue de valeur contraignante.

La Commission rejette l’amendement.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL170 du rapporteur.

En conséquence, les amendements CL206 de M. Alain Tourret et CL148 de M. Sergio Coronado tombent.

La Commission est saisie de l’amendement CL167 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement précise la mission du service public dans l’exécution des peines. Il souligne le rôle des juges de l’application des peines, des procureurs de la République et des agents des SPIP et rappelle l’importance de la coordination avec les autres services de l’État, les collectivités territoriales et les associations pour assurer un travail de réinsertion efficace.

M. le rapporteur. Je vous demande de retirer cet amendement qui est satisfait par l’amendement CL173 à venir.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL326 de M. Éric Ciotti.

M. Philippe Gosselin. L’amendement propose de réserver le bénéfice de la libération anticipée aux condamnés présentant des garanties de réinsertion.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

La Commission examine les amendements CL208, CL286, CL209 et CL 287 de M. Alain Tourret, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

M. Alain Tourret. Je tiens particulièrement à l’amendement CL208, que je défends conjointement avec les amendements CL286, CL 209 et CL287. Ils concernent la situation de la femme enceinte et celle de la femme avec enfant emprisonnée qu’évoquent la convention relative aux droits de l’enfant, mais aussi les rapports annuels du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Le nombre de femmes incarcérées est faible : 3,3 % en janvier 2013. Tous les ans, cinquante enfants de moins de dix-huit mois vivent dans les prisons françaises. Mais une future maman a-t-elle sa place en prison ? Toutes les études démontrent les dommages de l’incarcération pour l’enfant. Peut-on laisser une petite chose innocente devenir une victime supplémentaire ?

Il nous appartient de trouver des solutions alternatives à la prison, qu’il s’agisse du domicile ou d’autres lieux. En tant qu’humaniste, je ne peux pas admettre, au nom de prétendues raisons de sécurité, de cautionner une situation insupportable. J’espère que je serai entendu par mes collègues.

M. le rapporteur. Je suis très embarrassé par votre amendement qui met en lumière une situation incontestablement difficile, à laquelle il ne peut être remédié sans procéder, au préalable, à des investigations.

M. Alain Tourret. On m’a déjà fait cette réponse il y a quinze ans.

M. le rapporteur. La piste d’une modification des conditions de la libération conditionnelle parentale mérite d’être étudiée. Actuellement, celle-ci peut être octroyée, sans condition de délai, à toute personne élevant un enfant de moins de dix ans et qui a été condamnée à une peine inférieure à quatre ans, sauf dans les cas de crimes ou délits sur mineur et de récidive légale. On est inévitablement confronté au cas des mères infanticides, ce que l’amendement CL286 prend en compte.

Il convient également de s’interroger sur une possible exploitation par les réseaux de criminalité organisée des femmes enceintes, notamment pour le transport de stupéfiants.

Il nous faut en outre expertiser les solutions alternatives à l’emprisonnement. L’assignation à résidence sous surveillance électronique est-elle satisfaisante ? Ne causerait-on pas un mal plus grand en confinant l’enfant au domicile de sa mère sans possibilité de sortie alors que la prison lui permet de le faire ?

Dernière difficulté : les femmes qui accouchent en détention peuvent conserver leur enfant auprès d’elle après la naissance pendant dix-huit mois, auxquels peuvent s’ajouter six mois supplémentaires. Avec l’amendement, dès lors que l’accouchement n’a plus lieu en situation de détention, plus aucun enfant ne pourra rester en prison avec sa mère.

Il est difficile de savoir quelle solution adopter sans craindre de proposer des remèdes pires que le mal – la séparation de la mère et de l’enfant dès l’accouchement ou le développement d’activités criminelles impliquant des femmes enceintes.

J’ai bien conscience de me faire « l’avocat du diable », mais des évaluations complémentaires s’imposent.

M. Philippe Gosselin. Tout en saluant l’humanisme dont fait preuve M. Tourret, je partage l’embarras du rapporteur.

Nous sommes confrontés à des situations humaines très délicates. Mais il faut bien peser les conséquences de la proposition qui nous est faite et mesurer les risques de détournement. Je partage entièrement les interrogations exprimées par le rapporteur.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je remercie M. Tourret de poser cette question. Le sujet est grave et difficile. En excluant les femmes ayant commis des crimes ou délits contre les enfants, son amendement propose une rédaction conforme aux limites actuelles du droit. Mais sommes-nous capables d’adopter un principe en la matière, même s’il est assorti d’exceptions ? Le système pénitentiaire est-il capable d’accueillir des femmes dans des conditions compatibles avec la grossesse ou la maternité ? Il est, en l’état, difficile de répondre à ces questions. Sur ce point, une fois n’est pas coutume, je rejoins le rapporteur.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Vous aurez noté que le Contrôleur des lieux de privation de liberté, dont nous connaissons à la fois la force de conviction et la prudence, ne formule pas de recommandations tant le sujet est sensible et complexe. Il suggère des études et évoque la possibilité d’une suspension de la peine.

M. Alain Tourret. Je souhaite entendre l’avis de la garde des Sceaux. En 1998, on m’avait promis des études : je les attends toujours. Alors que la loi italienne interdit l’emprisonnement des mères d’enfants de moins de quatre ans, la loi du 15 juin 2000 a seulement autorisé une libération conditionnelle pour les parents.

Pour la femme enceinte, comme le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, je plaide pour une suspension de la peine, car l’emprisonnement attente aux conditions de vie de l’enfant à naître. D’autre part, on ne peut accepter qu’une mère soit emprisonnée avec son bébé : je le répète, toutes les études ont démontré que cela avait de graves incidences sur la vie de l’enfant. La prison doit être proscrite pour la mère du troisième mois de grossesse jusqu’aux dix-huit mois de l’enfant. Si vous visitez les prisons, vous serez convaincus.

