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N° 1077

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 mai 2013.

PROPOSITION DE LOI

tendant à plus d’exemplarité dans l’embauche des collaborateurs de collectivités territoriales et d’offices publics de l’habitat,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Julien AUBERT,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les révélations de l’affaire Cahuzac ont fait éclore, chez nos concitoyens, un souhait manifeste d’avoir des élus plus transparents et faisant preuve de pratiques et d’éthique irréprochables.

Si le Gouvernement a décidé de modifier, au niveau national, les règles en matière de transparence et de conflit d’intérêts, il ne faut pas pour autant oublier que la vie politique locale est, elle aussi, loin d’être exemplaire… Les affaires Guérini et Kucheida n’en sont que les parties émergées.

Reste que si les Français demandent de l’exemplarité aux élus nationaux, ils n’en attendent pas moins de leurs élus locaux, ce qui est tout à fait légitime.

Cette proposition de loi a donc, dans un premier temps, pour objet d’appliquer au niveau du conseil général ce qui existe déjà dans la loi pour le conseil régional. En effet, comment justifier qu’un collaborateur de cabinet du président ou d’un vice-président de conseil régional n’ait pas le droit d’être élu conseiller général d’un département de la région dans laquelle il exerce ses fonctions (article L. 195 du code électoral), alors qu’un collaborateur de cabinet du président ou d’un vice-président de conseil général aurait le droit d’être élu maire d’une commune du département dans lequel il officie ? La loi doit être la même pour tous : soit elle autorise le cumul de ce type de fonctions, soit elle l’interdit totalement et doit s’appliquer à tous les cas.

Ainsi, l’article 1er modifie l’article L. 195 du code électoral en élargissant la condition de temporalité à un an au lieu de six mois et en incluant les collaborateurs de cabinet de vice-président de conseil général.

L’article 2 élargit les cas d’incompatibilité à l’élection municipale aux collaborateurs de cabinet de collectivités territoriales.

Par ailleurs, il convient d’interdire l’embauche d’un membre de la famille ou d’un proche d’un élu au sein d’un cabinet d’exécutif local, au même titre que l’embauche d’un responsable d’un parti politique. En effet, comment peut-on accepter qu’un membre de la famille d’un élu de la collectivité concernée ou qu’un responsable départemental, régional ou national d’un parti politique soient rémunérés par des fonds publics ? À l’heure où les Français demandent à leurs élus d’être exemplaires, cela paraît inconcevable.

L’article 3 remédie donc à cela en ajoutant deux nouveaux articles à la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, qui excluent certaines possibilités de recrutement de collaborateurs au sein des cabinets de collectivités territoriales.

Si l’exemplarité doit s’imposer au sein des cabinets d’exécutifs locaux, elle ne doit pas moins s’appliquer aussi en matière de gestion, d’attribution de logements sociaux et de recrutement des collaborateurs, par les offices publics de l’habitat.

L’article 4 instaure donc une coprésidence de ces offices publics et empêche le recrutement, par leurs dirigeants, de proches et membres de la famille d’élus de la collectivité dont dépend directement l’office public.

Enfin, afin de lutter contre une possible concentration des pouvoirs, l’article 5 crée, quant à lui, une commission départementale de déontologie des agents contractuels territoriaux dans chaque département. Cette commission ad hoc sera chargée d’examiner tout recrutement contractuel d’agent dès lors que ce recrutement semble porter atteinte à l’intégrité de la collectivité territoriale ou serait susceptible de créer un conflit d’intérêts.

Présidée par le président du tribunal administratif territorialement compétent, la commission sera composée d’un magistrat de la chambre régionale de comptes, du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale, du directeur départemental des libertés publiques et des collectivités locales et d’une personnalité reconnue pour son expérience nommée par le préfet. Cette commission ne pourra être saisie que par un élu de la collectivité territoriale concernée, à partir du moment où il estime qu’une embauche lui semble le justifier.

L’objectif de ce texte est donc bel et bien de rendre plus exemplaires les pratiques et les conditions de recrutement des collaborateurs de collectivités territoriales et d’offices publics de l’habitat, en limitant davantage les possibilités de conflit d’intérêts et de favoritisme au bénéficie de territoires particuliers, de familles particulières ou d’un même parti politique.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’article L. 195 du code électoral est ainsi modifié :

1° À la fin des 2° à 6°, au 7° et à la fin des 8° à 19°, les mots : « moins de six mois » sont remplacés par les mots : « un an » ;

2° Après la première occurrence du mot : « président », sont insérés les mots : « ou d’un vice-président ».

Article 2

L’article L. 231 du code électoral est ainsi modifié :

1° À la fin du deuxième alinéa, les mots : « six mois » sont remplacés par les mots : « un an » ;

2° Au 8°, la première occurrence du mot : « directeurs » est remplacée par le mot : « membres » ;

3° Au même 8°, après les trois premières occurrences du mot : « président », sont insérés les mots : « ou d’un vice-président ».

