Accueil > La séance publique > Les comptes rendus > Compte rendu provisoire de la séance

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit

Avertissement : version provisoire réalisée à 13:39

Deuxième séance du mercredi 15 mai 2013

Présidence de Mme Laurence Dumont
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.)

1

Adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable

Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable. (nos 775, 913, 879)

Présentation

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Madame la présidente, monsieur le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi que vous examinez ce soir est le troisième de cette législature portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, et le premier dans le domaine du développement durable.

La transposition de plusieurs textes européens regroupés sous une unique thématique dans un même projet de loi est un exercice pratiqué depuis plusieurs années. Mais tel qu’il est réalisé depuis peu, sous la forme de projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne – dit DDADUE – il constitue une nouveauté.

La création d’un comité de liaison avec le Parlement a renforcé la contribution des parlementaires à l’écriture du projet de loi. Dans ce cadre, les échanges entre le Gouvernement et le Parlement ont permis une définition précise du périmètre du texte.

Le travail des rapporteurs, Philippe Plisson pour la commission du développement durable et Frédéric Barbier pour la commission des affaires économiques, a permis d’approfondir les différents sujets. Je souhaite les remercier pour la qualité et la minutie du travail accompli.

L’enjeu est important. L’intégration de la législation européenne dans l’ordre juridique national, et dans les délais impartis, est une obligation essentielle inhérente à l’appartenance de la France à l’Union européenne. Tout manquement nous exposerait à des sanctions de la Cour de justice de l’Union européenne.

L’objectif fixé par la Commission européenne est de ne pas dépasser la proportion de 1 % de textes non transposés. Cette proportion s’élevait pour la France, au 1er octobre 2012, à 0,3 %, contre 0,6 % pour l’ensemble des pays de l’Union. La collaboration du Parlement et du Gouvernement permet ces bons résultats.

Le présent projet de loi prévoit, à lui seul, la transposition de six directives et l’amélioration d’ordonnances déjà transposées. Le texte initial prévoyait également la ratification de onze ordonnances. Le vote d’un amendement du rapporteur Philippe Plisson en commission permet d’y ajouter la ratification de l’ordonnance du 28 juin 2012 relative au système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Le Sénat avait déjà approuvé la ratification de ce texte essentiel, en ces temps où la mobilisation autour du marché carbone européen doit rester constante.

Si le texte est technique, son contenu transversal n’en est pas moins l’occasion pour nous d’échanger sur des sujets aussi essentiels que l’environnement, les transports et l’énergie, qui ont fait ou feront prochainement l’objet de projets de loi spécifiques.

Les trois titres du projet de loi prévoient des aménagements formels au code de l’énergie, à celui de l’environnement et à celui des transports, afin d’en améliorer la visibilité et la rationalité.

Le titre premier est relatif à l’environnement, à la santé et au travail. Il prévoit la transposition de la directive du 4 juillet 2012, dite « Seveso 3 », concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses. Le Gouvernement présentera deux amendements sur les plans de prévention des risques technologiques – PPRT. Déposés par plusieurs députés, dont M. Yves Blein, en commission, ils avaient été déclarés irrecevables au titre de l’article 40. Ces amendements s’inscrivant dans le champ d’application de la transposition de certaines dispositions de la directive « Seveso 2 » et portant sur le financement des PPRT, je m’étais engagée en commission à les redéposer au nom du Gouvernement.

Par ailleurs, dans le titre premier, l’introduction de nouvelles exigences du règlement du 22 mai 2012 concernant la mise sur le marché et l’utilisation des produits biocides permet certaines avancées en matière de santé environnementale.

Il est également prévu d’adapter le droit national à différentes exigences communautaires concernant la surveillance et les conditions de mise sur le marché des produits et équipements à risques tels que les artifices pyrotechniques, les appareils à gaz et les équipements sous pression, qui seront ainsi améliorées.

L’ordonnance tire les conséquences de deux décisions du 24 juillet 2009 du Conseil d’État annulant plusieurs dispositions de la partie réglementaire du code de l’environnement, issues de deux décrets relatifs aux procédures d’autorisation d’organismes génétiquement modifiés.

L’article 10 du projet de loi prévoit également la ratification de cinq ordonnances portant sur l’institution d’un comité d’entreprise européen ou d’une procédure en vue d’informer et de consulter les travailleurs.

L’ordonnance du 5 janvier 2012 a pour but d’adapter le dispositif législatif français aux nouvelles dispositions du droit communautaire prévues par la directive du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.

L’ordonnance du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement est également ratifiée, sans modification.

Ce sujet fait l’objet de discussions au sein des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement, que j’ai lancés ; nous aurons l’occasion d’en débattre prochainement dans le cadre de la discussion du projet de loi sur la biodiversité.

Par ailleurs, les dispositions du code rural et de la pêche maritime relatives à l’exercice de la profession de vétérinaire, modifiées par la directive relative aux services dans le marché intérieur du point de vue de la liberté d’établissement et de la libre prestation, ont suscité des échanges avec les professionnels concernés lors de l’élaboration du texte.

S’agissant des transports, le projet de loi touche à diverses questions. Je m’attacherai à évoquer les trois directives qu’il doit permettre de transposer en droit français.

Il s’agit d’abord de la directive du 25 octobre 2011 facilitant l’échange transfrontalier d’informations concernant les infractions en matière de sécurité routière, qui permet aux États membres de communiquer les informations d’immatriculation des véhicules en situation d’infraction.

La directive du 27 septembre 2011 relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, dite « Eurovignette », encadre les péages perçus sur les axes routiers du réseau transeuropéen de transport et sur l’ensemble des autoroutes de l’Union. Elle prévoit la possibilité d’appliquer le principe pollueur-payeur. La France avait déjà anticipé cette directive et poursuit son action avec l’entrée en vigueur de l’écotaxe poids-lourds le 1er octobre prochain, dans des conditions protectrices pour les transporteurs grâce au mécanisme de majoration du prix de transport voté par le Parlement au mois d’avril.

Enfin, la directive du 16 février 2009 relative à la convention du travail maritime de février 2006 est également transposée. Premier instrument juridiquement contraignant de l’Organisation internationale du travail, cette convention met en place un ensemble de normes couvrant les différents domaines du droit social dans le secteur du transport maritime.

Elle fixe des normes minimales applicables à bord des navires, notamment en matière de conditions d’emploi, de santé, de sécurité au travail, d’hygiène et de bien-être, en vue de contribuer à l’amélioration des conditions de travail et de vie des gens de mer. Ce texte apporte des compléments très attendus par la profession et a fait l’objet de nombreux échanges avec les acteurs du transport maritime.

Enfin, le titre III prévoit la transposition de deux directives dans le champ de l’énergie.

La transposition de la directive du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique est conforme à l’engagement pris par le Président de la République lors de la Conférence environnementale.

Le choix a été fait de n’en transposer qu’un seul article, de façon anticipée, afin de préparer les grandes entreprises concernées à l’instauration d’un audit énergétique obligatoire d’ici le 1er décembre 2015, date d’entrée en vigueur de la directive.

Enfin, l’article 30 prévoit la transposition de la directive du 14 septembre 2009 faisant obligation aux États membres de maintenir un niveau minimal de stocks de pétrole brut et produits pétroliers.

Le titre III prévoit également la ratification de l’ordonnance du 14 septembre 2011, qui procède elle-même à la transposition en droit français des dispositions de deux directives d’avril 2009 relatives aux énergies renouvelables et aux biocarburants.

L’ordonnance du 9 mai 2011 porte codification des textes relatifs à l’énergie, en même temps qu’elle intègre au nouveau code les dispositions de transposition des directives relatives aux règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et pour celui du gaz naturel.

Je souhaite revenir un instant sur la directive relative à l’efficacité énergétique. Nous avons eu une discussion en commission – nous l’aurons certainement de nouveau – portant sur les certificats d’économies d’énergie. Les économies d’énergie sont, vous le savez, l’un des axes prioritaires de la transition énergétique et les certificats d’économies d’énergie constituent un dispositif efficace pour agir dans les secteurs diffus.

Toutefois, le dispositif actuel a montré ses limites. Sa refonte est en cours, en vue du lancement de la troisième période des certificats d’économies d’énergie, qui sera ambitieuse. Des réformes structurelles doivent être envisagées pour rendre le système plus simple, plus efficace et plus ciblé, notamment sur la rénovation énergétique des passoires thermiques et des logements précaires.

La consultation publique que j’ai lancée à ce sujet le 19 février s’est terminée à la mi-avril. L’évaluation des résultats est en cours. Vous le savez, le Premier ministre et le Gouvernement ont demandé à la Cour des comptes d’évaluer le dispositif existant.

L’objectif global de la deuxième période est aujourd’hui atteint, ce qui conduit à un ralentissement des actions d’économies d’énergie alors qu’il faut au contraire monter en puissance pour atteindre le régime de croisière, fixé par la directive efficacité énergétique à 1,5 % des ventes nationales d’énergie, hors transports.

Pour assurer la continuité du dispositif des certificats d’économies d’énergie, et dans l’attente du démarrage de la troisième période, j’ai décidé de lancer une période transitoire à partir du 1er janvier 2014. Je veux qu’il y ait continuité entre la période actuelle et la troisième période, dont les modalités précises doivent faire l’objet d’un débat avec l’ensemble des acteurs. Le taux d’effort actuel sera donc maintenu à un niveau identique. Les modalités de cette période transitoire seront identiques à celles de la deuxième période des certificats d’économies d’énergie.

