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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mardi 24 mai 2016

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 83

– Audition commune avec la commission des Affaires économiques et la commission des Finances de M. Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics, sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (n° 3623) (M. Sébastien Denaja, rapporteur ; MM. Dominique Potier et Romain Colas, rapporteurs pour avis)..

Présidence de M. Jean-Yves Le Bouillonnec, vice-président, de Mme Frédérique Massat, présidente de la commission des Affaires économiques et de M. Dominique Baert, vice-président de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

La réunion commence à 9 heures 35.

Présidence de M. Jean-Yves Le Bouillonnec, vice-président de la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, de Mme Frédérique Massat, présidente de la commission des Affaires économiques et de M. Dominique Baert, vice-président de la commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

La Commission procède à l’audition commune avec la commission des Affaires économiques et la commission des Finances de M. Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics, sur le projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (n° 3623) (M. Sébastien Denaja, rapporteur ; MM. Dominique Potier et Romain Colas, rapporteurs pour avis).

M. Jean-Yves Le Bouillonnec, président. Avec Frédérique Massat, présidente de la commission des Affaires économiques et Dominique Baert, vice-président de la commission des Finances, nous avons le plaisir d’accueillir M. Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics.

Nous allons vous entendre et vous questionner, monsieur le ministre, au sujet du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

Ce texte a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 30 mars 2016, et renvoyé à la commission des Lois, laquelle a désigné M. Sébastien Denaja comme rapporteur. Deux commissions se sont saisies pour avis, la commission des Affaires économiques et la commission des Finances, qui ont respectivement désigné, comme rapporteur pour avis, M. Dominique Potier et M. Romain Colas.

En accord avec la présidence des deux autres commissions, Dominique Raimbourg, le président de la commission des Lois, a proposé, pour mieux respecter les compétences des commissions concernées et tenir compte de la nature spécifique de ce projet de loi, que l’examen des articles relevant des commissions saisies pour avis leur soit délégué. C’est la raison pour laquelle il a été jugé opportun de donner à cette audition un caractère conjoint.

La commission des Affaires économiques s’est réunie la semaine dernière ; la commission des Finances le fera cet après-midi ; enfin, la commission des Lois se réunira demain matin, chacune examinant les articles et les amendements relevant du processus de délégation mis en place. Le débat en séance publique aura lieu, quant à lui, à partir du lundi 6 juin.

Mme la présidente Frédérique Massat. Je salue l’initiative du président de la commission des Lois, qui a souhaité une délégation partielle de l’examen de ce texte aux commissions pour avis, grâce à laquelle la commission des Affaires économiques a examiné l’ensemble des articles qui lui ont été délégués, quasiment comme si elle avait été saisie au fond.

Il s’agissait de l’article 25, sur la réduction de la durée de la validité des chèques ; de l’article 30, sur l’interdiction de la cession à titre onéreux des contrats de vente de lait de vache ; de l’article 31, sur le renforcement de l’obligation légale de dépôt de leurs comptes annuels par les sociétés transformant des produits agricoles ou commercialisant des produits alimentaires ; de l’article 36, sur le renforcement de la réglementation sur les délais de paiement ; de l’article 38, sur la modification des conditions du stage préalable à l’installation des artisans ; de l’article 43, modifiant les obligations de qualifications professionnelles pour l’accès à certaines activités artisanales ; de l’article 44 enfin, qui autorise le Gouvernement à transposer par ordonnances des directives relatives aux qualifications professionnelles.

La commission des Affaires économiques a reçu le 17 mai le ministre Emmanuel Macron, directement concerné par plusieurs de ces articles. Elle a examiné 216 amendements et en a finalement adopté 61, dont 22 créant des articles additionnels.

Parmi les amendements qui n’ont pas été adoptés, plusieurs sujets ont retenu l’attention de notre rapporteur pour avis Dominique Potier, et nous avons eu des débats nourris sur l’agriculture, les négociations commerciales et les qualifications professionnelles. Les commissaires ont souhaité que les décrets appelés à fixer les exigences de qualifications donnent lieu à la consultation des représentants des professions concernées, ce qui n’était pas initialement prévu par le texte.

Cela étant, je demeure très réservée sur l’article 43, qui suscite beaucoup d’inquiétude parmi ces professionnels et dans nos territoires. L’allégement envisagé des qualifications ne risque-t-il pas de créer une nouvelle catégorie de professionnels non qualifiés, au risque d’exposer les autres à une concurrence déloyale ? La qualité du service rendu au consommateur ne s’en trouvera-t-elle pas diminuée ? Comment enfin articuler politiquement une telle réforme avec la valorisation des métiers et l’apprentissage ? Il demeure difficile de répondre à ces questions au vu du texte proposé, puisqu’il renvoie à des décrets d’application. Nous souhaiterions donc avoir le projet de décret afin de pouvoir nous prononcer en toute connaissance de cause.

M. Dominique Baert, président . Je vous prie tout d’abord d’excuser le président de la commission des Finances Gilles Carrez, qui ne peut être présent à notre réunion conjointe.

La commission des Finances s’est saisie de dix-huit articles du projet de loi, que nous examinerons pour avis dès cet après-midi, dans les conditions qui viennent d’être rappelées par Jean-Yves Le Bouillonnec.

L’intérêt de notre commission va de soi s’agissant de dispositions intéressant les secteurs financier, bancaire et assurantiel, mais aussi de dispositions relatives à l’épargne, à la fiscalité ou au financement des entreprises.

Nous avons même anticipé sur ce projet de loi, en déposant, avec Dominique Lefebvre, une proposition de loi visant à réformer le système de répression des abus de marché. À la suite d’une décision prise par le Conseil constitutionnel dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, il y avait en effet urgence à mettre fin au cumul des poursuites et des sanctions administratives et pénales en matière financière pour les procédures relevant du même ordre de juridiction. Marquée par l’urgence et par la nécessité de combler un vide juridique, cette proposition de loi, qui a pris soin d’intégrer en tant que de besoin les dispositions de la directive et du règlement européens de 2014, a été élaborée de façon consensuelle, d’abord entre les autorités judiciaires et administratives, puis entre l’Assemblée nationale et le Sénat : la semaine dernière, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord qui sera soumis au début du mois prochain au vote successif des deux chambres.

M. Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics. Ce projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique est porté par plusieurs ministres : Jean-Jacques Urvoas pour les dispositions à caractère pénal, Emmanuel Macron pour ce qui touche à l’économie, mais également Stéphane Le Foll pour les dispositions à caractère agricole. À l’instar de votre commission des Lois, je jouerai le rôle de chef de file dans les débats que nous aurons ensemble. Sachez que c’est avec une grande ouverture d’esprit vis-à-vis de vos propositions que j’aborde ces discussions, convaincu que le Parlement doit être étroitement associé à la construction de ce texte, dont l’objectif fondamental est de hisser la France aux meilleurs standards internationaux, pour renforcer la confiance de nos concitoyens dans leur système politique et économique.

Il porte à mon sens deux objectifs qui peuvent tous nous rassembler. Il s’agit, d’une part, d’accroître la transparence dans le fonctionnement de nos institutions, laquelle a déjà fait, au cours de ces dernières années, l’objet de plusieurs textes de loi. C’est en effet la condition sine qua non pour que nos concitoyens retrouvent confiance dans les institutions publiques et dans une économie ouverte et saine.

Il s’agit, d’autre part, de développer la liberté du commerce et de l’industrie en encourageant le financement de l’économie réelle – nos entreprises ont en effet besoin que l’épargne de nos concitoyens et les investissements s’orientent vers elles –, tout en luttant contre la finance qui corrompt et en sanctionnant plus sévèrement les dévoiements qui menacent notre modèle économique et social.

C’est dans ce cadre politique que j’ai travaillé étroitement ces dernières semaines avec les rapporteurs des trois commissions saisies, MM. Denaja, Colas et Potier, afin d’améliorer le texte. Je les remercie chaleureusement et salue le travail qu’ils accomplissent.

Je commencerai par trois remarques avant d’en venir au fond du texte. En premier lieu, mon expérience parlementaire – relativement longue puisque peu d’entre vous siégeaient déjà dans cette assemblée avant que j’y sois élu – m’incite à penser que le travail parlementaire est utile et efficace. Le premier pas vers la transparence passe par le débat démocratique, d’autant que nous avons tous à cœur de partager des valeurs et un souci d’efficacité.

Ensuite, je voudrais vous mettre en garde contre le risque de charger ce texte, déjà considérable, de toutes les bonnes – ou moins bonnes – idées que vous pourriez avoir. Je propose donc que toutes les propositions de nature fiscale soient renvoyées au débat que nous aurons à l’automne sur la loi de finances ; je vous invite par ailleurs à vous méfier des cavaliers législatifs, ce qui est à l’évidence le cas de bon nombre d’amendements. Ils ne manqueraient pas d’être sanctionnés comme tels par le Conseil constitutionnel qui, on l’a vu, se montre sur ce point de plus en plus sévère.

