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PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française

et le Gouvernement de la République du Tadjikistan relatif à la construction

d’une tour de contrôle sur l’aéroport de Douchanbé

NOR : MAEJ1608124L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I- Situation de référence et objectifs de l’accord

La République du Tadjikistan a apporté un soutien aux opérations de lutte contre le terrorisme international, en particulier à travers l’accueil d’un détachement aérien français sur l’aéroport de Douchanbé (DETAIR) sans conditions contraignantes et de façon quasi gratuite. Le DETAIR permettait la rupture de charge1 de tout type de transport aérien en provenance ou à destination de l’Afghanistan, tant au profit des forces françaises que des forces belges et espagnoles ; il pouvait également servir de point d’appui opérationnel pour le déploiement hors d’Afghanistan de moyens vulnérables ou pour le repli de certains moyens en cas de dégradation sécuritaire en Afghanistan (avions de chasse, par exemple).

La France s’est en contrepartie engagée à prendre en charge la construction d'une tour de contrôle, financée et supervisée par le ministère de la défense au profit des autorités tadjikes, bénéficiaires finaux.

En vue de la réalisation de cet engagement, il a donc été décidé de négocier un accord intergouvernemental ayant vocation à régir les conditions de mise en œuvre de la construction de la tour de contrôle, ainsi que le statut du personnel des forces armées françaises et du personnel civil français au Tadjikistan lors de la mise en œuvre de cet accord.

Celui-ci a été signé à Douchanbé le 13 juillet 2015.

Pour mémoire, deux autres projets ont d’ores et déjà été réalisés dans le cadre de cette coopération dite « de compensation » :

- la rénovation des surfaces aéroportuaires par l’armée française. De 2004 à 2014, le 25° Régiment du Génie de l’air a réhabilité la piste d’atterrissage de 3100 mètres, les bretelles d’accès et la quasi-totalité des parkings de stationnement pour avions. A l’issue de la dernière campagne de travaux, le DETAIR a été officiellement dissous, fin novembre 2014 ;

- la construction d'un terminal pour passagers au sein de l'aéroport international de Douchanbé par la société Vinci, grâce à un financement de 20 millions d’euros au titre de la Réserve Pays Emergents (RPE)2. L’ouvrage a été officiellement inauguré le 3 septembre 2014.

Le détail du montage financier est repris au paragraphe « articulation du texte avec les accords ou conventions internationales existantes ».

II- Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord

Conséquences économiques et commerciales

La construction de la tour de contrôle pourrait être réalisée par des entreprises françaises. A ce stade, bien que les appels d’offres n'aient pas encore été lancés, seules des entreprises françaises ont fait connaître leur intérêt pour le projet.

Les retombées économiques dans le domaine de la navigation aérienne, liées à la construction de la tour, pourraient bénéficier à deux entités françaises :

- L’entreprise Thales qui, à deux reprises en 2015, a envoyé ses représentants à Douchanbé. L'obtention d'un financement au titre de l’aide publique au développement, actuellement en cours de discussion avec le ministère des finances, permettrait d'assurer une entrée durable sur le marché tadjik à cette société française, qui pourrait éventuellement fournir des équipements pour ce futur ouvrage mais surtout au profit d'autres aéroports tadjiks ultérieurement.

- L'École nationale de l'aviation civile, située à Toulouse, qui envisage de participer à la formation des contrôleurs aériens tadjiks.

Le cas échéant, la France pourrait donc étendre son influence dans ce secteur prioritaire de la diplomatie économique, développée par son ambassade au Tadjikistan.

Dans le domaine de l'aviation civile, la France a développé une coopération privilégiée avec le Tadjikistan du fait de la présence du détachement aérien français à Douchanbé. Pour l’heure, Air France n'en est toutefois pas encore devenue un acteur majeur, et il n’existe pas encore de liaison directe entre Paris et Douchanbé. En revanche, la compagnie tadjike privée Somon Air, qui dispose déjà d’une liaison hebdomadaire vers Francfort, étudie son prolongement vers Paris. La construction de la tour de contrôle devrait conduire à une augmentation du trafic vers et en provenance de la capitale tadjike. D'autres Etats se montrent ainsi également intéressés par la construction de la tour et les perspectives de développement qu’elle entraîne : le Japon a prévu de bâtir un terminal de marchandises et de fournir des équipements d'aide à l'atterrissage, et l’Ukraine souhaite quant à elle remettre en place des vols directs vers Kiev, interrompus depuis la crise dans cet Etat.