Mme la garde des Sceaux. Tous les députés ont souligné la difficulté du sujet. Personne n’y est insensible. Cependant, il n’est pas possible de fonder une rupture d’égalité de traitement sur la condition de femme. Il ne faut pas, en outre, sous-estimer la capacité des réseaux de criminalité organisée à exercer des pressions sur les femmes enceintes.

Il est établi que les enfants ayant passé leurs dix-huit premiers mois en milieu carcéral présentent des troubles, notamment en matière de socialisation. Le sujet est très douloureux.

J’entends votre impatience et je connais votre constance, monsieur Tourret. Je vous propose de travailler à une formulation respectueuse de l’égalité de traitement devant la loi pour améliorer les dispositions en matière d’aménagement des peines.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Le rapporteur suggère la création d’une mission d’information pour prendre le temps de réfléchir à des préconisations fondées sur une étude sérieuse.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL171 du rapporteur.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement CL483 de M. Jean-Frédéric Poisson.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL172 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 11 modifié.

Article additionnel après l’article 11 (titre XIV ter du livre IV et art. 706-15-3 [nouveaux] du code de procédure pénale) : Possibilité pour l’auteur d’une infraction de verser volontairement une somme d'argent, même si la victime ne s'était pas constituée partie civile – Sort des revenus des personnes détenues affectés à la part de leur compte nominatif réservée à l'indemnisation des parties civiles en l’absence de réclamation des sommes concernées au moment de leur libération

La Commission examine l’amendement CL33 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement a un double objet : d’une part, donner aux auteurs d’infractions la possibilité de verser volontairement, dans un fonds dont la destination serait précisée par décret, une somme d’argent en réparation du préjudice causé par l’infraction, même si la victime ne s’est pas constituée partie civile ; d’autre part, fixer le sort des revenus du travail des personnes détenues qui sont affectés à l’indemnisation des parties civiles.

En effet, il arrive que certaines parties civiles ne se fassent pas connaître des établissements pénitentiaires. Dans ce cas, lors de la libération du détenu, les sommes prélevées par l’établissement pénitentiaire pour l’indemnisation, et qui n’ont pas été réclamées par les victimes, sont restituées au détenu. L’amendement propose donc que ces sommes soient versées à un fonds.

Je ne nie pas les difficultés d’application. C’est la raison pour laquelle l’amendement renvoie à un décret. Il faut également savoir que les créances civiles, qui portent parfois sur des sommes modiques, ont une durée de dix ans.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je suis plus convaincu par la seconde partie de votre amendement que par la première. Je voterai néanmoins avec plaisir cet amendement qui va dans un sens favorable à l’indemnisation. Le problème, pour les établissements pénitentiaires qui ne connaissent pas les parties civiles, n’est cependant pas résolu.

La Commission adopte l’amendement à l’unanimité.

Après l’article 11

Puis elle est saisie de l’amendement CL149 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Pour l’examen des demandes de confusion de peines, la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation impose de ne tenir compte que du passé pénal de la personne. Cela semble contraire avec la volonté de faciliter la réinsertion des personnes détenues. Différentes études démontrent, en outre, que la prise en compte du comportement du condamné peut améliorer sa réinsertion. Cet amendement propose donc de tenir compte du comportement de la personne condamnée depuis sa condamnation.

M. le rapporteur. Je vous demande de retirer cet amendement qui repose sur une lecture erronée de la jurisprudence de la Cour de cassation.

Il existe deux sortes de confusion de peines : la première, la confusion de droit – lorsque le maximum de la peine encourue a été dépassé par le cumul des condamnations – repose uniquement sur l’analyse du casier judiciaire ; la seconde, la confusion en opportunité – lorsque de vieilles situations pénales sont purgées – tient compte du comportement de l’intéressé. Votre préoccupation est donc satisfaite par la jurisprudence actuelle.

L’amendement est retiré.

Article 12 (art. 2 et 3 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire) : Accès aux dispositifs de droit commun pour les condamnés

La Commission examine les amendements identiques CL113 de M. Georges Fenech et CL484 de M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Georges Fenech. Selon l’article 12, les autorités ou organismes qui assurent le service public pénitentiaire ou qui y concourent – l’administration pénitentiaire, les autres services de l’État et des collectivités territoriales, les associations – doivent veiller, chacun « en ce qui le concerne, à ce que les personnes condamnées accèdent de façon effective à l’ensemble des droits de nature à faciliter leur insertion ». Avons-nous affaire à un rappel à la loi sans portée normative ou à la volonté de créer des droits sociaux supplémentaires ? La formulation de cet article ne lève pas les doutes concernant l’effectivité des droits existants ou même la possibilité de recourir à une logique de droits opposables.

Est-il juste de créer une sorte de garantie universelle pour les condamnés, leur donnant un droit supplémentaire à l’effectivité de leurs droits, notamment sociaux, comme le laisse entendre cette rédaction ? Il est tout à fait regrettable que ce projet de loi s’assure une nouvelle fois des droits sociaux des personnes condamnées sans s’intéresser nullement à la situation des victimes, dont certaines peuvent entrer dans une spirale dépressive et ne jamais faire valoir leurs droits. Il est inacceptable que l’État cherche à s’assurer de l’effectivité des droits des personnes condamnées et pas de celle des droits des victimes.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je suis surpris chaque fois que nous rédigeons un article de loi qui ne comporte aucune mesure de portée normative dans le seul dessein d’indiquer qu’il faut respecter la loi. C’est le cas de l’article 12 qui est superfétatoire.

M. le rapporteur. Monsieur Fenech, c’est à tort que vous déduisez du mot « effectif » que nous mettons en place un droit opposable. M. Jean-Frédéric Poisson ne s’y est pas trompé, puisqu’il considère, contrairement à vous, que l’article 12 ne crée aucun droit.

M. Georges Fenech. Nous pouvons avoir des divergences !

M. le rapporteur. Pour vous rassurer, monsieur Fenech, nous sommes prêts à supprimer le mot « effectif ». L’article 12 ne vise en aucun cas à créer des droits sociaux, mais à rappeler l’importance de la coopération entre les divers acteurs impliqués.

