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Texte du projet de loi – n° 1395
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2014 –
CRÉDITS ET DÉCOUVERTS
Il est ouvert aux ministres, pour 2014, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant respectivement aux montants de 410 458 992 562 € et de 407 409 515 462 €, conformément à la répartition par mission donnée à l’état B annexé à la présente loi.
ÉTAT B
(Article 44 du projet de loi)
Répartition, par mission et programme, des crédits du budget général
BUDGET GÉNÉRAL
(En euros) | ||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits |
Sport, jeunesse et vie associative |
554 036 435 |
560 438 000 |
Sport |
224 736 435 |
231 138 000 |
Jeunesse et vie associative |
229 300 000 |
229 300 000 |
Projets innovants en faveur de la jeunesse |
100 000 000 |
100 000 000 |
Amendement n° 267 présenté par M. Salen.
Après l’article 76, insérer l’article suivant :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport, au plus tard le 1er juin 2014, sur le rôle du Centre national pour le développement du sport dans le financement des équipements relevant des collectivités territoriales au regard de ses capacités financières réelles
Amendement n° 271 présenté par M. Salen.
Après l’article 76, insérer l’article suivant :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport, au plus tard le 1er juin 2014, sur le programme d’investissement d’avenir permettant d’identifier le rôle précis de tous les partenaires, de tracer les principales lignes stratégiques de ce programme et de définir des méthodes pratiques de mise en œuvre de ce programme.
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits |
Action extérieure de l’État |
2 944 903 964 |
2 952 303 964 |
Action de la France en Europe et dans le monde |
1 844 641 138 |
1 852 041 138 |
Dont titre 2 |
608 299 346 |
608 299 346 |
Diplomatie culturelle et d’influence |
724 722 032 |
724 722 032 |
Dont titre 2 |
79 638 228 |
79 638 228 |
Français à l’étranger et affaires consulaires |
375 540 794 |
375 540 794 |
Dont titre 2 |
218 893 794 |
218 893 794 |
Amendement n° 329 présenté par M. Frédéric Lefebvre.
Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes |
+ |
- |
Action de la France en Europe et dans le monde |
0 |
15 000 000 |
Dont titre 2 |
0 |
0 |
Diplomatie culturelle et d'influence |
0 |
0 |
Dont titre 2 |
0 |
0 |
Français à l'étranger et affaires consulaires |
15 000 000 |
0 |
Dont titre 2 |
0 |
0 |
TOTAUX |
15 000 000 |
15 000 000 |
SOLDE |
0 |
Amendement n° 92 présenté par M. Mariani, M. Marsaud et M. Frédéric Lefebvre.
Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes |
+ |
- |
Action de la France en Europe et dans le monde |
0 |
8 500 000 |
Dont titre 2 |
0 |
0 |
Diplomatie culturelle et d'influence |
8 500 000 |
0 |
Dont titre 2 |
0 |
0 |
Français à l'étranger et affaires consulaires |
0 |
0 |
Dont titre 2 |
0 |
0 |
TOTAUX |
8 500 000 |
8 500 000 |
SOLDE |
0 |
Aide publique au développement |
4 206 526 854 |
2 941 984 832 |
Aide économique et financière au développement |
2 365 654 044 |
1 115 423 479 |
Solidarité à l’égard des pays en développement |
1 840 872 810 |
1 826 561 353 |
Dont titre 2 |
206 180 672 |
206 180 672 |
Amendement n° 310 présenté par M. Mamère, Mme Abeille, M. Alauzet, Mme Allain, Mme Attard, Mme Auroi, M. Baupin, Mme Bonneton, M. Cavard, M. Coronado, M. de Rugy, M. François-Michel Lambert, Mme Massonneau, M. Molac, Mme Pompili, M. Roumegas et Mme Sas.
Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes |
+ |
- |
Aide économique et financière au développement |
0 |
30 000 000 |
Solidarité à l'égard des pays en développement |
30 000 000 |
0 |
Dont titre 2 |
0 |
0 |
TOTAUX |
30 000 000 |
30 000 00 |
SOLDE |
0 |
Amendement n° 348 présenté par M. Tetard.
Après l’article 61, insérer l’article suivant :
I. – À la fin du V de l’article 235 ter ZD du code général des impôts, le taux : « 0,2 % » est remplacé par le taux : « 0,4 % ».
II. – Au dernier alinéa du I de l’article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 50 % ».
III. – Cette contribution de solidarité internationale constitue un financement du développement innovant, additionnel et prévisible. À ce titre, elle ne se substitue aucunement à l’aide publique au développement existante, et n’est pas prise en compte dans le calcul du montant global de cette aide.
IV. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Amendement n° 349 présenté par M. Tetard.
Après l’article 61, insérer l’article suivant :
I. – À la fin du V de l’article 235 ter ZD du code général des impôts, le taux : « 0,2 % » est remplacé par le taux : « 0,4 % ».
II. – Au dernier alinéa du I de l’article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 50 % ».
III. – Cette contribution de solidarité internationale constitue un financement du développement innovant, additionnel et prévisible. À ce titre, elle ne se substitue aucunement à l’aide publique au développement existante.
IV. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Amendement n° 103 deuxième rectification présenté par le Gouvernement.
Après l’article 61, insérer l’article suivant :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le VI de l’article 302 bis K est ainsi rédigé :
« VI. – 1. Les montants mentionnés aux deuxième et troisième alinéas du II font l’objet d’une contribution additionnelle, dénommée taxe de solidarité sur les billets d’avion, perçue, dans la limite du plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 de finances pour 2012, par le fonds de solidarité pour le développement créé par l’article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.
« Le tarif de cette taxe, perçue en fonction de la destination finale du passager, est fixé à :
« 1,13 €, pour chaque passager embarqué à destination de la France, d’un autre État membre de l’Union européenne, d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;
« 4,51 €, pour chaque passager embarqué à destination d’un autre État.
« Ces tarifs sont portés respectivement à 11,27 € et à 45,07 € lorsque le passager peut bénéficier sans supplément de prix à bord de services auxquels l’ensemble des passagers ne pourrait accéder gratuitement.
« 2. Cette taxe n’est pas perçue lorsque le passager est en correspondance. Est considéré comme passager en correspondance celui qui remplit les trois conditions suivantes :
« a) L’arrivée a eu lieu par voie aérienne sur l’aéroport considéré ou sur l’un des aéroports appartenant au même système aéroportuaire desservant la même ville ou agglomération ;
« b) Le délai entre les heures programmées respectives de l’arrivée et du départ n’excède pas vingt-quatre heures ;
« c) L’aéroport de destination finale est distinct de celui de provenance initiale et ne fait pas partie du même système aéroportuaire tel que mentionné au a.
« Pour l’application du a, un décret précise les aéroports faisant partie d’un même système aéroportuaire.
« 3. La taxe de solidarité sur les billets d’avion est contrôlée dans les conditions prévues au IV du présent article et suivant les délais de prescription du droit de reprise prévus à l’article L. 176 du livre des procédures fiscales en matière de taxes sur le chiffre d’affaires ;
« 4. La taxe de solidarité sur les billets d’avion est recouvrée dans les conditions fixées au V. Elle est reversée mensuellement à l’Agence française de développement. ».
2° Au premier alinéa du XVII de l’article 1647, les mots : « majoration au profit du fonds de solidarité pour le développement de la taxe de l’aviation civile » sont remplacés par les mots : « contribution additionnelle, dénommée taxe de solidarité sur les billets d’avion, au profit du fonds de solidarité pour le développement ».
II. – Le I entre en vigueur à compter du 1er avril 2014 et s’applique aux vols effectués à compter de la même date.
Sous-amendement n° 194 présenté par M. Mamère, M. Alauzet, Mme Sas, Mme Abeille, Mme Allain, Mme Attard, Mme Auroi, M. Baupin, Mme Bonneton, M. Cavard, M. Coronado, M. de Rugy, M. François-Michel Lambert, Mme Massonneau, M. Molac, Mme Pompili et M. Roumegas.
À l’alinéa 7, substituer aux montants :
« 11,27 € et à 45,07 € »
les montants :
« 15 € et à 50 € ».
Compte rendu de la commission élargie du mardi 22 octobre 2013
(Application de l’article 120 du Règlement)
Sport, jeunesse et vie associative
La réunion de la commission élargie commence à neuf heures trente-cinq, sous la présidence de M. Pierre-Alain Muet, vice-président de la commission des finances, et de M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
M. le président Pierre-Alain Muet. Madame la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, je suis heureux de vous accueillir avec M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation. Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2014 consacrés à la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
La Conférence des présidents du 11 juillet 2013 a décidé que l'ensemble des missions sera discuté cette année en commission élargie, procédure destinée à favoriser les échanges entre les ministres et les députés.
Nous donnerons d'abord la parole aux rapporteurs de nos deux commissions qui interviendront pour une durée de cinq minutes sous forme de questions au ministre. S'exprimeront ensuite, pour cinq minutes chacun, les porte-parole des groupes.
Enfin tous les députés qui le souhaitent pourront interroger la ministre, leur intervention étant limitée à deux minutes.
Avant d’entendre M. Régis Juanico, rapporteur spécial de la commission des finances et Mme Marie-George Buffet, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, je donne la parole à M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.
M. le président Patrick Bloche. Madame la ministre, je suis particulièrement heureux, au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation que vous connaissez bien pour y avoir siégé, de vous accueillir au sein de cette commission élargie, pour examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2014.
Je pense que nous sommes nombreux ici à nous réjouir de la hausse de vos moyens d’action en 2014 grâce à la dotation de 100 millions d’euros issus du Programme des investissements d’avenir qui vous permettra de développer des projets innovants en faveur de la jeunesse.
En ce qui concerne les crédits consacrés au sport, bien évidemment votre ministère a été mis à contribution, comme les autres, afin de réduire le déficit des comptes de l’État. De ce fait, vous êtes amenée – et c’est sans doute toute la difficulté d’être ministre aujourd’hui – à faire des choix d’actions prioritaires, auxquels nous serons très attentifs.
Cette année, notre commission a confié l’étude des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » à Marie-George Buffet, spécialiste incontestable de ces dossiers. Elle s’est attachée à évaluer la capacité globale de votre ministère à accomplir l’ensemble de ses missions dans un cadre budgétaire contraint. Je suis certain que ses observations avisées retiendront toute notre attention et contribueront à votre réussite, madame la ministre, et à celle du Gouvernement.
J’indique enfin aux membres de la commission des affaires culturelles et de l’éducation que nous examinerons l’avis de notre rapporteure, Marie-George Buffet, et que nous voterons sur les crédits, non à l’issue de la présente réunion de la commission élargie, mais lors de notre réunion de commission du mardi 29 octobre prochain.
M. Régis Juanico, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Madame la ministre, le deuxième budget de la législature pour financer les politiques de l'État destinées à développer le sport, soutenir la jeunesse et encourager la vie associative est un budget de consolidation offensif.
En additionnant les 560,4 millions d'euros des trois programmes de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » – programmes 219, 163 et 411 – et les 480,7 millions d'euros provenant des programmes 124, 333 et 309 pour couvrir les dépenses de fonctionnement et de personnel du ministère, les moyens de la mission s'élèveront au total à 1,04 milliard d'euros en 2014.
Ce total, à périmètre constant, était de 940 millions d’euros en 2013. les crédits augmenteront donc l'an prochain de 10 %, sans tenir compte du CNDS, le Centre national pour le développement du sport, dont les moyens seront intégralement préservés et devraient atteindre 272 millions d'euros.
La sanctuarisation des ressources du CNDS était un engagement pris l'an dernier par vous-même, madame la ministre. Vous le tenez, alors que tous les opérateurs de l’État sont mis à contribution à hauteur de 4 % en moyenne, pour redresser nos comptes publics.
Si l'on prend en compte l'ensemble des moyens consacrés à la jeunesse par le Gouvernement, réunis dans le document de politique transversale « Politique de la jeunesse », l'effort de l'État s'élèvera l'an prochain à 81,15 milliards d'euros, soit près d'un tiers du budget total, contre 80,59 milliards d'euros en 2013, ce qui représente une progression de 0,7 %.
Comme je l'ai fait lors de la discussion générale sur la première partie du projet de loi de finances pour 2014, je veux souligner trois mesures de soutien favorables aux associations et aux nombreux emplois créés dans ce secteur.
D’abord, le maintien intégral des dépenses fiscales liées à la réduction d'impôt au titre des dons aux associations, soit 1,33 milliard d'euros au titre des dons de 5,4 millions de ménages, ajoutés aux 770 millions d'euros au titre des dons effectués par 32 000 entreprises. Cela représente au total un effort de plus de 2 milliards d'euros, qui est de nature à conforter la générosité publique.
Ensuite, une mesure nouvelle qui découle de l'amendement que nous avons voté l'an dernier lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative élargissant l'abattement de la taxe sur les salaires de 6 000 à 20 000 euros pour les associations. Avec cette disposition, 70 % des associations employeuses ne paieront plus de taxe sur les salaires à partir du 1er janvier 2014. Cela représente un effort financier supplémentaire de 300 millions d'euros pour soutenir la vie associative.
Enfin, au-delà des 15 000 emplois d'avenir dans le domaine de la jeunesse et du sport, dont deux tiers des contrats sont d'ores et déjà signés, et qui relèvent de la mission « Travail et emploi », tout comme la consolidation de 340 000 contrats aidés indispensables à la vie associative, contrats dont la durée moyenne sera portée à plus de 10 mois, 51 millions d’euros seront directement dédiés à l'emploi associatif. Ce montant se décompose en 26 millions affectés au FONJEP, le Fonds de coopération de la jeunesse et l'éducation populaire, qui se voit conforté dans son rôle d'accompagnement de 3 700 emplois qualifiés, et 25 millions d'euros au CNDS, pour financer 3 000 emplois sportifs.
Dans le domaine du sport, les crédits de 231,2 millions d'euros prévus en 2014 pour le programme 219, hors fonds de concours du CNDS, sont stables et permettront de préserver les missions prioritaires du ministère : le sport pour tous et la réduction des inégalités d'accès à la pratique sportive, le sport comme outil de santé publique, l'accompagnement individualisé des sportifs de haut niveau, les crédits progressant de 5 % pour ce dernier poste.
Je note avec satisfaction le soutien accru à l'INSEP ; en particulier les crédits d'investissement pour la rénovation des installations sportives progresseront de 2 millions d'euros.
En termes d'économies, la renégociation de la convention régissant la gestion du Stade de France évitera à l'État d'indemniser celui-ci à hauteur 16 millions d'euros en raison de l'absence de club résident. Quant au déménagement du Musée national du sport à Nice, c'est une économie de 4,5 millions d'euros par rapport au projet initial qui sera réalisée. Je ne peux que me féliciter du règlement de ces deux dossiers difficiles par le Gouvernement.
Les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » seront presque intégralement reconduits, avec une enveloppe de 229,3 millions d'euros.
Les crédits destinés à l'Agence du service civique seront portés à 146 millions d'euros ce qui, combiné à l’abaissement de 1 000 à 800 euros par mois du coût de chaque contrat, permettra de poursuivre la montée en charge du service civique, qui devrait accueillir plus de 31 000 volontaires en 2014. Par ailleurs, les subventions accordées aux associations impliquées dans l'éducation populaire, la formation des bénévoles et le soutien à la jeunesse seront globalement maintenues. Enfin, les crédits à la mobilité internationale des jeunes progresseront de 1 million d'euros.
Le Fonds d’expérimentation de la jeunesse devrait pouvoir utiliser, jusqu’en 2015, pour 12,4 millions d’euros des crédits non consommés de précédentes lois de finances. Il faudra veiller à ce que les projets sélectionnés s’articulent de façon cohérente avec le Programme « Investissements d’avenir » et les actions de la convention conclue entre le ministère et Total, pour 17 millions d’euros sur trois ans. Ces différentes actions devront être mises en œuvre par des partenaires aux responsabilités clairement définies et faire l’objet d’un contrôle et d’une évaluation attentive par le Parlement.
Enfin, en ce qui concerne les emplois correspondant à la mission, soit 5 000 ETP, la baisse totale des effectifs atteindra 1,9 %, à comparer avec une baisse de 3,2 % en moyenne pour les autres missions non prioritaires. De plus, les 1 644 emplois de conseillers techniques et sportifs seront intégralement préservés.
Madame la ministre, je souhaite enfin vous poser deux questions.
Concernant la pérennité des ressources du CNDS, comment comptez-vous traduire la volonté, assez largement partagée sur ces bancs, d'élargir l'assiette de la taxe Buffet aux détenteurs de droit étrangers lors du prochain projet de loi de finances rectificative ? Êtes-vous favorable au prolongement après 2015 du prélèvement exceptionnel de 0,3 % sur les mises de la Française des Jeux, afin de couvrir intégralement les dépenses liées aux stades de l'Euro 2016 ? En même temps que les critères d'intervention du CNDS seront revus cet automne, pouvez-vous vous engager à simplifier la procédure applicable aux dossiers de subvention, aussi bien pour les clubs sportifs que pour les services déconcentrés de l'État qui les instruisent ? Cela représente un effectif de 250 ETPT.
Enfin, s'agissant de l’enveloppe exceptionnelle de 100 millions d’euros prévue dans le cadre du programme « Investissements d'avenir », pourriez-vous nous donner des précisions sur la méthode, la répartition des crédits, la cohérence des actions soutenues au regard des priorités du ministère ? Comment le Parlement sera-t-il associé ?
Mme Marie-George Buffet, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Madame la ministre, favoriser l’accès de tous et toutes à la pratique sportive sur tout le territoire et à tous les niveaux, développer la vie associative dans le respect des objectifs propres à chaque association et animer une politique en faveur de la jeunesse, tel est le champ de compétences de votre ministère. Voilà des domaines pour lesquels vous avez de belles ambitions. Pourtant, une fois encore, les années se suivent et se ressemblent : le budget de cette mission n’est pas au niveau de ce champ de compétences.
Certes, les crédits de la mission augmentent. Cette hausse est due à un nouveau programme de 100 millions. On peut s’en réjouir, même si, selon les informations du ministère, cette somme constitue en fait une cagnotte utilisable sur la période 2014-2017.
À périmètre constant, les deux programmes « Sport et jeunesse » et « Vie associative » régressent respectivement de 2,9 % et de 1,1 %. En dépit des ambitions affichées sur l’emploi et l’insertion sociale, le budget du ministère n’est pas reconnu prioritaire après des années de diète. Pourtant, les défis à relever sont nombreux. La RGPP et la réforme des services ont frappé de plein fouet le personnel de ce ministère militant et laissé des acteurs de terrain désemparés car ils ne trouvent plus une « porte d’entrée » jeunesse et sport dans les directions départementales.
Aussi, madame la ministre, comment envisagez-vous de remobilise l’administration déconcentrée de la jeunesse et du sport et l’avenir des beaux métiers que sont ceux de professeur de sport et de conseiller jeunesse et éducation populaire ? Quels moyens comptez-vous déployer pour faire face aux nouveaux besoins de contrôle liés à la réforme des rythmes éducatifs ?
La part marginale du ministère dans le financement du sport fragilise son rôle dans son partenariat avec le mouvement sportif. Après le recul de 5 % de l’an dernier, on constate un redressement, mais l’on n’est pas encore arrivé au niveau nécessaire. Ainsi, le soutien au sport pour tous chute et la situation du CNDS dont vous héritez et que vous œuvrez à redresser ralentit des financements d’infrastructures. Sur cette ligne, on constate une légère érosion du soutien aux fédérations sportives, soutien pourtant nécessaire à leur fonctionnement et au développement de leurs clubs ; les appels à projet, reposant sur les publics dits ciblés, ne peuvent être, à mon avis, qu’un plus dans le financement et non l’essentiel.
Aussi, madame la ministre, quel est l’avenir de la part territoriale du CNDS ? S’oriente-t-on là aussi vers une politique de ciblage ? Ne faudrait-il pas plutôt valoriser les critères du nombre de licenciés, de l’implantation et de la vie des clubs dans le conventionnement avec les fédérations ?
En ce qui concerne le sport de haut niveau, je vous félicite, madame la ministre, pour la renégociation de la convention relative au Stade de France, la budgétisation des primes aux sportifs pour les Jeux olympiques d’hiver, le soutien à la rénovation de l’INSEP et la prise en charge des cotisations retraite des sportifs de haut niveau, un oubli de la majorité précédente.
Mais je veux aussi exprimer des inquiétudes. Ne sommes-nous pas au terme des efforts de gestion demandés aux opérateurs ? Jusqu’où l’INSEP devra-t-il augmenter ses ressources propres pour préserver son équilibre, sachant qu’il ne peut le faire sans que cela se répercute sur les tarifs demandés aux fédérations ?
Le projet de régionalisation des CREPS garantira-t-il le maintien d’un service public national de la formation, notamment au niveau 4 ? Allez-vous maintenir les écoles nationales dans leur statut actuel ou envisagez-vous, pour elles aussi, une prise en charge par les régions ?
Enfin, si les moyens de l’Agence française de lutte contre le dopage et de son laboratoire sont maintenus, toutes les fédérations n’ont pas les moyens d’un réel suivi médical. Comment allez-vous organiser vos moyens de façon à l’assurer dans toutes ?
Madame la ministre, le service civique représente les deux tiers des crédits du programme « Jeunesse et vie associative ». Votre ministère est-il capable de financer l’objectif fixé pour 2017, de cent mille jeunes en service civique, sans porter préjudice aux autres actions en faveur de la jeunesse ? Avez-vous envisagé, avec le président de l’agence, la possibilité de modifier la durée du service et les indemnités, notamment en matière de décrochage scolaire, puisque lui-même avance cette solution ?
Le ministère envisage-t-il, durant cette législature, de renforcer son soutien au fonctionnement des associations de jeunesse et d’éducation populaire, notamment par l’intermédiaire du FONJEP ? Allez-vous prendre des mesures en faveur des bénévoles ? Quel bilan tirez-vous de la réforme de l’INJEP ?
Enfin, venons-en au programme 411 que vous avez obtenu. Il fait appel à des projets innovants au niveau des territoires ou des réseaux et serait utilisable pour l’investissement comme pour le fonctionnement. Quelle sera la place du ministère de la jeunesse dans la mise en œuvre du programme, puisque je vois que dans le Bulletin de l’Éducation nationale on se félicite aussi de l’obtention de ces 100 millions ? Compte tenu de la procédure retenue, pourra-t-on bine lancer l’appel à projets en 2014 ?
Le programme permet de financer des dépenses de fonctionnement. Mais quand il arrivera à son terme, qui prendra le relais ? Comment le caractère innovant des projets sera-t-il apprécié ? Ne doit-on pas craindre des critères trop complexes, alors que les besoins ordinaires en matière d’investissement sont importants ? Je pense aux centres de vacances, mais aussi à la construction de centres de loisirs, nécessaire avec la mise en place des rythmes scolaires.
Enfin, quel bilan tirez-vous du travail du comité interministériel ? Comment jugez-vous, si vous pouvez nous donner votre sentiment, l’implication des autres ministères ?
Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative. C’est un plaisir de venir aujourd’hui, devant la commission élargie, pour vous présenter les priorités et les moyens de mon action ministérielle ainsi que pour répondre à l’ensemble de vos questions.
Je remercie d’abord Marie-George Buffet, dont chacun connaît l’attachement à ce ministère, et le rapporteur Régis Juanico qui, depuis de nombreuses années, s’est impliqué sur ces questions. L’important travail d’audition auquel ils ont procédé leur a permis de rapporter en toute clarté.
Le ministère s’est pleinement conformé au cap fixé pour 2014 par le Gouvernement : rétablir les comptes publics, pour retrouver le chemin de la croissance, de la compétitivité et de l’emploi. Si 2013 a été l’année des efforts, 2014 sera celle des premiers résultats et d’une ambition renouvelée, pour la jeunesse en particulier. Nous le devons au travail de fond d’un ministère qui est redevenu solide, assaini, entièrement mobilisé autour de son projet.
Ce budget pour 2014 s’élève au total à 833 millions d’euros, hors fonctions support, soit 1,3 milliard d’euros avec celles-ci. Il est en hausse de 14 %. Cette hausse est due au deuxième volet du Programme « Investissements d’avenir », le PIA 2 : 100 millions d’euros seront alloués au ministère pour financer des programmes de soutien à l’emploi et développer la capacité d’innovation des jeunes sur les territoires.
Chère Marie-George Buffet, il est vrai que l’on peut toujours regretter de ne pas disposer de plus de moyens. Mais dans une période de redressement des comptes – on ne peut oublier les 600 milliards d’euros d’accroissement de la dette au cours du dernier quinquennat – qui a conduit à réduire de 15 milliards d’euros les dépenses publiques, dont 9 milliards d’euros sur le budget de l’État, il me semble que le traitement réservé à ce ministère témoigne de son ambition et de sa solidité retrouvée.
À périmètre constant, donc hors PIA, les crédits ministériels sont stabilisés pour le programme « Sport » comme pour le programme « Jeunesse et vie associative » (-0,3%). Même s’il s’agit d’une dotation exceptionnelle qui a vocation à être consommée sur plusieurs exercices, l’enveloppe de 100 millions d’euros du PIA constitue un fait marquant et une première dans ce secteur.
La priorité en faveur de la jeunesse, c’est l’affaire de l’ensemble du Gouvernement. Les dépenses répertoriées dans le document relatif à cette politique transversale s’élèvent à 81 milliards d’euros, soit 1 % de plus qu’en 2013, qui avait déjà enregistré une augmentation en 2012.
Pour autant, je souhaite que le ministère prenne toute sa part à la stratégie gouvernementale de réformes structurelles pour des économies durables dans les dépenses publiques. Nous le devons tous aux Français. Sept millions seront ainsi économisés en éliminant des doublons et des dispositifs redondants ; nous nous engageons pleinement dans le processus de modernisation de l’action publique pour optimiser les structures : par exemple, avec les emplois d’avenir, le programme « parcours animation sport » n’avait plus lieu d’être. Nous réalisons ainsi une économie de 2 millions d’euros.
Nous continuerons à mettre en œuvre la politique volontariste du Gouvernement en faveur de l’emploi. Sachez que sur les 60 000 emplois d’avenir effectifs au 1er octobre 2013 – 70 000 aujourd’hui –, plus de 10 000 le sont dans les métiers de la jeunesse et du sport. Ici même, l’année dernière, j’avais pris l’engagement que mon secteur recruterait 10 % de l’objectif de 150 000 emplois d’avenir. Cet objectif est atteint aux deux tiers en moins d’un an et nous le dépasserons certainement, madame Buffet, avec une véritable mobilisation, de nos savoir-faire pour accompagner l’ensemble des jeunes qui s’inscrivent dans un parcours de formation, du BAFA au bac plus cinq. Si nous sommes au rendez-vous, c’est aussi parce que nos services peuvent construire, avec les missions locales et avec les partenaires des territoires, de véritables parcours d’insertion.
La réforme des rythmes scolaires nous permettra également de nous mobiliser, avec les collectivités, autour des emplois d’animation qui seront créés dans ce secteur. Avec Michel Sapin, nous mobiliserons ainsi davantage les dispositifs de financement de la formation professionnelle pour notre secteur.
Nos propres dotations bénéficient aussi directement à l’emploi associatif ou sportif qualifié : elles sont a minima préservées des économies – tous les moyens consacrés à l’emploi le sont. Je souhaite que ces dotations augmentent, notamment dans le cadre de la réforme du CNDS qui se prépare : c’est un élément que j’ai demandé à l’ensemble des acteurs de prendre en compte.
Je souhaite à présent vous présenter plus en détail les moyens et les priorités pour la jeunesse et la vie associative.
