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Commission des affaires sociales

Mercredi 2 octobre 2013

Séance de 9 heures 

Compte rendu n° 04

Présidence de Mme Catherine Lemorton, Présidente

– Suite de l’examen, ouvert à la presse, des articles du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (n° 1376) (M. Michel Issindou, rapporteur)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 2 octobre 2013

La séance est ouverte à neuf heures cinq.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission poursuit l’examen, sur le rapport de M. Michel Issindou, les articles du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites (n° 1376).

Après l’article 16

La Commission est saisie d’une série d’amendements portant articles additionnels après l’article 16.

Elle examine tout d’abord l’amendement AS 153 rectifié de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Cet amendement vise à prendre en compte les trimestres de stages en milieu professionnel au titre de la durée d’assurance. Ce serait un signal fort adressé aux jeunes qui, très nombreux, sont tenus d’accomplir des stages au cours de leur formation, pour certains pendant quatre ou cinq ans.

M. Michel Issindou, rapporteur. Les stages permettent aux étudiants de mettre un pied dans l’entreprise ; un stage n’est pas vraiment un travail, mais il y ressemble. Aujourd’hui, la gratification que reçoit le stagiaire est exonérée de charges sociales. La question de savoir si les périodes de stages peuvent donner lieu à validation dans le calcul de la pension de retraite fait l’objet de débats intenses. Aussi aimerais-je connaître l’avis de la ministre sur ce point.

M. Dominique Dord. L’amendement est excellent, la gêne avouée du rapporteur en atteste. Vous avez été les premiers, chers collègues du groupe socialiste, à demander que les stages soient strictement encadrés afin que les entreprises n’en abusent pas, et vous avez eu raison. Par notre volonté commune, la vôtre en particulier, les stages ont été dotés d’un statut comparable à celui d’un début de carrière professionnelle et ils marquent désormais une véritable entrée sur le marché du travail. Dans ce contexte, le fait que les périodes de stage soient omises du calcul de la durée d’assurance retraite pose une difficulté réelle. Certes, le sujet complique l’équation posée dans le projet de loi, qui n’en fait pas mention ; mais ce serait une incohérence de ne pas le faire. Nous partageons votre embarras, monsieur le rapporteur ; il n’en reste pas moins que cet amendement a été présenté, qu’il doit être mis aux voix et qu’il nous faut connaître votre avis.

M. Arnaud Robinet.  Dans un souci d’équité, les stagiaires devraient alors être concernés par le fameux compte de pénibilité. Ce serait logique si l’on considère que les stages constituent le départ d’une carrière professionnelle.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Nous sommes nombreux à souhaiter connaître la position du Gouvernement sur ce sujet particulier et, plus largement, sur les conséquences du texte pour les jeunes générations. Des inquiétudes légitimes s’expriment, dont plusieurs de nos amendements se font l’écho. Elles sont dues à la conjonction de trois facteurs : l’allongement de la durée moyenne des études ; les difficultés d’insertion dans la vie active ; les conséquences de l’allongement de la durée de cotisation envisagée dans la présente réforme. Pour ces raisons, il faut aller plus loin en faveur des jeunes. Il a été question hier d’un dispositif de rachat de cotisations correspondant aux trimestres d’études, dont on a vu les lacunes. Il conviendrait de le compléter par des mesures permettant aux jeunes d’acquérir des droits à la retraite plus précocement mais il reste à en déterminer le moyen. L’enjeu est capital puisqu’il s’agit de préserver la confiance de la jeunesse dans la retraite par répartition ; la proposition contenue dans cet amendement peut être une première réponse. Cependant, le dispositif général doit être conçu avec soin : il ne s’agit en aucun cas d’assimiler les stages à des emplois ; par ailleurs, tous les étudiants ne sont pas tenus aux mêmes périodes de stage. C’est pourquoi nous proposerons des amendements tendant à favoriser le rachat plafonné de trimestres d’études, pour ne pas favoriser ceux qui font des études longues.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Chers collègues, je vous appelle à la concision.

Mme Fanélie Carrey-Conte. C’est, madame la présidente, que j’ai par mon intervention défendu par avance plusieurs amendements.

M. Denis Jacquat. Comme nul ne l’ignore, il est de plus en plus difficile de trouver des stages ; la proposition avancée risque d’aggraver encore la situation. D’autre part, la question concerne bien davantage le ministre du travail que la ministre de la santé.

M. Fernand Siré. Le cursus des étudiants en médecine est long d’au moins neuf ans et plutôt dix. Au cours de leurs études, ils effectuent de quatre à cinq années de stages à l’hôpital, où ils rendent de considérables services. Si la durée de cotisation est portée à 43 ans mais que les périodes de stage ne sont pas prises en compte dans le calcul de la retraite, les futurs médecins, qui auront commencé à travailler à 27 ans au minimum, ne pourront prendre leur retraite avant d’avoir atteint l’âge de 70 ans, voire 72. Il y a là un réel problème.

Mme la présidente Catherine Lemorton. On s’écarte du cas général ; la problématique est un peu différente pour les étudiants en médecine.

M. Dominique Tian. Il est paradoxal de tenter de sauver le système de retraite par répartition et de multiplier, au long du débat, les charges supplémentaires. Nous n’avons malheureusement pas les moyens de prendre en compte les périodes de stage au titre de la durée d’assurance. De plus, mon collègue Denis Jacquat l’a souligné, il est déjà difficile de trouver des stages alors que les gratifications sont exonérées de cotisations sociales ; la mesure aggraverait cette difficulté. Enfin, les stages sont un atout pour la carrière professionnelle. Tous ces facteurs devraient inciter à ne pas durcir la législation.

M. Philippe Vigier. L’amendement tend à adresser un signal à la jeunesse. La pratique des stages pendant les études s’est généralisée, nul ne le conteste, et il suffit de compter le nombre de stagiaires de l’Institut d’études politiques accueillis à l’Assemblée nationale pour se le rappeler. Faut-il continuer de ne pas prendre en compte dans le calcul des retraites cette période pendant laquelle les jeunes gens sont très actifs, au moment où on leur demande de travailler plus longtemps sans leur assurer une pension plus élevée ? Ou faudrait-il interdire les stages, qui ont l’intérêt puissant de faire découvrir les métiers aux étudiants, et dont on sait combien ils sont répandus partout en Europe et notamment en Allemagne ? Exclure les périodes de stage du calcul des retraites, c’est passer à côté du sujet.

Mme Bérengère Poletti. Je puis témoigner, pour les avoir vécues à l’hôpital, que les périodes de stage sont des périodes de formation. Il me paraîtrait donc plus sage de favoriser le rachat des trimestres d’études que de valider les périodes de stage qui participent, je le redis, à la formation.

M. le rapporteur. Il n’y a aucune honte à reconnaître que le sujet, difficile, suscite des interrogations, un débat et un trouble sur l’ensemble de nos bancs. Non seulement la durée des stages n’est pas la même pour tous les étudiants, mais cotiser sur une gratification mensuelle de 430 euros ne permettrait pas de valider les périodes correspondantes. Pour ces raisons, je porte un avis défavorable sur l’amendement dans sa rédaction actuelle, mais je ne ferme pas la porte à l’éventuelle validation des durées de stage.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. La préoccupation légitime s’est exprimée de savoir comment répondre au défi de l’entrée dans la vie active. La réforme qui vous est soumise tend, en le consolidant, à renforcer la confiance de la jeunesse dans le système de retraite par répartition : les jeunes gens doivent savoir qu’ils pourront compter sur un système solide pour ne pas se laisser happer par le système de capitalisation qui prend de l’ampleur.

Vous proposez, madame Poletti, de favoriser le rachat des trimestres d’études ; je rappelle que le texte prévoit déjà cette disposition. Je ne sais si vous vous exprimiez à titre personnel ou au nom de votre groupe, mais nous pourrons donc nous retrouver sur ce point, et nous aurons votre soutien. En revanche, il n’est pas envisageable pour moi d’aller vers la validation de périodes de stage sans demander une contrepartie financière aux étudiants considérés. Ce serait inéquitable au regard des jeunes qui, ayant un emploi, cotisent pour leur retraite, et ce le serait d’autant plus que, le plus souvent, les jeunes gens qui font des études s’insèrent plus facilement et mieux sur le marché du travail.

Je suis favorable, madame Carrey-Conte, à ce que la réflexion collective se poursuive, d’ici à l’examen du texte en séance publique, sur la manière de prendre en compte plus spécifiquement les périodes de stage, aux conditions suivantes : que les stages aient lieu dans le cadre de la formation ; qu’il n’y ait pas de validation sans cotisation ; que la période de stage ne soit pas banalisée. On ne peut pas faire comme si un stage était une période de travail comme une autre ; ce serait créer un « sous-statut » inacceptable, avec des emplois rémunérés 430 euros par mois, sans plus pouvoir lutter contre les dérives constatées dans certains secteurs qui emploient des stagiaires à la place de salariés, et où à une année de stage succède une année en contrat à durée déterminée suivi, si l’intéressé a de la chance, par un contrat à durée indéterminée. Si les conditions dites sont respectées, nous verrons comment articuler un tel dispositif avec celui du rachat aidé des trimestres d’études déjà prévu dans le texte.

M. Arnaud Robinet. Nous approuvons l’ensemble de vos propos, madame la ministre, et nous nous félicitons de constater que le Gouvernement, qui comprenait déjà un ministre UMP en la personne de M. Manuel Valls, en compte un autre – vous.

Mme la ministre. Vous voterez donc le texte ?

M. Arnaud Robinet. Non. La question qui nous est posée est de savoir comment sauver et financer notre système de retraite ; or, le financement n’étant pas précisé, le système sera mis à mal. Quant à vous, madame Carrey-Conte, au nom de qui pensiez-vous parler ? La retraite est peut-être la priorité des jeunes apparatchiks du parti socialiste mais ce n’est pas celle de la jeunesse française : elle veut trouver du boulot et définir un projet personnel et professionnel.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Robinet, vos provocations stériles n’ont pas lieu d’être.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement AS 153 rectifié.

M. Christian Paul. Étant donné l’obstruction permanente à laquelle se livre l’opposition, j’aimerais vous entendre rappeler, madame la présidente, les règles relatives aux prises de parole en commission.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je me limiterai à dire que les orateurs peuvent s’exprimer pour autant qu’ils ne versent pas dans la provocation, et que s’il en va autrement, ils ne le pourront plus.

