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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Première séance du lundi 5 novembre 2012

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Le Fur

1. Projet de loi de finances pour 2013 Seconde partie (suite)

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées

M. Gérard Charasse

M. Jean-Jacques Candelier

Mme Émilienne Poumirol

M. Marc Laffineur

M. François Rochebloine

M. Jean-Michel Villaumé

Mme Sylvie Pichot

Mme Danièle Hoffman-Rispal

M. Kader Arif, ministre délégué chargé des anciens combattants

Rappel au règlement

M. Jean-Frédéric Poisson

Reprise de la discussion

M. Joaquim Pueyo

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Richard Ferrand

M. Kader Arif, ministre délégué

Mme Françoise Imbert

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Philippe Vitel

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Christophe Guilloteau

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Didier Quentin

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Francis Hillmeyer

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Yannick Favennec

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Kléber Mesquida

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Philip Cordery

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Jean-Louis Bricout

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Charles de La Verpillière

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Olivier Audibert-Troin

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Damien Meslot

M. Kader Arif, ministre délégué

Mme Marie-Lou Marcel

M. Kader Arif, ministre délégué

M. William Dumas

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Régis Juanico

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Stéphane Travert

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Jean-Pierre Decool

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Julien Aubert

M. Kader Arif, ministre délégué

Mme Marie-Christine Dalloz

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Frédéric Reiss

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Patrice Verchère

M. Kader Arif, ministre délégué

Rappel au règlement

M. Marc Laffineur

Reprise de la discussion

M. Laurent Marcangeli

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Jean-Luc Reitzer

M. Kader Arif, ministre délégué

M. Dino Cinieri

M. Kader Arif, ministre délégué

Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation »

État B

Amendement no 153

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées

Amendements nos 138, 170, 171, 150, 228, 227, 149, 154, 140, 226, 152, 151, 221, 148, 229, 185

Après l’article 62

Amendements nos 157, 223, 233, 158, 222, 231, 232, 204, 224

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Le Fur,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Projet de loi de finances pour 2013
Seconde partie (suite)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2013 (nos 235, 251).

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs aux anciens combattants, à la mémoire et aux liens avec la nation (nos 251, annexe 6, 256, tome I).

La parole est à M. Gérard Terrier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué chargé des anciens combattants, mes chers collègues, avec 3,07 milliards d’euros, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », quoiqu’en diminution de 2,55 % à périmètre constant,…

M. François Rochebloine. Vous vous en arrangez facilement !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. …ont la grande qualité de préserver intégralement les droits des anciens combattants ainsi que ceux des victimes d’actes de barbarie ou de persécutions antisémites pendant la Deuxième guerre mondiale. Ils traduisent aussi un effort en faveur de la mémoire et du lien entre la nation et son armée.

Le programme 169 qui, avec 2,84 milliards d’euros, soit la quasi-totalité des crédits de la mission, finance l’ensemble des mesures en faveur des anciens combattants, diminue de 75,28 millions d’euros et de 2,58 %. Cette évolution n’a cependant et malheureusement qu’une seule cause : la diminution, chaque année, du nombre des anciens combattants.

M. François Rochebloine. Vous ne disiez pas cela l’an dernier !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Monsieur Rochebloine, si je n’étais pas là l’année dernière, j’ai suivi vos interventions avec beaucoup d’intérêt ; nous y reviendrons au cours du débat.

Les montants consacrés au paiement de la dette viagère diminuent de 84,47 millions d’euros, ce qui correspond aux diminutions de crédits prévues.

En revanche, les droits des anciens combattants sont maintenus, et dans certains cas améliorés.

La retraite du combattant a été portée à 48 points avec effet au 1er juillet 2012.

M. Christophe Guilloteau. Grâce à qui ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Le présent projet de loi de finances assure l’extension de cette mesure en année pleine, pour un montant de 54 millions d’euros.

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. La droite y a pensé ; la gauche finance la mesure !

M. Christophe Guilloteau. Elle y est bien obligée : nous avons voté cette mesure !

M. François Rochebloine. C’est le minimum que vous puissiez faire !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Par ailleurs, monsieur le ministre, j’ai noté que vous êtes attentif à transposer aussi vite que possible dans la réglementation des retraites du combattant et des pensions d’invalidité les augmentations du point de la fonction publique qui en constitue la référence.

Enfin, les dépenses fiscales consenties au profit des anciens combattants, notamment la demi-part fiscale dont bénéficient ceux qui sont âgés de plus de 75 ans et leurs veuves, et les exonérations fiscales des pensions militaires d’invalidité et des retraites du combattant sont maintenues, pour un coût évalué à 500 millions d’euros environ.

Malgré un nombre d’invalides en diminution, les crédits destinés à la gestion des droits de ceux-ci, autrement dit ceux consacrés aux soins qui leur sont prodigués, sont en légère progression, de 1,2 million d’euros. Cette augmentation traduit en réalité les progrès techniques des appareillages.

Les crédits destinés aux prestations de solidarité sont également accrus. À partir de 2013, les crédits destinés à l’aide différentielle au conjoint survivant, de l’ordre de 5 millions d’euros aujourd’hui, seront abondés de 500 000 euros par an de manière cumulative. Pour cette année, cela représente 500 000 euros ; pour l’année prochaine, 1 million d’euros et pour l’année qui suit, 1,5 million d’euros. Au total, d’ici à 2015, 3 millions d’euros auront donc été consacrés à cette allocation. Celle-ci continuera à être autant que possible augmentée. Au 1er avril 2012, elle a atteint les 900 euros. Si des reliquats venaient à apparaître au sein des dotations, une élévation de son montant à 964 euros, seuil de pauvreté reconnu, serait proposée. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous le confirmer ?

Les militaires envoyés en OPEX, les opérations extérieures, forment la quatrième génération du feu. Le ministère est attentif à reconnaître à ces derniers la qualité de combattants. Ils sont aujourd’hui près de 50 000 à être détenteurs de la carte du combattant. Le 28 juin 2012, un nouveau décret, pris par l’actuelle majorité, a étendu la liste des théâtres d’opération qui ouvrent droit à cette qualité.

M. François Rochebloine. C’est bien !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Le nombre d’anciens combattants au titre des OPEX pourrait en conséquence progresser de 25 % à 50 %.

Enfin, l’extension jusqu’en 1964 de la période pendant laquelle quatre mois passés sous l’uniforme en Algérie donnent droit à la carte de combattant est mise à l’étude. Comme nous en avons convenu lors de nos discussions préparatoires, monsieur le ministre nous apportera au cours de cette séance des précisions sur ce point très important.

La suppression de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale du ministère de la défense a parfois provoqué de sérieux allongements des délais de règlement des demandes de prestations. Ce retard est aujourd’hui en voie de résorption. Les demandes sont désormais traitées non seulement à coût moindre, mais plus rapidement.

Les crédits nécessaires à l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et d’actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, qui font l’objet du programme 158, apparaissent suffisants pour satisfaire aux demandes d’indemnisation. Sauf dossier particulièrement complexe, les indemnisations sont versées dans un délai de quatre mois et demi pour les résidents français, et cinq mois et demi, pour les résidents à l’étranger, après l’avis favorable à leur versement prononcé par la commission d’indemnisation.

Je suis surpris des conditions d’ouverture des droits à réparation des conséquences sanitaires des essais nucléaires français.

La loi du 5 janvier 2010 a institué une procédure d’indemnisation pour les personnes, militaires ou civils, atteintes de maladies cancéreuses radio-induites résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants issus des essais nucléaires français. Des périodes de séjour ont été fixées, des territoires délimités et une liste des pathologies établie. En cas de doute, il appartient à l’administration d’apporter la preuve que le risque attribuable aux essais nucléaires est négligeable dans l’apparition de la maladie cancéreuse.

Le CIVEN, le comité des indemnisations des victimes des essais nucléaires, est chargé de présenter au ministre de la défense une recommandation sur les suites à donner à chaque demande. Chaque année depuis 2010, et cette année encore, le dispositif de reconnaissance et d’indemnisation est doté d’un budget de 10 millions d’euros. Entre la date de sa première réunion, le 20 septembre 2010, et le 6 septembre 2012, seulement sept indemnisations ont été accordées, pour un montant total de 290 000 euros.

Monsieur le ministre, alors que le dispositif législatif apparaît très ouvert, je m’étonne du peu de dossiers déclarés recevables et de la modestie des sommes décaissées au regard des montants provisionnés.

M. François Rochebloine. Vous avez raison !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Pour certains, la cause en serait une mise en œuvre parcimonieuse, voire restrictive, des dispositions de la loi. Quels éléments d’explication pouvez-vous nous donner à ce sujet ?

J’en viens au lien entre la nation et son armée et à la politique mémorielle, qui font l’objet du programme 167.

Avec 119,37 millions d’euros, les crédits de ce programme sont en hausse de 1,15 %. Avec 102,16 millions d’euros, les crédits relatifs à la Journée défense et citoyenneté sont encore en diminution, de 3,6 millions d’euros. Cette évolution tient à l’achèvement de la restructuration de la direction du service national, dont le format est désormais adapté à sa mission essentielle, l’organisation de la Journée défense et citoyenneté.

La rénovation de son contenu semble avoir été appréciée des jeunes. Plus de 85 % d’entre eux en ressortiraient en reconnaissant une amélioration de leur vision de la défense et des armées. Son éventuel allongement serait à l’étude. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner des précisions sur ce point ?

La politique de la mémoire – qui était jusqu’alors, il faut bien le dire, le parent pauvre, de l’action du ministère – voit ses crédits croître de plus de 5 millions d’euros, soit une augmentation de 43 %. Il s’agit, tout d’abord, de préparer le centenaire de la Grande Guerre, en 2014 : à ce titre, seront notamment conduites des actions de rénovation des cimetières militaires, en France et à l’étranger. S’inscrivant également dans la continuité de la mémoire combattante, un monument nominatif dédié aux militaires décédés en OPEX est actuellement en construction place Vauban, devant les Invalides ; il devrait être inauguré l’an prochain. Il est prévu d’y faire figurer le nom des victimes, actuelles et futures, de toutes ces opérations. Un tel monument constituera un signe fort de la reconnaissance de la nation à nos soldats.

Enfin, on me permettra d’évoquer ici les « malgré-nous » d’Alsace-Moselle, envoyés sur le front de l’Est par l’Allemagne nazie, puis internés en tant que soldats allemands par les Soviétiques dans des camps au régime particulièrement sévère. Seuls les prisonniers des camps situés à l’intérieur des frontières de l’Union soviétique du 22 juin 1941 ont bénéficié de l’imputabilité à la détention d’un certain nombre de maladies. Ceux qui avaient été internés dans l’un des 118 camps implantés à l’ouest de cette ligne ne s’en sont pas vu reconnaître le bénéfice. Les survivants sont moins de 200 aujourd’hui. Ne serait-il pas temps d’unifier le statut des Malgré-nous envoyés sur le front de l’est et internés par les Soviétiques ? Monsieur le ministre, lors de la réunion de la commission de la défense du 3 octobre 2011, vous m’avez répondu : « Je viens de signer un courrier demandant aux services de résoudre cette question : les demandes qui ont été formulées ont été prises en compte. » Je ne doute absolument pas de votre engagement. Aussi avais-je pris, afin de soutenir votre démarche et pour que les choses soient tout à fait claires entre nous, la décision de déposer un amendement prévoyant une ouverture de crédits. Toutefois, vos services m’ayant tout récemment donné l’assurance que ce problème serait réglé à la fin de cette année,…

M. Jean-Luc Reitzer. Il serait temps !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. …j’ai renoncé à déposer cet amendement, car je vous accorde toute ma confiance sur ce sujet auquel je vous sais très sensible. Je vous remercie donc de bien vouloir confirmer cet engagement devant la représentation nationale, sachant que ce dossier doit, bien entendu, être traité avant que toutes les victimes soient disparues.

En conclusion, j’ai l’honneur de porter à votre connaissance que notre commission des finances a émis un avis favorable à ce budget et propose à l’Assemblée nationale d’adopter les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, après la brillante présentation de ce budget par Gérard Terrier, je me contenterai de formuler quelques remarques et interrogations.

Le programme 167 finance notamment la Journée défense et citoyenneté organisée par la direction du service national. Cette journée défense et citoyenneté nouvelle manière sensibilise les jeunes aux nouveaux enjeux de la défense et de la sécurité nationale, tout en intégrant un module d’information sur le nouveau service civique. Je souhaite qu’en plus des actuels tests de détection de l’illettrisme, il soit également procédé à des tests de « numératie », destinés à vérifier la maîtrise des nombres. Je déplore que ces tests soient toujours à l’étude au ministère de l’éducation nationale et qu’ils ne soient pas attendus avant 2014. Pouvez-vous, monsieur le ministre délégué, nous préciser votre position sur ce point ?

Ce programme voit les crédits consacrés à la politique de mémoire augmenter de 12 à 17 millions d’euros en crédits de paiement. Cette augmentation permettra de préparer une année 2014 exceptionnelle, puisque seront célébrés le soixante-dixième anniversaire du Débarquement et le centenaire de la Grande Guerre. Un groupement d’intérêt public a été créé au printemps dernier pour préparer le cycle de commémoration de la Grande Guerre ; il regroupe sept ministères, plusieurs établissements publics et associations. Je souhaite que les financements promis à ce groupement d’intérêt public soient versés selon le calendrier initial. Pouvez-vous, monsieur le ministre délégué, nous présenter la nouvelle organisation que vous êtes en train de mettre en place pour organiser ces commémorations ?

Toujours dans le cadre de la politique mémorielle, un million d’euros doivent être consacrés à l’érection d’un monument national d’hommage aux morts en OPEX. Si je soutiens totalement cette initiative, je suis néanmoins étonnée par le coût de ce monument et par la longueur de la procédure. En effet, celui-ci ne devrait être inauguré qu’en 2014, alors que le ministère y travaille depuis un an déjà.

Par ailleurs, j’ai constaté que le Gouvernement avait versé trois millions d’euros à une fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie et des combats au Maroc et en Tunisie, fondation qui doublonne la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives ; j’y reviendrai lors de la discussion des amendements.

S’agissant de l’Institution nationale des Invalides, bon nombre de mes questions sont restées sans réponse. J’ai le sentiment que cette institution, en dépit d’un savoir-faire reconnu en chirurgie orthopédique ou dans le traitement des escarres, n’a pas achevé sa mue ni trouvé sa place dans la nouvelle organisation de l’offre de soins. J’attends donc avec intérêt les résultats de l’audit que doit mener cette année la Cour des comptes sur cette vénérable institution. Si la maison des pensionnaires accomplit une mission qu’elle seule peut remplir, le centre médico-chirurgical doit encore progresser dans l’optimisation de son fonctionnement et de sa mutualisation avec l’hôpital Percy. Pouvez-vous, monsieur le ministre délégué, nous indiquer quelles sont vos intentions en la matière ?

Le programme 169 finance, quant à lui, l’aide sociale accordée par l’ONAC aux anciens combattants. Je constate qu’un effort important a été consenti, puisque vous avez décidé de tenir les engagements du précédent gouvernement sur le financement en année pleine des 48 points, financement qui n’avait pas été budgété. Toutefois, il semblerait que des incertitudes pèsent sur le financement de l’aide différentielle au conjoint survivant. Pouvez-vous nous rassurer sur ce point ? Je reviendrai, à travers deux amendements, sur la situation des veuves des très grands invalides de guerre et des veuves « invisibles » – je veux parler des veuves des anciens combattants résidant à l’étranger.

Enfin, le programme 158 indemnise les victimes de la Seconde guerre mondiale. Depuis la création de ce dispositif, en 1999, 477 millions d’euros ont été alloués à plus de 44 000 bénéficiaires. Après douze ans de travaux, la commission d’indemnisation des victimes de la Shoah a en grande partie rempli sa mission. Sauf exception, pratiquement plus aucun dossier ne concerne une personne spoliée à l’âge adulte et très peu concernent des enfants victimes de la Shoah ou des survivants de la Shoah. En outre, les États européens qui avaient ouvert une procédure similaire ont déjà clôturé les opérations d’indemnisation. C’est pourquoi j’estime qu’il est temps de fixer une date de forclusion à ce dispositif ; je propose celle du 31 décembre 2014.

En résumé, ce projet de budget préserve l’essentiel et les droits du monde combattant sont maintenus. Je me réjouis que, dans un contexte difficile, ce budget n’ait pas été une « variable d’ajustement » et qu’un effort important soit consacré à la mémoire et à la solidarité. La commission de la défense a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Dans la discussion, la parole est à M. Gérard Charasse.

M. Gérard Charasse. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure pour avis, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste soutient le cap fixé par le Président de la République en vue du redressement financier de notre pays. En dépit de ce contexte difficile, le budget de la mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation » demeure dans son ensemble préservé.

Nombre de mesures en faveur des anciens combattants sont en effet maintenues, voire consolidées. Je pense notamment au financement de l’extension en année pleine de la retraite du combattant qui, depuis le 1er juillet 2012, est portée à 48 points, à la progression des prestations de sécurité sociale en vue de garantir une couverture santé aux anciens combattants les plus démunis, au maintien du plafond applicable à la majoration de la retraite mutualiste du combattant, portée à 125 points d’indice PMI, ainsi qu’à la mise en place de dispositifs fiscaux sur les rentes mutualistes.

Toujours dans le domaine de la solidarité, un effort particulier est consenti en faveur de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre, dont les crédits augmenteront chaque année de 500 000 euros jusqu’en 2015. Ils conforteront ainsi l’action sociale en faveur des anciens combattants et des bénéficiaires du code des pensions militaires d’invalidité et victimes de guerre. Ainsi l’aide différentielle au conjoint survivant sera augmentée, tant il est fondamental que la nation apporte un niveau de ressources minimum à celles et ceux dont le conjoint est mort pour la France. Les autres missions de l’Office, comme l’attribution de secours et de prêts individuels ainsi que la tutelle des pupilles de la nation et la gestion des maisons de retraite et des écoles de reconversion professionnelle, s’en trouveront également améliorées. En outre, l’Office percevra 107 millions d’euros de crédits pour la juste et nécessaire indemnisation des victimes d’actes de barbarie ou de persécutions antisémites pendant la Seconde Guerre mondiale.

De même, l’Institut national des Invalides, symbole fort de l’attachement de la nation au devoir de réparation, bénéficiera d’un plan de mise aux normes et de modernisation de son infrastructure ainsi que d’un abondement exceptionnel de 5,5 millions d’euros en 2015, qui lui permettra de continuer à mener à bien ses missions, en particulier celle d’accueil des invalides et victimes de guerre ainsi que celle de soins et de recherche, notamment sur l’appareillage des handicapés.

Il convient de se féliciter que, dans le but d’affirmer la reconnaissance de la nation à l’égard des combattants de la « nouvelle génération du feu », le décret du 28 juin dernier étende la liste des théâtres d’opération aux militaires actuels ou passés envoyés en opérations extérieures, les fameuses OPEX. L’attribution de la qualité de combattants leur sera ouverte et, par conséquent, le nombre de cartes du combattant augmentera de 25 % à 50 %. En outre, les dispositifs d’accompagnement des blessés sur ces théâtres d’opération seront pérennisés.

Par ailleurs, monsieur le ministre délégué, nous encourageons votre volonté affichée de mettre à l’étude l’extension jusqu’à 1964 de la période pendant laquelle quatre mois passés sous l’uniforme en Algérie donnent droit à la carte de combattant en sus de la médaille commémorative et du titre de reconnaissance de la nation. Je précise que son coût serait peu important, puisqu’il est évalué à 0,16 % de la mission « Anciens combattants ». Je veux rappeler, comme je le fais depuis plusieurs années, que cette mesure serait pleinement justifiée. En effet, des soldats français étaient encore présents en Algérie après le 2 juillet 1962, puisque plus de 500 d’entre eux, hors supplétifs, sont officiellement reconnus « morts pour la France », dont plus de la moitié tués par faits de guerre. Cette mesure les mettrait à égalité de droits avec leurs frères d’armes ayant servi au Maroc et en Tunisie, qui peuvent bénéficier de la carte du combattant s’ils étaient dans ces territoires jusqu’au 2 juillet 1962, soit six ans après l’indépendance de ces deux pays.

Enfin, il est à regretter que le problème de la campagne double pour le calcul des pensions de retraite des anciens combattants d’Afrique du Nord, anciens fonctionnaires et assimilés ne soit pas encore traité, comme je le souhaite depuis des années. Nous espérons, monsieur le ministre délégué, que ce point fait partie de vos priorités à venir.

Deuxième volet important de ce budget, l’effort en faveur de la mémoire.

La politique de mémoire est indispensable, qui vise à conserver le souvenir des conflits contemporains et à perpétuer l’attachement, notamment des jeunes générations, aux valeurs républicaines et civiques défendues lors de ces guerres. Jusqu’à présent, ces crédits étaient dérisoires. Ils connaîtront enfin, en 2013, une augmentation de 43 %, soit plus de 5 millions d’euros, pour la préparation du centenaire de la Grande Guerre en 2014 – notamment les actions de rénovation des cimetières militaires –, de la commémoration des Débarquements et de la libération du territoire national, ainsi que de la célébration du 70e anniversaire de la Résistance, qui doit devenir la journée nationale de la Résistance, non fériée et non chômée, anniversaire de la création du Conseil national de la Résistance.

Dans le cadre de cette politique mémorielle, il faut également se féliciter de l’unification de la reconnaissance par la nation des souffrances de tous les Malgré-nous d’Alsace-Moselle qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, ont été internés en tant que soldats allemands dans les terribles camps soviétiques.

Par ailleurs, l’adoption prochaine de la proposition de loi, actuellement en discussion au Sénat, relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc permettrait, pour la majorité de notre groupe, un légitime et indispensable travail de mémoire, tant sont encore prégnantes, un demi-siècle après son terme, les traces de ce conflit dans la mémoire collective.

S’inscrivant également dans la continuité de la mémoire combattante, des crédits permettront d’ériger l’an prochain, devant les Invalides, un monument nominatif dédié aux courageux militaires décédés lors d’opérations extérieures – une décision que je salue.

Enfin, ce budget crée les conditions pour renforcer le lien entre la Nation et son armée. Ainsi, la Journée défense et citoyenneté se verra encore améliorée…

M. le président. Merci de conclure, mon cher collègue.

M. Gérard Charasse. Puisque je dois abréger mon discours – peut-être un peu long, tant il y a de choses à dire –, je veux vous remercier pour votre action, monsieur le ministre, et vous assurer que le groupe RRDP votera ce budget, qui contribue à la reconnaissance de la Nation envers les anciens combattants et les victimes de guerre, en garantissant la gestion de leurs droits et la qualité des prestations fournies. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, la moyenne d’âge des anciens combattants dépasse aujourd’hui les 75 ans, tandis qu’on comptabilise plus de trois millions d’ayants droit.

Pour le projet de loi de finances 2013, le Gouvernement se contente simplement de maintenir les droits en faveur du monde combattant : le budget consacré à la réparation ne contient strictement aucune mesure nouvelle.

M. Jean-Luc Reitzer. Eh oui, c’est bien triste !

M. Jean-Jacques Candelier. Seule la hausse de la retraite du combattant, décidée sous la législature précédente, en année électorale, est financée.

M. Jean-Luc Reitzer. Elle l’est, c’est l’essentiel !

M. Philippe Vitel. Eh oui, c’est déjà ça !

M. Jean-Jacques Candelier. Par ailleurs, l’abondement de 500 000 euros au budget social de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre serait insuffisant, d’après des représentants du conseil d’administration, pour permettre le financement en 2013 de l’allocation différentielle aux veuves, d’un montant de 900 euros.

Le programme phare de la mission, « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », est en baisse de 75 millions d’euros par rapport à l’année dernière, une baisse qui fait suite aux 447 millions d’euros en moins sous la législature précédente. La disparition naturelle des pensionnés et retraités aurait dû diminuer mécaniquement le budget de 4,4 %. Mais en combinant l’inflation à la baisse nominale du budget de 2,4 %, on en arrive aux 4,4 % de baisse !

Combien d’années va-t-on encore attendre pour répondre aux légitimes revendications des anciens combattants ? Va-t-on accepter qu’avec un tel budget, l’État soit un grand pourvoyeur de pauvreté ? À budget constant, étant donné la disparition progressive des bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité et de la retraite du combattant, à raison d’environ 60 000 personnes par an, on pourrait rapidement donner satisfaction sur de nombreux points.

Par exemple, l’allocation différentielle de solidarité, créée à l’unanimité par la représentation nationale pour les veuves d’anciens combattants les plus démunies, a vu son fonctionnement amélioré et son plafond relevé. Il est difficilement acceptable que cette allocation soit plafonnée à un niveau inférieur au seuil de pauvreté.

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Jean-Jacques Candelier. Pour les bénéficiaires de cette aide, nous demandons que le plafond soit porté à 964 euros. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Par ailleurs, la pauvreté ne frappe pas les seuls conjoints survivants : de nombreux anciens combattants sont concernés. Nous souhaitons qu’ils puissent bénéficier, eux aussi, d’une telle allocation différentielle, qui leur permettrait de vivre dignement, alors qu’ils ont dignement servi la France.

Je rappelle aussi que la valeur du point de pension militaire d’invalidité, qui détermine les PMI, les retraites du combattant et le plafond des rentes mutualistes, accuse un retard de près de 43 %, et que le plafond majorable des rentes mutualistes stagne à 125 depuis 2007.

Autre dispositif de reconnaissance que nous devons améliorer : l’attribution de la campagne double aux anciens d’Afrique du Nord. Sur ce point, le Conseil d’État a tranché en condamnant l’État à rétablir l’égalité rompue. Face à cette décision, un décret inacceptable a limité l’application de la campagne double sous de fallacieux prétextes. Monsieur le ministre, allez-vous abroger le décret inique du 29 juillet 2010 et octroyer enfin la campagne double à tous les anciens d’Afrique du Nord ? Les députés communistes et du Front de gauche ont pris leurs responsabilités en déposant une proposition de loi relative à cette question.

Toujours en ce qui concerne le conflit en Afrique du Nord, le Gouvernement précédent s’était engagé à élargir les conditions d’attribution de la carte du combattant, en prévoyant de l’octroyer dès lors que les combattants totalisaient 120 jours de présence avec une arrivée sur le sol algérien avant le 2 juillet 1962. Aujourd’hui, il faut trancher.

Il y aurait encore tant à dire sur les pupilles, les orphelins de guerre que l’on fait lanterner scandaleusement, les pensions des conjoints survivants des grands invalides de guerre, ou encore l’indemnisation des victimes des essais nucléaires, qui est un véritable scandale. Sur ce dernier point, la provision de dix millions d’euros risque de ne pas être utilisée en l’état du dispositif d’indemnisation. Alors que plus de 700 dossiers ont été reçus, seulement sept d’entre eux ont fait l’objet d’une réponse positive, pour un montant total de 290 000 euros. Monsieur le ministre, comptez-vous améliorer le dispositif d’indemnisation, en inversant la charge de la preuve dans l’établissement du lien de causalité entre la pathologie des personnes et leur exposition à la radioactivité ?

Je veux encore dire un mot sur la politique de mémoire. Le Gouvernement, qui se targue de vouloir tourner le dos à la RGPP, est-il prêt à revenir sur la suppression des délégués à la mémoire combattante dans les offices départementaux, décidée par le gouvernement de droite qui l’a précédé ? Il faut des moyens pour exposer les causes des conflits aux populations, aux jeunes générations, dans le but de leur permettre d’agir pour empêcher les drames, les injustices, les massacres, les exactions, les crimes de guerre et toutes les atteintes à la dignité humaine.

Je terminerai sur quelque chose qui ne coûte strictement rien. À l’approche des commémorations du centenaire de la guerre de 1914-1918, il faudrait réhabiliter tous les fusillés pour l’exemple de la Première Guerre mondiale. Là encore, nous avons déposé une proposition de loi. Le Gouvernement est-il prêt à faire ce geste d’apaisement de la mémoire nationale ?

Pour les raisons que j’ai évoquées précédemment, les députés du Front de gauche émettront évidemment un avis négatif sur la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » du PLF 2013, dotée de crédits décevants. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Cela étant, vous n’avez pas fait mieux, chers collègues de droite !

M. Jean-Luc Reitzer. Ah si, nous avons fait mieux ! Nous avons pris des mesures concrètes !

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’existence de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » est la traduction budgétaire de la reconnaissance et du soutien de la République envers ceux à qui elle a confié les armes de la Nation. Dans un contexte budgétaire contraint, deux évolutions attestent aujourd’hui de cette reconnaissance.

Sur le plan protocolaire, après une succession de secrétaires d’État chargés de cette mission, c’est désormais un ministère qui a été institué. Cette décision du Président de la République traduit sa volonté de rendre pérenne le soutien de la Nation. Mais l’effort ne s’est pas arrêté au protocole, et c’est le budget lui-même qui s’en fait l’écho. Le programme 167 sur les liens entre la Nation et son armée en est l’exemple, puisqu’il est en hausse de 1,2 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2012.

Action souvent peu connue de la mission « Anciens combattants », le lien armée-Nation se matérialise en deux points essentiels : d’une part, l’hommage au passé, d’autre part, la préparation de l’avenir. S’attachant au passé, la politique mémorielle tisse un lien à travers l’histoire et les générations, pour que personne n’oublie les conséquences de la guerre, les principes qui nous y ont conduits, ainsi que le dévouement de ceux qui ont été amenés, par choix ou par nécessité, à prendre les armes. C’est pourquoi il faut saluer la hausse de 43 % des crédits de l’action 2, « Politique de mémoire », portée à 17 millions d’euros dans cette loi de finances initiale pour 2013.