Au sein du ministère, les crédits en faveur de la jeunesse, de la vie associative et de l’éducation populaire s’établiront en 2014 à 449 millions d’euros, soit une hausse de 28 % par rapport à 2013, compte tenu du programme d’investissements d’avenir.
Pour déployer son action, j’ai souhaité que ce ministère retrouve la vocation interministérielle qu’il avait perdue après Marie-George Buffet. Le premier comité interministériel de la jeunesse, en février 2013, présidé par le Premier ministre, a permis de mobiliser vingt-quatre ministères.
Madame la députée, vous m’interrogez sur le bilan des quarante-sept mesures arrêtées lors de ce comité interministériel. Depuis un an, nous avons considérablement avancé. Dix-neuf mesures sont opérationnelles, notamment celles qui concernent la santé des jeunes, la mobilité internationale, le service civique des décrocheurs, la réforme des bourses étudiantes ou le logement des apprentis... Vingt-deux sont en préparation, dont certaines sont expérimentées dans les régions, comme le service public de l’information et de l’orientation, et la garantie « jeune » qui vient de démarrer dans un certain nombre de territoires. Seules six mesures sont encore en cours de définition, parce qu’elles concernent une problématique plus large et suivent donc un calendrier décalé.
La mobilisation interministérielle est bien relayée par les préfets de région. Dans vingt-deux d’entre elles, pour la première fois des comités d’administration régionaux ont été organisés pour décliner cette priorité donnée à la jeunesse. Le PIA permettra d’accompagner financièrement cette mobilisation des collectivités.
Nous sécurisons ainsi progressivement les points les plus fragiles du parcours d’autonomie des jeunes. Vous le savez, j’avais souhaité que nous nous inscrivions dans l’accompagnement d’un parcours d’autonomie et non dans la mesure « jeunes ». Sont ainsi mobilisés à la fois les moyens de l’éducation, de l’insertion professionnelle, de l’orientation, du logement, de la santé, de l’engagement dans la vie citoyenne.
Dans mon périmètre ministériel, la mobilité, priorité marquée du comité interministériel, est un élément-clef de la formation et de l’emploi des jeunes. Pour permettre à un plus grand nombre d’entre eux d’avoir une expérience à l’international, nous mobiliserons 29 millions dans ce cadre en 2014.Par ailleurs, , le budget européen pour les programmes « Erasmus + » va augmenter de 30 % pour la période 2014-2020, avec une enveloppe destinée à l’ensemble des mobilités internationales hors parcours universitaires et nous avons mis en œuvre des moyens pour le volontariat international d’entreprise, avec le ministère du commerce extérieur. Les crédits vont passer de 15 à 25 millions d’euros dans les six prochaines années sur cette enveloppe « Erasmus Jeunesse » dédiée à l’AFPEJA.
La deuxième priorité est de favoriser l’engagement des jeunes. Nous poursuivons la montée en charge du service civique, avec l’objectif d’accueillir un minimum de 31 000 volontaires en 2014. C’est un effort de 149 millions d’euros, presque les deux tiers du budget de mon ministère.
Pour atteindre l’objectif de cent mille volontaires à la fin du quinquennat, nous avons travaillé sur les coûts de gestion. Nous ne voulons pas toucher aux droits des jeunes volontaires. En cohérence avec la réforme des retraites et avec les mesures relatives aux faibles cotisants, nous voulons que les cotisations retraite des jeunes puissent être validées par un dispositif de droit commun. Cela nous permet d’augmenter le nombre de jeunes en service civique tout en diminuant les coûts de gestion, sans rogner sur leurs droits ni sur la durée des missions, qui vont passer de six mois dans le budget 2013 à plus de sept mois.
Cette montée en charge ne se fera pas, comme avant 2013, au détriment des dispositifs consacrés au secteur associatif, lequel reste, avec l’éducation populaire, ma troisième priorité.
Le soutien direct à l’emploi associatif est, pour la deuxième année consécutive, totalement préservé des économies et bénéficie de plus de 50 millions d’euros, que ce soit au sein du FONJEP ou du CNDS, soit 6 700 emplois qualifiés.
C’est un dossier que vous connaissez particulièrement bien, monsieur le rapporteur spécial : l’abattement de la taxe sur les salaires, qui passe de 6 000 à 20 000 euros pour les associations permet à 70 % d’entre elles d’y échapper et de faire une économie qui va au-delà de celle qui est permise aux entreprises au titre du crédit d’impôt compétitivité-emploi. Nous prolongerons par ailleurs l’effort fiscal entrepris en faveur des dons aux associations.
J’insiste aussi sur la constance du budget alloué à la formation des seize millions de bénévoles – 11 millions d’euros en 2014 – et au soutien des associations et fédérations nationales de jeunesse et d’éducation populaire. Pour la deuxième année consécutive, pas de baisse de ces crédits !
Mais je souhaite par-dessus tout sécuriser les relations contractuelles entre les associations et les pouvoirs publics. La subvention sera donc, pour la première fois, définie dans la loi, à l’occasion du débat sur le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, qui s’ouvrira dans quelques jours. À la fin de l’année, le Premier ministre signera une charte d’engagement réciproque entre l’État, les associations et les collectivités locales qui sont aujourd’hui, sur le terrain, les acteurs du financement du secteur associatif.
Enfin, le PIA suscite de légitimes interrogations. Nous allons saisir l’occasion qu’il nous offre d’assurer la mobilisation des territoires autour des priorités du comité interministériel de la jeunesse. L’enveloppe financière sera déléguée en 2014 à l’ANRU, sans que cela restreigne pour autant son champ à la politique de la ville. Le commissariat général à l’investissement, présidé par Louis Gallois, assurera la cohérence et la qualité de la procédure d’appel à projets et de l’évaluation et de la sélection des actions, comme il le fait pour l’ensemble du PIA.
Le ministère de la jeunesse jouera pleinement son rôle. Il sera garant de la prise en compte des orientations du comité interministériel de la jeunesse dans le contenu des appels à projets et fera le lien avec les autres ministères. Nos services inciteront les acteurs locaux à se mobiliser et à se porter candidats. Ils fourniront ensuite l’expertise indispensable au choix des actions financées.
Le premier appel à projets sera lancé en 2014, afin que nous puissions entrer très rapidement dans une phase opérationnelle. Nous veillerons tout particulièrement à éviter les effets d’aubaine. Nous financerons des projets innovants, à grande échelle. Nous rendrons compte chaque année au Parlement du déroulement des appels à projets et de la consommation des crédits.
Il s’agit vraiment de favoriser l’émergence de politiques de la jeunesse à la fois globales et innovantes, intégrées à l’échelle d’un territoire et permettant d’appuyer soit les collectivités, soit les associations, soit les deux.
Nous poursuivrons donc nos efforts en 2014. En cours d’année, un second comité interministériel de la jeunesse fera le point des avancées que j’ai évoquées et envisagera de nouvelles mesures. Entre-temps, nous gagnerons en efficacité avec la nomination, imminente, d'un délégué interministériel à la jeunesse.
Sous son autorité, les missions de l’INJEP seront confortées et renforcées. Il sera ainsi chargé d’une nouvelle mission statistique, d’observation et d’analyse pour l’ensemble des politiques de jeunesse étendue à la vie associative. Ses missions d’expertise seront confortées par des moyens humains et sa structure juridique garantira à la fois son autonomie et sa légitimité scientifique. Le conseil scientifique, bien entendu, demeure. Cette institution jouera un rôle essentiel sur un plan interministériel.
Je vais à présent détailler les crédits du programme « Sport » pour 2014.
Pour l’année prochaine, les crédits sont stabilisés que ce soit pour le programme sport, avec 231 millions, ou le CNDS, dont les recettes sont maintenues à 272 millions.
Vous le savez, nous avons hérité d'un ministère aux moyens mal assurés, avec quelques… « oublis » budgétaires pour faire face à des dépenses engagées. Nous avons utilisé 2013 pour clôturer la plupart de ces dossiers mal ficelés qui grevaient les marges de manœuvre du ministère. Je remercie les rapporteurs d'avoir bien voulu le souligner.
Le versement de l'indemnité pour absence de club résident au Stade de France est supprimé, ce qui représente une économie de 16 millions en 2014 et de 64 millions sur quatre ans, une mesure d’importance pour le budget du sport.
Quant au Musée National du Sport, son installation a commencé dans des conditions financièrement soutenables pour l'État.
Enfin, nous pouvons construire l'avenir du CNDS grâce au redressement de ses comptes, bien engagé depuis la fin 2012.
Ce budget permet d'assurer le financement de nos projets car nous ciblerons les crédits sur les orientations prioritaires du ministère : l'accès au sport pour tous, le sport comme outil de santé publique, le rayonnement de la France sur la scène sportive internationale, l'accompagnement individualisé des sportifs de haut niveau, la lutte contre le dopage et contre les matchs truqués et, donc, en faveur de l’éthique du sport.
Cette feuille de route trouvera son aboutissement dans la loi de modernisation du sport qui sera présentée en conseil des ministres puis au Parlement en 2014. Elle permettra de rénover la gouvernance du sport en définissant ce qui relève de l’État, d’un mouvement sportif autonome, des collectivités territoriales dont la place sera mieux reconnue, de l’ensemble du secteur de l’emploi, du droit du travail, de la régulation du sport professionnel, des enjeux en termes d’intermédiaires financiers, de la sécurisation du sport professionnel et des investissements des collectivités locales, du contentieux sportif qui, on le voit aujourd’hui dans un certain nombre de dossiers, est peu adapté au sport et à ses délais.
Pour porter ces orientations fortes de notre politique sportive, je souhaite m'appuyer sur les fédérations dont le budget sera globalement stabilisé à 83 millions en 2014, soit une légère baisse de 2%. Le soutien de l'État se traduit aussi en termes de compétences, puisque les 1 644 conseillers techniques et sportifs, fonctionnaires de l'État, placés auprès des fédérations afin de décliner la politique ministérielle en leur sein, seront intégralement maintenus.
Le sport pour tous est au cœur de mon projet. Vous le savez, c'est le CNDS qui en est le principal opérateur et c'est la raison pour laquelle, pour la deuxième année consécutive, il est l’un des très rares opérateurs auxquels on ne demande pas d'efforts sur le plafond des taxes qui leur sont affectées. Je vous remercie de l’avoir souligné.
Monsieur Juanico, vous m'interrogez à juste titre sur la sécurisation de ces taxes. En particulier, vous nous invitiez dans votre rapport conjoint avec M. Huet sur la solidarité entre sport professionnel et sport amateur à élargir l’assiette du prélèvement conçu par Mme Buffet. C’était également le souhait de la Cour des comptes.
Nous avons donc décidé de le compléter par un dispositif permettant d'assurer un retour, pour le sport amateur, des profits générés par les compétitions internationales se déroulant sur le territoire national, c'est-à-dire avec le concours des moyens publics car il s’agit là d’une question d'équité. Ce complément qui concernera à titre dérogatoire les acheteurs de droits – on ne peut taxer des organisateurs non établis en France – ne modifie pas l’assiette traditionnelle de la taxe qui continuera à porter sur les vendeurs de droits. Il s'appliquera aux contrats conclus à compter de 2014 et sera proposé en loi de finances rectificative 2013.
Afin de ne pas freiner la diffusion du sport à la télévision, son impact sera marginal pour les chaînes – au-delà des contrats déjà signés, soit, environ 2 millions alors qu’avec la taxe Buffet nous nous situons à plus de 40 millions – et il sera en outre complété par un dispositif de soutien à la production des sports émergents et des sports féminins qui trouvent avec difficulté leur place dans les médias en raison de coûts importants que les fédérations ne peuvent pas prendre en compte. C’est là une demande pressante du mouvement sportif.
S'agissant de l'Euro 2016, je vous remercie de souligner que le Gouvernement s'est engagé à ce que les dépenses pour la rénovation des stades ne pèsent plus sur la trésorerie du CNDS.
Tout d’abord, il faut stabiliser le montant final des dépenses. Aujourd’hui, 120 millions de recettes ont été affectés. En l’état, les dépenses s’élèvent à 138 millions mais ce montant final dépendra de l’avis de la Commission européenne sur la procédure de notification des aides d'État et de l'aboutissement des deux derniers projets – Lens et Paris – qui n'ont pas fait l'objet d'une délibération. Une fois la dépense totale connue, nous déciderons avec Bercy du vecteur de la recette. Le prolongement du prélèvement de 0,3 % est une piste, mais il peut y en avoir d'autres. L'important est la neutralité pour les finances du sport pour tous.
S'agissant des dépenses du CNDS, le plan de redressement adopté unanimement fin 2012 est difficile pour tous les élus locaux. Lors des questions au Gouvernement, nombre d’entre vous me sollicitent à propos des investissements du CNDS dans leur circonscription. Ce plan est douloureux mais nécessaire faute de quoi l’outil aurait disparu. C'est pourquoi j'ai souhaité qu'une réforme de ses critères d'intervention lui permette de retrouver des marges de manœuvre. Nous en avons débattu en commission des affaires culturelles cette année, la Cour des comptes nous invitant aussi à engager cette démarche et à mieux cibler nos interventions.
Comme vous, madame Buffet, je suis attachée à la part territoriale du CNDS. Elle a d'ailleurs été très largement préservée des économies par rapport à la part nationale. La réforme des critères permettra de la rendre plus efficace en ouvrant des passerelles entre l'aide au fonctionnement et l'aide à l'investissement et en faisant plus confiance aux acteurs locaux.
L'aide aux territoires et le recentrage sur les inégalités d’accès seront au cœur de la réforme qui sera présentée au prochain conseil d'administration au mois de novembre, après une longue phase de concertation avec le mouvement sportif et l’ensemble des associations d’élus. Je souhaite en tout cas que l'aide à l'emploi soit la priorité de ce plan de redressement pour 2014 dans les crédits du CNDS, que les conseillers techniques sportifs soient plus impliqués avec les collectivités dans l’instruction de ces dossiers et que des priorités soient déterminées en termes de rénovation d’équipements et de bassins aquatiques puisque nous avons un très grand retard sur ce plan.
S’agissant maintenant du sport de haut niveau Les crédits s'établissent à 178 millions en 2014, soit 2,5% d'augmentation par rapport à 2013. On les retrouve dans les subventions aux fédérations, dans l'investissement dans nos établissements et dans le soutien individuel aux sportifs, lequel progresse de 5%.
Nous avons aussi réglé le problème des primes des jeux olympiques et paralympiques : nous avons prévu un million en 2014, ces primes étant inscrites pour la première fois à titre permanent dans un décret. J’ai souhaité que, comme c’est le cas depuis les jeux olympiques de Vancouver, elles soient intégrées dans l’imposition des sportifs mais que pour ceux d’entre eux qui ne résident pas en France, il y ait une retenue à la source de 15%. C’est exactement ce que prévoit actuellement le code général des impôts pour des sportifs qui ne sont pas domiciliés en France et qui participent à des compétitions sportives se déroulant dans notre pays.
Une cellule d’accompagnement dédiée à la reconversion individualisée des athlètes a également été créée au sein de l’INSEP. Ce dernier bénéficiera de 12 millions pour sa rénovation et 9 millions seront alloués aux investissements dans les CREPS, ce qui représente une hausse globale de 14 %.
Ce budget conforte les établissements. Je crois au service public du sport, au rôle majeur de ce ministère en matière de préparation aux compétitions de haut niveau et de formation. Les écoles nationales demeureront des écoles nationales. Quant aux CREPS, la réforme de leur statut – sur laquelle nous nous engageons en concertation avec les régions – permettra de mieux les inscrire dans les territoires sans faire disparaître en aucune manière leur vocation nationale. Les régions seront dans les CREPS avec l'État et non pas à sa place.
J'en termine avec les personnels du ministère ou des établissements. C'est vrai, nous ne sommes pas un ministère dit « prioritaire » au plan des effectifs. Les créations de postes, nécessaires dans l'éducation, la justice et la sécurité, sont donc compensées par la poursuite des schémas d'emplois dans les ministères dits non prioritaires. Mais comme le souligne Régis Juanico, ces schémas d'emplois sont en général nettement plus durs que ce que subit notre ministère qui avec une baisse de -1,9% pour les agents ministériels et de -1,5% sur les opérateurs, voit sa vocation éducative reconnue.
Je crois à l'avenir des corps « jeunesse et sports », des inspecteurs, des professeurs de sports, des conseillers techniques et sportifs, des CEPJ. Nous engagerons d'ailleurs en 2014 le rattrapage indemnitaire avec les corps comparables de la sphère de la santé et du social.
Les chantiers qui mobilisent nos agents sur les territoires sont très nombreux. Celui sur le sport-santé est très important. Aujourd’hui, presque partout, les directions régionales de la jeunesse et des sports se sont engagées dans un travail avec les agences régionales de santé pour favoriser une politique du sport comme outil de santé publique. Comme je le dis souvent : plutôt le sport qu’une longue liste de médicaments ! Des réseaux sport-santé se sont constitués dans presque tous les territoires et nos services sont pleinement mobilisés.
Il en est de même s’agissant des politiques dédiées aux personnes en situation de handicap et de l’ensemble des priorités en matière d’emploi, de même que du soutien aux collectivités locales pour la construction de leurs projets éducatifs de territoires. Le travail que nous avons entrepris dans le cadre de la modernisation de l'action publique sur l'adéquation des missions et des moyens nous donnera les marges de manœuvre pour y faire face.
Nous sommes en train d'optimiser la gestion de missions importantes qui sont aujourd'hui un peu trop chronophages, dont les formations et certifications. Une évaluation des politiques publiques a été demandée à l’inspection générale. Ce système, au fil des années, a fait l’objet de nombreuses initiatives via les branches professionnelles, le ministère, les fédérations sportives ou les universités. Nous souffrons d’un manque de lisibilité de l’ensemble de ces politiques. Nous devons aussi tenir compte des coûts des dispositifs en termes d’emploi. Nous avons donc engagé cette réforme à des fins de simplification et de facilitation de la circulation des étudiants et des stagiaires, mais aussi pour reconnaître le rôle des fédérations dans les certifications sportives.
Nous réformons également l'administration, avec notamment des allègements de procédures comme la dématérialisation des déclarations d’éducateurs sportifs ou la suppression de la déclaration d’établissements d’activités physiques et sportives. Ce sont là autant de simplifications pour l’ensemble des acteurs qui, au quotidien, sont nos partenaires.
Nous allons réorganiser les fonctions support sur les périmètres santé-social, travail, jeunesse et sport. Cela nous permettra d'appliquer une réduction de 3% par an sur les effectifs support et, donc, d’alléger les contraintes sur les directions métiers et les services déconcentrés.
Mais, après les bouleversements issus de la Réate – la réorganisation de l’administration territoriale de l’État – le Gouvernement a fait le choix salutaire de la stabilité. Nous le devions bien à nos agents ! Ceux de mon ministère sont particulièrement mobilisés autour des priorités du Gouvernement en matière d’emplois et d’accompagnement sur chacun des territoires avec les jeunes et les associations de notre pays.
M. Pascal Deguilhem, pour le groupe SRC. Comme vous avez été très précise, madame la ministre, sur le contexte de ce budget et sur la mise en œuvre de vos priorités, mes questions seront limitées. Cela témoigne d’ailleurs que même lorsque les marges de manœuvre sont assez étroites, il est possible de tenir ses engagements et de maintenir ses ambitions pour la jeunesse, le sport et la vie associative. C’est ainsi que je caractériserai votre budget.
Dans un contexte budgétaire difficile avec un important effort national de redressement des comptes publics, il n’est pas surprenant que les masses financières des programmes existants évoluent assez peu si l’on excepte le nouveau programme. J’ose à peine dire qu’il est presque heureux que vous ayez pu largement préserver les crédits de votre mission tant pour le programme jeunesse que pour le programme sport !
Cela ne signifie pas que nous n’aurions pas préféré des dotations plus importantes pour un ministère dont le périmètre est vaste. Les besoins du monde associatif sont aussi importants, de même que ceux des opérateurs. S’agissant des moyens territoriaux, Je m’associe d’ailleurs aux interrogations de Mme Buffet.
Le rapporteur de la commission des finances et vous-même ayant très scrupuleusement retracé les éléments chiffrés de ce budget, je m’attacherai à certains points seulement.
Le programme « Jeunesse » s’inscrit-il dans la priorité « jeunesse » que nous nous sommes fixée ? Au-delà de la stabilité des crédits budgétaires, oui, je le crois. Vous avez exposé les priorités qu’il convient de retenir : la mobilité de la jeunesse, l’engagement, l’innovation, l’emploi. Les 15 000 emplois d’avenir au sein des associations dans le mode du sport et de la jeunesse soutiendront ainsi l’engagement des bénévoles à travers le dynamisme de notre jeunesse, ce qui n’est pas rien !
La montée en charge du service civique, avec plus de 30 000 volontaires en 2014, est effectivement consommatrice de crédits. Vous nous avez certes rassurés sur le fait que cela ne se fera pas au détriment des autres outils d’intervention. Je le constate dans mon département, le déploiement du service civique implique d’insister sur le caractère positif de sa mise en œuvre au bénéfice des co-contractants, tant pour les jeunes que pour les missions qu’ils servent.
Nous saluons votre volonté de maintenir et de soutenir les dotations du FONJEP afin de soutenir l’emploi au sein des associations alors que la généralisation des nouveaux rythmes scolaires est en cours.
Le nouveau programme d’investissements d’avenir pour la période 2014-2017 nécessite encore des éclaircissements, en particulier sur la question du pilotage. Vous avez déjà apporté quelques réponses. Mais qui se plaindra d’une dotation de 100 millions sur le programme « Jeunesse » ?
J’en viens maintenant au programme « Sport ». Comme le rapporteur spécial l’a rappelé, si l’enveloppe globale reste stable par rapport à 2013, des mouvements de crédits à l’intérieur du programme dessinent des priorités, que nous partageons. La réduction des inégalités d’accès au sport est une priorité qui n’aurait jamais dû être remise en question. Vous avez consolidé les ressources du CNDS, le principal véhicule d’intervention de l’État en la matière, qui se trouvait dans une situation critique et dont l’existence était même menacée il y a un an. Nous saluons votre engagement, qui a permis de mettre fin à une période de déshérence et de dévoiement de la fonction première de cet outil.
Le plan de redressement est difficile, et il est vrai qu’il ne nous satisfait pas forcément dans les territoires. S’agissant de la concertation sur les critères, êtes-vous en mesure de préciser, à quelques semaines de son issue, l’état d’avancement de cette concertation ?
Nous saluons la politique de soutien au sport de haut niveau, à travers les moyens alloués à l’INSEP, qui est avec les CREPS, un outil d’excellence de notre politique sportive de haut niveau.
Lors des auditions budgétaires, les fédérations qui sont les plus fragiles économiquement nous ont fait part de leurs préoccupations quant au maintien des moyens financiers, et vous avez bien perçu la nécessité de traiter cette question de manière solidaire, en tenant compte des inégalités entre les fédérations fragiles et celles qui sont plus riches.
C’est une excellente chose d’avoir bouclé le dossier de l’indemnité pour la compensation d’absence de club résident au Stade de France. Après avoir déboursé 300 millions d’euros, l’État va en économiser 70 d’ici 2017, qui iront aux politiques prioritaires. Nous savons l’énergie que vous avez déployée sur ce dossier, comme sur celui du Musée national du sport à Nice, pour rééquilibrer, au bénéfice de l’État, les conditions de financement.
Conformément à vos engagements, vous avez mis en œuvre des réformes structurelles essentielles, en vue d’optimiser la dépense publique et de faciliter la mise en œuvre des politiques prioritaires, en associant l’ensemble des parlementaires. Vous avez également posé les bases d’une future loi de modernisation du sport, à l’élaboration de laquelle nous nous associerons volontiers – et je crois pouvoir parler au nom d’un grand nombre de parlementaires, issus de tous nos rangs. Sur la base de rapports auxquels nous avons participé, nous avons des propositions à vous faire pour rénover le monde du sport, qui en a effectivement besoin.
M. Guénhaël Huet, pour le groupe UMP. Madame la ministre, vous avez présenté votre projet de budget sous l’angle de l’ambition et de la solidarité retrouvées. La formule est séduisante, et on aimerait que les chiffres y correspondent. Or, s’il semble à première vue que les crédits de votre ministère augmentent de 14 %, chacun a bien compris – et vous l’avez vous-même indiqué – que cela résulte en réalité d’une sorte d’artifice, qui a consisté à modifier le périmètre de votre département ministériel, en créant un programme supplémentaire, qui suscite un certain nombre d’interrogations.
À périmètre constant, votre budget est en baisse : les autorisations d’engagement connaissent une baisse de près de 3%, comme les crédits de paiement – hors fonds de concours, il est vrai, et notamment du CNDS. Il y a donc bien une érosion des crédits consacrés à la mission « Sport » et cette remarque vaut également, quoique dans une moindre mesure, pour la mission « Jeunesse et vie associative », qui diminue, quant à elle, de 1,1 % par rapport à 2013.
En ce qui concerne la mission « Sport », vous avez indiqué que vos priorités étaient le sport pour tous et l’éthique du sport. Permettez donc, madame la ministre, que je m’étonne de la baisse sensible des crédits sur ces deux chapitres : en crédits de paiement, hors apport du CNDS, le sport pour le plus grand nombre, ou sport pour tous, subit une baisse de plus de 50 %.
On constate également une baisse, que vous avez cherché à minimiser, mais que vous n’avez pas niée, des crédits affectés aux fédérations sportives, qui, en passant de 85 à 83 millions d’euros, baissent de 2 %. Les présidents des fédérations ont exprimé des inquiétudes quant à l’évolution du nombre de conseillers techniques mis à disposition : vous avez évoqué cette question, mais j’aimerais que vous apportiez davantage de précisions.
Dans un souci d’objectivité, je tiens à saluer l’augmentation des crédits en faveur du sport de haut niveau, à hauteur de 2,8 % : c’est le seul poste en augmentation dans votre ministère. Je salue votre décision de provisionner des crédits pour récompenser les futurs médaillés olympiques de 2014, que l’on souhaite nombreux.
La prévention par le sport et la protection des sportifs sont de vrais sujets d’inquiétude, puisque leurs crédits baissent de 1,6 %. Cette baisse pose le problème du fonctionnement de l’Agence française de lutte contre le dopage, alors même que le rapport sénatorial qui a fait grand bruit au mois de juillet montre bien qu’il y a encore beaucoup à faire pour lutter contre le dopage, toutes disciplines confondues. Il ne faut pas que l’arbre cache la forêt et que les mêmes disciplines soient toujours montrées du doigt. Quelles sont, madame la ministre, vos projets pour rééquilibrer, en lien avec l’AFLD, les contrôles et les instruments de lutte contre le dopage dans l’ensemble des disciplines sportives ? Je ne doute pas que vous m’apporterez une réponse, puisque cette question est l’une de vos priorités.
Sur la mission « Sport », j’ai quatre questions à vous poser. Quelle sera l’évolution du nombre de conseillers techniques mis à la disposition des fédérations ? Quelles mesures prendrez-vous pour lutter contre le dopage, toutes disciplines confondues ? Qu’en sera-t-il de l’élargissement de l’assiette de la taxe Buffet – sur laquelle je partage les préoccupations de Régis Juanico ? Pouvez-vous, enfin, revenir sur le plan piscines, que vous avez annoncé, mais dont on ne trouve pas trace dans les documents budgétaires ?
