N° 1114

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 octobre 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES (1) , SUR LE PROJET DE loi de finances pour 1999 (n° 1078).

TOME III
DÉFENSE
ESPACE, COMMUNICATION ET RENSEIGNEMENT

PAR M. Bernard GRASSET,

Député.

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros : 1111 (annexe n°40)

Lois de finances

La commission de la défense nationale et des forces armées est composée de :

M. Paul Quilès, président ; MM. Didier Boulaud, Michel Voisin, Jean-Claude Sandrier, vice-présidents ; MM. Robert Gaïa, Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, secrétaires ; MM. Jean-Marc Ayrault, Jacques Baumel, Jean-Louis Bernard, André Berthol, Jean-Yves Besselat, Bernard Birsinger, Jacques Blanc, Jean-Marie Bockel, Loïc Bouvard, Jean-Pierre Braine, Philippe Briand, Jean Briane, Antoine Carré, Bernard Cazeneuve, Gérard Charasse, Guy-Michel Chauveau, Alain Clary, Charles Cova, Michel Dasseux, Jean-Louis Debré, François Deluga, Claude Desbons, Philippe Douste-Blazy, Jean-Pierre Dupont, François Fillon, Christian Franqueville, Roger Franzoni, Yann Galut, René Galy-Dejean, Roland Garrigues, Henri de Gastines, Bernard Grasset, Elie Hoarau, François Hollande, François Huwart, Jean-Noël Kerdraon, François Lamy, Pierre-Claude Lanfranca, Jean-Yves Le Drian, Georges Lemoine, François Liberti, Jean-Pierre Marché, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Christian Martin, Marius Masse, Gilbert Meyer, Michel Meylan, Jean Michel, Charles Miossec, Alain Moyne-Bressand, Arthur Paecht, Jean-Claude Perez, Robert Poujade, Michel Sainte-Marie, Bernard Seux, Guy Teissier, André Vauchez, Philippe de Villiers, Jean-Claude Viollet, Pierre-André Wiltzer, Kofi Yamgnane.

S O M M A I R E

Pages

INTRODUCTION 5

CHAPITRE PREMIER

UNE CERTAINE INQUIÉTUDE SUR LES AMBITIONS SPATIALES

I. —  UNE NOUVELLE RÉDUCTION DU BUDGET SPATIAL MILITAIRE 7

A. —  DES DOTATIONS BUDGÉTAIRES EN RETRAIT 7

1. — Un projet de budget trop raisonnable 7

2. — Le retour de l’imputation des crédits duaux 9

B. —  L’INCERTITUDE DES PROGRAMMES SPATIAUX MAJEURS 10

1. — La poursuite du programme d’observation optique 10

a) La réussite opérationnelle du programme Hélios I 10

b) La seconde génération Hélios 2 12

(1) La définition du programme 12

(2) La difficile recherche de partenaires 13

2. — L’arrêt du programme d’observation radar 15

a) L’échec dans la définition du programme 15

b) Le maintien d’une volonté française 16

3. — Les difficultés de la coopération pour les télécommuni-

cations 16

a) Le programme national Syracuse II 16

b) La prochaine génération 17

C. —  LES APPROCHES COMPLÉMENTAIRES 18

1. — L’écoute électromagnétique 18

2. — Les programmes de cohérence 19

II. —  LES POLITIQUES SPATIALES DANS LE MONDE 21

A. —  LA PUISSANCE SPATIALE INCONTESTÉE DES ETATS-UNIS 21

1. — La réorientation de la politique spatiale aux Etats-Unis 21

2. — Les systèmes spatiaux de défense 22

B. —  DES COMPÉTITEURS DE PLUS EN PLUS SÉRIEUX POUR

L’EUROPE 22

1. — Le manque d’ambition de la politique spatiale

européenne 22

2. — L’ambition des pays asiatiques 23

a) Un programme japonais cohérent et substantiel 23

b) Les perspectives favorables du programme chinois 24

c) L’émergence d’une politique spatiale indienne 24

C. —  LA POLITIQUE DE LANCEMENT ET LES ACCORDS DE

COOPÉRATION 25

DEUXIÈME PARTIE

LES MOYENS DE COMMUNICATION, DE RENSEIGNEMENT

ET DE CONDUITE DES OPÉRATIONS

I. —  LES PRINCIPAUX SYSTÈMES DE TRANSMISSION, DE LIAISON,

ET DE COMMANDEMENT 27

A. —  LES SYSTÈMES DU NIVEAU INTERARMÉES 28

B. —  LES PROGRAMMES D’INFORMATION ET DE COMMANDEMENT 29

II. —  LES SYSTÈMES DE RECUEIL DU RENSEIGNEMENT 30

A. —  LES PROGRAMMES STRATÉGIQUES 30

B. —  LES MOYENS À VOCATION TACTIQUE 31

1. — L’aviation de patrouille maritime 31

2. — La surveillance du champ de bataille 32

3. — La mise en service des drones 32

a) Un nouveau concept d’emploi 32

b) Le bilan des drones en service 33

CONCLUSION 35

TRAVAUX EN COMMISSION 37

I. —  AUDITION DE M. ALAIN RICHARD, MINISTRE DE LA DÉFENSE 37

II. —  EXAMEN DE L’AVIS 52

Mesdames, Messieurs,

L’accès à l’espace, la maîtrise des communications et de l’information sont des atouts indispensables à l’indépendance de la France et à ses missions internationales.

Depuis la mise en oeuvre du satellite d’observation optique Hélios, les responsables politiques et militaires se sont dotés d’une capacité autonome d’appréciation dans la prévention et l’analyse des crises. L’indépendance de décision et d’action de la France en a été renforcée. De même, les nouvelles technologies de télécommunications et de gestion des données rendent les forces armées plus opérationnelles et interopérables.

Mais il est nécessaire de poursuivre les efforts qui ont permis la mise en oeuvre de ces techniques et ne pas quitter le nécessaire “ cercle vertueux ” reliant la décision politique, le progrès scientifique, le savoir-faire industriel et l’opération militaire.

L’effort de notre pays dans le domaine spatial a été sans comparaison en Europe. Les crédits réellement dépensés par le ministère de la Défense ont dépassé 3 milliards de francs au cours des derniers exercices. La France reste le pays européen le plus impliqué dans le domaine spatial.

Le projet de budget pour 1999 risque cependant d’introduire une rupture. Certes il faut replacer la loi de finances initiale dans un contexte financier et politique global. Il est également indispensable de prendre en compte les aléas et les perspectives de la coopération européenne dans le domaine des communications ou des programmes spatiaux. Mais, si les programmes destinés à la prévention des crises continuent d’être privilégiés, un certain ralentissement affecte le domaine spatial.

Plusieurs constats méritent d’être effectués : 

— le décalage des dotations budgétaires par rapport à l’annuité de la loi de programmation militaire pour la période 1997-2002 se creuse de plus en plus.

Alors qu’il était prévu de consacrer près de 4 % des crédits d’équipement de la Défense à l’espace, les moyens budgétaires destinés à ce secteur ont régressé de 13,2 % par rapport à la programmation en 1998 ; ils devraient se situer de nouveau en retrait en 1999. Il est vrai que la revue de programmes a autorisé un recalage des ressources par rapport aux possibilités financières et au déroulement réel des programmes. Mais le niveau du budget ne semble plus en adéquation avec l’ambition de la politique française au moment où les offres du marché, essentiellement en provenance des Etats-Unis n’ont jamais été aussi tentantes pour nos partenaires éventuels.

— l’ensemble des moyens militaires en imagerie optique et radar, en écoute électronique, en surveillance de l’espace et en alerte avancée a toujours été considéré comme indissociable. Les applications civiles ne peuvent compenser l’absence de moyens militaires que dans le cas des transmissions non sécurisées, de l’imagerie optique à résolution métrique et de certains objectifs de surveillance de l’espace.

Avant de présenter l’évolution des crédits militaires consacré à l’Espace, votre rapporteur souhaite souligner leurs conséquences directes sur le développement de l’Europe de la défense et sur la cohérence de la politique spatiale de notre pays.

CHAPITRE PREMIER

UNE CERTAINE INQUIÉTUDE SUR LES AMBITIONS SPATIALES

I. —  UNE NOUVELLE RÉDUCTION DU BUDGET SPATIAL MILITAIRE

A. —  DES DOTATIONS BUDGÉTAIRES EN RETRAIT

1. — Un projet de budget trop raisonnable

L’évolution des crédits consacrés par notre pays aux programmes spatiaux est déterminée par les choix opérés par la revue de programmes. Elle est difficile à apprécier en raison des changements de nomenclature budgétaire qui ne permettent plus les comparaisons annuelles.

Si les dotations budgétaires ont progressé rapidement depuis dix ans jusqu’à dépasser 4 milliards de francs en francs courants et en crédits de paiement dans les lois de finances initiales pour 1993, 1995 et 1996, le niveau réel des dépenses exécutées, compte tenu des annulations et des transferts de crédits en exécution, n’a pas dépassé 2,5 milliards de francs au cours des trois derniers exercices.

Compte tenu de ce niveau de dépenses, le projet de budget 1999 pour l’Espace peut être globalement qualifié de raisonnable. La diminution des autorisations de programme de 2 790 à 2 523 millions de francs atteint 10,66 %, ce qui confirme un ralentissement des programmes spatiaux. La réduction de 15,9 % des crédits de paiement qui passent à 2 618 millions de francs contraste avec l’augmentation globale des dotations en capital de la Défense (+6,17 %). C’est pourquoi la part des crédits Espace dans le total des dépenses en capital de la Défense régresse à 3 % en crédits de paiement.

La comparaison des dotations prévues avec le niveau des crédits disponibles ou celui des dépenses réalisées au cours des trois derniers exercices est rendue difficile par la modification de la nomenclature budgétaire.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES ESPACE

 

Loi de finances initiale en millions de francs

Evolution en %

 

1997

1998

1999
(projet)

98/97

99/98

Autorisations de programme

3 407,0

2 790

2 523

- 18,10

- 10,6

Crédits de paiement

3 298,0

3 112

2 618

- 5,63

- 15,9

COMPARAISON DES CRÉDITS VOTÉS ET DES DÉPENSES RÉALISÉES

(en millions de francs)

 

1996

1997

1998

97/96

98/97

Crédits votés

4 085

3 298

3 112

- 19,3 %

- 5,6 %

Crédits votés hors BCRD

2 965

3 298

3 112

- 11,2 %

- 5,6 %

Annulations et reports

- 322

- 182

- 8

Crédits disponibles

2 643

3 116

3 104

- 19,9 %

- 0,4 %

Dépenses réalisées

2 658

2 681

1 375 (1)

   

Ecart crédits votés/dépenses réalisées

1 427

617

   

(1) Au 30 juin 1998

CRÉDITS PAR CATÉGORIES DE COÛT

(en millions de francs)

 

LFI 1998

Projet 1999

 

AP

CP

AP

CP

Etudes amont

267

317

273

220

Développements

1 913

1 898

1 711

1 695

Entretien programmé

435

400

459

417

Fabrications

176

498

80

286

Total

2 791

3 113

2 523

2 618

Rapport études / crédits espace

10,3 %

11,6 %

10,8 %

8,4 %

AP : autorisations de programmes / CP : crédits de paiement

2. — Le retour de l’imputation des crédits duaux

·  Le montant des crédits en faveur des programmes spatiaux pour l’exercice 1997 (3,407 milliards de francs d’autorisations de programme et 3,298 milliards de francs de crédits de paiement) avait pris en compte non seulement le montant réel des dépenses de l’exercice 1996 mais également l’assurance inscrite dans la loi de programmation militaire du 2 juillet 1996 de ne pas prévoir de contribution du ministère de la Défense au titre des crédits de recherche duale du BCRD.

En fait, le niveau des transferts devait graduellement baisser d’environ 1 milliard de francs en 1996 et 1997 (au titre des reports) à 500 millions de francs en 1998 pour disparaître par la suite. Si l’exercice 1998 correspond bien à ce schéma, force est de constater que le projet de budget pour 1999 envisage un transfert de 900 millions de francs en autorisations de programme et en crédits de paiement destiné essentiellement aux recherches civiles dans le domaine spatial et affecté au budget du CNES. L’affectation au ministère de la défense de ces dotations est en contradiction avec les engagements pris, non seulement par la loi de programmation militaire, mais aussi en avril dernier par la revue de programmes.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES
(en loi de finances initiale)

(crédits de paiement, en millions de francs)

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999
(2)

Crédits espace

3 385

3 463

3 812

4 026

3 682

4 155

4 085

3 298

3 112

2 618

BCRD

270

408

882

1 120

(1)

500

900

Crédits espace hors BCRD

3 385

3 463

3 812

3 757

3 274

3 273

2 965

3 298

2 612

1 718

Dépenses réalisées

2 522

2 658

2 116

(1) Un deuxième transfert de 1 120 millions de francs a été effectué dans le cadre du collectif budgétaire de l’automne 1996 et est venu en atténuation des reports de crédits de 1996 sur 1997.

(2) Projet de loi de finances

Certes les transferts de crédits militaires vers les programmes civils peuvent être acceptés si ceux-ci sont effectivement affectés à des études amont qui concernent les programmes militaires. Il s’agit dans tous les cas de dotations budgétaires publiques. Seule la source initiale de rattachement diffère.

Mais on peut se demander si l’ampleur des transferts (253 millions de francs en 1993, près de 400 millions de francs en 1994, 882 millions de francs en 1995 et 1 120 millions de francs en 1996) correspond à l’esprit de la convention entre le CNES et la DGA. En effet, la participation des crédits du ministère de la Défense aux dépenses spatiales civiles représente un simple abondement du budget du CNES. Les crédits transférés sont affectés par le ministère du Budget au budget des organismes civils concernés et ne sont pas gérés par le Ministère de la défense.

Non seulement les crédits présentés comme duaux sont comptabilisés deux fois puisqu’ils sont affichés dans la présentation des deux budgets, permettant de maintenir de manière quelque peu artificielle le niveau des crédits consacrés à l’espace militaire. Mais il n’est pas établi de comptabilité séparée de ces crédits dont il est impossible de connaître l’utilisation précise.

·  Les conséquences de la réaffectation de crédits duaux sur le budget spatial sont d’autant plus importantes que le montant des crédits d’études gérées par la DGA ne dépassera pas 265 millions de francs de crédits de paiement en 1999.

