N° 1862

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

      ONZIÈME LÉGISLATURE

      Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 1999.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES (1) SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2000 (n° 1805)

TOME III

CULTURE ET COMMUNICATION

CULTURE

PAR M. Bruno Bourg-Broc,

Député.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Voir le numéro : 1861 (annexe n° 9).

      Lois de finances

      La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; MM. Jean-Michel Dubernard, Jean-Paul Durieux, Jean-Pierre Foucher, Maxime Gremetz, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, MM. Denis Jacquat, Noël Mamère, Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; MM.  Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux, MM. André Aschieri, Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Baeumler, Pierre-Christophe Baguet, Jean Bardet, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Mmes Huguette Bello, Yvette Benayoun-Nakache, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Claude Boulard, Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, MM. Jean-Paul Bret, Victor Brial,  Yves Bur, Alain Calmat, Pierre Carassus, Pierre Cardo, Roland Carraz, Mmes Véronique Carrion-Bastok, Odette Casanova, MM. Laurent Cathala, Jean-Charles Cavaillé, Bernard Charles, Jean-Marc Chavanne, Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Marcel Dehoux, Jean Delobel, Jean-Jacques Denis, Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, MM. Julien Dray, Guy Drut, Nicolas Dupont-Aignan, Yves Durand, René Dutin, Christian Estrosi, Claude Evin, Jean Falala, Jean-Louis Fousseret, Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Germain Gengenwin, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Gaëtan Gorce, François Goulard, Jean-Claude Guibal, Jean-Jacques Guillet, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M.  Francis Hammel, Mme Cécile Helle, MM. Pierre Hellier, Michel Herbillon, Guy Hermier, Mmes Françoise Imbert, Muguette Jacquaint, MM. Jacky Jaulneau, Serge Janquin, Armand Jung, Bertrand Kern, Christian Kert, Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, MM. Jacques Lafleur, Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lasbordes, Mme Jacqueline Lazard, MM. Michel Lefait, Maurice Leroy, Patrick Leroy, Gérard Lindeperg, Patrick Malavieille, Mmes Gilberte Marin-Moskovitz, Jacqueline Mathieu-Obadia, MM. Didier Mathus, Jean-François Mattei, Mme Hélène Mignon, MM. Jean-Claude Mignon, Pierre Morange, Hervé Morin, Renaud Muselier, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Yves Nicolin, Bernard Outin, Dominique Paillé, Michel Pajon, Jean-Pierre Pernot, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Bernard Perrut, Pierre Petit, Mme Catherine Picard, MM. Jean Pontier, Jean-Luc Préel, Alfred Recours, Gilles de Robien, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. François Rochebloine, Marcel Rogemont, Yves Rome, Jean Rouger, Rudy Salles, Mme Odile Saugues, MM. André Schneider, Bernard Schreiner, Patrick Sève, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, André Thien Ah Koon, Mme Marisol Touraine, MM. Anicet Turinay, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, Alain Veyret, Philippe Vuilque, Jean-Jacques Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann.

    SOMMAIRE

    ========

    PAGES

    IINTRODUCTION 5

    I.- UN BUDGET EN PROGRÈS QUI ATTEND SA CONFIRMATION 9

      A. DES AVANCÉES INDÉNIABLES 9

        1. Un effort dans le sens de la démocratisation 10

        2. Une gestion plus serrée des établissements publics 14

        3. La poursuite du rééquilibrage entre Paris et la province 15

      B. DES ORIENTATIONS À CONSOLIDER 20

        1. Un premier effort pour résoudre le problème des emplois précaires 20

        2. Une priorité attendue pour les enseignements artistiques 22

      C. DES ZONES DE FAIBLESSE PERSISTANTES 26

        1. L’évolution contrastée des crédits du patrimoine 26

        2. le sacrifice des crédits d’acquisition 27

    II. LES MUSÉES, UN VERITABLE OUTIL DE DÉMOCRATISATION CULTURELLE 31

      A. LE BUDGET DE LA DIRECTION DES MUSÉES DE FRANCE, ENTRE GRANDS PROJETS ET DÉCENTRALISATION 31

        1. Une évolution structurelle sur le long terme 31

        2. Un budget 2000 clairement orienté vers les musées en région 34

      B. LES MUSÉES EN FRANCE : UNE GRANDE DIVERSITÉ DES STRUCTURES ET DES MODES DE GESTION 38

        1. Les musées nationaux : la règle et l’exception 39

        2. les musées en région : diversité et contractualisation 43

      C. LES MUSÉES AU SERVICE DE LA DÉMOCRATISATION 46

        1. Des défis à relever 46

        2. Une ambition à conforter 52

    TRAVAUX DE LA COMMISSION 59

      En 2000, le budget de la culture s’élèvera à 16,040 milliards de francs ; il bénéficie donc d'une progression de 329 millions de francs, soit une hausse de 2,1% par rapport à la loi de finances initiale pour 1999. Cette hausse le classe parmi les budgets prioritaires de l'Etat puisqu’il augmente à un rythme plus de deux fois supérieur à celui de l'inflation prévisionnelle (+ 0,9%), sur lequel est calquée l'évolution des dépenses de l'Etat en 2000. Cette hausse est toutefois sensiblement inférieure à celle des deux précédents budgets et ne vaut qu’autant que la consommation des crédits sera effective.

      Compte tenu de l'inscription de crédits relatifs à la réserve parlementaire dans la loi de finances initiale pour 1999, le budget de la culture bénéficiera en 2000 de 369 millions de francs de crédits supplémentaires par rapport à ceux dont il a effectivement disposé en 1999, soit une progression de 2,4%.

      Les dépenses ordinaires sont en hausse de 2,7 %, une priorité nette étant accordée aux interventions du titre IV avec 172 millions de francs de crédits supplémentaires, à l’exception notable des crédits d’acquisitions d’œuvres d’art qui connaissent une baisse de 1,1 %. L’accroissement des crédits du titre III (207,6 millions de francs supplémentaires) permettra néanmoins d’apporter un début de réponse au problème lancinant des emplois, tant dans les services de l’Etat que les établissements publics.

      Les dépenses d’investissement présentent quant à elles un profil fort différent de celui de l’an passé. Après une régression de plus de 4 % en 1999, les autorisations de programmes sont en nouveau en hausse de 4,6 %, principalement pour ce qui concerne le titre VI, c’est à dire les subventions d’investissement accordée par l’Etat. Ce rattrapage est bien justifié. Les crédits de paiements observent quant à eux une forte hausse (+ 19,4 %) pour ce qui concerne les investissements réalisés par l’Etat (titre V), alors qu’ils sont en nette baisse pour le titre VI (- 15,4 %), une redistribution interne étant cependant opérée au profit des projets d’intérêt régional et local, au détriments des équipements d’intérêt national (établissements publics notamment).

      Au total, les crédits d’investissements engagés sur l’année 2000 demeurent quasiment stables (- 0,1 %), alors qu’ils étaient en hausse de 3,6 % l’an passé. C’est pour le moins regrettable.

      Pour autant, l’objectif, annoncé par le Premier ministre, d’atteindre les « 1 % » du budget de l’Etat d’ici la fin de la législature est encore loin d’être réalisé. En effet, si, en référence au budget général de l’Etat dans sa structure 1998, le budget du ministère de la culture représentera 0,98% des charges nettes de l'Etat en 2000 (contre 0,97% en 1999), en proportion du budget général tel qu’il nous est aujourd’hui présenté, la barre est un peu plus éloignée, puisque le budget de la culture atteint 0,953 % du budget général, contre 0,942 % en 1999…

- Évolution du budget de la culture entre 1999 et 2000 -

      en millions de francs

     

    1999

    LFI (1)

    2000

    PLF

    Variation

    / LFI 99

    Variation à structure constante (2)

    - Personnel

    - Matériel et fonctionnement

    - Entretien et réparations

    - Établissements publics

    3 178,51

    603,31

    78,99

    3 481,84

    3 243,71

    604,14

    82,00

    3 620,38

    2,1 %

    0,1 %

    3,8 %

    4,0 %

    3,0 %

    0,8 %

    3,8 %

    2,3 %

    Total titre III

    7 342,66

    7 550,23

    2,8 %

    2,5 %

    - Interventions politiques et administratives (DGD* bibliothèques)

    941,19

    948,92

    0,8 %

    0,8 %

    - Interventions culturelles :

      - d’intérêt national

      - déconcentrées

    1 473,31

    2 112,54

    1 237,45

    2 492,47

    - 16,0 %

    18,0 %

    2,9 %

    5,7 %

    - Commandes et achats d’œuvres d’art

    256,76

    253,82

    - 1,1 %

    ct

    Total titre IV (1)

    4 783,80

    4932,66

    3,1 %

    3,6 %

    Total dépenses ordinaires (DO)

    12 150,89

    12 482,89

    2,7 %

    2,7 %

    Titre V (investissements Etat)

    1 567,31

    1 871,69

    19,4 %

    19,5 %

    Titre VI (subventions d’investissement)

    1 976,02

    1 684,63

    - 14,7 %

    - 14,8, %

    TOTAL AP

    3 522,36

    3 702,5

    5,1 %

    5,1 %

    Total dépenses en capital (CP)

    3 543,33

    3 556,32

    0,4 %

    0,4 %

    TOTAL DO + CP

    15 669,78

    16 039,21

    2,4 %

    2,4 %

      * DGD : dotation générale de décentralisation

      (1) hors réserve parlementaire

      (2) Hors mesures de transfert entre titres et chapitres

      Il reste que l’objectif chiffré du « 1 % », s’il possède la force incontestable du symbole, est en fin de compte moins important et significatif que le contenu même du budget et des actions qu’il permet de mettre – ou non – en œuvre.

      En prolongement de l’ambition fixée l’an passée de « concilier création et démocratisation », le budget pour 2000 affiche quatre priorités : assurer l’élargissement de l’accès à la culture par des mesures volontaristes en matière tarifaire, développer les enseignements artistiques, soutenir la création contemporaine et renforcer l’aide aux investissements locaux. Les moyens nécessaires ont été dégagés au prix d’une redistribution des crédits, notamment des crédits d’investissements.

- Destination des mesures nouvelles 2000 -

     

    en MF

    Répartition

    Moyens des services

    184,249

    49,8

    - Personnel

    95,090

    25,7

    - Fonctionnement des services

    5,003

    1,4

    - Travaux d’entretien

    3,000

    0,8

    - Subventions de fonctionnement aux établissements publics

    81,156

    21,9

    Interventions

    172,030

    46,5

    - Dotation générale de décentralisation – part bibliothèques

    7,730

    2,1

    - Interventions des administrations centrales

    43,000

    11,61

    - Interventions déconcentrées

    121,300

    32,79

    - Commandes artistiques et achats d’œuvres d’art

    -

    0,00

    Dépenses en capital

    13,660

    3,70

      - Apurement des retards de mandatement sur subventions d’investissement aux maîtres d’ouvrage locaux


    56,200


    15,2

      - Subventions d’équipement aux établissements publics

    2,350

    1,2

      - Autres crédits de paiement

    - 44,940

    - 12,7

    TOTAL

    369,30

    100,00

      Le rapporteur s’attachera, dans la première partie de cet avis, à examiner la structure du budget de la culture pour 2000 en regard de ces priorités, afin de sonder la solidité des ambitions affichées et la capacité réelle du ministère à les mettre en œuvre.

      Dans une seconde partie, il se proposera d’étudier en profondeur, comme il est désormais de tradition de le faire dans le cadre des avis budgétaires de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, un secteur de l’action culturelle, en analysant les moyens et les perpectives donnés à la politique des musées, qui constitue très certainement aujourd’hui un axe encore trop peu exploité pour la démocratisation de l’accès à l’art et à la culture en France.

I.- UN BUDGET EN PROGRÈS QUI ATTEND SA CONFIRMATION

      Il n’est nullement dans les intentions du rapporteur de nier les avancée constatées dans le budget de la culture pour 2000, notamment par rapport aux lacunes qu’il avait relevées dans son avis sur le budget de la culture pour 1998. Pour autant, les moyens données aujourd’hui à la politique culturelle au sein du budget de l’Etat sont encore loin d’être satisfaisants, tant en volume global (nous ne reviendront pas sur la frontière du « 1 % » et les différentes façons possibles de le calculer…) qu’en répartition entre les différentes priorités.

      Au total donc, si l’on se doit de relever un certain nombre d’actions satisfaisantes, certains progrès demeurent encore fragiles et de graves lacunes viennent ternir l’image de ce budget pour 2000.

          A. DES AVANCÉES INDÉNIABLES

      Comme l’écrit Mme Maryvonne de Saint Pulgent dans son dernier livre Le Gouvernement de la Culture :

      « (…) les enquêtes réalisées périodiquement par le ministère de la culture indiquent que "seule une minorité de Français appartenant aux milieux favorisés ont une fréquentation à la fois régulière et diversifiée des équipements culturels", mais il ne faut pas céder à la "tentation de s’en tenir au constat que les pratiques culturelles à l’échelle de la population française demeurent minoritaires, élitaires et cumulatives", car "plus de Français partagent ce qu’il est convenu d’appeler un minimum culturel".(…)

      Ce minimum culturel pour tous n’a pas grand chose à voir avec la démocratisation culturelle que Malraux pensait réussir en faisant circuler les chefs d’œuvre grâce aux maisons de la culture, que ses successeurs ont attendu de la promotion officielle des avant-gardes artistiques, de la proclamation du droit à la créativité pour tous et de l’augmentation massive et indifférenciée de l’offre de culture, et que les sociologues voyaient accompagner naturellement la généralisation de l’enseignement secondaire et supérieur. Avec lui s’installe non la démocratie, au sens d’une distribution moins inégalitaire du goût et de l’appétence pour les œuvres et la connaissance chez tous les citoyens, mais le décevant campement de la société de masse sur la scène de l’art et du savoir. »

          1. Un effort dans le sens de la démocratisation

      · l’élargissement de l’accès aux lieux de culture

      L’enjeu de la démocratisation des pratiques culturelles est très certainement essentiel pour la politique culturelle. Or, toutes les enquêtes culturelles tendent à démontrer que si de très nombreuses personnes ne fréquentent pas aujourd’hui les institutions culturelles, ne vont pas au musée ou au théâtre, ne visitent pas les monuments historiques, c’est surtout parce que ces lieux leur apparaissent inaccessibles non seulement sur un plan intellectuel mais aussi, plus prosaïquement, sur un plan matériel : ils sont trop chers et souvent difficile d’accès.

      Afin de modifier cet état de fait, la ministre a décidé en juin 1999 d’agir sur cet obstacle matériel en réduisant le prix des billets d’entrée et des places dans les institutions culturelles placées sous sa tutelle directe, à savoir les musées et les théâtres nationaux ainsi que le patrimoine monumental géré par la Caisse nationale des monuments historiques.

      A compter du 1er janvier 2000, la gratuité pratiquée le premier dimanche de chaque mois au musée du Louvre sera donc étendue à l'ensemble des 33 musées nationaux (coût : 8 millions de francs). La gratuité d'accès aux monuments historiques pour les moins de 12 ans sera étendue à tous les jeunes jusqu’à 18 ans et l'accès aux monuments historiques sera gratuit pour tous un dimanche par mois du 1er octobre au 30 mai (coût : 15 millions de francs). Enfin, un tarif unique, fixé à 50 francs, sera pratiqué tous les jeudis dans les cinq théâtres nationaux (Comédie Française, Chaillot, Colline, Odéon, Strasbourg) (coût : 7 millions de francs).

      · priorités retenues pour les subventions du titre IV

      En 2000, les crédits d’intervention du titre IV augmenteront de 156,56 millions de francs et de 172 millions de francs à structure budgétaire constante, c’est à dire hors transferts de crédits, soit une hausse de 3,6 % (et de 3,8 % hors crédits d’acquisition et de commandes).