En ce qui concerne, enfin, la mission « Jeunesse et vie associative », si nous saluons l’augmentation du service civique, nous ne pouvons que déplorer la baisse des crédits déconcentrés et des crédits à l’éducation populaire. Pouvez-vous, madame la ministre, apporter des précisions sur le nouveau programme, qui présente encore des zones d’incertitudes ? Vous avez parlé des emplois d’avenir, pour vous en féliciter. Ils sont certes utiles pour aider les jeunes à entrer dans l’emploi, mais que deviendront-ils à terme, à l’échéance des trois ans ? La question qui se pose, c’est celle de la pérennité de ces emplois qui, comme chacun sait, sont un peu artificiels.
M. Yannick Favennec, pour le groupe UDI. Le budget de la mission « Sport » est à l’étale, avec des choix qui nécessitent quelques explications.
D’abord, la progression apparente des crédits de cette mission tient à l’ajout d’un nouveau programme, le n° 411, intitulé « Projets innovants en faveur de la jeunesse ». Quel est le sens de cet ajout ? Ce nouveau programme aura-t-il réellement une traduction concrète en 2014 ? Cela semble peu probable, mais dans cette hypothèse, pouvez-vous m’indiquer, madame la ministre, quels sont les critères de cohérence retenus pour encourager les innovations ?
Plus surprenant : le sport pour tous est en berne. Les crédits de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre » sont divisés par deux, passant de près de 15 millions à 7 millions d’euros. De la même façon, l’action 1, « Vie associative », est en baisse de 4,8 %, et l’éducation populaire de 4 %. L'action 3, « Prévention du sport et protection des sportifs », connaît, elle aussi, une érosion régulière : alors qu’elle représentait 19,67 millions d’euros en 2011, elle n'atteint plus que 18,776 millions pour 2014.
Et que dire du budget quasi virtuel consacré à la lutte contre les incivilités, qui se racornit encore de 4 % cette année, après une baisse de 7 % l'année dernière ! Globalement, les crédits pour la jeunesse et la vie associative sont en baisse de 2,5 millions d’euros. Compte tenu de la priorité présidentielle accordée à la jeunesse, nous sommes surpris de ces chiffres. Mais peut-être la jeunesse n’est-elle plus une priorité dans ce secteur ? Cela appelle en tout cas une explication.
Autre paradoxe : un effort est visiblement consenti en faveur du sport de haut niveau, qui représente 76,2 % des crédits du programme « Sport », contre 74,1 % en 2013. Mais dans le même temps, le projet de loi de finances instaure une taxe à 75 % sur les salaires des sportifs, qui risque de mettre en danger les clubs les plus fragiles et de nuire fortement à la stabilité des clubs aux budgets les plus importants. Cet effort semble avoir un coût d'opportunité pour le réseau sportif des clubs et des associations, dont beaucoup risquent de se retrouver en grande difficulté. Quelle est l'explication du Gouvernement ?
Enfin, quels financements et quels partenariats sont envisagés pour le financement des stades de l'Euro 2016, sachant qu’on estime l'engagement minimal de l'État à 160 millions d’euros et qu'il n’est budgété qu’à hauteur de 120 millions ?
J'en viens maintenant au bénévolat. Au-delà de la nécessaire qualification, dont les crédits sont maintenus, le renouvellement régulier des responsables bénévoles est une impérieuse nécessité pour garantir la pérennité du monde associatif, des solidarités de proximité, du lien social et de l'animation, notamment dans les territoires ruraux. C'est pourquoi il serait légitime de mieux reconnaître l'engagement bénévole. J'avais évoqué par le passé, avec mon collègue Jean-Pierre Decool, l'attribution de points de retraite supplémentaires pour celles et ceux qui ont exercé des responsabilités pendant plusieurs années dans des associations.
J'ai bien compris, madame la ministre, la difficulté technique, et évidemment financière, d'une telle disposition, mais je vous rappelle que le bénévolat est une ressource humaine, et qu’elle n'est malheureusement pas intarissable. Si cette ressource venait à disparaître, quelle institution pourrait prendre le relais, avec les conséquences financières que l'on peut imaginer ? La médaille du bénévolat est une très sympathique attention, mais elle ne me paraît pas à la hauteur de ce qu’il conviendrait de faire pour reconnaître vraiment l’engagement bénévole. Je me permets également d'attirer votre attention sur les complexités administratives et l'inflation normative auxquelles sont confrontés ces responsables bénévoles ; elles deviennent souvent une source de découragement et de démotivation pour beaucoup d’entre eux.
J’appelle aussi votre attention, madame la ministre, sur l’article 78 du projet de loi de finances, qui révise l’exonération de charges relative à l’embauche de salariés au sein d’organismes à but non lucratif, associations sportives et culturelles par exemple, dont le siège social se situe dans les zones de revitalisation rurale. Cette mesure va diminuer de 25 % les aides permanentes à ces emplois en zone rurale. C’est une perte de 30 millions d’euros, qui porte ainsi atteinte à des associations qui créent pourtant du lien social, notamment dans les territoires ruraux.
Enfin, je souhaite évoquer devant vous un problème récurrent auquel doivent faire face les petites associations locales, et que je mesure quotidiennement dans mon département de la Mayenne, celui de leurs rapports avec la SACEM. Je sais que cela ne dépend pas directement de votre ministère, mais nous sommes ici à la commission des affaires culturelles ; je sais aussi que la SACEM est un organisme privé. Néanmoins, j’appelle votre attention sur le fait que le monde associatif est souvent, face à la SACEM, comme le pot de terre face au pot de fer. Il est évident que je ne suis pas opposé à ce que les auteurs-compositeurs perçoivent les droits qui leur sont légitimement dus ; il reste que l'opacité du fonctionnement de la SACEM est un vrai sujet de découragement et de démotivation pour le bénévolat associatif.
D’une manière générale, madame la ministre, que comptez-vous faire de concret et d’efficace pour pérenniser la vie associative dans notre pays et pour susciter des vocations bénévoles, notamment chez nos jeunes concitoyens, sans pour autant démotiver les plus anciens ?
Mme Barbara Pompili, pour le groupe écologiste. Madame la ministre, je souhaite tout d'abord vous féliciter pour le plan de redressement du CNDS que vous avez mené en 2013 au profit du sport pour tous, à travers une réduction des crédits consacrés au financement des grands événements et un transfert du financement des stades de l'Euro 2016 sur des ressources spécifiques. Que le CNDS se concentre à nouveau sur les territoires et les publics qui subissent les plus grandes inégalités d'accès aux sports est une très bonne chose. J'en profite pour vous rappeler notre attachement au soutien des clubs amateurs.
La baisse de 41.7 % de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre », qui ne représente plus que 1,5 % du budget total de la mission, nous inquiète néanmoins. En comparaison, le soutien au sport de haut niveau, qui est en augmentation, représente 38,6 % du budget de cette même mission. Un certain rééquilibrage des crédits nous paraîtrait donc nécessaire, car il s'agit avant tout d'amener le maximum de nos concitoyens à une pratique sportive régulière, et non quelques-uns à faire de la compétition. Le sport pour tous contribue au vivre ensemble, dont nous avons tant besoin en ce moment.
Cela m'amène d’ailleurs à vous interroger sur les actions prévues en faveur du soutien au sport féminin et au handisport, ainsi qu’à la lutte contre l’homophobie. À ce sujet, je veux d’abord vous redire combien les écologistes sont satisfaits que Paris ait été choisi pour l'organisation des Gay Games. Mais je souhaite également vous faire part à nouveau de mon inquiétude quant aux jeux olympiques qui vont bientôt s’ouvrir à Sotchi, dans un contexte où la liberté de la presse fait défaut et où des lois homophobes ont été adoptées. Comme je l'ai déjà dit, rester silencieux pourrait être interprété comme un signe de complicité. Qu’en pensez-vous, madame la ministre ?
D’une manière plus générale, nous aimerions savoir quelles actions sont d'ores et déjà organisées, financées ou prévues pour lutter contre l'homophobie dans le sport.
Concernant le programme « Jeunesse et vie associative », je salue la restauration du dialogue et du lien de confiance avec le tissu associatif. La nouvelle Charte des engagements réciproques va dans le bon sens ; nous espérons qu'elle sera suivie d'effets concrets et qu’elle pourra vivre dans nos territoires – vous nous avez déjà donné quelques exemples encourageants sur ce sujet.
Permettez-moi néanmoins de relayer quelques inquiétudes. Les attentes sont grandes quant à la définition à venir de la subvention dans la future loi sur l’économie sociale et solidaire. Il devra s'agir d'une réelle avancée pour le financement des associations, qui sont trop souvent obligées de recourir à la participation des usagers et dépendent de plus en plus de procédures de marché public, ce qui les réduit à l’état de prestataires de service et nie leur fonction sociale et citoyenne, ainsi que leur rôle de co-construction des politiques publiques. Il faut aussi agir en faveur d'une simplification administrative.
Par ailleurs, sans revenir sur la priorité accordée au service civique, pour lequel nous souhaiterions que soit présenté un bilan en vue de sa montée en puissance, j'attire votre attention sur d'autres besoins en financement, tout aussi importants en matière d'engagement citoyen. Qu'en est-il, par exemple, des réflexions autour de la création d'un congé d’engagement ? Quels dispositifs envisagez-vous, par ailleurs, pour soutenir l'engagement associatif des personnes porteuses de handicap ?
Concernant la stabilité du Fonds de développement de la vie associative, pourriez-vous nous garantir que cette sanctuarisation est également effective au niveau régional, où les besoins sont grands ? Dans la seule Picardie, on compte plus de 250 000 bénévoles.
Des crédits supplémentaires sont-ils prévus pour la formation des jeunes occupant un emploi d'avenir et pour la formation de leurs tuteurs ? L'accueil de ces jeunes nécessite un accompagnement spécifique qui, mieux financé, contribuerait sans aucun doute à la création d'emplois d'avenir. Une augmentation de ce fonds permettrait également de financer davantage d’expérimentations.
Concernant l'éducation populaire, je ne peux que vous faire part de mon inquiétude face à la baisse de 4 % des crédits alloués à l'action en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire. Alors que la réforme des rythmes scolaires se met en place et que les associations d'éducation populaire ont un rôle important à jouer pour la réussite de cette réforme, notamment à travers les projets éducatifs de territoire, le message envoyé ne me paraît pas bon.
Le nouveau programme, « Projets innovants en faveur de la jeunesse », qui est à l’origine de la hausse apparente du budget de la mission, m’interpelle – et il semble que je ne sois pas la seule dans ce cas. Il me semble que les crédits du programme des investissements d'avenir ne sont pas censés apparaître dans le PLF. Pourquoi sont-ils donc comptabilisés dans les crédits de la mission ?
S’agissant de la méthode de sélection des projets, pourriez-vous nous en dire plus sur les critères retenus, la constitution des jurys et le suivi des actions financées ?
Enfin, ce programme sera-t-il pérennisé ou s’agit-t-il d’une seule vague de projets financés ? Cette question n’est pas anodine, car la subvention par projet pose de nombreux problèmes au tissu associatif qui préfère les financements pluriannuels et pérennes.
M. Thierry Braillard, pour le groupe RRDP. Pour mener une bonne politique sportive, il faut concilier le soutien à la pratique du sport pour tous, tant au niveau des infrastructures qu’au niveau des associations et de la formation, et le soutien à la compétition et au sport de haut niveau.
Ce projet de budget montre, madame la ministre, que vous souhaitez relever ces deux défis essentiels et indissociables, malgré une contrainte budgétaire sans précédent. Sans conteste, l’esprit y est.
En ce qui concerne les moyens, il faut louer les efforts que vous avez consentis pour régler le problème majeur de la probable faillite du CNDS, grâce à la mise en œuvre d’un plan de redressement qui porte ses fruits. Vous avez fait ce qu’il fallait lors du conseil d’administration de novembre 2012.
La réorientation des missions et des interventions pour lutter contre la fracture spatiale est bienvenue afin que le territoire soit équipé en infrastructures sportives de la façon la plus équitable qui soit.
Les moyens semblent globalement stabilisés.
Concernant le sport pour tous, si j’ai bien lu le rapport, la baisse de 51 % est factice puisqu’il faut tenir compte des subventions qui vont être accordées dans le cadre de la réserve parlementaire. Les parlementaires sont toujours prompts à soutenir les associations sportives de leurs circonscriptions.
Cinq priorités sont affichées, que le groupe RRDP partage. Il s’agit de la réduction des inégalités d’accès aux activités physiques et sportives ; du renforcement de la performance du sport de haut niveau ; de la préservation de l’éthique sportive ; de la promotion du sport comme facteur de santé publique et du développement de l’emploi dans le champ du sport.
Les autorisations d’engagement proposées répondent aux besoins, notamment pour le haut niveau. C’est autant le cas au niveau des structures telles que l’INSEP que des facteurs humains tels que le financement des cotisations retraites, le suivi et l’accompagnement socioprofessionnel des sportifs de haut niveau ou encore les primes pour les médailles qui, je l’espère, seront nombreuses à Sotchi. S’il y a des médailles, nous saurons au moins que les primes auront été prévues et versées !
Permettez-moi de louer votre décision concernant le Stade de France. Cette enceinte ne cesse de nous inquiéter. Quel avenir lui envisagez-vous compte tenu de ce que nous entendons, notamment à propos du rugby ?
S’agissant des moyens du ministère, je partage pleinement l’analyse exhaustive de la rapporteure pour avis, notamment l’absence de services déconcentrés de proximité, qui se fait vraiment sentir, héritage de la fameuse RGPP du gouvernement précédent.
J’ai une légère divergence de vue avec le rapport pour avis, par ailleurs excellent, concernant l’avenir des CREPS. Quelle est votre position sur la possibilité de transférer les CREPS aux régions ?
S’agissant de la jeunesse et de la vie associative, force est de constater le succès du service civique. Ce sont 146 millions d’euros qui lui sont consacrés cette année. Mais nous alimentons les mêmes inquiétudes que le rapporteur pour avis à l’égard d’un dispositif glouton pour les crédits du ministère. Ne risque-t-il pas d’être chronophage à l’avenir ?
Je tiens aussi à faire valoir le succès des contrats d’avenir qui s’adressent aux jeunes de moins de 26 ans et bénéficient aux associations sportives. Je suis toujours surpris de constater qu’à la naissance d’un tel dispositif, l’UMP le critique en dénonçant le peu d’emplois créés, puis lorsque vient le succès, en s’inquiétant de la pérennité des emplois. Sans les emplois d’avenir, que feraient ces jeunes de moins de 26 ans en ce moment même ? Ils chercheraient certainement un emploi. Il faut donc louer les contrats d’avenir et le fait qu’ils aident beaucoup les associations sportives sur le terrain.
Il faut également noter la création du nouveau programme 411 consacré aux projets innovants en faveur de la jeunesse. Comme l’indique la ministre, il est totalement transversal puisqu’il concernera autant la formation et l’orientation des jeunes que la lutte contre le décrochage scolaire. Il proposera aussi, dans le cadre de l’offre périscolaire, du soutien aux activités culturelles et sportives innovantes et de qualité.
En ce qui concerne le tissu associatif et l’éducation populaire, le désengagement de l’État décidé par la droite depuis longtemps, au-delà des années Sarkozy, a établi un transfert de fonds vers les collectivités territoriales qui ont dû prendre le relais de l’État. Cela a conduit, sur la forme, à ne plus recourir à des subventions mais à des appels à projet, ce qui remet parfois en cause, pour ces associations, le projet associatif qui fonde leur existence. Le fait que la subvention soit définie par la loi pour sécuriser les associations est une bonne chose, et les propos de la ministre sont rassurants sur ce point.
L’informatisation et les bases de données sur les associations manquent au niveau des préfectures ; il faudra avancer sur ce point. Mme Pompili évoquait le nombre de bénévoles et d’associations sur son territoire. Pour vous donner l’exemple de la région Rhône-Alpes, lorsque j’y étais chargé de la vie associative on estimait le nombre d’associations entre 400 000 et 1 million. Ce n’est pas sérieux. Il faudra donc disposer un jour d’un suivi de la vie associative afin de distinguer celles qui sont encore en vie et celles qui n’existent plus.
Après avoir soigné quelques blessures, le budget sport et jeunesse a repris un bon rythme qu’il faudra conserver dans la durée, et je compte même sur la ministre pour accélérer.
Mme Marie-George Buffet, pour le groupe GDR. Je souhaite insister sur une idée que j’ai tenté de développer dans mon projet d’avis, celle des publics ciblés dans les appels à projet.
Ces dernières années, faute de moyens, ce ministère s’est vu obligé de mettre en œuvre une démarche volontariste pour entraîner les associations et le mouvement sportif vers les priorités ministérielles, qu’il s’agisse du développement du sport féminin, des quartiers en difficulté ou des jeunes en échec scolaire. Or nous avons atteint les limites de cette stratégie, et il faut revenir à un financement fondé sur les missions premières du ministère : développement du sport pour tous et du sport de haut niveau, vie associative, éducation populaire et jeunesse.
Certes, les associations s’adaptent aux priorités ministérielles et répondent aux appels à projets afin d’obtenir des financements, mais cela se fait au détriment de la véracité de leur réponse ou de leur pratique générale, qu’il s’agisse du développement du club, du nombre de licenciés ou encore de l’encadrement dans les clubs. Je souhaite que la ministre puisse nous exposer ses réflexions sur ce point.
Je tiens par ailleurs à lui soumettre deux questions. S’agissant, en premier lieu, du personnel de la jeunesse et des sports, j’ai bien entendu les éléments de réponse qui ont été apportés. Mais nous avons ressenti lors des auditions, en particulier des comités départementaux olympiques et sportifs, les CDOS, que les associations cherchent une porte d’entrée pour contacter les personnels de la jeunesse et des sports. Comment pourriez-vous contribuer à répondre à ce besoin ?
En second lieu, s’agissant des rythmes scolaires, quels vont être vos moyens pour inciter le monde associatif, sportif, et d’éducation populaire à participer à cette réforme, et comment allez-vous contribuer, grâce à votre expertise du contrôle, à la qualité éducative de cette réforme ?
M. Pierre Léautey. Madame la ministre, merci de votre présentation détaillée des objectifs de votre ministère, qui trouvent leur traduction dans ce projet de loi de finances.
S’agissant de la grande priorité donnée à la jeunesse par le Président de la République et le Gouvernement, je voulais insister sur deux points.
Je constate que cette politique se construit et devient plus visible grâce à votre action, et nous pouvons être satisfaits du signal envoyé à la jeunesse. La montée en charge progressive du service civique constitue, à juste titre, un projet majeur pour le Gouvernement en faveur de l’engagement des jeunes. Le projet affiché de compter 31 000 jeunes en mission de service civique en 2014 est ambitieux, et nous ne pouvons que nous en féliciter.
Cependant, le budget du service civique s’élève à 126 millions d’euros sur un budget total de 229,3 millions d’euros pour le programme 163 « Jeunesse et vie associative », soit environ 55 %. La part du service civique dans l’ensemble du budget jeunesse ne risque-t-elle pas de devenir trop importante ? Au-delà de la maîtrise des coûts que vous avez engagée, existe-t-il d’autres pistes pour permettre la cohabitation de cette montée en charge avec le développement des politiques d’éducation populaire ?
Enfin, le comité interministériel pour la jeunesse réuni par le Premier ministre le 21 février 2013 a validé treize chantiers et décliné quarante-sept actions concrètes dont vous avez la responsabilité interministérielle. L’enjeu est fort : il s’agit de dépasser la simple addition des politiques sectorielles pour construire une politique globale et transversale. En réponse à notre rapporteur, vous venez de dresser un bilan positif de ce comité interministériel consacré à la jeunesse en déclinant dix-neuf actions opérationnelles déjà mises en œuvre, et six actions en cours de réalisation. Pour dynamiser cette démarche et l’enrichir, pouvez-vous nous indiquer si un calendrier est d’ores et déjà arrêté afin de réunir à nouveau ce comité ?
M. André Schneider. Madame la ministre, on ne peut que se féliciter des intentions que vous affichez. Tout cela est cohérent. Mais les moyens ne suivent pas, et le compte n’y est pas si l’on souhaite réaliser tout ce que vous proposez.
Permettez au président du mouvement régional de défense du bénévolat en Alsace-Moselle que je suis de vous dire que la vie associative est très inquiète. Nous constatons une relative désaffection pour l’engagement bénévole. Vous proposez quelques solutions, et je ne trouve rien à y redire. Mais la majeure partie de mon temps est consacrée à la défense des associations contre la SACEM, l’Urssaf et bien d’autres choses, alors que l’on devrait aussi faire de l’animation. Quels sont les moyens, à tous les sens du terme, que vous pensez pouvoir mettre en œuvre ?
Concernant l’éducation populaire, les principales lignes de votre budget apportent peu d’éléments. Pourriez-vous préciser vos intentions dans ce domaine ?
Vous parliez, enfin, de potentiel d’emplois. Comment comptez-vous réussir à faire tout cela avec le budget qui vous est alloué sans pour autant créer de nouvelles désillusions ?
Mme Brigitte Bourguignon. Mon propos sera principalement consacré à la mission « Sport ». Dans un cadre budgétaire restreint et avec un héritage lourd à porter pour ce seul ministère, je veux avant tout souligner les véritables choix politiques de votre ministère, réaffirmés dans ce budget.
Une politique publique du sport doit s’attacher à l’accès du plus grand nombre au sport et à l’accompagnement de l’excellence des sportifs de haut niveau. Ce sont les deux choix opérés dans cette mission budgétaire. Vous êtes passée d’un ministère qui jouait le rôle d’un chroniqueur sportif à celui d’un nouveau régulateur de l’action publique.
Le soutien au sport pour le plus grand nombre passe par plusieurs moyens. C’est avec grand plaisir que je souligne la sanctuarisation des moyens et des recettes du CNDS, qui ne serviront plus à financer l’Euro 2016. C’est l’outil du sport pour le plus grand nombre. Nous partons de loin : de nombreux efforts de rigueur budgétaires restent à accomplir, mais vous êtes sur la bonne voie. Vous avez aussi souligné l’importance du plan piscines, ainsi que du soutien à l’emploi associatif – n’oublions pas que le sport est le premier créateur d’emplois – qui passe notamment par les contrats d’avenir, les contrats aidés pour le CNDS ou le FONJEP.
S’agissant du renforcement de la politique autour des sportifs de haut niveau, je note les travaux réalisés sur l’INSEP, outil par excellence du sport de haut niveau, et la prise en compte des périodes qui précèdent et qui suivent le haut niveau. Il en va ainsi de la cellule de reconversion ou du régime des retraites pour les sportifs de haut niveau, qui n’était pas financé. Vous avez également pensé aux primes des médaillés pour les jeux olympiques d’hiver qui se tiendront à Sotchi, alors que cela n’avait pas été fait pour les jeux olympiques de Londres.
Je suis choquée que certains au sein de l’opposition s’expriment tel qu’ils le font sur la taxation du football à 75 %. Cela ne relève pas de ce budget, mais des recettes du PLFSS. Dans un contexte budgétaire restreint qui impose des efforts à chacun, je trouve choquant que l’on défende cette position. Le prélèvement exceptionnel de 75 % sur la part des salaires supérieure à 1 million d’euros est une mesure d’urgence, mais aussi de justice. Il n’y a pas de raisons que les clubs les plus riches, capables de dépenser des millions d’euros pour s’offrir les meilleurs joueurs, ne participent pas à l’effort de redressement.
Enfin, je suis effarée des conclusions de nos collègues de l’opposition. Ils nous accusent toujours de faire progresser les dépenses publiques mais n’acceptent aucune restriction budgétaire. C’est de bonne guerre, mais peu crédible.
M. Michel Heinrich. Je souhaite évoquer à mon tour les mises aux normes des installations imposées par les fédérations. Elles pèsent lourd sur le budget des collectivités qui doivent composer sur le terrain avec des clubs sportifs placés entre le marteau et l’enclume, car c’est le club qui est pénalisé sportivement ou financièrement par sa fédération en cas de non-respect des règlements fédéraux liés aux infrastructures.
Si les collectivités sont très attachées au développement de la pratique sportive, leur situation financière, affectée par les baisses de dotation, ne leur permet plus de faire face aux demandes d’aménagement imposées bien trop fréquemment par les fédérations.
En effet, depuis une vingtaine d’années, les fédérations se dotent de règlements qu’elles modifient très régulièrement : surface de terrain, niveau d’éclairage, taille des tribunes ou des vestiaires, tracés au sol, et je vous épargne la suite. Ce sont autant de normes édictées par les fédérations qui s’imposent, in fine, aux collectivités propriétaires des installations.
Ces réglementations peuvent également être imposées par la télévision, titulaire de droits de retransmission qui constituent une source de revenus pour les fédérations dont bénéficient rarement les clubs non-professionnels.
L’organisation de certains championnats est également aberrante, obligeant les équipes d’amateurs à des déplacements lointains pesant sur leurs finances. Par exemple, l’organisation du championnat de National 2 de volley-ball est un monument d’aberration, qui plus est révélé aux clubs quelques semaines seulement avant le début du championnat.
Afin de limiter l’impact de ces normes sur les finances locales, une commission a été créée en 2010, la commission d’examen des règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs. Mais force est de constater que cela n’a pas calmé l’inflation normative. Ne serait-il pas nécessaire, afin de responsabiliser les fédérations, de leur imposer une participation financière à la mise en place des normes qu’elles imposent ?
Mme Colette Langlade. Madame la ministre, je tiens tout d’abord à saluer votre parcours sportif, et votre soutien pour tous nos bénévoles. Trois points principaux méritent d’être salués : le soutien renforcé de l’État à l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance ; la consolidation des centres de ressources d’expertise et de performance sportive, les CREPS, qui assurent un véritable maillage et permettent de goûter au sport de haut niveau en région ; et le sort qui a été réservé au Centre national pour le développement du sport qui, grâce à la taxe qui porte le nom de la rapporteure, permet de financer le sport pour tous et le développement d’infrastructures sportives sur nos territoires.
Madame la ministre, j’ai également entendu votre discours toujours sportif et positif pour l’emploi, la croissance et la jeunesse. Vous avez choisi de maintenir cette politique fiscale favorable à l’emploi associatif, et surtout de lancer des appels à projets.
Ma question porte sur le premier appel à projet en 2014. Il vise à financer les projets innovants à grande échelle et comporte deux objectifs principaux : l’émergence de politiques de jeunesse sur un territoire, et surtout l’innovation. Pouvez-vous nous en dire davantage ?
M. Guillaume Chevrollier. Le succès du service civique cache un certain détournement de sa fonction. Le statut de volontaire en service civique, créé par la loi du 10 mars 2010 pour favoriser l’engagement des jeunes dans des tâches d’intérêt général, est un bon outil permettant d’encourager la participation citoyenne et l’émancipation des jeunes. Cependant, ces contrats sont souvent acceptés par des jeunes diplômés qui ne trouvent pas d’emploi. Ainsi, près de 20 % des volontaires ont un diplôme de licence ou de doctorat : il s’agit donc pour beaucoup d’un choix forcé, effectué par manque d’opportunité professionnelle – un peu comme pour les emplois d’avenir, d’ailleurs. Le service civique permet donc aux structures d’accueil de recruter une main-d’œuvre temporaire qualifiée, très bon marché, au lieu de recourir à des emplois salariés dans les conditions du droit commun.
Madame la ministre, que fera le Gouvernement pour éviter ces dérives, alors que les moyens financiers mobilisés pour le service civique augmentent au détriment des subventions aux associations, qui jouent pourtant un rôle essentiel dans notre pays, notamment dans les territoires ruraux ?