Cependant, une simplification immédiate, proposée dans le cadre de la consultation publique, sera apportée en concertation avec les parties prenantes : il s’agit de la création d’un comité professionnel obligé unique de la filière fioul domestique, pour rassembler sous un même toit tous les acteurs de ce secteur.

La mise en œuvre effective de cette période transitoire se fera d’ici septembre 2013. La période transitoire durera jusqu’à la mise en œuvre de la troisième période. Pour cette dernière, le Gouvernement souhaite un objectif ambitieux d’au moins 200 térawattheures par an, conforme à nos engagements dans le cadre de la directive efficacité énergétique.

La concertation sur les réformes structurelles permettant de rendre le dispositif plus simple et plus efficace est engagée. J’attends les recommandations de la Cour des comptes et de la mission confiée à la CDC Climat sur les mécanismes de financement de l’efficacité énergétique. Telles sont les précisions que je tenais à apporter ce soir pour répondre aux questionnements de l’ensemble des acteurs concernés.

Voilà ce que je voulais dire en introduction à nos débats. Je me tiens désormais à votre écoute. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Philippe Plisson, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Le projet de loi dont nous débattons ce soir en première lecture, soumis à la procédure d’examen accélérée, a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 6 mars.

Saisie au fond, la commission du développement durable l’a examiné le 9 avril. La commission des affaires économiques, qui s’est saisie pour avis des articles 9 et 27 à 30, y a consacré sa réunion du 2 avril.

Ce texte portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable a été qualifié par Guillaume Chevrollier de « projet de loi révélateur des facultés de la technostructure européenne et française à produire des textes complexes et peu lisibles ».

Trop complexe, trop peu lisible, ce texte l’est effectivement, car il retranscrit toutes les obscurités, toutes les redondances, toutes les redites des directives européennes d’origine avec une méticulosité, un souci de l’exactitude et du détail qui forcent l’admiration. Je ne suis pas sûr que, dans la demi-pénombre de leur scriptorium, les moines du Mont-Saint-Michel mettaient plus de zèle à coucher sur parchemin ce qu’ils définissaient comme les enseignements divins ! (Sourires.)

Une fois que la jurisprudence aura rajouté de ses doigts de fée un niveau de complexité supplémentaire, je crains fort que les acteurs ne se trouvent rapidement embarrassés pour mettre en œuvre des dispositions qui les concernent pourtant au premier chef.

Toutes sensibilités politiques confondues, les membres de la commission du développement durable ont, par ailleurs, souligné et déploré le caractère extrêmement disparate du texte et l’impression de fouillis qui s’en dégage. S’agit-il même d’un véritable projet de loi, au plein sens du terme, ou plutôt d’une juxtaposition de « paquets » plus ou moins normatifs, traitant successivement de la prévention des risques industriels, des produits biocides, des professions vétérinaires, de Saint-Barthélemy, de la taxation des poids lourds, des conditions du travail maritime ou encore de l’efficacité énergétique ? Poser la question, c’est déjà donner la réponse.

Compte tenu de l’encombrement de l’ordre du jour parlementaire, ce sont des considérations d’efficacité qui ont conduit à faire ce choix de regrouper un ensemble de dispositions en attente de transposition sous le chapeau d’un texte fourre-tout. Je les comprends parfaitement, même si la députée que vous avez été, madame la ministre, imagine sans doute ce que l’exercice peut avoir de frustrant pour les parlementaires.

Mme Delphine Batho, ministre. Absolument !

M. Philippe Plisson, rapporteur. Par ailleurs, je veux aussi saluer la démarche qui a consisté, au-delà de la transposition pure et simple, à tenter de remettre d’aplomb des réglementations incomplètement transposées. C’est par exemple le cas pour ce qui concerne les produits et équipements à risques : il est en effet apparu que les différentes directives « produits » avaient été imparfaitement transposées, certaines dispositions étant manquantes en droit français et d’autres, relevant pourtant de la loi, déclassées au niveau réglementaire.

Il faut donc vous donner acte de ce travail salutaire de remise en ordre – et regretter incidemment qu’il n’ait pas été réalisé plus tôt.

La présentation très claire et très complète du projet de loi que vous venez de faire, madame la ministre, me pousse à ne pas me livrer au même exercice. Évitant ainsi une comparaison dont je ne serais assurément pas sorti vainqueur (Sourires), je me concentrerai sur quelques questions.

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Modeste !

M. Philippe Plisson, rapporteur. Il ne faut jamais rater l’occasion de décerner quelques lauriers…

Le titre Ier du texte porte notamment sur la transposition en droit français de la directive du 4 juillet 2012, dite « Seveso 3 ».

Alors que, de manière générale, les entretiens que j’ai eus avec vos services ont constamment fait apparaître leur souci de réaliser une transposition « au plus près », pour éviter tout risque de contentieux ultérieur, je m’interroge sur le traitement particulier réservé à la clause des 2 %, clause qui figure explicitement dans la note 3 de l’annexe I de la directive du 4 juillet 2012.

Je rappelle ici, pour la parfaite intelligibilité du débat, ce dont il s’agit : de manière générale, les quantités de substances dangereuses qui doivent être prises en considération pour l’application des articles concernés de la directive sont les quantités maximales qui sont présentes ou susceptibles de l’être à n’importe quel moment. Par dérogation à ce principe, les substances dangereuses présentes dans un établissement en quantités inférieures ou égales à 2 % seulement de la quantité seuil pertinente ne sont pas prises en compte dans le calcul de la quantité totale présente si leur localisation à l’intérieur de l’établissement est telle que les substances ne peuvent déclencher un accident majeur ailleurs dans cet établissement. C’est ce qu’on appelle la clause des 2 %. Méfiez-vous, je ferai une interrogation écrite ! (Sourires.)

L’application ou non de cette disposition aura naturellement un impact important sur le périmètre des installations soumises à la réglementation Seveso. Dans la mesure où, je le redis, cette clause figure bien dans le texte même de la directive, pourriez-vous, madame la ministre, nous préciser votre position sur ce sujet – nous dire les raisons d’un choix qui nous expose à un risque contentieux ou au contraire nous confirmer que cette règle se trouvera bien reprise, à terme, en droit français, dans le cadre d’un instrument non pas législatif mais réglementaire ?

Un mot également pour saluer les avancées réalisées devant la commission du développement durable en matière de règles applicables aux plans de prévention des risques technologiques. Yves Blein, que je salue ce soir et dont chacun connaît l’action à la tête d’Amaris, a défendu une série d’amendements qui ont été adoptés, relatifs, par exemple, à la fixation de plafonds pour le montant des travaux ou au partage des charges entre les différents financeurs.

D’autres amendements, irrecevables au regard des dispositions de l’article 40 de la Constitution, ont reçu un accueil favorable du Gouvernement qui a bien voulu les reprendre sous son timbre. Nous en discuterons tout à l’heure. Ils permettent d’enregistrer d’autres avancées substantielles, d’autant mieux venues que la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques se heurte à des difficultés récurrentes et préoccupantes depuis plusieurs années.

Comme je l’ai indiqué, le projet de loi comprend des mesures très diverses. L’application à Saint-Barthélemy des règles européennes en matière de transport aérien en fait partie. Je rappellerai très brièvement – car cette question a fait l’unanimité en commission – que cette collectivité est passée du statut de « région ultrapériphérique » à celui de « pays et territoire d’outre-mer » au sein de l’Union européenne. Le droit dérivé cessant d’y être en vigueur, il y avait un risque de vide juridique pour toute une série de dispositions relatives aux entreprises de transport aérien, concernant l’exercice de leur activité, leur régime de responsabilité ou encore les mesures de police.

L’article 11 introduit en conséquence dans le code des transports de nouveaux articles qui comblent ce vide et garantissent à nouveau la bonne application du droit aérien à Saint-Barthélemy. Je rappelle à ce propos que cette île dépend largement du transport aérien pour ses activités économiques et qu’elle a besoin en conséquence d’un cadre juridique sûr.

Dans le domaine des transports toujours, plusieurs articles du projet de loi concernent le transport routier. L’échange transfrontalier d’informations sur les infractions au code de la route, prévu par l’article 25, est une avancée juridique importante qui fait progresser la coopération policière et judiciaire dans l’Union européenne.

L’article 12 est directement lié à nos préoccupations de développement durable puisqu’il opère la transposition de plusieurs dispositions de la directive sur la taxation des poids lourds, dite directive « Eurovignette ».

Nous avons évoqué cette directive lors de nos débats sur l’écotaxe poids lourds. Elle constitue le cadre juridique européen de la future taxe.

M. Martial Saddier. Quels débats !

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cette fois-ci, il s’agit, toujours pour prendre en compte les externalités négatives de la circulation des poids lourds pour l’environnement et son coût pour l’entretien des routes, de transposer deux dispositions. D’abord, à l’avenir, il sera obligatoire de moduler les péages en fonction du niveau d’émissions polluantes des poids lourds. Il sera par ailleurs possible – et je suis convaincu qu’il faudra utiliser pleinement cette faculté – de les moduler en fonction de la congestion du réseau.

Madame la ministre, compte tenu des durées respectives des contrats de concession en cours, selon quel calendrier la modulation des péages liée aux émissions polluantes sera-t-elle effective ? D’autre part, le Gouvernement a-t-il bien l’intention de concrétiser la notion de modulation des péages en fonction de la congestion, et si oui dans quelles zones ?

Les dispositions relatives au transport maritime occupent une grande partie du texte, des articles 13 à 22. Je n’en dirai que peu de chose, car elles ont fait consensus, mais tout de même : félicitons-nous du renforcement des droits des marins et des gens de mer par l’intégration dans le droit national des clauses issues des négociations de l’OMI et de l’OIT. Félicitons-nous de l’exigence accrue de qualification professionnelle à bord des embarcations, du contrôle systématique de l’aptitude médicale des personnes du bord, du droit au rapatriement des malades et du cadre juridique renforcé des agences de placement.

