PROJET DE LOI

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N° 1627

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de lAssemblée nationale le 11 décembre 2013.

PROJET  DE  LOI

dorientation et de programmation relative à la politique
de développement et de solidarité internationale,

(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution dune commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

au nom de M. JeanMarc ayrault,

Premier ministre,

par M. Laurent FABIUS,
ministre des affaires étrangères,

et par M. Pascal CANFIN,
ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères,
chargé du développement.

 


TITRE Ier

ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE de DéVELOPPEMENT
et de solidarité internationale de la france

Chapitre Ier

Objectifs de la politique de développement
et de solidarité internationale

Article 1er

(1) La France met en œuvre une politique de développement et de solidarité internationale qui a pour objectif général de promouvoir un développement durable dans les pays en développement, dans ses trois composantes économique, sociale et environnementale.

(2) Cette politique vise à participer à leffort international de lutte contre la pauvreté extrême et à réduire les inégalités, sociales ou territoriales, en favorisant un développement économique équitable et riche en emplois, en préservant les biens publics mondiaux, en luttant contre le changement climatique et en promouvant la paix, la stabilité, les droits de lHomme et la diversité culturelle.

(3) La politique de développement et de solidarité internationale respecte et défend les libertés fondamentales. Elle contribue à promouvoir les valeurs de la démocratie et de lÉtat de droit, légalité entre les hommes et les femmes ainsi que la responsabilité sociale et environnementale et le travail décent. Elle œuvre pour développer et renforcer ladhésion à ces valeurs dans les pays et régions partenaires par la voie du dialogue et de la coopération. Elle veille à assurer la continuité entre les phases durgence, de reconstruction et de développement. Elle concourt à la politique étrangère de la France, à son rayonnement culturel, diplomatique et économique et accorde une attention particulière à la francophonie.

(4) La politique de développement et de solidarité internationale promeut les principes et les normes définis par la communauté internationale en matière de défense des droits de lHomme, du développement et de lenvironnement.

Article 2

Le rapport fixant les orientations de la politique de développement et de solidarité internationale, annexé à la présente loi, est approuvé.

Chapitre II

Principes de la politique de développement
et de solidarité internationale

Article 3

Une cohérence est recherchée entre les objectifs de la politique de développement et de solidarité internationale et ceux des autres politiques publiques susceptibles davoir un impact dans le domaine du développement, en particulier les politiques commerciale, agricole, migratoire, sociale, ou les politiques relatives à la recherche et lenseignement supérieur, à léducation, à la santé, à lenvironnement et la lutte contre le changement climatique, à la paix et la sécurité, à léconomie sociale et solidaire ou aux outremer.

Article 4

(1) Afin dassurer son efficacité, la politique de développement et de solidarité internationale est fondée sur une logique de partenariats différenciés tels que présentés dans le rapport annexé à la présente loi. Elle tient compte des priorités des politiques publiques des pays partenaires et favorise la transparence.

(2) Lallocation des ressources publiques tient compte des besoins des pays bénéficiaires et de leur évolution, de leurs capacités dabsorption et de limpact attendu de laide. Elle favorise la concentration géographique et sectorielle et la prévisibilité de ces ressources, elle prévient la dispersion de laide française.

(3) La France promeut au sein de lUnion européenne la programmation conjointe de laide apportée par les États membres ainsi que lharmonisation et la coordination des actions daide avec les autres bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux.

Article 5

La politique de développement et de solidarité internationale prend en compte lexigence de la responsabilité sociale et environnementale.

Titre II

organisation générale de la politique
de développement et de solidarité internationale

Article 6

Les orientations de la politique de développement et de solidarité internationale sont définies et actualisées régulièrement en veillant à la cohérence et en recherchant la complémentarité des composantes bilatérale et multilatérale et des priorités géographiques et sectorielles de cette politique.

Article 7

(1) Dans les institutions multilatérales de développement dont elle est partie prenante, la France défend les priorités, objectifs et principes de sa politique de développement et de solidarité internationale tels quénoncés aux chapitres Ier et II de la présente loi ainsi quau rapport annexé à la présente loi.

(2) La France promeut lamélioration de la coordination, de lefficience et de la transparence du système multilatéral.

TITRE III

expertise internationale

Article 8

Les opérateurs de lexpertise technique internationale contribuent, le cas échéant dans le cadre de conventions passées avec lÉtat, à la mise en œuvre des priorités, objectifs et principes de la politique de développement et de solidarité internationale de la France tels quénoncés aux chapitres Ier et II de la présente loi, dans le respect des mandats et objectifs spécifiques de ces institutions.

TITRE IV

Action extérieure des collectivités territoriales

Article 9

(1) Larticle L. 11151 du code général des collectivités territoriales est remplacé par les dispositions suivantes :

(2) « Art. L. 11151.  Dans le respect des engagements internationaux de la France, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent mettre en œuvre ou soutenir des actions de coopération ou daide au développement ainsi que des actions à caractère humanitaire. À cette fin, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent conclure des conventions avec des autorités locales étrangères.

(3) « Ces conventions et les délibérations adoptées à cet effet autorisent les actions envisagées et précisent leur objet et le montant prévisionnel des engagements financiers. Elles entrent en vigueur dès leur transmission au représentant de lÉtat dans les conditions fixées aux articles L. 21311, L. 21312, L. 31311, L. 31312, L. 41411 et L. 41412. Les articles L. 21316, L. 31321 et L. 41421 leur sont applicables. »

Titre V

MISE EN œuvre, éVALUATION ET RAPPORT

Article 10

(1) La politique de développement et de solidarité internationale fait lobjet dévaluations régulières sur la base dindicateurs tels ceux mentionnés à lannexe 2 du rapport annexé à la présente loi. Le programme dévaluation est communiqué au Parlement. Sur la demande de lune des commissions permanentes compétentes de son assemblée, le président de lAssemblée nationale ou le président du Sénat peut proposer une ou des évaluations similaires.

(2) Le Gouvernement transmet tous les deux ans aux commissions permanentes compétentes de lAssemblée nationale et du Sénat ainsi quau Conseil national du développement et de la solidarité internationale un rapport faisant la synthèse de la politique de développement et de solidarité internationale conduite par la France dans un cadre bilatéral et multilatéral et des évaluations dont elle fait lobjet.

(3) Le III de larticle 44 de la loi de finances rectificatives pour 1998 (n° 981267 du 30 décembre 1998) est abrogé.

 

 

 


ANNEXE À L’ARTICLE 2

 



RAPPORT

TABLE DES MATIERES

Préambule

1. Objectifs et priorités de la politique de développement et de solidarité internationale de la France

1.1. Finalité de la politique de développement et de solidarité internationale de la France

1.2. Priorités transversales

1.3. Priorités sectorielles

1.4. Priorités géographiques : des partenariats différenciés

1.5. Pilotage de la politique de développement et de solidarité internationale : le processus de révision des priorités sectorielles et géographiques

2. Cohérence, efficacité et transparence de la politique de développement

2.1. La cohérence des politiques sectorielles de la France sinscrit dans un cadre européen

2.2. Efficacité de la politique de développement et de solidarité internationale

2.3. Transparence et redevabilité de la politique de développement et de solidarité internationale

3. Les leviers daction de la politique de développement et de solidarité internationale de la France

3.1. Lintervention de lEtat

3.2. Les interactions avec les acteurs non étatiques

4. Le financement du développement

4.1. Instruments publics de financement du développement

4.2. Financements privés en faveur du développement

4.3. Les financements innovants

Annexe 1 : Liste des sigles et abréviations

Annexe 2 : Matrice des indicateurs de résultats

 


(1) Préambule

(2) Un contexte mondial en profonde mutation qui impose un renouvellement des enjeux du développement

(3) Ces deux dernières décennies ont été marquées par des progrès majeurs en matière de développement. Des centaines de millions de femmes et dhommes ont ainsi pu sortir de la pauvreté en Asie, en Afrique et en Amérique latine. Une partie du monde en développement est aujourdhui en émergence ou au seuil de lêtre. Pour autant, deux défis considérables se posent aujourdhui. Dune part, dimportant progrès restent à faire dans de nombreux pays car ce mouvement positif est loin dêtre homogène. La sécurité alimentaire dun milliard dêtres humains nest toujours pas assurée. Certains États continuent de dépendre largement de laide internationale pour leur financement. Les inégalités entre pays et entre individus au sein de chaque pays se sont accrues. Dautre part, et dans le même temps, lémergence de certains pays en développement bouleverse les équilibres économiques et politiques internationaux et entraîne une pression sur lenvironnement et le climat chaque jour plus forte.

(4) La politique de développement de la France a pour objectif général de promouvoir un développement durable dans les pays en développement, dans ses trois composantes économique, sociale et environnementale. Elle sinscrit ainsi pleinement dans la fusion des agendas du développement (Objectifs du Millénaire pour le Développement  OMD) et du développement durable (Objectifs du Développement Durable  ODD), dont les futurs objectifs seront définis en 2015 par les Nations Unies. Lélimination de la pauvreté et la garantie à tous dune vie décente ne pourront être atteints sans un renforcement de la gouvernance mondiale, ainsi quune transition vers des modèles de développement, de consommation et de production plus durables. Dans un monde en forte croissance démographique, aux ressources naturelles limitées et engagé dans un effort pour maintenir le réchauffement climatique sous le seuil des 2°C, il sagit de favoriser lépanouissement dune société inclusive, fondée sur les droits humains, un cadre de vie décent et durable pour chacun. Cest ainsi que la mondialisation pourra contribuer au progrès de nos sociétés et de notre planète.

(5) La politique de développement et de solidarité internationale de la France a pour ambition une mondialisation mieux maîtrisée et porteuse de valeurs. Sa vocation première, lutter contre la pauvreté et les inégalités pour aider le sixième de lhumanité, dont une majorité de femmes, qui vit encore dans lextrême pauvreté, à en sortir et éviter que ceux qui en sont sortis y tombent à nouveau, est réaffirmée. Par la promotion de la production et de léchange des savoirs, la circulation des idées et de la création et le dialogue des cultures, elle favorise une prise de conscience commune des enjeux collectifs et lémergence de solutions coopératives.

(6) Les instruments

(7) Laide française est mise en œuvre à travers divers instruments (dons, prêts, annulations de dette,…) quil faut tous mobiliser de façon adaptée aux besoins de nos partenaires. Tel est lobjectif des partenariats différenciés qui sinscrivent dans la recherche de nouveaux équilibres géographiques et sectoriels.

(8) Ainsi, dans les pays les plus pauvres, laide publique au développement (APD) doit contribuer au financement de politiques publiques essentielles, notamment dans les secteurs sociaux. Elle joue également un rôle de catalyseur des autres sources de financement, là où le potentiel de mobilisation des ressources fiscales et le recours aux marchés financiers demeurent encore limités et insuffisants, dans le financement des infrastructures et lappui au développement du secteur privé notamment.

(9) À linverse, dans les pays émergents, la dépendance à laide publique au développement est faible. La valeur ajoutée de lintervention de la France repose sur lexpertise, la capacité à agir en faveur de la préservation des biens publics mondiaux et la recherche de solutions partagées à des défis communs.

(10) LAPD, qui représente 0,2 % du revenu mondial, ne peut à elle seule répondre au défi du développement ; lenjeu que représente la mobilisation dautres ressources que laide est donc essentiel.