M. Marc Goua. Je salue les efforts de bonne gestion et les orientations prises avec ce projet de budget. J’appuie la demande de Régis Juanico relative au maintien du prélèvement exceptionnel de 0,30 % sur les jeux après 2015. J’irai même un peu plus loin : lors de la dernière législature, j’avais proposé d’augmenter les taxes sur les jeux. Cette mesure me paraît morale car elle permettrait d’abonder les fonds du CNDS, qui en a fort besoin.
Madame la ministre, vous avez partiellement répondu à la question sur la concentration des interventions, en 2014, sur les mesures incitant à la pratique du sport par le plus grand nombre en privilégiant les territoires carencés et les publics les plus éloignés. Si j’ai bien compris, vous avez expliqué que ces interventions étaient confiées à l’ANRU : cette décision me paraît positive, mais j’aimerais en connaître les critères.
Par ailleurs, les clubs de base sont complètement écrasés par les dépenses. On constate une augmentation continue du coût des licences, bien supérieure à l’inflation, que les clubs ne peuvent répercuter sur leurs adhérents. En outre, dans un certain nombre de fédérations, les clubs subissent des avalanches d’amendes. Il ne faudrait pas que l’augmentation de la participation financière des clubs au budget des fédérations serve à boire du Romanée-Conti en Corée du sud ! Au contraire, il faudrait demander aux fédérations de modérer cette augmentation, faute de quoi nous éloignerons une partie de la jeunesse de la pratique sportive.
M. Jean-Pierre Decool. Madame la ministre, je souhaite vous interpeller sur la mise en place de la réforme des rythmes scolaires prévue par le décret du 24 janvier 2013 relatif à l’organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires, et sur ses conséquences sur la vie associative. En dépit des assouplissements validés par le Gouvernement, des difficultés subsistent à ce jour. Les premiers retours d’expérience mettent en évidence de nombreuses insuffisances dans l’accompagnement. L’impact d’une telle réforme sur les missions dont nous débattons aujourd’hui ne peut être négligé, puisque les associations peuvent être partenaires dans ce dispositif.
Les activités sportives ou culturelles organisées dans le cadre périscolaire doivent être complémentaires des activités associatives et encadrées dans le respect des contraintes réglementaires. Les possibilités de recrutement d’animateurs qualifiés sont un élément essentiel de cette réforme des rythmes scolaires : encore faut-il disposer d’animateurs en nombre suffisant. Madame la ministre, ne serait-il pas opportun de revoir les priorités de votre budget, afin de favoriser en urgence la mise en œuvre de formations au BAFA ou d’envisager, pour des animateurs déjà expérimentés mais non diplômés, une validation des acquis, ou équivalence, dans le cadre de cette réforme ?
Permettez-moi aussi de vous interpeller sur l’avenir des séjours d’accueil collectif de mineurs. Le principe du repos compensateur dérogatoire a été mis en œuvre pour nous conformer au droit européen mais a rendu le contrat d’engagement éducatif difficilement applicable. Les surcoûts engendrés par cette loi renforcent l’exclusion au départ en vacances. Aujourd’hui, 3 millions d’enfants ne partent pas en vacances ; pour demain, de nombreux séjours courts ont déjà été annulés. Ces séjours correspondent pourtant au premier voire au seul départ en vacances pour ces enfants. Les associations nous alertent quant à l’urgence de préserver le modèle des séjours collectifs basés sur la mixité sociale et, plus largement, à la nécessité de protéger les valeurs portées par les structures non lucratives qui les organisent. Madame la ministre, avez-vous l’intention de créer rapidement un statut de volontaire de l’animation compatible avec le droit européen ?
M. William Dumas. Le Président de la République a fait de la jeunesse sa priorité : c’est un bel objectif que nous partageons et que vous mettez en œuvre, madame la ministre. Je tiens à vous féliciter car le budget de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative se caractérise par des points forts : l’emploi et la mobilité des jeunes, l’engagement des jeunes dans le cadre du service civique, le soutien au secteur associatif et à l’éducation populaire, et la nouvelle stratégie du fonds d’expérimentation pour la jeunesse dont la dotation connaît une augmentation exceptionnelle de 100 millions d’euros issus du programme d’investissement en faveur de la jeunesse et de l’emploi. Quelle belle preuve d’investissement de l’État pour encourager les acteurs locaux à inventer de nouvelles réponses pour nos jeunes !
Je me réjouis aussi de l’attention que vous continuez à porter au monde associatif, secteur essentiel de notre politique de la jeunesse. Nos 1300000 associations représentent un flux extraordinaire d’emplois : elles comptent 2 millions de salariés à temps plein ou partiel, sans oublier les 16 millions de bénévoles qui apportent leurs compétences. Préserver pour la deuxième année consécutive le soutien direct à l’emploi, construire une politique fiscale favorable à l’emploi associatif grâce à l’abattement de la taxe sur les salaires et au crédit d’impôt compétitivité emploi : voilà autant de preuves indéniables du soutien du Gouvernement au monde associatif.
Je me réjouis de la stabilité des crédits du budget du sport en 2014 : elle permettra une meilleure réalisation des priorités que vous avez fixées – je pense notamment à l’accès au sport pour tous, à l’utilisation du sport comme outil de santé publique, à l’accompagnement individualisé des sportifs de haut niveau et à l’attention accrue portée à la lutte contre le dopage.
Madame la ministre, en cette période de maîtrise des dépenses publiques, vous proposez un budget équilibré, qui prend en compte la priorité accordée à la jeunesse et le soutien aux associations pour favoriser l’emploi. Je vous en félicite.
Pour conclure, je souhaite vous poser deux questions. La première concerne les rythmes scolaires : quelle sera l’implication de votre ministère dans cette réforme ? La seconde concerne les bénévoles qui interviennent dans nos associations, et surtout dans nos clubs sportifs, en accompagnant nos jeunes tous les week-ends : ne serait-il pas intéressant de réfléchir à la mise en place d’une assurance spécifique à ces bénévoles ?
M. Hervé Féron. Grâce à une quasi-stabilité des crédits du programme 163 et à l’ouverture d’un nouveau programme doté de 100 millions d’euros, la priorité donnée à la jeunesse ne restera pas une promesse vaine à l’heure où les jeunes expriment des doutes quant à leur avenir.
S’agissant du service civique, les partenariats avec les entreprises privées ou publiques seront-ils renforcés ? Cela permettrait d’une part d’améliorer l’accès à une qualification diplômante, et d’autre part de faciliter l’accès à l’emploi. Quels types d’emplois seront privilégiés ? L’offre sera-t-elle suffisamment diversifiée pour s’adresser à tous les publics ?
Notre rapporteure pour avis a souligné le renforcement prioritaire des crédits relatifs au sport de haut niveau. Quelles seront les incidences de ce renforcement sur le sport de masse et sur l’inégalité d’accès à la pratique sportive, en matière d’équipements sportifs, de diversité des sports proposés et d’accès aux clubs ? Je pense aussi au sport en milieu rural et aux difficultés que connaît actuellement la fédération des foyers ruraux.
La préservation de l’essentiel des crédits en faveur de l’éducation populaire constitue également un motif de satisfaction. Je vous ai récemment interpellée à ce sujet, madame la ministre : vous m’avez affirmé votre volonté de préserver ce secteur qui participe, à travers son réseau local fortement développé, à l’épanouissement individuel hors des lieux traditionnels d’éducation. Le projet de budget pour 2014 semble conforme aux engagements du Gouvernement sur ce point.
J’émets cependant une réserve sur la question des centres de ressources, d’expertise et de performance sportives, les CREPS. Le rapport évoque une modification de leurs missions à compter de 2015. Un tiers d’entre eux ont été supprimés sous la précédente législature afin de réaliser de faibles économies ; leur rôle en matière d’éducation populaire a été peu à peu amoindri. En 2010, le rapport du sénateur Jean-Jacques Lozach avait mis en évidence l’absence de réformes de fond et la volonté de l’État de transférer cette charge financière aux collectivités locales sans compensation. Dans le cadre du projet de loi portant acte III de la décentralisation, les personnels ont exprimé leurs inquiétudes quant au risque de compétition et d’inégalité d’accès de tous les publics suivant les territoires. Ces professionnels craignent qu’au travers de ces réformes successives et de leurs conséquences, les CREPS ne soient progressivement délaissés. Madame la ministre, disposez-vous d’éléments permettant de répondre à ces appréhensions légitimes ?
M. le président Patrick Bloche. Avant de donner la parole à Mme la ministre pour répondre aux différents orateurs, je veux faire référence aux travaux les plus récents de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Nous avons auditionné M. Denis Masseglia, président du comité national olympique et sportif français, ainsi que MM. Jean Gachassin, président de la fédération française de tennis, et Gilbert Ysern, directeur général de la fédération, mais c’est moins sur la première audition que je voudrais vous interroger – encore qu’il y aurait certainement des choses à dire – que sur la seconde.
Il existe aujourd’hui un risque réel que le tournoi de Roland-Garros ne soit plus diffusé sur les chaînes de l’audiovisuel public, puisque les trois lots du marché lancé par la fédération n’ont pas encore trouvé preneur. Cette question n’a pas de rapport direct avec les crédits du ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, mais elle concerne le budget de l’État. Nos concitoyens, qui contribuent au financement de France Télévisions via l’impôt – puisque l’entreprise publique bénéficie d’une dotation de l’État – et, surtout, via la redevance audiovisuelle, souhaiteraient peut-être profiter de la diffusion d’un grand tournoi comme Roland-Garros sur les chaînes de l’audiovisuel public. Cette question est d’autant plus importante que les grands opérateurs privés historiques n’ont pas voulu concurrencer France Télévisions ou, tout du moins, n’ont pas encore fait part de leur intérêt pour le moment.
Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative. Messieurs les présidents, mesdames et messieurs, j’ai entendu de nombreuses comparaisons de chiffres. Or il faut parler à périmètre constant : à cet égard, le budget des sports a diminué de 12 % entre 2010 et 2012, tandis que la baisse l’an dernier n’a été que de 6 %.
Non, monsieur Huet, les crédits consacrés au sport pour tous n’ont pas été divisés par deux. En réalité, à périmètre comparable, si ce programme doit prendre en compte le fonds de concours du CNDS évidemment, la baisse apparente de 7,6 millions d’euros est liée à deux facteurs. D’une part, la réserve parlementaire qui fausse la comparaison à hauteur de 6,7 millions d’euros ; d’autre part, les crédits exceptionnels consacrés aux jeux de la francophonie en 2013 n’ont pas été reconduits. On ne peut donc absolument pas parler d’une diminution des moyens consacrés au sport pour tous, d’autant que l’enveloppe la plus importante concerne le CNDS, l’un des rares opérateurs qui ne subit aucune diminution des taxes affectées. Pour effectuer des comparaisons, il convient de prendre en compte à la fois l’action n° 1 du programme « Sport », le fonds de concours du CNDS et les crédits de soutien au sport pour tous, y compris la rémunération des personnels – les crédits relatifs aux conseillers techniques et sportifs sont entièrement sanctuarisés dans ce budget.
S’agissant des fédérations, elles subissent effectivement une baisse de crédits de 2 %, soit 2 millions d’euros, dans le projet de loi de finances. En réalité, la baisse se limite en gestion à 1 % par rapport à l’exécution 2013, compte tenu du gel appliqué aux fédérations comme à l’ensemble des programmes. Comme en 2013, cette baisse de crédits sera appliquée de façon différenciée selon les fédérations, puisque certaines bénéficient de ressources extérieures potentiellement supérieures aux autres. Ce choix a d’ailleurs été partagé par les fédérations les plus importantes. Ainsi, l’an dernier, les fédérations sportives ont subi une baisse de la participation de l’État de 6 % en moyenne, mais la Fédération française de football, par exemple, a connu une baisse de 38 %. De ce fait, nous avons pu sanctuariser le budget d’autres fédérations qui dépendent beaucoup plus de l’argent public, à l’instar des fédérations des sports d’hiver pour la préparation des jeux d’hiver. Ce travail, qui me semble pertinent, est donc effectué de concert avec le mouvement sportif.
Le développement de la vie associative ne subit aucune diminution de moyens. La montée en puissance du service civique ne se fait pas en effet au détriment des moyens consacrés à la vie associative : les 11 millions d’euros du fonds de soutien aux bénévoles sont intégralement maintenus, de même que le million d’euros consacré aux centres de ressources et d’information des bénévoles, ou CRIB, implantés sur l’ensemble de notre territoire et que les 700 000 euros d’autres subventions nationales. Les moyens du FONJEP, qui soutient notre vie associative par l’utilisation d’emplois qualifiés, sont eux aussi entièrement maintenus. Quant aux dépenses fiscales, importantes en ce domaine, elles ne connaissent pas de changement. Il faut au contraire mentionner les 314 millions d’euros du « CICE associations », du fait de l’augmentation du plafond de la taxe sur les salaires, qui bénéficient très largement à l’ensemble des acteurs de la vie associative.
Dans le cadre du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, un travail important a été mené pour sécuriser, au regard du droit de la commande publique et du droit européen, le recours des collectivités locales à la subvention et à la convention pluriannuelle. De 2005 à 2011, les marchés publics relatifs au secteur associatif ont augmenté de plus de dix points alors que les subventions régressaient de huit points : on a même parfois observé une concurrence entre les secteurs associatifs et les réseaux d’éducation populaire pour répondre à des marchés publics. C’est pourquoi nous souhaitons sécuriser le recours des collectivités locales à la subvention et à la convention pluriannuelle.
Il est important d’analyser le travail mené par l’IFOP pour l’association France Bénévolat qui a publié, il y a quelques semaines, des statistiques relatives au bénévolat en France. Le bénévolat progresse, particulièrement chez les jeunes, et a évolué : les bénévoles souhaitent davantage accomplir un projet personnel qu’un projet d’utilité sociale.
Pour les actifs, un travail est engagé avec le Haut conseil à la vie associative et les partenaires sociaux afin de leur dégager du temps pour qu’ils puissent s’engager dans la vie bénévole et d’envisager d’élargir le champ du congé de représentation. Nous y travaillons aussi avec les partenaires sociaux.
Hors réserve parlementaire, les crédits « Jeunesse, éducation populaire », action n° 2 du programme, régressent de 3%. Il s’agit d’une économie sur les crédits déconcentrés, en raison d’une importante mobilisation des crédits d’accompagnement de la réforme des rythmes éducatifs. Cette mobilisation de crédits de droit commun de la CNAF, à hauteur de 250 millions d’euros par an, permet d’en finir avec des sommes jusqu’à présent faibles, ciblées sur le financement de ces activités périscolaires. C’est la première fois aussi que l’État mobilise des crédits (le fonds d’amorçage) aussi significatifs pour la mise en place de projets éducatifs de territoire, en particulier dans le cadre des trois heures libérées par la réforme des rythmes scolaires. Les personnels jeunesse et sport sont à cet égard très mobilisés. C’est leur métier, leur savoir-faire d’accompagner, en lien avec la Caisse nationale d’allocations familiales, les collectivités sur les plans humain et financier. Les 250 millions d’euros de la CNAF prévus doivent donc permettre de contribuer à des projets éducatifs de territoire de qualité. J’ai moi-même accepté de diminuer les taux d’encadrement pour faciliter la construction de tels projets éducatifs. Il ne faut pas en effet que les trois heures libérées consistent à faire de la garderie.. Les 3 millions d’euros qui concernaient les politiques éducatives locales accompagnées par les directions déconcentrées sont largement compensés par l’ensemble des moyens ainsi mis à disposition.
Le service civique représente 149 millions d’euros – 146 millions de crédits budgétaires et 3 millions du fonds d’expérimentation pour la jeunesse, le FEJ. Une réforme des cotisations sociales des volontaires permettra de réduire de 18% le coût mensuel d’une mission, sans aucune perte de droits des volontaires. Il s’est produit un certain nombre de bugs à la fin de l’exercice pour ce qui concerne les agréments. Le pilotage de ces derniers a en effet conduit à ce que l’ensemble des recrutements en service civique soit concentré sur la fin de l’année. Dès lors, le pilotage ne permettait pas de prendre en compte l’ensemble des jeunes concernés, avec pour conséquence un embouteillage en fin d’année. Avec l’Agence du service civique, nous avons travaillé sur un « stock » de jeunes et nous devrions pouvoir parvenir à 37 000 services civiques sur l’année avec le souci, exprimé par M. Chevrollier, de voir évoluer ce public. La part des demandeurs d’emploi est ainsi passée de 44% en 2010 à 56% en 2013. Grâce à leur expérience civique, plus de jeunes vont pouvoir bénéficier d’une réorientation de leur parcours professionnel – il s’agissait pour moi d’une priorité, que j’ai fait valoir auprès de l’agence. Même s’il ne s’agit pas d’un emploi mais d’un engagement volontaire, celui-ci conduira un certain nombre de jeunes, qui ont besoin d’être réorientés, à s’engager. La part des non diplômés, ou infra-bac, est, elle, passée de 26% à 27,5% : c’est une petite progression et il faudra aller plus loin. En 2014, 5 000 services civiques seront consacrés aux décrocheurs scolaires et 1 000 services civiques au profit de personnes en situation de handicap.
S’agissant du Stade de France, les négociations ont été longues, parfois difficiles, tendues. Depuis son origine, en 1995, le contrat de concession était très fragile d’un point de vue juridique. En 1996, le tribunal administratif l’avait d’ailleurs annulé, ce qui a nécessité de passer par une loi pour le valider. Le Conseil constitutionnel, saisi par une QPC, ayant invalidé certaines clauses, il a fallu revenir sur les irrégularités du contrat. Ne l’oublions pas, l’État a non seulement accordé une subvention initiale de 191 millions d’euros au moment de l’investissement, mais a alors également assuré un chiffre d’affaires, garanti des matchs réservés pour le football et le rugby et accordé une indemnité pour absence de club résident. Au total, cela a coûté 114 millions d’euros au budget du sport depuis le début de la concession. En 2013, j’ai pris l’engagement de travailler à la sortie de l’indemnité pour absence de club résident. Nous y sommes parvenus avec un avenant qui purge le contrat des clauses illégales, met fin à l’indemnité jusqu’en 2017 ou jusqu’à ce que l’ensemble des fédérations soient hébergées au sein du Stade de France et qui sécurise la tenue des matchs réservés. Cette disposition permet d’économiser au minimum 64 millions d’euros.
À Thierry Braillard, je dirai qu’il est légitime que la Fédération française de rugby dont le modèle est avant tout assis sur les recettes au guichet, contrairement à la Fédération française de football laquelle s’appuie davantage sur les droits de télévision, s’interroge sur le modèle le plus pertinent de son économie. À la fin de l’année 2013, elle décidera si son modèle financier est viable. En tout état de cause, la priorité de l’État est de préserver l’équilibre global des grands équipements sportifs, qui ne peuvent être multipliés à l’infini. Le stade de la Fédération française de rugby doit donc trouver son modèle économique dans la conjoncture actuelle qui n’est pas facile. Dans le cadre d’un débat public, l’État exprimera sa position, laquelle ne pourra être qu’interministérielle au regard de l’ensemble des enjeux.
S’agissant de la commission d’examen des règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs, la CERFRES, la loi du 17 octobre 2013 – dite Gourault-Sueur suite au dépôt de leur proposition de loi – consacrée à la simplification des normes et créant le Conseil national d’évaluation des normes vient d’être promulguée. Nous avons, je crois, trouvé le bon équilibre : donner la présidence de la CERFRES aux élus, et faire en sorte que ces derniers puissent saisir la commission consultative d’évaluation des normes – CCEN – en appel. Le fait que des membres de la CCEN siègent au sein de la CERFRES a pour conséquence que les payeurs décideront en matière de normes des fédérations sportives. Ainsi, les élus locaux disposeront enfin d’un cadre d’expression, en particulier s’agissant des calendriers compte tenu de délais parfois très courts avec leur conséquence en matière d’aménagement.
Pour ce qui concerne les projets innovants en faveur de la jeunesse, j’ai déjà fait mention du nouveau programme d’investissements d’avenir – PIA : les 100 millions d’euros versés à l’ANRU en 2014 ne seront pas seulement consacrés à des projets relatifs à la politique de la ville. Ils seront consommés sous forme d’appels à projets de 2014 à 2017. Le commissariat général à l’investissement assure la cohérence méthodologique d’ensemble de tous les PIA – par exemple celui qui concerne les internats de la réussite – ainsi que l’évaluation des procédures de sélection. Quant au ministère de la jeunesse, il coordonnera les différents ministères impliqués afin d’assurer la cohérence des projets mais aussi des orientations portées dans le cadre du CIJ. Il devra également veiller à la qualité technique des projets, assurer le suivi des différentes étapes de réalisation et favoriser l’émergence de politiques pour la jeunesse intégrées et globales à l’échelle des territoires. Il s’agit d’apporter une réponse aux priorités d’information et d’orientation, à l’employabilité, à l’émergence d’une culture d’entreprenariat ainsi qu’à la lutte contre le décrochage scolaire et universitaire. En matière de financement, sont concernées les collectivités et les régions – principales cibles de ces projets globaux –, des réseaux associatifs, des groupements de plusieurs acteurs. Il n’y a pas un seul modèle. La politique en faveur de la jeunesse dans les territoires est intégrée et innovante. À cet égard, les technologies innovantes devront très largement faire partie des critères de sélection. Quels sont les objectifs ? Produire un effet de levier.
S’agissant de la taille des projets et du nombre de jeunes impliqués, il n’est pas question de prendre en compte des microprojets. Il ne s’agit pas non plus de projets d’expérimentation. Nous insistons vraiment sur le caractère innovant du partenariat proposé, et nous nous inscrivons dans une logique d’investissement pour l’avenir. Il ne s’agit pas de se substituer à des financements de droit commun. Enfin, il faut aider à la rationalisation des dispositifs existants. Avec les comités d’animation régionaux, les services de l’État et leurs partenaires, on peut imaginer une offre de services pour l’autonomie des jeunes, qui regrouperait des logements relais, des centres de santé, des missions locales et d’information jeunesse, accès aux droits, coopératives de services ou clubs de jeunes entrepreneurs.
La lutte contre le dopage est une de mes priorités – je siège au comité exécutif de L’Agence mondiale de lutte antidopage. Dans le contexte que nous connaissons, les moyens sont maintenus : le fonds de roulement de l’Agence française de lutte contre le dopage – AFLD – reste très confortable avec 3,9 millions d’euros, soit plus de cinq mois de fonctionnement. Du reste, le fonds de roulement a encore augmenté fin 2012. Il n’est donc pas nécessaire de rajouter des moyens. En revanche, sur la question de l’affectation d’une partie de la taxe Buffet, il faut prendre en compte son rendement qui est aléatoire aujourd’hui. Mais qu’il s’agisse de taxes affectées ou de subventions, c’est toujours de la dépense publique. Si, à missions constantes, l’AFLD n’a pas besoin de ressources supplémentaires, il faudra tirer les enseignements du rapport sénatorial et de la révision du code mondial antidopage. Entre le 12 et le 15 novembre à Johannesburg, nous voterons, dans le cadre de la conférence mondiale, le nouveau code mondial antidopage, qui devra ensuite être inscrit dans la loi. Il nous faudra donc être attentifs aux conséquences de ce nouveau code ainsi qu’à la mise en place du passeport biologique, qui doit faire l’objet de deux décrets. Les conclusions de la conférence mondiale contribueront peut-être à faire évoluer le fonctionnement de l’Agence française de lutte contre le dopage et à ajuster ses moyens. Mais il ne s’agit pas d’une urgence pour le moment.
Je ne reviens pas sur la situation du Centre national du développement du sport. La première étape a été le redressement des comptes, voté à l’unanimité moins une abstention. Tout le monde était conscient de la situation dans laquelle se trouvait l’établissement public en novembre 2012. Des efforts ont d’emblée porté sur la part territoriale, mais surtout sur la part nationale, sachant que la capacité d’engagements des investissements est réduite sur l’ensemble du plan de redressement. Il est indispensable d’arrêter collectivement les priorités sur lesquelles nous sommes le plus lisibles. Le chantier de la réforme des critères a été engagé, il sera arrêté définitivement par le conseil d’administration en novembre prochain.
S’agissant de cet établissement public, le travail a été mené par les associations d’élus, l’établissement public et le mouvement sportif. Il leur revient d’arrêter définitivement les critères sur lesquels ils s’appuieront pour assurer l’avenir du CNDS. Quelles sont les questions qui ont été traitées ? Le rééquilibrage entre le fonctionnement et l’investissement, qui peut s’étaler sur plusieurs exercices ; le mode de répartition entre les régions, en inversant la logique actuelle qui consiste à donner plus aux régions où le sport est déjà le plus développé ; l’aide à l’emploi, priorité que j’ai souhaité voir très clairement afficher ; la part territoriale d’équipement, le souhait étant qu’elle soit liée, dans chaque territoire, à une réflexion sur le schéma régional d’équipement. Les priorités en matière d’équipements sont en effet très différentes selon les régions, et le travail des élus locaux doit être pris en compte. C’est pourquoi j’ai souhaité, dans le cadre des commissions territoriales, que leur voix ne soit pas uniquement consultative. Il sera procédé à la finalisation des critères lors du conseil d’administration du 19 novembre.
Au regard de l’état de notre patrimoine sur le plan national, il m’a semblé pour le moins inopportun de ne pas exclure la rénovation des équipements sportifs de nos critères. Il faudra en particulier mobiliser le CNDS sur un plan « piscine » à la fois en investissements et en fonctionnement, sachant qu’un travail interministériel a été engagé avec le ministère de l’éducation nationale en faveur du « savoir nager à la sortie de la sixième ». Nous devons travailler, au sein de l’éducation nationale, avec les clubs sportifs et les collectivités locales, sur la meilleure façon de mettre à disposition des équipements pour améliorer cette triste statistique, à savoir qu’un enfant sur 4 sortant de sixième aujourd’hui ne sait pas nager.
Je reviens sur le bénévolat. La question du statut du bénévole n’a pas été vraiment évoquée car c’est certainement une fausse bonne idée contrairement à la valorisation des acquis de l’expérience ou à la valorisation comptable du bénévolat dans les documents financiers des associations. C’est le cas aujourd’hui pour le scoutisme, par exemple. Cela n’existe pas partout, et il faut poursuivre dans cette voie de la valorisation, étant entendu que, s'agissant de la prise en compte de leurs frais, les bénévoles peuvent soit en demander le remboursement à l'association, soit y renoncer expressément et bénéficier de la réduction d'impôt relative aux dons : tous les moyens de soutien au bénévolat ont été maintenus. Au même titre que pour les jeunes qui s’engagent dans le service civique, il faut reconnaître et valoriser les compétences qu’ils ont acquises dans le cadre du bénévolat. Avec Geneviève Fioraso, nous avons engagé un travail en faveur de la valorisation de leur parcours d’insertion professionnelle.
La mobilisation des services de l’État sur les rythmes éducatifs vise à soutenir les collectivités. Il leur revient de construire des projets éducatifs de qualité avec les moyens financiers qui ont été dégagés. Elles sont au rendez-vous et prêtes à s’engager auprès de ceux qui veulent faire de la qualité.
Au-delà de la question de la meilleure répartition du temps scolaire à l’école primaire, il y a la volonté de faire découvrir de nouvelles activités périscolaires aux enfants qui, le mercredi matin, n’avaient pas accès à une ouverture culturelle ou sportive.
