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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mercredi 8 février 2017

Séance de 10 heures 30

Compte rendu n° 47

Présidence de M. Dominique Raimbourg, Président

– Examen du projet de loi ratifiant l’ordonnance
n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières (n° 4358) (Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure)

– Présentation du rapport d’information évaluant la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière et la loi organique n° 2013-1115 du 6 décembre 2013 relative au procureur de la République financier (Mme Sandrine Mazetier et M. Jean-Luc Warsmann, rapporteurs)

La réunion débute à 10 heures 40.

Présidence de M. Dominique Raimbourg, président.

La Commission examine le projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières (n° 4358) (Mme Anne-Yvonne Le Dain, rapporteure).

M. le président Dominique Raimbourg. L’Assemblée nationale se prononcera le jeudi 16 février sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières (n° 4358). Mme Anne-Yvonne Le Dain va nous présenter son rapport.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Monsieur le président, mes chers collègues, cette ordonnance a été prise par le Gouvernement en application de l’article 86 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires. Cette loi, vous vous en souvenez, avait pour ambition de contribuer à restaurer la confiance des citoyens dans la puissance publique, en consolidant et en développant au sein de la fonction publique la culture de la déontologie.

Le projet de loi initial avait été déposé en juillet 2013 à l’Assemblée nationale, avant d’être modifié par le Gouvernement, le 17 juin 2015, par voie de lettre rectificative, afin de l’actualiser et d’en réduire le volume. Opérée au prix d’un renvoi à un grand nombre d’ordonnances, cette réduction visait, selon l’exposé des motifs, à permettre au Parlement « de débattre rapidement sur l’essentiel ». Il s’agissait donc d’aller vite pour construire un code de déontologie des fonctionnaires. Le II de l’article 86 de la loi du 20 avril 2016 a ainsi autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures législatives dont beaucoup étaient présentes dans le projet initial, notamment celles relatives aux juridictions financières.

L’ordonnance que le Gouvernement nous demande de ratifier comprend cinquante-trois articles. Elle poursuit un triple objectif, conforme au champ de l’habilitation : simplifier la présentation des dispositions relatives aux missions, à l’organisation et aux procédures des juridictions financières ; mettre à jour plusieurs dispositions relatives au statut des magistrats de ces juridictions ; enfin, clarifier les règles d’organisation et de procédure de la Cour de discipline budgétaire et financière. Ce texte, vous le voyez, est important.

Le chapitre Ier de l’ordonnance simplifie tout d’abord le livre Ier du code des juridictions financières, consacré à la Cour des comptes, afin d’en clarifier la présentation. Il organise ainsi ce chapitre Ier en deux sections, par type de missions – « Jugement des comptes » et « Contrôle des comptes et de la gestion ».

Après l’avoir défini, il précise également le champ d’application du contrôle opéré par la Cour. Ainsi, les dispositions relatives au contrôle des entreprises publiques et de leurs filiales, qui remontent à 1976, sont obsolètes : elles sont clarifiées et simplifiées.

L’article 8 de l’ordonnance nous intéresse plus particulièrement car il concerne notamment les relations entre la Cour et le Parlement. Il prévoit ainsi que, lorsque la Cour des comptes procède aux enquêtes qui lui sont demandées par les commissions des affaires sociales du Parlement, elle peut intervenir dans le domaine de compétence des chambres régionales et territoriales des comptes, ce qui était jusqu’à présent réservé aux saisines émanant des commissions des finances ou de commissions d’enquête.

Le chapitre II de l’ordonnance procède à une meilleure organisation du livre II du code des juridictions financières, consacré aux chambres régionales et territoriales des comptes. Il réorganise le livre par types de missions, procède à l’actualisation de dispositions procédurales et tient compte de l’extension du champ de compétence des chambres régionales et territoriales des comptes au cours de ces dernières années – établissements sociaux et médico-sociaux, groupements d’intérêt public, etc.

L’ordonnance met également à jour des dispositions relatives au statut des membres des juridictions financières, certaines règles budgétaires ou statutaires étant devenues obsolètes depuis l’entrée en vigueur de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

L’ordonnance apporte enfin des clarifications relatives aux règles d’organisation et de procédure applicables à la Cour de discipline budgétaire et financière, plusieurs dispositions n’ayant été modifiées qu’à la marge depuis la loi du 25 septembre 1948. Il était temps d’agir !

Les modifications introduites ont pour objet de tenir compte d’évolutions jurisprudentielles et de mieux prendre ainsi en considération les exigences de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.

Les règles d’incompatibilité et de récusation des membres de la Cour et des rapporteurs sont par exemple précisées afin de se conformer à l’exigence d’impartialité : ne pourront ainsi exercer les fonctions de rapporteur ou être membre de la formation de jugement les personnes qui, dans l’affaire qui est soumise à la Cour, auraient soit fait un acte de poursuite ou d’instruction, soit participé au délibéré de la Cour des comptes ou de la chambre régionale ou territoriale à l’origine du déféré. Le nouvel article L. 314-3 du code précise, en outre, que « la récusation d’un membre de la Cour ou d’un rapporteur est prononcée, à la demande d’une partie, s’il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité ».

