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le 5 novembre 1998

N° 1111

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 octobre 1998.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1) SUR
LE PROJET DE loi de finances pour 1999 (n°1078),

PAR M. DIDIER MIGAUD,

Rapporteur Général,

Député.

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ANNEXE N° 40
DÉFENSE

Rapporteur spécial :
M. Jean-Michel BOUCHERON

Député

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Lois de finances.

La commission des finances, de l'économie générale et du plan est composée de : MM. Augustin Bonrepaux, président ; Didier Migaud, rapporteur général ; Jean-Pierre Brard, Arthur Dehaine, Yves Tavernier, vice-présidents ; Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jegou, Michel Suchod, secrétaires ; MM.  Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Alain Belviso, Christian Bergelin, Éric Besson, Jean-Michel Boucheron, Michel Bouvard, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Yves Cochet, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Raymond Douyère, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jacques Heuclin, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Alain Rodet, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Jean-Pierre Soisson, Georges Tron, Philippe Vasseur, Jean Vila.

CHAPITRE PREMIER : LA MODERNISATION FINANCIÈRE DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 9

I.- L'AMÉLIORATION DU CONTRÔLE DE GESTION 10

A.- LA RÉFORME DES PROCÉDURES COMPTABLES APPLICABLES AUX INVESTISSEMENTS 10

1.- La comptabilité spéciale des investissements 10

2.- Les opérations budgétaires d'investissement 11

B.- UNE UTILISATION PLUS MESURÉE DES PROCÉDURES DÉROGATOIRES 13

II.- LA RÉFORME DE LA NOMENCLATURE BUDGÉTAIRE 15

A.- UNE TRANSPARENCE ACCRUE 16

B.- UNE RATIONALITÉ ÉCONOMIQUE ENCORE PERFECTIBLE 21

1.- La répartition entre le fonctionnement et l'équipement 21

2.- La définition de la dépense de défense 25

a) Les charges de reconversion 26

b) La recherche duale 27

CHAPITRE II : LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 1999
ET LA PROGRAMMATION MILITAIRE
29

I.- LA STABILISATION DES RESSOURCES 30

A.- L'ENCOCHE DE 1998 ÉTAIT BIEN UNE ENCOCHE 30

B.- L'ABSENCE DE RÉGULATIONS DÉSORDONNÉES 31

1.- La régulation de l'exercice 1998 est plus clémente que les précédentes. 31

2.- Le financement des opérations extérieures 37

C.- LA MONTÉE EN PUISSANCE DU TITRE III 42

II.- L'ÉVOLUTION DIFFÉRENCIÉE DES COMPOSANTES DU TITRE III 43

A.- LES PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES 47

B.- LA DIFFICILE MAÎTRISE DES RÉMUNÉRATIONS ET CHARGES SOCIALES 49

1.- Les effectifs 50

2.- Les mesures d'accompagnement de la professionnalisation 51

3.- Les mesures salariales et indemnitaires 52

C.- LA BAISSE DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT 56

III.- LA " SANCTUARISATION " DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT 59

A.- LE SOCLE DES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT ÉTRANGER
AUX PROGRAMMES D'ARMEMENT 62

1.- Les infrastructures 62

2.- Les munitions 64

B.- UN EFFORT DE RECHERCHE ENCORE INSUFFISANT 65

C.- LE FINANCEMENT DES PROGRAMMES 67

1.- Les conséquences financières de la revue des programmes 67

2.- La politique de réduction des coûts menée par la DGA 70

3.- Les nouvelles méthodes d'acquisition 73

a) Les commandes globales 73

b) Les programmes en coopération et le développement de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) 75

c) Les méthodes britanniques 78

CHAPITRE III : LA PROFESSIONNALISATION DES ARMÉES 81

I.- LA DÉCROISSANCE CONTRÔLÉE DES EFFECTIFS D'APPELÉS 82

A.- UNE INQUIÉTUDE LÉGITIME ET DIFFÉRENCIÉE SELON LES ARMÉES 82

1.- Un impact relatif selon les modèles d'armées 82

2.- L'activation anticipée des volontaires services longs 83

B.- UNE INCORPORATION JUSQU'ICI CONFORME AUX PRÉVISIONS ET AUX BESOINS 84

1.- Le bon comportement civique des dernières générations d'appelés 84

2.- Les aléas de la fin de la transition 85

3.- L'arrivée des volontaires 85

II.- LA MUTATION BIEN ENGAGÉE DES EFFECTIFS MILITAIRES 86

A.- LE RECRUTEMENT DES ENGAGÉS 86

B.- LE RAJEUNISSEMENT DES CADRES 87

C.- LA FÉMINISATION DES ARMÉES 89

III.- UN POINT PRÉOCCUPANT : LES VACANCES DE POSTES DE CIVILS 91

A.- LES RAISONS D'UN BLOCAGE 92

B.- LES SOLUTIONS ENVISAGEABLES 94

1.- Un assouplissement des conditions imposées au recrutement des civils 95

2.- Un recours accru à la sous-traitance 96

CHAPITRE IV : L'ACTIVITÉ ET L'ENVIRONNEMENT DES ARMÉES 99

I.- L'ACTIVITÉ DES FORCES 99

A.- L'ARMÉE DE TERRE 99

1.- La réorganisation du commandement et du soutien 99

2.- Évolution des indicateurs d'activité 101

B.- L'ARMÉE DE L'AIR 102

1.- Évolution de l'organisation et des missions 102

2.- Évolution des indicateurs d'activité 104

C.- LA MARINE 105

1.- Le format de la flotte 105

2.- Évolution des indicateurs d'activité 106

II.- LA BAISSE DU COÛT D'INTERVENTION DE LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT (DGA) 108

A.- DÉFINITION ET PORTÉE DU COÛT D'INTERVENTION DE LA DGA 109

B.- LE PLAN STRATÉGIQUE DE LA DIRECTION DES CENTRES D'EXPERTISE ET D'ESSAIS 111

III.- LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA SÉCURITÉ EXTÉRIEURE 114

IV.- LA PARTICIPATION FRANÇAISE AU BUDGET DE L'OTAN 117

CHAPITRE V : L'EXÉCUTION DES GRANDS PROGRAMMES 121

I.- L'ESPACE 122

A.- UN DISPOSITIF RÉDUIT 122

B.- LES SATELLITES MILITAIRES D'OBSERVATION 123

1.- L'observation optique : le système Hélios 123

2.- L'observation radar : l'abandon programmé de Horus 126

C.- LES SATELLITES MILITAIRES DE TÉLÉCOMMUNICATION 128

1.- Le programme Syracuse II 128

2.- Le programme Syracuse III et l'échec de Trimilsatcom 128

D.- LA RECHERCHE DUALE 130

II.- LES FORCES NUCLÉAIRES 131

A.- LA STABILISATION DES CRÉDITS 131

B.- LES CRÉDITS TRANSFÉRÉS AU COMMISSARIAT À L'ÉNERGIE ATOMIQUE (CEA) 133

C.- LES PROGRAMMES NUCLÉAIRES 135

1.- Les opérations de démantèlement 137

2.- La force océanique stratégique 138

3.- La composante aéroportée 140

4.- Les transmissions nucléaires 141

5.- La simulation 142

III.- LES PROGRAMMES DE L'ARMÉE DE L'AIR 144

A.- LES CRÉDITS DES PRINCIPAUX PROGRAMMES 144

B.- LES MISSILES 147

C.- LES MATÉRIELS ÉLECTRONIQUES 148

D.- LES AVIONS DE COMBAT 150

1.- Le Mirage 2000 D 150

2.- La rénovation des Mirage 2000 DA (Mirage 2000-5 France) 151

3.- Le programme Rafale 152

E.- L'AVION DE TRANSPORT EUROPÉEN 158

IV.- LES PROGRAMMES DE LA MARINE 161

A.- LE GROUPE AÉRONAVAL 163

B.- LES AUTRES PROGRAMMES NAVALS ET AÉRONAVALS 165

V.- LES PROGRAMMES DE L'ARMÉE DE TERRE 166

A.- LE CHAR LECLERC 168

B.- L'HÉLICOPTÈRE DE COMBAT TIGRE 171

C.- L'HÉLICOPTÈRE NH 90 173

VI.- L'ÉQUIPEMENT DE LA GENDARMERIE 173

CHAPITRE VI : LES RESTRUCTURATIONS DE L'INDUSTRIE D'ARMEMENT 177

I.- LA DIFFICILE TRANSITION DES " ARSENAUX " 177

A.- LA DIRECTION DES CONSTRUCTIONS NAVALES 177

1.- La délicate adaptation des effectifs au plan de charge 178

2.- Les leçons de l'exécution du contrat " Mouette " 181

B.- LE SERVICE DE MAINTENANCE AÉRONAUTIQUE 184

C.- LE GROUPE GIAT INDUSTRIES 186

1.- Des perspectives très sombres 187

a) L'activité blindée 188

b) Les armes et les munitions 189

c) Les activités nouvelles 190

2.- Un plan stratégique douloureux 190

a) Les réductions d'effectifs 191

b) La rationalisation de l'outil industriel 192

c) L'hypothétique retour à l'équilibre financier 193

II.- LA CONSTITUTION DE " CHAMPIONS " NATIONAUX 194

A.- LA RESTRUCTURATION DU CAPITAL DE THOMSON-CSF 195

B.- L'ACCORD AÉROSPATIALE - MATRA HAUTES TECHNOLOGIES 197

III.- LA DIFFICILE ÉMERGENCE DE LA SOCIÉTÉ AÉROSPATIALE ET DE DÉFENSE EUROPÉENNE 200

A.- LES INITIATIVES DES POUVOIRS PUBLICS 201

B.- DE NOMBREUSES INTERROGATIONS SUBSISTENT 202

EXAMEN EN COMMISSION 205

A.- AUDITION DU MINISTRE 205

B.- EXAMEN DES CRÉDITS 209

ARTICLE 47 : Mesures nouvelles - Dépenses ordinaires des services militaires 213

ARTICLE 48 : Mesures nouvelles - Dépenses en capital des services militaires 214

ANNEXE : Liste des personnes entendues par votre Rapporteur 215

CHAPITRE PREMIER :

LA MODERNISATION FINANCIÈRE
DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

Le ministère de la Défense n'était pas bien géré. Ce constat navrant au regard de la masse des crédits qui lui sont affectés, a été fait par de nombreux acteurs ou observateurs du secteur de la défense. Il repose sur des indices objectifs : reports de charges, intérêts moratoires, demandes d'ouvertures de crédits liées aux insuffisances de la construction budgétaire en sont autant d'exemples.

Cet état de fait tenait à des chocs externes sur lesquels le ministère avait peu de prise (régulation et annulations massives de crédits), mais aussi à l'insuffisance de ses instruments de gestion, ce qui relève bien de sa responsabilité.

Cette analyse a été précisée par deux rapports différents, l'un de la Cour des Comptes, La gestion budgétaire et la programmation au ministère de la Défense, datant de juin 1997, l'autre de l'Inspection générale des finances et du Contrôle général des armées portant sur Les arriérés de paiement du ministère de la Défense en matière d'équipement et datant d'avril 1997. Sous l'effet de ces critiques conjointes, une prise de conscience s'est véritablement opérée et le ministère, au terme d'une réflexion interministérielle, s'est engagé dans un processus de modernisation financière reposant sur deux fondements :

· l'amélioration du contrôle de gestion ;

· la réforme de la nomenclature budgétaire.

Les deux mouvements étaient indispensables, l'un dans une optique d'amélioration de la performance en interne, l'autre en direction du monde extérieur afin de démontrer que l'opacité ne servait plus de paravent à des dysfonctionnements répétés. Sans en dresser un premier bilan trop précoce, il importe de souligner les réels efforts qui sont d'ores et déjà entrepris.

I.- L'AMÉLIORATION DU CONTRÔLE DE GESTION

L'amélioration du contrôle de gestion du ministère de la Défense doit lui permettre de renforcer sa capacité de pilotage, d'adaptation de la gestion à l'évolution de la situation (niveau des ressources, réorientations des politiques) et de centralisation des données financières. Pour ce faire, de nouveaux instruments et modes de gestion sont indispensables. Ils reposent essentiellement sur l'application de la comptabilité spéciale des investissements, la mise en _uvre des opérations budgétaires d'investissement et sur une utilisation plus mesurée des procédures dérogatoires.

A.- LA RÉFORME DES PROCÉDURES COMPTABLES APPLICABLES AUX INVESTISSEMENTS

1.- La comptabilité spéciale des investissements

En vigueur dans les administrations civiles depuis quinze ans, la comptabilité spéciale des investissements (CSI) est applicable aux dépenses d'investissement du ministère de la Défense depuis la circulaire interministérielle du 28 avril 1995. La CSI a été introduite progressivement. A partir du 1er janvier 1996, elle a d'abord été appliquée à l'ensemble des services du ministère et à titre expérimental dans trois établissements de la Délégation générale pour l'armement (DGA). Puis, elle a été étendue à la moitié des établissements de la DGA, avant d'être généralisée à toute celle-ci au cours de la gestion 1998.

La CSI est une comptabilité contradictoire qui retrace les différentes phases de l'utilisation des autorisations de programme, de leur ouverture jusqu'à leur mise à disposition aux ordonnateurs chargés de la réalisation des opérations. Elle est tenue par les contrôleurs financiers déconcentrés au niveau de l'article budgétaire. Elle se subdivise en deux parties : la comptabilité des délégations et des subdélégations d'autorisations de programme et la comptabilité des opérations d'investissement.

La première retrace les différentes phases de la procédure de délégation et de subdélégation des autorisations de programme au profit des ordonnateurs secondaires.

La seconde est une comptabilité d'exécution des opérations d'investissement au niveau du chapitre et de l'article, retraçant l'ensemble des événements financiers qui marquent le déroulement de chaque opération : affectations, engagements et paiements. Elle est tenue contradictoirement par l'ordonnateur secondaire et son contrôleur financier de rattachement.

Chaque opération d'investissement enregistrée en CSI s'identifie par un numéro comprenant le code du ministère et de l'ordonnateur secondaire et les informations sont centralisées à l'agence centrale du trésor pour transmission au ministère de la Défense.

Comme le remarquait le rapport de la Cour des comptes en date de juin 1997 déjà cité, la mise en _uvre de la CSI représente un progrès à plusieurs titres : " désormais tenue contradictoirement, la comptabilité des autorisations de programme ne sera plus un simple document de suivi interne, mais aura le caractère d'un véritable document comptable. La duplication des enregistrements comptables et des systèmes de liaison
- verticales avec la direction des services financiers (DSF), horizontales avec les comptables assignataires - constituera donc un élément de sécurité. Enfin, l'analyse par la CSI des autorisations de programme - de leur ouverture à la clôture de l'opération - apportera à la DSF et aux services gestionnaires l'outil qui leur faisait jusqu'à présent défaut pour détecter les AP ouvertes non affectées ou affectées mais n'ayant pas donné lieu à engagement
 ".

Cette réforme est complétée par la définition d'un nouveau catalogue des opérations budgétaires d'investissement afin de rétablir un lien comptable entre les autorisations de programme et les crédits de paiement du ministère.

2.- Les opérations budgétaires d'investissement

L'instrument de rétablissement du lien comptable entre les autorisations de programme et les crédits de paiement et entre la nomenclature budgétaire et l'exécution concrète des investissements est l'opération budgétaire d'investissement (OBI).

L'OBI est un agrégat synthétique qui regroupe plusieurs opérations budgétaires représentatives d'une opération programmée. Elle correspond à un ensemble de tâches dépendant les unes des autres, s'enchaînant dans le temps de manière prédéterminée et concourant à la réalisation d'un objectif simple ou d'une tranche d'un objectif complexe en vue de satisfaire un objectif militaire.

Chaque OBI est identifiée par son code numérique à six chiffres, adoptée une fois pour toutes afin de suivre son exécution pendant toute sa durée. Le premier indique le gouverneur de crédits auquel se rattache l'opération programmée, les quatre suivants son radical et le dernier sa catégorie de coût.

L'OBI est désormais le périmètre des délégations des crédits de paiement. Sa mise en place est un facteur de meilleure transparence et de plus grande efficacité de la gestion des crédits d'équipement du ministère de la Défense.

Meilleure transparence, parce qu'il existe maintenant entre la construction budgétaire et l'exécution comptable une chaîne unique et simple, et que le nombre d'opérations budgétaires d'investissement est relativement limité (moins d'un millier).

Plus grande efficacité, car il sera possible de connaître, en temps réel, grâce à l'installation du logiciel CARNOT, pour chaque service gestionnaire le rythme de consommation des crédits par comparaison entre les autorisations de programme affectées et les crédits de paiement consommés. Cette amélioration de la gestion permettra de fonder tant les décisions de régulation budgétaire, que la construction budgétaire sur des données comptables plus fiables.

L'OBI se caractérise par une imputation budgétaire unique, sur un seul chapitre et sur un seul article. En se référant à son code (celui-ci est fixé pour toute sa durée de vie), on retrouve son article et son chapitre d'imputation, tant dans l'ancienne que dans la nouvelle nomenclature. L'OBI constitue ainsi le niveau de base de la gestion de crédits d'équipement au sein du ministère de la Défense.

Le catalogue des opérations budgétaires d'investissement (COBI) constituera désormais la grille privilégiée d'analyse et de suivi de l'effort d'investissement du ministère de la Défense. Cet instrument de référence, véritable tableau de bord de la programmation, faisait jusqu'à présent particulièrement défaut.

B.- UNE UTILISATION PLUS MESURÉE DES PROCÉDURES DÉROGATOIRES

La dernière réforme financière à mener et qui, à la différence des précédentes, n'est pas encore réellement engagée, consiste à restreindre considérablement l'utilisation des procédures dérogatoires d'exécution de la dépense publique en vigueur au ministère de la Défense.

Ces procédures dérogatoires sont habituellement désignées par le terme générique de dépenses à bon compte. Elles regroupent les fonds d'avances destinés aux dépenses de solde et d'alimentation et les masses, elles-mêmes décomposées en quatre catégories afin de financer les dépenses d'entretien du personnel, de chauffage, éclairage, eau et force motrice, de casernement et d'entretien des matériels d'usage courant.

Le caractère dérogatoire de ces procédures de dépenses réside dans le fait que les crédits destinés à être dépensés sont extraits de la caisse du comptable public avant l'engagement juridique et versés dans les caisses des trésoriers militaires. Ce sont alors ces derniers qui effectuent les paiements venant éteindre les dettes de l'État.

Il en résulte que l'ordonnancement est réalisé avant l'examen des pièces justificatives habituelles, puisqu'elles n'existent pas encore. Une fois la dépense faite, ces pièces sont toutefois conservées au sein des armées et mises à la disposition des comptables publics qui en feraient la demande.

Par ailleurs, le fait que les crédits concernés soient versés par le comptable public dans la caisse d'un agent militaire, avant d'être réellement dépensés, relativise fortement l'application des principes de spécialité et d'annualité budgétaires au ministère de la Défense.

Enfin, le contrôle de droit commun est inapplicable à ces dépenses, compte tenu de la complexité engendrée par leurs particularités. Le contrôle particulier qui leur est appliqué repose, d'une part, sur la responsabilité pécuniaire de toute militaire gestionnaire de fonds, selon un régime spécifique, analogue à celui des comptables publics et rapprochant les trésoriers militaires des régisseurs, d'autre part, sur l'activité des corps de contrôle dont dispose la Défense, c'est-à-dire le corps du contrôle général des armées et les corps de commissaires.

Les commissaires sont statutairement autonomes. Ils sont particulièrement appelés à exercer ce contrôle des dépenses de par leur compétence ès qualité de dresser ou d'attester des actes authentiques, ce qui leur vaut une responsabilité spéciale et directe devant le ministre de la Défense en matière de vérification des comptes. De par leur prérogative légale, ils poursuivent le cas échéant et dans la forme voulue la régularisation des comptes. Ils reçoivent également délégation du commandement pour l'exercice de la surveillance administrative, ce qui étend le contrôle de la régularité des comptes à celui de l'opportunité des dépenses.

La justification de ces procédures dérogatoires repose sur l'existence de contraintes propres aux activités opérationnelles des militaires. Elles garantissent la confidentialité et la vitesse de réaction requises.

Néanmoins, le caractère massif de ces procédures (elles recouvrent une grande partie des crédits du titre III) et l'opacité qu'elles génèrent immanquablement ne sont plus de mise au moment où le ministère s'engage dans une démarche de transparence et de vérité des coûts dont la crédibilité repose sur la cohérence d'ensemble.

La Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 1997 a une nouvelle fois relevé les " facilités " permises par la procédure des fonds d'avance : " au budget de la défense, comme les années précédentes, des reports de charges sur dépenses ordinaires ont pour origine la procédure de " recomplètement des fonds d'avance ". Cette facilité est de plus en plus utilisée par le ministère de la défense : les reports de charges qui en résultent se montent à 570 millions en 1995, 823 millions en 1996 et, selon l'estimation des services gestionnaires, à 2.194 millions en 1997. Les raisons de cette augmentation seraient le surcoût des opérations extérieures, l'incidence sur les rémunérations du GVT ainsi que l'absence de moyens complémentaires suffisants pour résorber les reports de charges de l'année 1996 sur l'année 1997. Comme cela a déjà été observé, cette pratique qui permet de s'affranchir de la règle de l'annualité budgétaire nécessitera une remise à niveau d'autant plus brutale que la dérive constatée aura longtemps été tolérée. "

Les dépassements constatés sur le nombre des volontaires service long (VSL), dans l'armée de Terre et la Marine en 1997, illustrent une nouvelle fois la " souplesse " de gestion autorisée par ces procédures
(cf. infra).

Conscient du caractère anachronique de cette survivance, le ministère a décidé d'engager une réflexion afin de :

· recentrer le périmètre d'utilisation des procédures dérogatoires sur ce qui demeure strictement nécessaire au terme du processus de professionnalisation, en faisant passer sous le régime de droit commun les dépenses qui pourraient désormais s'en satisfaire ;

· étudier les possibilités offertes par certaines modalités spécifiques de dépenses du droit commun (la régie d'avance, en particulier) pour vérifier dans quelle mesure leur utilisation pourrait répondre à certains besoins actuellement satisfaits par les procédures dérogatoires.

Le résultat de ces travaux sera entériné par un décret qui constituera une mise à jour de la base réglementaire de ces procédures dérogatoires.

Ces travaux ont déjà trouvé leur première traduction dans le domaine du paiement des rémunérations : le paiement sans ordonnancement préalable est appliqué au personnel civil de l'administration centrale depuis le 1er janvier 1998. Il est prévu de l'étendre dès 1999 au reste du personnel civil de la Défense, à l'exception des personnels ouvriers de la DGA. Le système devrait ensuite être progressivement étendu à certains militaires, en commençant par les corps militaires de l'armement.

On ne peut qu'inciter le ministère à progresser rapidement dans cette voie d'alignement progressif sur le droit commun.

II.- LA RÉFORME DE LA NOMENCLATURE BUDGÉTAIRE

La réforme de la nomenclature budgétaire du fascicule de la Défense était un souhait renouvelé du Parlement, motivé par le peu de transparence et l'extrême globalisation de la présentation des crédits adoptée jusqu'en 1998.

Cette nomenclature datait de 1993, année au cours de laquelle le nombre de chapitres était passé de 61 à 32 et les sections budgétaires avaient été supprimées.

La nouvelle nomenclature qui a été adoptée pour la loi de finances initiale pour 1999 fournit incontestablement une meilleure lisibilité de la destination effective des crédits. En revanche, sa rationalité économique, encore très marquée par la présentation précédente et la structure comptable du ministère, reposant notamment sur des comptes de commerce importants et atypiques, reste très contestable et ne permet guère des comparaisons internationales sans retraitement d'envergure.

A.- UNE TRANSPARENCE ACCRUE

Toute nomenclature repose sur des choix qui peuvent être contestés car présentant inévitablement une part d'arbitraire. C'est évidemment le cas du budget de la Défense, particulièrement complexe et lourd, qui présente des " entrées " différentes, par catégorie de coût (entretien programmé du matériel, entretien programmé du personnel, infrastructures, etc..), par gestionnaire de crédits (état-major des armées, DGA, etc...) ou par domaine d'activité (espace, nucléaire, armement classique, etc...). La réforme de 1999 n'a pas opéré de bouleversement conceptuel ou une modification fondamentale de la grille de lecture des 240 milliards de francs de crédits publics affectés à la Défense.

Elle a simplement décomposé des chapitres par trop massifiés en privilégiant la notion de programme d'armement, elle-même validée par la réforme des instruments de gestion interne du ministère et notamment le recours aux opérations budgétaires d'investissement.

S'agissant du titre III, dès la loi de finances initiale pour 1998, un effort a été fait pour mieux distinguer les grandes catégories de personnels militaires. Ainsi, un chapitre consacré aux appelés a-t-il été créé. De même, en 1999, un chapitre nouveau est affecté aux volontaires. Cette méthode est la bonne. Afin de suivre précisément le déroulement de la professionnalisation et l'évolution respective du poids des différentes catégories de personnel, il importe de disposer de chapitres spécialisés.

Un trop grande fongibilité dans ce domaine renforcerait une souplesse de gestion déjà très présente par rapport au modèle budgétaire voté par le Parlement, comme le montrent, par exemple, les vacances de postes de civils, et ne permettrait pas au contrôle parlementaire de s'exercer pleinement.

Dans le même ordre d'idée, dès 1998, les rémunérations principales des personnels ont été disjointes des indemnités sur des chapitres différents. Ce mécanisme permet de mieux cerner la portée du régime indemnitaire des personnels de la Défense, particulièrement varié et complexe.

Enfin, en 1999, un chapitre budgétaire sera créé pour les dépenses de maintien de l'ordre de la gendarmerie qui correspondent bien à une mission spécifique et un autre pour les crédits de fonctionnement des états-majors interarmés stationnés outre-mer, qui seront ainsi regroupés sous la responsabilité de l'état-major des armées.

S'agissant du titre V, les crédits sont répartis en 1999 de façon plus homogène entre les chapitre. Il n'existera plus de chapitre regroupant à lui seul plus de la moitié des crédits du titre V (le chapitre 53-80 totalisait 44 milliards de francs en 1998).

La notion de programme devient un concept important de la nomenclature budgétaire. Ainsi, l'ensemble des ressources affectées à un même programme se retrouve désormais dans le même chapitre puisque les crédits de développement et de fabrication ne sont plus séparés. On dispose là des bases nécessaires à l'esquisse d'un calcul de coût consolidé.

Parallèlement, les ressources nécessaires au financement de vingt-cinq programmes d'armement majeurs sont individualisées sur des articles clairement identifiés. Les critères retenus pour le choix des programmes ainsi mis en lumière ont été leur poids financier, leur conduite en coopération ou leur portée opérationnelle. Ils représentent au total 24 milliards de francs, soit 29 % des crédits du titre V et 51 % de la totalité des crédits de fabrication et de développement.

 

LISTE DES PROGRAMMES INDIVIDUALISÉS EN ARTICLES
DANS LA NOUVELLE NOMENCLATURE

   

(en millions de francs)

 
 

Intitulés

Dotation 1999 (crédits de paiement)

 
 

Modernisation du réseau de télécommunication des bases aériennes (MTBA)

290

 
 

Syracuse III

301

 
 

Poste radio de 4ème génération (PR4G)

490,4

 
 

Socrate

347

 
 

Hélios II

1.254

 
 

SNLE - NG

2.199,3

 
 

M51

1.450

 
 

Famille sol-air futur (FSAF)

575

 
 

MICA

459

 
 

Rafale

3.750

 
 

SCALP - EG

368

 
 

Hélicoptère NH 90

347,1

 
 

Rubis

399

 
 

Mirage 2000 D

1.218

 
 

Système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA)

811

 
 

Apache

326

 
 

Mirage 2000-5

662

 
 

Véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI)

102

 
 

Char Leclerc

2.231

 
 

Hélicoptère Tigre

890

 
 

Torpille MU 90

237,8

 
 

Frégate Horizon

510,4

 
 

Frégate La Fayette

663,7

 
 

PAN Charles de Gaulle

1.312,9

 
 

Système de défense antiaérienne de la frégate Horizon (PAAMS)

360,1

 
 

Cette innovation revêt une réelle importance et doit être saluée comme telle. Elle renforce incontestablement la transparence du budget de la Défense et elle constitue une avancée majeure. Pour autant, deux remarques peuvent être faites.

Tout d'abord, il s'agit d'articles et non de chapitres budgétaires. Si cette présentation des crédits engage le Gouvernement devant le Parlement, cet engagement est d'ordre moral puisque la réglementation budgétaire permet une souplesse de gestion beaucoup plus affirmée pour les articles que pour les chapitres.

La modification de la ventilation des crédits par article est très aisée. Elle prend la forme d'un arrêté ministériel de sous-répartition qui, dans le cas spécifique de la Défense, n'est pas visé au préalable par le contrôleur financier central et elle n'est soumise à aucune limite quantitative. Dans le cas de chapitres, la modification doit prendre la forme d'un décret de virement du Premier ministre dans la limite de 10 % de la dotation initiale.

Si l'individualisation des dotations par programme pouvait sembler difficile sur des chapitres en raison de sa rigidité excessive, le choix des articles autorise une gestion divergente de la présentation initiale.

Ensuite, le nombre des programmes ainsi identifiés semble encore insuffisant. Il existe au moins 50 programmes qui peuvent être qualifiés d'importants au regard des critères définis. Le système de distribution d'information multifonctionnelle (MIDS), l'anti-char de 3ème génération moyenne portée (AC3GMP), l'anti-char de courte portée Eryx, l'aérodyne léger télépiloté Brevel, les programmes de transports de chaland de débarquement, le radar de contrebatterie Cobra ou encore le programme de simulation des essais nucléaires en sont autant d'exemples.

Ce processus doit donc s'inscrire dans une vision dynamique. Au fur et à mesure de la vie des programmes et de la montée en puissance de certains d'entre-eux, nul doute que le nombre d'articles dédiés à des programmes spécifiques augmentera et que l'information du Parlement gagnera encore en précision et en lisibilité. Ce mouvement salutaire est maintenant lancé et il appartiendra aux différentes parties concernées de l'entretenir. Il était inéluctable et un peu tardif, au regard de l'information dont disposent les parlements des pays comparables à la France.

Néanmoins, tout n'est pas encore très explicite dans cette nouvelle nomenclature. Il subsiste, ici et là, de nombreux chapitres réservoirs, aux intitulés sibyllins ou très extensifs, qui mériteraient d'être à leur tour décomposés en autant d'actions agrégées. Le principe de spécialité budgétaire ne s'en porterait que mieux.

 
 

LISTE INDICATIVE DES CHAPITRES OU D'ARTICLES " RÉSERVOIRS "
SUBSISTANT DANS LA NOUVELLE NOMENCLATURE

 
 

(en millions de francs)

 
 

Intitulé

Dotation 1999
(en crédits
de paiement)

 
 

Chapitre 34-04 article 10 - Entretien et activité des forces de l'armée de Terre

2.377

 
 

Chapitre 34-05 article 11 - Activités et dépenses communes des forces maritimes

506

 
 

Chapitre 34-06 article 10 - Fonctionnement des formations de gendarmerie

1.608

 
 

Chapitre 34-20 article 11 - Entretien programmé des matériels aériens et électroniques

628

 
 

Chapitre 51-61 article 22 - Terre - Développements, observation, communication, information

940

 
 

article 24 - Terre - Électronique

933

 
 

article 62 - État-major des armées - Systèmes spatiaux

610

 
 

Chapitre 51-71 article 51 - DGA - Armement et propulsion nucléaires

5.494

 
 

Chapitre 52-81 article 51 - DGA - Études amont hors domaines espace et nucléaire

2.454

 
 

Chapitre 53-81 article 16 - Air - Développement et production des matériels

2.236

 
 

Chapitre 53-81 article 24 - Terre - Programmes de missiles et matériels divers

1.047

 
 

article 25 - Terre - Développements armements terrestres

518

 
 

Chapitre 53-81  article 65 - Marine - Programmes de l'aéronautique navale

2.205

 
 

Chapitre 55-21  article 11 - Air - Maintien en conditions opérationnelles des matériels

4.667

 
 

article 23 - Terre - Entretien programmé des matériels

1.617

 
 

article 31 - Marine - Maintien en conditions opérationnelles - Réparations, rechange et soutien de l'aéronautique navale

1.271

 
 

article 33 - Marine - Maintien en conditions opérationnelles des bâtiments et renouvellement des rechanges

2.446

 
     

Sans devenir une maison de verre car chaque pays doit garder ses " black programme " et sans nuire à la sécurité de la défense ou aux intérêts de nos industriels, un effort de transparence accru pourrait être envisagé par le ministère de la Défense au cours des prochains exercices.

B.- UNE RATIONALITÉ ÉCONOMIQUE ENCORE PERFECTIBLE

Une nomenclature budgétaire est destinée à refléter aussi fidèlement que possible la destination réelle des crédits et le coût des politiques publiques menées dans un secteur d'activité donné.

Elle doit par conséquent adopter une certaine rationalité économique, qui, sans exiger la précision d'une comptabilité analytique que la cadre budgétaire français n'autorise pas, permette de disposer de coûts consolidés par catégorie de dépenses. Les évaluations nationales et les comparaisons internationales ne peuvent s'établir rationnellement qu'à partir du moment où l'on dispose de ce type d'instrument.

Malgré des progrès récents, le secteur de la défense n'atteint pas complètement encore en France ce niveau d'exigence. La nomenclature adoptée présente trop de particularismes pour être immédiatement exploitable. Un retraitement des données s'impose systématiquement.

1.- La répartition entre le fonctionnement et l'équipement

La présentation des crédits observe traditionnellement le clivage entre dépenses de fonctionnement (titre III seulement car le fascicule Défense ne dispose pas d'un titre IV) et dépenses en capital (titres V et VI).

Pour la première fois en France, les dépenses de fonctionnement ont été inscrites dans la programmation 1997-2002 en plus des dépenses d'équipement. Cela devrait entraîner une certaine cristallisation de la césure entre les deux domaines de manière à bien suivre l'exécution de la programmation à périmètre constant sous peine d'avoir à neutraliser des transferts internes en sus des transferts externes constatés par ailleurs. De fait, cette règle n'a pas été respectée, parfois d'ailleurs pour des raisons bien fondées. Au-delà de ces mouvements de va-et-vient, il subsiste encore des imputations de crédits inappropriées à la nature de la dépense, ce qui fausse l'analyse du rapport entre le fonctionnement et l'équipement.

Par exemple, l'intégralité des transferts à destination du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) provient du titre V et de dotations affectées à des programmes alors que la proportion des crédits finançant le titre III du CEA (RCS, fonctionnement) est de l'ordre de 40 % du total et atteint un montant de 3 milliards de francs. Pour le financement des activités de recherche civile du CEA, l'État adopte sur le fascicule Recherche une autre logique, plus conforme à la réalité de la dépense, avec une dotation inscrite au titre III (au titre IV à partir du projet de loi de finances pour 1999) destinée à financer le fonctionnement des équipes de recherche et une autre au titre VI pour l'équipement des laboratoires ou des installations.

Plus complexe est le cas des comptes de commerce retraçant l'activité de la Direction des constructions navales (DCN) et du Service de la maintenance aéronautique (SMA). Dans le budget actuel, la totalité des crédits finançant leur activité, et donc leurs charges de fonctionnement, figurent au titre V au motif que, comme des industriels " normaux ", ils répercutent dans leur devis une fraction de leurs coûts de fonctionnement et que l'ensemble correspond bien à une activité d'équipement ou de recherche.

Cette comparaison est assez artificielle compte tenu de la très grande dépendance de la DCN et du SMA vis-à-vis des commandes étatiques et de leur statut d'administration. Le compte de commerce n'a vocation, aux termes de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances, qu'à " retracer des opérations de caractère industriel ou commercial effectuées à titre accessoire par des services publics de l'État ". Les agents de la DCN et du SMA sont d'ailleurs pour la plupart d'entre eux des fonctionnaires de l'État, gérés par la direction du personnel du ministère de la Défense. L'article 21 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 interdit de financer la rémunération des agents de l'État sur un compte spécial du Trésor. Le traitement des personnels de la DCN incombe donc au titre III du budget général. Les dépenses correspondantes n'apparaissent pas en construction budgétaire dans la loi de finances initiale mais sous la forme de remboursement des comptes de commerce au budget général par rétablissement des crédits au titre III.

La DCN assurait jusque dans un passé récent des missions étatiques sans aucun caractère industriel. Le processus de séparation des activités industrielles et étatiques ou régaliennes de la DCN entrepris depuis 1992 a quelque peu clarifié les choses. Un rappel sur ce point s'impose afin de pleinement mesurer ses effets sur les différentes lois de finances initiales de la période.

En 1992, la DCN a été séparée en deux entités distinctes regroupant respectivement les missions relevant de la maîtrise d'ouvrage (donneur d'ordre) et celles relevant de la maîtrise d'_uvre (réalisation industrielle). Une troisième entité, le service de l'administration générale, assurait un soutien commun aux deux autres pour les ressources humaines, l'administration financière, les achats, les infrastructures et les méthodes.

Les attributions de la DCN étatique d'alors correspondaient dans le domaine naval aux missions habituelles des directions opérationnelles de la DGA, c'est-à-dire préparer l'avenir, conduire les programmes d'armement, y compris d'entretien, apporter à l'État une expertise technique, contribuer aux actions d'aide aux exportations et de contrôle et participer à la politique industrielle de l'État.

La composante industrielle de la DCN était chargée des études de conception, de la réalisation puis du maintien en état des matériels navals pour le compte de la Marine nationale et pour l'exportation, la promotion des produits du service industriel à l'étranger étant assurée par la société publique de droit privé DCN International.

La séparation des activités étatiques et industrielles a été poursuivie et approfondie en 1997 dans le cadre de la réforme de la DGA. Par décret n° 97-35 du 17 janvier 1997, deux organismes distincts ont été créés et les services communs redéployés.

La nouvelle direction des constructions navales est désormais constituée de l'ancien service industriel et d'une partie des moyens communs.

Le service des programmes navals est rattaché à la direction des systèmes d'armes de la DGA et donc budgétisé comme les centres d'essais qui rejoignent la direction des centres d'expertise et d'essais (DCE) et l'établissement des constructions navales de Paris qui est intégré à la nouvelle Direction de la gestion et de l'organisation (DGO).

Le compte de commerce est destiné à n'accueillir à terme que la seule nouvelle DCN. Cette règle tolère cependant des exceptions puisque quatre centres de la DCE restent gérés en son sein.

La séparation entre les services étatiques et la DCN " industrielle " s'est donc traduite par la budgétisation de la partie étatique du compte de commerce et par la séparation comptable des activités.

La budgétisation de l'ex-DCN étatique s'est essentiellement opérée dans la loi de finances initiale pour 1998. Elle a porté sur 2.026 postes transférés en zone budgétaire, sur la construction d'un budget de fonctionnement établi sur la base d'un coût moyen de 70.000 francs par personne et sur l'estimation d'un budget d'investissement (190 millions de francs) tenant compte des transferts d'immobilisations de la partie industrielle vers la partie étatique.

Elle s'est soldée par un transfert de crédits d'un montant de 500 millions de francs en provenance des chapitres de programmes attribués à la Marine du titre V à destination des chapitres de rémunération du titre III.

Cette opération, souhaitable sur le plan de la rationalité économique, à " dégonflé " le titre V en 1998 par rapport aux exercices antérieurs d'un montant de 500 millions de francs. L'État reconnaissait ainsi explicitement que le titre V était auparavant largement surévalué. Incidemment, ce mouvement comptable est directement à l'origine d'une partie des " économies " obtenues sur le programme des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de nouvelle génération du fait de la budgétisation du service des programmes navals auparavant " facturé " sur les crédits SNLE-NG.

Ce type de nettoyage ne va pas sans une part d'arbitraire notamment dans la détermination de ce qui est étatique et de ce qui est commercial ou industriel. La meilleure preuve en est que le projet de loi de finances pour 1999 prévoit déjà une mesure de correction du dispositif avec la réintégration sur le compte de commerce de 125 emplois en provenance de la zone budgétaire pour un coût de 40 millions de francs.

Dans le cas de la DCN et du SMA, il est bien évident que la nomenclature budgétaire ne fait que refléter des situations statutaires complexes aux implications nombreuses et très lourdes de conséquences. On estime ainsi à 7 milliards de francs les dépenses de la DCN (RCS + fonctionnement) qui pourraient relever du titre III et à 1,3 milliard de francs celles du SMA. Certains exemples d'autres imputations contestables, régulièrement relevées par la Cour des comptes, n'ont pas ce genre de justifications.

Il en va ainsi des dépenses d'informatique qui sont plus largement rattachées au titre V que dans les autres ministères en vertu d'une dérogation datant de 1993.

Le cas des dépenses d'entretien programmé du matériel est plus complexe. Les règles de rattachement au titre III ou au titre V sont peu claires et diffèrent selon les armées. Le processus de basculement des dotations du titre III vers le titre V, souhaité par la Cour des comptes, est en bonne voie.

Après le transfert de 1,1 milliard de francs du titre III vers le titre V en loi de finances initiale 1997, le projet de loi de finances pour 1999 prévoit encore 400 millions de francs. Au total, en 1999, il restera 1.323 millions de francs inscrits au chapitre 34-20 contre 10.890 millions de francs au nouveau chapitre 55-21 du titre V, qui regroupe désormais cette catégorie de crédits. Très vertueux dès qu'il s'agit de regonfler le titre V, l'État devrait vraisemblablement poursuivre le processus au cours des exercices à venir.

Enfin, la présence de crédits dits d'" entretien programmé des personnels " au titre V peut être remise en cause. Dans le nouveau chapitre 55-11 - Soutien des forces du projet de loi de finances pour 1999 figurent ainsi des articles de crédits d'habillement, campement, couchage, ameublement des armées pour un montant de 1.744 millions de francs qui trouveraient mieux leur place au titre III.

Tout ceci complique l'analyse des dotations sur la moyenne période puisque de nombreux transferts internes s'opèrent chaque année et brouillent les comparaisons internationales. A titre d'information sur la conception internationale du clivage fonctionnement/équipement, l'OTAN définit le fonctionnement comme les dépenses de personnel (RCS, alimentation et entretien programmé du personnel) et les dépenses de fonctionnement et d'entretien (pensions, carburants, fonctionnement résiduel, munitions et entretien programmé du matériel) alors que la dépense en capital comprend les dépenses d'équipement (fabrications, recherche et développement) et d'infrastructure.

Dans la structure OTAN ainsi définie, on peut estimer les dépenses militaires de fonctionnement de la France à 177,2 milliards de francs courants en 1998 (pour 157,3 milliards de francs inscrits en titre III de la loi de finances initiale) et les dépenses en capital à 60,8 milliards de francs (pour 81 milliards de francs aux titres V et VI de la loi de finances initiale).

2.- La définition de la dépense de défense

La définition de la dépense de défense varie d'un pays à l'autre. L'impact de la Gendarmerie et des dépenses de TVA sur les crédits d'équipement ne doit pas être oublié dans l'appréhension de l'effort français de défense par rapport aux pays comparables.

Certains éléments conjoncturels, apparus récemment et qui varient fortement selon les années, doivent aussi être mis en lumière. On peut parfois se demander si certaines dépenses figurant sur le fascicule Défense relèvent bien de ce domaine ou si la tentation du " bourrage d'enveloppe " n'est pas parfois la plus forte.

a) Les charges de reconversion

Les charges de reconversion liées à la professionnalisation des armées et à la réduction de leur format pèsent sur le budget de la Défense. Si les outils d'indemnisation et d'encouragement à la mobilité des personnels ayant travaillé pour la Défense peuvent logiquement figurer au budget puisque le lien avec l'activité de défense est assez direct, on peut se poser la question pour les instruments de reconversion de certains sites et bassins industriels qui s'apparentent plus à de l'aménagement du territoire.

Il en va ainsi par exemple du Fonds de restructuration de la défense (FRED) doté de 200 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 1999, même si la loi de programmation avait expressément englobé ce fonds dans son périmètre.

Dans le même registre, on peut s'interroger sur le lien avec la défense du fonds pour la reconversion économique de la Polynésie française, mis en place par convention en date du 25 juillet 1996 entre l'État et le Territoire à la suite de la cessation d'activité programmée du Centre d'expérimentations du Pacifique (CEP).

Cette convention repose sur les points suivants :

· les flux financiers engendrés par l'activité du CEP sont maintenus jusqu'au 31 décembre 2005 à un niveau de référence fixé à 990 millions de francs ;

· sur ces 990 millions de francs, l'État garantit un montant de 220 millions de francs correspondant aux recettes douanières encaissées au titre du CEP (article 2) ; ce montant est indexé sur l'indice métropolitain des prix à la consommation ;

· le solde de la compensation sera consacré à des activités créatrices d'emplois, par le biais de la commande publique ou semi-publique et par l'aide au développement des activités privées dans tous les secteurs, particulièrement le tourisme et l'exportation (article 3).

Le mécanisme permet donc de compenser à la fois la diminution des recettes douanières et fiscales perçues par le Territoire au titre des importations du CEP et la diminution des dépenses du CEP en Polynésie française. La compensation des dépenses ayant un impact économique est calculée au vu des dépenses réelles du CEP effectuées au cours de l'exercice précédent, auxquelles s'ajoutent les dépenses du service militaire adapté et les contributions nouvelles des différents ministères nationaux.

La contribution du ministère de la Défense à ce fonds monte en puissance. Une dotation prévisionnelle de 350 millions de francs en crédits de paiement était inscrite sur le chapitre 66-50 - Autres équipements. Services communs dans la loi de finances initiale 1998.

Dans le projet de loi de finances pour 1999, cette dotation sera de 613 millions de francs. Ces crédits n'ont pas de rapport direct avec la Défense qui n'en contrôle ni le montant ni l'affectation ni la consommation effective. Compte tenu des mécanismes d'indexation qui la régissent, elle devrait être appelée à croître au cours des prochains exercices.

b) La recherche duale

A la différence des exemples précédents qui avaient été compris dans le périmètre de la programmation, les crédits de recherche duale en avaient été expressément exclus (article 2-1-1 du rapport annexé de la loi de programmation du 2 juillet 1996). Ils figurent pourtant régulièrement sur le fascicule Défense alors que le ministère n'a pas la maîtrise de la définition des programmes concernés ni de l'utilisation de leurs résultats. Il s'agit en fait de faire contribuer la Défense au bouclage final du budget civil de recherche-développement (BCRD), ce qui grève d'autant ses ressources propres, notamment dans le domaine de la recherche.

La loi de finances initiale 1997 ne comprenait pas de crédits BCRD mais 2 milliards de francs de reports de crédits Défense ont été consommés à ce titre à la fin 1996, après transferts de crédits décidés en collectif de l'automne, venus en atténuation de reports de fin 1996, dont 1.120 millions de francs à destination du CNES, 680 millions de francs à l'Aviation civile et 200 millions de francs au CEA

En loi de finances initiale 1998, la Défense a été ponctionnée de 500 millions de francs transférés par arrêté du 15 avril 1998 à destination du CNES. Dans le projet de loi de finances pour 1999, la ponction augmente significativement puisqu'elle s'élève à 900 millions de francs.

Ces crédits ne sont pas gérés par la Défense et la comptabilité des organismes bénéficiaires ne permet pas d'en connaître l'utilisation précise.

Votre Rapporteur estime qu'il doit être mis fin à ce mécanisme sauf à ce que le ministère de la Défense soit effectivement associé à la définition et à la gestion des programmes ainsi financés qui, dans le domaine de l'espace, pourraient être facilement identifiables pour le bénéfice de chacun des contributeurs.

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CHAPITRE II :

LE BUDGET DE LA DÉFENSE POUR 1999
ET LA PROGRAMMATION MILITAIRE

Le budget pour 1999 constitue la troisième annuité de la programmation 1997-2002. Nous sommes donc à mi-parcours d'une programmation particulièrement ambitieuse qui doit mener à bien la professionnalisation des armées et la modernisation de leur équipement en réponse à l'évolution de la menace, le tout sous la contrainte omniprésente de la maîtrise des finances publiques.

L'exercice est forcément délicat. A ce jour, il est globalement en passe de réussir, sous réserve de quelques ajustements à opérer dans tel ou tel domaine d'activité.

Après l'importante revue des programmes de l'hiver  1998 qui a permis, à l'occasion d'une démarche sincère de réduction de coûts et de capacités, de valider le modèle d'armée 2015 et la programmation 1997-2002, moyennant une économie de 20 milliards de francs d'ici 2002, le projet de budget pour 1999 confirme la méthode du Gouvernement qui consiste notamment à respecter ses engagements.

Ainsi, le projet de budget du ministère de la Défense s'élève à 243,5 milliards de francs pensions comprises pour 1999 contre 238,3 milliards de francs en loi de finances initiale pour 1998. Hors pensions, les crédits s'élèvent à 190 milliards de francs contre 184,7 milliards de francs en loi de finances initiale pour 1998, soit une progression de 2,9 % en francs courants et de 1,7 % en francs constants.

ÉVOLUTION DU BUDGET DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE (1)

(en milliards de francs)

 

Loi de finances
1998

Projet de loi de finances 1999

PLF 1999/LFI 1998
(en %)

Titre III

103,7

104

+ 0,2

Titre V et VII

81

86

+ 6,2

Total

184,7

190

+ 2,9

(1) hors pensions.

Ce budget revêt trois caractéristiques essentielles qu'il importe de détailler :

· une stabilisation globale des ressources qui rompt à la fois avec l'encoche de 1998 et les régulations désordonnées des exercices précédents ;

· une évolution différenciée des crédits de rémunération et de fonctionnement courant au sein d'un titre III péniblement " verrouillé " par la programmation ;

· la " sanctuarisation " des crédits d'équipement, à mi-chemin de l'encoche de 1998 et des dispositions de la loi de programmation 1997-2002.

I.- LA STABILISATION DES RESSOURCES

A.- L'ENCOCHE DE 1998 ÉTAIT BIEN UNE ENCOCHE

Le tableau ci-après retrace l'évolution des budgets de la Défense (lois de finances initiales) depuis 1991.

ÉVOLUTION DES BUDGETS DE LA DÉFENSE

(en milliards de francs courants)

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

Crédits de pensions

43,9

45,1

47,7

48,8

49,2

51,8

52,4

53,6

53,7

Crédits titre III hors pensions

91,4

92,3

95

98,9

99,4

100,6

102,2

103,7

104

Crédits titres V et VI

103,2

103

102,9

94,9

94,9

89

88,7

81

86

Total hors pensions

194,6

195,3

197,9

193,8

194,3

189,6

190,9

184,7

190

Total avec pensions

238,5

240,4

245,6

242,6

243,5

241,4

243,3

238,3

243,5

Ces chiffres sont exprimés en francs courants. Ils reflètent néanmoins les décrochages successifs des lois de finances initiales pour 1994, 1996 et 1998. Alors qu'en 1994 et 1996 l'ajustement avait aussi largement porté sur le titre III, en 1998 ce sont les crédits d'équipement qui ont subi l'intégralité de l'encoche. Elle était d'un montant de 7,7 milliards de francs par rapport à la loi de finances initiale pour 1997 et de 2,7 milliards de francs par rapport aux crédits ajustés après annulation en cours d'exercice 1997 (5 milliards de francs). Par rapport aux crédits inscrits dans la loi de programmation, l'encoche s'élevait à 8,7 milliards de francs, soit 9,7 % de moins que l'annuité initialement prévue (89,7 milliards de francs).

Le Gouvernement n'avait pas alors caché avoir utilisé, comme ses prédécesseurs l'avaient fait avant lui notamment en exécution, les crédits d'équipement de la Défense comme variable d'ajustement d'un budget 1998 fortement contraint par les critères de convergence économique de l'Union monétaire européenne et sur lequel sa responsabilité était partagée compte tenu de la date de son arrivée aux affaires.