      - Répartition des crédits d’intervention (titre IV) -

par direction et délégation

    en millions de francs

     

    LFI 1999*

    PLF 2000

    2000/99

    2000/99
    à structure constante (3)

    Patrimoine et architecture

    244,94

    268,75

    9,86 %

    11,59 %

    Spectacle vivant

    2 092,78

    2 184,06

    4,36 %

    3,82 %

    Musées

    277,77

    276,17

    - 1,14 %

    4,26 %

    Arts plastiques

    336,68

    353,68

    0,05 %

    5,64 %

    Livre et lecture (1)

    1 084,14

    1 095,66

    3,61 %

    3,76 %

    Archives

    16,25

    18,25

    16,49 %

    12,31 %

    Développement culturel et aménagement du territoire

    429,92

    430,22

    0,07 %

    4,02 %

    Langue française (et langues de France en 2000)

    9,55

    11,60

    21,46 %

    31,41 %

    Affaires internationales

    47,61

    47,11

    - 1,0 %

    2,1 %

    Centre national de la cinématographie (CNC)

    214,16

    218,96

    4,8 %

    1,9 %

    Administration générale (2)

    30,0

    28,18

    - 6,0 %

    0,0 %

    TOTAL

    5 724,99

    5881,55

    2,7 %

    3,6 %

        * hors réserve parlementaire

        (1) Y compris la DGD bibliothèques

        (2) Correspond aux dotations de commande et d’acquisition du centre Georges Pompidou

        (3) Hors transferts entre chapitres et titres

      Cette augmentation sera notamment destinée au financement de mesures tendant à assurer la démocratisation culturelle retenue comme l’axe principal de l’action du ministère.

      La direction du spectacle vivant est à nouveau prioritaire en 2000 puisqu’elle est destinataire de 80 millions de francs de mesures nouvelles. Celles-ci seront notamment destinées à prolonger l’action entreprise en 1999 dans le cadre de la charte de service public, qui a permis d’établir de nouveau rapports contractuels avec les équipes de production et de diffusion artistique des structures subventionnées et de réorienter le soutien financier en direction des institutions faisant preuve d’un souci constant des publics.

      10 millions de francs seront également consacrés au renforcement du programme « musique à l’école », qui devrait permettre de dispenser un enseignement musical à tous les enfants scolarisés en primaire.

      La direction de l’architecture et du patrimoine bénéficiera d’un renforcement des crédits d'intervention en faveur de la sensibilisation et de la diffusion de la culture architecturale. La subvention de fonctionnement à l'Institut français d'architecture, qui assure la préfiguration de la Cité de l'architecture et du patrimoine au Palais de Chaillot, sera par ailleurs augmentée de 3 millions de francs et les directions régionales des affaires culturelles seront dotées de moyens accrus (à hauteur de 3 millions de francs) afin notamment de développer les conventions ville - architecture.

      A la direction des musées de France, l’expérience du fonds de soutien aux expositions d’intérêt national organisées par les musées en région, destiné à assurer un plus grand rayonnement de ces manifestations, notamment en direction de publics habituellement exclus, a rencontré un vif succès tant auprès des collectivités locales que des visiteurs. Elle sera donc renouvelée et étendue en 2000, une mesure nouvelle de 2 millions de francs étant prévue à cet effet.

      La direction du livre et de la lecture disposera de 4 millions de francs de crédits déconcentrés supplémentaires pour soutenir les projets qui s’inscrivent parmi les objectifs de démocratisation culturelle. Dans cet esprit, les directions régionales des affaires culturelles s’attacheront à conforter le maillage du territoire en bibliothèques et librairies afin de contribuer à la réduction des inégalités dans l’accès au livre et à la lecture.

      Cette politique trouvera une traduction privilégiée dans la montée en charge du programme des contrats "villes-lecture", lancé en 1998 pour favoriser une approche globale du livre et de la lecture à l'échelon local, la création de nouveaux relais livres en milieu rural, l'encouragement des pratiques artistiques permettant la rencontre entre les écrivains et les jeunes (ateliers d'écriture, classes lecture-découverte du livre, résidences, parrainages), l'accompagnement en région des manifestations littéraires organisées dans le cadre des opérations nationales "le Printemps des poètes" et "Lire en fête" et enfin le soutien apporté aux collectivités et associations qui entendent attribuer aux jeunes des bons d'achat de livres.

      Enfin, dans la souci de valoriser la diversité culturelle et de prolonger la volonté de reconnaissance des langues régionales et minoritaires, la délégation à la langue françaises et aux langues de France (rebaptisée pour l’occasion) bénéficiera de 3 millions de francs de mesures nouvelles afin de développer des aides spécifiques pour les langues régionales. Jusqu'à présent, celles-ci étaient uniquement prises en compte à travers les différents champs d'intervention du ministère (musique, livre, théâtre, patrimoine ethnologique...), au même titre que la langue française.

      La diversité linguistique représente pour le patrimoine culturel de notre pays un atout réel. Comme toutes les langues, les langues régionales restent le vecteur de la culture qui les a engendres et, à ce titre, méritent considération. Nous ne sauvegarderons et ne pourrons développer l’usage du français qu’autant que notre culture continuera à affirmer son identité diverse mais dans un cadre national et républicain qui affirme que la langue officielle est – et doit rester – le français.

      Les mesures nouvelles prévues en 2000 vont permettre d’engager une politique ouverte et adaptée en faveur des langues régionales et minoritaires, qui concernera les 75 langues recensées dans le rapport du professeur Cerquiglini. Il s’agit principalement :

      - du soutien à des actions à caractère purement linguistique telles la collecte du patrimoine linguistique, les études sur les langues et les équipements linguistiques (grammaire, dictionnaires...), notamment pour les départements et territoires d'outre-mer, ou encore l’observation des pratiques linguistiques ;

      - d’actions linguistiques qui ne peuvent être prises en compte dans le cadre des procédures ou des critères habituels, notamment dans le secteur de l'édition où pourront être mises en œuvre les recommandations du rapport Poignant ;

      - de la mise en œuvre d'actions nouvelles en faveur de l'intégration par la prise en compte de situations linguistiques spécifiques (diglossie, mauvaise maîtrise du français, quête d'identité...).

      Les crédits centraux (un million de francs de mesures nouvelles) sont destinés au financement d'opérations à caractère national ou interrégional ainsi que d'actions conduites en liaison avec des organismes nationaux. L'ouverture de crédits déconcentrés (2 millions de francs), qui constitue une nouveauté du projet de loi de finances pour 2000, permettra aux directions régionales des affaires culturelles, dans les régions les plus directement concernées, d'engager des actions de valorisation des langues régionales.

          2. Une gestion plus serrée des établissements publics

      Ce choix de privilégier les crédits d’intervention du titre IV trouve assez largement sa contrepartie dans les conditions de gestion plus serrée imposées aux établissements publics. Le souhait de poursuivre le rééquilibrage des crédits entre Paris et la province (cf. paragraphe suivant) n’est pas non plus étranger à ce choix d’une rigueur accrue envers des établissements qui sont, dans leur très grande majorité, des établissements parisiens.

      Si l’évolution des subventions de fonctionnement accordées aux établissements publics est apparemment plus favorable en 2000 qu’en 1999 (+ 140 millions de francs sur le chapitre 36-60), celle-ci demeure par contre tout à fait contenue lorsque l’on considère le budget à structure constante, c’est à dire hors transfert d’emplois auparavant pris en charge directement par l’Etat (cf. ci-après, B. 1.). Au total en effet, les mesures de transferts de crédits de personnels s’élèveront à 64,67 millions de francs (dont 32,45 pour le conservatoire national supérieur de musique de Paris, 6,8 pour conservatoire national supérieur des arts dramatiques, 12,6 pour l'école nationale supérieure des beaux-arts et 12,06 pour l'école nationale supérieure des arts décoratifs).

- Evolution comparée des subventions aux établissements publics et des crédits d’intervention depuis 1998—

- à structure constante -

     

    98/97

    en MF

    98/97

    en %

    99/98

    en MF

    99/98

    en %

    2000/99

    en MF

    2000/99

    en %

    2000/97

    en MF

    2000/97

    en %

    Fonctionnement (chap. 36-60)

    69,39

    1,99

    62,95

    1,75

    81,16

    2,20

    231,50

    6,12

    Équipement courant (chap. 66-91)

    26,65

    12,67

    56,40

    23,80

    4,35

    1,48

    87,40

    41,55

    Total subventions établ. publics

    96,04

    2,60

    119,35

    3,11

    85,51

    2,15

    300,90

    8,14

    Total titre IV

    180,79

    4,06

    229,39

    5,00

    172,03

    3,60

    582,21

    13,07

      Les mesures nouvelles accordées aux établissements publics concernent principalement :

      - le renforcement des moyens de fonctionnement de la Bibliothèque nationale de France, destiné à améliorer les conditions d’accueil du public et de travail des agents (+ 20 millions de francs),

      - la compensation des mesures tarifaires décidées en faveur de la démocratisation dans les musées et les théâtres nationaux (cf. ci-dessus, coût total 15 millions de francs),

      - le financement de 79 créations d’emplois, dont 15 postes de stabilisation de vacataires permanents (au musée du Louvre et à Versailles),

      - le dégagement des moyens nécessaires à la réouverture du Centre Pompidou dans de bonnes conditions (plus un million de francs pour la Bibliothèque publique d’information et + 3 millions de francs pour le Centre),

      - et la poursuite du plan d’amélioration des conditions de fonctionnement des écoles d’architecture (+ 3,5 millions de francs).

      Pour le reste, tous les établissements placés sous la tutelle du ministère ont été rappelés à des exigences de bonne gestion et de gains de productivité, ce dont on doit se féliciter.

          3. La poursuite du rééquilibrage entre Paris et la province

      Afin de tirer les conséquences du pouvoir et du rôle croissants des collectivités locales en matière d’action culturelle, la déconcentration administrative de la gestion des crédits a bénéficié d’une forte impulsion ces dernières années. En 1999, tous titres confondus (hors charges de personnel, dotations décentralisées et dotations des établissements publics), 43 % des crédits disponibles ont été déconcentrés, contre 30 % en 1997.

      Le rapporteur considère que ce mouvement de déconcentration, en rapprochant les taches de gestion courante des dotations du lieu physique de leur consommation, doit avant tout permettre au ministère de la culture de recentrer son action sur ses missions de conception, d’impulsion, d’orientation, ainsi que d’évaluation et d’inspection.

      Il ne s’agit en rien de renoncer à une vision globale de la politique culturelle au profit d’une action segmentée et fragilisée mais bien de permettre aux directions régionales des actions culturelles (DRAC) de jouer pleinement leur rôle de conseil et de partenaire des collectivités territoriales et des institutions culturelles, dans le cadre des orientations et des missions conçues et formulées par les services centraux. Elle s’inscrit dans une logique de coopération renforcée, qui se substituera progressivement à une habitude d’administration autoritaire et cloisonnée de l’action culturelle.

      · Des crédits d’intervention de plus en plus déconcentrés

      En 2000, 66,8 % des crédits d’intervention seront délégués aux DRAC, contre 58,9 % en 1999.

- Déconcentration des crédits d’intervention (titre IV) -

      en millions de francs

    Chapitres

    LFI 98

    part du total

    LFI 99 (1)

    part du total

    PLF 2000

    Part du total

    Variation 2000/98

    43-20 : interventions culturelles d’intérêt national

    1 646,2

    47,8 %

    1 473,3

    41,1 %

    1 237,45

    33,2 %

    - 24,8 %

    43-30 : interventions culturelles déconcentrées

    1 801,4

    52,2 %

    2 112,5

    58,9 %

    2 492,47

    66,8 %

    + 38,3 %

    Total interventions

    3 447,6

    100 %

    3 585,8

    100 %

    3 729,92

    100 %

    + 8,2 %

      (1) hors réserve parlementaire

      L’action du ministère en faveur d’une gestion au niveau de l’échelon déconcentré des DRAC concerne l’ensemble de ses champs d’activité.

- montant des déconcentrations opérées –

répartition par direction

(en millions de francs)

     

    1998

    1999

    2000

    Archives

    0,18

    0

    0

    Livre et lecture

    9,27

    0,60

    0

    Architecture et patrimoine

    9,68

    0

    7,17

    Musées

    0

    0,50

    8,10

    Arts Plastiques

    0,97

    0

    2,54

    Spectacle vivant

    255,42

    204,051

    227,61

    Cinéma et audiovisuel

    0,98

    5,115

    11,64

    Développement culturel et action territoriale

    54,57

    10,0

    7,15

    Action internationale

    0

    4,0

    1,00

    Langue française

    0

    0

    0

    Total

    331,09

    224,26

    265,22

      Le domaine de l’action culturelle (délégation au développement et à l’action territoriale) est une priorité avec un taux de déconcentration qui dépasse les 80 %. La direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles a attribué plus de 60 % de ses crédits à l’échelon déconcentré en 1999, et ce taux sera en augmentation en 2000 (cf. tableau ci-dessus) avec le transfert en gestion des dernières scènes et compagnies nationales encore gérées à Paris. Les crédits de la délégation aux arts plastiques ont été déconcentrés à hauteur de 58 % en 1999, et, là aussi, la part réservée aux DRAC sera renforcée en 2000 avec un soutien plus affirmé aux centres d’art contemporain et aux fonds régionaux d’art contemporain.

      Avec un taux de déconcentration de 47 %, la direction de l’architecture et du patrimoine semble un peu en retrait, mais il faut noter que, d’une part, il s’agit de montants importants pour le ministère de la culture (plus d’un milliard de francs) et d’autre part que le volet « architecture » de cette direction commence à peine à faire l’objet d’une déconcentration budgétaire, en l’absence de correspondants architecture dans les DRAC jusqu’à cette année.

      Certains secteurs d’activité du ministère, compte tenu de leurs mission ou de leurs organisation, connaissent un taux de déconcentration moindre, qui pourrait néanmoins être amené à progresser dans les années à venir. C’est notamment le cas pour le cinéma, le livre et la lecture, les archives ou les musées de France.

          · Le rééquilibrage des crédits d’investissement entre Paris et la province

      Comme pour les dépenses ordinaires, la priorité en matière de crédits d’équipement a été donnée aux subventions d’investissements destinées à des opérations régionales.

      · La hausse des subventions d’équipement destinées aux établissements publics d’intérêt national (chapitre 66-91) est en effet considérablement réduite par rapport à 1999 (+ 1,48 % contre + 23,8 %). Ce ralentissement s’explique notamment par l’achèvement de certaines opérations comme le Grand Louvre, pour lesquels les autorisations de programmes passent de 63,92 millions de francs en 1999 à 8,6 millions de francs en 2000, ou celui la rénovation du musée Guimet (21,2 millions de francs en 1999, 12 en 2000), qui doit rouvrir ses portes en 2000.

      La baisse des crédits observée pour le Grand Palais n’est par contre que provisoire, le retard pris par les études de faisabilité ayant conduit à fortement ralentir le rythme d’ouverture des autorisations de programmes en 2000. Celui-ci devrait cependant reprendre dès 2002.

