N° 3323

--

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2001.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES(1),
SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2002 (n° 3262)

TOME X

DÉFENSE

GENDARMERIE

PAR M. Georges LEMOINE,

Député.

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

La Commission de la Défense nationale et des Forces armées est composée de :

M. Paul Quilès, président ; M. Robert Gaïa, M. Jean-Claude Sandrier, M. Michel Voisin, vice-présidents ; M. Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Jean-Claude Viollet, secrétaires ; M. Jean-Marc Ayrault, M. Jacques Baumel, M. Jean-Louis Bernard, M. André Berthol, M. Jean-Yves Besselat, M. Bernard Birsinger, M. Loïc Bouvard, M. Jean-Pierre Braine, M. Jean Briane, M. Marcel Cabiddu, M. Antoine Carré, M. Bernard Cazeneuve, M. Guy-Michel Chauveau, M. Alain Clary, M. François Cornut-Gentille, M. Charles Cova, M. Michel Dasseux, M. Jean-Louis Debré, M. François Deluga, M. Philippe Douste-Blazy, M. Jean-Pierre Dupont, M. François Fillon, M. Christian Franqueville, M. Yves Fromion, M. Yann Galut, M. René Galy-Dejean, M. Roland Garrigues, M. Henri de Gastines, M. Bernard Grasset, M. Jacques Heuclin, M. François Hollande, M. Jean-Noël Kerdraon, M. François Lamy, M. Claude Lanfranca, M. Jean-Yves Le Drian, M. Georges Lemoine, M. François Liberti, M. Jean-Pierre Marché, M. Franck Marlin, M. Jean Marsaudon, M. Christian Martin, M. Guy Menut, M. Gilbert Meyer, M. Michel Meylan, M. Jean Michel, M. Jean-Claude Mignon, M. Charles Miossec, M. Alain Moyne-Bressand, M. Arthur Paecht, M. Jean-Claude Perez, M. Robert Poujade, M. Jean-Pierre Pujol, Mme Michèle Rivasi, M. Michel Sainte-Marie, M. Bernard Seux, M. Guy Teissier, M. André Vauchez, M. Émile Vernaudon, M. Aloyse Warhouver, M. Pierre-André Wiltzer.

INTRODUCTION 5

I. - UN BUDGET SINCÈRE 7

A. UNE POLITIQUE DE PERSONNEL VOLONTARISTE 7

1. Des effectifs en augmentation 7

2. Des moyens conséquents pour améliorer les conditions de vie des personnels 9

B. UN BUDGET DE FONCTIONNEMENT COHÉRENT AVEC LES MISSIONS 12

1. Le fonctionnement quotidien de la gendarmerie : des moyens à la hauteur des besoins 13

2. La question des loyers : une vigilance nécessaire 15

C. UN NIVEAU D'INVESTISSEMENT SATISFAISANT 16

1. Un niveau d'équipement satisfaisant 17

2. La nécessité d'une politique immobilière cohérente 18

II. - QUELLES PERSPECTIVES POUR LA GENDARMERIE ? 21

A. DES MISSIONS MULTIPLES ET EXIGEANTES 22

1. Un niveau d'activité toujours soutenu 22

2. Le développement de nouvelles méthodes d'intervention et de nouvelles missions 25

B. L'IMPÉRATIF D'ADAPTATION 34

1. Une force militaire renouvelée 34

2. Un service public de proximité en mutation 36

C. LES PERSPECTIVES : CONFORTER LE RÔLE DE LA GENDARMERIE DANS LA SOCIETE 38

1. Un légitime besoin de reconnaissance 39

2. Deux impératifs : la formation et le dialogue social 41

CONCLUSION 45

TRAVAUX EN COMMISSION 47

I. - AUDITION DE M. PIERRE STEINMETZ, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE 47

II. - EXAMEN DE L'AVIS 55

Mesdames, Messieurs,

Une fois encore, c'est sous le signe du paradoxe qu'il faut examiner la gendarmerie dans le projet de budget pour 2002 : alors qu'elle bénéficie de l'un des meilleurs budgets qu'elle ait eu depuis longtemps, notamment en matière de fonctionnement, qui fait d'ailleurs suite à un budget 2001 qui était lui-même de bon niveau, un sentiment de malaise persiste chez une partie des personnels de gendarmerie. Précisons d'emblée qu'il n'existe pas de baisse générale du moral des gendarmes, comme pourraient le laisser penser certains médias. Au regard du rôle majeur de la gendarmerie dans la mise en _uvre du droit à la sécurité, il ne saurait pour autant être question d'ignorer le message transmis par une partie des personnels de la gendarmerie.

*

Les causes du phénomène sont connues.

Ce sont tout d'abord les missions toujours plus lourdes et exigeantes qui sont dévolues à la gendarmerie : missions traditionnelles de police judiciaire, de sécurité routière... et missions nouvelles de prévention de la délinquance juvénile, de sécurisation des sites de production et de stockage des euros ou encore dans le cadre de la lutte contre de nouvelles formes de terrorisme.

Afin de remplir au mieux ses missions, la gendarmerie est soumise à un continuel effort d'adaptation de ses structures, de ses méthodes, voire de sa culture. Dans cette exigence d'adaptation réside un second motif de malaise, d'autant que tous ces changements interviennent dans un contexte marqué par une charge de travail très lourde pour les gendarmes. Cet élément est celui qui ressort le plus des contacts réguliers qu'ont, sur le terrain, les élus avec les gendarmes.

Un autre élément doit être pris en compte pour comprendre ce qu'est la gendarmerie d'aujourd'hui : comme les armées, la gendarmerie a dû s'adapter à la suspension du service national qui se traduit pour l'arme par l'arrivée dans la gendarmerie de personnels au profil nouveau et par des redéploiements internes très importants.

Enfin, immergée dans la société du fait de son maillage territorial et de ses missions, la gendarmerie est confrontée de plein fouet aux transformations de la société : étant en contact permanent avec la population, elle doit s'adapter de manière continue, ce qui implique un effort de formation constant de la part de ses personnels.

*

Le gouvernement a pleinement conscience de ces difficultés et y a apporté des réponses. Le projet de budget pour 2002, qui fait suite à de nombreuses mesures qui n'étaient pas dans la loi de programmation militaire 1997-2002, en est un exemple.

Est-ce suffisant ? Votre rapporteur a le sentiment qu'avant toute autre chose, ce dont ont besoin aujourd'hui les personnels de la gendarmerie, c'est de reconnaissance, celle du politique et celle de la société. Un budget sincère, qui répond aux besoins réels des gendarmes en matière de fonctionnement quotidien et d'investissement, qui prévoit des mesures catégorielles précises, est un élément essentiel de cette reconnaissance. Mais celle-ci doit également s'exprimer par des symboles et des messages forts, qu'il revient notamment aux parlementaires de relayer sur le terrain.

C'est à cela qu'entend contribuer le présent rapport : il faut résoudre le paradoxe d'une gendarmerie qui doute parfois, alors même que le gouvernement lui donne les moyens de mener à bien ses missions, mettre fin à la situation quelque peu schizophrénique de personnels parfois mal à l'aise dans l'accomplissement quotidien de leur travail, et pourtant heureux et fiers d'être gendarmes.

I. - UN BUDGET SINCÈRE

Pour que la gendarmerie conserve sa bonne image dans l'opinion publique, il faut donner aux unités les moyens humains et matériels de répondre aux attentes de la population, tout en assurant une qualité de vie satisfaisante à ses personnels.

Le projet de budget de la gendarmerie pour 2002 satisfait à cet objectif, avec une augmentation des ressources de 5,6 % par rapport au budget voté de 2001. Notamment, au regard de cette force humaine qu'est avant tout la gendarmerie, avec une augmentation de près de 6 %, le titre III bénéficie d'un bon affichage.

C'est donc un budget cohérent qui nous est proposé, qui s'inscrit tant dans le cadre fixé par la loi de programmation militaire 1997-2002, dont il couvre la dernière annuité, que dans la continuité de la démarche complémentaire entreprise en 1999, en vue d'assainir la situation financière de la gendarmerie. Il répond par là-même à une double attente, de la population d'une part en matière de sécurité, et des personnels d'autre part.

L'évolution des crédits de rémunérations et de charges sociales inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002 en faveur de la gendarmerie représente un premier motif de satisfaction. Ils s'élèvent à 2,78 milliards d'euros, soit une progression de 4,6 % (+ 121,94 millions d'euros) par rapport à 2001.

Cette augmentation résulte d'une part de l'accroissement des effectifs et, d'autre part, de multiples mesures destinées à améliorer les conditions de vie des personnels. C'est donc dans une double démarche volontariste que s'inscrit le budget des personnels de la gendarmerie en 2002, qui va au-delà des mesures prévues par la loi de programmation militaire.

L'effectif total pour 2002 sera de 98 081 civils et militaires, soit une augmentation de 975 postes budgétaires par rapport à 2001. Cette augmentation globale vise trois objectifs. Il s'agit tout d'abord d'accompagner le renforcement du dispositif de sécurité intérieure, notamment dans les zones périurbaines et de développement résidentiel. En deuxième lieu, elle répond à l'extension du réseau autoroutier (350 kilomètres supplémentaires par an). Enfin, elle s'inscrit dans le renforcement de la coopération avec les pays frontaliers en matière de lutte contre le terrorisme, le trafic de drogue et la grande criminalité.

Cette augmentation globale se décompose ainsi :

- mise en _uvre de la dernière annuité de la loi de programmation militaire, qui se traduit par la création de 230 postes d'officiers, dont 34 officiers du corps technique et administratif de la gendarmerie et de 563 postes de sous-officiers dans le corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie (CSTAG), par la suppression de 1 214 postes de sous-officiers de gendarmerie et de 3 502 postes d'appelés du contingent et, enfin, par la création de 4 178 postes de volontaires et de 42 civils ;

- création de 700 emplois de sous-officiers de gendarmerie conformément aux mesures prises par le conseil de sécurité intérieure de mars 2000 ;

- mesures diverses de transfert d'emplois à l'étranger, dans le cadre interarmées, vers le service de santé des armées et création d'un emploi d'inspecteur général de la gendarmerie, gagée par la suppression de 2 postes d'officiers de gendarmerie.

La traduction budgétaire de ces mesures est présentée dans le tableau ci-dessous.

MESURES FINANCÉES PAR LE PROJET DE BUDGET 2002
EN MATIÈRE DE RCS DES PERSONNELS DE LA GENDARMERIE

(en millions d'euros)

Mesures d'effectifs de la loi de programmation militaire

 

- Création de 230 emplois d'officiers (196 OG + 34 CTAG)

+ 11,39

- Création de 563 emplois de sous-officiers CSTAG

+ 14,74

- Création de 4 191 emplois de volontaires

+ 47,49

- Suppression de 1 214 emplois de sous-officiers de gendarmerie

- 37,52

- Suppression de 3 502 emplois d'appelés

- 10,13

Autres mesures d'effectifs

 

- Création d'un emploi d'inspecteur de la gendarmerie par suppression de 2 emplois d'officier de gendarmerie

0

- Création de 700 emplois de sous-officiers de gendarmerie

+ 21,14

Mesures de transfert

 

- Transfert de 2 emplois de sous-officiers CSTAG à la poste interarmées

- 0,06

- Transfert de 13 postes de volontaires à la DCSSA

- 0,15

- Transfert de 16 emplois d'officiers de gendarmerie et de 3 emplois de sous-officiers de gendarmerie sur les chapitres interarmées dédiés aux postes permanentes à l'étranger (PPE)

- 2,78

Ces diverses mesures appellent deux commentaires de la part du rapporteur.

Il convient tout d'abord de souligner que les effectifs professionnels croissent de 257 postes, ce qui représente un infléchissement de la tendance prévue par la loi de programmation militaire qui prévoyait une diminution sensible du nombre de sous-officiers de gendarmerie : ainsi, la déflation du nombre de sous-officiers de gendarmerie s'établit à 517, au lieu des 1 217 initialement prévus dans cette loi.

En termes qualitatifs par ailleurs, les créations de postes de sous-officiers du corps de soutien vont permettre de recentrer les sous-officiers de gendarmerie sur leurs missions opérationnelles.

S'agissant des personnels civils et des gendarmes adjoints, on observe un nombre de créations de postes inférieur aux objectifs :

- le nombre de gendarmes adjoints augmente de 4 178 au lieu de 5 167, ce qui, compte tenu de la disparition des gendarmes auxiliaires (- 3 502), conduit à la création nette de 676 postes ;

- 42 postes sont par ailleurs créés pour les personnels civils, au lieu des 167 prévus par la loi de programmation militaire. Ces retards devront de toute évidence être comblés par la prochaine loi de programmation militaire.

En 1999, les personnels de la gendarmerie ont, de manière très directe, exprimé leur lassitude sur un certain nombre de sujets, qu'il s'agisse de leur charge de travail, liée au service courant ou aux astreintes, ou de l'insuffisance des moyens de fonctionnement (bureautique, frais de déplacement, véhicules...). En bref, les personnels de la gendarmerie, par tradition fort attachés à la qualité du service rendu, faisaient savoir qu'ils ne s'estimaient plus en mesure de le remplir.

Le mouvement de fond qui s'est exprimé à cette occasion ne saurait être réglé par des mesures ponctuelles. C'est donc dans une démarche globale, dont l'ambition est de traiter les problèmes au fond et sur plusieurs années, que s'est engagé le gouvernement, notamment à partir de la réunion du conseil de sécurité intérieure, en février 2000.

Cette démarche poursuit deux objectifs :

- il s'agit en premier lieu de trouver un meilleur équilibre entre l'obligation de disponibilité faite aux personnels et leurs légitimes aspirations à préserver leur vie personnelle. En bref, pour reprendre l'expression employée par le directeur général de la gendarmerie lors de son audition par la commission de la défense le 23 octobre 2001, on a cherché à « sanctuariser le temps libre », afin de préserver les droits des personnels ;

- le second but est d'améliorer les conditions de travail, par un effort en faveur des équipements, du fonctionnement mais aussi par des mesures spécifiques.

Le projet de budget pour 2002 fait plus que poursuivre cette politique de revalorisation de la condition des personnels de la gendarmerie. Il se caractérise en effet par une politique extrêmement volontariste en la matière.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS MILITAIRES 2001 - 2002

 

Effectifs pour 2001

Variation nette

Effectifs pour 2002

I. Officiers
A - gendarmerie :

Général de division
Général de brigade
Colonel
Lieutenant-colonel et chef d'escadron
Capitaine, lieutenant et sous-lieutenant



8
17
242
1 225
2 215



1

11
46
121



9
17
253
1 271
2 336

Total (A)

3 707

179

3 886

B- Corps de soutien :
Colonel
Lieutenant-colonel et commandant
Capitaine, lieutenant et sous-lieutenant


3
34
62


1
9
24


4
43
86

Total (B)

99

34

133

Total (I)

3 806

213

4 019

II. Sous-officiers
A - Gendarmerie

Aspirant
Major
Adjudant-chef
Adjudant
Maréchal des logis-chef
Gendarme



110
1 534
3 512
8 498
8 288
51 802




11
24
64
61
- 677



110
1 545
2 536
8 562
8 349
51 125

Total (A)

73 744

- 517

73 227

B - Corps de soutien :
Major
Adjudant-chef
Adjudant
Sergent-chef
Sergent


84
420
550
715
1 336


21
98
121
128
193


105
518
671
843
1 529

Total (B)

3 105

561

3 666

Total (II)

76 849

44

76 893

III - Personnels du rang
Appelés

Sous-lieutenant
Aspirant
Gendarme auxiliaire maréchal des logis
Gendarme auxiliaire brigadier-chef
Gendarme auxiliaire brigadier
Gendarme auxiliaire de 1ère classe
Gendarme auxiliaire



7
53
153
274
555
454
2 006



- 7
- 53
- 153
- 274
- 555
- 454
- 2 006



0
0
0
0
0
0
0

Total (III)

3 502

- 3 502

0

IV -Volontaires

     

Aspirant

61

86

147

Maréchal-des-logis

282

210

492

Brigadier chef

500

425

925

Brigadier

1 874

1 130

3 004

Volontaire

8 308

2 327

10 635

Total (IV)

11 025

4 178

15 203

Totaux généraux : - Militaires
- Civils

96 182
1 761

933
21

96 115
1 782

Total général (3)

96 943

954

97 897

(3) Ces chiffres ne comportent pas les effectifs hors-budget, gendarmerie de l'air, gendarmerie maritime et section commune (sauf les personnels civils). Les effectifs de personnel civil ne comprennent pas ceux des périmètres « administration centrale » (104) et « COMSUP » (80).

Ainsi, alors que les mesures générales et catégorielles en faveur des personnels s'élevaient, dans la loi de finances pour 2001, à 8,75 millions d'euros, elles représentent, dans le projet de loi de finances pour 2002, 83,7 millions d'euros, sans compter les 5,03 millions d'euros inscrits au chapitre de fonctionnement 34-07 au titre de la revalorisation de l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT).