Il avait toutefois assorti cet aveu d'un engagement portant sur le caractère temporaire de l'encoche. Votre Rapporteur, conscient du peu de marge de man_uvre budgétaire, avait fait part de son scepticisme sur la portée de cet engagement. Les arbitrages du budget 1999 montrent, après ceux de la revue des programmes avec lesquels ils sont en cohérence, que le pari a été tenu grâce à l'aide du retour de la croissance et que l'encoche sera bien restée une encoche, ponctuelle et isolée, comme le montre le graphe ci-après qui retrace l'évolution des dépenses en capital du budget de la Défense.

L'autre motif de satisfaction est de constater que si la loi de finances initiale 1998 avait arrêté des niveaux de crédits d'équipement très bas, son exécution à ce jour a été beaucoup plus modérée que les exercices précédents, ce qui ne peut qu'améliorer la qualité de la gestion du ministère.

B.- L'ABSENCE DE RÉGULATIONS DÉSORDONNÉES

La régulation de l'exercice 1998 est plus apaisée que celle des exercices qui l'ont précédée. Ceci ne veut pas dire qu'aucune difficulté ne soit constatée notamment sur le difficile bouclage des dotations du titre III ou encore sur le rythme insuffisant de consommation des crédits d'équipement ou le traitement budgétaire toujours difficile à anticiper des opérations extérieures. Mais au moins le ministère de la Défense est-il préservé en 1998 de chocs externes constitués d'annulations répétées de crédits qui bouleversaient les conditions de son exécution et compliquaient singulièrement la tâche des gestionnaires de crédits.

1.- La régulation de l'exercice 1998 est plus clémente que les précédentes.

Dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 1997, la Cour des comptes note que " comme les années précédentes, les crédits d'investissement du ministère de la Défense ont été fortement mis à contribution. Si le montant des annulations portant sur les titres V et VI de ce budget (5.010 millions de francs) est très inférieur aux chiffres atteints en 1995 (11.892 millions de francs) et en 1996 (8.507 millions de francs), il correspond toutefois, en 1997, à 67 % du total des annulations de crédits d'investissements (60 % en 1996 et 71,9 % en 1995) ".

GRAPHIQUE

Sans remonter aux excès de l'exercice 1995 qui ont durablement déstabilisé la gestion du ministère, votre Rapporteur tient à rappeler qu'en 1996 le budget qu'équipement militaire a fait l'objet de trois séries d'annulations de crédits en cours d'exercice.

En premier lieu, en avril 1996, 3.716 millions de francs ont été annulés en crédits de paiement et en autorisations de programme sur tous les chapitres du titre V du budget de la Défense pour couvrir les dépenses liées à la première recapitalisation de l'entreprise GIAT Industries effectuée au même moment. Pourtant, la loi de programmation militaire pour les années 1997-2002, votée quelques semaines plus tard, a expressément prévu que " l'enveloppe allouée à la défense ne comprend [...] ni les sommes nécessaires à la recapitalisation des entreprises publiques de défense " (1). Il n'a pas été procédé de même pour les recapitalisations du GIAT en 1997 et 1998.

En second lieu, l'arrêt d'annulation du 26 septembre 1996, associé au décret d'avance du même jour ouvrant notamment 2.750 millions de francs de crédits supplémentaires sur le titre III du budget de la Défense pour assurer le financement des opérations extérieures, avait également eu pour effet d'annuler 2.750 millions de francs sur tous les chapitres des titres V et VI du budget de la Défense. En revanche, contrairement à l'usage observé au cours des quatre années précédentes, les ouvertures de crédits demandées dans le cadre du collectif de fin d'année pour financer les opérations extérieures sur le titre III, à hauteur de 1.200 millions de francs, n'ont pas été compensées par des annulations sur le titre V.

Par ailleurs, l'arrêté d'annulation du 13 novembre 1996, annulait 2.040 millions de francs de crédits de paiement et d'autorisations de programme sur les différents chapitres du titre V et du titre VI. Cette annulation visait à compenser les crédits ouverts dans le dernier collectif au titre de la recherche duale civilo-militaire : 680 millions de francs pour les programmes aéronautiques civils (budget des Transports), 1.120 millions de francs pour le Centre national d'études spatiales, 232 millions de francs pour le Commissariat à l'énergie atomique (budget de l'Industrie). Ces crédits étaient alloués au titre de l'exercice budgétaire 1997, en sus de la dotation de recherche duale pour 1996.

Au total, le budget d'équipement militaire a été réduit de 8,5 milliards de francs, soit quasiment 10 % des dotations initiales. En termes de crédits votés et hors crédits de report, on peut considérer que les crédits disponibles en 1996 se sont élevés à 82,4 milliards de francs et 80,4 milliards de francs si l'on ne considère que les seuls crédits disponibles pour la Défense, hors recherche duale.

S'agissant de 1997, le tableau ci-après retrace les différents mouvements d'annulation.

ANNULATIONS DE CRÉDITS DE PAIEMENT SUR LE BUDGET D'ÉQUIPEMENT MILITAIRE EN 1997

(en millions de francs)

Chapitres
budgétaires

Crédits votés

Annulations du 9 juillet 1997

Annulations du 17 octobre 1997

Annulations du 19 novembre 1997

Montant total des crédits annulés

Crédits annulés/ Crédits votés

(en %)

51-60 - Espace

3.298

91

218

93,9

402,9

12,2

51-70 - Nucléaire

11.948

250

114

66,5

430,5

3,6

51-80 - Autres études

13.605

291

320

542,7

1.153,7

8,4

52-70 - Investissements DGA

1.335

27

25

54,1

106,1

7,9

53-70 - Fabrications services communs et gendarmerie

3.136

52

25

0

77

2,5

53-80 - Fabrication Air-Terre-Mer

47.628

932

643

778,8

2.353,8

4,9

54-40 - Infrastructures

6.552

133

243

12,6

388,6

5,9

66-50 - Participation équipements

520

10

22

51,4

83,4

16

67-10 - Subventions d'équipement

674

14

0

0

14

2

Total

88.699

1.800

1.610

1.610

5.010

5,6

L'arrêt d'annulation de crédits du 19 novembre a porté sur 1.804 millions de francs, dont 204,6 millions de francs sur le chapitre 34-02 - Entretien et achat de matériels, Fonctionnement et entretien immobilier (service de santé, direction du renseignement militaire, état-major des armées, services des essences), et 1.600 millions de francs, en crédits de paiement et en autorisations de programme, sur les chapitres des titres V et VI.

Une partie de ces annulations (400 millions de francs) correspondait à la différence entre le montant annoncé par le ministre de l'Économie et des Finances en juillet et le montant des crédits effectivement annulés en octobre. En outre, 400 millions de francs de crédits, équivalents aux fonds de concours disponibles (cessions immobilières ou autres recettes nettes de charges), étaient annulés comme gage des ouvertures de crédits réalisées sur le titre III au titre des opérations extérieures et 800 millions de francs correspondaient à des annulations nettes complémentaires.

Le budget d'équipement de la Défense avait déjà fait l'objet de deux séries d'annulations de crédits au cours de l'exercice 1997. Les crédits votés, à hauteur de 88,7 milliards de francs, ont été réduits de 1,8 milliard par l'arrêté d'annulation du 9 juillet 1997, correspondant au gel des crédits d'un même montant effectué en mars 1997. Puis les crédits d'équipement ont de nouveau été réduits de 1,6 milliard de francs par arrêté du 17 octobre 1997, comme contrepartie du décret d'avances du même jour comportant l'ouverture de crédits d'un même montant sur le titre III du budget de la Défense.

Compte tenu des trois séries d'annulations effectuées en 1997 (5.010 millions de francs, dont 2 milliards pour gager des ouvertures de crédits sur le titre III notamment au titre des Opex), et déduction faite des annulations de crédits équivalentes aux fonds de concours nets de charges (400 millions de francs), le montant des crédits disponibles pour l'équipement des armées a été ainsi ramené à 84,1 milliards de francs. Ce montant est inférieur d'environ 4,5 milliards de francs au montant retenu par la loi de programmation.

Pour ce qui concerne 1998, les annulations de crédits ont été à ce jour modérées puisqu'elles ont porté sur :

· 300 millions de francs par arrêté du 17 janvier 1998 au titre du financement du fonds en faveur de la lutte contre l'exclusion ;

· 3,850 milliards de francs par arrêté du 21 août 1998 afin de financer des ouvertures de crédits sur le titre III de la Défense, gagés par des autorisations de consommation de report de crédits du même montant. Pour 1997, les reports sont de 6.136 millions de francs dont 5.273 millions de francs pour les titres V et VI.

Le mouvement n'aura donc pas d'incidence sur le volume de l'effort d'équipement de la Défense puisque la perte réelle ne porte que sur les 300 millions de francs du mois de janvier.

Pour se convaincre du caractère plus mesuré de la régulation menée en 1997 et 1998 par rapport à 1995 et 1996 il suffit d'observer l'évolution d'un indicateur assez simple, le montant des intérêts moratoires.

Le tableau ci-après retrace leur évolution depuis 1996.

ÉVOLUTION DU MONTANT DES INTÉRÊTS MORATOIRES

(en millions de francs)

Montant dû au titre de la gestion 1996

757

Montant dû au titre de la gestion 1997

231

Montant dû au titre de la gestion 1998 (1)

61

(1) montant au 30 juin.

Le montant record d'intérêts moratoires payés en 1996 relève d'une explication très simple, la brutalité de la régulation menée en 1995 et 1996.

En 1995, un gel de 25 % des crédits de paiement des titres V et VI, avec plafond de consommation de 50 % jusqu'au 30 juin, a été instauré par le ministère de l'Économie et des Finances bien avant l'annulation record de 11,9 milliards de francs.

En 1996, au-delà de l'annulation de 6,5 milliards de francs, la libération des reports de crédits n'a eu lieu qu'en octobre, ce qui a placé la Défense en rupture de paiement dès la fin avril 1996.

L'exercice 1997 est caractérisé par un net fléchissement des intérêts moratoires qui s'explique par plusieurs causes :

· le volume plus modéré des annulations a permis aux services de disposer des crédits nécessaires aux paiements ;

· les plans de refroidissement des engagements mis en _uvre notamment par la DGA depuis 1996 ont permis d'éviter toute rupture de trésorerie ;

· les conditions légales et économiques encadrant les intérêts moratoires ont été modifiées. La TVA a été supprimée, la définition du taux applicable aux marchés a changé et le taux d'intérêt légal a baissé en raison des évolutions de marché.

L'exercice 1998 devrait toutefois être marqué par des retards de consommation de crédits en raison de la mise en place des nouveaux instruments de gestion et notamment de la comptabilité spéciale des investissements mais aussi en raison des effets des plans de refroidissement des engagements de 1996 dont les effets sur les paiements se sont pleinement fait sentir deux ans plus tard. La consommation risque d'être inférieure aux crédits disponibles en 1998 ce qui ne pourra qu'attirer l'attention intéressée du ministère de l'Économie et des Finances.

2.- Le financement des opérations extérieures

Le financement des opérations extérieures (Opex) du ministère de la Défense est devenu un sujet récurrent de discussions et d'interrogations pour une raison simple : les Opex tendent à se multiplier alors que la contrainte financière se durcit.

Il est difficile, même si de récents efforts ont été entrepris dans ce domaine, de prévoir, en construction budgétaire, le volume de ressources supplémentaires destinées aux Opex, alors même que ces dernières sont soumises à l'émergence de crises parfois brutales et aux aléas de la diplomatie internationale.

De même, il est souvent complexe d'évaluer, à l'occasion d'une demande d'ouverture de crédits, ce qui ressort d'un véritable surcoût directement engendré par la projection de force sur un théâtre extérieur et ce qui relève, somme toute, de l'activité normale des armées. Le ministère de la Défense est légitimement fondé à obtenir le financement complémentaire d'une surcharge imprévue résultant directement de l'opération qui lui est imposée, mais pas davantage.

Le tableau ci-après retrace l'évolution de ces surcoûts évalués par le ministère de la Défense et de leur financement depuis 1993.

En 1996, le coût total des opérations extérieures s'est élevé à 5.146 millions de francs, dont 3.933 millions de francs sur le titre III et 1.213 millions de francs sur le titre V. Les crédits ouverts sur le titre III par le décret d'avance du 26 septembre 1996, à hauteur de 2.750 millions de francs, visaient, pour l'essentiel (2.539 millions de francs), à couvrir les dépenses supplémentaires résultant des OPEX. Dans le cadre du collectif de fin d'année 1996, étaient votés 1.200 millions de francs, dont 700 millions de francs au titre des OPEX, soit 3,2 milliards de francs sur l'ensemble de l'année dont " seulement " 2 milliards de francs gagés par des annulations de crédits des titres V et VI.

DÉPENSES ET CRÉDITS SUPPLÉMENTAIRES LIÉS AUX OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

(en millions de francs)

 

Coûts
en
1992

Coûts
en
1993

Crédits
additionnels
votés en LFR 1993

Coûts
en
1994

Crédits
additionnels
votés en
LFR 1994

Coûts
en
1995

Crédits
additionnels
votés en
LFR 1995

Coûts
en
1996

Crédits
additionnels
votés en
LFR 1996

Coûts
en
1997

Crédits
additionnels
votés en
LFR 1997

Coûts
en
1998 -
(1)

Crédits
additionnels

Rémunérations

1.559

2.556

2.599

2.166

2.180

2.184

2.209

2.542

2.558

1.960

 

1.272

1.000

Alimentation

103

122

121

97

100

82

49

173

80

131

 

91

 

Fonctionnement

614

838

853

1.312

56

567

690

1.100

600

589

 

436

 

Entretien programmé des matériels

176

911

400

482

-

227

-

116

-

72

 

48

 

Total titre III

2.452

4.427

3.973

4.057

2.736

3.060

2.948

3.933

3.238

2.752

1.886

1.847

1.000 (2)

Entretien programmé des matériels

97

301

-

348

-

361

-

239

-

95

-

73

-

Fabrications

318

566

-

533

-

406

-

610

-

366

-

44

-

Munitions

284

744

-

672

-

289

-

190

-

105

-

127

-

Infrastructures

21

36

-

25

-

29

-

172

-

133

-

2

-

Total titre V

720

1.647

-

1.579

-

1.119

-

1.213

-

699

-

246

-

Total général

3.172

6.074

3.973

5.636

2.736

4.179

2.948

5.146

3.238

3.451

1.886

2.093

1.000

(1) prévision annuelle arrêtée au 31 mai 1998.

(2) par décret d'avance du 21 août 1998.

Les dépenses supplémentaires du titre III ont donc été couvertes à hauteur de plus de 80 %. Comme de coutume, les dépenses constatées sur le titre V n'ont pas été compensées par des ouvertures de crédits. Il est vrai que les dépenses supplémentaires du titre V sont souvent contestables : les munitions consommées au cours des opérations extérieures et les matériels accidentés ou détruits se substituent souvent aux munitions ou matériels qui auraient été consommés, accidentés ou détruits au cours des activités normales d'entraînement. Toutefois, certaines dépenses, comme celles qui correspondent aux infrastructures spécifiques réalisées sur les lieux des opérations extérieures, constituent des surcoûts nets.

Pour 1997, faute d'équivalence et de correspondance directe entre les dépenses supplémentaires constatées et les crédits ouverts, on peut considérer, par convention, que les crédits supplémentaires alloués au titre des opérations extérieures s'élèvent à 1.886 millions de francs, compte tenu des crédits de rémunération ouverts par décret d'avances (1.300 millions de francs), des crédits demandés dans la loi de finances rectificative ou des crédits virés sur le budget de l'Air qui n'ont pas été affectés aux carburants ou au fonctionnement courant des bases (environ 290 millions de francs) et des crédits demandés dans le collectif pour l'armée de Terre (40 millions de francs) ou répartis au bénéfice des armées de Terre et de l'Air (256 millions de francs).

Dans le cadre de la loi de programmation militaire pour les années 1997 à 2002, il était prévu que l'ensemble des dépenses liées aux opérations extérieures courantes seraient désormais financées sur le budget courant et que seules les dépenses imprévues liées aux opérations extérieures de grande ampleur seraient couvertes par des crédits supplémentaires.

En application de ce principe, en 1997, pour l'essentiel, seules les dépenses supplémentaires découlant des opérations en ex-Yougoslavie auront été financées par des ouvertures nettes de crédits, les autres opérations étant financées par redéploiements internes et par des mesures d'économies.

S'agissant de l'exercice 1998, outre l'inscription, dans la loi de finances initiale d'une dotation de 260 millions de francs pour couvrir les rémunérations supplémentaires versées aux personnels militaires en opérations extérieures dites " normales " (essentiellement sur le territoire africain) différentes mesures ont été prises pour réduire le coût des opérations extérieures ou en assurer le financement :

· substitution de compagnies tournantes aux unités stationnées ;

· réduction de la présence française en Afrique, avec la fermeture des deux bases situées en République centrafricaine ; compte tenu du désengagement des forces françaises en République centrafricaine (2.400 à 1.200 hommes entre 1997 et 1998), la dotation budgétaire a été réduite de 220 millions de francs à 160 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 1999 ;

· affectation des recettes nettes sur fonds de concours du titre V, notamment au titre des cessions immobilières, soit environ 450 à 500 millions de francs, au financement des Opex ;

· révision du régime du solde à l'étranger pour les personnels participants aux Opex (décret du 1er octobre 1997).

Depuis 1968, les militaires à l'étranger bénéficiaient du régime de rémunération des agents de l'État en service à l'étranger qui s'appliquait non seulement aux militaires affectés sur des postes permanents à l'étranger, mais aussi à ceux en service dans les forces prépositionnées - qu'ils soient affectés ou en renfort temporaire - et à ceux envoyés en opérations extérieures.

L'inadaptation de ce régime de rémunération, conçu pour des agents affectés pour plusieurs années à l'étranger, avec leur famille, à la situation des militaires envoyés en opération ou en renfort temporaire pour des durées courtes (4 à 6 mois) sans leur famille, a conduit à l'élaboration d'un régime spécifique qui a fait l'objet des décrets n° 97-902 du 1er octobre 1997.

Dorénavant, le régime de rémunération des agents à l'étranger concerne donc exclusivement les militaires affectés à l'étranger (postes permanents à l'étranger et forces prépositionnées).

Les militaires envoyés en opération ou en renfort temporaire à l'étranger perçoivent désormais, pendant leur séjour à l'étranger, l'intégralité de leur rémunération servie en métropole (solde et accessoires de solde) à laquelle s'ajoute une " indemnité de sujétion pour service à l'étranger " (ISSE), représentant, quel que soit le pays, 1,5 fois la solde de base pour les militaires d'active. Un supplément à l'ISSE est également alloué pour chaque enfant à charge.

La différence de rémunération en résultant pour le militaire par rapport au régime précédent est variable selon le pays concerné. Ainsi, la rémunération d'un capitaine, marié avec deux enfants, se trouve réduite dans le nouveau système :

· de 27 % au Liban ;

· de 16 % en RCA ;

· de 14 % en Yougoslavie.

L'économie pour le budget de l'État résultant de ce nouveau régime pour les Opex est fonction de l'effectif, par définition évolutif, des pays concernés et de la situation de famille des intéressés. Sur la base du dispositif 1997, elle aurait représenté de l'ordre de 500 millions de francs.

En 1998, compte tenu de la réduction des effectifs en Opex, l'économie sera inférieure à ce montant, mais n'a pu être à ce stade chiffrée.

La répartition des effectifs moyens par théâtre d'opération est retracée par le tableau ci-après.

EFFECTIFS MOYENS ENGAGÉS SUR LES DIFFÉRENTS THÉÂTRES D'OPÉRATIONS

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Ex-Yougoslavie

8.570

7.779

8.653

8.835

3.799

3.698

Cambodge

1.379

-

-

-

-

-

Tchad-Centrafrique

2.248

2.250

2.297

2.836

2.441

1.024

Liban

538

490

303

283

279

257

Somalie, puis Rwanda

1.376

860

-

-

-

-

Divers

2.605

1.890

2.153

2.495

1.390

1.751

Total

16.716

13.269

13.406

14.449

7.909

6.931

RÉCAPITULATION DU COÛT PAR PAYS

(en millions de francs)

 

1997

1998 (1)

Ex-Yougoslavie

1.546

1.096

Tchad-RCA

1.043

547

Liban

96

65

Autres

766

385

Total

3.451

2.093

(1) prévision arrêtée au 31 mai 1998.

Sous réserve d'une fin d'année 1998 conforme aux prévisions, on peut relever la tendance à la réduction du dispositif et du coût des Opex en 1997 et 1998 après le pic atteint en 1995. Ceci résulte largement de l'évolution de la situation en ex-Yougoslavie.

Pour 1998, le financement du surcoût de rémunération a été effectué par le décret d'avances du 21 août 1998 qui ouvrait un montant de 3,8 milliards de francs de crédits au titre III dont 1 milliard de francs au titre des Opex.

C.- LA MONTÉE EN PUISSANCE DU TITRE III

Le phénomène le plus évident du budget de la Défense en moyenne période (sur une décennie) est la montée en puissance du titre III par rapport aux dépenses en capital. Entre 1991 et 1999, les courbes des deux catégories de dépenses (une fois neutralisées les pensions) ont suivi une évolution quasiment symétriquement opposée.

On est parti en 1991 de 91 milliards de francs de dépenses de fonctionnement et 103 milliards de francs de dépenses d'équipement pour aboutir en 1999 à 104 milliards de francs de dépenses de fonctionnement et 86 milliards de francs d'équipement avec un croisement en 1994 où le décrochage des dépenses en capital a été important.

En conséquence, la part du titre III dans la totalité du budget n'a cessé de croître pour atteindre actuellement 55 % des dotations initiales. Encore faut-il préciser que la prise en compte de l'exécution budgétaire renforce cette constatation puisque les ouvertures de crédits portent systématiquement sur le titre III et les annulations sur les titres V et VI. La proportion du titre III en termes de crédits ou de dépenses nets s'approche de 60 % du total ce qui est véritablement préoccupant. Signalons enfin que ce calcul ne prend pas en compte les imputations de crédits qui ont leur place au titre III comme au titre V comme le Fonds d'adaptation industriel ou les crédits d'entretien programmé du personnel.

Il y a là un processus qui s'explique mais dont les conséquences n'ont pas encore été pleinement mesurées. Le monde extérieur à la Défense ayant tendance à raisonner à enveloppe constante, les crédits de certaines actions du c_ur du titre V (recherche, espace, infrastructures) ne peuvent que subir les conséquences de cette évolution. Faut-il voir les prémisses d'un syndrome du type CNRS où les crédits du titre III et notamment la masse salariale représentent plus de 80 % du budget total ce qui ne facilite pas la rapidité de réaction de l'institution aux évolutions technologiques ?

La rigidité de certains grands programmes d'armement constatée par ailleurs ne peut qu'alimenter ce type de questionnement.

II.- L'ÉVOLUTION DIFFÉRENCIÉE
DES COMPOSANTES DU TITRE III

L'évolution des dotations du titre III par nature de dépenses est retracée par le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DES DÉPENSES ORDINAIRES DU BUDGET DE LA DÉFENSE

(en millions de francs)

Nature des dépenses

1995
Loi de finances initiale

1996
Loi de finances initiale

1997
Loi de finances initiale

1998
Loi de finances initiale

1999
Projet de loi de finances

1999/1998
(en %)

Rémunérations et charges sociales

73.646

74.785

77.720

80.471

82.820

+ 2,9

Pensions

49.192

51.849

52.416

53.543

53.565

-

Matériel et dépenses diverses

22.729

22.943

21.696

20.582

18.590

- 9,7

Subventions et dépenses diverses

2.946

2.923

2.806

2.669

2.549

- 4,5

Total

148.515

152.501

154.639

157.265

157.524

+ 0,2

Total hors pension

99.323

100.652

102.223

103.722

103.959

+ 0,2

En 1999, alors que les rémunérations et charges sociales (RCS) progressent de près de 3 % pour atteindre 80 % du titre III hors pensions, les dépenses de fonctionnement baissent de près de 10 % pour représenter 18 % de l'ensemble, le solde se répartissant dans des dépenses diverses dont la contribution à la SNCF.

Depuis la loi de finances initiale 1996, on observe une évolution différenciée des RCS qui progressent en moyenne de l'ordre de 3,5 % par an et des crédits de fonctionnement courant qui baissent de 5 % par an puis de 10 % cette année.

Cette constatation est confirmée par la monographie que la Cour des comptes a consacrée au titre III du ministère de la Défense dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 1997.

La Cour a ainsi reconstitué ex post l'évolution des dépenses nettes du titre III dans le tableau ci-après.

DÉPENSES NETTES DU TITRE III

(en millions de francs)

 

1994

1995

1996

1997

1997/1994
(en %)

Première partie
(Rémunérations)

67.654

70.141

70.558

71.273

5,35

A/A-1 (en %)

4,45

3,68

0,59

1,01

 

Troisième partie
(Charges sociales)

6.959

6.957

7.149

7.708

10,76

A/A-1 (en %)

4,28

- 0,03

2,76

7,82

 

Quatrième partie
(Fonctionnement courant)

26.259

25.330

26.809

24.467

- 6,83

A/A-1 (en %)

0,64

- 3,54

5,84

- 8,74

 

Sixième partie
(Subventions de fonctionnement)

923

944

1.029

1.002

8,56

A/A-1 (en %)

3,76

2,27

9

- 2,63

 

Septième partie
(Dépenses diverses)

1.911

1.864

1.910

1.810

- 5,29

A/A-1 (en %)

- 3,42

- 2,46

2,47

- 5,24

 

Ensemble du titre III

103.706

105.236

107.455

106.260

2,46

A/A-1 (en %)

3,29

1,47

2,11

- 1,12

 

La Cour relève ainsi que " la progression régulière des dépenses du titre III s'est poursuivie, avec des taux modestes, pendant les exercices 1995 et 1996 avant de connaître pour la première fois une diminution de 1,12 % en 1997, sous réserve des remarques ci-après concernant les reports de charges. Sur l'ensemble de la période on remarque :

- une hausse des dépenses de rémunérations, avec une nette tendance au ralentissement pendant les années 1996 et 1997 ;

- la progression importante des charges sociales, notamment en 1997 ;

- la chute des dépenses de fonctionnement qui baissent de près de 9 % en 1997 et de 6,83 % sur les quatre exercices ".

La Cour a identifié 2.194 millions de francs de reports de charges sur le titre III pour l'exercice 1997 dont 1.925 millions de francs sur le chapitre 34-10 - Alimentation.

La Cour ajoute que " selon le ministère de la défense ces reports de charges seraient liés essentiellement aux surcoûts entraînés par les opérations extérieures, malgré les crédits supplémentaires ouverts par décrets d'avances ou en lois de finances rectificatives. L'importance particulière des reports en fin d'exercice 1997 résulterait à la fois des opérations extérieures, de l'apurement du solde 1996 du fonds de concours autoroutier, supprimé en 1997, et enfin de l'absence de ressources complémentaires suffisantes pour résorber le report de charges de l'année 1996 sur l'année 1997 (823 millions).

Ces reports de charges, qui concernent des chapitres de rémunérations et d'alimentation, sont facilités par l'existence de fonds d'avance, cette procédure permettant de s'affranchir de la règle de l'annualité budgétaire, en réglant sur les crédits de l'année suivante (fonds d'avance mis en place en novembre) une partie des reports de charges de l'exercice en cours.

En 1997, notamment, les fonds d'avance ont permis de transférer sur 1998 environ 1.370 millions de dépenses. Les dépenses 1997 ont de ce fait été sous-estimées d'autant : elles atteignent en fait 107.630 millions (106.260 millions + 1.370 millions). "

L'exécution de l'exercice 1998 rattrapera celle de 1997 sur ce point puisque le report de charges a été en partie soldé par le décret d'avances du 21 août 1998 qui a ouvert 3,8 milliards de francs sur le titre III de la Défense.

La Cour conclut sa monographie sur les exercices 1994 à 1997 par les considérations suivantes :

- dans un budget de la défense dont la part relative au sein du budget de l'État ne cesse de diminuer, les crédits de fonctionnement prennent une part de plus en plus importante (58,3 % des dépenses totales du budget de la défense en 1997) ;

- hors pensions, les crédits disponibles pour régler les dépenses de fonctionnement sont régulièrement plus élevés en exécution que ceux ouverts en loi de finances initiale : 108.196 millions disponibles en 1997 pour une dotation de 102.223 millions en loi de finances initiale. A titre principal cet écart résulte d'un abondement systématique des crédits ouverts en loi de finances initiale par des décrets d'avances ou des lois de finances rectificatives pour des motifs tenant essentiellement aux opérations extérieures ; mais les différents fonds de concours et transferts dont bénéficie la défense ont également une influence non négligeable ;

- les marges de man_uvre du ministère sont relativement faibles ; en effet les dépenses de caractère automatique, rémunérations et charges sociales, représentent pratiquement 75 % des dotations budgétaires du titre III. Les 25 % restants sont constitués majoritairement par les dépenses de fonctionnement, en baisse significative sur la période étudiée ;

- les reports de charges d'un exercice sur l'autre, grâce notamment aux facilités qu'autorise le système des fonds d'avance et des paiements à bon compte, deviennent systématiques, prennent une importance inquiétante. "

Les arbitrages de la loi de finances initiale pour 1998 (+ 3,5 % pour les RCS et - 5 % pour les crédits de fonctionnement courant par rapport à la loi de finances initiale pour 1997) comme le décret d'avance du 21 août 1998 ou encore les arbitrages du projet de loi de finances 1999 confortent cette tendance dont il faut essayer de cerner les causes et les conséquences.

A.- LES PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES

Pour 1999, les crédits demandés au titre des pensions civiles et militaires et des charges de retraite des ouvriers de la Défense s'élèvent à 53.565 millions de francs, soit à un montant très voisin de 1998 (53.543 millions de francs). Cette apparente stabilité reflète en réalité des mouvements contrastés. Les pensions militaires s'élèvent à 45.749 millions de francs contre 44.637 millions de francs en 1998, soit une progression de 2,5 % et les pensions civiles à 2.315 millions de francs (+ 1,9 %).

En revanche, les crédits demandés au titre de la participation du ministère de la Défense aux charges du fonds spécial de retraite des ouvriers de l'État baissent fortement puisqu'ils passent de 6.635 millions de francs en 1998 à 5.500 millions de francs en 1999, soit - 17 %.

Cette forte réduction résulte de la modification du mode de calcul de la contribution de l'État à ce fonds. En effet, la baisse de la subvention d'équilibre figurant à ce chapitre est partiellement compensée par une hausse de la part patronale des cotisations sociales retraite de ces personnels. Cette augmentation apparaît dans le chapitre de rémunération des personnels ouvriers de la Défense (chapitre 31-51). Le solde de l'opération est positif pour le budget de la Défense puisque la hausse de cotisation s'élève à 684 millions de francs alors que la baisse de la subvention atteint 1.196 millions de francs. Elle est à somme nulle pour le fonds spécial de retraite puisque le solde de la subvention est réparti sur les fascicules des ministères employant ou ayant employé des ouvriers d'État.

Il s'agit d'une mesure de clarification qui permettra de mieux appréhender le coût consolidé de l'emploi des ouvriers d'État même si son impact sur la masse salariale de la DCN n'est pas négligeable.

Cette opération a pu quelque peu masquer la tendance à la hausse des charges de pensions du ministère.

Les tableaux ci-après permettent de disposer des perspectives financières à moyen terme dans ce domaine.

ÉVOLUTION DES PENSIONS MILITAIRES DE RETRAITE (1)

   

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2008

Ayants

Nombre

336.571

339.364

339.912

340.317

340.550

340.668

338.605

327.092

droit

Montant (MF) (2)

36.770

37.076

37.135

37.180

37.205

37.218

36.993

35.735

Ayants

Nombre

154.757

155.480

156.004

156.379

156.593

156.631

156.518

153.839

cause

Montant (MF) (2)

7.789

7.825

7.852

7.871

7.881

7.883

7.878

7.743

Total

Nombre

491.328

494.844

495.916

496.696

497.143

497.299

495.123

480.931

 

Montant (MF) (2)

44.559

44.901

44.987

45.051

45.086

45.101

44.871

43.478

(1) Sont exclues les pensions " cristallisées " versées aux ressortissants des ex-territoires français (environ 68.500 pensionnés pour un montant de 222 millions de francs - en forte diminution), les pensions d'orphelins (environ 10.500 pour un montant de 82 millions de francs) et les allocations annuelles (1.900 de faible montant en diminution).

(2) en francs 1997.

Les charges des pensions militaires ont fortement augmenté en 1997 et 1998. Le nombre de départs de militaires avec pensions était ainsi d'environ 8.000 en 1995 et 1996, pour 11.300 en 1997 et d'un montant supérieur à 12.000 en 1998. Les mesures favorables aux départs anticipés ont pu accentuer un phénomène d'origine démographique. Ces mesures ont un effet mécanique instantané sur les pensions puisque la jouissance de la pension est immédiate pour les personnels non officiers ayant accompli quinze ans de service et pour les officiers totalisant vingt-cinq ans de service. Elle est différée jusqu'à l'âge de 50 ans pour les officiers ne réunissant pas 25 ans de services effectifs.

La charge des pensions militaires devrait toutefois cesser de progresser rapidement dès 1999 pour plafonner et décroître à partir de 2002-2003.

ÉVOLUTION DES PENSIONS DE RETRAITE DES FONCTIONNAIRES (1)

   

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2008

Ayants

Nombre

20.138

20.164

20.190

20.216

20.242

20.268

20.295

20.426

droit

Montant (MF) (2)

1.808

1.811

1.813

1.815

1.818

1.820

1.822

1.834

Ayants

Nombre

6.441

6.355

6.270

6.186

6.103

6.022

5.941

5.546

cause

Montant (MF) (2)

292

288

284

280

276

273

269

251

Total

Nombre

26.579

26.519

26.460

26.402

26.345

26.290

26.236

25.972

 

Montant (MF) (2)

2.100

2.099

2.097

2.095

2.094

2.093

2.091

2.085

(1) Les restrictions signalées pour les militaires en ce qui concerne la population non retenue dans le tableau sont également valables ici pour des populations peu nombreuses.

(2) en francs 1997.

L'évolution des pensions de retraite des fonctionnaires civils se caractérise par une grande stabilité tant en nombre d'ayants droit qu'en montant financier.

ÉVOLUTION DES PENSIONS DE RETRAITE DES OUVRIERS (1)

   

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2008

Ayants

Nombre

64.419

66.437

67.626

68.807

67.980

67.156

66.338

62.424

droit

Montant (MF) (2)

6.413

6.614

6.732

6.850

6.767

6.685

6.604

6.214

Ayants

Nombre

35.573

35.563

35.542

35.543

35.548

35.569

35.608

36.046

cause

Montant (MF) (2)

1.603

1.603

1.602

1.602

1.602

1.603

1.605

1.624

Total

Nombre

99.992

102.000

103.168

104.350

103.528

102.725

101.946

98.470

 

Montant (MF) (2)

8.016

8.217

8.334

8.452

8.369

8.288

8.209

7.838

(1) Les restrictions signalées pour les militaires en ce qui concerne la population non retenue dans le tableau sont également valables ici pour des populations peu nombreuses.

(2) en francs 1997.

En ce qui concerne les ouvriers, le nombre des ayants droit a fortement augmenté en 1997 et 1998 en raison des restructurations opérées dans le secteur de la défense pendant ces années. Il tendra, lui aussi, à décroître à partir de 2002.

En résumé, une fois passé le cap difficile de la programmation 1997-2002 et des effets de la professionnalisation des armées, la charge des pensions civiles et militaires aura tendance à s'alléger à partir de 2002/2003, ce qui constitue un point positif, compte tenu des risques d'inflation des charges de rémunérations de l'armée professionnelle dans cette même période.

B.- LA DIFFICILE MAÎTRISE DES RÉMUNÉRATIONS ET CHARGES SOCIALES

L'évolution des dépenses de RCS du ministère de la Défense est retracée par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE RCS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale 1996

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Projet de loi de finances 1999

Total 1997-1999

Total 1997-1999
(en %)

Montant

74.785,2

77.720,2

80.471,3

82.819,5

   

Variation

-

+ 2.935

+ 2.751

+ 2.348,3

+ 8.034,3

+ 10,74

Cette montée en charge résulte de mesures d'effectifs
mais aussi salariales et indemnitaires et d'accompagnement de la professionnalisation.

1.- Les effectifs

L'évolution des effectifs de la Défense est retracée par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

Effectifs

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Loi de programmation militaire (LPM)

573.081

548.508

524.026

497.385

474.784

453.801

440.206

loi de finances initiale (LFI)

573.081

548.689

526.240

498.599

-

-

-

Écart LPM/LFI

0

181

2.214

1.214

-

-

-

L'écart entre la loi de finances initiale et la loi de programmation militaire relève de mesures de périmètre (budgétisation de la DCN étatique pour 1.901 emplois, créations de 234 postes de gendarmes d'autoroutes) ou d'adaptation (abandon du " Rendez-vous citoyen " moins 700 emplois) non comprises dans la programmation.

La Défense perdra en 1999 27.641 emplois et passera ainsi sous la barre symbolique des 500.000 emplois, ce qui indique que plus de la moitié du chemin (- 13 %) aura été accompli par rapport à la cible 2002 (- 23 %). Au-delà de ce solde net, la professionnalisation se traduit par un chassé-croisé d'emplois qui est résumé par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES EMPLOIS BUDGÉTAIRES DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE ENTRE LA LOI DE FINANCES INITIALE 1998
ET LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1999

   

Air

Terre

Marine

Gendarmerie

DGA ZB (1)

Autres

Total ZB

DGA CC (2)

Total

 

Officiers

- 60

- 230

21

231

- 125

- 8

- 171

62

- 109

 

Sous-officiers

- 725

- 1.220

- 213

- 543

- 12

62

- 2.651

-

- 2.651

Militaires

MDR

2.371

5.879

0

0

- 20

159

8.389

-

8.389

 

Appelés

- 9.144

- 22.260

- 3.340

- 2.168

- 300

- 1.689

- 38.901

-

- 38.901

 

Volontaires

211

1.361

140

3.000

0

39

4.751

-

-

 

Total

- 7.347

- 16.470

- 3.392

520

- 457

- 1.437

- 28.583

62

- 28.521

 

Titulaires

327

551

947

202

- 339

238

1.926

-

1.926

Civils

Contractuels

8

- 20

18

0

- 184

- 13

- 191

63

- 128

 

Ouvriers

- 31

- 357

- 104

- 8

- 15

- 278

- 793

- 1.500

- 2.293

 

Total

304

174

861

194

- 538

- 53

942

- 1.437

- 495

 

Total

- 7.043

- 16.296

- 2.531

714

- 995

- 1.490

- 27.641

- 1.375

- 29.016

(1) ZB : zone budgétaire.

(2) CC : comptes de commerce (DCN et SMA).

Les grandes tendances de cette évolution qui seront commentées en détail dans le chapitre consacré à la professionnalisation peuvent être résumées comme suit :

· accélération de la déflation des effectifs d'appelés dont les suppressions passent de 31.853 postes en 1998 à 38.901 postes en 1999 pour un total résiduel de 98.700 postes. 1999 verra aussi l'arrivée des volontaires pour lesquels 4.751 postes seront ouverts pour une cible 2002 de 27.170 postes, dont 16.232 pour la seule gendarmerie ;

· accélération de la déflation de sous-officiers avec 2.651 suppressions d'emplois après 1.837 en 1998, pour un total résiduel de 209.661 et une cible 2002 de 199.296 ;

· poursuite de l'amélioration de l'encadrement de la gendarmerie par création de 231 postes d'officiers ;

· intensification des recrutements d'engagés ;

· poursuite des créations de postes de civils avec un total de 2.000 créations pour les trois armées, la gendarmerie et la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).

Si les mesures d'effectifs inscrites dans la programmation se soldent par une suppression nette de 27.041 postes budgétaires, elles se traduisent aussi, compte tenu de la nature des emplois créés et supprimés (professionnels contre appelés) par un surcoût de RCS de l'ordre de 485 millions de francs en 1999.

Par ailleurs, on observe une forte tension sur certains chapitres de rémunérations du ministère de la Défense, notamment le chapitre 31-31 - Personnels militaires - et le chapitre 31-51 - Personnels ouvriers de la Défense - en raison, soit d'une sous-évaluation initiale des dotations requises qui remonte parfois à plusieurs exercices et qui génère systématiquement un report de charges (le ministère semble avoir, par exemple, des difficultés à déterminer exactement son dispositif glissement-vieillesse technicité ce qui, compte tenu des effectifs en cause, peut rapidement provoquer des tensions importantes), soit d'un sureffectif constaté en gestion par rapport à la construction budgétaire. C'est notamment le cas des personnels ouvriers de la zone budgétaire de la DGA dont les sureffectifs (de l'ordre de 700 à 800 personnes estimées pour la fin de l'exercice 1998) pèsent sur la gestion du chapitre 31-51.

2.- Les mesures d'accompagnement
 de la professionnalisation

Les pécules d'incitation au départ anticipé des militaires (45 mois de solde budgétaire pour le militaire à plus de 10 ans de la limite d'âge de son grade puis dégressivité en fonction de la durée des services restant à accomplir) seront dotés de 857 millions de francs. Ils permettront d'assurer le départ anticipé de 200 officiers et de 2.000 sous-officiers. Il faut souligner que cette dotation est inférieure de 10,6 % à celle de 1998 qui avait atteint le montant record de 957 millions de francs. En effet, le dispositif destiné à rajeunir la pyramide des âges de l'armée professionnelle est fondé sur une dégressivité chronologique de manière à accentuer la rapidité de sa mise en _uvre. En 1999 et 2000, le montant des pécules baissera de 10 % puis de 20 % pour les années 2001 et 2002. La baisse de la dotation n'aura donc pas d'effet direct sur le nombre de départs aidés.

Le départ anticipé des ouvriers d'État de la Défense à 55 ans (dégagement des cadres) sera financé par l'inscription d'une dotation de 552 millions de francs au chapitre 31-51. A la différence des pécules qui ont une charge ponctuelle sur un exercice, le dispositif de dégagement des cadres à 55 ans génère une charge récurrente jusqu'à ce que les ouvriers bénéficiaires atteignent l'âge de 60 ans et soient pris en charge par leur fonds de retraite, le fonds spécial des ouvriers de l'État, lui-même d'ailleurs bénéficiaire d'une subvention d'équilibre inscrite au fascicule Défense.

Le poids des restructurations se fait aussi sentir au titre V puisque le Fonds d'adaptation industrielle (FAI), inscrit pour partie à l'article 38 du chapitre 55-11, finance le départ anticipé à 52 ans des ouvriers d'État de la DCN (736 millions de francs en 1999 contre 454 millions de francs en 1998) et la fin de la restructuration de la direction des applications militaires du CEA (43 millions de francs contre 160 millions de francs en 1998).

En toute orthodoxie budgétaire, ces crédits devraient d'ailleurs être imputés dans les dépenses ordinaires puisqu'ils financeront des charges de personnel.

3.- Les mesures salariales et indemnitaires

L'impact de l'accord salarial de la Fonction publique sur le ministère de la Défense est important.

Il s'élève à 488 millions de francs à raison de 427 millions de francs pour les militaires et 61 millions de francs pour les civils et se décompose en l'attribution généralisée de deux points d'indice supplémentaires en 1999 (coût 123 millions de francs) et en diverses mesures de revalorisation des bas salaires (solde des militaires du rang engagés, repyramidage des adjoints administratifs) pour un montant de 365 millions de francs dont 318 millions de francs pour les militaires.

La seule revalorisation de la rémunération des militaires du rang intervenue le 1er juin 1997 s'est traduite par une augmentation de la solde nette minima de 1.500 francs par mois (passage de 4.100 francs mensuels nets à 5.600 francs mensuels nets). Le coût pour le budget de la Défense s'est élevé à 772 millions de francs (dont 396 millions de francs en loi de finances initiale 1997).

L'application aux militaires (qui n'était pas de droit) de l'accord salarial conclu le 10 février 1998 pour la Fonction publique s'est traduite par une nouvelle augmentation de cette solde puisque la rémunération nette de base du militaire du rang professionnel se situe désormais à 6.250 francs par mois - hors primes spécifiques liées à l'activité - soit, compte tenu des avantages en nature dont bénéficient les intéressés (hébergement, alimentation, réduction SNCF), à un niveau largement supérieur au SMIC (5.240 francs net par mois au 1er juillet 1998).

A l'accord national s'ajoutent quelques mesures spécifiques à la défense comme la revalorisation de 1,1 % de l'indemnité pour charges militaires (coût 58 millions de francs), pour un total de 80 millions de francs.

A ce sujet, on doit souligner le poids et la diversité foisonnante du régime des primes et indemnités du ministère de la Défense.

La proportion de ces indemnités par rapport à la rémunération principale est élevée parfois très élevée, ce qui n'est pas toujours un avantage, notamment en matière de retraites. Elle varie fortement selon les catégories de personnel comme le montre le tableau ci-après établi à partir des dotations inscrites aux chapitres budgétaires de rémunération qui distinguent depuis 1998 les rémunérations principales des primes et indemnités.

POURCENTAGE DES PRIMES ET INDEMNITÉS PAR RAPPORT
AUX RÉMUNÉRATIONS PRINCIPALES DES PERSONNELS
DE LA DÉFENSE PAR CATÉGORIE DE PERSONNEL EN 1999

Civils non ouvriers

17

Militaires services communs
(DGA, Santé, Contrôle général)

37,8

Militaires des armées

34,7

Ouvriers d'État

non déterminé car fusionné dans les mêmes chapitres et articles

Volontaires

22,3

Le nombre de ces primes aussi est très élevé comme le montre la liste ci-après.

LISTE DES PRINCIPALES PRIMES ET INDEMNITÉS APPLICABLES AU PERSONNEL DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

I.- PERSONNEL CIVIL

A.- TEXTES INTERMINISTÉRIELS

- Indemnité horaire pour travaux supplémentaires

- Indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires

- Indemnité pour travaux dangereux, insalubres ou salissants

- Prime de rendement

- Indemnité de fonction informatique

- Indemnité forfaitaire de sujétions spéciales

B.- TEXTES SPÉCIFIQUES À LA DÉFENSE

- Indemnité de fonctions techniques

- Indemnité spéciale de responsabilité des contrôleurs aériens " essais-récepteurs "

- Indemnité pour services aériens techniques

- Indemnité spéciale de rendement des enquêteurs de prix

- Prime de rendement des fonctionnaires des corps des transmissions

- Indemnité de sujétions particulières des fonctionnaires des transmissions

- Allocation spéciale des ingénieurs d'études et de fabrications

- Indemnité de dépiégeage et de déminage

- Indemnité pour risques professionnels

- Indemnité spéciale des hors catégories

C.- TEXTES SPÉCIFIQUES AUX OUVRIERS D'ÉTAT

- Prime de rendement

- Prime pour travaux dangereux, pénibles, insalubres et salissants

- Indemnité spécifique mensuelle des ouvriers monteurs

II.- PERSONNEL MILITAIRE

A.- INDEMNITÉS RELATIVES À LA SUJÉTION

- Indemnité pour charges militaires (ICM)

- Majoration de l'indemnité pour charges militaires (MICM)

- Complément et supplément de l'indemnité pour charges militaires (CSICM)

- Indemnité pour service en campagne

- Majoration d'embarquement (20 % de la solde de base des marins)

- Prime pour services en campagne

B.- PRIMES RELATIVES À LA QUALIFICATION

- Prime des officiers brevetés (26 % de la solde de base)

- Prime des officiers diplômés (13 % de la solde de base)

- Prime de qualification de sous-officiers diplômés (10 % de la solde de base)

- Prime de service des sous-officiers (5 % de la solde de base)

C.- INDEMNITÉ RELATIVE AUX RISQUES ENCOURUS

- Indemnité pour services aériens (50 % ou 25 % de la solde de base)

Cette diversité reflète vraisemblablement la grande variété des métiers exercés au ministère de la Défense, elle ne facilite toutefois pas sa gestion, ni la lecture de ses coûts de personnel.

Dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 1997, la Cour des comptes a relevé que l'évolution des rémunérations du ministère de la Défense en 1997 était accompagnée d'un relatif changement de structures. Elle constate en particulier que la diminution sensible des soldes payées (- 4 %), légèrement inférieure à celle des effectifs réels (- 5,4 %), s'accompagne d'une augmentation des principales indemnités.

La décomposition des dépenses de rémunération et charges sociales par objet, évoquée dans le rapport de la Cour, confirme cette analyse.

PRINCIPAUX OBJETS DE DÉPENSES DES CHAPITRES DE RÉMUNÉRATIONS
ET DE CHARGES SOCIALES DE LA DÉFENSE

(en millions de francs)

 

1995

1996

1997

1997/1996

(en %)

Salaires

2.497,12

2.389,4

2.304,01

- 3,6

Ouvriers

891,55

871,75

846,7

- 2,9

Rémunérations principales des titulaires

3.197,93

3.205,63

3.420,23

6,7

Rémunérations principales des contractuels

350,17

315,15

313,67

- 0,5

Personnels autres, relevant de conventions collectives

487,68

523,46

531,59

1,6

Autres agents non indexés

339,42

320,47

347,16

8,3

Solde mensuelle

35.899,73

35.418,42

34.018,49

- 4

Solde forfaitaire

2.755,88

2.674,52

2.634,63

- 1,5

Indemnités tenant à certaines fonctions

279,18

269,67

258,06

- 4,3

Heures supplémentaires

331,46

310,04

329,8

6,4

Rendement

942,8

896,4

906,35

1,1

Charges militaires

5.677,3

5.731,29

5.997,89

4,7

Sujétions spéciales

2.224,83

2.249,13

2.329,59

3,6

Indemnités pour services aériens

1.328,9

1.378,85

1.519,61

10,2

Qualification et technicité

2.552,78

2.680,96

2.954,66

10,2

Indemnités liées aux conditions de séjour

3.228,35

4.110,47

4.010,1

- 2,4

Indexation des indemnités outre-mer

365,39

318,44

372,65

17

Majoration pour service dans les DOM

198,60

204,89

215,23

5

Majoration d'embarquement

320,70

331,39

429,81

29,7

Majoration pour service en sous-marin

225,51

227,34

213,78

- 6

Autres indemnités

407,08

292,19

496,31

69,9

Indemnité de départ en campagne

426,12

444,53

428,97

- 3,5

Indemnités résidentielles

108,01

176,08

184,74

4,9

Indemnités de résidence - soldes

312,38

326,1

326,75

0,2

Installations et éloignement (outre-mer)

582,22

609,05

649,18

6,6

Supplément familial de traitement

873,66

917,21

1.080,4

17,8

Charges diverses de traitement

416,09

410,06

576,62

40,6

Pécules

108,29

113,24

632,99

459

Contribution au Fonds spécial des pensions des ouvriers d'État

1.178,92

1.204

1.284,13

6,7

Total

70.141,37

70.557,99

71.274,05

1

C.- LA BAISSE DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT

La baisse des crédits de fonctionnement courant de 9,7 % en 1999 qui fait suite à 5,2 % en 1998 et une tendance de l'ordre de 5 % par an en moyenne depuis la loi de finances initiale pour 1996 (encore faut-il identifier l'exact périmètre de la notion de fonctionnement courant) est la conséquence directe de la professionnalisation et de la réduction du format des armées.

Le rapport annexé de la loi de programmation précisait même que " évalués en francs constants, les crédits de fonctionnement courant seront en fin de programmation inférieurs de 20 % à leur niveau actuel " (paragraphe 2-1-5).