En outre, cela permet de soutenir l’emploi. Les emplois d’avenir se développent dans notre secteur car nos services – les CREPS notamment – sont au rendez-vous de l’accompagnement de leur formation, de la préqualification de niveau V ou du BAFA jusqu’au diplôme d’État de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport – DEJEPS. Il y a la possibilité de construire un parcours à travers toute la filière. Les acteurs de la certification de qualification professionnelle « Animateur périscolaire » sont aujourd’hui pleinement mobilisés pour que nous soyons au rendez-vous de la réforme des rythmes scolaires mais aussi de l’emploi des jeunes. En ce domaine, nous pouvons tous être gagnants.
La question de l’INSEP, soulevée par Mme Langlade, a déjà été évoquée.
S’agissant de l’accueil collectif des mineurs au sujet duquel M. Decool a interrogé le Gouvernement, vous savez qu’un gros travail parlementaire a été mené par M. Michel Ménard pour favoriser le développement de ce secteur. Je citerai les chiffres de l’été 2013 pour permettre à tous d’avoir une vision d’ensemble. Le nombre total de séjours a été le même qu’à l’été 2012 : 67 069, pour être précise. Les effectifs de départ des mineurs ont été d’1,7 million, soit une baisse de 0,7 % par rapport à l’an passé. Par ailleurs, on a observé un nombre croissant de séjours courts, de moins de cinq jours, au détriment des séjours de vacances, d’une durée d’au moins cinq jours. À cela s’ajoute une baisse des séjours linguistiques à mettre en parallèle avec la baisse d’activité qu’a connue l’ensemble de l’industrie touristique.
L’enjeu pour nous est de permettre à davantage de jeunes et d’enfants de partir plus longtemps.
C’est ainsi que se pose la question de l’hébergement. Hier en déplacement dans la Vienne, j’ai pu constater en visitant le centre de plein air de Lathus comme certains centres pouvaient susciter de satisfaction. Point n’est forcément besoin de partir très loin pour bénéficier d’un accueil collectif de qualité.
Se pose également la question des transports. J’ai commencé à travailler avec le directeur de la SNCF pour améliorer l’aménagement des trains destinés à l’accueil collectif des mineurs.
Se pose enfin la question de la qualité des propositions éducatives, qu’il faut pouvoir combiner au souci pour le développement durable. Point n’est besoin de multiplier les activités sensationnelles et les visites extraordinaires : il y a aussi des projets de très grande qualité, proches de chez soi, portés par les grands réseaux d’éducation populaire. Nous leur faisons confiance pour les activités au sein des centres de loisirs sans hébergement, pourquoi ne pas leur faire confiance aussi pour les séjours prolongés ?
J’en viens à l’un des derniers sujets évoqués, qui n’est pas des moindres, celui des moyens humains. Mon périmètre regroupe 6 655 équivalents temps plein travaillé dont plus de 60 % dans les services déconcentrés. Nous avons voulu maintenir l’organisation territoriale de l’État et je peux vous assurer, madame la députée, que les priorités du Gouvernement en ce domaine – emploi, accompagnement des activités périscolaires, service civique – donnent un véritable sens à l’action de tous ces agents. La lisibilité de ces missions est parfois insuffisante pour les usagers mais leur force demeure. J’aimerais insister aussi sur le rôle essentiel joué par les conseillers techniques sportifs.
Nous entendons davantage mobiliser nos personnels autour des priorités qui sont les nôtres.
Premièrement, cela implique que nos personnels consacrent moins de temps à l’instruction des dossiers du CNDS. Aujourd’hui, cette tâche est exercée à la fois par les services départementaux, par les services régionaux et par le mouvement sportif avec toute la complexité que cela suppose pour les associations.
Deuxièmement, cette mobilisation implique de simplifier les formations et les certifications auxquelles près de 300 emplois sont consacrés. À cet égard, nous attendons beaucoup de l’évaluation dont elles font l’objet.
Enfin, j’en viens à la question de M. le président de la commission des affaires culturelles concernant le tournoi de Roland-Garros. Cet événement fait partie du patrimoine sportif, c’est un moment privilégié du partenariat des Français avec le sport. J’ai pris clairement position pour que les compétitions puissent, pour l’essentiel, rester en accès gratuit. L’appel d’offres de la Fédération française de tennis a été infructueux et le travail doit donc être poursuivi. Je fais pleinement confiance à la FFT pour aboutir à un résultat. Je ne doute pas que l’accès gratuit restera majoritairement au rendez-vous. C’est le souhait de tous les Français. Cet événement fait partie de notre histoire, il est de nature différente des matchs de football qui se renouvellent chaque week-end et s’inscrivent davantage dans le champ des télévisions payantes.
Mme Pompili a évoqué les droits de l’homme. La lutte contre toutes les discriminations est l’une des priorités portées par mon ministère et par le nouveau Conseil national du sport. Laura Flessel a été la marraine de la candidature française pour l’organisation des Gay Games à Paris en 2018. À travers cette manifestation qui réunira 15 000 participants, nous pourrons faire passer une nouvelle fois le message selon lequel, quelle que soit l’orientation sexuelle et les performances de chacun, il ne doit pas y avoir de discrimination dans le sport.
M. le président Pierre-Alain Muet. Merci, madame la ministre, pour vos réponses très détaillées et très complètes.
La discussion et le vote en séance publique des crédits consacrés à la mission « Sport, jeunesse et vie associative » auront lieu le mercredi 6 novembre 2013.
La réunion de la commission élargie s’achève à douze heures.
Compte rendu de la commission élargie du mardi 22 octobre 2013
(Application de l’article 120 du Règlement)
Action extérieure de l’État
La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures dix, sous la présidence de M. Pierre-Alain Muet, vice-président de la commission des finances, de Mme Élisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères et de Mme Marie-Odile Bouillé, vice-présidente de la commission des affaires culturelles.
M. le président Pierre-Alain Muet. Monsieur le ministre des affaires étrangères, Élisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères, Marie-Odile Bouillé, vice-présidente de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, et moi-même, sommes heureux de vous accueillir.
Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2014 consacrés à la mission « Action extérieure de l’État ». La conférence des présidents du 11 juillet 2013 a décidé que l’ensemble des missions sera, cette année, discuté en commission élargie, procédure destinée à favoriser les échanges entre les ministres et les députés.
Mme la présidente Élisabeth Guigou. Monsieur le ministre, le budget que vous soumettez au Parlement montre bien que l’on peut concilier l’économie des deniers publics et l’efficacité. L’effort de rigueur s’accompagne d’un redéploiement des crédits et de l’affichage d’un certain nombre de priorités : le réseau diplomatique est préservé ; la sécurité des postes est prise en compte ; la réforme des bourses est en bonne voie. En particulier, le réseau poursuit son adaptation en direction des pays émergents, manière primordiale de mettre le Quai d’Orsay au service du redressement économique.
L’une de vos priorités étant la diplomatie économique, le bilan de la nomination des représentants spéciaux et de l’articulation de leur travail avec celui des postes est-il positif ? Pour ce qui des postes, comment les différents services s’approprient-ils cette dimension de la politique étrangère ? Collaborent-ils activement à cet effet ? En Chine, le regroupement sur un seul site des services de l’ambassade a joué un rôle important. Observons-nous le même regroupement ailleurs – en particulier dans les pays émergents ?
Vous m’avez par ailleurs fait parvenir, ainsi qu’à Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles, et aux deux rapporteurs pour avis sur les crédits de la diplomatie culturelle et d’influence, François Loncle et Claudine Schmid, le troisième rapport d’évaluation de l’expérimentation du rattachement à l’Institut français du réseau culturel de la France à l’étranger. Ses conclusions sont très négatives : « L’expérimentation ne revêt pas de caractère concluant ; elle confirme l’existence du risque majeur pour la stabilité de notre réseau culturel et de coopération à l’étranger, en cas de rattachement. Outre ces incertitudes, le rattachement impliquerait un surcoût budgétaire estimé à 52 millions d’euros sur la période 2014-2016. La nature du lien avec notre dispositif culturel à l’étranger traduit aussi, aux yeux des autorités des publics locaux, le rôle que nous entendons assigner à notre diplomatie d’influence. Le rattachement poserait donc la question de l’articulation de notre politique dans ce domaine avec les autres champs de notre action diplomatique, et présenterait le risque de mettre en défaut le positionnement emblématique d’une diplomatie culturelle installée au cœur de notre action internationale. »
Quelles conclusions tirez-vous de ce rapport ?
Mme la présidente Marie-Odile Bouillé. La commission des affaires culturelles et de l’éducation se saisit traditionnellement de votre budget, monsieur le ministre, pour examiner les crédits consacrés à la diplomatie culturelle et d’influence, le programme 185. Les actions de coopération culturelle sont essentielles pour valoriser la culture et la langue française, mais elle constitue aussi un indispensable outil de promotion, voire de défense, de la diversité culturelle. Nous y sommes donc particulièrement attachés.
Pour ce qui est de la politique d’attractivité, le Parlement a dernièrement été saisi du projet de contrat d’objectifs et de moyens de Campus France. La commission des affaires culturelles devant se prononcer dans quelques semaines sur le sujet, je souhaite connaître votre sentiment sur l’action menée par cet organisme depuis sa création par la loi du 27 juillet 2010.
La commission des affaires culturelles a confié à Mme Claudine Schmid la rédaction d’un rapport pour avis sur la diplomatie culturelle et d’influence. Au-delà de l’examen des crédits de ce programme, elle a choisi de s’intéresser tout particulièrement aux résidences de créateurs qui constituent un moyen peu connu de soutien aux échanges artistiques et au dialogue des cultures. Je tiens à la remercier du travail qu’elle a accompli.
La commission des affaires culturelles examinera l’avis de sa rapporteure et votera les crédits en question non pas à l’issue de la présente commission élargie, mais lors de sa réunion du mardi 29 octobre.
M. Jacques Myard. Je tiens à protester contre l’organisation de cette réunion : il n’est pas admissible que nous n’ayons pas un vrai débat de politique étrangère en séance plénière. C’est abaisser la voix de la France et c’est même insulter le ministre des affaires étrangères que de le traiter ainsi. Il s’agit d’un budget régalien qui suppose autre chose qu’une série de questions qui vont être « évacuées » en quelques minutes. La conférence des présidents se trompe. La situation internationale étant ce qu’elle est, nous devons débattre des affaires étrangères, j’y insiste, en séance publique.
M. Pierre-Alain Muet, président. Il y aura bien un débat en séance publique qui ne sera pas très différent de ce qu’il était les années précédentes. A simplement été ajouté un débat en commission élargie qui le précède et permet à tous les députés de s’exprimer.
M. Jacques Myard. L’Assemblée, c’est dans l’hémicycle, pas ici !
M. François-Michel Lambert, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, en un an, vous avez accompli deux réformes d’ampleur, pas entièrement achevées mais largement engagées : celle de l’aide à la scolarité des enfants français vivant à l’étranger et celle de l’Assemblée des Français de l’étranger.
La première correspond au remplacement de la prise en charge (PEC), très onéreuse et inéquitable, par un système de bourses réformé, plus juste et dont le montant a été augmenté – il le sera à nouveau en 2014 et 2015. Malgré l’expression d’inquiétudes lors de la présentation du projet, il semblerait que le basculement d’un système sur l’autre se soit bien passé : les décisions finales d’attribution ne sont plus prises de manière centralisée à Paris, mais ont été déléguées aux commissions locales des bourses.
La réforme de l’Assemblée des Français de l’étranger vise pour sa part à donner une plus grande représentativité à ses membres. Elle a été largement débattue et adoptée par le Parlement il y a quelques mois. L’élection des membres de cette nouvelle AFE est prévue pour le printemps 2014 et je ne doute pas du bon fonctionnement de cette instance rénovée.
À côté de ces deux réformes, vous avez entamé une évolution peut-être moins visible aux yeux du grand public, mais dont certains observateurs ont souligné « l’ampleur inégalée » : vous avez commencé à rééquilibrer les moyens, financiers mais surtout humains, d’un certain nombre de nos postes, visiblement surdotés pour des raisons historiques, en faveur de postes situés dans les pays émergents. Nous déclarions déjà, l’année dernière, que la diplomatie devait s’adapter aux réalités nouvelles du XXIe siècle. Elle a commencé de le faire et j’ai cru comprendre que la démarche serait poursuivie l’an prochain. Peut-être pourrez-vous nous en dire quelques mots.
Vous avez réussi à entamer ce rééquilibrage tout en conservant la quasi-universalité du réseau diplomatique de la France et en menant les travaux de sécurisation nécessaires des postes les plus exposés – l’une des priorités de votre action.
Troisième point, votre administration a réussi à faire face à la demande croissante de visas, de 8 % par an depuis 2009, alors que les moyens des consulats, eux, ont tendance à diminuer. Pour cela, le réseau consulaire a dû innover : l’instruction des demandes de visas est le plus souvent externalisée, parfois en coopération avec nos partenaires de l’espace Schengen.
Les premiers résultats sont encourageants. Ainsi, des agences Schengen ont ouvert leurs portes dans des villes où la France ne dispose pas de consulat, comme à Vladivostok, à Shenyang ou à Izmir. Ce sont autant de touristes potentiels qui peuvent être tentés de venir visiter notre pays, avec les retombées économiques que nous savons.
Toutes ces réformes et actions ont été menées avec des moyens financiers et humains malheureusement en diminution constante.
En 2014, les moyens de la diplomatie française seront réduits de 3 % si l’on prend en considération le ministère des affaires étrangères, ou de 0,8 % si l’on considère le seul périmètre de la mission « Action extérieure de l’État ». Les effectifs de la mission diminueront de près de 200 emplois supplémentaires, à l’exception notable du recrutement de vingt-cinq agents qui seront affectés à la délivrance des visas. Le budget de l’action extérieure de l’État participe donc bien à l’effort de maîtrise de la dépense publique, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.
Néanmoins, des sujets de préoccupation demeurent, sur lesquels je souhaite vous interroger.
Les crédits de fonctionnement des postes sont globalement insuffisants. Ils ont atteint un point d’étiage qui, souvent, ne permet plus l’entretien courant, d’autant que les contrats d’externalisation, qui ont été encouragés, sont imputés sur le fonctionnement. Lorsque des investissements sont réalisés, les contrats d’entretien ne peuvent pas être conclus faute de crédits. Dans tel pays, j’ai rencontré un consul ayant du mal à assurer la révision périodique de son véhicule de fonction, puis un autre ne disposant plus des crédits nécessaires au fonctionnement des portes sécurisées. En matière de fonctionnement, les postes semblent être arrivés au bout des économies réalisables. Que comptez-vous faire ?
Deuxième question : l’entretien du parc immobilier du ministère des affaires étrangères n’est plus assuré de manière satisfaisante dans de nombreux pays, faute de moyens. Dans les cas extrêmes, lorsqu’un bien est trop dégradé, le ministère le vend pour en acquérir ou en louer un autre plus modeste. Quelles instructions donnez-vous à vos services sur ce point ?
Enfin, les agents de droit local (ADL) représentent désormais plus du tiers des emplois de la mission – un peu plus de 5 000 sur un total de 14 500 agents. Chacun s’accorde à reconnaître que le ministère ne pourrait plus fonctionner sans eux. Rémunérés en fonction du marché du travail local, ils coûtent beaucoup moins cher que le personnel expatrié. Mais dans certains pays, le coût de la vie augmente vite et, pour ces personnels, la situation devient parfois difficile. Or les ADL sont qualifiés, polyglottes, et ils comparent avec amertume leurs rémunérations avec celles proposées par les autres ambassades ou par les multinationales. Dans plusieurs postes où je me suis rendu, le thème de leur démotivation n’est plus tabou. Dans tel pays, le SMIC a tant augmenté que les salaires les moins élevés versés aux ADL y sont désormais inférieurs, si bien que certains agents ont dû trouver un second emploi. Envisagez-vous de prendre des mesures pour essayer de maintenir le niveau de vie de ces agents ?
Le rapport de la Cour des comptes sur le réseau consulaire est très positif à l’égard de votre gestion et de celle de nos agents, dont le travail est largement reconnu et que je tiens donc à saluer.
Mme Claudine Schmid, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, sur le programme « Diplomatie culturelle et d’influence ». Monsieur le ministre, je déplore que la diplomatie culturelle et d’influence se développe dans un cadre budgétaire contraint qui se traduit par des économies imposées à l’ensemble des instruments, y compris aux opérateurs. Comment, dans ces conditions, ne pas s’inquiéter pour la poursuite de la politique d’influence de la France et du fait que cette politique, ses ambitions et ses actions sont tributaires de financements extrabudgétaires ?
Le projet annuel de performance pour 2014 indique que la mise en œuvre de la stratégie d’influence privilégiera des moyens d’intervention capables de mobiliser des cofinancements. Or, dans son rapport concernant le réseau culturel de la France à l’étranger, la Cour des comptes souligne que, dans cette activité complexe de recherche de fonds, le ministère, et en particulier la direction générale de la mondialisation (DGM), n’accompagne pas suffisamment les postes. Selon la Cour, « ce sont les ambassadeurs, les conseillers de coopération et d’action culturelle et leurs collaborateurs qui effectuent le travail de lobbying nécessaire. L’impression prévaut d’une organisation fonctionnant de manière artisanale, sans vision ou stratégie globale et qui ne déploie pas des efforts coordonnés en vue de développer les cofinancements de façon systématique et avec des instruments adaptés ». Quel est votre commentaire sur cette appréciation de la Cour des comptes et de quelle manière comptez-vous répondre aux attentes des postes ?
Ma deuxième question concerne l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Le 19 février 2013, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision qu’a prise en 2009 l’AEFE d’instaurer une contribution de 6 %, assise sur les frais de scolarité des établissements en gestion directe et conventionnée, pour compenser partiellement l’intégration dans ses charges de la part patronale de la pension civile des personnels. L’Agence a fait appel du jugement et a également demandé de surseoir à son exécution. Au cas où le jugement du tribunal administratif serait confirmé en appel, quelle somme l’AEFE sera-t-elle appelée à rembourser ? Je n’ai pas trouvé trace d’une provision dans son budget : a-t-elle prévu une réserve de précaution à cet effet ?
Ma troisième question porte également sur l’AEFE dont le budget représente environ 60 % du programme 185. Voudriez-vous nous éclairer sur les propos tenus par Mme Conway en Conseil des ministres le 28 août dernier ? Elle mentionnait, au sujet des offres éducatives, que « des offres supplémentaires seront aussi encouragées pour répondre à une nouvelle demande des familles françaises ou étrangères qui souhaitent scolariser leurs enfants dans les systèmes d’enseignement locaux ». Quelle est votre position sur des écoles privées étrangères qui préparent avec succès les candidats au baccalauréat et qui ont le soutien de nos autorités diplomatiques ? Un label spécifique pourrait-il leur être accordé, qui leur assurerait une reconnaissance pédagogique sans coût pour l’État ?
M. Philippe Baumel, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, sur le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » et sur le programme « Français à l’étranger et affaires consulaires ». L’exercice budgétaire pour 2014 sera difficile pour le ministère des affaires étrangères qui devra participer au désendettement de l’État avec une baisse des crédits de 0,7 % et de ses effectifs de plus de 1 %. Cet effort est d’autant plus difficile que le ministère a constamment contribué, depuis une décennie, aux politiques budgétaires en rendant de nombreux emplois : de 2006 à 2013, près de 1 900 emplois y ont été supprimés, soit une baisse de plus de 12 %.
Dans ce contexte, le présent projet de budget est bon car, tout en prenant sa part de l’effort, il conserve la faculté de financer des priorités, en particulier, comme en 2013, le renforcement de la sécurité de nos ambassades, avec des crédits en hausse de 28 %. Je note également un effort significatif pour les bourses scolaires de nos compatriotes à l’étranger. Pour le reste, notre réseau diplomatique parvient, pour le moment, à se réorganiser sans renoncer à son universalité. Il convient de saluer le caractère novateur des réformes engagées pour y parvenir : expérimentation de postes diplomatiques avec des équipes réduites, mutualisation des moyens des différents services dans les grandes capitales étrangères et regroupement des sites, valise « Itinera » qui permet d’avoir des consulats mobiles, simplification, voire dématérialisation de procédures… Seulement, à force de réduire les effectifs, ces mesures ne risquent-elles pas d’atteindre leurs limites et ne devrons-nous pas, à terme, renoncer à une part de notre réseau ?
Il en est de même pour l’immobilier. Depuis quelques années, les cessions financent non seulement les nouvelles acquisitions, mais aussi les travaux d’entretien, ce qui n’est pas normal. Par ailleurs, le programme de cessions du ministère comprend, certes, de nombreux appartements de fonction et terrains divers, mais aussi des biens de prestige pourvus d’une grande valeur patrimoniale ou symbolique. Sur la liste des biens susceptibles d’être cédés, figure toujours la Maison de France à Berlin. Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ce cas particulier et, plus généralement, comment tracer une frontière nette entre les biens essentiels, incessibles, et les autres ? Car si la notion de domaine public inaliénable ne s’applique pas à ces biens à l’étranger, il est évident qu’il y a aussi à l’étranger des bâtiments qui constituent des symboles forts de la présence française.
En ce qui concerne les bourses, conformément aux engagements pris, le projet de loi de finances prévoit une hausse de 7,7 % des crédits. Le budget pour 2014 sera celui de la pleine application de la réforme mise en œuvre depuis la rentrée de septembre dernier. Cette réforme est juste car elle permettra de mieux prendre en compte la réalité des ressources des familles et les différences de coût de la vie entre les pays ; elle conduit à un dispositif plus progressif et à un léger rééquilibrage entre les zones géographiques. Toutefois, cette réforme répond aussi à une volonté, légitime dans le contexte actuel, de mieux contrôler la dépense. Néanmoins, envisagez-vous des adaptations du dispositif ?
Je terminerai par la politique des visas. Je tiens à saluer le volontarisme du Gouvernement et l’engagement commun de tous les ministères concernés – affaires étrangères, enseignement supérieur et recherche, intérieur – pour un changement de cap dans ce domaine. Nous avons rompu avec le temps de la circulaire Guéant et une politique purement méfiante et restrictive. L’ouverture aux talents étrangers est une nécessité pour l’internationalisation de nos entreprises et de nos universités et, plus généralement, pour le rayonnement de notre pays. Des mesures très intéressantes sont déjà en œuvre comme la délivrance d’un plus grand nombre de visas de circulation permettant des entrées multiples.
Je poserai deux questions sur deux points problématiques. Le premier est celui de l’hétérogénéité des taux de refus de visas. En 2012, moins de 10 % de toutes les demandes de visa adressées à la France ont été refusées, mais ce taux dépasse 20 %, voire 30 à 40 % en Algérie et dans de nombreux pays francophones d’Afrique subsaharienne. Je mesure les risques migratoires, mais nous avons des liens privilégiés avec ces pays où la jeunesse aime la France et veut souvent venir y étudier. Or les refus très fréquents de visa y sont mal vécus. Considérez-vous que cela appelle une analyse particulière des situations, afin de mesurer si ces taux sont réellement inévitables ?
Le second point concerne l’entrée des étudiants étrangers. En quelques années, la France est passée de la troisième à la cinquième position mondiale pour l’accueil d’étudiants étrangers, et de grands pays, comme l’Allemagne ou les États-Unis, se livrent une véritable concurrence pour libéraliser leurs règles d’entrée des étudiants étrangers afin d’attirer les meilleurs. Cette situation doit nous interpeller, car ce ne sont pas des pays que l’on peut considérer comme laxistes en matière d’immigration. Nous allons prochainement examiner le projet de loi sur l’immigration et l’asile : plaiderez-vous pour qu’il comporte des mesures fortes pour faciliter l’entrée des étudiants étrangers ? Ensuite, la procédure de délivrance des visas étudiants est parfois critiquée pour deux raisons : les refus ne sont pas motivés et le rôle de Campus France, point de passage obligé et chargé de donner un avis sur le dossier académique des demandeurs, est contesté. Ne pensez-vous pas que les universités et grandes écoles françaises pourraient avoir une plus grande part, avec la responsabilité qui va avec, dans le recrutement de leurs étudiants étrangers ?
M. François Loncle, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, sur le programme « Diplomatie culturelle et d’influence ». Le contexte de ce budget est triple. Tout d’abord, le déclin des crédits de l’action culturelle extérieure de la France remonte à 1994, à l’exception de deux années alors que Lionel Jospin était Premier ministre. Aux termes du programme triennal d’économies budgétaires, les crédits ont baissé de 7 % en 2013, ils diminueront de 4 % en 2014 et de 4 % également en 2015. Ensuite, nous menons un travail commun avec la Cour des comptes qui a procédé à une évaluation fort intéressante et plutôt positive du réseau culturel de la France à l’étranger, évaluation sur laquelle nous donnerons un avis dans quelques semaines. Enfin, à la suite de la réforme de 2010 expérimentée dans douze pays, il convient de prendre une décision pour savoir si l’on rattache les centres culturels à l’étranger à la maison mère, l’Institut français à Paris.
Le programme 185 a été créé dans l’ambition de regrouper, au sein d’un même programme, les crédits de l’action culturelle extérieure au sens large, inscrits au budget du ministère des affaires étrangères, lequel porte quelque 60 % de ces crédits. Or, même si l’on s’en tient à une définition stricte de l’action culturelle, il demeure difficile de suivre les crédits qui y sont consacrés car certains relèvent du programme 209, « Aide publique au développement ». C’est le cas des actions bilatérales en matière de francophonie, même si je comprends qu’elles s’inscrivent également dans le cadre des objectifs du programme Objectifs du millénaire pour le développement, mais aussi des effectifs du réseau culturel qui continuent à relever d’une logique géographique et non pas thématique. Quelles améliorations vous semble-t-il possible d’apporter pour clarifier cette situation ?
Ensuite, notre dispositif d’action culturelle extérieure au sens large est en restructuration permanente, avec réussite grâce aux personnels à Paris et dans le réseau. Il est donc chaque année difficile de porter une appréciation sur les crédits ouverts lorsque l’on s’interroge sur la manière dont ils seront optimisés – optimisation rendue indispensable par leur diminution continue. Le temps est venu des dernières décisions et de la stabilisation, car la réforme aura été efficace mais aussi déstabilisatrice. L’année 2014 sera donc décisive.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce qui devrait être décidé sur trois chantiers en cours ? Celui, d’abord, concernant l’expérimentation du rattachement au réseau. Comment envisagez-vous le rôle de l’Institut français à Paris comme instrument au service du réseau si les centres ne lui sont pas rattachés ? Le second chantier concerne l’exercice de la cartographie du réseau, appelée à évoluer. Le troisième point touche à la création de conseils d’influence : vous avez lancé cette excellente idée qu’il fallait rechercher des synergies entre les différentes composantes de ceux qui concourent à l’influence de la France, qu’il s’agisse des questions culturelles, des questions scientifiques ou de la diplomatie économique. La vitrine de la France à l’étranger, ce sont bien les entreprises françaises et la culture, les deux n’étant en rien antinomiques.
Une nouvelle mission prioritaire a été confiée à Campus France : créer et animer un outil de suivi des étudiants boursiers. C’est une initiative de bon sens, attendue depuis des années. Comment la développer ? Quel pourrait être le champ d’investigation de ces étudiants passés par notre enseignement ?
Je m’interroge également sur la diminution des crédits alloués tant aux bourses délivrées aux étudiants étrangers qu’à la diplomatie scientifique. Ces crédits sont des outils de notre rayonnement qu’il ne faudrait pas sacrifier.