L’augmentation forte des crédits se matérialise notamment dans la préparation de deux commémorations importantes en 2014 : le 70e anniversaire du débarquement, assuré par l’ONAC, et le centenaire du début de la Première Guerre mondiale, assuré par un groupement d’intérêt public. La mise en place d’une mission interministérielle chargée de coordonner ces deux commémorations relève de la logique même. Le but n’est pas, bien sûr, de lisser l’histoire, le conseil scientifique présidé par Antoine Prost s’en portera garant, mais de mettre en place une synergie entre des structures ayant acquis une compétence reconnue en la matière. Cette mission devra également permettre d’accompagner les collectivités locales dans l’organisation des événements.

Pour que le lien entre la Nation et son armée perdure, la politique de mémoire doit aussi penser son adéquation avec la société dans laquelle nous vivons aujourd’hui. Afin de ne pas mettre en péril la transmission de cette mémoire, la mission doit s’adapter, se moderniser. Cette modernisation prend pied tant sur le fond que sur la forme.

Sur le fond, il faut observer que le champ d’honneur a changé durant les dernières décennies. Il ne prend plus la forme de lignes de front bien identifiées, mais plutôt, désormais, d’embuscades, de raids, d’opérations de maintien de la paix en dehors du territoire national. Si la mission n’en est pas moins risquée et l’affrontement pas moins honorable, il importe de penser de nouvelles formes d’hommage pour de ne pas oublier ceux qui, par leur sang versé au Tchad, à Bouaké, en Afghanistan, à Beyrouth et ailleurs encore, ont affirmé la détermination de la France. Conformément aux recommandations du groupe de travail présidé par le général Thorette, le ministère doit poursuivre la réalisation d’un monument d’hommage national aux soldats ayant combattu en opérations extérieures.

Parallèlement, la modernisation passe aussi par la forme. Internet étant aujourd’hui la deuxième source d’information des Français, une action numérique en matière de mémoire devient indispensable. Avec « Les chemins de la mémoire » ou le projet de création d’un site Internet destiné aux anciens combattants d’OPEX, le ministère fait un grand pas en avant dans ses capacités de transmission de la mémoire aux plus jeunes générations.

La question de la modernisation et des jeunes générations se fixe aussi sur la deuxième grande fonction du lien armée-Nation : sa valeur éducative. La disparition progressive d’un public ayant vécu les conflits en question invite à modifier l’effort de mémoire en un sens plus pédagogique. La mise en place de la Journée défense et citoyenneté est un objet efficace, qui permet de sensibiliser l’ensemble d’une classe d’âge aux enjeux de défense et de sécurité, conformément au souhait exprimé par le Président de la République dans son discours du 11 mars dernier. Moment privilégié, parfois unique, de rencontre entre une jeunesse et son armée, cette journée ne doit cependant pas rester monochrome. Elle constitue l’occasion de pérenniser un certain nombre d’actions, notamment en matière de formation aux premiers secours et de sensibilisation sur des questions de santé publique. Le rapport de Mme Poznanski-Benhamou sur la mission « Anciens combattants » nous informe du projet de la direction du service national d’établir trois nouveaux partenariats en matière de sécurité routière et de dons d’organes et de sang. Cette action va dans la bonne direction et doit être approfondie : de nouvelles perspectives pour cette Journée défense et citoyenneté sont à définir, afin de la renforcer.

Forte de ces évolutions, la participation à la JDC présente une réelle plus-value. Aussi, il convient de réfléchir sur les moyens de réduire la forte disparité, mise en exergue par le même rapport, des taux de participations des jeunes selon qu’ils sont en France – où le taux de participation est de 97 % – ou à l’étranger.

M. le président. Merci de conclure, chère collègue.

Mme Émilienne Poumirol. Le lien armée-Nation, chers collègues, est autant une preuve de reconnaissance qu’un outil pédagogique. Aussi, ce lien se doit d’être adéquation avec l’ensemble des citoyens de notre Nation. La mémoire est un élément fondamental de la citoyenneté et un vecteur essentiel d’appartenance à la Nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » est effectivement en diminution par rapport à celui de l’année dernière, ce qui s’explique en partie par le fait que de nombreux anciens combattants sont malheureusement décédés. Sur ce point, nous ne critiquons pas la baisse du budget.

Toutefois, alors que « le changement, c’est maintenant », nous constatons que, pour la première fois depuis dix ans, il n’y a absolument rien de nouveau dans ce budget !

M. Jean-Luc Reitzer. Très juste !

M. Marc Laffineur. Pour la première fois depuis dix ans, rien n’est proposé pour améliorer le sort des anciens combattants, alors que beaucoup avait été fait lors des dix années précédentes. Ainsi, la retraite du combattant avait été revalorisée, et il est faux de prétendre, comme le font certains, que cette mesure n’avait pas été financée : la retraite du combattant a bien fait l’objet d’une augmentation de 30 % en moins de dix ans, chaque revalorisation étant financée comme il se doit…

M. Jean-Luc Reitzer. Absolument !

M. Marc Laffineur. …notamment celle intervenue au 1er juillet de l’année dernière.

Le budget étant préparé d’année en année, c’est dans la loi de finances pour 2013 que le financement d’une nouvelle revalorisation aurait dû se trouver.

Vos prédécesseurs ont aussi attribué aux anciens combattants d’Afrique du Nord le bénéfice de la campagne double ; ils ont accordé la carte du combattant aux vétérans des opérations extérieures ; ils ont mis en place la décristallisation des pensions servies aux ressortissants de pays devenus indépendants, qui avaient combattu sous le drapeau français, une revendication appuyée du monde combattant.

M. Jean-Luc Reitzer. Il faut le rappeler !

M. Marc Laffineur. Un fonds, doté de 10 millions d’euros, a été créé en 2010 pour l’indemnisation des victimes des essais nucléaires. Le décret permettant la reconnaissance des victimes a été amélioré. Sans doute faudrait-il aller plus loin…

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées. Ce n’est pas faute de l’avoir dit !

M. Marc Laffineur. …mais cette mesure est à mettre au crédit du précédent gouvernement.

Le plafond de l’allocation différentielle du conjoint survivant, mise en place en 2007, a été porté à 900 euros. Il serait souhaitable, monsieur le ministre, vous qui êtes également le président du conseil d’administration de l’ONAC, en charge de cette allocation, que ce plafond, censé augmenter d’année en année, soit aligné sur le minimum vieillesse, soit 964 euros. Enfin, les victimes de la barbarie nazie ont perçu des indemnisations.

Cette année, force est de constater que le budget des anciens combattants ne comporte rien de nouveau. Vous pourrez objecter, monsieur le ministre, que la période économique difficile exige des efforts de tous, mais vous faites partie d’un gouvernement qui a supprimé la franchise pour l’aide médicale accordée aux étrangers ! Cela signifie que tout étranger en situation irrégulière sur le territoire français peut être soigné gratuitement, alors que les autres paient une franchise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Pour les anciens combattants, il n’y a rien.

C’est aussi votre gouvernement qui a diminué de 50 % la taxe sur les visas pour les étudiants étrangers. Pour les anciens combattants, il n’y a rien de nouveau et de cela, ils souffriront dans les années à venir.

En revanche, monsieur le ministre, la construction du monument aux morts en opérations extérieures près des Invalides avait été lancée et vous allez l’inaugurer. Je vous en félicite. La nation, tous partis politiques confondus, doit se recueillir et commémorer la mémoire de ces soldats.

Je voulais évoquer en quelques mots la question du 19 mars. Le Sénat a repris une proposition de loi votée par l’Assemblée nationale il y a maintenant trois législatures. Il est incompréhensible que le Gouvernement ne prenne pas position sur ce texte. Nous sommes à un moment où la nation a besoin d’être rassemblée, unifiée. Les dates de commémoration doivent permettre à l’ensemble des Français de se retrouver et de se recueillir. C’est la raison pour laquelle il avait été décidé de retenir la date du 5 décembre comme date de commémoration de la fin du conflit algérien.

M. François Rochebloine. Elle ne signifie rien !

M. Marc Laffineur. Douze grandes associations d’anciens combattants ont voté pour cette date, parce que précisément, elle n’était pas source de conflit. Retenir le l9 mars, qui n’est commémoré que par certaines associations – ce qui est tout à fait légitime, et elles doivent pouvoir continuer à le faire –, diviserait profondément le monde des anciens combattants.

M. Philippe Vitel. Oh oui !

M. Marc Laffineur. Franchement, ce ne serait pas le moment, alors que nous devons chercher l’harmonie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) C’est en tout cas ce à quoi le Gouvernement et le ministre des anciens combattants doivent s’efforcer, afin de trouver, pour l’ensemble des anciens combattants, une date de recueillement.

Je voudrais évoquer aussi tourisme de mémoire, une question très importante puisque 7 millions de personnes viennent chaque année en France se recueillir sur les lieux de mémoire. Une étude sur les retombées économiques de cette forme de tourisme montre que s’il est synonyme de recueillement et d’harmonie entre les peuples, il l’est aussi de développement économique. Il représente dans certains départements comme la Somme 30 % des nuitées. Peut-être est-ce aussi le cas dans le Calvados

Un groupement d’intérêt public pour la célébration du centième anniversaire de la guerre de 14-18 a été mis en place. Monsieur le ministre, cette commémoration est-elle toujours une priorité du Gouvernement ? À un moment où l’on a tant besoin de croissance et d’emplois, elle serait très importante en termes de développement économique, puisqu’elle permettrait, en relayant les initiatives des collectivités locales, de drainer sur notre territoire de très nombreux étrangers. Rappelons que 500 000 Canadiens et 500 000 Australiens viennent chaque année se recueillir en France.

Avant de conclure, je veux saluer le travail effectué par les fonctionnaires de l’ONAC et par les fonctionnaires de l’hôpital des Invalides, dont la rapporteure a rappelé le savoir-faire unique dans le traitement des escarres. Monsieur le ministre, vous appliquez bien sûr la politique décidée par le Président de la République et par le Premier ministre. Mais pour la première fois, un Président de la République et un Premier ministre ont décidé de ne pas faire du budget des anciens combattants une priorité. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Cela heurte tout le monde ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en prenant connaissance de votre projet de budget, j’ai eu la confirmation de ce que je pressentais au moment de votre nomination, monsieur le ministre : un budget en baisse, en forte baisse.

Que sont devenues les déclarations de mes collègues, aujourd’hui dans la majorité, alors que nous nous efforcions sous le quinquennat précédent de respecter les engagements pris par le candidat Nicolas Sarkozy, notamment en revalorisant la retraite du combattant ? En politique, il semble que la mémoire puisse souvent faire défaut. Pour ma part, je me sens très à l’aise car, s’agissant de la question du monde ancien combattant, je me suis souvent opposé au gouvernement en exercice, alors que je siégeais dans la majorité.

Lorsque vous osez dire qu’il s’agit d’un budget de « consolidation des droits des anciens combattants », monsieur le ministre, je ne peux que m’insurger. La réalité est toute autre : votre budget est en réduction de plus de 3,4 %. Je ne partage pas du tout l’analyse du rapporteur de la commission des finances – un excellent rapporteur sans doute –, mais il est vrai que les pourcentages peuvent être interprétés pour illustrer à sa convenance telle ou telle situation.

M. Nicolas Bays. Vous avez dix ans d’expérience !

M. François Rochebloine. Ce budget est en baisse, certes, pour les raisons démographiques que l’on sait, mais aussi à cause de mesures d’économie. Il ne comporte d’ailleurs aucune mesure nouvelle au titre du droit à réparation.

Monsieur le ministre, nous savons tous que vous ne pouvez pas être tenu pour seul responsable de cette situation, alors que bien des points du contentieux avec le monde ancien combattant restent en suspens et que les marges de manœuvres budgétaires sont étroites.

Je ne vous étonnerai pas en abordant le rapport constant. La revalorisation des pensions militaires d’invalidité est nécessaire afin de compenser l’érosion liée à l’évolution du coût de la vie. Sur ce dossier complexe, il est indispensable, après les majorations successives qui ont permis d’atteindre les 48 points d’indice, conformément aux engagements pris par le président Nicolas Sarkozy, que l’on remette à plat les modalités de calcul retenues pour les révisions de la valeur du point. Aussi, nous vous proposons la constitution d’une commission tripartite – ministère, anciens combattants, parlementaires – dont le rôle sera de clarifier la situation.

S’agissant des conditions d’attribution de la carte du combattant pour les appelés affectés sur le territoire algérien et qui ne justifient pas des quatre mois à la date du 2 juillet 1962, nous attendons une mesure réparatrice, d’autant que les personnes concernées sont peu nombreuses et que l’un de vos prédécesseurs a pris des engagements.

Le plafond de la rente mutualiste restera inchangé, bloqué à 125 points, alors qu’un rattrapage s’imposerait. En cohérence avec mes prises de positions précédentes, je demanderai une augmentation d’un point seulement pour cette année, comme je l’avais déjà fait l’an dernier, et d’un point pour les années suivantes afin d’atteindre l’objectif d’un rattrapage de 5 points d’ici la fin du quinquennat.

M. Dino Cinieri. Très bien !

M. François Rochebloine. Le plafond de l’aide différentielle pour les conjoints survivants les plus démunis, actuellement de 900 euros par mois, devrait être relevé afin d’atteindre le seuil de pauvreté, soit 964 euros. Je rappelle que nous venons de très loin, puisque ce plafond avait été fixé initialement à 550 euros. Et comme l’allocation logement entrait alors dans le calcul des ressources, l’aide différentielle n’avait pratiquement pas été distribuée la première année. Je pense, monsieur le ministre, que les 500 000 euros supplémentaires seront insuffisants pour permettre d’attribuer cette aide en 2013.

Il serait également nécessaire d’étendre ce dispositif aux anciens combattants les plus démunis. Il est du devoir de la nation de prendre en considération les situations qui le méritent.

Quant à la campagne double, le décret du 29 juillet 2010 est tellement restrictif dans sa portée qu’il conduit à exclure du bénéfice de la mesure la plupart des anciens combattants concernés. La référence à la loi de 1999 n’est pas la bonne, la seule date de référence acceptable est le 9 décembre 1974, qui correspond à la reconnaissance de la qualité de combattant en Afrique du Nord. Une fois encore, l’égalité des droits entre les générations du feu n’est pas respectée.

Je me dois également d’évoquer la mise en œuvre de l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Compte tenu du nombre infime de dossiers retenus à ce jour – quatre me semble-t-il, sept selon le rapporteur – et du nombre important de dossiers en attente, nous souhaitons un réel assouplissement du dispositif en vigueur.

S’agissant de la situation des combattants en opérations extérieures, la reconnaissance de la nation doit être effective. Nous nous réjouissons de constater qu’un certain nombre de conflits sont pris en considération pour l’attribution de la carte.

Enfin, en ce cinquantième anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie, je ne peux achever mon propos sans aborder la question du 19 mars. Pour moi, vous le savez, la date du 5 décembre ne signifie rien et ne signifiera jamais rien. J’ai toujours considéré que la date du 19 mars était la plus juste. Le référendum du 8 avril 1962, qui a donné plus de 90 % des suffrages exprimés en faveur des accords d’Évian, l’a confirmé.

Le Sénat vient de reprendre le processus d’officialisation du 19 mars, interrompu voici plus de dix ans. Je m’en réjouis personnellement : à l’époque, j’avais voté la proposition de loi, comme d’ailleurs mes collègues François Sauvadet et Jean-Christophe Lagarde. Le Gouvernement va-t-il prendre une position ferme sur ce texte, monsieur le ministre ?

La politique de la mémoire doit pouvoir s’étendre à la troisième génération du feu. On doit pouvoir, en dehors de toute passion, perpétuer le souvenir et rendre hommage à ces dizaines de milliers de morts tombés pour la France en Afrique du Nord, et à ces dizaines de milliers de blessés ou traumatisés par huit années de guerre. Cinquante après, il est plus que temps que la nation française adopte une attitude responsable et raisonnable sur cette période douloureuse. À quelques jours des cérémonies du 11 novembre, nous ne pouvons que rappeler le sens qu’avaient voulu donner les poilus à la commémoration de l’armistice : « un acte au service de la paix ». Ce doit être là le sens premier d’une commémoration.

Pour conclure, monsieur le ministre, si nous sommes tous conscients, dans le contexte financier actuel, que la construction du budget 2013 nécessite de durs arbitrages, évitons les formules un peu faciles comme celle que vous avez prononcée, la « consolidation des droits des anciens combattants », à laquelle aucun des intéressés ne peut croire.

Votre budget ne répond pas aux attentes du monde ancien combattant et, vous le savez, il ne comporte aucune avancée nouvelle.

Aussi, le groupe UDI votera contre votre projet de budget. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Villaumé.

M. Jean-Michel Villaumé. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, chers collègues, en préambule à mon intervention, permettez-moi de saluer la décision conjointe du Président de la République et du Premier ministre de nommer, dès leur prise de fonction, un véritable interlocuteur pour le monde combattant, qui se soucie de ses préoccupations.

Le budget qui nous est présenté en est la preuve. Je tiens également à saluer la mémoire de l’un des plus célèbres résistants qu’ait connus notre patrie. Né en Haute-Saône, département que je représente, Raymond Samuel, plus connu sous le nom de Raymond Aubrac, fut l’un des grands artisans de la Résistance. (Applaudissements sur divers bancs.) Avec son épouse Lucie, il consacra son œuvre à la diplomatie, au souvenir et à la défense de notre territoire.

L’examen des crédits pour les anciens combattants est l’occasion de rappeler à la fois l’attachement de notre nation à ceux qui l’ont servie et notre volonté de faire prendre conscience aux nouvelles générations de l’effort qui a été celui de leurs anciens. C’est bien pour cela que le budget des anciens combattants n’est pas un budget comme les autres et qu’il doit se traduire par des avancées concrètes.

Bien sûr, ce projet de budget n’échappe pas à l’effort commun d’assainissement des finances publiques. Nous ne pouvons pas agir comme si la crise économique et financière n’existait pas. L’actualité se charge de nous rappeler quotidiennement cette évidence et notre devoir de responsabilité. Pour autant, ce budget garantit le maintien des droits à réparation des anciens combattants.

Je salue le travail du ministre qui nous propose un budget répondant aux nombreuses attentes du monde combattant. En cette période de réduction des finances publiques, et malgré une baisse mécanique de 2,55 % du budget, le projet de loi de finances conforte les actions relatives au lien entre la nation et son armée, notamment dans sa dimension mémorielle, et consolide l’ensemble des droits des anciens combattants. Il s’agit donc véritablement de s’assurer que le monde combattant, qui a déjà payé son tribut à la nation ne se voie pas demander des efforts supplémentaires.

Je souhaite faire deux remarques en ce qui concerne le programme 167 relatif aux liens entre la nation et son armée, qui connaît une hausse de ses crédits de 1,35 million d’euros. Cet effort doit consolider la politique de mémoire et la transmission de celle-ci pour les plus jeunes. Je me félicite de l’ambitieux programme qui nous est proposé en ce qui concerne cette politique.

Le programme 169 relatif à la reconnaissance et aux réparations en faveur du monde combattant prévoit une hausse importante, de 43,1 %, par rapport à la loi de finances 2012. Ces crédits répondront à l’attente de nos concitoyens, soucieux de rendre hommage à nos compatriotes. En 2013, hommage sera rendu aux hommes et femmes qui se sont engagés derrière Jean Moulin dans la Résistance intérieure, ainsi qu’à nos soldats tombés en OPEX.

En parallèle à ces éléments, des actions éducatives et pédagogiques seront menées afin de transmettre aux jeunes générations les valeurs républicaines et civiques défendues par leurs aînés. Je salue la rénovation et la modernisation de la Journée jeunesse et citoyenneté, qui permettra de détecter les jeunes de notre pays en situation d’échec et de leur proposer des parcours évitant l’exclusion.

Parallèlement à la réforme de la direction du service national, la Journée d’appel et de préparation à la défense a vu son contenu remanié, pour s’élargir à la sécurité nationale et au civisme. À ce sujet. Monsieur le ministre, il serait fort intéressant de pouvoir intégrer des témoignages d’associations patriotiques lors des Journées défense et citoyenneté pour conforter la volonté de transmission souhaitée par la réforme mise en place.

Enfin, et je conclurai par cela, j’ose espérer, monsieur le ministre, que nous engagerons très prochainement une réflexion afin de répondre à des problématiques non abordées depuis bien longtemps, je pense notamment à la reconnaissance de milliers d’anciens combattants ayant rejoint l’Algérie entre mai et juillet 1962 et qui ne peuvent, aujourd’hui, faire valoir véritablement leurs droits. En parlant du sort de la nation au milieu de la Seconde guerre mondiale, Raymond Aubrac a dit : « Une seule chose nous a guidés : l’optimisme, la conviction qu’en nous engageant, nous pouvions changer les choses ». J’espère, mes chers collègues, que nous nous engagerons et que nous adopterons ce budget respectueux de nos aînés et soucieux de transmission aux jeunes générations. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Pichot.

Mme Sylvie Pichot. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, chers collègues, nous examinons aujourd’hui le premier budget de cette législature pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Je veux tout d’abord souligner qu’en cette période de crise, il est essentiel de continuer à soutenir et à accompagner le travail de transmission de la mémoire de ceux qui ont combattu et donné leur vie pour leur pays. C’est ce travail de transmission, socle de notre identité commune, qui permet à celles et ceux qui n’ont pas connu la guerre de ne rien oublier de notre histoire. C’est en particulier nécessaire pour les plus jeunes, afin qu’ils puissent construire leur citoyenneté, leur responsabilité de citoyen.

Le budget 2013 va en ce sens, comme la nomination d’un ministre délégué chargé des anciens combattants.

Le projet de loi de finances 2013 fixe le cap du redressement de notre pays et prévoit un retour à 3 % de déficit pour la fin 2013.

Pour autant, le budget de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », est préservé, consolidant ainsi les droits des anciens combattants. C’est la réaffirmation de la reconnaissance et de la solidarité que la nation doit à ses anciens combattants, à leur famille, aux orphelins de guerre et pupilles de la nation.

Cette mission interministérielle s’articule autour de trois programmes distincts et essentiels.

Le programme 167, fixé à hauteur de 119,37 millions d’euros, connaît une hausse de 1,35 million d’euros. Il est destiné à favoriser l’esprit de défense et de citoyenneté au sein de la population, en y incluant la dimension mémorielle.

Le programme 169, d’un montant de 2,84 milliards d’euros, est dédié à la reconnaissance et à la réparation en faveur du monde combattant.

Le programme 158, d’un montant de 110 millions d’euros, est dédié à l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde guerre mondiale.

S’agissant de la politique de mémoire, l’enveloppe budgétaire prévoit 6 millions d’euros pour de nouvelles mesures sur la période 2013-2015. Son financement passe ainsi de 11,3 millions d’euros à 17,2 millions d’euros, traduisant concrètement la volonté de donner toute sa place à une nouvelle séquence mémorielle, notamment dans la perspective des commémorations du centenaire de la Première guerre mondiale.

Ces crédits seront également destinés à mener des actions éducatives et pédagogiques de transmission des valeurs républicaines et civiques en direction des jeunes générations, en partenariat avec l’éducation nationale, les associations d’anciens combattants, réaffirmant ainsi la priorité nationale donnée à la jeunesse et la volonté de transmission intergénérationnelle.

Il s’agit aussi aujourd’hui de refonder le lien armée-Nation, notamment au travers de la Journée défense et citoyenneté, seul « espace » à subsister entre les jeunes et les armées. Cette journée concerne 750 000 jeunes et permet de les sensibiliser aux droits et devoirs du citoyen et aux différentes formes de solidarité. C’est aussi l’occasion de détecter les jeunes en situation difficile, en situation d’échec.

Avant de conclure, je tiens à relayer votre appel, monsieur le ministre délégué, à destination des collectivités territoriales et de leurs correspondants défense qui, dans les mois et les années à venir, peuvent devenir de véritables « liens de mémoire », comme vous le disiez, et relais territoriaux.

Je conclurai mon propos en revenant sur le devoir de transmission. Transmettre, c’est partager. La cohésion sociale se construit à partir de valeurs partagées et d’une histoire commune qui lient les individus uns aux autres et font toute la force d’un peuple, d’une nation.

Transmettre, c’est comprendre. C’est la connaissance et la reconnaissance du passé qui permettent de comprendre d’où l’on vient, d’en tirer les enseignements pour construire le présent et préparer l’avenir.

Le comité Nobel l’a bien compris qui, le 12 octobre dernier, a remis à l’Union européenne le prix Nobel de la paix pour avoir fait vivre sa mémoire collective et contribué, pendant plus de six décennies, à promouvoir la paix, la réconciliation, la démocratie et les droits de l’homme en Europe.

Enfin, transmettre, c’est veiller à la préservation, année après année, de l’indispensable respect dû à tous ceux qui ont donné leur vie pour la France et à tous les anciens combattants qui, aujourd’hui, font vivre ce devoir de mémoire, de transmission et de solidarité, partout sur nos territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté aujourd’hui pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » se doit de répondre à l’équation difficile posée par l’exigence de redressement budgétaire et la volonté de soutenir ces femmes et ces hommes qui ont fait don de leur personne à la République française.

L’effort entrepris par votre gouvernement, monsieur le ministre délégué, est la conséquence directe du legs consécutif à dix années d’irresponsabilité budgétaire des gouvernements successifs de droite. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour quel résultat ? Un échec manifeste, conjuguant le doublement de la dette publique et la détérioration de la condition sociale du plus grand nombre.

C’est face à cet héritage, n’ayons pas peur de le dire au moment de discuter le premier budget de la majorité du changement, qu’est affirmée une action enfin responsable.

M. Julien Aubert. Vous nous faites la guerre !

M. Christophe Guilloteau. C’est du Jaurès !

M. le président. Seule Mme Hoffman-Rispal a la parole ! Je vous prie de l’écouter !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Au prétendu laxisme dont a été taxée la gauche depuis des années, ce projet proposé par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault hérite des errements de l’ancienne majorité, mais lui oppose un effort historique et courageux de redressement des finances publiques.

Il ne s’agit pas d’une posture idéologique qui opère des coupes budgétaires à l’aveugle.

M. Julien Aubert. Bien sûr que non…

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Bien au contraire, l’objectif de rétablissement des comptes publics, afin de réduire le déficit à 3 % dès 2013, va être tenu grâce à l’équilibre trouvé entre les impératifs de solidarité et la responsabilité budgétaire. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Christophe Guilloteau. Ils sont contents de vous entendre dans les tribunes du public !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Un exemple, mesdames et messieurs les députés, illustre cet équilibre de redressement dans la justice.

Alors que ce budget « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » aurait dû baisser de 7 %, conformément à l’effort demandé à l’ensemble des ministères, il ne baisse que de 2,4 % !

M. Julien Aubert. Ils en ont fait avant, des efforts !

M. Christophe Guilloteau. Il y a des priorités !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Ainsi, dans ce contexte de crise, la majorité s’engage pour la préservation des droits des anciens combattants. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. François Rochebloine. C’est un minimum !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Je connais votre engagement personnel sur ce sujet, monsieur le ministre. C’est pourquoi je vous fais confiance pour améliorer encore ce budget une fois la crise passée. Je sais à quel point vous y tenez, monsieur Kader Arif.

Le deuxième élément sur lequel je voudrais insister est relatif à la politique de mémoire ambitieuse engagée par le Gouvernement. La mémoire, ne nous y trompons pas, constitue le creuset de la nation et de la société dans laquelle nous vivons. Malgré la complexité de la situation budgétaire, nous répondons à cette exigence ! En effet, les crédits affectés à la politique de la mémoire enregistrent une augmentation d’environ 50 %, ce qui permet d’honorer nos anciens combattants à la hauteur des sacrifices auxquels ils ont consenti au service de la France. C’est cette ambition qu’incarne la richesse du calendrier commémoratif. Des tranchées creusées par les Poilus lors de la Grande Guerre il y a presque un siècle aux actes de la Résistance intérieure, notre histoire s’inscrit dans le présent et définit les contours d’une communauté civique où chacun doit trouver sa place.

Monsieur Laffineur, permettez-moi de vous répondre. Vous déplorez que nous ayons abrogé cette ridicule taxe de trente euros pour l’AME. Peut-être n’avez-vous pas dans votre circonscription, comme c’est mon cas, des demandeurs d’asile et des associations qui s’occupent de gens qui arrivent avec de gros problèmes parce qu’ils sont persécutés dans leur pays, ainsi que leurs enfants ! Ces gens ne pouvaient pas payer trente euros, c’étaient donc les associations qui les payaient au détriment de leurs salariés ! Pendant des années, j’ai écrit à plusieurs reprises au ministère concerné afin de mettre fin à cette situation. Ce n’est pas seulement une question de justice sociale, monsieur Laffineur ! Quand ces gens sont malades, il faut les soigner pour éviter la contagion ! Ce qu’a fait ce gouvernement, il était nécessaire de le faire ! Bravo ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Marc Laffineur. Jamais un médecin n’a refusé de soigner quelqu’un !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. Un mot, pour finir, à propos du 19 mars. Vous savez, monsieur le ministre, à quel point les Parisiens ainsi qu’un grand nombre d’associations tiennent au 19 mars. Sur ce sujet également, je vous fais confiance pour que le débat ait lieu. Nous commémorons le 19 mars à Paris avec le maire et beaucoup d’associations. Je pense qu’il faudra aller de l’avant. Je vous laisse engager ce débat.

Notre mémoire nationale, chers collègues, doit être le terreau de l’appartenance et de l’intégration à la nation, réconciliant les citoyens de tout âge et de toutes origines au sein d’un seul et même « nous » commun à l’ensemble des Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des anciens combattants.

M. Kader Arif, ministre délégué chargé des anciens combattants. Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, madame le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je tiens d’abord à vous remercier d’être présents si nombreux aujourd’hui.

M. François Rochebloine. Pas si nombreux que ça !

M. Kader Arif, ministre délégué. On m’avait dit que l’hémicycle est toujours bien rempli pour les débats portant sur le budget des anciens combattants. Je constate que c’est le cas aujourd’hui, aussi bien sur les bancs des parlementaires qu’en tribune.