Il est vrai qu'au rythme de 1998 et 1999, l'objectif sera largement dépassé fin 2002 puisque le chiffre est à mi-parcours de 17,7 %. Si certains postes de dépenses sont directement indexés sur le volume des effectifs, d'autres obéissent à des logiques moins proportionnelles. Par ailleurs, le secteur de la défense contribue à la politique générale de maîtrise des finances publiques, comme l'ensemble des ministères, dans un souci constant de rationalisation de ses dépenses. La restructuration s'accompagne ainsi d'une réflexion sur l'organisation et les méthodes. Toute la difficulté consiste à promouvoir des économies réelles sans porter atteinte au caractère opérationnel des forces et notamment à leur taux d'activité et d'entraînement.

L'incidence du solde net des mesures d'effectifs de la programmation pour 1999 (soit - 27.041 suppressions nettes d'emploi) sur les crédits de fonctionnement hors RCS est estimée à une économie de 749 millions de francs dont 236 millions de francs pour l'alimentation, 345 millions de francs pour le fonctionnement courant (informatique, entretien immobilier, entretien courant des matériels, chauffage, éclairage, eau, instructions, etc.) et 168 millions de francs pour l'indemnité compensatrice versée à la SNCF.

Les crédits d'alimentation, comme l'indemnité compensatrice à la SNCF dont le montant sera de 1.173 millions de francs en 1999, sont directement indexés sur le volume des appelés même si d'autres catégories de personnel militaire bénéficient de la gratuité des repas selon leur armée (équipages de la Marine) ou la nature de leur mission (astreintes, maintien de l'ordre pour la Gendarmerie, opérations à l'extérieur, etc.).

De fait ces crédits ont substantiellement baissé depuis 1995 comme le montre le tableau ci-après :

ÉVOLUTION COMPARÉE DES CRÉDITS D'ALIMENTATION ET DES EFFECTIFS

(en millions de francs)

Armées

 

Loi de finances initiale pour 1995

Loi de finances initiale
pour 1996

Loi de finances initiale
pour 1997

Loi de finances initiale
pour 1998

Projet de loi de finances
pour 1999

Évolution 1995/1999

Air

crédits

565

575

1,8 %

530

- 7,8 %

483

- 8,9 %

404

- 16,4 %

- 28,5 %

 

effectifs budgétaires

89.185

88.646

- 0,6 %

83.460

- 5,9 %

78.149

- 6,4 %

70.802

- 9,4 %

- 20,6 %

Terre

crédits

1.698

1.712

0,8 %

1.551

- 9,4 %

1.415

- 8,8 %

1.246

- 11,9 %

- 26,6 %

 

effectifs budgétaires

239.117

232.626

- 2,7 %

219.966

- 5,4 %

203.214

- 7,6 %

186.744

- 8,1 %

- 21,9 %

Marine

crédits

611

617

1 %

589

- 4,5 %

557

- 5,4 %

464

- 16,7 %

-24,1 %

 

effectifs budgétaires

63.820

63.383

- 0,7 %

60.326

- 4,8 %

57.016

- 5,5 %

53.624

- 5,9 %

- 16 %

Gendarmerie

crédits

191

197

3,1 %

200

1,5 %

212

6 %

223

5,2 %

16,8 %

 

effectifs budgétaires

92.232

92.411

0,2 %

92.905

0,5 %

93.654

0,8 %

94.174

0,6 %

2,1 %

Total

crédits

3.065

3.101

1,2 %

2.870

- 7,4 %

2.667

- 7,1 %

2.337

- 12,4 %

- 23,8 %

 

effectifs budgétaires

484.354

477.066

- 1,5 %

456.657

- 4,3 %

432.033

- 5,4 %

405.344

- 6,2 %

- 16,3 %

Il est normal que les crédits d'alimentation baissent proportionnellement plus que les effectifs puisqu'ils sont indexés sur les effectifs des seuls appelés qui ont plus baissé que l'ensemble des effectifs budgétaires.

En cinq ans, les crédits d'alimentation ont tout de même diminué de près d'un quart.

L'exception de la gendarmerie traduit le caractère spécifique de l'évolution de ses effectifs : seule une faible part de ses effectifs totaux est nourrie et cette catégorie de personnel est en augmentation sur la période.

Certaines catégories de coûts (entretien des bâtiments, chauffage) ne sont pas strictement proportionnels au volume des effectifs. En cas de dissolution d'unités ou de sites, les coûts de fonctionnement disparaissent bien évidemment.

Inversement, la professionnalisation génère des besoins nouveaux comme les travaux de sous-traitance qui sont appelés à progresser significativement devant les difficultés rencontrées par les armées à recruter le volume de personnel civil souhaité. Les crédits seront de 85 millions de francs en 1999 pour 35 millions de francs en 1998.

Votre Rapporteur estime qu'ils sont nettement insuffisants. Ou bien les armées disposent des personnels civils prévus dans les différentes maquettes d'armées arrêtées en 1996-1997 ou bien, si c'est impossible en raison des sureffectifs constatés ailleurs, on leur donne véritablement les moyens d'externaliser de plus en plus de tâches, pour la plupart de service ou de soutien (restauration, surveillance, entretien courant), naguère assumées par des appelés.

A ces 85 millions de francs identifiés pour la sous-traitance, s'ajoutent 60 millions de francs de crédits destinés à financer des surcoûts liés à la transition et aux restructurations.

Par ailleurs, de nombreuses mesures d'économies de crédits de fonctionnement figurent au budget 1999.

C'est notamment le cas des dotations en carburants opérationnels qui baisseront de 253 millions de francs en 1999 par rapport à la loi de finances initiale 1998.

En raison de la baisse des cours du baril de brut, 1997 a été un exercice excédentaire en matière de carburants opérationnels (selon toute probabilité, il en sera de même en 1998), comme le montre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS CONSACRÉS AUX CARBURANTS OPÉRATIONNELS

(en millions de francs)

 

1997
Loi de finances initiale
Crédits votés

1997
Loi de finances rectificative

1997
Consommation

1998
Loi de finances initiale
Crédits votés

1999
Projet de loi de finances
Crédits proposés

Air

771

1.076

1.073

903

827

Terre

510

-

468

469

393

Marine

         

- Flotte

262

-

232

284

244

- Aéronautique navale

120

-

(nc)

127

96

Gendarmerie

232

-

204

243

218

Un ajustement des crédits budgétaires du service de santé des armées sera opéré (- 160 millions de francs) grâce à l'augmentation attendue de ses fonds de concours qui résultera à la fois de la croissance de la fréquentation civile des établissements hospitaliers et d'une modification de la politique tarifaire suivie.

Enfin, un forfait d'économies supplémentaires de 400 millions de francs (sur un total de 23.250 millions de francs de crédits de fonctionnement en 1998) a été imposé à la Défense au titre de la productivité.

L'effort de rationalisation de l'imposant dispositif de formation du ministère (12,7 milliards de francs pour le personnel civil et militaire, soit 9 millions de journées élèves) sera poursuivi.

On attend ainsi 70 millions de francs de mesures comme le regroupement des sites de chacune des armées, par exemple l'ensemble des formations initiales de sous-officiers de l'armée de Terre à Saint-Maixent, le développement de synergies interarmées autour de pôles d'excellence (regroupement de la formation initiale des pilotes de multimoteurs de l'armée de l'Air et de la Marine sur le site d'Avord) ou encore la sous-traitance (prise en charge par le centre national d'enseignement à distance de formations linguistiques non spécifiques).

Pour mémoire, il convient de signaler que la baisse des crédits d'entretien programmée du matériel correspond non pas à une économie mais à un transfert sur le titre V à raison de 400 millions de francs.

III.- LA " SANCTUARISATION " DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT

Dans un important discours prononcé à Saint-Mandrier le 3 avril 1998, le Premier ministre a exposé la politique de défense menée par le Gouvernement. Il y a notamment détaillé les arbitrages rendus à l'issue de la revue des programmes et il s'est engagé à stabiliser les crédits d'équipement de la Défense en ces termes : " mais la conduite dans la durée d'une politique de défense oblige à dépasser la ligne d'horizon budgétaire. C'est pourquoi, afin de donner une visibilité sur le moyen terme, le Gouvernement retient une double orientation, caractérisée par la stabilisation des ressources de la Défense et l'obtention d'économies compatibles avec la programmation en vigueur.

Les crédits d'équipement de la Défense s'élèveront ainsi à 85 milliards de francs constants pour les quatre prochaines annuités, à mi-chemin entre le niveau nominal de la programmation et le montant inscrit au budget de 1998 ".

L'arbitrage du Premier ministre (85 milliards de francs valeur 1998 actualisés) stabilise donc le budget d'équipement des armées à mi-chemin entre " l'encoche " de 1998 et les dispositions de la loi de programmation 1997-2002. Ce montant est cohérent avec les décisions prises à l'issue de la revue des programmes qui doivent se traduire par une économie de 20 milliards de francs sur la période 1999-2002.

De fait, les crédits d'équipement (titres V et VI) du ministère de la Défense passeront de 81 milliards de francs en 1998 (loi de finances initiale) à 86 milliards de francs en 1999, soit une augmentation de 6,2 %.

Afin de disposer d'un chiffre consolidé, il faut toutefois neutraliser les effets de deux mesures de transfert qui modifient le périmètre des crédits. Il s'agit :

· d'un transfert interne portant sur 400 millions de francs de crédits d'entretien programmé du matériel en provenance du titre III vers le titre V. Ceci s'inscrit dans un processus de moyen terme destiné à rationaliser l'imputation budgétaire de ce type de crédits. La même opération avait eu lieu en loi de finances initiale 1997 pour un montant supérieur (1,1 milliard de francs) ;

· d'un transfert externe plus critiquable car expressément exclu du périmètre de la programmation. Il concerne le financement du budget civil de recherche développement à hauteur de 900 millions de francs contre 500 millions de francs en loi de finances initiale 1998 et 2 milliards de francs en 1996. Ces crédits sont destinés à des programmes du CNES sur lesquels le ministère de la Défense ne dispose d'aucune autorité.

Contrairement à une idée reçue, la totalité des crédits d'équipement du fascicule " Défense " ne finance pas des programmes d'armement, loin s'en faut, comme le montre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS EN CAPITAL PAR CATÉGORIE DE COÛTS

(en millions de francs)

 

Autorisations de programme

Crédits de paiement

Évolution
(en %)

Part des crédits de

 

1998

1999

1998

1999

Autorisations de programme

Crédits de paiement

paiement 1999
(en %)

Études

5.065

5.610

6.185

5.486

10,8

- 11,3

6

Développement

14.172

13.989

13.398

15.604

- 1,3

16,5

18

Entretien programmé du matériel

16.094

18.196

15.563

16.417

13,1

5,5

19

Entretien programmé du personnel

2.047

1.867

1.883

1.744

- 8,8

- 7,4

2

Fabrications

28.745

31.371

30.599

31.124

9,1

1,7

36

Infrastructures

10.353

10.078

9.196

10.725

- 2,7

16,6

12

Munitions

3.698

3.913

3.224

3.914

5,8

21,4

5

Restructurations

829

977

954

987

17,8

3,5

1

Total

81.002,9

86.000

81.002,9

86.000

6,17

6,17

100

Ces agrégats sont recomposés à partir des fiches d'affectation primaire des crédits, instruments quotidiens de la gestion du ministère de la Défense.

Déconnectés de la nomenclature du fascicule budgétaire, ils permettent toutefois de disposer d'une première approche analytique des dotations des titres V et VI.

Le premier agrégat est celui des restructurations. Il est évalué dans cette nomenclature à moins d'un milliard de francs soit 1,1 % des crédits d'équipement. C'est une approche assez restrictive de la notion de restructuration qui prévaut ici, ne comprenant guère que le fonds d'adaptation industrielle (736 millions de francs pour la DCN et 43 millions de francs pour la direction des applications militaires du CEA) et le fonds pour les restructurations de la défense (202 millions de francs en 1999 contre 176 millions de francs en 1998) à l'exclusion, par exemple, de la subvention de compensation à la Polynésie (613 millions de francs) ou de la provision de 343 millions de francs destinée à financer le transfert des charges d'entretien de certaines installations portuaires et maritimes de la DCN à la Marine.

Le deuxième agrégat est constitué des charges d'infrastructure qui représentent, bon an mal an, 10 à 12 % du budget d'équipement ce qui reflète l'important patrimoine immobilier du ministère et la complexité de ses installations opérationnelles.

Les agrégats entretien programmé du matériel, entretien programmé du personnel et munitions représentent différentes catégories de flux et ils totalisent environ un quart des dépenses.

Quant à l'effort de recherche du ministère, dans une acception étroite, il n'englobe que la notion d'études (études amont + subventions d'équipement aux instituts de recherche comme l'ONERA ou l'Institut de Saint-Louis + études à caractère politico-militaire établies par convention avec des instituts de recherche comme l'IRIS, l'IFRI, la Fondation nationale des sciences politiques, etc.). Dans une interprétation élargie, il comprend le développement afin d'approcher la notion de recherche et développement.

Enfin, l'activité de développement et de fabrication de programmes d'armement ne représente, dans la nomenclature présentée ci-dessus, que 46,7 milliards de francs en 1999, soit 54 % des dépenses en capital (titres V et VI) de la défense. On estime ainsi généralement à 60 % la part des dépenses de programmes (petits et grands) dans l'ensemble du titre V.

Ces précisions données, trois caractéristiques apparaissent dans le budget d'équipement de la défense pour 1999 :

· la persistance d'un socle important de dépenses d'investissement, indépendantes des programmes d'armement ;

· la faiblesse de l'effort de recherche ;

· l'effort de réduction de coûts des programmes mené en cohérence avec les conclusions de la revue de programmes.

A.- LE SOCLE DES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT ÉTRANGER
 AUX PROGRAMMES D'ARMEMENT

1.- Les infrastructures

Les crédits d'infrastructure sont retracés par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT D'INFRASTRUCTURE PAR ARMÉE

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale

1997

Loi de finances initiale

1998

Projet de loi
de finances pour 1999


(en %)

Air

1.066

1.126

1.084

- 3,7

Marine

891

848

1.040

+ 22,6

Terre

2.662

2.330

2.567

+ 10,2

Gendarmerie

915

830

868

+ 4,6

Services communs

4.207

4.064

5.166

+ 27

Total

9.741

9.198

10.725

+ 16,6

L'évolution des crédits d'infrastructure montre que l'entretien, la rénovation et l'adaptation du patrimoine immobilier des armées à la professionnalisation bénéficient d'arbitrages favorables.

La croissance atypique des crédits de la Marine s'explique par la provision de 343 millions de francs constituée en vue du transfert de charges immobilières en provenance de la DCN au terme d'un plan de rationalisation et de partage des responsabilités sur les installations portuaires et maritimes. Il s'agit d'alléger la DCN d'un certain nombre de charges qu'elle assumait sur des infrastructures dont la Marine bénéficiait aussi. Le partage remontait à la constitution de la DGA en 1961 et devait être adapté aux exigences de compétitivité de la DCN et à la réalité de l'usufruit des installations.

Les crédits d'infrastructure peuvent financer des opérations portant sur des installations techniques ou opérationnelles (hangars pour matériel, ateliers, quais, moyens de transmissions) mais aussi sur la modernisation du casernement en vue notamment de la professionnalisation.

C'est le cas du plan Vivien (revalorisation de l'infrastructure de vie des engagés) de l'armée de Terre.

Le plan Vivien concerne la construction ou la rénovation des logements affectés aux engagés volontaires et aux sous-officiers célibataires.

Ce plan prévoit une modernisation des normes d'hébergement reposant sur le logement des engagés en chambres de quatre avec lavabos individuels, des caporaux-chefs en chambre de deux avec lavabos individuels et des sous-officiers célibataires en chambres individuelles avec sanitaires individuels et " kitchenette ".

Il fait l'objet d'une programmation sur six ans (1998-2004) des travaux à réaliser pour atteindre ces normes, dotée en moyenne à hauteur de 600 millions de francs par an.

Votre Rapporteur considère en effet que les normes de confort et les conditions de vie plutôt spartiates imposées naguère aux appelés ne peuvent être transposées sans modification à du personnel engagé. Il convient toutefois d'être assez prudent dans l'estimation du besoin à moyen terme car il n'est pas acquis que les engagés futurs souhaiteront massivement être logés dans les casernes.

2.- Les munitions

Les crédits consacrés aux munitions sont retracés dans le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT CONSACRÉS AUX MUNITIONS

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale

1997

Loi de finances initiale
1998

Projet de loi
de finances pour 1999

Évolution
(en %)

Air

1.540

1.540

1.618

+ 5

Terre

1.017

748

1.121

+ 49,9

Marine

1.000

937

1.175

+ 25

Total

3.557

3.225

3.914

+ 21,4

La remontée des crédits en 1999 (d'importantes commandes de missiles ont été passées en 1997) fait suite à une longue période de diminution qui n'avait pas mis en péril les capacités opérationnelles ou d'entraînement des armées. Elle correspondait à la professionnalisation, à la réduction globale du format des armées et à la dissolution d'unités. Les stocks définis à l'origine sur la base d'un conflit de haute intensité en Europe centrale étaient manifestement suffisants, voire surdimensionnées (souvent au-delà de 100 %), d'autant que l'entraînement à munitions réelles est de plus en plus remplacé par l'entraînement sur simulateurs. De plus, dans le passé, l'armée de Terre a parfois dû constituer des stocks supplémentaires pour faire face aux insuffisances des plans de charge du GIAT. La remontée de 1999 permettra une remise à niveau après cette longue période de décroissance qui était sans doute allée au-delà du nécessaire redimensionnement des stocks qui s'imposait.

B.- UN EFFORT DE RECHERCHE ENCORE INSUFFISANT

Pris dans son acception la plus large (agrégat RDE soit études + développement), l'effort de recherche du ministère s'établit à 21,1 milliards de francs en 1999 contre 19,5 milliards de francs en 1998 mais 22,3 milliards de francs en 1997. Cet effort n'a cessé de décliner en francs courants au cours de la décennie. Il était encore de 29,4 milliards de francs en 1992.

Les seuls crédits d'études du ministère passeront en crédits de paiement de 6.185 millions de francs à 5.486 millions de francs en 1999, soit une chute de 11,3 %. Cette décroissance est préoccupante car elle ralentit les travaux menés par les industriels français sur les technologies de pointe et compromet la position de notre pays dans un certain nombre de secteurs qui feront les systèmes d'armes et les exportations de demain (espace, radars d'avions de combat, sonars, système de communication) alors même que nous y occupions un rang envié dans un passé récent. Faute de suivi et devant la faiblesse des crédits d'études amont (espace, sonars, missiles) certains industriels sont conduits à lever le pied et à réduire leurs équipes sauf dans des secteurs duaux où la demande civile relaie l'accès de faiblesse de la défense.

Les États-Unis et le Royaume-Uni témoignent de plus de continuité dans leur effort de recherche militaire et, sans réaction de la France, l'écart risque de se creuser. La décision prise à l'issue de la revue des programmes de réduire de 10 % les crédits d'étude amont ne peut que renforcer cette inquiétude.

Votre Rapporteur est conscient que les procédures jusqu'à présent en vigueur dans le secteur de la défense en matière de crédits d'études amont ne permettaient pas une optimisation de l'utilisation de l'argent public ni même un suivi précis de leur affectation. Il est des exemples de création de valeur industrielle obtenue à partir de crédits de recherche de la défense dans des domaines assez éloignés de l'objectif initial. Beaucoup d'argent s'est aussi perdu dans les sables de la recherche fondamentale peu appliquée. C'est la raison pour laquelle il soutient la réforme entreprise sur ce sujet et qui s'est traduite par l'adoption de la nouvelle instruction ministérielle du 4 juillet 1997 relative aux études amont.

La capacité d'orientation du ministère reposera désormais sur un document de référence, le plan prospectif à trente ans, décliné par une programmation révisée annuellement.

Une procédure annuelle d'évaluation sera systématiquement mise en place et la coordination du dispositif relèvera du comité d'orientation et d'évaluation des études amont, ce qui devrait permettre un meilleur retour sur investissement des crédits publics.

A côté des études amont figureront désormais des études à caractère opérationnel ou technico-opérationnel. La programmation de 1998 en prévoit environ 150 pour un montant de 137 millions de francs en 1998 et 146 millions de francs en 1999. Elles sont classées par systèmes de forces et ont pour but d'affiner les futures expressions de besoin militaire dans une optique de long terme ou de fournir des éléments d'aide à la décision pour la préparation des programmes identifiés, comme le montrent les exemples d'étude ci-après :

· concept d'emploi et vulnérabilité de l'avion de transport futur ;

· complémentarité entre avions et véhicules non habités ;

· analyse de la vulnérabilité NBC au niveau théâtre, etc.

Enfin, 40 millions de francs sont inscrits au projet de loi de finances pour 1999 pour financer des études à caractère politico-militaire, économique et social principalement pour le compte de la direction aux affaires stratégiques.

Si la rationalisation du dispositif d'études du ministère doit augmenter sa rentabilité, il n'en reste pas moins que, faute d'un effort financier important qui peut se trouver par redéploiement, la France perdra la compétition dans les technologies de pointe alors qu'elle a toujours su figurer dans le peloton de tête jusqu'à présent. Il en va aussi de la responsabilité des industriels qui, pour la plupart d'entre eux, en ont pris une conscience aiguë à la suite des restrictions budgétaires constatées dans un domaine où elles ne devraient pas être de mise. La simple dynamisation de l'enveloppe de crédits (900 millions de francs en 1999) imposée à la défense au titre de la recherche duale et sur laquelle elle ne dispose d'aucun contrôle constituerait un geste significatif.

C.- LE FINANCEMENT DES PROGRAMMES

L'examen du financement consolidé des programmes est une tâche particulièrement complexe en raison de leur nombre très élevé, de l'insuffisance des instruments de suivi du ministère de la Défense et de la multiplicité des paramètres qui peuvent intervenir sur l'exécution et le coût des programmes d'armement.

Il s'agit d'une activité très évolutive, chaque programme a sa vie propre, ponctuée par différentes phases (faisabilité, définition, développement, production), ce qui complique singulièrement la collecte et la synthèse de l'information.

A mi-parcours de la programmation dont la vocation première est tout de même d'encadrer l'effort d'équipement de la Nation en armement (la professionnalisation a quelque peu estompé cette évidence), il convient d'essayer de :

· dresser le bilan financier de la revue des programmes menée cet hiver ;

· fournir un premier commentaire sur les résultats de la politique menée par la DGA en matière de réduction de coûts ;

· et faire le point sur les nouvelles méthodes d'acquisition des programmes qui modifieront profondément cette activité.

1.- Les conséquences financières de la revue des programmes

L'encoche portée au volume des ressources d'équipement de la Défense en 1998 qui faisait suite à une longue série d'ajustements à la baisse par rapport au niveau prévu par la programmation, rendait inévitable une relecture ou un dimensionnement de l'effort d'équipement, à moins de se prêter aux traditionnels expédients qui n'ont pour seul effet que de repousser dans le temps les échéances grossies et de réduire la capacité de réaction ou d'adaptation aux évolutions géostratégiques.

Lancée en octobre 1997, cette revue de programmes devait " mettre au point une actualisation de l'ensemble des programmes d'armement, fondée sur des chiffrages fiables, en respectant les grands objectifs opérationnels assignés aux forces armées, dans le cadre de la planification 2015 ". Elle se proposait de préparer des choix politiques en cohérence effective avec le niveau de notre effort de défense.

Cette actualisation supposait une optimisation de l'effort financier nécessaire à l'acquisition et à la détention des équipements du futur modèle d'armées. Il importait donc de rechercher systématiquement toutes les marges de man_uvre financières dans les programmes et dans les flux, ainsi que dans la définition des systèmes de forces destinés à satisfaire le besoin opérationnel.

En tenant compte des contraintes économiques du moment et celles prévisibles pour les années à venir, le niveau de ressources prévu a été arrêté à 85 milliards de francs (1998) par an. L'adaptation des besoins de 5 milliards de francs par an, soit 20 milliards de francs sur le titre V par rapport aux échéanciers initiaux de la loi de programmation a été obtenue grâce aux mesures suivantes :

· des abandons ou arrêts de programmes (Horus, Milas, Torpille lourde, missile anti-char de 3ème génération longue portée, Apache IZ, Macped, système de surveillance de l'espace) ;

· des réaménagements (M51, SNLE-NG, Rafale, Mistral, engin porte-blindé, Syracuse III) ;

· l'abandon de capacités significatives comme la permanence du groupe aéronaval opérationnel qui devait être assurée au moins jusqu'en 2010, et le retrait anticipé du service opérationnel de deux escadrons de Jaguar en 2001 ;

· l'anticipation du remplacement du système de transmission nucléaire l'Astarte ;

· la diminution du flux de ressources annuellement consacrées aux études (- 20 % pour les études amont nucléaires et - 10 % pour les autres), à l'entretien programmé du matériel et à l'infrastructure.

La portée financière et opérationnelle des mesures applicables aux programmes est résumée dans le tableau ci-après.

PRINCIPALES DÉCISIONS DE LA REVUE DES PROGRAMMES

(en millions de francs 1998)

Nom du programme ou domaine considéré

Nature de la mesure

Modification par rapport à la loi de programmation militaire 1997-2002

Impact financier sur 1999/2002

Hélios I et II

Réduction de coût (composante sol de Hélios II et maintien en conditions opérationnelles de Hélios I)

Aucun changement

- 453

Missile AC3GLP

Abandon

Poursuite du développement et abandon de l'industrialisation. Achat sur étagère à l'horizon 2011.

- 470

Missile SATCP Mistral

Réduction de cible

L'armée de Terre commandera 400 missiles de moins que prévu. Le nombre de postes de tir reste constant

- 229

Engin porte blindés

Réduction de cible

100 EPB ne seront pas commandés. Ils seront numériquement remplacés par des porte-chars de 40 tonnes qui ne seront pas capables de transporter des Leclerc

- 261

Porte-avions Foch

Abandon

Le Foch ne sera pas mis en sommeil, mais définitivement désarmé dès l'admission en service actif du porte-avions Charles de Gaulle que rien ne pourra remplacer pendant sa première grande indisponibilité

- 400

Milas

Abandon

Abandon à l'issue de la phase de développement menée en coopération
avec l'Italie

- 212

Nouveau transport de chaland de débarquement (NTCD)

 

Commande passée au vu du résultat d'un appel d'offre. Aucun changement

(nc)

Rafale

Étalement du calendrier

Décalage de 9 mois des premières livraisons à l'armée de l'Air

Décalage de 3 mois des livraisons du standard " Assaut " de la Marine

- 2.000

reportés après 2002

Jaguar

Abandon partiel

Dissolution de 2 des 3 escadrons de Jaguar subsistant. Il n'en restera plus qu'un seul à l'armée de l'Air jusqu'en 2005

- 450

SNLE-NG

Étalement de calendrier

Recul de l'admission au service actif (ASA) du SNLE-NG n° 3 (Vigilant) de 6 mois, à ajouter aux 12 mois de retard décidé à l'automne 1997

Recul de l'ASA du SNLE-NG n° 4 pour être en phase à l'arrivée du missile M51

- 765

reportés après 2002

Missile M51

Changement de calendrier

Réduction de coût

Accélération du programme pour être en phase avec l'ASA du SNLE-NG

Aucun changement

- 65

Astarte

Abandon

Anticipation du retrait de service de 2005 à 2001

- 400

Satellite radar Horus

Abandon

Retard de la réalisation d'une capacité d'observation satellitaire qui devait être en orbite en 2005

- 1.870

Système successeur Syracuse II

Étalement de calendrier

Recul de 6 mois du premier lancement, toujours prévu en 2005.

- 962

2.- La politique de réduction des coûts menée par la DGA

A la suite de l'opération " coup de poing " menée dans la deuxième partie de l'année 1996, véritable électrochoc destiné à mobiliser l'ensemble de la Délégation générale pour l'armement (DGA) sur l'objectif de réduction des coûts des programmes d'armement, un contrôle de gestion des programmes a progressivement été mis en place à partir de 1997.

Ce contrôle repose sur la référence d'un coût objectif notifié au directeur de programme par le délégué général pour l'armement en accord avec le ou les états-majors concernés.

Les objectifs de réduction de coût sont échelonnés selon l'état d'avancement des programmes (de 30 % pour ceux entrant en phase de faisabilité à 10 % ou moins pour ceux en production).

Chaque mois, les responsables de programme fournissent une estimation des réductions de coût qu'ils ont obtenues. Elles sont considérées comme acquises lorsqu'elles sont actées (par une décision ou dans un contrat passé à l'industrie) ou considérées comme très proches de l'être.

Les méthodes de réduction de coûts sont nombreuses. Les plus importantes d'entre elles portent sur la stratégie d'acquisition (cf. Infra), l'analyse de la valeur qui, au terme d'une optimisation du rapport entre le coût et la performance, permet de fixer les spécifications au " juste besoin ", la négociation avec les industriels, l'optimisation du soutien logistique et des essais ou encore la réutilisation de matériels existants.

Les exemples ci-contre illustrent l'application de ces différentes méthodes par des cas concrets.

L'objectif d'économies fixé au départ de l'opération de réduction de coût est de 102 milliards de francs, soit 19 % de la somme (537 milliards de francs) qui restait à engager au mois de septembre 1996 pour financer 81 programmes d'armement placés sous contrôle de gestion. Le montant d'ores et déjà acquis et annoncé par la DGA s'élève à 43,5 milliards de francs au coût des facteurs de janvier 1997, au-dessus de la prévision linéaire établie à la fin de 1996. A peu près la moitié de ce montant total d'économies porte sur la période de fin de programmation 1999-2002.

Ces chiffres considérables appellent quelques commentaires.

EXEMPLES DE RÉDUCTION DE COÛTS OBTENUE
SUR DES PROGRAMMES D'ARMEMENT

I.- MISSILE D'INTERVENTION, DE COMBAT ET D'AUTODÉFENSE (MICA)

Objectif fixé : 16 % de la part production

Objectif atteint : 10 %.

Actions principales :

· 4 % par réduction des provisions destinées au matériel de soutien et d'entraînement, en conservant le niveau de service souhaité pour le soutien en utilisation.

· 4 % sur l'industrialisation obtenus sur la base d'une contribution des ventes à l'exportation ;

· 2 % par réduction du prix unitaire moyen des 1.310 missiles grâce notamment à la commande globale des 225 premiers.

D'autres réductions seront recherchées à travers l'évolution technologique de certains équipements, le regroupement de commandes ultérieures et l'optimisation du maintien en condition opérationnelle du missile.

II.- VALORISATION DU RÉSEAU MOBILE DE TÉLÉCOMMUNICATIONS TACTIQUES DE L'ARMÉE DE TERRE (RITA)

Objectif fixé : 14 % du coût de référence.

Objectif atteint : 9,5 %.

Actions principales :

· l'organisation du contrat en deux commandes groupées ;

· analyse de la valeur conduisant à la suppression des contraintes de résistance à l'impulsion électromagnétique et à diverses simplifications ;

· compétition renforcée sur des équipements ;

· réduction de la durée des essais par une meilleure intégration des équipes techniques et opérationnelles.

D'autres réductions seront recherchées à travers des gains de productivité et la participation de la Belgique à la production.

III.- SYSTÈME D'INFORMATION RÉGIMENTAIRE (SIR ÉTAPE 1)

Objectif fixé : 15 %.

Objectif atteint : plus de la moitié.

Actions principales :

· utilisation de produits existants " sur étagère " (radios PR4G, abris techniques mobiles, protocoles de communication, serveurs de communication) ;

· produits standards du marché qu'il conviendra, le cas échéant, d'adapter aux conditions particulières d'emploi : postes de travail informatiques et périphériques, contrôleurs de communication, moyens de climatisation, générateurs électriques, logiciels de base et progiciels.

La DGA, pourtant moins réticente que naguère à communiquer vers l'extérieur comme en témoigne, par exemple, la publication d'un rapport d'activité très documenté au printemps 1998, ne fournit pas d'état détaillé de la répartition des économies. Il est par exemple impossible d'obtenir une décomposition, même approximative ou rudimentaire, par catégorie de coût, par programme ou par type de mesure. A l'exception du programme de missile balistique M51 sur lequel elle a fourni quelques informations mais sans chiffrer précisément la ventilation des différentes mesures, aucun exemple n'a été cité ou expliqué au public.

Compte tenu du volume des ressources publiques en cause et de la vigueur de l'effort consenti par les uns et les autres, une politique de communication plus affirmée serait légitime et méritée.

Si la réalité et l'étendue de la réforme engagée en 1996-1997 ne fait guère de doutes, non plus que la tendance à la réduction effective des coûts sous la contrainte qui, comme chacun sait, rend intelligent, on peut accompagner le chiffrage publié de quelques commentaires afin d'en mieux cerner la portée.

Tout d'abord, le montant d'économies de 102 milliards de francs à atteindre ou de 43,5 milliards de francs déjà atteint porte sur des programmes à terminaison, c'est-à-dire au terme de leur durée de vie qui peut être très longue, parfois de l'ordre de 30 ans. Plus la période chronologique considérée est étendue, plus les montants en cause sont importants mais il est vrai qu'il n'y a guère d'autres moyens de procéder et que la moitié des économies annoncées porte sur la période 1999-2002.

Par ailleurs, il faut souligner que la référence comptable des économies obtenues est constituée des devis initiaux des programmes, parfois reflet d'une époque où les choses se faisaient autrement et où la maîtrise des coûts n'était pas la préoccupation première. La validation des devis initiaux des industriels est une étape décisive du processus de réduction des coûts qui engage largement sa crédibilité.

La DGA en est pleinement consciente puisqu'elle est en train de mettre en place des spécialistes des achats dans les équipes de programme. Une sous-direction des achats, créée en 1997, est chargée de centraliser les informations de prix et de coûts disponibles dans les services de programme et de favoriser la concurrence au niveau des maîtres d'_uvre et des sous-traitants afin d'obtenir plusieurs références pour évaluer une offre. Dans ce but, une base de données économiques mise en place début 1998 s'attache à recenser les éléments déterminants de la structure des prix de revient des fournisseurs : taux horaires des principales sections de main d'_uvre (fabrication, études ...), niveaux de frais hors production et de frais d'approvisionnement. Ces éléments sont issus des enquêtes d'éléments comptables de valorisation effectuées par les experts de coût de la DGA auprès des sociétés d'armement, principaux fournisseurs de la DGA.

Enfin, on peut aussi s'interroger sur la part des économies qui correspondent à des réductions de capacités opérationnelles. Réduire les spécifications de besoins sans réduire les capacités est souvent possible mais pas sur tous les programmes ni, à plusieurs reprises, sur le même programme.

Plus fondamentalement, on peut se demander si la DGA ne se heurtera pas à certaines limites dans son action de réduction de coûts qui tiennent à son statut et notamment à l'étendue de ses missions. La DGA est, par exemple aussi un industriel de l'armement (DCN, SMA) et un prestataire de services (Direction des centres d'expertise et d'essais). Peut-on lui demander de promouvoir systématiquement la réduction des coûts au risque de sacrifier des pans de son activité parfois déjà chancelants ou soumis à des restructurations d'envergure ?

Il n'en reste pas moins que les résultats sont tangibles et que le besoin financier de la future programmation sera d'autant plus supportable que la DGA aura atteint ses objectifs.

3.- Les nouvelles méthodes d'acquisition

Certaines mesures de la revue des programmes traduisent la volonté de diversifier les modes d'acquisition des équipements militaires. C'est le cas notamment du programme du nouveau transport de chaland de débarquement qui se fera sous la contrainte d'un coût objectif fixé à l'issue d'une démarche comparative, nationale et européenne. De même, des achats sur étagères sont prévus pour l'acquisition de la future torpille lourde, du missile destiné à remplacer l'AC3GLP et, dans une moindre mesure, de l'avion de transport futur.

a) Les commandes globales

La DGA pratique de façon courante les commandes pluriannuelles pour des opérations d'ampleur limitée ou lorsqu'il s'agit de commander des ensembles cohérents (développement d'un matériel prototype, fabrication d'un système complet comme un bâtiment naval) dont la réalisation prend plusieurs années. Cela a, par exemple, été le cas pour le développement du statoréacteur Vesta en 1997.

Fin 1997, la DGA a passé les premières commandes pluriannuelles dites " globales " qui consistent à s'engager pour plusieurs tranches de fabrication d'un matériel de série en maintenant le calendrier de réalisation et l'échelonnement des paiements. L'État peut ainsi obtenir des prix plus intéressants en contrepartie de l'engagement à plus long terme qui est pris vis-à-vis de l'industriel.

La procédure des commandes globales a connu en 1997 un début de mise en application pour cinq programmes. Les commandes ont concerné les missiles de croisière air-sol Apache anti-piste et Scalp EG, la torpille franco-italienne MU 90, le missile air-air Mica et les moyens de transmission MTBA de dix-huit bases aériennes.

LISTE DES COMMANDES GLOBALES PASSÉES EN 1997

Programmes

Date de l'accord interministériel

Date
de notification

Montant
(en millions de francs)

Apache anti-piste

24 juillet 1997

28 octobre 1997

1.564

Mica

24 juillet 1997

17 décembre 1997

1.180

MU 90

24 juillet 1997

23 décembre 1997

1.819

Scalp EG

22 décembre 1997

29 décembre 1997

4.208

MTBA

31 décembre 1997

31 décembre 1997

2.232

L'effet attendu de la procédure des commandes globales est une économie sur chaque commande d'au moins 5 %, avec un objectif de 10 %, et une rigidification budgétaire annuelle maximale de 10 %.

L'économie obtenue à travers la négociation des cinq commandes globales de l'année 1997 est estimée à un peu plus de 10 %. La rigidification des budgets due à l'ensemble de ces commandes devrait atteindre un maximum de 1,4 % du titre V de la défense en 2001, les paiements s'étalant jusqu'en 2007.

La seule commande globale actuellement suffisamment avancée pour la période 1998-1999 concerne 28 avions Rafale pour un montant total de l'ordre de 12 milliards de francs. Elle représente un peu plus de 11 % de l'objectif d'engagement pour l'année 1998.

Parmi les commandes pluriannuelles classiques à l'étude sur cette période ou en cours de notification, les plus significatives sont les suivantes :

· 15 dépanneurs Leclerc ;

· simulateurs Leclerc ;

· simulateurs de tir de roquette anti blindé léger ;

· freinages du véhicule de l'avant blindé ;

· chasseurs de mines tripartites modernisés ;

· postes Muse ;

· développement, industrialisation et production de canon de 155 AUF1 valorisés ;

· développement du missile M 51 ;

· développement et industrialisation du système de distribution d'informations multifonctions (MIDS) ;

· production de 80 hélicoptères Tigre ;

· missiles anti-navire futurs ;

· armements air-sol modulaire ;

· développement et fabrication des frégates Horizon.

b) Les programmes en coopération et le développement
de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR)

La conduite de programmes en coopération internationale n'est pas une nouveauté radicale puisqu'elle remonte au moins aux années 1960 entre la France et l'Allemagne ou la France et la Grande-Bretagne, notamment sur des programmes de missiles.

Ce qui est nouveau, en revanche, c'est la part prise par ces programmes et le début d'institutionnalisation de la coopération européenne dans ce domaine avec la montée en puissance de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR).

Le tableau ci-après récapitule les programmes actuellement menés par la France en coopération avec d'autres pays.

LISTE DES PRINCIPAUX PROGRAMMES EN COOPÉRATION

Programmes

Partenaires

 

Allemagne

Italie

Espagne

Royaume-Uni

États-Unis

Autres

Hélicoptère TIGRE

           

Hélicoptère NH 90

         

Pays-Bas

Véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI)

           

Anti-blindé léger (ABL)

         

Suède

Radar de contre batterie (COBRA)

           

ACED obus anti-char à effet dirigé Obus (BONUS)

         

Suède

Frégates Horizon

           

Torpille MU 90

           

Missile anti-char 3ème génération moyenne portée (AC3GMP)

         

Belgique Pays-Bas

Valorisation ROLAND

           

Système principal de missile anti-aérien (PAAMS)

           

Missile de croisière SCALP EG

           

Famille de missiles sol-air futurs (FSAF)

           

HELIOS II

           

Successeur SYRACUSE II

           

HELIOS I

           

Système de distribution d'informations multifonctions (MIDS)

           

Le projet de loi de finances pour 1999 consacre plus de 8 milliards de francs aux programmes conduits en coopération européenne et sur l'ensemble de la programmation, ils mobiliseront 30 milliards de francs, soit plus de 9 % des crédits de paiement consacrés à l'équipement des armées. Compte tenu des décisions de la revue des programmes, cette part devrait s'élever à 14 % en 2002.

Les raisons de cette politique qui ne fera que se développer dans les années à venir sont connues : baisse des coûts à la charge de chaque État, promotion de l'interopérabilité des matériels d'armées appelées à agir ensemble, amorce d'une identité européenne de défense.

La coopération européenne est indispensable mais elle n'est pas le remède à toutes les difficultés de la conduite des programmes. Elle génère immanquablement des étalements de calendrier en raison de la difficulté de concilier les besoins et les échéances de chacun ; la définition des spécificités est ainsi souvent plutôt cumulative que rationalisée.

De même, la règle du juste retour complique le partage industriel et les motivations des uns et des autres n'apparaissent pas toujours très clairement dès le début de la coopération. En cas de retrait d'un partenaire majeur, les autres États ont du mal à rebondir et doivent parfois sacrifier des capacités initialement jugées importantes mais impossibles à financer sans le partenaire déficient (exemple : le satellite d'observation radar).

Néanmoins, la plupart de ces difficultés trouvent leur origine dans la persistance du principe de la souveraineté absolue des États en matière d'armement et de ses implications tout au long de la vie des programmes. C'est la raison pour laquelle s'imposait la création de l'OCCAR en 1996, dotée de la personnalité juridique en vertu de la convention signée à Farnborough le 9 septembre 1998, car ce nouvel acteur peut modifier les conditions de la coopération européenne en établissant des mécanismes efficaces d'arbitrage entre les intérêts immédiats des différents États membres.

Les avancées obtenues dans cette convention ne sont pas minces comme en témoigne la liste suivante :

· renoncement à un calcul analytique du juste retour industriel programme par programme, pour le remplacer par la recherche d'un équilibre global multi-programmes et pluriannuel (article 5) ;

· attribution à l'OCCAR de l'élaboration des spécifications techniques conjointes pour le développement et l'acquisition d'équipements définis en commun (article 8) ;

· coordination des investissements et de l'utilisation des centres d'essais (article 8) ;

· interdiction faite au personnel de l'OCCAR d'accepter des instructions d'aucun gouvernement ni autorité extérieure à l'OCCAR (article 22) ;

· reconnaissance de la personnalité juridique la plus large qui lui permettra de conclure des contrats, d'acquérir des biens meubles ou immeubles et d'ester en justice (article 39).

L'OCCAR regroupe aujourd'hui la France, l'Allemagne, l'Italie et le Royaume-Uni et les Pays-Bas sont officiellement candidats à l'intégration. La gestion des programmes franco-allemands Tigre, Hot, Roland et Milan lui a été confiée dès 1997.

Le programme de canon automoteur PzH 2000, la famille future de missiles surface-air FSAF, le radar de contrebatterie Cobra et le missile anti-char Trigat-MP sont actuellement en phase d'intégration.

Les modalités d'intégration des programmes de véhicule blindé de combat d'infanterie VBCI, de satellite d'observation Hélios II, de frégate Horizon, de système d'identification IFF-futur, de système principal de missile antiaérien PAAMS et de système Polyphem sont en cours d'analyse et de discussion.

L'obtention de la personnalité juridique est une étape majeure dans la mesure notamment où elle conférera à l'OCCAR une capacité d'action contractuelle spécifique.

L'OCCAR est désormais appelée à se doter d'un référentiel de règles de gestion inspirées des meilleures méthodes de chacun des États membres.

Dans le domaine des acquisitions notamment, les quatre pays se sont mis d'accord sur des principes forts et structurants, totalement nouveaux par rapport aux pratiques traditionnelles de la coopération (mise en concurrence systématique dans tous les pays européens, extension à la concurrence extra-européenne en cas de réciprocité effective, abandon du juste retour industriel programme par programme ...).

Il appartient désormais aux États de ratifier la convention au cours de l'année 1999 afin que l'OCCAR prenne son véritable essor et signe ses premiers contrats sans tarder.

c) Les méthodes britanniques

Les méthodes britanniques d'acquisition reposent sur la notion de " Private Finance Initiative " (PFI) lancée en 1992 par le gouvernement conservateur et reprise par le gouvernement travailliste sous l'appellation de " Public Private Partnership " (PPP).

Il s'agit pour l'essentiel de substituer au financement des différentes phases d'un programme spécifié, l'achat d'un simple service à un industriel qui aura assuré le coût du développement et de l'industrialisation du matériel. Cette politique s'étend au Royaume-Uni à l'ensemble des services publics.

Elle se heurte toutefois à la complexité des contrats qui reposent sur une étude très précise des aléas et des risques pris par les industriels qui en assument la charge à la place de l'État, moyennant rémunération du service rendu.

Dans le domaine militaire, quinze contrats PFI avaient été signés début 1998 par l'État britannique et 70 projets étaient en cours d'examen pour une valeur en capital de 3,5 milliards de livres. Pour l'année 1998-1999, les prévisions de dépenses au titre de contrats PFI étaient de 610 millions de livres, soit 4 % des dépenses (hors personnel) du ministère de la Défense.

Les principaux contrats signés portent sur des véhicules utilitaires, l'entraînement et la formation des personnels et les télécommunications (réseau fixe unique pour les armées britanniques).

Votre Rapporteur s'étonne que cette piste n'ait pas été examinée en France, notamment pour des fonctions de soutien ou de maintenance.

Il semble que ce type de solutions soit promis à un bel avenir puisque la capacité de mobilisation financière et l'acuité des compétences technologiques à la disposition des États ont tendance à baisser alors que l'intégration verticale de l'industrie de défense permet à certains groupes ou consortium de disposer de ressources financières à la hauteur de l'investissement. Si nos entreprises de défense et notamment nos systémiers n'ont pas l'occasion d'acquérir cette compétence, et il leur est difficile de l'acquérir sur des appels d'offres d'États étrangers qui leur accordent rarement les premiers rôles dans ce type de procédure, ils risquent une certaine forme de marginalisation dans un futur proche.

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CHAPITRE III :

LA PROFESSIONNALISATION DES ARMÉES

La professionnalisation des armées est le grand enjeu de la programmation militaire de 1997-2002. Inéluctable et adaptée au nouveau contexte géostratégique, elle a été conçue dans un calendrier resserré afin de limiter les effets démobilisateurs d'une transition qui s'étirerait en longueur.

Le tableau ci-après récapitule les flux de suppressions et de créations de postes par catégorie entre 1996 et 2002.

SITUATION DES EFFECTIFS PAR CATÉGORIE EN 1999 À MI-PARCOURS DE LA PROGRAMMATION
(hors comptes de commerce)

 

1996

1999

Loi de programmation militaire 2002

 

Loi de finances initiale

Effectifs au projet de loi de finances

Évolution depuis 1996
( en %)

Loi de programmation militaire (annuité)

Mesures d'ajustement

Effectifs

Évolution par rapport à 1996
(en %)

Officiers

38.456

38.760

0,8

38.475

+ 285

38.189

- 0,7

Sous-officiers

214.828

209.661

- 2,4

208.842

+ 819

199.296

- 7,2

Militaires du rang

44.552

68.023

52,7

68.643

- 620

92.527

107,7

Total militaires professionnels

297.836

316.444

6,2

315.960

+ 484

330.012

10,8

Appelés et volontaires

201.498

103.495

- 48,6

103.496

- 1

27.171

- 86,5

(dont volontaires)

 

(4.751)

     

(27171)

(+ 100)

Civils

73.747

78.660

6,7

77.929

+ 731

83.023

12,6

Total général

573.081

498.599

- 13

497.385

+ 1.214

440.206

- 23,2

 

Les chassés-croisés impliquent un bouleversement, certains diront une refondation, de l'organisation et du fonctionnement de l'institution militaire. L'ensemble des personnels de la défense en saisit la portée et chacun la mesure dans son travail quotidien.

Audacieux, le pari est en passe d'être tenu :

· la décroissance des effectifs d'appelés est pour le moment contrôlée ;

· la mutation des effectifs militaires est bien engagée ;

· cependant, l'ampleur des vacances de postes de civils pourrait, à terme, constituer un point de blocage préoccupant.

I.- LA DÉCROISSANCE CONTRÔLÉE DES EFFECTIFS D'APPELÉS

La décroissance des effectifs d'appelés est le paramètre majeur de la réussite de la transition qui mène à la professionnalisation des armées. Elle doit s'étaler sur une période de six ans de manière progressive afin d'éviter un choc trop brutal pour les armées. Il importe de respecter ce modèle sous peine de s'exposer à de graves déconvenues. Jusqu'à présent l'inquiétude légitime des armées s'est accompagnée d'une incorporation conforme aux prévisions et aux besoins, ce qui est un motif de satisfaction.

A.- UNE INQUIÉTUDE LÉGITIME ET DIFFÉRENCIÉE SELON LES ARMÉES

1.- Un impact relatif selon les modèles d'armées

Les appelés doivent passer de 201.498 en 1996 (35 % du total) à 0 en 2002, date à laquelle 27.171 volontaires doivent figurer dans les cadres, selon un rythme régulier de décroissance d'un peu plus de 30.000 personnes par an. En 1999, 103.495 appelés sont attendus par les armées, soit à peu près la moitié du nombre de 1996. Toutefois ce processus revêt des formes variées selon les armées. La situation de départ de chacune d'entre elles était différente en 1996, de même que le rythme de décroissance adopté.

Ainsi, les appelés représentaient la moitié des effectifs totaux (132.000 sur 268.000) de l'armée de Terre en 1996, contre 35 % des effectifs de l'armée de l'Air (33.000 sur 93.000), 25 % dans la Marine (18.000 sur 70.000) et 13 % dans la Gendarmerie (12.000 sur 94.000).

De même, alors que l'armée de Terre et la Marine ont opté pour une décroissance linéaire de leurs effectifs d'appelés qui fait qu'à mi-chemin de la programmation, fin 1999, elles devront encore disposer de la moitié du nombre d'appelés qu'elles avaient en 1996, l'armée de l'Air a opté pour une accélération immédiate de la décrue en 1997, 1998 et, dans une moindre mesure, 1999, puisque fin 1999 elle ne comptera plus que 11.000 appelés, soit 2/3 de moins qu'en 1996. Quant à la Gendarmerie, sa situation est tout à fait spécifique, elle a quasiment maintenu ses appelés de 1996 à 1999 pour dès la fin 1998 annoncer leur remplacement par des volontaires qui seront plus nombreux en 2002 (16.000) que les appelés de 1996 (12.000).

Ces choix (et d'autres qui tiennent à l'option entre civils et militaires engagés) expliquent pourquoi l'armée de Terre et la Marine continuent à être très exposées au risque de la ressource en appelés dans la deuxième moitié de la transition (1999-2002) alors qu'au terme de 1999, l'armée de l'Air aura fait l'essentiel du chemin.

2.- L'activation anticipée des volontaires services longs

La grande exposition de l'armée de Terre et, dans une moindre mesure, de la Marine, aux aléas de la ressource en appelés les a conduites à activer le recrutement des volontaires services longs (VSL) parmi leurs appelés dès 1997-1998 afin de disposer d'un volant de sécurité pour affronter une éventuelle rupture de tendance dans l'incorporation des appelés. Ce choix a des conséquences : d'une part, sur un plan budgétaire, il a fait " exploser " l'enveloppe consacrée au financement des appelés et, d'autre part, il a été fait par anticipation d'une évolution qui n'a pas été constatée, même si les risques qu'elle se produise dans l'avenir ne sont pas nuls.