- Évolution comparée des crédits d’investissement consacrés aux équipements culturels nationaux à Paris et en Ile-de-France et aux équipements culturels dans les régions -

      En autorisations de programme (AP) hors réserve parlementaire

    Équipements culturels nationaux à Paris
    et en Ile-de-France

    LFI 1997

    LFI 1998

    LFI 1999

    PLF 2000

    Musée Guimet

    112,00

    17,78

    21,20

    12,00

    Musée d’Orsay

    3,50

    1,50

    20,10

    10,00

    Théâtre national de l’Odéon

    0,00

    121,00

    0,00

    0,00

    Ecole nationale supérieure des arts décoratifs

    14,00

    39,00

    30,10

    16,00

    Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts

    5,00

    5,00

    10,00

    11,20

    Ecole d’architecture

    22,00

    22,00

    22,00

    48,00

    CNAC-Georges Pompidou

    326,00

    129,00

    47,50

    8,00

    Achèvement du Grand Louvre

    200,00

    220,60

    63,92

    8,60

    Musée du Quai Branly

    0,00

    20,00

    62,00

    32,00

    Centre national de la danse

    10,00

    20,00

    17,00

    18,00

    Institut national d’histoire de l’art

    0,00

    20,00

    40,00

    60,00

    Centre de la jeune création

    0,00

    0,00

    0,00

    17,00

    Maison du cinéma

    0,00

    0,00

    0,00

    102,00

    Cité de l’architecture et du patrimoine (Chaillot)

    70,00

    62,00

    0,00

    40,00

    Palais Garnier

    0,00

    36,00

    36,50

    32,00

    Versailles

    23,00

    35,00

    35,00

    90,00

    Grand Palais

    0,00

    150,00

    217,00

    30,00

    Total

    785,50

    898,88

    622,32

    534,80

             

    Équipements culturels dans les régions

    LFI 1997

    LFI 1998

    LFI 1999

    PLF 2000

    Archives départementales et municipales

    17,00

    25,00

    30,00

    65,00

    Abbaye de l’Ardenne (archives de l’IMEC)

    1,00

    2,00

    5,20

    0,00

    Musées des collectivités locales

    75,00

    90,20

    116,55

    130,00

    Ecoles régionales et municipales d’arts plastiques, ateliers, FRAC, centres d’art

    15,00

    23,08

    29,85

    29,85

    Restructuration de la Villa Arson (Nice)

    0,00

    0,00

    5,00

    6,00

    Centre d’art contemporain de Toulouse et Midi-Pyrénées (GPR)

    25,00

    0,00

    1,00

    0,00

    Le Cargo (Grenoble) (GPR)

    3,50

    1,50

    45,00

    46,00

    Centres dramatiques nationaux et régionaux, scènes nationales, salles municipales

    32,90

    44,90

    53,10

    98,80

    Orgues d’église

    3,50

    3,00

    3,50

    3,50

    Équipements de diffusion culturelle, centres culturels de rencontre

    30,00

    42,00

    48,50

    61,00

    Musée Saint Pierre de Lyon (GPR)

    11,00

    8,35

    11,00

    0,00

    Aménagement du site du Pont du Gard (GPR)

    0,00

    0,00

    4,45

    0,00

    Centre national du costume de scène à Moulins (GPR)

    11,70

    14,00

    16,00

    0,00

    Ecole d’architecture

    33,00

    33,00

    33,00

    72,00

    Total

    258,60

    287,03

    402,15

    512,15

      Enfin, pour Versailles, élément symbolique du patrimoine français (s’agit-il de Paris ou de la Province ?), la réduction apparente des crédits sur le chapitre 66-91 (10 millions de francs contre 34 millions de francs en 1999) doit être nuancée par l’augmentation des autorisations de programme destinées à l’établissement sur le chapitre 66-20, relatif au patrimoine monumental. Au total, les autorisations de programmes inscrites pour Versailles sur le titre VI passent de 35 à 90 millions de francs.

      · Le montant des subventions d'investissement à des maîtres d'ouvrage locaux pour la rénovation ou la construction d'équipements culturels observe par contre une forte augmentation (+86 millions de francs, soit +24,7%), les augmentations les plus significatives ayant trait aux archives départementales et municipales (dotation portée de 30 à 65 millions de francs), aux musées classés et contrôlés (dotation portée de 117 à 130 millions de francs), aux équipements de spectacles (dotation portée de 53 à 99 millions de francs) et aux équipements de diffusion culturelle de proximité (dotation portée de 48,5 à 61 millions de francs).

      Au total, entre 1997 et 2000, le montant des subventions de l'Etat à des maîtres d’ouvrage locaux aura été multiplié par deux (de 214 à 434 millions de francs), les crédits relatifs à la réalisation d’équipements culturels dans les régions faisant désormais jeu (presque) égal avec ceux consacrés aux équipements culturels nationaux (512 millions de francs contre 534 millions de francs), alors que le rapport était de un à trois en 1997.

      Ce rééquilibrage du budget d’investissement du ministère de la culture sera de plus réalisé dans des conditions financières saines. Des efforts indéniables ont en effet été réalisés depuis 1998 pour effacer les retards de mandatements de subventions d’investissement aux maîtres d’ouvrage locaux puisque 350 millions de francs en crédits de paiement auront au total été dégagés sur trois ans ( 137,6 millions de francs en 1998, 156,2 en 1999 et 56,2 en 2000) par redéploiements internes ou par ouverture de crédits supplémentaires en loi de finances. Un changement de la clé de répartition des crédits de paiement sur trois ans au lieu de quatre devraient permettre, à l’avenir, d’éviter que de telles situations ne se renouvellent.

      Au total, ce rééquilibrage des crédits du ministère entre Paris et les régions est un résultat dont il convient de se féliciter, le rapporteur souhaitant simplement qu’il ne s’agisse pas là d’un effet d’affichage limité à la seule année 2000, mais bien d’une modification pérenne de la structure du budget et des habitudes de gestion de l’administration de la culture.

          B. DES ORIENTATIONS À CONSOLIDER

          1. Un premier effort pour résoudre le problème des emplois précaires

      En 1999, les effectifs des personnels du ministère de la culture s’élevaient à 14 700 personnes, dont près de 1 400 emplois précaires, auxquels il convient d’ajouter les emplois des établissements publics, soit 7 442 emplois.

      Cette importance de l’emploi précaire, particulière au ministère de la culture, était totalement inacceptable et a, à plusieurs reprises, provoqué des mouvements de personnels très dommageables dans les établissements publics tels que les musées ou les institutions de spectacle vivant.

      Le budget 2000 apporte enfin un début de réponse à cette situation en permettant, grâce à des créations nettes d’emplois, de résorber un certain nombre d’emplois précaires sans pour autant affecter les amplitudes horaires et la qualité du service offert au public, ce qui était le cas jusqu’à présent, puisque les quelques consolidations d’emplois effectuées étaient intervenues à effectifs budgétaires inchangés.

      - Évolution des emplois au ministère de la culture depuis 1997 -

      à structure constante

     

    1997

    1998

    98/97

    1999

    99/98

    2000

    2000/99

    Emplois Etat

    14 671

    14 698

    27

    14 700

    2

    14 995

    295 (1)

      - dont stabilisation emplois précaires

       

    27

         

    295

    Emplois établissements publics

    4 266

    4 300

    34

    4 524

    224

    4 603

    79

      - dont stabilisation emplois précaires

       

    34

     

    70

     

    15

    TOTAL

    18 937

    18 998

    61

    19 224

    26

    19 598

    374

    NB : Cette présentation retrace l’évolution réelle de la capacité à recruter du ministère. Les transferts d’emplois ont été neutralisés ; seules sont indiquées les créations nettes, pas les transformations d’emplois.

    (1) Dont 100 créations nettes d’emplois et 195 supports d’emplois dégagés par transferts d’emplois vers les établissements publics

      100 créations nettes d’emplois sont donc inscrites dans le projet de loi de finances pour 2000. Par ailleurs, par une mesure de transferts de 195 emplois de personnels non titulaires du budget du ministère de la culture vers celui de certains établissements publics d’enseignement, il est prévu, en redisposant des assises ainsi libérées sur le budget de l’Etat, de consacrer, en 2000, 295 nouveaux emplois à la stabilisation des personnels rémunérés sur ces crédits. Cette mesure bénéficiera à 57 agents relevant de la filière administrative, 206 agents de la filière de l’accueil, de la surveillance et du magasinage et 32 personnels associatifs.

      Ces créations, auxquelles s’ajouteront un certain nombre de postes vacants, devraient permettre l’organisation de concours débouchant sur la stabilisation d’au moins 320 agents dans les corps de personnels titulaires.

      - Évolution de la masse salariale du ministère de la culture -
      entre 1999 et 2000

en millions de francs

    Crédits personnels 1999

    3 178,51

    Mesures de reconduction

    + 84,09

    Mesures nouvelles

    - Dont créations d’emplois

    + 43,44

    + 32,03

    Transferts

        - Dont transfert d’emplois de contractuels enseignants vers les établissements publics

    - 62,33

    - 64,67

    Évolution totale masse salariale

    + 65,20

    Total crédits personnels 2000

    3 243,71

      En sus des créations d’emplois, des mesures catégorielles sont destinés aux personnels inscrits sur le budget de l’Etat (10,4 millions de francs directement consacrés à l’amélioration de la carrière des agents), ainsi que des mesures indemnitaires.

      Enfin, il est prévu d’augmenter les crédits consacrés à la formation continue des personnels (+ 0,5 millions de francs) ainsi que ceux consacrés à l’action sociale (+ 0,86 millions de francs).

      Si l’orientation est donc favorable, celle-ci demandera cependant à être consolidée dans les budgets suivants car, en 2000, seuls 20 % des emplois précaires bénéficieront d’une consolidation. La présentation d’un plan pluriannuel de résorption de ces types d’emplois serait donc hautement souhaitable.

          2. Une priorité attendue pour les enseignements artistiques

      Les crédits ordinaires (titres III et IV) consacrés aux enseignements augmenteront de 170 millions de francs en 2000 (+ 13,1 %), ce qui témoigne de la priorité – enfin ! – donnée à ce secteur. Ces crédits supplémentaires doivent permettre d'améliorer les conditions de vie et de travail des étudiants ainsi que la qualité des enseignements spécialisés et de renforcer la présence des enseignements artistiques en milieu scolaire.

      - Dotations consacrées aux enseignements artistiques depuis 1998 -

(crédits hors réserve parlementaires)

    En MF

    LF1 1998

    LF1 1999

    99/98

    en %

    PLF 2000

    2000/99

    en %

    Subvention aux établissements publics

    527,44

    548,10

    3,9 %

    623,67

    13,8 %

    Dont fonctionnement courant

    511,04

    516,10

    1,0 %

    592,62

    14,9 %

    Dont équipement courant

    16,40

    32,00

    95,1 %

    30,85

    - 3,6 %

    Interventions

    770,10

    787,14

    2,2 %

    843,91

    7,2 %

    Dont interventions centrales

    228,75

    262,99

    15,0 %

    203,96

    - 22,4 %

      Dont interventions déconcentrées

    541,35

    524,15

    - 3,2 %

    639,95

    22,1 %

    Investissements (AP)

    117,66

    124,53

    6,1 %

    165,60

    32,7 %

    Dont écoles d’architecture

    55,00

    55,00

    0,0 %

    120,00

    118,2 %

    Total dépenses ordinaires + autorisations de programme

    1 415,20

    1 460,07

    3,2 %

    1 633,18

    11,9 %

      · Les enseignements spécialisés

      S'agissant de l'amélioration des conditions de vie et de travail des étudiants, le régime des bourses des étudiants des écoles d'art et des écoles d'architecture sera aligné sur celui appliqué par l'Education nationale (coût : 14,5 millions de francs).

      Par ailleurs, la démarche initiée en 1999 avec l’institution d’une charte de service public destinée aux institutions de diffusion artistique sera étendue aux enseignements par la publication d'une charte de l'enseignement spécialisé. L’objectif est d’établir de nouveaux rapports contractuels, fondés sur une clarification des objectifs poursuivis à travers le soutien financier apporté par l'Etat et sur une exigence accrue quant à la prise en compte des attentes de l'Etat par les structures subventionnées. Cette charte sera progressivement mise en œuvre au cours de l'année 2000 par la signature de conventions d'objectifs avec les conservatoires nationaux de région, les écoles nationales de musique et les écoles nationales et municipales d'art. L'application de ces conventions se traduira par une augmentation progressive et sélective du soutien financier de l'Etat à ces structures.

      Chaque direction a par ailleurs mission de poursuivre, en 2000, un objectif d'amélioration de la qualité des enseignements spécialisés placés sous sa tutelle.

      Ainsi, la direction du spectacle vivant prévoit la préfiguration de deux nouvelles formations diplômantes pour l'enseignement musical. Il convient en effet d'améliorer la qualité des enseignements dispensés aux scolaires, amateurs et futurs professionnels, trop de professeurs de musique et de danse n’étant pas encore titulaires d'un diplôme d'enseignement. A vocation régionale ou interrégionale, les CEFEDEM, actuellement au nombre de huit, ont pour mission de remédier à cette situation. La préfiguration de deux nouveaux CEFEDEM sera engagée en 2000 et les CEFEDEM existants verront leurs moyens renforcés. En matière de formation professionnelle, une attention particulière sera également portée au développement de l'offre dans des disciplines jusqu'à présent peu représentées, comme le cirque et les arts de la rue.

      En ce qui concerne les arts plastiques, les concours de l'Etat aux écoles seront renforcés de manière significative puisque 8 millions de francs de crédits supplémentaires sont prévus à cet effet en 2000 (1,5 millions de francs pour les écoles nationales et 6,5 millions de francs pour les écoles municipales). Des conventions seront mises en œuvre avec les partenaires locaux pour favoriser la mise en réseau des établissements d'enseignement ainsi que le développement des options pédagogiques et des diplômes.

      Quant aux crédits d'investissement (autorisations de programme) destinés aux écoles d'art municipales, ils s'élèveront à 20 millions de francs en 2000, ce qui devrait permettre la poursuite des opérations de rénovation et d'extension de locaux, comme à Amiens et à La Réunion. Les établissements nationaux, par l'intermédiaire du Centre national des arts plastiques, bénéficieront de mesures nouvelles pour l'amélioration des équipements en région ; la Villa Arson à Nice fera l'objet d'une seconde tranche de travaux de restructuration (d'un montant de 6 millions de francs) et développera parallèlement son activité de Centre d'art. En outre, la rénovation du bâtiment « Ulm » de l'Ecole nationale supérieure des arts décoratifs sera poursuivie (16 millions de francs de crédits d'investissement prévus à ce titre) et l'Ecole nationale supérieure des beaux arts bénéficiera de travaux d'aménagement (pour un montant de 11,2 millions de francs), auxquels s'ajoutera une dotation particulière pour la restauration des parties classées.

      Enfin la réforme de l’enseignement de l’architecture et la rénovation des écoles est au centre des mesures nouvelles accordées à la direction de l’architecture et de patrimoine en 2000.

      Les subventions de fonctionnement aux écoles d'architecture bénéficieront d'une mesure nouvelle de 3,5 millions de francs. Depuis leur rattachement au ministère de la culture en 1996, les écoles d'architecture auront donc bénéficié d’une hausse de + 26,9 % de leurs crédits de fonctionnement (de 128,4 millions de francs à 163 millions de francs). De plus, comme pour l’ensemble des enseignements spécialisés, le régime des bourses à caractère social versées aux étudiants en architecture sera aligné sur celui de l'Education nationale (soit un coût de 7 millions de francs en mesure nouvelle).

      En ce qui concerne les crédits d'investissement destinés à la rénovation, l'extension et la création d'écoles d'architecture, ceux-ci seront doublés en 2000 ; leur montant sera donc porté de 55 millions de francs en 1999 à 120 millions de francs (en autorisations de programme), ce qui permettra d'engager la mise en œuvre de la nouvelle carte scolaire en Ile-de-France. Dans les régions, seront lancés la construction en centre-ville de la nouvelle école d'architecture de Nantes, l'extension de l'école d'architecture de Rennes, la poursuite de la modernisation de l'école d'architecture de Grenoble, la poursuite de la réalisation des Grands ateliers de l'Isle-d'Abeau et l'achèvement de l'extension et de la réhabilitation de l'école d’architecture de Toulouse.

      · les enseignements artistiques en milieu scolaire

      L’éducation artistique constitue le fondement de toute politique culturelle et cet enjeu est de taille pour la formation et l'épanouissement des enfants et des adolescents. En outre, la généralisation de l'éducation artistique aurait des effets déterminants sur la composition sociologique des futurs publics et sur le contenu et la vitalité de la création artistique en France. Pourtant, dix ans après le vote de la loi du 3 janvier 1988 sur les enseignements artistiques, nous sommes encore bien loin de cet objectif de généralisation.

      Si l’on prend l’exemple des ateliers de pratiques artistiques, qui permettent aux élèves du secondaire de découvrir un domaine artistique, culturel ou patrimonial, leur nombre, déjà modeste, a nettement chuté en trois ans, puisqu’il est passé de 2468 ateliers (pour 50 200 élèves) en 1996-1997 à 2353 (pour 44 000 élèves) en 1998-1999. Cette érosion a plus particulièrement touché les collèges mais concerne toutes les disciplines, sauf l’écriture, la danse, le cirque et le patrimoine, qui progressent légèrement. Durant la dernière année scolaire, 1995 ateliers étaient donc proposés dans les collèges, 138 dans les lycées et 200 dans des lycées professionnels… Où est la généralisation ?

