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PROJET DE LOI

relatif aux activités privées de protection des navires

NOR : TRAX1328530L/Bleue-1

ETUDE D'IMPACT

31 DECEMBRE 2013

SOMMAIRE

TITRE PRELIMINAIRE 4

I. DIAGNOSTIC GENERAL 4

II. OBJECTIFS POURSUIVIS PAR LE GOUVERNEMENT 7

III. ETUDE DE NECESSITE D’UNE NOUVELLE REGLEMENTATION 8

IV. INSERTION JURIDIQUE DU PROJET 11

PARTIE I - L’AUTORISATION DES ACTIVITÉS DES ENTREPRISES PRIVEES DE PROTECTION DES NAVIRES POUR LUTTER CONTRE LA PIRATERIE MARITIME 14

{ ARTICLES 1ER, ET 18 } 14

I.1. L’INTRODUCTION DANS NOTRE DROIT DU CADRE JURIDIQUE NÉCESSAIRE À L’EMBARQUEMENT D’ÉQUIPES PRIVÉES DE PROTECTION DES NAVIRES 14

I.1.1. Une évolution nécessaire en l’absence de cadre juridique adapté 14

I.1.2. Une activité précisément définie et limitée 14

I.1.2.1. Interdiction d’exercer l’activité à partir d’un navire tiers 15

I.1.2.2. Limitation à certaines zones 16

I.1.2.3. Limitation à certains navires 16

I. 2. LE CHOIX D’UNE REGULATION STRICTE 17

I.2.1. Les différentes options concernant l’ouverture du marché 17

I.2.2. La nécessité du recours à loi 17

I.3. DES IMPACTS PRINCIPALEMENT ECONOMIQUES 17

I.3.1. Impacts pour l’emploi 17

I.3.2. Impacts économiques et financiers 18

I.3.3. Impacts sociaux 18

I.3.4. Impacts pour l’égalité entre les femmes et les hommes 18

I.3.5. Impacts pour les personnes handicapées 19

I.3.6. Impacts environnementaux 19

I.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ 19

PARTIE II - ENCADREMENT DES ACTIVITÉS DES ENTREPRISES PRIVEES DE PROTECTION DES NAVIRES 20

{ ARTICLES 2 À 17, 19 À 23 ET 27 } 20

II.1. LA MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF AD HOC FAVORISANT LA TRANSPARENCE DE L’ACTIVITE ET S’APPUYANT SUR DES PROCEDURES ET INSTANCES EXISTANTES 20

II.1.1. Le code de sécurité intérieure comme modèle intellectuel 20

II.1.1.1. S’agissant de l’autorisation d’acquisition et de détention d’armes pour les entreprises 20

II.1.1.2. S’agissant de l’acquisition, de la détention, du transport, de l’importation, de l’exportation, du transfert des armes et munitions 21

II.1.2. La mise en place d’un système d’encadrement sui generis 22

II.1.2.1. Un accès à la profession conditionné à l’obtention d’une autorisation administrative et d’une certification préalable 22

II.1.2.2. L’instauration de mesures visant à garantir la professionnalisation du secteur 26

II.1.2.3. L’encadrement du nombre et de la tenue des agents 29

II.1.2.4. Une utilisation des armes très encadrée 30

II.1.2.5. L’interdiction de l’usage de la force armée 31

II.1.2.6. Le respect des prérogatives du capitaine du navire protégé 32

II.2. LA NECESSAIRE DEFINITION DE LIGNES ROUGES 32

II.2.1. Option alternative à l’intervention d’une loi nouvelle 32

II.2.2. Nécessité de l’action législative 33

II.3. LES IMPACTS PRÉVISIBLES DU DISPOSITIF ENVISAGÉ 33

II.3.1. Impacts économiques et financiers 33

II.3.2. En termes de coûts et bénéfices financiers pour chaque catégorie de personnes physiques et morales intéressés 33

II.3.3. En termes de coûts et bénéfices financiers pour chaque catégorie d’administrations publiques 34

II.4. ARTICULATION AVEC LE DROIT INTERNATIONAL ET EUROPÉEN 34

Éléments de droit comparé 34

PARTIE III – UNE TRAÇABILITÉ ET UN CONTROLE RIGOUREUX DES ACTIVITÉS ET PERSONNELS DES ENTREPRISES PRIVEES DE PROTECTION DES NAVIRES 38

{ ARTICLES 24 À 26 ET 28 À 40 } 38

III.1. L’INSTAURATION D’UN REGIME DE CONTRÔLE A TERRE ET EN MER 38

III.I.1. Un dispositif qui s’inscrit dans un cadre existant 38

III.I.2. Les évolutions juridiques proposées 38

III.2. LA NECESSAIRE INTERVENTION DU LÉGISLATEUR 43

III.2.1. Pour déterminer les modalités de mise en œuvre des contrôles 43

III.2.2. Pour définir un régime de sanctions pénales 43

III.3. DES IMPACTS RELATIVEMENT LIMITÉS SUR LE FONCTIONNEMENT DE L’ADMINISTRATION 44

III.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ 44

PARTIE IV - CONDITIONS D’APPLICATION OUTRE-MER 45

{ ARTICLE 41 } 45

PARTIE V - CONSULTATIONS 46

PARTIE VI - DISPOSITIONS D’APPLICATION 47

Conformément aux décisions prises lors du comité interministériel de la mer réuni le 2 décembre 2013, le ministre délégué auprès du ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, a présenté un projet de loi relatif aux activités de protection des navires.

Délibéré lors du conseil des ministres du 3 janvier 2014, ce projet de texte vise à garantir la sécurité des navires battant pavillon français confrontés à des risques d’attaques dans les zones de piraterie.

Il s’inscrit également dans la volonté de renforcement de la compétitivité du pavillon français et du transport maritime.

TITRE PRELIMINAIRE

I. DIAGNOSTIC GENERAL

Situation de référence

La piraterie maritime constitue aujourd’hui une menace majeure sur le commerce maritime international et la sécurité des approvisionnements, alors que 90 % du transport des marchandises au niveau mondial se fait par voie maritime.

Au total, et toutes zones géographiques confondues, 234 attaques ont été recensées depuis le début de l’année 2013 par le Bureau Maritime International (BMI)1.

Les zones de navigation présentant un risque important sont à ce jour :

- l’Océan indien, et en particulier le Golfe d’Aden : il constitue le passage obligé vers le canal de Suez pour 15% du pétrole mondial et la totalité des échanges par conteneur entre l’Europe et la Chine.

- le bassin somalien ;

- le Golfe de Guinée : menaçant des navires et les approvisionnements pétroliers mondiaux, cette piraterie s’exerce surtout dans les eaux territoriales ou intérieures et n’est donc pas juridiquement de la piraterie. Le Nigeria concentre la moitié des attaques mais la menace se disperse actuellement d’Est en Ouest ; 

- en Extrême Orient, Asie du sud-est et dans le sous-continent indien : l’Indonésie, les détroits de Singapour et de Malacca et le Bangladesh ;

Assurer la sécurité de leurs équipages et de leurs navires constitue donc un enjeu considérable pour nos armateurs.

Selon les années, entre 300 et 500 marins sont affectés par des actes de piraterie, causant entre 5 et 25 morts par an.

Les conséquences économiques de la piraterie maritime pour les armateurs sont évaluées entre 7 et 12 milliards de dollars chaque année (dépenses de carburant dues à l’accélération de la vitesse de transit dans les zones à risque, coûts liés aux assurances, dépenses de sécurité ainsi que les primes aux équipages).

Considérant le nombre d’attaques recensées par le Bureau maritime international 2, la piraterie maritime semble avoir reculé dans l’Océan indien, au cours de l’année dernière mais tend, en revanche, à s’accentuer dans le Golfe de Guinée, où les attaques sont souvent plus violentes.

La diminution du nombre d’actes de piraterie est nettement observable dans le Golfe d’Aden. Alors qu’environ 25 000 navires y transitent chaque année, seuls quatre ont été attaqués depuis le début de l’année 2013 (évaluation au 30 septembre 2013) contre 28 en 2012 et 116 en 2011.

Plusieurs facteurs combinés peuvent expliquer une telle évolution :

1° facteurs généraux :

- Un meilleur respect par l’industrie maritime des règles de bonnes pratiques relatives à la protection passive élaborées par la fédération internationale des armateurs (International Chamber of Shipping) et prescrites par l’OMI, dites « Best Management Practices ».

Aux fins de protéger leurs équipages et leurs navires en transit ou en opération dans des zones à risque de piraterie, les armateurs ont en effet adapté leurs pratiques et procédures avant la traversée de zones à risques mais également, en cas d’attaque et durant celles-ci.

- L’utilisation croissante de gardes privés ou étatiques à bord des navires de commerce.

Il s’est en effet avéré que la mobilisation d’équipes de protection privée, en plus du déploiement de bâtiments militaires, constitue un moyen efficace pour prévenir et limiter la survenance d’actes de piraterie.

2° mais surtout facteurs spécifiques à la zone :

- L’efficacité de l’action des forces navales présentes dans la zone.

De nombreuses initiatives ont été engagées au niveau international et européen pour lutter contre la piraterie.

La France est associée à ces réactions et participe notamment aux opérations navales initiées par l’Union européenne (opération « ATALANTE » lancée en 2008 dans le Golfe d’Aden et au large des côtes somaliennes), ou au sein de l’OTAN (force multinationale« Task Force 151 », créée en 2009).

Un dispositif français de contrôle naval volontaire a par ailleurs été instauré depuis 2001 dans l’Océan indien et depuis le 1er juillet 2008 dans le golfe de Guinée.

- L’évolution politique à terre dans la corne de l’Afrique.

A contrario, les attaques en Indonésie sont au nombre de 68 depuis le début de l’année 2013 contre moins de 30 par an de 2008 à 2011.

Au total, après avoir dépassé 400 attaques par an pendant trois années consécutives (2009, 2010 et 2011), celles-ci semblent revenir à un nombre compris entre 200 et 300 par an.

Il importe de préciser que le nombre d’attaques n’est pas un indicateur fiable de l’ampleur de la piraterie maritime. De fait, les équipages ne font pas toujours état des attaques qu’ils ont pu mettre en échec ou qui ont pu être découragées par des mesures préventives (veilles radar et humaine assurées en continue, vitesse de transit élevée, extinction des systèmes d’identification automatique AIS, etc.).

En conséquence, la baisse régionale et temporaire des indicateurs de surveillance de la piraterie maritime ne doit en aucun cas conduire à sous-estimer un phénomène qui reste relativement complexe à évaluer et demeure une préoccupation majeure pour la communauté maritime.

En tout état de cause, la lutte contre le risque de piraterie doit pouvoir jouer sur un panel de solutions, relevant tant des armateurs que des Etats.

Réponse actuelle apportée par le Gouvernement pour la protection des navires battant pavillon français ou d’intérêt français

Afin d’assurer la protection des navires civils battant pavillon français ou d’intérêt français, et dans le cadre de l’arrêté du 22 mars 2007 établissant le responsabilité du ministère de la défense dans la protection du trafic maritime, l’État français met à disposition des propriétaires ou exploitants de navires exposés à un risque de piraterie, des équipes de protection embarquées (EPE), représentant au total plus de 152 personnels militaires de la marine nationale (4 à 7 fusiliers marins ayant reçu une formation et un entraînement adaptés).

Leur cadre d’emploi est fixé par le Premier ministre et comprend notamment les critères d’attribution suivants : la nationalité du pavillon, la présence de citoyens français à bord, la nature de la cargaison de l’activité du navire, le port de départ de l’équipe etc.

Au nombre de 26, ces unités sont régulièrement amenées à intervenir dans les zones à risque (bassin somalien et golfe d’Aden principalement, parfois dans le golfe de Guinée).

En pratique, 10 et 12 équipes de protection embarquées sont dédiées en particulier aux thoniers français, les autres pouvant assurer notamment la protection de navires jugés stratégiques et particulièrement vulnérables (faiblesse de leur vitesse de dérobement ou insuffisance de leur franc-bord…).

En raison des moyens et des effectifs limités dont elle dispose, la marine nationale ne peut répondre à toutes les demandes de protection émanant des navires français (environ 70 % des 25 à 35 demandes reçues chaque année sont honorées).

Les refus sont principalement motivés par une incompatibilité des délais nécessaires aux démarches diplomatiques et au déploiement des équipes de protection embarquées, et aux critères d’éligibilité définis par le Premier ministre.

En outre, il faut tenir compte des problèmes logistiques soulevés par le transport de ces équipes à un point d'embarquement et des délais de prévenance, qui ne sont pas toujours compatibles avec les impératifs économiques des navires de commerce.

En tout état de cause, si les délais relatifs aux démarches logistiques et diplomatiques pouvaient être réduits, et si le cadre d’emploi des équipes de protection embarquées était élargi, il est estimé que le nombre de demandes en protection serait a minima multiplié par deux, dépassant alors significativement les besoins pouvant effectivement être couverts par la marine nationale.