En 1997 et 1998, l'armée de Terre et la Marine n'ont pas su résister à la demande excessive de volontariat service long (VSL) de la part des appelés. Les droits autorisés en VSL sont en effet de 10 % de l'effectif du contingent. Ce plafond a été largement dépassé. Ainsi, les effectifs de VSL de l'armée de Terre seront de 16.200 en moyenne sur l'année 1998 pour un effectif autorisé de 8.979, soit un sureffectif moyen de 7.221.

Par ailleurs, les contrats ont été passés dès le début de la période de service des appelés, ce qui a généré des surcoûts supplémentaires. En effet, les appelés volontaires pour un service long (2 ans) bénéficient d'une majoration de solde d'un coefficient multiplicateur de 1,5 du premier au sixième mois, de 2 du septième au douzième mois, de 3,65 du douzième au dix-huitième mois et de 4,5 du dix-neuvième au vingt quatrième mois. L'ampleur du décalage explique l'insuffisance de crédits, de l'ordre de 380 millions de francs pour 1998 au seul titre des soldes, sans tenir compte des besoins supplémentaires induits sur les indemnités. C'est une des raisons pour lesquelles le décret d'avance du 21 août 1998 a ouvert 738 millions de francs sur le chapitre 31-41 - Personnels appelés -, soit 37 % des dotations initiales. Compte tenu de la déflation des effectifs d'appelés en 1999, le sureffectif de VSL va mécaniquement s'accentuer début 1999 et une insuffisance de crédits en fin de gestion est de nouveau à prévoir.

Cette situation un peu contestable sur le plan de la gestion budgétaire ne se justifie pas par des carences constatées dans l'incorporation des nouveaux appelés. Elle résulte en effet de décisions prises en 1997 alors que l'incorporation était conforme aux prévisions et aux besoins.

B.- UNE INCORPORATION JUSQU'ICI CONFORME AUX PRÉVISIONS ET AUX BESOINS

1.- Le bon comportement civique des dernières générations d'appelés

Il n'a pas été constaté à ce jour de dégradation significative du comportement civique des jeunes hommes appelés à faire un service national d'une durée de dix mois. C'est même plutôt le contraire qui a été observé. Ainsi, en 1997, le nombre d'insoumis a-t-il diminué d'un quart, prolongeant ainsi une tendance amorcée en 1994.

Sur un autre plan, le recours au statut de l'objection de conscience s'est effondré en 1997. Ils sont passés de 10.000 en 1996 à 5.850 en 1997. Le taux d'exemption médicale (22 %) est resté stable en 1997, de même que le taux de dispense (sociale) avec un chiffre de 4,7 %. Le taux de réforme médicale pendant le service a légèrement augmenté (11,1 % en 1997 contre 9,2 % en 1996) mais la prévision pour 1998 est de 10 %.

Seuls les reports ont augmenté de 5,3 % en 1997 en raison de la réforme du service national qui permet aux jeunes gens de bénéficier d'un report pour poursuivre leurs études au-delà de 24 ans sans être titulaires d'un brevet de préparation militaire.

Le total des appelés incorporés en 1997 s'élevait à 210.678 personnes dont 163.842 au titre du service militaire, conformément aux prévisions et aux besoins.

S'agissant de 1998, l'exécution se déroule globalement conformément aux prévisions.

L'armée de Terre, dont le contingent était en sureffectif sur la première partie de l'année, est passée en léger sous-effectif depuis le mois de juin. Toutefois, l'incorporation d'octobre a été bonne pour l'armée de Terre. Les besoins initiaux étaient de 17.000, les besoins corrigés (demande de surincorporation pour combler les sous-effectifs) de 20.700. Ces besoins ont été pleinement satisfaits et permettent d'envisager une situation correcte pour le premier semestre 1999.

2.- Les aléas de la fin de la transition

Personne ne peut affirmer aujourd'hui que la fin de la transition sera exactement conforme aux prévisions. L'examen des années 1996 à 1998 n'incite toutefois pas à un pessimisme systématique.

Il est vrai que les demandes de report d'incorporation ou de retour anticipé à la vie civile pour les titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminé ou, à partir de décembre 1998, à durée déterminée, peuvent augmenter sous l'effet de la reprise de l'emploi et d'une meilleure connaissance de la mesure par le corps social, une fois passée la période traditionnelle de latence entre l'adoption d'une mesure par le Parlement et son utilisation concrète par les citoyens.

De même, on peut craindre que soit déstabilisé le bon comportement civique des dernières générations d'appelés par des campagnes médiatiques sur le thème " le service est fini " comme on en a vu lors de la description par la presse de la journée d'appel de préparation à la Défense (APD). Pour la même raison, il conviendrait d'éviter à l'avenir de convoquer dans le même lieu et au même moment, les jeunes gens qui viennent écouter huit heures de conférence dans le cadre de l'APD et ceux qui viennent pour l'incorporation d'un service de dix mois, comme cela c'est vu lors de la première journée d'APD.

L'observation des comportements passés et présents laisse espérer que les armées disposeront des effectifs d'appelés dont elles ont besoin pour achever la transition dans de bonnes conditions, d'autant plus que ces besoins sont en forte réduction, conformément au modèle défini par la programmation.

3.- L'arrivée des volontaires

Les premiers emplois de jeunes volontaires du service national seront créés en 1999, principalement dans le domaine de la sécurité.

La loi de programmation militaire prévoit 27.171 postes de volontaires en 2002.

La loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national a établi que les volontaires serviront sous statut militaire pour une durée d'un an renouvelable quatre fois. Ils pourront détenir les grades de militaire du rang, sergent et aspirant. Leur statut militaire leur permettra en particulier de participer aux opérations extérieures.

Ils bénéficieront d'une rémunération équivalente à celle des emplois jeunes, avantages en nature inclus. 4.791 emplois de volontaires sont créés dans le projet de loi de finances 1999 dont 3.000 gendarmes-adjoints et 1.361 à l'armée de Terre pour une dotation budgétaire de 313,5 millions de francs (indemnités comprises).

II.- LA MUTATION BIEN ENGAGÉE DES EFFECTIFS MILITAIRES

La professionnalisation des armées entraîne une transformation considérable de la structure des effectifs militaires. La disparition des appelés est ainsi partiellement compensée par un important effort de recrutement d'engagés tandis qu'à l'occasion de la professionnalisation et de la modification des taux d'encadrement qu'elle implique, un processus conséquent de rajeunissement des cadres est entrepris. Enfin, la féminisation des effectifs est appelée à se poursuivre, à vitesse différenciée selon les armées.

A.- LE RECRUTEMENT DES ENGAGÉS

Les militaires du rang ont vocation à passer d'un effectif de 44.552 personnes en 1996 (7,8 % du total) à 92.527 personnes en 2002 (21 % du total), c'est-à-dire qu'ils devraient plus que doubler en volume (+ 108 %) et presque tripler en proportion du total.

Leur effectif budgétaire sera de 68.023 en 1999, soit plus de 13 % du total.

Les différents chefs d'État-major ont confirmé à votre Rapporteur que les armées ne rencontrent aucune difficulté à assurer le recrutement effectif des engagés. Aucune inquiétude, ni quantitative ni qualitative n'est à signaler.

L'armée de Terre, qui disposera en 1999 de 47.835 postes d'engagés volontaires de l'armée de Terre (EVAT), soit 70 % du total, constate ainsi que le quart des nouveaux engagés ont un niveau de formation égal ou supérieur à la classe terminale et que moins du cinquième sont sans qualification.

De même, le recrutement des militaires techniciens de l'air (MTA) ne semble pas poser de problème à l'armée de l'Air. En 1997, plus de trois candidats par poste ont été recensés et 91 % des recrutés avaient au minimum le CAP.

Le bilan du dispositif des contrats courts Marine, qui sont de deux ans contre quatre ans pour les autres armées ou les autres filières de la Marine, comme l'école de maistrance ou les engagements initiaux de longue durée, est encore difficile à dresser car l'expérience ne date que d'avril 1997, mais il semble plus nuancé, en tout cas pour le premier contingent. La Marine dispose de 700 emplois de cette nature en 1997 pour un flux annuel de 1.300 personnes prévu en 2002. La difficulté principale concerne la reconversion des jeunes dans la société civile au terme de leur passage de deux ans dans la Marine, compte tenu de leur faible niveau de formation initiale.

Le bon niveau général du recrutement des engagés n'allait pas de soi au début du processus. Cet acquis reste fragile et tributaire de la situation générale de l'emploi. La difficulté consistera aussi à moyen terme à recruter directement des jeunes sans disposer du " vivier " naturel des appelés : on estime en effet que 60 % des recrutements se font à l'occasion du service national. C'est la raison pour laquelle les armées, et notamment l'armée de Terre, doivent maintenir constants leur effort et leur vigilance. Ceci passe notamment par des campagnes de communication que d'aucuns jugeront coûteuses (41 millions de francs en 1998 pour l'armée de Terre, soit un coût moyen de 6.000 francs par engagé) mais aussi et surtout par une action de proximité à partir des unités.

La revalorisation du statut financier des engagés qui leur permet de disposer d'une rémunération nette de 6.250 francs par mois sans les primes d'activité, donc très supérieure au SMIC compte tenu des avantages en nature (alimentation, hébergement, réduction SNCF) n'est pas non plus étrangère à ces bons résultats.

B.- LE RAJEUNISSEMENT DES CADRES

L'adaptation quantitative de l'encadrement des armées se fera essentiellement de manière mécanique par réduction de leur format. Toutefois, le taux d'encadrement sera aussi ajusté par déflation de certains effectifs.

C'est notamment le cas des sous-officiers qui passeront de 214.828 en 1996 (37 % du total) à 199.296 en 2002 (45 % du total) soit une baisse de 7,2 %. Toutes les armées connaîtront cette évolution. L'exécution n'est pas linéaire sur ce point puisque l'effectif budgétaire des sous-officiers sera de 209.661 à la fin de 1999, soit une baisse de 2,4 % par rapport à 1996 alors qu'une exécution linéaire aurait donné une baisse de - 3,6 %.

S'agissant des officiers, la décroissance est moins prononcée. De 1996 à 2002, ils passeront de 38.456 (6,7 % du total) à 38.189 (8,7 % du total) soit une baisse de 0,7 %. La Marine et surtout la Gendarmerie doivent même accroître le nombre de leurs officiers en valeur absolue entre 1996 et 2002.

Quant à l'exécution à mi-parcours, elle n'est pas non plus linéaire puisque la très légère décrue des effectifs d'officiers prévue par la programmation n'aura pas encore commencé à la fin de 1999.

Le sujet essentiel de préoccupation pour les cadres ne relève pas du recrutement mais du rajeunissement. Afin de disposer d'une moyenne d'âge conforme aux normes d'une armée professionnelle, il est indispensable de favoriser les carrières courtes, notamment des sous-officiers, ce qui n'est pas sans poser le problème de leur coexistence actuelle ou future avec les personnels civils qui, du fait de la nature des tâches qu'ils assument, ne sont pas soumis à cet impératif de mobilité et de départ précoce. La politique d'encouragement aux départs anticipés des cadres menée depuis 1997 a le même objectif de rajeunissement et de repyramidage des carrières.

L'instrument principal de cette politique est le pécule d'incitation au départ anticipé, institué par l'article premier de la loi n° 96-111 du 19 décembre 1996 et dont le bilan est retracé par le tableau ci-après :

PÉCULES D'INCITATION AU DÉPART ANTICIPÉ

(en millions de francs)

   

1997

1998

Prévision projet de loi de finances 1999

Total 1997/1999

   

Nombre

Montant

Nombre

Montant

Nombre

Montant

Nombre

Montant

Terre

Officiers

126

55,6

115

68,8

175

79,3

416

203,7

 

Sous-officiers

1.066

237,6

1.366

339,5

869

233,1

3.301

810,2

Air

Officiers

47

15,7

39

15,1

39

16,8

125

47,5

 

Sous-officiers

640

155,7

821

208,6

612

165,6

2.073

529,8

Mer

Officiers mariniers

332

84,3

403

111,3

331

90,6

1.066

286,2

Gendarmerie

Sous-officiers

78

20,6

281

81

612

153,5

971

255,1

Autres (Santé essentiellement)

Officiers

7

2,2

10

3,4

11

3,5

28

9,1

 

Officiers

180

74

164

87

225

99,5

569

260,3

Total

Sous-officiers

2.116

498

2.871

740

2.424

642,7

7.411

1.881,3

 

Total général

2.296

571,7

3.035

827,7

2.649

742,2

7.980

2.141,6

 

Votre Rapporteur rappelle que le pécule d'incitation au départ anticipé peut être accordé aux militaires de carrière en activité se trouvant à plus de trois ans de la limite d'âge de leur grade et qui font valoir leurs droits à une pension militaire de retraite à jouissance immédiate (25 ans pour les officiers et 15 ans pour les sous-officiers).

Le montant non imposable de ce pécule est égal à 45 mois de solde budgétaire pour le militaire se trouvant à plus de dix ans de la limite d'âge de son grade. Son montant est ensuite dégressif en fonction de la durée des services restant à accomplir avant la limite d'âge. En outre, une réduction de 10 % de ce montant est également prévue pour les pécules attribués à partir de 1999 et de 20 % à partir de 2001. Cette dégressivité explique la baisse du volume de crédits prévus pour 1999 par rapport à 1998. De plus, les officiers de carrière admis au bénéfice des dispositions des articles 5 et 6 de la loi n° 75-1000 du 30 octobre 1975 se voient attribuer de plein droit un pécule réduit des quatre cinquièmes.

Cette dernière disposition a mobilisé un volume supplémentaire de 68 millions de francs de crédits en 1997 et 1998.

On constate la part prépondérante de l'armée de Terre (+ 50 % des crédits) dans ce dispositif qui correspond à ses besoins ainsi que la montée en puissance de la Gendarmerie en 1999.

La stratégie en matière de pécules doit trancher entre deux options : soit faire partir le maximum de personnes et favoriser avec des pécules réduits les départs de cadres très proches de la limite d'âge de leur grade, ce qui s'apparente à un effet d'aubaine, soit privilégier le déblocage de la pyramide des carrières et faire partir moins de gens mais plus éloignés de la limite d'âge de leur grade. En 1997, c'est plutôt la première option qui a été choisie puisque la moyenne du nombre d'années précédant les limites d'âge était par exemple de trois ans et onze mois pour les adjudants de l'armée de Terre bénéficiaires de pécules. Elle est remontée à quatre ans et dix mois en 1998 ce qui annonce une réorientation de tendance qui devrait se confirmer en 1999.

C.- LA FÉMINISATION DES ARMÉES

La féminisation des armées est un processus assez lent qui a débuté récemment mais qui devrait s'accélérer dans le cadre de la professionnalisation. Le principe même de restriction de l'accès des femmes à certaines carrières militaires a été supprimé par le décret n° 98-86 du 16 février 1998 qui a modifié seize décrets portant statuts particuliers de certains corps d'officiers et de sous-officiers. Désormais, les emplois qui, par leur nature ou leurs conditions d'exercice, ne peuvent être ouverts aux femmes sont énumérés limitativement dans un arrêté interarmées unique.

S'agissant de l'armée de Terre, ce sont des emplois impliquant la possibilité d'un contact direct et prolongé avec des forces hostiles. L'ensemble des armes et spécialités sont ouvertes aux femmes et plus de 80 % des emplois répertoriés par l'armée de Terre leur seront accessibles.

Pour la Marine, ce sont des emplois dans les équipages d'avions embarqués, ou à bord des sous-marins et dans les formations de fusiliers marins et de commandos. Désormais, les emplois auxquels des femmes ne pourront pas prétendre, représentent environ 20 % des emplois dévolus à des officiers et des officiers mariniers.

Pour la Gendarmerie, ce sont des emplois d'officiers du groupe spécial d'intervention de la Gendarmerie nationale, de sous-officiers appartenant aux unités navigantes de la Gendarmerie maritime ou aux unités de la Gendarmerie mobile, à l'exception des orchestres de la Garde républicaine et du groupe de sécurité de la Présidence de la République.

Quant à l'armée de l'Air, elle n'a pas répertorié d'emplois qu'elle estime ne pas pouvoir confier à un militaire féminin. Les commandos de l'Air leur ont, par exemple, récemment été ouverts.

Du droit au fait, il y a cependant une marge comme le montre le tableau ci-après qui récapitule les effectifs féminins par armée et service commun.

FÉMINISATION DES ARMÉES EN 1998

Armées

Terre

Air

Marine

Gendarmerie

Essences

Armement

Santé

Total

Officiers

17.683

7.219

5.021

2.961

228

3.554

3.634

36.438

Nombre de femmes

440

292

164

17

10

186

572

1.099

Féminisation (en %)

2,49

4,04

3,27

0,57

4,38

5,23

15,74

3,02

Sous-officiers

57.483

41.366

33.757

80.490

342

-

3.830

211.920

Nombre de femmes

7.513

4.227

2.311

3.116

8

-

2.234

16.422

Féminisation (en %)

13,07

10,22

6,85

3,87

2,34

-

58,33

7,75

Militaires du rang

44.754

7.165

8.394

-

475

-

-

60.313

Nombre de femmes

1.666

1.777

822

-

9

-

-

4.265

Féminisation (en %)

3,72

24,80

9,79

-

1,89

-

-

7,07

Total des effectifs

119.920

55.750

47.172

83.451

1.045

3.554

7.464

308.671

Nombre de femmes

9.619

6.296

3.297

3.133

27

186

2.806

21.786

Moyenne (en %)

8,02

11,29

6,99

3,75

2,58

5,23

37,59

7,06

 

Ce tableau ne prend en compte que les effectifs militaires des armées. L'intégration des effectifs civils augmenterait le taux de féminisation. On y voit que, à l'exception de l'atypique service de santé des armées, la féminisation des armées reste encore faible même si elle est supérieure en France à de nombreux pays européens. Sauf pour la catégorie des sous-officiers où l'armée de Terre est en tête, c'est l'armée de l'Air qui présente le plus fort taux de féminisation (11,3 % en tout). C'est particulièrement vrai pour ses militaires du rang où la féminisation atteint un taux très important de 25 %. Le chef d'État-major de l'armée de l'Air a affirmé à votre Rapporteur qu'il n'avait qu'à s'en féliciter.

Enfin, la Gendarmerie se distingue par un taux de féminisation très marginal (inférieur à 4 %) et qui tend vers zéro pour ses officiers.

III.- UN POINT PRÉOCCUPANT :
LES VACANCES DE POSTES DE CIVILS

Selon le modèle de la programmation, les civils doivent passer de 73.747 personnes (13 % du total) en 1996 à 83.023 en 2002 (19 % du total), soit une progression de 12,6 %.

Les armées qui ont le plus misé sur la croissance des effectifs de civils sont la Marine, avec une évolution de 6.500 postes en 1996 (9,3 % du total) à 11.600 en 2002 (plus de 20 % du total), et, dans une moindre mesure, l'armée de l'Air qui passera de 4.900 postes en 1996 (5,2 % du total) à 6.730 postes en 2002 (9,5 % du total).

Pour l'armée de Terre, cette catégorie revêt aussi une grande importance puisque la faible croissance des effectifs de civils (+ 6 % entre 1996 et 2002) aura paradoxalement pour effet d'en augmenter la proportion à 20 % des effectifs totaux, du fait de la réduction du format de l'ensemble.

Quel que soit le modèle d'armée, les recrutements de civils sont donc fondamentaux pour la réussite de la professionnalisation. Or, dans ce domaine, la situation n'est pas satisfaisante, elle constitue même le point essentiel de préoccupation des différents interlocuteurs rencontrés par votre Rapporteur.

Les armées comptent en effet au 1er septembre 1998 plus de 6.500 vacances de postes de civils par rapport aux effectifs budgétaires. La seule armée de Terre en compte 3.500, soit 11 % des effectifs civils budgétaires. La Marine en compte 1.300, soit 15 % des effectifs budgétaires.

Cette situation navrante trouve ses origines notamment dans la rigueur avec laquelle le ministère de l'Économie et des Finances autorise les recrutements au regard de la situation d'ensemble du ministère de la Défense (comptes de commerce compris). Si cette conception des choses devait être maintenue, il conviendrait d'en tirer les conséquences, par exemple en développant davantage le recours à la sous-traitance.

A.- LES RAISONS D'UN BLOCAGE

Les raisons des vacances de postes de civils dans les armées résultent de l'appréciation de l'ensemble des composantes du ministère de la Défense et notamment des comptes de commerce.

Entre 1996 et 1998, l'effectif budgétaire global du ministère de la Défense en personnel civil a paradoxalement diminué de 908 postes. Cette évolution recouvre :

· la création nette de 3.973 postes civils en zone budgétaire. Ce chiffre résulte pour l'essentiel des créations de postes prévues au profit des armées dans le cadre de la professionnalisation (2.767 postes, en grande majorité de fonctionnaires) ainsi que de la budgétisation de la DCN étatique (voir supra) ;

· la déflation de 4.881 postes, pour l'essentiel d'ouvriers d'État, en zone de comptes de commerce (DCN et SMA).

Par catégorie de personnel, les postes de fonctionnaires et contractuels ont augmenté de 2.048 et les postes d'ouvriers d'État ont diminué de 2.956.

Au 1er septembre 1998, le ministère de la Défense compte plus de 7.000 vacances de personnel civil, soit environ 7 % de l'effectif budgétaire, répartis comme suit :

VACANCES DE PERSONNEL CIVIL

Personnel civil

Armées et services communs

DGA
zone budgétaire

Autres organismes

Total
zone budgétaire

Comptes
de commerce

Total Défense

dont DGA

Budgétaire

56.478

15.872

5.369

77.719

21.227

98.946

37.099

Réalisé au 1er septembre 1998

49.836

15.113

4.742

69.691

22.020

91.711

37.133

Sureffectif ou vacances

- 6.642

- 759

- 627

- 8.028

793

- 7.235

34

Ce constat global doit être nuancé et éclairé par l'examen des effectifs de fonctionnaires et contractuels, d'une part, d'ouvriers d'État, d'autre part. Les problématiques relatives à ces deux catégories d'agents sont en effet très différentes.

Les vacances de fonctionnaires et contractuels sont répartis comme suit.

VACANCES DE FONCTIONNAIRES ET CONTRACTUELS

Fonctionnaires et contractuels

Armées et services communs

DGA
zone budgétaire

Autres organismes

Total
zone budgétaire

Comptes
de commerce

Total Défense

dont DGA

Budgétaire

22.724

10.117

4.970

37.811

4.336

42.147

14.453

Réalisé au 1er septembre 1998

20.255

8.676

4.421

33.352

4.117

37.469

12.793

Sureffectif ou vacances

- 2.469

- 1.441

- 549

- 4.459

- 219

- 4.678

- 1.660

La Défense connaît donc un sous-effectif de fonctionnaires et contractuels qui concerne tous les sous-ensembles du ministère, mais touche particulièrement les armées et services communs. Pourtant, les exigences de la professionnalisation ont entraîné une reprise des recrutements externes de fonctionnaires civils sensible en 1998 puisque 2.177 recrutements sont attendus cette année contre 384 en 1997 et 159 en 1996. Au-delà des retards dus à la complexité de l'organisation de concours pour certains corps spécifiques, c'est le gel des embauches arrêté par le ministère de l'Économie et des Finances qui crée le blocage. L'actuelle " mise en réserve " de 1.100 emplois de fonctionnaires paraît ainsi un peu excessive. La perspective du retour à la Défense d'environ 300 fonctionnaires de GIAT au cours des prochaines années justifie en effet moins du tiers des emplois ainsi immobilisés.

Compte tenu du nombre important de lauréats des concours en instance de nomination, la situation des armées et services communs devrait sensiblement s'améliorer d'ici la fin de l'année et les vacances devraient être ramenées au nombre d'emplois mis en réserve.

La situation des ouvriers d'État est d'une autre nature. En 1998, et pour la première fois depuis plusieurs exercices, la Défense a commencé l'année avec des vacances d'ouvriers d'État. Au 1er septembre, le sous-effectif global est de plus de 2.500 ouvriers d'État comme le montre la répartition ci-après.

VACANCES D'OUVRIERS D'ÉTAT

Ouvriers d'État

Armées et services communs

DGA
zone budgétaire

Autres organismes

Total
zone budgétaire

Comptes
de commerce

Total Défense

dont DGA

Budgétaire

33.754

5.755

399

39.908

16.891

56.799

22.646

Réalisé au 1er septembre 1998

29.581

6.437

321

36.339

17.903

54.242

24.340

Sureffectif ou vacances

- 4.173

682

- 78

- 3.569

1.012

- 2.557

1.694

Cette donnée recouvre en fait une situation contrastée entre la DGA, d'une part, les armées et services communs d'autre part.

La DGA connaît un sureffectif de près de 1.700 ouvriers, qui devrait en fin d'exercice se réduire à 800 environ, voire moins, grâce notamment à l'effet du dégagement des cadres ouvert aux ouvriers de la DCN à l'âge de 52 ans. Il convient de rappeler à ce sujet que la DGA a perdu près de 3.500 postes d'ouvrier d'État depuis 1996. Ces déflations de grande ampleur ont pu être menées à bien non seulement au moyen des mesures d'incitation au départ, mais également grâce à près de 1.100 mutations vers les armées.

Les armées et les autres services communs connaissent un sous-effectif de plus de 4.000 ouvriers d'État, soit 12 % de l'effectif budgétaire. Cette situation est de plus en plus pénalisante pour le fonctionnement quotidien des organismes au fur et à mesure que les effectifs d'appelés diminuent. Si les mesures de dégagement des cadres avec départ à 55 ans des ouvriers d'État du ministère de la Défense n'ont pas amélioré la situation, le blocage là encore tient pour l'essentiel à l'interdiction d'embauche imposée à la Défense ces dernières années par le ministère de l'Économie et des Finances. Les dérogations accordées, 150 embauches en 1997 et 500 en 1998, sont bien évidemment insuffisantes pour redresser la situation. Il en est de même des mutations en provenance de la DGA (1.100 ouvriers depuis 1996) et de GIAT (214 ouvriers).

De ce fait, le ministère de la Défense a été conduit à ouvrir des postes d'ouvriers sous statut de fonctionnaire (corps des ouvriers professionnels et maître-ouvriers) et à créer des corps de fonctionnaires dans les spécialités paramédicales. 321 Emplois ont ainsi été créés au budget de 1998, et 787 sont prévus au budget de 1999. Il ne s'agit cependant que d'un palliatif très partiel, dans la mesure où nombre de spécialités des ouvriers d'État, et parmi les plus techniques, ne sont pas exercées par les ouvriers-fonctionnaires.

B.- LES SOLUTIONS ENVISAGEABLES

Votre Rapporteur considère que la loi de programmation doit être respectée. La Nation a passé contrat avec les armées en 1996-1997 en leur imposant une mutation quasiment sans précédent. L'un des termes du contrat était le transfert de certaines tâches assumées par des appelés à du personnel civil recruté dans cet objet. Il faut l'honorer sous peine de compromettre l'exécution d'une réforme que peu d'administrations auraient pu absorber sans remous, comme l'a fait la Défense jusqu'ici.

Deux moyens d'action non exclusifs l'un de l'autre peuvent être envisagés.

1.- Un assouplissement des conditions imposées au recrutement des civils

Le ministère de la Défense est en 1998 globalement en sous-effectif de civils, fonctionnaires comme ouvriers d'État. Ceci devrait suffire à l'autoriser à entreprendre ses recrutements au moins jusqu'à ce qu'il atteigne un solde nul après prise en compte des sureffectifs d'ouvriers d'État constatés à la DGA budgétaire et à la DCN. C'est ce qui a été initié avec l'autorisation accordée d'embaucher 500 ouvriers le 7 juillet 1998. Il faut continuer dans cette voie.

La position qui consiste à refuser tout recrutement d'ouvrier tant que la DGA budgétaire ou la DCN n'ont pas résorbé la totalité de leurs sureffectifs s'explique par le souci louable de maîtriser l'exécution budgétaire du titre III de la Défense. Il est vrai que certains chapitres de rémunérations, déjà insuffisamment dotés en construction budgétaire parce que le ministère ne parvient pas à évaluer précisément ses besoins en RCS, ne peuvent supporter de sureffectifs. Mais ce n'est pas une raison pour prendre en otage les armées qui ont peu de capacités d'action sur la résorption des sureffectifs de la DGA ou de la DCN. Les dégagements des cadres à 52 ans avec 100 % de la rémunération nette devraient permettre le départ anticipé de nombreux ouvriers d'État de la DCN.

Par ailleurs, le dispositif Proxima, favorisant les mutations vers les armées d'ouvriers en provenance de la DCN doit être redynamisé. Son application satisfaisante en 1997, en particulier de la DCN vers la Marine, sera plus difficile en 1998 (705 ouvriers de la DCN sont partis vers les armées en 1997 contre 200 au 1er août 1998). Chacun doit être conscient de la nécessité de la réussite de Proxima, les armées en accueillant correctement les civils mutés, le ministère en proposant des postes adaptés au profil des ouvriers concernés et les ouvriers d'État en se souvenant que leur statut n'impose qu'une obligation à l'État, celle des les affecter en fonction des besoins du service public. Si, à l'échéance de l'exercice 1998, on s'aperçoit que les objectifs de résorption des sureffectifs ne sont pas réalistes, il faudra en tirer les conséquences, notamment sur le montant des crédits affectés à la sous-traitance.

2.- Un recours accru à la sous-traitance

Si les postes de civils continuent à ne pas être pourvus dans les armées, un recours accru à la sous-traitance s'impose. Il ne peut être envisagé en effet de transférer les tâches de soutien, de logistique ou de maintenance aux engagés militaires. Ceci ne répond pas au modèle d'une armée professionnelle dans laquelle les militaires sont prioritairement affectés à des postes opérationnels, non plus qu'à la définition du poste qui leur a été présenté au moment de leur recrutement (cf. la campagne de communication de l'armée de Terre). Les fonctions et tâches susceptibles d'être externalisées sont nombreuses. Les armées en ont fourni des exemples variés à votre Rapporteur.

Ainsi, pour l'armée de Terre, les domaines les plus susceptibles de permettre le recours à la sous-traitance concernent la restauration, l'entretien des locaux, le gardiennage. Des expériences sont en cours ou envisagées pour :

· le gardiennage des emprises inoccupées suite aux restructurations en cours et en attente d'aliénation ;

· le nettoyage des locaux d'états-majors ;

· l'alimentation, dans certains cercles ;

· l'entretien et l'infrastructure d'un régiment ;

· l'enseignement des langues par la signature d'une convention en juillet 1997 avec le Centre national d'enseignement à distance (CNED) ;

· la rationalisation des soutiens en Ile-de-France.

La Marine pratique déjà la sous-traitance pour l'affrètement de navires, l'entretien immobilier ou le gardiennage d'emprises. L'appel à la sous-traitance est néanmoins appelé à s'y développer dans les domaines de la maintenance et de la gestion des infrastructures, de la logistique et des services aux personnes dans les éléments terrestres très importants (base d'aéronautique navale, écoles, centres, ...).

En 1998, une opération nouvelle de sous-traitance a été mise en place pour l'alimentation du centre de transmission de Saint-Assise, en région parisienne. En 1999, une nouvelle opération de sous-traitance (transport de rade à Toulon) sera engagée.

A titre exceptionnel, la Gendarmerie a externalisé en 1997 la gestion locative des logements de la légion de Languedoc-Roussillon ce qui a permis de conclure à l'intérêt d'une gestion rationnelle du parc immobilier par des professionnels extérieurs. L'élargissement de cette expérimentation doit faire l'objet d'un examen lors d'un comité de pilotage au dernier trimestre de 1998.

La Gendarmerie réfléchit également à cette solution pour remplacer des appelés très qualifiés au sein de sa sous-direction des télécommunications et de l'informatique ou encore ceux qui assumaient des tâches de maintenance assez simples ou de dépannage dans les ateliers des télécommunications.

Enfin, l'armée de l'Air est l'armée qui d'ores et déjà recourt le plus à l'externalisation des tâches. En effet, depuis de nombreuses années, l'armée de l'Air confie à des sociétés civiles la réalisation d'activités à caractère non strictement opérationnel, parmi lesquelles :

· l'entretien de niveau technique d'intervention 3 (DC 8, Airbus, CASA 235, FALCON, C 130, Super Puma, STRIDA, simulateur) ;

· la formation des équipages (A 310, DC 8, FALCON), des spécialistes météorologie est des linguistes ;

· l'assistance en escale (Air France Cargo) ;

· la révision de véhicules de type commercial ;

· la maintenance des matériels informatiques ;

· certaines fonctions de soutien général sur les bases aériennes (la direction départementale de l'équipement assure ainsi la fonction de service constructeur sur certaines bases).

L'armée de l'Air poursuit aussi une réflexion approfondie relative à la sous-traitance sur les bases aériennes. Ainsi, le principe du lancement en 1998, d'une étude portant sur la sous-traitance globale de la base aérienne de Varennes-sur-Allier a été retenu. Cette étude devrait permettre de déboucher en 1999 sur une expérimentation élargie avec pour principaux domaines :

· la restauration et l'hébergement ;

· la fonction transport et l'entretien des véhicules ;

· la fonction entretien général et l'infrastructure ;

· la fonction sécurité incendie et la protection ;

· la fonction soutien santé.

Dans le même but de rationalisation des tâches et d'adaptation à la professionnalisation, l'armée de l'Air s'attache à redéfinir l'exécution de certaines fonctions comme la protection (classification des bases par importance), la sécurité contre l'incendie ou les régimes de permanence (le degré d'alerte pour une opération de projection n'est pas le même que pour une intervention massive).

Les armées doivent incontestablement faire preuve de flexibilité dans ce nouveau contexte. Pour le développement de la sous-traitance, elles se heurtent à l'insuffisance des dotations budgétaires. En 1999, la totalité des crédits identifiés est de 85 millions de francs. Par ailleurs, il leur est interdit d'imputer des contrats de sous-traitance sur le titre V, même si cela permet d'éviter la réalisation de constructions neuves. La Marine a, par exemple, eu toutes les peines du monde à obtenir une mesure consistant à supprimer dix emplois budgétaires (7 maîtres et 3 Premiers maîtres) en contrepartie d'un contrat de sous-traitance portant sur la traversée de la rade de Toulon.

Votre Rapporteur estime qu'il faut absolument encourager les armées à externaliser les tâches qui peuvent l'être. Cela permettrait notamment de surmonter en partie le blocage sur les créations de postes de civils. N'est-ce pas aussi une certaine forme de promotion du lien Armée-Nation que de développer les relations contractuelles des armées avec les entreprises civiles plutôt que de les encourager à fonctionner en autarcie ?

CHAPITRE IV :

L'ACTIVITÉ ET L'ENVIRONNEMENT DES ARMÉES

Au delà de la description du déroulement de la professionnalisation et de l'analyse des crédits pour 1999, il importe d'essayer de caractériser les conditions de l'activité opérationnelle des forces en 1999, ainsi que leur contexte, constitué notamment des services communs et de l'OTAN.

I.- L'ACTIVITÉ DES FORCES

A.- L'ARMÉE DE TERRE

Après l'importante phase de restructuration des forces mise en _uvre pour l'essentiel entre 1997 et 1999 et qui se traduira par la dissolution de 38 régiments, l'armée de Terre aborde la réorganisation de son commandement et de ses structures de soutien.

1.- La réorganisation du commandement et du soutien

La réorganisation du commandement et du soutien est la traduction directe, après la réduction du format déjà bien avancée, du passage d'une armée territoriale de masse à une armée professionnelle de projection.

La réorganisation des structures de commandement, visant d'abord à assurer la disponibilité permanente des états-majors de force et de brigade, séparera ainsi le commandement opérationnel des forces du commandement régional.

La nouvelle organisation du commandement des forces, placée sous l'autorité du commandement de la force d'action terrestre de Lille, permettra de disposer, en permanence, d'états-majors projetables, aptes à assurer sur faible préavis le commandement opérationnel d'ensembles interarmes, nationaux ou multinationaux.

Elle repose sur quatre états-majors de force qui s'implanteront au siège de trois circonscriptions militaires de défense n'accueillant pas de régions militaires (Besançon, Limoges et Marseille) ainsi qu'à Nantes, et sur neuf états-majors de brigade. Cette réorganisation sera menée à terme dès 1999, à l'exception de l'implantation à Limoges du dernier état-major en 2000. Les unités opérationnelles seront constituées de onze brigades.

Par ailleurs, l'ensemble des unités logistiques projetables, articulées en deux brigades, est placé sous l'autorité du commandement de la force logistique terrestre de Montlhéry. Quatre commandements d'appui spécialisés (CAS) seront situés à Strasbourg (génie), Oberhoffen (artillerie), Metz (renseignement) et à Luneville (transmissions).

Le commandement régional s'exercera essentiellement dans les domaines de la vie courante, de la mise sur pied des forces et de leur maintien en condition, pour la totalité des unités stationnées sur le territoire national. Pour ce faire, l'armée de Terre conservera cinq régions qui auront leur siège à Bordeaux, Lyon, Metz, Paris et Rennes.

Afin de constituer un ensemble de grandes unités spécialisées et adaptables, à tout moment, aux besoins des forces de circonstance mises sur pied pour une opération particulière, les unités de soutien rattachées en temps de paix aux grandes unités permanentes, du type de la division, seront supprimées. Il s'ensuivra un important mouvement de regroupement de sites.

Le service du matériel sera très profondément restructuré. La diminution du nombre des formations à soutenir, la priorité donnée à la projection des forces et le transfert progressif des activités à caractère industriel au secteur concurrentiel auront pour conséquence le regroupement de la totalité des régiments, des bataillons et des établissements du matériel dans une composante unique comprenant quinze formations au sein desquelles les détachements projetables seront clairement identifiés. C'est ainsi que 88 organismes (régiments, bataillons, établissements et groupements) seront soit dissous, soit restructurés, soit transférés.

Le commissariat s'adaptera, lui aussi, à la réduction du format et à l'augmentation du nombre de professionnels à soutenir : les fermetures, les restructurations et les regroupements viseront à atteindre cet objectif.

Les progrès techniques des télécommunications et de l'informatique, la modification du plan de stationnement des armées sur le territoire, ainsi que la complémentarité accrue des réseaux fixes et des réseaux mobiles conduisent à une transformation générale du service des transmissions. C'est ainsi que la totalité des moyens affectés aux missions de mise en _uvre des systèmes de communication et d'information sera regroupée dans une même composante associant les formations projetables et les unités fixes.

La réorganisation générale des forces et des soutiens nécessitera inévitablement des travaux sur les emprises et bâtiments redistribués. Elle impose de ce fait une relative stabilité dans l'organisation du service du génie tout au long de la loi de programmation. Pour autant celui-ci devra s'adapter à la modification de l'implantation des forces survenues au cours de la première période. Ainsi, deux établissements devront être fermés, dix-sept autres feront l'objet d'une réorganisation et la totalité des détachements de maintenance du génie sera dissoute.

Enfin, la suspension de la conscription et la transformation du rôle et de l'organisation de la réserve rendent inéluctable la dissolution des onze derniers centres mobilisateurs en 2000.

2.- Évolution des indicateurs d'activité

La dégradation du taux moyen d'activité de l'armée de Terre, exprimé en nombre de jours passés sur le terrain, est réelle, notamment au regard des prévisions pour 1999, comme le montre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DU TAUX MOYEN D'ACTIVITÉ DE L'ARMÉE DE TERRE

Année

Nombre de journées

Nombre de journées

Total

 

(avec matériels)

(sans matériels)

 

1997

40

38

78

1998

40 (prévisions)

38 (prévisions)

78

1999

35 (objectif)

35 (objectif)

70

 

Ainsi le taux moyen d'activité de 1997 a été inférieur, avec 78 jours, à l'objectif de 80 jours. L'objectif pour 1999 a été fixé à 70 jours, soit une baisse de plus de 10 % par rapport aux prévisions de 1998. Il s'agit d'une conséquence directe de la baisse des crédits de fonctionnement arrêtée par le projet de loi de finances.

Selon les estimations dont dispose votre Rapporteur, ce taux serait inférieur à ceux des armées étrangères comparables comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou l'Allemagne. Toutefois les activités des unités de l'armée de Terre en Opex ne sont pas comptabilisées dans cet indicateur alors que leur prise en compte permet d'améliorer de près de 10 jours supplémentaires le taux d'activité opérationnel moyen.

Le nombre mensuel moyen d'heures de vol des pilotes d'hélicoptères de l'ALAT est prévu pour 1999 entre 15 heures (Alouette III) et 27 heures trente (Gazelle SA 341). Il est globalement en hausse par rapport à 1997, constant par rapport à 1998 et très supérieur aux indicateurs d'activité aérienne des armées de Terre étrangères comparables.

B.- L'ARMÉE DE L'AIR

1.- Évolution de l'organisation et des missions

Au terme de la loi de programmation, l'armée de l'Air disposera d'une flotte d'avions de combat répartie en 18 escadrons dotés d'appareils de la génération actuelle, dans l'attente du Rafale.

Elle continuera de mettre en _uvre la composante aéroportée de la dissuasion grâce au couple Mirage 2000 N/missile air-sol de moyenne portée. De même, elle poursuivra sa participation au contrôle opérationnel et au soutien technique des réseaux de transmissions nucléaires mais n'assumera plus la mise en _uvre de la composante aéroportée de ces transmissions à compter de 2001, date de retrait du service des avions spécialisés C 160 H Astarte.

Elle participera à la prévention des crises avec ses appareils de reconnaissance, ses systèmes de détection, ses avions de recueil du renseignement d'origine électromagnétique, ses moyens d'exploitation du système d'observation satellitaire, sans oublier ses moyens prépositionnés outre-mer.

De même, au titre de la protection du territoire, elle assurera la surveillance de l'espace national et de ses approches grâce au système de détection de la défense aérienne intégré dans le système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA).

S'agissant de la capacité opérationnelle et d'entraînement, l'armée de l'Air accordera la priorité à la projection. Une centaine d'appareils de combat, associés à la flotte d'avions ravitailleurs, les systèmes de détection et de commandement aéroportés, ainsi que la composante mobile du SCCOA, permettront de couvrir toute la gamme des missions envisageables. Les capacités de transport aérien militaire seront conservées à leur niveau actuel.

La réduction globale des effectifs, l'effort accru de rationalisation des organisations territoriale et de soutien et les améliorations technologiques dans le domaine de la surveillance de l'espace aérien conduisent l'armée de l'Air à poursuivre le resserrement de son dispositif pour atteindre, en 2002, un format de 33 bases aériennes, dont 25 sont dotées d'une plate-forme aéronautique.

Les mesures d'adaptation de l'armée de l'Air sur la période 2000-2002 concerneront ses unités aériennes, son organisation territoriale, son dispositif de surveillance de l'espace aérien et de contrôle de la circulation aérienne militaire, et enfin, ses services de soutien (matériel, commissariat et infrastructure).

Conformément aux conclusions de la revue des programmes, deux escadrons de Jaguars stationnés à Saint-Dizier seront retirés du service en 2001. En outre, les unités constitutives du système Astarte basées à Évreux seront dissoutes à la même échéance.

L'organisation territoriale passera, à l'été 2000, de trois à deux régions aériennes, nord et sud, dont les limites correspondront à un découpage cohérent avec la gestion de l'espace aérien. Cette mesure entraînera la suppression d'une structure d'état-major, en l'occurrence celle de l'actuelle région aérienne Méditerranée.

Par ailleurs, les centres de détection et de contrôle de la circulation aérienne militaire verront leur nombre et leur structure évoluer. Ainsi, les sites de Prunay-Belleville et Narbonne, tout en conservant leur mission de détection, feront l'objet d'un resserrement de leurs infrastructures, réalisable respectivement en 1999 et 2000. Par ailleurs, le site de Contrexeville adoptera le même statut en 2001, date à laquelle il perdra sa fonction de contrôle en secours. Enfin, la base aérienne de Doullens deviendra, en 2002, un détachement essentiellement dédié à la mission de détection radar.

S'agissant du service du matériel, les deux bases-établissements de Varennes-sur-Allier et Romorantin verront leurs missions recentrées sur la maintenance aéronautique, respectivement en 2000 et 2002.

Le service du commissariat adaptera le nombre de ses établissements de stockage de matériels au nouveau format de l'armée de l'Air, ce qui se traduira par la fermeture de deux de ses quatre établissements : Reims en 2000, puis Toulouse-l'Hers en 2002.

La compagnie régionale d'infrastructure de la région aérienne Méditerranée sera dissoute en 2000. Les structures et les attributions de celles des autres régions aériennes seront réaménagées.

2.- Évolution des indicateurs d'activité

Les ressources complémentaires allouées dans le cadre du décret d'avance du 17 octobre 1997 et de la loi de finances rectificative du 29 décembre 1997 ont permis d'une part de combler en gestion, les insuffisances dues au décalage entre les tarifs prévisionnels du carburant retenus en construction budgétaire 1997 et les tarifs constatés, d'autre part, d'apurer le report de charges structurel dû à l'opération Turquoise et, enfin, de recompléter les stocks objectifs de carburant à leurs niveaux prévus.

Cependant l'objectif initial fixé des 323.000 heures de vol n'a pu être atteint, en 1997, en raison de problèmes de disponibilité de l'aviation de combat et de la flotte de transport.

Un rebasage de la dotation en carburants opérationnels a été effectué en construction budgétaire 1998 afin de tenir compte de l'évolution du cours du dollar. L'activité aérienne a été de 164.000 heures de vol pour le premier semestre. Elle est conforme aux prévisions initiales (315.600 heures pour l'année).

Le projet de loi de finances 1999 reconduit le rebasage effectué en 1998 pour tenir compte de l'évolution du cours du dollar. Les prévisions d'activité sont de 315.000 heures, objectif identique à celui de l'année 1998, c'est-à-dire 180 heures par an pour un pilote de combat soit en moyenne 15 heures par mois et 360 heures par an environ pour un pilote de transport, soit en moyenne 30 heures par mois.

Le tableau ci-après récapitule les indicateurs d'activité aérienne des différentes armées comparables à la France.

ACTIVITÉ DES FORCES AÉRIENNES

(en heures)

 

Activité aérienne totale

Activité par pilote de combat

 

1995

1996

1997

1995

1996

1997

France

330.000

304.000

292.000

180

172

176

États-Unis

(nd)

2.181.000

2.118.000

230

190

190

RFA (1)

150.000

150.000

(nc)

145

145

(nc)

Grande Bretagne

420.000

342.000

337.000

220

200

200

Italie

136.000

150.000

120.000

140

150

160

(1) Pour des raisons techniques, l'Allemagne n'a pas été en mesure de fournir le bilan annuel 1997. Il est rappelé que l'Allemagne forme ses pilotes dans le secteur civil et dans l'US Air Force et que cette activité n'est pas comptabilisée dans les chiffres fournis. De plus, l'activité " Transport " est faible en comparaison de celle des armées française ou britannique, du fait de sa participation limitée aux opérations extérieures.

 

C.- LA MARINE

1.- Le format de la flotte

La Marine procède au désarmement d'un nombre élevé de navires conformément à la réduction du format exigée par la professionnalisation (81 bâtiments hors SNLE à l'horizon 2015, plus le second porte-avions si les conditions économiques le permettent).

Fin 1997, elle aura ainsi désarmé seize bâtiments dont un porte-avions (le Clémenceau), deux sous-marins, une frégate de premier rang, une frégate de deuxième rang et trois bâtiments de soutien logistique.

Au 1er juillet 1998, la composition de la Flotte est la suivante :

· 1 porte-avion (Foch) ;

· 4 sous-marins lanceurs d'engin dont un SNLE-NG ;

· 6 sous-marins nucléaires d'attaque ;

· 2 sous-marins diesel d'attaque ;

· 1 porte-hélicoptère ;

· 4 transports de chaland de débarquement ;

· 2 frégates lance-missiles de premier rang ;

· 2 frégates antiaériennes de premier rang ;

· 10 frégates anti-sous-marines de premier rang ;

· 25 frégates de second rang ;

· 5 bâtiments de transport légers ;

· 14 bâtiments anti-mines ;

· 31 patrouilleurs ;

· 4 pétroliers ravitailleurs ;

· 4 bâtiments de soutien logistique.

Entre 2000 et 2002, la Marine désarmera de manière anticipée trois frégates de deuxième rang. En outre, à la suite des décisions prises lors de la revue de programmes, le porte-avions " Foch " sera désarmé à l'admission du service actif du porte-avions " Charles de Gaulle " (fin 1999) et la flottille d'Alizés, implantée à Nîmes-Garons, dissoute simultanément.

Pendant cette même période, la Marine achèvera la concentration de ses soutiens dans les ports de Brest, Toulon et Cherbourg et poursuivra sa professionnalisation, ce qui l'amènera à fermer le centre de formation maritime d'Hourtin, actuellement chargé de l'incorporation des appelés de la Marine.

Ainsi, sur la façade atlantique, Brest assurera le soutien du port de Lorient. A Cherbourg, les organismes militaires de soutien seront regroupés et rationalisés au sein d'une base navale. En Méditerranée, les ateliers de réparation aéronautique de la Marine, implantés à Cuers, seront transférés à Hyères en 2001, ce qui les rapprochera des utilisateurs.

A Rochefort, la formation des techniciens d'aéronautique navale, assurée actuellement au sein du centre école de l'aéronautique navale, sera transférée sur la base aérienne 721 de la même ville et l'école des fourriers s'implantera au centre d'instruction navale de Querqueville, à proximité de Cherbourg.

L'amiral, commandant la Marine à Lorient, n'aura plus la responsabilité d'un arrondissement maritime dont le maintien n'est pas justifié.

Enfin, la rationalisation de la chaîne sémaphorique se traduira par l'automatisation ou la fermeture de huit sémaphores.

2.- Évolution des indicateurs d'activité

Évaluée en jours de mer, sur la base d'un minimum de 6 heures de navigation par jour de mer, l'activité des bâtiments représente une moyenne de 89 jours avec la répartition suivante :

· Bâtiments de combat : 95 jours de mer ;

· Bâtiments de soutien : 68 jours de mer ;

· Bâtiments auxiliaires : 80 jours de mer.

Les objectifs fixés pour l'activité en 1997 ont été globalement respectés. Ils se traduisent par une baisse de l'activité par rapport à 1996 (- 2,5 %).

L'activité des bâtiments de combat est équivalente en volume à celle de 1996, parce que les transports de chaland de débarquement (TCD) et bâtiments de transport légers (BATRAL), précédemment classés bâtiments de soutien sont dorénavant répertoriés dans cette catégorie. Ce transfert masque en réalité une diminution de 5,8 % de l'activité des autres bâtiments de combat. Les TCD et BATRAL ont eux-mêmes connu un ralentissement d'activité de 16 %.

L'activité des bâtiments de soutien a diminué de 11,3 % et celle des bâtiments auxiliaires de 4,6 %.

L'activité des forces maritimes au premier semestre 1998 présente une forte augmentation liée aux opérations réelles. Cet état de fait provient :

· du regain de tension dans le golfe arabo-persique en liaison avec les inspections de l'UNSCOM qui a porté le rythme contractuel annuel de 75 % à 100 % de présence d'une frégate pendant 7 mois ;

· des multiples détachements opérationnels en Afrique ;

· de l'accentuation de l'effort outre mer en matière de lutte contre les pêches illicites (Antilles, Guyane, TAAF) et le narco-trafic (Antilles, Guyane).

L'impact des opérations extérieures est plus sensible en 1998 et laisse présager une augmentation des taux d'activité pour certains bâtiments de combat (TCD en particulier). En revanche, la poursuite du ralliement au format entraînera en 1999 une baisse du volume global d'activité.

Quant à l'activité aérienne, les taux d'activité prévus, réalisés et programmés sont les suivants :

· 1997 : 77.000 heures de vol prévues, 68.200 heures effectuées soit 88,5 % ;

· 1998 : 66.000 heures de vol prévues ;

· 1999 : 63.000 heures de vol prévues.