      Dans son avis sur le budget de la culture pour 1998, le rapporteur avait fortement regretté le peu d’attention accordée aux crédits des enseignements artistiques. Ceux-ci ont également été « oubliés » en 1999, les mesures nouvelles étant réduites à la portion congrue (+ 1,1 %). Il ne peut donc que se féliciter des 17,3 millions de francs de mesures nouvelles consacrés en 2000 à l'éducation artistique et culturelle en faveur des publics scolaires et universitaires.

      Le ministère de la culture et celui de l’éducation nationale semblent enfin parvenus à se rapprocher pour mettre en œuvre différentes actions communes. Celles-ci devraient prendre leur essor en 2000, afin de remédier à la situation fondamentalement insatisfaisante qui veut que seuls 3 % des publics scolaires bénéficient actuellement d'un enseignement artistique, contrairement aux objectifs fixés par la loi du 6 janvier 1988.

      Ces actions concernent :

      - la mise en place systématique, dans le cadre de la réforme de l’enseignement secondaire, d'ateliers de pratiques artistiques dans les lycées, notamment professionnels, avec un objectif de généralisation en 2001 (10 millions de francs) ;

      - le développement des contrats éducatifs locaux grâce notamment à un rapprochement entre établissements d'enseignement spécialisés et établissements scolaires ;

      - Le renforcement du programme « Musique à l'école » qui permet l'organisation, dans les écoles primaires, d'un enseignement musical pour tous les élèves grâce en particulier à l'intervention des écoles de musique (10 millions de francs) ;

      - l'introduction dans les cursus scolaires d'une éducation à l'image.

      Il reste que bien des efforts sont encore à faire ne serait-ce que pour parvenir à réaliser les objectifs fixés par la loi de 1988. Le rapporteur est bien conscient que les crédits budgétaires ne sont pas tout, et qu’une évolution des mentalités et des comportements des enseignants, des administrations, des parents et des élus est également nécessaire pour que les actions projetées puissent véritablement fonctionner, mais il réaffirme fortement la nécessité de maintenir, voire d’amplifier l’effort manifesté cette année en faveur de l’enseignement artistique en milieu scolaire. Car nous sommes ici au cœur même de la démocratisation culturelle tant souhaitée par la ministre de la culture.

          C. DES ZONES DE FAIBLESSE PERSISTANTES

          1. L’évolution contrastée des crédits du patrimoine

      Si la hausse globale des crédits dégagés pour l’an prochain semble tout à fait honorable (+ 4,3 % en dépenses ordinaires et crédits de paiement), celle-ci cache des évolutions bien peu satisfaisantes

      - Crédits du patrimoine -

      Évolution entre 1998 et 2000 (DO + CP)

      en millions de francs

       

    en MF

    Variation en %

    Article

    Interventions

    LFI 98

    LFI 99

    PLF 2000

    99/98

    2000/99

    2000/98

    35-20/20

    Entretien MH* Etat

    63,18

    63,18

    65,18

    constant

    + 3,2

    + 3,2

    43-30/40

    Entretien MH* non Etat

    59,06

    69,06

    69,06

    + 16,9

    constant

    + 16,9

    TOTAL ENTRETIEN (DO)

    122,24

    132,24

    134,24

    + 8,2

    + 1,5

    + 9,8

    Maîtrise d’ouvrage par l’Etat :

               

    56-20/50

    Travaux MH* Etat

    574,9

    707,3

    731,24

    + 23,0

    + 3,4

    + 27,2

    56-20/60

    Travaux MH* non Etat

    346,5

    350,5

    367,4

    + 1,1

    + 4,8

    + 6,0

    Total titre V

    921,4

    1 057,8

    1 098,64

    + 14,8

    + 3,8

    + 19,2

    Maîtrise d’ouvrage par propriétaire :

               

    66-20/90

    Opérat. d’intérêt national

    316,7

    172,9

    121,3

    - 45,4

    - 29,8

    - 61,7

    66-20/60

    Opérations déconcentrés

    49,2

    109,8

    175,9

    + 223

    + 60,2

    + 357

    66-20/20

    Travaux sur monuments non protégés (non Etat)

    34,3

    34,1

    34,5

    - 0,5

    + 1,1

    + 0,6

    Total titre VI

    400,2

    316,8

    331,7

    - 20,8

    + 4,7

    - 17,1

    TOTAL TRAVAUX (CP)

    1 321,6

    1 368,0

    1 430,3

    + 3,5

    + 4,5

    + 8,2

    TOTAL (DO + CP)

    1 443,8

    1 500,2

    1 564,5

    + 3,9

    + 4,3

    + 8,35

    * MH : monument historique (monuments protégés, c’est à dire classés ou inscrits)

      · Les crédits d’entretien inscrits sur les chapitres 35-20 (monuments appartenant à l’Etat) et 43-30 (monuments n’appartenant pas à l’Etat) sont en quasi-stagnation en 2000 puisqu’ils ne bénéficieront que de 2 millions de francs supplémentaires, après une hausse de 10 millions de francs en 1999, déjà alors jugée insuffisante.

      L’an passé, c’était les crédits des bâtiments appartenant à l’Etat qui ne bénéficiaient d’aucune mesure nouvelle, cette année, c’est au tour des bâtiments « non Etat »… Ce jeu budgétaire à somme nulle n’est pas satisfaisant ni même très sérieux, car ce sont bien les crédits d’entretien qui permettent, lorsqu’ils sont utilisés à bon escient, d’éviter par la suite des grosses réparations qui se révèlent en fin de compte beaucoup plus coûteuses. Il semble en fait que 20 à 30 millions de francs de crédits supplémentaires seraient aujourd’hui nécessaires pour assurer le maintien en l’état des bâtiments classés et éviter ainsi de grever d’ores et déjà les crédits d’investissement de 2002 ou 2003.

      Il y a dans ce choix budgétaire à courte vue un manque de cohérence et, en fin de compte, de souci de bonne gestion qui ne cesse, année après année, d’étonner les rapporteurs budgétaires…

      · la baisse drastique imposée en 1999 aux subventions d’investissement accordées aux propriétaires de monuments classés (- 21 %) n’est que très partiellement rattrapée en 2000, puisque, sur deux ans, la perte s’élève à près de 70 millions de francs (soit – 17 %).

      Si une partie de cette baisse était justifiée par la conclusion de certains grands chantiers d’établissements publics (comme le Grand Louvre et de Villette), le rapporteur regrette que les crédits correspondant n’aient pas pu être conservés par le ministère pour être recyclés sur d’autres projets. Le ministère de la culture aurait-il manqué de poids face à une administration des finances toujours suspicieuse à l’égard des crédits culturels ? Le rapporteur ne saurait, pour sa part, se prononcer sur cette question…

          2. Le sacrifice des crédits d’acquisition

      Pour la deuxième année consécutive, les crédits de commande et d’acquisition sont les grands sacrifiés du budget de la culture. Après une hausse limitée à 0,6 % en 1999, le chapitre 43-92 observera une baisse de 1,1 % en 2000 et une stagnation à structure budgétaire constante.

      La plupart des directions voient leurs crédits maintenus au niveau de 1999, voire de 1998 puisqu’aucune mesure nouvelle ne viendra cette année abonder leurs moyens d’action, la dotation de délégation aux arts plastiques étant même réduite de 1,1 million de francs transférés sur le chapitre 43-30 (opérations déconcentrées). Cette mesure fait clairement apparaître les limites de l’intention affichée par le ministère d’assurer un soutien à la jeune création.

- Évolution des crédits d’acquisition et de commande publiques -

par directions et délégations du ministère

      en millions de francs

     

    LFI 1998

    LFI 1999

    99/98

    PLF 2000

    2000/99

    2000/98

    Patrimoine et architecture

    3,4

    3,4

    0 %

    3,4

    0 %

    0 %

    Spectacle vivant

    15,8

    7,3

    – 54 %

    7,3

    0 %

    – 54 %

    Musées

    129,1

    136,9

    + 6 %

    136,9

    0 %

    + 6 %

    Arts plastiques

    68,3

    68,3

    0 %

    67,2

    – 1,6 %

    – 1,6 %

    Livre et lecture

    6,7

    6,7

    0 %

    6,7

    0 %

    0 %

    Archives

    4,1

    4,1

    0 %

    4,1

    0 %

    0 %

    Centre Pompidou

    27,7

    30,0

    + 8,3 %

    28,2

    – 6 %

    + 1,8 %

    TOTAL

    255,1

    256,7

    + 0,6 %

    253,8

    – 1,1 %

    – 0,5 %

      Il en est de même pour la stagnation (et la forte régression sur trois ans) des crédits d’acquisition de la direction du spectacle vivant, qui, malgré sa volonté d’encourager la création contemporaine par un soutien à l’écriture et au montage d’œuvres d’auteurs vivants, se trouve quasiment dépourvue de toute capacité de commande d’œuvres.

      En trois ans, seule la direction des musées de France aura en fait bénéficié d’une légère augmentation de ses crédits (+ 7,8 millions de francs dégagées en 1999). Pourtant, son budget demeure largement insuffisant en regard des besoins d’enrichissement des collections des établissements existants et de la nécessité de constituer la collection du nouveau musée des arts et des civilisations (seulement 15 millions de francs inscrits cette année contre 25 en 1999).

      La reconduction à 105 millions de francs des crédits du Fonds du patrimoine (réorienté vers un soutien principal aux musées classés et contrôlés) et la stagnation des crédits directement gérés par la direction (dont 10 millions de francs, soit un tiers, seront en pratique versés à la Réunion des musées nationaux pour compenser la perte de recettes induite par la généralisation de la gratuité un dimanche par mois dans tous les musées nationaux) seront-elles vraiment suffisantes, comme l’affirme le dossier de présentation du budget 2000 du ministère de la culture, pour « permettre l'acquisition des œuvres dont le refus de certificat d'exportation est arrivé à échéance, poursuivre, conjointement avec le ministère de l'Education nationale, de la recherche et de la technologie, une politique ambitieuse d’acquisitions destinées au musée du Quai Branly voulu par le Président de la République, et concourir à l'enrichissement des collections des musées nationaux et des musées classés et contrôlés » ?

      Le rapporteur se permettra d’en douter fortement, et de déplorer, en conséquence, la non-inscription à l’ordre du jour du Parlement du projet de loi, maintes fois annoncé mais toujours attendu, de réforme de la loi du 31 décembre 1992 relatif à l’exportation des trésors nationaux. L’Etat ne s’étant jamais donné les moyens budgétaires de pouvoir intervenir sur le marché de l’art dans le cadre concurrentiel (comme la loi l’y contraignait en pratique), ce texte n’a en effet pas permis de s’opposer à la sortie définitive du territoire d’objets d’art ayant rang de trésors nationaux. Faute d’un budget d’acquisition digne de ce nom, la loi doit donc aujourd’hui être modifiée si l’on souhaite que les fleurons de l’art français cessent de quitter nos frontières pour aller rejoindre des collections privées étrangères.

      Enfin, la situation Centre national d’art et de culture Georges Pompidou doit être examinée de façon spécifique en raison de la fermeture du Centre depuis deux ans pour rénovation. Celui-ci a bénéficié, en 1998 et 1999, d’une nette augmentation de ses crédits d’acquisition (+ 6,2 % sur cette période) afin de pouvoir préparer la réouverture du musée dans de bonnes conditions malgré la perte de recettes induite par la fermeture. Cet accroissement est nettement interrompu dans le budget 2000, année de réouverture du Centre Beaubourg, puisque la dotation est réduite de 1,8 million de francs, transférés sur le budget de fonctionnement de l’établissement (chapitre 36-60), qui ne sera donc plus tenu de les utiliser à des fins d’acquisition. Il s’agit là d’un moyen un peu discutable d’étoffer le budget de fonctionnement du Centre pour sa réouverture.

II. LES MUSÉES, UN VERITABLE OUTIL
DE DÉMOCRATISATION CULTURELLE

      Qu’est-ce qu’un musée ? c’est le lieu permettant, dans un but non lucratif, la rencontre entre une collection permanente de biens culturels et un public, ou plutôt des publics. C’est une institution à vocation tout à la fois scientifique et artistique, un espace d’étude et de recherche, mais aussi de culture et de « délectation » selon les termes de l’ordonnance provisoire de 1945 qui continue encore aujourd’hui à fonder le droit des musées.

      Un musée, c’est donc traditionnellement une offre de connaissance et d’affinement de la culture et du goût… et ce n’est ni une salle de spectacle, ni un centre commercial. Mais les musées, en cinquante ans, ont changé. Leur nature, leurs structures, les hommes et les femmes qui les animent, leur vocation ont évolué avec le siècle, l’ouverture de la culture, l’élévation du niveau de vie, la décentralisation aussi.

      Aujourd’hui, alors que la culture et l’art se doivent d’être accessibles au plus grand nombre, les musées se doivent à une nouvelle ambition : permettre à tous, et surtout à ceux pour qui la culture est encore discriminante, d’accéder au beau, à l’histoire, à la mémoire ou aux sciences dans un langage clair et une démarche moderne… Pour devenir, en quelque sorte, un outil de démocratisation.

          A. LE BUDGET DE LA DIRECTION DES MUSÉES DE FRANCE, ENTRE GRANDS PROJETS ET DÉCENTRALISATION

          1. Une évolution structurelle sur le long terme

      L’examen du budget de la direction des musées de France depuis sept ans (seule série complète disponible) permet de mieux comprendre le poids que les grands travaux culturels peuvent représenter pour une direction du ministère et la conduite parallèle d’une politique de soutien sur le terrain.

      - Évolution du budget de la DMF entre 1993 et 1999 -

En millions de francs

    Chapitre

     

    1993

    1994

    1995

    1996

    1997

    1998

    1999

    Titre III

    Moyens des services

    619,1

    613,6

    610,9

    562,7

    537,1

    505,6

    513,4

    31-90

    Dont  - Autres rémun. Principales

    40,0

    40,0

    40,0

    30,4

    27,0

    26,8

    26,8

    34-97

        - matériels, moyens de fonctionnement

    84,1

    71,8

    75,5

    56,4

    54,8

    16,1

    15,7

    34-98

        - services déconcentrés

             

    140,8

    143,9

    36-60

        - subv. établissements publics

    370,6

    362,5

    355,6

    361,6

    343,4

    311,6

    316,6

    Titre IV

    Action éducative et culturelle

    227,1

    168,5

    168,5

    221,5

    219,5

    252,0

    277,7

    43-50

    Dont - Patrimoine muséographique et arts plastiques : subventions

    97,6

    92,9

    92,9

    103,6

    102,6

       
     

        - Patrimoine muséographique : interventions

    56,9

    48,2

    48,2

    22,6

    15,5

       

    43-20

        - Interventions nationales

             

    86,5

    101,0

    43-30

        - Opérations déconcentrées

         

    28,3

    31,9

    36,3

    39,8

    43-92

        - commandes et acquisitions

    121,7

    67,9

    67,9

    112,6

    111,6

    129,1

    136,9

    Titre V

    Investissements exécutés par l’Etat

    106,8

    81,0

    98,0

    138,5

    156,5

    71,7

    108,2

    56-91

    Dont – travaux

     

    67,0

    84,0

    124,5

    142,5

    57,7

    94,2

    Titre VI

    Subventions d’investissement

    676,3

    459,0

    471,5

    358,1

    344,0

    376,8

    301,8

    66-91

    Dont - collectivités locales

     

    152,3

    190,0

    78,9

    100,0

    90,2

    116,5

     

        - Grand Louvre

    461,0

    259,0

    259,0

    175,0

    170,0

    200,0

    35,9

     

        - Versailles

       

    12,5

    25,0

    24,0

    18,0

    34,0

    TOTAL GENERAL (DO + CP)

    1 629,3

    1 322,2

    1 348,9

    1 280,9

    1 257,1

    1 226,2

    1 201,3

      Si l’enveloppe dévolue à la DMF est en effet, globalement, en forte diminution depuis 1993, l’examen plus détaillé des mouvements propres aux différents titres et chapitres montre bien que cette baisse est essentiellement liée à la forte réduction des subventions d’investissement (titre VI : - 445 millions de francs entre 1993 et 2000, soit une baisse de deux tiers des crédits des paiements), assortie, sur une échelle moindre, d’une baisse des subventions de fonctionnement accordées aux établissements publics (- 66 millions de francs sur le chapitre 36-60, soit une baisse de 18 % entre 1993 et 2000).