MESURES GÉNÉRALES ET CATÉGORIELLES 2001 ET 2002

(en millions d'euros)

Mesures générales et catégorielles financées sur le budget 2001

 

Mesures d'ajustement technique

 

- revalorisation de l'indemnité compensatoire pour frais de transport en Corse

0,015

- revalorisation du prêt des appelés

0,06

- aménagement des rémunérations à l'étranger

0,166

- aménagement des postes à l'étranger

0,243

Mesures d'ordre général

 

- augmentation du contingent de primes de qualification des sous-officiers à 10 %

3,4

- plan de requalification des sous-officiers de gendarmerie

0,61

- fonds de professionnalisation : crédits réserves

3,69

- augmentation du contingent de primes à 26 % des officiers brevetés

0,312

- NBI Politique de la ville : adaptation du dispositif à la nouvelle géographie

0,26

Mesures générales et catégorielles financées sur le budget 2002

 

Mesures acquises

 

- revalorisation de la valeur du point fonction publique

38,6

- mesures en faveur des bas salaires

3,9

- augmentation des prestations familiales

1,16

- solde des volontaires

0,5

- indemnité compensatoire pour frais de transport pour service en Corse

0,02

Mesures générales d'ajustement technique

 

- rebasage indemnitaire

5,96

- revalorisation de l'indice fonction publique

10,98

- revalorisation de l'indemnité pour charges militaires

1,98

- revalorisation de la solde des volontaires

1,23

- aménagement des rémunérations à l'étranger

0,35

Mesures catégorielles en faveur du personnel

 

- augmentation du contingent de primes de qualification des sous-officiers à 10 %

9,2

- plan de requalification des sous-officiers de gendarmerie

0,53

- transformation d'échelle 2 en échelle 3 au profit des sous-officiers du corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie (CSTAG)

0,15

- transformation d'échelle 3 en échelle 4 au profit des sous-officiers CSTAG

0,23

- augmentation du contingent de primes de qualification des officiers à 26 %

0,15

Parmi les mesures catégorielles, on insistera plus particulièrement sur l'augmentation du contingent de primes de qualification de sous-officiers à 10 % (4 000 supplémentaires), qui permettra aux adjudants d'en bénéficier après un an de grade, alors que, il y a deux ans encore, il fallait six à sept ans dans le même grade pour en bénéficier. Ajoutons qu'ils en conserveront le bénéfice tout au long de leur carrière. Cette mesure poursuit, là encore, l'effort engagé en 2001, qui avait vu la création de 1 500 primes. Ce sont les adjudants, en effet, qui, sur le terrain, jour après jour, ont reçu mission d'imaginer et de mettre en _uvre les formules d'emploi des personnels les mieux adaptées à la configuration locale du terrain. Pour être efficace, une telle mesure devait être mise en _uvre de manière extrêmement déconcentrée. Il convenait, à un moment ou à un autre, de prendre acte de la charge supplémentaire que représentait cette mission essentielle à l'adaptation de la gendarmerie et à l'amélioration de son efficacité.

Par ailleurs, 50 échelles 4 et 217 échelles 3 supplémentaires sont attribuées aux sous-officiers du corps de soutien, ce qui permet d'améliorer le pyramidage d'un corps récent et jeune. Dans le même esprit, ont été créées deux primes pour les sergents passant de l'échelon 2 à l'échelon 3 et pour ceux qui sont passés de l'échelon 3 à l'échelon 4.

Enfin, les officiers se voient également gratifiés d'une prime, dans le cadre de l'amélioration de la pyramide des grades. Elle pourra bénéficier, par exemple, aux nouveaux officiers issus du collège interarmées de défense.

Le projet de budget pour 2002 se traduit également par un accroissement des crédits de la réserve à hauteur de 3,9 millions d'euros (soit 25,6 millions de francs). La réserve, tout en contribuant au renforcement du lien armées-nation, représente pour la gendarmerie une variable d'ajustement très utile, en complément de l'action des unités d'active. Il faut se féliciter à cet égard de la réactivité de ces forces de réserve, dont les tempêtes de 1999 et l'application en cours du plan Vigipirate ont donné la preuve. En outre, leur proximité et le caractère local de leur recrutement et de leur gestion leur donnent une très bonne connaissance du terrain. Au total, il s'agit d'une véritable réserve de service public, avec 9 000 contrats d'engagement spécial pour la réserve signés et 17 jours d'activité prévus en 2002.

Hors rémunérations et charges sociales, les crédits prévus en matière de fonctionnement s'élèvent à 687,97 millions d'euros (4,15 milliards de francs), soit une hausse de 11,31 % par rapport à 2001 (+ 69,91 millions d'euros ou 459 millions de francs). Grâce à l'apurement relatif des reports en 2001 et à cette dotation initiale en 2002, le budget de fonctionnement de la gendarmerie pour 2002 peut être qualifié d'excellent, en ce qu'il reflète la réalité des charges à couvrir. En poursuivant le redressement des moyens de fonctionnement de la gendarmerie, qui avaient atteint l'étiage en 1999, il donne réellement à la gendarmerie les moyens de fonctionner. Les personnels ne demandent pas autre chose.

Le schéma suivant illustre le redressement opéré en la matière depuis 2000, notamment sur le chapitre 34-06-10 dont les crédits sont destinés au fonctionnement courant des unités.

C'est en 2000 que les pouvoirs publics ont pris conscience de l'état préoccupant du budget de fonctionnement de la gendarmerie : le fonctionnement quotidien des unités sur le terrain n'était plus assuré correctement, sinon par des moyens de fortune souvent nés de l'imagination fertile des personnels, et, en tout état de cause, incompatibles avec la dignité que requiert la fonction d'autorité incarnée par le gendarme.

Ainsi, au cours de la gestion 2000, 350 millions de francs étaient venus abonder les chapitres fonctionnement, et à nouveau 330 millions de francs dans le budget 2001, faute d'une construction sincère de la loi de finances initiale pour 2001 qui n'avait pas pris acte des mesures exceptionnelles prises pendant la gestion 2000. En effet, le niveau des crédits ouverts en loi de finances initiale en 2001 étant le même qu'en 2000, l'exercice 2001 ne manqua pas d'achopper sur d'importants problèmes dans l'exécution du budget de fonctionnement.

Il faisait suite à une gestion durant laquelle il avait non seulement été nécessaire de réajuster le niveau des crédits à hauteur de 350 millions de francs, mais qui s'était également traduite par des reports de charges sur 2001 : il manquait au total 300 millions de francs environ, soit 150 au titre des reports et 150 dus aux insuffisances structurelles.

Le projet de loi de finances pour 2002 rompt avec cette logique d'insincérité, particulièrement pernicieuse dans la mesure où les effets négatifs qu'elle suscitait chez les personnels n'étaient que partiellement compensés par les mesures de compensation annoncées en gestion, en vertu d'un phénomène d'hystérésis somme toute prévisible. Nul besoin d'ajouter que cette impression de gestion de courte vue n'était en aucun cas représentative de la politique volontariste du gouvernement en matière de sécurité.

Le projet de loi de finances pour 2002 clôt donc le mouvement de mise à niveau réelle des crédits de fonctionnement de la gendarmerie entamé depuis deux ans, et ce dès le stade de la loi de finances initiale. Cette importante remise à niveau des dotations de fonctionnement bénéficie en priorité aux unités pour l'exécution du service quotidien.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT

(en millions d'euros)

Chapitre et article

Intitulé

Loi de finances initiale pour 2001

Projet de loi de finances pour 2002

Evolution
valeur absolue

Evolution
en %

Chapitre 34-06
Article 10

Fonctionnement des formations

297,79

319,14

+ 21,35

+ 7,17

Chapitre 34-06
Article 20

Locations immobilières

205,35

243,50

+ 38,15

+ 18,58

Chapitre 34-06
Article 30

Frais généraux du service du génie

1,39

1,39

0

/

Chapitre 34-06
Article 41

Dépenses centralisées de soutien

17,74

19,26

+ 1,52

+ 8,57

Chapitre 34-06 Article 50

Dépenses d'informatique, bureautique, télématique

6,12

7,67

+ 1,55

+ 25,33

Chapitre 34-06
Article 94

Sous-traitance

1,13

1,13

0

/

Chapitre 34-07
Article 10

Indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT)

40,96

45,99

+ 5,03

+ 12,06

Chapitre 34-07
Article 20

Transports

12,79

12,79

0

/

Chapitre 34-10

Alimentation

34,79

37,10

+ 2,31

+ 6,64

TOTAL

618,06

687,97

+ 69,91

+ 11,31

Ainsi, la dotation prévue pour le fonctionnement des formations est en hausse de 7,17 % (21,35 millions d'euros ou 140 millions de francs), en raison notamment du rebasage des moyens destinés à financer les mesures prises par le Conseil de sécurité intérieure. Les crédits réservés à l'alimentation font l'objet d'un ajustement de 2,31 millions d'euros (15 millions de francs). Quant aux crédits alloués aux dépenses informatiques, ils progressent de 1,55 million d'euros (10 millions de francs).

(en millions d'euros)

Rebasage du fonctionnement (CSI)

+ 21,34

Fonctionnement lié aux mesures d'effectifs hors prog.

+ 5,76

Actualisation du fonctionnement

+ 2,49

Alimentation afférente aux mesures d'effectifs (LPM)

+ 2,32

Rebasage des loyers

+ 34,30

Fonctionnement des réserves

+ 0,93

Actualisation de l'IJAT

+ 5,03

Fonctionnement afférent aux mesures d'effectifs (LPM)

- 2,28

Budgétisation des emplois « Berkani »

- 0,79

Enfin, la dotation consacrée aux loyers enregistre également une hausse importante de 38,15 millions d'euros (250 millions de francs), soit 18,6 % de plus qu'en 2001. Elle représente sans nul doute l'effort le plus notable en matière de fonctionnement. Les problèmes qui subsistent en la matière incitent toutefois le rapporteur à consacrer un développement spécifique à cette question importante.

L'effort considérable en faveur des loyers de la gendarmerie dans le projet de loi de finances pour 2002 est sans nul doute bienvenu. Est-il suffisant pour autant ?

D'après les informations recueillies par le rapporteur, la gestion 2001 fait apparaître une insuffisance de crédits de 115 millions d'euros sur le chapitre des loyers, dont 31,3 environ sont issus de reports de charges préexistants. Vraisemblablement, elle devrait être partiellement apurée par des mesures de gestion, dans une proportion qui fait actuellement l'objet de discussions avec le ministère de l'Économie et des Finances dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances rectificative pour 2001. Le projet de loi de finances pour 2002 prévoyant une augmentation de 38,1 millions d'euros et dans l'hypothèse où le collectif d'automne apurerait les reports de charges préexistants, ce sont, dans le meilleur des cas, environ 30 millions d'euros qui manqueront pour combler l'insuffisance structurelle sur les loyers.

Car c'est bien d'un manque structurel dont il s'agit, et non d'une difficulté ponctuelle. L'origine n'est pas à chercher dans une mauvaise gestion, mais dans un budget insincère, quand les charges sont, pour leur part, tout à fait objectives. Les causes de l'accroissement des dépenses de loyers sont en effet bien connues du ministère de la Défense. Une étude du contrôle général des armées a ainsi identifié quatre sources d'augmentation :

- le remplacement des gendarmes auxiliaires par les gendarmes adjoints. Alors que les premiers étaient logés de façon parfois sommaire, les seconds, qui sont volontaires, doivent se voir proposer des conditions de logement décentes, d'autant qu'ils n'ont pas le même profil que les gendarmes auxiliaires (plus âgés, plus souvent mariés) ;

- le redéploiement global au profit des zones périurbaines, où les loyers sont plus chers qu'en zone rurale ;

- l'augmentation des effectifs ;

- l'interdiction désormais faite aux gendarmes d'occuper des logements sociaux.

L'inspection générale des Finances devrait prochainement diligenter une enquête sur le même sujet. D'ores et déjà toutefois, le rapporteur ne peut qu'affirmer avec certitude qu'à moyen terme, la seule solution ne peut être que de combler ce déficit structurel, en un mot de consacrer à la question des loyers de la gendarmerie un effort important sur une période courte.

La gendarmerie, dont les crédits d'investissement représentent 2,6 % des titres V et VI  du budget d'équipement militaire global, se voit donner des moyens d'investissement satisfaisants dans le projet de budget pour 2002. Les autorisations de programme permettent d'assurer le renouvellement des équipements nécessaires au service quotidien des unités. Avec 339,71 millions d'euros (2 228 millions de francs), elles restent à peu près stables par rapport à 2001 (- 0,1 %). Quant aux crédits de paiement, dont l'enveloppe est en légère diminution, de 339,75 millions d'euros (2 228 millions de francs) en 2001, à 331,19 millions d'euros (2 172 millions de francs) pour 2002, ils devraient être abondés par une autorisation de consommation de reports de crédits antérieurs d'un montant de 4,42 millions d'euros. En tout état de cause, leur niveau est cohérent avec les engagements et devraient permettre de répondre aux besoins.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT
DE LA GENDARMERIE ENTRE 2000 ET 2001

(crédits de paiement en millions d'euros courants)

 

LFI 2001

Crédits de paiement

Evolution ressources 2002/
LFI 2001

PLF 2002

Reports

Ressources 2002

Chapitre 53.71
Equipements communs

138,976

148,372

0

148,372

+ 6,8 %

Chapitre 55.11
Soutien des forces

41,619

38,265

0

38,265

- 8,1 %

Chapitre 55.21
Entretien programmé des matériels

23,782

20,429

0

20,429

- 14,1 %

Chapitre 54.41
Infrastructure

127,752

117,262

4,421

121,683

- 4,8 %

Chapitre 66.50
Subventions d'investissement

7,622

6,860

0

6,860

- 10 %

TOTAL

339,751

331,188

4,421

335,609

- 1,2 %

En termes d'équipement, la loi de programmation militaire 1997-2002 fut, pour la gendarmerie, celle de la mise en place du réseau Rubis, achevée selon l'échéancier prévu, comme l'indique le tableau ci-dessous.

ECHÉANCIER DE DÉPLOIEMENT DU PROGRAMME RUBIS

 

1992-1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Total

Groupements installés

1

9

19

20

17

19

12

97

Ainsi, au terme du programme, les 97 groupements de gendarmerie de France métropolitaine sont dotés du réseau Rubis et de nombreuses zones, non couvertes précédemment par le réseau analogique, le sont désormais. Au printemps 1999, à l'occasion d'un sondage sur le moral, 92 % du personnel concerné par l'emploi de ce réseau se déclarait pleinement satisfait de son fonctionnement. Le retour d'expérience de la mise en _uvre de Rubis ainsi que les nouvelles contraintes opérationnelles de la gendarmerie ont cependant nécessité d'apporter quelques correctifs ou compléments au schéma initial, dont certains restent encore à mettre en _uvre. Notamment, à la fin de l'année 2001, Rubis et son équivalent dans la Police nationale, le système Acropole, seront interopérables en Corse, interopérabilité qui sera sécurisée. Alors que la France est aujourd'hui engagée dans une lutte de longue haleine contre le terrorisme international, on peut s'interroger sur l'intérêt de réaliser l'interopérabilité sécurisée entre les réseaux Rubis et Acropole sur l'ensemble du territoire national.

La diminution globale des crédits de paiement, tout à fait normale avec l'achèvement du programme Rubis, n'empêche pas une augmentation notable du chapitre supportant les dépenses d'équipement communs (véhicules, armements et munitions).

En 2002, la gendarmerie devrait ainsi acquérir un certain nombre de matériels destinés au service quotidien des unités :

- 1 900 véhicules destinés aux brigades ;

- 130 véhicules de liaison ;

- 520 motocyclettes ;

- 2 300 gilets pare-balles à port apparent ;

- 10 000 gilets pare-balles à port discret.

En outre, l'année 2002 verra le renouvellement des configurations informatiques mises en place au titre du programme Rubis et dans le cadre de l'équipement bureautique des unités. C'est d'ailleurs ce programme de modernisation qui explique la réduction des moyens de maintien en condition opérationnelle, mécaniquement déterminés par l'âge moyen des matériels.

(en millions d'euros courants)

Chapitres et articles d'imputation budgétaire

Autorisations de programme

Crédits de paiement

53-71 - Equipements communs et interarmées

   

53-71/41 - Rubis

0

1,037

53-71/42 - Mobilité

59,732

61,788

53-71/43 - Armement, munitions, optique, divers

17,472

16,312

53-71/44 - Matériels techniques

16,359

11,433

53-71/45 - Informatique

52,445

37,755

53-71/46 - Electronique (1)

13,788

20,047

Sous-total 53-71 - Equipements

159,796

148,372

55-11 - Soutien des forces

   

    54-11/51 - Habillement, couchage, ameublement, campement, subsistance

34,530

38,265

Sous-total 55-11 - Soutien des forces

34,530

38,265

55-21 - Entretien programme des matériels (EPM)

   

    55-21/41 - Maintien en condition opérationnelle Rubis

0,152

5,793

    55-21/42 - Maintien en condition opérationnelle informatique

2,287

8,385

    55-21/43 - Maintien en condition opérationnelle aériens

5,336

6,251

Sous-total 55-21 - EPM

7,775

20,429

(1) dont 0,305 million d'euros en autorisations de programme et 4,116 millions d'euros en crédits de paiement réservés aux évolutions du programme Rubis. Ces évolutions ne sont pas en effet comprises dans le programme Rubis identifié à l'article 41.