Cela m’amène à ma troisième remarque : nous touchons avec ce projet à des sujets extrêmement délicats sur lesquels les acteurs économiques concernés ne manqueront pas, et on ne peut les en blâmer, de vouloir se défendre, le cas échéant en en appelant à la justice, comme c’est naturel dans un pays démocratique. Aussi, que le Conseil soit saisi ou pas, et peut-être plus encore s’il ne l’est pas, nous devons donc être très vigilants sur la constitutionnalité des dispositions envisagées. Car s’il n’était pas saisi, des QPC pourraient naître en bien des occasions – on le voit à propos d’autres sujets, avec le non bis in idem, et je ne doute pas que certains spécialistes y travaillent déjà –, qui viseraient à remettre en cause certaines procédures. C’est la raison pour laquelle je vous demande la plus grande rigueur possible sur les questions de constitutionnalité. Même si personne ne peut prétendre détenir la vérité absolue dans ce domaine, puisqu’elle arrive toujours a posteriori, mieux vaut tirer les enseignements de certaines décisions récentes.

J’en viens à présent au fond. Ce projet de loi s’articule autour de quatre grands axes, au premier rang desquels la protection des lanceurs d’alerte. Le texte comporte d’ores et déjà des dispositions qui constitueront l’accroche nécessaire pour ajouter par amendements un statut général des lanceurs d’alerte. Cela en effet n’a pu être fait en amont, les services du ministère ne disposant pas encore lors de la rédaction du projet du rapport que le Conseil d’État vient de rendre sur la question. Il contient de très bonnes idées, même si le sujet peut donner lieu à bien des débats de toute nature ; je compte sur vous pour apporter les compléments nécessaires.

L’affaire des Panama Papers ou celle des Luxleaks et d’Antoine Deltour ont encore mis en lumière très récemment, s’il en était besoin, le rôle éminent des lanceurs d’alerte, et la manifestation de cette conscience citoyenne au bénéfice de l’intérêt général doit être mieux protégée. Il faut d’abord pour cela définir, et ce n’est pas si simple, ce qu’est un lanceur d’alerte afin de l’identifier juridiquement et, ainsi, de le protéger, en évitant l’utilisation abusive du concept. Il faut ensuite définir le « canal » que la révélation des informations dont le lanceur d’alerte est dépositaire doit emprunter. Ce canal doit être balisé clairement et précisément défini, afin, d’une part, de vérifier les informations et de protéger les tiers ainsi que l’organisation en cause contre tout signalement malveillant et, d’autre part, de permettre aux autorités compétentes de les traiter. Il faut enfin que tous les lanceurs d’alerte puissent bénéficier de la même protection, quel que soit le domaine dans lequel ils interviennent. Cette protection doit être renforcée au regard de ce qui existe, afin qu’aucun lanceur d’alerte n’ait à pâtir, notamment au point de vue financier, de la divulgation, dans les conditions légalement prévues, d’une information d’intérêt général au public ou à la presse. C’est la raison pour laquelle je crois que la protection des lanceurs d’alerte doit être confiée, quelle que soit la formule retenue, à une autorité publique indépendante.

Deuxième axe, le projet de loi prévoit la création d’un répertoire numérique des représentants d’intérêts – ou lobbyistes – auprès du Gouvernement, à l’image du fichier mis en place il y a quelques années par l’Assemblée nationale et le Sénat pour répertorier les représentants d’intérêts s’adressant aux parlementaires. L’objectif du Gouvernement est bien d’encadrer l’activité des représentants d’intérêts et non de l’interdire ou de la stigmatiser. Les représentants d’intérêts, par leur action, contribuent à la réflexion collective ; ils constituent des relais d’opinion que le Gouvernement et le législateur doivent écouter et dont les informations et les arguments doivent être pris en considération. Mais c’est parce qu’ils ont un pouvoir d’influence sur les pouvoirs publics qu’il faut rendre transparents les rapports qu’ils entretiennent avec ces derniers, en encadrant l’activité de représentation d’intérêts. Là encore, le projet du Gouvernement a naturellement vocation à être enrichi lors de l’examen que vous ferez du texte – votre rapporteur y travaille. Je suis favorable à toute extension qui ira dans le sens de la transparence, et notamment à la création d’un registre unique, commun au Gouvernement, à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Troisième axe, très important : la lutte contre la corruption. Vous le savez, et cela me fait toujours mal lorsque cette remarque m’est faite au niveau international : la France est très mal classée par les organisations internationales comme l’OCDE ou par les organisations non gouvernementales, comme Transparency International. Il lui est notamment reproché de manquer de dispositifs légaux suffisamment puissants pour prévenir la corruption internationale – nous nous sommes déjà, par d’autres lois, dotés de gros moyens pour détecter et punir les actes de corruption sur notre territoire, l’actualité juridico-politique en témoigne.

Je trouve notamment très choquant que notre justice n’ait condamné définitivement aucune société française pour corruption d’agent public étranger depuis 2000, date de la création de cette infraction, cependant que plusieurs de ces sociétés françaises étaient sanctionnées, parfois lourdement, par des justices étrangères, au premier rang desquelles la justice américaine, mais également par la justice britannique ou la justice hollandaise. C’est de toute évidence une situation inacceptable, nuisible à l’image de la France et de ses entreprises. C’est ce retard que je souhaite voir combler pour mettre notre pays au niveau des grandes démocraties modernes.

Il s’agit d’abord de mieux prévenir et détecter la corruption. Le projet de loi prévoit à ce titre la création de l’Agence nationale de prévention et de la détection de la corruption, qui remplacera le Service central de prévention de la corruption (SCPC), créé par la loi du 29 janvier 1993, dont elle reprendra les missions, tout en assurant celles, nouvelles, qui lui seront attribuées.

Le texte crée aussi une obligation de vigilance dans le domaine de la lutte contre la corruption, applicable notamment aux très grandes entreprises.

Il vise ensuite à rendre plus effective la répression de la corruption, à travers un renforcement de notre arsenal répressif. Je me bornerai à ce stade à mentionner la création d’une peine complémentaire dite de mise en conformité des procédures de prévention et de détection de la corruption pour les entreprises.

Je suis convaincu que, là encore, vous aurez l’audace nécessaire pour compléter le texte afin de mettre notre pays aux meilleurs standards de lutte contre la corruption, et en particulier de la corruption transnationale.

Quatrième axe, la modernisation de la vie économique. Il porte quatre ambitions cohérentes. À l’examen les amendements que vous avez pu déposer, je remarque que bon nombre d’entre vous brûlent d’envie d’apporter leur contribution… Prenons garde, je le répète, à ne pas trop alourdir la barque, déjà bien chargée.

Notre première ambition est de renforcer la régulation financière française, ce qui contribuera à la stabilité financière et à la compétitivité de la place financière de Paris. Cela permettra également d’accroître la protection des épargnants. Pour en avoir beaucoup discuté avec lui, je sais que c’est une préoccupation que partage le rapporteur de la commission des Finances.

Le projet de loi prévoit ainsi plusieurs mesures pour étouffer (Sourires), étoffer, pardon, les pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers – pour éviter justement qu’ils ne soient étouffés… L’autre superviseur financier français, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, verra également ses pouvoirs renforcés : nous allons en particulier créer un régime de résolution pour les assurances – une première en Europe –, afin de renforcer la stabilité financière et la protection des assurés.

Enfin, je sais que vous envisagez de renforcer les pouvoirs du Haut Conseil de stabilité financière, que je préside depuis maintenant deux ans. Cette institution, qui veille à l’interaction entre les développements financiers et la stabilité économique, a effectivement un rôle majeur à jouer : je salue donc votre initiative, qui vise à enrichir ses pouvoirs.

Notre deuxième ambition est d’améliorer la protection des consommateurs et des épargnants. Je voudrais insister ici sur deux mesures particulièrement importantes. Nous souhaitons d’abord interdire purement et simplement la publicité pour des plateformes internet qui proposent des instruments financiers très risqués et promettent de vous transformer en trader en quelques heures pour décrocher le gros lot en quelques jours, sans préciser qu’au bout du compte, vous vous exposez surtout à perdre beaucoup d’argent. Vous vous apprêtez pour cela à donner à l’AMF des pouvoirs supplémentaires, ce qui est une bonne initiative.

Je veux également faciliter l’usage des moyens de paiement modernes, de façon sécurisée pour les consommateurs. C’est notamment la raison pour laquelle je souhaite restreindre la durée de validité du chèque à six mois, ce qui permettra également de diminuer l’incertitude liée au délai d’encaissement. La commission des Affaires économiques a souhaité fixer une date claire d’entrée en vigueur afin de permettre aux acteurs de s’adapter ; j’en suis tout à fait d’accord.

La troisième ambition concerne le financement de l’économie française. Une première mesure qui me paraît majeure consiste à faciliter le financement de l’économie par les investisseurs. C’est pourquoi, conformément à ce que permet le droit communautaire et tout en maintenant un niveau de protection élevé pour les assurés, le projet de loi crée un régime prudentiel adapté pour les régimes de retraite supplémentaire – ce qu’on a faussement appelé des « fonds de pension à la française », alors qu’il s’agit d’une épargne que les Français ont volontairement mis de côté pour leurs vieux jours. Or ces retraites supplémentaires sont aujourd’hui régies par le système assurantiel, dont les règles prudentielles extrêmement contraignantes limitent considérablement le fléchage de ces sommes vers l’économie réelle.

Vous souhaiteriez que cette évolution puisse également s’appliquer aux plans d’épargne retraite populaire (PERP). Cependant, les PERP ne sont pas des produits de retraite professionnelle au sens de la réglementation communautaire. À droit constant, cela n’est donc pas possible, mais je suis prêt à plaider à Bruxelles pour que ce type de produits puisse bénéficier des mêmes souplesses.