(11) Dans cette perspective, la France souhaite continuer à favoriser laccroissement des ressources fiscales des pays en développement ainsi que linvestissement privé, local et international.

(12) La France promeut également la mise en place de financements innovants en sappuyant principalement sur des activités liées à la mondialisation, à linstar de la taxe sur les transactions financières que la France a introduite à titre national et dont elle a affecté une partie des recettes au développement. Elle souhaite quune part significative du produit de la future taxe européenne soit consacrée à la solidarité internationale.

(13) Linterconnexion croissante des enjeux nationaux et internationaux conduit désormais à rechercher des réponses globales, en sassurant quelles soient respectueuses du développement de tous les pays du monde. Dans une perspective universelle, la France entend favoriser lémergence de politiques publiques globales, notamment par son action dans les enceintes internationales (Organisations des Nations-unies, Institutions de Bretton-Woods, G8 et G20) et par sa participation à de nombreux fonds verticaux. Sa politique de développement et de solidarité internationale sinscrit aussi dans une dynamique européenne, nécessaire à la mise en cohérence de ses actions à titre national avec celles menées par lUnion européenne, premier pourvoyeur dAPD dans le monde.

(14) La méthode

(15) La politique française de développement implique tous les acteurs du développement dans leur diversité : administrations et opérateurs publics, fondations, collectivités locales, entreprises, y compris celles de léconomie sociale et solidaire, associations, organisations non gouvernementales et établissements denseignement supérieur, de recherche et de formation. Le Gouvernement fait désormais du soutien, de la consultation et de la coordination avec ces acteurs issus de la société civile une priorité de sa politique de développement et de solidarité internationale. Le Conseil National du Développement et de la Solidarité Internationale (CNDSI), espace de dialogue politique et instance de mise en cohérence des actions de développement, est créé à cette fin.

(16) La politique française de développement et de solidarité internationale doit rechercher la plus grande efficacité. Optimiser limpact de ses interventions et valoriser pleinement les ressources publiques utilisées relèvent de lintérêt premier des pays bénéficiaires comme des contribuables français. Cette efficacité passe par lutilisation souple des instruments disponibles, par la prise en compte de la « performance » des projets soutenus et par lévaluation indépendante de leurs résultats et de leur impact.

(17) La France sengage à faire de la transparence de son aide une priorité. Conformément aux conclusions du Forum de haut niveau de Busan de 2011 sur lefficacité de laide, qui visent à létablissement dun standard commun, elle améliore le nombre et la qualité des informations sur son aide publiée sur les sites gouvernementaux. Elle lance également des projets pilote destinés à publier en temps réel les informations sur les projets quelle finance, à linstar de ses activités au Mali.

(18) La transparence de laide passe également par une meilleure redevabilité. À partir de 2013, la France produira annuellement des indicateurs de résultats ex post de laide bilatérale et multilatérale. Les documents qui permettent dinformer les parlementaires (en particulier le document de politique transversale « Politique française en faveur du développement ») et la société civile seront revus dans le même esprit. Les résultats des évaluations menées par les principales structures pilotant laide au développement de la France, ainsi que la mise en œuvre de la stratégie présentée dans ce rapport, seront également rendus plus accessibles et plus lisibles.

(19) De nombreuses autres politiques publiques ont des effets importants sur les pays en développement. Lefficacité de la politique de développement et de solidarité internationale dépend donc fortement de larticulation entre cette politique et lensemble des politiques nationales et européennes (commerce, agriculture, santé, migrations, recherche et enseignement supérieur, éducation, lutte contre le changement climatique, sécurité, outre-mer,…). Cette cohérence doit donc être systématiquement recherchée.

(20) 1. Objectifs et priorités de la politique de développement et de solidarité internationale de la France

(21) 1.1. Finalité de la politique de développement et de solidarité internationale de la France

(22) La France met en œuvre une politique de développement et de solidarité internationale qui a pour objectif général de promouvoir un développement durable dans les pays en développement, tout en visant à participer à leffort international de lutte contre la pauvreté extrême et de réduction des inégalités.

(23) Pour tenir compte du niveau de développement de chacun de ses partenaires et des priorités liées à sa géographie, son histoire, sa culture et sa langue, la France fait le choix dune politique de développement et de solidarité internationale reposant sur des partenariats différenciés.

(24) Cette politique se décline dans quatre grands domaines simultanément :

(25)  Promotion de la paix, de la stabilité, des droits de lHomme et de légalité entre les hommes et les femmes : la liberté et la protection des individus comme le développement économique et social à long terme des pays partenaires ne peuvent être assurés que dans une démarche fondée sur la reconnaissance de droits et le renforcement de lÉtat de droit. La France y attache une importance particulière.

(26)  Équité, justice sociale et développement humain : les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) ont contribué à mobiliser la communauté internationale en faveur dun accès universel à un socle de services sociaux essentiels : alimentation, éducation, santé, eau potable, assainissement, habitat décent. Des progrès importants ont été réalisés, principalement alimentés par la croissance économique des pays eux-mêmes mais également grâce à lappui de la communauté internationale. Mais il reste à trouver les voies et moyens de généraliser et de rendre pérennes ces acquis car les défis restent nombreux. La France rappelle limportance de laccumulation de capital humain dans le processus de développement et laspect central du bien-être et des droits des individus parmi les objectifs de développement.

(27)  Développement économique durable et riche en emplois : la France place le développement économique des pays du Sud au cœur de sa politique de développement et de solidarité internationale. Elle considère que lamélioration des infrastructures, dans les secteurs de leau, de lénergie ou des transports notamment, le renforcement de lintégration régionale et le développement du secteur privé, en particulier des PME-PMI et des entreprises de taille intermédiaire (ETI), des entreprises de léconomie sociale et solidaire (associations et coopératives notamment), ainsi que dun secteur financier performant et inclusif pour tous, sont des outils essentiels. Une croissance verte et solidaire reste, particulièrement dans les pays en développement, un moteur essentiel du progrès social. Lenjeu est de promouvoir une croissance de qualité, créatrice demplois, fondée sur un juste équilibre entre capital physique, humain et naturel et qui ne se traduise pas par un « dumping » social ou écologique. La politique de développement doit ainsi favoriser une convergence des normes économiques, sociales et environnementales qui contribue à améliorer les conditions de vie des populations des pays en développement et qui préserve le tissu économique des pays bénéficiant déjà de normes sociales et environnementales de bon niveau.

(28)  Préservation de lenvironnement et des biens publics mondiaux : limiter à 2°C laugmentation des températures mondiales afin déviter de graves dérèglements climatiques, lutter contre lérosion de la biodiversité, veiller à la protection des milieux naturels et des écosystèmes terrestres et marins, améliorer la protection contre les risques sanitaires et environnementaux, prévenir lémergence et la propagation des maladies contagieuses et améliorer la stabilité financière mondiale constituent aujourdhui des enjeux collectifs majeurs. Ces biens publics mondiaux ne sont aujourdhui correctement pris en charge ni par les marchés ni par les États parce que les investissements que nécessite leur préservation ne profitent pas exclusivement à ceux qui les ont consentis et ne génèrent pas nécessairement de bénéfice marchand. Ils appellent donc de la part de la communauté internationale des solutions de gouvernance et de financement innovantes.

(29) 1.2. Priorités transversales

(30) La promotion de lautonomisation des femmes et lintégration systématique des problématiques de genre dans les actions menées par les acteurs de laide et les pays partenaires ainsi que la lutte contre le changement climatique (biodiversité et énergies renouvelables) sont des priorités transversales de la politique daide au développement de la France.

(31)  Les femmes sont des actrices essentielles du développement. Pour mettre les droits des femmes au cœur de la politique de développement, le Gouvernement a adopté lors du CICID de juillet 2013 une nouvelle stratégie « genre et développement » pour la période 20132017. Cette stratégie prévoit une prise en compte systématique dun objectif transversal « genre » dans les procédures délaboration, de suivi et dévaluation des projets : cette approche intégrée passera dans les partenariats différenciés, en particulier dans les pays pauvres, par une révision de tous les instruments du développement ainsi que par le renforcement des capacités des agents et le soutien à la recherche. La nouvelle stratégie, mise en œuvre par lensemble des ministères traitant de politique de développement et tous les opérateurs, sera évaluée annuellement par le Haut Conseil à lÉgalité entre les femmes et les hommes (HCE).

(32)  La lutte contre le changement climatique et le développement économique et social sont intrinsèquement liés : laccélération du réchauffement climatique entravera durablement le développement. Ladoption par les pays en développement, notamment les pays émergents, de modes de développement sobres en énergie fossile est devenue un enjeu majeur à la fois pour la lutte contre le réchauffement climatique au niveau mondial et pour le développement durable de chacun dentre eux. En parallèle, il apparaît crucial daccompagner les pays les plus pauvres et les plus fragiles pour quils puissent adapter leurs économies aux effets inéluctables et déjà présents de ce changement climatique. En effet, ce sont les populations les plus pauvres qui sont les plus directement dépendantes de lexploitation des ressources naturelles et donc les plus exposées aux évolutions que le changement climatique induit sur ces ressources. Ainsi, à travers son « cadre dintervention transversal climat », lagence française de développement vise à ce que, chaque année, 50% de ses financements dans les pays tiers comportent des co-bénéfices « climat » dans lensemble des secteurs pertinents, y compris lénergie. Enfin, la préparation de la conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques en 2015 sera une priorité pour la France.

(33) 1.3. Priorités sectorielles

(34) La France définit dix secteurs prioritaires dintervention, prenant en considération, dans une perspective de durabilité et de développement mutuellement bénéfique, dune part, les besoins des pays partenaires et, dautre part, les objectifs de sa politique de développement.

(35)  Santé et protection sociale

(36) La France consacre une part significative de son effort dans le domaine du développement et de la solidarité internationale à lamélioration des conditions de santé et de protection sociale dans les pays en développement. Plusieurs facteurs justifient cet investissement: laccélération de la mondialisation a renforcé les risques de diffusion des grandes pandémies ; la résilience des sociétés aux chocs sanitaires est une condition de leur capacité à se développer ; cest un secteur dans lequel la France dispose de compétences reconnues. Cette coopération doit cependant sadapter à la double transition démographique (vieillissement) et épidémiologique (progression des maladies non transmissibles) qui affecte les pays en développement. Par ailleurs, certaines maladies tropicales touchant les populations des pays les plus pauvres sont négligées dans leffort de R&D de lindustrie pharmaceutique du fait de labsence de marchés solvables. La santé, comme bien public mondial, appelle dès lors une mobilisation globale et coordonnée de lensemble des acteurs du développement international.

(37) Par ailleurs, laccès de tous à la protection sociale commence par le soutien au développement de socles nationaux de protection sociale (cf. à cet égard, la recommandation 202 de lOIT concernant les socles nationaux de protection sociale de lOIT adoptée en 2012). Sa promotion contribuera à concrétiser le caractère universel de la couverture sociale (santé, vieillesse, invalidité, prestations familiales…).

(38) La France réitère son engagement à combattre les trois grandes pandémies, notamment grâce au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, à lutter contre les maladies négligées, à améliorer la santé des mères et des enfants et à promouvoir la couverture sanitaire universelle.

