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Mercredi 4 novembre 2015

Séance de 16 heures 30

Compte rendu n° 15

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Examen de la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement (n° 2715 rectifié) (M. Michel Lesage, rapporteur)

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a examiné le rapport de M. Michel Lesage sur la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement (n° 2715 rectifié).

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement. M. Michel Lesage en a été désigné rapporteur. Je rappelle que M. Michel Lesage est président du groupe d’études « Politique de l’eau » et qu’il est l’auteur du rapport d’évaluation de la politique de l’eau en France, qu’il a remis en 2013 au Premier ministre.

Comme pour la proposition de loi sur l’économie bleue, ce texte devait être inscrit à l’ordre du jour de la semaine de l’Assemblée nationale du 23 au 27 novembre prochain. Mais la conférence des présidents a décidé de réserver ce texte pour la semaine de l’Assemblée qui commencera début février.

Néanmoins, j’ai décidé de maintenir la discussion de ce texte en commission, en accord avec le rapporteur qui a effectué un grand nombre d’auditions, tant pour sa préparation que pour son examen. Il était temps d’en tirer les conséquences.

En raison des auditions des représentants de la compagnie Air France que nous avons effectuées ce matin avec la commission des affaires économiques et celle des affaires sociales, nous avons été contraints de déplacer à cet après-midi l’examen de la proposition de loi.

Je rappelle qu’aucune commission ne s’est saisie pour avis sur ce texte.

À l’issue du délai de dépôt, le secrétariat de la commission a enregistré cinquante-cinq amendements. Un seul amendement, le CD16 du rapporteur, a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution.

M. Michel Lesage, rapporteur. Monsieur le président, je tiens à vous remercier d’avoir bien voulu inscrire ce texte à l’ordre du jour des travaux de notre commission.

À quelques jours de la Conférence de Paris sur le climat, je suis particulièrement heureux que notre commission examine une proposition de loi sur l’eau.

Pour tout être vivant, l’eau est un élément vital indispensable non substituable qui doit être considéré comme un bien commun.

L’eau est l’objet de nombreux enjeux, tant en termes quantitatifs que qualitatifs. L’eau facile est devenue fragile. Elle est aussi confrontée de nombreuses menaces, telles que le réchauffement climatique avec des phénomènes de plus en plus fréquents de sécheresse et d’inondations. L’eau menacée est devenue menaçante.

Dans le cadre de la préparation de la COP21, alors que les émissions de gaz à effet de serre tiennent la vedette, si je puis dire, l’eau n’a pas, me semble-t-il, toute la place qu’elle mérite dans les débats. Or l’accès à l’eau potable est un enjeu mondial. Si, sur le plan international, une résolution de l’Organisation des Nations unies de 2010 a reconnu que l’eau est un droit humain, c’est loin d’être une réalité pour tous : selon les experts, plus de 2 milliards de personnes continuent d’utiliser une eau contaminée et 3 à 4 milliards d’individus, soit à peu près la moitié de l’humanité, n’ont toujours pas accès à une eau satisfaisante, autrement dit à une eau potable.

Dans les pays en développement, 80 % des eaux usées domestiques et industrielles sont rejetées sans aucun traitement. Malheureusement, cette situation risque de s’aggraver avec le réchauffement climatique puisque des régions déjà défavorisées seront soumises au stress hydrique, à la croissance démographique et à l’urbanisation. On le voit, les enjeux liés à l’eau sont multiples et surtout peut-être à venir.

L’accès à l’eau pour tous est un enjeu social, humanitaire, de dignité, de développement et de paix.

Le changement climatique a déjà conduit 20 millions de personnes à se déplacer et les experts estiment à 250 millions le nombre de réfugiés climatiques dans le monde en 2050. Vous aurez remarqué que les premières actions de Daech et Boko Haram ont consisté à confisquer l’eau. Ils profitent de la raréfaction de l’eau, des conflits climatiques et des migrations pour accroître leur pouvoir. L’eau est donc un enjeu de paix.

Et la France dans tout cela ?

En France, l’eau potable coule au robinet de près de 99 % des personnes. 90 % des logements sont raccordés à l’assainissement. C’est le travail des élus locaux sur le terrain qui a permis cette belle réussite.

Mais de l’avis de tout un ensemble de partenaires qui s’impliquent dans ce domaine – le Conseil d’État, le Conseil national de l’eau, le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) qui a réalisé un rapport il y a trois ans sur cette question, les organisations non gouvernementales (ONG), les associations humanitaires, caritatives, l’Académie de l’eau, etc. –, deux enjeux considérables méritent d’être rappelés.

Premièrement, un million de ménages en France ont du mal à payer leur facture d’eau ; on s’accorde à reconnaître que ceux qui consacrent plus de 3 % de leurs revenus à leur facture d’eau sont en difficulté. Ce chiffre de 3 % fait consensus au niveau de l’OCDE et en France.

Deuxièmement, on estime que 100 000 à 150 000 personnes n’ont pas un accès effectif à l’eau, soit parce qu’elles sont sans domicile fixe, soit parce qu’elles vivent en habitat précaire, et ce chiffre serait en augmentation.

Le Comité national de lutte contre l’exclusion et l’Observatoire national de lutte contre la pauvreté que j’ai rencontrés ont souligné que la pauvreté s’aggrave et se traduit pour nombre de Français par des difficultés à accéder à l’eau.

Depuis une douzaine d’années, de nombreux rapports et travaux parlementaires ont mis l’accent sur ce sujet et des propositions de loi ont été déposées par des parlementaires, députés et sénateurs, de toutes sensibilités politiques. Je pense notamment à M. André Flajolet avec lequel j’ai travaillé sur ce texte, qui a présidé le Conseil national de l’eau et qui avait déposé une proposition de loi dans le même esprit. Elle se différencie de ma proposition de loi pour ce qui touche aux modalités de financement ; j’aurai l’occasion d’y revenir.

La présente proposition de loi a été élaborée conjointement avec de nombreuses associations autour de la fondation France Libertés, de la structure collective Coalition Eau, de l’Observatoire des usagers de l’assainissement en Île-de-France (OBUSASS), de M. Henri Smets, de l’Académie de l’eau. Leur concours a été particulièrement précieux, sur les aspects juridiques notamment.

J’ai également rencontré des collectivités locales – Dunkerque, Libourne, Niort – qui, sur le terrain, ont expérimenté une tarification différenciée, par exemple par paliers progressifs. C’est ce qui explique que ce texte soit signé par plusieurs parlementaires, dans le cadre d’une démarche transpartisane, de presque toutes les sensibilités politiques, à une exception près. Et M. Martial Saddier m’a expliqué à plusieurs reprises que, s’il était favorable à titre personnel à ce texte, il lui était difficile d’engager le groupe dont il était le porte-parole. Bref, c’est le fruit de trois ans de travail suite au Forum mondial de l’eau qui s’est tenu à Marseille en 2012.

J’en viens au contenu concret de la proposition de loi proprement dite.

L’article 1er rappelle les notions du droit de l’homme à l’eau en les précisant et la nécessité de le mettre en œuvre en France de manière effective pour ceux qui ne sont pas raccordés et ceux qui consacrent une trop grande part de leurs revenus au paiement de leurs factures d’eau. On sait que les charges relatives à l’eau et à l’énergie sont déterminantes par rapport au logement. Or le logement est un outil fondamental d’accès à la dignité et à l’épanouissement de la famille.

L’article 2 reprend des préconisations formulées notamment par le Conseil d’État. Il vise à obliger toutes les collectivités à installer et entretenir des points d’eau potable d’accès gratuit. Les collectivités de plus de 3 500 habitants devront disposer de toilettes publiques et celles de plus de 15 000 habitants devront prévoir l’accès à des douches.

C’est un enjeu social, sanitaire et de santé publique. Lors des périodes de canicule, chacun doit pouvoir accéder à des points d’eau dans des conditions correctes, où qu’il soit sur le territoire.

L’Association des maires de France (AMF), dont M. André Flajolet copréside le groupe de travail sur l’eau, est favorable à cette disposition facile à mettre en œuvre puisqu’il y a des réseaux d’eau potable partout, par exemple dans les cimetières et sur les terrains de football. Il est possible d’utiliser les équipements existants, comme les centres sportifs, les centres d’accueil de jour, etc. Est-il vraiment anormal d’exiger qu’il y ait des toilettes publiques dans les communes de plus de 3 500 habitants ? Du reste, c’est pratiquement le cas partout.

Les articles 3, 4, 5 et 6 portent sur le financement d’un outil nouveau : l’allocation forfaitaire d’eau à caractère préventif. La création de ce dispositif est pertinente parce que la précarité liée au logement est réelle et les charges afférentes au logement génèrent des difficultés pour les plus vulnérables. Les réponses apportées jusqu’à présent par le législateur trouvent leurs limites car elles ont avant tout un caractère curatif, par la prise en charge des impayés par les Centres communaux d’action sociale (CCAS) ou les Fonds de solidarité logement (FSL). Si les FSL ont le mérite d’exister, ils ont leurs limites : non seulement un quart des départements n’ont pas de FSL « eau », mais les critères d’attribution, les montages financiers, les partenariats diffèrent d’un territoire à l’autre, d’un département à l’autre. Le système est également peu efficace, car beaucoup de gens hésitent à recourir au FSL, jugeant cette démarche stigmatisante : on ne peut activer le FSL qu’en cas d’impayés, ce qui implique de pouvoir fournir une facture, autrement dit d’avoir un compteur individuel. Or, en France, 50 % des foyers n’ont pas de facture d’eau car, dans la grande majorité des cas, il n’existe pas de facture individuelle en habitat collectif. J’ajoute que ce n’est pas la solidarité nationale qui joue, dans la mesure où cette affaire concerne les territoires.