L'activité aérienne en 1997 a décru de 6 % par rapport à 1996 en raison du retrait de plus de vingt aéronefs et de la mise en sommeil ou la dissolution de plusieurs formations (4F, 59S, 52S) et de la recherche d'optimisation de l'emploi du potentiel. Cette diminution va se poursuivre dans les prochaines années pour rallier un niveau d'environ 62.000 heures de vol annuelles. L'activité des pilotes est retracée par le tableau ci-après.

TAUX MENSUEL D'ACTIVITÉ PAR PILOTE

(en heures de vol)

Type d'aéronef

1997

1998

1999

Assaut et interception

     

Super Étendard modernisé

15

15

15

Crusader

14

15

15

Patrouille maritime

     

Atlantique

24

27

29

Sûreté embarquée

     

Alizé

20,5

21

21

Hélicoptères embarqués

     

Super-Frelon

20

21

21

Lynx

20,2

21

21

Panther

18,2

21

21

 

L'activité des pilotes de l'aéronaval se caractérise donc par une grande stabilité. Quant aux appareils, le nombre moyen d'heures de vol annuelles est de 500 pour les avions de patrouille maritime, 300 pour les hélicoptères et 275 pour les avions de chasse.

II.- LA BAISSE DU COÛT D'INTERVENTION
DE LA DÉLÉGATION GÉNÉRALE POUR L'ARMEMENT (DGA)

La Délégation générale pour l'armement (DGA) est le plus important des services communs du ministère de la Défense. Son effectif budgétaire total était de 42.077 personnes pour 1998. A l'instar du reste du ministère et notamment des armées, elle est engagée dans un processus de rationalisation de sa gestion qui passe par la réduction de son coût d'intervention. Il importe de bien saisir la portée et la définition de cette notion avant d'en détailler un domaine d'application particulièrement important, c'est-à-dire la restructuration de la direction des centres d'expertise et d'essais.

A.- DÉFINITION ET PORTÉE DU COÛT D'INTERVENTION DE LA DGA

Le coût d'intervention est la mesure de l'ensemble des coûts de structure (rémunération du personnel, fonctionnement et investissements courants des services) générés par l'activité propre de la DGA.

Son évaluation est limitée à la seule partie étatique de la DGA c'est-à-dire la totalité de ses directions, y compris la direction des centres d'expertise et d'essais (DCE) à l'exclusion de ses établissements industriels (DCN, SMA), qui sont gérés en comptes de commerce, ainsi que des établissements publics placés sous sa tutelle (ONERA, Institut de Saint-Louis, écoles d'ingénieurs).

La méthode de calcul retenue n'intègre pas non plus le coût des immobilisations étatiques de la DCN. Le passage de ces immobilisations sous le gouvernorat de la Marine ne contribuera donc pas à la baisse du coût d'intervention de la DGA.

Plus précisément, le coût d'intervention de la DGA étatique correspond à la différence entre la somme des charges et la somme des produits générés par l'activité.

Les produits générés par l'activité donnent lieu à des paiements reçus de prestations effectuées au profit de clients " extérieurs " à la DGA et se matérialisent essentiellement par des rentrées de fonds de concours.

La somme des charges générées par l'activité est le coût complet de structure. Celui-ci est obtenu grâce à un retraitement du coût budgétaire de la DGA qu'il est possible de calculer à partir des données figurant dans les fascicules budgétaires en additionnant les crédits ouverts sur les articles gérés par la DGA dans les chapitres de rémunérations et charges sociales, de fonctionnement courant et d'investissement technique.

Ce retraitement, nécessaire car le coût budgétaire n'est pas représentatif du véritable coût généré par les activités propres de la DGA, consiste principalement à soustraire du coût budgétaire des charges non liées à l'activité (préretraites, charges de personnel géré mais non employé par la DGA), donc non incorporables dans les coûts, et à compléter ce même coût budgétaire de charges supplétives (personnel employé mais non géré par la DGA et organismes de la DCE gérés en compte de commerce), qui sont liées à l'activité mais qui ne sont pas supportées budgétairement par la DGA.

La méthode d'évaluation du coût d'intervention qui vient d'être décrite est différente de celle utilisée jusqu'en 1997. Les améliorations apportées en 1998 concernent principalement l'intégration, dans l'évaluation du coût d'intervention, de dépenses qui, bien que générées par l'activité n'étaient pas prise en compte jusqu'en 1997 (notamment le coût du personnel travaillant au sein de la DGA mais non rémunéré par elle) et la prise en compte des produits (recettes) générés par l'activité qui dorénavant sont déduits des charges.

Les évaluations actuellement disponibles du coût d'intervention de 1997 et des années antérieures ne sont pas donc pas homogènes avec cette nouvelle méthode qui sera utilisée pour évaluer le coût d'intervention de 1998. Elle sera toutefois appliquée rétroactivement aux années 1997 et 1996, l'année 1996 servant en effet de référence pour suivre la réalisation de l'objectif assigné à la DGA de réduction de 30 % de son coût d'intervention au terme des six années de la loi de programmation militaire 1997-2002.

Le coût d'intervention de la DGA étatique, évalué selon l'ancienne méthode de calcul présentée dans le rapport d'activité de 1997, a diminué de 13,5 % en valeur courante entre 1995 et 1997, passant de 7,6 à 6,6 milliards de francs.

Pour l'essentiel, cette diminution a été obtenue sur les dépenses de fonctionnement et d'investissement technique (- 24 % en valeur courante), les charges de personnel ayant été réduites de façon plus modérée (- 2,6 % en valeur courante sur la période considérée) car les gains obtenus par les déflations d'effectifs ont été, pour partie, compensés par les revalorisations salariales et les effets du glissement vieillesse-technicité (GVT).

Toujours à définition et périmètre constants (ceux de l'ancienne méthode d'évaluation), le coût d'intervention de la DGA devrait s'établir à environ 6,6 milliards de francs en 1998, soit une valeur proche de celle de 1997.

L'objectif de coût d'intervention pour 1999 ne sera fixé qu'à la fin de l'année 1998, mais il devrait être de l'ordre de 6,2 milliards de francs. Ceci traduit le ralentissement de la baisse du coût d'intervention de la DGA. Entre 1997 et 1999, la réduction sera de 6 %, soit moins de la moitié de celle des deux années précédentes. Mais il est vrai que le montant atteint en 1997 était très bas, en raison des reports de dépenses de fonctionnement et d'investissement liées à la mise en place de la réforme de la DGA.

La réduction du coût d'intervention ne peut être obtenue dans les proportions souhaitées que par la poursuite de la réduction des effectifs. Les RCS devraient ainsi passer de 4,64 milliards de francs en 1998 (70 % du coût d'intervention) à 4,17 milliards de francs en 1999 (67 % du coût d'intervention).

Si la DGA a déjà subi de fortes réductions d'effectifs budgétaires en 1997 et 1998, elle a du mal à les absorber en termes d'effectifs réels. Ainsi, la DGA étatique (qui exclut la DCN qui se trouve par ailleurs dans la même situation pour un sureffectif de 1.271 personnes) comptait un sureffectif de la catégorie des ouvriers de 784 personnes au 30 juin 1998 qui ne paraît pas devoir disparaître avant la fin de l'exercice.

La situation présente donc déjà des points de blocage qui tiennent notamment à l'insuffisance des départs volontaires vers les armées qui offrent des postes d'ouvriers et de fonctionnaires civils. On estime ainsi qu'un ensemble de 2.500 à 3.000 mutations supplémentaires vers les armées sont nécessaires pour atteindre une situation d'équilibre à l'horizon 2002.

B.- LE PLAN STRATÉGIQUE DE LA DIRECTION DES CENTRES D'EXPERTISE ET D'ESSAIS

La direction des centres d'expertise et d'essais (DCE) est la plus grosse direction de la DGA budgétaire.

En 1996, elle regroupait plus de 12.000 personnes sur 23 centres répartis sur plus de 50 implantations et 52.000 hectares. Elle pesait 7 milliards de francs de " chiffres d'affaires " et 60 milliards de francs d'immobilisations.

Dès 1997, une réflexion stratégique a été entreprise au sein de cette direction afin de s'adapter aux nouvelles contraintes qui encadraient désormais son activité.

Il s'agissait, d'une part, de participer à la réduction du coût des programmes d'armement par l'amélioration de la compétitivité des centres ; et, d'autre part, de faire face à la baisse du plan de charge liée à l'évolution des crédits d'études et de développement inscrits dans la loi de programmation militaire.

A titre d'exemple, la réduction de charge des centres spécialisés dans les systèmes aéronautiques sera en moyenne de 30 % entre 1996 et 2002. La charge relative aux missiles sera également diminuée de 20 %. Pour les systèmes navals et terrestres, l'activité se situera en 2002 à un niveau égal à 85 % de celui de 1996.

Au terme d'une intense phase de concertation interne, la DCE a adopté le premier volet de son plan stratégique début 1998. Le plan a défini les orientations stratégiques de la direction en ces termes :

· contribuer à la construction de l'Europe de l'armement ;

· améliorer la compétitivité (30 %) ;

· élargir la clientèle ;

· développer la culture du client ;

· fournir des prestations globales et développer des pôles d'excellence ;

· mobiliser et valoriser les compétences de chacun.

L'amélioration de la compétitivité a été traduite dans un plan pluriannuel de réduction du coût d'intervention de la DCE dont les tableaux ci-après précisent les paramètres.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS (1)

Janvier 1997

Janvier 1998

Janvier 1999
objectif

Janvier 2003
objectif

12.233

11.492

10.628

9.000

(1) affectés à la DCE, qu'ils soient ou non rémunérés par elle.

ÉVOLUTION DU COÛT D'INTERVENTION

(en millions de francs)

 

1996

1997

1998
objectif

1999
objectif

Fin 2002
objectif

RCS
(y compris assistance technique)

2.798

2.570

2.403

2.202

2.100

Fonctionnement

1.341

1.145

1.026

947

900

Investissement

1.364

1.129

1.109

948

900

Total

5.503

4.844

4.538

4.097

3.900

Selon ce plan, le coût d'intervention doit baisser de près de 32 % entre 1996 et 2002. En 1998, le résultat annoncé est déjà de - 17,5 %, soit une réduction de coût de près de un milliard en deux ans.

Les effectifs ont baissé de près de 13 % en deux ans, les dépenses de fonctionnement de 23,5 % et les dépenses d'investissement de 18,7 %.

L'examen de la tranche annuelle 1997/1998 montre toutefois que la baisse des RCS en 1998 (- 74 millions de francs, soit - 3 %) est inférieure au ratio de diminution des effectifs (- 6 %), ce qui traduit le repositionnement de la population DCE vers des catégories d'emplois plus élevées.

L'essentiel de la contribution de l'année 1998 a porté sur le poste fonctionnement (- 119 millions de francs, soit - 10,4 %), ce qui montre la réalité de l'effort d'économie supporté par les centres.

Les dépenses d'investissement ont été davantage préservées en 1998 après le décrochage de 1997.

L'évolution des dépenses d'investissement est liée à la vocation de la direction mais surtout au déploiement du deuxième volet du plan stratégique qui mettra en évidence les pôles de compétences à renforcer, ceux à maintenir et ceux où désinvestir.

En matière de coût de fonctionnement, la DCE a engagé une démarche de construction de son système d'information s'appuyant sur des progiciels unifiés au sein de la direction qui doit engendrer des économies.

La baisse volontaire et pilotée de l'assistance technique sera poursuivie. L'enjeu va cependant en s'amenuisant.

Une source d'économie privilégiée dans les années à venir sera la rationalisation et l'externalisation des activités de soutien. La rationalisation se fera en regroupant des activités communes à plusieurs centres, par grandes régions géographiques (Toulon, Sud-Ouest, Val de Reuil + Vernon). Dans ce domaine, comme dans les autres, les centres ont encore gardé des comportements autarciques qu'il faut faire évoluer rapidement.

L'externalisation concernera les activités de soutien pour lesquelles il existe un métier reconnu sur le marché (restauration, gardiennage, soutien informatique, transport, nettoyage...). Des sociétés extérieures spécialisées sont en mesure de proposer un ensemble de services logistiques à moindre coût que des personnels de l'administration par le jeu du professionnalisme et de l'effet d'échelle.

Il conviendra aussi de davantage rationaliser les activités techniques en réduisant les effets de la dispersion géographique des centres. Il a ainsi été décidé le transfert des activités du centre d'essais en vol de Brétigny vers les bases d'essais d'Istres et de Cazaux, la fermeture de l'annexe de Melun du centre d'essais en vol et de l'annexe de Quimper du centre d'essais des Landes.

Un rapprochement avec certains organismes extérieurs (centres d'expérimentation des armées, ONERA, CEA...) permettrait aussi de dégager des gains de productivité.

La DCE est engagée dans un processus de restructuration important qui porte à la fois sur son dimensionnement, son organisation, ses méthodes de travail, mais aussi sur sa vocation et ses missions.

La question clé qu'il conviendra de trancher désormais est celle du maintien de son appartenance à la DGA. La DCE assure actuellement une mission de prestations de services au profit du reste de la DGA et notamment de ses services de programmes mais aussi une activité commerciale d'expertise en faveur de clients extérieurs à la DGA : armées, industriels, français et étrangers. Tout laisse à penser que la deuxième catégorie de clients se développera plus rapidement que la première.

Dès lors, l'appartenance de la DCE à la DGA se révélera plutôt un handicap qu'un atout, au regard des exigences de la concurrence. Le meilleur moyen de lui rendre son autonomie tout en lui permettant de continuer à contracter avec la DGA dans des conditions satisfaisantes serait de l'ériger en établissement public industriel et commercial.

La solution du compte de commerce n'est qu'un pis aller. L'observation de la DCN et du SMA montre que ce mode de gestion comptable, conçu pour encadrer l'activité annexe d'une administration et non pas la mission essentielle d'un établissement industriel, fut-il public, ne contribue pas à clarifier les flux économiques ni les responsabilités, conditions minimales d'une bonne gestion.

III.- LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA SÉCURITÉ EXTÉRIEURE

Le budget pour 1999 de la direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE) est retracé par le tableau ci-après.

CRÉDITS DE LA DGSE

(en millions de francs)

 

Budget voté 1996

Budget voté 1997

Budget voté 1998

Projet de loi de finances 1999

1999/1998

(en %)

Dépenses ordinaires (titre III)

694,7

740,5

759,9

811,8

+ 6,8

- personnel : rémunérations d'activité

488,6

507,7

534,1

581,3

+8,8

- personnel : charges sociales

38,7

65

66,1

70,5

+ 6,2

- matériel et fonctionnement

167,4

167,8

159,7

160

+ 0,2

Dépenses en capital (titre V)

616

620

534

639

+ 19,7

- matériels informatiques et de transmission

322

425

399

482

+ 20,8

- infrastructures

294

195

135

157

+ 16,3

Total/Défense

1.310

1.360

1.294

1.450,8

+ 12,1

Fonds spéciaux (chapitre 37-91-20; §10)

218,4

196,4

196,4

(nd)

 

Total global

1.528

1.556

1.490,4

   
 

La direction générale de la Sécurité extérieure bénéficiera en 1999 d'un budget en hausse de 12 % par rapport à 1998, année, il est vrai, caractérisée par un décrochage général des crédits. Par rapport à 1997, l'évolution n'est plus que de 6,6 %.

En sus des moyens inscrits au fascicule de la Défense, la DGSE bénéficie de fonds spéciaux en provenance du fascicule des Services généraux du Premier ministre pour un montant de 196 millions de francs en 1998 comme en 1997, la dotation pour 1999 n'étant par définition pas encore déterminée. Ces fonds financent certaines activités opérationnelles des services " Action " et " Renseignement ".

Sur le titre III, la DGSE bénéficie en 1999 d'une mesure de 86 créations d'emplois de personnels civils, conformément à la loi de programmation. Ses effectifs budgétaires civils seront ainsi portés de 2.711 en 1998 à 2.797 en 1999 pour un effectif réalisé légèrement inférieur.

Les crédits individualisés au fascicule Défense ne financent que les personnels civils de la DGSE. Les effectifs militaires sont financés sur les dotations des différentes armées et il n'existe pas d'état consolidé de la masse salariale des personnels affectés à la DGSE. Celle-ci emploie, aux côtés des 2.797 civils, un effectif militaire de l'ordre de 1.200 personnes (tous grades confondus, des appelés au seul général figurant dans les cadres) auxquels s'ajoutent le millier de militaires du " service Action ", soit un total consolidé de l'ordre de 5.000 personnes.

De nombreux emplois sont occupés concurremment par des militaires ou des civils (technicien d'interception, analyste, logisticien). L'un des problèmes majeurs de la DGSE est la gestion de la carrière de ses personnels militaires. Leur avancement au sein des armées souffre de leur affectation à la DGSE car il n'existe pas de cadre d'évaluation de leur activité reconnu par les États-majors si bien que de nombreux militaires hésitent à rompre avec leur cadre d'origine en postulant à la DGSE. La DGSE ne compte par exemple qu'un emploi de général pour six à la direction du renseignement militaire (DRM).

Par ailleurs, la DGSE se heurte aux difficultés, classiques dans les administrations, de recrutement de contractuels de haut niveau, notamment afin de remplacer certains appelés informaticiens ou interprètes.

S'agissant du titre V, le budget est en forte progression (20 %), ce qui devrait permettre de rattraper le retard tant en matériel informatique et de transmission qu'en infrastructures.

Le transfert des locaux de la caserne Mortier au profit de la DGSE est intervenu le 1er septembre 1997. Les travaux préalables à une installation progressive des services (mise en sécurité du périmètre, adaptation des installations techniques, transformation des bâtiments de troupe en bureaux) ont commencé en 1997. Ils s'étendront jusqu'en 2001.

Deux nouveaux centres d'interception ont été réalisés en 1997 et 1998. Les investissements relatifs à la cryptologie restent la priorité du service. Des efforts d'informatisation des postes de travail et d'automatisation dans les procédures de transmission de l'information ont été engagés.

Le programme d'équipement en matériel de calcul a pris du retard en raison du faible montant de crédits prévus pour 1998.

Enfin, le renouvellement du bâtiment de guerre électronique mis à la disposition de la DGSE devra être envisagé très rapidement compte tenu de la date de sa mise en service.

Pour mémoire, la DRM comptera en 1999 un effectif budgétaire de 1.709 personnes pour un budget de fonctionnement de 36 millions de francs et un budget d'équipement de 67 millions de francs.

IV.- LA PARTICIPATION FRANÇAISE AU BUDGET DE L'OTAN

Les crédits relevant de la participation française aux dépenses de l'OTAN, pour ce qui concerne le budget militaire, se répartissent entre le titre III et le titre V du budget de la Défense, selon le tableau ci-après.

PARTICIPATION DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE
AUX DÉPENSES DE L'OTAN

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999

Titre III

170

170

240

Titre V

110

170

211

Total

280

340

451

 

Ces crédits n'englobent pas la participation française au budget civil de l'OTAN qui est financée par le ministère des Affaires étrangères.

L'évolution récente des différents budgets de l'Alliance est retracée par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES BUDGETS DE L'OTAN

(en millions de francs 1997 constants)

 

1997

1998

1999

Budget civil

936

936

936

Budget militaire de fonctionnement

4.093

4.161

4.352

Budget militaire d'investissement

4.173

4.269

4.300

 

La décomposition par fonction de ces budgets est détaillée dans le tableau ci-après.

DÉCOMPOSITION DU BUDGET MILITAIRE
DE FONCTIONNEMENT

Force Awacs 36 %

Quartiers généraux 39 %

Exercice 4 %

État-major international 2 %

Partenariat pour la paix 2 %

Agence des C 3 6 %

Divers 11 %

DÉCOMPOSITION DU BUDGET MILITAIRE
D'INVESTISSEMENT

Communications 20 %

Systèmes d'information 17 %

Surveillance, identification 11 %

Contrôle aérien 10 %

Moyens pour les opérations 16 %

Force Awacs 5 %

Divers 21 %

La participation française au budget militaire de l'OTAN a fortement augmenté entre 1997 et 1999 puisqu'elle est passée de 280 millions de francs à 451 millions de francs (+ 61 %).

Elle résulte des règles particulièrement complexes des répartitions des contributions des membres de l'OTAN.

La France qui, depuis 1966, n'appartient plus théoriquement à la structure militaire intégrée de l'OTAN, continue néanmoins à adhérer à certains des organismes qui en dépendent et contribue en conséquence à leurs budgets.

Le budget militaire de l'OTAN est ainsi constitué d'environ 75 codes budgétaires ou budgets qui couvrent les dépenses annuelles de ses quartiers généraux, agences, organismes, et de ses activités militaires.

Ces codes budgétaires sont examinés et financés soit à 12 ou 13 pays (l'escadre AWACS et son commandement), soit à 14 (l'essentiel des budgets de la structure militaire intégrée), soit à 15 lorsque la France ou l'Espagne contribue, soit encore à 16 lorsque les deux pays contribuent ensemble.

La France a décidé de contribuer à une trentaine de budgets. Elle supporte 17,1 % des frais lorsque l'Espagne ne l'accompagne pas, et 16,5 % dans le cas contraire. La part des États-Unis oscille entre 23,2 % et 41,5 % selon les budgets, celle du Royaume-Uni entre 10,2 % et 22 % et celle de l'Allemagne entre 15,5 % et 28,1 %.

Ces clefs résultent, d'une manière générale, de propositions du secrétariat général validées par le Conseil de l'OTAN. Elles ont été construites en quatre grandes étapes :

· janvier 1966 : sur la demande du Royaume-Uni, le partage des coûts est réétudié en sa faveur. La clef alors définie reste valable pour les budgets qui sont financés par les 14 membres de l'Alliance plus la France ;

· été 1966: la France se retire de la structure militaire intégrée. Les ¾ des budgets militaires basculent dans une enveloppe à partager à 14 ;

· 1984 : sont arrêtées les formules des budgets à 12 et 13 ;

· 1989 : la contribution de l'Espagne qui a adhéré à l'OTAN en 1982 est ajustée pour les budgets partagés à 15 ou 16 membres.

L'essentiel des coûts supportés au titre V par le ministère de la Défense français est imputable aux opérations du " Programme OTAN d'investissement au service de la sécurité ".

Ce programme a été organisé en 1993 en remplacement de l'ancien programme de l'infrastructure de l'OTAN. Les procédures applicables ont alors été profondément rénovées, dans un souci d'adaptation au nouvel environnement stratégique et de réduction des coûts. Alors que la formule précédente retenait une programmation par tranche annuelle et par catégorie d'infrastructure, la nouvelle approche introduit le concept de " paquets de capacités " et les grands commandements présentent désormais un besoin global pour remplir une capacité donnée.

La France a obtenu, en 1995, de ne participer qu'aux paquets qui l'intéressent. Sa contribution y est calculée conformément aux clefs de partage des coûts réexaminées en 1996, lorsque le Canada a demandé l'allégement de sa charge. Soumises à l'appréciation du Conseil, ces clefs s'efforcent de reposer sur un ensemble de critères économiques :

· la capacité contributive des pays membres, calculée sur la base du produit national brut ;

· les avantages économiques induits.

Actuellement, la contribution française est donc déterminée à l'aide des clefs de répartition retracées dans le tableau ci-après.

PART DE LA FRANCE DANS LES BUDGETS DE L'OTAN

(Clés de répartition)

(en %)

 


Budget civil

Budget militaire de fonctionnement

Budget militaire d'investissement

   

A 15

A 16 avec l'Espagne

A 15

A 16 avec l'Espagne

Part de la France

16,5

17,1

16,5

13,3

12,9

Les formules de partage des coûts sont en cours de réajustement pour prendre en compte l'élargissement à trois nouveaux pays membres (Pologne, Hongrie et République tchèque).

Le coût de l'élargissement a été officiellement estimé par l'OTAN à 7,8 milliards de francs pour les investissements et à 840 millions de francs pour le fonctionnement sur une période de dix ans.

Le coût pour la France serait en fonction de sa participation actuelle, de l'ordre de 1 milliard de francs en investissements et d'environ 140 millions de francs en fonctionnement, inégalement réparti sur toute la période.

La France a officiellement indiqué que l'élargissement de l'Alliance devait se réaliser sans surcoût par rapport aux enveloppes actuellement prévues. Cette volonté, partagée par de nombreuses nations, de stabiliser les plafonds de ressources autorisées, a conduit l'OTAN à étudier un redéploiement des opérations en cours. De ce fait, le volume global des budgets de l'Alliance ne devrait pas augmenter.

En revanche, la participation de la France risque de croître au cours de la période 2003-2007, pour un montant non encore défini. En effet, les programmes auxquels la France participe sont principalement concernés par l'élargissement de l'OTAN. Elle pourrait donc ne pas bénéficier de la baisse de la dotation des crédits afférents aux autres programmes dans la même proportion que l'augmentation de la dotation des programmes affectés par l'élargissement.

CHAPITRE V :

L'EXÉCUTION DES GRANDS PROGRAMMES

L'annuité 1999 de la programmation a été fixée à 86 milliards de francs. Elle permettra de financer l'exécution des grands programmes dans chacun des domaines d'activité de la défense dont la ventilation est retracée par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS EN CAPITAL PAR DOMAINE

(en millions de francs)

 

Autorisations de programme

Crédits de paiement

Évolution
(en %)

 

loi de finances initiale 1998

projet de loi de finances 1999

loi de finances initiale 1998

projet de loi de finances 1999

Autorisations de programme
(en %)

Crédits de paiement
(en %)

Classique

60.970

69.197

60.550

65.815

13,5

8,7

Espace

2.790

2.523

3.112

2.618

- 9,6

- 15,9

Nucléaire

16.414

13.304

16.387

16.581

- 18,9

1,2

Restructuration

829

977

954

987

17,8

3,5

Total

81.002,9

86.000

81.002,9

86.000

6,17

6,17

Les domaines espace et nucléaire feront chacun l'objet d'une analyse compte tenu de leurs spécificités et de la cohérence des programmes qui les composent.

Le domaine classique fera l'objet d'une analyse par armée. Le poids relatif de chacune d'entre elles est retracé par le tableau ci-après qui présente les crédits d'équipement par gouverneur, responsable de la programmation et de la planification des dépenses.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS EN CAPITAL (CP) PAR ARMÉE OU SERVICE (1)

(en millions de francs)

 

1998

1999

1999/1998
(en %)

Armée de l'air

19.161,6

20.238

5,6

Armée de terre

17.355,2

18.489

6,5

Marine

19.554,7

21.025,5

7,5

Gendarmerie

2.101,9

2.166

3

Services communs dont :

22.829,5

24.081,5

5,5

Délégation générale pour l'armement (hors crédits transférés et BCRD)

11.230,8

10.722,5

- 4,5

État major des armées (hors crédits transférés espace et nucléaire)

1.665,6

2.338,9

40,4

Direction des services financiers

-

662

-

Service des essences des armées

166

181

9

Service de santé des armées

241

274

13,7

Direction générale de la sécurité extérieure

534

639

19,7

Direction de la protection et de la sécurité de la Défense

27

28

3,7

Direction de l'administration générale

661,2

697

5,4

Délégation à l'information et à la communication de la Défense

13

15

15,4

Direction du service national

0

55

-

Action sociale des armées

44

49

11,4

Secrétariat général pour l'administration

22

23

4,5

(1) à structure constante.

I.- L'ESPACE

A.- UN DISPOSITIF RÉDUIT

Le budget de l'espace militaire pour 1999 suit une pente préoccupante qui traduit les difficultés observées dans les programmes en coopération (Horus, Hélios II et Trimilsatcom). Alors que l'ensemble du budget d'équipement de la défense progresse de 6,2 %, les crédits de paiement de l'espace baissent de 15,9 % et les autorisations de programme de 9,6 % comme le détaille le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS ESPACE PAR CATÉGORIE DE COÛTS

(en millions de francs)

   

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Projet
de budget 1999

Études amont

AP

393

267

273

 

CP

340

317

220

Développements

AP

2.191

1.913

1.711

 

CP

1.705

1.897

1.695

Fabrications

AP

363

176

80

 

CP

822

498

286

Entretien programmé du matériel

AP

460

434

459

 

CP

431

400

417

Total

AP

3.407

2.790

2.523

 

CP

3.298

3.112

2.618

 

Les lignes fabrication et développement sont le reflet direct de la réduction de la posture de la France dans le domaine spatial.

Aux yeux de votre Rapporteur, le plus inquiétant est la chute des crédits d'études amont qui passent de 340 millions de francs en 1997 à 317 millions de francs en 1998 et 220 millions de francs en 1999. Ces coupes drastiques ont des conséquences directes sur les équipes de recherche et les bureaux d'étude des industriels. A titre d'exemple, les équipes d'Alcatel espace travaillant sur les futurs satellites de télécommunication ont bénéficié de 200 millions de francs de crédits d'étude en 1997 contre 5 millions de francs à ce jour pour l'exercice 1998. Il est difficile dans ces conditions de pérenniser ses activités de recherche sauf à augmenter brutalement l'autofinancement sur des activités dont la visibilité à court terme n'est pas évidente.

La baisse des crédits reflète bien évidemment une forte contraction des capacités dans ce domaine.

RÉDUCTION DES CAPACITÉS EN MATIÈRE D'ESPACE MILITAIRE

 

Loi de programmation 1995-2000

- Filière optique Hélios I puis Hélios II avec deux satellites opérationnels

 
   

- Filière télécom avec phases de développement
dès 1997

 
   

- Filière radar (OSIRIS 1997-2000)

 
   

- Filière écoute (ZENON)

 
 

Loi de programmation 1997-2002

- Filière optique : un seul satellite opérationnel

 
   

- Filière radar : retard d'OSIRIS

 
   

- Filière télécom : retard de MILSATCOM

 
   

- Filière écoute : abandon

 
 

Revue de programme 1998

- Filière radar : abandon de OSIRIS/HORUS

 
 

Certains abandons de programmes (Horus) peuvent toutefois être utilement relayés par de nouvelles initiatives, plus performantes et moins coûteuses compte tenu de l'évolution très rapide des technologies dans ce domaine, mais sans financement d'impulsion, le retard risque de se cumuler.

B.- LES SATELLITES MILITAIRES D'OBSERVATION

1.- L'observation optique : le système Hélios

La filière Hélios consomme la grande majorité des crédits de l'espace militaire comme le montre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS (1) DEMANDÉS PAR LA FILIÈRE HÉLIOS

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Projet de loi de finances 1999

1997-2002

 

autorisations de programme

crédits de paiement

autorisations de programme

crédits de paiement

autorisations de programme

crédits de paiement

crédits de paiement (en millions de francs PIB 1998)

Hélios I

578

701

435

556

459

480

2.727

Hélios II

1.274

1.049

1.700

1.420

1.617

1.254

7.265

(1) y compris emploi opérationnel et renouvellement.

Le programme Hélios I est le premier programme spatial militaire européen d'observation à capteur optique.

Le programme Hélios a été décidé par la France en 1986. Il est mené en coopération internationale avec l'Italie à hauteur de 14,1 % et l'Espagne à hauteur de 7 %. Les taux de participation des trois pays se déclinent en termes financiers et de retour industriel, mais aussi en terme de droit d'utilisation opérationnelle du satellite.

Il comprend, outre un satellite en orbite (et un satellite de rechange au sol) et son centre de contrôle implanté en France (Toulouse) des centres de réception et de traitement des images dans chaque pays ; le centre de commandement du système est situé en France.

Le système Hélios est un système militaire d'observation optique par satellite destiné à acquérir des images dans le spectre visible. Ses capacités sont limitées à l'observation de jour et par temps clair. Il permet d'exploiter ces images à des fins de renseignement au profit des hautes autorités civiles et militaires et des forces armées.

L'orbite et les capacités de man_uvre du satellite garantissent au moins une possibilité d'observation d'un site donné tous les deux jours et la prise d'une quinzaine de vues par jour sur des orbites correspondant aux zones d'intérêt prioritaire.

Le premier satellite Hélios I A a été mis en orbite le 7 juillet 1995 depuis la base de Kourou. Le deuxième satellite Hélios I B a été mis en condition de stockage fin 1996 et sera lancé ultérieurement en fonction des besoins. La date de lancement en est actuellement prévue fin 1999.

Des améliorations du programme ont d'ores et déjà été décidées et lancées, en particulier pour prendre en compte l'évolution du contexte géostratégique et l'apparition de technologies nouvelles. Il s'agit d'améliorations des logiciels de la composante sol du système, dont notamment les logiciels d'exploitation des images, de l'adjonction d'une mémoire de masse électronique sur le deuxième satellite, de la réalisation d'une station de théâtre transportable et d'une capacité à exploiter un système bisatellite.

Le coût prévisionnel du programme initial à la charge de la France est de 8.262 millions de francs. Le coût des améliorations lancées s'élève à 554 millions de francs. Les coûts additionnels de la phase d'exploitation du système, à la charge de la France, sont de 748 millions de francs pour le deuxième lancement et de l'ordre de 342 millions de francs par an pour l'entretien, la maintenance et l'exploitation du système. Le coût total du programme est donc de l'ordre de 9,9 milliards de francs au coût des facteurs de janvier 1997.

Le programme Hélios II dont les études de faisabilité ont été lancées en 1992, constitue la deuxième génération du système Hélios d'observation spatiale à capteur optique. Par rapport au système Hélios I dont il doit assurer la continuité, les principaux objectifs sont les suivants :

· améliorer les capacités de prise de vue et de transmission des images de façon à réduire les délais d'acquisition de l'information et à augmenter le nombre d'images réalisables ;

· améliorer la résolution des images réalisées dans la bande optique visible de façon à garantir en particulier la détection de tous les objectifs d'intérêt militaire ;

· introduire une capacité d'observation infrarouge de façon à permettre l'observation de nuit et la détection d'indices d'activités.

Le système devra être capable d'opérer deux satellites simultanément en orbite.

Le programme Hélios II comprend actuellement la définition, le développement et la réalisation en coopération franco-espagnole de deux satellites de deuxième génération et le segment français d'une composante au sol adaptée des installations au sol déjà réalisées pour Hélios I et conçue pour être compatible avec l'arrivée de trois autres pays coopérants. A ce jour, seule l'Espagne est engagée sur le programme à hauteur de 3 % alors que l'Allemagne a différé sa participation, les discussions avec l'Italie n'ont pas abouti et que des négociations sont engagées avec la Belgique.

La phase de définition a débuté suite à l'approbation du dossier d'orientation du programme en avril 1994. La revue de définition préliminaire du satellite en mars 1995 a permis d'établir la conformité des performances du satellite aux exigences de la fiche des caractéristiques militaires.

Le retard dans la mise en place de la coopération et des modifications de concept décidées dans le cadre de l'analyse de la valeur menée fin 1995 ont conduit à prolonger les travaux de la phase de définition par une phase complémentaire détaillée de mars 1996 à mars 1997. Le dossier de lancement de la réalisation a été approuvé par le ministre de la Défense le 7 juillet 1998, soit plus de quatre ans après le début de la phase de définition.

Il est actuellement prévu que le premier satellite Hélios II A soit prêt au lancement fin 2002 pour assurer la continuité de service en cas d'anomalie au lancement ou en orbite sur l'un ou l'autre des satellites Hélios I. Les difficultés de mise en place de la coopération, avec l'Allemagne notamment, expliquent le glissement de cette date initialement prévue en 2001.

Depuis le lancement des premières études de faisabilité (1992) jusqu'au lancement (fin 2002) du premier satellite Hélios II, il se sera donc écoulé 10 ans, ce qui est manifestement trop long dans un secteur caractérisé par l'évolution rapide des progrès technologiques, sans évoquer les contraintes parfois excessives imposées aux industriels : augmentation du coût de revient par suite du décalage, avances de trésorerie afin de préserver les équipes en place, difficulté de prévoir une gestion des effectifs à long terme et de bénéficier des retours d'expérience.

Le coût à la charge de la France du programme Hélios II, en coopération franco-espagnole, comprenant la réalisation et le lancement des deux satellites ainsi que le segment français de la composante sol utilisateurs compatible avec l'arrivée de coopérants, est évalué à 10.947 millions de francs au coût des facteurs de janvier 1996. Il était estimé à 11,6 milliards de francs il y a un an, ce qui témoigne des résultats de l'action sur les coûts menée par la DGA. Le coût d'un troisième satellite réalisé en continuité des deux premiers est estimé à 1.500 millions de francs au coût des facteurs de janvier 1996 et son lancement à 900 millions de francs.

Les crédits déjà votés se montent à 6.121,5 millions de francs courants et les paiements au 1er janvier 1998 s'élevaient à 3.100 millions de francs.

2.- L'observation radar : l'abandon programmé de Horus

L'abandon du satellite d'observation radar Horus, entériné par la revue des programmes de 1998, était prévisible depuis un certain temps devant les difficultés de la coopération européenne dans ce domaine et tout particulièrement, du retrait allemand qui n'a pu honorer les engagements pris à Baden-Baden le 7 décembre 1995.

Il avait été décidé de considérer les deux programmes Hélios II et Horus comme formant un ensemble alors indissociable, les deux pays étant placés sur une base de stricte parité sur les plans opérationnel, industriel et financier.

Le partage opérationnel devait être égal entre la France et l'Allemagne (50 %-50 %), les participations éventuelles d'autres partenaires ne devant pas remettre en cause ce principe de parité. La charge industrielle du programme Hélios II devait revenir à la France pour 90 %, à l'Allemagne pour 10 %, les participations éventuelles de l'Espagne et de l'Italie venant en déduction de la part française. La charge industrielle du programme Horus devait revenir à l'Allemagne pour 60 %, à la France pour 40 %, les participations éventuelles d'autres partenaires devant s'imputer sur les parts des deux pays, pour maintenir la proportion 60/40. Le financement des développements était partagé selon les règles applicables au partage industriel, l'Allemagne devant toutefois verser une contribution aux investissements réalisés antérieurement par la France dans le domaine de l'observation optique. Enfin, le financement des lancements devait être partagé à parité.

La France n'est évidemment pas en mesure d'assumer seule le programme Horus dont les crédits prévus par la programmation s'élevaient à 2,5 milliards de francs pour seulement 300 millions de francs d'engagements fermes à ce jour au titre des études de faisabilité préparatoires (architecture, performance système...).

Faut-il pour autant renoncer à toute capacité dans le domaine de l'observation radar qui permet notamment d'assurer une observation tout temps alors que la couverture nuageuse constitue un obstacle pour la filière optique ?

L'un des inconvénients de l'accord franco-allemand était de figer l'observation radar dans une conception technologique datée recourant notamment au concept de satellite lourd du type de Hélios (4 tonnes) pour un prix prévisionnel très élevé, de l'ordre de 13 milliards de francs.

Pendant ce temps là, les industriels accomplissaient de grands progrès grâce aux contrats passés dans le domaine des satellites de télécommunications civils à base de constellation. Les nouvelles plates-formes seraient ainsi utilisables pour des minisatellites optiques (800 kg à 1 tonne) dont le coût de revient ne serait pas comparable avec celui du système Horus.

La relance de ce programme sous de nouvelles formes paraît donc s'imposer, autant pour des raisons opérationnelles que pour des raisons industrielles liées notamment à la préservation de la compétence technologique et à la promotion de l'exportation.

C.- LES SATELLITES MILITAIRES DE TÉLÉCOMMUNICATION

1.- Le programme Syracuse II

Le programme Syracuse II de télécommunications militaires par satellite a commencé sa phase de développement en 1988. Il se compose de trois parties (système, composante spatiale et composante sol) et il est conditionné par le calendrier de Télécom 2 qui répond au même besoin pour la part civile. La livraison de la version finale comportant toutes les capacités opérationnelles date du mois d'avril 1997.

Des compléments et améliorations sont en cours afin de prolonger sa durée de vie jusqu'en 2005 grâce aux lancements des troisième et quatrième satellites Telecom 2 effectués en décembre 1995 et en août 1996 et d'améliorer l'interopérabilité avec les alliés.

Le coût du programme est de 10.421 millions de francs (coût des facteurs janvier 1998) et le coût des compléments de 3.559 millions de francs, soit un total de 13.980 millions de francs. Son financement sur la période de programmation est retracé par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR SYRACUSE II

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Projet de loi de finances 1999

1999-2002

Autorisations de programme

322

189

249

 

Crédits de paiement

624

469

325

2.234

 

2.- Le programme Syracuse III et l'échec de Trimilsatcom

Le programme successeur de Syracuse II est en phase de faisabilité depuis 1993. La composante sol du système Syracuse II a été définie pour une durée de 20 ans et la composante spatiale prolongée jusqu'en 2005.

Au-delà de la continuité du système Syracuse II, le programme Syracuse III doit étendre le parc de stations au sol (de l'ordre de 400 stations comprenant de nombreuses petites stations tactiques), renforcer la résistance à la guerre électronique d'un nombre important de liaisons et assurer la zone de couverture des États-Unis aux Philippines. Son coût prévisionnel dans l'hypothèse de la coopération avec l'Allemagne et le Royaume-Uni (Trimilsatcom) était de 12.959 millions de francs (coût des facteurs, janvier 1997).

Le tableau ci-après retrace l'évolution des crédits consacrés à ce programme depuis 1997.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR SYRACUSE III

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Projet de loi de finances 1999

1999-2002

Autorisations de programme

625

123

21

 

Crédits de paiement

314

255

318

2.647

 

L'Allemagne, le Royaume-Uni et la France avaient décidé de démarrer en commun le programme Trimilsatcom par la signature en décembre 1997 d'un mémorandum d'entente pour la phase de définition.

La France et l'Allemagne sont engagées par ce mémorandum d'entente à démarrer l'étude de définition. Le Royaume-Uni avait prévu d'examiner en parallèle, dans une optique nationale, une solution d'acquisition classique et une solution privée, appelée PFI (Private Finance Initiative) à comparer à Trimilsatcom respectivement avant la phase de définition et avant la phase de réalisation. Le Royaume-Uni a annoncé son retrait de Trimilsatcom à la veille de la signature des contrats d'études au mois d'août 1998 au motif que la date de mise en service exigée (2005) ne pouvait être absolument garantie.

Au-delà des interrogations sur la solidité de cette motivation, ce retrait montre une fois encore les difficultés de la coopération européenne en matière spatiale.

Plusieurs options s'ouvrent désormais à la France :

· soit réaliser un programme purement national (Syracuse III), ce qui serait globalement plus coûteux pour la France, malgré les économies générées par la réduction des spécificités dont certaines, particulièrement onéreuses, avaient été exigées par le Royaume-Uni ;

· soit continuer le programme en partenariat avec la seule Allemagne (bimilsatcom), malgré les difficultés éprouvées lors des précédents retraits allemands en matière de satellites d'observation ; ces deux premières solutions peuvent d'ailleurs se combiner en deux étapes avec un démarrage en solitaire de la France rejoint dans un deuxième temps par l'Allemagne ;

· soit encore rejoindre les britanniques sur le programme Skynet 5 qui a fait l'objet d'un appel à l'investissement privé et services loués selon la méthode de la Private Finance Initiative (PFI, voir supra).

Dans tous les cas de figure, il conviendrait d'envisager le lancement d'un satellite préliminaire dès 2003 afin de préserver les positions orbitales et de garantir l'utilisation des bandes de fréquences EHF qui permettent un débit plus important, une meilleure protection contre le brouillage et la miniaturisation des antennes.

D.- LA RECHERCHE DUALE

La dualité des technologies est une solide réalité en matière spatiale.

La synergie est ainsi systématiquement recherchée entre les programmes spatiaux civils du CNES et les programmes spatiaux militaires.

Elle a pris plusieurs formes dont les plus significatives sont les suivantes :

· le lancement des satellites militaires se fait à l'aide de lanceurs civils Ariane. La Défense achète un service de lancement auprès de la société Arianespace et n'investit pas dans le développement des lanceurs ;

· le développement et l'exploitation de la filière Hélios de satellites militaires d'observation optique sont conduits en commun avec la poursuite de la filière des satellites civils Spot, le développement des éléments communs n'étant payé qu'une seule fois et le coût partagé entre les programmes ; l'économie générée pour le budget de l'État sur les programmes Hélios I et Spot 4 a été estimée par le CNES à 1.300 millions de francs. Cette mutualisation des coûts sera poursuivie dans le programme Hélios 2.

Par ailleurs, la mise en place des synergies entre les domaines civils et militaires se fait dès le stade préliminaire des études amont. L'utilisation des crédits du CNES de recherche et technologie consacrés à l'observation de la terre et aux technologies de systèmes orbitaux est ainsi coordonnée avec celle des crédits d'études amont spatiales de la DGA par la commission des études spatiales amont (CESA) présidée par le CNES.

En revanche, le ministère de la Défense ne dispose pas d'un droit de regard sur l'affectation et l'exploitation des crédits du Budget civil de la recherche et du développement (BCRD) régulièrement imputés sur son fascicule en bouclage budgétaire. Ce " portage " de crédits est d'autant plus dommageable que les domaines de véritable coopération entre le CNES et la défense sont importants. Ou bien le ministère de la Défense est réellement associé à la gestion de ces crédits ou bien il doit être mis un terme à cette pratique qui tend à devenir coutumière par simple souci d'affichage du volume souhaité de crédits d'équipement du ministère de la Défense.

Le montant de ces crédits voyageurs n'est pas marginal comme le montre le tableau ci-après.

CRÉDITS TRANSFÉRÉS AU CNES PAR LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

(en millions de francs courants)

 

1995

1996

1997

1998

1999
projet de loi de finances

BCRD

882

1.120

1.120

500

900 (1)

Hélios II

947

840

1.235

1.310

-

Études amont

47

19

24

49

-

Stentor

0

0

22

58

-

(1) La proportion destinée au CNES n'a pas été précisée à ce jour.

Le domaine spatial constitue un des points de préoccupation du budget 1999. Il est inutile d'insister sur son caractère vital pour la défense. L'autonomie stratégique réside autant en 1999 dans les moyens d'analyse et d'évaluation des crises que dans le volume étendu des systèmes d'arme à la disposition des forces opérationnelles.

II.- LES FORCES NUCLÉAIRES

A.- LA STABILISATION DES CRÉDITS

Les crédits de paiement demandés pour 1999 pour les forces nucléaires de dissuasion s'élèveront à 16.581 millions de francs, soit à un niveau très proche de 1998 en valeur constante.

En revanche, les autorisations de programme subiront un nouveau décrochage de 19 % pour s'établir à 13.304 millions de francs en suivant une pente comparable à celle de l'année dernière.

En moyenne période, la baisse des crédits consacrés à la dissuasion nucléaire est considérable puisque ceux-ci ont été quasiment divisés par deux entre 1990 et 1997 et ont encore subi une réduction de 13 % depuis cette date, comme le montre le tableau ci-après.

CRÉDITS CONSACRÉS AUX FORCES NUCLÉAIRES (1)

(en millions de francs courants)

Année

Autorisations de programme

Crédits de paiement

Crédits de paiement
(en millions de francs 1998)

1990

31.320

32.089

37.296

1991

31.291

31.024

34.908

1992

26.136

29.866

32.867

1993

21.789

26.420

28.385

1994

20.914

21.721

22.934

1995

19.464

20.745

21.553

1996

18.479

19.452

19.931

1997

19.689

18.848

19.093

1998

16.414

16.387

16.387

1999 (projet de budget)

13.304

16.581

-

(1) à l'exclusion des crédits de restructuration classés dans le domaine classique par convention.

Les crédits prévus pour la dissuasion nucléaire par la loi de programmation militaire s'élevaient à 105,8 milliards de francs constants de 1995 sur l'ensemble de la période 1997-2002. Au vu des crédits engagés à mi-programmation, il est peu probable que ce montant soit atteint. En revanche, la proportion des crédits consacrés à la dissuasion nucléaire par rapport à la totalité des crédits du titre V (20 % dans le projet de loi de finances pour 1999) est conforme aux dispositions de la loi de programmation aux termes desquelles " la part du budget du ministère de la Défense consacrée aux forces nucléaires s'établira en fin de période, à un niveau inférieur à 20 % du titre V (contre 31,40 % en 1990) " (paragraphe 1-3-1 du rapport annexé).

La force de dissuasion a assurément subi les contrecoups de l'évolution rapide de la situation stratégique depuis 1990. Elle a été aussi conduite à se moderniser, à adopter son format aux modifications de la menace et du contexte international. Les décisions prises en 1996 par le Président de la République (retrait des missiles Hadès, démantèlement de la composante terrestre, arrêt des essais nucléaires) exercent leurs effets directs sur le volume des dépenses.

Ce rétrécissement du dispositif nucléaire s'accompagne toutefois d'un effort constant de renouvellement, de maintenance, d'innovation afin de garantir sa crédibilité sur le long terme tant en ce qui concerne les vecteurs (missiles) que les charges (têtes nucléaires) ou les plates-formes de lancement (sous-marins à propulsion nucléaire, Mirage 2000 N).

B.- LES CRÉDITS TRANSFÉRÉS AU COMMISSARIAT À L'ÉNERGIE ATOMIQUE (CEA)

Le tableau ci-après récapitule les crédits inscrits sur le fascicule Défense et transférés à la Direction des applications militaires du CEA.

TRANSFERTS DU BUDGET DE LA DÉFENSE AU PROFIT DU CEA-DAM

(en milliards de francs)

 

1996 réalisé

1997
réalisé

1998
LFI

1999
PLF

 

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Matières nucléaires (production, retraitement, démantèlement, déchets, ....)

1,3

1,3

1,1

1,5

1,4

1,5

1,5

Armes

6,4

5,1

5

4,6

4,5

4,7

4,7

Propulsion navale

0,5

1,2

1,2

1,1

1,3

1

1,2

Total

8,2

7,6

7,3

7,2

7,2

7,2

7,4

Les trois dernières années sont caractérisées par une stabilité globale des crédits transférés. La légère progression des dotations consacrées au démantèlement est compensée par une réduction de crédits finançant les programmes d'armes.

La totalité des crédits transférés au CEA-DAM provient du titre V du budget de la Défense. Cependant, ces dotations ne financent pas en totalité des dépenses d'investissement, loin s'en faut puisque l'analyse des charges de fonctionnement de cet organisme, qui est effectuée par le comité mixte Armées-CEA, montre que près de 3 milliards de francs correspondent à des dépenses de salaires, charges sociales, retraites, taxes et frais de fonctionnement, soit plus de 40 % de la totalité de la dotation transférée.

Cette situation n'est pas saine puisque, d'une part, elle fausse l'appréhension économique de la dépense publique de défense, notamment au regard du clivage titre III/titre V, et que, d'autre part, elle pénalise le CEA lors des mouvements de régulation puisque les normes d'annulation sont toujours plus sévères sur les dotations du titre V en raison de leur flexibilité supposée que sur celles du titre III réputées plus rigides. Il est vrai que, cette année, pour la première fois, le Gouvernement a reconnu lors du mouvement d'annulation du mois d'août, la validité de l'argumentation du CEA en exonérant la part des crédits relevant du fonctionnement.

L'alignement de l'imputation budgétaire des crédits finançant l'activité militaire du CEA sur celle qui prévaut en matière civile, où une dotation de fonctionnement est inscrite au titre III du fascicule recherche en plus de la dotation d'équipement du titre VI, permettrait de mettre un terme à une injustice envers le CEA doublée d'une exception condamnable au principe de spécialité budgétaire.

Le CEA est engagé dans une restructuration profonde de la branche militaire de ses activités qui passe par un aménagement de ses effectifs.

Ceux-ci passeront de 5.700 agents en 1995 à 4.500 à l'horizon 2000 selon le calendrier ci-après.

EFFECTIFS DU CEA EMPLOYÉS AUX ACTIVITÉS MILITAIRES

1995

1996

1997

1998

1999

2000

5.666

5.198

4.962

4.843

4.662

4.500

Cette décroissance prolonge une tendance précédente puisque les effectifs du CEA-DAM s'élevaient à 6.800 personnes en 1990. En dix ans, la direction des applications militaires aura donc perdu le tiers de ses effectifs, accompagnant ainsi la baisse de l'effort financier consacré à la dissuasion nucléaire.