Par ailleurs, le livret de développement durable (LDD) comportera désormais un volet dédié à l’économie sociale et solidaire, qui représente 10 % du PIB en France : concrètement, les banques proposeront annuellement à leurs clients détenteurs d’un LDD d’en affecter une partie au financement d’une personne morale relevant de l’économie sociale et solidaire. Vous souhaitez également étendre les obligations d’emploi de l’épargne réglementée qui incombent aux banques aux entités de l’économie sociale et solidaire. Cela me paraît une bonne mesure, qui incitera les banques à investir davantage dans ce secteur.

Enfin, ce texte doit permettre d’améliorer les conditions d’exercice de nombreuses professions, en assurant plus de transparence et en adaptant le système de qualifications professionnelles pour en améliorer l’accessibilité et la qualité. Je n’entrerai pas dans le détail de mesures dont la commission des Affaires économiques a déjà longuement discuté avec le ministre de l’Économie ; je tiens d’ailleurs à saluer ces travaux, et particulièrement ceux du rapporteur pour avis, qui ont contribué à enrichir le texte et à en clarifier les objectifs là où cela était nécessaire.

Je comprends en particulier les préoccupations qui ont conduit à faire évoluer les dispositions en matière d’agriculture, pour apporter plus de transparence sur les ventes de foncier agricole et sur la formation des prix au sein des filières : on y retrouve parfaitement l’esprit du projet de loi.

Je suis satisfait également des clarifications qui ont pu être apportées sur certaines mesures chères au monde de l’artisanat. L’objectif est bien de tirer vers le haut les créateurs d’entreprise et en particulier les primo-créateurs, autrement dit ceux qui le font pour la première fois, en leur offrant d’autres passerelles – c’est le sens des modifications qui ont été apportées, que je trouve de bonne qualité.

Enfin, s’agissant des questions relatives au droit des sociétés, certains d’entre vous souhaitent enrichir le projet de loi pour rendre contraignantes les décisions des actionnaires en matière de rémunération. Je m’en félicite.

Mesdames et messieurs les députés, c’est avec une vraie émotion que, près de vingt-cinq ans après avoir présenté à votre assemblée un projet de loi qui portait quasiment le même titre – c’est ce qui vaut à celui-ci de porter un numéro en plus d’un nom –, j’engage aujourd’hui le débat avec vous.

Charles de Courson. Ça ne nous rajeunit pas !

M. Michel Sapin. Le hasard et la vie politique me donnent l’occasion de vous présenter un texte qui s’inscrit dans une totale continuité ; je me souviens que les débats sur la première loi avaient été particulièrement riches, et que le texte avait été adopté par l’Assemblée nationale à une assez large majorité, et avait fait ensuite l’objet d’une adoption conjointe de l’Assemblée et du Sénat. Je ne vois pas pourquoi il n’en serait pas de même aujourd’hui, sur un texte fidèle à nos valeurs, quel que soit le contexte politique – et je me souviens que celui de janvier 1993 n’était pas particulièrement calme (Sourires). Ce qui tend à prouver que, même dans un climat politique animé, il est possible de faire un travail législatif de qualité sur des sujets qui peuvent nous rassembler.

M. Sébastien Denaja, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Ce projet de loi s’inscrit avec cohérence dans l’action menée avec constance par le Gouvernement et la majorité depuis 2012. Il fait écho à un discours célèbre prononcé par François Hollande en janvier 2012 au Bourget et dans lequel l’ennemi avait été désigné : la finance dévoyée, cette finance que nous entendons aujourd’hui démasquer au moyen d’outils comme l’agence Anticorruption.

Il s’agit d’un texte ambitieux et courageux. Ambitieux, tant son champ est large : favoriser une plus grande transparence de l’action publique, garantir la probité des comportements économiques, améliorer la régulation financière, renforcer les droits des consommateurs et faciliter le financement des entreprises et de l’économie réelle. Courageux, parce qu’il aborde des sujets difficiles et propose des réformes trop longtemps différées : le renforcement de la lutte contre la corruption, la protection des lanceurs d’alerte, la transparence du lobbying.

Je souhaite donc que l’Assemblée nationale, et en particulier les trois commissions qui se sont saisies de ce projet de loi, contribuent à l’enrichir, tout en maintenant sa cohérence d’ensemble. C’est en tout cas l’objectif que je me fixe en tant que rapporteur de la commission des Lois. Je salue l’esprit de co-construction dans lequel nous avons travaillé avec mes deux collègues rapporteurs, Romain Colas et Dominique Potier, et le Gouvernement.

En ce qui concerne la prévention et la détection de la corruption, le projet de loi renoue avec l’esprit de la loi du 29 janvier 1993, que le ministre connaît bien. C’est l’honneur de notre majorité d’assumer les engagements internationaux de notre pays et de doter notre législation d’instruments efficaces pour lutter contre les maux de la corruption.

Le Gouvernement nous propose la création d’une agence – que je proposerai de rebaptiser plus simplement Agence française anticorruption – dotée enfin de ressources à la hauteur du défi. Je rappelle en effet qu’en 2012, le SCPC ne disposait plus que de 4,75 équivalents temps plein… En Italie, le service équivalent compte 350 agents ! Cette agence sera notamment chargée de contrôler la mise en œuvre, par les entreprises condamnées, de la nouvelle peine de mise en conformité prononcée par les tribunaux. Le projet de loi en fait un service à compétence nationale qu’il entoure de certaines garanties d’indépendance fonctionnelle, notamment pour son directeur. Êtes-vous prêt, monsieur le ministre à accueillir favorablement les amendements prévoyant notamment l’inamovibilité de son directeur et visant à étendre les garanties d’indépendance à tous ses agents ?

Dans l’avant-projet figurait une procédure de transaction spécifique aux atteintes à la probité qui nourrit les débats. Ces débats, il est essentiel que nous les ayons, en commission comme dans l’hémicycle, car on ne peut occulter le fait que notre pays n’ait, de toute son histoire, jamais condamné à titre définitif une seule personne morale pour des faits de corruption, alors que trois cents personnes physiques en moyenne sont chaque année condamnées par les tribunaux pour des faits de même nature.

Ne vous semble-t-il pas néanmoins qu’il serait utile, au-delà de cette procédure, de renforcer les moyens juridiques à la disposition des parquets ? Si l’on peut en effet saluer les moyens importants affectés par le projet de loi à la prévention et à la détection – l’étude d’impact parle de soixante à soixante-dix agents –, je rappelle qu’à l’heure actuelle le parquet national financier (PNF) ne peut compter que sur quinze magistrats, et je plaide pour ma part en faveur d’un doublement de ses moyens. Ne faudrait-il pas également envisager la création d’une infraction de corruption en bande organisée, afin d’étendre les moyens d’enquête et de permettre le prononcé de peines plus sévères ? Pourquoi, enfin, ne pas imaginer une exemption de peine pour les repentis, comme elle est déjà possible en matière de blanchiment ?

En ce qui concerne les lanceurs d’alerte, nous sommes nombreux, sur tous les bancs, à souhaiter que ce projet de loi permette de jeter les fondements d’un socle commun des droits des lanceurs d’alerte. C’est notamment l’objet de la récente proposition de loi déposée sur le bureau de notre assemblée par Yann Galut, et la récente étude du Conseil d’État doit nous aider à donner corps à ces fondements au travers de ce projet de loi. Je ne doute pas que vous accompagnerez plusieurs de nos initiatives en la matière. Je proposerai donc dès demain en commission des Lois des amendements visant à créer un véritable régime général de protection des lanceurs d’alerte, sous la forme de sept nouveaux articles ordinaires et d’une proposition de loi organique qui a reçu l’assentiment du groupe Socialiste et de son président, Bruno Le Roux, ainsi que de sa porte-parole pour ce texte, Sandrine Mazetier. Elle répond à l’exigence que vous venez, monsieur le ministre, de rappeler : seule une autorité indépendante peut garantir l’efficacité et la protection des lanceurs d’alerte. Nous proposons de faire du Défenseur des droits, autorité dont l’indépendance est garantie par la Constitution, la clef de voûte du dispositif de traitement et de protection des lanceurs d’alerte. Afin de nous permettre de passer l’obstacle de l’irrecevabilité financière prévue par l’article 40 de la Constitution, le Gouvernement est-il prêt à nous soutenir en indiquant son intention d’abonder les moyens budgétaires et en personnel du Défenseur des droits, afin de lui permettre d’exercer les nouvelles compétences que nous entendons lui confier ?

Pour ce qui concerne le répertoire des représentants d’intérêts, je me félicite qu’après le registre de transparence européen et les registres des représentants d’intérêts de l’Assemblée nationale et du Sénat, le pouvoir exécutif se dote à son tour d’un dispositif permettant de faire la lumière sur le lobbying, sous le contrôle de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Mais nous souhaitons aller plus loin encore, notamment sur le périmètre des acteurs publics concernés et, dans le prolongement de l’avis rendu par le Conseil d’État, étendre ce registre aux collectivités territoriales et aux intercommunalités, de plus en plus souvent l’objet des sollicitations des représentants d’intérêts. Le Gouvernement y est-il favorable ? De même, est-il favorable à l’idée que ce répertoire unique comporte « l’empreinte normative » des représentants d’intérêts, en d’autres termes qu’il retrace quelle aura été leur influence réelle ?

