N° 1116

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 octobre 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES (1) SUR LE PROJET DE loi de finances pour 1999 (n° 1078),

TOME II

AGRICULTURE ET PÊCHE

PÊCHE

PAR M. DOMINIQUE DUPILET,

Député.

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir le numéro : 1111 (annexe 5)

Lois de finances.

La commission de la production et des échanges est composée de : M. André Lajoinie, président ; MM. Jean-Paul Charié, Jean-Pierre Defontaine, Pierre Ducout, Jean Proriol, vice-présidents ; MM. Léonce Deprez, Christian Jacob, Daniel Paul, Patrick Rimbert, secrétaires ; MM. Jean-Pierre Abelin, Jean-Claude Abrioux, Stéphane Alaize, Damien Alary, André Angot, François Asensi, Jean-Marie Aubron, Pierre Aubry, Jean Auclair, Jean-Pierre Balduyck, Jacques Bascou, Mme Sylvia Bassot, MM. Christian Bataille, Jean Besson, Gilbert Biessy, Claude Billard, Claude Birraux, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Franck Borotra, Christian Bourquin, Mme Danièle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Alain Cacheux, Dominique Caillaud, André Capet, Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Jean Charroppin, Philippe Chaulet, Jean-Claude Chazal, Daniel Chevallier, Pierre Cohen, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Jean-Claude Daniel, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Decaudin, Jacques Desallangre, Eric Doligé, François Dosé, Jean-Pierre Dufau, Marc Dumoulin, Dominique Dupilet, Philippe Duron, Jean-Claude Etienne, Laurent Fabius, Alain Fabre-Pujol, Albert Facon, Alain Ferry, Jean-Jacques Filleul, Jacques Fleury, Nicolas Forissier, Roland Francisci, Claude Gaillard, Robert Galley, Claude Gatignol, André Godin, Alain Gouriou, Joël Goyheneix, Michel Grégoire, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Lucien Guichon, Gérard Hamel, Patrick Herr, Claude Hoarau, Robert Honde, Claude Jacquot, Mme Janine Jambu, MM. Aimé Kergueris, Jean Launay, Thierry Lazaro, Patrick Lemasle, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Arnaud Lepercq, René Leroux, Roger Lestas, Alain Le Vern, Félix Leyzour, Michel Liebgott, Lionnel Luca, Jean-Michel Marchand, Daniel Marcovitch, Alfred Marie-Jeanne, Alain Marleix, Daniel Marsin, Philippe Martin, Jacques Masdeu-Arus, Roger Meï, Roland Metzinger, Pierre Micaux, Yvon Montané, Gabriel Montcharmont, Jean-Marie Morisset, Bernard Nayral, Jean-Paul Nunzi, Patrick Ollier, Joseph Parrenin, Paul Patriarche, François Patriat, Germinal Peiro, Jacques Pélissard, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Annette Peulvast-Bergeal, MM. Serge Poignant, Bernard Pons, Jacques Rebillard, Jean-Luc Reitzer, Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean Rigaud, Mme Michèle Rivasi, MM. Jean Roatta, André Santini, Joël Sarlot, Mme Odile Saugues, MM. François Sauvadet, Bernard Schreiner, Jean-Claude Thomas, Léon Vachet, Daniel Vachez, François Vannson, Michel Vaxès, Michel Vergnier, Alain Veyret, Gérard Voisin, Roland Vuillaume.

INTRODUCTION 5

I.— UN CADRE JURIDIQUE ET ÉCONOMIQUE EN ÉVOLUTION SENSIBLE

A.— L’APPLICATION DE LA LOI D’ORIENTATION SUR LA PÊCHE MARITIME ET LES CULTURES MARINES

B.— L’ENTRÉE DE LA GRANDE DISTRIBUTION DANS L’ARMEMENT INDUSTRIEL A LA PÊCHE

C.— LES MODIFICATIONS DU CADRE COMMUNAUTAIRE

1.  La poursuite des sorties de flotte

2. L’évolution du régime communautaire de conservation et de gestion des ressources

3. Vers la disparition des captations de quotas

4. L’interdiction des filets maillants dérivants

II.— UN BILAN ÉCONOMIQUE PLUTÔT SATISFAISANT MALGRÉ UN SOLDE DES IMPORTATIONS STRUCTURELLEMENT DÉFICITAIRE

A.— BILAN DU SECTEUR DE LA PÊCHE FRANÇAISE

1. Une évolution positive de la production

2. Le rétablissement du revenu des pêcheurs 19

3. Un secteur conchylicole encore en redressement 

4. Une croissance lente de l’aquaculture nouvelle

5.  Situation de la flotte de pêche française

6. La lutte contre les pêches illégales dans les T.A.A.F.

B.— LA DÉPENDANCE STRUCTURELLE VIS-À-VIS DES IMPORTATIONS

III.— LES CRÉDITS CONSACRÉS À LA PÊCHE ET AUX CULTURES MARINES POUR 1999

A.— LES CRÉDITS D’INTERVENTION

1. La subvention à l’OFIMER

2. Les interventions en faveur des entreprises de pêche

B.— LES CRÉDITS D’INVESTISSEMENT

EXAMEN EN COMMISSION

MESDAMES, MESSIEURS,

Voici un an était promulguée la loi n°97-1051 du 18 novembre 1997 d’orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.

Objet d’un large accord à l’Assemblée nationale, comme d’ailleurs au Sénat, elle vise à offrir un cadre moderne à une activité qui a traversé en quelques années des crises majeures et subi des bouleversements, tant dans les techniques d’exploitation que dans les méthodes de gestion à terre.

La raréfaction de la ressource, les divers plans d’orientation pluriannuelle de la Communauté européenne qui ont visé à répondre à ce défi naturel, l’entrée de la grande distribution à tous les stades de la filière, mais aussi les fluctuations des cours, ont constitué autant d’éléments qui ont plus que fragilisé le secteur, puisqu’ils ont risqué, dans leur accumulation, de le conduire à une quasi disparition.

Pourtant, aujourd’hui, près de cinq ans après la crise majeure de 1994, le secteur de la pêche maritime connaît une situation globalement satisfaisante. Il faut toutefois avoir à l’esprit que cette embellie toute relative est due pour l’essentiel à un niveau des prix rémunérateur, ce qui constitue donc un élément plus conjoncturel que permanent.

Car il est évident que les dispositions de la loi d’orientation n’ont pu encore porter tous leurs fruits, qu’il s’agisse de la transformation du Fonds d’intervention et d’orientation des marchés (F.I.O.M.) en véritable office interprofessionnel de produits, qui devrait n’intervenir qu’à la fin de la présente année, ou encore du passage de l’entreprise artisanale à la forme sociétaire.

Cependant, l’existence même d’une telle loi d’orientation manifestait l’engagement décidé de l’Etat en faveur de la pérennité d’une activité essentielle au maintien et au développement de l’activité économique du littoral. Les dotations prévues en faveur du secteur de la pêche, au sein du projet de loi de finances pour 1999, confirment ce soutien public, puisque les dotations de l’année en cours seront reconduites, à un niveau particulièrement élevé puisque les crédits auront ainsi progressé de près de 30 % depuis 1995, c’est à dire au cours d’une période de très faible inflation.

Ces crédits devraient permettre de poursuivre l’assainissement du secteur en faveur des actions structurelles qu’il a engagées.

I.— UN CADRE JURIDIQUE ET ÉCONOMIQUE
EN ÉVOLUTION SENSIBLE

La mise en œuvre de mesures d’urgence, pour faire face à la crise aiguë de la pêche française du début de la décennie, avait permis de passer dans des conditions plus supportables les difficultés conjoncturelles nées de la baisse des cours du poisson. Les dispositions prises, telles l’allégement des charges des entreprises ou la restructuration des dettes, si elles résolvaient transitoirement les problèmes, devaient cependant, pour aboutir à une solution durable s’attaquant aux causes des faiblesses, être relayées par une modernisation de la filière, ébauchée par l’installation du «comité de suivi », chargé de veiller à l’équilibre entre les différentes activités de la filière.

Une réforme d’ensemble, contenue dans la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d’orientation sur la pêche maritime et les cultures marines, tendant à une meilleure gestion de l’entreprise de pêche, créant un véritable office des produits de la mer, dotant le conjoint d’exploitant d’un statut et facilitant l’installation de nouveaux pêcheurs, a posé les bases légales d’un cadre juridique et économique adapté à l’exercice des activités de pêche dans des conditions modernes.

Au-delà des évolutions internes, les changements opérés au plan des normes européennes contribuent à modifier significativement l’environ-nement dans lequel travaillent les pêcheurs : interdiction des filets maillants dérivants, apurement des retards constatés dans les sorties de flotte au titre des POP III et IV, mais aussi mise en place d’un dispositif visant à mettre fin aux excès des captations de quotas de pêche (« quotas-hopping »).

