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Commission des affaires économiques

Mardi 13 novembre 2012

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 22

Présidence de M. François Brottes Président

– Examen pour avis du projet de loi relatif à la création de la banque publique d’investissement (n° 298) (Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis)

– Informations relatives à la commission

La Commission a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Clotilde Valter, le projet de loi relatif à la création de la banque publique d’investissement (n° 298).

M. le président François Brottes. Notre ordre du jour appelle l’examen du projet de loi relatif à la création de la banque publique d’investissement – la BPI – dont la rapporteure est Mme Clotilde Valter, que je veux chaleureusement remercier pour le travail qu’elle a mené et, notamment, la trentaine d’auditions auxquelles elle a procédé. Notre commission est saisie pour avis sur ce texte, la commission des finances étant saisie au fond. La création de la BPI répond à un engagement fort du Président de la République et s’inscrit dans un ensemble où prennent place l’ensemble des mesures prises en faveur de la compétitivité.

Madame la rapporteure, je vous laisse à présent la parole.

Mme Clotilde Valter, rapporteure. Je vous remercie M. le président. La BPI est en effet, mes chers collègues, l’un des projets les plus importants de la législature. Il concerne le redressement productif, il s’inscrit dans la bataille pour l’emploi et il est l’un des moyens du rééquilibrage de notre balance commerciale.

La création de la BPI répond à un triple objectif. Le premier est de s’appuyer sur ce qui existe déjà et qui fonctionne – Oséo, le FSI, le crédit d’impôt recherche –, mais pour mutualiser les moyens existants et provoquer ainsi un puissant effet de levier. Le deuxième est de pallier les défaillances du marché. Le troisième est d’offrir un bouquet de services aux entreprises en assurant une meilleure coordination entre l’action de l’État et celle des régions.

Le rôle des parlementaires me semble crucial car le texte est actuellement trop dépouillé. L’examen du Conseil d’État et le fait que les dispositions opérationnelles – fort nombreuses et qui méritent d’être discutées entre nous – n’aient pas de valeur législative expliquent cette situation, notamment au regard de l’article 1er. Toutefois, la loi doit donner à cette nouvelle structure les moyens d’atteindre les buts qui lui sont fixés.

La BPI sera un groupe public dont les actionnaires seront, à parité, l’État et la Caisse des dépôts et consignations – la CDC. Elle reposera sur deux filiales qui exerceront deux activités séparées : BPI Financement reprendra les activités d’Oséo et BPI Investissement sera constituée de l’ancien FSI et de CDC Entreprises. Le risque d’une telle structure est de refaire ce qui existe déjà et de ne pas remplir les missions ayant justifié sa création.

C’est la raison pour laquelle trois axes doivent être approfondis afin de permettre le succès de la BPI.

En premier lieu, notre ambition pour la BPI doit être précisée et la rédaction de l’article premier du projet de loi amendée en ce sens. Il faut d’abord que l’emploi figure dans le texte alors qu’il en est actuellement absent. Le champ des entreprises couvertes doit être défini, en faisant explicitement référence aux très petites entreprises (TPE), aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI). Ces dernières se situent au cœur de la démarche à l’origine de la création de la BPI, qui s’inspire du dispositif allemand dans lequel les ETI jouent pleinement leur rôle dans le développement de l’activité économique et de l’emploi. Le stade de la vie des entreprises où la BPI interviendra doit également être spécifié. Le texte du Gouvernement évoque la création, le développement, l’innovation et l’internationalisation des entreprises ; nous vous proposons d’introduire également la transmission, tout aussi cruciale pour les entreprises. C’est en revanche délibérément que le texte ne mentionne pas les domaines d’intervention privilégiés, les filières et les secteurs car, outre qu’ils ne relèvent pas du domaine de la loi, il s’agit d’éléments qui peuvent s’avérer temporaires. De plus, leur énumération ne saurait être exhaustive. Mais nous aurons l’occasion d’en débattre.

En deuxième lieu, s’agissant de la gouvernance de la BPI – un sujet délicat –, elle sera dirigée par un conseil d’administration de quinze membres – la taille efficace pour une telle structure. J’y aurais volontiers fait entrer les représentants des employeurs et des salariés, mais j’avoue ne pas avoir trouvé de solution pour le moment qui puisse, dans le même temps, respecter les contraintes d’efficacité et la nécessité d’y assurer la prépondérance des actionnaires.

En troisième lieu, il est important que la voix de l’État porte. La BPI, un des projets importants de la législature, est une banque publique et elle ambitionne de faire autre chose que ce qui s’est fait jusqu’à présent. Aussi ne me semble-t-il pas suffisant que les quatre représentants de l’État soient de classiques directeurs d’administration centrale. Je vous proposerai donc un amendement pour que le directeur général de la BPI figure d’office parmi les représentants de l’État au lieu d’être nommé sur le contingent des personnalités qualifiées. Le Gouvernement devra d’ailleurs veiller à ce que ces personnalités qualifiées soient non seulement compétentes techniquement, mais également capables d’incarner le projet politique.

Quant au comité d’orientation – qui se substitue au comité stratégique attaché à d’autres conseils d’administration –, il sera composé de vingt et un membres représentant les organisations syndicales de salariés, les employeurs, les régions et les grands secteurs industriels. L’on peut regretter qu’il ne puisse formuler que des avis que le conseil d’administration ne sera pas tenu de discuter.

En dernier lieu, le Parlement devra être le garant de la mise en œuvre du projet. Pour ce faire, j’ai rédigé un amendement pour que le pacte d’actionnaires et la doctrine d’intervention de la banque soient discutés par le Parlement avant leur adoption – qui interviendra immédiatement après la mise en place de la banque – par le conseil d’administration. Le pacte d’actionnaires doit nous être soumis pour une autre raison : certaines situations exigeront de prendre des risques particuliers. Or la tradition fait que le modèle prudentiel de la CDC est particulièrement rigoureux. Celui de la BPI devra donc s’en inspirer – car elle engagera l’épargne des Français – mais il devra aussi lui permettre de remplir sa mission.