Pour ce qui concerne l’acquisition d’appareils et le renouvellement ou le développement des flottes commerciales, plusieurs marchés sont en cours de discussion avec des entreprises françaises comme Airbus ou la société ATR (« Avions de transport régional »).

Conséquences financières

Conformément à l’échéancier défini à l’annexe (article 5) de l’accord, les travaux de construction de la tour devraient durer 15 mois, dont 3 mois nécessaires à la préparation du chantier de construction. Ils débuteraient courant 2016 et pourraient s’achever en 2018, selon la date de commencement des travaux.

Le montant total des dépenses engagées pour la phase de conception s’élève à 259 k€. Le montant total des travaux et prestations s’élève quant à lui à 5,7 M€ à engager fin 2016 pour la phase réalisation, auxquels s’ajoutent 42,4 k€ à engager en 2018 pour la phase GPA3. En vertu de l’accord, l'ensemble des marchés est exempté de la TVA et les totaux mentionnés sont hors aléas/révisions (10% à prévoir).

Conséquences environnementales

La nouvelle tour de contrôle remplacera un ouvrage existant, vétuste, installé sur l'ancien terminal passagers, qui n'offre qu'une vue partielle sur l'aéroport. Sur demande des autorités tadjikes, sa résistance au séisme a fait l'objet d'une étude particulière. Les normes antipollution qui seront appliquées à l'ouvrage ont été validées au moment de l'attribution de « l'expertise d’État », document certifiant l’agrément technique du projet par les autorités tadjikes.

Si la sécurité des transports aériens est l'objectif premier d'une tour de contrôle, les aspects environnementaux font néanmoins partie intégrante de la conception de la tour. La tour répondra donc aux normes françaises en la matière, y compris dans ses aspects environnementaux :

- Thermique : application de la « Règlementation Thermique 20124 ». Sont prévus un système de refroidissement/chauffage par pompe à chaleur avec une isolation par l'extérieur. Le projet est conçu pour limiter les zones refroidies/chauffées aux stricts besoins du contrôle aérien (vigie/sous vigie). Le calcul thermique a eu pour objectif d'optimiser les apports solaires dans la vigie.

- Acoustique : une étude acoustique a été réalisée et le projet a été adapté de manière à atteindre les performances acoustiques réglementaires.

- Matériaux : la tour est préfabriquée en acier (matériau recyclable), structure légère et performante en contexte très sismique, avec une consommation d'eau et des transports de matière très réduits par rapport à un chantier béton. Le marquage « CE » a été demandé pour tous les matériaux de construction de la tour.

- Maintenance : elle a été simplifiée avec notamment le choix d'une charpente en acier galvanisé qui ne demande pas de mise en peinture régulière de la charpente, et l’accès aux équipements techniques a été facilité.

- Gestion du chantier : la réglementation française en matière de gestion des déchets a été appliquée, avec la mise en place par l'entreprise d'un schéma d'organisation et de gestion des déchets (SOGED), qui implique notamment le tri des déchets de chantier. Le recours à la préfabrication limite l'impact du chantier sur le site. De manière générale, les choix de conception de la tour privilégient une main d’œuvre qualifiée et limitée en nombre.

Conséquences juridiques

Le contrat d’adaptation de la conception à la réglementation tadjike a été conclu avec la société anonyme Shahrofar et sa mise en œuvre a conduit à l'obtention du « PROEKT », c’est-à-dire l’autorisation de construire tadjike.

§ Cet accord ne nécessite pas de modification du droit interne.

§ Articulation du texte avec les accords ou conventions internationales existantes

- Un Protocole financier a été signé entre la France et le Tadjikistan le 8 août 20085, prévoyant un prêt financier de la France de 17 millions d’euros. Un second protocole financier, signé le 1er mai 2009, qui a fait l’objet d’un avenant en date du 29 juin 20126, prévoyait un nouveau prêt gouvernemental, d’un montant de 3 millions d’euros.

Le concours financier accordé était destiné à la construction de l’aérogare de l'aéroport international de Douchanbé. Sur les 20 millions d’euros prêtés par la France, 4 l’ont été sous forme de prêt du Trésor. La totalité des dépenses liées à la construction du terminal s’est élevée à 49 millions d’euros. 29 millions d’euros ont donc été réglés par la partie tadjike.

- L’article 7 sur le statut des personnels des forces armées de la partie française sur le territoire du Tadjikistan dans le cadre de l’exécution du présent accord renvoie à l’accord sous forme d’échange de notes signé le 7 décembre 2001 relatif aux conditions de déploiement et de stationnement temporaire sur le territoire de la République du Tadjikistan des forces armées de la République française participant aux opérations de lutte contre le terrorisme international7.