Enjeux économiques pour les armateurs

Les armateurs mettent en exergue qu’il est indifférent que le taux de réponse soit amélioré dès lors que la seule existence d’un aléa subsiste quant à l’attribution d’une équipe, aléa commercialement inacceptable pour le client (ou son assureur).

Les compagnies maritimes françaises perdent en effet des marchés, faute de pouvoir garantir systématiquement la protection des navires, des équipages et de leurs cargaisons.

II. OBJECTIFS POURSUIVIS PAR LE GOUVERNEMENT

Au regard de la situation précédemment décrite, l’objectif du Gouvernement est de remédier aux difficultés mises en évidence ci-dessus, afin de répondre plus efficacement aux besoins de sécurité du transport maritime, tout en générant une nouvelle activité au sein de laquelle certaines entreprises de protection françaises pourraient faire valoir leur savoir-faire.

La menace que fait peser le défaut de réponse adéquate aux besoins exprimés sur l’attractivité du pavillon français est régulièrement rappelée par l’organisation professionnelle Armateurs de France, qui met en avant le risque de dépavillonnement.

Sans qu’un lien puisse être directement établi, 34 navires ont été retirés des registres du pavillon français en 2012. Les difficultés pour protéger certains navires font vraisemblablement partie des différentes causes.

La compétitivité des entreprises françaises, confrontées à la concurrence de pavillons tiers, qui garantissent une protection privée, est aujourd’hui compromise.

De nombreux États autorisent en effet cette pratique, parmi lesquels la plupart des pavillons européens.

La nécessité d’apporter une réponse rapide et adaptée aux armateurs français a été récemment évoquée dans le rapport parlementaire du député Arnaud Leroy sur la compétitivité des transports et services maritimes français, dont l’une des propositions consiste à autoriser l’embarquement à bord des navires français des gardes privés pour lutter contre la piraterie 3.

Il importe de noter que pour faire face à l’extension de la menace de piraterie et à l’accroissement de la violence, les propriétaires et exploitants de navires de la flotte contrôlée (soit 40% des navires contrôlés par des entreprises françaises mais exploités sous pavillon étranger), recourent depuis plusieurs années aux services d’entreprises de protection armée pour assurer la protection de leurs navires immatriculés sous pavillon étranger.

Du fait d’un retour d’expérience très positif, et malgré leurs réticences initiales à l’égard des sociétés privées de protection, les armateurs de navires battant pavillon français sont aujourd’hui particulièrement demandeurs de pouvoir recourir à de tels services de manière légale à bord.

**

*

Considérant la nécessité d’assurer la sécurité des navires et de préserver le pavillon français, et compte tenu des difficultés rencontrées par la marine nationale pour satisfaire à l’ensemble des demandes, le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 invite à examiner les solutions complémentaires aux équipes de protection embarquées pour lutter contre la piraterie maritime 4.

Appelé de ses vœux par les professionnels de l’industrie maritime, l’embarquement d’équipes de protection privée à bord des navires apparaît comme une solution consensuelle et efficace pour compléter les autres moyens disponibles, sous réserve qu’elle soit accompagnée de procédures permettant de garantir le professionnalisme et la probité des acteurs concernés.

Les enseignements tirés des retours d’expérience des armateurs, et les préconisations des parlementaires 5 confirment la pertinence de l’approche mais aussi la nécessité d’encadrer et de contrôler rigoureusement cette activité.

Tel est l’objet du dispositif proposé par le présent projet de loi.

III. ETUDE DE NECESSITE D’UNE NOUVELLE REGLEMENTATION

Options possibles en dehors de l’intervention de règles de droit nouvelles

Eu égard à l’objectif recherché et à l’absence d’un cadre juridique actuel, et compte tenu des difficultés rencontrées par l’État pour satisfaire les besoins de protection exprimés et à venir, il s’avère désormais nécessaire et urgent d’apporter une réponse adéquate à la demande croissante de protection exprimée par les armateurs de navires battant pavillon français.

L’intervention du législateur est ainsi préconisée aux fins :

- d’offrir une alternative aux armateurs de navires battant pavillon français qui ne pourraient pas obtenir une protection étatique armée lorsqu’ils exploitent des navires dans des zones de navigation présentant un risque élevé de piraterie, en autorisant le recours aux services d’entreprises privées de protection des navires ;

- d’encadrer strictement l’exercice d’une telle activité, en instaurant un système d’autorisation préalable des entreprises, d’agrément pour leurs dirigeants et gérants, et de carte professionnelle pour les agents ;

- de préciser les conditions d’exercice de l’activité ;

- de contrôler la mise en œuvre du dispositif et réprimer, le cas échéant, les violations des interdictions et les manquements aux obligations édictées pour la mise en œuvre du nouveau dispositif.

Motif du recours à une loi autonome

A ce jour, l’exercice de l’activité de protection armée des navires en mer par des entreprises privées et la faculté pour les armateurs de navires battant pavillon français de recourir à de tels services ne sont prévus par aucune législation ou réglementation existante.

Cette activité n’est pas recensée parmi les activités privées de sécurité dont le régime est encadré par la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de de surveillance, de gardiennage et de transport de fonds, désormais codifiée au Livre VI du code de sécurité intérieure.

Par ailleurs, les activités des entreprises privées de protection des navires ne relèvent en aucune matière de la définition du mercenariat fixée par la loi n° 2003-340 du 14 avril 2003 relative à la répression de l'activité de mercenaire et insérée aux articles 436 et suivants du code pénal.

Six critères cumulatifs sont retenus pour caractériser le mercenariat : le fait pour une personne d’être spécialement recrutée pour combattre dans un conflit armé (1) sans être ressortissant d’un État partie (2), ni membre de ses forces armées (3), ni envoyé en mission par son État (4), et de tenter de prendre une part directe au conflit (5) en vue d’en tirer un avantage personnel « ou une rémunération nettement supérieure » à celle des combattants réguliers (6).

De plus, cette activité ne peut s’exercer sans cadre législatif propre, principalement du fait de l’usage des armes.

La codification du présent projet de loi au sein d’un code préexistant (code des transports, code de sécurité intérieure ou code de la défense) s’est avérée inadéquate pour les raisons décrites ci-après :

- l’intégration des dispositions prévues par le projet de loi dans la cinquième partie du code des transports relative au transport et à la navigation maritimes est difficilement envisageable ; en effet, elle n’a pas vocation à régir exclusivement des questions relatives aux navires ou à la collectivité du bord.

Au surplus, la réglementation de la protection privée des navires s’applique également pour partie à terre.

- l’insertion du dispositif envisagé dans le code de sécurité intérieure ne semble pas non plus pertinente dès lors que l’activité de protection des navires a uniquement vocation à s’exercer en dehors du territoire national et des eaux intérieures de l’État.

En tout état de cause, la loi n° 94-589 du 15 juillet 1994 relative à la lutte contre la piraterie et aux modalités de l'exercice par l’État de ses pouvoirs de police en mer modifiée, qui revêt également un caractère hybride, n’a pas été codifiée et reste autonome.

L’instauration d’un cadre législatif et réglementaire ad hoc a dès lors été retenu, aux fins notamment de prévoir des mesures relatives à :

1° L’autorisation et la définition de l’activité de protection armée des navires

Aux termes du projet de loi proposé, la protection armée des navires « consiste, à la demande d’un armateur, à protéger contre les menaces extérieures, des navires battant pavillon français ainsi que l’équipage, les passagers et les biens embarqués sur ces navires ». Cette protection s’exerce uniquement depuis les navires protégés : l’utilisation de navires d’escorte n’est pas autorisée.

Le recours aux services d’une entreprise exerçant cette activité est toutefois strictement limité aux zones à haut risque de piraterie et à certains types de navire, définis par décret simple.

Ces dispositions font l’objet du Titre Ier du projet.

2° L’introduction d’un cadre juridique pour l’exercice de l’activité de protection armée des navires

Le dispositif envisagé par le projet de loi prévoit que seules les entreprises dûment autorisées par l’autorité administrative et certifiées conformément à une norme spécifique à l’activité, peuvent exercer des missions de protection armée des navires.

Les dirigeants d’entreprises privées de protection des navires devront en outre être titulaires d’un agrément et leurs agents d’une carte professionnelle, ces deux documents attestant leur honorabilité et aptitudes professionnelles (tant s’agissant des compétences directement liées à la protection que s’agissant des compétences proprement maritimes).

Le projet prévoit également des dispositions relatives à l’armement, comprenant une définition des catégories d’armes et munitions autorisées, des modalités d’acquisition, de détention et de transfert ainsi que des conditions dans lesquelles elles sont embarquées et stockées à bord.

Il énonce que l’activité est exercée dans une but préventif et que les agents ne recourent à la force que dans le cadre de la légitime défense, l’usage de la force armée demeurant une prérogative exclusive de l’État.

Il rappelle enfin les droits et obligations respectifs de l’équipe embarquée et du capitaine du navire protégé, qui conserve toute autorité à bord, conformément aux conventions internationales de l’Organisation Maritime Internationale.

Le projet prévoit un suivi régulier des activités des entreprises et de leurs agents (obligation de signalement par le capitaine de l’embarquement d’une équipe, déclaration obligatoire des incidents survenus à bord, tenue de registres d’activité etc.).

Ces dispositions font l’objet des Titre II et III du projet.

3° L’instauration d’un régime de contrôle de l’activité de protection armée des navires

Le projet de loi met en place un dispositif de contrôles administratifs sur le territoire national et à bord des navires.

Il prévoit enfin un dispositif de sanctions pénales et administratives visant à réprimer les infractions aux dispositions du présent projet de loi.

Ces dispositions font l’objet des Titres IV et V du projet.

IV. INSERTION JURIDIQUE DU PROJET

L’embarquement de gardes privés à bord des navires dans des zones de piraterie ne fait l’objet d’aucune réglementation internationale ou européenne.

En effet, en application de l’article 94 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 (CNUDM), le déploiement d’agents de sécurité armés sous contrat privé à bord des navires relève des compétences de l’État du pavillon, qui est tenu d’exercer effectivement sa juridiction et son contrôle dans les domaines administratif, technique et social.

Au niveau européen, il convient de souligner que si la politique des États membres a été très diversifiée en la matière, les positions des pavillons européens ont beaucoup évolué ces dernières années, principalement en faveur de l’embarquement de gardes privés à bord des navires marchands.

A ce jour, la France est l’un des derniers grands États maritimes de l’Union européenne à ne pas avoir adopté de législation spécifique concernant le recours à des entreprises privées de protection des navires.

Cette singularité tend à fragiliser la capacité de la France à promouvoir sa vision, fondée sur un encadrement étatique rigoureux, dans les instances internationales et européennes en charge de la régulation des activités de sécurité et sûreté maritimes.

Le tableau ci-après montre la situation en Europe :

Pays

Position nationale sur la présence d’équipe des marines nationales ou étrangères à bord des navires sous pavillon national

Position nationale sur la présence d’entreprises privées armées à bord des navires sous pavillon national

Belgique

Autorisée

Autorisée

Chypre

Autorisée

Autorisée

Allemagne

Autorisée

Autorisée

Danemark

Autorisée

Autorisée

Grèce

Non autorisée

Autorisée

Espagne

Non autorisée

Autorisée

Finlande

Pas de base légale

Pas de base légale mais réflexion en cours

France

Autorisée

Non autorisée

Italie

Autorisée

Autorisée

Luxembourg

Non autorisée

Autorisée

Malte

Autorisée

Pas de base légale mais autorisations au cas par cas

Pays-Bas

Autorisée

Non autorisée à ce stade mais un projet de loi est en cours de rédaction

Pologne

Non autorisée

Autorisée

Suède

Non autorisée

Autorisée

Royaume Uni

Non autorisée

Autorisée

Norvège

Pas de base légale mais réflexion en cours

Autorisée

Au niveau international, plusieurs enceintes, à l’instar de l’Organisation maritime internationale (OMI) se sont saisies de la question de l’encadrement des activités des entreprises de protection des navires.

Cette institution s’attache ainsi à rappeler dans une circulaire à l’intention des États du pavillon du 25 mai 2012 sur l’utilisation de personnel de sûreté armé sous contrat privé à bord de navires se trouvant dans des zones à haut risque, qu’il appartient à chaque État d’autoriser le recours à du personnel de sûreté armé à bord des navires battant son pavillon et d'établir les conditions dans lesquelles cette autorisation sera accordée 6.

L’Organisation recommande toutefois aux États qui jugeraient utile et approprié le recours à du personnel de sûreté armé, de respecter un certain nombre de critères dans l’élaboration de leur politique afin d’assurer le professionnalisme des intervenants et de limiter les risques d’incidents.

L’OMI a par ailleurs adopté des directives similaires à l’intention des propriétaires, exploitants et capitaines de navires et des sociétés fournissant du personnel pour ce type d’activité 7.

En l’absence de dispositif de régulation spécifique et complet relatif aux entreprises de protection des navires, ces documents, bien que non contraignants, constituent l’une des seules références applicables.