La Commission est saisie de l’amendement AS 71 rectifié de Mme Véronique Massonneau. 

Mme Véronique Massonneau. L’amendement vise à intégrer les conventions de stage au registre unique du personnel. Ainsi saura-t-on au moins le nombre des stagiaires au sein d’une entreprise donnée. Cette mesure s’inscrit dans la logique de validation des trimestres de stage au titre des annuités de retraite et contribue à repérer plus facilement les entreprises abusant de stages qui sont en réalité des emplois déguisés.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Nous avons entamé un travail important à ce sujet. Le législateur a déjà interdit les stages pratiqués en dehors d’un cursus de formation. En outre, la conférence sociale de juin prévoit une initiative législative sur l’encadrement des stages et le droit des stagiaires, initiative à laquelle je vous renvoie. Il serait cavalier, c’est le cas de le dire, de prendre une telle mesure dans un projet de loi consacré aux retraites.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement AS 157 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Les périodes de stage, on le sait, sont souvent imposées aux étudiants entrant dans la vie professionnelle. Vous venez de dire, madame la ministre, qu’il n’était pas possible d’intégrer ces périodes dans le système de retraites si elles ne donnaient pas lieu à cotisations sociales. Cet amendement qui prévoit d’introduire dans l’assiette des cotisations sociales la gratification versée à compter du troisième mois de stage répond donc à votre souhait.

M. le rapporteur. Avis défavorable, pour les raisons que j’ai énoncées au sujet de votre premier amendement. Soumettre ces rémunérations à cotisations n’est pas forcément le sujet de la réflexion.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS 154 du même auteur.

M. Philippe Vigier. Cet amendement a le même objet, mais il prévoit que la gratification ne puisse être introduite dans l’assiette des cotisations sociales qu’à condition que le stage soit validé.

Nous sommes tous d’accord pour considérer que le dispositif de rachat d’années d’études fonctionne mal – moins de 10 % des étudiants y ont recours – et qu’il faudrait l’encourager. Dès lors que la validation atteste que le stage s’inscrit bien dans le cadre d’une formation qualifiante, il serait normal que la gratification entre dans l’assiette. Ce signal conviendrait parfaitement au « contrat de confiance » que vous voulez passer avec les nouvelles générations, madame la ministre.

M. Jean-Marc Germain. Je souscris en grande partie aux propos de M. Vigier. Nous devons trouver des solutions au recul effrayant du nombre de trimestres cotisés par les personnes ayant atteint l’âge de trente ans – on a perdu trois ans au cours des vingt dernières années. Le Gouvernement a réalisé des avancées importantes en matière de formation professionnelle et d’apprentissage, mais la question des stages reste à régler. Il me semble souhaitable que l’on puisse commencer à accumuler des droits dès lors que l’on est dans l’entreprise.

Cela étant, la question relève de l’initiative législative qui mettra de l’ordre dans le domaine des stages. Notre volonté est de favoriser les stages en début de cursus, afin que les jeunes découvrent l’entreprise, mais de privilégier ensuite les contrats de travail dès lors que l’étudiant a atteint un certain niveau d’études, par exemple dans le cas des années de césure et des années postérieures au master, et d’assimiler les stages abusifs à du travail dissimulé.

J’espère que nous avancerons d’ici à la séance publique afin de donner ce signe de confiance à la jeunesse.

M. le rapporteur. Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment.

M. Bernard Accoyer. Comme d’autres, l’amendement contribue à augmenter non seulement les charges des entreprises, mais aussi celles des collectivités publiques. Il se traduit donc par un accroissement de la dépense publique. Je soulève la question une nouvelle fois : ces amendements ont-ils été soumis au président de la commission des finances pour qu’il en vérifie la recevabilité financière ? Si tel n’était pas le cas, nous serions mis dans une situation délicate d’un point de vue constitutionnel !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Il ne vous a pas échappé que les amendements de M. Vigier prévoient la compensation de la perte de recettes et, par conséquent, ne tombent donc pas sous le coup de l’article 40 de la Constitution. Par ailleurs, le Règlement précise bien que c’est le président de la commission qui apprécie la recevabilité financière des amendements déposés en commission.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements AS 490 de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, et AS 134 de Mme Fanélie Carrey-Conte, pouvant faire l’objet d’une discussion commune.

M. Régis Juanico. Depuis 1995, l’âge moyen de sortie des études est resté de 21,5, mais cette stabilité recouvre de grandes différences : alors qu’il s’élève à 24 ans pour les diplômés de l’enseignement supérieur, il n’est que de 17 ans pour les jeunes non diplômés. À 21 ans, 50 % d’une classe d’âge continue des études, 10 % à 25 ans.

Le problème n’est pas tant celui de l’emploi immédiatement après la formation initiale que celui du délai pour obtenir un emploi stable. Bien souvent, le jeune n’obtient un CDI que cinq ans après la sortie des études. Du fait de l’allongement de la durée des études et de l’augmentation du chômage des jeunes de moins de trente ans, on est passé de quarante trimestres validés avant trente ans pour la génération née entre 1934 et 1943 à trente seulement pour la génération entre 1964 et 1973.

Nous devons donc réfléchir à la prise en compte des périodes d’instabilité sur le plan de l’emploi. Le texte apporte des solutions concernant le temps partiel. S’agissant du service civique, la loi de 2010 prévoit déjà des droits à la retraite. Reste la question des « petits boulots » et des stages, objet de l’amendement AS 490. La commission des finances souhaite que, six mois après l’adoption de la loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport étudiant la possibilité d’intégrer les périodes de stage à la durée d’assurance.

M. Dominique Tian. Il serait plus simple de préciser que le rachat peut être effectué tout au long de la vie de la vie professionnelle et non, comme il est prévu, dans un délai de cinq ans.

M. le rapporteur. Il conviendrait en effet, monsieur Juanico, de mesurer l’impact de ces rachats. Un rapport pourrait être utile pour nous éclairer et faire avancer la réflexion.

M. Jean-Pierre Barbier. Je partage l’avis du rapporteur. Le dispositif proposé est inefficace : aucun jeune ne rachètera des trimestres dans les cinq premières années de sa vie professionnelle. Quand on entre dans la vie active, on a bien d’autres sujets de préoccupation que celui de la retraite !

M. Dominique Tian. C’est le troisième ou le quatrième rapport que nous demandons depuis hier soir. Il vaudrait mieux prendre des décisions !

Le dispositif, nous le savons, ne fonctionne pas à cause de la brièveté du délai de cinq ans. Dans cette période, les jeunes se soucient d’autres choses que de leur retraite et ils n’ont pas les moyens financiers de ces rachats. Le rapporteur l’a lui-même reconnu : si le système était plus souple, les gens y adhéreraient plus facilement. La solution, nous l’avons à portée de main : porter le délai à toute la durée de la vie professionnelle.

M. le rapporteur. Le coût serait sans doute beaucoup plus élevé et je crains que cette disposition ne soit rejetée au titre de l’article 40 de la Constitution.

J’invite M. Juanico à retirer son amendement en attendant la discussion que nous aurons sur le sujet dans les prochains jours. Peut-être trouverons-nous une solution acceptable qui nous évitera un rapport supplémentaire.

M. Régis Juanico. Je retire l’amendement.

L’amendement AS 490 est retiré.

Mme Fanélie Carrey-Conte. L’amendement AS 134 est un amendement de repli par rapport à une proposition, repoussée au titre de l’article 40, sur la validation des années d’études. Je vais le retirer – de même que les amendements suivants AS 317 et AS 323 deuxième rectification, qui demandent également la remise de rapports – afin que nous poursuivions la discussion avant la séance publique. Je comprends les propos de Mme la ministre comme une invitation à continuer à travailler à des propositions concrètes, concernant notamment le niveau auquel les périodes d’études ou de stage pourront être prises en charge.

Cela étant, mes chers collègues de l’opposition, il est absurde d’opposer les préoccupations des jeunes en matière d’emploi et en matière de retraite. Les deux questions sont évidemment liées. Un système de retraite par répartition financièrement pérenne et garantissant aux retraités un niveau de vie décent passe forcément par un effort intense en direction du plein-emploi.

L’amendement AS 134 est retiré.

La Commission en vient aux amendements AS 489 de la commission des finances, et AS 317 et AS 323 deuxième rectification de Mme Fanélie Carrey-Conte, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. Régis Juanico. Pour les raisons de recevabilité financière que vient d’exposer Mme Carrey-Conte, la commission des finances s’est contentée, dans l’amendement AS 489, de demander la remise d’un rapport sur la question de l’amélioration de la prise en compte des périodes de stage. Je retire cet amendement au bénéfice de la discussion collective que nous aurons à ce sujet.

Mme Fanélie Carrey-Conte. Je retire également mes deux amendements.

Les amendements AS 489, AS 317 et AS 323 deuxième rectification sont retirés.

Article 17 : Prise en compte des périodes d’apprentissage au titre de l’assurance vieillesse

La Commission est saisie de l’amendement AS 307 de M. Jean-Patrick Gille.

M. Jean-Patrick Gille. L’article 17 vise à assurer aux apprentis la validation de l’ensemble de la durée de leur apprentissage pour la retraite. Je propose d’étendre cette garantie à l’ensemble des contrats en alternance, qu’ils soient d’apprentissage ou de professionnalisation.

M. le rapporteur. L’intention est excellente mais il semble bien que les 150 heures de SMIC effectuées au titre des contrats que vous mentionnez suffisent pour valider ces activités. L’amendement est satisfait par le projet de loi.

M. Jean-Patrick Gille. Mais les personnes en contrat d’alternance, notamment les plus jeunes, ne sont rémunérées qu’à 50 % du SMIC.

M. le rapporteur. Même dans ce cas, elles bénéficieront du dispositif.

M. Jean-Patrick Gille. Je retire mon amendement

M. le rapporteur. Je veux soulever à cette occasion la question des personnes ayant effectué leur apprentissage avant 1972, ainsi que celle des assistantes maternelles et des travailleurs indépendants, qui se demandent comment récupérer des années incomplètes. Les assistantes maternelles, en particulier, effectuent peu d’heures. Leur permettre de valider ces heures qui ne relèvent ni du stage ni de l’alternance constituerait une mesure favorable aux femmes.

Mme la ministre. Je confirme à M. Gille que les situations qu’il évoque sont d’ores et déjà couvertes par le texte.