Il faut avoir à cœur de lutter, partout, pour les conditions de travail des salariés et pour la sécurité des biens et des personnes. Ce projet de loi y contribue grandement dans le milieu maritime. Je tiens à vous saluer pour cela, madame la ministre et, si vous me le permettez, à saluer tout autant votre ministre délégué, Frédéric Cuvillier.

Un dernier mot enfin quant aux dispositions relatives à l’énergie. Je passerai sur l’interminable liste de corrections que nous devons effectuer dans le code de l’énergie issu des ordonnances de codification. Reconnaissons que le législateur commet parfois des erreurs ; constatons que l’administration qui légifère en commet bien davantage ! Ce qui souligne l’intérêt de la procédure parlementaire et notre répugnance à y déroger pour laisser au Gouvernement les clefs du camion…

La directive relative à l’efficacité énergétique est transposée à l’article 29. Ces dispositions ne concernent que les grandes entreprises, mais c’est un premier pas que nous votons avec enthousiasme. Je précise à certains collègues qui pourraient s’inquiéter d’une atteinte à notre compétitivité que le taux de suite des audits énergétiques est aujourd’hui de près de 75 %, alors même qu’aucune obligation ne pèse sur les sociétés. Les meilleurs gestionnaires ont bien compris tout le gain que l’on peut espérer d’une rationalisation de la consommation énergétique, et je gage que tous se réjouiront de voir baisser leur facture, une fois mises en application des recommandations souvent peu coûteuses et parfois même gratuites.

Enfin, madame la ministre, vous avez agréé ma suggestion de profiter de ce projet de loi pour ratifier l’ordonnance relative aux marchés de carbone et permettre ainsi à l’Assemblée nationale de consacrer son ordre du jour à d’autres dossiers très attendus. Je ne saurais trop vous en remercier.

Je ne suis pas certain que ce projet de loi DDADUE suscite, entre ces murs ou dans la rue, des controverses et des passions comparables à celles qui ont accompagné le mariage pour tous. Peut-être d’ailleurs ne faut-il pas le regretter…

Sous le bénéfice d’une série d’amendements, votre rapporteur vous recommande donc, avec un enthousiasme qu’il peine à dissimuler (Sourires), d’adopter un texte pleinement inscrit dans l’obligation qui nous incombe de mettre en conformité l’ordre juridique national avec la législation d’origine communautaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Frédéric Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Sur le fondement de ses compétences dans les domaines de l’agriculture et de l’énergie, la commission s’est saisie pour avis de cinq articles du projet de loi que nous examinons aujourd’hui.

Ils portent sur des thèmes très divers : l’exercice de la profession vétérinaire, la production de biocarburants, l’électricité d’origine renouvelable, l’organisation du marché de l’électricité et du gaz, l’efficacité énergétique et les stocks pétroliers stratégiques. Ils procèdent à une transposition de plusieurs directives européennes, directement ou via la ratification d’ordonnances.

Pour ce qui est de la profession vétérinaire, la directive « services » a pour objectif de faciliter la liberté d’établissement des prestataires de service dans les pays membres de l’Union européenne. Notre droit à l’heure actuelle n’y est pas conforme pour cette profession particulière, considérée en France comme un maillon essentiel de la santé publique quand elle est vue comme une activité commerciale dans d’autres pays membres. Nous avons donc dû nous conformer à la directive tout en essayant de conserver cette particularité. Le texte instaure ainsi un certain nombre de garde-fous, qui préviennent les conflits d’intérêt et la résurgence d’intérêts commerciaux. Il faut également noter qu’il renforce les pouvoirs de contrôle de l’ordre des vétérinaires. Cette transposition me semble donc satisfaisante et équilibrée.

En ce qui concerne l’énergie, je n’évoquerai que les grandes lignes de chaque sujet dont nous sommes saisis, exception faite de la partie efficacité énergétique, sur laquelle j’aimerais m’attarder.

L’article 27, relatif à la production de biocarburants, est une déclinaison du « triple 20 » qui incite chaque pays membre à atteindre 23 % d’énergies renouvelables dans sa consommation finale d’énergie d’ici à 2020. L’encadrement du marché des certificats verts et l’attention portée à la durabilité des biocarburants, qui incite au développement des carburants de deuxième génération, sont de bonnes orientations.

La partie organisation du marché de l’électricité et du gaz conforte notre modèle, avec l’introduction de sanctions en cas de non-respect pour un fournisseur d’énergie de ses obligations de capacité. Je n’ai pas de remarque particulière à ce sujet.

En revanche, la partie efficacité énergétique nécessite à mon sens certains ajustements. L’article 29 impose à toutes les grandes entreprises de réaliser un audit énergétique avant le 5 décembre 2015, puis tous les quatre ans. Il prévoit également des sanctions en cas de non-respect. Si la transposition de cette obligation dans le droit français semble faire l’objet d’un consensus, il demeure deux points qui suscitent des interrogations.

D’abord, le délai laissé aux entreprises est vraiment très court. D’ici le 5 décembre 2015, plusieurs étapes sont en effet nécessaires, à commencer par voter les dispositions législatives et élaborer les textes d’application. Certes, un travail de concertation a déjà été mené, mais demeurent encore des inconnues : par exemple, comment l’obligation de réaliser un audit s’appliquera-t-elle aux entreprises qui disposent de très nombreux petits sites disséminés sur le territoire ?

Ce n’est qu’une fois que les textes réglementaires seront parus que les auditeurs pourront être formés. Et il faut prendre en compte la nécessité pour les filières locales de se structurer.

Enfin, il y aura l’étape de la réalisation des audits à proprement parler. Les entreprises ne prendront pas le risque de réaliser un audit sans être définitivement fixées sur le contenu de l’obligation, sans quoi elles s’exposeraient à tout devoir recommencer.

Il ne leur restera donc que des délais très serrés et, pour les respecter, il est à craindre que les entreprises et les bureaux d’étude privilégient la quantité sur la qualité. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement pour repousser la date limite d’un an. J’ai bien conscience de la difficulté qu’il pose, car il serait contraire à la directive sur l’efficacité énergétique. Mais je veux tout de même attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de prendre les textes d’application rapidement, sans quoi les entreprises se retrouveront dans une situation difficile.

Second point à éclaircir, les préconisations des audits énergétiques ne seront pas obligatoirement suivies, car la loi met en œuvre une obligation de moyens et non de résultats.

Si l’on peut aisément convenir que le préalable à toute action de maîtrise de la demande d’énergie est un diagnostic bien réalisé, comment pousser les entreprises à suivre les préconisations de l’audit ? Selon l’ADEME, 73 % d’entre elles passent à l’acte. Ce chiffre suscite l’optimisme, mais il faut néanmoins le relativiser. En effet, les actions mises en œuvre ne couvrent que 20 à 25 % des préconisations.

C’est pourquoi j’ai déposé un amendement qui oblige les entreprises à transmettre à l’administration un rapport très succinct sur le suivi des préconisations de l’audit, dans un délai de deux ans après sa réalisation.

Enfin, le dernier article dont la commission des affaires économiques a été saisie a trait aux stocks pétroliers stratégiques. Il oblige les États membres à maintenir un niveau minimal de stocks de pétrole brut et change le statut et la nature du lien entre divers opérateurs, sans conséquences économiques. Cela ne pose pas de difficulté.

Ce texte, qui manque de cohérence dans sa globalité, n’en reste pas moins une transposition que je juge plus que satisfaisante des différentes directives européennes évoquées. Il est tout à fait conforme à leur esprit, tout en préservant nos spécificités quand elles méritent de l’être. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Les projets de loi portant diverses mesures d’adaptation de notre législation au droit de l’Union européenne sont toujours des moments particuliers pour notre assemblée et l’actuel projet, dit « DDADUE écologie », n’échappe pas à la règle. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, qui l’a examiné au fond, a été à la fois surprise, pour ne pas dire perplexe, par la diversité des sujets abordés et leur caractère transversal, et désappointée par la marge étroite qui nous est laissée dans notre mission de législateur. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

En effet, le projet de loi vise non seulement à assurer la transposition obligatoire en droit français de six directives et à améliorer l’application d’un certain nombre d’autres déjà transposées, mais également à ratifier onze ordonnances – douze en fait, depuis que la commission a adopté l’amendement portant sur celle relative au changement climatique.

Bien que le titre du projet de loi mentionne seulement le domaine du développement durable, force est de constater que bien d’autres départements ministériels que celui de l’écologie sont concernés par ses dispositions : les transports, l’énergie, la santé, l’intérieur, l’agriculture, voire la mer.

C’est ainsi, comme l’a souligné notre rapporteur Philippe Plisson, que je remercie à cette occasion pour la qualité de son travail, que plus de la moitié du texte est consacrée au transport maritime et fixe de nouvelles normes applicables à bord des navires, apportant des compléments très attendus par toute la profession. Avancée juridique, progrès social pour les marins embarqués, clarification des normes, avez-vous dit madame la ministre lors de la discussion générale : autant d’objectifs que nous partageons volontiers avec vous.

Le travail réalisé par la commission du développement durable a porté essentiellement sur la remise en forme d’un texte disparate et technique qui n’a brillé, je regrette de le souligner ici, madame la ministre, ni par sa facture, ni par sa cohérence législative.

M. Julien Aubert. Oh !

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable. C’est la loi du genre, il faut bien le reconnaître, et sous la précédente législature, nous avons également eu à examiner des textes semblables.