      Dans un même temps, les crédits ont fait l’objet, comme dans l’ensemble des directions du ministère de la culture, d’une déconcentration accrue, afin de mieux accompagner une redistribution des crédits d’intervention en directions des actions en régions. Ainsi, les crédits déconcentrés destinés à subventionner le développement culturel sont passés de 8,5 millions de francs en 1990 à 47,5 millions de francs en 2000.

      Le même phénomène est observable en matière de crédits d’investissement, l’achèvement de grands travaux parisiens comme le Louvre permettant à la DMF de restaurer le niveau des subventions d’investissement destinées à soutenir la modernisation des musées en région.

      Le tableau ci-après retrace l’évolution et la répartition de ces subventions d’investissement depuis 1990.

- Autorisations de programme (AP) déléguées par région -

en milliers de francs

    +Région

    1990

    1991

    1992

    1993

    1994

    1995

    1996

    1997

    1998

    1999

    2000

    Imputation budgétaire (chapitre, article)

    6630.21

    6630.21

    6630.21

    6691.31

    *

    6691.31*

    6691.31*

    6691.31*

    6691.93

    *

    6691.93

    *

    6691.93

    6691.93

    Alsace

    10 600

    3 900

    7 000

    15 500

    35 000

    35 000

    4 650

    3 200

    3 000

    6000

     

    Aquitaine

    3 830

    3 600

    5 600

    4 800

    0

    4 000

    0

    5 000

    5 500

    3000

     

    Auvergne

    11 600

    7 750

    1 500

    1 000

    1 800

    0

    0

    1 100

    1 750

    0

     

    Bourgogne

    7 823

    4 130

    16 000

    11 500

    11 500

    0

    1 400

    3 400

    6 000

    11000

     

    Bretagne

    5 026

    9 050

    10 000

    6 700

    4 800

    0

    3 750

    2 800

    4 500

    8800

     

    Centre

    6 590

    2 000

    8 600

    10 000

    0

    0

    0

    800

    1 500

    500

     

    Champagne-Ardenne

    6 310

    5 150

    2 000

    5 900

    3 200

    1 000

    0

    0

    500

    0

     

    Corse

    3 700

    1 000

    8 500

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

     

    Franche-Comté

    1 100

    3 500

    4 200

    4 300

    800

    2 000

    3 250

    1 035

    4 000

    6 250

     

    Ile-de-France

    10 900

    11 580

    10 000

    9 500

    14 200

    39 000

    11 200

    18 900

    1 750

    2 000

     

    Languedoc-Roussillon

    11 450

    14 700

    10 000

    11 700

    6 500

    4 000

    2 150

    100

    6 000

    5 000

     

    Limousin

    1 000

    1 100

    2 000

    1 000

    500

    0

    0

    0

    500

    2 500

     

    Lorraine

    4 000

    6 850

    9 500

    3 600

    12 000

    2 700

    11 200

    14 000

    8 000

    7 300

     

    Midi-Pyrénées

    3 950

    3 300

    5 000

    6 500

    4 000

    1 000

    13 700

    27 800

    6 000

    6 700

     

    Nord-Pas-de-Calais

    9 761

    22 260

    22 600

    25 700

    26 000

    18 500

    7 450

    0

    4 600

    16 200

     

    Basse-Normandie

    3 500

    20 000

    14 000

    5 000

    1 000

    700

    560

    150

    0

    1 600

     

    Haute-Normandie

    0

    10 800

    13 000

    3 797

    0

    7 500

    0

    500

    9 000

    1 900

     

    Pays de la Loire

    4 620

    3 650

    4 000

    4 300

    3 800

    4 300

    2 300

    0

    3 500

    6 000

     

    Picardie

    8 500

    8000

    9 000

    3 250

    1 000

    500

    950

    100

    200

    0

     

    Poitou-Charentes

    3 160

    5 400

    4 500

    8 000

    6 500

    2 500

    3 250

    1 900

    5 000

    3 800

     

    PACA

    27 100

    16 450

    8 000

    15 000

    500

    3 500

    5 600

    18 000

    12 000

    10 000

     

    Rhône-Alpes

    19 980

    37 630

    42 000

    23 600

    18 000

    5 000

    5 600

    0

    7 000

    18 000

     

    DOM-TOM :

                         

    Guadeloupe

    0

    0

    0

    0

    1 000

    0

    370

    0

    0

    0

     

    Guyane

    0

    0

    0

    0

    0

    1 000

    0

    0

    0

    0

     

    Martinique

    0

    0

    0

    0

    1 000

    0

    0

    0

    0

    0

     

    Réunion

    0

    0

    1 000

    0

    300

    0

    0

    0

    0

    0

     

    Polynésie

    0

    0

    0

    0

    500

    0

    0

    0

    0

    0

     

    Nouméa

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    0

     

    Saint-Pierre et Miquelon

    0

    0

    0

    0

    0

    0

    2 400

    2 500

         

    Total réparti

    164 500

    201 800

    218 000

    180 647

    153 900

    132 200

    79 780

    100 565

    90 300

    116 500

    130 000

      * Crédits globalisés avec ceux des autres directions du Ministère.

          2. Un budget 2000 clairement orienté vers les musées en région

      Pour les musées de France, le budget 2000 se caractérise davantage par une modification importante dans la répartition des ressources (avec une forte déconcentration des crédits en région), que par une augmentation en masse des crédits. Au total en effet, le budget de la DMF diminue de 7,52 %, car d'importantes opérations de rénovation et d'équipement s'achèvent ou sont en fin de financement.

      · Les dépenses ordinaires observent une baisse de 2,19 %.

      en millions de francs

    CHAP.

     

    LFI 1999

    PLF 2000

    Évolution

    TITRE III

    3190/31

    Vacations – musées nationaux

    18,99

    18,99

    0,00 %

    3190/34

    Vacations Orsay

    7,85

    7,85

    0,00 %

    3497/57

    Services centraux DMF

    15,77

    12,87

    -18,39 %

     

    Formation

    2,10

    2,10

    0,00 %

    3498/40

    Services déconcentrées

    143,96

    145,43

    1,02 %

    3520-11

    Entretien

    6,66

    7,16

    7,51 %

    3497/67

    Études DMF

    1,50

    1,50

    0,00 %

    3497-93

    Recherche

    1,05

    0

    -100,00 %

    Total fonctionnement

    197,89

    195,91

    -1,00 %

    3660-32

    Musée Gustave Moreau

    315,92

    316,75

    0,26 %

    3660-33

    Musée Jean-Jacques Henner

    316,41

    316,70

    0,09 %

    3660-36

    Ecole du Louvre

    13,48

    11,96

    -11,28 %

    3660-73

    Musée du Louvre

    281,13

    274,36

    -2,41 %

    3660-83

    Musée du Quai Branly

    7,50

    7,56

    0,81 %

    3660-88

    Musée du Château de Versailles

    13,87

    8,00

    -42,30 %

    3660-85

    Recherche (contrats Louvre)

    1,41

    1,72

    21,77 %

    Total établissements publics

    318,05

    304,26

    -4,34 %

    Total du titre III

    515,94

    500,18

    -3,06 %

    Titre IV

    4320

    Interventions d’intérêt national

    101,02

    87,32

    -13,56 %

    4320-14

    aides aux projets

    24,68

    9,58

    -61,18 %

    4320-15

    aides aux institutions

    75,44

    74,44

    -1,33 %

    4320-44

    Enseignement et formation

    0,90

    903,11

    0,00 %

    4320-94

    Bourses (Ecole du Louvre et Patrimoine)

     

    2,40

    NS

    4330

    Interventions déconcentrées

    39,86

    51,96

    30,35 %

    4330/14

    Musées de France : aides aux projets

    35,42

    47,52

    34,16 %

    4330/34

    Enseignements et formation

    4,44

    4,44

    0,00 %

    4392

    Commandes et achats d’œuvres

    136,88

    136,88

    0,00 %

    4392-31

    Acquisitions des musées nationaux

    11,87

    21,87

    84,23 %

    4392/52

    FRAM (acquisitions musées en région)

    19,76

    19,76

    0,00 %

    4392-60

    Fonds du patrimoine

    105,25

    95,25

    -9,50 %

    Total du titre IV

    277,77

    276,17

    -0,58 %

    Total Dépenses ordinaires

    793,72

    776,36

    -2,19 %

      - Les crédits du titre III (en diminution de 3,06 %, soit - 15,76 millions de francs) sont surtout marqués par la baisse des subventions de fonctionnement accordées au musée du Louvre (- 2,4 %) et au musée du château de Versailles (- 42,3 %), ainsi que par la suppression des crédits de recherche (1,05 millions de francs). Les crédits de fonctionnement de l'administration centrale seront par ailleurs plus largement déconcentrés pour ce qui concerne des dépenses que peuvent effectuer les établissements (communication, dépliants, guides, etc.). 2,9 millions de francs ainsi seront directement dévolus aux musées.

      - Pour le titre IV (en baisse de 1,6 million de francs mais en hausse de 4,26 % à structure budgétaire constante), la priorité est clairement donnée à la démocratisation et aux musées en région.

      Un fonds expérimental de soutien des expositions d’intérêt national organisées par les musées classés et contrôlés a été mis en place en 1999 afin de favoriser un plus grand rayonnement de ces manifestations, notamment en direction des publics prioritaires de la politique de démocratisation culturelle. Le succès remporté par cette initiative tant auprès des collectivités territoriales que des visiteurs incite la Direction des musées de France à la poursuivre et à l'étendre.

      Des mesures comme l’instauration de la gratuité des musées nationaux en Ile-de-France et en région, le premier dimanche de chaque mois, à partir du 1er janvier 2000 (cf. première partie de cet avis) ou le développement d’une politique de dépôt d'œuvres majeures des musées nationaux dans les musées classés pour une durée d'un an devraient également contribuer à créer une nouvelle dynamique démocratique :

      Enfin, à une mesure importante de déconcentration des crédits destinés aux restaurations des collections des musées classés et contrôlés (8,1 millions de francs sur les 10,3 millions de francs consacrés à ces opérations), s'ajoutera la mise en œuvre de 4 millions de francs de mesures nouvelles en région pour développer l'aide à ces musées et soutenir l'action de diffusion culturelle dont ils ont la charge.

      On peut par contre déplorer que les crédits d’acquisition soient simplement maintenus à leur niveau de 1999 (soit 136,9 millions de francs).

      · En ce qui concerne les dépenses d’investissement, les autorisations de programme observeront une diminution de – 17,72 % (- 2.14 % sur le titre V et - 23.47 % sur le titre VI), en raison de l’achèvement d’une certain nombre de chantiers. La deuxième tranche du Grand Louvre est en effet terminée et la rénovation des musées de l'Orangerie, d'Orsay et Guimet nécessitent désormais des financements moins importants.

      - Budget d’investissement de la direction des musées de France -

en autorisations de programmes

      en millions de francs

    Chap.

     

    LFI 1999

    PLF 2000

    Évolution

    Titre V

    5691-31

    Restauration dans musées nationaux

    14,00

    17,00

    21,43 %

    5691-31

    Travaux dans musées nationaux

    94,20

    89,00

    -5,52 %

     

    dont Guimet

    21,20

    12,00

    -43,40 %

     

    Dont Musée d’Orsay

    23,00

    17,00

    -26,09 %

     

    Autres musées nationaux

    50,00

    60,00

    20,00 %

    5698-30

    Équipement recherche

    3,75

    3,55

    -5,33 %

    Total titre V

    111,95

    109,55

    -2,14 %

    Titre VI

    6698-30

    Recherche

    1,17

    1,17

    0,00 %

    6691-32

    Musées territoriaux

    116,55

    130,00

    11,54 %

    6691-61

    Ecole du Louvre

    0

    0,75

     

    6691-62

    Musée du Quai Branly

    62,00

    32,00

    -48,39 %

    6691-68

    Versailles

    34,00

    10,00

    -70,59 %

    6691-69

    Opérations DMF par l’EPMOTC*

    63,92

    27,60

    -56,82,%

     

    Aménagement du musée de l’Orangerie

    28,00

    10,00

    -64,29 %

     

    Centre restauration aile de Flore

     

    8,60

     
     

    UCAD

     

    9,00

     
     

    Grand Louvre

    35,92

    0

    -100,00 %

    6691-73

    Musée du Louvre

    25,40

    30,40

    19,69 %

    Total titre VI

    303,04

    231,92

    -23,47 %

    Total des autorisations de programmes

    414,99

    341,47

    -17,72 %

    Total Budget (DO + AP)

    1 208,71

    1 117,83

    -7,52 %

      Deux grandes priorités peuvent être détachées :

      - La rénovation des musées nationaux

      Les dotations prévues dans le cadre du projet de loi de finances pour 2000 permettront de financer l'achèvement du grand chantier de rénovation du musée national des arts asiatiques (musée Guimet), mais aussi la poursuite de la mise en place de la muséographie du musée de Eyzies, ainsi que la rénovation des espaces d’accueil et d’exposition du musée d’Orsay et la restructuration du musée de l’Orangerie aux Tuileries. De plus, l'année 2000 verra l'installation des ateliers du Centre de recherche et de restauration des musées de France dans l'aile de Flore du Palais du Louvre, et la réintégration des services administratifs et de la conservation du musée national du Moyen-Age de Cluny dans ses locaux rénovés.

      La dotation de fonctionnement du Musée Guimet sera en sensible augmentation à l'occasion de sa réouverture, une déconcentration de crédits de communication venant majorer les dotations destinées autres musées.

      Par ailleurs, les dispositifs de sécurité mécanique et électronique dans les musées nationaux feront l'objet, encore plus que les années précédentes, d'importants investissements (Orsay, Fontainebleau, Compiègne, Versailles, Musée Chagall à Nice, etc.).

      Les subventions de fonctionnement des établissements publics seront par contre strictement contenues ou diminuées, compte tenu des créations d'emplois prévues par ailleurs, et des capacités de collecte de ressources propres.

      - Les chantiers de rénovation et de modernisation des musées classés et contrôlés en région

      Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit un accroissement conséquent des concours de l’Etat aux collectivités locales pour la rénovation et la modernisation des musées classés et contrôlés : 130 millions de francs au lieu de 116,6 millions de francs en 1999.

      Les opérations qui seront poursuivies ou engagées portent sur des projets de premier plan et couvrent un grand nombre de régions.

      Parmi les opérations les plus importantes, on peut citer : le musée du chemin de fer de Mulhouse (Alsace), le nouvel équipement culturel à Rennes (Bretagne), le musée d’archéologie urbaine et portuaire à Port Vendres (Languedoc-Roussillon), le musée des Beaux-Arts d'Angers (Pays de la Loire), le musée d'art et d'industrie de Saint-Étienne (Rhône-Alpes), la cité des images à Epinal (Lorraine), l'écomusée de Lewarde ((Nord-Pas-de-Calais), les musées Fenaille à Rodez et Toulouse-Lautrec à Albi (Midi-Pyrénées).

          B. LES MUSÉES EN FRANCE : UNE GRANDE DIVERSITÉ DES STRUCTURES ET DES MODES DE GESTION

      En 1945, l’organisation des musées en France est particulièrement simple : une administration d’Etat (la Direction des musées) gère l’ensemble des musées présents sur le territoire, ceux qui appartiennent à l’Etat (les « musées nationaux ») comme les autres, les musées « de province », qui sont « classés » et « contrôlés ».

      Un double mouvement est venu profondément remettre en cause cette structure simple. D’une part, le nombre des musées a connu une véritable explosion qui s’est traduite par une transformation de la notion même de musée, tant sur le plan des tâches accomplies, que des moyens utilisés, des publics visés et des secteurs concernés. De ce fait, l’organisation centrale est devenue beaucoup plus complexe.