Le besoin est estimé entre 50 et 60 millions d’euros. Il fallait trouver un système simple, lisible, ne pas créer une nouvelle taxe, fixer des critères d’éligibilité ainsi que des mécanismes de financement et de redistribution simples. C’est pourquoi il était proposé que la redistribution des financements obtenus par le biais de la taxe sur les boissons embouteillées redescende sur les territoires par le biais des services des Caisses d’allocation familiale (CAF) et de la MSA qui disposent de tous les éléments sur les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) socle et/ou de la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) en fonction du décret d’application qui sera pris pour mettre en œuvre ce dispositif.

D’autres mécanismes ont été proposés dans des propositions de loi précédentes, via les FSL ; non seulement on n’en trouve pas partout, mais la disparition, un temps envisagée, des départements, gestionnaires de ces fonds, aurait posé problème.

Bien sûr, le système pourra évoluer lorsque la réflexion sur le chèque énergie aboutira. En fait, ce que je propose équivaut à un « chèque eau ». Notre allocation a été pensée et travaillée il y a déjà trois ou quatre ans, bien avant la création du chèque énergie qui a eu lieu dans le cadre de la loi sur la transition énergétique. Le chèque énergie coûtera 600 millions d’euros par an ; l’allocation dont je vous parle devrait coûter 50 à 60 millions d’euros, soit dix fois moins.

Il existe plusieurs façons de financer ces 60 millions d’euros. La première consiste à augmenter la facture d’eau, comme cela a été proposé dans des propositions de loi précédentes. Vous le savez, le prix de l’eau est fixé sur le territoire par les services publics de l’eau et de l’assainissement. Il suffit de multiplier les quantités consommées par un prix au mètre cube. En France, 3,5 milliards de mètres cubes d’eau sont distribués chaque année aux ménages. Le prix moyen d’un mètre cube d’eau étant de 3,80 euros, cela fait 13 milliards par an. Pour obtenir 60 millions supplémentaires, il suffirait d’augmenter de 0,5 % les factures d’eau et la question serait réglée. Mais ce n’est pas ce que nous proposons, car nous considérons que cette mesure n’est pas juste : elle toucherait les familles les plus défavorisées. Et comme il existe 24 000 autorités organisatrices, il est extrêmement difficile de traiter la question sociale de l’eau via la facture. Certes, il y en aura moins à l’avenir : la loi NOTRe prévoit de donner la compétence eau et assainissement aux EPCI, ce qui va diviser par trois ou quatre le nombre d’autorités organisatrices et permettre que les différents prix de l’eau qui existent sur le territoire soient rapprochés. C’est ce qu’a fait l’agglomération de Saint-Brieuc qui avait quatorze services d’eau et d’assainissement.

J’ajoute que les ménages paient déjà, à travers leur facture, des éléments du « petit cycle » de l’eau, c’est-à-dire la potabilisation, le transport, l’arrivée au robinet, et du « grand cycle » de l’eau – la lutte contre les inondations, la pollution, etc. Enfin, la facture d’eau ne tient pas compte des revenus.

Voilà pourquoi nous n’avons pas retenu cette hypothèse et nous proposons que les recettes du fonds de solidarité soient constituées par une contribution sur les bouteilles d’eau.

Le marché des eaux embouteillées est particulier. Un hors-série du magazine L’Express du 17 juin 2015 titrait : « Un liquide qui vaut de l’or », « La tendance est mondiale », « Les eaux embouteillées déferlent sur tous les continents et génèrent un business juteux ». Au-delà des jugements que l’on peut porter sur la question, il s’agit d’être juste et objectif.

La France compte quarante eaux de sources et quatre-vingts eaux minérales. Nous proposons une contribution de 0,5 centime d’euro par litre d’eau embouteillée vendue en France ou 1 centime d’euro par bouteille d’un litre et demi, ce qui, j’en conviens, n’est pas tout à fait proportionnel. Comme 10 milliards de litres d’eau embouteillée sont vendus par an, soit en moyenne 140 litres d’eau par an et par habitant, cela représente un surcoût de 1 euro par an pour le consommateur, ce qui ne remettra pas en cause l’achat de bouteilles d’eau. Les producteurs d’eau en bouteille estiment que cette disposition les pénalisera. C’est pourquoi nous leur proposons que ce prélèvement puisse se transformer en une opportunité de communication pour eux via l’affichage sur les bouteilles du centime solidaire. Et de toute façon, il sera répercuté sur l’acheteur final.

80 % des eaux de source sont regroupées au sein de trois multinationales : le suisse Nestlé Waters possède 30 % du marché, le géant français Danone 27 % et le groupe Neptune Roxane 20 %. Les 13 % restants sont des marques de distributeurs comme Leclerc, Intermarché, etc., et des petites sociétés comme Plancoët dans les Côtes d’Armor qui dépend du groupe Semo.

En résumé, la mesure qui vous est proposée présente plusieurs avantages. D’abord, il ne s’agit pas de créer une nouvelle taxe. Ensuite, elle est simple, lisible et elle s’applique sur l’ensemble du territoire. De plus, le surcoût pour le consommateur est faible.

Enfin, il n’est pas anormal que la commission du développement durable tienne compte de l’empreinte écologique extrêmement forte générée par les eaux en bouteille pour les produire, les transporter, les réfrigérer ou les éliminer – seulement 50 % des bouteilles d’eau sont recyclées. Tous ces processus sont fortement consommateurs de pétrole. J’ajoute que l’eau du robinet coûte cent fois moins cher que l’eau en bouteille, voire 1 500 fois moins cher qu’une petite bouteille d’eau individuelle.

Enfin, les collectivités et les territoires qui sont responsables des politiques de l’eau doivent se mobiliser. L’article 7 vise à renforcer la loi dite « loi Brottes » en prévoyant un rapport sur la question sociale de l’eau, une réflexion sur la tarification différenciée, éventuellement progressive même si une telle tarification n’est pas sociale.

Mme Martine Lignières-Cassou. Au mois de juillet 2010, l’Organisation des Nations unies a voté une résolution qui déclare que l’eau est un droit fondamental et essentiel au plein exercice du droit à la vie. Cette résolution, qui a été approuvée par la France, demande aux États de fournir les ressources financières nécessaires et de développer les nouvelles technologies indispensables pour garantir l’accès à une eau potable, salubre, propre, abordable à chacun et pour que l’assainissement soit effectif pour tous.

C’est cette année que doit être atteint l’objectif 7 du millénaire pour le développement. Il prévoit que le pourcentage de la population qui n’a pas accès à l’eau potable soit réduit de moitié. C’est donc aussi dans ce contexte d’engagement pris par la France à l’échelle internationale et pour respecter le droit à l’eau et à l’assainissement dans notre pays que nous soutenons la proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement.

Cette proposition de loi est transpartisane et rassembleuse. Il n’y a aucune divergence entre l’actuelle majorité et le gouvernement précédent en ce qui concerne les enjeux cruciaux qu’elle contient.

Tous ici nous partageons l’idée qu’il est nécessaire de garantir à chaque être humain l’accès à l’eau potable. Notre collègue André Flajolet avait déposé une proposition de loi en 2010.

Le présent texte vise à inscrire le principe du droit à l’eau et à l’assainissement dans le droit français et à le traduire par des mesures concrètes. Les collectivités territoriales sont appelées à les mettre en œuvre.

L’article 2 tend à instaurer une obligation pour les municipalités de fournir de l’eau gratuitement à tous ceux qui n’y ont pas accès, notamment les personnes sans domicile fixe. Cela ne créera pas de charge nouvelle pour les collectivités qui possèdent, soit dans leur cimetière, soit dans leur salle des sports, au moins un point d’eau et des toilettes. D’ailleurs, ce dispositif a été discuté avec l’Association des maires de France dont l’interlocuteur n’était autre que M. André Flajolet.

Le Conseil d’État recommandait déjà en 2010 aux communes d’ouvrir des points d’eau collectifs accessibles aux sans-abri. En outre, la responsabilité des communes ne se limite pas à l’ouverture des équipements existants aux personnes qui n’ont pas accès à l’eau potable puisque l’article 7 prévoit qu’elles organisent un débat sur la mise en œuvre du droit à l’eau au cours des trois premières années de chaque mandature.

La présente proposition de loi n’est pas originale par rapport aux précédentes puisqu’elle reprend l’idée de la création d’une aide préventive à l’eau et à l’assainissement pour les ménages les plus modestes et pour lesquels les factures d’eau et d’assainissement dépassent 3 % de leurs revenus. L’innovation de ce texte réside dans le mode de financement du système préventif. Comme l’a dit M. Michel Lesage, il nous est apparu beaucoup plus juste de ne pas solliciter directement ou indirectement les consommateurs d’eau potable, les ménages déjà taxés, y compris pour le financement du grand cycle de l’eau. Les recettes nécessaires, estimées à 50 millions d’euros par an, proviendraient de l’élargissement d’une taxe sur les eaux embouteillées qui existe déjà, ce qui reviendrait à 1 centime d’euro par bouteille d’un litre et demi.