Je ne répondrai pas ici à l’ensemble de vos questions, préférant le faire de façon beaucoup plus précise tout à l’heure lors du débat, dans lequel j’arrive avec une volonté d’apaisement et en fuyant toute caricature. J’ai eu la chance de participer aux débats de votre commission de la défense qui se sont globalement bien passés. Chacun a eu l’occasion de poser des questions et d’obtenir des réponses avec un respect mutuel honorant les fonctions des uns et des autres. Je m’inscris dans la logique qui a toujours été la mienne selon laquelle un débat public ne doit pas devenir une scène de théâtre où se faire plaisir.

Votre présence ici illustre la mobilisation nationale en faveur des anciens combattants, de ces hommes et ces femmes, héros maintes fois décorés, héros anonymes, simples soldats, qui ont fait l’histoire de notre pays et de notre continent et grâce auxquels l’Europe où nous vivons est aujourd’hui le plus grand espace au monde de paix et de liberté partagée. Dans chaque maison, dans chaque famille de France subsiste la mémoire du récit d’un parent ou d’un proche qui parle de ce qu’étaient la France, la guerre et la peur, mais aussi de la fierté de se battre pour des valeurs, pour un drapeau auquel on fait honneur et pour une nation dont on veut qu’elle perdure parce qu’elle fait notre force collective et individuelle. Chaque foyer de notre pays est imprégné de ces histoires qui, au fil du temps, structurent notre identité commune.

Vous êtes, et moi avec vous, l’expression de cette identité commune et de la volonté partagée de la faire perdurer au-delà du temps qui passe et qui malheureusement fait son œuvre. C’est pourquoi je souhaite que ce ministère, parfois méconnu, ne soit pas tourné vers le passé ni considéré uniquement comme un outil de gestion des pensions d’anciens combattants. La mission qui est la mienne et que j’ai l’honneur de conduire se veut résolument ancrée dans le présent et tournée vers l’avenir.

Chaque fois que je remets une médaille, je félicite non seulement l’homme mais aussi son engagement pour la France, au-delà de toute temporalité. En effet, ceux qui ont su porter le plus loin les valeurs de la France sont un exemple pour la jeunesse d’aujourd’hui. Chaque fois que j’améliore les mesures de reconnaissance et de réparation à l’égard des anciens combattants, ce n’est pas seulement pour réparer les blessures de la guerre, mais pour assurer des conditions de vie dignes et une vraie place dans la société à ceux qui symbolisent avec autant de force l’engagement citoyen pour notre pays et pour sa liberté. Chaque fois que je remets un prix, par exemple aux lauréats du concours national de la Résistance, ce n’est pas une maîtrise historique que je récompense mais la capacité à alimenter les débats contemporains par une réflexion renouvelée sur notre histoire commune.

Le constat est simple. Il y a une véritable ambition à construire pour ce ministère. C’est la volonté affichée d’emblée par le Président de la République, qui a souhaité me nommer comme ministre délégué. Je crois que cela répond à une attente légitime, portée par l’ensemble des acteurs du monde ancien combattant, de disposer d’un interlocuteur dédié. Je rappelle en effet que ce ministère avait été supprimé pendant quelques mois…

M. Régis Juanico. Six mois !

M. Kader Arif, ministre délégué. …et qu’il n’y avait même plus ni secrétaire d’État ni ministre dédié aux anciens combattants dans ce pays. On a rouvert ce ministère quelques mois avant l’élection présidentielle de 2012 en croyant répondre aux attentes d’une clientèle !

Cette politique que j’ai à construire, cette mission que j’ai l’honneur de conduire, doit répondre selon moi à trois objectifs. Le budget que je vous présente aujourd’hui en est, me semble-t-il, la traduction.

La première de ces priorités, c’est l’exigence de justice sociale. Conformément aux engagements pris par le Président de la République et par le Premier ministre, c’est cette motivation qui guide avant tout l’action du Gouvernement. Dans le cadre de la mission dont j’ai la responsabilité, je considère que les anciens combattants et leur famille méritent la reconnaissance de la nation, mais aussi un accompagnement et des réparations qui soient à la hauteur de leur engagement. Le projet de budget pour 2013 réalise donc, quoi qu’on en dise, un effort substantiel pour atteindre cet objectif, malgré les contraintes budgétaires actuelles rappelées tout à l’heure.

Mais ma mission ne se limite pas à cette dimension-là, même si elle est essentielle. C’est pourquoi ma seconde priorité est de mettre en œuvre une politique de mémoire dynamique, qui suscite une réflexion sur le passé pour mieux comprendre le présent et préparer l’avenir. Le rappel des conflits passés doit nous faire prendre conscience que la paix, telle que nous la connaissons sur notre continent, n’est que très récente et peut-être pas éternelle. Avec le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, au sein de la commission du livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, nous menons une réflexion commune afin d’engager le débat national sur le futur modèle d’armée de notre pays. Nous ne pouvons pas prédire l’avenir, mais nous pouvons nous appuyer sur les expériences passées. La politique mémorielle que j’ai engagée n’a pas pour vocation la repentance ou l’enfermement dans des débats stériles, mais le rassemblement de la communauté nationale. Parce que nous avons su, ensemble, affronter les conflits passés, nous devons également être unis dans le présent pour faire face aux défis qui nous attendent.

Cela m’amène à ma troisième priorité, qui est le renforcement du lien armée-Nation. Dans un monde en profond bouleversement, frappé par la crise et où tout va trop vite, il est nécessaire, pour ne pas dire indispensable, de prendre le temps et les mesures nécessaires pour refonder le lien social. Je pense en particulier aux jeunes, citoyens de demain aujourd’hui en perte de repères. Ils oublient parfois que leurs parents ou grands-parents se sont battus pour un idéal et que dans les temps les plus difficiles, ils se sont raccrochés au drapeau français comme on s’accroche à la vie.

N’y a-t-il pas là un sentiment que l’on devrait rappeler, raviver et faire émerger de la conscience collective pour retisser des liens trop souvent fragilisés par le mode de vie individualiste dans lequel nous évoluons ? Je sais que vous êtes sensibles à ces questions. C’est pourquoi je veux travailler, avec l’ensemble de la jeunesse et en particulier avec les jeunes issus des quartiers dits difficiles, sur les questions de place dans la société, de citoyenneté et d’attachement aux valeurs de la République.

Soutien au monde combattant, politique mémorielle ambitieuse, renforcement du lien armée-Nation : voilà le triptyque qui guidera mon action et que traduit le projet de budget que j’ai l’honneur de vous soumettre pour l’année 2013.

Permettez-moi maintenant d’évoquer en détail chacun des volets de cette action.

M. Jean-Luc Reitzer. Ah ! Enfin !

M. Kader Arif, ministre délégué. J’adore ce genre de commentaires !

Au sein de la mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation », c’est le programme n° 169 intitulé « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » qui concentre l’essentiel des crédits, soit un peu plus de 2,8 milliards d’euros. Je sais que le premier réflexe consiste à dire qu’étant donnée la diminution du nombre de retraites à verser chaque année et les marges budgétaires ainsi dégagées, mieux vaudrait réaffecter l’ensemble de ces sommes à l’amélioration des droits des anciens combattants. Je vais être très clair. En cette période de restrictions budgétaires, au cours de laquelle il faut faire des économies pour combler les déficits abyssaux qui nous ont été laissés, les contraintes sont réelles.

M. Jean-Luc Reitzer. On l’avait oublié, ça !

M. Dino Cinieri. Assez avec ça !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je rappelle qu’il a été demandé à chaque ministère de réduire de 7 % ses dépenses d’intervention. Cela aurait représenté une baisse de 220 millions d’euros de mon budget. Si j’avais appliqué une règle stricte de diminution du budget, proportionnelle à la diminution du nombre d’anciens combattants, j’aurais dû appliquer une baisse de 4,4 %, soit 133 millions d’euros. Mais j’ai obtenu que la baisse ne soit que de 2,4 % soit 73 millions d’euros. Cela représente 60 millions d’euros préservés, ce n’est pas rien dans le contexte actuel ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Régis Juanico. Très bien !

M. Jean-Luc Reitzer. Quel exploit !

M. Kader Arif, ministre délégué. J’ai aussi fait le choix de préserver dans leur intégralité les droits des anciens combattants. Cela n’a pas été facile. Je prendrai l’exemple de la retraite mutualiste. Certains demandent le relèvement de son plafond, notamment au sein du groupe communiste. Cela m’étonne. Je rappelle qu’il s’agit d’une forme de retraite par capitalisation, exonérée d’impôt sur le revenu. Cela s’appelle une niche fiscale, dont 14 % seulement des cotisants actuels atteignent le plafond !

M. François Rochebloine. C’est une honte !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je le dis donc clairement, le relèvement de ce plafond n’est pas pour moi une priorité.

M. Jean-Luc Reitzer. Voilà qui est clair !

M. Kader Arif, ministre délégué. 410 000 personnes sont concernées et plus de 260 millions d’euros sont consacrés à la rente mutualiste. Faire de la retraite par capitalisation une priorité du Gouvernement n’est pas aujourd’hui à l’ordre du jour. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Luc Reitzer. Pas de quoi applaudir !

M. Kader Arif, ministre délégué. J’ai préféré mettre l’accent sur d’autres mesures, en particulier sur l’aide sociale de l’ONAC, dont le budget sera augmenté de 500 000 euros par an de manière cumulative pendant trois ans, ce qui représente 3 millions d’euros supplémentaires au total. Voilà une vraie mesure nouvelle qui aura des conséquences sociales concrètes pour améliorer le quotidien des conjoints survivants. Venir en aide aux plus démunis, dont le dialogue avec l’ONAC, leur premier interlocuteur, est préservé grâce au maintien de ses représentations départementales, voilà un bel exemple de soutien au monde combattant, qu’il s’agisse des anciens combattants eux-mêmes, de leur conjoint, ou des orphelins de guerre et pupilles de la nation.

Autre priorité qui fut la mienne – priorité imposée, mais j’ai tenu à agir en responsabilité en honorant les promesses de mes prédécesseurs : j’ai cherché dans ce budget à financer ce qui ne l’avait pas été par le gouvernement précédent.

Je pense d’abord à la retraite du combattant, passée depuis le 1er juillet 2012 de 44 à 48 points. J’ai découvert cette mesure annoncée avec habileté…

M. Jean-Luc Reitzer. C’était dans le budget !

M. Kader Arif, ministre délégué. …et qui n’a en tout cas commencé à être appliquée qu’en milieu d’année,…

M. Jean-Luc Reitzer. On aurait pu gagner les élections !

M. Kader Arif, ministre délégué. …ce qui a permis à mon prédécesseur, pour la présentation du budget 2012, d’intégrer seulement 12 millions d’euros supplémentaires alors que j’ai dû moi-même dégager 54 millions d’euros pour l’année 2013.

M. Serge Janquin et M. Jean-Michel Villaumé. La mesure n’était pas financée !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je comprends sa volonté de générosité, mais je dois avouer que j’aurais préféré qu’il en assume personnellement toute la charge, puisqu’il avait fait cette annonce dans le cadre de la campagne électorale, et d’autant que, contrairement aux années précédentes, l’augmentation a été de quatre points, et non d’un ou deux points comme était l’usage depuis 2007. Cependant, nous avons su trouver les ressources nécessaires. Je sais que cette avancée était attendue, et je me félicite d’avoir pu la concrétiser. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Luc Reitzer. Nous aurions assumé aussi !

M. Kader Arif, ministre délégué. S’agissant de l’aide différentielle, là aussi, je dois souligner le peu de sérieux de la gestion précédente. Je suis favorable à l’augmentation de cette aide à 900 euros, mais je suis d’abord favorable à ce que cette annonce soit consolidée ! Il faut rappeler que les 900 euros – il faudra regarder le budget de l’ONAC – n’avaient pas été eux-mêmes budgétés. Il s’agit donc d’annonces payées à crédit, sans être sûrs de savoir qui sera le payeur.

Je consoliderai donc les 900 euros…

M. Marc Laffineur. C’est un mensonge !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Non, monsieur Laffineur, c’est la vérité ! Regardez le budget !

M. Kader Arif, ministre délégué. Ce n’est pas un mensonge : je vous donnerai des chiffres très précis. Je consoliderai ces 900 euros et j’essaierai de tendre vers les 964 euros qui correspondent au seuil de pauvreté. S’il y a un domaine où il aurait été nécessaire d’allier les actes à la parole, c’est bien celui-là.

Ce dispositif, parce qu’il est justement essentiel pour garantir un niveau de ressources minimum aux conjoints survivants, mérite d’être traité avec le plus grand sérieux : c’est ce que je vous propose. Il ne s’agit pas d’une mesure cosmétique, mais bien de ressources vitales pour ses bénéficiaires.

Alors que ce type d’augmentation a été annoncé sans financement, le manque de responsabilité consiste à laisser aujourd’hui le budget de l’ONAC dans de grandes difficultés. Nous avons tenté – et nous allons tenter – de colmater la brèche, mais je tiens à rappeler que l’augmentation de 500 000 euros au titre de l’aide sociale que j’évoquais tout à l’heure n’était pas prévue, à l’origine, pour abonder l’augmentation de l’aide différentielle. Nous devons aujourd’hui dégager des crédits dans l’urgence – nous y reviendrons d’ailleurs au moment de l’examen des amendements –, mais je tiens à souligner que je ne suis pas satisfait de cette situation. Le montant de l’aide différentielle a pris plus de 64 % de sa valeur depuis 2008 : c’est là une dynamique positive que nous devons retrouver, mais dans la sérénité, et en conservant le souci de savoir si le financement est possible ou non.

Autre point que je souhaitais évoquer dans ce premier chapitre relatif à la préservation des droits des anciens combattants : il s’agit du rapport constant. J’entends que certaines associations souhaiteraient revoir le mode de calcul de la valeur du point PMI, aligné sur l’évolution du traitement des fonctionnaires. Je tiens cependant à rappeler que le dispositif actuel a été mis en place en concertation avec ces associations, et qu’il n’existe pas à l’heure actuelle d’autre indice de l’INSEE permettant de suivre de manière précise l’évolution du traitement des fonctionnaires, primes comprises. Toute élaboration d’un nouvel outil statistique se heurterait à d’importantes difficultés de réalisation.

En revanche, je me suis préoccupé des retards observés dans la publication des décrets prenant acte de l’augmentation de la valeur du point PMI. Le système ayant été créé précisément pour suivre au plus près l’évolution des salaires dans la fonction publique, il n’est pas acceptable que la publication des décrets tarde parfois pendant plus d’un an, surtout lorsqu’il s’agit de sommes très modiques. C’est pourquoi, rapidement après ma prise de fonctions, j’ai signé le décret entérinant la hausse du point PMI de l’année dernière.

M. Serge Janquin. Vous avez fait le travail de vos prédécesseurs !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je m’engage à garantir une réactivité égale à l’avenir. Il en va du respect du monde combattant !

Dernier élément que je tiens à évoquer devant vous : la reconnaissance que nous devons avoir à l’égard de nos soldats engagés, actuellement ou dans le passé, en opérations extérieures. Vous le savez : ils sont en manque cruel de reconnaissance. Je comprends leur souffrance. Il n’est plus acceptable que le seul hommage qui leur soit rendu ait lieu lors du décès de l’un des leurs. Ils méritent bien mieux que cela !

Certes, ils ne luttent pas pour sauver notre pays de l’emprise d’un ennemi extérieur, ils n’ont pas pour mission de libérer le territoire national ou d’organiser la résistance face à l’occupant. Mais ils sont au service de causes internationales, envoyés par les Nations Unies, l’Union européenne ou l’OTAN, pour venir en aide à des populations sur l’ensemble de la planète, pour garantir une stabilité mondiale qui est le gage de notre sécurité à tous, pour porter enfin des valeurs qui sont plus que jamais nécessaires dans un monde bouleversé par les extrémismes de toute nature. L’engagement de nos soldats en opérations extérieures est exemplaire, et il mérite le plein soutien de la nation. Cela doit, à mes yeux, se traduire à deux niveaux.

M. Dino Cinieri. Ce n’est que du bla-bla !

M. Kader Arif, ministre délégué. D’une part, l’octroi de la carte du combattant aux militaires ayant servi en OPEX doit être facilité. Les textes ont dû être adaptés à de multiples reprises pour assurer la prise en compte de la nature particulière des missions dans lesquelles sont engagés ces soldats, puisque les critères utilisés pour qualifier les actions combattantes des conflits passés étaient à l’évidence inadaptés. Nous avons également adopté, dès le 28 juin 2012, un décret modifiant la liste des opérations extérieures ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant. De nouveaux théâtres d’opération ont été ainsi intégrés, pour couvrir notamment plusieurs missions des Nations Unies.

En termes de nombre de bénéficiaires, ces nouveaux critères permettent d’augmenter de 25 à 50 % le nombre de cartes du combattant attribuées au titre des OPEX. Parce qu’il s’agit d’une évolution que j’estime indispensable, je compte sur les parlementaires pour suivre attentivement les conséquences de l’application de ce décret. S’il ne produit pas les effets escomptés, nous améliorerons encore le dispositif.

Mais parce que la reconnaissance est aussi symbolique, je serai heureux de poser en 2013 la première pierre du monument pour les morts en OPEX, grâce au million d’euros budgété pour réaliser cet ouvrage qui sera situé à Paris, place Vauban. Six cents noms de soldats morts en OPEX y seront inscrits dans un premier temps ; les noms seront ajoutés à chaque nouveau décès sur un front extérieur.

L’ensemble des éléments que je viens d’évoquer sera également repris dans la refonte en cours du code des pensions, conformément aux recommandations du Conseil d’État. L’objectif est d’aboutir à la rédaction d’un document clair, à jour, complet, juridiquement sûr et permettant ainsi de rendre à ses utilisateurs l’ensemble des services qu’ils sont en droit d’attendre. Les associations seront pleinement associées à ce travail. Il s’agit de l’une de leurs demandes, et je m’y engage, car c’est avant tout pour faciliter leurs démarches et celles de leurs adhérents que la refonte du code a été lancée.

Je souhaite maintenant évoquer un domaine qui touche tant à la question des droits des anciens combattants qu’à celle de la mémoire, que j’évoquerai dans la seconde partie de mon propos. Il s’agit de la guerre d’Algérie. L’histoire qui nous lie à ce pays est faite de douleurs et de désillusions autant qu’elle est porteuse de promesses et d’espérances. Le rapprochement entre les deux rives de la Méditerranée ne pourra pourtant se faire que lorsque la relation à notre passé commun aura été apaisée. Il ne s’agit pas de faire table rase du passé, ni de s’engager dans une course aux lois mémorielles, mais de créer les conditions d’un regard nouveau et apaisé sur notre passé, d’un regard sans repentance – je le disais tout à l’heure – mais capable de se porter sur toutes les réalités de ce douloureux conflit.

Vous le savez, et vous l’avez également évoqué : un travail est en cours au Sénat sur la reconnaissance du 19 mars. Je ne souhaite pas m’immiscer dans ce travail parlementaire. J’ai dit que je m’en remettais à la sagesse des parlementaires qui se prononceront sur cette proposition de loi. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Dino Cinieri. Ça, c’est balaise !

M. Philippe Vitel. C’est la meilleure !

M. Christophe Guilloteau. Courage, fuyons !

M. Kader Arif, ministre délégué. Il y a d’autres facettes de ce conflit sur lesquelles je suis attendu : je tiens à m’exprimer sur ces aspects. Il y a, d’abord, la question de l’attribution de la carte du combattant au-delà de la date du 2 juillet 1962.

M. Christophe Guilloteau. Heureusement que nous ne sommes pas en guerre !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je pourrais parler de la guerre d’Algérie mieux que ne pourrait le faire chacun d’entre vous, au travers de mon histoire, avec des douleurs toutes personnelles. Je n’ai pas voulu utiliser la guerre d’Algérie pour toucher une clientèle électorale. C’est la différence entre vous et moi, messieurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Vitel. C’est scandaleux !

M. Kader Arif, ministre délégué. Il y a d’autres facettes de ce conflit sur lesquelles je suis attendu : je tiens en priorité à m’exprimer sur ces aspects-là.

Il y a, d’abord, la question de l’attribution de la carte du combattant au-delà de la date du 2 juillet 1962. Certains de nos soldats respectent le critère établi par le code des pensions, à savoir un stationnement d’au moins quatre mois en Algérie, mais sans que l’ensemble de cette période n’ait été réalisé avant le 2 juillet 1962.

Je précise d’abord que ces militaires ne sont pas oubliés par notre institution, puisque le code des pensions prévoit que pour une présence jusqu’en 1964, ils peuvent solliciter le titre de reconnaissance de la nation, qui ouvre droit au port de la médaille de reconnaissance de la nation, à la souscription d’une rente mutualiste, et qui les rend ressortissants de l’ONAC.

Mais je comprends qu’ils souhaitent pouvoir prétendre, comme leurs compagnons d’armes, à la carte du combattant. Là aussi, l’impératif de justice nous empêche de laisser deux soldats aux parcours quasiment identiques soumis à des régimes différents. C’est pourquoi je souhaite faire évoluer la législation pour rendre possible l’attribution de ladite carte aux militaires ayant servi en Algérie quatre mois à cheval sur la date du 2 juillet 1962.

M. Régis Juanico. Très bien !

M. Kader Arif, ministre délégué. Cela représente un effort financier non négligeable : 5,5 millions d’euros pour 8 000 bénéficiaires supplémentaires. Il m’était impossible, étant donné l’augmentation de la retraite du combattant et les autres priorités que je vous ai exposées, de réaliser cet effort supplémentaire dès 2013. Mais je vous garantis que cela fait partie de mes priorités pour 2014 : j’en ai discuté longuement avec M. Terrier, le rapporteur spécial.

Autre sujet qu’il me tient à cœur d’évoquer devant vous, et qui n’a pas encore été évoqué : il s’agit de notre politique à l’égard des harkis et rapatriés. Le 25 septembre dernier avait lieu la journée nationale d’hommage aux harkis, au cours de laquelle j’ai lu un message du Président de la République. Le drame vécu par ces populations, qu’il s’agisse de l’abandon des harkis au moment du retrait des troupes françaises d’Algérie ou du traitement réservé aux rapatriés dans les camps français par la suite, mérite d’être connu et reconnu. C’était tout le sens du message du Président de la République, qui tient à ce que ce moment de notre histoire commune sorte de l’oubli, et qu’il soit notamment pleinement intégré aux chapitres consacrés à la guerre d’Algérie dans les manuels scolaires. J’ai engagé des discussions avec l’ensemble des ministères concernés, et une réunion interministérielle s’est tenue à ce sujet il y a deux semaines : elle a permis de dégager des priorités concrètes, notamment pour améliorer les dispositifs sociaux et professionnels permettant l’insertion des harkis et de leurs descendants dans la société française.

M. Jean-Luc Reitzer. Très bien !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je tiens également à ce que l’ONAC devienne l’interlocuteur de référence pour les harkis et les rapatriés. C’est pourquoi j’ai annoncé lors du conseil d’administration de l’ONAC que les directeurs départementaux auraient désormais la responsabilité d’accompagner ces personnes dans leurs démarches pour leur permettre de bénéficier davantage des dispositifs qui leur sont dédiés.

Ce travail qui doit s’opérer dans le cadre de la reconnaissance de l’histoire des harkis m’amène à exposer devant vous ma seconde priorité : la mise en place d’une politique de mémoire novatrice et ambitieuse.

Cette politique est novatrice parce je souhaite donner un nouvel élan aux travaux engagés dans le cadre du groupement d’intérêt public pour le centenaire de la Grande Guerre. Je l’ai annoncé en conseil des ministres : je présiderai sous l’autorité du ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, une mission interministérielle en charge de piloter le GIP tout comme la politique en matière de commémoration du soixante-dixième anniversaire des années 1940.

Sans faire l’amalgame entre ces deux conflits bien distincts, et en préservant les engagements financiers déjà dédiés à chacun d’eux, j’estime en effet indispensable de redonner une véritable ambition politique à ces commémorations. Pour ne citer que l’année 2013, nous mettrons l’accent sur la résistance intérieure, mais aussi sur la libération de la Corse par exemple. 2014 sera une année charnière, commémorant à la fois le débarquement en Normandie et le début de la libération du pays, mais aussi l’entrée dans le centenaire de la Première Guerre mondiale.

S’agissant de cet anniversaire, ma priorité est de donner une dimension internationale exceptionnelle aux célébrations. J’ai déjà rencontré mes homologues britannique, canadien, américain, australien et néo-zélandais sur ce sujet. Tous souhaitent être associés. Nous sommes déjà en train de mettre en place des protocoles spécifiques avec chacun d’eux pour le pilotage des épisodes qui sont pour eux prioritaires. Je pense aux Britanniques pour la bataille de la Somme, ou aux Canadiens pour la bataille de Vimy par exemple. Imaginez que 50 000 Canadiens dont 20 000 jeunes se rendront, m’a dit mon homologue canadien, à Vimy en 2017. Nous devrons être à la hauteur de la confiance que nos partenaires internationaux et alliés ont en nous : c’est pour moi une priorité.

Mais là aussi, cela implique de consacrer les moyens financiers à la réalisation de nos objectifs. C’est pourquoi le budget 2013 consacre une augmentation de plus de 50 % des crédits affectés à la politique de mémoire, qui passeront de 12 millions d’euros en 2012 à 17 millions d’euros en 2013. Il s’agit de la traduction directe de cette volonté politique. Elle inclut un effort particulier sur la rénovation des nécropoles de la Première Guerre mondiale, avec un budget dédié de 5 millions d’euros.

Parce que ces moments seront aussi l’occasion d’accueillir un public très vaste – M. Laffineur l’évoquait tout à l’heure –, je souhaite également mettre en avant le tourisme de mémoire comme dimension essentielle de la politique que je désire mettre en œuvre. Il s’agit de promouvoir les sites mémoriels en France et à l’étranger, de développer des formations sur la valorisation touristique des lieux de mémoire, notamment par la création d’un label dédié, de favoriser la mise en réseau des lieux de mémoire, et d’œuvrer conjointement au développement d’une politique événementielle autour des commémorations. Le chiffre d’affaires lié au tourisme de mémoire s’élevait en 2011 à 45 millions d’euros, hors hébergement et restauration, donc limité au paiement des tickets d’accès aux sites mémoriels uniquement. Ce chiffre révèle à lui seul le potentiel d’évolution à l’avenir, par la mise en valeur de notre patrimoine, et avec des retombées économiques notables pour les régions et les départements concernés. À l’heure où les collectivités locales réalisent un travail exceptionnel pour mettre en valeur les territoires, je veux saisir cette opportunité pour donner un nouvel élan au tourisme dans ces régions, en rassemblant les populations locales en particulier autour des grandes dates du calendrier commémoratif.

La mémoire comme élément fondamental de la citoyenneté, comme vecteur d’appartenance à la nation, la mémoire pour retisser le lien intergénérationnel, rapprocher les Français de toutes origines : voilà ma priorité.

C’est pour cette raison qu’au-delà de la politique mémorielle, c’est le lien armée-Nation qui doit également être renforcé. C’est le dernier volet de mon action que je souhaite évoquer devant vous, avant de répondre à vos questions.

Si ce ministère doit se projeter dans l’avenir, et je suis convaincu que telle est sa vocation, c’est par le lien armée-Nation que cela doit s’opérer. Car l’enjeu fondamental est celui de la mobilisation de la jeunesse. Je suis du reste étonné que ce lien armée-Nation tel qu’il s’incarne dans la Journée Défense et Citoyenneté ait été remis en cause avant mon arrivée à la tête de ce ministère.

Rappeler aux jeunes le sens de l’engagement de leurs aînés, les associer aux commémorations, leur faire prendre conscience de la diversité parmi les soldats combattant sous le drapeau français et de la fierté qui était la leur, transmettre enfin une connaissance qui doit permettre de mieux comprendre le présent, de se forger un esprit critique, de prendre le recul nécessaire sur les conflits actuels et de mieux appréhender les enjeux pour l’avenir : voilà une belle ambition que nous pouvons partager.

N’oublions jamais que les jeunes d’aujourd’hui sont les citoyens et les décideurs de demain. Et c’est pour cela que François Hollande a fait de la jeunesse une priorité nationale. Chaque ministère se mobilise pour cette cause, et je mettrai également en œuvre une politique qui donne à ces jeunes les meilleurs outils pour affronter l’avenir.

C’est pourquoi j’ai tenu à préserver la Journée Défense et Citoyenneté. Nous l’évoquerons au moment de la discussion des amendements budgétaires, mais je ne peux accepter que la JDC soit systématiquement identifiée comme la politique à détricoter. La JDC touche 750 000 jeunes par an, c’est l’ensemble de la classe d’âge, et pour beaucoup c’est bien souvent le seul moment de contact avec le monde de la défense. Journée de prise de conscience des enjeux de sécurité nationale, de sensibilisation au rôle des armées, de découverte aussi des métiers que propose le ministère de la défense, la JDC est une étape incontournable du parcours de citoyenneté.

C’est d’ailleurs l’ensemble de ce parcours qui doit être amélioré : pour assurer un enseignement de défense plus efficace en classes de troisième et de première, pour combler les quelques lacunes qui persistent dans l’obligation de recensement, mais aussi pour renforcer la Journée Défense et Citoyenneté elle-même. Conformément aux engagements pris, la JDC devra être recentrée sur sa fonction première qu’est la transmission de l’esprit de défense. Mais il faudra également réfléchir à de nouvelles perspectives pour cette journée, notamment autour de l’allongement de sa durée et de la diversification des modules proposés ; je pense notamment à un module de santé, évoqué par l’un d’entre vous.

