PROJET DE LOI

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N° 2435

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de lAssemblée nationale le 9 décembre 2014.

PROPOSITION DE LOI

visant à assurer aux patients le respect
de leur choix de fin de vie,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

 

Véronique MASSONNEAU, Laurence ABEILLE, Éric ALAUZET, Brigitte ALLAIN, Isabelle ATTARD, Danielle AUROI, Denis BAUPIN, Michèle BONNETON, Christophe CAVARD, Sergio CORONADO, François de RUGY, Cécile DUFLOT, FrançoisMichel LAMBERT, Noël MAMÈRE, Paul MOLAC, Barbara POMPILI, JeanLouis ROUMÉGAS et Eva SAS,

 

députés.

 

 

 

 


Article 1er

(1) L’article L. 11109 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

(2) « Art. L. 11109.  Toute personne malade dont l’état le requiert a un droit universel d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. Chaque département, région et collectivité d’outremer doit être pourvu d’unités de soins palliatifs en proportion du nombre de ses habitants. »

(3) « Toute personne majeure et capable, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, infligeant une souffrance physique ou psychique inapaisable ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier, dans les conditions strictes prévues au présent code, d’une euthanasie ou d’un suicide médicalement assisté. »

Article 2

(1) Après l’article L. 111110 du même code, il est inséré un article L. 1111101 ainsi rédigé :

(2) « Art. L. 1111101.  Lorsqu’une personne majeure et capable, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, infligeant une souffrance physique ou psychique inapaisable ou qu’elle juge insupportable, demande à son médecin le bénéfice d’une euthanasie ou d’un suicide médicalement assisté, celuici doit s’assurer de la réalité de la situation médicale dans laquelle se trouve la personne concernée.

(3) « Après examen du patient, étude de son dossier et, s’il y a lieu, consultation de l’équipe soignante, le médecin doit faire appel, pour l’éclairer, dans un délai maximal de 48 heures, à un autre praticien de son choix.

(4) « Les médecins vérifient le caractère libre, éclairé, réfléchi et explicite de la demande présentée, lors d’un entretien au cours duquel ils informent l’intéressé des possibilités thérapeutiques, ainsi que des solutions alternatives en matière d’accompagnement définies notamment à l’article L. 11109 du présent code.

(5) « Les médecins peuvent, s’ils le jugent souhaitable, renouveler l’entretien dans les 48 heures.

(6) « Les médecins rendent leurs conclusions sur l’état de l’intéressé dans un délai de quatre jours au plus à compter de la demande initiale du patient.

(7) « Lorsque les médecins constatent la réalité de la situation médicale, l’impasse thérapeutique dans laquelle se trouve la personne ainsi que le caractère libre, éclairé, réfléchi et explicite de sa demande, l’intéressé doit, s’il persiste, confirmer sa volonté de bénéficier d’une euthanasie ou d’un suicide médicalement assisté, le cas échéant, en présence de la personne de confiance qu’il a désignée.

(8) « Le médecin est tenu de respecter cette volonté.

(9) « L’acte d’euthanasie, pratiqué à la demande du patient sous le contrôle d’un médecin et par ce médecin, ou, dans le cas d’un suicide médicalement assisté, pratiqué à la demande du patient sous le contrôle d’un médecin et par le patient, s’il est en capacité de le faire, en milieu hospitalier ou au domicile du patient, ne peut avoir lieu avant l’expiration d’un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande. Les conditions de mise en œuvre de ce bénéfice sont fixées par décret en Conseil d’État.

(10) « L’intéressé peut, à tout moment, et par tout moyen, révoquer sa demande. »

Article 3

(1) I.  L’article L. 111111 du même code est ainsi rédigé :

(2) « Art. L. 111111.  Toute personne majeure et capable peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Ces directives anticipées indiquent les souhaits de la personne relatifs à sa fin de vie et prévalent sur tout autre avis, y compris médical, dans les cas où elles s’appliquent.

(3) « Les directives anticipées peuvent également mentionner une personne de confiance désignée par le patient, en application de l’article L. 11116 du présent code.

(4) « Les directives anticipées sont modifiables et révocables à tout moment par l’intéressé.

(5) « Les directives anticipées demeurent valables sans conditions de durée. Le médecin est donc tenu de les respecter pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement la concernant.