Pour inciter les collectivités locales à mettre en place des programmes destinés aux personnes sous main de justice, nous présenterons même un amendement qui conditionne le versement des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD).

Ne laissons pas se diffuser l’idée fausse et néfaste que les détenus bénéficient de plus de droits sociaux que les autres ! Vous savez parfaitement qu’ils ne peuvent pas bénéficier du revenu de solidarité active (RSA) et que le montant de l’allocation aux adultes handicapés qui leur est versée est considérablement réduit.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Pour vous donner satisfaction, messieurs, nous pourrions supprimer les mots « de façon effective » dans l’amendement CL173 du rapporteur, qui propose une rédaction globale de l’article 12.

M. le rapporteur. Cela me convient.

M. Georges Fenech. À moi aussi ! Les explications du rapporteur ayant fait disparaître toute ambiguïté, je voterai cet amendement.

M. Jean-Frédéric Poisson. Pour ma part, j’estime que la suppression des termes « de façon effective » ne fait que renforcer l’inutilité de cet article qui se contente de rappeler l’état du droit en vigueur.

Monsieur le rapporteur, je sais fort bien que l’on n’a pas plus de droits sociaux en prison qu’à l’extérieur, et j’estime que les détenus doivent pouvoir profiter de tous les droits qui sont les leurs, y compris pour préparer leur sortie. Cependant, il me semble vain de simplement affirmer que la loi va les aider à le faire.

L’amendement CL113 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CL484.

Puis elle adopte l’amendement CL173 du rapporteur, ainsi rectifié.

L’article 12 est ainsi rédigé.

Après l’article 12

La Commission en vient à l’amendement CL267 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. La loi pénitentiaire de 2009 a ouvert la possibilité pour les personnes détenues de se domicilier dans les établissements pénitentiaires, afin de faciliter leurs démarches administratives. Le bilan de cette mesure montre ses limites : en mai 2012, l’administration pénitentiaire ne dénombrait que 275 domiciliations.

Dans son rapport d’activité 2013, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a recommandé que la loi permette la domiciliation d’une personne détenue auprès du centre communal ou intercommunal d’action sociale (CCAS) proche du lieu où elle recherche une activité dans le cadre d’une préparation à sa sortie.

M. le rapporteur. Je demande le retrait de l’amendement. À défaut, j’y serai défavorable, car il risque de créer de véritables encombrements dans certains CCAS. Nous avons besoin d’informations supplémentaires.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. L’amendement de notre collègue ne rend pas obligatoire la domiciliation dans les CCAS.

La Commission rejette l’amendement.

Chapitre III

Dispositions relatives aux missions du service public pénitentiaire dans le suivi
et le contrôle des personnes condamnées

Article 13 (art. 712-1 du code de procédure pénale) : Clarification des compétences entre les juridictions de l’application des peines et les services pénitentiaires d’insertion et de probation

La Commission examine l’amendement CL114 de M. Georges Fenech.

M. Georges Fenech. L’article 13 ne dissipe aucunement le flou qui plane sur le rôle exact du SPIP. Comment son rôle s’articuletil avec celui du juge de l’application des peines en matière de contrainte pénale ? Les évaluations demandées ne concernent que les aspects matériels et la personnalité : aucune évaluation criminologique n’est demandée, les SPIP n’étant pas formés efficacement à ces évaluations. L’étude d’impact prévoit bien des coûts de recrutement et de fonctionnement pour les SPIP, mais elle ne mentionne aucun coût spécifique de formation.

Une nouvelle fois, votre projet revient à ne plus juger des faits délictuels ou criminels, ni même des actes de réinsertion, mais des personnes. En cela, il méconnaît les risques de manipulation des SPIP par les personnes condamnées. En refusant d’ouvrir les yeux sur le potentiel de dangerosité de certaines personnes condamnées, cet article et ce projet de loi mettent en place les conditions d’une plus grande récidive.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Les articles 13 et 14 relatifs aux missions du SPIP ont leur cohérence. Le SPIP n’est aucunement empêché de se livrer à quelque évaluation que ce soit.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL174 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 13 modifié.

Article 14 (art. 13 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire) : Définition des missions des services pénitentiaires d’insertion et de probation

La Commission examine les amendements identiques CL115 de M. Georges Fenech et CL485 de M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Georges Fenech. Le fait que la mise en œuvre effective de la contrainte pénale repose pour l’essentiel sur les SPIP pose la question des moyens qui seront donnés à ces services pour accomplir leur mission, que ce soit en termes d’effectifs ou de formation.

Peut-on considérer qu’il suffirait d’augmenter de mille personnes les effectifs des SPIP pour répondre aux besoins futurs ? Quel sera le contenu de la formation des personnels qui auront la responsabilité de la mise en œuvre des peines des personnes condamnées à la contrainte pénale ? Dans ce dispositif, est-il possible de considérer que le tribunal puis le juge de l’application des peines sont encore les juges, alors que la contrainte pénale prononcée par le tribunal pourrait être contredite par le juge de l’application des peines, luimême plus que jamais dépendant de l’évaluation produite par les SPIP ? Le texte ne répond à aucune de ces interrogations.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 14 sans modification.

Après l’article 14

La Commission est saisie de l’amendement CL409 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à modifier l’article 145-4 du code de procédure pénale, relatif au permis de visite des personnes placées en détention provisoire. Il propose tout d’abord de supprimer le délai d’un mois pendant lequel le juge n’a pas à justifier son refus de délivrer un permis de visite à un membre de la famille du détenu. Il impose ensuite au parquet de motiver son éventuel refus, alors que seul le juge d’instruction est aujourd’hui soumis à cette obligation. Il impose également de motiver le refus de permis de visite pour tous les demandeurs au-delà des seuls membres de la famille.