La proposition de loi a vocation à traduire dans les faits nos engagements sur le plan international et à garantir à chacun un accès à l’eau potable pour qu’il puisse vivre dignement. J’espère qu’elle suscitera l’adhésion de toutes et de tous.

M. Frédéric Reiss. Monsieur le président, je vous remercie de m’accueillir dans votre commission à l’occasion de l’examen cette proposition de loi.

La présente proposition est examinée à la veille de la COP21 – est-ce une coïncidence ? Elle repose sur des valeurs de fraternité et de solidarité puisqu’elle permet un accès à l’eau pour les ménages les plus précaires et les personnes démunies. Si l’intention est tout à fait respectable, le mode de financement en revanche me préoccupe : l’article 5 prévoit que le fonds de solidarité du droit à l’eau sera alimenté par une nouvelle taxe de 0,5 centime par litre d’eau embouteillée ainsi que par l’affectation des recettes du droit d’accises auquel est soumise la filière des eaux en bouteille.

Je ne peux mesurer aujourd’hui quel sera l’impact demain de cette mesure sur un petit producteur d’eau minérale naturelle. Reste que ce mode de financement me semble assez discriminatoire puisqu’il fait basculer la responsabilité des opérateurs en charge de la distribution de l’eau sur le producteur d’eau en bouteille.

L’adoption d’une telle disposition aurait à n’en pas douter des conséquences sur un secteur réputé économiquement fragile. Le secteur de l’eau minérale naturelle est déjà fortement contributeur : il acquitte un droit d’accise de 0,54 centime d’euro par hectolitre et une surtaxe versée aux communes du territoire sur lequel se situent les sources.

Elle aurait également un impact néfaste sur la filière de l’eau minérale et de l’eau de source dans un certain nombre de PME qui représente 10 000 emplois directs non délocalisables et 30 000 emplois indirects.

Le coût de cette taxe devra nécessairement être répercuté sur le prix de la bouteille. Pourtant, c’est un produit de première nécessité qui est consommé par tous les Français.

La création de cette taxe est-elle conforme à l’article 40 de la Constitution ?

M. le rapporteur. Elle existe déjà…

M. Frédéric Reiss. Plus de 80 % de l’eau du robinet consommée par les ménages sont destinés à l’hygiène et seulement 1 % est consommé pour la boisson. Les eaux emballées ne sont pas responsables du prix de l’eau du robinet et n’ont donc aucune influence sur le montant des factures d’eau. Taxer les eaux emballées pour financer le fonds de solidarité ne me paraît pas pertinent.

M. Guillaume Chevrollier. Monsieur le rapporteur, je tiens tout d’abord à préciser que ce texte n’est pas totalement transcourants puisque le groupe Les Républicains ne s’y est pas associé. Qui plus est, vous « mouillez », si je puis dire, notre collègue Martial Saddier alors qu’il n’est pas présent aujourd’hui, ce que je trouve inélégant. (Murmures divers)

La présente proposition de loi correspond à la politique du Gouvernement faite de bons sentiments, surtout dans cette période électorale, mais marquée par un irréalisme économique.

Vous voulez accorder un nouveau droit, le droit à l’eau gratuit, principe à mon sens déresponsabilisant. Je ne crois pas que l’accès à l’eau ne soit pas réel dans notre pays. En revanche, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement est un droit qu’il faut développer dans un certain nombre de pays sous-développés, même si des améliorations significatives ont eu lieu en Asie puisque le pourcentage de personnes n’ayant pas accès à l’eau potable est passé de 32 % en 1990 à 8 % en 2011. Mais en 2011, l’accès à l’eau restait difficile en Afrique pour 327 millions de personnes. En France, et c’est heureux, la situation n’est pas celle-ci. On peut donc se poser la question de la légitimité d’un tel texte, de la création de nouvelles contraintes pour les communes et surtout de cette nouvelle imposition.

Certes, l’eau devient chère dans nombre de communes et son prix peut être un problème pour certaines familles. Mais celles-ci sont déjà aidées. Améliorons les dispositifs existants plutôt que de créer des droits nouveaux qui comportent un certain nombre d’inconvénients.

Votre proposition d’interdire les coupures d’eau semble irréaliste alors que l’on sait que 90 % des coupures sont dues aujourd’hui à des impayés sans rapport avec des situations de précarité. Ne développons pas l’irresponsabilité, ce à quoi peut conduire votre texte.

M. le rapporteur. Mais ce n’est pas dans le texte !

M. Guillaume Chevrollier. Pourquoi taxer l’eau embouteillée ? En quoi le secteur de l’eau minérale serait responsable du prix de l’eau du robinet ? Pourquoi grever la compétitivité de ce secteur déjà lourdement taxé et qui doit faire face à une forte concurrence européenne ? Pourquoi menacer des milliers d’emplois qui ne sont pas délocalisables ?

Cette taxe représenterait 4 % du chiffre d’affaires de l’eau minérale Plancoët, ce qui est loin d’être négligeable contrairement à ce que vous avez dit. Cette hausse se répercutera inévitablement sur les consommateurs.

Dans un contexte de ras-le-bol fiscal et de reculs fiscaux comme nous le montre le projet de loi de finances pour 2016, M. Dino Cinieri et moi-même avons cosigné un amendement qui vise à supprimer cette nouvelle taxe inopportune et malvenue.

Si ce texte est bien-pensant, il n’est pas responsable, pas nécessaire et il me paraît assez négatif pour les municipalités.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La liste des signataires représente tous les groupes, sauf Les Républicains. M. Michel Lesage a voulu dire qu’il s’était adressé à M. Martial Saddier pour savoir si le groupe Les Républicains accepterait de signer cette proposition de loi. M. Martial Saddier a indiqué qu’à titre personnel il soutenait ce texte, mais que le groupe LR ne le signerait pas, comme en témoigne votre déclaration, cher Guillaume Chevrollier : c’est un texte dans lequel vous ne vous retrouvez pas, ce que je peux comprendre.

Cette mise au point était nécessaire. Le rapporteur l’a fait de façon que je ne crois pas maladroite : il n’y avait pas dans ses propos la volonté de nuire ou d’être désagréable envers tel ou tel. Il est respectueux des autres, comme tous les parlementaires. (Approbations)

M. François-Michel Lambert. Merci à notre collègue Michel Lesage pour cette proposition de loi transpartisane, qui doit le rester, et de sa confiance, puisqu’il m’y a associé.

Nous n’avons plus le temps d’attendre : il n’est pas acceptable en 2015 que 150 000 personnes – l’équivalent d’une ville comme Aix-en-Provence – soient encore exclues de l’accès à l’eau potable, et que 1 million de personnes – soit une ville comme Marseille – se retrouvent en grande difficulté pour payer leur facture d’eau. J’ajoute que les 65 millions de Français – et les 80 millions de touristes accueillis sur notre sol – doivent avoir accès à des toilettes publiques. Il nous est tous arrivé un jour d’être confronté à ce genre d’urgence… (Sourires)

Ce texte répond à un enjeu du XXIe siècle, en n’oubliant pas les plus démunis tout en garantissant l’hygiène d’un pays moderne comme le nôtre. Au demeurant, le coût pour la nation des 150 000 personnes exclues de l’accès à l’eau potable et des milliers de personnes n’ayant pas accès à un réseau d’hygiène n’est jamais explicitement pris en compte.

En 1987, un gouvernement de droite a instauré une taxe sur les briquets et allumettes pour l’affecter à la lutte contre les incendies de forêt. (Rires) C’est la même logique que nous proposons aujourd’hui avec une taxe sur les bouteilles d’eau, dont l’impact sur les foyers sera de 1 euro par an – moins que le prix d’un café dans ma commune.

Comme le suggèrent le rapporteur et notre président, il est indispensable de trouver un chemin apaisé pour faire aboutir ce texte et ainsi l’inscrire comme l’une des grandes réussites transpartisanes de cette législature.

Dans ma circonscription, la commune de Roquevaire, en régie publique, a mis en œuvre un dispositif d’accès à l’eau potable à 1 euro les trente premiers mètres cubes et progressif au-delà ; d’autres communes l’ont mis en œuvre, et je les soutiens. Je me réjouis de la traduction législative de leurs efforts à travers la mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement.

M. Stéphane Demilly. À vingt-six jours de l’accueil par la France de la 21e Conférence des parties (COP21), le débat sur l’instauration d’un droit humain à l’eau potable et à l’assainissement revêt une dimension hautement symbolique.

Hier, nous avons eu le plaisir d’entendre dans l’Hémicycle M. Roger Nkodo Dang, président du Parlement panafricain et de débattre avec lui de la mise en place d’un plan d’urgence d’accès à l’électricité et à la lumière pour le continent africain. Il nous a présenté la recommandation, adoptée à l’unanimité par le Parlement panafricain le 7 octobre dernier, validant l’initiative de la Fondation Énergies pour l’Afrique, présidée par M. Jean-Louis Borloo. Il s’agit là d’un magnifique défi pour la décennie à venir, porté de surcroît par un ancien ministre français, un défi qui est en passe d’être relevé, ce dont nous pouvons être fiers.