Des auditions que j’ai conduites, je tire certains enseignements sur les aspects opérationnels du dispositif. Ils ne sont pas du ressort de la loi mais ils sont essentiels pour que la banque respecte son mandat. Et, lors du débat parlementaire, le Gouvernement devra nous préciser ses conceptions en la matière.

Le mécanisme de création de la banque est compliqué puisque l’intégration s’effectuera en au moins deux temps et nécessitera un second projet de loi : Oséo, CDC Entreprises et le FSI d’abord, la COFACE et Ubifrance ensuite. Les auditions n’ont pas permis de comprendre l’utilité d’une telle démarche même si le statut de certains personnels – notamment ceux de la COFACE – peut l’expliquer à défaut de la justifier.

Le fonctionnement de la BPI reposera sur des structures existantes et un équilibre devra donc être trouvé entre les acquis et les nouvelles missions. La première filiale – constituée de l’ancien Oséo – s’occupera des prêts et la seconde sera dédiée aux fonds propres. Cette stricte séparation des deux activités de la banque constitue une garantie fondamentale et tire les leçons des expériences passées – celle du Crédit lyonnais, par exemple. Toutefois, le projet de loi est silencieux sur l’exercice de la fonction de synthèse et de coordination. Les auditions laissent penser que le directeur général de la BPI en serait chargé, aidé dans cette tâche par une organisation qui n’est pas encore arrêtée. Qu’une telle responsabilité pèse sur une seule personne mérite un débat entre le Parlement et le Gouvernement.

Sur la place des régions, des ambiguïtés subsistent. Le compromis signé entre le Premier ministre et l’Association des régions de France – l’ARF – se retrouve dans le texte de ce projet de loi. Pourtant, les préoccupations des uns et des autres demeurent et une clarification est urgente. Avec deux représentants au conseil d’administration, et deux autres au comité d’orientation, dont le président, les régions trouveront toute leur place dans le dispositif central. En revanche, localement, le comité régional d’orientation aura bien à sa tête le président de la région, mais sa composition reste encore floue puisqu’un décret en énumérera les membres ès qualités. Ainsi, le président de la région d’Ile-de-France, auditionné au titre de l’ARF, nous a fait part de son refus de voir le préfet et les représentants de l’État figurer dans ce comité – alors que leur présence est prévue – au motif que la loi de décentralisation aurait transféré aux régions la totalité des fonctions assurées par l’État en matière de développement économique et d’emploi. Je ne partage pas ce point de vue mais il faut régler la question car elle est importante.

À l’issue de la trentaine d’auditions que nous avons donc organisées, l’accueil réservé à la BPI a été bon dans l’ensemble, de la part des institutionnels comme des organisations syndicales, mais les espoirs qu’elle suscite doivent cependant être cadrés afin que les attentes ne soient pas démesurées.

Selon leurs représentants, les personnels des structures qui vont être intégrées à la BPI n’ont pas été associés à l’élaboration du projet. Des inquiétudes s’expriment donc sur les conséquences que la création de la BPI pourrait faire porter sur l’emploi en raison de la mutualisation de certaines fonctions. Ces craintes ne m’apparaissent pas fondées car de nouvelles tâches apparaîtront.

Mme Anne Grommerch. Vous nous avez rappelé, Mme la rapporteure, combien ce texte était essentiel tout en nous expliquant que tout était encore à faire. Je regrette que ce projet de loi ait été présenté dans la précipitation alors qu’un travail plus approfondi aurait été nécessaire. Le principe de la rationalisation des moyens de financement offerts aux entreprises ne peut que recueillir notre approbation. Cependant, la BPI sera dotée d’une force de frappe comprise entre 35 et 40 milliards d’euros, ce qui ne bouleversera pas fondamentalement le financement de l’économie qui représente environ 1 300 milliards d’euros dans notre pays.

Nos entreprises font face à un sérieux problème de financement : l’Association française des banques indique ainsi que 25 % à 30 % des PME et des TPE se sont vues refuser un crédit au cours des vingt-quatre derniers mois. Un durcissement du crédit s’est opéré pour 40 % à 46 % des entreprises. Bref, les banques ont tendance à ne seulement financer les entreprises qui ne rencontrent pas de difficultés.

Ce projet de loi vise à supprimer les doublons et à mutualiser les efforts. Des entités comme Oséo, le FSI, CDC Entreprises puis, dans un second temps, Ubifrance et la COFACE vont être absorbés par la BPI. Pourtant, ces organismes bénéficient d’une vraie visibilité en France comme à l’étranger et leur bilan est très positif. Dès lors, leur suppression n’est-elle pas dangereuse ?

Vous l’avez dit, madame la rapporteure, c’est la discussion parlementaire qui permettra de créer un instrument de financement efficace puisque le projet de loi, mis à part la question de la gouvernance, est actuellement trop lacunaire. Quelle sera la stratégie de la banque et qui, de l’État ou des régions, la définira ? Qui bénéficiera de l’action de la BPI ? Ces questions sont importantes mais doivent être précédées de l’élaboration d’une ligne directrice. Les fonds drainés par la banque devront-ils soutenir la politique industrielle de notre pays ou abonder certains secteurs comme l’économie sociale et solidaire ou l’agroalimentaire comme il semble être envisagé ? Peut-on se permettre de saupoudrer une ressource aussi précieuse pour les entreprises au risque de handicaper encore la compétitivité de notre économie ?

Il est important de mettre en place un guichet unifié et non unique afin de ne pas construire une usine à gaz.

Selon M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, « la BPI ne sera pas un machin parisien mais le fruit d’un partenariat étroit avec les régions et 90 % des décisions de la BPI seront prises en région ». En donnant le carnet de chèques aux élus régionaux, ne risque-t-on pas de favoriser des choix plus politiques qu’économiques ? La BPI va abriter les activités de crédit et celles d’apport en fonds propres, ce qui la rapproche des sociétés de développement régional qui furent un échec. Quelles garanties existent pour prévenir la répétition des erreurs passées ?

Quelle sera la place accordée aux TPE puisque seules les PME sont évoquées ? Elles doivent pourtant figurer explicitement dans le texte et je déposerai un amendement en ce sens.