Cet amendement permet également de revoir les conditions de motivation et de recours contre la décision de refus de permis de visite.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Nous avons besoin de visibilité pour modifier les règles actuelles.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL260 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Il est proposé d’expérimenter, dans certaines juridictions, des mesures de justice restaurative comme peines complémentaires – participation à des rencontres encadrées entre condamnés et victimes ou à des rencontres encadrées entre personnes condamnées. Toutefois, craignant que le rapporteur ne réitère sa position relative à l’expérimentation, je retire l’amendement.

L’amendement CL260 est retiré.

Chapitre IV

Dispositions visant à renforcer les pouvoirs de la police et de la gendarmerie
en cas de violation de ses obligations par une personne sous-main de justice

Article 15 (art. 141-4, 141-5 [nouveau], 230-19, 709-1, 709-1-1 [nouveau] et 712-16-3 du code de procédure pénale ; art. 64-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique) : Suivi des personnes condamnées par les services de police et de gendarmerie

La Commission est saisie d’un amendement CL46 du rapporteur.

M. le rapporteur. La visite domiciliaire prévue pour découvrir la détention d’arme est inutile puisqu’elle n’autorise pas à fouiller un lieu. La perquisition est donc mieux adaptée.

La Commission adopte l’amendement.

L’amendement CL126 de M. Sergio Coronado est retiré.

La Commission adopte successivement l’amendement de coordination CL268, les amendements rédactionnels CL175, CL177, CL178, CL179 et CL176 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL50 du même auteur.

M. le rapporteur. Cet amendement rend applicable à la retenue judiciaire les règles aujourd’hui prévues dans le code de procédure en matière de défèrement. Il précise les conditions dans lesquelles la personne qui a violé de façon grave les obligations ou interdictions la concernant est présentée au tribunal.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement de cohérence CL51 du rapporteur.

Puis elle est saisie de l’amendement CL180 du rapporteur, qui fait l’objet d’un sous-amendement CL572 rectifié de M. Sergio Coronado.

M. le rapporteur. S’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’une personne condamnée sortant de détention n’a pas respecté l’interdiction qui lui est faite d’entrer en relation avec certaines personnes ou de paraître en un lieu, cet amendement permet aux services de police et aux unités de gendarmerie, sur instruction du juge de l’application des peines, de procéder à l’interception, à l’enregistrement et à la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications, ainsi qu’à la localisation en temps réel d’une personne, d’un véhicule ou de tout autre objet.

M. Sergio Coronado. Nous proposons de substituer aux termes trop flous « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner », les mots « indices graves ou concordants rendant vraisemblable ». Dans nos débats avec Mme la garde des Sceaux, nous avons déjà eu l’occasion de souligner le caractère intrusif de ce type de procédure.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Certes, la géolocalisation et les écoutes ont un caractère intrusif, mais il est moindre que celui de l’incarcération qui constitue l’alternative à ces procédures. Par ailleurs, la présence d’« indices graves et concordants » devrait à mon sens se suffire à elle-même. En tout état de cause, la rédaction du projet de loi me semble mieux correspondre à la réalité du terrain.

M. Jean-Frédéric Poisson. Les députés du groupe UMP voteront contre le sous-amendement de M. Sergio Coronado, mais en faveur de l’amendement du rapporteur.

La Commission rejette le sous-amendement CL572 rectifié.

Puis elle adopte à l’unanimité l’amendement CL180.

Elle adopte également l’amendement rédactionnel CL181 du rapporteur.

Elle adopte enfin l’article 15 modifié.

Article additionnel après l’article 15 (art. 41-1 du code de procédure pénale) : Possibilité pour le procureur de la République de confier, par convention, à l’officier de police judiciaire, au délégué ou au médiateur du procureur de la République, l’initiative des mesures alternatives aux poursuites

La Commission est saisie de l’amendement CL53 du rapporteur.

M. le rapporteur. Les nombreux officiers de police judiciaire que nous avons entendus consacrent un temps précieux à tenter de joindre les substituts du procureur souvent débordés. Cet amendement vise à donner aux directives pénales un caractère légal, ce qui donnera au procureur de la République la faculté de confier à l’officier de police judiciaire, dans le cadre d’une convention, l’initiative de la mise en œuvre individuelle des mesures alternatives aux poursuites. Il serait évidemment rendu compte régulièrement au procureur de la République à un rythme prévu dans les conventions.

La pratique des directives pénales a déjà cours. Sa « légalisation » permettra sa généralisation.

La Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 15 (art. 41-1-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Possibilité pour les officiers de police judiciaire de recourir à la transaction pénale pour les infractions de faible gravité

Elle examine l’amendement CL262 du rapporteur.

M. le rapporteur. Les officiers de police judiciaire pourraient bénéficier, avant que l’action publique ne soit engagée, de pouvoirs semblables à ceux qu’exercent déjà les douaniers et recourir à des transactions pénales pour des infractions de faible gravité : délits punis d’une peine d’amende ou d’un an d’emprisonnement au plus, vols simples lorsque la valeur du butin est inférieure à un montant fixé par décret…

Cette extension du champ de la transaction pénale à de nouvelles infractions répond à des revendications formulées par les représentants syndicaux de la police nationale. Elle a également reçu l’appui de Mme la directrice générale des douanes et des droits indirects.

M. le président Jean-Jacques Urvoas. L’ancien procureur général près la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, avait fait la même proposition.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Cette disposition a-t-elle bien sa place dans ce projet de loi consacré à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines ?

M. le rapporteur. Je proposerai de changer la dénomination du projet de loi qui vise aussi à l’efficacité des sanctions pénales. Il traitera également, par exemple, du contentieux routier, car il convient de maîtriser le flux des dossiers soumis à la justice tout en maintenant le niveau actuel de répression.

La Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 15 (art. L. 132-5, L. 132-10-1 [nouveau],
L. 132-12-1 et L. 132-13 du code de sécurité intérieure) : Rôle des instances locales de sécurité et de prévention de la délinquance en matière d’exécution des peines et de prévention de la récidive

Elle en vient à l’amendement CL52 du rapporteur.