Ce défi met en lumière d’autres enjeux vitaux, pour notre pays cette fois-ci, que l’on avait tendance à négliger. En effet, si aujourd’hui 99 % des Français accèdent à l’eau, près de 1 million de ménages n’y ont accès qu’à un prix considéré comme excessif, puisque leur facture d’eau dépasse 3 % de leurs revenus.

En novembre 2013, le nombre de bénéficiaires de tarifs sociaux en matière d’énergie s’élevait à 4 millions. Ce chiffre démontre une nouvelle fois la précarité énergétique dans laquelle se trouvent bon nombre de nos concitoyens, alors que notre pays fait partie du club des pays riches.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui pose ainsi le débat à sa juste place, en proposant des outils visant à répondre à cet enjeu majeur de santé publique que constitue l’accès naturel à l’eau potable et à l’assainissement. Il est en effet essentiel qu’un combat de cette nature transcende les clivages politiques traditionnels pour faire l’objet d’un consensus politique le plus large possible.

Avec mes collègues du groupe Union des démocrates et indépendants, nous souhaitons que le germe de l’unité républicaine porté par cette proposition de loi trouve sa traduction dans les débats à venir au sein de cette commission puis dans l’Hémicycle, et que les remarques des uns et des autres y trouvent leur place, afin que nous parvenions à construire ensemble une grande loi consacrant le droit humain à l’eau potable et à l’assainissement dans notre pays.

Dans sa version actuelle, le texte pose plusieurs questions : des doutes sont émis par les uns et les autres, des amendements ont été déposés, dont certains par le rapporteur lui-même, ce qui laisse présager que cette proposition de loi devra évoluer pour prendre une forme permettant d’atteindre l’objectif que ses auteurs lui ont assigné.

Si l’article 1er, qui consacre un droit de l’Homme à l’eau – je mets une majuscule à « homme » –, fait difficilement débat en réaffirmant le droit à l’accès à l’eau comme un des fondements mêmes de notre démocratie, certaines notions ainsi que plusieurs mesures visant à sa mise en œuvre méritent d’être précisées. Ainsi, la notion de « quantité suffisante d’eau potable » n’est pas définie alors même que des chiffres pourraient être utilisés sur la base de différentes sources statistiques.

À l’article 2, l’obligation pour les communes d’installer des équipements n’est pas chiffrée. Or dans un contexte de baisse de la dotation globale de fonctionnement, il est absolument nécessaire de connaître le coût de telles mesures et de les anticiper – c’est un maire qui vous le dit pour avoir bouclé son budget lundi soir.

Par ailleurs, la proposition de loi crée une aide préventive de la collectivité, ainsi qu’une nouvelle allocation forfaitaire à l’eau. Ces idées sont intéressantes, reste à en connaître les modalités. La multiplication des aides ne risque-t-elle pas d’être contre-productive ? Ne serait-il pas plus judicieux d’approfondir ce qui existe déjà, notamment les dispositifs en cours d’expérimentation ? Je pense à la tarification progressive de l’eau qui présente la triple vertu d’être socialement intéressante, responsabilisante et respectueuse de nos ressources en eau.

Enfin, la taxe sur l’eau en bouteille prévue à l’article 5 pose question, même si j’en comprends les objectifs. Cette contribution ne risque-t-elle pas d’être directement répercutée sur les consommateurs, à un moment où toute nouvelle taxe est perçue comme une injustice par nos concitoyens ? Finalement, n’allons-nous pas taxer l’eau pour financer l’accès à l’eau ? Peut-être pouvons-nous imaginer un financement basé sur une assiette plus large, différente, avec un taux beaucoup plus faible et ne touchant pas un produit de première nécessité.

Monsieur le rapporteur, je pose ces questions dans le même esprit constructif que celui ayant présidé à l’élaboration de cette proposition de loi. Je souhaite que notre commission puisse y apporter de premières réponses afin, comme je l’ai dit, de le faire évoluer vers une version capable de susciter une adhésion beaucoup plus large.

M. Olivier Falorni. Comme le rappelle l’UNICEF, l’accès à l’eau potable fait partie des plus grandes réussites du millénaire. Cependant, 11 % de la population mondiale n’a pas accès à l’eau. Chaque minute dans le monde, un enfant de moins de cinq ans meurt d’une maladie liée à l’eau. Dans ces conditions, comment ne pas se réjouir qu’un travail dépassant les clivages et associant des dizaines de structures ait lieu sur un droit fondamental ?

Avec mon collègue Jacques Krabal, nous considérons que cette proposition de loi est pleine de bons sens. Même dans notre pays, des centaines de milliers de personnes n’ont pas accès ou ont un accès insuffisant à l’eau et à l’assainissement. Les coupures d’eau – inacceptables et totalement illégales – se poursuivent, malgré les saisines de tribunaux. L’obligation de saisine des services sociaux par le fournisseur et le maintien d’un service restreint sont des dispositifs respectueux des besoins fondamentaux et de la dignité humaine, l’aide étant aujourd’hui délivrée au cas par cas.

Le simple fait de prendre une douche ou de boire un verre d’eau restant inaccessible pour les personnes les plus vulnérables, nous ne pouvons que partager les dispositions de l’article 2 de cette proposition de loi. Outre l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, les collectivités locales ou les EPCI doivent assurer la mise à disposition des points d’eau gratuits. L’installation et l’entretien de toilettes publiques gratuites pour tous dans les communes de plus de 3 500 habitants, de douches gratuites et de laveries dans les communes de plus de 15 000 habitants, sont des dispositions respectueuses de la dignité de chacun. De plus, inscrire les toilettes gratuites pour tous évite la stigmatisation.

Le paiement de ces services, encore en vigueur dans de nombreuses communes, contribue à diminuer les coûts, mais ne couvre pas la globalité des dépenses. Si l’on peut s’accorder sur la nécessaire mise en œuvre de tous les moyens pour assurer l’accès de tous à l’eau potable et à l’assainissement, on ne peut éviter l’écueil du coût supporté dans un contexte budgétaire restreint. Le texte stipule que le délai de mise en œuvre est de cinq ans et que les collectivités peuvent faire appel à des subventions des agences de l’eau. Or celles-ci auront-elles les moyens de répondre à un nombre important de collectivités ? La contribution solidaire de 0,5 centime par litre d’eau embouteillée suffira-t-elle à répondre aux exigences du texte ?

Le prix moyen du mètre cube d’eau distribué en France est passé de 3,39 euros en 2008 à 4,15 euros en 2013. Or il s’agit bien d’une moyenne nationale : les Français ne sont pas égaux, parfois même au sein d’un même département, devant ce besoin élémentaire. C’est pourquoi nous plaidons pour une harmonisation des tarifs : il en va de l’égalité devant le droit humain à l’eau et à l’assainissement.

Enfin, à l’approche de la COP21, comment ne pas souligner la conjonction entre climat et eau ? Même si nous constatons dans nos circonscriptions que les citoyens sont de plus en plus sensibilisés aux économies d’eau, d’énergie, à la protection de la planète et au réchauffement climatique, en prenant des initiatives parfois surprenantes et très positives, il faut intensifier les campagnes de sensibilisation pour amener les collectivités, les entreprises et nos concitoyens à amplifier le mouvement. Chacun peut économiser son eau et prendre en compte l’empreinte eau des produits qu’il consomme. On peut aussi réduire sa consommation. Autant d’éléments à prendre en considération pour aller au-delà des dispositions du texte.

En conclusion, le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste ne peut qu’approuver une réponse sociale à un besoin élémentaire, conformément aux engagements nationaux sur ce droit essentiel, dont sont privées des centaines de milliers de personnes dans notre pays.

M. Patrice Carvalho. Cette proposition de loi semble salutaire. Nous connaissons le lien étroit entre l’eau et la vie : sans accès à l’eau, il ne peut y avoir de vie. Par conséquent, chaque foyer doit bénéficier de ce droit vital. Or la baisse du pouvoir d’achat des familles populaires, avec en particulier l’augmentation du coût de l’eau, tend à mettre en cause ce droit.

L’exposé des motifs indique que « si la facture d’eau et d’assainissement représente 1,25 % du revenu disponible moyen d’un ménage, près d’un million de ménages n’ont accès à l’eau qu’à un prix considéré comme excessif par rapport à leur revenu et qu’un consensus existe pour considérer que le prix de l’eau est inabordable lorsque cette facture dépasse 3 % des revenus effectifs du ménage ». Or ce pourcentage de 1,25 % vaut pour les hauts revenus : l’impact de la facture sur les petits revenus est bien plus important.