PARTIE I - L’AUTORISATION DES ACTIVITÉS DES ENTREPRISES PRIVEES DE PROTECTION DES NAVIRES POUR LUTTER CONTRE LA PIRATERIE MARITIME

{ ARTICLES 1ER, ET 18 }

I.1. L’INTRODUCTION DANS NOTRE DROIT DU CADRE JURIDIQUE NÉCESSAIRE À L’EMBARQUEMENT D’ÉQUIPES PRIVÉES DE PROTECTION DES NAVIRES

I.1.1. Une évolution nécessaire en l’absence de cadre juridique adapté

Ainsi qu’évoqué dans le Titre préliminaire, il n’existe à ce jour aucune disposition législative et réglementaire applicable à l’activité de protection des navires.

I.1.2. Une activité précisément définie et limitée

Répondre aux préoccupations consiste à autoriser l’embarquement d’agents de protection privés à bord des navires lorsqu’ils doivent transiter par des zones de navigation à haut risque de piraterie.

Il importe cependant que l’ouverture de ce nouveau marché soit non seulement limitée, mais également que l’exercice de l’activité soit strictement régulée.

Dans cette perspective, le projet de loi définit en son article 1er l’activité comme « l’activité qui consiste, à la demande d’un armateur, à protéger, contre les menaces extérieures, des navires battant pavillon français ainsi que l’équipage, les passagers et les biens ».

Les personnes morales exerçant cette activité sont dénommées entreprises privées de protection des navires. Les personnes physiques exerçant cette activité, employées par ces entreprises, sont dénommées agents.

Aux termes de l’article 1er, le projet de loi n’a vocation à régir que les activités de protection des navires qui ne sont pas exercées par des agents de l’État ou par des agents privés agissant pour le compte de l’État.

Cette précision a pour objet d’exclure expressément du champ d’application du projet de loi les opérations conduites par les équipes de protection embarquées de la marine nationale ou celles effectuées par des personnes privées en exécution d’une obligation de protection imposée par l’État.

Il existe en effet dans le code de la défense une obligation de recourir à une escorte pour le transport de matière nucléaire, à laquelle le ministre compétent peut décider ou non de faire participer la force publique. En cas de refus, cette escorte, assurée par des moyens privés, serait considérée comme agissant pour le compte de l’État.

La définition de l’activité fait référence à la notion de « menaces extérieures ».

Il apparaît en effet trop restreint de limiter cette activité à la protection contre les seules menaces de piraterie - qui n’existe stricto sensu que dans les conditions strictes de l’article 101 de la convention des Nations Unies sur le droit de la précitée, prévoyant notamment qu’il s’agit d’actes commis à des fins privées, et de l’article 1er de la loi n° 2011-13 du 5 janvier 2011 relative à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police de l’État en mer.

Or, la mission de protection peut être également dirigée contre des actes à mains armée à des fins non lucratives, notamment à visée terroriste.

Par convention afin de simplifier le texte de la présente étude d’impact, on utilisera le mot « piraterie » au sens du présent document.

Le deuxième alinéa de l’article 1er et l’article 18 du projet de loi posent en outre les limites suivantes :

I.1.2.1. Interdiction d’exercer l’activité à partir d’un navire tiers

L’article 1er précise en son deuxième alinéa que l’activité s’exerce uniquement à bord du navire qu’elle a pour but de protéger.

A ce jour, quelques entreprises anglo-saxonnes ont acquis d’anciens navires de guerre, les ont immatriculés sous registre civil et proposent des prestations d’escorte des bâtiments marchands.

Cette pratique n’apparaît pas souhaitable, pour des raisons opérationnelles, juridiques et politiques. La protection armée d’un navire à partir d’un navire extérieur est moins efficace que celle conduite depuis le bord par une équipe embarquée à bord du navire à protéger. En effet, le navire d’escorte ne peut surveiller tout le plan d’eau à la fois et des pirates peuvent attaquer un navire sans que son escorteur s’en aperçoive.

Juridiquement, l’équipe de protection est soumise, à bord, à l’autorité du capitaine, qui a la responsabilité de rechercher et constater les crimes et délits constatés à bord (articles 26 du code disciplinaire et pénal de la marine marchande) et « prend toutes mesures nécessaires et adaptées en vue d'assurer la préservation du navire et de sa cargaison et la sécurité des personnes se trouvant à bord » (article 28 du code disciplinaire et pénale de la marine marchande). Sur un navire d’escorte privé, le capitaine relève de l’entreprise de sûreté. L’effectivité de l’autorité que le capitaine du navire protégé sera en mesure d’exercer sur le navire d’escorte est donc plus qu’incertaine.

En outre, les agents de l’État français ne seraient pas en mesure de vérifier les conditions d’exercice de l’activité à bord d’un navire d’escorte battant un autre pavillon en l’absence de cadre conventionnel les y autorisant.

Enfin, on peut craindre que le navire d’escorte s’en prenne à des présumés pirates en transit, hors de la légitime défense. Le risque de confusion avec la police en mer est également important car un navire d’escorte n’a pas de pouvoir de police et, à la différence des navires de l’État.

I.1.2.2. Limitation à certaines zones

L’article 18 du projet de loi prévoit que l’activité privée de protection des navires ne peut être exercée qu’au-delà de la mer territoriale des États, dans des zones fixées par décret en raison des menaces encourues.

La mer territoriale est définie par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (article 2) comme la zone de mer adjacente au territoire d’un État, et sur laquelle il exerce sa souveraineté. Les lois et règlements de l’État côtier s’y appliquent donc pleinement, en particulier en matière de sûreté en mer.

Afin d’éviter de porter atteinte à la souveraineté d’un État côtier en autorisant dans sa mer territoriale l’exercice d’une activité pouvant relever directement de cette souveraineté, le projet de loi prévoit – en l’absence de tout accord international, bilatéral ou multilatéral conclu par la France avec l’Etat concerné et en disposant autrement - de limiter l’exercice de l’activité de protection des navires aux zones situées au-delà de la mer territoriale. Dans ces zones, c’est-à-dire en haute mer et dans la zone économique exclusive des États, la sûreté des navires relève des lois et règlements mis en place par l’État du pavillon.

En complément de cette limitation générale du champ d’application de la loi dans l’espace, et afin de faciliter le contrôle par l’État de l’activité de protection des navires, l’article 18 restreint la possibilité de recours aux entreprises de protection des navires qu’à certaines zones.

Ces zones, caractérisées par un risque élevé de piraterie maritime, et par nature évolutives, sont fixées par décret.

I.1.2.3. Limitation à certains navires

Le Gouvernement souhaite par ailleurs conserver la possibilité d’utiliser des équipes militaires de protection embarquées pour protéger des navires d’intérêt stratégique.

A cette fin, l’article 18 précise que les catégories de navires éligibles sont fixées par la voie réglementaire.

Ceci permet également de dissuader les navires non éligibles pour lesquels le gouvernement déciderait de ne pas fournir d’équipe de protection embarquée, de fréquenter des zones à risque.

I. 2. LE CHOIX D’UNE REGULATION STRICTE

I.2.1. Les différentes options concernant l’ouverture du marché

Différentes options ont pu être envisagées s’agissant du degré d’ouverture du marché de la protection privée des navires battant pavillon français.

Une première hypothèse consistait à autoriser l’embarquement de gardes privés sans aucune restriction liées aux zones ou aux types de navires.

Une autre hypothèse, pouvant le cas échéant se combiner avec la précédente, aurait consisté à autoriser toute entreprise privée de protection des navires à exercer l’activité sur les navires battant pavillon français.

Ces deux hypothèses ont été écartées en faveur de l’instauration d’un cadre précis et strict de recours aux services de ces entreprises.

I.2.2. La nécessité du recours à loi

La création d’une nouvelle catégorie de personnes morales et la définition du régime d’autorisation préalable d’exercice auquel celles-ci seront assujetties rendent nécessaires l’adoption de mesures législatives.

I.3. DES IMPACTS PRINCIPALEMENT ECONOMIQUES

I.3.1. Impacts pour l’emploi

Dans un rapport d’information remis à la commission de la défense de l’Assemblée nationale en février 2012, MM. Ménard et Viollet estimaient à environ 300 le nombre de personnes nécessaires à la sécurisation des navires battant pavillon français vulnérables à la menace pirate. Ceci constitue l’hypothèse basse.

Selon les armateurs, pour ce qui concerne le seul pavillon français, la demande en termes de gardes privées sera limitée en nombre.

Dans l’état actuel de la situation de la piraterie dans l’Océan Indien et en Afrique de l’est, les armateurs français utilisent ce type d’entreprises pour protéger les navires qu’ils détiennent sous pavillon étranger (40% de la flotte des armateurs français navigue sous pavillon étranger). Les emplois concernés sont au nombre de 200. Aussi pour assurer la même protection des navires battant pavillon français, ce sont donc 250 emplois qui pourraient être concernés.

Il faut néanmoins noter que les intérêts français vont bien au-delà de l’Océan indien. On peut donc estimer à environ 400 à 500 le nombre de personnels nécessaire à la sécurisation des navires battant pavillon français vulnérables à la menace pirate sur l’ensemble des zones concernées.

I.3.2. Impacts économiques et financiers

Le coût d’une équipe de protection privée est estimé entre 3000 € et 4000 € par jour.

Compte tenu des perspectives envisagées ci-dessus, on peut s'attendre à 3000 jours d'activité annuelle. Cela laisse augurer un chiffre d’affaires de quelques 12 millions d’euros pour la protection des navires sous intérêt français. Ce chiffre pourrait cependant être bien supérieur si on considère l’attractivité vis à vis de clients étrangers, européens notamment, qu’offriraient l’agrément étatique et la labellisation des entreprises françaises.

Bien que représentant un coût direct, le recours à la protection privée selon les conditions prévues par le présent projet de loi permet, d’une part, d’envisager la maîtrise voir la baisse des primes d’assurance pour les armateurs, mais aussi d’améliorer la fiabilité du pavillon du point de vue des chargeurs.

I.3.3. Impacts sociaux

L’objectif de la loi étant de permettre une meilleure protection des navires, il est escompté une baisse des attaques, donc une diminution des atteintes aux personnes (équipages), que ce soit en terme de stress, ou d’atteinte directe (menaces, séquestrations, atteintes physiques).

I.3.4. Impacts pour l’égalité entre les femmes et les hommes

Ce projet de loi implique la consolidation d’un marché où les entreprises françaises de sécurité privée pourront bénéficier de nouveaux contrats pour protéger les navires. La sécurité privée est un secteur très fortement masculin, à hauteur de 87 % selon les chiffres de 2011 du ministère de l’Intérieur8. Il est important de veiller à ce que ce développement s’accompagne du respect des obligations des entreprises en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, en veillant notamment à la croissante féminisation de ce secteur d’activité.

En effet, depuis la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, les entreprises d’au moins 50 salariés ont l’obligation de négocier un accord collectif en faveur de l’égalité professionnelle ou, à défaut, d’adopter un plan d’action unilatéral sous peine de sanction financière. La loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012 portant création des emplois d’avenir est venue par la suite préciser les modalités de négociation au préalable pour les entreprises d’au moins 50 salariés, ainsi que les formalités particulières en cas d’échec de négociation pour les entreprises d’au moins 300 salariés.

I.3.5. Impacts pour les personnes handicapées

Cette mesure ne fait l’objet d’aucune adaptation spécifique aux personnes handicapées.

I.3.6. Impacts environnementaux

Cette mesure n’entraîne aucune conséquence directe sur l’environnement, mais pourrait avoir un effet induit s’agissant d’une moindre consommation en carburant si les navires protégés font le choix de ne pas accélérer leur vitesse dans les zones à risque. Toutefois, il n’est pas recommandé de se dispenser des différentes mesures de prévention, la protection par des gardes armés n’étant qu’un des éléments de la prévention contre la piraterie.

I.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

Nos partenaires européens ayant mis en place un cadre de régulation des entreprises de protection des navires, en limitent tous le champ d’application aux bâtiments battant pavillon national et restreignent les activités des entreprises dans l’espace et dans le temps.

Au Royaume-Uni, le recours aux entreprises de protection des navires est présenté comme temporaire et destiné à aider l’industrie à faire face à des circonstances qualifiées d’exceptionnelles. Ainsi, ce recours est non seulement limité aux navires naviguant dans une zone à haut risque mais également à certaines catégories de navires (navires à passagers, navires de charge d’une jauge brute d’au moins 500).

L’Espagne, qui a fait évolué sa réglementation en 2009 afin de permettre aux compagnies maritimes de recourir à des opérateurs privés de sécurité pour protéger les navires battant pavillon espagnol, limite cette faculté aux navires marchands et aux navires de pêche qui naviguent dans des eaux où existent de graves risques pour la sécurité des personnes et des biens.

Enfin, les lois italiennes et allemandes indiquent que l’objectif des gardes armés est d’assurer des missions de protection dans l’espace maritime international dans lequel les actes de piraterie sont élevés.