M. le rapporteur. Pour que la libération sous contrainte fasse ses preuves, le contrôle doit être effectif. Police, gendarmerie, justice, services pénitentiaires, services de probation et d’insertion, tous les acteurs doivent collaborer. Cet amendement vise à trouver un lieu de coordination qui pourrait être les états-majors de sécurité au sein des conseils départementaux de prévention de la délinquance (CDPD), et, dans les zones de sécurité prioritaires, les cellules de coordination opérationnelle du partenariat.

La Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 15 (art. L. 132-16 [nouveau] du code de la sécurité intérieure) : Participation des députés et sénateurs aux conseils locaux, intercommunaux et métropolitains de sécurité et de prévention de la délinquance

Elle est saisie de l’amendement CL263 de Mme Élisabeth Pochon.

Mme Élisabeth Pochon. Même sans disposer d’une voix délibérative, les parlementaires doivent être associés au travail des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) et des conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CISPD) de leur circonscription. Le non-cumul des mandats qui ne leur permettra plus d’y participer à un autre titre rend cette précision d’autant plus indispensable.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 15 (art. 5 de la loi n° 2007 297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance) : Règles de conditionnalité du versement aux collectivités territoriales du fonds interministériel de prévention de la délinquance

Puis elle examine l’amendement CL54 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le versement des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) est conditionné à la mise en œuvre, à l’attention de l’ensemble des personnes placées sous main de justice, détenues ou non détenues, d’actions d’insertion ou de réinsertion, ou d’actions de prévention de la récidive.

La Commission adopte l’amendement.

Chapitre V

Dispositions assurant un retour à la liberté contrôlé, suivi et progressif des personnes condamnées

Article 16 (art. 720 [rétabli] et 712-11 du code de procédure pénale) : Création de la libération sous contrainte pour les personnes condamnées à une ou plusieurs peines privatives de liberté d’une durée inférieure ou égale à cinq ans

La Commission est saisie d’un amendement de suppression CL116 de M. Georges Fenech.

M. Georges Fenech. L’article 16 institue une procédure d’examen obligatoire de la situation des personnes condamnées à une peine de cinq ans au plus lorsqu’elles ont exécuté les deux tiers de leur peine afin d’apprécier s’il y a lieu qu’elles bénéficient ou non d’une mesure de sortie encadrée.

Soulignons tout d’abord qu’il s’agit de la création d’un nouvel automatisme. Notons ensuite que les crédits de réduction de peine pourtant automatiques ne sont pas supprimés, ce qui aurait pu donner une relative cohérence à ce système.

En fait, le mécanisme d’examen automatique aura lieu non pas aux deux tiers de la peine, mais à la moitié de sa durée. Ce dispositif concernera sans distinction les récidivistes et les primo-délinquants condamnés à une première peine privative de liberté, même si le cas est rare. Tous les détenus seront concernés par ce dispositif de libération anticipée. Une nouvelle fois, refusant de voir la réalité criminologique, le projet de loi étend à tous les détenus une mesure qui ne devrait concerner que ceux démontrant un effort particulier de réinsertion.

Conformément à l’idéologie mensongère qui dénonce l’existence d’un supposé « tout carcéral », cet article atteste de la volonté de vider plus rapidement les prisons en créant, malgré les nuances d’appellation, un véritable mécanisme de sortie automatique.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL156 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL153 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à imposer l’audition systématique de la personne libérable avant le prononcé de la libération sous contrainte afin d’adapter au mieux les mesures prononcées et de permettre la réussite de cette sortie.

La présence du détenu au moment de la fixation de l’aménagement est indispensable pour permettre qu’il l’accepte et s’y conforme. Cette audition est un préalable à la réussite de l’encadrement de la sortie.

M. le rapporteur. Je demande le retrait de cet amendement. La tenue d’un débat contradictoire relève de la procédure de libération conditionnelle, dont nous savons qu’elle dure des mois et ne bénéficie qu’à 6,3 % des sortants. Je défendrai dans un instant un amendement CL76 visant à donner au juge de l’application des peines la possibilité d’ordonner la comparution du détenu. Pour des raisons matérielles, cette solution me semble la plus à même d’assurer le succès de la libération sous contrainte.

L’amendement CL153 est retiré.

La Commission examine l’amendement CL154 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Je souhaite qu’il soit permis aux détenus de refuser une mesure de libération sous contrainte. Outre qu’il paraît contraire aux droits des personnes d’imposer cette forme de libération, l’échec est à peu près certain s’il n’y a pas d’acceptation de la mesure de la part du condamné.

M. le rapporteur. Avis défavorable. La libération sous contrainte est la continuation d’une peine à l’extérieur de la prison, sous des modalités différentes. Il n’y a donc pas lieu de requérir l’accord formel du détenu. Dans la pratique, le juge de l’application des peines tiendra compte de l’éventuelle opposition du détenu dans la mesure où personne ne souhaite que la mesure se solde par un échec, qui se traduirait par le retour en prison. Mais je ne souhaite pas que soit inscrit dans le texte le fait que l’accord du détenu doive être demandé. Les juges sont raisonnables et ne mettront pas en place des dispositions dont ils savent qu’elles sont vouées à l’échec.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL76 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement, que j’ai déjà évoqué, permet au juge d’ordonner la comparution de la personne condamnée devant la commission de l’application des peines.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte successivement l’amendement de clarification rédactionnelle CL77 et les amendements rédactionnels CL159 et CL83, tous trois du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL34 du rapporteur.

M. le rapporteur. Amendement de cohérence avec les règles applicables en matière d’appel des décisions d’application des peines.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 16 modifié.