Ma dernière question concerne France Expertise Internationale (FEI), qui n’est pas un opérateur au sens de la loi organique relative aux lois de finances. Cet établissement public est monté en puissance de façon remarquable et dispose d’une surface que n’ont pas les autres opérateurs, bénéficiant par ailleurs de subventions et d’emplois. Vous avez décidé de lancer une évaluation : je m’associe à cette démarche, espérant qu’elle permettra véritablement de rationaliser notre dispositif d’expertise et d’accroître notre influence. Il est essentiel de disposer d’un établissement public qui remporte des marchés européens et internationaux et donne une visibilité à l’action de la France, si l’on songe notamment au poids de la participation française dans l’aide multilatérale.
La culture et l’économie participent à égalité de la vitrine de la France à l’étranger.
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Je suis évidemment à la disposition des différentes commissions de l’Assemblée nationale pour faire le point tant sur la politique générale de mon ministère que sur des aspects plus techniques.
Madame la présidente de la commission des affaires étrangères, vous avez soulevé des questions relatives notamment au bilan des représentants spéciaux, à la diplomatie économique, au lien entre les ambassades, le Quai d’Orsay et les autres administrations, ou encore à l’Institut français, auquel plusieurs députés se sont également intéressés.
Dès mon arrivée au Quai d’Orsay, j’ai fait de la diplomatie économique une de mes priorités tout en soulignant, comme vous, qu’on ne saurait séparer, dans le rayonnement de la France, la diplomatie économique des dimensions culturelles ou scientifiques, voire sportives de notre action à l’extérieur – je nommerai bientôt un ambassadeur pour le sport, qui est très important pour le rayonnement de la France. Les ambassadeurs sont chargés au premier rang de coordonner les différents aspects de la diplomatie économique, puisqu’ils dirigent l’administration française à l’étranger. D’autres services travaillent également sur le sujet : le ministère des finances ou celui du commerce extérieur. Les lettres de missions que j’envoie aux ambassadeurs comprennent des objectifs en matière de diplomatie économique : ils doivent m’envoyer des rapports réguliers sur l’évolution de la situation, leurs prévisions et les mesures prises. J’ai également créé une direction des entreprises, qui travaille sous l’autorité de la Direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats.
Quant aux représentants spéciaux, qui sont peu nombreux – sept ou huit –, ils suivent avec un intérêt particulier, compte tenu de leur histoire personnelle, les dossiers qui leur sont confiés. J’évoquerai quelques noms : Jean-Pierre Chevènement pour les relations avec la Russie, Jean-Pierre Raffarin pour les relations avec l’Algérie – il avait commencé d’apporter des solutions à certains problèmes sous le gouvernement précédent –, ou encore Louis Schweitzer pour les relations avec le Japon : c’est lui qui a réalisé l’alliance entre Renault et Nissan. Je n’ai qu’à me féliciter de l’action bénévole de ces représentants spéciaux, comme de l’action des ambassadeurs, notamment dans leurs relations avec les entreprises. Les grandes entreprises sont du reste très satisfaites de cette orientation. S’agissant des moyennes entreprises, en revanche, l’effort sera de longue haleine : chacun le sait, le bât blesse par rapport à l’Allemagne. Je peux toutefois d’ores et déjà assurer que la priorité accordée à la diplomatie économique demeurera, quelles que soient les évolutions du Quai d’Orsay.
La coordination entre le ministère des affaires étrangères et les autres ministères est excellente au plan local. Elle est également correcte au plan national : je traite les éventuels problèmes avec les autres membres du Gouvernement. Nous avançons dans la même direction.
S’agissant de l’Institut français, j’ai décidé de conserver les éléments positifs de son expérimentation, en commençant par son nom et les fonctions de coordination que l’Institut a fort bien assurées sous l’autorité de Xavier Darcos. C’est pourquoi je compte étendre certaines fonctions de l’Institut français, notamment en matière d’analyse des publics ou de gestion des équipes culturelles. Toutefois, je ne suis pas favorable à une systématisation de l’expérimentation : je ne l’étendrai donc pas à d’autres postes, et ce pour deux raisons principales. La première a déjà été soulignée par certains d’entre vous : une telle mesure coûterait plus de 50 millions d’euros, qui ne pourraient être pris que sur le budget du ministère, ce qui est inacceptable. La seconde tient au rayonnement même de la France, qui est un tout. Une systématisation du rattachement des offres culturelles à un établissement unique réduirait la richesse de la palette dont les ambassades doivent disposer.
Je tiens toutefois à préciser, madame la présidente, que les conclusions du rapport sur l’Institut français n’ont pas été « très négatives » – même si ces mots ont pu être employés. Si je ne suis pas favorable à une systématisation du rattachement de l’offre culturelle à l’Institut français, en revanche, l’Institut a réalisé du bon travail et je tiens à rendre hommage à ceux qui l’ont conduit.
Madame la vice-présidente de la commission des affaires culturelles, le nouveau contrat d’objectifs et de moyens de Campus France pour 2013-2015 sera signé avant la fin de l’année, après avoir été soumis pour avis aux assemblées. Je tiens à rappeler les objectifs qui ont présidé à la mise en place de Campus France : la promotion de nos établissements d’enseignement supérieur et de recherches, l’amélioration de l’accueil et de l’accompagnement des étudiants et chercheurs étrangers, ainsi que l’amélioration de la gestion administrative et financière des programmes de mobilité et d’attractivité. L’animation d’un réseau d’étudiants et de chercheurs est un élément nouveau que j’ai décidé de mettre en œuvre afin de valoriser la fonction de réseau. En effet, alors que, dans de nombreux pays, il existe des réseaux d’alumni – mot latin repris dans les pays anglo-saxons, et qui signifie « anciens élèves » –, j’ai été choqué, lors d’une rencontre à l’ambassade de France au Viêt-nam avec un Vietnamien, ancien élève de l’École normale supérieure et médaille Fields, qu’on ne puisse pas répondre à son désir de constituer un réseau d’anciens étudiants vietnamiens ayant suivi leurs études en France. Nous n’avons en effet aucun recensement des étudiants étrangers ayant suivi leurs études en France. Aucune trace de leur passage n’existe. C’est la raison pour laquelle, au cours de la Conférence des ambassadeurs, j’ai fixé comme tâche aux ambassadeurs de constituer des réseaux des anciens étudiants étrangers qui ont fréquenté nos écoles ou nos instituts culturels ou ont bénéficié de nos bourses. Campus France, qui doit reconstituer sur vingt ou trente ans une mémoire dont nous ne disposons pas à l’heure actuelle, nous aidera à animer de tels réseaux.
S’agissant des résidences de créateurs, je vous transmettrai la réponse par écrit.
Monsieur Lambert, dans l’ensemble, le remplacement de la PEC par des bourses a plutôt bien fonctionné. Des ajustements sont toutefois nécessaires dans le mécanisme d’attribution – le bilan sera tiré en décembre. Les bourses permettent de mieux prendre en compte la situation sociale et économique des familles.
Quant à la réforme de l’Assemblée des Français de l’étranger, elle est trop récente pour que je puisse, ce soir, en tirer le bilan. Elle a été faite dans un esprit positif.
Oui, nous continuerons l’an prochain de rééquilibrer les moyens de nos postes : 300 postes sont concernés sur trois ans – 100 par an. Même si on doit constater et déplorer, comme M. Loncle, la réduction de nos moyens depuis de trop nombreuses années, rien n’interdit, dans le cadre d’une contrainte que chacun connaît, d’agir intelligemment pour permettre au Quai d'Orsay de fonctionner efficacement et d’assurer le rayonnement de la France.
C’est vrai, monsieur Lambert, une partie de nos ressources provient de la vente de notre patrimoine immobilier. S’il existe encore des marges de manœuvre, on ne saurait poursuivre éternellement dans cette voie. Il faut procéder à de telles opérations avec un esprit d’à-propos. En effet, autant on peut céder des biens dont le caractère somptuaire est inutile, autant il faut préserver la qualité de l’installation de notre représentation diplomatique. Comme me le confiait récemment l’un d’entre eux, un ambassadeur doit pouvoir convier de hauts responsables dans sa résidence et non au restaurant ! Il est faux, en revanche, de prétendre que tous nos bâtiments à l’étranger participeraient du rayonnement de la France. C’est ainsi que nous disposons dans le Sud-est asiatique d’un terrain valant 150 millions d’euros, ce qui est loin d’être négligeable. Du reste, seuls des spécialistes de l’immobilier doivent, sous notre surveillance, procéder à des cessions de notre patrimoine à l’étranger. En effet, la formation des ambassadeurs ne les conduit pas à valoriser les biens dont ils ont la charge.
Il est vrai qu’on observe parfois un décrochage du revenu de nos personnels de droit local, qui font un travail remarquable, par rapport à la réalité de la vie. Il peut leur arriver de nous quitter pour une meilleure offre, ce qui conduit à un taux important de rotation. C’est pourquoi nous avons intégré une augmentation de 3 % de la rémunération des personnels de droit local et assurons leur protection sociale. Le tout est de trouver un équilibre entre leurs exigences et nos capacités financières. La difficulté de l’exercice, qui a des limites, varie selon les pays. Il convient de se montrer pragmatique en la matière.
Monsieur Baumel, la décision concernant la Maison de France de Berlin sera prise en décembre. J’ai demandé à notre ambassadeur en Allemagne, M. Gourdault-Montagne, de réexaminer la question à la suite des nombreuses protestations que la décision de fermeture a suscitées. Il faut toutefois savoir que, si l’immeuble est beau, il n’est pas du tout fonctionnel. Est-il possible d’en garder une partie ? J’attends les propositions de notre ambassadeur.
Plusieurs d’entre vous ont abordé la question des visas qui est très importante, car le visa est le premier contact que nos futurs visiteurs ont avec la France. J’ai évoqué cette question à plusieurs reprises avec le Premier ministre et le ministre de l’intérieur. Je rappelle que tout pays doit aujourd'hui avoir une politique migratoire. Aucun ne peut accepter que ses frontières soient entièrement ouvertes. Nous sommes donc conduits à avoir une politique des visas.
Il convient toutefois de prendre également en considération la question de notre attractivité. S’il faut être attentifs vis-à-vis des pays dont la pression migratoire est forte, en revanche, il faut savoir que nous ne subissons aucune pression migratoire de la part d’autres pays, auprès desquels nous exerçons un grand attrait. Il convient, de plus, d’encourager certaines catégories de migrants, notamment les étudiants. Nous voulons recevoir en France des étudiants étrangers de grande qualité car, comme les autres pays, à l’avenir, nous nous renforcerons à proportion du nombre d’étudiants étrangers de grande valeur que nous accueillerons et qui, une fois rentrés chez eux, deviendront nos meilleurs ambassadeurs. Recevoir des étudiants étrangers est donc un bon investissement.
Il en est de même du monde des affaires ou de la coopération décentralisée, en direction du monde des artistes. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de conduire une politique des visas mieux adaptée aux diverses situations que par le passé. Les catégories de personnes auxquelles la France ne délivre pas de visas sont peu nombreuses et différentes selon la pression migratoire. Il convient en revanche d’encourager la venue d’autres catégories en facilitant l’obtention des visas. L’année prochaine verra le cinquantième anniversaire de l’établissement par le général de Gaulle des relations diplomatiques avec la Chine populaire : or, en Chine, le visa sera délivré sous quarante-huit heures en 2014 – tel est l’objectif que j’ai fixé. C’est un élément considérable d’attractivité.
Le tourisme, comme l’a déclaré le Président de la République à la Conférence des ambassadeurs, est une grande cause nationale. C’est un des secteurs dans lesquels nous pouvons réaliser des progrès extraordinaires en termes économiques. Avec 30 % de touristes en moins que la France, l’Espagne réalise 30 % de recettes en plus : nous avons donc des progrès à réaliser. Or le progrès commence avec le visa. Il continue avec l’amélioration de l’accueil à Roissy-Charles-de-Gaulle, actuellement très triste : je l’ai dit récemment à Augustin de Romanet, le nouveau président-directeur général d’Aéroports de Paris (ADP). Il en est de même de l’accueil des touristes britanniques à la Gare du Nord de Paris, bien inférieur à celui de Saint-Pancras, à Londres – je l’ai dit à Guillaume Pepy.
Madame Schmid, vous avez raison, la décision du tribunal administratif de Paris d’annuler la contribution de 6 % destinée à aider l’AEFE à financer la part patronale est ennuyeuse. La quasi-totalité des établissements ont manifesté leur soutien à l’agence lorsqu’ils ont eu connaissance du jugement et ont confirmé leur volonté de l’aider. L’AEFE a pris ses dispositions pour faire face à un éventuel arrêt du Conseil d’État confirmant le jugement en appel. Si tel était le cas, l’AEFE serait très fortement pénalisée et ce sont les familles qui en supporteraient les conséquences financières. Or il n’est dans l’intérêt de personne de fragiliser cet établissement. J’espère que les choses se passeront pour le mieux.
S’agissant du Label France, je me rappelle très bien la communication de Mme Conway au Conseil des ministres du 28 août dernier. Je tiens à rappeler que nous n’avons pas les moyens de financer partout des établissements AEFE, alors même qu’ils rencontrent un succès extraordinaire. C’est pourquoi nous proposons de donner le Label France à des établissements locaux qui font un effort particulier dans l’enseignement du français. J’ai visité l’un de ces établissements, tout à fait extraordinaire, à Brooklyn. Dans cette petite école primaire publique, qui dépend de la ville de New York, les enfants apprennent à la fois l’anglais et le français. Ce type d’établissement ne nous dispense certes pas d’efforts, d’autant qu’il faudra assurer la suite dans le secondaire, mais il concourt indubitablement à notre réseau. On en compte une trentaine actuellement, dont un bon nombre aux États-Unis. Il faut encourager ces initiatives.
Monsieur Loncle, vous avez rappelé que les crédits avaient diminué par le passé, à l’exception de deux années. Pour ce qui est de l’évaluation de la Cour des comptes, elle est dans l’ensemble objective et juste. Je ne reviens pas sur la décision concernant l’Institut français. Nous allons nous efforcer de clarifier l’ensemble des crédits. Pour ce qui est de la cartographie du réseau, dès lors que les moyens ne sont pas extensibles à l’infini, l’orientation est de faire porter l’effort dans les pays où nous ne sommes pas assez présents. Lorsqu’on pense au développement auquel sont promis des pays comme l’Indonésie en Asie, le Mexique en Amérique latine ou le Nigéria en Afrique, il est évident que nous n’y sommes pas du tout au niveau où nous devrions être.
Pour ce qui est de la création de conseils d’influence, j’ai demandé aux ambassadeurs de regrouper autour d’eux diverses personnalités susceptibles de faire le lien entre les différents aspects de notre influence, économique, culturelle, scientifique, sportive…
J’en viens à France Expertise Internationale. Le Premier ministre nous a demandé de de rationaliser l’expertise française, car voilà un domaine où nous faisons beaucoup, mais de manière trop dispersée. Avec le potentiel qui est le nôtre, nous devrions emporter davantage de contrats.
Au total, le ministère des affaires étrangères respecte bien entendu le cadre budgétaire qui s’impose à nous compte tenu de la situation des finances publiques. Bien que nous ayons déjà été assez lourdement ponctionnés, nous essayons de concilier l’indispensable discipline budgétaire avec le lancement ou la poursuite de certaines réformes.
Enfin, je ne voudrais pas conclure sans saluer la compétence et le dévouement de notre administration. Les fonctionnaires du ministère des affaires étrangères, tant en France qu’à l’étranger, ne sont pas arrivés là par hasard, mais l’ont choisi. La représentation nationale peut, comme moi, compter sur leur loyauté et la qualité de leur travail.
M. Jean-Pierre Dufau. Les députés SRC voteront le budget de la mission « Action extérieure de l’État », même si ce n’est bien sûr pas celui qu’ils auraient souhaité.
Ce vote positif relève à la fois du bon sens et de la raison. Le Gouvernement et sa majorité doivent en effet faire face à l’endettement inconsidéré du pays qui leur a été laissé en héritage. Sous peine que la France ne perde sa place dans le concert européen et celui des grandes nations, le Gouvernement se devait de serrer les boulons de la dépense publique.
Comme d’autres, le ministère des affaires étrangères doit donc faire un effort – effort douloureux, mais indispensable pour préserver l’avenir. Difficile, l’exercice est néanmoins demeuré modéré et n’altère pas la possibilité de rebondir dans le futur.
Un effort de rationalisation a eu lieu, qui a pu s’appuyer sur le repli conjoncturel de nos contributions obligatoires. Poursuivant dans des voies déjà explorées ces dernières années, on s’est efforcé de combiner économies et efficacité administrative. Ainsi a-t-on mutualisé des services diplomatiques, consulaires et culturels extérieurs avec certains partenaires européens, l’Allemagne en particulier. Concourent également à l’effort un recours accru au numérique, qui permet de réduire les frais d’abonnement à certaines publications, et le recrutement de personnels locaux – lesquels bénéficient désormais d’une couverture sociale.
Ces choix, contraints, ont permis de dégager quelques marges qui ont été utilisées au mieux dans le contexte budgétaire actuel. Les bourses au bénéfice des enfants de nos compatriotes résidant à l’étranger ont été abondées. La sécurité de nos ambassades et consulats situés dans des régions sensibles a été renforcée. Trois cents agents ont été affectés dans des pays émergents, où, placés au service de la diplomatie économique à laquelle vous tenez, monsieur le ministre, ils devraient contribuer à renforcer l’attrait et l’influence de la France.
Notre vote positif en faveur de ce budget, imposé par la raison plus que choisi, ne peut toutefois masquer nos interrogations pour le futur.
Bien qu’il en aille de l’influence de notre pays, le ministère des affaires étrangères a, depuis plusieurs années, contribué plus que d’autres à l’effort de réduction de la dépense publique.
La France peut s’enorgueillir d’avoir l’un des réseaux diplomatiques les plus importants au monde, en tout cas le plus dense de tous les pays européens. Elle souhaite aujourd’hui, pour reprendre votre propos, monsieur le ministre, « aller au-delà de l’héritage pour couvrir la géographie du futur ».
Sous le quinquennat précédent, les ambassades ont été classées en différentes catégories, certaines, dites à format réduit, ayant vu leurs personnels diminuer. Des consulats ont été classés « en gestion simplifiée ». D’autres, ainsi d’ailleurs que plusieurs ambassades, ont fermé. La question se posera tôt ou tard du maintien d’un réseau diplomatique certes encore étendu, mais de plus en plus virtuel.
Responsable par délégation de la section française de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF), il ne m’a pas échappé que le nombre de nos agents avait diminué dans certains pays d’Afrique noire et du Maghreb, de même que la part des bourses accordées par la France à des étudiants étrangers. Je partage votre ambition, monsieur le ministre, d’aller vers l’avenir. Mais, si l’avenir est en Asie ou en Amérique latine, il est également, pour la France, au Maghreb et en Afrique noire.
Dans l’attente de ce que vous pourrez nous dire sur ces deux points, je vous renouvelle, monsieur le ministre, le soutien des députés SRC, qui sont conscients des difficultés et de la nécessité pour notre pays d’assainir la situation des finances publiques qui lui a été laissée en héritage.
M. André Schneider. Le gaulliste que je suis est convaincu que nous partageons tous « une certaine idée de la France ». Le budget de la mission « Action extérieure de la France » est celui qui doit nous permettre de faire vivre notre vision du monde, notre vision de l’Europe, de renouveler nos relations avec le continent africain ou encore de renforcer le dialogue avec des régions du monde comme l’Amérique latine où il était jusqu’à présent limité. Pour résister au géant que sont les États-Unis, nous devons faire preuve de détermination dans notre action diplomatique.
Les crédits du programme 151 augmentent de 8 % par rapport à l’an passé, en raison essentiellement de l’organisation des élections à l’Assemblée des Français de l’étranger. Ces crédits servent à animer le vaste réseau de consulats généraux qui fait notre fierté : il faut renforcer notre action en ce domaine, tout en la réorganisant. La dotation prévue devrait nous permettre de conserver ce réseau, le deuxième au monde. Les crédits attribués à la Maison des Français de l’étranger, dont la mission est d’informer les Français désireux de s’installer à l’étranger, progressent de 34 %, du fait surtout de l’extension de ses activités. Les crédits de l’action 2 « Accès des élèves français au réseau de l’AEFE » augmentent de 8,5 millions d’euros. Mais, dans le même temps, ceux de l’AEFE baissent de 8 millions, si bien que c’est l’Agence qui financera l’essentiel de l’augmentation de ces bourses.
Si les crédits du programme 105 ne régressent que légèrement, ceux de l’action 4 « Contributions internationales » diminuent, eux, de 5 %. Il est regrettable que la contribution de notre pays à l’Organisation des Nations unies baisse de 43 millions d’euros. Notre influence dans les organisations internationales, qui n’est déjà pas des plus fortes, ne pourra qu’en pâtir. L’effort de 10 millions d’euros supplémentaires consenti en faveur de la sécurité de nos ambassades est, quant à lui, indispensable.
Avec plus de 220 millions de locuteurs, le français est encore la sixième langue parlée au monde. Or, au sein du programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence », dont les crédits baissent de 3 %, ceux destinés à la promotion de la langue française diminuent de 3,5 millions d’euros. Ce n’est pas en réduisant sans cesse ces crédits que nous parviendrons à accroître la diffusion de notre culture et de nos valeurs, et donc aussi à conforter notre poids économique dans le monde.
Alors que 7 millions d’euros vont être dépensés en licences Microsoft, ne pourrait-on pas former des agents consulaires à des logiciels libres comme Linux, dont l’exploitation est gratuite ? Les sommes économisées pourraient utilement être réaffectées.
Mme Schmid évoquait tout à l’heure le Label France. Sans doute serait-il judicieux de trouver une autre dénomination, plus appropriée pour les écoles francophones.
Monsieur le ministre, on ne peut qu’être d’accord avec les grandes lignes de votre action et la philosophie qui l’inspire, mais force est de reconnaître que « l’intendance ne suit pas ». Ce n’est certes pas de votre faute, mais il faudrait faire quelques efforts. Le professeur bienveillant que j’étais et que je suis sans doute resté vous mettrait une note satisfaisante, monsieur le ministre, assortie toutefois de l’observation « Peut mieux faire ».
Même s’il reste beaucoup à faire, en matière de bâtiments notamment, nous avons la chance de disposer d’un réseau diplomatique exceptionnel. Le monde attend énormément de la France : donnons-nous les moyens de continuer à professer nos valeurs de démocratie, de liberté, de respect des droits de l’homme, de culture et de paix. Ni votre bonne volonté ni celle de tout notre réseau diplomatique ne peuvent, hélas, pallier le manque de moyens. Nous n’avons plus aujourd’hui les moyens de nos ambitions.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP ne pourra pas voter ce budget.
M. Meyer Habib. Au nom du groupe UDI, je tiens à saluer l’action de nos diplomates et de nos agents qui œuvrent dans des conditions parfois difficiles au rayonnement de notre pays. Député de la huitième circonscription des Français établis hors de France, j’ai eu le privilège de pouvoir apprécier leurs compétences, et je leur rends hommage.
Son exceptionnel réseau diplomatique et culturel permet à la France de faire entendre dans le monde sa voix si forte et si particulière. Il lui permet également de diffuser sa vision du respect des droits de l’homme, sa créativité, son humanisme et ses valeurs universelles auxquelles, à l’UDI, nous sommes si attachés.
Il faut donc encourager le développement de ce réseau de 163 ambassades, seize représentations permanentes et deux antennes diplomatiques, tout en en redéployant les moyens et les effectifs vers les pays émergents. Le groupe UDI salue donc l’action du Gouvernement en ce sens, tout en appelant à la plus grande vigilance afin que notre pays ne perde pas en influence auprès de ses partenaires traditionnels.
Nous découvrons non sans surprise que le Gouvernement a retranché 43 millions d’euros à la contribution totale de notre pays aux soixante-douze organisations internationales auxquelles nous contribuons ainsi qu’aux opérations de maintien de la paix. Il en va pourtant de la stature de la France dans le monde. Ce choix est-il judicieux, alors que, dans un monde de plus en plus dangereux et multipolaire, les organisations internationales devraient nécessairement être appelées à jouer un plus grand rôle ?
Nos valeurs universelles sont aussi portées par notre culture. L’AEFE, Campus France et l’Institut français jouent à ce titre un rôle essentiel. Le groupe UDI comprend que, en période de restrictions budgétaires, des efforts particuliers leur soient demandés. Mais il s’interroge sur la capacité qu’elles auront à rendre soutenable leur masse salariale et à développer de manière plus systématique des ressources propres. Leur donnerez-vous la liberté et la flexibilité nécessaires pour qu’elles fassent aussi bien avec moins ?
En matière de bourses, le groupe UDI s’interroge sur le nouveau mode de calcul des quotités attribuées aux familles dans le besoin, consécutif à la réforme du système d’attribution. Certaines familles, qui vivent déjà dans des conditions très difficiles, ont vu diminuer la somme qui leur est attribuée sans que le niveau de leurs revenus ait changé. Je reviens d’Italie, qui fait partie de ma circonscription : à Milan et à Rome, des mères m’ont dit qu’elles allaient être obligées de retirer leurs enfants du lycée français – j’ai d’ailleurs écrit à ce sujet à la ministre déléguée, Mme Conway-Mouret. Les familles monoparentales, les plus vulnérables, sont les plus touchées. Comment accepter qu’une famille française soit contrainte, par manque d’argent, de retirer ses enfants de l’école ?
Du haut de sa morale à géométrie variable, une partie de la majorité s’indigne de « l’affaire Leonarda », dans laquelle le droit a été respecté, même si elle soulève la question de la sanctuarisation des espaces scolaires. Dans le même temps, nul ne s’émeut qu’à l’étranger des enfants français doivent quitter l’école de la République, parce que leurs parents ne peuvent pas payer leur scolarité et que les bourses diminuent. Aucun enfant ne doit être exclu du système scolaire français à l’étranger par manque de moyens de sa famille.
Il est prévu, dans le programme 151, d’augmenter les effectifs de fonctionnaires affectés à la délivrance des visas de tourisme. Il faut en effet faciliter la venue des touristes en France, mais la solution proposée est archaïque. Il aurait fallu se fixer pour objectif de délivrer plus de visas, plus rapidement, à effectifs constants. Certains pays y parviennent en recourant de façon massive et intelligente à internet. Pourquoi la France ne le pourrait-elle pas ?
Un dernier mot sur la réforme de la représentation des Français de l’étranger : le groupe UDI considère qu’elle n’a fait que multiplier les élus sans leur donner ni compétences ni moyens supplémentaires, et qu’il s’agit avant tout d’un tripatouillage électoral. De surcroît, il est pour le moins curieux de faire présider les conseils consulaires formés d’élus du peuple par des fonctionnaires, ceux-ci fussent-ils consuls. Voilà 4 millions d’euros bien mal dépensés !
Pour toutes ces raisons, le groupe UDI votera contre les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Mme Françoise Dumas. Dans le cadre de la politique de redressement économique voulue par le Président de la République et mise en œuvre par le Gouvernement, les moyens d’influence du ministère des affaires étrangères doivent venir appuyer certains secteurs stratégiques pour la France : le tourisme, la recherche, les filières industrielles d’excellence, l’innovation.
Pour relever le défi de l’attractivité économique de la France, nous disposons du premier réseau culturel au monde. Vous avez décidé d’en faire évoluer la cartographie afin, notamment, que nous soyons plus présents dans les pays émergents. Notre langue constitue aussi un atout, notamment en Afrique, où l’on comptera bientôt 700 millions de francophones.
La diplomatie culturelle permet, au travers des instituts français et du corps diplomatique, de faire entendre la voix de la France dans un espace mondialisé. La culture française est un outil d’influence et un atout économique majeur, d’ailleurs envié.