Le plan de restructuration repose aussi sur un redéploiement des activités. Après la fermeture des sites de Montléry (fin 1996), Vaujours (fin 1997) et Limeil à la fin 1999 sur lequel il reste encore 200 personnes, l'ensemble des activités nucléaires sera regroupé à Valduc alors que les activités relatives aux matériaux non nucléaires iront au centre du Ripault et les activités de physique des armes, de calcul et d'interprétation à Bruyères-le-Chatel, la ligne d'intégration du laser demeurant au CESTA de Bordeaux. Cette restructuration est facilitée par une pyramide des âges favorable en raison de nombreux recrutements opérés dans les années 60 et par des transferts vers la Défense ou le CEA civil.

Ceci a provoqué ou provoquera néanmoins le déplacement de 1.500 personnes dont 600 de Paris vers la province et 900 à l'intérieur de la région parisienne, ce qui n'est pas le plus simple compte tenu des conséquences sur les temps de transport des personnels. Parallèlement, 200 personnes devront être reconverties à un nouveau métier.

Le coût de cette opération (mesures relatives au personnel, investissements destinés à accueillir les activités transférées, coûts de la logistique associée) a été évalué à 700 millions de francs pour les années 1996-1999 au titre du Fonds d'adaptation industrielle inscrit dans la loi de programmation. Des dotations de 319 millions des francs (dont 100 millions de francs pour les incitations à la mobilité) et 241 millions de francs ont été dégagées en 1997 et 1998.

En sens inverse, le CEA a réussi à maintenir un volant de recrutement significatif, notamment de jeunes ingénieurs ou de techniciens affectés au programme de simulation des essais nucléaires. L'une de ses préoccupations dans le domaine du recrutement est d'avoir à faire face au départ prochain des 300 scientifiques du contingent qui lui étaient traditionnellement affectés. Hautement qualifié même s'il avait vocation à passer peu de temps dans les équipes, ce personnel sera difficile à remplacer. A tout le moins, ceci posera un problème budgétaire puisque le remplacement de ce potentiel scientifique est estimé à un surcoût de 200 millions de francs par an.

C.- LES PROGRAMMES NUCLÉAIRES

Les crédits consacrés à la dissuasion nucléaire sont récapitulés dans le tableau ci-après.

CRÉDITS CONSACRÉS A LA DISSUASION NUCLÉAIRE

(Crédits de paiement)

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999

 

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Composante océanique :

8.908

9.632

8.227

7.622

5.319

7.818

- Construction des SNLE NG

2.480

3.828

2.117

2.595

1.270

2.257

- M 51

1.791

995

2.518

1.052

-

1.450

- M 45

974

1.417

963

1.250

835

1.200

- Autres

3.663

3.392

2.629

2.725

3.214

2.911

Composante aéroportée :

1.689

1.721

1.385

1.640

1.760

1.904

- dont ASMPA

185

24

184

78

269

139

- transmissions

673

929

504

230

700

-

Autres :

8.419

6.566

6.392

6.621

6.028

6.202

- dont études amont

905

1.146

922

1.079

844

929

- dont simulation

1.629

1.644

1.600

1.531

1.936

1.859

Total

19.689

18.848

16.508

16.628

13.337

16.624

Cette présentation des crédits émanant du ministère de la Défense diffère quelque peu de celle qui a été adoptée dans la nouvelle nomenclature budgétaire.

PRÉSENTATION DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR 1999
AU TITRE DES FORCES NUCLÉAIRES
DANS LA NOUVELLE NOMENCLATURE BUDGÉTAIRE

(en millions de francs)

Chapitres

Crédits de paiement

Chapitre 51-71 - Forces nucléaires dont :

16.080,3

- Air Forces nucléaires

823

- Marine-SNLE-NG

2.199,3

- Marine-Force océanique stratégique hors SNLE-NG

1.927,9

- DGA-Armement et propulsion nucléaire

5.494

- EMA-Charges nucléaires

1.487

- EMA-Missiles stratégiques

2.130,1

- EMA-Transmissions nucléaires

436,1

- EMA-M 51

1.450

Par rapprochement des deux présentations, on peut toutefois constater l'impact des phénomènes suivants :

· la baisse de l'effort consacré aux études amont conformément aux décisions de la revue de programmes ;

· la montée en puissance du programme de simulation et des opérations de démantèlement des usines de production de matières fissiles ;

· le décalage par rapport aux prévisions initiales de la mise en service du SNLE-NG n° 3 le Vigilant et le ralentissement concomitant du programme M 45 ;

· la montée en puissance du programme M 51 après la pause observée en 1998 ;

· l'abandon et le démantèlement de la composante terrestre ;

· le lancement du programme ASMP amélioré et du vecteur Vesta.

Ces différents points appellent une remise en perspective.

1.- Les opérations de démantèlement

Le démantèlement de la composante terrestre (plateau d'Albion) commencé en septembre 1996 est en passe d'être totalement achevé puisque la fin des travaux sur le site (génie civil sur zones de lancement, postes de conduite de tir et travaux sur la base aérienne) est programmée pour la fin novembre 1998.

La dépose de la dernière tête nucléaire de la zone de lancement s'est faite en septembre 1997. Cette opération, de loin la plus délicate, même si la conception même du système d'armes l'avait envisagée et donc facilitée, à la différence de certains systèmes étrangers, s'est déroulée au rythme d'un missile sorti du silo par mois. La tête a été démontée sur le site même, les éléments nucléaires ou pyrotechniques expédiés dans des centres du Commissariat à l'énergie atomique. La matière nucléaire (plutonium, uranium) doit être recyclée au centre de Valduc afin d'être réutilisable. Le traitement s'opère progressivement en fonction du plan de charge du centre et notamment entre deux phases de fabrication de têtes nucléaires nouvelles (TN 75 et TN A).

Le financement de cette opération, d'un coût total de 433 millions de francs, s'est déroulé selon l'échéancier ci-après :

ÉCHÉANCIER DU DÉMANTÈLEMENT DE LA COMPOSANTE TERRESTRE (SSBS)

(en millions de francs)

   

Avant 1996

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Total

Démantèlement SSBS

AP

330

0

15

0

0

0

0

345

 

CP

0

25

154

110

56

0

0

345

Retrait 19 têtes nucléaires

AP

0

22

22

20

12

11

1

88

 

CP

0

19

22

20

13

12

2

88

Certaines nouvelles implantations sont d'ores et déjà prévues sur le site du plateau d'Albion comme le centre déporté de guerre électronique à l'intérieur de la base aérienne ou un centre de la Direction générale de la sécurité extérieure. L'installation d'un régiment étranger du génie, d'un effectif voisin de 1.000 personnes, est prévue à partir de la mi-1999. Enfin, l'implantation d'activités civiles notamment liées à la recherche est en cours de finalisation.

Parallèlement, les opérations de démantèlement et d'assainissement des sites de production de matières nucléaires (uranium et plutonium) se poursuivent.

Le site de Pierrelatte, propriété du Commissariat à l'énergie atomique, a toujours été exclusivement consacré à l'enrichissement de matière nucléaire pour la mission de défense. Son activité a cessé en juillet 1996. Le pré-démantèlement (rinçage, nettoyage des installations) a aussitôt été lancé.

Il s'agit à présent d'aborder le démantèlement proprement dit.

Compte tenu du volume du site aux fameuses cathédrales de béton, il s'agit d'une opération pilote. La décontamination radioactive prendra encore de l'ordre de cinq à six ans. Le coût global à la charge du ministère de la Défense est estimé à 2 milliards de francs depuis juillet 1996.

Le site de Marcoule est plus complexe. Alors que les réacteurs produisant du plutonium sont arrêtés depuis des années, ceux qui produisent du tritium fonctionnent toujours. L'assainissement du site passe par l'élimination du stock de déchets produits par l'usine de retraitement des combustibles nucléaires. Cette opération sera longue et coûteuse, de l'ordre de vingt à trente ans, pour un coût consolidé voisin de 30 milliards de francs. Sur ce site, le CEA agit en collaboration avec EDF et la COGEMA. Mais, alors que ces deux entreprises passent régulièrement des provisions dans leurs comptes afin de faire face progressivement à la charge financière de l'assainissement, le CEA dépend de son financement budgétaire annuel, ce qui le place dans une position plus vulnérable.

2.- La force océanique stratégique

Le programme de sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de nouvelle génération (SNLE-NG) était initialement prévu pour six sous-marins. En 1991, la cible a été ramenée à 4 sous-marins pour un coût total de 88 milliards de francs.

Il est difficile de descendre en-dessous de ce nombre. Un sous-marin est toujours en opération d'entretien lourd, pendant que deux sont en cycle opérationnel pour un seul en patrouille, compte tenu des périodes de départ en patrouille et de ravitaillement au port.

L'échéancier de ce programme a toutefois subi des étalements répétés pour des raisons budgétaires. A la suite de la revue des programmes de l'hiver dernier, il a été décidé de repousser l'admission au service actif du SNLE-NG n° 3 (le Vigilant) de 2003 à 2004 (au lieu de 2002 en programmation et 2000 prévu dans la programmation 1995-2000) et celle du SNLE-NG n° 4 de 2007 à 2008.

Le nouveau calendrier du programme est retracé ci-après.

CALENDRIER RÉVISÉ DU PROGRAMME SNLE-NG

 

Commandes

Admissions au service actif

Le Triomphant

juin 1987

mars 1997

Le Téméraire

octobre 1989

été 1999

Le Vigilant

mai 1993

2004

SNLE-NG n° 4

2001

2008

Le devis global de réalisation du programme a diminué cette année malgré l'augmentation mécanique des coûts fixes d'infrastructure résultant de son étalement supplémentaire. Il est aujourd'hui de 87 milliards de francs. Cette diminution est due pour partie à la budgétisation du service des programmes navals (SPN) mais aussi à la réduction des coûts de réalisation des 3ème et 4ème SNLE-NG pour un montant de 383 millions de francs.

En revanche, à la suite des décisions prises à l'issue de la revue des programmes, le devis du SNLE-NG n° 4 augmente de 300 millions de francs car il sera directement réalisé en version M51. Ce surcoût est plus que compensé par la baisse corrélative de 1.355 millions de francs du devis du programme " adaptation M51 " puisque seuls les trois premiers SNLE-NG seront refondus. Les dotations demandées pour ce programme sont décrites dans le tableau ci-après.

CRÉDITS DEMANDÉS EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR LES SNLE-NG (1)

(en millions de francs)

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999 (PLF)

Autorisations de programme

4.104

3.400

3.250

3.826

2.481

2.116

1.270

Crédits de paiement

5.796

5.222

3.540

4.234

3.828

2.594

2.256

(1) fabrication, environnement, développement.

S'agissant des missiles, les SNLE actuels sont équipés de M45 emportant chacun six têtes nucléaires (TN75). Le coût du programme M4 M45 (coût des facteurs 1997) est de 56 milliards de francs. Les crédits demandés pour cet équipement sont retracés dans le tableau ci-après.

CRÉDITS DEMANDÉS EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR LE PROGRAMME M4 M45

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999

 

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Part missiles

974

1.417

963

1.250

835

1.200

dont - MCO

948

1.009

948

945

792

890

- développement et fabrication M 45

26

408

15

305

43

310

Par têtes nucléaires (1)

1.038

1.060

851

804

799

793

dont - MCO

395

386

238

236

199

198

- développement et fabrication M 45

643

674

613

568

600

595

Total

2.012

2.477

1.814

2.054

1.634

1.993

(1) hors matières nucléaires.

Le programme M51 a vocation à assurer le remplacement des M45. Il se décompose en un programme missile proprement dit (coût estimé à 42 milliards de francs) et en un programme d'adaptation du système de lancement des sous-marins et de la pyrotechnie de l'île Longue à ce nouveau missile (coût de 9 milliards de francs).

La principale décision de la revue des programmes dans le domaine de la dissuasion a été d'avancer la date de mise en service opérationnel du M51 de 2010 à 2008 afin de la faire coïncider avec celle de l'admission au service actif du SNLE-NG n° 3.

Sur l'ensemble des programmes de renouvellement de la FOST, cette mesure a généré près de 6 milliards de francs d'économies, notamment en raison d'un profond remaniement du programme des essais.

CRÉDITS DEMANDÉS EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR LE PROGRAMME M51 (1)

(en millions de francs)

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999 (PLF)

Période 2000-2002

Autorisations de programme

1.019

1.370

1.400

1.296

2.263

778

363

8.737

Crédits de paiement

417

804

997

1.310

1.501

1.472

1.800

7.875

(1) missiles et têtes nucléaires.

3.- La composante aéroportée

Les crédits consacrés aux Mirage 2000N sont retracés dans le tableau ci-après.

CRÉDITS DEMANDÉS EN LOI DE FINANCES INITIALE
POUR LE MIRAGE 2000N
(1)

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999 (PLF)

Autorisations de programme

54

0

100

Crédits de paiement

242

199

204

(1) fabrication et développement.

Ces crédits ont essentiellement financé la modification de 29 appareils afin d'accroître leur polyvalence en leur conférant une capacité d'attaque air/sol conventionnelle et l'amélioration tactique de l'ensemble de la flotte par une meilleure intégration des contre-mesures au système d'armes.

Les crédits consacrés aux missiles air/sol moyenne portée (ASMP) sont évoqués dans le tableau ci-après.

CRÉDITS DEMANDÉS EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR LES MISSILES ASMP

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999 (PLF)

 

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Missiles

303

323

318

365

288

361

dont

           

- développement

0

0

0

0

0

0

- fabrication

0

9

0

13

0

6

- maintien en condition opérationnelle (MCO)

303

314

318

352

288

355

Têtes nucléaires (MCO)

50

50

49

48

63

61

Total

353

373

367

413

351

422

A la suite des orientations prises en comité stratégique et entérinées dans la loi de programmation 1997-2002, le choix s'est porté sur un missile à statoréacteur appelé ASMP amélioré ou ASMPA pour succéder à la composante aéroportée actuelle. La phase de faisabilité du programme ASMPA a débuté fin 1997. Le lancement du développement est prévu début 2000 pour une entrée en service en 2010.

Par rapport au missile ASMP actuel, l'ASMPA offrira une plus grande portée (500 à 600 km) et une plus grande diversité de trajectoires, incluant des pénétrations finales man_uvrantes à très basse altitude.

Le développement de l'ASMPA est également préparé par une opération, dite Vesta, financée au titre de la ligne " travaux de transition aérobie " de la loi de programmation, qui permettra de tester en vol un vecteur à statoréacteur commun à l'ASMP amélioré et au missile antinavire futur ANF. Les deux missiles partageront le même statoréacteur liquide à combustion prolongée et la même section de guidage pilotage. Ils différeront par leur guidage terminal et, bien évidemment, la nature de leur charge.

Les trois développements exploratoires lancés en 1993 et les recherches exploratoires préparant le projet de missile air/sol longue portée (ASLP) ont fait l'objet d'une réorientation profonde afin de couvrir les travaux complémentaires nécessaires à l'ASMP amélioré et non compris dans le marché de faisabilité ou dans l'opération Vesta.

4.- Les transmissions nucléaires

Les programmes de transmissions nucléaires sont désormais individualisés dans l'article 63 du chapitre 51-71 consacré aux forces nucléaires. Pour 1999, cet article est doté de 436 millions de francs en crédits de paiement et de 215 millions de francs en autorisations de programme. Le programme d'ensemble Hermès regroupe Astarte, Ramses, Transfost et le système de dernier recours Syderec dont la réalisation a été lancée en 1993 et dont la mise en service opérationnel est prévue pour 2000.

Ce système doit permettre d'acheminer les communications nucléaires essentielles, en particulier les ordres gouvernementaux, dès lors que les autres moyens de transmission seraient hors d'usage. Le coût total de Syderec est estimé à 1.852 millions de francs. 971 millions de francs ont déjà été consommés depuis l'origine du programme et 308 millions de francs de crédits de paiement sont prévus à ce titre dans le projet de loi de finances pour 1999.

5.- La simulation

L'arrêt des essais nucléaires, avec la signature du traité d'interdiction complète des essais nucléaires, constitue un véritable défi pour la communauté chargée du maintien de la disponibilité opérationnelle des armes nucléaires en service et de la mise au point des têtes futures, les têtes nucléaires aéroportées et océaniques (TNA et la TNO). La direction des applications militaires du CEA s'est préparée, dès 1991, à l'arrêt des expérimentations en proposant le programme PALEN qui comportait deux volets : la mise au pont des filières d'armes robustes, c'est-à-dire présentant une fiabilité tolérante aux écarts de modélisation ou de réalisation, et le passage à la simulation.

Lors de la dernière campagne d'essais nucléaires, en 1995-1996, ces deux volets ont donné lieu à des expérimentations ; des formules d'armes robustes ont pu être ainsi validées et de nombreuses données techniques et scientifiques ont aussi été acquises au bénéfice de la simulation.

Désormais, c'est au plan simulation d'apporter la garantie, en l'absence d'essais nucléaires, de la fiabilité et de la sûreté des armes françaises actuelles et futures, c'est dire l'importance cruciale de ce programme dont les crédits sont retracés dans le tableau ci-après.

CRÉDITS DE PAIEMENT DEMANDÉS POUR LE PROGRAMME DE SIMULATION (1)

(en millions de francs 1998)

 

1997

1998

1999

2000-2002

Total

Études

1.251

1.037

932

2.455

5.675

Laser Mégajoule
(y compris la ligne d'intégration laser)

164

376

506

2.035

3.081

Autres investissements
(AIRIX, ordinateurs, divers)

250

320

399

1.297

2.266

Total

1.665

1.733

1.837

5.787

11.022

(1) Ces crédits comprennent le coût des agents CEA travaillant sur ce programme (environ un millier de personnes) et les dépenses externes du CEA-DAM.

Le coût de l'ensemble du programme de mise en place des moyens est estimé à environ 15 milliards de francs dont 9,5 milliards de francs d'investissement et 5,5 milliards de francs de sous-traitance d'études et développement. Les prévisions budgétaires relatives aux coûts des investissements sont en forte progression par rapport à l'année dernière.

La simulation consiste à reproduire, à l'aide d'expériences ou par le calcul, les phénomènes observés au cours du fonctionnement d'une charge nucléaire. L'objectif est de disposer d'un ensemble de logiciels décrivant les différentes phases du fonctionnement d'une arme nucléaire et reposant sur une représentation des lois physiques mises en jeu.

La validation globale en sera obtenue par recalage sur les résultats des essais nucléaires passés, tandis que la validation des modèles physiques décrivant les phénomènes essentiels du fonctionnement des armes nucléaires reposera sur des moyens de laboratoire appropriés. Les deux principaux moyens spécifiques sont la machine radiographique AIRIX, pour la visualisation détaillée du comportement dynamique de l'arme, et le laser Mégajoule, pour l'étude de nombreux processus physiques élémentaires dont celle des phénomènes thermonucléaires. L'intégration des nombreux modèles physiques et la précision requise pour les évaluations numériques nécessiteront par ailleurs des calculateurs environ 1.000 fois plus puissants que ceux qui sont disponibles actuellement.

Cette démarche suppose la mise à disposition de physiciens de grande qualité, de numériciens de haut niveau et d'expérimentateurs hors pair. L'un des défis du plan simulation est d'ailleurs de constituer ce nouvel ensemble de compétences, tout en l'associant à l'expérience des équipes qui ont suivi les campagnes d'essais. Il est essentiel que cette osmose s'opère avant leur départ en retraite, sous peine d'une perte irrémédiable de compétences.

Pour la même raison, il est impératif que les outils de la simulation fonctionnent dès 2010, avant le départ des personnels qui ont connu les essais de manière à ce que la garantie sur les armes soit optimale.

L'infrastructure de l'installation AIRIX est désormais achevée alors que la machine radiographique est en phase de fabrication. Le calendrier de l'opération prévoit la mise en service de la machine dotée d'un axe de visée en 1999 ; la réalisation d'un second axe est prévue au-delà de l'an 2002.

Quant au programme " laser-Mégajoule " (LMJ), le calendrier de son déroulement est le suivant :

· la phase de faisabilité a démarré avec le lancement de la réalisation du prototype " ligne d'intégration laser " (LIL) dont l'infrastructure devrait être achevée en 1998 (huit faisceaux sont installés) et la mise en service effectuée en 2001 ;

· la montée en puissance du laser s'effectuera en deux étapes correspondant à une énergie disponible de 600 KJ en 2006 et à l'énergie maximale voisine de 2 MJ en 2010.

L'étude du laser Mégajoule bénéficie des échanges et coopérations technologiques conduits avec le laboratoire américain Lawrence de Livermore, qui réalise un projet de laser Mégajoule, le NIF (National ignition facility) similaire au projet français.

Le développement technologique commun a ainsi porté sur un milliard de crédits en quatre ans. Toutefois, les Américains ont opté directement pour un grand laser, sans ligne prototype, pour un achèvement prévu en 2004. Ils travaillent aussi sur d'autres pistes comme les machines électriques pulsées.

Le CEA-DAM développe depuis 1992 de nouveaux logiciels conçus pour intégrer les modèles plus précis et scientifiquement rigoureux évoqués précédemment. L'obtention de la puissance requise semble possible aujourd'hui seulement par l'utilisation d'ordinateurs massivement parallèles dont la disponibilité semble réaliste à l'horizon de 2006, compte tenu des projections des progrès effectués en la matière.

III.- LES PROGRAMMES DE L'ARMÉE DE L'AIR

A.- LES CRÉDITS DES PRINCIPAUX PROGRAMMES

Le graphique ci-après récapitule les principaux postes de consommation des crédits de paiement de l'armée de l'Air entre 1999 et 2002.

GRAPHIQUE ARMÉE DE L'AIR

Le tableau ci-après précise les montants financiers des principaux programmes de l'armée de l'Air.

FINANCEMENT DES PRINCIPAUX PROGRAMMES DE L'ARMÉE DE L'AIR

(en millions de francs 1998)


Programmes


Dépenses

Loi de finances initiale 1998

Projet de loi
de finances 1999

Prévisions
de 2000 à 2002

 

1997

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Avions

             

Rafale Air

             

développement

1.584

1.107

925

1.056

1.199

2.839

3.840

production

1.933

1.296 (1)

1.814

2.067

2.551

22.479

6.708

ATF

             

développement

13

-

-

-

44

-

-

fabrication

-

-

-

-

-

2.876

607

Rénovation M 2000DA

(Mirage 2000-5 France)

             

développement

56

6

20

36

83

4

206

production

1.018

193

1.060

128

579

106

682

Mirage 2000 D

             

développement

104

-

30

-

18

-

8

production

1.429

699

1.155

708

1200

777

2.678

Matériels électroniques sol

             

SCCOA étape 1

             

développement

140

68

130

32

96

16

143

fabrication

540

453

502

120

449

63

964

SCCOA étape 2

             

développement

-

161

38

119

62

193

380

fabrication

-

479

122

499

204

555

1.300

MTBA

             

développement

61

-

35

-

4

-

-

fabrication

12

60

220

25

286

674

1.130

Missiles

             

MICA

             

développement

82

169

150

-

138

83

355

fabrication

-

133

193

250

321

1.265

1.256

APACHE AP

             

développement

121

75

147

8

108

2

169

fabrication

74

-

185

8

218

39

1.051

SCALP

             

développement

-

98

330

2

358

2

1.484

fabrication

-

80

-

110

10

487

424

(1) Les ressources de la loi de finances initiale 1998 ne tiennent pas compte de la commande globale prévue en 1998.

B.- LES MISSILES

Armement tactique principal du Mirage 2000 D et du Rafale, le missile modulaire Apache anti-piste (AP) a pour mission la neutralisation à distance de sécurité (140 km) des bases aériennes par l'interdiction de pistes et des aires bétonnées au moyen de charges classiques.

Le lancement du développement date d'avril 1989, la livraison du premier missile est prévue pour mars 2001 et le nombre total d'exemplaires prévus est de 100 unités dont 72 livrés à fin 2002. Le coût de son développement est de 2.449 millions de francs (CF janvier 1998) dont 1.976 millions de francs (plus de 80 %) déjà financé et le coût de sa production de 1.770 millions de francs.

Le missile SCALP/Emploi général est un missile air-sol largué à distance de sécurité (400 km) des systèmes de défense. Il est dérivé de l'Apache anti-piste. Sa mission est la destruction des objectifs d'infrastructures militaires, logistiques, économique moyennement durcis. Il sera tiré à partir du Mirage 2000 D et du Rafale Air et Marine. Le lancement de la réalisation du programme date de mai 1997 et la notification de la commande pluriannuelle de 500 missiles du 29 décembre 1997. Les premières livraisons sont attendues pour la mi-2003.

Le coût du programme est de 5.423 millions de francs dont 2.066 millions de francs pour le développement. Les crédits déjà consommés s'élèvent à 396 millions de francs.

Le missile d'interception de combat et d'autodéfense (MICA) est un missile d'interception, de combat et d'autodéfense. Il sera l'armement principal du Rafale et du Mirage 2000 5 dans leurs missions de défense aérienne et l'armement d'autodéfense dans les missions d'attaque au sol du Rafale.

Le lancement du développement date de mars 1987, la notification de la première commande de décembre 1997 (225 missiles dont 125 pour l'armée de l'Air) et les premières livraisons sont prévus pour 1999 (25 missiles).

Le coût total du programme est de 10.068 millions de francs (CF janvier 1998) dont 3.157 millions de francs pour le développement. Les crédits déjà consommés s'élèvent à 2.743 millions de francs.

C.- LES MATÉRIELS ÉLECTRONIQUES

La modernisation du réseau de télécommunications des bases aériennes (MTBA) doit satisfaire les besoins en communications fixes de 102 sites de l'armée de l'Air en remplacement des réseaux actuels de desserte des abonnés des bases aériennes.

Le lancement du développement du programme date de décembre 1992, le lancement de la production de décembre 1997, la livraison des équipements doit commencer en 1999 pour s'achever en 2005.

Le coût total du programme est de 2.995 millions de francs (CF 1997) pour un développement de 555 millions de francs. Les crédits consommés s'élèvent à 936 millions de francs.

Le système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA) est destiné à doter l'armée de l'Air d'une capacité de gestion globale des systèmes d'armes à partir d'un commandement unique des opérations aériennes, fortement automatisé, rapidement renseigné et jouissant d'un niveau d'interopérabilité élevé avec les armées françaises et alliées.

Le SCCOA est donc constitué par l'ensemble des moyens concourant au commandement et à la conduite des opérations aériennes, exceptés ceux qui s'appliquent au nucléaire, complétés par les moyens de détection associés (radars principalement) ainsi que par les moyens de transmission " sol-air-sol " exclusivement dédiés à la conduite des opérations aériennes.

Les fonctions opérationnelles couvertes par le SCCOA sont :

· la surveillance (détection radar et identification) de l'espace aérien national et de ses approches, ainsi que d'un ou plusieurs théâtres extérieurs ;

· l'évaluation de la menace sous toutes ses formes (aérienne, spatiale, électronique) ;

· la gestion de l'espace aérien en coordination avec l'aviation civile ;

· le contrôle de la circulation aérienne militaire et notamment la planification et le suivi des mouvements ;

· le contrôle des missions, au sens " guidage en temps réel ", qu'elles soient défensives, offensives ou de soutien ;

· l'optimisation de l'emploi des forces en fonction de leur état et de leur environnement, ainsi que la planification, l'attribution et la préparation des missions aériennes ;

· la gestion des moyens de commandement et de conduite (C2), notamment radars et transmissions de données ;

· l'exploitation du renseignement d'intérêt " air " dans un contexte interarmées et interallié.

Le SCCOA est scindé en trois étapes successives d'une durée de deux à six ans environ. La première étape a été lancée en février 1993 et la deuxième en décembre 1997.

Le coût total du programme est estimé à 15.484 millions de francs (CF janvier 1998) dont 5.180 millions de francs pour la première étape, 2.304 millions de francs pour la deuxième et 8.000 millions de francs pour la troisième. Les crédits déjà consommés s'élèvent à 3.396 millions de francs.

Le SCCOA est étroitement couplé avec le programme Air Command and Control System (ACCS) de l'OTAN dont il englobe la partie française.

Le programme ACCS a été initialisé en 1981 dans le cadre de la rénovation des systèmes sol de défense aérienne de l'OTAN. La participation de la France à ce programme a été décidée par le Chef de l'État en 1990.

En 1994, le conseil de l'Atlantique Nord a approuvé la première étape du programme ACCS qui prévoit notamment la mise en _uvre de deux centres en France dont un à Lyon Mont Verdun. Cette composante française fait partie intégrante du SCCOA.

Les logiciels correspondant à l'ensemble des fonctions relatives au commandement et à la conduite d'opérations aériennes non nucléaires seront en principe communs pour tous les pays de la structure militaire intégrée. De plus, ces logiciels comporteront des modules standards d'interface avec les systèmes de conduite des opérations de l'armée de Terre et de la Marine. enfin, les matériels mis en _uvre, dont les moyens de télécommunications, répondront à des normes communes.

Ainsi, un double interopérabilité " interalliée et interarmées " devrait être garantie. Elle concernera à la fois les moyens " statiques " implantés dans les territoires des nations concernées et les moyens mobiles répondant notamment au besoin d'opérations menées à partir de théâtres extérieurs.

Les premières réalisations de l'ACCS concernent le développement de la version initiale de logiciels communs et l'équipement de quatre centres fixes dont la mise en service opérationnel est prévue pour 2003.

A titre intérimaire, en attendant l'ACCS, le système ICC (Interim CAOC Capability) développé par l'OTAN a été installé au centre de commandement des opérations aériennes (CCOA) de Taverny et dans certains PC de l'OTAN.

L'ACCS est financé sur le budget " programme OTAN d'investissements au service de la sécurité " à laquelle la France contribue (section commune) à hauteur de 13,34 % depuis la création de l'OTAN.

Le financement OTAN, prévu sur dix-huit ans, étant fixé à 900 MUCI (millions d'unités de comptes internationales) soit à environ 20 milliards de francs, la contribution française s'élèvera à environ 150 millions de francs par an.

Il est toutefois à noter que, dans le cadre de l'ACCS, la France sera amenée à réaliser certaines opérations sur son territoire ; celles-ci feront l'objet d'un remboursement de l'OTAN, pour leurs parties éligibles au budget de l'Alliance, conformément aux règles en vigueur.

D.- LES AVIONS DE COMBAT

1.- Le Mirage 2000 D

Le Mirage 2000 D est un avion de pénétration et d'attaque au sol tout temps capable de tirer en aveugle les armements air-sol conventionnels, les armements guidés laser de jour comme de nuit, le missile nucléaire ASMP, et à terme d'emprunter des systèmes de reconnaissance montés en nacelle. Il se distingue du Mirage 2000 N par son système d'armes et de navigation.

Le Mirage 2000 D sera adapté aux armements futurs tels que le missile Apache ainsi qu'à l'armement air-sol modulaire. Le lancement du programme date de décembre 1988, la livraison du premier avion de série de mars 1993, la constitution du premier escadron opérationnel d'avril 1995 et la dernière livraison est prévue pour mai 2001.

Le nombre d'appareils prévus à été porté de 70 à 105 en 1989, réduit à 90 en 1992 puis à 86 par la programmation 1997-2002.

La cadence de livraison a été réduite de 15 à 12 appareils par an en 1995, puis de 12 à 6 de 1996 à 1998, ce qui a généré une augmentation de prix de série. Pour 1999, les livraisons remonteront à 12 appareils. Au 31 décembre 1998, l'armée de l'Air disposera de 55 Mirage 2000 D affectés aux trois escadrons de chasse de Nancy.

Le coût total du programme est évalué à 28.052 millions de francs (CF 01/98), soit un coût unitaire de 326 millions de francs, dont 1.781 millions de francs pour le développement, 410 millions de francs pour l'intégration du missile Apache et 25.861 millions de francs pour la production. La somme des crédits déjà consommés s'élève à 21.745 millions de francs.

2.- La rénovation des Mirage 2000 DA (Mirage 2000-5 France)

Le programme de rénovation des Mirage 2000 DA est plus complexe.

En 1998, la composante air-air des avions de combat de l'armée de l'Air comporte des avions dotés d'un système d'armes moderne (Mirage 2000 RDI), mais également des appareils (Mirage 2000 RDM) dont les capacités sont insuffisantes face à une menace en constante amélioration qualitative.

En conséquence, il est nécessaire d'améliorer le système d'arme des Mirage 2000 RDM, qui sont les plus anciens des Mirage 2000 de défense aérienne.

Cette amélioration consiste en un système d'armes entièrement nouveau, y compris les équipements associés et la cabine de pilotage, sans modifier la cellule et les équipements avion. Le choix s'est porté sur le système d'armes 2000-5, qui correspond au besoin et dont le développement était en cours pour l'exportation, comprenant le radar RDY multicible, une cabine entièrement reconfigurée, et capable de tirer le missile air-air MICA multicible.

La modernisation sera effectuée en transformant en Mirage 2000-5 les 37 premiers Mirage 2000 RDI commandés, les Mirage 2000 RDM étant transformés en Mirage 2000 RDI en remplacement des précédents. Cette solution a l'avantage de donner les meilleures capacités (notamment l'emport interne du système de leurrage Spirale) et un potentiel de vieillissement suffisant pour la flotte de Mirage 2000-5, laquelle est appelée à rester en service le plus longtemps.

La notification du contrat relatif à la transformation de série des 37 avions date de novembre 1993, la livraison du premier avion de série de décembre 1997, la constitution du premier escadron est prévue pour fin 1999 et la livraison du 37ème avion en février 2000.

Le coût total du programme est estimé à 4.748 millions de francs dont 726 millions de francs pour le développement et 4.022 millions de francs pour la production. Les crédits déjà consommés s'élèvent à 3.153 millions de francs.

3.- Le programme Rafale

La grande force de l'avion Rafale est sa polyvalence puisqu'il sera capable d'assurer les missions suivantes :

· dissuasion nucléaire  ;

· pénétration et attaque au sol par tous les temps ;

· intervention à long rayon d'action avec ravitaillement en vol ;

· reconnaissance tactique et stratégique.

Son système d'armes lui permettra notamment :

· de mener des attaques tout temps sur des objectifs au sol ou en mer, avec tir à distance de sécurité de missiles classiques ou nucléaires ou tir d'armements classiques de précision. Il pourra être engagé en haute ou moyenne altitude, ainsi qu'en très basse altitude en suivi de terrain automatique, contre des objectifs planifiés ou d'opportunité ;

· d'assurer, lors de ces missions, un niveau de survie élevé dans un environnement dense en menaces de toutes natures. Dans ce but, il combinera un niveau réduit de signatures et une man_uvrabilité élevée, et mettra en _uvre un système de contre-mesures internes, adapté à la menace ;

· d'engager un combat à grande distance contre plusieurs avions hostiles grâce à des capteurs adaptés (radar multicibles à balayage électronique, capteur optronique frontal) et à des missiles de type " tire et oublie " avec autodirecteur électromagnétique ou infrarouge.

Ce programme de grande envergure a subi les effets des réductions budgétaires comme le montre le rappel ci-après des différents reports de calendrier.

· 1992 : allongement d'un an du programme de développement et décalage correspondant de la mise en série, en raison du retard pris par le développement du système de navigation et d'attaque ;

· 1993 (octobre) : décalage de six mois de la constitution des premières unités de la Marine et de l'armée de l'Air, pour des raisons budgétaires ;

· 1994 (avril) : le projet de loi de programmation militaire 1995-2000 prévoit un glissement d'un an de la mise en place du premier escadron de l'armée de l'Air, en mi-2002 ;

· 1995 (septembre) : le budget de la défense pour 1996 prévoit un étalement d'un an, avec pour conséquence le décalage d'un an du premier escadron opérationnel de l'armée de l'Air, à la mi-2003. La mise en service de la première flotille de 12 avions pour la Marine est reportée en mi-1999 ;

· 1996 (mai) : le projet de loi de programmation 1997-2002 prévoit un glissement de deux ans et demi sur la mise en place du premier escadron opérationnel de l'armée de l'Air, en fin 2005 ; le nombre d'appareils pour la Marine est réduit de 86 à 60 ; la mise en service d'une première demi-flotille (6 avions) pour la Marine est prévue à mi-2001, une seconde demi-flotille en mi-2002 ;

· 1998 (avril) : la revue des programmes conclut au recul de dix mois de la livraison des premiers avions destinés à l'armée de l'Air, ce qui entraîne une diminution du nombre d'avions livrés à fin 2005 (23 au lieu de 25) date de la constitution du premier escadron opérationnel. Même mesure pour la Marine dont la flotille opérationnelle de 12 appareils est maintenue pour 2002.

Le nombre d'appareils prévus est maintenu à 294 dont 234 Rafale Air (139 biplaces et 95 monoplaces) et 60 Rafale Marine. selon l'échéancier suivant (dans l'hypothèse d'une commande groupée) :

ÉVOLUTION DES COMMANDES ET LIVRAISONS D'AVIONS RAFALE

 

Rafale Air

Rafale Marine

 

Commandes

Livraisons

Commandes

Livraisons

Avant 1995

2

0

3

0

1995

1

0

7

0

1996

0

0

0

0

1997

0

0

0

0

1998

21

0

7

0

1999

0

1

0

1

2000

12

1

8

3

2001

0

0

0

5

2002

0

0

0

1

Après 2002

198

232

35

50

Cible

234

 

60

 

Le coût global du programme est estimé à 201,5 milliards de francs au coût des facteurs de janvier 1998.

Le coût budgétaire pour l'État français est estimé à 188,6 milliards de francs au coût des facteurs de janvier 1998, compte tenu du financement escompté de l'ordre de 25 % du développement par les industriels, soit 13 milliards de francs.

La décomposition de ce coût est retracée par le tableau ci-après :

COÛT DU PROGRAMME RAFALE (AIR ET MARINE)

(Coût des facteurs janvier 1998)

(en millions de francs)

Éléments du programme

Montants

Développement des trois premiers standards opérationnels, y compris le moteur M-88

56.140

- dont participation escomptée des industriels (25 %)

12.900

- dont participation de l'État

43.240

Devis de production

145.400

- dont industrialisation

17.860

- dont fabrication de 95 Rafale Air monoplaces

27.270

- dont fabrication de 139 Rafale Air biplaces

42.657

- dont fabrication de 60 Rafale Marine

19.670

- dont volants, rechanges, divers, options

36.696

- dont simulateurs

1.220

Total

201.540

A ne s'en tenir qu'aux frais de production, le coût unitaire (CF janvier 1998) des avions prêts au vol (non armés) est de 287 millions de francs pour la Rafale Air monoplace, 307 millions de francs pour la Rafale Air biplace et 328 millions de francs pour le Rafale Marine.

La part État du devis de développement a augmenté entre la référence initiale de 23,472 milliards de francs au coût des facteurs de janvier 1986 et l'évaluation actuelle de 30,580 milliards de francs au coût des facteurs de janvier 1986 ou de 43,240 milliards de francs au coût des facteurs de janvier 1998.

L'augmentation de l'écart en 1998 est due à la prise en compte des évolutions de la phase de développement intervenues en 1996 et au recalage du programme selon les hypothèses retenues lors de la revue des programmes.

En revanche, le devis de production a baissé entre l'estimation initiale (136,6 milliards de francs CF 01/91) et l'estimation actuelle de 125,1 milliards de francs (CF 01/91).

Les crédits consommés (part Air) s'élèvent à 23,561 milliards de francs pour le développement et à 8,7 milliards de francs pour la production auxquels il faut ajouter la part Marine.

La cinquième campagne d'essais du Rafale sur le porte-avions Foch a eu lieu du 5 janvier au 6 février 1998. Ses objectifs techniques étaient multiples :

· valider le logiciel de commandes de vol dans sa dernière version prototype ;

· ouvrir la configuration à trois réservoirs de carburant et six missiles ;

· consolider les résultats de la première campagne concernant les catapultages sans utilisation du dièdre de pont d'envol (2) ;

· valider certaines modifications techniques apportées à l'avion depuis le dernier embarquement au cours d'opérations de maintenance et de mise en _uvre sur le porte-avions Foch.

A la fin de la campagne technique, l'état-major de la Marine a procédé à une évaluation de l'avion placé dans un contexte opérationnel avec participation de bâtiments de surface et d'aéronefs de la Marine et de l'armée de l'Air.

La quasi totalité des objectifs de cette campagne a été atteinte. Les qualités de vol du Rafale à l'appontage sont aujourd'hui satisfaisantes pour les conditions météorologiques d'emploi envisagées. Il reste à découvrir l'avion dans des conditions d'appontage extrêmes, qui n'ont pas été rencontrées au cours des sorties sur le Foch. Les pilotes évaluateurs n'ont cependant pas formulé d'inquiétude particulière sur ce point. Le comportement de l'avion au catapultage est en effet très sécurisant dans toutes les configurations et ce, avec ou sans dièdre.

La configuration de grande endurance, à trois réservoirs externes de carburant et six missiles air-air, a été ouverte dans les limites de masse permises par les performances des catapultes du porte-avions Foch. C'est seulement au cours du premier embarquement sur le Charles de Gaulle que la configuration sera totalement autorisée à l'emploi.

Placé dans un environnement tactique réaliste, le Rafale M02 a démontré son aptitude aux opérations aériennes à partir du porte-avions. Les modifications du système d'armes demandées au cours des évaluations précédentes ont donné satisfaction. Le taux de disponibilité de l'avion, des moteurs et de ses équipements a été souligné.

Les dernières opérations de vérification des capacités du Rafale à être embarqué sont les suivantes :

· campagnes d'essais et évaluations militaires sur le Charles de Gaulle (1er semestre 1999) ;

· qualification sur la base de Lakehurst (États-Unis) de la barrière d'arrêt d'urgence du porte-avions (fin 2000).

Concurrent direct du Rafale, le programme Eurofighter a abordé récemment une étape décisive avec la signature de l'accord intergouvernemental sur la production de série, le 22 décembre 1997, et de l'accord industriel, le 30 janvier 1998, portant sur le contrat de livraison de 620 appareils pour les quatre pays membres du programme (Allemagne, Royaume-Uni, Italie et Espagne) avec une option d'achat de 90 avions supplémentaires. La signature d'un accord pour la production d'une première tranche de 148 appareils et environ 380 moteurs a été annoncée le 18 septembre 1998 au salon de Farnborough.

Votre Rapporteur rappelle que le développement de l'Eurofighter a été lancé à l'automne 1988 et que le changement de situation géopolitique consécutif à l'effondrement du pacte de Varsovie a conduit les quatre pays partenaires à réorienter le programme, ce qui a eu pour conséquence d'entraîner un glissement de la fin du développement de 1999 à 2002.

Le programme de développement comporte la réalisation et l'expérimentation de sept prototypes de vol et de cinq avions de présérie équipés de leurs instruments de vol. A chaque prototype est affecté un domaine d'essais. La réalisation des différents ensembles pour les prototypes a été partagée entre les industriels afin d'assurer un transfert de technologie complet entre les partenaires.

La répartition du travail en phase de développement est la suivante : Allemagne 33 %, Royaume-Uni 33 %, Italie 21 % et Espagne 13 %.

Le développement de l'Eurofighter est entré dans sa phase finale et les derniers essais (juillet 1998) ont porté sur l'adaptation du moteur EJ 200, sur l'avionique de phase 3, le vol en conditions de hautes températures, l'emport et le largage de réservoirs supplémentaires, le ravitaillement en vol et le vol supersonique avec un leurre remorqué.

Toutefois, avec 475 heures de vol pour 576 sorties, en janvier 1998, l'Eurofighter n'avait pas rattrapé un retard dû, entre autres, aux difficultés rencontrées sur les commandes de vol.

Les premières livraisons devraient avoir lieu en 2001. Entre 2002 et 2010, l'armée de l'Air allemande recevra 180 appareils, le Royaume-Uni 232, l'Italie 121 et l'Espagne 87.

Le coût global des avions, difficile à appréhender, est estimé à 184 milliards de francs (55 milliards de Deutschmark) et celui des moteurs à 42 milliards de francs (12,5 milliards de Deutschmark), étalés sur 20 ans.

La part allemande s'élèverait à 77 milliards de francs (23 milliards de Deutschmark) pour l'industrialisation et la production de 180 appareils. L'équipement complet des avions (armes) pourrait entraîner un surcoût de 11 milliards de francs.

La part britannique s'élèverait à 1,6 milliard de livres pour l'industrialisation et 11,6 milliards de livres pour la production de 232 appareils (incluant le soutien logistique et les moyens d'entraînement et de simulation). 4,3 milliards de livres seraient consacrés au développement de l'appareil.

La part italienne s'élèverait à 48,5 milliards de francs (15.690 milliards de livres), sur 15 ans, pour l'industrialisation et la production de 121 appareils.

E.- L'AVION DE TRANSPORT EUROPÉEN

Le besoin opérationnel d'aéromobilité des armées se décline pour le transport aérien militaire en besoin de projection stratégique inter-théâtres, et en capacité de man_uvre tactique intra-théâtre.

Le premier volet du besoin nécessite de déployer suffisamment vite et loin de la métropole des moyens, pour stopper la dynamique initiale d'un adversaire potentiel, puis d'entretenir le flux de ravitaillement des forces projetées. Seuls des avions cargos possédant de bonnes capacités d'emport et un rayon d'action suffisant sont capables de remplir ces missions logistiques.

La man_uvre tactique intra-théâtre quant à elle, ayant pour objet l'engagement au contact direct des troupes adverses par aéroportage ou aérolargage, suppose l'emploi d'appareils dotés de capacités spécifiques : parachutage¸ poser d'assaut, vol autonome et discret en très basse altitude aptitude à pratiquer des terrains sommairement aménagés ou à survivre en zone de menace.

L'armée de l'Air a exprimé, dès 1984, le besoin d'un avion de transport moderne qui conservera les bonnes capacités tactiques du Transall. En outre, ses capacités logistiques devront permettre de répondre à un besoin nouveau : la projection de matériels lourds et volumineux que la flotte actuelle est incapable d'emporter.

Aujourd'hui, l'armée de l'Air accomplit les missions intra-théâtre au moyen de 66 C 160 Transall dont 46 sont entrés en service entre 1967 et 1973 et 20 en 1981 et de 14 C 130 Hercules entrés en service en 1987/1988, mais c'est à partir de 2004 que la décroissance du parc d'avion de transport C 160 sera la plus sensible.

La multiplication des opérations extérieures a incontestablement eu un impact sur le vieillissement de la flotte car la création d'un pont aérien sur des distances importantes entraîne une utilisation des appareils à des masses élevées ce qui a des répercussions sur la cellule de l'avion (voilure, train d'atterrissage).

L'utilisation intensive du Transall sur des théâtres d'opérations aux conditions climatiques extrêmes a pu aussi accélérer l'usure de la cellule (impacts, corrosion) et des moteurs.

Par ailleurs, un gain de productivité opérationnelle par rapport à la flotte existante est nécessaire dans les domaines suivants :

· dimensions de la soute ;

· charge utile/rayon d'action ;

· vitesse de croisière ;

· autonomie de chargement/déchargement ;

· survivabilité ;

· maintenabilité ;

· capacité de ravitaillement en vol ;

· évolution en ambiance de guerre électronique et de menace infrarouge et/ou électromagnétique.

Ce besoin convergeant avec celui d'autres pays européens, un projet commun d'avion de transport futur (ATF) a ainsi été étudié conjointement par les experts de huit nations : l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la France, l'Italie, le Portugal, le Royaume-Uni et la Turquie.

Ce projet, rebaptisé Future Large Aircraft (FLA), s'est concrétisé par un document commun, la fiche de caractéristiques provisoires approuvée par tous les partenaires du programme en avril 1996.

Les besoins exprimés par les pays participants sont retracés par le tableau ci-après :

NOMBRE D'AVIONS DE TRANSPORT FLA DEMANDÉS
PAR LES PAYS MEMBRES DE LA COOPÉRATION

Pays

Nombre d'avions

Livraison 1er avion

France

50

2004

Allemagne

75

2008

Royaume-Uni

45

2004

Italie

44

2008

Espagne

36

2008

Turquie

20 à 26

2007

Belgique

12

2010

Portugal (observateur)

6 à 9

2010

Total

288 à 297

-

La phase de faisabilité s'est achevée en mai 1995 et avec elle l'existence du consortium EUROFLAG qui réunissait Aérospatiale (France), DASA (Allemagne), British Aerospace (Royaume-Uni), Alenia (Italie), CASA (Espagne), Flabel (Belgique), OGMA (Portugal) et TAI (Turquie).

L'organisation industrielle retenue est fondée sur la création d'une filiale d'Airbus Industrie, Airbus military compagny, permettant de générer des économies par l'utilisation de structures et de centres de compétences existants. Cette société aurait comme actionnaires Airbus Industrie (Aérospatiale, British Aerospace, DASA, CASA) et ses partenaires Alenia, TUSAS et Flabel.

Afin de respecter les principes de l'approche commerciale du programme, le " Statement of principles " exclut la gestion de celui-ci par une agence. Il n'est donc pas envisagé de prendre en compte le programme FLA dans le cadre quadripartite de l'OCCAR.

La France s'étant déclarée favorable en février 1996 à un achat sur étagère, plus conforme aux procédures civiles de type Airbus, une approche à phase unique, de développement-production, a été proposée par l'industrie.

Il n'a donc pas été prévu de financement consacré au développement du FLA dans la loi de programmation 1997-2002. Cela nécessite, pour l'industrie, le recours à un financement de type bancaire qu'il conviendra de rembourser au moment de l'acquisition des aéronefs. Pour s'engager dans cette voie, l'industrie aura certainement besoin d'un engagement ferme de l'État afin de disposer de garanties suffisantes.

Pour étudier plus précisément les possibilités de financement et la capacité de l'État français à formaliser un engagement compatible avec les ressources prévues dans la programmation militaire, le Premier ministre M. Juppé a confié une mission à M. Lelong, Président de chambre à la Cour des comptes.

Un rapport intermédiaire, établi en juin 1997, concluait, entre autres, que le devis pour l'acquisition de 50 appareils serait de l'ordre de 30 milliards de francs dans l'hypothèse du préfinancement de la totalité du développement par des organisations extérieures à la défense, et que le FLA constituait la meilleure réponse en coût-efficacité au nouveau besoin prioritaire de projection de forces dans un contexte national et européen. Il proposait également de participer au financement des travaux préliminaires pour montrer l'intérêt que la France portait à ces études.

Cette dernière proposition s'est concrétisée par le financement public de 50 % de la part d'Aérospatiale, soit à ce jour 50 millions de francs.

La revue de programmes, achevée en mars 1998, a confirmé la stratégie retenue lors de l'élaboration de la loi de programmation militaire et notamment le financement du développement par l'industrie.

Parallèlement, à la demande du Royaume-Uni, une mise en concurrence avec d'autres produits a été organisée et un appel d'offres a été lancé en juillet 1998 pour remise des offres le 31 janvier 1999.

Une première alternative est l'achat d'appareils américains. Les aéronefs disponibles sur étagère sont le C 130J de Lockheed et le C 17 de Boeing-Mc Donnell Douglas.

Cependant, le premier, bien que possédant d'assez bonnes capacités, ne permettra pas l'emport des matériels français futurs, et le second a des capacités tactiques très inférieures à celles du FLA. En effet sa motorisation réduit son aptitude à utiliser des terrains courts non préparés, car le turboréacteur est plus sensible à l'injection de corps étrangers (pierres...) et moins performant qu'un moteur à hélices en terme de longueur de décollage et d'atterrissage.

Par ailleurs, en l'absence de propositions fermes de la part des industriels américains, une estimation fondée sur les informations disponibles permet de penser que l'achat d'une flotte mixte de 48 C130J et 5 C17 générerait un coût d'acquisition équivalent à celui du FLA. Ce coût sera néanmoins affiné après la remise des propositions industrielles en janvier 1999.