Dans un autre domaine, les dispositions de l’article 24 suscitent de nombreuses interrogations sur l’interprétation des conventions internationales relatives à la protection des biens des États étrangers ; nous aimerions que vous nous précisiez les intentions du Gouvernement.

Pour ce qui concerne enfin les mesures relatives aux entreprises, le projet de loi comporte de nombreuses mesures en faveur de la simplification de la vie des entreprises, qui ont été, pour la plupart, bien accueillies par leurs représentants – je parle des dispositions dont la commission des Lois s’est saisie et non de celles qu’a évoquées Frédérique Massat, au nom de la commission des Affaires économiques, dont je ne suis pas loin de partager la circonspection.

Plusieurs d’entre elles ont retenu mon attention, notamment une des dispositions de l’article 45, qui prévoit que le Gouvernement pourra prendre par ordonnance des mesures autorisant les entreprises à déposer leurs comptes annuels sous un format dématérialisé dans un délai de deux ans. Or, les représentants des entreprises y voient le risque de se faire imposer une technologie appelée XBRL – extensible Business Reporting Language –, dont certains éditeurs de logiciels et avocats font la promotion et qui est de plus en plus utilisée dans le monde. Est-ce bien l’objet de cette disposition ?

Je souligne également que deux initiatives parlementaires importantes devraient venir compléter ces mesures. La première, qui porte sur l’encadrement des rémunérations des mandataires sociaux, donnera force contraignante à la décision de l’assemblée générale des actionnaires, selon le principe du say on pay, déjà en vigueur chez les Allemands, les Anglais ou les Américains ; ce faisant, nous nous alignerons sur des standards bien connus des grandes économies occidentales. La seconde proposition fait suite aux débats que nous avons eus à l’automne dernier au sujet du reporting pays par pays – public country-by-country reporting – et vise à inscrire dans la loi des dispositions permettant sa mise en œuvre. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quelle sera votre position sur ces deux propositions ?

Sachez en tout cas que, de notre côté, nous sommes déterminés à enrichir ce texte et à ce qu’il puisse aboutir dans les meilleures conditions – je l’espère, avant la fin de l’été –, ajoutant à la loi Sapin I ce que nos amis anglais appelaient la semaine dernière « the Sapin two bill » (Sourires), qui permettra à notre pays de se poser en véritable leader européen dans le domaine de la protection des lanceurs d’alerte et de la transparence du lobbying.

M. Dominique Potier, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques. La commission des Affaires économiques s’est concentrée sur deux volets importants de ce projet de loi : les mesures touchant à l’agriculture et celles touchant à l’artisanat.

Concernant l’agriculture, il s’agissait avant tout d’établir des conditions d’équité dans une activité économique qui a partie liée avec la question de notre souveraineté alimentaire et celle de la maîtrise de notre territoire, enjeux singuliers qui participent du bien commun.

Ainsi, la commission des Affaires économiques s’est montrée unanime à soutenir et à renforcer les dispositions visant à augmenter les sanctions applicables aux pratiques commerciales abusives, à la non-publication des comptes ou au non-respect des délais de paiement ; elle a aussi souhaité que les contrats laitiers post-quotas ne puissent faire l’objet d’une transaction commerciale dans un délai étendu de cinq à sept ans.

En créant dans le texte des articles additionnels, la commission a également tenu à ouvrir plusieurs chantiers en vue de la séance. C’est notamment le cas sur la question des coûts de production, pour lesquels nous avons inscrit dans le projet de loi qu’ils devaient être évalués en référence à un ou plusieurs indicateurs publics qui reflètent la diversité des bassins de production et des modes de production agricoles, au regard de la valorisation de la triple performance économique, sociale et environnementale de l’agro-écologie, chère à Stéphane Le Foll.

Nous nous sommes également retrouvés unanimes sur la proposition visant à ouvrir la possibilité de conclure des contrats pluriannuels et tripartites entre producteurs, transformateurs et distributeurs, et avons également posé les jalons d’une réforme de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, autant de dispositions qui pourraient constituer les prémices d’une refonte de la loi de modernisation de l’économie et rendre à nos producteurs un peu de leur dignité.

Bref, nous avons du travail et des rendez-vous dès cet après-midi avec toutes les forces vives et les parties prenantes à ce volet agricole. Nous avons accueilli des amendements venant de tous les horizons et qui convergeaient vers le même but : c’est une unanimité sur le volet agricole qui se dessine pour la séance publique.

Le combat que nous avons à mener sur l’artisanat sera plus difficile, dans la mesure où il relève moins de l’équité que de l’agilité… Cela étant, j’ai entendu vos encouragements, monsieur le ministre, et il me sont précieux à ce stade, car de nombreux malentendus subsistent.

Sur la question du stage de préparation à l’installation (SPI), nous avons rapidement trouvé un terrain d’entente, tombant d’accord sur le fait que ce stage devait évidemment s’effectuer avant l’installation, mais plus rapidement. Le SPI est précieux et nous devons le renforcer. C’est dans cette optique que nous y avons intégré l’information sur la responsabilité sociale et environnementale (RSE), qui ne doit pas rester le monopole des multinationales.

En revanche, l’autre nouveauté que le ministre de l’Économie a souhaité introduire dans la loi et qui concerne les qualifications nous posait d’autant plus problème que, outre le fait que cela conduisait à ouvrir une boîte de Pandore, elle nous paraissait s’inscrire en porte-à-faux par rapport à la loi Pinel relative à l’artisanat, qui prônait la reconnaissance des métiers. La tentation était grande à ce stade de rejeter en bloc la proposition du ministre et de nous enfermer dans une logique opposant conservateurs et libéraux, ancienne et nouvelle économie. Mais nous ne sommes pas tombés dans ce piège et nous avons préféré examiner au fond les sujets posés dans le diagnostic du Gouvernement et qui méritaient peut-être des réponses différentes de celles qu’il proposait. C’est donc dans une logique de réforme de l’article 43 que nous nous sommes inscrits : autrement dit, l’article 43 auquel certains ici s’opposent n’existe plus. Nous travaillons sur de nouvelles pistes.

Ainsi, il n’y aura pas de remise en cause des tâches ou des métiers de l’artisanat qui ne fasse l’objet d’une concertation avec l’assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA) et avec les professions concernées. Cela étant, l’enjeu reste de sortir de l’économie informelle grâce à ce sas vers l’artisanat que constitue la micro-entreprise ; or nous avons identifié une réelle carence à ce niveau. En effet, si la voie royale vers l’artisanat reste l’enseignement initial délivré par nos lycées professionnels – qui doivent devenir des lycées des métiers – et l’apprentissage, il nous faut en parallèle réformer la validation des acquis de l’expérience (VAE), pour donner leur chance à des personnes qui ont acquis un savoir-faire leur permettant d’intégrer cette économie de l’excellence et du contrat de confiance avec le consommateur, qui est la marque de l’artisanat, une de nos fiertés nationales.

Si nous voulons parvenir à un consensus sur l’article 43, le « déminer » en quelque sorte, il nous faut tirer tout le monde vers le haut. Cela exige de faire bouger les lignes et de faire preuve d’inventivité. C’est le chantier que nous proposons d’ouvrir à travers une réforme de la VAE, voire en élargissant la catégorie des « hommes toutes mains » et autres métiers du bricolage, qui, en marge de l’artisanat, répond à une attente croissante de nos concitoyens et constitue donc un précieux réservoir d’activité pour d’éventuels autoentrepreneurs.

Je tiens, pour conclure, monsieur le ministre, à saluer la disponibilité dont vous-même et votre cabinet avez fait preuve autour d’un chantier qui dépasse largement le champ de la commission économique mais que j’ai néanmoins souhaité ouvrir : la lutte contre les fonds vautours, qui s’attaquent aux dettes des États les plus fragiles et les plus pauvres. Nous devons prendre des mesures de protection des biens acquis par des pays tiers sur notre sol et concourir à débarrasser l’économie de ces fonds vautours qui sont souvent les mêmes que l’on retrouve dans les Panama Papers, acteurs d’une économie de la fraude et de la triche qui désespère le peuple et fabrique de la misère au bout du monde comme au bout de la rue.

Votre disponibilité ne s’est pas non plus démentie sur la question du marché foncier. Il ne peut en effet y avoir de politique alimentaire ou de politique agricole qui ne s’appuie sur une politique foncière. Or les multiples lois que nous avons adoptées ont laissé des « trous dans la raquette », qui ont permis à une société chinoise de racheter des terres en Berry. La présence de fonds spéculatifs sur nos terres depuis 2008, d’abord sur des terres à enjeu – terres périurbaines ou viticoles – mais bientôt sur des terres simplement destinées à la production de blé ou de colza, nous inquiète fortement. Il s’agit d’un dévoiement profond d’une politique agricole qui fait consensus depuis la Libération, d’une remise en cause de notre modèle de production et des valeurs de civilisation que nous attachons à la terre. C’est la raison pour laquelle, j’ai déposé un amendement d’appel visant à éviter que notre espace rural ne devienne un supermarché pour sociétés écrans.

M. Romain Colas, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Ce projet de loi est un texte fondamental qui s’inscrit dans la cohérence de l’action menée par la majorité depuis 2012 pour accroître la transparence et la moralisation de la vie publique et de la vie économique.