M. Julien Aubert. Moins souvent !

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable. Tout bien considéré, le Parlement reste dans son rôle en corrigeant un texte perfectible sur la forme afin de lever toute ambiguïté.

Mais notre travail n’est pas achevé et l’occasion nous est donnée d’approfondir notre réflexion sur quelques sujets, notamment sur l’application de la directive « Seveso 3 » et la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques autour des sites industriels à risques.

Le foisonnement des dispositions techniques ne doit pas faire oublier que certaines d’entre elles sont emblématiques. Il en va ainsi de l’application de la directive « Eurovignette », dont on ne souligne jamais assez les objectifs en matière de report modal ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou alors de la prescription des audits énergétiques dans les grandes entreprises, premier pas, encore modeste, vers une meilleure prise de conscience de la nécessité de réduire la consommation d’énergie afin d’atteindre nos objectifs en ce domaine. Là encore, l’enjeu est considérable et mérite d’être souligné.

Il nous restera à compléter l’adoption de ce texte par l’organisation dans l’hémicycle de deux débats dont nous sentons tous la nécessité.

Le premier devrait porter sur la situation du marché européen du carbone, dont l’adoption du nouvel article 30 bis nous prive – mais je sais, madame la ministre, que vous y êtes très favorable.

Le second pourrait concerner les sites industriels à risques, car bien des questions n’ont pas encore trouvé de réponse satisfaisante, en particulier sur la prise en charge du coût des travaux de mise en conformité.

J’ajouterai un troisième débat portant sur le schéma national des infrastructures de transport, dès que la commission Mobilité 21 aura terminé ses travaux.

Le Gouvernement a engagé la procédure accélérée afin que les mesures essentielles puissent être mises en œuvre dans les meilleurs délais.

Pour toutes ces raisons, j’invite l’Assemblée à adopter le projet de loi en discussion dans le texte voté par notre commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Julien Aubert. Très bien !

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Si l’objet principal du texte que nous examinons aujourd’hui est avant tout de transposer des directives communautaires, il n’en demeure pas moins que les thématiques traitées représentent des enjeux majeurs liés au développement durable.

L’importance que revêtent de tels sujets, leur complexité, leur technicité nous ont amenés à regretter un agencement de propositions et de dispositions sans aucun fil conducteur.

Toutefois, passé le manque de cohérence et l’aspect fourre-tout de ce projet de loi, force est de constater que nombre des sujets traités, d’importance inégale, étaient attendus depuis longtemps.

En effet, comme cela a pu être rappelé en commission, l’intégration de la législation européenne dans l’ordre juridique national n’est pas seulement une obligation inhérente à tout État membre de l’Union, dont le manquement serait sanctionné, mais plus fondamentalement, le groupe UDI le croit sincèrement, l’expression d’un processus d’harmonisation éminemment nécessaire au niveau européen.

La politique environnementale du Gouvernement manquant singulièrement d’ambition…

M. Julien Aubert. Ah oui !

M. Bertrand Pancher. …et, par conséquent, de traduction législative depuis plus d’un an, aucun support législatif réellement convenable n’avait pu être identifié pour examiner ces dispositions. C’est la raison d’être du présent texte.

Nous ne vous ferons pas grief d’avoir choisi d’utiliser un texte balai pour toutes ces transpositions, tout en soulignant que les délais de cette procédure sont trop restreints pour pouvoir mener des travaux approfondis.

Mais en dépit de difficultés de forme, le projet pourrait être relativement consensuel sur le fond. Tout n’y est cependant pas parfait, loin s’en faut, et les amendements que le groupe UDI a portés en commission et aujourd’hui en séance – et malheureusement peut-être aussi vendredi, en raison du fonctionnement fou de notre assemblée – sont là pour le rappeler.

Je ne m’attarderai pas sur les dispositions les plus consensuelles du projet de loi, pour en venir directement aux points d’achoppement qui sont apparus au cours de nos travaux.

Ainsi, les dispositifs relatifs à la mise à disposition sur le marché et à l’utilisation des produits biocides n’ont pas manqué de poser un certain nombre de questions, et notamment celle du transfert à l’Agence européenne des produits chimiques du rôle de coordination de l’évaluation des substances actives biocides.

Harmoniser et transcrire, ce n’est pas marginaliser ou externaliser.

Que devient dès lors l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, qui fournit un travail remarqué par tous ? Comment concevoir son rôle en la matière ? Une coordination paraît souhaitable avec l’Agence européenne, dont les moyens sont renforcés alors qu’elle fut mise en cause, parfois gravement, du fait de certaines de ses positions. Ce renforcement, s’il était attendu, crée la controverse.

L’article 12, qui procède à la transposition de la directive relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, soulève plus de questions : l’application du principe pollueur-payeur élargi à des coûts externes comme le bruit ou la qualité de l’air demeure facultative. Nous aurions souhaité que vous fassiez preuve de plus de volontarisme sur ce sujet.

La remise en cause des conditions d’exercice de la profession de vétérinaire a également suscité des interrogations, et je me félicite que l’amendement de notre collègue UMP Jean-Pierre Vigier ait mis l’accent sur la protection de la médecine vétérinaire, son indépendance et la déontologie dont elle doit faire preuve.

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Bertrand Pancher. Autre thématique capitale : la problématique énergétique, et notamment l’activité gazière et le transport du gaz. Dans ce domaine, nous avons plusieurs propositions et je me félicite de l’adoption d’un amendement qui ouvre explicitement la possibilité pour les entreprises de transport de gaz d’exercer diverses activités en dehors de l’espace communautaire.

De même, l’instauration d’un audit énergétique obligatoire dans les grandes entreprises, souhaitable, n’en pose pas moins des difficultés de calendrier : près de 5 000 entreprises devront être auditées d’ici à décembre 2015. Si l’on estime la durée d’un audit à trois semaines, plus de 500 auditeurs devront être agréés, ce qui devrait prendre environ un an. Si la disposition législative correspondante est adoptée en 2014, les auditeurs seront prêts en 2015, ce qui laissera moins d’un an aux entreprises pour respecter leurs obligations en la matière. On peut donc être dubitatif sur les possibilités de mise en œuvre de la mesure dans les délais prévus et souhaiter davantage de souplesse pour ces entreprises. Nous y reviendrons au cours des débats.

Une fois de plus, la technicité des sujets suppose une précision et une exigence considérables. C’est dans cet objectif que nous avons souhaité accentuer l’intervention du ministre en charge de l’énergie à défaut de recourir à la voie réglementaire, peu convaincante. Et c’est dans ce même esprit que nous défendrons des amendements visant à clarifier et à simplifier la rédaction du code de l’énergie.

En conclusion, je souhaite insister sur le fait que si le texte est globalement acceptable, il n’en est pas de même pour l’une de ses dispositions très importantes, celle de l’article 10 visant à ratifier l’ordonnance du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement.

Cette disposition autorisait le Gouvernement à prendre des mesures de bon sens pour, notamment, regrouper les procédures ainsi que les sanctions, voire rendre davantage applicables les peines en cas de manquements au droit de l’environnement par le biais, en particulier, des transactions. Nous avons détecté, très récemment il est vrai, beaucoup d’erreurs – mais il faut reconnaître que le peu de moyens à notre disposition ainsi que la complexité du texte rendent nos missions très difficiles.

Parmi ces erreurs, une grave omission : la méconnaissance du droit de la défense dans le cadre de la généralisation des transactions. Nous introduisions des transactions, il fallait évidemment aménager un droit à la défense. Pourquoi ne pas avoir prévu la communication des procès-verbaux ainsi que le droit à l’assistance d’un avocat ? Cette simple omission amènera inéluctablement le Conseil constitutionnel à rejeter ces dispositions. De même, des oublis fâcheux conduiront à ne plus considérer demain ce qui était hier un délit. Si aujourd’hui l’absence d’exécution d’une mise en demeure est ainsi un délit, ce ne sera plus le cas demain.

Autre exemple : nous n’avons pas débattu des raisons pour lesquelles on ne condamne pas l’absence de respect d’une décision du juge administratif en matière d’environnement ou on n’oblige pas une collectivité à exécuter une condamnation par ce même juge.

J’ai déposé en hâte des amendements en commission du développement durable, soutenus par les juristes de France Nature Environnement, extrêmement inquiets sur un grand nombre de sujets. Je les avais d’ailleurs encore au téléphone lors de la dernière réunion de la commission du développement durable. Ils m’ont bien répété qu’ils contestaient le texte tel qu’il était rédigé, lequel ne pourrait pas être mis en œuvre. Et l’on demande au Parlement de ratifier une ordonnance avec des orientations de fonds qui n’ont jamais été discutées !

C’est d’autant plus étonnant que le Gouvernement a décidé d’engager des états généraux du droit de l’environnement. Que s’est-il passé pour en arriver là, madame la ministre ? J’ai discuté de ces amendements avec notre excellent rapporteur, pour qui il s’agit de mesures de bon sens mais qui arrivent au dernier moment et qui seront certainement réexaminées dans le cadre des états généraux. Pourquoi alors vouloir reprendre aujourd’hui cette ordonnance, alors que tout un travail de fond est actuellement lancé ?

Nous sommes très inquiets de la précipitation avec laquelle vous voulez ratifier une ordonnance qui ne tient pas compte de l’esprit de l’autorisation donnée au Gouvernement à l’époque.

J’espère que les amendements déposés par notre groupe en commission seront reçus favorablement et que nous obtiendrons des réponses précises à ces questions, qui inquiètent la seule grande organisation environnementale française qui a vraiment travaillé d’arrache pied sur ce sujet et qui a d’ailleurs eu à plusieurs reprises votre cabinet au téléphone, madame la ministre.