Une deuxième alternative est le fruit d'une coopération entre la Russie et l'Ukraine, l'Antonov 70 (AN70). Ce programme a déjà subi un retard de plus de deux années dû à l'accident du premier prototype. Un certain nombre de divergences a été identifié entre la spécification du FLA et l'AN 70, dont certaines sont inacceptables. Des solutions techniques de modifications permettraient de les résoudre, mais les coûts et délais ne peuvent être évalués. Les discussions avec Antonov se poursuivent sous la direction de l'Allemagne avec la contribution d'autres nations dont le niveau de participation reste très limité.

IV.- LES PROGRAMMES DE LA MARINE

Les principaux postes de consommation de crédits d'équipement de la Marine sont retracés par le graphique ci-après.

GRAPHIQUE MARINE

L'évolution des crédits affectés aux principaux programmes est retracée par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DES GRANDS PROGRAMMES DE LA MARINE

(en millions de francs)

 

1998

1999

 

Loi de finances initiale

Projet de loi de finances

 

autorisations de programme

crédits de paiement

autorisations de programme

crédits de paiement

Frégate Horizon

1.088

66

4.107

510

Aéronef de guet embarqué (Hawkeye)

408

994

537

996

Rafale

955

2.151

1.545

1.873

Hélicoptère NH 90

153

136

336

161

Frégate type La Fayette

342

379

367

664

Torpille MU 90

574

162

111

238

Porte-avions nucléaire Charles de Gaulle

394

1.488

497

1.313

A.- LE GROUPE AÉRONAVAL

Le porte-avions à propulsion nucléaire (PAN) Charles de Gaulle sera admis au service actif à la fin de 1999. La décision de lancement de la construction date de 1986, sa mise sur cale de 1989. Il doit être présenté aux essais officiels prochainement si toutefois les " surprises " de dernière minute, qui tiennent à des insuffisances de finition d'équipements classiques, indépendants de la propulsion nucléaire ou des systèmes d'armes, le permettent. On a ainsi constaté de nombreuses déficiences des turbines à gaz, des pompes, des tableaux électriques ou de la climatisation qui, sans être particulièrement inquiétantes, génèrent des retards et des surcoûts.

Votre Rapporteur rappelle que la vitesse maximale du PAN est de 27 n_uds, qu'il dispose d'une autonomie en vivres de 45 jours et qu'il peut mettre en _uvre 35 à 40 avions de la classe 15-20 tonnes par mer de force 6. Selon le ministère de la Défense, le coût total du porte-avions est estimé à 19.283 millions de francs au coût des facteurs de janvier 1997. Ce coût a dérivé de l'ordre de 15 % par rapport au devis initial ce qui s'explique principalement par l'étalement du calendrier résultant des difficultés budgétaires et par le durcissement des normes contre le rayonnement ionisant qui a nécessité la mise en _uvre d'une troisième barrière de protection des installations nucléaires par pose de plaques de métal lourd.

L'équipement de combat du porte-avions compte de nombreux systèmes dont l'architecture et l'intégration constituent un ensemble très complexe. Ces systèmes sont regroupés en trois ensembles :

· le système d'information et de commandement comporte les aides au commandement et à l'emploi des moyens. Il a la capacité de fusionner les données de renseignement d'origine extérieure, qui proviennent des centres de commandement à terre ou de la direction du renseignement militaire (en particulier les informations d'origine spatiale), avec celles qui résultent des missions de reconnaissance du groupe aérien embarqué ;

· le système de direction de combat s'appuie sur le système d'exploitation navale des informations tactiques dont les capacités de traitement permettent l'acquisition et le suivi automatique de deux mille pistes, l'évaluation de la menace selon des critères programmables, la gestion des liaisons de données tactiques, la mise en _uvre coordonnée des senseurs radar, des moyens de guerre électronique et des armes ;

· le système de communication gère l'ensemble des transmissions extérieures, en particulier les liaisons par satellite, ainsi que les réseaux de distribution interne de l'information.

La clé de voûte du dispositif de défense aérienne du groupe aéronaval est le Hawkeye dont le rayon de détection est d'environ 200 nautiques. Équipé de la liaison 16, le Hawkeye augmentera notablement la maîtrise et la circulation de l'information tactique.

Les deux premiers appareils ont été commandés en avril 1995 et seront livrés en décembre 1998 et février 1999. Une lettre d'intention pour la commande d'un troisième Hawkeye a été signée en 1998 pour bénéficier des conditions d'une commande globale de la Marine des États-Unis.

La couche externe de défense est constituée par les intercepteurs Rafale et leurs missiles Mica et Magic. Les Rafales interviennent seuls ou guidés par le Hawkeye, le porte-avions ou une frégate antiaérienne. La première unité de Rafale version air-air sera constituée en 2001 et la flottille sera au complet (10 appareils) en 2002.

A proximité du porte-avions est définie une zone d'engagement par les missiles des frégates de l'escorte, qui représente la deuxième couche de défense. Le positionnement de cet écran varie entre 5 et 60 nautiques du porte-avions, selon la nature et le secteur de la menace. La portée des missiles de défense de zone type TARTAR ou SAMP est de l'ordre de 30 à 50 nautiques.

Enfin, la zone d'autodéfense du porte-avions est couverte par les missiles antimissiles SAAM et SADRAL, dont les portées efficaces sont respectivement de l'ordre de 12 et 4 nautiques.

A terme, l'escorte antiaérienne du groupe aéronaval sera assurée par des frégates du type Horizon qui pourront aussi assurer l'escorte d'un groupe de bâtiments pas armés (force amphibie ou antimines par exemple). Leur système de combat antiaérien reposera sur des missiles Aster à vocation prioritaire antimissiles.

La phase de faisabilité a démarré en juillet 1994 et le lancement du développement et de la construction des premiers de série est attendue pour la fin de 1998 en vue d'une admission au service actif de la première frégate début 2005. Le besoin exprimé par la France est de quatre frégates alors que le Royaume-Uni et l'Italie, partenaires de ce programme, en prévoient respectivement douze et six.

Les frais de définition, développement et construction des bâtiments têtes de série (un par nation) sont partagés en trois parts égales. La part française du devis global pour la livraison de deux frégates est estimée à 12 milliards de francs (CF 1995). Les crédits consommés s'élèvent à 728 millions de francs en crédits de paiement alors que 4.107 millions de francs sont prévus en moyens d'engagement pour 1999. Sur la période 2000-2002, le montant prévisionnel des dépenses est estimé à 3.529 millions de francs.

L'étape suivante consiste désormais à commander un second porte-avions. Cette nécessité est d'autant plus évidente que le désarmement anticipé du Foch en 2000, décidé à l'issue de la revue des programmes, prive la France de son groupe aéronaval dès la première indisponibilité pour entretien du Charles-de-Gaulle. A moins d'une coopération étroite avec le Royaume-Uni dans ce domaine, la France ne disposera pas de capacités aéronavales nécessaires à l'affirmation de son rang si la construction du second porte-avions n'est pas décidée rapidement.

B.- LES AUTRES PROGRAMMES NAVALS ET AÉRONAVALS

L'hélicoptère NH 90 est destiné à remplacer les hélicoptères Lynx à bord de frégates afin d'assurer les missions de lutte anti-sous-marins et anti-navires. Il assurera aussi les missions de transport logistique et de service public assumées actuellement par les Super-Frelon. L'âge moyen des 33 hélicoptères Lynx en parc est supérieur à 17 ans. Ils sont appelés à être retirés du service entre 2003 et 2012.

La signature du contrat de développement du NH 90 remonte au mois de septembre 1992. La signature du mémorandum of understanding (MOU) pour l'industrialisation et la production d'une première tranche devrait intervenir en 1999. Les quatre pays partenaires du programme (France, Allemagne, Italie et Pays-Bas) ont annoncé un besoin de l'ordre de 640 appareils dont 160 pour la France.

La Marine devrait acquérir 27 appareils dont 14 en configuration combat et 13 en configuration soutien. La livraison des 3 premiers appareils devrait intervenir en 2005 ; elle s'échelonnera ensuite jusqu'en 2011 au rythme de 4 appareils par an.

Le coût du développement pour la Défense est estimé à 5.124 millions de francs (CF 01/98) dont 40 % à la charge de la Marine, le solde étant assuré par l'armée de Terre. Le prix unitaire de la version marine est actuellement estimé à 195 millions de francs.

Le lancement de la production de la torpille Murène, devenue en 1991 MU 90, a été effectué en décembre 1997 avec une première commande globale de 300 torpilles de la part de la France et de 200 torpilles pour l'Italie pour livraison en 2001.

Les premiers porteurs seront les F 67 type Tourville à partir de 2001 puis les avions de patrouille maritime Atlantique 2. La MU 90 a vocation à remplacer toutes les armes anti-sous-marines des bâtiments et aéronefs de la Marine à l'horizon 2010. Le coût total du développement s'élève à 3.641 millions de francs (CF 01/98) et le coût d'industrialisation à 484 millions de francs (CF01/98).

Enfin, la frégate type Lafayette n° 4 a commencé ses essais officiels en mai 1998 et sera admise au service actif début 1999, la cinquième et dernière sera admise au service à la mi-2002. Le coût moyen d'une frégate de ce type pour la Défense s'élève à 1.421 millions de francs (CF 01/97).

V.- LES PROGRAMMES DE L'ARMÉE DE TERRE

Les principaux postes de consommation des crédits d'équipement de l'armée de Terre sont retracés par le graphique ci-après.

GRAPHIQUE ARMÉE DE TERRE

L'évolution des crédits affectés aux principaux programmes est récapitulée dans le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS AFFECTÉS AUX PRINCIPAUX PROGRAMMES DE L'ARMÉE DE TERRE

Programmes

Loi de finances initiale 1997

Loi de finances initiale 1998

Projet de loi
de finances 1999

1999-2002

 

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Char Leclerc

1.001

1.862

2.046

2.203

2.335

2.231

6.421

8.447

Hélicoptère de combat Tigre

490

605

840

807

645

871

4.868

3.633

Hélicoptère de transport NH 90

993

698

233

326

474

347

1.111

1.321

Missile sol-air moyenne portée (FSAF)

474

301

395

348

453

283

2.241

1.318

Missile anti-char de courte portée Eryx

335

292

25

177

65

209

132

539

Les principaux programmes de l'armée de Terre ont été maintenus par la revue des programmes à l'exception des capacités anti-char qui ont supporté l'essentiel de l'ajustement. Ainsi la France a-t-elle renoncé à l'acquisition de la mine anti-char Macped de même qu'à l'industrialisation du missile anti-char de troisième génération à longue portée (AC3GLP). Ce missile qui devait équiper l'hélicoptère Tigre sera remplacé par un achat sur étagère.

Au-delà de la période de programmation, les crédits alloués à l'armée de Terre lui permettront cependant de renforcer sa capacité anti-char de courte portée avec la livraison de 600 missiles Eryx en 1999 (2.000 en 1998) et sa capacité anti-aérienne par le développement du programme du missile sol-air moyenne portée FSAF et du système MISTRAL dont 190 exemplaires seront commandés en 1999, ainsi que le perfectionnement de ses systèmes de transmission, grâce à la livraison de 2.344 postes radio de 4ème génération (1.330 en 1998) et à la poursuite de la valorisation du programme RITA.

A.- LE CHAR LECLERC

Les principales étapes de la vie du programme Leclerc peuvent être ainsi récapitulées :

· l'étude de faisabilité a été lancée en juin 1977, pour un successeur du char AMX 30 ;

· de 1979 à 1981, la France et l'Allemagne définissent un programme de développement et de production d'un " char 90 franco-allemand ". La cible française est de 1.400 chars ;

· en 1982, l'Allemagne décide de ne pas poursuivre la coopération engagée. Le ministre de la Défense décide, en décembre 1982, le lancement du programme de " char futur ", purement national. La sortie du premier matériel de série est prévue en 1991 ;

· en 1990, le GIAT devient une société nationale ;

· le premier char est livré en décembre 1991 ;

· en février 1993, les Émirats arabes unis se portent acquéreurs de 390 chars, dont 46 dépanneurs ;

· la production du char est établie pour une cible de 650 chars pour l'armée de Terre, à la cadence de 66 chars par an ;

· l'expérimentation tactique débute en 1994, avec le premier escadron de 13 chars livrés ;

· la loi de programmation 1997-2002 réduit la cible à 406 chars et la cadence de 44 à 33 chars par an.

L'échéancier actualisé des commandes et livraisons est le suivant :

ÉCHÉANCIER DE COMMANDES ET DE LIVRAISONS DU CHAR LECLERC

 

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000/2002

>
2002

Commandes budgétaires

16

10

12

30

66

44

44

44

44

-

44

52

-

Commandes à l'industriel

16

10

12

30

66

-

44

44

-

88

44

52

-

Livraisons

-

-

1

3

11

22

39

16

40

40

33

102

99

Cumul des livraisons

-

-

1

4

15

37

76

92

132

172

205

307

406

Le budget 1998 prévoyait une livraison de 30 chars en 1998. Le rattrapage partiel des retards enregistrés en 1997 conduit à une prévision de 40 chars livrés à la fin de 1998. Au 1er juillet 1998, 135 chars seulement étaient livrés à l'armée de Terre et 189 aux Émirats arabes unis. Le projet de budget prévoit la livraison de 33 chars supplémentaires en 1999.

Le coût total du programme est de 34.361 millions de francs (CF janvier 1997). Les crédits consommés au 31 décembre 1997 s'élevaient à 16.719 millions de francs.

Deux autres programmes sont liés au char Leclerc : le dépanneur et le camion porte-char TRM-700-100 qui constitue, avec sa semi-remorque, l'ensemble porte-blindé (EPB) destiné à augmenter la mobilité stratégique du Leclerc en complément du transport par voie ferrée.

La revue des programmes a conclu à la décision de réduire la cible des EPB et de renoncer à la commande des 100 derniers matériels, ce qui limite l'équipement de l'armée de Terre aux 120 premiers EPB déjà commandés (hors les deux prototypes).

La cible initiale de 302 matériels a donc été ramenée d'abord à 222 matériels (y compris les deux de pré-séries) puis à 122 (y compris les deux pré-série) suite à la revue de programme selon l'échéancier ci-après :

COMMANDES ET LIVRAISONS DES ENSEMBLES PORTE-BLINDÉS

 

Avant 1993

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

Total

Commandes à l'industriel

2

35

-

50

-

35

-

-

122

Livraisons

2

-

-

-

35

46

30

9

122

En contrepartie, l'acquisition de 100 porte-chars de capacité de 40 tonnes a été décidée. Le gain net de cette mesure est de 261 millions de francs entre 1999 et 2002.

Le Leclerc pesant 54,5 tonnes en ordre de combat, cette décision diminue la capacité de projection des blindés lourds. En cas d'engagement de haute intensité, l'armée de Terre devra acheminer ses moyens en plusieurs rotations.

Quant au dépanneur pour char Leclerc, il a été décidé fin 1996 d'acheter sur étagères le dépanneur proposé par GIAT aux Émirats arabes unis. Un contrat a été notifié à GIAT Industries en juillet 1998. Il comprend :

· la livraison fin 1998 et début 1999 de deux dépanneurs et la mise en place d'un premier soutien logistique ;

· la définition du dépanneur de l'armée de Terre (DCL) et de son système de soutien, c'est-à-dire l'adaptation de la définition du dépanneur EAU et des produits logistiques dans le but de satisfaire les besoins de l'armée française sur les plans technique et logistique ;

· la livraison de 30 DCL et la mise en place du soutien logistique associé.

Les DCL seront produits à raison de cinq unités par an et livrés à partir de 2001.

La première tranche (d'un montant d'environ 700 millions de francs), ferme, porte sur les deux premières prestations, treize engins et la majeure partie des produits logistiques. Elle sera suivie de trois autres tranches conditionnelles (d'un montant d'environ 175 millions de francs chacune) portant chacune sur cinq engins.

B.- L'HÉLICOPTÈRE DE COMBAT TIGRE

Le Tigre est un hélicoptère biplace qui a été conçu dès l'origine dans deux versions, la version appui-protection retenue par la France (HAP) et la version anti-char pour les armées de terre française et allemande. Cette deuxième version comporte une variante française (HAC) et une variante allemande (UHT) ayant des capacités d'appui limitées.

Un premier accord bilatéral concernant le Tigre a été signé avec les Allemands en 1984. Il a été amendé fin 1987, date à partir de laquelle les premiers travaux de développement ont pu démarrer. Le premier vol du premier prototype est intervenu en avril 1991. La cellule, le moteur, l'avionique de base et les équipements sont en fin de développement. Le programme Tigre a été intégré dans l'OCCAR en février 1998.

Un accord bilatéral sur l'industrialisation,signé mi-1995, prévoyait le lancement de l'industrialisation fin 1995 sur une base paritaire. Le budget de 1996 et la programmation 1997-2002 ont conduit la France à prévoir le lancement de l'industrialisation en 1997.

Un exercice de révision des spécifications et d'économie sur le programme Tigre a été entrepris. Il a conduit à ne pas retenir certains équipements souhaités par les utilisateurs. Il s'agit d'un détecteur d'alerte et de veille pour la version appui-protection, d'un détecteur d'obstacles, d'un FLIR (forward looking infrared system) de pilotage de nuit pour la version appui-protection, d'une conduite de tir air-air de deuxième génération, d'un système de surveillance des ensembles mécaniques et d'un nouvel équipement de tête intégré. Par ailleurs, une communauté d'équipement avec l'hélicoptère NH 90 a été recherchée dans tous les cas où cela était envisageable.

Les discussions avec les coopérants allemands ont permis d'arrêter les décisions suivantes :

· financement d'une seule chaîne d'assemblage au titre de l'industrialisation au lieu de deux ;

· diminution de 10 % du prix moyen de la part Eurocopter obtenue en contrepartie de quelques évolutions sur le programme et dans le cadre de commandes globales.

Le contrat d'industrialisation a été signé le 20 juin 1997 et l'accord bilatéral sur la production le 20 mai 1998.

Les premiers contrats de série devraient intervenir avant la fin de 1998 pour la commande de 80 hélicoptères pour la France et 80 hélicoptères pour l'Allemagne.

Le modèle d'armée à l'horizon 2015 prévoit 180 hélicoptères armés en ligne. A cette échéance, il s'agira de 120 hélicoptères Tigre et de 60 hélicoptères Gazelle. Ceci correspond, en tenant compte de l'attrition et des besoins de formation, à une cible totale de 215 hélicoptères Tigre.

Les premières livraisons de la version appui-protection sont prévues en 2003 à une cadence de 10 appareils par an à partir de 2005 et avec deux ans de retard par rapport au calendrier défini en 1994. Les livraisons de la version anti-char devraient intervenir à partir de 2011.

Le coût total du programme est estimé à 44.925 millions de francs (CF janvier 1998) pour une série de 215 appareils dans la version française et 212 appareils dans la version allemande. Les crédits consommés au 31 décembre 1997 s'élevaient à 7.067 million de francs.

Votre Rapporteur tient à souligner l'importance de cette commande franco-allemande pour Eurocopter et pour l'ensemble de l'industrie aéronautique européenne. Faute de concrétisation des engagements pris dans un délai raisonnable (il est vrai que les élections en Allemagne n'ont pas contribué à accélérer le calendrier), le Tigre subirait un handicap à l'exportation face à son concurrent direct, l'Apache, alors que de nombreux pays (Turquie, Australie, Espagne, Singapour) ont manifesté leur intérêt pour cet appareil.

C'est à l'occasion d'une évaluation en Australie que le prototype n° 4 du Tigre s'est écrasé à la suite de man_uvres très périlleuses (simulation de tir de nuit) en février 1998. Cet accident, comme l'a montré l'enquête, n'a aucunement remis en question les capacités du Tigre mais plutôt les conditions de sécurité de ce type de démonstration.

C.- L'HÉLICOPTÈRE NH 90

Pour ce qui concerne l'armée de Terre, le NH 90 est un hélicoptère de transport tactique capable de transporter 14 à 20 commandos ou deux tonnes de charge utile ou un véhicule de combat léger.

Le besoin français (armée de Terre et Marine) a été chiffré à 160 appareils contre 243 pour l'Allemagne, 20 pour les Pays-Bas et 219 pour l'Italie.

Le coût du développement est de 5.124 millions de francs (CF janvier 1998) dont 60 % à la charge de l'armée de Terre, le solde étant financé par la Marine. L'estimation de la part française de l'industrialisation est de 1.546 millions de francs (CF janvier 1998) et le prix unitaire de la version transport tactique de 137 millions de francs.

Les crédits consommés au 31 décembre 1997 s'élevaient à 1.982 millions de francs.

Le NH 90 devrait faire l'objet d'un accord d'industrialisation en 1999 ce qui permettrait d'optimiser son lancement sur le marché mondial. Il s'agit d'un hélicoptère composite, comme son futur concurrent américain le Comanche, qui allie des qualités de furtivité et de man_uvrabilité sans commune mesure avec les performances des actuels Cougar. Son prix restant encore élevé, la négociation devrait permettre d'augmenter la part d'autofinancement du programme par les industriels.

VI.- L'ÉQUIPEMENT DE LA GENDARMERIE

Les principaux postes de consommation des crédits d'équipement de la Gendarmerie sont retracés dans le graphique ci-après.

GRAPHIQUE GENDARMERIE

Avec un budget d'équipement de 2.165 millions de francs en crédits de paiement pour 1999, la Gendarmerie est en progression de 3 % par rapport à la loi de finances initiale 1998. Les dotations consacrent d'abord la priorité accordée à l'extension du réseau Rubis qui bénéficiera de 399 millions de francs en crédits de paiement et 158 millions de francs en autorisations de programme.

Votre Rapporteur rappelle que ce réseau de transmission numérique doit progressivement couvrir tous les groupements de gendarmerie. Commencé en 1995, l'équipement des groupements sera achevé à la fin de 2000, 19 groupements seront équipés en 1999 et 12 en 2000. Il est cependant regrettable qu'au motif de raisons techniques liées à la présence de fortes zones de montagnes, le quart sud-est du territoire, soit le dernier à être équipé.

Le coût du programme pour la défense (opérations connexes comprises) est estimé à 3.222 millions de francs (coût des facteurs janvier 1998). Les crédits consommés s'élèvent à 1.932 millions de francs depuis l'origine du programme.

Par ailleurs, le remplacement des hélicoptères de sauvetage et d'intervention (Alouette III) se poursuivra par la commande d'un troisième hélicoptère biturbine (sur un total programmé de 8 appareils) conforme aux nouvelles normes européennes en matière de survol des zones urbaines et de montagne.

Le strict renouvellement des autres catégories de matériels nécessaires au service quotidien sera préservé avec la livraison en 1999 de 1.744 véhicules de brigade, 275 motocyclettes, 1.679 micro-ordinateurs (un pour deux personnes) et la commande de 20 canots rigides.

L'infrastructure, trop souvent variable d'ajustement des réductions budgétaires imposées à la Gendarmerie, bénéficiera des dotations minimales nécessaires à l'entretien d'un patrimoine immobilier qui vieillit. Les subventions d'équipement inscrites au titre VI paraissent toutefois insuffisantes pour mener des opérations d'envergure en partenariat avec les collectivités territoriales dans ce domaine.

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CHAPITRE VI :

LES RESTRUCTURATIONS DE L'INDUSTRIE D'ARMEMENT

L'industrie d'armement française est plongée depuis le début de la décennie dans un processus de restructurations qui n'a pas encore produit tous ses effets. Cette tendance s'est encore accélérée au cours des dernières années du fait des conséquences de la réduction des budgets de défense et des mouvements capitalistiques constatés aux États-Unis.

Si l'exigence de compétitivité n'a épargné personne, pas même les établissements industriels héritiers des anciens arsenaux, elle n'a pas produit les mêmes effets sur les différentes composantes du secteur public.

En effet, les " arsenaux " sont encore dans une phase difficile de transition alors que certaines entreprises publiques du secteur de la défense ont su conclure récemment des alliances qui les ont renforcées dans la perspective de l'émergence probable de regroupements européens.

I.- LA DIFFICILE TRANSITION DES " ARSENAUX "

A.- LA DIRECTION DES CONSTRUCTIONS NAVALES

La Direction des constructions navales (DCN) traverse une période délicate de son histoire qui a commencé il y a quelques années et dont le terme est loin d'être en vue.

La comparaison des devis proposés par l'établissement de Toulon et une entreprise privée pour la réparation du pétrolier ravitailleur " Var " a montré que la DCN n'était pas en mesure d'affronter la concurrence dans des conditions satisfaisantes.

Dans l'unique perspective stratégique qui est la sienne, c'est-à-dire une moindre dépendance vis-à-vis de son " client " historique, et largement captif, la Marine nationale, ce constat est préoccupant. Sans une compétitivité plus affirmée, la DCN ne pourra pas mener à bien son effort de diversification-développement ni bâtir des alliances industrielles solides et valorisantes.

Il appartient à l'État de lui permettre de progresser sur cette voie en lui fixant un cadre, des objectifs et les moyens de les atteindre. C'est le sens du plan d'entreprise qui doit être prochainement arrêté.

Au cours de la période récente, l'État a déjà mis en place de nombreuses réformes ou instruments destinés à alléger les charges de structure de la DCN et à clarifier les responsabilités des uns et des autres.

C'est par exemple le sens de la séparation opérée en 1997 entre la DCN étatique qui doit procéder à l'acquisition des équipements navals militaires, veiller à leur disponibilité et proposer leur renouvellement, toutes activités régaliennes désormais directement financées par le budget de l'État, et la DCN industrielle qui ne garde que l'activité de production et de vente.

De même, l'État a engagé cette année un processus de transfert de charges immobilières de la DCN vers la Marine afin de mieux répartir le financement correspondant à l'affectation réelle de nombreuses installations portuaires et maritimes (bassins, hangars, etc...). Une provision de 343 millions de francs est inscrite à ce titre dans le projet de loi de finances pour 1999.

Enfin, l'accompagnement social de la réduction des effectifs de la DCN repose sur un outil, le Fonds d'adaptation industrielle (FAI) qui est directement financé par le budget de l'État à hauteur de 735 millions de francs en 1999.

Deux points ont plus particulièrement attiré l'attention de votre Rapporteur dans cette bataille menée pour renforcer la productivité de la DCN :

· la difficile adaptation des effectifs au plan de charge ;

· la déficience de ses règles de gestion, constatée lors de l'exécution du contrat " Mouette ".

1.- La délicate adaptation des effectifs au plan de charge

Le plan de charge de la DCN est orienté à la baisse puisque l'activité est passée de 22,1 millions d'heures productives en 1997 à 18,8 millions en 1998 (estimation au 1er juillet) pour une prévision de 17 millions d'heures en 1999. Même si le taux de sous-traitance global a baissé de 32 à 25 % entre 1997 et 1998, la décroissance est flagrante. La DCN s'attend à un creux d'activité pour 2000/2001 et espère une remontée pour les années postérieures.

En termes de chiffre d'affaires, les recettes atteindront en 1998 un total de l'ordre de 11,5 milliards de francs, exportations et recettes de diversification comprises, contre 13 milliards de francs en 1997.

Parallèlement, les effectifs réels en 1998 s'élèvent à 19.065 personnes. Le ratio du chiffre d'affaires par personne est donc très faible (600.000 francs) alors que la référence dans l'industrie d'armement est de l'ordre d'un million de francs et que les chantiers navals de l'Atlantique atteignent 1,1 million de francs par personne. Il appartiendra au plan d'entreprise de tirer les conséquences de cet état de fait, notamment en envisageant une rationalisation de l'outil industriel de la DCN dont la physionomie est retracée par le tableau ci-après.

La DCN est d'ores et déjà engagée dans un processus de réduction d'effectifs dont l'exécution a été plus difficile en 1998 qu'en 1997.

En effet, les effectifs autorisés en 1997, qui diffèrent des effectifs budgétaires du compte de commerce dans la mesure où certains d'entre eux ne sont pas affectés à la DCN, s'élevaient à 19.096 personnes. Les effectifs réalisés étaient de 19.213 personnes, soit un sureffectif global de 117 personnes, constitué d'un sureffectif de 191 postes d'ouvriers et atténué par un sous-effectif de personnels civils non ouvriers.

Malgré les mesures d'âges (414 départs à 55 ans au titre du dégagement des cadres et 225 indemnités de départ volontaire) et le succès en 1997 des mutations dans les armées (720 départs surtout à destination de la Marine), les sureffectifs de postes ouvriers n'ont donc pas pu être totalement résorbés en 1997.

En 1998, les effectifs autorisés étaient de 17.215 personnes. La baisse devrait donc être de près de 2.000 postes par rapport aux effectifs réalisés en 1997. Ces réductions d'effectifs devraient s'opérer sous forme de dégagement des cadres à 52 ou 55 ans (1.360), mutations dans les armées (555) et départs volontaires (80). Il semble acquis que l'objectif ne sera pas tenu, notamment en raison de la parution tardive du décret autorisant les départs à 52 ans (12 mai 1998) et que les sureffectifs de postes ouvriers de la DCN augmenteront. En août 1998, les effectifs réalisés de la DCN étaient encore de 19.065 personnes, soit à peine moins que l'effectif théorique de 1997.

S'agissant de 1999, 1.437 suppressions supplémentaires d'emplois ont été inscrites au compte de commerce de la DCN, ce qui reculera d'autant l'objectif fixé.

RÉPARTITION DES EFFECTIFS DE LA DCN PAR SITE ET PAR FONCTION (situation août 1998)

Établissements

Activités

Soutien/Gestion

Études/Essais

Management de projet/Commercial

Production

Total

Paris

Siège

250

-

65

-

315

DCN Ingénierie (Paris, Toulon)

Conception des navires militaires, intégration de systèmes d'armes

380

740

90

100

1.310

Cherbourg

Constructions des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins, des sous-marins nucléaires d'attaque, des sous-marins classiques

930

495

55

2.100

3.580

Brest

Construction du porte-avions nucléaire et de transports de chalands de débarquement

Entretien et grosse réparation de la Force océanique stratégique et de la Flotte de l'Atlantique

1.175

440

85

3.200

4.900

Lorient

Construction et entretien de navires de surface (frégates)

640

330

70

1.420

2.460

Indret

Maîtrise d'_uvre des systèmes de propulsion, y compris les chaudières nucléaires

375

360

45

600

1.380

Ruelle

Systèmes d'armes, simulateurs, équipements divers (manutentions, appontage, ...)

265

300

55

540

1.160

Toulon

Entretien et modernisation des navires en Méditerranée et des sous-marins nucléaires d'attaque

1.080

100

45

2.450

3.675

Papeete

Maintien en service et entretien des navires du Pacifique

90

-

-

195

285

Total

 

5.185

2.765

510

10.605

19.065

En 1997, les 1.600 départs de la DCN, accompagnés du recrutement de 14 cadres, se sont traduits par une diminution de 7,8 % de sa masse salariale. Elle était de 4.123 millions de francs (non compris le coût des dégagements des cadres financé par le Fonds d'adaptation industrielle), répartie en 773 millions de francs pour le personnel d'encadrement et 3.350 millions de francs pour le personnel de première catégorie (ouvriers, fonctionnaires niveau III, non titulaires niveaux II et III). La masse salariale moyenne du personnel d'encadrement était de 260.000 francs et celle du personnel de première catégorie de 200.000 francs.

La part du personnel ouvrier représentait 65 % de la totalité de la masse salariale.

2.- Les leçons de l'exécution du contrat " Mouette "

Au-delà de ses sureffectifs et de l'insuffisante rationalisation de son outil industriel, la DCN souffre de graves déficiences de ses méthodes de gestion qui ont été mises en évidence lors d'une enquête conjointe de l'Inspection générale des finances et du Contrôle général des armées consacrée à l'exécution du contrat " Mouette ".

Le contrat " Mouette " porte sur la révision (carénage) de quatre frégates et de deux pétroliers ravitailleurs vendus à l'Arabie Saoudite en 1980 dans le cadre du contrat Sawari I. Ce contrat date de 1994 et son exécution par le site de Toulon s'étendra jusqu'au début de 2000.

Son montant était de 3,150 milliards de francs. La perte générée par ce seul contrat a été estimée en février 1998 à 1,2 milliard de francs, soit 38 % de la facturation. Encore cette estimation est-elle provisoire puisque l'exécution du contrat n'est pas achevée et que, par exemple, le conflit social du printemps 1998 à Toulon a entraîné un surcoût de 40 millions de francs résultant de décalage du carénage des bâtiments concernés par le contrat Mouette.

Les deux tiers (800 millions de francs) de la perte sont imputables aux positions prises par la DCN durant les négociations préalables au contrat, le dernier tiers (400 millions de francs) relevant de son exécution proprement dite.

La DCN a tout d'abord fait preuve d'un manque de professionnalisme étonnant tout au long de la négociation, depuis la précipitation avec laquelle elle a adressé son premier devis jusqu'à la légèreté de la rédaction des clauses finales du contrat.

Malgré le recours à de nombreux contractuels bien rémunérés, le défaut de compétences dans ces domaines est flagrant. Elle n'a pas su non plus coordonner les positions prises par son établissement de Toulon et celle de la société DCN International, créée en 1991 afin d'assurer la commercialisation des produits de la DCN et le suivi des contrats signés.

Dans un rapport particulier datant du 28 novembre 1997 et consacré à cette entreprise, la Cour des Comptes a d'ailleurs souligné les conditions très contestables de création et d'activité de cette société au regard des textes qui sont applicables à la DCN en sa qualité d'administration de l'État.

La Cour a ainsi relevé que l'insuffisante dotation en capital initiale de cette entreprise avait conduit la DCN à mettre en place un financement inadapté, sous forme d'un pseudo-marché d'un montant de 137 millions de francs, dont les signataires auraient été passibles de la Cour de discipline budgétaire et financière sans la prescription dont les faits étaient l'objet puisqu'ils remontaient au 3 septembre 1991. La Cour a ensuite énuméré la liste des pratiques litigieuses qui consistaient à imputer à DCN International des frais et des charges refacturés ensuite à DCN alors que le statut de la DCN ou bien lui interdisait de financer ce type de dépenses (personnel employé sur des sites étrangers) ou bien les soumettait au visa du contrôleur financier (frais de mission des agents de la DCN à l'étranger).

En l'espèce, lors de la négociation du contrat Mouette, DCN International n'a pas démontré de manière évidente l'acuité des compétences qu'elle était censée mettre au service de la DCN. Elle a toutefois su préserver ses intérêts puisque l'exécution du contrat Mouette ne se solde pas par une perte pour elle, pas plus que pour sa filiale DCN Log qui assure la logistique du marché et dont l'intervention s'est notamment traduite par des achats de pièces détachées très supérieurs aux besoins du marché, aboutissant à un surplus de l'ordre de 75 millions de francs.

Au terme du processus de négociation qui a aussi subi les conséquences désastreuses d'interventions extérieures à la DCN, le marché était très mal engagé puisque celle-ci avait consenti un prix beaucoup trop bas et qu'elle l'avait de surcroît assorti d'une clause de forfaitisation qui lui imputait toute la charge du risque et des aléas de l'exécution.

C'était d'autant plus dangereux que la définition des travaux à faire était imprécise, que le prix finalement proposé avait fait disparaître toute réserve technique pour financer d'éventuels travaux supplémentaires et que les méthodes de travail du client saoudien n'étaient pas celles du client habituel de la DCN, la Marine nationale, ce qui était aisément prévisible.

On peut supposer alors que la négociation de Mouette doive être resituée dans le contexte global des relations avec l'Arabie Saoudite et relever qu'elle était menée à peu près au même moment que la négociation sur la fourniture de nouvelles frégates dans le cadre du contrat Sawari II, signé en 1995 et étendu en mai 1997.

Ce raisonnement serait recevable à condition de prouver que le lien a bien été fait entre les deux contrats dans le cadre d'une négociation préalable, preuve qui n'a pas été apportée jusqu'à présent. Ceci supposerait aussi que la DCN soit en mesure de calculer de manière assez fine sa marge prévisible sur l'exécution de tels contrats, afin d'ajuster ses positions de négociation, ce qu'elle n'est pas en état de faire pour une raison simple, elle ne connaît pas ses coûts consolidés, faute d'une comptabilité analytique digne de ce nom.

Enfin, ceci n'excuse pas le dérapage supplémentaire lié à l'exécution même du contrat.

En acceptant de forfaitiser ses prestations, la DCN a gravement sous-estimé les aléas et les charges de toutes sortes liées à l'exécution du contrat.

Tétanisée par les clauses de la forfaitisation, elle n'a pas cherché à renégocier ou à facturer des prestations pour travaux supplémentaires au fur et à mesure que le déficit du contrat se creusait. Les responsables ont-ils véritablement répondu aux devoirs de leur charge dans cette affaire ? A vrai dire, le pouvaient-ils ?

Au moment où l'exécution du contrat Mouette approche de son terme, aucune réelle action de réduction de coût n'a été véritablement entreprise, ni sous forme de négociation avec le client, ni sous forme de mutualisation des pertes avec quelques uns des partenaires de la DCN (dont certains appartenaient à la sphère publique) qui ont su, eux, garantir leurs marges sur l'exécution de ce contrat.

Aucune sanction n'a été prise à l'encontre des maillons les plus élevés d'une longue chaîne de responsabilité.

Votre Rapporteur n'est absolument pas en mesure de constater que les réformes qui s'imposent à la suite de ce sinistre aient été menées à la DCN, que ce soit sur le plan du management, des procédures ou des outils comptables. Il ne peut donc exclure la perspective d'autres foyers de perte dans le domaine de l'exportation ou du développement. Il faut aussi préciser que la structure du compte de commerce ne permet pas de compenser comptablement les pertes générées par un contrat par les gains d'un autre contrat, situation que la DCN a connue dans un passé récent.

Si la DCN souhaite véritablement occuper des positions durables à l'exportation, et son succès dans le domaine des sous-marins montre qu'elle est capable de convaincre technologiquement et commercialement, il lui faudra améliorer considérablement ses modes de gestion internes, sous peine de mettre en péril l'ensemble de l'outil industriel dont elle dispose.

Une réforme profonde, globale, immédiate de la DCN s'impose. Vérité, concertation, pragmatisme, ces trois exigences devront guider les pas des acteurs de cette nécessaire mutation.

B.- LE SERVICE DE MAINTENANCE AÉRONAUTIQUE

Le service de maintenance aéronautique (SMA), organisé en compte de commerce comme la DGN, connaît une plus grande stabilité comme le montre l'évolution de son plan de charge.

ÉVOLUTION DU PLAN DE CHARGE DU SMA

(en milliers d'heures)

Ateliers industriels de l'aéronautique

1997
(réalisés)

1998
(estimés)

1999
(prévus)

Bordeaux

947

932

962

Clermont-Ferrand

1.155

1.170

1.161

Cuers-Pierrefeu

947

955

963

Total

3.049

3.057

3.086

L'évolution de son chiffre d'affaires par catégorie de clients est retracée par le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DU CHIFFRE D'AFFAIRES PAR CATÉGORIE DE CLIENTS (1)

(en millions de francs)

 

1997
(réalisés)

1998
(estimés)

1999
(prévus)

Air

929

954

960

Marine

547

548

550

Terre

68

53

55

DGA et divers budgétaire

64

106

100

Non budgétaire

63

106

105

Total

1.671

1.767

1.770

(1) Le chiffre d'affaires ne comprend pas le prix des rechanges utilisées pour les prestations du SMA, rechanges mises à disposition sur stock de l'État. L'intégration de cet élément dans le chiffre d'affaires augmenterait celui-ci d'environ 900 millions de francs par an.

Ce tableau montre que la progression du chiffre d'affaires prévue en 1998 (+ 5,7 %) émane de la DGA mais aussi des clients extérieurs au ministère de la Défense.

Si la mission première du SMA est de fournir, aux meilleures conditions économiques et techniques, la prestation de maintenance aéronautique sur les matériels des forces armées françaises, la baisse à terme de l'activité du secteur de la réparation des matériels aéronautiques militaires (diminution du format des armées, amélioration de la fiabilité et modularité croissante des matériels) nécessite la recherche d'un complément d'activité pour le maintien d'un outil industriel performant.

Cette recherche de complément de charge d'activité se fait auprès de clients non budgétaires, en partenariat avec les industriels français du secteur (constructeurs et principaux équipementiers).

Cette prise de compétences nouvelles est importante puisqu'elle devrait permettre :

· de contribuer à la réduction des coûts du SMA par l'élargissement de la prise en compte de ses charges de structure ;

· d'apprécier la compétitivité des prestations du SMA sur un marché concurrentiel ;

· de favoriser le développement des exportations d'aéronefs neufs par une meilleure présence dans la maintenance des matériels français vendus à l'exportation.

Sur le plan des marchés, l'action est orientée vers les clients étrangers de matériels aéronautiques français dont la maintenance n'est plus aujourd'hui effectuée par des entreprises françaises du secteur.

Les principaux contrats en cours de réalisation portent sur la révision de moteurs Atar pour le Brésil en coopération avec SNECMA et pour la Colombie en association avec Amio, la maintenance de Mirage III pour le Brésil en coopération avec Amio, la révision de moteurs Gem (moteurs de l'hélicoptère Lynx) pour le Royaume-Uni avec Turboméca et les grandes visites de Mirage III (y compris moteurs et équipements) pakistanais en partenariat avec Sagem et Sogerma (contrat Blue Flash 6).

En 1997, 117 millions de francs de commandes ont été notifiés, soit l'équivalent de 7 % de la charge annuelle en régime établi.

En 1998, pour un objectif annuel maintenu à 120 millions de francs, les prises de commandes obtenus fin juillet s'élèvent à 60 millions de francs.

Compte tenu de ces différents éléments, les réductions d'effectifs budgétaires du SMA sont limitées. Elles sont estimées à une déflation annuelle moyenne de 50 ouvriers entre 1997 et 2002. Le SMA comptait ainsi un effectif budgétaire de 3.637 en 1997 pour une prévision de 3.287 personnes en 2002.

S'agissant des effectifs réalisés, le tableau ci-après montre que le SMA est en sous-effectif de 68 ouvriers.

EFFECTIFS DU SMA

Catégories de personnel

Effectifs budgétaires du compte de commerce

Effectifs autorisés

Effectifs réalisés au 30 juin 1998

Écarts
effectifs réalisés  / effectifs autorisés

Niveau I

311

285

274

- 11

Niveau II

497

446

446

0

Niveau III

221

168

159

- 9

Statut ouvrier

2.458

2.611

2.543

- 68

Total

3.487

3.510

3.422

- 88

Les effectifs autorisés diffèrent des effectifs budgétaires car ils prennent en compte les personnels participant directement à l'exécution des tâches du SMA dans une logique économique et industrielle, ce qui exclut, par exemple, les personnels affectés au Centre d'expérimentations pratiques de l'aéronavale.

La masse salariale du SMA passera de 780 millions de francs en 1998 à un montant estimé de 840 millions de francs en 1999 (+ 7,7 %) qui prend en compte l'augmentation du taux de cotisation patronale pour les pensions des ouvriers (de 10,3 % à 24 % pour une incidence de 43 millions de francs). Le coût des mesures de restructuration (dégagements des cadres à 55 ans) devrait s'établir à une quarantaine de millions de francs dans les charges du compte de commerce en 1999, contre 54 millions de francs prévus en 1998.

C.- LE GROUPE GIAT INDUSTRIES

Depuis sa création en 1990, l'histoire du groupe GIAT Industries aura été ponctuée d'échecs industriels, de réductions d'activité et de mauvais résultats financiers. Malgré le succès commercial du contrat émirati en mars 1993 dont il n'a pas su gérer l'accompagnement financier, il faut bien admettre que le groupe n'a pas été en mesure de démontrer sa viabilité ces dernières années.

La transformation d'un arsenal en une entreprise dotée d'un compte de résultat qui reflète directement la réalité des chiffres au moment même où la crise de l'activité d'armement terrestre éclatait et produisait peu à peu ses effets, était une démarche nécessaire mais audacieuse.

La transition est longue, coûteuse pour les finances publiques et difficile pour le personnel dont les effectifs diminuent au fil des plans stratégiques.

Devant la dégradation des paramètres qui conditionnent l'activité du GIAT, un nouveau plan d'ajustement douloureux a été rendu nécessaire.

1.- Des perspectives très sombres

Les prévisions du plan de charge interne du GIAT sont retracées par le tableau ci-après.

PRÉVISIONS DU PLAN DE CHARGE

(en milliers d'heures directes)

 

1998

1999

2000

2001

2002

Plan de charge

3.948

3.326

2.574

2.345

2.388

Dès 1999, l'activité du GIAT baissera de près de 16 %, elle continuera de baisser jusqu'en 2001, date à laquelle elle atteindra à peine 60 % de la charge de production industrielle de 1998.

Ceci se traduit directement dans les prévisions de chiffre d'affaires avec un an de décalage, comme le montre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DU CHIFFRE D'AFFAIRES DE GIAT

(en milliards de francs)

 

Réalisations (1)

Prévisions

Années

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Chiffre d'affaires

8,1

7,3

5,8

4,8

5,3

6,1

6,7

6,7

9,3

7,1

5

6,3

(1) hors filiales étrangères.

Après 1999 et les derniers effets du contrat émirati, GIAT verra son chiffre d'affaires descendre jusqu'en 2001, date à laquelle il atteindra 5 milliards de francs, soit à peine plus que le creux de 1994 qui avait conduit au montant historique de pertes de 1995 (10 milliards de francs).

Ces chiffres, qui reposent pourtant sur certaines hypothèses extrêmement optimistes, traduisent la crise observée sur les principales activités de GIAT.

a) L'activité blindée

En matière de char de bataille, la perspective à moyen terme est une décroissance forte du marché mondial sous l'effet de l'achèvement des programmes de rééquipement des grands pays de l'OTAN, des restrictions budgétaires qui poussent de nombreux pays à moderniser les matériels existants plutôt qu'à acheter du neuf, de l'abondance du matériel d'occasion qui suffit à certains pays, et surtout de la révision des concepts d'emploi des chars de bataille du fait de l'évolution géostratégique.

Sur un marché en baisse, GIAT compte des concurrents solides qui bénéficient de marchés captifs. Ainsi, le Leclerc est-il actuellement vendu à 796 unités (390 pour les Émirats Arabes Unis et 406 pour la France) contre 3.000 pour le Léopard 2 de Krauss Maffei (Allemagne) qui l'a vendu aux Pays-Bas, à la Suisse, la Suède, l'Autriche et l'Espagne, 400 pour le Challenger 2 de Vickers (Grande-Bretagne) vendu à Oman et 10.000 pour l'Abrams M1 de General Dynamics (États-Unis) vendu en Égypte, Arabie Saoudite et au Koweït. On peut d'ailleurs noter que devant la faiblesse des perspectives sur ce marché, le groupe britannique Vickers vient d'annoncer la suppression de 1.136 postes (22 % de ses effectifs) et la fermeture d'une de ses deux usines de production de chars.

Le contrat émirati s'achève en 2000. GIAT compte sur le marché saoudien pour prendre la relève. Dans ses perspectives de chiffres d'affaires, il a intégré une commande d'une brigade sur les deux proposées à l'appel d'offres, soit 175 chars et 20 dépanneurs livrables à partir de 2001. Sans ce contrat, dont l'issue devrait être connue en 1999, c'est l'ensemble du plan stratégique qui devrait être reconsidéré puisque son impact est estimé à 800 millions de francs pour 2001 et 2,7 milliards de francs en 2002 en termes de chiffres d'affaires et à 2.000 personnes en termes d'emploi.

En tout état de cause, GIAT devra éviter de remporter un marché de chars de bataille dans les conditions accordées aux Émirats Arabes Unis puisque votre Rapporteur rappelle que ce contrat devrait se solder par une perte à terminaison de l'ordre de 7 milliards de francs, soit 17,5 millions de francs par char.

Quant au segment blindés légers, il englobe les chars légers (châssis et tourelles), le transport de troupe ou de combat d'infanterie.

La perspective est aussi à la décroissance pour les mêmes raisons que les chars lourds, peut-être dans une proportion plus mesurée car les blindés d'infanterie répondent à un profil d'emploi opérationnel plus large que les chars. La part actuelle de GIAT est faible et elle a été parfois acquise au prix de pertes très élevées. GIAT a ainsi vendu des tourelles d'appui feu d'infanterie Dragon (calibre 25 mm) à la Turquie dans des conditions financières étonnantes (700 millions de francs de pertes pour un contrat de 400 millions de francs).

Les conditions de participation de GIAT au programme de véhicule blindé de combat d'infanterie à roues (VBCI) ne sont pas encore arrêtées. Si cette participation peut être encore rattrapée, on ne peut que s'interroger sur la méthode qui a été suivie pour aboutir à une situation aussi défavorable. Ce programme est au stade final des études de faisabilité et devrait être réalisé en coopération avec l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Toutefois, les premières livraisons à l'armée de Terre ont été repoussées de 2002 à 2004 et l'organisation industrielle du programme n'est pas finalisée.

Votre Rapporteur ne peut envisager une coopération européenne dans ce domaine si le partage industriel du programme ne respecte pas les aspirations légitimes de GIAT (au moins 30 % du volume d'affaires tant en matière de développement que de fabrication).

b) Les armes et les munitions

Le marché mondial des armes et munitions est en pleine récession. Il est passé de 30 milliards de francs en 1994 à 20 milliards de francs en 1997.

L'artillerie souffre de la réduction généralisée des parcs de canons dans les pays occidentaux. Le taux de remplacement est de l'ordre de un pour deux pour les automoteurs et très faible pour les canons tractés. Les programmes de modernisation des matériels existants augmentent leur durée de vie. Pour les matériels de 155 mm se situant à mi-chemin des tractés et des automoteurs, transportés sur châssis camion, GIAT dispose d'un créneau avec le système Caesar qui pourrait trouver des débouchés à l'exportation.

La réduction généralisée du format des forces oriente à la baisse les segments du moyen calibre, de l'infanterie (armes légères), du génie et des systèmes de protection. Les applications sur hélicoptères connaissent cependant une évolution importante dans le moyen calibre. L'armement canon en tourelle y reprend de l'importance et GIAT a acquis sur ce créneau une compétence remarquable grâce au développement de la tourelle de 30 mm THL 30 pour l'hélicoptère Tigre.

c) Les activités nouvelles

Le plan stratégique en discussion au GIAT se signale par une grande prudence, voire une certaine pusillanimité dans ses perspectives de développement de nouvelles activités. L'absence d'une pensée industrielle suffisamment lisible y est regrettable. Il est vrai que dans un passé récent, le GIAT s'est engagé dans des entreprises de diversification peu soutenues commercialement. Il n'en reste pas moins qu'un objectif de 200 millions de francs de chiffre d'affaires sur les nouvelles activités en 2002 pour une charge industrielle complémentaire de 6 % en fin de plan est peu ambitieux au regard de la contraction attendue des activités sur les métiers de base du GIAT.

Si les pistes envisagées sont intéressantes (grands projets scientifiques, pyromécanismes, réservoirs de gaz pour l'automobile, équipements ferroviaires et électroniques, aéronautique), elles dépendent pour la plupart de partenariats dont on attend la concrétisation.

En tout état de cause, elles ne sont pas de nature à répondre, à elles-seules, à l'ampleur de la baisse d'activité attendue du GIAT. Par ailleurs, on voit mal comment GIAT pourrait progressivement s'imposer comme systémier dans le domaine de l'armement terrestre face à des électroniciens dont la valeur ajoutée est supérieure. Cette remarque concerne peu ou prou tous les producteurs de plate-forme.