Je rejoins Sébastien Denaja sur l’importance de créer des dispositifs de protection des lanceurs d’alerte, des systèmes anticorruption, mais également des outils de régulation financière, en France comme à l’échelle européenne et transnationale.

Mais ce projet de loi touche également à notre quotidien, en apportant des protections aux consommateurs et aux épargnants comme aux investisseurs.

Je veux à mon tour, comme l’ont fait mes prédécesseurs, saluer votre disponibilité, monsieur le ministre, et celle de vos équipes, qui ont permis ce travail de co-construction législative. Je remercie les autres rapporteurs, mais également Christophe Castaner, qui m’ont accompagné dans l’examen de ce texte. J’ai pris bonne note, monsieur le ministre, de votre assentiment sur certaines des dispositions que nous proposons – je pense notamment à l’extension des pouvoirs du Haut Conseil de stabilité financière et à l’émergence d’un régime macroprudentiel inspiré du régime macroprudentiel bancaire pour le secteur assurantiel, ou encore à l’extension des dispositifs prévus à l’article 28 visant à interdire efficacement la publicité pour les contrats à haut risque, extrêmement toxiques pour ceux qui se laisseraient berner. La proposition de la commission des Finances en la matière s’inspire des moyens dont dispose l’Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), et vise à permettre la fermeture par l’AMF, sous contrôle du juge, des sites illégaux.

Vous approuvez également que l’ouverture du livret de développement durable à l’économie sociale et solidaire soit étendue aux autres produits de l’épargne réglementée. Pensez-vous qu’on puisse envisager à terme un produit d’investissement qui viendrait compléter ces dispositions et permettrait de flécher du capital vers l’économie sociale et solidaire ?

Enfin, Sandrine Mazetier et Éric Alauzet ont travaillé sur la création d’un registre public des bénéficiaires effectifs des sociétés. Il me semble que ce texte sur la transparence serait le véhicule idoine pour inscrire dans la loi un tel outil ; qu’en pensez-vous ?

Êtes-vous favorable au fait que notre commission des Finances puisse se prononcer sur les décisions relatives à la liste des États non coopératifs et des paradis fiscaux ? L’actualité récente et le fait que le Panama ait été sorti de cette liste sans que le Parlement ait eu son mot à dire en prouve, me semble-t-il, la nécessité. De telles décisions doivent faire l’objet d’un débat public.

S’agissant enfin du reporting public pays par pays, une proposition de la Commission européenne est actuellement à l’étude. Grâce notamment aux efforts de la France, ce sujet est désormais entré dans une phase opérationnelle au niveau européen. La majorité a toujours souhaité accompagner avec exigence le Gouvernement français sur cette question. Pensez-vous que notre assemblée pourra s’en saisir dans le cadre de nos débats sur ce projet de loi ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec, président. Je donne maintenant la parole aux représentants des groupes.

Mme Sandrine Mazetier. Au nom du groupe Socialiste, républicain et citoyen, je salue les objectifs de ce texte qui emporte notre adhésion pleine et entière : lutter contre la corruption, renforcer la transparence dans l’élaboration des décisions publiques, moderniser la vie économique. Ce projet de loi prend ainsi la suite de la loi du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique ainsi que de la loi du 6 décembre 2013 sur la lutte contre la fraude fiscale et contre la grande délinquance économique et financière, qui avait créé le parquet national financier.

Nous vous remercions, monsieur le ministre, de vous être d’emblée placé dans une logique collaborative en invitant les parlementaires à compléter le dispositif proposé par le Gouvernement.

Ce texte permettra incontestablement de lutter contre les atteintes à la probité, notamment au niveau international, en corrigeant notre législation tant sur le plan de la prévention – aujourd’hui, nos entreprises ne sont ni obligées ni même incitées à mettre en place des programmes de conformité anticorruption – que sur celui de la répression.

Nous sommes obligés de constater que les condamnations de personnes morales pour corruption sont extrêmement rares ; et quand elles interviennent, c’est toujours tellement longtemps après la commission des faits qu’on ne peut pas vraiment considérer que la justice passe. Et la peine est toujours d’une légèreté proportionnelle à la durée interminable de la procédure… Ce texte vise à corriger cet état de fait ; le groupe Socialiste déposera des amendements pour mettre définitivement fin à cette impunité, et pour faire en sorte que la corruption – qui jette l’opprobre sur notre pays – soit sanctionnée rapidement, efficacement et de manière exemplaire. Nos entreprises, vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, sont lourdement condamnées à l’étranger, notamment aux États-Unis où quatre grands groupes français sont entrés dans le top 10 des sanctions les plus sévères ! Nous sommes déterminés à sortir du statu quo et nous attendons beaucoup des réponses de l’exécutif dans ce domaine.

Le projet de loi entend également renforcer la protection des lanceurs d’alerte. Nous vous remercions d’avoir levé les contraintes de l’article 40 de la Constitution pour nous permettre de confier la protection des lanceurs d’alerte à une autorité indépendante, efficace et reconnue, en l’occurrence le Défenseur des droits.

Le groupe Socialiste a déposé des amendements visant à mieux définir les lanceurs d’alerte, mais aussi à améliorer leur protection : avance des frais de justice, mais aussi accès au référé prud’homal, afin de contrer les représailles qui détruisent la vie des lanceurs d’alerte.

M. Pascal Cherki et M. Yann Galut. Très bien !

Mme Sandrine Mazetier. Enfin, nous nous félicitons de la création d’un registre des représentants d’intérêts : vouloir participer de la décision publique n’est pas illégitime ; mais le faire de façon opaque et avec des moyens financiers considérables est condamnable.

Je ne reviens pas sur la question du reporting. L’ensemble des membres du groupe SRC veulent avancer sur ce point.

Malheureusement, dans ce texte qui marque de nombreuses avancées et qui illustre par bien des aspects la volonté de la France de respecter ses engagements internationaux, et même d’être souvent à l’avant-garde, une disposition fait tache : l’article 24, parfaitement contradictoire avec toutes les belles intentions et promesses exprimées ailleurs. S’il était adopté en l’état, il contreviendrait à la mission historique de notre pays qu’est la défense de l’État de droit et des citoyens. Il serait regrettable de laisser de telles scories au risque de jeter le trouble sur les intentions du Gouvernement.

M. Joël Giraud. Sur l’ensemble de ces sujets, le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste vous soutient, monsieur le ministre, comme il soutient votre action déterminée à Bercy comme à Bruxelles. Ce soutien s’accompagne, cela va de soi, de propositions auxquelles nous tenons.

Nous relevons avec enthousiasme les récentes déclarations du Premier ministre indiquant son souhait d’introduire en séance une mesure législative d’encadrement des très hautes rémunérations, qu’il est judicieux de dénommer avec lui les « rémunérations indécentes » – particulièrement lorsqu’elles ne sont pas conformes au vote des actionnaires, comme on l’a vu dernièrement !

Concernant la transparence, la France est en pointe et doit le rester. Aussi souhaitons-nous reposer la question des déclarations préalables des schémas d’optimisation fiscale par les conseils et professionnels en fiscalité, déclaration préalable en vigueur au Royaume-Uni mais censurée par le Conseil constitutionnel en 2014. Cette proposition, faite par de nombreux rapports et adoptée par la représentation nationale en 2013, vise à accroître la réactivité de vos services ; sa présence dans ce texte se justifie pleinement. Nous sommes toutefois ouverts à toute solution qui ferait progresser le droit et la morale fiscale. Vous avez rappelé votre souci de sécurité juridique. Avez-vous des propositions pour faire avancer ce dossier ?

Comme de nombreux collègues de la majorité, nous sommes attachés à l’obligation d’un reporting complet et public pour les sociétés cotées. Nous saluons bien entendu la mesure adoptée dans le projet de loi de finances pour 2016 ; toutefois les règles européennes vont évoluer rapidement sous la pression de l’affaire des Panama Papers et il serait dommage que la France ne maintienne pas son rôle pionnier.

Nous formulons également des propositions de protection des consommateurs. Nous souhaitons ainsi clarifier le devoir d’information des banques à l’égard de leurs clients lorsqu’elles prélèvent des commissions d’intervention sur les comptes de dépôt. Cette information doit être transmise au préalable, via un support distinct du relevé bancaire ; cette obligation figure dans la loi de séparation et de régulation des activités bancaires de juillet 2013, mais elle n’est majoritairement pas appliquée, sans conséquence pour les banques – mais pas pour les clients ! Il est donc nécessaire de prévoir des sanctions.

Toujours concernant les banques, nombreuses sont celles qui facturent à leurs clients l’obligation légale d’informer chaque année la personne qui s’est portée caution du montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie. Nous proposons de prohiber la facturation de cette obligation légale, facturation injustifiable s’il en est !

Nous proposons aussi plusieurs mesures sur le crédit affecté, notamment pour éviter que le consommateur ne se retrouve engagé à ce titre sans en avoir conscience.

S’agissant des articles sur lesquels la commission des Affaires économiques était saisie, ma collègue Jeanine Dubié a défendu une quinzaine d’amendements dont trois ont été votés et plusieurs satisfaits.