Pour le reste, monsieur le rapporteur, le Gouvernement travaille pour présenter d’ici à la séance publique des propositions permettant de répondre à la situation des assistantes maternelles ou des conjoints collaborateurs. Toute contribution des députés sera examinée avec attention, de même que, en matière d’apprentissage, toute disposition sur des situations qui n’entreraient pas dans le champ du projet de loi.

M. Dominique Tian. On ne peut prendre des dispositions en faveur des seules assistantes maternelles sans créer une rupture d’égalité. Cette catégorie professionnelle a réclamé des mesures – c’est son droit –, mais est-on certain d’avoir demandé aux autres ce qu’elles en pensaient ?

Mme Linda Gourjade. Précisons que les assistantes maternelles sont payées l’équivalent de trois heures de SMIC pour une journée de travail. Abaisser le seuil de 200 à 150 heures de SMIC permettrait de reconnaître un temps de travail effectif qui ne correspond pas au temps de travail rémunéré.

M. le rapporteur. Cet argument mérite d’être pris en considération.

Par ailleurs, monsieur Tian, j’ai également mentionné les indépendants et les conjoints collaborateurs. Nous examinerons l’ensemble de ces situations.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission adopte l’article 17 sans modification.

Article 18 : Validation des périodes de formation des demandeurs d’emploi

La Commission est saisie de l’amendement AS 277 de M. Jean-Pierre Decool.

M. Rémi Delatte. Nous sommes au point de rencontre entre le souhaitable et le raisonnable. La sagesse voudrait que la contrainte financière l’emporte : je rappelle que l’objectif est l’équilibre du système, pour lequel nous devons trouver 20 milliards d’euros.

Pour autant, la possibilité de rachat ultérieur de trimestres par le stagiaire peut apparaître comme une bonne réponse, en dépit des difficultés de mise en œuvre. Je retire donc mon amendement.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission adopte l’article 18 sans modification.

Article 19 : Amélioration des droits à pension des conjoints collaborateurs

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS 413 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 19 ainsi modifié.

Chapitre IV
Améliorer les petites pensions des non-salariés agricoles

Article 20 : Suppression de la condition de 17 ans et demi pour bénéficier de la pension majorée de référence au régime des non-salariés agricoles

La Commission adopte l’article 20 sans modification.

Après l’article 20

La Commission est saisie de l’amendement AS 276 de M. Jean-Louis Dumont, portant article additionnel après l’article 20.

Mme Annie Le Houérou. Il s’agit de résoudre les difficultés que rencontrent les exploitants agricoles lorsqu’ils veulent faire procéder au versement de cotisations au titre d’années accomplies en qualité d’aide familial. Aujourd’hui, en effet, il leur faut recueillir des témoignages de cette activité auprès de personnes ayant elles-mêmes exercé leur activité dans une exploitation agricole de la même commune. Du fait de l’organisation et de la taille actuelles des exploitations, il est souvent difficile d’obtenir ces témoignages dans le seul territoire de la commune. Nous proposons donc d’élargir le périmètre aux communes limitrophes ou à la communauté de communes.

M. Denis Jacquat. C’est à l’occasion d’un précédent texte sur les retraites que nous avions retenu le principe du témoignage pour permettre de valider des années d’activité dont il ne restait pas de trace écrite. Mais les dérives constatées ont donné lieu à de nombreuses instances devant les tribunaux et nous avons dû revenir en arrière en ce qui concerne les témoignages. Je crains que l’amendement ne se traduise par de nouvelles dérives.

M. le rapporteur. Bien que j’en comprenne l’intention, je donnerai un avis défavorable à l’amendement. Pourquoi définir un rayon de vingt kilomètres alors que ce dont on a besoin, c’est de témoignages oculaires ? Le système a déjà donné lieu à des dérives. Pour éviter d’introduire des inégalités, il me semble préférable de limiter le recours à des témoignages facilement obtenus par les uns, inaccessibles pour les autres. En outre, les dispositions proposées sont à la limite de la recevabilité financière.

Mme Annie Le Houérou. J’entends vos craintes au sujet d’éventuelles dérives, mais il arrive bien souvent qu’une exploitation s’étende à l’ensemble du territoire d’une commune. L’extension du périmètre aux communes limitrophes faciliterait, j’insiste, la prise en compte de droits.

M. Christian Paul. Je trouve le rapporteur un peu sévère. Dès lors que l’on admet que le recours au témoignage est parfois nécessaire pour faire reconnaître ces droits, il n’est pas incohérent de retenir les intercommunalités rurales, qui sont aujourd’hui des espaces de vie. Ne pourrions-nous en rediscuter avant l’examen en séance publique ?

M. le rapporteur. Soit. Essayons d’y travailler encore.

La Commission rejette l’amendement.

Article 21 : Mesures relatives au régime complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS 414, AS 415, AS 416, AS 417, AS 418, AS 419, AS 420, AS 421 et AS 422 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 21 ainsi modifié.

Article 22 : Mise en œuvre de la garantie « 75 % du SMIC » pour les exploitants agricoles

M. Jean-Pierre Barbier. Je voudrais faire remarquer à la Commission que le niveau de pension garanti pour la profession agricole – 75 % du SMIC – est inférieur au seuil de pauvreté. Les organisations professionnelles revendiquent une revalorisation de ce minimum à hauteur de 85 % du SMIC : il me semble que, pour des gens qui ont travaillé dur toute leur vie, ce n’est pas indécent ! J’aurais souhaité déposer un amendement en ce sens, mais cela n’a pas été possible en raison de l’article 40 de la Constitution. Il serait quand même souhaitable que notre société se préoccupe un peu plus des retraites agricoles !

M. Jean-Louis Costes. Un retraité agricole ne perçoit en effet que 680 euros par mois, alors que le seuil de pauvreté est de 964 euros. En outre, le montant de la pension est calculé sur la base d’une carrière entière, et non des 25 meilleures années, comme pour les salariés du privé, ou des 6 derniers mois, comme pour les fonctionnaires. Il faudrait remédier à ces distorsions flagrantes ! Augmenter de 10 % le niveau de pension garanti ne me semble pas insurmontable ; j’avais déposé un amendement en ce sens, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels AS 423, AS 424, AS 425 et AS 426 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 22 ainsi modifié.

Après l’article 22

La Commission est saisie de deux amendements portant articles additionnels après l’article 22.

Elle examine tout d’abord l’amendement AS 74 de Mme Brigitte Allain.

Mme Véronique Massonneau. Cet amendement vise à rendre plus juste le système de cotisations pour l’assurance vieillesse agricole. Le dispositif actuel fonctionne par paliers ; conçu initialement pour faire jouer la solidarité entre agriculteurs, il est devenu une source d’évasion fiscale, car il incite les agriculteurs à sous-déclarer une partie de leurs revenus. Il est nécessaire de s’adapter aux pratiques et d’instaurer une cotisation proportionnelle aux revenus.

M. le rapporteur. Avis défavorable : une telle mesure relève du pouvoir réglementaire. En outre, elle risquerait de provoquer une augmentation brutale du taux de cotisation de nombreux exploitants agricoles.

D’autre part, l’article 31 du présent projet de loi ouvre la possibilité de créer des tranches de cotisation différenciées dans le régime complémentaire des non-salariés agricoles ; votre amendement est donc satisfait sur ce point.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS 75 de Mme Brigitte Allain.

Mme Véronique Massonneau. Actuellement, 74 % des cotisants agricoles, bien qu’ils aient un revenu inférieur au SMIC annuel, doivent acquitter une cotisation calculée sur la base de ce dernier. Nous proposons de supprimer cette assiette minimale et de rééquilibrer le dispositif en réajustant les taux de cotisation pour les revenus les plus élevés.

Dans l’état actuel du texte, la revalorisation des retraites agricoles est financée par une mise à contribution des montages sociétaires, qui sont de véritables lieux d’évasion sociale – 2,2 milliards échappent aux prélèvements sociaux via les dividendes versés aux membres de sociétés agricoles hors GAEC –, mais aussi par l’augmentation des cotisations à la retraite complémentaire obligatoire (RCO), dispositif pourtant injuste et inéquitable. Cela ne nous semble pas souhaitable.

M. le rapporteur. Avis défavorable : les cotisations de sécurité sociale sont déjà progressives et proportionnelles, puisqu’elles sont assises sur les rémunérations et plafonnées.

M. Gérard Bapt. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 prévoit une revalorisation du minimum retraite des agriculteurs. Pourquoi ne pas renvoyer cette discussion à son examen ?

La Commission rejette l’amendement.

Chapitre V
Ouvrir des solidarités nouvelles en faveur des assurés handicapés
et de leurs aidants

Article 23 : Élargir l’accès à la retraite anticipée pour les travailleurs handicapés

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS 427 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS 319 de Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Mon amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, un rapport étudiant l’éventuelle mise en œuvre d’un compte handicap/travail.

Je voudrais à cette occasion attirer l’attention des collègues et de la ministre sur le fait que la surexposition des personnes en situation de handicap à des facteurs d’usure de l’organisme, de vieillissement prématuré et de fatigabilité accrue est insuffisamment prise en compte par le projet de loi – même si celui-ci comporte des avancées intéressantes. Nous pensons qu’un compte handicap/travail, conçu sur le modèle du compte pénibilité, permettrait de prêter une plus grande attention aux situations individuelles.

M. Denis Jacquat. Je trouve cette proposition extrêmement intéressante. Nous avions retenu à l’époque 55 ans comme âge minimum pour pouvoir bénéficier d’une retraite anticipée pour cause de handicap, mais, pour certaines personnes dont l’incapacité est importante et qui sont particulièrement usées, c’est un âge beaucoup trop élevé. Le dispositif proposé me semble à la fois bienvenu et logique, puisqu’il serait le symétrique du compte pénibilité que vous souhaitez instaurer.

M. le rapporteur. Avis favorable : il serait bon de regarder comment pourrait fonctionner un compte pénibilité qui s’appuierait sur un compte handicap/travail, et un rapport permettrait de le faire efficacement.

À l’occasion de la préparation de l’examen de cet article, plusieurs associations de handicapés m’ont fait part de leur émotion face à ce qu’ils ont interprété comme une suppression de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) – alors que son remplacement par le critère d’une incapacité permanent d’un 50 % constitue a priori un progrès par rapport aux exigences précédentes. Pourriez-vous nous donner quelques précisions à ce sujet, madame la ministre ?