L’article L. 314-4 du code est également modifié afin que les personnes puissent avoir accès au dossier dès leur mise en cause et non plus après la décision de renvoi devant la Cour.

Certaines dispositions obsolètes, relatives au suivi du déroulement de l’instruction par le ministère public ou à la présentation de son rapport par le rapporteur à l’audience, sont supprimées. La voix prépondérante du président en cas de partage égal des voix est également supprimée.

Voilà, mes chers collègues, les principales dispositions de l’ordonnance. Je vous invite à adopter sans modification le projet de loi de ratification.

Mme Françoise Descamps-Crosnier. L’ordonnance dont la ratification nous est proposée aujourd’hui est issue d’une habilitation inscrite dans la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie, aux droits et obligations des fonctionnaires. Ayant rapporté ce projet de loi à l’Assemblée nationale, j’ai bien sûr prêté une attention particulière à ce texte.

La rapporteure a décrit les apports et modifications apportés au code des juridictions financières. L’ordonnance modernise les dispositions relatives aux missions et à l’organisation de ces juridictions, ainsi que les procédures applicables ; elle réorganise l’architecture du code et supprime des dispositions devenues obsolètes, y compris sur le plan de la sémantique.

L’ordonnance intervient également dans le domaine statutaire : c’est notamment sur cette partie qu’il nous faut faire preuve de vigilance. Elle apporte un certain nombre d’améliorations en adaptant aux juridictions financières les avancées que comporte la loi du 20 avril 2016. Je pense particulièrement aux garanties disciplinaires – cas du rétablissement de l’agent dans ses fonctions, conduite à tenir en cas de poursuites pénales, etc.

Sur le fond, les modifications vont dans le bon sens. Sur la forme, l’ordonnance demeure dans le périmètre fixé par la loi. Il n’y a ainsi pas de difficultés de ce point de vue, comme l’a souligné notre rapporteure, et le groupe Socialiste, écologiste et républicain votera donc sans difficulté ce projet de loi.

Tout juste pourra-t-on peut-être regretter que quelques mesures un temps envisagées n’aient pas trouvé de traduction dans le texte qui nous est soumis. Il aurait pu être souhaitable d’encourager davantage encore l’ouverture des juridictions financières, tout particulièrement de la Cour des comptes, et la création de passerelles pour la bonne respiration des corps concernés dont l’excellence est connue de tous. Si la création des « conseillers experts » prévue par l’article 2 de l’ordonnance me semble une bonne chose, de même que la diversification du recrutement par le tour extérieur, je regrette, à titre personnel, qu’on ne soit pas allé plus loin dans l’ouverture de la Cour des comptes aux membres des chambres régionales.

Je voulais profiter de ce projet de loi pour évoquer une question qui touche non seulement les juridictions financières mais également les juridictions administratives : certains de leurs membres sont soumis, au titre de la loi du 20 avril 2016, à l’obligation de déclarer leur situation patrimoniale.

Nous avons, la semaine dernière, voté la proposition de loi organique relative aux obligations déontologiques applicables aux membres du Conseil constitutionnel, que rapportait notre collègue Cécile Untermaier. Cette proposition visait à tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 28 juillet 2016 : pour une raison de forme, le Conseil avait censuré l’obligation faite à ses membres de déclarer leur situation patrimoniale, qui avait été insérée dans la loi organique relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats.

Cette décision a aussi invalidé une partie de l’article 50 de la même loi organique qui déterminait les catégories de magistrats judiciaires soumises à l’obligation de déclarer leur situation patrimoniale, au motif qu’il n’était pas légitime d’instaurer une différence de traitement entre magistrats. Pour résumer, soit tous les magistrats doivent établir une déclaration, soit aucun ne le peut.

La loi du 20 avril 2016, qui étend l’obligation de déclarer leur situation patrimoniale à certains magistrats des juridictions administratives et financières en raison de l’importance des fonctions qu’ils exercent, n’a pas été soumise au Conseil constitutionnel, mais le même raisonnement pourrait s’appliquer. Le décret en Conseil d’État, qui est nécessaire pour que s’appliquent les obligations en matière de déclarations de situation patrimoniale, pourrait dès lors ne jamais voir le jour, ce qui irait clairement à l’encontre de la volonté du législateur.

Je tenais à souligner cet état de fait, qui invalide une partie du dispositif construit depuis 2013 en matière de transparence de la vie publique : la prochaine législature devra se pencher sur ce sujet.

Mme Cécile Untermaier. Je commence par féliciter notre rapporteure, ainsi que Mme Descamps-Crosnier, rapporteure de la loi du 20 avril 2016. Au cours de cette législature, nous avons beaucoup travaillé sur la question de la déontologie : la France a ainsi rattrapé son retard vis-à-vis des autres pays de l’Union européenne.

L’ordonnance que nous examinons porte sur les magistrats financiers. Nous avons voulu une diversification du recrutement par le tour extérieur, et plus généralement une ouverture des corps de la fonction publique. Nous devons persévérer dans cette voie.