Le projet de budget pour 2002 fait apparaître une diminution des crédits finançant l'effort immobilier de la gendarmerie, de 4,8 % pour les crédits d'infrastructure, c'est-à-dire correspondant aux travaux immobiliers réalisés sur le parc domanial, et de 10 % pour les crédits supportant les subventions d'investissement essentiellement destinées aux collectivités locales. Néanmoins, s'agissant des infrastructures domaniales, le projet de budget devrait permettre de poursuivre, entre autres chantiers, la reconstruction de la caserne de Pithiviers, de lancer la deuxième tranche de la rénovation de la caserne de Marseille Beauvau et de lancer les opérations d'extension et de restructuration des casernes de Montmédy, Istres et Saint-François, en Guadeloupe.

Le rapporteur a souligné précédemment la nécessité de combler le déficit structurel enregistré par le chapitre supportant les dépenses de loyers de la gendarmerie. Ce constat est d'autant plus pertinent que, si l'on considère l'évolution de la politique de construction immobilière telle qu'elle apparaît dans le projet de budget pour 2002, cette faiblesse structurelle devrait s'accentuer.

D'après les renseignements fournis par la direction générale de la gendarmerie, les subventions du titre VI devraient permettre la construction d'environ 600 équivalents unités-logements (UEL), contre 668 UEL commandées sur le titre V, c'est-à-dire directement construites par l'Etat et ne donnant pas lieu au paiement de loyers ultérieurs. Au total, l'évolution semble plutôt favorable dans la mesure où 1 268 UEL seront mises en chantier, contre 1 187 en 2001.

MISES EN CHANTIER
ET LIVRAISONS D'INFRASTRUCTURE 1995-2001

 

Mises en chantier

Livraisons d'infrastructures

Année

Etat

Collectivités locales et particuliers

Total

Etat

Collectivités locales et particuliers

Total

1995

910

300

1 210

1 035

378

1 413

1996

800

415

1 215

973

310

1 283

1997

934

470

1 404

838

338

1 176

1998

880

353

1 233

871

446

1 575

1999

914

231

1 145

911

243

1 154

2000

780

280

1 060

901

300

1 201

2001
(prévision)

787

400

1 187

751

310

1 061

Ces chiffres ne reflètent cependant pas la réalité, puisqu'ils présentent les constructions autorisées par les crédits budgétaires figurant en loi de finances initiale et ne prennent de ce fait pas en compte les rallonges budgétaires obtenues en cours de gestion. Or, les crédits ajoutés au titre VI au titre du budget 2000 ont permis le lancement de 22 opérations totalisant 342 EUL, soit au total 600 EUL subventionnées en 2000 ; en 2001, selon les mêmes modalités, ce sont quelque 43 opérations supplémentaires qui ont été subventionnées, soit un total de 1 000 EUL commandées. On assiste par conséquent à une inversion de la proportion entre les constructions domaniales et les locations, au profit de ces dernières, 787 EUL étant financées par l'Etat en 2001. Le projet de budget pour 2002 accroît cette tendance en faisant figurer cette inversion dès le stade de la loi de finances initiale, en sorte que d'éventuels abondements budgétaires en cours d'année, qui bénéficient généralement aux subventions et non aux constructions domaniales, ne feront qu'accentuer la tendance.

In fine, la gendarmerie enregistre certes un accroissement net du parc immobilier à sa disposition, mais celui-ci s'effectue au profit des logements pris en location. Par conséquent, en dépit d'une politique optiquement satisfaisante, l'augmentation de la part du parc en location préfigure une aggravation, du moins une prolongation de la crise des loyers si le déficit structurel qui affecte ce chapitre n'est pas comblé. Mécaniquement en effet, l'absence de sincérité du budget consacré aux loyers des gendarmes dans le projet de loi de finances pour 2002, jointe à la construction de nouvelles EUL qui seront prises à bail, augmente le déficit de ce poste budgétaire.

Il est donc temps de mettre un frein à cette évolution schizophrénique, rendue possible à court terme uniquement par le glissement entre le titre V et le titre VI, ce qui n'est pas tenable à moyen terme. Il faut qu'en termes d'équipement et d'infrastructure, la prochaine loi de programmation militaire soit, pour la gendarmerie, celle de l'immobilier, comme la précédente fut celle du programme Rubis.

II. - QUELLES PERSPECTIVES POUR LA GENDARMERIE ?

Le métier de gendarme tel que l'exerçait encore la génération précédente n'a plus beaucoup en commun avec ce que signifie, aujourd'hui, être gendarme. Naguère, s'engager dans la gendarmerie signifiait avoir toutes chances d'exercer son métier dans une zone rurale, sans perspectives de mobilité très importantes, au contact d'une population pour laquelle le gendarme incarnait une figure, certes familière, mais néanmoins d'autorité. Au début du XXIème siècle, ce qu'il est coutume d'appeler le profil de carrière n'a plus grand chose en commun avec cette description.

Première différence : la diversité des gendarmes eux-mêmes. A l'issue d'une loi de programmation militaire 1997-2002 qui a définitivement changé le visage des armées, la gendarmerie se présente comme une institution aux personnels aux statut et aux profils très diversifiés. La part des civils s'est considérablement accrue, tandis que de nouveaux corps sont apparus.

Deuxième différence : l'évolution des missions. Sans doute la diversité des missions a-t-elle toujours été une caractéristique du rôle de la gendarmerie et, en surface, l'activité des gendarmes reste axée autour des missions militaires, de défense civile, de police judiciaire, et des concours aux ministères. Pour autant, pour prendre le seul exemple de la police judiciaire, tant l'évolution des techniques que de la délinquance elle-même confèrent à cette activité traditionnelle un aspect entièrement renouvelé. Enfin, le développement du rôle international de la gendarmerie ouvre des perspectives d'action totalement nouvelles aux gendarmes.

Troisième différence : l'évolution de la société elle-même. Traditionnellement ancrée dans la France rurale, la gendarmerie est confrontée de plein fouet aux métamorphoses de la société française. Etre gendarme en zone rurale prend aujourd'hui un sens nouveau, alors que l'on assiste au développement de nouvelles formes de délinquance, très proches de celles qui existaient traditionnellement dans les zones urbaines, dans des régions rurales jusqu'alors épargnées. Plus encore, dans ces zones, la gendarmerie est confrontée à des phénomènes nouveaux, qui leur sont spécifiques, tels que les rave par exemple. Que dire par ailleurs de la transformation complète de l'activité de la gendarmerie dans les zones périurbaines ou urbanisées, sans évoquer l'aide apportée par les gendarmes mobiles dans les zones urbaines dépendant de la police nationale ?

En réalité, au-delà de la distinction entre zones rurales, rurbaines, périurbaines ou urbaines, le changement radical réside dans l'évolution de la relation entre le gendarme et la population, le citoyen - usager étant devenu un client - consommateur de sécurité qui n'envisage plus, de ce fait, le gendarme comme une figure d'autorité, mais comme un prestataire de services qui doit remplir ses objectifs. Là sans doute réside l'une des causes du malaise de certains personnels de la gendarmerie que nous évoquions en introduction : notamment, le fait que le moral soit médiocre au sein des unités de gendarmerie départementale, mais plutôt bon chez les gendarmes mobiles, n'est pas anodin. Le gendarme affecté dans les unités territoriales, avant d'être jugé par sa hiérarchie, l'est par des clients ou des donneurs d'ordre qui ne se privent pas de faire savoir leur opinion sur la qualité du service rendu, y compris par médias interposés. Et ce alors que le gendarme, dont la charge de travail est extrêmement lourde, a parfois le sentiment d'être tenu à l'écart de progrès sociaux importants.

Missions traditionnelles, nouvelles missions : la distinction peut paraître artificielle dans la mesure où, sur le fond, la gendarmerie reste chargée de maintenir la sécurité publique. Néanmoins, nul ne peut nier que les évolutions sociales et technologiques ont complètement renouvelé l'exercice de certaines missions. Tel est notamment le cas s'agissant de l'action de la gendarmerie mobile dans les zones urbaines ou en matière internationale, quand elle n'est pas confrontée à des missions certes ponctuelles, mais dont l'accomplissement recouvre des enjeux essentiels pour la nation. A cet égard, avec la réactivation du plan Vigipirate renforcé et la prochaine introduction de l'euro, l'actualité est particulièrement riche.

De 1999 à 2000, le poids global des missions de la gendarmerie apparaît stable.

RÉPARTITION DE L'ACTIVITÉ MISSIONNELLE
DE LA GENDARMERIE DÉPARTEMENTALE (EN %)

Activité missionnelle

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Défense
civile

Sécurité publique générale

33,26

33,57

33,38

34,24

34,03

35,44

Circulation routière

17,03

16,75

16,37

16,49

17,91

16,54

Secours et divers

1,98

2,00

2,00

2,01

0,75

0,74

Missions militaires

5,74

5,84

5,72

5,69

5,40

5,62

Police judiciaire

38,38

38,62

39,39

39,02

38,00

37,79

Concours aux ministères

3,53

3,12

3,06

2,48

3,92

3,57

La part consacrée à la défense civile représente toujours plus de la moitié de l'activité totale, passant de 52,69 % en 1999 à 53,02 % en 2000. De même, la répartition de la charge de travail entre les missions de sécurité publique générale, de sécurité routière et de sauvegarde des biens et des personnes ne connaît pas de changement notable. Les concours aux ministères tendent également à se stabiliser en 2000, à 3,57 % de l'activité générale. La part consacrée à la police judiciaire est constante sur l'ensemble de la période, s'établissant entre 37 et 39 de l'activité missionnelle. Enfin, la mission de défense militaire a également peu évolué, à 5,62 %.

Ce tableau global ne fait pas apparaître certaines missions particulières de la gendarmerie, sur lesquelles le rapporteur souhaiterait insister alors que notre pays est engagé dans une lutte de longue haleine contre le terrorisme, dans laquelle la gendarmerie est, bien entendu, particulièrement impliquée. On rappellera ainsi qu'existe une gendarmerie des transports aériens (GTA), placée pour emploi auprès de la direction générale de l'aviation civile, qui assure certes des missions traditionnelles, notamment en matière de police judiciaire, mais surtout des missions spécifiques, telles que la participation à la sûreté du trafic aérien et des installations situées dans les zones réservées de ces sites aéroportuaires. En 2001, les effectifs de la GTA s'élèvent à 1 065 personnels ; aucun création de postes n'est prévue en 2002, ce qui laisse penser que 304 volontaires supplémentaires devraient être déployés vers cette unité pour compenser la disparition des gendarmes auxiliaires en nombre équivalent. Dans cette lutte de tous les instants contre le terrorisme, la gendarmerie maritime est également appelée à jouer un rôle important afin de prévenir toute approche d'un bâtiment à la cargaison suspecte. Elle compte en 2001 1 145 personnels.

Enfin, le tableau précédent ne fait pas apparaître les concours particuliers apportés au ministère de la Justice, sous forme de transfèrements, qui ne sont pas inclus dans les concours apportés aux ministères, mais dans les activités de police judiciaire. Ces concours ont représenté 1,57 % de l'activité totale de la gendarmerie en 2000, contre 1,5 % en 1999. Ainsi, l'exécution des transfèrements a nécessité l'équivalent de l'activité de 755 gradés et gendarmes départementaux et mobiles et de 152 sous-officiers de gendarmerie, au profit du seul palais de justice de Paris, se consacrant, tout au long de l'année 2000, à plein temps à l'exécution de cette unique mission.

Ce problème, pour traditionnel qu'il soit, n'en reste pas moins aigu, d'autant qu'il ne peut que s'accroître. Selon la direction générale de la gendarmerie, il existe sept facteurs d'aggravation potentielle de ce phénomène :

- en instaurant de nouveaux recours juridictionnels, la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence va immanquablement accroître le volume des transfèrements. Les prévisions, qui émanent notamment du ministère de la Justice, font état d'une charge équivalant à l'activité d'environ 158 à 189 militaires ;

- la création du juge des libertés et de la détention implique, depuis le 1er janvier 2001, date de mise en _uvre de la loi sur la présomption d'innocence, une présentation systématique des mis en cause pour toute décision éventuelle d'écrou. Or, 110 postes de juges ayant été créés pour 180 juridictions, le déficit de 70 juges va indubitablement impliquer le transport des personnes mises en examen vers le magistrat le plus proche. Sur la base de deux gendarmes par escorte et de 18 000 ordonnances de placement en détention par les unités de la gendarmerie en 1997, la charge nouvelle peut être estimée à l'activité annuelle de 100 gendarmes environ ;

- la loi du 15 juin 2000 a également instauré deux nouveaux types d'appels, qui pourraient être à l'origine de 9 000 recours par an, soit une surcharge équivalant à l'activité annuelle de 50 gendarmes environ ;

- l'appel instauré en matière criminelle entraînera quant à lui le transfèrement des accusés vers une nouvelle chambre criminelle de la cour de cassation. La chancellerie estime qu'un tiers environ des 4 000 arrêts rendus par les cours d'assises seront concernés par ce recours, soit une charge nouvelle de transfèrement équivalant à l'activité de 7,3 gendarmes si la cour d'assises désignée par la chambre criminelle de la cour de cassation se situe dans le département de détention, ou à l'activité annuelle de 39 gendarmes si le département de jugement diffère du département de détention ;

- la politique pénitentiaire se traduira également par une augmentation des transfèrements, qu'il s'agisse du projet de regroupement des prévenus considérés comme dangereux dans des maisons d'arrêt régionales ou du programme de construction d'établissements pénitentiaires nouveaux d'une capacité d'accueil de 600 détenus, le plus souvent implantés hors agglomération, et donc en zone de gendarmerie. Ainsi, en 2002 ouvriront deux établissements en zone gendarmerie, la maison d'arrêt de Seysses, en Haute-Garonne, et le centre pénitentiaire du Pontet dans le Vaucluse ;

- l'abandon progressif du fonctionnement des petits dépôts au sein des palais de justice par la police nationale est également une source potentielle de croissance des transfèrements ;

- enfin, les projets d'externationalisation des modalités d'accomplissement des peines, visant à faciliter la réinsertion sociale des condamnés en favorisant les peines exécutées en milieu ouvert, pourraient accroître les charges de la gendarmerie dans ses activités de concours au ministère de la Justice.

Ne nous y trompons pas : la politique pénale du gouvernement n'est aucunement en cause, d'autant qu'elle traduit le rattrapage d'actions qui n'avaient jamais été mises en _uvre jusqu'alors. Mais, de même qu'elle entraîne un accroissement, légitime, du budget du ministère de la Justice, il sera nécessaire, si les transfèrements augmentaient fortement, que la gendarmerie bénéficie de moyens à la hauteur de l'accroissement de la charge de travail afférente, sous peine de perpétuer une distorsion entre donneur d'ordres et prestataire de service qui, aujourd'hui, pèse beaucoup sur le moral de la gendarmerie. D'ores et déjà, un certain nombre de mesures ont été prises, visant à une répartition des charges de transfèrements entre l'administration pénitentiaire, la police nationale et la gendarmerie, conforme aux textes en vigueur. Ainsi, l'administration pénitentiaire prendra à sa charge la garde des détenus hospitalisés dans les unités hospitalières spécialisées interrégionales, en cours de création dans sept centres hospitaliers universitaires. En outre, la conduite des détenus devant les juridictions de la compétence des forces de police et de gendarmerie sera rationalisée. A cette fin, le ministère de la Justice a relancé l'expérimentation conduite depuis 1997 sur 10 Juridictions visant à faire coordonner la charge des transfèrements par le Procureur de la République. Il n'existe pas à ce jour de retour d'expérience en la matière. Sans doute l'édiction par la Chancellerie d'instructions précises quant aux modalités de recours aux transfèrements judiciaires permettrait d'assurer le respect et le bonne application des textes en vigueur par l'ensemble des juridictions.

L'évolution à la hausse de la charge de travail de la gendarmerie est liée à la conjonction de deux phénomènes : la mise en _uvre de nouvelles méthodes de travail et l'adjonction de missions nouvelles, ponctuelles ou durables.

· C'est dans le domaine de la police judiciaire que la transformation des méthodes d'intervention de la gendarmerie est la plus flagrante, ce que ne reflètent d'ailleurs pas les statistiques d'activité, qui montrent une stabilité de la part des missions de police judiciaire par rapport aux autres missions. Et pourtant, afin de lutter plus efficacement contre la petite et moyenne délinquance, en augmentation, la gendarmerie a, depuis 1997, fourni d'importants efforts sur le plan de l'implantation territoriale de ses unités, des effectifs, de la formation et des programmes de modernisation des méthodes et des outils.

S'agissant de l'adaptation des structures territoriales aux progrès de la délinquance, de nombreuses unités ont été créées. Notamment, 108 pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG), qui interviennent prioritairement dans les zones les plus sensibles, ont été créés, dont 20 au 1er septembre 2001. 11 brigades territoriales ont par ailleurs été créées depuis 1996.