Il faut ajouter à ce problème la grande diversité des situations géographiques : le prix de l’eau n’est pas le même partout et les conditions d’exploitation et de fourniture ne sont pas identiques non plus selon que la collectivité est en régie ou en délégation de service. Le mètre cube d’eau le moins cher s’établit à 1,50 euro, le plus cher à 5,17 euros, soit une amplitude de 1 à 4. Dans ma petite commune, le coût va de 4 à 11 euros avec l’assainissement : une personne qui tire un mètre cube d’eau paie un mètre cube d’assainissement. L’écart peut être de 1 à 7 en milieu rural et en zone semi-urbaine. Depuis 2011, les tarifs ont augmenté en moyenne de 6,3 %, pour une inflation à 4 %, avec des augmentations parfois vertigineuses : 37 % à Évreux, 25 % à Bar-le-Duc, 24 % à Agen.

Les actuels dispositifs d’aide aux familles dans l’impossibilité de régler leurs factures ne sont pas satisfaisants. Par conséquent, la création d’une aide préventive pour les personnes en situation de précarité apparaît judicieuse. Je m’interroge cependant sur le financement de cette disposition, car le texte propose une contribution de solidarité de 0,5 centime par litre d’eau embouteillée : c’est plus près de 2 euros par an, monsieur le rapporteur, si l’on prend en compte les consommations moyennes d’eau en bouteille. Tous les médecins vous disent qu’il faut boire au moins un litre d’eau par jour. Je n’ai donc pas d’opposition formelle à cette disposition, mais une étude d’impact me semble nécessaire car cette contribution ne concernera pas seulement les géants de la distribution, elle concernera aussi les PME dans ce secteur, ce qui entraînera une répercussion sur le prix de la bouteille.

Mme Martine Lignières-Cassou. Mais on n’impose pas de boire de l’eau en bouteilles !

M. Patrice Carvalho. En 2020, les syndicats d’eau seront transférés aux intercommunalités. Or à l’heure actuelle, les grandes collectivités sont régies par le plan comptable M49 – les choses sont plus compliquées pour les petites communes rurales – et pratiquent la vérité du prix de l’eau. Autrement dit, l’investissement et le fonctionnement sont répercutés sur la facture. Quand on me dit que les premiers mètres cubes coûtent 1 euro, je demande à voir… Comment un tel prix est-il possible, surtout dans les grandes villes ?

M. François-Michel Lambert. Venez voir chez moi, à Roquevaire. Et c’est une municipalité communiste…

M. Patrice Carvalho. Ce sont les meilleurs, je sais ! (Sourires.)

Comment les collectivités rassemblées en intercommunalités géreront-elles l’eau, quand les unes payaient 4 euros et les autres 11 euros ? Une moyenne sera instaurée, si bien que celles qui avaient investi paieront pour celles qui ne l’ont pas fait. Bref, ce sera ingérable.

Monsieur le rapporteur, la proposition de loi devrait comporter l’obligation d’une réelle information sur la qualité de l’eau car, dans neuf cas sur dix, la qualité de l’eau tirée en sous-sol est meilleure que celle de certaines bouteilles. Or, quand des gens en grande difficulté financière achètent des packs entiers de bouteilles d’eau, alors qu’elles ont du mal à payer leur facture d’eau, il y a un vrai problème.

Lorsque je gérais un syndicat d’eau, les impayés – une centaine sur 3 000 abonnés – étaient soumis aux services sociaux, car la moitié des gens avaient les moyens, mais géraient mal leur budget ou ne voulaient tout simplement pas payer. Après intervention des services sociaux, ces gens réglaient leur facture. Si demain, on donne l’eau à tout le monde, les impayés vont se multiplier, ce qui sera plus difficile à gérer.

Mme Catherine Quéré. Je félicite le rapporteur de son important travail. Nous ne pouvons que soutenir ce texte, car il est inacceptable que des milliers de personnes n’aient toujours pas accès à l’eau potable.

Néanmoins, nous sommes nombreux à nous interroger sur l’article 5. Nous en avons beaucoup discuté avec M. Jean Launay, président du Comité national de l’eau, et Mme Viviane Le Dissez, qui ont reçu France Libertés. Les modalités de financement ne sont peut-être pas les bonnes. Certes, le consommateur sera peu touché. Mais si l’augmentation de la taxe n’impactera pas les grands groupes, elle risque de mettre en danger les petites et moyennes entreprises d’embouteillage d’eau implantées dans nos communes.

La loi a instauré une taxe conventionnelle entre les sources thermales et les communes où elles sont implantées avec un maximum de 0,453 euro par hectolitre. Aussi la mise en place d’une taxe nationale ne va-t-elle pas entraîner une diminution ou une perte de recettes pour les communes thermales, plus nombreuses en milieu rural et en montagne ? Les petites sources locales, les plus nombreuses, pourraient être contraintes de cesser leur activité.

En conclusion, si nous soutenons cette proposition de loi, les modalités de l’article 5 nous semblent devoir être revues. Serait-il possible de nous réunir pour trouver une solution acceptable par tous, par exemple une taxe assortie d’un plancher ?

M. Michel Heinrich. Je salue la passion avec laquelle le rapporteur a défendu sa proposition de loi. Si je suis, comme lui, attaché au principe du droit à l’eau potable, ma position ne sera pas différente de celle du groupe auquel j’appartiens : nous considérons que l’eau a un prix et que la gratuité serait déresponsabilisante, d’autant que les communes proposent des dispositifs d’aide aux personnes en difficulté financière.

Quant à la taxe sur les bouteilles, je n’en comprends pas la logique. Je ne vois pas en quoi les eaux embouteillées seraient responsables du prix de l’eau – c’est comme si vous vouliez financer la lutte contre la précarité énergétique en taxant les piles et les batteries !

Par conséquent, je ne voterai pas cette proposition de loi.

M. Bertrand Pancher. Je salue le travail remarquable réalisé par notre collègue Michel Lesage, dont la ténacité a permis à cette proposition de loi d’entamer son chemin législatif. Ce texte a d’autant plus de valeur à mes yeux qu’il est non seulement juste, mais aussi le fruit d’un travail transpartisan et d’une très étroite collaboration avec tous les acteurs de terrain, qui connaissent mieux que personne les problématiques auxquelles sont encore confrontés trop de nos concitoyens.

Certes, notre pays a d’ores et déjà mis en place divers dispositifs, mais il convenait d’ancrer les choses et de combler des lacunes. Je pense notamment à l’accès à l’eau, encore trop insatisfaisant pour les plus démunis, en particulier les sans-abri. C’est un vrai problème de santé publique et d’humanité, tout simplement.

La principale pierre d’achoppement de ce texte est – ne nous voilons pas la face – la taxe sur les eaux embouteillées. Or il convient d’abord de rappeler que cette taxe n’est pas nouvelle, la proposition de loi souhaitant simplement l’augmenter de 0,5 centime d’euro. Ensuite, cette difficulté ne tient pas longtemps si l’on se place du côté des consommateurs, un sondage IPSOS 2014 ayant démontré que 67 % des Français étaient favorables au principe d’une contribution de 1 centime d’euro sur chaque bouteille d’eau vendue, afin de financer un fonds de solidarité permettant aux personnes en difficulté d’avoir accès à l’eau. Du côté des petits embouteilleurs, ils ont été écoutés avec toute l’attention que méritaient leurs inquiétudes, mais ils doivent à présent être entendus au travers d’amendements, monsieur le rapporteur.

Au-delà de cette proposition de loi, nos habitudes doivent changer. L’accès à l’eau est, certes, un droit, mais, comme tout droit, il implique des devoirs, le premier étant de protéger cette ressource précieuse que nous nous plaisons encore trop souvent à croire inépuisable, noyés que nous sommes dans nos habitudes de surconsommation. Il revient à chacun d’entre nous de mieux respecter cette ressource et de mieux la partager.

Mme Geneviève Gaillard. Je tiens à féliciter M. Michel Lesage pour cette proposition de loi. Je m’étonne d’entendre certains collègues trouver que ce texte n’a pas de légitimité et d’autres soutenir que l’eau en bouteille est un produit de première nécessité : l’eau est un produit de première nécessité, mais l’eau embouteillée ne l’est pas dès lors que l’on peut disposer d’une eau du robinet potable, comme c’est le cas dans toutes les collectivités, et qui coûte deux cents fois moins cher ! Replaçons les choses là où elles doivent l’être… (Approbations sur divers bancs)

J’entendais ce matin quelqu’un parler des résistances au changement. Le changement exige du courage et un attachement à des valeurs, comme la solidarité. Si l’on veut que notre société avance, il faut savoir évoluer. Je ne m’inquiète pas pour les embouteilleurs d’eau : ils trouveront un moyen de s’en sortir et les conséquences pour eux ne seront pas aussi importantes qu’on l’imagine. Par contre, je ne vois pas l’intérêt de demander aux gens de consommer cette eau deux cents fois plus chère s’ils n’en ont pas les moyens.

Je me pose toutefois une question, monsieur le rapporteur : si les collectivités de plus de 3 500 habitants doivent installer et entretenir des toilettes publiques gratuites, et celles de 15 000 habitants des douches publiques gratuites, est-ce à dire que les personnes habitant dans des communes de 3 500 habitants ne prennent pas de douche ? Cette discrimination me semble choquante. Les communes de 3 500 habitants pourraient installer des douches en utilisant les vestiaires des stades, par exemple.