B. —  L’INCERTITUDE DES PROGRAMMES SPATIAUX MAJEURS

En attendant que les partenaires européens s’engagent sur des projets en coopération, la France garantit le déroulement des programmes majeurs qu’elle a engagé dans le cadre du plan pluriannuel spatial militaire et elle prépare leur renouvellement afin d’assurer la continuité de service.

1. — La poursuite du programme d’observation optique

Le programme de satellites de reconnaissance et d’observation optique Hélios est le seul projet spatial militaire en coopération européenne.

a) La réussite opérationnelle du programme Hélios I

Le programme trinational Hélios I qui associe la France, l’Italie et l’Espagne porte sur la réalisation de deux satellites d’observation optique dont le contrôle s’effectue à partir d’un centre principal sur la base de Francazal Toulouse, et d’installations au sol qui comprennent, dans chaque pays partenaire, une station de réception (Colmar, Iles Canaries et Lecce) et un centre de traitement des images (Creil, Torrejon et près de Rome).

Le satellite Hélios 1A a été mis en orbite le 7 juillet 1995 par une fusée Ariane 40 et le système est entré en phase opérationnelle depuis le 11 octobre 1995. Le deuxième satellite, Hélios 1B, dont la réalisation a débuté en janvier 1994, a été mis en condition de stockage et sera placé en orbite au cours du dernier trimestre de 1999 pour assurer le relais avec le satellite Hélios 1A dont la durée de vie a été fixée de manière contractuelle à cinq ans. Même si les négociations n’ont pas encore été ouvertes avec Arianespace, les trois partenaires du programme se sont mis d’accord sur le tir du satellite.

Depuis deux ans, le programme Hélios a confirmé son aptitude au renseignement documentaire et à l’information politique. Les images reçues sont d’une excellente qualité et, après traitement, donnent entière satisfaction aux différents services de renseignement. Il est à noter qu’en février dernier, le Président de la République a pu maintenir une position nationale ferme face aux propositions américaines dans la crise irakienne grâce à la capacité autonome d’observation de la France.

Le partage entre les trois pays des temps d’utilisation en fonction des financements initiaux est globalement satisfaisant malgré sa complexité. Il est respecté de manière statistique sur le long terme depuis trois ans. Il ne paraît pas devoir poser de problème majeur en cas de crise. Des protocoles ont permis d’étendre la coopération à la phase d’exploitation du programme et au maintien en condition opérationnelle.

En avril 1993, un protocole de fourniture rémunérée des images Hélios 1 a été signé entre le secrétaire général de l’UEO et les ministres de la Défense des trois pays coopérant au programme. La première fourniture au centre satellitaire de Torrejòn en Espagne est intervenue en mai 1996. La mise en place du centre d’interprétation des images satellitaires à Torrejòn a été décidée par le Conseil de l’UEO en 1990 dans la perspective d’un système spatial de renseignement propre à l’organisation. Le centre dispose également d’images prises par les satellites SPOT, ERS et LANDSAT, ou de produits commerciaux disponibles. Un nouveau concept d’emploi, défini en mai 1997 par le Conseil des ministres de l’UEO, confie au centre une mission de surveillance générale dans le domaine de la sécurité.

Sur le coût total incluant la réalisation du système, les améliorations, les charges additionnelles et le maintien en condition opérationnelle, la part du programme Hélios 1 à la charge de notre pays est estimée à 9,8 milliards de francs (1997). Le montant des dépenses réalisées de 1985 à 1997 atteint 9,1 milliards de francs. Des crédits de paiement à hauteur de 546 millions de francs sont inscrits en faveur du programme dans le projet de loi de finances pour 1999.

b) La seconde génération Hélios 2

(1) La définition du programme

Dans sa définition actuelle, le satellite Hélios 1 emporte une caméra à très haute résolution et des enregistreurs magnétiques spécialisés EMS, destinés à conserver les informations entre deux passages successifs au-dessus des stations de réception. Il comprend aussi un système d’écoute électronique Euracom, réalisé uniquement dans le cadre national français. L’orbite polaire héliosynchrome et les capacités de manoeuvre garantissent une possibilité d’observation d’un site donné tous les deux jours (à l’équateur). Les capacités sont limitées à l’observation de jour et par temps clair. Le satellite ne repasse exactement à la verticale d’un point donné que tous les vingt-six jours.

La nécessité de relever sur orbite le satellite Hélios 1 (dont l’espérance de vie ne peut dépasser 2002-2003) et d’améliorer les capacités techniques a conduit dès 1994 à définir une nouvelle génération dite Hélios 2. Celle-ci doit valoriser les acquis du programme précédent en rentabilisant leurs investissements, en modernisant les installations à mi-vie et en bénéficiant de synergies avec les programmes civils. Elle doit également intégrer les améliorations technologiques dans les domaines de la capacité de prises de vues, de la réduction des délais d’accès aux informations recueillies et de la résolution des images.

Des améliorations ont déjà été incorporées au système Hélios 1B : l’emport d’une mémoire de masse à la place des MES va accroître les capacités et permettra une utilisation plus souple des images ; les modifications apportées aux composantes sol les rendra aptes à recevoir les images civiles (Spot, ERS ou Landsat) ; la station de théâtre transportable sera mise au point à partir d’un démonstrateur d’une station de réception et de traitement des images. Enfin, il est prévu d’adjoindre une composante d’observation infrarouge de façon à permettre l’observation de nuit et la détection d’indices d’activités apportant une information complémentaire.

La phase de définition a été prolongée jusqu’en mars 1997. La fiche de caractéristique militaire a été approuvée le 21 avril de la même année et la phase de développement a été lancée il y a un an.

·  Le coût total du programme Hélios 2 pour notre pays a été estimé à près de 11 milliards de francs (valeur 1996) pour deux satellites ainsi que pour l’adaptation nécessaire des installations au sol. Près de 3,1 milliards de francs ont déjà été dépensés. Le Ministre de la Défense a approuvé le dossier de lancement de la réalisation du programme, prévu par la loi de programmation militaire le 7 juillet dernier.

La DGA s’est placée dans un contexte de maîtrise des coûts sans transiger sur les capacités opérationnelles. Le dialogue avec les industriels passe également par le CNES qui assure la maîtrise d’ouvrage.

Sur l’article 69 du chapitre 51-61, le projet de budget a inscrit 1 254 millions de francs de crédits de paiement pour ce programme qui représentera donc à lui seul la moitié des crédits consacrés à l’espace en 1999.

(2) La difficile recherche de partenaires

L’importance des flux financiers a incité à rechercher un partenariat européen depuis le début de la phase de définition.

L’Italie aurait souhaité retarder la mise en orbite d’Hélios 1 B afin de prolonger le service de la première génération de satellites. Elle a demandé à s’associer au programme mais n’a pas encore fait connaître sa décision. Des dispositions sont prises pour que ce pays puisse rejoindre le programme en cours de développement. Par contre, des discussions ont eu lieu avec la Belgique qui a fait part de son intérêt et avec l’Espagne qui a confirmé sa participation à un niveau de 3 %. Un accord technique et administratif franco-espagnol a été signé à l’été 1998. Les négociations avec la Belgique achoppent sur le montant de l’engagement, le taux de 1 % dans le programme, envisagé par les autorités belges, ne permettant pas d’obtenir au moins une image par jour et le taux d’utilisation de 2,5 % souhaité par les partenaires franco-espagnols étant supérieur aux possibilités financières belges.

L’intérêt britannique pour les satellites d’observation militaire est moindre car le Royaume-Uni s’estime satisfait de sa coopération avec les Etats-Unis même aux dépens de son indépendance de décision. La Grande-Bretagne et les Etats-Unis ont constitué des structures intégrées de renseignement au niveau de l’OTAN qui excluent les autres partenaires de l’Alliance atlantique en raison de leurs liens avec la dissuasion.

Un raisonnement analogue a pour l’instant persuadé les chefs d’état-major des armées allemandes que la fourniture d’images satellitaires par les Etats-Unis était suffisante : elle est surtout moins coûteuse à l’heure où les budgets d’équipement militaire sont contraints. On peut croire que les Allemands trouveront un équilibre entre leur culture liée à l’OTAN et une frustration grandissante due à une trop grande dépendance.

La participation allemande s’est heurtée à plusieurs difficultés, d’une part, la réduction des dotations budgétaires du ministère de la défense, d’autre part, l’impossibilité de régler les questions opérationnelles, industrielles ou financières. Une participation à Hélios 2 supposait un apport financier de l’Allemagne d’au moins 10 % pour compenser les investissements déjà réalisés par les autres pays et un partage opérationnel dès la mise en oeuvre du premier satellite.

Les décisions de Baden-Baden, le 7 décembre 1995, et de Dijon, en juin 1996, avaient pourtant confirmé la volonté politique commune et permis de négocier un accord intergouvernemental sur l’observation spatiale ainsi qu’un protocole particulier à la phase de définition du programme Hélios 2. Les sommets de Nuremberg, en décembre 1996, et de Poitiers, en juin 1997, ont réaffirmé l’engagement politique de la France et de l’Allemagne et aménagé la participation de chacun. A cette occasion, ont été liées les négociations sur le projet d’observation optique et celles sur un système radar.

La situation de ses finances publiques ayant incité l’Allemagne à différer son entrée dans ces programmes, la France a accepté un décalage de six mois du premier satellite Hélios 2 et, afin d’éviter une discontinuité dans le système Hélios, elle a dû augmenter son effort financier pour compenser le retrait partiel de son partenaire. Cette opération explique le niveau des dotations pour Hélios 2 en 1998 (1 700 millions de francs d’autorisations de programme et 1 420 millions de francs de crédits de paiement) et leur maintien dans le projet de budget pour 1999 (1 644 millions de francs d’autorisations de programme et 1 417 millions de francs de crédits de paiement).

Mais la décision allemande de ne plus participer au programme d’observation optique oblige la France à engager seule sa réalisation en ménageant les possibilités d’implication des autres partenaires européens lorsque la situation aura évolué.

2. — L’arrêt du programme d’observation radar

a) L’échec dans la définition d’un programme

Le coût d’un système radar est élevé. Les estimations prévisionnelles pour un système comprenant trois satellites et une composante sol s’élevaient dans la loi de programmation militaire à 6,5 milliards de francs (valeur 1996) dans l’hypothèse d’une participation allemande de près de 40 %, d’une participation française au programme d’environ un tiers et d’une participation italienne de l’ordre de 20 %.

En raison du coût de ce programme et de l’impossibilité pour un seul pays d’en assurer le financement, l’accès à la filière du renseignement “ tout temps ” a été envisagé dans un cadre multinational associant l’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Italie. La préférence allemande pour un système d’observation radar a d’ailleurs lié les négociations sur les deux catégories de satellites d’observation, optique et radar.

En effet, deux conceptions sont possibles :

·  Soit on estime qu’un système spatial d’observation radar est complémentaire des systèmes optiques car il offre la capacité d’obtenir des images et de surveiller de larges zones par tout temps, même en cas de couverture nuageuse, de jour comme de nuit. Les trois moyens (optique visible, optique infrarouge et radar) assurent alors un ensemble d’observation complet et cohérent.

·  Soit on considère que chaque système répond à une finalité précise et qu’il devient nécessaire de hiérarchiser les priorités. Dans ce schéma, l’intérêt de la France ne réside pas forcément dans un système de satellite radar unique.

Le cumul des crédits de paiement prévus dans la loi de programmation militaire 1997-2002 pour le système d’observation radar s’élevait à 2,476 milliards de francs (1996). Des crédits budgétaires d’un montant total de 296 millions de francs ont déjà été consommés depuis 1992 pour le projet initial français baptisé Osiris et devenu Horus lorsque la participation allemande semblait acquise.

La persistance des incertitudes allemandes a conduit le Gouvernement, dans le cadre de la revue de programmes, à arrêter le projet Horus sans pour autant renoncer à l’acquisition d’une capacité d’observation radar sur la période du plan pluriannuel spatial militaire.

b) Le maintien d’une volonté française

La volonté de la France d’acquérir un système radar demeure mais les hypothèses technologiques initiales sont remises en cause. La précédente solution datait des années 80 et était orientée vers un projet de gros satellite. La maturité croissante du concept de petits satellites radar réoriente le débat et oblige à un réexamen des projets de recherche et des capacités des systèmes.

C’est pourquoi des crédits ont été maintenus en faveur de l’observation par satellite radar dans le projet de budget pour 1999.

3. — Les difficultés de la coopération pour les télécommunications

La succession du programme national de communications satellitaires Syracuse II s’avère difficile.

a) Le programme national Syracuse II

Les communications spatiales militaires reposent depuis le milieu des années 80 sur des charges utiles intégrées aux satellites civils Télécom et dédiées aux usages militaires.

La première génération Syracuse I a compris trois satellites : Télécom 1A lancé en août 1984, Télécom 1B en mai 1985 et Télécom 1C en mars 1988. La deuxième génération Télécom 2-Syracuse II a assuré la continuité du service grâce à quatre satellites lancés successivement en décembre 1991 (Télécom 2A), en avril 1992 (Télécom 2B), en décembre 1995 (Télécom 2C) et le 8 août 1996 (Télécom 2D).

Les caractéristiques techniques actuelles assurent une liaison protégée contre l’écoute, l’intrusion et les brouillages. Elles permettent également d’étendre les capacités du système par la réalisation d’un ensemble complet de stations, terrestres ou navales : près de 77 nouvelles stations ont été installées (16 navales, 22 terrestres, 10 sous-marines et 29 sur véhicules légers) entre 1991 et 1997 pour les stations de série. Le parc final atteint ainsi une centaine de stations.

Des compléments au programme initial et des améliorations visent à prolonger la durée de vie de la composante spatiale jusqu’en 2005 et à améliorer son interopérabilité avec les autres systèmes de télécommunications.

Sur un coût total du programme Syracuse II et de ses compléments estimé à 13,98 milliards de francs, près de 10 milliards de francs ont déjà été consommés. La loi de programmation militaire 1997-2002 a inscrit 2,254 milliards de francs de crédits de paiement en faveur de ce programme.