En matière de transparence, l’actualité nous rappelle tous les jours l’absolue nécessité des mesures de prévention que nous avons prises et qui ont parfois été jugées superflues. Le Conseil constitutionnel a censuré l’obligation de déclaration de situation patrimoniale pour les magistrats administratifs, financiers ou judiciaires : il nous faudra donc imaginer un nouveau dispositif. La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ne doit pas être noyée sous le nombre des déclarations. Mais l’ensemble des magistrats doivent satisfaire à cette obligation, qui les protège et qui vise à garantir la qualité des décisions prises.

Article unique (ordonnance n° 2016-1360 du 13 octobre 2016 modifiant la partie législative du code des juridictions financières) : ratification de l’ordonnance

La Commission adopte l’article unique du projet de loi sans modification.

En conséquence, le projet de loi est adopté.

*

* *

La Commission procède à l’examen du rapport d’information évaluant la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière et la loi organique n° 2013-1115 du 6 décembre 2013 relative au procureur de la République financier (Mme Sandrine Mazetier et M. Jean-Luc Warsmann, rapporteurs).

M. le président Dominique Raimbourg. Nous entendons maintenant Mme Sandrine Mazetier et M. Jean-Luc Warsmann, qui nous présentent le rapport d’information évaluant la loi n° 2013–1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, et la loi organique n° 2013-1115 du 6 décembre 2013 relative au procureur de la République financier. Je me réjouis d’ailleurs d’accueillir à cette occasion parmi nous plusieurs membres de la commission des Finances.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. En 2013, la commission des Lois était saisie au fond de deux textes : le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, et le projet de loi organique relatif au procureur de la République financier. M. Yann Galut en était le rapporteur. Quant à la commission des Finances, elle était saisie pour avis et avait, par délégation, examiné au fond quatre articles du projet de loi. Mme Sandrine Mazetier était sa rapporteure.

L’article 145-7 du Règlement prévoit que deux députés – un de la majorité, un de l’opposition – présentent, trois ans après l’adoption de la loi, un rapport évaluant les conséquences de son application. Vous nous avez désignés pour cette tâche le 21 septembre 2016. Depuis cette date, nous avons procédé à quatorze auditions : celles des services de l’État participant à la lutte contre la fraude fiscale – direction générale des finances publiques (DGFIP), douanes, TRACFIN, services d’enquête, direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) du ministère de la justice… ; des magistrats et des personnels des juridictions concernées – parquet national financier (PNF), procureur de la République de Paris, procureur général près la Cour de cassation… ; des représentants de la Fédération bancaire française (FBF), des associations anti-corruption, du Conseil National des Barreaux (CNB) ; enfin, d’une universitaire, Mme Chantal Cutajar. Nous nous sommes également déplacés auprès des juridictions inter-régionales spécialisées (JIRS) de Paris, le 28 novembre, et de Nancy, le 5 janvier. Enfin, nous avons adressé des questionnaires écrits à l’Autorité des marchés financiers (AMF), à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC), à la commission des infractions fiscales (CIF) et aux banques systémiques.

Nos propositions portent d’abord sur les moyens budgétaires et humains des entités chargées du « régalien financier ».

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Ce travail s’adresse à vous, chers collègues, mais également, vous l’avez compris, à la prochaine législature et au prochain Gouvernement.

Nous demandons d’abord que les moyens budgétaires, humains et techniques des entités chargées du « régalien financier » soient au minimum garantis et maintenus.

S’agissant du procureur de la République financier, l’étude d’impact de la loi de 2013 évaluait le besoin, pour 260 dossiers, à vingt-deux parquetiers, assistés de vingt et un personnels de greffe et de cinq assistants spécialisés. Pour l’instruction, le besoin était estimé à six magistrats d’instruction supplémentaires, dix postes de greffe et cinq assistants spécialisés. Or, aujourd’hui, cette institution ne compte que quinze magistrats, sept personnels de greffe et quatre assistants spécialisés pour plus de 350 dossiers à traiter. Nous insistons donc fermement sur la nécessité de lui allouer les moyens nécessaires à son bon fonctionnement.

Les services enquêteurs font face aux mêmes déficits, quand ils ne sont pas plus graves encore. Malgré la hausse constante du nombre d’affaires qui lui sont confiées, l’office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), créé en 2013, est par exemple passé de 95 à 78 personnels entre 2013 et 2016. C’est l’évolution inverse de ce qui serait nécessaire !

Il faut aussi insister sur le fait que le « droit d’entrée » est élevé : le besoin de formation initiale est important en raison de la grande technicité des dossiers financiers. Les officiers fiscaux judiciaires passent par exemple quatre mois à l’école de police de Cannes-Écluses avant de rejoindre l’OCLICFF. Pour les greffes des JIRS, les opérations sont de plus en plus complexes, surtout dans des procédures avec de nombreux prévenus et dans plusieurs langues – ainsi, 95 % des dossiers de délinquance économique et financière traités par la JIRS de Nancy concernent des ressortissants étrangers.