Article additionnel après l’article 16 (art. 712-5 du code de procédure pénale) : Consécration dans la loi du principe selon lequel le service pénitentiaire d’insertion et de probation est représenté au sein de la commission de l’application des peines

La Commission est saisie de l’amendement CL152 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. L’article 712-5 du code de procédure pénale dispose actuellement que la commission de l’application des peines est présidée par le juge de l’application des peines, et que le procureur de la République et le chef d’établissement en sont membres de droit. Le service pénitentiaire d’insertion et de probation n’y est pas obligatoirement représenté et, dans les faits, il en est parfois absent. Compte tenu de son rôle dans l’application des peines, je souhaite que cette représentation soit obligatoire.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 16 (art. 723-4 du code de procédure pénale) : Extension du bénéfice des mesures d’aide prévues à l’article 132-46 du code pénal au condamné exécutant sa peine sous le régime de la semi-liberté ou du placement à l’extérieur

La Commission adopte l’amendement CL79 du rapporteur.

Après l’article 16

Elle est alors saisie de l’amendement CL155 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Je défendrai en même temps l’amendement CL155 et l’amendement CL157, qui portent sur le même sujet.

Actuellement, pour les condamnés à de longues peines, la libération conditionnelle est subordonnée à un avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, après examen au centre national d’évaluation. Cette commission doit normalement rendre son avis en six mois mais, en pratique, ce délai n’est presque jamais tenu. Or les juridictions de l’application des peines ne rendent pratiquement jamais leurs décisions sans cet avis.

Le jury de la conférence de consensus a ainsi noté qu’il était « devenu impossible d’examiner la demande du condamné dans un délai raisonnable, car plus d’une année s’écoule entre la demande et l’examen au fond. Il est dès lors illusoire d’exiger du condamné qu’il soit en mesure de présenter un projet de qualité. Il est impératif de laisser le soin aux juridictions d’application des peines de définir les mesures d’instruction pertinentes au regard du projet présenté et de la personnalité du condamné. »

Entre 2010 et 2013, le taux de sorties de longues peines non encadrées par une mesure de libération conditionnelle est passé de 31 % à 75 % alors qu’il est impératif d’éviter ces « sorties sèches ». C’est pourquoi l’amendement CL155 tend à simplifier la procédure pour les personnes qui n’ont plus que deux ans de prison à effectuer en rendant facultatif l’avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté.

Quant à l’amendement CL157, il vise à ajouter le placement extérieur au nombre des mesures probatoires au terme desquelles la libération conditionnelle peut être accordée à des personnes condamnées à plus de dix ans de prison, et à réduire la période probatoire à six mois.

M. le rapporteur. La commission qui se penche sur l’exécution des peines devrait apporter une réponse à ces questions relatives aux longues peines. Avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements CL155 et CL157.

Article 17 (art. 730-3 [nouveau] du code de procédure pénale) : Création d’une obligation d’examen, aux deux tiers de la peine, de la situation des personnes condamnées à une ou plusieurs peines privatives de liberté de plus de cinq ans

La Commission est saisie d’un amendement CL117 de M. Georges Fenech, tendant à supprimer l’article.

M. Georges Fenech. Conformément à la logique « anticarcérale » de ce projet, l’article 17 fait obligation d’examiner la situation des condamnés à de longues peines lorsque celles-ci sont exécutées aux deux tiers. Ainsi un condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pourra bénéficier d’une libération sous contrainte après dix-huit années de détention. Une telle disposition porte atteinte à l’autorité de la chose jugée et à la crédibilité de la justice en ce qu’elle porte suppression définitive des peines perpétuelles. Voilà qui mériterait au moins un débat plus approfondi que celui que nous pouvons avoir à propos d’un article arrivant en fin de projet de loi.

Cet article montre par ailleurs que le projet de loi ne se limite pas aux délits punis de cinq ans de prison au plus, mais qu’il s’applique également aux crimes. S’ajoutant aux crédits de réduction de peine, ces examens obligatoires facilitant des libérations s’appliqueront dès que les peines seront exécutées à moitié, et non aux deux tiers comme il a été dit.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement l’amendement rédactionnel CL160, l’amendement de simplification rédactionnelle CL84 et l’amendement rédactionnel CL161 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL80, également du rapporteur.

M. le rapporteur. Le présent amendement vise à rapprocher la procédure créée par l’alinéa 4 de l’article 17 de celle prévue par les articles D. 49-33 et D. 49-36 du code de procédure pénale. En bref, il s’agit d’unifier les règles d’appel.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 17 modifié.

Article additionnel après l’article 17 (art. 721-2 du code de procédure pénale) : Renforcement des mesures de contrôle, des obligations et interdictions susceptibles d’être prononcées à l’encontre du condamné ayant bénéficié d’une ou plusieurs réductions de peines

La Commission est saisie de l’amendement CL55 (2e rectification) du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement réécrit l’article 721-2 du code de procédure pénale afin que les crédits de réduction de peine et les réductions de peine supplémentaires puissent être soumis à conditions, et que la violation des interdictions imposées à un condamné, à l’issue de son incarcération et après un débat contradictoire, puisse être sanctionnée par la révocation de ses crédits et, en conséquence, par sa réincarcération pour une durée égale à celle des réductions de peines dont il aura bénéficié.

La Commission adopte l’amendement.

Article additionnel après l’article 17 (art. 730 du code de procédure pénale) : Coordination dans le code de procédure pénale

La Commission adopte l’amendement CL78 du rapporteur.

Article 18 (art. 712-4, 723-14, 723-19 à 723-28, 934-1 et 934-2 du code de procédure pénale) : Suppression de la procédure simplifiée d’aménagement des peines (PSAP) applicable aux condamnés incarcérés et de la surveillance électronique de fin de peine (SEFIP)

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL118 de M. Georges Fenech, tendant à la suppression de l’article.

Puis elle adopte l’article 18 sans modification.

Article additionnel après l’article 18 (art. 712-17 du code de procédure pénale) : Modification relative aux mandats délivrés par le juge de l’application des peines

La Commission adopte l’amendement CL35 du rapporteur.