Cet effort quantitatif s'est accompagné de mesures visant à mieux identifier la notion de brigade périurbaine, de façon à faire porter les efforts de redéploiements d'effectifs en priorité sur ces unités. La gendarmerie distingue ainsi entre les brigades périurbaines normales (761), sensibles (100) et très sensibles (85). A ce titre, entre 1999 et 2001, 1 496 sous-officiers de gendarmerie et 995 gendarmes adjoints ont été déployés sur les départements prioritaires et sensibles, quand, parallèlement, 286 sous-officiers et 273 gendarmes adjoints venaient renforcer les départements déficitaires en effectifs. Ce sont ainsi 3 050 militaires qui ont été concentrés dans les 39 départements qui en avaient le plus besoin, dont 28 dits prioritaires et sensibles.

Au total, les 946 brigades périurbaines disposent de 14 100 militaires, ce qui reflète une organisation tout à fait spécifique. En effet, tandis que le ratio général appliqué en matière de sécurité est de 1 gendarme pour 1 000 habitants résidant en zone de gendarmerie nationale et de 1 pour 10 000 habitants en zone de police nationale, au regard du recensement général de la population de 1999, les ratios appliqués aux unités périurbaines sont de 1 gendarme pour 900 habitants en zone de gendarmerie nationale pour les brigades périurbaines normales et de 1 pour 800 pour les brigades périurbaines sensibles ou très sensibles. Ceci permet d'adapter le dispositif à la délinquance effective rencontrée dans ces zones, plus élevée que pour la moyenne nationale comme l'indique le tableau suivant.

ETRE GENDARME EN ZONE PÉRIURBAINE :
UNE PÉNIBILITÉ ACCRUE DES TÂCHES

 

Brigades périurbaines
très sensibles

Brigades périurbaines
sensibles

Brigades périurbaines
normales

Moyenne
nationale
des brigades

Crimes et délits totaux constatés par militaire

59

44

28

26

Crimes et délits de voie publique constatés par militaire

39

27

15

13

Il est à noter que, selon la direction générale de la gendarmerie, le volume horaire journalier est néanmoins le même (9 h 12) que dans les brigades normales, la pression y étant, elle, beaucoup plus forte.

Autre spécificité de l'organisation de la gendarmerie dans ces zones, l'existence de brigades de prévention de la délinquance juvénile. Créées depuis 1997 pour répondre à la priorité gouvernementale accordée par le gouvernement à la lutte contre la délinquance des mineurs, elles sont placées directement sous la responsabilité du commandant de groupement de gendarmerie départementale du lieu d'implantation et ont une vocation prioritairement préventive. Au nombre de 40 à ce jour, elles devraient augmenter en 2002, avec deux unités supplémentaires à Troyes et au Pontet. Par définition, il est difficile de dresser le bilan d'une institution chargée de faire de la prévention. Néanmoins, alors qu'en 1999, 17 745 mineurs étaient mis en cause dans les 26 départements les plus sensibles, ce nombre a été ramené à 16 604 en 2000, soit une baisse de 7 %. Ce chiffre constitue à lui seul un bilan encourageant et objectif, à l'heure où des affaires médiatiques donnent parfois le sentiment d'une croissance débridée de la délinquance des jeunes.

La croissance globale de la délinquance et les nouveaux visages qu'elle prend ont, évidemment, des incidences sur les méthodes d'intervention de la gendarmerie, sans compter le rôle que jouent en la matière les nouvelles technologies. L'effort de formation de la gendarmerie en matière de police judiciaire est donc une priorité, d'ailleurs reconnue par la direction de la gendarmerie nationale. Ainsi, le volume général de la formation dispensée au sein du centre national de la formation de police judiciaire de Fontainebleau a connu une augmentation de 40 % au cours des six dernières années.

LA CROISSANCE DE LA FORMATION DES GENDARMES
EN MATIÈRE DE POLICE JUDICIAIRE DEPUIS 1996

    Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

    Jour/gendarme

24 860

25 205

26 120

27 595

32 775

34 905

Cette formation fait d'ailleurs l'objet d'un schéma directeur depuis 1998, complété par des mesures d'accompagnement financières, immobilières et humaines. Ainsi, elle intègre un enseignement général et de préparation au commandement supérieur (11 stages), un enseignement technique et scientifique (5 stages), un enseignement sur les phénomènes de société (11 stages) et, enfin, un enseignement sur les délits complexes et les nouvelles technologies (5 stages). En outre, pour tenir compte des orientations gouvernementales et des évolutions de la délinquance, le centre de Fontainebleau a créé quatre nouveaux stages en 2000, relatifs notamment à l'adaptation à la zone périurbaine et à l'audition de mineurs victimes. En 2001, ont été ajoutés des stages sur les nouvelles technologies et la délinquance financière, économique et informatique. Au total, c'est donc un champ de formation extrêmement large qui est proposé aux personnels, comme le montre le tableau suivant.

LES FORMATIONS SPÉCIALISÉES
DANS LE DOMAINE DE LA POLICE JUDICIAIRE

En jour/gendarme

1996

1997

1998

1999

2000

2001

    Formateur Relais anti-drogue

400

450

760

760

1 000

600

    Formateur Relais environnement écologie

960

330

1 095

735

1 500

1 200

    Délinquance économique et financière

1 500

1 500

1 500

3 000

4 500

2 880

    Analyse recherche criminelle 1er niveau

-

-

-

-

825

1 125

    Délinquance juvénile

-

-

1 140

1 410

1 275

300

    Adaptation ZPU

-

-

-

-

1 500

1 000

    Audition de mineur victime

-

-

-

-

875

960

    Enquêteur

-

-

-

-

3 125

3 125

    Délinquance ECO. Magistrats/officiers

-

-

-

-

-

125

    DEFI / officiers

-

-

-

-

-

450

    Nouvelles technologies

-

-

-

-

-

200

· Au-delà de cette évolution dans la mise en _uvre de ses missions traditionnelles, la gendarmerie voit se développer des missions nouvelles, ponctuelles ou durables.

L'ampleur prise par la lutte antiterroriste suite aux attentats du 11 septembre 2001 laisse penser qu'il s'agit d'une mission durable. Est-elle nouvelle ? La réponse est négative si l'on considère qu'elle ressort de missions de défense civile. Cependant, le visage nouveau du terrorisme en ce début de XXIème siècle, qui devient un terrorisme de destruction massive, incite à penser qu'il n'est plus possible de se contenter des moyens classiques pour y faire face. Pour l'heure, les charges liées à la mise en _uvre du plan Vigipirate renforcé sont supportées sans difficulté particulière par la gendarmerie, qui bénéficie en outre du soutien de 300 à 500 réservistes. Une dizaine d'escadrons a été mobilisée, soit pour des gardes exceptionnelles, soit pour des gardes préexistantes réorientées vers le dispositif Vigipirate. On rappellera ainsi que s'agissant de la gendarmerie mobile, 31 escadrons, soit environ 2 000 hommes, sont engagés quotidiennement pour des missions de gardes de points sensibles (ambassades, palais de justice, gares, aéroports, ...) en métropole, 15 escadrons et 2 pelotons, soit environ 1 200 personnels, assurant quant à eux des missions de sécurité générale dans les territoires et départements d'outre-mer. La gendarmerie départementale, pour sa part, assure, dans le cadre de ses missions quotidiennes, une surveillance renforcée des lieux publics et des bâtiments et installations considérés comme sensibles. Elle participe, au côté des autres formations, plus particulièrement :

- à la sécurité des aérodromes (300 en zone de gendarmerie) et des emprises aéroportuaires nationales. La gendarmerie des transports aériens (1 065 personnels) a renforcé les mesures de sécurité sur les 30 sites aéroportuaires où elle est présente. Elle est par ailleurs soutenue dans cette mission par des personnels du groupement blindé de gendarmerie mobile et ponctuellement par des gendarmes du GSIGN et de la Garde Républicaine. La surveillance des autres aérodromes est assurée par les personnels des compagnies de gendarmerie départementale ;

- à la sécurité extérieure des centrales nucléaires (19 sites sur le territoire national) et à la recherche du renseignement dans les aires spéciales de surveillance. Les pelotons de surveillance et d'intervention des zones concernées, au nombre de 20, assurent une surveillance continue de ces sites et maintiennent une réserve d'intervention, ce qui représente 250 gendarmes par jour ;

- à la sécurité extérieure et intérieure des sites nucléaires de l'armée (8 sites). La gendarmerie de l'air (1 027 personnels), la gendarmerie maritime (1 175 personnels) et la gendarmerie de la sécurité des armements nucléaires effectuent de manière continue la surveillance de ces sites militaires ;

à la sécurisation des lignes SNCF et des transports urbains dans le cadre de contrats locaux de sécurité (14), notamment dans les départements de l'Oise, de la Seine-et-Marne, de l'Essonne et du Nord-Pas-de-Calais.

En outre, depuis la mise en place du plan Vigipirate renforcé, les personnels de l'EPIGN ont été amenés à intervenir plus fréquemment pour des missions préventives, et notamment des fouilles de sites, avec l'aide de chiens spécialisés.

Par ailleurs, la gendarmerie départementale est intervenue à de nombreuses reprises en protection des biens et des personnes pour de nombreuses fausses alertes à la bombe, alertes à la poudre blanche, dégradations de biens publics et vols de bouteilles de gaz. L'augmentation du nombre d'enquêtes judiciaires suite à des signalements suspects est lui aussi significatif.

La gendarmerie contribue enfin à la lutte contre le terrorisme international par ses enquêtes judiciaires et par la remontée de l'information, qu'elle ne traite pas elle-même toutefois. C'est en effet au sein de l'unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT) qu'est organisée, dans un climat de confiance, la coopération entre la gendarmerie et la police nationale en matière de lutte contre le terrorisme international.

Le rapporteur note par ailleurs que les hasards du calendrier ont conduit à la création, le 1er juillet 2001, d'une cellule nucléaire - radiologique - bactériologique - chimique (NRBC) à compétence nationale.

Sur le territoire national, la gendarmerie fait également face, depuis plusieurs mois, et continuera de le faire en 2002, aux charges liées à l'introduction de l'euro. Cette tâche a d'ailleurs nécessité le report des permissions que les personnels avaient souhaité prendre en fin d'année, la période couvrant les mois de décembre et janvier devant être, en effet, particulièrement tendue.

En amont, la participation à la mise en place de l'euro s'est traduite par une action de formation importante. Une formation dite « généraliste » a été assurée sous l'autorité des commandants de région de gendarmerie pour donner à chaque militaire une connaissance générale de la monnaie unique (dispositif et calendrier, vrai et fausse monnaie, etc.), leur permettant ainsi d'avoir un rôle d'information auprès du public. Certains personnels de la gendarmerie départementale et de la gendarmerie mobile ont également été formés aux missions d'escortes ferroviaires ou routières. C'est ainsi qu'un stage a été organisé en liaison avec la SNCF pour former les unités de gendarmerie mobile désignées pour les escortes ferroviaires. Cette formation a été commune aux militaires de la gendarmerie et aux fonctionnaires de la police nationale (CRS). D'autres stages ont été mis en place au centre de Saint-Astier, à l'attention des commandants de groupement de gendarmerie départementale et des commandants de PSIG. Dans le même temps, les enquêteurs des unités de recherche ont été instruits à la lutte contre la contrefaçon, le faux monnayage et les diverses fraudes ou escroqueries. Cette formation, initiée par l'office central de lutte contre le faux monnayage (OCRFM) a été commune aux militaires de la gendarmerie et aux fonctionnaires de police (SRPJ). Elle a été ensuite relayée au plan régional. Enfin, le dispositif de mise en place et de formation dédié au pistolet mitrailleur HK MP5 a été anticipé, de façon à doter les unités de GD engagées dans des missions euro dès le 20 août 2001.

Au plan opérationnel, les missions d'escorte de pièces ont débuté dès le mois de juin 2001. En fait, depuis l'année 2000, les unités engagées dans le cadre du protocole passé avec la Banque de France effectuent des escortes de monnaie fiduciaire. A la fin du mois d'octobre 2001, ce sont près de 10 000 gendarmes qui auront été employés sur ces missions d'escortes, de garde, de sécurité des transbordements, de sécurisation des itinéraires ou de pilotage des convois. A cette même échéance, l'ensemble des opérations d'acheminement de l'euro vers les départements et collectivités territoriales d'outre-mer auront été effectuées, soit par voie maritime, soit par voie aérienne. Pour la distribution des billets, des escortes seront accordées aux sociétés de transport de fonds pour assurer les transferts entre les succursales de la Banque de France et leurs centres forts (2 escortes journalières gratuites). Dans le même temps, une sécurisation sera assurée à l'ouverture et à la fermeture de ces succursales comme des centres forts (1 heure chaque jour). Viendra alors la phase délicate où l'euro sera mis en circulation et où la gendarmerie, comme la police, devra assurer une surveillance renforcée de tous les lieux où l'argent va circuler en flux plus important : établissements financiers, grandes surfaces, marchés. A la fin des opérations, vers la mi-février 2002, lorsque la remontée des francs aura été assurée, on estime que 65 000 gendarmes auront participé aux diverses missions liées à la mise en place de l'euro.

· Enfin, l'accroissement des missions de la gendarmerie est lié au renforcement de sa stature internationale, qui représente un phénomène nouveau lié à la conjonction de trois éléments :

- les opérations d'assistance militaire technique (1) ;

- les relations de coopération bilatérale ou multilatérale que la gendarmerie entretient avec ses homologues européennes (2) ;

- enfin, sa présence à l'étranger (3).

Au total, ce sont quelque 107 officiers et 924 sous-officiers qui étaient en service à l'étranger au 1er août 2001.

ACTIVITÉS INTERNATIONALES DE LA GENDARMERIE

    En Ambassade

322

    Renfort sécurité au profit des représentations diplomatiques françaises à l'étranger

134

    En coopération militaire technique

81

    En détachement d'assistance militaire temporaire

4

    En mission de l'ONU (dont FINUL au Liban : 4)

188

    En mission OTAN

192

    En organisation de l'Union européenne

16

    En organisations internationales ou étrangères

6

    Détachement prévôtal d'Allemagne

30

    En prévôté (permanente : 45, de circonstance hors ONU : 6)

51

    En école de sous-officiers en Italie, Espagne et Portugal (FIEP)

4

    En stage à l'étranger

3

(1) Au titre des opérations de coopération militaire technique (CMT), la gendarmerie fournit des détachements de coopération permanents, d'importance numérique variable dans 19 pays. Au 1er août 2001, l'effectif total de la CMT s'élevait à 45 officiers et 36 sous-officiers. On peut cependant noter que ces effectifs ne sont pas toujours en corrélation avec les besoins et la priorité affichée en matière sécuritaire, et qu'ils sont constants d'année en année. Parallèlement, la gendarmerie fournit des détachements temporaires constitués pour répondre à des demandes ponctuelles du ministère des Affaires étrangères. Les détachements d'assistance militaire _uvrent actuellement au profit de 3 pays (Cambodge, Tchad et Niger). Par ailleurs, la gendarmerie menait, en 2000, des actions de formation au profit de 327 stagiaires originaires de 48 pays dans ses écoles.

(2) Les relations de coopération bilatérale ou multilatérale que la gendarmerie entretient avec ses homologues européennes s'établissent dans divers domaines. Il apparaît de plus en plus clairement que l'implication de la gendarmerie dans la coopération européenne ira croissant, les accords internationaux ayant une incidence directe sur le service quotidien des unités. Il peut, par exemple, s'agir de commissions rogatoires internationales, dont la gendarmerie nationale est saisie par le canal d'Interpol et qui, pour une fraction importante, lui sont adressées par d'autres pays européens. 221 commissions rogatoires internationales ont été délivrées à la gendarmerie par les magistrats français en 2000.

En outre, la gendarmerie, qui a en charge de la sécurité publique dans la majeure partie des zones frontalières, entretient des rapports étroits avec ses voisins dans le cadre d'accords transfrontaliers tendant à faciliter les relations de service et à échanger les renseignements en matière d'ordre public et de police judiciaire. Sur le terrain, elle participe concrètement aux échanges liés à cette coopération par le biais des centres opérationnels des groupements de gendarmerie départementale (COG) des départements frontaliers. Au plan central, la direction générale de la gendarmerie nationale participe aux réunions du comité de coordination de la politique européenne de sécurité intérieure (CCPESI). Ce comité assure le suivi et la cohérence des négociations de conventions intergouvernementales qui formalisent la coopération transfrontalière entre les forces des Etats limitrophes.

Enfin, la gendarmerie nationale, qui surveille plus de 95 % des frontières intérieures françaises, agit en partenariat avec les fonctionnaires de la police nationale et des douanes des centres de coordination policière et douanière (CCPD). Si, aujourd'hui, seul le CCPD d'Offenbourg (Allemagne) est effectivement opérationnel, d'autres centres sont en préparation avec l'Italie, la Suisse, l'Espagne et le Luxembourg.