Les personnels concernés sont très engagés dans leur mission. Or il n’existe aucun mécanisme pour s’assurer qu’ils restent longtemps en poste : la stabilité des compétences n’est pas assurée. Ces personnels très spécialisés ne bénéficient pas d’une rémunération plus avantageuse ni d’une progression de carrière plus rapide. C’est regrettable, car, faute d’une juste reconnaissance, les services enquêteurs ne parviennent pas à trouver de candidats lorsqu’ils ouvrent des postes.

Cumulés, ces obstacles découragent les bonnes volontés et accélèrent encore les demandes de mutation.

La lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière constitue pourtant une mission régalienne fondamentale. Les services qui y concourent ont pour fin ultime d’assurer une meilleure rentrée des ressources fiscales. C’est pourquoi les ressources de ces services doivent elles-mêmes impérativement être préservées.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Nous voulons également souligner devant vous les progrès effectués en matière de circulation de l’information.

Les lois de 2013 consacrent un principe d’articulation des réponses administratives et pénales, ce qui suppose que les différents services se parlent. Toutefois, notre travail a permis de découvrir, par exemple, que les inspecteurs des finances publiques lorsqu’ils sont mis à disposition des JIRS perdent leurs accès à l’ensemble des bases de données de la DGFIP et à leurs fichiers. En pratique, lorsqu’un magistrat veut une information, il doit procéder par réquisition alors même qu’il a auprès de lui un spécialiste des finances publiques, c’est absurde ! Nous souhaitons donc que les inspecteurs des finances publiques conservent leurs codes d’accès. Cela n’empêchera pas des réquisitions formelles lorsqu’elles sont nécessaires, mais cela évitera aux JIRS de se lancer sur de fausses pistes, ou au contraire de rater des pistes intéressantes ! Le ministère nous indique qu’il faudrait une disposition législative expresse, à l’instar de ce qui a été fait pour la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. Nous regrettons que l’occasion de l’examen des différentes lois de finances n’ait pas été saisie. Il faudra résoudre ce problème.

De même, nous avons eu la surprise de découvrir que les JIRS fonctionnent aujourd’hui avec un réseau seulement informel. Ainsi un établissement financier impliqué dans un dossier à Marseille peut également l’être à Nancy sans que les magistrats l’apprennent. Il faut donc créer un véritable système d’information des JIRS. L’intérêt de l’État est que tous les acteurs se parlent le plus possible.

La loi de 2013 a également prévu un droit d’information « retour » des administrations qui saisissent la justice. Ce fonctionnement n’est pas encore entré dans les habitudes. Pour pallier cet inconvénient, un procureur que nous avons rencontré nous a même indiqué prendre la précaution d’inscrire TRACFIN parmi les « victimes », dans le logiciel judiciaire CASSIOPÉE, afin que ce service soit bien informé de la suite de la procédure, même s’il ne se constitue pas partie civile ! Mais il s’agit de solutions empiriques, et nous devons trouver une solution plus générale : un service qui a signalé une affaire doit savoir quelles suites ont été données à ce signalement, c’est la moindre des choses.

Au niveau international, des progrès ont été faits en matière de circulation de l’information entre cellules de renseignement et entre administrations. En matière judiciaire, la situation est très variable ; la coopération avec certains pays – le Royaume-Uni, par exemple – fonctionne particulièrement mal. Il arrive que la réponse à la question posée par nos services soit une autre question… Il faut noter, de surcroît, que moins d’une dizaine de pays européens disposent d’un fichier centralisé des comptes bancaires, à l’image du FICOBA (Fichier national des comptes bancaires et assimilés) en France. Une directive européenne demande maintenant aux pays d’instituer un tel dispositif, mais c’est récent. Ainsi, quand vous suspectez une personne de détenir un compte dans un pays qui ne dispose pas de fichier central, la réquisition doit être envoyée à toutes les banques – et, dans les pays fédéraux, ce n’est pas toujours une compétence de l’État central… L’Europe avance, mais nous préconisons que la France milite en faveur d’une instauration, partout dans l’Union, de fichiers semblables à nos FICOBA et FICOVIE (Fichier des contrats d’assurance vie). En effet, même avec l’échange automatique de données, si l’administration ne dispose pas des informations sur les titulaires de comptes, la procédure sera longue, puisque l’État concerné devra interroger toutes ses banques une à une.

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Nous avons constaté que l’architecture judiciaire créée par les lois de 2013 – en particulier la nouvelle organisation des JIRS et l’institution du parquet national financier comme le cadre juridique applicable aux personnes physiques – avait fait ses preuves. Nous préconisons donc une certaine stabilité en ce domaine.

Les interrogations et inquiétudes qui avaient pu être exprimées au moment de la création du parquet national financier se sont révélées infondées. L’organisation choisie est satisfaisante. Les règles de dessaisissement des JIRS au profit du parquet national financier, dans certains dossiers très complexes ou répondant à certaines caractéristiques mentionnées dans la circulaire de politique pénale de la garde des Sceaux du 31 janvier 2014, sont parfaitement claires et ne présentent aucune difficulté de compréhension ni d’application par les juridictions concernées.