J’ai pleinement conscience du coût que cela représente, mais je considère qu’un grand pays démocratique, dont l’armée s’est professionnalisée, ne peut faire l’économie d’une jeunesse pleinement sensibilisée à l’effort de défense de notre pays. L’on oublie trop souvent que le service militaire n’a été que suspendu, et que l’ensemble des jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans peut encore être appelé sous les drapeaux, si une catastrophe venait à se présenter, ce que bien entendu je ne souhaite pas.

Ayons donc conscience qu’au-delà de l’engagement citoyen, c’est la relation essentielle entre la nation et son armée qui est posée, et avec elle, celle de l’effort qu’une nation est prête à réaliser pour assurer sa sécurité et celle de son territoire.

M. Gérard Bapt. Très bien !

M. Kader Arif, ministre délégué. Vous aurez prochainement à auditionner le ministre de la défense, et je ne doute pas que vous aborderez avec lui ces sujets qui font toute l’actualité, notamment dans le cadre de la préparation du prochain livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.

M. Jean-Luc Reitzer. Cela ne mange pas de pain.

M. Kader Arif, ministre délégué. Voilà, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, les principales composantes du budget que j’ai l’honneur de vous présenter pour l’année 2013, et le sens de la politique que je souhaite mettre en œuvre.

M. Jean-Luc Reitzer. Il n’y a rien ! Aucune mesure dans votre discours !

M. Kader Arif , ministre délégué. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions avec précision et sérénité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et GDR.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Frédéric Poisson. Mon rappel se fonde sur l’article 58, alinéa 1, de notre règlement.

Je souhaite réagir aux propos du ministre sur la question de la guerre d’Algérie.

M. Régis Juanico. Ce n’est pas un rappel au règlement !

M. Jean-Frédéric Poisson. Laissez-moi poursuivre mon propos, monsieur Juanico.

Monsieur le ministre, la légitimité pour intervenir sur des sujets de fond dans cet hémicycle ne dépend ni de notre date de naissance, ni de notre participation directe ou indirecte à ce conflit, ni du lieu où nous sommes nés.

Nous sommes très nombreux à avoir été touchés, indirectement au moins, par la guerre d’Algérie, par nos pères, nos oncles, nos cousins, parfois nos frères et sœurs.

Plusieurs députés du groupe SRC. Ce n’est pas un rappel au règlement.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le député, car votre intervention ne s’apparente pas vraiment à un rappel au règlement.

M. Jean-Frédéric Poisson. Si, monsieur le président.

M. le ministre devrait prendre en compte que chacun d’entre nous ici est parfaitement légitime à faire valoir une opinion sur cette question, en dehors de tout aspect politicien. Je tenais à le rappeler. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Reprise de la discussion

M. le président. Nous en venons aux questions.

Nous allons procéder selon nos usages en donnant la parole à trois orateurs d’un groupe. Puis, le ministre répondra à chacune des questions.

Nous commençons par trois questions du groupe socialiste, républicain et citoyen.

La parole est à M. Joaquim Pueyo.

M. Joaquim Pueyo. Voilà dix ans que la conscription a été supprimée en France ou, pour le dire selon les termes pudiques de la loi, suspendue. Le caractère définitif de cette suspension ne fait aujourd’hui que peu de doute et laisse la représentation nationale devant une question béante : comment faire pour que le lien indispensable entre l’armée et la nation, naturellement tissé naguère par le service militaire, s’incarne dans d’autres réalités et sous d’autres formes ?

Chacun doit convenir que la partie du projet de loi de finances pour 2013 portant sur les Anciens combattants, la mémoire et le lien armée-Nation que nous examinons aujourd’hui doit s’assigner l’objectif de renforcer ce lien qui confère toute sa légitimité à l’action militaire.

Il s’agit donc d’abord d’encourager l’investissement de la société civile dans la défense nationale : tel est le rôle des réserves opérationnelles et citoyennes.

Aussi, monsieur le ministre, quels efforts seront consentis, dans le contexte économique difficile que nous connaissons, non seulement pour recruter de nouveaux volontaires issus de la société civile, mais aussi pour assurer la fidélisation de nos réservistes ?

Par ailleurs, l’inscription de l’armée dans la nation est indissociable du souvenir et de la commémoration de ceux qui ont combattu et sont morts pour la patrie. L’année 2014 verra ainsi coexister deux commémorations majeures : d’une part, le centenaire du début de la Première guerre mondiale, hommage aux hommes et aux femmes qui ont lutté pour la défense de la France ; d’autre part, la célébration du soixante-dixième anniversaire de la Résistance, des débarquements en Normandie et de la libération du territoire nationale. La presse s’est faite l’écho, monsieur le ministre, d’un projet, visiblement abouti, de constitution d’une seule et même mission interministérielle, chargée d’animer et de coordonner le programme commémoratif de ces deux anniversaires.

Ne craignez-vous pas un risque de confusion, voire de brouillage des enjeux respectifs de ces deux conflits ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, vous me donnez l’occasion d’éclairer la représentation nationale sur ces deux missions.

Je reviendrai d’abord sur la Journée Défense et Citoyenneté, dont la disparition était programmée. Il a donc fallu maintenir 20 millions d’euros pour son fonctionnement, et 102 millions d’euros si l’on considère son budget global.

Nous réfléchissons à l’idée de doubler, à terme, cette journée ou d’associer les jeunes, au-delà de la JDC, à une participation avec la réserve. La question de la réserve est un des objets du débat qui se tient dans la perspective du Livre blanc ; 70 millions d’euros étaient prévus pour 2013. Ce budget sera maintenu, et nous verrons ce qu’il découlera du Livre blanc. Mais je pense que la réserve peut jouer un rôle particulier et faire en sorte que les jeunes, dans le cadre de la JDC, aient un lien avec les réservistes, dans le courant de l’année. Le lien armée-Nation serait ainsi renforcé.

M. Gérard Bapt. Très bonne chose !

M. Kader Arif, ministre délégué. S’agissant de la mission interministérielle, celle-ci regroupe neuf ministères, et a pour objectif de préparer le Centenaire de la Grande guerre et le soixante-dixième anniversaire des années 1940.

C’est une mission interministérielle commune. Mais pour le Centenaire, un groupement d’intérêt public a été constitué, regroupant dix-sept personnes ; il comporte notamment un comité d’éthique, un comité Histoire, etc. Le général Irastorza, que je rencontrerai du reste ce soir pour préparer le conseil d’administration qui se tiendra le 6 novembre, préside le conseil d’administration de la Mission du Centenaire de la Première guerre mondiale ; Joseph Zimet en est le directeur général.

La direction de la mémoire et du patrimoine aura, elle, à gérer le soixante-dixième anniversaire des années 1940. Les deux équipes seront donc totalement distinctes.

M. le président. La parole est à M. Richard Ferrand.

M. Richard Ferrand. Dans le droit-fil de la question précédente, je souhaiterais connaître le rythme des travaux de la mission interministérielle que vous présidez. Il semblerait que certains retards aient été pris dans la conception et la préparation des événements marquants pour le futur cycle commémoratif de 2014 – événements marquants dont l’évocation pédagogique et mémorielle sont de première importance.

C’est pourquoi je vous saurais gré de nous préciser de quelle manière vous pensez pouvoir rattraper le retard pris pendant la précédente législature.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Le décret, signé par l’ensemble des ministres, est en cours de publication. C’est l’affaire de quelques jours, et cela n’interdit pas au GIP de se réunir sans attendre. Quoi qu’il en soit, le retard sera vite rattrapé.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Imbert.

Mme Françoise Imbert. Deux minutes, mes chers collègues, pour poser une question, c’est un peu court ! Cependant, cela me permet tout de même de saluer le travail d’un gouvernement qui a créé un ministère dédié aux Anciens combattants avec un ministre délégué auprès du ministre de la défense, M. Kader Arif. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Régis Juanico. Vous êtes intolérants !

M. Jean-Frédéric Poisson. Parole d’expert !

M. François Rochebloine. Rappelez-vous votre attitude l’année dernière !

M. le président. Nous écoutons Mme Imbert, qui va sans doute poser une question. (Sourires.)

Mme Françoise Imbert. En dépit de la situation économique difficile que connaît notre pays et son impact indéniable sur les finances publiques, le budget 2013 de la Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » préserve, renforce et consolide les droits du monde combattant.

Il est cependant une demande du monde combattant qui ne figure pas dans ce projet de loi de finances pour 2013 : l’attribution de la carte du combattant aux anciens combattants de la guerre d’Algérie, qui ont comptabilisé au moins quatre mois de présence, mais, pour certains, au-delà de la date du 2 juillet 1962 ; vous venez d’en parler, monsieur le ministre.

M. Jean-Luc Reitzer. J’avais déposé une proposition de loi sur ce sujet !

Mme Françoise Imbert. C’est une demande ancienne des anciens combattants de cette guerre. Je la soutiens parce qu’elle me semble légitime, même si je ne méconnais pas le coût d’une telle mesure. Je sais également, monsieur le ministre, que toutes les demandes ne peuvent pas être traitées en une seule année : il y a tant à faire encore pour nos anciens combattants.

Pouvez-vous cependant nous assurer que cette question sera traitée le plus rapidement possible dans le quinquennat et dans le sens souhaité par les anciens combattants de la guerre d’Algérie ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Il me semble avoir abordé la question de la carte dite « à cheval » dans mon intervention. Cela peut concerner 8 000 personnes pour un coût d’environ 5,5 millions d’euros. J’ai rappelé qu’il était impossible de la voir intégrer au budget 2013. Nous réexaminerons la question dans les années à venir, car il s’agit d’une revendication importante des différentes associations d’anciens combattants ainsi que des parlementaires.

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

La parole est à M. Philippe Vitel.

M. Philippe Vitel. Monsieur le ministre, j’ai bien compris que vous n’avez plus d’argent à distribuer. À défaut, je vais vous demander un peu de reconnaissance. (Sourires.)

M. Gérard Bapt. Ce n’est pas comme à Toulon !

M. le président. Seul M. Vitel a la parole.

M. Philippe Vitel. Les troupes ayant stationné en Allemagne au sein du deuxième corps d’armée après le 8 mai 1945 n’entrent pas dans le cadre des conflits armés majeurs ouvrant droit au titre de reconnaissance de la nation.

Les membres de ces forces ont pourtant eu leur lot de blessés et de morts. Les journalistes ont baptisé cette période « guerre froide » ; ce n’est qu’une expression imagée, mais c’est celle que l’histoire retiendra.

Cette guerre s’est terminée par la chute du Mur de Berlin le 9 octobre 1989. Les forces françaises en Allemagne avec un effectif de l’ordre de 80 000 hommes étaient la composante terrestre française de la force de dissuasion occidentale face aux forces du Pacte de Varsovie. Dès 1998, les États-Unis ont décerné un titre de reconnaissance à tous les acteurs américains de cette période. Ce titre américain – cold war recognition certificate – est même reconnu aux Français ayant travaillé avec eux. Ce dernier point soulève quelques mécontentements d’ailleurs car les Français trouvent un peu humiliant que le gouvernement des États-Unis reconnaisse une action passée alors que le Gouvernement français l’ignore.

Satisfaction serait donnée à tous les acteurs de cette guerre froide si une marque de reconnaissance spécifique leur était attribuée. Point n’est besoin que celle-ci s’accompagne de l’ouverture de droits comme pour le titre de reconnaissance de la nation : il s’agirait seulement de valoriser un passé tout comme la médaille de Sainte-Hélène, attribuée en 1857, a valorisé avec retard l’engagement des soldats de Napoléon 1er.

J’ai déposé une question écrite à ce sujet le 28 août 2012. Dans votre réponse du 9 octobre 2012, monsieur le ministre, vous m’informez de la possibilité que leur soit attribuée la médaille de la défense nationale avec agrafe « Forces françaises stationnées en Allemagne ». Toutefois, cet octroi, qui ne constitue pas en soi une reconnaissance spécifique, ne concernerait que les personnels ayant servi dans les FFA à partir du 1er septembre 1981, comme le stipule le décret n° 82-358 du 21 avril 1982 portant création de la médaille de la défense nationale.

Monsieur le ministre, pouvez-vous modifier ce décret afin de corriger cette terrible discrimination envers ceux qui ont résidé en Allemagne entre 8 mai 1945 et le 31 août 1981 et qui sont exclus du décret de 1982, à défaut bien sûr de mettre en place comme l’ont fait nos amis américains un titre de reconnaissance spécifique ?

M. Didier Quentin et M. Jean-Luc Reitzer. Très bonne question !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, je suis sensible à votre question, à plusieurs titres.

Sachez tout d’abord que je suis prêt à étudier cette demande de modification car il me semble important qu’il y ait une reconnaissance symbolique forte, à l’instar de celle qui est accordée dans d’autres pays.

En même temps, j’ai envie d’aller encore plus loin – et cela répondra sans doute à d’autres questions. Au-delà du cas des militaires que vous avez évoqués, je pense qu’un pays comme le nôtre manque de médailles spécifiques, marquant un moment fort dans le lien entre l’armée et la nation.

M. Philippe Vitel. En effet !

M. Kader Arif, ministre délégué. Échappant à l’ordonnancement établi par la Grande chancellerie, elles nous permettraient de reconnaître et de récompenser les activités de femmes et d’hommes qui se sont engagés à divers titres au service de notre nation, ce que nous ne pouvons pas faire en l’état actuel des choses.

J’aimerais donc être soutenu dans cette démarche, qui fait partie du combat que nous menons pour les anciens combattants et tous ceux qui ont servi notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Luc Reitzer. Nous vous soutiendrons !

M. Philippe Vitel. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Christophe Guilloteau.

M. Christophe Guilloteau. Monsieur le ministre, j’aurai une remarque, une interrogation et deux petites questions.

Tout d’abord, pardonnez-moi de revenir sur le 19 mars, mais je ne suis pas sûr que la méthode utilisée soit la bonne. Le Parlement se serait honoré de faire revenir ce texte devant l’Assemblée nationale.

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense. Il a déjà été voté !

M. Christophe Guilloteau. Certes, il a déjà été voté, mais il y a trois législatures déjà et nous aurions pu débattre du fond, sachant qu’entre-temps le décret portant sur le 5 décembre a été publié et que la loi sur le 11 novembre a été votée. Je m’étonne au passage que les commémorations ne soient pas célébrées avec plus d’ampleur cette année, car c’est la première fois que nous vivons un 11 novembre dans ce nouveau cadre législatif.

Ensuite, j’aimerais revenir sur la différence de prestations versées aux veuves selon que leur époux est mort avant ou après 1962.

Enfin, je souhaiterais que vous m’apportiez des précisions sur la demi-part supplémentaire. Ce matin, au téléphone, un ancien combattant du Rhône membre de la FNACA, qui a beaucoup œuvré pour l’ONAC, m’expliquait que, selon une rumeur persistante, elle serait supprimée. Certains pourraient la considérer comme une niche fiscale ; pour notre part, nous y voyons la juste reconnaissance d’un engagement passé. Votre réponse est attendue par de nombreux anciens combattants.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. S’agissant des commémorations du 11 novembre, je peux vous dire qu’elles seront à la hauteur de ce que représente cette grande date dans notre histoire commune. Vous n’ignorez pas que l’ensemble des associations combattantes récuse l’idée d’un Memorial Day à l’anglo-saxonne.

M. Marc Laffineur. Cela n’a jamais été l’idée !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je ne fais aucun procès d’intention.

Sachez que dans le cadre de ce 11 novembre, j’ai tenu à convier aux cérémonies de l’Arc de Triomphe l’équipe de rugby d’Australie, qui jouera la veille au stade de France contre l’équipe de France. Cela peut paraître anecdotique, mais pour moi, c’est un marqueur symbolique du lien qui unit nos deux pays. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Quant à la demi-part, sa suppression n’est pas envisagée. Le débat portait sur la possibilité de l’accorder à partir de soixante-dix ans au lieu de soixante-quinze ans comme c’est le cas actuellement. J’ai déjà dit qu’une telle modification n’était ni souhaitable ni possible. Il s’agirait d’une autre niche fiscale. Mais, je le répète, la demi-part, aujourd’hui accordée à partir de soixante-quinze ans, ne sera pas remise en cause.

Quant à votre question concernant les veuves, je l’examinerai et vous répondrai par écrit.

M. Christophe Guilloteau. La différence de prestations est minime !

M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.

M. Didier Quentin. Monsieur le ministre, j’aimerais vous interroger au sujet de deux mesures attendues depuis longtemps par le monde combattant et par les orphelins de guerre.

Tout d’abord, j’aimerais revenir sur une question que vous avez déjà abordée dans votre propos liminaire et dans votre réponse à l’une de nos collègues. L’UMP, comme tous les groupes, souhaite que la législation soit modifiée afin de permettre aux militaires qui ont servi quatre mois en Algérie d’obtenir la carte du combattant, sous réserve, bien sûr, d’y avoir été présents avant le 2 juillet 1962. Au regard de l’insécurité qui régnait au cours de cette période, il serait légitime de leur ouvrir le droit d’obtenir cette carte. Vous avez déjà répondu sur ce point, monsieur le ministre, mais j’aimerais vous entendre prendre un engagement encore plus ferme que celui que vous avez formulé il y a quelques minutes.

Deuxièmement, s’agissant des orphelins de guerre, deux décrets, nos 2000-657 et 2004-751, ont institué une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et raciales ou d’actes de barbarie durant la seconde guerre mondiale. Ces deux décrets ont été pris pour répondre à des situations jugées particulièrement dramatiques. Une décennie plus tard ou presque, cette reconnaissance, bien que fondée, est vécue comme injuste et partielle par les familles des morts pour la France. Parmi eux, environ une soixantaine de milliers de pupilles de la nation, orphelins de guerre ou du devoir, arrivent aujourd’hui à l’âge de la dépendance et de la fragilité. Toutes et tous sont exclus de ce système de reconnaissance morale et d’indemnisation financière, ce qu’ils jugent discriminatoire. Sans méconnaître les contraintes budgétaires qui pèsent sur nos finances publiques, e temps semble venu d’apporter une réponse concrète à cette légitime revendication. C’est pourquoi je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de m’indiquer les mesures que vous entendez prendre pour engager une uniformisation de ces décrets pour tous les orphelins de guerre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Luc Reitzer. Très bonne question !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. J’aimerais rappeler, monsieur le député, que l’indemnisation ouverte par le décret de 2000 au bénéfice des orphelins de parents juifs morts en déportation représente un coût de 61 millions d’euros chaque année. L’indemnisation créée par le décret de 2004 pour les orphelins de résistants morts en déportation représente quant à elle un coût de 54 millions d’euros chaque année. Aujourd’hui, tout orphelin de guerre touche jusqu’à ses vingt et un ans une pension spécifique qui vient s’ajouter à la pension de veuve versée à sa mère. J’ajoute que pour les bénéficiaires des décrets de 2000 et 2004, le choix était donné entre le versement d’une pension à vie et le versement d’une indemnité forfaitaire d’un montant de 27 400 euros.

L’extension du dispositif à l’ensemble des orphelins de guerre, qui a suscité diverses prises de position, je le sais, représenterait un coût total de 2 milliards d’euros environ. Vous comprendrez qu’il est impossible de dégager une telle somme, crise ou pas, pour dire les choses très clairement.

Je suis donc favorable au maintien de la logique qui a prévalu pour ces deux décrets : une indemnisation particulière pour les victimes de l’extrême barbarie nazie et de la déportation, qui renvoient à une douleur tout à fait spécifique, même si je ne nie pas les autres souffrances. Aucune modification n’est donc à l’ordre du jour.

M. Jean-Luc Reitzer. C’est bien dommage !

M. le président. Nous en venons aux questions du groupe Union des démocrates et indépendants.

La parole est à M. Francis Hillmeyer.

M. Francis Hillmeyer. Monsieur le ministre, vous avez évoqué la prise en compte de la période allant du 2 juillet 1962 au 1er juillet 1964 pour l’attribution du titre de reconnaissance de la nation et de la carte du combattant. De nombreux soldats ont débarqué sur le sol d’Algérie entre le 6 mars et le 19 mars 1962 et plus de cinq cents sont morts entre juillet 1962 et juillet 1964. Il est donc indispensable aujourd’hui d’attribuer la carte du combattant aux militaires ayant séjourné cent vingt jours en Algérie pendant une période située à cheval sur la date du 2 juillet 1962. Vous avez la volonté de régler ce problème. Mais dans quels délais ?

Selon les mêmes critères, qu’en est-il de l’attribution de la carte du combattant en OPEX pour cent vingt jours de présence ?

Je veux aussi rappeler l’octroi de la reconnaissance de la nation à tous les réfractaires au STO, le service de travail obligatoire créé par les Allemands durant la seconde guerre mondiale. Les Alsaciens et les Mosellans ont été particulièrement touchés tout comme les incorporés de force concernés par les délimitations de la ligne dite Curzon. Vous avez fait part au Sénat de votre volonté de régler ce problème. Qu’en est-il ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, j’ai déjà répondu à propos de l’attribution de la carte du combattant pour la période que vous évoquez, sur son coût et sur le nombre des bénéficiaires éventuels, prenant en compte les demandes des associations. J’ai déjà dit mon souhait de voir la question réglée pour le budget prochain. Je crois avoir été clair sur cette question.

En ce qui concerne les OPEX, le décret du 28 juin 2012 a modifié la liste des opérations extérieures ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant : sont concernées les opérations d’Afghanistan, de Côte d’Ivoire, de l’ex-Yougoslavie, du Liban, d’Israël et certaines missions menées dans le cadre de l’ONU. L’objectif est de passer de 25 % à 50 % de cartes de combattants supplémentaires. Nous avons enregistré à ce jour 3 000 demandes, qui seront prises en compte.

S’agissant de la ligne Curzon, j’ai interrogé la direction des affaires juridiques du ministère pour savoir si la modification envisagée relevait d’un décret ou d’une loi. Il m’a été répondu il y a deux jours qu’un décret devrait suffire. Après concertation avec mes services, j’élaborerai donc un décret pour faire en sorte que l’engagement que j’avais pris en la matière soit respecté avant la fin de l’année.

M. Jean-Luc Reitzer. Voilà une bonne chose !

M. Francis Hillmeyer. Et pour le STO ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Je vous apporterai des précisions par écrit.

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec.

M. Yannick Favennec. Monsieur le ministre, il me semble légitime de poursuivre l’effort de solidarité nationale entamé lors de la précédente législature sous l’impulsion de l’ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, en ce qui concerne l’augmentation de la retraite du combattant. C’est pourquoi je soutiens pleinement l’amendement de mon collègue François Rochebloine qui prévoit son augmentation d’un point.

Par ailleurs, comme le propose l’amendement du porte-parole du groupe UDI, un élargissement des conditions d’attribution de la carte du combattant aux militaires des armées françaises, justifiant de quatre mois de présence en Algérie, dont le séjour aurait commencé avant le 2 juillet 1962 et se serait prolongé après cette date permettrait de répondre à une revendication justifiée.

La revalorisation du plafond de la rente mutualiste du combattant représente également une forte attente et, sur ce point aussi, je soutiens l’amendement de François Rochebloine qui propose de la majorer d’un point en la portant à 126 points.

En dernier lieu, monsieur le ministre, m’étant beaucoup impliqué lors de la discussion parlementaire du texte sur l’indemnisation des conséquences sanitaires des essais nucléaires, je souhaite appeler votre attention sur les problèmes que rencontrent les personnes ayant déposé un dossier. Il apparaît que l’application de la loi aboutit à une absence d’indemnisation. Le texte avait créé une présomption de causalité entre le développement d’une maladie inscrite sur la liste et la présence dans une région où des essais nucléaires avaient eu lieu ; or il est très difficile d’apporter la preuve de sa présence lors d’un tel essai. Ne faudrait-il pas prendre une initiative pour faire évoluer ce mécanisme ?

Pouvez-vous m’indiquer votre position sur ces différents sujets ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Je souhaiterais, concernant la retraite du combattant, rappeler un chiffre : un point d’augmentation de cette retraite représente deux millions d’euros.

J’ai déjà indiqué, sans vouloir polémiquer, que l’augmentation de 44 à 48 points n’avait été budgétée que pour six mois en 2012, et qu’il fallait encore trouver 54 millions pour l’année 2013 – ce que nous avons fait.

Je trouve tout à fait normal d’augmenter la retraite du combattant chaque fois que cela est possible. Néanmoins, j’assume les propos que j’ai tenus tout à l’heure : nous ne prévoirons aucune augmentation en 2013 tant que nous n’aurons pas stabilisé le budget et fait en sorte que ces 54 millions d’euros soient financés chaque année.

Par ailleurs, la retraite mutualiste représente un coût de 263 millions d’euros pour 2013 et une perte de recettes fiscales de 30 millions, soit un total de 293 millions. Aujourd’hui, 410 000 personnes en bénéficient, dont 14 % seulement atteignent le plafond de 1 733,75 euros. En conséquence, l’augmentation de ce plafond ne concernerait que très peu de monde, et favoriserait en outre des personnes, non pas riches – je n’emploierai pas ce mot –, mais qui du moins disposent de revenus suffisamment élevés pour atteindre le plafond de la retraite mutualiste. L’effort doit donc porter sur le plan social, plutôt que sur une niche fiscale.

Enfin, l’indemnisation des victimes des essais nucléaires a évolué grâce à l’élargissement des territoires et de la population concernés. Toutefois, ce dispositif n’est à l’évidence pas efficace : sur 720 demandes, seules quatre ont abouti, avec une indemnisation moyenne de 65 000 euros. Nous maintenons donc la provision de 10 millions d’euros pour l’indemnisation, mais si le rapport déjà cité conclut que cette procédure n’est pas efficace, il faudra alors la réexaminer dans son ensemble afin que nous puissions répondre aux demandes qui nous sont faites.

M. le président. Nous revenons aux questions du groupe socialiste, républicain et citoyen.

La parole est à M. Kléber Mesquida.

M. Kléber Mesquida. Dans la situation budgétaire très contrainte due aux déficits abyssaux légués par l’ancienne majorité…

Plusieurs députés du groupe UMP. Évidemment !

M. Kléber Mesquida. …et contrairement à ce qui a été dit pendant la discussion générale par nos collègues de ladite ancienne majorité, le budget présenté aujourd’hui permet la consolidation des droits des anciens combattants et s’inscrit dans la mémoire et le respect.

Ce budget marque notre attachement à la reconnaissance de la nation envers le monde combattant, et démontre en outre une réelle reconnaissance de la France à l’endroit de celles et de ceux qui, par sens du devoir, ont toujours répondu à l’appel de la nation.

C’est pourquoi, dans le peu de temps qui nous est imparti, je souhaite réitérer la question relative à l’attribution de la carte du combattant aux anciens combattants au-delà du 1er juillet 1962. Certes, cette mesure ne figure pas dans le projet de loi de finances pour 2013, mais me semble suffisamment importante pour vous demander à nouveau si vous prévoyez de l’intégrer dans le budget pour 2014.

Je connais votre souci de répondre au mieux à cette requête émanant d’une partie du monde combattant, tout comme votre souhait de faire évoluer ce dispositif dans un sens aussi favorable que possible.

Bien que les contraintes inhérentes à la situation économique actuelle invitent à beaucoup de précautions, pensez-vous pouvoir aborder cette question dans les prochains mois ? Vous permettriez ainsi à une partie du monde combattant de se reconnaître, après toutes ces années, dans une véritable politique fondée sur le lien entre les Français et leur mémoire et la solidarité de notre pays envers toutes les générations d’anciens combattants.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Je répondrai une nouvelle fois de manière précise.

Sur le principe, je vous ai déjà indiqué que j’étais très sensible à cette question et qu’il fallait avancer dans ce sens.

Cela étant, vous connaissez les données du problème : nous souhaitons toucher le maximum de bénéficiaires, sans intervenir en catimini. En effet, il est toujours possible de jouer sur les dates pour réduire la portée de cette décision ; mais telle n’est pas ma volonté.

La question qui nous est posée aujourd’hui, et à laquelle nous nous attelons, est de trouver 5,5 millions dès le prochain budget. Nous allons chercher le moyen de les trouver, en examinant et en rationalisant divers aspects. La volonté politique est là !

M. le président. La parole est à M. Philip Cordery.

M. Philip Cordery. Ma question porte sur le lien des jeunes Français vivant hors de France avec la Journée Défense et Citoyenneté.

La Journée Défense et Citoyenneté constitue pour ces jeunes, comme ceux vivant en métropole, un moment privilégié qui leur offre l’opportunité de s’informer sur leurs droits et leurs devoirs de Français. Elle constitue un véritable vecteur de citoyenneté.

Elle permet également à l’État de répondre aux questions que ces jeunes peuvent se poser sur la France et à leurs besoins, et parfois même de détecter des situations difficiles, car les jeunes vivant à l’étranger sont issus de milieux très différents et connaissent des situations très diverses.

Cette Journée est aussi un moyen de faire vivre la communauté française à l’étranger et d’assurer la mixité sociale, en leur donnant la possibilité de se retrouver tous ensemble autour de sujets concernant notre pays. Pour certains d’entre eux, elle représente même un premier contact avec la France. Elle est donc essentielle pour faire vivre la France hors de ses frontières.

Favoriser l’interaction lors de cette Journée, comme l’ont proposé des associations d’anciens combattants, me semble être une piste intéressante. Je souhaite à cette occasion rendre hommage aux anciens combattants vivant hors de nos frontières, et saluer la forte implication du Gouvernement envers eux ainsi que sa volonté de prendre en considération leur situation géographique particulière, afin d’améliorer l’effectivité de leurs droits à l’étranger.

Ma question concerne plus particulièrement les jeunes vivant hors de France, qui participent beaucoup moins aux Journées Défense et Citoyenneté que les jeunes vivant en France : sur 25 000 jeunes recensés à l’étranger en âge de participer à cette Journée, seuls 10 000 le font effectivement. Comparé aux 97 % de participation des jeunes vivant en France, ce taux est donc très faible. Comment expliquez-vous cette différence de participation, et quelles mesures envisagez-vous pour y remédier ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. La Journée Défense et Citoyenneté est organisée hors du territoire national avec l’aide du ministère des affaires étrangères.