(39) Dans les domaines du renforcement des systèmes de santé et de protection sociale, son action se concentrera sur les trois grands enjeux suivants : (i) lamélioration de la santé maternelle et infantile et des politiques de population dans les pays prioritaires dAfrique subsaharienne ; (ii) ladaptation des systèmes de santé et de protection sociale à laccroissement des maladies chroniques et des problèmes de santé découlant de lélévation des niveaux de vie et du vieillissement ; et (iii) le renforcement de la surveillance épidémiologique et de la capacité des pays à agir sur les déterminants environnementaux de la santé.

(40)  Agriculture et sécurité alimentaire et nutritionnelle

(41) La France promeut une agriculture familiale, productrice de richesses et demplois et respectueuse des écosystèmes. Elle soutient des initiatives permettant à lagriculture familiale de jouer pleinement son rôle : adoption de politiques agricoles cohérentes, renforcement de lintégration régionale, structuration des marchés agricoles, développement de filières, appui aux organisations paysannes, recherche de laccès équitable à leau, sécurisation du foncier et la lutte contre la dégradation des terres, accès aux financements. En matière de pêche, elle agit pour renforcer laide à la protection des milieux et ressources marines et à la gestion durable des pêcheries des pays en développement. Elle cherche à développer une évaluation européenne systématique et publique de la mise en œuvre et des effets des volets sociaux et environnementaux des accords de pêche.

(42) Laide bilatérale a pour finalité daméliorer durablement la sécurité alimentaire des ménages ruraux et urbains, principalement en Afrique subsaharienne, par un soutien aux exploitations agricoles familiales, aux filières et aux politiques agricoles, alimentaires et nutritionnelles, en intégrant les enjeux de développement durable. À ce titre, les interventions contribueront : (i) à lamélioration de la gouvernance sectorielle de la sécurité alimentaire, tant en ce qui concerne les politiques agricoles, rurales que nutritionnelles ; (ii) au développement économique et social des territoires ruraux et à la conservation de leur capital naturel ; (iii) à une croissance soutenue, riche en emplois, durable et inclusive des filières agricoles.

(43)  Éducation et formation

(44) Une des caractéristiques des pays bénéficiaires de la politique de développement est la jeunesse de leur population. Encore plus pour ces pays, les jeunes représentent lavenir et doivent pouvoir bénéficier dinvestissements forts à tous les niveaux pour permettre leur inclusion sociale, économique et politique. Cest pourquoi la France fait de léducation et de la formation une des priorités de sa politique de développement et de solidarité internationale.

(45) Léducation est au cœur des processus de développement. Une éducation et une formation de qualité sont des facteurs puissants de transformation sociale et contribue à la réduction des inégalités sociales et territoriales, à un développement économique durable et à la promotion de la démocratie et de lÉtat de droit.

(46) La politique française daide au développement et de solidarité internationale doit aider à la mise en œuvre de politiques déducation et de formation efficaces, à même de garantir lacquisition des connaissances et la maîtrise des compétences nécessaires au développement autonome des populations et à leur pleine insertion économique, sociale et citoyenne, dans la société. La France contribue également à ces objectifs à travers sa politique daccueil et de formation détudiants étrangers en France. La politique de promotion et de soutien de la langue française est également un vecteur de la politique de développement.

(47)  Secteur privé, secteur financier et promotion de la responsabilité sociale et environnementale

(48) Le secteur privé contribue à la création de richesses, demplois, de revenus, de services et de biens. La politique de développement et de solidarité internationale encourage laction des entreprises, en particulier les PME-PMI et les entreprises de taille intermédiaire. Le développement des PME, laccroissement des flux dinvestissement et le renforcement des cadres règlementaires nécessaires tant pour encourager que pour encadrer le développement de lentreprenariat privé, représentent autant denjeux majeurs. Quil sagisse du financement dinfrastructures durables, du développement des échanges, du renforcement et de la transparence du secteur financier, des secteurs privés sociaux, de la prise en compte des externalités négatives globales et notamment environnementales, lencadrement réglementaire de lactivité des entreprises est essentiel tout au long de la chaîne pour parvenir une croissance riche en emplois, inclusive et durable.

(49) La responsabilité sociale et environnementale (RSE) est une dimension transversale de laction du gouvernement et doit être pleinement intégrée dans la politique de développement. Le gouvernement a donc décidé de lancer une concertation pour une meilleure responsabilisation des entreprises multinationales et des donneurs dordre vis-à-vis de leurs filiales et de leurs fournisseurs situés dans les pays en développement. Il mandate la plateforme nationale RSE pour nourrir cette concertation. La France sefforce également de promouvoir cette démarche auprès de lensemble des partenaires du développement, dans les enceintes internationales ou européennes. Elle soutient le renforcement des exigences sociales et environnementales dans les processus de passation des marchés publics, dans le cadre des réformes en cours au sein des institutions financières multilatérales.

(50) La France soutient lessor et la promotion des entreprises de léconomie sociale et solidaire (ESS), acteurs devenus incontournables de la politique de développement. Les coopératives, mutuelles, associations, fondations et entreprises sociales, qui sont les principaux acteurs de lESS, placent lindividu au cœur du développement et apportent, le plus souvent, des réponses au plus près des besoins locaux, appuyant lémergence dune solidarité citoyenne.

(51)  Développement des territoires

(52) Le développement urbain et le développement rural sont décisifs pour lavenir de la planète. Ils ne peuvent être traités indépendamment lun de lautre compte tenu de leur interconnexion croissante. Particulièrement engagée en faveur du développement des territoires, la France sest, notamment, vue confiée par ONU Habitat un rôle de chef de file pour la mise en œuvre des « lignes directrices internationales sur la décentralisation et laccès aux services de base » (eau, assainissement, traitement des déchets, énergie, transports, communications, école primaire, santé et sécurité publique) adoptées par le Conseil dAdministration dONU Habitat en 2007 et en 2009. Elle est aussi chef de file européen pour lélaboration de lignes directrices internationales sur la planification urbaine et territoriale.

(53) Les villes sont aujourdhui au cœur des enjeux du réchauffement climatique et de la surexploitation des ressources naturelles. Mais des solutions dordre institutionnel et technique peuvent aujourdhui être apportées afin de faire face au défi environnemental. Lapproche française du développement urbain durable privilégie ainsi trois grands objectifs : (i) participer au renforcement des capacités des collectivités locales ; (ii) améliorer les conditions de vie et la productivité urbaine ; et (iii) contribuer à un aménagement des territoires urbains qui préserve lenvironnement et les autres biens publics mondiaux.

(54) En écho à la stratégie dans le domaine de la sécurité alimentaire, lapproche de développement rural favorisera les trois axes stratégiques suivants : (i) accompagner des politiques agricoles nationales et régionales concertées ; (ii) investir pour une agriculture, moteur de croissance inclusive et durable ; (iii) soutenir lintégration des territoires ruraux dans les échanges économiques nationaux, régionaux et internationaux.

(55)  Environnement et énergie

(56) Une complète prise en compte en compte des questions environnementales dans la politique de développement est une condition nécessaire à la pérennisation des projets de lutte contre la pauvreté. La France contribue activement aux négociations internationales dans le cadre de diverses Conventions des Nations unies telles que celles sur les changements climatiques (CCNUCC), la diversité biologique (CBD), la lutte contre la désertification (CNULCD) ainsi quau sein des différents accords multilatéraux sur lenvironnement. Elle concourt à leur mise en œuvre à travers, notamment, sa participation au Fonds pour lenvironnement mondial (FEM) et son outil de coopération bilatérale en matière denvironnement, le Fonds français pour lenvironnement mondial (FFEM).

(57) La politique de développement et de solidarité internationale de la France dans le secteur de lénergie sinscrit dans le cadre de stratégies globales de lutte contre la pauvreté, de promotion de la croissance verte et de protection des biens publics mondiaux. Elle est étroitement liée à notre action dans le domaine de la lutte contre le changement climatique et sarticule aujourdhui autour de trois grands objectifs : améliorer laccès à des services énergétiques modernes ; développer les énergies renouvelables ; améliorer lefficacité énergétique, conformément aux objectifs de lInitiative « Énergie durable pour tous » (SE4All) du Secrétaire général des Nations unies.

(58) Trois axes prioritaires et un appui transversal aux politiques énergétiques durables et aux acteurs du secteur ont été définis : (i) prioriser les énergies renouvelables et lefficacité énergétique ; (ii) réduire la fracture énergétique et développer laccès en zones rurales et suburbaines ; (iii) sécuriser et renforcer les systèmes énergétiques ; (iv) renforcer les politiques énergétiques durables et les capacités des acteurs.

(59)  Eau et assainissement

(60) Laccès à leau et à lassainissement soulève des défis dordre sanitaire et environnemental mais aussi en matière de réduction de la pauvreté ou dégalité entre les femmes et les hommes. LObjectif du millénaire pour le développement (OMD) visant à réduire de moitié le pourcentage de la population qui na pas accès de façon durable à leau potable devrait être atteint dici à 2015 mais environ 800 millions de personnes ne bénéficient toujours pas dun accès à leau potable satisfaisant. Et la situation est encore plus préoccupante pour lassainissement où cette composante de lOMD ne sera certainement pas atteinte. De plus, les pressions quantitatives et qualitatives sur la ressource en eau augmentent avec la croissance démographique, lévolution des régimes alimentaires et la croissance urbaine. Les changements climatiques devraient renforcer ces tensions en entrainant une répartition encore plus inégale de la ressource. Dans 15 ans, un tiers de la population mondiale pourrait vivre dans des régions en situation de stress hydrique.

(61) Dans le domaine de leau et lassainissement, trois priorités sont retenues : (i) appuyer la définition de cadres sectoriels nationaux clairs et efficaces ; (ii) gérer la ressource en eau de manière durable ; (iii) soutenir des services deau et dassainissement performants et durables.

(62)  Gouvernance et lutte contre la corruption

(63) Les mouvements démocratiques au sud de la Méditerranée et les évolutions politiques en Afrique ont illustré récemment linterdépendance entre gouvernance et développement. La France a mis laccent sur ce lien, lors de sa présidence du G8 en 2011, en promouvant un pilier relatif à la gouvernance dans le Partenariat de Deauville et en mentionnant les droits de lHomme et la gouvernance démocratique dans la déclaration conjointe du G8 et de lAfrique.

(64) Pour avancer dans ce domaine, il est indispensable de renforcer les capacités administratives des partenaires et daccorder lattention nécessaire à laccroissement de la qualité des ressources humaines des administrations nationales. Cest ainsi quil sera possible daccompagner le développement des infrastructures et des cadres législatifs et réglementaires, ainsi que leur mise en œuvre, et de favoriser la présence des investisseurs.

(65) Sagissant de la gouvernance financière, deux engagements ont été pris dans le cadre du G8 et du G20 :

(66)  la promotion de la transparence dans les industries extractives, illustrée notamment par ladhésion de la France à lITIE ;

(67)  lappui à la mobilisation des ressources domestiques pour le financement du développement, concrétisé par la poursuite de lappui de la France au renforcement des capacités des administrations fiscales, grâce en particulier à linitiative de lOCDE « inspecteurs des impôts sans frontières » pour lutter contre la fraude et lévasion fiscale internationale dans les pays en développement.