En revanche, en ce qui concerne l’incrimination et les possibilités de poursuites des personnes morales, des améliorations restent à apporter. Nous l’avions pressenti lors de nos débats en 2013 et cela s’est confirmé. Toutes les personnes auditionnées ont souligné la faiblesse des sanctions applicables aux personnes morales et leur caractère non dissuasif. Nous avons été invités à compléter les dispositions permettant de mettre en cause pénalement les personnes morales car les conditions cumulatives devant être remplies rendent souvent la chose impossible, même lorsque la responsabilité de ces personnes morales saute aux yeux.

S’agissant des résultats, les premiers jugements rendus depuis 2013 reflètent une plus grande sévérité puisqu’ont été prononcées des peines élevées visant tous les acteurs de la chaîne, y compris des avocats ayant conseillé les contribuables. Cela est vrai pour les personnes physiques mais pas encore tout à fait pour les personnes morales. Sur le plan fiscal, l’année 2015 est historique avec plus de 20 milliards d’euros de redressements, droits et pénalités additionnés. Enfin, le régime des saisies et confiscations est efficace. Il s’agit d’une mesure particulièrement dissuasive qui est de plus en plus utilisée par les magistrats et qui est aujourd’hui très bien appliquée. Je voudrais saluer à cette occasion Jean-Luc Warsmann, qui a été le rapporteur de la proposition de loi qui avait créé l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC). Tout le monde a pu constater à quel point la création de cette agence avait été extrêmement utile et précieuse.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. J’en viens à la présentation de nos seize propositions concrètes.

S’agissant des moyens budgétaires et humains, la proposition n° 10 vise à offrir aux agents travaillant dans une juridiction ou un service de lutte contre la fraude fiscale plus de stabilité et une meilleure reconnaissance professionnelles. Sandrine Mazetier vous l’a dit tout à l’heure : lorsqu’un agent intègre un service spécialisé, il doit d’abord suivre une formation de plusieurs mois. Nombre de policiers sont aujourd’hui découragés par la masse de travail et le fait qu’ils ne trouvent aucun avantage à rester dans un service de lutte contre la fraude fiscale. L’État-employeur utilise du temps et de l’argent pour former des fonctionnaires de haut niveau dans des domaines complexes : s’ils doivent quitter leurs fonctions au bout de deux ans, il y a vraiment une perte d’énergie et de savoir-faire.

Afin de mieux poursuivre les personnes morales, la proposition n° 1 vise, en matière de fraude fiscale aggravée, à porter l’amende encourue au double du produit de l’infraction. Un magistrat auditionné nous a expliqué que les conseillers juridiques internes à certaines grandes entreprises s’employaient à comparer l’amende encourue en cas d’infraction au gain qui pouvait être tiré de cette dernière ; bien souvent le rapport n’est pas favorable à l’ordre public. C’est pourquoi la possibilité de fixer l’amende au double du produit de l’infraction nous semblerait beaucoup plus dissuasive.

La proposition n° 2 tend à renforcer la répression à l’égard des personnes morales et la proposition n° 3, les sanctions du favoritisme passif et du favoritisme actif « délibéré », c’est-à-dire ne résultant pas d’une simple erreur.

La proposition n° 4 vise à assouplir les conditions requises pour engager la responsabilité pénale des personnes morales. Aujourd’hui, si un salarié qui n’a pas de mandat de délégation accomplit des actes délictueux, il est difficile de poursuivre la personne morale si bien que passer par un salarié non mandaté peut être le moyen, dans certaines sociétés mal intentionnées, de contourner nos lois.

Notre troisième objectif est de faciliter l’échange et la circulation des informations.

La proposition n° 5, qui ne coûte pas grand-chose et ne nécessite pas de modifier la loi, vise à décliner au plan territorial les espaces d’échange. Il nous semble que dans chaque région, les services travaillant sur ces dossiers – parquet, douanes, services enquêteurs – doivent se parler. Il faut que le dialogue soit institutionnalisé et pas seulement le fruit du facteur humain.

La proposition n° 6 consiste à maintenir les droits d’accès aux fichiers fiscaux pour les fonctionnaires de l’administration fiscale détachés ou mis à disposition des juridictions chargées de la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière. J’ai déjà traité cette question.

La proposition n° 7 est destinée à systématiser le retour d’informations des juridictions vers les administrations et la proposition n° 8 à constituer une base de données sécurisée commune aux JIRS et au parquet national financier. Au terme du travail que nous avons mené, nous pouvons dire que la répartition des dossiers entre le parquet national financier et les JIRS se passe correctement. Nos interlocuteurs ont insisté sur le fait que l’essentiel était de se parler dès le début car c’était un facteur de fluidité et d’efficacité.

La proposition n° 9 vise à constituer une base de données sécurisée nationale recensant l’ensemble des procédures engagées en matière de fraude fiscale et de grande délinquance – une base de données qui soit accessible aux acteurs administratifs et judiciaires spécialisés dans la lutte contre la fraude fiscale. Nous nous appuyons là encore sur le même raisonnement : quand une personne ou une société est mise en cause et qu’un service commence à travailler sur ce dossier, il importe que ce service sache ce que les autres services ont déjà fait dans ce même dossier.