A.— L’APPLICATION DE LA LOI D’ORIENTATION SUR LA PÊCHE MARITIME ET LES CULTURES MARINES

La loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 nécessite, pour être pleinement mise en œuvre, la prise de 29 décrets d’application.

Sur les 17 décrets concernant le volet économique, 4 sont d’ores et déjà prévus. Il s’agit des décrets visant à favoriser l’investissement lors de la première installation (SOFIPÊCHE), organisant la situation des conjoints de chef d’entreprise au regard de l’ENIM, ainsi que ceux relatifs à l’inscription des pêcheurs au registre du commerce et des sociétés, ou à l’interdiction de certains engins de pêche (réglementation de la pêche à l’anchois).

Le texte mettant fin aux captations de quotas a été publié le 31 août dernier et le décret concernant le conseil supérieur d’orientation est en cours de signature. Les autres décrets sont encore en cours d’élaboration dans le cadre interministériel, ou en cours d’examen par le Conseil d’Etat. C’est le cas des décrets relatifs aux marchés (première mise en marché, organisations de producteurs…) ou de celui prévoyant une exonération partielle de l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux, en faveur des jeunes pêcheurs.

En outre, les décrets relatifs aux ressources (licences, quotas) sont actuellement soumis pour avis au Conseil de la concurrence avant d’être transmis à la Commission européenne puis au Conseil d’Etat.

S’agissant de l’office des produits de la mer, la phase d’élaboration du décret en Conseil d’Etat, qui devait permettre sa création et son installation, avait été interrompue par l’abrogation intempestive de l’article de la loi d’orientation l’instituant, lors de la récente codification du livre VI du Code rural. Afin de réparer cette erreur, votre rapporteur a récemment déposé, conjointement avec plusieurs autres députés, une proposition de loi rétablissant les dispositions du texte supprimé. Cette proposition, qui vient d’être adoptée par le Parlement a été publiée au journal offficiel du 4 novembre, permettra de relancer la procédure réglementaire relative à l’OFIMER.

La transformation de l’actuel FIOM en un office interprofessionnel des produits de la mer et de l’aquaculture (OFIMER), à l’image des offices agricoles, constituera une pièce centrale de la réorganisation de la filière, permettant aux entreprises du secteur de renforcer leur compétitivité, mise à mal notamment par l’internationalisation du marché des produits de la mer. La création de l’OFIMER, qui interviendra désormais à très brève échéance, selon les informations qui ont été communiquées à votre rapporteur, permettra de développer un esprit de filière favorisant la valorisation systématique et organisée de la production française, y compris de l’aquaculture. Elle emportera un certain nombre de conséquences :

– pour faciliter le développement de cet esprit de filière, le futur OFIMER sera piloté par un conseil de direction appréhendant de manière équilibrée les préoccupations de l’ensemble des professions du secteur, afin de les coordonner et de les rendre, non seulement compatibles, mais aussi complémentaires. Pour cela, le conseil de direction sera composé, outre des représentants des pouvoirs publics, à parité des représentants de l’amont et de l’aval de la filière ;

– par ailleurs, le conseil de direction de l’office aura la possibilité, comme c’est le cas pour tous les offices interprofessionnels agricoles, de déléguer tout ou partie de ses attributions pour certaines questions à des conseils spécialisés ; ces structures pourront comprendre des représentants n’appartenant pas au conseil de direction, ce qui constitue un élément de souplesse et d’efficacité ;

– le personnel du futur OFIMER sera rattaché au statut commun des offices, ce qui leur offrira une meilleure stabilité tout en leur assurant des possibilités de mobilité entre offices. Cette souplesse favorisera un échange d’expériences entre filières agro-alimentaires ;

– enfin, afin que soit consacré le caractère purement économique de l’office, la section sociale du FIOM, qui gère actuellement les caisses de chômage intempéries, sera transférée au conseil national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM).

Les dotations consacrées au FIOM, qui ont pratiquement quadruplé depuis 1993, seront reconduites, à périmètre constant, en 1999. Cet effort démontre la volonté de l’Etat de ne pas relâcher son effort engagé en faveur du développement de la filière.

Il est bien entendu prématuré d’établir un bilan des dispositions économiques prévues par la loi d’orientation, qu’elles soient d’application directe comme l’établissement des artisans en sociétés de pêche artisanale ou les effets de la possibilité d’étalement des plus-values de cession, ou qu’elles nécessitent encore la prise de décrets d’exécution, telles l’aide à la première installation ou la modernisation du régime de constitution de droits réels sur les ports de pêche.

De même, l’harmonisation de la rémunération à la part et de l’application du SMIC suppose un accord de branche, dont la négociation n’a pas encore abouti.

Enfin, le rapport sur le chômage à la pêche artisanale a été remis au Parlement au mois d’août dernier. Il fait état de l’existence d’une situation contrastée, où la présence d’un certain chômage coexiste avec une pénurie de main d’œuvre dans certains métiers. Le rapport préconise une solution équilibrée ; plutôt que la création d’un régime spécifique à la profession, il propose une affiliation aménagée des pêcheurs à l’UNEDIC et recommande une gestion plus dynamique de l’emploi à la pêche, afin d’acquérir une meilleure connaissance du marché du travail dans le secteur pour mettre fin aux déséquilibres entre l’offre et la demande de main d’œuvre.

Par ailleurs, un certain nombre d’articles de la loi d’orientation ne nécessitant pas de textes d’application sont déjà en vigueur. C’est notamment le cas des dispositions sur la lutte contre la pêche illégale dans les Terres australes et antarctiques françaises, l’abaissement du seuil de l’agrément des constructions de navire en défiscalisation dans les DOM, ou l’exercice de la pluriactivité…

Au total, l’essentiel des dispositions de la loi d’orientation devrait être effectivement en place d’ici la fin de la présente année, ce dont se réjouit votre rapporteur. En effet, il importe de conforter la bonne situation actuelle, qui reste encore fragile car il faut avoir à l’esprit que l’évolution positive du marché ne repose toujours pour l’essentiel que sur des phénomènes conjoncturels, comme l’amélioration des cours, qui ne peuvent être tenus pour définitivement acquis.

B.— L’ENTRÉE DE LA GRANDE DISTRIBUTION DANS L’ARMEMENT INDUSTRIEL A LA PÊCHE

Depuis plusieurs années, un groupe du secteur de la grande distribution a effectué une entrée remarquée dans le secteur des pêches maritimes, notamment par la prise de contrôle d’armements de pêche industrielle. L’intervention d’un groupe de grande distribution dans l’amont résulte d’un double objectif :

– le groupe concerné souhaite contrôler, au moins partiellement, son approvisionnement dans le domaine des produits de la mer qui, pour des raisons de conservation, font partie des marchandises dont la gestion est difficile. Ainsi, les apports peuvent être réguliers et prévisibles, ce qui permet d’optimiser la valorisation de ces produits ;

– par ailleurs, ce choix permet au grand distributeur d’établir une politique commerciale compatible avec les souhaits des consommateurs (prix attractifs, adaptés à la demande, objectifs de qualité) et les impératifs de la production (indépendance des approvisionnements, économies d’échelle par la suppression des intermédiaires).

C’est pourquoi cette arrivée de la grande distribution dans le secteur de la pêche industrielle n’est pas sans conséquence pour cette dernière, ni pour le reste de la filière. En effet, en rachetant des navires de pêche industrielle appartenant à des armements en difficulté, le secteur de la grande distribution a permis de maintenir ceux-ci sous pavillon français alors même qu’un certain nombre d’autres sont passés sous contrôle étranger (phénomène des « quotas-hopping ») faute d’avoir pu être repris par des armateurs de notre pays.

Par ailleurs, l’apport financier de la grande distribution au secteur de la pêche industrielle a permis de conserver dans la flotte française des navires modernes et bien adaptés aux techniques de pêche actuelle. De plus, la modernisation des navires participe à l’amélioration des conditions de travail des marins.

Enfin, cette arrivée a permis de maintenir l’activité du port de Lorient en débarquant un tonnage plus important de produits de la mer, compte tenu de l’accroissement de la flotte de cet armement. L’entrée d’un groupe de la grande distribution dans le secteur de la pêche industrielle marque ainsi une étape nouvelle dans la restructuration de la filière. Il est possible d’y voir une piste de son évolution à moyen terme.