Mme la ministre. Madame la députée, j’entends votre préoccupation : nous allons regarder comment aller de l’avant tout en maintenant le critère de la RQTH pendant une période transitoire, de manière à répondre aux préoccupations de ceux qui sont sur le point de partir en retraite.

Néanmoins, le critère de la RQTH permet d’apprécier l’insertion dans la vie professionnelle ; si l’on s’en sert pour déterminer les conditions de départ en retraite, on le transforme en mécanisme d’aide sociale, ce qui n’est pas son objectif. C’est pourquoi nous proposons d’abaisser de 80 à 50 % le taux d’invalidité exigé pour pouvoir bénéficier des conditions de départ en retraite anticipée – critère plus juste et de nature à tenir compte de certaines situations de handicap justifiant un départ en retraite anticipée.

Toutefois, je comprends que cela risque de bouleverser des projets de départ en retraite ; conformément à la méthode que nous avons suivie jusqu’à présent, nous serons donc attentifs à votre suggestion, en veillant à ce que le double critère puisse s’appliquer de manière transitoire, par exemple jusqu’au 31 décembre 2015. Le Gouvernement examinera avec intérêt tout amendement en ce sens.

M. Denis Jacquat. Il faudrait également réduire la durée d’assurance minimale exigée pour pouvoir partir à 55 ans.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Même si cette mesure ne concerne qu’un petit nombre de personnes, on ne peut pas tout changer brutalement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 23 modifié.

Article 24 : Extension de l’obtention de la retraite à taux plein dès l’âge légal pour les tous assurés justifiant de 50 % de taux d’incapacité permanente.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS 428 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 24 ainsi modifié.

Article 25 : Mieux reconnaître les droits à l’assurance vieillesse des aidants familiaux de personnes handicapées ou de personnes âgées dépendantes

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS 429 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 25 ainsi modifié.

TITRE III
SIMPLIFIER LE SYSTÈME ET RENFORCER SA GOUVERNANCE

Chapitre Ier
Simplifier l’accès des assurés à leurs droits

Article 26 : Création d’un compte individuel de retraite en ligne

La Commission est saisie de l’amendement AS 27 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. La construction progressive de notre système de retraite a introduit une grande complexité de gestion : aujourd’hui, 35 régimes différents gèrent la retraite de base et plusieurs centaines d’institutions sont impliquées, à un titre ou un autre, dans la gestion du système. Cette atomisation du paysage présente un double inconvénient : elle complexifie la délivrance du service et elle est coûteuse, sans pour autant apporter une qualité de service supérieure aux autres pays européens.

Pour simplifier le système, la loi prévoit la création d’« un service en ligne », un guichet unique des retraites qui permettra aux usagers d’entrer en contact avec l’ensemble des régimes et à ces derniers de se concentrer sur leur cœur de mission, la liquidation des pensions et le conseil, sans pour autant perdre leur autonomie de gestion. On réalisera ainsi des économies significatives, en limitant le volume des démarches nécessaires.

Dans son discours du 27 août, le Premier ministre appelait ce service en ligne le « compte retraite unique ». Cet amendement vise à reprendre cette dénomination dans le projet de loi.

M. Philippe Vigier. On cherche dans ce texte à faire des économies et à accroître la transparence : cette proposition va dans le même sens. En plus, il s’agit d’une idée du Premier ministre : autant la relayer ! Pour les polypensionnés, le texte prévoit un calcul unique, avec un guichet unique ; nous ne proposons finalement qu’une extension de cette disposition…

M. le rapporteur. Avis défavorable : la dénomination du GIP ne relève pas de la loi !

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette également l’amendement AS 28 de M. Arnaud Robinet.

Elle en vient l’amendement AS 29, du même auteur.

M. Arnaud Robinet. Toujours dans son discours du 27 août, le Premier ministre annonçait « la création d’un simulateur de retraite en ligne », afin de donner à nos concitoyens une meilleure visibilité sur leur future retraite. Cet amendement vise à introduire cette disposition dans le projet de loi.

M. le rapporteur. Avis défavorable : vous compliquez à dessein le texte, en y introduisant des choses qui n’ont pas à y être ! Le simulateur sera mis en place le plus vite possible – un premier outil devrait être disponible dès 2015.

M. Jean-Pierre Door. Je ne comprends pas que l’on refuse ces amendements, alors que le texte prétend simplifier l’accès des assurés à leurs droits. À la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), nous avions fait il y a plusieurs années un rapport sur les coûts de gestion et d’organisation des branches de la sécurité sociale, dans lequel nous recommandions déjà la mise en place de ce genre d’outils ! Pourquoi la refuser aujourd’hui ?

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS 467 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement tend à supprimer les dispositions relatives au groupement d’intérêt public (GIP) « Info Retraite ». En effet, même s’il fonctionne bien, celui-ci est appelé à être absorbé par un nouveau GIP, qui comprendra les mêmes membres – à savoir l’ensemble des régimes obligatoires de base et complémentaires –, et qui reprendra les missions relatives à la mise en œuvre du droit à l’information des assurés.

M. Arnaud Robinet. Pourtant, vous aviez déclaré ces mêmes arguments irrecevables lorsque nous avions demandé une simplification du système à l’article 3… Que d’incohérence !

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 26 modifié.

Après l’article 26

La Commission est saisie de l’amendement AS 310 de M. Christophe Sirugue, portant article additionnel après l’article 26.

M. Christophe Sirugue. Nous nous sommes aperçus en travaillant sur le projet de loi que le taux de recours à l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) était particulièrement faible. On aurait pu penser que c’était parce que cette aide sociale pouvait faire l’objet d’un recours sur succession, mais ce cas de figure semble relativement rare et la véritable cause est plus vraisemblablement une mauvaise connaissance du dispositif.

Pour y remédier, le présent amendement tend à inverser la charge de la sollicitation : ce sera à l’administration de faire savoir aux bénéficiaires potentiels de l’ASPA qu’ils sont éligibles au dispositif. Une telle mesure permettrait d’améliorer le niveau de vie de retraités dont les pensions sont inférieures à 787,26 euros par mois.

M. le rapporteur. Il s’agit d’un vrai problème : la Cour des comptes a relevé que l’ASPA n’était pas utilisée comme elle le pourrait.

Avis favorable donc, sous réserve de supprimer le terme « impérative », afin d’éviter tout risque de contentieux.

M. Christophe Sirugue. J’en suis d’accord.

M. Arnaud Robinet. Cet amendement n’introduit-il pas une charge supplémentaire ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous nous contentons d’appliquer le droit, monsieur Robinet : l’ASPA a été évaluée au départ.

M. Arnaud Robinet. Comme le RSA, dont le coût dépasse aujourd’hui largement l’évaluation initiale !

M. le rapporteur. Monsieur Robinet, nous avons fait des lois pour permettre à ceux qui se trouvent à l’âge de 65 ans en grande difficulté financière de survivre dignement. Et vous, vous dites : « S’ils ne savent pas qu’ils peuvent bénéficier de cette aide, qu’ils se débrouillent autrement » ? J’ai du mal à vous suivre !

M. Arnaud Robinet. Ne caricaturez pas mes propos !

M. le rapporteur. En tout cas, ce n’est pas notre conception de la loi, ni de notre rôle. La loi prévoit des droits, à nous d’en informer les bénéficiaires potentiels !

M. Christophe Sirugue. Contrairement à ce que d’aucuns prétendent, les droits sociaux sont peu sollicités. Faire en sorte que celles et ceux qui étaient visés par ces dispositifs puissent en bénéficier, ce n’est pas créer une charge supplémentaire ! Je suis moi aussi surpris par la remarque de M. Robinet – mais il est vrai qu’il n’y a pas si longtemps, on se contentait de noter que les taux de recours étaient insuffisants, sans rien faire pour les améliorer.

La Commission adopte l’amendement rectifié.

Article 27 : Création d’une Union des institutions et services de retraite

La Commission est saisie de l’amendement AS 491 de la Commission des finances.

M. Pascal Terrasse, rapporteur pour avis de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Cet amendement répond à une demande de la Caisse des dépôts et consignations, notamment des parlementaires qui siègent au sein du conseil de surveillance, et en particulier du président Henri Emmanuelli.

Le pilotage de la démarche de simplification voulue par le Gouvernement est confié à une structure interrégimes, le GIP « Union des institutions et services de retraites ». Or la Caisse des dépôts et consignations gère des régimes de retraite qui seront membres du GIP, sans que la Caisse des dépôts y soit elle-même représentée. Le présent amendement tend à combler cette lacune.

M. le rapporteur. Bien qu’elle ne soit pas un organisme de retraite à proprement parler, la Caisse des dépôts et consignations joue en effet un grand rôle dans la gestion des régimes de retraite. Il serait bon qu’elle soit représentée afin de faire bénéficier le GIP de son expertise en la matière. Avis favorable, donc.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS 30 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Il s’agit d’un amendement rédactionnel : l’objectif de cette loi étant une mutualisation sur l’ensemble du périmètre et, à défaut, sur une partie, il vaut mieux utiliser « tout ou partie » plutôt que « plusieurs ».

M. le rapporteur. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement AS 468 du rapporteur.

M. le rapporteur. Le GIP « Union des institutions et services de retraites » doit reprendre les compétences du GIP « Info Retraite » relatives à la mise en œuvre du droit à l’information des assurés.

M. Denis Jacquat. Cela signe la disparition du GIP  « Info Retraite » qui fonctionnait pourtant très bien.

M. le rapporteur. Les membres de l’ancien dispositif sont intégrés à une structure plus vaste qui aura une vocation plus large.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement AS 32 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec la rédaction de l’alinéa précédent qui utilise les termes « projets de coordination, de simplification et de mutualisation »

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le terme « projets » est plus restrictif que le mot « objectifs ».

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS 33 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. L’expression « organismes assurant la gestion des régimes de retraite légalement obligatoires ainsi que les services de l’État chargés de la liquidation des pensions » est utilisée à l’article 3, puis reprise aux articles 26 et 27. Elle est plus précise et moins ambiguë que les termes « assurance vieillesse ». Je vous propose d’harmoniser le texte en ce sens.

M. le rapporteur. Avis défavorable. La formulation proposée me paraît trop longue et trop lourde.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS 34 du même auteur.