2.- Un plan stratégique douloureux

L'analyse du contexte régissant les activités de GIAT a conduit à mettre en place un nouveau plan stratégique, particulièrement douloureux en termes de réduction d'effectifs et de rationalisation de l'outil industriel.

a) Les réductions d'effectifs

Le projet de plan prévoit une réduction d'effectifs de 4.000 personnes, soit 37 % de l'effectif actuel, selon le calendrier suivant :

CALENDRIER DU PLAN DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS

Années

1998

1999

2000

2001

2002

Effectifs

10.702

9.130

7.585

6.940

6.700

Il repose sur une analyse de l'évolution des différents métiers retracée par le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DE L'EMPLOI PAR CATÉGORIE SOCIO-PROFESSIONNELLE ET MÉTIER

 

Référence 31 mai 1998

Besoins au 31 décembre 2002

 

Total

I C (1)

Etam (2)

Ouvrier

Total

I C (1)

Etam (2)

Ouvrier

Services commerciaux

185

121

64

0

95

79

16

0

Services de direction

194

100

89

5

122

77

42

3

Finances et gestion

382

100

282

0

175

49

126

0

Informatique

245

75

165

5

130

39

91

0

Qualité

427

107

212

108

180

63

86

31

Ressources humaines

392

99

259

34

202

66

120

16

Achats

150

64

85

1

102

45

34

23

Programmes et R&D

1.687

707

865

115

1.239

614

550

75

Production

5.380

203

1.426

3.751

2.654

107

509

2.038

Soutien logistique

512

136

304

72

772

231

463

78

Moyens communs

630

49

288

293

189

16

94

79

Expatriés

7

7

0

0

40

28

12

0

Sofred

26

18

8

0

27

17

10

0

Personnel mis à disposition

99

15

44

40

80

11

30

39

Personnel non à disposition et en formation

386

45

180

161

693

70

283

340

Total

10.702

1.846

4.271

4.585

6.700

1.512

2.466

2.722

(1) I C : ingénieurs et cadres.
(2) Etam : employés, techniciens et administratifs.

On constate l'ampleur de la réduction envisagée du dispositif de production dont les effectifs seront divisés par deux (2.726 réductions d'emploi sur le total de 4.000) et l'ajustement d'un certain nombre de fonctions qui y sont reliées (moyens communs, qualité). Les fonctions administratives ne sont pas épargnées (finances et gestion, ressources humaines). L'accroissement de la fonction logistique correspond à une volonté de promouvoir cette catégorie de marché, notamment à l'exportation.

La structure par catégorie socio-professionnelle n'est pas bouleversée même si la part des ingénieurs et cadres progresse (de 17 % à 22,5 %) alors que celles des employés, techniciens et administratifs (40 % à 37 %) et des ouvriers (43 % à 40,5 %) baissent.

Les modalités concrètes des départs des personnels concernés par ce plan feront appel à l'ensemble des mesures envisageables (dégagement des cadres à 52 ans jusqu'au 31 décembre 2002, à 55 ans au-delà, départs naturels, départs volontaires indemnisés, reclassements notamment dans les emplois offerts par la Défense, etc.).

Ces mesures sont actuellement l'objet de discussion avec les partenaires sociaux. Votre Rapporteur se contentera de souligner la nécessité d'organiser et de promouvoir la solution des reclassements vers la Défense, compte tenu des vacances de postes des civils qui y sont constatées (cf. supra). Entre 1994 et 1997, 615 salariés de GIAT ont ainsi rejoint la Défense. Les prévisions pour 1998 sont de 230 personnes. Le nouveau plan pourrait concerner 700 personnes supplémentaires entre 1999 et 2002.

b) La rationalisation de l'outil industriel

Le tableau ci-après récapitule les options du plan stratégique en matière de rationalisation des principaux sites et de répartition géographique des réductions d'effectifs.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS PAR SITE PROPOSÉE PAR LA DIRECTION DANS SON PROJET DE PLAN STRATÉGIQUE (JUILLET 1998)

Centre

Département

Activité principale

Situation 1998

Besoins au
31 décembre 2002

Bourges

Cher

Études, développement, production artillerie

1.220

746

Le Mans

Sarthe

Munitions de petit calibre

131

0

Rennes

Ille-et-Vilaine

Shelters, douilles gros calibre

271

0

Roanne

Loire

Fabrication, intégration, recette de chars et véhicules blindés, soutien logistique

1.831

1.201

Salbris

Loir-et-Cher

Munitions de gros calibre

164

0

Satory

Yvelines

Directions centrales, bureau d'études blindés, soutien logistique

1.247

1.175

Saint-Chamond

Loire

Véhicules blindés légers, tourelles légères et équipements Leclerc

747

540

Siège

   

256

253

Saint-Étienne

Loire

NBC, mécanique, armes petit calibre, optique

602

64

Tarbes

Hautes Pyrénées

Fabrication, intégration de tourelles de chars, éléments de projectiles pour munitions, composants pyrotechniques

1.526

885

Toulouse

Haute Garonne

Électronique

763

466

Tulle

Corrèze

Armes de moyen calibre

828

500

GIAT estime que ses sites industriels sont aujourd'hui trop nombreux et surdimensionnés par rapport à l'activité de l'entreprise, ce qui pèse lourdement sur ses comptes et nuit à son efficacité industrielle. Il est envisagé la fermeture de trois, le cas échéant quatre, des quatorze sites actuels du groupe. Les activités résiduelles seraient transférées sur d'autres sites et restructurées pour assurer leur viabilité économique.

GIAT souhaiterait également effectuer des regroupements et des rationalisations intersites, pour rassembler des compétences industrielles et réduire les coûts de structures : regroupement des activités NBC et mécanique de Saint-Étienne sur le site de Saint-Chamond, regroupement des fabrications de munitions de gros calibre dans le site de La Chapelle (à partir de transferts d'activités de Salbris, Tarbes et Cusset), regroupement de l'activité d'armes de petit calibre à Tulle (à partir d'un transfert d'activité de Saint-Étienne), le cas échéant regroupement des activités pyrotechniques de Cusset sur le site de La Chapelle. Les effectifs du coûteux siège de Satory ne seraient, par contre, réduits que de manière symbolique (trois postes).

Ce plan dit " stratégique " dont les perspectives industrielles demeurent relativement floues aux observateurs les plus avisés est fort mal vécu par les personnels.

c) L'hypothétique retour à l'équilibre financier

L'application du plan stratégique dans les conditions précisées ci-dessus permettrait un retour du GIAT à la rentabilité financière. La marge opérationnelle passerait ainsi de - 800 millions de francs en 1998 (presque 12 % du chiffre d'affaires) à - 600 millions de francs en 2001 pour sortir du rouge en 2002.

Ce retour à un résultat positif suppose que les hypothèses retenues dans les estimations de chiffre d'affaires soient validées.

Par ailleurs, la longue série de résultats négatifs du GIAT a considérablement fragilisé la situation de ses fonds propres, malgré les recapitalisations successives du groupe par l'État.

RÉSULTAT NET DE GIAT

(en milliards de francs)

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

- 0,4

- 0,5

- 1,3

- 2,9

- 10

- 0,17

- 3,46

Votre Rapporteur rappelle que le GIAT a été recapitalisé à hauteur de 11,7 milliards de francs en deux ans (3,7 milliards de francs en avril 1996, 3,7 milliards de francs fin 1997 et 4,3 milliards de francs en février 1998).

La décision de l'État d'imputer la charge du plan social (3 milliards de francs) sur l'exercice de 1997 conduit à une situation nette négative de l'ordre de 5,5 milliards de francs à la fin de 1998 et nécessitera une augmentation de capital de 7 milliards de francs afin de respecter la loi sur les sociétés commerciales qui oblige l'actionnaire à recapitaliser l'entreprise lorsque ses fonds propres passent en dessous de la moitié du capital social.

Le plan stratégique est censé permettre à GIAT d'affronter la récession qui s'annonce dans ses activités de base et de rétablir sa rentabilité. C'était déjà l'objectif du précédent plan de retour à l'équilibre. S'il est nécessaire de renforcer GIAT, dans la perspective des prochaines alliances européennes, il ne faudrait pas que ce processus dure trop longtemps, sous peine de condamner GIAT à un isolement dangereux alors que les restructurations s'annoncent rapides (voir le rapprochement entre GKN et Alvis dans les blindés au Royaume-Uni), du fait de la crise de l'armement terrestre et du grand nombre d'opérateurs encore présents sur le marché européen.

II.- LA CONSTITUTION DE " CHAMPIONS " NATIONAUX

L'année dernière, le sentiment dominant en Europe et particulièrement en France au sujet des restructurations de l'industrie d'armement, était le scepticisme, voire le pessimisme. On avait coutume d'opposer le dynamisme des États-Unis où les fusions et acquisitions se succédaient à un rythme effréné, à l'immobilisme de l'Europe. La situation particulière de notre pays, avec les échecs et les palinodies de la privatisation avortée de Thomson-CSF, ne pouvait que renforcer cette impression d'impuissance. Il n'en va plus de même un an plus tard. Incontestablement, le rapport des forces a évolué.

Aux États-Unis, le processus s'est ralenti, voire enrayé. Le Pentagone a ainsi interdit la fusion de Lockheed Martin et de Northrop Grumman au nom de la préservation de la concurrence. Les énormes groupes constitués dans la décennie 1990 marquent le pas et éprouvent quelques difficultés à " digérer " certaines acquisitions. Les rationalisations s'opèrent parfois douloureusement sous la surveillance des actionnaires. Des redondances apparaissent là où elles n'étaient pas attendues. Les plans de suppressions d'emploi se multiplient. D'ici la fin de 1999, Raytheon va par exemple réduire de 16 % sa main d'_uvre.

Inversement, l'Europe a trouvé un nouvel essor à la suite de la déclaration commune des chefs de gouvernement de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni en date du 9 décembre 1997 qui a permis de donner le véritable départ d'un processus de restructuration du secteur de grande ampleur.

Sur un plan intérieur, l'industrie d'armement française s'est renforcée en un temps record grâce à la constitution de véritables champions nationaux en mesure de peser dans les rationalisations européennes qui s'annoncent.

A.- LA RESTRUCTURATION DU CAPITAL DE THOMSON-CSF

La restructuration du capital de Thomson-CSF a été menée avec une efficacité qui tranche avec les échecs précédents. Le rappel de ses principales étapes en témoigne.

Le 13 octobre, le Gouvernement décidait de constituer un grand pôle d'électronique professionnelle et de défense centré sur Thomson-CSF et doté d'un actionnariat public déterminant. L'objectif d'une telle démarche était de construire un groupe ouvert à des alliances ultérieures, françaises et européennes, afin de répondre à l'accroissement de la compétition dans le domaine des industries de défense. Le renforcement industriel devait s'effectuer par voie d'apports.

L'accord de coopération signé le 14 avril 1998 par Thomson-SA, Thomson-CSF, Aérospatiale, Dassault Industries et Alcatel traduisait cette intention de manière très concrète.

Cet accord établissait un partenariat stratégique entre les sociétés Alcatel Alsthom et Thomson-CSF avec, notamment, la mise en _uvre d'une très large coopération en matière de recherche et de développement et un accès réciproque aux droits de propriété industrielle afférents aux résultats permettant de dégager des synergies entre les applications militaires et civiles de l'électronique.

Il précisait les modalités de la coopération industrielle entre Alcatel Alsthom, Dassault Industries, Aérospatiale et Thomson-CSF dans les activités d'électronique professionnelle et de défense relevant de Thomson-CSF dans son périmètre élargi ainsi que dans les activités spatiales qui seront exercées par la Société commune de satellites détenue à 51 % par Alcatel et à 49 % par Thomson-CSF.

Enfin, il définissait les restructurations capitalistiques à mettre en _uvre. Ces restructurations se composent de deux séries d'opérations d'apport : apports à Thomson-CSF, d'une part, apport à la Société commune de satellites, d'autre part. Elles prévoient également une augmentation de capital en numéraire de la Société commune de satellites, souscrites par Thomson-CSF.

Une fois ces apports réalisés, le capital de Thomson-CSF se répartissait comme suit.

· Alcatel Alsthom et Dassault Industries, actionnaires industriels privés et agissant de concert en qualité de " partenaires industriels " détenaient respectivement 16,36 % et 6,00 % du capital élargi de Thomson-CSF : la quote-part du capital détenue par les autres actionnaires privés (et correspondant au capital " flottant " de Thomson-CSF) était de 30,70 %.

· Thomson-SA avec 42,94 % du capital demeure le premier actionnaire de Thomson-CSF, Aérospatiale détenant pour sa part 4,00 % du capital.

Le ministre de l'Économie, des finances et de l'Industrie a ensuite signé le 4 juin 1998 un arrêté fixant les modalités du transfert au secteur privé de la majorité du capital de Thomson-CSF.

· L'apport à Thomson-CSF par Dassault Industries du contrôle de Dassault Électronique a ensuite conduit Thomson-CSF à procéder à une offre publique simplifiée aux actionnaires minoritaires de Dassault Électronique sur les bases de parité très proches de celles qui ont été retenues en rémunération de l'apport de Dassault Industries et avec une alternative en numéraire.

· L'abaissement en dessous du seuil de 50 % du capital de Thomson-CSF, de la participation indirecte de l'État a imposé la mise en place d'une " tranche salariés " dans les conditions prévues aux articles 11 et 12 de la loi de privatisation de 1986 révisée en 1993.

A l'issue de l'ensemble de ces opérations, le capital de Thomson-CSF a été réparti de la façon suivante :

RÉPARTITION DU CAPITAL DE THOMSON-CSF (1)
(
au 14 septembre 1998)

(en %)

Thomson SA

40,03

Aérospatiale

3,87

Dassault Industries

5,81

Alcatel

15,84

Public

32,92

Salariés

1,53

Total

100

(1) L'État français garde une action spécifique.

L'ensemble de l'opération s'est déroulé selon le calendrier prévu et sans obstacle d'envergure, au-delà des négociations traditionnelles dans ce type de restructuration (valorisation des apports, répartition du management).Il a été suivi rapidement d'un deuxième accord, entre Aérospatiale et Matra Hautes technologies, disposant de sa logique propre.

B.- L'ACCORD AÉROSPATIALE - MATRA HAUTES TECHNOLOGIES

A la différence de l'opération précédente qui est achevée, l'accord entre Aérospatiale et Matra Hautes technologies (MHT) annoncé en juillet 1998 porte sur le principe de la fusion des deux entités mais il doit être suivi de plusieurs étapes avant de prendre une configuration opérationnelle. Des négociations sont actuellement menées sur le partage de compétences industrielles, la définition d'un pacte d'actionnaire, la valorisation des apports et la répartition du management.

La crise boursière et ses répercussions sur le groupe Lagardère ne faciliteront pas la valorisation des actifs de MHT (50 % de Matra Bae Dynamics, 100 % de Matra Systèmes et Informations, 100 % de MDES, 51 % de Matra Marconi Space et 50 % de Matra Nortel Communications). La fourchette prévue pour le premier actionnaire privé de la nouvelle entité (30 à 33 %) pourrait s'accompagner d'une soulte à l'issue des négociations sur les évaluations qui seront analysées par la Commission des transferts et des participations.

Le montage capitalistique reste aussi soumis à l'accord de tiers, en l'occurrence le groupe allemand DASA et le groupe britannique British Aerospace (BAe), partenaires de Matra Hautes technologies.

BAe pourrait par exemple exiger d'élever sa participation dans la nouvelle société qui sera dédiée à la fabrication de missiles, en vertu des clauses régissant l'activité de sa filiale commune avec MHT dans les missiles, Matra BAe Dynamics.

En tout état de cause, il convient de franchir rapidement toutes ces étapes afin de montrer aux marchés et aux partenaires étrangers que la volonté française de restructuration sans ambiguïté. Un achèvement des opérations juridiques serait envisageable dès le mois de juin 1999.

Cet accord pose d'ores et déjà deux principes fondateurs : la volonté de l'État français de baisser sa participation dans Aérospatiale et la désignation du groupe Lagardère comme premier actionnaire privé de la nouvelle entité.

Le futur groupe ainsi défini présentera des atouts incontestables. Il sera la premier groupe européen dans l'industrie d'armement en termes de chiffre d'affaires consolidé, juste devant BAe et quatrième mondial derrière les trois géants américains (Boeing Mac Donnell, Lockheed Martin et Raytheon Hughes). Il disposera d'un portefeuille d'activités équilibré en étant présent sur tous les segments de marché. Sa taille critique devrait lui permettre de disposer d'un autofinancement important des activités de recherche et développement soumises à la baisse des crédits de l'État.

Deux domaines d'activités méritent d'être approfondis, notamment au regard de leur positionnement face à l'ensemble Thomson/Alcatel, ce sont les missiles et les satellites.

L'activité missilière sera un point fort du nouveau groupe, tant en matière de taille que de diversité de la gamme de missiles couverte.

Matra BAe Dynamics (MBD), filiale commune du groupe Lagardère et de BAe dans les missiles, est déjà le premier missilier européen. Cette société a su tisser un réseau mondial de coopération qui en fait un axe privilégié de regroupement de capacités missilières en Europe. L'accord stratégique passé avec DASA le 6 mai 1997, qui a permis à MBD de prendre 30 % du capital de la filiale missiles du groupe allemand a renforcé cette position.

La fusion avec Aérospatiale la rend plus évidente encore. Dans une telle configuration, toute la gamme de missiles serait couverte : antichars, antinavires, antiaériens, air-surface, missiles de croisières, antiradars, air-air, balistiques et drones. Ceci constituerait le deuxième missilier mondial, derrière Raytheon Hugues et devant Lockheed Martin.

Dès lors, se pose la question du positionnement de Thomson face à ce pôle missilier de première envergure. Le clivage traditionnel entre les producteurs de missiles (les équipementiers) et les architectes d'un système de missiles (les systémiers) s'estompe et la frontière devient de plus en plus difficile à tracer. Par ailleurs, certains atouts commerciaux de Thomson qui le désignaient comme maître d'_uvre incontournable en matière de systèmes de missiles sont maintenant partagés. C'est, par exemple, le cas dans le secteur prometteur des missiles antiaériens. Les missiles qui assurent la relève des Roland et Crotale sont le Mistral de Matra et l'Aster d'Aérospatiale qui est à la base des futurs systèmes antiaériens terrestres et navals. Mais alors que Thomson disposait de l'exclusivité commerciale du Crotale au sein du Groupement d'intérêt économique qui l'avait produit, il n'en va plus de même pour l'Aster ce qui ne veut pas dire qu'il n'y aura plus accès.

Si la maîtrise de l'ensemble reste à préciser, les rapports de force, au sein d'un système d'armes, entre les missiliers d'une part, et les fournisseurs d'autodirecteurs, de radars et contremesures d'autre part, peuvent donc évoluer. En tout état de cause, un rapprochement des activités missiles de Thomson de celles de la nouvelle entité en train de se créer ne serait pas absurde, moyennant des compensations dans d'autres domaines. Faute d'un compromis équilibré, Thomson serait conduit à se rapprocher du pôle GEC/Alenia et/ou d'un partenariat transatlantique.

Le secteur qui a le plus illustré l'apparente difficile cohérence des deux opérations de restructuration est celui des satellites.

Dans le cadre de la restructuration du capital de Thomson-CSF, Aérospatiale a pris un engagement de non-rétablissement dans le domaine des satellites pendant une durée de cinq ans à compter du 30 juin 1998.

Un mois plus tard, l'annonce de la fusion d'Aérospatiale avec MHT jette le doute sur le respect de cet engagement. Au-delà des arguties juridiques autour des dérogations précisées dans l'engagement contractuel signé par Aérospatiale, il est évident que la fusion avec Aérospatiale renforce considérablement le pôle spatial de MHT, constitué de la filiale commune avec GEC-Marconi, Matra Marconi Space (MMS). D'abord, parce que Aérospatiale a gardé des actifs " Espace " (activités dans les lanceurs, infrastructure orbitale, étages cryogéniques, microgravité, senseurs optiques, traitement d'images, pyrotechnie, etc.) qu'elle va pouvoir fédérer avec MMS, ensuite parce que le nouvel ensemble Aérospatiale-MHT va devenir le premier actionnaire industriel de l'opérateur Arianespace, après l'actionnaire institutionnel qu'est le CNES.

Si l'on comprend les raisons pour lesquelles Alcatel a pu concevoir une certaine amertume vis-à-vis du comportement d'Aérospatiale, il n'en demeure pas moins que la rationalisation des activités spatiales françaises est favorisée par ces deux opérations et que plusieurs possibilités d'évolution demeurent dans le secteur, notamment dans la perspective d'une réorganisation européenne. Il existe déjà de nombreux programmes en coopération entre MMS et Alcatel Space, notamment dans les communications (satellites Worldstar, programme Stentor, Artemis) ou dans l'observation (Spot, Hélios).

Les zones de confluence entre les groupes Thomson/Alcatel d'une part et Aérospatiale/MHT d'autre part sont nombreuses : optronique, électronique de vol embarquée (Sextant Avionique est une filiale commune), les contremesures aéroportées, les systèmes de combat naval, de propulsion de missiles, les plates-formes et charges utiles pour satellites, etc. Il n'est donc pas exclu que des ajustements de périmètre surviennent après une négociation globale entre les deux entités. Loin d'augmenter la complexité du paysage, la politique de constitution de champions nationaux aura ainsi permis d'accélérer les mutations et les rationalisations du dispositif français.

En tout état de cause, ces mouvements ne sont pas complètement indépendants du processus de restructuration européen amorcé le 9 décembre 1997 et dont l'issue reste très ouverte.

III.- LA DIFFICILE ÉMERGENCE DE LA SOCIÉTÉ AÉROSPATIALE ET DE DÉFENSE EUROPÉENNE

L'émergence d'une société aérospatiale et de défense européenne (EADC) est un objectif particulièrement ambitieux compte tenu de l'enchevêtrement des problématiques qui en dépendent et de l'énormité des enjeux économiques, sociaux et financiers. Les pouvoirs publics de différents pays européens ont donné une impulsion le 9 décembre 1997 qui n'a pas fini de produire ses effets et ses chocs en retour. Dans un paysage industriel particulièrement mouvant, il est difficile de se livrer à un quelconque exercice de prévision. Il convient mieux de pratiquer l'interrogation que l'affirmation afin d'essayer de cerner la portée et les paramètres des différentes évolutions possibles.

A.- LES INITIATIVES DES POUVOIRS PUBLICS

La déclaration conjointe des chefs de gouvernement de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni en date du 9 décembre 1997 a solennellement fixé un objectif de restructuration aux industriels de l'armement européens. Dans leur réponse en date de mars 1998, les industriels ont demandé aux pouvoirs publics de préciser leurs instructions et de les aider à surmonter un certain nombre de points de blocage d'ordre administratif ou institutionnel comme :

· l'harmonisation des besoins opérationnels ;

· la sécurité des approvisionnements ;

· la réglementation des exportations ;

· la sécurité des informations ;

· la réglementation fiscale ;

· la protection contre les offres publiques d'achat.

Le 6 juillet 1998, les ministres de la Défense de six pays européens ont signé une lettre d'intention qui précise l'organisation et le calendrier des travaux à conduire afin de définir des règles efficaces de fonctionnement des futures sociétés transnationales notamment en matière de sécurité d'approvisionnement, de procédures d'exportation, de sécurité de l'information, de recherche et technologie, de droits de propriété industrielle et d'harmonisation des besoins opérationnels.

Dans le même temps, le Gouvernement français donnait, en 1998, plusieurs signes concrets de sa détermination à contribuer à la restructuration de l'industrie aéronautique européenne comme :

· le transfert annoncé le 14 mai des actions détenues par l'État dans Dassault Aviation au groupe Aérospatiale, soit 45,76 % du capital de celui-ci, permettant au groupe public de développer une légitimité dans l'aéronautique militaire par le biais d'un rapprochement avec l'avionneur privé ;

· l'attribution au président d'Aérospatiale d'une mission visant à faire des propositions pour ouvrir le capital de l'entreprise en vue de la constitution d'alliances européennes solides ;

· l'annonce, le 22 juillet, de l'accord de principe du Gouvernement au projet industriel élaboré par Aérospatiale et le groupe Lagardère visant à regrouper les activités d'Aérospatiale et de Matra Haute Technologies. Ce projet, dont l'objectif principal est de rassembler et de renforcer les compétences françaises dans le domaine de l'aéronautique et de l'espace (voir supra), permettra, par la mise en _uvre d'un partenariat stratégique privilégié avec le groupe Lagardère, de progresser dans la construction d'une industrie européenne, en s'appuyant sur la complémentarité des accords conclus par les deux entreprises avec leurs partenaires français et européens.

Ces impulsions n'ont pas encore permis de mettre la future société européenne d'armement sur des rails décisifs. Trop d'interrogations demeurent sur l'issue du processus engagé en raison notamment de la diversité de ses acteurs.

B.- DE NOMBREUSES INTERROGATIONS SUBSISTENT

De nombreuses interrogations subsistent sur le périmètre exact et l'issue des restructurations européennes du secteur de l'armement. Certaines réponses seront peut-être données rapidement. L'expérience montre que, dans ce secteur, le dénouement de situations apparemment inextricables peut s'accélérer de manière très rapide.

Pour les tenants de la société européenne aérospatiale et de défense (EADC), le périmètre doit englober l'ensemble des activités du secteur c'est-à-dire l'aéronautique civile (Airbus et avions de transport militaire compris), les avions de combat, les hélicoptères, l'ensemble des activités spatiales (satellites, lanceurs, infrastructures orbitales) ainsi que l'ensemble des activités de défense y compris l'électronique de défense, le tout étant constitué en une seule étape de manière à globaliser et accélérer la négociation.

Cette thèse, séduisante sur un plan strictement rationnel, fait fi d'un certain nombre d'obstacles dont certains restent dirimants et que l'on peut rappeler sans prétendre à l'exhaustivité.

Elle suppose d'abord un accord sur le poids respectif des différents actionnaires du futur ensemble qui pose le problème du niveau de la participation des États et notamment de l'État français, mais aussi de la portée des actions spécifiques qui leur seraient attribués. Les divergences sur la structure de l'actionnariat privé sont tout aussi importantes, notamment entre DASA qui dispose d'un actionnaire privé de référence très puissant, le groupe Chrysler-Benz, et BAe qui compte un actionnariat éclaté.

Cette thèse englobe aussi la problématique propre à Airbus qui devrait fondre sa transformation en une véritable société commerciale (Airbus est actuellement un groupement d'intérêt économique) au sein d'un ensemble plus vaste, au motif que les parties prenantes sont les mêmes. Pour l'instant, cette association a plutôt eu pour effet de ralentir le calendrier de l'opération Airbus dont la valorisation des actifs n'a pas véritablement commencé.

Elle implique aussi l'intégration d'adversaires jusqu'ici irréductibles sur toute une série de segments d'activité (missiles, satellites, avions de combat, etc...). Le segment aviation de combat se distingue par une cristallisation des positions dont on voit mal les possibilités d'évolution à court terme.

BAe et ses partenaires constituent un bloc européen qui dispose à l'heure actuelle de deux avions(le Tornado et l'Eurofighter) en concurrence directe avec Dassault Aviation qui fait cavalier seul avec ses Mirage 2000 et son Rafale. Dassault pense qu'il n'a aucun intérêt à rallier maintenant le dispositif européen envisagé car il ne s'y présenterait pas en position de force (valorisation boursière, faible volume de commandes du Rafale) alors que la situation peut lui être plus favorable en fonction des résultats de la confrontation entre le Rafale et l'Eurofighter, au moment où les décisions relatives à la prochaine génération d'avions de combat se prendront.

Ce raisonnement se trouve renforcé par le fait qu'il n'y aura pas de nouveau programme dans ce domaine dans les quinze années qui viennent. La taille n'est pas nécessairement un critère d'efficacité dans ce type de phase industrielle et commerciale.

Certains acteurs français pensent le contraire et estiment qu'en se présentant en ordre dispersé, le camp français risque de moins peser sur les arbitrages. Mais y a-t-il véritablement une communauté d'intérêts et de motivation au sein du " camp français " de l'aéronautique ?

Enfin, la thèse de la société unique repose sur une agrégation de l'électronique de défense au reste des activités qui semble poser problème à de nombreux analystes et acteurs du secteur, d'autant que nombre d'entre eux refusent l'hypothèse d'un seul groupe européen, monopole imposant ses conditions aux États. Les défenseurs de la concurrence, qui réfutent l'hypothèse d'un recours aux groupes américains comme politiquement irréaliste, plaident pour un maintien de la césure entre les équipementiers, regroupés dans un pôle organisé par métiers et segments, et les systémiers reposant sur les électroniciens. Certains envisageant même la possibilité du maintien de deux systémiers à côté d'un équipementier. Dans cette hypothèse, certains n'excluent pas des accords transatlantiques.

Le champ des possibilités est donc vaste et la partie peut se poursuivre longtemps. L'essentiel est qu'elle évolue vers une configuration des positions plus favorables à l'Europe que la fragmentation actuelle. L'ensemble des acteurs semble en être conscient, il est donc permis d'espérer des évolutions décisives dans un avenir proche.

EXAMEN EN COMMISSION

A.- AUDITION DU MINISTRE

Au cours de sa séance du 1er juillet 1998, la commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a procédé à l'audition de M. Alain Richard, ministre de la Défense, sur l'exécution 1998 et les perspectives pour 1999 des crédits de son ministère.

Interrogeant le Ministre sur l'exécution de la loi de programmation, M. Didier Migaud, Rapporteur général, a souhaité savoir si le programme d'économies engagé serait suffisant ou s'il faudrait envisager une révision complète de cette loi, dans la mesure où les 85 milliards de francs (en valeur 1998) de crédits dont disposera chaque année le budget de la défense entre 1999 et 2002, même s'ils sont supérieurs aux 81 milliards votés pour 1998, n'en demeurent pas moins inférieurs aux 89 milliards initialement prévus par la loi de programmation. Évoquant les propos de M. Yann Galut, rapportés le matin même dans la presse, il a demandé des précisions sur le niveau envisageable pour la recapitalisation de GIAT Industries.

Répondant au Rapporteur général, M. Alain Richard, Ministre de la Défense, a estimé que la nécessité d'assurer l'articulation entre les programmes, qui mettent parfois en jeu plusieurs armes, plaidait pour le maintien d'une loi de programmation, d'autant qu'il a pu être reproché au Gouvernement, c'est-à-dire principalement aux Ministères de la Défense et des Finances, les insuffisances de cette articulation, et ce souvent à juste titre. Justifiant la poursuite de la loi de programmation adoptée par la précédente majorité, il a souligné que la revue des programmes avait montré que l'essentiel des choix stratégiques effectués par cette loi était conforme aux intentions du Gouvernement actuel, soulignant que, d'ailleurs, la préparation de ce texte avait été entamée sous la présidence de François Mitterrand. Observant que les crédits d'équipement avaient diminué de 25 % en francs constants depuis 1991-1992, il a indiqué que l'effort de réduction des dépenses arrêté dans le respect des objectifs retenus par le Gouvernement avait pu passer, soit par une baisse du prix des achats, soit par l'achat d'équipements comparables mais moins chers, soit par la réduction du volume des achats. Il a fait remarquer que la diminution de 20 milliards de francs des crédits prévue entre 1999 et 2002 ne résulterait pas d'un simple étalement des programmes, lequel serait d'ailleurs, in fine, plus coûteux, mais de véritables économies, et a fourni l'exemple de l'entrée en service simultanée du prochain sous-marin nucléaire lanceur d'engins et des nouveaux missiles, qui rapporterait plus d'un milliard de francs. Il a estimé que cet exemple démontrait également l'utilité de la programmation à laquelle recourent l'ensemble des pays, même si elle ne prend pas nécessairement la forme d'une loi.

Abordant les conditions de réalisation des programmes, le Ministre a indiqué que l'objectif était de ne retarder aucun programme, car des retards auraient entraîné des coûts pour l'État ainsi que des difficultés pour les partenaires industriels, et que la plupart des programmes seraient donc réalisés dans les délais, à l'exception de quelques programmes envisagés ou mis en route depuis peu, qui ont été interrompus. Il a précisé que le Premier ministre et le Président de la République avaient donné leur accord à cet aménagement de la loi de programmation et que l'ensemble des programmes était concerné, sauf les programmes de coopération dont la valeur pourrait atteindre, dans le courant de la prochaine décennie, 25 % de cet ensemble. Rappelant que la loi de programmation avait prévu une baisse de 30 % du coût des matériels livrés d'ici 2002, engagement qui paraissait pouvoir être tenu, il a jugé qu'un effort supplémentaire dans cette direction ne pouvait être envisagé. Il a considéré que toute économie supplémentaire ne pourrait désormais résulter que d'une réduction des capacités : si celle-ci devait être envisagée, une nouvelle loi de programmation, qui exigerait nécessairement un nouveau " Livre blanc ", devrait être mise en chantier. Il a précisé qu'alors on devrait examiner certains des principes fondamentaux de notre politique actuelle de défense, comme, par exemple, la fabrication nationale des armes de dissuasion ou l'existence d'un porte-avions à propulsion nucléaire.

Évoquant enfin la situation de GIAT Industries, M. Alain Richard a déploré les déclarations de M. Galut dans un quotidien de la presse économique. Rappelant que le conseil d'administration et le comité central d'entreprise devaient se réunir respectivement les 7 et 10 juillet prochain, il a précisé que toute révélation prématurée était inopportune et fragiliserait le déroulement du processus d'adaptation souhaité par le Gouvernement.

Relevant qu'avec la professionnalisation de l'armée de conscription et la multiplication des interventions internationales, le ministère de la Défense vivait actuellement des mutations dans tous les domaines, M. Jean-Michel Boucheron, Rapporteur spécial des crédits de la Défense, s'est d'abord interrogé, s'agissant de l'exécution 1997, sur le montant des intérêts moratoires, qui ont enregistré une forte augmentation au cours des exercices précédents, et sur les incidences de la réduction du taux de ces intérêts prévue par la loi de finances rectificative pour 1996. Remarquant que l'exécution budgétaire des derniers exercices avait été affectée par des mouvements de régulation importants, en raison notamment de la volonté de ne pas afficher d'emblée des baisses trop fortes, il a souhaité savoir si l'annulation de 300 millions de francs par l'arrêté du 16 janvier dernier serait suivie d'autres mesures de régulation au cours de l'exercice 1998. Il a également demandé si le montant des opérations extérieures pouvait être estimé en 1998 et comment elles seraient financées.

Abordant la gestion budgétaire et financière des crédits et la réforme de la nomenclature, il a souhaité qu'à chaque programme majeur corresponde un chapitre distinct du titre V. Rappelant que la mise en place d'une comptabilité spécifique des investissements devait permettre de rétablir le lien entre autorisations de programme et crédits de paiement, il s'est interrogé sur le rythme de consommation des crédits en 1998, compte tenu de la faiblesse des taux d'exécution relevée par la Cour des comptes pour l'exercice 1997. S'agissant de la revue des programmes, il a souhaité savoir si le Gouvernement entendait présenter une révision des échéanciers et quand aurait lieu le débat annuel sur l'exécution de la loi de programmation. Interrogeant le Ministre sur la répartition des 20 milliards de francs d'économies annoncées entre les diminutions de coûts, les réductions de cibles et les augmentations de productivité, il a craint que les 85 milliards de francs de crédits prévus à partir de 1999, même s'ils sont supérieurs aux 81 milliards de francs votés en 1998, ne se révèlent trop rigides pour financer les engagements constatés et l'achèvement des programmes. Soulignant l'intérêt mais aussi les effets pervers des commandes pluriannuelles groupées, il a demandé quelle était leur part relative et dans quelle mesure elles avaient déjà permis de maîtriser les coûts.

Évoquant, en conclusion, les questions industrielles, il a reconnu que le Ministre pouvait difficilement s'exprimer, à ce stade, sur les inquiétudes quant à la situation de GIAT Industries. Estimant que le débat créé par le récent conflit de Toulon avait été très instructif, il a demandé quels étaient les grands axes envisageables de la réforme de la DCN et quelles consignes le Gouvernement avait donné à la mission Moynot. Il a enfin interrogé le Ministre sur les conséquences financières et commerciales de l'industrialisation de l'hélicoptère Tigre.

Répondant à M. Jean-Michel Boucheron, le Ministre a précisé que les intérêts moratoires payés en 1997 par le ministère de la Défense atteignaient 361 millions de francs contre 812 millions de francs pour 1996. Il a estimé qu'une telle réduction ne pourrait vraisemblablement pas se reproduire en 1998, la récente réforme de la comptabilité spéciale des investissements ayant induit, en avril et en mai derniers, des retards, certes aujourd'hui rattrapés, dans l'engagement des dépenses qui se traduiraient par quelques dizaines de millions de francs d'intérêts moratoires supplémentaires mais à tout le moins, 1998 verrait une stabilisation du niveau des intérêts moratoires par rapport à 1997. Il a par ailleurs jugé que les observations de la Cour des comptes sur la consommation des crédits de la Défense avaient eu l'effet d'un électrochoc, même si une partie des anomalies relevées par la Cour, portant sur des exercices anciens, était aujourd'hui périmée. Il a aussi fait observer que la situation économique et l'amélioration du niveau et de la rentrée des recettes de l'État ne militaient pas en faveur d'une régulation budgétaire massive. S'agissant des opérations extérieures, il a rappelé que, selon les principes adoptés par le précédent gouvernement, le coût ordinaire de ces opérations avait été approximativement fixé à un milliard de francs, seuil au-dessus duquel elles nécessitaient une ouverture exceptionnelle de crédits. Sur ce point, il a précisé que les opérations extérieures devraient coûter 2,1 milliards de francs en 1998 contre 3,5 milliards de francs en 1997, et qu'environ un milliard devrait être ouvert lors du prochain collectif budgétaire. Il a, en outre, fait part de ses propositions visant à augmenter le détail de la nomenclature du titre V, et notamment à créer un chapitre spécifique aux études, à regrouper les crédits relatifs à l'espace dans un poste unique et à différencier par armée les dotations nécessaires aux dépenses de développement et de fabrication, en précisant que l'arbitrage sur ces propositions n'était pas encore rendu.

Le Ministre a ensuite annoncé que le rapport sur l'exécution de la loi de programmation serait examiné par le Parlement en même temps que le projet de budget de la Défense pour 1999. Il a estimé que la loi de programmation devait s'adapter aux changements d'environnement stratégique, tout en mettant en valeur l'impératif politique, que s'était fixé le Gouvernement, de respecter les programmes financés en coopération avec des pays européens. Sur ce point, il a fait observer que la Grande-Bretagne s'était engagée dans une révision de ses programmes de défense, tout en s'attachant également à préserver les programmes de coopération, et s'est interrogé sur l'ampleur des changements que les élections de l'automne prochain pourraient susciter en Allemagne. Il a estimé que la prochaine loi de programmation devait être précédée, à travers la rédaction en 2000 d'un nouveau livre blanc, d'une réflexion sur les orientations stratégiques de la France. Il a par ailleurs indiqué que le ministère de la Défense n'envisageait pas de nouvelles commandes globales importantes autres que celle relative au programme Rafale qui faisait actuellement l'objet de négociations avec la société Dassault sur la définition des versions intermédiaires de l'avion. Il a estimé que les économies obtenues par la procédure des commandes globales pourraient être de l'ordre de 10 % du prix initial. Il a en outre insisté sur la nécessité de ne pas aborder le dossier de GIAT Industrie dans une optique politique et de traiter cette entreprise, qui n'est plus un service de l'État, de la même manière que les autres entreprises nationales. Relevant que l'endormissement de la Direction de la construction navale, quelle que fût la majorité en place, pouvait être considérée comme une coproduction du Gouvernement et du Parlement, il a jugé possible la modernisation de cette direction, à condition de procéder à une diversification concertée de ses activités, et notamment à une ouverture à l'exportation. Il a observé qu'une telle modernisation constituait une démarche nouvelle, et déploré la réaction négative, relayée par plusieurs élus, de certains membres du personnel, qu'il a jugée contraire à la réalité économique. Il a, en dernier lieu, annoncé que le premier appareil de la série Tigre serait livrée en 2001 en Allemagne et en 2003 en France dans la version " appui protection ". Il a ajouté que la version anti-char n'avait pas été jugée prioritaire, et que, par conséquent, il avait été décidé d'en limiter le développement et de ne pas la fabriquer, le ministère ayant choisi d'acheter sur le marché un missile adapté pour la version anti-char.

Rappelant la disparition progressive du service militaire, M. Christian Cuvilliez a d'abord interrogé M. Alain Richard sur l'évolution en 1998 et 1999 des effectifs en personnel civil et militaire du ministère de la défense. Il a souhaité savoir quelle part des dotations d'investissement ouvertes sur le titre V de la loi de finances pour 1998 serait dévolue aux entreprises d'État, direction des constructions navales, arsenaux, GIAT, en rappelant que le personnel de ces entreprises n'était pas ignorant des réalités économiques. Il a demandé si le Gouvernement avait évalué les coûts respectifs du projet allemand de véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI) et du projet Vextra développé par le GIAT, qui est prêt à être mis en _uvre. Enfin, il a souhaité obtenir des précisions sur l'évolution des crédits de la recherche et s'est interrogé sur les risques d'externalisation des travaux de recherche.

M. Gilbert Gantier a souhaité savoir si le programme d'observation par satellite HORUS était définitivement abandonné.

Répondant aux intervenants, M. Alain Richard a notamment apporté les précisions suivantes :

- compte tenu de l'ampleur de la participation allemande au projet HORUS, la décision prise par l'Allemagne de renoncer à sa réalisation compromettait de manière définitive son avenir ; toutefois, la réduction éventuelle des coûts par l'apparition de nouvelles technologies pourrait conduire à réexaminer la question de l'observation par satellite et à rechercher la constitution d'un nouveau tour de table européen sur un projet de cette nature.

- la suppression totale de la conscription en 2002 conduirait à créer 70.000 emplois militaires et civils destinés à compenser le départ de 190.000 appelés. Le statut d'ouvrier d'État commun aux personnels civils de la défense nationale et aux employés des entreprises publiques permettait le reclassement, sur une base volontaire, de personnels provenant notamment du GIAT et des services industriels dans des services militaires du ministère de la défense, 700 emplois ayant été pourvus en 1997 de cette façon. Toutefois, s'il convient d'appliquer autant que possible le principe du volontariat, il ne faut pas perdre de vue le fait que ce principe ne constitue pas une garantie statutaire, et qu'au contraire la situation statutaire des personnels a pour conséquence la règle de leur affectation en fonction des besoins du service public. Par ailleurs, il est exact que les techniciens du GIAT ou de la DCN n'ont pas vocation à occuper les emplois d'accompagnement actuellement confiés aux appelés, et que cette situation justifie de nouveaux recrutements, qui auraient d'ailleurs un effet favorable sur le profil de la pyramide des âges.

- il existe en France une dizaine de grandes entreprises de défense, comptant environ 190.000 salariés, tous dignes de l'attention des pouvoirs publics. La baisse des volumes des marchés de l'armement, même jugulée, et la récente montée en puissance, comme exportateur d'armements, des États-Unis, qui ont su prendre récemment les mesures propres à augmenter leurs marges de man_uvre, rendent indispensable une européanisation des industries de défense, sous peine de stagnation. Il faut relever que l'activité du GIAT et de la DCN se situe précisément dans des secteurs particulièrement touchés par la baisse : dans ces conditions, ou bien on suit une logique d'arsenal, et on passe aux entreprises intéressées des commandes de matériel inadéquates qui iront ensuite peupler les hangars, ou bien on adopte, ce qu'a choisi le Gouvernement, une logique d'entreprise passant par l'adaptation de ces industries aux commandes passées par l'État et par la coopération européenne.

- il convient d'éviter, à propos du VBCI, les erreurs commises, dans le passé, sur l'avion de combat et le char lourd, et il est donc nécessaire de promouvoir des accords avec les Anglais et les Allemands sur les spécifications de ce type de véhicule. Il ne serait pas raisonnable d'attendre, pour engager une coopération européenne indispensable, que nos partenaires soient convaincus du bien-fondé des choix faits par le GIAT avec le Vextra, qui ne correspond pas à leurs conceptions, étant bien entendu que la production du Vextra serait lancée dès qu'un acheteur se présenterait.

- pour les crédits de recherche, la France est, après les États-Unis, le pays qui a consenti l'effort le plus important en la matière, très loin devant les autres pays européens ; leur niveau actuel doit être préservé, et il faut promouvoir des synergies avec la recherche civile.

B.- EXAMEN DES CRÉDITS

Au cours de séance du 20 octobre 1998, la commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan, a examiné, sur le rapport de M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur spécial, les crédits de la Défense et les articles 47 et 48 rattachés à ce budget.

M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur spécial, a tout d'abord signalé que le budget de la Défense pour 1999 avait fait l'objet d'un accord politique global entre le Premier ministre et le Président de la République et qu'il était stabilisé à mi-chemin entre " l'encoche " de 1998 et l'annuité prévue par la loi de programmation militaire.

Abordant le titre III, il a souligné la croissance de 3 % des crédits de rémunération et de charges sociales, qui relevait de la modification de structure des effectifs liée à la professionnalisation ainsi que des mesures d'accompagnement et de restructuration comme les pécules. Il a aussi évoqué la baisse importante des crédits de fonctionnement (- 9,7 %) qui relevait d'un effet mécanique résultant de la disparition des appelés, mais aussi de la chute des cours du pétrole ou encore de mesures d'économie et de productivité.

Après avoir rappelé la stabilisation des crédits du titre V et les 20 milliards de francs d'économies générées par la révision des programmes menée pendant l'hiver 1998, M. Jean-Michel Boucheron a observé que la loi de programmation militaire était conservée dans ses grands principes. Il a mentionné les mesures de modification de périmètre relevant, d'une part, d'un transfert interne d'une dotation de 400 millions de francs de crédits d'entretien programmé des matériels du titre III vers le titre V, et, d'autre part, de l'imputation au titre V d'une dotation de 900 millions de francs finançant le budget civil de recherche et développement.

Il a salué la réforme de la nomenclature budgétaire qui permettait d'identifier et d'assurer le suivi de l'exécution budgétaire de 25 programmes d'armement et il a mentionné la diminution sur le moyen terme des crédits consacrés à la dissuasion nucléaire tout en la justifiant. Il a, enfin, regretté la réduction des crédits d'études (- 11 % en crédits de paiement) et des crédits consacrés à l'espace (- 16 % en crédits de paiement) après les échecs de la coopération européenne dans ce domaine.

M. Alain Rodet a interrogé le Rapporteur sur l'affectation des civils recrutés en 1999, sur le dispositif de dégagement des cadres appliqué aux militaires et notamment aux officiers, sur les modalités de cession par l'armée de ses actifs immobiliers et, enfin, sur l'affectation des officiers recrutés par la Gendarmerie.

Répondant à M. Alain Rodet, le Rapporteur spécial a indiqué que :

- le montant des pécules inscrit au projet de loi de finances (857 millions de francs) permettrait le départ anticipé de 200 officiers et de 2.000 sous-officiers ;

- le ministère de la Défense avait réformé la structure administrative chargée de la cession des actifs immobiliers, ce qui devrait renforcer l'efficacité du dialogue avec les collectivités territoriales portant notamment sur la détermination d'un prix satisfaisant les deux parties ;

- la répartition des officiers de gendarmerie se ferait sur l'ensemble du territoire et des brigades et non pas au profit exclusif de la direction parisienne.

Puis la Commission a adopté, sur la proposition du Rapporteur spécial, les crédits de la Défense ainsi que les articles 47 et 48 rattachés à ce budget et vous demande d'émettre un vote favorable à leur adoption.

Article 47

Mesures nouvelles

Dépenses ordinaires des services militaires

Texte du projet de loi :

I.- Il est ouvert au ministre de la défense, pour 1999, au titre des mesures nouvelles de dépenses ordinaires des services militaires, des autorisations de programme s'élevant à la somme de 1.322.692.000 francs, applicables au titre III " Moyens des armes et services ".

II.- Pour 1999, les crédits de mesures nouvelles de dépenses ordinaires des services militaires applicables au titre III " Moyens des armes et services " s'élèvent au total à la somme de - 1.031.676.000 francs.

Exposé des motifs du projet de loi :

La comparaison des crédits ouverts en 1998 et de ceux prévus pour 1999 au titre des dépenses ordinaires militaires (mesures nouvelles) figure au II de la partie " Analyses et tableaux annexes " du présent projet de loi.

Les justifications par chapitre sont présentées dans l'annexe " Services votés-Mesures nouvelles " relative au budet de la défense.

Observations et décision de la Commission :

Cet article a pour objet, d'une part, d'ouvrir les autorisations de programme correspondant aux dépenses d'entretien programmé des matériels qui restent imputées au titre III et, d'autre part, d'ouvrir les crédits correspondant aux mesures nouvelles des dépenses ordinaires pour 1999.

Votre commission des Finances a adopté l'article 47 et vous demande d'émettre un avis favorable à son adoption.

Article 48

Mesures nouvelles

Dépenses en capital des services militaires

Texte du projet de loi :

I.- Il est ouvert au ministre de la défense, pour 1999, au titre des mesures nouvelles sur les dépenses en capital des services militaires, des autorisations de programme ainsi réparties :

Titre V "Équipement"....................................................................................................

83.476.900.000 F.

Titre VI "Subventions d'investissement accordées par l'État".......................................

2.523.100.000 F.

 

______________

Total..............................................................................................................................

86.000.000.000 F.

II.- Il est ouvert au ministre de la défense, pour 1999, au titre des mesures nouvelles sur les dépenses en capital des services militaires, des crédits de paiement ainsi répartis :

Titre V "Équipement"....................................................................................................

22.844.680.000 F.

Titre VI "Subventions d'investissement accordées par l'État".......................................

2.090.800.000 F.

 

_____________

Total...............................................................................................................................

24.935.480.000 F.

Exposé des motifs du projet de loi :

La comparaison, par titre, des autorisations de programme et des crédits de paiement prévus pour 1999, au titre des dépenses militaires en capital, avec les autorisations de programme et les crédits de paiement accordés en 1998, figure au II de la partie " Analyses et tableaux annexes " du présent projet de loi.

Les justifications détaillées par chapitre sont présentées dans l'annexe " Services votés-Mesures nouvelles " relative au budget de la défense.

Observations et décision de la Commission :

Votre commission des Finances a adopté l'article 48 portant ouverture des autorisations de programme et des crédits de paiement correspondant aux mesures nouvelles des dépenses en capital du budget de la Défense et vous demande d'émettre un avis favorable à son adoption.

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR VOTRE RAPPORTEUR

· Général Jean-Pierre Kelche, chef d'état-major des armées.

· Amiral Jean-Charles Lefebvre, chef d'état-major de la Marine.

· Général Jean Rannou, chef d'état-major de l'armée de l'Air.

· Général Philippe Mercier, chef d'état-major de l'armée de Terre.

· M. Bernard Prévost, directeur général de la Gendarmerie nationale.

· M. Jean-Yves Helmer, délégué général pour l'armement.

· M. Jean-François Hébert, secrétaire général pour l'administration.

· M. Rodolphe Greif, directeur des constructions navales

· M. Jacques Dewatre, directeur général de la sécurité extérieure.

· M. Jacques Bouchard, directeur des applications militaires au CEA.

· M. Gilles Dangeard, contrôleur général des armées.

· M. Yves Michot, président d'Aérospatiale.

· M. Jean-Claude Husson, président d'Alcatel Space.

· M. Patrick Gavin, président d'Eurocopter.

· M. Jacques Loppion, président de GIAT Industries.

· M. Jean-Paul Béchat, président de SNECMA.

· M. Denis Ranque, président de Thomson CSF.

· MM. Charles Edelstenne et Bruno Revellin-Falcoz, vice-présidents de Dassault Aviation.

· M. Philippe Camus, co-gérant du groupe Lagardère.

· M. Fabrice Brégier, président de Matra BAe Dynamics.

________

() rapport annexé - paragraphe 2.1.1.

() Dispositif prévu initialement sur le Foch afin de faciliter la mise en assiette de l'avion après catapultage. En raison du retrait du service du Foch, il était prévu pour les catapultages sur le Charles de Gaulle de valider le dernier logiciel de commandes de vol sans utilisation de cet artifice.

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