PARTIE II - ENCADREMENT DES ACTIVITÉS DES ENTREPRISES PRIVEES DE PROTECTION DES NAVIRES

{ ARTICLES 2 À 17, 19 À 23 ET 27 }

II.1. LA MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF AD HOC FAVORISANT LA TRANSPARENCE DE L’ACTIVITE ET S’APPUYANT SUR DES PROCEDURES ET INSTANCES EXISTANTES

II.1.1. Le code de sécurité intérieure comme modèle intellectuel

S’agissant d’une activité nouvelle, le cadre législatif existant n’est pas opérant.

Il convient toutefois de noter que par souci d’efficacité et d’économie de moyens, le dispositif proposé est directement inspiré de celui mis en œuvre pour les activités de sécurité privée exercées sur le territoire national, et régies par le Livre VI du code de sécurité intérieure.

Le choix d’un texte spécifique, spécialement dédié à la protection des navires permet de tenir compte des spécificités de l’exercice de l’activité à l’instar du rôle du capitaine du navire protégé, des conditions de stockage particulières des armes liées au passage inoffensif dans les eaux territoriales, de l’information des autorités maritimes compétentes, etc.

Compte tenu du nombre assez restreint d’entreprises et d’agents susceptibles d’exercer l’activité visée, la création d’instances ou d’organismes spécifiques n’apparaît par ailleurs pas pertinent.

En conséquence, la mise en œuvre des mesures proposées repose en outre sur le même organisme que celui prévu par le code de sécurité intérieure, le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS).

Cet établissement public administratif placé sous tutelle du ministère de l’Intérieur est d’ores et déjà chargé, en application de l’article L.632-1 du code susmentionné, de l'agrément, du contrôle et du conseil des professions de sécurité privée.

II.1.1.1. S’agissant de l’autorisation d’acquisition et de détention d’armes pour les entreprises

L’acquisition et la détention d'armes sont actuellement encadrées par le code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-304 du 6 mars 2012 relative à l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif, et par le décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013 portant application de la loi n° 2012-304 du 6 mars 2012.

A ce jour, aucune disposition de ces textes n’autorise spécifiquement les entreprises et les agents des entreprises privées de protection des navires à acquérir et à détenir des armes.

Dès lors, une intervention du législateur est nécessaire afin d’autoriser ces entreprises et leurs agents à acquérir et détenir des armes dans le cadre de leur activité.

Compte tenu de la nature de l’activité des entreprises privées de protection des navires, le Gouvernement a estimé qu’il était nécessaire d’encadrer strictement tout ce qui a trait aux armes. C’est pourquoi le présent projet de loi contient, outre l’autorisation de détenir ou acquérir certaines armes, un dispositif de contrôles et de sanctions(Cf. Partie III de l’étude).

II.1.1.2. S’agissant de l’acquisition, de la détention, du transport, de l’importation, de l’exportation, du transfert des armes et munitions

Le projet de loi définit les conditions dans lesquelles les entreprises privées de protection des navires sont autorisés à acquérir, détenir et utiliser des armes. Aucune disposition n’existe actuellement dans le droit français concernant l’activité des entreprises privées de protection des navires et donc, la gestion des armes par ces entreprises.

Les conditions de transport de ces armes sur le territoire national sont prévues par des dispositions réglementaires inscrites dans le décret n° 2013-700 du 30 juillet 2013 portant application de la loi n° 2012-304 du 6 mars 2012 relative à l'établissement d'un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif.

S’agissant des conditions d’importation, d’exportation ou de transfert intracommunautaire de ces armes, le droit commun s’applique.

Concernant la sortie du territoire d’armes acquises en France, les entreprises privées de protection des navires devront obtenir, selon qu’elles utiliseront des armes à feu ou des armes de guerre :

- une autorisation d’exportation, pour les armes à feu relevant du règlement (UE) n° 258/2012 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 portant application de l’article 10 du protocole des Nations unies « relatif aux armes à feu », ou une autorisation de transfert intracommunautaire, pour les armes à feu régies par la directive 91/477/CEE du Conseil du 18 juin 1991 relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes ou pour les explosifs régis par la directive 93/15/CEE du Conseil du 5 avril 1993 relative à l'harmonisation des dispositions concernant la mise sur le marché et le contrôle des explosifs à usage civil ;

- une licence d’exportation, pour les armes de guerre mentionnées à l’article L. 2335-2 du code de la défense, ou une licence de transfert intracommunautaire, pour les armes de guerre mentionnées à l’article L. 2335-9 du même code, ces licences étant délivrées par le Premier ministre après avis de la commission interministérielle pour l’étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG).

Enfin, le retour en France de ces armes sera, le cas échéant, soumis à l’autorisation d’importation de matériels de guerre et matériels assimilés prévue par l’article L. 2335-1 du code de la défense.

Il pose par ailleurs l’interdiction pour ces entreprises, d’une part, d’importer sur le territoire national des armes et munitions acquises dans un État non membre de l’Union européenne et, d’autre part, de revendre dans État non membre de l’Union européenne des armes et des munitions acquises sur le territoire national

Il s’agit ainsi de veiller à ce que l’activité des entreprises ne contribue pas au trafic international d’armes, trafic pouvant être facilité par leur transit dans différents ports étrangers.

II.1.2. La mise en place d’un système d’encadrement sui generis

II.1.2.1. Un accès à la profession conditionné à l’obtention d’une autorisation administrative et d’une certification préalable

Le dispositif proposé permet de faire appel à une équipe de protection armée à bord d’un navire français, s’il est satisfait à de strictes conditions, listées ci-après :

1° Le recours à une entreprise privée de protection des navires n’est autorisé que si l’entreprise est dûment agréée par l’autorité administrative, conformément à des critères fixés par le présent projet de loi et par les mesures réglementaires prises pour son application.

L’article 3 du projet de loi précise que l'autorisation est accordée par le CNAPS, ceci afin de ne pas créer des procédures ou organismes nouveaux, ce qui aurait été source de coûts supplémentaires pour l’État.

2° La certification préalable des entreprises souhaitant exercer l’activité à bord de navires battant pavillon français.

L’article 6 du projet de loi impose que les entreprises justifient de l’obtention d’une certification sur la base d’une norme ad hoc garantissant la qualité et le sérieux des prestations de protection qu’elles offriront.

L’obligation de certification a pour principal objet de s’assurer que les armateurs ne recourent qu’à des entreprises dont la fiabilité aura été au préalable démontrée et qui maîtrisent l’ensemble des processus nécessaires à l’accomplissement de cette activité en mer. Les procédures visées sont relatives aux conditions de gestion des opérations, à l’évaluation des risques, au signalement des incidents et à l’évaluation des connaissances des dirigeants et agents.

L’obtention et le maintien de la certification imposent des audits réguliers par un organisme tiers (organisme certificateur) et apporte une garantie supplémentaire, tant à l’État qu’aux armateurs qui emploieront les entreprises privées de protection des navires.

A titre d’information, l’Organisation internationale de la normalisation (ISO) a élaboré un référentiel spécifique au déploiement à bord des navires d’agents de protection armés 9. Cette norme, qui a été établie, en collaboration avec l’OMI, les professionnels de l’industrie maritime et des organismes de renseignement tels qu’INTERPOL, définit les éléments d'un système de management de la sécurité, parmi lesquels la planification, les ressources, la formation et la sensibilisation, la communication et la documentation.

Elle décrit par ailleurs les exigences opérationnelles pour les aspects relatifs à la gestion du lieu de l'attaque et à la gestion des blessés, les rapports et enquêtes sur les incidents, la santé et la sécurité, et les plaintes des clients.

C’est, à ce jour, la seule norme existante pour ce type d’activité. Elle apporte les garanties mentionnées à l’article 6 du projet de loi.

La désignation des organismes certificateurs est assurée par la voie réglementaire.

3° L’article 6 impose à toute entreprise souhaitant exercer l’activité de protection des navires de souscrire une assurance couvrant ses responsabilités professionnelles.

Cette obligation, relativement classique s’agissant d’une activité privée de sécurité, semble par ailleurs justifiée compte tenu du fait que les agents chargés de la protection des navires peuvent être armés dans l’exercice de leurs fonctions.

4° L’article 6 prévoit en outre la possibilité de délivrer une autorisation provisoire d’exercice de six mois pour les entreprises n’ayant jamais exercé l’activité de protection des navires si elles démontrent avoir engagé une démarche de certification.

5° Autres mesures visant à assurer la transparence de l’activité.

L’article 2 du projet de loi réserve l’exercice professionnel de l’activité privée de protection des navires aux personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés et aux personnes morales qui sans être immatriculées audit registre, sont établies dans un autre État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen et qui exercent cette activité.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (article L.612-2).

La nécessaire inscription des personnes morales au registre du commerce interdit que l’exercice de cette activité touchant à la sécurité puisse être assuré sous la forme associative et d’éviter tout « paracommercialisme » dans ce secteur réglementé.

Par ailleurs, l’article 2 du projet de loi se conforme au droit communautaire, notamment au principe de libre prestation de services aux activités privées de sécurité (décision de la Cour de justice des Communautés européennes du 9 mars 2000, Commission c./ Belgique).

L’article 4 du projet de loi précise qu’une autorisation est nécessaire pour l’établissement principal ainsi que pour chaque établissement secondaire.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de sécurité intérieure (article L.612-9). Antérieurement à l’adoption de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, une telle autorisation n’était exigée que pour l’entreprise seule, sans considération du nombre de ses établissements.

La distinction entre établissement principal et établissement secondaire permet de renforcer la portée du contrôle de l’autorité administrative. Il s’agit de s’assurer que chaque établissement pris individuellement remplit les conditions attachées à la délivrance de l’autorisation, relatives par exemple à l’objet de la société ou à sa dénomination.

L’article 5 prévoit par ailleurs que le CNAPS ne fait pas droit automatiquement à toute demande d’autorisation déposée par une entreprise pour exercer l’activité de protection des navires dès lors que cette demande comporte l'ensemble des mentions requises par la loi. En effet, l'autorisation doit être refusée lorsque l'activité de l'entreprise considérée est susceptible de causer un trouble à l'ordre public.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (article L.612-12).

En pratique, cette disposition pourrait concerner par exemple le projet de création d’une entreprise par des dirigeants qui seraient tenants de positions idéologiques extrémistes et pour lesquels les finalités recherchées à travers l’activité de leur société divergeraient de l’esprit de la loi.

L’article 7 dispose en outre que la dénomination d’une entreprise de protection des navires fait ressortir qu’il s’agit d’une personne privée afin d’éviter toute confusion avec un service public.

Il est en effet important, au cas où les agents d’une telle entreprise seraient encore à bord lors de l’arrivée du navire dans un port, que les autorités locales ne puissent les confondre avec un service public ou une force armée. De même, en cas de contrôle à bord par les agents français prévus à cet effet, toute confusion doit pouvoir être évitée.

Par ailleurs, en application du dispositif proposé, les articles 8, 9 et 10 du projet de loi définissent précisément les prescriptions relatives à la dénomination des entreprises, au contenu de leurs documentations ou encore à l’absence de prérogative de puissance publique.

L’article 8 précise ainsi que les entreprises de protection des navires autorisées ne bénéficient d’aucune prérogative de puissance publique, de même que leurs agents.

Le caractère particulier de l’activité privée de protection des navires exige que toute précaution soit prise pour éviter une confusion avec l’action publique. Il est en effet indispensable de distinguer clairement ce qui relève d’une activité privée et commerciale d’une mission de service public assortie de prérogatives de puissance publique.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure. s.

L’article 9 a trait aux documents de toute nature qui émanent des entreprises privées de protection des navires. Il prévoit que ces documents doivent reproduire l’identification de l’autorisation administrative prévue à l’article 3. Il précise en outre que les dispositions de l’article 8, aux termes desquelles l’autorisation ne confère aucune prérogative de puissance publique à l’entreprise doivent également être mentionnées.

L’article L.612-3 encadre de la même manière les règles de dénomination pour ces entreprises et l’article L.612-14 du code de la sécurité intérieure précise que l’autorisation d’exercer une activité privée de sécurité mentionnée à l’article L.611-1 du même code ne confère aucun caractère officiel à l’entreprise qui en bénéficie et n’engage en aucune manière la responsabilité des pouvoirs public

Il s’agit donc de permettre à quiconque de savoir que l’entreprise est habilitée à exercer son activité tout en évitant que l’entreprise ne paraisse relever d’une activité étatique.

Dans le même esprit, l’article 9 interdit de mentionner sur un document la qualité d’ancien fonctionnaire de police ou d’ancien militaire d’un des membres du personnel de l’entreprise, qu’il soit dirigeant ou agent.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (article L.612-15).

L’article 10 du projet de loi précise enfin que l’activité privée de protection des navires est exclusive de toute autre activité.

Dans le domaine de la sécurité privée, le principe d’exclusivité offre d’importantes garanties sur le plan de la sécurité intérieure. Il assure que chacune des activités de sécurité privée est accomplie par de véritables entreprises spécialisées.

Ainsi, à titre de comparaison l’article L. 612-2 du code de sécurité intérieure prévoit que l’exercice des activités de surveillance et de gardiennage ainsi que les activités de transports de bijoux, fonds ou métaux précieux est exclusif de toute autre prestation de services non liée à la surveillance, au gardiennage ou au transport de fonds, de bijoux ou de métaux précieux.

