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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 15 mai 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de Mme Laurence Dumont

1. Adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable

Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d'un projet de loi

Présentation

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

M. Philippe Plisson, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. Frédéric Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Discussion générale

M. Bertrand Pancher

M. Jacques Krabal

M. Patrice Carvalho

M. Denis Baupin

M. Serge Bardy

M. Jean-Pierre Vigier

M. Yves Blein

M. Lionel Tardy

M. Yann Capet

Mme Delphine Batho, ministre

Discussion des articles

Article 1er

M. Julien Aubert

Article 2

Article 3

Amendement no 91

Après l’article 3

Amendements nos 86, 80 rectifié, 81 deuxième rectification, 23 rectifié

Article 3 bis

Article 3 ter

Amendement no 124

Article 3 quater

Amendement no 22

Article 4

Mme Catherine Quéré

Mme Delphine Batho, ministre

Amendements nos 92, 83, 85

Articles 5 à 8

Article 9

M. Michel Heinrich

Amendements nos 8, 9, 10, 58

Article 10

Après l'article 10

Amendements nos 44, 47, 43 rectifié, 93 rectifié, 46, 48, 41, 51, 45, 94 rectifié

Mme Delphine Batho, ministre

Amendements nos 49, 50, 95, 52, 53, 42

Article 11

Avant l’article 12

Amendements nos 5 rectifié, 29

Article 12

Amendements nos 56, 97, 98, 101, 99, 100, 57, 102, 103

Après l'article 12

Amendement no 96

Article 13

Article 14

Amendements nos 59 rectifié, 60

Article 15

Article 16

Amendements nos 65 rectifié, 62 rectifié, 63 rectifié, 69, deuxième rectification, 64, 87, 90, 88, 68, 71 rectifié, 61, 66, 120, 67 rectifié, 89

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Laurence Dumont
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures quarante-cinq.)

1

Adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable

Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable. (nos 775, 913, 879)

Présentation

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Madame la présidente, monsieur le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi que vous examinez ce soir est le troisième de cette législature portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne, et le premier dans le domaine du développement durable.

La transposition de plusieurs textes européens regroupés sous une unique thématique dans un même projet de loi est un exercice pratiqué depuis plusieurs années. Mais tel qu’il est réalisé depuis peu, sous la forme de projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne – dit DDADUE – il constitue une nouveauté.

La création d’un comité de liaison avec le Parlement a renforcé la contribution des parlementaires à l’écriture du projet de loi. Dans ce cadre, les échanges entre le Gouvernement et le Parlement ont permis une définition précise du périmètre du texte.

Le travail des rapporteurs, Philippe Plisson pour la commission du développement durable et Frédéric Barbier pour la commission des affaires économiques, a permis d’approfondir les différents sujets. Je souhaite les remercier pour la qualité et la minutie du travail accompli.

L’enjeu est important. L’intégration de la législation européenne dans l’ordre juridique national, et dans les délais impartis, est une obligation essentielle inhérente à l’appartenance de la France à l’Union européenne. Tout manquement nous exposerait à des sanctions de la Cour de justice de l’Union européenne.

L’objectif fixé par la Commission européenne est de ne pas dépasser la proportion de 1 % de textes non transposés. Cette proportion s’élevait pour la France, au 1er octobre 2012, à 0,3 %, contre 0,6 % pour l’ensemble des pays de l’Union. La collaboration du Parlement et du Gouvernement permet ces bons résultats.

Le présent projet de loi prévoit, à lui seul, la transposition de six directives et l’amélioration d’ordonnances déjà transposées. Le texte initial prévoyait également la ratification de onze ordonnances. Le vote d’un amendement du rapporteur Philippe Plisson en commission permet d’y ajouter la ratification de l’ordonnance du 28 juin 2012 relative au système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Le Sénat avait déjà approuvé la ratification de ce texte essentiel, en ces temps où la mobilisation autour du marché carbone européen doit rester constante.

Si le texte est technique, son contenu transversal n’en est pas moins l’occasion pour nous d’échanger sur des sujets aussi essentiels que l’environnement, les transports et l’énergie, qui ont fait ou feront prochainement l’objet de projets de loi spécifiques.

Les trois titres du projet de loi prévoient des aménagements formels au code de l’énergie, à celui de l’environnement et à celui des transports, afin d’en améliorer la visibilité et la rationalité.

Le titre premier est relatif à l’environnement, à la santé et au travail. Il prévoit la transposition de la directive du 4 juillet 2012, dite Seveso III, concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses. Le Gouvernement présentera deux amendements sur les plans de prévention des risques technologiques, les PPRT. Déposés par plusieurs députés, dont M. Yves Blein, en commission, ils avaient été déclarés irrecevables au titre de l’article 40. Ces amendements s’inscrivant dans le champ d’application de la transposition de certaines dispositions de la directive Seveso II et portant sur le financement des PPRT, je m’étais engagée en commission à les redéposer au nom du Gouvernement.

Par ailleurs, dans le titre premier, l’introduction de nouvelles exigences du règlement du 22 mai 2012 concernant la mise sur le marché et l’utilisation des produits biocides permet certaines avancées en matière de santé environnementale.

Il est également prévu d’adapter le droit national à différentes exigences communautaires concernant la surveillance et les conditions de mise sur le marché des produits et équipements à risques tels que les artifices pyrotechniques, les appareils à gaz et les équipements sous pression, qui seront ainsi améliorées.

L’ordonnance tire les conséquences de deux décisions du 24 juillet 2009 du Conseil d’État annulant plusieurs dispositions de la partie réglementaire du code de l’environnement, issues de deux décrets relatifs aux procédures d’autorisation d’organismes génétiquement modifiés.

L’article 10 du projet de loi prévoit également la ratification de cinq ordonnances portant sur l’institution d’un comité d’entreprise européen ou d’une procédure en vue d’informer et de consulter les travailleurs.

L’ordonnance du 5 janvier 2012 a pour but d’adapter le dispositif législatif français aux nouvelles dispositions du droit communautaire prévues par la directive du 22 septembre 2010 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.

L’ordonnance du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement est également ratifiée, sans modification.

Ce sujet fait l’objet de discussions au sein des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement, que j’ai lancés ; nous aurons l’occasion d’en débattre prochainement dans le cadre de la discussion du projet de loi sur la biodiversité.

Par ailleurs, les dispositions du code rural et de la pêche maritime relatives à l’exercice de la profession de vétérinaire, modifiées par la directive relative aux services dans le marché intérieur du point de vue de la liberté d’établissement et de la libre prestation, ont suscité des échanges avec les professionnels concernés lors de l’élaboration du texte.

S’agissant des transports, le projet de loi touche à diverses questions. Je m’attacherai à évoquer les trois directives qu’il doit permettre de transposer en droit français.

Il s’agit d’abord de la directive du 25 octobre 2011 facilitant l’échange transfrontalier d’informations concernant les infractions en matière de sécurité routière, qui permet aux États membres de communiquer les informations d’immatriculation des véhicules en situation d’infraction.

La directive du 27 septembre 2011 relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, dite « Eurovignette », encadre les péages perçus sur les axes routiers du réseau transeuropéen de transport et sur l’ensemble des autoroutes de l’Union. Elle prévoit la possibilité d’appliquer le principe pollueur-payeur. La France avait déjà anticipé cette directive et poursuit son action avec l’entrée en vigueur de l’écotaxe poids lourds le 1er octobre prochain, dans des conditions protectrices pour les transporteurs grâce au mécanisme de majoration du prix de transport voté par le Parlement au mois d’avril.

Enfin, la directive du 16 février 2009 relative à la convention du travail maritime de février 2006 est également transposée. Premier instrument juridiquement contraignant de l’Organisation internationale du travail, cette convention met en place un ensemble de normes couvrant les différents domaines du droit social dans le secteur du transport maritime.

Elle fixe des normes minimales applicables à bord des navires, notamment en matière de conditions d’emploi, de santé, de sécurité au travail, d’hygiène et de bien-être, en vue de contribuer à l’amélioration des conditions de travail et de vie des gens de mer. Ce texte apporte des compléments très attendus par la profession et a fait l’objet de nombreux échanges avec les acteurs du transport maritime.

Enfin, le titre III prévoit la transposition de deux directives dans le champ de l’énergie.

La transposition de la directive du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique est conforme à l’engagement pris par le Président de la République lors de la Conférence environnementale.

Le choix a été fait de n’en transposer qu’un seul article, de façon anticipée, afin de préparer les grandes entreprises concernées à l’instauration d’un audit énergétique obligatoire d’ici le 1er décembre 2015, date d’entrée en vigueur de la directive.

Enfin, l’article 30 prévoit la transposition de la directive du 14 septembre 2009 faisant obligation aux États membres de maintenir un niveau minimal de stocks de pétrole brut et produits pétroliers.

Le titre III prévoit également la ratification de l’ordonnance du 14 septembre 2011, qui procède elle-même à la transposition en droit français des dispositions de deux directives d’avril 2009 relatives aux énergies renouvelables et aux biocarburants.

L’ordonnance du 9 mai 2011 porte codification des textes relatifs à l’énergie, en même temps qu’elle intègre au nouveau code les dispositions de transposition des directives relatives aux règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et pour celui du gaz naturel.

Je souhaite revenir un instant sur la directive relative à l’efficacité énergétique. Nous avons eu une discussion en commission – nous l’aurons certainement de nouveau – portant sur les certificats d’économies d’énergie. Les économies d’énergie sont, vous le savez, l’un des axes prioritaires de la transition énergétique et les certificats d’économies d’énergie constituent un dispositif efficace pour agir dans les secteurs diffus.

Toutefois, le dispositif actuel a montré ses limites. Sa refonte est en cours, en vue du lancement de la troisième période des certificats d’économies d’énergie, qui sera ambitieuse. Des réformes structurelles doivent être envisagées pour rendre le système plus simple, plus efficace et plus ciblé, notamment sur la rénovation énergétique des passoires thermiques et des logements précaires.

La consultation publique que j’ai lancée à ce sujet le 19 février s’est terminée à la mi-avril. L’évaluation des résultats est en cours. Vous le savez, le Premier ministre et le Gouvernement ont demandé à la Cour des comptes d’évaluer le dispositif existant.

L’objectif global de la deuxième période est aujourd’hui atteint, ce qui conduit à un ralentissement des actions d’économies d’énergie alors qu’il faut au contraire monter en puissance pour atteindre le régime de croisière, fixé par la directive efficacité énergétique à 1,5 % des ventes nationales d’énergie, hors transports.

Pour assurer la continuité du dispositif des certificats d’économies d’énergie, et dans l’attente du démarrage de la troisième période, j’ai décidé de lancer une période transitoire à partir du 1er janvier 2014. Je veux qu’il y ait continuité entre la période actuelle et la troisième période, dont les modalités précises doivent faire l’objet d’un débat avec l’ensemble des acteurs. Le taux d’effort actuel sera donc maintenu à un niveau identique. Les modalités de cette période transitoire seront identiques à celles de la deuxième période des certificats d’économies d’énergie.

Cependant, une simplification immédiate, proposée dans le cadre de la consultation publique, sera apportée en concertation avec les parties prenantes : il s’agit de la création d’un comité professionnel obligé unique de la filière fioul domestique, pour rassembler sous un même toit tous les acteurs de ce secteur.

La mise en œuvre effective de cette période transitoire se fera d’ici septembre 2013. La période transitoire durera jusqu’à la mise en œuvre de la troisième période. Pour cette dernière, le Gouvernement souhaite un objectif ambitieux d’au moins 200 térawattheures par an, conforme à nos engagements dans le cadre de la directive efficacité énergétique.

La concertation sur les réformes structurelles permettant de rendre le dispositif plus simple et plus efficace est engagée. J’attends les recommandations de la Cour des comptes et de la mission confiée à la CDC Climat sur les mécanismes de financement de l’efficacité énergétique. Telles sont les précisions que je tenais à apporter ce soir pour répondre aux questionnements de l’ensemble des acteurs concernés.

Voilà ce que je voulais dire en introduction à nos débats. Je me tiens désormais à votre écoute. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Philippe Plisson, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Le projet de loi dont nous débattons ce soir en première lecture, soumis à la procédure d’examen accélérée, a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 6 mars.

Saisie au fond, la commission du développement durable l’a examiné le 9 avril. La commission des affaires économiques, qui s’est saisie pour avis des articles 9 et 27 à 30, y a consacré sa réunion du 2 avril.

Ce texte portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable a été qualifié par Guillaume Chevrollier de « projet de loi révélateur des facultés de la technostructure européenne et française à produire des textes complexes et peu lisibles ».

Trop complexe, trop peu lisible, ce texte l’est effectivement, car il retranscrit toutes les obscurités, toutes les redondances, toutes les redites des directives européennes d’origine avec une méticulosité, un souci de l’exactitude et du détail qui forcent l’admiration. Je ne suis pas sûr que, dans la demi-pénombre de leur scriptorium, les moines du Mont-Saint-Michel mettaient plus de zèle à coucher sur parchemin ce qu’ils définissaient comme les enseignements divins ! (Sourires.)

Une fois que la jurisprudence aura rajouté de ses doigts de fée un niveau de complexité supplémentaire, je crains fort que les acteurs ne se trouvent rapidement embarrassés pour mettre en œuvre des dispositions qui les concernent pourtant au premier chef.

Toutes sensibilités politiques confondues, les membres de la commission du développement durable ont, par ailleurs, souligné et déploré le caractère extrêmement disparate du texte et l’impression de fouillis qui s’en dégage. S’agit-il même d’un véritable projet de loi, au plein sens du terme, ou plutôt d’une juxtaposition de « paquets » plus ou moins normatifs, traitant successivement de la prévention des risques industriels, des produits biocides, des professions vétérinaires, de Saint-Barthélemy, de la taxation des poids lourds, des conditions du travail maritime ou encore de l’efficacité énergétique ? Poser la question, c’est déjà donner la réponse.

Compte tenu de l’encombrement de l’ordre du jour parlementaire, ce sont des considérations d’efficacité qui ont conduit à faire ce choix de regrouper un ensemble de dispositions en attente de transposition sous le chapeau d’un texte fourre-tout. Je les comprends parfaitement, même si la députée que vous avez été, madame la ministre, imagine sans doute ce que l’exercice peut avoir de frustrant pour les parlementaires.

Mme Delphine Batho, ministre. Absolument !

M. Philippe Plisson, rapporteur. Par ailleurs, je veux aussi saluer la démarche qui a consisté, au-delà de la transposition pure et simple, à tenter de remettre d’aplomb des réglementations incomplètement transposées. C’est par exemple le cas pour ce qui concerne les produits et équipements à risques : il est en effet apparu que les différentes directives « produits » avaient été imparfaitement transposées, certaines dispositions étant manquantes en droit français et d’autres, relevant pourtant de la loi, déclassées au niveau réglementaire.

Il faut donc vous donner acte de ce travail salutaire de remise en ordre – et regretter incidemment qu’il n’ait pas été réalisé plus tôt.

La présentation très claire et très complète du projet de loi que vous venez de faire, madame la ministre, me pousse à ne pas me livrer au même exercice. Évitant ainsi une comparaison dont je ne serais assurément pas sorti vainqueur (Sourires), je me concentrerai sur quelques questions.

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Modeste !

M. Philippe Plisson, rapporteur. Il ne faut jamais rater l’occasion de décerner quelques lauriers…

Le titre Ier du texte porte notamment sur la transposition en droit français de la directive du 4 juillet 2012, dite Seveso III.

Alors que, de manière générale, les entretiens que j’ai eus avec vos services ont constamment fait apparaître leur souci de réaliser une transposition « au plus près », pour éviter tout risque de contentieux ultérieur, je m’interroge sur le traitement particulier réservé à la clause des 2 %, clause qui figure explicitement dans la note 3 de l’annexe I de la directive du 4 juillet 2012.

Je rappelle ici, pour la parfaite intelligibilité du débat, ce dont il s’agit : de manière générale, les quantités de substances dangereuses qui doivent être prises en considération pour l’application des articles concernés de la directive sont les quantités maximales qui sont présentes ou susceptibles de l’être à n’importe quel moment. Par dérogation à ce principe, les substances dangereuses présentes dans un établissement en quantités inférieures ou égales à 2 % seulement de la quantité seuil pertinente ne sont pas prises en compte dans le calcul de la quantité totale présente si leur localisation à l’intérieur de l’établissement est telle que les substances ne peuvent déclencher un accident majeur ailleurs dans cet établissement. C’est ce qu’on appelle la clause des 2 %. Méfiez-vous, je ferai une interrogation écrite ! (Sourires.)

L’application ou non de cette disposition aura naturellement un impact important sur le périmètre des installations soumises à la réglementation Seveso. Dans la mesure où, je le redis, cette clause figure bien dans le texte même de la directive, pourriez-vous, madame la ministre, nous préciser votre position sur ce sujet, nous dire les raisons d’un choix qui nous expose à un risque contentieux, ou au contraire nous confirmer que cette règle se trouvera bien reprise, à terme, en droit français, dans le cadre d’un instrument non pas législatif mais réglementaire ?

Un mot également pour saluer les avancées réalisées devant la commission du développement durable en matière de règles applicables aux plans de prévention des risques technologiques. Yves Blein, que je salue ce soir et dont chacun connaît l’action à la tête d’Amaris, a défendu une série d’amendements qui ont été adoptés, relatifs, par exemple, à la fixation de plafonds pour le montant des travaux ou au partage des charges entre les différents financeurs.

D’autres amendements, irrecevables au regard des dispositions de l’article 40 de la Constitution, ont reçu un accueil favorable du Gouvernement qui a bien voulu les reprendre sous son timbre. Nous en discuterons tout à l’heure. Ils permettent d’enregistrer d’autres avancées substantielles, d’autant mieux venues que la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques se heurte à des difficultés récurrentes et préoccupantes depuis plusieurs années.

Comme je l’ai indiqué, le projet de loi comprend des mesures très diverses. L’application à Saint-Barthélemy des règles européennes en matière de transport aérien en fait partie. Je rappellerai très brièvement – car cette question a fait l’unanimité en commission – que cette collectivité est passée du statut de « région ultrapériphérique » à celui de « pays et territoire d’outre-mer » au sein de l’Union européenne. Le droit dérivé cessant d’y être en vigueur, il y avait un risque de vide juridique pour toute une série de dispositions relatives aux entreprises de transport aérien, concernant l’exercice de leur activité, leur régime de responsabilité ou encore les mesures de police.

L’article 11 introduit en conséquence dans le code des transports de nouveaux articles qui comblent ce vide et garantissent à nouveau la bonne application du droit aérien à Saint-Barthélemy. Je rappelle à ce propos que cette île dépend largement du transport aérien pour ses activités économiques et qu’elle a besoin en conséquence d’un cadre juridique sûr.

Dans le domaine des transports toujours, plusieurs articles du projet de loi concernent le transport routier. L’échange transfrontalier d’informations sur les infractions au code de la route, prévu par l’article 25, est une avancée juridique importante qui fait progresser la coopération policière et judiciaire dans l’Union européenne.

L’article 12 est directement lié à nos préoccupations de développement durable puisqu’il opère la transposition de plusieurs dispositions de la directive sur la taxation des poids lourds, dite directive Eurovignette.

Nous avons évoqué cette directive lors de nos débats sur l’écotaxe poids lourds. Elle constitue le cadre juridique européen de la future taxe.

M. Martial Saddier. Quels débats !

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cette fois-ci, il s’agit, toujours pour prendre en compte les externalités négatives de la circulation des poids lourds pour l’environnement et son coût pour l’entretien des routes, de transposer deux dispositions. D’abord, à l’avenir, il sera obligatoire de moduler les péages en fonction du niveau d’émissions polluantes des poids lourds. Il sera par ailleurs possible – et je suis convaincu qu’il faudra utiliser pleinement cette faculté – de les moduler en fonction de la congestion du réseau.

Madame la ministre, compte tenu des durées respectives des contrats de concession en cours, selon quel calendrier la modulation des péages liée aux émissions polluantes sera-t-elle effective ? D’autre part, le Gouvernement a-t-il bien l’intention de concrétiser la notion de modulation des péages en fonction de la congestion, et si oui dans quelles zones ?

Les dispositions relatives au transport maritime occupent une grande partie du texte, des articles 13 à 22. Je n’en dirai que peu de chose, car elles ont fait consensus, mais tout de même : félicitons-nous du renforcement des droits des marins et des gens de mer par l’intégration dans le droit national des clauses issues des négociations de l’OMI et de l’OIT. Félicitons-nous de l’exigence accrue de qualification professionnelle à bord des embarcations, du contrôle systématique de l’aptitude médicale des personnes du bord, du droit au rapatriement des malades et du cadre juridique renforcé des agences de placement.

Il faut avoir à cœur de lutter, partout, pour les conditions de travail des salariés et pour la sécurité des biens et des personnes. Ce projet de loi y contribue grandement dans le milieu maritime. Je tiens à vous saluer pour cela, madame la ministre et, si vous me le permettez, à saluer tout autant votre ministre délégué, Frédéric Cuvillier.

Un dernier mot enfin quant aux dispositions relatives à l’énergie. Je passerai sur l’interminable liste de corrections que nous devons effectuer dans le code de l’énergie issu des ordonnances de codification. Reconnaissons que le législateur commet parfois des erreurs ; constatons que l’administration qui légifère en commet bien davantage ! Ce qui souligne l’intérêt de la procédure parlementaire et notre répugnance à y déroger pour laisser au Gouvernement les clefs du camion…

La directive relative à l’efficacité énergétique est transposée à l’article 29. Ces dispositions ne concernent que les grandes entreprises, mais c’est un premier pas que nous votons avec enthousiasme. Je précise à certains collègues qui pourraient s’inquiéter d’une atteinte à notre compétitivité que le taux de suite des audits énergétiques est aujourd’hui de près de 75 %, alors même qu’aucune obligation ne pèse sur les sociétés. Les meilleurs gestionnaires ont bien compris tout le gain que l’on peut espérer d’une rationalisation de la consommation énergétique, et je gage que tous se réjouiront de voir baisser leur facture, une fois mises en application des recommandations souvent peu coûteuses et parfois même gratuites.

Enfin, madame la ministre, vous avez agréé ma suggestion de profiter de ce projet de loi pour ratifier l’ordonnance relative aux marchés de carbone et permettre ainsi à l’Assemblée nationale de consacrer son ordre du jour à d’autres dossiers très attendus. Je ne saurais trop vous en remercier.