Monsieur le ministre, la diplomatie culturelle doit servir la diplomatie économique, dont vous avez fait la première priorité. Elle fait partie de la stratégie globale d’influence de la France à l’étranger au travers de l’économie, de la culture, de l’éducation et de la science. Quels objectifs le Gouvernement a-t-il fixés aux opérateurs placés sous votre tutelle afin de participer au développement de l’attractivité économique de notre pays ? Quelles directives leur a-t-il données ? En matière de diplomatie économique, les opérateurs comme Ubifrance, la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (COFACE), l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et les missions économiques sont placés sous la tutelle du ministère de l’économie et des finances. Comment les deux ministères coopèrent-ils ? Comment opérateurs économiques et réseau de coopération culturelle travaillent-ils ensemble au service de l’objectif économique ? Quel bilan dressez-vous de votre action sur ce point depuis un an ?
M. Hervé Féron. La valorisation du parc immobilier à l’étranger sera poursuivie. Mais comment être sûr que sera garantie l’égalité de traitement entre les différents occupants du domaine de l’État et que seront pris en compte le caractère social ou la mission d’intérêt général de certaines organisations ?
Les subventions versées à l’AEFE, à Campus France et à l’Institut français diminuent globalement de 2 % en 2014, soit 11,4 millions d’euros. Quelles en seront les conséquences pour la promotion de la langue française, l’accueil des étudiants dans le supérieur et la gestion de leur mobilité internationale, ainsi que la formation des agents de notre réseau culturel ?
M. Philip Cordery. Merci, monsieur le ministre, pour ce budget qui décline à l’international les priorités nationales que sont l’éducation, la sécurité et le redressement économique, grâce à la nouvelle stratégie de diplomatie économique, si importante pour notre balance commerciale et qui commence de porter ses fruits.
Les crédits consacrés à l’enseignement français à l’étranger représentent près d’un cinquième du budget global de la mission « Action extérieure de l’État ». Je me félicite que le projet de budget mette l’accent sur la diversification de cet enseignement, avec des programmes comme le « Label FrancÉducation » ou FLAM (Français langue maternelle), qui permettront que davantage de jeunes aient accès à une éducation française de qualité. Mme Conway-Mouret a fait des propositions intéressantes en ce domaine.
Le nouveau système de bourses est plus juste et plus transparent. Des injustices demeurent toutefois, qui seront corrigées. L’une des solutions ne serait-elle pas de proroger les mesures d’atténuation, de façon qu’aucune famille ne puisse perdre plus de 20 % d’une année sur l’autre et n’ait donc pas à subir de choc financier aussi brutal ?
Plafond d’emplois, immobilier, pensions civiles, autant de postes susceptibles de faire exploser les frais de scolarité, alors même que les bourses se réduisent. Comment faire pour enrayer l’envolée de ces frais ?
Que prévoit le projet de budget pour que, à l’étranger, les élèves en situation de handicap puissent eux aussi être accueillis de manière satisfaisante ?
La loi pour l’enseignement supérieur et la recherche, adoptée en juillet dernier, vise à attirer dans les universités françaises non seulement les étudiants étrangers, mais aussi les jeunes Français de l’étranger. Cela pourrait-il faire partie des missions de Campus France ? Des moyens budgétaires sont-ils prévus ?
M. Guy-Michel Chauveau. Coopération décentralisée, culture, économie, développement : autant de domaines où des milliers de partenariats existent avec des pays étrangers. Même si la situation s’est améliorée, les délais sont, hélas, encore beaucoup trop longs pour obtenir un visa.
M. Alain Rodet. Monsieur le ministre, votre prédécesseur avait décidé de réaffecter une quarantaine de conseillers des affaires étrangères et de ministres plénipotentiaires à d’autres missions. Poursuivez-vous cette politique de « dégagement des cadres » et en avez-vous reçu une évaluation ?
Quelle est l’intensité de la présence française à Taïwan, économie performante de 25 millions d’habitants ?
Mme Monique Rabin. Le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale a pointé un manque de visibilité de nos services à l’étranger, notamment pour les entreprises qui souhaiteraient investir en France ; il convient de lutter contre cette faiblesse.
Plutôt que de disposer d’une politique de visas non ciblée, il faudrait attirer les anciens étudiants étrangers en France qui ne peuvent rester dans l’entreprise dans laquelle ils ont effectué un stage – alors que cette possibilité est offerte pendant deux ans en Allemagne.
Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, le ministère des affaires étrangères concourt au redressement des finances publiques et vous ne pouvez pas en même temps regretter cet effort et douter de la capacité du Gouvernement à dégager 15 milliards d’euros d’économies. Nous devons maintenir ce cap, puis réallouer des moyens supplémentaires d’ici à deux ou trois ans.
M. Jean-Paul Bacquet. Je siège au conseil d’administration de France Expertise Internationale (FEI) et je n’ai toujours pas compris ce que faisait cet établissement public, mais je suis rassuré d’entendre que tel n’est pas votre cas !
Votre investissement dans la diplomatie économique commence à payer et, pour poursuivre cet effort, il y a lieu de rassembler les personnels qui exercent le même métier. Si le regroupement d’Ubifrance et de l’AFII ne présente que peu d’intérêts, le rapprochement d’Ubifrance, de la Banque publique d’investissement (BPI), de CCI International et de Sopexa-Atout France aurait du sens.
M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Seuls six ou sept ambassadeurs devaient être protégés il y a quelques années ; ils sont aujourd’hui plus d’une vingtaine, ce qui entraîne des coûts supplémentaires.
Nous conduisons un effort de mutualisation important, notamment avec l’Allemagne, que nous devons poursuivre – dans les projets immobiliers, par exemple, où nous devrions davantage solliciter le service européen pour l’action extérieure (SEAE) –, afin de réaliser davantage d’économies.
L’avenir passe par l’Afrique noire et le Maghreb, qui constituent notre zone prioritaire d’intervention. Le président de l’Afrique du Sud, M. Jacob Zuma, a récemment souligné l’efficacité de l’aide apportée par la France à l’ensemble du continent africain.
La contribution de la France à l’ONU s’élevait l’année dernière, selon le barème des quotes-parts, à 6,123 % du budget de l’organisation et atteint 5,597 % cette année – cette diminution étant due au tassement du poids relatif de notre économie dans le monde. Nous constituons certes le deuxième contributeur du Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme – notre contribution approchant les 300 millions d’euros –, mais nous n’occupons que rarement cette place. Néanmoins, l’influence ne se mesure pas aux engagements financiers, et 80 % des résolutions votées par le Conseil de sécurité sont présentées par la France ou par le Royaume-Uni.
Le réseau diplomatique français n’est plus que le troisième mondial, la Chine ayant accédé à la place de dauphin des États-Unis. L’Institut français s’occupera prochainement de la formation et de la professionnalisation de notre réseau, y compris celles des agents expatriés et recrutés locaux, il aidera à la gestion et à la mise en œuvre des programmes culturels, il développera les plateformes et les outils numériques innovants qu’utiliseront l’ensemble des postes, et il recherchera des mécénats – à l’image des 6 millions d’euros de financement privé qui permettront l’ouverture d’une librairie française au consulat de New York dans quelques mois.
Nous avons lancé, avec le ministre de l’intérieur, une refonte complète de notre système informatique de délivrance des visas, qui s’avérait obsolète et sera remplacé d’ici à deux ou trois ans. Lors de périodes d’intense activité, les chefs de poste doivent pouvoir faire appel à des personnes – comme des anciens fonctionnaires – permettant de gérer l’afflux de demandes ; tous les ambassadeurs me transmettent chaque mois un tableau comparant le nombre de dossiers de visas traités l’année précédente avec celui de l’année en cours : nous constatons une amélioration sensible dans de nombreux pays, principalement en Chine où des efforts considérables ont été réalisés.
Les ambassadeurs sont les préfets de l’extérieur : il leur revient de coordonner l’action des services placés sous leur autorité, responsabilité facilitée lorsque l’ensemble des départements sont regroupés géographiquement. Si des problèmes remontent à l’échelon central, ce sont alors les ministres qui interviennent.
Les crédits de fonctionnement de l’AEFE et de l’Institut français diminuent, ce mouvement pouvant n’avoir qu’un impact limité sur les actions conduites, à condition qu’il n’aille pas trop loin. Cette réduction ne justifie pas que l’accès à ces écoles soit réservé aux seuls élèves français. Bien que la demande surpasse largement l’offre de places, il convient de maintenir le brassage des nationalités qui constitue la qualité et la spécificité de notre enseignement à l’étranger.
Les frais de scolarité financent plus de la moitié du fonctionnement de l’AEFE, soit 600 millions d’euros, le budget de l’État apportant l’autre moitié de la contribution, ce qui représente une somme élevée. L’État ne contrôle que certains paramètres de la politique tarifaire des établissements scolaires, mais les responsables d’établissement essaient d’accueillir les enfants des familles les plus modestes et ne reçoivent en tout cas aucune instruction pour ne pas les accepter.
Monsieur Habib, vous avez parlé de « tripatouillage électoral », sans que je comprenne bien à quoi vous faisiez allusion. Sachez, en tout cas, que ce n’est pas le genre de la maison !
Monsieur Chauveau, j’ai demandé aux ambassadeurs d’anticiper l’afflux de demandes de visas lié à des manifestations – comme un spectacle ou le jumelage d’une commune française avec une ville étrangère – qui sont programmées à l’avance. Les risques de fraude restent marginaux et nous devons compter sur le sens des responsabilités des collectivités locales.
Monsieur Rodet, en plus des quarante personnes entrées dans le dispositif de fin d’activité, nous souhaitons qu’une vingtaine d’agents supplémentaires y accèdent.
L’Institut de Taipei assure la représentation de la France à Taïwan, notre pays étant bien implanté dans cette partie du monde.
Un inspecteur des finances est chargé de réfléchir au regroupement d’Ubifrance, de CCI International et de l’AFII ; son rapport nous permettra d’arrêter certaines décisions, le comité interministériel tenu sur ce sujet il y a quelques semaines n’ayant pas été concluant. Nous devons organiser les relations entre ces organismes de telle sorte que l’efficacité de notre action soit maximale.
FEI est un organisme intéressant, mais le ministère des affaires étrangères étudie l’ensemble des expertises publiques, afin d’en assurer la coordination. Ce travail permet de présenter à nos partenaires étrangers et aux organismes internationaux la richesse de l’expertise dont nous disposons dans de nombreux domaines, cette connaissance – notamment dans le domaine de la formation – s’avérant de plus en plus déterminante pour l’obtention de contrats à l’étranger.
S’agissant des amendements déposés à la partie du projet de loi de finances consacrée à l’action extérieure de l’État, je souhaiterais affirmer mon opposition à la suppression des postes d’ambassadeurs thématiques travaillant en direction des départements d’outre-mer. Par ailleurs, l’éventuelle augmentation des crédits dédiés à l’enseignement français à l’étranger ne doit pas s’effectuer au détriment de ceux finançant l’action européenne.
M. le président Pierre-Alain Muet. Monsieur le ministre, nous vous remercions.
La réunion de la commission élargie s’achève à vingt-trois heures dix.
Compte rendu de la commission élargie du jeudi 24 octobre 2013
(Application de l’article 120 du Règlement)
Aide publique au développement
La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures, sous la présidence de M. Pierre-Alain Muet, vice-président de la commission des finances et de Mme Élisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères.
M. le président Pierre-Alain Muet. Monsieur Pascal Canfin, ministre chargé du développement, monsieur Benoît Hamon, ministre chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, je suis heureux de vous accueillir avec Mme Élisabeth Guigou, présidente de la Commission des affaires étrangères. Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2014 consacrés à la mission « Aide publique au développement ».
La conférence des présidents du 11 juillet 2013 a décidé que l’ensemble des missions serait cette année discutées en commission élargie, afin de favoriser les échanges entre les ministres et les députés.
Je vous rappelle les règles de nos commissions élargies. Nous donnerons d’abord la parole aux rapporteurs de nos deux commissions, qui interviendront pour une durée de cinq minutes. S’exprimeront ensuite, pour cinq minutes chacun, les porte-parole des groupes. Enfin tous les députés qui le souhaitent pourront interroger les ministres, leur intervention étant limitée à deux minutes.
Mme la présidente Élisabeth Guigou. L’année qui vient de s’écouler a été importante pour l’aide au développement. Le Président de la République avait souhaité une refondation de notre politique d’aide ainsi qu’un large débat sur cette politique. C’est ce qui a été fait dès le début du quinquennat, avec la tenue des Assises du développement et de la solidarité internationale, que vous avez animées, monsieur le ministre Pascal Canfin, pendant quatre mois au cours desquels de nombreuses tables rondes ont été organisées, qui ont permis aux participants de la société civile, aux ONG, aux experts et aux parlementaires de réfléchir aux axes autour desquels devait s’articuler notre politique, à moins de deux ans de l’échéance des Objectifs du millénaire pour le développement, en 2015.
Un comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) a ensuite été réuni, ce qui ne s’était pas fait depuis plus de quatre ans. Je veux donc saluer l’impulsion forte qui a été donnée à l’aide publique au développement et qui va se poursuivre dans les prochains mois puisque, pour la première fois dans notre pays, une loi d’orientation sur l’aide au développement est en préparation, qui sera présentée au Parlement au plus tard au début de l’année prochaine.
La commission des affaires étrangères aura également d’autres occasions de se pencher attentivement sur l’aide publique au développement dans les prochaines semaines, avec le nouveau contrat d’objectifs et de moyens de l’Agence française du développement, par exemple. C’est dire à quel point notre agenda commun est chargé.
Cela étant, le projet de budget que vous nous présentez, messieurs les ministres, participe comme les autres aux efforts de réduction des déficits, conformément à la trajectoire triennale qui a été décidée. Les crédits inscrits aux programmes 110 et 209, dont vous avez l’un et l’autre la responsabilité, sont donc en diminution, mais l’impact de cette dernière en est fortement atténué grâce à la mobilisation des financements innovants qui viennent les compenser.
Je relève aussi que les priorités que le Président de la République a définies continuent d’être honorées. Je pense, par exemple, à l’aide qui transite par les ONG, lesquelles voient, cette année encore, les autorisations d’engagement en leur faveur augmenter de 9 millions d’euros ; je pense encore à l’effort en direction de l’aide alimentaire, ainsi qu’au soutien à la coopération décentralisée.
Cela étant, cette année 2013 a surtout été marquée par l’intervention de notre pays au Mali. La situation est exemplaire à beaucoup d’égards car, après la victoire militaire qui n’est jamais un but en soi, c’est aujourd’hui la victoire du développement qu’il faut remporter. À ce sujet, on a souvent dit que le Mali n’était pas un orphelin de l’aide : cela n’a pas empêché qu’il reste parmi les pays les moins avancés, malgré les moyens considérables qui lui ont été donnés durant des années.
C’est pourquoi, quelques mois après la conférence des donateurs, que la France a réunie à Bruxelles le 15 mai, je souhaiterais, monsieur le ministre chargé du développement, que vous nous disiez où nous en sommes aujourd’hui sur la question de la reconstruction du Mali et de ses efforts de développement, non seulement par rapport aux promesses considérables qui ont été faites par la communauté des bailleurs, mais aussi sur la manière dont l’aide arrive sur le terrain et dont elle bénéficie, très concrètement, aux populations locales.
Nous avons déjà évoqué à plusieurs reprises la question de la traçabilité de notre aide, qui doit nous permettre d’éviter, comme cela s’est trop souvent produit par le passé, que cette aide soit captée au bénéfice de quelques-uns. Ces mécanismes de traçabilité devraient, à notre sens, concerner non seulement l’aide française mais aussi l’aide européenne. Je souhaite que vous nous les rappeliez. Comment pouvons-nous être certains aujourd’hui que les erreurs commises dans le passé ne seront pas répétées ?
M. Jean-François Mancel, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le ministre Canfin, je salue tout d’abord votre engagement et votre efficacité au service du développement. Mais les bonnes intentions évoquées par Mme Guigou ne se traduisent pas, hélas, dans le budget pour 2014 qui, comme le budget pour 2013, est marqué par une baisse de 6 % des crédits alloués à l’aide au développement, véritable peau de chagrin. Quant aux financements innovants, censés à l’origine être des financements additionnels, ils sont devenus des financements de substitution.
Tout cela est problématique, si l’on veut que la France assume le rôle qui est le sien. Nous ne consacrons en effet que 0,47 ou 0,48 % de notre revenu national brut à l’aide publique au développement et nous ne ferons guère mieux d’ici à 2015, alors que, dans la même conjoncture, les Anglais y consacrent 0,7 % de leur RNB.
J’en viens à mes questions. Tout d’abord, comment la France parvient-elle, au plan européen comme au plan international, à faire jouer son influence ? Quelle est votre stratégie et quels sont les moyens que vous mettez en œuvre pour affirmer l’action de la France ?
Ma seconde question porte sur l’Agence française de développement, dont chacun sait le rôle majeur qu’elle joue en matière d’aide publique au développement. Une discussion est engagée avec le ministère des finances sur l’augmentation des fonds propres de l’AFD. Cette discussion ne risque-t-elle pas de s’enliser et entendez-vous fixer une date butoir pour que l’on donne à l’AFD les moyens de son futur développement ?
Pouvez-vous, en troisième lieu, nous préciser les modalités de notre action au Mali, pays dont les institutions et l’économie doivent être intégralement restaurées ?
Pouvez-vous également nous dire quelques mots de la loi d’orientation. Se limitera-t-elle à de grandes lignes ? Comportera-t-elle des dispositions financières ?
Enfin, j’en terminerai avec une proposition dont je doute qu’elle recueille l’assentiment général. Les crédits du programme 209 chutant de 14 % et nos aides bilatérales se limitant désormais à 568 millions d’euros, je vous propose, afin de ne pas augmenter la dépense publique, d’y transférer 200 millions des 600 millions d’euros consacrés, dans le budget de la santé, à l’Aide médicale d’État, c’est-à-dire à la prise en charge médicale d’immigrés en situation irrégulière sur notre territoire. Cela permettrait à la France d’accroître l’envergure de ses aides bilatérales et de mieux assumer les responsabilités qui sont les siennes.
M. Hervé Gaymard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Monsieur le ministre Canfin, je salue moi aussi votre engagement en faveur du développement, et me félicite du bon déroulement des Assises du développement. Remercions également le Gouvernement d’avoir réuni le CICID, en sommeil depuis des années. Tout cela confirme les propos du Président de la République lors de son discours de clôture des Assises, le 1er mars dernier, et témoigne de la volonté de l’exécutif de reprendre en main la politique du développement.
Cela étant, j’aurai quelques questions en forme de critiques. La première concerne le Mali. J’ai salué et voté la prolongation de l’intervention militaire française au Mali. Faisons-nous preuve de la même alacrité et du même engouement pour la reconstruction et l’aide au développement ? Certes, la France a organisé la Conférence des donateurs à Bruxelles, mais il semblerait que les 280 millions d’euros que nous affectons au Mali ne soient pas des fonds additionnels : ils recouvriraient des sommes ou des dépenses déjà engagées.
J’aimerais que vous dissipiez nos doutes sur notre capacité à être une force d’entraînement dans la reconstruction du Mali et, au-delà, du Sahel, zone à risque où les prévisions démographiques sont extrêmement préoccupantes. Au lieu de disperser nos moyens dans l’aide multilatérale, mieux vaudrait concentrer notre action sur la zone sahélienne, où notre expertise est reconnue.
Ma seconde remarque concerne la santé. L’été dernier est paru dans The Lancet un article soulignant l’effort très important fait par la France depuis quelques années en matière de santé publique en Afrique et dans les pays en développement, effort trop peu mis en valeur selon l’auteur de l’article. C’est ainsi que certaines recommandations du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme sont rédigées en anglais, y compris dans des pays francophones. Quels moyens entendez-vous donc utiliser pour mettre davantage en lumière notre implication dans les politiques de santé en faveur des pays en développement ?
En matière de politique éducative et d’éducation de base, nos crédits sont en baisse et certains pays traditionnellement francophones reçoivent des États-Unis des aides dix fois supérieures aux nôtres. Or les efforts en faveur de l’éducation primaire sont fondamentaux pour le développement de la francophonie.
Enfin, il nous a semblé que la France soumettait son aide à des conditionnalités supplémentaires. Je souhaiterais savoir ce qu’il en est.
M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement. J’évoquerai en premier lieu la question du Mali. La France a très largement contribué à mobiliser la communauté internationale, qui s’est engagée, pour les deux prochaines années, à aider le Mali à hauteur de 3,2 milliards d’euros, dépassant les objectifs initiaux de la Conférence des donateurs.
Dans un contexte budgétaire moins tendu, sans doute notre contribution aurait-elle pu grimper de 280 à 320 ou 330 millions d’euros : moins que ce montant, c’est l’effet de levier qui importe et notre capacité à être une force d’entraînement pour l’ensemble des acteurs du développement. Le Mali est, à ce titre, un très bon exemple de la manière dont nous articulons action bilatérale et action multilatérale. Nous avons réussi, grâce à notre influence au sein des instances multilatérales comme la Banque africaine de développement, la Banque mondiale ou l’Union européenne, à mobiliser 3,2 milliards d’euros. Après l’élection présidentielle, les projets soutenus par les bailleurs ont redémarré, et une première réunion d’évaluation devrait avoir lieu à Bamako dans une quinzaine de jours.
L’aide française se monte à 280 millions d’euros pour les deux prochaines années. Cet engagement intègre l’argent gelé, à juste titre, par le précédent gouvernement en 2012. Cela, en soit, ne constitue pas un problème, puisqu’il s’agit de sommes originellement affectées au Mali.
Sur le fond, nous souhaitons qu’une partie plus importante de ces crédits passent par les collectivités locales maliennes. Le Mali vient de tenir ses états généraux de la décentralisation, et nous pensons qu’en matière d’éducation ou de santé, par exemple, la gestion des services publics nécessite une action administrative locale et que l’aide sera d’autant plus efficace que les projets seront pilotés au niveau local. Cette décentralisation est par ailleurs une des clefs de la solution politique qui permettra au Mali de réussir sa démocratisation et son développement économique. Nous avons ainsi obtenu – ce qui est une première – l’engagement que le tiers des crédits passeraient par les collectivités, celles-ci n’étant pas capables, dans leur état de développement actuel, d’en absorber davantage.
Pour ce qui concerne la transparence et la traçabilité, nous avons, pour la première fois, recensé sur un site internet l’ensemble des projets financés par la France au Mali. Y figureront toutes les informations concernant la réalisation du projet, la date de signature du contrat et les dates prévisionnelles de son achèvement. Il s’agit d’un effort de transparence sans précédent qui permettra aux contribuables français comme aux citoyens maliens de se tenir informés, ces derniers pouvant de ce fait mieux s’approprier notre aide et exercer une forme de « contrôle citoyen » en alertant par mail ou par SMS l’ambassade de France en cas de problème ou de retard sur tel ou tel projet. Cela devrait améliorer la traçabilité de l’aide et aider à lutter contre son « évaporation ». Des sites identiques devraient être lancés en 2014 pour les seize pays pauvres prioritaires – tous africains –, ce qui nous permettra de rattraper notre retard en matière de transparence.
L’aide bilatérale représentait 61 % de l’APD française en 2008 et 66 % en 2012, soit cinq points d’augmentation – ce qui contredit vos propos. Quant à l’aide multilatérale, je ne considère pas qu’elle rend la France invisible. J’étais il y a quelques jours en Afrique du Sud avec le Président de la République. Dans ce pays, où le sida fait deux cent mille morts par an, pas un des acteurs institutionnels ou associatifs n’ignore que la France est le deuxième financeur du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, et tous l’en remercient car le fonds mondial est le meilleur outil dont nous disposions pour lutter contre le sida
Il est donc légitime de vouloir s’assurer de la visibilité de note action, mais notre premier objectif doit être l’efficacité dans le traitement des malades. C’est la raison pour laquelle nous avons fait un arbitrage très fort dans le contexte budgétaire actuel, en maintenant à leur niveau pour les trois prochaines années les crédits alloués au Fonds mondial, soit plus de un milliard d’euros.
Le budget de l’aide publique au développement n’est certes pas en hausse ; mais la baisse n’est pas aussi importante que ce que vous prétendez. En effet, les financements innovants nous ont permis de préserver la capacité d’intervention dans ce domaine. Les programmes 110 et 209 passant de 3,3 à 3,2 milliards d’euros, la baisse des crédits ne représente que 100 millions ; cela nous permet de respecter les priorités que le Président de la République et moi-même avions fixées. Ainsi, le doublement de l’aide passant par les ONG – qui doit être réalisé sur la durée du quinquennat – se poursuit cette année. Un autre engagement du Président de la République – la stabilisation des dons de projets – est également traduit dans les faits. L’aide alimentaire reste intacte. Si nous participons à l’effort de redressement des comptes publics, toutes ces priorités – véritable cœur de la solidarité internationale – ne sont en rien affectées par la baisse de 100 millions du budget de l’aide publique au développement.
Benoît Hamon répondra en détail à la question portant sur les fonds propres de l’AFD ; la question de leur augmentation devra être tranchée dans le contrat d’objectifs et de moyens – COM – qui doit être adopté au plus tard au premier conseil d’administration de l’AFD, en janvier 2014. Il nous faudra donc arbitrer à la fin de cette année.
La loi d’orientation sur ce sujet – qui correspond à une volonté du Président de la République – représente une première dans l’histoire de la République. Elle symbolisera la rénovation de la politique de développement, consacrant notamment les efforts de transparence, de démocratisation et de mise en débat de ses choix. Cette loi constituera un marqueur en matière de relations entre la France et le reste du monde ; à nous – exécutif comme Parlement – de la rendre la meilleure et la plus ambitieuse possible.
Monsieur Gaymard, l’éducation – une des cinq priorités sectorielles – représente 1,5 milliard d’euros, et les crédits qui y sont affectés ne sont pas en diminution. Cet effort important concerne à la fois l’éducation primaire, mais également, de plus en plus, la formation professionnelle, suivant la demande croissante des pays qui souhaitent améliorer l’accès des jeunes au marché du travail – enjeu central en Afrique, compte tenu des évolutions démographiques. Nous veillons particulièrement aux questions de genre, jusqu’à présent négligées. En effet, les conditions d’accès à l’éducation des filles sont spécifiques, en termes de risques liés aux trajets, à l’absence d’équipements adaptés et à l’insécurité. Dorénavant, nous prenons en compte cette dimension qui devra, en 2017, figurer parmi les objectifs de 50 % des projets financés par l’aide publique française.
Enfin, nous ne soumettons pas notre aide à des conditions de respect impératif de telle ou telle règle précise ; en revanche, notre action repose sur une doctrine et des principes, favorisant certains projets plutôt que d’autres. Elle relève donc de choix politiques – dont l’OCDE avait d’ailleurs critiqué l’absence par le passé. Le contribuable français a le droit de savoir au nom de quels objectifs nous menons notre politique de développement. Ainsi, dans le domaine de l’énergie, pour rester en cohérence avec les grands enjeux du XXIe siècle – dont le réchauffement climatique –, nous favorisons le déploiement des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, et non les centrales au charbon. Dans le domaine agricole, puisque nous ne voulons pas d’OGM dans notre pays, nous ne les finançons pas non plus dans les pays du Sud. Ces choix représentent une forme de conditionnalité qui prouve qu’au-delà du pilotage budgétaire, notre action repose sur de vrais arbitrages politiques.
M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Je compléterai les informations fournies par Pascal Canfin sur des points qui concernent plus spécifiquement le ministère de l’économie et des finances – un acteur majeur de la politique française de soutien au développement au travers du programme 110.