      D’autre part, le développement de la décentralisation et la déconcentration de l’action administrative qui a suivi a conduit à multiplier les rouages entre l’administration centrale et les musées et à rapprocher ces derniers des enjeux de développement local et d’aménagement du territoire.

      En terme de gestion, on peut schématiquement distinguer deux grands ensembles : les musées nationaux, qui dépendent de l’Etat et les musées territoriaux, rattachés aux collectivités locales.

          1. Les musées nationaux : la règle et l’exception

            a. La règle : la gestion partagée entre la Direction des musées de France et la Réunion des musées nationaux

      Les musées nationaux dépourvus de personnalité civile, c’est à dire la très grande majorité d’entre eux sont aujourd’hui gérés directement par l’Etat, dont ils sont des subdivisions directes. Certains, parmi les plus importants, se sont vus conférer la caractéristique de services extérieurs à vocation nationale, ce qui fait de leur directeur un ordonnateur secondaire, d’où une plus grande autonomie en matière budgétaire. Pour autant, l’essentiel de l’activité économique et commerciale n’est pas laissé à la libre appréciation des établissements mais confiée à une autre subdivision de l’Etat, de nature cependant un peu différente : la Réunion des musées nationaux (RMN).

      Crée en 1895 avec un statut d’établissement public administratif, la RMN avait à l’origine comme vocation l’accroissement des collections publiques grâce aux donations qu’elle était chargée de recevoir. Son développement et son passage du statut d’une agence technique et commerciale à celui d’une institution reconnue comme un rouage essentiel de la diffusion artistique et culturelle est liée au développement et au succès de sa politique de grandes expositions. Cette évolution explique la modification du statut de la RMN et sa transformation en établissement public en 1990.

      Elle demeure néanmoins fortement liée à l’administration d’Etat, puisque son président est également le directeur des musées de France, ce qui n’est pas sans créer d’ambiguïtés, compte tenu de la compétence de ce dernier pour tous les musées de France, quel que soit leur statut.

      Le fonctionnement de la RMN est basé sur le principe de la mutualisation des fonds et des actions menées.

      En contrepartie des recettes générées par la collecte des droits d’entrées dans les musées nationaux et les expositions temporaires, la RMN apporte à chacun des établissements, selon ses besoins, ses compétences dans des domaines aussi divers que les acquisitions, les expositions temporaires, l’accueil du public, l’activité éditoriale et la réalisation de produits dérivés des œuvres, la vente à travers ses réseaux de distribution.

      Statutairement, ses principales activités sont donc la collecte du droit d'entrée dans les musées nationaux, l'organisation d'expositions temporaires, les acquisitions d'œuvres d'art et les activités commerciales.

      Fortement déficitaire en 1996 (- 85,9 millions de francs en résultat d’exploitation), la RMN a fait l’objet d’un plan de redressement sur trois ans (1997-1999) destiné à reconstituer les réserves de l’établissement et son fonds de roulement au niveau de 1993 (ce qui supposait que la RMN dégage sur trois ans, toutes activités confondues, un bénéfice après acquisitions d’environ 80 millions de francs, intégralement reversé au fonds de roulement) et à rationaliser l’activité commerciale pour qu’elle parvienne au minimum à équilibrer son exploitation en 1999.

      Les résultats d’exploitation de la RMN ont été meilleurs que prévus puisque, sur les années 1997 et 1998, le résultat d’exploitation cumulé s’établit à 108,6 millions de francs contre 38,5 millions de francs escomptés par le plan d’action.

      - Grâce à une meilleure fréquentation des musées nationaux (9,57 millions de visiteurs payants, en 1998, soit 7,1 % de plus qu’en 1997), la RMN a donc recueilli 195,2 millions de francs au titre de la perception des droits d’entrée. Comme les années précédentes, les principaux contributeurs nets ont été le musée du Louvre (54,5 millions de francs), le musée d’Orsay (75,5 millions de francs), le musée du château de Versailles (23,3 millions de francs), le musée Picasso (9,8 millions de francs) et le musée de l’Orangerie des Tuileries (8,3 millions de francs).

      Le résultat net de cette activité s’élève à 55,7 millions de francs contre 86,9 millions de francs en 1997. Cette diminution apparente du résultat est essentiellement la conséquence d’une reprise des acquisitions d’œuvres d’art, dont le niveau avait été limité en 1997 dans le cadre du plan d’action (cf. ci après, C. 1. c.).

      - L’organisation des expositions temporaires, déficitaire depuis 1996, fait l’objet d’un plan de maîtrise des coûts, qu’il s’agisse des efforts consentis par les chefs d’établissements et les commissaires lors de la réalisation des expositions ou par les personnels dans tous les domaines d’activité de la RMN.

      Celle-ci a organisé 24 expositions temporaires en 1998 (plus d’un million de visiteurs), dont 8 en collaboration avec des musées en région ou de musées étrangers. Les dépenses (94,3 millions de francs) ont été couvertes par les recettes à hauteur de 77 millions de francs. Conformément au plan d’action, le budget d’organisation des expositions temporaires est donc encore déficitaire de 17,3 millions de francs.

      - une rationalisation plus grande des activités éditoriales et commerciales, a permis un retour à l’excédent en 1998 (7,8 millions de francs), contre 17,7 millions de francs de déficit en 1997 et… 144,8 millions de francs en 1996 ! Le chiffre d’affaires s’est au total établi à 486 millions de francs en 1998 contre 416 millions de francs en1997.

      Les espaces commerciaux des musées et des Galeries Nationales du Grand Palais ont réalisé un chiffre d’affaires de 336 millions de francs (soit 69,4% du chiffre d’affaires total), en hausse de 12 % par rapport à 1997, avec des progressions significatives à Orsay (+30 %), Versailles (+14 %) et dans les musées territoriaux (+30 %). La vente par correspondance a progressé de 28 %, avec un chiffre d’affaires de 31 millions de francs contre 24 millions de francs en 1997. L’activité de diffusion distribution a augmenté de 2,6 %, avec un chiffre d’affaires de 48 millions de francs et les ventes de produits RMN ont représenté 49 % du chiffre d’affaires , avec une progression de 8,7 % .

      La poursuite du plan d’action sur l’année 1999 permettra de mettre en place des outils de gestion et de consolider les acquis. La RMN devra faire face à de nombreux engagements financiers, comme par exemple le passage à l’Euro ou l’informatisation de son outil de travail. Elle doit également se prémunir contre des fluctuations imprévues de la fréquentation des musées et des expositions temporaires.

            b. L’exception : le statut d’établissement public

      Deux musées nationaux bénéficient aujourd’hui d’un statut d’établissement public : le musée du Louvre et le musée du Château de Versailles.

      Tout l’intérêt de ce statut réside dans l’autonomie financière que cela leur confère, l’établissement recevant chaque année une subvention de fonctionnement et d’équipement de la part de l’Etat, allouée sur présentation d’un projet de budget. Ces sommes sont ensuite gérées de façon autonome.

      L’indépendance budgétaire n’est cependant pas totale, puisque la RMN continue à percevoir une large part des droits d’entrée et assure la gestion commerciale des librairies boutiques des deux établissements, ceux-ci se voyant attribuer une redevance annuelle ainsi qu’un intéressement au chiffre d’affaire. La RMN est restée, statutairement, le partenaire des deux musées tant pour les acquisitions, l’organisation des expositions et des visites-conférences, que pour l’édition, les produits dérivés ou la gestion des espaces de vente.

      Ainsi, le musée du Louvre verse 45 % de ses droits d’entrée à la RMN, soit 60 millions de francs par an (ce qui en fait, comme on l’a vu plus haut, le premier contributeur). Par le biais des dotations pour les acquisitions et les expositions temporaires, il récupère environ un tiers de ces versements. Au titre de la gestion des boutiques, la RMN reverse une redevance annuelle d’un peu plus d’un million de francs pour la carterie et de 1,6 million de francs pour la librairie, plus un intéressement de 3 % au chiffre d’affaires, soit environ 3 millions de francs par an.

      La contribution du château de Versailles a quant à elle été fixée de façon forfaitaire à 20 millions de francs en 1995 et est indexée sur l’évolution des recettes de droit d’entrée, d’où une contribution de 22,4 millions de francs en 1998.

      Le passage au statut d’établissement public a tout à la fois donné à ces établissements plus de liberté et plus de contraintes : plus de liberté dans les choix en matière tarifaire et de financement, l’organisation interne, les options scientifiques, artistiques et culturelles, mais également plus de contraintes en matière de gestion, de présentation des comptes, de projection budgétaire. Un contrôle a priori, basé sur les projets de l’établissement et conditionnant l’octroi des subventions, est venu se substituer à un contrôle a posteriori, plus formel que fonctionnel, qui n’influait pas véritablement sur la politique générale du musée. Au total, les établissements rendent désormais beaucoup plus de comptes à la tutelle mais, en même temps, ont plus d’aisance pour entreprendre. Le bilan est donc tout à fait satisfaisant.

      On peut cependant craindre que, dans les années à venir, la contradiction entre l’existence d’un établissement public industriel et commercial centralisateur, compétent pour la quasi totalité des musées nationaux et la montée en puissance d’établissements publics administratifs comme le Louvre ou Versailles n’aille en s’accroissant.

      En effet, si le principe d’une certaine mutualisation des moyens pour l’enrichissement des collections nationales semble tout à fait légitime, on peut cependant penser que la tendance « naturelle » des musées à statut d’établissements publics sera de chercher à conquérir une autonomie pleine et entière, et donc de négocier des relations autres qu’imposées avec la RMN.

      Par ailleurs, un effet de « contamination » en direction de quelques autres musées nationaux dont l’ampleur pourrait justifier un passage au statut d’établissement public n’est pas à écarter.

          2. Les musées en région : diversité et contractualisation

      A côté des 32 musées nationaux, 1078 musées « classés ou contrôlés », selon l’appellation officielle, sont aujourd’hui recensés sur le territoire national.

      Au delà de l’uniformité du nombre, règne cependant la plus totale diversité :

      - diversité des types de musées (on peut dénombrer 535 musées spécialisés, 116 musées archéologiques, 243 musées ethnographiques ou de sciences et techniques, 71 musées d’histoire, 33 musées d’art contemporain, 72 musées des beaux arts, qui sont donc loin d’être majoritaires et 543 musées polyvalents),

      - diversité des statuts (musées municipaux ou départementaux gérés la plupart du temps en régie directe, mais aussi parfois par une société d’économie mixte, une association, ou encore dotés d’un statut d’établissement public ou de groupement d’intérêt public ; musées privés gérés par une association ou une fondation),

      - diversité des qualités scientifiques des collections et des conservations,

      - diversité culturelle des animations.

      · Depuis les années 80, les acteurs locaux ont progressivement pris la mesure de l’intérêt de cet outil en terme de développement culturel et d’animation locale. Une enquête récente de l’association des maires de grande ville montre que 78 % des maires interrogés considère que leurs musées participent d’une bonne manière à l’image de leur ville ; ils contribuent au développement local et justifie les crédits d’investissements qui leur ont été consacrés.

      Sur la base des projets scientifiques et culturels rédigés avec l’aide de l’Inspection des musée de France, les musées territoriaux bénéficient aujourd’hui d’un soutien relativement solidaire de leur tutelle. Les objectifs qui leurs sont fixés sont prioritairement d’ordre culturel et pédagogiques : accroissement de la fréquentation, meilleure connaissance des publics, diversification des publics, participation à des actions communes avec les autres institutions culturelles, mise en réseau avec les musées de la région. Viennent ensuite des objectifs sociaux et économiques.

      Si le rapporteur se réfère à l’incapacité de la direction des musées de France à répondre à sa question sur ce sujet, l’effort financier des collectivités locales en direction de ces établissements est cependant, encore aujourd’hui, difficile à chiffrer. Les quelques exemples qui suivent, qui rapprochent les niveaux de fréquentation des subventions de fonctionnement allouées en 1999 permettent cependant d’avoir une idée de cet effort :

      Ainsi, la fréquentation la plus importante constatée dans les musées de grandes villes est de 390 500 visiteurs par an pour les neuf musées de l’agglomération strasbourgeoise, pour un coût de fonctionnement global de 11,5 millions de francs. Pour ses cinq musées, la ville de Toulouse a, quant à elle, décompté un total de 370 000 visiteurs pour une subvention totale de 42 millions de francs.

      · De son côté, même si, selon l’article 62-1 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983, l’activité des musées de collectivités locales « est soumise au contrôle technique de l’Etat », celui-ci a rapidement été amené à réformer ses modalités d’exercice traditionnel de sa tutelle scientifique pour privilégier, comme d’ailleurs dans l’ensemble de la politique culturelle, une gestion plus déconcentrée des crédits (cf. paragraphe précédent) et des rapports de plus en plus contractualisés, fondés sur le principe d’une aide sélective, attribuée, de plus en plus, sur la base du projet scientifique et culturel, et d’un soutien logistique par le biais des DRAC.

      Les collectivités territoriales assurent seules le fonctionnement courant des musées dont elles ont la charge. Toutefois, l’Etat participe ponctuellement, grâce aux crédits d’intervention du titre IV, à certaines actions muséographiques telles que la restauration et la conservation préventive des œuvres, l’enrichissement des collections, la préparation d’expositions et la rédaction de catalogues ou encore l’animation, la formation et l’enseignement spécialisé de ces musées, selon un taux très variable (en moyenne 40 %).

      Ces crédits sont, pour la quasi-totalité d’entre eux, déconcentrés au niveau des directions régionales des affaires culturelles (cf. A.) ; l’année 2000 marque une étape décisive dans la déconcentration des crédits dédiés à la restauration des œuvres, qui seront totalement gérés par les DRAC à compter de 2001.

      En ce qui concerne les dépenses d’investissement, l’Etat apporte son concours en tenant compte de la diversité et de la spécificité des projets, sans perdre de vue l’aménagement du territoire et les programmes culturels d’ensemble concernant une ville, un département ou un réseau de musées en région ou figurant, par exemple, dans les contrats de plan. Il participe au financement des études et des concours d’architecture et de muséographie, puis des travaux, mais ne subventionne pas l’entretien courant des bâtiments et les petits travaux d’aménagement.

      Les critères d’attribution des crédits d’investissement sont les suivants :

      - Les opérations retenues doivent concerner exclusivement les musées classés et contrôlés, placés sous la responsabilité d’un conservateur qui établit un projet culturel et scientifique fondé sur les collections qui doivent être présentées dans les conditions les meilleures au public ;

      - L’opération de rénovation du musée doit être accompagnée d’un programme de conservation préventive et de restauration établi en collaboration avec les services de la direction des musées de France ;

      - Les coûts de fonctionnement de l’établissement créé, rénové ou modernisé, ainsi que les perspectives d’exploitation et de développement, sont analysés par les services de l’Etat ;

      - L’Etat vérifie enfin que les maîtres d’ouvrage locaux ont la capacité financière de réaliser l’équipement projeté et la volonté résolue ensuite d’en assurer la bonne marche.

      Ainsi, l’Etat s’efforce de faciliter la réalisation des opérations qu’il soutient en allégeant la charge financière des collectivités locales, il apporte également une contribution à la qualité de leurs équipements culturels par l’expertise architecturale et technique prodiguée par ses services.

      · Ces nouveau rapports peuvent également être illustrés par la place importante accordée aux musées au sein des volets « culture » des contrats de plan.

      Les deux dernières générations de contrats de plan Etat / Régions (1989-93 et 1994-99) ont été un outil déterminant de la densification du maillage du territoire en équipements culturels. La part prise part les musées au sein des crédits dégagés pour le volet culturel des contrats de plan Etat/Régions (25 % des 1 505 millions de francs prévus pour les contrats en cours) démontre assez le rôle prédominant de ces institutions en la matière.