Pour ma part, je considère que le taux de participation, qui s’établit à 44 %, est satisfaisant compte tenu des difficultés d’organisation de cette Journée hors du territoire national. Il démontre en effet l’intérêt que ces jeunes vivant à l’étranger portent à ce premier lien avec la nation.

Je me propose aujourd’hui d’engager un travail en commun avec le ministère des affaires étrangères, visant à améliorer dans l’année qui vient l’information et les conditions de participation d’un plus grand nombre de nos jeunes. Nous mènerons également ce travail avec les parlementaires représentant les Français de l’étranger ; vous serez naturellement consulté concernant votre circonscription.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. Je tiens en premier lieu à souligner l’intérêt que ce débat revêt à mes yeux, au-delà de son seul aspect budgétaire.

En effet, réunie dans l’hémicycle au travers de sa représentation nationale, la République rend hommage à ceux qui se sont battus, parfois durement, jusqu’à y laisser leur vie, pour nous léguer les valeurs de tolérance et de fraternité qui nous guident encore aujourd’hui.

À travers ce budget, notre devoir consiste à donner du sens à la dimension sociale du lien entre la nation et son armée. À ce titre, je salue le maintien des principaux crédits alloués à la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation, et tout particulièrement la hausse de 4 points de l’indice de la retraite du combattant, laquelle avait déjà été amorcée au 1er juillet dernier. Nous portons ainsi cette mesure à 54 millions d’euros supplémentaires en année pleine, effort d’autant plus méritoire qu’il intervient dans un contexte budgétaire très difficile.

Cela démontre que nous attachons une grande importance à ce qui fait notre histoire commune ainsi qu’à ceux qui l’ont façonnée. Il nous revient de perpétuer cette histoire, notamment auprès des nouvelles générations. À ce sujet, je salue la très sensible augmentation, pour 2013 et les trois années suivantes, des crédits alloués à la préparation des commémorations, notamment celle du centenaire de la Grande Guerre.

Pouvez-vous, concernant la nécessaire sensibilisation de notre jeunesse à la citoyenneté, et conformément à l’engagement du Président de la République, préciser les objectifs de la Journée Défense et Citoyenneté ainsi que les moyens budgétaires qui lui sont consacrés ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Il était initialement prévu de supprimer cette Journée Défense et Citoyenneté. Le premier combat à mener a donc été de conserver cette Journée au sein de la Défense, en maintenant un budget global de 102 millions d’euros, dont 20 millions d’euros en fonctionnement.

Regrettant encore, pour ma part, la suppression du service militaire, véritable creuset pour notre pays, je souhaite faire de cette Journée Défense et Citoyenneté un moment fort de ce creuset républicain, afin de lutter contre le délitement, que l’on sent poindre, des valeurs de la République.

Des améliorations sont nécessaires ; des propositions parlementaires ont été faites, dans le domaine de la santé publique notamment. Il serait également envisageable de renforcer le lien avec le milieu de la défense au travers de la réserve. Cette première étape pourrait précéder la création d’un service public mixte et obligatoire, facteur de citoyenneté indispensable pour nos jeunes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. Nous revenons aux questions du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

La parole est à M. Charles de La Verpillière.

M. Charles de La Verpillière. Le budget pour 2013 des anciens combattants, le premier préparé par le nouveau gouvernement, est décevant.

Il ne s’agit pas d’une consolidation, monsieur le ministre, mais bel et bien d’une régression. En effet, les crédits affectés au programme 169 Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant baissent de 3,76 % par rapport à 2012. De ce fait, aucune mesure nouvelle, et singulièrement aucune revalorisation de la retraite du combattant, ne sera possible en 2013.

Cela signifie donc l’arrêt brutal de l’effort de revalorisation poursuivi par la précédente majorité. Je rappelle que, de 2007 à 2012, sous le gouvernement de François Fillon, l’indice de la retraite du combattant a été porté de 37 à 48 points, son montant passant ainsi de 488,03 euros à 609,40 euros.

Monsieur le ministre, les anciens combattants ne réclament pas l’aumône, mais tout simplement de la considération et la juste reconnaissance par notre pays des sacrifices qu’ils ont consentis.

L’effort doit donc se poursuivre ; c’est pourquoi, avec mes collègues députés de l’UMP, nous défendrons un amendement ayant pour objet d’augmenter de deux points l’indice de la retraite du combattant. En l’adoptant, nous enverrons un signal fort au monde combattant.

Les anciens combattants, et particulièrement ceux d’Algérie, ont de la mémoire : ils n’ont pas oublié que c’est le gouvernement socialiste de M. Guy Mollet qui, en 1956, a envoyé leur génération en Algérie.

Pouvez-vous leur éviter ce soir de devoir constater qu’à nouveau c’est un gouvernement socialiste, nommé par M. Hollande, qui leur marchande la reconnaissance de la Nation ?

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense. C’est faux !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, il est toujours facile de commander la tournée et de ne pas la payer ! (Sourires.) Mes prédécesseurs ont commandé la tournée, et c’est très bien, mais c’est maintenant à nous de la payer.

M. Charles de La Verpillière. Cela avait été budgété !

M. Kader Arif, ministre délégué. Nous avons dû trouver 54 millions d’euros pour 2013. Nous faisons en sorte que l’engagement qui a été pris soit tenu pour ne pas décevoir les associations d’anciens combattants qui attendent cette augmentation, et qui ne savaient pas qu’elle n’était pas budgétée pour 2013.

M. Jean-Frédéric Poisson. Ce n’est pas vrai !

M. Kader Arif, ministre délégué. Cet engagement, c’est pour eux que nous le tiendrons, pas pour vous !

Ensuite, chaque fois que nous le pourrons, nous essaierons de procéder à des augmentations.

M. le président. La parole est à M. Olivier Audibert-Troin.

M. Olivier Audibert-Troin. Monsieur le ministre délégué, bis repetita placent !

Une proportion de plus en plus importante de la représentation parlementaire n’a jamais connu un conflit armé, et c’est heureux. C’est mon cas. Nous le devons à ceux qui ont accompli le sacrifice suprême : donner leur vie pour que nous puissions vivre en paix.

Notre génération a donc une dette envers nos anciens combattants. La nation ne doit pas oublier et la représentation nationale doit être un aiguillon afin que les générations futures n’oublient pas.

Malheureusement, ce budget est en rupture avec les exercices précédents. Avec une baisse annoncée de 2,4 %, en fait 4,4 % à budget constant, le rattrapage indispensable, je devrais dire humainement et socialement obligatoire, de la retraite du combattant se voit donc stoppé.

Je veux rappeler, après Charles de la Verpillière, que sous la mandature précédente, la retraite du combattant avait augmenté de près de 30 %, pour être portée à 48 points d’indice au 1er juillet 2012. Cette revalorisation ne doit pas être analysée uniquement à l’aune de critères économiques et sociaux. Elle est aussi un symbole concret de la reconnaissance de la nation envers nos anciens combattants.

Voilà pourquoi, monsieur le ministre délégué, je me permets de vous demander si vous entendez poursuivre cet effort de revalorisation de la retraite du combattant en la relevant de deux points d’indice supplémentaires au 1er juillet 2013, si vous entendez revaloriser la rente mutualiste actuellement gelée à l’indice 125, et si vous entendez nous suivre en analysant avec bienveillance les amendements qui seront examinés sur ce point pour porter l’aide différentielle du conjoint survivant à 964 euros, correspondant au seuil de pauvreté.

Vous me répondrez certainement par l’obligation de maîtriser nos dépenses publiques dans un environnement contraint. Nous vous objecterons que vous avez fixé un certain nombre de priorités, notamment que vous avez supprimé la franchise de 30 euros imposée aux sans-papiers bénéficiaires de l’aide médicale d’État. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Pour nous, la priorité va vers ceux qui ont risqué leur vie pour leur pays afin que nous puissions vivre en paix. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. C’est du populisme !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Je disais tout à l’heure que j’aime bien les débats apaisés et que j’essaie de ne pas être caricatural dans mes propos. Contrairement à vous, je ne fonctionne pas dans une logique de confrontation des Français les uns contre les autres.

M. Olivier Audibert-Troin. On n’a jamais dit ça !

M. Kader Arif, ministre délégué. Si, puisque vous dites aux anciens combattants qu’ils ne verront pas leur retraite augmenter parce qu’on aide les étrangers. Voilà qui n’honore pas une expression parlementaire. Mais je m’en tiendrai là, pour ne pas polémiquer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Quand on fait l’addition des propositions que vous faites, on aboutit à 40 millions d’euros. Augmenter chaque année d’un point la retraite du combattant chaque année représente 16 millions d’euros.

La meilleure des communications étant la répétition, je vous redis donc que le gouvernement précédent n’avait pas budgété la hausse de quatre points de la retraite du combattant et que nous avons dû dégager 54 millions d’euros pour 2013 ; que le budget de l’aide sociale de l’ONAC sera augmenté de 500 000 euros, de manière cumulative, pendant trois ans, ce qui représentera 3 millions d’euros supplémentaires au total ; que nous ne répondons pas à la demande de relèvement du plafond de la rente mutualiste car c’est une niche fiscale et qu’il y a d’autres priorités ; enfin que nous maintenons la journée défense et citoyenneté, qui est une priorité, malgré un budget qui n’était pas au rendez-vous. Voilà des réponses qui, dans la période contrainte que nous vivons, vont dans le bon sens.

Parce qu’il faut toujours regarder vers l’avenir, parce que nous avons le même souci que vous de la reconnaissance de nos anciens, nous augmenterons la retraite du combattant quand nous en aurons la possibilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Damien Meslot.

M. Damien Meslot. Monsieur le ministre délégué, ma première question porte sur l’attribution de la carte de combattant.

La loi fixant au 11 novembre de chaque année la commémoration des morts pour la France rassemble dans un même hommage tous les morts pour la France, quelles que soient la localisation du conflit ou la génération du feu concernée. Cependant, force est de constater que les textes législatifs ne permettent pas un traitement égalitaire entre les différentes générations du feu. Ainsi, les anciens combattants de l’armée française ayant au moins quatre mois de présence en Algérie entre le 1er juillet 1962 et le 1er juillet 1964 ne peuvent prétendre à la carte d’ancien combattant. Or un risque d’ordre militaire a existé en Algérie jusqu’au 1er juillet 1964. En témoigne la délivrance du titre de reconnaissance de la nation aux anciens combattants en Algérie jusqu’à cette date.

Je ne peux oublier nos cinq cents morts pour la France en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964, tragique témoins d’une insécurité permanente et de risques d’ordre militaire, critère retenu pour l’attribution de la carte du combattant.

Pouvez-vous nous confirmer définitivement que cette question sera réglée dès le budget 2014 ?

Ma seconde question porte sur la commémoration du centenaire de la guerre de 1914-1918. La commémoration prévoit de commencer au début de la guerre. Or dans mon département, dans la commune de Joncherey, le caporal Peugeot a été tué lors d’une incursion de l’armée allemande le 2 août 1914, avant même que l’Allemagne ait déclaré la guerre à la France. Je souhaiterais que le centenaire de la mort du caporal Peugeot soit intégré à la commémoration du centenaire de la première guerre mondiale, puisque cet événement est directement lié à la guerre.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, le caporal Peugeot fait partie de notre histoire. Je prends l’engagement que la mémoire de cet homme sera commémorée lors du centenaire de la première guerre mondiale ; nous verrons avec vous comment le faire.

M. Damien Meslot. Je vous remercie.

M. Kader Arif, ministre délégué. S’agissant de votre première question, tout à l’heure j’ai dit qu’il fallait trouver plus de 5 millions d’euros si l’on voulait avoir une vision la plus large possible qui prenne en compte l’ensemble des bénéficiaires potentiels. Nous étudierons cette question, qui fait l’objet de tout un débat ; certains souhaitent même aller jusqu’en 1967.

M. Damien Meslot. Ce n’est pas ce que j’ai demandé.

M. Kader Arif, ministre délégué. Je sais que ce n’est pas votre demande. En tout cas, ma volonté est de pouvoir intégrer cette mesure au budget de 2014. Je ne prends pas l’engagement de la réaliser, mais de l’étudier et de chercher sérieusement comment trouver les 5 millions nécessaires.

M. le président. Nous en revenons aux questions du groupe socialiste, républicain et citoyen.

La parole est à Mme Marie-Lou Marcel.

Mme Marie-Lou Marcel. Monsieur le ministre, je me réjouis de la hausse de quatre points de la retraite du combattant. C’est un signe fort pour le monde combattant.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012 avait été évoquée l’extension du bénéfice de la carte du combattant jusqu’au 1er juillet 1964 pour ceux justifiant de quatre mois de service en Algérie à condition que leur séjour ait commencé avant le 2 juillet 1962. Mais le gouvernement d’alors n’avait pas inscrit au budget les crédits afférant à cette mesure. Cette mesure ne figure pas non plus dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.

Monsieur le ministre délégué, vous avez dit souhaiter répondre au mieux à cette requête et faire évoluer le dispositif. Je vous demande donc si vous pouvez nous confirmer votre engagement sur ce sujet.

Se pose également la question de la campagne double accordée aux fonctionnaires et assimilés. L’article 3 du décret du 29 juillet 2010 précise que seules les pensions liquidées à compter du 19 octobre 1999 pourront être révisées. Pour les associations d’anciens combattants, cette date de référence est drastique puisqu’elle a pour effet d’exclure la quasi-totalité des anciens combattants, ceux-ci ayant obtenu le bénéfice de leur pension avant cette date.

Face à cette situation d’iniquité entre tous les anciens combattants, que comptez-vous faire ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Madame la députée je ne reviendrai pas sur l’attribution de la carte du combattant dite « à cheval » aux militaires qui ont servi en Algérie. Je l’ai dit, 8 000 personnes sont concernées, c’est-à-dire qu’il faudra trouver 5,5 millions d’euros pour le budget 2014. Je ne peux donc pas prendre aujourd’hui d’engagement, sachant que le financement n’est pas assuré. Mais ma volonté politique de le faire si l’on dégage des marges de manœuvre, elle, est au rendez-vous.

Vous évoquez ensuite la campagne double. J’entends le souhait que vous exprimez ainsi qu’un certain nombre d’associations sur cette question. Toutefois, la non rétroactivité des lois est un principe essentiel de notre pays. La loi du 18 octobre 1999 a créé une situation juridique nouvelle avec l’expression « guerre d’Algérie ». Les pensions liquidées avant la loi ne pourront donc pas être révisées.

M. le président. La parole est à M. William Dumas.

M. William Dumas. Monsieur le ministre délégué, le budget relatif aux anciens combattants symbolise avec force notre volonté de réaffirmer la solidarité de la nation à l’égard de ceux qui ont combattu pour la France. Le chapitre V de ce budget, « Une politique de mémoire renouvelée », me permet aujourd’hui d’évoquer la question de la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et du recueillement des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats de Tunisie et du Maroc.

Le travail de mémoire est une nécessité, il est une exigence et une responsabilité pour assurer la cohésion de la nation. Il nous permet de lutter contre l’oubli mais aussi contre la déformation des faits. Nous n’insisterons jamais assez sur le fait que le combat pour la tolérance est d’autant plus fort qu’il s’appuie sur la volonté de celles et ceux qui ont vécu dans leur chair les horreurs de la guerre. Ne pas oublier, se souvenir permet de comprendre et, je l’espère, d’agir différemment.

Le 19 mars 1962, les accords d’Évian annoncèrent le cessez-le-feu de l’un des conflits douloureux qui concerna notre République. La douleur ne provient pas seulement du nombre de morts, mais de ce qu’elle a mis progressivement face à face deux légitimités, deux communautés qui finirent par ne plus pouvoir trouver de raison de vivre ensemble et dont le point final fut d’aboutir à une douloureuse séparation. Rappelons aujourd’hui que 30 000 Français y laissèrent leur vie et que 65 000 militaires de carrière et du contingent furent blessés. N’oublions pas non plus les 4 000 victimes d’attentats terroristes en France et en Algérie ni les 200 000 harkis qui servirent la France. Enfin, n’oublions surtout pas le million de Français d’Algérie contraints de quitter leur terre natale.

M. Régis Juanico. Très bien !

M. William Dumas. Beaucoup de pudeur, de tristesse, de colère parfois entourent cette guerre d’Algérie. Aujourd’hui encore, le débat autour de la date du 19 mars reste un sujet complexe et sensible. Pourtant, le dépassement de certains clivages est nécessaire, tant la question de cette journée nationale est étroitement liée à notre actualité. En effet, les événements dramatiques qui secouent l’Afrique du Nord nous obligent à tout mettre en œuvre collectivement, calmement et progressivement pour apaiser les tensions et cicatriser les plaies encore ouvertes. C’est notre responsabilité à tous. C’est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais que la proposition de loi visant à reconnaître le caractère de journée nationale du souvenir et du recueillement à la journée du 19 mars puisse être inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée et votée.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Il m’a été reproché tout à l’heure une maladresse dans mes propos : la question de la guerre d’Algérie est tellement sensible ! Monsieur le député, sur cette question, il serait malvenu que le Gouvernement s’exprime. Mon souhait, depuis le début, est d’éviter toute ingérence et toute interférence dans le débat parlementaire : il y a une loi qui a été votée ici en 2002 et une proposition de loi en cours d’examen au Sénat. Je m’en remets donc à la sagesse des parlementaires et au débat qu’ils auront au Sénat.

M. le président. La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l’évolution de l’aide différentielle au conjoint survivant.

Il n’est pas juste de dire, comme le font certains de nos collègues de l’opposition, que ce budget ne contient aucune avancée. Ce budget des anciens combattants pour 2013, ce n’est pas seulement la consolidation de l’ensemble des droits existants, ce n’est pas simplement le financement de la revalorisation de la retraite du combattant – 54 millions d’euros à trouver par ce gouvernement –, ce n’est pas simplement la préservation intégrale des dépenses fiscales en faveur des anciens combattants qui, je le rappelle, s’élèvent à plus de 500 millions d’euros : 270 millions pour la demi-part fiscale pour les titulaires de la carte du combattant de plus de soixante-quinze ans et leurs veuves, 200 millions pour l’exonération fiscale de certaines prestations comme la retraite du combattant, et 35 millions pour la retraite mutualiste. Il y a une avancée qui n’a pas été assez soulignée, mais qui a été relevée tout à l’heure par le ministre : c’est l’augmentation des crédits sociaux de l’ONAC, à hauteur de 500 000 euros. C’est une augmentation qui sera cumulative sur trois ans, c’est-à-dire plus de 3 millions d’euros d’augmentation pour l’aide sociale de l’ONAC d’ici à 2015. Cela veut dire que nous allons pouvoir consolider, en particulier, mais pas seulement, l’aide différentielle au conjoint survivant.

Il y a trois façons de le faire. La première consiste à augmenter le plafond de ressources : il était de 550 euros en 2007, il a été relevé à 900 euros l’an dernier. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.) Il y a effectivement la notion de seuil de pauvreté à envisager pour la suite, à hauteur de 964 euros.

Deuxième possibilité : augmenter le nombre de dossiers instruits et recevables. Il y a 5 300 demandes chaque année, 4 670 bénéficiaires : on pourrait examiner un certain nombre de critères de calcul du plafond de ressources, et je pense en particulier à la question de savoir s’il faut intégrer ou non dans ce calcul l’allocation personnalisée d’autonomie.

Et puis il y a une troisième piste, sur laquelle je voudrais insister : c’est l’extension du dispositif aux anciens combattants les plus démunis. L’ONAC a fait une étude en 2011 : cela concernerait très peu de résidents sur le sol français. L’ancien ministre, M. Laffineur, avait évoqué l’an dernier le risque de décristallisation. Il faut aujourd’hui avoir un avis du Conseil d’État pour savoir si ce dispositif relève de l’aide sociale, sous condition de résidence en France, ou bien du droit à réparation. Monsieur le ministre, au nom du Gouvernement, êtes-vous prêt à saisir le Conseil d’État, comme je vous l’ai demandé par courrier récemment et aussi en commission ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, sur votre dernier point la réponse est oui : saisir le Conseil d’État ne pose pas de problème.

Vous me permettrez de revenir sur les chiffres que vous avez évoqués et que je n’avais pas donnés tout à l’heure. Quand je parlais d’augmentation de l’aide différentielle non budgétée, c’est parce que le passage de 834 à 900 euros a été un effet d’annonce, qui fait que le budget de l’ONAC se trouve aujourd’hui en grande difficulté. En réalité, nous aurons non seulement à stabiliser les 900 euros annoncés et non budgétés, mais aussi à examiner le fonds de roulement de l’ONAC qui est aujourd’hui aux limites. Voici donc deux incidences négatives des effets d’annonce ou des effets électoraux. S’engager sur les chiffres, c’est facile ; tenir les engagements, c’est autre chose, surtout quand ce sont les autres qui sont amenés à le faire.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Travert.

M. Stéphane Travert. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, Charles Péguy écrivait : « La mémoire et l’histoire forment un angle droit. L’histoire est la parallèle à l’événement, la mémoire lui est centrale et axiale. » Il n’y a pas d’histoire sans mémoire, pas de mémoire sans vecteurs de transmission aux jeunes générations.

Je me félicite donc de la place centrale réservée à la politique de mémoire au sein de la mission budgétaire que nous examinons aujourd’hui. L’effet du temps, l’oubli, la disparition de grands témoins sont autant de menaces qui pèsent aujourd’hui sur notre capacité à transmettre notre patrimoine mémoriel aux jeunes générations. Il est également de notre devoir d’œuvrer pour la transmission de cet héritage à nos enfants : celui des guerres, mais aussi, surtout, celui de la réconciliation des peuples.

La Normandie, région d’où je viens, fut le théâtre d’opérations qui redonnèrent la liberté à la France. Elle garde encore aujourd’hui les stigmates du sacrifice de celles et de ceux qui ont combattu pour la liberté. Ce patrimoine, nous le partageons : il lie les générations. Des actions éducatives et pédagogiques, dans le but de transmettre aux jeunes générations nos valeurs républicaines et civiques défendues pendant les conflits contemporains, vont être poursuivies et amplifiées. Je tiens ici à rappeler le rôle fondamental joué par nos professeurs pour sensibiliser nos jeunes de tous âges et les amener à s’interroger sur ces périodes charnières de notre histoire.

En effet, la mémoire ne s’impose pas, elle s’incorpore. À ce titre, je ne crois pas que la simple lecture de la lettre d’un jeune résistant fusillé soit de nature à permettre la mise en œuvre d’un réel processus de réflexion sur la Résistance. C’est l’apprentissage, toujours plus approfondi à chaque cycle scolaire, qui permettra à nos jeunes de mieux saisir la portée de ce qui s’est joué par le passé. À l’aube du soixante-dixième anniversaire du Débarquement, pourriez-vous, monsieur le ministre, nous préciser quelles actions vous allez mettre en œuvre pour transmettre notre patrimoine mémoriel aux jeunes générations ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, 7 millions d’euros seront consacrés à notre patrimoine, en ce qui concerne le centenaire de la Grande Guerre et la deuxième guerre mondiale, dont 2 millions pour 2013 au titre des commémorations et 2 millions pour le soixante-dixième anniversaire du Débarquement. Si vous aviez des inquiétudes, j’espère pouvoir vous rassurer.

La direction de la Mémoire et du Patrimoine, l’ONAC et le GIP conduisent une politique active pour répondre à votre souhait, c’est-à-dire pour donner une véritable dimension pédagogique à la politique de mémoire. Ce sont des soutiens aux voyages scolaires sur des lieux de mémoire, ce sont des expositions itinérantes sur la Grande Guerre, la citoyenneté, les rafles, qui sont présentées dans les établissements scolaires, c’est le soutien aux concours scolaires comme le concours de la Résistance ou le concours de l’ONAC.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cela existe déjà.

M. Kader Arif, ministre délégué. Mais la volonté qui est la mienne, c’est d’aller beaucoup plus loin. J’ai appris au contact des femmes et des hommes qui représentent cette histoire deux choses : la dignité, et la volonté que cette mémoire de chair qu’ils représentent ne soit pas seulement traduite en mémoire de pierre. Il faut continuer à pouvoir les utiliser au bon sens du terme, c’est-à-dire que tant que ces personnes sont vivantes, il faut que nous puissions les aider, à travers toutes les initiatives qui sont les leurs, pour faire que cette mémoire de chair perdure et que nous puissions la transmettre aux plus jeunes.

Je crois aussi qu’il faut aller chercher des idées ailleurs. Je ne défends pas le modèle anglo-saxon dans tous les domaines, mais en matière de transmission de la mémoire, je pense que nos amis néo-zélandais, australiens, canadiens, ont des choses à nous apprendre et que, dans le cadre des accords bilatéraux pour la commémoration du centenaire, je vais essayer de me nourrir de ce qu’ils savent faire avec leur jeunesse pour essayer de l’appliquer à notre pays. C’est le débat que j’ai ouvert avec Vincent Peillon dans le cadre de l’Éducation nationale et sur lequel nos deux cabinets travaillent conjointement.

M. le président. Nous en revenons aux questions du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen du budget des anciens combattants est chaque année un moment important du débat parlementaire dans notre Assemblée. J’ai eu l’occasion de rappeler à la fois l’attachement de notre nation à ceux qui l’ont servie et notre volonté de faire prendre conscience aux jeunes générations de l’effort qui a été celui de leurs anciens.

L’hommage rendu par la nation aux anciens combattants doit être à la hauteur des sacrifices consentis. Il nous revient donc de poursuivre le renforcement de leurs droits.

Même si nous ne négligeons pas le contexte économique délicat que traverse notre pays et malgré le maintien de la totalité des acquis votés par le passé, il faut tout de même regretter aujourd’hui la présentation d’un budget manquant d’ambition et indéniablement en baisse de 2,4 %.

La politique volontariste en faveur du monde combattant et de ses idéaux doit être poursuivie. L’augmentation de la retraite du combattant est évidemment son illustration la plus marquante. Or, celle-ci a été valorisée de quatre points le 1er juillet dernier et de quatorze points depuis 2006. C’est pourquoi, comme bon nombre de mes collègues, il me paraît essentiel de poursuivre cette dynamique. J’ai donc déposé un amendement en ce sens, visant une nouvelle revalorisation de deux points de la retraite du combattant l’année prochaine.

Quant à la rente mutualiste, instituée en 1923 au titre des réparations du préjudice financier subi par les anciens combattants, elle lie l’effort d’épargne individuelle à la participation de l’État. Actuellement plafonnée à 125 points d’indice, il semblerait juste de la majorer d’un point chaque année.

Par ailleurs, les anciens des opérations extérieures bénéficient de la carte du combattant depuis 2010. Afin d’élargir ses critères d’attribution, il serait légitime de faire prévaloir une présence consécutive d’au moins quatre mois sur les théâtres d’opération.

Le monde combattant revendique aussi l’augmentation de l’allocation différentielle de solidarité aux veuves d’anciens combattants au seuil de pauvreté. Il est de notre devoir de répondre favorablement. La nation, consciente des sacrifices de ceux qui se sont battus pour sa liberté, attend de ses responsables politiques qu’ils poursuivent leurs efforts en faveur des anciens combattants. Monsieur le ministre, je vous demande donc de bien vouloir répondre favorablement aux revendications légitimes du monde combattant évoquées ici. Je vous en remercie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, je mesure tout l’effort que nous avons à faire et je partage votre volonté, mais il serait injuste de considérer qu’il n’y a pas eu d’effort budgétaire.

S’il n’y avait pas eu une prise de conscience de ce que représentent les anciens combattants pour notre pays et de la reconnaissance que leur doit la nation, nous serions sur une baisse de 7 %, la même qui a affecté les autres ministères. Si nous avions seulement pris en compte ce qu’est la réalité naturelle de la vie, ce serait une baisse de 4,4 %.

Je disais tout à l’heure que la baisse est de 2,4 %, ce qui, comparé à ce qu’on pouvait craindre, représente un gain de 60 millions d’euros, ce qui n’est pas rien.

Je ne reviendrai pas sur la retraite du combattant, j’ai expliqué à maintes reprises la nécessité de la budgéter et de ne pas laisser l’ONAC dans la situation où il se trouve, c’est-à-dire dans l’obligation de répondre au diktat politique pour financer l’aide différentielle sans qu’on lui donne les moyens de la payer. Nous avons un Office qui peut se retrouver rapidement en grande difficulté et sur lequel j’ai des inquiétudes, pour ne rien vous cacher.

S’agissant de la retraite du combattant, je l’ai dit, chaque fois qu’il y aura une petite marge budgétaire, nous conserverons cette logique d’augmentation, parce qu’elle est pour nous importante en termes de reconnaissance.

Ensuite, en ce qui concerne la rente mutualiste, je crois avoir déjà rappelé qu’il s’agissait d’une niche fiscale qui, j’y insiste, concerne très peu de gens : seulement 14 % de ceux qui en bénéficient peuvent atteindre le plafond de 1733 euros, soit 125 points d’indice. Ce n’est donc pas aujourd’hui une priorité. La priorité est dans l’effort budgétaire de 3 millions d’euros consolidés d’aides sociales en trois ans.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Monsieur le ministre, un budget en baisse de 2,4 % et dont vous vous targuez qu’il préserve l’essentiel et ne gère que les acquis ; un programme « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » – qui concerne directement le droit aux réparations prévu pour les anciens combattants et victimes de guerre – en baisse de 3,76 % ; une rupture avec la dynamique enclenchée depuis près de dix ans par l’ancienne majorité qui avait augmenté la retraite du combattant de près de 30 % entre 2007 et 2012, et cela malgré un contexte budgétaire difficile… Tel est donc le budget qui nous est présenté.