Enfin, pourquoi ce qui touche à l’accompagnement des entreprises exportatrices ne sera-t-il intégré dans le dispositif que dans un second temps et par une autre loi ? Ne faut-il pas procéder dès maintenant à l’introduction d’Ubifrance et de la COFACE dans la BPI alors que le rétablissement de la balance commerciale est une nécessité ?

M. Patrice Prat. Le groupe SRC souhaite unanimement exprimer sa satisfaction au sujet de la création de la BPI qui constitue un signal fort envoyé aux acteurs économiques, notamment industriels. Le Président de la République, lors de la campagne électorale, avait fait part à plusieurs reprises de son souhait de mettre en place un tel outil financier, qui traduit sa volonté de promouvoir le retour de l’État stratège. Six mois après son élection, un projet de loi nous est déjà soumis, preuve que les critiques de l’opposition sur la lenteur des prises de décisions ne sont pas justifiées.

Le succès de la BPI passera par sa capacité à favoriser la réindustrialisation. Sa mission est de stimuler l’économie de nos territoires et l’entreprenariat, ainsi que d’anticiper les mutations. Ainsi, 40 milliards d’euros seront injectés dans l’économie réelle. La BPI soutiendra également les filières d’avenir et la conversion écologique et énergétique de l’industrie, qui constitue l’un des enjeux principaux de notre économie au XXIsiècle.

La crise a aggravé l’asphyxie financière des entreprises qui ont rencontré de grandes difficultés de trésorerie. La BPI pourra répondre à cette situation d’urgence en aidant les entreprises. Un partenariat ambitieux entre l’État et les régions permettra de renforcer l’appui à l’innovation et à l’export.

Ces missions visent à résoudre certains problèmes rencontrés par l’économie française : accès au crédit ardu pour les PME et les TPE, déficit de fonds propres des PME et des ETI et incapacité du marché à financer l’innovation. La BPI développera, en lien avec le Commissariat général à l’investissement, une stratégie plus ambitieuse en faveur du développement de l’innovation dans les secteurs clés de l’industrie française comme celui des énergies renouvelables. Le Président de la République avait d’ailleurs signalé, à l’occasion de l’ouverture de la conférence environnementale, le besoin de disposer de nouveaux outils financiers pour la transition écologique parmi lesquels la BPI pourra être rangée.

Le redressement productif ne doit pas s’inscrire dans une perspective de croissance à tout prix mais dans celle d’un développement durable rendu possible par des investissements dans les secteurs de l’éco-conception et de la rénovation énergétique. La BPI sera un levier pour le développement des filières vertes, porteuses d’emploi et d’investissement.

Félicitons-nous de cette création qui donnera au Gouvernement un instrument pour sa politique de relance industrielle dans le cadre de la transition écologique.

Mme Brigitte Allain. Le groupe écologiste salue la création de la BPI qui est une mesure phare de ce quinquennat. Elle répond à un besoin des entreprises qui rencontrent de grandes difficultés pour accéder au crédit. Le fonctionnement décentralisé de la BPI – qui reposera sur des antennes régionales – devrait lui permettre d’être proche des entreprises, en tout cas des plus grandes. Les régions ont désormais un rôle de pilotage de la politique économique. Cependant, l’échelle régionale ne paraît pas adaptée aux TPE : les bassins économiques et les collectivités territoriales infrarégionales seront-ils être associés à la gouvernance locale de la BPI ?

Outre l’activité principale de financement, quels seront les services fournis par la BPI aux entreprises ? Les structures qui vont être intégrées dans la BPI ne répondaient pas aux entreprises en demande de microcrédit. Or, 76 % des TPE nécessitent un financement inférieur à 15 000 euros. La BPI pourra-t-elle les aider ?

La banque ne disposera pas d’une dotation financière supérieure à celle des trois organismes qu’elle va regrouper : puisqu’elle devra faire des choix, quels seront les axes privilégiés ? Le soutien se concentrera-t-il davantage sur les entreprises exportatrices, innovantes, créatrices de bienfaits sociaux et environnementaux durables ou en difficulté ?

Cet outil peut être très utile pour accompagner les innovations sociales et environnementales des entreprises qui font éclore des métiers et développent de nouvelles activités. La BPI pourrait ainsi être le vecteur du pôle d’excellence économique qui créerait des emplois et exporterait ses savoirs. Pour ce faire, la vision à long terme doit être privilégiée.

Le rôle de la BPI ne sera pas de pallier les défaillances du marché, car sa mission est limitée. Favorisera-t-elle ainsi le renouvellement du secteur bancaire et sa réorientation vers le secteur productif ? Les cofinancements entre la BPI et les banques seront-ils encouragés ? Les banques devront jouer leur rôle de prêteur au moment où le Crédit immobilier de France – le CIF – s’effondre. Comment et combien de temps la Banque de France va-t-elle le soutenir ?

Mme Jeanine Dubié. Le groupe RRDP soutient l’engagement pris par le Président de la République de créer, dès 2013, une banque publique d’investissement. Nous regrettons toutefois que ce projet de loi soit examiné dans le cadre de la procédure accélérée qui laisse peu de temps pour mener un travail de fond.

Comme la banque publique allemande qui a octroyé 14 milliards d’euros de prêts et de crédits à quelque vingt mille PME depuis 2009, la BPI doit relancer la compétitivité des entreprises françaises et créer des emplois. Elle aura pour mission d’accorder des prêts aux PME et aux entreprises innovantes des « secteurs stratégiques d’avenir » – ceux qui favorisent la transition énergétique, le numérique ou l’économie sociale – et d’investir en capital dans ces mêmes sociétés pour les accompagner tout au long de leur développement et les aider à innover. Ce futur organisme doit également fournir des crédits aux PME exportatrices afin qu’elles puissent faire face à la concurrence allemande.

La BPI évitera la dispersion des flux financiers en regroupant Oséo, CDC Entreprises et le FSI et elle agira en direction de trois types de société : les entreprises industrielles, les entreprises innovantes et les PME exportatrices. Elle n’aura pas pour mission de sauver une entreprise en difficulté mais d’accompagner efficacement la croissance des PME. Afin de se situer au plus près des besoins des entreprises, son fonctionnement sera décentralisé dans les régions.