Les crédits affectés à ce programme et à ses compléments pour 1999 s’élèvent à 318 millions de francs en crédits de paiement.

b) La prochaine génération

Le système Syracuse II couvrira les besoins essentiels en matière de comunications spatiales militaires jusqu’à la fin de la programmation. La durée de vie des satellites, fixée initialement à dix ans, limitait à 2001 la continuité du service, mais les actions de complément permettront de prolonger le système jusqu’en 2005. Cependant, il convient de préparer la nouvelle génération de satellites de télécommunications à partir de 2005 et de développer une meilleure interopérabilité avec les alliés. Aussi, la loi de programmation militaire a-t-elle inscrit près de 4 milliards de francs de crédits de paiement pour le développement de cette troisième génération de satellites dont le premier exemplaire devrait être commandé avant 2002 et pourrait être lancé en 2005, en fonction de la solution retenue.

·  La recherche d’une coopération européenne se justifiait par la concordance des dates de remplacement des systèmes nationaux en service, britannique Skynet 4 et français Syracuse II, et par la convergence des besoins opérationnels avec l’Allemagne.

Selon le schéma retenu, il pouvait être envisagé un projet binational (Bimilsatcom) ou trinational (Trimilsatcom). Une solution regroupant quatre autres pays est toujours apparue peu probable (Eumilsatcom) en raison de l’insuffisance des études préparatoires et de la complexité d’un tel système (absence de maîtrise des coûts, instauration d’un “ juste retour ” industriel...).

L’annonce, le 12 août dernier, par la Grande Bretagne qu’elle ne prendrait pas part à la phase de définition de la coopération montre qu’elle a privilégié une solution nationale en raison de différences d’approche sur le recours aux techniques EHF et de considérations industrielles. Aucun pays européen ne maîtrise encore cette technique et on peut supposer qu’une entente a eu lieu avec les Etats-Unis. Même si officiellement une compétition a été lancée entre Matra Marconi Space (MMS) et Lockheed Martin pour la définition du futur système de télécommunications, la Grande Bretagne a fait le pari de l’échec de la coopération européenne et de l’achat “ sur étagère ” des techniques EHF. De plus la solution nationale permet de retrouver le groupe industriel britannique MMS-UK soit en maître d’oeuvre, s’il remporte le contrat, soit en maître d’ouvrage sous-traitant d’un consortium auquel participerait Lockheed Martin.

La France ne souhaite pas renoncer à la coopération mais il n’est pas impossible qu’il soit nécessaire d’envisager une solution intermédiaire pour attendre la réalisation d’un système commun. Un équipement dual Syracuse III se limiterait aux communications non protégées. Le recours à l’initiative privée dans un concept PFI (private financial initiative) comporte de nombreuses incertitudes opérationnelles et oblige à des transferts du Titre V (l’Etat n’assure plus les investissements) vers le Titre III (le ministère de la Défense paye des services).

Dans l’attente, 318 millions de francs de crédits de paiement ont été inscrits dans le projet de budget pour 1999 sur les articles 36 et 74 du chapitre 51-61, afin que se poursuivent les études de faisabilité.

C. —  LES APPROCHES COMPLÉMENTAIRES

1. — L’écoute électromagnétique

·  L’écoute électromagnétique par des moyens spatiaux correspond à un besoin opérationnel en complément de l’observation optique car elle est nécessaire à la connaissance des activités militaires et des caractéristiques des matériels mis en oeuvre chez l’adversaire. En effet, un système d’écoute permet de localiser les sources d’émission, de surveiller les déplacements et les variations significatives d’intensité.

A l’inverse des moyens aériens (DC 8 Sarigue) ou maritimes (composante MINREM embarquée sur un navire), un satellite d’écoute a l’avantage de n’être ni visible, ni intrusif, et de constituer de manière continue des bases de référence.

Des études préparatoires avaient débuté dès juillet 1992. Mais la loi de programmation militaire (1995-2000) n’avait pas retenu le projet Zénon, et seule une veille technologique a été financée.

Dans une première étape, deux micro-satellites scientifiques d’environ 50 kilogrammes ont été développés à titre exploratoire et financés au titre des études amont spatiales :

— l’un, Cerise, a été lancé en même temps qu’Hélios 1A le 7 juillet 1995. Il est chargé d’effectuer des mesures d’impulsion électromagnétique dans certaines gammes de fréquence. Il contribue ainsi à une meilleure connaissance de l’environnement radioélectrique et prépare l’insertion des futurs satellites d’observation dans un spectre de fréquences actuellement encombré. La collision dont il a été victime en juillet 1996 a endommagé le mât de stabilisation mais la charge utile fonctionne normalement. Il a été remis dans une attitude favorable pour poursuivre sa mission à l’été 1997 ;

— un projet analogue, Clémentine, portera sur des bandes de fréquence différentes et pourrait être lancé à partir de 1999.

La maîtrise d’oeuvre de ces deux programmes est assurée par Alcatel Espace (43 millions de francs), Thomson-CSF (24 millions de francs) et Surrey Satellite Technology Limited (14,5 millions de francs).

La réalisation d’un système complet ne semble pouvoir être envisagée que dans un cadre multinational. Les premières discussions avec l’Allemagne montrent à l’évidence que ses responsables privilégient le cadre de l’O.T.A.N. dans la mesure où des accords secrets de défense lient déjà la République fédérale aux Etats-Unis pour l’analyse des signaux électromagnétiques.

Mais l’arrêt du programme Horus dans la configuration prévue par la loi de programmation militaire redonne toutes ses chances au projet d’écoute satellitaire.

2. — Les programmes de cohérence

·  La météorologie est considérée comme un élément majeur de la planification des opérations militaires. Les besoins actuels s’appuient sur les données des satellites civils METEOSAT qui suffisent aux forces armées en terme d’infrastructures. Un meilleur accès aux informations est en cours d’étude afin de recevoir et de traiter les données sur site.

·  La mission de surveillance de l’espace constitue un facteur essentiel de sécurité car elle permet d’apprécier les menaces des systèmes adverses en service et de se prémunir contre elles.

A la suite de la revue de programmes, il a été décidé d’arrêter le programme de système de surveillance de l’espace (SSE) mais d’en conserver les acquis. C’est pourquoi le projet de démonstrateur radar Graves, proposé par l’ONERA mais financé sur crédits de la DGA, sera achevé. Les études, qui ont fait l’objet d’un moratoire d’un an, reprendront et permettront d’acquérir une capacité pré-opérationnelle à l’horizon 2002.

La revue de programmes a également mis fin au projet de télescope Solstice pour photographier les satellites et les identifier, et a conduit à dénoncer le contrat avec Spot-Images pour l’obtention d’images de satellites en orbite.

·  La navigation et le positionnement

Le système américain de navigation par satellite GPS (Global Positioning System) dont l’accès est gratuit est de plus en plus utilisé par les forces armées. Celles-ci ont parallèlement recours au système russe Glomass.

La réflexion porte sur l’utilisation des systèmes actuels et l’éventuelle constitution d’un autre réseau. En effet, la situation est ambiguë car un réel problème d’autonomie et de sécurité existe. Dans certains cas, les Etats-Unis peuvent refuser l’utilisation du service sans préavis et sans motivation. Le ministère de la Défense évalue actuellement le degré de dépendance à l’égard du système et sa fiabilité.

Mais il n’est pas envisagé de développer un système national équivalent ni de persuader les Etats européens d’élaborer un programme commun. A terme cependant, il serait souhaitable de mettre en oeuvre un système international de précision, à vocation civile ou militaire.

·  La surveillance et le contrôle

Un système de détection du départ des missiles balistiques paraît hors de portée d’un seul pays. Les études préalables ont montré que, pour détecter un signal infrarouge et déterminer (par calcul) la trajectoire et le point d’impact d’un missile, le système devrait s’appuyer sur deux à trois satellites en orbite basse, observant en permanence une région donnée.

Dans le cadre de l’OTAN a été élaboré le projet MEADS. Mais, dans le cadre de la programmation, la France a renoncé à poursuivre sa collaboration à ce programme en raison du coût prohibitif qui serait à sa charge, et la phase de définition ne réunira que les Etats-Unis, l’Allemagne et l’Italie.

II. —  LES POLITIQUES SPATIALES DANS LE MONDE

Si le niveau des dépenses budgétaires et la priorité accordée à certains programmes confirment la prépondérance de la politique spatiale américaine et témoignent du souhait de certains Etats asiatiques de devenir des acteurs majeurs, force est de constater que seule en Europe la France continue de consacrer un effort significatif et cohérent au regard de ses ambitions.

A. —  LA PUISSANCE SPATIALE INCONTESTÉE DES ÉTATS-UNIS

1. — La réorientation de la politique spatiale aux Etats-Unis

L’évolution de la politique spatiale américaine depuis le début des années 90 se traduit par une réallocation des dotations budgétaires et par une réorientation des programmes.

La stabilisation du budget de la NASA à 14 milliards de dollars pour l’exercice 1998 confirme les choix stratégiques qui ont été opérés entre les activités et les systèmes spatiaux : choix de moyens spatiaux “ plus légers et disponibles plus rapidement ”, part prépondérante de la station spatiale internationale et des vols habités qui absorbent 40 % du budget civil, intérêt des programmes d’exploration planétaire et de recherche sur les origines de la vie, comme Pathfinder ou Mars Global Surveyor, dont le succès profite à l’image de la NASA.

Le maintien du budget spatial militaire à un niveau équivalent de 14 milliards de dollars pour 1998 masque la priorité accordée aux investissements non classifiés (+20 %), à la recherche (+19 %) et aux programmes d’alerte avancée (Space Based Infra Red SBIR) tandis que les programmes de communication sont en forte diminution.

La politique en matière de lanceurs repose toujours sur un objectif de réduction du coût d’exploitation et sur la rationalisation des responsabilités. Le Département de la Défense reste chargé de l’amélioration des lanceurs lourds ou semi-lourds existants (Delta-4 de McDonnell Douglas, Atlas-2A et Titan de Lockheed Martin Marietta). La NASA est responsable de la recherche et de la préparation de lanceurs futurs, en particulier le lanceur monoétage réutilisable Delta Clipper. A l’initiative privée revient la charge du développement des lanceurs de moyenne puissance (Taurus, Pegasus ou LLV de Lockheed).

2. — Les systèmes spatiaux de défense

La réorientation de la défense antimissiles et anti-satellites est spectaculaire. Alors que près de 40 milliards de dollars ont déjà été dépensés depuis le lancement de l’IDS, les moyens financiers consacrés à la défense antimissiles ne cessent d’augmenter : 2,7 milliards de dollars en 1994, 2,9 milliards en 1996, environ 3,55 milliards en 1997.

Le système de défense du territoire (NMD National Missile Defense), réduit un moment à une veille technologique, a bénéficié d’un accord entre la majorité républicaine du Congrès et le Président des Etats-Unis. Il est prévu une étape de “ préparation au déploiement ” menant à un test en 1999 et à une décision opérationnelle en 2003. D’importants efforts ont été concentrés sur la défense du théâtre dans le cadre du programme TMD (Theater Missile Defense) mais les récents échecs des essais du programme essentiel THAAD ont amené à une révision des financements.

B. —  DES COMPÉTITEURS DE PLUS EN PLUS SÉRIEUX POUR L’EUROPE

1. — Le manque d’ambition de la politique spatiale européenne

L’espace ne bénéficie en Europe que d’un effort cinq fois inférieur à celui existant aux Etats-Unis pour les applications civiles et treize fois inférieur pour les programmes militaires (seulement 1,1 milliard de dollars pour cinq pays européens contre 14 milliards de dollars aux Etats-Unis).

·  La politique britannique est marquée par le souhait de limiter l’engagement financier public et de confier les initiatives en matière spatiale au secteur privé. Elle se traduit par une faible implication dans les grands programmes civils européens (le Royaume Uni a accepté de participer à hauteur de 1 % au programme d’infrastructure d’Ariane 5) et par une concentration des efforts sur le domaine scientifique d’observation de la Terre. Le budget spatial militaire est difficile à identifier mais semblerait stable si on en juge par le maintien du budget annuel du programme de télécommunications Skynet à 80 millions de livres.

·  La participation de l’Allemagne à l’ensemble des grands projets spatiaux européens depuis vingt ans s’appuie sur un engagement financier qui a connu une croissance régulière jusqu’en 1993 et a permis à ce pays d’être le premier contributeur à l’Agence spatiale européenne (engagement dans le programme Ariane 5 à hauteur de 22 %, maîtrise d’oeuvre de l’élément Columbus de la station internationale). Depuis 1994, le budget géré par la DARA, agence fédérale qui gère toutes les activités civiles, s’est stabilisé entre 1,35 et 1,4 milliard de deutschmarks dont une faible part est réservée aux programmes nationaux.

Le “ concept spatial ” élaboré au printemps 1997 donne la priorité aux initiatives industrielles et à la recherche scientifique. Mais il reconnaît que les télécommunications et l’observation de la terre prennent un rôle croissant dans la sécurité du pays. On ne peut que constater cependant la faible traduction de ce postulat dans le développement des filières spatiales en coopération.

2. — L’ambition des pays asiatiques

Trois pays d’Asie affichent depuis une dizaine d’années de sérieuses ambitions dans le domaine de l’espace.

a) Un programme japonais cohérent et substantiel

L’augmentation régulière du budget spatial (12,8 milliards de francs en 1996, 14,5 milliards de francs en 1997 comme en 1998) correspond au souhait de développer une base industrielle et technologique avancée grâce à un programme complet d’applications spatiales.

Trois programmes de lanceurs coexistent :

— alors que la NASDA (National Space Development Agency) avait réussi en février 1994 le premier tir du lanceur lourd H-2, l’échec du 21 février 1998, dû à un arrêt prématuré du moteur du deuxième étage, semble mettre en doute les chances de la société Rocket Corporation de commercialiser une version améliorée H2-A à un coût moindre dès 2000. Mais la politique de réduction des coûts et d’accroissement des performances permettra une offre à tarifs compétitifs dans un délai inférieur à dix ans ;

— le lancement avec succès en février 1996 d’un petit lanceur J-1 place davantage le Japon dans la compétition pour les satellites de taille moyenne (environ une tonne) à placer sur orbite basse ;

— depuis février 1997, le premier vol du M-5, fusée à trois étages à poudre qui peut lancer en orbite basse une charge utile de 2 tonnes ou envoyer 400 kg dans l’espace plus éloigné, alimente les soupçons d’une application militaire en raison d’un double emploi évident avec le J-1 et de sa possible transformation en un missile balistique de portée 8 000 km.