Contrairement au vôtre, le précédent gouvernement n’a jamais abandonné cette dynamique de reconnaissance du monde combattant, sans doute parce que nous considérons que les efforts consentis au service de la patrie méritent qu’on considère cette population autrement que sous un angle purement fiscal et qu’on l’exempte peut-être de certaines restrictions budgétaires parfois appliquées à d’autres.

Outre la revalorisation de la retraite du combattant et celle de l’aide différentielle pour les conjoints survivants, l’augmentation du point d’indice de la rente mutualiste constitue l’une des plus vives demandes des anciens combattants. Or il nous faut constater que cette mesure, qui n’est pas d’un coût démesuré – on parle ici de 1,7 million d’euros –, ne fait pas partie des objectifs de ce gouvernement.

Faire avec ce qui a déjà été engagé sans mener une politique volontariste, augmenter les impôts et réaliser de fausses économies, c’est donc cela, pour la majorité, faire de la politique – pas pour l’opposition. Monsieur le ministre, faire de la politique, c’est avant tout « faire », s’impliquer pleinement dans les combats que l’on estime justes. C’est pourquoi j’aimerais savoir si vous aurez le courage de soutenir les propositions du groupe UMP et, de surcroît, savoir si une augmentation du point d’indice de la rente mutualiste est envisageable dès cette année.

J’ai bien entendu que vous considériez cette rente comme une niche fiscale. Or il n’est question en moyenne que de 4 euros par personne. Les sacrifices rendus, la mémoire de ce qui a été fait au service de la nation ne méritent-t-il pas que l’on sorte d’un raisonnement purement budgétaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Je n’aime pas évoquer les questions de courage, monsieur le député : le courage est quelque chose de très relatif. On peut en effet examiner le courage en fonction de la situation dans laquelle on se trouve, de la place occupée. Pour moi, la politique, c’est choisir. Or j’ai choisi, nous avons choisi. La rente mutualiste, je le répète, c’est 263 millions d’euros et 30 millions d’euros de recettes fiscales en moins pour le Gouvernement. Voilà les chiffres exacts. Il faut donc trouver presque 300 millions d’euros pour financer la rente mutualiste.

Je continue à considérer – mais nous pouvons bien sûr être en désaccord – que ce n’est pas sur ce point que nous devons porter notre effort quand il s’agit de reconnaissance, mais bien sur les questions sociales. Et si nous devons trouver une plus grande marge de manœuvre demain, notre effort portera plus sur l’aide différentielle, sur l’aide sociale au sens large plutôt que sur la retraite mutualiste. Nous assumons cette position. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Monsieur le ministre délégué, si l’on rapporte l’évolution des crédits de cette mission au taux d’inflation, et si l’on tient compte de la mobilisation de 5 millions d’euros pour le centenaire du début de la première guerre mondiale, le compte n’y est pas.

Je reviens, au passage, sur cette commémoration. Vous proposez une conception inédite : nous allons commémorer le début d’un conflit ; j’ignorais qu’on pouvait le faire. (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. C’est vous qui en êtes les initiateurs !

Mme Marie-Christine Dalloz. Ma première question porte sur les bénéficiaires de l’aide différentielle au conjoint survivant, relevant de l’ONACVG, qui sont âgés d’au moins soixante ans, disposent d’un plafond de ressources mensuelles inférieur à 900 euros et résident de façon régulière et continue dans le département où la demande a été déposée – les critères sont précis. Au 30 juin 2012, ces bénéficiaires étaient au nombre de 4 671. J’ai constaté, comme le monde combattant, que certains anciens combattants ne disposaient pas de ce revenu mensuel de 900 euros, notamment en milieu rural. Comment pourrait-on étendre le dispositif de l’ADCS au profit des anciens combattants eux-mêmes qui répondraient à ces critères ? Et, de grâce, veuillez considérer que la seule perspective de consulter le Conseil d’État ne marque pas une volonté suffisante de résoudre cette question.

Ma seconde question a trait aux contingents annuels de décorations – qu’il s’agisse des deux ordres nationaux réservés au monde combattant, de la médaille militaire ou des chevaliers de la Légion d’honneur en faveur des anciens combattants –, contingents qui se révèlent insuffisants. Les augmenter serait l’occasion de mettre en cohérence vos propos et vos actes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Vitel. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Madame la députée, en ce qui concerne la politique de mémoire, au-delà du rappel que le budget est passé de 12 à 17 millions d’euros, ce qui n’est pas rien, me semble-t-il, ce n’est pas nous qui avons créé le GIP pour les commémorations du début de la première guerre mondiale. Ce n’est pas nous qui avons décidé que ce GIP ne serait mis en place que jusqu’à la fin de l’année 2014 et donc n’aurait pour vocation que de célébrer l’entrée en guerre de 1914. Et tout mon travail aujourd’hui consiste à revenir, en accord, d’ailleurs, avec des critiques provenant de vos bancs, sur l’action du GIP, sur sa philosophie – sans pour autant remettre en cause les hommes qui le dirigent. Notre volonté est justement, surtout, de ne pas commémorer l’entrée en guerre, madame la députée.

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Vous vous êtes trompée, madame Dalloz !

M. Kader Arif, ministre délégué. Ensuite, toujours en ce qui concerne la mémoire, pas un euro n’était budgété pour le soixante-dixième anniversaire des années 1940 – à croire que la date n’avait pas semblé importante au gouvernement précédent. Nous découvrons ainsi que, sur le point de célébrer le soixante-dixième anniversaire de la Libération, pas un euro n’était prévu à cet effet. Nous devons donc, ici aussi, prévoir un budget.

M. Jean-Luc Reitzer. Nous voulions précisément le faire l’année prochaine !

M. Kader Arif, ministre délégué. Pour ce qui est de l’extension du dispositif de l’ADCS aux anciens combattants eux-mêmes, le Parlement, en 2010, avait commandé une étude réalisée par les services de l’ONACVG dans douze départements. Il s’est agi de dénombrer les anciens combattants les plus démunis susceptibles de bénéficier de cette aide différentielle. En se fondant sur un effectif théorique de 5 000 personnes, l’ONACVG a évalué le coût de cette mesure à environ 5 millions d’euros, ce coût n’intégrant que les personnes vivant seules et résidant en France.

Je ne suis pas fermé à l’idée qu’il faut aider les anciens combattants les plus démunis, mais il faudra prendre en considération non seulement les anciens combattants vivant en France, mais aussi ceux vivant à l’étranger, ce qui, madame la députée, représente un tout autre coût.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Je profite de cette question, monsieur le ministre, pour rappeler combien, le 8 août dernier, votre présence à Obernai aux côtés des « malgré nous » a été appréciée pour commémorer le soixante-dixième anniversaire des décrets scélérats qui instauraient l’incorporation de force en Alsace-Moselle à partir d’août 1942. Rappelons que 134 000 Alsaciens et Mosellans ont ainsi été appelés dans la Wehrmacht et que 42 000 ne sont jamais revenus. De nombreux incorporés de force ont été faits prisonniers par l’armée soviétique pour se retrouver dans des camps, dont le tristement célèbre camp de Tambov.

Le 8 mai 2010, à Colmar, le président Sarkozy avait trouvé les mots justes pour rendre hommage aux « malgré nous » devant la France entière, parlant de « victimes d’un véritable crime de guerre ». Or cette tragédie vécue par les Alsaciens-Mosellans est trop souvent méconnue. Il serait bon que votre ministère intervienne pour que les jeunes générations y soient sensibilisées par le biais des manuels scolaires. Il ne faut pas occulter ces périodes douloureuses mais il faut enseigner les traumatismes qu’elles ont engendrés et honorer la mémoire de nos victimes. La construction européenne n’en prendra que plus de sens.

Permettez-moi un second souhait. Dans ma circonscription se trouvent bon nombre d’ouvrages de la ligne Maginot qui font partie de notre patrimoine et sont l’objet du tourisme de mémoire, en particulier de visites de groupes scolaires. Malheureusement, le dynamisme des associations qui font revivre ces ouvrages est souvent freiné par les mises aux normes draconiennes appliquées avec une rigueur administrative tatillonne. Il serait bon que le ministère délégué chargé des anciens combattants intervienne auprès des commissions ad hoc pour conjuguer authenticité, accessibilité et sécurité de notre patrimoine militaire.

Ces deux mesures ne requièrent pas de crédits supplémentaires. Aussi je compte sur vous pour aller dans le sens de la reconnaissance du drame des « malgré nous » et du travail remarquable de nos associations patriotiques et culturelles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Luc Reitzer. Excellente question !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. J’ai pris moi aussi plaisir à me trouver à vos côtés à Obernai l’été dernier, monsieur le député. J’ai précisé déjà qu’un décret réglerait la question de la ligne Curzon d’ici à la fin de l’année. Vous avez raison de rappeler qu’on appartient à la nation quand on appartient à sa mémoire collective ; c’est tout particulièrement le cas des « malgré nous » qui doivent avoir leur place dans les manuels d’histoire. Je suis prêt à m’engager sur cette question et à examiner de quelle manière la faire avancer afin qu’on ne les oublie pas.

Pour ce qui est du patrimoine, notamment de l’opération « chemins de la mémoire », et du tourisme mémoriel, un effort particulier reste à faire ; nous devons, ensemble, faire évoluer les choses. Comme je le rappelais dans mon propos liminaire, nous avons la volonté de faire en sorte que ce tourisme de la mémoire soit traité dans le cadre qu’il convient car il représente un atout pour les départements, pour les régions et pour le patrimoine d’une manière générale.

Je répondrai enfin à Mme Dalloz sur la question des médailles. Je me bats pour la création d’une médaille ad hoc. Les contingents de médailles de l’ordre de la Légion d’honneur et de l’ordre national du mérite réservés aux anciens combattants ne sont pas suffisants. Les présidents d’associations locales, en particulier, qui font un travail remarquable, parce qu’ils ne sont pas présidents sur le plan national, n’ont droit à rien ! Nous devrions donc pouvoir leur attribuer un titre de reconnaissance.

M. Jean-Luc Reitzer. Très juste !

M. le président. La parole est à M. Patrice Verchère.

M. Patrice Verchère. Monsieur le ministre, le Président de la République a promis le changement dans de nombreux domaines et beaucoup de Français sont déçus. En revanche, le changement a bien lieu pour les anciens combattants, et quel changement, puisque le budget de votre ministère est en diminution de près de 4 % par rapport à la loi de finances pour 2012. Votre budget ne contient aucune nouvelle proposition ou avancée pour le monde combattant.

M. Régis Juanico. Les urnes ont parlé !

M. Patrice Verchère. Autre changement depuis l’élection de M. Hollande : il vous a nommé avec rang de ministre délégué au lieu de secrétaire d’État. Je vous en félicite mais force est de constater que vous n’avez pas été très efficace pour défendre votre budget et celles et ceux dont vous êtes chargés – cela malgré un nombre bien plus important de collaborateurs voués à cette tâche que n’en avait votre prédécesseur.

M. Christophe Guilloteau. En effet, il n’y en a jamais eu autant !

M. Patrice Verchère. Vous auriez pu insister, au moment des arbitrages budgétaires, pour que le budget des anciens combattants soit épargné par les mesures de rigueur : les anciens combattants ont assez largement sacrifié leur jeunesse au service de notre pays pour ne pas être appelés à fournir des efforts supplémentaires.

Votre budget est en rupture avec la dynamique enclenchée depuis près de dix ans par l’ancienne majorité. C’est probablement, là encore, votre vision du changement… Malgré un contexte budgétaire difficile, le gouvernement de François Fillon n’a jamais abandonné cette dynamique. Ainsi, la retraite du combattant a augmenté de près de 30 % sur la période 2007-2012. Attribuée aux titulaires de la carte du combattant, elle n’avait été revalorisée que de 10 % entre 1978 et 2007. De 37 points à l’époque, elle a été portée à 48 points au 1er juillet 2012. Son montant est ainsi passé de 488 à 609 euros.

Mes questions sont simples, monsieur le ministre : allez-vous accepter, bien que vous les ayez tous refusés en commission, les amendements visant à augmenter la retraite du combattant de deux points au 1er juillet 2013 ? Allez-vous, par ailleurs, accepter les amendements proposant l’augmentation du budget de l’ONAC afin de relever le plafond de l’aide différentielle au conjoint survivant pour que celle-ci approche enfin le seuil de pauvreté, soit 954 euros. Car l’augmentation prévue par le projet de loi de finances pour 2013 – de 500 000 euros – ne sera pas suffisante pour assurer la pérennité et l’accroissement de cette aide.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, s’il y a un changement entre l’équipe précédente et la nôtre, il consiste en ceci, que nous pouvons tenir notre parole et avoir un discours de vérité. C’est une différence essentielle, que vous aurez certainement notée. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Didier Quentin. On l’avait fait !

M. Kader Arif, ministre délégué. Pour reprendre une formule que j’ai déjà utilisée tout à l’heure, commander une tournée sans la payer et laisser la note aux autres, c’est facile.

M. Julien Aubert. On n’avait pas prévu de perdre les élections ! On voulait les gagner !

M. Kader Arif, ministre délégué. C’est ce que vous avez fait. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Dans ces conditions, ne vous engagez pas dans ce débat : ne prétendez pas que nous avons moins de considération pour les anciens combattants que vous n’en aviez, car ce n’est pas vrai.

M. François Rochebloine. On n’a jamais dit ça !

M. Kader Arif, ministre délégué. Le budget que je défends, en tant que secrétaire d’État ou de ministre délégué – je ne répondrai pas aux insultes et aux attaques sur ce sujet – obéit aux contraintes budgétaires qui ont été imposées à l’ensemble des ministères. Mon budget a été plutôt bien défendu par mes équipes : nous avons été entendus à Bercy, dans le respect et la reconnaissance des anciens combattants. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Par ailleurs, monsieur le député, il est un peu facile de demander le renflouement du budget de l’ONAC, alors que l’avez vidé sans demander l’autorisation à cet Office. Nous allons faire en sorte que ce budget soit protégé ; nous verrons ensuite si le texte est amendé.

J’ai répondu à l’ensemble de vos interrogations, non seulement avec des accents de sincérité – car, de ceux-ci, on peut toujours douter – mais surtout avec un message de vérité, qui est la marque de fabrique de notre gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur, pour un rappel au règlement.

M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre, cela commence à bien faire ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cela commence à bien faire !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. À quel article du règlement faites-vous référence ?

Plusieurs députés du groupe SRC. Ce n’est pas un rappel au règlement !

M. Marc Laffineur. Écoutez, ce n’est pas vous qui allez m’apprendre le règlement !

Cela commence à bien faire ! Vous ne pouvez pas remettre en cause en permanence le gouvernement précédent. Aucun gouvernement n’a fait autant que le précédent pour les anciens combattants. Son action a déjà été rappelée : augmentation de 30 % de la retraite du combattant, instauration de la campagne double, création d’un fonds pour les victimes des essais nucléaires et allocation différentielle pour les conjoints d’anciens combattants. Vous n’avez vraiment pas de leçons à nous donner en la matière ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Nicolas Bays. Et vous non plus !

Plusieurs députés du groupe SRC. Ce n’est pas un rappel au règlement !

M. Marc Le Fur. Merci, cher collègue, vous vous êtes exprimé.

M. Marc Laffineur. Vous présentez un budget, dans lequel il n’y a absolument aucune mesure en faveur des anciens combattants !

M. Marc Le Fur. Votre rappel au règlement était fondé sur l’article 58, alinéa 1, et je crois que vous avez pu vous exprimer.

M. Marc Laffineur. Vous nous dites, monsieur le ministre, que vous avez mis en place un groupement d’intérêt public, un GIP, pour commémorer le centième anniversaire de la Première Guerre mondiale…

M. Marc Le Fur. Monsieur Laffineur, veuillez conclure.

M. Marc Laffineur. Mais s’agissant de la commémoration du soixante-dixième anniversaire du débarquement de 1944, je tiens à rappeler que l’événement donne lieu, tous les dix ans, à une commémoration spéciale, et qu’un budget est prévu à cet effet.

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense. Il faut faire appliquer le règlement, monsieur le président !

M. Marc Laffineur. Le GIP est une bonne chose pour le centenaire de la guerre de 1914…

M. Marc Le Fur. Merci, cher collègue. Nous en avons fini avec ce rappel au règlement.

M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre, nous ne vous attaquons pas. De votre côté, ce n’est pas parce que vous n’avez rien à proposer que vous devez attaquer vos prédécesseurs.

Reprise de la discussion

M. le président. Nous en revenons aux questions.

La parole est à M. Laurent Marcangeli, au titre du groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Laurent Marcangeli. Monsieur le ministre, comme plusieurs de mes collègues, je souhaite exprimer mon inquiétude quant à la faiblesse des moyens attribués à l’ONACVG, cet opérateur qui, sur le terrain, met en œuvre la politique en faveur du monde des anciens combattants et de la conservation des lieux de mémoire.

Je m’en inquiète car, dans le même temps, vous souhaitez, de manière légitime, améliorer ses services de reconversion professionnelle et augmenter de 25 à 50 % le nombre d’attributions de cartes d’anciens combattants à la nouvelle génération du feu. Sans remettre en cause la sincérité de votre démarche, monsieur le ministre, je me permets de poser la question de la cohérence entre vos intentions et les moyens obtenus pour ce budget, et peut-être même pour les prochains.

J’ai également une conviction profonde, que nous partageons certainement : les crédits que la nation accorde à notre politique de mémoire ne sont jamais à la hauteur.

Entretenir la mémoire collective sur les grands conflits du XXe siècle est capital, afin de sensibiliser nos concitoyens et de leur faire comprendre quel fut le prix de la paix qu’ils connaissent depuis près de soixante-dix ans. Une histoire pacifiée et partagée n’est-elle pas l’un des meilleurs garants de l’unité d’une nation ? Je m’inquiète lorsque j’apprends que des incertitudes subsistent quant au montant de la subvention au GIP « Centenaire de la Première Guerre mondiale ». Une telle commémoration est importante pour notre pays : elle ne doit pas être une variable d’ajustement budgétaire.

La nation a besoin de repères de cette sorte. Cela constituerait une faute envers les nouvelles générations que de manquer à nos obligations de mémoire, à ces grands rendez-vous nationaux. J’espère, monsieur le ministre, que vous allez nous donner toutes les assurances sur ce sujet. Le monde des anciens combattants et l’ensemble de nos concitoyens ne comprendraient pas de tels abandons.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, s’agissant de la commémoration, les engagements que j’ai pris seront tenus, puisqu’il est prévu, dès le 1er janvier 2013, un versement de deux millions d’euros pour la commémoration du centenaire, et un versement du même montant pour le soixante-dixième anniversaire du débarquement ; pour l’année 2014, ce seront trois millions d’euros pour le centenaire et le soixante-dixième anniversaire. Sur la durée, le budget du centenaire s’élèvera à 30 millions d’euros, à raison de 10 millions d’investissement public, 10 millions de valorisation et 10 millions de fonds privés. Le GIP travaille actuellement sur cette question.

Quand j’évoquais tout à l’heure le soixante-dixième anniversaire du débarquement, je n’ai pas entendu critiquer M. Laffineur, ni qui que ce soit…

Plusieurs députés du groupe UMP. Mais non !

M. Kader Arif, ministre délégué… mais ce qui était une réalité politique.

M. Christophe Guilloteau. Il faut assumer !

M. Kader Arif, ministre délégué. J’assume tout, vous savez.

Je ne suis pas inscrit dans la mémoire officielle…

M. le président. Nous écoutons le ministre, mes chers collègues.

M. Kader Arif, ministre délégué. …et je considérais donc qu’il était important, à l’occasion du soixante-dixième anniversaire, de ne pas commémorer seulement le débarquement de 1944. Je voulais faire en sorte qu’on n’oublie pas ce qu’avait été la résistance intérieure : c’est pour cette raison que je voulais, dès 2013, commencer à commémorer les années de la guerre. Je pense en effet que la résistance intérieure a une place importante dans l’esprit de nos concitoyens et dans notre mémoire. (« Bravo ! » et applaudissements sur certains bancs du groupe SRC.). C’est un sujet qui me paraît particulièrement important, et je ne reviendrai pas sur les autres.

À l’évidence, il n’y a jamais de budget suffisant. Il faudra donc travailler pour faire en sorte que les commémorations du centenaire, qui avaient d’abord été prévues pour la seule année 2014, soient intégrées dans un cycle plus long, allant de 2014 à 2018. Je me suis entretenu sur ce sujet avec M. le Premier ministre. Il faut trouver les moyens adéquats pour être à la hauteur de notre histoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Reitzer.

M. Jean-Luc Reitzer. Monsieur le ministre, je souhaitais aborder deux sujets, et d’abord la ligne Curzon. Je voudrais vous dire que j’enregistre avec satisfaction, en tant qu’élu alsacien, l’engagement que vous avez pris de régler cette question par décret d’ici le mois de décembre. Je vous en remercie et nous veillerons naturellement, à vos côtés, à ce qu’il en soit ainsi.

Le deuxième sujet que je souhaitais aborder a déjà été évoqué par mon collègue Didier Quentin : il s’agit du droit à réparations des orphelins de guerre et pupilles de la nation. Comme cela a été rappelé tout à l’heure, deux décrets ont été pris par le passé pour répondre à cette question : le décret de juillet 2000, prévoyant des mesures de réparations pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites, et le décret de juillet 2004, qui reconnaît les souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. Comme cela a également été rappelé, ces deux décrets ont malheureusement occulté la condition des autres orphelins de guerre.

Le président Sarkozy avait souhaité procéder à une unification de ces dispositifs d’indemnisation et les assortir de mesures complémentaires. Un rapport avait été demandé au préfet honoraire Audoin ; une commission nationale de concertation avait été formée, qui réunissait les représentants du monde associatif concernés et l’administration, et elle avait émis plusieurs hypothèses.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué tout à l’heure la somme de 2 milliards d’euros : c’est le chiffre qui m’avait déjà été donné par votre prédécesseur, M. Falco, lorsque je lui avais posé la même question, en mai 2010. Comme dit le proverbe, « qui veut noyer son chien l’accuse de la rage ». Les deux milliards d’euros, monsieur le ministre, correspondent à l’indemnisation des orphelins de tous les conflits. Le ministre avait en outre ajouté que ceci entraînerait une dépense récurrente annuelle de l’ordre de 350 millions d’euros.

Je suis conscient, comme vous, des difficultés budgétaires que connaît notre pays. Ne serait-il pas possible de s’en tenir aux orphelins de la deuxième Guerre mondiale ? Ne serait-il pas possible d’étaler cette indemnisation dans le temps, en commençant par les plus âgés ? Ne serait-il pas possible, comme je l’avais moi-même obtenu pour les patriotes résistants à l’Occupation, et comme cela a été obtenu, aussi, pour les personnes incorporées de force dans les RAD-KHD, de mettre en place une indemnisation minimale, qui serait au moins la reconnaissance morale de la nation envers des orphelins de guerre qui se sentent oubliés par elle ?

Je vous fais là un certain nombre de propositions et je serais très heureux de connaître votre avis sur ces propositions, qui permettraient d’honorer l’engagement que doit avoir notre pays vis-à-vis des orphelins de guerre.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, si j’ai utilisé la même argumentation qu’Hubert Falco, ce n’est pas par hasard. Et ce n’est pas pour faire peur ; mais à partir du moment où vous créez les conditions d’une extension, comment justifier ensuite que l’orphelin de la deuxième Guerre mondiale a souffert davantage que l’orphelin d’un autre conflit ?

M. Jean-Luc Reitzer. C’est ce qu’ont fait les deux décrets !

M. Kader Arif, ministre délégué. Les problèmes posés par les décrets de 2000 et 2004 sont spécifiques et ne visent pas les personnes au regard de leur seule qualité d’orphelins. S’agissant des orphelins, de nouvelles questions se posent. Que fait-on, par exemple, des orphelins de la guerre d’Algérie ?

M. Jean-Luc Reitzer. Eh oui !

M. Kader Arif, ministre délégué. Il faut bien sûr poser la question d’une éventuelle extension à l’ensemble, d’où l’évocation des deux milliards d’euros, engagement impossible à tenir, d’autant plus qu’on reviendrait sur ce qui fait la spécificité des décrets de 2000 et 2004.

Du reste, même si l’on s’en tenait à la seule seconde Guerre mondiale, il faudrait trouver dix millions d’euros en année pleine.

M. Jean-Luc Reitzer. C’est déjà moins que deux milliards !

M. Kader Arif, ministre délégué. C’est déjà moins que deux milliards, je vous l’accorde, mais je pense que si l’on procède à une extension en ce domaine, il faudra qu’elle soit la plus large possible, ce qui impliquera un budget supérieur à 10 millions d’euros.

M. Jean-Luc Reitzer. Et pourquoi pas une indemnisation minorée, comme on l’a fait pour les PRO et les personnes incorporées de force dans les RAD-KHD ?

M. le président. Nous terminons par une question de M. Dino Cinieri, à qui je donne la parole.

M. Dino Cinieri. Je considère le droit à réparations de nos anciens combattants comme une responsabilité morale qui incombe à l’État français. Ceux qui, dans leur jeunesse, ont agi par devoir pour servir la France, doivent à présent être certains que nous, leurs représentants, nous veillons sur leurs droits. C’est dans cet esprit que j’ai soutenu, ces dernières années, la revalorisation de la retraite du combattant qui, je le rappelle, est passée, entre 2006 et 2012, de 460 à 665 euros, alors qu’elle n’avait pas progressé depuis 1978.

Je n’ignore pas, monsieur le ministre, nos contraintes budgétaires, mais vous savez que le budget des anciens combattants est un budget particulier car, plus que de moyens, il est avant tout question, ici, de la reconnaissance de la nation.

En outre, le nombre des ayants droit diminue chaque année, ce qui permet de mettre en œuvre des mesures nouvelles sans augmentation de la dépense publique. En la matière, monsieur le ministre, vous n’avez que l’embarras du choix : augmentation de la retraite du combattant ou de la retraite mutualiste, attribution de la carte du combattant pour les cent vingt jours de présence en Algérie, sous réserve d’y avoir servi avant le 2 juillet 1962, extension de la campagne double, ou encore renforcement de l’allocation différentielle pour les veuves les plus démunies, au niveau du seuil de pauvreté, qui a été fixé à 964 euros par mois.

Dès lors, monsieur le ministre, quel levier allez-vous actionner pour poursuivre ce nécessaire travail de mémoire ? Nos anciens combattants pourront-ils compter à nouveau sur la reconnaissance nationale, à travers ce budget pour 2013 ?

Comme l’a rappelé M. Michel Huet, président de la FNACA de la Loire, Clemenceau avait affirmé, en son temps, que les anciens combattants avaient des droits. Une nation sans mémoire et sans souvenirs est une nation sans identité.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur le député, je partage ce que vous avez dit en conclusion…

Plusieurs députés du groupe UMP. Et le reste ?

M. Kader Arif, ministre délégué. …et nous partageons la même philosophie. Je ne vais pas expliquer à nouveau que ce budget a été défendu et que, dans le contexte de contraintes budgétaires que nous connaissons aujourd’hui, ce budget parvient à maintenir les droits des anciens combattants, qu’il les préserve, et qu’il avance même sur un certain nombre de questions, en particulier en matière d’aide sociale.

Par ailleurs, ce budget revient sur les diminutions qui avaient été décidées au sein des opérateurs. S’agissant de l’Office national des anciens combattants, notre volonté est de maintenir une forte présence dans les départements alors que la RGPP a déjà entraîné la suppression d’un certain nombre de postes.

Nous protégeons également le budget de l’Institution nationale des Invalides, tout en essayant de lui procurer d’autres ressources et d’autres moyens, en collaboration avec le ministère des affaires sociales.

Le budget de la politique de mémoire est en augmentation, et nous avons maintenu la journée défense et citoyenneté.

Nous nous inscrivons dans la logique d’une hausse continue de la retraite du combattant, en fonction des possibilités qui se présenteront. S’agissant de l’aide différentielle, nous verrons quels efforts seront possibles pour la consolider d’abord, puis pour l’augmenter. Enfin, nous trouverons les 5 millions d’euros nécessaires pour permettre la retraite dite « à cheval » dans le budget pour 2014.

Il me semble que nous prenons ainsi en compte un certain nombre des revendications portées par le monde combattant. Nous partageons ses préoccupations, et vous pouvez compter sur ma volonté pour faire avancer les choses chaque fois que ce sera possible, car non seulement cette idée de reconnaissance m’est chère à titre personnel, mais elle est également importante sur le plan collectif.

Je crois que nous devrions éviter de nous faire des procès d’intention les uns aux autres, et notamment de considérer que certains seraient plus généreux que d’autres. Vous savez que c’est un peu plus compliqué que cela, et que nous pouvons partager cette générosité.

M. le président. Nous avons achevé les questions.

Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation »

M. le président. J’appelle les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », inscrits à l’état B.

État B

M. le président. Sur ces crédits, je suis saisi d’un certain nombre d’amendements.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour soutenir l’amendement n° 153.

M. Jean-Jacques Candelier. Une troisième catégorie de pupilles de la nation sollicite une reconnaissance de la part de l’État. C’est celle dont les parents résistants sont morts les armes à la main et reconnus par la mention marginale portée sur les registres d’état-civil : « Mort pour la France. »

À l’occasion de cette prise de parole, je souhaite dénoncer les propos de M. Laffineur, pour qui j’avais une grande considération. Il a osé opposer les droits des anciens combattants au droit à la santé des étrangers. La droite a réduit le budget des anciens combattants de 447 millions d’euros en cinq ans. Il est trop facile de faire de l’immigré un bouc émissaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. L’amendement est fort intéressant, mais il présente une réelle difficulté, comme le ministre l’a expliqué au cours du débat.