M. Jean-Pierre Vigier. Monsieur le rapporteur, selon l’exposé des motifs de votre proposition de loi, le droit à l’eau traduit deux exigences, dont « celle de la réalisation d’un équipement garantissant à chacun l’hygiène, la santé, la salubrité et la dignité ». Les collectivités locales ont déjà pris conscience de la nécessité de réhabiliter leurs réseaux d’eau et d’assainissement, dont la plupart, construits dans les années cinquante à soixante-dix, sont devenus vétustes, voire hors normes sanitaires. Or avec leurs faibles budgets et leur petit nombre d’abonnés, les petites collectivités en milieu rural n’ont plus les moyens de réhabiliter ces réseaux. Sans compter que leurs moyens financiers s’amenuisent avec la baisse des dotations d’État, mais aussi des subventions des agences de l’eau et des départements qui sont passées de 70 % à 40 %. Ce retard dans la rénovation des réseaux entraîne inévitablement des conséquences sur l’environnement et la qualité sanitaire de l’eau. Donner les moyens aux collectivités rurales de réhabiliter leur réseau ne doit-il faire partie de la mise en œuvre du droit à l’eau ?

M. Guy Baillart. Je ne reviendrai pas sur le principe même, incontestable, de cette proposition de loi : tous nos concitoyens doivent avoir accès à l’eau et nul ne peut en être privé.

M. le rapporteur a reconnu que le problème de l’accès à l’eau est relativement minoritaire. Par contre, les difficultés des services de distribution d’eau, en particulier en milieu rural, risquent de se multiplier et tout porte à croire que le prix de l’eau va probablement beaucoup augmenter. C’est le cas pour l’assainissement, dont les installations sont vieillissantes dans un contexte de réorientation des financements des agences de l’eau. C’est le cas également pour la distribution d’eau potable, car les réseaux datent souvent des années cinquante et ont été peu modifiés, si bien que pratiquement tous les syndicats d’eau vont se retrouver à devoir financer de lourds investissements.

Certes, la qualité des eaux souterraines est généralement bonne, mais dans certaines zones, je pense au Grand Ouest, cette eau est de si mauvaise qualité que l’Europe nous inflige des pénalités.

Certains ont l’air de penser que l’eau va devenir gratuite, ce qui ne sera pas le cas puisque ce texte prévoit des aides accordées sur critères sociaux. Par contre, le texte ne prévoit rien sur le cubage. Or cet aspect est important, car les personnes en grande difficulté financière dont les factures sont prises en charge ne se préoccupent pas forcément des fuites et des robinets qui coulent…

L’eau et l’assainissement ne relèvent pas toujours de la même facture. Dans de nombreux cas, il existe un syndicat pour l’assainissement et un syndicat pour l’eau. Une harmonisation me semble nécessaire car, au-delà de l’accès à l’eau, l’accès à l’assainissement doit être abordé, et le problème n’est pas aussi évident qu’on pourrait le penser.

Enfin, il existe un flou sur la définition des collectivités, ce qui sera d’autant plus gênant lors de la mise en place des communes nouvelles, dont certaines seront très étendues.

M. Gabriel Serville. En Guyane, près de 15 % de la population – dont 70 % en milieu rural – n’est pas raccordée au réseau d’eau potable. Cette situation, pour le moins paradoxale au regard de l’abondance des pluies sur le littoral, s’explique par la répartition non homogène de la population sur le territoire : 90 % se trouvent sur la bande littorale, et 10 % à l’intérieur des terres où il pleut moins souvent et où la ressource est difficilement récupérable.

En réalité, nous sommes confrontés à un problème davantage qualitatif que quantitatif, puisque l’obligation de respecter certaines normes européennes et nationales imposent de très lourds investissements en termes d’équipement, que les collectivités guyanaises n’ont pas forcément les moyens de réaliser. Nous avons connu une situation assez catastrophique en janvier 2005, quand 40 % des habitants de Camopi, commune située sur les bords de l’Oyapock, ont contracté une gastro-entérite après avoir consommé une eau de très mauvaise qualité.

Les fonds nécessaires pour régler le problème de l’accès à l’eau potable en Guyane sont évalués à 400 millions d’euros. Face aux voix qui s’élèvent pour dire que les embouteilleurs d’eau vont être pénalisés, j’espère que la sagesse va l’emporter pour faire passer le message de solidarité de cette proposition de loi. Compte tenu par ailleurs des nombreux problèmes de financement auxquels sont confrontées les collectivités territoriales et les EPCI, je suis prêt à accompagner cette démarche de solidarité jusqu’à son terme.

Mme Geneviève Gaillard. Très bien !

M. Jean-Yves Caullet. Il me semble que l’on gagnerait en souplesse si le texte se limitait à inscrire le principe de seuils de population minimaux, renvoyant à un décret le soin de les fixer.

M. le rapporteur. Le texte que nous examinons est appelé à évoluer encore, mais je note que le consensus existe sur le principe qui le sous-tend – l’institution du droit à l’eau pour tous, singulièrement pour les plus défavorisés, comme un droit fondamental. C’est un enjeu d’hygiène, de santé et de dignité des personnes, et parfois de salubrité. Le problème étant avéré, nous devons lui apporter une solution. Le consensus s’est fait aussi sur les bénéficiaires des mesures à prendre : premièrement, ceux dont les habitats précaires ne sont pas raccordés aux réseaux de distribution d’eau, et les personnes sans domicile fixe ; deuxièmement ceux qui sont raccordés, mais qui ne peuvent pas payer leur facture.

La question des coupures d’eau ne figure pas dans la version du texte qui vous est soumise parce qu’elle a été réglée par la loi dite « Brottes » du 15 avril 2013 et ses décrets d’application ; elles sont désormais interdites toute l’année, pour toutes les résidences, quels que soient les revenus des abonnés. Je sais que cela ne fait pas forcément consensus, notamment en cas de mauvaise foi, mais cette affaire est désormais juridiquement tranchée.

L’accord existe aussi sur le fait qu’il appartient aux communes de se mobiliser, puisqu’elles ont autorité pour installer des points d’eau, des douches et des toilettes publiques. Nous pouvons bien sûr revoir les seuils de population à partir desquels les collectivités devront installer ces équipements, mais j’appelle l’attention sur le fait que l’abaissement des seuils signifie l’augmentation du coût de la mesure car, à ce jour, il y a presque partout des toilettes publiques dans les agglomérations de plus de 3 500 habitants et beaucoup de douches publiques dans les villes de plus de 15 000 habitants.

L’octroi aux personnes vulnérables d’une aide préventive pour l’eau fait consensus parmi tous ceux qui travaillent à ces questions depuis longtemps. Son principe n’a pas été remis en cause au cours du débat, mais les modalités de son financement divisent.

Chacun le sait, la consommation d’eau est financée par les taxes, les transferts et les tarifs. On pourrait donc envisager d’augmenter la tarification de l’eau, que les communes déterminent. On aurait pu aussi concevoir de taxer les grandes sociétés délégataires ; mais pour éviter une distorsion de concurrence il aurait fallu taxer aussi les régies et, au final, la taxe aurait été répercutée sur les usagers ; c’est pourquoi cette solution ne nous est pas parue souhaitable, non plus que celle qui consisterait à augmenter la redevance perçue par les agences de l’eau. La modalité retenue me paraît la plus pertinente, mais rien n’empêche d’approfondir encore la réflexion entre collègues et avec le Gouvernement pour mettre au point une alternative qui semblerait meilleure. On pourrait d’ailleurs régler la question très simplement : il suffirait de distraire les 50 millions d’euros nécessaires au financement de l’aide préventive des 175 millions d’euros que l’État prélève chaque année sur les 2,3 milliards du fonds de roulement des agences de l’eau, lui-même constitué par un prélèvement opéré à 80 % sur les factures d’eau domestiques. Le problème serait réglé…

Il n’y a pas création d’une taxe nouvelle puisque la taxe sur les eaux et autres boissons embouteillées existe déjà. Certains arguments avancés pour s’opposer à son augmentation me semblent contradictoires : si, comme il a été dit, elle est répercutée sur les consommateurs d’eau en bouteille, elle ne pèsera pas sur les embouteilleurs. Au demeurant, notre collègue Bertrand Pancher a fait référence à une enquête conduite par la société Ipsos et dont les résultats sont éloquents : non seulement les deux tiers des personnes interrogées se disent favorables à une contribution solidaire d’un centime d’euro sur le prix d’achat d’une bouteille d’eau, mais 70 % des acheteurs d’eau en bouteille se déclarent prêts à contribuer.

Au vu de ces résultats, j’ai fait valoir aux embouteilleurs d’eau l’image positive que donnerait une pastille « solidarité » collée sur chaque bouteille pour attester du geste fait en faveur des plus démunis, et souligné que les acheteurs continueraient, j’en suis convaincu, d’acheter de l’eau embouteillée en dépit de ce centime supplémentaire, qui serait donc sans conséquence sur le chiffre d’affaires des entreprises considérées, y compris les plus petites d’entre elles.

Une proposition pratiquement identique à la nôtre avait été présentée par le Conseil général de l’environnement et du développement durable, saisi par Mmes Nathalie Kosciusko-Morizet et Roselyne Bachelot, alors ministres, qui publia en 2012 un rapport consacré à l’accès à l’eau et à l’assainissement dans des conditions acceptables par tous, confié à Mme Isabelle Monteils et à M. Pierre Rathouis, et dont les conclusions sont reprises dans le texte qui vous est soumis ; l’alternance politique empêcha l’aboutissement de la proposition.