Avec un budget spatial inférieur à celui de la France, la NASDA développe des satellites scientifiques ou d’application (dans les domaines des télécommunications, de la météorologie ou de la télédétection) et reste présente sur les programmes liés aux vols habités, portant notamment sur le module JEM qui devrait se raccorder en 2000 à la station orbitale internationale.

b) Les perspectives favorables du programme chinois

La politique spatiale chinoise répond aux objectifs classiques du renforcement de l’indépendance nationale, de l’affirmation d’un rôle régional et de l’intégration des technologies spatiales dans le développement du pays.

Après plusieurs échecs, la Chine semble améliorer de façon significative la fiabilité de ses lanceurs. Les récents succès des fusées Longue Marche LM-3B qui ont placé sur orbite plusieurs satellites, dont certains de la constellation Iridium, ont renforcé la crédibilité du plus puissant des lanceurs chinois et ont relancé la crainte d’une offre à des prix de dumping. La société Hughes a d’ailleurs confirmé la commande de dix lancements par des lanceurs Longue Marche.

Pour résoudre les difficultés techniques rencontrées, par exemple dans le développement d’un réseau propre de satellites de météorologie, ou pour satisfaire des besoins spécifiques, notamment en télécommunications, la Chine est décidée à poursuivre un effort d’envergure et à recourir de manière plus importante à la coopération internationale.

L’Allemagne, le Brésil (avec laquelle la Chine a signé un programme de quatre satellites d’observation de la Terre) et la Russie constituent des partenaires privilégiés de la coopération chinoise. Les accords avec des sociétés américaines se heurtent à la question des transferts de technologies sensibles.

c) L’émergence d’une politique spatiale indienne

Afin de soutenir une ambitieuse politique de présence sur la scène mondiale, l’Inde a doublé son budget spatial de 1991 à 1998. Plus de la moitié de ce budget est destiné à renforcer l’indépendance de l’Inde en matière de lanceurs, les générations en service (PSLV) ou en développement (GSLV) s’appuyant sur des coopérations avec la France ou la Russie. Quatre familles de satellites ont été développées depuis vingt ans dans les domaines de la science, des télécommunications et de l’observation optique.

Les progrès opérés laissent à penser que l’Inde sera capable d’offrir des services commerciaux de lanceurs, même si cet objectif n’est pas affiché. Des discussions ont commencé entre l’agence indienne ISRO et Arianespace pour le lancement de petits satellites. La commercialisation d’images produites par le satellite indien IRS depuis 1995 concurrence directement Spot-Images.

Par ailleurs, bien que le programme spatial soit orienté vers les applications civiles, il n’y a pas de doute que les connexions avec les applications militaires sont nombreuses, notamment en ce qui concerne les missiles balistiques et les satellites d’observation.

C. —  LA POLITIQUE DE LANCEMENT ET LES ACCORDS DE COOPÉRATION

Les coopérations internationales constituent un vecteur privilégié de la politique spatiale américaine pour consolider ses propres programmes, notamment scientifiques, et assurer aux Etats-Unis un leadership mondial.

·  Alors que le marché du lancement des satellites américains gouvernementaux demeure fermé aux opérateurs étrangers à l’exception de certaines coopérations, les accords de coopération et de quotas signés dans le domaine commercial tirent les prix vers le bas et pénalisent Arianespace.

Ainsi le projet Sea Launch, conduit par Boeing au sein d’un consortium international (Boeing 40 %, Kvaerner, 25 %, Energuia 20 %, NPO Youjnoe 15 %) utilisant le lanceur ukrainien Zenith, est dénoncé par Arianespace qui réclame des droits analogues. Le premier lancement a été effectué en juin 1998 depuis une ancienne plate-forme pétrolière transformée et basée en plein océan Pacifique. La plate-forme Odyssey et son navire d’accompagnement sont en voie d’achèvement et devraient rejoindre leur port d’attache en Californie à la fin de l’année.

·  La Russie continue à entretenir une panoplie diversifiée de lanceurs lourds (Proton) et moyens (Soyouz ou Molnya). La réussite des lancements commerciaux Proton lui permet de se positionner sur le marché international au moment où la renégociation de l’accord qu’elle a passé avec les Etats-Unis supprime en fait la contrainte des quotas. Dans le cadre d’une société américano-russe ILS (International Launch Services), Lockheed Martin Marietta propose des fusées Proton et complète aussi sa gamme par une version simplifiée de l’Atlas-2 AR.

·  A terme, la concurrence sur les lanceurs pourrait être défavorable à Ariane et la suprématie qu’elle détient sur le marché commercial (environ 50 % du marché civil mondial de lancement de satellites soit 3,4 milliards de dollars, un plan de charge complet jusqu’en 2000) ne doit pas faire illusion. Tant l’évolution des conditions du marché que celle des technologies renforcent la concurrence.

Le tir réussi du 21 octobre dernier et la mise en orbite d’une maquette de satellite ainsi que d’une capsule d’essai montrent que la fusée Ariane 5 a réussi son pari technologique. Le premier tir commercial est prévu pour le premier semestre 1999. Les capacités des Ariane 5 devront s’accroître afin de leur permettre d’emporter simultanément plusieurs satellites pour une charge maximale de 7 tonnes dès 2000, de 8,5 tonnes en 2003 et de 5,5 tonnes vers 2005-2006. Mais le programme devra également réussir le défi commercial en restant compétitif c’est à dire en proposant des coûts réduits d’au moins 40 %. De plus, il est nécessaire de répondre à l’évolution du marché, qui privilégie les petits satellites lancés en grappes.

Or les gros lanceurs ne sont pas toujours adaptés au lancement de ces grappes. C’est pourquoi, les constellations Iridium (opérateur Motorola, constructeur Lockheed Martin Marietta), Globalstar de Loral et ICO (opérateur Innarsat, constructeur Hughes) font appel aux lanceurs Pégase-XL, Taurus, Delta-2 ou Proton.

DEUXIÈME PARTIE

LES MOYENS DE COMMUNICATION, DE RENSEIGNEMENT

ET DE CONDUITE DES OPÉRATIONS

La programmation militaire a été construite autour du concept de cohérence interarmées. En effet, l’analyse stratégique a montré que, dans les conflits auxquels la France devra participer ou auxquels elle sera associée, l’efficacité opérationnelle d’ensemble reposera sur la conjugaison des capacités propres à chaque armée et sur la maîtrise de toutes les fonctions interarmées. C’est pourquoi, une attention croissante a été portée aux moyens qui relèvent des fonctions de commandement, de communication, de conduite des opérations et de renseignement.

I. —  LES PRINCIPAUX SYSTÈMES DE TRANSMISSION, DE LIAISON ET DE COMMANDEMENT

Les systèmes de communication en service dans les armées sont marqués par la période de guerre froide pendant laquelle ils ont été conçus. L’obsolescence de certains systèmes a imposé leur refonte complète. Celle-ci prend en compte l’évolution du concept stratégique et intègre les contraintes liées à la projection des forces et au caractère interarmées des opérations.

La refonte des systèmes fait appel à la complémentarité des moyens civils et militaires, même si elle préserve toujours un noyau militaire ; elle privilégie les réseaux et les services interarmées ; elle confère aux autorités organiques la responsabilité de leurs moyens ; elle cherche à renforcer la confidentialité, la sécurité et la fiabilité des systèmes au sein des forces mais aussi entre les forces et les différents échelons de commandement.

La mise en oeuvre des nouveaux systèmes crée ainsi un noyau homogène et plus cohérent sur lequel se greffent les réseaux de desserte et les réseaux tactiques de chaque armée.

A. —  LES SYSTÈMES DU NIVEAU INTERARMÉES

Hormis le système de radiocommunications par satellite Syracuse, les moyens de communication de niveau interarmées et du haut commandement incluent trois systèmes :

— RIMBAUD (Réseau interministériel de base uniformément durci) est un système interministériel au service des plus hautes autorités civiles et militaires, impliquées dans la défense nationale. Bien qu’ils s’appuient sur des concessions civiles de France Télécom, les matériels utilisés sont durcis aux impulsions électromagnétiques. Le Secrétariat général pour la défense nationale SGDN qui gère le système a lancé fin 1997 un programme de valorisation afin de l’ouvrir à de nouveaux services sécurisés ;

— RETIAIRE (Réseau interarmées d’infrastructure) est principalement orienté vers les unités nucléaires spécialisées. Il supporte aussi certaines applications de l’Etat-major des Armées. Comme le réseau RIMBAUD, il est durci à l’impulsion électromagnétique et assure un niveau de confidentialité secret-défense. Mais ses fonctions seront progressivement transférées au système SOCRATE au fur et à mesure de sa montée en puissance ;

— compte tenu de l’obsolescence ou de l’insuffisance des réseaux de transit propres à chaque armée, essentiellement RITTER pour l’Armée de terre, RA 70 pour l’Armée de l’air et réseaux en concessions pour la Marine, un seul système interarmées SOCRATE devrait remplacer les services existants. Une partie est opérationnelle depuis le début de 1998 mais le déploiement complet ne sera achevé qu’après 2004, soit deux ans après le délai prévu par la programmation militaire. Le nouveau réseau fournira des services modernes de téléphonie, de télégraphie et de transmission de données.

Par ailleurs, SOCRATE offrira des possibilités de transit aux réseaux de desserte locale des armées et pourra s’interconnecter aux principaux systèmes, nationaux ou alliés, en offrant un niveau de protection suffisant.

Alors que plus de 4,1 milliards de francs ont déjà été consommés depuis l’origine, le projet de budget prévoit 283 millions de francs d’autorisations de programme et 347 millions de francs de crédits de paiement pour ce programme sur l’article spécifique 63 du chapitre 51-61.

B. —  LES PROGRAMMES D’INFORMATION ET DE COMMANDEMENT

La maîtrise des moyens de commandement, de contrôle de l’information et de gestion des données a révélé toute son importance au cours des crises récentes auxquelles la France a participé. Ces moyens connaissent donc un développement significatif.

Le système informatique de commandement des armées de première génération SICA dotera les forces d’un outil moderne d’informatique de commandement et de gestion des situations, dont la sécurité sera renforcée et la vulnérabilité réduite. Il regroupe des aides à l’exploitation des données et des outils de gestion des informations. Il sera prolongé par les systèmes compatibles de chacune des armées, SICF/SIR pour l’Armée de terre, SCCOA pour l’Armée de l’air et SYCOM pour la Marine. L’objectif est de disposer d’architectures flexibles, modulaires et interopérables.

·  Le programme SCCOA de l’Armée de l’Air

Le SCCOA est un système d’information et de commandement destiné au recueil, à la gestion, au traitement et à la diffusion de l’information pour l’ensemble des missions opérationnelles conventionnelles de l’Armée de l’air. Il regroupe des études et fabrications relatives à des capteurs (radars principalement), à des centres d’opérations associés aux différents échelons de commandement et à des moyens de transmission. Le financement de certains capteurs devrait être assuré par l’OTAN dans le cadre de son programme interopérable ACCS (Air Control and Command System) dont le SCCOA est la partie française.

Le programme a été scindé en trois phases dont la première a été lancée en février 1993 et sera opérationnelle en 2001. Le coût total du programme est aujourd’hui estimé à environ 15,5 milliards de francs, celui de la première phase à 5,18 milliards de francs. Les crédits inscrits pour la période 1997-2002 dans la loi de programmation militaire dépassent 5,8 milliards de francs. Le projet de budget pour 1999 prévoit 152 millions de francs de crédits de paiement pour l’étape 1 (dont 120 millions de francs pour la fabrication) et 618 millions de francs de crédits de paiement pour l’étape 2 (dont 500 millions de francs pour la fabrication).

·  Le programme SICF pour l’Armée de Terre

Le programme SICF a pour objectif de constituer le système global d’information et de commandement des PC de division et de fournir tous les éléments de stockage et de traitement de l’information. Il est destiné à améliorer la cohérence et le rendement de la chaîne de commandement par automatisation des manipulations, transferts et traitements réalisés avec les autres systèmes d’information de l’Armée de terre, des autres armées et des alliés.

L’Armée de Terre devrait être dotée au cours des prochaines années d’ensembles d’information et de commandement des forces (SICF) qui seront livrés à partir de 1999 :

— la première version comprenant deux PC de niveau brigade, deux plates-formes d’entraînement et une plate-forme de référence ;

— la seconde version devant équiper douze PC de différents niveaux.

Parallèlement, pour assurer le commandement des régiments et unités élémentaires lors de leur engagement, ont été commandés des systèmes modulaires d’information sur véhicules (programme SIR) dont la livraison pourrait intervenir à partir de 2000. Une cible de 441 véhicules de série a été retenue pour un coût total de 826 millions de francs (1998).

II. —  LES SYSTÈMES DE RECUEIL DU RENSEIGNEMENT

La loi de programmation militaire comme la revue de programmes ont confirmé l’intérêt porté au renseignement stratégique qui assiste les autorités politiques dans leurs prises de décision. En dehors des programmes spatiaux, d’autres moyens, aériens ou maritimes, s’inscrivent dans le cadre national de recueil de ce renseignement.

Les moyens tactiques en soutien des unités engagées sur le terrain se développent peu à peu.

A. —  LES PROGRAMMES STRATÉGIQUES

Le projet de satellite d’écoute ayant été abandonné par la précédente programmation militaire et seule une veille technologique ayant été organisée dans le cadre de programmes de micro-satellites expérimentaux (Cerise et Clémentine), les moyens d’écoute sont mis en oeuvre par les forces elles-mêmes.

·  La composante aéroportée : le Sarigue nouvelle génération

Le système aéroporté Sarigue a pour mission essentielle le recueil d’informations électromagnétiques à vocation opérationnelle. Décidé en 1993 pour remplacer le système actuel mis en service en 1977, le programme de nouvelle génération, qui comprend un segment aéroporté et une composante sol, devait être mis en service en 1999. Les difficultés liées à la définition du porteur DC 8 remotorisé ont conduit à un retard de près de neuf mois dans la mise au point du système qui terminera ses essais en mars prochain.

Sur un coût total estimé à 1,56 milliard de francs (valeur 1998), le projet de budget affecte à ce programme 66 millions de francs d’autorisations de programme et 170 millions de francs de crédits de paiement (dont 38 millions de francs pour l’Armée de l’Air).