      L’aménagement culturel du territoire demeurera un des enjeux majeurs de la nouvelle génération des contrats de plan, la priorité étant donnée aux zones géographiques déficitaires grâce à une plus grande sélection des projets. Pour les musées, qui sont au cœur de la réalisation de cet effort d’irrigation de l’ensemble du territoire, les orientations seront les suivantes :

      - la poursuite sur les prochains contrats de plan des opérations de construction de musées prévues au XIème Plan, dont les études sont finalisées ou, a fortiori, dont les travaux sont entamés ;

      - pour les opérations nouvelles, et compte tenu des efforts réalisés pour les musées dans les contrats en voie d’achèvement, l’accent sera être mis sur les musées de société, de culture scientifique et technique et les musées ethnographiques ;

      - l’inscription dans les contrats de plan des fonds régionaux d’acquisition ;

      - la mise en réseau des équipements culturels existants pour favoriser leur rayonnement sur le territoire régional.

          C. LES MUSÉES AU SERVICE DE LA DÉMOCRATISATION

      L’examen d’un budget est le moment tout désigné pour examiner les lignes de force et de faiblesse d’une politique publique et analyser les enjeux qui se présenteront à elles dans les années à venir.

      Pour parvenir à répondre pleinement à l’objectif de démocratisation fixé à la politique culturelle, les musées doivent aujourd’hui relever un certain nombre de défis et se donner les moyens de conforter leur ambition.

          1. Des défis à relever

            a) Les personnels : effectifs, statut et formation

      · Un problème d’effectifs mal résolu par le recours aux emplois précaires :

      Au 31 décembre 1999, les effectifs de la direction des musées de France s’élevaient à 3363 agents (vacataires non compris). Une double nécessité s’impose alors de façon nette :

      - combler les 185 vacances de postes (dont 72 postes de surveillants),

      - résoudre les situations précaires : il importe que le plan de stabilisation, adopté initialement pour la surveillance par le ministère (décret statutaire modificatif de mars 1995),et élargi aux autres filières par l’accord Perben, se traduise par des concours qui permettront rapidement la stabilisation des agents vacataires sur des emplois budgétaires.

      La création de 295 emplois sur le budget du ministère de la culture et de la communication pour 2000, dont 100 créations nettes, devraient permettre, compte tenu des postes vacants, d’organiser un concours dont 260 places seront réservées aux vacataires dits permanents du ministère et de ses établissements publics dans la filière surveillance et 60 aux vacataires dits permanents de la filière administrative (130 places étant proposées au concours externe).

      · La création d’un statut pour les médiateurs culturels

      Alors que, dès sa constitution, la fonction publique territoriale a été dotée d’un statut d’attaché de conservation, éventuellement spécialisé dans le domaine de l’action culturelle, rien de tel n’existait dans la fonction publique d’Etat jusqu’à une date récente.

      Des responsabilités importantes se trouvaient de fait confiées aux responsables des services de surveillance et d’accueil, aussi bien que de sécurité tant en matière de conception que d’encadrement d’équipes. De plus, les médiateurs culturels issus d’une formation universitaire récemment mise en place, restaient jusqu’ici sans statut, les fonctions étant assurées par des personnels précaires sans mobilité ni formation suffisante.

      En réponse à ces problèmes, le ministère a obtenu en 1998 la création d’un nouveau corps d’ingénieurs des services culturels Leurs missions s’articuleront autour de trois fonctions : conception d’une politique d’animation (après ciblage des types de publics, définition des partenaires et choix des outils de médiation...), mise en place des moyens et évaluation des actions.

      Ce nouveau corps permettra aux chefs de service de surveillance et d’accueil de mieux se positionner auprès des chefs d’établissement et vis à vis de leurs subordonnés ; par ailleurs, les services culturels pourront ainsi avoir recours à des agents publics permanents, alors qu’ils utilisent actuellement les services de contractuels et de vacataires pour des missions permanentes de service public.

      Enfin, ce corps permettra d’offrir un débouché de carrière à une partie des techniciens en place dans les musées, fortement qualifiés ou expérimentés, alors même que leurs pairs dans la spécialité Bâtiments de France peuvent accéder au corps de catégorie A des vérificateurs. Un pyramidage hiérarchique constitué de 78% en catégorie C, 20% en catégorie B et 2% en catégorie A paraît devoir être organisé avant 4 ans.

      Il importe donc de mettre en place rapidement le nouveau statut qui permettra le recrutement de ces médiateurs sur de véritables emplois. L’objectif est de créer, sur quatre ans, 1560 en catégorie C, 400 en catégorie B et 40 en catégorie A (dont 5 en 2000). Sur ces 5 postes, 3 seront gagés par des transformations d’emplois de techniciens des services culturels.

      · La nécessaire formation des conservateurs à la gestion muséale ou la lente émergence de l’Ecole du patrimoine

      Au 1er août 1999, la direction des musées de France comptait 272 conservateurs du patrimoine, non compris les 30 actuellement en position de détachement auprès d'autres organismes.

      Depuis 1990, ceux-ci doivent effectuer une scolarité à l'Ecole nationale du patrimoine, destinée à être une école d'application des conservateurs. Différentes spécialités sont proposées, parmi lesquelles une spécialisation musées qui permet aux stagiaires possesseurs d’une formation scientifique (Ecole du Louvre ou université) d’acquérir des connaissances complémentaires dans des domaines tels que la gestion des personnels, la réforme de l’Etat, la gestion publique, l’économie du patrimoine ou la diffusion culturelle. Ce cursus est donc destiné à former des chefs d’établissement susceptibles d’envisager les différentes facettes de ce métier riche et complexe, sans se limiter exclusivement aux fonctions scientifiques, certainement essentielles, mais non exclusives de toutes les autres.

      Malheureusement, les promotions de l’Ecole demeurent globalement très réduites depuis sa création et, en raison d’une pyramide des âges très défavorable, seuls trois conservateurs du patrimoine de la spécialité musées sont sortis de l'Ecole en 1999. Trois sorties sont également prévues en 2000. Après des années où les départs à la retraite ont été très faibles (1 en 1999), ceux-ci devraient néanmoins fortement augmenter à partir de 2004 (10 départs prévus cette année là).

            b) La sécurité des collections

      L’importance des vols intervenus ces dernières années dans les musées nationaux exige le renforcement du dispositif de protection des œuvres d’art.

      Deux types de vols peuvent être distingués : il s’agit, d’une part, de vols nocturnes organisés avec effractions, touchant essentiellement des châteaux ou des musées nationaux installés dans des châteaux, et d’autre part de vols diurnes touchant des biens culturels isolés et perpétrés pendant les heures d’ouverture au public des musées nationaux. Différentes actions ont été mises en œuvre pour y remédier :

      - L’activité de la mission sécurité, créée en 1990 à la direction des musées de France, a été renforcée. L’action de la mission, assistée par un ingénieur spécialiste, consiste en des opérations de conseil et d’expertise, effectuées à la demande des établissements ou à l’occasion de projets d’aménagement ou encore sous forme d’inspection dans les musées classés ou contrôlés. Ces démarches sont réalisées en intégrant le mode opératoire des malfaiteurs, la typologie des œuvres volées et les particularités de chaque musée, afin d’apporter l’assistance la plus appropriée.

      - Tandis que des actions de formations initiale et continue, spécifiques au domaine de la sécurité, ont été engagées en direction des conservateurs dans le cadre de l’école nationale du patrimoine, la direction des musées de France a entrepris de réaliser une mallette pédagogique “ sécurité mode d’emploi ” avec l’aide du ministère de l’intérieur, et de former des personnels choisis parmi les techniciens des services culturels.

      - Au musée du Louvre, tout un ensemble de mesures a été pris comme par exemple la création d’un comité de sécurité permanent comprenant des conservateurs et des chefs de services techniques, destiné à améliorer la coordination des différents acteurs de la sécurité dans le musée et à mettre en œuvre les actions pratiques nécessaires de lutte contre le vol.

      Le programme des expositions temporaires a par ailleurs été allégé afin de redéployer et mobiliser les personnels techniques et renforcer la protection mécanique des œuvres des collections permanentes.

      - Au musée de Versailles, le programme sûreté/sécurité est l'un des volets majeurs du schéma directeur d'aménagement ; il sera mis en œuvre de façon prioritaire dans les années à venir, en commençant par la création d'un PC de sécurité au pavillon Gabriel qui sera suivi d'une réfection générale des réseaux techniques du château.

      S’agissant des mesures financières, une programmation financière spécifique pour la sécurité, avec des moyens accrus, a été élaborée sur trois ans de manière à améliorer sensiblement la protection mécanique et électronique des collections et des bâtiments en tenant compte des nouvelles formes de délinquance apparues ces dernières années. Au-delà de l'effort financier, l’accent sera mis sur la nécessaire coordination des ressources humaines et des moyens techniques.

            c) L’enrichissement des collections

      Le rapporteur ne reviendra pas ici sur les remarques formulées dans la première partie de cet avis en ce qui concerne la misère persistante des crédits d’acquisition, et tout particulièrement de ceux dévolus à la direction des musées de France.

      · Pour ce qui concerne les musées nationaux, le budget d’acquisition a connu de fortes fluctuations durant les années 90, liées notamment aux rigueurs de la régulation budgétaire, témoignant ainsi du peu de cas fait de ces crédits par l’administration des finances.

      En millions de francs

       

      Subventions Etat

      Crédits RMN

      TOTAL

      ANNEE

      Subvention annuelle

      Fonds du Patrimoine

      Autres (1)

      Dotation RMN

      Dons et Legs affectés

      "Mécénat"

       

      1990

      29,70

      22,90

      0,60

      47,7

      38,00 (2)

      2,90

      141,80

      1991

      16,50

      (initiale 29,7)

      8,40

      0,50

      46,4

      1,60

      2,60

      76,00

      1992

      32,72

      (initiale 33,7)

      11,00

      0,61

      57,64

      18,47 (3)

      5,33

      125,77

      1993

      16,56

      (initiale 32,12)

      1,50

      0,30

      40,55

      3,81

      7,04

      69,76

      1994

      14,26

      (initiale 14,57)

      15,00

      0,62

      77,29

      20,42

      11,72

      139,31

      1995

      7,28

      (initiale 14,57)

      9,30

      0,20

      55,00

      6,30

      9,70

      87,78

      1996

      6,05

      (initiale 8,07)

      36,20

      0,00

      43,62

      0,95

      7,79

      94,61

      1997

      7,87

      55,75

      0,05

      26,51

      37,13

      14,87

      142,18

      1998

      11,87

      74,23

      0,50

      54,5

      15,50

      16,26

      172,86

      1999

      (1ersem.)

      11,87

      55,71

      0

      25,74

      22,52

      10,06

      125,9

      2000

      (prév.)

      21,87

      0

      0

      0

      0

      0

      0

(1) Commission nationale de la photographie

(2) dont 15,6 MF de prélèvement sur le capital de la donation canadienne pour l'acquisition d'un Watteau, "Les deux cousines"

(3) dont 5 MF de prélèvement sur le capital de la donation canadienne pour l'acquisition de l'Antonello de Messine, "Christ à la colonne"

      Au titre des acquisitions marquantes en 1999, on peut citer, par exemple, un dessin de Caspar David Friedrich, Allégorie de la musique profane pour le département des arts graphiques du Louvre ou encore une tapisserie bruxelloise, David se fait présenter le butin des Ammonites, 1530, pour le musée d’Ecouen.

      De l’aveu même des principaux intéressés, le véritable enrichissement des collections nationales provient aujourd’hui des paiements en dation, qui permettent à l’Etat de devenir propriétaires d’œuvres qui lui sont inaccessibles au prix actuellement pratiqués sur le marché. De 1996 à 1999, ce sont ainsi plus de 400 millions de francs d’œuvres qui sont entrées dans les collections nationales, comme l’indique le tableau ci-après.

Paiements en dation

En millions de francs

     

    Valeur totale

    dont Musées nationaux

    dont Musée national d’art moderne

    1996

    34,17

    22,64

    3,16

    1997

    169,50

    100,86

    67,74

    1998

    89,76

    74,68

    0,00

    1999 (1er sem)

    112,91

    85,79

    22,60

    TOTAL

    406,34

    283,97

    93,50

      Parmi les œuvres acceptées en dation, on peut noter, en 1996, le sabre dit « des Empereurs » par Biennais, offert à Napoléon lors du traité de Campo-Formio en 1797 ; en 1997, les Danseuses de Degas, un ensemble de 62 manuscrits et dessins originaux, 289 feuillets de notes ainsi qu’une œuvre de Marcel Duchamp datant de 1914 ainsi que La fermière par Joan Miro ; en 1998 Maternité par Auguste Renoir ainsi qu’un ensemble d’œuvres de Pablo Picasso provenant de la collection Dora Maar ; en 1999, Berthe Morisot à l’éventail par Edouard Manet et L’enfant au chat (Julie Manet) par Auguste Renoir.

      A ce sujet, le rapporteur souhaite dire ici sa plus ferme opposition aux tentatives, régulièrement réitérés part le ministère du budget, de déduire, a posteriori, le montant des paiements en dation des crédits d’acquisitions alloués aux ministère de la culture. Vu le montant des dations, une telle mesure reviendrait à réduire à néant l’intégralité du budget d’acquisition du ministère.

      · Pour ce qui concerne les musées en région, les crédits d’acquisition provenant de l’Etat ont subi une forte contraction depuis dix ans, les contributions du fonds du patrimoine étant notamment de plus en plus destinées aux musées nationaux.

- Crédits d’acquisition des musées classés et contrôlés -

En millions de francs

    Année

    FRAM (1)

    Convention

    Fonds du patrimoine

    TOTAL

    1990

    25,11

    9,9

    18,79

    53,8

    1991

    35,01

    12

    1,97

    48,98

    1992

    31,05

    13,96

    7,63

    52,64

    1993

    13,52

    10,25

    2,78

    26,55

    1994

    20,69

    Crédits déconcentrés à partir de 1994

    7,47

    28,16

    1995

    20,86

     

    6,55

    27,41

    1996

    20,56

     

    10,60

    31,16

    1997

    15,38

     

    5,35

    20,73

    1998

    20,8

     

    7,43

    28,23

    1999
    (1er sem)

    19,76

     

    9,34

    29,10

    2000 (prév)

    19,76

         

      (1) Fond régional d’acquisition des musées

      Parmi les principales acquisitions de 1989, on peut noter, pour le musée de la chartreuse à Douai, une œuvre par Daniel Buren, Cabane rouge aux miroirs, pour le musée de la Révolution française à Vizille, un tableau de Jean-Baptiste-Claude Robin, Trophine-Gérard, comte de Lally-Tollendal, dévoilant le buste de son père, ou encore, pour le musée des arts asiatiques de Nice, une paire de daims affrontés en cuivre (Tibet, XVIIIème siècle).

          2. Une ambition à conforter

            a) Développer une véritable politique des publics

      Les musées, grâce à la richesse de leurs collections, sont par excellence, des lieux de transmission de savoir, d'éducation et d'intégration sociale. Les actions éducatives et culturelles réalisées par plus de quatre cents services culturels des musées répartis sur l'ensemble de la France répondent à cette mission fondamentale du musée.

      · Les services éducatifs des musées ont pour mission de transmettre aux jeunes générations le goût du musée et de l'œuvre d'art.

      Ces activités pédagogiques destinées au public scolaire (2,5 millions accueillis dans les musées nationaux, 1,5 million dans les musées classés et contrôlés) s'accompagnent aujourd'hui d'actions qui visent à l'élargissement des publics (adultes ou jeunes hors temps scolaire) tant dans les musées nationaux que dans les musées territoriaux.

      · Dans les quartiers en difficulté, et plus particulièrement dans les zones d’éducation prioritaires, des actions destinées aux catégories socioprofessionnelles les plus défavorisées sont menées dans les lycées professionnels et les quartiers, en partenariat avec les acteurs sociaux et les associations d'immigrés.

      Les musées nationaux proposent ainsi des actions à l'attention des jeunes issus des milieux et quartiers les plus défavorisés. Ainsi le château-musée de Compiègne a conçu le projet « un moteur pour démarrer ». A partir des collections du musée de la voiture et du tourisme, des jeunes en échec scolaire ou en réinsertion de vingt-quatre sites sensibles (collèges, lycées professionnels, prisons, etc... de la région Picardie et du département des Yvelines), participent, avec des professionnels, à la restauration de véhicules anciens. Ces jeunes en difficulté abordent par ce biais la notion de patrimoine, les évolutions technologiques liées à l'automobile et la création contemporaine en compagnie d'artistes en résidence.