Je ne suis pas certain que ce projet de loi DDADUE suscite, entre ces murs ou dans la rue, des controverses et des passions comparables à celles qui ont accompagné le mariage pour tous. Peut-être d’ailleurs ne faut-il pas le regretter…

Sous le bénéfice d’une série d’amendements, votre rapporteur vous recommande donc, avec un enthousiasme qu’il peine à dissimuler (Sourires), d’adopter un texte pleinement inscrit dans l’obligation qui nous incombe de mettre en conformité l’ordre juridique national avec la législation d’origine communautaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

M. Frédéric Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Sur le fondement de ses compétences dans les domaines de l’agriculture et de l’énergie, la commission s’est saisie pour avis de cinq articles du projet de loi que nous examinons aujourd’hui.

Ils portent sur des thèmes très divers : l’exercice de la profession vétérinaire, la production de biocarburants, l’électricité d’origine renouvelable, l’organisation du marché de l’électricité et du gaz, l’efficacité énergétique et les stocks pétroliers stratégiques. Ils procèdent à une transposition de plusieurs directives européennes, directement ou via la ratification d’ordonnances.

Pour ce qui est de la profession vétérinaire, la directive « services » a pour objectif de faciliter la liberté d’établissement des prestataires de service dans les pays membres de l’Union européenne. Notre droit à l’heure actuelle n’y est pas conforme pour cette profession particulière, considérée en France comme un maillon essentiel de la santé publique quand elle est vue comme une activité commerciale dans d’autres pays membres. Nous avons donc dû nous conformer à la directive tout en essayant de conserver cette particularité. Le texte instaure ainsi un certain nombre de garde-fous, qui préviennent les conflits d’intérêt et la résurgence d’intérêts commerciaux. Il faut également noter qu’il renforce les pouvoirs de contrôle de l’Ordre des vétérinaires. Cette transposition me semble donc satisfaisante et équilibrée.

En ce qui concerne l’énergie, je n’évoquerai que les grandes lignes de chaque sujet dont nous sommes saisis, exception faite de la partie efficacité énergétique, sur laquelle j’aimerais m’attarder.

L’article 27, relatif à la production de biocarburants, est une déclinaison du « triple 20 » qui incite chaque pays membre à atteindre 23 % d’énergies renouvelables dans sa consommation finale d’énergie d’ici à 2020. L’encadrement du marché des certificats verts et l’attention portée à la durabilité des biocarburants, qui incite au développement des carburants de deuxième génération, sont de bonnes orientations.

La partie organisation du marché de l’électricité et du gaz conforte notre modèle, avec l’introduction de sanctions en cas de non-respect pour un fournisseur d’énergie de ses obligations de capacité. Je n’ai pas de remarque particulière à ce sujet.

En revanche, la partie efficacité énergétique nécessite à mon sens certains ajustements. L’article 29 impose à toutes les grandes entreprises de réaliser un audit énergétique avant le 5 décembre 2015, puis tous les quatre ans. Il prévoit également des sanctions en cas de non-respect. Si la transposition de cette obligation dans le droit français semble faire l’objet d’un consensus, il demeure deux points qui suscitent des interrogations.

D’abord, le délai laissé aux entreprises est vraiment très court. D’ici le 5 décembre 2015, plusieurs étapes sont en effet nécessaires, à commencer par voter les dispositions législatives et élaborer les textes d’application. Certes, un travail de concertation a déjà été mené, mais demeurent encore des inconnues : par exemple, comment l’obligation de réaliser un audit s’appliquera-t-elle aux entreprises qui disposent de très nombreux petits sites disséminés sur le territoire ?

Ce n’est qu’une fois que les textes réglementaires seront parus que les auditeurs pourront être formés. Et il faut prendre en compte la nécessité pour les filières locales de se structurer.

Enfin, il y aura l’étape de la réalisation des audits à proprement parler. Les entreprises ne prendront pas le risque de réaliser un audit sans être définitivement fixées sur le contenu de l’obligation, sans quoi elles s’exposeraient à tout devoir recommencer.

Il ne leur restera donc que des délais très serrés et, pour les respecter, il est à craindre que les entreprises et les bureaux d’étude privilégient la quantité sur la qualité. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement pour repousser la date limite d’un an. J’ai bien conscience de la difficulté qu’il pose, car il serait contraire à la directive sur l’efficacité énergétique. Mais je veux tout de même attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de prendre les textes d’application rapidement, sans quoi les entreprises se retrouveront dans une situation difficile.

Second point à éclaircir, les préconisations des audits énergétiques ne seront pas obligatoirement suivies, car la loi met en œuvre une obligation de moyens et non de résultats.

Si l’on peut aisément convenir que le préalable à toute action de maîtrise de la demande d’énergie est un diagnostic bien réalisé, comment pousser les entreprises à suivre les préconisations de l’audit ? Selon l’ADEME, 73 % d’entre elles passent à l’acte. Ce chiffre suscite l’optimisme, mais il faut néanmoins le relativiser. En effet, les actions mises en œuvre ne couvrent que 20 à 25 % des préconisations.

C’est pourquoi j’ai déposé un amendement qui oblige les entreprises à transmettre à l’administration un rapport très succinct sur le suivi des préconisations de l’audit, dans un délai de deux ans après sa réalisation.

Enfin, le dernier article dont la commission des affaires économiques a été saisie a trait aux stocks pétroliers stratégiques. Il oblige les États membres à maintenir un niveau minimal de stocks de pétrole brut et change le statut et la nature du lien entre divers opérateurs, sans conséquences économiques. Cela ne pose pas de difficulté.

Ce texte, qui manque de cohérence dans sa globalité, n’en reste pas moins une transposition que je juge plus que satisfaisante des différentes directives européennes évoquées. Il est tout à fait conforme à leur esprit, tout en préservant nos spécificités quand elles méritent de l’être. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Les projets de loi portant diverses mesures d’adaptation de notre législation au droit de l’Union européenne sont toujours des moments particuliers pour notre assemblée et l’actuel projet, dit « DDADUE écologie », n’échappe pas à la règle. La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, qui l’a examiné au fond, a été à la fois surprise, pour ne pas dire perplexe, par la diversité des sujets abordés et leur caractère transversal, et désappointée par la marge étroite qui nous est laissée dans notre mission de législateur. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

En effet, le projet de loi vise non seulement à assurer la transposition obligatoire en droit français de six directives et à améliorer l’application d’un certain nombre d’autres déjà transposées, mais également à ratifier onze ordonnances – douze en fait, depuis que la commission a adopté l’amendement portant sur celle relative au changement climatique.

Bien que le titre du projet de loi mentionne seulement le domaine du développement durable, force est de constater que bien d’autres départements ministériels que celui de l’écologie sont concernés par ses dispositions : les transports, l’énergie, la santé, l’intérieur, l’agriculture, voire la mer.

C’est ainsi, comme l’a souligné notre rapporteur Philippe Plisson, que je remercie à cette occasion pour la qualité de son travail, que plus de la moitié du texte est consacrée au transport maritime et fixe de nouvelles normes applicables à bord des navires, apportant des compléments très attendus par toute la profession. Avancée juridique, progrès social pour les marins embarqués, clarification des normes, avez-vous dit madame la ministre lors de la discussion générale : autant d’objectifs que nous partageons volontiers avec vous.

Le travail réalisé par la commission du développement durable a porté essentiellement sur la remise en forme d’un texte disparate et technique qui n’a brillé, je regrette de le souligner ici, madame la ministre, ni par sa facture, ni par sa cohérence législative.

M. Julien Aubert. Oh !

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable. C’est la loi du genre, il faut bien le reconnaître, et sous la précédente législature, nous avons également eu à examiner des textes semblables.

M. Julien Aubert. Moins souvent !

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable. Tout bien considéré, le Parlement reste dans son rôle en corrigeant un texte perfectible sur la forme afin de lever toute ambiguïté.

Mais notre travail n’est pas achevé et l’occasion nous est donnée d’approfondir notre réflexion sur quelques sujets, notamment sur l’application de la directive Seveso III et la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques autour des sites industriels à risques.

Le foisonnement des dispositions techniques ne doit pas faire oublier que certaines d’entre elles sont emblématiques. Il en va ainsi de l’application de la directive Eurovignette, dont on ne souligne jamais assez les objectifs en matière de report modal ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou alors de la prescription des audits énergétiques dans les grandes entreprises, premier pas, encore modeste, vers une meilleure prise de conscience de la nécessité de réduire la consommation d’énergie afin d’atteindre nos objectifs en ce domaine. Là encore, l’enjeu est considérable et mérite d’être souligné.

Il nous restera à compléter l’adoption de ce texte par l’organisation dans l’hémicycle de deux débats dont nous sentons tous la nécessité.

Le premier devrait porter sur la situation du marché européen du carbone, dont l’adoption du nouvel article 30 bis nous prive – mais je sais, madame la ministre, que vous y êtes très favorable.

Le second pourrait concerner les sites industriels à risques, car bien des questions n’ont pas encore trouvé de réponse satisfaisante, en particulier sur la prise en charge du coût des travaux de mise en conformité.

J’ajouterai un troisième débat portant sur le schéma national des infrastructures de transport, dès que la commission Mobilité 21 aura terminé ses travaux.

Le Gouvernement a engagé la procédure accélérée afin que les mesures essentielles puissent être mises en œuvre dans les meilleurs délais.

Pour toutes ces raisons, j’invite l’Assemblée à adopter le projet de loi en discussion dans le texte voté par notre commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Julien Aubert. Très bien !

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Si l’objet principal du texte que nous examinons aujourd’hui est avant tout de transposer des directives communautaires, il n’en demeure pas moins que les thématiques traitées représentent des enjeux majeurs liés au développement durable.

L’importance que revêtent de tels sujets, leur complexité, leur technicité nous ont amenés à regretter un agencement de propositions et de dispositions sans aucun fil conducteur.

Toutefois, passé le manque de cohérence et l’aspect fourre-tout de ce projet de loi, force est de constater que nombre des sujets traités, d’importance inégale, étaient attendus depuis longtemps.

En effet, comme cela a pu être rappelé en commission, l’intégration de la législation européenne dans l’ordre juridique national n’est pas seulement une obligation inhérente à tout État membre de l’Union, dont le manquement serait sanctionné, mais plus fondamentalement, le groupe UDI le croit sincèrement, l’expression d’un processus d’harmonisation éminemment nécessaire au niveau européen.

La politique environnementale du Gouvernement manquant singulièrement d’ambition…

M. Julien Aubert. Ah oui !

M. Bertrand Pancher. …et, par conséquent, de traduction législative depuis plus d’un an, aucun support législatif réellement convenable n’avait pu être identifié pour examiner ces dispositions. C’est la raison d’être du présent texte.

Nous ne vous ferons pas grief d’avoir choisi d’utiliser un texte balai pour toutes ces transpositions, tout en soulignant que les délais de cette procédure sont trop restreints pour pouvoir mener des travaux approfondis.

Mais en dépit de difficultés de forme, le projet pourrait être relativement consensuel sur le fond. Tout n’y est cependant pas parfait, loin s’en faut, et les amendements que le groupe UDI a portés en commission et aujourd’hui en séance – et malheureusement peut-être aussi vendredi, en raison du fonctionnement fou de notre assemblée – sont là pour le rappeler.

Je ne m’attarderai pas sur les dispositions les plus consensuelles du projet de loi, pour en venir directement aux points d’achoppement qui sont apparus au cours de nos travaux.

Ainsi, les dispositifs relatifs à la mise à disposition sur le marché et à l’utilisation des produits biocides n’ont pas manqué de poser un certain nombre de questions, et notamment celle du transfert à l’Agence européenne des produits chimiques du rôle de coordination de l’évaluation des substances actives biocides.

Harmoniser et transcrire, ce n’est pas marginaliser ou externaliser.

Que devient dès lors l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, qui fournit un travail remarqué par tous ? Comment concevoir son rôle en la matière ? Une coordination paraît souhaitable avec l’Agence européenne, dont les moyens sont renforcés alors qu’elle fut mise en cause, parfois gravement, du fait de certaines de ses positions. Ce renforcement, s’il était attendu, crée la controverse.

L’article 12, qui procède à la transposition de la directive relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures, soulève plus de questions : l’application du principe pollueur-payeur élargi à des coûts externes comme le bruit ou la qualité de l’air demeure facultative. Nous aurions souhaité que vous fassiez preuve de plus de volontarisme sur ce sujet.

La remise en cause des conditions d’exercice de la profession de vétérinaire a également suscité des interrogations, et je me félicite que l’amendement de notre collègue UMP Jean-Pierre Vigier ait mis l’accent sur la protection de la médecine vétérinaire, son indépendance et la déontologie dont elle doit faire preuve.

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Bertrand Pancher. Autre thématique capitale : la problématique énergétique, et notamment l’activité gazière et le transport du gaz. Dans ce domaine, nous avons plusieurs propositions et je me félicite de l’adoption d’un amendement qui ouvre explicitement la possibilité pour les entreprises de transport de gaz d’exercer diverses activités en dehors de l’espace communautaire.

De même, l’instauration d’un audit énergétique obligatoire dans les grandes entreprises, souhaitable, n’en pose pas moins des difficultés de calendrier : près de 5 000 entreprises devront être auditées d’ici à décembre 2015. Si l’on estime la durée d’un audit à trois semaines, plus de 500 auditeurs devront être agréés, ce qui devrait prendre environ un an. Si la disposition législative correspondante est adoptée en 2014, les auditeurs seront prêts en 2015, ce qui laissera moins d’un an aux entreprises pour respecter leurs obligations en la matière. On peut donc être dubitatif sur les possibilités de mise en œuvre de la mesure dans les délais prévus et souhaiter davantage de souplesse pour ces entreprises. Nous y reviendrons au cours des débats.

Une fois de plus, la technicité des sujets suppose une précision et une exigence considérables. C’est dans cet objectif que nous avons souhaité accentuer l’intervention du ministre en charge de l’énergie à défaut de recourir à la voie réglementaire, peu convaincante. Et c’est dans ce même esprit que nous défendrons des amendements visant à clarifier et à simplifier la rédaction du code de l’énergie.

En conclusion, je souhaite insister sur le fait que si le texte est globalement acceptable, il n’en est pas de même pour l’une de ses dispositions très importantes, celle de l’article 10 visant à ratifier l’ordonnance du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l’environnement.

Cette disposition autorisait le Gouvernement à prendre des mesures de bon sens pour, notamment, regrouper les procédures ainsi que les sanctions, voire rendre davantage applicables les peines en cas de manquements au droit de l’environnement par le biais, en particulier, des transactions. Nous avons détecté, très récemment il est vrai, beaucoup d’erreurs – mais il faut reconnaître que le peu de moyens à notre disposition ainsi que la complexité du texte rendent nos missions très difficiles.

Parmi ces erreurs, une grave omission : la méconnaissance du droit de la défense dans le cadre de la généralisation des transactions. Nous introduisions des transactions, il fallait évidemment aménager un droit à la défense. Pourquoi ne pas avoir prévu la communication des procès-verbaux ainsi que le droit à l’assistance d’un avocat ? Cette simple omission amènera inéluctablement le Conseil constitutionnel à rejeter ces dispositions. De même, des oublis fâcheux conduiront à ne plus considérer demain ce qui était hier un délit. Si aujourd’hui l’absence d’exécution d’une mise en demeure est ainsi un délit, ce ne sera plus le cas demain.

Autre exemple : nous n’avons pas débattu des raisons pour lesquelles on ne condamne pas l’absence de respect d’une décision du juge administratif en matière d’environnement ou on n’oblige pas une collectivité à exécuter une condamnation par ce même juge.

J’ai déposé en hâte des amendements en commission du développement durable, soutenus par les juristes de France Nature Environnement, extrêmement inquiets sur un grand nombre de sujets. Je les avais d’ailleurs encore au téléphone lors de la dernière réunion de la commission du développement durable. Ils m’ont bien répété qu’ils contestaient le texte tel qu’il était rédigé, lequel ne pourrait pas être mis en œuvre. Et l’on demande au Parlement de ratifier une ordonnance avec des orientations de fond qui n’ont jamais été discutées !

C’est d’autant plus étonnant que le Gouvernement a décidé d’engager des états généraux du droit de l’environnement. Que s’est-il passé pour en arriver là, madame la ministre ? J’ai discuté de ces amendements avec notre excellent rapporteur, pour qui il s’agit de mesures de bon sens mais qui arrivent au dernier moment et qui seront certainement réexaminées dans le cadre des états généraux. Pourquoi alors vouloir reprendre aujourd’hui cette ordonnance, alors que tout un travail de fond est actuellement lancé ?

Nous sommes très inquiets de la précipitation avec laquelle vous voulez ratifier une ordonnance qui ne tient pas compte de l’esprit de l’autorisation donnée au Gouvernement à l’époque.

J’espère que les amendements déposés par notre groupe en commission seront reçus favorablement et que nous obtiendrons des réponses précises à ces questions, qui inquiètent la seule grande organisation environnementale française qui a vraiment travaillé d’arrache pied sur ce sujet et qui a d’ailleurs eu à plusieurs reprises votre cabinet au téléphone, madame la ministre.

Je souhaite donc que nous obtenions des réponses positives, faute de quoi, contrairement à ma prise de position en commission, nous réexaminerons les conditions de notre vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Vigier. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Krabal.

M. Jacques Krabal. Nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner ce projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable.

Soyons clairs – même si, dans ce domaine, ce n’est pas forcément facile, il faut bien le reconnaître – il s’agit de transposer six directives, ainsi que d’autres textes juridiques issus du droit de l’Union européenne, pour lesquelles la France est en retard.

Ce projet de loi va donc intégrer dans notre droit national des textes importants pour l’environnement. Nous avons l’obligation de le faire, et ce n’est pas un député du groupe RRDP, fondamentalement européen, qui va le regretter.

Au-delà de la diversité des sujets abordés, nous avons le devoir de bâtir cet édifice juridique commun à l’ensemble des pays de l’Union, comme cela a été le cas cet après-midi pour le renforcement des droits aux personnes. Cela permet plus de justice pour nos concitoyens européens.

Le groupe RRDP est très attaché à cette construction, et nous aimerions qu’il en soit de même pour les domaines fiscaux ou sociaux que pour le droit environnemental dont nous allons maintenant discuter.

Cette activité législative est certes formelle et technique, mais ces textes ne sont pas anodins.

En effet, ce projet de loi est un véhicule législatif pour transporter en urgence…

M. Julien Aubert. Pour balayer !

M. Jacques Krabal. …des textes qui auront une portée normative pour une grande partie de nos concitoyens, en particulier les agriculteurs, les gens de mer, les chefs d’entreprises industrielles ou encore les transporteurs routiers.

Dans le titre Ier, il est question de dispositions relatives à l’environnement et à la santé au travail. Il transpose la directive Seveso III du 4 juillet 2012, qui traite de la prévention des risques liés aux substances dangereuses. En tant que rapporteur du programme 181 « Prévention des risques », j’étais intervenu en commission à ce sujet et je vous remercie, madame la ministre, de m’avoir apporté des réponses.

Cette directive doit entrer en vigueur dès le 1er juin 2015. Elle marque des progrès significatifs par rapport à la directive Seveso II, qu’elle a vocation à remplacer.

La surveillance des substances dangereuses est renforcée, notamment pour leur mise sur le marché.

À ce propos, ne soyons pas naïfs : les trafics clandestins existent et si une surveillance particulière ou des interdictions réglaient le problème de façon définitive, cela se saurait depuis longtemps.

Le volet « Lutte contre les trafics » est utile et indispensable, mais l’augmentation des contrôles et des sanctions lourdes pour les trafiquants doivent compléter l’arsenal.

Au-delà de cet aspect, 1 200 établissements industriels en France seront incités à mettre en place des mesures de sécurité plus fortes, avec la distinction entre les établissements dits de « seuil haut », qui ont sur leur propre site des substances en grandes quantités, et les établissements de « seuil bas » pour les quantités moindres.

Cette distinction est importante pour proportionner les normes et les risques et ne pas alourdir inutilement des contraintes qui pèsent sur les établissements.

En ce qui me concerne, je suis particulièrement sensible aux dispositions qui renforcent l’information du public et son association à la prise de décision.

S’il y a une chose que les députés peuvent faire remonter du terrain, c’est bien la volonté de nos concitoyens d’être davantage associés aux débats publics et aux décisions qui concernent directement leur territoire, leur cadre de vie quotidien, qu’il s’agisse des dangers liés aux risques industriels ou de ceux liés aux risques environnementaux pour l’installation des nouvelles infrastructures.

Seveso III va dans le bon sens, mais tâchons de faire toujours mieux ! Je salue votre engagement, madame la ministre, à vouloir combler notre retard en consentant un effort important en faveur des plans de prévention des risques technologiques.

Mais revenons à notre texte. Toujours dans le titre Ier, l’article 6 procède à des adaptations du droit français pour les produits biocides. Il tend à transférer à l’Agence européenne des produits chimiques la fonction de coordination et d’évaluation de ces substances. Ce sont des produits actifs susceptibles d’avoir des effets nuisibles sur l’homme, l’animal ou l’environnement.

La création d’une autorisation de mise sur le marché délivrée au niveau européen et les procédures visant à l’harmonisation des systèmes d’autorisation nationaux sont des dispositions que nous saluons et que nous soutenons.

Mais de nouveau se pose la question des trafics et du respect des règles dans l’ensemble des pays de l’Union, du fait de la liberté de circulation des marchandises. Lorsque nous achetons des productions agricoles européennes, nous devons avoir la garantie que des produits dangereux interdits n’aient pas été utilisés. Sinon, c’est la double peine : nos concurrents européens augmentent leurs rendements, pénalisent nos producteurs – agriculteurs, éleveurs, maraîchers – et empoisonnent potentiellement les consommateurs. Ce n’est pas une caricature, nous savons que de telles situations existent ! Madame la ministre, nous comptons sur vous pour relayer ces préoccupations à la Commission afin de maximiser les garanties de surveillance et de contrôle.

L’article 8 prévoit que les produits explosifs, qui sont actuellement soumis au seul code de la défense, puissent être soumis aux dispositions du code de l’environnement pour les aspects de mise sur le marché.

Les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes seront habilités pour le contrôle des dispositions de la présente loi. Mais en auront-ils les moyens, humains et financiers ?

Compte tenu de la RGPP, les effectifs sont passés de 3 600 en 2007 à 3 000 en 2012. Il ne reste que quelques agents dans les départements dits « ruraux ». Cette surcharge de travail, pour des services presque impuissants devant la quantité de contrôles à effectuer, ne manquera pas de provoquer de nouveaux constats de carence.