De plus, la gendarmerie participe à la coopération institutionnelle dans le cadre de la définition du corpus juridique de l'Union européenne pour ce qui concerne les domaines policiers. En vue de la construction d'un « espace de liberté, de sécurité et de justice » en Europe, objectif réaffirmé lors du sommet de Tampere en octobre 1999, le traité de Maastricht, révisé par le traité d'Amsterdam, énumère neuf domaines d'action dans lesquels les Etats s'engagent à développer leur coopération dans le 3ème pilier JAI (justice et affaires intérieures) de l'Union européenne. Près de vingt-cinq groupes de travail ont ainsi été créés par le conseil de l'Union pour couvrir le champ de la coopération policière et judiciaire. La gendarmerie participe aux travaux des groupes techniques couvrant les domaines de la coopération prévue par les instruments internationaux que sont la convention Schengen et la convention Europol, mais également aux groupes d'experts de haut niveau chargés de questions techniques ou de questions transversales telles que la coopération policière, la lutte contre les trafics de stupéfiants, la lutte contre la criminalité organisée, la protection de l'euro, les formations au sein du collège européen de police ou encore l'évaluation des conditions d'application des mesures de contrôle aux frontières extérieures de l'Union. D'autres actions sont menées pour lutter contre les formes les plus graves de criminalité. Elles visent en particulier le blanchiment d'argent, mais aussi la cybercriminalité et le terrorisme, et se concrétisent par l'adoption de conventions ou d'actions communes. Mais surtout, les Etats membres de l'Union européenne essayent de s'accorder sur des définitions, des incriminations et des sanctions communes. La reconnaissance mutuelle des décisions en matière pénale est aussi l'un des objectifs majeurs de l'Union européenne qui doit permettre de faciliter la coopération policière et judiciaire : elle aboutira, à terme, à une harmonisation des procédures judiciaires, avec notamment le rôle de coordination que devrait jouer Eurojust.

GROUPES DE TRAVAIL DE L'UNION EUROPÉENNE
AUXQUELS PARTICIPE LA GENDARMERIE

Comité de l'article 36

Coopération S.I.S.

► Systèmes d'information et de protection des données

► Systèmes d'information

► SIS - aspects techniques

SIRENE

Coopération policière

► Coopération policière

Télécommunications

Techniques d'investigations

Police scientifique

Echange de renseignements policiers

► Europol

► Trafic de drogues

► Terrorisme

Coopération pénale

► Coopération policière en matière pénale

► EUROJUST

► Droit pénal matériel

Comité stratégique sur l'immigration,
les frontières et l'asile

► Comité d'information, de réflexion et d'échange en matière de frontière et d'immigration

► Groupe frontières

Groupe d'experts de haut niveau

► Evaluation collective

► Ex-comité permanent Schengen

► Groupe multidisciplinaire sur la criminalité organisée

► Groupe horizontal « drogue »

Comité chargé des aspects civils de la gestion des crises

Groupe protection civile

Par ailleurs, depuis les engagements du sommet de Feira, en juin 2000, visant à mettre sur pied, d'ici à 2003, une force de police européenne de 5 000 hommes projetables sur un théâtre d'opérations extérieures (dont 1 000 en 30 jours), la gendarmerie est étroitement associée aux réflexions du comité chargé des aspects civils de gestion des crises, menées au sein du 2ème pilier dans le cadre de la PESD (politique européenne de sécurité et de défense). Il s'agit, en particulier des travaux relatifs à la constitution de cette force (conférence de capacités) et à la mise en place d'une structure de planification et de conduite des opérations de police. A cet effet, la gendarmerie organise chaque année à Saint-Astier un exercice international de maintien de l'ordre destiné à assurer l'interopérabilité des unités de police européennes. De même, l'institution a marqué son intention de contribuer à la constitution de la force européenne de police et d'assurer la gestion d'un module de formation, dans le cadre du collège européen de police, sur le thème de la planification et de la conduite d'opérations de police.

La gendarmerie participe enfin à la coopération opérationnelle entre forces de polices européennes. Cette coopération opérationnelle est formalisée dans trois domaines : la coopération Schengen, la coopération transfrontalière qui complète Schengen et la coopération Europol.

A l'heure ou l'Union européenne progresse à grands pas dans la lutte commune contre le terrorisme, rappelons qu'Europol a officiellement été inauguré à La Haye en juillet 1999. Après une année de fonctionnement, l'office européen s'est doté de bases de données encore limitées mais continue de monter en puissance régulièrement. Pour l'instant, organisme à vocation analytique et de renseignement, Europol se consacre à la criminalité organisée dans des secteurs bien délimités (trafic de drogue, immigration illégale, trafic d'êtres humains dont la pédopornographie, trafic de véhicules volés, trafic de matières toxiques et nucléaires, blanchiment d'argent, contrefaçon de moyens de paiement dont l'euro). Suite aux recommandations définies lors du sommet de Tampere, le mandat d'Europol doit être élargi à d'autres domaines. Outre le trait d'union qu'il représente entre les pays de l'Union pour les demandes de renseignement (rôle des officiers de liaison Europol), l'office fournit également des analyses stratégiques sur des phénomènes transnationaux et met à la disposition de chaque service de police, gendarmerie et douanes ses fichiers d'analyse pour certains domaines criminels précis. Douze sont actuellement ouverts et couvrent un large spectre, allant de l'immigration clandestine kurde, chinoise ou albanaise au terrorisme islamique, ainsi qu'aux mafias d'Europe de l'Est. Suite au sommet de Tampere, il est envisagé de donner à Europol une dimension plus opérationnelle en l'associant aux équipes communes d'enquête appelées à se former pour lutter ponctuellement contre des crimes ou délits transnationaux. Dans un premier temps, son action se bornerait à un soutien technique, ses personnels ne pouvant assurer directement des actes d'enquête. Fort de 243 membres, Europol devrait voir ses effectifs augmenter de 50 agents jusqu'en 2004. Actuellement, 15 Français ont été recrutés, dont quatre militaires de la gendarmerie. Un gendarme est par ailleurs présent au sein de l'Unité nationale Europol, interface chargé de relayer les demandes entre La Haye et les acteurs de terrain.

(4) Enfin, l'engagement de la gendarmerie dans les missions extérieures reste important et très diversifié. L'action de la gendarmerie dans les opérations de maintien de la paix s'inscrit dans une logique de continuité au sein du dispositif mis en place par la communauté internationale. Le concept d'emploi de la gendarmerie privilégie un engagement sous forme de détachements très qualifiés capables de participer à la fois aux volets militaire et civil des opérations.

Le champ des missions de la gendarmerie en opérations extérieures s'est considérablement étendu depuis quelques années, débordant largement le simple cadre de la prévôté aux armées. L'apport des capacités de la gendarmerie (sécurité publique générale, maintien de l'ordre, recherche du renseignement d'ordre public, police judiciaire, liaison avec les polices locales et les polices militaires alliées) est reconnu par les différentes autorités d'emploi. Pour faire face à ces nouvelles missions, la gendarmerie a donc adapté les formes de son engagement, en intégrant notamment dans le dispositif mis en place, des unités de la gendarmerie mobile.

LA GENDARMERIE
DANS LES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES EN 2001

Théâtre d'opération

Nom de l'opération

Nombre d'officiers

Nombre de
sous-officiers

Bosnie

GIP1 / ONU

6

99

SFOR2 / OTAN

10

44

Kosovo

KFOR3 / OTAN

9

131

CIVPOL / MINUK

4

75

Liban

FINUL

-

4

Rép.Centrafricaine

CIVPOL / ONU

1

-

Tchad

Prévôté

-

4

Ethiopie/Erythrée

MINUEE

-

2

Total

30

359

1 Groupe International de Police

2 Stabilisation Force

3 Kosovian Force

Au total, l'accroissement de la demande policière dans les opérations de maintien de la paix est révélateur de l'évolution des menaces et des besoins en outils adaptés de gestion de crise. Dans ce contexte, la mise en _uvre de capacités de police constitue une des priorités de l'Union européenne. Les futures opérations de sécurité générale et de police internationale en Europe pourront notamment s'appuyer sur l'expérience, la disponibilité et la capacité d'adaptation des forces de police à statut militaire.

C'est bien une gendarmerie profondément renouvelée qui se dessine au long des pages qui précèdent, les réformes en cours étant mises en _uvre avec la préoccupation constante de préserver les principes qui fondent l'organisation et l'action de la gendarmerie : caractère militaire, maillage territorial, déconcentration, insertion sociale et attachement au service rendu. Le renouvellement est double : c'est d'abord celui d'une institution militaire, qui doit s'adapter à la professionnalisation des armées ; c'est ensuite un service public confronté aux évolutions de la société.

L'annuité 2002 verra fonctionner une gendarmerie totalement professionnalisée. A l'issue de la réforme inscrite dans la loi de programmation militaire 1997-2002, la gendarmerie se présente comme un corps mieux encadré, dans lequel chacun est recentré sur ses missions de base. Ceci s'est traduit par la création de nouveaux corps : corps technique et administratif pour les officiers, corps de soutien technique et administratif pour les sous-officiers et corps de volontaires.

S'agissant du corps de soutien, les objectifs de la loi de programmation militaire 1997-2002 sont respectés en termes d'effectifs budgétaires. Grâce aux postes ouverts dans le projet de loi de finances pour 2002, l'effectif total des corps de soutien atteindra 3 799 militaires. Il faut toutefois relever que, faute d'une ressource qualitative suffisante, un certain nombre d'emplois n'ont pas été pourvus en 2001.

Un sous-effectif doit également être constaté s'agissant des volontaires. Sur les bases des effectifs recrutés au terme du premier trimestre 2001, il représente 1 421 volontaires. La direction de la gendarmerie nationale explique ce résultat par la conjonction entre deux phénomènes : d'une part, la concurrence du secteur privé et des autres corps de la fonction publique, d'autre part la forte augmentation des effectifs ouverts en 2001, donc des besoins de recrutement. Il est vrai que près de 4 000 postes avaient été ouverts en loi de finances initiales. La gendarmerie est donc confiante et estime pouvoir combler ce retard d'ici à la fin de l'année. Le rapporteur ne partage pas totalement cet optimisme dans la mesure où, si ce phénomène persiste en 2002, la cible fixée par la loi de programmation, de 16 232 volontaires, ne sera pas atteinte.

EFFECTIFS DE
GENDARMES AUXILIAIRES/GENDARMES ADJOINTS

 

Gendarmes auxiliaires

Gendarmes adjoints

Total

2000

Effectif budgétaire

7 403

7 300

14 703

Effectif moyen réalisé sur l'année

6 021

7 277

13 298

Ecart

- 1 382

- 23

- 1 405

2001

Effectif budgétaire

3 502

11 025

14 527

Effectif moyen réalisé sur le 1er semestre 2001

2 527

9 604

12 131

Ecart

- 975

- 1 421

- 2 396

2002

Effectif budgétaire

0

15 203

15 203

Cet absence d'engouement pour le volontariat en gendarmerie est d'autant plus préoccupant qu'il contraste avec le succès rencontré par les contrats courts dans l'armée de Terre ou les adjoints de sécurité dans la police nationale.

Ce constat quantitatif est aggravé par l'analyse du volontariat en termes qualitatifs. Alors que la qualité de la ressource des candidats au service national en gendarmerie permettait de durcir la sélection, notamment au regard du niveau scolaire, la sélectivité opérée pour les gendarmes adjoints est beaucoup moins sévère : un admis pour 2,6 candidats en 2000 et un admis pour 3 candidats en 2001. Ainsi, la proportion de gendarmes adjoints d'un niveau inférieur au baccalauréat est quasiment le double de celle des gendarmes auxiliaires, tandis que celle des gendarmes adjoints d'un niveau supérieur au baccalauréat est faible (6,24 % en moyenne, contre 27,28 % pour les gendarmes auxiliaires).

Dans les analyses qu'il a consacrées à ce sujet les années précédentes, le rapporteur a toujours souligné la nécessité d'améliorer l'attractivité du volontariat en gendarmerie, par définition moins séduisant qu'un emploi d'adjoint de sécurité (charges de travail, conditions de vie). Par l'argent tout d'abord : à cet égard, il faut noter qu'en plus de leurs soldes, les volontaires ont droit à un certain nombre d'indemnités et peuvent notamment prétendre au versement de l'indemnité pour charges militaires, de l'indemnité de résidence, de la prime complémentaire de police ou encore de l'indemnité pour services en campagne. Par ailleurs, tout volontaire bénéficie de l'indemnité spéciale. Au total, le salaire net d'un volontaire célibataire, logé, variait, au 1er janvier 2001, de 769,22 euros à 899,95 euros, selon son grade.

Le salaire n'est pas le seul critère d'attractivité. Le volontaire doit également se voir ouvrir des perspectives de carrière. A cet égard, la situation a très favorablement évolué depuis les débuts de mise en place du dispositif. Ainsi, les volontaires peuvent aspirer accéder aux emplois de sous-officiers (3 500 ouverts en 2001), sous réserve de satisfaire aux épreuves de sélection. La gendarmerie a adopté un certain nombre de mesures spécifiques pour valoriser les expériences acquises par les gendarmes adjoints :

- réduction de 18 à 12 mois des délais d'attente entre deux présentations aux épreuves psychotechniques ;

- autorisation d'une présentation supplémentaire après trois échecs ;

- prise en compte de la manière de servir et des appréciations portées par les échelons de commandement ;

- réexamen d'un dossier sur propositions motivées des autorités hiérarchiques d'emploi.

De plus, un dispositif de préparation aux tests d'entrée en école de sous-officiers de gendarmerie est mis en _uvre, depuis janvier 2001, au profit des gendarmes adjoints ayant obtenu un premier renouvellement de contrat et titulaires d'un diplôme de gendarme adjoint. Une équipe pédagogique, composée de gradés ou de gendarmes, organise des journées d'instruction mensuelles à l'échelon du groupement, journées relayées en unité par des tuteurs nommément désignés. Enfin, les gendarmes adjoints bénéficient, à titre de prêt, d'une documentation facilitant la préparation.

Force militaire, la gendarmerie est tout autant un service public de sécurité. Le rôle des gendarmes lors des tempêtes des 25 et 26 décembre 1999 a d'ailleurs illustré l'importance de leur contribution à sa continuité. Comme tous les services publics de l'Etat, il fait l'objet, depuis plusieurs années, d'une réorganisation profonde de son fonctionnement. Certes, la piste explorée en 1998, qui consistait à effectuer des redéploiements massifs, dans des délais très brefs, n'a pas été choisie. Il serait erroné pour autant de croire que la gendarmerie reste inactive dans ce domaine. L'absence de redéploiement global ne doit pas tromper : l'adaptation des structures au terrain est permanente.

Ainsi, 47 unités nouvelles ont été créées en gendarmerie départementale en 2001, soit 5 brigades territoriales, 26 pelotons de surveillance et d'intervention (PSIG), dont 20 au titre des mesures de renforcement annoncées par le Ministre de la Défense le 28 février 2000, 1 brigade motorisée, 4 pelotons d'autoroute et 11 brigades de recherches. Dans le même temps, 13 brigades territoriales ont été supprimées.

Par ailleurs, le renforcement des unités périurbaines sensibles, qui doivent faire face à un accroissement notable de leur charge de travail, s'est poursuivi par le biais de redéploiement d'effectifs. Ainsi, la gendarmerie nationale affecte dans les unités concernées des sous-officiers issus de brigades territoriales à l'activité plus faible, dans lesquelles les militaires prélevés sont remplacés par des gendarmes adjoints ; ces redéploiements sont également mis en _uvre suite à la réorganisation du dispositif territorial et au redimensionnement de certaines unités. Ainsi, au cours de l'année 2001, la gendarmerie a redéployé 465 gendarmes adjoints volontaires vers les unités périurbaines de 28 départements prioritaires et sensibles. A ces redéploiements liés aux mesures décidées par le conseil de sécurité intérieure s'est ajouté un renforcement en sous-officiers des unités présentes dans ces départements à hauteur de 147 postes, prélevés sur le contingent de 500 postes supplémentaires pour 2001 créé par décision du Ministre de la Défense le 28 février 2000.

L'ensemble de ces mesures territoriales est la résultante directe des mesures mises en _uvre dans le cadre de l'évolution de la doctrine d'emploi de la gendarmerie en vue d'améliorer le service rendu aux citoyens. Trois pistes sont suivies à ce titre.

En premier lieu, la gendarmerie s'est enfin donné les moyens de mieux tirer parti de la déconcentration naturelle de son organisation, en augmentant la marge d'initiative des échelons locaux dans l'organisation du service. Le rapporteur a indiqué dans les pages qui précèdent que le projet de budget pour 2002 tirait les conséquences financières de cette réforme, qui a pesé d'un poids important sur les commandants d'unités dans les années récentes. Elle était de toute façon inéluctable. La gendarmerie est, en effet, une institution paradoxale : d'un côté, de par son statut militaire, elle est extrêmement hiérarchisée ; d'un autre côté, la dispersion territoriale qui est la sienne et la nature même de ses missions confère à l'unité de base un rôle essentiel dans l'efficacité globale de l'institution. En bref, c'est une institution militaire et une administration assez lourde qui repose paradoxalement sur la valorisation de l'initiative individuelle, autant de caractéristiques qu'elle ne partage sans doute qu'avec l'éducation nationale. Peut-être a-t-on mis trop de temps à tirer les conséquences de cet état de fait, en valorisant excessivement la dimension hiérarchique de l'organisation. Aussi ne peut-on que saluer la place nouvelle dévolue aux échelons locaux dans le bon fonctionnement de l'arme.

La deuxième réforme mise en _uvre dans cet objectif consiste à rationaliser l'emploi des moyens et à mutualiser les missions dans le cadre de la sectorisation, de manière à réduire les frais généraux.