M. Arnaud Robinet. Le délai standard des conventions d’objectifs et de gestion (COG) est de quatre ans. Le contrat défini dans cet article doit être cohérent avec le cadre classique des COG.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement AS 35 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Dans le cadre du PLFSS, le Gouvernement doit être tenu informé de l’état d’avancement des travaux des différents projets de simplification, de coordination et de mutualisation.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le programme de qualité et d’efficience de la branche retraite, annexé au PLFSS, comporte déjà des indicateurs relatifs au droit à l’information. Cette disposition inutile n’a donc pas sa place dans le texte.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AS 36 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Le GIP Union des institutions et services de retraites assure le pilotage stratégique et la mise en œuvre des projets de coordination, et simplification et de mutualisation. Le comité de surveillance des retraites a pour but de s’assurer de la viabilité du système et de tirer la sonnette d’alarme si besoin. Ses membres devront émettre chaque année leurs recommandations visant à pérenniser le système de retraite. On mesure l’ampleur de la tâche !

Afin que l’avis du comité de surveillance des retraites soit aussi informé et complet que possible, le GIP « Union des institutions et services de retraites » devrait lui communiquer l’ensemble des informations dont il dispose.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Monsieur Robinet, pourquoi charger le GIP d’une mission supplémentaire alors que vous reconnaissez vous-même « l’ampleur de la tâche » qui lui incombe ?

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement de précision AS 473 du rapporteur.

Puis elle en vient à l’amendement AS 474 du même auteur.

M. le rapporteur. Un délai de six mois est nécessaire pour la création du nouveau GIP et sa fusion avec le GIP Info Retraite.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 27 modifié.

Après l’article 27

La Commission est saisie de l’amendement AS 495 du Gouvernement, portant article additionnel après l’article 27.

Mme la ministre. Lors de la réforme des retraites de 2010, la durée de service minimale des fonctionnaires civils pour obtenir un droit à pension, dite « clause de stage », a été ramenée de quinze à deux ans. Cet amendement vise à étendre cette disposition aux militaires.

M. le rapporteur. Avis favorable.

M. le rapporteur pour avis. Madame la ministre, en tant que vice-président de l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (IRCANTEC), je souhaite en savoir plus sur les conséquences financières de cette mesure pour ce régime.

Mme la ministre. Nous avons pour objectif de ne pas générer de surcoût : dans un premier temps, les recettes de l’IRCANTEC diminueront mais, dans un second temps, ce sera aussi le cas du montant total des pensions versées.

M. Philippe Vigier. L’exposé sommaire de l’amendement comporte une phrase ainsi rédigée : « À long terme, cette mesure aboutit à un transfert de charge du régime général et de l’IRCANTEC vers le régime des pensions civiles et militaires de retraite, qui n’engendra toutefois pas de surcoût significatif. » Madame la ministre, comment définissez-vous le « long terme » ? Par ailleurs, le coût de cette mesure a-t-il été calculé ?

Je note que ce dispositif va à nouveau à l’encontre du rapprochement entre secteur public et secteur privé que nous appelions de nos vœux. Vous créez même, en quelque sorte, une niche supplémentaire, ce qui ne va pas dans le sens d’une harmonisation entre les régimes, qu’ils soient spéciaux ou pas.

M. Denis Jacquat. Madame la ministre, la question de M. Pascal Terrasse laisse supposer que l’IRCANTEC n’a pas été consultée, ou très peu.

Mme la ministre. Cette disposition résulte d’un engagement à l’égard des militaires pris lundi dernier, à Cherbourg, par le Président de la République. Il a souhaité que les règles appliquées aux militaires ne diffèrent pas de celles applicables aux fonctionnaires civils. Même lorsque le temps passé sous les drapeaux n’atteint pas quinze ans, il semble juste de reconnaître l’engagement et le travail de ces personnels en leur permettant de bénéficier d’une pension – étant donné la nature des contrats proposés, ils sont assez nombreux dans ce cas.

Monsieur Vigier, les prestations à long terme seront servies par l’État au fur et à mesure des liquidations. Nous opérons seulement un transfert entre régimes, ce qui n’est pas coûteux pour les finances publiques. Les sommes en jeu sont évaluées à environ 50 millions d’euros.

M. Philippe Vigier. Pour ma part, je ne suis pas convaincu. Il y a bien un surcoût que vous venez d’évaluer. Il sera financé par les régimes spéciaux dont nous savons déjà qu’ils sont déficitaires. J’entends ce que vous dites sur la spécificité du cas des militaires contractuels qui n’effectuent pas quinze ans de service. À ma connaissance, ils bénéficient déjà toutefois d’avantages spécifiques du fait même des responsabilités liées à leurs missions.

Votre amendement crée de nouvelles inégalités. Nous espérions que votre réforme permettrait une certaine convergence entre le public et le privé ; il est clair que ce n’est pas le cas. Elle accroît même les divergences, et vous créez un régime spécial à l’intérieur d’un régime spécial.

Pourquoi ne pas rétablir le bénéfice de la retraite anticipée dont bénéficiaient les personnels de l’éducation nationale ayant élevé plusieurs enfants ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Vigier, la mesure défendue par le Gouvernement ne fait que prolonger celle que vous avez voulue en 2010. Quant à la disposition concernant les femmes ayant élevé trois enfants, c’est vous qui l’avez supprimée !

M. Bernard Accoyer. Malheureusement, la défense nationale est devenue la variable d’ajustement du déficit budgétaire. Aujourd’hui, il me semble nécessaire de soutenir les militaires qu’inquiète, à juste titre, le traitement que fait subir le Gouvernement à leur budget. Je ne m’opposerai pas à cet amendement.

M. le rapporteur pour avis. Les arguments de la ministre sont pertinents. Je rappelle que l’IRCANTEC ne constitue pas un régime spécial mais un régime complémentaire.

Le montant de la soulte appelé par l’État restant comparativement modeste, je suis très favorable à l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Article 28 : Calcul unifié de la retraite des polypensionnés des régimes alignés

La Commission examine l’amendement AS 281 de M. Jean-Pierre Decool.

M. Rémi Delatte. Cet amendement vise à prévoir le droit à l’information des intéressés.

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’assuré sera nécessairement informé par le premier organisme auquel il demandera la liquidation de sa pension. Ce travail d’information est d’ores et déjà assuré de façon satisfaisante.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS 469 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement vise à supprimer le principe du remboursement entre régimes des pensions versées pour le compte d’un autre régime au bénéfice des polypensionnés. En effet, ce mécanisme serait extrêmement lourd à gérer pour les caisses. La compensation entre caisses doit être organisée de façon globale.

M. Denis Jacquat. Les polypensionnés seront de plus en plus nombreux et une approche globale est nécessaire.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 28 modifié.

Article 29 : Mutualisation du service des petites pensions

La Commission est saisie d’un amendement AS 475 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement de précision permettra de simplifier la gestion des dossiers.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement AS 470 du même auteur.

M. le rapporteur. Il est proposé d’étendre la mesure de simplification de l’article L. 173-1-3 aux pensions de réversion. Un veuf ou une veuve qui bénéficierait de plusieurs réversions, certaines modestes, pourrait ainsi bénéficier d’un interlocuteur unique.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement AS 477 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement précise le champ dapplication de la mesure afin que les assurés polypensionnés qui auront déjà obtenu la liquidation d’une première pension avant le 1er janvier 2016 ne soient pas concernés.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS 37 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Le principe d’un paiement unique pour les petites pensions constitue un progrès indéniable qui doit devenir la règle générale pour l’ensemble des pensions. Nous proposons d’intégrer cette ambition dans la loi ainsi qu’une une date crédible de réalisation au 1er janvier 2020.

Il s’agira aussi d’une source non négligeable d’économies compte tenu des montants importants des frais bancaires engendrés par le paiement de multiples pensions.

Enfin, le rapport entre coût et investissements liés à la mutualisation des petites retraites pourrait servir, avec un surcoût marginal négligeable, à mutualiser tous les paiements.

M. le rapporteur. Avis défavorable. L’article 29 ne s’applique qu’aux très petites pensions – le versement forfaitaire unique (VFU) –, et l’article 28 a déjà résolu le problème des polypensionnés. Il serait pour l’instant prématuré d’aller plus loin.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 29 amendé.

Après l’article 29

La Commission est saisie de l’amendement AS 492 de la commission des finances portant article additionnel après l’article 29.

M. le rapporteur pour avis. Suite aux débats qui se sont déroulés hier matin sur les amendements de M. Pouria Amirshahi, il me semble utile qu’un rapport évalue les conditions d’application des conventions bilatérales existantes en matière de retraite. Utilisant la seule voie permise par l’application de l’article 40 de la Constitution, cet amendement vise essentiellement à demander des précisions au Gouvernement, et non à rédiger un énième rapport

M. le rapporteur. Avis favorable. Il faut mettre la situation au clair avant d’améliorer la situation des Français qui passent une grande partie de leur carrière à l’étranger et souhaitent percevoir sur le territoire national la retraite pour laquelle ils ont cotisé dans un autre pays.

M. Denis Jacquat. Je suis extrêmement favorable à cet amendement issu des riches débats qui se sont tenus hier matin dans notre Commission.

La Commission adopte l’amendement.

Chapitre II

Améliorer la gouvernance et le pilotage des caisses de retraites

Article 30 : Organisation d’un débat annuel sur les orientations de la politique des retraites dans la fonction publique

La Commission est saisie de l’amendement de suppression de l’article AS 97 de M. Arnaud Robinet.

M. Arnaud Robinet. Il est choquant que le Gouvernement se cache une nouvelle fois derrière un rapport pour justifier son manque de courage sur la retraite des fonctionnaires.

Doit-on rappeler que ce projet de loi fait l’impasse sur les 7 milliards d’euros qui manqueront à l’horizon 2020 pour financer les retraites des fonctionnaires, et qu’aucune mesure de financement spécifique n’est prévue ? Doit-on rappeler qu’au lieu de prendre des mesures de convergence, le Gouvernement met en place des dispositifs qui entretiennent la rupture entre les fonctionnaires et les salariés du privé, en prévoyant d’ores et déjà un étalement dans la durée des hausses de cotisation supplémentaires prévues par cette réforme ?