Permettez-moi de le répéter, lutter contre toutes les formes de fraudes, comme contre les paradis fiscaux, doit être une priorité. Ainsi, le groupe RRDP considère que le renforcement de la DGCCRF en moyens et en effectifs en est une condition.

La directive « Eurovignette » régule la mise en place et le calcul des péages et vignettes pour les poids lourds, et sa dernière version prévoit l’application, sous conditions, du principe pollueur-payeur, avec la possibilité d’intégrer dans le péage certains coûts externes comme le bruit et la qualité de l’air.

Le groupe RRDP se félicite aussi des dispositions concernant la convention du travail maritime et portant modernisation du droit social des gens de mer.

La directive reprend les règles et normes énoncées au sein des quatre premiers titres de la convention du travail maritime. Je ne m’étendrai pas sur ce sujet qui a déjà été abordé, mais je voudrais saluer en particulier le dispositif de protection de la maternité prévu pour les femmes marins enceintes, qui, étant inaptes à travailler à bord, ne pouvaient être reclassées. Le régime de sécurité sociale des marins et l’armateur cofinanceront le maintien d’une prestation dans ce cas.

Pour conclure, au sujet du titre III et des dispositions relatives à l’énergie, l’audit énergétique obligatoire prévu pour les grandes entreprises à l’article 27 est une avancée, à condition qu’il puisse se faire en toute objectivité et qu’il aboutisse à l’amélioration significative de l’efficacité énergétique et à la baisse de la consommation d’énergie.

Mais, même si vous venez d’annoncer, madame la ministre, la prolongation de la deuxième période des certificats d’économies d’énergie, avec une période transitoire utilisée pour améliorer les dispositifs – ce qui est une bonne décision pour les acteurs de la filière – je voudrais vous poser une question plus précise : les efforts d’obligation vont-ils changer ? Maintenir une obligation à niveau constant serait un vrai problème pour l’ensemble de la filière et menacerait les emplois, compte tenu de l’excédent qui sera atteint fin 2013. Il faudrait a minima déduire ces excédents des calculs d’obligation à appliquer en 2014, alors que ce niveau d’effort devrait être doublé pour correspondre aux objectifs fixés par la directive européenne à plus de 200 térawatts heure cumac par an.

Au-delà des remarques sur les normes et les règles, avec la volonté de simplification souvent légitime qui nous anime ici, ce qui nous paraît important, c’est que ces textes donnent de la cohérence et de la force à l’Union européenne. Oui, contrairement à ce que ne cessent de clamer les eurosceptiques, le territoire européen est pertinent pour construire des politiques efficaces dans les domaines du développement durable, de l’alimentation et de la santé.

Pour conclure, je citerai Jean de La Fontaine, né à Château-Thierry. Dans l’une de ses fables – vous la connaissez sans doute, Le Vieillard et ses Enfants –, il écrivait : « Toute puissance est faible, à moins que d’être unie ».

Voilà ce que nous ne devons jamais perdre de vue pour notre pays, la France, mais aussi pour notre Europe. Il reste encore beaucoup à faire, mais ces transitions nous montrent que nous sommes sur la bonne voie. C’est pourquoi le groupe RRDP votera ce projet de loi.

Mme Sophie Errante et M. Serge Bardy. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Carvalho.

M. Patrice Carvalho. Nous sommes réunis ce soir pour l’examen d’un texte qui nous laisse pour le moins dubitatifs. Il s’agit d’un ensemble disparate de dispositions plus ou moins normatives, dont l’objet n’a parfois rien à voir avec le développement durable, comme les dispositions relatives au comité d’entreprise européen ou aux conditions du travail maritime. Un tel fourre-tout nous contraint à n’aborder que quelques-unes des questions soulevées.

La première a trait à la prévention des risques industriels, qui forme l’un des chapitres centraux du texte. En matière de prévention des risques, votre projet de loi prévoit la transposition de la directive Seveso III, qui se substituera à Seveso II en juin 2015. Son champ d’application est modifié en profondeur au regard de la liste des substances dangereuses dont l’usage entraîne des prescriptions spéciales pour les installations. Parmi les nouveautés importantes figure notamment l’instauration d’un système de dérogations, délivrées par la Commission européenne, qui nous pose question quant au risque de perte de souveraineté des États en matière de classement Seveso.

Les mesures de sécurité ainsi que les dispositifs d’information et de participation du public aux décisions sont par ailleurs renforcés.

Pour nous, le nœud de la question demeure les plans de prévention des risques technologiques. Vous avez, madame la ministre, levé le gage sur l’amendement de notre collègue Yves Blein qui traduit au plan législatif l’accord intervenu entre les représentants des fédérations professionnelles et l’Association des maires de France. Sans négliger l’effort important accompli pour rattraper le retard accumulé, puisque seuls 43 % des PPRT ont été approuvés à ce jour, la question des moyens reste centrale. Nous regrettons pour notre part que le principe du créateur de risques-payeur n’apparaisse pas clairement au même titre que le principe du pollueur-payeur. Nous nous inquiétons par ailleurs du manque de moyens des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement. Les DREAL sont la pierre angulaire du dispositif sur les risques majeurs. Elles ont souffert, comme toutes les administrations, de la RGPP et n’ont plus les moyens d’assurer aujourd’hui leurs missions avec l’efficacité nécessaire.

En ce qui concerne maintenant les substances actives biocides, le texte, en conformité avec la nouvelle directive, prévoit un processus en deux étapes : il confie l’évaluation de la substance active à l’Agence européenne des produits chimiques et l’autorisation proprement dite de mise sur le marché à l’État membre, tout en prévoyant la possibilité que certains produits biocides soient autorisés à l’échelle européenne, ce qui leur donne un accès direct au marché de l’Union tout entière.

Nous craignons qu’un tel dispositif ne marginalise le rôle de notre Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail, qui devrait pourtant jouer aujourd’hui un rôle essentiel. « Devrait », car ses avis ne sont pas toujours respectés par les services de l’État eux-mêmes.

M. Martial Saddier. Hélas !

M. Patrice Carvalho. Le ministère de l’agriculture a délivré ces dernières années pas moins de quarante autorisations de mise sur le marché pour des produits dits phytosanitaires que l’ANSES avait formellement déconseillés. Le ministère a reconnu, dans un communiqué, que la base de données publique sur les autorisations de mise sur le marché n’était pas à jour et a demandé qu’un audit soit initié pour étudier les moyens d’y remédier.

Tout ceci nous laisse à penser que l’éloignement des instances chargées de l’évaluation, voire des autorisations de mise sur le marché, ne marque pas une évolution positive. Cela risque de se traduire par une moindre efficacité des prescriptions formulées par les autorités compétentes, a fortiori lorsque celles-ci, comme l’Agence européenne des produits chimiques, ont pu parfois prêter une oreille attentive aux doléances des industriels.

Nous ne sommes pas non plus enthousiasmés, c’est le moins que l’on puisse dire, s’agissant de l’article 9, relatif à l’exercice de la profession de vétérinaire, qui ouvre la possibilité aux personnes morales d’autres États membres de s’établir ou de proposer librement des prestations de services en France. Le Gouvernement a, certes, pris quelques précautions, mais la question de fond demeure. Ainsi que le rappelait le rapporteur pour avis, Frédéric Barbier, la Commission européenne considère l’exercice de la profession de vétérinaire comme une activité commerciale, là où nous la considérons comme un maillon essentiel de la santé publique. L’évolution proposée n’est donc pas très rassurante.

J’en viens à présent à la transposition de la convention du travail maritime, adoptée par l’organisation internationale du travail en 2006 à Manille. La ratification par la France de cette convention, qui fixe des standards sociaux minimaux garantis de protection sociale ainsi que les conditions de travail des marins, était attendue. La mise en place des dispositions d’harmonisation sociale et fiscale visant à sortir de la concurrence, source de dumping social, tarifaire et fiscal, est une bonne chose en principe. Nous attendons néanmoins beaucoup du contenu des décrets relatifs à la définition des notions de marin et de gens de mer et aux conditions de sécurité, exigence centrale des salariés du secteur maritime.

Nous venons d’avoir ce débat lors du récent examen du projet de loi relatif aux infrastructures et aux services de transport. L’Union européenne a ouvert à la concurrence européenne le transport maritime en 1986, puis le cabotage maritime en 1992. De nombreux pavillons naviguent aujourd’hui au standard international. Ainsi, des entreprises d’armement remplacent des équipages de marins sous statuts nationaux par des marins communautaires ou issus de pays tiers, afin de les employer à bas coûts et à des conditions sociales minimales selon les normes internationales en vigueur.

Ces normes tendent à devenir la règle en Europe et en France grâce à la création de pavillons sous registre international. Une harmonisation par le bas du secteur maritime s’est ainsi dessinée, sur fond de mondialisation et de libéralisation des échanges. Ces pavillons peuvent afficher des coûts de transport 40 % moins chers. Des navires battant pavillon français peuvent naviguer sans plus aucun marin français à bord et dans des conditions sociales minimales et précaires. C’est de cette manière que la compagnie Corsica Ferries a raflé à la SNCM les deux tiers du trafic vers la Corse à des prix cassés. La directive qu’il nous est proposé de transposer tend à mettre un peu d’ordre social dans cette anarchie. Nous n’avons pas à nous en plaindre !

L’enregistrement sous pavillon de premier registre français assure un haut niveau de garanties en matière de sécurisation et de droit des salariés. C’est ainsi que le transport maritime s’est longtemps organisé en France avant que l’Union européenne n’autorise l’ouverture à la concurrence, dont nous voyons la pagaille qu’elle génère. Je maintiens l’exigence d’appliquer la législation du pavillon français de premier registre aux navires circulant dans nos eaux territoriales. Et j’insiste, au-delà de la directive que nous transposons, sur la nécessité dans laquelle se trouve la France de promouvoir à l’échelon européen la revendication de création d’un pavillon européen équivalent au pavillon français de premier registre, offrant aux gens de mer la garantie d’une haute protection sociale.

Le projet de loi comporte par ailleurs un important volet relatif à l’énergie, dont les dispositions couvrent la quasi-totalité du secteur : production de biocarburant, électricité d’origine renouvelable, organisation du marché de l’électricité et du gaz, efficacité énergétique et stocks pétroliers stratégiques. Ce vaste champ recoupe les objectifs retenus par le Conseil européen et les États membres à l’horizon de 2020 dits « triple vingt », c’est-à-dire réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur niveau de 1990, porter la part des énergies renouvelables à 20 % de la consommation et réaliser 20 % d’économies d’énergie. Compte tenu du temps qui m’est imparti, je m’en tiendrai à deux aspects.

L’article 28 prévoit la ratification de l’ordonnance de codification du code de l’énergie en transposant deux directives, communément appelées troisième paquet de libéralisation du marché de l’énergie. Je rappelle qu’il s’agit initialement de démembrer des entreprises verticalement intégrées, comme on dit en langage technocratique bruxellois, c’est-à-dire rassemblant en une même entité l’ensemble de la chaîne énergétique : production, transport, distribution et commercialisation. Bien sûr, nos entreprises publiques EDF et GDF étaient dans le viseur, soupçonnées de porter atteinte au sacro-saint principe libéral de concurrence libre et non faussée dont nous savons par expérience les ravages qu’il peut faire.

C’est sur de telles bases que nous avons accepté l’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie, transformé EDF en société anonyme cotée en bourse et privatisé GDF, devenue GDF Suez. La France a certes obtenu un statut particulier, dit « ITO », qui a permis de préserver notre modèle de l’explosion. J’observe néanmoins que le troisième paquet a des conséquences sur l’organisation des secteurs électriques et gaziers car, en contrepartie du maintien du modèle ITO, nous sommes contraints de renforcer la séparation entre EDF et RTE qui sont désormais totalement distincts. En outre, le rôle du régulateur se trouve renforcé. Il lui appartient, en particulier, de fixer les tarifs du réseau. En cas de désaccord, le Gouvernement peut au mieux demander une seconde délibération. Cela est très préoccupant au regard de la flambée des tarifs et des hausses des tarifs réclamées depuis l’ouverture à la concurrence. Peu à peu, nous le voyons, des coins sont enfoncés dans notre organisation énergétique. La logique libérale tend à s’imposer au détriment du service public et du consommateur.

L’article 29 concerne les audits énergétiques obligatoires dans les grandes entreprises. Cinq mille d’entre elles seront concernées. Il s’agit d’identifier les consommations excessives d’énergie et donc les potentiels d’économie. Ces audits comporteront des préconisations. Très bien, mais qui vérifiera leur application ? La seule incitation, c’est que la direction de l’entreprise considérera que les économies d’énergie réalisables permettront de rembourser les 15 000 ou 20 000 euros qu’aura coûtés l’audit. Mais est-ce suffisant ?

Compte tenu de l’ensemble de ces remarques et du caractère très disparate des mesures proposées, qui n’invite guère à l’expression d’une position univoque, nous nous abstiendrons de voter ce texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Le texte qu’il nous est proposé de discuter aujourd’hui est d’un abord complexe. Il comporte en effet de multiples entrées : transposition de six directives européennes, ratification de douze ordonnances transposant elles-mêmes chacune plusieurs directives européennes et adaptation du droit national à une série de règlements… Les seuls points communs à ces textes sont d’émaner de l’échelon européen et de concerner l’environnement. Ce texte de 31 articles aborde aussi bien les conditions de travail des gens de mer que les transports routiers et aériens, les risques industriels ou encore les réseaux d’énergie.

Vous me pardonnerez donc, dans le temps qui m’est imparti, de ne pas traiter de toutes ces problématiques. Une telle diversité était certes une nécessité, comme cela a été rappelé en commission, après plus de deux ans sans transposer de textes européens, mais cela reste un exercice assez frustrant. En tant qu’écologistes, nous sommes profondément européens. Il va de soi que nous sommes soucieux d’une véritable démocratie européenne, qui est d’ailleurs en partie encore à construire. Cela passe en particulier par la transposition rapide des directives votées et le respect des textes européens. Ce n’est pas toujours le cas en France, particulièrement en matière de droit européen de l’environnement – en matière de qualité de l’air par exemple, notre pays est souvent pointé du doigt.

Mais cela ne signifie pas pour autant que tous les textes européens soient exempts d’améliorations. La transposition du droit européen implique de respecter des minima mais n’interdit en rien d’être plus allant. C’est en tous les cas le sens de mon intervention et c’est la raison pour laquelle nous proposons des améliorations au texte sous forme d’amendements.

Pour ce qui est de la prévention des risques, tout d’abord, nous avons ici un texte important, voire majeur, qui vient actualiser et compléter le dispositif Seveso. Malheureusement, il n’inverse pas réellement la charge du risque et reste dans une logique de gestion du risque et d’exposition des populations, même quand un éloignement des industries à risque nous paraîtrait pertinent. Il n’en comporte pas moins des avancées pour les populations.

L’accident de l’usine AZF de Toulouse, encore gravé dans la mémoire collective, aurait eu beaucoup moins de conséquences s’il avait eu lieu loin des habitations. C’est une évidence, mais il est parfois nécessaire de la rappeler. En outre, cette catastrophe aurait pu être bien plus importante encore si un autre site classé Seveso avait été touché par l’accident. On connaît des situations similaires ailleurs en France, avec parfois des cumuls de risques extrêmement importants. Le couloir rhodanien, par exemple, cumule non seulement un grand nombre d’industries mais aussi des sites nucléaires d’importance, le tout dans un bassin de vie très peuplé.

Nous proposerons donc deux amendements, l’un pour ne pas exclure d’emblée la possibilité d’expropriation des riverains en cas de danger, l’autre afin d’assurer la transparence de l’information des riverains. Nous souhaitons que celle-ci soit totale, afin que ces derniers soient clairement informés des activités de l’usine voisine.

L’article 10 ratifie en un paquet commun cinq ordonnances, dont une sur l’expérimentation animale. Pour nous, cette dernière va dans le bon sens mais l’on pourrait aller plus loin en favorisant plus encore le développement des techniques alternatives. Les modalités de contrôle mériteraient également d’être renforcées.

Éric Alauzet défendra après l’article 10 trois amendements visant à compléter notre arsenal juridique contre les délinquants environnementaux, dont les actions restent trop souvent impunies. Il s’agit notamment de l’imprévoyance des industriels cessant leur activité, du renforcement des sanctions en cas de dommages causés à l’environnement et du trafic d’animaux.

Ce texte comporte ensuite un important volet sur les transports. Si les éléments relevant de l’aviation civile n’appellent pas de commentaire particulier des députés écologistes, François-Michel Lambert proposera des améliorations à l’article 12 relatif à la création d’une taxation des poids lourds sur le réseau autoroutier. Il s’agit d’en permettre l’application anticipée et d’étendre le champ des modulations de péage à d’autres nuisances que la pollution atmosphérique, en particulier la congestion du trafic et les nuisances sonores, comme le prévoit le texte de la directive. Il proposera également des modulations pour le cas particulier des zones de montagne, où une alternative au transport routier existe et où ses conséquences sont particulièrement sensibles.

M. Lionel Tardy. Très bien !

M. Martial Saddier. Oui, les zones de montagne, c’est important !

M. Denis Baupin. De tels amendements ont un double objectif : appliquer le principe pollueur-payeur en limitant les nuisances subies par les riverains des infrastructures routières et encourager le report modal et l’utilisation de modes de transports moins agressifs pour l’environnement.

Le troisième titre du projet de loi concerne l’énergie. Il tombe en plein débat national sur la transition énergétique et l’éclaire d’un certain nombre d’éléments dont les uns sont positifs et les autres moins. En premier lieu, le texte nous propose de ratifier une directive datant de 2009 sur les agrocarburants alors même qu’un autre projet de directive est en discussion, qui vise à réduire les impacts des changements d’affectation des sols indirects liés aux agrocarburants et à promouvoir les carburants d’origine végétale offrant une réelle plus-value en matière de réduction des émissions de gaz à effets de serre. Ce projet a été présenté en novembre 2012 et discuté depuis. Il est donc relativement incongru, même si c’est juridiquement justifié, de nous demander dans un tel contexte de ratifier en 2013 une ordonnance de transposition, d’autant que la future directive est plus favorable à notre conception du développement de carburants issus de végétaux.

Je souhaite d’ailleurs souligner à cette occasion notre désaccord avec la terminologie de « biocarburants ». Ces carburants, rien ne les rattache à l’agriculture biologique. Ils sont au contraire le fruit d’un processus agroindustriel, en concurrence potentielle avec les usages alimentaires des ressources agraires. Nous avons déposé un amendement à ce sujet. Il est temps de cesser d’appeler « agrocarburants » des carburants qui n’ont rien de bio.

L’article 28, qui transpose des éléments relatifs aux réseaux de distribution d’électricité, nous pose problème. La France s’accroche en effet au modèle incestueux hérité du passé des entreprises de production et de distribution d’énergie. On pense notamment, en matière d’électricité, à EDF, ERDF et RTE. Le problème est en train de ressurgir tant au niveau européen que dans le débat national sur la transition énergétique. Pour nous, l’intégration des entreprises de distribution au sein d’une entité pilotée par une entreprise de production est un obstacle à la transition énergétique. Nous proposons donc un amendement de suppression de l’article. J’aurai l’occasion de m’expliquer plus avant au cours de la discussion des amendements.

L’article 29, en revanche, constitue une très bonne nouvelle. Il transpose en effet partiellement une directive à nos yeux fondamentale relative à l’efficacité énergétique. C’était la directive manquante du paquet « climat énergie ». Nous en avions une sur les émissions à effet de serre, une sur les énergies renouvelables, il en manquait une sur l’efficacité énergétique qui, vous l’avez rappelé, madame la ministre, est au cœur de notre politique énergétique et du débat sur la transition énergétique.

Je proposerai néanmoins deux amendements pour aller plus loin dans les prescriptions faites aux entreprises, et des amendements au dispositif des certificats d’économie d’énergie. Vous nous avez dit en commission, madame la ministre, que le reste de la directive « efficacité énergétique » n’a pas besoin de traduction législative puisque les CEE existent. Certes, mais cela n’empêche pas d’améliorer le dispositif, de se donner des objectifs ambitieux et de gérer la transition entre deux périodes de CEE.

Je me réjouis donc de constater qu’avant même la défense de notre amendement sur cette période transitoire, vous avez répondu favorablement, madame la ministre. Ce point étant acquis, je m’empresse donc de vous présenter nos autres demandes ! Il s’agit d’amendements tout aussi importants, notamment sur l’ampleur de la troisième période à venir. Vous nous avez indiqué que celle-ci serait au moins de 200 térawattheures par an, mais l’ADEME propose plutôt un objectif de 300. Nous préférons une ambition plus importante, aussi avons-nous déposé un amendement en ce sens.

Le Réseau Action Climat, la fédération des collectivités concédantes de réseau, la fondation Abbé Pierre et d’autres ont déjà fait des propositions sur l’évolution des CEE, dont nous aurons l’occasion de débattre tout à l’heure lors de la discussion de nos amendements.

Enfin, le dernier texte transposé a été ajouté en commission. Il s’agit du titre III bis, comportant des dispositions relatives à la lutte contre le changement climatique. Sur le fond, ce texte est très intéressant. Il va dans le sens d’un approfondissement du système européen d’échange de quotas de CO2. Le groupe écologiste ne peut donc que soutenir cette ratification, qui prévoit son extension à de nouveaux secteurs industriels et à de nouveaux gaz à effet de serre. Cependant, il intervient justement à un moment où le marché des quotas d’émissions de gaz à effets de serre est au plus mal. Je tiens d’ailleurs à saluer votre prise de position au plan européen sur le sujet, madame la ministre, car il est très important que nous réussissions à sauver ce dispositif et à revenir à un prix réellement dissuasif pour le CO2. Et quand je dis « revenir »… Il s’agirait plutôt d’y « venir », car le prix n’a jamais été suffisamment dissuasif, ce dont nous voyons aujourd’hui les conséquences sur le mix énergétique, notamment avec le retour du charbon en Europe.

Pour finir, nous voterons ce texte, qui va globalement dans le bon sens – ou devrais-je dire « les bons sens », tant les sujets sont nombreux ! Nous espérons toutefois qu’à l’avenir les projets de loi d’adaptation au droit de l’Union européenne seront moins espacés et permettront plus de discussions de fond entre nous et avec vous, madame la ministre. Il en va du bon fonctionnement et de la lisibilité de la construction européenne en matière de politique environnementale et énergétique commune.

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et M. Philippe Plisson, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Bardy.