Article additionnel après l’article 18 (art. 712-21 du code de procédure pénale) : Limitation du champ d’application des expertises psychiatriques obligatoires préalables à une mesure d’aménagement de peine

La Commission adopte l’amendement CL36 du rapporteur.

Après l’article 18

La Commission examine l’amendement CL252 de M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Cet amendement vise à supprimer la rétention de sûreté.

Cette disposition, introduite par la loi de février 2008, n’a été que très peu appliquée : quatre personnes seulement ont séjourné au centre socio-médico-judiciaire de Fresnes, la première y étant arrivée le 23 décembre 2011, la dernière en étant sortie le 24 novembre 2013.

La rétention de sûreté est totalement contraire au sens de la peine et à notre conception de la justice en permettant l’incarcération d’une personne pour un délit à venir. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté a d’ailleurs été très sévère à l’égard de cette mesure dans son avis du 25 février 2014 : selon lui, les quatre personnes auxquelles elle a été appliquée n’auraient pas dû en relever.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Nous nous éloignons du cœur du texte, qui ne concerne que les délits. Je ne peux, là encore, que renvoyer à la commission de refonte du droit des peines, présidée par M. Bruno Cotte.

M. Georges Fenech. Madame la garde des Sceaux, en décembre 2012, vous avez dit votre intention de supprimer cette rétention de sûreté. Est-ce toujours votre volonté ? Si vous voulez bien répondre…

Mme la garde des Sceaux. La suppression de la rétention de sûreté est un engagement du président de la République et j’ai en effet dit que j’y étais moi aussi favorable. Pour autant, la mesure ne figure pas dans ce texte.

La rédaction de dispositions sur le sujet est complexe, compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel, mais, je le répète, ce n’est pas un sujet que ce projet aborde et cela ne le sera pas du fait du Gouvernement. Cela étant, si vous cherchez querelle, vous pourrez soulever la question en séance publique…

M. le président Jean-Jacques Urvoas. Il me semble, madame la garde des Sceaux, que, si le président de la République a pris des engagements relatifs aux peines plancher et aux tribunaux correctionnels pour mineurs, ce n’est pas le cas en ce qui concerne la rétention de sûreté.

La Commission rejette l’amendement CL252.

Article additionnel après l’article 18 (art. 121-8 [nouveau] du code pénal, art. L. 409-1 [nouveau] du code des douanes, art. L. 612-42 et art. L. 621-15 du code monétaire et financier, art. L. 464-5-1 [nouveau] et art. 44 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne) : Contribution additionnelle pour l’aide aux victimes, assise sur le montant des amendes pénales et douanières ainsi que les sanctions pécuniaires prononcées par certaines autorités administratives indépendantes

Elle examine ensuite les amendements CL266 et CL56 de Mme Nathalie Nieson, pouvant faire l’objet d’une discussion commune.

Mme Nathalie Nieson. Depuis le début de cette législature, je travaille sur l’aide aux victimes – comme l’avait fait avant moi Mme Martine Carillon-Couvreur. Il y a quelques mois, à la demande du Premier ministre, j’ai conduit une mission sur le financement des associations d’aide aux victimes, qui a abouti à la remise d’un rapport à Mme la garde des Sceaux.

Depuis sa prise de fonctions, celle-ci a constamment soutenu cette cause. Pour autant, le constat s’impose : la situation des associations d’aide aux victimes, qui remplissent pourtant une véritable mission de service public au sein de notre système judiciaire, est plus que fragile en raison de la faiblesse et de la précarité des financements publics.

L’amendement CL266, issu d’une des préconisations de mon rapport, vise à insérer dans le code pénal un nouvel article 121-8 instituant, en faveur de la politique d’aide aux victimes, une contribution additionnelle assise sur les amendes pénales recouvrées. Pour le dire très précisément, il serait demandé à toute personne déclarée coupable d’une infraction de verser une contribution additionnelle – de 10 % – à l’amende pénale, contribution dont le produit viendrait abonder le financement des services d’aide aux victimes d’infractions pénales. Cette contribution additionnelle serait également appliquée aux amendes douanières ainsi qu’aux sanctions pécuniaires prononcées par l’Autorité des marchés financiers, par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, par l’Autorité de la concurrence ainsi que par l’Autorité de régulation des jeux en ligne.

Cet amendement repose, en définitive, sur l’idée de faire contribuer les auteurs d’infractions pénales aux dispositifs d’aide et d’assistance aux victimes – que ces infractions pénales aient fait ou non des victimes. Il procède des grands principes qui ont inspiré les lois relatives à l’aide aux victimes.

L’amendement CL56, quant à lui, est un amendement de conséquence.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte successivement les amendements CL266 et CL56.

Article additionnel après l’article 18 (art. 147-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Dispositif de suspension de détention provisoire pour motif d’ordre médical

La Commission est saisie des amendements CL253 et CL254 de M. Sergio Coronado, pouvant faire l’objet d’une présentation commune.

M. Sergio Coronado. Ces deux amendements reprennent une proposition de loi, adoptée à l’unanimité par le Sénat avec le soutien du Gouvernement, visant à créer un mécanisme de demande de mise en liberté pour motif médical, comme il existe une suspension médicale de peine pour les personnes détenues condamnées.

Il n’existe actuellement aucun mécanisme pour permettre la libération immédiate d’une personne gravement malade placée en détention provisoire. Il s’agirait ici, non pas d’une procédure de suspension de peine, mais d’une possibilité de demande de mise en liberté pour motif médical.

Mme Colette Capdevielle. L’amendement CL253 me semble tout particulièrement opportun : d’une part, comme l’a dit M. Coronado, il applique aux personnes en détention provisoire des dispositions équivalentes à celles de l’article 720-1-1 du code de procédure pénale, dont peuvent aujourd’hui bénéficier les personnes condamnées ; d’autre part et surtout, il modifie le deuxième alinéa du même article 720-1-1 en ne prévoyant désormais plus qu’une seule expertise, au lieu de deux, pour les condamnés malades. Les experts mettant beaucoup de temps pour se prononcer, cela réduira considérablement le délai entre la demande de suspension médicale de peine et le moment où le juge de l’application des peines sera saisi.