Sur l’agriculture, on tâtonne depuis des années sur la question du prix à payer à nos paysans pour nos productions agricoles. Contractualisation, Observatoire des prix et des marges, structuration des interprofessions : autant de tentatives utiles, mais qui n’ont pas encore réussi à inverser la grande tendance de fond qu’est la captation de la valeur ajoutée par la grande distribution et l’industrie agroalimentaire. Le pouvoir de négociation des acteurs est trop déséquilibré en défaveur de nos paysans ; nous devons rétablir de l’équité dans les relations commerciales. La commission des Affaires économiques a prévu de renforcer cet aspect du projet de loi, mais nous sommes encore loin du compte et il faudra faire mieux en séance publique.

S’agissant enfin de l’artisanat, nous constatons les blocages et nous demandons plus de fluidité et de simplicité, mais nous voulons aussi défendre la nécessité de la qualification. Sur le maintien du stage préalable à l’installation (SPI) comme sur le maintien de qualifications professionnelles pour certains métiers du bâtiment, par exemple, nous devons être vigilants : ne prenons pas le risque de basculer dans une « uberisation » mal maîtrisée aux conséquences sociales, économiques et fiscales souvent préjudiciables.

M. Olivier Marleix. Il est indispensable de lutter contre la corruption sur notre territoire, mais aussi de jouer à armes égales avec des puissances étrangères, fussent-elles amies : la création d’une agence spécialisée digne de ce nom, outil équivalent à ceux dont disposent d’autres grands pays, est une bonne chose. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, l’absence de condamnations d’entreprises en France pour corruption ; aux États-Unis, le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) a permis d’engager une centaine de poursuites pour un montant supérieur à 15 milliards d’euros au cours des dernières années.

Malheureusement, tel que votre texte est rédigé, il risque de passer « à côté de la plaque » : d’un côté vous imposez de nouvelles contraintes aux entreprises françaises – je pense aux obligations nouvelles de vigilance, dont le non-respect sera sanctionné à partir d’un seuil très bas –, et de l’autre vous créez une agence dépourvue de réels moyens d’action depuis que vous avez renoncé à la transaction pénale à la suite de l’avis du Conseil d’État. Notre dispositif risque de demeurer inopérant. Nous souhaitons vivement que le Gouvernement revienne sur ce point au cours du débat.

S’agissant des lanceurs d’alerte, le groupe Les Républicains salue l’intention du Gouvernement mais reste « sur sa faim ». Les lanceurs d’alerte prennent des risques très importants ; nous avons tous en tête le témoignage de Stéphanie Gibaud, cette ancienne salariée d’UBS, que vous avez vous-même reçue. Ils collaborent avec l’État pour résoudre ces affaires. Or le texte actuel ne prévoit pas d’indemnisation, et l’encadrement du secret des alertes paraît très insuffisant. La protection de ces démarches est pourtant essentielle.

Il nous paraîtrait hasardeux d’élargir la définition des lanceurs d’alerte – je pense au texte de notre collègue Yann Galut, qui est très large – sans les protéger véritablement et aller jusqu’au bout de la démarche.

S’agissant des représentants d’intérêts, le besoin de transparence dans les relations entre lobbyistes et autorités publiques est évident. Mais les décideurs doivent aussi être confrontés à ces intérêts particuliers, privés, n’ayons pas peur des mots : il ne faut pas entrer dans une logique de suspicion a priori. Or le projet de loi tend à alimenter une défiance généralisée, en raison de lacunes dans sa rédaction : je regrette notamment le peu de garanties procédurales prévues. Il est seulement question d’un secret professionnel dont la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique serait le garant ; cela me paraît insuffisant, la Haute Autorité n’ayant pas toujours montré un respect parfait de ce secret. Il est nécessaire d’aller plus loin, car les enjeux pour la réputation de ces entreprises sont importants.

La question de l’interaction entre intérêts privés et publics ne saurait d’ailleurs pas se limiter au rôle de lobbyistes ; il ne faudrait pas que la relation d’influence ne soit peu à peu réservée aux anciens élèves des grandes écoles de la fonction publique – je ne vise bien évidemment aucune promotion en particulier. Le départ annoncé ce matin même du directeur général du Trésor, l’homme qui connaît le mieux les participations de l’État actionnaire, qui est membre des conseils d’administration des dix plus grosses entreprises françaises et qui part se mettre au service d’un fonds d’investissement franco-chinois, nous rappelle combien il serait intéressant que les avis de la commission de déontologie soient rendus publics – à supposer qu’elle ait été saisie, d’ailleurs. Êtes-vous favorable à cette transparence systématique ?

S’agissant enfin de l’artisanat et des qualifications, notre groupe est évidemment opposé aux dispositions initiales du projet de loi ; les renvoyer à des textes réglementaires ne changera rien à notre position.

M. Charles de Courson. Le groupe UDI est un groupe ouvert, divers, qui essaye de ne pratiquer ni la langue de bois, ni l’opposition systématique.

Le risque de censure de cavaliers législatifs, monsieur le ministre, est infime : ce texte, entre nous, est déjà un patchwork. Il aurait dû s’intituler « projet de loi portant diverses dispositions économiques et financières » : autrement dit, on peut y mettre de tout. Les risques d’inconstitutionnalité sont ailleurs, mais ils sont majeurs, sur le fondement de la disproportion entre les faits et les sanctions mais aussi de la rupture du principe d’égalité.

Franchement, monsieur le ministre, ce texte est brouillon et mal rédigé (Murmures). Ne vous vexez pas, mes chers collègues, vous le verrez bien au fur et à mesure…

M. Eduardo Rihan Cypel. Nous comptons sur votre plume !

M. Charles de Courson. Précisément : j’ai déposé de nombreux amendements.

Venons-en au fond. Nous sommes bien sûr favorables à la lutte contre la corruption. Vous avez rappelé le vote de la loi Sapin I – adoptée juste avant que vous ne nous quittiez, en 1993, avant de revenir à l’Assemblée presque quinze ans plus tard. Mais cette loi a échoué, vous l’avez reconnu vous-même, monsieur le ministre, avec honnêteté : aucune sanction n’a été prise contre les personnes morales coupables de corruption active. Pourquoi ?

J’y vois deux grandes raisons. La première a été soulevée par un de nos rapporteurs : les gouvernements successifs n’ont jamais donné aux magistrats les moyens de lutter efficacement contre la corruption.

M. Pascal Cherki. C’est très juste.

M. Charles de Courson. Était-ce intentionnel ? Il y a eu, je crois, une volonté de ne pas aller au fond des choses. On ne saurait le reprocher à ce seul gouvernement, bien que cela fasse déjà quatre ans que vous êtes au pouvoir.

Quant à la deuxième raison, elle nous concerne tous : il n’y a pas de majorité au Parlement pour réviser la Constitution et donner au parquet son indépendance, c’est-à-dire pour prévoir que les nominations de ces magistrats sont soumises à un avis conforme du Conseil de la magistrature.

Si le parquet était indépendant, et si les moyens étaient fortement renforcés, la lutte contre la corruption pourrait être efficace ; et alors seulement nous pourrions parler de transaction pénale et nous commencerons à avoir une véritable efficacité dans la lutte contre la corruption. La France est mal notée, et a même perdu des places dans le classement international, et nous devons nous interroger.

Quant à l’encadrement du lobbyisme, nous y sommes naturellement favorables. Mais prenons garde à ne pas créer de rupture d’égalité entre les avocats lobbyistes et les autres !

Mme Sandrine Mazetier. Très juste !

M. Charles de Courson. Faisons bien attention au problème de la territorialité de notre droit. Nous sommes, vous et moi, des Européens convaincus depuis plus de quarante ans, et nous nous félicitons toujours de voir ceux qui ont combattu l’Europe finalement s’y rallier. Mais aujourd’hui, tous les proeuropéens feraient bien de s’unir : reprenons ce qu’a fait l’Union européenne ! Il faut nous caler sur les mêmes concepts, et aller plus loin que le registre unique ; or le texte que vous nous proposez est relativement étroit.

Il faut également, bien sûr, améliorer le statut des lanceurs d’alerte. Là encore, il est toutefois nécessaire de veiller à bien articuler ce dispositif avec l’obligation de loyauté et de discrétion qui s’impose aux salariés.

Sur la modernisation de la vie économique enfin, là encore nous avons affaire à un patchwork. Rappelons-nous que toutes les majorités ont échoué à contrôler internet : interdire la publicité pour certains instruments financiers risqués, ce sera un nouveau coup d’épée dans l’eau : la publicité se fera à partir de sites hébergés à l’étranger. Réfléchissons et adaptons nos outils.

Sur le reporting, nous sommes d’accord, mais nous ne devons agir que dans un cadre européen : c’est d’ailleurs, ou plutôt c’était, la position du Gouvernement.

Enfin, je défends depuis quinze ans la fixation des rémunérations des dirigeants par l’assemblée générale des actionnaires : où est la démocratie économique si les propriétaires d’une entreprise ne peuvent pas fixer la rémunération de ceux qui la dirigent ? Un peu de bon sens, enfin !

M. le ministre. Monsieur de Courson, pourquoi cherchez-vous à vous montrer désagréable alors que vous êtes au fond très ouvert ? Est-ce un moyen de vous excuser de vous montrer si constructif ? (Sourires.) Quoi qu’il en soit, je vous remercie pour le travail que vous avez réalisé : je me doute que bon nombre de vos amendements seront utiles, cela ne m’étonne pas de vous.