La BPI disposera, pour atteindre ses objectifs, d’une force de frappe de 42 milliards d’euros, soit deux fois plus que le FSI. Par ailleurs, la banque bénéficiera des liquidités des épargnants français grâce au doublement du plafond du livret de développement durable et l’augmentation de celui du livret A.

L’un des principaux apports de la BPI sera de renforcer les synergies entre des dispositifs qui existent déjà et qui ne sont que trop peu coordonnés. A contrario, une trop grande intégration risquerait de créer une structure administrative lourde et complexe qui ne pourrait atteindre ses objectifs. La solution proposée par le Gouvernement permet-elle de trouver le bon équilibre entre ces deux impératifs ? Comment la situation pourrait être évaluée au bout de deux ans ? Si elle s’avérait insatisfaisante, quelles corrections pourraient-elles être apportées ?

La BPI a pour but d’améliorer la coordination des actions de l’État et des collectivités territoriales – en particulier celles des régions. Les relations entre l’État et les régions sont aujourd’hui apaisées. On peut donc penser que le déploiement de la BPI se fera sans heurt, et même avec l’appui des conseils régionaux car ils ont à cœur de soutenir les entreprises. Dans le cas où ces rapports entre l’État et les régions se dégraderaient, notamment en cas d’alternance politique, les régions pourraient-elles continuer à participer activement à l’action de la BPI ? Autrement dit, qu’est-ce qui permet d’assurer la pérennité du dispositif ?

M. le président François Brottes. Lors de son audition par notre commission le 7 novembre dernier, M. Louis Gallois avait indiqué que l’ouverture du périmètre de la BPI aux TPE n’était pas une bonne idée – contrairement à votre souhait que je partage, madame la rapporteure. À ma question sur le risque de ne voir intervenir les banques que si la BPI agissait elle-même, M. Gallois m’a répondu qu’il fallait favoriser l’effet de levier, ce qui ne dissipe pas le risque du détournement de l’usage et de l’objet de la BPI.

Je vous laisse la parole, Madame la rapporteure, pour répondre à cette première série de questions.

Mme la rapporteure. C’est pour une contrainte de temps que toutes les dispositions, notamment opérationnelles, n’ont pas été arrêtées. Au cours des auditions menées, nos interlocuteurs ont en effet insisté sur l’urgence qu’il y avait à créer un dispositif qui réponde aux besoins des entreprises, notamment en trésorerie, qui ne sont pas satisfaits en période de crise. Je vous renvoie sur ce sujet aux annonces du Premier ministre. En 2009 déjà, Oséo était intervenu efficacement, pour un coût relativement faible – entre 300 millions et 500 millions d’euros –, en faveur d’entreprises qui représentaient 350 000 emplois. Cette opération sera reconduite au sein de la BPI.

En tout cas, la BPI est bien là pour pallier les défaillances du marché car il y a aujourd’hui des créneaux qui ne sont pas occupés, ou mal couverts, en particulier celui des crédits à long terme, indispensables à certains stades de la vie des entreprises. En outre, le rationnement du crédit ne pourra que se renforcer avec l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation dite de « Bâle III ».

Certes, les banques ne doivent pas se défausser sur la BPI. Et ce sera à la doctrine d’intervention d’éviter cet écueil. Quant à savoir si la BPI interviendra seule ou accompagnée, l’idée est de privilégier les cofinancements, mais, si les autres banques ne veulent pas intervenir, la présence de la BPI pourra être décisive et faire levier.

Le déploiement du dispositif au niveau régional doit être remis dans son contexte. La situation des régions est très hétérogène mais le cadre hexagonal est déjà étroit – le financement et la compétitivité de l’économie ne devraient-ils pas être traités au niveau de l’Europe ? –, et on ne va pas encore diviser par vingt-deux notre capacité d’intervention. Il est donc très important que la doctrine assure la cohérence des opérations de la BPI et la gouvernance de la BPI un équilibre satisfaisant entre l’échelon central et les régions. S’agissant de l’action en direction des secteurs et des filières, les limites de la région sont vite atteintes et la situation doit être appréciée au niveau national, surtout si les demandes d’aide aux collectivités ici vont de pair avec des fermetures de site ailleurs sur le territoire. Mais le dispositif opérationnel ne pourra pas ne pas tenir compte de l’expérience acquise par les régions, en particulier de leur très bonne connaissance du tissu économique local. Cette expertise, alliée à une stratégie nationale et à un outil offrant une palette très large de services aux entreprises, peut être d’un grand profit.

Quant au risque d’erreurs, voire de dérives, dans le choix des projets, il devrait être limité par les mécanismes prévus : les décisions sur les fonds propres et les engagements de long terme ne seront pas pris par les régions, sauf si elles s’engagent elles-mêmes financièrement.

La création de la BPI ne se traduira pas par des moyens supplémentaires. Toutefois, dans son rapport sur l’épargne réglementée, M. Pierre Duquesne suggère d’utiliser pour la BPI une partie de l’épargne réglementée, aujourd’hui très largement orientée vers le logement. En outre, l’intervention de la BPI pourra, en jouant sur l’effet de levier, susciter d’autres concours financiers. Certaines personnes auditionnées nous ont d’ailleurs indiqué que le montant des besoins n’était pas considérable ; nous verrons à l’usage. D’ailleurs, l’amendement qui renforce le rôle du Parlement prévoit qu’il débattra non seulement du pacte d’actionnaires et de la doctrine d’intervention, mais aussi du rapport annuel d’activité de la BPI. Ce dernier servira de base au dialogue entre le Parlement et le Gouvernement sur les ressources, si la question devait se poser ; sur la gouvernance et l’équilibre entre l’État et les régions. Ce sera aussi l’occasion de se pencher sur les orientations de la banque en termes de filières et de secteurs. La discussion avec le directeur général de la BPI permettra de faire évoluer le dispositif.

Les TPE ne figurent pas dans le projet de loi alors qu’elles sont mentionnées à de nombreuses reprises dans l’étude d’impact. Leur absence dans le texte du Gouvernement est-elle due à un oubli ? Nos interlocuteurs ont insisté sur la nécessité de les inclure dans le champ d’intervention de la BPI, d’où l’amendement que nous vous proposons.