Cette mesure revêt un double intérêt. Non seulement elle ne remet pas en cause l'efficacité de la gendarmerie et lui permet une utilisation optimale de ses moyens, mais en outre elle favorise l'amélioration des conditions de vie et de travail des personnels. En effet, pour remplir cet objectif sans porter atteinte au maillage territorial actuel, il est nécessaire de regrouper les brigades en secteurs. Cette réforme est facilitée par l'existence d'équipements modernes, notamment automobiles, qui permettent de compenser l'éloignement géographique même si le contact avec les populations est moins direct et moins étroit. Elle est d'autant plus adaptée que les phénomènes d'augmentation de l'insécurité qui sont observés dans les zones rurales correspondent à une délinquance nomade, et non locale. Les avantages de la sectorisation des brigades l'emportent donc sur ses inconvénients, même si des aménagements devront certainement y être apportés de manière à mieux faire correspondre les secteurs avec des zones géographiques et humaines. Au demeurant, les résultats de la réforme sont positifs, y compris dans certains départements où la géographie est difficile.

Au total, la sectorisation, en cours de mise en place, est nécessaire, que ce soit dans l'accomplissement des missions ou dans un objectif de gestion moderne du personnel. Toutefois, dans la mesure où la sectorisation sans suppression de brigades conduit à faire travailler ensemble des personnels qui ont leurs propres méthodes de travail, il ne sera pas possible de la mettre en _uvre partout au même rythme. Pour cette raison, la Direction générale de la gendarmerie laisse une grande latitude aux échelons locaux pour organiser de manière optimale la montée en puissance de la mutualisation des moyens et des missions. On en revient au premier axe de réforme évoqué précédemment.

Enfin, le dernier axe de réforme relève de ce qui s'appellerait dans le secteur privé des pratiques de « management ». Il vise à mieux prendre en compte les attentes de sécurité exprimées par les élus et les populations, par la définition d'objectifs, en matière d'accueil et de délais d'intervention notamment, atteints en associant davantage les échelons subordonnés à la préparation de la décision. Le rapporteur reviendra par la suite sur ce dernier aspect, qui recouvre un enjeu majeur dans les prochaines années, à savoir la mise en place d'un véritable dialogue social au sein de la gendarmerie. S'agissant de la réponse apportée aux attentes de la société, on notera que, depuis 1998, la gendarmerie s'est dotée d'un centre de prospective. Pour remplir des objectifs, encore faut-il les connaître : c'est en vertu de ce principe et afin d'identifier, au sein du flux constant d'informations, de sollicitations et de décisions qui parvient à la direction de la gendarmerie, que ce centre a été mis en place. Il ne suffit pas, en effet, d'avoir une conscience ex post, ou même en temps réel, des changements auxquels la gendarmerie doit faire face dans l'accomplissement de sa mission de force de sécurité. En les anticipant, elle sera en mesure de les maîtriser, au lieu de les subir.

A la fin de l'année 1999 et au début 2000, la gendarmerie a connu une situation très difficile, où les personnels se plaignaient tout à la fois de la lourdeur excessive de leurs missions, de l'insuffisance de leurs moyens, d'une durée du travail sans commune mesure avec celle du monde civil, surtout depuis l'introduction des 35 heures, et d'un manque de considération. Aujourd'hui, certains personnels de la gendarmerie continuent de ressentir un certain malaise, et le font savoir, via les associations de femmes de gendarmes ou, ce qui est nouveau, de manière directe.

Qui ne peut comprendre que les multiples chantiers de réformes engagés par une institution qui subit ses évolutions propres et celles de la société, conjugués à un rythme de travail très lourds, ne suscitent chez une partie des personnels une certaine lassitude, voire un sentiment de révolte ?

La Direction de la gendarmerie nationale a alors tenté d'apporter une réponse d'ensemble à ces attentes nombreuses et diverses, qui ne se réduit pas à l'attribution de compléments de rémunération. Celles-ci sont certes indispensables, comme le projet de loi de finances pour 2002 en prend acte, mais elles sont insuffisantes. Aujourd'hui, le fonctionnement d'une gendarmerie apaisée passe par deux obligations : la reconnaissance et le dialogue social.

Le mal est connu : les gendarmes sont soumis à une charge de travail bien souvent excessive. Pour un gendarme départemental, le nombre d'heures de travail quotidien moyen est supérieur à 9 heures :

- 9 h 04 en 1994 ;

- 9 h 10 en 1995 ;

- 9 h 09 en 1996 ;

- 9 h 08 en 1997 ;

- 9 h 12 en 1998 ;

- 9 h 23 en 1999.

Le sommet a été atteint au premier trimestre 2000, avec 9 heures 44 de travail quotidien par jour. On notera que c'est précisément à ce moment que le mécontentement s'est exprimé et qu'ont été prises un certain nombre de mesures en vue de remédier au problème. Ces décisions, annoncées le 28 février 2000, ont d'abord porté sur la maîtrise de la charge de travail. Dans la mesure où la gendarmerie effectue des tâches demandées par d'autres institutions, cette action a nécessité un dialogue avec les donneurs d'ordre. Des mesures ont été parallèlement prises pour que l'organisation du travail des gendarmes ne les coupe pas à l'excès du reste de la société : il a été garanti aux gendarmes deux jours de repos par semaine et des quartiers libres à prendre en fonction des nécessités du service. Les moyens de travail ont été améliorés : il a été remédié par exemple aux insuffisances de carburant et le taux d'équipement en micro-ordinateurs a été porté à un poste pour deux gendarmes.

Cet ensemble de mesures a été efficace puisqu'au 4ème trimestre 2000, le rythme quotidien de travail en gendarmerie départemental était retombé à 8 heures 43.

Les gendarmes mobiles n'ont paradoxalement pas exprimé le même mécontentement, alors qu'ils sont aussi confrontés à un accroissement de leur activité. Ainsi, le nombre de jours de déplacement des unités de gendarmerie mobile s'est encore accru en 2000 :

- 193 jours en 1994 ;

- 208 jours en 1995 ;

- 199 jours en 1996 ;

- 216 jours en 1997 ;

- 204 jours en 1998 et 1999 ;

- 214 jours en 2000.

Selon le directeur général de la gendarmerie, cet apparent paradoxe tient au fait que les gendarmes mobiles apprécient la mise en _uvre de la fidélisation qui mobilise actuellement 9 escadrons de gendarmerie mobile - 12 à la fin 2002 -, notamment du fait des conditions de vie positives qu'elle implique en termes d'horaires et en termes financiers, avec le versement de l'indemnité journalière d'absence temporaire. Notons que la fidélisation des unités de gendarmerie mobile est également bien vue par la population et les élus.

Reste qu'en termes de formation, ce niveau d'activité excessif a des conséquences négatives, alors même que la formation est essentielle à la préservation des capacités opérationnelles des unités de gendarmerie mobile. Ainsi, sur les 124 escadrons de marche, 46 ont effectué un séjour en camp en 2000, contre 50 en 1999, tandis que 45 (44 en 1999) ont suivi le stage de recyclage à Saint-Astier. Le tableau suivant fait apparaître une réduction du temps de formation des escadrons de gendarmerie mobile.

BILAN DE LA FORMATION EFFECTUEE PAR LES LEGIONS
DE GENDARMERIE MOBILE EN 1999 ET 2000

 

En jours / escadron

1999

2000

Légion de gendarmerie mobile d'Ile de France

24

20

Légion de gendarmerie mobile de BORDEAUX

16

16

Légion de gendarmerie mobile de RENNES

18

19

Légion de gendarmerie mobile de LYON

15

19

Légion de gendarmerie mobile de MARSEILLE

21

16

Légion de gendarmerie mobile de METZ

22

15

Légion de gendarmerie mobile de VILLENEUVE D'ASCQ

17

17

D'ores et déjà donc, de nombreuses mesures ont été prises pour améliorer les conditions de vie des gendarmes. Le rapporteur a évoqué les effets positifs des mesures prises le 28 février 2000. Ce budget même, qui donne réellement à la gendarmerie les moyens de fonctionner correctement au quotidien et qui comporte de nombreuses mesures catégorielles, est également une réponse aux interrogations des gendarmes.

Reste que les mouvements qui sont apparus ne doivent pas être sous-estimés. Ils expriment un besoin profond et humain : celui de la reconnaissance. Les gendarmes rencontrent en effet des difficultés communes à l'ensemble des personnels publics exerçant une fonction d'autorité, comme les enseignants par exemple. Sur ce point, le rôle des élus sur le terrain est essentiel : il nous appartient notamment à nous, parlementaires, de faire savoir aux gendarmes toute l'importance que nous attachons à leur rôle. Il nous revient également de leur présenter des perspectives d'avenir. A cet égard, il est regrettable que les effectifs de gendarmerie ne soient pas programmés dans le projet de loi de programmation militaire 2003-2008. Il eût été nettement préférable que soit inscrite dans la loi l'inéluctable - d'ailleurs reconnue par tous les responsables politiques - création de 7 000 effectifs supplémentaires. Le projet actuel se contente de noter que les effectifs « évolueront en fonction des missions ». Cette phrase sibylline est d'autant plus regrettable, en termes d'affichage politique, qu'elle ne cadre pas avec la politique du Gouvernement en matière de sécurité intérieure.

Enfin, il est indéniable que d'autres attentes perdurent, relatives aux mesures spécifiques que les gendarmes souhaitent à titre d'équivalence de la réduction de la durée du travail accordée aux civils. Soulignons d'emblée que, conscients de la spécificité de leur statut militaire, les gendarmes ne souhaitent nullement bénéficier pour eux-mêmes de la réduction du temps de travail, mais souhaiteraient obtenir des compensations. Théoriquement, trois solutions sont envisageables :

- l'accroissement du nombre de jours de récupération sans augmentation de personnels, ce qui se traduirait par une baisse - inacceptable - de la présence des gendarmes sur le terrain ;

- l'accroissement du nombre de jours de récupération avec augmentation de personnels ;

- un accroissement des moyens budgétaires, sous forme de primes.

La deuxième solution se traduisant par une hausse des coûts incompatible avec la maîtrise des finances publiques, c'est donc la dernière proposition qui semble théoriquement la seule valable. Elle ne saurait toutefois être examinée que dans un cadre commun à l'ensemble des personnels militaires.

Force humaine, la gendarmerie n'échappera pas, pour mener à bien les réformes dans lesquelles elle est engagée, à deux impératifs : la formation et le dialogue social, deux outils nécessaires pour valoriser l'énorme potentiel humain dont elle dispose.

· De longue date, la formation a toujours bénéficié d'une attention particulière au sein de la gendarmerie, qu'il s'agisse des formations initiales dispensées dans les écoles de gendarmerie, des formations complémentaires ou continues mises en _uvre au sein même des unités ou, enfin, des formations spécialisées correspondant à certains métiers bien spécifiques. Toutefois, en raison de la charge de travail des unités, le bilan de la formation est médiocre, tant et si bien que le principe de passer de 15 à 35 jours de formation par an a été inscrit dans la prochaine loi de programmation militaire.

Et pourtant, d'impératif, la formation est aujourd'hui devenue un défi, en raison de la conjonction de trois phénomènes.

En premier lieu, la professionnalisation signifie, comme nous l'avons dit précédemment, l'arrivée de personnels aux statuts et aux profils très diversifiés. La direction générale de la gendarmerie a parfaitement conscience du défi que représente, en termes de formation, l'arrivée de personnels nouveaux en gendarmerie (volontaires, corps de soutien technique et administratif), qu'il faut former dans des délais relativement brefs.

En deuxième lieu, la formation des gendarmes doit répondre à la demande de sécurité croissante de la société, qui plus est dans un contexte de juridicisation accrue de la vie quotidienne : au-delà de la sécurité traditionnelle des biens et des personnes, il faut aujourd'hui prendre en compte la sécurité environnementale, la sécurité alimentaire, de santé publique..., bref répondre à des demandes croissantes et diversifiées.

Enfin, l'intégration européenne et l'ouverture des frontières conduit à une multiplication des contacts avec des forces de sécurité étrangères et à une européanisation accrue des textes, là encore source de complexité.

Pour répondre à ces besoins, un schéma directeur des écoles a été défini, qui vise à maintenir la cohérence du dispositif par l'application d'un certain nombre de principes (spécialisation de chaque école, restructuration et rénovation des sites en vue d'une rationalisation des moyens). Dans ce dernier domaine, trois actions essentielles ont été entreprises en 2001 :

- l'école de gendarmerie de Libourne a été créée le 1er juillet 2001. La mise en place des effectifs s'effectuera en deux étapes, correspondant à une montée en puissance sur deux annuités budgétaires, dans les conditions suivantes : création, au 1er juillet 2001, de deux compagnies d'instruction d'élèves gendarmes et création, au 1er janvier 2002, de la totalité de l'école ;

- deux compagnies supplémentaires d'élèves-gendarmes ont été créées à l'école de gendarmerie de Chaumont le 1er juillet 2001. Elles forment les 5ème et 6ème compagnies ;

- le centre national de formation des personnels du corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie (CNF-CSTAG) est créé le 1er septembre 2001 à l'école de gendarmerie de Rochefort, corrélativement à la dissolution du centre national de formation des gendarmes auxiliaires féminins et des personnels de la spécialité « emplois administratifs et de soutien de la gendarmerie » (CNF-GAF-EASG) de l'école de Chaumont.

· La gendarmerie est également confrontée aujourd'hui au défi du dialogue social : qu'ont révélé les mécontentements récents, si ce n'est les insuffisances du dialogue social ou plutôt l'ampleur des besoins existants et du chantier à mettre en _uvre, les années récentes ayant vu, en effet, se développer la concertation en préalable à la prise de décision ? Notamment, les mesures annoncées par le Ministre de la Défense le 28 février 2000 sont le résultat direct d'une concertation menée de manière approfondie à tous les niveaux hiérarchiques. N'oublions pas en effet que la gendarmerie dispose d'instances de concertation vivantes : présidents de sous-officiers, Conseil de la fonction militaire gendarmerie, Conseil supérieur de la fonction militaire.

La concertation ne doit toutefois pas être ponctuelle. Il lui faut au contraire s'inscrire dans les pratiques comme mode privilégié de prise de décision. Etant un fait nouveau dans la gendarmerie, elle doit être favorisée par la création d'une formation adéquate, délivrée aux représentants des personnels au sein des instances de participation pour les impliquer davantage dans le dialogue. Sans doute, institution militaire, la gendarmerie est-elle régie par le principe du commandement. Mais il serait irresponsable de nier qu'autant que les relations avec les populations, les relations au sein même de l'institution se sont considérablement transformées au cours des années récentes. S'il s'agit toujours de diriger et de commander des hommes, l'objectif des échelons supérieurs doit être avant tout d'emporter l'adhésion des personnels afin d'accroître l'efficacité globale de l'arme. Sans doute la gendarmerie découvre-t-elle ce que les entreprises connaissent depuis longtemps à travers la notion de « management » mais, dans une institution organisée, voire fondée sur le principe d'obéissance, une telle notion n'allait certainement pas de soi. Plus encore où, en raison de la dispersion territoriale de l'arme, l'organisation d'un dialogue social fructueux est complexe, l'éloignement entre les échelons hiérarchiques supérieures et les unités territoriales ne facilitant pas l'instauration d'un dialogue direct.

Le palier franchi en 2000 a toutefois montré qu'il existait dans la gendarmerie un fort potentiel de réussite en faveur de l'instauration d'un véritable dialogue social. Là encore, les élus ont sans aucun doute leur pierre à apporter à l'édifice, notamment les parlementaires qui sont à la fois très proches des unités de base de la gendarmerie, étant élu dans une circonscription, et des plus hauts échelons hiérarchiques, de par leur fonction de représentant du peuple. Même s'il sera sans doute long à construire, le dialogue social dans la gendarmerie doit devenir un réflexe, tant il est nécessaire au maintien de la cohésion de l'arme qui voit maintenant cohabiter des personnels dotés d'une forte culture militaire, héritée de leur passage sous les drapeaux, et de nouveaux arrivants qui, par définition, n'auront pas connu le service national obligatoire.

CONCLUSION

La gendarmerie est aujourd'hui traversée par le doute, voire le mécontentement, ainsi que l'ont montré certaines actions récentes, totalement inédites dans l'histoire de l'arme, et d'autant plus marquantes qu'elles touchent un corps d'élite.

Ces doutes, ces attentes, ces besoins, il appartient au politique de les entendre et d'agir pour y répondre. Tel est le sens du projet de budget pour 2002 qui donne aux gendarmes les moyens de répondre, au quotidien, à la diversité des missions qui sont les siennes.

Nous savons bien néanmoins que ce qu'attendent aujourd'hui les gendarmes va au-delà des questions budgétaires, alors qu'ils sont confrontés à une charge de travail très importante, qui ne va pas faiblir dans les mois à venir avec l'arrivée de l'euro. Et nous devons dire et répéter que la reconnaissance qu'ils demandent est légitime.

TRAVAUX EN COMMISSION

I. - AUDITION DE M. PIERRE STEINMETZ, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA GENDARMERIE NATIONALE

La Commission de la Défense a entendu, le 23 octobre 2001, M. Pierre Steinmetz, Directeur général de la Gendarmerie nationale, sur le projet de budget pour 2002.