La proposition n° 14 vise à la création d’une plateforme d’identification en ligne des autorités judiciaires locales compétentes en fonction des pays et des actes sollicités. Chaque JIRS de France peut avoir besoin, à un moment donné, de demander un acte dans un autre pays. Il nous a été dit que les services étaient très demandeurs de cette plateforme qui constituerait un gain de temps.

La proposition n° 12 tire les conséquences du fait qu’aujourd’hui, l’AGRASC n’a accès ni au FICOBA ni au FICOVIE. Il importe de remédier à cette situation. La proposition n° 13 vise à modifier les modules du logiciel CASSIOPÉE pour que l’AGRASC puisse suivre la totalité des saisies dans l’ensemble des procédures du pays.

Pour atteindre le quatrième objectif, la proposition n° 11 encourage, dans le cadre de la politique pénale, un plus grand recours à la qualification de non-justification des ressources, incrimination prévue aux articles 321-6 et suivants du code pénal et qui permet d’avancer dans beaucoup d’affaires.

Enfin, nous avons deux propositions en matière internationale : la proposition n° 15 vise à convaincre les États signataires de la convention de Budapest de faire évoluer cette dernière pour permettre aux services enquêteurs d’aller chercher des données stockées dans un autre pays mais consultables depuis le nôtre ; la proposition n° 16 consiste à encourager les États membres de l’Union européenne à aller le plus loin possible dans la constitution des fichiers des comptes bancaires et d’assurance vie en les interconnectant. En effet, quand bien même un État fédéral créerait dans chacun de ses États fédérés un fichier des comptes bancaires, seul un système d’interconnexion permettra un véritable échange sécurisé.

Il me reste à remercier ma collègue : nous avons essayé d’effectuer ce travail dans le meilleur état d’esprit possible et de la manière la plus concrète et constructive qui soit.

M. Charles de Courson. À la page 53 de votre rapport, vous évoquez la rémunération des aviseurs fiscaux. Quel est le montant versé annuellement aux aviseurs douaniers ? Est-on en contact, en dehors des douanes, avec des personnes susceptibles de nous livrer des informations contre rémunération ?

À la page 54, vous montrez que les condamnations pour fraude fiscale sont très rarement annulées puisque le taux de relaxe définitive est de moins de 10 %. Cela étant, vous n’évoquez pas le problème en amont – dont nous avions longuement discuté – du monopole de la saisie de la justice par l’administration. Y a-t-il beaucoup de gens qui échappent au filtre de la commission des infractions fiscales, ce qui expliquerait que les taux de relaxe soient extrêmement faibles ?

Pour la première fois, dans l’affaire Ricci, abordée en page 55, un avocat fiscaliste a été condamné solidairement avec le fraudeur. La condamnation n’est pas définitive puisque le condamné a fait appel. Connaît-on la position de l’ordre des avocats à ce sujet ? Ne faudrait-il pas diffuser l’information sur cette affaire pour dissuader les avocats fiscalistes et les conseillers fiscaux de se rendre complices de fraude fiscale ?

Enfin, l’écart entre le montant des redressements et celui des encaissements – légèrement supérieur à 50 %, comme l’illustre le tableau de la page 58 du rapport – vous paraît-il justifié ?

M. Guillaume Garot. Je salue la qualité du travail conduit par les deux rapporteurs et me réjouis que, dans cette enceinte républicaine, nous puissions publier un rapport qui, sans doute, fera date. Je veux rappeler combien la lutte contre la fraude fiscale est un enjeu majeur du pacte républicain aujourd’hui. Nous devons nous montrer impitoyables au moment même où des efforts sont demandés aux Français.

Dans votre rapport, vous indiquez que les droits redressés et les pénalités atteignent 20 milliards d’euros en 2015. Vous expliquez que le parquet national financier traite actuellement 360 dossiers. Combien de ces dossiers ont-ils été examinés sur la base de faits pour lesquels les associations de lutte contre la corruption se seraient portées partie civile, sur le fondement de l’article 1er de la loi de 2013 ? Il importe en effet de bien cerner le rôle de ces associations dans ce processus.

M. Georges Fenech. Vous souhaitez, chers collègues, que les inspecteurs des impôts qui sont détachés dans les JIRS pour apporter leur assistance au déroulement des procédures puissent continuer à avoir accès à des informations couvertes par le secret fiscal et provenant de leur administration d’origine. On comprend votre souci d’efficacité mais une telle préconisation ne va-t-elle pas à l’encontre du secret professionnel et des droits de la défense ? Encore une fois, je partage votre souci de renforcer l’efficacité des enquêtes mais encore faut-il être absolument certain de ne pas aller à l’encontre des règles de procédure auxquelles nous sommes attachés.

M. le président Dominique Raimbourg. Peut-on mesurer la plus-value que représente la création du parquet national financier au regard de la situation antérieure, lorsque les poursuites étaient diligentées par les parquets locaux ou ceux des JIRS ?