Au-delà de la question de savoir si le guichet sera unique ou unifié, beaucoup de candidats se sont déclarés. Les régions considèrent qu’elles sont à même d’organiser ces guichets et le président de CCI France a proposé de les confier aux chambres de commerce et d’industrie. Il reste à définir s’il faut une doctrine unique pour tout le territoire ou si l’on doit s’appuyer sur ce qui a déjà été fait au niveau des régions. Une fois que les principes auront été posés, peut-être les acteurs locaux pourront-ils décider.

M. le président François Brottes. Je laisse maintenant à chacun des inscrits deux minutes pour poser des questions.

Mme Frédérique Massat. L’étude d’impact rappelle que la BPI doit, sans se substituer aux banques, combler les défaillances du marché. Mais comment éviter que le système bancaire ne se défausse sur elle ?

Je remercie notre rapporteure pour son excellent travail et pour les amendements qu’elle propose, notamment celui qui revalorise le rôle du Parlement, dont l’intervention – et c’est une première – est prévue en amont, et non a posteriori.

L’évaluation, dans l’étude d’impact, des conséquences pour l’État déconcentré et les régions, ne dit rien de l’aspect financier. Or les régions vont devoir remettre à plat les dispositifs existants, créer et animer des plateformes d’accueil. Comment les choses vont-elles se passer ?

Enfin, comment les entreprises de l’économie sociale et solidaire, qui sont en général de petite taille auront-elles accès à la BPI ?

M. Alain Marc. J’ai beaucoup apprécié la présentation pédagogique de notre rapporteure qui, fait remarquable, n’a pas hésité à nous faire part de ses doutes. C’est suffisamment rare pour mériter d’être souligné.

La BPI est un outil dont la gouvernance doit être encore précisée. Quel lien entretiendra-t-elle avec les plateformes d’initiative locale et les associations de capital-risqueurs ?

Mme Pascale Got. Le modèle de financement que propose la BPI ne risque-t-il pas de se heurter à la politique de concurrence si chère à l’Union européenne ?

Malgré vos précisions, madame la rapporteure, je continue à m’interroger sur la cohérence entre la politique nationale et les choix des régions, notamment en raison des inégalités et disparités territoriales ?

Existe-t-il d’ores et déjà des grilles et des critères pour cibler les activités à aider ?

En quoi la BPI peut-elle mieux faire qu’Oséo ?

Mme Michèle Bonneton. Les entreprises à caractère technologique seront-elles les seules concernées, ou bien la BPI financera-t-elle aussi les services et les entreprises de l’économie sociale ? Quelles seront les conditions portant sur l’activité de l’entreprise ?

Jusqu’où descendra-t-on dans le fonctionnement décentralisé ? Les bureaux de poste serviront-ils à mettre en place un maillage fin des territoires, au plus près des TPE ? Ne risque-t-on pas d’assister à une compétition entre les régions pour accéder au crédit de la BPI, plutôt qu’à une redistribution favorable à une meilleure égalité économique des territoires ? Des garde-fous sont-ils prévus ?

Si la Banque Postale se mettait à prêter aux entreprises, y aurait-il des synergies possibles avec la BPI ?

Mme Annick Le Loch. Vous avez précisé, madame la rapporteure, que les TPE pourraient s’adresser aussi à la BPI. Or elles sont nombreuses dans l’artisanat, « la première entreprise de France » – selon une formule qui n’est pas qu’un slogan. Pourtant, je n’ai rien trouvé sur l’accueil réservé à la BPI par l’Union professionnelle artisanale – l’UPA – que vous avez sûrement auditionnée. Quelles sont ses attentes ?

Mme Laure de La Raudière. Nous saluons l’idée même de la BPI mais le texte n’est qu’une esquisse de la tuyauterie et il reste des zones floues. La nouvelle entité réunira des structures comme Oséo, le FSI, Ubifrance et la COFACE, mais le budget de l’ensemble recevra-t-il moins, autant, ou plus que la somme des parties ?

Quel sera le calendrier de mise en œuvre ? Il nous manque encore des éléments importants, comme la doctrine d’intervention, le pacte d’actionnaires et le projet de loi concernant Ubifrance et la COFACE.

Je comprends bien la stratégie mais je n’y vois pas clair du tout sur l’aspect opérationnel. Une fois que nous aurons voté ce projet de loi et en attendant le second, les structures existantes, Oséo et CDC Entreprises continueront-elles à fonctionner ? Quelle sera la place respective de l’innovation et de l’export ? Quels seront les montants affectés à chacun des domaines d’intervention de la BPI ? Accordera-t-elle des crédits de trésorerie ? Même si le but visé est louable, nous devons être extrêmement prudents car il s’agit, vous l’avez rappelé, de l’argent de la collectivité et de l’épargne des Français.

Mme Marie-Lou Marcel. La création de la BPI correspond à un engagement fort du candidat François Hollande et les TPE et les PME en attendent beaucoup, en particulier pour soutenir l’innovation. La BPI reposera sur un réseau d’antennes régionales et les régions mettront en place des plateformes d’accueil sous la forme d’un guichet unique, ce dont on peut se féliciter d’autant plus que l’Observatoire de l’action économique régionale relève une augmentation du nombre d’interventions des régions depuis la crise de 2008. Le projet met en cohérence les outils existants et les actions portées par les régions.

Que penser de l’idée de créer, sous l’égide de la BPI, des fonds de retournement destinés à des entreprises connaissant des difficultés passagères ?

M. Philippe Le Ray. Je souscris aux objectifs visés à travers la création de cette banque, mais j’attire votre attention sur la nécessité de préserver le modèle économique du secteur. Qui se chargera d’actionner les garanties que la BPI aura prises ? Quelle marge prendra-t-elle sur ces concours ? Et combien ses ressources lui coûteront-elles ?

M. Philippe Kemel. Toutes les régions ne sont pas d’accord sur la solution finalement retenue pour les représenter dans les instances dirigeantes. Certes, les régions sont différentes les unes des autres mais les faire participer toutes au comité d’orientation permettrait d’entendre chacune et d’articuler parfaitement politique nationale et action régionale.