Deux scandales sont à relever dans l’étude d’impact dont fait l’objet le projet de loi. D’une part, assurer que le besoin de financement des régimes spéciaux serait garanti par les efforts de maîtrise de dépenses de l’État, c’est avancer une source de financement opaque pour se dispenser d’une réforme structurelle. D’autre part, le Gouvernement écarte certains scénarios, comme le prolongement de la règle de 2003 en matière d’allongement de la durée de cotisation, ou certaines des pistes du rapport Moreau, au motif qu’ils « dépasseraient les besoins de financement requis », alors qu’au moment de l’entrée en vigueur de l’allongement de la durée de cotisation prévue par le projet de loi, en 2020, il manquera toujours 13 milliards d’euros dans les caisses des régimes !

Cet amendement de suppression dénonce une mesure d’affichage et le manque de courage et de responsabilité du Gouvernement sur la retraite des agents de l’État.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Je réfute tous les arguments de M. Robinet.

Le Gouvernement organisera annuellement un débat sur les orientations de la politique des retraites dans la fonction publique qui permettra à partir de données objectives d’informer l’ensemble de la population sur la situation de ce régime. Il faut maintenir l’article pour que le débat ait lieu sous une autre forme que celle de l’invective et de la démagogie permanente dominée par une idéologie « anti-fonctionnaires » dont vos propos, monsieur Robinet, sont une parfaite illustration.

Mme Isabelle Le Callennec. Le débat prévu à l’article 30 doit concerner « la fonction publique ». Portera-t-il sur la fonction publique hospitalière et celle des collectivités territoriales comme sur celle de l’État ?

M. le rapporteur. L’étude d’impact précise que le débat portera sur les trois fonctions publiques.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 30 sans modification.

Après l’article 30

La Commission est saisie de l’amendement AS 333 de M. Dominique Tian portant article additionnel après l’article 30.

M. Fernand Siré. Nul ne doit pouvoir siéger au conseil d’administration d’un régime de retraite s’il n’y est affilié. À l’heure actuelle, il n’existe pas de règles claires de représentativité. Les organismes paritaires liés à la retraite peuvent ainsi voir leur conseil d’administration composé d’individus non affiliés à leur régime.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Il est important de maintenir un maximum de souplesse dans la représentation des organisations syndicales.

La Commission rejette l’amendement.

Article 31 : Pilotage du régime complémentaire obligatoire du régime des non-salariés agricoles

La Commission adopte successivement les amendements AS 449, AS 430, AS 433, AS 432, AS 431, AS 435, AS 434, AS 436, et AS 450 du rapporteur.

Puis la Commission adopte l’article 31 modifié.

Après l’article 31

La Commission examine l’amendement AS 3 de M. Jean-Pierre Barbier portant article additionnel après l’article 31.

M. Jean-Pierre Barbier. Notre pays compte aujourd’hui plus de 15 millions de retraités, soit 23 % de la population. Dans les prochaines années, le poids des retraités s’accroîtra non seulement en termes démographiques, mais aussi sur le plan économique et social.

La réforme dont nous discutons constitue un fait majeur car le système de répartition tel que nous l’avons connu est remis en cause. Pour la première fois de notre histoire, les retraités cotiseront pour leur propre retraite. Il est d’ores et déjà prévu que la nouvelle contribution sur les pensions passe de 0,15 % à 0,3 %, et l’on sait trop bien qu’une fois mise en place une cotisation de cette nature ne régressera jamais. À partir du moment où l’on demande aux retraités de payer leur propre retraite, il me semble légitime qu’une place leur soit donnée, par l’intermédiaire de la Confédération française des retraités, au sein des organismes et instances qui réfléchissent à l’avenir des retraites.

M. Denis Jacquat. Cette demande ancienne de la Confédération française des retraités a parfois été adoptée à l’unanimité en commission des affaires sociales, avant d’être rejetée en séance publique – quel que soit le gouvernement au pouvoir. Elle mérite aujourd’hui d’être satisfaite, puisque les retraités vont devoir cotiser.

M. le rapporteur. Les retraités ne vont pas cotiser, monsieur Jacquat. L’effort qui leur est demandé repose sur deux mesures : le décalage de six mois de la revalorisation des pensions et l’inclusion des majorations de pensions des retraités ayant élevé trois enfants ou plus dans l’assiette de l’impôt sur le revenu. Nous avons tous été sollicités par la Confédération française des retraités, association très active sur le terrain, qui revendique 1,5 million d’adhérents. Vous avez dit que sa demande avait toujours été rejetée en séance publique, mais reconnaissez qu’elle est constante : vous auriez donc pu la satisfaire plus tôt si elle vous semblait légitime.

La participation des retraités aux instances de concertation et de dialogue social est déjà assurée. Le Comité national des retraités et personnes âgées (CNRPA) représente les retraités auprès des pouvoirs publics ; il siège notamment au conseil d’administration de la CNAV. Quatre des seize organisations que compte le CNRPA sont aussi membres de la Confédération française des retraités. Enfin, il a un représentant au Conseil d’orientation des retraites. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Article 32 : Évolution des caisses des professions libérales

La Commission examine les amendements de suppression identiques AS 4 de M. Jean-Pierre Barbier, AS 39 de M. Gérard Cherpion, AS 98 de M. Arnaud Robinet et AS 151 de M. Philippe Vigier.

M. Jean-Pierre Barbier. Vous l’avez dit vous-même en début de séance, madame la présidente, nous ne reviendrons pas sur le débat entre régimes publics et régimes privés. Il n’y aura donc pas de rapprochement entre les deux, pas de convergence, ni même de débat sur le sujet. Nous le regrettons.

Nous sommes donc d’autant plus surpris de la volonté de « reprise en main » des régimes de retraite des professions libérales dont témoigne l’article 32. Ces professions ont consenti de vrais efforts en termes de cotisations, de durée du temps de travail et d’âge légal de départ à la retraite. Pour prendre un exemple que je connais bien, l’âge légal de départ à la retraite des pharmaciens est désormais de 67 ans.

Si convergence il y a, elle doit concerner tous les régimes. Nous ne pouvons accepter une telle mainmise de l’État sur des caisses qui participent déjà largement aux efforts demandés au titre de la solidarité nationale.

Mme Véronique Louwagie. On comprend que cet article suscite des émois, car la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) fonctionne sans difficulté depuis plusieurs années.

La nomination par décret de son directeur – pour une durée de six ans – prévue par cet article est pour le moins choquante : l’État agit seul et décide seul, sans concertation ni dialogue avec les principaux intéressés. Il n’est pas inutile de rappeler en quoi consiste la mission du directeur de la Caisse : organiser sa gestion et établir un partenariat fort avec l’organe d’administration qui décline les orientations décidées par la gouvernance, c’est-à-dire le président du conseil d’administration. La limitation à un seul mandat de six ans risque également d’être source de difficultés.

Quant à la signature d’une convention de gestion, il me semble que nous devrions tirer les enseignements de l’expérience du régime social des indépendants (RSI). Aujourd’hui encore, des assurés reçoivent des avis comportant des montants qui ne correspondent en rien à la réalité de leur situation ; d’autres attendent jusqu’à dix-huit, voire vingt-quatre mois après leur inscription pour recevoir un premier appel de cotisations. Le regroupement des trois branches – maladie, famille et retraites – est également source de difficultés.

Enfin, organiser l’étatisation des caisses des professions libérales sans envisager de convergence entre les régimes n’a pas de sens. Si convergence il y a, elle doit se faire à tous les niveaux et concerner tous les régimes !

M. Arnaud Robinet. Avouez-le, vous n’aimez pas les professions libérales ! Si vous voulez vraiment parler de convergence, poussons la démarche à son terme : parlons de la convergence entre régimes publics et régimes privés. On voit mal au nom de quoi cette convergence ne devrait concerner que les caisses des professions libérales !

Ayez donc le courage de préciser la réalité de vos intentions : sous couvert de modernisation de la CNAVPL, c’est bien une mainmise de l’État sur ses réserves qui est à craindre. Nous ne pouvons accepter ce hold-up. La réforme de la gouvernance de la Caisse et l’instauration de contrats pluriannuels de gestion ne doivent pas conduire à déséquilibrer son modèle de fonctionnement, ni à menacer son autonomie et sa pérennité financière.

M. Philippe Vigier. Comment cet article 32 a-t-il pu se retrouver dans le texte ? Vous serez décidément passés à côté de tout dans cette réforme. Loin d’établir un pacte de confiance, elle pourrait être qualifiée de réforme de défiance, voire d’anti-réforme. Que vous a donc fait la CNAVPL pour que vous jugiez tout à coup qu’il est nécessaire de prendre la main sur son fonctionnement, alors même que depuis deux jours, vous rejetez toutes nos propositions tendant à harmoniser les régimes publics et privés, à mettre en œuvre la convergence ou à mettre en extinction des régimes spéciaux ?

Sont-ce des problèmes de gestion qui vous poussent à vouloir mettre la main sur un « trésor de guerre » de 15 milliards d’euros ? Dois-je rappeler que vous venez de recréer un régime spécial pour une catégorie de fonctionnaires particulière ? C’est profondément incohérent. De même, nous n’avons fait aucun geste en faveur de la jeunesse – vous avez encore balayé d’un revers de main l’une de nos propositions ce matin.

Notre collègue a invoqué à juste titre l’exemple du RSI. Nous n’avons eu de cesse d’alerter le gouvernement précédent sur les dysfonctionnements que nous constations dans nos circonscriptions. Souhaitez-vous que cela se reproduise pour la CNAVPL ? Pensez-vous vraiment que la présence d’un représentant de l’État au conseil d’administration et la nomination du directeur par décret suffiront à empêcher toute dérive ?

Encore une fois, pourquoi prendre la main sur le fonctionnement d’une structure privée qui a fait ses preuves ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Vous avez des éléments de réponse dans l’étude d’impact.

M. Denis Jacquat. Cet article a de quoi étonner. La CNAVPL regroupe un ensemble de régimes qui fonctionnent, et vous voulez sa casse – à moins que vous ne cherchiez à « faire un casse » ! Serait ainsi rendue juridiquement possible la spoliation des ressources qui ont été constituées au prix de constants efforts. Aucune concertation préalable n’a pourtant eu lieu. En outre, je rappelle que ces régimes n’ont jamais rien coûté à la collectivité nationale, et qu’ils participent largement aux mécanismes de solidarité. Cette mainmise de l’État sur la CNAVPL n’est rien d’autre qu’une étatisation. Pourquoi tant de haine ?