C.— LES MODIFICATIONS DU CADRE COMMUNAUTAIRE

1.  La poursuite des sorties de flotte

La politique communautaire des pêches repose pour l’essentiel sur le principe de la préservation de la ressource, mise à mal par des prélèvements excessifs qui conduisaient inexorablement à la disparition des principales espèces prélevées. Afin de garantir les capacités de reproduction des différentes variétés halieutiques, l’Union européenne a mis en œuvre plusieurs plans d’orientation pluriannuelle (POP) ; le quatrième, qui a débuté au 1er janvier 1997, dit « POP IV » devant normalement constituer la phase ultime de l’adaptation des capacités de capture aux disponibilités prévisibles de la ressource.

Depuis 1991, des plans successifs de sortie de flotte ont été organisés, visant à encourager les cessations définitives d’activité par le versement d’aides. Malgré des actions significatives ayant conduit fin 1996, dernière année normale d’exécution du POP III, à ramener la flotte française à 6.475 navires représentant un total de 987.626 kW, notre pays accusait un retard par rapport à l’objectif communautaire fixé. Ce retard doit être cependant nuancé par le fait que les effets du plan de sorties de flotte de cette dernière année ne se sont fait sentir qu’au début de 1997. Ainsi à la fin du mois de décembre suivant, la flotte de pêche française n’affichait plus qu’un retard de 12.000 kW. Cependant, tous les segments de la flotte, à l’exception des petits métiers de la Méditerranée, étaient en retard par rapport aux objectifs communautaires en termes de puissance motrice, unité de mesure retenue par la Communauté pour mesurer les capacités de pêche. Ce retard a entraîné la suspension des autorisations de construction de navires et de leur financement public.

Le POP IV français, adopté au mois de décembre 1997, prévoit une réduction globale de la flotte de pêche nationale de 40.000 kW supplémentaires, avec un premier objectif intermédiaire de 10.000 kW au 31 décembre de cette année. Le segment des chalutiers jusqu’à 30 mètres et des navires non fileyeurs de plus de 12 mètres sont les principaux segments concernés par les objectifs de réduction.

Afin d’apurer le retard au titre du POP III et d’atteindre les objectifs intermédiaires au titre du POP IV, le Gouvernement a mis en place au mois de mars dernier un plan de sortie de flotte. La réussite de ce plan va permettre la reprise maîtrisée du processus de renouvellement de la flotte de pêche par l’autorisation de constructions neuves, que la Commission européenne vient tout récemment d’accorder.

L’Etat a consenti un effort financier particulièrement important. En effet, la prime d’Etat à la sortie de flotte, ramenée au kW, a été doublée par rapport au plan précédent. Par ailleurs, plus encore que par le passé, les collectivités territoriales ont été sollicitées afin d’abonder l’aide consentie au niveau central ; une aide communautaire, égale au montant total des aides nationales, complète la prime à la sortie de flotte. Les régions du Nord-Pas-de-Calais, de Basse et Haute Normandie, des Pays de Loire, d’Aquitaine, de Languedoc-Roussillon et de Provence-Alpes Côte d’Azur, ont décidé de s’associer à ce plan.

S’agissant des aides à la modernisation de la flotte, une réserve de 175 millions de francs a été constituée pour la période triennale 1997-1999. Le retard de la France sur les objectifs du POP III, qui a eu pour conséquence la suspension du versement de ces aides depuis le mois d’avril 1996, a bien entendu ralenti les investissements dans ce secteur. Ainsi seuls 14 projets de modernisation ont été retenus l’année dernière, représentant un engagement de seulement 2,3 millions de francs au titre des crédits de l’Instrument financier d’orientation de la pêche (IFOP).

2. L’évolution du régime communautaire de conservation et de gestion des ressources

Le régime communautaire de conservation et de gestion des ressources de la pêche, institué par le règlement (CEE) 170/83 comprenait des mesures de conservation, des règles d’utilisation et de répartition des ressources et des mesures de contrôle.

Le 20 décembre 1992, le Conseil avait en outre adopté un nouveau règlement de base (CEE) n° 3760/92 qui couvre également les volets structures et marchés de la politique commune des pêches.

En matière de conservation et de gestion de la ressource, l’instrument principal consiste en la fixation par le Conseil des ministres européens de la pêche, chaque année pour les espèces les plus sensibles, de totaux admissibles de capture (TAC) répartis en quotas nationaux par Etat membre. Le niveau des TAC pour chaque espèce soumise à ce mode de gestion est arrêté après avis des organismes scientifiques : conseil international pour l’exploitation de la mer et comité scientifique, technique et économique des pêches. Depuis plusieurs années, les avis scientifiques recommandent ainsi une réduction substantielle de l’effort de pêche sur de nombreux stocks. La décision du Conseil prend également en considération les conséquences socio-économiques prévisibles d’une trop forte baisse des TAC et des quotas. Les TAC sont répartis entre les Etats membres en quotas nationaux sur le fondement d’une clef de répartition définie en 1983.

L’application de ces mesures nécessite une gestion rigoureuse des quotas par l’Etat membre : obligation pour le pêcheur de remplir et de remettre aux autorités un journal de bord et une déclaration de débarquement, suivi statistique des captures et déclaration mensuelle aux services de la Commission, fermeture de la pêche quand le quota est atteint.

Pour 1998, la France a obtenu la limitation des baisses affectant deux espèces primordiales pour nos pêches : le lieu noir en Ouest Ecosse et la langoustine dans le Golfe de Gascogne. Ces TAC ont été fixés à 10.900 tonnes pour le lieu noir et 5.500 tonnes pour la langoustine. Ils permettent aux pêcheurs français de maintenir leur capacité de pêche.

Par ailleurs, deux éléments nouveaux ont été introduits :

– la transposition des réglementations de la commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique, qui sont applicables de la même façon pour chaque Etat ;

– la répartition du TAC de chinchard en Atlantique. La France a finalement obtenu un quota de 15.000 tonnes, ce quota s’ajoutant aux 20.000 tonnes que l’Espagne a concédées à la France.

Le règlement n°847/96 du Conseil du 6 mai 1996 a introduit une marge de souplesse dans la gestion des quotas de pêche. Dans la limite de 10 % d’un quota, les Etats membres ont la possibilité de reporter un solde de quota disponible en fin d’année ou d’anticiper les captures sur le quota de l’année suivante. Ce mécanisme, limité aux stocks qui ne sont pas en danger, a pour objectif d’éviter de courtes fermetures en fin d’année ou de permettre la poursuite d’une campagne de pêche en début d’année sur le quota de l’année précédente. Le règlement prévoit cependant également le remboursement de tout dépassement de quota avec application de pénalités lorsqu’il s’agit de stocks sensibles.

Depuis le 1er juillet dernier, les navires communautaires soumis au régime d’effort de pêche, défini par le règlement n° 2027/95 du 15 juin 1995, doivent, outre la communication de leurs entrées et sorties de zone et l’inscription de ces données sur le journal de bord, communiquer leurs captures à l’Etat du pavillon ainsi qu’à l’Etat côtier, à chaque entrée et sortie de zone.

En se fondant sur les enseignements des projets pilotes menés dans les Etats membres entre juillet 1994 et décembre 1995, la Commission a estimé que la surveillance continue des navires de pêche par satellite devrait considérablement améliorer l’efficacité du contrôle des prises.

Le règlement n° 1489/97 du 29 juillet 1997 fixe désormais les règles que doivent faire respecter les Etats membres en ce qui concerne le système de surveillance des navires par satellite. Ce système concerne les navires de pêche communautaires de plus de 24 mètres hors tout, opérant en haute mer (hormis en Méditerranée) ou dans les eaux de pays tiers appliquant le système de surveillance par satellite à leurs propres navires, ou bien encore pêchant du poisson destiné à la fabrication de farine et d’huile (pêche minotière). Compte tenu des délais d’installation, la mise en œuvre effective de cette nouvelle réglementation, également applicable à compter du 1er juillet 1998, ne pourra être que progressive. Le centre de surveillance des pêches françaises devrait ainsi être installé au CROSS d’Etel à la fin de la présente année, à l’issue d’une procédure d’attribution de marché public.

3. Vers la disparition des captations de quotas

Rappelons que la captation de quotas (ou « quotas-hopping ») consiste, pour des intérêts originaires d’un Etat membre de l’Union européenne, à exploiter des navires de pêche sous pavillon d’un autre Etat membre, en pêchant sur les quotas de ce dernier et en contournant ainsi le principe de la stabilité relative, qui attribue à chaque Etat une part fixe des droits communautaires de prélèvement de la ressource halieutique.

Comme d’autres Etats membres, la France est confrontée depuis près de dix ans à cette pratique qui concerne une cinquantaine de navires totalisant près de 23.000 kw. Les professionnels français dénoncent depuis longtemps cette situation et contestent que des navires sous contrôle d’un autre Etat membre puissent exploiter nos quotas. La raréfaction de la ressource, et donc la diminution des quotas accordés à chaque Etat membre, avive le mécontentement des pêcheurs.