Ce principe d’exclusivité s’applique entre la sécurité privée et d’autres secteurs d’activité mais aussi entre plusieurs champs de la sécurité privée (par exemple, entre le transport de fonds et la protection des personnes).

Si une exception à ce principe est prévue dans le code de sécurité intérieure, dans la mesure où une même entreprise peut exercer plusieurs activités privée de sécurité relativement voisines, figurant parmi celles listées dans l’article L.611-1 de ce code, en revanche l’activité des entreprises de protection des navires est totalement exclusive de toute autre activité et notamment d’autres activités de sécurité privée.

En effet, la protection des navires implique des règles d’engagement et des pratiques dans le cadre particulier d’un navire, et est régie par des règles qui divergent très sensiblement de celles applicables à terre et auxquelles sont soumises les sociétés de sécurité privée.

II.1.2.2. L’instauration de mesures visant à garantir la professionnalisation du secteur

L’ensemble des dispositions prévues par le présent projet de loi devrait permettre d’apporter les garanties indispensables de régularité et de qualité des prestations fournies par une profession appelée à intervenir dans un environnement et des conditions particulièrement complexes.

Tel est plus particulièrement l’objet du chapitre 2 du Titre II du projet de loi, qui encadre strictement l’accès à la gestion et à la direction d’une entreprise privée de protection des navires comme l’exercice de la profession d’agents de protection.

Dans un souci de professionnalisation et de transparence du secteur, il prévoit notamment la détention d’un agrément des dirigeants et gérants et d’une carte professionnelle pour les agents.

A l'instar du système applicable aux professions de sécurité privées régies par le code de sécurité intérieure, les articles 3, 11 et 12 du présent projet de loi prévoient de désigner le CNAPS comme autorité compétente pour la délivrance des autorisations d’exercice, agréments et cartes professionnelles.

L’agrément des dirigeants et gérants

L’article 11 prévoit que nul ne peut exercer à titre individuel une activité privée de sécurité, ni diriger, gérer ou être l’associé d’une personne morale exerçant cette activité, s’il n’est titulaire d’un agrément délivré par le CNAPS. Par ailleurs, il énumère les conditions que doivent satisfaire les personnes souhaitant obtenir un agrément et prévoit la possibilité pour le représentant de l’État dans le département du siège de l’entreprise de retirer l’agrément en cas de nécessité tenant à l’ordre public.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (articles L.612-6 à L. 612-8).

Dans le code de la sécurité intérieure, ces dispositions sont liées à la nature particulière des activités de sécurité privée qui exige des personnes qui les exercent qu’elles soient irréprochables. Outre ces conditions d’honorabilité et de moralité, le dirigeant ou l’associé d’une telle entreprise doit être ressortissant d'un État membre de l'Union européenne ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, ne doit pas exercer une activité incompatible par nature avec l’activité pour laquelle l’agrément est demandé, et justifier d'une aptitude professionnelle.

Les compétences requises pour l’obtention de l’agrément sont définies par décret en Conseil d’État.

Elles comprennent le management de l’entreprise et des moyens (connaître les modalités de création, de reprise et de rachat d’une entreprise, savoir analyser les risques, étudier la stratégie commerciale et marketing, examiner les approches juridiques et financières, étudier le seuil de rentabilité, connaître les aides et prévoyances et maîtriser la communication de l’entreprise), ainsi que la connaissance des législations et réglementations afférentes à l’environnement juridique de la sécurité privée :

- les dispositions pertinentes du code pénal relatives à la légitime défense, aux faits justificatifs de l’état de nécessité, aux atteintes à l’intégrité et à la liberté d’aller et venir ;

- les garanties liées au respect des libertés publiques (respect de la vie privée et du droit de propriété).

Plus spécifiquement, s’agissant d’une entreprise de protection des navires :

- les dispositions du présent projet de loi et des décrets d’application ;

- les dispositions pertinentes des principales Conventions de l’OMI applicables en la matière : Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires dit« Code ISPS », du Code international pour la gestion de la sécurité « Code ISM » ainsi que les Meilleures pratiques de gestions de l’OMI « Best Management Practices » ;

- les législations des États côtiers et des États du port en matière de transport, de port, de stockage et d’utilisation d’armes à feu, de matériel de sûreté et d’usage de la force ;

Ces dispositions répondent à une préoccupation de moralisation des dirigeants et associés et de professionnalisation des dirigeants de ces entreprises.

La carte professionnelle des agents

L’article 12 prévoit la nécessité pour les agents employés par les entreprises privées de protection des navires de détenir un numéro de carte professionnelle délivré par le CNAPS et pour ce faire il est prévu que ces agents satisfassent aux conditions prévues dans l’article 11 de moralité et de qualification professionnelle.

En sus des connaissances des législations et réglementations afférentes à l’environnement juridique de la sécurité privée précisées supra, et compte tenu du caractère particulier de l’activité de protection armée des navires, les compétences maritimes théoriques et pratiques minimales requises pour les gens de mer sont en outre exigées :

- des connaissances basiques de l’environnement maritime et des règles de conduite à bord ;

- une familiarisation et une formation de base en matière de sécurité et de sûreté ;

- la gestion des premiers secours;

La maîtrise du fonctionnement et du maniement de l’armement de dotation sera également exigée.

La vérification de ces compétences est indispensable pour s’assurer que les agents savent se comporter sur un navire, qui plus est dans des conditions très particulières liées au type d’activité et aux possibles attaques de pirates.

Par ailleurs, ce même article 12 prévoit la possibilité pour le représentant de l’État dans le département du siège de l’entreprise de retirer l’agrément en cas de nécessité tenant à l’ordre public ou bien plus généralement lorsque son titulaire cesse de remplir l’une des conditions visées.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (articles L.612-20 et L. 612-21).

Ces dispositions du code de la sécurité intérieure répondent comme les articles L.612-6 à L. 612-8 de ce même code à une volonté de réglementer, moraliser et professionnaliser ce secteur d’activité.

Procédure

L’article 13 prévoit que l’une des commissions régionales d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité sera chargée, au nom du Conseil national des activités privées de sécurité de délivrer, refuser, retirer ou suspendre les autorisations, agréments et cartes professionnelles prévus aux articles 3, 11 et 12 de la présente loi, et de prononcer les sanctions disciplinaires prévues à l’article 36.

La composition de la commission du CNAPS spécifique chargée des attributions énumérées au présent article sera déterminée par décret en Conseil d’État. Il sera en effet nécessaire de l’adapter à la marge, pour introduire des administrations compétentes dans le domaine maritime.

Cet article est calqué sur l’article L. 633-1 du code de la sécurité intérieure relatif aux activités privées de sécurité créé par la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite « LOPPSI II ». Cette loi a créé l’établissement public CNAPS et lui a attribué une mission de sanction disciplinaire et de police administrative, à savoir l’instruction, la délivrance, la suspension et le retrait des autorisations des entreprises de sécurité privée, des agréments de leurs dirigeants et de leurs associés et des cartes professionnelles des salariés, en application du livre VI du code de la sécurité intérieure.

L’article 14 du projet précise que les demandes d’autorisation, d’agrément ou de carte professionnelle sont faites auprès de la commission spécifique mentionnée à l’article 13 ci-dessus. Les conditions et modalités dans lesquelles sont introduites ces demandes sont fixées par décret.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (articles L.612-10, L.612-12 et 612-13 relatifs aux autorisations d’exercice délivrées aux exploitants individuels et aux personnes morales).

Ces dispositions du code de la sécurité intérieure déterminent les éléments que doivent fournir les entreprises de sécurité à l’appui de leur demande d’autorisation d’exercice.

L’article 15 du projet prévoit que pour l’exercice des mêmes activités par une personne morale non immatriculées au registre du commerce et des sociétés, établie dans un autre État membre de l'Union européenne ou un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, la commission délivre l’autorisation, l’agrément ou la carte professionnelle au vu des conditions et garanties exigées, pour l’exercice des mêmes activités, par la législation et la réglementation de l’État dès lors que les justifications produites en vertu de cette législation et de cette réglementation sont regardées comme équivalentes à celles qui sont exigées en vertu du présent titre.

Les agréments et cartes professionnelles des personnes physiques dirigeants, gérants ou agents de ces entreprises sont délivrées selon la même procédure.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (article 612-11).

L’article 16 prévoit le retrait ou la suspension de l’autorisation, l’agrément ou la carte professionnelle, dès lors que les conditions qui ont permis leur attribution cessent d’être remplies.

Cet article est le pendant des articles 3, 6, 11 et 12 du projet relatifs aux conditions que doivent satisfaire les personnes souhaitant obtenir une autorisation, un agrément ou un numéro de carte professionnelle délivré par le CNAPS.

L’article 17 prévoit que tout recours contentieux formé à l’encontre des décisions prises par la commission mentionnée à l’article 13 est précédé d’un recours administratif préalable obligatoire devant la Commission nationale d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité.

Les modalités selon lesquelles un tel recours est exercé sont précisées par décret en Conseil d’État.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de la sécurité intérieure (article L.633-3).

II.1.2.3. L’encadrement du nombre et de la tenue des agents

L’article 19 prévoit que le nombre minimum d’agents à bord d’un navire est fixé par décret. En effet, le retour d’expérience des actions de protection montre qu’un navire ne peut être correctement protégé avec une équipe trop réduite.

Afin d’assurer la sécurité du navire, il importe notamment que figurent au moins un chef d’équipe et plusieurs agents, afin d’assurer une bonne surveillance de l’ensemble du navire et assurer une certaine dissuasion

Plusieurs facteurs sont par ailleurs déterminants pour fixer l’effectif optimal, parmi lesquels : la durée estimée du passage en transit du navire, l’évaluation des dangers encourus, les dimensions et le type du navire, ou encore sa vitesse et son franc-bord.

L’article 20 concerne la tenue des agents de protection ; il vise à éviter toute confusion avec des agents de l’État français, notamment ceux qui pourraient effectuer une mission de protection similaire.

En outre, elle permet de prévenir une mise en cause de l’État français en cas d’incident. En parallèle, cette disposition sous-tend que les agents de protection doivent porter une tenue permettant de les identifier comme tel et participant à la mission de prévention et de dissuasion des attaques extérieures.

Ce même article prévoit par ailleurs que les agents de protection des navires peuvent être armés dans l’exercice de leurs fonctions.

Une disposition similaire permettant l’armement des agents existe par ailleurs pour les agents de surveillance ou les convoyeurs de fond.

II.1.2.4. Une utilisation des armes très encadrée

Encadrement des conditions de mise à disposition des armes et munitions et lutte contre les trafics

L’article 22 du projet de loi autorise les entreprises exerçant l’activité de protection des navires, dans des conditions définies par un décret en Conseil d’État notamment à mettre à disposition de leurs agents, pour les besoins de leurs activités, des armes et munitions.

Il reprend le régime spécial mis en place par l’article L. 613-5 du code de sécurité intérieure pour les agents de surveillance et de gardiennage.

Afin de limiter strictement les condition de manipulation des armes (notamment au retrour des agents sur le territoire national), il n’est pas prévu d’octroyer de permis de port d’arme sur le territoire national aux agents des entreprises privées de protection des navires. Le projet de loi se borne à autoriser ces agents à porter des armes pendant l’activité de protection dans les zones autorisées.

Le respect des prérequis similaires à ceux nécessaires à la délivrance d’un permis de port d’armes est, d’ailleurs, garanti par les dispositions régissant l’attribution aux agents de la carte professionnelle.

Conditions d’embarquement et de stockage des armes et munitions à bord des navires

L’article 23 du projet de loi prévoit qu’un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’embarquement, de stockage et de remise des armes aux agents.

Il s’avère nécessaire d’encadrer strictement ces phases sensibles, pour éviter toute distraction des armes. De même, il est nécessaire d’apporter des restrictions à leur usage en dehors des zones à risque.

Ces dispositions sont similaires à celles régissant d’ores et déjà les activités des équipes de protection embarquée de la marine nationale ou le transit en mer territoriale française au large de la Réunion d’équipes privées à bord de navires marchands battant pavillon étranger10.

De ce fait, le simple transit dans une mer territoriale étrangère sans escale peut s’exercer dans le cadre du droit de passage inoffensif, prévu par les articles 17 à 32 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer, les articles L. 5211-1 à L. 5211-5 du code des transports et le décret n° 85-185 du 6 février 1985 portant réglementation du passage des navires étrangers dans les eaux territoriales françaises. Une déclaration auprès de l’État côtier n’est pas nécessaire.

En revanche, lors d’escales, la réglementation sur les armes de l’État du port est applicable et le capitaine du navire est tenu de la faire respecter à son bord.

De plus, afin d’éviter tout dérapage ou confusion entre les agents des entreprises de protection des navires et les membres de l’équipage, le projet interdit toute manipulation par l’équipage de ces armes et des munitions.