M. Serge Bardy. Nous sommes réunis, ce mercredi 15 mai, pour examiner le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable, un DDADUE composé de 31 articles et dont le but principal est de nous mettre en conformité avec le droit européen. Le respect des règles européennes nous permet d’ailleurs d’éviter certaines sanctions financières. Cet exercice auquel nous participons aujourd’hui permettra à notre pays de continuer à être un bon élève de l’Europe.

Au moment où certains s’interrogent sur l’engagement européen de la France, l’examen de ce texte devant le Parlement montre toute l’importance que le Gouvernement et les parlementaires français portent à cette Europe, dans laquelle nous souhaitons que le développement durable prenne toute sa place. Le développement durable est l’un des enjeux que notre gouvernement souhaite mettre en valeur.

Ce texte nous donne l’occasion, une fois de plus, de prendre position sur le développement durable que nous appelons de nos vœux et de discuter des solutions et des méthodes que nous jugeons les plus pertinentes afin d’avancer dans ce domaine. Au programme de son examen, l’analyse de plus de 120 amendements déposés par les divers groupes politiques de cette assemblée. Comme nous le verrons, cinq articles sont plus fortement concernés. Je pense en particulier à l’article 16, qui concerne les gens de mer et pour lequel les amendements déposés par notre rapporteur, Philippe Plisson…

Mme Catherine Quéré et M. Christian Assaf. Excellent rapporteur !

M. Serge Bardy. …prévoient, à mon sens, un certain nombre d’évolutions positives.

Ce projet de loi, examiné en commission le 9 avril dernier, a fait l’objet d’échanges intéressants sur les volets portant notamment sur les plans de prévention des risques technologiques et les sites Seveso III. Yves Blein devrait présenter dans quelques instants les principales avancées auxquels nous sommes parvenus.

Outre ces deux points, un débat intéressant s’est engagé sur l’exercice de la profession de vétérinaire et sur les pouvoirs de contrôle dont dispose l’Ordre des vétérinaires en matière de respect des règles déontologiques. Nous reviendrons sur ce point plus précis lors de l’examen de plusieurs amendements portant sur l’article 10. Le texte s’intéresse également à l’Eurovignette, qu’il aborde dans son article 12, qui vise à réguler la mise en place et le calcul des péages et vignettes pour les poids lourds.

Enfin, vous l’avez rappelé, madame la ministre, l’hétérogénéité de ce texte et des six directives qu’il se propose de transposer en droit français a rendu nécessaire un important travail interministériel impliquant votre ministère et celui des transports, de la mer et de la pêche, mais également ceux de l’agriculture, de la santé et de l’intérieur. Je tenais à souligner la qualité de cette coordination interministérielle qui a permis notamment de fluidifier notre travail et de rendre davantage exploitables les dispositions européennes que ce texte doit adapter et transposer.

Je terminerai en empruntant à Gaston Bachelard une citation extraite de son ouvrage Le Nouvel Esprit scientifique : « On ne pourra bien dessiner le simple qu’après une étude approfondie du complexe ». C’est ce à quoi je vous invite dès à présent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier. Comme cela a déjà été dit, nous avons affaire à un texte touffu et dense…

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Jean-Pierre Vigier. …puisqu’il prévoit la transposition en droit français de six directives et de plusieurs règlements ou directives déjà transposés, et la ratification de douze ordonnances.

M. Julien Aubert. C’est bien résumé !

M. Jean-Pierre Vigier. Les sujets abordés sont extrêmement disparates, et le projet de loi n’en est que plus complexe. Parmi cette multitude de dispositions, je voudrais retenir quatre domaines.

Premièrement, le projet de loi modifie les conditions d’exercice de la profession vétérinaire. L’un de mes amendements a été adopté en commission, et je m’en réjouis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Il s’agit de renforcer l’indépendance et les règles déontologiques de la profession en interdisant la détention par les vétérinaires de parts ou d’actions du capital social dans toutes les activités en amont ou en aval. Je souhaite bien évidemment que cette mesure soit conservée lors de cette lecture.

M. Martial Saddier. C’est fondamental !

M. Jean-Pierre Vigier. Cependant d’autres points, sur lesquels j’ai déposé d’autres amendements, me paraissent nécessiter des améliorations. La médecine vétérinaire est une profession libérale, pratiquée avec un haut niveau de qualification. Elle implique responsabilité personnelle et indépendance professionnelle. C’est l’intérêt du client, du public et de l’animal. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Les propositions de modification du code rural contenues dans ce projet de loi ont un impact sur les conditions d’exercice des missions qu’effectue le vétérinaire pour le compte de l’État. Dans ce cadre, il contribue à la sécurité et à la qualité de la chaîne alimentaire, ainsi qu’au contrôle des maladies animales, parfois transmissibles à l’homme. Pour les « vétérinaires sanitaires », nous proposons donc une dérogation en ce qui concerne l’exercice des missions spécifiques de santé publique effectuées pour le compte de l’État. Ces missions ne sont pas toujours rémunérées et sont prises sur le temps de travail des vétérinaires libéraux. Je rappelle que, dans d’autres pays européens, ces missions sont exercées par des fonctionnaires.

M. Martial Saddier. Il a raison !

M. Jean-Pierre Vigier. Cela ne s’oppose pas à la libre prestation prônée au niveau européen. Il est aussi indispensable d’éviter les dérives financières ou la création de sociétés à des fins purement capitalistiques. Il faut donc garantir que, derrière une société, il y ait une réalité physique : des personnes réellement présentes doivent exercer effectivement le métier de vétérinaire.

Enfin, l’Ordre peut exercer un contrôle sur la prise de participations financières par des personnes exerçant la profession de vétérinaire. Cependant, cette faculté ne doit pas entraîner la transmission systématique de tous les documents nécessaires à ce contrôle. Ce n’est ni souhaitable, ni faisable, compte tenu des moyens qui y sont actuellement dédiés.

M. Julien Aubert. Parfaitement !

M. Jean-Pierre Vigier. Rendre ce contrôle systématique coûterait très cher et aboutirait à une augmentation considérable des cotisations pour les vétérinaires libéraux.

M. Martial Saddier. C’est indéniable !

M. Jean-Pierre Vigier. Le deuxième sujet que je souhaite aborder concerne Saint-Barthélemy. (« Ah ! Enfin ! » sur les bancs du groupe UMP.) L’article 11 du projet de loi applique à ce territoire plusieurs règlements européens dans le domaine de l’aviation civile. Cette situation résulte du changement de statut de Saint-Barthélemy au sein de l’Union européenne au 1er janvier 2012.

Comme vous le savez, afin de ne pas anéantir les effets de ce statut, le conseil exécutif de Saint-Barthélemy, saisi sur ce projet, avait souhaité un examen particulier en tant que « pays et territoire d’outre-mer ». En effet, dans ce territoire, le transport aérien se déploie dans un environnement régional, économique et concurrentiel très différent de celui de l’Union européenne. C’est pourquoi, jusqu’à présent, certains textes européens relatifs à des domaines qui ne sont pas de la compétence de la collectivité n’y étaient pas applicables en tant que tels, par exemple pour le transport aérien.

S’ils l’étaient, la compétitivité des entreprises françaises serait affaiblie par rapport aux concurrents régionaux. Il me semble donc important de préserver une certaine spécificité à Saint-Barthélemy, faute de quoi des entreprises qui fonctionnent bien actuellement connaîtraient de sérieux problèmes.

M. Martial Saddier. Nous sommes d’accord !

M. Jean-Pierre Vigier. L’emploi s’en ressentirait évidemment. Et ce n’est vraiment pas le moment d’aggraver la situation !

M. Martial Saddier. Exactement !

M. Jean-Pierre Vigier. En ce qui concerne le droit maritime et l’application des normes sociales françaises aux équipages embarqués sur les navires effectuant une prestation dans les eaux territoriales ou intérieures françaises, l’objectif est louable. En effet, il s’agit de réduire le déficit de compétitivité entre armements français et étrangers qui opèrent sur les lignes de cabotage maritimes ou qui effectuent des prestations de services à l’intérieur des eaux françaises.

Cependant, l’activité de maintenance et de réparation des câbles sous-marins est effectuée aujourd’hui uniquement par deux opérateurs français. Ces opérateurs sont mis en péril par les dispositions du projet de loi : le coût de stationnement de ces navires en France, ainsi que les activités portuaires, sont renchéris de manière très importante – environ deux millions d’euros par an et par navire.

Nous pensons qu’il est nécessaire de permettre à ces navires câbliers de conserver leur stationnement en France tout en en limitant le coût. Pour cela, il faut restreindre le champ d’application défini par l’article L.5561-1 du code des transports, pour les navires de service, à ceux qui effectuent leurs prestations exclusivement dans les eaux territoriales ou intérieures françaises.

Enfin je voudrais aborder brièvement les dispositions relatives à l’énergie. Nous vous proposons des améliorations relatives à la codification du code de l’énergie. Les amendements que nous avons déposés à ce sujet ne visent pas à créer du droit. Ils ont simplement pour but, d’une part, de transposer en toutes lettres la directive de 2009 relative aux règles communes pour le marché intérieur de l’électricité, et d’autre part de réintroduire des éléments qui existaient auparavant dans la loi de 1906 et qui ont été omis lors de ladite codification.

Nos propositions concernent la conservation de certaines dispositions que nous jugeons importantes pour l’attractivité à l’embauche de l’entreprise, la suppression des dispositions jugées à la fois contreproductives et difficiles à mettre en œuvre et enfin le rétablissement de certaines dispositions contenues dans la loi du 15 juin 1906 et oubliées ou modifiées lors de la codification.

Je souhaite bien évidemment que cette lecture nous permette de nous faire entendre mieux qu’en commission et que nos amendements soient, cette fois, adoptés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) En effet, puisqu’il s’agit d’un texte extrêmement technique, nous devrions trouver un terrain d’entente. En conclusion, le vote du groupe UMP sera déterminé par la qualité de l’accueil que vous voudrez bien, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, faire à nos suggestions pratiques et de bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Et nous ? (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Blein.

M. Yves Blein. Notre assemblée examine ce soir la transposition de diverses directives européennes. Vous me permettrez de m’arrêter particulièrement sur la partie de ce texte qui transpose la directive Seveso III relative aux activités économiques impliquant l’emploi de substances dangereuses. Celle-ci remplace la directive Seveso II. Plus complète, elle vise notamment à permettre la mise en place au niveau mondial d’un système harmonisé de classification des substances dangereuses. Cet aspect de la directive concerne surtout les industriels ; cependant, il nous faut veiller à ce que ces classifications et réglementations n’entament pas la compétitivité des entreprises européennes opérant dans ce domaine.

Seveso III s’attache également, comme le faisait Seveso II, à la situation des citoyens concernés par ces activités et les risques qu’elles comportent. Les citoyens sont de plus en plus nombreux à vouloir être mieux informés. Ils veulent aussi pouvoir donner leur avis, voire s’opposer à des projets d’implantation ou de développement d’activités potentiellement dangereuses. Il est d’ailleurs rassurant, pour les autorités comme pour les industriels européens – qui doivent parfois faire face à l’hostilité des riverains – de voir que ce besoin de transparence gagne du terrain au niveau mondial. Les normes imposées aujourd’hui en Europe seront probablement aussi, à l’avenir, exigées ailleurs.

Songez seulement que la Chine elle-même, qui n’est pas toujours exemplaire en la matière, n’est plus à l’abri du besoin de transparence ! Un grand quotidien en a rendu compte cette semaine de façon détaillée. La population de la région de Shanghaï a manifesté vendredi dernier contre la construction d’une usine de batteries au lithium considérée comme polluante. Par ailleurs, un millier de personnes ont occupé, il y a une semaine, le centre de la ville méridionale de Kunming pour protester contre un projet de raffinerie et d’usine de paraxylène, demandant une information plus transparente ainsi que la possibilité de se prononcer sur ce projet par un vote populaire.

Ce besoin d’information est légitime. Il est indispensable d’y répondre de manière adéquate si l’on veut permettre à ces industries de se développer. La directive que nous transcrivons vise à mieux répondre à ces aspirations du public, sur des sujets qui restent malgré tout complexes. Ainsi, les établissements dits Seveso seront désormais tenus de publier, au format électronique, toute une série d’informations. Les statuts et les activités de ces établissements devront être décrits, de même que les risques que comportent ces activités et les mesures prises pour les prévenir. Des informations relatives au comportement à tenir en cas d’accident devront également être communiquées. Autre exemple : la date de la dernière inspection du site et les noms des personnes auxquelles les conclusions de cette inspection peuvent être demandées devront aussi être rendus publics.

Toutefois, la directive ne dit rien de la qualité pédagogique des supports de publication de ces informations. Le droit français n’est pas plus précis sur ce point. Chacun sait que trop de complexité, trop de technicité tue l’information, ou tend à la réserver à un public d’initiés. Il est facile, sur ces sujets, de tomber dans ce travers.

Au-delà des obligations faites aux industriels, la directive Seveso III – comme les directives précédentes – affirme la nécessité de mettre en œuvre une politique de maîtrise de l’urbanisation autour des sites Seveso. Son article 13 en particulier, auquel différents amendements font référence, prévoit que « les États membres veillent à ce que leur politique de maîtrise de l’urbanisation tienne compte de la nécessité, à long terme, de maintenir des distances de sécurité appropriées entre, d’une part, les établissements visés par la directive et, d’autre part, les zones d’habitation, les bâtiments, les zones fréquentées par le public, les zones de loisirs et, dans la mesure du possible, les principales voies de transport. » L’accident récent de Waco, au Texas, ou, plus près de nous, l’incendie de wagons contenant des produits dangereux en Belgique, montrent que le risque zéro n’existe pas. La chronique des accidents industriels nous le rappelle régulièrement. Il convient donc, bien sûr, d’organiser l’urbanisation future autour des sites industriels à risques, mais aussi de protéger les populations riveraines exposées.

À Waco, le 17 avril dernier, du nitrate d’ammonium, sans doute porté à une température mal maîtrisée, a provoqué une explosion dévastatrice dans une usine d’engrais, causant 14 morts et 200 blessés. Plus de 70 maisons alentours ont été détruites. Il y a quelques jours seulement, le 4 mai, à Wetteren, en Belgique, des wagons transportant un produit chimique liquide inflammable dont la combustion dégage un gaz proche du cyanure ont déraillé, causant deux morts et quatorze blessés. Les populations ont dû être évacuées dans un rayon de 500 mètres.

Ces accidents, comme celui intervenu en Normandie il y a quelque temps, nous invitent à ne pas relâcher notre vigilance. La France a choisi d’être attentive à ces risques et de transposer ces directives par le biais de plans de prévention des risques technologiques, prévus aux articles L. 515-15 et suivants du code de l’environnement. Certains des amendements que nous examinerons au cours de ce débat ont simplement pour but de les rendre applicables et réalisables sans charge exorbitante pour la population.

C’est ainsi, par exemple, que des dispositions imposant aux industriels et aux collectivités territoriales bénéficiant de la contribution économique territoriale de participer à parts égales au financement des travaux rendus nécessaires chez les riverains pour les protéger des conséquences d’un éventuel accident ont été intégrées au texte qui vous est soumis. Si cette mesure n’était pas adoptée, alors qu’elle est déjà acceptée conventionnellement par les associations d’élus et par les industriels, il y aurait à craindre que la directive et les PPRT qui en découlent restent lettre morte. Le texte fixe d’ailleurs une limite raisonnable à ces coûts, obligeant ainsi à hiérarchiser les travaux prescrits. Il est généralement admis que ce plafond permet d’assurer l’essentiel de la protection des personnes concernées. C’est ainsi que 90 % des coûts engendrés par cette obligation seront pris en charge. En 2004, on ne parlait que d’une prise en charge de 15 % !

Ces dispositions sont très attendues par les populations. Songez que plusieurs dizaines de nos concitoyens vivent aujourd’hui à proximité d’installations classées « Seveso seuil haut ». Vous imaginez bien que les foyers qui vivent là ne sont pas fortunés. Il ne s’agit pas non plus de je ne sais quels spéculateurs. Ce sont plutôt des ménages modestes, n’ayant pas les capacités financières nécessaires pour se mettre à l’abri de ces dangers.

Ce texte permet de tourner la page d’une trop longue quête de solution. Les habitants concernés ont d’ailleurs parfois pu penser que leur sort n’intéressait pas la nation. Qu’il me soit permis à cet instant de remercier en leur nom chacune et chacun de ceux qui ont contribué à ce bon résultat. Vous d’abord, madame la ministre, qui avez exprimé dès votre prise de fonction votre détermination à régler ce dossier. Les industriels ensuite, impliqués et volontaires ; et enfin les collectivités, également mises à contribution. Tous ont fait preuve de bonne volonté pour concilier le développement économique et le bien-être social.

Ces dispositions semblaient relever du bon sens : il paraissait logique que la solidarité de tous s’exerce. Il aura cependant fallu près de dix années de mobilisation pour aboutir enfin à une solution satisfaisante. Dans le même ordre d’idées, la transcription des dispositions relatives à la prise en charge de l’évaluation de la vulnérabilité des bâtiments d’habitation a été précisée. Les obligations qui pèsent sur les activités économiques situées dans les périmètres concernés – qui ne sont d’ailleurs pas nécessairement liées à l’activité à risque – ont été également mieux définies. Enfin, l’allégement des procédures d’enquête publique et la définition de limites temporelles permettront aux territoires concernés de se donner au plus tôt de nouvelles perspectives, dans un environnement réglementaire clair et stabilisé.

En transposant la directive Seveso III, notre pays s’honore de concilier deux objectifs qui lui sont chers : permettre à l’industrie de se développer, d’innover et de conquérir de nouveaux marchés, contribuant ainsi au développement de l’emploi, à l’enrichissement et à la compétitivité de notre économie ; et permettre à nos concitoyens de vivre dans des périmètres d’activité dont ils connaissent les risques, et de s’en savoir enfin protégés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Le texte que nous examinons ce soir appartient à la catégorie des fourre-tout, dans lesquels on regroupe de manière vaguement thématique un ensemble de dispositions disparates souvent très techniques.

M. Martial Saddier. Bravo !

M. Lionel Tardy. Si j’ai bien compté, c’est le quatrième texte de cette nature que nous examinons depuis le début de la législature, avec à chaque fois beaucoup de dispositions de transposition.

Je ne conteste pas la nécessité de tels textes : ces mesures doivent en effet figurer dans un texte de rang législatif. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer à ce sujet lors de l’examen d’un texte de ce genre en décembre dernier. Mais faut-il vraiment passer par un projet de loi ? Ne pourrait-on procéder par ordonnances, tant les dispositions sont techniques et disparates ? Même le rapporteur de la commission des affaires économiques, saisie pour avis sur quelques articles seulement, n’a pas réussi – c’est normal ! – à trouver une cohérence entre les dispositions portant sur l’énergie et celles relatives à la profession de vétérinaire.

En outre, les quelques articles portant sur l’énergie couvrent quasiment tout le spectre de ce domaine. L’un d’entre eux ratifie une ordonnance procédant à une réécriture majeure du code de l’énergie : on pourrait donc envisager une foule d’amendements à ce propos. On mesure bien à quel point il est difficile d’examiner de tels textes au Parlement de manière satisfaisante !

M. Martial Saddier. Analyse pertinente.

M. Lionel Tardy. Je me souviens des propos peu amènes tenus par des députés socialistes avant l’examen de propositions de lois de simplification du droit. On retrouve ici les mêmes problèmes et les mêmes questionnements.

Le premier problème qui me frappe est celui du déficit d’informations. L’étude d’impact est vide, ou presque : cela devient une habitude. Pour comprendre un tel projet de loi, l’on aurait besoin de disposer également du texte de la directive concernée. Cela permettrait de vérifier que l’on ne va pas au-delà de la transposition, comme c’est malheureusement trop souvent le cas en France.

M. Julien Aubert. Très bien !

M. Lionel Tardy. Pire encore, il arrive souvent que l’on glisse en douce dans le texte de transposition des dispositions qui ne figurent pas dans la directive qu’il est censé transposer !

Ce travail commence par de la recherche documentaire. Il se poursuit par une analyse qui est, il faut bien le dire, aride et technique. Un parlementaire ne peut l’accomplir seul : cela ne peut qu’être un travail collectif, accompli dans le cadre d’une commission. Je ne veux pas jeter la pierre aux deux présidents de commission et aux rapporteurs du texte, pour qui j’ai de l’estime,…

M. Philippe Plisson, rapporteur. Que c’est gentil !

M. Lionel Tardy. …mais il faut constater que l’examen en commission a été bien léger !

Je constate, dans le même temps, que plusieurs séances de la commission des affaires économiques ont été consacrées aux antennes relais et à la concurrence dans le secteur des télécommunications alors qu’aucun texte législatif concernant ce domaine ne sera examiné dans les prochains mois. Il y a eu des auditions dont nous aurions pu nous passer…

Messieurs les présidents de commissions, je connais vos contraintes, notamment de calendrier. Mais qu’un texte au contenu aussi dense et aussi important puisse être déposé le 11 mars, puis examiné au fond le 10 avril en commission et le 15 mai en séance après engagement de la procédure accélérée, pour ne plus être revu par la suite, ce n’est pas satisfaisant !

M. Julien Aubert. Il a raison !

M. Michel Heinrich. Raisonnement implacable !

M. Lionel Tardy. C’est d’autant moins satisfaisant que, dans le même temps, le Président de la République nous a annoncé un grand choc de simplification et une chasse aux normes : pour toute création d’une norme, une autre doit être supprimée. Quand on lit ce projet de loi, on constate qu’il introduira de nombreuses normes dans notre législation. Loin de participer au choc de simplification, il contribuera à complexifier encore plus notre droit.

M. Julien Aubert. Encore un renoncement de la part du Gouvernement !

M. Lionel Tardy. Je ne prendrai qu’un exemple : l’article 7 et ses 167 alinéas relatifs à la mise sur le marché et à la surveillance des produits et équipements à risque. Cet article réforme des textes existants ; il les refond globalement tout en les adaptant au droit de l’Union européenne. Comment voulez-vous que l’on y comprenne quoi que ce soit, sinon qu’il ne simplifie pas vraiment les choses ?

J’aurais aimé pouvoir analyser en détail cet article 7, pour voir ce qu’il apporte réellement de nouveau et surtout comment il aurait pu simplifier et supprimer des normes inutiles. Je n’en ai eu ni le temps ni les moyens, pas plus que pour les autres articles de ce texte d’ailleurs. Je n’ai pu que les survoler de manière très superficielle, comme beaucoup de mes collègues.