Ce même article renvoie à la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 19618 pour les privilèges de juridiction et d’exécution accordés aux personnels civils de la partie française.

- Il n’existe pas actuellement d’accord aérien entre la France et le Tadjikistan. Le projet de la compagnie tadjike privée Somon Air, qui envisage de desservir la France en prolongeant la ligne existante entre Douchanbe et Francfort, pourrait à terme conduire à envisager la négociation d’un tel accord, alors même que le pavillon français n’a pas de projet à faire valoir.

§ S’agissant d’un accord exécuté intégralement sur le territoire d’un Etat tiers à l’UE, l’articulation du texte de l’accord avec le droit de l’UE est sans objet.

Conséquences administratives

Les agents publics (civils et militaires) de la partie française amenés à travailler sur le projet ne le feront qu’au titre de la maîtrise d’œuvre et de la conduite d’opération. S’agissant du personnel civil, seules des missions ponctuelles sont envisagées pour des personnels de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), en particulier le Service national des infrastructures aéroportuaires (SNIA), dans le cadre de visites de contrôle, ou si une difficulté venait à apparaître sur le chantier de construction. Le cas échéant, ces missions n’impliqueraient que des effectifs très réduits (moins de cinq personnes).

Durant les travaux de construction, il est prévu de déployer deux militaires à plein temps : un officier et un sous-officier.

Enfin, les effectifs mis en place par l’entreprise pour la réalisation du chantier sont inconnus, le marché n’ayant pas encore été passé.

Conséquences concernant la parité femmes/hommes

Sans objet.

III – Historique des négociations

Le texte de l’Accord a été élaboré en 2010 par la direction des Affaires juridiques du ministère de la Défense sur demande de la direction centrale du service d’infrastructure de la défense. Il a fait l’objet de discussions entre les différents ministères avant d’être soumis à la partie tadjike en août 2012.

Les principaux points de discussion avec les interlocuteurs tadjiks ont porté, d’une part, sur le statut du personnel français déployé sur le territoire de la République du Tadjikistan aux fins de cette coopération. Les Tadjiks ont en effet refusé d’étendre aux personnels civils de la partie française les stipulations de l’accord par échange de lettres du 7 décembre 2001, qui permettait à ces personnels de bénéficier, au même titre que les militaires des forces armées françaises, des privilèges de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961. Une solution de compromis a été trouvée sur ce point, nos partenaires tadjiks ayant finalement accepté, à défaut d’extension de l’accord franco-tadjik du 7 décembre 2001 susmentionné, que les agents publics de la partie française bénéficient des mêmes privilèges de juridiction et d’exécution que ceux accordés aux membres du personnel administratif et technique d’une mission diplomatique par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, du 18 avril 1961.

Des discussions ont, d’autre part, concerné l’imposition du personnel français. Les Tadjiks ont, sur cette question, accédé aux exigences françaises, permettant l’insertion à l’article 8 de clauses similaires à celles habituellement négociées par la France dans ses accords.

Les négociations ont abouti en juin 2015.

L’Accord est conclu pour la durée de l’opération et prendra fin au terme de la garantie de parfait achèvement, soit un an à compter de la date de réception de l’ouvrage officialisant l’achèvement des travaux. A ce titre, la fin de garantie de parfait achèvement peut être estimée à l’horizon décembre 2019.

IV – État des signatures et ratifications

L’Accord a été signé à Douchanbé le 13 juillet 2015. La partie tadjike a notifié le 3 novembre 2015 à la partie française l’accomplissement de ses procédures internes pour son entrée en vigueur.

V - Déclarations ou réserves

Sans objet.

1 Une rupture de charge est, dans le domaine des transports, une étape pendant laquelle des marchandises ou des passagers transportés par un premier véhicule sont transférés dans un second véhicule, immédiatement ou après une période de stockage.

2 Instrument de prêt destiné, dans le cadre de l'aide publique au développement, à financer des projets d’infrastructures publiques répondant aux priorités du pays bénéficiaire.

3 «Garantie de parfait achèvement », soit un an après la date de réception de l’ouvrage.

4 Conformément à l'article 4 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, la Règlementation Thermique 2012 a pour objectif de limiter la consommation d'énergie primaire des bâtiments neufs.

5 https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2008/10/31/MAEJ0824864D/jo

6 http://portaildoc.diplomatie.gouv.fr/exl-php/commun/Accede_TRAITES.php?accord=00000829

7 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000596841&categorieLien=id

8 http://www.csc-scc.gc.ca/transferements-internationaux/092/004001-0006-fra.pdf


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