      Le château-musée de Pau, à la suite des expositions sur la détention de l'émir Abdelkader et de la célébration de la signature de l'Edit de Nantes, a mis en place un programme d'alphabétisation par les pratiques culturelles en collaboration avec une association (la maison des femmes du Hédas) qui regroupe des femmes venant de quinze pays différents.

      Des expériences, menées par des musées relevant de collectivités visent à la conquête de nouveaux publics et tendent à une plus grande inscription du musée dans l'espace urbain périphérique, espace le plus défavorisé.

      Ainsi le musée de Picardie (Amiens) organise depuis trois ans une exposition décentralisée avec le centre culturel le Safran. L'objectif de cette action innovante, intitulée « Le musée sort de sa réserve », est de renforcer la présence du musée dans un quartier défavorisé, et de permettre une confrontation entre des publics différents et les collections du musée.

      · Publics défavorisés et art contemporain : l’art contemporain, souvent considéré comme difficilement abordable, est toujours accompagné dans les musées par des efforts importants de médiation. Les services culturels des musées de Bordeaux, Grenoble, Lyon, Rochechouart, Saint-Etienne, Nîmes proposent notamment de nombreuses activités aux habitants des quartiers périphériques.

      Par exemple, le musée d’art contemporain de Lyon a engagé un travail à long terme avec des groupes d’âges, de sensibilité, d’appartenances socioculturelles diverses travaillant à la réalisation de projets artistiques sur leur lieu d’habitation : centre ville, quartiers, places publiques, bains publics, HLM, etc... sous la conduite de douze artistes. Le processus de formalisation, la nature des échanges et les problématiques sont exposés au musée, et sur la place Bellecour au centre de Lyon.

      · La direction des musées de France, à la suite de la loi d'orientation du 30 juin 1975 sur les personnes handicapées, a mis en place une politique d'accessibilité physique pour les handicapés moteurs dans les musées en rénovation ou en création. Elle a parallèlement développé et encouragé des actions pour les personnes handicapées sensorielles et mentales.

      Par exemple, "le musée au bout des doigts", réseau des musées de la région Nord-Pas de Calais (Valenciennes, Arras, Calais, Villeneuve-d'Ascq...), propose aux aveugles et malvoyants un dispositif permanent de guidage et des ateliers adaptés.

      · Enfin, dans un souci de démocratisation culturelle, la direction des musées de France incite les musées à développer des partenariats et à s'inscrire dans les conventions et protocoles d'accords interministériels :

      Une convention a ainsi été passée entre le ministère de la culture et celui de l’agriculture afin de « favoriser la création, la diffusion, la pratique culturelle et artistique en milieu rural [et de] donner aux populations rurales les moyens de maîtriser et de s'approprier les bénéfices de la mise en valeur de leur patrimoine naturel et culturel".

            b) prolonger l’effort sur les tarifs

      La politique tarifaire mise en place dans les musées nationaux prévoit des exonérations et/ou des tarifs réduits pour les catégories de public les plus défavorisées (gratuité pour les chômeurs, les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion ou de l'aide sociale, les titulaires du minimum vieillesse, les personnes handicapées ; tarif réduit pour les titulaires d'une carte de réduction pour famille nombreuse, et les visiteurs acquittant le droit d'entrée avec des chèques vacances).

      En 1998, les musées nationaux ont accueilli gratuitement un peu plus de 4 millions de visiteurs, soit, 27 % du nombre total de visiteurs (15,2 millions). On estime que ces visites gratuites comprennent :

      - 1,2 million (30 %) de visites de jeunes de moins de 18 ans dans le cadre scolaire,

      - 1,2 million (30 %) de visites de jeunes de moins de 18 ans hors cadre scolaire,

      - 1,6 million (40 %) d’autres visites gratuites : enseignants, élèves des écoles d’art, personnes défavorisées, (...)., y compris les entrées prépayées s’effectuant sans passage aux caisses.

      Au total, la gratuité d’entrée accordée aux moins de 18 ans bénéficie donc à 2,4 millions de jeunes, dont la moitié au titre des visites scolaires. Elle favorise par ailleurs très fortement les visites familiales. 51,5 % des visiteurs viennent au Louvre en famille, 370 000 enfants de moins de 18 ans accompagnant ainsi chaque année leurs parents. Pour 12,5 % des visiteurs, la venue au Louvre est précisément motivée par la volonté de faire découvrir le musée à des enfants ou à des jeunes.

      Depuis 1996, l’accès au Louvre est gratuit pour tous le premier dimanche de chaque mois.

      L’effet d’incitation est manifeste : la fréquentation des dimanches gratuits a été, en 1998, de 57,5% supérieure à celle des dimanches payants et 22,5% des visiteurs de ces journées déclarent qu’ils ne seraient pas venus au Louvre si l’entrée n’avait pas été gratuite. Enfin, le public des dimanches gratuits est majoritairement local. Les franciliens (41%) sont en moyenne deux fois plus nombreux qu’un dimanche payant.

      Les évaluations menées par le musée du Louvre depuis l’entrée en vigueur de la mesure, conduisent à retenir un effet net de 100 000 visites par an, soit de l’ordre de 2 % de la fréquentation totale d’une année « normale ».

      Au plan qualitatif, l'effet de la gratuité dominicale s’exerce principalement sur le public français : le dimanche gratuit est le seul jour du mois où les Français sont majoritaires au Louvre (59% des visiteurs, contre 37% les dimanches payants). Les analyses tendent à montrer que les visiteurs des dimanches gratuits sont plus franciliens, moins habitués du musée, plus familiaux et plus jeunes que ceux des dimanches payants. On note que la proportion des primo-visiteurs parmi le public du dimanche gratuit est importante. Elle varie ainsi de : 12 à 14 % de Parisiens,15 à 20 % de Franciliens et 23 à 34 % de provinciaux.

      A partir de janvier 2000, l'accès à tous les musées nationaux sera gratuit le premier dimanche de chaque mois. On estime que cette mesure à devrait avoir pour effet de permettre à des personnes éloignées des musées d’en prendre le chemin, et peut être d’en devenir des visiteurs réguliers. Dans la mesure où, pour l’ensemble des musées nationaux, la proportion de visiteurs dits « de proximité » (originaires de la même région pour les musées d’Ile-de-France, et du même département pour ceux de province) est légèrement supérieure à ce qu’elle est au Louvre (24% contre 22%), ce public bénéficiera de l’essentiel de l’impact de la mesure. On attend une augmentation minimale de 2 % de la fréquentation annuelle, soit environ 200 000 visites supplémentaires.

            c) Utiliser les nouvelles technologies pour attirer de nouveaux publics

      Depuis quelques années, la direction des musées de France s’est attaché à développer une véritable politique multimédia qui permette de dépasser l’utilisation traditionnelle des nouvelles technologies dans les domaines scientifiques et documentaires pour en faire un véritable outil d’élargissement des publics.

      L’intérêt des nouvelles technologies apparaît tout particulièrement dans les domaines de la communication et de l’action pédagogique.

      · En ce qui concerne la communication, les nouvelles technologies de l’information et de la communication permettent une présentation de l’information au public plus attrayante, facile d’accès et dont la mise à jour est assurée en permanence. Les sites internet jouent, de ce point de vue, un rôle essentiel.

      Les « musées en ligne » sont des sites d'information et de découverte pour le grand public. Dès 1994, de nombreux musées ont créé un site internet afin de faire connaître leur patrimoine à un large public. Conçu comme une introduction à la visite, le site donne des informations sur l'histoire du musée, ses collections, ses activités culturelles ainsi que des renseignements pratiques. Les textes sont souvent traduits en plusieurs langues.

      La production s'accroît sans cesse et se diversifie : quelques exemples peuvent illustrer ce propos : le Louvre a bien sûr un site très fréquenté (www.louvre.fr), le musée d'Orsay (www.musee-orsay.fr) sera bientôt accessible en trois langues dont l'anglais et l'espagnol, le site du musée et domaine national de Versailles (www.chateauversailles.fr) présente l'ensemble des activités de l’établissement. Les sites de plusieurs autres musées nationaux, accessibles par le serveur du ministère de la Culture (www.culture.fr), offrent également des dossiers pédagogiques destinés aux enseignants et aux élèves.

      Les musées en région disposent également, de plus en plus souvent, d’un site propre : le musée des beaux-arts de Bordeaux propose par exemple des visites thématiques (www.culture.fr/culture/bordeaux), le musée des Augustins de Toulouse offre une présentation détaillée des collections (cf. page suivante) et des jeux pour les enfants (www.augustins.org).

page zoom du site du musée des Augustins

      Enfin, les sites communs à plusieurs musées permettent une mise en réseau des musées nationaux et régionaux qui introduit une cohérence nouvelle et permet des économies d'échelle. Sous l'impulsion des associations de conservateurs et des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), les musées se regroupent et proposent une information structurée pour les publics de proximité et les touristes.

      Les musées du Nord-Pas-de-Calais (www.musenor.org) ont été pionniers en créant un site accueillant trente trois établissements ; les musées de Poitou-Charentes ont ouvert leur site (www.alienor.org) en partenariat avec l'Ecole des technologies de l'image de Poitiers-Angoulême et présentent les dix ans du fonds régional d’acquisition des musées sous un angle scientifique et artistique.

      · L’action pédagogique trouve également de nouvelles formes dans la réalisation de produits développés spécifiquement pour le réseau internet, qualifiés d’expositions imaginaires ou d’expositions virtuelles, et qui proposent de nouveaux modes de présentation thématiques des collections.

      Basées sur des expérimentations techniques ou graphiques menées au fur et à mesure de l'évolution des logiciels disponibles, ces expositions permettent de faire découvrir des aspects parfois mal connus du patrimoine et favorisent un rapprochement d'un type nouveau entre musées français ou étrangers

      Parmi les expositions imaginaires qui ont été proposées, on peut citer Le siècle des Lumières dans la peinture des musées de France, sélection de cent peintures de cent artistes du dix-huitième siècle provenant de seize musées de France, Traditions de Noël en France et au Canada, exposition réalisée à l’occasion du cinquième anniversaire de l’accord bilatéral France-Canada pour la coopération et les échanges dans le domaine de la muséologie ou encore la Visite virtuelle du musée des beaux-arts de Bordeaux.

      Cette politique pédagogique sera poursuivie au cours de l’année 2000 qui verra notamment la mise en place d’un projet d’apprentissage de « l’Histoire de France par l’image », sur le réseau internet, élaboré en partenariat avec le ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Ce projet repose sur la valorisation des collections des musées liées à des thèmes et des événements historiques et sur leur mise en relation avec les programmes scolaires. La lecture de l’image et son interprétation y seront enrichies par la confrontation avec des documents d’archives et des supports comme les estampes, la photographie et divers documents audiovisuels.

travaux de la commission

      La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Bruno Bourg-Broc, les crédits de la culture pour 2000, au cours de sa séance du mardi 12 octobre 1999.

      En conclusion de son exposé, le rapporteur a indiqué qu’il s’abstiendrait sur le vote du budget, compte tenu de la balance encore fragile entre les avancées, les actions à consolider et les points de faiblesse.

Après l’exposé du rapporteur, M. Marcel Rogemont a souligné que le budget du ministère de la culture était un bon budget, tant sous l’angle arithmétique que sous celui des moyens et des priorités. Alors qu’entre 1994 et 1997, les crédits du ministère ont diminué de 8,8 % à périmètre constant, ils ont augmenté de 9,7 % entre 1997 et 2000. Cette augmentation traduit une volonté politique manifeste et pérenne de faire un effort significatif pour la culture. On peut souhaiter atteindre le montant symbolique de 1 % en 2002, mais il faut d’ores et déjà rendre justice à l’effort accompli.

Pour mettre en œuvre la politique culturelle, une véritable dynamisation de l’administration centrale a été réalisée à la suite du rapport Rigaud. De même, toutes les conséquences de la décentralisation ont été tirées avec une forte déconcentration des crédits et un renforcement des compétences des directions régionales des affaires culturelles (DRAC). La nouvelle organisation du ministère contribuera à l’établissement de nouveaux rapports plus fructueux avec les autres acteurs de la culture, sur le fondement contractuel de la charte de service public créée en 1999. Enfin en ce qui concerne les créations d’emplois (295 en 2000), il faut là aussi souligner l’effort réalisé pour réduire la précarisation, même s’il reste encore beaucoup à faire.

      Le budget du ministère permet de traduire une ambition forte, celle de la démocratisation culturelle. Les mesures tarifaires dans les musées et les théâtres nationaux permettront de conquérir de nouveaux publics. L’enseignement artistique bénéficie de crédits en hausse de 7,2 %, ce qui permettra de donner une nouvelle importance à l’éducation culturelle dans les lycées, en collaboration avec le ministère de l’éducation nationale, avec par exemple le développement des contrats éducatifs locaux.

En conclusion, ce budget, qui permet de passer de la parole aux actes et favorise un réel équilibrage entre Paris et la province au bénéfice de l’aménagement du territoire, ne peut être qu’approuvé par le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Baeumler a regretté l’absence d’unanimité sur ce qu’il faut pourtant considérer à juste titre comme un bon budget. L’engagement du 1 % sera tenu d’ici 2002 et, dès cette année, des mesures nouvelles fortes et importantes illustrent cette priorité. A la différence de la situation prévalant entre 1993 et 1997, l’Etat aura les moyens d’honorer ses engagements sur le terrain, par exemple au niveau des subventions des collectivités locales. Les crédits ne doivent toutefois pas se limiter aux chefs-lieux des départements mais irriguer l’ensemble du territoire dans le cadre des pays. La négociation des contrats de plan Etat/régions devra permettre de disposer d’équipements culturels en réseau. Les contrats éducatifs locaux concrétisent également cette volonté d’action globale.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la culture pour 2000.

N°1862-03. - Avis de M. Bruno Bourg-Broc, au nom de la commission des Affaires culturelles, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Culture et communication : culture

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© Assemblée nationale

En 1997, 17 % des Français de plus de 15 ans n’étaient jamais allés dans un musée ou un monument historique au cours de leur vie, ce taux atteignant 35 % pour la fréquentation des lieux de diffusion de spectacle vivant (source : département des études et de la prospective, ministère de la culture et de la communication).

Au début de l’année 1999, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a constitué une mission d’information sur la politique des musées en France, chargée de réfléchir plus particulièrement sur le rôle de ces institutions en matière de démocratisation et d’aménagement culturel du territoire. Cette mission, présidée par M. Alfred Recours, est en outre composée de MM. André Aschieri, Bruno Bourg-Broc, Jean-Paul Bret, Mme Catherine Génisson, M. Michel Herbillon, Mme Muguette Jacquaint, MM. Christian Kert, Patrice Martin-Lalande et Marcel Rogemont.

C’est à dire tous les musées nationaux à l’exception du Louvre et de Versailles, établissements publics : le musée de l’Orangerie, le musée de Cluny, le musée de la céramique à Sèvre, le musée Guimet, le musée des monuments français, le musée des arts et traditions populaires, le musée des antiquités nationales de Saint Germain en Laye, la Malmaison, Le château de Compiègne, le château de Fontainebleau, le château de Pau, le château de Blérancourt, le musée Gustave Moreau, le musée d’Ennery, le musée Rodin, le musée Henner, le musée Magnin à Dijon, le musée Adrien Dubouché à Limoges, le musée des deux-victoires à Mouilleron-en-Pareds, le musée fernand Leger à Biot, le musée message biblique-Marc Chagal à Nice, le musée des arts africains et océaniens, le musée Eugène Delacroix, le musée Picasso de Vallauris, le musée des granges de Port-Royal, le musée préhistorique des Eyzies, la maison natale du maréchal de lattre de tassigny, le musée de la renaissance au château d’Ecouen, le musée Hébert, le musée Picasso à Paris, le musée d’Orsay.