Le phénomène des quotas-hopping peut également avoir des effets négatifs sur l’économie de l’Etat visé, en termes d’emploi dans les ports ou en mer. Souvent, l’équipage est originaire de l’Etat capteur ; des conséquences dommageables apparaissent également en termes socio-économiques, car l’absence de débarquement des captures par ces navires fragilise l’ensemble de la filière, en amont comme en aval.

Le problème des quotas-hopping traduit un conflit juridique entre, d’une part, le principe de la liberté d’établissement qui est un des fondements de l’intégration économique entre les Etats membres, d’autre part, la gestion nationale des quotas et le principe de stabilité relative. A partir d’une jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, la Commission a élaboré en 1989 un cadre proposant des solutions à ce phénomène ; il repose sur la notion de « lien économique réel » entre le navire et l’Etat du pavillon et définit la représentation à terre des entreprises qui doit se concrétiser par l’implantation d’un service administratif apte à assurer la gestion des navires.

L’application de la loi d’orientation sur la pêche maritime va très prochainement, dans le respect des règles communautaires, permettre de réserver l’accès aux licences ou quotas nationaux aux navires de pêche battant pavillon français qui ont un lien économique réel avec le territoire de la République et qui sont dirigés et contrôlés à partir d’un établissement stable situé en France. L’objectif de ces nouvelles dispositions vise à mieux préserver le caractère national des quotas en évitant que des capitaux étrangers n’en profitent sans aucun bénéfice économique ou social pour le littoral français.

L’obligation d’un lien économique réel et d’un établissement stable entre le navire et l’entreprise qui l’exploite s’appliquera à compter du 1er janvier 1999. Le délai restant devra permettre aux navires actuellement en activité de se conformer aux nouvelles règles ; des sanctions administratives de suspension ou de retrait de licence, ainsi que des mesures pénales d’amendes sont prévues à l’égard des contrevenants. Votre rapporteur considère qu’il conviendrait d’établir, à la fin du premier semestre de l’année prochaine, un bilan économique par façade, des conséquences de l’application de cette importante disposition de la loi d’orientation.

4. L’interdiction des filets maillants dérivants

Une majorité qualifiée s’est dégagée en faveur de l’interdiction de l’utilisation du filet maillant dérivant à l’issue du Conseil des ministres européens de la pêche du 8 juin dernier. La France s’est opposée jusqu’au bout et a voté contre cette décision qui n’est justifiée ni au plan scientifique, ni au regard de nos obligations internationales.

Constatant que les arguments fondés et rationnels, développés par la France n’entraînaient pas l’adhésion des autres Etats membres, tout a été mis en œuvre pour que les pêcheurs français, particulièrement dépendants de cette pêcherie, disposent des délais nécessaires et des moyens d’adaptation et de reconversion capables d’assurer la pérennité des entreprises de pêche. L’objectif était également de favoriser le maintien de l’activité sur le thon germon avec de nouvelles techniques afin d’éviter un accroissement de l’effort de pêche sur d’autres stocks déjà surexploités comme la sole, le merlu ou la baudroie.

Ainsi la France a obtenu finalement que le délai pendant lequel l’utilisation de filets maillants dérivants resterait autorisée soit porté à quatre ans, jusqu’au 1er janvier 2002, soit deux ans de plus que la proposition initiale de la Commission. Il a été également pris acte que d’importantes mesures d’accompagnement seraient définies par le Conseil avant la fin de l’année. Elles concerneront :

– le cofinancement par la Commission d’actions de recherche pour l’expérimentation de nouvelles techniques de pêche du thon germon ;

– les modernisations nécessaires à la reconversion des navires vers d’autres techniques de pêche concernant cette dernière espèce ;

– des aides adaptées à la sortie de flotte ;

– l’indemnisation pour les conséquences économiques de l’arrêt de l’utilisation du filet maillant dérivant.

Si la décision prise par le Conseil est loin d’être satisfaisante pour la France, elle comporte néanmoins les conditions qui devraient permettre de préserver l’activité des entreprises visées.

II.— UN BILAN ECONOMIQUE PLUTÔT SATISFAISANT MALGRE UN SOLDE DES IMPORTATIONS STRUCTURELLEMENT DEFICITAIRE

Malgré un solde des importations structurellement déficitaire, les données pour l’année 1997, encore provisoires, montrent que le chiffre d’affaires des pêches maritimes françaises a atteint plus de 5,9 milliards de francs, correspondant à une production de 597.759 tonnes de poisson, crustacés et mollusques (hors cultures marines). Ces chiffres sont en légère progression par rapport à l’année précédente, où, à un chiffre d’affaires de 5,8 milliards de francs, correspondait une production de 639.605 tonnes.

Comme ses partenaires européens, la France souffre d’un déficit structurel de sa production, puisque celle-ci ne représente guère que la moitié de la consommation intérieure. Ce déséquilibre s’explique par la conjonction d’une forte demande communautaire et d’une diminution des capacités globales débarquées par l’Union européenne.

A.— BILAN DU SECTEUR DE LA PÊCHE FRANÇAISE

1. Une évolution positive de la production

Hors cultures marines, la production française des pêches se répartit en 1997 entre :

– 366.882 tonnes de poissons, pour une valeur de 3,86 milliards de francs  (contre 358.951 tonnes et 3,78 milliards en 1996) ;

– 115.877 tonnes de crustacés, mollusques et algues, pour une valeur de 1,36 milliard de francs. Ces chiffres montrent, globalement pour cette activité, un raffermissement des prix, puisqu’en 1996 la production n’avait rapporté que 1,28 milliard de francs pour un résultat de 122.798 tonnes ;

– 115.000 tonnes de thon tropical, pour une valeur de 760 millions de francs. Le phénomène de redressement des prix est ici encore plus marqué, puisqu’en 1996 une production de 147.568 tonnes n’avait conduit qu’à une valeur de 690 millions de francs.

Ainsi, la production des pêches maritimes progresse au rythme de plus de 5 % en valeur sur une année. Les principales espèces sont, en valeur, la sole, la baudroie, la langoustine, le merlu, la morue et la seiche. Le chiffre d’affaires des cultures marines s’est élevé pour sa part au cours de la même période, à 2,55 milliards de francs correspondant à une production de 223.395 tonnes.

Les principales régions de production sont la Bretagne, qui fournit à elle seule la moitié des quantités, puis le Nord-Pas-de-Calais pour 15 % du tonnage et les Pays de Loire pour 10 %.

PRODUCTION FRANÇAISE
DES PÊCHES MARITIMES ET DES CULTURES MARINES

 

1993

1994

1995

1996

1997*

 

Quantité
(tonnes)

Valeur
(MF)

Quantité
(tonnes)

Valeur
(MF)

Quantité
(tonnes)

Valeur
(MF)

Quantité
(tonnes)

Valeur
(MF)

Quantité
(tonnes)

Valeur
(MF)

Poissons

331 348

3 864,1

351 523

3 490,3

346 770

3 476,3

350 238

3 650,1

353 582

3 820,2

Crustacés

22 081

593,8

21 017

580,6

22 034

586,8

22 299

556,6

22 240

619,5

Coquillages

59 400

385,8

66 915

413,0

40 740

326,1

57 278

356,3

55 375

397,5

Céphalopodes

23 839

307,9

20 193

278,3

23 272

297,8

23 706

326,8

22 694

325,2

Algues

12 775

20,3

16 485

23,9

15 883

22,1

15 948

22,0

15 568

20,8

Thon tropical

154 222

729,5

161 507

851,1

141 948

658,6

147 568

684,7

115 000

761,5

Grande pêche

10 000

43,6

7 210

34,1

12 669

53,1

13 319

40,8

13 300

40,0

Total pêche

613 665

5 945,0

644 850

5 671,3

603 316

5 420,8

603 356

5 637,3

597 759

5 984,7

Huîtres

148 467

1 796,7

146 990

1 671,9

152 129

1 409,2

149 650

1 485,6

141 300

1 557,0

Moules

64 413

471,3

66 194

475,2

61 962

444,6

63 350

506,8

70 000

560,0

Autres coquillages

4 188

61,0

3 938

52,7

3 994

54,0

4 350

60,9

4 506

64,1

Aquaculture

3 700

160,4

5 781

248,0

6 166

284,0

7 041

327,4

7 589

365,9

Total cultures marines

220 768

2 489,4

222 903

2 447,8

224 251

2 191,8

224 391

2 380,7

223 395

2 547,0

Total général

834 433

8 434,4

867 753

8 119,1

827 567

7 612,6

854 747

8 018,0

821 154

8 531,7

Source : Ministère de l’agriculture et de la pêche.