M. Jean-Pierre Door. Cet article pose des questions majeures. Vous prévoyez une modification en profondeur des règles de gouvernance de la CNAVPL, qui entraînera ipso facto de graves conséquences sur le fonctionnement de l’organisation et la qualité du service rendu aux assurés. Ainsi que cela a été dit, vous vous apprêtez à reproduire le modèle désastreux du RSI, dont les méthodes de gestion ont été dénoncées par la Cour des comptes. Car cette modification de la gouvernance entraînera la perte d’autonomie des caisses professionnelles, une mutualisation des moyens et une mainmise de l’État sur leurs réserves financières.

Il ne faut pas souffler en permanence le chaud et le froid sur les professions libérales, madame la ministre. Un jour vous leur dites que tout va bien, et le lendemain vous écrivez autre chose : c’est l’exemple même de ce qui s’est passé avec cet article auquel nous nous opposerons.

M. Bernard Accoyer. Nous ne pouvons que déplorer cette stigmatisation des professions libérales, qui ne demandent rien à l’État ni à la branche vieillesse, et sont déjà l’objet de contrôles particulièrement sévères de la part des caisses. Quelle injustice, alors que ce texte se targue justement d’avoir reçu l’onction du principe de justice ! Quelle différence avec l’attitude du Gouvernement à l’égard des régimes de la fonction publique, en particulier de la fonction publique d’État, ou les régimes spéciaux ! Bref, cet article est l’expression d’un sectarisme qui ne peut que susciter malaise et anxiété chez nos compatriotes.

Mme Bérengère Poletti. En modifiant la gouvernance, l’article 32 orchestre l’étatisation des caisses de retraite des professions libérales, et cela sans concertation, alors que par ailleurs, on renonce à toute évolution sur la convergence entre régimes publics et régimes privés. Pour le Gouvernement, il y a visiblement deux poids et deux mesures !

L’État veut mettre la main sur l’argent des caisses des professions libérales. Cette mesure est choquante. Il est vrai qu’en période de disette budgétaire, les 21 milliards de réserves de ces caisses – soit l’équivalent de 10 à 11 ans de prestations – peuvent faire rêver. Mais ils sont aussi le fruit des efforts consentis par les professionnels concernés, notamment sur l’âge du départ à la retraite et la durée du travail, qui va souvent bien au-delà des 35 heures hebdomadaires. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

M. Gérard Sebaoun. Beaucoup d’entre nous ont été interpellés par les représentants des différentes caisses des professions libérales au sujet de cet article 32. Revenons donc à la réalité, et gardons-nous de toute réaction corporatiste. Il n’y a dans ce texte aucune volonté de stigmatiser les professions libérales. L’Union nationale des professions libérales (UNAPL) a fait entendre sa voix lors de la grande Conférence sociale de juin, dans le cadre d’une table ronde consacrée à l’avenir de nos retraites et à la protection sociale. Elle était représentée par deux vice-présidents délégués. Il est vrai que le président Chassang aurait souhaité être reçu par le Premier ministre dans le cadre des auditions des organisations dites hors champ sur le projet de loi sur les retraites, et que cela n’a pu se faire. Mais quoi qu’il en soit, la Confédération nationale des retraités des professions libérales (CNRPL) a réaffirmé son attachement aux systèmes de retraite par répartition et par points existants. Reste un problème, qui a été abordé franchement lors d’une audition de la CNAVPL : le rapport extrêmement sévère de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la gestion de l’une des grandes caisses que fédère la CNAVPL, la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF), qui compte 124 000 cotisants et plus de 42 000 allocataires.

Contrairement à ce que laissent supposer les communiqués « incendiaires » de la CNAVPL, qui évoquent une « étatisation » des caisses des professions libérales, cet article n’a rien d’abusif. Il se borne à prévoir la désignation par décret du futur directeur de la Caisse et la signature d’un contrat pluriannuel entre l’État et la Caisse – ce qui se pratique dans bien d’autres domaines. Sachons donc raison garder. Compte tenu des outrances et des accusations que nous venons d’entendre, il serait bon que Mme la ministre nous donne son sentiment.

Mme Isabelle Le Callennec. Existe-t-il des caisses dont le directeur ne soit pas nommé par le Gouvernement ?

M. le rapporteur pour avis. Je défendrai tout à l’heure un amendement de la commission des finances sur la nomination du directeur de la CNAVPL. Avant cela, j’aimerais intervenir de manière plus générale sur la justification de cet article 32.

Il est indéniable que la CNAVPL a rencontré des difficultés. Il faut rappeler que cette caisse dite pivot regroupe des caisses autonomes, appelées sections – par exemple la section des pharmaciens, celle des médecins, ou encore celle des architectes. La caisse pivot a vocation à travailler en étroite collaboration avec les sections, chacune de celles-ci gérant à la fois le régime de base et le régime complémentaire. En 2003, la loi Fillon a chargé la caisse pivot de mettre en place un régime à points complémentaire, ainsi que de mieux coordonner l’ensemble des sections.

Depuis, deux rapports – l’un de l’IGAS et l’autre de la Cour des comptes – ont porté une appréciation sévère sur la façon dont cet objectif avait été mis en œuvre, et jugé qu’il n’avait pas été atteint. Ils ont donc suggéré d’améliorer le dispositif. Contrairement à ce que nous avons pu entendre, il ne s’agit pas de l’étatiser ou d’en contrôler le fonctionnement. Certains ont dit que ce dispositif fonctionnait bien : c’est le cas dans certaines sections, mais pas dans toutes. Est-il normal, par exemple, que le directeur d’une section – dont le nombre d’assurés est très faible – soit rémunéré plus de 300 000 euros par an ? C’est notre rôle de parlementaires de soulever ces questions.

Dès lors, quelles orientations prendre ? Il faut que la CNAVPL puisse jouer pleinement son rôle de caisse centrale, en exerçant un contrôle sur la gestion des sections. Il faut également mettre en œuvre une convergence entre les conventions collectives et les systèmes d’information des différentes sections. Enfin, il faut un contrat d’objectifs et de gestion avec l’État, comme c’est le cas pour les autres caisses.

Reste le point délicat de la nomination du directeur. J’ai cru comprendre que des discussions étaient en cours avec la Caisse et que son président, M. Chassang, souhaitait avancer. Nous devons trouver une solution qui réponde aux exigences exprimées par la Cour des comptes et l’IGAS tout en préservant l’indépendance de la Caisse. Il n’est évidemment pas question de prendre les 17 milliards d’euros de la Caisse ! Les discussions en cours doivent permettre d’avancer sereinement.

M. le rapporteur. Je suis défavorable à ces amendements de suppression, pour les raisons que M. Sebaoun et M. Terrasse viennent d’exposer en toute honnêteté. La CNAVPL a connu des difficultés, qui ont été identifiées aussi bien par l’IGAS que par la Cour des comptes. M. Migaud les a d’ailleurs évoquées ici même il y a quelques semaines. Les missions qui avaient été assignées à la caisse centrale n’ont pas été remplies de manière satisfaisante. Il ne s’agit pas de « faire un casse », monsieur Jacquat, mais de prévoir la nomination du directeur de la Caisse par l’État, comme c’est le cas pour tous les autres grands régimes de retraite. Dès lors qu’il s’agit d’argent public, il n’y a rien de scandaleux à ce que l’État ait un droit de regard.

Par ailleurs, je pense que la discussion a eu lieu. Nous avons reçu de nombreuses sections de la CNAVPL. La Caisse a besoin d’harmonie, d’unité et d’une saine gestion. Les mesures proposées devraient permettre d’aller dans ce sens.

Mme la ministre. M. Sebaoun a parfaitement exposé la situation. Les difficultés de la CNAVPL sont maintenant bien connues. Contrairement à ce que j’ai pu entendre, cet article n’est pas arrivé par hasard dans le texte. Voilà un an que nous avons engagé des discussions avec les intéressés ; elles se poursuivent aujourd’hui pour envisager des aménagements aux dispositions proposées, en particulier sur les conditions de nomination du directeur.

Pour répondre à Mme Le Callennec, toutes les caisses ont aujourd’hui un directeur nommé par l’État, à l’exception de celle des avocats, pour laquelle c’est un agrément qui est prévu. Nous essayons de rapprocher les modes de gouvernance de la CNAVPL pour garantir aux assurés qui en relèvent que leurs cotisations seront bien utilisées et qu’ils pourront compter sur des conditions de départ à la retraite satisfaisantes. L’objectif n’est pas de faire entrer cette Caisse dans un ensemble qui n’existe pas à ce jour, mais de garantir son bon fonctionnement. J’ai rencontré toutes les personnes concernées, ainsi que le président Chassang. Dans la mesure où les discussions sont encore en cours, je souhaiterais d’ailleurs que M. Terrasse retire son amendement AS 493.

M. Arnaud Robinet. Si j’ai bien compris, madame la ministre, vous estimez que le régime fonctionne bien mais qu’il suscite des inquiétudes ! Or, quand on compare les caisses de retraite gérées par l’État et la CNAVPL, qui est excédentaire, et que l’on constate la mobilisation des professions libérales pour défendre leur caisse, on voit mal où sont leurs inquiétudes.

Il serait intéressant que certains membres de la majorité, notamment des parlementaires, osent s’exprimer car, quand on est avec eux sur des tribunes lors de congrès de médecins, de pharmaciens ou de professions libérales, leur discours est différent. Il faudrait éviter ce double langage !

M. Philippe Vigier. Dans une structure de droit privé, le directeur est nommé par le conseil d’administration. En l’occurrence, les membres de celui-ci sont issus des professions libérales.

Comment, avec un excédent de 15 milliards d’euros, le régime serait-il si mal géré ? Y a-t-il eu des fraudes avérées, des détournements ou des malversations organisées ? Auquel cas, j’espère que vous allez porter plainte madame la ministre !

Nous savons que d’ici à 2020, il manquera, selon le Conseil d’orientation des retraites, 15 milliards d’euros et que certains régimes, spéciaux notamment, sont structurellement déficitaires. Considère-t-on pour autant qu’ils sont mal gérés ? Non. Et s’ils restent spéciaux, c’est parce que le Gouvernement l’a souhaité !

M. Christian Paul. L’histoire retiendra de ce débat en commission que vous avez lutté pendant des heures jusqu’au bout de la nuit contre la prise en compte de la pénibilité dans le système de retraite et que, dès le lendemain matin, vous avez continué sur le mode du lobbying pour essayer de perpétuer des organisations qui, sans être en tous points condamnables, paraissent échapper à la rigueur normale qu’on attend d’une caisse de retraite, que ce soit au travers des modes de désignation de sa direction générale ou des conventions de gestion. Vous avez des indignations bien sélectives !