« Brouillon », « mal rédigé » : voilà des termes bien déplaisants pour tous ceux qui ont travaillé à ce texte, y compris au Conseil d’État. Ce projet de loi est un gros travail, et de qualité. Ne prenez pas prétexte de notre souci d’ouverture… De deux choses l’une : ou bien notre texte est impeccable, circulez, il n’y a rien à voir, et vous allez nous accuser d’être autoritaires ; ou bien nous restons ouverts aux propositions et aux amendements, et aussitôt vous nous dites que notre texte est brouillon ! Je pense au contraire qu’un texte bien écrit peut être bien amendé, et je souhaite que ce soit le cas.

Vous dites, monsieur de Courson, que la loi Sapin I a été un échec. Mais si vous l’aviez lue, vous sauriez que cette loi s’arrêtait aux frontières de la France. Cette loi n’est pas un échec en France.

M. Charles de Courson. Mais si ! Vous l’avez dit vous-même.

M. le ministre. Non. Le fait d’avoir introduit de la transparence dans la vie publique et son financement, dans les délégations de service public, dans les marchés publics, etc., a été incontestablement dissuasif. Je n’irai pas jusqu’à dire que nous sommes débarrassés de la corruption, car on ne se débarrasse jamais du mal ; mais l’effort a été considérable.

Mais la loi Sapin I ne traitait pas de la corruption à l’étranger – je l’avais souhaité, mais on m’en avait dissuadé. Voilà pourquoi, vingt-cinq ans après, je suis à nouveau devant vous, après avoir eu tout le temps d’y réfléchir dans les nombreuses collectivités territoriales que j’ai dirigées lorsque je n’ai plus été député.

En ce qui concerne la lutte contre la corruption, nous instaurons des règles nouvelles, des droits nouveaux, des institutions nouvelles, et nous manifestons notre volonté d’être plus efficaces contre la corruption tant en France qu’à l’étranger : cela implique des moyens supplémentaires. Le garde des Sceaux et moi-même nous y attacherons. Je ne suis pas pour l’affichage, mais pour l’efficacité : et j’entends bien que ce texte soit efficace, ne serait-ce que pour éviter d’entendre dans vingt-cinq ans M. de Courson m’adresser les mêmes remarques désagréables. (Sourires.)

Mme Aurélie Filippetti. Nous vous souhaitons à tous deux d’être encore là !

M. le ministre. Monsieur le rapporteur de la commission des Lois, le Gouvernement est favorable à vos propositions sur le Défenseur des droits. Je lève le gage afin que le débat s’engage dans les meilleures conditions.

Le débat sur la protection des lanceurs d’alerte est important mais difficile. Mes collaborateurs sont prêts à vous apporter tous les éléments techniques. Le problème n’est pas simple : nous sommes tous d’accord sur les principes, mais il faut arrêter les modalités précises. La première voie que nous pourrions emprunter serait la création d’une nouvelle autorité administrative indépendante spécialisée ; ce qui nous ferait une autorité indépendante de plus, alors que nous essayons par ailleurs d’en diminuer le nombre. La deuxième solution serait celle d’une amélioration de la procédure judiciaire : cette voie, défendue par certains, peut être explorée, mais il paraît difficile de penser qu’elle puisse prendre en charge l’ensemble des lanceurs d’alerte. D’où la troisième solution, défendue par le rapporteur, qui consisterait à élargir les compétences du Défenseur des droits. Le débat nous éclairera. J’insiste seulement sur la nécessité d’attribuer cette compétence à une autorité qui dispose de moyens suffisants, et surtout qui soit parfaitement indépendante.

S’agissant des représentants d’intérêts, beaucoup d’entre vous souhaitent aller plus loin. Beaucoup souhaitent également s’inspirer des règles européennes, ce que nous avons déjà fait ; il est sans doute possible de progresser encore, mais je me permets de rappeler un point de droit constitutionnel. S’il existe un registre unique des représentants d’intérêts, c’est parce que l’Assemblée nationale et le Sénat ont souhaité qu’il en soit ainsi ; la séparation des pouvoirs interdit à l’exécutif de l’imposer au législatif. La mise en place d’un registre unique facilite certes les choses, mais elle résulte d’une décision des bureaux des deux chambres et non à proprement parler d’une volonté d’améliorer le texte.

S’agissant de l’article 45 et de la norme XBRL, je veux vous rassurer, monsieur le rapporteur : son application n’est pas une obligation, mais une simple faculté ; on me souffle, de plus, qu’il est d’ores et déjà tout à fait possible d’utiliser une norme moins complexe, nommée Edifact.

S’agissant de l’article 24, madame Mazetier, je veux à tout prix éviter un malentendu. Je comprends votre inquiétude, exprimée avec fougue : vous craignez qu’il ne s’agisse de protéger des États voyous et des voyous d’États étrangers qui disposeraient chez nous de biens mal acquis, ce qui serait effectivement anormal. Ce n’est absolument pas le but de cet article, qui vise au contraire à permettre au juge de se prononcer a priori plutôt qu’a posteriori sur la saisie d’un bien diplomatique par un privé. Ce juge écartera évidemment les cas manifestes de fraude ou d’abus de droit : autrement dit, il ne suffira pas d’apposer une belle plaque dorée « Ambassade de Je-ne-sais-où » à l’entrée d’un immeuble privé sis avenue Hoche pour le transformer en bien diplomatique.

On pense, à raison, aux biens mal acquis ; on pense également à une affaire récente qui touche à la Russie. Mais je vous demande de ne pas oublier ce qui s’est passé, ou qui pourrait se passer, quand des fonds privés, des « fonds vautours », ont pu saisir, pour des raisons strictement privées, des biens incontestablement diplomatiques dans différents pays dans le but de récupérer des sommes qui leur étaient par ailleurs dues. De tels procédés sont parfaitement tout à fait inadmissibles. Je reste ici, vous le comprenez, très prudent sur ce cas russe, mais il est arrivé qu’un fonds demande la saisie des comptes d’une ambassade, et l’ait obtenue dans certains pays, comme la Belgique. C’est à ce genre de situation que cette disposition vise à répondre. Je suis donc tout prêt à me pencher sur des amendements qui préciseraient ce qu’est un bien diplomatique, par exemple, pour éviter les malentendus. Mais je redis que cet article ne vise qu’à mettre en place en France les règles de protection des biens diplomatiques qui prévalent dans la plupart des grands pays du monde.

D’autres sujets ont été abordés sans figurer dans le texte.

Monsieur Giraud, le débat sur la déclaration préalable des schémas d’optimisation fiscale est récurrent. Le Gouvernement avait donné un avis favorable à plusieurs amendements l’an dernier, mais ils ont été censurés par le Conseil constitutionnel. Je suis prêt à reprendre ce sujet, mais il serait de meilleure méthode de le faire à l’occasion de la prochaine loi de finances.

De même, nous nous pencherons sur vos propositions qui concernent la transparence de la facturation par les banques afin qu’elles soient techniquement impeccables.

Monsieur Marleix, j’avais moi-même, vous l’avez dit, initialement proposé la création d’une transaction pénale. Le Gouvernement a en effet suivi sur ce point l’avis du Conseil d’État, qui a souhaité la sortir du texte. Les parlementaires sont évidemment libres d’aborder le sujet. À mon sens, il ne faut toutefois pas tenter de transposer sans précaution des modèles étrangers. Nous sommes attachés à la présence dans la procédure, le plus souvent possible, dans les transactions de quelque nature qu’elles soient, du juge du siège. Mais il me semble également nécessaire, même si c’est le procureur de la République qui agit, de ménager des moments de publicité : de telles affaires ne peuvent être traficotées dans un coin sombre du palais de justice, fût-ce sous le regard du procureur. À ces deux conditions, et en prenant garde à l’avis du Conseil d’État qui estime que la transaction pénale ne saurait s’appliquer qu’à la corruption transnationale, nous pourrons mener un travail constructif. Je m’en remets à l’inventivité du Parlement – nous serons bien sûr heureux d’apporter tous les éléments techniques nécessaires.

En ce qui concerne les rémunérations des chefs d’entreprise, des amendements ont été déposés ; le Gouvernement est favorable à l’adoption de dispositions législatives. Je souligne toutefois qu’une limitation par la loi du montant des rémunérations serait contraire à la Constitution, car contraire à la liberté des contrats et à la liberté du commerce et de l’industrie – la jurisprudence du Conseil constitutionnel est à cet égard sans ambiguïté. À mon sens, il faut donc privilégier le renforcement des pouvoirs de l’assemblée générale des actionnaires pour définir les politiques de rémunération. En clair, il s’agit d’éviter ce qui s’est produit chez Renault, qui a été très choquant non seulement par les montants mais aussi par la méthode employée : un conseil d’administration demande son avis à l’assemblée générale, qui répond qu’elle n’est pas d’accord, et une heure après, on repart en conseil d’administration et on passe outre… Tout cela est contraire au bon fonctionnement de nos entreprises.

S’agissant du rapport public pays par pays, puisque telle est la traduction française de l’expression public country-by-country reporting, nous avons déjà eu ce débat à deux occasions l’an dernier, vous vous en souvenez certainement. La première fois, en loi de finances, les choses s’étaient plutôt bien passées ; la seconde fois, en loi de finances rectificative, cela s’est passé dans des conditions plus compliquées…

Rappelons que le reporting pays par pays est pratiqué en France : il permet aux administrations fiscales, notamment européennes, d’échanger les informations nécessaires. Du point de vue fiscal, nous disposons donc des outils nécessaires pour identifier les « trous » et faire régulariser les situations et payer l’impôt. Je comprends très bien la volonté d’étendre cette transparence ; j’ai dit l’an dernier que j’étais favorable à ce que nous progressions.