Le dispositif actuel est effectivement loin d’être parfait. Il a exclu de la reconnaissance des enfants de personnes mortes les armes à la main. Mais comme l’expliquait le ministre, si ce dispositif devait être étendu, cela devrait être à l’ensemble des orphelins de parents morts pour la France. L’étendre à une catégorie seulement créerait un autre niveau d’injustice, certains se sentiraient frustrés et il nous faudrait en débattre à nouveau.

Bien que j’adhère totalement à l’idée, j’émets donc un avis défavorable, mais je souhaite que le ministre s’engage à étudier une fois pour toutes l’ensemble du dispositif afin que personne ne soit oublié. Et, lorsque les jours seront meilleurs pour les finances publiques, peut-être pourrons-nous accéder à cette demande légitime.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées. Je précise que cet amendement a été rejeté par la commission. D’autre part, il ne relève pas de la loi de finances car il s’agit d’une extension de dispositif existant.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Défavorable, mais favorable à la proposition de M. le rapporteur spécial de créer une mission d’étude.

(L’amendement n° 153 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 138, 170 et 171.

La parole est à M. Christophe Guilloteau pour présenter l’amendement n° 138.

M. Christophe Guilloteau. La retraite des anciens combattants fait l’objet de beaucoup de questions. Le groupe UMP a déposé l’amendement n° 138 pour ne pas rompre le cercle vertueux mis en place par le gouvernement précédent, et qui a permis d’augmenter la retraite du combattant de 30 % sous la dernière législature.

Je m’honore de faire partie des parlementaires qui ont proposé cette mesure à l’époque. Elle avait été adoptée avec le renfort de la gauche,…

M. François Rochebloine. Absolument !

M. Christophe Guilloteau. …qui votait alors nos amendements comme un seul homme. Le Nouveau Centre nous suivait également, j’espère que ce sera aussi le cas du groupe UDI.

Cela montre en tout cas que nos amendements n’étaient pas saugrenus, et j’espère, monsieur le ministre, que vous abonderez dans notre sens. Je ne vous voudrais pas que vous nous rappeliez l’un de vos prédécesseurs, originaire du Var, qui avait soutenu que l’on ne pouvait pas augmenter la retraite des anciens combattants. Je lui avais rappelé que le vote du budget se faisait quelques jours avant le 11 novembre, et que je préférais être à ma place qu’à la sienne ce jour-là. Si vous veniez à refuser cet amendement, je préférerais être à ma place qu’à la vôtre, monsieur le ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Nicolas Bays. Des menaces ? L’UMP va descendre dans la rue ? (Sourires.)

M. Christophe Guilloteau. Non, simplement l’histoire.

M. François Rochebloine. Il rappelle les choses, c’est tout !

M. Christophe Guilloteau. Enfin, et je parle sous le contrôle de quelques anciens, j’ai rarement vu autant de membres de cabinets dans cet hémicycle, au point d’y être plus nombreux que les anciens combattants dans les tribunes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Sur l’amendement n° 138, je suis saisi par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

M. le président. La parole est à M. Dino Cinieri pour soutenir l’amendement n° 170.

M. Dino Cinieri. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool pour défendre l’amendement n° 171.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement a pour objet d’augmenter l’indice de la retraite du combattant de deux points afin de ne pas rompre la dynamique mise en place depuis 2005 en matière de retraite du combattant.

La revalorisation pourrait avoir lieu au 1er juillet 2013, le coût en année pleine s’établissant à 9 millions d’euros pour un point.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Le débat a déjà été riche, mais je voudrais mettre les choses au clair. Qui, dans cet hémicycle, pourrait s’opposer à l’augmentation de la retraite des anciens combattants ?

Plusieurs députés du groupe UMP. Personne !

M. Philippe Vitel. Vous !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Personne, dites-vous. Eh bien, si : quelques-uns s’y opposent, et c’est vous, messieurs de l’UMP ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Lorsque nous touchons aux recettes, vous n’avez de cesse de dire qu’il ne faut pas les augmenter, mais diminuer, diminuer et diminuer encore les dépenses. Et lorsque nous examinons les dépenses, vous n’avez de cesse de les augmenter ! (Même mouvement.)

M. François Rochebloine. Il y a d’autres dépenses à réduire !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Mais attendez, monsieur Rochebloine…

M. François Rochebloine. C’est inadmissible !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. La vérité vous fait mal, n’est-ce pas ?

Nous avons eu la sagesse de ne pas diminuer les dépenses, parce qu’effectivement le budget des anciens combattants n’est pas un budget comme les autres. Et nous avons souhaité qu’il échappe à la règle de la contrainte budgétaire. Et, contrairement à vos suggestions de réduire la dépense, nous l’avons maintenu, voire augmenté.

J’ai étudié l’évolution du nombre de points depuis quelques années. L’augmentation était généralement d’un ou deux points. Et, brusquement, elle a été de quatre points l’an dernier. Pourquoi ? Parce qu’il y avait une élection présidentielle et que certains ont cru pouvoir appâter avec ces quatre points. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Luc Reitzer. C’est minable !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. J’ai lu les propos tenus à l’époque par M. Laffineur dans cette assemblée. À l’opposition qui lui disait que ce serait à elle de trouver les moyens pour financer cette mesure, il rétorquait qu’il serait encore là pour le faire. Les prédications de M. Laffineur ne sont pas tout à fait exactes…

Aujourd’hui, nous relevons le défi de financer ce maintien, c’est pour cela que nous n’irons pas au-delà des quatre points. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Défavorable, au risque assumé du 11 novembre, puisque j’ai cru comprendre que l’on appelait les anciens combattants à venir manifester ce jour-là contre moi. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Luc Reitzer. Pas du tout !

M. Kader Arif, ministre délégué. Si mon avis est défavorable, c’est aussi parce que le coût de la mesure, de 9 millions d’euros l’an prochain, sera de 36 millions en année pleine à partir de 2014, et que nous aurons les plus grandes difficultés à les trouver.

M. le président. La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Avec mes collègues du groupe SRC qui ont siégé lors de la législature précédente, nous sommes un certain nombre sur ces bancs à avoir assisté aux cinq dernières lois de finances.

M. François Rochebloine. Un nombre réduit !

M. Régis Juanico. Nous constituons donc la mémoire objective des débats budgétaires qui se sont succédé.

Permettez-moi donc de rafraîchir quelque peu la mémoire de certains. Pourquoi y a-t-il eu une augmentation de quatre points dans le budget 2012 ? Parce que l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, s’était engagé à faire passer la retraite du combattant de l’indice 41 à l’indice 48 sur trois exercices budgétaires : 2010, 2011 et 2012, mais que le relèvement de quatre points n’est intervenu qu’au 1er juillet 2012.

Vous savez donc très bien que l’essentiel de la charge financière de cette hausse de quatre points pèsera déjà 54 millions d’euros en année pleine pour l’année 2013. C’est cet effort-là que le Gouvernement se propose de consentir cette année.

Les députés socialistes, pour leur part, avaient proposé de suivre un rythme progressif : trois points en 2010, deux points en 2011, deux points en 2012.

Vous avez augmenté la retraite de deux points dans la loi de finances pour 2010. Puis, l’année suivante, vous avez invoqué la crise économique et financière pour justifier une hausse d’un point seulement, et faut-il rappeler que tous les groupes confondus – communistes, socialistes, Nouveau centre et une partie de l’UMP – ont voté un amendement la portant à deux points, mais que le Gouvernement a demandé une seconde délibération pour revenir sur ce vote ?

C’est ce qui explique que le même gouvernement, pour tenir l’engagement de Nicolas Sarkozy, ait proposé une hausse de quatre points l’an dernier. Mais même le rapporteur spécial de l’époque, a reconnu qu’il aurait fallu procéder à une hausse de trois points en 2011.

Voilà qui devrait vous rafraîchir la mémoire. En 2013, l’augmentation sera de quatre points sur une année pleine, et ce sera déjà un très bel effort. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je n’ai pas eu la chance de participer aux débats budgétaires des exercices précédents, mais je suis extrêmement choqué par les propos du rapporteur qui semble considérer que, si nous avons augmenté de quatre points la retraite du combattant l’an dernier, c’était dans un but électoraliste, pour « appâter » les anciens combattants. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Luc Reitzer. C’est minable !

M. Serge Janquin. C’est bien ce que vous avez fait !

M. Julien Aubert. C’est un manque de respect total que de considérer les anciens combattants comme une clientèle pouvant être « appâtée » avec quelques euros.

Que nous ayons des différends quant à l’effort à fournir, c’est normal ; c’est la démocratie. En revanche, dire que nous utilisons les anciens combattants et que, parce qu’on leur a donné quelques euros, ils vont voter pour la droite, je trouve cela particulièrement insultant à leur égard si l’on considère leurs sacrifices. Je voudrais que l’on tienne des discours un peu plus courtois... (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre, rassurez-vous : personne n’appelle à manifester contre vous. Nous avons tous trop de respect pour le 11 novembre, pour votre fonction et pour les anciens combattants pour nous amuser à ce genre de chose.

M. Jean-Luc Reitzer. C’est vrai !

M. Marc Laffineur. M. Juanico a de la mémoire, mais il n’est pas le seul. Le Président de la République, Nicolas Sarkozy, avait pris l’engagement de porter l’indice de calcul de la retraite du combattant à 48 points ; cet engagement a été tenu. Pour notre part, lorsque nous prenons des engagements, nous les tenons. Sur ce plan, il peut y avoir des différences entre les familles politiques. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) J’aimerais bien que les engagements pris par l’actuel Président de la République pendant la campagne électorale soient tenus.

Par ailleurs, monsieur Juanico, je relève une contradiction dans vos propos. Il y a deux ans, il y avait selon vous l’unanimité de tous les groupes politiques pour augmenter de deux points la retraite du combattant.

M. Yves Fromion. C’est vrai !

M. Marc Laffineur. Nous ne vous proposons aujourd’hui que de faire la même chose. Je suis en conséquence certain que vous soutiendrez notre amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Le monde combattant mérite le respect. Nous n’avons pas à jeter l’anathème sur un côté de l’hémicycle ou l’autre, mais plutôt à garantir le droit à réparation que les anciens combattants méritent bien.

Vous nous reprochez le relèvement de l’indice de la retraite du combattant à 48 points. Selon vous, nous l’aurions fait pour des raisons électoralistes. Mais que n’aurions-nous entendu si nous nous étions contentés d’un relèvement de deux points et si nous n’avions pas respecté notre promesse de parvenir aux 48 points !

M. Jean-Luc Reitzer. Très bien !

M. François Rochebloine. Nous sommes très heureux d’être parvenu à ce niveau. Il faut cesser de parler de promesses électoralistes ! Ce qui compte, c’est avant tout le respect du monde ancien combattant. Ce respect, nous le leur devons. Ils ont des droits sur nous, que nous devons respecter.

Le groupe UDI votera le relèvement de deux points proposé par le groupe UMP.

M. Philippe Vitel. Bravo !

M. François Rochebloine. Il faut toutefois insister sur une question tout aussi importante : celle de la valeur du point. Monsieur le ministre, je vous entendais dire que vous alliez signer les décrets plus rapidement. Je vous en remercie. C’est une très bonne chose, c’est positif. Cela dit, cela aurait plus de portée si des sommes un peu plus importantes étaient en jeu. Je me souviens d’une revalorisation annuelle du point se résumant à un centime !

Il ne faut pas se moquer du monde combattant. Il faut voter le relèvement de deux points. Je crains toutefois qu’il n’y ait pas cette fois l’unanimité que nous avions pu connaître il y a deux ans, même si je l’appelle de mes vœux. Cela dit, il est avant tout urgent revoir la valeur du point qui aujourd’hui est absolument indécente. Le monde combattant nous l’a dit à tous : cette valeur du point est de 46 % inférieure à ce qu’elle devrait être si les revalorisations avaient été faites. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre au voix les amendements identiques nos 138, 170 et 171.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 100

Nombre de suffrages exprimés 100

Majorité absolue 51

(Les amendements identiques nos 138, 170 et 171 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 150, 228, 227 et 149, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour soutenir l’amendement n° 150.

M. Jean-Jacques Candelier. Il est défendu, de même que l’amendement n° 149.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine pour défendre l’amendement n° 228.

M. François Rochebloine. J’en profiterai pour défendre également l’amendement n° 227, qui est de repli.

Le plafond de l’aide différentielle au conjoint survivant est désormais fixé à 900 euros. Je rappelle que, lors de nos débats, il y a un an, il ne s’agissait que d’une proposition dont la réalisation dépendait des disponibilités financières. La réflexion engagée par l’ONAC a permis d’en arriver où nous sommes. Cette évolution est totalement légitime. Je rappelle que nos collègues de l’opposition considéraient il y a un an que notre proposition était insuffisante puisque 900 euros se situait encore sous le seuil de pauvreté.

Il est vrai que nous sommes partis de très bas – 550 euros – et que, dans un premier temps, l’allocation logement était intégrée dans ce montant. À cette époque, cette aide ne bénéficiait à quasiment personne, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Les choses ont évolué positivement.

Les crédits destinés à l’ADCS augmentent cette année de 500 000 euros. Je ne peux que m’en réjouir et m’en féliciter. Je crains toutefois que ce montant ne soit encore insuffisant. Il permettra peut-être, je l’espère en tout cas, à toutes les personnes concernées de parvenir au niveau de revenu de 900 euros. J’estime cependant qu’il faudrait fixer le plafond de l’ADCS à 964 euros, ce niveau de revenus étant retenu par l’INSEE comme celui constituant le seuil de pauvreté. Tel est l’objet de l’amendement n° 228.

Je propose également une solution de repli avec l’amendement n° 227 qui fixe ce plafond à 932 euros. Nous ferions un pas important en nous engageant sur ce chemin. Nous respecterions le monde ancien combattant et les conjoints survivants les plus démunis en adoptant ce dernier amendement pour lequel un scrutin public est demandé par mon groupe.

M. le président. Sur l’amendement n° 227, je suis saisi par le groupe Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. M. Rochebloine a raison d’appeler au respect du monde des anciens combattants. Son amendement n° 227 témoigne de cette position.

Le ministre l’a dit, j’ai travaillé avec lui sur une évolution possible du plafond de l’aide différentielle. Il s’agit d’une mesure d’équité. Je n’évoquerai pas la contrainte budgétaire ; le ministre le fera. Il lui appartient de réitérer son engagement d’évoluer sur ce dossier et de nous proposer une solution. En conséquence, si je ne retiens pas les amendements proposés en l’état, je suis favorable à leur principe.

M. François Rochebloine. Ce n’est déjà pas mal, mais vous pouvez faire mieux !

M. Yannick Favennec. Encore un effort !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Je suis défavorable à l’amendement n° 227.

Je ne remets pas en cause ce que d’aucuns présentent comme le caractère prioritaire d’une telle mesure ; je me contente de prendre en compte la situation actuelle de l’ONAC. En effet, l’ADCS est géré par l’ONAC qui se trouve aujourd’hui dans une situation très compliquée. Il faudra être très attentifs à ce qui se passera lors de son prochain conseil d’administration. En tout état de cause, il faut d’ores et déjà stabiliser le plafond fixé à 900 euros dans le cadre du budget actuel de l’ONAC.

En tenant compte de la rationalisation future du budget de l’ONAC et de l’abondement cumulatif des crédits destinés à l’ADCS pour un total de 3 millions d’euros d’ici à 2015, je peux, si nous parvenons à stabiliser les 900 euros, m’engager sur un principe consistant à consacrer tout ou partie des sommes en question à l’aide différentielle pour parvenir, dans un premier temps, au montant de 932 euros et, dans un second temps, pour tendre vers 964 euros, c’est-à-dire vers le seuil de pauvreté. Pour les bénéficiaires qui résident hors du territoire national, il faudra examiner avec les consulats généraux de France le niveau de l’aide différentielle à fixer quand ce seuil de pauvreté est différent. Il faudra aussi que l’ADCS évolue dans ces cas-là. En tout état de cause, il faut tendre vers les 932 euros, puis 964 euros dès lors que nous nous situons dans l’espace européen où ces montants constituent le seuil de pauvreté.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je note un léger désaccord entre le rapporteur spécial et le ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le rapporteur spécial est favorable au principe de l’amendement ; le ministre a commencé par dire qu’il y était défavorable.

J’entends les arguments défendus par le ministre. Il me semble que l’amendement de repli proposé par M. Rochebloine constitue tout de même un premier pas.

Une question de principe se pose. En 2012, est-il digne de laisser les conjoints survivants d’anciens combattants vivre en dessous du seuil de pauvreté ? En mon âme et conscience, je réponds non à cette question. En conséquence, je voterai les deux amendements de M. Rochebloine.

Si le Gouvernement faisait un premier pas en acceptant l’amendement de repli, et s’il prenait des engagements pour le futur, nous nous retrouverions à mi-chemin du parcours. On parle beaucoup en ce moment de trajectoire de compétitivité ; je vous propose de parler d’une trajectoire de sortie de la pauvreté.

M. Yannick Favennec. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Je remarque que le rapporteur spécial est favorable à l’amendement mais qu’il ne le votera pas. J’ai du mal à comprendre. J’espère que, dans le secret du bouton « pour », il votera pour l’amendement de notre collègue…

L’amendement de repli de M. Rochebloine est modéré comme son auteur. (Sourires.)

M. François Rochebloine. Merci !

M. Gérald Darmanin. Je suis sincère. M. Rochebloine est un modèle de modération. Nous le connaissons bien.

L’Assemblée nationale s’honorerait en votant cet amendement en faveur des conjoints survivants. Monsieur le ministre, ces derniers auraient mérité que le Gouvernement soutienne cette initiative.

(L’amendement no 150 n’est pas adopté.)

M. le président. Monsieur Rochebloine, avant que nous ne passions au vote de l’amendement n° 227, maintenez-vous l’amendement n° 228 ?

M. François Rochebloine. Je le retire.

(L’amendement n° 228 est retiré.)

M. le président. Je mets donc aux voix l’amendement n° 227.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 88

Nombre de suffrages exprimés 88

Majorité absolue 45

(L’amendement n° 227 n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets enfin aux voix l’amendement n° 149.

(L’amendement n° 149 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour soutenir l’amendement n° 154.

M. Jean-Jacques Candelier. Cet amendement, qui vise à transférer 1,97 million d’euros, permet de maintenir l’enveloppe budgétaire de l’ONAC pour ne pas réduire le nombre de bénéficiaires de l’aide différentielle pour les conjoints survivants et éviter le recul des acquis.

En effet, il manque 1,97 million pour assumer l’ADCS en 2013. Cet amendement doit être impérativement adopté. Concrètement, si rien n’était fait, l’ONAC serait contrainte de durcir les critères de l’aide sociale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Je soutiens cet amendement qui me semble cohérent par rapport à ce qui a été dit précédemment.

Une telle mesure permettrait de renforcer l’ONAC. On a beaucoup dit que la droite avait affaibli l’ONAC. Ce n’est pas forcément la réalité.

En tout état de cause, cet amendement permettrait de mener une politique sociale plus généreuse. Or, cela ne me paraît pas contradictoire avec la ligne du Gouvernement. Il serait en effet incohérent que la majorité socialiste s’oppose à une mesure sociale soutenue par les communistes et la droite.

M. le président. La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Je rappelle qu’un effort sans précédent est réalisé pour abonder les crédits d’aide sociale de l’ONAC : 500 000 euros en 2013, puis une aide cumulative sur les deux années suivantes, soit 3 millions d’euros d’ici à 2015. Le budget de l’aide sociale de l’ONAC s’élevant à 20 millions d’euros, il s’agit d’un effort significatif. Le ministre nous a indiqué à l’instant que, compte tenu des contraintes budgétaires de l’Office, il n’était pas évident que le plafond de 900 euros puisse être respecté en 2013 et qu’il était en train d’étudier la manière dont les choses pourraient évoluer positivement durant l’année.

M. Gérald Darmanin. Qui est ministre ?

M. Régis Juanico. Il a même évoqué, à propos des amendements de François Rochebloine visant à porter le plafond de ressources à 964 ou 932 euros, la possibilité que celui-ci soit réévalué, en fonction, là encore, de la situation budgétaire concrète de l’ONAC. Nous devons donc, me semble-t-il, laisser au Gouvernement et au conseil d’administration de l’Office le soin de gérer ces questions.

Je rappelle que, dans le passé, ce dernier a décidé de son propre chef, en l’absence de toute décision du Gouvernement et d’amendements parlementaires, de relever ce plafond de ressources en cours d’année. Il me paraît donc réaliste d’attendre de connaître la situation financière exacte de l’ONAC pour aller de l’avant.

M. Christophe Léonard. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Monsieur le ministre délégué, nous prenons acte des 500 000 euros que vous avez annoncés pour 2013. S’agissant en revanche des montants prévus pour les années suivantes – 1 million et 1,5 million d’euros –, nous n’avons aucune certitude.

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense. C’est la parole du ministre !

M. François Rochebloine. Vous ne pouvez pas prendre un tel engagement pour 2014 et 2015 : ce n’est pas possible ! Pour ce qui est de ces 500 000 euros, ils sont, certes, indispensables, mais je rappelle que, l’an dernier, nos collègues de l’opposition souhaitaient que le plafond de ressources corresponde au seuil de pauvreté. Les conjoints survivants méritent amplement une telle mesure. C’est pourquoi je suis favorable au relèvement de ce plafond.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Kader Arif, ministre délégué. Monsieur Rochebloine, nous avons non seulement les 500 000 euros prévus pour 2013, mais aussi le million de l’année 2014 et le million et demi de 2015, car il s’agit d’un budget triennal. Nous sommes donc sûrs d’avoir les 3 millions sur lesquels je me suis engagé. C’est pourquoi je me suis permis de vous faire une proposition, et je maintiens l’engagement que j’ai pris devant vous.

(L’amendement n° 154 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 140, 226 et 152, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Marc Laffineur pour soutenir l’amendement n° 140.

M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre délégué, permettez-moi de relever avec humour quelques contradictions dans vos propos sur l’ONAC. Soit, comme vous nous l’expliquez depuis le début de notre débat, son budget est exsangue et on ne peut rien faire ; soit, comme vous venez de l’indiquer à François Rochebloine, l’allocation différentielle pourra être portée à 932 euros et il faut en conclure que son budget n’est pas exsangue et donc qu’il a été bien géré.

J’en viens à l’amendement. Chacun peut comprendre que, dans la situation actuelle, vous ne disposiez pas de beaucoup de financements pour les anciens combattants. C’est pourquoi nous n’avons déposé qu’un petit amendement. En effet, la mesure que nous proposons, c’est la moindre des choses que l’on puisse faire pour les anciens combattants. Nous souhaitons – et c’est une promesse qui avait été faite l’année dernière – que tous ceux qui ont servi au moins quatre mois en Algérie au cours d’une période à cheval sur la date du 2 juillet 1962 puissent bénéficier de la retraite du combattant. On estime le coût de cette mesure à 5 millions d’euros, dans l’hypothèse où toutes les personnes concernées en réclameraient le bénéfice, ce qui n’est pas du tout certain. Il s’agit donc d’une petite somme et il me semble que le Gouvernement pourrait donner un avis favorable à cet amendement. Ainsi ce budget ne serait pas dépourvu de mesures nouvelles en faveur des anciens combattants. Ce petit geste traduirait la prise en compte du monde combattant.

M. le président. Sur les amendements nos 140 et 226, je suis saisi d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. François Rochebloine, pour soutenir l’amendement n° 226.

M. François Rochebloine. Monsieur le ministre délégué, je souscris pleinement aux propos de notre collègue Marc Laffineur. En confirmant l’engagement que vous avez pris dans le cadre de votre programme triennal – ce dont je vous remercie –, vous nous avez tendu une perche. Plutôt que d’annoncer que vous étudierez les possibilités – et je ne doute pas que vous ferez le maximum pour obtenir satisfaction dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 –, pourquoi ne prenez-vous pas le même engagement que pour le relèvement du plafond de l’aide différentielle ? Le monde combattant attend cette mesure depuis longtemps. Inscrivez-la dans le programme triennal : ce ne serait plus une promesse, mais une certitude. Dès lors, je retirerais mon amendement et je suis convaincu que Marc Laffineur ferait de même.

Certains disaient que les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent.

M. Régis Juanico. C’est un expert qui parle !

M. François Rochebloine. Non, je ne parle pas en tant qu’expert. Je me suis souvent opposé aux gouvernements, quels qu’ils soient. Monsieur le ministre délégué, je le répète, si vous prenez cet engagement, je serai prêt à retirer mon amendement, car je suis persuadé que le monde combattant serait satisfait de cette avancée importante. Je compte sur vous !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour soutenir l’amendement n° 152.

M. Jean-Jacques Candelier. Les anciens combattants nous regardent et nous écoutent. Je sais que l’héritage est loin d’être brillant. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je vous ai entendu, monsieur le ministre délégué – je vous ai compris, comme disait le Général. (Sourires.)

M. Charles de La Verpillière. Enfin une bonne parole !

M. Jean-Jacques Candelier. Mais il est des décisions que l’on ne peut retarder continuellement. C’est le cas de l’octroi de la carte du combattant pour cent vingt jours de présence en Afrique du Nord, à cheval sur la date du 2 juillet 1962. Si l’UMP a déposé des amendements en ce sens, je rappelle, sans faire de polémiques, qu’en dépit des promesses, rien n’a été fait sur ce point sous le gouvernement précédent. Cette mesure coûterait 5,5 millions d’euros. J’ajoute que, si tous les groupes se ralliaient à notre amendement, nous n’en tirerions aucune gloire partisane.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 140, 226 et 152 ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Je vais le répéter une nouvelle fois : la mesure me paraît intéressante. Suis-je pour autant favorable à ces amendements ? Non. En effet, cette mesure n’est pas financée, et elle est gagée…

M. François Rochebloine. Comme le reste !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Attendez, monsieur Rochebloine. Cette mesure, disais-je, a été gagée sans scrupule – mais cela relève de la technique législative – sur le programme « Liens entre la Nation et son armée ». Or, chaque amendement est gagé sur ce programme, de sorte que, si l’on suivait l’ensemble de vos prescriptions, ce programme serait entièrement supprimé. C’est la raison pour laquelle, puisque nous n’avons pas les moyens de financer la mesure proposée, je suis défavorable à ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Un certain nombre d’arguments ont été avancés. Permettez-moi de faire un petit rappel historique. Pendant cinq ans, rien n’a été fait... (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. François Rochebloine. Vous êtes au Gouvernement, maintenant !

M. Kader Arif, ministre délégué. …et, si mes souvenirs sont bons, monsieur Laffineur, l’an dernier, vous avez, en tant que ministre, donné un avis défavorable à un amendement similaire.

M. Marc Laffineur. En disant que ce serait pour l’année prochaine : relisez le compte rendu des débats ! (Sourires.)

M. Kader Arif, ministre délégué. Pour que les choses soient claires, je tiens à préciser que le budget de l’ONAC n’a pas été bien géré. La proposition que j’ai faite s’inscrit dans le cadre de l’avancée que représente la programmation de 500 000 euros en 2013, d’un million en 2014 puis d’un million et demi en 2015, soit 3 millions cumulés, car, actuellement, à cause de décisions non budgétées que vous avez prises, le fonds de roulement du budget de l’ONAC met celui-ci en grande difficulté. Mais nous aurons l’occasion d’y revenir ultérieurement, lorsque nous traiterons du budget de l’ONAC.

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Monsieur le rapporteur, « Errare humanum est, perseverare diabolicum » : cela fait deux fois que vous nous dites que la mesure est intéressante, et deux fois que vous vous y déclarez défavorable !

Monsieur le ministre délégué, vous ne répondez pas sur le fond aux amendements de nos collègues. De quoi s’agit-il ? Des appelés ont servi en Algérie pendant une période d’au moins quatre mois qui s’étend au-delà du 2 juillet 1962, date qui marque la fin de la guerre d’Algérie. Or, après cette date, ces appelés ont participé à des combats, parfois meurtriers : certains y ont perdu la vie et des milliers de harkis ont été massacrés. Les priver du statut de combattant est donc une injustice.

Dans l’exposé sommaire de son amendement, M. Laffineur résume très bien la situation. Je vais donc vous en lire un extrait, monsieur le ministre délégué, si vous voulez bien avoir l’amabilité d’écouter le parlementaire que je suis (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : « Rien ne distingue un soldat arrivé en Algérie le 2 mars 1962 d’un camarade arrivé un ou deux jours plus tard. La carte du combattant doit être attribuée à tout soldat qui a débuté son service en Algérie avant l’indépendance et y a servi quatre mois. »

Ce que nous proposent M. Laffineur, M. Rochebloine et M. Candelier, c’est le retour de la justice que la majorité appelle de ses vœux, comme elle nous le répète à longueur de discours. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. La mesure proposée dans ces amendements n’est pas du même ordre que celles qui ont été discutées un peu plus tôt. Il appartient au Gouvernement de faire le choix d’augmenter ou non certaines prestations. Mais, ici, il n’est pas question d’opportunité budgétaire ni même d’opportunité politique : il s’agit d’une créance.

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Julien Aubert. Ces gens ont combattu ; nous leur devons ce statut. Vous me direz : « Vous ne l’avez pas fait ! » (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. François Rochebloine. Ce n’est pas une raison pour ne pas agir !

M. Julien Aubert. J’ai été élu en juin, mais j’assume le bilan de la précédente majorité.

Cela étant, si vous avez été élus, c’est peut-être pour faire ce que nous n’avons pas fait ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Nous vous donnons les moyens, chers collègues, de nous donner une grande leçon – une fois n’est pas coutume ! Je préfère reconnaître que la précédente majorité a eu tort, et vous voir voter une mesure de justice, plutôt que de m’entêter à prétendre que nous n’avions pas à prendre cette mesure. Il s’agit d’une mesure de justice, d’une mesure de droit, et non d’une mesure d’opportunité. La question n’est pas de savoir si nous aurions pu ou nous aurions dû prendre cette mesure : nous avons aujourd’hui à le faire, et c’est tout ce qui compte : il y va de l’honneur de la France ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Guilloteau.