Bailleur important de plusieurs institutions de soutien au développement – tels que le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme –, la France participe aux mécanismes multilatéraux de financement. Cinquième contributeur à l’Association internationale de développement – AID – de la Banque mondiale, elle a contribué à ce que l’AID continue à faire de la politique de soutien et de développement à l’Afrique subsaharienne une de ses priorités, évitant le transfert d’une partie des moyens vers les pays asiatiques, l’Inde. Le poids de la France dans le financement multilatéral a été déterminant dans sa capacité à jouer ce rôle. Quatrième bailleur du Fonds africain de développement – FAD – hébergé par la Banque africaine de développement, la France peut là encore influer sur les choix politiques en matière de soutien aux États les plus fragiles, tels que le Mali, la RDC ou la Côte d’Ivoire. En 2013, la France y a consacré 380 millions d’euros de ressources budgétaires, déclenchant une mobilisation financière importante en direction de pays qui font aujourd’hui partie de ses priorités.
Les besoins de l’AFD en fonds propres – qui s’élèvent à au moins un milliard d’euros – sont liés à l’entrée en vigueur des règles prudentielles de Bâle III. Nous devrons officialiser nos choix lors de l’adoption du COM de l’AFD, début 2014 ; les discussions suivent trois pistes principales. L’intervention de l’État au titre de créances de long terme peut permettre de renforcer les fonds propres de l’AFD en les transformant quasiment en capital. On peut également revoir la politique des dividendes, augmentant la quotité de l’État, afin de procéder à une recapitalisation de l’Agence. Enfin, on peut essayer de rendre le modèle financier de l’AFD plus soutenable à long terme, pour éviter que la question ne se repose dans dix ans. Nous travaillons de la manière la plus transparente possible pour formuler des propositions – certainement une combinaison des trois solutions envisagées – qui seront rendues publiques lors de la première réunion de l’AFD en janvier 2014.
M. Jean-René Marsac. Le groupe SRC votera les crédits de la mission « Aide publique au développement », qui contribuent à la mise en œuvre des orientations de la France en matière de solidarité internationale. Ces orientations ont été redéfinies par le CICID du 31 juillet 2013, présidé par le Premier ministre. Ce conseil, qui ne s’était pas réuni depuis 2009, a abouti à vingt-huit décisions opérationnelles, faisant suite à une large concertation avec les ONG, entreprises et collectivités territoriales, qui s’était déroulée sous forme d’assises entre novembre 2012 et mars 2013. Tout cela participe d’une démarche de mobilisation et de clarification saluée par tous.
Dans le cadre de cette dynamique, la loi sur le développement et la solidarité internationale – première loi d’orientation et de programmation – devrait permettre de partager des objectifs et des priorités avec l’ensemble de nos concitoyens et avec leurs représentants au niveau local et national. L’évolution de notre planète et les modifications dans les rôles respectifs des différents continents doivent nous amener à aborder très différemment le développement des pays pauvres.
La mission dont nous parlons ici comprend les programmes 110, relevant du ministère de l’économie et des finances, et 209, piloté par le ministère des affaires étrangères ; elle ne concerne cependant qu’environ un tiers de l’effort de la France en matière d’aide au développement. Pour cette mission, et de manière générale pour les quatorze missions et vingt-cinq programmes qui contribuent, dans les différents ministères, à l’aide publique au développement, les crédits nouveaux pour 2014 s’inscrivent dans l’effort général d’économie. Cela se comprend compte tenu des déficits budgétaires accumulés depuis une décennie ; cependant, ces restrictions ne doivent pas être durables dans un domaine où il faudra au contraire consolider l’effort pour l’avenir.
Si l’on ajoute les annulations de dettes pour près de 1,6 milliard d’euros et les recettes nouvelles attendues des taxes sur les billets d’avions et sur les transactions financières, l’évolution amène l’effort global de la France à 9,6 milliards d’euros en 2014, soit 0,48 % du RNB. Nous sommes encore loin de l’objectif de 0,7 % !
Dans ce contexte, il nous serait utile d’avoir des informations plus précises sur les annulations de dettes, qui ont pratiquement triplé entre 2013 et 2014. S’agit-il de l’inscription de décisions déjà prises ou des prévisions ? Quels pays en sont bénéficiaires ? Beaucoup d’ONG souhaitent des clarifications sur ce point.
Le programme 110 « Aide économique et financière au développement », mis en œuvre par le ministère de l’économie et des finances, maintient un effort particulier en direction de l’Afrique, priorité réaffirmée à juste titre à travers le FAD et le Fonds international de développement agricole – FIDA. Il traite également des bonifications de taux d’intérêt des prêts accordés par l’AFD.
Compte tenu des difficultés budgétaires particulièrement graves des pays les plus pauvres, et de leur encadrement par des règles internationales limitant leur possibilité de recourir aux emprunts, nous souhaiterions savoir comment leur bénéficient les outils financiers du programme 110 et les prêts de l’AFD.
Le programme 209 « Solidarité à l’égard des pays en développement », met l’accent sur la coopération bilatérale. Il concrétise notamment l’engagement du Président de la République de doubler l’aide publique transitant par les ONG françaises entre 2012 et 2017, avec une hausse nette de 9 millions d’euros en 2014. Il augmente très – peut-être trop – légèrement le soutien à la coopération décentralisée. Enfin, il continue à tenir compte des attentes de la francophonie à travers l’Organisation internationale de la francophonie – OIF – et l’Agence universitaire de la francophonie – AUF.
Ce programme maintient également les contributions au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Vous connaissez par ailleurs, monsieur le ministre Pascal Canfin, mes interrogations sur la sous-nutrition et la malnutrition, phénomènes qui restent scandaleux en 2013 et constituent des handicaps majeurs pour le développement des pays pauvres et de ceux dont une part importante de la population vit dans la misère.
Nous devrons, dans les mois à venir, aborder de nombreux sujets : thématiques et pays prioritaires, aides d’urgence, solidarité, co-développement durable, partenariats de types nouveaux, efficacité des interventions bilatérales et multilatérales, rôles respectifs de la France et de l’Union européenne, coordination des interventions publiques françaises, rôle à venir de l’AFD, etc. Il faudra sûrement aussi considérer l’évolution des financements innovants et les procédures d’investissements à long terme dans des territoires aux fortes perspectives de développement, notamment pour le continent africain.
Compte tenu de l’importance des enjeux, afin que nous puissions débattre et arrêter nos positions, concrétisant ainsi les conclusions de la concertation entreprise depuis plus d’un an, il est nécessaire que votre projet de loi soit inscrit dans notre agenda dès début 2014.
M. Jean-Louis Christ. Je ne doute pas de votre volonté de préserver le budget de l’aide au développement au terme de l’exercice d’équilibre auquel vous devez vous livrer. Cependant, nombre d’ONG estiment que ce budget n’est pas à la hauteur de vos ambitions.
Alors qu’un quart de la population mondiale doit compter aujourd’hui encore sur la solidarité internationale, la mission « Aide publique au développement » accuse, dans le PLF 2014, une baisse de 178 millions d’euros. Ce budget interdit à la France d’honorer ses engagements internationaux, puisque nous nous éloignons de plus en plus de l’objectif des 0,7 % du RNB à consacrer à l’aide publique au développement d’ici à 2015. En effet, hors allégement de la dette, la France n’y consacre plus que 0,4 % du RNB.
On peut légitiment s’interroger sur le rôle international que la France entend tenir, tant son influence et sa crédibilité dépendent du respect de ses engagements en matière d’aide au développement et de lutte contre l’extrême pauvreté. Comme l’a rappelé Jean-François Mancel, la Grande-Bretagne, bien que fortement touchée par la crise financière, a décidé d’atteindre l’objectif des 0,7 % ; n’est-ce pas la preuve qu’une politique de développement ambitieuse est une question de volonté politique ?
Le choix de couper dans l’aide publique au développement ne permettra pas de redresser nos finances publiques, car la mission « Aide publique au développement » ne correspond qu’à seulement 1 % du budget total de la France en 2014 ; en revanche, il affectera d’une manière irréversible les populations les plus vulnérables.
Dans le sillage des conclusions et recommandations du Comité d’aide au développement – CAD –, je voudrais savoir quelle trajectoire réaliste vous entendez établir pour atteindre l’objectif de 0,7 %, et dans quels délais.
Le Parlement, la Cour des comptes, le CAD et l’OCDE ont souvent évoqué la complexité du système institutionnel global de la coopération – qui implique une dizaine de ministères et des instances de pilotage peu fonctionnelles – ainsi que l’architecture éclatée du budget qui rend difficile l’appréhension de l’ensemble des moyens engagés. Ces questions ont également été évoquées lors du dernier CICID en juillet dernier. Pourriez-vous nous indiquer les mesures prises pour améliorer la lisibilité de l’aide publique au développement ?
Aujourd’hui, 70 % de l’aide publique au développement mondiale est déclarée sous le standard de l’Initiative internationale sur la transparence de l’aide, dit standard IATI – International Aid Transparency Initiative. Son but est d’améliorer la transparence de l’aide afin de permettre une meilleure compréhension et un contrôle effectif de la part des parlementaires – très demandeurs. L’accessibilité des données concourt à offrir une meilleure connaissance des actions des bailleurs, à en améliorer la gouvernance et à lutter contre la corruption. Pourquoi notre pays n’a-t-il pas encore mis en œuvre cette norme commune sur la transparence de l’aide ?
Alors que la France reste dernière des États membres du CAD en part d’aide publique au développement transitant par les ONG – 1 % seulement pour une moyenne OCDE de 13 % –, le Président de la République s’est engagé à doubler cette part, sans toutefois préciser les modalités de son action. Quelle est la progression des crédits affectés au soutien des initiatives des ONG françaises ?
Dans ce budget, la taxe sur les transactions financières est à nouveau détournée de son objet. Rappelons que son ambition initiale était de répondre à deux objectifs : une fiscalité internationale dédiée au service des biens publics mondiaux et une limitation de la spéculation financière outrancière. Aujourd’hui, ces deux objectifs sont loin d’être atteints. En 2013, 10 % de cette taxe étaient reversés au budget de l’aide publique au développement. En 2014, par un artifice dont vous avez le secret, vous relevez la participation de cette taxe à 15 % alors que ses recettes sont prévues à la baisse – 700 millions d’euros contre 1,6 milliard initialement attendu.
D’une manière générale, ce budget affiche une bonne volonté de façade, mais reste toujours aussi peu lisible et transparent. Dans l’attente de la mise en œuvre d’une loi d’orientation, le groupe UMP s’abstiendra lors du vote.
Mme Danielle Auroi. Je tiens à excuser mon collègue Noël Mamère qui n’a pas pu rester ce soir. Ayant partiellement participé aux Assises du développement et de la solidarité internationale, j’ai pu suivre en direct les propositions et les réactions des ONG ; aussi suis-je surprise de la perception qu’en a mon collègue de l’UMP. Ce qui inquiète les ONG – tout comme le rapporteur général Christian Eckert –, c’est que comme tous les budgets, celui du développement a été touché par une baisse de quelque 3 %, et que nous ne parvenons pas à atteindre l’objectif – que nous partageons avec d’autres pays européens – des 0,7 % du RNB à consacrer au développement. Ces insuffisances touchent davantage les dons – en particulier aux pays les plus fragiles – que les prêts ; messieurs les ministres, cette politique sera-t-elle poursuivie ?
Les financements innovants de la solidarité internationale – tels que la taxe sur les billets d’avion – ont plutôt bien fonctionné. Certes, la taxe sur les transactions financières mériterait d’être renforcée et instaurée au niveau européen ; j’espère donc, monsieur Christ, que vous nous aiderez à mener ce combat. En prélever 15 % a permis de conforter le Fonds de lutte contre le sida – et pour bien connaître l’Afrique du Sud, j’y vois une nécessité impérieuse –, ainsi que le Fonds vert.
Les ONG ont été particulièrement sensibles à la cohérence qu’introduit dans notre politique l’attention portée au développement durable, en particulier à la lutte contre le changement climatique. En tant que présidente de la commission des affaires européennes, j’ai récemment participé, aux côtés du président de l’Assemblée nationale Claude Bartolone, à la réception du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon. Celui-ci a rappelé que la lutte contre le changement climatique constituait la priorité absolue au niveau international, dans la mesure où il était responsable du développement de la pauvreté et des migrations. Si l’on n’agit pas, ces mouvements de population – déjà à l’œuvre au Bangladesh et ailleurs – risquent de s’accentuer. Cet avis nous encourage à nous engager dans cette voie en France. Messieurs les ministres, pourriez-vous confirmer que cet axe d’action sera conforté ?
Nous serons tous ravis si l’année prochaine, nous parvenons à augmenter le budget de l’aide au développement et à atteindre le fameux objectif des 0,7 % ; en attendant, le groupe écologiste votera ce budget.
M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le ministre, en tant que responsable de l’aide au développement accordée par la France, vous êtes chargé de mettre en œuvre la solidarité avec les pays les plus pauvres. Celle-ci se décline de différentes manières, touchant des domaines aussi divers que l’agriculture, l’environnement, la santé, l’éducation ou l’État de droit. L’apprentissage rationnel d’une langue peut également être un instrument au service du développement. Président délégué de la section française de l’Assemblée internationale des parlementaires de langue française, j’ai pu mesurer, à l’occasion de déplacements en Afrique ou en Asie du Sud-Est, à quel point la maîtrise d’une langue – le français –, en harmonie avec les langues vernaculaires, participait à l’épanouissement de la jeunesse et, au-delà, des nations en développement.
L’Assemblée parlementaire de la francophonie – APF –, mais également des organisations comme l’OIF, l’Organisation internationale de la francophonie, et l’AUF, l’Agence universitaire de la francophonie, construisent une forme unique de coopération entre pays du Nord et pays du Sud. La préservation de la pluralité linguistique est au cœur du projet francophone. Cette identité collective qui se veut multiple et ouverte consolide, au-delà de la diversité linguistique, celle de la pensée, donc de la démocratie et de l’État de droit – toutes nécessaires au développement harmonieux –, loin des conceptions réductrices reposant sur une langue et une pensée économique et politique uniques ou hégémoniques.
Monsieur le ministre, la rénovation de la politique du développement à laquelle vous êtes attaché comporte-t-elle une dimension francophone ? Le « Forum Afrique – 100 innovations pour le développement durable » que vous préparez pour le mois de décembre prochain intègre-t-il, dans ses différents volets – et comment –, la culture, les langues vernaculaires et la francophonie ? Ces éléments comptent tant en matière de communications, d’institutions ou de citoyenneté que dans le domaine du social, de l’entreprise et de la finance.
M. Guy-Michel Chauveau. Les enjeux liés à la santé restent pour un certain nombre de pays un obstacle au développement. C’est pourquoi nous sommes très heureux de voir le budget de l’aide publique au développement préserver la contribution de la France au Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose. Cet engagement est d’autant plus apprécié qu’il est garanti au-delà de l’enveloppe votée cette année pour les exercices 2014 et 2015.
C’est en grande partie la conséquence d’allocations permises par la taxe sur les transactions financières. Ce financement innovant est incontestablement bienvenu, mais l’effort solidaire qu’il a permis de perpétuer est-il suffisant ? Certainement pas. Pour autant, compte tenu des contraintes que nous connaissons tous, il paraît pour l’instant difficile d’aller au-delà. Dès lors, pourrait-on hiérarchiser autrement l’affectation des crédits en donnant un coup de pouce à la santé et à la protection sociale ? Ou encore, pourrait-on imaginer de consacrer à la santé les recettes attendues de la taxe sur les billets d’avion – c’est en partie l’objet de l’article 36 du projet de loi de finances – et celles de la taxe sur les transactions financières ? Nous ne souhaitons pas l’affichage d’objectifs chiffrés ou de pourcentages, mais une annonce de nature qualitative.
Monsieur le ministre délégué chargé du développement, vous avez été chargé par le Premier ministre de mettre en chantier une loi d’orientation et de programmation et, en accord avec le Président de la République, vous avez pris l’initiative d’organiser, parallèlement au sommet de l’Élysée sur la sécurité et la paix en Afrique, un forum consacré aux innovations pour le développement durable. Ces initiatives, annoncées le 31 juillet à l’occasion d’un CICID, et dont nous nous réjouissons, vont-elles réserver aux problématiques de santé une place, sinon centrale, du moins priorisée ?
En ce qui concerne le développement du Mali, j’approuve votre intention d’accorder la confiance aux pouvoirs locaux, qui ont fait leurs preuves.
M. le président Pierre-Alain Muet. Je rappelle que le Gouvernement a présenté un amendement destiné à rétablir les dispositions de l’article 36 du projet de loi de finances. En effet, bien que celles-ci tendaient à modifier des impositions de toute nature, elles n’avaient pas d’incidence sur l’équilibre du budget et devaient, de ce fait, être renvoyées en deuxième partie.
M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. J’évoquerai les crédits correspondant aux annulations de dette, qui passent de 607 millions d’euros à 1,579 milliard d’euros, ainsi que la part des recettes de la taxe sur les transactions financières affectée à l’aide publique au développement – et plus particulièrement aux priorités climatiques, conformément au souhait du secrétaire général des Nations unies.
Sur le premier point, l’incertitude demeure en ce qui concerne le calendrier d’effacement des créances de la part des pays membres du Club de Paris. En 2014, toutefois, nous estimons que la Somalie, le Zimbabwe, le Tchad, la Côte d’Ivoire et surtout le Soudan – soit plusieurs pays entretenant des relations importantes avec la France – pourraient voir une partie de leur dette effacée. En ce qui concerne le Soudan, le montant de la dette annulée devrait atteindre, sur plusieurs années, 2,2 milliards d’euros.
C’est l’incertitude à laquelle j’ai fait allusion et la présence du Soudan dans la liste qui expliquent l’importance des crédits consacrés au traitement de la dette au sein de l’aide publique au développement.
Cela étant, l’effacement de la dette, en transformant des prêts en dons, donne aux pays concernés la possibilité de voir leur situation financière assainie de façon quasi immédiate. Il a donc un impact réel sur leur développement.
En ce qui concerne la taxe sur les transactions financières, son rendement a été inférieur aux prévisions en raison d’une baisse des volumes de transactions liée à la crise. Toutefois, elle a permis en 2013 de collecter 60 millions d’euros au bénéfice de l’aide publique au développement, une somme qui atteindra 100 millions d’euros l’année prochaine. Sur ce montant, 30 millions seront consacrés au financement du Fonds vert pour le climat. Cela illustre la volonté de la France de mobiliser des crédits en faveur des enjeux climatiques.
M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement. M. Marsac a souligné l’importance de la coopération décentralisée : nous avons en effet maintenu, voire très légèrement augmenté les crédits qui lui sont consacrés. Même si les montants concernés sont modestes, cela représente, dans le contexte budgétaire actuel, un signal fort en faveur de ce que Laurent Fabius appelle la « diplomatie des territoires ». L’action de la France, ce n’est pas seulement celle de l’État français, mais aussi celle de tout ce qui fait sa diversité, dont les collectivités locales et la société civile – d’où le doublement de l’aide transitant par les ONG.
Je connais, monsieur le député, votre implication sur les questions de nutrition. Sachez que nous avons modifié cet été la doctrine de l’Agence française de développement en matière agricole et pris l’engagement de doubler la part de ses investissements dans le secteur. Ce faisant, nous luttons contre la malnutrition et la sous-alimentation et nous contribuons à répondre, en Afrique notamment, à la nécessité, due aux évolutions démographiques que chacun connaît, de produire plus, intelligemment et de manière écologiquement soutenable.
Plusieurs orateurs ont évoqué l’objectif de porter le montant de l’aide au développement à 0,7 % du revenu national brut. À ce sujet, je vous renvoie aux propos du Président de la République : dès que la situation économique s’améliorera – et cela a déjà commencé –, nous serons en mesure de rétablir la trajectoire initiale. D’ailleurs, comme le fait apparaître l’indicateur APD – qui, il est vrai, agrège des données très différentes –, notre aide va passer de 0,45 à 0,46 %. Si elle n’a rien de glorieux, une telle progression montre que nous n’avons pas décidé, comme l’ont fait les Pays-Bas ou l’Espagne, de pratiquer des coupes claires dans les crédits consacrés au développement et à la solidarité internationale – songeons qu’en Espagne, leur réduction a atteint 60 %. Au contraire, notre logique est celle de la préservation. Nous sommes pour l’instant contraints de faire des efforts sur le plan budgétaire, mais dès que nous disposerons à nouveau de marges de manœuvre, nous reprendrons le chemin vers le 0,7 %.
Monsieur Christ, le manque de coordination et le faible pilotage de la politique d’aide au développement faisaient en effet partie des principales critiques formulées par l’OCDE, mais l’Organisation a publié depuis une évaluation des réformes mises en œuvre en juin dans laquelle elle se montre beaucoup moins négative, allant même jusqu’aux louanges dans certains paragraphes… Je me réjouis de cette évolution, qui montre que la politique de solidarité et de développement fait désormais l’objet, malgré la variété des ministères concernés, d’un véritable pilotage. En particulier, l’État parle d’une seule voix au conseil d’administration de l’Agence française de développement, sur laquelle il exerce pleinement sa tutelle – certains la jugent même trop pesante.
Je suis attentif à vos propos sur la transparence. Une des décisions prises lors du CICID du 31 juillet est justement d’appliquer, dès 2014, les standards de l’IATI dans les seize pays recueillant le plus de dons. La première étape a concerné le Mali, compte tenu de l’installation d’un nouveau gouvernement et des montants en jeu. Le site auquel je faisais référence tout à l’heure n’est pas, sur le plan technique, conforme aux standards de l’Initiative, mais il le sera l’année prochaine, de même que les quinze autres. Il s’agit d’un engagement important : jusqu’à présent, les gouvernements successifs n’avaient pas jugé bon de faire correspondre l’aide française aux standards internationaux en matière de transparence.
Vous avez dit que la taxe sur les transactions financières était détournée de son objet. J’ai conscience qu’une part encore faible de ses recettes – 10 % d’abord, 15 % ensuite – est affectée à l’aide publique au développement. Mais n’oubliez pas que nous partions de zéro ! J’espère que cette part va continuer à augmenter, mais en tout état de cause, nous avons déjà fait un bout du chemin.
D’ailleurs, lorsque l’on affirme, dans les enceintes internationales, que la France a mis en place une taxe sur les transactions financières dont 15 % du produit sont mis au service du développement, on est sûr d’être applaudi. Nous sommes en effet les seuls au monde à l’avoir fait, ce qui est un motif de fierté.
M. Jean-Louis Christ. Pour être exact, j’ai parlé de dévoiement de la taxe, et non de détournement.
M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement. Cela revient un peu au même.
Cela étant, madame Auroi, il est évident que l’usage de cette taxe au niveau de l’Union européenne constitue un enjeu important. Pour l’instant, la France est, avec la Belgique, le seul État qui a affirmé officiellement son souhait de consacrer au développement une partie « significative » des recettes de la future taxe européenne qui doit voir le jour au plus tard au 1er janvier 2014. Il ne s’agit donc pas de convaincre le Gouvernement, puisque sa position est connue, mais plutôt de voir celle-ci adoptée par la majorité des onze pays de l’Union qui ont décidé de mettre en place une coopération renforcée sur ce sujet. Et dans la mesure où les pays concernés ne sont pas nécessairement du même bord politique que nous, j’invite aussi les députés de l’opposition à user de leur influence sur leurs collègues européens.
En ce qui concerne le Fonds vert pour le climat, le chiffre cité par Benoît Hamon, 30 millions d’euros, est juste, mais je précise qu’il ne correspond qu’à la partie des recettes de la taxe sur les transactions financières qui viendra l’abonder, et non à la totalité de la contribution française, dont le montant sera rendu public dans le cadre de la négociation sur le climat.
Je pourrais consacrer des heures à la question de l’articulation entre le développement et le développement durable, qui constitue un des éléments centraux de mon action depuis dix-huit mois. Ainsi, nous avons décidé que tous les investissements de l’AFD dans le domaine agricole devraient respecter les règles internationales destinées à limiter l’accaparement des terres, au nom de la sécurité alimentaire. De plus, 50 % des engagements de l’Agence devront contribuer à réduire le changement climatique. Enfin, l’ensemble des projets présentés au conseil d’administration font désormais l’objet, outre d’un avis financier – car l’AFD, rappelons-le, est une banque –, d’un avis « développement durable » : le conseil pourra refuser un projet, si pertinent qu’il soit du point de vue financier, s’il ne répond pas à cet égard à certains critères. L’idée est de faire de l’Agence un leader dans la recherche d’un nouveau modèle de développement.
La francophonie, monsieur Dufau, ne relève pas directement de ma responsabilité. Mais à chaque fois que c’est possible, il va de soi que notre politique de développement – qu’elle concerne la santé, l’éducation, les infrastructures, la gouvernance ou les relations avec la société civile – contribue à promouvoir la francophonie, parfois de façon implicite. Ainsi, la transformation de l’actuel fonds social de développement en fonds des sociétés civiles du Sud et le recentrage de l’action des ambassades qu’il entraîne auront, de fait, un impact positif sur la francophonie.
Cela étant, la francophonie est, dans ma conception, une francophonie ouverte, plurielle, multiple, complémentaire avec d’autres langues. Les messages adressés, via les réseaux sociaux, aux innovateurs africains dans le cadre du Forum Afrique sont rédigés en français, mais aussi en anglais, voire en swahili, en bambara ou en peul, car ce sont aussi les langues parlées par nos interlocuteurs. C’est ainsi que l’on attirera dans l’espace francophone des gens qui aujourd’hui n’en font pas partie.
Sachez, monsieur Chauveau, que depuis l’année dernière, l’immense majorité des recettes résultant de financements innovants sont fléchées vers des enjeux de santé, à travers Unitaid, le Fonds mondial et un projet qui, à nouveau, nous rend exemplaires à l’échelle mondiale, l’initiative pour l’accès aux soins des enfants du Sahel. Une partie du produit de la taxe sur les transactions financières, à hauteur de 30 millions d’euros, est en effet destinée à faire bénéficier à 2 millions d’enfants de l’accès aux soins, de façon à améliorer leur situation sanitaire et à construire le capital humain sur lequel les pays concernés pourront fonder leur développement. Il s’agit d’une belle initiative, non seulement par son résultat, mais aussi en raison de l’origine de son financement. Nous sommes les premiers à le faire ; l’enjeu est que rapidement, nous ne soyons plus les seuls.
Pour finir, je remercie M. Gaymard et M. Mancel pour les propos qu’ils ont formulés à mon égard. Je crois effectivement que la politique d’aide publique au développement mérite d’être défendue avec énergie. Je compte sur vous pour que la loi que nous allons élaborer ensemble sur le sujet soit la plus ambitieuse possible.
M. Pierre-Alain Muet, président. Merci, monsieur le ministre délégué, d’avoir rappelé que l’objectif de 0,7 % n’était pas abandonné. Dès que nous serons sortis des difficultés budgétaires dont nous avons hérité, nous pourrons reprendre la marche destinée à l’atteindre.
De même, vous avez rappelé à juste titre que la France avait été un précurseur non seulement pour l’institution d’une taxe sur les transactions financières, mais aussi s’agissant de son affectation. Lorsqu’une coopération renforcée aura permis de la généraliser à l’échelle européenne, la taxe deviendra ce qu’elle doit être : une source importante de financement de l’aide au développement.
La discussion et le vote en séance publique des crédits de cette mission auront lieu le mercredi 6 novembre.
La réunion de la commission élargie s’achève à vingt-deux heures vingt.