·  La composante navale : le MINREM

Le MINREM constitue un ensemble d’équipements d’écoute pour l’interception et la goniométrie de signaux électromagnétiques. Ceux-ci sont financés au titre de l’Etat-major des Armées et embarqués sur un bâtiment de 3 000 tonnes environ qui assure la présence de longue durée à la mer.

La programmation, qui a inscrit près de 333 millions de francs (valeur 1997) en faveur de ce programme, prévoit la rénovation du système actuel embarqué sur le Berry et le transfert de la charge utile en mai 1999 sur le Bougainville afin d’assurer la continuité du service jusqu’à la livraison du nouveau système qui pourrait intervenir fin 2004.

B. —  LES MOYENS À VOCATION TACTIQUE

1. — L’aviation de patrouille maritime

Les avions de patrouille maritime Atlantique 2, qui ont remplacé les Atlantic 1, ont deux missions prioritaires : la sûreté des SNLE pour la mise en oeuvre de la FOST et le soutien des forces, notamment dans la lutte anti-sous-marine. La cible du programme, réduite par la loi de programmation militaire 1995-2000 de 42 à 28 appareils aujourd’hui commandés, a été maintenue. Les trois derniers appareils ont été livrés en 1998.

Cependant, le modèle comprenant seulement 22 appareils en parc, il a été prévu de maintenir “ sous cocon ” les 6  exemplaires excédentaires par rapport à la série de 28 afin de réduire les besoins d’entretien programmé.

2. — La surveillance du champ de bataille

Le programme héliporté Horizon de surveillance du champ de bataille est adapté aux besoins d’interarmisation dans le domaine du recueil et de la circulation du renseignement tactique. Chaque système comprend deux hélicoptères SUPER Puma équipés de radar Doppler (d’une portée de 150 km) et d’une station au sol. Le premier hélicoptère a été livré en juin 1996 et est opérationnel depuis un an. Les deux systèmes prévus ont été livrés, l’un en décembre 1996, l’autre en mars 1998. Près de 800 millions de francs ont déjà été dépensés depuis le début du programme.

Concourt également à l’acquisition du renseignement sur le champ de bataille, le radar de contre batterie COBRA, installé sur un véhicule de dix tonnes, qui permet de localiser les moyens de tir adverses avec une grande précision. La France prévoit d’acquérir 21 systèmes pour un montant total de 2,36 milliards de francs. Développé depuis 1988, ce programme est entré en phase de production et les dix premiers systèmes seront livrés de 2001 à 2004.

3. — La mise en service des drones

Les armées françaises témoignent d’un intérêt croissant pour les drones en raison des avantages qu’ils présentent dans le nouveau contexte d’intervention des forces. Le bilan des premiers systèmes en service incite à développer ce nouveau type de systèmes et à profiter des acquis du secteur industriel français.

a ) Un nouveau concept d’emploi

La politique à l’égard des drones a suivi l’évolution du contexte dans lequel les armées sont amenées à intervenir et qui privilégie les missions de projection et d’intervention dans un cadre international. Le renseignement et l’information deviennent ainsi des facteurs essentiels dans la gestion et la conduite des crises et incitent à développer une capacité d’observation permanente et continue au-dessus du champ de bataille ou de la zone d’intervention.

Les intérêts des drones sont nombreux. D’une part, ils répondent aux nouvelles exigences pour le recueil de l’information car ils offrent une capacité continue d’observation et d’investigation dans la profondeur du dispositif, devenant indispensables à la manoeuvre aéroterrestre. Par leur mobilité et leur faible coût unitaire, ils constituent un moyen complémentaire du renseignement tactique par voie aérienne ou spatiale. Leur emploi autorise un niveau de prise de risque plus élevé.

Mais les drones présentent également des inconvénients qui limitent leur utilisation. L’absence d’intelligence à bord réduit leur cadre d’emploi et leurs capacités d’adaptation. Leur utilisation reste peu compatible avec la réglementation internationale de la navigation aérienne. Enfin, leurs caractéristiques de vitesse et d’altitude rendent les appareils sensibles à une agression dans une zone adverse.

b ) Le bilan des drones en service

La place des drones est aujourd’hui limitée au niveau tactique, en soutien des unités sur le terrain. Plusieurs systèmes sont en service dans l’Armée de terre au 7ème régiment d’artillerie.

·  Destiné au renseignement dans la profondeur, le CL 289 est constitué :

— d’un missile préprogrammé, de portée moyenne (150 kilomètres) et évoluant à grande vitesse et à faible altitude. Il emporte un appareil photographique et une caméra thermique dont les informations peuvent être recueillies en temps réel par une station d’exploitation. Une version “ dégradée ” de la charge utile peut être transportée dans une nacelle par hélicoptère ;

— d’un système au sol qui assure le lancement par rampe, la récupération du missile par parachute, la réception des informations et la maintenance.

Le système a été développé dans le cadre d’une coopération tripartite (Canadair, Dornier et SAT) et Aérospatiale a réalisé les travaux d’adaptation aux besoins opérationnels français. L’Armée de terre est équipée de six stations de lancement dotés de 55 missiles.

Utilisé en Bosnie-Herzégovine par les forces allemandes dans le cadre de l’IFOR de janvier 1995 à mars 1997, le drone CL 289 a donné des résultats satisfaisants tant du point de vue de la qualité des informations reçues que des caractéristiques techniques. Il permet d’observer des objectifs ponctuels mais sa durée de vie est limitée.

·  Le Crécerelle s’apparente à un petit avion téléprogrammable qui évolue à faible vitesse et à moyenne altitude. Les informations saisies par la caméra à très haute définition et par la caméra thermique peuvent également être transmises en temps réel à une station. La maîtrise d’oeuvre est assurée par Sagem.

Deux systèmes à six drones ont été livrés en mai 1995 et en mai 1996. Ils n’ont pas été testés en Bosnie-Herzégovine mais les missions expérimentales accomplies jusqu’à présent doivent permettre d’en améliorer les performances.

·  Le drone Brevel a été défini comme un petit avion télépiloté, relativement lent (120 à 180 km/h), évoluant à moyenne altitude mais endurant. Il a été développé en coopération avec l’Allemagne dans le cadre du GIE franco-allemand Eurodrone (Matra Bae Dynamics France et STN Atlas Electronik). Mais le comité stratégique de 1996 a décidé d’interrompre le programme à la fin du développement. La loi de programmation militaire n’a pas prévu d’acquisition d’ici 2002.

·  La France a fait également l’acquisition, pour 200 millions de francs, d’une section de quatre drones israéliens Hunter dont l’évaluation opérationnelle sur la base de Mont-de-Marsan, commencée en janvier 1998, devrait s’achever mi-1999. L’objectif est de préciser les spécifications des futurs drones car le Hunter vole à plus haute altitude (jusqu’à 6000 mètres) et dispose d’une endurance plus longue (environ 10 heures).

Les crédits qui ont permis le développement des drones dans les dernières années sont en régression. La DGA ne participe plus au financement des recherches mais seulement aux études amont à caractère technico-opérationnelles. Les compétences existent chez les différents industriels (SAGEM, Matra, Aérospatiale, Dassault-Aviation et Thomson) mais elles sont dispersées. Il existe donc un risque de repli industriel préjudiciable à la préparation de l’avenir.

CONCLUSION

En conclusion, votre rapporteur aimerait souligner que les aléas de la coopération européenne expliquent de manière prépondérante le niveau des dotations prévues dans le projet de budget pour 1999 en faveur des programmes spatiaux. Le projet de loi de finances initiale apparaît ainsi raisonnable voire trop raisonnable.

Notre pays se voit contraint d’assurer presque seul la mise en oeuvre des systèmes de nouvelle génération afin de maintenir la continuité de service des équipements actuels. Cet état de fait pose deux questions sur la réalité de l’engagement européen dans le domaine de la prévention puis de la gestion des crises dont l’actualité montre la nécessité, et sur la capacité de la France à continuer l’effort qu’elle a mené jusqu’ici.

On ne comprendrait pas l’abandon de systèmes qui éclairent les décisions politiques, assurent l’indépendance d’appréciation et sont en cohérence avec les objectifs majeurs de la programmation militaire. Le bénéfice des efforts passés ne doit pas être perdu et seules les dotations des prochains budgets pourront éviter les remises en cause des acquis indispensables à l’indépendance de notre pays.

TRAVAUX EN COMMISSION

I. —  AUDITION DE M. ALAIN RICHARD, MINISTRE DE LA DÉFENSE

La Commission de la Défense a entendu, le 9 septembre 1998, M. Alain Richard, Ministre de la Défense, sur le projet de loi de finances pour 1999.

Accueillant le Ministre de la Défense, le Président Paul Quilès a rappelé que la Commission de la Défense était particulièrement attentive aux conditions de la professionnalisation, au retour des crédits d’équipement à un niveau permettant de mener à bien le programme de modernisation des forces ainsi qu’à l’amélioration de la transparence et de la lisibilité du budget de la Défense, en loi de finances initiale comme en exécution.

Le Ministre de la Défense a présenté les principales orientations du budget de la Défense contenues dans le projet de loi de finances pour 1999, adopté le 9 septembre 1998 par le Conseil des Ministres. Il a rappelé que le budget de l’exercice précédent avait fait de la poursuite de la réforme des armées et de la professionnalisation sa priorité et s’était traduit, d’une part, par une conformité du titre III aux objectifs fixés dans la loi de programmation et, d’autre part, par une réduction temporaire des crédits d’équipement par rapport à cette même loi, en raison des contraintes de l’assainissement des finances publiques.

Il a relevé que les difficultés entraînées par cette réduction des ressources disponibles pour l’équipement des armées ne pouvaient être surmontées qu’à la condition d’un réexamen d’ensemble de la cohérence des choix financiers de la loi de programmation militaire, constat qui avait présidé à la revue de programmes et donné lieu, en conséquence, à un ajustement des flux financiers prévus. Il a d’ailleurs souligné que le projet de loi de finances pour 1999 appliquait les conclusions de la revue de programmes concernant les crédits d’équipement, tout en répondant à une vision à long terme des besoins de la défense. Il s’est également félicité des conditions d’élaboration du budget de la Défense, qui n’avait pas nécessité le recours à l’arbitrage du Premier Ministre, en ajoutant que la nouvelle présentation des crédits portait la marque d’un effort de clarification comptable répondant notamment aux souhaits réitérés de la Commission de la Défense.

M. Alain Richard a ensuite présenté les principaux chiffres du projet de loi de finances pour 1999. Il a indiqué que le titre III, d’un montant de 104 milliards de francs, progressait de 240 millions de francs par rapport à la loi de finances initiale pour 1998, concédant que ce montant aurait été plus élevé si l’on avait appliqué les règles générales d’indexation mais soulignant qu’il restait conforme aux objectifs de la programmation. Quant aux crédits des titres V et VI, il a déclaré qu’ils s’établiraient à 86 milliards de francs, ce qui, par rapport aux 81 milliards de francs du budget voté de 1998, représentait une augmentation d’autant plus forte en termes réels que la valeur des achats d’équipements militaires avait tendance à suivre l’évolution de l’indice des prix industriels, nettement inférieure à celle de l’indice des prix. Il a indiqué qu’au total, les crédits militaires hors pensions progresseraient de 2,9 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1998.

Le Ministre de la Défense a souligné que le projet de budget permettait de poursuivre la professionnalisation des forces, qui perdraient en 1999 un peu plus de 30 000 appelés et 2 690 sous-officiers, le nombre d’officiers demeurant globalement stable, alors que seraient créés environ 16 000 emplois, soit, notamment, 8 400 militaires du rang, 4 750 volontaires, dont 3 000 dans la Gendarmerie, et 1 900 emplois civils. Il a fait observer que la baisse de 9 % des crédits de fonctionnement, corrélée à l’évolution des effectifs, n’amputait pas le pouvoir d’achat du titre III, des économies non pénalisantes ayant été rendues possibles en 1999, notamment par l’évolution du prix du pétrole ou par l’augmentation des ressources extrabudgétaires du Service de santé des armées.

S’agissant des crédits d’équipement du budget de la Défense, le Ministre de la Défense a souligné que leur évolution marquait un rattrapage par rapport à la précédente loi de finances et traduisait les conclusions tirées de la revue de programmes. Il a fait observer que les ressources affectées à la dissuasion se trouvaient confortées, le programme de SNLE de nouvelle génération se poursuivant normalement, avec l’admission au service actif du deuxième SNLE-Ng en juillet 1999 et un objectif de mise en service du dernier SNLE-Ng en 2008. Evoquant les crédits consacrés à l’espace, il a rappelé le caractère prioritaire du programme Hélios II et indiqué, s’agissant du programme Trimilsatcom, que la décision de retrait britannique du 12 août 1998 n’entravait pas la coopération entre la France et l’Allemagne dans ce domaine, les deux partenaires ayant décidé de modifier, en les simplifiant, certaines spécifications du programme.

En ce qui concerne les armements conventionnels, il a indiqué que l’année 1999 verrait la poursuite des livraisons de chars Leclerc, à raison de 33 exemplaires, le lancement du programme VBCI réalisé en collaboration avec la Grande-Bretagne et l’Allemagne, l’entrée dans la phase de fabrication du programme Tigre, la livraison du premier Rafale Marine, du deuxième Hawkeye, le lancement du programme de TCD de nouvelle génération et la poursuite du programme d’hélicoptère NH-90. Il a également fait valoir que, pour la Gendarmerie, les délais d’équipement du programme Rubis seraient respectés puisque, fin 1999, 85 départements seraient équipés, ce qui permettait d’être désormais sûr de l’achèvement du programme à la fin de l’année 2000.

M. Alain Richard a également fait remarquer que l’effort du ministère de la Défense en matière de recherche et développement dépasserait 21 milliards de francs en 1999 contre 19,6 dans la loi de finances initiale pour 1998.