(6) « Les directives anticipées ainsi que le nom de la personne de confiance sont enregistrés sur la carte vitale des assurés sociaux. »

(7) Un décret en Conseil d’État définit les conditions de rédaction, de validité, de confidentialité et de conservation des directives anticipées.

(8) II.  L’article L. 111112 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

(9) « La personne de confiance a le même droit d’accès au médical que le titulaire. »

Article 4

(1) Après l’article L. 111112 du même code, est inséré l’article L. 1111121 ainsi rédigé :

(2) « Art. L. 1111121.  Lorsqu’une personne majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, infligeant une souffrance physique ou psychique inapaisable ou qu’elle juge insupportable, se trouve dans l’incapacité d’exprimer une demande libre et éclairée, peut bénéficier d’une euthanasie, à la condition que cette volonté résulte de ses directives établies dans les conditions mentionnées à l’article L. 111111.

(3) « Après examen du patient, étude de son dossier et, éventuellement, consultation de l’équipe médicale soignante, le médecin fait appel pour l’éclairer à un autre praticien de son choix. Le médecin établit dans un délai de quatre jours au plus à compter de leur saisine pour avis un rapport indiquant si la situation médicale de la personne concernée correspond aux conditions exprimées dans ses directives anticipées, auquel cas elles doivent impérativement être respectées.

(4) « Lorsque le rapport conclut à la possibilité d’une euthanasie ou d’un suicide médicalement assisté, la personne de confiance désignée dans les conditions prévues à l’article L. 11116 du présent code, si elle existe, doit confirmer la volonté du patient. Alors, le médecin est tenu de respecter cette volonté. L’acte d’euthanasie ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande. »

Article 5

(1) La section 2 du chapitre Ier du livre Ier de la première partie du même code est complétée par trois articles L. 111114, L. 1111141 et L. 1111142 ainsi rédigés :

(2) « Art. L. 111114.  Dans un délai de huit jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l’euthanasie ou au suicide médicalement assisté adresse à la commission régionale de contrôle un rapport exposant les conditions du décès. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical en application du présent article ainsi que les directives anticipées ; la commission contrôle la validité du protocole. Le cas échéant, elle transmet à l’autorité judiciaire compétente.

(3) « En cas de pronostic vital engagé à très brève échéance, le médecin peut, après en avoir informé la commission régionale qui se réserve la possibilité de dépêcher auprès de lui un médecinconseiller, ramener l’ensemble du protocole à quatre jours. »

(4) « Art. L. 1111141.  Il est institué auprès du Garde des Sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de la santé, un organisme dénommé Commission nationale de contrôle des pratiques en matière d’aide médicale à mourir.

(5) « Il est institué dans chaque région une commission régionale présidée par le préfet de région ou son représentant. Elle est chargée de contrôler, chaque fois qu’elle est rendue destinataire d’un rapport d’aide médicale à mourir, si les exigences légales ont été respectées. Si ces exigences ont été respectées, l’article 2213, le 3 de l’article 2214 et l’article 2215 du code pénal ne peuvent être appliquées aux auteurs d’une aide médicale à mourir.

(6) « Lorsqu’elle estime que ces exigences n’ont pas été respectées ou en cas de doute, elle transmet le dossier à la Commission susvisée qui, après examen, dispose de la faculté de le transmettre au Procureur de la République.

(7) « Les règles relatives à la composition ainsi qu’à l’organisation et au fonctionnement des commissions susvisées sont définies par décret en Conseil d’État. Les membres de ces commissions ne peuvent recevoir aucune rémunération due à leur appartenance à ces commissions. »

(8) « Art. L. 1111142.  Est réputée décédée de mort naturelle la personne dont la mort résulte d’une euthanasie ou d’un suicide médicalement assisté mis en œuvre selon les conditions et procédures prescrites par le présent code. »

Article 6

(1) L’article L. 11105 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

(2) « Le médecin n’est pas tenu d’apporter son concours à la mise en œuvre de l’euthanasie ou du suicide médicalement assisté ; dans le cas d’un refus de sa part, il doit, dans un délai de deux jours, s’être assuré de l’accord d’un autre praticien et lui avoir transmis le dossier. »

Article 7

La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration des droits mentionnés aux articles 402 bis, 438 et 520 A du code général des impôts.