M. le rapporteur. Je suis pour ma part favorable à l’amendement CL254, qui se limite à la première disposition.

L’amendement CL253 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL254.

TITRE III

DISPOSITIONS DIVERSES

Article additionnel avant l’article 19 (art. 131-6 du code pénal) : Ajout à la liste des peines privatives ou restrictives de liberté susceptibles d’être prononcées à la place de l’emprisonnement l’interdiction de conduire, pendant une durée de cinq ans au plus, un véhicule non équipé d’un éthylotest anti-démarrage

La Commission est saisie de l’amendement CL82 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cette disposition vise à permettre au juge d’obliger une personne frappée d’une interdiction de conduire à installer, à l’issue de l’exécution de sa peine, un éthylotest anti-démarrage sur sa voiture.

La Commission adopte l’amendement.

Article 19 : Disposition transitoire en matière de révocation de sursis simple

La Commission examine l’amendement CL119 de M. Georges Fenech, visant à supprimer l’article.

M. Georges Fenech. C’est un amendement de cohérence avec l’amendement déposé à l’article 6, qui supprime la révocation automatique des sursis en cas de nouvelle condamnation.

Il me fournit l’occasion, madame la garde des Sceaux, de vous demander si vous avez répondu à l’interpellation du Syndicat national des directeurs pénitentiaires, qui vous a récemment alertée en ces termes : « Il faut créer de nouvelles places de prison. Il faut que tous les dispositifs d’accroissement de capacités soient mis en chantier. Il faut que les nouveaux établissements annoncés sortent de terre sans attendre. (…) Le nombre des places doit être cohérent avec l’évolution constatée et anticipée de la délinquance. »

Ce nouvel article vise à éviter à tout prix de nouvelles incarcérations parce que, faute de volonté politique ou par idéologie, le Gouvernement se refuse à construire les milliers de places de prison qui manquent à notre pays alors que l’ancienne majorité en avait voté la création dans la loi de programmation relative à l’exécution des peines.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL37 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement permettra au juge de l’application des peines de statuer, à la place du tribunal correctionnel, sur la dispense de révocation du sursis simple formée par un condamné dont le sursis aura été révoqué de plein droit avant l’entrée en vigueur de la présente loi.

M. Georges Fenech. Cet article peut s’analyser comme une forme de dépossession de la juridiction de jugement naturelle, le tribunal. Sachant que 30 % des peines de prison procèdent aujourd’hui de révocations de sursis, il aura en effet pour conséquence que, demain, la même proportion de condamnations à l’emprisonnement sera le fait, non pas d’une juridiction collégiale, mais du juge de l’application des peines !

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 19 modifié.

Article 20 : Date d’entrée en vigueur de la loi

La Commission est saisie de l’amendement CL120 de M. Georges Fenech, tendant à la suppression de l’article.

M. Georges Fenech. L’article 20 prévoit une entrée en vigueur différée de certaines dispositions, dont celles qui concernent la contrainte pénale et l’examen obligatoire des aménagements de peines : preuve que notre justice n’a sans doute pas les moyens de répondre à l’afflux massif de détenus qui pourront bénéficier du dispositif de libération conditionnelle quasi automatique. Ces délais risquent d’ailleurs de ne pas être suffisants.

J’observe en outre qu’avec l’application partiellement rétroactive de la disposition de l’alinéa 3, c’est une loi d’amnistie déguisée qui sera votée.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL220 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à prendre en compte, pour l’entrée en vigueur des dispositions dont l’application est différée dans le temps, la promulgation de la loi plutôt que sa publication.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 20 modifié.

Article 21 : Application outre-mer du projet de loi

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL121 de M. Georges Fenech, tendant à la suppression de l’article.

Elle adopte alors l’article 21 sans modification.

TITRE

La Commission examine l’amendement CL261 du rapporteur et l’amendement CL102 de M. Georges Fenech, pouvant faire l’objet d’une discussion commune.

M. le rapporteur. L’amendement CL261 vise à rédiger ainsi le titre du projet de loi : « Projet de loi tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales ».

La Commission adopte l’amendement CL261.

En conséquence, l’amendement CL102 tombe.

La Commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

*

* *

La séance est levée à 20 heures 15.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Nathalie Appéré, M. Christian Assaf, Mme Marie-Françoise Bechtel, M. Erwann Binet, M. Jean-Pierre Blazy, Mme Colette Capdevielle,
Mme Marie-Anne Chapdelaine, M. Éric Ciotti, M. Sergio Coronado, M. Carlos Da Silva, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. Marc Dolez, M. René Dosière, M. Olivier Dussopt, M. Georges Fenech, M. Guillaume Garot, M. Guy Geoffroy, M. Bernard Gérard, M. Yves Goasdoué, M. Philippe Gosselin, M. Philippe Goujon, M. Philippe Houillon, M. Sébastien Huyghe, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Bernard Lesterlin, M. Paul Molac, Mme Nathalie Nieson, M. Sébastien Pietrasanta, Mme Elisabeth Pochon, M. Jean-Frédéric Poisson, M. Pascal Popelin, M. Dominique Raimbourg, M. Alain Tourret, Mme Cécile Untermaier, M. Jean-Jacques Urvoas, M. Daniel Vaillant, M. Jacques Valax, M. Alain Vidalies,
M. Jean-Luc Warsmann, M. Michel Zumkeller

Excusés. - M. Jean-Pierre Decool, Mme Laurence Dumont, M. Daniel Gibbes, Mme Marietta Karamanli, Mme Anne-Yvonne Le Dain, M. Alfred Marie-Jeanne, Mme Sandrine Mazetier, M. Bernard Roman, M. Roger-Gérard Schwartzenberg

Assistaient également à la réunion. - M. Gérald Darmanin, M. Yann Galut, M. Yannick Moreau