Il a indiqué par ailleurs que près d’un milliard de francs seraient consacrés à l’accompagnement économique des restructurations sous la forme de dotations du Fonds pour les restructurations de la Défense (FRED) et du Fonds d’adaptation industrielle (FAI), destinées à financer l’accompagnement économique et social des restructurations, tandis que les aides au départ et à la mobilité, accordées dans le cadre de la professionnalisation, représenteraient plus de 1,8 milliard de francs. Sur ce dernier point, il a fait observer que, conformément à la loi de programmation, les crédits relatifs aux pécules connaîtraient leur première baisse puisqu’ils se monteraient à 810 millions de francs au lieu de 900 en 1998. Il a ajouté qu’après la réalisation complète des prévisions de départ pour 1998, ce montant devrait assurer le départ aidé de 900 officiers et 2 000 sous-officiers en 1999.

Evoquant les restructurations industrielles, le Ministre a indiqué que les efforts de la DGA produisaient désormais leurs fruits en matière de coûts et de délais et mis l’accent sur le dialogue mené avec les industriels de la défense. Sur le point plus précis des relations de la DGA avec les PME-PMI, il a fait observer que, désormais, de nouveaux moyens, notamment en personnel, seraient affectés spécifiquement à cette tâche.

Le Ministre de la Défense a alors analysé la participation du budget de son département à la politique générale du Gouvernement en faveur de l’emploi, de la sécurité intérieure et de la construction européenne.

S’agissant de la politique de l’emploi, il a souligné à nouveau que le ministère allait ouvrir en 1999 de l’ordre de 16 000 recrutements dont plus de 13 000 de militaires du rang et de volontaires, c’est-à-dire des emplois destinés à des jeunes de qualification moyenne et faible. Il a ajouté que 15 millions de francs seraient consacrés à l’accompagnement social des jeunes sans emploi en fin de contrat et rappelé que le ministère prenait sa part des efforts de relèvement des rémunérations les plus basses, qu’il s’agisse de celles des militaires ou de celles des personnels civils.

S’agissant de l’effort en matière de sécurité intérieure, il a précisé qu’en relève des appelés, 3 000 volontaires allaient être recrutés par la Gendarmerie en 1999 en complément des 800 recrutés par anticipation dans les prochaines semaines. Il a toutefois fait observer que l’effort en faveur des effectifs de la Gendarmerie engendrerait en contrepartie un alourdissement des charges de formation, consécutif, notamment, à l’accroissement du nombre de départs à la retraite dans les prochaines années, de 2 000 à 4 000 par an. Il a ajouté que le renforcement des effectifs de la Gendarmerie d’autoroute serait néanmoins poursuivi pour tenir compte de l’accroissement du kilométrage autoroutier et annoncé que, dans le cadre du programme de renouvellement des hélicoptères Alouette III, la première commande d’hélicoptères biturbines allait être passée.

M. Alain Richard a alors décrit la part prise par le ministère de la Défense à la politique européenne du Gouvernement. Il a fait ressortir la participation accrue de la France au développement d’une industrie de défense européenne compétitive et attiré l’attention sur la signature du traité instituant l’OCCAR. Sur ce point, il a fait remarquer la forte volonté des signataires de déléguer à l’OCCAR la gestion de nouveaux programmes, indiquant que les Britanniques avaient fait part de leur intention de porter à 40 % la part des programmes européens dans leurs acquisitions.

Il a également souligné que la France faisait pleinement appel aux crédits de reconversion de l’Union européenne (fonds KONVER et Objectif 2).

En conclusion, il a indiqué que le projet de budget pour 1999 marquait une nouvelle étape dans la modernisation et l’adaptation de nos capacités de défense tout en contribuant efficacement à la mise en oeuvre des grands objectifs du Gouvernement. Il a également mis l’accent sur l’efficacité des armées dans l’accomplissement de leurs missions extérieures, puisque l’année 1998 avait vu, outre la conduite d’opérations sur divers théâtres, la mise en oeuvre de plusieurs interventions d’évacuation de nos ressortissants, tout en rendant hommage aux qualités dont elles faisaient preuve dans l’exercice de leurs missions intérieures. Evoquant la participation du ministère de la Défense à la sécurité de la Coupe du Monde de football, il a à ce propos tenu à rendre hommage au gendarme Nivel, symbole du dévouement et de l’efficacité des armées dans l’ensemble de leurs missions.

Rappelant que l’arrêté d’annulation et le décret d’avance du 21 août 1998 avaient réduit de 3,8 milliards de francs les crédits d’équipement de l’exercice 1998 et ouvert sur le même exercice un crédit de 3,8 milliards de francs en vue de couvrir des charges de personnel, notamment au titre des opérations extérieures, le Président Paul Quilès s’est demandé si, dans la mesure où une bonne partie de ces opérations pouvait être prévue en début d’exercice, une provision ne pourrait pas être instituée en loi de finances initiale pour faire face aux charges qu’elles entraînent, ce qui permettrait ainsi un meilleur contrôle parlementaire.

Remarquant également qu’une partie des crédits ouverts par le décret d’avance semblait destinée à remédier à l’insuffisance des dotations initiales pour la rémunération des VSL (volontaires service long), il s’est demandé si cet ajustement ne traduisait pas certaines dérives en matière de rémunérations et s’est interrogé sur leur perpétuation en 1999.

Abordant alors la réforme destinée à rapprocher la comptabilité des investissements du ministère de la Défense de celle des ministères civils, il a souhaité savoir si l’on pouvait en attendre une plus grande conformité des autorisations de programme du budget de la Défense à la définition qui en est faite par l’ordonnance de 1959 relative aux lois de finances, soulignant qu’une telle amélioration faciliterait le contrôle parlementaire des dépenses en capital, grâce notamment à l’inscription dans le fascicule budgétaire de la Défense d’échéanciers véritablement significatifs des crédits de paiement. Il a également demandé dans quelles conditions le montant en autorisations de programme des nouvelles opérations budgétaires d’investissement ainsi que leur échéancier en crédits de paiement seraient portés à la connaissance des rapporteurs budgétaires.

Enfin, s’agissant des commandes groupées, il a souhaité savoir si leur montant en était connu et si elles feraient l’objet d’une individualisation au sein du fascicule budgétaire de la Défense.

M. Alain Richard a apporté les éléments d’information suivants :

— le décret d’avance qui porte sur 3,8 milliards de francs couvre en partie (1 milliard de francs) les surcoûts liés aux opérations extérieures. Il ouvre également des dotations supplémentaires pour assainir la situation des chapitres de rémunérations, afin d’éviter des tensions de trésorerie avant le collectif budgétaire prévu en novembre prochain ;

— environ 300 millions de francs de crédits provisionnels avaient été inscrits pour la première fois dans le projet de budget pour 1998 pour couvrir une part des surcoûts entraînés par les opérations extérieures. D’une part, il est difficile d’évaluer à l’avance l’ampleur de ces surcoûts. D’autre part, cette provision, souhaitée par le Ministre de la Défense, doit rester modérée et ne saurait dépasser à terme un milliard de francs ;

— le débat politique avec le Parlement sur les opérations extérieures se déroule habituellement au moment de l’examen de la loi de finances rectificative de fin d’année mais il serait souhaitable que le Ministre de la Défense vienne, dès le printemps, présenter les principales dépenses liées à ces opérations ;

— les VSL permettent d’accompagner la professionnalisation. Parce qu’il n’a pas été possible d’inscrire en 1998 des postes de volontaires pour pallier la disparition des appelés, les armées ont été autorisées à recourir à des VSL en anticipation de l’arrivée des volontaires ;

— la couverture du décret d’avance repose sur des annulations de crédits d’équipement. Mais ces annulations seront compensées par une autorisation de consommer un montant équivalent de crédits de report de l’exercice 1997 sur l’exercice 1998 afin de garantir la capacité de dépenses du ministère de la Défense pour l’exercice en cours ;

— la mise en oeuvre au sein du ministère de la Défense de la nouvelle comptabilité spéciale des investissements (CSI) s’est traduite par des retards de paiement au détriment des fournisseurs, en particulier des PME, et l’application de la réforme de la nomenclature budgétaire prévue par le projet de loi de finances pour 1999 risque d’entraîner des conséquences de même nature. Les retards provoqués par l’introduction de la CSI devraient toutefois être rattrapés d’ici quelques mois afin que la consommation des crédits approche, à la fin de l’exercice 1998, les montants inscrits en loi de finances initiale ;

— la présentation du budget pour 1999 se place dans la cohérence des demandes des commissions parlementaires. Elle fait passer de 7 à 8 le nombre de chapitres du ministère de la Défense et permet, notamment, de détailler, dans le chapitre des fabrications, 25 articles, correspondant chacun à un grand programme ;

— cinq commandes groupées de matériels pour un montant d’engagements d’environ 11 milliards de francs ont été lancées en 1997 et deux nouvelles commandes de ce type seront sans doute attribuées en 1999. Le Gouvernement ne pourra confirmer publiquement la commande groupée des 48 Rafale qu’en 1999 car, si l’essentiel de la négociation est effectué, il reste certaines questions à régler avant la signature définitive du contrat.

Après s’être félicité de l’augmentation des titres V et VI en loi de finances initiale et des efforts effectués dans certains domaines, en particulier dans l’adéquation des autorisations de programme et des crédits de paiement, M. Arthur Paecht a émis la crainte que la loi de finances rectificative pour 1998 ne vienne à nouveau amputer les crédits d’équipement pour abonder les dépenses liées aux opérations extérieures. Ayant estimé ambitieux l’objectif de fabriquer en coopération européenne près de 40 % des programmes en valeur, il s’est interrogé sur la nature de l’identité européenne de défense qui soutiendra le développement de l’OCCAR. Enfin, il a évoqué l’élaboration du nouveau concept stratégique de l’Alliance atlantique et a souhaité obtenir des informations complémentaires sur la participation de la France aux structures intégrées alliées.

M. Jean-Yves Le Drian s’est étonné que le projet de budget pour 1999 prévoie le lancement du développement de deux frégates Horizon dans la mesure où il n’avait pas eu connaissance que des progrès significatifs avaient été récemment accomplis dans la définition des spécifications de ce programme en coopération trilatérale. Evoquant la réforme de la DCN, il a souhaité avoir des précisions sur la méthode et le calendrier retenus par le ministère de la Défense.

Estimant qu’il ressortait des propos du Ministre de la Défense que l’augmentation du titre III ne correspondait pas à celle du coût de la vie, M. Michel Voisin a souhaité que l’effort entrepris en faveur de la professionnalisation ne soit pas terni par une altération de la qualité de vie des personnels militaires. Notant qu’une dotation supplémentaire de 40 millions de francs était affectée aux réserves, il a demandé quel était l’état d’avancement des travaux d’élaboration du projet de loi les concernant. S’agissant de la réorganisation des services de police et de Gendarmerie, il a indiqué que la réforme annoncée avait soulevé, notamment dans la zone périurbaine de Lyon, de vives protestations de la part des élus locaux et des populations qui craignent qu’il s’ensuive une altération des conditions de sécurité et a regretté qu’elle n’ait été précédée d’aucune véritable consultation préalable. Evoquant l’annonce de la double commande de 80 hélicoptères Tigre faite à la suite de la rencontre des Ministres de la Défense à Berlin, il a souhaité savoir si ces commandes avaient été notifiées à l’industriel. Enfin, il s’est inquiété du maintien des effectifs et des spécificités de la Légion étrangère ainsi que des troupes de marine.

M. René Galy-Dejean a fait part de sa satisfaction au regard d’un budget qu’il a considéré comme une assez bonne surprise, après les résultats de la revue de programmes, et indiqué qu’il portait des appréciations également positives sur la politique suivie en matière de restructuration industrielle. Il a toutefois regretté que les négociations avec le ministère du Budget n’aient pu permettre d’obtenir une augmentation du montant des crédits militaires et en particulier de ceux du titre III, en rapport avec l’amélioration sensible des recettes fiscales. Rappelant que le contexte international avait sensiblement évolué dans le domaine de la prolifération nucléaire et balistique depuis l’élaboration du précédent budget, il a souhaité savoir si cette situation avait été prise en compte dans la fixation des orientations budgétaires concernant la dissuasion et si le Ministre avait pu constater l’émergence d’une prise de conscience européenne en ce domaine.

Après avoir fait valoir que l’augmentation des crédits de la Défense pour 1999 était conforme aux engagements précédents du Gouvernement et que le projet de budget reflétait la priorité accordée à l’emploi, M. Yann Galut a fait part de ses préoccupations quant à l’avenir de GIAT-Industries, en ce qui concerne notamment le secteur armes et munitions, la nature de la participation française au VBCI, et plusieurs incertitudes relatives à la revalorisation des matériels d’artillerie de type 155 AUF 1 ou aux commandes portant sur le système Minotaur et les tourelles d’hélicoptères. Il a noté avec satisfaction l’accroissement des crédits de recherche-développement, qui lui a paru témoigner du souci de préserver l’avenir des industries françaises de défense et a souhaité savoir quels moyens pouvaient être accordés, dans le cadre de cet effort, à des programmes tels que le VEXTRA, l’artillerie future des chars de combat et les munitions intelligentes.

S’agissant des aides à la diversification des entreprises de défense, il a souhaité savoir quelle avait été l’affectation des crédits inscrits à ce titre dans le budget pour 1998. Il s’est enfin félicité de l’annonce de la prochaine commande pluriannuelle de 48 Rafale et des engagements pris en faveur du programme ATF, tout en indiquant que parmi les trois options évoquées par le Ministre, il souhaitait que celle proposée par Airbus Industrie soit privilégiée.

M. Georges Lemoine s’est félicité que le projet de budget de la Défense pour 1999 vienne atténuer certaines inquiétudes concernant les moyens alloués à la Gendarmerie, notamment en matière de volontariat. Se déclarant satisfait à cet égard de l’ouverture, par anticipation, de 800 postes de volontaires en 1998 et des objectifs de recrutement fixés pour 1999, il a toutefois fait état des difficultés que pourrait soulever, dans les brigades, la durée de formation de ces personnels, nettement supérieure à celle des actuels gendarmes auxiliaires. Il a ensuite évoqué les nombreuses inquiétudes suscitées, chez les élus, par le rapport de MM. Roland Carraz et Jean-Jacques Hyest. Il a plaidé en faveur d’une information accrue des élus locaux sur les propositions énoncées dans ce rapport, dont il a souligné qu’il avait été peu lu et estimé que l’intervention du Directeur général de la Gendarmerie nationale devant le congrès des maires de France, au mois de novembre, pourrait participer de cette meilleure information.