Je souhaite donc que nous obtenions des réponses positives, faute de quoi, contrairement à ma prise de position en commission, nous réexaminerons les conditions de notre vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Vigier. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. Nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner ce projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable.

Soyons clairs – même si, dans ce domaine, ce n’est pas forcément facile, il faut bien le reconnaître – il s’agit de transposer six directives, ainsi que d’autres textes juridiques issus du droit de l’Union européenne, pour lesquelles la France est en retard.

Ce projet de loi va donc intégrer dans notre droit national des textes importants pour l’environnement. Nous avons l’obligation de le faire, et ce n’est pas un député du groupe RRDP, fondamentalement européen, qui va le regretter.

Au-delà de la diversité des sujets abordés, nous avons le devoir de bâtir cet édifice juridique commun à l’ensemble des pays de l’Union, comme cela a été le cas cet après-midi pour le renforcement des droits aux personnes. Cela permet plus de justice pour nos concitoyens européens.

Le groupe RRDP est très attaché à cette construction, et nous aimerions qu’il en soit de même pour les domaines fiscaux ou sociaux que pour le droit environnemental dont nous allons maintenant discuter.

Cette activité législative est certes formelle et technique, mais ces textes ne sont pas anodins.

En effet, ce projet de loi est un véhicule législatif pour transporter en urgence…

M. Julien Aubert. Pour balayer !

M. Jacques Krabal. …des textes qui auront une portée normative pour une grande partie de nos concitoyens, en particulier les agriculteurs, les gens de mer, les chefs d’entreprises industrielles ou encore les transporteurs routiers.

Dans le titre Ier, il est question de dispositions relatives à l’environnement et à la santé au travail. Il transpose la directive Seveso 3 du 4 juillet 2012, qui traite de la prévention des risques liés aux substances dangereuses. En tant que rapporteur du programme 181 « Prévention des risques », j’étais intervenu en commission à ce sujet et je vous remercie, madame la ministre, de m’avoir apporté des réponses.

Cette directive doit entrer en vigueur dès le 1er juin 2015. Elle marque des progrès significatifs par rapport à la directive Seveso 2, qu’elle a vocation à remplacer.

La surveillance des substances dangereuses est renforcée, notamment pour leur mise sur le marché.

À ce propos, ne soyons pas naïfs : les trafics clandestins existent et si une surveillance particulière ou des interdictions réglaient le problème de façon définitive, cela se saurait depuis longtemps.

Le volet « Lutte contre les trafics » est utile et indispensable, mais l’augmentation des contrôles et des sanctions lourdes pour les trafiquants doivent compléter l’arsenal.

Au-delà de cet aspect, 1 200 établissements industriels en France seront incités à mettre en place des mesures de sécurité plus fortes, avec la distinction entre les établissements dits de « seuil haut », qui ont sur leur propre site des substances en grandes quantités, et les établissements de « seuil bas » pour les quantités moindres.

Cette distinction est importante pour proportionner les normes et les risques et ne pas alourdir inutilement des contraintes qui pèsent sur les établissements.

En ce qui me concerne, je suis particulièrement sensible aux dispositions qui renforcent l’information du public et son association à la prise de décision.

S’il y a une chose que les députés peuvent faire remonter du terrain, c’est bien la volonté de nos concitoyens d’être davantage associés aux débats publics et aux décisions qui concernent directement leur territoire, leur cadre de vie quotidien, qu’il s’agisse des dangers liés aux risques industriels ou de ceux liés aux risques environnementaux pour l’installation des nouvelles infrastructures.

Seveso 3 va dans le bon sens, mais tâchons de faire toujours mieux ! Je salue votre engagement, madame la ministre, à vouloir combler notre retard en consentant un effort important en faveur des plans de prévention des risques technologiques.

Mais revenons à notre texte. Toujours dans le titre Ier, l’article 6 procède à des adaptations du droit français pour les produits biocides. Il tend à transférer à l’Agence européenne des produits chimiques la fonction de coordination et d’évaluation de ces substances. Ce sont des produits actifs susceptibles d’avoir des effets nuisibles sur l’homme, l’animal ou l’environnement.

La création d’une autorisation de mise sur le marché délivrée au niveau européen et les procédures visant à l’harmonisation des systèmes d’autorisation nationaux sont des dispositions que nous saluons et que nous soutenons.

Mais de nouveau se pose la question des trafics et du respect des règles dans l’ensemble des pays de l’Union, du fait de la liberté de circulation des marchandises. Lorsque nous achetons des productions agricoles européennes, nous devons avoir la garantie que des produits dangereux interdits n’aient pas été utilisés. Sinon, c’est la double peine : nos concurrents européens augmentent leurs rendements, pénalisent nos producteurs – agriculteurs, éleveurs, maraîchers – et empoisonnent potentiellement les consommateurs. Ce n’est pas une caricature, nous savons que de telles situations existent ! Madame la ministre, nous comptons sur vous pour relayer ces préoccupations à la Commission afin de maximiser les garanties de surveillance et de contrôle.

L’article 8 prévoit que les produits explosifs, qui sont actuellement soumis au seul code de la défense, puissent être soumis aux dispositions du code de l’environnement pour les aspects de mise sur le marché.

Les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes seront habilités pour le contrôle des dispositions de la présente loi. Mais en auront-ils les moyens, humains et financiers ?

Compte tenu de la RGPP, les effectifs sont passés de 3 600 en 2007 à 3 000 en 2012. Il ne reste que quelques agents dans les départements dits « ruraux ». Cette surcharge de travail, pour des services presque impuissants devant la quantité de contrôles à effectuer, ne manquera pas de provoquer de nouveaux constats de carence.

Permettez-moi de le répéter, lutter contre toutes les formes de fraudes, comme contre les paradis fiscaux, doit être une priorité. Ainsi, le groupe RRDP considère que le renforcement de la DGCCRF en moyens et en effectifs en est une condition.

La directive « Eurovignette » régule la mise en place et le calcul des péages et vignettes pour les poids lourds, et sa dernière version prévoit l’application, sous conditions, du principe pollueur-payeur, avec la possibilité d’intégrer dans le péage certains coûts externes comme le bruit et la qualité de l’air.

Le groupe RRDP se félicite aussi des dispositions concernant la convention du travail maritime et portant modernisation du droit social des gens de mer.

La directive reprend les règles et normes énoncées au sein des quatre premiers titres de la convention du travail maritime. Je ne m’étendrai pas sur ce sujet qui a déjà été abordé, mais je voudrais saluer en particulier le dispositif de protection de la maternité prévu pour les femmes marins enceintes, qui, étant inaptes à travailler à bord, ne pouvaient être reclassées. Le régime de sécurité sociale des marins et l’armateur cofinanceront le maintien d’une prestation dans ce cas.

Pour conclure, au sujet du titre III et des dispositions relatives à l’énergie, l’audit énergétique obligatoire prévu pour les grandes entreprises à l’article 27 est une avancée, à condition qu’il puisse se faire en toute objectivité et qu’il aboutisse à l’amélioration significative de l’efficacité énergétique et à la baisse de la consommation d’énergie.

Mais, même si vous venez d’annoncer, madame la ministre, la prolongation de la deuxième période des certificats d’économies d’énergie, avec une période transitoire utilisée pour améliorer les dispositifs – ce qui est une bonne décision pour les acteurs de la filière – je voudrais vous poser une question plus précise : les efforts d’obligation vont-ils changer ? Maintenir une obligation à niveau constant serait un vrai problème pour l’ensemble de la filière et menacerait les emplois, compte tenu de l’excédent qui sera atteint fin 2013. Il faudrait a minima déduire ces excédents des calculs d’obligation à appliquer en 2014, alors que ce niveau d’effort devrait être doublé pour correspondre aux objectifs fixés par la directive européenne à plus de 200 térawatts heure cumac par an.

Au-delà des remarques sur les normes et les règles, avec la volonté de simplification souvent légitime qui nous anime ici, ce qui nous paraît important, c’est que ces textes donnent de la cohérence et de la force à l’Union européenne. Oui, contrairement à ce que ne cessent de clamer les eurosceptiques, le territoire européen est pertinent pour construire des politiques efficaces dans les domaines du développement durable, de l’alimentation et de la santé.

Pour conclure, je citerai Jean de La Fontaine, né à Château-Thierry. Dans l’une de ses fables – vous la connaissez sans doute, Le Vieillard et ses Enfants, il écrivait : « Toute puissance est faible, à moins que d’être unie ».

Voilà ce que nous ne devons jamais perdre de vue pour notre pays, la France, mais aussi pour notre Europe. Il reste encore beaucoup à faire, mais ces transitions nous montrent que nous sommes sur la bonne voie. C’est pourquoi le groupe RRDP votera ce projet de loi.

Mme Sophie Errante et M. Serge Bardy. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho. Nous sommes réunis ce soir pour l’examen d’un texte qui nous laisse pour le moins dubitatifs. Il s’agit d’un ensemble disparate de dispositions plus ou moins normatives, dont l’objet n’a parfois rien à voir avec le développement durable, comme les dispositions relatives au comité d’entreprise européen ou aux conditions du travail maritime. Un tel fourre-tout nous contraint à n’aborder que quelques-unes des questions soulevées.

La première a trait à la prévention des risques industriels, qui forme l’un des chapitres centraux du texte. En matière de prévention des risques, votre projet de loi prévoit la transposition de la directive Seveso 3, qui se substituera à Seveso 2 en juin 2015. Son champ d’application est modifié en profondeur au regard de la liste des substances dangereuses dont l’usage entraîne des prescriptions spéciales pour les installations. Parmi les nouveautés importantes figure notamment l’instauration d’un système de dérogations, délivrées par la Commission européenne, qui nous pose question quant au risque de perte de souveraineté des États en matière de classement Seveso.