Enfin, pour les mêmes raisons de sécurité, le nombre d’armes qu’il sera possible d’embarquer sera limité par décret.

II.1.2.5. L’interdiction de l’usage de la force armée

L’article 21 autorise les agents des entreprises privées de protection des navires à recourir à la force pour assurer la protection des personnes et des biens se trouvant à bord du navire.

Ce recours à la force ne s’exerce toutefois que dans le cadre des articles 122-5 à 122-7 du code pénal régissant la légitime défense et à l’état de nécessité. .

L’article 122-5 de ce code prévoit ainsi l’irresponsabilité pénale de « la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d’elle-même ou d’autrui, sauf s’il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l’atteinte ». Ce même article prévoit l’irresponsabilité pénale de la personne qui, « pour interrompre l’exécution d’un crime ou d’un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu’un homicide volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l’infraction ».

De même, l’article 122-7 du même code prévoit l’irresponsabilité pénale de la personne qui, « face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ».

II.1.2.6. Le respect des prérogatives du capitaine du navire protégé

Le projet de loi s’attache à souligner les pouvoirs dévolus au capitaine du navire en vertu notamment des conventions internationales de l’Organisation Maritime Internationale, du code des transports et du code disciplinaire et pénal de la marine marchande.

En particulier, l’article 27 précise que les agents des entreprises de protection des navires agissent sous l’autorité du capitaine.

L’article 34-1 de la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer de 1974 dite « Convention SOLAS » relatif au pouvoir discrétionnaire du capitaine énonce ainsi que :

« Le propriétaire, l'affréteur, la compagnie qui exploite le navire, telle que définie à la règle IX/1, ni aucune autre personne, ne doit entraver le capitaine ou l'empêcher de prendre ou d'exécuter une décision quelconque qui, selon son jugement professionnel, est nécessaire pour la sauvegarde de la vie humaine en mer et la protection du milieu marin ».

La présence d’une entreprise privée de protection n’est en effet qu’un moyen à disposition du capitaine pour assurer sa mission encadrée notamment en droit national par le code disciplinaire de la marine marchande et le code des transports, dont l’article L. 5331-1 dispose que :

« Le capitaine a sur toutes les personnes, de quelque nationalité qu'elles soient, présentes à bord pour quelque cause que ce soit, l'autorité que justifient le maintien de l'ordre, la sûreté et la sécurité de navire et des personnes embarquées, la sécurité de la cargaison et la bonne exécution de l'expédition entreprise ».

Le même article précisant que : « dépositaire de l'autorité publique, il peut employer à ces fins tout moyen de coercition nécessité par les circonstances et proportionné au but poursuivi. Il peut également requérir les personnes embarquées de lui prêter main-forte ».

II.2. LA NECESSAIRE DEFINITION DE LIGNES ROUGES

II.2.1. Option alternative à l’intervention d’une loi nouvelle

L’une des options possibles consistait à ne pas adopter de réglementation en matière de sélection et de formation des entreprises de protection des navires et de leurs personnels, laissant à l’industrie maritime et aux compagnies d’assurance la responsabilité d’apprécier la qualité de celles auxquelles il sera fait recours.

Cette option, fondée sur l’autorégulation, qui ne sera pas exposée ici plus avant, et que les travaux interministériels ont permis d’écarter est celle privilégiée par les pays anglo-saxons.

II.2.2. Nécessité de l’action législative

Le présent projet de loi a pour objet d’encadrer une nouvelle activité professionnelle, en définissant notamment les droits et les obligations des dirigeants et agents des entreprises qui l’exerceront.

Les mesures envisagées prévoient notamment des règles relatives à l’armement des agents.

Considérant l’objet du dispositif envisagé, l’intervention du législateur s’avère nécessaire.

II.3. LES IMPACTS PRÉVISIBLES DU DISPOSITIF ENVISAGÉ

II.3.1. Impacts économiques et financiers

La quantité d’armes susceptibles d’être achetées en France puis exportées sera vraisemblablement très faible. En effet, les retours d’expérience en provenance des États européens ayant autorisé l’activité de protection des navires démontrent que, pour des raisons d’accessibilité aux armes et de conditions de détention, la majorité des armes seront achetées en dehors du territoire national.

L’autorisation de l’activité ne devrait pas avoir, pour la France, de conséquences économiques significatives concernant les ventes d’armes.

L’autorisation de l’activité devrait constituer une charge de travail supplémentaire mineure pour la CIEEMG dans le cadre des procédures d’exportation des armes et munitions devant nécessiter une autorisation.

II.3.2. En termes de coûts et bénéfices financiers pour chaque catégorie de personnes physiques et morales intéressés

Les entreprises privées de protection des navires devront déposer un dossier au CNAPS, de même que les agents qui souhaiteront obtenir la carte professionnelle. Le coût de ce dossier peut être considéré comme très faible.

L’obtention de la certification impose des coûts pour rémunérer l’organisme certificateur. Les coûts pour une telle prestation sont de l’ordre de 30000 euros pour l’obtention de la certification initiale, et d’environ 10000€ par an pour les audits de maintien de la certification.

Par ailleurs, les exigences d’aptitude professionnelle des agents imposeront des formations, dans les différents domaines requis.

Il n’a pas été possible d’estimer ce coût à ce stade, mais on peut observer que, même en l’absence de telles dispositions d’agrément, les entreprises et les agents devraient s’assurer de maîtriser les compétences requises pour assurer correctement les prestations.

II.3.3. En termes de coûts et bénéfices financiers pour chaque catégorie d’administrations publiques

L'effectif du CNAPS se répartit entre trois catégories d'agents qui sont respectivement en charge du fonctionnement de l’établissement, du contrôle des personnes morales et physiques et de l'instruction des titres.

La mise en œuvre du projet de texte n'aura qu’un impact très marginal sur les services supports du CNAPS. Seuls le service juridique et celui en charge des finances pourraient être ponctuellement impliqués sans qu'une évaluation plus précise des charges puisse être effectuée.

La délivrance des titres est assurée par 83 instructeurs auxquels s'ajoutent les 8 secrétaires permanents qui participent directement au fonctionnement des 7 commissions métropolitaines.

Au cours de l'année 2012, le CNAPS a délivré près de 83000 titres répartis entre des autorisations préalables, des cartes professionnelles, des agréments et des autorisations d'exercer pour les personnes morales.

Sur la base de ces seuls chiffres, on peut considérer que la productivité de chaque ETPT participant à la procédure d'instruction et de délivrance des titres a été un peu supérieure à 900 titres pendant cette période.

Selon les premières évaluations communiquées, 5 à 6 entreprises seraient susceptibles de demander une autorisation d'exercer une activité de protection des navires.

Si ce chiffre devait se confirmer, le nombre de salariés pourrait atteindre 400 à 500 soit une charge de travail en instruction d'un demi-ETPT pour le CNAPS.

La faiblesse de cette évaluation doit cependant être relativisée dans la mesure où cette charge de travail supplémentaire ne sera pas répartie sur l'ensemble des délégations mais concentrée sur la seule délégation de l’île de France qui est déjà, de très loin, celle dont le ratio nombre de demandes traitées / nombre d'instructeurs, est le plus défavorable.

A ce premier constat, s'ajoute le fait qu'à partir de 2014 et surtout 2015 pour l’île de France, le renouvellement des cartes professionnelles délivrées en 2009 et 2010 va très sensiblement peser sur l'activité de cette délégation.

II.4. ARTICULATION AVEC LE DROIT INTERNATIONAL ET EUROPÉEN

Éléments de droit comparé

Les dispositifs de nos partenaires européens font tous explicitement référence aux directives promues par l’OMI et recommandent le suivi des « Best Management Practices » dans les zones à haut risque.

Ils diffèrent essentiellement dans le degré d’implication de la puissance publique.

En Allemagne, les entreprises privées de protection des navires souhaitant prendre part à des activités de protection à bord de navires battant pavillon allemand devront obligatoirement, à partir du 1er décembre 2013, recevoir un agrément préalable les autorisant à exercer. La procédure d’autorisation sera confiée à l’office fédéral pour l’économie et le contrôle des exportations (BAFA), subordonné au ministère de l’Économie et des Technologies.

Le processus d’agrément vise à s’assurer que l’entreprise apporte des garanties suffisantes vis-à-vis de la conduite des opérations en mer, des équipements utilisés, et du contrôle des agents (contrôle judiciaire, aptitudes physiques, validation des connaissances, détention et utilisation d’armement, etc.).

En Italie, il revient aux services préfectoraux de veiller à la régulation des entreprises privées de protection des navires, dans le prolongement des dispositions existantes relatives aux sociétés de sécurité privées.

En Espagne, l’autorisation d’activité est délivrée par le ministère de l’Intérieur qui assure le contrôle, la sélection et l’inspection des entreprises privées de protection des navires et de leurs personnels.

Au titre des spécificités du système espagnol on peut noter que les agents sont considérés comme des « agents collaborateurs de l’autorité publique » et doivent être exclusivement de nationalité espagnole.

A l’inverse des modèles précités, le Royaume-Uni favorise l’autorégulation des marchés, par la responsabilisation maximale des entreprises privées de protection des navires et des armateurs ayant recours à celles-ci.

Le Gouvernement britannique indique explicitement se refuser à reconnaître toute forme de certification ou d’homologation qui serait délivrée à une compagnie privée par l’industrie des entreprise privée de protection des navires elle-même.

Il s’attache uniquement à lister un certain nombre de critères auxquels les armateurs peuvent se référer pour porter une appréciation sur une entreprise.

Au titre des critères généraux d’appréciation, le dispositif britannique mentionne les « indicateurs de gestion de qualité » tels que la norme ISO PAS 28007.

Afin de conserver une visibilité, le dispositif britannique impose toutefois aux armateurs des mesures de signalement avant embarquement d’une équipe de protection.

S’agissant du contrôle des armes

La délivrance d’une autorisation reste la prérogative de la puissance publique, quel que soit le système national envisagé.

S’agissant du Royaume-Uni, il s’agit en particulier du seul domaine sur lequel l’État britannique intervient. En effet, le ministère de l’Intérieur est chargé de délivrer les autorisations de détention et de port d’armes pour la compagnie dans son ensemble et, individuellement, pour chacun de ses employés susceptible d’être déployé à bord d’un navire, au regard des critères prévus par la législation britannique pour la détention d’armes, notamment en termes de contrôle de sécurité.

Le Royaume-Uni a par ailleurs élaboré une licence11 qui permet le transfert de biens (armes à feu, accessoires et munitions) pour les entreprises privées de protection des navires prévoyant une liste d’armes autorisées à bord des navires. Il en est de même pour les conditions devant être remplies par l’entreprise privée de protection des navires avant de pouvoir autoriser le transfert.

En Allemagne, le port d’armes est accordé aux agents des entreprises privées de protection des navires dans la mesure où des « armes de guerre » et de « gros calibre » ne sont pas nécessaires dans la cadre de la lutte contre la piraterie. La délivrance des autorisations d’armes fait l’objet d’un décret séparé, et le dispositif d’autorisation stipule que les armes devront être enregistrées séparément. Le dispositif stipule en outre qu’aucune arme lourde ne pourra être employée. Les armes semi-automatiques pourraient être autorisées.

Le dispositif d’agrément prévoit qu’un contrôle accru des agents (permis de port d’armes, aptitudes, entraînements etc.) devra être réalisé en amont de l’autorisation et des preuves de validation des acquis remises au BAFA.

En Espagne, le ministère de l’intérieur détermine les catégories d’armes qui peuvent être utilisées dans le cadre de la sécurisation des navires. Les conditions de détention, de contrôle, d’utilisation et d’acquisition d’armes de guerre par les entreprises privées de protection des navires sont fixées sur proposition conjointe des ministères de la Défense et de l’Intérieur. L’autorisation d’emploi des armes est délivrée par le ministère de l’Intérieur, sur avis conforme du ministère de la Défense. Les armes doivent être fournies exclusivement par des distributeurs, commerçants, firmes commerciales et usines légalement établis sur le territoire national espagnol et expressément autorisés par le ministère de la Défense. Les armes autorisées sont énumérées précisément, ainsi que leur calibre12.

S’agissant de l’usage de la force

En matière d’usage de la force, la notion de légitime défense est au cœur de tous les dispositifs étudiés.

La définition de la légitime défense n’est toutefois pas identique selon les pays. Notre définition diffère en particulier des conceptions anglo-saxonnes qui retiennent non seulement la défense contre un acte hostile, mais également contre une « intention » hostile (intention laissée alors à l’appréciation de celui susceptible d’exercer son droit à la légitime défense).

Pour le Royaume Uni, la force létale peut ainsi être employée dans le cadre de la légitime défense de soi ou d’autrui : la décision en appartient à celui qui fait usage de la force dès lors qu’il considère qu’il y a un risque pour la vie humaine.

Par ailleurs, des divergences existent s’agissant de l’autorité du capitaine du navire en matière d’usage de la force. Pour le Royaume Uni, ni le capitaine, ni le chef de l’équipe de gardes privés, ne peuvent obliger une personne d’user ou non de la force létale à l’encontre de sa volonté.