Toutefois, le Conseil constitutionnel a été très explicite sur le fait que le rapport pays par pays n’était conforme à la Constitution que parce qu’il ne donnait pas lieu à publicité. Voter à nouveau une disposition rendant ce rapport public nous mettrait donc inévitablement en situation d’inconstitutionnalité.

Mais dès lors qu’une directive européenne prévoira cette règle, sa transposition dans le droit français ne sera pas contraire à l’ordre juridique interne et à la Constitution. Or cette directive est en cours de discussion. C’est la raison pour laquelle je soutiendrai un amendement prévoyant un reporting public pays par pays dès que cette directive sera applicable. Et je vous rassure, ce ne sera pas à la Saint-Glinglin : ce texte est d’ores et déjà sur la table et devrait être définitivement adopté d’ici à la fin de l’année. Je suis favorable au rapport public pays par pays, je soutiens très clairement et très fermement au niveau européen, mais nous devons nous entourer de toutes les garanties juridiques nécessaires.

S’agissant du registre des bénéficiaires effectifs, je rappelle qu’un décret du 11 mai prévoit la transparence sur les bénéficiaires effectifs des trusts en France. Nous avons été l’un des premiers pays au monde à prendre une telle mesure. Nous travaillons également aux modalités d’actualisation du registre du commerce, afin que l’on puisse savoir en temps réel qui sont exactement les propriétaires de telle ou telle société. Je suis donc, vous l’avez compris, favorable à ce que nous avancions. Là aussi, une directive européenne est en préparation.

S’agissant enfin de la liste des États non coopératifs, je suis favorable à votre proposition, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des Finances. Aujourd’hui, c’est moi qui décide de l’inscription ou non sur la liste noire. Je viens d’ailleurs d’y réinscrire Panama, en raison de ce que j’appellerai, pour ne pas créer de soucis à notre ambassadeur, une coopération limitée des autorités panaméennes, qui ne tiennent pas toujours leurs engagements – je n’en dis pas plus. Cette inscription entrera en vigueur au 1er janvier de l’année prochaine.

Vous proposez, monsieur le rapporteur pour avis, qu’il soit possible d’actualiser cette liste en cours d’année : je suis favorable à cet amendement. Je suis également favorable à ce qu’un débat ait lieu en commission des finances.

Mme Véronique Louwagie. Je souhaite évoquer le statut des autoentrepreneurs, auquel le projet de loi, dans ses articles 37 et 39, entend apporter de la souplesse. Le chiffre d’affaires trimestriel moyen des micro-entrepreneurs s’élevait à 3 319 euros au deuxième trimestre 2015 ; moins de 3 % des micro-entreprises réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 10 000 euros, selon l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). Combien d’entreprises sont concernées par le dispositif de lissage que vous proposez, monsieur le ministre ?

Avez-vous mesuré les éventuelles distorsions de concurrence entre les micro-entreprises et celles qui sont soumises au régime réel ?

L’article 39 prévoit la suppression de l’obligation pour les micro-entrepreneurs de détenir un compte bancaire dédié à leur activité professionnelle. Pourquoi modifier un dispositif adopté il y a deux ans seulement ?

M. Yann Galut. Je salue à mon tour les avancées marquées par ce projet de loi et la volonté du Gouvernement de travailler avec les parlementaires ; en particulier, vous nous avez laissé l’espace nécessaire pour imaginer un statut des lanceurs d’alerte, question sur laquelle je travaille depuis dix mois. Pourvu que nous agissions, qu’importe le véhicule législatif ! Je soutiens la proposition du rapporteur de confier au Défenseur des droits la protection des lanceurs d’alerte.

Je suis extrêmement favorable à la création d’une Agence anticorruption. Mais le Gouvernement doit aussi donner tous les moyens nécessaires au parquet national financier, qui en sera le bras armé judiciaire. Le doublement du nombre de magistrats proposé par le rapporteur me paraît une excellente idée.

M. Eduardo Rihan Cypel. Je salue l’engagement du Gouvernement. Cette loi est essentielle, car la lutte contre la corruption doit faire l’objet dans toutes les démocraties d’un effort constant.

Pouvez-vous nous préciser l’étendue des pouvoirs et les moyens qui seront accordés à la nouvelle agence anticorruption ? Je m’associe aux propos du rapporteur et de Yann Galut sur la nécessité de renforcer les moyens dont dispose le parquet national financier. Cette lutte doit aussi être menée à l’échelon local, car certains liens entre les entreprises et les élus minent la démocratie. L’agence pourra-t-elle agir également au niveau local ?

M. Pascal Cherki. Je n’ai pas ici le temps de m’appesantir sur les motifs de satisfaction et les avancées de ce projet de loi : je me concentrerai sur ce qui fait encore débat. Les questions des lanceurs d’alerte et du renforcement des moyens du parquet national financier viennent d’être abordées et je n’y reviens pas non plus.

S’agissant du reporting public, la seconde délibération à laquelle il a été procédé lors de la discussion de la loi de finances rectificative a été très mal vécue par ceux qui mènent ce combat et a fait douter de la sincérité du Gouvernement. Celui-ci doit fait la preuve de sa volonté d’agir. Je suis ouvert à tous les débats juridiques, mais ceux-ci ne doivent pas servir de paravent. Trouvons les moyens d’aboutir ensemble.

M. Jacques Bompard. La lutte contre la corruption est une exigence populaire ; La Croix révélait hier que moins de 20 % des Français étaient prêts à s’engager dans un parti ou à financer un candidat à l’élection présidentielle.

Quelle sera l’attitude du ministère des Finances devant la concurrence sur le marché du financement obligataire qui résultera de l’application de l’article 34 de votre texte ? Des mécanismes sont-ils prévus pour prévenir l’émergence de positions dominantes et les pressions sur les donneurs d’ordre ? Comment envisagez-vous de traiter les effets d’éviction qui s’ensuivront ?

L’article 35 aborde la question des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). Vous faites sortir certains OPCVM du domaine des prestataires d’investissement, ce qui renforcera la concurrence étrangère et ses effets sur les fluctuations du marché. La France ne cède-t-elle pas encore une fois aux sirènes du cosmopolitisme financier ?

Enfin, l’article 22 soumet de nouveaux organes au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Les services de votre ministère, ou une éventuelle structure indépendante, disposeront-ils des moyens de mener des enquêtes sérieuses sur le comportement de certains groupes peu regardants, mais très efficaces ?

M. le ministre. Je souhaite avancer sur le reporting pays par pays, monsieur Cherki. Mais je ne suis pas favorable au vote d’une disposition qui sera immanquablement annulée par le Conseil constitutionnel. Ce ne serait ni sérieux, ni respectueux ceux qui, en France, en Europe et dans le monde, sont très attachés à faire progresser ce dispositif. Il y a une marge de progression. Et le Gouvernement saura vous prouver sa totale sincérité sur ce sujet.

S’agissant des moyens, je veux, je le répète, une loi réelle et non une loi formelle. L’Agence anticorruption devra avoir les moyens d’agir contre la corruption internationale, mais aussi contre la corruption sur notre territoire : le service central créé en 1993 sera largement renforcé. L’étude d’impact mentionne un format de croisière de l’ordre de soixante-dix agents.

Monsieur Bompard, vos questions portent sur des sujets sur lesquels vous êtes visiblement très informé ; je vous apporterai des précisions ultérieurement.

Madame Louwagie, les dispositions qui concernent les micro-entreprises seront examinées par la commission des finances, qui les complétera sans doute. Aujourd’hui, tout franchissement du plafond de chiffre d’affaires – 82 200 euros pour les activités de ventes et 32 900 euros pour les activités de prestations de services – impose une sortie brutale du régime de la micro-entreprise. Nous proposons donc d’assouplir le passage du régime de la franchise en base au régime réel de TVA. Ce lissage évitera l’effet de yo-yo et simplifiera la vie des entreprises concernées – qui ne sont pas très nombreuses : 1 % des autoentreprises sont radiées chaque année pour dépassement du seuil, soit 4 000 à 5 000 entreprises. Mais il n’est pas question de réévaluer le plafond de manière durable. Ce statut a été créé pour favoriser la naissance d’entreprises ; il n’a pas vocation à se prolonger tout au long d’une vie professionnelle.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec, président. Merci, monsieur le ministre.

La réunion s’achève à 11 heures 30.

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Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jacques Bompard, M. Sébastien Denaja, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. René Dosière, M. Guillaume Garot, M. Guillaume Larrivé, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Olivier Marleix, Mme Sandrine Mazetier, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, Mme Christine Pires Beaune, Mme Cécile Untermaier

Excusés. - M. Ibrahim Aboubacar, M. Sergio Coronado, M. Marc Dolez, Mme Laurence Dumont, M. Daniel Gibbes, M. Joaquim Pueyo, M. Bernard Roman, Mme Maina Sage, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, M. Jean-Luc Warsmann

Assistaient également à la réunion. - M. Eduardo Rihan Cypel, Mme Sophie Rohfritsch, M. Stéphane Travert