Les mesures de sécurité ainsi que les dispositifs d’information et de participation du public aux décisions sont par ailleurs renforcés.

Pour nous, le nœud de la question demeure les plans de prévention des risques technologiques. Vous avez, madame la ministre, levé le gage sur l’amendement de notre collègue Yves Blein qui traduit au plan législatif l’accord intervenu entre les représentants des fédérations professionnelles et l’Association des maires de France. Sans négliger l’effort important accompli pour rattraper le retard accumulé, puisque seuls 43 % des PPRT ont été approuvés à ce jour, la question des moyens reste centrale. Nous regrettons pour notre part que le principe du créateur de risques-payeur n’apparaisse pas clairement au même titre que le principe du pollueur-payeur. Nous nous inquiétons par ailleurs du manque de moyens des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement. Les DREAL sont la pierre angulaire du dispositif sur les risques majeurs. Elles ont souffert, comme toutes les administrations, de la RGPP et n’ont plus les moyens d’assurer aujourd’hui leurs missions avec l’efficacité nécessaire.

En ce qui concerne maintenant les substances actives biocides, le texte, en conformité avec la nouvelle directive, prévoit un processus en deux étapes : il confie l’évaluation de la substance active à l’Agence européenne des produits chimiques et l’autorisation proprement dite de mise sur le marché à l’État membre, tout en prévoyant la possibilité que certains produits biocides soient autorisés à l’échelle européenne, ce qui leur donne un accès direct au marché de l’Union tout entière.

Nous craignons qu’un tel dispositif ne marginalise le rôle de notre Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail, qui devrait pourtant jouer aujourd’hui un rôle essentiel. « Devrait », car ses avis ne sont pas toujours respectés par les services de l’État eux-mêmes.

M. Martial Saddier. Hélas !

M. Patrice Carvalho. Le ministère de l’agriculture a délivré ces dernières années pas moins de quarante autorisations de mise sur le marché pour des produits dits phytosanitaires que l’ANSES avait formellement déconseillés. Le ministère a reconnu, dans un communiqué, que la base de données publique sur les autorisations de mise sur le marché n’était pas à jour et a demandé qu’un audit soit initié pour étudier les moyens d’y remédier.

Tout ceci nous laisse à penser que l’éloignement des instances chargées de l’évaluation, voire des autorisations de mise sur le marché, ne marque pas une évolution positive. Cela risque de se traduire par une moindre efficacité des prescriptions formulées par les autorités compétentes, a fortiori lorsque celles-ci, comme l’Agence européenne des produits chimiques, ont pu parfois prêter une oreille attentive aux doléances des industriels.

Nous ne sommes pas non plus enthousiasmés, c’est le moins que l’on puisse dire, s’agissant de l’article 9, relatif à l’exercice de la profession de vétérinaire, qui ouvre la possibilité aux personnes morales d’autres États membres de s’établir ou de proposer librement des prestations de services en France. Le Gouvernement a, certes, pris quelques précautions, mais la question de fond demeure. Ainsi que le rappelait le rapporteur pour avis, Frédéric Barbier, la Commission européenne considère l’exercice de la profession de vétérinaire comme une activité commerciale, là où nous la considérons comme un maillon essentiel de la santé publique.

L’évolution proposée n’est donc pas très rassurante.

J’en viens à présent à la transposition de la convention du travail maritime, adoptée par l’organisation internationale du travail en 2006 à Manille. La ratification par la France de cette convention, qui fixe des standards sociaux minimaux garantis de protection sociale ainsi que les conditions de travail des marins, était attendue. La mise en place des dispositions d’harmonisation sociale et fiscale visant à sortir de la concurrence, source de dumping social, tarifaire et fiscal, est une bonne chose en principe. Nous attendons néanmoins beaucoup du contenu des décrets relatifs à la définition des notions de marin et de gens de mer et aux conditions de sécurité, exigence centrale des salariés du secteur maritime.

Nous venons d’avoir ce débat lors du récent examen du projet de loi relatif aux infrastructures et aux services de transport. L’Union européenne a ouvert à la concurrence européenne le transport maritime en 1986, puis le cabotage maritime en 1992. De nombreux pavillons naviguent aujourd’hui au standard international. Ainsi, des entreprises d’armement remplacent des équipages de marins sous statuts nationaux par des marins communautaires ou issus de pays tiers, afin de les employer à bas coûts et à des conditions sociales minimales selon les normes internationales en vigueur.

Ces normes tendent à devenir la règle en Europe et en France grâce à la création de pavillons sous registre international. Une harmonisation par le bas du secteur maritime s’est ainsi dessinée, sur fond de mondialisation et de libéralisation des échanges. Ces pavillons peuvent afficher des coûts de transport 40 % moins chers. Des navires battant pavillon français peuvent naviguer sans plus aucun marin français à bord et dans des conditions sociales minimales et précaires. C’est de cette manière que la compagnie Corsica Ferries a raflé à la SNCM les deux tiers du trafic vers la Corse à des prix cassés. La directive qu’il nous est proposé de transposer tend à mettre un peu d’ordre social dans cette anarchie. Nous n’avons pas à nous en plaindre !

L’enregistrement sous pavillon de premier registre français assure un haut niveau de garanties en matière de sécurisation et de droit des salariés. C’est ainsi que le transport maritime s’est longtemps organisé en France avant que l’Union européenne n’autorise l’ouverture à la concurrence, dont nous voyons la pagaille qu’elle génère. Je maintiens l’exigence d’appliquer la législation du pavillon français de premier registre aux navires circulant dans nos eaux territoriales. Et j’insiste, au-delà de la directive que nous transposons, sur la nécessité dans laquelle se trouve la France de promouvoir à l’échelon européen la revendication de création d’un pavillon européen équivalent au pavillon français de premier registre, offrant aux gens de mer la garantie d’une haute protection sociale.

Le projet de loi comporte par ailleurs un important volet relatif à l’énergie, dont les dispositions couvrent la quasi-totalité du secteur : production de biocarburant, électricité d’origine renouvelable, organisation du marché de l’électricité et du gaz, efficacité énergétique et stocks pétroliers stratégiques. Ce vaste champ recoupe les objectifs retenus par le Conseil européen et les États membres à l’horizon de 2020 dits « triple vingt », c’est-à-dire réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur niveau de 1990, porter la part des énergies renouvelables à 20 % de la consommation et réaliser 20 % d’économies d’énergie. Compte tenu du temps qui m’est imparti, je m’en tiendrai à deux aspects.

L’article 28 prévoit la ratification de l’ordonnance de codification du code de l’énergie en transposant deux directives, communément appelées troisième paquet de libéralisation du marché de l’énergie. Je rappelle qu’il s’agit initialement de démembrer des entreprises verticalement intégrées, comme on dit en langage technocratique bruxellois, c’est-à-dire rassemblant en une même entité l’ensemble de la chaîne énergétique : production, transport, distribution et commercialisation. Bien sûr, nos entreprises publiques EDF et GDF étaient dans le viseur, soupçonnées de porter atteinte au sacro-saint principe libéral de concurrence libre et non faussée dont nous savons par expérience les ravages qu’il peut faire.

C’est sur de telles bases que nous avons accepté l’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie, transformé EDF en société anonyme cotée en bourse et privatisé GDF, devenue GDF Suez. La France a certes obtenu un statut particulier, dit « ITO », qui a permis de préserver notre modèle de l’explosion. J’observe néanmoins que le troisième paquet a des conséquences sur l’organisation des secteurs électriques et gaziers car, en contrepartie du maintien du modèle ITO, nous sommes contraints de renforcer la séparation entre EDF et RTE qui sont désormais totalement distincts. En outre, le rôle du régulateur se trouve renforcé. Il lui appartient, en particulier, de fixer les tarifs du réseau. En cas de désaccord, le Gouvernement peut au mieux demander une seconde délibération. Cela est très préoccupant au regard de la flambée des tarifs et des hausses des tarifs réclamées depuis l’ouverture à la concurrence. Peu à peu, nous le voyons, des coins sont enfoncés dans notre organisation énergétique. La logique libérale tend à s’imposer au détriment du service public et du consommateur.

L’article 29 concerne les audits énergétiques obligatoires dans les grandes entreprises. Cinq mille d’entre elles seront concernées. Il s’agit d’identifier les consommations excessives d’énergie et donc les potentiels d’économie. Ces audits comporteront des préconisations. Très bien, mais qui vérifiera leur application ? La seule incitation, c’est que la direction de l’entreprise considérera que les économies d’énergie réalisables permettront de rembourser les 15 000 ou 20 000 euros qu’aura coûtés l’audit. Mais est-ce suffisant ?

Compte tenu de l’ensemble de ces remarques et du caractère très disparate des mesures proposées, qui n’invite guère à l’expression d’une position univoque, nous nous abstiendrons de voter ce texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Le texte qu’il nous est proposé de discuter aujourd’hui est d’un abord complexe. Il comporte en effet de multiples entrées : transposition de six directives européennes, ratification de douze ordonnances transposant elles-mêmes chacune plusieurs directives européennes et adaptation du droit national à une série de règlements… Les seuls points communs à ces textes sont d’émaner de l’échelon européen et de concerner l’environnement. Ce texte de 31 articles aborde aussi bien les conditions de travail des gens de mer que les transports routiers et aériens, les risques industriels ou encore les réseaux d’énergie.