Article 3

La loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifiée :

1° Au premier alinéa de l’article 110, le mot : « librement » est supprimé ;

2° Après l’article 110, sont insérés des articles 110 bis et 110 ter ainsi rédigés :

« Art. 110 bis. – Un collaborateur de cabinet du président ou d’un vice-président du conseil général ou de l’assemblée territoriale de Corse, ne peut être :

« – maire, adjoint ou conseiller municipal délégué d’une commune d’un même département ;

« – président, vice-président ou conseiller communautaire délégué d’un établissement public de coopération intercommunale d’un même département ;

« – conjoint, partenaire d’un pacte civil de solidarité, ascendant, descendant ou collatéral direct d’un membre de l’exécutif au sein duquel il exerce ;

« – conjoint ou partenaire d’un pacte civil de solidarité d’un ascendant, descendant ou collatéral direct d’un membre de l’exécutif au sein duquel il exerce ;

« – responsable national, départemental ou régional d’un parti politique. »

« Art. 110 ter. – Un collaborateur de cabinet du président ou d’un vice-président du conseil régional ne peut être :

« – maire, adjoint ou conseiller municipal délégué d’une commune du territoire régional ;

« – président, vice-président ou conseiller communautaire délégué d’un établissement public de coopération intercommunale du territoire régional ;

« – conseiller général d’un département du territoire régional ;

« – conjoint, partenaire d’un pacte civil de solidarité, ascendant, descendant ou collatéral direct d’un membre de l’exécutif au sein duquel il exerce ;

« – conjoint ou partenaire d’un pacte civil de solidarité d’un ascendant, descendant ou collatéral direct d’un membre de l’exécutif au sein duquel il exerce ;

« – responsable national, départemental ou régional d’un parti politique. »

Article 4

I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase de l’article L. 421-8, les mots : « le président » sont remplacés par les mots : « les coprésidents » ;

2° L’article L. 421-11 est ainsi modifié :

a) Le début est ainsi rédigé : « Les coprésidents du conseil d’administration sont élus par le… (le reste sans changement) » ;

b) Il est complété par une phrase ainsi rédigée : « La coprésidence du conseil d’administration est assurée par un élu de la majorité et un élu de l’opposition de la collectivité territoriale de rattachement. » ;

3° À l’article L. 421-14 :

a) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « le président » sont remplacés par les mots : « les coprésidents » ;

b) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « son président » sont remplacés par les mots : « ses coprésidents ».

II. – Les coprésidents et directeurs généraux d’offices publics de l’habitat ne peuvent procéder au recrutement :

– d’un conjoint, partenaire d’un pacte civil de solidarité, ascendant, descendant ou collatéral direct d’un coprésident ou d’un élu de la collectivité dont l’office public de l’habitat dépend ;

– d’un conjoint ou partenaire d’un pacte civil de solidarité d’un ascendant, descendant ou collatéral direct d’un coprésident ou d’un élu de la collectivité dont l’office public de l’habitat dépend.

Article 5

Dans chaque département, est instaurée une commission départementale de déontologie des agents contractuels territoriaux.

La commission départementale de déontologie des agents contractuels territoriaux a pour objet d’examiner si le recrutement d’un agent contractuel au sein d’une collectivité territoriale est de nature à porter atteinte à l’intégrité de celle-ci ou s’il est susceptible de conflit d’intérêts.

Cette commission est compétente pour tout recrutement contractuel effectué par le conseil général, un établissement public de coopération intercommunal à fiscalité propre ou une commune du département. La commission compétente pour tout recrutement contractuel au sein du conseil régional est celle du département qui accueille le siège de la préfecture de région.

Son secrétariat est assuré, au sein des services de l’État, par la direction départementale des libertés publiques et des collectivités locales. Elle se réunit dans les locaux de la préfecture.

La commission est présidée par le président du tribunal administratif territorialement compétent. Outre son président, elle est composée :

– d’un magistrat de la chambre régionale des comptes territorialement compétente ;

– du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale ;

– du directeur départemental des libertés publiques et des collectivités locales ;

– d’une personnalité nommée par le préfet reconnue pour son expérience.

Elle ne peut être saisie que par un élu de la collectivité concernée, si celui-ci estime que l’embauche d’une personne porterait atteinte aux intérêts de la collectivité territoriale ou serait susceptible de créer un conflit d’intérêts.

Après avoir auditionné le chef de l’exécutif local concerné, ou à défaut le directeur général des services, la commission de déontologie des agents contractuels territoriaux rend un avis sur le recrutement litigieux et en avertit le maire, le président de l’établissement public de coopération intercommunale, le président du conseil général ou le président du conseil régional concerné, la personne concernée par le recrutement, l’élu ayant saisi la commission et le préfet.

Un décret pris en Conseil d’État précise les éléments de procédure ainsi que les critères objectifs sur lesquels la commission fonde son avis.

Article 6

Les charges pour l’État sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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