Enfin, j’ai cité le nom de M. Martial Saddier par correction, car je le sais attaché à l’aide, par ce moyen, aux plus défavorisés, même si des divergences peuvent demeurer sur l’appréciation des instruments à mettre en œuvre pour atteindre l’objectif commun visé.

Mme Martine Lignières-Cassou. Contrairement à ce qui a été avancé, le dispositif proposé ne peut induire de distorsion de concurrence entre eaux embouteillées en France et eaux embouteillées à l’étranger dans la mesure où la taxe s’appliquera à toutes les eaux en bouteille vendues sur notre territoire, quelle que soit leur provenance. Par ailleurs, peut-être le texte devrait-il préciser davantage que l’aide préventive est calculée par ménage.

M. le rapporteur. Il est dit à l’article 3 que l’aide préventive porte sur une consommation d’eau annuelle forfaitaire de 50 mètres cubes par unité de consommation. L’aide n’est pas directement proportionnelle au nombre de personnes qui composent le foyer.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je serai contraint de m’absenter sous peu ; M. Christophe Bouillon me remplacera à la présidence. Il est acquis, au terme de cet intéressant débat, que la proposition de loi est appelée à évoluer. Dans l’intervalle, je souhaite que l’article 5, qui fait l’objet d’amendements de suppression, soit adopté par notre commission. Cela n’empêchera pas que les modalités de financement de l’aide préventive puissent être modifiées lors de l’examen de la proposition en séance plénière ou dans le cadre de l’article 88. Si l’article 5 était supprimé, l’équilibre du texte serait détruit et nous nous trouverions en difficulté.

Mme Catherine Quéré. Il est bon de savoir que la porte n’est pas fermée à des modifications ultérieures. (Sourires)

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ce disant, je ne pense pas trahir la pensée de notre rapporteur, dont les réponses nous ont fait comprendre qu’il est prêt à revoir les modalités de financement, le cas échéant.

M. le rapporteur. En effet.

*

La Commission en vient à l’examen des articles.

Article 1er (article L. 1314-1 [nouveau] du code de la santé publique) : Reconnaissance et définition du droit à l’eau

La Commission est saisie de l’amendement CD1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Les articles d’une loi ne comportant pas de titres, l’amendement tend à supprimer l’intitulé de l’article.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD2 du rapporteur.

M. le rapporteur. À mon grand regret, la mention « de l’homme » doit être supprimée, à la fois parce que le droit à l’eau concerne évidemment tant les hommes que les femmes et parce que la création d’un nouveau droit de l’homme ne peut se faire qu’au niveau constitutionnel ou international. Par l’amendement CD53, je vous proposerai ultérieurement, pour les mêmes raisons, de modifier le titre de la proposition de loi.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement l’amendement CD3, de conséquence, les amendements rédactionnels CD4 et CD6, et l’amendement de précision CD5, tous du rapporteur.

La Commission adopte l’article 1er ainsi modifié.

Article 2 (article L. 1314-2 [nouveau] du code de la santé publique) : Obligation pour les collectivités territoriales de mettre à disposition gratuitement des points d’eau potable, des toilettes publiques et des douches publiques sur leur territoire

L’amendement CD7 est retiré.

La Commission examine et adopte successivement l’amendement de précision CD8 et les amendements rédactionnels CD9 et CD10, tous du rapporteur.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CD11 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement tend à inclure, dans le champ de l’article, des personnes non résidentes, par exemple des touristes.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement l’amendement rédactionnel CD12, l’amendement de précision CD13 et les amendements rédactionnels CD14 et CD15, tous du rapporteur.

La Commission adopte l’article 2 ainsi modifié.

Article 3 (article L. 115-3-1 [nouveau] du code de l’action sociale et des familles) : Création de l’aide préventive pour l’accès à l’eau potable et définition des bénéficiaires

La Commission examine et adopte successivement les amendements rédactionnels CD17, CD18, CD19 et CD20 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 3 ainsi modifié.

Article 4 (article L. 115-3-2 [nouveau] du code de l’action sociale et des familles) : Allocation forfaitaire d’eau

La Commission examine et adopte l’amendement de précision CD21 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD22 du même auteur.

M. le rapporteur. L’objectif étant que la proportion des revenus consacrée à l’eau n’excède pas 3 %, il faut, pour définir les bénéficiaires de l’allocation forfaitaire, tenir compte des revenus des ménages mais aussi du tarif de l’eau. Le croisement de ces données permettra de déterminer les personnes éligibles à l’allocation forfaitaire. On estime à 1 million sur les 2,5 millions d’allocataires du revenu de solidarité active socle ceux qui percevront l’allocation forfaitaire d’eau. C’est ce que précise l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CD23 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD24 du même auteur.

M. le rapporteur. L’amendement précise que ce n’est pas aux services des caisses d’allocations familiales qu’il revient de distribuer l’aide mais que les modalités de distribution seront fixées par le pouvoir réglementaire.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement les amendements rédactionnels CD25, CD26 et CD28 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CD29 du même auteur.

M. le rapporteur. L’article 40 de la Constitution ne nous permettant pas de confier aux organismes de Sécurité sociale une nouvelle mission pouvant constituer une création de charge, l’amendement tend à supprimer l’alinéa 4 de l’article.

La Commission adopte l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD27 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement précise qu’un décret en Conseil d’État fixera le prix de référence de l’eau au-delà duquel le montant de l’allocation forfaitaire d’eau est doublé.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 ainsi modifié.

Article 5 (article L. 1314-3 [nouveau] du code de la santé publique) : Financement de la mise en œuvre du droit à l’eau

La Commission est saisie des amendements identiques CD54 de M. Dino Cinieri et CD55 de M. Philippe Folliot.

M. Guillaume Chevrollier. Nous proposons par l’amendement CD54 de supprimer l’article, qui prévoit de financer le nouveau fonds de solidarité du droit à l’eau en taxant les eaux embouteillées. Ce mécanisme n’a aucune justification : le prix des eaux en bouteille n’entre en rien dans la tarification de l’eau du robinet. Alors que le Gouvernement avait promis une pause fiscale, de nouvelles taxes fleurissent. Nous avons entendu le président Jean-Paul Chanteguet expliquer qu’une évolution était possible. Il est vrai que l’examen du projet de loi de finances pour 2016 nous a habitués aux reculades du Gouvernement… (Murmures divers) Celui-ci a déjà renoncé aux dispositions qui devaient frapper les retraités modestes, les personnes handicapées et les étudiants ; peut-être aurons-nous gain de cause pour les eaux embouteillées.

Il le faut, car ce projet de taxe, loin d’être anecdotique, aura un très fort impact sur la filière, notamment sur les PME ; 10 000 emplois directs et 30 000 emplois indirects sont en jeu. La taxe aura aussi une incidence sur le pouvoir d’achat des Français puisque son montant sera nécessairement répercuté sur le prix de la bouteille – or 94,6 % de la population achèterait de l’eau embouteillée. Ainsi, la taxe projetée représenterait une hausse non négligeable de 4,4 % du prix d’une bouteille de Cristalline vendue 0,11 euro. Dans la proposition de loi à laquelle vous avez fait référence, monsieur le rapporteur, notre ancien collègue André Flajolet assurait le financement de l’aide par la création d’une taxe prélevée sur les redevances perçues par les services d’eau et d’assainissement, ce qui avait une certaine logique. Arrêtons de créer de nouvelles taxes qui mettent à mal la compétitivité de nos entreprises.

M. Philippe Folliot. Je partage la philosophie d’un texte tendant à remédier à la situation de gens qui, vivant dans la précarité, ont difficilement accès à l’eau. Je remarque par ailleurs qu’à la précarité des individus s’ajoute une « précarité territoriale », qui doit également être prise en considération. Ma commune étudie ainsi un projet d’extension du réseau public d’adduction à l’eau potable, à laquelle des habitants n’ont pas accès pour l’instant. La difficulté tient à ce que dans ces zones très peu densément peuplées, la réalisation de ces équipements représente un coût considérable. Il faut prévoir un mécanisme de solidarité tel que tout le monde ait un accès direct à l’eau. En l’espèce, l’investissement nécessaire s’élève à 1 million d’euros pour servir une dizaine d’usagers.

Je reviens à l’amendement CD55, qui tend à supprimer un dispositif particulièrement injuste. Pourquoi viser les seuls embouteilleurs d’une eau dont on vante par ailleurs les vertus ? Il me souvient d’avoir assisté à des réunions dans lesquelles nous nous inquiétions de l’hydratation des populations… Si, pour atteindre l’objectif recherché, une taxe est nécessaire, elle devrait dans l’absolu concerner d’autres boissons moins bonnes pour la santé.

Sur un autre plan, cette taxation aura des conséquences dommageables pour les PME qui embouteillent dans des zones en difficulté. Dans ma circonscription, deux embouteilleurs sont installés au centre d’une zone de revitalisation rurale comptant moins de dix habitants au kilomètre carré. Ces entreprises pourvoient des emplois, qualifiés ou non qualifiés, très importants pour notre territoire. La perspective d’un doublement de la taxe ne peut qu’inquiéter, qu’il s’agisse de leur capacité d’investissement ou du maintien des emplois, voire de l’activité elle-même.