C’est sur ce genre de textes qu’il faudrait concentrer notre attention, pour agir en amont contre les réglementations qui asphyxient notre pays. Nous ne le faisons malheureusement pas assez, qu’il s’agisse de projets de lois ou d’ordonnances. Je ne peux me satisfaire du travail qui a été mené sur ce texte. Malgré toute la bonne volonté et l’honnêteté des rapporteurs – encore une fois, je ne le nie pas – ce travail est insuffisant pour que je puisse me prononcer en connaissance de cause. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yann Capet.

M. Yann Capet. Madame la présidente, mesdames, messieurs, nous avons à débattre d’un projet de loi, certes, très fourni, transversal et sans doute disparate – disparate par nécessité, au regard des textes non transposés restés en souffrance. Ce type de texte ne permet sans doute pas de laisser libre cours à l’inventivité et génère une certaine frustration, s’agissant, avant tout, de transposer des dispositions qui ne laissent que des marges de manœuvres limitées.

Je tiens particulièrement à remercier et féliciter notre rapporteur, Philippe Plisson, qui a su magistralement manier la sémantique et la syntaxe, avec efficacité et parfois gourmandise sur un texte, il est vrai, plutôt aride.

M. Christian Assaf. Très bien !

M. Yann Capet. Le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable prévoit notamment la transposition de la directive du 16 février 2009 portant mise en œuvre de l’accord conclu par les Associations des armateurs de la Communauté européenne et la Fédération européenne des travailleurs des transports concernant la convention du travail maritime de février 2006. Il s’agit, comme vous le rappeliez, madame la ministre, du premier instrument juridique contraignant de l’Organisation internationale du travail. Ceci doit être souligné, car l’édiction de ces règles sociales marque une volonté internationale certaine d’améliorer de manière aussi unifiée que possible le droit des gens de mer. La convention du travail maritime se donne, en effet, pour objet « de créer un instrument unique et cohérent » intégrant, parallèlement aux principes fondamentaux du travail, toutes les normes et recommandations déjà existantes dans le domaine du travail maritime. Les principales mesures proposées apportent des améliorations évidentes au statut social des gens de mer. Vous avez souhaité, madame la ministre, étendre le bénéfice de ces dispositions à l’ensemble des personnes exerçant la profession de marin, anticipant ainsi la ratification de la convention n° 188 de l’OIT sur le travail dans la pêche, et ce dans une logique de cohérence juridique et d’unicité du droit social. Le texte doit alors procéder à la définition des gens de mer, y compris dans les dispositions concernant le Registre international français, et de l’armateur, en définissant la responsabilité sociale de celui-ci pour la totalité des gens de mer embarqués. L’ensemble du dispositif constitue un socle de normes, certes minimales, applicables à bord des navires, notamment en matière de conditions d’emploi, de santé, de sécurité au travail, d’hygiène et de bien-être, en vue de contribuer à l’amélioration des conditions de travail et de vie des gens de mer, notamment les mineurs ou les femmes, comme cela a été précédemment souligné. Les domaines concernés sont nombreux : la protection des jeunes ; le rétablissement de l’équilibre contractuel, en précisant la formation du contrat d’engagement maritime ; le droit pour les gens de mer à une alimentation saine et appropriée ; celui de pouvoir communiquer avec leurs familles ou leurs proches ; ou encore le droit de descente à terre lors des escales.

Le texte impose également l’obligation, pour l’armateur, de détenir à bord un certain nombre de documents tels les conventions et accords collectifs, les contrats d’engagement, ou les textes relatifs au rapatriement.

Nous savons que le secteur des transports maritimes est marqué par une concurrence exacerbée, parfois sous couvert d’une application déloyale des dispositions européennes, ou par le recours à un dumping social devenu monnaie courante à l’échelle internationale, échelle naturelle du transport maritime.

Le Gouvernement a démontré, à plusieurs reprises, sa volonté d’armer la France face à ces dérives et de créer les conditions d’une économie maritime forte, qui ne se construit pas au détriment des conditions de travail et des conditions sociales. Ainsi, le projet de loi portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports, auquel il a été fait allusion dans l’intervention précédente, a permis, par l’application des règles de l’État d’accueil aux navires armés pour le cabotage maritime, de renforcer les règles sociales imposées aux navires quel que soit leur pavillon.

La transposition des règles issues de la convention du travail maritime participe du même esprit, dès lors qu’elle permet d’exiger de tout armateur, qu’il respecte des conditions minimums.

Nous devons utiliser toutes les potentialités ouvertes par cette convention, singulièrement celles qui peuvent contribuer à consolider nos compagnies maritimes nationales. Un travail a d’ailleurs été engagé avec la direction des affaires maritimes, les armateurs et les syndicats, notamment sur la question de la prise en compte des accords d’entreprises qui témoignent, particulièrement au sein des coopératives, de cette volonté d’allier enjeux sociaux et dynamiques économiques.

Nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir durant les débats. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Delphine Batho, ministre. Mesdames, messieurs les députés, je vais essayer de répondre à un certain nombre d’observations portant sur un texte très technique. Je rappellerai d’ailleurs, à cet égard à Lionel Tardy que, si ma mémoire est bonne, c’est le treizième du genre et qu’un certain nombre de textes de ce type ont été examinés lors de la précédente législature.

M. Lionel Tardy. Tout à fait et vous nous le reprochiez à l’époque !

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable. Il a perdu la mémoire !

Mme Delphine Batho, ministre. Comme je l’ai souligné dans mon propos liminaire, cette méthode tendant à discuter des textes portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne a permis à la France de se situer à un bon niveau dans le domaine de la transposition des directives européennes et d’atteindre un score plus que correct.

Je répondrai, tout d’abord, au rapporteur Philippe Plisson sur la clause de 2 % concernant les règles Seveso. Ce point relève des textes réglementaires qui transposeront de façon complémentaire la directive. Cette clause prévue par la directive, mais utilisée dans peu d’États membres, permettrait, en fait, à une dizaine d’établissements qui stockent de multiples substances dangereuses en petite quantité de ne pas être soumis aux règles Seveso. Une concertation est en cours sur ce point avec les fédérations professionnelles, dont je ne préjuge pas du résultat. Une discussion technique consistera à vérifier qu’il n’existe pas de risques d’accidents importants. Si tel était le cas, je ne verrais pas d’obstacle à l’application de cette disposition.

Denis Baupin s’est interrogé sur la modulation des péages. La modulation selon la classe d’émission Euro du véhicule s’appliquera aux concessions nouvelles et aux concessions existantes au moment de leur renouvellement. La modulation des péages en fonction de la congestion du trafic est déjà en place sur certains tronçons – l’A 14, le tunnel de l’A 86 – et sur certaines sections où il y avait eu une acceptation de cette notion de modulation antérieure à la directive Eurovignette. Le déploiement, qui demeure une faculté et non une obligation, de cette capacité de modulation pourra être effectivement appliqué au cas par cas, en accord avec les concessionnaires.

Je tenais aussi à vous remercier d’avoir salué le travail de Frédéric Cuvillier !

Monsieur Frédéric Barbier, vous avez évoqué la question des audits. Le système des audits est un point de départ aux travaux d’efficacité énergétique dans les entreprises. Les entreprises concernées par les dispositions sont celles qui sont en mesure d’engager cette procédure. La date ne peut pas être reportée, puisqu’elle est fixée par la directive européenne. C’est précisément la raison pour laquelle nous procédons aujourd’hui à cette transposition.

J’indiquerai également à M. Pancher que nous ne sommes pas obligés d’attendre un an avant de sortir le décret d’application. Nous essaierons, par conséquent, d’être rapides et efficaces pour que toutes les dispositions réglementaires d’application puissent être prises très rapidement et que les entreprises soient également accompagnées. Nous discutons d’ailleurs, à ce titre, dans le cadre du débat national sur la transition énergétique, de la façon dont on peut accompagner, aider et encourager les entreprises à réaliser des investissements d’efficacité énergétique au-delà de l’audit, afin que celui-ci déclenche un certain nombre de travaux. Je rappelle que nous pouvons réduire de 43 % la consommation d’énergie dans le domaine de la production industrielle en France. Ce levier est donc extrêmement important, si l’on considère, notamment, l’installation de modulateurs de vitesse des moteurs. Passer à des moteurs à vitesse variable suffirait déjà à réaliser énormément d’économies d’énergie.

M. le président Chanteguet a évoqué le marché du CO2. Nous adoptons, en effet, dans ce projet de loi, des dispositions essentielles, s’agissant de la troisième période d’engagement du marché ETS. J’ai eu l’occasion, cet après-midi, d’évoquer devant la commission des affaires européennes les positions françaises sur ce dossier. Nous espérons que le Conseil européen du 22 mai prochain sera l’occasion de soutenir la proposition de back-loading et d’engager la discussion sur l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, ce qui sera un signal important.

Monsieur Pancher, s’agissant du bilan de la politique environnementale du Gouvernement, je vous donne rendez-vous lors du conseil des ministres de la semaine prochaine qui permettra de faire le point sur la mise en œuvre de tous les engagements de la Conférence environnementale qui, pour deux tiers d’entre eux, sont, d’ores et déjà, réalisés.

Lorsque nous aborderons les dispositions relatives aux vétérinaires, nous examinerons des amendements qui permettront de répondre de façon approfondie aux différentes préoccupations dont nous avons déjà discuté en commission.

Vous m’avez interrogée sur les biocides. L’évaluation des substances actives est une évaluation européenne. Celle des produits biocides est une évaluation réalisée par l’ANSES au niveau national. Lorsque nous signalons un certain nombre de substances dangereuses, nous consultons également l’ANSES sur la position française ou nous prenons connaissance de son expertise sur les évaluations au niveau européen.

Vous avez évoqué la police de l’environnement. Je dois vous dire que c’est la première fois que j’entends ces objections. Sauf erreur de ma part, mon cabinet n’a pas été contacté, comme vous l’avez indiqué. Je comprends que se pose une difficulté. Puisqu’il semble que nous devions arrêter nos travaux à une heure trente, car vous recommencez tôt, demain matin, je pense que nous ne pourrons pas examiner l’article 10 du projet au cours de cette séance. Je propose que nous discutions de ce point à cette occasion. J’examinerai en détail les objections que vous avez soulevées. Ces dispositions sont de nature technique et je ne veux pas qu’il y ait de malentendu. Je vous répondrai donc très précisément lorsque nous aborderons l’examen de l’article 10 et des amendements déposés sur cet article.

Je vous ai répondu sur le décret.

M. Krabal a souligné, à juste titre, qu’il était nécessaire que tous les pays appliquent les règlements s’agissant de Seveso III et des produits biocides.

Le président Chanteguet a évoqué le financement des PPRT. Nous avons mis en place le crédit d’impôt à 40 % dans le projet de loi de finances pour 2013. L’amendement qui sera réintroduit dans le texte proposera une clé de répartition : les collectivités et les industriels participeront respectivement à hauteur de 25 %. Les travaux seront donc pris en charge à 90 %. S’agissant des 10 % restants, monsieur Chanteguet, nous envisageons de mobiliser en faveur des personnes et familles modestes des dispositifs de droit commun, en particulier l’ANAH. Nous sommes d’ailleurs en train d’expérimenter cette mobilisation, puisque le PPRT n’existait pas jusqu’ici.

Concernant la prévention des risques, je tenais à remercier Patrice Carvalho pour les propos qu’il a tenus sur les DREAL et sur le travail accompli par leurs agents. Nous avons encore pu en mesurer l’importance, les semaines passées, s’agissant des risques naturels, et ces derniers jours à l’occasion des inondations.

Pour ce qui est de l’engagement des industriels dans le financement de la prévention des risques technologiques, je tenais à rappeler qu’ils financent 100 % de la réduction du risque à la source et qu’au cours des cinq dernières années, un milliard d’euros a été investi dans la prévention des risques technologiques. Ce n’est pas accessoire. Ils financent également un tiers des mesures foncières.

Concernant la souveraineté et l’articulation entre la compétence nationale et celle de l’Union européenne, je tiens à préciser que les dérogations à la directive Seveso III sont délivrées par la Commission après le vote des États membres. La France donne, par conséquent, son avis. En revanche, nous considérons que l’uniformité des dérogations sur le territoire européen est une bonne chose.

Je rappellerai, concernant les autorisations de mise sur le marché d’un produit phytosanitaire, que le ministère de l’agriculture, suite aux difficultés soulevées, a demandé deux audits dont les résultats seront connus mi-juin. Le Gouvernement en tirera immédiatement un certain nombre de conséquences.

Monsieur Baupin, nous parlerons du renforcement des sanctions dans la discussion des amendements. Quant à la modulation des péages, j’ai déjà répondu.

Quand on parle de biocarburants, c’est dans le sens biomasse. Nous aurons cette discussion. La future directive sera, c’est vrai, rediscutée au conseil environnement du 18 juin. Nous soutenons d’ailleurs le projet de la Commission. Il reste des discussions sur un certain nombre de points techniques. Depuis la conférence environnementale, nous avons déjà plafonné le niveau d’incorporation. Je voulais simplement souligner que, le temps qu’un accord soit trouvé, que la nouvelle directive soit finalisée et entre en vigueur, il n’y a aucun obstacle à ce que l’on transpose la directive précédente.

Sur les certificats d’économie d’énergie, j’ai anticipé vos amendements ; nous y reviendrons. Pour la troisième période, j’ai parlé d’un objectif d’au moins 200, ce qui laisse ouverte la discussion, qui a lieu aussi dans le cadre du débat national sur la transition énergétique mais, quoi qu’il en soit, le niveau d’engagement de la troisième période ne relève pas de la loi. C’est un débat qu’il faudra poursuivre. Je vous remercie de ce que vous avez dit des positions françaises sur la situation du marché ETS.

Monsieur Bardy, je vous remercie d’avoir souligné l’important travail interministériel qui a permis d’élaborer ce texte. Il nécessite aussi une grande mobilisation des différents collaborateurs, que je salue, des directions générales des services de l’État, qui sont présents pour aborder les différents points techniques.

Monsieur Vigier, nous reviendrons sur le problème des vétérinaires.

Les dispositions sur les salariés, nous vous avions déjà dit en commission que nous y étions défavorables.

Sur les navires câbliers, ce que vous avez évoqué, ce n’est pas une disposition de la loi DDADUE, mais une disposition dite « État d’accueil » de la précédente loi transports. Votre proposition conduirait à lui enlever toute efficacité, mais nous y reviendrons sans doute dans le débat.

Monsieur Blein, je salue votre intervention, ce que vous avez dit sur les milliers de citoyens vivant à proximité d’établissements Seveso seuil haut et la nécessité de régler ces situations.

Monsieur Tardy, j’ai déjà répondu à vos objections sur les textes portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne.

Monsieur Capet, je vous remercie de ce que vous avez dit sur les gens de mer, sur les avancées prévues par ce texte et sur le fait que l’on peut, c’est en tout cas l’ambition de la France, être une puissance maritime sans que cela soit au détriment du droit social et des conditions de travail.

Discussion des articles

Mme la présidente. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.

Article 1er

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert, inscrit sur l’article 1er.

M. Julien Aubert. L’article 1er illustre assez bien, je crois, la mauvaise qualité du travail que nous pouvons réaliser sur un texte dont la formulation est assez sibylline, qui est dépourvu d’exposé des motifs et d’étude d’impact, et sur lequel il devient donc difficile de se prononcer.

Je voudrais de plus signaler la procédure un peu baroque selon laquelle nous avons travaillé en commission, avec une nouvelle convocation hors normes une heure après la réunion organisée en application de l’article 88. C’est un peu étrange. Le rapporteur avait donné un avis favorable, par exemple, à l’amendement n° 83 de Mme Marion Maréchal-Le Pen à l’article 4 ; et, une heure après, nouvelle convocation, et nous réexaminons cet amendement. Nous n’avons pas compris ce qui justifiait le fait que le rapporteur, le Gouvernement et le président de la commission aient changé d’avis dans l’heure, pourquoi ce qui était vertu à dix-sept heures est devenu vice à dix-huit heures. Nous n’osons pas imaginer, évidemment, que l’identité de la signataire de l’amendement en soit la cause.

Quoi qu’il en soit, quand on voit ce type de procédure et ce type de fonctionnement, il nous est évidemment difficile de travailler de manière tout à fait transparente et efficace. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

(L’article 1er est adopté.)

Article 2

(L’article 2 est adopté.)

Article 3

Mme la présidente. La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n° 91.

M. Denis Baupin. Cet amendement vise à faire en sorte que l’on protège mieux les riverains habitant à proximité d’une installation.

L’article tel qu’il est écrit aujourd’hui interdit purement et simplement l’expropriation si l’habitation a été construite dans les règles de l’époque de sa construction, qui peut être très largement antérieure à la mise en place de l’installation dangereuse. Alors que l’on peut exproprier des installations pour mettre à l’abri des gens pour des projets de transport, on ne voit pas pourquoi ce ne serait pas possible pour les usines dangereuses.

L’amendement vise donc à permettre une telle expropriation et à faire porter la responsabilité sur l’industriel, ce qui incitera un industriel souhaitant installer une entreprise dangereuse à ne pas la mettre à proximité des habitations.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement ouvre la possibilité de remettre largement en cause des situations existantes pour des bâtiments pourtant édifiés en conformité avec les dispositions législatives et réglementaires en vigueur avant l’institution des servitudes. Il y a donc là une source importante d’insécurité juridique pour les propriétaires et de charges financières pour les industriels, qu’il faut bien mesurer.

Si un tel choix devait être fait – car la porte n’est pas totalement fermée –, cela devrait être dans le cadre d’un dispositif législatif et réglementaire beaucoup plus complexe et étoffé que celui qui proposé par les auteurs de l’amendement. La commission y est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Défavorable.

L’amendement modifierait d’abord la politique de maîtrise de l’urbanisation autour des sites industriels. Les servitudes visent avant tout à préserver de nouvelles constructions dans les zones les plus exposées.

Sur un plan pratique, pour les rares constructions concernées, le bâtiment serait démoli mais le terrain inconstructible resterait la propriété de la personne concernée. Il y aurait donc des difficultés financières.

Sur le plan juridique, la modification conduirait à des situations où il serait porté atteinte au droit de propriété défini par l’article 34 de la Constitution et il serait nécessaire de prévoir une intervention du juge judiciaire pour garantir le respect de ces droits.

Pour l’ensemble de ces raisons, il nous semble que l’amendement n’est pas assez mûr pour être adopté.

(L’amendement n° 91 n’est pas adopté.)

(L’article 3 est adopté.)

Après l’article 3

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement n° 86.

Mme Marion Maréchal-Le Pen. Je remercie mon collègue du Vaucluse, Julien Aubert, d’avoir rappelé l’émoi suscité en commission par cet amendement. Il a d’abord été adopté en commission avec un avis favorable du rapporteur avant d’être rejeté une heure plus tard après une nouvelle délibération demandée par les députés socialistes. Je pense que l’amendement était légitime sur le fond mais que l’auteure, a priori, l’est nettement moins dans vos esprits.

Pourtant, il était simple. Il permettait aux associations de riverains, de protection de l’environnement et de santé publique de demander le plan d’opération interne à l’exploitant afin de s’assurer de son existence. C’est donc quelque chose d’assez restreint et l’argument de la confidentialité qui était avancé ne tient pas puisque le nouvel article 515-35 permet au préfet de rejeter une demande risquant de porter atteinte à la confidentialité des informations industrielles et commerciales.

Si cet argument ne vous convainc pas, je suis tout à fait disposée à proposer un sous-amendement qui serait ainsi rédigé : la demande est adressée au représentant de l’État dans le département, qui peut la refuser dans les conditions prévues à l’article 515-35 du même code.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Sauf erreur de ma part, madame la députée, vous ne parliez pas de l’amendement n° 86, auquel la commission est défavorable.

Il convient de laisser le juge de l’expropriation, juge judiciaire, décider librement du montant de l’indemnisation en fonction de l’ensemble des intérêts en présence. Il n’y a aucune raison de créer un mécanisme de plancher qui laisserait croire à nos concitoyens que la justice rend aujourd’hui des décisions qui leur sont en règle générale défavorables.

Par ailleurs, la procédure judiciaire garantit en toute hypothèse la préservation des intérêts des riverains expropriés, puisque ceux qui estimeraient que la décision du tribunal de grande instance n’évalue effectivement pas leurs biens à leur valeur réelle ont toujours la possibilité de saisir le juge d’appel.

(L’amendement n° 86, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n° 80 rectifié.

Mme Delphine Batho, ministre. La directive Seveso III impose de mettre en œuvre une politique de maîtrise de l’urbanisation autour des sites Seveso. La France a choisi de transposer cet objectif par la mise en place de PPRT.

Le code de l’environnement permet aux propriétaires de bâtiments inscrits dans un secteur de délaissement d’un plan de prévention des risques technologiques d’obliger la commune ou les collectivités à racheter leurs biens. Ces bâtiments sont évidemment soumis à des risques d’accident à cinétique rapide présentant un danger grave pour la vie humaine. Les propriétaires peuvent donc choisir entre quitter leurs bâtiments en faisant valoir leurs droits de délaissement ou rester sur place en réalisant les travaux de renforcement du bâti prescrits par le PPRT. Ces travaux doivent être réalisés dans un délai limité, qui est en général de cinq ans.

La loi ne limite pas dans le temps le droit de délaissement. Les participants à l’indemnisation du propriétaire éprouvent des difficultés à provisionner pendant une durée illimitée à compter de la date d’approbation du PPRT les crédits nécessaires. Cette provision est d’autant plus difficile à déterminer que le montant de l’indemnisation devra être actualisée en fonction des évolutions du prix du marché, selon les principes fixés dans la convention.

Ensuite, dans la mesure où les biens objets du délaissement deviennent propriété de la commune ou des collectivités compétentes, il est difficile pour ces dernières, devant l’incertitude, de définir un projet d’aménagement qui prenne en compte à la fois les objectifs de réduction des risques et ceux de développement cohérent et durable du territoire.

Il est donc nécessaire de limiter dans le temps la période de délaissement ouverte aux propriétaires concernés pour aboutir à une politique de maîtrise de l’urbanisation qui soit cohérente et concentrée dans le temps.

La durée d’extinction proposée est de six ans après bouclage du financement.

Cet amendement, qui avait été proposé par Yves Blein, avait été suspendu pour les raisons de procédure que j’avais évoquées. Il est donc repris par le Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement répond à un problème très important qui est celui des limites temporelles d’exercice du droit de délaissement par les propriétaires.

À l’heure actuelle, ce délai n’est pas limité, ce qui oblige les contributeurs à l’indemnisation du propriétaire à provisionner des montants difficiles à calculer et, par ailleurs, soumis à actualisation en fonction de l’évolution des prix du marché. En outre l’incertitude sur l’exercice ou non du droit de délaissement complique la mise en place de projets de développement urbain durable et cohérent.