Après s’être félicité des perspectives d’achèvement du programme Rubis, il a soulevé la question des conditions de vie et des casernements, qui risquait d’être rendue plus difficile par l’arrivée des volontaires. Il a enfin interrogé le Ministre sur la contribution des sociétés autoroutières au financement des pelotons de gendarmerie d’autoroute.

M. Jean-Claude Sandrier s’est déclaré gêné pour approuver le projet de budget, de la même façon que les membres de l’opposition s’étaient trouvés gênés pour le critiquer. Il a précisé que son analyse concernant la loi de programmation militaire était inchangée et a exprimé son désaccord avec une politique de défense principalement fondée sur des objectifs de projection. Il a souligné en revanche que le concept de défense nationale gardait toute sa validité et que sa mise en oeuvre supposait de revaloriser les forces et équipements classiques. Il a estimé en outre que la journée d’appel de préparation à la défense ne suffirait pas à insuffler aux jeunes l’esprit de défense. Il a ensuite interrogé le Ministre sur les résultats de la campagne de recrutement de l’Armée de terre et, s’agissant des crédits d’équipement, sur leur taux de consommation en 1998.

Après avoir demandé au Ministre de faire le point sur les nouvelles infrastructures, il s’est interrogé sur l’état actuel de la coopération européenne pour la réalisation du programme Hélios II. Il s’est également déclaré inquiet de la politique industrielle suivie dans le secteur de la défense, relevant qu’elle était largement inspirée par le souci d’instaurer une défense européenne. Il s’est à ce propos interrogé sur l’évolution de la politique de coopération suivie par nos partenaires britanniques et allemands en matière de défense, notamment à l’égard des Etats-Unis. Il s’est enfin demandé s’il était prudent de programmer la fin du système armes et munitions de GIAT-Industries, avant de demander que le plan de restructuration de cette entreprise soit revu en fonction d’autres objectifs que ceux qui ont été retenus par le Gouvernement.

Remarquant que plusieurs des questions posées avaient trait aux orientations de la politique générale de défense de la France, M. Alain Richard a proposé que leur examen ait lieu en séance publique, à l’occasion du débat sur les crédits militaires, de sorte qu’ils puissent faire l’objet d’une discussion plus approfondie.

Il a également suggéré que la Commission de la Défense tienne un débat spécifique sur la politique industrielle dans le secteur de la défense et s’est déclaré disposé à y contribuer.

Il a en outre apporté les éléments de réponse suivants :

— les dépenses liées aux opérations extérieures sont, par nature, affectées d’un fort coefficient d’incertitude en début d’exercice ; en 1999, elles seront sans doute en réduction par rapport à 1998 du fait, notamment, de la fermeture des bases françaises en République Centrafricaine ;

— le programme Horizon sera bien lancé en 1999 ; en effet, la définition de ses besoins par la Grande-Bretagne, principal acheteur, a beaucoup évolué et s’est considérablement rapprochée de celle de la France ;

— la réforme de la DCN est une réforme en profondeur qui doit donc être conduite sur le long terme. La DCN doit conserver une place éminente au sein de l’industrie de défense européenne de demain. Pour cela, il a été demandé à sa direction de recueillir des avis diversifiés avant de formuler ses propositions en vue d’une réforme et d’un plan d’entreprise. Cette réflexion prend nécessairement du temps. Le plan d’entreprise qu’elle élaborera devra permettre à la DCN de répondre aux demandes de la Marine et de trouver des marchés, dans des conditions économiques saines ;

— la hausse des rémunérations et charges sociales, au sein du titre III, est de 2,9 %. Elle inclut donc des accroissements de pouvoir d’achat. Mais elle pèse indéniablement sur les moyens de fonctionnement. Les tensions sur les crédits de fonctionnement n’affecteraient la qualité de vie que des personnels logés. Or, sur ce point, sans doute du fait de l’ingéniosité des chefs de corps, il n’apparaît pas qu’on aille vers une situation réellement difficile. De plus, les jeunes engagés sont tous en début de contrat et il n’est pas certain qu’ils souhaiteront, à l’avenir, continuer à être logés à la caserne ; il convient donc d’être prudent dans la construction des casernements de manière à éviter les surcapacités ;

— le ministère de la Défense a bénéficié d’une amélioration spécifique de ses crédits de fonctionnement, due notamment à la réforme du financement du fonds de pension des ouvriers d’Etat. Celui-ci connaissait un déficit structurel apuré a posteriori par une subvention. A la suite d’une proposition du ministère des Finances, ce déficit sera désormais financé par les cotisations des employeurs. Cette réforme, appliquée de façon plafonnée, aboutit à transférer 300 millions de francs de cotisations du titre III vers les établissements employeurs des ouvriers d’Etat, notamment la DCN ;

— en ce qui concerne les modifications du partage de compétence territoriale entre la Police et la Gendarmerie, les propositions envoyées aux préfets feront l’objet de négociations et ne présagent pas des décisions finales ;

— les besoins, plus importants en zones urbaines périphériques, sont mieux satisfaits par un travail collectif des brigades ;

— le reversement des sociétés concessionnaires d’autoroutes à la Gendarmerie par la procédure du fonds de concours a été déclaré non conforme à l’ordonnance organique relative aux lois de finances. Pour compenser ce fonds de concours, un peu plus de 500 millions de francs ont été inscrits en crédits budgétaires dans la loi de finances initiale pour 1998. Le projet de budget pour 1999 fait l’objet d’une procédure analogue ;

— la consommation de l’ensemble des crédits d’équipement devrait dépasser 95 % des dotations initiales pour l’exercice en cours ;

— la commande des 80 hélicoptères Tigre sera notifiée à l’industriel avant la fin de l’année ;

— il est de l’intérêt de GIAT-Industries de participer au programme VBCI qui concerne près de 2 000 commandes à terme et dont la France pourrait recevoir près de 30 % de part industrielle, même si les négociations de prix ne sont pas terminées. Au contraire, pour l’instant aucun marché assuré n’existe à l’exportation pour le programme VEXTRA dans la situation économique très difficile que connaît l’armement terrestre. Quant à l’artillerie future des chars de combat, il s’agit d’un domaine auquel des crédits de recherche seront affectés ;

— les crédits du FRED et du FAI dont la consommation est satisfaisante permettent une bonne mise en place des programmes de diversification économique et d’accompagnement social ;

— les partenaires du consortium Airbus doivent faire une proposition crédible et compétitive en termes de prix pour remporter le marché de l’avion de transport militaire européen. S’il est nécessaire de tenir compte des intérêts économiques et industriels européens dans le choix des coopérations, il n’est pas non plus politiquement souhaitable de fermer a priori la porte à toute coopération avec Antonov ;

— la réponse favorable de l’Espagne au programme Hélios II, dont le calendrier de réalisation est maintenu, permet de le poursuivre dans un cadre de coopération européenne. L’Italie qui effectue d’importants efforts d’économie budgétaire n’a pas encore fourni de réponse. D’autres partenaires sont par ailleurs envisageables. Les pays intéressés pourront s’abonner au programme en cours de réalisation ;

— les recrutements d’engagés de l’Armée de terre se déroulent dans de bonnes conditions, grâce à l’amélioration des conditions de rémunération des personnels et à l’image positive que donne cette armée dans sa démarche de professionnalisation, notamment en matière de formation et d’intégration sociale ;

— la professionnalisation des armées suppose la remise en cause des spécificités de certaines armes de l’Armée de terre et il apparaît nécessaire de faire comprendre tant à la Légion étrangère qu’aux Troupes de Marine que l’accroissement global des capacités opérationnelles des forces constitue une garantie importante pour la Nation.

M. Bernard Grasset a souligné le courage dont avait fait preuve le Gouvernement en modifiant la carte de répartition des zones de Police et de Gendarmerie, apportant ainsi une réponse à une question très ancienne que les gouvernements précédents avaient toujours hésité à aborder. Il a fait part du trouble suscité chez un certain nombre de maires de sa circonscription par les confidences du Directeur général de la Gendarmerie, concernant l’emploi de ses personnels, parues dans un supplément d’un grand journal parisien. Il s’est félicité du dépôt prochain d’un projet de loi sur les réserves, qui constituent un élément essentiel du lien entre la Nation et ses Armées et a souhaité qu’à l’avenir le recrutement dans les sessions régionales de l’IHEDN soit moins élitiste. Après avoir estimé que les spécificités de certaines armes telles que les troupes de Marine devaient être préservées, il s’est prononcé en faveur du maintien du Service militaire adapté, dont il a souligné qu’il apportait, dans les DOM-TOM, une contribution essentielle au resserrement des liens entre les Armées et la population. Relevant la diminution de 16 % des crédits de paiement consacrés à l’Espace, dont il a déclaré comprendre les raisons, il a insisté sur la nécessité de préserver l’avenir en accordant une priorité au programme de satellite radar Horus.

M. Pierre Lellouche a tout d’abord convenu que le projet de budget apparaissait optiquement meilleur que celui de l’année en cours, estimé que les restructurations industrielles engagées pouvaient être considérées comme satisfaisantes et jugé courageuse la politique menée par le Ministre de la Défense pour restructurer les arsenaux. Il a résumé son appréciation en déclarant que le libéral qu’il était se réjouissait de ces orientations. Il a également insisté sur la nécessité d’instituer un mode approprié de financement des opérations extérieures, excluant toute ponction sur les crédits d’équipement pénalisant, en cours d’exercice, la politique d’équipement des forces armées. Soulignant l’intérêt du volontariat du service national en entreprise, il a souhaité savoir si le Gouvernement entendait proposer au Parlement son maintien.

Il s’est par ailleurs inquiété de la répartition des officiers, sous-officiers et militaires du rang au sein des armées, notant que la professionnalisation avait pour effet de créer un déséquilibre important en faveur des gradés par rapport aux hommes du rang. Enfin, rappelant qu’il avait saisi la présidence de l’Assemblée nationale de la nécessité d’une réflexion parlementaire sur la pertinence du concept de dissuasion au regard de l’évolution géostratégique liée aux essais nucléaires indiens et pakistanais, il a fait part de sa stupéfaction quant au manque d’intérêt suscité par sa demande. Il s’est enfin interrogé sur la cohérence des choix financiers effectués, dans le projet de budget pour 1999, en faveur des différents systèmes de forces face à une menace aujourd’hui très évolutive et s’est demandé si une réflexion suffisante avait été conduite sur le modèle d’armée dont la France avait à présent besoin.

Le Président Paul Quilès a indiqué que le bureau de la Commission, dont M. Pierre Lellouche est membre, devait se réunir la semaine prochaine pour examiner notamment sa proposition. Il a par ailleurs rappelé les propos de M. Arthur Paecht et ceux du Ministre, évoquant les travaux de l’OTAN relatifs au nouveau concept stratégique de cette organisation, et souligné que les conclusions de ces travaux ne seront pas sans incidences sur nos propres réflexions nationales en matière de politique de défense. Enfin, il a observé que l’analyse des menaces et des besoins militaires de la France était déjà contenue dans le Livre Blanc et la loi de programmation militaire, qu’une majorité de membres de la Commission, dont certains appartenaient à l’opposition, n’avaient pas souhaité remettre en cause.

M. Guy-Michel Chauveau s’est félicité du projet de budget, qu’il a considéré comme le meilleur depuis plusieurs années. Il a plaidé en faveur d’une maîtrise des dépenses du titre III, condition nécessaire à la préservation des crédits de recherche et développement. Il a également souhaité savoir s’il avait été procédé à une réorganisation des dispositifs de formation, pour mieux les adapter aux spécificités des personnels engagés. Il a également demandé quelles étaient les mesures de reconversion des engagés prévues. S’agissant de la politique industrielle menée par le Gouvernement, il s’est déclaré pleinement satisfait des décisions prises depuis quinze mois, souhaitant que toutes les grandes entreprises du secteur y participent. Se félicitant de la nomination d’un coordinateur des restructurations au niveau national, il a souligné la nécessité d’une évaluation de leur impact, site par site.

M. Jean-Noël Kerdraon, rappelant que la revue des programmes avait fixé à l’an 2000 le lancement du programme de nouveau transport de chaland de débarquement (TCD), a demandé au Ministre de la Défense de confirmer qu’il était avancé d’un an. S’agissant des programmes en coopération, il a évoqué les divergences entre la France et l’Italie dans le choix du sonar destiné à équiper le NH 90, non sans estimer que celui proposé par Thomson-Marconi semblait de meilleure qualité. De même, il a souhaité que le choix du sonar du chasseur de mines tripartite s’oriente vers le produit proposé par cette même société, dont 300 emplois étaient en jeu sur un effectif de 400.

Félicitant le Ministre, non pour son budget, qu’il a estimé critiquable mais pour l’habileté avec laquelle il l’avait présenté, M. Yves Fromion, usant de la faculté que l’article 38 du Règlement confère aux députés d’assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, a indiqué que, pour sa part, il avait toujours estimé qu’il fallait maintenir l’actuelle loi de programmation militaire, fruit d’un débat approfondi. Il a même regretté que la loi de programmation militaire initiale n’ait pas été appliquée plus fidèlement encore, évoquant notamment le retard que la France risquait de prendre dans le domaine de l’aéromobilité avec un parc d’hélicoptères qui allait passer de 600 environ à 350 ou 370 en 2010. Il a également demandé au Ministre des informations sur l’abandon du département munitions de GIAT-Industries et sur les perspectives d’exportation du char Leclerc. Il l’a enfin interrogé sur l’appel de préparation à la défense.