* données provisoires

2. Le rétablissement du revenu des pêcheurs

Si la disparité des situations et des flotilles rend aléatoire la définition d’une moyenne nationale, il est néanmoins possible d’indiquer que, après la violente crise de la pêche du début des années 1990, qui avait engendré une baisse du revenu des pêcheurs, celui-ci, après s’être stabilisé en 1994, semble connaître une légère croissance, bénéficiant ainsi de l’augmentation des cours des produits de la mer.

Un rapport de l’inspection des finances et de l’inspection générale des affaires maritimes, établi en 1994 pour la préparation du plan de restructuration des exploitations de pêche artisanale, avait fourni des données intéressantes pour les navires de 12 à 25 mètres. Il apparaît désormais que la répartition des recettes entre l’armement et l’équipage, traditionnellement à 50-50, tend aujourd’hui vers un rapport plus favorable à l’armement, de 55-45.

Pour la pêche artisanale, le salaire du marin dépend directement des cours du poisson, du fait du système de la « rémunération à la part ». Des efforts de productivité expliquent qu’en dépit de la baisse sensible du prix moyen du poisson constaté jusqu’à ces dernières années, le salaire brut annuel moyen, évalué sur un échantillon de plus de 500 navires de 12 à 25 mètres, n’ait pas connu de chute brutale : il atteignait 175.000 francs en 1989, 165.000 francs en 1992 et 156.000 francs un an plus tard. Depuis 1994, les revenus se sont améliorés en même temps que la situation générale de la pêche. Sans qu’il soit possible d’avancer aujourd’hui de chiffres précis, une évaluation fournie par le ministère de l’agriculture et de la pêche permet d’estimer que le revenu a retrouvé en moyenne son niveau de 1989, à 175.000 francs par an (même si des diversités importantes existent selon les types de navires). Ainsi, les moins de 15 mètres génèrent des revenus d’environ 120.000 francs par an seulement.

S’agissant de la pêche hauturière, il est difficile de donner une évaluation moyenne du revenu annuel. On peut retenir un revenu pour un matelot de l’ordre de 100.000 à 150.000 francs par an, mais variant selon les modes d’exploitation. En ce qui concerne la pêche thonière tropicale, les revenus annuels des matelots peuvent fréquemment atteindre 170.000 francs.

La loi d’orientation sur la pêche maritime et les cultures marines a apporté des éléments nouveaux en matière de rémunération dans le cadre du salaire à la part. Elle propose une réponse pragmatique à l’application du SMIC dans ce secteur, dans la mesure où, en lissant sur l’année le calcul du revenu minimum et en tenant compte du temps de travail à la pêche, elle concilie le principe du SMIC avec ce mode de rémunération particulier. Dans le cadre de cette loi, le règlement devrait préciser la nature des frais communs à déduire du chiffre d’affaires du navire pour le calcul du salaire à la part.

3. Un secteur conchylicole encore en redressement 

Divers facteurs concourent à une stabilisation de la production conchylicole, dont le principal est la surcharge des bassins. Par ailleurs, la production reste régulièrement soumise à des mortalités anormales dues en particulier aux aléas météorologiques (sécheresse ou pluies et températures excessives) qui ont occasionné en 1997 des pertes de cheptel importantes dans les Pays de Loire, en Languedoc et en Normandie. L’IFREMER suit avec attention ces phénomènes, qui ne manquent pas d’inquiéter.

S’agissant de l’huître plate, l’effort est maintenu pour relancer la production qui avait été anéantie par des épizooties. Cependant, le niveau de la production reste faible, à hauteur de 1.500 tonnes en 1996 contre 2.700 tonnes l’année précédente. En effet, aucun progrès notable n’a été réalisé dans le domaine curatif concernant la bonamia.

La production mytilicole, en progression régulière notamment grâce aux apports des techniques de production par filières, ne permet toutefois pas encore de répondre à la demande nationale. L’augmentation de la production reste en conséquence un objectif prioritaire pour les années à venir. Elle se situe actuellement à 70.000 tonnes.

L’amélioration de la productivité des sites traditionnels d’élevage, la colonisation de nouvelles zones d’élevage, situées de préférence en mer ouverte devraient permettre un accroissement significatif de la production mytilicole dans les prochaines années. Par ailleurs, la démarche visant à valoriser la qualité des produits doit être poursuivie. Les prix de ce secteur sont relativement stables, avec une légère tendance à la baisse en raison de la concurrence de la moule de pêche, d’une part, de la politique de commercialisation menée par les hypermarchés, d’autre part.

Les efforts déjà engagés pour la modernisation des entreprises conchylicoles ont été poursuivis en 1997. La mise en conformité avec les normes sanitaires fixées par la réglementation communautaire s’est achevée en fin d’année 1996. Un premier bilan de cette opération fait apparaître un affaiblissement de la trésorerie des entreprises en raison du coût des travaux réalisés, malgré les aides obtenues de la part de l’Union européenne, des régions et des départements. En revanche, l’outil de travail a été modernisé et les produits présentent une meilleure garantie de salubrité et de qualité, ce qui constitue pour les professionnels un solide argument pour leur commercialisation. Sur le plan socio-économique, la conchyliculture occupe une place importante dans la plupart des régions littorales, souvent marquées par un taux de chômage supérieur à celui de la moyenne nationale. Elle contribue ainsi au maintien d’un tissu d’activité.

4. Une croissance lente de l’aquaculture nouvelle

Les efforts de recherche et d’expérimentation qui ont été déployés depuis une vingtaine d’année par les organismes scientifiques et la profession ont largement contribué à l’émergence de nouvelles productions de poissons marins et de crustacés. Mais les résultats économiques restent cependant inférieurs aux projections. Ce secteur connaît une croissance lente et son poids demeure encore faible dans l’économie nationale. Les forts tonnages produits en Europe entraînent par ailleurs une baisse du niveau des prix du marché, réduisant ainsi les marges des entreprises françaises.

La salmoniculture en mer concerne essentiellement la production de truites (truites arc-en-ciel et truites fario) et avec une moindre importance le saumon. La production des salmonidés a conservé en 1996 le niveau atteint l’année précédente, soit 1.800 tonnes, mais pour les entreprises le seuil de rentabilité reste difficile à atteindre. La Salmor a disparu en 1997 et Salmona a été reprise par la société norvégienne Saetremyr à la fin de l’année dernière.

La production de bars et daurades continue de se développer tout autour du bassin méditerranéen. Elle s’est en revanche globalement repliée au plan global, pour n’atteindre que 3.000 tonnes en 1996, en diminution de plus de 10 % par rapport aux résultats des deux années antérieures. Ces tonnages restent très inférieurs à ceux réalisés par les partenaires européens.

L’aquaculture du turbot concerne surtout le stade de l’éclosion mais la production s’est néanmoins développée suite à la mise en place de plusieurs unités de grossissement sur le littoral atlantique. Ainsi la production, qui avait atteint 550 tonnes en 1994 et 630 tonnes en 1995, a été évaluée à 900 tonnes pour 1996, dernier résultat communiqué.

En ce qui concerne l’élevage des crevettes pénéides, la production reste très faible en métropole, suite à des problèmes techniques survenus dans les élevages. Cette activité reste secondaire et constitue le plus souvent un élevage accessoire pour certaines entreprises. L’essentiel de la production est réalisé en Nouvelle Calédonie. Au total, plus de 800 tonnes de crevettes pénéides ont été produites en 1996.

Globalement, la production de poissons marins et de crustacés reste limitée, de l’ordre d’un peu plus de 7.000 tonnes en 1996. Hormis la concurrence des autres pays européens, qui rend le marché particulièrement disputé et très modérément rentable, l’aquaculture nouvelle est également confrontée à une limitation des sites accessibles. Il est cependant important d’une part, de maintenir le savoir faire acquis et d’autre part, de valoriser les sites disponibles lorsqu’ils existent. Aussi l’IFREMER remettra avant la fin de cette année un inventaire des sites favorables et une négociation sera engagée, notamment avec le ministère chargé de l’aménagement du territoire, pour l’élaboration d’un schéma de développement aquacole. Ce schéma s’insérera dans les objectifs approuvés en la matière par la Commission européenne dans le cadre du plan de secteur pour la période qui s’achèvera en 1999. Il s’agit de :

– l’aménagement de zones aquacoles privilégiées et du développement de l’aquaculture en mer ouverte, permettant la colonisation de nouveaux sites ;

– l’amélioration de la productivité des élevages, la diminution des coûts de production afin de rendre les entreprises plus concurrentielles ;

– la conduite d’actions de promotion des produits et d’amélioration de l’organisation de la profession.

5.  Situation de la flotte de pêche française

Au 31 décembre 1997, la flotte de pêche française métropolitaine comptait 6.255 navires, totalisant une puissance de 960.822 kw.