(68) La lutte contre la corruption est également un élément essentiel à la mise en place dÉtats légitimes et efficaces pour assurer un développement durable. La France est signataire, dans ce domaine, de plusieurs conventions :

(69)  convention de lOCDE sur la lutte contre la corruption des agents publics étrangers dans les transactions commerciales ;

(70)  convention des Nations unies contre la corruption ;

(71)  conventions civile et pénale du Conseil de lEurope sur la corruption (GRECO) ;

(72)  convention entre États membres de lUnion européenne contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de lUnion européenne.

(73)  Mobilité, migration et développement

(74) La politique de développement et la politique migratoire doivent être en cohérence. La France reconnaît le rôle des migrations dans le développement des pays partenaires, les migrants étant des acteurs à part entière du développement en y contribuant par leurs apports financiers, techniques et culturels.

(75) Larticulation entre politique migratoire et politique de développement sinscrit dans lapproche globale des migrations adoptée par le Conseil européen, en 2005, et mise en œuvre depuis lors par lUnion européenne, concernant, notamment, limmigration légale, la lutte contre limmigration irrégulière et la promotion de la contribution des migrants au développement de leur pays dorigine.

(76) Sur ce dernier volet, la France appuie le renforcement du potentiel de solidarité et dinvestissement des migrants ainsi que laccroissement des capacités des pays partenaires à intégrer la migration dans leurs stratégies de développement. Cette approche a vocation à sappliquer à tous les pays concernés.

(77)  Commerce et intégration régionale

(78) Linsertion progressive des pays en développement dans le commerce mondial constitue pour la France une priorité. Dans cette perspective, elle promeut la conclusion daccords commerciaux bilatéraux visant une meilleure insertion dans le commerce régional et international, des politiques daide au commerce et de facilitation des échanges, un soutien aux efforts de lUE en faveur du multilatéralisme à travers lOMC, une meilleure prise en compte des spécificités des pays les moins avancés (PMA) et des efforts attendus de la part des grandes économies émergentes dans le cadre du cycle de Doha. Compte tenu de limportance dune différenciation entre pays en développement, la France œuvre au renforcement du système de préférences généralisées en ciblant les pays qui en ont le plus besoin.

(79) En la matière, la France a pris plusieurs engagements internationaux :

(80)  Au G20 de Séoul, il a été décidé de :

(81)  progresser vers laccès au marché sans droits de douane ni quota pour les pays les moins avancés (PMA);

(82)  maintenir, au-delà de 2011, les niveaux daide au commerce qui tiennent compte de la moyenne des trois dernières années (2006 à 2008) ;

(83)  respecter les engagements financiers dans le domaine de laide au commerce. Accords de Partenariat Économique (APE) : au-delà de laccès au marché accordé aux pays en développement dans le cadre du système des préférences généralisées de lUE, la France reste attachée à faire des APE un instrument au service du développement. Elle favorise une meilleure prise en compte des préoccupations de nos partenaires africains dans la négociation des APE régionaux afin que ces accords portent leurs fruits en termes dintégration régionale et de développement.

(84) 1.4. Priorités géographiques : des partenariats différenciés

(85) Le monde en développement connait des disparités croissantes avec lémergence de nouvelles puissances économiques et politiques, le dynamisme dun grand nombre de pays dAfrique, dAsie et dAmérique latine et la persistance dÉtats en situation de crise ou de vulnérabilité. Afin de faire le meilleur usage des ressources quelle consacre au développement et à la solidarité internationale, la France doit tirer les conséquences de cette hétérogénéité en adaptant ses objectifs et ses modalités dinterventions aux enjeux propres à chaque catégorie de pays. Cest pour répondre à cet objectif et tenir compte des priorités liées à sa géographie, son histoire, sa culture et sa langue, que la France met en œuvre des  partenariats différenciés avec quatre catégories de pays. Dans ce cadre, la France définira, conjointement avec chacun de ses partenaires, trois secteurs de concentration prioritaire parmi les dix évoqués ci-dessus.

(86) Les pays les plus pauvres

(87) La France concentre son effort de solidarité en subventions sur un nombre limité de pays pauvres prioritaires dont la liste a été établie par le CICID, le 31 juillet 2013([1]). Dans ces pays, la France mobilise ses instruments bilatéraux et multilatéraux au bénéfice de lensemble des objectifs de sa politique de développement, notamment : les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), le développement économique, la gouvernance démocratique et lÉtat de droit et la préservation du capital environnemental. Pour atteindre ces objectifs, le Gouvernement décide de concentrer dans les pays pauvres prioritaires au moins la moitié des subventions de lÉtat et les deux tiers de celles mises en œuvre par lAgence Française de Développement (AFD).

(88) LAfrique subsaharienne et les pays du voisinage Sud et Est de la Méditerranée

(89) Le Gouvernement décide de consacrer au moins 85 % de leffort financier de lÉtat en faveur du développement en Afrique subsaharienne et dans les pays voisins du Sud et de lEst de la Méditerranée.

(90)  Les pays dAfrique subsaharienne demeurent la priorité de la France. Cette région reste la dernière région du monde où la question du sous-développement se pose à léchelle du continent. Elle rassemble la plupart des pays les plus mal classés au regard de lindicateur du développement humain. Dans le même temps, léconomie de la plupart des pays du continent a fortement progressé. LAfrique subsaharienne enregistre ainsi sur les dix dernières années un taux de croissance économique moyen largement supérieur à celui des pays de lOCDE. Lanalyse de moyen-long terme, au-delà des phénomènes conjoncturels, semble confirmer quun processus vertueux de croissance est enclenché dans un grand nombre de pays pauvres : accélération de la croissance économique, supérieure à la croissance démographique et autorisant une augmentation du revenu par habitant ; amélioration sensible de la stabilité macro-économique (baisse de lendettement extérieur, décélération de linflation, réduction des déficits budgétaires et externes) ; forte réduction du taux de conflictualité et enracinement des processus démocratiques. La France interviendra dans tous les secteurs opportuns et mobilisera toute la gamme des instruments dont elle dispose  dons, aides budgétaires, prêts bonifiés ou non, souverains et non souverains, prises de participations, garanties et autres financements innovants pour répondre de manière adaptée aux besoins de ces pays.

(91)  Les pays du voisinage Sud et Est de la Méditerranée : cette région représente un enjeu essentiel, tant pour lEurope que pour la France. Elle est confrontée à des défis sociaux et économiques importants : les Nations unies prévoient, dici 20 ans, 60 millions de jeunes supplémentaires à employer et donc à former, 75 millions de nouveaux urbains à accueillir, dans un environnement fragile et aux portes de lEurope ; les bouleversements politiques en cours appellent un accompagnement et un effort accru en faveur du renforcement de la gouvernance ; la préservation de lenvironnement, et en particulier de la mer Méditerranée, doit être assurée. La création dun espace de stabilité politique et de prospérité économique, ainsi que la gestion concertée, entre les deux rives de la Méditerrané, de tous ces défis sont donc nécessaires. La politique de développement de la France visera à renforcer les tissus productifs locaux et le capital humain, à promouvoir la création demplois et laménagement du territoire, dans une perspective de durabilité, de développement mutuellement bénéfique et de co-localisation. La plupart de ces partenaires étant des pays à revenus intermédiaires, les concours financiers de lÉtat seront prioritairement des prêts, complétés par des actions en matière de formation comme de coopération culturelle, scientifique et technique. Conformément à la volonté marquée par le Président de la République de développer une « Méditerranée des projets », les interventions sinscriront dans une logique euro-méditerranéenne, notamment en faveur de lintégration régionale, et mobiliseront toutes les initiatives pertinentes : politique de voisinage de lUnion européenne, Union pour la Méditerranée, dialogue 5+5 et partenariat de Deauville.

(92) Les pays en crise et en sortie de crise ou en situation de fragilité

(93) Sils ne font pas partie des pays pauvres prioritaires, ces pays bénéficient dune attention particulière. La prévention sera privilégiée à chaque fois que possible et, en cas de crise ouverte, une attention particulière sera apportée à la coordination de notre action : entre civils et militaires, entre acteurs publics et non gouvernementaux, entre la phase humanitaire et celle de retour au développement.

(94) Les interventions de la France dans ce groupe de pays répondront prioritairement à leurs besoins en matière de développement humain, économique et dapprofondissement de lÉtat de droit et sarticuleront avec le rôle majeur de lUnion européenne dans la réponse aux crises et dans le soutien aux efforts des pays et des organisations régionales africains pour maintenir la paix sur leur continent. Des instruments souples, principalement des subventions, seront utilisés.

(95) Dans le reste du monde, notamment lAsie, lAmérique latine et les Caraïbes, qui comptent majoritairement des pays à revenus intermédiaires à croissance rapide ou émergents, il sagira daller au-delà du concept de laide qui nest plus adapté à leur situation : la France aura pour objectif de rechercher des solutions partagées à des défis communs et dassocier ces pays à la coopération internationale en appui aux pays les plus pauvres. La France y interviendra pour promouvoir une « croissance verte et solidaire » en y favorisant, notamment, des partenariats économiques.

(96) Le partenariat avec les « très grands émergents », qui mobilisera les acteurs français dans leur diversité, est essentiel pour renforcer le dialogue et préparer ensemble les négociations internationales sur les enjeux partagés. Il se fera sans coût financier pour lÉtat (hors expertise technique).

(97) Les actions en matière de gouvernance démocratique, droits de lHomme, égalité entre les femmes et les hommes et assistance technique seront, quant à elles, possibles dans lensemble des pays dintervention.

(98) Dans un monde en mouvement, où la situation de chaque pays évolue rapidement, le secrétariat du CICID réexaminera chaque année les partenariats différenciés.

(99) 1.5. Pilotage de la politique de développement et de solidarité internationale : le processus de révision des priorités sectorielles et géographiques

(100) Les orientations de la politique de développement et de solidarité internationale sont définies par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) qui rassemble, sous la présidence du Premier ministre, lensemble des ministres concernés par la politique de développement et de solidarité internationale. Il sest réuni pour la dernière fois le 31 juillet 2013, après quatre ans dinterruption.

(101) Laffectation des moyens de laide est encadrée par les partenariats différenciés. Au sein de chaque catégorie de partenariat, la répartition des ressources et le choix des modalités dintervention selon les pays sont effectués en prenant en compte les besoins mais également les capacités des pays. Le CICID a, par ailleurs, décidé de lancer une étude sur la faisabilité dun dispositif dallocation de laide qui permette de mieux tenir compte des efforts des pays partenaires en matière de performance économique et de gouvernance.

(102) Tous les deux ans, le gouvernement transmettra aux commissions permanentes compétentes de lAssemblée nationale et du Sénat une synthèse des évaluations réalisées au cours des deux années précédentes ainsi quun rapport dressant un état des lieux détaillé de la politique de développement et de solidarité internationale mise en œuvre par la France. Ce rapport évaluera également la cohérence des politiques pour le développement. Il sera transmis au Conseil national du développement et de la solidarité internationale.

(103) 2. Cohérence, efficacité et transparence de la politique de développement

(104) 2.1. La cohérence des politiques sectorielles de la France sinscrit dans un cadre européen

(105) Le principe de cohérence doit sous-tendre la mise en œuvre de la politique de développement. Lensemble des politiques publiques pouvant affecter les pays partenaires, leur élaboration et leur mise en œuvre tiennent compte de la politique de développement.