J’ai entendu ce qu’a dit le président Jean-Paul Chanteguet, mais, en attendant que la discussion reprenne en séance plénière pour permettre une autre formulation, la sagesse commanderait d’adopter les amendements de suppression de l’article pour rassurer des PME qui jouent un rôle d’aménagement du territoire essentiel dans des zones rurales très fragiles.

Présidence de M. Christophe Bouillon, vice-président de la Commission

M. le rapporteur. Il est contradictoire de dire que les embouteilleurs pâtiront d’une taxe dont vous expliquez ensuite qu’ils la répercuteront sur le prix de vente des bouteilles, et donc sur les clients. Quant aux consommateurs, ceux-là mêmes qui acceptent de payer 100, 200, voire 300 fois plus cher pour boire de l’eau en bouteille plutôt que l’eau du robinet, ils sont bien sûr prêts à payer un centime d’euro en plus chaque bouteille d’eau achetée – ce qui représente un euro par an et par personne – pour faire acte de solidarité. J’avais même songé à l’impression d’une pastille sur l’étiquette.

Je ne suis pas désespérément attaché à ce mode de financement, et si des propositions alternatives sont avancées, elles seront examinées, mais je considère celle qui vous est faite comme la plus juste et la plus pertinente, et elle ne pénalisera ni les embouteilleurs ni les consommateurs. L’eau embouteillée est source de profits considérables pour les sociétés multinationales, ce qui est très bien, et l’impact de l’augmentation de la taxe sera très faible pour elles. Et comme les PME dont vous vous inquiétez pourront également augmenter d’un centime d’euro leur prix de vente, le rapport de forces interne ne sera pas modifié. Avis, donc, défavorable aux amendements de suppression.

M. Philippe Folliot. Je n’ai pas parlé du coût pour le consommateur de la mesure proposée mais de son impact sur les entreprises du secteur – non pas les multinationales mais les PME qui, comme les deux qui sont implantées dans ma circonscription, utilisent des capitaux locaux pour employer une main-d’œuvre locale, dans une logique d’aménagement du territoire. Ma question demeure : pour quoi ne taxer que l’eau en bouteille et non les sodas ?

M. le rapporteur. Ils le sont aussi.

M. Philippe Folliot. Il s’agit d’un secteur fragile, soumis à la concurrence, Si nous souhaitons ne pas être en contradiction avec la politique du Gouvernement tendant à engager une action dynamique en faveur de l’aménagement du territoire, ne donnons pas, par cette taxe, un signe contraire. Pour la PME dont je vous ai parlé, le doublement de la taxe représenterait 600 000 euros ; c’est tout sauf insignifiant pour une entreprise de petite taille.

M. Guillaume Chevrollier. Les entreprises ne répercutent pas entièrement les taxes dans leurs prix de vente ; elles en absorbent une partie, ce qui porte atteinte à leur compétitivité. Par ailleurs, les réponses aux enquêtes d’opinion sont sujettes à caution, tant elles varient en fonction de la formulation des interrogations. Les consommateurs seront-ils vraiment d’accord pour payer plus cher l’eau en bouteille, ou la hausse bloquera-t-elle la consommation en cette période de tension sur le pouvoir d’achat ? La question reste posée.

M. Christophe Bouillon, président. Le président Jean-Paul Chanteguet a appelé la Commission à adopter l’article 5, au bénéfice du réexamen ultérieur du dispositif de financement du fonds de solidarité du droit à l’eau, pour rassurer chacun. Le rapporteur a indiqué qu’il n’y est pas opposé. Il va sans dire que, si l’article 5 est supprimé, tout l’édifice s’écroule ; ce n’est pas la volonté partagée des membres de la Commission.

M. le rapporteur. Je rappelle que l’article 520 A du code général des impôts prévoit déjà la perception d’une taxe sur les boissons non alcoolisées, dont les eaux embouteillées. L’enquête d’opinion réalisée par la société IPSOS à la demande de France Libertés figure sur le site de la fondation. Je rappelle enfin que la somme en jeu s’élève à 50 millions d’euros par an ; c’est très peu au regard du chèque énergie, dont le coût est de 600 millions d’euros. Je le redis, si des modalités plus pertinentes de financement du fonds de solidarité du droit à l’eau sont proposées, je ne m’y opposerai pas, en particulier si la collectivité nationale décide de consacrer à cette fin 0,50 % des 12 milliards d’euros prélevés chaque année sur les factures d’eau. L’important, c’est la cause que nous défendons ; le financement de la mesure peut aussi se traduire par une augmentation de 1 euro par an sur les factures d’eau, mais le mécanisme que nous avons retenu est celui qui nous a paru être le plus juste et le moins pénalisant pour les entreprises et pour les consommateurs d’eau embouteillée. Avis, donc, défavorable aux amendements de suppression.

M. Christophe Bouillon, président. Les amendements sont-ils maintenus ?

M. Guillaume Chevrollier. Je maintiens l’amendement CD55 et je dois vous dire ma perplexité devant la manière dont cette proposition de loi est écrite. Ce texte, qui est pourtant le fruit de mois de travail que je salue, prend l’eau de toute part, si j’ose dire, et l’on parle déjà de le réviser. (Murmures divers) C’est surprenant.

Mme Martine Lignières-Cassou. Faites d’autres propositions !

M. Christophe Bouillon, président. Notre rapporteur a montré qu’il tient bien la barre (Sourires) mais qu’il sait aussi tenir compte des observations qu’il entend.

La Commission rejette les amendements CD54 et CD55

Puis elle adopte successivement l’amendement rédactionnel CD31 et l’amendement de précision CD32 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD33 rectifié du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement précise que la contribution additionnelle s’appliquera à tous les fûts, bouteilles ou boîtes, quelle que soit leur contenance. Nous avions songé un temps à en exclure les bonbonnes de plus de dix litres dont on se sert dans les entreprises, mais cette rédaction aurait posé beaucoup trop de difficultés d’application.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine et adopte ensuite l’amendement de précision CD34 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 5 ainsi modifié, le groupe Les Républicains votant contre.

Article 6 (articles L. 351-6 et L. 351-7 du code de la construction et de l’habitation et article 6 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement) : Financement de l’allocation forfaitaire d’eau

La Commission examine et adopte l’amendement rédactionnel CD35 et les amendements de précision CD36, CD 37, CD 38, CD39 et CD40 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 6 ainsi modifié.

Article 7 (articles L. 1413-1, L. 2224-5 et L. 2224-5-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Suivi des mesures de mise en œuvre du droit à l’eau prises au niveau communal

La Commission examine et adopte l’amendement de précision CD41, l’amendement rédactionnel CD42 et les amendements de précision CD43, CD44, CD45, CD46 et CD47 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CD48 du rapporteur.

M. le rapporteur. La loi dite « Brottes » du 15 avril 2013, qui lance une expérimentation de cinq ans, ne fournit malheureusement pas la base légale qui permettrait d’instituer une première tranche de consommation gratuite ou à prix réduit. En proposant de supprimer cette possibilité, l’amendement laisse les collectivités définir la politique de prix qu’elles souhaitent, sans leur donner d’orientation, car une tarification progressive obéit à une logique plus environnementale que sociale : lorsque le prix du mètre cube d’eau augmente par tranche, les familles nombreuses sont pénalisées.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine et adopte successivement l’amendement de précision CD49 et l’amendement rédactionnel CD50 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 7 ainsi modifié.

Article 8 (article L. 213-1 du code de l’environnement) : Demande de rapport

La Commission examine et adopte l’amendement CD51 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 8 ainsi modifié.

Article 9 : Gage

La Commission examine et adopte l’amendement CD52 du rapporteur.

En conséquence, l’article 9 est supprimé.

Titre

La Commission examine l’examen CD53 du rapporteur.

M. le rapporteur. Pour la raison que j’ai indiquée au début, il convient d’intituler le texte « Proposition de loi visant à la mise en œuvre effective du droit à l’eau potable et à l’assainissement », l’expression « droit humain » étant inusitée en droit français.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.

M. Christophe Bouillon, président. En notre nom à tous, je remercie notre rapporteur.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 4 novembre 2015 à 16 h 30

Présents. - M. Guy Bailliart, M. Serge Bardy, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, M. Vincent Burroni, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Stéphane Demilly, Mme Françoise Dubois, M. Olivier Falorni, Mme Geneviève Gaillard, M. Michel Heinrich, M. Jacques Krabal, M. François-Michel Lambert, M. Michel Lesage, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Gérard Menuel, M. Bertrand Pancher, Mme Catherine Quéré, M. Gabriel Serville, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - Mme Laurence Abeille, M. Julien Aubert, M. Jacques Alain Bénisti, Mme Chantal Berthelot, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Florence Delaunay, M. David Douillet, M. Charles-Ange Ginesy, M. Christian Jacob, Mme Viviane Le Dissez, M. Napole Polutélé, M. Gilbert Sauvan, M. Gilles Savary

Assistaient également à la réunion. - M. Philippe Folliot, M. Frédéric Reiss