Vous me pardonnerez donc, dans le temps qui m’est imparti, de ne pas traiter de toutes ces problématiques. Une telle diversité était certes une nécessité, comme cela a été rappelé en commission, après plus de deux ans sans transposer de textes européens, mais cela reste un exercice assez frustrant. En tant qu’écologistes, nous sommes profondément européens. Il va de soi que nous sommes soucieux d’une véritable démocratie européenne, qui est d’ailleurs en partie encore à construire. Cela passe en particulier par la transposition rapide des directives votées et le respect des textes européens. Ce n’est pas toujours le cas en France, particulièrement en matière de droit européen de l’environnement – en matière de qualité de l’air par exemple, notre pays est souvent pointé du doigt.

Mais cela ne signifie pas pour autant que tous les textes européens soient exempts d’améliorations. La transposition du droit européen implique de respecter des minima mais n’interdit en rien d’être plus allant. C’est en tous les cas le sens de mon intervention et c’est la raison pour laquelle nous proposons des améliorations au texte sous forme d’amendements.

Pour ce qui est de la prévention des risques, tout d’abord, nous avons ici un texte important, voire majeur, qui vient actualiser et compléter le dispositif Seveso. Malheureusement, il n’inverse pas réellement la charge du risque et reste dans une logique de gestion du risque et d’exposition des populations, même quand un éloignement des industries à risque nous paraîtrait pertinent. Il n’en comporte pas moins des avancées pour les populations.

L’accident de l’usine AZF de Toulouse, encore gravé dans la mémoire collective, aurait eu beaucoup moins de conséquences s’il avait eu lieu loin des habitations. C’est une évidence, mais il est parfois nécessaire de la rappeler. En outre, cette catastrophe aurait pu être bien plus importante encore si un autre site classé Seveso avait été touché par l’accident. On connaît des situations similaires ailleurs en France, avec parfois des cumuls de risques extrêmement importants. Le couloir rhodanien, par exemple, cumule non seulement un grand nombre d’industries mais aussi des sites nucléaires d’importance, le tout dans un bassin de vie très peuplé.

Nous proposerons donc deux amendements, l’un pour ne pas exclure d’emblée la possibilité d’expropriation des riverains en cas de danger, l’autre afin d’assurer la transparence de l’information des riverains. Nous souhaitons que celle-ci soit totale, afin que ces derniers soient clairement informés des activités de l’usine voisine.

L’article 10 ratifie en un paquet commun cinq ordonnances, dont une sur l’expérimentation animale. Pour nous, cette dernière va dans le bon sens mais l’on pourrait aller plus loin en favorisant plus encore le développement des techniques alternatives. Les modalités de contrôle mériteraient également d’être renforcées.

Éric Alauzet défendra après l’article 10 trois amendements visant à compléter notre arsenal juridique contre les délinquants environnementaux, dont les actions restent trop souvent impunies. Il s’agit notamment de l’imprévoyance des industriels cessant leur activité, du renforcement des sanctions en cas de dommages causés à l’environnement et du trafic d’animaux.

Ce texte comporte ensuite un important volet sur les transports. Si les éléments relevant de l’aviation civile n’appellent pas de commentaire particulier des députés écologistes, François-Michel Lambert proposera des améliorations à l’article 12 relatif à la création d’une taxation des poids lourds sur le réseau autoroutier. Il s’agit d’en permettre l’application anticipée et d’étendre le champ des modulations de péage à d’autres nuisances que la pollution atmosphérique, en particulier la congestion du trafic et les nuisances sonores, comme le prévoit le texte de la directive. Il proposera également des modulations pour le cas particulier des zones de montagne, où une alternative au transport routier existe et où ses conséquences sont particulièrement sensibles.

M. Lionel Tardy. Très bien !

M. Martial Saddier. Oui, les zones de montagne, c’est important !

M. Denis Baupin. De tels amendements ont un double objectif : appliquer le principe pollueur-payeur en limitant les nuisances subies par les riverains des infrastructures routières et encourager le report modal et l’utilisation de modes de transports moins agressifs pour l’environnement.

Le troisième titre du projet de loi concerne l’énergie. Il tombe en plein débat national sur la transition énergétique et l’éclaire d’un certain nombre d’éléments dont les uns sont positifs et les autres moins. En premier lieu, le texte nous propose de ratifier une directive datant de 2009 sur les agrocarburants alors même qu’un autre projet de directive est en discussion, qui vise à réduire les impacts des changements d’affectation des sols indirects liés aux agrocarburants et à promouvoir les carburants d’origine végétale offrant une réelle plus-value en matière de réduction des émissions de gaz à effets de serre. Ce projet a été présenté en novembre 2012 et discuté depuis. Il est donc relativement incongru, même si c’est juridiquement justifié, de nous demander dans un tel contexte de ratifier en 2013 une ordonnance de transposition, d’autant que la future directive est plus favorable à notre conception du développement de carburants issus de végétaux.

Je souhaite d’ailleurs souligner à cette occasion notre désaccord avec la terminologie de « biocarburants ». Ces carburants, rien ne les rattache à l’agriculture biologique. Ils sont au contraire le fruit d’un processus agroindustriel, en concurrence potentielle avec les usages alimentaires des ressources agraires. Nous avons déposé un amendement à ce sujet. Il est temps de cesser d’appeler « agrocarburants » des carburants qui n’ont rien de bio.

L’article 28, qui transpose des éléments relatifs aux réseaux de distribution d’électricité, nous pose problème. La France s’accroche en effet au modèle incestueux hérité du passé des entreprises de production et de distribution d’énergie. On pense notamment, en matière d’électricité, à EDF, ERDF et RTE. Le problème est en train de ressurgir tant au niveau européen que dans le débat national sur la transition énergétique. Pour nous, l’intégration des entreprises de distribution au sein d’une entité pilotée par une entreprise de production est un obstacle à la transition énergétique. Nous proposons donc un amendement de suppression de l’article. J’aurai l’occasion de m’expliquer plus avant au cours de la discussion des amendements.

L’article 29, en revanche, constitue une très bonne nouvelle. Il transpose en effet partiellement une directive à nos yeux fondamentale relative à l’efficacité énergétique. C’était la directive manquante du paquet « climat énergie ». Nous en avions une sur les émissions à effet de serre, une sur les énergies renouvelables, il en manquait une sur l’efficacité énergétique qui, vous l’avez rappelé, madame la ministre, est au cœur de notre politique énergétique et du débat sur la transition énergétique.

Je proposerai néanmoins deux amendements pour aller plus loin dans les prescriptions faites aux entreprises, et des amendements au dispositif des certificats d’économie d’énergie. Vous nous avez dit en commission, madame la ministre, que le reste de la directive « efficacité énergétique » n’a pas besoin de traduction législative puisque les CEE existent. Certes, mais cela n’empêche pas d’améliorer le dispositif, de se donner des objectifs ambitieux et de gérer la transition entre deux périodes de CEE.

Je me réjouis donc de constater qu’avant même la défense de notre amendement sur cette période transitoire, vous avez répondu favorablement, madame la ministre. Ce point étant acquis, je m’empresse donc de vous présenter nos autres demandes ! Il s’agit d’amendements tout aussi importants, notamment sur l’ampleur de la troisième période à venir. Vous nous avez indiqué que celle-ci serait au moins de 200 térawattheures par an, mais l’ADEME propose plutôt un objectif de 300. Nous préférons une ambition plus importante, aussi avons-nous déposé un amendement en ce sens.

Le Réseau Action Climat, la fédération des collectivités concédantes de réseau, la fondation Abbé Pierre et d’autres ont déjà fait des propositions sur l’évolution des CEE, dont nous aurons l’occasion de débattre tout à l’heure lors de la discussion de nos amendements.

Enfin, le dernier texte transposé a été ajouté en commission. Il s’agit du titre III bis, comportant des dispositions relatives à la lutte contre le changement climatique. Sur le fond, ce texte est très intéressant. Il va dans le sens d’un approfondissement du système européen d’échange de quotas de CO2. Le groupe écologiste ne peut donc que soutenir cette ratification, qui prévoit son extension à de nouveaux secteurs industriels et à de nouveaux gaz à effet de serre. Cependant, il intervient justement à un moment où le marché des quotas d’émissions de gaz à effets de serre est au plus mal. Je tiens d’ailleurs à saluer votre prise de position au plan européen sur le sujet, madame la ministre, car il est très important que nous réussissions à sauver ce dispositif et à revenir à un prix réellement dissuasif pour le CO2. Et quand je dis « revenir »… Il s’agirait plutôt d’y « venir », car le prix n’a jamais été suffisamment dissuasif, ce dont nous voyons aujourd’hui les conséquences sur le mix énergétique, notamment avec le retour du charbon en Europe.

Pour finir, nous voterons ce texte, qui va globalement dans le bon sens – ou devrais-je dire « les bons sens », tant les sujets sont nombreux ! Nous espérons toutefois qu’à l’avenir les projets de loi d’adaptation au droit de l’Union européenne seront moins espacés et permettront plus de discussions de fond entre nous et avec vous, madame la ministre. Il en va du bon fonctionnement et de la lisibilité de la construction européenne en matière de politique environnementale et énergétique commune.

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et M. Philippe Plisson, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Nous sommes réunis, ce mercredi 15 mai, pour examiner le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable, un DDADUE composé de 31 articles et dont le but principal est de nous mettre en conformité avec le droit européen. Le respect des règles européennes nous permet d’ailleurs d’éviter certaines sanctions financières. Cet exercice auquel nous participons aujourd’hui permettra à notre pays de continuer à être un bon élève de l’Europe.