La loi pourrait-elle empêcher la banque de se livrer à des activités spéculatives, puisque l’expérience a montré que la participation de l’État au capital ne suffisait pas ?

Le rapport Gallois propose de conforter le rôle du Commissariat général à l’investissement pour préparer l’avenir. Ne doit-il pas être représenté au sein de la BPI de façon à mettre les financements au service des objectifs stratégiques ?

Le rapport que j’ai rendu récemment a mis en évidence les difficultés de l’économie solidaire à réunir des fonds propres. N’y a-t-il pas lieu de flécher cette activité spécifique dans la loi ?

M. Frédéric Roig. En Languedoc-Roussillon, le tissu économique est constitué
à 95 % par des TPE. Nous nous intéressons donc tout particulièrement à ce que la BPI peut apporter à l’artisanat, au commerce, aux sociétés coopératives et participatives – les SCOP – et aux sociétés coopératives d’intérêt collectif – les SCIC. À cet égard, il faudrait veiller à ce qu’elle complète l’offre du microcrédit, en finançant des concours de 10 000 à 30 000 euros, destinés à renouveler les équipements, et que les entreprises ne trouvent pas auprès du système bancaire classique.

Quels seront la durée et les taux des prêts consentis ?

S’agissant de la gouvernance, comment la stratégie économique régionale sera-t-elle prise en compte dans les critères d’éligibilité, de façon à éviter le saupoudrage et à s’assurer que l’argent ira aux filières prioritaires, notamment les plus porteuses d’emploi ?

M. Daniel Fasquelle. La BPI est confrontée au risque de décevoir. Jean-Pierre Jouyet a déclaré, à propos de Florange, que la BPI n’avait pas vocation à aider « les canards boiteux » et qu’il ne voyait pas ce qu’elle viendrait faire à Aulnay. Nous avons intérêt les uns et les autres à dissiper les illusions. Jean-Pierre Jouyet n’a toutefois pas exclu d’intervenir pour prévenir les difficultés des entreprises, mais je ne vois pas très bien comment l’action de la BPI se combinera avec les mécanismes qui existent déjà, et qui sont nombreux.

Par ailleurs, la BPI accompagnera le lancement de nouvelles activités, en particulier l’innovation ; Les services pourront-ils bénéficier de ces concours ?

M. le président François Brottes. Il ne faudrait pas que le risque d’être accusé de soutien abusif interdise à la BPI d’intervenir et de permettre ainsi à une entreprise de survivre. Enfin, permettez-moi de poser à mon tour une question Mme la rapporteure : la BPI sera-t-elle bien une banque ?

Mme la rapporteure. C’est ce que j’ai compris M. le président, et c’est la raison pour laquelle j’ai fini par renoncer à modifier le conseil d’administration, pour qu’il demeure restreint, efficace, comme celui d’une banque. Ensuite, la BPI, telle une banque, interviendra en fonction de critères d’appréciation du risque. D’où ma remarque sur la nécessité de construire un modèle prudentiel spécifique, pour s’écarter, un peu, de celui de la CDC qui est particulièrement strict, plus encore que celui des banques classiques. La BPI n’est pas un outil destiné à aider les entreprises en difficulté, mais cette règle ne l’empêchera pas d’apporter des financements à long terme, à des moments clés de la vie de l’entreprise : amorçage, développement, innovation, internationalisation. Oui à des crédits de trésorerie, dans le prolongement de ce qu’Oséo faisait, d’ailleurs très bien. Il n’est pas question de mettre en difficulté une entreprise qui traverse une passe délicate, mais dont les perspectives de développement sont bonnes.

L’économie sociale et solidaire est un secteur que nous entendons développer parce qu’il est porteur d’activités nouvelles et prometteuses, et que, dans certaines zones, il représente une part importante de l’emploi. Mais on ne s’en sortira pas si l’on veut inscrit dans la loi la liste des filières ou des secteurs éligibles. Les débats nous donneront l’occasion de mettre l’accent sur tel ou tel secteur prioritaire, mais il faut éviter de se disperser. Par ailleurs, l’économie sociale et solidaire est la cible d’une filiale de la Caisse des dépôts qui donne apparemment satisfaction et il existe déjà des dispositifs publics qui lui sont destinés.

La question de Mme Massat, qui est centrale, ne nous a pas échappé. La BPI doit pallier certaines défaillances du marché, incapable notamment de fournir des ressources stables aux entreprises, mais il ne faudra pas que les banques se défaussent sur elle. Les établissements de crédit ne souhaitent pas forcément voir la BPI intervenir seule, mais elle doit faire jouer le plus possible l’effet de levier. La discussion sur la doctrine d’intervention et sur le pacte d’actionnaires qui sera l’occasion de préciser le modèle prudentiel devra répondre à plusieurs questions qui viennent d’être soulevées.

Quant aux délais, ils devraient être assez courts dans la mesure où certains acteurs nous réclament d’aller plus vite. Si l’on veut que la BPI soit en place au début de l’année prochaine, il faudra avoir arrêté avant le pacte d’actionnaires ainsi que le modèle prudentiel, dont le Parlement devra, selon ce que nous avons prévu, avoir débattu avant leur passage en conseil d’administration.

L’UPA, que nous avons effectivement reçue, a réservé un accueil extrêmement favorable au texte car elle considère que la nouvelle structure apportera des réponses à ses adhérents, souvent mal traités par les banques. Elle souhaite même siéger au comité d’orientation.

Nous savons que nous sommes sous le regard de Bruxelles. Cela explique qu’un tel montage ait été choisi, et qu’il faille faire fi de la nécessité et attendre pour intégrer les volets internationalisation et export.

Pour prévenir les difficultés, monsieur Fasquelle, on peut agir à plusieurs niveaux, d’abord à celui de l’interlocuteur habituel des entreprises, en l’occurrence Oséo, dont nous pouvons nous inspirer de la présence sur le terrain et de la bonne connaissance du tissu économique. Il y a ensuite les organismes qui étudient en profondeur la situation des entreprises, en particulier la Banque de France. On nous a demandé de légiférer à ce sujet, mais une loi ne me paraît pas indispensable pour que la Banque de France partage ses données et ses informations. Les élus locaux savent déjà qu’ils peuvent faire appel à elle.