Le Ministre de la Défense a apporté les éléments de réponse suivants :

— il a convenu que l’accès à l’IHEDN, notamment à ses sessions régionales, devait être élargi ;

— le SMA (service militaire adapté) fonctionne de manière satisfaisante. Le souhait de la Polynésie française de se voir attribuer directement les crédits correspondants pour organiser elle-même la formation des jeunes pourrait cependant créer une disparité de situation entre les différents départements et territoires, qui rendrait le dispositif plus difficile à maintenir ;

— l’objectif de construction d’un satellite d’observation radar n’est pas abandonné mais il est sans doute opportun d’attendre que les évolutions technologiques en cours permettent de l’atteindre à moindre coût ;

— la dissuasion a, jusqu’ici, été surtout l’affaire du Chef de l’Etat ; c’est sans doute la raison pour laquelle la nécessité d’un débat parlementaire n’est pas apparue pressante ;

— le taux d’encadrement d’une armée professionnelle est toujours supérieur à celui d’une armée de conscription. Par ailleurs, l’analyse des taux d’encadrement doit tenir compte de la structure des grades de la Gendarmerie, puisque les gendarmes sont tous sous-officiers ;

— la professionnalisation va indiscutablement engendrer des tensions sur la part relative des crédits du titre III et du titre V, d’ici à la fin de la programmation ; un risque de glissement existe. Ce sera l’un des points à évoquer lors de la préparation de la prochaine loi de programmation;

— il y a des gains d’efficacité à faire en matière de formation. Ils passent notamment par des regroupements d’écoles. S’agissant du recrutement, l’une des clefs du succès sera effectivement la réussite de la reconversion des engagés et sa perception correcte par le public ;

— en matière d’industrie aéronautique, le pas essentiel est la fusion entre les sociétés Aérospatiale et Matra : en revanche, s’agissant de la position de la société Dassault au sein de l’industrie européenne, il est encore possible de se laisser un temps de réflexion ;

— le souci de préserver le plus grand nombre de sites et de maintenir une activité industrielle dans les bassins d’emploi a joué un rôle essentiel dans l’élaboration du plan de restructuration de GIAT-Industries ;

— en ce qui concerne le TCD, le besoin est avéré : il s’agit d’un outil de projection précieux qu’il ne faut pas trop tarder à réaliser. Des négociations devront toutefois s’engager avec la DCN en vue de sa construction, notamment sur la question des prix ;

— dans les mois qui viennent, il faudra résoudre les divergences entre l’Italie et la France à propos du sonar Thomson-Marconi ;

— dès lors qu’on est en accord avec les objectifs fixés par la loi de programmation militaire, il convient de se tenir à celle-ci ;

— la réduction en cours du nombre d’hélicoptères laissera à la France un nombre d’appareils dont les capacités seront toutefois hors de comparaison avec celles des matériels qu’ils remplaceront ; l’aéromobilité reste un concept essentiel dans la doctrine d’emploi de l’Armée de terre ;

— le plan de réduction des capacités du secteur des munitions de GIAT-Industries répond aux besoins d’adaptation de l’entreprise qui ne peut produire que ce qu’elle est en mesure de vendre dans des conditions économiques normales. S’agissant de l’achat de chars Leclerc par l’Arabie Saoudite, le Gouvernement ne s’en désintéresse pas ; il est cependant trop tôt pour formuler des commentaires à ce sujet ;

— s’agissant de l’appel de préparation à la défense, il est organisé avec rigueur. De plus, aujourd’hui, la vision qu’ont les jeunes de la Défense est positive. Ces éléments permettent de penser que la nouvelle formule sera un succès ;

— en ce qui concerne les réserves, la concertation est en bonne voie et le Premier Ministre a annoncé devant l’IHEDN que le projet de loi les concernant serait déposé sur le bureau d’une des Assemblées avant la fin de l’année ;

— pour réformer le partage de compétence entre Police et Gendarmerie, il fallait bien partir d’un point de départ, susceptible de constituer une base de discussion. Des instructions ont été envoyées aux préfets pour rappeler que c’est là précisément la fonction du rapport Carraz-Hyest qui n’a donc pas vocation à être transposé sur le terrain dans son intégralité.

II. —  EXAMEN DE L’AVIS

La Commission de la Défense s’est réunie le 28 octobre 1998, sous la présidence de M. Paul Quilès, Président, pour examiner les crédits du ministère de la Défense pour 1999 consacrés à l’Espace, à la communication et au renseignement, sur le rapport de M. Bernard Grasset, rapporteur pour avis.

M. Bernard Grasset a rappelé que, depuis la mise en oeuvre du satellite d’observation optique Hélios, la France s’était dotée d’une capacité autonome d’appréciation dans la prévention et l’analyse des crises qui confortait son indépendance de décision et d’action. Il a estimé qu’il était nécessaire de poursuivre les efforts qui ont permis d’accéder à ces techniques et ne pas quitter le “ cercle vertueux ” de la décision politique, du progrès scientifique et du savoir-faire industriel.

Le rapporteur pour avis a émis la crainte que le projet de budget pour 1999 comporte un risque de rupture avec les tendances précédentes, même s’il est nécessaire de prendre en compte les aléas et les perspectives de la coopération européenne dans le domaine des communications ou des programmes spatiaux. Il a estimé que, si les programmes destinés à la prévention des crises continuaient globalement d’être privilégiés, un certain ralentissement affectait le domaine spatial.

Présentant le projet de budget, il a rappelé que l’effort de notre pays dans le domaine spatial avait été sans comparaison en Europe et que les dotations budgétaires avaient progressé rapidement depuis dix ans jusqu’à dépasser 4 milliards de francs en francs courants dans les lois de finances initiales pour 1993, 1995 et 1996. Il a constaté que le niveau réel des dépenses, compte tenu des annulations et des transferts de crédits, n’avait toutefois pas excédé 2,5 milliards de francs au cours des trois derniers exercices. Alors qu’il était prévu de consacrer près de 4 % des crédits d’équipement à l’espace, la revue de programmes a autorisé un recalage des ressources par rapport aux possibilités financières et au déroulement réel des programmes.

M. Bernard Grasset a ensuite qualifié les dotations prévues pour l’espace de globalement raisonnables, compte tenu du niveau des dépenses réelles des précédents exercices. Il a estimé que la diminution des autorisations de programme de 10,66 % confirmait un ralentissement des programmes spatiaux et a fait observer que la réduction de 15,9 % des crédits de paiement qui passeront à 2 618 millions de francs contrastait avec l’augmentation globale des dotations en capital de la défense (+ 6,17 %).

Il a regretté le retour de l’imputation de dotations duales dans les crédits spatiaux en contradiction avec les engagements de la loi de programmation militaire qui avait exclu toute contribution du ministère de la défense au BCRD. Il a rappelé que le niveau des transferts au BCRD devait graduellement baisser, en crédits de paiement, d’environ 1 milliard de francs en 1996 et 1997 (au titre des reports) à 500 millions de francs en 1998 pour disparaître par la suite. Si l’exercice 1998 correspond bien à ce schéma, le projet de budget pour 1999 prévoit un nouveau transfert de 900 millions de francs, destiné essentiellement aux recherches dans le domaine spatial et affecté au budget du CNES.

Le rapporteur pour avis a considéré que les transferts de crédits militaires vers les programmes civils pouvaient être acceptés si ceux-ci étaient effectivement affectés à des études amont qui présentaient un intérêt direct pour la Défense.

Mais la participation des crédits militaires aux dépenses spatiales civiles représente un simple abondement du budget du CNES. Les conséquences de la réaffectation de crédits duaux sur le budget spatial militaire sont d’autant plus importantes que le montant des crédits d’études relatives à l’espace gérées par la DGA ne dépasse pas 265 millions de francs de crédits de paiement dans le projet de budget pour 1999.

M. Bernard Grasset a ensuite souligné qu’en attendant que ses partenaires européens s’engagent sur des projets en coopération, la France garantit le bon déroulement des programmes majeurs qu’elle conduit dans le cadre du plan pluriannuel spatial militaire et prépare leur renouvellement afin d’assurer la nécessaire continuité de service. Il a ainsi indiqué que notre pays proposait à ses partenaires espagnol et italien de participer au lancement du satellite Hélios 1B en décembre 1999 pour assurer la continuité du premier satellite de ce type. Il a également précisé que, devant les incertitudes italienne, espagnole et belge concernant leur association au programme de seconde génération Hélios 2, et suite à l’abandon, que l’on espère provisoire, des projets allemands de coopération dans le domaine spatial, le projet de budget prévoyait un financement de 1,254 milliard de francs de crédits de paiement pour le développement du système Hélios 2.

Il a rappelé qu’en raison du coût élevé d’un système d’observation radar et de l’impossibilité pour un seul pays d’en assurer le financement, l’accès à la filière du renseignement “ tout temps ” avait été envisagé dans un cadre multinational avec l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie. Il a également indiqué que la préférence allemande pour un système d’observation radar avait alors lié les négociations sur les deux catégories de satellites d’observation, optique et radar. Par la suite, la persistance des incertitudes allemandes avait conduit le Gouvernement, dans le cadre de la revue de programmes, à arrêter le projet Horus, sans pour autant renoncer à l’acquisition d’une capacité d’observation radar sur la période du plan pluriannuel spatial militaire. Il a observé à ce propos que la maturité croissante du concept de petits satellites radar entraînait le réexamen des projets de recherche et des capacités d’observation des systèmes.

Le rapporteur pour avis a par ailleurs indiqué que le système de communications militaires spatiales Syracuse II reposait sur des charges utiles intégrées aux satellites civils Télécom et dédiées aux usages militaires. Des compléments au programme initial et des améliorations visent à prolonger la durée de vie de la composante spatiale de ce système jusqu’en 2005 en améliorant son interopérabilité avec les autres systèmes de télécommunications.

Il a justifié la recherche d’une coopération européenne pour le développement du successeur de Syracuse II par la concordance des dates de remplacement des systèmes nationaux britannique et français et par la convergence des besoins opérationnels avec l’Allemagne. Il a considéré qu’en annonçant, le 12 août dernier, qu’elle ne prendrait pas part à la phase de définition de cette coopération, la Grande-Bretagne montrait qu’elle privilégiait une solution nationale en raison de différences d’approche sur le recours aux techniques EHF et de considérations industrielles.

Se félicitant que la France ne souhaite pas renoncer à la coopération, il a considéré qu’il serait peut-être nécessaire d’envisager une solution intermédiaire permettant de prolonger Syracuse II dans l’attente de la réalisation d’un système commun, même si cette solution ne permettait que des communications non protégées. Dans l’attente d’une décision, 318 millions de francs de crédits de paiement ont été inscrits dans le projet de budget pour 1999 afin que se poursuivent les études de faisabilité.

En résumé, le rapporteur pour avis a qualifié le budget de raisonnable tout en s’interrogeant sur la volonté réelle de coopération de nos partenaires européens dans le domaine spatial.

Mme Martine Lignières-Cassou s’est étonnée que le rapporteur pour avis déplore l’imputation au budget de la Défense du financement de la recherche duale.

M. Bernard Grasset a indiqué que le problème tenait, non au transfert de crédits militaires vers les budgets de recherche civile, mais à l’absence d’intérêt pour la défense des travaux ainsi financés, qui n’avaient pas véritablement de caractère dual. Il a estimé en conséquence que, dans la mesure où la recherche militaire ne bénéficiait pas des retombées des recherches civiles menées avec des crédits militaires, le budget de la Défense n’avait pas à assumer cette charge financière.

*

* *

La Commission de la Défense a ensuite procédé au vote sur l’ensemble des crédits de la Défense pour 1999.

Elle a tout d’abord adopté à l’unanimité deux observations, l’une présentée par M. Jean-Yves Le Drian, rapporteur pour avis des crédits de la Marine, relative à la gestion et à la politique d’embauche de la DCN, l’autre, par M. Charles Cova relative à la situation des sous-lieutenants retraités et des veuves allocataires.

M. Michel Voisin a souligné que, si le projet de budget de la Défense pour 1999 avait d’abord paru favorable, une analyse approfondie des dotations montrait qu’il était présenté en trompe l’oeil. Il a alors indiqué que le groupe UDF réservait son vote sur ces crédits.

M. Guy-Michel Chauveau a estimé qu’il convenait de se féliciter du niveau des dotations budgétaires compte tenu de la situation de l’exercice 1998 et des circonstances économiques et financières. Il a indiqué que le groupe socialiste voterait les crédits de la Défense.

Après avoir considéré que le projet de budget pour 1999 se caractérisait par de fortes contraintes soulignées par la plupart des Chefs d’état-major, M. Charles Cova a fait observer que la hausse de 6,2 % des crédits d’équipement n’était pas à la hauteur des ambitions de la loi de programmation militaire. Il a émis le voeu que l’exécution budgétaire soit conforme aux dotations initiales, notamment pour les 25 programmes d’armement dont les dotations sont individualisées. Il a rappelé que le Général Philippe Mercier, Chef d’état-major de l’Armée de terre, avait estimé que les crédits d’équipement ne pouvaient plus être entamés qu’à la marge sauf à créer de véritables ruptures capacitaires, et que, si le Chef d’état-major de l’Armée de l’air avait fait preuve d’un optimisme réconfortant sur le niveau des crédits de fonctionnement, les Chefs d’état-major des deux autres armées avaient “ tiré le signal d’alarme ”. Le Chef d’état-major de la Marine avait évoqué avec inquiétude la réduction d’activité générale, fait état d’un risque de “ casser l’outil ” et souligné que la Marine était à la limite de la rupture de capacité alors que ses missions ne sont pas diminuées, et qu’il est impossible de prévoir les nécessités opérationnelles qui pourraient surgir.

M. Charles Cova a également rappelé que le Chef d’état-major de l’Armée de terre avait mis l’accent sur la réduction sévère des crédits de fonctionnement dont il a souligné qu’elle entraînerait une baisse draconienne des objectifs de soutien et d’activité, même s’il a jugé par ailleurs que le projet de budget lui permettait de poursuivre la refondation de son armée. Enfin, il a rappelé l’inquiétude exprimée par le rapporteur pour avis des crédits de la Gendarmerie nationale, M. Georges Lemoine, à l’égard de la faiblesse du titre III.

M. Charles Cova a alors estimé que, si le projet de budget pour 1999 témoignait d’un léger redressement par rapport à 1998, l’extrême contrainte financière qu’il établissait entraînerait une réduction des objectifs de soutien et d’activité et ramènerait au concept de disponibilité différée pour certaines unités. Il a indiqué que le groupe RPR s’abstiendrait sur les crédits de la Défense.

Se déclarant en accord avec les propos tenus par M. Charles Cova, M. Guy Teissier a souligné les difficultés que soulevaient certaines réductions de dotations, notamment liées au fonctionnement courant, et a estimé que le budget de la Défense, outil opérationnel, risquait de devenir un outil opératoire. Il a indiqué que le groupe DL voterait contre les crédits de la Défense.

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La Commission de la Défense a alors donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la Défense pour 1999, les commissaires appartenant au groupe DL votant contre, ceux du groupe RPR s’abstenant et ceux du groupe UDF ne prenant pas part au vote.

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