(106) Au-delà de la politique de développement, de nombreuses autres politiques publiques ont un impact important sur les pays en développement. Lefficacité de la politique française de développement et de solidarité internationale dépend donc fortement de la cohérence de lensemble de ces politiques nationales. Ainsi, la recherche active de synergies, quelle quen soit la complexité, et la résolution des conflits dobjectifs sont promues.

(107) La France veille également à cette cohérence des politiques publiques dans lélaboration des politiques européennes auxquelles elle contribue.

(108) Le « consensus européen sur le développement » identifie douze politiques sectorielles dont les États membres sengagent à renforcer la cohérence avec les objectifs de développement et qui couvrent de facto les principaux enjeux de cohérence([2]). En novembre 2009, le Conseil de lUnion européenne (UE) a choisi de se concentrer en priorité sur cinq de ces douze politiques : commerce et finance, changement climatique, sécurité alimentaire, migrations et sécurité. LUnion européenne a également mis en œuvre un nouvel outil : le Programme de travail CPD 2010-2013. Adopté en 2010 il présente les initiatives stratégiques permettant daméliorer la cohérence des politiques pour le développement.

(109) La France a défini, en 2010, six priorités en matière de cohérence des politiques qui sinscrivent dans le cadre du « consensus européen sur le développement » : commerce, immigration, investissements étrangers, sécurité alimentaire, protection sociale, changement climatique, quelle réaffirme en 2013. Cette recherche de cohérence porte aussi sur les autres politiques ayant un impact sur le développement : recherche et enseignement supérieur, éducation, santé, environnement, sécurité et outre-mer.

(110) À titre dexemple, dans le domaine du commerce, la France œuvre à la cohérence entre politique commerciale et de développement à travers le renforcement du système de préférences généralisées (SPG) en faveur des pays qui en ont le plus besoin. La France promeut également la cohérence entre politique commerciale et politique de développement dans le cadre des accords bilatéraux européens que la Commission européenne négocie avec les pays tiers (accords de partenariat économique notamment).

(111) Concernant la sécurité alimentaire, la France accorde la priorité à lamélioration des capacités de production et du fonctionnement des marchés de matières premières agricoles. Elle sefforce daccroître la capacité des pays partenaires à satisfaire les normes sanitaires qui conditionnent laccès aux marchés européens et internationaux de produits agricoles. La France choisit dappuyer les politiques agricoles au nord comme au sud afin de fournir un cadre favorable permettant à lagriculture de jouer pleinement ses fonctions économique, sociale et environnementale.

(112) Dans le domaine des politiques sociales, la France continue à promouvoir les normes fondamentales du travail ainsi que lemploi décent et les socles de protection sociale. Elle sefforce également dencourager et appuyer la mobilisation des entreprises françaises sur le thème de leur responsabilité sociale et environnementale.

(113) En matière denvironnement et de changement climatique, la France sattache à ce que les pays industrialisés, en particulier lUnion européenne, respectent leurs engagements en termes de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Elle veille à ce que les politiques de développement intègrent pleinement le changement climatique, en favorisant les projets qui contribuent, au-delà de leur objectif principal, à la lutte contre le changement climatique tant en ce qui concerne latténuation que ladaptation (notion de « co-bénéfices »).

(114) La politique de développement et de solidarité internationale inclut également le renforcement des capacités dans le domaine de la sécurité, par exemple la lutte contre les trafics ou la réforme du secteur de sécurité, tant un environnement instable ne permet pas à un État dexercer ses missions. Il convient donc dappuyer les pays partenaires dans les domaines concourant à létablissement de conditions de sécurité favorables au plein exercice de lÉtat de droit. La France continuera donc à contribuer au maintien de la paix et à la prévention des conflits, comme elle le fait à titre bilatéral au Mali, mais aussi par les canaux européens et multilatéraux, Elle sattache à favoriser la prise en compte des enjeux liés aux États fragiles et aux méthodes spécifiques qui sy rattachent dans les enceintes internationales.

(115) Les femmes sont des actrices essentielles du développement. Pour mettre les droits des femmes au cœur de la politique de développement, le Gouvernement a adopté lors du Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) de juillet 2013 une nouvelle stratégie « genre et développement » pour la période 2013-2017. Cette stratégie prévoit une prise en compte systématique dun objectif transversal « genre » dans les procédures délaboration, de suivi et dévaluation des projets. Cette approche intégrée passera dans les partenariats différenciés, en particulier dans les pays pauvres, par une révision de tous les instruments du développement ainsi que par le renforcement des capacités des agents en charge de cette politique et le soutien à la recherche. La nouvelle stratégie, mise en œuvre par lensemble des ministères traitant de politique de développement et tous les opérateurs, sera évaluée annuellement par le Haut Conseil à lÉgalité entre les femmes et les hommes (HCE).

(116) Mécanismes de coordination des politiques

(117) Le CICID, qui rassemble sous la présidence du Premier ministre tous les ministères concernés par la politique de développement, est chargé de veiller à sa cohérence.

(118) Le Parlement y contribue également, grâce au rapport que le Gouvernement lui transmettra tous les deux ans. Il reviendra aux deux chambres du Parlement de se doter, si elles le souhaitent, de mécanismes leur permettant au mieux dexercer leurs fonctions dévaluation et de contrôle de cet aspect essentiel de notre politique de développement.

(119) Enfin, le Conseil National du Développement et de la Solidarité Internationale (CNDSI) a vocation à devenir un espace de dialogue  entre les représentants dONG, du secteur privé, des établissements denseignement supérieur et de recherche, des collectivités locales et des parlementaires sur les objectifs et les grands enjeux relatifs à la cohérence des politiques publiques en matière de développement. En lien avec les différentes instances de concertation existantes, le CNDSI examinera les enjeux et les orientations de la politique française de développement et les questions relatives à sa mise en œuvre, sagissant de la cohérence, de la transparence et de la redevabilité.

(120) 2.2. Efficacité de la politique de développement et de solidarité internationale

(121) Depuis la conférence de Monterrey (2002), la France est activement engagée dans le renforcement de lefficacité de laide. Elle a largement contribué à la définition de principes en la matière lors des réunions du forum de haut niveau sur lefficacité de laide de Rome (2003), Paris (2005) et Accra (2008) où elle a soutenu des engagements en faveur de la division du travail, du renforcement des politiques publiques et de la prise en compte de la diversité des situations des pays partenaires, notamment pour les États fragiles.

(122) Dans le cadre de la préparation du IVe forum de Busan (2011), elle a plaidé en faveur de louverture de ce processus aux nouveaux donateurs, du rôle de laide comme catalyseur du développement, de la prise en compte de son impact et de la réduction de la dispersion de laide.

(123) La politique française de développement et de solidarité internationale met ainsi en application les principes suivants :

(124)  lalignement sur les priorités et procédures des pays partenaires, afin de maximiser lappropriation des interventions par les bénéficiaires et la subsidiarité par rapport à la mobilisation des ressources et capacités propres des partenaires ;

(125)  la coordination et la division du travail entre bailleurs de fonds, pouvant aller, au niveau européen, jusquà la programmation conjointe et la délégation réciproque du suivi de la mise en œuvre dactions de développement ;

(126)  une gestion axée sur limpact sur le développement des pays partenaires, reposant, notamment, sur lutilisation dindicateurs de résultats attendus, puis obtenus ;

(127)  un effort accru sur la capacité à rendre compte, à lensemble des parties intéressées, des objectifs et des résultats des actions financées.

(128) Système dévaluation de la politique de développement et de solidarité internationale

(129) Mesurer la qualité des interventions et apprécier leurs résultats est indispensable. Il sagit dune exigence démocratique qui vaut aussi bien en France, à légard du Parlement et de la société civile, que vis-à-vis des populations et des autorités des pays bénéficiaires. Cette analyse des résultats est également nécessaire pour améliorer la pertinence et lefficacité des opérations, responsabiliser les acteurs chargés de leur mise en œuvre et permettre dapprendre des expériences passées.

(130) La politique et le dispositif dévaluation de la France se renforcent progressivement. Les services dévaluation de laide placés respectivement auprès des trois principaux acteurs publics du développement (ministère des Affaires étrangères/direction générale de la mondialisation, ministère de lÉconomie et des Finances/DG Trésor et AFD) travaillent en étroite concertation et coordination et établissent en particulier une programmation pluriannuelle conjointe de ces évaluations. Ils publient, tous les deux ans, un rapport conjoint public présentant une synthèse consolidée des évaluations réalisées. Ce rapport est transmis au Parlement et au Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI).

(131) En outre, en conformité avec les engagements de la Déclaration de Paris (2005), la France a renforcé depuis 2008 les évaluations conjointes avec ses partenaires européens et internationaux.

(132) Une matrice dune dizaine dindicateurs de résultats ex post de laide publique bilatérale et multilatérale (annexée au présent rapport) devra permettre de mieux suivre les résultats obtenus dans chacun des secteurs prioritaires de laide française. Les résultats des principales organisations multilatérales, auxquelles la France contribue, font également lobjet dun rapport régulier au regard de leur impact sur les secteurs jugés prioritaires par la France. Ces indicateurs de résultats sont mis à jour annuellement et publiés tous les deux ans dans le rapport bisannuel transmis par le Gouvernement au Parlement.

(133) 2.3. Transparence et redevabilité de la politique de développement et de solidarité internationale

(134) La transparence de laide est aujourdhui une priorité de la politique française de développement. Elle répond à un triple objectif :

(135)  une aide transparente permet  aux contribuables, aux parlementaires et plus largement à lopinion publique dapprécier la bonne utilisation de largent public ;

(136)  elle permet aux pays bénéficiaires de planifier lapport de ressources extérieures et de construire des budgets plus fiables et cohérents et est une condition essentielle de lappropriation de laide par ces pays ;

(137)  elle permet davoir une vision exhaustive des projets dans un pays et de favoriser la coordination et la division du travail entre bailleurs.

(138) La France a accompli des efforts importants en termes de transparence ces dernières années :

(139)  au niveau international, la France participe activement à lensemble des exercices de redevabilité mutuelle : elle est notamment pleinement engagée dans les rapports de redevabilité du G8 et rappelle systématiquement lintérêt des rapports du NEPAD sur laction des pays africains qui en constitue lindispensable contrepartie. Lors de sa présidence du G8, la France a été la première à promouvoir un rapport de redevabilité conjoint entre les membres du G8 et les partenaires africains.

(140)  par ailleurs, la France a accru et amélioré ses exercices de redevabilité. En 2012 a été publié le premier rapport bisannuel au Parlement sur la mise en œuvre de la « stratégie française de coopération au développement » ; en outre, la programmation budgétaire pluriannuelle donne une plus grande prévisibilité de lévolution des crédits dAPD à moyen terme.

(141) En complément du rapport bisannuel, les documents budgétaires, et en particulier le document de politique transversale, seront améliorés afin de répondre aux attentes du Parlement.

(142) En matière de transparence des données, le partenariat de Busan pour une coopération efficace au service du développement prévoit la mise en œuvre dun standard commun pour la publication dinformations détaillées et prévisionnelles sur les ressources apportées par la politique de développement. La France plaide à cet égard pour la convergence des normes du comité de laide au développement de lOCDE et de linitiative internationale pour la transparence de laide (IITA) et sinvestit dans lélaboration du standard commun qui en résultera. En outre, la politique « dopen data » de la France donne lieu à la mise en ligne dinformations statistiques sur laide au développement, renforcée par la création en juin 2013 dun site pilote dédié à la transparence de laide au Mali. La France sefforcera de publier les informations requises par le standard IITA dans les pays pauvres prioritaires dès 2014.