S’agissant des activités entrant dans le périmètre de la BPI, c’est par crainte d’en oublier que je ne veux pas d’une liste dans la loi. Il me semble moins risqué de décrire précisément les objectifs de la BPI et les moments de la vie de l’entreprise où elle doit intervenir – création, développement, innovation et internationalisation. Je vous propose d’ailleurs, comme je l’ai déjà souligné, d’ajouter la transmission qui n’est actuellement pas prévue dans le projet du Gouvernement. En procédant ainsi, on évite les écueils d’une liste limitative. Le Gouvernement parle des « entreprises » en général, et pas seulement des entreprises industrielles.

Madame Bonneton, le débat sur la région me paraît passablement faussé. Nous avons d’un côté un outil public national au service de l’économie et de l’emploi, et, de l’autre, les régions qui, au fil des années, et selon leurs spécificités, ont acquis une expérience en matière de développement économique. Il est indispensable d’agir à l’intérieur du cadre national. Ensuite, au niveau régional, le comité d’orientation présidé par le président de région interviendra avec, le cas échéant, le comité d’engagement si la région apporte des financements, et il fera le lien avec les politiques locales.

La présence au conseil d’administration deux représentants des régions sur quinze membres n’est pas négligeable puisque les actionnaires n’auront pas plus de huit représentants. Le comité d’orientation, qui associera les personnalités compétentes, les représentants des organisations syndicales et ceux des employeurs, comptera aussi deux représentants des régions, dont le président. À ce niveau, les régions pourront peser d’un poids significatif. La représentation me semble équilibrée et l’articulation assurée. Cela étant, la doctrine d’intervention et ce qui se décide en comité de pilotage pourront évoluer sans toucher à la loi. Nous avancerons en marchant grâce au rapport d’évaluation annuelle qui nous sera remis.

Votre question sur les budgets est tout à fait pertinente, madame de La Raudière, mais je suis incapable, à ce stade, de vous répondre. La Banque aura deux filiales principales, l’une qui remplacera Oséo et qui accordera des financements, et l’autre spécialisée dans l’investissement et les apports en fonds propres. L’existant servira donc de point de départ, en termes de compétences, de réseau et de financement. Et, grâce à l’intelligence collective, aux synergies et objectifs assignés à la Banque, j’espère que nous réussirons à faire mieux et à pallier les carences du système actuel.

Les demandes sur les taux et la durée des prêts sont trop précises également. Je vous renvoie à la doctrine d’intervention. En tout état de cause, la vocation de la BPI n’est pas de prêter aux entreprises à des taux inaccessibles… Elle devrait proposer des concours aux mêmes conditions qu’Oséo, dont le directeur nous a dit qu’il se finançait aujourd’hui à 2,37 %.

Monsieur Marc, la réponse à votre question sur les plateformes et les capital-risqueurs dépendra du contexte local.

La politique d’emplois de la banque fera l’objet de discussions avec les dirigeants, monsieur Kemel. Mais le modèle prudentiel de la CDC est plutôt trop strict, que pas assez.

La Commission passe ensuite à l’examen des articles.

Article 1 : Objet de la banque publique d’investissement

La Commission examine l’amendement CE 1 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le texte du Gouvernement a été réduit après son passage au Conseil d’État et cet amendement propose de redéfinir et de préciser les missions de la Banque, en mentionnant qu’elle s’adressera en priorité aux PME, TPE et ETI ; en ajoutant la transmission – qui est une phase sensible – aux moments de la vie de l’entreprise où la banque pourra intervenir et qui sont déjà cités dans le texte ; et qu’elle devra favoriser l’emploi, en même temps que la croissance et la compétitivité des entreprises.

M. le président François Brottes. Je souhaiterais faire trois remarques au sujet de cet amendement.

Le texte, en l’état, évoque des « politiques menées par l’État et les régions ». Je propose de retenir la formulation suivante : « des politiques menées par l’État et menées par les régions » car elles ne se confondent pas forcément.

Ensuite, en se contentant d’écrire qu’elle « aide à la création d’entreprises », on risque d’exclure une participation en capital. Le verbe me semble trop faible.

Enfin, la précision « de croissance » à propos des entreprises susceptibles d’être financées par la BPI est sujette à interprétation. Elle laisse la porte ouverte à la contestation sur la nature de l’entreprise et sur l’opportunité du projet à financer. Il vaudrait mieux supprimer ces termes.

Mme Michèle Bonneton. Est-ce à dessein que le texte est muet sur les crédits de trésorerie ?

Mme la rapporteure. Je suis tout à fait d’accord pour supprimer la précision « de croissance », afin de lever une ambiguïté.

Comme il est écrit que la BPI agira comme « prêteur », il est inutile d’entrer davantage dans le détail. Je ferai la même réponse au président puisqu’il est prévu que la banque agira aussi comme « investisseur ».

Faute de trouver une meilleure rédaction, je me rallie à la proposition du président concernant les politiques de l’État et des régions.

La Commission adopte l’amendement CE 1 ainsi rectifié.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er modifié.

Article 2 : Mesures de coordination avec l’ordonnance du 29 juin 2005 relative à Oséo

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 sans modification.

Article 3 : Dispositions relatives au conseil d’administration de la Banque publique d’investissement

La Commission adopte l’amendement CE 7 de la rapporteure, qui précise que le conseil d’administration devra être composé dans le souci du principe de parité entre les hommes et les femmes.

Elle adopte ensuite l’amendement CE 2 de la rapporteure, qui stipule que le directeur général figurera parmi les quatre représentants de l’État au conseil d’administration, de façon à respecter l’égalité entre les deux actionnaires.

Puis elle examine l’amendement CE 5 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit de s’assurer que les représentants des régions au conseil d’administration seront désignés par une association représentant l’ensemble des régions, et non une fraction partielle du territoire.

M. le président François Brottes. L’adjectif « françaises » n’est-il pas superflu ?

Mme la rapporteure. On peut effectivement le supprimer.

La Commission adopte l’amendement CE 5 ainsi rectifié.