Observant que le projet de loi de finances pour 2002 prévoyait une augmentation de 5,8 % des crédits du titre III de la Gendarmerie, qui se répercutait tout particulièrement sur les rémunérations, ainsi qu'un accroissement de 7 % des crédits de fonctionnement, le Président Paul Quilès a estimé que la légère diminution des crédits d'équipement paraissait cohérente avec l'achèvement du programme Rubis. Il a alors remercié le Directeur général de la Gendarmerie d'être venu livrer à la Commission ses observations et ses appréciations sur le projet de budget. Puis se référant au contexte international, il l'a interrogé sur la contribution de la Gendarmerie à la lutte contre les nouvelles menaces terroristes.

Rappelant que le projet de budget de la Gendarmerie pour 2002 couvrait la dernière annuité de la loi de programmation militaire, M. Pierre Steinmetz a indiqué qu'il permettait globalement d'en atteindre les objectifs, grâce à une augmentation des ressources de 5,6 % par rapport au budget voté de 2001. Le Directeur général de la Gendarmerie nationale a également insisté sur la cohérence du projet de budget, soulignant qu'il s'inscrivait dans le cadre d'une démarche entreprise en 1999 et qu'il poursuivait l'assainissement de la situation financière de la Gendarmerie. Il a jugé que ce projet répondait à une double attente, de la population d'une part en matière de sécurité, et des personnels d'autre part. M. Pierre Steinmetz a précisé que les aspirations des personnels, qui avaient été exprimées très directement en 1999, concernaient la charge de travail, qu'il s'agisse du service courant ou des astreintes, les moyens de fonctionnement (bureautique, frais de déplacement, véhicules...) - les gendarmes étant fort attachés à la qualité du service rendu - et, enfin, la crainte d'un décalage avec la fonction publique civile, dans la perspective des 35 heures. Il a souligné que les mesures prises dès février 2000 s'étaient inscrites dans une démarche globale dont l'ambition était de traiter les problèmes au fond et sur plusieurs années. Cette démarche a poursuivi trois objectifs : sanctuariser le temps libre, afin de préserver les droits des personnels, ce qui a permis de réduire la journée de travail, entre le 1er et le 4ème trimestre 2000, de 9 heures 44 à 8 heures 43 ; améliorer les conditions de vie et de travail, par un effort en faveur des équipements, du fonctionnement (350 millions de francs supplémentaires, dont 330 au titre de 2001), et des effectifs dont l'augmentation représente 1 500 postes de sous-officiers de Gendarmerie sur 3 ans ; enfin, faire évoluer la doctrine d'emploi en vue d'améliorer le service rendu aux citoyens. A cet égard, le Directeur général de la Gendarmerie nationale a souligné que l'évolution de la doctrine obéissait à quatre préoccupations :

- mieux tirer parti de la déconcentration naturelle de la Gendarmerie, en augmentant la marge d'initiative des échelons locaux dans l'organisation du service ;

- rationaliser l'emploi des moyens et mutualiser les missions dans le cadre de la sectorisation, de manière à réduire les frais généraux ;

- fixer des objectifs en matière d'accueil et de délais d'intervention ;

- accorder une attention accrue aux attentes de sécurité exprimées par les élus et les populations, et mieux associer les échelons subordonnés à la préparation de la décision.

Le Directeur général de la Gendarmerie nationale a fait valoir que l'année 2001 avait été marquée par la poursuite de ce processus. En termes budgétaires tout d'abord, 330 millions de francs supplémentaires ont été inscrits en crédits de fonctionnement. S'agissant de l'organisation et de l'emploi des personnels, de nouveaux procédés ont été expérimentés, dans un double esprit de pragmatisme et de déconcentration. Enfin, la concertation s'est poursuivie à tous les niveaux de la hiérarchie. Le projet de budget pour 2002, qui poursuit dans la même voie, se caractérise par une cohérence des évolutions dans la durée.

M. Pierre Steinmetz a tout d'abord noté qu'il donnait à la Gendarmerie les moyens de fonctionner. Hors rémunérations et charges sociales, les crédits prévus en matière de fonctionnement s'élèvent à 688 millions d'euros (4,15 milliards de francs) soit une hausse de 11,31 % par rapport à 2001 (+ 69,91 millions d'euros ou 459 millions de francs). Cette importante remise à niveau des dotations de fonctionnement bénéficie en priorité aux unités pour l'exécution du service quotidien. Ainsi, la dotation prévue pour le fonctionnement des formations est en hausse de 7,2 % (21,34 millions d'euros ou 140 millions de francs) en raison notamment du rebasage des moyens destinés à financer les mesures prises par le Conseil de sécurité intérieure. Les crédits réservés à l'alimentation font l'objet d'un ajustement de 2,32 millions d'euros (15 millions de francs). Quant aux crédits alloués aux dépenses informatiques, ils progressent de 1,52 million d'euros (10 millions de francs). Enfin, la dotation consacrée aux loyers enregistre également une hausse importante de 38,15 millions d'euros (250 millions de francs), soit 18,6 % de plus qu'en 2001.

Le Directeur général de la Gendarmerie nationale a ensuite expliqué que le projet de budget pour 2002 poursuivait la politique de revalorisation de la condition des personnels de la Gendarmerie. L'effectif total pour 2002 sera de 98 081 civils et militaires, soit une augmentation de 978 postes budgétaires par rapport à 2001.

Les effectifs militaires professionnels augmentent de 257 postes. Cette augmentation résulte de la création de 213 postes d'officiers, dont 34 du corps administratif de soutien, et de 561 postes de sous-officiers du corps de soutien, alors que la déflation du nombre de sous-officiers de Gendarmerie s'établit à 517, au lieu des 1 217 initialement prévus dans la loi de programmation militaire. M. Pierre Steinmetz a fait observer qu'il s'agissait là d'un infléchissement de la tendance prévue par la loi de programmation militaire qui prévoyait une diminution sensible du nombre de sous-officiers de Gendarmerie. Il a également souligné que les créations de postes de sous-officiers du corps de soutien allaient permettre de recentrer les sous-officiers de Gendarmerie sur leurs missions opérationnelles.

S'agissant des personnels civils et des gendarmes adjoints, on observe un nombre de créations de postes inférieur aux objectifs : le nombre de gendarmes adjoints augmente de 4 178 au lieu de 5 167, ce qui, compte tenu de la disparition des gendarmes auxiliaires (- 3 502), conduit à la création de 676 postes. 45 postes de personnels civils sont par ailleurs créés, au lieu des 167 prévus par la loi de programmation militaire.

Le Directeur général de la Gendarmerie nationale a ensuite exposé que le plan de requalification des emplois, qui permettra de transformer 260 postes de gendarmes en postes de gradés, se poursuivait. Puis, présentant les mesures catégorielles inscrites dans le projet de budget pour 2002, il a indiqué qu'elles étaient dotées de 14,81 millions d'euros (97 millions de francs). Les adjudants pourront désormais recevoir la prime de qualification à 10 % après 1 an de grade. M. Pierre Steinmetz a expliqué que cette mesure visait à reconnaître le rôle joué dans la mise en _uvre des réformes par ces gradés chargés de concevoir et d'appliquer les formules d'emploi répondant au mieux aux besoins. 50 échelles 4 et 217 échelles 3 supplémentaires sont attribuées aux sous-officiers du corps de soutien, ce qui permet d'améliorer le pyramidage d'un corps récent et jeune. Les gendarmes mobiles bénéficient, pour leur part, de la réévaluation de l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT) (5,03 millions d'euros soit 33 millions de francs).

Le projet de budget pour 2002 se traduit enfin par un accroissement des crédits de la réserve à hauteur de 3,9 millions d'euros (soit 25,6 millions de francs). A cet égard, M. Pierre Steinmetz a insisté sur le caractère novateur que présentait l'existence d'une réserve opérationnelle au sein d'une force de police. Il a fait valoir que la réserve, tout en contribuant au renforcement du lien armées-nation, représentait pour la Gendarmerie une variable d'ajustement très utile, en complément de l'action des unités d'active. Il s'est félicité à cet égard de la réactivité de ces forces de réserve, dont les tempêtes de 1999 et l'application en cours du plan Vigipirate donnaient la preuve. Il a ajouté que leur proximité et le caractère local de leur recrutement et de leur gestion leur donnaient une très bonne connaissance du terrain. Au total, il a rappelé qu'il s'agissait d'une véritable réserve de service public, avec 9 000 contrats d'engagement spécial pour la réserve signés et 17 jours d'activité prévus en 2002.

Il a enfin noté que des mesures complémentaires étaient attendues par les personnels, notamment pour accompagner le passage aux 35 heures dans la fonction publique civile.

Le Directeur général de la Gendarmerie nationale a ensuite jugé que le projet de budget donnait à la Gendarmerie des moyens d'investissement satisfaisants.

Les autorisations de programme permettent d'assurer le renouvellement des équipements nécessaires au service quotidien des unités. Avec 339,71 millions d'euros (2 228 millions de francs), elles restent stables par rapport à 2001.

Les crédits de paiement sont cohérents avec les engagements et devraient permettre de répondre aux besoins. En légère diminution, ils passent de 339,75 millions d'euros (2 228 millions de francs) à 331,19 millions d'euros (2 172 millions de francs).

Enfin, en matière d'infrastructure, le titre V autorisera la commande de 668 équivalents unités logement tandis que le titre VI permettra de subventionner 600 unités logement, soit un total d'environ 1 300 logements contre 1 200 en 2001.

Le Directeur général de la Gendarmerie nationale a souligné que les réformes en cours étaient mises en _uvre avec une préoccupation constante de fidélité aux principes qui fondent l'organisation et l'action de la Gendarmerie : caractère militaire, maillage territorial, déconcentration, insertion sociale et attachement au service rendu.

Après s'être félicité de la bonne image de la Gendarmerie dans l'opinion publique, M. Pierre Steinmetz a souligné que, pour lui conserver ce crédit, il convenait de donner aux unités les moyens humains et matériels de répondre aux attentes de la population tout en assurant une qualité de vie satisfaisante à ses personnels.

Il a enfin estimé qu'en accordant la priorité aux personnels et aux moyens de fonctionnement des unités, le projet de budget 2002 s'inscrivait dans cette perspective.

Le Président Paul Quilès a demandé quel impact aurait sur la vie des unités et sur l'accomplissement des missions le surcroît de travail entraîné par la protection des sites de stockage de l'Euro ainsi que par le Plan Vigipirate renforcé.

Il a ensuite demandé si son organisation permettait à la Gendarmerie d'être suffisamment réactive face aux nouvelles menaces terroristes. Puis il a interrogé M. Pierre Steinmetz sur la participation de la Gendarmerie à la défense opérationnelle du territoire (D.O.T.) et sur sa contribution à la lutte contre le terrorisme international. Il a souhaité savoir en particulier si ses capacités de renseignement étaient bien adaptées à cette menace et quel était l'état de sa coopération avec la police en ce domaine. Il a enfin demandé si la Gendarmerie disposait de structures et de moyens spécifiques pour la prévention et la répression des actes de terrorisme.

M. Charles Cova a souligné qu'une part importante des créations de postes était neutralisée par la déflation des effectifs. Puis, faisant état d'un mécontentement des gendarmes, il s'est demandé si le projet de budget était de nature à atténuer leur grogne, voire leur malaise devant les difficultés qu'ils rencontrent en matière d'effectifs, d'équipement, de logement, de primes et de charge de travail au moment de l'introduction des 35 heures dans le monde civil.

Par ailleurs, il a interrogé le Directeur général de la Gendarmerie nationale sur les bruits relatifs à l'éventuelle création d'un ministère de la Sécurité publique qui rassemblerait, sous un statut civil, gendarmes et policiers.

Evoquant ses entretiens en qualité de Président de l'association des maires de son département, M. Michel Voisin a confirmé les propos de Charles Cova. Puis, après avoir insisté sur l'attachement des gendarmes à leur statut militaire, il a estimé que c'était moins la lourdeur de leurs missions et la longueur de leur temps de travail qui les mécontentaient que l'absence de reconnaissance, notamment financière, de leurs efforts.

Observant que les gendarmes étaient également irrités par les demandes excessives d'autres administrations, il a demandé quelles mesures M. Pierre Steinmetz jugeait nécessaires pour améliorer leur moral.

Soulignant que les gendarmes avaient la possibilité d'exprimer leurs préoccupations au sein de leur arme, M. André Vauchez a considéré que les engagements pris en matière d'amélioration de leurs conditions de vie et de travail avaient été tenus. Il a toutefois reconnu que les gendarmes, immergés dans la vie civile, éprouvaient certainement davantage le besoin de faire connaître leurs souhaits. Après avoir rappelé les améliorations prévues par le projet de budget en matière d'équipement, de fonctionnement et de rémunérations, il s'est félicité que la mise sur pied des pelotons de surveillance et d'intervention de la Gendarmerie (PSIG) permette la mutualisation des moyens de brigades différentes.

M. René Galy-Dejean a demandé si un site avait enfin été trouvé pour l'État-major de la Gendarmerie.

Reconnaissant que la situation matérielle des gendarmes avait connu une amélioration, M. Yves Fromion a considéré que l'ensemble de l'arme souffrait d'un sous-effectif réel. Il a souhaité l'élaboration d'un plan de mise à niveau de ses effectifs qui tienne compte, notamment, de la nécessité de la réduction du temps de travail des gendarmes au moment où le monde civil passe aux 35 heures.

Il a interrogé le Directeur général de la Gendarmerie nationale sur le recrutement et l'emploi des réserves. Puis il a évoqué la situation des maréchaux des logis-chefs partis à la retraite avant la création de l'échelon exceptionnel de gendarme et demandé s'il était envisagé d'améliorer leur pension pour la rapprocher de celle des sous-officiers ayant quitté le service ultérieurement.

Observant que le contexte international mettait plus que jamais en lumière la nécessité de coordonner les services de renseignement aux niveaux national et international, M. Robert Gaïa a demandé si la coopération de la Gendarmerie avec les autres services de sécurité européens s'avérait satisfaisante.

M. Alain Clary a souhaité obtenir des précisions sur l'état de la coordination des services de police municipale et nationale avec la Gendarmerie, en s'inquiétant plus particulièrement des effets de transfert géographique de la délinquance hors des zones couvertes par les contrats locaux de sécurité. Il s'est également interrogé sur le nombre de recrutements des gendarmes adjoints. Se référant à certaines difficultés rencontrées pour pourvoir les postes ouverts, il a demandé quels efforts la Gendarmerie entreprendra pour assurer la promotion de ces emplois.

M. Aloyse Warhouver s'est inquiété du niveau des démissions des gendarmes adjoints au cours des six premiers mois de leur activité. Il a également interrogé le Directeur général de la Gendarmerie sur l'éventualité de redéploiements des brigades de Gendarmerie dans les zones périurbaines.

M. Michel Dasseux s'est étonné de la description du moral des gendarmes donnée par MM. Charles Cova et Michel Voisin. Après avoir indiqué que cette description ne s'appliquait pas à sa région, plus méridionale, il a souligné les progrès permis par le projet de budget en matière de logement et de paiement des loyers. Puis il a demandé quelle était la réflexion de la Gendarmerie sur l'externalisation éventuelle de certains services.

M. Jean-Louis Bernard, rappelant que sa région se trouvait dans une situation géographique intermédiaire, a indiqué que s'il ne discernait pas de mécontentement prononcé, il percevait néanmoins chez les gendarmes de véritables états d'âme. Il a considéré que les causes de ce phénomène récent et nouveau tenaient principalement à l'accumulation des tâches, parfois difficiles, et à l'introduction des 35 heures dans le monde civil, qui accentuait le contraste entre la durée de travail des gendarmes et celle des policiers.

M. Robert Poujade a indiqué que son appréciation sur le moral des gendarmes était, à l'image de la situation géographique de sa région, intermédiaire entre le blâme et l'éloge. Il a jugé que ce moral n'était ni très mauvais ni vraiment bon. Tout en reconnaissant que le projet de budget permettait certains progrès, il s'est inquiété de l'existence d'un sentiment sourd de mécontentement chez les sous-officiers comme chez les officiers. Il en a imputé la cause à une charge de travail à la limite du supportable alors que les gendarmes adjoints ne peuvent pas, en raison de leur manque d'expérience et de formation, remplir les fonctions de sous-officiers. Il s'est ensuite interrogé sur le niveau d'équipement des réserves, demandant des précisions sur leur dotation en tenues, véhicules, et notamment en véhicules blindés à roues de Gendarmerie (VBRG). Après avoir demandé des précisions sur l'équipement des gendarmes en armes de poing, il a insisté sur leurs inquiétudes à l'égard du projet de loi de programmation militaire, soulignant qu'il ne comportait pas d'indications précises sur l'évolution des effectifs de l'arme.