(143) En matière de transparence dans le domaine des industries extractives, le Gouvernement a pris la décision en 2013 dengager le processus formel dadhésion à linitiative sur la transparence dans les industries extractives (ITIE), conformément à lannonce du Président de la République lors du sommet du G8 de Lough Erne. Lobjectif est dadhérer à loccasion de la prochaine conférence internationale de lITIE et dengager la transposition par la France des dispositions des directives comptables concernant certaines obligations pour les entreprises extractives européennes en matière de publication, pays par pays et projets par projets, des montants tirés de lexploitation des ressources extractives et versés à des États. La France soutient également activement les initiatives des banques multilatérales de développement en matière daccompagnement juridique des pays africains dans la négociation des contrats.

(144) Léducation au développement

(145) Léducation au développement constitue un volet important pour la France en termes de transparence et de cohérence des politiques. Elle vise à faire progresser le niveau de connaissance et dappropriation par les citoyens des actions conduites, mais aussi à promouvoir la solidarité. En effet, la mobilisation de lopinion publique est nécessaire pour produire de nouvelles dynamiques favorables au développement. Pour cela, il est essentiel que les citoyens puissent davantage sinformer sur les enjeux du développement ainsi que sur les choix stratégiques et les résultats de laction publique en faveur du développement. Dans cette perspective, les actions de sensibilisation menées par le gouvernement français sont nombreuses, en particulier auprès de la jeunesse. Ainsi, les établissements scolaires mènent des projets déducation au développement et à la solidarité internationale visant à faire comprendre les grands déséquilibres mondiaux et à encourager la réflexion sur les moyens dy remédier. Léducation au développement et à la solidarité internationale peut seffectuer dès le plus jeune âge et dans toutes les disciplines. Elle sinscrit dans les dispositifs pédagogiques existants avec le concours des collectivités territoriales, dintervenants extérieurs qualifiés et dassociations de solidarité internationale.

(146) 3. Les leviers daction de la politique de développement et de solidarité internationale de la France

(147) Lampleur des enjeux du développement, la multiplicité des objectifs et des partenaires, mais aussi la contrainte qui pèse sur nos ressources, imposent une rigueur particulière dans la définition et lutilisation des outils de la politique de développement et de solidarité internationale.

(148) 3.1. Lintervention de lÉtat

(149) Laide publique au développement nette de la France est majoritairement bilatérale (65 % en 2011).

(150) LAgence Française de Développement (AFD) est le principal canal par lequel transite laide programmable bilatérale inscrite dans plusieurs programmes budgétaires. Elle finance ses actions aussi bien par des subventions (aide-projet, aide budgétaire, contrats de désendettement et de développement) que des prêts concessionnels ou non concessionnels, des prises de participations et des garanties. Dautres instruments bilatéraux ciblés existent, tels que le Fonds français pour lenvironnement mondial dédié au financement de projets innovants dans le domaine environnemental.

(151) La France est engagée dans un important effort de désendettement, essentiellement en faveur des pays les moins avancés, par le biais de linitiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE). Ces traitements de la dette sont négociés au sein du Club de Paris, groupe informel de créanciers publics dont le rôle est de trouver des solutions coordonnées et durables aux difficultés de paiement de États endettées. Ils contribuent à rétablir la soutenabilité de la dette des pays en développement ou à leur permettre de faire face à des crises de liquidité extérieure temporaires.

(152) Le ministère des Affaires étrangères gère en propre les crédits du Fonds de solidarité prioritaire en matière de gouvernance et laide directe aux populations les plus fragiles, notamment laide alimentaire et le fonds durgence humanitaire. Il est responsable des interventions en faveur de la francophonie et de la politique dinfluence de la France, notamment en matière culturelle. Des ministères à compétences sectorielles (Éducation nationale, Intérieur, Agriculture, Écologie, Santé, Travail, etc.) gèrent certains programmes dans le domaine du développement.

(153) La France propose aussi une aide en matière de coopération technique et dexpertise. En effet, les pays en développement, et en particulier nos partenaires émergents, sont fortement demandeurs dune expertise technique de haut niveau. En ce qui concerne lassistance technique, le Gouvernement a créé en 2013 un Fonds dexpertise technique et déchange dexpériences (FEXTE), logé à lAFD et dédié à la promotion des savoir-faire français chez nos partenaires. La France pourra ainsi promouvoir son expertise et son influence.

(154) Lenseignement supérieur et la recherche apportent une contribution éminente à notre dispositif daide au développement. Si la France dispose datouts indéniables dans le domaine de la recherche pour le développement, avec des institutions scientifiques dédiées, telles lIRD et le CIRAD, ou moins spécifiques telles que le CNRS, lINRA ou les universités, loffre française de recherche au service du développement doit toutefois être rendue plus accessible pour les partenaires du sud. Il convient den renforcer la visibilité et la cohérence entre acteurs. Dans cette perspective, le CICID du 31 juillet 2013 a décidé délaborer, avec laide de lensemble des acteurs français de la recherche, une charte sur la recherche au service du développement qui débouchera sur des recommandations opérationnelles sappuyant, notamment, sur le travail de coordination des alliances thématiques.

(155) La contribution française à la politique européenne de développement

(156) La France est le second contributeur au Fonds Européen de Développement (FED) qui reste hors du budget européen. Elle participe, à travers sa contribution au budget communautaire, au financement des autres instruments européens en faveur du développement, notamment linstrument de coopération au développement, linstrument européen pour la démocratie et les droits de lhomme (IEDDH), lInstrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP).

(157) La France recherche, par ailleurs, un effet de levier avec lUnion européenne. Dans le cadre du « programme pour le changement », elle favorise la convergence entre ses priorités géographiques et sectorielles et les orientations de politique européenne de développement et des politiques nationales des autres États membres. Elle soutient la programmation conjointe entre lUnion européenne et les États membres et contribuera aux efforts accrus qui seront encore nécessaires pour synchroniser les cycles des différents bailleurs avec ceux des pays partenaires.

(158) Une aide importante aux institutions multilatérales

(159) Hors Union européenne, laide multilatérale représente près de 20 % de lAPD nette française en 2011. Elle est répartie entre quatre blocs dorganisations internationales de développement :

(160)  Le groupe Banque mondiale dont la part dans laide multilatérale a fluctué durant les dix dernières années (entre 11 % et 19 %). La grande majorité de nos financements directs concernent lAssociation internationale pour le développement (AID).

(161)  La France appuie également laction des Nations unies en faveur du développement sous la forme de contributions à des fonds et programmes (autour de 5 %) dont les financements proviennent exclusivement de contributions volontaires. Un effort important de concentration de ces contributions volontaires a été accompli et sera poursuivi. La France privilégie les thématiques de laide humanitaire, de laide économique et sociale et de la gouvernance puisquelle contribue au PNUD (Programme des Nations unies pour le développement), au HCR (Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés), à lUNICEF (Fonds des Nations unies pour lenfance) et à lUNWRA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient).

(162) En matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle, la France soutient la FAO (Organisation des Nations unies pour lalimentation et lagriculture) et son Comité de la sécurité alimentaire, le FIDA (Fonds international de développement agricole) et le PAM (Programme alimentaire mondial).

(163) La France soutient également, sur une base volontaire (accords de coopération pluriannuels France-BIT associant le ministère chargé du travail et le ministère des Affaires étrangères au Bureau international du travail), les programmes de coopération techniques de lOIT (Organisation internationale du travail), notamment pour lappui à la mise en œuvre du travail décent dans les pays en développement (soutien au respect et à la mise en œuvre des normes internationales du travail ainsi quaux administrations du travail chargées de leur mise en œuvre ; appui au développement de la protection sociale et à la mise en œuvre de socles nationaux de protection sociale ; appui au développement de programmes en faveur de lemploi).

(164)  Les banques régionales et fonds verticaux représentent 31 % de laide multilatérale, hors aide européenne. Cette catégorie comprend les fonds de développement de la Banque asiatique de développement et de la Banque africaine de développement mais aussi les fonds sectoriels correspondants à certaines priorités : Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose, dont la France est le deuxième contributeur, mais aussi Fonds pour lenvironnement mondial, Fonds international de développement agricole ou Protocole de Montréal.

(165) La France conduit une politique dinfluence et de partenariat avec ces instances afin dassurer une réelle complémentarité entre son action bilatérale et son action multilatérale. Elle agit dans son rôle dactionnaire, de financeur et de partenaire dans la mise en œuvre de projets conjoints. Il sagit à la fois de peser sur la définition des priorités et des stratégies des organisations concernées, daccroître la visibilité et limpact de notre aide bilatérale et de toucher des secteurs ou des pays difficilement accessibles dans le cadre dune action isolée. En tant que gouverneur des banques multilatérales de développement, le ministre de léconomie et des finances est particulièrement impliqué dans la mise en œuvre de cette complémentarité.

(166) Afin de renforcer la cohérence de ces politiques, mieux articuler les instruments de son aide bilatérale et multilatérale et contribuer à une plus grande rationalisation du paysage multilatéral, la France élaborera en 2014 une stratégie portant sur les orientations de son aide multilatérale et européenne. Il sagira de formaliser la vision au fondement de lengagement multilatéral de la France en matière de développement : le rôle des organisations internationales partenaires, les attentes à légard de ces dernières comme le retour sur investissement attendu de nos échanges seront présentés par grande famille dinstitutions (Union européenne, banques multilatérales de développement et institutions financières internationales, système des Nations unies et fonds verticaux). Cette stratégie aura aussi pour objet de renforcer leffet de levier que peut constituer laide multilatérale pour laide bilatérale, pour lexpertise française et notre diplomatie économique. Enfin, sur la base dun panorama exhaustif des institutions et fonds multilatéraux auxquels elle contribue financièrement, la stratégie proposera des objectifs et des modalités de maîtrise de la fragmentation de laide.

(167) La France accordera par ailleurs une attention croissante à lévaluation des performances des institutions quelle finance.

(168) La France continuera à sinvestir de manière active dans les enceintes internationales traitant notamment de développement, au premier rang desquelles le G8 et le G20. Ces enceintes à fort effet dentraînement peuvent en effet permettre de réaliser des progrès que lensemble de la communauté internationale peut ensuite reprendre à son compte. Ainsi, au sommet du G8 de Lough Erne (Royaume-Uni) centré sur les « 3T » (Trade, Tax and Transparency), les membres du G8 ont mis laccent sur la création des conditions du développement, tant en termes de gouvernance que de renforcement des ressources propres des pays, notamment dans le domaine fiscal.

(169) 3.2. Les interactions avec les acteurs non étatiques

(170) La France promeut le développement des organisations de la société civile, du Nord comme du Sud

(171) Les organisations de la société civile du Nord, fortes de leur expérience au plus près des sociétés des pays partenaires, disposent dune expertise et dune connaissance particulières des contextes dintervention. Elles jouent un rôle essentiel en matière de renforcement des capacités et daccompagnement des sociétés civiles du Sud en appui à leurs efforts pour se structurer. En particulier, les organisations paysannes du Sud doivent être encouragées pour leur rôle dans la professionnalisation des agriculteurs et dans la participation au débat démocratique.