Elle adopte ensuite à l’unanimité l’amendement CE 3 de la rapporteure, qui supprime la référence à la loi relative à la démocratisation du secteur public puisque l’État n’est pas l’actionnaire majoritaire de la BPI.

La Commission en vient à l’amendement CE 4 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le pacte d’actionnaires et la doctrine d’intervention devront, avant leur adoption par le conseil d’administration, être communiqués aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, et faire l’objet d’un débat, tout comme le rapport d’évaluation annuel du directeur général.

La Commission adopte l’amendement.

Elle donne ensuite un avis favorable à l’adoption de l’article 3 modifié.

Article 4 : Dispositions relatives au comité national d’orientation de la Banque publique d’investissement

La Commission adopte à l’unanimité l’amendement CE 8 de la rapporteure qui précise que le comité national d’orientation devra, lui aussi, être composé dans le respect du principe de parité.

Elle adopte ensuite l’amendement CE 6 rectifié de la rapporteure, qui est de cohérence.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 4 modifié.

Article 5 : Dispositions financières et réglementaires relatives à la banque publique d’investissement

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 6 : Possibilité pour la banque publique d’investissement de transmettre à l’État des informations

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 7 : Dispositions transitoires relatives à Oséo

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 8 : Dispositions transitoires relatives à Oséo

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 9 : Habilitation faite pour le Gouvernement pour prendre des mesures permettant l’application de la présente loi outre-mer

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 10 : Ratification de l’ordonnance n° 2009-915 du 1er août 2011 relative aux OPCVM

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 11 : Correction d’erreurs matérielles relevées dans l’ordonnance n° 2009-915 du 1er août 2011 relative aux OPCVM

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 12 : Habilitation faite au Gouvernement pour prendre par ordonnance toute mesure permettant de transposer en droit interne la directive 2011/61/UE du 8 juin 2011 sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Article 13 : Habilitation faite au Gouvernement pour prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi nécessaire à la réforme du statut d’établissement de crédit

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article sans modification.

Enfin, la Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble du projet de loi modifié.

amendements examinÉs par la commission

Amendement CE 1 rectifié présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article premier

Substituer à l’alinéa 2 les trois alinéas suivants :

« Art. 1er – La banque publique d’investissement est un groupe public au service du financement et du développement des entreprises qui vise, dans le respect et en appui aux politiques menées par l’État et menées par les régions, à favoriser la croissance, l’emploi ainsi que la compétitivité de notre économie.

« Composée d’un établissement public, d’une société anonyme et de filiales, la banque publique d’investissement oriente en priorité son action en faveur des très petites entreprises, des petites et moyennes entreprises ainsi que des entreprises de taille intermédiaire. Agissant comme conseil, prêteur et investisseur avisé, elle aide à la création d’entreprises, à leur développement, à leur capacité à innover, à leur internationalisation ainsi qu’à leur transmission.

« Dans le respect de la stratégie arrêtée au niveau national par le conseil d’administration mentionné à l’article 3 de la présente loi, la banque publique d’investissement intervient dans un souci constant de proximité à l’égard des entreprises en s’appuyant sur les comités régionaux d’orientation mentionnés à l’article 4 ainsi que sur tout autre acteur propre à soutenir son action. ».

Amendement CE 2 présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article 3

I. – À l’alinéa 3, substituer aux mots : « , dont quatre représentants de l’État », les mots : « : quatre représentants de l’État, dont le directeur général, »

II. – En conséquence, supprimer l’alinéa 7.

Amendement CE 3 présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article 3

Après le mot : « capital », supprimer la fin de l’alinéa 6.

Amendement CE 4 présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article 3

Après l’alinéa 9, insérer les deux alinéas suivants :

« Le pacte d’actionnaire passé entre les représentants de l’État et ceux de la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que la doctrine d’intervention définie par le directeur général, sont communiqués aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat avant leur adoption par les instances de la banque publique d’investissement. Ils donnent lieu à un débat.

Le directeur général de la banque publique d’investissement rend compte au Parlement de l’activité de la banque en lui remettant un rapport d’évaluation annuel. »

Amendement CE 5 rectifié présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article 3

À l’alinéa 4, substituer à la seconde occurrence des mots : « des régions », les mots : « de l’ensemble des régions ».

Amendement CE 6 présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article 4

À l’alinéa 6, substituer à la seconde occurrence des mots : « des régions », les mots : « de l’ensemble des régions ».

Amendement CE 7 présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article 3

À l’alinéa 2, après le mot : « comprend », insérer les mots : « , dans le respect du principe de parité entre les hommes et les femmes, ».

Amendement CE 8 présenté par Mme Clotilde Valter, rapporteure pour avis :

Article 4

À l’alinéa 3, après le mot : « composé », insérer les mots : « , dans le respect du principe de parité entre les hommes et les femmes, ».

*

* *

Informations relatives à la commission

– Vote sur la nomination de M. Pierre-Franck Chevet en qualité de président de l’ASN

Le dépouillement du scrutin du 6 novembre 2012 concernant l’avis sur la nomination de M. Pierre-Franck Chevet en qualité de président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a donné le résultat suivant au sein de notre commission :

Votants : 22

Pour : 20

Bulletins nuls : 2

Contre : 0

Pour votre information, cette nomination a également été approuvée par la Commission des affaires économiques du Sénat (par 10 votes favorables sur 10 votants).

La nomination par M. le président de la République de M. Pierre-Franck Chevet à la présidence de l’ASN est donc autorisée par le Parlement.

– Nomination de rapporteur

La commission a nommé Mme Audrey Linkenheld, rapporteure sur le projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public pour le logement et au renforcement des obligations de production de logement social (sous réserve de son dépôt).

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 13 novembre 2012 à 16 h 15

Présents. - Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, Mme Jeanine Dubié, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, Mme Pascale Got, Mme Anne Grommerch, M. Antoine Herth, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Alain Marc, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Yannick Moreau, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, Mme Clotilde Valter

Excusés. - M. Philippe Armand Martin, Mme Josette Pons, M. Bernard Reynès, M. Fabrice Verdier

Assistaient également à la réunion. - M. Arnaud Leroy, M. Boinali Said