M. Christophe Guilloteau. Je suis d’accord avec M. Aubert pour considérer qu’il y va de l’honneur de la France. Depuis tout à l’heure, j’ai l’impression que tout le monde est d’accord sur le fond au sujet de cette mesure, qu’il s’agisse de ceux qui en demandent la mise en œuvre, ou de ceux qui voudraient bien l’adopter, mais disent ne pas le pouvoir. On peut, de cette manière, tourner en rond et se jeter des anathèmes à la figure pendant longtemps. Aux nouveaux parmi nous, je rappellerai un principe très simple : l’important n’est pas d’arriver ici, mais d’y revenir,…

M. François Rochebloine. Très bien !

M. Christophe Guilloteau. …et pour revenir, il vaut mieux tenir ses promesses. Certes, on pourra nous reprocher de ne pas avoir pris cette mesure, mais nous avons fait d’autres choses : ainsi, nous avons augmenté la retraite des anciens combattants.

Monsieur le ministre, je rappelle tout de même qu’onze amendements, présentés en commission de la défense, ont été refusés. De grâce, vous n’allez tout de même pas rentrer ce soir dans votre joli ministère sans avoir pris une mesure tenant compte de ce que tout le monde demande, à savoir de permettre l’attribution de la carte du combattant aux anciens combattants ayant servi en Algérie à cheval sur la date du 2 juillet 1962 ! N’oublions pas qu’il y a eu, malheureusement, de nombreux morts après cette date.

Ne nous figeons donc pas dans des postures politiques commandées par l’appartenance à tel ou tel groupe politique. Vous dites que vous êtes d’accord, monsieur le ministre, et le rapporteur dit de même. Dès lors, la question semble pouvoir faire l’objet d’un consensus. Trouver le budget correspondant n’est pas un obstacle : certes, il y a des contraintes budgétaires, mais c’est une somme qui n’a rien d’énorme, surtout du point de vue de l’histoire.

Monsieur le ministre, pensez aux personnes qui se trouvent ce soir dans les tribunes : ce sont des anciens combattants qui attendent de vous quelque chose de cohérent. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. François Rochebloine. Je demande la parole !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 140.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 89

Nombre de suffrages exprimés 87

Majorité absolue 44

(L’amendement n° 140 n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets maintenant aux voix l’amendement n° 226.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 94

Nombre de suffrages exprimés 94

Majorité absolue 48

(L’amendement n° 226 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 152 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 151 et 221, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour soutenir l’amendement n° 151.

M. Jean-Jacques Candelier. Le présent amendement vise à renforcer de 5 millions d’euros les possibilités d’intervention du programme 169 et de son action 01 afin de financer une hausse de valeur du point de pension militaire d’invalidité, lié à l’évolution de l’indice INSEE des traitements bruts de la fonction publique.

Les députés du Front de gauche dénoncent la poursuite du gel du point d’indice de la fonction publique, qui conduit à une baisse du pouvoir d’achat pour les fonctionnaires, donc à la récession. Ce n’est pas ainsi que l’on réglera le problème du déficit de l’État. Le gel des traitements pénalise aussi le monde combattant, du fait de l’absence d’évolution de la valeur du point de pension militaire d’invalidité. Nous estimons qu’il est possible de revaloriser le point de PMI en intégrant une part moyenne de la valeur des primes versées aux fonctionnaires de l’État.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine pour soutenir l’amendement n° 221.

M. François Rochebloine. Monsieur le président, je regrette que vous ne m’ayez pas donné la parole tout à l’heure – peut-être ne me suis-je pas suffisamment manifesté –, car j’avais encore quelque chose à dire. J’aimerais en effet que M. le ministre réponde à ma question relative à l’application de la règle des trois ans à l’octroi de la carte du combattant. Certes, il a pris un engagement, mais celui-ci ne figure nulle part – alors que, nonobstant la règle de l’annualité budgétaire, il a la possibilité de le concrétiser, comme il l’a fait pour l’ONAC.

Il est tout de même dommage de ne rien faire, alors que le montant des sommes en jeu est estimé à 5 millions d’euros, pour environ 8 000 anciens combattants, dont le plus jeune a aujourd’hui 70 ans. Le temps passe très vite, monsieur le ministre, c’est pourquoi j’aimerais vraiment avoir une réponse claire de votre part sur ce point.

Pour en revenir à notre amendement, le groupe UDI a voté, tout à l’heure, l’amendement présenté par nos collègues de l’UMP, ayant pour objet d’augmenter de deux points l’indice de la retraite du combattant. Ce que nous proposons maintenant, c’est de revoir la méthode de détermination du rapport constant servant à calculer la valeur du point PMI. Pouvez-vous prendre l’engagement, monsieur le ministre, de créer une commission tripartite associant le monde combattant, les parlementaires – députés et sénateurs – ainsi que le ministère, afin de formuler une proposition recueillant l’accord de tous ?

Vous nous avez dit tout à l’heure qu’il y avait eu un accord. Certes, mais cet accord est ancien et, depuis sa conclusion, la situation a beaucoup évolué. Si les critères retenus étaient certainement justes à l’époque, ils sont aujourd’hui dépassés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Cet amendement est quelque peu surprenant, monsieur Rochebloine. Comme vous l’avez dit, les pensions évoluent en fonction de l’indice de la fonction publique – et cet indice n’évoluant pas, les pensions n’évoluent pas non plus.

M. François Rochebloine. Et cela ne date pas d’aujourd’hui !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Si vous êtes tellement attachés à cette proposition, pourquoi n’avez-vous pas vous-mêmes fait évoluer la valeur de l’indice de la fonction publique ?

M. François Rochebloine. Je l’ai demandé !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Mais vous n’avez pas été écouté, et c’est dommage.

En fait, deux stratégies sont possibles. Ainsi, on peut prendre pour base le montant de primes de la fonction publique, ce qui pose une question, celle de savoir à quelles primes il convient de se référer – celles des services sociaux, celles de l’éducation nationale, celles du ministère des finances ou d’autres encore. De votre côté, monsieur Rochebloine, vous proposez l’adoption d’un nouveau mode de calcul.

M. François Rochebloine. Tout à fait !

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Pour ma part, je suis défavorable à l’amendement de M. Candelier et, en ce qui concerne le vôtre, je vais écouter attentivement le ministre sur ce point qui n’a pas été débattu en commission.

M. Gérald Darmanin. Quel suspense ! Vous parlez d’une majorité !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Je vais commencer par rassurer M. Rochebloine en disant que je suis favorable à l’idée d’une mission associant les partenaires qu’il a évoqués : cela me paraît être la manière la plus transparente pour procéder à une évolution qui paraît effectivement souhaitable, étant précisé que nous ne disposons pas, en l’état actuel, des outils qui nous permettraient d’évaluer les choses avec toute la précision souhaitée.

Je suis, en revanche, défavorable à l’amendement présenté par M. Candelier.

Pour ce qui est des engagements pris au sujet des combattants ayant servi « à cheval » sur la date du 2 juillet 1962, j’ai exprimé tout à l’heure ma volonté politique d’y parvenir en 2014, en trouvant les 5,5 millions d’euros nécessaires. Vous connaissez le budget aussi bien que moi, et savez donc qu’on ne peut jouer que sur très peu de lignes budgétaires. Or, je ne veux pas toucher aux crédits du programme « Liens entre la Nation et son armée », en particulier à la journée défense et citoyenneté – si je le faisais, je manquerais singulièrement de cohérence.

M. Gérald Darmanin. À l’image du Gouvernement !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je suis donc favorable à ce que l’on évolue sur cette question sur la base de 8 000 bénéficiaires supposés, pour un coût estimé à 5,5 millions d’euros, mais seulement dans deux ans.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Comme j’ai l’habitude de respecter mes propres engagements, je veux croire que M. le ministre en fait de même et lui fais donc confiance pour créer la commission tripartite. Je retire donc mon amendement.

(L’amendement n° 221 est retiré.)

(L’amendement n° 151 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 148, 229 et 185, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour soutenir l’amendement n° 148.

M. Jean-Jacques Candelier. Nous pouvons être raisonnables tout en étant ambitieux. En l’occurrence, si notre ambition consiste à porter, à terme, le plafond de la rente mutualiste à 130 points d’indice, nous considérons qu’il serait raisonnable, dans le cadre de ce budget, de transférer 2,5 millions d’euros de l’action « Journée défense et citoyenneté » afin de financer une hausse d’un demi-point du plafond majorable de la rente mutualiste.

C’est bien le minimum, car après avoir été porté à 125 points d’indice au 1er janvier 2007, ce plafond n’a fait l’objet d’aucune augmentation depuis. Et que l’on ne vienne pas me dire que ce dispositif n’intéresse que les nantis, et que les Français misent sur la capitalisation : les Français ne mettent pas leurs économies dans la rente mutualiste, croyez-moi, ils trouvent des placements beaucoup plus rémunérateurs !

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour soutenir l’amendement n° 229.

Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Vous avez la parole, monsieur Rochebloine.

M. François Rochebloine. Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, je propose, comme je l’ai déjà fait en vain l’année dernière, de majorer d’un point la rente mutualiste – si nous faisons un petit pas chaque année, nous finirons par atteindre les 130 points.

Avec tout le respect que l’on vous doit, monsieur le ministre, je ne suis pas d’accord quand vous employez l’expression de « niche fiscale ». Le monde combattant, qui vous écoute et va vous lire, va être absolument furieux, comme il l’a déjà été précédemment quand vos prédécesseurs ont utilisé ces termes. Il y avait eu alors des réactions violentes, ce que l’on peut comprendre tant la qualification de niche fiscale est inappropriée dans ce domaine.

Je le répète, une augmentation régulière d’un point serait tout à fait correcte. Il faut savoir que tout le monde ne peut pas bénéficier de la rente mutualiste : à l’heure actuelle, seuls 26 % d’anciens combattants, me semble-t-il, ont les moyens de cotiser. Des engagements ont été pris précédemment à ce sujet, et je souhaite qu’ils soient tenus.

M. le président. La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l’amendement n° 185.

M. Julien Aubert. Si Nicolas Sarkozy n’a pas été réélu, nous souhaitons tout de même, avec l’amendement n° 185, faire preuve de cohérence en faisant en sorte de tenir l’un des engagements du candidat que nous soutenions, consistant à augmenter progressivement la rente mutualiste créée au lendemain de la Première Guerre mondiale, pour la porter à 130 points d’indice.

La compréhension dont fait montre M. le ministre contraste favorablement avec l’attitude de certains de ses collègues du Gouvernement, beaucoup moins à l’écoute de l’opposition. Cela dit, si les sommes dont il est ici question, de l’ordre de quelques millions d’euros, peuvent représenter des transferts importants au sein de votre budget, monsieur le ministre, elles ne sont tout de même pas énormes : ce sont pratiquement des queues de cerise par rapport au budget de l’État ! Ainsi, 5 millions d’euros ne représentent qu’un dix-millième des 50 milliards d’euros que rapporte à lui seul, chaque année, l’impôt sur le revenu !

Dès lors, monsieur le ministre, ne pourriez-vous batailler plus ferme avec le ministre du budget pour obtenir davantage de moyens ? Ce que nous souhaitons correspond, en fait, à peine à l’épaisseur du trait !

En l’occurrence, en majorant d’un point la rente mutualiste, nous ferons un premier pas, qui, je l’espère, sera suivi de quatre autres, pour parvenir aux 130 points d’indice dans cinq ans, une mesure chiffrée entre 1,7 et 2 millions d’euros. Il ne s’agit pas d’une niche fiscale, au sens où il n’y a pas d’optimisation fiscale. Je ne crois pas que l’on puisse considérer que ce soit un calcul financier ou budgétaire qui préside aux revendications des groupes UMP et UDI.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Il s’agit bien d’un placement, abondé par l’État et qui, de surcroît, est défiscalisé. On peut changer le vocabulaire et dire qu’il ne s’agit pas d’une niche fiscale, mais cela y ressemble beaucoup. Faut-il maintenir des niches fiscales pour le monde combattant ? C’est une autre question, que je veux bien aborder. Qui est concerné ? Aujourd’hui, 85 % de ceux qui cotisent ne sont pas au plafond et ont donc la possibilité d’augmenter encore leurs placements. Le relèvement du plafond ne concernerait que 14 % des bénéficiaires.

M. François Rochebloine. Et alors ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Ne pensez-vous pas que, dans cette période de restriction budgétaire, où nous sommes d’accord sur un certain nombre de points et où les seuls freins sont financiers, il ne vaudrait pas mieux revaloriser la retraite du combattant, si on en avait la possibilité, plutôt que de favoriser ce véhicule ? Je le crois pour ma part, et suis défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Kader Arif, ministre délégué. La vie politique est toujours surprenante, qui fait que l’on retrouve sur différents bancs des positions communes en faveur d’une retraite par capitalisation. Je continue – pardon pour cette maladresse, monsieur le député – à considérer comme une niche fiscale un dispositif qui coûte chaque année, y compris les 30 millions d’euros de recettes fiscales qui ne sont pas au rendez-vous, 300 millions à l’État, et qui ne concerne que 26 ou 27 % du monde combattant, parmi lesquels seuls 14 % atteignent le plafond. Nous pouvons nous accorder à considérer que c’est peu. Et sans croire que le monde combattant soit un monde aisé, ce sont les plus aisés du monde combattant qui sont concernés.

M. François Rochebloine. Il faut mettre des guillemets !

M. Kader Arif, ministre délégué. Je suis défavorable, presque par philosophie, à ces amendements car je pense que l’effort doit être accompli en matière sociale. De plus, relever le plafond ne favoriserait que quelques personnes et constituerait un manque à gagner important pour la puissance publique.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Monsieur le ministre, je peux comprendre vos arguments mais j’espère que nos collègues, qui défendaient encore l’an dernier des amendements similaires, parfois même communs, ne renieront pas leurs positions passées et voteront notre amendement.

(L’amendement n° 148 n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets maintenant aux voix l’amendement n° 229.

M. François Rochebloine. On regardera les noms !

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 95

Nombre de suffrages exprimés 95

Majorité absolue 48

(L’amendement n° 229 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 185 n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation ».

(Les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » sont adoptés.)

Après l’article 62

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 157 et 223, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour soutenir l’amendement n° 157.

M. Jean-Jacques Candelier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour soutenir l’amendement n° 223.

M. François Rochebloine. Il est défendu.

(Les amendements nos 157 et 223, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour défendre l’amendement n° 233.

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis. Les conjoints survivants de très grands invalides se trouvent fréquemment démunis lors du décès de l’ouvrant-droit, alors qu’ils doivent faire face seuls aux frais du ménage et aux difficultés causées par le décès. Il existe une disproportion considérable entre la pension que percevait l’invalide et celle versée au conjoint survivant, 500 points au taux normal pour un soldat en application de l’article L. 50 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, majorée forfaitairement de 15 points depuis 2004.

Cette disproportion est d’autant plus choquante que, dans presque tous les cas, le conjoint survivant a apporté ses soins à l’invalide. Les lois de finances pour 2011 et 2012 avaient corrigé à la marge ce système en octroyant un complément de pension de 360 points aux veuves d’invalides bénéficiant de pensions de plus de 11 000 points. Il est temps d’aller plus loin.

Cet amendement prévoit que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur ce sujet. J’associe à cette demande mon collègue Daniel Boisserie, qui n’est pas là pour défendre l’amendement identique qu’il avait déposé.

(L’amendement n° 233, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 158 et 222, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour soutenir l’amendement n° 158

M. Jean-Jacques Candelier. Je me demande si nous devons poursuivre la discussion. Je constate en effet que les amendements sont systématiquement rejetés et que le groupe SRC est très discipliné. On pourrait presque passer de l’examen du budget en conseil des ministres à la promulgation de la loi par le Président de la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ce n’était pas mieux de votre temps, messieurs de l’opposition ! (Sourires.)

J’en viens à mon amendement. Tous les parlementaires avertis connaissent le scandale que constitue le décret du 29 juillet 2010 portant, soi-disant, attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord.

Je m’adresse à tous mes collègues, car une chose est de dénoncer quand on est dans l’opposition, une autre est d’agir quand on est en responsabilité ! Nous, députés communistes et du Front de gauche, agissons de manière constante, quel que soit le gouvernement, pour faire avancer les dossiers qui touchent à la justice élémentaire.

Sur la campagne double, si une loi était nécessaire – ce qui n’est pas certain – nous avons déposé la proposition de loi n° 326.

Par cet amendement, nous demandons simplement un rapport d’information au Gouvernement, avant la fin de l’année, car c’est très urgent !

Si la représentation nationale veut faire preuve de bonne volonté pour accorder réellement le bénéfice de la campagne double à tous les anciens d’Afrique du Nord, il suffit d’adopter, en pis-aller, notre amendement. Cela ne réglera pas le problème, mais constituera un geste symbolique.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine pour soutenir l’amendement n° 222.

Sur cet amendement, je suis saisi par le groupe Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

M. François Rochebloine. Alors que le Gouvernement a pris par décret en date du 29 juillet 2010 des dispositions concernant l’attribution de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord, ses articles 2 et 3 écartent la grande majorité des anciens combattants d’Afrique du Nord fonctionnaires et assimilés du bénéfice de la campagne double. L’article 3 écarte les bénéficiaires potentiels les plus nombreux, dont les pensions avaient été liquidées avant le 19 octobre 1999.

Cet amendement vise à demander au Gouvernement de définir les modalités de mise en œuvre d’un décret attribuant le bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord fonctionnaires et assimilés.

Monsieur le ministre, je rappelle que la référence de la loi de 1999 n’est pas la bonne. La seule date de référence acceptable est le 9 décembre 1974, qui correspond à la reconnaissance de la qualité de combattant en Afrique du Nord. Cela réglerait le problème de la campagne double. Il s’agit simplement d’une question d’équité entre les différentes générations du feu. Je ne vois pas pourquoi cette troisième génération serait pénalisée par rapport aux précédentes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Les données du problème sont connues. Ce n’est plus qu’une question de décision politique, qui dépend des faibles moyens que vous nous avez légués. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission de la défense.

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense. Cette question a été régulièrement soulevée, sur tous les bancs de cette assemblée. Je propose, après en avoir parlé avec le ministre, que la commission de la défense confie une mission d’information sur le sujet, à notre rapporteure par exemple. Son bureau se réunira prochainement pour en décider. Je convierai alors le Gouvernement, en la personne de M. le ministre, pour venir discuter des conclusions de ce rapport devant la commission. Cela vous convient-il, monsieur le ministre ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Kader Arif, ministre délégué. La proposition de Mme la présidente m’agrée tout à fait.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Je maintiens mon amendement !

(L’amendement n° 158 n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 222.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 93

Nombre de suffrages exprimés 93

Majorité absolue 47

(L’amendement n° 222 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour soutenir successivement les amendements nos 231 et 232.

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis. Ils sont défendus.

(Les amendements nos 231 et 232, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 204 et 224.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier pour soutenir l’amendement n° 204.

M. Jean-Jacques Candelier. Nous constatons tous que le dispositif d’indemnisation des victimes des essais nucléaires ne donne pas satisfaction. Sur plus de 700 dossiers reçus, seulement sept ont fait l’objet d’une réponse positive. Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport d’information pour améliorer le dispositif. Dans notre esprit, c’est bien la charge de la preuve qu’il faudra inverser dans l’établissement du lien de causalité entre la pathologie des personnes et leur exposition à la radioactivité.

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine pour soutenir l’amendement n° 224.

M. François Rochebloine. Nous sommes unanimes : il faut faire quelque chose. Cet amendement vise à demander au Gouvernement de définir de manière précise les modalités de mise en œuvre d’un décret qui permettrait une reconnaissance et une indemnisation effective des victimes des essais nucléaires. Plus de 700 dossiers ont été déposés. Seuls quatre – sept, selon le ministre – ont connu une issue positive. Nous ne pouvons en rester là ! Comment comptez-vous régler ce problème, monsieur le ministre ? Vous avez rencontré sans doute des victimes de ces essais. Pour ma part, j’ai pu constater les difficultés auxquelles elles sont confrontées. Il y a urgence. Je serais prêt à retirer cet amendement si vous nous apportiez, de manière très claire, des précisions sur ce que vous comptez faire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Terrier, rapporteur spécial. Favorable.

J’ai fait état de cet amendement dans mon rapport de présentation, et j’avais interrogé le ministre à ce sujet. Je suis favorable au dépôt d’un tel rapport, absolument indispensable pour pouvoir régler ce problème.

M. François Rochebloine. Merci, monsieur le rapporteur !

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission de la défense.

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense. Ce rapport est nécessaire. Je rappelle que la commission de suivi compte un député parmi ses membres.

La loi a été votée alors que nous avions précisé – j’étais, à l’époque, membre de l’opposition – les manques qu’il y avait dans ce texte et les conclusions auxquelles on pouvait s’attendre. Cela s’est malheureusement vérifié.

M. François Rochebloine. Il faut réparer !

Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense. Absolument ! Il est temps de réparer cette injustice, sans compter que les crédits sont là puisque, monsieur le ministre délégué, vous avez maintenu les 10 millions d’euros. J’espère que vous pourrez accéder à cette demande de rapport.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure pour avis.

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis. J’ai une demande à adresser à M. le ministre délégué et une remarque à faire à mes collègues de l’opposition.

Monsieur le ministre délégué, vous avez dit tout à l’heure que l’équipe australienne de rugby serait la prochaine invitée du 11 novembre à l’Arc de Triomphe. Ce serait un beau symbole si, la veille, lors du match France-Australie, l’équipe de France pouvait arborer le bleuet durant les hymnes nationaux et si une minute de silence était respectée, en commémoration de tous les soldats morts pour la France et de tous les soldats alliés morts pendants les deux guerres mondiales.

J’en viens à la remarque que je veux faire à mes collègues de l’opposition, des deux côtés extrêmes de l’hémicycle. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP, UDI et GDR.)

M. François Rochebloine. Extrêmes ? Vous plaisantez !

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis. Chers collègues de l’opposition, je voudrais vous dire à quel point je suis choquée. Je suis une députée nouvellement élue et j’ai été très choquée par votre comportement. Vos demandes sont légitimes, mais gager tous vos amendements sur les crédits de la Journée défense et citoyenneté est scandaleux ! (Nouvelles exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. François Rochebloine. C’est ce que faisaient vos prédécesseurs !

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis. Vous êtes incohérents. Vous vous drapez dans les valeurs républicaines, mais en réalité, vous les foulez aux pieds !

M. le président. Madame la rapporteure pour avis, ce n’est pas le sujet. Il s’agit d’une demande de rapport et il n’y a pas de gage.

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, rapporteure pour avis. Monsieur le président, j’en termine.

S’en prendre à la Journée défense…

M. le président. Madame la rapporteure pour avis, ces amendements ne sont pas gagés. Vous abordez un sujet qui n’est pas pertinent à ce moment du débat.

Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements ?

M. Kader Arif, ministre délégué. Favorable.

Pour répondre à la question concernant le bleuet, j’ai eu le président de la Fédération française de rugby au téléphone. Je peux vous dire que cette année, ce n’est pas l’Équipe de France, mais le président de la Fédération française de rugby qui l’arborera, ainsi qu’un certain nombre de ses dirigeants.

M. le président. La parole est à M. Jonas Tahuaitu.

M. Jonas Tahuaitu. Monsieur le ministre délégué, ma question porte sur la loi relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires en Polynésie française.

La procédure d’indemnisation pour les personnes atteintes de maladies résultant d’une exposition aux rayonnements des essais nucléaires, prévue par la loi du 5 janvier 2010, n’est pas efficace au regard du nombre de dossiers ayant abouti à une indemnisation : il y a eu quatre indemnisations pour 772 dossiers présentés. C’est peu, voire inexistant. Il est clair qu’un vrai changement est nécessaire. Nécessaire, car derrière chaque dossier de demande d’indemnisation, n’oublions pas qu’il y a un être humain qui souffre, ou des familles qui ont perdu un être cher.

Monsieur le ministre délégué, quels changements pouvons-nous espérer dans ce dossier ? Et quand seront-ils effectués ?

Au nom de toutes les associations défendant les victimes des essais nucléaires, nous vous demandons une réponse claire et précise. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

M. le président. La parole est à M. Christophe Guilloteau.

M. Christophe Guilloteau. Je constate qu’à cette heure, les passions s’emballent !

Je voudrais dire à la présidente de la commission qu’elle a raison de proposer une mission. Cela va dans le sens de l’intérêt général.

Ce texte a été voté au cours de la précédente mandature. Nous l’avons peut-être élaboré avec les contours qui étaient les nôtres à l’époque sans voir la problématique médicale. Mais le budget était là. Il convient aujourd’hui de revoir ce schéma.

En tout cas, je vous remercie d’avoir demandé ce rapport qui me paraît nécessaire. Au regard des sommes engagées et budgétées et des dossiers retenus aujourd’hui, il y a quelque chose qui ne va pas. Il faut en tenir compte.

À partir des travaux de la commission de la défense, nous pourrons peut-être faire une nouvelle projection et faire en sorte qu’un certain nombre d’hommes et de femmes ne soient pas exclus du dispositif. Notre collègue vient de le dire, il y a des hommes et des femmes qui souffrent dans leur chair d’avoir simplement fait, à l’époque, leur devoir de militaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Madame la rapporteure pour avis, après nous avoir insultés, j’espère que vous aurez l’obligeance de nous écouter ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Vous dites que nous foulons aux pieds les valeurs de la République. C’est vous qui, aujourd’hui, ne faites pas honneur à votre travail de parlementaire et de rapporteure pour avis ! Souffrez, madame, que l’opposition existe, souffrez qu’elle propose ! Et, lorsque vous répondez à ses arguments, faites en sorte d’avoir les bonnes informations.

Nous faisons notre travail d’opposants, nous sommes des élus de la République. Comme vous, madame, je suis un jeune élu de la République. C’est, comme pour vous, mon premier mandat. Je suis tout aussi légitime que vous et nous sommes tous aussi légitimes que le premier des députés élu ici. Les propos franchement scandaleux que vous avez tenus sur nous (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) ne sont pas dignes de votre fonction. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. François André.

M. François André. S’agissant des victimes des essais nucléaires, je suis quelque peu surpris, non par le texte même de l’amendement déposé par nos collègues de l’UDI, mais par les signataires de celui émanant de l’UMP.

Je suis surpris, car cet amendement ne fait que reconnaître l’échec de la mise en œuvre de la loi Morin.

M. François Rochebloine. Et alors ?

M. François André. Cet échec est assez révélateur d’une technique qui consistait à voter des lois généreuses – pour ne pas dire des lois de communication – pour mieux verrouiller leur application par des décrets extrêmement restrictifs. Cette technique aboutit au résultat crûment rappelé par l’amendement : 700 dossiers éligibles et seulement quatre personnes indemnisées !

Chacun le sait, et le ministre l’a dit devant notre commission il y a quelques semaines, le problème n’est pas budgétaire. Les 10 millions d’euros déjà prévus demeurent inscrits. Le problème, c’est qu’ils ne sont pas consommés, principalement parce que la charge de la preuve du lien entre la maladie contractée par les vétérans et l’exposition aux retombées nucléaires reste à établir par le requérant. Il est assez surprenant de voir dénoncer des dispositions que l’on approuvait hier…

Je suis surpris, enfin, que les collègues signataires de cet amendement n’aient pas réagi aux propos tenus l’autre jour en commission par un collègue de l’UMP disant – je résume – que, s’il y avait peu de personnes indemnisées, c’était parce que les vétérans eux-mêmes étaient sans doute d’une morphologie plus « consistante » que la moyenne et qu’ils n’étaient donc pas exposés au risque.

Bien entendu, je souscris pleinement à la proposition de la présidente de la commission demandant un rapport sur ce sujet. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Le Roux.

M. Bruno Le Roux. Monsieur le ministre, il est urgent que la République donne un signe, et je sais que vous y êtes prêt.

Pendant des années, certains de nos compatriotes ont été touchés dans leur chair, ont pensé que la République ne leur rendrait jamais justice, puis ont cru – nous l’avions dit à l’époque – dans un texte qui allait leur permettre de faire valoir leurs droits, texte qui se révèle être aujourd’hui une sorte de piège – je veux parler de la façon dont ils le ressentent et de la façon dont on les considère.

C’est cette urgence que je voudrais ici, au nom du groupe SRC, relayer auprès de vous avec la proposition de Patricia Adam, présidente de la commission de la défense, parce que la situation est peut-être aujourd’hui pire qu’elle ne l’était hier ; parce qu’il y a eu un texte, parce qu’il y a eu un engagement et que cet engagement n’a abouti à rien pour ceux qui, victimes de ces essais nucléaires, ont été touchés dans leur chair.

Monsieur le ministre, au nom de mon groupe, qui s’associe à cette demande de rapport, je le répète, il y a urgence à ce que la République adresse aujourd’hui un signe fort à ceux qui ont été blessés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Si de tels propos ont été prononcés, par qui que ce soit, nous ne pouvons que les désapprouver.

Cela étant, nous constatons aujourd’hui qu’il y a urgence, comme vient de le dire très justement le président du groupe socialiste. La proposition qui a été faite est intéressante, mais il va falloir aller très vite.

Rien n’est jamais parfait. Toutefois, le texte voté était assorti de crédits. Or aujourd’hui, on s’aperçoit que, sur 700 dossiers, quatre seulement ont connu une issue positive. Il y a donc urgence à régler ce problème.

(Les amendements identiques nos 204 et 224 sont adoptés.)

M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs aux anciens combattants, à la mémoire et aux liens avec la Nation.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2013 : crédits de l’agriculture, de l’alimentation, de la forêt et des affaires rurales.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)