(172) La France a mis en place un groupe de travail interministériel, le Groupe Interministériel pour la Sécurité Alimentaire (GISA), chargé de proposer des mesures afin de répondre à la dégradation de la situation alimentaire et nutritionnelle des pays pauvres et à ses conséquences politiques, économiques et sociales. Le Comité de la sécurité alimentaire réformé est la plate-forme internationale et intergouvernementale où toutes les parties prenantes œuvrent collectivement et de façon coordonnée à la sécurité alimentaire et à une meilleure nutrition pour tous.

(173) Reconnaissant le rôle important joué par les organisations non gouvernementales, le gouvernement sest engagé à doubler, dici la fin du quinquennat, la part de laide française transitant par les ONG. Depuis 2009, lappui du ministère des Affaires étrangères à laction internationale des ONG françaises a été transféré, à lexception de lappui au volontariat, à lAgence française de Développement. LAFD assure désormais linstruction et le suivi des projets et programmes des ONG françaises en faveur du développement (actions de terrain, programmes pluriannuels, programmes multi-pays, conventions-programmes autour daxes stratégiques, projets inter-associatifs, programmes concertés pluri-acteurs) et ceux des actions déducation au développement, de plaidoyer ou de structuration du milieu associatif, par le biais du soutien aux plates-formes et collectifs dONG.

(174) À ce dispositif, sajoutent des appuis apportés par le ministère des Affaires étrangères aux ONG par lintermédiaire du Centre de Crise (Fonds durgence humanitaire), les procédures daide alimentaire, les appuis à la gouvernance démocratique ou à des projets associatifs (par le Fonds social de Développement). Le dispositif du ministère des Affaires étrangères permet chaque année dappuyer la mobilisation par les acteurs associatifs de près de 2 500 volontaires de solidarité internationale (VSI) dans plus dune centaine de pays sur des périodes de un à deux ans.

(175) Lexpertise et linfluence françaises sont aussi promues par les collectivités territoriales

(176) 4 800 collectivités territoriales françaises mènent des actions de développement à létranger avec plus de 10 000 collectivités locales partenaires, totalisant près de 12 500 projets dans 141 pays. Le ministère des Affaires étrangères appuie aujourdhui cette politique par le biais dappels à projets.

(177) Les collectivités territoriales jouent en effet un rôle spécifique désormais reconnu par la loi  dans le renforcement des capacités techniques et institutionnelles, grâce au partage de connaissances quelles opèrent au profit des collectivités territoriales du Sud. Les collectivités territoriales françaises valorisent ainsi une approche territoriale du développement établie en partenariat avec lensemble des acteurs qui les animent et au cœur des dynamiques locales, diffusant ainsi une expertise française en matière de gestion des territoires.

(178) Plus particulièrement, les collectivités ultramarines, par leur situation géographique et les relations notamment économiques, universitaires et migratoires quelles entretiennent avec leur environnement, ont un rôle spécifique à jouer dans le dispositif national.

(179) Les collectivités territoriales et lÉtat partagent, en termes de politique de développement dans le domaine de la gouvernance locale, les mêmes priorités : appui au processus de décentralisation, renforcement des capacités, approche participative de la gouvernance locale. La reconnaissance du rôle clef des collectivités territoriales dans la gouvernance démocratique constitue ainsi lun des axes forts de la stratégie française de développement. Le CICID du 31 juillet 2013 a appelé les collectivités territoriales à jouer un rôle croissant dans les dynamiques territoriales de développement, dans leur domaine dexpertise, et en tenant compte autant que possible des politiques dappui à la décentralisation conduites par lÉtat français.

(180) Le Rapport sur laction extérieure des collectivités territoriales françaises que M. André Laignel a présenté au ministre des Affaires étrangères en janvier 2013 présente les nouvelles ambitions et approches de laction extérieure des collectivités territoriales françaises. Il montre la nécessité de faciliter et valoriser leur action par un cadre législatif modernisé et des institutions plus efficaces. Cest à la Commission nationale de la coopération décentralisée, créée par la loi de 1992 et qui rassemble à parité des représentants de lÉtat et des collectivités territoriales (CNCD), quil reviendra de débattre de ces nouvelles missions. La CNCD a, en effet, vocation à devenir un organe plus souple, plus dynamique, dans un esprit de renforcement de laction des collectivités et de leur rôle international.

(181) Enfin, lÉtat suit avec attention le renforcement du rôle des réseaux régionaux multi-acteurs (RRMA) dont il reconnait limportance. Neuf dentre eux existent déjà et sont très actifs.

(182) Les entreprises sont des partenaires importants de la politique de développement et de solidarité internationale.

(183) Comme tous les grands bailleurs internationaux, la France sest engagée dans un processus de déliement de son aide dont les bénéfices sont clairement établis en termes dimpact pour les pays en développement : elle a entièrement délié son aide en faveur des pays les plus pauvres (2001) et des pays pauvres très endettés (2008). Le taux de liaison de laide française est aujourdhui extrêmement bas (1 % en 2011 et 7 % en moyenne depuis 2008).

(184) Pour autant, les entreprises françaises sont présentes à travers leurs filiales dans de nombreux pays en développement. Linternationalisation des entreprises françaises contribue au développement économique de la France comme des pays dans lesquels elles sont implantées.

(185) Les entreprises françaises sont en effet porteuses dun savoir-faire qui garantit aux bénéficiaires un niveau élevé de qualité dans la réalisation des projets, y compris en termes dimpact environnemental et social. Dans lesprit des décisions du CICID du 31 juillet 2013 relatives aux partenariats avec les « très grands émergents », qui devront mobiliser les acteurs français sans coût financier pour lÉtat, il sagira de rechercher un bénéfice mutuel pour les pays concernés comme pour nos entreprises.

(186) 4. Le financement du développement

(187) En matière de financement du développement, la France sappuie sur le consensus de Monterrey, adopté par les Nations unies en 2002, qui prend acte de la diversité et de la complémentarité des sources concourant au développement, tout en apportant une attention accrue à la cohérence des politiques de développement et des autres politiques publiques. Elle part du constat que lintensification des flux financiers à destination des pays en développement et la nouvelle répartition de la richesse mondiale impliquent de repenser les instruments et les moyens de financement du développement.

(188) 4.1. Instruments publics de financement du développement

(189) La France considère que le soutien et lapport de financements publics aux pays en développement demeurent nécessaires et justifiés, notamment lorsque des défaillances de marchés (marchés financiers, marchés du crédit et de lassurance) et des défaillances des États (incapacité à fournir des services de base, à assurer un environnement politique et économique stable et sain) ne permettent pas de répondre aux défis du développement. Les financements publics visent à mettre en place les conditions dun développement durable et à stimuler la croissance dans les pays bénéficiaires. À terme, lobjectif est que ces pays dégagent leurs propres ressources (quelles soient publiques ou privés, domestiques ou internationales) et ne soient plus dépendants des financements publics extérieurs.

(190) Les financements publics français sont octroyés sur la base danalyses approfondies, en cohérence avec laction de lensemble des acteurs du développement et en concertation avec les pays récipiendaires, en tenant compte de leurs besoins et de leur capacité dabsorption. Ils sont mobilisés de façon différenciée (cf. 1.4 pour une présentation des partenariats différenciés) et stratégique, en prenant en considération leur valeur ajoutée selon les contextes et les secteurs afin de maximiser leur impact.

(191) La France apporte un appui financier à ses partenaires en ayant recours à différents instruments, de manière prévisible. Le financement direct par don/subvention demeure linstrument privilégié dans les pays les plus pauvres. Laide de la France sappuie également sur des prêts, essentiellement octroyés par lAFD, dont le degré de concessionnalité et les conditions diffèrent selon les objectifs poursuivis, les secteurs financés, le niveau de développement et lanalyse de soutenabilité de la dette des pays débiteurs. La France sest, par ailleurs, engagée à promouvoir au sein du G20 la thématique du « prêt soutenable » qui consiste précisément à tenir compte de la capacité des pays en développement à sendetter dans la définition des concours financiers qui leur sont octroyés. Ces prêts permettent dassurer un suivi dans la durée des actions menées en faveur du développement, de mobiliser des montants plus importants, notamment en cofinancement, et de créer des incitations positives pour la sélection de bons projets.

(192) La France octroie également des allègements de dette qui contribuent à libérer des ressources budgétaires additionnelles pour les pays bénéficiaires et représentent un vecteur de développement important. Dans le cadre multilatéral du Club de Paris, la France accorde des allègements de dette au bénéfice des pays éligibles à linitiative « Pays pauvres très endettés » (PPTE) afin de ramener la dette de ces pays à des niveaux soutenables. Par ailleurs, les efforts consentis par la France dans le cadre de linitiative PPTE sont complétés par des annulations bilatérales allant au-delà de leffort multilatéral. La France sest, en effet, engagée à annuler, dune part, lintégralité de la dette commerciale éligible des pays concernés par linitiative et, dautre part, la totalité de ses créances daide publique au développement subsistant après latteinte du point dachèvement, sous la forme de contrats de désendettement et de développement (C2D).

(193) La France a également diversifié ses contreparties, en intervenant de plus en plus auprès dacteurs non-souverains dont les collectivités territoriales, les entreprises publiques ou privées et les ONG. Ces financements non-souverains prennent la forme de dons, de prêts mais aussi de garanties et de prises de participations. PROPARCO et FISEA, filiales de lAFD, sont spécialement dédiées au soutien du secteur privé, respectivement dans lensemble des pays éligibles à laide au sens du CAD de lOCDE et en Afrique subsaharienne.

(194) 4.2. Financements privés en faveur du développement

(195) Au-delà de ces instruments de financement publics, notre politique daide au développement  a pris acte des bouleversements intervenus ces dernières années dans le financement du développement et sadapte en conséquence.

(196) Les financements privés (notamment internationaux) ont considérablement dépassé, en termes de volume, le montant des financements publics. Comme dautres grands bailleurs internationaux, la France entend jouer un rôle moteur pour aider à renforcer et canaliser ces flux financiers pour un impact maximal en termes de développement inclusif et durable. Cette action passe, en particulier, par laide à la mise en place des incitations économiques, politiques et réglementaires qui permettront de canaliser ces flux en accord avec cet objectif. La France attache une grande importance au rôle de catalyseur des financements publics quelle octroie qui permet aux pays bénéficiaires de mobiliser des ressources privés additionnelles, quelles soient domestiques ou internationales. Ainsi, la France aide les pays en développement à mobiliser davantage leurs ressources domestiques en œuvrant à renforcer leur fiscalité, à lutter contre lévasion fiscale, le blanchiment dargent et la corruption.

(197) Au-delà de la mobilisation des ressources domestiques publiques, la France promeut linclusion financière, le développement des marchés financiers locaux et leur insertion responsable dans les marchés internationaux comme moyens de financer les économies en développement.