Le dispositif de l’Allemagne est celui qui se rapproche le plus des dispositions envisagées par le présent projet de loi.

L’usage de la force est strictement soumis à la légitime défense, et l’usage de la force doit se faire de façon « proportionnelle » et « ajustée ». Après l’accord du capitaine du navire et celui du chef d’équipe, les agents de l’entreprise privée de protection des navires peuvent décider de la légitimité d’utiliser la force de manière graduée. Ainsi, le dispositif précise explicitement que de la réponse doit se faire en prenant compte de la gradation suivante : tirs de sommation dans les airs, tirs de sommation dans l’eau, tirs ciblés sur des objets (moteurs) enfin, en derniers recours, usage des armes à l’encontre des assaillants.

En Espagne, le dispositif précise que l’usage de la force est admis afin « d’éviter et repousser les attaques », notion qui semble aller au-delà de la légitime défense telle qu’elle est définie par le droit français.

Articulation avec le droit international

Dans ces recommandations destinées aux États du pavillon, l’OMI recommande aux États qui jugeraient utile et approprié le recours à du personnel de sûreté armé d’élaborer une politique qui pourraient inclure :

- les critères minimaux auxquels le personnel de sûreté devrait satisfaire, compte tenu des aspects pertinents énoncés dans les directives à l’intention des propriétaires, des exploitants et des capitaines de navires précitées ;

- une procédure permettant d’autoriser l’utilisation de personnel de sûreté armé dont il aurait été jugé qu’il satisfait aux prescriptions minimales applicables aux navires battant son pavillon ;

- une procédure au terme de laquelle les propriétaires, exploitants de navires ou compagnies maritimes pourrait être autorisées à utiliser du personnel de sûreté armé ;

- les conditions dans lesquelles l’autorisation est accordée et la responsabilité du respect des dispositions relatives à ladite autorisation ;

- les références à toute législation nationale directement applicable concernant le port et l’utilisation d’armes à feu par le personnel de sûreté armé, la catégorie à laquelle le personnel appartient ainsi que les rapports entre le personnel et le capitaine à bord du navire ;

- des prescriptions en matière de compte-rendu et de tenue de registres.

Les procédures prévues par le projet de texte, comme les mesures réglementaires envisagées pour leur mise en œuvre, répondent à ces recommandations.

PARTIE III – UNE TRAÇABILITÉ ET UN CONTROLE RIGOUREUX DES ACTIVITÉS ET PERSONNELS DES ENTREPRISES PRIVEES DE PROTECTION DES NAVIRES

{ ARTICLES 24 À 26 ET 28 À 40 }

III.1. L’INSTAURATION D’UN REGIME DE CONTRÔLE A TERRE ET EN MER

III.I.1. Un dispositif qui s’inscrit dans un cadre existant

Le présent projet propose d’instaurer un régime de contrôles administratifs sur le territoire national mais également en mer, à bord des navires.

Le dispositif envisagé est largement inspiré de l’existant, tout comme le système de sanctions pénales et disciplinaires, soit :

- Lesdispositions du Livre VI du code de sécurité intérieure pour les contrôles à terre et les sanctions disciplinaires susceptibles d’être prononcées à l’encontre des dirigeants et agents et,

- La loi n° 2011-13 du 5 janvier 2011 relative à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police en mer pour les constatations des infractions en mer.

III.I.2. Les évolutions juridiques proposées

Le projet de loi introduit un certain nombre d’obligations visant à assurer la transparence de l’activité et la traçabilité des interventions, dans les conditions particulières d’exercice à bord d’un navire :

L’article 28 prévoit une obligation de tenue, à terre, par les entreprises privées de protection des navires de registres de leurs activités précisant l’ensemble des opérations qui ont fait l’objet d’un contrat ainsi que les agents concernés, la liste des armes, les opérations d’acquisition, de transfert, de vente d’armes et de munitions, etc..

La tenue d’un tel registre a pour objet de vérifier que les entreprises ont une connaissance parfaite des contrats en cours et des missions qui sont confiées à leurs équipes, qui seront parfois très éloignées du siège de l’entreprise.

Ce dispositif permet en outre, en cas de contrôle, de s’assurer que les entreprises puissent suffisamment étayer leur activité à l’aide de pièces originales.

En application du même article, le chef des agents présents à bord du navire doit tenir, en mer, un registre détaillant leur activité à bord du navire.

Ce registre est destiné d’une part en cas de contrôle à vérifier la maîtrise des procédures par l’entreprise et d’autre part, en cas d’incident impliquant les agents de l’entreprise, à disposer d’éléments d’éclairage pour les enquêtes à mener.

Un décret définit les modalités de tenue des registres susmentionnés.

L’article 24 prévoit ainsi que l’armateur demande communication des références de l’entreprise privée de protection des navires, de la carte professionnelle de chacun des agents participant à l'exécution de la prestation, de l’assurance prévue à l’article 6 ainsi que des marques, modèles et numéros de série des armes embarquées.

Ces informations, portées au contrat établi entre l’armateur et l’entreprise privée de protection des navires, contribuent à ce que les parties soient informées explicitement des principales obligations légales.

Elles seront par ailleurs communiquées au capitaine du navire protégé, représentant de l’armateur à bord, aux fins de garantir la bonne application de l’article 26, en vertu duquel le capitaine est tenu de vérifier la validité des documents présentés par les agents ainsi que la conformité des armes embarquées avec celles portées au contrat.

La disposition proposée vise ainsi à garantir l’application effective des prescriptions relatives à la détention d’une carte professionnelle pour les agents assurant une mission de protection et à l’armement.

En application de l’article 24 précité, l’armateur est tenu d’informer les autorités de l’État qu’il a recours aux services d’une équipe de protection privée, dans des conditions définies décret.

Pour des raisons de cohérence, il est envisagé que cette information soit adressée en premier lieu au ministre chargé des transports, conformément au circuit d’information mis en place dans le cadre international fixé par le Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires dit « Code ISPS ».

En application du code ISPS, « les Gouvernements contractants doivent fournir un point de contact par l'intermédiaire duquel ces navires peuvent solliciter des conseils ou une assistance et auxquels ils peuvent signaler tout problème de sûreté que pourraient susciter d'autres navires, mouvements ou communications.

Lorsqu'un risque d'attaque a été déterminé, le Gouvernement contractant intéressé doit informer les navires concernés et leur Administration :

.1 du niveau de sûreté actuel ;

.2 de toutes mesures de sûreté qui devraient être mises en place par les navires concernés pour se protéger contre l'attaque, conformément aux dispositions de la partie A du Code ISPS, et

.3 des mesures de sûreté que l'État côtier a décidé de mettre en place, lorsqu'il y a lieu ».

Le Comité interministériel de la mer de 2004 a désigné le Haut fonctionnaire de défense Mer pour satisfaire aux prescriptions précitées. Cette responsabilité est assurée depuis 2005 par l’Adjoint Mer du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’Énergie, désigné comme point de contact national pour la sûreté maritime.

L’article 26 impose par ailleurs au capitaine du navire protégé de déclarer aux autorités de l’État l’embarquement d’une équipe et ce, dans des conditions précisées par la voie réglementaire.

Cette disposition vise à informer préalablement l’administration de l’État du pavillon de toute mission de protection exercée sur l’un de ses navires.

Elle permet à celle-ci de dûment contrôler l’application des mesures prescrites par la législation et la réglementation en vigueur et le cas échéant d’informer les États étrangers qui auraient un intérêt, en cas d’incidents, de disposer immédiatement des informations pertinentes.

En vertu de l’article 29, le capitaine du navire protégé est en outre tenu de retranscrire sur le livre de bord tout événement impliquant les agents de l’entreprise privée de protection des navires ainsi que leurs armes et munitions.

Cette obligation permet de garantir la traçabilité des événements survenus à l’occasion d’une mission de protection des navires et de disposer, en cas d’enquête par exemple, de preuves écrites concernant les conditions de survenance d’un incident.

En effet, en application de l’article L.5412-7 du code des transports, le livre de bord fait foi, jusqu’à preuve du contraire, des événements et des circonstances qui y sont relatés.

Les dispositions de l’article 30 concourent à ce même objectif de traçabilité en ce qu’elles prévoient la transmission systématique par le capitaine du navire protégé d’un rapport de mer auquel est annexé un rapport rédigé par le chef de l’équipe de protection relatant les circonstances et les conséquences de tout incident ayant entraîné l’usage de la force.

La transmission dudit rapport doit être réalisée dans les meilleurs délais, par exemple sous forme électronique, afin de permettre au représentant de l’État en mer de réagir rapidement.

Il contient une série d’informations obligatoires, listées par décret et qui,, conformément à ce qui est prévues par les recommandations de l’OMI, devraient comprendre notamment des renseignements détaillés sur les événements qui ont conduit à l’incident, l’identité et les coordonnées des agents impliqués dans l’incident ou encore les blessures et les dommages matériels qui ont résulté de l’incident.

Enfin, l’article 25 prohibe la sous-traitance de l’activité de protection des navires.

L’interdiction de la sous-traitance constitue en effet un gage de la qualité de la prestation du fait que l’entrepreneur principal, dûment agréée et certifié, exécute lui-même la mission.

Elle est par ailleurs justifiée en raison des contrôles, rendus plus difficile lorsque l’activité est sous traitée.

Au surplus, en cas de non-respect des obligations prescrites, cela permet également de prévenir le risque de dilution des responsabilités.

Le projet de loi prévoit en outre des conditions strictes d’exercice de l’activité de protection armée des navires, et il apparaît primordial d’assurer la pleine effectivité de l’application des prescriptions prévues.

A cet égard, les articles 31 à 35, qui constituent le Titre IV du texte, instaurent un dispositif de contrôle des entreprises et de leurs agents sur le territoire national mais également à bord des navires, dans les conditions précisées ci-après.

S’agissant des contrôles, le dispositif envisagé aux articles 31 à 33 permet que des contrôles soient menés pour le compte de l’autorité administrative, par les commissaires et officiers de police, les officiers et sous-officiers de la gendarmerie nationale, au siège des entreprises de protection des navires.

Au titre de sa mission disciplinaire, le CNAPS peut en outre procéder à des contrôles des agents de protection des navires sur le territoire national.

Il s’agit en effet d’accorder aux agents du CNAPS des pouvoirs analogues à ceux qu’ils détiennent en application du Livre VI du code de sécurité intérieure.

L’article 34 encadre les contrôles administratifs pouvant être exercés à bord des navires .

Il est notamment tenu compte de la décision n° 2013-357 QPC du Conseil constitutionnel du 29 novembre 2013, aux fins d’assurer le respect de la vie privée à bord des navires lorsque ces contrôles portent sur des locaux à usage privé ou de domicile.

Tirant les conséquences de la décision du Conseil, le projet prévoit que les contrôles effectués en mer ou sur un navire à quai pour une courte période pouvaient être effectués sans autorisation de l’autorité judiciaire, et ce, eu égard à la mobilité du navire et aux difficultés de procéder à ces contrôles en mer.

Ainsi, lorsqu’ils sont effectués en mer ou que le navire est à quai depuis moins de 72 heures, les contrôles des locaux affectés à un usage privé ou de domicile nécessitent seulement la présence de l’occupant des lieux, ou à défaut du capitaine du navire.

En revanche, et afin d’apporter une garantie suffisante à l’inviolabilité du domicile dès lors que le navire se trouve plus durablement à quai (soit, depuis plus de 72 heures), une autorisation préalable du juge des libertés et de la détention est nécessaire.

La régularité des opérations de contrôle des locaux affectés à un usage privé ou de domicile peut faire dans tous les cas l’objet d’un contrôle juridictionnel a posteriori devant le juge judiciaire.

L’article 34 prévoit par ailleurs la liste des agents habilités à rechercher et constater les infractions aux dispositions du projet de loi et des mesures réglementaires prises en son application. Les agents désignés13 peuvent d’ores et déjà intervenir en application de la loi n° 2011-13 du 5 janvier 2011 relative à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police en mer pour les constatations des infractions en mer.

Dans un souci d’harmonisation des procédures et des pouvoirs des agents précités, l’article 35 précise les agents susceptibles d’exercer des pouvoirs de police judiciaire de constatation des infractions connexes.

Enfin, un ensemble de sanctions disciplinaires et pénales sont prévues aux articles 36 à 40 aux fins de réprimer les infractions au présent projet de loi.

L’article 36 du projet de loi détermine les sanctions disciplinaires pouvant être prononcées à l’encontre des personnes physiques ou morales exerçant l’activité de protection des navires : avertissement, blâme, et interdiction d’exercice de l’activité à titre temporaire pour une durée maximum de cinq ans, etc.

L’article prévoit également des pénalités financières qui ne peuvent excéder 3% du chiffre d’affaire hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos (maximum porté à 5% en cas de nouvelle violation de la même obligation).

Cette possibilité de sanctionner s’inscrit dans une optique de valorisation de la profession.