M. Joël Giraud. J’ai été confronté, dans une vie antérieure, à l’impossibilité d’accéder à certains fichiers, ce qui me contraignait à recourir à des méthodes qui n’étaient pas tout à fait légales pour obtenir les informations nécessaires à une procédure légale. Les préconisations des rapporteurs en la matière me semblent donc très opportunes.

Que pensez-vous de l’archaïsme qui veut que la fraude fiscale soit soumise à une procédure dérogatoire en France qui gêne considérablement les investigations en la matière ? Le délit de blanchiment de fraude fiscale a permis de contourner l’avis de la CIF qui s’apparentait à une opération de justice retenue mais pour autant, il demeure certains cas où, la fraude fiscale n’étant pas constituée, il est difficile d’entamer une procédure sur le fondement même du blanchiment de fraude fiscale. Je me souviens encore d’avoir vu un comptable public m’expliquer que ce que j’avais découvert relevait de la fraude fiscale et pas du blanchiment et que je ne pouvais donc rien faire. Avez-vous des suggestions à faire à cet égard ?

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Nous n’avons aucun chiffre en ce qui concerne la rémunération des aviseurs douaniers. Mais sans doute le commissaire aux finances que vous êtes, monsieur de Courson, pourrait-il demander à sa commission d’obtenir ce type d’informations ?

Nous ne connaissons pas non plus le nombre de personnes susceptibles de livrer des informations demain contre rémunération. Il y a aujourd’hui de très nombreuses personnes qui le font de manière totalement gratuite et les services de l’administration fiscale travaillent sur la base d’informations qui leur parviennent gracieusement, tous les jours, en abondance. Cela a d’ailleurs donné lieu à des affaires célèbres. Peut-être notre collègue qui a déposé un amendement permettant d’expérimenter pendant deux ans la rémunération d’aviseurs fiscaux dispose-t-elle de chiffres ou d’estimations ?

Quant à savoir combien de personnes échapperaient aux poursuites avant même toute saisine de la commission des infractions fiscales, nous avions ensemble introduit de nouvelles dispositions dans les lois de 2013, en particulier une nouvelle définition de la transaction fiscale qui est prévue dans le code général des impôts. Nous avions alors indiqué ce que ne pouvait plus être une transaction fiscale et donc resserré les possibilités d’accord entre l’administration fiscale et un contribuable qui se serait trompé sans volonté manifeste de frauder ou de diminuer ses impôts. Nous avions aussi prévu que le Parlement, en particulier ses commissions des finances, devrait être informé par la voie d’un rapport sur les transactions fiscales. Ce rapport devait préciser le nombre de transactions par département – puisque nous avions constaté à l’époque de grandes disparités, le ratio allant de un à dix-huit selon les départements. Or ce rapport n’a jamais été produit. Les seuls chiffres dont nous disposons figurent dans le rapport du comité du contentieux fiscal, douanier et des changes et ne permettent pas de nous assurer de l’homogénéité des pratiques sur l’ensemble du territoire de la République. En revanche, il est incontestable que les dispositions que nous avions prises en matière de définition de la transaction fiscale ont conduit à une diminution de cette pratique.

Je partage votre volonté d’assurer la publicité de la condamnation dans l’affaire Ricci qui a notamment entraîné le paiement solidaire des amendes de son client par l’avocat mis en cause.

Enfin, l’écart entre les montants de redressement et de recouvrement tient avant tout à un décalage dans le temps entre les deux opérations. Le projet de loi de finances comprend d’ailleurs une annexe présentant les chiffres des redressements et de leur recouvrement, avec un décalage de deux ans. Par ailleurs, il est parfois difficile de recouvrer pleinement les sommes identifiées. Les choses se sont largement améliorées grâce aux dispositions adoptées dans les lois de 2013, en particulier en ce qui concerne l’assurance-vie qui permettait à certains de se rendre insolvables. Mais malheureusement, il subsiste des possibilités d’échapper au paiement des sommes redressées.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. Le recouvrement des redressements fiscaux n’était pas au cœur de notre travail, mais le tableau qui figure en page 58 de notre rapport vous montrera que, de ce point de vue, 2014 fut une année moyenne, avec une augmentation de 7,2 % du montant total des droits et pénalités redressés mais de 3 % seulement des encaissements. L’année 2015 fut en revanche excellente, avec une augmentation de 9,8 % du montant total des droits et pénalités redressés et de 17,3 % des encaissements.

Depuis quatre ou cinq ans, le nombre de saisines de la commission des infractions fiscales est à peu près stable, variant entre 1 000 et 1 200. En revanche, la part des avis défavorables a très nettement baissé. Pendant plusieurs années, elle est restée comprise entre 8 % et 9 %, avant de tomber à 7,4 % en 2014 et 5,4 % en 2015.