(198) Concernant les flux financiers privés, les transferts dargent des migrants constituent lune des ressources financières extérieures majeures des pays en développement, dun niveau souvent supérieur à laide publique au développement. Ces flux permettent également de réduire la pauvreté et daccroître linclusion financière des populations (pour la part formelle des envois dargent). Ils présentent aussi lavantage dêtre globalement stables et pérennes en cas de crise financière ou de catastrophe naturelle. Les coûts de ces envois dargent demeurent toutefois élevés, en particulier vers lAfrique subsaharienne, et leur utilisation accrue à des fins dinvestissement est un enjeu essentiel. Dans ce contexte, la France sest engagée, avec ses partenaires du G8 et du G20, à œuvrer à la facilitation de ces transferts et en particulier à la baisse de leurs coûts, ainsi quau développement de nouveaux produits financiers, adaptés aux besoins de migrants et permettant une meilleure allocation de leurs envois dargent vers des dépenses dinvestissement dans leurs pays dorigine.

(199) Les Investissements directs étrangers (IDE) sont également devenus une source importante de financement extérieur privé pour les pays en voie de développement. Ils peuvent jouer un rôle majeur pour accélérer leur croissance et leur transformation économique. Depuis quelques années, les pays en développement ont entrepris de créer un cadre réglementaire plus propices aux IDE, daméliorer le traitement accordés aux entreprises étrangères et de fluidifier le fonctionnement des marchés (bancaires, financiers, de biens et de services). En plaidant pour lamélioration du climat dinvestissement ou en finançant des infrastructures, la France soutient leffort des pays en matière dattraction des IDE.

(200) Outre la recherche dun effet catalyseur des financements publics au développement, la France recherche également à maximiser les financements privés à destination des pays en développement en utilisant des mécanismes à effet de levier financier. En effet, une partie des ressources allouées au financement du développement prend la forme dapports initiaux ou dinstruments financiers (dons, prêts, garanties, fonds propres, financements mixtes, co-financements, etc.). Ces instruments permettent de lancer un projet, den réduire les risques (réels ou perçus) et/ou de le rendre économiquement viable, permettant ainsi de mobiliser des flux privés additionnels. Sappuyer sur des effets de levier financier est particulièrement adapté pour financer des projets de taille conséquente censés générer un retour financier comme les infrastructures.

(201) Enfin, la France met en œuvre une politique dappui à la philanthropie privée et dincitation au don de nature individuelle, entrepreneuriale ou associative. En particulier, le Gouvernement a décidé de renforcer la sécurité juridique du régime dincitation fiscale permettant la déductibilité des dons aux associations qui concourent au développement et à la solidarité internationale et sefforcera de mieux rendre compte de leffort budgétaire associé, dans le cadre de sa déclaration sur laide publique au développement au CAD de lOCDE.

(202) 4.3. Les financements innovants

(203) Au-delà des instruments de financement traditionnels, publics ou privés, la France contribue à la recherche de nouvelles ressources pour le développement, comme certaines taxes affectées ou les dons des particuliers. Elle promeut surtout les utilisations innovantes des sources de financement pour trouver des réponses à des problèmes de développement.

(204) Dans le domaine de la santé, la taxe de solidarité sur les billets davion, initiée en 2005 par la France, permet à UNITAID dinfluencer les marchés des médicaments contre le VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme (baisses de prix, qualification de traitements plus adaptés, etc.). Depuis 2006, les engagements français dans le cadre de la Facilité internationale de financement pour la vaccination (IFFIm) permettent de financer des programmes de vaccination des enfants et de renforcement des systèmes de santé menés par lAlliance pour les vaccins et la vaccination (GAVI). Cette démarche nest pas propre quau secteur de la santé et la France soutient la recherche dautres mécanismes dans dautres domaines comme le changement climatique, lagriculture, la sécurité alimentaire ou léducation. Ainsi, depuis 2012, la France met en œuvre une taxe sur les transactions financières à titre national, dont une part significative est allouée à des actions de développement, consacrées aux grandes pandémies et à la santé, mais aussi à la protection de lenvironnement et à la lutte contre le changement climatique.

 


(205) Annexe 1

(206) Liste des sigles et abréviations

(207)

AFD

Agence française de développement

AID

Association internationale de développement

APD

Aide publique au développement

APE

Accord de partenariat économique

BIT

Bureau international du travail

CAD

Comité daide au développement de lOCDE

C2D

Contrat de désendettement et de développement

CBD

Conventions des Nations unies sur la diversité biologique

CCNUCC

Conventions des Nations unies sur les changements climatiques

CE

Commission européenne

CICID

Comité interministériel de la coopération internationale et du développement

CIEP

Centre international détudes pédagogiques

CIV

Délégation pour les relations avec la société civile et les partenariats

CIRAD

Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement

CNCD

Commission nationale de la coopération décentralisée

CNDSI

Conseil national du développement et de la solidarité internationale

CNRS

Centre national de la recherche scientifique

CNULCD

Conventions des Nations unies pour la lutte contre la désertification

COM

Contrat d’objectifs et de moyens

CONFEJES

Conférence des ministres francophones de la jeunesse et des sports

CONFEMEN

Conférence des ministres de l’éducation des pays ayant le français en partage

COS

Conseil d’orientation stratégique de l’AFD

CPD

Cohérence des Politiques pour le Développement

DAECT

Délégation pour laction extérieure des collectivités territoriales

DGM

Direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats

DG Trésor

Direction générale du Trésor

ESS

Économie sociale et solidaire

ETI

Entreprises de taille intermédiaire

FAO (OAA)

Organisation des Nations unies pour lalimentation et lagriculture

FED

Fonds européen de développement

FEM

Fonds pour lenvironnement mondial

FEXTE

FFEM

Fonds dexpertise technique et déchange dexpériences

Fonds français pour lenvironnement mondial

FHF

Fédération hospitalière de France

FIDA

Fonds international de développement agricole

GAVI

Alliance mondiale pour les vaccins et limmunisation

GIP

Groupement dintérêt public

GISA

Groupe interministériel français sur la sécurité alimentaire

GRECO

Conventions civile et pénale du Conseil de lEurope sur la corruption

HCE

Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes

HCR

Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies

HQE

Haute qualité environnementale

IITA

Initiative internationale pour la transparence de laide

IDE

Investissement direct étranger

IEDDH

Instrument européen pour la démocratie et les droits de lHomme

IEVP

Instrument européen de voisinage et de partenariat

IFFIm

Facilité internationale pour la vaccination

IRD

Institut de recherche pour le développement

ITIE

Initiative pour la transparence des industries extractives

LADOM

Agence de lOutre-Mer pour la Mobilité

MAE

Ministère des affaires étrangères

MAFF

Ministère de lAgriculture, de lAgroalimentaire et de la Forêt

MEFI

Ministère de l’économie et des finances

MEN

Ministère de lÉducation Nationale

NEPAD

Nouveau partenariat pour le développement de lAfrique

OCDE

Organisation pour la coopération et le développement économique

ODD

Objectifs de développement durable

OIF

OIT

Organisation internationale de la Francophonie

Organisation internationale du travail

OMC

Organisation mondiale du commerce

OMD

Objectifs du millénaire pour le développement

ONG

Organisation non gouvernementale

ONU

Organisation des Nations unies

PAM

Programme alimentaire mondial

PED

Pays en développement

PMA

Pays les moins avancés

PNUD

Programme des Nations unies pour le développement

PNUE

Programme des Nations unies pour l’environnement

PPP

Pays pauvres prioritaires

PPTE

Pays pauvres très endettés

RRMA

Réseaux régionaux multi-acteurs

RSE

Responsabilité sociale et environnementale

SMA

Service militaire adapté

SPG

Système de préférences généralisées

TTF

Taxe sur les transactions financières

UE

Union européenne

UNESCO

Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture

UNICEF

Fonds des Nations unies pour l’enfance

UNITAID

Facilité internationale d’achat de médicaments

UNRWA

Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient

VSI

Volontaire de solidarité internationale

 

 


(208) Annexe 2

(209) Matrice des indicateurs de résultats

(210)

Indicateur de laide apportée par lAFD

Domaine

1.

Nombre dexploitations agricoles familiales soutenues par les programmes financés par lAFD

Agriculture, sécurité alimentaire

2.

Superficies bénéficiant de programme de conservation, restauration ou gestion durable de la biodiversité

Biodiversité

3.

Nombre de passagers empruntant les transports en commun sur les tronçons financés

Transports

4.

Nombre de personnes raccordées au réseau de distribution délectricité, ou gagnant accès à lélectrification

Énergie durable

5.

a. Nombre denfants scolarisés au primaire et au collège

b. Nombre de jeunes accueillis dans les dispositifs de formation professionnelle initiale soutenus par lAFD

Éducation et formation

6.

Nombre dhabitants des quartiers défavorisés dont lhabitat est amélioré ou sécurisé

Collectivités locales et développement urbain

7.

Investissements accompagnés dans le secteur privé

Institutions financières et appui au secteur privé

8.

Nombre dentreprises (PME) bénéficiaires dappuis ou de financements de lAFD

Institutions financières et appui au secteur privé

9.

Nouvelles capacités dénergies renouvelables installées

Energie durable

10.

Nombre de personnes gagnant un accès pérenne à une source deau potable améliorée

Eau et assainissement

11.

Nombre de personnes gagnant accès à un système dassainissement amélioré

Eau et assainissement

12.

Nombre de consultations externes de professionnels de santé par habitant et par an

Santé

13.

Réduction des émissions de gaz à effet de serre (CO2) – indicateur ex-post à prévoir mais non envisageable fin 2013.

Transversal (climat)

 

Indicateur FSP

Domaine

14.

Nombre dinstitutions bénéficiaires daction de renforcement de capacité

Culture, enseignement supérieur et francophonie

15.

Nombre dinstitutions bénéficiaires daction de renforcement de capacité

Gouvernance démocratique

16.

Nombre de projets financés au bénéfice des sociétés civiles du Sud

Société civile du Sud

(211)

Indicateur de laide apportée par linstitution internationale

Domaine

1

Nombre de personnes ayant accès à un ensemble de services de santé de base (BM)

Santé

2

Nombre denfants immunisés grâce à notre contribution au GAVI Alliance

Santé

3

Nombre de moustiquaires imprégnées distribuées grâce à notre contribution au Fonds mondial

Santé

4

Nombre de personnes sous traitement antirétroviral grâce à notre contribution au Fonds mondial

Santé

5

Nombre denseignants recrutés et/ou formés (BM)

Éducation

6

Nombre de manuels et matériels didactiques fournis (BAfD)

Éducation

7

Superficie de zones bénéficiant de services dirrigation (en ha) (BM)

Agriculture

8

Nombre de personnes formées/recrutées/ utilisant une technologie moderne (BAfD)

Agriculture

9

Nombre de personnes bénéficiaires de services fournis par des projets soutenus par le FIDA

Agriculture

10

Nombre de personnes ayant gagné accès à des sources deau améliorées (BM)

Développement durable (eau)

11

Kilomètres de conduites deau installées ou améliorées (BAsD)

Développement durable (eau)

12

Nombre de routes construites ou réhabilitées (BM)

Infrastructures (transport)

13

Nombre de PME aidées (SFI)

Secteur privé

14

Nombre de clients de la microfinance formés en gestion des entreprises (BAfD)

Secteur privé

 

 


[1]() Bénin, Burkina Faso, Burundi, Djibouti, Comores, Ghana, Guinée, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Tchad, Togo, Sénégal.

[2]() Le commerce, l’environnement, le changement climatique, la sécurité, l’agriculture, les accords de pêche bilatéraux, les politiques sociales, la migration, la recherche/l’innovation, les technologies de l’information, le transport et l’énergie.