La solution retenue, un délai de six ans à compter du bouclage des financements, me semble établir un équilibre raisonnable entre la liberté de choix laissée au propriétaire et la nécessité de ne pas laisser cette faculté perdurer indéfiniment.

La nécessité de maintenir une égalité de traitement aux propriétaires, quel que soit le degré d’avancement de la procédure du PPRT, est également prise en compte à travers la fixation d’un point de départ unique à la date du bouclage du financement.

Cet amendement permettra de débloquer un ensemble de situations dans des conditions satisfaisantes pour toutes les parties. La commission y est donc favorable.

(L’amendement n° 80 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement n° 81 deuxième rectification.

Mme Delphine Batho, ministre. C’était également un amendement présenté par Yves Blein qui avait été bloqué par la procédure de l’article 40 et que le Gouvernement reprend. Il s’agit de rendre éligibles aux financements et à la clé de répartition des financements les travaux de démolition qui, sinon, sont uniquement à la charge des communes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Il s’agit de faire couvrir, dans le cadre du financement tripartite État-exploitant-collectivité propre au PPRT, certaines mesures spécifiques comme la limitation de l’accès aux biens exposés et leur démolition afin d’en empêcher toute occupation future. À l’heure actuelle, contrairement aux dispositions applicables par exemple en matière de risque naturel, ce sont en effet les collectivités territoriales qui supportent seules une telle charge. Cet amendement permet donc de rétablir un équilibre, faisant partager l’effort de financement du PPRT à l’ensemble des parties. Avis favorable.

(L’amendement n° 81, deuxième rectification, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Blein, pour soutenir l’amendement n° 23 rectifié.

M. Yves Blein. Il s’agit, dans le même ordre d’idées, de rendre éligibles au financement des dépenses assumées par les riverains les coûts que représente le diagnostic nécessaire pour la réalisation des travaux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Ainsi que cela vient d’être rappelé par l’auteur de l’amendement, il s’agit de lever un doute possible quant au point de savoir si le diagnostic préalable aux travaux dans le cadre d’un PPRT est éligible au crédit d’impôt. L’amendement permet de lever toute incertitude sur ce point. L’avis est donc favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Favorable. Le Gouvernement lève le gage. Les financements sont d’ores et déjà inclus dans les plans de financement des PPRT.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Les députés UMP sont favorables au partage du coût de la démolition, qui serait autrement assumé par les seules collectivités territoriales. Nous sommes également favorables à ce que le coût du diagnostic soit partagé. Je tenais à le préciser, au nom de l’ensemble des députés UMP.

(L’amendement n° 23 rectifié, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Article 3 bis

(L’article 3 bis est adopté.)

Article 3 ter

Mme la présidente. À l’article 3 ter, la parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 124.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement vise à rectifier une erreur de plume. À la fin de l’alinéa 4, il convient de substituer au mot « public » le mot « privé ».

(L’amendement n° 124, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 3 ter, amendé, est adopté.)

Article 3 quater

Mme la présidente. À l’article 3 quater, la parole est à M. Yves Blein, pour soutenir l’amendement n° 22.

M. Yves Blein. Il s’agit du même amendement que précédemment, à ceci près qu’il modifie le code de l’environnement alors que le premier portait sur le code des impôts.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Favorable. Il s’agit de lever un doute possible quant au point de savoir si le diagnostic préalable aux travaux dans le cadre d’un PPRT est éligible au crédit d’impôt. L’amendement lève toute incertitude sur ce point.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Favorable. Nous étions tout à l’heure sur le crédit d’impôt, nous sommes à présent sur la clé de répartition du financement entre collectivités et industriels. Le Gouvernement lève le gage.

(L’amendement n° 22, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

(L’article 3 quater, amendé, est adopté.)

Article 4

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Quéré, inscrite à l’article 4.

Mme Catherine Quéré. À l’article 4 du projet de loi, il est indiqué, au sujet l’article L. 515-32 du code de l’environnement, que les travaux de transposition prévoient des projets de décrets et d’arrêtés qui pourraient modifier substantiellement la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement.

Députée d’une région que vous connaissez bien, madame la ministre, je suis très préoccupée par l’éventuelle suppression de la rubrique 2255 relative au stockage des alcools de bouche de plus de quarante degrés. Cette suppression, qui n’est pas prévue par la directive Seveso III, aboutirait à l’élimination de l’encadrement spécifique de nos produits et à leur classement dans la rubrique des liquides inflammables de catégories 2 et 3, assimilant ainsi les spiritueux à des produits chimiques et toxiques.

Cette remise en cause de nos spécificités n’est pas acceptable. Tout d’abord, elle porterait atteinte à la sécurité et à la viabilité de nos sites. Ensuite, nos boissons sont des denrées alimentaires, donc fondamentalement différentes des liquides chimiques inflammables. Enfin, cela imposerait des mesures inadaptées à ce secteur et susceptibles de remettre en cause son activité. Par exemple, il y a une incompatibilité manifeste avec le vieillissement sous bois, étape fondamentale du processus de fabrication de nombreuses boissons spiritueuses en France.

M. Martial Saddier. Elle a raison !

Mme Catherine Quéré. Pouvez-vous, madame la ministre, lever les inquiétudes des producteurs de spiritueux, si nombreux dans toutes nos régions ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Delphine Batho, ministre. Je tiens à vous rassurer, madame la députée. La transposition en droit français du règlement dit CLP – « classification, emballage et étiquetage » en anglais – modifie de façon importante la classification des substances dangereuses. Plusieurs textes doivent être modifiés. Il y a notamment un projet de nomenclature des installations classées, en consultation. C’est ce qui suscite un certain nombre d’inquiétudes. Cela illustre d’ailleurs le bien-fondé de cette procédure de mise en consultation des textes réglementaires.

Il est envisagé en effet de supprimer la rubrique 2255 relative aux alcools de bouche. C’est l’usage dans les autres pays européens, qui s’imposent les mêmes obligations. Les alcools sont en effet concernés par la note 5 de l’annexe I de la directive Seveso III, qui inclut dans son champ d’application les substances non concernées par le règlement, telles que les denrées alimentaires. Les alcools de bouche doivent donc être classés sur la base de leurs propriétés dangereuses, c’est-à-dire l’inflammabilité, ce qui, dans la nouvelle nomenclature des installations classées, revient à les classer dans la rubrique relative aux liquides inflammables de catégories 2 et 3, dont les seuils Seveso bas et haut sont respectivement fixés à 5 000 et 50 000 tonnes.

C’est un exemple qui illustre les limites du « choc de simplification » et montre la nécessité de conserver parfois des dispositions spécifiques. C’est ce que j’ai décidé, suite à des échanges avec les représentants des filières professionnelles concernées : il y aura toujours une rubrique spécifique dédiée aux alcools de bouche. Je pense, madame Quéré, que vous inquiétudes seront ainsi levées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Nous en venons aux amendements à l’article 4.

La parole est à M. Denis Baupin, pour soutenir l’amendement n° 92.

M. Denis Baupin. Cet amendement vise à supprimer un alinéa qui permet aux industriels d’être quasiment souverains sur la transparence des informations données aux riverains. Nous parlons ici d’installations où ont lieu des activités dangereuses, où des matières dangereuses sont utilisées ; il nous semble donc normal que les riverains aient accès à l’information sur ces matières et ces processus, sans que les industriels puissent recourir à des dérogations pour éviter de divulguer ces informations. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet alinéa dangereux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. L’alinéa 13 de cet article donne au préfet la possibilité de rejeter une demande de communication ou de ne pas divulguer une information dans la mesure où cette divulgation porterait atteinte à la confidentialité d’informations industrielles ou commerciales. La diffusion de certaines informations sur les processus industriels et technologiques est susceptible de contraindre les industriels à renseigner leurs concurrents sur leurs procédés de fabrication, parfois issus de coûteux investissements de recherche, alors même que ces concurrents ne sont pas soumis à des obligations symétriques dans leurs pays d’origine. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. La suppression de l’alinéa 13 reviendrait à se reposer sur les dispositions de l’article L. 124-4 du code de l’environnement en matière de limitation des données rendues publiques. Cela équivaudrait à une surtransposition de la directive Seveso III, qui est relativement protectrice du secret industriel. D’un autre côté, cela mettrait en cohérence l’ensemble des dispositions de protection des secrets protégés par le code de l’environnement, puisque le régime Seveso ne disposerait plus d’un traitement dérogatoire. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Parlement.

M. Denis Baupin. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. J’ai une petite incompréhension. En lisant l’exposé sommaire de l’amendement, on a le sentiment que c’est l’industriel qui peut refuser de communiquer les informations, alors que, selon l’alinéa 13, c’est le préfet. Ce n’est pas du tout la même chose. Autant je comprends qu’on puisse se méfier d’un industriel, qui pourrait vouloir interpréter la loi, autant j’ai toute confiance en l’État et en son représentant dans le département, qui est, selon l’alinéa, la personne habilitée à divulguer ou non les informations. De la manière dont je comprends les choses – si mon interprétation est mauvaise, qu’on me le dise –, l’industriel est obligé de communiquer les informations au préfet, et c’est le préfet qui peut décider au besoin de ne pas les divulguer. Ce n’est pas le sens de l’exposé sommaire.

(L’amendement n° 92 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement n° 83.

Mme Marion Maréchal-Le Pen. Pardonnez-moi, j’ai inversé les amendements. Mettez-le sur le compte de l’émotion suscitée par le soutien de notre collègue (Rires) et surtout de la vive envie d’entendre votre argumentation. L’amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. L’idée défendue par l’amendement, qui est de permettre la diffusion des plans d’opération interne aux associations de riverains et aux associations de protection de l’environnement, ne me semble pas complètement pertinente. Le POI est en effet un document technique complexe, qui décrit dans le degré de détail le plus fin l’ensemble des procédures et moyens mobilisés dans différentes configurations accidentelles. Le risque est donc grand, en le mettant à la disposition d’un public qui ne dispose pas nécessairement des compétences techniques adéquates, de susciter des interrogations ou des inquiétudes peu ou mal fondées. Je ne suis pas non plus enthousiaste à l’idée de faciliter l’action d’individus ou de groupes criminels qui pourraient ainsi identifier les vulnérabilités d’une installation industrielle et démultiplier l’impact de l’agression qu’ils envisagent de commettre. Pour toutes ces raisons, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Défavorable. Je rappelle de surcroît que toute association ou riverain peut aujourd’hui demander aux services de l’État la communication des POI.

(L’amendement n° 83 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Maréchal-Le Pen, pour soutenir l’amendement n° 85.

Mme Marion Maréchal-Le Pen. Les catastrophes industrielles révèlent souvent que la mauvaise organisation interne des sites à risques est à l’origine des conséquences dramatiques pour l’environnement et le voisinage. En cas d’accident, les mesures prises au niveau du site sont primordiales car elles sont les premières à s’appliquer. De leur pertinence dépend bien souvent qu’un incident soit circonscrit et maîtrisé ou qu’il dégénère et touche l’extérieur. Il est donc nécessaire de prévoir une actualisation périodique ainsi que des sanctions afin de donner une réelle portée à l’obligation faite à l’exploitant d’élaborer ce plan d’opération interne. D’où cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Je ne peux naturellement que souscrire sur le fond aux préoccupations exprimées dans cet amendement, à savoir une actualisation du POI en cas de réorganisation substantielle du site, et l’infliction de sanctions en cas de défaut d’élaboration ou d’actualisation. Je crois savoir que l’intention du Gouvernement est de renvoyer ces dispositions, dont certaines sont d’ores et déjà en vigueur, au décret en Conseil d’État mentionné à l’alinéa suivant de l’article 4. Sous réserve des précisions qu’apportera certainement Mme la ministre, vous pourriez donc éventuellement retirer votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Ce sont en effet des dispositions d’ordre réglementaire. Un décret d’application de la présente loi inscrira dans la partie réglementaire du code de l’environnement les périodicités de mise à jour du plan d’opération interne, notamment les fréquences périodiques par défaut, qui sont fixées par la directive à trois ans, et non deux, ainsi que les occasions spécifiques, comme la mise en œuvre d’un changement notable dans les installations.

Les sanctions sont déjà prévues pour toutes les non-conformités aux dispositions présentées dans l’intégralité du chapitre : il est donc inutile de rappeler qu’il existe des sanctions spécifiques pour les obligations relatives aux plans d’opération interne.

Mme la présidente. Madame Maréchal-Le Pen, retirez-vous l’amendement n° 85 ?

Mme Marion Maréchal-Le Pen. Je ne le retire pas, parce que le décret ne peut pas créer de sanctions pénales.

Mme la présidente. Quel est alors l'avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis défavorable

(L'amendement n° 85 n'est pas adopté.)

(L'article 4 est adopté.)

Articles 5 à 8

(Les articles 5, 6, 7 et 8 sont successivement adoptés.)

Article 9

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Heinrich, inscrit sur l’article.

M. Michel Heinrich. Cet article concerne la profession de vétérinaire. Je tiens à vous faire part de deux préoccupations : l’une touche à l’exercice personnel, l’autre aux missions effectuées par les vétérinaires pour le compte de l’État.

La profession de vétérinaire est une profession libérale qui doit être pratiquée à un haut niveau de qualification, comme chacun le sait. Elle implique une responsabilité personnelle. Or les propositions de modifications du code rural contenues dans ce projet de loi ont un impact sur les conditions d’exercice de la profession, mais également sur la qualité du service rendu. À terme, cela risque de faire disparaître la notion d’exercice personnel de la profession. Il me paraît donc indispensable de limiter le nombre de sociétés dans lesquelles un vétérinaire peut être majoritaire afin de s’assurer d’un minimum d’exercice personnel.

D’autre part, en tant qu’acteur de santé publique, le vétérinaire exerce des missions pour le compte de l’État : il contribue dans ce cadre à la sécurité alimentaire ainsi qu’au contrôle des maladies animales parfois transmissibles à l’homme. Il est donc important qu’il connaisse bien la réglementation de notre pays, l’organisation des services et les moyens de leur mise en œuvre sur tout le territoire. C’est pourquoi il est nécessaire de confier ces missions à un professionnel établi en France. De fait, un professionnel qui ne serait pas établi dans notre pays et interviendrait à titre temporaire connaîtrait mal la réglementation française. Il est donc particulièrement pertinent de supprimer l’alinéa 2 de cet article 9.

Soulignons d’ailleurs que certains pays membres de l’Union européenne – la Belgique par exemple – ont soumis dans leur propre législation l’intervention pour le compte de l’État au respect de certaines conditions ; d’autres ont réservé cette activité aux seuls agents de l’État, comme c’est le cas en Allemagne.

C’est pourquoi j’espère que les amendements défendus par mes collègues de la commission du développement durable seront adoptés.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l'amendement n° 8.

M. Jean-Pierre Vigier. Le mandat sanitaire relève de la directive 64/432/CEE du Conseil européen du 26 juin 1964 et s’impose aux États membres. En revanche, les moyens mis en place pour son organisation sont du ressort de chaque État.

S’agissant des missions réalisées pour le compte de l’État, qui ont un impact sur la santé publique, il semble normal d’exiger que les vétérinaires, qui disposent d’un mandat permanent, répondent à des conditions particulières. Par exemple, ils doivent connaître parfaitement la réglementation française et l’organisation des services de santé publique. Il faut exclure de ces missions des vétérinaires qui ne sont pas installés en France et qui interviendraient à titre ponctuel. Certains États ont déjà recours à cette limitation, comme la Belgique ou l’Allemagne.

Par ailleurs, il n’existe pas d’incompatibilité avec le statut de profession libérale puisqu’il ne s’agit que de missions occasionnelles menées pour le compte de l’État.

C’est pourquoi nous proposons la suppression de l’alinéa 2 de cet article 9.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Plusieurs raisons conduisent à ne pas soutenir cet amendement. D’une part, le projet de loi n’innove pas sur la question de l’exercice du mandat sanitaire par des vétérinaires étrangers, puisqu’il se borne à régulariser une situation déjà existante. D’autre part, les ressortissants des États membres de l’espace économique européen bénéficient du principe de reconnaissance mutuelle automatique de leur diplôme de vétérinaire. Il n’y a aucune raison de supposer que ces vétérinaires, pour être étrangers, seraient moins qualifiés que leurs homologues français. Ils sont soumis aux mêmes règles de déontologie et d’indépendance que leurs collègues. Enfin, ces vétérinaires étrangers sont tenus de suivre une formation continue, dispensée par les services ou les établissements de l’État.

Pour toutes ces raisons, la restriction que vous nous proposez ne me semble pas pertinente. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis défavorable également. Le projet de loi permet aux éleveurs de faire appel à des vétérinaires ressortissants de l’Union européenne pour réaliser certaines interventions imposées par l’autorité administrative – vaccinations, surveillance, traitements – et qui sont d’ailleurs prévues aujourd’hui par les dispositions réglementaires du code rural et de la pêche maritime.

Il ne faut pas confondre les vétérinaires sanitaires, qui sont les seuls visés par l’alinéa 2 de l’article 9, et les vétérinaires mandatés que vous évoquez. Les vétérinaires dits sanitaires interviennent pour le compte de l’éleveur et ne sont pas systématiquement mandatés par le préfet pour exercer des missions publiques. Comme vient de le dire M. le rapporteur, les vétérinaires ressortissants de l’Union européenne ont le même niveau de compétence que les vétérinaires français, puisque la législation européenne prévoit que la formation de tous les vétérinaires de l’Union doit comprendre au moins cinq années d’études théoriques et pratiques dans des établissements reconnus. Cette formation garantit l’acquisition des connaissances et des compétences requises par les missions accomplies dans les domaines de la santé animale et de la santé publique dans l’ensemble de l’Union.

Les règles de déontologie et d’indépendance s’imposent à la profession vétérinaire, que les professionnels soient établis en France ou qu’ils y exercent en libre prestation de services, c’est-à-dire à titre occasionnel ou temporaire. Tous les vétérinaires exerçant en France sont soumis aux règles fixées par l’autorité administrative, notamment le préfet, en cas de mise en œuvre de mesures de police sanitaire. Les vétérinaires ressortissants de l’Union européenne doivent connaître les règles nationales applicables à l’exercice de leur mission et ils sont soumis à une obligation de formation continue. Il n’y a pas lieu de se priver du recours à un vétérinaire en libre prestation de services en cas de besoin. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable à votre amendement.

(L'amendement n° 8 n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l'amendement n° 9.

M. Jean-Pierre Vigier. Aujourd’hui, la notion d’exercice n’est pas définie et peut conduire à des dérives. Aussi nous semble-t-il important de garantir qu’il y ait effectivement, derrière une société, des vétérinaires qui exercent la médecine et la chirurgie animales et qui, pour ce faire, soient au moins présents un jour par semaine dans une structure. S’ils travaillent dans une structure au moins un jour par semaine, ils ne pourront donc pas travailler dans plus de cinq sociétés. Cela répond parfaitement aux objectifs fixés par la directive « services » qui vise à assurer un haut niveau de qualité de services rendus à l’animal et à son détenteur.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. M. Vigier avait déjà présenté cet amendement devant la commission du développement durable qui l’avait rejeté. L’article L.242-2 du code rural et de la pêche maritime, créé par le projet de loi, permet à l’Ordre des vétérinaires de contrôler les prises de participation dans les sociétés. Ce pouvoir de contrôle, ainsi que les conditions encadrant les sociétés en exercice, suffisent à assurer l’indépendance des praticiens et le respect des règles déontologiques de la profession. Les dispositions du projet de loi permettent donc d’écarter le risque soulevé par l’auteur de l’amendement, sans qu’il soit utile de limiter le nombre des sociétés dans lesquelles le vétérinaire pourrait intervenir, d’autant que la fixation explicite d’un seuil est la porte ouverte à d’infinies contestations sur le niveau considéré comme acceptable. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Le texte garantit le respect des règles déontologiques fondamentales pour la profession de vétérinaire : je préfère l’amendement proposé par le rapporteur sur lequel je reviendrai le temps venu. L’article L.242-2 du code rural permet à l’Ordre de contrôler les prises de participation dans les sociétés et de vérifier que cela ne porte pas atteinte aux règles inhérentes à l’exercice de la profession. Ce pouvoir qui est donné à l’Ordre nous paraît plus efficace qu’une condition fondée sur le nombre de sociétés. Quatre est déjà un chiffre élevé, pourquoi cinq ? Les difficultés qui sont rencontrées par certains vétérinaires, en terme de manque de suivi des animaux, notamment dans l’élevage, sont bien réelles, mais le problème ne relève pas du nombre de sociétés dans lesquelles ils exercent. C’est pourquoi je vous propose de retirer cet amendement au bénéfice de la proposition du rapporteur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier. Nous maintenons l’amendement.

Mme la présidente. Quel est alors l'avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis défavorable.

(L'amendement n° 9 n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l'amendement n° 10.

M. Jean-Pierre Vigier. L’Ordre doit pouvoir exercer un contrôle sur l’indépendance des personnes exerçant la profession de vétérinaire. Il nous semble exagéré et surtout irréalisable de demander une transmission systématique des prises de participations dans quelque société que ce soit. L’objectif de cet article est de mettre en place les moyens pour que l’Ordre des vétérinaires vérifie l’indépendance des vétérinaires en exercice.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Pour que le contrôle opéré par l’Ordre des vétérinaires soit véritablement opérationnel et efficace, il convient qu’il s’exerce dès le premier point de pourcentage de participation dans une société. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis défavorable. Non sans paradoxe, cet amendement réduit la transparence.

(L'amendement n° 10 n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 58.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Il s’agit d’ajouter « notamment s’agissant de la surveillance sanitaire des élevages » à la deuxième phrase de l’alinéa 45, après le mot « vétérinaire ».

La notion d’exercice de la profession vétérinaire n’est pas expressément définie. Or un vétérinaire ne devrait pas pouvoir soigner des animaux sans jamais se rendre dans les élevages. Si le suivi des élevages est déjà prévu par la réglementation, ce point devrait pouvoir être examiné particulièrement par l’Ordre des vétérinaires, étant donné que la bonne réalisation de la surveillance sanitaire fait partie intégrante de l’exercice de la profession.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Quelques mots seulement, car je ne voudrais pas laisser croire, même si l’heure avance, que l’amendement du rapporteur, qui est tout de même assez laconique, remplace efficacement les trois amendements précédents refusés par la majorité. Quant à préciser que le vétérinaire va être compétent en matière de surveillance sanitaire des élevages : heureusement ! Nous regrettons cette ouverture européenne très large ; nous regrettons qu’il n’y ait aucun contrôle sur la présence effective des vétérinaires dans les exploitations ; nous regrettons enfin qu’il n’y ait pas un meilleur pouvoir de contrôle donné à l’Ordre pour examiner la participation des vétérinaires dans les sociétés. En aucun cas, je le répète, nous ne saurions considérer que cet amendement du rapporteur remplace les trois excellents amendements précédemment défendus par Jean-Pierre Vigier.