Ce même type de disposition est prévu pour les entreprises de sécurité privée mentionnées dans le code de sécurité intérieure (article L.634-4), suite à l’adoption de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

En effet, en sa qualité d’autorité administrative, titulaire d’un pouvoir disciplinaire sur les entreprises qu’il contrôle, le CNAPS, en conséquence de son contrôle, dispose légalement de la faculté de prononcer des sanctions à leur encontre, en cas de manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles et déontologiques intervenues depuis moins de trois ans.

A titre d’illustration, dans le cadre de la mise en œuvre des sanctions applicables aux entreprises privées de sécurité (relevant du livre VI du code de sécurité intérieure), sur 114 dossiers de contrôle dont l’instruction a été achevée en 2012, 58 dossiers ont été transmis aux commissions interrégionales d’agrément et de contrôle (CIAC) pour poursuites disciplinaires et 56 autres procédures ont fait l’objet d’un classement sans suite pour absence ou régularisation des manquements constatés.

Les premières sanctions prononcées à partir d’octobre 2012 ont montré que les CIAC ont pleinement utilisé l’échelle des sanctions disciplinaires prévues par la loi. Ainsi pour 14 dossiers examinés par les CIAC en 2012,12 sanctions ont été prononcées :

- 4 avertissements,

- 4 interdictions d’exercice pour une personne physique (prononcées pour une durée de deux ans à chaque fois),

- 1 interdiction de fonctionnement pour une entreprise (prononcée pour une durée d’un an),

- 4 pénalités financières (une de 80 000 euros, deux de 40 000 euros et une de 10 000 euros).

Les articles 36 à 40 créent une série de nouvelles incriminations visant à réprimer les manquements et atteintes aux dispositions prévues par le projet de loi.

Ces dispositions sont l'objet du Titre V du projet.

III.2. LA NECESSAIRE INTERVENTION DU LÉGISLATEUR

III.2.1. Pour déterminer les modalités de mise en œuvre des contrôles

L’instauration d’un cadre d’activité pour les entreprises de protection des navires impose un mécanisme de contrôle et un dispositif de sanctions administratives et pénales spécifiques.

Il n’y a donc pas d’autre option que de prévoir dans le projet de loi les modalités de ces contrôles.

Elles sont conformes aux dispositions équivalentes prévues pour les activités de sécurité privée régies par le code de sécurité intérieure.

De plus, les exigences de traçabilité sont destinées à exercer les contrôles et d’autre part, en cas d’incident grave, à pouvoir disposer des éléments nécessaires aux enquêtes, par la mise en place de documents qui éclaireront les enquêteurs (registres tenus par l’entreprise de protection) ou qui feront foi jusqu’à preuve du contraire (documents tenus par le capitaine et rapport de mer).

III.2.2. Pour définir un régime de sanctions pénales

La détermination des crimes et délits relève du domaine de la loi en vertu du quatrième alinéa de l’article 34 de la Constitution, qui dispose également que la loi fixe les règles concernant la procédure pénale.

III.3. DES IMPACTS RELATIVEMENT LIMITÉS SUR LE FONCTIONNEMENT DE L’ADMINISTRATION

Compte tenu du faible nombre d’entreprises (5 à 6), d’opération de protection (moins de 100) et d’agents concernés (400 à 500), les aspects économiques, financiers et sociaux des dispositifs de contrôle sont négligeables.

Pour ce qui concerne les contrôles, le projet de texte limite les interventions du CNAPS à des contrôles de nature administrative qu'il s'agisse des entreprises ou de leurs salariés que le CNAPS n'est pas habilité à contrôler en situation opérationnelle.

Compte tenu du faible nombre d'entreprises qui seront être intéressées pour cette nouvelle activité, les contrôles opérés ne devraient pas dépasser une dizaine par an soit moins d'un centième de l'activité actuelle de l’Établissement.

L'impact serait donc également négligeable sur le volet « contrôle » à terre.

III.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ

L’analyse des dispositifs de contrôle mis en œuvre par nos partenaires européens permet de mettre en exergue que les modalités proposées dans le présent projet de loi sont, à plusieurs égards, plus contraignantes que les directives britanniques (qui s’appuient sur le principe d’autorégulation et place le gouvernement dans une position de conseil vis à vis des armateurs) ou que les dispositions allemandes, reposant essentiellement sur la vérification régulière de procédures écrites à défaut de contrôles in situ.

PARTIE IV - CONDITIONS D’APPLICATION OUTRE-MER

{ ARTICLE 41 }

Les mesures proposées par le présent projet de loi seront applicables de plein droit dans les départements d’outre-mer, à Saint-Barthélemy, à Saint Martin, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Elles seront applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les terres australes et antarctiques, sur mention expresse.

Le présent projet de loi permet à des opérateurs privés de sécurité dont le siège se situe en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, ainsi qu’à Saint-Pierre-et-Miquelon d’assumer la protection de navires battant pavillon français sans qu’il soit nécessaire d’en faire mention dans le texte, compte tenu du principe d’identité législative qui les régit.

En outre, le texte permet également à des navires immatriculés au registre des Terres australes et antarctiques Françaises (TAAF), au registre de Nouvelle Calédonie, au registre de Wallis et Futuna ou au registre de Polynésie française de pouvoir disposer d’équipes de protection embarqués à leur bord. En effet, les navires immatriculés sur ces registres battent pavillon français.

L’article 41 du présent projet de loi comporte ainsi une mention d’applicabilité sur l’ensemble du territoire de la République, complétée par des adaptations particulières et nécessaires à l’effectivité du dispositif applicable dans chacune des collectivités ultramarines susmentionnées.

Les adaptations qui sont opérées pour chacune des collectivités susmentionnées sont reprises à l’identique de celles existant actuellement dans le livre VI du code de la sécurité intérieure relatif aux activités privées de sécurité dont le présent projet de loi s’est largement inspiré pour créer le dispositif des équipes de protection embarquées sur les navires.

PARTIE V - CONSULTATIONS

Le Conseil Supérieur de la Marine Marchande doit être consulté, en application de l’article 2 du décret n° 2002-647 du 29 avril 2002 qui prévoit que le Conseil Supérieur de la marine marchande est obligatoirement consulté sur les projets de loi et de décret relatifs à la marine marchande ou au ports maritimes.

Le Conseil a rendu un avis favorable au projet le 18 décembre 2013.

Par ailleurs, des adaptations particulières étant prévues pour certaines de ces collectivités ultramarines, la consultation de celles-ci est nécessaire en application des dispositions du code général des collectivités territoriales ou de leurs statuts respectifs.

Par conséquent, ont été consultés, selon la procédure d’urgence propre à chaque collectivité, qui ramène pour toutes le délai de consultation à quinze jours :

- le Conseil général de Mayotte (en application de l’article L. 3444-1 du code) ;

- les Conseils territoriaux de Saint-Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon (en application des articles L.O 6213-3 et L.O 6413-3 du code) ;

- l’Assemblée de la Polynésie française (en application de l’article 9 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004) ;

- le Congrès de la Nouvelle-Calédonie (en application de l’article 90 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999).

Ces institutions n’ont pas fait connaître leur avis sur le projet de texte au terme du délai de consultation, qui est donc réputé acquis.

En revanche, aucune nécessité n’impose de consulter l’Assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna, dès lors que le présent projet de loi ne modifie pas l’organisation particulière de la collectivité, précisée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

En ce qui concerne les Terres australes et antarctiques françaises, la loi n° 55-1052 du 6 août 1955 portant statut des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton n’impose aucune consultation.

PARTIE VI - DISPOSITIONS D’APPLICATION

Article

du projet de loi

Objet du texte

Catégorie de texte

Titre II – Conditions d’exercice de l’activité privée de protection des navires

Article 3

Modalités de délivrance de l’autorisation d’exercice par le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS).

Décret en Conseil d’État

Article 6

Liste des normes de certification et modalités de désignation des organismes certificateurs.

Modalités de délivrance de l’autorisation provisoire.

Décret simple

Décret en Conseil d’État

Article 11

Liste des activités incompatibles par leur nature avec l’activité de protection privée des navires.

Conditions de justification de l’aptitude professionnelle.

Décret en Conseil d’État

Décret en Conseil d’État

Article 12

Conditions de délivrance de la carte professionnelle par le Conseil national des activités privées de sécurité.

Décret en Conseil d’État

Article 13

Désignation de la commission régionale d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité compétente pour la délivrance, le refus, le retrait et la suspension des autorisations, agréments et cartes professionnelles et pour prononcer les sanctions disciplinaires.

Composition de la commission régionale d’agrément et de contrôle susmentionnée.

Décret

Décret en Conseil d’État

Article 14

Conditions et modalités de dépôt des demandes d’autorisation, d’agrément et de carte professionnelle.

Décret

Article 17

Modalités du recours administratif préalable obligatoire formé devant la commission nationale d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité.

Décret en Conseil d’État

Titre III – Modalités d’exercice de l’activité privée de protection des navires

Article 18

Définition des zones où le recours à une entreprise privée de protection des navires est autorisé et des types de navires éligibles.

Décret simple

Article 19

Détermination du nombre minimum d’agents à bord d’un navire protégé.

Décret

Article 22

Définition des armes et munitions que les entreprises privées de protection des navires sont autorisées à acquérir, détenir, transporter et à mettre à disposition de leur agents.

Décret en Conseil d’État

Article 23

Conditions d’embarquement, de stockage et de remise des armes aux agents des entreprises privées de protection des navires à bord des navires battant pavillon français.

Définition du nombre d’armes autorisé pour une équipe d’entreprise privée de protection des navires à bord d’un navire battant pavillon français.

Décret en Conseil d’État

Décret

Article 24

Modalités d’information des autorités de l’État par l’armateur de tout navire battant pavillon français ayant recours aux services d’une entreprise privée de protection des navires.

Décret

Article 26

Modalités d’information des autorités de l’État par le capitaine de tout navire battant pavillon français ayant embarqué une équipe privée de protection des navires.

Décret

Article 28

Modalités de tenue du registre de l’activité de l’entreprise privée de protection des navires.

Modalités de tenue du registre de l’activité des équipes de protection à bord.

Décret

Décret

Article 30

Contenu du chef de l’équipe embarqué annexé au rapport de mer.

Décret

Titre IV – Contrôle administratif de l’exercice de l’activité privée de protection des navires et constations des infractions en mer

Article 35

Conditions d’habilitation des agents chargés de la constatation des infractions à bord des navires.

Décret en Conseil d’État

Article 36

Conditions dans lesquelles peuvent être prononcées des sanctions disciplinaires et pénalités financières.

Décret en Conseil d’État

1 http://www.icc-ccs.org/piracy-reporting-centre/piracynewsafigures (au 25 novembre 2013)

2 Chambre de Commerce Internationale, Bureau Maritime International, rapports annuel 2012 et trimestriel 2013

3 Cf. Rapport Leroy sur la compétitivité des transports maritimes et services maritimes français - Proposition n° 6 : « Prendre sans attendre une disposition législative autorisant l’embarquement à bord des navires français des gardes privés pour lutter contre la piraterie ».

4 Cf. page 78 : « Pour répondre aux besoins de sécurité du transport maritime, et lorsqu’il n’est pas possible de recourir à des équipes de protection de la Marine nationale, des solutions appropriées seront étudiées ».

5 Cf. Rapport d’information n° 4350 sur les sociétés militaires privées de MM. Christian MENARD et Jean-Claude VIOLLET, députés, fait au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées, du 14 février 2012 et rapport d’information n° 499 sur l’application de la loi n° 2011-13 du 5 janvier 2011 relative à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police de l’État en mer de MM Jean-Claude PEYRONNET et François TRUCY, sénateurs, ait au nom de la commission pour le contrôle de l’application des lois, du 11 avril 2012.

6 Circulaire du Comité de la sécurité maritime MSC.1 /Circ.1406/Rev.2 du 25 mai 2012

7 Circulaires du Comité de la sécurité maritime MSC.1 /Circ.1405/Rev.2 et MSC.1 /Circ.1443/Rev.2 du 25 mai 2012

8 http://www.interieur.gouv.fr/Le-ministere/Organisation/Delegation-Interministerielle-a-la-Securite-Privee/La-securite-privee/Les-chiffres-de-la-securite-privee

9 ISO/PAS 28007:2012, Navires et technologie maritime – Guide destiné aux sociétés privées de sécurité maritime (PMSC) fournissant des agents de protection armés embarqués sous contrat privé (PCASP) à bord de navires (et contrat pro forma).

10 Cf. Arrêté du 11 août 2011 du préfet de la Réunion

11 Open General Trade Control Licence (Maritime Anti-Piracy) du 23 février 2011

12 Ordre ministériel PRE/2914/2009 du 2 novembre 2009, qui fixe les catégories d’armes qui peuvent être utilisées.

13 Commissaires de police, officiers de police, officiers et sous-officiers de la gendarmerie nationale, ,les administrateurs et officiers du corps technique et administratif des affaires maritimes, les commandants, commandants en second ou officiers de bâtiments de l’État et les commandants des aéronefs de l’État affectés à la surveillance maritime, les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer et les agents des douanes


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