– 161 navires de pêche industrielle et semi-industrielle, de plus de 25 mètres ;

– 1.463 navires de pêche artisanale et hauturière, de 12 à 25 mètres ;

– 4.631 navires artisans de petite pêche côtière, de moins de 12 mètres.

Comme pour la production, la Bretagne représente de loin la région la plus concernée par la pêche maritime en nombre de navires, puisqu’elle totalise à elle seule 41 % de la puissance disponible. La façade méditerranéenne réunit quant à elle 17,7 % de l’ensemble, chacune des autres régions de la façade Manche-Atlantique totalisant de 5 % (Haute-Normandie, Poitou-Charente, Aquitaine) à 10 % (Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Basse-Normandie, Pays de Loire).

En 1999, la flotte française devrait évoluer selon le rythme fixé par le POP IV, ce qui correspond à une réduction de la puissance motrice d’environ 10.000 kw. Cependant, la possibilité de réduire l’effort de pêche par la gestion interne de cet effort et non seulement par des réductions de capacité pourrait permettre d’atteindre cet objectif autrement que par des sorties définitives de flotte.

Le tableau ci-après indique l’évolution de la flotte de pêche par tranches de longueur de navire, de 1990 à la fin de l’année 1997. Les objectifs de décroissance de la flotte fixés par le POP ont été respectés en 1992 et 1993 ; conformément à ce programme, une décroissance sensible est intervenue en 1994. Elle s’est amplifiée en 1995.

FLOTTE DE PÊCHE PAR TRANCHES DE LONGUEUR
Situation au 31 décembre 1997

Tranches de longueur H.T.

Caractéristiques

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

< 12 M

NOMBRE

KW

TJb

6 556

405 901

27 479

5 445

359 152

23 454

5 227

350 162

22 904

5 124

346 301

22 629

5 021

344 447

22 541

4 847

339 342

22 007

4 766

339 299

21 943

4 631

335 483

21 498

12 M à 16 M

NOMBRE

KW

TJb

850

157 013

20 842

765

145 790

19 253

745

143 751

18 974

740

142 841

18 819

691

135 620

17 610

652

129 371

16 749

630

124 798

16 207

587

117 998

15 212

16 M à 25 M

NOMBRE

KW

TJb

1 022

338 054

58 599

981

332 040

58 203

980

333 776

59 329

976

332 404

59 400

946

325 127

58 308

930

321 865

57 635

912

317 472

57 032

876

307 643

55 715

25 M à 38 M

NOMBRE

KW

TJb

122

66 546

21 697

105

59 247

18 931

98

55 993

17 713

99

56 612

17 946

93

54 122

16 655

89

51 768

15 850

90

53 230

16 173

89

52 484

15 828

> 38 M

NOMBRE

KW

TJb

104

182 971

75 205

97

176 199

72 071

89

165 745

68 276

82

155 847

65 026

78

151 331

63 859

75

148 163

62 886

77

152 827

64 607

72

174 214

61 927

TOTAL

NOMBRE

KW

TJb

8 654

1 150 485

203 823

7 703

1 088 949

198 803

7 139

1 049 427

187 196

7 021

1 034 005

183 820

6 829

1 010 647

178 973

6 593

990 509

175 127

6 475

987 626

175 962

6 255

960 822

170 180

Source : ministère de l’agriculture et de la pêche.

6. La lutte contre les pêches illégales dans les T.A.A.F.

Constituée des îles Kerguelen, Crozet, Saint-Paul et Amsterdam et de leurs eaux adjacentes, la zone des terres australes et antarctiques françaises (T.A.A.F.), sous souveraineté française, connaît depuis plusieurs années une importance économique non négligeable compte tenu des ressources halieutiques à forte valeur commerciale qu’elles renferment, en particulier la langouste et la légine. L’exploitation de ces eaux, qui est assurée en priorité par des nationaux dans le cadre de quotas fixés par les pouvoirs publics, permet aujourd’hui avec l’arrivée d’un armement boulonnais dans la zone, à trois armements de se partager les possibilités de pêche (armements Sapmer, Comata et le Garrec).

Par ailleurs, dans le cadre de la conclusion d’un accord intergouvernemental de pêche, trois palangriers ukrainiens se sont vu allouer des droits de pêche (1.000 tonnes de légine) moyennant le payement à l’administration des T.A.A.F. d’une contrepartie financière de 3 millions de francs par an. Cet accord, qui expire en 1998, devrait faire l’objet d’une renégociation.

S’agissant de la ressource exploitable, sa fragilité explique que les pouvoirs publics aient mis en place ces dernières années une réglementation contraignante sur le plan technique (interdiction de pêche dans certaines zones, réglementation des engins de pêche…) comme en matière d’accès (quotas) afin d’en assurer une gestion responsable et durable, sur la base des recommandations de conservation émises par le muséum d’histoire naturelle à qui a été confié le suivi scientifique de ces pêcheries.

Pour la campagne de pêche 1998/1999, l’armement français se partage près de 6.000 tonnes de légine pêchable au chalut et à la palangre dans les eaux des îles Kerguelen et Crozet. En revanche, seul l’armement Sapmer a accès au stock de langouste de Saint-Paul et Amsterdam à hauteur de quelques centaines de tonnes par an.

La zone maritime des T.A.A.F. fait l’objet depuis 1996 d’activités de pêche illégales menées par des navires battant pavillons de complaisance ou de certains Etats d’Amérique latine. La ponction effectuée sur le stock de légine de Crozet et des Kerguelen a été évaluée à plusieurs dizaines de milliers de tonnes et près d’une trentaine de navires ont été aperçus en situation de pêche illicite.

Afin de lutter contre ces activités, les autorités françaises ont mis en place un schéma de contrôle prévoyant la surveillance des zones de pêche par des bâtiments de la Marine nationale qui ont depuis arraisonné puis escorté jusqu’à l’île de la Réunion près d’une dizaine de navires en situation irrégulière. En outre, l’affectation désormais permanente d’une frégate de surveillance à la Réunion constitue une mesure de nature à dissuader d’éventuels contrevenants. Cet effort accru a été demandé à la Marine nationale s’agissant d’une question de souveraineté et compte tenu de l’importance des enjeux économiques.

Les capitaines des navires arraisonnés comme les armements font l’objet de poursuites judiciaires et des peines ont été infligées sous la forme d’amendes, surtout depuis la modification de la législation qui, dans le cadre de la loi d’orientation sur la pêche maritime, a permis d’accroître le montant des amendes afin de rendre les sanctions plus dissuasives. Enfin, la réglementation française prévoit la saisie des cargaisons et des engins de pêche.

Par ailleurs, les pouvoirs publics ont décidé en 1997 d’ouvrir la pêche dans les eaux de Crozet et d’autoriser leur exploitation ainsi que celle des eaux des Kerguelen durant l’hiver austral, considérant que la présence de navires de pêche français pouvait permettre de dissuader les navires sans autorisation de venir pêcher illégalement.

Il n’en demeure pas moins que l’étendue de la zone des T.A.A.F. et son éloignement rendent extrêmement difficile une surveillance régulière eu égard aux coûts financiers qu’engendrent ces opérations de contrôle.

La surveillance des activités de pêche dans les T.A.A.F. suppose donc de mettre en œuvre une véritable coopération régionale avec nos voisins (Australie, Afrique du Sud) qui connaissent les mêmes activités de pêche illégale dans leurs eaux. Cette coopération permettrait d’additionner les moyens propres à chaque pays par la mise en place d’actions communes.

Des contacts ont d’ores et déjà été établis avec l’Afrique du Sud et surtout l’Australie, pays avec lequel la France échange désormais des informations. Par ailleurs, un début de coopération a été instauré avec les autorités militaires australiennes par la mise à disposition de moyens logistiques leur permettant de mener à bien des opérations de surveillance de leur zone économique. L’autre cadre de cette coopération est constitué par la Commission pour la conservation de la faune et de la flore de l’Antarctique, organisme international de conservation et de gestion des ressources marines vivantes, dont la zone de réglementation couvre les eaux françaises de Crozet et Kerguelen et dont la France est partie contractante, ainsi d’ailleurs que certains Etats dont les navires sont à l’origine de cette pêche illégale.