(L'amendement n° 58 est adopté.)

(L'article 9, amendé, est adopté.)

Article 10

(L'article 10 est adopté.)

Après l'article 10

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 10.

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 44.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à réprimer la violation d’une décision du juge administratif ordonnant la suspension d’une autorisation administrative. En effet, une telle violation n’est pas sanctionnée en matière d’environnement. Il y a été remédié récemment en matière d’urbanisme par l’article L. 483 de la loi du 22 mars 2012 : par exemple, un permis de construire attaqué devant le juge n’empêche évidemment pas de commencer les travaux, mais ceux-ci doivent être arrêtés si le tribunal administratif décide de suspendre le permis de construire. Mais le problème, je l’ai dit, c’est que cette règle ne vaut pas en matière environnementale : une entreprise ou une collectivité obtient l’autorisation du préfet de combler une zone humide, sa contestation devant le tribunal n’empêche pas, là non plus, de commencer le comblement, mais la méconnaissance de l’éventuelle décision de suspension par le tribunal administratif n’entraîne pas condamnation. C’est la raison pour laquelle cet amendement propose que la non-exécution des décisions du juge administratif puisse se traduire par des condamnations en vertu du code de l’environnement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Nous en venons à une série d’amendements qui ne semblent pas devoir être traités dans le cadre de ce débat. En effet, les auteurs de cet amendement comme des autres articles additionnels après l’article 10 souhaitent renforcer les instruments de la répression pénale des atteintes à l’environnement. Ce souci est tout à fait légitime et je dois dire que je partage pleinement sur le fond les préoccupations de leurs auteurs – même si nous pourrions probablement débattre de certains des mécanismes ou des formulations proposés. Mais je tiens à rappeler que le projet de loi DDADUE est un texte de transposition de directives et d’adaptation du droit français au droit de l’Union européenne. Il ne s’agit donc pas du vecteur adapté pour un tel débat sur la police de l’environnement, et l’engager maintenant reviendrait au contraire à fragiliser le texte dans son ensemble au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur les cavaliers législatifs. Je pense qu’il y aura d’autres projets de loi – Mme la ministre va certainement s’exprimer sur ce point – qui permettront d’aborder ce débat de fond.

En conséquence, je suggère à mon collègue de retirer cet amendement et ceux qui vont suivre. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. La police de l’environnement est un enjeu considérable. Il est vrai qu’aujourd’hui, malgré l’engagement personnel autant que professionnel de l’ensemble des agents chargés de l’exercice des missions de police de l’environnement, il y a de nombreux points à améliorer ou à revoir. Ce sera un des enjeux importants des états généraux du droit de l’environnement, qui auront lieu le 25 juin prochain et auquel tous les parlementaires intéressés par ces sujets sont invités ; et ce sera aussi un des enjeux essentiels du processus de modernisation de l’action publique sur la police de l’environnement que j’ai décidé, et qui sera conduit au second semestre de l’année 2013.

Dans votre intervention en discussion générale, monsieur Pancher, vous avez soulevé, avec un certain bon sens, la question de la cohérence entre la transposition de dispositions, prévue de longue date et portant sur des points techniques, et des éléments de réorientation et d’évolution sur le fond Ceux-ci sont nécessaires, ils contribuent au renforcement de la police de l’environnement que j’appelle de mes vœux, et leur mise en œuvre est engagée dans les deux processus que j’ai évoqués. Mais ces processus doivent être abordés de façon cohérente et globale, à la fois en termes de politiques publiques et de mobilisation des moyens de l’État, et aussi en termes juridiques.

C’est pourquoi – comme nous n’avons pas encore atteint une heure et demie du matin… – j’indique par avance que je serai obligée de ne pas suivre les amendements qui n’auront pas de rapport avec le projet de loi, au sens où ils ne portent pas sur la transposition de directives européennes mais proposent de créer de nouveaux délits ou de renforcer les sanctions.

J’indique par ailleurs que se tiendra ce jeudi, au Sénat, le débat sur la proposition de loi créant le préjudice écologique.

Je souhaite donc que l’on puisse travailler sur l’ensemble des propositions de ces amendements dans le cadre des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement et dans le cadre du processus de modernisation de l’action publique. Certaines sont pleines de bon sens et j’en rejoins l’esprit, et même parfois la lettre, mais ce n’est pas ici le cadre d’un tel débat, au détour d’un texte de nature technique, un texte de transposition de directives européennes, même si un débat de fond est nécessaire sur l’ensemble des aspects de la police de l’environnement.

Mme la présidente. Monsieur Pancher, maintenez-vous votre amendement ?

M. Bertrand Pancher. Je le retire mais je défendrai tout de même mes amendements qui visent à remettre en cause, de façon vraiment frontale, la législation actuelle. J’espère que, dans le cadre de la navette avec le Sénat, on pourra revenir sur ce sujet. J’attire tout de même votre attention, madame la ministre, sur le fait que l’ordonnance portant simplification, réforme et harmonisation des dispositifs de police administrative aurait pu faire l’objet en amont d’une concertation beaucoup plus large de façon à éviter ce débat-ci. Le sujet que j’évoque à travers ces amendements est évidemment important, puisque la question de la condamnation détermine celle de l’efficacité des mesures que l’on met en place.

(L’amendement n° 44 est retiré.)

M. Martial Saddier. Il n’y aura pas de navette, mon cher collègue !

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 47.

M. Bertrand Pancher. Il s’agit encore d’un amendement de bon sens qui propose de créer une responsabilité pénale aggravée dans les espaces d’enjeux écologiques majeurs. L’objectif est de doubler les peines d’amende lorsqu’il y a infraction dans les réserves naturelles, les parcs naturels, les zones de protection spéciale ou les zones de conservation. Je rappelle qu’actuellement, le montant de l’amende est au maximum de 15 000 euros. Certes, il va être augmenté avec l’ordonnance que j’ai évoquée, mais il y a des récidives et il serait important que le juge puisse tenir compte des profits réels des délinquants.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Mon cher collègue, ce sont les mêmes arguments que je vais être obligé d’égrener pour tous vos amendements portant articles additionnels après l’article 10. Ne voulant pas rabâcher, je vous ferai exactement la même demande de retrait que sur l’amendement précédent et pour les mêmes raisons, ainsi que sur ceux qui vont suivre… ce qui nous ferait gagner de précieuses minutes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur le député, retirez-vous l’amendement n° 47 ?

M. Bertrand Pancher. Oui, madame la présidente.

(L’amendement n° 47 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 43 rectifié et 93 rectifié.

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 43 rectifié.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à réprimer le fait de ne pas respecter une mise en demeure de surveillance ou de remise en état d’un site d’activité. Aujourd’hui, lorsqu’une activité a cessé, le préfet peut, en cas de mise en demeure, exiger une remise en état, et le contrevenant encourt une sanction. Mais ce ne sera plus le cas demain à cause de la suppression de cette disposition dans le la nouvelle rédaction du code de l’environnement. L’ordonnance du 5 janvier 2012 supprime en effet le délit de non-respect d’une mise en demeure de surveillance ou de remise en état d’un site industriel ancien, et il y a une vraie confusion dans l’écriture de ce texte puisqu’il confond le non-respect d’une mise en demeure qui implique un acte matériel positif avec le non-respect qui implique une abstention. C’est un vrai problème puisqu’il y avait hier un délit qui était sanctionné, et qui ne le sera plus demain. J’aimerais bien avoir, madame la ministre, une explication, et j’espère que vous pourrez retravailler ma proposition lorsque le projet de loi sera discuté prochainement au Sénat.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 93 rectifié.

M. Éric Alauzet. Nous nous situons dans la séquence d’une quinzaine d’amendements faisant suite à des suggestions d’associations de protection de l’environnement, suggestions que nous accueillons avec bienveillance. Pour notre part, nous n’en avons sélectionné que trois au groupe écologiste, ceux qui nous paraissaient les plus importants.

Celui-ci est crucial puisqu’il vise à combler un vide juridique laissé par l’ordonnance de janvier 2012. En effet, celle-ci permet d’incriminer les acteurs qui mènent leur activité malgré l’absence d’agrément, d’autorisation ou d’une mise en demeure, mais elle ne permet pas d’incriminer le non-respect des obligations de surveillance de sites ou des prescriptions techniques après une cessation d’activité sur une installation classée, si bien qu’on les transforme en sites orphelins et que plus personne n’est responsable. Il est important de combler un tel vide par cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Les arguments développés sont incontestables, pleinement justifiés, mais, encore une fois, nous ne sommes pas dans la bonne discussion. Cette réflexion aura lieu dans un cadre global, ce qui permettra de prendre en compte l’amendement de M. Alauzet et, je le pense, de l’accepter. Avis défavorable aujourd’hui.

(Les amendements nos 43 rectifié et 93 rectifié, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 46.

M. Bertrand Pancher. Il s’agit d’un amendement relatif à l’obligation d’application d’une décision d’arrêt, de suspension ou de remise en état incombant aux personnes morales. Aujourd’hui, seule est prévue pour celles-ci la peine d’amende ; pour les autres sanctions, une disposition législative spéciale est nécessaire. Un exemple très précis : une commune condamnée par le juge administratif à remettre en état un site suite à une dégradation n’est en rien obligée à le faire – même si elle a payé une amende. Il y a donc, là aussi, une vraie difficulté. Je veux bien admettre que l’on puisse remettre ce sujet à demain, mais il faut tout de même souligner que c’est un vrai problème à régler.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Même réponse que tout à l’heure.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Même réponse. En plus, j’avoue ne pas comprendre l’amendement parce que l’obligation de remise en état s’impose actuellement aux personnes morales autant qu’aux personnes physiques.

Mme la présidente. Monsieur Pancher, l’amendement n° 46 est-il maintenu ?

M. Bertrand Pancher. Il est maintenu car la généralisation de la responsabilité des personnes morales ne concerne que le prononcé de la peine principale : l’amende. S’agissant des autres mesures prononcées à l’encontre des personnes morales par le juge pénal, une disposition législative est donc nécessaire car le principe de la légalité de la sanction y fait actuellement obstacle. C’est la raison pour laquelle, comme pour l’article L. 480-5 du code de l’urbanisme, cet amendement vise à y remédier.

(L’amendement n° 46 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 48.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement porte sur l’application du régime des mesures alternatives aux poursuites, et tend à éviter une dérive de la procédure transactionnelle.

Cette ordonnance introduit en effet une procédure transactionnelle, ce qui relève du bon sens. Il convient cependant de préciser, comme en matière de composition pénale, que les décisions transactionnelles sont inscrites au bulletin n° 1 du casier judiciaire et que les refus d’exécuter les transactions acceptées font l’objet de poursuites pénales.

Pourquoi ? Prenons l’exemple d’une entreprise qui ne respecte pas des interdictions d’affichage publicitaire dans un département, ce qui donne lieu à une transaction. L’entreprise paie mais recommence dans un autre département où elle règle aussi la transaction. Les procureurs qui ne disposent pas de l’inscription au casier judiciaire ne peuvent pas constater le nombre de transactions et l’abus de ces procédures. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons introduire cette inscription au casier judiciaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Avis défavorable, toujours pour les mêmes raisons.

(L’amendement n° 48, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 41.

M. Bertrand Pancher. Défendu.

(L’amendement n° 41, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 51.

M. Bertrand Pancher. Défendu.

(L’amendement n° 51, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 45 et 94 rectifié.

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour défendre l’amendement n° 45.

M. Bertrand Pancher. Cet amendement vise à simplifier l’incrimination de délit de pollution des eaux.

L’objectif de l’ordonnance était de simplifier la réglementation, mais le code de l’environnement comporte trois délits de pollutions des eaux : le premier, puni par l’article L. 432-2, concerne les dommages causés à la faune piscicole d’eau douce ; le deuxième, puni par l’article L. 218-73, concerne les dommages causés à la faune et à la flore marines ; le troisième, puni par l’article L. 216-6, concerne les dommages causés au reste de la faune et de la flore ainsi que les atteintes graves aux usages de l’eau.

La simplification de la loi exige un texte unique d’incrimination, ce qui simplifiera en outre la mission des agents compétents.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement n° 94 rectifié.

M. Éric Alauzet. Pour compléter les arguments donnés par mon collègue, je voudrais signifier que les objectifs qui nous sont fixés par les réglementations européennes et par le Grenelle 1 doivent nous amener à améliorer la qualité de l’eau et à avoir deux tiers des masses d’eau superficielles en bon état écologique alors que nous n’en sommes qu’à 41 %. Il reste donc un important chemin à parcourir.

Les produits qui peuvent être déversés, qu’il s’agisse de liquides ou d’autres déchets, contribuent à maintenir, voire à aggraver la situation. L’objectif de cet amendement est bien de fusionner les trois dispositifs mais aussi d’aggraver le niveau des sanctions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Défavorable toujours pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Si je suis défavorable à l’amendement, je ne suis pas du tout défavorable à l’idée et je ne veux pas que la position du Gouvernement soit mal interprétée.

Je pense que ce n’est pas dans une loi portant sur diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne que l’on peut engager la discussion nécessaire sur la fusion des délits de pollution de l’eau, dont les différences actuelles sont justifiées par ce que l’on appelle l’élément matériel de l’infraction : c’est ce qui a conduit à l’état actuel de notre droit.

Encore une fois, je rejoins complètement les objectifs de clarté, de simplification mais aussi d’effectivité de l’application du droit et des sanctions, mais cela doit s’inscrire dans une démarche globale et cohérente. Le calendrier n’est pas si lointain puisque les états généraux de la modernisation du droit de l’environnement se tiennent le 25 juin prochain.

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. Je ne vais pas m’étendre sur ce sujet mais j’attire une nouvelle fois votre attention sur le fait que cette ordonnance devait notamment simplifier et harmoniser les dispositifs de police administrative. Nous sommes donc totalement dans le sujet. Il y a quand même eu un vrai problème de préparation de cette ordonnance et il faudra rebalayer l’ensemble de ces dispositifs lors du passage de ce texte au Sénat.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Delphine Batho, ministre. Pour rebondir sur les propos tenus par M. Bertrand Pancher, je m’engage à faire un travail sur tous les amendements qui ont été présentés, et à en discuter dans le cadre des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement. Comme je pense qu’à cette date le présent projet de loi n’aura pas encore été inscrit à l’ordre du jour du Sénat, nous avons le temps, sur les dispositions qui ont un rapport avec la transposition de directives européennes, de profiter de ce vecteur législatif pour résoudre les problèmes qui s’inscrivent dans la cohérence d’ensemble que j’évoquais tout à l’heure.

M. Bertrand Pancher. Merci beaucoup !

(Les amendements identiques nos 45 et 94 rectifié ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 49.

M. Bertrand Pancher. Il est retiré.

(L’amendement n° 49 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 50 et 95.

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour défendre l’amendement n° 50.

M. Bertrand Pancher. Je remercie Mme la ministre pour ses propositions qui me vont bien, mais je voulais insister sur la nécessité de créer une sanction de la criminalité organisée du trafic d’espèces protégées.

J’attire votre attention sur le fait que la troisième source de profit de la délinquance internationale, après le trafic des armes et de la drogue, c’est le trafic des espèces protégées, je pense notamment à la forêt et au bois.

Alors que l’on prévoit de réprimer fortement le trafic de déchets, on ne s’est pas penché sur ce problème majeur qui, je l’espère, sera traité lors des états généraux de la modernisation du droit de l’environnement.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour défendre l’amendement n° 95.

M. Éric Alauzet. Mon collègue me facilite la tâche et je vais présenter brièvement quelques points complémentaires concernant ces amendements dont on a bien compris qu’ils allaient être réétudiés avec toute la bienveillance de la ministre et du rapporteur.

L’objectif est de modifier la qualification qui porte sur le délit de trafic d’espèces protégées et d’introduire la notion de bande organisée qui correspond bien à la réalité. Il s’agit bien de réseaux avec des intermédiaires divers et variés comme dans les trafics d’armes et de drogue ; les profits de cette activité sont colossaux, on parle de 7 milliards ; le risque d’atteinte à la vie des animaux et à la biodiversité met aussi en danger la vie humaine. Nous sommes donc bien sur les mêmes risques et les mêmes qualifications que pour la drogue et les armes.

Actuellement, la légèreté des peines a tendance à banaliser et à minimiser ce type de délit. L’aggravation des peines le mettra à sa juste valeur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Nous anticipons les débats futurs. Nous sommes toujours d’accord sur le fond, mais nous ne pouvons malheureusement pas l’être sur la forme. Avis défavorable à ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Pour prolonger les propos du rapporteur, j’indique que je suis tellement favorable à cette mesure qu’elle est incluse dans le préprojet de loi sur la biodiversité dont l’examen se fera dans des délais moins rapprochés mais le processus est engagé.

(Les amendements identiques nos 50 et 95 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 52, 53 et 42, présentés par M. Pancher.

M. Bertrand Pancher. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements nos 52, 53 et 42, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Article 11

(L’article 11 est adopté.)

Avant l’article 12

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 5 rectifié et 29, portant articles additionnels avant l’article 12 et pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour défendre l’amendement n° 5 rectifié.

M. Lionel Tardy. Cet amendement a pour objet d’interrompre le calcul de l’écotaxe poids lourds lorsque les véhicules ne sont pas en exploitation commerciale mais en essais et réparations.

Les camions sont en effet amenés à effectuer de courts déplacements avant leur mise en circulation ou pendant leurs périodes de maintenance et de réparation. Ces situations de conduite font l’objet d’une immatriculation provisoire en « W garage ». Il est proposé d’exclure les véhicules en « W garage » du calcul de l’écotaxe. En effet, je répète que ces déplacements n’ont pas pour objet d’exploiter les véhicules et de les utiliser pour le transport de marchandises. Ils ont pour seul but de les mettre en circulation sur les plans techniques et administratifs, de les entretenir et de les réparer.

Appliquer la taxe poids lourds aux véhicules avant leur immatriculation ou pendant leurs essais et réparations serait par ailleurs source de confusions administratives et techniques et de nombreux contentieux entre les professionnels de la route.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier, pour défendre l’amendement 29.

M. Martial Saddier. Je serai bref car mes arguments sont exactement les mêmes que ceux de mon collègue Tardy. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer longuement sur le texte de l’écotaxe. Pour prendre l’exemple parlant d’un poids lourd qui va au garage pour un contrôle pollution : le garagiste qui fait ce contrôle sur la route sera soumis à l’écotaxe, ce qui est un comble. Nous avons longuement essayé de vous convaincre durant l’examen du texte sur l’écotaxe et nous revenons sur le sujet avec cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Nous n’allons pas reprendre une discussion qui a déjà eu lieu sur le sujet. La taxe s’applique à tous les poids lourds à partir du moment où ils circulent sur le réseau routier taxable, qu’ils soient vides, pleins, neufs ou anciens. Nous avons, il y a quelques semaines, décidé de limiter strictement le nombre d’exonérations de l’écotaxe, ne rouvrons pas la boîte de Pandore. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Je voudrais reconnaître aux auteurs des amendements le mérite de la persévérance et de la continuité. Ce débat a eu lieu ; ces amendements ont déjà été rejetés par le Parlement ; la loi est maintenant devant le Conseil constitutionnel. Je propose de ne pas refaire à cette heure avancée de la nuit le débat qui a déjà eu lieu. Avis défavorable.

(Les amendements nos 5 rectifié et 29, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Article 12

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 56 et 97.

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour défendre l’amendement n° 56.

M. Bertrand Pancher. Si vous le permettez, madame la présidente, je vais défendre l’amendement n° 57 par la même occasion. Ces amendements visent à transposer la directive Eurovignette 2011/76/UE du 27 septembre 2011, modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l’utilisation de certaines infrastructures.

L’amendement n° 56 vise à rendre applicable sur le réseau des autoroutes concédées les modulations de péages des poids lourds en fonction des normes Euro dans les trois ans à venir. En effet, si l’on retient la rédaction actuelle de l’article, la très grande majorité du réseau autoroutier français concédé ne sera pas soumise à ces modulations avant 2028-2032, date de fin de concession des réseaux.

Les modulations de péage en fonction des normes Euro contribuent à limiter les effets néfastes de la circulation des poids lourds sur la qualité de l’air en incitant à l’utilisation de véhicules à moindres taux d’émission. Il s’agit donc d’un signe très fort pour encourager les entreprises de transports à s’équiper de véhicules moins polluants et défendre la santé publique.

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 97.

M. François-Michel Lambert. Comme mon collègue Bertrand Pancher vient de l’exprimer, nous ne pouvons, c’est indéniable, attendre 2028-2032 pour faire évoluer notre réseau autoroutier et prendre en compte, notamment mais pas seulement, les enjeux de pollution atmosphérique.

Les modulations de péages en fonction des normes Euro contribuent à limiter les effets néfastes de la circulation des poids lourds sur la qualité de l’air en incitant à l’utilisation de véhicules à moindres taux d’émission. Il s’agit donc d’un signe fort pour encourager les entreprises de transports à s’équiper de véhicules moins polluants, favorables à la santé publique. C’est aussi une bonne chose du point de vue des performances économiques car, on l’oublie souvent, des véhicules modernes améliorent les performances des opérateurs. Il est également nécessaire de tenir compte du fait que la France est, depuis plusieurs années, sous la menace d’une condamnation européenne pour non-respect des seuils d’émission de polluants atmosphériques ; le cas échéant, il faudrait payer plusieurs centaines de millions d’euros.

Notons également que la mise en œuvre des modulations de péages n’aura aucune incidence sur le montant global des péages acquittés par les transporteurs routiers mais qu’elle entraînera un changement de leur structure en termes de types de camion.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. La commission a rejeté ces amendements. Il serait en effet ardu et sans doute très coûteux pour l’État de renégocier toutes les concessions existantes simultanément et bien avant leurs termes respectifs. Même si, en conséquence, la modulation effective des péages ne sera mise en œuvre que dans plusieurs années, l’enjeu budgétaire et l’enjeu de sécurité juridique pour les cocontractants de l’État doivent prévaloir.

Pour toutes ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Même avis.