M. Jean-Pierre Dupont a tenu à rendre hommage à la Gendarmerie pour sa présence territoriale, soulignant qu'à l'occasion des tempêtes des 25 et 26 décembre 1999 les brigades avaient bien souvent permis de maintenir les communications nationales tout en secondant rapidement et efficacement les élus locaux dans leur état des lieux. Il a regretté que la réorganisation des brigades de la Gendarmerie en binômes et trinômes se traduise par un affaiblissement de cette présence territoriale et conduise à un allongement des délais d'intervention à certaines heures. Constatant que le Département de la Corrèze, dont il préside le Conseil général, était confronté à une forte augmentation des vols avec violences, il a souligné l'inquiétude des élus locaux à l'égard d'une réforme mise en _uvre sans concertation, regrettant l'insuffisance de la réponse que lui avait donnée à ce sujet le Ministre de la Défense au cours d'une séance de questions au Gouvernement.

Le Directeur général de la Gendarmerie nationale a alors apporté les éléments de réponse suivants :

- fin 1999-début 2000, la Gendarmerie a connu une situation très difficile, où les personnels se plaignaient tout à la fois de la lourdeur excessive de leurs missions, de l'insuffisance de leurs moyens, d'une durée du travail sans commune mesure avec celle du monde civil, surtout depuis l'introduction des 35 heures et d'un manque de considération. La Direction de la Gendarmerie nationale a alors tenté d'apporter à ces attentes nombreuses et diverses une réponse d'ensemble, qui ne se réduit pas à l'attribution de compléments de rémunération.

L'effort a d'abord porté sur la maîtrise de la charge de travail. Dans la mesure où la Gendarmerie effectue des tâches demandées par d'autres institutions, cette action a nécessité un dialogue avec les donneurs d'ordre. Des mesures ont été parallèlement prises pour que l'organisation du travail des gendarmes ne les coupe pas à l'excès du reste de la société : il a été garanti aux gendarmes deux jours de repos par semaine et des quartiers libres à prendre en fonction des nécessités du service. Les moyens de travail ont été améliorés : il a été remédié par exemple aux insuffisances de carburant et le taux d'équipement en micro-ordinateurs a été porté à un poste pour deux gendarmes.

Une attente reste perceptible dans le domaine de la reconnaissance, où les gendarmes rencontrent des difficultés communes à l'ensemble des personnels publics exerçant une forme d'autorité, comme les enseignants par exemple.

D'autres attentes sont relatives aux mesures spécifiques que les gendarmes souhaitent à titre d'équivalence de la réduction de la durée du travail accordée aux civils. Ces attentes sont logiques et méritent de recevoir satisfaction sous une forme ou une autre.

Les attentes diverses des gendarmes ne se traduisent pas par des tensions graves. Ainsi, les mouvements revendicatifs qui se sont organisés, notamment parmi les épouses de gendarmes ou les retraités de la Gendarmerie, paraissent s'être fortement atténués, voire dispersés.

On constate à présent une stabilisation des esprits qui paraît témoigner d'une reconnaissance par les personnels de la réalité des actions menées pour l'amélioration des conditions de travail.

La Gendarmerie dispose d'instances de concertation vivantes : présidents de sous-officiers, Conseil de la fonction militaire Gendarmerie, Conseil supérieur de la fonction militaire. La concertation étant un fait nouveau dans la Gendarmerie, une formation doit être donnée aux représentants des personnels au sein des instances de participation pour les impliquer davantage dans le dialogue ;

- le rôle des gendarmes lors des tempêtes des 25 et 26 décembre 1999 a illustré l'importance de leur contribution à la continuité du service public. L'amélioration des conditions de vie et de travail des personnels n'en est que plus prioritaire. Remplir cet objectif sans porter atteinte au maillage territorial actuel nécessite de regrouper les brigades en secteurs. Les équipements modernes, notamment automobiles, permettent de compenser l'éloignement géographique même si le contact avec les populations est moins direct et moins étroit. Les phénomènes d'augmentation de l'insécurité qui sont observés dans les zones rurales correspondent à une délinquance nomade et non locale. Les avantages de la sectorisation des brigades l'emportent donc sur ses inconvénients, même si des aménagements devront certainement y être apportés de manière à mieux faire correspondre les secteurs avec des zones géographiques et humaines. Au demeurant, les résultats de la réforme sont positifs, y compris dans certains départements où la géographie est difficile tels que la Côte d'Or.

Au total, la sectorisation, en cours de mise en place, est nécessaire, que ce soit dans l'accomplissement des missions ou dans un objectif de gestion moderne du personnel. Toutefois, dans la mesure où la sectorisation sans suppression de brigades conduit à faire travailler ensemble des personnels qui ont leurs propres méthodes de travail, il ne sera pas possible de la mettre en _uvre partout au même rythme. Pour cette raison, la Direction générale de la Gendarmerie laisse une grande latitude aux échelons locaux pour organiser de manière optimale la montée en puissance de la mutualisation des moyens et des missions ;

- en matière de D.O.T., la Gendarmerie dispose d'équipements, y compris les véhicules, pour 15 000 personnels ;

- les VBRG étant des véhicules d'excellente qualité, les dispositions ont été prises, dans le projet de loi de programmation militaire 2003-2008, pour les prolonger et préparer la génération suivante ;

- les charges liées au plan Vigipirate sont supportées sans difficulté particulière par la Gendarmerie, qui bénéficie en outre du soutien de 300 à 500 réservistes. Une dizaine d'escadrons a été mobilisée, soit pour des gardes exceptionnelles, soit pour des gardes préexistantes réorientées vers le dispositif Vigipirate ;

- la Gendarmerie fera également face aux charges liées à l'introduction de l'euro, même si cette tâche a nécessité le report des permissions que les personnels avaient souhaité prendre en fin d'année. La période couvrant les mois de décembre et janvier sera, en effet, tendue. Pour le moment, la mise en place de l'euro est satisfaisante, les seuls incidents ayant été enregistrés à la Banque de France, à l'occasion du conditionnement et de l'impression des signes monétaires ;

- la Gendarmerie contribue à la lutte contre le terrorisme international dans le cadre du Plan Vigipirate, des enquêtes judiciaires et de la remontée de l'information, qu'elle ne traite pas.

C'est au sein de l'unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT) qu'est organisée, dans un climat de confiance, la coopération entre la Gendarmerie et la police nationale en matière de lutte contre le terrorisme international ;

- la Gendarmerie pourrait, si les événements l'exigeaient, se voir confier par les autorités politiques des missions de protection des points sensibles. Il serait possible à cet effet d'avoir recours aux réserves de manière plus importante ;

- il n'est pas actuellement envisagé de mesure en faveur des maréchaux des logis chefs ayant quitté le service avant la création de l'échelon exceptionnel de gendarme.

II. - EXAMEN DE L'AVIS

La Commission de la Défense s'est réunie le 31 octobre 2001, sous la présidence de M. Paul Quilès, Président, pour examiner les crédits du ministère de la Défense pour 2002 consacrés à la Gendarmerie, sur le rapport de M. Georges Lemoine, rapporteur pour avis.

M. Georges Lemoine a jugé que le projet de budget de la Gendarmerie pour 2002 était bon, voire excellent, et qu'il s'inscrivait dans la continuité des mesures prises en 2000 et 2001. Il a toutefois estimé que la vigilance était nécessaire dans le domaine de la politique immobilière, même si le nombre d'unités logement construites en 2002 augmentait. Il a fait observer à cet égard que le logement des personnels du nouveau corps des volontaires soulevait davantage de difficultés que ce n'était le cas avec les gendarmes auxiliaires. Il s'agit en effet d'une population totalement différente des anciens appelés qui ne peut par conséquent pas être logée dans des conditions similaires. M. Georges Lemoine a toutefois souligné que, malgré un bon budget, un sentiment de malaise persistait, dont il a donné quelques indices : c'est tout d'abord le mouvement d'humeur sans précédent des gardes républicains ; c'est encore le retrait des pistolets MAS G1 pour des raisons techniques ; ce sont enfin les difficultés de recrutement des gendarmes auxiliaires.

Le rapporteur pour avis a alors jugé nécessaire de dépasser la dimension technique du budget afin de débattre de la situation de la Gendarmerie elle-même. Il a souhaité, pour sa part, lancer ce débat en mettant l'accent sur la formation des gendarmes. Tout en reconnaissant que beaucoup de progrès avaient été faits en ce domaine, il a jugé que le statut du personnel enseignant dans les écoles de Gendarmerie n'était pas satisfaisant. Regrettant que l'affectation dans une école de Gendarmerie porte aujourd'hui préjudice à la carrière des personnels concernés, il a vivement souhaité que la Direction générale de la Gendarmerie nationale prenne des initiatives pour améliorer leur situation dans les années à venir, afin que les meilleurs officiers et sous-officiers de Gendarmerie puissent exercer des fonctions d'enseignants dans les écoles. Il s'est par ailleurs félicité de la qualité des travaux du conseil d'orientation de la Gendarmerie. Puis il a appelé la Commission à donner un avis favorable aux crédits de la Gendarmerie dans le projet de loi de finances pour 2002.

M. Robert Poujade a estimé que la Gendarmerie donnait aujourd'hui l'impression d'être déstabilisée et que le malaise en son sein était aussi profond qu'en 1989. Il a fait valoir qu'il y aurait beaucoup de risques à oblitérer ce profond sentiment de malaise, d'autant qu'il n'est pas limité à une catégorie de personnels, mais qu'il est général. Expliquant que ce malaise était d'abord lié à la charge de travail très lourde qui incombe aux gendarmes, il a cité l'exemple des personnels de la Gendarmerie mobile, dont il a souligné que, pour la plupart, ils n'avaient pas eu un dimanche libre depuis le mois d'août. Il a, par ailleurs, insisté sur le fait que les gendarmes ont beaucoup changé en 10 ans : de ruraux, ils sont devenus citadins, tout en restant appelés à travailler en zone rurale. M. Robert Poujade a également souligné que les épouses des officiers et sous-officiers de Gendarmerie supportaient souvent avec difficulté le niveau de contrainte imposé à leur mari. Il a également mis l'accent sur la perception par les gendarmes d'un décalage entre leur statut militaire et les évolutions du monde civil, qui vont vers une liberté toujours croissante, comme l'illustre l'introduction des 35 heures. Il a, à ce propos, relevé que les gendarmes ne demandaient pas l'application des 35 heures, même si la question de la durée du travail était importante à leurs yeux. Il a, en conclusion de son analyse, jugé nécessaire d'améliorer encore les conditions matérielles de vie et de travail des personnels de la Gendarmerie et notamment des sous-officiers. Se déclarant pleinement conscient des risques de surenchères qu'une telle mesure pouvait entraîner dans le reste des armées, M. Robert Poujade a néanmoins insisté sur la lourdeur des contraintes subies par les gendarmes. Le malaise de la Gendarmerie, loin d'être un mythe, doit être considéré comme une réalité préoccupante pour la société française et sa sécurité.

M. Robert Poujade a enfin demandé au rapporteur des précisions sur ses propositions concernant la situation des personnels affectés dans les écoles.

Déclarant partager complètement les analyses de M. Robert Poujade, M. Georges Lemoine a estimé qu'aujourd'hui, il fallait distinguer parmi les personnels de la Gendarmerie, départementale ou mobile, trois strates qui correspondent à des attentes différentes : les personnels âgés de plus de 45 ans se situent souvent dans la perspective de la retraite ; la tranche intermédiaire, entre 30 et 45 ans est à la fois dans une situation d'attente d'améliorations et de crainte des évolutions à venir ; quant aux moins de 30 ans, ils souhaitent le changement. Le rapporteur pour avis a estimé que la principale interrogation portait sur la manière dont la Gendarmerie, corps militaire, allait évoluer avec des personnels sans formation militaire initiale. D'un côté, en effet, les volontaires qui se présentent dans les écoles sont presque surpris du caractère militaire de la Gendarmerie et il n'est pas rare qu'ils abandonnent l'expérience au bout de trois semaines, les filles s'adaptant d'ailleurs plus facilement que les garçons. Quant aux officiers non issus du corps des sous-officiers, ils seront dorénavant recrutés directement à partir des universités et donc dépourvus de formation militaire. Ils pourront même être dans la situation de commander à des volontaires également dépourvus de formation militaire. M. Georges Lemoine a jugé que de ce fait, l'esprit civil allait inéluctablement remplacer l'esprit militaire. Ajoutant qu'il fallait vivre avec cette mutation, il est revenu sur le caractère fondamental, à cet égard, de la formation dans les écoles. Enfin, s'agissant de l'amélioration du statut du personnel enseignant dans les écoles de Gendarmerie, il a souhaité que le temps consacré à la formation des élèves gendarmes donne lieu à une bonification de carrière et n'entraîne pas de pénalisation pour le retour à une affectation opérationnelle.

Faisant référence aux propos du rapporteur pour avis sur la nécessité d'améliorer le budget immobilier de la Gendarmerie, M. Claude Lanfranca a estimé que l'Etat devait aussi aider davantage les communes qui, non seulement n'ont pas les ressources suffisantes pour financer des travaux de construction sur lesquels elles n'ont pas le droit de récupérer la TVA, mais qui, en outre, ne peuvent pas négocier les loyers qu'elles perçoivent.

M. René Galy-Dejean a indiqué que le Groupe RPR donnerait un avis défavorable à l'adoption des crédits de la Gendarmerie. Puis se référant à la situation actuelle de la Gendarmerie, il s'est demandé si le ministère de la Défense était le mieux placé pour l'améliorer. Il a observé que pendant longtemps, la Gendarmerie avait regardé vers l'armée de Terre mais que, désormais, son attention se portait sur la situation des policiers. Il a ajouté que les armées elles-mêmes étaient attentives à la situation de la Gendarmerie, leurs sous-officiers, notamment, s'estimant moins favorisés que les sous-officiers de Gendarmerie. Il a alors estimé que la création d'une école d'officiers spécifique à la Gendarmerie représentait une étape supplémentaire vers la « civilianisation » de la Gendarmerie.

M. Jean-Noël Kerdraon a souligné que la situation des policiers n'était elle-même pas facile et jugé qu'il fallait par conséquent raison garder. Il a ensuite fait observer que la Gendarmerie était confrontée à des évolutions sociales profondes : l'obligation d'être logé sur le lieu de travail est, par exemple, moins bien acceptée. De même, la Gendarmerie doit s'adapter aux conséquences du travail des femmes et à l'évolution de la délinquance et de l'insécurité. Quant à la question de l'enseignement en Gendarmerie, il faut considérer également son contenu afin de répondre aux nécessaires adaptations requises par les évolutions sociales. M. Jean-Noël Kerdraon a enfin remarqué qu'alors qu'elle était , il y a peu, généralement respectée comme institution, la Gendarmerie se trouvait aujourd'hui exposée à un mouvement global de contestation de l'autorité.

M. Guy-Michel Chauveau a estimé que c'était en réalité la question de la condition militaire qui était, à nouveau, posée. Il a relevé que la Gendarmerie avait très mal vécu la décision de confier les opérations de maintien de l'ordre au Kosovo à l'armée de Terre. Il a, par ailleurs, observé que la question de la valorisation du statut des formateurs militaires se posait dans toutes les armées. Enfin, estimant que le véritable débat portait actuellement sur le complément de rémunération à accorder aux gendarmes en contrepartie d'une durée du travail supérieure à celle des personnels civils, il a demandé au rapporteur quel montant était inscrit dans le projet de budget pour financer les primes compensatoires.

M. Michel Voisin a observé que l'intercommunalité offrait des solutions au problème du financement des casernes de Gendarmerie. Puis, il a fait valoir que l'évolution sociologique de la Gendarmerie pouvait également rendre plus difficiles leurs relations avec les élus.

M. Georges Lemoine a alors apporté les éléments de réponse suivants :

- il est nécessaire de maintenir la Gendarmerie au sein du ministère de la Défense ;

- l'évolution sociologique de la Gendarmerie est apparue au grand jour à la fin des années 80 quand il a été constaté que ses personnels, auparavant majoritairement d'origine rurale, étaient devenus des citadins à plus de 70 %. Pour tenir compte de cette évolution qui se reflète notamment dans l'attitude des épouses de gendarmes, la Gendarmerie a fait des efforts, en particulier dans l'architecture des casernes, afin de séparer les lieux de travail et de vie, allant même jusqu'à construire des pavillons indépendants ;

- il est toutefois frappant de constater que les nouvelles familles de gendarmes souhaitent parfois vivre en caserne pour des raisons de sécurité ;

- la question de la réduction du temps de travail est au c_ur du débat, même si les gendarmes ne souhaitent pas bénéficier du régime des 35 heures. Comme ils sont insérés dans un environnement où les 35 heures sont d'application générale, ils se posent la question d'éventuelles compensations, à l'instar de tous les militaires. Celles-ci sont actuellement étudiées par le ministère de la Défense ;

- en 2000, la Gendarmerie mobile a été mobilisée 214 jours, ce qui représente un record. Il faut rappeler qu'elle est également mobilisée dans des zones urbaines sensibles dans le cadre du dispositif de fidélisation.

La Commission a alors émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la Gendarmerie.

*

Au cours de sa réunion du 6 novembre 2001, la Commission de la Défense a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la Défense pour 2002, les membres des groupes RPR, UDF et DL votant contre.

------------------------------------------------------------------

N° 3323-X.- Avis de M.Lemoine rapporteur de la commission de la défense sur le projet de loi de finances pour 2002 - gendarmerie.


- Cliquer ici pour retourner au sommaire général

- Cliquez ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires

- Cliquez ici pour retourner à la liste des discussions budgétaires



© Assemblée nationale