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PROJET DE LOI ORGANIQUE

relatif au procureur de la République financier

ETUDE D'IMPACT

NOR : JUSX1310899L/Bleue-1

6 MAI 2013

SOMMAIRE

1. ETAT DU DROIT 3

2. OBJECTIF DE LA REFORME ET OPTIONS ENVISAGEABLES 4

2.1. L’objectif poursuivi 4

2.2. La nécessité d’une modification de l’ordonnance statutaire 4

2.3 Les principales options envisageables quant au contenu du texte 5

3. EFFETS ATTENDUS DE LA REFORME ORGANIQUE 5

3.1. Impact important sur l’efficacité de la lutte contre la corruption et la fraude fiscale 5

3.2 Impact limite sur la dépense publique 5

4. CONSULTATIONS ET MODALITES D’APPLICATION DE LA LOI ORGANIQUE 6

Introduction

A la suite de l’intervention du Président de la République du 3 avril 2013, le Premier ministre, lors du conseil des ministres du 10 avril, a présenté une communication sur la transparence de la vie publique et le renforcement des moyens de lutte contre la grande délinquance économique et financière et les paradis fiscaux qui constitue un enjeu de souveraineté et de redressement des comptes publics. Il a annoncé à cette occasion diverses dispositions s’inscrivant dans un programme ambitieux de transparence démocratique et de lutte contre les circuits financiers frauduleux.

Lors du conseil des ministres du 24 avril 2013, le Premier ministre a ainsi présenté un projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, qui comporte plusieurs dispositions traduisant une plus grande sévérité et une plus grande détermination dans la lutte contre la corruption et la fraude fiscale.

Il a annoncé que les dispositifs prévus par ce projet de loi seront autant de points d’appui, le moment venu, pour le traitement des affaires complexes du ressort du futur procureur de la République, à compétence nationale, chargé de la lutte contre la corruption et la fraude fiscale. Placé sous l’autorité du procureur général de Paris, le procureur de la République financier sera compétent pour les atteintes à la probité et les délits de fraude fiscale d’une grande complexité, ainsi que le blanchiment de l’ensemble de ces infractions.

Le présent projet de loi organique prévoit les dispositions statutaires nécessaires à la création de ce procureur de la République financier.

I. ETAT DU DROIT

Le statut des magistrats du parquet est défini à la fois par la Constitution (articles 64 et 65) et par l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature qui dispose en son article 1er que le corps judiciaire comprend entre autres les magistrats du parquet de la Cour de cassation, des cours d’appel et des tribunaux de première instance ainsi que les magistrats du parquet placés auprès du procureur général d’une cour d’appel.

L’article 3 de cette ordonnance précise que les magistrats du parquet de la Cour de cassation, les procureurs généraux, les avocats généraux ainsi que certains emplois de procureur de la République et de procureur de la République adjoint sont placés hors hiérarchie. La loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature a inséré dans l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature des dispositions qui limitent  à sept ans la durée d’exercice des fonctions de procureur de la République du premier grade et hors hiérarchie (articles 28-2 et 38-2) ainsi que de procureur général (article 38-1).

Aux termes de l’article 5 de l’ordonnance statutaire, « les magistrats du Parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du garde des sceaux, ministre de la justice. A l’audience leur parole est libre. »

Cet article pose le principe de la « subordination hiérarchique » des magistrats du parquet, dont il est tenu compte dans l’appréciation d’une éventuelle faute disciplinaire (article 30 du code de procédure pénale).

L’article 30 du code de procédure pénale définit et limite les conditions dans lesquelles s’exerce l’autorité du ministre de la justice, en prévoyant, dans sa rédaction aujourd’hui en vigueur, que le garde des Sceaux peut leur adresser des instructions générales d’action publique ou particulières dans le cadre d’une affaire pénale précise.

Les articles 35 et 36 de ce même code définissent les attributions du procureur général à l’égard des procureurs de la République. Comme le précise la circulaire du 14 mai 2004, « ces dispositions clarifient ainsi le rôle du procureur général en affirmant sa mission d’animation et de coordination de l’action des procureurs de la République ».

L’organisation du parquet est régie par le principe de l’indivisibilité posé par l’article L.212-6 du code de l’organisation judiciaire : le procureur de la République représente, en personne ou par ses substituts, le ministère public près le tribunal de grande instance.

La compétence est définie par diverses dispositions du code de procédure pénale. En matière économique et financière, coexistent différents niveaux de juridictions et Paris occupe une place particulière. En effet, l’article 704-1 de ce code attribue au tribunal de grande instance de Paris une compétence exclusive en matière économique et financière sur l’ensemble du territoire national pour la poursuite des délits d’initié, de la manipulation de cours et la diffusion d’informations fausses ou trompeuses. L’article 706-1 de ce même code attribue au procureur de la République de Paris une compétence concurrente aux autres tribunaux pour les délits de corruption et de trafic d’influence internationaux.