B.— LA DÉPENDANCE STRUCTURELLE VIS-À-VIS DES IMPORTATIONS

Le marché français des produits de la pêche se caractérise toujours par une forte dépendance vis à vis des importations, car la production nationale n’est pas en mesure de satisfaire à la seule demande interne. Pour cette raison, le déficit de la balance commerciale de la France dans le secteur des produits de la mer doit être considéré comme structurel, notre seule production nationale ne pouvant couvrir que la moitié de nos consommations. Dans ce contexte, le déficit du commerce français des produits de la pêche et de l’aquaculture s’est stabilisé en 1997, à 11 milliards de francs contre 10,9 milliards en 1996. Ce chiffre traduit à la fois une hausse des recettes d’exportations (+24 %) qui compense l’accroissement de la facture des importations. Il est toutefois à noter que l’intégration statistique des données des D.O.M., comptabilisées avec l’étranger avant 1997, a tendance à fausser les résultats à l’exportation, compte tenu notamment des apports de crevettes de Guyane française. Le dynamisme des échanges repose en 1997 essentiellement sur l’augmentation du prix moyen des transactions dans un contexte de léger ralentissement des flux commerciaux en volume. L’évolution globale des prix des produits importés, de près de 11%, génère une augmentation des dépenses d’importations de près de 9 %, qui passent de 16 à 17,3 milliards de francs. A l’exportation, l’indicateur des prix moyens qui affiche une très forte croissance de 26,1 %, gonfle les recettes des ventes réalisées hors de France, qui ont évolué de 5 à 6,25 milliards de francs. Le classement des produits importés est resté identique en 1997 à celui des deux dernières années. Les achats de crevettes se maintiennent au premier rang de nos importations (2,7 milliards de francs), suivis de près par les achats de saumon (2,5 milliards) puis de thon (2,1 milliards). Ces trois premier postes enregistrent par rapport à 1996 un taux de croissance de 5 à 6 % et contribuent de manière significative à la hausse des dépenses globales. On note par ailleurs une augmentation plus sensible des dépenses relatives aux approvisionnements en poissons « non identifiés » : filets, blocs et poissons entiers atteignent respectivement 1,2 milliard et 900 millions de francs, tandis que le montant des importations de cabillaud s’est accru de 5 % en un an, pour atteindre 1,1 milliard de francs en 1997.

La Norvège représente le deuxième fournisseur de la France, après le Royaume-Uni, avec 10 % du volume des importations totales de notre pays en 1997 (97.476 tonnes, pour une valeur de 1,8 milliard de francs). Elle a été un des principaux bénéficiaires du développement des échanges l’année dernière, avec la progression de ses ventes en saumon, lieu noir et morue.

L’Islande représente le septième fournisseur de la France, avec 5 % du volume de nos importations (46.987 tonnes, pour une valeur de 653 millions de francs. Ses ventes vers la France ont porté essentiellement sur des filets de lieu noir ainsi que de morue congelée et salée. Inversement, nos exportations vers ces deux Etats de l’Espace économique européen sont très réduites.

Dans un contexte peu favorable à une augmentation de l’effort de pêche, l’amélioration du solde déficitaire de nos échanges passe avant tout par une amélioration du taux de couverture de notre consommation interne, ce qui suppose une valorisation des produits français auprès des consommateurs.

Cette action est aujourd’hui menée par le FIOM qui intervient sur différents aspects qui vont du soutien à divers programmes d’amélioration de la qualité mis en œuvre par les producteurs (certification, indication d’origine…), d’information du consommateur (actions dans les points de vente) et de promotion des produits.

Les autorités soutiennent par ailleurs la promotion des produits français sur les principaux marchés étrangers afin de développer nos exportations. Cette intervention qui doit être soutenue a cependant été limitée, dans le passé, par les dévaluations monétaires successives intervenues dans les pays qui constituent nos principaux clients, notamment l’Espagne et l’Italie.

Au delà de l’amélioration de nos échanges extérieurs, il convient de contrôler la loyauté de nos importations. Ainsi, depuis la création du grand marché unique entre les pays membres de l’Union européenne, il est impératif que les importations de produits de la mer sur le territoire communautaire s’effectuent dans la transparence la plus absolue et notamment dans le respect le plus strict et homogène des normes sanitaires communautaires. Cette préoccupation conduit la France à agir à deux niveaux :

· Au plan communautaire, il convient que les contrôles soient développés et garantissent le respect homogène des règles sanitaires et douanières dans tous les Etats membres. A cet égard, les mesures proposées dans le cadre de la réforme de l’O.C.M., actuellement en cours de discussion au sein des instances communautaires, devraient permettre d’assainir les règles d’échanges avec les pays tiers. Elles concernent notamment :

– le renforcement des pouvoirs de contrôle des inspecteurs de la Commission ;

– le développement d’un processus d’assistance mutuelle entre les Etats membres, associé à une coordination plus efficace de leurs services de contrôle.

· Au niveau national, les importations de produits de la pêche font l’objet d’un régime de contrôle renforcé :

– en matière sanitaire, les services vétérinaires du ministère de l’agriculture et de la pêche contrôlent et sanctionnent sévèrement les infractions qui peuvent être constatées ;

– dans le domaine des normes de commercialisation (fraîcheur, calibrage…), les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes contrôlent la régularité des produits mis en vente ;

– en matière d’origine, les services de la direction générale des douanes et des droits indirects veillent à ce que l’application des régimes tarifaires préférentiels accordés à certains pays tiers ne bénéficie pas indûment à d’autres Etats qui ne peuvent y prétendre.

III.— LES CRÉDITS CONSACRÉS À LA PÊCHE
ET AUX CULTURES MARINES POUR 1999

En reconduisant globalement les dotations pour l’année 1999 à leur niveau de l’année en cours, dans un contexte de poursuite de la rigueur budgétaire, l’Etat confirme ainsi son engagement à poursuivre la mise en œuvre des priorités définies en faveur de la filière des pêches maritimes et des cultures marines. Il convient de rappeler que la stabilisation des crédits s’effectue à un niveau satisfaisant, puisque dans un contexte d’inflation particulièrement faible, les dotations s’inscrivent à un niveau supérieur de près de 30 % par rapport à celui de1995.

Les crédits consacrés à la pêche au sein du ministère de l’agriculture se répartissent en une subvention à l’IFREMER (chapitre 36-22) reconduite pour son montant de 1998, soit 3,29 millions de francs, en crédits d’intervention (chapitre 44-36) et en crédits d’investissement (chapitre 66-36).

A.— LES CRÉDITS D’INTERVENTION

1. La subvention à l’OFIMER

La transformation du FIOM en office interprofessionnel des produits de la mer (OFIMER), qui devrait intervenir pour le 1er janvier prochain, s’accompagnera du transfert de la section sociale de l’ancien FIOM, destinée à la participation aux caisses de chômage intempéries, au comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM). Ainsi l’OFIMER verra son rôle économique renforcé. Il contribuera à développer des démarches de qualité et un partenariat entre l’amont et l’aval de la filière, pour une meilleure prise en compte des réalités du marché.

La subvention de l’Etat à l’OFIMER / FIOM sera en 1999 en très légère progression par rapport à son niveau pour l’année en cours, pour s’établir, à périmètre équivalent, à 95,59 millions de francs contre 95,13 millions pour 1998. Les dotations consacrées à la section sociale, de 30 millions de francs comme cette année, seront ainsi transférées au profit de la CNPMEM.

Une part importante de la subvention à l’OFIMER sera consacrée aux actions structurelles permettant la modernisation et la réorganisation de la filière :

– renforcement des mesures visant à améliorer la politique de qualité et à valoriser les produits de la mer français, impliquant l’ensemble des acteurs de la filière, du marin-pêcheur au distributeur ;

– encouragement des démarches communes de commercialisation des organisations de producteurs. Ceci concerne plus particulièrement les espèces les plus sensibles pour lesquelles des schémas d’intervention communs et des campagnes de promotion concertées sont nécessaires ;

– incitation à la restructuration et à la modernisation de la filière : amélioration de la connaissance, de la régulation et de l’orientation de l’offre, modernisation des entreprises de mareyage.

2. Les interventions en faveur des entreprises de pêche

La France a rattrapé le retard constaté sur l’exécution du POP III, qui atteignait 4 % par rapport aux obligations de réduction de puissance au 31 décembre 1996. Cela a permis la mise en œuvre du POP IV et par conséquent celle des aides qui lui sont associées.

Les crédits qui sont ouverts à l’article 20 du chapitre 44-36 sont destinés à poursuivre la mise en œuvre du plan de sortie de flotte, permettant l’ajustement de la flotille française aux objectifs définis par le programme communautaire d’orientation pluriannuelle.

La dotation prévue pour 1999, est à périmètre équivalent, égale à celle de 1998. Quoiqu’en forte progression apparente (52 millions de francs contre 22 millions), elle résulte du transfert des 30 millions de francs autrefois gérés par le FIOM au titre de sa section sociale, désormais transférée au CNPMEM. Les 22 millions de francs restants serviront, comme aujourd’hui, à permettre l’adéquation entre les capacités de capture et l’état de la ressource.