M. Gérard Sebaoun. Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) est très sévère : déplacements hasardeux, absence de contrôle, directeur faisant ce qu’il veut, conflits d’intérêt. Une caisse ne peut être gérée ainsi ; il faut mettre fin à ces dérives.

M. Jean-Pierre Barbier. Ce débat est ubuesque. Cette caisse est globalement excédentaire et on la dénonce comme un modèle de mauvaise gestion, au contraire des régimes déficitaires dont on a parlé tout le reste du temps !

M. Gérard Sebaoun. On ne fait que rappeler le constat de l’IGAS !

M. Jean-Pierre Barbier. Je ne le conteste pas mais le régime est excédentaire !

Mme Véronique Louwagie. Madame la ministre, vous avez invoqué un objectif de cohérence et d’harmonisation. Or, depuis le début du débat, chaque fois que nous avons fait valoir cet argument, on nous a répondu que cet aspect devait être traité plus tard. Il y a deux poids et deux mesures, selon ce qui vous arrange.

Nous voulons bien entendre les difficultés constatées, mais la caisse fonctionne bien : ses résultats en termes de gestion le montrent. S’il y a des problèmes administratifs, on ne les résoudra pas en supprimant le lien étroit entre le président du conseil d’administration, les administrateurs et le directeur. Il faut au contraire que celui-ci soit en phase avec le président de ce conseil.

En outre, vous ne nous avez pas dit pourquoi vous vouliez étatiser cette caisse.

M. Philippe Vigier. L’absence de réforme proposée par le Gouvernement devrait aboutir, selon le Conseil d’orientation des retraites, au déficit que j’évoquais tout à l’heure, lequel, compte tenu des hypothèses de croissance erronées qui ont été retenues – 1,6 point depuis 2011 –, pourrait atteindre 23 milliards ! Et vous stigmatisez cette caisse ! Si son directeur a mal travaillé, pensez-vous que les administrateurs ne sont pas capables de s’en rendre compte ? Pourquoi s’attaquer en urgence à ce sujet, alors que sur tous les autres, notamment la convergence, vous opposez une table rase, et que, par cette réforme totalement injuste, vous sanctuarisez la baisse des retraites sans rien toucher aux autres régimes spéciaux ? Mettons tout sur la table, y compris le fonctionnement de ces derniers !

Mme la présidente Catherine Lemorton. Votre intervention, monsieur Vigier, n’apporte aucun élément nouveau !

Mme la ministre. L’enjeu de cet article n’est pas de toucher aux paramètres de calcul des pensions, mais de s’occuper des modes de fonctionnement et de gouvernance de cette caisse. Les deux sujets sont distincts et nous ne modifions en rien les règles applicables aux assurés pour le versement de leur retraite.

Pour ce qui est de la gouvernance, tous les autres régimes spéciaux ont adopté des règles nouvelles avec, notamment, des conventions d’objectifs et de gestion (COG). La CNAVPL exerce des missions de service public comme les autres caisses : on lui applique donc les mêmes règles, sans que cela change quoi que ce soit aux paramètres que j’évoquais. D’autant que nous avons été alertés sur plusieurs points justifiant notre intervention. Quand on sait que certains assurés doivent attendre plus d’un an pour bénéficier du versement de leur retraite, on se dit qu’il y a peut-être des améliorations à apporter.

La Commission rejette les amendements AS 4, AS 39, AS 98 et AS 151.

Elle en vient à l’amendement AS 187 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Il s’agit de préciser que la CNAVPL est un organisme de droit privé chargé d’une mission de service public, sans but lucratif.

M. le rapporteur. Il n’est pas nécessaire d’apporter cette précision dans la loi. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS 193 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Cet amendement vise à supprimer la tutelle du ministre chargé de la sécurité sociale sur la gestion du régime de base des professions libérales.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AS 191 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Il s’agit de donner au conseil d’administration de la CNAVPL la capacité de fixer la valeur de liquidation du point.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AS 190 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Cet amendement vise à doter la CNAVPL d’un pouvoir de recommandation vis-à-vis des pouvoirs publics.

M. le rapporteur. Cette intention n’a rien de choquant, mais il vaut mieux attendre le compromis qui est en train de se dessiner avec le Gouvernement sur ce sujet. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte les amendements AS 437, AS 438 et AS 439 rédactionnels du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS 188 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Il s’agit de rendre obligatoire la saisine du conseil d’administration de la CNAVPL pour tout projet gouvernemental modifiant l’organisation et le fonctionnement de la caisse.

M. le rapporteur. Il vaut mieux là encore attendre la nouvelle rédaction de l’article. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement AS 440 rédactionnel du rapporteur.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS 493 de la commission des finances.

M. le rapporteur pour avis. Il ne s’agit pas de remettre en cause le travail des administrateurs ou des présidents de section, qui font globalement un très bon travail, ni d’opposer les régimes entre eux – comme cela vient d’être fait à l’instant. Il ne faut pas non plus mettre de l’huile sur le feu : des négociations sont en cours entre le Gouvernement et l’Union nationale des professions libérales et une nouvelle rédaction de l’article nous sera proposée.

Compte tenu de la forte volonté du Gouvernement d’améliorer le dispositif pour les uns et les autres, je retire mon amendement en attendant le débat en séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement AS 185 rectifié de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. J’observe que l’amendement du rapporteur pour avis opère un recul, puisqu’il prévoit que le directeur serait désigné sur une liste de cinq noms proposés par le conseil d’administration.

Cela dit, il est surréaliste de retirer à ce conseil le pouvoir de nommer le directeur de la caisse, qui est une structure de droit privé. Cet amendement tend à rétablir ce pouvoir.

On pourrait d’ailleurs faire un parallèle avec d’autres organismes de droit privé : monsieur le rapporteur, lors du débat en séance publique, je vous ferai une proposition qui pourra peut-être vous surprendre.

M. le rapporteur. J’attends avec impatience la surprise !

En attendant, je répète que l’article va être reformulé. Le fait que l’État nomme le directeur d’une caisse gérant des retraites obligatoires ne me choque pas. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte les amendements AS 441 et AS 442 rédactionnels du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS 184 rectifié de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Quel jugement portez-vous, monsieur le rapporteur, sur la gestion des autres régimes au regard du respect des COG ? Et quels critères d’appréciation retenez-vous ?

M. le rapporteur. M. Vigier voudrait qu’on rende les COG facultatifs, mais ils constituent un cadre de gestion dans lequel on se met d’accord, un partenariat dont on vérifie régulièrement la bonne application : s’ils ne donnent pas toujours lieu à un mode de gestion parfait, ils produisent des résultats globalement satisfaisants. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement AS 443 rédactionnel du rapporteur.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS 183 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Même objet que l’amendement AS 184 rectifié.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement AS 182 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Il s’agit d’alléger le contrôle du Gouvernement sur les actions exercées par les sections professionnelles.

M. le rapporteur. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement AS 444 rédactionnel du rapporteur.

Elle en vient ensuite à l’amendement AS 180 de M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Je m’étonne que la ministre ait préféré être présente à nos débats sur cet article plutôt que de participer au conseil des ministres !

Cet amendement vise à supprimer l’obligation de soumettre la convention de groupement de sections professionnelles à l’approbation de l’autorité compétente de l’État.

M. le rapporteur. La ministre est venue montrer tout l’intérêt qu’elle vous portait, monsieur Vigier ! Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite les amendements AS 445 et AS 446 rédactionnels du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 32 modifié.

Article 33 : Externalisation des régimes à prestations définies mis en place par l’employeur

La Commission adopte l’article sans modification.

Après l’article 33 

La Commission est saisie de l’amendement AS 494 de la commission des finances portant article additionnel après l’article 33.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à faire en sorte que le régime de retraite complémentaire IRCANTEC puisse trouver une solution à sa situation d’insécurité juridique provoquée par la loi du 8 août 1994, qui l’avait oublié. Il s’agit de lui donner un fondement légal, de manière à le sécuriser juridiquement.

M. le rapporteur. Vous soulevez une bonne question. Mais la réponse que vous y apportez pourrait être améliorée. Je vous propose donc que nous travaillions à une autre rédaction en vue du débat en séance publique.

M. le rapporteur pour avis. Je suis ouvert à toutes les améliorations et retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

Article 34 : Habilitation à prendre par ordonnance les mesures d’harmonisation nécessaires à Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte

La Commission adopte l’article sans modification.

Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

La séance est levée à douze heures.

——fpfp——

Présences en réunion

Réunion du mercredi 2 octobre 2013 à 9 heures

Présents. – M. Élie Aboud, M. Bernard Accoyer, M. Pierre Aylagas, M. Gérard Bapt, M. Jean-Pierre Barbier, Mme Gisèle Biémouret, Mme Kheira Bouziane, Mme Valérie Boyer, Mme Sylviane Bulteau, M. Jean-Noël Carpentier, Mme Fanélie Carrey-Conte, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Gérard Cherpion, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Jean-Louis Costes, M. Rémi Delatte, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, M. Richard Ferrand, Mme Hélène Geoffroy, M. Jean-Marc Germain, M. Jean-Patrick Gille, Mme Linda Gourjade, M. Henri Guaino, M. Jérôme Guedj, Mme Chantal Guittet, Mme Joëlle Huillier, Mme Sandrine Hurel, M. Christian Hutin, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, Mme Chaynesse Khirouni, Mme Bernadette Laclais, Mme Conchita Lacuey, Mme Isabelle Le Callennec, Mme Annie Le Houerou, Mme Catherine Lemorton, M. Jean Leonetti, Mme Geneviève Levy, M. Michel Liebgott, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, Mme Véronique Massonneau, M. Pierre Morange, Mme Ségolène Neuville, Mme Monique Orphé, Mme Luce Pane, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, Mme Martine Pinville, Mme Bérengère Poletti, M. Arnaud Richard, M. Denys Robiliard, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gérard Sebaoun, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Jonas Tahuaitu, M. Dominique Tian, M. Jean-Louis Touraine, M. Olivier Véran, M. Jean-Sébastien Vialatte, M. Philippe Vigier

Excusés. – M. Céleste Lett, Mme Gabrielle Louis-Carabin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Dominique Orliac

Assistaient également à la réunion. – Mme Catherine Coutelle, M. Régis Juanico, M. Laurent Marcangeli, M. Hervé Morin, M. Pascal Terrasse