Au moment où certains s’interrogent sur l’engagement européen de la France, l’examen de ce texte devant le Parlement montre toute l’importance que le Gouvernement et les parlementaires français portent à cette Europe, dans laquelle nous souhaitons que le développement durable prenne toute sa place. Le développement durable est l’un des enjeux que notre gouvernement souhaite mettre en valeur.

Ce texte nous donne l’occasion, une fois de plus, de prendre position sur le développement durable que nous appelons de nos vœux et de discuter des solutions et des méthodes que nous jugeons les plus pertinentes afin d’avancer dans ce domaine. Au programme de son examen, l’analyse de plus de 120 amendements déposés par les divers groupes politiques de cette assemblée. Comme nous le verrons, cinq articles sont plus fortement concernés. Je pense en particulier à l’article 16, qui concerne les gens de mer et pour lequel les amendements déposés par notre rapporteur, Philippe Plisson…

Mme Catherine Quéré et M. Christian Assaf. Excellent rapporteur !

M. Serge Bardy. …prévoient, à mon sens, un certain nombre d’évolutions positives.

Ce projet de loi, examiné en commission le 9 avril dernier, a fait l’objet d’échanges intéressants sur les volets portant notamment sur les plans de prévention des risques technologiques et les sites Seveso 3. Yves Blein devrait présenter dans quelques instants les principales avancées auxquels nous sommes parvenus.

Outre ces deux points, un débat intéressant s’est engagé sur l’exercice de la profession de vétérinaire et sur les pouvoirs de contrôle dont dispose l’ordre des vétérinaires en matière de respect des règles déontologiques. Nous reviendrons sur ce point plus précis lors de l’examen de plusieurs amendements portant sur l’article 10. Le texte s’intéresse également à l’eurovignette, qu’elle aborde dans son article 12, qui vise à réguler la mise en place et le calcul des péages et vignettes pour les poids lourds.

Enfin, vous l’avez rappelé, madame la ministre, l’hétérogénéité de ce texte et des six directives qu’il se propose de transposer en droit français a rendu nécessaire un important travail interministériel impliquant votre ministère et celui des transports, de la mer et de la pêche, mais également ceux de l’agriculture, de la santé et de l’intérieur. Je tenais à souligner la qualité de cette coordination interministérielle qui a permis notamment de fluidifier notre travail et de rendre davantage exploitables les dispositions européennes que ce texte doit adapter et transposer.

Je terminerai en empruntant à Gaston Bachelard une citation extraite de son ouvrage Le Nouvel Esprit scientifique : « On ne pourra bien dessiner le simple qu’après une étude approfondie du complexe ». C’est ce à quoi je vous invite dès à présent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier. Comme cela a déjà été dit, nous avons affaire à un texte touffu et dense…

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Jean-Pierre Vigier. …puisqu’il prévoit la transposition en droit français de six directives et de plusieurs règlements ou directives déjà transposés, et la ratification de douze ordonnances.

M. Julien Aubert. C’est bien résumé !

M. Jean-Pierre Vigier. Les sujets abordés sont extrêmement disparates, et le projet de loi n’en est que plus complexe. Parmi cette multitude de dispositions, je voudrais retenir quatre domaines.

Premièrement, le projet de loi modifie les conditions d’exercice de la profession vétérinaire. L’un de mes amendements a été adopté en commission, et je m’en réjouis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Il s’agit de renforcer l’indépendance et les règles déontologiques de la profession en interdisant la détention par les vétérinaires de parts ou d’actions du capital social dans toutes les activités en amont ou en aval. Je souhaite bien évidemment que cette mesure soit conservée lors de cette lecture.

M. Martial Saddier. C’est fondamental !

M. Jean-Pierre Vigier. Cependant d’autres points, sur lesquels j’ai déposé d’autres amendements, me paraissent nécessiter des améliorations. La médecine vétérinaire est une profession libérale, pratiquée avec un haut niveau de qualification. Elle implique responsabilité personnelle et indépendance professionnelle. C’est l’intérêt du client, du public et de l’animal. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Les propositions de modification du code rural contenues dans ce projet de loi ont un impact sur les conditions d’exercice des missions qu’effectue le vétérinaire pour le compte de l’État. Dans ce cadre, il contribue à la sécurité et à la qualité de la chaîne alimentaire, ainsi qu’au contrôle des maladies animales, parfois transmissibles à l’homme. Pour les « vétérinaires sanitaires », nous proposons donc une dérogation en ce qui concerne l’exercice des missions spécifiques de santé publique effectuées pour le compte de l’État. Ces missions ne sont pas toujours rémunérées et sont prises sur le temps de travail des vétérinaires libéraux. Je rappelle que, dans d’autres pays européens, ces missions sont exercées par des fonctionnaires.

M. Martial Saddier. Il a raison !

M. Jean-Pierre Vigier. Cela ne s’oppose pas à la libre prestation prônée au niveau européen. Il est aussi indispensable d’éviter les dérives financières ou la création de sociétés à des fins purement capitalistiques. Il faut donc garantir que, derrière une société, il y ait une réalité physique : des personnes réellement présentes doivent exercer effectivement le métier de vétérinaire.

Enfin, l’Ordre peut exercer un contrôle sur la prise de participations financières par des personnes exerçant la profession de vétérinaire. Cependant, cette faculté ne doit pas entraîner la transmission systématique de tous les documents nécessaires à ce contrôle. Ce n’est ni souhaitable, ni faisable, compte tenu des moyens qui y sont actuellement dédiés.

M. Julien Aubert. Parfaitement !

M. Jean-Pierre Vigier. Rendre ce contrôle systématique coûterait très cher et aboutirait à une augmentation considérable des cotisations pour les vétérinaires libéraux.

M. Martial Saddier. C’est indéniable !

M. Jean-Pierre Vigier. Le deuxième sujet que je souhaite aborder concerne Saint-Barthélemy. (« Ah ! Enfin ! » sur les bancs du groupe UMP.) L’article 11 du projet de loi applique à ce territoire plusieurs règlements européens dans le domaine de l’aviation civile. Cette situation résulte du changement de statut de Saint-Barthélemy au sein de l’Union européenne au 1er janvier 2012.

Comme vous le savez, afin de ne pas anéantir les effets de ce statut, le conseil exécutif de Saint-Barthélemy, saisi sur ce projet, avait souhaité un examen particulier en tant que « pays et territoire d’outre-mer ». En effet, dans ce territoire, le transport aérien se déploie dans un environnement régional, économique et concurrentiel très différent de celui de l’Union européenne. C’est pourquoi, jusqu’à présent, certains textes européens relatifs à des domaines qui ne sont pas de la compétence de la collectivité n’y étaient pas applicables en tant que tels, par exemple pour le transport aérien.

S’ils l’étaient, la compétitivité des entreprises françaises serait affaiblie par rapport aux concurrents régionaux. Il me semble donc important de préserver une certaine spécificité à Saint-Barthélemy, faute de quoi des entreprises qui fonctionnent bien actuellement connaîtraient de sérieux problèmes.

M. Martial Saddier. Nous sommes d’accord !

M. Jean-Pierre Vigier. L’emploi s’en ressentirait évidemment. Et ce n’est vraiment pas le moment d’aggraver la situation !

M. Martial Saddier. Exactement !

M. Jean-Pierre Vigier. En ce qui concerne le droit maritime et l’application des normes sociales françaises aux équipages embarqués sur les navires effectuant une prestation dans les eaux territoriales ou intérieures françaises, l’objectif est louable. En effet, il s’agit de réduire le déficit de compétitivité entre armements français et étrangers qui opèrent sur les lignes de cabotage maritimes ou qui effectuent des prestations de services à l’intérieur des eaux françaises.

Cependant, l’activité de maintenance et de réparation des câbles sous-marins est effectuée aujourd’hui uniquement par deux opérateurs français. Ces opérateurs sont mis en péril par les dispositions du projet de loi : le coût de stationnement de ces navires en France, ainsi que les activités portuaires, sont renchéris de manière très importante – environ deux millions d’euros par an et par navire.

Nous pensons qu’il est nécessaire de permettre à ces navires câbliers de conserver leur stationnement en France tout en en limitant le coût. Pour cela, il faut restreindre le champ d’application défini par l’article L.5561-1 du code des transports, pour les navires de service, à ceux qui effectuent leurs prestations exclusivement dans les eaux territoriales ou intérieures françaises.

Enfin je voudrais aborder brièvement les dispositions relatives à l’énergie. Nous vous proposons des améliorations relatives à la codification du code de l’énergie. Les amendements que nous avons déposés à ce sujet ne visent pas à créer du droit. Ils ont simplement pour but, d’une part, de transposer en toutes lettres la directive de 2009 relative aux règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, et d’autre part de réintroduire des éléments qui existaient auparavant dans la loi de 1906 et qui ont été omis lors de ladite codification.

Nos propositions concernent la conservation de certaines dispositions que nous jugeons importantes pour l’attractivité à l’embauche de l’entreprise, la suppression des dispositions jugées à la fois contreproductives et difficiles à mettre en œuvre et enfin le rétablissement de certaines dispositions contenues dans la loi du 15 juin 1906 et oubliées ou modifiées lors de la codification.

Je souhaite bien évidemment que cette lecture nous permette de nous faire entendre mieux qu’en commission et que nos amendements soient, cette fois, adoptés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) En effet, puisqu’il s’agit d’un texte extrêmement technique, nous devrions trouver un terrain d’entente. En conclusion, le vote du groupe UMP sera déterminé par la qualité de l’accueil que vous voudrez bien, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, faire à nos suggestions pratiques et de bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Et nous ? (Sourires.)