B.— LES CRÉDITS D’INVESTISSEMENT

Il convient tout d’abord de rappeler, s’agissant de l’investissement en faveur de la pêche artisanale, que la loi d’orientation a prévu un dispositif fiscal d’incitation lors de la première installation. Toutefois, la récente mise en place du système de « SOFIPECHE » ne permet pas encore d’en dresser un bilan.

Au plan budgétaire, les crédits de paiement (19 millions de francs) et les autorisations de programme (18,1 millions de francs) destinés à la modernisation de la flotte et à l’aquaculture seront reconduits en 1999, à l’identique de l’exercice qui s’achève.

L’attribution des aides à la pêche est conditionnée, aux termes de nos engagements européens, au respect des objectifs des POP. L’apurement du retard de la France dans ce domaine permettra la reprise des aides à la construction, les opérations sans augmentation de capacités n’ayant pas été quant à elles affectées par les retards enregistrés.

Votre rapporteur, s’il apprécie positivement le niveau des dotations consenti, estime cependant que le retour à une politique de modernisation des navires de pêche, rendue possible par le comblement des retards, nécessitera à partir de l’année 2000 des crédits plus importants.

Enfin, la dotation relative aux investissements à terre est également reconduite en 1999 à l’identique des montants prévus pour l’année en cours (20,6 millions de francs en crédits de paiement et 21,2 millions en autorisations de programme). Ces crédits permettront de soutenir l’activité du secteur du mareyage en poursuivant notamment la modernisation des circuits de commercialisation. Ils permettront également de poursuivre la réalisation des contrats de plan Etat-régions.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA PÊCHE

 

LFI 98

PLF 99

Variation PLF 99/
LFI 98 (en %)

Chapitre 36–22

     

Art. 14.– IFREMER

3,29

3,29

=

Chapitre 44–36

     

Art. 20.– interventions en faveur des entreprises de pêche et de cultures marines

22,60

52,00

 

Art. 30.– organisation des marchés : industrie et commercialisation des produits de la mer

125,13

95,59

 

Total dépenses ordinaires

150,42

150,88

+ 0,3 %

Chapitre 64–36

     

art. 20.– modernisation et développement des entreprises de pêche et de cultures marines

18,10

18,10

=

art. 30.– organisation des marchés  : industrie et commercialisation des produits de la mer

20,6

20,60

=

Total des crédits de paiement

38,70

38,70

=

Total général

189,12

189,58

+ 0,24 %

       

Autorisations de programme

LFI 98

PLF 99

Variation PLF 99/LFI 98

Chapitre 64–36

     

art. 20.– modernisation et développement des entreprises de pêche et de cultures marines

19,00

19,00

art. 30.– organisation des marchés : industrie et commercialisation des produits de la mer

21,20

21,20

Total

40,20

40,20

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du mercredi 4 novembre 1998, la commission a entendu M. Jean Glavany, ministre de l’agriculture et de la pêche, sur les crédits de son département pour 1999.

S’agissant du secteur de la pêche, le ministre a indiqué que son action s’inscrivait dans le cadre de la loi d’orientation sur la pêche maritime et les cultures marines. Il a mis l’accent en particulier sur la poursuite de la modernisation de la flotte de pêche, engagée par la France en mars dernier à travers un plan substantiel de sortie de flotte, en partenariat avec les régions ou départements concernés. Après avoir estimé que ce plan est en train de réussir, il a précisé, en outre, que la France venait d’obtenir de la Commission européenne la reprise des autorisations de construction de bateaux interrompue en 1997. Il a également rappelé que la filière sera désormais dotée d’un véritable office interprofessionnel avec la création de l’OFIMER et souligné que le projet de budget pour 1999 maintenait à niveau les crédits alloués à la pêche, à près de 200 millions de francs.

M. Dominique Dupilet, rapporteur pour avis des crédits de la pêche, a considéré que la France, qui dispose des plus grandes façades littorales au sein de l’Union européenne, devait affirmer sa vocation maritime. Insistant sur l’importance de la pêche au sein des compétences du ministère de l’agriculture, il a estimé que notre pays devait consacrer des efforts importants pour réduire le déficit annuel de 11 milliards de francs constaté au sein de la filière.

Il a indiqué que la reconduction en 1999 des dotations budgétaires consenties pour 1998 en faveur du secteur s’effectuait après des hausses importantes de ces crédits au cours des années antérieures. Leur niveau sera ainsi suffisant pour mettre en œuvre les dispositions contenues dans la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d’orientation pour la pêche maritime et les cultures marines. Il a demandé que soit accélérée la préparation des décrets d’application de cette loi, dont certains tardent à être publiés.

Se réjouissant de la reprise de la construction des navires de pêche il a considéré que, si les crédits prévus étaient suffisants en 1999 pour poursuivre les sorties de flotte en application du IVème plan d’orientation pluriannuelle (POP 4), il serait nécessaire de les accroître en 2000 pour permettre le financement de la modernisation d’une flotte de pêche souvent trop âgée.

Rappelant les obstacles juridiques récemment rencontrés pour créer l’Office interprofessionnel des produits de la mer (OFIMER), il a souhaité que sa création puisse intervenir avant la fin de cette année et demandé des précisions sur les moyens qui seraient mis en œuvre pour assurer la transition entre la disparition du fonds actuel (FIOM) et la naissance du nouvel office.

Il a ensuite interrogé le ministre sur trois points :

– quel est le calendrier de mise en place des dispositions de la loi d’orientation interdisant la pratique abusive des captations de quotas ? Est-il prévu d’établir un bilan de l’efficacité du dispositif à la fin du premier semestre de 1999 ?

– quelles dispositions sont prévues pour accompagner l’interdiction décidée des filets maillants dérivants et indemniser les pêcheurs visés par cette mesure ?

– le rapport prévu par la loi d’orientation sur les mesures relatives au chômage à la pêche, a été remis au Gouvernement à la fin du mois d’août. Alors que la concertation sur ce point s’achève avec les partenaires du secteur, quelles suites lui seront données et selon quel calendrier ?

En réponse au rapporteur pour avis, le ministre de l’agriculture et de la pêche a apporté les précisions suivantes :

– les décrets nécessaires à la mise en place de l’OFIMER seront pris avant la fin de cette année ;

– les dispositions de la circulaire relative aux captations de quotas entreront en vigueur le 1er janvier prochain. Comme le prévoit la loi, les entreprises qui exploitent des quotas de pêche français devront avoir un lien économique réel avec le territoire et y disposer d’un établissement stable. Un contrôle très strict du respect de ces règles a été demandé aux affaires maritimes ;

– au-delà du délai de quatre ans avant l’interdiction effective des filets maillants dérivants, la France a obtenu, lors du dernier Conseil des ministres de l’agriculture du 22 octobre dernier, des mesures importantes de compensation, qui portent sur le cofinancement de la recherche d’autres techniques de pêche, la reconversion des navires thoniers et la mise en place d’une aide adaptée aux sorties de flotte et à l’indemnisation des marins. Le ministre de l’agriculture a demandé sur ce point que des crédits soient d’ores et déjà débloqués, au niveau national, dans le cadre de la prochaine loi de finances rectificative ;

– le rapport de Mme Marie-Françoise Simon-Rovetto sur le chômage à la pêche artisanale, a montré l’existence de ce phénomène et propose que les mesures pour le compenser ne portent pas sur une simple indemnisation, mais comportent, comme dans les autres secteurs, des volets de traitement social et de requalification professionnelle. C’est pourquoi l’hypothèse de l’affiliation des pêcheurs aux ASSEDIC est la plus intéressante, car le financement de ces prestations annexes serait prohibitif dans le cadre d’un régime spécifique. Cependant, cette solution ne rencontre pas l’accord de tous les partenaires et la concertation doit se poursuivre afin de mettre en place un dispositif dans le courant du premier semestre de 1999.

M. André Angot a demandé si les autorisations de construction et de modernisation de la flotte de pêche seraient accordées eu égard aux efforts consentis par chaque région pour la réalisation des objectifs de sortie de flotte.

M. Léonce Deprez a insisté sur l’urgence d’une modernisation de la flotte de pêche ; il a souhaité à cet égard que les prochains contrats de plan Etat-régions concourent à cet objectif, qui permettra aux jeunes de pouvoir s’installer dans ce secteur.

En réponse aux intervenants, le ministre de l’agriculture et de la pêche a précisé que les possibilités consenties par la Commission européenne de contribuer au financement de la modernisation de la flotte de pêche, sont limitées. Dans ce cadre, les attributions seront fonction de l’effort consenti par les régions en faveur des sorties de flotte, ce qui est favorable à la Bretagne. La priorité sera donnée aux remplacements qui n’accroissent pas la jauge ou la puissance, et à la première installation des jeunes.

Conformément aux conclusions de M. Dominique Dupilet, rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de l’agriculture et de la pêche : pêche pour 1999.

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