II. OBJECTIF DE LA REFORME ET OPTIONS ENVISAGEABLES

2.1. L’objectif poursuivi

Pour améliorer l’efficacité et la pertinence de la poursuite pénale en matière de corruption et de fraude fiscale, le traitement des affaires complexes doit être confié à un procureur de la République à compétence nationale concurrente, positionné près le tribunal de grande instance de Paris, autonome vis-à-vis du procureur de Paris, mais assurant le ministère public devant les juridictions parisiennes du premier degré, et ce sous l’autorité hiérarchique du procureur général près la cour d’appel de Paris.

La détermination du Gouvernement se traduit ainsi par un dispositif ambitieux qui va au-delà d’une simple centralisation des affaires et d’une spécialisation des magistrats, comme c’est par exemple le cas en matière de lutte contre le terrorisme, qui aurait consisté à un renforcement du parquet de Paris, dans sa configuration actuelle, en lui confiant une compétence nationale concurrente en matière de délinquance économique et financière.

Avec le projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature qui offre aux magistrats du parquet des garanties similaires à celles des magistrats du siège et le projet de loi relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique qui interdit les instructions individuelles et donne aux parquets le plein exercice de l’action publique, le procureur de la République financier disposera d’un cadre juridique d’action, d’une autonomie et de moyens propres lui permettant de diligenter des enquêtes dans les meilleures conditions pour combattre efficacement ces infractions spécifiques.

2.2. La nécessité d’une modification de l’ordonnance statutaire

La nécessité, en l’espèce, d’une intervention du législateur organique est commandée par l’article 64 de la Constitution et par la nature de la disposition du présent projet de loi organique, qui vise à limiter la durée d’exercice de la fonction de procureur de la République financier et à prévoir son rattachement au tribunal de grande instance de Paris.

Suivant un considérant de principe du Conseil constitutionnel, les règles statutaires applicables aux magistrats doivent en effet se trouver dans la loi organique portant statut des magistrats ; seules les modalités d’application de ces règles peuvent être fixés par décret (voir par exemple DC n° 92-305 DC du 21 février 1992). La limitation de la durée d’exercice de certaines fonctions n’a pas été considérée par le Conseil constitutionnel, lors de ses contrôles, comme relevant de la loi ordinaire.

2.3 Les principales options envisageables quant au contenu du texte

Le présent projet de loi organique propose de modifier uniquement l'article 38-2 de l'ordonnance statutaire afin, à l’instar des autres procureurs de la République, de limiter l’exercice des fonctions de procureur de la République financier à sept années.

La formulation proposée permet d'indiquer clairement son rattachement au tribunal de grande instance de Paris et d'éviter une reformulation de l'alinéa en question.

Le rattachement du procureur de la République financier au tribunal de grande instance de Paris étant précisé dans le deuxième alinéa de l'article 38-2 précité, la modification de l'article 7 de l'ordonnance statutaire sur l'installation n’est pas nécessaire. Il en est de même de l’article 1er qui énumère les membres du corps judiciaire.

Afin de prévoir son placement hors hiérarchie, une modification de l’article 3 de l’ordonnance statutaire ne s’impose pas, dans la mesure où le dernier alinéa de cet article mentionne les termes d' « emplois de procureur de la République », englobant ainsi le procureur de la République financier.

III. EFFETS ATTENDUS DE LA RÉFORME ORGANIQUE

3.1. Impact important sur l’efficacité de la lutte contre la corruption et la fraude fiscale

La création de ce procureur de la République, à compétence nationale, autonome vis-à-vis du ministère public parisien de droit commun, placé sous l’autorité directe du procureur général de Paris, permettra de dédier des moyens spécifiques sous l’autorité de ce parquet spécialisé dont l’objectif est d’améliorer l’efficacité de la répression et de la coordination de l’action publique engagée à l’égard de ce type d’infraction.

Le présent projet de loi organique est accompagné d’un projet de loi tendant, notamment, à modifier l’architecture du traitement judiciaire de la grande délinquance économique et financière ainsi que l’organisation et le fonctionnement du ministère public parisien, modifications induites par la création de ce procureur de la République financier autonome et non rattaché au parquet de Paris.

3.2 Impact limite sur la dépense publique

La mesure envisagée n’a aucune incidence significative pour les finances publiques. Le coût annuel associé à cet emploi de procureur de la République financier est de 199 298 € (coût chargé) et de 138 780 € (coût  hors CAS).

IV. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D’APPLICATION DE LA LOI ORGANIQUE

Aucune consultation n’est exigée.

Si le présent projet de loi organique ne prévoit aucun renvoi à un texte réglementaire, des modifications réglementaires en matière statutaire et indemnitaire s’avèreront nécessaires. Ainsi, l’article 3 du décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 et l'arrêté du 25 avril 2002 fixant l'échelonnement indiciaire des magistrats de l'ordre judiciaire devront prévoir le placement hors hiérarchie du procureur de la République financier et son échelonnement indiciaire. De même, cet emploi de procureur devra être ajouté à l’annexe de l’arrêté du 3 janvier 2008 fixant les conditions d’attribution de la nouvelle bonification indiciaire en faveur des magistrats de l’ordre judiciaire exerçant des responsabilités supérieures.


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