J’ajouterai une remarque plus politique. Il s’agit aujourd’hui de l’application effective de la taxe poids lourds. Il est important de réussir sa mise en œuvre, déjà reportée à plusieurs reprises. La taxe poids lourds, je le rappelle, prévoit déjà une modulation en fonction des normes Euro.

Fixons-nous une clause de rendez-vous à propos de cette mise en œuvre, sans préjuger de développements ultérieurs. À vouloir trop charger la barque maintenant, nous risquerions de nous créer des difficultés dans cette phase qu’il faut réussir.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. D’ici à l’examen du texte par le Sénat, nous aurons peut-être plus de visibilité sur l’application de la taxe poids lourds, ses dates et modalités précises. En attendant ce moment, et la décision du Conseil constitutionnel, vos services, madame la ministre, pourraient-ils se pencher sur la situation précise du tunnel du Mont Blanc ? La concession expire en 2050 ; c’est majoritairement, mais pas seulement, une concession d’État. En tout cas, c’est un point sensible, puisqu’elle se trouve à l’intérieur d’un PPA. Il faudrait considérer la situation précise de la société du tunnel du Mont Blanc au regard de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert.

M. François-Michel Lambert. J’entends bien les arguments de M. le rapporteur et de Mme la ministre.

Tout d’abord, sur le plan technique, cela n’a rien à voir avec l’écotaxe. Il s’agit simplement de mettre en œuvre, sur le réseau autoroutier, qui n’est absolument pas soumis à l’écotaxe, ce qui se fait par ailleurs, à savoir une modulation en fonction des véhicules qui l’empruntent.

Ensuite, sur le fond, j’entends dire qu’il ne faudrait pas en rajouter, en cette période d’incertitudes économiques, avec la mise en place d’un schéma d’écotaxe ; nous en avons effectivement débattu. Pour ma part, je rappelle que c’est aussi une période de pollution atmosphérique. Dans ma région de Marseille-Aix, c’est tous les jours – auparavant, toutes les semaines ; désormais, tous les jours – que le niveau de pollution interdit tout simplement à de nombreuses personnes de vivre. Pendant ce temps, les véhicules qui – ce n’est pas moi qui le dis – rejettent ces polluants qui tuent 20 000, 30 000 ou 40 000 personnes chaque année en France peuvent circuler sur les autoroutes qui sillonnent ce territoire et d’autres, et ils le pourront encore pendant des années et des années.

Certes, l’adoption de cet amendement ne mettra pas un terme à cette mortalité, mais elle incitera au moins à penser différemment et à avancer dans la bonne direction, celle de la réduction de la pollution atmosphérique. La situation, en France, est quand même très grave.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Delphine Batho, ministre. Je pense ne pas avoir été la dernière à soulever le problème de la qualité de l’air et du nombre de morts – 42 000 – liées à la pollution aux particules en France.

Nous avons pris des engagements. Nous nous sommes notamment engagés à ce que toutes les zones où la situation est la plus critique en termes de qualité de l’air soient, avant la fin de l’année, soumises à un PPA. En outre, un certain nombre de mesures de régulation de vitesse doivent être prises ; elles l’ont d’ailleurs été dans votre région, monsieur le député. Et, en ce qui concerne les poids lourds, j’ai signé hier l’arrêté sur les rétrofits.

Un travail de fond est engagé, et les mesures que je viens de rappeler ne font pas obstacle à d’autres. En ce qui concerne l’écotaxe, j’insiste vraiment : nous avons déjà rencontré beaucoup de difficultés dans la mise en œuvre de ce dispositif, beaucoup de retards. Le sujet a vraiment été examiné dans le détail au cours des débats parlementaires, avec Frédéric Cuvillier. Je ne dis pas qu’il ne faudra pas aller plus loin sur les modulations, mais il importe de réussir la mise en place de l’écotaxe le 1er octobre prochain. Ne remettons donc pas en cause le travail accompli ces dernières semaines et ces derniers mois en vue d’une mise en œuvre effective et opérationnelle de la taxe poids lourds.

(Les amendements identiques nos 56 et 97 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 98.

M. François-Michel Lambert. L’alinéa 6 de l’article 12 dispose qu’il peut être dérogé à l’exigence de modulation des péages lorsque « la cohérence des systèmes de péage est gravement compromise, notamment en raison d’incompatibilité entre les nouveaux systèmes de péage et ceux mis en place pour l’exécution des contrats de délégation de service public existants ». Introduite lors de l’examen du texte en commission, cette possibilité de dérogation offerte par la directive Eurovignette ne figurait pas dans le texte initial. Elle affaiblit d’autant le dispositif introduit par la transposition de la directive européenne, alors que la France – nous venons de le dire, et Mme la ministre vient de le rappeler – est régulièrement condamnée pour son non-respect des seuils d’émission de polluants atmosphériques, dont on estime qu’ils tuent 42 000 personnes par an, ce qui, par ricochet, affecte les finances publiques.

Les réseaux autoroutiers français étant suffisamment équipés pour permettre de déterminer la classe Euro du véhicule, notamment avec les systèmes de télépéage, cette possibilité de dérogation n’a pas lieu d’être et crée une confusion inutile. Elle ne manquera pas d’engendrer des tentatives de contournement du dispositif, ce qui impliquera des contrôles et de la gestion administrative, voire judiciaire, c’est-à-dire des coûts supplémentaires injustifiés pour le contribuable. Voilà qui contrevient deux fois à l’intérêt collectif : en termes de santé publique, en termes de finances publiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement remet en cause un amendement adopté en commission, qui remédiait au caractère incomplet de la transposition. Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Même avis.

(L’amendement n° 98 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 101.

M. François-Michel Lambert. Cet amendement s’inscrit dans la continuité des précédents. Il est donc défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Comme le précédent, l’amendement n° 101 remet en cause un amendement adopté en commission. Prévoir une dérogation pour cause d’incompatibilité technique des nouveaux systèmes de péage est logique dans l’attente de l’application des règles européennes sur l’interopérabilité des systèmes de péage. Et si l’on prévoit une dérogation pour les contrats de concession existants, c’est à cause des lourdes conséquences budgétaires que pourrait comporter la renégociation de ces contrats avant leur terme.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Même avis.

(L’amendement n° 101 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 99.

M. François-Michel Lambert. Cet amendement s’inscrit dans la continuité des précédents. J’estime donc qu’il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Même avis.

(L’amendement n° 99 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 100.

M. François-Michel Lambert. Cet amendement s’inscrit dans la continuité des précédents ; nous insistons.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.

M. Martial Saddier. Je ne reviens pas sur la taxe poids lourds : Mme la ministre nous a invités à ne pas rouvrir le débat, je ne le fais donc pas. Cependant, la série d’amendements présentée par une partie de la majorité montre bien qu’un certain nombre des arguments que nous avions avancés lors du débat sur l’écotaxe étaient fondés.

Cela dit, je veux rebondir sur les propos qu’a tenus Mme la ministre à propos de la pollution de l’air ; je ne le ferai qu’une fois.

Si je reconnais, madame la ministre, votre engagement en la matière, permettez-moi de préciser que les plans de protection de l’atmosphère sont issus de la loi Grenelle, et que la majorité précédente, notamment avec Nathalie Kosciusko-Morizet et le Conseil national de l’air, s’était très fortement engagée dans la préparation du volet législatif et du volet réglementaire. Vous poursuivez cette action, je vous en remercie.

Le Conseil national de l’air, dont la composition est pluraliste, a fait un énorme travail au cours de l’ancienne législature, et il l’a poursuivi ensuite.

Il s’agit donc d’un travail collégial qui va dans le bon sens. J’espère qu’il permettra, premièrement, de résoudre le problème de santé publique qui se pose et, deuxièmement, de répondre aux exigences de la Commission européenne.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Delphine Batho, ministre. Les PPA datent de 1996, monsieur le député, de la loi présentée par Corinne Lepage, si ma mémoire est bonne. Cela étant, ce que vous avez dit du travail du Conseil national de l’air est tout à fait vrai, et je ne voudrais pas troubler ce soir la sérénité des débats en rappelant le nombre des territoires qui n’avaient pas adopté les PPA. Tant mieux si nous nous rejoignons sur la nécessité de les mettre en place le plus rapidement possible.

(L’amendement n° 100 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 57 et 102.

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l’amendement n° 57.

M. Bertrand Pancher. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 102.

M. François-Michel Lambert. Dans le prolongement de ce que nous avons dit précédemment, cet amendement a pour objet de cibler plus précisément les zones caractérisées par une très forte pollution. En ce sens, l’article 9.1 bis de la directive Eurovignette n° 2011/76/UE du 27 septembre 2011 confère aux États la possibilité de percevoir des droits régulateurs dans les zones urbaines – ces fameuses zones souffrant de niveaux de pollution extrêmement élevés. Ce texte a ainsi pour objet de combattre spécifiquement la congestion du trafic mais également de prendre en compte l’ensemble des impacts environnementaux, en particulier la dégradation de la qualité de l’air, sur tout axe routier situé en zone urbaine.

Le présent amendement vise à permettre la perception de ces droits régulateurs en France par la transposition de la directive Eurovignette.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques 57 et 102 ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Ces amendements ont été rejetés par la commission. Ils tendent à créer une rupture d’égalité en limitant cette majoration aux véhicules de plus de 3,5 tonnes. Par ailleurs, la congestion en zones urbaines provient essentiellement de véhicules plus légers. Si je souscris à la philosophie de cet amendement, le risque juridique dont il est porteur me conduit à exprimer un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Même avis.

(Les amendements identiques nos 57 et 102 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 103.

M. François-Michel Lambert. Cet amendement s’inscrit dans une approche différente. Dans les zones de montagne soumises à péages, l’article 7 septies de la directive Eurovignette du 27 septembre 2011 confère aux États la possibilité de percevoir des majorations de péages sur des tronçons routiers de zones de montagne dont l’utilisation par des véhicules cause des dommages importants à l’environnement. Le montant des majorations perçues conformément à la directive sera investi dans des projets contribuant à atténuer les dommages environnementaux causés par le transport routier de marchandises.

Le présent amendement vise à permettre la perception de ces majorations en France par la transposition de la directive Eurovignette.

C’est aussi le moment de prendre conscience du niveau excessif du transport routier alpin, et de la nécessité de basculer vers un transport alternatif, principalement, mais pas exclusivement ferroviaire. Il s’agit, ce faisant, de procéder à un rééquilibrage économique.

M. Martial Saddier. J’adore la montagne !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement pose, comme le précédent, un problème de rupture d’égalité ; aussi émettrai-je un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. L’adoption de cet amendement paraît prématurée, même si cette disposition pourrait être un outil de financement envisageable pour la ligne Lyon-Turin. Toutefois, la directive européenne impose un accord transfrontalier formel : le sommet franco-italien a d’ailleurs demandé à ce que la CIG avance sur ce dossier en vue d’un accord formel. La disposition proposée est donc, je le répète, prématurée. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert.

M. François-Michel Lambert. J’ai bien noté les arguments avancés, mais je me permets de faire remarquer que le projet Lyon-Turin n’est pas le seul à devoir être financé dans les Alpes. Ce serait un outil de financement complémentaire à ceux déjà existants en faveur des autres offres alternatives de transport de marchandises à travers les Alpes.

(L’amendement n° 103 n’est pas adopté.)

(L’article 12 est adopté.)

Après l'article 12

Mme la présidente. La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l’amendement n° 96.

M. François-Michel Lambert. La directive Eurovignette 3 du 27 septembre 2011 accorde aux États la faculté de prendre en compte, dans la tarification des péages routiers, les coûts externes relatifs aux nuisances sonores. Nous avons évoqué les dégâts de la pollution atmosphérique sur la santé, mais il faut également mentionner les nuisances sonores, dont on a de plus en plus conscience.

Le Gouvernement français a soutenu les dispositions de cette directive, allant jusqu’à regretter qu’elle n’aille pas plus loin dans la prise en compte des externalités engendrées par le transport routier.

Le présent amendement vise donc à permettre l’application des dispositions de cette directive européenne.

Il est important de signaler que cette taxe additionnelle n’handicapera pas le pavillon routier français puisqu’elle sera exigible auprès de tous les transporteurs empruntant le réseau routier français concerné.

Cette internalisation permettra, par application du principe pollueur-payeur, de réduire les distorsions de concurrence dont profitent aujourd’hui les transports les plus polluants, au premier rang desquels le transport routier. De surcroît, en majorant le coût du transport, cette taxe fournira un signal prix qui modifiera le choix des chargeurs sur le type de transport retenu. Elle contribuera ainsi à une évolution de la part modale. Enfin, elle favorisera l’optimisation des pratiques, concernant en particulier les circuits logistiques et les coefficients de chargement, et réduira ainsi la demande en transport.

Je note que, s’agissant du bruit, une première réussite est à saluer à Paris, dans le cadre du programme de livraison nocturne de marchandises, qui met en œuvre le modèle Piek. Cela démontre que l’on peut satisfaire, tout à la fois, les attentes des citoyens et les besoins économiques des entreprises, en conservant un haut niveau de performance économique au sein des territoires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Créer une nouvelle taxe additionnelle est effectivement une possibilité ouverte par la directive Eurovignette, mais cela ne paraît pas opportun alors que l’écotaxe poids lourds, qu’elle alourdirait, n’est pas encore entrée en vigueur. Aussi notre avis est-il défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Sans répéter l’argumentation, je rappelle qu’en termes de couverture des externalités, la taxe poids lourds représentera un milliard d’euros. Franchissons déjà cette étape ; nous verrons ensuite.

(L’amendement n° 96 n’est pas adopté.)

Article 13

(L’article 13 est adopté.)

Article 14

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 59 rectifié.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement a pour objet de donner une base légale à une pratique déjà bien installée dans les faits : pour contrôler les qualifications des gens de mer et leur octroyer en retour leurs pièces d’identité, il convient que l’administration les connaisse et les identifie sans erreur. Aujourd’hui, en droit, un tel référencement ne concerne que les seuls marins, dont le statut est plus ancien et, partant, plus complet. Il s’agit, par cet amendement, de s’inscrire dans la finalité générale de ce chapitre et d’étendre aux gens de mer les droits et les devoirs des marins.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 59 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 60.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement sanctionne le fait, pour l’armateur ou le capitaine, d’admettre à bord des gens de mer ne disposant pas d’un certificat d’aptitude médical valide ou des qualifications requises pour exercer la mission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 60 est adopté.)

(L’article 14, amendé, est adopté.)

Article 15

(L’article 15 est adopté.)

Article 16

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 65 rectifié.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Il s’agit d’une disposition de cohérence en faveur des travailleurs en mer qui, quoique n’étant pas des gens de mer, sont appelés à exercer en milieu maritime. Il convient de leur appliquer des dispositions exigées par leur environnement que le code des transports limite pour l’instant aux gens de mer. Il est par exemple admis que l’activité puisse être allongée en cas de beau temps et raccourcie en cas de mauvaise mer. Des dispositions limitatives, incluses dans la loi et destinées à figurer ensuite dans les textes réglementaires, éviteront tout abus en réservant ce cas dérogatoire aux travaux effectivement requis en milieu marin. Il ne s’agit aucunement de créer un effet d’aubaine conduisant à la délocalisation en mer d’activités purement terrestres.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 65 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 62 rectifié.

M. Philippe Plisson, rapporteur. La convention du travail maritime entrera en vigueur le 20 août 2013, soit sans doute à une date proche de la promulgation du projet de loi. Il apparaît donc plus sûr d’inscrire directement dans le texte les clauses obligatoires du contrat d’engagement maritime, au lieu de les renvoyer à un décret, comme le prévoit la rédaction initiale. Mieux vaut en effet éviter de placer en porte-à-faux nos gens de mer, lors de contrôles opérés par des autorités étrangères, dans leurs prérogatives d’État du port.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 62 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 63 rectifié.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement applique au milieu maritime les évolutions contenues dans l’ANI. La conciliation qu’il institue se substituera à la procédure des prud’hommes, telle qu’elle existe pour les travailleurs à terre. Le maintien de cette phase précontentieuse est expressément demandé par les partenaires sociaux, auxquels il s’agit ici de donner satisfaction.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 63 rectifié est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 69, deuxième rectification.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement, conforme à l’esprit général du chapitre, étend aux gens de mer les dispositions limitées pour l’heure aux seuls marins. C’est ici le cas pour ce qui concerne la responsabilité pénale.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 69, deuxième rectification, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 64.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement confère une base légale à la commission nationale de la négociation collective maritime, qui ne dispose pour l’heure que d’un fondement réglementaire. Cette instance a prouvé son efficacité en termes de dialogue social et a permis des avancées dans la situation sociale des marins. Sa pérennisation est donc sollicitée par les partenaires sociaux. Par ailleurs, il convient d’inclure dans ses prérogatives des sujets auxquels nous sommes tous attachés : je pense notamment au point 7 sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 64 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yann Capet, pour soutenir l’amendement n° 87.

M. Yann Capet. Le décret du 31 mars 2005 relatif à la durée de travail des gens de mer prévoyait la possibilité de la prise en compte de l’existence d’accords d’entreprise dans la définition de cette durée. Il s’agit, par cet amendement, de conserver cette possibilité de prise en compte du dialogue social au sein des compagnies maritimes – je pense notamment aux coopératives –, mais aussi de fixer un cadre et des limites, notamment au regard des conditions dans lesquelles il peut être dérogé aux durées maximales de travail.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement satisfait une demande forte du monde maritime, qui souhaite pouvoir continuer à organiser son activité par la voie d’accords d’entreprise, ce que la rédaction initiale du texte ne prévoyait pas. Dans la mesure où l’amendement de M. Capet pose des limites à la négociation, empêchant d’exiger des salariés qu’ils renoncent à leurs droits légitimes par le décret prévu au IV de l’article L. 5544-4, j’émets un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. J’émets le même avis. Nous avions eu cette discussion en commission. Il me semble que la rédaction proposée est parfaite en ce qu’elle permet de prendre en compte les accords tout en évitant des dérogations excessives.

(L’amendement n° 87 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yann Capet, pour soutenir l’amendement n° 90.

M. Yann Capet. Cet amendement répond à la même logique que le précédent. Les conditions étant réunies, la concertation étant intervenue, il a pour objet d’ouvrir cette même possibilité de tenir compte des fruits du dialogue social et des accords d’entreprise, s’agissant cette fois des périodes de repos, en fixant le même cadre et les mêmes limites que ceux prévus à l’article L. 5544-4 et ceux qui figureront dans le décret à venir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement étant de cohérence, j’émets un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 90 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yann Capet, pour soutenir l’amendement n° 88.

M. Yann Capet. Cet amendement propose de faire référence à l’inscription sur la liste d’équipage qui semble la plus pertinente – celle des marins physiquement embarqués à bord – pour mettre en œuvre la gratuité de la nourriture pour les périodes embarquées. L’application du dispositif aux gens de mer non marins fait l’objet d’un amendement distinct, qui sera examiné ultérieurement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement permet une double clarification.

D’une part, il élargit le bénéfice du droit à la nourriture des marins, inscrit au rôle d’équipage, à l’ensemble des gens de mer inscrits sur la liste d’équipage. Ceci est conforme à l’esprit du projet de loi.

D’autre part, la condition d’inscription sur la liste d’équipage permet de réserver effectivement le bénéfice de ce droit aux seuls gens de mer embarqués, empêchant ainsi qu’une indemnité soit perçue par un marin demeuré à terre. J’émets donc à nouveau un avis favorable à la proposition de M. Yann Capet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Avis favorable.

(L’amendement n° 88 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l’amendement n° 68.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement est en cohérence avec l’amendement n° 69 deuxième rectification. Comme ce dernier, il vise à étendre à tous les gens de mer les droits et devoirs accordés jusqu’alors aux seuls marins en matière pénale.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Batho, ministre. Favorable.

(L’amendement n° 68 est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l’amendement n° 71 rectifié.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement propose d’appliquer aux services de recrutement et de placement des gens de mer les règles en vigueur pour les agences de travail temporaire. Il prévoit les sanctions encourues en cas de manquement à ces mêmes règles.

Je ne doute pas qu’il recueillera l’assentiment de tous les bancs de l’Assemblée.

(L’amendement n° 71 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. Martial Saddier. L’ambiance est plus favorable à la mer qu’à la montagne ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l’amendement n° 61.

M. Philippe Plisson, rapporteur. Cet amendement vise à réparer un oubli du projet de loi. Il formule pour les gens de mer des exigences en matière d’aptitude médicale et de qualification, comme le prévoit l’article 14 pour les seuls marins.

(L’amendement n° 61, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l’amendement n° 66.

M. Philippe Plisson, rapporteur. C’est un amendement de coordination.

(L’amendement n° 66, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l’amendement n° 120.

M. Philippe Plisson. Il s’agit également d’un amendement de coordination.

(L’amendement n° 120, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l’amendement n° 67 rectifié.

M. Philippe Plisson. Cet amendement tire les conséquences de l’histoire pour séparer les régimes de couverture sociale des marins et des gens de mer.

Le régime des marins est en effet particulièrement spécifique, puisque la marine de guerre a fait l’objet du premier système de retraite institué en France, qui remonte à l’ordonnance du 19 avril 1670 préparée par Colbert pour Louis XIV.

De nos jours, l’Établissement national des invalides de la marine est en charge des diverses prestations. Des obligations spécifiques pèsent sur l’armateur. Ce système ne peut être transposé aux gens de mer, qui bénéficient des prestations classiques de la sécurité sociale et qui par conséquent cotisent en échange des prestations auxquelles ils ont droit. Tout au plus convient-il d’adapter le droit commun en prévoyant les cas de blessure, de maladie ou de décès au cours d’une période d’embarquement.

(L’amendement n° 67 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yann Capet, pour soutenir l’amendement n° 89.

M. Yann Capet. Il s’agit de faire référence, dans les dispositions de l’article L. 5542-18 du code des transports, non pas au rôle d’équipage mais à la liste d’équipage, car le rôle ne comprend pas les gens de mer autres que marins. En d’autres termes, la référence à la liste d’équipage permet d’assurer la mise en œuvre de la gratuité de la nourriture à bord pour l’ensemble des gens de mer embarqués, qu’ils soient ou non marins.

(L’amendement n° 89, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 16, amendé, est adopté.)

2

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, jeudi 16 mai à neuf heures trente :

Proposition de loi portant amnistie des faits commis à l’occasion de mouvements sociaux ;

Proposition de loi tendant à interdire les licenciements boursiers ;

Proposition de loi tendant à la suppression du mot « race » de notre législation.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 16 mai 2013, à une heure trente-trois.)