Il faut effectivement légiférer à propos du secret fiscal. Il est assez paradoxal qu’un fonctionnaire des finances publiques ait accès aux informations couvertes par le secret fiscal s’il est dans un service de police judiciaire et qu’il n’y ait pas accès s’il travaille en JIRS. Il ne s’agit pas de porter atteinte aux garanties procédurales et de supprimer la nécessité de réquisitions en bonne et due forme, mais, au quotidien, il serait opportun qu’un service puisse savoir tout de suite s’il risque d’emprunter une fausse piste. Il serait ainsi possible, dans le respect des garanties procédurales, de gagner considérablement en efficacité.

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Novation majeure, l’article 1er de la loi de 2013 permet aux associations de lutte contre la corruption de se constituer partie civile. En réalité, elles n’ont pas fait un usage immodéré de la possibilité ainsi ouverte. Rappelons par ailleurs que le champ d’activité du parquet national financier est extrêmement large, s’étendant des paris sportifs à des fraudes fiscales très complexes, en passant par la délinquance économique et financière, ou les atteintes à la probité – lorsque sont en cause des agents exerçant des responsabilités de haut niveau ou en présence d’entreprises et de dirigeants à forte visibilité économique. Le parquet national financier ne s’occupe donc pas que de lutte contre la corruption et son action va au-delà de quelques affaires bien connues.

La plus-value apportée par le parquet national financier a été reconnue par tous nos interlocuteurs, y compris ceux qui étaient les plus hostiles à sa création, de même que par les représentants des JIRS. On constate une meilleure organisation de toute la chaîne et de toutes les juridictions concernées, qui travaillent plus vite parce qu’elles peuvent se concentrer sur leur ressort ou sur leur domaine de compétence. Des liens particulièrement étroits entre l’administration fiscale, les services enquêteurs, l’OCLCIFF, les juridictions et le PNF ont permis de gagner en efficacité à tous les échelons.

M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur. En page 28 du rapport, chers collègues, vous trouverez toutes les informations relatives aux saisines du parquet national financier.

Quant aux relations entre JIRS et PNF, à Nancy, on nous a expliqué qu’un certain nombre d’affaires avaient été confiées au second sans que les magistrats de la JIRS en conçoivent la moindre amertume ; ceux-ci considèrent même que les affaires en question représentaient une masse de travail qu’ils ne pouvaient traiter et qu’ils n’auraient pas été en mesure d’enquêter eux-mêmes dans des délais corrects.

M. Daniel Lebègue, président de Transparency International France, que nous avons reçu, nous a dit que la possibilité ouverte aux associations n’avait entraîné nul stakhanovisme. Elles interviennent en fait dans des dossiers ponctuels, emblématiques ou enlisés. Il a cité par exemple un dossier concernant les Bouches-du-Rhône, qui n’avançait pas et pour lequel l’intervention d’une association pouvait présenter une valeur ajoutée.

Mme Sandrine Mazetier, rapporteure. Enfin, je veux dire à M. Joël Giraud qu’il n’y a absolument plus besoin de prouver qu’il y a fraude fiscale pour poursuivre pour blanchiment de fraude fiscale, ce qui a ouvert d’immenses possibilités à tous les acteurs que nous avons rencontrés.

M. le président Dominique Raimbourg. Merci, chers collègues, de nous avoir présenté de manière aussi vivante et brillante ce rapport percutant.

La Commission autorise à l’unanimité la publication du rapport.

La réunion s’achève à 11 heures 35.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Ibrahim Aboubacar, M. Christian Assaf, M. Luc Belot, M. Erwann Binet, M. Gilles Bourdouleix, M. Dominique Bussereau, Mme Colette Capdevielle, M. Jean-Yves Caullet, Mme Marie-Anne Chapdelaine, M. Éric Ciotti, M. Jean-Michel Clément, M. Gilbert Collard, M. Marc-Philippe Daubresse, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. Patrick Devedjian, Mme Sophie Dion, M. Marc Dolez, M. René Dosière, M. Philippe Doucet, M. Olivier Dussopt, M. Georges Fenech, M. Hugues Fourage, M. Guillaume Garot, M. Bernard Gérard, M. Yves Goasdoué, M. Philippe Gosselin, M. Philippe Goujon, Mme Françoise Guégot, M. Philippe Houillon, M. Sébastien Huyghe, M. Guillaume Larrivé, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Anne-Yvonne Le Dain, M. Olivier Marleix, Mme Sandrine Mazetier, M. Patrick Mennucci, M. Paul Molac, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, M. Edouard Philippe, M.Sébastien Pietrasanta, Mme Elisabeth Pochon, M. Pascal Popelin, M. Joaquim Pueyo, M. Dominique Raimbourg, M. Alain Tourret, Mme Cécile Untermaier, M. Daniel Vaillant, M. François Vannson, M. Patrice Verchère, M. Jean-Luc Warsmann, Mme Marie-Jo Zimmermann

Excusés. - Mme Danielle Auroi, Mme Huguette Bello, Mme Laurence Dumont, M. Guy Geoffroy, M. Daniel Gibbes, Mme Marietta Karamanli, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, M. François Pupponi, Mme Maina Sage, M. Roger-Gérard Schwartzenberg

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Claude Buisine, M. Charles de Courson, Mme Pascale Crozon, M. Joël Giraud, M. Michel Ménard